ïo$ lû'S I SOCIÉTÉ GEOLOGIQUE a>a saiüB^a» Soc. géol. Tom. il, -2e série. l :( PARIS. - IMPRIMERIE DE BOURGOGNE ET MARTINET, IKPfiiyKUKà DE t.A SOCIÉTÉ GKOLOC. IQUK D b MANCE, BUE JACOB, 50. V DE LA SOCIÉTÉ DE FRANCE. ëo/ne 'ecù&ùeme. ettœxeme àewe. 1844 a 1845. AU LIEU DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, RUB DU V I ËUX-COLOMDI Kll , 26. 1845. BE FRANCE» Séance du 4 novembre 1844. PRÉSIDENCE DE M. d’aRCHIAC. Le Président annonce la présentation de 18 personnes qui demandent à être admises au nombre des membres de la So- ciété ; il ajoute qu’indépendamment de ces présentations , 17 membres nouveaux ont été admis à la réunion extraor- dinaire de Chambéry, en août dernier. Il déclare en outre que, comme anciens membres de la Société, sont admis, sur leur demande, à en faire partie de nouveau: MM. 1° Borromeo (le comte Vitaliano) , grand d’Espagne de première classe, chambellan et conseiller intime de S. M. I. et R. A., et membre honoraire de l'Institut impérial et royal de Lombardie, résidant à Milan (royaume Lombardo-Véni- tien). 2° DeCourtigis (Edouard) , colonel d’état-major, résidant à Paris, rue Montaigne, 2. 3° Jourdan, directeur du Muséum d’histoire naturelle de Lyon , à Lyon. 4° Graves, ancien secrétaire général de l’Oise, actuelle- ment chef au ministère des finances , rue de l’Université, 39, à Paris. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : * De la part de M. Pictet , Traité élémentaire de paléonto- logie, ou Histoire naturelle des animaux fossiles ; t. Ier, in-8°f 368 p. et 18 pl. Paris, 1844. 6 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. De la part de M. Lejoncourt (Charles) , Galerie des cente naire s anciens et modernes ; 1 vol. in-8°, 250 p. Paris, 1842. De la part deM. Wolski (À. -N.) , Mémoire sur le gisement du bassin anthraxifère dans le département de Maine-et-Loire y et sur ses relations géologiques avec divers terrains qui P avoi- sinent et qui le recouvrent ; (extrait du 2e vol. du Compte- rendu de la onzième session du Congrès scientifique de France ) br. in-8% 44 p. et 2 pl. Angers, 1844. De la part de M. Delesse (A.), 1° Note sur l'emploi des gaz d'un fourneau à cuivre de Riechelsdorf (Hesse électo- rale); (extrait des Annales des mines , 4e série, t. IV) in-8°, p. 541-552. Paris. 2° Note sur le dipyre; (extrait des Annales des mines , 4e sé- rie, t. IV) in-8°, p. 609-616. Paris. De la part de M. Fournet, 1® Sur V état de surfusion du quartz dans les roches éruptives et dans les filons métallifères ; (Extrait des Annales de la société royale d’ agriculture , his- toire naturelle et arts utiles de Lyon.) 1843, grand in-8°, 16 p. 2° Observations sur la disposition de certaines cristallisa- tions des géodes ; (extrait des Annales de la société royale d' a- sriculture , histoire naturelle et arts utiles de Lyon ) grand in-8% 9 p. 1843. 3° Essai sur les filons métallifères du département de l'Avey- ron; (extrait des Annales de la Société royale d' agriculture , histoire naturelle et arts utiles de Lyon ) grand in-8°, 83 p. et 4 pl., 1843. De la part de M. Barnéoud (F. Marius) , De l'origine des lacs, etc., Thèse pour le doctorat ès-sciences ; g rand in-i°, 42 p. et 2 pl, Paris, 1844. De la part de M. Agassiz (L.) , 1° Essai sur la classification des poissons ; extrait de la 18e et dernière livraison des Re- cherches sur les poissons fossiles; petit in-f°, xxxn p. Neuf- châtel , 1844. 2° Essai sur la classification des poissons; extrait de la 18e et dernière livraison des Recherches sur les poissons fos- siles , -petit in-f°, p. 165-172. Neufchâtel, 1844. SÉANCE DU 4 N O Y EMBIIE 1 844. 3° Tableau général clés poissons fossiles rangés par ter- rains ; petit in-f°, p. xxxiii-xlix. Neufehâtel , 1844. De la part de M. le Ministre de la justice, Journal des savants; n°* de juin à septembre 1844. De la part de M. Stiehler (A. W.), Ueber die Bildung der Steinkohle , etc. (Sur la formation de la houille d’après Lin- dley et Hutton, etc.); in*8°, 69 p. Brunswick, 1843. De la part de M. Darwin (Charles), Geological observa- tions on the Volcanic lslands , etc. (Observations géologiques sur les îles volcaniques, etquelques courtes notes sur la géo- logie de l’Australie et du cap de Bonne-Espérance); in-8°, 169 p. et 1 pl. Londres, 1844. De la part de M. Gervais (Paul), Remarques sur les oi- seaux fossiles , thèse de géologie; in-8°, 45 p. , 1844. De la part de M. Giulj (Giuseppe) , Saggio statistico , etc. (Essai statistique de minéralogie utile de la Toscane, pour servir aux ingénieurs, aux propriétaires, aux médecins , aux artistes, aux manufacturiers et aux commerçants); in-8°, 177 p. Bologne, 1843. De la part de M. Studer (B.), Hauteurs barométriques pri- ses dans le Piémont, le Valais et en Savoie; in-4°, 4 p. Sans indication d’année. De la part de M. Chevalier (Eugène), Voyage autour du monde sur la corvette la Bonite, en 1836 et 1837 (M. Vail- lant, capitaine) ; géologie et minéralogie ; 1 vol. in-8°, Paris, 1844 ; 4 1 9 p. et 5 pl. De la part de M. Raulin (Victor), Géologie delà Finance, 1 cah. in-12; (extrait de Patria, p. 290-411) 3 pl. Paris, octobre 1844. De la part de M. D’Orbigny (Charles), livraisons 49 à 54 du Dictionnaire universel d'histoire naturelle. De la part de M. D’Orbigny (Alcide) , Paléontologie fran- çaise : terrains crétacés, livraisons 79-88; terrains jurassiques, livraisons 21-26. De la part de M. Leblanc, 1° Mémoire sur le levé expéditif d'une position militaire; in*8°, 24 p.,2 pl., 1844 (Extrait du Mémorial de l'Offcier du Génie). 2° JS ote sur le niveau à réflexion de M. Burel, modifié ; 8 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. in«8°, 7 p., 1 pl. , 18 fxk. — Ce niveau est fabrique chtz M. Gravet, successeur de Lenoir, rue Cassette, 14. De la part de M. le docteur Hessel (J.-F.-C.) , Versuche uber Magnetketten , etc. (Recherches sur la chaîne électri- que et sur la propriété de ses anneaux, etc.), in-8°, 301 p., 3 pl. Marbourg, 1 844* De la part de M. Bronn (H. -G.), Uber Ichthyosauren , etc. (Sur les Ichthyosaures des schistes Basiques des environs de Boll en Wurtemberg), (Extrait du Jahr. f. min. géol. , 18 14). in-8°, p, 385-Zi08, 1 pl. De la part de M. le docteur Klipstein (A. -Y.) , Beitrage zur geologischen kenntniss , etc. (Mémoire pour servir à la description géologique des Alpes orientales) ; lre et 2e livrais. Giesen , 1843. La Société reçoit en outre les publications suivantes : Mémorial encyclopédique , noS de mai, juin, juillet 1844. Annales des mines ; 6® livraison 1843; lre et 2* livrai- sons 1844. Annales scientifiques , littéraires et industrielles de U Au- vergne , n0i de juillet à décembre 1843. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences; 1844 , t. XVIII , nos 25 , 26 , et table du 1er semestre 1 844 ; t. XIX, nos 1 à 48. Bulletin de la société de géographie , n°9 d’avril à août 1844. Mémoires de la société royale des sciences , de V agriculture et des arts de Lille , année 1842. Compte-rendu des travaux de la société d1 agriculture de Pa- ris depuis V exposition de 1843. Paris, 1844. Séance générale , etc. , de la société royale d’agriculture de Paris y le 16 juin 1844. Paris, 1844. L’Écho du monde savant , 1 Ie année, n°* 48 à 51 , 1er se- mestre; noS l à 33 , 2e semestre. 1844. L9 Institut , nos 547 à 566, du 19 juin au 30 octobre 1844. Bulletin de la société industrielle d’Angers , nos 4 et 5 , I 5e année. 1844. Bulletin de la société industrielle de Mulhouse , n°* 87 et 88. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 9 Extrait du programme de la société hollandaise des sciences à Harlem , pour Vannée 1844. Ahhandlungen , etc. (Mémoires de l’académie des sciences de Berlin pour 1842.) Correspondenzblatt , etc. (Bulletin de la correspondance de la réunion wurtembergeoise d’agriculture); année 1844, 1er, 2® et 3e cahiers. Bericht , etc. (Analyse des mémoires présentés à l’acadé- mie des sciences de Berlin); in-8°, de janvier à juin 1844. Transactions of the Cambridge philosophie al society; vol. 8, part. 1. III. 1844. Transactions of the royal géologie al society of Cornwall; t. Y. London, 1843. ln-8°, 512 p. The Mining journal , nos 461 à 479. The Athenœum , n°* 869 à 888. Twenty ninth et thirtieth, etc. (29° et 30e Rapports an- nuels de la réunion de la société géologique du Cornouailles); la 29®, 78p.; la 30®, 138; in-8°. 1842, 1843. Journal of the Bombay branch royal asiatic society , n° 5, avril 1843, et n° 6, octobre 1843, in-8°. Memorie délia reale academia , etc. (Mémoires de l’acadé- mie royale des sciences de Turin) , 2e série, t. V ; in 4°. Tu- rin, 1843. Det kongelige danske Videnskabernes Selskabs Afhandlin - gei\ etc. (Mémoires d’histoire naturelle et de mathématiques de la société royale des sciences de Danemarck); in-4°, t. 10, 370 p. et 55 pl. Copenhague, 1843. Oversigt , etc. (Comptes-rendus des travaux de la société royale des sciences de Danemarck en 1843); in-8°, 128 p. Copenhague, (844. De la part de M. Stobiecki , (trois échantillons de roches des marnes jurassiques de Propiac (Dronie). M. A. Boue, en faisant hommage à la Société de l’exem- plaire d’un plan en relief de l’Europe et de partie des conti- nents voisins, que lui avait donné M. le colonel de Hauslab , annonce, dans sa lettre, l’intention où est ce savant de l’exé- cuter sur une plus grande échelle. M. Paul Gervais, en offrant h la Société scs Remarques sur 10 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. les oiseaux fossiles , dit que pour compléter ce qu’on connaît à l’égard de cette partie de la zoologie fossile , il faudrait ajouter les observations publiées depuis qu’il a composé ce travail, notamment la découverte faite par M. E. Robert d’oiseaux fossiles dans le calcaire grossier des environs de Paris, et celle indiquée dans une note de M. Pomel , insérée au Bulletin (2e série, t. ier, p, 593), comme faite en Au- vergne. Cette dernière paraît à M. Gervais avoir cependant besoin de quelques éclaircissements, parce que, parmi les oi- seaux fossiles trouvés en Auvergne, on a signalé des Echassiers et un oiseau ayant deux doigts seulement, caractère qui n’ap- partient qu’à l’autruche. Il demande si M. Pomel pourrait en- trer dans quelques détails à cet égard. M. Pomel répond qu’il a l’intention de communiquer suc- cessivement les monographies des animaux fossiles dont il a parlé ; que d’ici là il donnera directement à M. Gervais les renseignements qui peuvent l’intéresser. M. Raulin ajoute que M. Peigné-Delacourt a récemment donné à la collection géologique du Muséum un échantillon de meulière de Brie-sur-Marne ( Seine-et-Oise), dans lequel se trouve un petit ossement de 3 millim, et demi de longueur, que M. Laurillard a reconnu pour être une phalange du pied d’un oiseau de la taille d’un moineau. Ces meulières appar- tiennent à l’étage de celles de la Brie, qui sont une dépen- dance des dépôts gypseux dans lesquels Cuvier a déjà décrit plusieurs espèces d’oiseaux. M. de Tchihatcheff , en présentant à la Société, de la part de M. Gœppert , la revue des travaux de la Société de Silésie, annonce que ce volume contient un mémoire de ce savant sur les Cy codées fossiles en général et sur ceux de la Silésie en particulier , et qu’il en donnera une analyse pour le Bulletin. Il ajoute que ce mémoire n’est lui-même en quelque sorte que le prodrome servant d’introduction à un grand ou- vrage général sur les Cycadées que prépare l’auteur et pour lequel M. A. Brongniart a bien voulu lui communiquer ses propres observations. M. Viquesnel , trésorier, donne connaissance à la Société de l’état de la caisse. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 18M. ! I Il y avait en caisse au 01 décembre i843 1,079^. 20 c. La recette, depuis le 1er janvier jusqu’au 3i oc- tobre i844» s’élève à 1^,691 g5 Ensemble 14,771 *5 La dépense s’élève à. i3,4o6 5o Différence eu caisse au 5i octobre 1 84 4 1,364 65 Dans la recette figure une somme de 3,300 francs pour onze cotisations une fois payées. Dans la dépense figure une somme de 3,156 fr. 05 c. pour achat de 128 francs de rentes. M. Angelot, secrétaire, donne lecture d’une lettre de M. Graugnard, par laquelle ce dernier adresse à la Société sa démission des fonctions d’agent. Le président annonce ensuite que le Conseil s’étant assem- blé le 30 octobre dernier pour examiner les demandes et les titres des candidats à ces fonctions , a arrêté l’ordre de présentation de ces candidats de la manière suivante : 1° M. Laudy, docteur en médecine. SM. Caut, ancien caissier \ M. Rouault, attaché pour la géologie au Mu- \cx œquo. séum d’histoire naturelle J Il ajoute que, conformément au règlement spécial concer- nant l’agent, adopté par le Conseil le 9 février 1835 , cette liste de présentation restera affichée dans la salle des séances pendant un mois , à l’expiration duquel la Société devra choi- sir sur cette liste son agent à la majorité absolue des suffrages des membres présents. M. A. Leymerie lit le résumé d’un Mémoire sur le terrain ci Nummulites {épi crétacé} des Corbières et de la Montagne Noire {Aude). INTRODUCTION. En comparant et rapprochant les notions les plus exactes que nous possédions sur les divers gisements à Nummulites du midi de l’Europe et des parties adjacentes de l’Asie et de l’Afrique, je suis arrivé depuis quelque temps à considérer ces terrains comme con- stituant, dans leur ensemble, un système particulier qu’il est né- SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. cessaire de distinguer et de séparer même des couches à Hippu - rites , sur lesquelles il repose ordinairement (l). On sait combien a été et est encore controversée la question de savoir si ce système doit appartenir au groupe tertiaire ou au groupe crétacé. Le désaccord bien prononcé qui règne à cet égard entre les géologues tient sans doute à la difficulté réelle du sujet; mais il dépend beaucoup aussi, suivant nous, du peu de notions précises qui existent sur le terrain dont il s’agit. En effet , dans une question de cette nature, l’élément paléontologique doit évidemment jouer un grand rôle , et , cependant, personne jus- qu’ici, si l’on excepte toutefois M. Alexandre Brongniart (Mé- moire sur les terrains calcaréo-trappéens du Vicentiri ), n’a travaillé serieusement à y introduire cette donnée sans laquelle la solution nous paraît réellement impossible. Ayant eu personnellement, dans le cours de mes recherches, à déplorer cette lacune, j’ai voulu la combler autant qu’il m’était possible pour le gisement principal des Pyrénées françaises. Tel est le véritable but du mémoire que j’ai l’honneur de présenter à la Société géologique, mémoire dont elle veut bien me permettre de donner ici un résumé suffisamment détaillé. Le terrain à Nummulites, qui paraît très développé en Espagne au S. des Pyrénées , se trouve réduit en France, au pied N. de cette chaîne, à une bande étroite, qui s’étend presque sans inter- ruption depuis l’Océan jusqu’à la Méditerranée. Cette bande ne présente pas en tous ses points les mêmes caractères ; les couches qui la composent éprouvent , au contraire , des variations assez importantes pour que l’on doive y distinguer trois types ou faciès , savoir : un type occidental (Basses et Hautes Pyrénées) ; un type moyen (Haute-Garonne) , et un type oriental (Ariège, Aude). Ce dernier gisement, et particulièrement celui de l’Aude, qui com- prend le petit groupe montagneux des Corbières et le versant S. de la Montagne Noire , est sans contredit celui qui mérite le plus de fixer l’attention à cause de son grand développement et de l’im- portance des caractères géognostiques et paléontologiques qu’il présente; on peut même dire qu’il est digne d’être remarqué parmi tous ceux qui constituent la grande zone à Nummulites prise dans son ensemble. C'est cette considération , jointe à quel- (1) Je chercherai à le démontrer dans un mémoire particulier, pour lequel je réserve aussi toute la partie systématique de la question . dont le présent travail ne contient que la partie positive. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 13 ques circonstances favorables, qui m’a déterminé à concentrer sur ce point mes observations et mes études. Mon but principal, en composant ce Mémoire, était, comme je l’ai déjà indiqué plus haut, de faire connaître le gisement qui vient d’être désigné , sous le rapport paléontologique ; toute- fois, ayant à déduire, dans ce travail, des conclusions géo- logiques de l’étude des fossiles , il était indispensable d’étudier aussi le terrain et de mettre à chaque instant les fossiles en rapport avec les couches qui les renferment. C’est pourquoi j’ai dû joindre à mes considérations paléontologiques des no- tions topographiques et géognostiques, pour lesquelles j’ai sou- vent emprunté au beau mémoire de M. Dufrénoy sur le ter- rain crétacé des Pyrénées et à des notes consciencieusement re- cueillies par M. Vène pour l’établissement de la carte géologique de l’Aude. CORB1ERES. Les Corbières, qui forment la partie principale du gisement de l’Aude, constituent, au pied des Pyrénées, une petite chaîne di- rigée à peu près du S. -O. au N.-E. et limitée , du côté du S. et de FO. par les vallées de la Boalsane et de Y Aude, au N. par le canal du Midi, et àl’E. parle canal de Narbonne , par la mer et par la plaine du Roussillon (1). Ce petit groupe montagneux présente des accidents variés et prononcés d’une manière bizarre. Il est découpé par un grand nombre de petites vallées, dont la principale est la vallée de FOr- bieu, qui traverse presque tout le massif du S. -O. au N.-E., de- puis le pic de Bugarach jusqu’à Caumont, dans la vallée de l’Aude. Ces vallées et les vallons qui en dépendent sont sinueux, étroits et profondément encaissés entre des talus rapides. Fréquemment ces talus se terminent par des crêtes abruptes et quelquefois créne- lées comme de vieilles fortifications démolies. La direction de ces crêtes n’a rien de bien constant; toutefois, M. Dufrénoy a remar- qué qu’elle coïncidait souvent avec celle des Pyrénées. On distingue dans cette chaîne deux parties, dont l’une, qui se trouve le plus rapprochée des Pyrénées et qui est la plus élevée en général, prend le nom de Hautes- Corbières. Le pic de Buga - (1) Nous omettons ici à dessein le petit massif delà Clape, qui sépare Narbonne de la mer , quoiqu’il fasse partie géologiquement des Cor- bières, parce qu’il est tout-à-fait étranger au sujet qui nous occupe. 14 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. rach (altitude 1230^,64) en est le point culminant ; on y distingue aussi le mont Tauch , dont l’altitude est de 879m, 1 5. L’autre par- tie, celle qui descend au N. vers la vallée du canal et àl’E. vers Narbonne , est désignée par la dénomination de Basses-Corbières quoiqu’elle ait quelques cimes assez élevées. Sa dernière crête , celle d’où l’on descend immédiatement au canal du Midi , entre Lésignan et Carcassonne, est fort escarpée du côté de l’intérieur et se dessine au loin d’une manière très marquée aux yeux d’un observateur placé dans la plaine : c’est le mont Alaric (altitude , 600 mètres). Trois grands éléments composent essentiellement les Corbières, savoir : le Terrain de transition , le Terrain crétacé et le Terrain à Numnmlites. Les dépôts accessoires sont : deux petits gîtes liouil- lers, plusieurs lambeaux de lias dispersés çà et là d’une manière, en général, fort singulière, un peu de terrain tertiaire moyen qui s’élève sur les lisières orientale et occidentale , enfin des ophites qui ont percé en un certain nombre de points où elles ont déter- miné la formation de gypses , de dolomies et même de dépôts salifères. Les deux divisions indiquées par la topographie sont assez en rapport avec la constitution géognostique. Ainsi les Hautes-Cor- bières sont formées par le terrain de transition et par le terrain crétacé, tandis que les Basses-Corbières , sauf un lambeau de ter- rain crétacé, qui descend entre Lésignan et Narbonne, sont com- posées de roches appartenant au système à Nummulites. Les cou- ches secondaires se relèvent, en général, de plus en plus en appro- chant du terrain de transition, contre lequel elles s’appuient de toutes parts; mais l’influence des ophites qui ont percé en diffé- rents points, ou qui, en beaucoup d’autres, ont seulement tenté de se faire jour, a produit beaucoup d’inclinaisons anomales, accom- pagnées de dislocations partielles , souvent très prononcées , les- quelles ont puissamment contribué à donner à cette petite chaîne son relief âpre et ruiné et l’aspect sauvage de ses vallées. Les in- clinaisons sont généralement plus fortes du côté de Perpignan que vers Carcassonne, où les couches deviennent presque horizontales comme celles du terrain tertiaire miocène qui constituent le fond delà vallée. On doit admettre que le soulèvement principal des Corbières, quel qu’il soit , est postérieur au terrain à Nummulites, et, dans tous les cas, il est évident que le dépôt de ce dernier terrain a succédée celui des couches crétacées sans aucune interruption ni discontinuité; car ces deux systèmes, partout où ils existent en- SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 15 semble, sont concordants, et l’un semble faire suite à l’autre. Cette circonstance se reproduit, au reste , dans toute la chaîne des Py- rénées, dont le surgissement principal, celui qui a porté le cal- caire à Nummulites jusqu’à la crête au Mont-Perdu , a dû déter- miner la gibbosité fondamentale des Corbières. Le redressement des couches miocènes vers ces dernières montagnes, lequel se fait particulièrement remarquer du côté de Limoux et de Narbonne, indique de plus un soulèvement plus moderne, qui date probable- ment de l’époque de l’apparition des ophites. Nous ne donnerons aucun détail sur le terrain de transition dus Corbières ; ce serait inutile pour l’objet de ce travail. Ce terrain est, en général, schisteux, fort relevé et contient de nombreux gîtes métallifères, consistant principalement en minerais de fer et de manganèse. Il est presque indispensable au contraire , pour donner une idée suffisamment complète du dépôt que nous vou- lons spécialement décrire , d’indiquer brièvement la composition du groupe crétacé , ses relations avec le système à Nummulites et l’état actuel de nos connaissances sur la classification de ces ter- rains. C’est ce dont nous allons d’abord nous occuper. Les caractères minéralogiques et purement géognostiques des couches dont il s’agit, c’est-à-dire des couches à Nummulites et crétacées , que nous embrassons d’abord ensemble dans nos con- sidérations, avaient porté les premiers géologues, qui se sont sé- rieusement occupés des Pyrénées, à regarder ces couches comme appartenant à cette division vague qu’ils désignaient par le nom de Calcaire alpin , dont les Alpes avaient présenté le type, et qu’ils considéraient comme plus anciens que les calcaires secondaires proprement dits. M. de Charpentier, dans son Essai sur la con- stitution géognos tique des Pyrénées , a cependant assimilé une partie du terrain qui nous occupe au Calcaire du Jura. Telle a été aussi la première idée que l’aspect des Corbières a inspirée à M. Dufré- noy : « La première fois que je visitai ce pays, dit-il en parlant » des calcaires de Lagrasse (1), je venais de parcourir les Céveimes » composées , en grande partie , de cette dernière formation cai- » caire (lias) , je fus tellement frappé de cette analogie que je » n’hésitai pas à regarder le calcaire des Corbières comme appar- » tenant à la même formation. » Toutefois, après un examen dé- taillé, et s’aidant du précieux secours des fossiles, il renonça (t) Mémoires pour servir à une Description géologique de la Francs , t. 11, page 5g. j6 SÉANCE DE 4 NOVEMBRE 1844. bientôt à cette manière de voir et il rangea ces couches dans le groupe crétacé. Cette détermination, qui a fait faire un si grand pas à la géolo- gie des contrées sub-pyrénéennes, a été généralement adoptée jus- qu’à ces derniers temps, et elle reste encore vraie aujourd’hui pour la partie la plus ancienne de ces couches et notamment pour celles qui renferment des Hippurites et des Spherulites : mais pour le terrain à Nummulites, elle est contestée d’une manière très vive. Sans anticiper ici sur la discussion à laquelle nous devons nous livrer dans le mémoire général que nous avons déjà annoncé , il est essentiel , pour pouvoir mettre de l’ordre et de la clarté dans l’exposition des faits qui doivent servir de base au présent travail, que nous rappelions ici que , dans une lettre adressée à M. E. de Beaumont, lettre qui se trouve insérée dans le Bulletin , tome XIV, page 527, nous avons séparé des couches crétacées incontestables le terrain à Nummulites, et notamment les couches qui avaient paru dans l’origine à M. Dufrénoy identiques avec le lias, pour en faire provisoirement , sous le nom à? Épicrétacé , un type particulier plus récent que le terrain crétacé proprement dit. Après avoir isolé ce terrain supérieur, il reste au-dessous une masse considérable de couches que nous avons été conduit , d’a- près nos observations, combinées avec les coupes de M. Dufrénoy, à diviser en trois étages, qui correspondent assez bien à ceux que l’on a reconnus dans le terrain crétacé de l’ Angleterre et du nord de la France. Cette classification, que nous espérons bien amélio- rer par la suite , se trouve résumée dans un tableau annexé à la lettre que nous venons de rappeler , où nous avons fait entrer quelques indications sur la nature des roches et sur les principaux fossiles caractéristiques , indications au moyen desquelles nous pourrons nous dispenser de nous arrêter plus longtemps sur cet ensemble et passer immédiatement à la description particulière du terrain à Nummulites. La petite carte géologique qui accompagne notre mémoire montre ce terrain, occupant, sur le revers septentrional des Cor- bières, une grande surface ayant la forme d'un triangle , dont le sommet serait à Albas près de la crête de la chaîne, et dont la base longerait à peu près la vallée du canal du Midi, entre Argens et Capendu , et s’étendrait ensuite jusqu’à Belcastel (1) . C’est là le (1) Les observations faites jusqu’à ce jour semblent prouver que le ter* rain crétacé qui, à TE. de Lagrasse, passe sous le terrain à Nummulites, n existerait plus à l’O. entre celte ville et l’Aude, de sorle que, dans celte 17 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. massif principal, qui selie par un étroit ruban avec la zoneà Num nul- lités de l’Ariége, dont l’extrémité E. , comprise entre Alet etQuillan, sur la rive droite de l’Aude, appartient encore aux Corbières (1). La puissance de ce terrain varie d’une contrée à une autre; mais si l’on considère qu’il occupe à peu près la moitié de la lar- geur de la chaîne, et que ses couches se redressent , dans la plu- part des cas, vers la partie centrale, on sera forcé d’admettre qu’elle est très considérable, et nous ne croyons pas exagérer en por tant jusqu’à 1000 mètres sa valeur maximum. Les roches qui le composent sont des calcaires gris ou noirâtres, purs ou marneux, souvent compactes, qui contiennent fréquem- ment de très petits corps blancs , dans lesquels on peut quelque- fois observer les caractères des Miliolites , des calcaires compactes subcristallins, des calcaires ordinairement d’un gris cendré clair, passant à des grès à grains très fins, dont certaines parties sont pétries de N umm alites et d ' Alvéolina (Mélonies) ; des marnes or- dinairement noirâtres, quelquefois cependant grises, rouges ou jaunâtres, contenant, en beaucoup de places, de nombreux fos- siles, et notamment des Turritella ( Turritclla imbricataria , Lamk), et prenant, en certaines localités, des nœuds solides, où semblent s’être concentrées lesNummulites ; enfin, un poudingue, dont les galets ont pour base principale des calcaires compactes empruntés au terrain crétacé. A l’exception de quelques calcaires contenant des coquilles d’eau douce, lesquels se montrent vers la base du terrain (Ribaute, le Rabe) , tout ce système doit être considéré comme un dépôt ma- rin. Les caractères des couches varient beaucoup en passant d’une localité à une autre , même lorsqu’on ne change pas de niveau géognostique. En général, ces caractères rappellent, comme nous l’avons déjà dit, les roches jurassiques les plus anciennes. Quant à l’ordre dans lequel ces divers éléments se trouvent su- perposés , il ne paraît pas être assujetti à des règles bien fixes; toutefois, on peut admettre que les poudingues et les grès qui parlie des Corbières, le terrain que nous étudions reposerait immédiate- ment, comme dans la Montagne-Noire, sur le terrain de transition. (i) En comparant ces indications avec les limites tracées sur la Carte géologique de France, on verra que nous rangeons dans le terrain à Nummuliles, non seulement les couches coloriées en jaune et rapportées par M. Dufrénoy au terrain crétacé supérieur , mais encore une partie de celles représentées par la couleur verte , affectée au terrain crétacé in- férieur. •Soc. Gëoi. Tome II, ae série. a 18 SÉANClî DU 4 NOVEMBRE 1844. leur sont ordinairement associés, les calcaires d’eau douce et cer- taines marnes fossilifères (Albas) occupent la partie inférieure , tandis que les roches les plus riches en Nummulites et en Alvéo- lines se développent particulièrement à la partie supérieure. Après ces considérations générales, nous avons donné dans notre mémoire des notions particulières sur les principaux gîtes fossili- ières des Coj bières , avec la liste des espèces que chacun de ces gîtes renferme. Ne pouvant entrer ici dans ces détails , nous nous bornerons à une liste générale , dans laquelle nous indiquerons cependant, à la suite de chaque espèce, les localités qui nous l’ont offerte. Liste clcs fossiles épicrétacés des Corbières (1). Polypiers, * humilités punctata. * Porites eiegans. * Astrea contorta. * — distans. * Lobopliyllia Micheliniana. Turbinolia sinuosa, AI. Brongn. ar. Couiza. ar. Couiza, Couslouge, St-Laurent. r. Fonjoncousc. ar. Couiza. ac. Fonjoncousc. cc. Couiza, cc. St. -Laurent; ar. Se trouve dans le terrain à Nummulites du Vicentin. Foraminifères. * N animalités Atacicas. Vicentin, Egypte. * Discorbites ammoneas. * — granulosas. * Alveolina Subpyrenaïca. cc. Couslouge, St-Laurent Albas. ac. Couiza, Bize. ac. id. id. cc. Alont-Alaric. Annétides. Serpala gordialis, Schlol? ac. Couiza. Terrain crétacé et jurassique de diverses localités. — quadricar inata, Munst. ? c. Couiza, Coustouge, Roubia. Grès vert de Ratisbonne d’après Goldfuss. Conchifères. * Teredo Tournali. ac. Fontcouverte. * Panopea? elongata. ar. Coustouge, Fonjoncousc. (î) Dans cette liste, on a fait précéder d’un P les noms des fossiles qui se trouvent aussi dans le bassin parisien. Les espèces nouvelles sont dési- gnées par un astérisque (*) : c signifie commun ; cc, très commun ; ac, assez commun ; r, rare; ar, assez rare. SÉANCE DU 4 * Crassatella minima. P — scutellaria , Desh. ?? — Securis. Lucina Corbarica. — suLcosa. Cytherea Custugensis. * — Rabica. * Venus Rubiensis. — Subpyrenalca. Venericardia minuta . J’ai reconnu cetle gypte par M. Lefèvre. NOVEMBRE 1844. 19 ar, Gorbières. r. Couiza. ac. Goustouge, Lagrasse. c. Coustouge, Fonjoncouse* 5t.- Laurent. r. Goustouge. ac. Goustouge, Fonjoncouse. r. Bords du Rabe. r. Roubia. ac. Plusieurs localités. ac. Coustouge, Albas, Couiza. espèce dans la collection rapportée d’E- — trigona. — vicinalis. P Cardium hippopœum, Desh. P C liama gigas, Desh.? P Modiola cordata , Lamk. P Ostrea multicostata. — lateralis , ÏVilson ? r. Goustouge, St-Laurent. r. Saint-Laurent, r. Saint-Laurent, Albas. ac, Couiza, Goustouge. r. Couiza. ar. Plusieurs localités. ar. Roubia, Craie de Suède et de Maeslricht. P — ginrantea. Dubois. r. Fontcouverlé. O O Cetle espèce , que M. Deshayes considère comme une variété de son Ostrea latissima, qui se trouve dans les couches inférieures du terrain tertiaire de Paris et de la Belgique, joue un rôle très important, d’après MM. Dubois et de Verneuil, dans le terrain à ÎVuminuliles de Grimée. Terebratula Defrancii, AI. Br.? r. Roubia. Craie du bassin parisien.. * — Montolearensis. ar. Fontcouverte. — Venei. ac. Roubia, Fontcouverte. Planorbis. Lymnea. Paludina ? Melania ? P Neritina conoidea, Desn. Mollusques. Bords du Rabe, id. Ribaule. id. • Couiza, Albas, Roubia. Ronca (Vicentin) ; Egypte, terrain à Nummulites. ISatica acutella. # j — Àlbasiensis. # — brevispira. Turritella Archimedis , Al. Br. Terrain à Nummulites c. Albas, Fonjoncouse, c. Albas. Fonjoncouse, ur. ac. Goustouge. r. Goustouge. de Ronca (Vicentin). 20 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. * — Dufrenoyi. ac. Couiza. P — imbricataria, Lam. cc . Couiza , Tournissan , Cous- touge, Lagrasse, elc. Terrains à Nummulites du Vieentin , des Basses-Alpes, de Cri- mée, etc . P Cerithium acutum, Desh. * — Albasiense. * — Deshayesianum. * — fusiforme. P — involutum , Lam. * — polygonum . P — propinquum. Desh. * — Subpyrenaicum. * — Venei P Fusus bulbiforrnis, Lam. P — lotigœvus. Desli. P Voiuta ambigua. Lam. P TerebeLLum fusiforme , Lam .? Dents de squale. c. Fonjoncousc, Albas, Veraza. ac. Albas. r. Albas. ac. Albas. c. Albas. ar. Albas. r. Albas. r. Veraza. c. Albas. ac, Couiza, Albas. ar. Couiza, Veraza, ar. Couiza, Albas, Fonjoncousc. r. Saint-Laurent. Fontcouverte. Parmi toutes les localités citées dans cette liste, deux méritent d’être particulièrement remarquées; ce sont celles de Couiza et àf Albas. Elles offrent des marnes très riches en espèces, parmi lesquelles il s’en trouve un assez bon nombre du bassin de Paris. Le gîte d’Albas se recommande, en outre, par une belle suite de Cérites, qui le caractérisent d’une manière toute spéciale. Si l’on jette maintenant sur la liste entière un coup d’œil général, on voit que la très grande majorité des espèces qu’elle présente sont inédites. Quinze espèces, dont douze ne peuvent laisser d’incerti- tude, se rapportent à des espèces tertiaires du bassin parisien et particulièrement des couches inférieures. Deux autres sontpropres au terrain à Nummulites du Vieentin. Nous citons encore dans cette liste deux espèces ( Terebratula Dcjrancii et Ostrea lateralis ), qu’on n’a trouvées jusqu’à présent que dans le terrain crétacé du N. de l’Europe ; mais le mauvais état denosindividuset quelques différences , qui peut-être ne sont qu’individuelles, ont inspiré à M. Desliayes, sur leur détermination, quelques doutes que nous partageons. C’est aussi avec une grande réserve que nous rappor- tons, d’après les figures de Goldfuss, deux Serpules à des espèces crétacées et jurassiques. Montagne-Noire. Nous avons déjà dit que le terrain à Nummulites se présentait sur le versant S. delà Montagne -Noire sous la forme d'une bande étroite. C’est à St-Papoul, non loin de Castelnaudary, que cette SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. bande commence, et, à partir de ce point, elle s’étend à l’E. sans interruption jusqu’à une petite distance de St-Chinian (Hérault). Dans toute cette longueur qui traverse entièrement le département de l’Aude, le terrain à Nummnlites s’appuie immédiatement soit sur le terrain de transition, entre St-Chinian et Salsigne, soit sur le granité, entre Salsigne et St-Papoul , sans interposition de ter- rain crétacé ; caractère bien#remarquable , puisqu’il semble an- noncer, pour le système épicrétacé, une sorte d’indépendance que nous avait déjà fait pressentir la manière d’être de ces mêmes couches sur le versant N. desCorbières au N. -O. de Lagrasse. Les couches qui constituent le gisement de la Montagne INoire sont redressées sous des angles assez faibles vers les roches an- ciennes , qui forment la masse principale , et présentent à cette masse leurs têtes , laissant entre les deux systèmes une espèce de sillon qui marque assez clairement leur limite. C’est vers le fond de cette ligne creuse que paraît en plusieurs points, et notamment à Montolieu et à Conques, une assise de cal- caire ordinairement blanchâtre, quelquefois subcristallin, où existent de nombreux fossiles d’eau douce, parmi lesquels MM. Braun et Rolland du Roquan ont reconnu environ 14 es- pèces, probablement inédites, appartenant aux genres Bulimus, Agathina , A tir i cul a , Cyclostoma , Papa , Planorbis , Lymnea , Physa (1). Cette assise remarquable, dont nous devons la connais- sance à MM. Yène et Braun, peut avoir, d’après ce dernier géo- logue, K) mètres de puissance au-dessus de Conques. On trouve encore dans cette même position, d’après M. Braun, un calcaire coloré en noir par du bitume, et qui contient aussi des fossiles d’eau douce associés à des gyrogonites. Au-dessus de cette assise paraît la masse du terrain à Nuinmu- lites, lequel est principalement composé de calcaires arénifères ou marneux, grossiers, d’un gris sale, renfermant de nombreux fossiles ordinairement à l’état de moule, et souventcomme corrodés à la surface, et contenant des nœuds, en forme d’amandes, de cal- caire plus dur, pétri de Nummnlites. Ces calcaires sont fréquem- ment séparés par des lits marneux riches en Ostrcn multicostata , et par des marnes sableuses, verdâtres, où abondent les Nummulites. Un autre élément qui paraît, en général, occuper la partie supé- (i) Ces espèces diffèrent de celles qui caractérisent le calcaire miocène que l’on exploite dans la vallée en face de Caslelnaudary. Une des plus remarquables est une grande Physa , qui ressemble beaucoup à celle que l'on connaît dans les sables de l’argile plastique de Ililly (Marne). 22 SÉANCE DU 4 novembre 1844. rieure de la formation, et que l’on trouve bien développé surtout à Moussoulens, est un calcaire blanc qui devient souvent sub- saccharoïde par suite cle la présence d’une multitude d'Alvéolines (Mélonies). Nous réunirons ici dans une seule liste, sans désignation de lo- calités, les fossiles marins que l’on trouve dans ces couches, parce que les divers gisements qui’ les présentent sont presque identiques dans toute l’étendue de la bande. Quant aux fossiles d’eau douce et terrestres, nous laissons à MM. Braun et Rolland le soin de les spécifier, et nous nous en tenons à l’indication des genres qui vient d’être donnée ci dessus. Liste des fossiles épicrétacés marins de la Montagne-Noire (1). * Nummulites Atqcicus. cc. * Alveolina Subpyrenaica. cc. Spatangus ambulacrum.Desh. ? ac- Corse, Egypte. Terrain à Nummulites. * Teredo Tournali. ar. * Lucina Corbarica. c. P. Chama gigas. Desh.? ar. P. Ostrea multicostata. Desh. cc. * Terebratula Montolearensis . ac. P. Neritina conoidea . Desh. ac. * Natica brevispira. ar. * — longispira. ac. P. — sigaretina. Desh.? ar. * Solarium simplex. ar. P. Cerithium giganteum. Lam.?^ar. * Terebellum Carcassense. ar. Terebellum obvolutum. Brongn. r. Ronca (Vicenlin). T. à Num. ** Terebellopsis Brauni. c. P. N autilus Lamarckii. Desh. r. * — Rolland'. r. Denis de Squale. — de Pycnodonte. L’examen de cette liste nous montre d’abord que 1 £ bande à Numinulites de la Montagne-Noire constitue un gîte spécial assez différent de celui des Corbières. En effet, sur 19 espèces bien dé- terminées, il s’en trouve 11 qu’on ne rencontre pas dans la petite chaîne que nous venons de nommer, parmi lesquelles plusieurs sont assez abondantes. D’un autre côté, les Turritella , la Turbi- nolia sinuosa , etc., si commune au-delà de l’Aude, ne reparaissent plus ici, où le premier de ces deux genres semble être remplacé par l’ Ostrea multicostata. La présence de deux grands Nau- tilus , dont l’un existe dans le gisement à Numinulites du bassin parisien, est encore un fait caractéristique et bien remarquable dont nous devons la connaissance à M. Rolland du Roquan, de Carcassonne. C’est encore à ce géologue, et à l’un de mes audi- teurs, M. Tallavignes, que je dois la communication de deux moules d’un grand Cerithium, de la taille, mais probablement dif- (i) Celle liste , comme celle relative aux Corbières, ne renferme que les fossiles déterminables, SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 23 férent, du Cerithium giganteum , lequel, dans tous les cas, m’a paru identique à celui que l’on a signalé dans le terrain à Num- mulites de Crimée et d’Egypte. Un Spatangue, que nous rappor- tons avec doute au Sp. ambulacrum , Desh., à cause de quelques dif- férencesde contour qui s’effacent presque lorsqu’on le compare au type moulé de la collection Agassiz , serait un fossile important, si notre détermination venait à être confirmée, puisqu’il établirait un nouveau lien entre les gîtes épicrétacés de l’Aude, de Bayonne, de Corse et d’Egypte. Enfin, nous retrouvons encore dans cette liste le mélange, au milieu des fossiles propres au terrain à Num- mulites, de plusieurs espèces du système parisien, et notamment Y Ostrea multicostata , qui joue ici le rôle de fossile habituel et ca- ractéristique, la Ne ri tin a conoidea ,, le Nautilus Lcimarckii , enfin, peut-être le Cerithium giganteum. D ’un autre côté , la présence des Nummulites et des Alvéolines des Corbières, et celle de plusieurs autres fossiles que nous avons déjà rencontrés dans ce dernier massif ( Lucina Corbarica , Chama gigas , Teredo Tournai/' , Ncritina. conoidea, Natica brevispira) , ne peuvent laisser aucun doute sur la correspondance des couches de l’un et de l’autre gisement. La bande de la Montagne-Noire n’est évidemment autre chose qu’un affleurement des couches à Nummulites des Corbières , qui passent sous les terrains miocènes de la vallée qui sépare les deux massifs. CONCLUSIONS. 1° Le gisement de l’Aude, qui se compose de la plus grande partie des Basses-Corbières et de la bande étroite qui se montre sur le revers méridional de la Montagne-Noire , offre le terrain à Nummulites. avec un développement et des caractères plus prononcés que dans tout le reste de la zone sous-pyrénéenne. 2° Il comprend tous les terrains coloriés en jaune sur la carte géologique de France , et rapportés par M. Dufrénoy au T. crétacé supérieur , plus une portion de ceux qui offrent la couleur verte affectée à l’étage inférieur du même groupe. 3° Les caractères des roches qui constituent ce gisement varient, à la même hauteur géognostique , lorsqu’on passe d’une localité à une autre. En général, cependant, les couches inférieures sont formées par des poudingue# à noyaux calcaires, associés à des grès (i) Ces relations des deux gites se voient très clairement sur une petite coupe qui accompagne la carte géologique annexée à notre mémoire. 21 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1814. et à des marnes et recouvertes par des argiles à Cérites (Àlbasjo C’est à cette hauteur que se développent en certaines localités (Ri- haute, le Rabe, Conques, Montolieu ) une ou plusieurs assises de calcaires caractérisés par des fossiles d’eau douce et terrestres qui probablement appartiennent à des espèces nouvelles. Le reste du terrain, dans lequel il paraît difficile de faire des subdivisions, consiste en calcaires subcompactes à Miliolites, associés à des grès et à des marnes arénifères (Lagrasse) , ou en marnes jaunâtres ou noirâtres à Turritelles (Tournissan , Couiza) , avec grès fins passant au calcaire, plus ou moins consistants, renfermant beau- coup de Nummulites et d’autres fossiles (Montolieu, le Rabe) , et , enfin , en des calcaires à Mélonies souvent compactes et sub- cristallins (Alaric , Moussoulens). 4° Dans les parties méridionale et orientale des Corbières, on voit le terrain que nous étudions reposer sur les couches créta- cées ; mais du côté N. -O. de ce petit groupe , et dans tous les gîtes de la Montagne-Noire, ce même terrain paraît immédiatement posé sur les roches de transition ou sur le granité, et prendre ainsi l’allure d’une formation indépendante. 5° Les couches épicrétacées affectent , dans les Corbières, un redressement général vers le massif de transition qui forme la gibbosité centrale, sous un angle dont la valeur est très variable, médiocre ordinairement. Ce redressement que suit le T. crétacé, concordant avec le terrain à Nummulites partout où ces deux systèmes se trouvent ensemble, paraît dater de l’époque du sou- lèvement principal des Pyrénées. Ces terrains ont en outre été localement disloqués et modifiés par l’influence des Opliites qui , vers la lisière des Hautes-Cor bières, ont pu se faire jour sur le sol ou s’approcher assez de la surface pour altérer sensiblement les caractères des roches, et pour y déterminer notamment la transformation du calcaire en gypse. 6° Un des principaux effets des relèvements et des dislocations soit généraux , soit locaux que nous venons de rappeler, a été la production de crêtes escarpées et souvent crénelées qui , d’après M. Dufrénoy , offrent souvent la direction normale des Pyrénées, et des vallons profonds et sauvages. C’est aussi à ces perturbations géologiques qu’il faut attribuer l’aspect ruiné et la stérilité de cette partie du département de l’Aude. 7° La bande étroite qui borde les terrains anciens sur le flanc méridional de la Montagne-Noire n’offre pas ces caractères de dislocation. Les couches y sont simplement et médiocrement relevées vers la chaîne centrale, à laquelle elles présentent sou SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 25 vent leurs têtes sous la forme d’une crête légèrement saillante. 8° Le tableau général des fossiles que j’ai pu étudier j usqu’à ce jour, tableau qui se trouve annexé à mon mémoire, présente 104 espèces, dont 79 seulement ont pu être déterminées spécifique- ment. Sur ces 79 espèces , il en est 53 propres au terrain qui nous occupe, dont 39 marines que j’ai décrites et figurées, laissant à MM. Braun et Rolland le soin de faire connaître les espèces d’eau douce. Les autres espèces, au nombre de 26, appartiennent presque toutes , d’une part au terrain tertiaire inférieur du nord , et d’autre part à des gîtes plus ou moins bien étudiés de la zone épicrétacée du midi de l’Europe. Nous avons recherché avec soin les indications de ces gîtes, et nous les avons consignées en regard des noms des fossiles, dans notre tableau général. Nous croyons utile de donner à la fin de ce résumé la liste des espèces les plus habituelles du gisement de l’xVude considéré d’une manière générale ; ces espèces sont : G. Turbinolia sinuosa. Nummulites Atacicus. Discorbites ammoneus. Âlveolina Subpyrenaica. Serpula q uadricarinata ? C. CrassatellaSecuris. Lucina Corbarica. G. V enericardia minuta. M. Ostrea multicostata , M. TcrebratuLa Montolearensis. C. Terebratula Venei. Neritina conoidea. M. Natica longispira. G. Turritella imbricataria. M. Terebellopsis Brauni. G. Natica acutella. \ G. — Albasiensis. [ Couches G. Ceritliium acutum. i inférieur . G. — involutum.J Un voit que parmi ces 19 espèces habituelles , on en trouve 5 qui sontégalement communes dans le bassin parisien, et surtout dans les couches inférieures ; ce sont les suivantes : Ostrea multicostata. Ceritliium acutum. N eritina conoidea. — involutum. T urrilella imbricataria. tandis qu’aucun fossile bien reconnu comme crétacé ne s’y trouve compris. Nous avons eu bien souvent l’occasion de comparer les espèces du T. crétacé incontestable des Corbières à celles du T. à Num- mulites, et toujours elles nous ont offert des caractères différents. (i) Parmi ces fossiles, les uns se rapportent plus particulièrement au gîte des Corbières , nous les avons désignés par la lettre G ; les autres à la Montagne Noire, la lettre M nous a servi à les désigner. 26 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. Les Nummulites notamment et les Rudistes ne se mêlent point dans les mêmes couches , à moins , cependant , que cela n’ait lieu vers la surface de contact des deux formations , où l’on pourrait admettre une liaison que semblent prouver les observations de MM. Dufrénoy et Vène. En un mot, il existe bien réellement , dans le département de l’Aude, si l’on considère les choses en grand, une puissante for- mation caractérisée principalement par les Nummulites , laquelle se développe d’une manière indépendante, ou se trouve super- posée à la formation crétacée dont les Rudistes sont les fossiles les plus caractéristiques. Le but direct de notre mémoire était l’établissement de ce fait, qui nous sera d’un grand secours pour la détermination du système général à Nummulites, dont l’étude sera, comme nous l’avons déjà annoncé, l’objet d’un autre travail. Nota. Les pages qu’on vient de lire offrent le résumé de la pre- mière partie seulement de notre mémoire. La seconde partie, qui se compose d’un tableau général des fossiles et de la description des espèces nouvelles, avec 5 planches où ces espèces se trouvent figurées , n’est pas susceptible de résomption. A la suite de cette lecture, M. le marquis de Roys annonce qu’il a vu un lambeau de terrain nummulitique au bord du Rhône, près du Bourg St- Andéol (Ardèche), qui estconnudans le pays sous le nom de banc rouge. Ce qu'il en a observé est un calcaire subcristallin surmonté d’un grès très friable. Il y a vu des Nummulites, des Huîtres, plusieurs coquilles tur- riculées et un Nautile. Ce terrain est distinct, par ses fossiles et sa plus grande cristal linité, de la partie des terrains créta- cés inférieurs ; mais il est encore plus différent des terrains tertiaires voisins, qui, il est vrai, n’appartiennent proba- blement pas à la partie inférieure de ces terrains. M. Bourjot dit avoir recueilli sur les bords de l’Adige un échantillon de terrain nummulitique, dont les Nummulites lui paraissent semblables à celles dont a parlé M. Leymerie. M. Constant Prévost, à l’occasion du mémoire de M. Ley- merie, lit la note suivante : fiwam iiiiiiwnilitiifiir au contact desquelles la roche a été évidemment modifiée; celles de ces assises qui sont le plus inférieures renferment un très grand nombre d’Hippui ites , tandis que les supé- rieures sont presque entièrement composées de Mélonies et de Nummulites; je crois même me rappeler, et je l’ai noté, que les deux sortes de fossiles se rencontrent dans la même couche; je n’avance ce dernier fait qu’avec doute; mais ce dont je suis convaincu, c’est que la concordance parfaite dans la superposition, les rapports des divers bancs au con- tact, leur identité minéralogique, 11e permettent pas d’ad- mettre une distinction géologique entre les bancs inférieurs et les supérieurs; pour le géologue, c’est évidemment un même système. Si du cap Passaro on revient au nord vers Noto par Pa- chino, et jusqu’à Syracuse (1), on trouve sur les bancs sac- charo'ides à Hippurites et à Nummulites (n° 2), un calcaire beaucoup plus grossier, jaunâtre (n° 3) , dans lequel , avec des Turbinolies et des moules de coquilles univalves, d’as- pect tertiaire, se voient, non pas des Hippurites semblables (1) goir la coupe du cap Passaro à Syracuse, pi. 1. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. à celles du cap Passaro, mais des vestiges de coquilles eloi- sonnées à la manière de celles de la famille des Rudistes. J’ai pu dessiner de ces empreintes, qui avaient près de six pouces de longueur (pl. ï, fig. a , b). C’est au-dessus du calcaire grossier à Turbinolies que vient cette marne blanche crétacée (n° 4), qui, en Sicile comme en Italie , et, à ce qu’il paraît, en Syrie, en Egypte et en Algérie, forme un horizon géologique très constant. Cette marne blanche olfre les plus grandes ressemblan- ces minéralogiques avec la craie de Meudon, celle de l’An- gleterre et du Nord; elle paraît, suivant les observa- tions de M. Ehrenberg, presque entièrement composée de Foraminifères microscopiques, dont plusieurs espèces se voient également dans la craie du Nord et dans celle de Meudon; mais, d’un autre côté, cette marne renferme, d’a- près M. dePinteville (Bull, de la Soc. gèol. , t. XIV, p. 558) , les Pecten Jlabelliformis , Scalaria crassicostata , Terebratula caput serpentis , T. vitrea , T. bipartita , T. ampulla , tous fossiles reconnus comme tertiaires, et enfin une Grypbée, que l’on a souvent confondu avec VOstrea 'vesicularis de la craie, à laquelle elle ressemble beaucoup, mais dont les pa- léontologistes ont fait VOstrea navicularis , coquille très abon- dante dans les dépôts analogues de l’Italie, de la Grèce , de la Syrie et de l’Afrique septentrionale. C’est dans la marne, dont les caractères secondaires et ter- tiaires se mélangent pour ainsi dire, qu’est le gisement ordi- naire du gypse , du soufre et du sel gemme, en Sicile. Aussi, tandis que M. F. Hoffmann regardait les dépôts de ces substances comme subordonnés à celui de la craie , j’ai été conduit, au contraire, à les placer à la base des terrains tertiaires (Bull, de la Soc. gèol. , t. Il, p. 403 et 404, et t. III, p. 176). C’est la difficulté de trouver dans cette partie de l’Europe une séparation tranchée comme celle que l’on observe dans le Nord entre la craie et les ter- rains tertiaires qui est la cause naturelle de cette diver- gence d’opinion entre M. F. Hoffmann et moi, dont l’opi- nion s’est trouvée appuyée depuis par les observations de MM. Paillette et de Pinteville; ce senties faits constatés 29 SÉANCE I)U 4 NOVEMBRE 1844. pendant mon voyage qui m’ont fait dire : « 11 en est de » ces produits et phénomènes volcaniques comme des cal- » caires qu’ils accompagnent ; ceux-ci passent de l’un à l’autre » par des nuances presque insensibles , depuis la craie indu- » s d et rient jusqu’aux sédiments qui se déposent et se conso- » lident encore maintenant; et si dans une localité on voit » des caractères et des superpositions qui semblent annoncer » des périodes bien tranchées, dans une autre on trouve » des transitions graduées. C’est ainsi que de Syracuse à Pa- » chino par Noto , on voit les terrains tertiaires les plus mo- » dernes passer graduellement à la craie, transition que l’on » retrouve encore auprès de Sciacca, au mont Saint-Calogero » et au pied dumontÉrix de Trapani.» [Bull., t. II, p. 404.) Je sais bien que cette assertion parut dans le temps pres- que une hérésie paléontologique à ceux des géologues qui ont admis a priori que la formation de chaque groupe des terrains doit avoir suivi ou précédé une révolution générale par l’effet de laquelle tous les êtres auraient été anéantis et remplacés par de nouvelles créations; mais je n’ai jamais eu foi, comme on le sait, dans ces brillantes hypothèses, et j’ai depuis longtemps confiance dans la découverte successive de faits qui s’accumuleront bientôt, je l’espère, de manière à ré- duire à leur juste valeur des illusions, séduisantes par leur invraisemblance même. F. Hoffmann, que j’ai connu à Naples longtemps après avoir communiqué mes premières impressions à la Société (mai 1833) , avait vu comme moi qu’il y a passage, en Si- cile, de la craie aux terrains tertiaires; ainsi il dit {Bull. , t. III, p. 176): «Cette liaison double du sol secondaire et * tertiaire est un des faits les plus curieux dans la géologie » de la Sicile, d’autant plus qu’il y a mélange des fossiles, à • la limite des deux terrains, et que les coquillages du sol » tertiaire présentent les caractères d’un dépôt très récent. » En effet, au-dessus de la marne blanche, au cap Passaro comme à Sciacca et àGirgenti, sont superposés les deux sys- tèmes synchroniques d’argile ou de calcaire tertiaire ( Ma- caluba, Sciacca , Val de Noto et Syracuse) (PI. I, n° 5) , systè- 30 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. mes que j’ai appelés anciens , bien qu’ils contiennent, avec des fossiles de la marne, des fossiles semblables aux calcaires et faluns les plus modernes de Castro-Giovani, Girgenti, Syracuse , Messine , Palerme , Melazzo , etc. (n° 6) , mais parce que ces derniers reposent dans un grand nombre de points en superposition très contrastante sur les premiers ; ceux-ci même, comme je l’ai dit [Bull. , t. III, p. 1 7 G) , ont été traversés par des émissions de roches volcaniques dont les fragments se voient empâtés dans les calcaires récents qui, paléontologiquement parlant, ne diffèrent presque pas des dépôts qui se forment actuellement dans la Méditerra- née. Ici la liaison par les fossiles est aussi incontestable que l’est la séparation géologique par la discordance de superpo- sition. A l’occasion des conséquences générales qui me paraissent devoir découler bientôt de la discussion calme et impartiale des opinions et des observations d’un grand nombre de sa- vants , et particulièrement de celles de MM. Dufrénoy, Ley- merie et Deshayes , relativement au gisement et au classe- ment géologique des calcaires à Nummulites du Soissonnais, delà Suisse, du Vicentin , de l’Italie, de la Sicile, de la Grèce, de l’ Afrique, etc., je demande la permission à la So- ciété de transcrire à la suite de cette note improvisée un passage imprimé d’un mémoire encore inédit , mais, depuis plus de quinze ans , rédigé et communiqué h l’Académie des sciences : a Je ne puis me dispenser de faire de nouveau remarquer » combien il est important pour l’histoire philosophique des » êtres et pour celle des révolutions qui ont agité la surface » de la terre , de rechercher si l’apparition ou la disparition « de certains types de végétaux ou d’animaux fossiles dans » les couches superposées d’une portion du sol, tient à ce que » les types d’organisation auraient réellement changé, et que » des espèces anéanties auraient été remplacées par des espèces » nouvellement créées. Ne pourrait-on pas croire plutôt que » les circonstances de localité n’étant plus les mêmes, les races » qui habitaient un point quelconque l’ont abandonné pour se SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 31 » retirer sur des points plus convenables, tandis que d’autres » races, qui existaient déjà dans certaines contrées plus ou » moins éloignées, sont venues s’établir dans des lieux ren- » dus propres à leur existence par suite de certains événe- »> ments? Ainsi le changement d’une mer profonde en une » baie, de celle-ci en un lac, en un marais, ne doit-il pas » avoir amené des changements dans la série des espèces qui » se seront succédé dans un même lieu? Ainsi les change- » ments dans les rapports des continents et des mers, dans la » direction des courants, la position, l’abondance plus ou n moins grande des affluents, la modification dans les cli— » mats qui en sont la conséquence , etc. , etc. , ne peuvent-ils » pas produire de semblables résultats?... Telle me semble » cependant être la tendance des opinions de beaucoup de » géologues, que, croyant voir dans la distribution des fos- » siles dans les couches de la terre l’indication exacte de /> l’ordre suivant lequel les divers êtres auraient été créés et » auraient apparu pour la première fois dans les eaux ou sur » la terre, ils regardent, en retournantla proposition, comme » déposées à la même époque les couches qui renferment les » mêmes espèces. » Je suis loin de nier que l’ identité des fossiles ne caracté- » rise, dans beaucoup de cas, des dépôts de même âge ; mais je » crois que, dans beaucoup de cas aussi, des fossiles sem- » blables peuvent appartenir à des dépôts d’âge différent, et , » pour arriver à cette conclusion , je me fonde sur l’analogie » et sur le raisonnement le plus simple. On ne peut révoquer » en doute, dit-on, que certains types , certaines espèces, ont » commencé à exister après que d’autres avaient cessé d’être, » puisque, dans la série des couches dont est composé le sol, » on ne trouve plus les uns à une certaine hauteur dans » l’ordre chronologique des terrains {Ammonites , Belemnites , » Ickthyosaures) , et que les débris des autres ne se rencon- » trent jamais au-delà d’une certaine profondeur {Mammi- » feres , Eléphants, etc.). Tout en admettant le fait comme un » résultat de l’observation , et la conséquence comme juste » dans sa généralité, je crois cependant qu’il est possible de » s’égarer en en faisant l’application dans la plupart des cas 32 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. » particuliers. Ainsi , pour prendre un exemple, en laissant de » côté la difficulté, insoluble pour nous, de concevoir la » création subite et de toutes pièces d’une espèce nouvelle » (comme un Mastodonte , un Crocodile , un Poulpe , une Huître » même, etc.), supposons que les circonstances et les condi- » tions nécessaires pour la production d’un tel prodige se » réunissent sur un point; s’ensuivra-t-il que sur tous les • autres points de la surface de la terre, dans le même mo- » ment et comme instantanément, des individus de la nou- » velle espèce seront simultanément créés? Ne faudra-t-il pas » du temps pour que la propagation multiplie le nombre des » individus? Et lorsque les causes destructives exerceront » leur influence , les mêmes effets de destruction seront-ils » produits partout en même temps? L’anéantissement de la » race ne pourra-t-il pas avoir lieu dans une contrée long- » temps avant la disparition de tous les individus de la même » race dans une autre contrée? Si ces réflexions n’ont rien » que de raisonnable, ne conçoit-on pas que les sédiments '> qui se formeront près de l’endroit où le type a pris nais- « sance pourront contenir des fossiles qui ne commenceront » à se montrer qu’au sein de couches beaucoup plus nou- » velles, formées là où le type se sera le plus longtemps con- » servé ? » J’ai été entraîné presque malgré moi dans cette digres- » sion , en pensant à la grande différence qui existe entre les >> fossiles de la craie et ceux des premiers dépôts du calcaire » grossier. Est-ce que les races des animaux dont les débris » caractérisent ce dernier n’existaient nulle part lorsque la » craie se déposait encore? Est-ce que l’on ne pourrait pas re- » trouver des dépouilles semblables dans des terrains plus an- » ciens formés dans de plus anciennes baies? » Les dépôts qui, depuis plus de six mille ans, se for- » ment au sein de la Méditerranée, par exemple, n’en- » veloppent-ils pas des animaux semblables , presque tous, à v ceux qui caractérisent les terrains tertiaires circum-méditer- » ranéens , et les uns ne sont-ils pas les ancêtres des autres, « comme peut-être les fossiles tertiaires des Hautes-Alpes se- « raient la dépouille des ancêtres des animaux qui ont peuplé 33 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 18 H. » plus tard le bassin parisien. » ( Documents pour l’hisL des terr. tert. Essaisurla form. des terr. des env. de Paris, p. 1 1 4.) M. de Pinteville s’élève contre l’idée de considérer la couche de marne blanche crayeuse à foraininifères et à fos- siles tertiaires de Pachino, comme un passage du terrain crétacé au terrain tertiaire. En effet, bien que reposant im- médiatement sur les couches à Nummulites et à Hippurites qui forment, en Sicile, la partie supérieure de l’étage cré- tacé, bien que se trouvant à la base du terrain subapenriin de la Sicile, l’ensemble des fossiles qu’elle renferme, et dont quelques uns sont encore vivants, le porte à supposer au contraire qu’il y a eu un long intervalle entre la craie et ce terrain, qu’il est impossible de placer plus bas que la partie inférieure du système Pliocène. M. Deshayes parle dans le même sens. M. V irlet rappelle, pour appuyer l'idée de l’indépendance de la formation nummulitique , qu’aux environs de Cham- béry, où le système crayeux manque, cette formation repose immédiatement sur le calcaire à Chaîna ammonia du terrain néocomien. M. Deshayes déclare avoir examiné les fossiles trouvés dans le terrain tertiaire de Dax avec le Terebratula Caput - serpentis de la Méditerranée, et ceux considérés par JM. Lev- merie comme étant le Terebratula Defrancii et YOstrea laté- rales , espèces crétacées. Il est difficile de déterminer l’es- pèce de ces échantillons: ainsi , celui considéré comme étant le Terebratula Defrancii a les deux valves chevauchant Tune sur l’autre, et les deux oreillettes particulières à cette es- pèce ne se montrent pas. Le Spatangus ambulacrutn de M. Leymerie n’est pas moins douteux. Il huit donc encore laisser, quant à présent, la question dans le doute où elle se trouve. Enfin, la dénomination de terrain épicrétacé, em- ployée par M. Leymerie, paraît fâcheuse cà M. Deshayes, parce quelle ne s’applique pas à un terrain d’une nature particulière, indépendant soit du terrain tertiaire de Paris , soit de la craie. Les terrains d’eau douce ont un cachet si particulier qu’on ne peut s‘y méprendre. On ne connaissait pas tout le terrain tertiaire en France. On commence à le Soc. géol. Tome II, 2e série. 5 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 181L 34 connaître, grâce aux travaux de M. Leymerie et à ceux de M. Pratt, Le nom de terrain Nuinmulitique, sous lequel ce terrain est connu dans la science, a l’avantage de ne rien dé- placer. C’est une connaissance plus complète du terrain ter- tiaire inférieur. M. d’Arehiac rappelle qu’il a dit précisément la même chose, il y a dix-huit mois environ, dans la séance du 15 mai 1843 (Bull., lre série , t. XIV, p. 488 et suiv.), une quinzaine de jours avant la lecture d’une lettre de M. Leymerie sur le même sujet. M. A. d’Orbigny rappelle à son tour qui! l’avait fait dans cette même séance avant M. d’Archiac [Bull. , lre série, t. XIV, p. 486 et suiv.) . M. Leymerie répond qu'il ne met pas en doute que ce soit là un terrain tertiaire; que c’est pour lui ï Eocène du Midi , et qu’il développera plus tard cette idée dans un mémoire spé- cial. Il ne diffère pas d’opinion à cet égard avec MM. Des- hayes, d’Archiac et A. d’Orbigny. Si l'on donne le nom de terrain tertiaire à tout ce qui est paléontologiquement supé- rieur à la craie, reste la question de synchronisme entre les terrains tertiaires parisiens et ceux du Midi. Or, M. Leymerie ne pense pas que l’on puisse établir de synchronisme entre les divers étages de ces deux bassins. Quant à ce qui est des fossiles, il s’empresse d’adopter les idées de M. Deshayes, qui, dit-il, s’y connaît beaucoup mieux que lui. M. d’Archiac dit que les terrains qui ont donné lieu à cette discussion sont aussi indiqués comme tertiaires dans un tra- vail de M. de Boucheporn , qui fonde cette opinion sur des considérations théoriques d’un ordre très élevé. M. Leymerie répond que M. de Boucheporn part de l’idée que , les lignes de soulèvement s’étant étendues d’un même coup tout autour du globe, les lignes de démarcation des terrains, dues à un seul et même phénomène, s’étendent à la fois sur toutes les parties du globe ; que toutes ces idées ne sont pas généralement admises , et que, pour son compte, il pense le contraire ; que des observations eussent mieux décidé la question que les théories de M. de Boucheporn. M. d’Archiac réplique que la distinction des terrains. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1 8 \ 4 . 35 d’après des considérations paiéontologiques , n’est elle-même qu’une théorie, que c’est donc prêter appui à cette théorie que d’arriver aux mêmes conclusions par des considérations théoriques d’un ordre tout différent. M. Deshayes réclame la priorité de l’idée du rapproche- ment de ces terrains avec les terrains tertiaires de Paris. Il l’a émise, il y au moins une dizaine d’années, dans des discus- sions à la Société même, à propos des soulèvements des Alpes. M. Angelot donne lecture de la lettre suivante , à lui adres- sée de Grenoble le 21 octobre 1844 par M. Scipion Gras: Nouvelles observations sur les gîtes de spilite du Dauphiné , par M. Scipion Gras, ingénieur des mines. En parcourant, cette année, les Alpes Dauphinoises, j’ai décou- vert quatre gîtes de spilite qui étaient restés jusqu’à présent in- connus ; car ils ne sont ni indiqués sur la carte géologique de France , ni mentionnés par aucun auteur. Je crois devoir les si- gnaler aux géologues, en donnant quelques détails succincts sur ceux qui m’ont paru les plus intéressants. Le premier de ces gîtes est situé tout près du village d’Auris- en-Rattiers, dans la vallée de la lloisanne ; il forme, au N. -O. du village, un escarpement au-dessous duquel passe le chemin qui conduit à la Valdens. Ce spilite est à base d’aphanite verdâtre, avec paillettes de mica bronzé. La chaux carbonatée y est dissé- minée , non pas en noyaux arrondis , mais en petites particules jaunâtres presque indiscernables. Sur quelques points il est dis- tinctement stratifié et entremêlé de lits schisteux d’un rouge foncé. Les bancs spili tiques se trouvent au milieu de calcaires al- térés auxquels ils sont intimement liés. La coupe du terrain qui constitue cette localité est très intéressante. On y observe, en al- lant de bas en haut, 1° des calcaires schisteux à Bélemnites for- mant la base de la vallée ; 2° des bancs de spilite en partie stra- tifiés et même schisteux; 3° quelques couches peu épaisses de calcaire altéré, compacte et dolomitique ; 4° des grès argileux et micacés avec indice d’anthracite ; 5° des grès quarzeux et des poudingues à base de schiste argilo-talqueux ; 6° enfin des talc- schistes et des gneiss. Ce dernier système de couches constitue toute la montagne au pied de laquelle est bâti le village d’Auris ; se SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 18 H. sa superposition aux roches précédentes est évidente , et peut se suivre sur plusieurs centaines de mètres de longueur. Cette localité doit donc être ajoutée à tant d’autres déjà connues dans les Alpes, où l’on voit le terrain de schiste talqueux et de protogyne recou- vrir soit les grès à anthracite , soit les schistes à bélemnites. Le second gîte de spilite constitue le sommet même du col de Praclos ou de Prades, que l’on traverse pour aller de Valjouffrey à Corps. Comme à Auris , il se trouve à la jonction du calcaire à Bélemnites et des grès anthracifères. En suivant l’arête du col dans la direction du S. au N., on observe successivement : l°des grès rouges quartzeux , faisant partie du système anthracifère ; 2° un banc de calcaire gris, avec silex présentant sur plusieurs points l’aspect et la nature minéralogique du spilite; 3° plusieurs couches de schiste calcaire devenues rouges et siliceuses par alté- ration ; 4° des lits de spilite schisteux intimement liés aux couches précédentes et alternant avec elles ; 5° des bancs de calcaire altéré, compacte ; 6° une grande masse de spilite à pâte de couleur brune avec de nombreuses amygdales calcaires; 7° enfin une longue série de calcaires schisteux à Bélemnites. La stratification plus ou moins distincte de ces diverses roches paraît d’abord verticale, puis elle incline fortement vers le N.-E. Le terrain de schiste tal- queux se trouve à peu de distance de là , vers le S. -O., et succède immédiatement aux grès anthracifères sans qu’on puisse voir clai- rement leurs relations mutuelles à cause du bouleversement des couches. Si Ton suppose une ligne droite menée du col de Praclos à Au- ris et prolongée vers le N. -O. jusqu’au-delà du village de la Va- lette , cette ligne, longue d’environ quinze kilomètres, passera par les hameaux de Gragnolet et du Villars , situés entre Entrai- gues et Valjouffrey , par la Roche près les Engellas , par Val- bonnais , le col de Plancolet , Auris , et enfin par la montagne du Mouchet , au-dessus de la Valette. Ce qui est bien remarquable, c’est que dans toutes les localités qui viennent d’être citées on observe soit du spilite , soit du gypse et du calcaire altéré à l’état de cargneule , en sorte que ces trois espèces de roches se trouvent ou associées , ou rangées sur une même ligne droite. Leur aligne- ment, que j’ai remarqué également ailleurs, établit entre elles une liaison intime ; c’est une preuve, ajoutée à beaucoup d’autres, qu’on doit les considérer comme des équivalents géologiques pro- bablement d’origine contemporaine et formés de la même ma- nière. La disposition de ces roches métamorphiques par bandes rectilignes présente aussi une analogie frappante avec les axes des 37 SÉANCE DU \ NOVEMBRE l 8 i 4. bouleversements qui, en se croisant dans plusieurs direclions, ont donné naissance aux Alpes ; ce qui m’a fait penser depuis longtemps qu’il avait existé des rapports , au moins dans la manière d’agir, entre la cause qui a soulevé les montagnes et celle qui a modifié leurs caractères minéralogiques sur de grandes longueurs. Le troisième gîte de spilite que j’ai rencontré est situé sur le col de Baclia , par lequel on communique du Yalsenestre au Dé- sert , dans la haute vallée de la Bonne; il forme à l’O. du col un mamelon escarpé ayant tout-à-fait le même aspect que les calcaires altérés qui l’environnent , et il se trouve à peu près sur la ligne de jonction de ces derniers et du terrain talqueux. Quant au quatrième gîte , on le voit au-dessus du village de Venosc, au hameau du Collets , où , comme le précédent, il est intercalé entre des roches talqueuses et des calcaires à Bélemnites. Le nombre total des gîtes spilitiques distincts connus actuelle- ment dans le Dauphiné est d’environ vingt-quatre. Les trois quarts au moins de ces gîtes se trouvent à très peu près sur la ligne même de contact du terrain talqueux et des schistes à Bélemnites. La plupart des autres ne sont distants de cette ligne que de quelques centaines de mètres. Le gîte du Pont-de-Cognet , qui de tous est le plus éloigné des montagnes de talcscliiste et de gneiss , n’en est cependant séparé que par un intervalle d’environ 10 kilomètres. Ce rapport constant de voisinage entre les spilites et les roches talqueuses des Alpes n’est pas certainement dû au hasard. Dans l’état actuel de la science , il serait bien difficile d’indiquer la cause de cette liaison ; mais elle me paraît incontestable. Elle mérite d’autant plus d’être remarquée que les gypses qui accompagnent si souvent les spilites ont une indépendance de gisement beaucoup plus grande. Ainsi, dans les départements de la Drôme et des Basses-Alpes, où les roches talqueuses manquent, on ne rencontre pas non plus de spilite , tandis que les gypses métamorphiques y sont très abondants. Sur les vingt-quatre gîtes de spilite que renferme le Dauphiné, il n’en est aucun qui ne soit en contact, au moins d’un côté, avec des couches calcaires, et intimement lié avec elles géologiquement et minéralogiquement. Tous, à un très petit nombre d’exceptions P» ès , offrent des indices d’une stratification quelquefois très dis- tincte, et cette stratification est concordante avec celle du terrain calcaire voisin ; enfin il y a une similitude complète sous le rapport des circonstances du gisement entre les spilites et les gypses. D’a- près ces caractères constants, j’ai rapproché ces deux espèces de roches , et je les ai considérées aussi bien l’une que l’autre comme 38 SEANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. le produit d’une modification profonde que des agents plutoniques auraient fait subir à des couches originairement calcaires. Mon opinion a trouvé un contradicteur dans M. Coquand, qui, per- suadé d’abord que dans tous les pays les spilites avaient été for- més de la même manière, m’a objecté que ceux de l’Esterel, dans le Var, paraissaient être le résultat d’un épanchement. J’ai ré- pondu qu’en admettant comme exacts les faits cités dans l’Esterel, on ne pouvait en conclure qu’une seule chose , c’est que les spi- îites de cette contrée , ayant un mode de gisement opposé à ceux du Dauphiné, avaient été aussi formés d’une manière différente. Dans une nouvelle note insérée récemment dans le Bulletin (1), M. Coquand a abandonné l’argument tiré de l’Esterel pour tu employer un autre qui, je crois, n’est pas meilleur. Au lieu d’aborder le fond même de la question, de discuter les faits et les raisonnements que j’avais fait valoir, et de justifier ainsi sa prétention de connaître les spilites des Alpes , mon adver- saire n’a rien trouvé de mieux que d’invoquer l’opinion de M. Gueymard et de quelques autres membres de la Société géo- logique , réunis à Grenoble en 1840. Ces membres, dont je recon- nais hautement la science , étaient persuadés depuis longtemps , conformément à l’opinion commune, encore consacrée par tous les traités de géologie , que le spilite est une roche essentiellement plutonique. Ils n’ont pas cru devoir renoncer de prime-abord à cette manière de voir pour adopter la mienne , surtout après une exploration évidemment insuffisante des gîtes spilitiques du Dau- phiné. Cette réserve n’a rien d’étonnant ; ce qui l’est davantage , c’est que l’on s’appuie sur de pareilles raisons dans une discussion géologique (2). C’est également en ayant recours à l’autorité que M. Coquand a cherché à combattre ma réclamation au sujet des expressions de spilite et de mélaphyre , considérées par lui comme synonymes ; mais , là encore , il est resté à côté de la question. Il résulte bien de ses citations et des détails dans lesquels il est entré que dans certaines localités , comme dans l’Esterel , le mélaphyre et le spi- lite affectent le même gisement , et passent de l’un à l’autre : cela est incontestable ; mais doit-on en conclure qu’il n’y a aucune différence entre un spilite et un mélaphyre ? S’il fallait adopter la (1) Tome Ier. 2e série, page 4*4* (2) Que dirait M. Coquand, si, pour faire rejeter sa classitici.lion des terrains tertiaires de la Provence, je me contentais d objecter que MM. Élie de Beaumont , Duirénov et Rozet ne sont pas de son avis? SEANCE DU 4 NOVEMBRE 1814. 39 même dénomination pour toutes les roches qui sont réunies dans la nature, et quelquefois liées entre elles par des transitions in- sensibles , toute la nomenclature minéralogique se réduirait à trois ou quatre noms. M. Brongniart a créé tout exprès le mot spilite pour que la roche ainsi désignée, et qu’il a bien définie, ne fût plus confondue avec le mélaphyre, le trappite, etc. Je persiste à croire que c'est embrouiller la science que de chercher à rétablir cette confusion. Il est d’ailleurs évident qu’il faut ou ne pas adop- ter un nouveau nom, ou bien lui conserver le sens que son auteur lui-même lui a donné. La discussion qui s’est élevée entre M. Coquand et moi au su- jet des spilites des Alpes me paraissant épuisée et déjà trop longue, je dois déclarer qu’à l’avenir et dans tous les cas je n’ajouterai plus rien aux réflexions par lesquelles je viens de terminer cette note. M. Rivière pense que MM. Gras et Coquand donnent le nom de spilite chacun à des roches différentes. Les spilites de M. A. Brongniart ne sont pas ceux de M. Gras, qui confond sous ce nom cinq ou six roches différentes de composition et d’origine, et jusqu'à des oligistes, ainsi que j’ai pu le vérifier, dit-il, sur des échantillons de ces localités; et peut-être M. Coquand en fait-il autant. Cette confusion d ailleurs n’est que trop facile; mais cela rend la discussion entre ces mes- sieurs interminable. Les spiliies de M. Brongniart sont des roches à base d’Aphanite; M. Rivière donnera plus tard une note à ce sujet. M. Virlet fait observer que les discussions sur les spilithes tiennent probablement à ce que les géologues ne se rendent pas toujours bien compte de leur origine. Selon lui, ce ne sont point des roches ignées, mais bien des masses metamor- pliisées par le voisinage ou le contact et même quelquefois la pénétration d’une roche ignée. On comprend dès lors que leurs caractères minéralogiques doivent tenir à la fois des roches aux dépens desquelles elles se sont formées, et de celles auxquelles celles-ci doivent leur transformation. De là les spilithes à base calcaire, de là celles à base de serpentine (BuH. , t. IV, p. 213) , qui sont dues à la pénétration de cou- ches argileuses par des ophiolithes ; mais, en général cepen- dant, les spilithes sont des masses argiloïdes de différentes cou- 40 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. leurs, souvent scoriacées, et dont les vacuoles sont ou vides , ou remplies de chaux carbonatée, d’agathe, et quelquefois d’autres substances minérales. Des dégradations insensibles dans les caractères minéralogiques et métamorphiques de ces roches, résultant de l’affaiblissement de l’action métamorphi - santé , s’observent souvent dans leur masse à mesure quelles sont plus éloignées du centre d’action , et rendent parfois dif- ficile leur classement, en même temps qu’elles font naître les incertitudes des géologues. M.le marquis de Roys donne lecture d’une note de M. Sto- biecki qu’il fait précéder de l’observation suivante : On ne connaissait autrefois de filons métallifères que jusque dans le lias, où même ils étaient très rares. Ayant entendu parler à notre confrère, M. Stobiecki , d'un filon de cuivre pyriteux observé par lui dans un terrain plus supérieur, je lui ai demandé et il m’a remis pour la Société la note suivante : Note sut' un filon de cuivre pyriteux dans l'étage moyen du terrain jurassique dans le département de la Dr ôme , par M. Stobiecki, datée d’Avignon le 15 octobre 1842. Ayant entendu parler d’un gisement de cuivre à la limite des départements de Vaucluse et de la Drôme, le fait m’a semblé assez intéressant pour que j’entreprisse une visite des beux en compagnie de M. Meyssonier, ingénieur des mines. Nous avons trouvé le filon dans la commune de Propiac, dé- partement de la Drôme, tout auprès de la campagne la Jalaye, indiquée sur le nu 121 de la carte de Cassini. Le minerai de cuivre a pour gangue la baryte sulfatée II est accompagné de fer oxidé carbonaté, comme on peut en juger par l’ échantillon ci-joint. La baryte affleure à la surface du terrain dans plusieurs endroits. Elle est tachetée en bleu par le cuivre carbonaté, provenant de la décomposition à l’air du cuivre pyri- teux ; cette circonstance se retrouve aussi dans le filon exploité. Il est dès lors probable qu’il existe plusieurs gisements de ce minerai dans la localité. On trouve dans le même terrain plusieurs fitonsde galène qu’on exploite, ou plutôt dont on essaie l’exploitation, ainsique du filon de cuivre , dont on a extrait un millier de kilogrammes de SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1814. minerai. Les échantillons ont été pris sur les lieux, au filon même ; à cet égard le doute est impossible. Le filon de cuivre pyriteux se dirige de l’O. à FE.; il constitue une faille normale aux assises des schistes marneux. Ces schistes marneux appartiennent à Fétage moyen du terrain jurassique, qui est au reste le plus ancien de nos terrains ; ils s’étendent sur une grande longueur du S. au N., de Gigondas (Vaucluse) jusque vers Rozane, dans lesHautes-Alpes, et sur plu- sieurs lieues de FE. à FO. Je crois que M. d’Orbigny les a visités. Cette assise de terrain contient les Ammonites biplex et stria tu- lus , plusieurs espèces de Bélemnites , «les Inocérames, des Téré- bratules, des Apiocrinites et les belles géodes de Rémusat. Je fais hommage à la Société de trois échantillons détachés par moi-même à coups de marteau; l’un est composé de cuivre pyri- teux, de fer oxydé carbonaté et de baryte sulfatée; l’autre , de galène et de fer oligiste; le troisième , de chaux carbonatée , con- tenant , je pense, des lentilles de fer oligiste. Dans le même terrain se trouvent un gisement puissant de gypse, une source d’eau sulfureuse et une source salée. M. Leymerie lit la note suivante : Observations sur la communication faite sur le lower-green- sand de File de Wight, par M. Fi/ton, dans la séance du 20 mai 1844 , par M. A. Leymerie. On concevra qu’ayant étudié d’une manière toute spéciale le terrain crétacé de Champagne , je n’aie pu rester indifférent à la découverte faite récemment en Angleterre, à la base du Greensand , de couches renfermant un certain nombre de fossiles néocomiens de l’E. de la France. C’est donc avec un vif intérêt que j’ai pris connaissance des communications faites à ce sujet , soit dans les Proceedings de la Société géologique de Londres, qui m’ont été obligeamment communiqués par M. Fitton , soit dans le Bulletin de la Société géologique de France ( t. Ier de la 2e série , p. 438 ). Le principal but de cette note est d’exprimer mon opinion sur les rapports qui peuvent lier ces nouvelles couches avec le terrain néocomien du continent. Toutefois, il me semble indispensable, avant d’en venir là , de jeter un coup d’œil critique sur la liste des espèces que M. Fitton considère comme étant communes au greensand d’Angleterre et au terrain néocomien de France, et de faire voir que c’est à tort que plusieurs des espèces que noirs 42 SEANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. avions établies, M. Desliayes et moi , s’y trouvent rapportées à des types anciennement connus de Sowerby et de Nilson. Les espèces contestées dont il s’agit sont rassemblées dans la liste suivante , où j’ai mis en regard nos noms avec ceux que M. Edouard Forbes a cru pouvoir leur substituer. Noms do MM. Deshayes et Leymerie. Pholadomya Prevosti , Desh. ; Aslarte Beaumontii , Leyrn.; Cardium subliillanum , Leym.; Cucullœa Gabrielis , Leym.; Modiola Archiaci , Leym. : Pinna sulcifera , Desh. ; Pecten interstriatus . Leym. ; Ampullaria iœvigala , Dosh. Noms correspondants de Sowerby et de Nilson d’après M. Édouard Forbes. Mya piicata , Sow. ; Aslarte obovata , Sow.: Cardium strlatulum , Sow.; Area exallata, Nilson ; Modiola œqualis , Sow.; Pinna tetragona , Sow.; Pecten obliquus, Sow.; Natica rotundata , Sow Ayant soumis ces espèces à un nouvel examen, et les ayant de nouveau comparées avec soin , sous les yeux de M. Desbayes , avec les types auxquels M. Forbes les a rapportées , je crois pouvoir dire ici avec quelque assurance que les nouvelles déter- minations de ce concliyliologiste sont tout-à-fait inadmissibles. Pour en convaincre la Société , il me suffira de rappeler ici les principaux caractères différentiels qui m’avaient engagé, en 1842, à considérer les espèces en question comme nouvelles, caractères dont la plupart avaient déjà été indiqués dans les courtes descrip- tions annexées à mon mémoire. Pholadomya Prevosti , Desh. Diffère de la Mya / licata, Sow., par une inflexion brusque qu’elle porte sur chacune de ses valves, tout près du bord postérieur, et par sa forme plus oblongue et diminuant plus rapidement de hauteur d’une extrémité à l’autre. D’ailleurs l'espèce de Sowerby est une Panopée, d’après M. Deshayes, tandis que celle de l’Aube appartient bien au genre Pholadomye. A s tarte Bcamnontii , Leym. D’après les figures , l'idée ne viendrait à qui que ce soit de comparer celle espèce à 1 Astarte obovata, Sow. , qui est bien plus haute , plus équilatérale cl subtronquée. La description de railleur anglais n’est d’ail- leurs pas assez explicite pour conduire à uue conclusion quelconque. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 43 Carilium subhillanum , Leym. J’ai indiqué dans mon texte les caractères qui séparent cette espèce du Cardium striaiulum , Sow., lequel ne porte, vers le milieu de ses valves , que des stries concentriques, tandis que dans le nôtre les stries domi- nantes sont, au contraire, longitudinales. Cucallœa Gobrielis , Leym. Nous avions indiqué avec tant de soin les différences importantes qui éloignent celte espèce de X Area exaltata , Nilsou , que nous sommes obligé de croire que M. Ed. Forbes n’a pas consulté notre texte avant de se décider à assimiler ces deux coquilles si différentes ( voir notre Mé- moire) , Pinna sulcijcra , Desli. Les caractères par lesquels cette Pinna se sépare de la Pinna tetragona , Sow., sont si saillauts et si faciles à saisir au premier coup d’œil, que nous avons été très surpris que M. Forbes les ait méconnus au point de confondre ces deux coquilles. En effet, outre la forme générale, qui est très différente, notre espèce porte des côtes rondes et bien marquées, séparées par des sillons très prononcés, tandis que la Pinna tetragona , Sow., montre seulement de légères stries. Pectcn interstriatus , Leym. Ce Peigne est principalement caractérisé par les stries qui couvrent les intervalles des côtes, stries qui n’existent pas dans le Peclen obliquus, Sow. Celte dernière espèce a d’ailleurs des côtes bien moins rapprochées et une forme générale bien différente. Modiola Arcliiaci , Leym. Nous pourrions peut-être passer condamnation pour celte espèce, qui ressemble beaucoup en effet à la Modiola œqualis , Sow. Nous l’avions considérée comme une Modiole nouvelle à cause d’une ondulation que présente l’arête saillante de chaque valve, caractère qu on ne remarque pas dans l’espèce de Sowerby, qui est d’ailleurs plus arrondie à son estré- mité inférieure. Ampullarin lœvigata , Desli. Celte espèce, qui, d’après M. Deshayes , t si bien une Ampnllaire et non une Notice , se trouve assimilée , dans la liste de M. Forbes , à une Natica rotundata que nous n’avons pu lui comparer, ne sachant où en trouver une ligure ou une description. En présence de ces faits, que chacun pourra vérifier, nous nous trouvons dans la fâcheuse alternative ou d’accuser IM. E. Forbes d’avoir fait trop rapidement les déterminations , ou déconsidérer 44 SEANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. les planches de Sowerby comme tellement mauvaises qu’il serait dorénavant tout-à-fait impossible de s’en servir. Dans ce dernier cas , qui ne nous semble pas être le plus probable, il aurait été juste , en redressant nos erreurs , de déclarer qu’elles étaient in- dispensables dans l’état des choses , afin de ne pas laisser planer sur nous un soupçon de légèreté que nous avions tout fait pour éviter. On conçoit, d’après ce qui précède, que nous conservions quel- ques doutes sur l’ensemble des noms qui composent les listes sur lesquelles s’appuie M. Fitton. JNous ne pouvons admettre , par exemple, que notre Exogyra aquilina , qui est une variété de YExogyra subsinuata ou Couloni , puisse être considérée comme appartenant à Y Exogyra si/mata , qui diffère beaucoup de la pré- cédente et par la forme , et par le gisement. Nous ne pensons pas non plus que la petite Exogyre lisse que Sowerby a figurée sous le nom de Gryphœa lœvigata , puisse représenter V Exogyra Couloni ( Exogyra subsinuata , nobis), dont la surface est toujours plus ou moins couverte de varices , de nœuds et d’autres irrégularités. 11 est bien difficile de croire aussi , avec M. Forbes , que la Tri- gonia caudata Agass. puisse être assimilée à la Trigonia scabra , Lam. Avec ces restrictions , les listes dont il est question présentent un assez petit nombre d’espèces véritablement néocomiennes, et dès lors les conséquences que M. Fitton en a tirées perdent de leur force. Quant à nous, ces conséquences ne nous paraîtraient pas néces- saires dans le cas même où il n’y aurait aucune erreur dans les listes de M. Forbes , et nous croyons même, malgré les intéres- santes découvertes qui viennent d’être signalées, que le terrain néocomien représente le fVeald clay d’Angleterre. Quoique nous ayons donné dans notre Mémoire sur le ter - rain crétacé de l’Aube les principaux motifs qui nous ont fait ad- mettre ce dernier rapprochement, dont l’idée première appartient, au reste , à M. E. de Beaumont , il ne sera pas inutile de rappeler ici d’une manière très succincte les principaux de ces motifs, et de les opposer à ceux que fait valoir, de son côté , M. Fitton. Le terrain crétacé de Champagne se divise d’abord, d’une ma- nière très nette , en deux parties principales , dont l’une , notre craie proprement dite , n’est formée en effet, dans toute son épais- seur, que de la roche qu’on nomme minéralogiquement craie. Elle correspond exactement à la craie d’Angleterre , telle que M. Mantell l’a décrite. Entre cet étage et le système jurassique sc montre une série de SÉANCE DU \ NOVEMBRE 1841. 45 couches très variées et très riches en fossiles, où l’on peut distin- guer encore deux nouveaux étages séparés paléontologiquement par une couche d’une constance remarquable dans toute la France, et que caractérise principalement Y Exogyra sinuata. L’étage inférieur à cet horizon représente le terrain néocomien de la Suisse et offre une multitude de fossiles spéciaux , dont quelques uns seulement existent aussi dans le lower greensand de la Grande-Bretagne. L’étage supérieur aux Exogyra sinuata , y compris ce dernier gisement lui-même , correspond au greensand des Anglais , dont les subdivisions ne se retrouvent plus ici , quoique la mince assise à Exogyra sinuata ait des rapports très marqués avec le lower greensand . Les deux étages inférieurs que nous venons de distinguer d’a- près les fossiles, et qui diffèrent également beaucoup par les ca- ractères minéralogiques, ont été séparés d’ailleurs par un phé- nomène géologique assez faible , à la véiité , mais qui a laissé en Champagne des traces très marquées. Ces traces , que nous avons spécialement signalées dans une note insérée au Bulletin ( t.T, 2e sér.,p. 40), consistent principalement en une discordance de stra- tification : ainsi près Cliaource, par exemple, on voit les argiles à Exogyra sinuata , et le grcensand tout entier reposer à la base d’une colline assez élevée que constitue le terrain néocomien. Ce dernier terrain forme donc dans l’Aube, et l’on pourrait dire aussi dans le Jura, dans le Midi de la France et jusqu’en Crimée, un type bien caractérisé qu’il conviendrait dans tous les cas , fùt- il même synchronique du lower greensand , de considérer à part comme le type principal du terrain crétacé inférieur. Examinons maintenant si ce synchronisme peut être admis. Si nous nous transportons dans la partie S.-E. de l’Angleterre, nous voyons , dans un espace assez circonscrit , un puissant dépôt d’eau douce principalement sableux et argileux , qui sc trouve compris entre deux terrains absolument marins , dont l’un ( portlandstone ) , presque exclusivement calcaire , trouve dans nos contrées son représentant dans les calcaires compactes et oo litiqnes que nous désignons , avec MM. Thirria et Thurmann , par l’épithète de portlandien . L’autre terrain , celui qui occupe la partie supérieure, est le lower greensand , qui admet comme fossile propre et évidemment caractéristique X Exogy ra sinuata , si constante sur le continent au-dessus du terrain néocomien. De sorte que voilà deux terrains, l’un marin ( terrain neoco/nien) et l’autre d’eau douce ( IVcaldcn ) , qui paraissent être compris 46 SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. entre les mêmes limites , et qu’il est d’abord tout naturel de pla- cer au même niveau. Les considérations suivantes viennent ap- puyer cette manière de voir. Lorsque le fVeaUlen , dont la puissance annonce un temps pro- longé de dépôt, se formait dans un estuaire où affluaient abon- damment les eaux douces , la sédimentation ordinaire ne se trouvait probablement pas suspendue au sein des mers de cette époque ; il devait donc se déposer des sédiments au bord de ces mers, et ces sédiments nous paraissent être le terrain néocomien. On voudrait maintenant voir dans les couches d’eau douce des Wealds le représentant des derniers dépôts de la mer jurassique; nous ne voyons , en vérité , aucune raison de le penser. En effet , les couches supérieures du calcaire du Jura , qui se lient si inti- mement , dans l’E. de la France , au groupe kimmeridien , qui forme la base de l’étage , ne nous paraissent pas pouvoir s’élever au-dessus du niveau du portlandstone des Anglais, Nous serions plutôt porté , par la considération des fossiles, à les faire des- cendre , au contraire , vers la partie supérieure du Kimmeridge clay. Quant à l’analogie signalée entre les formes des poissons et des reptiles du terrain wealdien et du terrain jurassique , qu’on nous permette de dire qu’elle est trop vague et trop incertaine pour qu’on puisse sérieusement s’y arrêter. D’ailleurs des considérations purement géologiques viennent encore s’opposer à l’adoption de la nouvelle théorie. En effet , le commencement du dépôt d’eau douce que l’on nomme IV e aide n a du être amené par un mouvement des eaux des mers et par un changement correspondant dans les conditions minéralogiques et zoologiques qu'il est rationnel d’attribuer à la cause générale qui a produit l’anéantissement de la faune jurassique, en préparant le nouvel ordre de choses que l’on désigne par l’épithète de cré- tacé. La fin de'la période d’eau douce dont il est ici question trou- verait alors sa cause tout naturellement dans ce nouveau trans- port des eaux , qui a dénudé le terrain néocomien avant le dépôt des Exogyra sinaata , et qui a donné lieu à la discordance de stra- tification que nous avons signalée entre le terrain néocomien et le grès vert de Champagne. Ce serait donc à la fin de la période néocomienne que les eaux des mers seraient venues envahir la contrée des JVealds, empor- tant avec elles les germes des espèces néocomiennes , que l’on re- trouve maintenant parmi celles du grecnsancl , et dont nous avions déjà signalé la plus grande partie dans notre mémoire. Nous fe- rons remarquer, en terminant , que ces espèces se tiouvent asso- SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1844. 4 7 ciées , dans les couches inférieures nouvellement découvertes en Angleterre , avec des fossiles que l’on ne retrouve en France que dans l’étage auquel nous avons réservé le nom de greensand. Outre X Exogyra sinuata , nous pourrions citer les Ammonites Dcs- haycsi , Pecten interstria tus , Plicatula pectinoides , Terebratula sella , 77 elegans , et d’autres encore que nous n’avons jamais rencontrés dans les couches néocomiennes. Après cette lecture, M. A. d’Orbigny annonce que M. Fit- ton lui a apporté des fossiles de l rle de Wight, et qu’à leur vue il ne lui est pas resté le moindre doute que ce terrain fut du terrain néocomien; il y a quinze ou vingt espèces néo- comiennes bien caractérisées, qui ne permettent aucune in- certitude. 11 n’y a pas la moindre séparation, en Angleterre, de la fin du Gault, ou terrain aptien, et du terrain néocomien. M. de Roys dit avoir montré aux géologues de Vaucluse la liste des fossiles de M. Fitton ; ils ont reconnu tous ces fos- siles pour appartenir à la partie supérieure. M. A. d’Orbigny cite la Perna Mulleti parmi ces fossiles comme espèce de la partie inférieure du terrain néocomien. 11 est certain , du reste, que le plus grand nombre des espèces appartient à la partie supérieure. Il partage d ailleurs les idées de M. Leymerie quant aux déterminations des fossiles de M. Fitton. M. Leymerie dit qu’il y a une différence entre ses idées et celles de M. A. d’Orbigny. Les couches à Exogyra sinuata sont en concordance parfaite avec le gault et le greensand. Si quelques fossiles néocomiens se trouvent dans le greensand d’Angleterre , cela n’a rien d’etonnant. Des formations ont eu lieu dans des estuaires pendant que, sur la terre, se formait le terrain néocomien. La Perna Mulleti seule le frappe comme se trouvant dans le greensand, au-dessus du Weald-Clay. C’est une espèce qui aura survécu en Angleterre. M. A. d’Orbigny répond qu’il y a en Angleterre la même série d’espèces qu’en France, du terrain néocomien le mieux caractérisé et au même niveau ; qu’il n’y a aucune différence dans la superposition des couches dans les deux pays. Si M. Fitton a changé les noms , peu importe ; mais M. A. d’Or- 48 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. bigny a vu les fossiles, et M. Fitton lui-même a reconnu, à Wassy, les mêmes espèces. M. Rivière demande si la différence de stratification dans l’Aube est étendue, et dit que dans les Alpes la stratification est concordante vers Sassenage. M. Leymerie répond que dans l’Aube la dislocation s’étend à la moitié du département. M. de Roys dit qu’à Gargas la stratification discordante sur le terrain néocomien a été constatée par MM. Renaud et d’autres géologues. Séance du 18 novembre 1844. PRÉSIDENCE DE M. d’aRCHIAC. M. Angelot, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, qui est adopté. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Costa de Beauregard ( le marquis Léon ), de Turin , Etats Sardes, résidant à Champigny, par Chinon (Indre- et-Loire) , présenté par MM. le comte de Choulot et de Pinleville; Steinbuchel Reinwall (Antoine de), ex-directeur du mu- sée I. et R. de Vienne , professeur d’archéologie, et membre de l’académie I. et R. de Vienne , résidant à Venise , royaume Lombardo-Vénitien , présenté par MM. Viquesnel et de Pin- teville ; Orsini (Antonio) , naturaliste , résidant à Ascoli, Etats de l’Église , présenté par MM. Catullo et Pilla. Charpentier (de), directeur de mines et professeur , ré- sidant à Bex , canton de Vaud (Suisse), présenté par MM. Élie de Beaumont et Viquesnel; Balbi (Adrien), membre de l’Institut I. et R. des sciences, lettres et arts de Lombardie, conseiller I. de S. M. l’empe- reur d’Autriche, etc., résidant à Venise, royaume Lom- bardo-Vénitien, présenté par MM. Viquesnel et de Pinte- ville; SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 49 Ratti (P. Innocenti), ex-chirurgien près l’hôpital des Fate-bene-Fratelli , résidant à Milan, royaume Lombardo- Vénitien , place S. Fideli , présenté par MM. Balsamo Ciivelli et Sismonda ; Biondelei (Bernardini) , membre des académies royales d’Amsterdam et de Copenhague, résidant à Milan , royaume Lombardo-Vénitien , présenté par MM. Viquesnel et Pasini ; Porro (Charles), membre de plusieurs sociétés savantes, résidant à Milan , royaume Lombardo-Vénitien , rue San Gio- vanni aile quatro faccie, n° 1808, présenté par MM. Viques- nel et de Collegno; Gastaloi (Barthélemy), avocat, résidant à Turin, États Sardes, rue du Deposito, n° 8, présenté par MM. Viquesnel et de Pinteville ; Reichenau (de) , commandant de la compagnie des Ca- dets, résidant rue San Ceiso, collège des Cadets, à St-Luc, à Milan , royaume Lombardo-Vénitien , présenté par MM. Le- blanc et Viquesnel ; Vacàni (le général Camille), chevalier de Fortolivo , membre honoraire de 1 Institut I. et R., de Lombardie, rési- dant à Vienne, Autriche, présenté par MM. de Collegno et le marquis de Pareto. Giiibellini (Francesco), professeur du Gymnase I. et R. , et membre de l'académie de Brescia, résidant à Brescia, royaume Lombardo-Vénitien , présenté par MM. Viquesnel et de Filippi ; Chalande, négociant et naturaliste, chez M. Laplace, maître d’hôtel, rue Claudia, maison du Concert, à Lyon, présenté par MM. Requien et Aubéry; Maissin (Alphonse), capitaine de vaisseau , 106, Cours du Jardin royal, à Bordeaux, présenté par MM. Bellardi et le comte de Choulot; Guillion (AlDert) , propriétaire, Palais Mangilli Valma- rana , à Venise, royaume Lombardo-Vénitien , présenté par MM. Viquesnel et de Pinteville; Gal, chanoine de l’Insigne Collégiale d’Aoste, professeur de théologie, membre de l’académie de Savoie, à Aoste, présenté par MM. Carrel et de Pinteville; Soc. gcol. Tome II, 2° série. 4 50 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1841. Pomel ( Nicolas -Auguste) , rue Mazarine, 56, à Paris, présenté par MM. Viqüesnel et Leblanc; Lewis (Augustus), à Worcester-Park ( Surrey ) , présenté par MM. Bouchard et de Verneuil. Le Président annonce ensuite deux autres présentations. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. le ministre de la maison du Roi , Gale- ries historiques du palais de Versailles , t. VI, 2e partie; in-8°. Paris, 1844. 527 pages. De la part de M. Desbayes, Histoire naturelle des animaux sans vertèbres, par J.-B.-P.-A. de Lamarck, 2e édit., revue et augmentée par MM. Deshayes et H. Milne Edwards; in-8° t. IX, 728 p., Paris, 1843 ; t. X, 638 p. Paris, 1844. De la part de M. A. Rivière , Mémoire minéralogique et géologique sur les roches dioritiques de la France occidentale ( Extrait du Bulletin de la Société géologique de France ) . In-8°, 46p.; Paris , 1844. De la part de M. de Win ter, Disputatio geologica inaugura- lis de metamorphicorum saxorum origine, sioe b reois conspectus hypogenœarum formationum ; pars prior . Thèse pour le docto- rat, soutenue le 10 mai 1844, à Leyde; in-8«, 62 p. Leyde, 1844. De la part de M. Ch. d'Orbignv, Dictionnaire universel d’ Histoire naturelle , 55e livraison. De la part de M. Murchison (R. -I. ) , Address , etc. ( Dis- cours prononcé à la réunion anniversaire de la Société royale géologique de Londres le 27 mai 1844); in-8°, 92 p. Londres, 1844. 1° De la part de M. Dana (James-D.), A System of minera- log y, etc. (Système de minéralogie, comprenant les plus ré- centes découvertes) ; 2e édit., 633 p., avec de nombreuses figuresintercaléesdans le texte, et 4 pl. New-York etLondres, 1844. 2° Beglj , etc. (Réplique à la défense d’accusation de pla- SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 51 giat de M. Conthouy) , Extrait du Journal américain des sciences et arts , vol. XLVI , n° 1 ; in 8°, 8 p. 1843. De la part de M. Rogers (Henri-D.) , 1° Description , etc. ( Description de la géologie de l’Etat de New-Jersey); in-8% 30 1 p., 2 pl. Philadelphie, 1840. 2° Second , third , fourth , Jifth , sixth annual Report , etc. (Deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième Rap- port annuel sur la description géologique de l’Etat de Pen- sylvanie); 5 broch. in-8°. Harrisbourg , 1838, 1839, 1840, 1841 , 1842. 3° Report of the progress , etc. (Rapport sur les progrès de la description géologique de i’État de Virginie pendant l’an- née 1839); in-8°, 161 p. Richmond, 1840. 4° Contributions to the geologj , etc. (Recherches sur la géologie des États-Unis) ; in-8°, p. 298 à 544, 6 pl. Phila- delphie, 1843. De la part de M. le Ministre de la justice , le Journal des savants . Octobre 1844. La Société reçoit en outre les publications suivantes : Comptes -rendus des séances de V Académie des sciences ; 1841, 2e semestre , t. XIX, n08 1 9 et 20. L'Écho du monde savant ; 1844, nos 34 à 37. L'Institut; 1844 , nos 567 et 568. Journal d' agriculture pratique et d' économie rurale pour le midi de la France; 2e série, t. VI, 1843, p. 353 à 384. Programme des prix proposés pour 1815 par la Société royale des sciences, de l'agriculture et des arts de Lille; 8 pag. in-4°. The Mining Journal; 1844 , nos 481 et 482. The Athenœum ; 1844 , nos 889 et 890. Proceedings , etc. (Procès-verbaux de la Société d’histoire naturelle de Boston) , du 6 janvier 1841 au 17 avril 1814; in-8% 176 p. Boston Journal , etc. (Journal d histoire naturelle de Bos- ton) ; vol. IV, nos 3 et 4. 1843, 1844. The American Journal, etc. (Journal américain des sciences et des arts, dirigé par MM. Silliman), vol.XLV, n°2 : juillet, août, septembre ! 8 i 3 ; — vol. XLVI, n° 1 : octobre, no- 52 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. vembre, décembre 1843; — vol. XLVI, n° 2 : janvier, fé- vrier, niais 1844. Bericht über die zur bekanntmachung , etc. (Analyse des mémoires destinés à la publicité par l’académie des sciences de Berlin), de juillet 1843 à janvier 1844 ; 1 pl. Studien des Gottingischen bereins , eic. (Travaux de la So- ciété des Amis des mines de Gottingue) ; l844,in-8°, p. 105 à 220. Auszug aus der Uebersicht , etc. (Revue des travaux et des développements de la Société d’agriculture de Silésie pendant l’année 1843, par le professeur Gœppert) ; in-4°, 86 p. De la part de M. Cornuel , deux échantillons de fossiles des environs de Wassy (Haute-Marne). CORRESPONDANCE ET COMMUNICATIONS. Le secrétaire lit la lettre suivante, adressée de Wassy, le 1er novembre 1844, parM. Cornuel : En recherchant les causes de la structure de l’oolite jurassi- que des environs de Wassy , je découvris quelques foraminifères dans une couche voisine. En passant au terrain néocomien , j’y trouvai quelques autres foraminifères, et, bientôt, une grande quantité de tests d’Entomostracés microscopiques. Ces derniers fossiles, la plupart très bien conservés, se montrent à la surface de petites plaques calcaréo-sableuses, qui appartiennent aux alter- nats supérieurs de l’argile ostréenne. Ils m’ont paru assez intéres- sants pour mériter une description particulière. Je* viens de la terminer , ainsi que les figures qui doivent raccompagner, et je l’enverrai incessamment à la Société. Je joins à cette lettre quelques plaquettes et des fragments, sur partie desquels j’ai indiqué quelques individus appartenant, l’un à l’espèce Cythere harpa , les autres à la C. auriculata , n’en ayant pas encore assez de la C. sculpta pour pouvoir en envoyer. Quant à la C. amygdaloides , on la trouvera à profusion sur toutes les plaquettes. Pour bien observer ces petits fossiles , il faut une forte loupe ou le microscope, et préférer la lumière du jour à toute autre. Par une lettre de Loudun (Vienne), en date du 9 no- SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 53 vembre 1844 , M. Gilles de la Tourette annonce que depuis longtemps il travaille à la statistique géologique de la contrée qu’il habite, et que, si la Société désirait augmenter ses col- lections par quelques échantillons d’Ichthyosarcolites dont il a découvert un immense gisement dans une de ses proprié- tés, à la Bastie, près Loudun (Vienne) , ce serait avec em- pressement qu’il en ferait l’envoi. Par une lettre adressée au secrétaire, en date de Turin du 1 7 juillet 1 844 , M. Barthélemi Gastaldi fait connaître qu’iL vient de trouver, sur la colline de Turin , quelques fragments qu’il suppose appartenir au Pentacrinites basa/ti/ormis. Déjà, dans' l’automne de 1842, étant avec M. Michelotti, il avait rencontré dans une localité des Apennins, près de Bel- forte, village qui, sous le gouvernement français, faisait par- tie du département de Montenotte, quelques fragments de Pentacrinites parmi d’autres fossiles,- mais, quoique ces deux géologues fussent entourés de tons côtés parles terrains mio- cènes, ils avaient cru alors devoir considérer ces fragments comme arrachés par les eaux à des couches plus anciennes. Cette découverte de la présence de Pentacrinites dans les terrains myocènes pouvant intéresser la Société, M. Gas- taldi offre de lui faire parvenir les fragments qu’il a trou- vés dans ces deux localités. M. Alcide d’Orhigny dit, à propos de ce fait, qu’on a trouvé des Pentacrinites dans les terrains tertiaires de Biar- ritz, et qu’on connaît même maintenant une espèce de Pen- tacrinite vivante, ce qui rend moins surprenante la présence de ces fossiles dans les terrains tertiaires. Le secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Bernard, datée de Nantua le 2b juin 184 4 . L’auteur dit qu’il existe parmi les étages du terrain jurassique une couche calcaire qui semblerait avoir échappé aux géologues. Cette couche, appelée molasse à Charrix , était considérée comme un cal- caire siliceux par M. Itier, avec lequel il s’était proposé de l’étudier en commun; mais son propre départ pour 111e de Corse, et celui deM. Itier pour Cayenne d’abord, et plus tard pour la Chine, s’y étant opposés, il en a entrepris seul l’é- tude. Il termine parla note suivante: SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 54 Sur le calcaire appelée molasse a Charrix [Jinj. Etant peu au courant de la superposition des couches jurassi- ques, je fis des efforts, dans Pintérêt de la science, pour tâcher de reconnaître la position de cette roche ; cerne fut presque impossible â la carrière de Charrix, où elle est exploitée en beaux matériaux pour les constructions. Là tout est recouvert par la terre ; et en me dirigeant vers le sommet de la montagne couronnée par une forêt de sapins , je trouvai constamment la molasse de Charrix sortant un peu du sol par intervalles, tandis qu'à ma gauche se trouvaient de nombreux débris de calcaire corallien dispersés sur le sol , mais jamais la roche corallienne. L’ayant rencontrée depuis sur l’énorme rempart abritantNantua auN.-E., je pus remarquer qu’elle se trouve placée sous le calcaire corallien, dont elle est cependant séparée par une couche calcaire supportant le corallien, ce qui la classe dans l’étage moyen jurassique. Je dois observer qu’en désignant le calcaire corallien, j’entends indiquer unique- ment la couche oolitique. Peut-être ne serait- il pas impossible que la couche intercalée appartînt en partie à la molasse de Charrix changeant de forme; car, l’ayant examinée depuis peu le long de la côte de Samognat, à Oyonnçtx (Haut Bugey), et sous la belle et intéressante carrière de l’oolite corallienne d’Oyonnax possédant de si beaux fossiles, j’ai cru apercevoir, mais trop tard pour bien m’en assurer, que la même coucheavait un côté différent de l’autre, l’un olivâtre friable, l’autre blanchâtre et très dur. Cette molasse de Charrix dans un milieu humide , ce qui est assez fréquent, est de couleur olivâtre, friable entre les doigts, susceptible de se désagréger sur place , et parsemée^ à Charrix de petits grains vitreux et brillants. Exposée à l’air, elle devient très dure et solide; les grains vitreux se maintiennent dans leur état sous une forme oolitique, ou s’oblitèrent, laissant parfois une petite cavité ferrugineuse. Dans un milieu sec, elle est blanchâtre., peu ou point friable et est recherchée pour les constructions. Dans les deux états sa consistance est siliceuse. Jusqu’à ce moment la molasse de Charrix n’a été aperçue que dans le Haut-Bugey, placé sur la partie méridionale de la seconde chaîne du Jura; elle semble dépourvue de fossiles. Une seule petite térébratule incrustée dans la roche prise à Charrix est tout ce que je possède . ainsi que deux petits fragments de polypiers 55 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844t pris à Oyonnax sur la couche intercalaire entre l’oolite coral- lienne et la molasse de Charrix. M. de Tcliihatchelï lit la note suivante : Résumé cV un Mémoire de M. le professeur Goeppert , intitulé : « Sur les Cycadées fossiles en général et particulièrement sur » celles qui se trouvent en Silésie * ( Revue des travaux de la Société de Silésie , etc. , pour l’année 1843, p. 114-144); par M. de Tchihatclieff. L’auteur commence son mémoire en Faisant observer que, mal- gré l’accroissement considérable que le nombre des espèces qui composent les Cycadées fossiles a éprouvé dans ces derniers temps, la classification établie en 1828 par M. Ad. Brongniart , clans son Prodrome des végétaux fossiles, suffit encore, à peu de modifi- cations près, aux exigences des nouvelles intercalations. La grande majorité des Cycadées fossiles connue jusqu’à ce jour appartient à la formation jurassique ; celles que* l’auteur a recueillies en Silésie se trouvent dans les dépôts de fer argileux de la Silésie supérieure, dépôts qui font partie de la formation sus-mentionnée. Après avoir passé en revue les essais qui, depuis la publication du Prodrome de M. Ad. Brongniart, ont été faits dans le but d’établir une nouvelle classification des Cycadées, M. Goeppert donne l’énumération de la totalité de ces végé- taux fossiles, distribués selon la méthode de M. Brongniart, en réunissant toutefois les deux genres Zamia et Zamites en un seul, et en y ajoutant le genre Zamiostrobus (Endlich) pour désigner leurs fructifications. Parmi les Cycadées connues jusqu’à ce jour et que M. Goeppert répartit entre les quatre sections suivantes: Cycadites , Zamites (y compris les Zamiostrobus) , Pterophyllum et Nilso/iia, les espèces ci-après ont été découvertes par l’auteur. Zamiostrobus (fruit) ovatus. — crassus. — Sussexiensis. J'teroplijllum Oeynhausianum ( av. % )• — Carnallianum (av . fig. ). — propinquurn (av. fig. ). — gonorr hachis ( av. fig. ). — Preslianum. — taxinum. — Braunianum. — D unkerianum. — M unsteri. — inconstans. — difforme. — lunulari folium. NUsonia compta. — Bergcri. — acuminata. — K irchncriana. 56 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. Tl résulte de l’énumération faite par l’auteur, que le total des différentes espèces de Cycadées fossiles connues jusqu’à ce jour et désignées par un nom spécifique, s’élève à 78, parmi lesquelles 9 troncs ou stipes, 65 frondes et 4 fructifications. Sur ce total, les genres qui le composent figurent dans les proportions sui- vantes : Cycadites Zamites Zamiostrobus Plerophyllum . Nilsonia . *8 . 4 . 20 Troncs, Frondes. Fructifications. 1 il 1 CN-fc» 7 23 23 1 2 4 Total des espèces. • 78 9 65 4 Les espèces se trouvent ainsi réparties dans 1 es diverses for- mations; Terrai n linnillpr 4 .T 11 ra n Grès rnnoff» . 1 Argile Wealdionne. .... 5 Grès bigarré Grès vert . . . . Keuper Craie fiias 1 Q Lisante Oolile V O # Gisement inconnu 5 Tout en faisant une large part aux reproductions inévitables des mêmes espèces sous des noms nouveaux , ainsi qu’à la proba- bilité que plusieurs frondes et stipes, décrits comme espèces diffé- rentes, ne sont en effet que les parties intégrantes du même indi- vidu, il n’en est pas moins vrai qu’en comparant les espèces des Cycadées fossiles avec celles des Cycadées vivantes , dont le total est généralement évalué à 38, l’avantage numérique appartiendra infailliblement aux premières, en sorte que l’on pourra toujours en porter le nombre au double de celui des Cycadées vivantes , d’autant plus que l’influence des causes qui tendraient à réduire cette proportion se trouve puissamment contrebalancée par des découvertes sans cesse croissantes de nouvelles espèces fossiles. Les onze espèces de Cycadites se rapprochent le plus par leurs feuilles, roides et uninervées des Cycas d’au jou rd’lni i , dont lenombre est à peu près égal à celui des espèces fossiles ; une partie du genre Zamites , et nommément les espèces (à peu près au nombre de 15) SEANCE DU 18 NOVEMBRE 1814. b 7 dont les pinnules présentent un certain rétrécissement à leur base, correspondent au genre Encephalartos , tandis que les espèces (au nombre de 8) dont les pinnules sont articulées à leur base et se trouvent fixées à la fronde d’une manière oblique, pourraient bien offrir un pendant au Macrozamia. Enfin les genres Zamios - trobus, Nilsonia et Pterophyllum , composés de 38 espèces , doi- vent être considérés comme des genres éteints, et n’admettent point de parallèle avec les Zamia L. dont les pinnules se trouvent distinctement articulées , tandis que celles des genres en question n’offrent point cette particularité. L’auteur termine son important travail par un tableau compa- ratif de l’extension géographique et géologique des Cycadées vi- vantes et fossiles. Nous avons cru devoir le placer sous les yeux de nos lecteurs, non seulement parce qu’il offre un grand intérêt, mais aussi parce qu il sert à faire apprécier l’étendue des labo- rieuses investigations du célèbre savant de Breslau. FLORE ACTUELLE. Cycas L., composée de 10 espè- ces; Asie tropicale et subtropicale, Nouvelle-IIollandc. M acrozamiaM\q. , 3 espèces : Nou- velle Hollande et le Cap. Encephalartos j Lehm. , ]5 espè- ces ; le Cap, non loin des tropiques. Zamia , îo espèces ; Amérique tropicale et subtropicale. Genre en partie éteint. Genre complètement éteint. Genre complètement éteint. Genre complètement éteint. FLORE FOSSILE. Cycaditcs, composée de î i espè- ces; Suède, île de Portland, France, Bohême, Saxe -Cobourg et Hanovre. Zamites, Brong. (analogie incom- plète) ; France , Angleterre , Bai- reuth, Bamberg (Bavière). Se reproduit à i5° plus au nord, savoir: île de Portland, Angleterre, Bamberg. Manque complètement. Zamites , Goepp. ; île de Portland. Angleterre. France, Bamberg. Bai- reuth, Indes orientales. Zamiostrobus , Angleterre. Pterophyllum , Brong. , 25 espè- ces; Suisse, Wurtemberg, Autriche, Bohême, Bamberg, Baireuth, Saxe, Schaoumberg, Silésie. Nilsonia. Brongn. , 12 espèces; Suède, Angleterre , Saxe-Cobourg , Quedlinbourg, Bamberg, Baireuth. M. de Collegno présente deux: notes en réponse à un mémoire de M. Coquand et «à une lettre de M. Catullo, dont il n a eu connaissance qu’à la lecture du cahier du Bulletin qui les contient. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 18 H. 68 Note sur les terrains tertiaires de la Toscane. M. Coquand dit (1) avoir constaté, en Toscane, la présence de trois étages distincts dans les terrains tertiaires, tandis que M. Savi et moi ne séparons point l’étage moyen deM. Coquand des marnes subapennines, et rapportons en même temps son étage inférieur à la période miocène. Quels sont donc les faits d’après les- quels M. Coquand voudrait séparer des marnes subapennines la molasse marine inférieure à ces marnes? Il ne se fonde point su» des caractères géologiques, puisque la molasse et les marftes sont en stratification concordante. Quant aux caractères paléon- tologiques, M . Coquand indique dans la molasse de Pomerance des coquilles des genres Ostrea, Pecten , Turbo , Turritella , Pieu - rotoma , Voluta , Pyrula, Conus ; mais il ne cite définitivement que deux espèces, savoir : les Pecten latissimus , Brocclii, et le Pecten benedictus , Lamarck : or, la première de ces deux espèces est cer- tainement subapennine, puisque Lamarck l’indique au Monte- Mario, près de Rome et Brocclii, dans les marnes de Sienne; la seconde est indiquée dans les marnes subapennines des environs de Perpignan et dans les faluns de la Touraine; il paraît en outre qu’elle vit encore aujourd’hui dans la mer Bouge. On ne peut donc s’appuyer sur la présence de ces deux coquilles pour établir une séparation entre les marnes subapennines et la molasse de Pomérance. M. Coquand ajoute, à la vérité, qu’il s’est convaincu que les mêmes espèces ne se trouvent point à la fois dans la mo- asseetdans les marnes; mais c’est là un fait qui se répète toutes les fois que dans une même formation on voit des marnes alter- ner avec des grès ou avec des calcaires, et ce fait s’explique faci lement par les habitudes connues des mollusques, dont les uns vivent de préférence sur un fond de sable, tandis que les autres préfèrent des vases plus ou moins argileuses. Quant à l’âge du terrain à lignite de la Toscane, M. Coquand a cru arriver à une détermination rigoureuse en comparant ce terrain à celui des en- virons d’Aix ; M. Savi et moi l’avions comparé à des localités moins éloignées, et nous avions trouvé une identité frappante de caractères géologiques et paléontologiques entre les lignites de Monte-Bamboli et ceux de Caniparola, dans la Ligurie , et nous avions trouvé de même qu’on pouvait suivre les sables ser- pentineux , associés aux lignites de la Toscane, jusque près de (i) Bulletin de la Soc. géol. , 2e série, l.I r, p. /j 2 o et suiv. 59 SEANCE DU 18 NOVEMBRE 1841* Turin, où ces sables renferment, comme l’on sait, près de deux cents espèces de coquilles marines, identiques pour la plupart avec celles du bassin de Bordeaux. M. Savi et moi « n’avons » donc pas manqué de données suffisantes pour bien asseoir les » couches àlignites et assigner leur véritable position. » J’arrive maintenant à la position assignée par I\J. Coquand aux gypses et au sel gemme de Volterra. Il paraît que M. Co- quand n’a pas connaissance du sondage pratiqué aux salines mêmes il y a quelques années, sondage dont j’ai publié les résul- tats d’après la coupe que le directeur des salines a bien voulu me communiquer (1) ; cette coupe prouve suffisamment que le sel exploité près de Volterra alterne avec le gypse, et que tous deux sont réellement enclavés dans les marnes subapennines. Je sais bien que l’on trouve du gypse dans le terrain tertiaire moyen de la vallée de la Cecina; j’en ai vu aussi près de Monte-Cerboli, dans le macigno, appartenant à la formation crétacée; cela prouve seulement que les gypses de la Toscane sont postérieurs aux dé- pôts qui les renferment, et qu’ils se sont formés indifféremment dans les divers terrains traversés par les fentes servant de chemi- née aux émanations des matières intéiieures. Je finirai en rectifiant un passage du mémoire de M. Coquand, d’après lequel il paraîtrait que j ’admets « que le sulfate de chaux » de Volterra a été formé au moyen de coquilles subapennines. » Ce serait là , comme le dit fort bien M. Coquand, «« reconnaître une » abondance de corps marins tellement prodigieuse, qu'on clier- '» cherait peut-être vainement dans la nature un exemple qui prit » justifier une pareille supposition (2). » IMaissi on veut relire le passage auquel M. Coquand fait allusion , on verra que ce n’est point la formation entière des masses de gypse, mais bien la dispa- rition des coquilles que j’ai voulu expliquer, en disant que « si la » formation du gypse est postérieure au dépôt des marnes bleues, » la chaux du sulfate a pu être fournie en partie par les débris '> organiques calcaires contenus originairement dans ces mar- » nés (3). » Je crois donc pouvoir conclure encore, avec M. Savi, que les terrains tertiaires de la Toscane appartiennent exclusive- ment aux périodes miocène et pliocène , et que ces terrains ont été pénétrés, après leur dépôt, par diverses substances étrangères, telles que le sulfate de chaux et le sel marin. Les émanations d’a- (i) Bulletin, ire série, t. XIII, p. 274. (a; Bulletin, 2e série, t. l* r, p. 435. (5 Bulletin, t. XIII, y. 276, 60 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1811. eide borique de Monte-Cerboli nous offrent peut-être encore un exemple de ce mode de production. Note sur le calcaire rouge des Alpes lombardes . Quant à la détermination de l’âge des calcaires des Alpes ita- liennes, qui fait l’objet de la lettre de M. Catullo (1), cette ques- tion a été le principal objet des études de la section de géologie du congrès scientifique de Milan au mois de septembre dernier. Outre les fossiles cit^s dans mon mémoire lu le 22 janvier (2), la section de géologie a reconnu dans les calcaires en question les espèces suivantes: Ammonites depressus (Brug.), Davœi (Sow.) , polygyratus (Rein.), ûmbriatus (Sow.), Gowcrianus (Sow.), planicostatus (Sow.) , Bcchii (Sow.), armants (Sow subarmatus (Sow.), hecticus (Rein.), contractas Sow-)., falcijer (Sow ), Aptychus lamellosus, lœvis (Meyer), Belemnites semihastatus (Blainv.), Spirijer ff^alcotii (Sow.), ro stra- tus (Schlottli.), Terebratula triquetra (Sow.), vicinalis (Schlotth.). D’après ces fossiles, M. de Bucli qui était présent au congrès, a cru que l’on ne pouvait hésiter un instant à rapporter à la for- mation jurassique le calcaire rouge et la majolica des Alpes ita- liennes, et voici dans quels termes il a exprimé son opinion : « La » formation qui renferme ces fossiles constitue unezor.e qui s’étend » dans le midi de l’Europe depuis la Crimée jusqu’au Jura fran- » çais ; les fossiles les plus caractéristiques de cette formation » son t les Ammonites latricus, P uscli (variété de Y A . h e tero p hyl l us ) , » contractas, Sow., et plusieurs espèces delà tribu desFalcifères, >» plusieurs Aptychus , la Terebratula diphya , etc.; ces fossiles ju- » rassiques fixent l’âge de cette formation, dont les caractères pa- » léontologiques doivent l’emporter sur tous les accidents que » l’on pourrait signaler dans certaines localités. » M. Rivière lit le mémoire suivant : Mémoire sur les Te/spciths. CONSIDÉRATIONS PRELIMINAIRES. Le travail sur les Felspaths, dont je présente un extrait, fait partie d’une série de recherches que j’ai entreprises dans le but de connaître la composition minérale des roches, et par suite d’ar- river à leur détermination rationnelle. On comprenait autrefois sous le nom de Felspath un certain nombre de minéraux qui, par l’ensemble de leurs caractères et en (1) Bulletin , 2e série, t. 1er, p. 525. (2) Bulletin, 2’’ série. I. Ier, p. 179. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1814. 61 raison de l’enfance de la science , étaient regardés comme ne fai- sant qu’une seule espèce minérale. Aujourd’hui, la plupart des minéralogistes regardent au contraire l’ancienne espèce Felspatli comme formant un groupe d’espèces minérales , parmi lesquelles je citerai l’Orthose, l’Albite, l’Oligoclase, la Ryacolite, la Labra- dorite, l’Andésine, l’Anorthite , la Carnatite , la Pétalite , l’Adi- nole, l’Éeiite, la Néphrite, la Murchisonite, le Tripliane, etc. Haüy ayant remarqué des différences importantes parmi les Felspaths, avait déjà réuni sous le nom d’Orthose les variétés qui étaient semblables, soit par la forme cristalline, soit par la com- position ou par des caractères empiriques. De leur côté, MM. Ber- zélius, G. Rose, Alex. Brongniart, Beudant, Eggertz, etc. , cir- conscrivirent, sous les désignations d’Albite ou de Cleavelandite , d’OIigoclase, de Ryacolite, de Labradorite, d’Anorthite. de Car- natite , de Triphane , etc. , un certain nombre de Felspaths qui différaient notablement des Orthoses et entre eux , tantôt par la forme et la composition, tantôt aussi par la forme ou par la com- position seulement. Puis M. H. Abieli est venu dernièrement pro- poser une nouvelle espèce sous le nom d’Andésine. Enfin cette voie étant une fois tracée . les minéralogistes ne s’en sont pas tenus à ces espèces déjà nombreuses; car, d’après des analyses différentes, ils ont obtenu des formules différentes, et ont essayé d’élever au rang d’espèces les Felspaths dont elles résultaient: aussi les miné- ralogistes de notre époque sont-ils tombés dans l’excès contraire à celui qu’on pouvait reprocher à leurs prédécesseurs. Les Felspaths étant des minéraux qui jouent un rôle très im- portant dans la composition de l’écorce du globe (1), on comprend pourquoi on a tant écrit sur ces substances depuis les travaux d’Haüy. Les derniers mémoires qui ont été publiés sur les Fel- spaths et les roches felspathiques, au nombre desquels je citerai ceux de M. H. Abieli (2), celui de M. Duroclier (3), celui de M. Alex. Brongniart et de ses collaborateurs (4), ceux de M. G. Rose (5), ainsique celui de M. C. Deville(6), ont jeté beaucoup de (1) Les felspaths entrent pour les 45/ioo environ dans la composition moyenne de l'écorce connue du globe. (2) Ann. de Pog.;c t Annales des mines , 5e série, p. 619; 4* série, p. 579. (5) Annales des mines, 3e série, p. 547- (4 Archives du muséum d' histoire naturelle. Paris, 1809. (5) Ann. de Pog.; et Annales des sciences géologiques. (6) Analyse des felspaths de Ténériffe ; Comptes-rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome XIX, p. 46. 62 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. lumière sur ces minéraux. Mais les minéralogistes dont je parle , à l’exception de MM. Alex. Brongniart et G. Rose , ont suivi, se- lon moi, une marche vicieuse; car ils ont essayé d’établir des espèces différentes toutes les fois qu’ils ont trouvé des analyses notablement différentes et susceptibles d’être traduites en formules différentes, considérant alors ces formules comme définitivement arrêtées. Pour atteindre ce résultat, tantôt ils se sont servis des analyses de leurs prédécesseurs, ce qui est le cas exceptionnel, tantôt ils les ont laissées de côté, en les regardant comme défectueuses , pour s’en rapporter uniquement aux leurs , qu’ils ont, au reste, inter- prétées trop souvent selon leur caprice. Or , ainsi que je l’ai dit ailleurs (lj, les formules, dans la supposition que l’on apporte toute la rigueur nécessaire à leur déduction rationnelle, n’étant que la traduction symbolique des analyses, diffèrent pour chaque analyse notablement différente. Leur exactitude dépend donc de celle des analyses , du nombre et de l’interprétation de ces ana- lyses. De sorte que pour être en droit d’établir une formule ra- tionnelle d’un minéral , c’est-à-dire une formule qui deviendrait la représentation symbolique de la composition moyenne de ce minéral, il est indispensable d’avoir à sa disposition un grand nombre d’analyses qui, chimiquement, diffèrent peu entre elles, et qui aient été faites sur les variétés les plus abondantes du miné- ral pris dans son état habituel ou normal. Au reste , il n’est pas certain, même dans ce cas, que la formule moyenne ainsi déduite ne soit pas susceptible de varier en présence de nouvelles analyses et de nouvelles observations géologiques, car le rôle géognostique d’un minéral doit nécessairement servir de guide pour établir l’espèce, sinon naturelle , du moins rationnelle. D’après ces con- sidérations , on voit qu’il est à regretter que les minéralogistes aient, dans beaucoup de cas, établi trop légèrement des formules, en oubliant leur portée véritable et les éléments qui sont indis- pensables pour les déduire. C’est un abus de principes qui peu- vent, en minéralogie comme en géologie, être d’un grand secours, si toutefois il existe réellement des lois dans les compositions qui peuvent être représentées par des formules fondées sur les rap- ports en oxygène. Outre les considérations précédentes, il en est plusieurs autres, telles que les procédés analytiques , qui peuvent conduire à des (î) Mémoire minéralogique et géologique sur les roches dioritiques de la France occidentale , î brocli. iu-8’; Paris, i844'» et Bullel. de la Société gcol. de France, t Ier, 2e série, p. 528. SEANCE Dlj 18 NOVEMBRE 1844. 63 différences notables dans les formules établies d’après des analyses isolées. Ainsi, loin de considérer les formules données par les minéta- logistes comme définitivement arrêtées, je les crois pour la plupart établies sur des bases peu solides, d’autant plus qu elles sont sou- vent différentes pour les divers auteurs. Dans cette position , j’ai c rutile voir employer une autre mé- thode , moins exceptionnelle et plus conforme aux lois de la na- ture, il me semble, pour reconnaître parmi les Felspatlis les espèces qui pouvaient être regardées comme réellement détermi- nées , et celles à l’égard desquelles on ne possédait pas assez d’é- léments, quelles que soient, du reste, les formules qui devraient les représenter. Ainsi, après avoir discuté les foi mes cristallines, les clivages, etc , des Felspatlis, j’ai réuni toutes les analyses qui pouvaient mériter un certain degré de confiance ; j’ai groupé ensuite ccs analyses, d’après les analogies de composition, de forme cristalline, de texture, de gisement et diverses autres consi- dérations, pour prendre des moyennes, et j’ai enfin obtenu les résultats que j’exposerai bientôt. Mais , je le répète, de nouvelles recherches pourraient amener des modifications à l’égard des for- mules qui représentent les espèces que j’admets parmi les Fel- spatlis ; néanmoins, je ne pense pas qu’il y ait jamais beaucoup à changer dans certaines espèces, telles que l’Orthose, l’Albite, l’O- ligoclase, la Ryacolite et la Labradorite. La discussion approfondie dont je viens de parler m’a démontré que l’on pouvait avec certitude admettre les espèces Orthose , Albite, Oligoclase, Ryacolite et Labradorite , autant que le mot espèce a de valeur en minéralogie; car l’idée de l’espèce n’a rien d’absolu dans cette science , lorsqu’on envisage la série du règne minéral comme nous l’offi e la nature (1). Les espèces précédentes sont assez caractérisées par leurs diverses propriétés , et les docu- (i) Dans la nature , il n’y a réellement pas d espèces minérales tran- chées et telles qu’on les définit en minéralogie proprement dite. L’écorce du globe n’offre en effet que des espèces géologico-minéralcs, car la na- ture a toujours procédé en grand , sou objet étant de former des masses ou les roches. Par suite de ces phénomènes généraux, les espèces géolo- gico-minérales n’ont pas une composition chimique fixe (i) * * 4, elles ont une composition qui varie dans certaines limites. De sorte que, si l’on veut ad- mettre des espèces naturelles, il faut prendre la moyenne des composi- tions pour représenter l'espèce ; et les individus qui constituent l’espèce gravitent autour de celte moyenne théorique et entre les limites natu relies que la science ne saurait préciser rigoureusement. 04 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE l8'l4. ments que l’on possède maintenant sur ces propriétés sont suffi- sants pour les définir d’une manière précise et claire. Mais quant aux espèces Andésine,Anorthite,Carnatite,Pétalite,Triphane, etc. , je ne pense pas que l’on soit autorisé à lesadmettre, encore moins à les caractériser par des formules 11 peut bien se faire que plu- sieurs de ces espèces existent réellement ; mais il est probable aussi qu’il y en a moins qu’on ne le suppose, et que celles que l’on pourra admettre par la suite devront être représentées autrement. Dans tous les cas , les premières espèces , en ajoutant toutefois l’Andésine , si l’on admet que les observations géologiques de M. de Flumboldt dans les Andes et que les analyses de MM. H. Abich et G. Rose suffisent pour établir l’espèce Andésine , ce qui n’est pas rigoureux, étant les seules qui jouent un rôle important dans la composition de l’écorce du globe, il importe peu au géo- logue, je dirai même au minéralogiste, d’être fixé sur les autres, qui sont des espèces accidentelles , sinon douteuses, et qui, en raison de leur rareté, n’ont aucun intérêt, soit dans l’application, soit dans laphilosopliie de la minéralogie, lorsqu’on envisage cette science sous un point de vue général. La minéralogie pure et ap- pliquée, pour marcher parallèlement avec les autres sciences na- turelles, exige, en effet, qu’on bannisse de son domaine les détails qui nuisent à ses progrès , et mérite à tous égards d’être considé- rée d’une manière plus élevée, plus philosophique. D’après les réflexions précédentes, je dois donc diviser les Fels- paths en deux catégories : la première comprend les Felspaths essentiels ; la seconde, les Felspaths accidentels. PREMIÈRE CATÉGORIE. Felspaths essentiels . Ainsi que je l’ai annoncé plus haut , je range dans la première catégorie l’Orthose, l’Albite, l’Oligoclase, la Ryacolite, la Labra- dorite et l’Andésine. Orthose (O.) [1] Orthoklase, Felspath ordinaire, Petunzé, etc.). L’Orthose a pour forme primitive un prisme oblique rhom- Loïdal de 118° 58' et 61° 0*2', dont la base est inclinée sur les (i) Dans le système d’annotations que j’ai adopté pour indiquer la composition minérale des roches, je représente l’orlliose par la lettre O. SEANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 65 pans de 112° 35' et 67° 25'. Elle offre 3 clivages, dont 2 assez nets, qui se rencontrent à angle droit. Composition chimique de V Orthose d'après 26 analyses. Nombres Nombres Oxi- extrêmes. moyens. gène. Silice ... 'de 58 à 68 I 1 63,96 j 1 53,22 ! Alumine de i5 à 23,95 , 19,08 8,91 \ Peroxide de fer de 0 à i»75 ! 0.25 0,07 > Peroxide de manganèse. de 0 à 1 ,55 0,06 0,01 ) Polasse 'de 6,90 à 16,95 10,65 2,3l \ Soude 1 de 0 à 5, 06 o,55 0,14 | Chaux de 0 à 3 | o,55 0,14 ( Magnésie J de 0 à 2 ; 0,17 0,10 J Eau 'de 0 à 1 ,70 o,58 0,55 1 Perte. ■de 1 0 à 0,80 0,28 » 1 i 98,95 1 46,23 j Oxi- gène. 53,22 8>99 2,69 Rap- ports. 1 2 3 En considérant l’alumine , ainsi que les peroxides de fer et do manganèse, comme isomorphes, et en agissant de même à l'égard de la potasse, de la soude, de la chaux et de la magnésie, on a pour rOrthose la formule : 3 Al Si*- f (K, Na, Ca,Ma)Siï. Cette espèce est donc , d’une manière générale , un silicate d’a- lumine et de potasse. Alhite (A.) (Cleavelandite , Kieselspath, Eisspatli, Schorl blanc , Tétartine, Péricline, etc.). La forme primitive de l’Albite est un prisme oblique non sy- métrique, c’est-à-dire à base de parallélogramme obliquangle, de 119° 30' et 60ü 30', dont la base est inclinée sur les pans de 115° et de 65°. L’Albite montre 3 clivages qui ne sont pas à angles droits, et dont 1 plus facile que les autres. Cette espèce est souvent mâclée, à gouttière ou éventail , et offre des angles rentrants de 6° environ. Soc geot. Tome II, 2e série 5 66 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. Composition chimique de ï Albi te d'après 13 analyses. Nombres Nombres Oxi- Oxi- Rap- extrêmes. moyens. gène. gène. ports. Silice de 65, 87 à 70,68 68,73 35,70 35,70 12 Alumine. de 18,20 à 22,00 19,52 9> 1 1 r» 1 3 5 Peroxide de fer de 0 à c,48 0,08 0,02 j 9,10 Potasse ... de 0 à 2 , 4 1 o,3o 0,04 ’ Soude de 8 à i\,47 10,17 2,60 ( \ 2 80 \ Chaux de 0 à i,44 0,29 9.08 Magnésie de 0 a o,55 0,14 0,08 ) Eau de 0 à 1,20 0,09 0,08 Perle , de 0 à o,65 o,o5 99>37 47>7* D’après les résultats pr écédents la fc irmule 1 de l’Alb ite est 3 Al SP + {Na, K , Ca, Ma) SP. L’Albite est donc, d’une manière générale, un silicate d’alumine et de soude. Oligoclase (01.) (Spodumène, Nation spodumen, etc.). La forme primitive de l’Oligoclase est un prisme oblique non symétrique, c’est-à-dire à base de parallélogramme obliquangle, de 115° 30' et de 64° 30', dont la base est inclinée sur les pans de 93° 45' et 86° 15'. Cette espèce montre 3 clivages obtus, dont un net et un autre imparfait. Composition chimique de l’ Oligoclase d'après 6 analyses. Nombres extrêmes. Nombres moyens. Oxi- gène. Oxi- gène. Rap- ports. Silice. .... de 6i,55 à 64>25 62,74 32,78 32,78 9 Alumine de 19*6° à 24,60 22,99 10, 73 r 1 i no Peroxide de fer de o,5c 1 à 4 • 1 1 0,96 0,29 1 V 1 l 0 Potasse ... de 0 à 3,91 1,27 0,21 ' Soude de 7,55 à 9>67 8,37 2,14 3 55 Chaux . . . f de 2,16 à 4>6o 2,98 0,82 1 Magnésie de 0,02 à 1 , 1 4 o,63 0,08 99’89 47,16 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1841. 67 Ainsi, la formule de l’Oligoclase est 3 Al Si 2 4- [Na? Ca , K, Ma) Si\ On peut donc dire d’une manière générale que l’Oligoclaseestun silicate d’alumine et de soude calcique. Ryacolile (R.) (Felspath vitreux , etc.). La Ryacolite a pour forme primitive un prisme oblique rhom- boïdal, comme l’Orthose, de 119° 21' environ. Cette espèce pré- sente à peu près les mêmes clivages que l’Orthose ; ils sont très visibles; enfin la Ryacolite offre une texture fendillée comme une substance qui aurait été étonnée par le refroidissement. Composition chimique cîc la Ryacolite d'après 7 analyses. Nombres Nombres Oxi- Oxî- R a p- extrêmes. moyens. gène. gène. ports. Silice de 5o,3i à 70,22 64,69 53,6o 33,6o 9 Alumine de 15,72 à 29.44 19 54 9.12 ' Pcroxide de fer de 0 à 2,41 0.74 0, 22 9,35 5 Peroxide de manganèse. de 0 à o,i5 0,02 0,01 Potasse de 3,71 à 8,27 6,94 1,17 ) 1 Soude de 2,86 à io,56 4.90 1,25 I | Chaux de 0 à 3,i6 1,25 o.35 I : 5»4° Magnésie de o,23 à 1 ,4o 1 ,04 o,63 > 1 1 99» 1 2 46,35 1 ! D’où la formule de la Ryacolite est 3 Al Si2 -f- (K y Na y Ca , Ma) Si}. D’une manière générale on peut donc dire que la Ryacolite est un silicate d’alumine et de potasse sodique. Labradorite (L. ) (Labrador , Felspath opalin , etc.). La Labradorite a pour forme primitive un prisme oblique non sy- métrique, c’est-à-dire à base de parallélogramme obliquangle , de 11 9° et 01°, dontles bases sontinclinées sur les pansde 1 15°etde65°. Cette espèce présente 4 clivages non à angles droits, dont un par- fait et un autre assez facile ; l’un de ces clivages offre le phéno- mène du chatoiement d’une manière remarquable. 68 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1814. Composition chimique de la Labradori te d'après 9 analyses . Nombres extrêmes. Nombres moyens. Oxi- gène. Oxi- gène. Rap- ports. Silice de 47 9° à 55,7.5 53,36 27,72 27,72 6 Alumine de 24 jOO à 34,oo 28.17 i3,i5 Peroxide de fer Pcroxides de fer et de de 0 à 5,25 1,67 o,5i 13,69 5 manganèse de 0 à 0,89 0,10 o,o3 j Potasse de 0 à °>49 0,25 0,0 4 N | Soude de 5,5o à 5,46 4,55 1,11 1 > 4,33 j Chaux de fu 49 à 12,01 10>79 3,o3 | Magnésie de 0 à 1,74 0,25 o,i5 , Eau de 0 à o,5o 0,10 0,08 Perte de 0 à 1,25 0,19 «r 99,25 45,82 Ainsi, la formule de la Labradori te est 3 Al Si -f- (Ca, Na, K, Ma ) Si 3. En sorte que, d’une manière générale, on peut dire que la Labra- dorite est un silicate d'alumine et de chaux sodique. Anclésine (An.) (Andésite, Pseudo-Albite, etc.). L’Andésine paraît avoir la même forme primitive que l’Albite, et offrir les mêmes caractères de texture ; néanmoins je ne crois pas que l’on ait fait encore une étude assez étendue de l’Andésine pour être certain de cette similitude. Composition chimique de V A ndésine cl' après 3 analyses. Nombres Nombres Oxi- extrêmes. moyens. gène. Silice de 56,72 à 59,60 5-8, 24 3o,26 Alumine de 24,28 à 26,52 25,34 ii,83 Peroxide de fer de 0 à i,58 0,76 0,23 Potasse de 0 â 1,08 0,62 0,10 Soude de 6,09 à 7,39 6,67 l>7* Chaux ... de 5,77 à 9,28 7, 18 2,02 Magnésie. . , de 0 à 1,08 0,49 o,3o 99, 3o s 46,4a Oxi- gène. 3o,26 12, 06 4,i3 Rap- ports. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 69 I) après ces résultats, la formule de l’Andésine serait 3 AlSi2-\- ( Ca, Na , K, Ma) Si, Mais on ne saurait regarder cette formule comme définitive ; car, s’il existe réellement une loi simple entre les rapports des diffé- rents Felspatlis, ainsi que le pensent les minéralogistes, la formule précédente , et les nombres 7,3,1 qui l’ont fournie ne seraient pas ce que l’on devrait trouver pour l’Andésine. En effet, on devrait obtenir, en prenant les nombres les plus rapprochés ou 6, 3, 1 , ou 9, 3,1, d’après ce que montrent l’Orthose, l’Albite, l’Oligoclase, la Ryacolite et la Labradorite, espèces qui sont bien caractérisées et qui paraissent être rationnellement représentées par leurs for- mules respectives. Les nombres auxquels sont arrivés MM. H. Âbicli et G. Rose sont airssi défectueux que ceux obtenus plus haut, puisque M. G. Rose est parvenu aux nombres 7, 3, 1, et M. H. Àbich aux nombres 8, 3, 1. Or, en adoptant 6, 3, 1, ce qui serait assez raisonnable, on rentrerait dans la Labradorite • tandis qu’en adoptant les nombres 9, 3, 1, on tomberait sur les formules de l’Oligoclase et de la Ryacolite. D’un autre coté, s’il n’existe rigoureusement point de loi entre les rapports des Felspatlis , l’Andésine, en raison de la grande quantité de chaux et de soude qu’elle renferme , ne serait qu’un Labrador, et dans ce cas, je ne crois pas qu’il fût nécessaire d’en faire une espèce particulière. 11 résulte donc des réflexions précédentes, comme je l’ai déjà dit au sujet de ce minéral , qu’il est indispensable de faire de nouvelles observations géologiques dans les Andes et de nouvelles analyses pour être fixé définitivement sur l’Andésine. Pour le moment, je pense que ce minéral devra rentrer dans l’une des espèces déjà déterminées ; néanmoins , comme il n’y a point de certitude à cet égard , et comme l’on n’est pas en droit de décider positivement s’il doit se rattacher plutôt à la Labradorite qu’à la Ryacolite et même qu’à toute autre espèce, je crois utile de conserver provi- soirement cette espèce minérale, afin d’éviter deserreurs, d’autant plus que l’on doit la connaissance, imparfaite il est vrai , de l’An- désine à trois savants qui méritent laplus grande confiance, MM. de Humboldt, G. Rose et H. Abich. DEUXIÈME CATÉGORIE. Felspatlis accidentels. Je range dans la seconde catégorie l’Anorthite, la Pétalite, le Tripliane, la Carnatite et tous les autres Felspatlis que l’on a 70 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. essayé de présenter comme espèces, d’après des formules qui ré- sultaient d’analyses isolées ou faites sur des raretés, des mélanges ou bien sur des variétés extrêmes d’espèces déjà déterminées. Je vais résumer les documents que l’on possède sur l’Anortliite, la Pétalite , le Triphane et la Carnatite. Quant aux autres Fels- patlis de la seconde catégorie , je crois devoir me dispenser d’en parler d’après ce que j’ai dit ci-dessus. Anorthite (Felspath de cliaux et de magnésie, etc.). La forme primitive de l’Anorthite est un prisme oblique non symétrique , c’est-à-dire à base de parallélogramme obliquangle, de 117° 28' et 62° 32', dont la base est inclinée sur les pans de 94° 12' et de 85° 48' , de 110° 57' et de 69° 33'. Cette espèce présente deux clivages nets et obliques de 94° 12' et de 85° 48'. Composition chimique, de /’ Anorthite d’après 6 analysez. N o ml ires Nombres Oxi- Oxi- Rap- extrêmes. moyens. gène. gène. ports. Silice. de 43,79 à 46 44,56 25, i5 23, i5 4 Alumine de 55,02 à 57 35, i5 16^42 3 Peroxitle de fer de 0 à 0,74 o.33 0, 10 1 U 5 0 1 Polasse de 0 à 0,88 0,37 0,06 Soude de 0 à 0,68 o,i5 o,o4 > K Chaux de i4,5o à 19.02 17,54 4.87 1 Maguésie de 0 à 5,26 1,62 °>99 99>52 45,63 La formule qui résulterait des nombres précédents serait 3 Al Si -f- (Ca, Ma, K, Na J Si. Mais cette formule ne saurait être regardée comme représentant l’ Anorthite , les nombres 4 , 3 et 1 ne pouvant rentrer dans la loi commune des Felspaths. 11 en est de même des nombres donnés par M. G. Rose et par les autres auteurs. Tout ce que l’on peut dire de l’Anorthite , c’est que cette substance est un silicate d’alu- mine et de chaux magnésique. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1841. 71 Pétalite (Berzélite , Arfvedsonite, etc.). La Pétalite a pour forme primitive un prisme oblique non sy- métrique de 137° 43' et de 42° 17'; elle offre deux clivages obtus et assez faciles. Composition chimique de la Pétalite d'après 2 analyses. Nombres extrêmes. Nombres moyens. Oxi- j gène, j 0 xi- gène. Rap- ports. Silice de 74-» 1 7 à 79*21 de 17,22 à 17,4* de 0 à o,32 de 5,i6 à 5,76 76,69 1 7,3 1 39,84 7,68 0,04 2,39 39,84 7,68 2,43 16 Alumine 3 Chaux 0,16 Lithinc 5,46 1 99,62 49*95 La formule qui résulterait des nombres précédents serait 3 AlSP + fLi, CaJ Si. Mais elle ne saurait être regardée comme définitive. On peut donc dire seulement que la Pétalite est un silicate d’alumine et de li- tliine calcique. Triphane (Spodumène , Zéolite de Suède , etc. ). La forme primitive du Triphane est un prisme oblique non sy- métrique de 100° et 80"? Ce Felspath offre deux clivages assez fa- ciles et aigus. Composition chimique du Triphane d'après 2 analyses. Nombres Nombres Oxi- Oxi- Rap- extrêmes. moyens. gène. gène. ports. Silice de 63,29 a 66, 4o 64,84 33,68 | 53,68 i3 Alumine de a5,3o à 28,78 27,04 12,23 ' ) Peroxide de fer. ...... de O579 à i,/|5 M2 0,34 16,60 4 Peroxide de manganèse . de 0 à 0,20 0,10 o,o3 - Lithinc de 5,63 à 8,85 7*24 3,07 3,07 1 Perle de 0 à 0,77 o,58 100,72 4g.35 ! : SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 7 1 La formule qui résulterait des nombres précédents est 441 SP + Li Si. Mais elle ne saurait être regardée comme définitive. On peut donc dire seulement que le Tripliane est un silicate d’alumine et de lithine. Carncitite (Felspatli du Carnate, etc.). La Garnatite paraît avoir la même forme primitive que l’Or- tliose. Composition chimique de la Carnatite dû après l'analyse faite par M. Beudant. Silice . . Alumine Soude. . Chaux... Nombres r Oxi- Rap- trouvés. Oxigène. gène. ports. 71,00 36,88 56,88 )3 18,00 8,4i 8,4 1 3 2,10 8,5o o,54 j - \ 2,q3 2,09 ) ’y 1 99>6° 48,22 La formule qui résulterait des nombres précédents, en prenant toutefois 12 au lieu de 13 , serait 3 AlSiz-\- fCa, Na) Si* ; mais elle ne saurait être maintenant regardée comme définitive , puis- qu’on ne possède encore qu’une analyse de la Carnatite. Dans tous les cas , on peut dire que cette substance minérale est un si- licate d’alumine et de chaux sodique. APPENDICE. Je ne crois pas inutile de dire quelques mots sur certaines sub- stances minérales , qui ont été regardées par différents minéralo- gistes comme étant des Felspatlis particuliers , et à l’égard des- quelles on a besoin d’être fixé , tant pour la géologie que pour la minéralogie. Pc tro silex. On a compris sous le nom de Pétrosilex des substances miné- rales , qui sont en apparence identiques , mais qui sont très diffé- SÉANCE DU 1 8 NOVEMBRE 1814. 73 rentes minéralogiquement et géologiquement. Le plus souvent, le Pétrosilex est de l’Albite; d’autres fois, c’est de l’Orthose , de rOligoclase ou de la Labradorite ; d’autres fois, enfin , on donne le nom de Pétrosilex à des roches compactes, uniformes, et résul- tant du mélange d’un des Felspaths essentiels avec un autre mi- néral . Le Pétrosilex le plus commun , celui qui forme la base des eurites, est de l’albite. On pourrait donc conserver le mot Pétro- silex pour désigner les variétés compactes et plus ou moins pures d’albite, ou bien les variétés homogènes d’eurite. Jade. Le Jade comprend, comme le Pétrosilex, plusieurs substances minérales. Ordinairement le Jade n’est qu’une Labradorite com- pacte et plus ou moins pure ; d’autres fois on désigne, sous cette dénomination, de l’albite compacte et plus ou moins pure. Le Jade le plus commun ou le véritable type du Jade labrado- rite est celui qui forme la base des eupliotides ; c’est alors une Labradorite plus ou moins souillée par du diallage. On pourrait donc, à l’instar du Pétrosilex , conserver le mot Jade pour dési- gner les variétés compactes et plusou moinspures de Labradorite. La Néphrite n’est pas un Jade , car la Néphrite est un silicate d’alumine et de magnésie. Obsidienne , Rètinite , Perlite , Ponce , etc. L’Obsidienne, la Rètinite, la Perlite, la Ponce, etc., ne sont pas des minéraux proprement dits , mais bien des variétés de roches felspathiques, dont je parlerai dans un autre travail. BEMARQOES sur les felspaths essentiels. Les Felspaths essentiels, c’est-à-dire ceux qui jouent un rôle important dans la composition de l’écorce du globe , se réduisent à 6: l’Orthose, l’Albite, l’Oligoclase, la Ryacolite, la Labradorite, l’Andésine; et peut-être même à 5, l’Andésine étant encore très douteuse. Or , si l’on récapitule les formules respectives des Felspaths essentiels, en exceptant celle de l’Andésine, qui n’est pas définitive , on a : Pour l’Orthose 3 Al Si*+ (K , Na , Ca, Ma) SP; Pour l’Albite 3 Al SP- f (Na , K , Ca , Ma) Si 3; Pour l’Oligoclase 3 Al 6ï2-J- (Na , Ca , K , Ma) Si 3 ; Pour la Ryacolite 3 Al Si2+ (K , Na , Ca , Ma) Si*, Pour la Labradorite ‘S Al Si -j- (Ca, Na . K, Ma) Si*, 74 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. D’un autre côté, si l’on récapitule les rapports qui ont fourni les formules précédentes, on a la série suivante : Pour l’Orthose : 3 12; Pour l’Albite. ........ . . . 1 : 3 12; Pour l’Oligoclase : 3 9; Pour la Byacolite 1 : 3 9; Pour la Labradorite .... 1 : 3 6„ Cette série ne donne, au reste , que trois symboles différents : i : 3 : 6, ou i : 3 : 3x2; 1 : 3 : 9, ou 1 : 3 : 3x3; i : 3 : 12, ou i : 3 : 3x4. Enfin la composition des cinq felspatlis précédents, et proba- blement des autres aussi, peut être représentée d’une manière gé- nérale par le symbole suivant : 1 : 3 : 3 X n. En jetant les yeux sur les formules précédentes , on voit qu’elles ont entre elles une relation simple , et de plus en plus simple depuis l’Orthose jusqu’à la Labradorite. La même obser- vation s’applique à la série des rapports. Eli bien, cette série décroissante est conforme à la loi que dévoile la géologie relati- vement à la cessation de la formation des Felspaths essentiels- car l’Orthose, par exemple, qui a été produite la première ne re- monte pas très haut dans l’échelle des terrains , tandis que la Labradorite se trouve encore comme partie constituante dans les laves de notre époque. Ainsi les formules et les rapports sont d’au- tant plus simples que les Felspatlis sont plus modernes. Le tableau suivant, qui indique la richesse en silice et en oxigène des Felspaths essentiels, ne conduit pas rigoureusement à la même loi , contrairement à ce qu’avaient annoncé divers minéralogistes, notamment M. Abich. Espèces. Silice. Oxigène. Orthose. 60,96 45,23 Albite . . 68,73 47*7 1 Oligoclase 62,74 47,16 Kyacolite 64,69 46,35 Labradorite. ...... e ........... . 53,36 45,82 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1841. 75 Mais, si la loi qui exprime l’ancienneté relative ou la cessation de la production des Felspaths essentiels n’est pas rigoureusement en rapport avec les teneurs respectives en silice et en oxigène de ces espèces, lorsqu’on les envisage seules , c’est-à-dire indépen- damment de leurs associations en grand avec les autres minéraux, elle existe réellement quand on interprète d’une manière conve- nable le fait naturel. On découvre , en effet, la loi ou la relation qui existe entre l’ordre d’ancienneté et les teneurs en silice et en oxigène, si l’on considère, non l’élément felspathique de chaque roche felspathique, mais bien l’ensemble des minéraux essentiels de chaque roche felspathique; ensemble qui formait primitive- ment un bain à l’état igné , avant le départ des éléments chi- miques , dont le résultat a été , par suite du refroidissement et de la cristallisation plus ou moins confuse de la masse, la pro- duction des divers minéraux essentiels qui constituent la roche felspathique. C’est donc la somme des teneurs en silice et en oxigène de chaque minéral qui entre essentiellement dans la composition de la roche felspathique , et non les teneurs de l’élé- ment felspathique seulement, qu’il faut prendre pour trouver la loi énoncée. En suivant cette méthode , qui est la seule naturelle, on voit alors que les roches felspathiques sont d’autant plus an- ciennes qu’elles sont plus riches en silice et en oxigène. Il résulte également des considérations précédentes et des phénomènes géologiques qu’aux différents âges de la vie du globe les bains étaient composés différemment, et qu’ils étaient aussi doués de propriétés physiques différentes. Ainsi l’Orthose, qui est moins riche en siîice et en oxigène que l’albite , se trouve associée avec des minéraux dont les teneurs en silice et en oxigène sont plus grandes que celles des minéraux associés avec Palbite et les autres felspaths. Par exemple , dans le granité , qui peut être regardé comme la première roche résul- tant de la consolidation delà surface du globe, l’Ortliose se trouve associée avec une grande quantité de quarz hyalin, qui est de la silice plus ou moins pure et qui renferme environ 52 pour cent d’oxigène. Dans la pegmatite, l’orthose est réunie seulement à du quarz. Dans la yénite l’orthose est aussi associée avec du quarz et de l’amphibole. Au contraire, en considérant les roches albi- tiques qui ont de l’analogie avec les précédentes, l’albite dans la protogyne se trouve réunie à une faible quantité de quarz, et dans le diorite elle existe exclusivement avec l’amphibole. D’un autre côté , la labradorite, déjà moins riche en silice et en oxi- gène que les autres espèces de felspaths , se trouve réunie dans 76 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. l’euphotidë avec le diallage, et cette association de la labra- dorite avec le diallage offre une teneur en silice et en oxigène moins considérable que celles des roches albi tiques, et à plus forte raison que celles des roches orthosiques. Or , cette différence dans les teneurs serait encore plus grande , si l’on considérait le basalte où la labradorite se trouve associée à du pyroxène , à du péridot et à de la nigrine. Les citations précédentes suffisent pour démontrer qu’il faut considérer l’ensemble des minéraux qui composent essentielle- ment une roche d’origine ignée , toutes les fois qu’on cherche la relation naturelle qui existe entre l’ordre d’ancienneté de cette roche et sa teneur en silice et en oxigène. Elles font voir aussi de quelle importance peut être la connaissance exacte des éléments minéralogiques des roches pour l’étude de certains phénomènes’géologiques ; car la richesse en silice ou en oxigène des roches , et plusieurs autres faits relatifs à la nature des mi- néraux essentiels de ces roches, sont étroitement liés aux phéno- mènes physiques et chimiques qu’ont présentés la matière ignée, qui a formé la première pellicule du globe , et celles qui ont été vomies aux diverses époques géologiques : elles dévoileront sou- vent des circonstances qui resteraient cachées, si l’on négligeait de semblables considérations. En admettant que les roches felspathiques les plus anciennes sont les plus riches en silice et en oxigène , qu’en outre les pro- portions de ces substances diminuent graduellement à mesure que l’on considère des roches felspathiques déplus en plus modernes, l’alumine, y compris ses isomorphes, suit généralement une pro- portion inverse dans les mêmes roches. Si l’on examine maintenant dans les felspaths les teneurs en potasse , en soude et en chaux , on trouve que le plus ancien felspatli , l’orthose , est à base de potasse , que l’albite est à base de soude , que l’oligoclase est à base de soude et de chaux , que la ryacolite est à base de potasse et de soude, qu’ enfin la labra- dorite et l’andésine sont à base de chaux et de soude ; c’est-à- dire que, d’une manière générale, la potasse est la plus ancienne des trois bases , tandis que la chaux est la plus moderne. Dans tous les cas , je dois rappeler que j’ai pris des moyennes pour établir la composition fondamentale de chaque felspath essen- tiel , et qu’en réalité il n’y a peut-être pas beaucoup d’ortlioses qui ne renferment point de soude ni d’autres bases isomorphes, qu’il n’y a peut-être pas aussi beaucoup d’albites qui ne renfer- ment point de potasse ni d’autres isomorphes , et qu’en dernière SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 77 analyse la même observation s’applique aux autres feispatlis. Comme l’orthose et l’albite sont formulées semblablement , la différence de leurs formes primitives résulterait-elle plutôt de la différence des bases et de la différence des proportions de la silice, ou de toute autre substance, que de la différence des circonstances au milieu desquelles ces espèces ont été formées? Je dirai, sans préjuger la question , qu’il y a eu des cas où les circonstances au milieu desquelles ont été formées l’orthose et l’albite, ayant été à peu près semblables , il en est résulté cependant des formes distinctes pour ces deux espèces; tandis que la ryacolite, quia été formée par un refroidissement brusque et dans des circon- stances très différentes de celles de l’orthose , mais qui renferme plus de potasse que de soude , et dont la formule est bien diffé- rente de celle de l’ortliose, rentre presque dans la forme primitive de cette dernière espèce. Les considérations précédentes peuvent conduire à la conclusion théorique suivante : les espèces felspatliiques sont moins tran- chées dans la nature qu’on ne le suppose généralement; il y a même des passages entre elles, ainsi que le montrent les diverses analyses, d’autant plus que dans les roches felspatliiques un des lelspaths n’existe pas toujours exclusivement. Par exemple , dans le granité, l’orthose est souvent accompagnée d’albite; dans la protogyne, l’albite est à son tour fréquemment associée à de l’orthose; dans le trachyte , outre la ryacolite, on trouve quel- quefois un autre felspath; etc. Mais lorsqu’il existe à la fois plu- sieurs feispatlis dans une roche felspathique , il y en a un qui domine , qui forme un élément essentiel de la roche ; et c’est toujours le même felspath qui joue ce rôle pour la même roche. Ainsi , quoiqu’il y ait les mélanges et les passages dont je viens de parler, la nature n’a pas moins fait des coupes générales dans l’ensemble des feispatlis , soit par la différence de composition et de forme, soit par les autres caractères qui résultent des circon- stances géologiques, au milieu desquelles les divers feispatlis ont été respectivement produits. Revenant à l’ancienneté relative des feispatlis, ou, pour mieux dire, des roches felspatliiques, je vais essayer de confirmer la loi énoncée plus haut par la considération des densités des feispatlis et des roches felspatliiques. Les densités des feispatlis sont : Pour l’Orthose 2,56 ; Pour l’Albite 2,61 ; 78 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. Pour TOI igoclase 2,66; Pour la Ryacolite. 2,61 ; Pour la Labradorite 2,71 ; Pour l’Andésine 2,73. Or , ce tableau montre approximativement que les densités des felspaths sont d’autant plus grandes que ces minéraux sont plus modernes. Mais pour rétablir dans son entier cette relation qui existe entre la densité et l’ordre d’ancienneté , il faut encore embrasser l’ensemble des minéraux qui composentessentiellement chaque roche felspathique. Ainsi , dans le granité , l’ortliose est associée à du quarz et à du mica; dans la protogyne, l’albite est associée à du talc et à une petite quantité de quarz. Or , la somme des densités des divers éléments minéralogiques du granité est moins grande que la somme des densités des éléments minéralogiques de la protogyne. On trouve de même que la syénite , qui est composée d’orthose, de quarz et d’amphibole hornblende , est moins dense que le diorite , qui est composé d’albite et d’amphibole hornblende ; au contraire ccs deux dernières roches sont plus denses que le granité. D’un autre côté, l’hyperstliénite , qui est formée de la- bradorite et d’hypersthène , offre une densité supérieure à toutes les roches précédentes. Enfin le basalte, qui est formé de labra- dorite , de pyroxène augite, de péridot et denigrine, présente une densité bien supérieure à celle des roches que je viens de citer. Donc , en supposant que toute la matière de notre globe ait été primitivement à L'état de fluidité ignée , il a dû y avoir tendance des éléments les moins denses à se porter à la surface du bain , et cette tendance n’a pu être détruite par l’affinité des bases pour la silice, qui agissait pendant le partage des éléments, puisque ce sont les hases les moins denses qui paraissent avoir le plus d’affinité pour la silice. Ensuite , la première couche s’étant refroidie peu à peu par suite du rayonnement , les contractions éprouvées durant la solidification auront déterminé des ruptures dans l’enveloppe déjà formée , et dès lors aura commencé une série d’éruptions qui ont continué jusqu’à ce jour. Les premières doivent avoir donné une matière analogue à celle de la première couche , et quant à la nature et quant à la densité ; tandis que les produits des érup- tions ultérieures et successives doivent avoir été de plus en plus différents de la première croûte à mesure que le globe vieillis- sait. Cette conclusion se trouve , du reste , vérifiée par les faits SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 79 géognostiques ; elle est en outre d’accord avec la densité moyenne du globe , qui prouve que vers le centre les matières sont beau- coup plus denses que celles qui sont situées à une profondeur moins grande. Il résulte enfin des considérations précédentes que les éruptions qui auront lieu dans les époques ultérieures , devant amener des matières moins éloignées du centre du globe , produi- ront des laves encore plus denses que celles de nos volcans actuels. Passant à la fusibilité relative des felspaths, on peut classer ap- proximativement ces minéraux dans l’ordre suivant, qui repré- sente une série croissante en fusibilité. Orthose , Albite, Oligoclase , llyacolite , Andésine , Labradorite. Mais cette série croissante serait plus exacte, et par conséquent plus conforme à la loi d’ancienneté relative des felspaths , si l’on tenait compte des minéraux avec lesquels les divers felspaths sont associés pour former les roches , en d’autres termes , si l’on pre- nait la somme de fusibilité de tous les minéraux essentiels d’une roche. Par exemple, l’ortliose , qui paraît être le moins fusible des felspaths, est généralement associé au quarz, qui est très difficile- ment fusible ; tandis que la labradorite , l’un des felspaths les plus fusibles, est ordinairement associé au pyroxène, au diallage et à l’hyperstliène, minéraux qui sont beaucoup plus fusibles que le quarz. Il résulterait donc de ce qui précède qu’en général les roches felspathiques sont d’autant plus fusibles qu’elles sont plus modernes. Cette conclusion découle , au reste , de la théorie de la fluidité ignée du globe; mais il ne faudrait pas trop étendre le principe que je viens d’énoncer, car une foule de circonstances ont pu le modifier. La chaleur spécifique de l’eau étant prise pour 1 , celle de l’or» tliose est de 0,49 , tandis que celle de l’albite est de 0,51 , et que celle de la labradorite est encore supérieure aux nombres précé- dents. En sorte que l’ordre d’ancienneté des felspaths est généra- lement lié à leurs chaleurs spécifiques relatives. Il résulterait de là que les felspaths sont en général d’autant plus anciens qu’ils possèdent une chaleur spécifique moins élevée. Mais cette loi n’est encore réellement exacte qu’en considérant l’ensemble des miné- raux qui composent essentiellement les roches felspathiques , c’est- 80 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. à-dire que ces roches ont une chaleur spécifique d’autant moins grande qu’elles sont plus anciennes. Ce fait paraît , du reste, être d’accord avec la théorie de la chaleur centrale , les matières les plus voisines du centre du globe devant avoir une chaleur spéci- fique plus élevée. La série des teneurs en silice et en oxigène des felspaths essen- tiels, celle de leurs densités, de leurs fusibilités et de leurs cha- leurs spécifiques , ainsi que leurs associations avec les autres mi- néraux et leurs gisements habituels, montrent qu’il existe une sorte de parenté entre chaque felspath essentiel et les différents autres minéraux qui lui sont associés pour former les roches ; car les divers minéraux qui sont réunis en grand jouissent de pro- priétés semblables ou qui se combinent et se compensent entre elles, de manière à donner à la roche des propriétés rentrant dans les lois énoncées ci-dessus. On peut donc dire : pour que des minéraux soient associés en grand, il faut qu’il y ait entre eux une sorte de parenté en har- monie avec les circonstances au milieu desquelles l’ensemble a été formé; et, ce qui semblerait confirmer ce fait, c’est que s’il se trouve dans une roche un minéral étranger ou non essentiel à la composition de la roche, ce minéral est pour ainsi dire isolé du reste, car il y forme ordinairement des critraux ou s’y présente en masse amorphe à l’extérieur. Par exemple, lorsque Porthose et l'albite se trouvent ensemble dans le granité et dans la protogyne, l’ortbose forme la base du granité , et l’albite s’y présente en cris- taux , tandis que l’inverse a lieu dans la protogyne. Or, comme la nature a généralement réuni des espèces qui ont une sorte de parenté , les cristaux doivent être des raretés. En effet , on les trouve ordinairement dans les fentes , dans les géodes, et comme expulsés de la masse essentielle par les minéraux qui la composent. C’est un fait qui , étant étudié plus sérieusement , peut devenir d’une grande importance dans les questions de géogénie , et qui par conséquent mérite , il me semble , d’être signalé aux médita- tions des géologues. L’affinité ou la parenté qui existe entre certaines espèces miné- rales est d’un grand secours en géologie; car, étant connues , une ou plusieurs des espèces minérales qui constituent une roche, on peut en quelque sorte déterminer d’avance les autres , si leurs ca- ractères sont masqués, et par suite arriver à la détermination de la roche et même à celle de son âge. On voit donc , d’après tout ce qui précède , combien l’étude exacte des felspaths est importante en géologie , puisqu’elle peut 81 SEANCE DIT 18 NOVEMBRE 1841. indiquer l’àge relatif des roches felspathiques , et jusqu’à un cer- tain point les circonstances physiques qui ont présidé à leur for- mation. Je terminerai ce mémoire en indiquant les roches dans les- quelles on trouve habituellement les divers felspatlis essentiels. L’orthose se trouve essentiellement dans le granité, le lepty- nite , la pegmatite, le gneiss , la syénite , la syénitone (1) , le por- phyre , la miascite et l’arkose. L’albite dahs Teurite, le granitone, la protog vne, la gnégyne et la diorite. L’oligoclase dans l’ophite et dans certaines roches , qui ne sont pas bien connues , et que l’on a rapportées au granité et au gneiss. La ryacolite dans le trachyte et la phonolite. La labradorite dans l’euphotide , l’hypersthénite , la dolérite , le mélaphyre et le basalte. L’andésine dans l’andésite, qui est regardée par les uns comme un porphyre dioritique, c’est-à-dire un diorite, et qui, selon d’au- tres, serait un trachyte. Or, ne connaissant pas suffisamment l’an- désite de M. de Humboldt, je ne saurais, pour le moment , me prononcer à l’égard de cette roche. M. de Wegmann communique à la Société l’analyse sui- vante du Rapport (en allemand) fait par M. Haid de Fend sur les mouvements menaçants cîes glaciers du Rofenthal et de Vernagt, dans le Tyrol septentrional. Le Rofenthal, entouré de hautes cimes et de glaciers étendus, forme le prolongement de la vallée de Fend, et remonte depuis Fend , au S. -O. , vers le sommet de la chaîne centrale , en formant une vallée étroite et à bords escarpés. A deux lieues derrière Fend débouche, au N.-O. , le vallon de Vernagt, qui renferme dans sa partie supérieure le glacier de ce nom, et un peu au sud , en deçà d’une muraille formée par des éboulis de rochers , le glacier du Rofenthal. Plus bas, dans cette dernière vallée, se déploient également les glaciers du Hochjoch et de Buflar, dont les eaux alimentent le torrent du Rofenthal. D’après ces détails locaux, on voit que, lorsque le glacier de Vernagt descend par son sillon et atteint le fond du Rofenthal , il Oppose une digue de (1) Plusieurs des noms des roches que je cite u’ont pas pour moi la siguification que leur donnent les auteurs. Dans un autre travail,, je pré- senterai la définition minérale exacte de ces roches. Soc. géol. Tome II, 2e série. 6 82 SEANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. glace aux eaux des glaciers du Hochjocli et de Bufiar, et qu’il se forme un lac derrière cet obstacle. Ce lac, qui s’est formé plu- sieurs fois, a fait de grands ravages dans les vallées d’Oetz et de l’inn, lors de la rupture de sa digue {Voy. Nachricliten ueber die Eisberge in Tyrol, par M. Walker; Tienne 1773). Depuis 1822, époque où le glacier de Vernagt touchait déjà la rive du torrent du Rofenthal, son extrémité inférieure s’était peu à peu retirée à plus d’une lieue ; mais, en 1840, on remarqua que le glacier du Rofenthal, séparé encore de celui de Yernagt, in- diquait de nouveau , par des fentes de plus en plus nombreuses , son accroissement progressif. Les fentes s’augmentant sans cesse , le glacier de Vernagt s’éleva bientôt sur les deux bords de la vallée et s’accrut en puissance, jusqu’à ce qu’en 1842, le glacier du Rofenthal, soulevant la moraine médiane qui le séparait de celui de Vernagt, finit par se réunir à lui. Pendant l’été de 1843, le glacier de Vernagt se fendilla également à son extrémité infé- rieure. Cette partie était alors , ainsi que les flancs , bordée d’un mur de neige , dont le niveau s’élevait progressivement à mesure que le glacier augmentait de volume , et l’on présageait dès îors que les flancs ne tarderaient pas à descendre dans la vallée. En effet, le 10 avril 1844, après une neige abondante tombée huit jours auparavant sur le glacier , et qui avait encore rehaussé sa barrière de neige terminale , cette barrière se montra coupée à pic à l’extrémité inférieure du glacier , et la glace débordait de six pas au-dessous de ce mur. Donc le glacier était descendu d’environ 2 toises en 8 jours. Vers le même temps on entendit aussi, coup sur coup , les explosions produites par l’ouverture des fentes , et ce fendillement fut tel que dès le mois de juin le glacier était de- venu impraticable. Par une conséquence naturelle de leur expo- sition au midi, les glaciers du Rofenthal et de Vernagt étaient déjà sans neige au mois de mai, en sorte qu’àpartir de cette époque on ne pouvait plus observer leur marche que par des signaux. Dans la première moitié de juin , leur extrémité inférieure s’a- vancait journellement de 2 pieds viennois; mais du 15 juin au 21 août, c’est-à-dire en 67 jours, elle descendit de 200 pieds. En même temps, les deux glaciers augmentaient de puissance et s’étendaient en largeur; en sorte qu’à la fin d’août la glace avait déjà atteint, et sur quelques points même dépassé, les moraines les plus éloignées qu’elle eût refoulées jadis , et quelle avait de- puis abandonnées. D’après les observations de M. Haid, ce mou- vement n’a pas toujours été égal et régulier ; il a dû dépendre nécessairement de l’angle de pente du fond de la vallée et des SEANCE BU 18 NOVEMBRE 1844. 83 mille accidents de la surface du sol. L’auteur du rapport prétend même avoir observé que sur un point le glacier aurait avancé de la longueur de sa canne dans le court espace de 8 minutes. Le 2 septembre, l’extrémité inférieure des glaciers réunis de Rofen- thal et de Yernagt n’était plus qu’à une demi-lieue de la place où une digue de glace a changé plusieurs fois la vallée du Rofentbal en un lac. L’expérience a appris aux habitants de cette localité que, plus le glacier de Yernagt approche du débouché de son vallon, plus son mouvement descendant est considérable ; les gens âgés se rap- pellent même qu’une fois, dans le bas de la vallée , ce glacier avait franchi en 15 jours la distance d’une portée de carabine, et qu’arrivé à l’étranglement de la vallée du Rofentbal, il l’avait barrée en un jour. Bans l’état actuel des choses , un événement pareil arrivera probablement bientôt , car les glaciers du Rofen- tbal et de Yernagt continuent tous deux à descendre et à s’ac- croître, tandis qu’en 1822 le dernier seul s’avancait. Or, les hommes sont hors d’état d’arrêter ce malheur ; tout ce qu’ils peu- vent espérer de plus favorable , c’est qu’au lieu de rompre subi- tement sa digue et de porter la désolation sur son passage, le lac s’écoule insensiblement par les canaux naturels que ses eaux pour- ront se frayer par leur poids. En comparant le mouvement de ces glaciers avec celui du gla- cier de l’Aar en 1844, on voit qu’au mois d’août les glaciers du Tyrol descendaient d’environ 3 pieds viennois en un jour, et le glacier de l’Aar deOm,2l2, ou environ 8 pouces. A la suite de cette communication, M. Martins cite dans les hautes Alpes d’autres exemples cle lacs formés par des glaciers, lacs qui viennent quelquefois à se vider. Ainsi il en existe un formé par le glacier du Tacul , dans la vallée de Chamounix. Dans la vallée de Saas, le Maemargersée , autre lac de ce genre, est aussi barré par un glacier. Un semblable lac , que formait dans la vallée de Bagne le glacier du Getroz, dont les glaces, tombant d’en haut, viennent combler la vallée, a beaucoup occupé M. Yenetz. Il est arrivé à en em- pêcher la formation en dirigeant sur ce point, au moyen de petits canaux, des sources dont la température suffit pour fondre la glace. Ainsi , au moyen de petits canaux peu coû- teux pratiqués dans la glace , et qui s’agrandissent d’eux- 84 SÉANCE DU 18 novembre J 84 4 . mêmes par la fusion qu’opèrent les sources, les habitants peuvent éviter ce danger. M. Leblanc indiqué un exemple analogue, en Suisse, d’un lac, qui existait cinquante ans auparavant, et qui avait dis- paru complètement à l’époque des dernières guerres. L’on se plaignait très fort alors de ce que l’on eût marqué sur les cartes un lac qui n’existait pas. M. Virlet dit que M. Forbes indique pour marche d’un certain glacier deux pieds par jour. M. Raulin présente un Mémoire sur la constitution géologique du Sancerrois (partie septentrionale du département du Cher). Ce travail est accompagné d’une carte géognostique et de trois coupes. L’auteur en donne l’analyse suivante : Le Sancerrois est une petite région montueuse , qui comprend l’espace triangulaire situé entre Sancerre, Gien et Vierzon. Il s’é- lève de 200 mètres environ au-dessus des plaines delà Sologne et du Berry qui l’avoisinent , et atteint l’altitude de 434 mètres à la Motte d’Humbligny : aussi est-ce le pays le plus élevé de toute cette moitié occidentale de la France, qui comprend les trois grandes régions naturelles connues sous les noms de bassin de Paris , de presqu’île de Bretagne et de bassin de Bordeaux. Le Sancerrois est une portion de la ceinture crétacée du bassin de Paris. Il offre, comme terrain dominant, le grès vert et la craie inférieure ; au-dessous ressortent les terrains néocomie»; et juras- sique • au-dessus viennent la craie moyenne et les terrains ter- tiaires. Le terrain jurassique présente le coral-rag et Vooliîe supé- rieure, qui ont la même composition que dans les départements de l’Aube et de la Meuse; en effet, le coral-rag est formé de calcaires oolitiques el pisolitiques , blancs ou jaunâtres , et Foolite supé- rieure commence par des argiles grises remplies d’ Exogyra virgula et se termine par des calcaires compactes blanchâtres. Le terrain néocomien , qu’on n’avait pas encore cité sur la rive gauche de la Loire, se montre seulement autour de Sancerre ; il est formé par des calcaires jaunes ferrugineux , de quelques mètres d’épaisseur seulement, qui contiennent près de quarante espèces de fossiles , parmi lesquels les plus abondants sont les Spatangus retusus (Lk. ) , Nucleolites Olfersii (Ag.), Pholadomya neocomensis (Leym.), Car- dinal subhillaimm (Leym.), Perna Midleti (Desh.), Pecten striatocos- tatus (Goldf.), Ostrea Leymerii (Desh.), Exogyra subsinuata (Yai\ SEANCE DU I 8 NOVEMBRE 18 H. 85 [ Gouloni ] Leym.), Ex. subplicata (Rœm.); Terebratula suborbicula- ris (D’Arch.) , Ampullaria lœvigata (Desh.), Scrpula filiformis (Fitt.) . Le grès vert présente le même faciès que dans la Puisaye, entre l’Yonne et la Loire ; il commence par des sables jaunes avec lits degrés ferrugineux , souvent à gros grains de quarz blanc ; au- dessus viennent des sables blanchâtres ou le plus souvent verdâ- tres, donnantà Vierzon desgrès tendres, employés dans les construc- tions; les fossiles sont très rares dans tout cet étage. La craie infé- rieure commence par des marnes sableuses chloritées vertes, puis vient une craie dure, siliceuse, grisâtre, dL\ecSpatangus suborbicularis (Defr.), Trigonia spinosa (Park.) , Inoceramus gryphœoides{ Sow.), Peçten asper (Lk.), Pecten qidnquccostatus (Sow. ), Ammonites va - ricins (Sow.), A. Mantelli (Sow.). La craie moyenne est blanche et ne renferme que rarement quelques silex noirs. Les terrains tertiaires présentent trois assises distinctes : les sables à silex, les calcaires d’eau douce et les sables de la Sologne, hessables à silex , que l’on considère généralement comme le représentant des sa- bles et grès de Fontainebleau , sont des sables jaunes, légèrement argileux , sans fossiles , qui renferment de nombreux silex non roulés; sur plusieurs points , notamment à Sancerre, ils donnent des brèches employées autrefois à faire des meules. Les calcaires c Veau douce sont d’un blanc légèrement brunâtre et renferment des lymnées et des planorbes ; ils forment trois bassins , qui pa- raissent être des dépendances des calcaires de la Beauce : ce sont ceux de Châtillon-sur-Loire, deCosne et deMehun-sur-Yèvre. Les sables de la Sologne sont composés par des argiles grises, à nombreux grains de quarz, qui ont une analogie minéralogique complète avec les faluns marins de la Touraine : aussi est-on d’accord pour les considérer comme un prolongement lacustre de ces derniers. Les divers terrains qui composent le Sancerrois forment des nappes qui en occupent presque toute l’étendue, à l’exception des calcaires d’eau douce et dessables de la Sologne. Ils ont éprouvé un relèvement qui a porté les couches à plus de 150 mètres au- dessus du niveau normal : aussi est-ce dans cette région que les terrains crétacés et les terrains tertiaires du bassin de Paris attei- gnent leurs plus grandes altitudes. Ce relèvement s’est fait à peu près de t’E.-N.-E. à l’O. S.-O., parallèlement à labordure septen- trionale du plateau central de la France ; c’est aussi dans une direc- tion semblable que coule la Loire, d’Orléans à Saumur. La ligne anticlinale va de Sancerre à Mehun-sur-Yèvre, et la pente des cou- ches au IN. de cette ligne est moins forte qu’au S. Tous les terrains précédemment indiqués ont été relevés , à l’exception des sables de 86 SÉANCE DU 1.8 NOVEMBRE 1844. la. Sologne, qui n’entrent pas dans la composition du massif du San- cerrois, mais qui l’entourent en grande partie et forment à sa base une grande plaine unie. Le Sancerrois présente donc un nouvel exemple de relèvement analogue à ceux du pays de Bray et du Pas-Boulonnais , les deux seuls connus jusqu’à présent dans le bassin de Paris ; mais il en diffère essentiellement et par sa direc- tion, qui est presque perpendiculaire, et par son âge; car presque tous les dépôts tertiaires du bassin de Paris s’y trouvent relevés, tandis que la formation des deux autres est antérieure au dépôt du terrain éocène. Enfin le relèvement du Sancerrois paraît coïn- cider avec la ligne de démarcation la plus tranchée que l’on con- naisse dans les dépôts tertiaires du bassin de Paris, celle qui existe entre les calcaires de la Beauce et les faluns de la Touraine. M. d’Archiac dit qu’ayant étudié dans ce pays la ceinture crétacée du S.-O. du bassin de Paris, sur laqueile il prépare lui-mème un mémoire, il trouve très exactes les observations de M. Raulin, et qu’il est arrivé aux mêmes résultats théo- riques. Il adresse cependant à M. Raulin quelques questions relatives à certaines dispositions des couches sur lesquelles il lui reste quelque doute. M. Raulin répond qu’il a encore quelque incertitude à cet égard, et qu’il reverra les lieux avant de publier son mémoire. Le secrétaire donne lecture de la lettre suivante, adressée d’Auxonne à M. d’Archiac , le 4 septembre 1844 , par M. Gi- roux, géomètre à Auxonne (Côte-d'Or) : elle renferme des Observations sur diverses parties de la Cote-d'Or. Ayant fait des recherches dans le calcaire blanc dTs -sur-Tille, qui doit appartenir au calcaire portlandien, j’y ai trouvé une grande quantité de fossiles , parmi lesquels il y a le Conus miniums , décrit avec doute à la page 385 du Ve volume des Mé- moires de la Société géologique ; ce fossile, dont la spire est par- faitement conservée, ne laisse aucun doute sur son genre : on a donc parfaitement déterminé cette espèce, quoiqu’avec un échantillon imparfait. J’ajouterai, relativement à ce terrain, que les coquilles citées dans le Mémoire sur le département de l’Aisne sont bien moins nombreuses que celles que nous avons trouvées, conjointement avec M. Maréchal, capitaine au 34e, dans le cal- caire blanc d’Is-sur-Tille (Côte-d’Or). Voici celles qui m’ont paru devoir être principalement remarquées : une Scalaire, une Mé- SÉANCE DU 1 8 NOVEMBRE 18 U. 87 îanopside, uneTornatelle, la P atella Aubentonensis y la Phasicinella Leymerii , la Natica subumbiiica , ces premiers échantillons fort rares; puis un Ceritliium , plusieurs et une autre Patelle, des Turbo , des Troclius \ parmi les conchifères plusieurs espèces de jolis Peignes, des Térébratules , Huîtres, Arches ou Cucullées , Trigonies, Moules , Cardites, etc. ; enfin , beaucoup d’espèces de polypiers. Parmi les Peignes , j’ai reconnu que plusieurs espèces étaient absolument les mêmes que celles qui existent dans les marnes supérieures du Portlandien, des carrières de l’abbaye Dam- paris, où se trouve en abondance et bien conservée Y Isocardia ex- centrica. Si ce terrain peut offrir quelque intérêt à la Société géo- logique, je me ferai un plaisir de lui faire parvenir les doubles que je puis avoir, ainsi que des échantillons du terrain. Les terrains de nos environs sont tellement bouleversés que , dans un rayon de 12 à 16 kilomètres , on parcourt tous les ter- rains, depuis les schistes et les porphyres jusqu’aux argiles de Londres ; enfin , dans le fond de la vallée, se trouve une grande partie des terrains d’alluvion. Cette vallée est limitée , comme on sait, au levant parles montagnes du Jura (premiers éche- lons) et au couchant par les montagnes de Dijon. Partant des montagnes du Jura (territoire de Moissey), on trouve quelques traces de porphyre (dans la forêt de la Serre), des schistes , dans lesquels j’ai trouvé des grenats d’une très belle eau , mais fort petits ; une eurite verte compacte contenant des cubes de fer sulfuré se présente en masse imposante derrière Moissey; le grès rouge , les marnes irisées , s’y présentent aussi à découvert sur une assez grande étendue. A Gredisan , les grès bigarrés sont très abondants. Le calcaire magnésien et les arkoses forment des montagnes de plusieurs lieues de longueur. Dans tous ces terrains j’ai trouvé pour tous fossiles des tiges d’encrines, mais en très petite quantité. Viennent ensuite les terrains basiques; ils commencent par les grès inférieurs^ puis le lias bleu, un grès supérieur, formant une belle lumachelle, enfin les marnes supérieures; tous ces terrains sont riches en fossiles, à part le grès inférieur. L’oolite ferrugineuse ou calcaire noduleux et tous les terrains jurassiques inférieurs et supérieurs s’y rencontrent, mais souvent avec des hiatus tellement considérables, que, près Gredisan, le calcaire du foresl-marble se trouve en contact avec les schistes, et qu’à Raynaus, où les couches sont en certains endroits relevées perpendiculairement, le calcaire à entroques se trouve en contact avec le calcaire à Périnées. 88 SÉANCE i)U 18 NOVEMBRE 1841. Le lias bleu forme une arête de près de 12 kil. de longueur ; sa régularité semblerait indiquer un point de soulèvement posté- rieur à celui occasionné par les montagnes granitiques. A partir de Raynaus , les terrains s’abaissent et plongent dans le fond de la vallée , où ils ont été d’abord recouverts par une immense quantité de marnes , qui semblent appartenir aux cou- ches liasiques, puis par les terrains d’alluvion , dans lesquels il a été trouvé plusieurs débris à'Elephas primigçnius . J’en possède une molaire et les fragments d’une défense, qui avait 2m,60 de longueur; elle a été malheureusement brisée. Cette défense était très entière ; j’ai son extrémité , sa base , ainsi qu’une partie de sa longueur; la partie intérieure était tellement ramollie qu’au premier aspect on l’eût prise pour de l’axonge. Cette matière était sans aucune saveur, d’une blancheur parfaite, mais à l’airelle s’est durcie, et j’en ai un morceau qui me reste du grand nombre que j’avais recueilli , dans lequel on remarque les stries de l’i- voire. On y a rencontré en outre une tête de Sus , des coquilles roulées, une grande quantité de coquilles fluviatiles empâtées dans des marnes noires, qui sont à environ 3 mètres au-dessous du sol naturel (ces coquilles correspondraient à celles du Lehm du Rhin ) et enfin une prodigieuse quantité de lignites. Au couchant d’Auxonne est un petit coteau formé par des ar- giles qui correspondraientà celles dites de Londres, et j’y ai trouvé la Paludina lenta très belle, d’autres très petites, des Plcmorbis , Pupay etc. Enfin , près Poulailler , la petite montagne appelée Mont-Ar- doux, ou Arduens, appartient à la formation du grès vert. On y remarque les marnes vertes et rougeâtres , lé grès vert en roche, le calcaire et terrain néocomien ; cette localité est assez riche en fossiles: les principaux sont des Exogyres , des Lutraires, des Lucines, les Serpula Rotala , S. Jîliformis , S. Lituola , Lucinct Ven- doperana , L. globiformis , Venus Brongniartinu , Ccirdium subhil- lanutn , Spatangus retusus, etc. Ce terrain est très développé dans le département de la Haute-Saône, près Gray. Voilà un aperçu général des terrains qui se rencontrent dans un rayon de douze kilomètres à partir d’Auxonne. Leur grande va- riété serait, je pense , digne des observations des savants géolo- gues qui pourraient traverser le pays, et ce serait pour moi, qui connais assez bien le terrain , un grand plaisir de leur servir de guide si l’occasion se présente. Une découverte, fort importante sous le rapport de L’histoire du pays, vient d’être faite en creusant un puisard pour le para- SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 89 tonnerre du cloclier de notre église, dont la fondation remonte au xmc siècle. Sur le gros gravier , semblable à celui qui tapisse le fond de la Saône , il vient d’être trouvé un fer de harpon assez bien conservé ; ce gravier était recouvert de 5 mètres de sable rouge d’alluvion, déposé lentement par les eaux et non remué (ce même sable forme une grande partie du terrain d’alluvion dans toute la vallée), puis d’environ deux mètres de terre végé- tale. Cette circonstance fait remonter la navigation sur la Saône à une époque fort reculée : d’abord 500 ans depuis la fondation du monument; ensuite le temps nécessaire pour l’affermissement du terrain, et le détournement du lit de la rivière qui passait en cet endroit lorsque l’objet a été perdu ; enfin , le temps de la forma- tion de 5 mètres d’alluvion : ces trois époques forment nécessai- rement plusieurs décades de siècles. Dans le Ve volume, planche 14, Y Hinnites Leymerii y est dessiné en partie seulement; la description de ce qui manque est donnée par prévision. Possédant cette coquille très belle et bien entière , j’ai suivi sa description avec soin; le talon est exactement ce qu’il a été prévu. Cet échantillon vient des terrains néocomiens de Liencourt (Haute-Saône). Le secrétaire donne également lecture de la note suivante : Sur la position que le terrain aptien (argile à plicatules) du département de F Yonne occupe dans V étage crétacé , par M. G. Cotteau. Dans la séance du 20 mai dernier , à la suite de l’intéressante communication de M. Fitton sur le terrain néocomien de Vile de Wight, j’ai demandé au géologue anglais si l’ A mm onites Des h ayesi qui, dans l’Yonne, caractérise le terrain aptien, couch^ipférieure au gault, se trou vait en Angleterre mêlée aux fossiles neocomiens ; à propos de cette demande, une erreur s’est glissée dans le pro- cès-verbal de la séance, car il résulte de sa rédaction que dans l’Yonne Y Ammonites Deshayesi se trouve dans le gault , ce que je suis loin d’admettre. L’ Ammonites Deshayesi caractérise une couche qui, par ses fossiles, diffère essentiellement du terrain néocomien sur lequel elle repose et plus encore du gault , qui lui est supé- rieur. J’attache d’autant plus d’importance à cette petite rectifica- tion qu’un désaccord existe entre quelques géologues sur la place que cette couche doit occuper dans l’étage crétacé; M. Leymerie l’a rattachée au gault -} et M. d’Orbigny, qui d’abord l’avait placée 90 SEA.NCE DU 18 NOVEMBRE 1844. à la partie supérieure du terrain néocomien , l’en a bientôt re- tranchée et en a fait son terrain aptien. Cette couche, qui, à cause de son peu d’épaisseur, est assez dif- ficile à observer , est traversée , à quelques kilomètres d’Auxerre, par la rivière de l’Yonne , et là elle constitue un terrain distinct, sans aucun doute , et du gault et du terrain néocomien. Parmi plus de GO espèces de fossiles que j’y ai recueillies, une seule passe dans le gault, le Solarium dentatum, d’Orb. [Delphinula dentata , Desh.), et cinq dans le terrain néocomien Nucula obtusa (Fitton), Nucula scapha (d’Orb.) , Nucula simplex (Desh. ), Area Marullcnsis (d’Orb.) et une espèce de Corbula , qui n’a pas encore été décrite \ restent donc plus de 50 espèces spéciales à cette couche. Les Cé- phalopodes y abondent , et tous sont caractéristiques : outre le Conoteathis Dupiniana (d’Orb.), le Nautilus Lallierianus (d’Orb.), le Toxoccras Royerianus (d’Orb.), l’ Ammonites Deshayesi (Leym.), Y A, raresulcatus (Leym.), VA. Cornuelianus (d’Orb.), VA. nisus (d’Orb.), VA. Royerianus (d’Orb.), j’y ai trouvé plusieurs espèces inédites. Les Gastéropodes, avec des espèces appartenant aux genres Turritella , Natica, Solarium, P/eurotomaria , Cerithium , Per- metus , etc. , m’ont offert une espèce de Dentale , différente du Dentalium decussatum du gault et la seconde qui ait été rencontrée dans le terrain crétacé. Les Acéphales y sont aussi représentés par des espèces nombreuses. Ce n’est pas , du reste , seulement dans l’Yonne que le terrain aptien se distingue des couches auxquelles on a voulu le réunir. J’ai eu occasion , il y a quelques mois , de l’observer dans la Pro- vence, et il suffit de descendre le ravin qui de La Bedoule con- duit à Cassis pour se convaincre combien dans cette contrée ce terrain est nettement séparé des couches supérieures. Il offre, du reste , à une aussi grande distance , une ressemblance frappante avec celujjde l’Yonne ; les marnes ont la même couleur bleuâtre, et l’oxydeoe fer a pénétré la plupart des fossiles. Je pense donc que cette couche , qui offre dans des contrées si éloignées les unes des autres une ressemblance aussi grande et qui contient dans son sein une faune nombreuse et caractéristique , doit être séparée du terrain néocomien et du gault , et constituer dans le terrain crétacé un étage distinct. M.d’Orbigny lui a donné le nom géographique de terrain Aptien, et je m’empresse d’adop- ter cette dénomination, car nulle part peut-être cette couche n’acquiert autant de puissance qu’à Gargas , près Apt. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. 91 Enfin, le secrétaire termine par la lecture de la note sui- vante de M. J. -J. d’ O malins d’Halloy. Note sur le grès de Luxembourg . Le grès de Luxembourg est un dépôt sur les relations géognos- tiques duquel les opinions des géologues ont beaucoup varié. En 1822, M. de Humboldt (1) l’a rangé avec le grès de Kœnig- stein , qui figurait dans la géognosie allemande sous le nom in- dustriel de quadersanstein , et il a placé ce groupe entre le mu- sclielkalk et le calcaire du Jura. Cette association a présenté cela de particulier que, depuis lors, le type du groupe a été remonté dans la série au niveau de ia craie , tandis que l’on n’a jamais varié sur la position générale du grès de Luxembourg; mais il n’en a pas été de même sur ses relations avec les systèmes voisins, ainsi qu’on va le voir. En 1825, MM. d'OEynhausen , de Dechen et de la Roche (2) ont considéré ce dépôt comme le dernier terme de la formation dukeuper; mais, en 1828, M. Steininger (3) a fait voir que les fossiles du grès de Luxembourg étant analogues à ceux du lias, c’était dans ce groupe , et non dans le terrain keuprique, que l’on devait le ranger ; toutefois, des circonstances, que j’in- diquerai tout-à -l’heure , l’ont porté à le considérer comme infé- rieur au lias proprement dit, ou calcaire à Gryphœa arcuala . En 1829, Puillon Boblaye (4) a reconnu que le calcaire sableux d’Orval est supérieur au lias proprement dit; mais, n’ayant pas poussé ses observations jusqu’à Luxembourg , et ayant probable- ment perdu de vue que M. Steininger étudiait son grès de Luxem- bourg jusqu’au-delà d’Orval, il a cru pouvoir mettre ses obser- vations en harmonie avec l’opinion de M. Steininger, en suppo- sant que le calcaire sableux d’Orval éfait un dépôt différent du grès de Luxembourg , et il a vu le représentant de ce dernier dans quelques petites masses sableuses qui forment, à Florenville, la partie inférieure des marnes basiques bleues ou calcaire à Gryphœa arc ua ta. Cette manière de voir, tout en établissant la véritable (i } Essai géognostique sur le gisement des roches dans les deux hémi- sphères. (,42) Geognostische Umrisse der Bheinlœnder . (3J Essai d’une description géognostique du grand-duché de Luxembourg, l. VII des mémoires couronnés par l’Académie de JBruxeljes. (l\) Mémoire sur la formation jurassique du nord de la France . I. X V I [ des Annales des sciences naturelles. 92 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844, position d’une partie du massif du grès de Luxembourg , était plus erronée que celles qui l’ont précédée , puisqu’elle séparait en deux un même dépôt et créait un système imaginaire dans la sé- rie des terrains. Cette erreur, comme beaucoup d’autres , a été accueillie avec empressement; je l’ai notamment adoptée dans mes Éléments de géologie , et elle se trouve reproduite dans un des plus beaux monuments élevés à la science dans ces derniers temps , c’est à-dire dans la magnifique Carte géologique de la France , par MM. Dufrénoy et Élie de Beaumont. En 1841, M. Dumont (1) a rétabli l’identité du grès de Luxembourg avec le calcaire sableux d’Orval, et ii a annoncé que la position assignée à ce dernier est réellement celle de tout le système. Cependant, comme on a élevé des doutes sur cette assertion, et que M. Bennigsen Fœrder a en- core reproduit postérieurement (2) l’idée des deux dépôts sa- bleux , j’ai désiré former mon opinion sur les lieux , et j’ai non seulement reconnu que les observations de M. Dumont étaient parfaitement exactes, mais j'ai compris comment d’aussi bons ob- servateurs que ceux que je viens de citer avaient pu se former des opinions différentes. On sait que les terrains seconda res qui s’étendent au nord de Montmédy et de Tbionville forment une pointe du grand massif de la Lorraine qui s’avance entre les terrains primaires de l’Ar- denne et du Hundsrück , pointe qui probablement représente un golfe ou un détroit de la nier qui couvrait tout le bassin de Pa- ris lors de la formation de ces terrains. On sait également que les dépôts qui composent de semblables appendices sont souvent moins puissants que ceux qui se trouvent dans des espaces plus étendus. On sait encore qu’il arrive souvent que les dépôts se développent en quelque manière aux dépens les uns des autres, c’est-à-dire que quand certains dépôts sont très puissants dans un lieu , d’autres, au contraire , y sont très minces. Or, la réunion de ces circonstances, c’est-à-dire le resserrement du massif et le déve- loppement du système sableux, semble avoir réduit, dans les en- virons de Luxembourg, le système du lias inférieur, ou calcaire à Gryphœa arcuata , ou marne de Jamoigne , selon la nomenclature de M. Dumont , à une assise fort mince de marnes grisés qui ne renferment presque pas de fossiles. Cette assise , étant placée im- médiatement sur le terrain keuprique , qui est principalement (1) Mémoire sur les terrains triasique et jurassique de la province de Luxem- bourg, I. XV des Mémoires de l’ Académie de Br uxelles. (2) Karstcn ' Archiv fur minéralogie, geognosie, etc., 184 si. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1814. 93 composé de manies ordinairement bigarrées de rouge fet de gris , mais où ces couleurs s’isolent quelquefois , on conçoit que les ob- servateurs, arrivés dans cette contrée par le nord ou l’est, auront pris la petite assise grise pour un membre du terrain keuprique plutôt cjue comme représentant le calcaire à Grÿphœa . arcucita , système si céjj^bre parmi les géologues et si bien prononcé un peu plus au sud. Une autre circonstance appuyait encore cette manière de voir : c’est qu’au-dessus du grès se trouve , dans quelques loca- lités , notamment à Strassen, près de Luxembourg , une assise de calcaire argileux et de marnes bleuâtres qui contiennent quelque- fois une grande quantité de Grfphœa arcuatja , et que, pour cette raison, on a considéré comme le véritable représentant du lias proprement dit. En effet, si l’on était réduit aux seules observa- tions faites dans les environs de Luxembourg, on n’aurait peut- être pas la possibilité de contredire ces conclusions (1); mais les observateurs , arrivés au massif du grès de Luxembourg par le sud et l’ouest, ont présenté la chose sous un autre point de vue, et l’on ne peut contester leurs conclusions ; car, outre les garantie qu’of- frent des géologues tels cjueBoblaye, MM. Sauvage, Buvignier (2) et Dumont, il est à remarquer que les trois premiers avaient eu l’oc- casion de se familiariser avec les caractères du lias inférieur dans l’étude de localités où il est très bien prononcé , et qu’ils étaient si peu partis d’une idée préconçue , que l’on a vu ci-dessus comment Boblaye avait été en quelque manière forcé de torturer ses ob- servations pour les faire cadrer avec l’opinion de M. Steininger. Quant à MM. Sauvage et Buvignier, s’ils avaient eu à s’occuper de ce qui existe au-delà des limites du département qui fait le su- jet de leur travail , il leur aurait suffi de rapprocher leur carte de celle de M. Steininger pour proclamer l’identité du calcaire sa- bleux de Mézières avec le grès de Luxembourg , et annoncer que M. Steininger avait méconnu la véritable position de ce dernier. (1) Il y a cependant un petit caractère paléontologique que l’on pour- rait invoquer, pour dire que le calcaire de Strassen n’est pas le lias infé- rieur ; c’est la présence d’une gryphée plus large que la G. Arcuata et qui, dans nos contrées, paraît ne pas se trouver dans Je lias inférieur. Mais je mets peu d'importance à cette observation, d’autant plus que l’on n’est pas d’accord sur la détermination de cette coquille, que Boblaye, MM. Sauvage et Buvignier rapportent à la G. Cymbium de Lamarck, tau- dis que M. Dumont y voit la G. Obliquata deSowerby. (2) Statistique minéralogique et géologique du département des Ardennes , par MM. Sauvage et Buvignier. Mézières, 1842. 9 4 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1844. Enfui y s’il était permis de s’appuyer sur des rapprochements ti- rés d’une contrée assez éloignée , mais qui est classique pour l’é- tude des terrains secondaires , je ferais remarquer que le classe- ment du grès de Luxembourg dans le lias moyen est beaucoup plus en harmonie avec l’état des choses en Angleterre. On trouve, en effet, les plus grands rapports entre le lias supérieur ou alum- shale de l’Yorksliire et les marnes de Flize , d’Amblimont (1) , de Grand-Court. On trouve également que le calcaire ferrugineux de Margut (2),‘ les schistes et macigno d’Aubange et le grès de Luxem- bourg rappellent le lias moyen , c’est-à-dire Yironstone (pierre do fer) et le scindstone (grès) de l’Yorkshire ou le marlstone (grès mar- neux) duNorthamptonsbire , et qu’enfm la marne de Jamoigne et autres marnes grises , inférieure au grès de Luxembourg , pré- sentent le;s principaux caractères du lias inférieur {lower lias shalc), de l’Yorksbire ou du lias proprement dit du midi de l’Angleterre. A la suite de cette lecture , M. Raulin dit qu’ayant visité les environs de Luxembourg, en 4836, il a été très disposé »à assimiler les grès de Luxembourg aux sables et grès de Mé- zières etd’Orval, mais qu’il n’a osé publieralors son opinion (1) Suivant la marche adoptée par Boblaye et par M. Dumont , j’avais indiqué, dans mes Éléments de géologie et dans le Coup d'œil sur la géolo- gie de la Belgique, la marne d’Amblimont ou de Grand-Court comme appartenant à l’étage bathonièn ou oolitique ; mais, depuis lors, a paru l’ouvrage cité ci-dessus, de MM. Sauvage et Buvignier, qui rangent ce dépôt dans l’étage liasique , et je considère cette manière de voir comme plus conforme à la nature des choses et aux classements adoptés en An- gleterre. (2) L’ouvrage de MM. Sauvage et Buvignier, ainsi qu’un examen plus complet du mémoire de M. Dumont, dont j’avais seulement vu le ma- nuscrit lors de l’impression du Coup d’œil sur la géologie de la Belgique , m’ont fait reconnaître que j’avais eu tort de soupçonner qu'il y avait identité entre l’oolite ferrugineuse de Margut, décrite par Boblaye, et celle de Mont Saint-Martin, prise par M. Dumont comme type d’une de ses divisions. Ce sont deux dépôts différents séparés par la marne d’Am- blimont, et qui doivent être respectivement placés dans les étages liasique et bathonièn, ainsi que l’a fait M. Dumont. Le plus élevé de ces dépôts avait échappé à Boblaye, soit qu’il l’ait confondu avec l’autre, soit qu’il ne L’ait pas rencontré dans le territoire qu’il a exploré, ce qui est d’au- tant plus probable que les dépôts ferrugineux de celte contrée, comme ceux de beaucoup d’autres pays, sont plutôt des masses subordonnées que de véritables systèmes de terrai use SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. 95 parce qu’elle était en désaccord avec celle de tous les géo- logues. * Séance du 2 décembre 1844. PRÉSIDENCE DE M. d’aRCHIAC. Le procès verbal de la dernière séance est lu par le secré- taire et adopté. Le président proclame membres de la Société : MM. Koechlin Schlumberger (Joseph), propriétaire, à Mul- house (Haut-Rhin), présenté par MM. Viquesnel et de Pinteville. Le général comte de La Roche-Pouchin, quai d’Orsay, 3, à Paris, présenté par MM. Leblanc et Raulin. Le président propose ensuite l’admission de deux nou- veaux membres. DONS FAITS . A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. Jéhan (L.-F.) , Nouveau traité des sciences géologiques , 2e édition, in-12, 396 pag. et 1 pi. Paris et Lyon, 1844. De la part de M. le vicomte Héricart de Thury, Lettre à M. le comte Rambuteau sur les chances de succès d'un puits artésien modèle à forer , à Champ grenon , près Mâcon ( Saône - et-Loire ); (Extrait des Annales de l’Agriculture française . Décembre, 1844)» etc., in-8°, 15 pag. et 1 pi, Paris , 1844. De la part de M. Buckland (W.), Address , etc. (Adresse au maire et aux membres du comité du puits artésien de Southampton, 27 juillet 1844), in-8°, 14 pag, Southamp- ton, 1844. De la part de M. Catullo (T.-A.), Dei massi erratici , etc. , 96 SÉANCE DIT .2 DÉCEMBRE 1814. (Des blocs erratiques qui se voient sur les montagnes et dans les vallées adjacentes de l’Etat Vénitien); in-8°, 11 p. 1844. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences; XIX, n°s 21, 22. L’Institut , nos 569 — 570, 20 et 28 novembre 18 M. L’Écho du Monde savant , IIe année, nos 38 à âl, 2e se- mestre 18M. Bulletin de V Académie des sciences et belles-lettres de Bruxelles , t. XI, nos h à 8, avril — août 1844. Mémoires couronnés et Mémoires des savants étrangers pu- bliés par l’Académie royale de Bruxelles, in-4°, t.XVI, 1843, 369 p.et 18 pl., plus 38 pag. supplém.; Bruxelles, 1844. Recueil des actes de la séance publique de V Académie im- périale des sciences de Saint-Pétersbourg tenue le 29 décembre 1843, in-4°, 72 pag. Saint-Pétersbourg, 1844. Novorumactorum , e te. (Premier supplément du XI0 vol. des nouveaux actes de l’Académie des curieux de la nature) ; i vol. in 4°, 512 p. et 13 pl. , Breslau et Bonn, 1843. The Mining Journal , n° 483. The Athenœum , nos 891, 892. De la part de M. Robert (Eugène), une planche in-folio représentant les fossiles de la rade de Bell-Sound ( Spitz- berg). M. Constant Prévost offre à la Société un plan en relief de l’île Julia. M. Viquesnel dépose sur le bureau la statistique admi- nistrative de la Société depuis son origine. Le président fait observer que l’abrégé qui en a été imprimé et distribué aux membres de la Société en 3 feuilles 1/2 d’im- pression ne peut faire apprécier suffisamment l’importance de ce travail , fort utile à connaître pour la direction des af- faires et l’administration de la Société. Il annonce ensuite que M. Rouault se retire de sa candida- ture aux fonctions d’agent. SÉANCE DU 2 DECEMBRE 1844. 97 Le secrétaire donne lecture des articles du règlement spé- cial aux fonctions de l’agent qui détermine le mode de sa no- mination. Il est procédé au scrutin. Le nombre des membres présents et votants est de 61. M. Laudy obtient 38 voix, M. Gant 13. En conséquence, M. Laudy (François-Victor), docteur en médecine, ayant obtenu la majorité absolue des suffrages des membres présents, est proclamé Agent de la Société géolo- gique de France . M. A. Pomel lit le travail suivant : Note sur les basaltes de Gergovia ( Auvergne ) et sur l'âge des calcaires qui paraissent intercalés dans ces roches 'volcaniques. Il n’est peut-être pas de géologue qui, ayant visité l’Auvergne, n’ait étudié la célèbre montagne où les traditions placent l’antique cité gauloise, vainement attaquée par César; elle était déjà célè- bre lorsque les membres de la société présents à la réunion ex- traordinaire de Clermont-Ferrand en firent le but d’une de leurs excursions géologiques. On sait donc généralement que ses pentes abruptes, sillonnées par de profonds ravins, laissent voir de tous côtés, à la base, des couches sédimentaires calcaréo-marneuses, al- ternant un grand nombre de fois entre elles et colorées très di- versement. Ces roches passent, du côté de Clermont, à des calcaires marneux, se délitant en boules et très magnésiens, qui constituent les collines basses presque sans fossiles des environs de cette ville. Sur tout le flanc méridional de Gergovia, ce système lacustre pa- raît recouvert en stratification généralement concordante par une épaisse nappe de basalte généralement prismatique qui se lie très intimement à des conglomérats basaltiques formés aux dépens des roches sédimentaires diversement altérées , mélangées ou injec- tées de basalte. Au-dessus, on retiouve des calcaires marneux qui ont la plus grande ressemblance avec ceux de la base, sauf la plus grande abondance de matière argileuse, qui constitue à elle seule plusieurs couches épaisses. L’horizontalité souvent parfaite de ces couches, concordant avec le niveau supérieur de l’affleurement ba- saltique, donne à la première inspection l’idée d’une contempora- néité certaine entre les roches neptuniennes et plutoniennes. En Soc. Géoi. Tome II, 2* série. n 98 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. continuant de s’élever vers le sommet de la montagne, on recon- naît qu’il est formé par une nappe basaltique qui a coulé sur les derniers sédiments lacustres en les chauffant un peu (argiles rou- gies). M. Rozet pense qu’elle résulte de l’éruption de deux bou- ches situées aux extrémités E. et O. du plateau. On a expliqué de trois manières différentes la présence des ro- ches basaltiques au milieu des calcaires. MM. Croizet, Jobert, etc., ont pensé qu’il y avait eu, pendant la formation des sédiments ter- tiaires de la Limagne, des éruptions basaltiques ; ils ont même des- siné, dans leurs coupes des Recherches sur les ossements fossiles, etc., une inflexion des strates calcaires , attribuée par eux à îa pression de la matière basaltique, lorsqu’elle coulait sur des couches non encore solidifiées. D’autres géologues n’ayant trouvé dans les ter- rains sédim entai res lacustres de la Limagne aucun débris roulé basaltique, ont rejeté la contemporanéité du basalte et des calcai- res; mais la roche volcanique de Gergovia leur ayant paru possé- der tous les caractères d’une coulée , ils ont rangé dans le système des travertins les sédiments supérieurs à cette roche. Nous devons dire que cette opinion était appuyée par la présence d’une source minérale, déposant actuellement du travertin dans le voisinage de ces dépôts anciens, et sur l’existence de fragments basaltiques dans quelques parties des calcaires marneux supérieurs les plus voisins des roches volcaniques. Enfin, le plus grand nombre des obser- vateurs, MM. Dufrénoy, Rozet, etc., ont considéré le basalte infé- rieur comme l’affleurement d‘un énorme dyke sorti entre deux strates tertiaires , à l’époque où ont eu lieu la plupart des érup- tions basaltiques de l’Auvergne. Cette dernière manière devoir est, selon nous, la seule ration- nelle, car elle repose sur des preuves nombreuses et irrécusables : 1° l’altération égale des calcaires marneux qui sont en contact avec le basalte , soit au-dessus , soit au-dessous de son affleure- ment; 2° le filon basaltique (basalte et tuf), qui, partant de la grande masse inférieure, traverse les calcaires, qui lui paraissent superposés, en les altérant et les injectant dans son voisinage, et va se terminer au sommet, vers la nappe supérieure ; 3° la relation intime du basalte et des conglomérats qui l’accompagnent toujours (car ceux-ci sont certainement le résultat de l’injection et de la trituration prolongée des sédiments inférieurs par la roche volca- nique qui les traversait) ; 4* la silice qui a pénétré dans les préten- dus travertins sous forme de filons de quarz pyromaque, et qui a rendu siliceuse la roche calcaréo-marneuse qu’elle a pénétrée , phénomène très fréquent en Auvergne, et ne se montrant que là SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1814. 99 où ies sédiments lacustres sont traverses par des roches basalti- ques, etc. ; tout, enfin, concourt à établir que l’horizontalité du basalte inférieur n’est qu’une apparence trompeuse de stratifica- tion, comme on en trouve des exemples aussi frappants dans d’au- tres collines des environs de Clermont ( Cbanturgues, côtes de Gandaillat,etc. ) et surtout à laTour-de-Boulade, où un dyke, tra- versant presque perpendiculairement les argiles stratifiées, devient horizontal sur une assez grande longueur et se redresse de nou- veau pour se lier à un centre d’étoilement marqué par la ruine qui donne son nom à la montagne. Le but de cette note est d’appuyer cette dernière explication des phénomènes d’intercalation basaltique à Gergovia de quelques considérations paléontologiques très intéressantes pour la géolo- gie de l’Auvergne. Nous savons que les auteurs des deux premières théories sur la constitution géologique de cette montagne ont modifié leurs idées à cet égard et que le basalte du flanc méridio- nal est considéré par eux comme un dyke; mais plusieurs n’en continuent pas moins de regarder les calcaires argileux qui le re- couvrent comme bien plus récents que le grand système lacustre de la Limagne et d’en faire des travertins de l’âge des basaltes. C’est cette dernière opinion que nous allons attaquer ici et qu’il nous sera facile de détruire par l’exposition des observations sui- vantes : 1° Les calcaires marneux, qui constituent la base de la montagne, ont offert aux paléontologistes des ossements de reptiles (chélo- niens et sauriens), et, parmi de nombreux mammifères, un rongeur de genre éteint, désigné par M. Croizet sous le nom de Gergo- viamys (manusc.), qui existe aussi à Boudes dans les grès su- perposés aux argiles rouges et vertes, à la Tour-de-Boulade dans les couches tourbeuses, etc. Ces mêmes espèces ont été retrouvées par nous dans les calcaires les plus supérieurs. Elles y sont associées à ces mêmes batraciens, à ces cyprins que j’ai signalés au Puy-du- Tellier dans des couches incontestablement tertiaires et identiques à toutes celles du grand système lacustre arvernien. Ce fait est d’autant plus positif que les terrains volcaniques les plus anciens de la même contrée n’ont pas encore offert un seul débris de gen- res semblables, malgré les recherches incessantes dont ils sont l’objet. 2° M. Bouillet, quia spécialement étudié les mollusques vivants et fossiles de l’Auvergne , a reconnu dans des argiles marneuses délitées du flanc N. de la même montagne, considérées par lui comme le fond d’un ancien lac ouvert par la sortie d’un filon ba~ 100 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. saltique , de nombreuses espèces décrites dans un mémoire sur la conchyliologie de l’Auvergne. Ce sont, d’après lui, les Planorbis Cornu , complanatus , disjunctus , nitidus , marginalité , Valvcita pla- norbis, Ancylus fluviatilis , Melania inquinata , Mclanopsis buccinoi- dea , ventricosa , etc. M. Dufrénoy avait observé des planor- bes et des lyinnées dans ces prétendus travertins ; mais ces coquilles, n’ayant pas été déterminées rigoureusement, ne pou- vaient donner aucun renseignement positif , car leurs congénères sont très abondantes dans les vrais travertins. L’identité des cou- ches coquillières du flanc N. et de celles intercalées entre les deux basaltes, sur le revers opposé, ne peut être douteuse, puisque la dernière espèce avait été observée par M. Bouillet dans le dernier gisement, et que nous y avons retrouvé les Melania et les Melano- psis.Çies deux dernières espèces sont certainement les plus remar- quables de toutes celles observées en Auvergne, puisque, caractéri- sant pour M. Desbayes l’étage inférieur tertiaire du bassin parisien, elles doivent, à plus forte raison, faire considérer les terrains où on les trouve en Auvergne comme liés synchroniquement au grand système lacustre qui les supporte et qu’on s’accorde géné- ralement à ranger dans l’étage moyen des formations tertiaires. 3° L’identité d’âge de tous les sédiments lacustres de Gergovia est surtout bien établie par la découverte que nous y avons faite d’une nouvelle espèce d’érable, déterminée non seulement par des feuilles, mais encore, et avec plus de certitude, par des fruits nombreux et très bien conservés. Les uns ont été recueillis au ra- vin de Bonneval (flanc E.), dans un calcaire marneux, jaunâtre, rubané, distant d’un mètre de la partie inférieure du basalte en dyke ; les autres ont été trouvés dans des argiles marneuses noirâ- tres situées à cinq ou six mètres au-dessous de la nappe basaltique supérieure, à peu de distance du hameau de Merdogne. Ce dernier gîte, que j’ai exploré avec le plus grand soin , m’a offert, mélangées avec les mélanie, mélanopside et unio, de nom- breuses empreintes végétales qui nous donnent des notions assez étendues sur la flore de l’Auvergne à l’époque de la formation de ses sédiments lacustres. Nous pouvons indiquer comme bien dé- terminés les types suivants: l’érable, qui a ses feuilles divisées en cinq lobes profonds , crénelés, larges à leur base et très acuminés à leur sommet ; le Phyllites cinnamomeifolia , d’autres analogues aux feuilles des saules , des platanes et des Potnmogeton , quelques autres plus incomplètes, qui paraissent avoir quelque analogie avec celles de certaines protéacées; un Comptonia , genre déjà ob- servé dans les terrains tertiaires seulement, où il est représenté SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. lOi par deux espèces, l’une (C. acutiloba, Ad. Brong.) des lignites de Comothau (Bohême), très voisine de celle d’Auvergne, l’autre (G. dryandrœfolia , Ad. Brong.) des calcaires lacus- tres d’Armissan , près Narbonne ; des gousses et des feuilles pinnées d’une léguinineuse qui , sans lui être cependant iden- tique , ressemble beaucoup au Robinia pseudo-acacia ; un fruit très abondant, mais conser vé seulement à l’état d’empreinte, que M. Ad. Brongniart croit avoir appartenu à un genre particulier de la famille des malvacées (il est pédonculé, ovoïde , acuminé au sommet, un peu aplati, peut-être seulement par la compres- sion qu’il a éprouvée, fortement et assez régulièrement strié dans la longueur, conservant le plus souvent à sa base les traces bien marquées d’un calice monosépale à huit divisions profondes qui déterminent des lobes grêles, filiformes, dont quatre , longs de 0m,018, arrivent à peine au sommet du fruit et alternent avec les quatre autres, beaucoup plus allongés, un peu moins grêles, mais encore linéaires. Ceux-ci, longs de 0m,028 , sont un peu déjetés en dehors et présentent à leur sommet, sur une longueur de0m008, un double rang de petites pointes serrées , très fines , longues de 1 à 2millim. , ressemblant un peu aux barbes d’une plume, mais rétrogrades, ce qui a dû faciliter la dispersion du fruit en l’atta- chant aux corps mobiles environnants. Un seul échantillon nous l’a montré divisé en plusieurs valves , dont le nombre n’a pu être déterminé. Est-ce un accident de compression?); plusieurs sa- mares d’une conifère du genre pin , trouvées aussi à Coran dans les marnes à dusodyle; le Carpolithes thalicti oïdes; des fleurs de graminées; des tiges de chctra ; une fougère trop incomplète pour être déterminée génériquement 5 enfin, plusieurs autres débris qui ont besoin d’être étudiés ou confirmés par des pièces plus complè- tes (1). Espérons que M. Ad. Brongniart, à qui nous avons remis tous les végétaux intéressants de cette localité , les fera connaître plus en détail, dans leurs rapports spécifiques avec les espèces actuelles et celles des divers gisements de la même époque. (i) Un collecteur d’objets d’histoire naturelle, M. Degeorges, a, je crois, le premier, découvert ce gisement et recueilli des empreintes de plantes. M. Croizct, en ayant fait l’acquisition et ayant ensuite visité la localité, annonça cette découverte dans le t. VII, p. io4 et 216 du Bul. de la soc. géol., en établissant entre ces végétaux et ceux de la flore actuelle de nombreux rapprochements qui nous paraissent dou- teux. 102 SÉANCE DU 2 DECEMBRE 1844. Cette fiot e, tertiaire par plusieurs de ses espèces qu’on aobser-?. vées dans divers gisements des terrains de cette époque, était très différente de celle des terrains volcaniques , dont les espèces nous sont connues en assez grand nombre. Cette étude nous mènera donc encore aux mêmes résultats que les précédentes, c’est-à-dire que, faisant rej ter de cette époque volcanique tous les calcaires de Gergovia, elle nous obligera à les considérer comme formant une série continue, une même formation, antérieure à l’éruption des basaltes. Les terrains meubles trachytiques et basaltiques de la montagne de Perrier, si célèbres par les mammifères fossiles qu’ils contien- nent, mastodonte, tapir, rhinocéros, fells meganthereon, etc., ont fourni à nos recherches plusieurs espèces remarquables qui indi- quentlevoisinagedesforêts ;cesont: l°un Fraxinus bien caractérisé par son fruit, beaucouppluscoui tque l’aile membraneuse quile ter- mine, ce qui lui donne une forme plus ovalaire; 2° un £/////«,? différant des espèces vivantes par un fruit beaucoup plus grand et encore plus allongé que celui de Y ülmas cffusa\ 3° un Carpinus dont les bractées ont une forme assez différente de celles des espèces vivan- tes et fossiles, par leur lobe moyen plus allongé, plus étroit sur- tout à la partie supérieuie , par les lobes latéraux plus courts, plus aigus, ce qui est le caractère opposé du C. macroptera d’Ar- missan (Ad. Brong. ); des saules, un chêne et un carex ne nous sont qu’imparfaitement connus par leurs organes les moins essen- tiels. Nous proposerons pour les premières espèces les noms spé- cifiques suivants: Fraxinus Lècoquii , Ulmus Lcimothii , Carpinus brachyptera. (Voyez les phrases caractéristiques à la fin de la note.) Dans la vallée de Saint-Vincent, au Cantal , il existe aussi des empreintes nombreuses de feuilles qu’on peut également rappro- cher avec assez de certitude des espèces arborescentes actuelles de la contrée ; mais, parmi elles, est une feuille qui a tous les carac- tères de celles des érables. Elle diffère notablement de ses congénè- res de Gergovia par ses lobes , au nombre de sept, et ses dentelu- res, peu nombreuses et profondes. La roche dans laquelle on les trouve est un oxyde de fer plus ou moins rouge , très compacte, sur lequel s’est étendue une nappe basaltique. Dans la vallée de la Monne, près Saint-Sandoux, il existe aussi, sous une coulée basaltique, un dépôt de débris végétaux du même âge, dans lequel M. Burin, pharmacien, a trouvé de nombreuses feuilles de chêne, qui paraissent semblables à celles de Perrier, et des fruits du même genre, ainsi que des cônes de pin, qu’il n’a pas été possible de comparer avec les analogues actuels, parce que SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. 103 la substance végétale ayant été remplacée par du phosphate de fer, les détails de forme ont tout-à-fait disparu. Enfin, dans les tufs ponceux eux-mêmes, il a été trouvé des feuilles et des rameaux entiers d'une plante dont les rapports spé- cifiques avec le Buxus sempervirens sont des plus frappants (Ürcet). Nous pourrions encore, en étudiant les végétaux des vrais tra- vertins (1), Coudes, St.-]Nectaire, tour de Rambeau, etc. , établir de plus grandes différences, car lorsqu’on peut les déterminer avec toute la précision nécessaire , on n’y reconnaît que des plantes semblables, même spécifiquement, aux végétaux des sites voisins, souvent même à des espèces exotiques, naturalisées par la culture dans la contrée. Nous ne terminerons pas cette note sans faire remarquer que cette végétation des couches tertiaires de Gergovia est même dif- férente de celle des schistes bitumineux de Menât , qu’on croyait de même époque, et que cette dernière, dans son ensemble comme par quelques unes de ses espèces , se rapproche davantage de la flore des terrains volcaniques ; ainsi, on y a reconnu des feuilles de châtaignier, de coudrier, de tilleul, des fruits de charme, etc. il y a bien des feuilles qui ont quelque analogie avec celles de Ger- govia, nommées Phyllites cinnamomei folia ; mais une observation attentive y fait découvrir des différences notables : ainsi, celles de Gergovia ont leurs deux nervures secondaires alternes et leurs bords entiers ; dans celles de Menât , au contraire , les nervures secondaires sont opposées, s’insèrent plus bas sur la nervure principale, et enfin, le pourtour de la feuille est fortement cré- nelé. En outre, malgré l’abondance des débris et leur variété, on n’a pas encore observé dans cet amas de débris végétaux les espè- ces d’autres gisements évidemment tertiaires de la vallée de l’Ai- lier, les Carpolithes thalictroides , Char a helicteres , Calamites de Juvillac? le noyer de Ravel, etc. (î) Les travertins, en Auvergne, quoique très abondamment répandus, sont toujours des formations très circonscrites, qui offrent des carac- tères minéralogiques assez variés , suivant qu’ils se forment sous l'eau ou à la surface du soi. Il ne faudrait pas, comme on l'a déjà fait en déter- minant minéralogiquement les groupes géologiques , leur identifier les calcaires plus ou moins concrétionnés ou celluleux , si fréquents dans les sédiments tertiaires de la même contrée, quoiqu'ils présentent la raômo structure minéralogique, de même qu’il ne faudrait pas regarder comme roches tertiaires des travertins compactes, marneux, et semblables aux calcaires tertiaires. SÉA.NCE DU 2 DÉCEMBRE 1814. 101 En nous résumant, nous dirons que toutes les observations pa- lépntologiques dans les deux règnes des êtres organisés tendent à faire ranger dans le groupe lacustre tertiaire moyen de l’Auvergne les sédiments qui, à la montagne de Gergovia , semblent reposer sur une nappe basaltique, et que tous les faits géologiques démon- trent que ce même basalte intercalé est un dyke qui a percé les calcaires et est sorti entre deux strates horizontaux. Nota . Les espèces bien caractérisées des alluvions ponceuses de Perrier méritent de fixer l’attention des paléontologistes; car ce sont les végétaux fossiles les plus récents parmi lesquels on ob- serve des formes n’appartenant pas à la flore actuelle. Nons croyons donc devoir en donner ici les caractères essentiels. Jas minées. 1. Fhaxinus Lecoquii ( Nob.), samara obovato-elongata , a cuta , nervo inedio, simplici, ad apicem evanescente et nervulis obliquissimis, ar- cualis, approximatis notata, 34 millirn. longa, et 7 millim. lata; cap- sula coriacea, obovata, compressa, 1 1 millim. longa, supernè in alam foliaceam duplô lougiorem expausa ; foliis? pinnatis , foliolis elongalis crenatis, basi rotundatis. A mentacées . 2. Carpinus brachyptera (Nob.). bractea florifera , semi-involucranle, membranacea , nuculam , solitariam ovatam, compressam , tricosla- tam in quàlibet fade fcosta media asperius notata), perigonii lirobo apiculatam cingente, Irinervia, triîobala, margine integra ; lobo me- dio productiore, angusto, sensim attenualo , obinsinsculo , ex pctiolo ad apicem 45 millim. et transversè 8 millim. æquante; lobis latera- libus brevissimis (i4 millim. long. ) atlenuatis, aculis , subquadralim divergentibus ; nervo simplici in quolibet lobo, nervulis subperpen- dicularibus, tenuibus, reticnlalim ramosis. 3. TJlm.üs Lamot/iii (Nob.), samara monosperma, enerve membranacea, compressa, peripterigia, elongata, elliptico-lanceolata , long. 4° mil- lim. . etlat. i5 millim. æquante!; capsula oblongo-ovata, vel alæ sub- conformi, 18 millim. longa, et 5 millim . lata; foliis ? ovatis symc- tricis, dentalo crenatis. M. Raulin demande ce que M. Pomel entend par des filons de”tuf basaltique , et s’il ne pourrait désigner d’une manière plus précisela roche dont il veut parler. M. Pomel répond que ce sont des filons basaltiques passant à une wacke , à un^détritus qu’il est impossible de décrire ininéralogiquemenr, parce qu’il y a des passages successifs à SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1841. 105 des roches différentes et que chaque échantillon gros comme le poing aurait besoin alors de recevoir un nom particulier. Ce sera, si l’on veut, dit-il, un conglomérat basaltique sorti de bas en haut à l’état boueux et qui a coulé de chaque côté. M. Rozet cite à la Tour-de-Botilade , sur la rive même de l’Ailier, un dyke semblable qui s’élève à 150 mètres d’élé- vation, et une coulée de conglomérat de 8 ou 9,000 mètres de longueur sortie du Puy-de-Chalancé à l’état boueux, et composée de calcaire et de scories. M. Constant Prévost rappelle que M. d’Omalius d’Halloy a donné à ces éruptions de conglomérat le nom de roches iV emballage. M. Deshayes est fort surpris de la découverte en Auvergne de la Melania iuquinata , qui était jusqu’à présent caractéris- tique des formations parisiennes. Il ajoute que M. Sowerby a fait reconnaître l’erreur qu'il avait commise en confondant autrefois la Melatüa iuquinata avec une mélanie vivante des îles Philippines. M. Angelot donne lecture de l’analyse suivante d’un mé- moire intitulé: Description des Entomostracès fossiles du ter- rain crétacé inférieur du département de la Haute-Marne , sui- vie dé indications sur les profondeurs de la mer qui a déposé ce terrain ; par M. J. Cornuel. Dans la partie supérieure de C argile ostréenne du terrain néoco mien de la Haute-Marne , il y a des plaquettes minces , grises ou d’un jaune terreux , à surface inégale et raboteuse , et à pâte cal- caréo-argileuse, mélangée de beaucoup de sable, dont les grains ne sont visibles qu’à la loupe. Parmi les menus débris de fossiles, tous marins, qu’elles renferment , et indépendamment d’une es pèce que je crois être un Foraminifère du genre Marginulina , (d’Orb.), dont je m’occuperai dans des recherches subséquentes , j’ai découvert une multitude de petits corps microscopiques très intéressants. Ce sont des Entomostracès de l’ordre des Ostracodes de Latreille. Leur carapace ou test bivalve est translucide et d’ap- parence cornée, et leur couleur dominante est le jaune fauve et le jaune de miel. Leurs valves sont presque toujours séparées; mais beaucoup sont dans un bon état de conservation, J’en ai 1 06 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. compté jusqu’à 240 , entières , dans un centimètre carré, ce qui ferait plus de 3,700 par centimètre cube. J’ai d’ailleurs recueilli et isolé assez d’individus ayant les deux valves, pour en pouvoir décrire et figurer les espèces. Obligé d’opter, pour le genre, entre les Cf pris, qui appartien- nent à l’eau douce, et les Cythcre , qui vivent dans les eaux ma- rines, et n’ayant pas l’anatomie de l’animal pour fixer mon choix, je me suis arrêté à ce dernier genre, en me laissant guider par ces considérations : que ces entomostracés ne sont accompagnés que de fossiles marins, et qu’il s’en trouve jusque dans des valves d’huîtres; qu’ils sont tous différents de la Cypris fabci; et que l’argile ostréenne n’est pas synchronique du terrain wealdien, puisque, d’après les observations de M. le docteur Fitton, ce der- nier terrain est antérieur aux couches néocomiennes. J’arrive ensuite à la description des espèces que j’ai reconnues et qui sont au nombre de quatre , les Cythcre amygdaloides, harpa , auriculdta et sculpta . Dans tous ces tests, dont l’animal se débarrassait à chaque mue, les caractères oscillent et varient dans des limites assez étendues, et sont loin d’avoir la fixité de ceux des coquilles des mollusques : aussi la Cythere amygdaloides comprend-elle quatre variétés et la C. auriculata trois autres. Dans la seconde partie, je présente les inductions que je tire de l’état paléontologique des couches que j’ai précédemment dé- crites (Mérn. de la Soc. géol. tome 4, 2e part. lre série), et dont j’indiquerai tous les fossiles, avec leur degré d’importance, dans un tableau comparatif que je soumettrai à la Société. D’après nies recherches , l’ancien sol sous-marin de la contrée dont je m’occupe s’est abaissé , après le dépôt du kimmcridgc-clay , au point que, sauf peut-être un moment d’exception, les dernières couches jurassiques se sont formées au-dessous de la limite la plus basse des stations des mollusques. Un relèvement brusque a ensuite marqué le commencement de la période crétacée. Des premiers dépôts fossilifères de la nouvelle série se firent alors lentement et au milieu d’une riche faune néocomienne. L’ex- haussement continuant, un dépôt vaseux, qui est devenu V argile ostréenne , n’enfouit plus que des animaux tout-à-fait littoraux ou d’embouchure, tels que des Cardium , et un grand nombre d’ Exogyra subplicata etd’ Ostrca Leyrncrii. En même temps parais- sent les entomostracés, accompagnés de fhistres et de fucoïdes. Ensuite, avec 1 e fer oolithique , vint l’ Unio Martinii.F itt. , son seul fossile, mais d’eau douce, qui se montre déjà dans le terrain SEANCE DU 2 DÉCEMBRE 184U î 07 wealJien de F Angleterre. Puis, tout-à-coup, un mouvement in- verse d’abaissement ramena la faune néocomienne dans les cou- ches rouges qui recouvrent le fer et qui sont à la base de l’argile à Plrcatules. La profondeur de la mer augmenta encore et chassa les mollusques côtiers ; et la partie supérieure de cette dernière argile 11e recela plus que dis Céphalopodes; ou, ce que rend plus vrai- semblable la présence de fucoïdes, le mouvement du sol aurait plutôt été de nouveau ascensionnel ; mais le dépôt de l’argile au- rait marché assez vite pour empêcher les mollusques littoraux de se développer, et pour n’enfouir que des animaux de haute-mer, jetés morts à la côte. Enfin la profondeur des eaux , devenue moindre à l’époque des sables jaunâtre et vert , se serait accrue pendant la formation du gau/t, et plus encore pendant celle de la craie blanche. Je rattache enfin mes idées sur ces phénomènes d’oscillation à celles que me suggèrent, non seulement les causes des grandes discordances de stratification marquées, çà et là, dans toute la série des terrains stratifiés, mais encore les retours successifs d’eaux marines et d’eaux lacustres dans les bassins tertiaires , et les changements de niveau cons atés , de nos jours, sur les côtes de certaines mers. M. d’Archiac, à propos de la question de la profondeur de la mer traitée dans ce mémoire, dit qu’il se propose d’en en- tretenir incessamment la Société pour tout le. bassin crétacé du nord delà France. M. de Pinteviîle lit la noie suivante, adressée du Puy au président de la Société le 24 novembre 1844 par M. Aymard, secrétaire de la Société académique du Puy. Note sur une découverte de fossiles humains dans un bloc de pierre provenant de la montagne volcanique de Denise [Haute Loire) . Une découverte d’ossements fossiles, qui se rattache à l’une des questions géologiques les plus controversées jusqu’à ce jour, vient d’enrichir les collections du musée du Puy d’un pièce paléontolo- gique des plus remarquables. M. Bertrand de Doue, président de la Société académique du Puy. et moi , nous avous acquis depuis peu, pour cet établissement , un bloc de pierre qui provient d’un terrain volcanique, et au milieu duquel se trouvent des dents et 108 SÉANCE DU O DÉCEMBRE 1844. des ossements humains (1). La pierre présente une succession de" petites couches de cendres argiloïdes et oci acées, l’une d’elles avec fragments angulaires ou à peine émoussés de laves et de scories. On observe que la plupart des os sont brisés et couchés en divers sens, les uns horizontalement, d’autres dans une position oblique, et qu’ils appartiennent à différentes parties du squelette. De plus, j’ai constaté , d’après l’inspection de deux fragments de mâchoi- res, que ces débris osseux proviennent de deux individus. Les os- sements, que leur état de conservation m’a permis de reconnaître. Sont : 1° une portion de mâchoire supérieure avec dent canine et alvéoles d incisives ; 2° un autre fragment de mâchoire supérieure avec canine et trois molaires ; 3° une portion antérieure de l’os frontal; 4° deux autres fragments des os du crâne; 5° une vertè- bre lombaire ; 6° la moitié supérieure d’un radius ; 7° les deuxième et troisième os du métatarse. Quelque temps avant que ces fossiles me fussent signalés, j’avais eu occasion d’explorer et de fouiller le lieu où le propriétaire a depuis, et d’après mes conseils , pratiqué de nouvelles fouilles ( t découvert les ossements. Ces diverses recherches m’ont permis de constater avec certitude la position du banc ossifère. Les indica- tions qui suivent sont le résultat d’observations faites avec le plus grand soin. Le gisement est situé dans la propriété de M A... , sur le ver- sant S. -S. -O. de la montagne volcanique de Denise, près le Puy, et à peu de distance de la maison dite de l’ Hermitage . Le système de couches auquel le dépôt ossifère appartient est composé de plu- sieurs lits plus ou moins épais de cendres ocracées et argiloïdes. Ces petites assises alternent avec d’autres lits formés de cendres, de scories et de fragments basaltiques, et quelquefois mélangés de sables quarzeux et volcaniques. On remarque des rapports de structure et de composition entre ces derniers bancs et la roche sous-jacente. Celle-ci constitue un terrain d’agrégation avec frag- ments angulaires et nombreux de scories et de laves, empâtés dans un ciment argileux et très souvent ocracé. C’est une variété de ces brèches volcaniques qui occupent une si large place dans la sé- (î) Il ne rn’csl pas possible, à cause des limites de celle noie, d’indi- querici leurs caractères positifs de structure, lesquels ne permetlenl pas de classer ces ossements parmi les genres connus de l’ordre des quadrumanes. Un hasard heureux ayant fait reconnaître dans le même bloc de pierre des dents et des os de la tôle, du bras et du pied, j’ai acquis la conviction qu'ils se rapportent tous à l’espèce humaine. SÉANCi: DU 2 DÉCEMBRE 1844. iO(J rie de nos formations géologiques. Des affleurements considéra- bles de la même roche se montrent en recouvrement immédiat du dépôt ossifère, et l’ensemble du système est recouvert lui- même par une quantité de scories et de fragments de laves. Au milieu de tous ces débris amoncelés , on voit percer, suivant les pentes du volcan, des masses basaltiques à structure compacte et souvent sphéroïdale, et qui paraissent se trouver au point même de leur émission. On observe des brèches, sinon tout-à-fait identiques, au moins se rapprochant beaucoup de celles que je viens de décrire rapide- ment, en plusieurs endroits du cône volcanique de Denise. A l’ouest, elles s’étendent en couches épaisses au-dessus d’un massif de brèches auxquelles on s’accorde à attribuer une origine plus ancienne. Au sud, elles apparaissent de chaque côté du dyke de la Croix-de-Paille, célèbre par sa chaussée de basaltes prismatiques; mais les plus remarquables par leur étendue et par leur puissance saut au nord-est. De ce côté, on les voit descendre des parties éle- vées du volcan, et de là se diriger vers le vallon de Polignac, en suivant les contours et la déclivité des pentes. Vers le village de la Malouteyre , elles sont traversées par une éruption basaltique et recouvertes par une coulée de laves. Ces déjections , qu’il faut considérer comme produites par des éruptions boueuses, ont en- traîné, en se répandant dans la vallée, des débris pierreux et de nombreux ossements. J’ai reconnu que ces dépouilles animales ont appartenu à plusieurs genres de mammifères, bœufs, cerfs, chevaux, éléphants, mastodontes, rhinocéros ( Rhin . megarhinus Christol.) , etc. Remarquons que la plupart de ces fossiles ne diffèrent pas, sous le rapport des espèces, de ceux qui ont été signalés par M. Ber- trand de Doue dans les scories et cendres volcaniques de Saint- Privat, et par M. Robert dans les brèches et dans les marnes limo- neuses de Solilhac (1). La superposition des laves et les rapports de structure des brè- ches à ossements humains et de celles à ossements de pachyder- mes et de ruminants qu’on observe à peu de distance les unes des autres, et autour du même foyer volcanique, m’ont paru offrir la preuve de la contemporanéité de ces divers terrains. On peut donc induire de ce fait important que d’antiques sociétés humaines ont (1) Exceptons toutefois une espèce de hyène, trouvée jusqu’à ce jour seulement dans les tufs de Saint-Privat , et un pachyderme du genre Sus que j’ai rencontré à Saint-Privat et à Solilhac. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. iio îiabité nos contrées à Tune des époques géologiques où vécurent les rhinocéros, les tapirs, les mastodontes et d’autres races aujourd’hui éteintes, et pendant lesquelles des embrasements volcaniques cou- vrirent les régions centrales de la France de déjections boueuses, de matériaux de transport, délavés et de toutes sortes de produits ignés. Les découvertes nouvellement faites à Denise soulèvent une au- tre question très intéressante de la chronologie géologique, mais fort difficile à résoudre , dans l’état actuel de la science : à quel âge de l’existence du globe devons-nous rapporter l’ensemble des produits volcaniques du Yela y , et plus particulièrement les roches ignées de Denise et les allumions qui leur sont subordonnées? En d’autres ternies : les éruptions de nos volcans sont-elles toutes antérieures au dépôt des terrains clysmiens , ou sont-elles d’une époque contemporaine , ou bien encore quelques uns de nos volcans, et celui de Denise entre autres, ne pourraient-ils pas être postérieurs à ces derniers terrains? C’est là un problème bien digne des investigations de la science , et dont la solution ajoutera un haut intérêt à la découverte que je viens de si- gnaler (1). M. Constant Prévost dit qu’on n’avait pas encore indiqué l’existence simultanée de l’homme et du mastodonte. M. Pomel dit qu’il ne croit pas que les fossiles humains se trouvent précisément avec ceux du mastodonte, et cherche à établir qu’il y a eu en Auvergne deux faunes suc- cessives. Il soutient que le mastodonte et l’éléphant n’ont jamais été trouvés ensemble, du moins en Auvergne. Le mastodonte se trouve dans les terrains ponceux, et l’éléphant dans les terrains supérieurs. M. Gervais soutient au contraire que l’éléphant a été trouvé avec le mastodonte en Italie et en Auvergne. Le secrétaire donne ensuite lecture d’une lettre deM.Boué relative à divers sujets. 1 ° Sur les causes qui peuvent produire des effets semblables a ceux des glaciers . Si l’on a déjà beaucoup écrit sur les glaciers et les glaces flottantes , (î) J’espère pouvoir bientôt soumettre à la Société géologique diverses SÉ\NCE DU 2 DÉCEMBRE 1 B \ 4 . m on est convenu que tous leurs phénomènes n’ont pas encore été éclaircis suffisamment; d’une autre part on n’a pas encore étudié avec toute l’attention désirable les effets géologiques de la con- gélation de l’eau , de la fonte des neiges et des glaces hivernales, quoique dans le fond ils doivent présenter en petit les phéno- mènes qui nous frappent en grand dans lesglaciers. Il peut donc résulter de cette similitude que les personnes recherchant sur la surface terrestre les traces d’anciens glaciers, courent risque souvent de confondre deux séries d’effets assez différents quant à leurs causes, quoique très semblables par leur nature. Elles arri- vent ainsi, sans s’en apercevoir, à des théories étayées de faits irré- cusables, mais mal appliqués dans le fond. En effet, personne ne nie que les zones tempérées du globe n’aient éprouvé depuis des milliers d’années l’alternative du froid et du chaud de nos saisons; donc on doit retrouver partout les traces des destructions opérées par la congélation de l’eau superficielle et par la fonte des neiges et des glaces. Il suffira que la terre ait offert les rochers ou les matières meubles nécessaires à ce travail continu et appropriés à la conservation de ces modi- fications de la superficie. Quels sont donc les effets généraux de ces agents destructeurs? Le passage de l’eau en glace fendille et détruit. La neige et la glace, en se fondant, produisent un ruissellement semblable à celui de l’eau pluviale et agissent aussi sur les rochers attaquables au moyen de leur acide carbonique, car elles contiennent encore plus d’air que la pluie. En conséquence du séjour de la neige et de l’eau dans des trous de rochers , ces creux s’agrandissent et s’approfondissent autant chimiquement que mécaniquement. On sait que ces eaux sont intérieurement dans un mouvement con- stant, au moins pendant le jour, par suite de leur échauffement et de leur refroidissement graduel , ce qui doit augmenter leur action destructive. Si une eau dérivant de la neige fondue charrie sur un rocher des particules sableuses plus dures que ce dernier, le roc sera à la fin entamé par ce seul fait. De même des glaces glis- sant sur une pente rocailleuse pourront produire çà et là à la longue des surfaces polies, des entailles ou même de petits sillons au moyen de matières dures empâtées dans la glace ou interpo- sées entre elles et le sol. Plus la masse de glace sera grande, plus ces effets devront être sensibles. observations qui jetteront peut être quelque lumière sur cette iinprotante question. SEANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. 1 12 Pendant le dégel, des digues de neige ou de glace donnent lieu souvent à la formation de petites flaques d’eau ou à des étangs, qui s’écoulent tantôt petit à petit, tantôt brusquement. Les dé- bâcles de nos rivières, de nos mers gelées, sont des phénomènes qui se renouvellent chaque année- Les glaçons sont flottés au loin par les fleuves; des sables et des blocs sont transportés, des terres meubles entamées ; bref toute une série de dépôts particuliers et de formes extérieures du terrain est le produit de ces actions, si souvent observées, auxquelles il faut encore ajouter les effets des éboulis. Mais ces résultats divers sont très voisins, si ce n’est iden- tiques , avec ceux que certaines personnes paraissent trop dispo- sées aujourd’hui à ne vouloir attribuer qu’aux glaciers seuls. Dans ce cas sont des surfaces de rochers couvertes de petites aspé- rités, rugueuses, cannelées, arrondies ou polies; des rocs cal- caires percés de trous verticaux ou d’entonnoirs d’une structure particulière, des rochers minés à la manière de ceux où a passé la cascade des eaux d’un glacier, des amas de débris sous la forme d’éminences , des séries de blocs échoués sur des bancs de gra- vier, etc. Or, plus le sol présentant de pareils accidents est élevé au-dessus de la mer, plus ces traces et ces destructions doivent être naturellement grandes ou fortes, car la longueur de l’hiver et la quantité des neiges et des glaces hivernales sont bien diffé- rentes pour les régions au niveau de l’océan comparées à celles fort supérieures à ce dernier. Gomme les pépites des métaux aug- mentent à mesure qu’on s’approche de leur gîte originaire, de même les vestiges des modifications superficielles dont nous par- lons gagnent en intensité en s’élevant de la mer vers les pays hauts et les cimes des montagnes, jusqu’à ce qu’ils trouvent leur maximum dans la région des glaciers et des neiges perpétuelles. Le géologue qui perd de vue ces effets annuels des hivers dans les zones tempérées ou élevées, ne trouvera partout que des traces de glaciers et pourra se croire autorisé à admettre même qu’à une époque comparativement récente une capote de glace a enve- loppé toute notre terre. Il doit être le plus souvent impossible de distinguer les effets de la fonte des glaces et des neiges hivernales d’avec ceux de la fonte des glaciers et des neiges perpétuelles , puisque leurs causes sont les mêmes, quelle que soit d'ailleurs l’ex- plication ou l’état de l’explication de ces phénomènes. Si un élé- phant et une puce sont tous les deux des animaux, quoique de grandeur et de caractères très différents, de même les effets des glaciers et de la fonte des neiges et des glaces hivernales ne sont que les extrêmes d’une même série d’actions, qui forme une SÉANCE DU 2 DÉCEMBîlE 1844. 1 13 chaîne continue, et dont l'intensité est en raison directe de la gran- deur des causes. Les sources et les eaux minérales donnent lieu aussi à des destructions et à des dépôts qui peuvent être pris pour des effets d’anciens glaciers; ou même on peut attribuer à Faction des eaux minérales des destructions que l’eau pure a produites à elle seule. Ainsi les sources circulant dans l’intérieur de la croûte terrestre rongent mécaniquement et chimiquement les roches , tandis qu’en charriant aussi des argiles et des sables elles accroissent ces effets. Les eaux minérales véritables, contenant tant de ma- tières chimiques diverses, agissent d’une manière encore plus éner- gique , au moins sur la plupart des roches. Ainsi il faut bien se garder de penser à des glaciers, quand on n’aura devant soi que des trous perforés dans le roc par les eaux souterraines, ou bien des cavernes tortueuses, ou des excavations comme celles existant or- dinairement derrière le bas des cascades, où le rocher a été rongé par la répercussion de l’eau. Les eaux lacustres et marines polissent les rochers sur leurs bords à 1?» manière des eaux courantes. Elles entament les sur- faces dures, y détruisent les parties tendres, y produisent, par le lavage, des aspérités et des trous de diverses formes suivant la nature des roches. Leur action a lieu ordinairement sur des lignes horizontales répondant à leur niveau à diverses époques de la journée ou de l’année. Le flux et le reflux produisent deux li- gnes. Sur ces lieux se trouvent des cavernosités, des grottes, des perforations, des entonnoirs creusés uniquement par le flot ou à l’aide de petits cailloux mis en mouvement par l’eau dans ces trous. D’un autre côté il arrive aussi que l’action des eaux lacustres et marines se fait sentir sur des plans inclinés, ce qui a lieu lorsque la stratification des couches est favorable à de pareilles destructions ou dans des lieux où l’eau est lancée contre le rivage de manière à remonter sur un plan incliné. En comparant tous ces effets des eaux à ceux si semblables des glaciers, on voit combien on doit être circonspect dans le juge- ment porté sur la cause de pareils accidents. Toute ligne de ca- vernosités non horizontale ne sera donc pas toujours l’indication de la présence d’un ancien glacier ou de la descente de quelqu’un de ses cours d’eau. Tout entonnoir, dût-il être même sur le haut d’une île, ne doit pas indiquer toujours le lieu de la chute d’un torrent de glacier. Comme les lacs et les mers ont dû produire à leur pourtour de Soc. géol. Tom. II, 2e série. S 114 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. pareils effets dans tous les temps, l'entourage de tous les bassins géologiques en doit présenter encore des traces plus ou moins parfaites , ce qui forme une étude qui n'a point encore été faite. Elle devient très nécessaire aujourd’hui , afin qu’on puisse op- poser des arguments ad hominem à ceux de nos jeunes géologues trop fascinés par les effets des glaciers; car ils ont une tendance à confondre quelquefois avec ces derniers ceux d’une date bien an- térieure à l’époque alluviale et même le produit des travaux des hommes. D’ailleurs de pareils relevés sont encore ce qui nous manque pour nous reporter entièrement par la pensée vers ces périodes anciennes, et moins ces momies géologiques sont anti- ques, plus nous pouvons espérer de les ressusciter. Etudions avec soin les moindres détails du relief et de la surface du sol ou des rochers; nous les avons trop négligés jusqu’ici ; la théorie glaciale nous y force et aura eu ce résultat utile, quelque avenir qui lui soit réservé. 2° Sur les courants (Veau de mer qui se précipitent dans Vintérieur de certaines îles Ioniennes . Ces courants excitent, il me semble, plus d’étonnement qu’ils ne méritent. En effet ces gouffres ne sont autre chose que les katavo- throns du système crétacé dans tout l’occident de la péninsule slavo grecque. Certaines cavernes jurassiques ou primaires (inter- médiaires) ne sont que le fac simile de ces conduits aisé à étudier. Leur mode de formation probablement varié a étédiscuté souvent; mais on n’a pas assez entrevu encore qu’il devait s’en ouvrir au- tant sur les bords delà mer que dans les vallées. Or, la place de ces ouvertures peut différer tellement qu’il en résulte des phéno- mènes hydrauliques très divers. Si un rocher ou des rochers percés de part en part par de tels canaux, se trouvent isolés au milieu de la mer par suite d’acci- dents géologiques, Veau remplira les conduits entièrement, s’ils dérivent sous son niveau, quelle que soit d’ailleurs la sinuosité de leur cours. Dans ce cas, ils échappent au dehors à la vue, à moins qu’ils ne soient très près de la surface de l’eau et qu’ils n’aient leurs deux bouches à peu de distance l’une de l’autre. Mais le plus souvent ce cas ne se présentant pas, on croira voir une petite caverne sous-marine. Si le conduit est très près de la surface de l’eau et qu’il débouche sur une mer où la marée soit notable , il sera découvert plus aisément et pourra donner lieu pendant la marée haute à un SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1844. I 1 5 courant de la mer dans la terre et pendant le reflux à un autre du continent à la mer. Si le débouché est près de la limite de la haute marée, et qu’il y ait des réservoirs souterrains communiquant avec le conduit, on concevraaisémentqu’ilenpeut résulter des fontaines intermittentes par un jeu de siphon. Cet effet pourra aussi avoir lieu lors même que le canal est assez incliné pour y arrêter l’introduction de la marée à quelque distance de son embouchure, car, le long des côtes rocailleuses et entamées , rien n’est plus commun que des jets d’eau par suite de l’impulsion de l’eau dans un conduit étroit, tandis que rien de semblable ne se produit par l’eau pro- jetée dans une grande entaille ou cavernosité dans les rochers. Si ces conduits souterrains sont quelquefois horizontaux, ils sont aussi disposés çà et là sur deux ou plusieurs plans inclinés à la manière des siphons; c’est ce que nous montrent les cavernes et les katavothrons : or, dans ces derniers, les chutes d’eau, les engouf- frements de torrents sontdes traits caractéristiques de cet accident géologique. Il est donc tout simple de les retrouver dans ceux de ces canaux qui s’ouvrent sur les côtes marines sous le niveau des eaux, près de ce dernier ou même un peu au-dessus. Si le conduit n’a que deux plans inclinés en sens inverse, il peut se faire que ce soit un siphon véritable, ce qui servirait peut-être à expliquer certaines sources salées voisines des plages marines ou situées dans quelques îles. Il peut aussi se faire que le canal présente à l’entrée de l’eau une pente très longue, de manière que l’eau arrive à des profon- deurs telles que la température du sol élève la sienne ouvmême la vaporise. On aurait ainsi une idée de la formation de certaines eaux thermales salines. A Céphalonie on voit s’engouffrer l’eau de la mer dans la terre sans découvrir sa sortie ; mais la même chose arrive pour beaucoup de torrents des continents , dont quelques uns font même tourner des moulins avant de disparaître. Or, il n’est pas rationnel d’en inférer que, dans ces deux cas, l’eau se vaporise dans l’intérieur de la terre, puisqu’elle peut .en ressortir sans que nous nous en apercevions. M. Boue termine sa lettre par la réclamation suivante : Ne recevant le Bulletin que longtemps après sa publication, on m’excusera de faire si tard la réclamation suivante : à la page 446 du volume XIV du Bulletin (lre série), à propos de la théorie sur |j6 SÉANCE DU Î6 DÉCEMBRE 1844. les effets des taches du soleil relativement à la température de rén- veloppe de notre globe, si, au lieu de dire cette hypothèse , j’ai écrit mon hypothèse , je n’ai point voulu dire que ce fût la mienne propre, comme on a paru le croire, mais j’ai voulu exprimer seulement que telles étaient les idées que j’aimerais le mieux adopter. Je n’avais nullement oublié que MM. Renoir et Le Blanc s étaient occupés de cette question ; mais sachant parfaitement que d’au- tres que ces savants l’avaient étudiée et développée avant eux (Herschell, par exemple), je ne vois pas pourquoi j’aurais dû les citer préférablement aux autres dans un mémoire où , faute déplacé, je ne pouvais rendre à personne ce qui lui était dû. Si citation devait y avoir, j’aurais pu tout naturellement les passer sous silence et citer quelquesnoms moins connus ou des mémoires de plus ancienne date , tels , par exemple , que celui de l’astro - nome Gruithuisen , de Munich. (Voy. Ârchiv. F. Naturlehre de Kastner, 1828, vol. 8,p. 27-30.) Séance du 16 décembre 1844. PRÉSIDENCE DE M. d’aRCIIIAC. M. Raulin, vice-secrétaire , donne lecture du procès-ver» bal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Le Président proclame membres de la Société : MM. Gxnat (Claude-Jules-Cyrille), docteur en médecine à Cha- lon-sur-Saône (Saône-et-Loire), présenté par MM. Rozet et de Roys ; Cercelet, à Paris, rue d’ Anjou-Dauphine, 7, présenté par MM. Constant Prévost et Martins. M. le Président annonce ensuite une présentation. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : Delà part de M. Melleville, Mémoire sur les sables tertiaires inférieurs du bassin de Paris (extrait des Annales des sciences géologiques , t. II), in-8°, 88 p. , 10 ph Paris. 1843. SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844. 117 De la part de M, Fou met , Note sur la température des eaux du Rhône et sur leur rafraîchissement souterrain (extrait ries Annales de la Société royale d’agriculture, etc. , de Lyon) , in -8°, 12 p. De la part de M. de Fourcy (Eug.) , 1° Carte géologique des Côtes-du-Nord (vote du conseil-général du département, session de 1836); en 4 feuilles grand-aigle , imprirn. lith, de Kaeppelin. Paris, 1843. 2° Carte géologique des Côtes-du-Nord { notice explicative), in-8°, 172 p. , imprimerie de Fain et Thunot. Paris, 1814. De la part de M. d’Orbigny (Charles), Dictionnaire univer- sel d’histoire naturelle, t. V, 56e livraison. De la part de M. le ministre de la justice , Journal des Savants , novembre 1844. De la part de M. Struve (O.), Détermination des positions géographiques de Novgorod , Moscou , Riazan, Lipetsk, Voro- néje et Toula (extr. du Bulletin de la classe physico-mathéma- tique de V Acad. imp. des sciences de Saint-Pétersbourg , t. Il), in-4°, 18 p. Saint-Pétersbourg, 1843. De la part de M. Struve (W. ), Resultate , etc. (Résultats des mesures astronomiques et trigonométriques prises de 1816 à 1819, en Livonie) (extrait des Mémoires de V Acad, imp. des sciences de Saint-Pétersbourg , sc. math.), in-4°, 86 p., 2 pl. Saint-Pétersbourg, 1844. De la part de l’Académie royale de Stockholm , 1° Ofver- sigt , etc. (Bulletin des séances de l’Académie royale des sciences de Stockholm pour l’année 1844), noS 1 à 7, 166 p. 2° Kongl. Vetenskaps-academiens handlingar fœr ar 1842 ( Mémoires de l’Académie royale de Stockholm pour l’année 1842), 1 vol. in-8°, 376 p. , 5 pl. Stockholm, 1843. 3 0 J rsberœttelse , etc. (Compte-rendu annuel des travaux et découvertes botaniques de l’année l 838, par M. Joh.-Em. Wikstrœm , publié le 3 1 mars 1839), 1 v. in-8°, 644 p. Stock- holm, 1842. 4° Arsberœttelse , etc. (Compte-rendu annuel des progrès de la zoologie de 1840 à 1842 , 3® part. , Crustacés et vers de Linné, par M. S. Lovén), 1 vol. in-8°, 392 p. Stock- holm, 1844. I ÏS SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844, 5 ° Arsbercettel se , etc. (Compte-rendu annuel des progrès de la chimie et de la minéralogie, par M. J. Berzelius , pu- blié le 31 mars 1844), 1 v. in-8°, 552 p. Stockholm, 1844. 6° Taly etc. ( Discours prononcé par M. Hans Jærta , Pré- sident de l’Académie royale des sciences de Stockholm , le 31 mars 1839, pour le centième anniversaire de la fondation de l’Académie), in-8°, 40 p. Stockholm, 1 843. 7° Taly etc. ( Discours prononcé par M. C.-G, Von Brinkman, Président de l’Académie des sciences de Stock- holm, le 31 mars 1843), in-8°, 12 p. Stockholm, 1843. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences , 1844, 2e sem., t. XIX, nos 23 et 24. L'Echo du Monde savant, nos 42 à 45. U Institut , nos 571 et 572. Annales scientifiques , littéraires et industrielles de I Au- vergne, n09 de janvier à avril 1844, Bulletin de la Société des sciences naturelles de Neufchdtel > 1843-1844. The Athenœum , nos 893 et 894. The Mining Journal, nos 485 et 486. M. Martins fait la communication suivante : Note sur le delta de V A ar, a son embouchure dans le lac de Brienz. Les formes régulières des terrains de transport ont été signalées par un grand nombre de géologues. L’analyse de leurs travaux se trouve dans les deux mémoires que nous avons publiés, M. Bra- vais et moi , sur les lignes d’ancien niveau de la mer dans le Finmark (1) et sur les terrasses des bords du Rhin (2). Quandnn cherche à se rendre compte de la formation de ces dépôts et des causes qui ont pu les modeler d’une manière telle- ment régulière, qu’ils représentent, à s’y méprendre, les ouvrages (î) Sur les lignes d’ancien niveau de la mer, dans le Finmark , par A. Bravais. Voyages en Scandinavie, en Laponie, au Spitzberg et aux îles Féroé de la corvette la Recherche, Géographie physique , t. I, p. 5q. (‘2 J Sur les formes régulières du terrain de transport des vallées du Rhin postérieur et du Rhin antérieur, par Ch. Martins. Bulletin de la So- ciété géologique de France, t. XIV, p. 322, 1842. SEANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844. 1 1 1 de défense construits par la main des hommes, on arrive tou- jours à se demander si le talus qui se raccorde avec le fond de la vallée s’est formé à l’air libre ou au-dessous de la surface d’une eau tranquille. La même question se présente quand on veut ex- pliquer l’origine de ces cônes d’éboulements, que l’un de nous a désignés sous le nom de deltas inclinés , parce qu’on trouve tous les passages intermédiaires entre ces cônes inclinés et les deltas horizontaux des rivières. MM. Elie de Beaumont (1) et Le Blanc (2) ont mesuré l’inclinai- son des talus formés par un grand nombre de terrains meubles, tels que le sable, les cailloux, les terres, les fragments de roche, etc. L’on sait donc maintenant quel est le talus naturel de ces substan- ces à l’air libre ; mais l'on avait peu de données sur l’inclinaison du talus formé par des débris de différente grosseur et de différente densité, lorsqu’ils sont versés par une rivière dans le sein d’un lac tranquille. M. Egertoii (3) a fait quelques sondes sur les bords du delta de la Kander , dans le lac de Thun , et M. Lyell (4) en a conclu que l’inclinaison du talus devait être de 30° à 40°. M. Yates (5) pense que celui de la Linth , dans le lac de Wallenstadt , fait le même angle avec l’horizon ; mais ces messieurs se sont bornés , comme on le voit, à de simples approximations. ÏSous avons profité de notre dernier séjour à Brienz pour faire un travail plus complet sur le delta de l’Aar , à son embouchure dans le lac du même nom. La source de cette rivière est aux glaciers de l’TJnter et de l’ü- ber-Aar, sur la Grimsel. Après un cours de 25 kilomètres, inter- rompu par de nombreuses cascades, dont celle de la Handeck est la plus célèbre, elle arrive à Meyringen, chargée de sables siliceux provenant des roches gneissiques , qu’elle a lavées dans sa course rapide. A partir de Meyringen , le cours de l’Aar se ralentit , et après avoir serpenté dans la vallée d’alluvion de l’Unter Hasli , elle se jette dans le lac de Brienz, en se divisant en deux bras. Ces deux bras sont séparés par un delta régulier ayant 85 mètres de (1) Mémoires pour servir à une description géologique de la France, t. IV, p, 204. (2) Bulletin de la Société géologique de France, t. XIV, p. 85, 1842. (3) Proceedings of ihe geological Society of London, i834, p. 77. (4) Principles of geology, third édition, t. IV, p. 21. (5j Reinarks on the formation of alluvial deposits. Edinburgh new p!u- losophical Journal, t. XI, p. 5o, i83i. 1 20 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1814. base et 58 mètres de hauteur ( voyez Ici pl. II). La base AC de ce delta se termine par un talus entièrement submergé. C’est l'incli- naison de ce talus et son étendue que nous nous sommes proposé de mesurer. Nous étions munis d’une ligne de soie de 400 mètres de long et enroulée sur un cylindre de bois évidé de manière à représenter deux troncs de cônes réunis par leurs petites bases. Ce cylindre était traversé par un axe en fer, et muni à l’une de ses extrémi- tés d’une manivelle. Deux piquets en bois, percés à leur partie supérieure d’un trou pour recevoir l’axe de rotation, supportaient le cylindre. Cet appareil avait été fixé solidement à barrière d’un bateau qui portait une perche de 5m 37 de haut, terminée par un voyant. M. Bravais était sur la plage du delta avec un théodolite. 11 se plaça d’abord au point A , à l’angle septentrional du delta, puis successivement aux points C, E et B. J’étais dans le bateau , et je m’éloignais et me rapprochais, en suivant, autant que possible, la normale au rivage. A un signe convenu, je laissais tomber le plomb de sonde : en même temps, M. Bravais mesurait l’angle de hauteur du voyant au-dessus du centre du théodolite. On pouvait donc calculer la distance au rivage à l’aide de cet angle et de la hauteur connue du voyant au-dessus du centre de l’instrument. Cette hauteur a varié, dans les quatre stations, entre 4m, 02 et 3m, 87. La position du bateau était en outre déterminée au moyen d’un angle asimutal rapporté à une droite passant par le centre du delta et le sommet du Rinckenberg , éloigné de 12100 mètres. Nous notions aussi l’instant de l’observation , afin de savoir quelles étaient les mesures angulaires correspondantes aux différents sondages. Je revins plusieurs fois au rivage pour m’en éloigner ensuite à la distance de 200 à 300 mètres en ligne droite. Je fis ainsi trente sondages, suivant quatre lignes partant des points A, B, C etD, et suivant une cinquième qui était courbe et parallèle au rivage. Les points extrêmes marqués 26 et 46 sur le plan sont éloignés de 450 mètres. Le delta de l’Aar se termine par un talus subîacustre dont l’in- clinaison est de 30° au commencement de la pente; mais ce talus devient de moins en moins rapide, et à 300 mètres du rivage, la pente n'est plus que de 20° environ (voy. le profil sur /«pl. Il ). Le talus immergé se raccorde avec la partie horizontale du delta par un petit talus émergé dont la hauteur est d’un mètre et la pente de 10°. C’est sur cette petite berge que les vagues viennent se bri- ser quand le lac est agité. La surface du grand talus sublacustre «st sensiblement plane. Il se compose de sable siliceux très fin . mjl. it Soc. M. JeFrymai. 2? J'en'e. TmusJf./’lJIJ? aio SEANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844. 121 faisant avec l’eau une boue noirâtre, homogène Ce sable forme le fond du lac deBriçnz , dans presque toute son étendue. En face du point D, sur l’angle méridional de la terre ferme , il existe dans le voisinage de la sonde 2 un petit banc de sable à fleur d’eau , dû au remous du bras gauche de l’Aar. 11 est probable que ce même banc existe à l’angle septentrional delà terre ferme, un peu au nord de l’embouchure du bras droit. A quelle distance s’étend le talus dû delta de l’Aar? Entre Brienz, le Giessbacli et le hameau d’Engi (1 ), le fond du lac forme un plan horizontal situé à 195 mètres au-dessous de la surface. Si donc on prolonge le talus dont le plan représente la coupe, on trouve que c’est vers 1100 à 1200 mètres du rivage que le talus doit se confondre avec le fond du lac. On ne saurait établir sur cette observation isolée une compa- raison entre les talus qui se forment à l’air libre et les talus subla- custres. Je me bornerai donc à quelques remarques, que je ne prétends nullement élever au rang de lois. Le lac de Brienz est profondément encaissé par de hautes mon- tagnes. Rarement il est agité par les vents ; celui qui y souffle avec le plus de violence est le S. -O. , qui pousse les vagues vers Fem- bouchure de l’Aar. Mais , au niveau du village de Brienz , le lac tourne à l’O. , et les eaux viennent se briser contre la partie du rivage qui s’étend de Tracht au Kienholz (voy. pl. II). On peut donc considérer ce delta comme formé dans une eau tranquille , et comparer son talus à ceux qui s’établissent à l’air. MM. Elie de Beaumont et Le Blanc trouvent 35° pour la pente moyenne du sable sec abandonné à lui-même. On voit que cette pente est de 5° plus forte que celle que nous avons trouvée pour le talus sublacustre. Ce résultat s’explique très bien, si l’on considère avec M. Le Blanc les particules de sable , qui s’éboulent dans l’eau , comme revêtues d’une légère couche de liquide qui favorise leur glissement. Leur talus doit alors se rapprocher de celui des talus formés par des corps lisses, tels que la cendrée de plomb , le blé , les graines de millet, de chènevis, etc., talus qui sont tous com- pris entre 22° et 32°. Il résulterait aussi de là que les talus des terrasses de sable observées par nous en Suisse et dans le Nord, et par le commandant Le Blanc dans la vallée de l’Eissack , ont pris à l’air libre leur état définitif, car les talus de toutes ces terrasses sont en général compris entre 35° et 41° , et par conséquent beau- (0 Voyez Nouvelle description de l'Oberland bernois , carte n° 4- 122 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844. coup plus rapides que celui du delta de l’Aar, à son entrée dans le lac de Brienz, M. Constant Prévost dit qu’il a fait des expériences qui concordent avec les observations de M. Martins. En laissant tomber dans un bocal rempli d’eau des cendres volcaniques ou du sable au moyen d’un cône de papier renversé, dont l’ouverture inférieure portait un disque central pour réser- ver une cavité cratériforme , la partie plongée dans l’eau se présentait sous forme d’un cône surbaissé , tandis que la partie hors de Veau offrait des pentes beaucoup plus ra- pides. M. Le Blanc ajoute que le cône de déjection sur lequel est assis le château de Saint-Bartholomé , et dont la pente n’est que de cinq à six degrés, se termine brusquement dans le lac de Kœnigsée (Bavière) , par un talus d’éboulement d’en- viron 33°. M. Eugène Robert lit un travail intitulé: Observations sur quelques gemmes cV altérations et de modifications qui survien- nent a la longue 9 dans la structure des pierres et ciment exposés à l'air; moyens proposés pour y remédier . Tout le monde connaît cette espèce de moulure de la pierre qu’on appelle vermicu laire , et que je ne saur ais mieux comparer, pour en donner une idée satisfaisante, qu’à des circonvolutions du cerveau un peu écartées les unes des autres. Ce genre d’ornement s’observe surtout dans les murailles des anciens châteaux. La fa çade du château du Louvre tournée vers le sud , ou qui regarde la Seine, en est un exemple frappant. Eh bien , à côté de ces mou- lures , la pierre de taille , qui est d’une nature calcaréo-sablon- neuse(l), dans les points où elle est le plus facile à se désagréger a subi, par l’effet de la pluie, des dégradations profondes que l’on serait tenté de prendre pour des moulures semblables, si les véri- tables n’offraient , comme dans l’arc de triomphe de la Porte- Saint-Martin, de petites hachures transversales. Je ne sais si l’art (i) Les grains de sable qui lui donnent ce caractère sont de petits fragments de quarz analogues à ceux qui composent les grands dépôts tertiaires presque uniquement formés de cet élément. SÉANCE DU !6 DÉCEMBRE 1841, 123 a été, dans cette circonstance, une imitation de la nature , ayant pour but de prévenir l’altération ultérieure des murailles ; mais toujours est-il qu’une fois établies, les unes par la main del’liomme, les autres par les agents atmosphériques , elles paraissent douées d’une conservation indéfinie. Les façades d’un grand nombre d’é- glises, en JNorrnandie, sont dans ce dernier cas relies se sont cou- vertes de rides qui, bien loin de les vieillir, semblent au contraire les mettre à même de défier les outrages du temps. A côté de cette désagrégation , que par analogie avec les mou- lures j’appellerai désagrégation vermiculairc , du calcaire grossier pour les monuments de Paris, de la craie tufau pour ceux de Rouen, de Caen, etc., désagrégation qui est trop symétrique pour n’être pas le résultat d’un nouvel arrangement des molécules de calcaire et de sable entre elles, nous rangeons dans la même caté- gorie une modification non moins singulière qu’on peut remar- quer dans le ciment à la chaux et au sable des murailles égale- ment exposées aux intempéries de l’air. Depuis que M. Alexandre Brongniart a fait connaître la ten- dance de la silice hydratée à se convertir en orbicules, en anneaux siliceux, ou à devenir des solides à contours courbes (1), phéno- mène que je crois encore en activité dans le conglomérat argilo- sablonneux rougeâtre qui recouvre les pentes de nos collines cou- ronnées par des meulières, où je suis parvenu à recueillir une grande quantité de petites calcédoines transparentes et opaques sous forme d’orbicules parfaits (2), j’ai observé, dis-je, une trans- formation, qui a beaucoup d’analogie avec ces corps, dans le ciment calcaréo-sablonneux des murailles. Dans les plus anciennes prin- cipalement, on voit le ciment, qui lie les pierres meulières entre elles , prendre une structure amygdalaire, et si l’on vient à briser les amandes qui s’en détachent, on les trouve composées de cou- ches concentriques que le moindre choc suffit pour isoler les unes des autres; il n’est pas même nécessaire de recourir à ce moyen: (1) Annales des sciences naturelles , t. XXIII, p. 166. (2) Dans un prochain travail que je me propose de faire sur le dilu- vium du bassin de Paris, ainsi que sur une partie des atterrissements de la Seine et de la Loire, comparés entre eux, j’appellerai l’attention sur les modifications qu’éprouvent les silex, même depuis la cause qui les a arrachés de leur gîte primitif, et l’on verra que cette tendance de la si- lice i» se convertir en orbicules est tellement grande, que des fragments de ces mêmes silex, mis à nu, et par conséquent à même de subir les in - ^ fluences atmosphériques, ne tardent pas à présenter des zones de diverses nuances. S 24 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844. par suite du gonflement qu’éprouvent ces amandes dans le nouvel arrangement moléculaire qui s’y passe , elles se divisent d’elles- mêmes ou se désemboitent. Le relief que forment les amandes en partie délitées permet alors de voir facilement à la surface des murailles et dans les intervalles que laissent les pierres entre elles, la disposition en orbicules que je viens de signaler. Je ne saurais trop insister sur cette modification éprouvée par le ciment, car je suis persuadé qu’elle est une des causes puissantes des dégrada- tions qui affectent les murailles où il est uniquement employé, et dont la ruine ne tarde pas à en être le triste résultat. L’auteur entre ensuite dans des considérations ayant trop peu de rapport avec les sciences géologiques pour être insé- rées au Bulletin. M . Constant Prévost dit que, pendant son dernier séjour à La Rochelle, M. Fleuriau deBellevue lui a communiqué des observations sur le même sujet. A La Rochelle, les roches cal- caires employées dans les monuments présentent une destruc- tion vermiculaire qui commence àd mètre au-dessus du sol et se poursuit jusqu’à une hauteur de 3 à 4 mètres; le maxi- mum de dégradation est entre lm 50 et 2 mètres. M. Fleu- riau de Bellevue, qui a observé les mêmes effets sur des murs bordant des terrasses élevées , s’occupe à multiplier les ob- servations et à faire des expériences directes, dans le but de déterminer la cause de ce phénomène, M. Constant Prévost, d’après les indications de M. Fleuriau de Bellevue, a égale- ment observé à l île de Ré que les piliers qui supportent les arcades des casernes sont très dégradés entre lm 50 et 2 mè- tres au-dessus du sol, et ce qu’il y a de remarquable , c’est que la dégradation n’est pas moindre à l’intérieur qu’à l’ex- térieur, qui est exposé à la pluie. M. Virlet dit que le inur oriental de clôture du parc de Versailles présente sur certains points une destruction ver- miculaire très profonde et d’autant plus intense quelle est plus rapprochée du sol. L’humidité lui paraît en être la cause toute naturelle. Il fait observer aussi que sur les côtes l 'aura maritima pourrait peut-être bien n’agir qu’à une certaine hauteur seulement. M. Bontemps croit que la cause la plus puissante de ces SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1814. 125 dégradations est la pluie aidée du vent. A l’appui de son opi- nion , il signale la galerie du Louvre, qui est infiniment moins altérée sur sa façade N.-N.-E., du côté du Carrousel que sur la façade S.-S. -O., du côté du quai. M. Meileville dit que de la base au sommet de la tour de la cathédrale de Laon, qui s’élève à 60 mètres au-dessus du sol , les pierres et le ciment sont fort dégradés. 11 cite aussi une vieille tour, dans les environs de Laon , qui est très dé- tériorée au S. et à 10. ; tandis que , sur le reste de son pourtour , elle est parfaitement conservée. M. de Fourcy présente la Carte géologique des Côtes-du- Nord et le texte explicatif qui l’accompagne. Cette carte, relevée pendant les trois campagnes de 1837, 1838 et 1839, a été publiée en 4 feuilles, sur une contre-épreuve de Cassini. Après avoir donné un aperçu de la constitution physique de la Bretagne, emprunté en grande partie au travail de M. Bo- hlaye ( Annales du Muséum, t. XV), M. de Fourcy passe à la description géologique du département des Côtes-du- Nord dont il donne l’analyse suivante : Ce département ne renferme pas tous les terrains dont se com- pose l’écorce terrestre ; sa chronologie géologique ne comprend que les faits suivants : Dépôt des couches cambriennes ; Éruption des granités h petits grains (système du Weslmoreland et du Hundsrück, E. 25° N. — O. 25° S.)- Dépôt des couches silur iennes ; Eruption des porphyres quarzifères (système des ballons des Vosges et des collines du Bocage normand, E. 15° S. — O 15° N.) ; Eruption des granités porphyroïdes et syénitiques ( système des Pays-Bas et du sud du pays de Galles, E. 5° S. — O. 5° N.) ; Apparition des roches amphiboliques et des filons métallifères ( système des îles de Corse et de Sardaigne, N. -- S.) j Dépôt des couches tertiaires moyennes ; Dépôt des couches tertiaires supérieures ; Dépôt de la période moderne . TERRAINS IGNÉS. Les terrains ignés comprennent non seulement les granités qui ont spécialement reçu des géologues la désignation de 126 SEANCE DU 16 DÉCEMBRE 1811. roches primitives, mais encore les divers produits auxquels on a donné le nom de roches plutoniques ou pyrogènes , et qui , en réalité, me paraissent tout aussi primitifs que les granités. Le granité forme plus de la moitié du sol des Côtes-du-Nord ; mais il n’y est point apparu d’un seul et même jet. Non-seulement les granités porphyroïdes ne sont pas contemporains des granités à petits grains; mais les époques d’éruption de ces deux roches ont été séparées par l’apparition des porphyres quarzifères. § Ier. Granité à petits grains ( système du Westmoreland et du Hundsrück , E. 25° W. — O. 25° S.}. — Le granité à petits grains forme, à l’E. de Saint-Brieuc, de grandes bandes alignées dans la direction E. 25° N. — O. 25° S. La première s’étend d’Iffiniac à l’Isle ; la seconde passe par Lamballe; la troisième court de la Mallioure au Guildo; enfin , une quatrième bande commence à Plélan (route de Paris à Brest), passe par Dinan et se prolonge dansl’llle-et-Vilaine. Il existe, à un quart de lieue de Dinan, une source d’eau minérale ferrugineuse dont les vertus hygiéniques sont très faibles. A l’0. de Saint-Brieuc, le granité ancien est confu- sément enclavé dans les granités porphyroïdes, comme si ces der- niers l’eussent empâté, et peut-être même refondu lors de leur apparition au jour. Le granité à petits grains contient beaucoup de mica , se désa- grège facilement et peut à peine servir à l’empierrement des rou- tes. Les environs de Dinan fournissent seuls d’assez bon moellon et un peu de pierre de taille. § IL Roches feldspathiques ( système des ballons des Vosges et du Bocage normand , direction E. 15° S. * — O. 15° N.). — La période de calme qui suivit l’éruption des granités à petits grains a été mar- quée par le dépôt des assises supérieures du terrain de transition. La seconde révolution du globe, celle qui a fait surgir les ballons des Vosges et les collines du Bocage normand, mit fin à ce dépôt. M. Dufrénoy rapporte à cette perturbation ( Annales des Mmes , 3e série, t. XIV, p. 213 ) la direction des montagnes Noires et des buttes de Clécy (Calvados), la forme de la côte méridionale de la presqu’île armoricaine depuis la pointe du Baz (Finistère) jus- qu’à l’embouchure de la Loire, etc. Cette perturbation s’est mani- festée en Bretagne par l’apparition des porphyres quarzifères. Les porphyres quarzifères ne se sont point épanchés par grandes mas- ses dans le département des Côtes-du-Nord. Les gisements les plus importants de cette roche se voient entre Lannion et Faim- pol, entre Callac et la limite du Finistère, aux environs de Saint- Brieuc. Ces îlots ne sont pour ainsi dire que les bouches de dé- SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1841. 1 27 gorgement d’une grande masse intérieure de porphyres dont la force d’éruption a été assez énergique pour soulever et fissurer les schistes, mais trop faible pour y ouvrir une grande et large voie d’épanchement. M. Dufrénoy, qui a été à même d’étudier les por- phyres quarzifères sur un grand parcours, a fait voir que l’appa- rition des porphyres en Bretagne doit être placée entre la forma- tion des granités à grains fins et celle des granités porpliyroïdes. Cette opinion repose principalement sur des observations faites aux mines de Littry ( Calvados) ; car il résulte de ces observations que les porphyres ont été soulevés antérieurement au terrain houiller, lequel est lui-même plus ancien que les granités por- phyroïdes. § III. Granité porphyroïcle ; granité amphibolique {système des Pays-Bas et du S. du pays de Galles , E. 5° S. - — O. 5° N,). — Le granité à gros grains renferme de volumineux cristaux de feld- spath gris, bleuâtre ou blanc. Le feldspath qui forme la pâte de la roche est rosé; il est moins micacé, moins fissile que le granité à grains fins. On voit en plusieurs points de nombreux filons de granité porphyro'ide pénétrer dans le granité à grains fins. — Le granité porphyroïde est ordinairement d’excel- lente qualité; il alimente de nombreuses exploitations à Mégrit, à Beaulieu, à Plœuc, à Moncontour, à Rostrenen.il constitue le grand massif compris entre Callac et Saint-Brieuc. Les granités de Saint-Brieuc s’expédient par la mer et la Seine jusqu’à Paris. Ils sont à grains moyens. Le mica en est brun , le quarz gris , le feld- spath blanc-bleuâtre. A l’O. et au N. de Lannion , la côte et les îles de la Manche sont formées par un granité d’un très beau grain analogue à celui qu’on exploite à l’Aber-Ildut (Finistère), et qui a fourni le socle de l’obélisque de Louqsor. Au N. de Paimpol , le granité renferme une forte proportion d’amphibole , et forme une roche tout-à-fait remarquable par la beauté de ses couleurs et la variété de sa structure. On rencontre également des granités amphiboliques â l’E. de Saint-Brieuc, entre la mer et Lamballe. On le voit , entre Lamballe et Saint-Aubin, s’intercaler dans les granités anciens et y apparaître en beaux por- phyres verdâtres qui seraient susceptibles d’un magnifique poli, et dont les nuances rappellent les roches de Corse ou d’Italie , si recherchées dans les arts d’ornement. M. Dufrénoy a décrit dans son Mémoire les filons remarquables que le granité amphibolique forme , au cap Fréhel , dans les escarpements des poudingues siluriens de la côte. § IV. Roches amphiboliques , filons métallifères {système des îles SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 18 H. I 28 de Corse et de Sardaigne, N. -S.). Indépendammentdes trois grand es perturbations qui ont donné à îa Bretagne ses traits généraux, le relief de cette contrée a subi des dislocations de détad dues à l’é- ruption des roches ainphiboliques. Certaines directions voisines de la direction N--S. paraissent se rattacher à l’apparition de ces roches (1). Telle est la direction des rivages depuis Saint-Michel- en-Grève jusqu’à l’île Grande ; depuis Tréguier jusqu’aux Roches Noires, etc. La direction N. -S. se retrouve dans le cours d’un grand nombre de vallées. Enfin, on l’observe, à quelques dévia- tions près , dans les filons métallifères de Poullaouen et du liuel- goët (Finistère), de Ruebourgeois et des Boissières (Côtes-du-Nord), de Pontpéan (Ille-et-Vilaine). L’on manque de points de repère pour fixer d’une manière précise l’âge des roches ainphiboliques et des filons métallifères de Bretagne. On voit qu’il faut les y pla- cer entre les granités poi phyro'ides et les terrains tertiaires moyens ; mais il est difficile de trouver, dans la liste des systèmes de soulè- vement compris entre ces deux époques , un système auquel on puisse les rapporter d’une manière satisfaisante , et c’est avec doute que je les ai rapprochés du système des îles de Corse et de Sardaigne. Peut-être même ya-t-il eu plusieurs époques d’érup- tion pour les roches ainphiboliques et les filons métallifères. Le diorite est la plus abondante des roches ainphiboliques du département des Côtes-du-Nord; il est habituellement composé d’amphibole verte et de feldspath blanc. Quand l’amphibole do- mine , la roche a une teinte vert-noirâtre , et mérite alors le nom d’amphibolite. Le diorite contient fréquemment, de la pyrite de fer (environs de Saint-Brieuc). Les diorites abondent entre Saint- Brieuc et Guingamp. La montagne isolée du Menez-Bré , qui a 3Q00m de circonférence à la base et 300m de hauteur, est formée d’un diorite riche en amphibole lamelleuse; qui surgit au milieu des granités poi phyroïdes , et s’y ramifie en plusieurs filons , ce qui établit clairement sa postériorité sur cette roche. On trouve à la pointe de Pléneuf (route de Saint-Brieuc à Erquy) une roche dioritique qui agit sur la boussole. Les grèves de Saint-Quay fournissent un sable noir, brillant, magnétique , riche en acide titanique. Aux environs de Loudéac, les diorites sont décomposés et forment des masses brunes terreuses , à odeur et saveur argi- leuse , qu’on a employées comme pouzzolanes pour les travaux du canal de Nantes à Brest. Une masse dioritique fort remarquable (i) Celte relation a été signalée pour la première fois par M. J. Des- noyers. SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1844. 129 par son développement est celle qui s'étend de Gurunhuel à Lo- liuec , au S. de Belle-Isle ; l’origine des nombreux gîtes de mi- nerai de fer exploités pour l’usine de Coat-an-Noz se relie à l’ap- parition de cette masse. En face de Lézardrieux , on trouve une belle hémithrène composée de calcaire blanc lamellaire et d’am- phibole en cristaux d’un beau vert foncé. Dans la dernière moitié du siècle précédent, il existait aux envi- rons de Châtelaudren une vaste exploitation de minerai de plomb; quelques haldes de déblais et un chemin ferré de scories signalent encore aujourd’hui l’orifice des principaux puits et l’emplacement de l’usine. Les mines de Châtelaudren comprenaient jusqu’à 15 fi- lons de galène épars çà et là, soit au S. soit à l’E. de ce bourg, les uns dans le granité , les autres dans les schistes modifiés. Leur direction générale était une ligne N.-N.-O.— -S.-S. -E.; les principaux étaient ceux de Ruebourgeois et des JBoissières. La découverte de plusieurs de ces gîtes paraît due à une compagnie anglaise formée en 1711. On comptait, en 1784, sur l’exploitation 500 ouvriers; la production s’élevait à 2,200 quintaux anciens de plomb et à 1,100 marcs d’argent, ce qui représente une valeur de 165,000 fr. Mais les dépenses surpassaient de beaucoup les produits , et eu 1790 l’exploitation fut définitivement abandonnée. Il existe à Coat-an-Noz , près de Belle-Isle , des traces d’an- ciennes mines de plomb argentifère. La direction du filon , peu constante du reste, se rapprochait généralement de l’E.-N.-E., et son inclinaison était d’environ 45° vers l’E. L’existence de ce gîte était déjà connue en 1714. Il fut comme retrouvé en 1763 et ex- ploité par la Société de Poullaouen ; il était déjà abandonné à l’époque de la révolution. La concession de Poullaouen s’étend à la fois sur le Finistère et les Côtes-du-Nord. Elle comprend dans les Côtes-du-Nord les filons de plomb argentifère de Carnoët et de Plusquellec, et le filon cuivreux de Quénécan ; aucun d’eux n’est exploité aujourd’hui. En 1834, on avait entrepris une recherche de galène à Cabrac, au S.-E. de Dinan, sur la frontière commune des Côtes-du-Nord j et de l’Ille-et-Vilaine. La belle apparence des échantillons que j’ai ! vus à Dinan ne semble point justifier l’abandon de cette première I tentative. § V. Gneiss. — Je pense que le gneiss ne constitue point une ! formation distincte. Cette roche est, ou un accident du granité au ] contact des roches stratifiées , ou une modification des schistes I cambriens au contact des terrains ignés. C’est à une pareille mo- ; dification que j’attribue l’origine des lambeaux de gneiss indiqués Soc. géol. Tome II, 2e série. cj 130 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1814. sur la carte, au Guildo , à Belle-ïsle , près de Saint-Brieuc. Au voisinage des granités amphiboliques , les gneiss sont eux-mêmes imprégnés d’ampliibole. TERRAIN DE TRANSITION. L’étage cambrien et l’étage silurien existent dans les Cotes-du- Nord ; l’étage devonien ne s’y rencontre pas. § Ier. Étage cambrien. — Les couches cambrienne&sont les seules que les granités aient redressées , et sont en conséquence aussi les seules qui puissent manifester la direction propre au soulèvement de ces granités; mais, indépendamment de leur premier redres- sement, elles ont dû subir plus ou moins l’influence des pertur- bations ultérieures. Si donc tout système de couches orienté E. 25° N. — O. 25° S. peut être rangé avec certitude dans l’étage cambrien, il n’est pas également vrai que tout système de couches cambriennes soit nécessairement orienté E. 25° N. — O. 25° S. Ces quelques mots suffisent pour faire entrevoir la complication de directions dont l’étage cambrien est susceptible en Bretagne. Les schistes cambriens ont éprouvé au contact des roches graniti- ques des modifications profondes, auxquelles je rapporte l’origine des micaschistes qu’on trouve presque constamment entre le gra- nité et les schistes cambriens purs. L’île Mihau, sur la côte de Lannion , présente un contact fort intéressant du granité et des schistes cambriens ; on voit à mer basse, sur son rivage méridio- nal , des blocs de granité empâter totalement des fragments de schistes de toutes formes et de toutes dimensions ; les portions de schiste ainsi enclavées dans le granité sont brillantes, dures, so- nores, cristallines , et manifestent tous les caractères d’une roche demi-fondue. Les porphyres quarzifères et les roches amphiboliques ont , comme les granités, métamarphisé à leur contact les schistes cam- briens ; mais leur action a été beaucoup moins énergique que celle des granités. — Aux environs de Saint-Brieuc , les schistes cam- briens présentent un double métamorphisme dû aux granités et aux roches amphiboliques. Ces schistes sont très chargés de mica, entremêlés de bancs d’un grès quarzeux très dur, avec pyrites, et abondent en amphibole, en staurotides et en tourmalines. Les schistes cambriens, non modifiés, sont d’un noir bleuâtre, satinés, souvent talqueux. Leur partie inférieure est caractérisée par de minces assises d’un quarz bleu, qui, dans la partie N.-E. du département, se prolongent presque sans interruption vers le SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1814. 13! S. -O. , sur 15 lieues de long. L’indestructibilité de ees bancs de quarz permet de reconnaître les schistes cambriens, quand le mé- tamorphisme voile les caractères ordinaires de ces derniers (envi- rons de Saint-Brieuc, baie de Saint-Michel-en--Grèvc, etc.). Les schistes cambriens fournissent quelques ardoises; mais ces dernières sont toujours de très mauvaise qualité. — Dans le sud du département, les schistes cambriens sont réduits en un détritus au milieu duquel les rares débris des lits de quarz forment les seuls matériaux applicables à la construction des habitations et à l’empierrement des routes. Si l’ardoise manque dans les schistes cambriens, cet étage con- tient, en revanche, des richesses assez importantes en minerais de fer. Ces minerais se trouvent au voisinage des roches ignées, soit granitiques, soit amphiholiques, et leur origine paraît se rattacher à l’éruption de ces roches. Les minières de Goarec, du Menez, de Catenoy, de Corlay, de l’Hermitage, de Coat-an-Noz, fournissent du fer oxydé hydraté, dont la richesse moyenne est de 33 p. 100. — Le gîte du Bas-Valet ( près Quintîn) se relie aux roches amplri- boliques, si même l’amas ferrifère qu’on y exploite n’est point une variété de ces roches. Ce gîte forme un puissant amas. Le minerai qu’on en extrait est un silico-aluminafe de fer, mêlé ou combiné avec de l’oxyde magnétique. Il est noir, sans éclat, à structure oolitique; il contient près de 60 p. 100 de fer. Il n’y a guère plus de vingt-cinq ans qu’on l’employait pour l’empierre- ment des chemins; il forme maintenant la plus riche exploitation du département. § IL Étage silurien. — L’allure de la formation silurienne e»t moins confuse que celle de la formation cambrienne ; car, ayant été déposée postérieurement au granité à petits grains, elle a subi une perturbation de moins que la formation cambrienne, et n’a dû être disloquée que par les porph yres quarzifères, les granités por- pliyroïdes et les roches amphiboliques ; mais si son allure est moins compliquée, sa composition est en revanche plus variée. Le métamorphisme par les porphyres quarzifères est particulier à la bande de terrains siluriens qui court de Paimpol à Lannion. il a été parfaitement observé et décrit par M. Dufrénoy. Ce méta- morphisme consiste dans un passage graduel des schistes à des amygdaloïdes, tantôt verdâtres, tantôt brunâtres. Malgré cette al- tération, les parties amygdalaires ont conservé leur texture géné- rale, ainsique leur stratification, qui est E. 10° S. — O. 10° N. Les amygdaloïdes brunâtres sontpresque toujours à cavités vides, comme une scorie volcanique. Lorsque les cavités sont remplies , 132 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1 844. elles contiennent, soit des noyaux verdâtres plus durs que la masse, soit des noyaux siliceux. La modification des schistes siluriens par les granités ne semble pas avoir eu la même intensité ni donné naissance aux mêmes mi- néraux que celle des schistes cambriens. D’une part, en effet, on passe plus vite, en quittant le granité , des strates modifiés aux strates non modifiés. De l’autre, le mica, les staurotides , les tourmalines, qui caractérisent les schistes métamorphiques de la formation cambrienne, semblent généralement remplacés par les mâcles dans ceux de la formation silurienne. L’étang des Salles est depuis longtemps célèbre par la beauté des mâcles qu’il fournit aux cabinets de minéralogie. Ces dernières se trouvent citées dans un petit traité que Roch-le-Baillif publia en 1577 sur l'antiquité et les singularités de la Bretagne armorique. Près de cet étang , M. Boblaye a découvert dans les schistes mâclifères des Orthis (spirifer ) et des trilobites du genre Calymene. Cette découverte est très intéressante et ne peut laisser aucun doute sur la nature mé- tamorphique des schistes à mâcles ; elle ne permet plus de les ran- ger dans les terrains primitifs. Quant aux roches amphiboliques, comme elles ne se sont point fait jour par masses aussi considérables , ni peut-être à une aussi haute température, que les autres roches ignées , elles n’ont im- primé aux couches siluriennes que desmodificationspeu profondes. Les assises inférieures de l’étage silurien renferment de puissan- tes masses de poudingue et de grès. A Erquy, le schiste cambrien est recouvert par un poudingue composé de galets de quarz rose, dequarz laiteux et de quelques galets de schiste reliés par un ci- ment de schiste argileux rougeâtre. Les bancs de ce poudingue sont dirigés sur toute la côte E. 15° S. — O. 15° N. La mer les in- terrompt à l’O. ; mais on les retrouve de l’autre côté de la baie de Saint-Brieuc , entre Paimpol et Pontrieux. L’on ne trouve point de poudingue dans la partie méridionale du département. Labase de l’étage silurien y est formée par des quarzites ou grès à grains fins. Il existe une carrière importante de ce grès à une demi-lieue de l’usine des Salles ; elle fournit les pierres d 'ouvrage de tous les hauts-fourneaux de Bretagne ; on en vient même chercher de la Mayenne. Le grès se montre en bancs nettement stratifiés E. 15° S. — O. 15° 1\. , sur les bords du Blavet, près de l’abbaye de Bon- Repos. On le retrouve à Hemonstoii , dans la forêt de Convaux, près de Callac , sur les plateaux de Lanfains , aux environs de Broons, etc. Les assises schisteuses qui font suite au grès quarzite fournissent SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1814. 133 presque toutes les ardoises de Bretagne. Les ardoisières ont une grande importance dans le Finistère (à Châteaulin) , et surtout dans Maine-et-Loire (environs d’Angers); les produits qu’elles fournissent s’exportent dans une grande partie de la France. Le département des Côtes-du-Nord est à cet égard moins bien par- tagé. On exploite de l’ardoise à La Roche-Derrien, entre Callac et Rostrenen, et surtout aux environs de Mur, sur la rive gauche du Blavet. La direction des schistes de Mur est E. 10° S . — 0. 10°N., avec pente de 60° vers le N. Le grain de l’ardoise est beau, uni. La pierre est dure, sonore; mais le plan de clivage y manque de netteté. Dans l’E. du département , on trouve les ardoisières de Boquien , de Broons et de la Chapelle-Blanche. Les schistes siluriens deviennent, à mesure qu’on s'élève dans l’ordre de leur superposition, de moins en moins fissiles, de moins en moins ardoisiers ; puis ils prennent une texture grossière qui les rapproche de la grauwacke. Il est donc difficile de préciser le point où le grain du schiste est assez gros et assez lâche pour con- stituer une grauwacke proprement dite. L’amas calcaire de Car- travers se trouve précisément placé à ce degré, où l’indécision commence dans la dénomination des roches. Cet amas n’a que 20 ou 30 mètres d’épaisseur, et 250 mètres de long. On n’en connaît pas la profondeur. Il a été découvert au commencement du siècle dernier. Je le rapporte au Dudley-rock des Anglais. La grauwacke proprement dite forme dans les Côtes-du-Nord l’extrémité orientale d’une grande bande allongée qui, vers l’O. , commence à la rade de Brest (Finistère). La grauwacke est émi- nemment fossilifère dans le Finistère et s’y trouve, en certains en- droits, comme pétrie de débris d’encrines, de trilobites, despiri- fères, de productus, d’orthocères. 11 n’en est point de même dans les Côtes-du-Nord. TERRAIN TERTIAIRE. § Ier. Terrain tertiaire moyen. Les faluns de la Touraine se pro-? longent dans l’Hle-et-Vilaine , où l’on en observe encore d’assez nombreux lambeaux, et se terminent dans les Côtes-du-Nord par le petit dépôt isolé de Saint-Juvat ( au S. de Dinan). En certains points, le falun est exploité à ciel ouvert. En d’autres points , il faut, pour l’atteindre, traverser 15 mètres de sables et de cailloux roulés. § II. Terrain tertiaire supérieur. Les sables et cailloux roulés qui recouvrent les faluns de Saint-Juvat paraissent contemporains 134 SÉANCE DU IG DÉCEMBRE 1844. lie ceux que j’ai eu depuis occasion d’étudier en Sologue, et re- présentent comme les témoins d’une vaste nappe appartenant à la partie supérieure du terrain tertiaire , et due à un grand cata- clysme (système des Alpes occidentales ?) qui aurait en partie nivelé la Bretagne et la Normandie. Les lambeaux du terrain tertiaire supérieur , quoique de moins en moins étendus , de moins en moins épais à mesure qu’on avance vers l’O. , n’en sont pas moins reconnaissables dans les Côtes-du-Nord , où ils recouvrent un grand nombre de petits plateaux élevés à quelques dizaines de mètres au-dessus des vallées, et évidemment supérieurs à la limite des plus grands débordements des cours d’eau actuels. TERRAIN MODERNE. Le terrain moderne est représenté dans les Côtes-du-Nord par quelques petits dépôts de mauvaise tourbe, par des gisements d’ar- gile à poterie, par les restes d une forêt sous-marine que M. Le Maout, de Saint-Brieuc, a observés dans la baie de Saint-Brieuc, non loin de la pointe du Roselier, et qui semblent attester une dépression lente des côtes de la Manche , analogue, mais en sens inverse, à l’exhaussement graduel des côtes de Suède et de Nor- wége , par les alluvions de quelques vallées, et enfin par les atter- rissements de vases, de sables et de coquilles que la mer forme chaque jour dans un grand nombre des baies du rivage. M, Virlet fait observer que dans les départements méri- dionaux, où il a eu occasion d’observer récemment les gra- nités, c’est toujours le granité porphyroïde à gros grains qui est le plus ancien, quoiqu’il y traverse et englobe les gneiss et les schistes micacés , à Mont jeu , dans la vallée de Mes- vrin, aux environs de Couches (Saône-et-Loire), sur le ver- sant oriental de la chaîne du Pilât (Loire), à Larnage et à la montagne de l’Hermitage, près Tain ( Drôme), tandis qu’on voit toujours dans les mêmes localités le granité à petits grains s’injecter en filons, non seulement dans le granité porphyroïde , mais aussi dans les schistes micacés et argileux. M. d’Archiac fait observer qu’il est assez étonnant que, dans la pratique, on ne puisse pas séparer les granités à gros grains des granités à grains fins, puisqu’ils appartiennent à SÉANCE DU 6 JANVIER I8i5. 135 deux époques géologiques assez éloignées, entre lesquelles s’est opérée la sortie des porphyres. M. Virlet rappelle ensuite, relativement à l’âge des por- phyres , qu’il a annoncé , lors de la réunion à Chambéry, avoir trouvé des galets de porphyie au milieu des poudingues et conglomérats de la partie inférieure du terrain houiller des environs de Saint-Etienne et de Rive-de-Gier, ce qui doit évidemment faire remonter l’âge de ces porphyres à une époque antérieure, et il ajoute que depuis il a eneore eu occasion de constater également de nombreux débris por- phyriques dans les poudingues houillers du département de l’Ailier. M. Pomel ajoute qu’on trouve également des cailloux roulés de porphyre dans le terrain houiller de Brassae ( Haute- Loire). On lit une proposition de M. Angelot, qui est renvoyée au conseil. MM. Raulin et de Pinteville se succèdent dans la lecture du commencement d’un mémoire de M. Coquand sur les terrains stratifiés de la Toscane. Séance du 6 janvier 1 8 i 5 . PRESIDENCE DE M. D ARCH1AC . M. Raulin , vice-secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, qui est adopté. Le Président proclame membre de la Société : M. Jaiian, capitaine du génie, rue Grange-Batelière, n° 18 , à Paris, présenté par MM. Le Blanc et d’Etaule. è Le Président annonce ensuite deux présentations, DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part deM. de Fourey (Eugène), 1° Carte géologique du Finistèt'e (vote du conseil-général du département, session 136 SÉANCE DU 6 JANVIER 1845. de 1835) ; en 6 feuilles colombier, iinprim. lithograph. iîe Kaeppelin. Paris, 1844 ; 2° Carte géologique des Côtes- dm Nord (notice, explica- tive) ; in-8° , 196 p. Paris , Carilian-Gœury , 1844. De la part de M. Beaudouin (Jules), Description géologique de V arrondissement de Châtillon (Côte-d’Or) ; in-8®, lre partie, 124 p. Châîillon-sur-Seine, 1844. De la part de M. Fournet, Aperçus sur quelques phéno- mènes chimiques et de cristallisation produits dans les filons (Exlr. des Annales de la Société royale dé agriculture de Lyon ) ; in-8°, 35 p. Lyon, 1844. De la part de M. Ch. d’Orbigny, Dictionnaire universel d’ histoire naturelle ; t. Y., 57e et 58e liv. De la part de M. Lortet (P.) , Documents pour servir à la géographie physique du bassin du Rhône (Extr. des Annales de la Société royale d' agriculture de Lyon); in-8°, 44 p. , 5 pl. , 1 tableau. Lyon, 1843. De la part de MM. Lortet et Bravais , Rapport à M . le maire de Lyon sur les observations recueillies par la commis- sion hydrométrique; in-8°, 8 p. , 5 tableaux. Lyon, 1844. De la part de M. le baron Jomard, Notice sur la vie et les ouvrages de C.-L . Berthollet; in -8°, 91 p. Anneci , 1844. De la part de M. le chanoine Georges Carrel , 1° Notice sur quelques observations météorologiques faites à Aoste en 1843 (Extr. de la Bibliothèque universelle de Genève , mai 1844); in-8®, 12 p. , 1 tableau. Genève, 1844. 2° Notice sur les observations météorologiques faites ci Aoste en 1842 (extr, de la Bibliothèque universelle de Genève , février 1844); in-8°, 16 p., I pl. Genève, 1844. De la part de M. J. Bonjean, 1° Analyse chimique des eaux minéraîes cl’ Aix en Savoie ; in-8% 288 p. , 2 tableaux. Cham- béry, 1838. 2° Recherches chimiques , etc., sur les eaux de Challes en Sa- voie; in-8°, 15 p. Chambéry, 1843. De la part de M Domenget, Aperçu sur les eaux minérales de Challes en Savoie; in-8°, 39 p. Chain béry, 1841. De la paît de M. Constant Despine fils, Manuel topogra SÉANCE DU 6 JANVIER 1 8 4 5. 137 phique et médical de V étranger aux eaux dé A ix , en Savoie ; in-8°, 306 p., 2 pl. , 1 tableau. Anneci , 1813. De la pan de M. Socquet (J.-M.), Essai sur les eaux miné - raies de la Perrière près Mou tiers , en Savoie ; in -8°, 315 p. , J pl. Paris, etc. , 1824. De la part de M. Blanchet (Rod.), 1° Aperçu de V histoire géologique des terrains tertiaires du canton de V aud ; in-8°, 9 p. Vevey , 1843. 2° Essai sur V histoire naturelle des environs de Vevey ; in-8°, 62 p. Vevey, 1 843. De la part de M. le chevalier Orsi, Documents historiques sur les eaux thermales du hameau des Bains , en Tarentaise; in-8®, 67 p. , t pLMoutiers, 1836. De la part deM. Laissus (J.-A.), Manuel des baigneurs aux eaux thermales de Brides en Savoie; in 8°, 83 p. Lyon, 1835. De la part de M. Favre (Alphonse), Remarques sur les anthracites des Alpes (Extr. du t. IX des Mémoires de la So- ciété de phys. et d'hist. natur. de Genève) ; in-4°, 26 p., 2 pl. Genève , 1 844. De la part de M. le chevalier Despines, 1° Recherches sur les grêles auxquelles sont exposés les Etats de terre ferme de S.M. le roi de Sardaigne ; in-4°, 22 p. , 4 tableaux. Turin. 2° Observations sur les grêles tombées en 1840, etc . ; in-4°, 41 p. Turin , 1844. De la part de M. Agassiz (L.) 1° Tableau général des pois- sons fossiles rangés par terrains (Extr. de l’introduction des Recherches sur les poissons fossiles) ; in-4°, p. xxxm à xlïx. Neufchâtel , 1844. 2° Monographie des poissons fossiles du Vieux grès rouge ; texte, tre et 2e livraisons; planches, lro et 2e livraisons. Neuf- châtel , 1814. De la part de M. Jacquemont (Porphyre), Voyage dans l'Inde , par Victor Jacquemont, pendant les années 1828 à J 832 j texte et pl. 52e à 54e livraison. De la part de M. Gotta (Bernhard) , Geognostische IV an- ci erungen (Excursions géognosliques à Meissen, etc. ) ; in-8°, 64 p. , 3 pl. Dresde et Leipsick , 1838. Delà part deM. Catulle (T.-A.) , 1° Trattato, etc. (Traité SÉANCE DU 6 JANVIER 1845. 138 de la constitution géognostico-physique des terrains d’allu- vion ou postdiluviens des provinces Vénitiennes) ; in-8° , 4G7 p. Padoue, 1 841. 2° Sulle caverne , etc. (Sur les cavernes des provinces Vé- nitiennes) ; in-4°, 91 p. 9 pl. Venise, 1844. De la part de M. Scortegagna , Sulla formazione geolo- gica , etc . (Sur la formation géologique de la colline dite la Favorita , près Longino); in-8°, 25 p. , 2 pl. Vérone, 1 83 (» . De la part de MM. Villa (À. etF.-B.), Sulla constituzione , etc. (Sur la constitution géologique et géognostique de la Brianza et notamment sur le terrain crétacé) ; in-8% 46 p. , 1 carie et 2 pl. Milan , 1 844. De la part de M. Ghibellini (F.) Compendio , etc . (Intro- duction à un abrégé de géographie ancienne et moderne); in- 18, 1 6 p. Brescia , 1 844. De la part de M. Balsamo Crivelli (J.), Storia , etc. (Histoire du genre Gordius); in-4°, 24 p. , 1 pl. Milan, 1843. De la part de M. le baron Jacquemond (J.), Description historique de V abbaye royale d’ Hautecombe ; in -8°, 1 4 5 p. Chambéry, août 1843. Comptes-rendus des séances de l’académie des sciences ; 1844, 2e semestre, t. XIX, nos25 à 27. Annales des mines ; 4e série, l. V, 3e livraison de 184 4. Bulletin de la Société de géographie ; 3e série , t. Il, nos 9 à 1 1 . Septembre à novembre 1844. Annales de la Société d’ agriculture , etc. , du Puy , pour 1 8Zi 1 - 1 8/i2. Actes de la Société Helvétique des sciences naturelles ; 28e session; juillet 1843. U Écho du Monde Savant ; 1844, n° 51. L’Institut ; 1845, n° 575. Philosophical Transactions , etc. (Transactions philosophi- ques de la Société royale de Londres pour l’année 1844); 2e partie. 1 844. Novorum actorum , etc. (Nouveaux actes de l’Académie des curieux de la nature) ; t. XX, parties 1 et 2 ; 1843-1844. The Athenœnm ; n°s 895 à 897. The Mining Journal ; nos 487 à 489. 139 SÉANCE DU 6 JANVIER i 8 4 5 . De la part de M. Robert (Eugène), Une planche in-l° re- présentant la Paléontologie de la Nouvelle-Zemble et du nord de la Russie. M. le marquis de Roys offre, au nom du conseil-général du département du Gard, la Statistique du département du Gard, par M. Hector Rivoire, publiée sous les auspices de M. le Baron de jessaint, préfet, et de MM, les membres du conseil général; 2 vol, in-4°, avec une carte du département du Gard. Nîmes, 1842. On lit une lettre de M. de La Rocbe-Pouchin, qui remercie la Société de l’avoir admis au nombre de ses membres. Sur la proposition du Président , la Société vote des re- merciements à M. Cléinent-Mullet, qui a bien voulu se charger de faire les tables des 14 volumes de la première série du Bulletin. Conformément au règlement, le trésorier dépose sur le bureau l’état des finances de la Société et le projet de budget pour 1845. Les nominations des diverses commissions pour Tannée 1845, faites par le conseil, sont adoptées successivement par !a Société. Ces commissions sont composées de la manière suivante : Commission de comptabilité, chargée de vérifier la gestion du trésorier : MM. Delafosse, Clément-Mullet et Wal- FERD1N. Commission des archives , chargée de vérifier la gestion de l’archiviste : MM. Gu. d’Orbigny, Deshayes et Martins. Commission du Bulletin: MM. d’Archiac, de V erneuil et DE WEGMANN. Commission des Mémoires : MM. Le Blanc, Alc. d’Orbigny et Angelot. On procède ensuite à l’élection du président pour Tannée 1845. Avant le dépouillement du scrutin, la Société, confor- mément au règlement, annule six suffrages qui avaient été envoyés non cachetés. 140 SÉANCE DU 6 JANVIER 1845. M. Elle de Beaumont, ayant obtenu 96 suffrages sur 110, est élu président pour l’année 1845. La Société nomme ensuite successivement : Vice-présidents , MM. de Verneuil, Al. Brongniart, Thirria et Constant Prévost. Secrétaires , MM. Raulin et de Wegmann. Vice-secrétaires , MM. Le Blanc et Martins. Membres du conseil , MM. Angelot, d’Archiac, Alc. d’Or- BIGNY , DESHAYES, DE PlNTEVILLE , DeLAFOSSE et VlRLET d’Aoust. Il résulte de ces nominations que le bureau et le conseil se trouvent composés de la manière suivante pour l’année 1845. Président . M. Élie de Beaumont. M. de Verneuil. M. Brongniart (AL) V ice - prési den ts . M. Thirria. M. Prévost (Constant). Secrétaires. M. Raulin. M. de Wegmann. Trésorier. M. Viquesnel. Vice-secréta ires . | M. Le Blanc. | M. Martins. Archiviste. | M. Clément-Mullet. Membres du Conseil. M. Desnoyers. M. Walferdin. M. le marquis de Roys. M. d’Orbigny (Charles). M. Bontemps. M. Angelot. M. d’Archiac de Saint-Simon. M. d’Orbigny (Alcide). M. Deshayes. M. de Pinteville. M. Delafosse. M. Virlet d’Aoust. SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. 141 Séance du 1 3 janvier 1845. Présidence de M. Elie de Beaumont. M. Raulin, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée, La Société renvoie à l’examen du conseil une proposition de M. de Roys , relative au mode de remplacement des membres du conseil. Sur la proposition du Président, la Société vole à l’una- nimité des remerciements aux membres du bureau et du conseil pour 1844. M. d’Archiac remercie la Société en sa qualité d’ancien président. M. Élie de Beaumont adresse des remerciements à la So- ciété pour l’avoir appelé à la présider pendant l’année 1845. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Trochereau , rue de Nièvre , à Nevers (Nièvre) , présenté par MM. le comte de Choulot et l'abbé Landriot. Purgold, secrétaire de S. A. I. et R. madame l’archidu- chesse Sophie d’Autriche, à Vienne (Autriche), présenté par MM. Boué et Raulin. M. Michelin est admis sur sa demande à faire de nouveau partie de la Société. dons faits a la société. De la part de M. de Tchihatcheff (Pierre), Coup d'œil sur la constitution géologique des provinces méridionales du royaume de Naples ; in-8°, 285 p. , 1 carte , 1 pl. Berlin, 1842. De la part de M. le Ministre de la justice, Journal des Sa- vants ; décembre 1844. De la part de MM. Lyell et Faraday , Report , etc . (Rap - port de MM. Lyell et Faraday sur une explosion qui a eu lieu dans les mines de Haswell, et sur les moyens de pré- I 42 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. venir des accidents semblables); in-8°, 20 p. , 2 pi. Lon- dres, 1844. De ia part de M. Paillette (Adrien), 1 * Ensayos quimi- cos y etc. (Essais chimiques de plusieurs combustibles des Asturies) ; in*8°, 10 p. , 2 tableaux. Oviedo, 1844. 2° Apuntes historicos , etc. (Aperçus historiques sur les mines des Asturies) ; in-8°, h p. Ferrones, 1844. De la part de M. Cesare Pezza, Saggio , etc. (Essai d’une nouvelle théorie de l’écorce terrestre) ; in- 1 2, 1 36 p. Turin, 1844. Comptes’ rendus des séances deV Académie des sciences; 1845, 1- sem. T. XX, n° 1. Mémoires de V Académie royale de Metz ; xxve année, 1 843- 1844. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse } n° 89. I 8Z| \ . JJ Institut 9 1845, n° 576. The Athenœum , n° 898. The Mining Journal y n° 490. M. d Archiac communique à la Société la seconde partie de ses Etudes sur la formation crétacée des versants S. -O., N. et N.- O. du plateau central de la France (1). Dans la première partie de ces Etudes, M. d’Archiac avait décrit les couches de la formation crétacée qui, s’appuyant sur le ver- sant S. -O. du plateau central, s’étendent du S.-E. au N. O. de- puis les environs de Cahors jusqu’aux îles d’Aix et d’Oléran; dans la seconde , il expose les caractères et la disposition de celles qui leur correspondent au N. et au N. -O. du même plateau, depuis Cosne et Sancerre sur les bords de la Loire, yusqu’à l’embouchure de la Seine. Ces couches comprennent tout ce qui, dans cet espace, est représenté par une teinte verte, sur la belle carte géologique du royaume, due aux savantes recherches de MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont , c’est-à-dire les dépôts qui se sont formés entre la fin de h période oolitique et la craie blanche proprement dite. fi) La publication de la première partie avait élé commencée dans les Annales des sciences géologiques , I. 11, p. 121, i84o; mais ce recueil ayant cessé de paraître, l’impression du Mémoire a élé continuée par Fauteur. 143 SÉANCE DU *13 JANVIER 1845. Après avoir rappelé les publications dont cette zone crayeuse a déjà été l’objet, et signalé les diverses causes qui ont fait mécon- naître la véritable théorie des assises qui la composent, l’auteur jette un coup d’œil sur l’orographie et l'hydrographie de cette partie de la France , et établit les divisions suivantes dans l’en- semble des couches dont la description occupe les trois premiers chapitres de son travail. i*r groupe ( 3e étage. Craie de Blois, de Chaumont et de Vendôme. Craie jaune de Touraine (tu Tau de la Touraine). Craie micacée, avec ou sans silex ( tufaii de l’Anjou). Psa nullités, glaises et marnes à ostracées. Calcaire et macigno à trigonies, sa- bles et grès ferrugineux. Craie glauconieuse. psammites, sables et grès divers, argiles sableuses grises. Sables verts et argiles vertes. Calcaires jaunes. Dans le quatrième chapitre , le seul dont il sera question dans cet extrait, se trouvent d’abord résumés les détails relatifs au second et au troisième groupe, qui sont les mieux développés de cette zone. Le groupe de grès vert , dans tout le versant qui est au S. de la Loire, est composé de sables verts ou ferrugineux, de grès et d'ar- giles diverses dont le peu de constance dans les caractères et la po- sition relative ne permet pas d’y distinguer les trois étages établis pour le N.-O. Toutes ces couches plongent faiblement au N. et au N.-E. sous la vallée de la Loire. Les puits forés dans cette vallée ont permis d’apprécier la proportion de cet abaissement , la puissance des diverses assises, beaucoup plus considérable au N. que sur la limite méridionale du bassin, enfin leur relèvement et leur amincissement à l’O. Dans le département de Maine-et-Loire, les couches crétacées reposent sur le groupe inférieur de la for- mation oolitique , dans celui de la Vienne sur le groupe moyen de la même formation , dans ceux de l’Indre et du Cher presque constamment sur le groupe supérieur. La comparaison de l’allure souterraine des couches avec leur mode d’affleurement à la surface montre que , dans cette partie de de la craie blanche. 2e groupe de la craie tufau. À 5e 3® groupe du grès vert 4e groupe ( néocomien. ( SÉANCE DU 13 JANVIER IB^IDo ! 4.4 la vallée de la Loire, il existe une relation constante entre les don- nées géologiques et les résultats positifs ou négatifs des sondages artésiens. C’est ainsi que les puits forés à Tours et aux environs devaient réussir, puisque les couches traversées étaient dans leur position normale, tandis que ceux de Saumur et de Beaufort , entrepris au contraire sur le bord de deux failles presque per- pendiculaires l’une et l’autre, n’avaient aucune chance de succès. A partir de la vallée du Loir, et remontant vers le N., les sub- divisions établies dans le grès vert deviennent déplus en plus pré- cises. Dans la partie centrale et orientale du département de la Sarthe, et particulièrement dans les collines du Mans, dans celles de St Calais et à la montagne de Queux, entre Laferté-Bernard et Nogent-le-Rotrou , on trouve l’étage supérieur bien caractérisé. Ce sont des calcaires sableux et des rnacigno à Trigonies, puis des sables et des grès à gros grains, très ferrugineux, séparés des assises oolitiques moyennes, au N. et au N. -O. du Mans, comme à l’O. de Laflèclie , par des argiles grises , sableuses, giauconieuses ou pa- nachées du deuxième étage. Ce dernier se montre sous le précé- dent, avec des caractères plus prononcés , au N. du village de La- mennay; il repose sur le calcaire oolitique supérieur de Cherté et se développe vers le N. autour de Bellesme. Entre cette ville et Mortagne il est composé de psammites gris ou jaunes , de grès gris, d’argile cendrée et de calcaires marneux à points verts, re- posant sur l’étage inférieur. Celui-ci est formé d’argiles et de sable vert foncé , tandis que l’étage supérieur ne constitue plus que des buttes isolées. A l’O. , dans la direction d’Alençon et autour de cette ville, on ne trouve que des lambeaux peu épais de glaises sableuses vertes, de sables verts et quelquefois de marnes giauconieuses, recouvrant les divers groupes de la formation ooli- tique ou même le terrain de transition. Au N. de Mortagne, tout le groupe du grès vert est réduit à quelques couches formant une bande étroite, parfois discontinue, le long d’une ride assez prononcée , dirigée O. 31° N. , à E. 3l°S. Depuis le bord méridional de la forêt de St-Evroult, où le grès vert atteint une altitude de 311 mètres, toutes les couches s’a- baissent régulièrement vers les côtes de la Manche. Une coupe proportionnelle, de Châtellerault à Honfleur, complète l’idée déjà émise par M. Boblaye , d’un relèvement sensible des couches secondaires entre la Manche et la Loire, et dont l’axe passerait près du Mellerault avec la direction indiquée ci-dessus. Dans cette coupe, la plus grande différence entre les altitudes connues de la base du grès vert est de 44l mètres. Outre son relief, l’axe du SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. S 4 5 Mellerault présente encore cette particularité, que sur ses deux versants les couches crétacées offrent des différences très pro- noncées. Sur le versant N. , les sables et les argiles vertes de la base du groupe recouvrent constamment les couches oolitiques supérieures jusqu’aux falaises du Calvados. Les calcaires sableux et glauco- nieux du second étage acquièrent une grande épaisseur , et comme le premier étage manque complètement, ainsi que les couches à ostraéces au-dessus, la limite entre le groupe du grès vert et celui de la craie tufau n’a plus la précision qu’elle avait au S. ; elle devient même en quelque sorte arbitraire par la continuité , la liaison et les passages insensibles de toutes les assises jusqu’à la craie blanche. En étudiant la vallée du cours inférieur de la Seine, les ré- sultats négatifs ou positifs des divers forages entrepris depuis St- André et Eibeuf jusqu’au Havre sont venus confirmer les conclu- sions déduites des circonstances géologiques particulières de la vallée de la Loire. Ainsi dans chaque cas, le succès ou la non- réussite s’est trouvé parfaitement d’accord avec ce que l’on pou- vait prévoir de la position et de l’allure des couches traversées, ainsi que des dérangements partiels qu’elles avaient éprouvés, et qui suffisent, comme on sait, pour rendre toutes les tentatives plus ou moins infructueuses. Passant ensuite au second 'groupe , celui de la craie tufau , M. d’Archiac ensuit le développement et les modifications comme pour le précédent. Dans le département du Cher, il est composé île marnes grises glauconieuses, de calcaire blanc grisâtre, micacé, avec points verts et renfermant encore les fossiles qui les caracté- risent si bien à TE. , mais qui disparaissent dans le département de l’Indre, où la craie jaune de Touraine recouvre la craie mi- cacée. La superposition et les caractères de ces deux étages sont indiquésavec précision de Buzançais à Loches, comme de St-Aignan à Bléré ; mais L’étage inférieur que signale particulièrement la présence de V Ostrca bumriculata et des Exogyra columba et flabel - lata , n’est bien distinct que sur la limite du département de la Vienne, et dans les parties des départements d’Indre-et-Loire et de Maine-et-Loire qui y sont contiguës. L’étage moyen ou craie micacée forme des chaînes de collines dont le relief est n ttement accusé au-dessus des plaines environnantes , soit des deux côtés de la vallée de la Vienne et de la Creuse, soit plus à l’O. dans les petits chaînons qui , se dirigeant par Mirebeau ou par Loudun , Soc. gëol. Tome IJ, 2 e séria. 10 1 \ 6 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. suivent la rive gauche de la Vienne jusqu’à sa jonction avec la Loire. La vallée de la Loire, depuis Mosne et Gangey, à LE. d’Am- boise, jusqu’aux environs de Candes , c’est-à-dire sur une lon- gueur de 24 à 25 lieues, est presque entièrement ouverte dans la craie jaune de Touraine , dont l’épaisseur est de 50 à 55 mètres. A l’E. elle est surmontée par la craie à silex plus récente de Blois et de Chaumont, à l’O. et au S. elle repose partout sur la craie micacée. A la hauteur de Tours, les couches se correspondent des deux côtés de la vallée , mais à l’E. et à l’O. les dislocations sont fréquentes. L’une des plus remarquables a fait alfleurer au N. la craie jaune dans les escarpements qui entourent Châteaudun, et où abondent les corps auxquels M. d’Archiac a donné le nom à’ Amphorites. Cette craie peut se suivre jusqu’à Vendôme, où elle est recouverte par une craie à silex semblable à celle de Blois. En descendant la vallée du Loir , la craie jaune devient de plus en plus sableuse , passe vers le bas à la craie micacée, et toutes deux diminuent sensiblement d’épaisseur à mesure qu’on approche de La Flèche. Autour de cette ville, l’étage inférieur prend au con- traire un développement remarquable et des caractères particu- liers. A sa base est le banc à ostracées, puis au-dessus viennent des glaises, dessables et des psammites d’un gris vert , que recouvrent le second et le troisième étage , réduits à quelques mètres d’épaisseur. Dans ces mêmes collines on voit à une distance de 8 mètres seulement, l’un au-dessus de l’autre, les deux bancs d 'Exogyrci columba, qui, dans la vallée de la Loire, sont séparés par un ensemble de couches d’environ 100 mètres. L 1 0strea biau* riculata etl ' Excigyra JlabeUata semblent appartenir exclusivement au banc inférieur du troisième étage. Plus au N. , la craie de Touraine a disparu ; la craie micacée présente çà et là quelques lambeaux. L’étage inférieur est encore bien caractérisé dans les collines du Mans , mais on n’en trouve plus de trace vers Alençon, ni sur la rive droite de la Sarthe. Aux environs de St-Calais, de Vibraye,cle Laferté-B( rnard, etc., la craie micacée repose sans intermédaire sur les sables et les grès ferrugineux ou sur les calcaires sableux qui en dépendent; et des trois étages du second groupe, il ne reste plus que la craie micacée, marneuse, un peu glauconieuse , occupant quelques points isolés dans le département de la Sarthe, et qui cesse tout-à-fait dans celui de l’Orne, où le groupe du grès vert atteint seul l’axe du Mellerault. Au N. de cet axe, le second étage du grès vert est recouvert SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. H 7 immédiatement par une craie marneuse , micacée , un peu glau- conieuse, qui s’y lie d’une manière assez intime , et dont les fos- siles sont d’ailleurs peu caractérisés, excepté Ylnoceramus my- ti loi de s. En s’avançant vers les bords de la Seine, le passage de cette craie à la craie blanche proprement dite n’est pas moins in- sensible , et la difficulté de préciser la limite de ces modifications se reproduit partout dans les escarpements qui bordent la rivière jusqu’à son embouchure , et dans les falaises qui remontent au N. du Havre vers Fécamp. Dans la comparaison , que fait ensuite M. d’Archiac, des diverses parties du bassin crétacé clu N . de la France qui sc prolonge en Belgique et en Angleterre , il montre que le groupe néoçomien , ou groupe inférieur de la formation , constitue seulement , depuis les environs de Bar-le-Duc jusqu’au pied des collines de Sancerre, une bande étroite , continue, dirigée N.-E. S. -O. , qui marque le rivage S.-E. du golfe crétacé sur une longueur d’environ 51 lieues. Au N., à l’O. et au S. du bassin , on n’en voit aucune trace. Ce n’est qu’au-delà du détroit que M. Fitton a signalé récemment, à la base du grès vert inférieur du Kent et du ïiampshire, un certain nombre d’espèces fossiles qui caractérisent en général les dépôts les moins anciens du groupe néocomien. Les couches lacustres, Puviati- les, torrentielles oju de mélange du groupe weaîdien n’ont de repré- sentant sur le continent que quelques traces indiquées dans le Bas-Boulonnaiset dans le pays de Bray : ainsi la plus grande partie du groupe néocomien n’a pas au N. d’équivalent marin. On a souvent invoqué le paraléllisme du grès vert de l’E. du bassin avec celui des côtes d’Angleterre; mais l’analogie cesse dès que l’on passe à quelques lieues au N. de la ligne de partage dirigée N. -O. S.-E. , ou mieux O. 33° N. à E. 33° S. de la pointe orientale du Bas-Boulonnais au Catelet. Ainsi, en Belgique et jusque sur les bords du Rhin, comme l’auteur s’est attaché à le démontrer dans un mémoire précédent, rien ne représente le troisième groupe. La limite du grès vert paraît se trouver à 7 ou 8 lieues au N de la ligne de partage , et s’étendre parallèlement à cette ligne de Landrecies et Lillers au cap Blanc-Nez. Au S. est une seconde ligne de partage parallèle à la précé- dente, et qui s’étend du Mellerault jusqu'à St-Amand sur la li- mite des départements de l’Yonne et de la Nièvre. Cette ligne n’est que le prolongement S.-E. de l’axe anticlinal du Mellerault, et dont on peut encore suivre les traces au N. -O. , ou mieux à l’O. 31° N. à travers les départements du Calvados et de la Manche, jusque sur les côtes au N. de Barne ville. Au S. et à 10 de cet axe 1 4 8 SK A N CF. DU H JANVIER 1845. on trouve à la vérité l’équivalent du troisième groupe qui manque dans la Belgique ; niais il y présente des différences essentielles dans les caractères pétrographiques et zooîogiques, comparés à ceux des couches contemporaines de la partie E. et N. du bassin en France , et de la partie 3N.-0. en Angleterre. Vers l’extrémité S -E. de la ligne de partage, ces différences sont graduelles comme on pour- rait l'attendre de l’ancienne existence sur ce point d’un large canal ou détroit, et elles 11e sont réellement complètes que lorsqu’on inet en parallèle les rivages opposés du Perche, du Maine, de l’Anjou et de la Touraine avec ceux des Ardennes , de la Cham- pagne et de la Bourgogne. L’épaisseur du groupe sur ces divers points est aussi dans le même rapport, c’est-à-dire qu’elle est la plus grande sur les rivages opposés de l’E. et de l’O , et qu’elle est la moindre au S. Si l’on prolonge au N .-O. la ligne de partage de l’Artois et celle du Mellerault, la première, en s’inclinant à l’O. , suit l’axe de la vallée de Weald , dont la continuation sépare le bassin tertiaire de Londres de celui de Hamspliire , et la seconde va coïncider avec le rivage crétacé le plus occidental du Devonshire. Au S.-E. , la zone du groupe néocomien se trouve comprise entre les extrémités de ces deux mêmes lignes prolongées , comme , en Angleterre, le groupe wealdien ne dépasse pas non plus leurs pro- longements directs. Dans le groupe de ta craie tufau , des trois étages de l’O. , le premier et. le troisième manquent complètement à l’E. , le second seul y est représenté par un ensemble de couches réunies sous le nom de craie tufau , et caractérisées par les mêmes fossiles que la craie giaüccnieuse de Rouen , que la craie marneuse de Wis- sant , que celle enfin qui leur correspond dans les comtés du S. et du S.-E. de l’Angleterre. C’est entre Sancerre et Vierzon , c’est-à- dire quelques lieues plus à l’O. que le groupe néocomien , que cessent les caractères zoologiques les plus tranchés de la craie tu- fau de l’E. et du N. de la France. A mesure qu’on s’avance vers l’O., d’autres corps organisés viennent caractériser les couches du même âge, et ceux de l’E. qui s’y rencontrent encore, au lieu de se trouver à un niveau constant, sont dissémines dans diverses as- sises, et plusieurs même vivaient déjà à l’époque du grès vert de ce coté de la ligne du Mellerault. Les couches crayeuses et sableuses inférieures à la craie blanche, dans la Belgique et aux environs d’Aix- la -Chapelle , appartien- nent à ce second groupe, et leur rivage méridional est en partie marqué par le poudingue appelé tourtin. Ce poudingue, dont la SEANCE DU 13 .JANVIEPt 1845. 149 relation avec le troisième groupe n’est pas d’ailleurs bien connue repose sur les terrains anciens de Maubeuge à Lille et au-delà, parallèlement à la ligne de l’Artois. La puissance totale des trois étages de l’O. correspond à celle de la craie tufau de TE. et la dépasse même sur plusieurs points, surtout dans la partie qu’occupe aujourd’hui la vallée de la Loire et jusqu’à 12 ou 15 lieues vers le S. La largeur de la zone for- mée à l’E. par le second et le troisième groupe réunis, est beau- coup plus étroite qu’à LO. et au S. , circonstance due à l’inclinai- son des couches, qui est plus prononcée dans la première direction que dans les deux autres. En séparant de la craie de Touraine, la craie de Blois , de Chau- mont et celle de la partie supérieure des escarpements de Ven- dôme, l’auteur a voulu seulement indiquer les différences tran- chées que présentent ces deux étages , sans prétendre qu’ils ne puissent être rapportés au même groupe, la relation de la craie de Blois avec la craie blanche lui étant encore inconnue; mais ce qui paraît certain , c’est que cette dernière, comme l’indique la carte géologique de France , ne s’étend pas à l'O. de l’axe du Mellerault. La craie blanche , dont la plus grande épaisseur se trouve au- dessous de la vallée de la Seine, se prolonge au contraire en Bel- gique jusqu’à Maestricht et dans toute la partie orientale de l'Angleterre ; mais on doit remarquer que sa puissance est en- core très faible, précisément sur la frontière du département du Nord, laquelle coïncide à ti ès peu près avec les anciens rivages du second et du troisième groupe. Enfin la craie supérieure de Bel- gique est pour ainsi dire reléguée au N. de la ligne de partage de l’Artois et même de l’ancien rivage du second groupe, et s’il en existe quelques traces au S. , c’est vers le milieu du bassin occupé par la craie blanche qu’il faut les chercher, et où elles présentent des caractères si différents de ceux des couches du N. qu’on a pu hésiter longtemps à les regarder comme contempo- raines. M. d’Arcliiac , appliquant ensuite ce mode de recherche aux couches tertiaires qui dans ce même espace ont succédé aux dé- pôts secondaires, fait voir que les assises tertiaires inférieures du N. de la France dont les groupes s’échelonnent du N. au S. , viennent s’appuyer au pied du versant N. de la ligne du Melie- rault qu’elles ne dépassent pas. La ligne de partage des eaux de l’Artois et de la Flandre sépare de même le bassin tertiaire de la Belgique de celui de la Seine, comme on a vu le prolongement de SEANCE DU 13 JANVIER 1845. 150 l’axe de la vallée de Weald séparer le bassin de Londres de celui de l’ile de Wight. Quoique l’ouverture du canal de la Manche soit sans doute très récente , le relèvement des couches des deux cotés du détroit vers les côtes actuelles permet de penser qu’à partir de l’époque des ligniles, dont les dépôts sont si parfaitement semblables depuis la Champagne jusque dans le Berkshire, il existait, à l’endroit même du détroit, un bombement sous-marin dirigé N.-E. S. -O. , comme le rivage S.-E. du golfe crétacé parallèle lui-même au système de la Côte-d’Or. Ce bombement donna lieu aux diffé- rences qu’on observe entre les dépôts tertiaires d’Angleterre, d’une part, et ceux du N. de la France et de la Belgique, de l’autre. 11 devait peu s’étendre au N. de Calais, et la séparation des bassins de Londreset deBruxelles, malgré l’incertitude que peuvent laisser les caractères orographiques du sol actuel, avait probablement lieu suivant une ligne tirée des environs de Calais vers Malines, passant un peu au-dessus de Gand, et laissant ainsi au N. les couches du London-clay et du crag de la province d’Anvers. Pendant l’époque tertiaire , non plus que pendant la période crayeuse, ces diverses parties du grand bassin n’étaient pas toutes complètement isolées les unes des autres , et ces lignes de partage, sans être tout-à-fait émergées , pouvaient se trouver cependant sous une si faible profondeur d’eau que les animaux qui vivaient et les sédiments qui se déposaient fussent , de part et d’autre de ces digues ou banquettes sous-marines , daps des conditions phy- siques assez variées pour rendre compte des différences que pré- sentent aujourd’hui des fossiles et des roches du même âge. Lorsque le terrain tertiaire moyen commença à se déposer, la ligne du Mellerault, cessant de manifester son influence, permit aux poudingues, aux sables et aux grès marins supérieurs , ainsi qu’aux marnes et aux calcaires lacustres qui leur ont succédé , de s’étendre librement depuis le nord de la France jusqu’au pied du plateau central, et desplaines de la Champagne jusqu’aux terrains anciens de la Bretagne. Mais si , conformément à l’opinion de MM. Desnoyers et Lyell, on doit regarder les faluns coquilliers de la Bretagne, ceux de la vallée de la Loire, et peut-être aussi les sables de la Sologne qui s’y rattachent, comme parallèles au crag d’Angie- têrre et de Belgique , les différences organiques si considérables qu’on observe entre les premiers de ces dépôts et les seconds se coor- donnent encore à la ligne du Mellerault, dont le prolongement est indiqué au N.-O. par une ligne de partage qui s’étend de St- Patrice-le-Clay à St-Pierre-des-Moitiers. Les coquilles trouvées SEANCE DU 13 JANVIER 1845. 151 dans le Cotentin et si parfaitement identiques à celles du crag rouge du Sufl’olk , se rencontrent précisément dans des couches adossées au pied N. de cette ancienne barrière. Elles ont pu être ainsi en relation directe avec la nier du crag, et séparées au con - traire de celle des faluns qui ne dépassait pas non plus le prolon- gement S.-E. de cette ligne. On remarquera encore que ces co- quilles du crag du Cotentin se trouvent aussi au N. -O. de l’axe du bombement, qu’on a supposé exister pendant la période ter- tiaire à la place du canal de la Manche, et en-deçà duquel il n’y a aucune trace du crag ni d’autres dépôts de cet âge. « Nous sommes donc arrivé à reconnaître, dit M. d’Archiac, » une certaine corrélation entre les caractères orographiques et » hydrographiques du sol actuel , et les différences organiques et » inorganiques des dépôts qui se sont succédé depuis la fin de la » période oolitique jusqu’à l’époque du grès de Fontainebleau et » même au-delà. Cette coordination à deux lignes parallèles de » la plupart des changements qui se sont produits ne peut être le »> résultat du hasard ou de causes fortuites , qui n’influent jamais » avec cette permanence ni avec cette espèce de symétrie , et ces » lignes doivent traduire encore pour nous l’orographie du sol » immergé pendant ce laps de temps. Mais ce qui n’est pas moins » digne de remarque, c’est que cette disposition du sol sous-marin » n’ait pas été plus influencée elle-même dans ses effets immé- » diats par les grands bouleversements que nous savons être sur- » venus, pendant cette longue période, dans une partie peu éloi- » gnée de l’Europe occidentale etdont iis ont si puissamment mo- » difié le relief. Ces bouleversements ont sans doute occasionné » des changements généraux dans les sédiments et les êtres orga- » nisésdes formations et des principaux groupes ; mais les modifi- » cations locales des étages sont presque toujours restées subor- » données aux lignes que nous avons indiquées. » Passant à l’explication des faits qu’il a énumérés dans son mé- moire, l’auteur s’attache à démontrer, sans toutefois donner à son hypothèse une valeur absolue, que ces faits peuvent résulter de certaines combinaisons dans les mouvements oscillatoires du sol immergé ou émergé , mouvements en rapport avec les diffé- rences organiques et inorganiques des couches. La profondeur relative des eaux dans les diverses parties du bassin à tel ou tel moment donné, a été également en rapport avec ces différences. Il applique successivement ce point de vue théorique à chacune des principales époques qu’il a décrites, faisant voir en outre que l’influence de Taxe du Mellerault ne commence pas seulement SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. avec la période crayeuse, mais s’e^t manifestée pendant toute la formation oolitique et remonte probablement jusqu’à celle du trias. L'hypothèse des mouvements oscillatoires du sol avant, pen- dant et après les sédiments crétacés, lui semble encore confirmée par la comparaison des altitudes du grès vert sur le pourtour du bassin , et de laquelle il résulte que, si ces couches n’avaient pas éprouvé de dérangement depuis leur formation , les sables verts et les argiles, d’où viennent les eaux du puits de Grenelle , se se- raient déposés sous une nappe d’eau de plus de 869 mètres d’é- paisseur, et la craie, ou mieux le premier et le second groupe, sous une nappe de plus de 731 mètres. D’un côté, le peu de pro- babilité d’une cavité aussi profon le dans un espac aussi restreint, et entouré de couches régulières comme le sont celles de la for mation oolitique; et de l’autre la supposition du relèvement en masse de la partie E. etlN.-E. du bassin, tandis que les rivages du S. et de l’O. sont restés dans leur position première, se trouvent encore appuyés par cette observation, que s’il en avait été autrement, non seulement le grès vert, mais encore line grande partie de la craie, auraient recouvert une portion considé- rable des terrains anciens de la Bretagne et de la Vendée, et se seraient étendus jusqu’aux pentes granitiques du centre de la France. Cette dernière considération s’applique également au terrain tertiaire inférieur, qui ne dépasse point l’axe du Melle- rault, et qui, d’après son altitude dans la Champagne et la Pi- cardie, aurait dû cou vrir aussi tous les plateaux situés à l’O. et au S. de cet axe. « Tous ces faits joints aux dislocations locales et aux soulève- » ments plus apparents indiqués dans le cours du mémoire, prou- « vent assez, dit en terminant M. d’Àrcliiac, que la partie de la » France dont nous nous sommes occupé , sans présenter de ces » grandes rides qui appellent le regard et frappent l’imagination, » n’en a pas moins été soumise à des mouvements fréquents dont » nous pouvons retrouver les traces et les effets dans l’hydrogra- >► pliie superficielle et souterraine et dans l’orographie du sol, » aussi bien que dans les caractères stratigraphiques , pétrogra- » phiques et zoologiques des formations sédiinentaires. Nous » voyons enfin que si l’étude de la direction et de la composition » des grandes chaînes qui sillonnent la surface du globe, a conduit » M. Elie de Beaumont à la connaissance des phénomènes géné- » raux qui s’y sont produits, l’examen comparatif et détaillé des » petits accidents du sol pourra peut-être nous expliquer les ano- SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. 153 » malies apparentes qu’on rencontre à chaque pas dans le domaine » de la géologie descriptive. » Dans un appendice placé à la fin de son travail , l’auteur a en- core traité du parallèle des zones crayeuses du S. -O. et du N.-O., auquel il a ajouté quelques observations sur la partie occidentale du département de la Yenclée, et des notes relatives à la première de ces Etudes (1)* M. de Roys fait observer que M. Fitton a trouvé dans l’île de Wight la Perria Mulleti , caractéristique du terrain néocomien inférieur. M. Elie de Beaumont fait plusieurs questions auxquelles M. d’Àrchiac répond par la lecture de différents passages de son mémoire. Il insiste particulièrement sur la craie à silex et à spongiaires siliceux de Blois , de Cbâleaudun et de Vendôme, qu’il croit devoir ranger dans le terrain crétacé inférieur, parce qu’elle a la plus grande analogie avec les couches à silex et à polypiers qui se trouvent à Rouen, im- médiatement au-dessous de la couche à Turrilites de la mon- tagne Ste-Catherine. M. d’Archiac répond que la craie de Blois est bien distincte par ses caractères minéralogiques de la craie jaune de Tou- raine sur laquelle elle repose; qu’il l’a rangée dans le groupe de la craie blanche, mais qu’il ne verrait aucun inconvénient a ce qu’on la rapportât à la partie supérieure de la craie chlo- ritée. Il croit que cette craie de Blois et de Vendôme serait supérieure à la couche à Turrilites , si celle-ci existait dans ces contrées , et il fonde son opinion sur ce que le niveau de la couche de Rouen , qui existe dans l’Est du bassin de Paris, se prolonge dans le département du Cher, et que la conti- nuation de cette couche passe évidemment sous la craie jaune, laquelle est inférieure à la craie de Blois et de Vendôme. M. de Beaumont fait encore les remarques suivantes : Au N. d’Argentan il y a une bande de terrain de transition qui vient atteindre l’axe de bombement du Mellerault. Les limites (1) Le travail de M. d’Archiac sera publié dans la première partie du t. II des Mémoires de la Société. lôi SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. de l’étage jurassique supérieur ne different pas beaucoup de celles du terrain néocomien, qui s’est déposé dans une dépres- sion allongée suivant le grand axe du bassin jurassique qui s’é- tendait par-delà le Jura avant le soulèvement perpendiculaire de la Côte-d’Or. Pendant le dépôt des terrains crétacés , il paraîtrait y avoir eu un affaissement graduel du sol , qui au- rait produit l’extension successive de la mer crétacée. Le pays de Bray, qui a une direction N. -O. S.-E. parallèle à celle du Thuringerwald , est dû à deux relèvements , celui de la bor- dure septentrionale qui n’a pas affecté la craie blanche et qui est contemporain du soulèvement du Mont-Viso, et celui d’une partie de la bordure méridionale qui est parallèle à la direction des Pyrénées et de l âge de cette chaîne; deux autres causes se sont mêmes jointes aux premières, suivant M. Élie de Beaumont, pour donner au pays de Bray la forme qu’il présente. L’une est le soulèvement de la chaîne prin- cipale des Alpes, et l’autre la dénudation due aux phéno- mènes erratiques alpins. Les vallées de la Canche , de l’Authie, de la Somme, de la Brêle et de la Béthune sont des érosions diluviennes indépendantes de la direction des bassins crétacés malgré la coïncidence de directions. Enfin le prolongement du terrain miocène qui pénètre fort avant dans le plateau central, a sa cause dans le soulèvement N. -S. des îles de Corse et de Sardaigne, M. Paillette présente une coupe manuscrite de la côte de Bénisalem , dans l’île de Majorque, faite par M. Bouvy de Schomenberg , qui s’occupe de la carte géologique de cette île ainsi que de celle de la Catalogne. Cette coupe montre l’in- tercalation de marnes noires, avec Lymnœa, Paludina , et deux couches de lignite exploité, dans un système de couches de calcaire compacte avec Belemnites , Ammonites , etc. , du terrain crétacé. C’est un fait analogue à celui qui a été ob- servé par M. Dufrénoy à Hernani,à l’extrémité occidentale des Pyrénées. Le tout est recouvert, comme dans la chaîne des Pyrénées , par des alternances de poudingues calcaires marneux avec traces de Nummulites. M. Paillette ajoute que le terrain crétacé se poursuit avec les mêmes caractères de- puis les Pyrénées jusqu’en Galice, et même à Oporto. SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. 1 55 Le Secrétaire achève la lecture du mémoire suivant de M. Coquand : Sur les terrains stratifiés de la Toscane . Introduction. A mesure que les observations géologiques se multiplient sur le soi toscan , on parvient à y reconnaître successivement la série presque complète des terrains stratifiés, telle du moins qu’on a pu la constater dans les montagnes principales du reste de l’Europe. i,orsqu’en 1833 M. Savi (1) publiait ses coupes des Alpes Apuen- nes et de l’île d’Elbe, il n’admettait guère qu’un terrain unique, le terrain crétacé, dont la partie inférieure, convertie, par l’efiet des agents plutoniques, en gneiss ou en stéaschiste, constituait ce qu’il a appelé son terrain de Verrucano , regardé avec raison comme le plus ancien de l’Italie méridionale, et par conséquent comme la base de toutes les autres formations sédimentaires. A cette opinion hardie, émise à une époque où la théorie du métamorphisme était à peine connue, se rallia un géologue célèbre, M. Hoffmann, qui voyait dans le gneiss de Capoliveri (île d’Elbe) un macigno modifié plutôt qu’un terrain particulier et indépendant. Depuis, grâce aux fossiles recueillis sur divers points, au golfe de la Spez- zia, à Caldana, à Monte-Calvi, à la Pania di Corûno , à Montieri, à Sasso-Rosso en Garfagnana et ailleurs , on a pu détacher de la craie une série de couches assez puissantes représentant la forma- tion oolitique et même le lias (2). Enfin, tout récemment, M. de Collegno , dans son mémoire sur les terrains stratifiés des Alpes Lombardes (3) a saisi avec beaucoup de bonheur, suivant moi, dans le calcaire rouge de briques à Ammonites qui s’observe sur plusieurs points de la Toscane et de la Romagne, et que Ton suit jusqu’au lac de Corne toujours dans la même position , un horizon géologique qui permet de fixer avec plus d’exactitude l’âge des roches sédimentaires de cette partie de l’Italie. Ce même calcaire rouge, qui estaussi très développé dans les environs de Campiglia ( Maremmes Toscanes) et dans ceux d’un autre Campiglia du golfe de la Spezzia, se présente dans ces deux localités avec des carac- tères si uniformes de gisement et de composition minéralogique, (î) Nuovo giornale de Letterati , n. 70 et 71, Pisa. (2) Sopra i carboni fossili, Savi, p. 70 bis. — Sluder, Bull. Soc. géoL de France , t. XII, p. 281. (3) Collegno, ici »• série, t. 1 , p. 179 et 207. 1 56 SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. que je l’avais choisi à mon tour comme point de repère pour sépa- rer et distinguer les unes des autres les diverses formations strati- fiées qui se montrent dans le groupe montagneux de Monte-Calvi, que l’on peut regarder comme le point culminant du promontoire de Piombino. A la Spezzia, la position de ce calcaire ne saurait être douteuse; il représente le lias inférieur, ainsi que nous aurons occasion de le démontrer plus tard. Dans le Campigliese Toscan, les fossiles trouvés sont aussi ceux du lias inférieur, et de plus, comme dans le vallon duTempérino, ce calcaire repose direc- tement sur le marbre blanc, le même que celui qui est exploité à Carrare et dans le Serravezzano, mais en discordance de stratificao- tion incontestable. Nous déduirons de ce fait important l’impossibi- lité d’introduire les calcaires saccliai oïdes des Alpes Apuennes dans la formation jurassique , impossibilité qui découle, non seulement de leur position, mais encore des circonstances paléontologiques. Dès lors, on ne saurait considérer comme rigoureuses les conclu- sions de M. de Collegno relativement à la classification des ter- rains stratifiés de la Toscane, dont la partie inférieure, suivant l’opinion de ce savant, ne dépasserait pas les limites de la formation jurassique. Nous pensons avoir recueilli des matériaux assez nom- breux, assez concluants pour prouvera la fois que les marbres des Alpes Apuennes et de quelques chaînes de la péninsule italienne ap- partiennent à une époque géologique reculée ; que les schistes cris- tallins désignés et décrits sous le nom de Yerrucano , que la plupart des géologues ont considérés comme de la craie ou du terrain juras- sique métamorphique, sont à leur tour entièrement distincts des marbres blancs, et représentent, dans la série générale des couches de la terre, leurs parallèles des Pyrénées, du Var, de la Vendée, de la Bretagne , en un mot , les terrains connus sous la dénomination ancienne de terrains primitifs stratifiés et de terrain de transition. Je ne me dissimule pas la défiance que soulèvera cet écrit, qui contraste avec presque tous ceux qui ont été publiés jusqu’à ce jour sur l’Italie; mais je dois avouer à mon tour, tout en ren- dant justice aux efforts et aux lumières des géologues qui m’ont devancé, que les erreurs dans lesquelles on est tombé proviennent de la difficulté de séparer nettement les diverses formations de cette contrée à cause du petit nombre de corps organisés fossiles qu’on a recueillis, ou de la fausse application que l’on a faite des caractères paléontologiques. TJne autre cause d’erreur provient aussi du peu de valeur que l’on a accordée aux discordances de stra- tification , ainsi qu’aux différences minéralogiques qui leur cor- respondent. Eblouis par la théorie séduisante du métamorphisme* SEANCE DU 13 JANVIER 18 \ 5. 15 1 les auteurs en ont outré les effets au point de confondre et d’en- glober dans une seule et même formation quatre formations géo- logiques distinctes. Ce n’tst point seulement de la craie que nous trouverons en Toscane, nous y verrons encore les schistes cristal- lins, les terrains silurien , jurassique et tertiaire; et si à ceux-ci nous ajoutons le trias du Vicentin et le terrain néocomien de la Calabre, on verra que l’Italie présente une série aussi complète que celle que l’on a reconnue sur le continent français. Après les excellents mémoires publiés par le professeur Savi sur la constitution géologique du sol de la Toscane, il serait fasti- dieux autant qu’inutile de se livrer à une description minutieuse des caractères minéralogiques des roches dont nous aurons à par- ler. Esquisser à grands traits leur physionomie générale et indi- quer leurs rapports réciproques de position, tel est le but que nous nous sommes proposé en écrivant ce mémoire. Nous ren- voyons donc pour les particularités aux travaux de MM. Savi, de Collegno, Studer et Pai eto. § Ier. Formation des schistes cristallins et de la grauwaeke. Les terrains les plus anciens de la Toscane ( Verrucano des géo- logues italiens) sont essentiellement composés de gneiss, de mica- schiste , de stéaschiste, de phyllade, de cipolin, de conglomérats quarzeux, de quarzite et de grauwaeke. Le gneiss occupe principalement la base du système, ainsi qu’on peut l’observer sur quelques points de l’île d’Elbe, dans le voisi- nage de Porto-Longone , où il est traversé par des filons remar- quables de granité blanc , dans le cirque du Monte-Altissimo et des montagnes qui en dépendent, et, d’après M. Savi, dans la val- lée du Frigido, sous Cageggi (Alpes Apuennes). Dans cette der- nière localité, le gneiss, qui passe graduellement au stéaschiste, présente un feldspath parfaitement cristallisé, à cassure miroi- tante, mélangé avec du quarz hyalin et avec du talc blanchâtre. Au gneiss succède le micaschiste, et surtout le stéaschiste, que l’on peut regarder comme la roche qui constitue à elle seule la presque totalité des terrains anciens des Alpes Apuennes, des mon- tagnes Pisanes, de la partie méridionale de l’île d’Elbe et de quel- ques autres points de la Toscane. Ses caractères sont assez uniformes et n’offrent guère de diffé- rences que par rapport à la quantité de quarz qu’il renferme. Ce- lui-ci est tantôt disséminé avec assez de constance dans la masse , et constitue alors, avec un talc verdâtre entrelacé, une roche d’une 158 SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. ténacité extrême, exploitée à Rosina ( vallée de la Vezza), comme pierre réfractaire, pour les hauts-fourneaux de Cécina et de Fol- lonica. Tantôt, au contraire, il paraît s’isoler en nodules quarzeux, à cassure vitreuse (Altissimo), ou sous forme de cristaux impar- faits, comme dans certains porphyres quarzifères. A Ripa , dans le voisinage des mines de cinabre > le taîcschiste prend un aspect plus cristallin et nacré , et passe à un micaschiste blanchâtre, à feuillets excessivement minces , qui , sous le choc du marteau , se dispersent en poussière argentée. Il renferme, de plus, et en assez grande abondance, un minerai brunâtre, cristallisé en longs pris- mes rhomboïdaux, modifiés par une facette sur les arêtes latérale# aiguës, que je crois appartenir à la staurotide. J’y ai recherché vai- nement le grenat, qui accompagne presque constamment cette substance dans les micaschistes du département du Var et dans ceux du Saint-Gotlia rd, bien que, dans les Pyrénées, j’aie ren- contré aussi la staurotide seule et dans les mêmes conditions qu’à Ripa. Aux stéaschistes, et par des gradations insensibles, succèdent, les phyllades satinées, avec filons noduleux de quarz parallèles au sens de la stratification, et des schistes argileux plus communs pas- sant à leur tour à des quarzitës fins, à des schistes grauwackiliens, à la grauwacke avec particules de mica disséminées uniformé- ment dans la masse, enfin aux anagénites et aux conglomérats quarzeux. Ces diverses roches admettent à divers niveaux des couches subordonnées, quelquefois très puissantes, de cipolins glanduleux donnant souvent naissance à des marbres de couleur, remarquables par la variété et l’éclat de leurs teintes. Entre Porto- hongone et Porto-Ferrajo, sur le monticule qui est séparé du vallon de Vardana, près la ferme de ce nom , par la route qui met ces deux villes en communication, et vers le golfe de Proc- chio, sur le chemin qui conduit à Campo, le cipolin se montre en grandes masses alternant avec un schiste argileux très dur, violâ- tre, dans lesquelles le mica est remplacé par de la grammatite blanche qui s’épanouit dans le joint des couches en rosaces ra- diées, à reflets nacrés. Elles contiennent de plus des grenats irré- gulièrement jetés dans la masse, à laquelle ils donnent une appa- rence porpliyroïde, ou bien , sur quelques points , ils deviennent tellement envahissants, qu’ils chassent le calcaire , et constituent alors une roche de grenat qui me rappelait les roches de même nature que j’avais découvertes- dans les terrains primitifs de Col- lobrières , dans le Var , où les cipolins et les grenats se montrent dans des conditions analogues de gisement. C’est à tort que SÉANCE I)U 13 JANVIER 1845. 159 M. Savi (1) rapporte les cipolins à grammatite du Posto de Ca- voli, sur le flanc méridional de Marciana, au calcaire du macigno, que le granité aurait converti en marbre salin (2). Comme ceux de Yardana, ils font partie des schistes cristallins. Nous démon- trerons incessamment que le vcrrucano constitue un terrain parti- culier et indépendant qui a reçu après son soulèvement les formations postérieures dont il se détache nettement, et par sa composition minéralogique, et par des discordances de stratifi- cation. C’est encore à lui qu’il faut rapporter le gisement des ci- (1) Nuovo giornale de Letlerati, n. 70, p. 5/|. (2) Aucune contrée 11e fournit des exemples d’injections de roches ignées, au milieu des terrains stratifiés, aussi nombreux et aussi instruc- tifs que l’île d’Elbe. A la rade de l’EnfoIa on voit les porphyres quarzi- fères traverser dans tous les sens Valberese, l’empâter même sans que ce calcaire ait subi la moindre altération dans sa couleur et dans sa texture. Lé même phénomène se reproduit à Capoliveri, à Rocca Tederighi et dans la vallée del (fiardino ; aux environs de Gampiglia , une eurile graniloïde très feldspatliique et très quarzifère ( trachyte de M. Savi ) déborde sur le même alberesé , sans qu’on puisse apercevoir, vers les points de contact, le moindre changement. A la Pilla, sous San-IJietro- di-Campo, mon marteau a mis à découvert un fragment de macigno , entièrement enchâssé dans un porphyre granitoïde, qui avait conservé intacts tousses caractères originaux. J’ai eu dernièrement occasion d'exa- miner, dans les Apennins Bolognais, des dykes, des amas de serpentine au milieu des albereses qui n’avaient éprouvé aucun effet d’un pareil voisinage. J’ai même en ma possession des échantillons de Gnbbro rosso , soudé avec le calcaire, crétacé dans lesquels chacune de ces roches pré- sente le cachet minéralogique qui lui est propre. Je suis bien éloigné de vouloir opposer l’autorité de ces faits, que j au- rais pu multiplier a l’infini, à la théorie du métamorphisme, dont je suis moi-même un des plus zélés partisans, comme pouvant la renverser. Je suis seulement amené à en conclure que c’est plutôt dans la manifesta- tion d’un phénomène général qu’on doit rechercher 1 origine des chan- gements survenus dans les grandes masses, que dans la présence , vers le voisinage des terrains métamorphiques , de tel ou tel produit igné , qui, le plus souvent, est fort innocent des actes de violence qu’on lui attribue. Ainsi, il est assez étonnant de ne trouver aucune roche d'é- ruption dans les Alpes Apuennes, oü l’existence des schistes cristallins, des cipolins et des marbres blancs, atteste l’énergie d’une cause mo- difiante, tandis que dans fille d'Elbe, où foisonnent les roches éruptives, on n’observe aucun changement clans les terrains sédimentaires tra- versés. SÉANCE DU 13 JÀNVïKR 184'). 160 polins de la Tour-de-Rio -, remarquables ])ar les beaux liions d’ilvaïte radiée et d’amphibole verte qui les traversent , ainsi que celui de la base du mont de la Brugiana, signalé par M. Savi. En se dirigeant de la Tour-de-Bio vers le point de la côte où le grand amas de fer oiigiste exploité montre ses racines, le verrn- cnno passe insensiblement, ainsi qu’on peut le remarquer au Capo Calamita , au schiste tunphiboLeuæ , et celui-ci à son tour se con- vertit en un schiste ophiolitique composé d’écailies à surfaces re- couvertes de stéatite verdâtre, qui, sous le rapport de la di position et de la composition, ne diffèrent en rien des schistes ophiolitiques si répandus dans le Cap-Corse, principalement dans la commune de Centuru Le haut de la formation , vers le village de Livigliani , est oc- cupé par un schiste carburé qui succède aux phyllades -, et dont l’aspect rappelle exactement les schistes alumineux et les ampélites des vallées de la Pique et du Larboust dans les Pyrénées; j’ai même cru y apercevoir , comme dans les environs de Bagnères- de-Luchon, la variété de mâcle cruciforme; mais la décomposi- tion profonde que produit dans ces schistes la présence Continuelle de l’eau ne m’a pas permis d’en conserver un échantillon de forme bien déterminée. En face de ce village , mais de 1 autre côté de la Yez/.a, dans le lit même du torrent qui descend des gorges de Stazzemma , on marche d’abord sur des stéascliistes satinés qui , un peu au-dessous des fameuses carrières ouvertes clans la brèche dite M ischio- di-Serrctvezza sur lesquelles M. Savi a écrit un fort bon mémoire, sont recouverts par une véritable grau- wacke noire à grains très fins, parsemée de particules brillantes de mica , et dont le faciès présente des caractères extérieurs si frap- pants avec le grès maciguo (grès vert) des autres contrées de la Toscane, qu’on l’a confondue avec ce dernier, et que dès lors on s’est ci u autorisé à proclamer des mélanges, des alternances de gneiss, de stéascliistes, de marbres, de grès et de calcaires com- pactes. Cette grauwacke, quoique recouverte par toute la formation des calcaires blancs et supportée par celle des schistes cristallins, n’a plus été qu’un maciguo non modifié, respecté par les causes piutoniques qui ont étendu leur énergie en dessus et en dessous^ et comme à Stazzemma les marbres lui sont directement super- posés, ceux-ci ont été rajeunis sans respect pour les vrais maci- gnos qui, recouvrant transgressivement ces mêmes marbres vers les exi rémités de ia chaîne , se trouvaient violemment introduits dans une famille qui n’était pas la leur, et dont la nature les a F\z *> Fy 8 Fy. 7. SËA.XCE DU 13 JANVIER 18 45. 1 f> 1 réellement séparés par la formation entière des calcaires saccha- roïdes et par la formation jurassique, ainsi que nous espérons le démontrer bientôt (1). Les conglomérats qui couronnent le terrain des schistes cristal- lins, comme on a lieu de l’observer à l’île d’Elbe, à la base du fameux filon de fer oligiste exploité à Rio , dans la vallée di Calci (Montagnes Pisanes) , et au Capo-Coi vo (golfe de la Spezzia) , se composent généralement de couches épaisses d’anagénite à frag- ments polygéniques, parmi lesquels prédomine un quarz rou- geâtre, à surface arrondie et quelquefois anguleuse, enveloppée de toutes parts d’une pellicule de talc verdâtre, ou plutôt noyée dans ce talc, qui est la roche constituante du système entier. Lorsque les fragments diminuent de volume , les conglomérats passent à un grès grossier, ou bien à un quarziteà éléments granuleux. La coupe du Capo-€orvo (pl. 111, fig. 1) indique très bien la disposi- tion relative des divers membres de la formation des schistes cristallins, grâce aux escarpements de cette partie du golfe de la Spezzia qui permettent d’en saisir l’ensemble d’un seul coup d’œil. Aux puissantes couches de conglomérats (A) sur lesquels le terrain jurassique repose transgressivement, succèdent des schistes argileux gro siers au milieu desquels commencent à se montrer des nodules de calcaire rougeâtre qui deviennent de plus en plus abondants et finissent par constituer un véritable talcscliiste ou cipolin glanduleux (B) , fouetté de rouge et de vert , renfermant disséminés çà et là quelques noyaux roulés de ce même quaiz dont sont presque entièrement formés les conglomérats; ce qui prouve que si le mouvement des eaux , au fond desquelles ceux- ci ont été stratifiés, avait alors perdu beaucoup de sa violence, l’action des courants se faisait cependant sentir encore, puisque les cipolins sont le produit combiné d’une sédimentation chi- mique et mécanique qui s’opérait dans le même temps. On y observe, ainsi qu’à l’île d’Elbe, quelques filons de fer oligiste éclatant. (i) Dans la figure 4 rie son mémoire sur l< s Alpes Apuennes, M. Savi désigne comme macigno , la grauwacke du canal de Basali, au-dessous de la vallée de Stazzemma. Culte indication tendrait à faire admettre une alternance plusieurs fois répétée de macigno, de marbres et de schistes cristallins , qui prêterait alors au terrain crétacé des caractères et une puissance que réellement il ne possède pas , tout en introduisant de la confusion dans le classement des terrains qui se succèdent dans cette chaîne de montagnes. Soc gcol. Tome II, 2 e série i 1 SÉANCE DU 13 JANVIER Î8 182 Des alternances de schistes verdâtres conservant encore quel- ques amygdales de calcaire (C) , des marbres blancs un peu lal- queux (D), des phyllades grisâtres plissées (E), des cipolins bréchi- formes (F) , des schites argileux satinés (Or) nous conduisent à tra- ders mille accidents de structure et de variations minéralogiques, à la base du système des schistes cristallins du Capo-Corvo , qui est occupée , comme dans les Alpes Aptiennes , par du stéaschiste et du micaschiste noduleux (H). Avant de laisser cette localité intéressante , faisons observer que les montagnes qui recouvrent les tranches des couches représentées dans la coupe et qui forment la portion orientale du golfe de 1a. Spezzia , sont la continuation de celles qui en constituent la portion occidentale et qu’elles appartiennent au terrain jurassique et à celui du macigno. Comme ces deux dernières formations discordantes entre elles (pl. III, fig. 2) sont aussi discordantes avec les schistes cristallins (H), puisqu’on voit les calcaires jurassiques (S) reposer transgressivement et sur les conglomérats (A), et sur les cipolins , et sur les micaschistes (1) , nous ne saurions considérer ces conglo- mérats comme représentant la base du terrain oolitique ; et nous insistons sur cette séparation avec d’autant plus d’intention que , dans son mémoire sur les terrains stratifiés des Alpes Lombardes, M. de Collegno a fait entrer dans les cinq groupes qu’il a établis, non seulement les conglomérats et les grès rouges du lac de Corne, de Bellanoet de Yarenna , mais encore les schistes cristallins de Bellano, sans qu’il lui ait été possible, dit il, de jamais constater la ligne de séparation de ce grès d’avec le véritable micaschiste. Nous 11’avons pasencore eu l’occasion de visiter les localités décrites par notre savant confrère; mais si les relations des conglomérats avec les schistes cristallins sont dans les environs du lac de Corne les mêmes que dans les Alpes Apuennes, qu’à l’île d’Elbe et dans les montagnes Pisanes, nous ne pouvons partager cette classification que le Capo-Corvo démontre opposée à l’évidence des faits , et qui de plus est contestée par presque tous les géologues italiens, dont l’un, M. Curioni, voit dans ces mêmes grès rouges le représentant de la grauwacke. J’avoue que les études que j’ai faites en Toscane m’amènent au rapprochement établi par M. Curioni, et qu’on ne peut raisonnablement séparer, danseette partie de l’Italie, les grès (1) La Ggure 2 représente une coupe qui, du Capo-Corvo, coupe les montagnes de la partie orientale du golfe de la Spezzia, en passant par les villages de Barcola et d’Arncglia. Elle est parallèle au cours de la Magra. 163 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. et les conglomérats des schistes cristallins avec lesquels ils ne for- ment qu’un seul et même système. Ajoutons que les Pyrénées, aux- quelles fort heureusement les calcaires siluriens avec Spirifer et Orthocera ont laissé aux phyllades, aux micaschistes et aux gneiss placés au-dessous d’eux le privilège d’être conservés terrain pri- maire, présentent des exemples nombreux de conglomérats et de grès liés aux schistes cristallins. La vallée du Larboust, vers son point de jonction avec celle de la Pique à Bagnère-de-Luchon, la vallée d’Aure, vers les environs de St-Lary, offrent constam- ment les grauwackes et les phyllades dépendant de la formation gneissique, à laquelle ils se lient insensiblement par l’intermédiaire du micaschiste. En Toscane , ainsi qu’au lac de Corne , nous pos- sédons dans une position parallèle les mêmes calcaires rouges, considérés à juste titre, par M. de Collegno, comme le représentant du lias, et, suivant moi, du lias inférieur ; dès lors je demanderai ils es schistes cristallins, dont la puissance dans les Alpes Lom- bardes m’est inconnue , mais qui, dans les Alpes Apuennes, n’est pas moindre de 12 à 1500 mètres, si les conglomérats (300 mètres à Introbbio), si le calcaire noir de Varenna (1000? mètres \ enfin si le calcaire gris avec silex (200 mètres), groupes reconnus par M. de Collegno pour être inférieurs au calcaire rougeà Ammonites Bucklandi et A. IValcotii , mais tous jurassiques, je demanderai si ces groupes, dont l’épaisseur s’élèverait à plus de 3,000 mètres, peuvent représenter seulement la partie inférieure du lias, lorsque cette partie inférieure se représente parfaitement elle-même avec ses caractères normaux et tous les fossiles qui lui sont propres ? Dans les Pyrénées, où le terrain jurassique (lias y compris) repose sur le calcaire silurien (vallée de la Garonne, sous le pic du Gaz) ; dans la Provence, et principalement dans le département du Yar, où le même terrain recouvre directement le trias, en présentant la succession de tous ses étages , dans les environs d’Autun , dans laSaintonge, dans l’Angleterre, enfin dans tous les pays où le lias est classique , on ne connaît point au-dessous des couches à Ammo- nites fV alcotii et A. Heterophyllus , ou au-dessous du quadersan- stein, l’équivalent de ces prétendus terrains jurassiques qui , en Italie, par des influences plutoniques, auraient été convertis en gneiss, en micaschistes , en phyllades, en cipolins; influence dont l’action , après avoir dénaturé des couches qu’on ne retrouve nulle part dans les contrées à séries normales, aurait respecté tout juste celles auxquelles leur position et leurs caractères paléonto- logiqu'cs assignent un horizon et un parallélisme analogue avec des étages d’une position bien reconnue dans le reste de 1 Europe. SÉANCE DU 13 JANVIER I 8 f S . *64 C’est certaiuementà une pareille préoccupation métamorphique que M. Hoffmann, voyant sous Capoliveri , dans l’île d’Elbe, le macigno reposer sur le verrucano , pensait que celui-ci n’était autre chose qu’un grès rendu gneissique par suite d’une modification plutonique, opinion que M. Studer a presque partagée, tandis que le macigno et l’alberese , qui constituent un terrain indépendant pouvant recouvrir toutes les formations géologiques antérieures , reposaient à Capoliveri sur les schistes cristallins, comme ailleurs ils reposent indistinctement sur le calcaire sacchai o'ide ou bien sur le terrain jurassique, sans qu’on soit autorisé à déduire de ces Superpositions que les terrains supportant et supportés apparte- naient à une seule et même formation. La coupe (pl. III , fig. 3) indique nettement que le verrucano (H) supporte et le calcaire saccharoïde (X) et le terrain crétacé, composé de l’alberese (m) et du macigno (M) qui recouvre indistinctement le gneiss et le marbre blanc: or, comme sur la route qui conduit delà Marine-de-Rio aux carrières de fer oligiste, on voit claire- ment à la base du Monte-Jove les conglomérats quarzeux passer .sans transition minéralogique sous les calcaires sacchai oïdes et les cargneules dolomitiques* et ces derniers dans le chemin qui con- duit à Porto-Longone passer sous l’alberese et le macigno qui ne présentent aucune trace d’altération , 11e faut-il pas conclure que le macigno séparé du gneiss et des micaschistes par le groupe des conglomérats, par la formation du calcaire métamorphique et par l’alberese, n’a pu servir à la confection des schistes cristallins f puisqu’il existe intact et superposé à un calcaire compacte qui renferme les Fucoides intricatus et Fucoides Targionii ? La digression qui précède a moins pour but de détruire l’opi- nion de M. de Collegno, d’après laquelle les conglomérats quar- zeux du lac de Corne, que je 11e connais pas, appartiendraient à la formation jurassique, que de démontrer par des exemples évi- dents que ceux que l’on observe à la partie supéi ieui e des schistes cristallins, soit dans les Alpes Apuenues, dans les montagnes Pi- sûnes , soit à la Spezzia ou à l’île d’Elbe, sont une dépendance réelle de ces derniers terrains, sans qu’on puisse les rapporter à la formation jurassique; car , je le répète, au Capo-Corvo , les cou- ches ooliticjues recouvrent transgressivement non seulement les conglomérats (fig. 1 et 2), mais encore les autres membres des schistes cristallins : donc le verrucano constitue une formation in- dépendante. C’est au surplus un pareil fait qu’avait exprimé M. Savi , sans SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. 165 €n tirer toutes les conséquences , loisqu’il annonçait (1) que dans les montagnes Pisanes il avait toujours observé bien distincte- ment la séparation du verrucano ( stéa schistes et conglomérais) d’avec le terrain calcaire superposé. Si l’âge des filons pouvait être précisé avec autant d’exactitude que celui des schistes cristallins par rapport aux autres forma- tions géologiques qui leur sont supérieures, les circonstances particulières de leur gisement pourraient peut être ajouter quel- ques nouvelles preuves à l’appui de nos distinctions. Dans les Alpes Apuennes, les mines de sulfures sont toutes propres à la partie inférieure des schistes cristallins ; telles sont celles du Bot- tiné dans le Serravezzano et celles de Val-di-Castello et de l’Ar- gentiera dans le Pietro-Saiitino, où la galène argentifère est as^- sociée à la blende , celles de cinabre de Ripa et de Livigliani. Les gisements de fer oligiste paraissent au contraire appartenir à la partie supérieure des schistes cristallins, aux conglomérats; c’est en effet dans ce groupe qu’on observe ce minerai sur plusieurs points de l’île d’Elbe, à Punta-Rossa, près de Porto- Longone, et notamment à Rio la-Marina ; au Capo-Corvo les mêmes conglo- mérats renferment aussi quelques petits filons. Enfin M. Savi les a signalés dans le vcrrucano de la vallée di Calci, sans qu’on les voie jamais traverser les formations calcaires supérieures qui, d’après le sentiment de cet auteur, font néanmoins partie du même terrain. § II. Formation des calcaires saccharoïdes . Lorsque de Pietra Santa on se rend à Serravezza , on traverse près de Corvaja une gorge étroite dominée jusqu’à une centaine de mètres par des masses en surplomb de sléaschistes qui mena- cent l’étroit chemin que borde en même temps h* torrent. Ce système de schistes cristallins qui, vers Ripa, constitue le premier ressaut des Alpes Apuennes, se poursuit jusque dans le cœur de la chaîne et se distingue de loin par la hardiesse de ses sommités; ce sont ces enfilades de pics, ces aiguilles déchiquetées dont la forme capricieuse dans les Alpes et dans les Pyrénées prête tant de grâce et de majesté à la physionomie du paysage. Au delà du torrent de Serravezza, en face de Corvaja ( pl. III, fig. 4 ) , le stéaschiste (H) supporte, en discordance de stratifica- tion , une grande masse (X) entièrement composée de marbre (i) Nuovo giornale de Lelieraii, n. 70 et 71, p, 43. et figure 1 et 2. 166 SEANCE DU to JANVIER 1845. blanc, que vers la hauteur du Bottino on voit butter de nouveau contre les mêmes roches schisteuses. En remontant la vallée de la Serra jusqu’en face de la carrière exploitée de Trambiserra (fig. 5), même encaissement du marbre blanc , pareille indépendance. Enfin, dans le fameux cirqueque couronnent les formes fantas- tiques du Monte- Altissimo, le marbre statuaire (pl. JIÏ, fig. 6) X remplit toutes les dépressions ouvertes dans le gneiss, le recou- vre en plusieurs points, se modèle exactement sur tous ses plis, suit ses inflexions , sa direction court N.-O. S.-E., tandis que celle du gneiss court du JN. au S Dans ces diverses localités et dans la vallée du Frigido on cher- cherait vainement le passage des schistes cristallins au calcaire; jamais séparation ne fut plus tranchée et de caractères minéralogi- ques et de position relative. M. Savi, dans ses coupes géologiques des Alpes Apuennes (1), a très bien indiqué cette discordance de stratification; mais obéis- sant à cette idée théorique que les schistes cristallins et que les calcaires saceharoïdes n’étaient autre chose que du macigno et de l’alberese métamorphiques, il a fait bon marché de la discor- dance de stratification, et pour l’expliquer, il suppose que dans le Minuccianese et dans les Alpes du Monte-Altissimo le verrucano a seulement été soulevé d’un côté. Yoici comment, en parlant de ce phénomène, s’exprime ce savant professeur : « Les torrents de la Serra et du Frigido traversent une longue » et étroite vallée dont les berges sont formées de stéascliistes ; » mais l’aspect du pays change tout d’un coup lorsqu’on arrive »> vers le fond de la vallée; là s’ouvre un amphithéâtre semi-cir- » laire, composé d’un calcaire blanc ou de couleur cendrée, do- » miné par des cimes aiguës et escarpées. Cette masse calcaire est » formée de très grandes couches , qui , se dirigeant de la partie op- » posée à celle d’où viennent les strates du stéaschiste sur les tran- » ch es duquel elles s appuient , s’élèvent presque verticalement et » à une telle hauteur qu’elles forment quelques sommités de ces »» montagnes , l’Altissimo par exemple. Ces couches sont tellement » repliées en divers points qu’elles dépassent la peipendiculaire, » comme à Pania di Sassi. » Ce singulier phénomène de l’adossement du calcaire sur les » tranches des couches du stéaschiste , et par conséquent la diver- » gence de leur direction , s’observe beaucoup plus distinctement (l) Nuuvo giornate de Letlerati . il. 70 cl 71, p. [\Ô, fig. 1 et 2, SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. 167 » encore en regardant les amphithéâtres de la sommité de quelques » unes des hautes montagnes circonvoisines, parce qu’alors on « embrasse d’un coup d’œil la position relative des diverses ro- » clies. Ainsi, en se plaçant sur le Pizzo del monte Sagro, ou mieux encore un peu au-dessous, aux cabanes del Forno et » en examinant la chaîne formée par l’Altissimo et le Monte-Fol- » gorito, qui se dirige du N. au S., on voit clairement les strates » de la partie septentrionale de cette chaîne qui sont calcaires et » presque verticaux (Monte-Altissiino) s’appuyer sur les tranches » des couches de stéaschistes du Alonte-Folgorito qui forment la » partie méridionale de cette même chaîne, mais avec une incli » naison peu marquée [dolcc. mente emergenti). » fut justement la première vue de cette singulière structure, de ces amphithéâtres de marbre à stratification verticale venant rencontrer sous un angle aigu les couches peu redressées du verrucano , qui, en 1 829, suggéra à M. Savi l’idée de calcaires érup- tifs. Dans son dernier travail il rend compte ainsi qu’il suit de la cause de la discordance : « Quant à la vallée du Frigido, je dirai que quoiqu’à la prt- » mière vue il paraisse étonnant de ne point rencontrer du côté » de Minucciana le verrucano , cependant toute surprise cesse en » réfléchissant que , sur tous les points de l’écorce terrestre où ont » agiles causes pîutoniques et où elles ont donné naissance à des »> ruptures et à des soulèvements, il n’était point nécessaire que » les deux côtés de la fente se soulevassent à la fois, mais que » bien souvent un seul des côtés a pu être relevé , tandis que » l’autre qui lui correspond est resté dans sa situation normale, » ou qu’il s’est un peu affaissé ou qu’il n’a pas été porté à la même » hauteur. Or, c’est justement ce qui semble être arrivé dans le » cas dont il s’agit : d’un côté , le système septentrional s’étant » soulevé de manière à mettre à découvert le macigno des mon- » tagnes du Fivizzanese et le calcaire qui forme le Pisanino, le » Pizzo d’Uccello, la Tambura, etc. ; d’un autre côté, le système » méridional ayant été élevé d’une manière tellement plus consi- » dérable, que non seulement le macigno (montagne deMirmeto) » et la masse calcaire (montagnes de Bergiolaet de Brugiana) ont » été mis à découvert, mais encore la grande masse stéaliteuse du » milieu de laquelle s’échappe le Frigido. » Cette explication , tout ingénieuse qu’elle peut être, ne rend nullement raison de la discordance frappante observée entre les schistes et les calcaires; en effet, reconnaître avecM. Savi que les uns et les autres ne sont que les deux termes d’une même formation î 68 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. métamorphique, c’est admettre eu même temps une concordance de stratification entre eux . une faille ou plusieurs failles auron t bien pu troubler leur niveau relatif, mais non point de manière à nous montrer des masses calcaires plaquées eontre le stéaschhte, comme on l’observe à Trambiserra (pl. III, fîg. 5) (1), ou bien T comme au Monte-Akistimo , un marbre à couches parfaiteme nt distinctes (fig. 6) reposant dans une dépression formée au milieu des terrains anciens et s’appuyant sur la tête des strates qui les composent. Pour que l’hypothèse de ce savant fût admissible , il faudrait au moins que la discordance apparente n’existât que le long des lignes de fractures et non point entre les calcaires et les stéaschistes ; car ceux-ci supportant les premiers et ayant obéi à un mouvement commun, doivent, pui.q fils appartiennent à un même terrain ( toujours d’après les idées de M. Savi) prés nt« r une direction identique, une seule et même concoi dance : or, le contraire a lieu et démontre l’existence de deux formations diffé- rentes. Dans la coupe qu’il a donnée du Monte-Altissimo, M. Savi a omis d’indiquer la présence du verruccmo au-dessous du marbre ; ce qui tendrait à faire supposer qu’il manque réellement sur ce point ou qu’il n’a pas été mis à découvert. Cependant le stéa- schlste forme la charpente de toutes les hautes vallées, se montre dans presque toutes les déchirures du sol, non seulement au bas du cirque de la Serra , mais encore sur le revers oriental de l’Al- tissimo, qui n’est à proprement parler qu’une île enchâssée dans le verruccmo envahi derrière les carrières de Forcovaja par les prairies verdoyantes que dominent vers FE. les colosses de marbre de la Corchia Et il en e t de meme de tous les gisements des calcaires sacchai oides des Alpes Apuenues, que l’on trouve con- stamment superposés aux schistes cristallins dont la surface avait été déjà modifiée au moment de leur dépôt, puisqu’on voit que (i) M. Savi indique , dans scs coupes 2 et !\, le mamelon isolé de marbre de Trambiserra comme subordonné aux stéaschistes. Je puis as- surer qu’il n'y est qu’adossé. Il n’v a qu’à comparer nos deux dessins, pour voir comment il est facile , avec un point de départ si différent , d’arriver à des conclusions si opposées. C’est un pareil buttage du marbre contre les micaschistes , mais passé inaperçu aux yeux de M. de La Bêche, que désignent les paroles sui- vantes de cet habile observateur : « 11 est remarquable que les couches fie marbre n’existeut pas dans » la partie inférieure de la vallée du Frigido, quoique , d’après leur s direction, elles devraient s’y prolonger. » ( Mém. Soc- géol. de France, t. I, p 02.) SEANCE DU 13 JANVIER 181Ô. 6# leurs couches, d’abord portées à des niveaux inégaux par suite du .soulèvement qui en changea la position première, et plus tard dé- nudées par les actions extérieures, furent successivement et trans- gressivement recouvertes sur tous les points accessibles à la mer qui précipitait les marbres. Les portions du verrucano que hur élévation mettait à l’abri d’un pareil recouvrement n’eurent que leur base encroûtée. Le cette manière, le buttage des calcaires cristallins contre les stVates du stéascliiste et la discordance qui en est une des conséquences naturelles sont expliqués rationnellement et conformément aux lois généiales de la superposition et de l’ar- rangement réciproque des terrains; ils nous démontrent déplus que les marbres des Alpes Àpuennes constituent un terrain indé- pendant et entièrement distinct du verrucano qui les supporte. Une pareille indépendance se décèle encore dans l’île d Elbe, où le marbre blanc occupe une zone comprise entre le Capo C dam ita et b* Monte-Fico au S. de la Marina-di-Rio, mais interrompue par les hauteurs stéaschisteuses de Capoliveri et recouverte au-dessous de Vardana par le terrain crétacé. La pi. 111 , fig. 3, indique très bien les rapports de position de ces trois formations. Depuis Porto- Longone jusqu’au pont jeté sur le torrent de Vardana, on tra- verse le verrucano , qui se montre avec ses gneiss, ses talcschisU s, ses phyllades et ses cipolins subordonnés, et qui forme à la gauche de la route de Poi to-Ferrajo un escarpement montagneux qui sert de berge au vallon qui reçoit les eaux des hauteurs voi- sines. C’est au-dessous de la dépression occupée par le torrent à quelques centaines de mètres de la ferme de Vardana que l’on aperçoit les premières couches de calcaire saccharoïde (X) adossées aux schistes cristallins (H) et recouvertes à quelque distance par l’alberese avec fucoïdcs (/>/) et par le macigno (M) (1). La même discordance qui se manifeste dans les Alpes Apuennes se maintient encore dans ce point éloigné, et confirme entière- ment la légitimité des motifs qui nous ont porté à faire la sépara- tion que nous avons précédemment établie; elle démontre de plus l’impossibilité de rapporter le marine blanc à l’alberese, qu’une cause plutonienne aurait modifiée; car les lignes de contact entre ces deux formations sont on ne peut mieux tranchées; elles in- diquent non seulement une divergence de stratification , mais en- (\) La figure 3 présente une coupe en raccourci depuis Capoliveri jusqu’aux hauteurs de Vardana : ainsi j’ai omis d’y figurer un terrain d’alluvion qui sépare les montagnes du Capo-Calamita des autres mon- tagnes de l’ile . 170 SEANCE I)U 13 JANVIER 1845. core l’intervention d’un ordre différent de circonstances dans la production des causes qui ont présidé à leur dépôt, et dans celles qui ont amené leur rencontre fortuite. Je n’ai rien à ajouter aux détails que M. Savi a donnés dans sa description des montagnes Pisanes; je renvoie donc à ses excel- lents mémoires , afin d’évher des répétitions fastidieuses. En trai- tant du terrain jurassique , j’aurai occasion de parler du calcaire à silex età fossiles des bains de San-Giulano, que nous retrouve- rons dans le massif du Monte-Cal vi. Je ne puis me dispenser toute- fois de fournir quelques notions sur un gisement intéressant de calcaire saccharoïde que l’on observe dans les environs de Campi- glia , et qui nous servira admirablement plus tard pour fixer les limites de la formation oolitique. ïl existe entre Suvereto, Sasseta , Castagnetto, le fort de San- 'Vincenzo et Caldana un groupe montagneux particulier dominé par les sommités du Monte-Calvi (pl. III, fig. 7). Bien que la plaine d’alluvion de la Cornia, ainsi qu’une ligne de collines qui, de T antique Popolonia jusqu’à Piombino, forme le promontoire auquel on a donné le nom de cette dernière ville, la sépare de l’île d’Elbe, cette région remarquable ne s’y lie pas moins géologi- quement, tant par l’identité des terrains que par la nature des filons que l’on observe dans ces deux contrées. Il est vrai que les schistes cristallins n’apparaissent point dans le Campigliese, le soulèvement ne les ayant point mis à découvert ; mais eu revanche la formation des calcaires saccharoïdes y est développée presque autant que dans les Alpes Apuennes, et s’y présente dans les mêmes conditions de structure et de composition. Le marbre statuaire, le bardiglio et les cipolins sont les roches qui constituent les monta- gnes de la Rocca-San-Silvestre, de Monte-Rombolo et de l’Aqua- viva. Lorsqu’on se rend au Monte-Calvi par le mauvais chemin qui met en communication Sasseta etCampiglia, on observe d’abord, au-dessous du château ruiné de cette ville, le macignoetl’alberese à veines spathiques blanches noyé au milieu de ses schist, s gri- sâtres (Galestro des Italiens) ; puis, en face de la gorge qui dé- bouche dans le vallon de Temperino, commencent à se montrer des schistes rouge , verdâtres et jaunâtres , à couleurs générale- ment vives et mélangées qui recouvrent, après quelques alter- nances , des calcaires rouges de brique et verdâtres, à cassure franche et conchoïde, auxquels succèdent d’autres calcaires à texture plus fine, d’une teinte plus pâle, et remarquables par la grande quantité de silex pyromaques qui s’y logent en nodules et en plaques parallèles interrompues. Il n’est pas rare d’y ren- SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. 174 contrer quelques fossiles, mais qui sont tellement engagé* dans la roche , que ce n’est que dans les surfaces exposées aux intem- péries atmosphériques qu’on peut espérer d’en apercevoir les con- tours. Tout ce système occupe le Monte-Calvino , se continue sans interruption jusqu’au Monte-Calvi, où il rencontre les calcaires saccharoïdes, et se prolonge en traversant le pays même île Sasseta jusqu’à la rencontre du chemin de Castagnetto à Monte-Verdi, où il s’enfonce sous le terrain crétacé. A ne juger de ces différentes l oches et de leurs relations que par l’étude imparfaite que Ton peut en faire dans un sentier tracé sur le revers d’une montagne, où les couches se recouvrent toutes à de courtes distances sans se montrer à nu sur une grande étendue, on croirait qu’elles se succèdent naturellement les unes aux autres, en constituant les divers étages d’une même formation ; mais à les examiner en détail, à les observer dans les escarpements ébouleux ou dans des coupes verticales, leurs véritables rapports vous apparaissent alors sous un autre aspect, et vous font apercevoir des hiatus , des discontinuités là même où, dans une première inspection, on pen- sait avoir remarqué une série non interrompue de couches mu- tuellement subordonnées. C’est qu’on doit convenir que dans les Maremmes Toscanes, à cause des forêts buissonneuses et de la terre végétale qui recouvrent les 19/20es du territoire , il n’est pas toujours facile de saisir les relations des terrains qui constituent la charpente des monts. La bonne volonté ne suffit pas toujours pour surmonter ces difficultés inhérentes au pays; il faut de plus de la témérité et un séjour prolongé. Ainsi, malgré des rt cherches journalières et assidues , je n’ai pu connaître la position des cal- caires et des schistes rouges qu’a près avoir retrouvé leurs analo- gues dans le golfe de la Spezzia , où la présence de nombreux fos- siles ne peut guère laisser de doutes sur leur âge. Aussi conçois-je facilement l’erreur dans laquelle est tombé M. Savi, lorsque, dans son mémoire sur les altérations plutoniennes souffertes par Tal- berese compacte et sa conversion en calcaire salin et en dolomie , il a écrit que le marbre blanc du Campigliese était de la craie mé- tamorphique. Examinons à notre tour les faits qui nous portent à adopter un tout autre sentiment. Campiglia est bâti sur deux collinesdemacigno etd’alberese (pl. 111, fig. 7), M et w, dont on peutobserver les rapports depuis la fou t;iine Corvo jusqu’au petit oratoire de Santa-Croce , en parcourant la terrasse ouverte sous les murs de la partie méridionale de cette ville. En face du chemin qui conduit par Pozzatello aux montagnes de l’Aquaviva , le macigno butte directement contre les schistes î 72 SEANCE DU 13 JANVIER 1815. rouges (4) qui font partie du terrain jurassique, occupant le vallon de Fucinaja, où près de l’église de ce nom ils recouvrent un cal- caire rougeâtre (4) un peu feuilleté, passant au talcsciiisie et ren- fermant une très grande quantité d’encrines que leur état spa- ihiquefait facilement distinguer. Les restes de ces corps organisés sont principalement abondants dans le sentier qui conduit aux mines de cuivre exploitées et dans son escarpement nommé la Grande-Fave situé au-dessus des fourneaux de fusion. Comme, en parlant des terrains jurassiques, nous aurons occasion d’indi- quer la position et l’âge de ces calcaires fossilifères d’une manière plus précise, qu’il nous suffise d’énoncer en ce moment que nous les considérons comme appartenant au lias inférieur, puisqu’on a découvert sur une foule de points où ils se montrent à nu, b s Ammonites Bucklandi , A. obtusus et A. serpent inus , avec des a F véoles de B délimites que l’on avait prises à tort pour des Ortho - ceiü , et qu’au-dessus de ces mêmes calcaires nous avons reconnu un étage schhto-marneux rempli de Posidonia liasinn ; ce qui permet de fixer leur position d’une manièie plus exacte encore. La discordancedes calcaires encrinitifèreset des marbres du Cam- pigiiese i st évidente et incontestable au-dessus de la Grande-Cave (pl. 111 , fig. 8). La séparation est d’autant plus facile à saisir, même au premier coup d’œil, que vers les lignes de contact les premiers possèdent une stratification très bien marquée et fort régulière, et qu’ils sont composés de couches d’un calcaire rouge de chair très mince (I), séparées de distance en distance par des strates d’un schiste de même couleur qui donnent à la masse entière une appa-^ rence feuilletée, et lient les calcaires, par le moyen des talcschistes, à l’énorme système des marnes bariolées \L'), que l’on traverse depuis le vallon de Fucinaja jusqu’à la chapelle de Santa-Croce, et que l’on retrouve à Sasseta et dans les gorges del Giardino, au-dessus de San-Vincenzo ; le marbre , au contraire , se pré- sente sans stratification distincte, en masses très épaisses , fissu- rées dans tous les sens et prenant l’apparence d’une roche éruptive fendillée par suite du refroidissement (X); la texture en est par- faitement saccliaroïde , et sa blancheur irréprochable contraste avec la teinte foncée des calcaires jurassiques qui viennent ap- puyer successivement l’extrémité de leurs couches contre l’escar- pement qu’avait formé un premier soulèvement, tandis que s’ils avaient été la continuation naturelle des calcaires saceharoïdes, un étage immédiatement supérieur, ils se seraient modelés exacte- ment sur la surface , au lieu de présenter une opposition de strates si saillante. Ajoutons que l’hypothèse d’une faille ne SÉANCE DL! 13 JANVIER 1845. 173 pourrait nullement concorder avec les faits observés ; car vers les lignes où s’opère la juxtaposition, il existe un dépôt de conglo- mérat grossier dans lequel on distingue des fragments remaniés de calcaire saccharo’ide , phénomène assez ordinaire, comme on le sait, vers les points de jonction de deux formations différentes. De plus, comme le manteau du calcaire rouge et des schistes qui lui sont superposés forme autour du IVIonte-Calvi , qui est le point central du soulèvement du Campigüese, une ceinture non interrompue (fig. 7) qui enveloppe la base de ce groupe monta- gneux, la supposition d’une faille dans le vallon de Temperino est repoussée parle manque total du calcaire encrinitifère , au- dessus de la ligne de fracture et dans toute la partie de la chaîne occupée par le marbre blanc. Cette rencontre brusque des deux terrains, la présence des fossiles dans l’un, jointe à sa stratifi- cation distincte, les caractères minéralogiques de l’autre, sa structure massive, circonstances qui dévoilent le concours de causes opposées dans leurs effets, et dont l’action ne s’est point manifestée dans une même période; tout, dans cette localité re- marquable, se réunit pour arracher les calcaires saccharoïdes à la formation jurassique. M. Savi , qui avait été frappé à son tour de cette discordance de la Grande-Cave , admettait pour l’expliquer que la manifesta- tion des causes plutoniennes qui d’un calcaire compacte avait formé un marbre salin s’était arrêtée vers ce point, et que la structure observée, que la solution de continuité, devaient être rap- portées à des effets inégaux de température, qui auraient provoqué des dilatations et des contractions auxquelles il fallait attribuer létat particulier d’un même calcaire, dont une portion aurait éprouvé une métamorphose complète , tandis que l’autre aurait conservé ses caractères primitifs. Cette explication , pour être admise, exigerait la connaissance plus parfaite de la nature des agents employés pour amener le métamorphisme d’une chaîne entière de montagnes. Dans tous les cas, le principe po.-é veut qu’ils aient été très énergiques ; il y aurait alors lieu d’être étonné de voir d’un côté le calcaire blanc de la Grande-Cave portant les traces d’une complète transformation, et d’un autie côté les cal- caires jurassiques ne présentant aucune marque d’altération et conservant de nombreux fossiles. Si , à tous ces faits, déjà si con- cluants par eux-mêmes, nous joignons la discordance de stratifica- tion et l’existence d un conglomérat entre les deux formations, n’auions-nous pas un faisceau de documents suffisants poui ad- mettre la séparation que nous proposons? 174 SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. Cette localité et les accidents qu’elle montre ont été l’objet de l'attention de tous les géologues qui ont eu l’occasion de les ob- server. M. A. Burat s’en était servi lui-même (1) comme point de repère pour la détermination des formations secondaires de la Toscane traversées par les filons amphiboleux, et il plaçait les marbres de Carrare et du Campigliese dans le terrain jurassique. Cette conclusion notait que la conséquence de l’opinion qu’il s’é- tait faite de -l’âge des calcaires et des schistes rouges, qu’il consi- dérait, avecM. Savi , comme crétacés. Mais ayant parcouru der- nièrement en sa compagnie les localités que je décris, je lui ai signalé l’indépendance de l’alberese et du macigno (craie) par rapport aux marnes et aux calcaires rouges qu’ils recouvrent à Santa-Croce en stratification transgressive (fig. 7) ; et la discor- dance de ces derniers avec les marbres blancs, à la Grande-Cave (pl. III, fig. 8) , étant un fait bien démontré, j’ai eu l’avantage de voir mes idées paît âgées parce savant. J’ai dit qu’il n’était pas aisé de saisir les relations réciproques des divers terrains du Campigliese, quand on se bornait à en étudier les accidents dans les sentiers pratiqués sur les têtes des couclus, et qu’on était tenté de rapporter à un seul et même sys- tème trois formations cependant bien distinctes. En effet, si à la Grande-Cave une rupture profonde et verticale n’eût mis en évi- dence la discordance dont je viens de parler, il aurait été difficile, pour ne pas dire impossible, de la constater au-dessous comme au-dessus de l’escarpement, bien que pourtant dans le vallon de Temperino les travaux exécutés dans l’intérieur de la mon- tagne l’aient rendu manifeste en deux points placés à différents niveaux, d’abord dans le chemin de fer, taillé ail milieu , qui met en communication le puits d’extraction avec les fonderies, et en- suite dans la galerie Fortuné , où le marbre et les calcaires rouges se montrent avec les mêmes particularités qu’à la Grande-Cave , c’est-à-dire avec les mêmes couches de conglomérats au contact, et avec un changement complet dans la stratification. On peut se faire une idée de la confusion involontaire dans laquelle on peut tomber, quand on suit la formation du calcaire rouge dans les légions de la montagne de l Aquaviva , qui est une continuation du Monte-Calvi dont elle est séparée \ ar le vallon de Botro-ai-marmi. On les retrouve là avec tous les caractères que nous leur avons reconnus, et on les voit s’appuyer avec une direc- tion constante du N. au S. sur la formation des calcaires saccha- (i) Géologie appliquée, p, x5 et 1 4 2 • SÉANCE DU 1S JANVIER 1845. 175 roïdes qui courent du S. -O. au N.-E. Il existe vers les points de contact entre le Montorsi et l’Àquaviva un énorme filon d’am- phibole radiée qui pénètre même au milieu des calcaires rouges, sans que la couleur ait été altérée et la stratification troublée; on aperçoit seulement une cristal! i ni té que l’on serait presque tenté d’attribuer à la présence de ces masses injectées, si la même cris- tallinité n’existait pareillement à la Grande-Cave, dans des cou- ches remplies de fossiles, à Caldana et sur une foule de points où le même étage se montre à découvert et en dehors du voisinage des filons. Il faut savoir se tenir en garde contre les erreurs dans lesquelles peut vous engager la valeur trop absolue que l’on donnerait aux caractères foui nisseulement par la structure ; c’est qu’en vérité il en est de la texture subsaccharoïde de ces calcaii es à Diceras des Pyrénées, comme de certains calcaires néocomiens de la Provence , et comme de presque tous les albercses de la Tos- cane, qui n’ont pas subi la moindre altération , bien que dans la cassure ils montrent cet aspect cristallin particulier à certains marbres métamorphiques. S’il fallait ajouter un exemple plus ex- traordinaire, je le trouverais clans le calcaire tertiaire lacustre de Bayons près d’Aix, exploité comme marbre coloré , et qui , par la finesse du grain, sinon par l’éclat, ne le cède en rien à quel- ques uns des marbres réputés primitifs. Bien qu’à cause des déblais et des terres qui recouvrent les alentours du fila» de TAquaviva , les lignes de jonction entre le calcaire rouge et le marbre ne soient pas visibles , cependant leurs rapports réciproques sont in- diqués assez nettement par leur direction respective, qui pour le calcaire rouge à l’Aquaviva, comme à Caldana, à Montorsi , à Pozzatello et à la Grande-Cave est constamment N.-S. , tandis que celle du calcaire saccharoïde à l’Aquaviva, à San-Barto!o,au Monte delle fessure, à Botro-ai-marmi , incline généralement du S. -O. au N.-E., circonstance qui trahit le mouvement sur- venu dans cette chaîne avant le dépôt du terrain jurassique, et qui concorde parfaitement avec la discordance observée dans le vallon de Temperino. Il n’y a qu’à jeter les yeux sur la coupe représentée par la fig. 7 pour saisir la position des marbres par rapport aux autres formations, et s’apercevoir que les calcaires l onges de la Sasseta, de Monte Calvino, de l’Aquaviva, de Monte- Valerio et de Caldana , représentent , à proprement parler, la demi-ceinture du terrain jurassique autour du marbre blanc déjà soulevé , l’autre demi-ceinture se retrouvant, mais inclinée dans un sens opposé, sur les flancs du Monte-Calvi qui confinent avec les terres de la Gherardesca. séance DU 1-3 J AN VI Eli 1815. no Avant «le discuter l’âge des calcaires saccharoïdes , émanerons rapidement les particularités qu’ils peuvent présenter. Les marbres de Carrare, de l’île d’Elbe et du Gampigliese ren- ferment à l’état disséminé quelques minéraux que l’on retrouve pareillement dans les Pyrénées ; en première ligne je dois placer la couzcranite , que j’ai décou vcj te, je ne dirai pas sans étonne- ment, dans la montagne du Monte-Rombolo, à la droite du tor- rent de Botro-ai-marmi , qui prend naissance dans le cirque de Fucinaja et couit à peu près parallèlement à la route de Cam- piglia à San-Yincenzo. Après .avoir dépassé la Madonnina, petit oratoire placé presque en face du vallon de la Rocca-Sa u-Silvestre, après avoir laissé à gauche la route communale, on prend le sentier qui conduit à la base occidentale du Monte-Rombolo , vers d'anciennes mines de 1er, et on arrive sur l’emplacement de fours à chaux alimentés par le marbre blanc. C’est dans les cou- ches mêmes dont ou l’extrait qu’abondent les couzéranites, qui constituent une loche absolument semblable à celles qui pro- viennent des Pyrénées. Leur couleur est généralement celle du calcaire qui les renferme, blanche, noire ou grise, suivautque la gangue est blanche, noire ou grise à son tour. Les marbres du Catnpigliese et de l’île d’Elbe présentent en outre des pyrites de fer cristallisées en cubes et en dodécaèdres à faces pentagonal^. A la Corchia, au-dessus du village du Livi- g iani (Alpt s Apuennes \ on a recueilli de 1 épidotezoïsite. On sait que les calcaires de Carrare renferment aussi des cristaux de quarz d’une parfaite limpidité. Il est presque inutile de rappeler que c’est dans cette formation qu’abondent les marbres statuaires, objet d’une exploitation ac- tive à Carrare et à Serravezza, les bardigli et les brèches calca- réo-talqueuses connues sous le nom de mischio di Stazzemma. Les bardigli fioriti des environs de Rosina dans le Serra vezzano sont fort recherchés, et doivent leur réputation aux dessins formés par des lignes noires irrégulières qui traversent la masse dans tous les sens et la bariolent d’une manière fort capricieuse. Ces lignes sont pi oduites par des feuillets excessivement minces de talc noi- râtre qui , lorsqu’ils deviennent plus abondants, fout passer la roche à un véritable cipolin. Ccttedernière roche est fortabondante dans les Alpes Apuennes, où on peut en recueillir une collection très variée ; tantôt le talc se trouve disséminé en paillettes isolées , tantôt engagé en nœuds inégaux , ou bien intercalé en feuillets réguliers auxquels est due la schistosité particnhèie aux cipolins. La présence du talc dans SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. 177 les carrières où l’on recherche le marbre statuaire est consi- dérée par les ouvriers qui nomment les parties souillées par ce minéral madré macchia comme un indice favorable pour la ren- contre de blocs irréprochables. Si les filons de fer oligiste et des sulfures sont particuliers, ainsi que nous l’avons déjà vu, au terrain de vermcano , ceux de fer oxidulé paraissent appartenir exclusivement à la formation des calcaires saccharoïdes au milieu desquels ils constituent des amas irréguliers très puissants, comme au-dessus du Yal di Cas- tello dans le Pietrosantino , à Stazzemma , au cap Calamita, dans l’ile d’Elbe. Les montagnes du Campigliese sont également traversées par de magnifiques filons d’amphibole radiée et d’ilvaïte que l’on re- trouve sur deux points de l’ile d’Elbe, à Rio la Marina, et au cap Calamita# Mais comme les allures de ces masses offrent tous les caractères des roches ignées, et qu’il est dès lors plus rationnel de les considérer comme des dykes éruptifs, nous nous réservons d’en parler plus longuement dans un travail que nous préparons sur les produits plutoniques de la Toscane. Il existe enfin un filon très régulier defahlers , contenant or et argent, dans les montages de Yal di Castello. Il a pour gangue une fluorine verte ou incolore et une barytine blanche lamellaire. Au contact les calcaires sont convertis en dolomie et pénétrés de pyrite et de quarz cristallisés. Les coupes que nous avons données de l’Altissimo , de Trambi- serra, deCorvaja et deYardana (pl. III, fig. 3, 4, 5 et 6), ainsi que les développements auxquels nous nous sommes livré à cet égard, démontrent que la formation des calcaires blancs est entièrement distincte des terrains des schistes cristallins, et que par consé- quent elle ne peut lui être rapportée. D’un autre côté, le vallon de Temperino (fig. 8) nous a fourni la preuve qu’elle est aussi sé- parée des calcaires jurassiques qu’elle supporte dans les régions du Monte-Calvi et que nous croyons attribuer au lias inférieur. Elle appartiendrait donc ou au système devonien ou au système silurien . Si pour sa classification rigoureuse nous pouvions appeler à notre secours les caractères paléontologiques , tout embarras cesserait : mais l’absence presque absolue de tout corps organisé laissera constamment subsister quelques doutes, à moins que des découvertes ultérieures ne viennent les dissiper. Nous ne connais- sons en réalité qu’un seul exemple de fossiles signalé dans les mai bres blancs de Carrare ; c’est celui cité par M. de Blainville dans son Manuel d'actinologie (page 105), et qui se rapporte à un Soc, géol, Tome II. 2e série. 12 178 SÉANCE DU 13 JANVIER 184-5. échantillon poli provenant de la collection de M. Faujas de Saint- Fond, sur la surface duquel on distingue des loges d’Astræa. Ce n’est point d’un fait isolé et qui d’ailleurs ne précise rien sur l’es- pèce à laquelle appartiendrait ce polypier qu’on peut arguer pour asseoir le véritable horizon géologique des calcaires sacciia- a oïdes. On le trouverait peut-être plus naturellement dans la Sar- daigne, quia l’avantage incontestable de fournir une foule de points de ressemblance avec le sol italien. Or, l’on sait que M. de la Marmora a découvert dans cette île un calcaire silurien avec Spirifer, Productus et Orthocera j pourquoi le même calcaiie ne trouverait-il pas son équivalent dans les marbres blancs des Alpes Apuennes et du Campigliese, qu’une cause plutonique au- rait plus tard modifiés? Alors la formation des schistes cristallins avec leurs cipolins subordonnés ( verrucano de M. Savi) qui con- stitue la base des terrains stratifiés, et que nous avons vue discor- dante avec les marbres saceharoïdes, correspondrait au terrain de transition inférieur (système cambrien), tandis que ces derniers rentreraient dans le terrain de transition moyen (système silurien). Cette classification concorderait très bien avec les deux lignes de soulèvement constatées dans les terrains de transition et désignées par M. de Beaumont sous le nom du système des ballons des Vosges et sous celui du Westmoreland et du Hundsruck. Si j’ai bien saisi l’opinion de M. Pareto, le verrucano , suivant ce géologue, représenterait en Italie le grès bigarré et les mar- bres blancs le muschelkalk ; il retrouverait ainsi dans une grande partie de la péninsule, mais à l’état métamorphique, le trias du midi de la France et des Alpes Vénitiennes. Dans le département du Var, le trias repose non seulement sur le terrain houiller, mais encore sur les montagnes de schistes cristallins qui constituent la chaîne des Maures et d’une grande partie de i’Esterel. Outre que la discordance observée entre le verrucano et les calcaires saceharoïdes s’oppose à la détermination de M. Pareto , puisque cette discordance entraînerait aussi celle du grès bigarré et du muschelkalk, il ne faudrait pas moins expli- quer l’absence dans les Alpes Apuennes des micaschistes et des phyliades de la Provence. Si au contraire on a égard à la disposi- tion relative des masses et à leur composition minéralogique, dont il faut tenir quelque compte , on aura l’avantage de ne faire heurter aucun système et de retrouver les schistes cristallins de eette partie de la France dans les grandes bandes qu’on observe dans le golfe de Gênes à Savonna, Tranzaiio , au Capo-Corvo, dans les Alpes Apuennes, dans les montagnes Pisanes, dans la 179 * SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. Romagne et dans une portion du royaume de Naples, formation , disons-le, que l’on retrouve dans tous les pays à la base de tous les terrains stratifiés , et qui ne doivent qu’aux terrains plus mo- dernes qui les ont recouverts de n’apparaître pas toujours à la surface. Rappelons, en terminant cette question, que la double discor- dance observ e entre les marbres, le verrucano et le lias ne lais- sent que le choix , pour les premiers , d’une place dans un des termes du terrain dit de transition , et que, quelque opinion que l’on adopte pour leur classement , il est de toute impossibilité de les considérer comme primitifs, puisqu’il résulte évidemment de nos études dans les Alpes Àpuenneset dans l’île d’Elbe qu’ils re- posent à Stazzemma sur la grauwacke et à Rio sur les conglo- mérats quarzeux qui constituent le dernier étage des schistes cris- tallins. § III. Formation jurassique. M. de Collegno reconnaît dans le terrain jurassique des Alpes Lombardes (1) cinq groupes qui sont, en allant de bas en haut : 1° un grès rouge ; 2° un calcaire noir , bitumineux ; 3° un calcaire gris avec silex ; 4° un calcaire marneux rouge de brique; 5° un calcaire blanc ( majoliça ). Bien que ces divisions, surtout les n. 1 , 2 et 5, ne se maintiennent pas dans toute leur intégrité en dehors des contrées décrites par M. de Collegno , nous en retrou- vons cependant quelques unes en Toscane, et principalement le calcaire rouge ammonitifère , qui établit un horizon très facile à reconnaître, et qui apparaît sur presque tous les points où se montre la formation jurassique. Mais pour bien saisir les caractères du terrain qui nous occupe, il est indispensable de décrire ici les environs delà Spezzia , où non seulement s’observe bien la succession des couches , mais en- core où l’on peut s’aider de la présence des fossiles pour bien déterminer des étages qui reparaissent sur d’autres points de la Toscane. La coupe représentée (pl .III, fig 9), tracée du golfe de la Spezzia à la Méditerranée, passe par Campiglia et montre la construc- tion de la montagne de la Coregna, qui est séparée de la Castellana par le vallon de l Aqua-Santa. M. de La Bêche, dans son Manuel de géologie (traduction française , pages 404 et suivantes) , et dans (î) Sur les terrains stratifiés des Alpes Lombardes. Bull 2e série, 1. 1, p. 1 8 1 , 180 SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. le 1er volume des Mémoires de la Société géologique de France , a décrit la constitution géologique de cette contrée; j’aurais volon- tiers renvoyé aux écrits du savant anglais , si les rapports entre le macigno et la formation jurassique n’avaient été intervertis dans les coupes qu’il a données de la Coregna, et si la valeur mal appréciée des caractères paléontologiques , le mélange de Bélem- nites et d’Orthocères, ainsi que la présence d’espèces propres au lias et au terrain carbonifère que l’on a cru reconnaître dans les mêmes couches, n’eût jeté beaucoup de confusion sur le classe- ment de ces montagnes. En s’engageant dans le vallon de l’Aqua-Santa , on traverse successivement les étages suivants : 1° Un calcaire compacte gris ou noirâtre renfermant en très giande abondance des Entroques et des Pentacrinites , desTéré- bratules et d’autres fossiles , mais tellement empâtés dans la roche qu’il est très difficile de s’en procurer des échantillons reconnais- sables. Ce n’est guère qu’en cherchant avec attention dans les pierres détachées et exposées depuis longtemps aux intempéries de l’air, que l’on peut espérer de rencontrer quelques espèces déterminables J’ai été assez heureux pour y découvrir un Pleu- rotomaria ornata (Défiance) que je conserve dans ma collection ; 2° Une dolomie blanche , grise ou rosée formant les arêtes do- minantes de la Castellana, delà Coregna et du Pignone, et consti- tuant à Porto-Yenere , à l île Palmaria , le fameux marbre connu sous le nom de Portor. En parlant de cette roche , M. de la Bêche s’exprime en ces termes (1) : « Il faut remarquer que la dolomie forme la partie » centrale de la chaîne, en constituant les points les plus élevés » des montagnes calcaires, et qu’elle peut être considérée aussi » bien comme un grand filon redressant les couches, que comme » une grande couche ou un assemblage de couches renfermées au » milieu d’autres masses. » M. Savi a attaqué avec raison cette assertion (2) en prouvant que la dolomie n’existe ni en masse, ni en couches séparées de celles du calcaire gris, compacte et fossilifère. «En visitant l'île » du Tinetto et du Tino , dit-il, on voit clairement que les cal- » caires qui, à leur extrémité orientale, sont de couleur grise ou »> noirâtre , d’un grain compacte, et remplis de bivalves, d’uni- « valves et de zoophytes sont convertis à leur extrémité occidentale (î Mém , soc géol. de France, t. I, p. 28. (2) A hiovo giornale dei Lctterat. , n. 71, p. 92. SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. 181 » en une belle dolomie blanche et grenue. Et en observant avec » une loupe la portion des strates où s’opère la conversion, on » s’assure que le phénomène est dû au développement dans la pâte » du calcaire gris de petits rhomboèdres de dolomie qui , rares «dans le principe, deviennent de plus en plus abondants vers » l’extrémité occidentale de la couche, finissent par se toucher, et » forment alors la grande masse dolomitique : aussi ne peut-on » se dispenser d’admettre qu’à la Spezzia , cette roche ne soit une » simple modification du calcaire compacte. » Cette explication, que je partage entièrement, et qui rend parfaitement compte de la dolomisalion du calcaire jurassique , emprunte son dernier degré d’évidence à la rencontre que j’ai faite, sous le fort ruiné de Porto-V enere , d’une dolomie grenue contenant une quantité de bivalves et d’univalves très reconnaissables , et appartenant aux mêmes espèces que celles que l’on rencontre immédiatement et en grand nombre sous la dolomie, dans le calcaire noir qui forme l’escarpement connu dans le pays sous le nom d’Arpaja. C’est principalement dans ces mêmes calcaires noirs , bitumi- neux , qui de l’Arpaja se continuent dans les îles de Palmaria, du Tinoetdu Tinetto, qu’ont été recueillies des coquilles appartenant aux genres Pecten , Plagiostoma , Ostrea , Astaste , T ri go ni a , Nu- cula , Cucullca et divers polypiers. M. Guidoni a annoncé avoir trouvé aussi la Gryphea arcuata dans le marbre de Poi to-Venere. Nous pensons que ce nom aura été appliqué par erreur à une autre espèce de gryphée; car les couches dans lesquelles on la signale appartiennent évidemment à l’oolite inférieure. 3° Un calcaire compacte gris foncé, en lits minces , passant in- sensiblement par l’intermédiaire de schistes alternant à un 4° Calcaire noirâtre en couches peu épaisses mais courtes, sé- parées par des strates d’un schiste marneux grisâtre, qui renfer- ment principalement des fossiles pyritisés et des rognons de fer sulfuré que les habitants du pays considèrent comme des pierres de tonnerre. Ce point est un des plus importants à étudier pour la connaissance du terrain jurassique de l’Italie, puisqu’on y trouve une quantité considérable d’Ammonites très bien conser- vées , et ces fameuses Ortliocera que nous verrons bientôt se transformer en alvéoles de Belemnites. On sait que Sowerby, sur 15 espèces d’Ammonites de cette lo- calité qui ont été soumises à son examen , en a décrit onze comme nouvelles (l) , la douzième serait un individu jeune de VA. Buch- (0 Manuel de géologie , p. 4o6. — Ces onze espèces y sont si mal figu- 182 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. lancli ; la treizième, Y A. erugatus de Piiilipps et les deux autres les A. Listeri et biformis particulières au calcaire carbonifère. Ces dernières sont évidemment mai dénommées, car toutes les Am- monites de la Coregna que j'ai dans ma collection, et principale- ment celles qui ressembleront le plus à Y A. Listeri , sont persillées. A cette liste on peut ajouter lés Ammonites tumidus (Rein.), d. cor- datus (Sow.) , A. contractas (Sow.), A. Parhinsonii (Sow.), A. discas (Sow.), A . bisulcatas (Brug) que j’ai recueillies moi- même avec plusieurs autres espèces dont quelques unes me pa- raissent nouvelles. On trouve généralement ces Ammonites libres sur le sol et d’une petite taille; par exception, j’en ai trouvé un échantillon remarquable par ses dimensions: il a quatorze centimètres de diamètre. A ces céphalopodes cloisonnés sont associés de nombreux hÿg- ments d’alvéoles de Rélemnites que MM. Guidoni, Savi et de la Bêche ont pris pour des Orthocera qui ont été rapportées à Y O. Steinhaueri du calcaire carbonifère et à l’O. Elongatas du lias. Parmi les nombreux exemplaires que j’ai ramassés dans cette lo- calité , il s’en trouve un de parfaite conservation, composé de cinq cloisons distinctes et dans leqael le siphon latéral contiga aux parois du cône est visible dans toute sa longueur. On n’avait peut- être pas besoin d’une pareille démonstration pour admettre h priori que ces corps coniques appartiennent réellement à des Bélemnites ; leur association avec des Ammonites à cloisons persillées donnait à cette opinion un degré de certitude , corroboré d’ailleurs par la rencontre de corps semblables dans des terrains analogues du reste de l’Europe. La présence des Ortliocères au milieu de la for- mation jurassique, en l’état actuel des observations paléontolo- giques, était un fait monstrueux, très malheureusement intro- duit dans la science , et qu’il était de la dernière importance de faire disparaître. Un Pleurotomaria , conservé seulement à l’état de moule et con- verti en fer hydroxidé, est le seul mollusque que j’aie observé dans les mêmes couches. 5° Un système de marnes grisâtres et jaunâtres très schisteuses, traversé par des filons de quarz gras et renfermant à la base de la montagne , coupée par le ruisseau de Marola, des empreintes très nombreuses de Posidonia liûsina (Ls) . rées qu'il est presque impossible de déterminer les exemplaires nue les dessins ont représentés ou voulu représenter. SÉANCE DU 13 JANVIER 1815. 183 Gps marnes, qui deviennent souvent satinées et ressemblent alors à un véritable phyllade de transition, passent insensible- ment aux couches suivantes. 6° Système de marnes grises, brunes, rouges et verdâtres qui se succèdent jusqu’à Campiglia (L) , se montrent au-dessous de la chapelle Santa-Catarina et s’enfoncent recouvertes par le ma- cigno (M) sous la mer , en expirant dans le vallon raviné de Mar- ban a dans la direction de l’île du Tinetto. Aces schistes bariolés, qui n’ont pas moins de cent mètres de puissance, sont associés des calcaires à cassure franche, à texture sub-saccharoïde , dont les plans des couches sont recouverts d’un enduit talqueux qui leur prête un air de famille commun avec les taleschistes de Campan et de Sarancolin. On y observe des fragments d’ encl ines, ressor- tant en saillie à la surface des pièces détachées, ou se laissant distinguer, dans les fragments fraîchement cassés , par leur struc- ture spalhique et par l’existence d’un canal central. La place pra- tiquée autourde l’église Santa-Catarina est pavée avec ce calcaire, que sa disposition à la schistoïté laisse détacher en dallesà surfaces lisses et bien parallèles. C’est dans ce calcaire, que le macigno masque en grande partie à Campiglia de la Spezzia,ou du moins dans les calcaires analogues et identiquement les mêmes qui reparaissent en beaucoup de points de la Toscane, que l’on a recueilli plusieurs Ammonites , parmi lesquelles les A. obtus us, A. Bucklandi et A . serperttinus. Dans le nombre des faits importants que présentent à l’obser- vateur les montagnes de la partie occidentale du golfe de la Spczzia , un réclame une attention spéciale, commandée par la présence de fossiles caractéristiques, la Posiclonia li usina. L’étage qui la contient représente incontestablement le lias supérieur : 1° paroe qu’il est supporté par des marnes et des calcaires qui renferment des fossiles propres au lias inférieur ( Ammonites Bucklandi , etc.) ; 2° parce qu’il supporte les calcaires noirs avec schistes intercalés où abondent des Ammonites mal déterminées sans doute, mais que les A. Parkinsonii , A . discus , A. contractus doivent faire considérer comme caractérisant la grande oolite. Il est vrai que les A. bisulcatus , A . cru ga tus , A. Bucklandi (jeune) , qu’on y a pareillement signalées, tendraient à introduire les cou- ches qui les renferment dans le lias et que, dans cette hypothèse, ces mêmes couches pourraient représenter et le lias supérieur et le terrain jurassique inférieur ; mais, comme à l’époque où M. de la Bêche recueillit les fossiles qu’il montra à M. Sowerby , les déter- minations spécifiques ne reposaient point sur des caractères aussi SÉANCE DU 13 JANVIER 1843. 181 rigoureux que ceux qu’on applique aujourd’hui, il est évident qu’on ne doit recevoir qu’avec quelque défiance les noms im- posés par le conchyliologiste anglais , et surtout ces prétendus mélanges de fossiles propres au calcaire carbonifère et au lias. Nous avons vu déjà combien peu était fondée l’existence simul- tanée des Orthocères et des Ammonites persillées. Mais ce qu’il y a de bien prouvé pour moi , et mon opinion se fonde sur les lois irrécusables de la superposition et sur la présence de quelques co- quilles dont je garantis les noms, parce que je les ai trouvées dans la série jurassique du midi de la France, de la Saintonge, de la Vendée, et que j’ai pu les comparer à celles qui proviennent de la Normandie, c’est que l’étage à Posidonici qui caractérise le lias su- périeur est placé entre un étage qu’il recouvre et qui renferme les Ammonites Bucklandi et A. obtusus et un autre étage qui ren- ferme les et ^/. contractas , qui sont caracté- ristiques de l’oolite inférieure. Je néglige ici à dessein les espèces d’une dénomination douteuse et que je prierai M. A. d’Orbigny de déterminer. Donc l’étage à Posidonici liasina , en supposant même qu’on ne trouvât plus au dessus aucun fossile, dessinerait un ho- rizon assez bien marqué pour nous forcer de placer dans le lias inférieur l’étage des marnes bariolées et des calcaires rouges, qui est inférieur et concordant avec lui : si ce classement, déduit seu- lement de la superposition, s’appuie, de plus, sur l’existence, dans les mêmes calcaires, des A. Bucklandi , A. obtusus et A. serpentinus , on verra lescaractères paléontologiques justifier entièrement les caractères géologiques, et par conséquent nos divisions. Si à présent nous suivons ce calcaire rouge dans les contrées italiennes où il s’est développé, nous nous assurerons qu’au lac de Corne non seulement il possède les acciden:s minéralogiques qu’on lui reconnaît à la Spezzia , mais encore que tes fossiles qui y ont été signalés sont tous basiques ( Ammonites hctcrophyllus, A. clc- gans, A. fibulatus , A. kValcotii , A. insignis , A . radians, A. Scipio- nianus , A. thouarsensis). Pareillement en Toscane, les Ammonites trouvées jusqu’ici dans le calcaire rouge sont basiques [A, obtusus , A. Bucklandi et A. ser- pentinus), comme à Caldana du Massitano, à Montieri, à Sassita , à la Pania di Coi fino, etc. Je suis heureux de me trouver sur ce point d’accord avec M. de Collegno, relativement à l’importance attribuée à l’horizon géologique de ce calcaire rouge. Ce que je n’admets point, ce sont ses restrictions quant à son âge précis : « Les fossiles qu’il ren- »> ferme, dit notre savant confrère, paraissent devoir faire consi- SÉANCE L>U 13 JANVIER 18 î 5. 185 » dérer ce calcaire comme l’équivalent de l’étage oolitique infé- » rieur, peut-être même de la partie supérieure du lias (1). » Ces dernières paroles laissent subsister un doute que la présence des Ammonites fValcotii , A. Scipionianus , A. thouarsensis et autres au- rait dû, suivant nous, dissiper. Peut-être aussi cette réserve est- elle établie pour faire entier les marbres de Carrare dans la for- mation jurassique. Ces marbres représenteraient alors le lias in- férieur lorsqu’ils sei aient recouverts par les calcaires rouges, ou toute la série oolitique métamorphique lorsqu’ils disparaîtraient, — hypothèse inadmissible , puisque nous avons vu dans le Cam- pigliese Toscan un même calcaire rouge à Entroques et à Am- monites reposer sur la formation des calcaires saccharoïdes en dis- cordance de stratification. Mais revenons à notre coupe de la Coregna. Nous avons vu les schistes et les calcaires rouges former, au-dessous de Campiglia, un système épais qui se continuait jusqu’à la sommité des monta- gnes qui dominent la mer. Ces roches, vers le moulin à vent et dans le sentier qui conduit du village à l’église Santa-Catarina , sont recouvertes transgressivement par le macigno (M). Ce grès, qui appartient à la formation crétacée, est remarquable en ce qu’il contient des blocs assez volumineux de granité roulé. Si l’on admet avec M. Savique les granités toscans sont tous postérieurs à la craie et contemporains de la période tertiaire , il serait inté- ressant de rechercher le lieu de provenance de cette roche ignée. A partir du moulin, le macigno constitue un bourrelet monta- gneux qui court parallèlement à la mer et masque presque en- tièrement les calcaires rouges, dont une bande fort étroite se montre vers les points de contact, dans la direction du Pignone, comme d’un autre côté, vers le S., le prolongement des calcaires j massiques vers les îles de Palmaria et du Tmo continue sous la mer une partie de la formation elle-même, et ses rapports avec les autres terrains échappent à l’observation (2). M. de la Bêche s’est trompé en figurant dans ses coupes le macigno de Campiglia comme inférieur aux schistes rouges : sa superposition transgres- (î) Loc. cil. p. 207. (2) Dans la carie coloriée dont M. de la Bêche a accompagné son mé- moire sur le golfe de la Spezzia , le macigno elles marnes bariolées, con- fondues ensemble, figurent sous la dénomination de grès brun et de schiste , avec l'indication de couches tourmentées; mais la direction des teinles montre comment les rapports des calcaires rouges avec les ter- rains inférieurs, deviennent par le fail invisibles. 1 86 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. sive est un des faits les plus évidents, jedirai le plus général, puis- qu’elle se soutient dans toute la Toscane, et elle sert par consé- quent à séparer nettement l une de l’autre les formations jurassique et crétacée. La côte orientale du golfe de la Spezzia présente la même suc- cession de couches que celle que nous a offerte la partie occiden- tale : seulement, comme le calcaire gris et la dolomie en forment le revêtement superficiel , les calcaires et les schistes rouges sont généralement recouverts et ne se trahissent que dans le fond des gorges ravinées, comme au-dessous de Fiascarino, et dans les fa- laises du S.-E. de Lerici, où ces mêmes schistes sont accompagnés de jaspes rouges et verts , que nous aurons occasion de signaler sur d’autres points, dans une position identique. La coupe de Fiascarino est intéressante en ce qu’elle montre clairement que le prolongement du terrain infra -basique, repré- senté par les schistes rouges, repose sur les conglomérats et les schistes cristallins du Gapo Corvo, sans V intermédiaire dit marbre de Carrare , circonstance qui prouve l’indépendance de ces trois formations. Avant d’abandonner le golfe de la Sptzzia, qui, comme on le voit, jette tant de lumières sur les rapports des terrains stratifiés de la Toscane, résumons en peu de mots les faits importants que cette contrée présente. Elle nous montre : 1° Le terrain de macigno (crétacé) discordant avec le terrain jurassique ; 2° Le terrain jurassique composé de cinq étages, qui sont de bas en haut : a. b. c. cl. e. Calcaires et schistes rouges infra basiques. Schistes gris avec Posidonia liasina (bas supérieur). Calcaires à Ammonites et Bélemnites . Dolomie. Calcaire gris à encrines. / T. jurassique i inférieur. 3° Le terrain des schistes cristallins du Capo Corvo, discordant avec le terrain jurassique, est composé d’anagénites , de cipohns, de phyllades et de micaschistes. Les calcaires gris, que nous considérons comme appartenant au terrain jurassique inférieur, et qui se montrentsur lesdeux portions du golfe, forment un ourlet, à la base occidentale des Alpes Apuen- nes, qui s’observe dans les environs de Carrara, passe par Massa et se continue, presque sans interruption, dans les montagnes qui SÉANCE DU (3 JANVIER 1845. 187 courent parallèlement à la vaste plaine de Viareggio et viennent expirer dans les alluvions du Sercliio. Ils sont souvent encroûtés de cargneule dolomitique, et ils rappellent alors -, sous le point de vue minéralogique , le muschelkalk du midi de la France. Au- dessus de Massazueoli , dans le duché de Lueques, ils deviennent bréchiformes , et ils contiennent une très grande quantité d’en- crines passées à l’état spathique. A quelque distance de cette loca- lité, entre les bureaux des douanes toscane et lucquoise, reparais- sent les marnes et les calcaires rouges infra-liasiques, ceux-ci avec une abondance considérable de silex grisâtre disséminée en pla- ques et en rognons. La formation jurassique est recouver te là , comme à la Spezzia, en discordance de stratification : en effet , tandis que les schistes sont redressés presque verticalement , les grès crétacés viennent butter contre eux sous une faible incli- naison, et recouvrent à divers niveaux et indistinctement les ar- giles et les calcair es. Les développements auxquels nous nous sommes livré sur le terrain jurassique du Campigliese Toscan, en parlant de ses rap- ports avec les marbres blancs, abrégeront considérablement notre travail, en nous épargnant la répétition de détails déjà connus; nous avons fait ressortir, en décrivant la Grande Cave dans le vallon de Temperino , la discordance des calcaires rouges et des calcaires saccliaro'ides et l’importance que ce fait, joint à la pré- sence des fossiles, acquérait pour établir leur séparation. Ces cal- caires rouges, qui , dans le golfe de la Spezzia, sont recouverts en grande partie par le macigno, enveloppent la base du Monte- Cal vi et se montrent dans cette région avec une puissance que nous ne leur avons jamais reconnue ailleurs. Cela tient au sou- lèvement de cette chaîne de montagnes qui , ayant fait surgir la formation qui supporte le terrain jurassique, a mis sa partie infé- rieure tout-à-fait à découvert et nous a permis de retrouver le calcaire gris de fumée avec silex que M. de Collegno a cité dans les Alpes Lombardes, et qui forme le troisième groupe de son terrain oolitique. Bans le Campigliese, ce calcaire avec silex s’ob- serve principalement sur les flancs orientaux du Monte-Cal vi, qui s’abaissent si brusquement vers le village de Suvereto. Ses ca- ractères sont peu variables; sa couleur passe du gris au blanc sale; sa texture, sans être précisément saccharoïde , n’est pas cependant compacte : elle participe de l’une et de l'autre et res- semble beaucoup à celle de quelques calcaires à Chama animonia , des environs de Cassis, ou mieux des calcaires à Diceras d’Aventi- gnan , dans les Pyrénées. 11 renferme par places des lits de silex ï 88 SEANCE DU 13 JANVIER I 84 5. blanchâtre, qui simulent quelquefois des couches interrompues, mais qui, le plus souvent, sont disposés en rognons parallèles, en indiquant la direction des strates. Les fossiles ne sont pas rares dans ce groupe , mais ils sont tous spatliisés et reconnaissables, seulement dans les surfaces usées par l’intempérie de l’air ; ce sont généralement des univalves turri- culées paraissant se rapprocher des Fusas ou des Buccinum , ainsi que des polypiers. M. Pilla a découvert , dans le même calcaire des montagnes Pisanes, quelques Ammonites et des Pentacrinites de mauvaise conservation. Si on peut restituer à ces corps en- fouis les genres auxquels ils ont appartenu , je ne pense pas qu’il soit aussi facile de les ressusciter comme espèces. Depuis le Monte-Calvino jusqu’au col de la vallée del Giar- dino, où viennent aboutir les limites des communes de Campiglia, de Suvereto , de Sasseta et de Gherardesca , on marche constam- ment sur le calcaire à silex dont les couches très redressées attei- gnent le sommet de Monte-Cal vi , où elles sont recouvertes par les calcaires rouges qui dominant le vallon de l’Ortaccio , occupent le vallon de Temperino, où ils reposent sur le marbre blanc, se prolongent dans le Montorsi, dans le Monte-Valerio et vien- nent s’enfoncer à Caldana sous la vaste plaine alluviale de la Cornia. A Caldana, le calcaire rouge est entremêlé de feuillets schisteux qui le font passer à un calscliiste glanduleux au milieu duquel sont engagés de nombreux fragments d’encrines et quel- ques ammonites dont on aperçoit distinctement la structure sur les surfaces polies. 11 est quelquefois fouetté de veines blanches , et il constitue alors un marbre griotte d’un très bel effet et qui fi- gure avec honneur dans plusieurs monuments de Florence. Au- dessus du Poggio des Alunières, qui n’est autre chose que l’extré- mité méridionale du Monte-Valerio , on exploite, pour l’entretien de la route Emilia, un calcaire compacte d’un grain très fin, à large cassure conclioïdale, susceptible d’être employé comme pierre lithographique, et passant successivement du rouge fleur de pêcher au rose, au grisâtre , à l’olivâtre et au verdâtre. En même temps il est traversé par de nombreuses veines spathiques qui contiennent du manganèse terreux , tandis que de belles den- drites tapissent les plans des couches et s’infiltrent dans la masse même du calcaire. La localité la plus intéressante pour l’étude des calcaires rouges et avec silex est sans contredit celle de Sasseta , dont les environs en présentent de fort belles coupes. Gomme les couches sont très redressées et les points qu’elles occupent presque entièrement SÉANCE DU Î3 JANVIER 1845. 189 dénudés, on peut observer non seulement toutes les particula- rités de leur gisement, leurs alternances avec les schistes rouges, mais encore saisir leur épaisseur, qui n’est pas moindre de 3 à 400 mètre • . Cet étage, qui, comme nous l’avons dit, s’enfonce sur les allu- vions, dans la plaine de la Cornia , et dont le prolongement vers Piombi.no est masqué par une colline d’alberese, reparaît à l’île d’Elbe, sous le Forte-Falcone, en contact avec les serpentines, et dans la montagne de Volterrajo, entre Rio et Porto-Ferrajo, avec les mêmes caractères que nous lui avons reconnus dans le Cam- pigliese. Les environs de Monte-Rotondo, de Montioni , de Gavorrano , de Ravi , les montagnes de Gerfalco et de Montieri offrent de nou- veaux exemples de la présence du calcaire rouge et du calcaire à silex. D’après !VT. Savi, la Cornata de Gerfalco, dans la vallée du Pa- vone, renferme des empreintes très nombreuses d’Ammonites (1). En considérant la constance des caractères de la partie infé- rieure de la formation oolitique, et qui se soutient sur des points très éloignés les uns des autres, au golfe de la Spezzia, au lac de t ome, dans les Alpes Apuennes, à Campiglia, à l’île d’Elbe, dans le Gavorrano, etc.; en considérant, en outre, la parfaite conservation des fossiles qu’elle renferme, je ne puis m’empêcher de considé- rer la couleur rouge dominante comme une couleur native et qui ne présente rien de plus extraordinaire que celle du marbre cain- pan des Pyrénées, du grès bigarré de la Provence et des argiles tertiaires de Yaucluse et des Bouches-du-Rhône. Quoi qu’il en soit, enregistrons la découverte faite dans les cal- caires rouges des Ammonites heterophyllus , A. Bucklandi , A. obtusus , A. 'serpe ntinus , A. elegans, A . fibalatus , A. bValcotii , A. insignis , A. radians j A. Conybeari , A. Scipionianus , A. thoaarsensis , et leur recouvrement par les schistes à Posidonia liasina, et nous letrou- ( i) A l’époque où M. Savi écrivait ses Mémoires sur les Alpes Apen- nines et sur l’ile d'Elbe (i833). il considérait lout le sol de la Toscane comme composé d’un terrain unique ( macigno et alberese) plus ou moins altéré : or, comme le terrain jurassique est nécessairement re- couvert par la craie, et que sa teinte rougeâtre contraste avec le ton foncé de celle-ci, il voyait dans sa coloration les traces des altérations que lui avaient imprimées les causes pluloniennes : mais depuis ( Sopra i car- boni fossili délié maremme Toscane, i843, p. 58), il a arraché à la forma- tion du macigno , non seulement le verrucano , mais encore les calcaires et les schistes rouges dans lesquels il cite les Ammonites Conybeari et A . radians. i 90 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845- verons dans la Toscane le lias inférieur et le lias supérieur for- niant deux étages bien marqués et non métamorphiques. Le lias supérieur Ls (Fig. 7) est représenté dans les environs de Campiglia, comme au golfe de laSpezzia, par des masses puissantes de schistes bigarrés, qui depuisSasseta s’étendent jusqu’à Caldaria, en passant par le vallon de Fucinaja et par la fontaine de la Cis- terna ; bien que la couleur rouge soit la dominante, on y observe aussi le brun, le gris et le verdâtre. Leur stratification, quelque- fois indiquée par l’alternance des teintes, ne devient bien distincte que lorsqu’ils renferment quelques couches calcaires intercalées , ce qui se manifeste nettement vers les points de contact et surtout dans leurs alternances avec le calcaire rouge. Bien que, le plus ordinairement, ils soient mats dans leur cassure et que leur fria- bilité les divise en très petits fragments allongés, qui se séparent d’après les faux joints de stratification , quelques parties ont ce- pendant un aspect satiné , qui les fait ressembler à des phyllades de transition. Entre Caldana et Campiglia, ils passent à un schiste coticulaire et aux Alunières à un véritable schiste siliceux très tenance, à couches très minces contournées et repliées de mille fa- çons bizarres. Cesschistes, ou, pour mieux dire, ces jaspes stratifiés que nous avons déjà examinés à Ceiici(Spezzia) sont rougeâtres et traversés par des veines de quarz blanc. Entre Sasseta et la rivière deCornia, ils constituent une partie des montagnes qui séparent la plaine de ce premier village de celle de Suvereto dans les envi- rons duquel ils reparaissent dans le quartier dit delle For es te. On les retrouve au-dessus de la petite chapelle de Santa Lucia de Caldana , à Monte-Rotondo , toujours dans la même position , c’est-à-dire concordant avec les calcaires rouges auxquels ils sont superposés*, dans le chemin qui conduit à Castel-Nuovo par la forêt des Châtaigniers, leurs couches, coupées perpendiculairement par les eaux du torrent, présentent une structure rubanée et régu- lière, qui les fait ressembler, suivant l’expression de M. Savi , à de vraies constructions en brique. C’est au milieu de cesschistes que sont ouvertes, à Montioni et sous Campiglia , les carrières d’alun. La pierre qui le produit forme, dans la masse schisteuse, des espèces de filons irréguliers, grossièrement parallèles à la di- rection générale des couches, qui ne sont autre chose que les portions les plus argileuses des schistes siliceux , qui ont été atta- quées par des vapeurs sulfureuses et converties en sulfate d’alu- miue. Les montagnes de Volterrajo, de Monteserrato, enfin la chaîne entière parallèle au rivage, supportée par les serpentines, qui, de- SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. 191 puis Porto-Longone, se poursuivent jusqu’à la chapelle de San a Catarina, au dessus de Rio, sont couronnées par un épais système de schistes siliceux rougeâtres, tourmentés dans tous les sens et alternant aux Picini cli Mundini , avec des schistes argileux (gales- tro) grisâtres et verdâtres, qui se désagrègent avec la plus grande facilité, et avec des calcaires sonores, verdâtres noyés, au milieu de ce galestro. Ces schistes-jaspes, très développés à l’île d’Elbe, à Monte-Ca- tini, à Romito, et placés, dans ces diverses localités, dans le voisi - nage des serpentines , ont été considérés, par presque tous les géologues, comme des schistes crétacés (galestro) , endurcis et si- licifiés par 1 influence de ces roches ignées. J’avoue que j’ai moi- même partagé cette idée , sans restriction , lors de mes premières études en Italie ; mais depuis que j’ai mieux étudié leur position, que jelesai vusàla Sasseta, àCampiglia, à Monte-Rotundo éloignés de tout terrain pyrogène , supportés et recouverts par d’autres schistes et des calcaires , qui n’avaient éprouvé aucune altération et avaient conservé leurs fossiles; quand je les ai vus, au-dessus de l’ermitage de Monte-Serrato, alterner dans toute leur épaisseur et avec la plus parfaite régularité avec des lits de schiste argileux et avec un calcaire qui n’avaient pas subi le moindre change- ment, je n’ai pu me rendre compte de ces alternances, qui se trouvaient en opposition si flagrante avec l’intervention de causes modifiantes qui auraient dû agir sur l’ensemble de tout le sys- tème ; je n ai pu ni expliquer comment des phénomènes si éner- giques, capables de convertir des schistes argileux en jaspes, avaient pu s’exèreer d’après une théorie de prédilection (qu’on me passe le mot), qui aurait frappé sur telles ou telles couches, mais de manière à ne jamais troubler rharmonie des alternances et aurait changé entièrement l’aspect minéralogique des unes, en respectant les caractères originels des autres. Je suis bien éloigné de nier les réactions des serpentines sur les roches stratifiées qu’elles ont traversées- mais je de mande comment à Romito un filon ophioli- tique, qui pénètre en même temps et sur un même point dans les schistes du lias et dans les schistes de l’alberese , aurait pu rendre les premiers siliceux en les cuisant comme des briques , dont ils possèdent la teinte foncée, et n’aurait pas même altéré ni la cou- leur ni la texture des seconds , qui sont restés ce qu’ils sont par- tout, c’est-à-dire une roche très tendre et très friable. Je ne puis trouver une solution satisfaisante qu’en admettant que la serpen- tine a trouvé, au moment de son éruption, les schistes jurassiques 19 2 SÉANCE DU 13 JANVIER 1845. déjà siliceux, comme ils le sont dans le Campigliese, et aura laissé alors les uns et les autres dans leur état primitif. L’étage des schistes rouges renferme de petits amas de manga- nèse oxidé terreux , qui forment comme des géodes noduleuses , ainsi que du manganèse métalloïde qui imprègne les schistes , comme on peut l’observer sur le chemin qui conduit aux alunières sous Çampiglia. M. de la Bêche (1) annonce que des nids de manganèse sont exploités dans la partie inférieure des jaspes, à la Rochetta. Dans les Maremmes Toscanes je n’ai point retrouvé les calcaires jurassiques inférieurs de la Spezzia, soit qu’ils n’y aient point été déposés, soit qu’ils aient été recouverts par la formation crétacée. Le terrain oolitique dans le Campiglièse est traversé par de gros filons de fer hydraté , qui ont été, de la part des anciens, l’objet d’une grande exploitation. Les principaux s’observent au Monte Valerio, aux points de contact des schistes et des calcaires rouges : ils se lient, suivant toute vraisemblance, à ceux du Monte Rombolo, où l’on remarque de vastes excavations, con- nues sous le nom de Bucche aile Câpre (2). § IV. Formation crétacée. Les coupes que nous avons données de la Coregna (fig. 9) et de Çampiglia (fig. 7) indiquent entre la formation jurassique et la (1) Mém. de la sor. géol.de France, t. I, p. 55. (2) Mon travail était déjà rédigé el envoyé à Paris, lorsqu’une lettre que j’ai reçue de mon ami M. Pilla m’annonce qu’au congrès de Milan la position du calcaire rouge à Ammonites a été l’objet d’une vive con- troverse, et qu’après une visite faite à Varèse où l’on a recueilli Y Ammo- nites contractas , la Terebratula diphya , et des Aptychus , dans un calcaire qui se lie insensiblement à un calcaire à fucoides . M. de Buch avait prouvé que le premier appartenait à (a formation jurassique supérieure. L’au- torité du savant prussien est d’un très grand poids dans la discussion des questions géologiques, mais elle ne peut prévaloir contre les faits. Ü se- rait facile de prouver que dans toute la Provence, que dans la Drôme et dans le Gard, la Terebratula Dipliya est particulière au terrain néoco- mien inférieur , caractérisé par le Spatangus retusus, les Belemnites di- latatus, Belemnites subfusiformis , etc. C’est incontestablement dans cet étage que je l’ai recueillie moi même dans les environs de Castellane, et que l’ont recueillie tous les géologues provençaux ; c’est encore dans cet étage que j’ai découvert le bel Aptychus que j'ai figuré et décrit sous SÉANCE DU .3 JANVIER 1 8-4-5. 193 formation crétacée une discordance complète de stratification. Cette discordance se montre dans le groupe des montagnes Pisanes à Mazzasucoli , à Suvereto , sur les flancs du Monte Calvi , à la le nom «Je Blainvillii dans mcn mémoire sur ces fossiles. Déplacer clans le midi de la France la T. Diphya du terrain néocomien, ce serait dé- truire d’un seul coup la position reconnue aux fossiles signalés dans cette portion de la craie et planter un nouvel étage jurassique au-dessus de l’étage à Gryphea virgula, puisque dans le département du Var -Le Vicentin Manque j [ > Provence. uépt. du Var. ' Esterel , Collo- brières, Plan , de la Tour. Terrain de tran- ) sition. . . .] Métamorphique , Cal- | caires saccharoïdes. | SILURIEN. Carrare , Alpes Apuen- nés , Ile d’Elbe, Cam- piglièse , Montagnes 1 Pisanes i Manque. 1 Calcaire avec Productus \ et Spirifer. I i Sardaigne 1 i / PARTIE SUPERIEURE. ! 1 (Cambrien). . . ^ < Terrain des schis- 1 tes cristallins. . [ \ Anagénites , conglomé- i rats , quarzite et | grauwcke. 1 PARTIE INFÉRIEURE. Gneiss, micaschiste, stéa- schiste , cipolin , \ phyllade. 1 Rio, Stazzemma, Vallée^ di Calci, Capo Corvo. 1 Ile d’Elbe, Alpes Apuen- nes, Montagnes Pisa- nes , Capo Corvo. , i i | Chaîne des ^Maures et de { l’Estérel. ]NIota. Les motifs qui nous ont porté à séparer les marbres blancs de la formation jurassique sont, en premier lieu, la discor- dance de stratification observée à la Grande Cave et ensuite la dif- ficulté de pouvoir considérer comme iufra-liasique une masse si considérable placée au-dessous decouclies non métamorphiques, qui sont infra-liasiques elles mêmes, puisqu’elles contiennent Y Ammonites Bucklandi et toutes les autres espèces que nous avons mentionnées. Cette double considération a beaucoup de valeur à nos yeux et nous fait persister dans les conclusions rapportées dans ce tableau. Nous devons faire observer cependant que le passage du calcaire à silex au calcaire saccharoïde à San Giuüano (monta- gnes Tisanes) peut être opposé à notre opinion, et qu’il y aurait SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 197 alors à se demander si celui-ci ne serait pas le représentant du calcaire noir bitumineux, reconnu par M. deCollegno dans les Alpes Lombardes et introduit dans la formation jurassique. Ce calcaire bitumineux est-il réellement jurassique? Sa position au-dessous des calcaires rouges à Ammonites Walcottï ne pourrait-elle pas le faire considérer comme une dépendance des marnes irisées? Dans le département du Var, le passage entre le lias et les marnes irisées gypsifères s’opère par des transitions si naturelles que presque tous les géologues les ont confondus ensemble et en ont fait un seul et même terrain. Les calcaires rouges de la Grande Cave , observés dans l’escarpement qui indique leurs rapports avec les marbres blancs, se montrent franchement indépendants de ces derniers et s’en distinguent par leurs caractères minéralogiques et leurs fos- siles. Examines, au contraire, au-dessus même de la Grande Cave, mais sur le flanc de la montagne , ils paraissent se lier aux cal- caires salins par des gradations tellement bien ménagées, que leur texture sub-saccharoïde ajoute à l’illusion et fait croire à une liaison qui, par le fait, n’a pas lieu. Séance du 20 janvier 1845. PRESIDENCE DE M. ElIE DE BeAUMONT. M. Raulin, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la dernière séance dont la rédaction est adoptée. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ, La Société reçoit : De la part de M. Martins (Ch.) , Essai sur la météorologie et la géographie botanique de la France (Extr. de Patria , col. 177 à 288 et 413 à 492);in-l2. Paris, 1844. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences ; 1845, lre sem. , t. XX , n° 2. Annales des mines; ke série , t. VI , 6e liv. de 1844. U Echo du monde savant; 1845, nos 1 et 2. L Institut; 1845, n° 577. The American Journal of science and arts , by Silliman; vol. XLVII , n° 1 , juillet 1844. The Athenœum ; n° 899. The Mining Journal ; n° 491. 198 SÉANCE DU 20 JANVIER 1815. M. Gastaldi , ainsi qu’il l’avait, offert précédemment {Bul- letin, p. 53), adresse à la Société des fragments de la tige d’une Pentacrinite provenant des sables serpentineux verts qui appartiennent au terrain miocène de la colline de Turin. Cet envoi est accompagné de deux échangions de Spiruli- rostre et de pièces détachées de la coquille d un Oscahrion. M. Rozet demande si cette ençrine n’aurait pas appartenu primitivement au terrain jurassique , et si elle n’aurait pas été entraînée dans le terrain tertiaire par suite d’un rema- niement. M. d’Archiae fait observer que M. Gastaldi a répondu d’avance à cette objection dans sa précédente lettre. Quant à lui, il trouve que cette encrine présente une certaine ana- logie avec celle qui se rencontre dans la craie de Valognes et d’autres localités. CORRESPONDANCE ET COMMUNICATIONS. On lit une lettre de M, A. de Ville de Quincy, syndic de la ville de Chambéry, qui, au nom de l’administration de cette ville, remercie la Société de l’envoi qu’elle a fait à la bibliothèque de Chambéry de la collection du Bulletin et de la seconde série des Mémoires, en souvenir de sa réunion dans cette ville. M. Virlet d’Aoust lit le mémoire suivant: Notes sur quelques phénomènes de déplacements moléculaires qui se sont opérés dans les roches postérieurement à leur dépôt , adressées à M. Becquerel, membre de l’Institut, par M. Virlet d’Aoust. J’ai lu avec d’autant plus d’intérêt le premier mémoire de M. Becquerel, Sur les courants électriques et de leur influence sur les phénomènes de la décomposition et de la recomposition dans les terrains quils parcourent (1) , que je m’occupe depuis longtemps des modifications que les roches ont presque toutes éprouvées, mais à des degrés différents , postérieurement à leur dépôt. Le (1) Comptes-rendus de L’Ac. des Sc. t. XIX , séance du 18 nov. 1 844- Bull . de la soc. Géol ..de France 2e Yol . 2e Série. . PL 4 . Pa^e 196 . T/iïoint/itk. lmp. lemtraer a Pans . SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 199 prochain mémoire de ce savant devant particulièrement traiter de X Influence exercée par les courants électriques sur les roches, je vais présenter quelques faits qui se rattachent à cette question impor- tante. Déjà en 1833 , dans la Géologie de la Morée (1) et en 1835 à la Société géologique de France, j’avais été amené à penser que les roches, en#raison de la diversité de leurs éléments et du plus ou moins d’humidité qu’elles contiennent, pouvaient devenir , dans de certaines circonstances, les éléments d’autant de piles et donner lieu à des courants électriques, sans le concours desquels plusieurs faits géologiques s’expliqueraient difficilement. C’est ainsi que je considère les sphérosi dérites , les cherts , les chailles , les sep tarins , etc., comme s’étant non seulement formés postérieurement au dépôt desterrainsqui les renferment, par suite d’un déplacement moléculaire , mais comme pouvant même con- tinuer à se former encore de nos jours et comme étant, en quelque sorte, les témoins des modifications que ces terrains ont eux-mêmes éprouvées depuis leur formation. J’ai eu occasion d’observer récemment, par exemple, deux cas très curieux de sphérosidérites , qui ne me permettent plus de douter de leur formation postérieure, et qui me les font r egarder comme des centres d’attractions , où les molécules ferrugineuses, transportées par un courant électrique ou une force analogue, sont venues se grouper concentriquement. Le premier consiste en nodules de fer carbonaté lithoïde très compacte, à formes sphéroïdales remarquables, qui se rencontrent fréquemment dans des argiles schisteuses, houillères, très mica- cées, au milieu desquelles se trouve creusé l’un des souterrains que doit traverser le chemin de fer allant des houillères de la Ricamarieà Saint-Etienne (Loire). Ces espèces de boulets , comme les appellent les ouvriers, coupent les feuillets du schiste, dont ils se sont assimilé les éléments. (Voyez fig. lre de la planche IV.) Le second cas consiste également en nodules ellipsoïdaux plus aplatis de fer carbonaté lithoïde, qui existent, non dans le terrain houiller, mais dans des argiles jurassiques de Y Oxford-clay, dans lesquelles se trouve la couche de fer hématite, qu’on exploite près de la Voulte (Ardèche). Ces rognons interrompent aussi d’une ma- nière très nette les lits d’argile et les petites couches de fer très minces qui s’y trouvent intercalées. (Voy. fig. 2.) On ne peuùévi- (i) Expédition sc. de Morée , section des sc. phys., t. II . 2* pal lie p. 68 , 1 84 , 286 et 298. 200 SEANCE DU 20 JANVIER î8l5. déminent les considérer comme des galets; car, dans ce cas, Ie£ couches, au lieu de se trouver interrompues et d’avoir été assimi- lées aux sphéroïdes, les auraient enveloppées en se déposant, ainsi que cela s’observe, dans tous les dépôts argileux, quand ceux-ci renferment des fragments préexistants un peu volumineux. Dans les deux exemplesde sphérosidérites que je viens de dé- crire, la schistosité de la roche encaissante a tout-à-f»it disparu ; cependant on peut encore distinguer dans l’intérieur de ceux de la Voulte des zones différemment nuancées correspondant aux diffé- rentes assises du schiste, au milieu desquelles ils se sont formés : ces sphérosidérites ne sont donc , par conséquent , que ces schistes eux -mêmes modifiés et fortement pénétrés par du carbonate de fer. Ils contiennent dans leur intérieur des Astcirte , des Ammonites déprimées et un fossile encore inconnu. J’ai égale- ment rencontré dans la couche de fer qui se trouve immédiatement au-dessus de cette assise noduleuse Y Ammonites Backeriœ (Sow.) et Y A. Moreanus (d’Orb.), qui se trouvent également, suivant ce dernier auteur, à Liffol, près Neufchâteau (Vosges), précisé- ment dans une couche d’oolithe ferrugineuse du même étage. Si nous entrions dans la couche de fer de la Voulte, il seiait facile d’y reconnaître, comme dans celle de Sargans, canton de St-Gall (Suisse), que j’ai fait connaître (Bull. , t. vi, p. 313) , des phénomènes de métamorphisme et de déplacement moléculaires non moins curieux , car je pense que ces couches à minerai , sou- vent d’aspect plutonique, étaient très probablement dans l’origine à texture oolitique , comme celles qu’on observe ailleurs , dans les mêmes horizons géologiques; mais je me bornerai à ajouter ici qu’en général les molécules métalliques ont une grande ten- dance à se déplacer et que les phénomènes qui, à différentes épo- ques, ont donné lieu à la formation des sphérosidérites, se sont reproduits à des époques très récentes , et se continuent même encore aujourd’hui, car la plupart des minerais de fer d’alluvion, principalement les limonites en rognons géodiques, sont certaine- ment dus à un déplacement moléculaire semblable., L’action des courants électriques ou de forces analogues s’ex- plique d’autant mieux en cette circonstance que ces minerais existent tous au milieu de dépôts très récents, très perméables à l’eau et à des profondeurs bien au-delà desquelles les agents mé- téorologiques vont évidemment exercer leur influence. Il est fa- cile , d’ailleurs, de se convaincre qu’ils ne doivent leur formation ni à des infiltrations ferrugineuses ni à un dépôt contemporain de celui de leurs gangues, et que si les éléments du fer ont origi- SÉANCE DU JO J lîNViEPi 1845 201 nairementété déposes avec cel es-ci, ils n’ont pu betre qu’unifor- înéinent. Les rognons siliceux nommés cherts , si abondants dans quel- ques terrains , ont également une origine postérieure , et , ce qui j le prouve, c’estleur position souvent inclinée et quelquefois même \ verticale par rapport au plan des couches qui les renferment, position qu’ils n’auraient certainement pas conservée si , étant d’origine antérieure , ils avaient dû se déposer à la manière des galets ; on ne les verrait pas non plus , comme j’ai eu occasion de le remarquer fréquemment, au milieu des jaspes crétacés de la Grèce, occuper plusieurs bancs. (Voy. fig. 3 et 4. ) Mais ce qui m’a surtout entièrement convaincu de la postériorité des cherts en général, ce sont les observations que j’ai eu occasion de faire à ce sujet dans les calcaires jurassiques qui forment la partie orien- tale de la chaîne des Cévcnnes. En parcourant les flancs des montagnes si déchirées et si ru- gueuses de cette région de la France, on peut observer, et no- tamment sur la route qui conduit de Saint-Âmbroix aux mines de Bessèges , de nombreux cherts à tous les degrés de forma- tion ; tt le phénomène peut s’y comparer à celui des nébuleuses, car au milieu des bancs calcaires s’aperçoivent tantôt des parties siliceuses, à formes tout-à-fait diffuses et nuageuses; tantôt des zones concentriques et souvent très allongées et irrégulières, où l’on voit que les molécules siliceuses ont été arrêtées dans leur marche vers le centre ; plus loin, ou dans d’autres bancs, ce sont des nodules aux formes encore incertaines, qu’on observe à côté d’autres nodules aux formes les plus accusées et qui annoncent une opération complètement terminée. Ainsi , là on surprend en quelque sorte la nature sur le fait. (Fig. 5 et 6.) Lorsqu’on envisage, en effet, l’ensemble de ce phénomène cu- rieux , on reconnaît qu’un dépôt simultané de tous les éléments constitutifs de la roche , avec un départ de la silice, affectant, au milieu de la masse calcaire, des formes aussi bizarres et surtout enveloppantes , est tout-à-fait impossible, quelque force d’attrac- tion moléculaire qu’on puisse supposer à la silice. La cause qui a déterminé ici ces changements dans les calcaires paraît avoir également réagi sur les couches argileuses avec les- quelles ils alternent, et celles-ci ont parfois acquis une structure nodulaire et sphéroïdale , qui les ferait prendre à distance pour des poudingues à très gros galets. Le même phénomène se répète avec des circonstances analogues dans les couches argileuses néo- 502 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. comiennes de la montagne de la Dent-du~Chat , près Chambéry. (Figure 7.) Certains terrains a rgilo- marneux renferment, au lieu de rognons siliceux, des nodules calcaires ou calcaréo- marneux appelés [ chai lies dans le Jura , et dont l’origine est évidemment la même que celle des cherts : seulement, ici, ce sont les molécules calcaires qui ont subi le déplacement. Les chailles renferment souvent, comme les sphérosidérites, des fossiles, et nous en avons vu, dans la collection deM Tbirria , qui contenaient des madrépores • elles sont d’ailleurs aussi quelquefois silicéo-calcaires et prennent plus communément alors le nom de sphérites. Enfin ces masses ovalaires | ou aplaties de calcaire marneux, que les Anglais nomment septaria, et qui sont si abondantes dans l’argile de Londres, où, suivant MM. Conybeare et Phillips (' Outlines ofGeol ., p. 27), elles se pré- sentent quelquefois sur plus de deux cents pieds de puissance, sont encore, ainsi que les nodules analogues qu’on rencontre dans les marnes oxfordiennes de l’Isère, le résultat d’un phénomène de dé- placement moléculaire analogue. Les fissures remplies de spath calcaire , qui fréquemment remplissent l’intérieur de ces masses, sont dues à un phénomène évidemment postérieur à la formation des septaria. Je pense qu’il faut encore rapporter à ce genre de phénomènes la formation de certains grès en masses noduliformes qu’on remarque assez fréquemment au milieu dessables incohé- rents des difiérentes époques géologiques, comme, par exemple, dans ceux de Fontainebleau et dans les sables verts aquifères de la craie inférieure ; et l’on doit regarder comme une circonstance très heureuse pour la science, par exemple, que la sonde du puits de Grenelle n’ait pas rencontré une de ces masses de sable agglo- méré , car elle aurait fort bien pu traverser la couche aquifère sans obtenir d’eau. Les prévisions de la géologie n’eussent pas été en défaut pour cela sans doute ; mais le public, qui ne peut juger que par les résultats, aurait bien pu ne pas avoir cette opinion. Ces agglomérations isolées et à formes ellipsoïdales plus ou moins con- sidérables, au milieu de masses sableuses , ne s’expliqueraient pas facilement par des infiltrations ordinaires ; il faut donc admettre que la matière du ciment a été amenée là par une cause qui l’a déterminée à se fixer sur certains points plutôt que sur d’autres. Ce qu’il y a surtout de remarquable dans tous ces phénomènes, et ce qui semble confirmer l’ex istence de courants dans les couches et leur action dans la formation de tous ces nodules ferrugineux , calcaires ou siliceux , c’est que généralement ils sont disposés en SÉANCE DU 20 JANVIER 1 8 \ 5 . 203 zones régulières et suivant les plans de stratification, soit dans des argiles, soit dans des calcaires, soit même dans des grès ou des sables. La formation des rognons siliceux et calcaires, comme celle des Ætites et autres rognons ferrugineux , s’est également continuée jusque dans les formations les plus modernes ; ainsi, sans parler des nombreux silex cornés, pyromaques, ménilithes, etc., qu’on rencontre dans les différents étages du terrain tertiaire, je rappel- lerai les masses nodulaires de calcaire compacte et géodique ren- fermant de petits cristaux de strontiane sulfatée apotome signalées à Auteuil et à Bougival, dans l’argile plastique, par MM Becque- rel et Al. Brongniart [Description géologique des environs de Paris , 3e édition, p. 138 et 188). J’ai eu occasion de reconnaître moi- même de ces nodules calcaires dans les marnes bleues sub-apen- nines de la Morée ; on en cite également dans différents terrains d’alluvion , et enfin M. Pomel a observé, au milieu des terrains d’atterrissement les plus récents de l’Auvergne ( Bull ., t. xiv, p. 209 , des nodules tuberculeux ou cylindroïdes silicéo-calcaires, renfermant de petits cailloux ou des fragments d’os, qui semblent, dit-il, avoir servi de centres d’attraction U existe beaucoup de roches à structure globulaire ou sphé- roïdale, comme, par exemple , les syénites et les porphyres orbi- culaires de la Corse; les grès lustrés à nodules ovoïdes du Cour- coula que nous avons fait connaître, M. Boblaye et moi ( Géol . de la Morée , p. 105 et 184) ; les syénites nodulaires de la vallée du Connecticut, décrites par M. Hitchcock ( Report on the Geol, , Min. y etc , , of Massachusetts , p. 462) ; mais ici et dans beaucoup d’autres roches à formes analogues, ces différentes structures sont dues ou à un mode de cristallisation particulier , ou à des mouve- ments moléculaires postérieurs qui ont modifié la structure origi- naire sans rienajouter aux éléments de la roche ; ce sont des réac- tions chimiques ou des phénomènes d’attractions et de répulsions moléculaires favorisées par une cause quelconque ; mais ce méta- morphisme est bien différent du phénomène qui a produit les masses nodulaires que je viens de signaler, et il pourrait bien plutôt se comparer à celui qui s’opère souvent dans les mélanges plasti- ques lorsqu’on les laisse trop longtemps sans les utiliser ; ils pas- sent, par suite de véritables réactions des matières les unes sur les autres, de l’état de mélanges à celui de combinaisons chimi- ques, et deviennent alors impropres àla fabrication. Enfin une formation, qui ne paraît pas moins digne d’attention, est celle des silex meulières de Paris. Ma première pensée, en exa- SÉANCE ou 20 JANVIER I 84 5. 201 minant ces silex cariés, si recherchés pour les constructions , fut qu’ils devaient avoir une origine analogue à celle de la fameuse pierre, meulière de Milo (Archipel grec), qui se forme encore de nos jours, aux dépens de couches de trass et de conglomérats tra- chytiques, par l’influence de la chaleur et des gaz acides qui se dégagent à travers un sol volcanisé (1) ; et j’étais d’autant plus porté à supposer aux pierres meulières parisiennes un mode de si- licification analogue , que je venais de reconnaître que les nom- breux jaspes et silex, si abondants dans certaines alluvions moder- nes, résultaient d’une transformation d’argiles alluviales anciennes par suite d’actions analogues et àè émanations ferrugineuses et man- ganésijères. Mais j’ai dû complètement modifier cette opinion préconçue , lorsque j’en suis venu à étudier le gisement des silex celluleux qui couronnent presque tous les hauts plateaux des en- virons de Paris. Le résultat de mes observations a été de me convaincre que toutes ces meulières n’avaient pu se former que dans la gangue argilo-sableuse au milieu de laquelle elles se trouvent fort irrégu- lièrement disséminées , et qu’elles s’y étaient formées à la manière des cherts, c’est-à-dire par le déplacement et la réunion des mo- lécules siliceuses; car si le rapprochement de ces molécules avait dû se faire par un commencement de fusion de la masse argileuse, comme pour les meulières de Milo, la conservation d’empreintes de coquilles ou la conversion en silex de leurs tests, qu’on y ob- serve quelquefois, ne s’expliqueraient pas ; et l’argile elle-même, ainsi que la masse de sable au-dessus de laquelle elle repose, au- rait .certainement conservé des traces d’actions calorifiques ou de corrosions, que ni l’une ni l’autre n’indiquent. Les silex pa- raissent souvent , au contraire, s’être formés suivant les lignes de fissures de la gangue argileuse , ce qui leur donne une apparence de dérangement, qu’il faut attribuer, selon moi, à leur seul mode de formation. M. G. Prévost, qui , en 1826, a si bien décrit ce terrain (2) , admettait également que les silex meulières étaient en place : seu- lement, il pensait alors qu’ils avaient pu se former par voie d’agré- gation chimique, en même temps que la gangue limoneuse se dé- (î) Géol. de la Morée, p 294 et 3 12 , où j’ai été amené par analogie à supposer la même origine aux porphyres molaires de la Hongrie (Mühlstei?is porphyre décrits par M Beudant, dans son Voyage min. et géol. en Hongrie. (2) Bulletin de la soc. Philom. , octobre 1826. SÉANCE DU 20 JANVIER 184 5. 205 posait mécaniquement. Cette hypothèse ingénieuse et hardie pour l’époque ne me paraît cependant pas plus admissible pour expli- quer la formation de ces silex, parfois aussi enveloppants (1), que pour ceux des calcaires métamorphiques des Cévennes. M. Puülon de Boblaye était presque arrivé, par l’observa- tion des faits , à émettre la même opinion que moi sur la for- mation des silex meulières. Voici , en substance , ce qu’il dit dans la coupe du terrain siliceux de Meillant (Cher), qui appartient à l’oolite inférieure, et qu’il a communiquée à M. Dufrénoy : on trouve d’abord de grands bancs variant du silex compacte au silex meulière carié, etc.; ils sont recouverts par des plaquettes de cal- caires feirugineux , endurcis par un suc siliceux quelquefois fort abondant , et donnant lieu à des silex tendres et effervescents. Dans leur cassure , ces plaquettes siliceuses présentent des coupes assez nombreuses de térébratules , qui forment en même temps, à la surface, des parties saillantes arrondies. Leurs tests, en se dessinant en blanc, donnent à la roche l’apparence d'une luma- chelle. Ces plaquettes sont quelquefois à l’état ooliiique ; il sem- blerait alors que le calcaire oolitique a été pétrifié par le même procédé que les fossiles Cette circonstance intéressante, ajoute M. Boblaye , pourrait jeter quelque incertitude sur le rôle que la silice a joué dans cette formation , et la faire regarder comme ayant été Introduite postérieurement dans ce terrain. « L’ensemble des phénomènes conduit au contraire M. Dufré- noy à penser que les couches puissantes de meulières de laFerté et de Meillant , ainsi que les couches de silex que l’on observe dans quelques parties du terrain jurassique, sont des produits nep- tuniens dus à des causes analogues à celles qui ont donné nais- sance au calcaire. La transformation des coquilles à l’état siliceux peut avoir eu lieu à la même époque que ce dépôt général de si- lice , et il est naturel de supposer que les mêmes eaux qui terraient cette substance en dissolution ont eu la propriété de remplacer le test des coquilles qui étaient soumises à leur action. L’ossification siliceuse est donc probablement de même éqoque, soit qu’elle ait eu lieu directement, ou qu’elle ait été le résultat de la pétrifica- tion du calcaire oolitique. » (Bull. t. XlV, p. 318.) J’ajouterai que le transport postérieur de la silice me paraît (î) J’appelle ici les silex enveloppants parce qu’en effet il arrive sou- vent qu’un même bloc enveloppe totalement, sans la modifier en rien , une partie de la gangue argileuse. SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 200 encore surtout démontré par les nombreux silex de la craie du bassin parisien , qui parfois ne sont que des corps organisés, pé- nétrés ou englobés par la silice , et qui d’autres fois forment sim- plement des géodes bizarres , au milieu desquelles , ainsi que l’a reconnu M. d’Orbigny , sont parfaitement bien conservés tous les polypiers et autres petits corps fossiles qui composent en grande partie la craie ; et l’on voit même ces corps fossiles se prolonger dans les parties pénétrées par le silex , sans en être altéré. Le transport postérieur de la silice, du fer et d’autres substan- ces est encore démontré d'une manière évidente et incontestable par les nombreux bois pétrifiés qu’on rencontre partout et dans toutes les formations, et où l’on peut souvent reconnaître, princi- palement dans ceux qui ont été silicifiés , que les parties les plus délicates de l’organisation végétale ont été parfaitement conser- vées ; au contraire , les tiges qui ont été converties soit en carbo- nate de chaux , soit en carbonate , en oxide ou en sulfure de fer, conservent rarement des traces d’organisation , ce qui tient sans doute à la compacité habituelle de ces matières ; cependant j’ai eu occasion d’observer fréquemment, au milieu des couches de houille du terrain houiller de St-Berain (Saône-et-Loire), des tiges plus ou moins aplaties de Calamites , converties en carbonate de fer lithoïde , et souvent de 30 à 40 pieds de longueur, où, à la cassure et même au poli, apparaissait encore cette organisation rayonnée intérieure très singulière, qui s’accuse par des lignes noires charbonneuses divergentes du centre à la circonférence. J’ai adressé à nos confrères, IVIM. l’abbé Landriot pour le musée d’Autunet Ad. Brongniart pour celui de Paris, de beaux échantil- lons de ces tiges ferrugineuses. Enfin j’ai signalé depuis longtemps {Bull. , t. iv , p. 337) des tiges d’arbres, des lignites de l’argile plastique à Sars-Poterie, près Avesnes (Nord), qui ont été conver- tis partie en pyrite de fer et partie en silex. A ces faits, qui sont très nombreux dans la nature, je crois devoir en ajouter un dernier non moins intéressant, en ce qu’il prouve d’une manière évidente que les déplacements moléculai- res se continuent encore aujourd’hui. Il consiste en la décou- verte qui a eu lieu , il y a à peu près un an , aux environs d’Au- tun , dans des fouilles faites par la Société aichéologique de cette ville , près de l’ancien temple de Janus , de quatre vaisseaux en forme de tonneaux , qui étaient en très grande partie pétrifiés et incrustés par du carbonate de chaux. M. l’abbé Landriot, qui a décrit ce curieux phénomène dans une note imprimée et conimu- SÉANCE DU 20 JANVIER 1815. 207 niquée à la Société Éduenne , a pu reconnaître encore , sur quel- ques parties de ces vases, qui avaient conservé les empreintes lies cercles et des douves , l'organisation des dicotylédones. En résumé , le déplacement et le transport moléculaire dans les couches postérieurement à leur dépôt me paraissent l’un des phénomènes les plus évidents, et qu’on devra désormais faire in- tervenir parmi ceux qui sont destinés à expliquer la question, beaucoup plus complexe qu’on ne se l’imagine généralement, du métamorphisme des roches. J’ai cru utile, poursuit M. Virlet, de compléter mes obser- vations sur la question des différentes formations nodulaires, par l’analyse chronologique des principaux mémoires qui ont traité de ce sujet, et d’exposer succinctement les différentes idées théo- riques des géologues dont l’attention s’e^t particulièrement fixée sur ce phénomène intéressant. En 1 8 1 6, M. Buckland ayant fait suivre sa Description du Para - moudra , corps fossile très singulier c/ui se trouve dans la craie du nord de V Irlande , de quelques Observations générales sur les silex de la craie , tendant à expliquer l'histoire de leur formation ( Geol . Trans. , first sériés , t. IV,p. 4 1 3), dit que les nodules siliceux de la craie, soit irrégulièrement isolés , soit disposés en lignes, semblent avoir été produits par des causes analogues à celles qui ont engendré les nodules et les lits de clierts de la pierre de Poi tland , du cal- caire de montagne de Mells, des calcaires oolitiques du Yorkshire et des environs de Poligny, où l’on observe des couches très éten- dues de cherts disposés en nodules ressemblant tout-à-fait, pour la forme, les dimensions et leur disposition , aux silex de la craie. La seule différence tient à ce que l’arrangement nodulaire est beaucoup plus prédominant dan* la craie que dans les autres for- mations, où les concrétions siliceuses se présentent plus fréquem- ment en plaques continues ou presque continues. Ces concrétions et les couches siliceuses paraissent à M. Buck- land avoir été formées pendant que la matière qui les enclave était encore molle, et être arrivées à un état de consolidation presque contemporain. La séparation de la silice de la masse calcaire se serait opérée par suite de forces attractives qui entraînaient les molécules siliceuses vers certains centres. Comme, dans beaucoup de ces concrétions, on ne peut recon- naître de noyau étranger, il semble assez difficile de dire la cause qui a déterminé leur centre d’action ; dans tous les cas , il ne pa- raît pas possible , à l’auteur, d’admettre qu’elles aient pu être formées par des infiltrations dans des cavités préexistantes • *208 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. outre la difficulté de pouvoir expliquer la formation de semblables cavités par couches régulières , on ne comprendrait pas qu’aucune d’elles ne fût restée vide ou seulement remplie partiellement. D’un autre côté , il est impossible d’admettre une semblable origine pour ceux de ces nodules dont la forme dérive entièrement de celle des corps étrangers que la silice n’a fait qu’incruster. M. Buekland ajoute qu’il existe encore de nombreux exemples de l'arrangement stratifié de concrétions géodiques argileuses, dans les couches de septaria des argiles de Slieppey et de Kimme- ridge , et que des lits de concrétions silicéo-ealcaires sont égale- ment abondants dans plusieurs dépôts sableux , notamment dans le grès vert de l’île de Wiglit , dans celui de Stonesfield et dans celui de i’ooîite inférieure des environs de Balli. Il fait observer enfin, en terminant, que l’absence de tout ai rangement en zones concentriques ou parallèles des silex de la craie doit les faire distinguer des géodes d’agate des terrains trappéens , auxquels il suppose une origine toute différente (Voir sa note p. 419). En 1822, MM. Conybeareet Phillips ont donné quelques dé- tails sur la formation des septaria ( Outlinesof Geol. ofEngland and TV aies , p. 26). Partout où se montre l’argile de Londres, soit en escarpement, soit qu’elle ait été fouillée par des puits, elle a constamment été reconnue contenir des couches de masses ova- laires ou aplaties de calcaire argileux , nommées septaria , et qui en raison de leur abondance ont été considérées comme caracté- ristiques de cette formation, quoique ce ne voit pa^ le seul terrain d’Angleterre où il en existe Ces masses sont d’ordinaire , mais non toujours, fendillées à l’intérieur comme si elles avaient été tra- versées en divers sens par des fissures qui sont entièrement ou partiellement remplies de spath calcaire ou de sul ate de baryte. (Voy. pl. IV,fig. 8.) Les septaria sont si communs sur la côte d Evsex et dans les en- virons d’Harwich, que les rues de cette ville en sont pavées, et que la plupart des murs en sont construits. Le long escarpement d’argile de Londres, qui s’étend sur le côté septentrional de l’îîe de Sheppey , en fournit aussi abondamment ; ils en sont détachés par l’action des vagues ; on les ramasse en tas et on les exporte en différents points pour fabiiquer cette excellente chaux hydrau- lique connue sous le nom de ciment de Parker. Dans les collines de Hampstead et de liighgate , dans le Middlesex et dans celles de Boughton , dans le comté de Kent, les couches de septaria com- mencent à environ 50 pieds du sommet ; dans la colline de Shooter, elles n’affleurent qu’à la surface, et à Epping on ne les rencontre SÉANCE DU 20 JANVIER 1 8 \ 5. 209 qu'à 100 pieds de profondeur et elles s’y continuent jusqu’à celle de 300 pieds. 1825. J’ai déjà parlé des nodules calcaréo-marneux de l’argile plastique, signalés par MM. Cuvier etBrongniart dans leur Descrip- tion des environs de Paris (t. 2 , p. 341), qui les regardent connue des masses agrégées par concrétions. M. Mac Culloch a également signalé (. Système of geol ., t. 1 , p. 179) dans des calcaires argileux et des grès qui les accompagnent , des sphéroïdes fort aplatis et de larges dimensions qui se trouvent réunis deux à deux par une espèce de tige cylindrique. J’ai eu occasion de voir l’été dernier, dans la collection de M. le baron d’Hombres Firmas. à Alais , des cherts ainsi réunis et ressemblant à des espèces de chevalets ou à ces champignons doubles dont se servent les chapeliers. Mais ces bizarreries de la nature n’offrent d’intérêt que par leur plus ou moins de ressemblance avec des objets de fabrique humaine. (Yoy. fig 6, a.) En signalant, en 1833 ( Géol . de la Morêe , p. 384), des nodules de jaspe, je disais que dans plusieurs localités les jaspes(de lacraie) «présentent des rognons sphéroïdaux , tout-à-fait semblables, » pour la forme et même pour les couleurs, aux rognons de fer » carbonate lithoïde des terrains houillers. Ces nodules, plus u » moins volumineux et à structure testacée , sont presque tou- jours plus épais que les couches qui les renferment; ils inter- » rompent ainsi la régularité ordinairement si parfaite des assises » de jaspe. Il serait difficile d’expliquer cette disposition singulière » au milieu des couches, si l’on n’admettait pas qu’elle est le ré- » sultat d’une modification postérieure à laquelle les jaspes eux- »inêmes doivent peut-être aussi leur existence. » (Voy. fig. 4.) Ces singuliers nodules, exactement de la même nature que les jaspes, et qui occupent quelquefois plusieurs strates, m’avaient en effet assez frappé pour m’amener dès lors à considérer les jaspes enveloppants comme n’étant que des argiles schisteuses mé- tamorphosées , et dans lesquelles ces nodules s’étaient formés postérieurement, par suite d’actions concentriques. Dans la même année (1833), M. Hitchcock a décrit ( Report on tlie geol., min., etc., of Massachusetts, p. 188) des concrétions curieuses de calcaire argileux compacte qui existent dans la vallée du Con- necticut, au milieu des argiles du terrain tertiaire le plus récent , et auxquels on donne le nom de Claystone , à cause de leur res- semblance avec de l’argile endurcie qui aurait été arrondie par l’action des eaux. Cesconcrétions, quelquefois presque sphériques, d’autres fois en sphéroïdes si aplatis qu’ils deviennent lenticulaires, Soc géol. Tome II, 2e série. i4 210 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. varient dans leurs dimensions depuis la grosseur d’un œuf de pi- geon jusqu’à celle de deux pieds de diamètre ; ils sont souvent très fortement réunis entre eux, et quand ils sont en nombre ils ressemblent à des masses botryoïdes; d’autres fois ils sont si rap- prochés qu’ils forment des plaques souvent de plusieurs pieds , et où les nodules ne s’accusent que par des ondulations de la surface. Dans tous les cas, ces concrétions ne dépassent jamais en épaisseur celle de la couche d’argile qui les renferme et quia rarement plus d’un demi-pied d’épaisseur. Ces masses calcaires sont évidemment, dit M. Hitchcock , un exemple d’une structure solide concrétionnée , qui doit être le ré- sultat d un arrangement chimique; mais si elles sont le résultat des lois de la cristallisation, pourquoi ne laissent-elles apercevoir aucune trace de cristaux? Leur origine est donc encore dans les ténèbres; car, ajoute-t-il, j’ai reconnu que mon idée première d’un mode de formation analogue à celui qui a produit l’oolite est insoutenable. L’auteur cite encore les nombreuses concrétions réniformes parfaitement semblables qu’il a observées à la caverne de Fun- derland, au Mont-Toby, dans du grès argileux, gris , apparte- nant à la formation du nouveau grès rouge: ce qui prouve, dit-il, que les mêmes causes opérèrent aussi bien après la formation /lu nouveau grès rouge qu’après celle du terrain tertiaire le plus récent. En 1834, M.de La Bêche, dans ses Recherches sur la partie théo- rique de la géologie (p. 65 de la traduction française de M. de Colle- gno) dit a qu’on voit dans les roches d’origine mécanique certaines » agrégations fort remarquables , qui doivent avoir été produites » par l’attraction mutuelle des molécules qui les composent. On » découvre souvent dans des argiles calcarifères des nodules ou » rognons plus calcaires que les autres parties de la roche, et que » l’on voit facilement ne point être des cailloux arrondis avant h ur »> dépôt , quoique de loin ils puissent en présenter l’apparence. » De tels corps sont assez communs dans plusieurs localités ; mais il cite seulement pour exemple les rognons analogues que Ton rencontre dans le lias de Lyme Regis, où ils sont alignés parallèle- ment à la stratification générale : or, ces rognons contenant une plus grande quantité de carbonate de chaux que les marnes et schistes marneux qui les entourent, nous pourrions en conclure, dit-il , que ce sont des concrétions concentriques; mais selon lui il n’en est rien , et il s’appuie , pour repousser cette opinion , sur des faits qui me semblent prouver le contraire, savoir : d’abord sur SÉANCE DU 20 JANVIER 1815. 211 la présence fréquente mais non nécessaire de fossiles dans leur in- térieur, et sur la texture feuilletée qu’affectent ces rognons, texture qui est la même que celle de la masse stratifiée dont ils font par- tie; et on ne peut guère douter, ajoute-t-il, « qu’ils n'aient été » jadis la continuation les uns des autres. Les molécules de la ma- » tière calcaire se sont séparées de la masse des marnes pour se » réunir, ainsi que nous le voyons maintenant , et l’on ne se trom- » pera probablement pas beaucoup si l’on suppose que des assises » particulières du dépôt, sans contenir assez de carbonate de chaux » pour former des lits calcaires suivis, en contenaient trop pourtant » pour qu’il pût rester disséminé dans les marnes sans s’efforcer » de se réunir en petites masses a M. de La Bêche rappelle ensuite que M. Babbage a sigualé ( Economy of manufactures , 2e édit., p. 50) l’espèce (^agréga- tion de particules siliceuses qui se forme accidentellement dans les préparations argileuses employées à la fabrication des porce- laines; fait sur lequel M. Babbage appelle l’attention , parce qu’il y trouve l’explication de la foimation des silex de la craie. Cette circonstance peut être, en effet, ajoute M. de La Bêche, regardée comme donnant une explication de ce qui se passe lors de la sé- paration , par affinité, des parties très atténuées d’un dépôt dé- tritique qui a été transporté en suspension mécanique par l’eau. Sans aucun doute, ajouterai-je, il peut bien se produire des phé- nomènes de réactions chimiques comme ceux qui s’opèrent dans les mélanges plastiques destinés à la fabrication des poteries ; mais pour que la formation des rognons siliceux , calcaires ou ferrugi- neux pût leur être comparée, il faudrait supposer que les roches limoneuses qui renferment ces masses nodulaires ont été déposées d’un seul jet, tandis que très probablement cliaeuned’tlles a exigé une plus ou moins longue période de temps, si on compare, par exemple , leur formation à celles des dépôts limoneux du JNil; et il est probable même que chaque feuillet des schistes nous repré- sente aujourd’hui des dépôts annuels ou périodiques des eaux qui les ont déposés autrefois d’une manière analogue. En parlant ensuite des rognons de silex , M. de La Bêche ajoute « que la séparation de la silice d’avec la masse calcaire est accom- » pagnée d’une autre circonstance fort curieuse ; on voit héquem- » ment dans la craie des veines de silex coupant le plan des cou- *> elles qui ont l’apparence de fentes remplies par la silice La ma- » tière de ces veines est la même que celle des rognons, et on est »> conduit à conclure que la concenti ation de la silice est due dans » les deux cas à une même cause. » (Eig- 3.) 212 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. « — La matière siliceuse, comprise dans une partie donnée » du dépôt, s’est réunie en foi me de rognons, et cette opé- ration s’étant répétée plusieurs fois, il enest résulté une » série de lits de rognons successifs parallèles au plan de la » stratification. — L’agrégation purement mécanique des par- » ties siliceuses, quelque ténues qu’on veuille les supposer, ne » suffit point à expliquer tous les phénomènes observés. Dans » plusieurs cas il y aura une telle pénétration de la matière sili- » ceuse dans les pores de certains débris organiques , qu’il est » difficile d’admettre que la silice ne fut point à l’état de solution » lors de son infiltration dans ces corps. Dans quelques rognons » de cliert du grès vert, et d’autres roches arénacées, on voit sou- » vent un passage curieux de la structure arénaeée à une texture » indiquant une origine chimique ; l’intérieur de plusieurs de ces » rognons est creux , et la calcédoine mamelonnée qui en tapisse » les parois s’est produite évidemment à la manière des stalactites. » Il y a eu filtration d’un liquide qui tenait en solution la silice » à travers la matière arénaeée pour atteindre l’intérieur du ro- » gnon, et pourtant le passage de la structure arénaeée à celle con- » crétionnée est généralement insensible. Il me semble que si M. de La Bêche, au lieu de chercher, dans le fait purement chimique signalé par Babbage , l’exp'li- cation de la formation des silex de la craie, se fut attaché par analogie à les comparer aux deux derniers faits qu’il signale exceptionnellement , et où il ne lui est pas permis d'ad- mettre que la silice ne fut pas en solution dans le fluide lors de son infiltration, soit à travers les corps organisés, soit à travers les rognons formant les clierts du grès vert , aurait certainement fini par trouver la véritable explication du phénomène, tandis que les ve nés transversales de silex qu’il signale rendent encore son hypothèse plus difficile. D'ailleurs si , comme il est très probable, les calcaires se sont formés commeune partie delà craiedu bassin de Paris, à la manière des bancs de coraux, ou par un dépôt précipité , combiné avec l’accumulation successive des débris de coquilles, ils n’ont véritablement jamais été à un état de mollesse primitive suffisante pour expliquer un départ des éléments sili- ceux, analogue, par exemple , aux départs qui ont dû se former dans les filons ignés lors de leur consolidation. La conservation de la schistosité des marnes de Lyme Regis, à travers les nodules cal- caires, ne semble-t-elle pas s’opposer complètement à une sem- blable supposition? et dans une telle hypothèse, au lieu de voir les silex régulièrement disposés en lignes , ne devrions-nous pas SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 213 voir toute la niasse du terrain qui les renferme présenter plutôt une structure générale rayonnée analogue à celle des porphyres de la Corse et autres roches à formes orbiculaires que j’ai citées précédemment? tandis que l’intercalation postérieure , par suite d’un transportmoléculaire des éléments siliceux , calcaires ou fer- rugineux, à travers les molécules de la masse encaissante, explique très bien la plus grande pesanteur spécifique des nodules, leur compacité habituelle et la disparition apparente, dans le plus grand nombre de cas, de la structure schisteuse primitive de la roche dans laquelle ils se sont formés. En 1835 je m’exprimais ainsi (Bull. , t. VI , p. 320) : « D’autres » faits , pris dans la nature même , pourraient venir à l’appui de »> ce déplacement possible des molécules; par exemple la présence »> de substances métalliques et minérales, au milieu des cavités » géodiques de certaines roches , peut-elle s’expliquer autrement » que par un déplacement desmolécules postérieures au dépôt de » ces roches? La présence de cristaux dequarz hyalin , de chaux » carbonatée, de zinc et de plomb sulfurés, de titane rutile, etc. , » qu’on observe au milieu des crevasses ou cavités géodiques, que » présentent fréquemment dans leur intérieur les rognons de fer » carbonate lithoïde des houillères, pourrait-elle s’expliquer au- » trementque par le transport des molécules, par suite d’actions «électro-chimiques? et ces rognons ellipsoidaux de fer sont-ils » autre chose eux-mêmes que le résultat de modifications posté- » rie u res au dépôt du terrain qui les renferme? Rien ne peut nous » porter à supposer que de semblables sphéroïdes aient pu se for- » mer eu même temps que les couches de sédiment qui les renfer- » ment, tandis que l’observation d’un grand nombre de faits, et » toutes les expériences du laboratoire , tendent à prouver qu’ils » sont le résultat d’un autre mode de formation ; ne savons-nous » pas aussi comment certains cristaux se groupent et peuvent for- « mer des noyaux au milieu des masses argileuses plongées dans » une dissolution saline ? » M. Sedgwick , dans un mémoire publié également en 1835, et intitulé : Remarques sur la structure des grandes masses minérales y et spécialement sur les changements chimiques produits dans les roches stratifiées , durant les différentes périodes de leur dépôt ( Trans. of the Geol . , t. TII, 2nd sériés, p. 468 ), adopte entièrement les idées de M. de La Bêche sur la formation des masses nodulaires; il ajoute seulement que , quant aux spliérosidérites houillers , il en pos- sède quelques uns provenant du Yorkshire , lesquels présentent une structure parfaitement schisteuse, et qu’en conséquence leur 514 SÉANCE DU 50 JANVIER 1815. origine et leur mode d’agrégation doi vent être assimilés avec toute certitude à celles des septaria. • Les concrétions nodulaires, considérées comme phénomène ani- mal,bienque très imparfait, paraissent fort instructives àM. Sedg- wick , en ce qu’elles indiquent que les causes déterminantes de i’ag' égation sont dues à quelques débris, soit d’animal, soit de plante , soit à quelque petit grain invisible, ce qui est parfaite- ment d’accord avec ce que l’expérience nous a appris sur la pré- cipitation et la cristallisation des matières, ordinairement déter- minées par la présence de corps étrangers au milieu d’un fluide dissolvant. Eu comparant ces faits d’expérience avec la manière dont s’accroissent les calculs dans la vessie , l’auteur y trouve de nombreuses preuves que des effets semblables ont eu lieu dans la nature, et que la présence de corps étrangers quelconques ont aussi pu former les centres de concrétions où s’est réunie la matière séparée des lits stratifiés. Mais, quel fut dans le principe, se de- mande M. Sedgwick, la cause déterminante de la nature chimi que du noyau de concrétion nodulaire ou de la substance lapi difiante des pétrifications? Si les corps de même nature tendent à s’agréger ensemble, nous avons là un principe qui explique en quelque sorte pourquoi la silice de la craie s’est portée sur les fi- bres descorps unisaux éponges, et pourquoi la substance extérieure des écbinodermes est si fréquemment changée en carbonate de chaux ; mais comment expliquer alors que des troncs cl’arbres enve- loppés dans des grès siliceux soient en quelques points minéralisés par le carbonate de chaux , pendant que d’autres arbres, encla- vés dans des calcaires , sont minéralisés par la silice? que, dans une contrée calcaire, les coquilles soient toutes transformées en car- bonate de chaux , quand, dans une autre , les coquilles de même espèce, et même les portions les plus délicates de la structure in- térieure, ont été pétrifiées par la silice? Pour expliquer de tels phénomènes , ou même pour les classer rationnellement, j’atten- drai , ajoute M. Sedgwick, que nous ayons des observations plus étendues ; mais , dans tous les cas, il faut bien admettre que les roches où se trouvent ces concrétions ont subi un grand change- aient chimique depuis leur dépôt. Les belles découvertes microscopiques de M. Ehrenberg sont destinées à jeter beaucoup de jour sur certaines questions géo- logiques , et entre autres sur l’origine et la composition des silex de la craie et des autres terrains. Le 2 janvier 1837, M. de Hum holdl ayant adressé à M. Arago, au nom de M. Ehrenberg, deux plaques des silex senti opale de Bilin et pyromaque de De- SÉANCE DU 20 JANVIER 1 845. 215 litzsh , dans lesquels il avait reconnu plusieurs corps organisés comme ensevelis dans la pâte de ces silex ; la communication qui en a été faite à l’Académie des sciences , a donné lieu à un très intéressant mémoire de l’un de ses membres M. Turpin, inséré dans ses Comptes-rendus , tom. 1Y, p. 304 et 351, sous le titre de : Analyse et étude microscopique des différents corps organisés et au- tres corps de nature diverse cpd peuvent accidentellement se trouver enveloppés dans la pâte translucide des silex. « À la vue , ces silex , dit M. Turpin , sont des masses qu’on » peut croire purement inorganiques , purement homogènes , et » non des agglomérations formées en grande partie d’une immense » quantité de corps organisés d’espèces différentes, la plupart par- » faitement conservés dans leurs formes et leurs détails , etc. Le » microscope seul pouvait nous faire découvrir ces soi tes de cata- » combes , et nous amener à concevoir quelques idées nouvelles » sur la matière siliceuse et sur la formation irrégulière et à peu » près polymorphe des silex , soit en rognons, soit en nodules. » Naturellement , M. Turpin repousse l’hypothèse qui supposait que les rognons de silex avaient été de grands vers ou alcyons , car il faudrait admettre , ajoute- t-il , que ces prétendus vers ma- rins contenaient dans leur intérieur tous les zoopliytes , madré- pores, oursins , coquilles , végétaux confervoïdes , grains de sable et autres corps étrangers qu’on y reconnaît parfois. a Si l’on admet que les rognons du silex doivent leur transfor - » mation à la décomposition des innombrables végétaux et ani- » maux qui vivent soit dans l’eau salée , soit dans l’eau douce, » si sur ces fonds marins ou lacustres, les débris ou même les » corps entiers de ces êtres pieu vent , se précipitent et s’entassent » les uns sur les autres , de manière à y foi nier de grandes cou- » cbes plus ou moins épaisses, composées jusqu’alors de toutes » espèces de choses , comme une sorte de chaos ; si l’on se rap- » pelle bien que tous ces corps organisés, particulièrement les ani- » maux, se composent en grande partie , i° de matière organi- » que vivante ; 20 de matières calcaires ; et 3° de matière sili- » ceuse ; ces deux dernières ayant été absorbées et sécrétées mo- » léculaii ement et confusément dans les interstices tissulaires de la » première ; si , dans cette couche pâteuse , gélatineuse et très li- » quide , qu’on a nommée b ciré gi ne , couche où tout est encore » mélangé, où tout est encore disposé au hasard, on admet, a comme cela paraît prouvé , la séparation plus ou moins com- » plète des molécules siliceuses, d’avec les molécules calcaires et » la conglomération des premières au milieu des secondes , et 216 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. » comme, pour me servir d’une comparaison sans doute incom- » plète , les globules du sang et ceux du lait s’isolent et se sépa- » reïit du sérum pour former ccs autres conglomérations que l’on » nomme des caillots; si enfin on reconnaît que dans cette sépa- » ration les molécules siliceuses, attirées les unes vers les autres , » se portent encore vers un corps de nature quelconque, comme » point déterminant du noyau , commençant la conglomération » d’un caillot siliceux , on comprendra facilement que , dans le »> champ du travail du caillot , les molécules siliceuses peuvent, » en s’agglomérant , envelopper successivement de la matière or- n ganique pulvéïisée, des corps organiques plus ou moins entiers, » comme tout autre corps se trouvant furtivement placé sur le » point et dans l’étendue de la conglomération. « Ainsi s’expliqueraient , 1° comment les caillots siliceux , n’é- » tant que de simples agglomérats de molécules siliceuses, sont » irrégulièrement polymorphes, de grandeurs très variables, >» isolés et indépendants les uns des autres , disposés par couches » interrompues dans la craie , avec laquelle , et la matière orga- » nique et les corps organisés, ils formaient dans l origine un tout »> liquide et mélangé, un véritable magma ; 2° comment ces cail- »> lots siliceux contiennent toujours plus ou moins de matières or- ). ganisées, particulièrement animales, et quelquefois des végétaux -v et des animaux entiers; circonstance à laquelle est due seulement ..la couleur sombre plus ou moins foncée, ou grisâtre, blonde, » jaunâtre, brun-noirâtre, verdâtre, etc., et en même temps, » conséquemment , cette odeur qui s’exhale par le frottement de « deux morceaux de silex l’un contre l’autre ; 3° comment, parla y calcination , la matière inorganique colorée devient blanche, parce que la matière organique seule brûle et fait disparaître » complètement la couleur, etc. » Sans doute, beaucoup de couches ont dû se former, ainsi que le suppose M. Tuj pin , par une accumulation confuse de débris orga- niques et en quelque sorte comparable auxdépôts barégineux ; mais il n’est pas probable-que les silex se soient formés , dans des couches analogues, lorsqu’elles étaient encore à l’état mou ou de magma, et le phénomène qui les a produits n’a i ien de comparable à ce qui se passe , soit dans les mélanges plastiques , soit dans l’opé- ration de l’assimilation des différentes matières qui constituent l’organisme animal. Si la silice était douée de la force d’attraction moléculaire qu’on lui suppose, pour expliquer par ségrégation les phénomènes no- dulaires, il n’existerait pas autant de couches homogènes d’argile SÉANCE DU 20 JANVIER 1815. 217 ou de calcaire siliceux ; elles seraient en quelque sorte toutes transformées en des masses à rognons, tandis qu’on n’observe souvent ceux-ci que dans de certaines zones, lesquelles sont par- fois isolées , par exemple, au milieu de masses argileuses , dont on peut dire, avec certitude, que le mode de formation aussi bien que la composition n’a pas varié depuis le commencement du dé- pôt jusqu’à la lin ; cependant les argiles , selon moi, sont les seules roches qui peuvent être considérées comme ayant pu rester, après leur dépôt, un certain temps à l’état de mollesse vaseuse. Si on admet , au contraire, un déplacement moléculaire, non seulement on n’est pas obligé de supposer la formation par segré- gation de la masse enveloppante et en vertu des forces d’attraction moléculaire qui ne sont que relatives, mais même il n’est pas né- cessaire de supposer que les éléments ferrugineux, calcaires ou siliceux des nodules étaient originairement disséminés dans cette masse ; on n’a pas besoin non plus de supposer que l’opération s’est produite au moment où le dépôt était encore mou ; elle a pu se produire à toutes les époques. Une intercalation moléculaire postérieure, par transport au milieu de la masse et autour de cer- tains centres d’attraction , explique également bien pourquoi , dans les rognons siliceux géodiques de la craie , par exemple , les corps fossiles se prolongent aussi bien en dehors qu’en dedans de l’enveloppe siliceuse : seulement, comme ces prolongations non empâtées ou pénétrées par la silice sont souvent très friables, il faut examiner le fait avec beaucoup de précaution pour pouvoir s’en assurer. Cela explique encore fort bien , ainsi que je l’ai déjà dit précédemment , comment les nodules ferrugineux ou calcaires ont quelquefois conservé la schistosité et même les nuances par zones des masses schisteuses qui les renferment. En 1838, M. Lyell , dans ses Éléments de géologie (voyez p. 86 de la traduction française de madame Tullie Meulien), pense « que » les molécules, tenues en suspension dans l’eau, une fois déposées, » celles qui sont de nature semblable paraissent exercer une at- » traction mutuelle les unes sur les autres, et s’agglomèrent en » de cerlains endroits où elles forment des amas, des nodules et » des concrétions. » L’un des exemples les plus remarquables de structure concré- tionnée est certainement, ajoute M. Lyell , celui que M. Sedg- wick a décrit et signalé dans le calcaire magnésien du nord de l’Angleterre. « La grosseur des concrétions sphériques y est très » variable , tantôt ne dépassant pas celle d’un pois , et tantôt at- » teignant jusqu’à plusieurs pieds de diamètre. Ces concrétions 218 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. » ont une structure tout à la fois concentrique et radiée , en même » temps qu’elles sont traversées sans interruption par les feuillets » du dépôt originel. Ce calcaire , dans quelques falaises , ressemble » à une grande pile irrégulière de boulets de canon. Quelquefois » il arrive que le centre de ces masses globulaires est dans une » strate, tandis qu’une portion de leur contour se trouve dans la » couche supérieure ou inférieure (voy. pî. IV, fig. 8). Il faut donc » nécessairement supposer qu’une fois la formation accomplie, un » mouvement eut lieu parmi les molécules , et que de ce inouve- » ment résulte la séparation des carbonates de chaux et de ma- » gnésie d’avec la matière la plus impure et la plus mélangée » formant les parties non encore consolidées de la strate. Lacris- » talîisation, commençant vers le centre, dut continuer en for- » mant des couches concentriques autour du noyau primitif, sans » se confondre avec la structure feuilletée de la roche. Quant aux » radiations partant du centre , c’est un phénomène qui , tout sin- » gulier qu’il est, s’offre très fréquemment dans les concrétions » sphériques de diverses substances minérales. » M. Sobolewsky, dans son Coup d’œil sur l’ancienne Finlande , inséré dans l’Annuaire du journal des mines de Russie de 1839, décrit de la manière suivante (p. 119) le gisement des pierres d’imatra , dont il donne une figure. Au village de Mieck, situé à une verste environ au-dessous de la cataracte d Imatra , les bords de la Vokça, qui roule sur un lit de granité, sont formés par des escarpements de 10 à 11 mètres de hauteur, composés d’argile schisteuse de couleur grise, qui contient du calcaire demi- transparent , et ces rognons de marne si connus sous le nom de pierre d’imatra. Malheureusement, ni M. Sobolewsky, ni M. Hoffmann, qui a aussi visité cette localité , n’ont fait connaître l’âge de ce terrain ar- gileux. Nous savons bien, par les Observations géognostiques sur V arrondissement minier cVOlonetz , de M. Komaroff (Annuaire clés mines de Russie pour 1842) , que la formation jurassique se mon- tre sur quelques points de la partie méridionale de la Finlande; mais les argiles d’imatra pourraient se rapporter tout aussi bien aux argiles sableuses alluviales très développées sur quelques points de cette partie de l’empire de Russie, et les fragments de roches étrangères auxquels adhèrent souvent les nodules cal- caretix , tendent même à le faire supposer. Quoi qu’il en soit, ces messieurs se rangent à l’opinion de M. de La Bêche, relative- ment à la formation de ces masses sphéroidales qu’ils considèrent comme analogues à celles de Lyme Regis. SÉANCE DU 20 JANVIER i 845. 219 En i84o , M. Parrot, dans un travail inséré dans le tome Y de la seconde partie des sciences mathém. , phys. et nat. des Mém. de V Acad. imp. de Saint-Pétersbourg, a également fait connaître les fameuses pierres d’Imatra, qui depuis longtemps fixent l’attention des amateurs. Tout ce que l’on peut conclure de la lecture du long mémoire de M. Parrot , et de l’inspection des belles et nombreuses figures qui l’accompagnent , c’est que ces pierres, aux formes si bizarres et souvent si régulières (Yoy. fig. 10), qu’on les prendrait pour des objets d’art, ne sont autre cliose que des nodules argilo- calcaires , de dureté variable , qui se sont formés au milieu d’une masse d’argiles sableuses. Ces rognons réni formes semblent en effet composés d’espèces de disques superposés et allant en dimi- nuant de diamètre , mais dont l’ensemble cependant affecte des formes sphéro'idales ou ellipsoïdales. Les zones parallèles , de différentes nuances , correspondant toujours à des disques ou à des rainures, sont tout simplement la prolongation des différen- tes couches de la masse argileuse qui les renferme , circonstance à laquelle M. Parrot, qui a principalement étudié ces pierres iso- lément , ne paraît pas avoir prêté attention. On peut aussi re- connaître, à l’inspection des figures de l’auteur, que plusieurs de ces nodules, gênés dans leur développement par le voisinage de fragments de granité , semblent comme brisés ou pénétrés par ces corps étrangers qui dérangent ainsi l’harmonie habi- tuelle de leurs formes , et que d’autres ont été réellement bri- sés postérieurement à leur formation , et offrent de véritables failles remplies de terre jaune ou noire. Selon que ces ro- gnons sont isolés ou réunis deux à deux, trois à trois, etc., M. Par- rot les appelle monotypes , di types, tri types , tétratypes , pentatypes et polytypes , désignations sans utilité pour indiquer des formes et des réunions qui peuvent et doivent même nécessairement varier à l’infini. Plusieurs hypothèses ont été imaginées pour expliquer la for- mation de ces nodules : Y hypothèse giratoire est de M. le chanoine Meyer ( Russiche Denkmalei ) ; il cherche à expliquer la formation de ces pierres par les tourbillons ou tournoiements de la rivière sur une base pierreuse. M. Hoffmann ( Geognostische Beobachtungen auf ci fier Reise von Borpat bis Abo 1837), après avoir fait observer que ces pierres ressemblent ordinairement à un 8 renversé, dit que le fait de leur existence sous la montagne adjacente , d’où le Yokça les déterre , ne permet pas d’admettre une semblable hy- pothèse. M Parrot objecte, lui, ses bitypes , tritypes, etc. , et les nombreux tourbillons qu’il aurait fallu que l’eau fît pour expli- 220 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. quer par ce moyen la formation de tous les rognons qui souvent se touchent. Sans s’arrêter à Y hypothèse stalacti tique , cependant M. Parrot parait plus disposé à l’admettre , et il fait observer que, si l’on ne trouve aucune trace des infiltrations qui aurait produit de sem blables concrétions , on pourrait supposer qu’elles auraient pu être arrêtées par un recouvrement de couches. M. Parrot repousse également comme inadmissible Y hypothèse végétale , qui donnerait pour origine à ces corps des végétaux sem- blables à des champignons, ainsi que Y hypothèse stercorale , qui suppose que ces masses à formes orbiculaires sont des coprolithes d’animaux gigantesques , mais pour adopter une hypothèse qui ne vaut guère mieux, Y hypothèse animale . M. Parrot admet donc que ces nodules ou rognons marneux sont les restes pétrifiés d’a- nimaux encore très inconnus , d’un genre qu’il suppose analogue à celui des médusaires , et il engage les voyageurs à rechercher leurs analogues dans les baies tranquilles!... Après ces conclu- sions, et malgré ce que l’auteur ajoute contre les géologues élec- tromanes , j’avoue que j’aime encore mieux m’en tenir à Y hypo- thèse électro-chimique . En 1841, M. Thomas Weaver, dans les conclusions de son mémoire sur la composition des roches crayeuses , etc. ( London , Ed. , and Dub philos. Mag. , for May and June ), fait observer que dans le midi de l’Europe, les lits de marne qui alternent avec la craie sont composés de coquilles siliceuses d’infusoires et que les silex manquent; tandis que dans le nord de l’Europe, où des lits de silex alternent avec la craie , ce sont les marnes avec infusoires qui manquent , et il en conclut que les particules siliceuses pul- vérulentes des infusoires ont été converties en nodules de silex compacte. En 1842, M. Bowerbank a publié un mémoire sur les corps si- liceux de la craie , du grès vert et de l’oolite ( Trans . of tlie Geol ., t. VI, p. 181), dont M. Buckland , dans son discours anniver-; saire pour 1841 ( Proceedings of Geol. Soc., t.|III , p. 506), a donné une analyse que je crois devoir reproduire en partie. * — ■ Déjà Do- nati avait décrit et figuré des alcyonites fossiles, lorsqu’en 1808 , M. Parkinson , dans son intéressant ouvrage ( Organic Remains of a Former hVorlcf t. II, p. 87), décrivit des spiculés acicu- laires qu’il regardait comme étant communs aux spongiles et aux alcyons fossiles, et figura une espèce fossile d’Alcyonite cruci- forme très remarquable , ressemblant à V Alcy onium cynodium de L inné. SEANCE DU 20 JANVIER 1845. 221 Ou savait aussi depuis longtemps qu’une grande partie des silex de Wilts, d’Oxon et de Buck contenaient, au milieu d’une enveloppe extérieure de silex gris d ’épaisseurvariable, un noyau de silex translucide, souvent de couleur pourpre et laissant distinc- tement apercevoir un réseau et un assemblage de tubes semblables aux alcyons modernes. On supposait que ces alcyonites avaient servi de centre ou de noyau d’attraction ; qu’ils avaient d’abord été en- veloppés d’une croûte de silex gris , ne présentant aucune trace d’organisation; qu’ils avaient été pénétrés ensuite par du silex cai- cédonien rouge ou pourpre qui était venu remplacer les molécules de la matière animale à mesure qu’elles se décomposaient. Cette hypothèse a été modifiée par M. Bowerbank , qui s’est d’abord attaché à confirmer par des observations microscopiques l’opinion admise depuis longtemps par beaucoup de naturalistes, que la forme tuberculeuse des cberts de la craie est due à des corps organisés. Il suppose que des spongiles parasites se sont attachés aux alcyons ainsi qu’aux écliinides et aux autres coquilles, pour former une enveloppe à ces noyaux organiques. Ce mode d’accroissement explique, selon lui , ces formes tuberculeuses si irrégulières, plus particulières aux rognons de la craie, et pour appuyer son hypothèse, licite les habitudes parasites de quelques spongiles vivants, qu’on observe enveloppant des coquilles et au- tres corps étrangers. Il suppose encore que la matière organique des spongiles et des zoophytes a fourni des centres d’attraction plus puissants à la silice que les spiculés siliceuses des spongiles; et c’est, selon lui, une considération géologique qui paraît confirmer l’hypothèse que la matière siliceuse des silex a été ségrégée de la masse enveloppante, composée de calcaire et de silice, pendant qu’elle était encore molle, et par l’attraction de quelques corps organiques; il ajoute que la craie tendre de la région supérieure de l’Angleterre, qui contient le plus de silex , est composée de carbonate de chaux presque pur; tandis que la craie compacte des régions plus basses et habituellement privée de silex contient de la silice disséminée dans sa masse. En terminant, M. Buckland ajoute que l’hypliotèse de M. Bo- werbank . en n’admettant pas que des alcyons ou d’autres corps étrangers aient pu se trouver dans la craie, sans que des spongiles soient venues coopérer à la formation des silex gris qui les enve- loppent, lui paraît beaucoup trop exclusive. Enfin, en 1843, M. Alp. Favre a cité dans ses Considérations géologiques sur le Mont-Salève (p. 88) des corps cylindriques et 222 SÉANCE DU 20 JANVIER 184Ô. subgîobulaires , analogues aux pierres d’Imatra, qui existent au Musée de Genève et qui ont été décrits par M. Necker p. 257). Selon M. Favre, ces corps irréguliers proviennent probablement des environs d’Onex , et très probablement aussi de son terrain diluvien cataclysmique. Explication de la planche, Fig . î. Sphérosidérites dans des schistes honiller9 très micacés de la Ricamarie, près St.-Elienne (Loire). Fig. a. Sphérosidérites dansJes argiles marneuses jurassiques près de la Voulte (Ardèche) ; les traits noirs indiquent de petites couches de fer alternant. Fig. 3. Disposition’générale des silex de la craie en Morée. Fig. 4* Ptognons de jaspe testacé, au milieu des jaspes en couches de la craie de Morée. Fig. 5 et 6. Formation et disposition générale des cherts, dans les cal- caires jurassiques des environs d’Alais ( Gard ). Fig. 7. Argiles noduliformes , jurassiques et néocomiennes des environs d’Alais et de Chambéry. Fig. 8. Chailles et septaiia de différents terrains. Fig. 9. Sphérosidérites houillers de différentes formes. Fig. 10. Pierres d’Imatra , en Finlande, d’après M. Parrot. M. Virlet lit ensuite un extrait de la réponse que lui a adressée M. Becquerel. « Une foule de faits géologiques prouvent effectivement qu’il a existé et qu’il existe encore, dans des roches de na- ture diverse, des centres d’action autour desquels sont venus et viennent encore se grouper des éléments étrangers à ces roches et d’où sont résultés des composés particuliers. Nul doute que ces transports de molécules n’aient été effectués par des forces analo- gues à l’électricité ; mais il 11e suffit pas d’avancer que le phénomène a une origine électrique, il faut le prouver : c’est ce que j’ai déjà fait dans un certain nombre de cas, en reproduisant ces composés; il faudrait suivre cette marche à l’égard des substances que vous mentionnez dans votre lettre; c’est ce dont je m’occùperai quand le temps me le permettra. » Gomme effetde transport, dont l’origine électrique ne saurait être mise en doute, c’est ce qui s’est passé quand les pyrites auri- fères de Bérézoff ont perdu leur soufre pour prendre de l’oxigène et de l’eau , sans changer de forme. O11 voit là l’action d’un cou- rant électrique qui apporte un élément et en enlève un autre. Le Bull, de la Soc. Céol. de /ranci 21 Sorte . Tout. 2. P! . I • /nn/c 22 3 Voiweîles obseroa/tons sur /<■ tjbiacr de Faidhorn pur (7t. JJarfms. /')2 , et un aide faisait glisser le voyant jusqu’à ce qu’il se trouvât sur le prolongement de l’axe optique de la lunette. La distance verti- cale entre le voyant ainsi placé et la surface de la glace indiquait la quantité dont le niveau du glacier s’était abaissée. Mais cette méthode comme l’autre 11e mesure que la somme des effets pro- duits par les différentes causes qui peuvent faire varier le niveau du glacier. De plus , elle peut être entachée , comme la première, de toutes les erreurs dépendantes du niveau de l’instrument et du changement de la collimation de la lunette. Bans notre méthode, nous étions à l’abri de toutes ces causes d’erreur, qui ne sont nul- lement négligeables pour un instrument soumis à des transports continuels à travers les montagnes. M. Forbes semble avoir compris lui-même que ses deux mé- thodes ne lui donnent que la somme des effets dus à l’affaissement, au tassement, à la progression et à la fusion du glacier ; car il dit p. 154 : « La seule méthode rigoureuse pour mesurer la fonte su- perficielle consisterait à creuser des trous horizontaux dans la paroi d’une grande crevasse, et à mesurer leur distance à la surface du glacier. » Or c’est implicitement ce que nous avonsfait, M. Bravais et moi, avant que M. Forbes eut entreprisses expériences et publié son livre : seulement, les trous dans la glace, dont la grandeur et la forme seraient altérées par la fusion, étaient remplacés par une pierre, sorte de repère inférieur qui ne change ni de grandeur ni de forme , et que nous rapportions à une ligne visuelle invariable. choisis nous donnait la quantité 0 — s h. Pour le glacier du Faulhorn, la formule se réduit donc à D = A -b è - € h. Nous n'avons pu isoler l’une de l’autre les quantités S et t h. Cette der- nière même n’a été introduite dans la formule par M. Hopkins que pour représenter la turgescence et le tassement possible du glacier; mais la réalité de ces hypothèses n’a pas encore été vérifiée par l’expérience di- recte. (Q Page 1 55. 236 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. III. Courbes noires paraboliques de la surface du glacier. Quand on s’élève à cent ou Cent cinquante mètres au-dessus de la surface d’un grand glacier, on y aperçoit des lignes noires for- mant des courbes paraboliques dont le sommet , dirigé vers l’extrémité inférieure du glacier, coïncide sensiblement avec l’axe de la surface supérieure. Les deux branches de chacune de ces courbes viennent se terminer sur les bords du glacier. Ces lignes noires ( dirt bands des Anglais ) ont été signalées et décrites par MM. Agassiz , Desor et Forbes. Constamment sur les grands gla- ciers, la convexité de ces courbes est tournée en bas. Il en était au- trement sur le glacier du Faulhorn. En l’examinant du milieu de la hauteur du cône qui le domine , je comptai quatre courbes pa- raboliques sensiblement équidistantes, dont les branches venaient se perdre sur les bonis de l’escarpement terminal , tandis que les sommets tournés vers le haut du glacier se trouvaient sur la droite qui mesure sa longueur. (Yoy. pl. Y, fig. 1.) La surface triangu- laire du glacier paraissait donc composée de quatre demi-ovales inscrits les uns dans les autres. Examinées de près, ces courbes se présentaient sous la forme de petites arêtes peu saillantes, cou- vertes de poussière noire et composées d’une glace plus dure que celle qui les entourait. Avec la hache , je fis un grand nombre de coupes verticales perpendiculaires à la direction de ces arêtes, et je reconnus qu elles se prolongeaient , dans l’intérieur de la masse , sous forme de lames de glace bleue et compacte , tandis que celle qui les entourait était plus blanche et plus grenue. Ces lames, un peu concaves vers le ciel dans le sens perpendiculaire à l’axe du glacier et diversement inclinées sur cet axe dans le sens longitu- dinal , sont , pour ainsi dire , le squelette du glacier, qui parais- sait formé en grande partie de quatre grandes écailles superpo- sées , mais de grandeur inégale , dont la base était tournée vers l’escarpement, le sommet vers le haut du glacier. En parcourant le glacier, il était facile de voir que ces quatre grandes écailles étaient séparées l’une de l’autre par une foule d’autres lames beaucoup plus minces, moins apparentes, invisibles de loin , mais dont la structure et la disposition étaient les mêmes que celles des écailles principales. Toutes ces écailles plongeaient vers l’escarpement terminal du glacier, et leur inclinaison était d’autant plus forte qu’on se rapprochait davantage de cet escarpe- ment. Ainsi , vers le haut du glacier, leur inclinaison était de 6" à 8°, et de 20° à 35° vers le tiers inférieur. Ces écailles étaient sé- parées entre elles par des couches de glace blanche et peu coin- SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 237 pacte. Près de l’extrémité inférieure de la surface supérieure du glacier, on apercevait un grand nombre d’arêtes noires, irrégu- lières , non paraboliques , mais sensiblement parallèles au bord de l’escarpement. (Yoy. pl. Y, fig. 1 et 3.) Leur inclinaison était de 45°. Chacune d’elles représentait la tranche d’une ancienne écaille réduite à une bande étroite. Tous ces débris d’écailles ac- cumulés vers l’escarpement s’étaient affaissés les uns sur les autres; de là une inclinaison beaucoup plus forte que celle des quatre écailles à bords paraboliques dont nous avons parlé. Les trois croquis de la planche rendront cette description plus intelligible. La fig, 1 représente la surface du glacier vu de haut en bas en 1844 ; en a , b , c , d , -on voit l’affleurement des couches qui composent le glacier et forment les courbes paraboliques. La fig. 3 est une coupe longitudinale par un plan vertical coïncidant avec la ligne SE ; elle montre l’inclinaison croissante des cou- ches à mesure quelles sont plus rapprochées de l’escarpement. /, h > h & sont d’anciennes écailles réduites à une bande étroite. a, b , r, d sont les grandes écailles désignées par les mêmes lettres dans la fig. 1. J’ai indiqué par des lignes ponctuées le parcours probable de ces couches dans l’intérieur du glacier. Leur extrémité inférieure vient affleurer sur l’escarpement EF. Si l’on fait une coupe vers le milieu du glacier par un plan ver- tical perpendiculaire à l’axe, on voit (fig. 4) que les écailles sont légèrement concaves dans le sens de la largeur du glacier. Ainsi donc sa masse se compose de cinq grandes couches de glace concaves vers le haut et séparées par un grand nombre de couches analogues, mais plus minces, parallèles aux premières. L’une de leurs extrémités forme les courbes noires de la surface supérieure ; l’autre extrémité est indiquée par les lignes sensible- ment horizontales de l’escarpement. M. Agassiz a étudié ces courbes sur le glacier de l’Unteraar (1), M. Forbes sur la mer de glace de Chamonix (2). Il les a retrou- vées sur les glaciers de Macugnaga et d’Alalein , où elles étaient nettement dessinées (3). Je les ai vues moi-même de la manière la plus distincte sur le glacier inférieur de Grindelwald , entre la Stierregg et leZæsenberg Sur tous ces glaciers, leur convexité est tournée vers la partie inférieure du glacier , et ces courbes sont d’autant plus allongées qu’elles se rapprochent davantage de cette (î) Excursions et séjours dans les glaciers , par Desor, p. 49 1 - (2) Travels, etc. , p. 162. (3j Ibid., p. 345, esquisses topographiques, VIII et IX. SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 238 extrémité (1). La vue de ces ligues fit naître dans l’esprit de M. For- bes le premier germe de sa théorie sur la progression des glaciers. Voici cette théorie en peu de mots (2) : le glacier se meut plus vite au milieu que sur les bords ; son mouvement est donc com- parable à celui d’une masse semi-liquide. Les parois du canal dans lequel elle coule retardent sa progression sur les côtés ; si elle charrie à la surface de l’écume ou des impuretés , celles-ci for- meront des anses dont la convexité est tournée vers le bas de la pente. Donc la forme parabolique de ces courbes est due à la pro- gression inégale des diverses portions du glacier, et prouve sa vis- cosité. M. Agassiz n’assimile nullement la marche d’un glacier à l’écoulement d’un liquide ; toutefois il attribue aussi la courbure des lignes noires à la progression plus rapide du centre de la masse. Je suis loin dfe nier qu’il n’en soit ainsi sur les grands glaciers; mais sur celui du Faulhorn, la convexité des courbes noires étant tournée vers le haut du glacier en sens inverse de sa progression , il faut chercher ailleurs les causes de la forme parabolique de ces courbes. Nous la trouverons dans le mode de fusion des princi- pales couches qui composent la masse du glacier; celui du Faul- horn, avons-nous dit, est dirigé du S. -S. -O. au N.-N.-E. Sa rive occidentale est dominée par le cône du Faulhorn ; sa rive orien- tale, par les parties élevées du plateau de Gassen , qui plongent vers le Tscliingelfeld ; son extrémité supérieure par ce plateau lui-même. L’escarpement tourné vers le N.-N.-E., suspendu au- dessus d’un abîme, n’est frappé directement par les rayons du soleil que pendant quelques heures par jour, et seulement en été. En outre, son orientation est telle qu’il ne saurait recevoir la cha- leur réfléchie par les rochers voisins. Ainsi donc, les écailles de glace qui composent le glacier ne sauraient fondre beaucoup pendant l’été par leur tranche inférieure qui vient aboutir à l’escarpement. Il n’en est pas de même de la tranche supérieure de ces écailles, dont nous allons examiner la fusion. Reportons- nous, pour simplifier l’explication, au commencement de l’été , et représentons-nous l’écaille la plus superficielle au moment où la couche de neige'molle qui recouvrait le glacier vient de disparaître. Cette écaille est alors en contact avec le sol dans toute la périphérie du glacier, et ne tarde pas à fondre sous la triple influence de la chaleur de l’air, du soleil, et principalement du sol, qui agit h la fi) Voy. la carte de la mer de glace de Chamonix. par M. Forbes. (q) Travels, etc. , p. i;5. SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 1 39 fois par sa conductibilité et par sa chaleur rayonnante (1). Cette fusion a un double effet : 1° elle diminue l’épaisseur de la couche, c’est la fonte superficielle; 2° elle rétrécit l’étendue delà couche , c’est la fusion périphérique. La couche , fondant ainsi par son ex- trémité supérieure et par ses côtés, se rétrécit, diminue d’étendue, et semble reculer vers l’escarpement terminal sur lequel elle reste constamment appuyée. Bientôt l’écaille n’est plus en contact avec le sol, mais elle continue à fondre sous l’influence de Pair du so- leil et de la chaleur réfléchie par les sommités et les rochers qui entourent le glacier. Cette fusion se propageant de la partie supérieure vers l’extrémité inférieure du glacier , et des parties latérales vers l’axe , il en résulte la forme parabolique que nous avons mentionnée. Plus on se rapproche de l’escarpement , moins la fusion latérale est efficace et moins aussi les bords de l’écaille s’éloignent des rives du glacier. Il y a plus : les côtés des écailles sont beaucoup plus éloignés de la rive occidentale du gla- cier que de la rive orientale. (Voy. pl. Y, fig. 1.) Cette différence s’explique aisément : en effet, tandis que le bord occidental de l’écaille fondait et reculait Rapidement sous l’influence de la cha- leur réfléchie par le versant méridional du cône terminal de la montagne , la partie orientale diminuait fort peu ,car elle ne re- çoit que la chaleur qui lui est renvoyée par le talus peu élevé du plateau de Gassen. En se rétrécissant, en reculant pour ainsi dire vers l’escarpe- ment et vers le milieu du glacier, l’écaille dont nous parlons a mis à découvert celle qui lui est sous-jacente ; à son tour, celle-ci fond sous l’influence des causes que nous avons énumérées. Elle se ré- trécit et se retire comme la précédente. Ces fusions successives des couches du glacier continuent ainsi pendant les chaleurs de l’été : de là ces écailles imbriquées sensiblement équidistantes qui com- posent le glacier. Les plus superficielles sont les plus anciennes , et aussi les plus petites en étendue; elles se montrent sous forme (i) Pour donner une idée de l’échauffement relatif du sol à la sur- face etde l’air dans les hautes Alpes, je tne bornerai aux faits suivants: du 1 1 au 17 août 1842 , la moyenne de Pair fut de 6°, 67 ; maximum , 1 i°, 4 ; minimum, 20, 1. Sol à la surface,; 90, 5 1 ; maximum, 270, 5 ; mi- nimum, i°, o. Du 21 au 28 septembre 1 844 ? la température moyenne de l’air a été de t j° , of ; le maximum, io°8 ; le minimum, — o° 3. La tempé- rature moyenne du sol , du 21 au 28, à la surface, a été de 6°, 4; maxi- mum, 090, 8; minimum, o'* 1, 3. A om, 25 de profondeur, moyt nne 5°. 4^. 240 St: A. N CE DU 20 JANVIER 1815. de lambeaux irréguliers, accumulés près de l’escarpement termi- nal. La fusion de ces écailles est encore favorisée par une poussière noire qui recouvre leur tranche, soit que cette poussière y ait été accumulée par les vents, soit qu’elle ait été déposée sur l’écaille à l’époque où celle-ci formait la partie supérieure du glacier, et qu’elle fasse partie intégrante de la glace qui la compose. A toutes ces causes de fusion , il faut encore en ajouter une autre : c’est l’action directe des rayons solaires , qui tendent à di- viser la surface du glacier en lames parallèles dirigées vers le midi et dans le plan de l’équateur. Nous en avons eu la preuve , M. Bravais et moi. En descendant du Mont-Blanc le 1er sep- tembre 1844, nous traversions le glacier des Bossons entre les Grands-Mulets et la pierre de l’Echelle, à. environ 2800 mètres au-dessus du niveau de la mer. Une couche de neige , tombée quinze jours auparavant, recouvrait le glacier. A la surface, cette neige était divisée en lames séparées par des sillons de 1 à 2 cen- timètres de profondeur. Toutes ces lames étaient dans le plan de l’équateur, et dirigées vers le midi. C’est le soleil qui , en fondant les parties de la neige les plus fusibles. , la divise ainsi en lames équatoriales. La même chose a lieu pour les couches du glacier dont la tranche est dirigée vers le midi. Je ne prétends point étendre ces explications aux grands gla- ciers, tels que celui de l’Unter-Aar , de Grindelwald, ou de la mer de glace de Cliamonix. Toutefois , je ne puis m’empêcher de faire remarquer que la fusion explique tout aussi bien la forme parabolique des tranches de couches que la progression plus ra- pide du centre de ces grands glaciers. En effet , dans un glacier ayant dix ou quinze kilomètres de long , il est évident que la fu- sion d’une couche commence d’abord par sa partie la plus dé- clive, où le climat est beaucoup plus chaud et le printemps plus hâtif ; c’est donc par là que les couches superficielles commence- ront à fondre. Plus on descendra des régions supérieures vers les régions inférieures d’un glacier, plus aussi l’excès de la fusion des parties latérales sur celle de la portion médiane des écailles sera considérable. Près de son origine, le glacier n’est entouré que de champs de névé et de cimes couvertes de neige , l’air s’échauffe peu , et les nuages se tiennent habituellement à ces hauteurs : aussi les écailles fondent peu , la fusion de leurs bords ne l’em- porte guère sur celle de la partie moyenne , et les courbes noires sont à peine convexes. Dans les régions inférieures du gla- cier il n’en est pas de même ; la fusion , très active au milieu SÉANCE DU 20 JANVIER "1845. 241 l’est encore plus sur les bords, où la chaleur réfléchie par les parois des rochers voisins ou les hauteurs environnantes fond incessamment les parties latérales de l’écaille. Ces excès de la fu- sion latérale sur la fusion moyenne s’accumulent d’année en année; de là la forme de plus en plus allongée des courbes paraboliques à mesure que l’on descend le long d’un glacier. M. Forbes les a parfaitement figurées sur sa carte de la mer de glace de Chamonix. Je ne prétends pas nier que la courbure de ces lignes noires ne soit un effet complexe de l’inégale fusion et de la différence de progression du milieu et des bords , mais je pense que la première de ces deux causes ne saurait être négligée , puis- qu’elle peut à elle seule donner lieu aux courbes dont nous par- lons , comme le prouve l’exemple du glacier du Faulhorn. IY. Stratification du Glacier . L’accroissement du glacier et la formation des courbes para- boliques qu’on observe à sa surface nous ont conduit à parler plusieurs fois de sa structure stratifiée. Il est temps de prouver que ce glacier se compose en effet de couches superposées, distinc- tes et séparées. Pour bien comprendre cette structure , il faut se reporter à l’origine d’un glacier sans névé. Je vais d’abord expo- ser cette formation comme je la conçois; les preuves viendront après. Pendant l’automne > l’hiver et le printemps , de nombreuses chutes de neige ont lieu sur le Faulhorn, Les couches qui en ré- sultent diffèrent généralement entre elles par leur épaisseur et par la forme , la consistance et la grosseur des flocons ou du gré- sil qui les composent. De là une densité très variable qui se trouve encore modifiée par le tassement de la couche elle-même et la pression des couches subséquentes. Arrive le printemps : la fusion de la neige commence ; mais c’est d’abord sur les sommets et les plateaux exposés au soleil que cette fusion a lieu. L’épais- seur de la neige, que le vent accumule toujours dans les bas-fonds, est moins considérable sur les reliefs du terrain, et l’eau résultant de cette fusion atteint bientôt le sol. Dès que celui-ci est en par- tie à découvert, la neige restante fond principalement en dessous et sur les bords. L’eau résultant de cette fusion coule vers les par- ties les plus déclives , où se trouvent de grandes masses de neige, et pénètre d’abord la couche la plus inférieure qui est en contact avec le sol , puis successivement , et en remontant de proche en Soc. géol. Torn. II, 2e série, 16 242 SÉAN6E DU 20 JANVIER 1845. proche, toutes les autres jusqu’à là plus superficielle. Si la masse de neige n’est pas fondue par les chaleurs de l’été , ces couches , pénétrées d’eau , gèlent pendant les périodes de froid et forment le noyau d’un petit glacier. Je passe à l’énumération des preuves sur lesquelles repose cette théorie de la formation des glaciers sans névé. J’ai dit que les chutes de neige forment des couches distinctes, sinon à l’œil , du moins par quelques unes de leurs propriétés ; j’ajoute que deux ou trois couches différentes peuvent correspondre à une seule chute de neige. Pour vérifier le fait directement , il faudrait se trouver au Faulhorn en hiver, ou au moins au printemps ; mais si, pendant l’été, on s’élève dans les Alpes, on retrouve , à de grandes hauteurs, le printemps des montagnes moins élevées. Au grand plateau du Mont-Blanc , à 3910 mètres au-dessus de la mer, on voyait partout que les assises de neige étaient parfaite- ment distinctes, et quelquefois séparées l’une de l’autre par une couche mince de poussière et d’impuretés. Cette stratification est surtout évidente dans certaines crevasses et sur les séracs (1), qui sont tous composés de couches de neige faciles à compter et d’une épaisseur très variable. Nonj seule- ment ces couches sont distinctes, mais leur couleur, leur densité , sont très différentes, et quelques unes sont complètement conver- ties en glace vive. De Saussure (2). Agassiz (3), et tous les voya- geurs qui ont étudié les hautes régions des Alpes de la Suisse ont été frappés de cette disposition remarquable. J’ai dit ensuite que la fusion de la neige commençait sur les sommets et les plateaux exposés au soleil : l’expérience journa- lière prouve qu’il doit en être ainsi. J’ajouterai néanmoins qifen été on trouve des calottes de glace résultant de la congélation de l’eau fondue à des hauteurs supérieures à 4000 mètres, mais tou- jours dans les endroits saillants et découverts. Sur le Mont-Blanc, j’ai observé ces calottes de glace au dôme du Goûté , au-dessus des llocliers-Rouges et sur l’aiguille de Saussure (aiguille sans nom), celle qui avoisine le sommet de la montagne. Sur le Sclireckhorn M. Desor a fait des observations analogues (4). La (1) De Saussure donne ce nom à des masses de neige compacte cubiques ou pyramidales qu’cn trouve sur les glaciers supérieurs, et qui ont quel- quefois vingt mètres d’élévation. (2) Voyages dans les Alpes , § 1975 et 1981. (S) Excursions et séjours dans les glaciers, p. 867. ^4} Excursions, etc., p. 554- SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 243 même chose se passe au printemps et même en hiver à des hauteurs inférieures à 3000 mètres. Dès qu’une portion du sol est à découvert, c’est sur les bords et par sa partie inférieure que la neige continue à fondre. Toutle monde peut s’en assurer au bord des flaques de neige qui persis- tent en été dans les Alpes. Il se forme alors, à leur périphérie , des voûtes sous lesquelles on trouve quelquefois des touffes de Saxifrage étoilée et de Soldanelle en fleur. L’eau résultant de la fusion de ces neiges coule vers les bassins de réception et s’infiltre dans les masses de neige qui y sont accumulées. Cette infiltration se fait successi- vement de bas en haut. Je crois l’avoir établi dans mon premier mémoire sur le glacier du Faulhorn (1). Mais cette année nous avons pu voir, M. Bravais et moi , comment s’opère cette infiltra- tion horizontale de la neige. Sur le bord oriental du glacier, il y avait deux couches visibles ; l’inférieure dépassait la supérieure, s’élevait sur une pente couverte de fragments de roche , et se rac- cordait avec elle sous un angle très aigu. La supérieure n’était pas en contact avec le sol : aussi était-elle encore à l’état de neige ; l’in- férieure , au contraire , était pénétrée d’eau et changée en glace ; elle se prolongeait vers le milieu du glacier, au-dessous de la su- périeure , sous la forme d’une lame épaisse de glace compacte. Je donnerai plus bas un autre exemple d’infiltration horizontale dont nous avons été témoins au grand plateau du Mont-Blanc. Y. Structure rubanée cle la glace. M. Zuinstein reconnut le premier, en 1820, dans une crevasse où il passa la nuit , non loin de la cime du Mont-Rose, que la glace des glaciers se composait de bandesalternati veulent bleues et blan- ches (2). Cette structure est plus ou moins apparente sur tous les glaciers, excepté à leur extrémité inférieure, où la glace est sou- vent homogène. Les bandes blanches sont formées de glace peu compacte , remplie de petites bulles d’air sensiblemeut sphéri- ques. La glace bleue est plus dure et contient peu ou point de bulles d’air : de là les différences de couleur et de densité de ces deux espèces de glace. Pour étudier ces bandes bleues, je fis avec une hache un grand nombre de coupes verticales dans le glacier : les unes étaient parallèles , les autres perpendiculaires à son axe. fi) Annales des sciences géologiques , octobre 1842, p. 845 , et Bulletin de la Société géologique, 1842, p. 142. (2) Von Welden , Dev Monte Bosa , p. 129. 2 44 SÉANCE DU 20 JANVIER 1815. On se rappelle que la tranche de chacune des grandes écailles qui entraient dans la composition du glacier formait une courbe para- bolique dont la convexité était tournée vers le haut du glacie r * tandis que les deux branches venaient aboutir aux extrémités de l’escarpement, près duquel elles étaient sensiblement parallèles aux bords du glacier. Chacune de ces écailles était composée de glace compacte. Ainsi , eu faisant une coupe verticale perpendiculaire à l’une de ces courbes , je mettais à nu une de ces bandes bleues, qui , dans le cas actuel , n’était autre chose que l’écaille elle- même : or, les écailles dont se compose le glacier étant légèrement convexes vers le ciel, dans le sens transversal, et d’autant plus in- clinées qu’elles se rapprochent davantage de l’escarpement ter- minal , les bandes bleues affectaient et devaient affecter une di- rection et une inclinaison variées. Sur les bords du glacier elles étaient sensiblement horizontales ou inclinées vers son axe sous des angles moindres de 25°. (Yoy. pl. Y, fig. 4). C’est ce que l’on constatait très bien sur toutes les coupes verticales et perpendicu- laires à l’axe du glacier. Des coupes verticales parallèles à l’axe montraient que vers le sommet du glacier les bandes venaient se raccorder avec la surface sur un angle très aigu ^fig. 3); mais à mesure qu’on se rapprochait de l’escarpement, leur inclinaison augmentait avec celle des couches , et atteignait enfin 40° et 45°. L’épaisseur de ces bandes était en général de 4 à 5 centimètres. Entre les affleurements des grandes écailles , il y avait, à la sur- face du glacier, de petites saillies séparées par des sillons étroits et peu profonds. Ces saillies étaient sensiblement parallèles an bord des grandes écailles, c’est-à-dire longitudinales sur les bo ds du glacier, transversales au milieu. Quand on faisait des coupes verticales perpendiculaires à la direction de ces sillons, on trouvait aussi des bandes bleues ou plutôt des veines bleues ; car ellesétaient beaucoup plus nombreuses, plus étroites et plus irrégulières que les bandes (pl. Y, fig. 5). J’en ai compté souvent vingt à trente dans une coupe de 6o centimètres de long sur 11 debaut ; mais elles deve- naient d’autant plus rares qu’on remontait davantage vers le som- met du glacier, où la surface était composée de neige grenue en- core imparfaitement gelée. Quelques unes avaient à peine deux ou trois millimètres de large, et celles quiatteignaient une largeur de plusieurs centimètres étaient évidemment composées de la réunion de plusieurs petites veines isolées, car on y remarquait des lames de neige très minces qui séparaient la bande de glace en plusieurs veines distinctes; en outre elles se croisaient dans leur direction de manière à former une espèce de treillis ou de réseau Ainsi SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. 215 donc il y a , sur le petit glacier du Faulhorn, deux genres de bandes : les grandes bandes parallèles qui constituent les écailles principales, puis les petites veines bleues dont je viens de parler. Les veines se distinguent aussi des bandes par leur moindre den- sité et par leur couleur : elles sont plutôt grisâtres que bleues, et ne contrastent pas aussi fortement avec la neige qui les entoure. Toutes ces circonstances leur assignent une origine différente de I celle des bandes bleues qui correspondent aux grandes écailles du | gracier. Les auteurs ne sont pas d’accord sur le mode de formation des j grandes bandes bleues. Je pense qu’elles sont dues à une infiltra- | tion plus parfaite de certaines couches de neige. Nous avons vu 1 que toutes les couches du glacier sont successivement pénétrées I horizontalement par l’eau qui coule sur les pentes voisines. Mais toutes ne le sont pas aussi complètement l’une que l’autre. La den- j sité, la grandeur et la disposition des espaces capillaires, la nature I de la surface qui la première est en contact avec l’eau, peuvent produire à cet égard de grandes différences. En voici la preuve. Dans la première ascension que je fis au Mont-Blanc avec MM. Bra- vais et Lepileur, le 3l juillet 1844, le mauvais temps nous força à dresser notre tente au grand plateau, à 900 mètres au-dessous du sommet , et à redescendre le lendemain. Une seconde tentative ne fut pas plus heureuse ; enfin, le 28 août , nous atteignîmes pour la troisième fois le grand plateau. Notre tente y était depuis un mois. Durant cet intervalle, d’abondantes chutes de neige avaient eu ; lieu; car, autour de la tente, la neige s’élevait à 0m,8 du côté r de l’est, et à lm,5 du côté de l’ouest. Notre premier soin fut I de la déblayer. On fit donc dans la neige des coupes verticales dont la plus élevée était tournée vers l’est ; elle ne présentait pas l de coucbes distinctes. Au bout de trois jours, nous remarquâmes ■ sur cette coupe de petites bandes horizontales de glace bleuâtre d’un 1 centimètre d’épaisseur. Ces bandes étaient composées de lames pa- | rallèles très minces. Elles pénétraient horizontalement de deux à cinq centimètres dans la masse et étaient séparées par des inter— J valles où la neige se trouvait dans son état naturel. Ainsi donc la chaleur du soleil , qui faisait monter quelquefois à 8° au-dessus de zéro le thermomètre exposé à ses rayons , avait fondu légèrement la tranche de certaines couches qui s’étaient infiltrées cl’eau, 1 tandis que les autres n’avaient pas été pénétrées. Un autre fait | démontrait cette grande influence du mode d’agrégation des par- ticules. Parmi les blocs de neige détachés des abords de la tente et gisant autour d’elle, quelques uns s’étaient couverts d’un mince séance du 20 JANVIER 1815 vernis de glace sur toute la surface exposée au soleil. La neige du grand plateau , au contraire , ne fondait nulle part ; nous nous en sommes assurés expérimentalement (1). Ces observations prouvent d’abord que les couches d’une même paroi verticale de neige ne s’infiltrent pas d’eau avec une égale fa- cilité, mais qu’il existe des couches de plus facile infiltration , et en second lieu , que cette infiltration se fait très bien dans le sens ho- rizontal. La même chose se passe dans les glaciers sans névé. Cer- taines couches s’infiltrent complètement d’eau ; tout l’air que la neige contenait dans ses interstices se dégage ; de là l’origine des bandes bleues. D’autres s’infiltrent beaucoup moins et restent remplies de nombreuses bulles d’air ; ce sont les bandes blanches. Je ne serais pas éloigné de croire que les couches bleues sont celles qui se sont trouvées près de la surface pendant l’un des étés de la vie du glacier. Elles se sont alors infiltrées à la fois hori- zontalement par les bords du glacier et verticalement par suite de la fusion superficielle. C’est pendant l’infiltration verticale que les bulles d’air se dégagent le plus facilement. Dans les beaux jours d’été, lorsque le glacier est couvert de petites flaques d’eau, on voit une foule de bulles d'air s’élever sans cesse à leur surface en produisant un bruit particulier analogue à la crépitation d’un poumon sain qu’on presse entre les mains (2). A la suite d’une nuit sereine, M. Bravais a vu, le 18 août 1842 , vers 5 heures du matin, le glacier du Faulhorn couvert d’une croûte de glace compacte et d’un vert bleuâtre , qui réfléchissait très bien les teintes du crépuscule. Les veines réticulées que j’ai observées au-dessous des petites stries superficielles de la surface du glacier me paraissent être un nouvel argument en faveur de la théorie de l’infiltration. Il était évident, en les examinant, que l’eau avait pénétré de haut en bas à travers les interstices de la neige , et produit le réseau irré- gulier dont nous avons parlé. Les faits que nous avons observés sur le glacier du Faulhorn ne sont pas favorables à l’hypothèse de M. Forbes sur la formation ( i ) À deux décimètres de profoudeur , la température du névé était , en moyenne , de — jo°, o. Pendant les nuits sereines, elle descendait tou- jours à — 1 8° ou — 2o°, et nous nous sommes assurés que , pendant nos quatre jours de séjour au grand plateau , l’ablation superficielle avait été complètement nulle. (a) Voyez Annales des sciences géologiques, octobre 1842 , p. 843, et Desor, Excursions, etc., p. 3io. SEANCE DU 20 JANVIER 1845. 247 des bandes bleues. La progression d’un glacier étant plus rapide au centre que sur les bords , ce physicien suppose que la glace est une substance plastique, semi-fluide, qui coule comme un liquide visqueux dont la marche serait retardée par son adhérence aux parois du canal qui le contient (1). Sur cette hypothèse, M. Forbes I en élève une deuxième : c’est que la différence de mouvement du milieu et des bords du glacier donne lieu à des surfaces de séparation, à des vides qui s’infiltrent d’eau (2). Cette eau , selon lui , gèlerait pendant l’hiver et formerait les bandes bleues. Au- cune de ces suppositions n’est applicable au glacier du Faulhorn. La progression de ce glacier est tellement lente , même dans sa partie centrale, qu’elle est inappréciable dans l’espace de huit jours. I II ne saurait donc y avoir une différence sensible entre la vitesse ! de ses bords et celle de son centre. Cependant il contient dans sa || masse des bandes bleues de 4 à 5 cenlim. de largeur, qui, suivant I M. Forbes, seraient des surfaces de séparation de parties qui se | meuvent avec une vitesse inégale. M. Forbes considère en outre ! comme une conséquence nécessaire de sa théorie que les bandes j bleues doivent devenir horizontales à mesure qu’elles s’appro- chent de l’extrémité inférieure du glacier (3). Sur le nôtre , c’est le contiaire, car c’est près de l’escarpement qu’elles ont l’incli- naison la plus forte. En terminant ces remarques , je crois nécessaire de répéter en- core que je ne prétends pas établir une similitude parfaite entre les glaciers sans névé des basses montagnes et les grands glaciers des hautes Alpes. Néanmoins, dans les uns et les autres , l’affleu- rement des couches sur l’escarpement terminal forme des lignes horizontales , la surface supérieure présente des courbes noires paraboliques, et l’intérieur de la masse offre des bandes bleues. Il 1 est par conséquent probable que cette structure doit avoir une I explication commune aux deux genres de glaciers , sauf les modi- fications qui doivent résulter de leur grandeur, de leur inclinaison et de leur progression relatives. Résume général. 1° De 1841 à 1844, le glacier du Faulhorn s’est accru dans le (1) Travels through the Alps , p. 568. (2) Ibid., p.577. (3) Théorie de la structure veinée de la glace, Bibliothèque universelle , juin 1844. 248 SÉANCE DU 20 JANVIER 18 \ 5. rapport de 1 à 8 par l'addition de nouvelles couches de neige qui se sont infiltrées d’eau, puis congelées ensuite. 2° L’ablation diurne moyenne, pendant l’été , a été de 41mm,0 avec une température moyenne de 4°, 10. C. L’ablation moyenne pour 1° est de 10mm,2. 3° La méthode employée pour mesurer l’ablation du glacier permet de tenir compte des effets dus au tassement et à l’affaisse- ment de la masse. 4° Les couches noires paraboliques de la surface présentent leur convexité tournée vers le haut du glacier, contrairement à ce qu’on observe sur les mers de glace. 5° Ces couches sont les affleurements des écailles de glace com- pacte qui forment le squelette du glacier. 6° La forme parabolique est due au mode de fusion de ces écailles, et ne saurait être attribuée à la marche plus rapide du centre comparée à celle îles bords. 7° Le glacier du Faulhorn est composé de couches stratifiées dont l’inclinaison augmente à mesure qu’on se rapproche de l’es- carpement. 8° Les grandes bandes bleues correspondent à ces couches, qui se sont infiltrées d’eau plus complètement que les autres. 9° Elles ne sauraient être dues à la progression inégale des diffé- rentes parties du glacier, puisque cette progression est insensible. 10° Outre les bandes bleues, il y avait aussi des veines bleues anastomosées entre elles, et formant un treillis assez compliqué. 11° La plupart de ces observations doivent être applicables aux grands glaciers, avec les modifications résultant de leur origine, de leur progression , de leur longueur, etc. , etc. M. de Beaumont demande si M. Forbes n’a pas mesuré l’a- blation des glaciers de la même manière que MM. Escher de la Linth et Agassiz, en enfonçant un pieu à une certaine profondeur, et en examinant l’abaissement de la surface su- périeure par rapport à une marque quelconque faite sur le pieu j il pense que renfoncement du bâton, par suite de la fusion de la glace au fond du trou, doit être fort peu de chose. M. Martins dit que ce procédé ne donne qu’une approxi- mation assez grossière parce que le trou se creuse. Le creu- sement a lieu quelquefois avec assez de vitesse pour que le résultat de la vérification accuse une accrétion de la surface - '■> <’/■/<' . Tome / /, PL VI, Pa/fc j + I . Carte d’une partie de la vallée de* la Moselle entre Mæcoiu*bauip*s et Ilupl No/c #///* le# trace# d'aocte. a# y la a (la/i# le# fo/jye# , pa/‘ JVr.TTogard . ( ou/te .mn/anf la //allée c/ #uivan t la direc/iou de# Strie# L àesA J/arelle ^ÆTiii Î8ÏS.ÎI!- 1 ’ ’ ‘ ' ' 1 1 ■1 . DirfKwition , Pro/bàdmr# et Dive/mli/mité dar Strie.. I) 7 . Bloc# du J fard de Pour cite "G.- ////,..; SÉANCE DU 20 J AN VI CR 1815. 240 du glacier, au lieu de l’ablation qui a lieu, il ajoute que M. Forbes a renoncé à l’emploi de ce moyen ; il s’est servi d’un procédé analogue au sien, mais sans indiquer s’il avait tenu compte de la translation du glacier, laquelle, se faisant sur un sol incliné, peut donner lieu à une erreur assez forte sur la quantité de l’ablation; la pente moyenne de la surface du glacier observé par M. Forbes était de 4° 4-3’. On lit un travail de M. Hogard intitulé : Note sur les traces d'anciens glaciers clans les Vosges. Dans mes notes de 1840 et de 1842, sur les traces de glaciers qui, à une époque reculée , ont recouvert la chaîne des Vosges , j’ai négligé de citer les localités où l’on pouvait retrouver les ro- chers à surfaces polies et striées que l’on doit considérer comme les preuves les plus évidentes de l’action des glaciers. Les détails dans lesquels je suis entré sur les formes et sur les dispositions des moraines et des blocs erratiques, et ceux que MM. Le Blanc et Renoir avaient donnés de leur côté sur ces dé- pôts, me paraissaient suffisants pour lever tous les doutes et pour démontrer que si jusqu’alors on avait pu confondre en un seul groupe tous les amas de sables , de galets et de blocs répandus dans nos vallées, sur les flancs et les sommités mêmes de quelques montagnes, il était t^mps enfin de séparer les nappes d’alluvion et de comblement des dépôts de mêmes matières rejetées sur les limites des glaciers; mais les objections que plusieurs géologues m’ont adressées m’imposent en quelque sorte l’obligation de re- venir sur cette question , en citant de nouveaux faits à l’appui de mon opinion , fondée sur des observations répétées avec soin et sans idées théoriques arrêtées à l’avance , et en produisant de nouvelles preuves que je m’empresse de consigner dans cette note. Dans les Vosges comme dans le voisinage des glaciers actuels on voit des sillons, des stries gravées sur les rochers les plus durs , des surfaces mamelonnées et encore parfaitement polies (1). M. Renoir en a cité plusieurs exemples (2) : ainsi il en a rencontré près de Wesserling, sur la rive droite de la Thur, à des hauteurs plus ou moins grandes, tandis que sur le versant S. -O. les sur- faces des rochers, étant plus exposées aux actions de l’atmosphère, (î) H. Ilogard, Observations sur les traces de glaciers, etc. iS4o. p. 17. (2) Bulletin de la Société géologique de France, I. XI . p. 250 SÉANCE DU 20 JANVIER 1845. sont entièrement décomposées, recouvertes de débris, et déjà arri- vées aux talus d’éboulement sur un grand nombre de points. Au- dessus du village d’Üibey, près de la route, ces surfaces polies ont peu d’étendue , elles sont moins bien conservées que celles de Wesserling; mais plus haut, près de l’un des tournants de la route, il a retrouvé ces surfaces mieux conservées, avec leurs stries bien visibles à plus de 5(30 mètres au-dessus de Wesserling, et enfin sur le versant méridional du ballon de Giromagny. Dans les vallées delà Moselle , de la Moselotte et de Cleurie , on rencontre à chaque pas des rochers à surfaces mamelonnées , dont le poli est quelquefois encore assez net, mais dont quelques unes commencent à se décomposer, et sur lesquelles on rencontre assez fréquemment des stries, des cannelures, et, dans tous les cas , lors même que la décomposition a fait disparaître ces der- nières en partie , des traces évidentes d’un frottement qui n’a pu être exercé que par un agent poussé constamment dans le même sens et suivant une direction invariable. Il serait superflu de donner la description des divers rochers présentant les traces de l’action de matières dures , mises en mou- vement par un agent qui*a disparu, et dont les forces érosives ont dû avoir une très grande puissance pour abattre et arrondir les aspérités des roches très dures, leur donner souvent une courbure allongée dans le sens des stries, les polir, et graver enfin sur ces surfaces polies de profondes ornières , témoignant à la fois de l’énergie de l’action et indiquant la nature de l’agent qui seul a pu l’exercer. Les rochers , ainsi façonnés , existent tantôt sur les flancs des montagnes à de grandes hauteurs au-dessus du fond des vallées , tantôt se relevant en massifs isolés dans les fonds mêmes de ces dépressions , tantôt formant enfin les barrages des bassins successifs qu’elles présentaient autrefois. Nous nous contenterons de citer un seul exemple, pris à un point facilement accessible , près d’une grande route, sur le bord même de la Mo- selle , et dans une position telle qu’on n’aurait pas hésité, il y a quelques années , d’attribuer à l’action seule des eaux les disposi- tions dont nous allons rendre compte. A l’amont du tissage des Meix , commune de Rupt, à moitié chemin à peu près de Remiremont à Saint-Maurice , près de la route royale n° 66 de Bar-le-Duc à Bâle, s’élève un petit massif de rochers granitiques au fond même de la vallée et au pied du- quel la Moselle vient décrire un double coude pour tourner l’ob- stacle qu’il oppose à son passage. Toutes les surfaces inclinées vers l’amont sont polies, tà l’excep- 251 SÉANCE DU 20 JANVIER 1846, lion de celles du cône supérieur, dont les flancs démantelés ont éprouvé quelques déchirements, soit par suite de la chute de quelques fragments décomposés, soit par suite de travaux exé- cutés de main d’homme, à diverses époques. Sur ces surfaces polies on remarque des stries tracées en ligne droite , s’élevant ou s’abaissant sur les pentes du rocher, malgré les nombreuses inflexions du plan sur lequel elles sont projetées, conservant leur parallélisme, et suivant, sans éprouver de dévia tion , la direction de la vallée N. 51°. 30'. O. Cependant , sur un point , elles courent au N. 50° 20' O., ce qui établirait une dif- férence bien légère et insignifiante de 1°. 10'. , eu égard à la distance parcourue entre les directions des stries de l’une des surfaces et de celles des autres parties du rocher sur lesquelles ces directions ont été relevées (pl. VI, fig. 1). On voit, en examinant les coupes n° 2 et n° 3 , que ce massif formait dans le fond même de la vallée un obstacle qui a du arrêter ou retarder la marche, soit d’un courant, soit d’un glacier; que du sommet au niveau du cours d’eau, son flanc gauche est incliné vers le Thalweg, et qu’à l’amont, contre le courant de la rivière, il présente un escarpement bien prononcé , tandis qu’il s’abaisse graduellement vers l’aval suivant une inclinaison beau- coup plus faible, et que dans son ensemble il affecte une courbure tracée à l’amont avec un rayon très petit , comparativement à ceux du surplus delà surface du côté d’aval. C’est sur le côté gauche et sur les parties planes et inclinées qu’on remarque plus particulièrement les surfaces polies et striées qu’un corps dur quelconque n’aurait pu creuser suivant des lignes droites parallèles, sans dévier sur ces plans inclinés transversale- ment, s’il n’eût été fortement engagé et maintenu dans la direction verticale par un corps solide qui le faisait avancer en marchant avec lui , et ce n’est pas dans l’eau et avec le concours de l’eau à l’état liquide , que des galets de substances minérales dures au- raient pu , même par leur passage longtemps prolongé sur ce ro- cher, produire ces traces de frottement et d’érosion bien conser- vées, et qu’on ne voit se produire que sur les masses minérales soumises à l’action des glaciers actuels. Des galets, en roulant sur un rocher à surfaces inclinées et sub- mergées, usent ses aspérités, entament ses parties les plus tendres, y creusent même, suivant les fissures qui le divisent , des sillons irréguliers communiquant les uns avec les autres, se réunissant et s’entre- croisant ; enfin, par un mouvement de rotation longtemps prolongé, ils y creuseraient de ces cavités, des bassins cylindriques 262 SÉANCE DU ?0 JANVIER 1845. ou coniques dont nous avons tant d’exemples dans les Vosges, et dont l’étude est d’autant plus facile que nos rivières torrentueuses laissent leurs lits presque entièrement à sec pendant une partie de l’année. Mais toutes les formes modifiées ou produites par cette action des eaux se reproduisent dans toutes les localités avec les mêmes caractères. On n’y voit rien de heurté , de régulier, de tranché. Ces contours mollement arrondis, ces ondulations, ces protubérances irrégulièrement groupées , ces cavités à rebords émoussés et sinueuses indiquent un frottement favorisé par un agent qui peut acquérir dans certains cas une certaine puissance, une force d’érosion très grande , et opérer avec une grande éner- gie, mais dont l’excessive mobilité permet aux débris, lancés contre les rochers, en glissant à leurs surfaces, de tourner sans cesse sur eux-mêmes, de s’écarter latéralement dans tous les sens, et de tomber dans toutes les dépressions ou les cavités qu’ils ren- contrent. Les eaux de la Moselle ne pourraient recouvrir le rocher dont il est question que dans le cas d’une crue extraordinaire, et dont on n’a jamais eu d’exemples, puisqu’il faudrait qu’elles s’élevassent de 10 mètres au-dessus de leur niveau habituel pour atteindre le point ci , et de 18 mètres pour couvrir le sommet (fig. 2). Mais si elles parvenaient à ces hauteurs, que dans aucun temps sans doute elles n’ont atteint, il est bien certain qu’elles se comporteraient comme elles le font aujourd’hui , c’est-à-dire qu’elles viendraient avec force se jeter contre la tête du rocher, puis le contourne- raient ; enfin si un galet mis en mouvement parvenait au pied du rocher, soit en a , soit en b (fig. 2), il serait évidemment en- traîné suivant la pente du terrain sur les bords du rocher; mais dans aucun cas il ne marcherait , en montant et en descendant successivement suivant les irrégularités de la roche et en ligne droite , comme ont marché cependant les blocs et les galets angu- leux et non émoussés qui ont creusé les sillons et les stries dont nous nous occupons. A l’amont , près de l'aqueduc conduisant les eaux dans le ca- nal de l’usine {fig. î), le rocher présente un escarpement de 30° 28’, soit une rampe de 58 p. 0/0 et une surface polie et recouverte de stries profondes moyennement de 10 centimètres au pied même du talus , et dont la largeur et la profondeur diminuent graduel- lement en montant (fig. 4 « et fig. 5). Ces stries sont d’autant plus profondes que les pentes opposées à l’agent qui les a produites sont plus fortes. Elles sont moins fortes en b qu’en a {fig. 4), en c qu’en b : en b elles sont à peine visibles; en b ’ et en c elles sont SÉANCE DU 20 JANVIER 1815. 25$ de nouveau aussi profondes qu’en b et en c : elles disparaissent au point o. Elles sont un peu plus profondes en cn qu’en c\ et en d elles sont légèrement marquées , moins larges, plus serrées et plus déliées. Ainsi elles sont à peine marquées sur les surfaces inclinées dans le sens de la vallée , et elles disparaissent entièrement dans tous les plis , dans les anfractuosités découpant naturellement la ro- che transversalement, pour reparaître ensuite quand les surfaces remontent de nouveau. Au point n [fig. 2 et 4 ) , elles ont la forme d’entailles coniques (fig. 5) qui auraient été creusées par un instrument d’abord for- tement engagé dans la roche ou pressé contre elle , au point où la résistance était le plus considérable, et qui ensuite aurait en- levé une couche moins épaisse, à mesure que cette résistance et l’effet exercé pour la vaincre diminuaient et que le glissement du corps frottant et corrodant devenait plus facile et moins lent. De l’extrémité de ces premières entailles partent toujours, sui- vant la même direction , d’autres stries produites par l’action de corps de diverses formes, semi-circulaires ou prismatiques, et sou- vent à arêtes supérieures très vives. Aïais ces formes bien accu- sées , ces découpures en lignes droites parallèles entre elles avec leurs arêtes bien dessinées , ne rappellent en aucune façon ces ondulations, ces sillons arrondis et irréguliers de rochers exposés à l’action érosive des eaux , qui n’a rien de la fixité de celle d’une masse de glace avançant graduellement , toujours dans un même sens et avec cette immuable persistance d’un corps so- lide obéissant à des lois invariables, et marchant entre des mas- ses qui s’opposent à toute déviation et le resserrent dans une voie dont il suit forcément la direction. Nous avons dit que les stries étaient interrompues dans toutes les anfractuosités transversales (fig- 4); nous devons ajouter que, dans ces plis , le rocher a conservé toutes ses aspérités : n’est-ce pas une preuve évidente de l’action , sur le rocher, d’une masse de glace qui a franchi , sans y pénétrer, ces cavités dans lesquelles l’eau, à l’état liquide , aurait agi sans difficultés , qu’elle aurait creusées , élargies , arrondies? n’est-ce pas enfin un fait qu’on n’observe que sur les bords des glaciers , et dont on cher- cherait vainement des exemples dans les lits des ruisseaux et des torrents? Immédiatement au-dessus de ce rocher on ne rencontre plus de traces de moraines; celle qui probablement fermait la vallée, entre le tissage des Meix et Maxonchamp, a été entièrement dé 25 i SÉANCE DU 20 JANVIER. î 8 1 5. truite , et les matériaux dont elle se composait ont été entraînés dans ces bassins inférieurs où nous retrouvons ces nappes de com- blement qui se succèdent depuis Remiremont jusqu’à la sortie des Yosges. Blais à l’amont , sur la rive droite , nous avons cité les morai- nes de Rupt, dans un vallon qui descend de Longegoute ; à l’a- val , sur la rive gauche , la moraine terminale du lac de Fon- dromé et les blocs erratiques disséminés sur les flancs des mon- tagnes voisines; enfin, sur la même rive, entre la filature de Lette et le col du Blont-de-Fourches , sur les flancs très inclinés de la montagne, au col même et sur les crêtes de cette partie de la petite chaîne , nous avons retrouvé une assez grande quantité de blocs à arêtes émoussées et arrondies : du col au pont de Lette les débris d’une moraine latérale renferment beaucoup de blocs. Ges blocs , si on les rencontrait dans le fond de la vallée, dans les lits de la Bioselle et de ses affluents , on ne manquerait pas de les considérer comme des blocs transportés et arrondis par un frottement prolongé dans le sein des eaux ; mais aux points où ils se trouvent placés on ne saurait admettre qu’ils aient pu être entraînés par un courant , attendu qu’ils se trouvent placés à plus de 200 mètres au-dessus du niveau de la Moselle , et que, s’ils avaient été mis en mouvement par les eaux , ils seraient naturellement tombés au fond même de la vallée. Cependant , en parcourant la distance entre le lieu où ils ont été déposés et le point d’où ils sont partis, leur translation ne s’est pas opérée sans qu’ils fussent soumis à un frottement qui, pour quelques uns de ces blocs , a dû être assez fort, à en juger d’après leur poli et leurs formes arrondies. Mais en les exami- nant attentivement, on reconnaît bien vite qu’ils ont dû marcher sans s’écarter de la direction initiale qui leur avait été imprimée, qu’ils ont avancé sans tourner sur eux-mêmes et sans éprouver ce roulement continuel que les galets et les blocs subissent dans les lits des torrents. En effet , les surfaces sur lesquelles ils repo- saient tout en cheminant , sont généralement planes, et, de plus , elles sont souvent striées (zr, 5, fig. 6). Ces formes , ces stries, au- tant que leurs positions sur des plans très inclinés, hors des li- mites que jamais les eaux courantes aient pu atteindre, ne laissent pas de doute sur les causes auxquelles on doit attribuer leur transport, aussi bien que la formation des stries, des sillons et des surfaces polies dont nous avons parlé. Des glaciers seuls ont pu autrefois , comme ils le font encore SE \ N CE DU 50 JANVIER 1815. sous nos yeux , imprimer au soi qu’ils recouvraient , les marques de la puissance de leur action , et celles-ci n’en sont pas moins évi dentes et caractéristiques, quoique , pendant trop longtemps , on ait négligé d en tenir compte , ou que leur existence ait été mé- connue ; mais aujourd’hui, et quelles que soient les modifica- tions à introduire dans certaines théories élevées sur des observa- tions faites pendant les ténèbres, il faut bien enfin que la vérité soit connue et enseignée. On a même prétendu que nos moraines pour- raient bien n’être que des débris isolés de nappes d’alluvion ou de comblement , et que leurs formes si caractéristiques pourraient bien n’être que les résultats d’accidents locaux , aussi bien que les surfaces polies du rocher et les stries qui y sont gravées. Mais après tout , il faudra bien convenir que ces accidents se sont reproduits dans des contrées éloignées avec les mêmes cir- constances, ce qui indique qu’ils ont été déterminés par des cau- ses , des lois communes et invariables. Enfin , on le sentira , ce n’est pas assez d’opposer des dénégations aux observations pré- sentées par les naturalistes qui ont fait des observations sur divers points éloignés des glaciers actuels , et dans des chaînes de mon- tagnes dont les sommités sont de beaucoup au-dessous de la limite des neiges perpétuelles ; il faudra, par des explications baséessur des calculs solides, leur démontrer la fausseté de leur théorie et leur expliquer comment ont pu se produire ces phénomènes , bien simples quand on les étudie en abandonnant toute idée systéma- tique arrêtée à l’avance , mais qui seraient des plus extraordi- naires, si l’on parvenait à établir que l’eau, à l’état liquide , a pu produire les traces que nous attribuons à d’anciens glaciers. M. Paillette, sans vouloir contredire les conclusions de M. Hogard , pense que des effets plus ou moins analogues pourraient être dus à d’autres causes. Il dit que la vallée de la Têta, dans les Pyrénées-Orientales, dont il a déjà parlé (Bull., t. XIII, p. 231, 1 842), a été cette année même inondée par une trombe d’eau descendue du Canigou. La gorge des Graous-d’Olette , qui a 25 mètres de largeur sur au moins 60 mètres de profondeur, ne suffisant pas momentanément à l’écoulement de l'eau, il s’est produit de véritables cascades sur plusieurs points. Le courant avait une telle force que des ponts ont été arasés d’un seul coup et des voussoirs trans- portés tout entiers à 100 mètres de distance, ainsi que des blocs de granité de 5 à ô mètres cubes. Il existe même une 256 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 18 15. chronique d’après laquelle le couvent de Saint-Martin-de- l’Exalada, élevé de 60 mètres environ au-dessus de la Têla, aurait été détruit par les eaux; mais peut-être qu’à cette époque la gorge était moins profonde. M. Paillette ajoute que la Moselle même, d’après les rap- ports des ingénieurs, présente quelquefois des crues très brusques et dénivelées. Séance du 3 février 1845. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEUIL , VICE-PRESIDENT. M. Martins, vice-secrétaire, donne lecture du procès- verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. M. le Président annonce trois présentations. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. Teissier Rolland (Jules) : De Nîmes et de ses eaux , in-8° , IIIe partie , p. 43 l à 812 , et XL p., 1 pl. Nîmes , 1844. De la part de M. Simms (F.-W.) : Practical Tunnelling (Traité pratique delà construction des tunnels), in-4°, 1 74 p. ; 12 pl. et fig. intercalées dans le texte. Londres, 1 844. De la part de M. Carlo Porro : Malacologia , etc, (Mala- cologie terrestre et fluviatile delà province de Corne); in-8°, 1 40 p. , 2 pl. Milan , 1838. De la part de M. Pilla (Léopold j : Sopra la produzione -, etc, (Sur la production des flammes dans les volcans et sur les conséquences qu’on peut en tirer); in-4° , 28 p., 2 pl. Lucques , 1844. Comptes-rendus des séances de P Académie des sciences ; 1 8 15. Ier semestre , nos 3 et 4. Bulletin de la Société industrielle d’Angers 15e année, n° 6 , 1844. Bulletin de la Société de géographie ; 3e série, t. Il; n° 12. Décembre 1844. 257 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1845. L’Écho du Monde savant ; 1 845 , nos 3 à 6. L’Institut ; 1845 , n° 579. Boletin qficial de Minas de Espana (Bulletin officiel des mines d’Espagne ) ; n°s 1 à 14 ; du Ie' mai au 15 novembre. Madrid, 1844. Transactions , etc. (Transactions de la Société royale d’Edimbourg); t. XY , 1844. Proceedings 3 etc . (Procès-verbaux de la Société royale d’Edimbourg ) ; 1844 , nos 23 et 24. The Athenœum ; nos 900 et 901. The Mining Journal ; n° 492. Ap rès quelques observations de MM. Rozet et G. Prévost, la Société adopte une décision du Conseil portant: 1° qu’il sera adressé des remerciements à M. Graugnard pour les services qu’il lui a rendus lorsqu’il remplissait les fonctions d’agent; et 2° qu’une somme de 300 francs sera appliquée à l’acquittement de sa cotisation une fois payée, dans le cas où il désirerait faire partie de la Société. Le trésorier présente le budget des recettes et des dé- penses proposé par le Conseil pour l’année 1845. La Société l’adopte après quelques observations de M. Rozet. Soc . Cccn.Toine II, a' série. 258 “SÉANCE DU B FEVRIER 1 815. Budget présenté par M. Auguste Yiquesnel, trésorier , poicr les Recettes et Dépenses à faire pendant V année 1845. RECETTE. DÉSIGNATION (A 2 O HÎ SOMMES SOMMES des il NATURE DES RECETTES. prévues au budget admises chapitres de lu recette. a delS44. pour 1845. §1. Produits ordinaires ! des réceptions. . . i 9,500 » 10,000 n 2 Cotisations. . < arriérées 1,200 » 1,000 » 3 ( de l’annèes 1846 . . . 300 » 500 b § 2. Produits extraord 4 I | Droits d’entrée 500 » 500 » des réceptions.. . | 1 5 | | Cotisations une fois payées. ..... 1 800 » 2,400 » ; 6 ! 1 Bulletins et abonnements. . 200 » 400 « § 3. Publications. • • • < 1 7 . Vente de j Mémoires . 1,000 » 400 » 1 8 ( cartes coloriées » » 30 » ; 9 . . , l rentes sur l’Etat. . . . 1,068 » 1,259 * § 4. Renti ées diverses. . ( 10 11 rrerages es J j>ons sur ie u-ésor. . . Recettes imprévues 30 » 100 » 80 » 100 » ! 12 1 Remboursement de frais de mandats. . p » 25 » 1 i ! 1 15,648 » 16,694 » § 5. Solde des comptes de 1844 13 1 Reliquat en caisse au 31 décembre 1844 758 25 1 1 17,452 25 DÉPENSE. DÉSIGNATION S 3 SOMMES SOMMES des BS - *5 « NATURE DES DEPENSES. pi è vues au budget admises chapitres de la dépense, S CA de 1844. pour 18451 1 i son traitement. ..... 1,800 » 300 » » » 1.800 * 300 » 300 » § 1. Personnel. . < 2 ) 3 Agent.. . \ travaux auxiliaires. . . . V gratifications. . . . ... 1 Garçon de bureau , ses gages 800 » 800 » g 2. Frais de logement. ! 1 6 i 6 Loyer, contributions, assurance. . . . ChafiiiTage et éclairage.. . 1,150 . 400 » 250 » 1,100 » 400 » 200 b 450 » f 7 Dépenses diverses, . g 3. Frais de bureau. . < 8 Ports de lettres. . 350 » 1 9 Impression» , lithographies diverses , avis, etc 150 » 200 b g 4. Encaissement. . . 1 I 10 Change et retour de mandats. ..... 300 » 300 » | 11 Mobilier 100 » 100 » g 5. Matériel . . . . . < 12 Bibliothèque, 300 b 400 » 1 [ 13 Collections. ... . 100 » 100 » r 14 1 imprejssion, papier, plan- Bullelin. • < ches , etc. 5 000 » 900 » 1,900 » 5,500 » 1,200 » 15 c f port g 6. Publications. . . .4 16 / achats des exemplaires. . 17 ... • \ dépenses supplémentaires 1,400 b emoues. < et indemnités. .... 1) » g 7. Placement de ca- , 18 19 ' 1 ( menus frais. . . . . . . ” 1 800 » 50 b 2,400 b pitaux i 20 Achats de Bons sur le Trésor (placement temporaire pour contribuer aux dé- § 8. Dépenses impré- penses d’un ouvrage intitulé : Résumé des progrès de la géologie) 1,000 b 200 . vue». . , , . • . 21 Av ances remboursées. • 100 » 100 . 16,700 .» 17,300 b 259 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1845. Compte des recettes et dépenses exécutées pendant Vannée 1844 pour la Société Géologique de France , présenté par M. Auguste Viquesnel, trésorier. RECETTE. 'SIGNAT ION des res de la recette. O NATURE DES RECETTES. RECETTES prévues au budget. RECETTES effectuées. Augmentation. Diminution. J j ... 1 1 . 1 f de l’année courante. . 9 500 8,926 25 573 75 roduils ordinaires l 2 | Cotisations < arriérées. ....... 1,200 » 985 1» „ 215 w des réceptions. . ' 3 ) ( de l’année 1843* . . . 30!) B 1,137 90 837 90 D » roduils exlraord. ( 4 1 Droits d’entrée 500 B 1,260 760 B ( des récepiions. . i 5 | Cotisations une fois payées. ...... 1,800 B 4,800 » 3,000 9 U B 6 1 l de Bulletins et abonnements 200 B 712 B 512 „ B * 1 I ublications. . . . • 1 7 > Vente < de Mémoires 1,000 B 957 50 • 42 50 8 » (de cartes coloriées. . . . . » B 77 9 77 B B B I 9 Arrérages des Rentes sur l’Etat. . . . 1,068 o 1,147 9 79 » B . 10 Arrérages d'un Bon du Trésor. . . . 30 B 30 B B 11 1 entrées diverses. . • 11 Recettes imprévues 100 B 76 80 0 23 20 ' 12 Remboursement de frais de mandats. ” * 22 50 22 50 8 » 1 ! îlde du compte Total de la recette effectuée. 15,698 ; 20,131 95 5,288 40 854 45 précédent 13 Reliquat en caise au 31 décemb. 1843. 1,079 20 1,079 20 11 " » Total de la recette et du reliquat en caisse. 16,777 20 21,211 15 COMPARAISON. La Recette effectuée s’élève à 21,211 i5 La Recette présumée était de 16,777 20 L’excédant de la Recette réelle monte à 4»433 95 2*60 SEANCE DU 3 FÉVRIER 1845, DÉPENSE. DÉPENSES prévues au budget. DÉPENSES effectuées. | Augmentation 1 1,800 1,800 ' 1 1 » 300 B 300 B , ' B 800 N 800 1) B n 1,150 B 1,061 50 a B 400 a 365 30 * a 250 » 188 40 » a 350 B 427 75 77 75 150 B 192 25 42 25 300 B 377 40 77 40 100 B 71 90 a s 300 B 321 65 21 65 100 » 16 50 » » 5,000 B 4,371 60 , 900 » 1,021 15 121 15 1,900 » 2,357 50 457 50 • 20 „ 20 , » 4 40 4 40 1,800 • 4,678 B 2,878 ■ 1,000 t, 2,000 B 1,000 B 100 B 77 60 B » 16,700 B 20,452 90 4,700 10 DÉSIGNATION de* chapitres de la dépense. s 1 § 1. Personnel. . . . . < 2 ( 3 § 2. Frais de logement, j ■g A Frais de bureau. . j | 4. Encaissements. . . j 9 ( 10 §5. Matériel. ..... | Il 12 nature des dépenses. Agent § 6. Publications. §7. Placement de capi- ( 18 taux ....... §8, Dépenses impréi 20 son traitement travaux auxiliaires Garçon de bureau ; ses gages. . . . . Loyer, contributions et assurances.. Chauffage et éclairage. . . ..... Dépenses diverses Ports de lettres. . Impressions, lithographies, avis, etc. Change et retour de mandats .... JVJobiiier. Bibliothèque. . . Collections. impression, planches, pû Bulletin ^ pier, etc.. port achat d’exemplaires. . . dépenses supplémentaires et indemnités, menus frais.,. . réntes sur I État ( place- ment de cotisations uni ques) ......... Bon du Trésor (placement temporaire pour con tribuer aux dépenses d’un ouvrage intitulé Résumé dé la géologie) Avances qui sont ou qui seront rem- boursées . "1 / Mémoires Achats de < 88 (I 34 I 6lo 28 0 83 0 22 i<) 94' -0 COMPARAISON. La Dépense effectuée s’élève à 20,452 90 La Dépense présumée était de.. . „ 16,700 » L’excédant de la Dépense réelle monte à. 3,752 90 RÉSULTAT GÉNÉRAL ET SITUATION AU 31 DÉCEMBRE 1844. La Recette totale 4tant de 21,211 i5 Et la Dépense totale de 20,452 90 11 reste en caisse audit jour. 758 25 € i Diminution. SEANCE DU 3 FÉVRIER 1815. 261- K0UV-EMENT DES COTISATIONS UNE FOIS PAYEES ET DES PLACE- MENTS DE CAPITAUX. Antérieurement à 1 8 4 4 • • • Pendant l’année 1 844 Totaux Legs Roberton Total des capitaux encaissés. PLACEMENTS EN ACHATS 1)E RENTES 5 o/o. 1,068 fr. de renies. — Antérieure- ment à i844 191 de rentes. — Pendant l’an- née 1844 NOMBRE DES COTISATIONS. 4o 16 56 VALEURS. fr. c. 2,000 » 4,800 16,800 )> 12,600 )) 29,4oO » fr. c. 24,754 5o 4,678 » 29,432 5o 32 5o 1,259 fr. de rentes. — Excédant de la dépense sur la recette 262 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1845. MOUVEMENT DES ENTREES ET DES SORTIES DES MEMBRES d'après la statistique administrative de la Société géologique de France ( v . t. Ier, 2e série). Les membres qui ont contribué aux dépenses de l’année i843 s’élevaient au nombre de 4o 7 • D’après les listes officielles, ils s’élevaient au nombre de 4*4 Les réceptions de septembre i843 à septembre 1844 ont été de. . . 4 n A quoi il faut ajouter les membres rentrants qui ont \ 44 acquitté l’arriéré. 3 ) Ensemble 438 A déduire : les décès . démissions et radiations.. 24 Total des membres qui contribuent aux dépenses de 1 844- 434 Ainsi l’accroissement du nombre des membres en 1 844 est de 19. De septembre dernier au 5i décembre 1 844 les réceptions montent à 43 1 Les démissions montent à 3 j Total des membres maintenus sur les listes au 3i décembre i844 476 Ainsi l'accroissement du nombre des membres, de septembre 1 843 au 3i décembre i844> est de 61. M. Clément Mollet lit le rapport suivant : Rapport sur la gestion du trésorier de la Société géologique de' France pendant Vannée 1844. Messieurs-,. Une commission composée de MM. Walferdin , Delafosse et moi , a été chargée d’examiner la gestion de votre tréso- rier pendant l’année 1844; je vais avoir l’honneur de vous présenter le résultat de notre travail. RECETTE. La recette s’est élevée à la somme de 21,211 î 5 Elle avait été évaluée dans le budget à la somme de 16,777 20 Excédant 4,433 95 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1 8 4 5 . 263 Voici de quels éléments se compose cét excédant. Les cotisations payées sur l’année 1845, prévues pour 300 f'r. , e sont élevées à 1,137 f r. 90 c. Augmentation 837 fr. 90 c. provenant de la grande quantité de membres qui se sont fait recevoir en Savoie et en Italie. Les cotisa- tions de l’année courante et celles arriérées présentent une diminution apparente de 788 fr. 75 c. Gette différence vient principalement du grand nombre de membres qui ont ra- cheté leur cotisation annuelle et du rapport d’une partie des sommes reçues à l’article des cotisations une fois payées. Le droit d’entrée a dépassé la prévision de 760 fr., et les cotisations une fois payées se sont élevées à 4 ,800 fr., chiffre qui excède de 3,000 fr. celui du budget , parce que seize membres sont devenus membres à vie; jusqu’ici on n’avait pas vu cette quantité. La vente du Bulletin et les abonnements au Bulletin ont encore reçu un accroissement de 512 fr., augmentation qui se rattache à la cause déjà signalée de la multiplicité des nouvelles admissions. Les arrérages de rentes sur l’Etat se sont élevés de 1,068 fr. à 1 ,147 fr. par suite du placement des capitaux en rentes sur l’Etat. Enfin, nous voyons figurer en recette une somme de 22 fr. 50 c. pour remboursement de frais de mandats : c’est une innovation résultant de la délibération du conseil par suite de laquelle on réclame aux membres retardataires Je prix des mandats retournés faute de paiement. DÉPENSE. On ne voit aucune différence dans les trois premiers ar- ticles; on observe aux articles 4 , 5 , 6 , un ensemble de di- minution de 184 fr. 80 c. Tous les articles qui ont pour but les rapports de la Société avec ses divers membres ont du nécessairement grossir par suite de raecroissement numérique des membres. Ainsi, le chiffre des ports de lettres, des impressions , lithogra- phies et avis, change et retour de mandats, donnent une augmentation de 197 fr. 40 c. La multiplicité des votes. 264 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1845, arrivés de la France et de l’étranger, pour l’élection du pré- sident , est encore un motif qui a fait élever la dépense pour ports de lettres. Le change et retour de mandats a , l’an dernier, éprouvé de l’amélioration sur les années précédentes; cette amélio- ration sera même encore sentie si on compare l’exercice 1 844 à ceux qui précèdent. L’avenir doit encore amener une bo- nification, grâce à une heureuse idée qu’a eue notre tréso- rier : c’est celle d’établir, dans les principales villes de France et de l’étranger, des correspondances avec ceux des membres qui auraient assez de complaisance pour se charger d’encaisser les cotisations de leurs compatriotes et les expé- dier à Paris. Déjà ces membres correspondants sont trouvés pour quelques villes; qu’ils reçoivent ici l’expression de la reconnaissance de la Société. Espérons que leur exemple trouvera des imitateurs. Les frais d’impression du Bulletin paraissent avoir éprouvé une diminution de 628 fr. ; mais cette diminution est seule- ment apparente. Elle vient du retard qui est survenu dans la publication de la table du XIVe volume; elle devait pa- raître en 1844, mais elle ne paraîtra qu’en 1845. L’achat de rentes sur l’Etat dépasse les prévisions île 2,878 fr. ; c’est la conséquence du rachat de la cotisation annuelle par un grand nombre de membres, fait déjà signalé plus haut. Cette dépense fictive est une amélioration réelle dans la position de la Société. L’augmentation de 457 fr. 50 c. pour achats de mé- moires est une avance seulement. En effet, la Société est obligée, par son traité avec l’éditeur des mémoires, de prendre un certain nombre d’exemplaires déterminé. Vers la fin de l’année, le trésorier a cru que l’état des finances lui permettait d’avancer une dépense qu’il eût fallu faire plus tard. Ainsi, cette charge du budget de 1844 est à la décharge de celui de 1845. L’article 19, dont la prévision était de 1,000, a été porté à 2,000, c’est-à-dire doublé. Cette somme fait partie de la réserve créée pour faire face à la dépense occasionnée par la publication du grand travail que préparent MM. d’Arcbiac SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1845. 2'6> et de Pinteville sur les progrès de la géologie, et pour la- quelle le conseil a voté une somme de 4,500 fr. L’an dernier, 1 ,000 fr. ont été mis en réserve ; cette année votre trésorier a pu mettre 2,000 fr. C’est une opération intelligente qui empêche que les fonds de la Société ne demeurent stériles. En définitive, la dépense effectuée s’élève à la somme de 20,452 f. 00 c. La dépense présumée était de. . . 16,700 » Différence en plus . . 3,752 f. 90 c. En dernière analyse , la recette est de 21,21 If. 15 c. La dépense est de 20,462 90 Reste en caisse. . . . 758 f. 25 c. Ainsi, Messieurs, si nous examinons l’actif réel delà Société, nous le trouvons composé des éléments suivants : Une bibliothèque spéciale très intéressante, dont l'impor- tance va toujours en croissant. Le mobilier est aussi fort convenable. En outre, elle possède en rentes sur l’État 1,259 fr., représentant un capital de près de 30,000 fr. pro- venant d’économies ou du legs fait par le docteur Roberton ; les 3,000 fr. placés en bons du trésor dont nous avons parlé, 1 I 6 exemplaires des mémoires de la seconde série, plus 1 1 exemplaires de la première série , qui donnent un ensemble de 1174 fr. ; en outre, un bon nombre d’exem- plaires du Bulletin , y compris deux collections complètes, cités ici pour mémoire. La Société se compose de 476 membres. Ce nombre, Messieurs, est rigoureusement exact. Jusqu’ici nous n’avions que des à-peu-près; mais, grâce au zèle de notre trésorier et au travail pénible et intelligent auquel il s’est livré sur la statistique de la Société , nous sommes sortis, pour cet objet comme pour plusieurs autres , du vague de l’incertitude. Les chiffres sont précis, et ils le sont d’autant plus qu’ils n’ont été pris qu’à la suite des éliminations volées et arrêtées par le Conseil. Vous voyez donc. Messieurs, que la prospérité de la So- 266 SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1815. ciété se maintient, que son avenir se consolide de plus en plus par l'activité de notre trésorier et en général de toutes les personnes chargées des intérêts de la Société. La commission vous propose , Messieurs , d’approuver pu- rement et simplement la gestion de votre trésorier pour l'année 1844 et de le déclarer quitte et déchargé pour cette année. Le Rapporteur , J. -J. Clément Mullet. M. Rozet présente un résumé de sa Note sur quelques parties des Alpes Dauphinoises , qui a été lue à la réunion de Chambéry et qui sera imprimée dans les procès-verbaux, des séances. A. propos de la ligne d’érosion produite par des eaux marines tertiaires sur les roches des flancs de certaines v al- lées des Alpes > M, de Beaumont , qui a observé le même phénomène , ainsi que des trous de pholades dans les envi- rons de Pont-en-Royans, croit quelle date de l’époque des Molasses, et qu elle est antérieure au soulèvement des Alpes Occidentales et au dépôt du terrain pliocène. M. de Beaumont donne lecture du passage suivant d'une lettre de M. Haidinger. Je viens d’apprendre que M. Gizek, jeune géologue de Vienne, a trouvé , ilya quelque temps , des blocs erratiques de. granité sur le penchant N. -O. des montagnes de grès de Vienne , tout près de cette ville , à Siegersdorf , près et à l'O. de Sieghardskirchen, au midi de Tuln et à Kônigstetten , au S.-E. de Tuln. Il les a trouvés posés sur le grès même. M. Zippe m’écrit qu'il a trouvé dernièrement un galet de quai z, évidemment roulé, engagé dans le vrai granité. Il compte pu- blier un mémoire sur ce fait extrêmement intéressant pour le métamorphism e . M. Rozet rappelle à ce sujet qu’il a déjà cité des galets de gneiss dans le granité des Vosges. M. de Beaumont communique encore une lettre de M. Deane, de Greenfield , dans l’état de Massachussets, qui annonce qu’il possède des empreintes de pieds d’oiseaux SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1815. 267 trouvées dans le Newalled-Sandstone de la rivière Connec- ticut qui traverse l’Etat de ce nom , et dans la même localité où il a le premier découvert ces fossiles en 1835. Les plus beaux échantillons sont : 1° une magnifique empreinte de 1’ ' ornithichnites gigantea, qui a0m,43 de longueur sur 0m,33 de largeur; 2° une plaque présentant cinq empreintes succes- sives, montrant chacune la succession des phalanges des doigts avec les ongles, ainsi que l’empreinte des os du mé- tatarse et du tarse; 3° enfin une plaque complètement re- couverte sur ses deux faces d’empreintes de gouttes de pluie, et présentant 20 empreintes appartenant aux O . fulicoides et gracillima ; l’une d’elles est dans un tel état de conservation , qu’on voit les écailles épidermiques parfaitement étalées. Le secrétaire lit enfin une Note sur les mines de mercure de Ripa , près de Pietra-Santa , en Toscane „ par M. d’Hom- bres-Firmas. Il y a quatre ans qu’un nommé Giov. Andrea Salvatori , en détachant des dalles de talcschiste dans son propre fonds, dé- couvrit quelques filets de cinabre cristallisés. M. Berge fut un des premiers auxquels il les montra : il sut en apprécier l’importance et sacrifier quelques capitaux pour des recherches. Ï1 existe deux autres minières de la même nature sur le versant de la montagne de Piipa , appartenant aux sociétés Heiner, et Se- mach et compagnie. Celle de MM. Berge, comme leur ingénieur, Mortemart etPérier, tous trois Français, est la plus considé- rable, ou du moins celle qui est exploitée le plus en grand. Trois galeries principales sont ouvertes dans la montagne jusqu’à la couche cinabrifère . Les deux supérieures sont réunies à travers cette couche par une sorte de puits incliné, d’environ 40 mètres de profondeur, qui joindra la troisième 80 mètres plus bas; cette dernière galerie , à laquelle on travaille jour et nuit , n’est pas arrivée à la rencontre de ce puits ; on calcule qu’il faut encore près d’un an de travail , mais alors on sera en pleine exploitation et l’on pourra employer deux cents mineurs, qui extrairont cha- cun 60 à 70 kil. de minerai de choix journellement, en tout 13,000 kil. , ou 3,770,000 pour 290 jours de travail par année. Le minerai premier choix , analysé par JYJ. le professeur Tar- gionitozzetti, de Florence, rend , terme moyen ,21/3 pour 0/q. Ne prenant que 0,02 pour être plus sûr, nous trouvons 75,400 kil SÉANCE DU 17 FÉ VRIER ! 8 1 5 . 2 m de mercure qui à 12,5 fr. rendraient 942,500 fr. : en déduisant le tiers pour les frais, le bénéfice net annuel serait 628,333 fr., et M. Gailian , ingénieur de la Société , pense qu’il y aura vingt an- nées à' abattage. Le mercure sulfuré de Ripa se présente dans les fissures d’un talcschiste en petits filets , interrompus par des veines de stéatite. Dans les endroits les plus riches , ces filets semblent des jœspures et occupent une largeur moyenne de 0 m,7 au fond de la ga- lerie Périer, qui est celle du milieu. On rencontre, mais rare- ment, de petits cristaux de 3 à 4 millim. qui se détachent et se brisent. Deux appareils distillatoires contigus viennent d’être établis dans un bâtiment vers le bas de la montagne ; l’un fonctionnera pendant que l’autre se refroidira et sera rechargé; le travail sera, ainsi continu. Séance du 17 février 1845. PRÉSIDENCE DE M. ÉLIE DE BEAUMONT. M. Raulin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Le baron de Meyendorf , ambassadeur de Russie à la cour de Prusse, présenté par MM. Elie de Beaumont et de Ver- neuil ; De la Ribette , ingénieur civil des mines à Doyet, près Montmarault ( Allier), présenté par MM. Ale. d’Orbigny et Hommaire de Hell; Baugier, propriétaire à Niort (Deux-Sèvres), présenté par MM. Auzanneau et Garran. Le Président annonce ensuite deux présentations, DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ, La Société reçoit : De la part de M. le ministre des travaux publics; 269 SÉANCE DU 17 FEVRIER 1845. Statistique minéralogique , géologique , métallurgique et mi- néralogique du département de V Isère; par Emile Guey- mardj in-8°, 998 p., 8 pl. Grenoble, 1844. De la part de M. le ministre de la justice : Journal des Savants , janvier 1845. De la part de M. Guibal : 1° Carte du département de la Meurthe, coloriée géologiquement par lui pour la statistique de ce département par M. Henri Lepage, une feuille co- lombier. Nancy, Pfeiffer, 1844. 2° Mémoire sur le terrain jurassique de la Meurthe ; in- 8° , 48 p , 1 pl. Nancy, 1840. 3° Mémoire sur les terrains du département de la Meurthe inférieurs au calcaire jurassique ; in-8 , 34 p. Nancy, 1842. 4° Notice sur la géologie du département de la Meurthe , (extrait de la Statistique du département de la Meurthe , pu- bliée par Henri Lepage), in-S°, 22 p. Naucy, 1843. De la part de M. Durocher : Essai pour servir à la classification du terrain de transition des Pyrénées (extrait du tome VI des Annales des Mines , 1814) , in-8° , 100 p., 2 pl. Paris, 1844. De la part de M. Ch. d’Orbigny : Dictionnaire universel d’histoire naturelle ; t. V, 59e liv. De la part de M. B. M. Keilhau : Gaea Norvegica (Géo- logie de la Norvège, publiée par B.-M. Keilhau) , 2e cahier; in-folio, p. 149 à 340 , 2 pl. Christiania, 1844. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences; 1845 , 1er sem., t. XX , nü* 5 et 6. Précis analytiques des travaux de V Académie royale des sciences , belles-lettres et arts de Rouen pendant Vannée 1844. L'Echo du monde savant ; 1845 , nos 8 tà II. L’Institut; 1845, n°* 580 et 581. The Athenœum ; nos 902 et 903. The Mining Journal; nos 494 et 495. M. de Wegmann offre au nom de M. Ch. d’Orbigny et au sien la première partie du tome Ier du Dictionnaire d' His- toire naturelle qu'ils rédigent ensemble, et qui se composera de deux volumes. Il fait remarquer que cet ouvrage n’a rien 270 SEANCE DU 17 FEVRIER 1845. de commun avec le Dictionnaire universel cl’ Histoire naturelle , dirigé par M. Ch. d’Orbigny. M. Le Blanc, vice-secréiaire , présente à la Société des exemplaires de la Carte géologique du globe par M. Boue ; carte dont il a dirigé le coloriage mécanique au moyen de découpures faites avec l’acide hydrochlorique dans des pla- ques de zinc mises préalablement au vernis. Il annonce que 10 exemplaires ont été déposés lundi dernier chez M. An- driveau Goujon, rue du Bac, 17, et qu’un pareil nombre sera déposé chaque lundi pour satisfaire aux demandes des membres. % La Société vote des remerciements à M. Le Blanc. CORRESPONDANCE ET COMMUNICATIONS. On lit une lettre deM. Graugnard, qui remercie la Société de la décision prise en sa faveur dans la séance précédente, et qui demande à faire partie de la Société. Le Secrétaire donne lecture d’une Lettre sur le terrain à Nummulites des Corbiéres , par M. Leymerie. Le travail que j’ai lu dans la séance du 4 octobre 1844 est pure- ment un mémoire défaits. J’avais eu soin d’en bannir, à dessein, toute idée théorique ou systématique, me réservant de traiter plus tard cette partie de mon sujet. Cependant , une discussion s’étant engagée à la suite de cette lecture, j’ai été entraîné à dire quelques mots de théorie; mais, comme j’avais encore une autre communication à faire dans cette même séance, j’ai été trop court et trop peu explicite : aussi n’ai-je pas eu le bonheur de me faire comprendre, car on m’attribue dans le procès-verbal une opinion qui n’est pas précisément la mienne. Comme le mémoire théorique que j’ai annoncé pourra tarder encore à paraître, à cause d’autres travaux plus pressés qui m’oc- cupent en ce moment et par le désir que j’ai d’augmenter les ren- seignements que je possède déjà sur des gisements éloignés et qui me sont trop imparfaitement connus, et qu’il m’importe qu’on ne m’attribue pas, en attendant, une manière de voir que je n’ai pas sur la question importante qui préoccupe en ce moment d’une manière toute spéciale le monde géologique, je vais énoncer ici SEANCE DU H FÉVRIER 1845. 27 î d’une manière très succincte, mais catégorique, ma véritable opinion. Le terrain à Nummulites des Pyrénées se lie aux couches à Hip- purites ; si l’on considère les choses sous le point de vue purement géognostique , cela me paraît incontestable. Il y a concordance parfaite entre les deux terrains; on ne remarque à la surface du contact aucune trace d'interruption ; les roches de l’un sont très analogues et souvent identiques à celles de l’autre. Il paraît même, d’après des observations récentes de M. Vène, que les Nummulites se mêlent en certains points de la Haute-Garonne et des Hautes-Pyrénées avec des fossiles crétacés. Si donc l’on met de côté, pour un instant, les considérations paléontologiques , le terrain dit à Nummulites et le terrain crétacé incontestable forment un seul et même système déposé sous les mêmes eaux et sans discontinuité. Toutefois, la superposition aux terrains anciens, sans inter- position de couches crétacées du système à Nummulites sur le versant S. de la Montagne-Noire et probablement sur une grande partie du versant N. des Corbières , et l’apparition de couches d’eau douce vers la base de ce terrain indiquent un léger mouve- ment de la mer crétacée vers le N. après le dépôt du terrain à Hippurites et un changement dans le régime général des eaux afïluentes; phénomènes que, peut-être, on pourrait attribuer au soulèvement du mont Yiso qui a produit dans les Basses-Alpes, à la même époque, une discordance si prononcée entre le terrain crétacé et le terrain à Nummulites. Si maintenant on consulte les fossiles , en considérant les choses en grand, sans s’arrêter à quelques espèces qui pourraient passer d’un système dans l’autre, on voit le terrain à Nummulites présenter une faune toute spéciale. Les Hippurites ne s’y rencon- trent plus et sont remplacées par les Nummulites , qui n’existaient pas auparavant, au moins en grande masse; aux fossiles crétacés du N. succèdent des espèces tertiaires du bassin parisien. Les espèces propres aux couches crétacées des Pyrénées cèdent la place à d’autres espèces qui caractériseront désormais le système supérieur. Enfin, il y a là, sous le rapport paléontologique, un changement complet. C’est donc réellement Y aurore d’un nouvel ordre de choses , c’est-à-dire Y Eocène pour le Midi; de même que les sables inférieurs du Soissonnais et l’argile plastique du bassin de Paris et de Londres commencent Y Eocène du N . La question est maintenant de savoir si ces deux Eocènes sont contemporaines. C’est ce que pensent MM. Deshayes, d’Archiac, 272 SEANCE DU 17 FÉVRIER 1845. d’Omàlius , etc... Quant à moi, je ne le crois pas. Je développerai plus tard mes motifs; pour l’instant, je me contenterai des con-* sidérations suivantes. Les dernières couches à fossiles crétacés de nos contrées ne peu - vent être comparées qu’aux craies marneuse ou tufau, et, tout au plus, à notre craie moyenne à Spatangus coranguînum de Cham- pagne ; on ne trouve parmi elles rien qui puisse raisonnable- ment représenter la craie blanche à Bélemnites, ni , à plus forte raison , les craies de Maestricht ou de Ciply. Si l’on rappelle d’ail- leurs que les couches dont il s’agit sont immédiatement suivies et sans discontinuité par celles à Nuinmulites, il faudra nécessaire- ment conclure que la formation du terrain que nous venons de désigner en dernier lieu a commencé dans le Midi , pendant que dans le Nord la craie achevait de se déposer. D’un autre côté, l’apparition dans le S. des Nuinmulites en masse, principalement vers la fin de la formation du terrain qu’elles caractérisent conjointement avec une vingtaine d’espèces parisiennes dont plusieurs jouent un rôle important dans le S. comme dans le N. , est un caractère de similitude trop frappant pour qu’on puisse se soustraire à une idée de synchronisme entre les deux gisements à Nuinmulites du bassin parisien et des contrées pyrénéennes. Il semble donc résulter de ces considérations combinées que l’époque de la formation du terrain à Nuinmulites du S. doit cor- respondre à la fois à la fin de la période crétacée et au commence- ment de la période tertiaire du JS . (1). Les noms de terrain tertiaire et de terrain crétacé , qui se rap- portent à des époques déterminées, dans l’échelle des terrains du N. qui jusqu’à présent a servi de régulateur, mal à propos suivant nous, pour toutes les couches observées à la surface du globe, ne conviennent donc ni l’un ni l’autre au terrain qui fait l’objet de cette note. Voilà pourquoi j’ai été obligé de créer un nom nouveau, celui d 'Epicrétacé, calqué sur le nom d ' Epioolitique déjà (i) Cotte théorie exige que les terrains du Midi el ceux du N. aienlélédépo- sés chacun dans un bassin particulier. C’est en effet ce que tend à prouver l’observation des couches situées au N. el au S. d’une ligne qui passerait au pied des Pyrénées et sur le revers S. de la Montagne-Noire. A partir du lias, tout est différent de part et d'autre de celle ligne , de même que le Jura et les Alpes semblent appartenir à deui ordres de choses distincts, quoiquer ces deux massifs ne soient séparés que par la vallée de la Suisse. SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1845. 273 établi par M. Brongniart. Ce nom me paraît représenter assez Lien la véritable position du terrain dont il s’agit et offre en outre l’avantage de ne rien faire préjuger absolument sur son âge dé- finitif, qui sera probablement encore longtemps contesté. Le nom à'Eocène du Midi pourrait également être adopté; mais il faudrait alors distinguer cet Eoeène de ceiui du Nord; ce qui est un incon- vénient : d’aillgurs ce nom est un nom théorique. Dans ma ma- nière de voir, je ne pouvais d’ailleurs adopter le nom N Oldest Eocen donné par les géologuesarglais au terrain à Nummulites de Bayonne, quoiqu’il nie paraisse le meilleur de tous ceux qui ont été jusqu’à présent proposés, parce qu’il indiquerait un véritable terrain tertiaire qui se serait déposé avant le terrain tertiaire du Nord, à la vérité, mais, toutefois, après la formation crayeuse. Enfin, la dénomination de système h Nummulites ne peut s’ap- pliquer qu’à une partie du terrain dont il est question et non à son ensemble; car, outre que la plupart des couches du système dont nous cherchons à fixer la place ne présentent pas de Num- mulites, au moins dans les Pyrénées, il faut bien remarquer que, si on le considère d’une manièr e générale , il comprend le macigno d’Italie et les schistes à fucoïdes des Alpes , terrains dont M. L. Pilla vient de faire ressortir l’indépendance dans un mémoire spécial où il propose de le désigner par l’épithète de Hetrurien. M. C. Prévost a remplacé, dans le Bulletin , les courtes obser- vations verbales qu’il avait faites à la séance, par une note con- tenant des faits intéressants qui me paraissent venir à l’appui de mes propres observations. Dans cette note, il suppose que j’admets une liaison entre le terrain à Nummulites et le terrain tertiaire. 11 n’en est absolument rien, au moins sous le rapport géngnostique. En effet, nous avons dans le S.-O. de la France un véritable terrain tertiaire inférieur dans le bassin de la Gironde, terrain qui ressemble beaucoup au calcaire grossier parisien, mais qui n’offre aucun rapport avec le système à Nummulites. Nous avons aussi des couches miocènes , qui d’abord sont d’origine lacustre, et qui ensuite sont presque partout discordantes par rapport au terrain qui fait l’objet de cette lettre. M. El ie de Beaumont pense qu’on pourrait adopter la dé- nomination de terrain Iléîrurîen proposée par M. Pilla. M. Eiie de Beaumont communique l’extrait suivant d’une lettre de M. Agassiz sur des roches striées de Suisse. Soc. Géol. Tome 1S, _2è série. iS 274 SÉANCE DU 17 FEVRIER 1815. J’ai pensé qu’il, pourrait vous être agréable d’avoir une série d’échantillons de Suisse à comparer avec les échantillons de roches polies des Vosges qui vous ont été adressés par M. Collomb. J’ai fait dans ma collection un choix d’exemplaires, en vue de vous 4'aire voir l’aspect du poli sur différentes roches, et selon que les échantillons sont taillés sous le glacier même ou sur ses flancs en dehors de l’action actuelle des glaces. Le n° 1 est un exemplaire du portlandien poli du Landeron; la forme arrondie d’un des côtés provient de ce que ce morceau a été enlevé &ur le bord d’un large sillon. N° 2. Calcaire noir de Rosenîaui. L’échantillon a été taillé sous le glacier même ; sa surface polie et rayée était en contact immé- diat avec la face inférieure du glacier et la couche de boue qui est intermédiaire entre la roche et la glace, et dont il est resté des traces sur l’échantillon. L’apparence des cassures vous montre que la surface polie coupe à peu près à angle droit les surfaces de la structure stratifiée de la roche. N° 3. Petit échantillon de la même localité que le n° 2 et re- cueilli dans la même position sous le glacier au bord d’un Karren- felder qui lui a donné sa forme arrondie. N° 4. Echantillon de la même roche que les nos 2 et 3, prove- nant de la même localité , mais taillé au-dessus du glacier, sur le flanc de la montagne , et exposé par conséquent de temps immé- morial à l'action des agents atmosphériques : aussi est-il rare de trouver dans de pareilles circonstances des surfaces aussi bien conservées; on n’en rencontre même que sur des points abrités par suite de leur orientation. JN° 5. Fragment de serpentine schisteuse , détaché de la roche en place sous le glacier de Zermatt. Cet échantillon se trouvait danslesmèmes circonstances que le n° 2 sous le glacier de Rosen- laui. Le poli et les raies coupent aussi les surfaces qui dépendent de la structure de la roche. C’est le seul fragment que j’aie pu enlever sous le glacier même. K° 6. Provient aussi de Zermatt , mais l’échantillon a été cassé sur le flanc du Riffel à environ 500 pieds au-dessus du glacier. C’est le même burinage que sur l’exemplaire n° 5 : seulement, la surface est rougie par l’action del’oxigène de l’atmosphère sur les éléments ferrugineux de la roche. N° 7. Granité de Wasen, dans la vallée de la Reuss, détaché d’une grande surface polie semblable à la Helle-Platte au-dessus de la liandeck, dans la vallée de Hassly. 8. Quartz à surface polie, provenant d’un filon près du Tod- SEANCE DU l? FÉVRIER 1845. 275 îensee, sur le col du Griinsel , usé au même niveau que les sur- laces polies de granité qu’il traverse. Je n’ai jamais pu réussir à détacher en même temps une partie des surfaces adjacentes de granité. On ne peut apprécier ce fait convenablement qu’en place. N° 9. Porphyre à surface polie du sommet de Shehallion en Ecosse. Dans le Nord, il y a peu de chaînes de montagnes dont le sommet soit élevé au-dessus de l’agent qui a buriné la surface des roches en transportant les blocs erratiques. Le résultat im- médiat de cette différence entre le phénomène du Nord et celui du centre de l’Europe est que chez nous la plupart des blocs erra- tiques sont anguleux , tandis que dans le Nord , non seulement le galet, mais même les grands blocs sont arrondis, polis et rayés, comme chez nous le petit galet des fonds de glacier. On n’a pas assez insisté sur ces différences, qui me paraissent essentielles et qui, dans mon opinion, prouvent que dans le Nord les masses mobiles qui ont occasionné le poli étaient plus uniformément répandues à la surface du sol et n’étaient pas dominées par des pics aussi nom- breux que dans les Alpes. Nos 10 et 11. Sont peut-être les exemplaires qui vous frapperont le plus. Ce sont des cailloux rouJés, tels qu’on en trouve abon- damment dans tous nos dépôts glaciaires, sous les glaciers, sur les bords et à distance, partout où on trouve d’anciens polis et d’an- ciennes moraines. Us accompagnent partout les blocs erratiques. Le burinage est le même qie celui des surfaces polies en place: seulement, comme ces fragments étaient mobiles, leurs raies se croisent plus fréquemment. Ceux qui sont le plus arrondis ont des raies sur toutes les faces ; ceux qui sont plus aplatis sont sur- tout rayés sur leurs plus grandes surfaces, sur lesquelles ils ont dû reposer plus constamment , comme le n° 10 par exemple. On ne trouve jamais de pareils galets rayés dans les torrents, ni dans les fleuves; j’ai même remarqué que partout où les galets rayés des fonds de glaciers sont entraînés par les torrents, ils perdent bientôt leur burinage pour prendre un aspect mat et uniforme. Ces galets sont à mes yeux le caractère le plus constant et le plus incontestable de la présence des glaciers dans les lieux où on les trouve. Il est fort à regretter qu’on n’y ait fait jusqu’ici que peu d’attention ; car je suis convaincu qu’à eux seuls ils peuvent servir à distinguer les dépôts glaciaires des dépôts caillouteux de trans- port, déplacés par d’autres causes que par des glaciers. Un fait qui vous aura sans doute frappés en comparant entre eux ces divers échantillons , c’est runifonnité de leur poli et du bu ri- SÉANCE DU 17 FEVRIER 1815. 27 G nage dont ils sont marqués* quelle que soit la nature minéralo- gique de la roche sur laquelle on l’observe, sur les roches de sé- diment , comme sur les roches massives. Ce fait me paraît de la plus haute importance dans l’appréciation de la cause qui a pu produire de pareils effets , et montre jusqu’à l’évidence que le poli et les raies n’ont rien de commun avec la structure de la roche , comme le pensent encore quelques géologues. Le n° 12 est un échantillon du poli ou plutôt de l’usure que produit sur les rochers des bords de notre lac le battement des vagues. L'aspect en est mat ; les sillons profonds qui coupent les grandes surfaces soumises à cette action sont sinueux , comme le montre un des côtés de l’exemplaire. Jamais on ne voit sur ces surfaces la moindre trace d’un fin burinage ou de raies, pas plus que sur le galet roulé qui les recouvre. Peut-être que cette petite collection intéresserait les géologues français qui ont suivi les débats qui ont eu lieu sur la question des glaciers, sans avoir eux-mêmes occasion d’observer les faits delà discussion. Si vous croyez utile de la faire voir à la Société géo- logique, cela pourrait faire plaisir à quelques personnes. A propos de glaciers , voici quelques faits qui vous inté- resseront. Au fond de la vallée de Ferret, celle du côté du Piémont, on trouve le glacier de Triolet , qui descend du mont Dolant. Demi- lieue plus bas commence une série de larges moraines qui barrent la vallée et qui sont couvertes de sapins, tandis que les espaces intermédiaires sont plats et tapissés seulement d’une végétation marécageuse. On voit évidemment , quand on domine la scène, que le glacier de Triolet , grossi des petits glaciers latéraux , attei- gnait jadis un niveau bien inférieur à son extrémité inférieure^ actuelle. Mais ce qu’il y a surtout de curieux dans cette localité, c’est qu’un glacier latéral, le glacier d’Aneron, qui paraît d’origine toute réqente, à en juger d’après l’aspect de ses moraines, qui sont entièrement dépourvues de végétation et dont les blocs offrent une cassure encore fraîche, s’avance à travers la vallée et a disloqué Ses anciennes moraines du glacier de Triolet. Un fait dont les habitants de la vallée ont conservé le souvenir explique tout naturellement cet avancement curieux du glacier d’Aneron. Il y a environ un siècle qu’il se fit un immense éboule- ment de la montagne sur le milieu du glacier , qui, protégé dès lors contre l’ablation annuelle de sa surface par l’action des agents atmosphériques, n’a pas cessé d’avancer vers le fond de la vallée, qu'il n’atteignait point avant cette catastrophe. SÉANCE DU 17 FÉvraER 1845. J’ai encore observé un autre fait curieux dans la vallée du Ferret qui descend vers Orsières en Valais. En face de la gorge d’Ornex, le glacier qui descend du pic de ce nom se termine devant une plaine gazonnée; mais à une demi-lieue plus loin, cette plaine est limitée par une immense moraine , entièrement boisée, de près de 100 pieds de haut, qui forme un grand cintre avançant dans la vallée de Ferret, qu’elle barre transversalement, et refoulant le torrent contre le versant oriental de la vallée pour se courber en aval et se raccorder à des lambeaux de moraines du côté opposé de la gorge d’Ornex. Le côté inférieur de la mo- raine est coupé par le torrent du glacier d’Ornex. N’est-il pas évident pour vous, comme pour moi, que ce fait prouve que si la débâcle dont a parlé M. de Buch est partie de la pointe d’Ornex, le glacier qui en descend a dû, à une époque postérieure, s'étendre au moins à une demi-lieue plus bas que maintenant? A la suite de la précieuse collection que IVI, Agassiz lui a fait l’amitié de lui confier et qu’il met sous les yeux de la Société, M. Eüe de Beaumont met également sous les yeux de la Société plusieurs beaux échantillons de schiste argi- leux durs ou de grauwacke très fine , à surface usée et striée, qui lui ont été adressés de Wesserling ( Haut-ilhin ) par M. Edouard Gollomb. Ces échantillons proviennent du Glattstein , dans la vallée de -Saint - A mai in , au pied des bal- lons des Vosges. Leur surface présente les mêmes caractères, le* même genre de burinage que les échantillons de la Suisse, de l’Ecosse, de la Suède, de l’Amérique du Nord, etc. En signalant ces caractères à l'attention de la Société , M. Elie de Beaumont se plaît à rappeler qu’il a toujours saisi avec empressement les occasions d appeler l’attentif n des géologues sur le curieux et important phénomène des surfaces polies et striées. C’est dans ce but qu’il a mis sous les yeux de l’Académie des sciences , dans sa séance du 23 avril 1838 (1) , un fragment poli et strié de porphyre# d’Elfdolen, en Suède, qui lui avait été envoyé par 1V1. Ber- zélius, ainsi qu’un fragment de calcaire jurassique également poli et strié, détaché d’une surface polie très étendue, que (t) Comptes-rendus, t. VI, p. 567 (instructions pour l’expédition scien- tifique qui se rend dans le nord de l’Europe). 578 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1845. M. Agassi z iui avait fait observer au mois de juillet prece- dent au Landêron , près du lac de Neuchâtel. C’est également dans ce but que, dans la séance du 1 7 janvier 1812 , il a en- core mis sous les yeux de l’Académie une grande plaque de schiste argileux polie et striée, recueillie aux environs de Boston (Massachussets) par M. le docteur Jackson, ainsi qu’un fragment de gneiss à gros grains provenant des belles surfaces polies qui forment les flancs de la vallée de l’Aar, entre l’hôpital duGrimsel et la Handeck [H elle- P latte), frag- ment recueilli par lui même le 20 août 1838 (1). Depuis 1838 ces échantillons ont figuré maintes fois dans les leçons de M. Eiie de Beaumont , qui en a même fait faire des moules en plaire dont il a distribué des exemplaires. Il sera heureux d’y joindre à l’avenir les échantillons que M. Agassiz voudrait bien lui laisser, de même que ceux du Glattstein. M. Elie de Beaumont fait observer ensuite que le carac- tère le plus remarquable des stries dont il s’agit est leur ré- gularité. Elles n’ont jamais que des courbures d’un très grand rayon ; jamais elles ne soflt cahotées ; jamais la rencontre d’une partie dure telle qu’un nœud de quartz n’y produit de déviation. Il se demande si celles de ces stries qui peuvent être attribuées à l’action des glaciers doivent être supposées produites par leurs mouvements rapides ou par leurs mou- vements insensibles. Il estindubitable qu’une portion de gla- cier, animée d’un mouvement rapide, comme celle qui a détruit le village de Banda, peut produire des stries douées du genre de régularité qu’on observe. M. de Coîlegno a constaté que, près de Bagnères de Luchon, dans les Pyré- nées , des avalanches de neige ont produit des stries sem- blables au moyen des pierres qu’elles entraînaient. Des ava- lanches de glace sont certainement capables du même effet. Les glaciers produisent-ils des stries pareilles par leur mou- vement lent et insensible? 11 parait jusqu’ici permis d’en douter, et peut-être le mouvement lent ne produit-il pas de stries du tout. M. Élie de Beaumont n’a jamais observé (i) Çomptcs-rendus , l. XIV, p. io/j , Rapport sur un mémoire de M. Du- rocher. 279 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1845,.. qu une seule espèce de suies, et il pense que les stries produites par le mouvement lent devraient différer de celles produites par les mouvements rapides. Une masse plastique comme un glacier, dont la surface en contact avec les pierres change sans cesse par l’effet de sa propre fusion , ne peut, suivant lui, diriger ces pierres d’une manière assez sûre pour leur faire produire invariablement des stries régulières sur des roches d’une résistance inégale : ainsi que M. de Collegno Va fait remarquer depuis longtemps , les stries produites de cette manière devraient être cahotées. Toutes les stries observées présentent une continuité, une simplicité de courbure qui conduit à Vidée d’un mouve- ment rapide. Si les stries ont été produites en général par un mouve- ment rapide, elles peuvent également résulter d’avalanches de glace, d’avalanches de neige, ou du mouvement très rapide de masses boueuses remplies de pierres. Pour ce qui concerne les anciennes moraines de la vallée de Ferret, M. Élie de Beaumont est heureux de pouvoir joindre au témoignage de M. Agassiz celui de ses propres souvenirs , et il rappelle le passage suivant d’un rapport qu il a lu à l’Académie des sciences, le 17 janvier 1842, sur un mémoire de M. Durocher. « Cette supposition d’hivers plus froids en Eu- » rope, pendant la période géologique qui a précédé la nôtre >x immédiatement, serait d’ailleurs en harmonie avec plusieurs » autres résultats d’observation Parmi ces faits curieux , » je citerai certaines digues de débris qu’on observe dans les » Alpes, à une certaine distance ( quelquefois près d’une » lieue) de l’extrémité inférieure des glaciers actuels, no- » tamment dans la vallée de Chamonix et dans celle de » Ferret. Les digues dont je parle ici m’ont présenté tous les » caractères de véritables moraines. Peut-être le Gulf-Stream a qui réchauffe aujourd’hui l’Europe occidentale n’existait-il » pas encore pendant les dernières périodes géologiques qui % ont précédé la nôtre (I).» L’une des digues de débris du (1) Comptes-rendus, t. XIV, p. 102. 280 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 18 45. val Ferrer, présentant les caractères d’une véritable .mo- raine, dont il est ici question, n’était autre que celle décrite par Mo Agassiz, et que M. Elie de Beaumont aurait observée de son côté le 25 août 1838. M* Mar-tins dit qu’en remontant le glacier de Grindelwald on rencontre à l’étranglement de la Stîereck des roches cal- caires qui présentent des stries très marquées inclinées à l’horizon d’environ 45». Sur le rocher appelé l’Angle, près de la mer de glace de Chamonix, il y a des stries peu in- clinées près du glacier qui repose sur une pente de 4 à 5°. M. Martins en conclut que les glaciers peuvent produire des stries sur des pentes faibles comme sur des pentes rapides et même des stries qui remontent le long des flancs de la vallée. Quant à la rectitude des suies, il convient quelle est très difficile à expliquer, puisqu’il y a une couche de boue et de cailloux entre la face inférieure du glacier et le soi qui le supporte. Les actions qui se passent au contact du glacier et du sol, surtout celles qui dépendent de la tempé- rature, sont fort difficiles à étudier, les eaux qui s’écoulent d’un glacier provenant tout «à la fois de la fusion de ses sur- faces inférieure et supérieure, des torrents qui y descendent des montagnes encaissantes, et enfin des sources qui peuvent exister dans le voisinage. ïl ajoute enfin que les stries attri- buées aux anciens glaciers sont parallèles à l’axe de la val- lée, tandis que les avalanches ne produisent que des stries perpendiculaires et dans le sens de la plus grande pente. M. de Beaumont fait remarquer qu’à la Stiereck le glacier n’a qu’une pente de 7 à 8°; ce n’est qu’inimédiatement au- dessous qu elle devient très forte. A l’Angle, où les roches sont des gneiss qui résistent a la décomposition, les stries sont semblables sur le fond et sur les côtés du glacier, tandis que celles qui sont situées au-dessus du niveau du glacier sont beaucoup plus effacées. MM. Le Blanc et Leconte font observer qu’une machine à raboter qui posséderait une masse considérable produi- rait des stries droites et régulières , quelle que fût la vitesse avec laquelle elie opérât. La réunion de plusieurs cailloux enchâssés à la partie inférieure du glacier pourrait produire SÉANCE DU i 7 FÉVRIER î 8 4 5 . ?8 ! des stries régulières sur tous les points où ie glacier touche le soi. M. de Beaumont répond que l'espèce d’emmanchement, par la glace , des cailloux supposés produire les stries à la surface des roches , ne posséderait aucune solidité , parce que les glaciers, par suite du flux de chaleur de l'intérieur de la terre, fondent à la fois au contact du sol sous-jacent et au contact des cailloux. Cette fusion fut-elle seulement de un à deux millimètres par semaine, les cailloux seraient plus ou moins mobiles , et les stries n’auraient pas la régularité et les dimensions qu’on leur remarque , et qui sont telles, qu’elles atteignent souvent un mètre de longueur. 11 termine en di- sant qu’il admet que les stries ont été produites par des niasses de matières qui parcouraient rapidement les vallées dans le sens de leur longueur et qui avaient la consistance des ava- lanches. M. Virlet communique quelques fossiles qu’il a recueillis près de Tournus, et qui semblent constater un fait très im- portant pour l’histoire géologique de l’époque actuelle. Un des élèves du petit séminaire d’,Autun ayant signalé à M. l’abbé Landriot, son supérieur, un gisement de coquilles marines qui avait été mis cà découvert en creusant les fonda- tions d’une petite maison située dans un lieu appelé Belnay, à environ un kilomètre de Tournus et sur la route qui con - duit de cette ville à Saint-Jean-Goux , ils sont allés visiter, M. Landriot et lui, à leur retour de Savoie, ce gisement in- téressant. Dans la petite fouille que nous avons été obligés de faire faire, ajoute M. Virlet, pour remettre les fossiles à décou- vert, nous avons trouvé au milieu d’une argile glaiseuse d’un gris verdâtre , qu’on avait crue d’eau douce , seulement deux espèces de coquilles, que M. Deshayes a reconnues être Y Ostrea hippopus et le Murex trunculus , et qui toutes deux sont de l’époque actuelle et vivent encore aujourd’hui sur nos plages de l’Océan et de la Méditerranée. Ce fait est important, en ce sens que Tournus se trouvant à plus de 50 myriamètres de la Méditerranée, et le gise- ment qui renferme ces coquilles modernes étant bien â 282 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1815. 175 mètres au-dessus de son niveau actuel, il entraîne la conséquence d’un soulèvement au moins égal du sol depuis l’époque actuelle; soulèvement qui paraît à M. Yir- îet ne s’être fait que lentement, sans commotions, et gra- duellement, à l’instar de celui qu’éprouve encore depuis plu- sieurs siècles le sol d’une partie de la Scandinavie. Ce sou- lèvement ne pourrait-il pas, ajoute-t-il, nous aider un peu à résoudre la question encore pendante des glaciers et des blocs erratiques ? M. Rivière, revenant sur une lettre de M. Haidinger, lue à la précédente séance par M. Elie de Beaumont , dit qu’il ne croit pas à la présence de cailloux de quartz dans le véritable granité. Cependant, si le fait était prouvé, il le considére- rait comme contraire à la théorie du métamorphisme; car si le granité était une roche modifiée , le galet présenterait une surface corrodée, fondue, qui se lierait intimement au granité, et il ne s’offrirait plus que sous la forme d’un simple nodule quartzeux , ce qui n’a pas lieu. M. Virlet, sans contester le fait, qui lui paraît extrême- ment intéressant, objecte cependant que si l’on conçoit fa-.. cilement que des- granités cl épanchement peuvent contenir des fragments étrangers arrachés aux roches traversées , on conçoit plus difficilement qu’un galet de quartz puisse se trouver au milieu d’un granité métamorphique sans avoir lui- même subi faction métamorphisante , de manière à lui faire perdre tout au moins ses caractères de galet, s’il ne se trou- vait pas entièrement fondu dans la masse. M. de Beaumont dit qu’il croit à l’existence des galets de quartz dans le granité. M. Robert dorme lecture de la note suivante. Rapprochement entre les atterrissements de la Loire a Orléans et ceux de rivières coulant dans des contrées bien différentes. et très éloignées les unes des autres. A voir les atterrissements qui tendent à obstruer le cours de la Loire , au-dessus et au-dessous d’Orléans, ou en amont et en aval de cette ville, on ne se douterait guère qu’ils sont pour ainsi SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1 8 15. dire entièrement composés de matériaux étrangers à la contrée ; on y chercherait presqueen vain des débris du calcaire d’eau douce dans lequel le fleuve s’est cependant creusé un large canal. Loin de moi la pensée de décrire tous les objets qu’il charrie et dépose : je ne veux pas entrer dans des détails fastidieux ; je me contente- rai seulement d’appeler l’attention sur quelques uns d’entre eux ; leur présence et leur mélange à une si grande distance des points d’où ils ont été arrachés par les eaux fluviales pourront peut-être intéresser les personnes qui s’occupent des atterrissements en général. Tout le long des berges de la rive gauche on remarque dans les atterrissements dont elles sont composées des veines noirâtres qui ne sont autre chose que des dépôts quelquefois très abondants defertitané. On pourrait croire que ce minéral, comine les sub- stances dont je parlerai ci-après, est venu directement, dans l’état ou il se présente , des roches volcaniques du plateau central de la France; mais en examinant avec attention les sable et gravier granitiques de la Loire, on y trouve de nombreux petits galets de basanite très riche en fer titane et en olyvine; d’où je suis amené à conclure que le minerai en question tire principalement son origine de cette roche , et cela au fur et à mesure qu’elle est charriée par le fleuve et réduite par l’attrition aux faibles pro- portions où nous l’observons sous les murs d’Orléans; le même sable fin renferme de nombreux grains de grenat , de zircon et de corindon, etc., discernables à la loupe. L’examen des sable et gravier ordinaires m’a permis d’y ren- contrer des objets non moins curieux à signaler relativement à leur origine; ce sont : 1° des calcédoines, dont une serait , par ses zones alternativement blanchâtres et noirâtres, susceptible de faire un joli camée; 2° des cornalines; 3° du jaspe rougeâtre et verdâtre; 4° du quartz hyalin , du quartz zone ; 5° des mésotypes, dont quelques unes encore encroûtées de leur gangue; 6° de petits galets de wacke , de tufa , de pépérino . de basalte grisâtre, ce dernier remarquable par l’abondance des pyroxènes. Je ne sais s’il faut attribuer l’absence du véritable 'basalte noir compacte à la grande pesanteur spécifique de cette roche , qui l’aurait em- pêchée d’être entraînée aussi loin que les autres; toujours est-il que je ne crois pas l’avoir rencontrée. Quant aux galets d’un gros volume, (que l’on est convenu d’ap- peler cailloux roulés) disséminés au milieu des sable et gravier , les plus remarquables appartiennent au terrain porphyrique. Ce sont principalement diverses variétés de porphyre , venues sans SEANCE DU 17 FEVRIER 1815. 28 i doute aussi du plateau central ; puis des roches granitiques et gra- nitoïdes, du micaschiste, une véritable pegmatite graphique, des amphibolites, des roches pétrosiliceuses noirâtres, etc. Je citerai également pour mémoire des fossiles de la craie , notamment le Spatangus cor anguinum. Maintenant si l’on veut établir des rapprochements entre les atterrissements de la Loire, seulement dans les environs d’Or- léans et ceux de quelques autres cours d’eau situés dans des contrées bien différentes et très éloignées les unes des autres , on verra qu’ils tiennent des uns et des autres : par l’abondance du fer titane on se croirait sur les rives du Torneâ en Laponie ; les pierres gemmes rappellent les atterrissements fluviatiles deCeylan, duThi- bet, etc.; les calcédoines, les jaspes, les mésotypes roulés, les petits galets de roche volcanique nous transportent à l’embouchure des rivières rapides de l’Islande; enfin d’autres objets, tels que les roches porphyriques , les granités, les silex de la craie, nous rap- prochent de la Seine, sur les atterrissements de laquelle, en amont et en aval de Paris seulement, je me propose de lire prochaine- ment une notice. M. de Collegno lit le travail suivant : Note sur le terrain erratique du revers méridional des Alpes. Le sol des plaines de la Haute-Italie est composé de cailloux roulés dont la nature minéralogique varie assez considérablement d’un point à l’autre, car elle correspond à la nature des roches dominantes dans les vallées les plus voisines; ainsi les cailloux des bords des deux Doires, de la Stura et ceux de la plaine du Piémont, en général, appartiennent presque exclusivement à des roches cristallines (granité, gneiss, serpentines, etc.). Dans les. environs de Milan, on trouve en grand nombre des cailloux de porphyre rouge quarzifère , et ces cailloux deviennent de plus en plus abondants si on remonte la vallée de l’Olona jusqu’à Varese. Sur les bords du Lambro , ce sont les calcaires jurassiques de la Val-Assina qui dominent , au point qu’on les a exploités quelque- fois comme pierre à chaux à Monza, à Yerano, etc. On trouve sur les bords de l’Adda des fragments roulés d’un conglomérat analogue au grès rouge jurassique de Bellano; on y en trouve aussi qui paraissent provenir des poudingues crétacés des collines de JNava. Plus à l’E. , les cailloux des bords de l’Oglio appar- tiennent principalement à un granité à feldspath bleuâtre et SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1845. 285 grandes lames de mica argentin et au scliiste amphibolique ; ces deux rocîies se trouvent en place au fond de la Yal-Camonica ; ce sont encore des cailloux de^ même nature, qui couvrent les plaines de la province de Brescia, vis-à-vis de la vallée du Cbiese; enfin les cailloux roulés qui couvrent les plaines de Yérone offrent des échantillons de tous les granités et de tous les por- phyres des montagnes du Tyrol et de la vallée de l’Adige. Le dépôt de cailloux a été souvent aggloméré en un poudingue plus ou moins solide , et il forme alors des escarpements bien pro- noncés sur le bord des rivières, qui, en général , coulent à un niveau fort inférieur à celui de la plaine. Ces escarpements offrent un moyen facile de constater que les cailloux roulés augmentent rapidement de volume à mesure qu’on approche des montagnes; les travaux des grandes routes conduisent au même résultat : on a reconnu ainsi, qu’au S. de Milan, les graviers sont d’un trop petit volume pour qu’on puisse les employer à l’entretien des routes; au N. de Milan , au contraire, tout comme dans les en- virons de Turin, les routes sont entretenues avec les cailloux trouvés sur place au-dessous de la terre végétale. Ces cailloux at- teignent rarement le diamètre de 50 centimètres dans les exploi- tations, à côté de la route de Turin à Verceil ; tandis que si l'on remonte de Chivasso vers la vallée d’Aoste, on trouve, auprès d’Ivrée , des blocs de 30 et même 40 mètres cubes. Lorsque le diamètre des cailloux roulés atteint 6 ou 8 décimètres, on com- mence à trouver, à la partie supérieure du dépôt, quelques frag- ments de même nature que les cailloux , mais présentant des angles assez vifs; ces fragments augmentent en nombre eu avançant vers les Alpes, et les grandes accumulations de terrain de trans- port que l’on trouve à l’ouverture des vallées en sont presque exclu- sivement composées; ce fait a été signalé par M.E. de Beaumont, entre Saronno et Yarcse dans la vallée de l’Olona ; on peut le re- connaître également dans la plupart des vallées qui descendent des Alpes de la Lombardie et du Piémont , et on arrive ainsi à rattacher aux cailloux roulés de la plaine les blocs de roches alpines épars sur les pentes des montagnes calcaires. Ces blocs , en elfet, « appartiennent à la partie supérieure du vaste dépôt dilu- » vien qui forme le sol du plateau faiblement incliné de la rive » gauche du Pô, de Saluces à Como et au-delà (1). » La puissance du terrain de transport est nécessairement très (l) E. de BeaumonE Annales des sciences naturelles , t. XIX, p, 70. 286 SEANCE DU 17 FÊYRÏER 1845. variable d’un point à un autre; car cette puissance tient surtout à la configuration du fond sur lequel les cailloux ont été déposés. Il n’est pas rare de voir, au bord des rivières, des escarpements de poudingues de 100 mètres de hauteur; sur les points les plus rapprochés des montagnes, à Ivrée , par exemple, la hauteur des terrasses formées de matériaux meubles, estde plus de 400 mètres- mais il ne faudrait pas conclure que c’est là l’épaisseur du terrain de transport dans les plaines dont les Bancs des vallées paraissent offrir une coupe naturelle. M. Sismonda a reconnu il y a quelques années que le terrain de transport des collines de Castellamonte, à 15 kilomètres au S. -O. d’ Ivrée, est purement superficiel, et que la masse de ces collines est constituée par des sables et des argiles à fossiles pliocènes (1). A Paderno , le poudingue, exploité sous le nom de ceppo , se présente le long de l’Adcla avec une épaisseur de 60 à 80 mètres; mais il est facile d’y reconnaître que le ceppo ne fait que revêtir la tranche des couches du grès à fucoïdes et du calcaire à Nummulites qui paraissent au jour à une petite dis- tance vers le N. On conçoit cependant que le terrain de trans- port doit être plus puissant au centre de la vallée que vers le pied des Alpes : en effet, les sondages artésiens que l’on a tentés sur divers points de la rive gauche du Pô ont été abandonnés sans avoir dépassé le terrain de transport; quelques uns des puits situés au N. de Milan ont une profondeur de 30 mètres; quel- quefois même on a du creuser jusqu’à 60 mètres dans le terrain de transport avant de trouver de l’eau. J’ai cité, il y a un instant, les terrasses formées par le terrain de transport à l’entrée de la vallée d’Aoste; ces terrasses ont une cer- taine célébrité par les spéculations qu’elles ont suggérées à Saus- sure (2) ; mais le terrain erratique se présente en masses presque aussi considérables à l’entrée de toutes les grandes vallées qui descendent des Alpes. Que si l’on pénètre dans l’intérieur de ces vallées, les cailloux roulés disparaissent en grande partie, ou ne se trouvent plus que dans les lits des cours d’eau actuels, tandis que les blocs anguleux augmentent en volume et en nombre, de manière à frapper l’attention des voyageurs les plus indifiérents aux phénomènes naturels; c’est ce dont on peut se convaincre en visitant à quelques heures au N. de Milan les hauteurs calcaires fij Observations géologiques, etc. , dans les Mémoires de l’Académie des sciences de Turin , 1808. (2) Voyages dans les Alpes , 997. SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1815. 587 qui entourent les lacs de Como et de Lecco, lesquels ne sont en réalité qu’un élargissement momentané de la vallée de l’Adda (1). Le promontoire de Bellagio , placé au point de partage de ces lacs , est dominé, à 9 kilomètres vers le S. , par une crête calcaire dont le point le plus élevé atteint 1 ,595 mètres de hauteur absolue (1,384 mètres au-dessus du niveau des lacs), et porte le nom de Monte-San-Primo ; la direction moyenne de eette crête est de i’O.-20°'N. à l’E.-20°-S. , c’est-à-dire qu’elle est perpendiculaire à la direction de la paitie supérieure du lac de Como. La pente moyenne générale du San-Primo vers le N. est de 9 à 10°; mais cette pente est interrompue par divers ressauts qui sont comme autant de marches d’un escalier gigantesque. Chacune de ces marches est occupée par une accumulation de blocs erratiques; les pâturages et les superbes châtaigniers de i’Alpe de Guel , à 400 mètres environ au-dessus du lac, recouvrent une de ces ac- cumulations; mais les blocs les plus remarquables sont perchés sur une marche plus élevée (700 mètres environ au-dessus du lac) à l’Alpe de Prcwolta ( Prato-alto , en patois Pravolt) ; c’est là que se trouve le bloc figuré par M. de La Bêche (2), bloc qui est connu dans le pays sous le nom de Sasso di Lentina; plusieurs autres blocs moins volumineux ont cependant reçu un nom des montagnards, qui distinguent le Sasso délia Luna, celui dei quattro Commuai , etc. On trouve encore quelques blocs à l’Alpe de Bot go , qui occupe une marche plus élevée que celle de Pravolla; mais ils sont beaucoup moins volumineux. Le Monte-San-Primo oppose, comme l’a dit M. de La Bêche, « un rempart audacieux aux chocs qui arriveraient du côté du » N. (3) . » Aussi explique-t-on facilement comment les blocs erratiques ont dû s’accumuler sur son flanc septentrional; mais la crête du San-Primo se termine à l’E. par un escarpement de plusieurs centaines de mètres qui domine la vallée du Lambro : le col de Ghisallo, par lequel la route de Bellagio à Canzo descend dans cette vallée , est moins élevé de 100 mètres environ que l’Alpe de Pravolta; on comprend dès lors qu’une grande quantité de blocs ait pu passer par-dessus ce col, pour descendre plus au S. vers Asso et Canzo; et en effet, les flancs de la vallée du Lambro sont semés de blocs ayant souvent 5 et 600 mètres cubes. A Canzo, (1) Voyez dans les Coupes et vues géologiques de M. de La Bêche, pl. 3i el 32, la carie géologique et les coupes des environs du lac clé .Como. (2) Coupes et vues géologiques, pl. 58, fig. 5. (3) Manuel géologique, p. 220 de la traduction française. 288 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1845. la vallée est barrée par un contrefort dirigé vers l’K. 18° N., qui oblige le Lambro à changer de direction presque à angle droit : la pente de ce contrefort (Monte-Pesura) est couverte de blocs jusqu’à 200 mètres au-dessus du lit du torrent; les blocs pénè- trent à i’E. dans le vallon romantique de San-Miro; iis m’ont frappé surtout , parce que la plus grande partie en est de serpen- tine ; on en voit derrière le sanctuaire un amas remarquable par la fraîcheur des angles des divers fragments. On peut cependant encore suivreda traînée des blocs erratiques de la vallée du Lambro, bien au-dessous de Canzo; cette traînée s’élargit considérablement en sortant des Alpes, et les collines septentrionales de la Brianza sont couvertes de blocs de plusieurs mètres cubes, dont quelques uns proviennent du calcaire juras- sique de la Yal-Assina. A Villa-Albese , j'ai vu à 150 mètres au- dessus du Lambro et du lac Alserio, un groupe de blocs de gneiss, parmi lesquels il en est un de 250 à 300 mètres cubes, qui pré- sente sur toute sa hauteur une fente de quelques centimètres de large • les parois de cette fente sont usées et arrondies, elles pré- sentent même sur un point une sorte de canal grossièrement cylindrique, de 4 à 5 décimètres de diamètre; quelle que soit l’origine de cet accident, il est bien certain qu’il a eu lieu après que le bloc de gneiss avait été transporté à la place qu’il occupe aujourd’hui. A l’E. et à l’O. du promontoire de Bellagio , les dépressions profondes occupées par les deux branches du lac de Como ont du nécessairement être envahies jusqu’à une grande hauteur lors du transport des blocs erratiques, quelle que fut d’ailleurs la cause de ce transport : aussi tous les caps qui s’avancent vers le centre du lac, de manière à en modifier la direction, ofïrent-ils des accumulations plus ou moins puissantes de blocs erratiques. Sur le lac de Como, proprement dit, l’accumulation la plus remar- quable est celle qui se voit entre Molina et la Yilla-Plîniana , contre la base du Pizzo di Torno, qui fait un angle droit avec la direction suivie par le lac, depuis la Cavagnola. Les blocs grani- tiques, de 2 et 300 mètres cubes, s’y élèvent à plus de Ï0Q mètres au-dessus du niveau du lac ; leurs angles sont généralement très vifs : on en a détruit un grand nombre pour divers usages, mais il en reste encore de cpioi fournir longtemps aux exploitations. A Como, la masse du terrain erratique paraît s’être élargie tout-à- coup, en sortant de la vallée étroite qu’elle suivait depuis le centre des Alpes; la pente S. de la montagne de Brunate en a été entièrement recouverte ; et le hameau de Saiï-Tommaso est 28) SEANCE DU 17 FEYEïEH. iti'l'5. situé à 300 mètres au-dessus du lac , sur un amas de blocs angu- leux de granité, de gneiss , de schiste amphibolique, disséminés dans un sable grossier, et cimentés en une brèche assez solide pour présenter sur cjuelqucs points des escarpements presque ver- ticaux. On peut considérer cette brèche comme le point de départ de la traînée de cailloux erratiques qui se prolonge vers le S. dans la vallée du Seveso ; en effet, elle ne diffère du ceppo des régions moins élevées que par le volume des blocs qui la composent et par les angles non émoussés de la plupart de ces blocs. Le lac de Lecco présente une répétition des faits que je viens de signaler entre Bellagio et Cotno : ainsi on trouve une accumu- lation considérable de blocs à la rive occidentale du lac, à 5 kilo- mètres environ de Lecco , dans une position qui correspond à peu près à celle de Molina , sur le lac de Como. La masse des blocs transportés s’est de même déversée latéralement en sortant de la gorge étroite qu’eiîe avait suivie de Bellagio à Lecco; on cite sur la pente méridionale des Corni-di-Cànzo un bloc de granité por- phyroïde de 1,000 mètres cubes environ, qui se trouvait à 300 mètres au-dessus du niveau du lac, et qui a été débite en tronçons de colonnes, ii y a une vingtaine d’années, lors de la construction de l’église de Val-Madrera. Les pentes septentrionales du Monte-Baro offrent au-dessus de Malgrate des accumulations analogues à celle que j'ai citée à San-Tommaso ; mais c’est particulièrement à Olginate, là ou l’Adda coin meme à prendre le cours d’un fleuve régulier, que les blocs sont accumulés en plus grand nombre : aussi , Breislack et M. de Bue b ont-ils comparé la colline qui domine au S. le lac d’Olginate à un champ de bataille de géants. Plusiemsdes blocs ont plus de 100 mètres cubes, et leurs arêtes sont en général très vives; ils appartiennent en tiès grande partie au granité por- phyroïde; la serpentine y est abondante aussi, et on y trouve en outre quelques blocs de calcaire jurassique. Plus au S., le volume des blocs diminue, leurs angles s’émoussent, et on passe par gradations insensibles aux poudingues exploités sur les bords de l’Adda, à Capriate, à San-Gervasio , à Brembate, etc. Puisque les blocs erratiques atteignent sur le San-Primo un niveau de 700 mètres au-dessus du lac de Como , ii est naturel de penser que des blocs comparables à ceux de Guel, de Pravolta, etc. , devrontse trouver àdes niveaux correspondants sur les montagnes qui encaissent le lac de Como à l’E. et à i’O. de Bellagio. En effet, les blocs de roches cristallines sont très fréquents sur les hauteurs calcaires qui* dominent Ti amezzo , Grianta, Menaggio ; en ont re, Soc, Gëui. Toine II, assène. iq SÉANCE DU 17 février 1 3 1 5. 290 comme l’arête du partage des eaux entre les lacs de Como et de Lugano n'atteint pas, à beaucoup près, la hauteur de 700 mètres au-dessus du premier de ces lacs, la cause qui transportait les blocs erratiques a dû nécessairement diriger une partie de ces blocs dans la dépression qui s’ouvrait ainsi vers l’O. La partie la plus septen- trionale du lac de Lugano consiste en un canal de 11 à 1,200 mètres de large , en face duquel le mont Salvatore se présente à peu près comme le Monte-San-Primo , en face de la partie supé- rieure du lac de Como: aussi trouve-t-on sur le Salvatore, à 300 mètres environ au-dessus du lac de Lugano, un amas de blocs comparables à ceux de Quel. La configuration accidentée de ce lac a dû diriger ensuite la traînée des blocs erratiques vers le S.; mie partie s’en est échouée sur les pentes du Monte-Genei oso et dans la plaine de Mendrisio et de Balerna ; une autre partie a suivi la direction de Porto et de Varese, et est allée se terminer dans les poudingues de l’Olona. Enfin j’ajouterai , pour compléter la description du terrain de transport du lac de Como, que les blocs erratiques se sont accumulés aussi en quantité considérables dans un vallon alpin très sauvage qui s’ouvre sur la rive orientale du lac, un peu au N. de Yarenna. En effet, lorsque l’on monte de Perledo vers Esmo , on se trouve à 600 mètres environ au-dessus du lac, au milieu d’un entassement de blocs granitiques angu- leux dont le volume dépasse presque toujours les i00 mètres cubes; on continue à trouver des blocs de même nature, mais d’un moindre volume jusqu’au-dessus d’Esino , à 5 kilomètres de distance horizontale des bords du lac. D’après ce qui précède , ou voit que la disposition des blocs erratiques du San-Primo a quelques rapports avec ce cjue l’on observe sur le Jura, vis-à-vis de la vallée du Rhône; dans les deux cas, les blocs ont dû traverser une dépression considérable avant d’arriver à leur position actuelle; dans les deux cas aussi, les blocs des points les plus élevés se rattachent à des traînées de débris moins volumineux, qui se sont jetés dans des vallées laté- rales. Les autres vallées du revers méridional des Alpes, depuis le Pô à l’Adige, présentent des faits analogues : partout les blocs erratiques forment des accumulations puissantes en amont des gorges des vallées , comme à Olginate et sur les points où ces vallées changent de direction sous un angle un peu considérable, comme à Canzo, au mont Salvatore près de Lugano, etc.; en d’autres termes , les grands amas de blocs erratiques se trouvent sur des points où un courant capable de déplacer ces blocs aurait dû perdre une partie de sa force de transport par suite des obsta- SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1815. 291 cîes qui diminuaient sa vitesse. Ce fait, bien constaté aussi sur le revers septentrional des Alpes, avait fait penser à Saussure que les blocs erratiques avaient été transportés et déposés dans leurs positions actuelles par des courants d’une violence et d’une étendue considérable. L’étude détaillée des vallées du Rhône, de l’Isère, de la Du- rance, a porté de même M. E. de Beaumont à conclure que le transport du terrain erratique y est du à Faction de grands cou- rants descendus des cimes des Alpes, et l’on sait en outre que ce savant voit la principale source de ces courants dans la fusion sou- daine , lors de l’apparition des mélaphyres, des glaces et des neiges qui devaient couvrir les cimes plus anciennes appartenant au Système des Alpes occidentales (1). On sait que MM; de Charpentier, Agassiz, Forbes, etc. , croient qu’il est plus facile d’expliquer le phénomène erratique en admettant que d’immenses glaciers ont occupé jadis toute l’étendue des vallées de toutes les chaînes de montagne. Je crois avoir démontré dans un mémoire précé- dent(*2) que l’hypothèse glaciale n’était point applicable au terrain erratique des Pyrénées, taudis que le phénomène diluvien pour- rait réellement se répéter dans cette chaîne, s’il s’y produisait un nouveau dégagement de chaleur analogue à celui qui dut accom- pagner l’apparition des ophites. Mais FexpFcalion que j’ai donnée des faits observés dans les Pyrénées peut-elle être admise d’une manière générale pour toutes les chaînes de montagne, quelles que soient les dimensions du phénomène? Quelques personnes ont paru penser que non , et dès lors il ne sera point inutile de re- chercher si la fusion instantanée des glaces et des neiges des Alpes, telle que Fa supposée M. E. de Beaumont, avait été ca- pable de disperser le terrain erratique jusqu’aux divers points de l’Italie sur lesquels nous l’avous signalé, ou bien , si le transport de ce terrain serait plus facile à expliquer en admettant l’existence d’anciens glaciers qui se seraient étendus depuis le centre des Alpes jusqu’à la plaine du Pô. Je crois ne pouvoir mieux faire pour apprécier la valeur de ces deux hypothèses, que de les ap- pliquer successivement à l’explication des faits que j’ai décrits sur les bords des lacs de Como , de Lecco et de Lugano; car c’est là surtout que le phénomène erratique du revers méridional des Alpes se présente avec les dimensions les plus gigantesques; c’est (1) Annales des sciences naturelles , l. XIX, p. 2 i3. (2) Comptes-rendus de L’ Académie des sciences , L XVb p i3/j , et Bulletin de la Société géologif/ue, t. XIV, p. 4 02. 292 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1 84-7. là, par conséquent aussi, que la cause du transport de 4 blocs paraît le plus énigmatique. Je rappellerai d’abord que tous les blocs que j’ai vnssur leMonle- San Primo et sur les bords des îacs de la Lombardie, tous ceux qui y ont été indiqués par Breislack et par MM. de Buch et de La Lèche, appartiennent à des roches qui se trouvent en place dans les Alpes de la Yalteline. Les trois quarts au moins de ces blocs sont d’un granité à grands cristaux de feldspath gris (rarement rougeâtre), clans lequel on discerne quelquefois de petites aiguil- les d’amphibole et plus rarement de petits cristaux de spliène. Ce eranite for nie des masses considérables vers l'axe de la chaîne des Alpes; il paraît constituer en totalité les cimes qui environnent Campo-üolcino, sur la route du Splughén. La serpentine est fré- quente aussi parmi les blocs erratiques des Alpes Lombardes ; on en connaît particulièrement une belle variété d’un vert très foncé avec des veines plus claires , qui contient quelquefois des cristaux de diallage métalloïde : cette roche est recherchée comme pierre d’ornement, < ton la trouve fréquemment employée dans les villas des bords du lac de Coino. On sait que les roches serpentineuses forment, de Tirano à Coire, une suite de protubérances alignées, à peu de chose près, du S. au N. ; il en existe des masses considé- rables à l’origine de la vallée de la Mail a , qui tombe dans le lac deComo à sa partie la plus septentrionale, et ces masses s’étendent jusque près de Chiavenna. Les autres blocs appartiennent au gneiss, aux schistes micacés et amphiboliques, au feldspath grenu (leptynite) , qui se trouvent en place dans presque toutes les hautes vallées de la grande chaîne, à la jonction des terrains sédim'en- taires et cristallins. Il est clone évident que la cause qui a transporté à leurs posi- tions actuelles les blocs erratiques des environs du lac de Como avait son origine vers le centre des Alpes; et en effet , cette évi- dence a été reconnue de tout temps par les géologues italiens. En 1807, Brocclii, adoptant l’opinion de Saussure, expliquait le transport des blocs granitiques du mont Tonal jusqu’aux mon- tagnes calcaires du lac d’Iseo, par des cornants dus au retrait des mers qui avaient d’abord recouvert les cimes des Alpes (1) ; mais, dès 1817, Venturi avait pressenti que les glaciers devaient avoir joué un rôle dans la distribution du terrain erratique : le trans- port des blocs de la Lombardie était dû , suivant lui, à un phéno- mène analoguie à ce qui se passe aujourd'hui dans les mers po- Mines de fer du département du Mella,[ , .11, p. 336 et suiv. SÉAN-CE DU 17 ÉÉYR'iELt 1845. 293 îaires. Les Blocs du Sali -Primo auraient été tran-.poités sur des plaçons flottants que les vagues enlevaient aux glaciers de la Val- teline, lorsque la mer s’élevait à un niveau assez considérable pour baigner le pied de ces glaciers. Venturi avait même calculé qu’un fragment de glace de 45 mètres de long, autant de large et 20 mètres d’épaisseur, dont le volume serait, par conséquent, de 40,500 mètres cubes, pourrait transporter un bloc de granité de 880 mètres cubes (volume delà masse granitique qui sert de base à la statue de Pierre-le-Grand à Saint-Pétersbourg et 200 mètres cubes de fragments moins volumineux (1). M. de Charpentier a parfaitement démontré que l’hypothèse d’une mer qui aurait en- touré les Alpes, après leur dernier soulèvement, est contraire à tous les buts observés (2). La chose est surtout évidente pour le revers méridional de la chaîne, où les marnes subapemiines , trace du dernier séjour de la mer dans ces contrées , sont souvent foi t disloquées (Verrua , Maggiora , etc.) et toujours séparées d’une manière tranchée du terrain erratique supérieur à ces marnes. Mais l’objection de M. de Charpentier n’est pas valable contre l’hypothèse du transport des blocs par la fusion subite des glaciers, telle que l’admet M. E. de Beaumont. Il s’agit de savoir seule- ment si cette fusion pourrait réellement produire l’effet qu’on lui attribue. Il est assez difficile de concevoir que des fragments de glace aient pu être charriés depuis le centre de la chaîne des Alpes jus- qu’aux pâturages du San Primo, à moins que toute la vallée de l’Addà ne fût remplie d’eau jusqu’au niveau de ces pâturages. On sait , à la vérité, que dans les Hautes-Alpes, la masse entière des tçyjunts s’avance quelquefois au moment des grandes crues comme une avalanche liquide, qui remplirait successivement jusqu’à de grandes hauteurs les diverses parties d’une vallée (3) ; mais ce mode de transport qui a pu jouer un grand rôle dans la dispersion du terrain erratique , ne me paraît pas expliquer suffisamment l’existence des blocs anguleux du San-Piimo; je crois devoir ad- mettre plutôt que la masse d’eau descendue des cimes de la chaîne au moment d’une fusion générale des glaces et des neiges , a été arrêtée par la barrière que lui opposait le San-Primo, et a (1) Memoria sopra atcuni / henomeni geologici. Pavie, 1817. On trouve un extrait de ce mémoire de Venturi dans les Institutions géologiques de Breislack , t. II, p. 533 et suiv. (2) Essai sur les glaciers, p. 178. (3) Surrcl, Description des torrents des Hautes Alpes, p. ôq. 2H SÉANCE DU J 7 FÉVRIER 1845. comblé momentanément toute la Yalteline jusqu’à une hauteur de 700 et même 800 mètres au-dessus du niveau actuel du lac , puisqu’on trouve encore des blocs anguleux à l’Alpe de Borgo, à une centaine de mètres au-dessus de Pravolta : pendant ce temps d’arrêt de la masse d’eau diluvienne, quelques blocs auraient pu flotter enchâssés dans de la glace et venir s’échouer à la place qu’ils occupent aujourd’hui. Mais les glaces et les neiges des Alpes antédiluviennes ont elles pu fournir assez d’eau pour remplir la vallée de l’Adda jusqu’au niveau des pâturages de Borgo? 11 est difficile que nous arrivions jamais à des données assez exactes sur la géographie physique de la période pliocène , pour calculer ri- goureusement quel devait être le volume des glaciers de cette période; mais, en l’absence de pareilles notions , nous pouvons du moins obtenir une certaine approximation en cherchant ce qui devrait se passer si les glaciers actuels venaient à fondre soudaine- ment par une cause quelconque. L’eau qui remplirait la Valteline jusqu’au niveau de l’Alpe de Borgo aurait grossièrement la forme d’une pyramide dont le sommet serait à la gorge de la Serra, où l’Adda coule à 1,011 mètres au-dessus du niveau de la mer (800 mètres au-dessus de celui du lac de Corao), et dont la base s’appuierait contre le San- Primo. Cette base peut être considérée comme un triangle dont un côté serait la largeur totale de la vallée à Bellagio, prise à un niveau de 800 mètres au-dessus du lac , largeur qui peut être évaluée à 7,500 mètres ; la hauteur de la base triangulaire serait donnée en ajoutant aux 800 mètres, niveau des blocs, la pro- fondeur du lac entre Aareuna et Menaggio, savoir, 316 mètres: on aurait donc la surface de la base de la pyramide = 7,500 X ’ -- == 4,185,000 mètres carrés ; et pour le volume de la masse d’eau qui remplirait la vallée depuis la Serra jusqu’à Bellagio, cette base multipliée par le tiers de la distance entre ces deux points, distance qui , en tenant compte des sinuosités de la vallée, se trouve être de 25 lieues ou 111,111 mètres, savoir 4,185,000 X 111,111 3 154,999,845,000 mètres cubes. Si l’on ajoute la quan- tité d’eau nécessaire pour remplir au même niveau les vallées de la Maira et de la Lira , vers le Septimer et le Spîughen , on arrive à un volume total de 187,027,445,000 mètres cubes. Or, il fau- drait pour fournir une telle quantité d’eau (abstraction faite de la contraction de l’eau passant à l’état liquide), une masse de glace SÉANCE DU 1,7 FÉVRIER i 8 4 5. 595 de 935 kilomètres carrés (48 lieues carrées) et 200 mètres d épais- seur. Les cimes qui entourent les sources de la Lira, de la Maira et de l’Adda présentent depuis le Pizzo ciel Piombo (au N. -O. de Chiavenna) jusqu’au Corno dei Tre-Signori (au S.-E. de Bormio) un développement de 200 kilomètres environ, et sur toute cette longueur, on ne trouve qu’un petit nombre de cols inférieurs à la limite des neiges perpétuelles, qui est dans les Alpes à 2,708 mètres; le col du Stelvio, par lequel passe une route militaire de Milan à Tienne , dopasse même cette limite de près de 100 mètres. PI usieurs glaciers descendent de ces hauteurs; les principaux sont celui du Tamboliorn , à la source de la Lira; ceux de Savogno , de Muretto , d’Albigna , de la Eondasca , dont les eaux réunies forment la Maira; ceux de Siviggia, de Maseno , de Malenco, de Poschiavo , qui descendent de la mer de glace du Bernina ; ceux de i’Qrtler-Spitz vers la source de l’Adda, etc. La mer de glace du Bernina est décrite par Ebel comme « formant le centre d’é- » normes glaciers qui remplissent toutes les vallées d’une chaîne » dont la longueur est de 16 lieues ( 1 ) ; » il n’y a donc rien d’exagéré dans la supposition que l’ensemble des glaciers dont les eaux se versent dans le lac de Como présente une surface totale de 48 lieues carrées ou 935 kilomètres carrés ; et comme d’après les observations les plus récentes, on peut prendre 200 mètres pour l’épaisseur moyenne des glaciers des Alpes, on arrive à trouver que la fusion des glaciers actuels donnerait toute la quantité d’eau nécessaire pour combler la vallée de l’Adda jusqu’au San-Primo. A la vérité, jen’ai pas tenu compte dans ce calcul de la différence de densité entre la glace des glaciers et l’eau; mais il est évident que cette différence serait plus que compensée par la fusion des champs de neige supérieurs aux véritables glaciers. Si donc nous supposons aux glaciers de la période pliocène une étendue approchant de celle des glaciers actuels , et si nous admettons «que les neiges dont les hautes montagnes du système » des Alpes occidentales, ne pouvaient manquer d’être couvertes, » aient été fondues en un instant par les gaz auxquels est attribuée » l’origine des dolomies et des gypses, » et qu’en même temps les glaciers de ces montagnes, fondant à leur base, soient partis char- gés de leurs moraines médianes pour descendre vers les plaines , il n’y aura rien de surprenant à ce que quelques uns des blocs de ces (i) Manuel du voyageur en Suisse , 2e vol., p. 1 6 5 , édition de Zu- rich, i8o5. SÉANCE Dü l 7 FÉVRIER 181 5. moraines aient pu être clianiésà la surface des eaux jusqu’au San- Primo. On concevra facilement aussi que la masse d’eau retenue un instant par cette montagne se soit déversée immédiatement après par les vallées de Lecco, du Lambro , de Coino, de Lugano, et qu’elle ait déposé sur les dernières pentes des Alpes les blocs de Val-Madrera, de San-Miro, de Molina, du Salvatore, etc., pour transporter plus loin les blocs moins volumineux des collines de la Brianza et les cailloux de la plaine de la Lombardie. Dans cette dernière partie de leur cours , les eaux auront pu entraîner vers le S. quelques blocs calcaires enlevés aux cimes jurassiques du San-Primo, du Crocione, etc. Le groupe des blocs du San-Primo est certainement la partie la plus difficile à expliquer de tout le phénomène erratique du re- vers méridional des Alpes, et le raisonnement qui rend compte du transport de ces blocs s’applique bien plus aisément aux autres grandes vallées , à celles , par exemple , du Tessin , d’Aoste , de Suze, etc. 'Ainsi pour la vallée d’Aoste, d’Aubuisson a calculé que les glaciers qui versent leurs eaux dans la Doire-Baltée ont un volume d’environ 100,000 millions de mètres cubes (l); on com- prend que la fusion instantanée de pareils glaciers suffirait pour produire les collines de terrain de transport que l’on observe à l’entrée de la Doire, dans la plaine du Piémont. M. de Charpentier a consacré quelques unes des pages de son Essai sur le terrain erratique à la réfutation de l’hypotbèse de la fonte des glaciers, et en général de toutes les hypothèses qui ad- mettent des courants; il s’appuie principalement sur ce que l’ac- tion de pareils courants ne saurait produire tous ces phénomènes accessoires qui accompagnent généralement les traînées de blocs erratiques, savoir : le polissage des roches, le creusement de stries et d’ornières plus ou moins profondes , etc. M. Studer a signalé des roches polies et striées d’une parfaite conservation , dans la vallée d’Aoste et dans celles de Quarazza et d’Anzasca (2). Sur les bords du lac de Como , la surface des roches est presque constam- ment cachée sous une végétation toute méridionale, et il est rare qu’on puisse y lire les traits que le phénomène erratique a dû im- primer sur cette surface; j’indiquerai cependant les rochers de gneis sur lesquels passe le chemin de Rezzonico à Cremia qui , à la limite des deux communes, sont fortement sillonnés et présen- ( 1) Statistique minéralogique du département de la Doire , dans le Journal des mines , t. XXIX, p. 254- (2) Bulletin de la Société géologique, t.II, p. 5 i . SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1845. 29Î tent même des commencements d’érosions verticales ou de cuves ; la concavité polie des sillons y est souvent rayée par des stries très fines, qui sont dirigées comme les sillons eux-mêmes vers le 1N.- N.-E. , c’est-à-dire que touscesaccidents sont alignés suivant le pro- longement de la partie septentrionale du lac, depuis l’embouchure de l’Adda jusqu’à la pointe d’Olgiasca. J’ai vu aussi près d’Inesio, à l’entrée de la Yal Sasina , un poudingue rouge très solide, qui est parfaitement poli et strié paiallèlement à la direction de la vallée. Outre ces accidents qui sont dus bien certainement à la cause qui a transporté les blocs erratiques, on trouve dans les en- virons du Monte-San-Primo des faits qui ont quelque analogie avec les précédents, mais qui ont une tout autre origine. Ainsi on voit près de la source du Lambro , dans les pâturages de Pra- volta, une surface polie verticale qui présente en petit les mêmes caractères que la célèbre roche polie du Saint-Bernard, et qui est le résultat d’un frottement analogue à celui qui a produit le po- lissage des saîhandes de certains filons métallifères. J'ai indiqué ailleurs (1) les stries de certaines surfaces calcaires des environs de Bellagio, produites par l’action de l’atmosphère sur une roche à veines spathiques très minces ; je pourrais citer encore des Kar- renjeldcr à Lezzeno, à Balbianello, etc. ; mais les géologues suisses, eux-mêmes paraissent reconnaître que les Karrenjcldcr peuvent provenir d'un phénomène d’érosion indépendant de la cause quel conque qui a donné lieu au transport des blocs erratiques (2). Mais les surfaces polies, les sillons, les stries , les cuves de Rez» zonico, des vallées d’Ao>te, de Quarazza, d’Anzasca ,* etc., in- diquent-elles nécessairement, comme le croit M. de Charpentier, que ces surfaces ont été exposées au frottement produit par le mouvement des glaciers? Je me bornerai à rappeler que mes ob- servations sur le terrain diluvien des Pyrénées m’ont porté à conclure que le « passage des avalanches produit de nos jours des » surfaces polies et striées; que le passage violent d’une grande » masse d’eau suffit pour produire des sillons et des érosions ver- » ticales, de sorte que les diverses modifications de la surface des » roches dans lesquelles on a cru voir des preuves de l’ancienne » extension des glaciers peuvent être expliquées par des actions » d’un ordre tout différent (3). » (î) Notes surles terrains stratifiés des Alpes lombardes. Bulletin, 2csé- rie, t. icr, p. i85. (2) Studer, Éléments de géographie phjsu/ue et de géologie, l. I. p. 358. (5] Comptes-rendus de l’ Académie des sciences, I. XVI, p. i3/|. 298 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 181-5. M. de Charpentier pourrait objecter aussi, comme il l’a fait pour d’autres localités, qu’en proposant le mode de transport des blocs à l’aide de glaçons flottants, « on n’a tenu aucun compte des «défilés, des sinuosités, des coudes souvent fort brusques des >» vallées, non plus que de la fragilité des glaciers. Les radeaux de » glace, chargés de blocs de toutes les dimensions, auraient été » entraînés parun courant de 800 mètres de profondeur, hauteur » des blocs du San-Primo au-dessus de la vallée de l’Adda. Com- » ment aurait-il été possible qu’un certain nombre de ces radeaux «arrivassent sains et saufs jusqu’au San-Primo (1)?» Je crois pouvoir répondre à cette objection que, d’après les faibles pentes qu’ont généralement les flancs des vallées, la largeur de ces vallées est toute autre à 800 mètres de hauteur qu’elle ne l’est à leur fond. J’ai dit plus haut que l’on trouvait à tous les coudes, à tous les défilés des vallées de grandes masses de terrain erratique ; mais on peut concevoir cependant que quelques blocs enveloppés de glace et de neige aient suivi le milieu d’un courant de plusieurs kilo- mètres de large, qu’ils aient évité tous les chocs et soient arrivés jusqu’au lac de Como (2). Que l’on compare les blocs dispersés sur le San-Primo, à Alolina, sur le mont Salvatore, etc. , aux masses de débris accumulées dans les moraines des glaciers actuels, et on verra que le nombre des blocs arrivés jusqu’au débouché des vallées n’est réellement qu’une petite fraction du nombre de ceux qui ont dû être entraînés par la fusion des glaciers de la période pliocène. On nous dira peut-être que « lorsqu’un courant charrie des » matériaux et qu’il vient frapper à angle droit contre une digue, » ce n’est pas sur la place frappée que se forme le plus grand dépôt, « mais à quelque distance à droite et à gauche de cette place, là (\)Essae sur les glaciers, p. 18/j. (i) Le transport des blocs, par suite de leur adhérence «à une quantité de glace capable de contrebalancer les effets de leur pesanteur spécifique, n’est pas un phénomène aussi rare qu’on pourrait le penser. Ainsi, Dolo- mieu,qui voyageait eu Italie en 1788, rapporte que « l’hiver de celte an- » née couvrit le rivage de l’Adriatique de grosses pierres anguleuses, pro- » venant dts Alpes. Les rivières furent gelées, ce qui n’était pas arrivé de » mémoire d homme, et les glaçons voiturèrent dans la mer des pierres « de toute espèce , les unes qu’ils avaient soulevées avec eux en s'élevant » du fond des rivières, les autres qui s’étaient écroulées sur la glace et » qui y restèrent jusqu’au moment de la débâcle. Alors elles furenttrans- « portées dans la mer, ou les flots les rejetèrent sur le rivage. >> ( Journal de physique, t. XXXIX, p. 3i3.) SEANCE DU i 7 FÉVRIER 1845. 289 » où le courant a perdu de sa force; par conséquent, si la dis- » persion des débris erratiques avait été opérée par des courants* » la plus grande accumulation de ces débris ne devrait point se » trouver sur le San-Primo, précisément vis-à-vis la vallée supé- » rieure de l’Adda (1). » Si la pente septentrionale du San-Primo était un mur vertical, je concevrais, en effet, que les blocs charriés par le courant eussent été rejetés à droite et à gauche du point du choc; mais j’ai dit plus haut que la pente générale du San-Primo , vers le N., était de 9 à 10°; entre l’Alpe de Guel et celle de Borgo, il y a une différence de niveau de 400 mètres sur une distance horizon- tale de 3 kilomètres , c’est-à-dire que dans la partie de la mon- tagne où les blocs sont le plus abondants et le plus volumineux , la pente n’est que de 7 à 8° ; on comprend qu’un flot arrivant contre une telle pente, y glisserait en la remontant et poussant devant lui les blocs qu’il charriait, et qui pourraient être portés ainsi à un niveau supérieur à celui du courant. 11 suffit, au reste, d’avoir vu les vagues de la mer se déferler sur une plage peu inclinée pour comprendre que la direction de la force de transport d’un courant diluvien ne serait nullement rejetée à droite et à gain lie par la rencontre d’une pente comme celle du San-Primo; on conçoit aussi que les blocs poussés contre une telle pente, avec une vitesse égale même à celle d’un boulet de canon, ne s’y 'seraient point brisés, qu’ils auraient plutôt ricoché à la surface de la montagne, comme le fait un boulet dans des circonstances ana- logues (2). On a demandé aussi « comment des courants auraient pu former » des accumulations de débris en forme de digues ou de bandes » longeant en lignes parallèles le flanc des montagnes, et se trou- » vant placés à différents étages qui se correspondent ordinaire- » ment sur les deux flancs des vallées (3) ! » C’est par suite de cette impuissance prétendue des courants diluviens à former ces dépôts en formes de terrasses si fréquents dans toutes les chaînes de montagnes, que l’on a été amené à voir des moraines d'anciens glaciers dans toute accumulation un peu considérable de cailloux plus ou moins rouf s; que l’on a cité dans les Pyrénées, par exemple, les moraines de Garen, de Grip, d’ Ai gelez, d’Arudy, du Yernet, etc. J’ai démontré ailleurs que toutes ces prétendues (1) Essai sur les glaciers, p. 218. (2) Bulletin de la Société géologique , t. XIV, p. 4f>5. (3) Essai sur les glaciers, p. 225. 300 sé a s g u du 17 fi:v hier î 8 \ 5 . niorain.es des Pyrénées //e pouvaient pas être l’ouvrage d’anciens glaciers (1); je me bornerai aujourd ’liui à répondre à l’objection de M. de Charpentier, en citant un passage du dernier ouvrage de M. Forbes, que l’on sait être l’un des adversaires les plus ar- dents de la théorie du transport des blocs par les courants : « Les » accumulations des blocs sur les bords des torrents des hautes » vallées des Alpes ont une ressemblance frappante avec les mo- » raines des glaciers. La forme de ces accumulations est celle des » moraines, car leurs talus sont déterminés dans les deux cas » par la pente que prennent naturellement des matériaux meubles, » livrés à l’action de la pesanteur. Les matériaux sont les mêmes » aussi dans les deux cas : ce sont des blocs anguleux plus ou » moins arrondis par le frottement des graviers anguleux et un » sable grossier. Je n’ai pas su reconnaître, continue M. Forbes, » dans la disposition des matériaux accumulés aux bords des » torrents, cette régularité d’après laquelle on croit pouvoir dis- » tinguer les dépôts des eaux courantes d’avec ceux des glaciers. » Les dépôts des torrents ne m'ont paru présenter aucune sépa- » ration en strates distinctes par le volume des débris, et souvent » les blocs les plus volumineux y sont les plus élevés, comme la » chose a lieu dans les véritables moraines (2). » Ces observations de M. Forbes suffisent, je pense, pour qu’on soit autorisé à voir dans les collines allongées qui con inuent souvent les contre-forts latéraux des grandes vallées des Alpes, des sortes d’osars gigan- tesques produits contemporainement au transport des blocs erra- tiqu es; ces collines représenteraient, ainsi que l’a dit Saussure pour celles d’Ivrée, «les bords du courant qui s’évasait en dé- » bouchant des vallées (3). » M. de Charpentier pense encore que « l’on ne saurait ex- » pliquer par des courants d’eau les groupes étonnants de gros » blocs, tous d’une même espèce de roche [4\ » tels que celui du vallon de San-Miro ; et cependant cette disposition des blocs me paraît être une conséquence forcée de la fusion simultanée de tous les glaciers. En effet, si une telle fusion avait lieu aujour- d’hui, les glaciers du Bernina, chargés d’une grande quantité de blocs de serpentine, entreraient dans le courant général , à 60 kilomètres au-dessous des glaciers de l’Or tler-Spilz , sur lesquels (1) Terrain diluvien des Pyrénées , p. 37 el suiv. (2) Forbes, Travels tlirough t/ie Alps , p. 3 10. (3) Saussure, Voyages, 997. (4) Essai sur les glaciers, p. 226. SÉANCE DU 17 FEVRIER 1815. 301 les blocs de granité porphyroïde sont de beaucoup la roche do- minante; il serait donc tout simple que ceux des blocs de serpen- tine qui, échappant à tous les accidents, iraient s’échouer dans la vallée du Lambro , y arrivassent avant les blocs venus de l’Ortler, qu'ils s’y déposassent tous à la fois et à la même place; on com- prend en outre que quelques uns des blocs, enveloppés dans un remous du courant, pourront descendre assez lentement au fond de l’eau pour s’y trouver « perchés les uns sur les autres et se » maintenir en équilibre par de bien faibles appuis, tandis que » d’autres tombant avec une grande vitesse, pourront se trouver » fendus verticalement par l’effet de cette chute, etc. (I). » Quant à l’objection qui a été tirée de ce que l’espace occupé par les lacs alpins aurait dû être comblé par les matériaux trans- portés par les courants, je crois qu’on peut répondre que les torrents qui descendent aujourd’hui des Alpes, et qui, dans leurs plus grandes crues, déposent sur leurs flancs des masses volumi- neuses de débris arrachés sur les hauteurs, n’en conservent pas moins un lit fort profond au milieu de ces débris; les lacs de Lecco, de Como, de Lugano, ne seraient autre chose que les lits des courants gigantesques qui ont charrié les blocs alpins et le terrain erratique. On voit que les objections faites par M. de Charpentier au transport des blocs par les* courants et les glaçons enveloppant des débris de roches , ne sont peut-être pas aussi sérieuses que le pense ce savant ; nous croyons, au contraire, que la distribution du terrain erratique dans la Lombardie ne saurait s’expliquer par l’existence de glaciers qui se seraient étendus jusqu’à la vallée du Pô. D’après les données que j’ai citées plus haut, il y a entre le lit de l’Adda à la Serra et le fond du lac de Como à Bellagio, une différence de niveau de 1 ,1 16 mètres, sur une distance de 1 1 1 ,1 1 ï mètres; il s’ensuit qu’un glacier qui aurait occupé toute la Val- teline aurait dû se mouvoir depuis la Serra jusqu’à bellagio sur un lit incliné de 0m,0l par mètre, ou de 0,35'; la pente de la surface du glacier, en supposant son origine à 3,000 mètres au- dessus de la mer (hauteur moyenne des cimes qui entourent les sources de l’Adda) , ou à 2,000 mètres environ au-dessus des blocs erratiques de l’A’.pe de Borgo, et 128 à kilomètres de cette localité-, la pente de la surface, dis-je, aurait dû être de0‘n,0156 par mètre, ou de 0%5//; tandis qu’on ne connaît dans les Alpes aucun glacier qui se meuve sur une étendue d’une lieue , sur une (î) Essai sur 1rs glaciers, p. 227, 302 SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1815. pente notablement inférieure à 3° (1). Voudrait-on, malgré cela, supposer l’existence d’un glacier arrivant jusqu’à Bellagio , et dont les blocs du San-Primo seraient la moraine terminale? Je me bornerais alors à rappeler ce que j’ai dit plus haut sur les blocs erratiques du vallon d’Ësino; ce vallon est ouvert en entier dans le calcaire noir bitumineux de la partie inférieure du terrain jurassique ou dans des dolomies qui résultent d’une modification de ce calcaire, ies cimes qui dominent ce vallon vers le S.-E. atteignent presque la limite des neiges perpétuelles; et en effet, au mois de septembre 1843 , je voyais encore des plaques de neige sur le revers septentrional du Monte-Codeno ( 2,4 1 4 mètres de hauteur absolue, d’après la carte de Relier) ; de sorte qu’il suffi- rait d’un abaissement de quelques degrés dans la température moyenne des Alpes pour que le massif de montagnes compris entre la Val-Sasina et le lac de Lecco, fût envahi par les glaces; et par conséquent , si les glaciers de la Valteline arrivaient jadis à Bellagio, il devait exister au pied du Monte-Codeno un glacier descendant par le vallon d’Esino jusqu’à Varenna. Ce dernier glacier se serait trouvé , relativement à celui qui descendait des Alpes, dans une position analogue à celle du glacier du Tacul, relativement à la mer de glace de Cliamouny , ou bien à celle du glacier du Lauter-Aar , relativement à celui du Finster-Aar ; les fragments éboulés des cimes du Monte-Codeno seraient des- cendus jusqu’à la vallée principale, et ils y auraient formé une moraine médiane à la rencontre du glacier venant des Alpes ; dans aucun cas, les blocs de ce dernier glacier n’auraient remonté vers le Monte-Codeno ; or, je n’ai vu dans le vallon d’Esino que des blocs de roches de la Valteline ! Enfin, il n’y a pas jusqu’au petit accident que j’ai signalé dans un bloc fendu de Villa-Albese qui n’exige une antre explication que celle du transport par les glaciers; car on ne supposera jamais que la glace ait pu se mouvoir à travers une fente de quelques centimètres pour en arrondir les aspérités! On peut donc conclure, je pense , que jamais « le lac de Como » n’a été le couloir d’un grand émissaire dans lequel se seraient » confondus tous les glaciers de la Val-Telline , et qui seraient » descendus jusqu’à la plaine du N. de l’Italie (2) ; » on "peut con- clure aussi que les blocs erratiques du revers méridional des Alpes, et les cailloux roulés de la vallée du Pd ont été transportés à (i) E. de Beaumont, Institut , t. X, p. 5oi. ^2) Agassiz, Etudes sur les glaciers, p. 2G1. SÉANCE DU 17 FEVRIER 1845. 303 leurs positions actuelles par de grands courants provenant, suivant toute probabilité , de la fusion des glaciers antérieurs au dernier soulèvement des Alpes. Il serait arrivé ici ce que M. Agassiz a admis pouvoir arriver en Suisse: « Si, par une cause quelconque, » un de ces immenses glaciers chargés de débris de rochers , » comme le glacier inférieur de PAar ou le glacier de Zermatt , » venait à fondre, et si la foule avait lieu assez rapidement pour » déterminer des courants capables d’entraîner de pesantes masses » de glace chargées de blocs , quelques uns de ces blocs seraient alors !> transportés au loin sur ces radeaux flottants (1). » M. Martins fait observer qu’au Spilzberg les glaces flot- tantes ne transportent pas de blocs de roches à leur surface, parce que ceux ci tombent très vite à la mer ; il n’y a de transportés à de grandes dislances que ceux , en très petit nombre, qui sont enchâssés dans la glace, il n’admet pas que les milliers de blocs que l’on voit entassés sur les flancs des vallées des Alpes y aient été amenés par des débâcles; il cite notamment la vallée del’Arve, au-dessus de Sallen- che, qui présente, à environ 200 mètres au-dessus de son fond , ces traînées de blocs ou moraines longitudinales si remarquables et couvertes cle bois de sapins, tandis que le sol plus haut et plus bas est occupé par des cultures. Enfin il ne croit pas que les moulures rectilignes de Landeron et de la Forclaz puissent être attribuées à des glaces flottantes , cardans une débâcle générale il n’y aurait que des courants d eau et de glaces sans cailloux. M. de Collègue dit qu’il n’y a guère qu’un millier de gros blocs sur le San-Primo; comme il y a au moins cinquante glaciers dans la partie supérieure des vallées qui débou- chent dans celle h l’ouverture de laquelle est situé le San- Primo , il ne voit rien d’impossible à ce que chacun d eux ait pu fournir une vingtaine de blocs. Il admet qu’il s’est pro- duit des roches polies et striées lors de la fusion générale des glaciers. (i) Théorie vies glaces et ses progrès, Bibliothèque universelle de Genève T t. XLÏ. p. 127. 304 SÉANCE DU 3 MARS 18'l5. Séance du 3 mars 1845. présidence de m. de verneuil , ; vice-président . M. Raulin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance* le Président proclame membres de la Société : MM. Graugnard (Gabriel) , docteur en médecine à Paris, rue de Courcelles, n° 36, présenté par MM. Vi/quesnel et d’Ar- cbiac ; Faissoles, capitaine du génie, à Paris, rue de Grenelle- Saint -Germain , n° 89, présenté par MM. d Etaule et Le Blanc ; SVOzersky, lieutenant-colonel au corps des mines, pro- fesseur a l’École des mines, à Saint-Pétersbourg, présenté par MM. Aie. d Qrbigny et de Verneuil. Le Président annonce ensuite deux présentations. DONS FAITS A LA SOCIETE. La Société reçoit : î> De la part de M. Hardouin Michelin, Iconographie zoo- phytologique ; description par localités et terrains des polypiers fossiles de France et pays environnants ; te\le et planches , 1 3® à 1 (>e livraison. De la part de M. le ministre des travaux publics, Etude du bassin houiller de Greissessac [Hérault), faite en 1838 par Napoléon Garella, in-4°; 1 12 pages, avec atlas de ! ! pl. in f°, Paris, 1 843.. De la part de M. Murchison , Synopsis of the char act ers , etc. (Résumé des caractères des fossiles du calcaire carbo- nifère d Irlande, par Frédérick M’Coy, sous la direction de Richard Griffith); in-4°, 207 p. 29 pl. Dublin, 1844. De la part de M. Charles T. Jackson, Final report , etc. (Dernier rapport sur la géologie et la minéralogie de l’Etat. SÉANCE DU 3 MARS 1845. 305 du New-Hampshire ; publié par ordre de la législature de cet état) ; in-4°, 376 p. 10 pl. et cartes; Concord. N. H. 1844. De la part de M. Achille Delesse, 1 ° Mémoire sur la pré- paration mécanique de la calamine dans la Haute-Silésie, 2e partie (extr. des Annales des mines, t. VI, 1844); in- 18, p. 213-270, 3 pî. Paris, 1844. 2° Analyse de la gréenovile (extr. des Annales des mines, t. VI, 1 8M.) ; in-8°, p. 325-336 ; Paris. 1844. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences , 1 8Z|5 , 1er semestre ; t. XX, nos 7 et 8. Annales des mines , hc série, t. VI, 5e livraison de 1844. Bulletin de la société de géographie , 3e série, t. Il I, n° 13, janvier, 18i5. U Institut, nos 582, 583. The Athecnœum , nos 904, 905. The Mining Journal, n° Zi 9 7. M. de Verneuil met sous les yeux de la Société des épreu* vesdes planches de fossiles qui doivent faire partie du Geolo- gical Suivey of En gland, dirigé par M. de La Bêche. M. Ed. Forbes, qui est chargé de celte publication, compte figurer et décrire toutes les espèces de la Grande-Bretagne, dont il aura des échantillons en bon état de conservation, sans s’astrein- dre à aucun ordre géologique. Chaque livraison se compo- sera de 25 planches contenant chacune une ou deux espèces, et sera livrée à très bon marché, le gouvernement se char- geant tles frais. M. Martins met sous les yeux de la Société des roches polies et striées recueillies par M. Bravais et lui. Il fait observer que sur des calcaires provenant de Grindelwald les parties en saillie sont seules polies et striées, tandis que les parties rentrantes ne le sont pas. 11 fait remarquer que dans la roche du Saint-Bernard les surfaces polies ne sont pas seulement superficielles, mais qu elles pénètrent dans l’intérieur de la roche. 11 admet que les roches doivent leur poli et les stries qu elles présentent à des causes très différentes. M. Bozet dit que sur la partie occidentale du Mont-Dore Soc. Géol. Tome II, 2e série. 20 306 SÉANCE 1)U 3 MARS 1815. il a observé des tracliyt.es polis qui présentent des lignes assez régulières. Près du confluent de l’Alagnon et de l’Ailier, à Lempdes, il y a des rochers verticaux de gneiss qui pré- sentent un poli et des stries très fines qui lui paraissent dus au passage de cailloux et de torrents boueux. Dans la plaine au-dessous, il y a un dépôt d’alluvion puissant composé en gratifie partie de cailloux de basalte. M. Viquesnel dit que les stries des trachytes du Mont-Dore sont un effet de cristallisation ; elles se trouvent sur les di- verses surfaces des plaques de la roche. Quant au gneiss de l’Alagnon, ayant remarqué des stries sur différentes sur- faces situées à angle droit les unes par rapport aux autres, il ne peut admettre que les stries aient été produites par le passage des cailloux. MM. Rozet et d Archiac disent que les roches dans les- quelles il y a du talc ou de la stéatite présentent fréquem- ment dans leur intérieur des surfaces polies et striées. M. de Roys rappelle qu’il a annoncé, il y a déjà quelques années, qu’il avait observé des roches polies et striées dans le massif néocomien deBeaucaire [Bull, de la Soc.géol ., t. If, p. 66'), ainsi que sur les Alpines entre Saint-Remy et Arles, il a la conviction que ces stries sont dues au passage des cailloux roulés du diluvium alpin. Ces cailloux ont franchi le massif de Beaueaire pour se répandre au-dessus des argiles subapennines qui s’étendent jusqu’à Nîmes et Aigues-Mortes. C’est également au-dessus des Alpines qu’ont passé les cailloux qui s’étendent vers Barbegal. Les stries dans les deux par- ties sont parallèles à la direction du passage de ces cailloux. Près du point où ils ont franchi le massif de Beaueaire existe une fissure connue sous le nom de Roque-partide , où passait l’ancienne voie romaine, dont les faces verticales sont éga- lement polies, mais sans aucune apparence de stries. M. Pomel met sous les yeux de la Société des échantillons de végétaux fossiles des environs de Paris, et lit la note sui- vante : SÉANCE DU 3 MARS 1845. 307 Note sur des végétaux fossiles nouveaux découverts âansle calcaire grossier des environs de Paris, par A. Pomel. En 1828, époque à laquelle M. Ad. Brongniart fit paraître son Prodrome d’une histoire des végétaux fossiles, la flore du calcaire grossier parisien ne comptait qu’un bien petit nombre d’espèces , et encore la plupart d’entre elles n’étaient que très imparfaitement connues et rangées parmi les fossiles de famille incertaine. Ces dernières étaient les Phyllites linéarisé P . nerioides , P. mucronata , P . re mi for mis , P. retusa , P. spathulata , P. laneea ; les Cuhnites nodosus et ambiguus et des exogenites. Lès espèces mieux déter- minées étaient réduites à quatre : Ec/uisetum brachyodon -, Cauli- nites parisiensis , P inus Dejrancii, Flabc llaria parisiensis , auxquelles il faudra joindre le potamophyllites multinervis , qui appartient aussi à la même flore. C’était donc un total de quinze à seize espèces dont une seule, le caulinites pouvait alors être considérée comme marine , ce qui constituait une véritable anomalie au mi- lieu de la multitude de corps marins (mollusques et zoophytes) renfermés dans ce terrain , et surtout par la comparaison avec la flore contemporaine de Monte-Bolca , si riche en algues et en naïades marines. Depuis lors cependant, M. Brongniart a découvert un fucoïde, annoncé l’existence de plusieurs caulinites, et considéré les deux culmites de cette flore comme ayant appartenu à des zostera ( Dictionnaire d’Orbigny , art. Cul mite , Caulinité). Plus récem- ment, M. Unger, dans son Ch loris protogœa , a rangé ces deux espèces dans le genre Caulinites à cause de leur ressemblance avec les tiges de certaines naïades de la mer Rouge , les Thalassia. Si nous ajoutons à cela la découverte de gyrogonites , d’un palmier (prétendu yucca) et de feuilles, faite par M. E. Robert dans les carrières de Passy, nous aurons réuni tout ce qui avait été fait et dit jusqu’à ce jour sur la végétation enfouie dans le calcaire grossier de Paris. De nombreuses excursions , faites tout récemment dans le but unique d’étendre nos connaissances sur cette branche de la pa- léontologie, m’ont procuré de nombreux échantillons, dont la plupart ont été déposés aux galeries du Muséum, et où j’ai re- connu des espèces totalement nouvelles et très intéressantes par les formes auxquelles elles ont appartenu. C’est dans les mêmes couches où M. Al. Brongniart avait depuis longtemps reconnu l’existence de nombreux débris végétaux regardés alors, pour la plupart, comme indéterminables, que nous avons recueilli les 308 SÉANCE DE 3 MARS 1815. pièces les plus intéressantes. Ces couches sont les premières qu’on rencontre au-dessus du calcaire clilorité , et c’est entre les divers bancs pétris de milioîithes, dans les marnes un peu fissiles qui les séparent, que les empreintes sont plus nombreuses et souvent plus parfaitement conservées* Dans bien des cas cependant, la nervation des feuilles a totalement disparu, surtout lorsque la texture de la roche est trop grossière, ce qui rend souvent très difficile leur détermination exacte. L’abondance de ces débris dans le calcaire grossier varie con- sidérablement à de petites distauces et dans les quelques bancs où on les rencontre; à Pa^sy, par exemple, et dans une seule des carrières de Vaugirard, on les trouve en grande quantité, mais malheureusement dans un état très imparfait, dans une couche assez épaisse de marne sableuse avec rognons de silex et copro- li thés signalés pour la première fois par M. E. Robert. Dans une autre carrière de Vaugirard, les Caulinites et les Fucoïdes se trou- vent surtout dans les marnes qui recouvrent le banc superposé à la couche précédente; un peu plus loin au S. -O , à la «carrière Royale , c’est encore dans une couche séparée de la précédente par deux ou trois bancs, dont un est presque entièrement formé de moules de coquilles , où on remarque comme plus fréquents , des fragments du Cerithiurn giganteiun , le Voluta Harpa , le Crassatella turnicla , etc., que les empreintes sont plus nombreuses et cepen- dant moins variées. Dans cette carrière nousavons observé un ait curieux qui nous prouve que les végétaux , la plupart marins , du calcaire grossier, ont en grand nombre végété à la place même où on les trouve; car le Caulinites Brongniartii traverse verti- calement une couche entière et non pas accidentellement, puis- que sur une tranchée de 3 à 4 mètres d’étendue horizontale, on pourrait peut-être compter plus de cinquante individus ainsi dis- posés, et aucun au contraire placé horizontalement; du moins c’est le cas qui s’est offert à nous.. Du reste, quelques individus faisant exception ne pourraient donner lieu à aucune objection, car ils pourraient certes bien être considérés comme des.fragments de tiges arrachés à leur souche rampante , dont la position à la surface du fond de la mer rend très facile leur arrachement par le mouvement de l’eau. La couche immédiatement au dessus pré- sente au contraire un grand nombre d’impressions du Caulinites grandis qui ont certainement végété sur place; mais comme cette espèce a ses tiges toujours rampantes, elles sont disposées presque horizontalement, en se relevant toujours d’un côté, qui a dù être celui du développement de la plante. A la vérité, le ca- SÉANCE DU 3 MARS 1845. 303 ractère propre à faire reconnaître cette espèce et même le genre a ici disparu, le vide laissé dans la couche par la décomposition de la substance végétale ayant été rempli par de l’argile mêlée au détritus charbonneux qu elle a laissé ; mais on ne peut la diffé- rencier d’empreintes semblables, disposées de même dans les couches et ayant conservé tous leurs caractères spécifiques, que nous avons trouvées en abondance aux environs deGentilly et de la Glacière. Entre Vaugirard et les murs d’enceinte près du chemin de fer on ne trouve d’empreintes que dans une très mince couche d’ar- gile verte, devenue noire sur certains points par son mélange avec les débris tout-à-fait désorganisés des plantes qu’elle ren- ferme. Plus près d’Issy on retrouve la même argile séparée du calcaire chlorité par une seule couche pétrie de miliolithes. Elle renferme un grand nombre de tiges un peu moins altérées et qui semblent être des fragments de Caulinites. À une centaine de mètres de distance, une carrière montre une seconde couche argileuse séparée de la précédente par un banc de calcaire; mais ici les débris sont encore plus nombreux et un peu plus reconnaissables, ce sont surtout des Fucoïdes, des Cau- linites et des feuilles qui présentent le caractère des Zostérites de M. Brongniart et qui ont sans doute appartenu à quelques unes des espèces de Caulinites , ou peut-être à d’autres naïades à tiges herbacées qui se sont plus difficilement conservées. Là on trouve aussi des tiges eu place, mais altérées, de Caulinites grandis. Cette dernière carrière nous a montré un épaississement de cette couche d’argile, dii à l’existence d’une petite dépression à la surface de la couche sur laquelle elle s’est déposée. Les débris végétaux y sont encore bien plus abondants et produisent une espèce de lignite ou plutôt d’argile charbonneuse qui renferme aussi des coprolitlies, des débris de poissons et de très petits grains de résine fossile. Presque tous les fossiles reconnaissables sont des Fucoïdes, des Caulinites et des Zostérites, c’est-à-dire des plantes marines; on y trouve cependant quelques morceaux de bois, probablement de conifères. La longueur de cet accident n’a pas plus de 15 à 20 mètres et semble avoir été mis à jour tout récemment. L’exemple remarquable de tiges en place dans une carrière voisine nous fait croire que ces plantes marines, qui composent presque entière- ment le lignite, ont végété sur place pendant assez longtemps et que rampant à la surface du fond, ou s’y déposant après avoir SÉANCE DU 3 MARS 1843. 310 vécu » elles y étaient successivement recouvertes par l’argile qui se déposait, jusqu’à ce que la formation plus rapide d’un banc calcaire soit venu y détruire la végétation en la recouvrant d’une masse épaisse de détritus aride et de coquilles microscopiques. Un grand nombre de ces fossiles végétaux sont en outre très intéressants par les zoophytes qui s’y étaient attachés comme cela arrive dans les mers de nos jours; ce sont principalement des Escares, des Liclienopores, et un Grbitolithe d’une forme assez par- ticulière, qui seront décrits par M. Michelin dans un supplément à son Iconographie zoopliytologique. En réunissant les espèces que nous avons observées à celles déjà connues nous aurons donc une flore plus normale, plus en rapport avec la nature du terrain auquel elle appartient, comme on pourra le voir par l’exposé que nous allons en faire. Algues. — La plus remarquable des plantes que nous ayons re- cueillies est un Fucoïde que nous nommerons F, Beaumontianus , et qui est parfaitement caractérisé par sa fronde membraneuse , profondément pinnatifide, à lobes entiers, ovales, spatulés, ou quelquefois même un peu cunéiformes, naissant par une base très étroite, nombreux et comme imbriqués, par son stipe linéaire, comprimé, strié longitudinalement, et très allongé, qui, isolé, pourrait être confondu avec des Zostérites mal conservés. D’autres fragments plus incomplets signalent une espèce voisine des Laminaria, à fronde plane, linéaire, assez large et parcourue par une nervure médiane , qui disparaît bien avant d’atteindre le sommet. Les feuilles longues, obovales ou spatulées, et plus ou moins sinueuses et obtuses, signalées par M. Robert comme semblables à celles des palétuviers, semblent par leur seule nervure médiane épaisse et dont les déformations indiquent l’état cellulaire et non fibreux , avoir été une espèce de fucoïde voisine des Laminaria , et notamment du Fucoïdes tuberculosus de la craie de l’île d’Àix, Nous en avons même vu deséchantillons dans la couche de lignite, qui ayant leur tissu conservé, n’ont présenté aucune autre nervure que celle du milieu, aucun réseau fibreux, mais au contraire une structure très semblable à celle des Fucoïdes de cette section. Mais il nous a été impossible d’en conserver des échantillons, qui se délitent tous promptement au contact de l’air un peu sec. Un échantillon de la deuxième espèce montre en outre un petit Fucoïde parasite à fronde rameuse dont les divisions sont simples, cylindriques, égales, et paraissent avoir été coriaces. Une autre espèce est encore indiquée par des frondes très ra- SÉANCE DU 3 MARS 1815. 311 me u ses à divisions cylindriques, grêles, assez courtes et un peu renflées vers leur sommet; elle pourrait se placer près de Xlntri- ca tus du terrain néocomien, dont elle diffère cependant beaucoup par des caractères spécifiques ( F. Dujrenoyi ). Chnracées. — M. Robert a trouvé à Passy des graines de Chara qu’il dit être identiques au Ch. medicaginula des meulières. Naïades. — Le Potamophyllites multinervis doit être placé dans cette flore ; car il a été trouvé probablement dans le lignite de ce terrain et non dans l’argile plastique. M. Unger a fait connaître deux Potamogeton de Monte-Bolca , qui diffèrent de celui-ci; les graines qui ont caractérisé pour lui le genre Halochloris sont probablement d’une de ces deux espèces et les feuilles celles d’un Zostera ou d’un Cyinodocea JNous avons dit que M. Brongniart avait annoncé l’existence de plusieurs Caulinites dans le calcaire grossier parisien; nos re- cherches ont confirmé ses prévisions , et nous pouvons compter comme bien distinctes : 1 0 le fossile décrit par Desmarest comme un zoophyte, qui est caractérisé par ses tiges très rameuses, ren- flées entre les insertions des rameaux et marquées de cicatrices de feuilles presque annulaires [C. Desmaresti ); 2° une espèce (C. grandis) à tiges moins rameuses, rampantes , non renflées, plus grandes et à articulations aussi très rapprochées; 3° un C. Bron~ gniartii â tiges plus grêles , rameuses , non rampantes , marquées de cicatrices semi-annulaires et plus espacées que dans les deux précédentes. Quelques fragments indiquent une plante très semblable à celle nommée Caulinites radobogensis par M. Unger; mais il est un peu moins certain que ce soit une espèce du genre Caulinia pro- prement dit. La position des Caulinites nodosus et C. arnbiguus dans la famille des naïades est hors de doute; car la première espèce ressemble beaucoup aux tiges de Thalassia ciliata , comme l’a reconnu M. Unger. On peut donc, comme lui, les nommer provisoirement Caulinites nodosus et Caulinites arnbiguus. Nous rapportons à cette même famille, comme très voisine du Cymodocea , une plante à tige grêle, sarmenteuse , striée, presque dépourvue d’articulations , portant des rameaux qui sur notre échantillon sont tous du même côté, courts et pourvus de cicatri- ces de feuilles très rapprochées et presque annulaires ( Caulinites cymodoccitcs ). Une autre plante plus curieuse ressemble à une feuille traversée par une seule nervure et linéaire, lorsqu’on ne la trouve qu’en 312 SÉANCE DU 3 MARS 1 845. fragments; mais mieux conservée , elle présente une tige rameuse pourvue de cicatrices de feuilles presque annulaires plus rappro- chées à l’origine des rameaux , et ensuite de plus en plus espacées à mesure qu’elhs sont plus éloignées de l’origine. Elles ont du être herbacées, traversées par un axe fibreux grêle , donnant des ra- mifications alternes qui se portent vers l’insertion des feuilles ( Cau - Unités herbaceus ). Des feuilles nombreuses présentant tous les caractères de celles des plantes marines de la même famille ont probablement appartenu à quelques unes des nombreuses espèces indiquées par les tiges; pour ne pas multiplier les espèces nous nous contente- rons donc de signaler des empreintes filiformes , très allongées (1 à 2 décim.), marquées de trois ou quatre nervures égales assez mai quées, qui s’insèrent sur de petites tiges grêles, striées, partout des feuilles alternes assez espacées et qui rappelleraient un peu les formes du genre ruppia, si les bases des feuilles étaient un peu plus larges et renflées; ce sont probablement des débris d’une petite espèce de Zoslera que nous désignerons sous le nom de Caulinites zostéoroïdes (le genre Caulinites renfermant provisoi- rement les tiges de toutes les naïades marines, comme l’a étendu M. Unger). A Radeboy (Croatie), on a trouvé une autre naïade appelée Zostcrites marina par M. Unger , et qui me paraît devoir être con- sidérée comme les tiges précédentes, c’est-à-dire sans égard aux analogies qui ne sont pas très certaines (je n’ai du reste rien ren- contré qui lui parût analogue) ( Caulinites Ungeri). Les naïades qui se montrent déjà dans les schistes bitumineux ( Zosterltes aghardiana) , ont aussi laissé de leurs débris dans la craie inférieure \Zost. orbigniana , bellonisana , elongata, lineata de l’île d’Aix), et c’est surtout, comme on vient de le voir, dans les couches tertiaires qu’on en trouve le plus. L’Oohthe, qui n’en avait pas encore offert, paie aujourd’hui son tribut par une espèce bien remarquable qui a dû appartenir au genre Caulinia proprement dit, et par conséquent au genre fossile Caulinites. Nous en devons la connaissance à M. Michelin, qui l’a recueillie dans l’Oolithe moyenne aux carrières de pierre lithographique de Cliâteauroux avec le Zamia Feneonis , une ou deux conifères voisines des Brackyphyllum , des Sphenopteris et un Fucoïde voisin du B. recar vus. Les tiges de cette espèce, que nous nommerons Caulinites Michelinii , sont simples , plus ou moins épaisses, rampantes et tortueuses, revenant même quelquefois sur elles-mêmes. Elles portent des cicatrices de feuilles presque annulaires très rappro- SÉANCE DU 3 31 AH S l 845. 3 1 3 chées, et à leur partie inférieure de gros tubercules ou mame- lons équidistants disposés en une seule rangée d’où partaient sans doute les racines. Nous n’y avons vu aucune feuille qui puisse se rapporter à cette espèce, dont les débris ont cependant végété bien certainement sur place. Palmiers. — Cette famille de plantes a laissé des traces assez remarquables de son existence ancienne dans les couches du calcaire grossier ; les tiges constituent peut-être deux espèces dont une, plus anciennement trouvée par M. E. Robert dans les car- rières de Passy , a été considérée par lui comme une libacée du genre Yucca ; la forme des cicatrices des feuilles et les traces du déchirement de leurs faisceaux vasculaires ne permettent pas de séparer cette plante des Palmacites, dont elle constituera pro- bablement une espèce distincte lorsqu’elle sera mieux connue. Une autre tige, différente de la première par sa forme conique, est bien plus remarquable par sa belle conservation et sa forme particulière qui lui a valu le nom de Palm. Cocoijormis (Brongn. MSC. ) ; elle a été trouvée dans le calcaire grossier près de Meudon et acquise par l’Ecole des mines, dont elle orne les belles collections. Les feuilles fossiles de Palmiers sont connues depuis plus long- temps dans les couches du calcaire grossier de Paris. De nouveaux échantillons mieux conservés ont complété ce que nous connais- sions des formes du Flabellcria parisiensis. Plus récemment j’ai rencontré à la Glacière une empreinte qui semble indiquer une espèce différente par son rachis plus aigu et surtout plus oblique d’un côté, par son pétiole plus étroit, non strié et s’élar- gissant au sommet, mais analogue d’une autre part, par sa petite taille et le petit nombre de ses folioles. Amentacécs. — Cette grande famille, si abondante de nos jours en genres et en espèces, se trouve représentée dans la flore du calcaire grossier par une espèce du genre TJlmus différente de toutes celles que l’on connaît. La grandeur de son fruit, l’étendue de son aile membraneuse, qui est dépourvue de nervure et pres- que ronde, la forme ovale-lancéolée de son fruit le distinguent des Ulmus bicornis , Prisca et Zclcovæjolia de M. Unger, de notre XJlmus Lamothii des terrains pliocènes d’Auvergne et de celle d’Armissan près Narbonne. Nous la nommerons Ulmus Bron- gniartii. Phyllites ( dicotytédones ) . — Nous avons retrouvé la plupart des feuilles figurées par M. Brongniart, dans la description géolo- gique des environs de Paris, et nous avons observé quelques 314 SÉANCE DU 3 MARS 1845. formes nouvelles qui sont aussi indéterminables dans leurs rap- ports génériques avec les végétaux vivants : nous signalerons cependant une espèce qui s’est offerte avec ses nervures dans un fragment très incomplet et qui nous a présenté quelque analogie, peut-être éloignée , avec la nervation du Protêt! mèlalèiica. Conifères. — Cette famille de végétaux, si remarquable par son abondance aux époques géologiques anciennes, n’a laissé dans le calcaire grossier parisien que des débris assez rares et bien fragmentaires; nous n’avons rien vu du Pi/uis Def ranci i ancien- nement trouvé à Accueil; mais nous avons recueilli un fragment qui présente un cône assez semblable à ceux des Thuja et des débris mutilés de la plante décrite d’abord comme un Equiseluni ( Brachytlon ) parM. Brongniart, et que M. Unger a reconnu être une Conifère très voisine du Thuja articula ta ou Callitris quadri- valvis ; de nombreux rameaux, des fruits même ne permettent pas de révoquer en doute cette analogie , qui nous engage à faire de cette plante une simple espèce de Callitris sous le nom de Callit . Ungeri ( Thuytes callitrina Un g. , Thuja nudicaulis Brongn.). C’est probablement cette espèce dont M. Brongniart a parlé dans le Dict. tV Orh. comme appartenant au genre Callitris. On voit par cet exposé rapide combien les caractères de cette flore locale ont changé à la suite de quelques recherches et com- bien de découvertes on doit s’attendre encore à faire dans cette partie de l’histoire paléontologique des environs de Paris. Note additionnelle . Depuis la rédaction de ce qui précède, j’ai continué mes re- cherches aux environs de Paris, et j’ai été assez heureux pour ajouter quelques espèces à celles que j’avais déjeà signalées. Dans le calcaire grossier , proprement dit, j’ai recueilli un fucoïde à fronde rameuse filiforme , dont les rameaux simples portaient des globules agglomérés (conceptacles?) sessiles cominedans lesgigar- tina, mais les tiges sont striées transversalement comme celles du rhodomela penastroïdes. Une autre empreinte indique une espèce voisine des Caulerpa delà section des Chauvinia (C. ericoides). Elle présente de petites frondes peu rameuses , portant à leur sommet des feuilles ou petits rameaux ovoïdes aigus presque imbriqués, qui rappelleraient les formes du Lomentaria ovalis , si dans celle-ci leur état gélati- neux pouvait permettre la conservation de leur forme ovoïde. Une souche épaisse , marquée de cicatrices presque annulaires, tuber- SÉANCE DU 3 MARS 1845. 3 t 5 culeuses et rapprochées, indique l’existence d’une naïade très voisine du thalassia testudinum. Le flabellaria parisiensis, dont M. Brongniart avait dessiné un échantillon très imparfait et réduit à ses nervures, avait les lobes linéaires larges de 5 à 6 millimètres, longs de 3 à 4 décimètres, et formant un éventail très étroit en raison de leur petit nombre. Le pahnacites cocciformis existe en assez grande abondance dans les carrières de Yaug rard, et nous en avons recueilli plusieurs échantillons assez bien caractérisés. Avec eux se trouve un fruit déformé, convexe sur une de ses faces , et ayant sa base comme trilobée, qui pourrait bien avoir appartenu à la même espèce ou à une autre espèce de palmier. Nous considérons comme une espèce de Cyprès, des rameaux comprimés partant des feuilles opposées, disposées sur quatre rangs, comme dans ces végétaux et les tliujas, mais différant de ces derniers par la disposition irrégulière des ramifications. Si nous sortons du calcaire grossier , proprement dit , pour étudier les débris enfouis dans les terrains de mélange , c’est-à- dire dans ceux renfermant une grande quantité de débris ter- restres et d’eau douce mêlés à des restes marins , nous trouvons, entre les gypses et les sables de Beauchamp , dans les calcaires plus ou moins siliceux et les marnes avec lesquelles ils alternent, le caulinites parisiensis (C. Desmaresti nob. ) des fragments des autres naïades propres au calcaire grossier , et de plus un fucoïde assez semblable aux très petites variétés du dictyota dichotoma, dont je dois la communication à M. Rouault. Dans les bancs renfermant plus exclusivement des débris fluviatiles ou la- custres, existent de nombreux fruits de Chara , se rapportant aux espèces décrites par M. Brongniart, sous les noms de Ch. Lemani , Ch. medicaginula , et, en outre, une espèce remar- quable par les tubercules qui hérissent sa surface ; elle paraît assez analogue au Ch. tubercula de l île de Wight, décrit par M. Lyell. De nombreux fruits semblent aussi indiquer une es- pèce différente ou seulement une variété plus lisse du Ch. medi- caginula. Là aussi se trouvent de nombreuses feuilles linéaires sans nervures médianes plus marquées, offrant des nervures très rapprochées, parallèles, peu marquées et des côtes saillantes, parallèles qui ressemblent, au premier aspect, à de fortes ner- vures. On les a déjà comparées aux feuilles de typha , avec les- quelles elles ont certainement quelque analogie ; de semblables empreintes ont été découvertes dans le Midi de la France , à Valréos ( Drôme ), avec des Chara medicaginula, et dans des cir- 316 SÉANCE Dü 3 MARS 1845. constances géologiques assez semblables. C’est aux environs de la Glacière et de Clicliy-la-Garenne, dans les fossés des fortifica- tions, que nous avons recueilli tous ces fossiles. Dans les grès et les sables inférieurs au calcaire grossier, on a aussi trouvé quelques débris de végétaux assez remarquables, dont nous devons la communication à M. Graves; ce sont : un flabellaria, décrit par M.- Unger , sous le nom de Fl. maxima , d’après des échantillons de Radeboy (Croatie) ; la largeur de son pétiole semble coïncider assez bien avec celle des cicatrices pétiolaires du palmacites echinatus des mêmes terrains pour qu’on puisse penser que ces divers débris ont appartenu à la même espèce ; un cône de pins qui paraît différer des espèces fossiles connues, mais dont on ne connaît pas la forme des dis- ques des écailles; des rameaux mutilés présentant, par la forme de leurs feuilles, une certaine analogie avec les Woltzia, et par conséquent avec les araucaria ou les cryptomeira ; mais des échan- tillons plus complets seraient nécessaires, et su rtout descônes, pour établir plus sûrement ces analogies. Nous espérons pouvoir exposer plus tard les caractères de la flore de l’argile plastique, pour laquelle nous avons déjà des ma- tériaux intéressants, que nous devons à l'obligeance de MM. Rui- nartde Brimout et deWeigmann. M. Elie de Beaumont metsousles yeux de la Société deux échantillons de basalte des environs d’Eisenach qui contien- nent, outre beaucoup de péridot, plusieurs fragments an- guleux de grès quarzeux passé, par l’effet de la chaleur du basalte, à un état jaspoïde. Le feldspath des basaltes (le La- brador) renferme des quantités d’alcali, d’alumine et de si- lice dans lesquelles la proportion de Toxigène est comme les nombres I, 3 et 6 ; le feldspath des granités (orthose ou al- bite) renferme des quantités d’alcali, d’alumine et de silice où la proportion d’oxigène est comme les nombres 1, 3 et 12. D’après Cela, et en ayant égard à la présence du péridot dans le basalte et du quarz dans le granité, on voit que le basalte fondu doit être beaucoup plus avide de silice que le granité fondu. Or, le basalte ayant enveloppé des fragments anguleux de grès quarzeux, sans détruire même leurs angles, on ne doit pas s étonner que des cailloux roulés de quarz aient pu être observés dans un granité; il ne faut pas oublier que 3 1 T SÉANCE DU 3 MARS 18 45. pour obéir complètement au jeu de leurs affinités, les sub~ tances soumises à l’action de la chaleur doivent être porphy- risées; les fragments un peu gros y échappent toujours facilement, et c’est ce qui fait que des cailloux de quarz pas- sent quelquefois dans un haut-fourneau sans y être altérés et se retrouvent dans les laitiers. M. Virlet répond à M. de Beaumont que les objections qu’il avait présentées dans la dernière séance, relativement au fait intéressant signalé par M. de Zippe, avaient d’autant moins pour but de le contredire , que lui-même a annoncé que depuis longtemps il considérait certains granités aussi bien que certains porphyres et autres roches réputées d’épan- chement comme n’étant que des roches régénérées en place par métamorphisme [Bull., Iresér. , t. VI, p. 279 et3 I 3 ;t. VII, p. 1 60 et 1 70 ; t. VIII , p. 307 , et Génl. de la Morée , p. 300). Ainsi le granité porphyroïde de la Bâtie, route d’Albertville à Moutiers en Tarentaise, et la roche de Deville, dans les Ardennes, ne sont pour lui que des schistes d’origine sedi- mentaire, arrivés, soit par suite de leur composition parti- culièie, soit par suite de toute autre cause, à un état de transformation extrême qui leur a fait perdre en grande partie leur schistosité, laquelle ne se fait plus sentir qu’en grand. (Réunions extr. de la Soc. en Savoie.) M. de Beaumont croit que les parties fines ont pu seules se fondre, tandis que les cailloux restaient intacts par suite de leur volume. M. Elie de Beaumont lit une lettre de M. le docteur C.-T. Jackson sur le gisement de cuivre et d’argent natifs des bords du lac Supérieur. Boston, le 24 décembre 1 84 4 • Depuis l’époque de ma dernière lettre, j’ai fait un voyage au lac Supérieur pour examiner les mines de cuivre de Kewena-Point , sur le rivage méridional de ce lac. J’ai trouvé là une légion minérale très intéressante. Le cuivre s’y présente généralement à l’état métallique, remplissant toutes les cavités d'un trapp amygdaloïde disposé en dy\es très épais, coupant les couches du vieux grès rouge et du conglomérat, qui forment, dans cette partie, les bords du lac Supérieur. 318 SÉANCE DU 3 MARS 1815. Le cuivre se trouve à la fois à l’état de cuivre métallique pur et à l’état d’alliage d 'argent et de cuivre , renfermant des spiculés et des grains à? argent pur enveloppés dans sa masse, et de l’argent cristallisé en globules anguleux adhérents à la surface de l’alliage cuivreux. Quelquefois des veines d'argent pur coupent de grandes masses de cuivre contenant seulement à l’état d’alliage de { 040 0 à d’argent; les veines paraissent alors s’ètre formées dans la masse par voie de ségrégation. J’ai trouvé des morceaux de cuivre et d’argent unis ensemble , de manière à pouvoir être aplatis sous le marteau en plaques minces, sans que la proportion de l’alliage y surpassât celle qui vient d’être indiquée. L’un des morceaux dont il s’agit était un nodule arrondi de l’amygdaloïde , et après avoir été aplati sous le marteau , il présentait une plaque formée de deux parties à peu près égales séparées par une ligne légère- ment sinueuse : l’une des parties formée d’argent, et l’autre de cuivre, contenant deux parcelles d’argent nettement circonscrites. Maintenant , si on vient à fondre au chalumeau une pièce telle que celle-là, le cuivre et l’argent s’unissent intimement, et il en résulte un alliage. Cependant , si on place un bouton d’argent et un de cuivre côte à côte sur le charbon , et qu’on fonde le cuivre le premier, on peut unir les deux boutons par leur surface, sans qu’ils se fondent beaucoup l’un dans L’autre , pourvu qu’on n’em- ploie aucun flux ; mais un pareil état de choses ne pourrait s’être produit dans une masse de roches trappéennes en fusion , et on est forcé de supposer que l’argent s’est séparé du cuivre à une haute température par quelque loi de ségrégation inconnue. On trouve aussi de Y argent métallique pur répandu en abon- dance dans la roche amygdaloïde en petits grains et en boutons de la grosseur d’un pois. Les mineurs ont été mis à l’œuvre sur un des filons les plus riches, et nous verrons bientôt une grande quantité de métal riche provenant du lac Supérieur. L’alliage obtenu au fourneau ou par la voie sèche donne de 5 à 16 pour 100 d’argent. J’ai analysé dans une seule opération 50 livres (23 kilogrammes) de minerai , et j’ai obtenu pour résultats de gros boutons de cuivre pur et d’argent pur. Parmi les choses curieuses que présente le trapp amydaloïde , on peut citer de grands filons de Datholite (chaux boratée sili- ceuse) de trois pieds d’épaisseur (0m,91), où les cristaux de Da- tholite contiennent de petites écailles de cuivre pur. Il existe aussi dans le trapp des filons de Prehnite de 3 à 4 pieds d’épaisseur (0m,91 à lm,22) également remplis de petites spiculés et paillettes SÉANCE DU 3 MARS 1845. 319 de cuivre pur. L’ analcyme^ la la uni oui te , le spath calcaire , se montrent à la ligne de jonction du trapp avec le conglomérat et le grès, et cette dernière roche est traversée par de nombreux filons de spath calcaire ayant de quelques pouces à 6 pieds de puissance. Du cuivre hydraté siliceux (chrysocale) et du silicate de cuivre noir se trouvent dans le conglomérat à Copper Harbour. Je me suis procuré une masse de cuivre pur du poids de 16 livres (7 kilogrammes) , provenant du lit d’une rivière. Un bloc erratique de cuivre , pesant environ trois mille livres ;( ! ,360 kilogrammes), a été trouvé sur le conglomérat près de la rivière Onontaga. Il provient, suivant toute apparence, de la serpentine de l’ile Royale, située au nord à la distance de 40 milles ( 64 kilomètres). M. Elie de Beaumont présente à la Société, au nom de l’au leur, le Final report of the geology and minercilogy of the s ta teof New- Ha m psi lire , with contributions towards the impro- prement of agriculture and metallurgy , by Ch. T. Jackson , M. D. Il demande la permission d’en citer le passage sui- vant, qui lui a paru renfermer un fait curieux; la traduction est textuelle. « A quatre milles et demi du village de Canaan , dans le lieu nommé Orange-Corner , sur le côté occidental de la grande route, près du sommet du terrain élevé où se fait le partage des eaux qui coulent vers le continent et vers le Merrimack , il existe, dans un granité solide, une série de cavités profondes de la nature de celles appelées Marmites des Géants ( Pot Holes ). L’une d’elles, à cause de sa grande profondeur et de sa parfaite régularité , est appelée le Puits. Cette dernière a 4 pieds 1/4 ( lm,29) de diamètre à la partie supérieure, et 2 pieds (0m,60) au fond; un côté a été enlevé de manière à laisser voir la partie concave d’un demi-cylindre. Depuis la partie supérieure du côté intact jusqu’au fond de la ca- vité , la profondeur est de 1 1 pieds ( 3m,35) , et sur la face opposée de la cavité qui s’arrête au niveau de la route, la profondeur est de 8 pieds (2®, 44). La surface usée, qui forme l’intérieur de ce Pot Hole ancien , est polie , et présente la même apparence que celle des Pot Holes d’origine plus récente observés à la cascade appelée Bellows-Falls. Les habitants du village voisin avaient en- levé les pierres , la terre et l’eau dont ce puits était rempli, dans le désir d’en voir tout l’intérieur , de manière qu’on avait une 32 0 SÉANCE DU 3 MARS 1845. bonne occasion d’examiner sa surface et sa profondeur. J’ai été informé (dit le docteur Jackson) que les pierres trouvées dans cette cavité étaient arrondies et polies, ressemblant ainsi à celles qu’on trouve habituellement dans les Pot-Holes à Bellows-Falls. En explorant les environs immédiats , nous trouvâmes un grand nombre de cavités moins profondes, mais d’une nature semblable, et, sur la surface des rochers où on les avait mises récemment à découvert, nous observâmes de nombreuses stries du genre de Celles qui font partie du phénomène erratique ( Drift Scratches ). En examinant avec la boussole l’alignement des Pot-Holes , nous le trouvâmes dirigé parallèlement aux stries , savoir, du N. 10° E. au S. 10° O. , ce qui semble indiquer que les stries ont été produites par le même courant qui a creusé ces profondes ca- vités dans le rocher. Sur les côtés E. et O. de ce passage de mon- tagne, il y a des élévations rocheuses, mais aucun cours d’eau issu de ces élévations n’a certainement passé sur l’emplacement des Pot-Holes qui forme le point départagé entre les filets d’eau tributaires du Connecticut et ceux tributaires du Merrimack, et qui est élevé de 900 à 1,000 pieds (274 à 305 mètres) au-dessus de ces rivières, ou de 1,229 (375 mètres) au dessus de la mer. On n’a pas mentionné (en Amérique) de Pot-Holes appartenant à l’époque erratique, et leur absence a conduit quelques géologues à nier que l’eau ait joué un rôle dans le charriage du N. vers le S. des blocs erratiques et des terres qui les accompagnent. D’après cela, la découverte actuelle pourra offrir de l’intérêt, car, non seulement elle prouve que les eaux ont autrefois ruisselé sur la surface des roches de ce col élevé , mais en outre , comme les exca- vations sont beaucoup plus profondes que celles qui ont été pro- duites d’une manière semblable par les chutes d’aucune de nos rivières modernes, une durée beaucoup plus longue doitêtre attri- buée aux anciens courants qui leur ont donné naissance. La roche est aussi dure ici qu’elle l’est aux chutes de Bellows-Falls , où il est rare de trouver des Pot-Holes de plus de 3 pieds (0m.91) de profondeur , et cependant ces chutes ont été en action depuis une période antérieure de beaucoup à la création de l’homme, ayant commencé à exister peu de temps après que cette partie du conti- nent a été élevée du niveau de l’Océan à sa hauteur actuelle. Il faudrait que la contrée eût une configuration toute différente de celle qu’elle présente aujourd’hui pour qu’aucune rivière pût pas- ser par ce col. Le Connecticut et le Merrimack devraient s’élever de 1,000 pieds (305 mètres) pour que leurs eaux pussent couler sur ces montagnes. La présence d’un glacier pourrait avoir donné SÉANCE DU 3 MARS 1845. 321 naissance à une cascade, mais les glaciers ne sont pas assez sta- tionnaires pour produire de pareils effets. Je suis disposé à regar- der les phénomènes décrits ci-dessus comme ayant été le résultat de l’action longtemps continuée d’une rivière coulant par le col, à une époque où le terrain n’avait pas atteint sa hauteur actuelle au-dessus de la mer, et présentait une configuration différente qui donnait une direction correspondante aux cours d’eau. Depuis cette découverte, j’ai appris de M. John Mac-Duflie que d’anciens pot-h oie s ont été trouvés entre Plymouth et Neutwarth, à 3 milles de cette dernière ville, ainsi que près de Winchester , où ils ont été mentionnés par M. Evi Tierce, et dans le Vermont, près d’Onion River. Je ne doute pas qu’on n’en trouve dans beaucoup d’autres localités quand l’attention sera appelée sur ce sujet, car ils peuvent aisément rester inaperçus quand ils sont remplis de terre. M. Elie de Beaumont rappelle que des marmites de géants (pot -ho les) liées au phénomène erratique ont été observées en Suède et en Finlande, et que des cavités ana- logues ont été décrites dans les calcaires de la Suisse par M. de Charpentier et M. Agassiz. M. Martins y répond par la communication suivante: Note sur une marmite de géant dans le lit de V Arve a rentrée de la vallée de Chamonix , par Ch. Martins. A l’entrée de la vallée de Chamonix , en face du village des Ouclies, l’Arve est traversée par un pont. Un peu en amont de ce pont et sur la rive droite du torrent, se trouve une marmite de géant (pot-holé) creusée dans un talcschiste vert (serpentine tal- queuse). La partie supérieure de cette cavité est cylindroïde. L’ou- verture a 2 mètres de diamètre, et la flèche de sa courbure inté- rieure est de 0m,4- Elle était remplie de sable jusqu’à 1 mètre au-dessous de l’orifice; sur ce sable se trouvaient cinq gros blocs de protogine arrondis et polis par le frottement. L’intérieur de la cavité était aussi parfaitement lisse et poli. A l’époque où je l’examinai (23 août 1844). l’orifice de cette cavité était à 3 mètres environ au-dessus du niveau du torrent; maiscomme le ht de l’Arve est extrêmement encaissé dans ce point, il est incontestable que dans les grandes crues du prin- Soc. géol. Tome II, 2e série. 21 322 SÉANCE DU 3 MARS 184 5. temps, les eaux doivent s’élever au-dessus du niveau de cet ori- fice. En face de cette cavité, sur la rive droite de la rivière, on remarque dans le lit une grande surface de la même roche et toute sillonnée par l’action des eaux. Les sillons ou gouttières ne sont pas rectilignes , les arêtes qui les séparent sont arrondies ou tranchantes, çà et là on observe des cavités coniques Partout la roche est lisse et polie, aussi bien dans ses parties creuses que dans celles qui sont convexes. Nulle part on n’observe de stries. En aval, à quelques mètres au-dessus de ce pot-hole , toutes les roches présentent de larges surfaces planes et polies sans gout- tières et sans cavités coniques ou arrondies; ces surfai es sont striées. Les stries sont rectilignes, sensiblement parallèles entre elles et à l’axe de la vallée. Toutefois elles remontent un peu comme si la force qui les a produites avait agi suivant la résul- tante de deux forces, dont l’une très grande était parallèle, l’autre beaucoup plus faible, perpendiculaire à l’axe de la vallée. En aval de ces surfaces , sont trois gros mamelons arrondis en amont, escarpés en aval. Ces mamelons sont formés d’une pbyllade à feuillets très minces et très fragiles. Si l’on enlève le gazon qui recouvre la roche , on reconnaît dans beaucoup de points qu’elle est polie et striée. Les stries sont rectilignes, très fines et parallèles à l’axe de la vallée. Souvent aussi on remarque des sillons ou cannelures peu profondes également rectilignes et parallèles aux stries. Ces trois mamelons sont couverts des blocs de protogine gigantesques. Ces blocs sont souvent suspendus dans des positions et sur des pentes si inclinées, que la force qui les a amenés dans ce point a dû les déposer doucement et non les charrier avec im- pétuosité. Leurs angles et leurs arêtes sont parfaitement conservés ; du reste, ces blocs remontent sur les flancs de la montagne au pied de laquelle l’Arve a creusé son lit, jusqu’au-dessus du ha- meau de Beté , qui est à 395 mètres au-dessus du niveau de 1 Arve près du pont, et à 1350 mètres au-dessus du niveau de la mer. Les roches polies et striées remontent presque à la même hauteur, et correspondent à celles que l’on trouve de l’autre côté de la vallée, quand on traverse le Forclaz de Saint-Gervais. La même force qui a poli et strié les mamelons arrondis en amont qui bordent la rive droite de l’Arve, au-dessous du pont des Duchés, a imprimé des formes semblables et gravé les mêmes stries sur celles qui se trouvent entre les Montées et 1 village deServoz, dans la gorge qui mène de la vallée de Sallanclie à celle de Cha- monix. Ces modifications dans le relief des différentes parties du sol me paraissent dues à l’action de l’immense glacier qui sortait SÉANCE DU 3 MARS 1845. 323 autrefois de la vallée de Chamonix et s’étendait jusqu’au bassin de Léman , dans le voisinage de Genève. M. de Coîlegno rappelle qu’il a signalé, il y a deux ans, l’existence près d’Alby d’excavations cylindriques analogues àcellesdé Canaan et de Bellows-Falls. Le Tarn forme h son entrée dans la plaine d Alby une cataracte qui est connue sous le nom de Saut-de-scibot ; cette cataracte tombe de 20 mètres de hauteur dans une gorge fort étroite qui a environ 300 mètres de long et qui est creusée dans le micaschite qui constitue le fond de la vallée vers l’est. Une grande partie de l’eau du Tarn est dirigée par un barrage vers l’aciérie qu’on a établie depuis quelques années sur la rive gaucbe du fleuve, vis-à-vis du village de Saint-Juery; l’eau surabon- dante se décharge habituellement par la cataracte, et il existe des deux côtés de la rivière une sorte de plateau formé par la tranche des couches de micaschite qui semble barrer le fleuve et que l’eau ne recouvre que dans ses plus grandes crues, quand elle s’élève au-dessus du barrage. « Lorsque je » visitai le Saut-de sabot, dit M. de Coîlegno, je venais de » quitter les Pyrénées, et je fus frappé de la ressemblance » qui existe entre la surface des micaschistes sur lesquels a » coulé et coule encore quelquefois le Tarn et celle des mi- » easchistes de la vallée du Lys près de Luchon. Ce sont les » memes stries, les mêmes sillons, le même poli : ce poli est » si parfait au Saut-de-sabot qu’on ne peut y marcher qu’avec » quelque précaution : mais ce qui est particulier à cette der- » nière localité, c’est que la surface de la plate-forme de mi- » caschite est criblée d’érosions verticales plus ou moins » profondes dont le diamètre varie depuis quelques déci- » mètres jusqu a un mètre. On a cru pouvoir expliquer » l’existence des surfaces polies de la vallée du Lys en di- » sant que le glacier de Crabioules arrivait jadis jusqu’à Lu- » chon : je ne pense pas qu’on soit tenté d’admettre une » explication analogue pour la vallée du Tarn; mais d’aib » leurs les employés de l’aciérie m’ont dit que le nombre et » les dimensions des cuves variaient à chaque crue de la » rivière, et la même chose m’a été répétée par tous ceux des 324 SÉANCE DU 3 MARS 184 5. » habitants de Saint-Juery que j’ai interrogés. On m’a mon* » tré des excavations de deux ou trois décimètres qui auraient » été produites lors de la dernière crue, et j’ai dû me con- » vaincre que le passage violent d’une grande masse d’eau » sur la surface horizontale de la plate-forme de micaschite » suffisait pour déterminer la formation d’excavations cy- » lindriques qui pouvaient atteindre les plusgrandes dimen- » sions. » J’ai eu l’occasion depuis, continue M. deC., de reconnaî- » tre un fait analoguedans une autre localité. La Dordogne » a un cours si rapide au-dessus de la Linde, qu’on a été » obligé de creuser un canal latéral pour que la navigation » ne fût pas interrompue entre Bergerac et Pouillae. Dans » de très basses eaux, la rivière tout entière coule aux ra- » pides de la Gratuse et de Pescarou dans un canal très » étroit, et son lit habituel reste à découvert. M. Ch. Des- » moulins, qui demeure au château de Lanquais, tout près » de la Linde, a bien voulu me communiquer les observations » qu’il avait pu faire à plusieurs reprises sur les accidents » que présente l’été le lit de la Dordogne, ainsi que les des- » sins qu’il en avait pris, et j’ai reconnu des excavations cy- » lindriques entièrement analogues à celles du Saut de-sabot ; » seulement, celles de la Dordogne sont creusées dans un » calcaire à Hippurites fort dur, le meme qui est exploité » tout près aux carrières de Léna, et qui est bien connu par » les descriptions zoologiques de M. Desmoulins. » M. Elie de Beaumont communique à la Société un passage d’une lettre de M. le professeur J.-D. Forbes, d’Edimbourg, relatif à des expériences faites par M. le professeur Gardon, de Glascow, sur la* poix ( pitch ). « La poix, quoique assez » dure pour être cassante même en été et se briser avec une » fracture conchoïdale , coule cependant graduellement » comme un glacier en affectant la même forme et en pré- » sentant dans sa structure des bandes dues au mouvement » différentiel ( structural bands of differential motion) et un » plongeaient frontal [frontal dip). » M. Elie de Beaumont fait remarquer que cette observation peut trouver son application non seulement dans la théorie des SÉANCE DU 17 31 A RS 1815. 325 glaciers , mais aussi dans celle des roches éruptives qui sont venues au jour dans un état pâteux plus ou moins voisin de la solidité. M. Martins dit qu’au Faulhorn il a observé des lignes cour- bes en sens inverse de celles indiquées par M. Forbes; il n’admet pas la plasticité des glaciers. Le secrétaire communique les procès verbaux de la réunion extraordinaire à Chambéry. Le secrétaire commence la lecture d’un mémoire de M. Ca- tullo. Séance du 17 mars 1845. PRÉSIDENCE DE M. ELIE DE B üAUMONT. M. Raulin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Le comte Alexandre spada lavinj di macerata, résidant àOsimo, près Ancône (Etats du pape) , présenté par MM. Or- sini et Viquesnel ; Warburton, membre du parlement, résidant à Londres (Angleterre) , présenté par MM. le vicomte d’Archiac et de Verneuil. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. De la part de M. Mauduyt , Herpétologie de la Vienne ; in- 8°, 62 p. Poitiers, 1844. De la part de M. Le Touzé de Longuemar, Terrains cré- tacés inférieurs compris entre V Yonne etV Armance, comparés à leurs équivalents géologiques de la rive gauche de V Yonne (Extr. de l’Annuaire du département de l’Yonne, 1811); in-8°, 8 p. I pl. Auxerre, 1845. De la part de M. Victor Raulin, A ote sur un nouveau genre 326 SÉANCE DU 17 MARS 1845. de gastéropodes (Deshayesia) du terrain tertiaire du bassin de Paris (Extr. du Magasin de zoologie, d’anatomie com- parée et de palæontologie de M. Guérin-Meneville; 12e li- vraison, année 1844). De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa - vants; février 184 5. De la part de M. L. Agassiz , 1° Monographie d'Ecliino- dermes vivants et fossiles , 4 livraisons in-4°, texte et plan- ches; avec F anatomie du genre Echinas , par Valentin, 9 pl. in-f°. Neufchâtel, 1838, 1841, 1842. 2° Etudes critiques sur les mollusques fossiles; 3 livraisons in-4°, texte et planches; Neufchâtel, 1840-1842. 3° Histoire naturelle des poissons d'eau douce de l'Europe centrale; in-8°,t. 1er, 326 p. avec atlas de planches inf°; Neufchâtel, 1842. 4° Etudes sur les glaciers ; in-8°, 346 p. et atlas de pl in-f°; Neufchâtel, 1840. De la part de M. Joseph Bergtnarm, U ntersuchungen , etc. (Recherches sur les Francs-Valaisans dans le canton des Grisons et le Voralherg) ; in-8°, 108 p. I carte, Vienne 1844. Comptes-rendus des séances de l' Académie des sciences; 1845, 1er sem®, t. XX, n°* 9 et 10. Actes de la Société Linnéenne de Bordeaux; t. XII, 3e liv., 25 février 1843. Mémoire de la Société d' agriculture , des sciences , arts et belles lettres du département de l'Aube; nos 87 et 88, 3e et 4e trim. 1843, et n08 8 9 et 90, 1er et 2e trim. 1814. Mémoires de la Société d' agriculture, sciences et arts d' An- gers ; 5e vol., 3e livraison, 1844. Société d’agriculture , sciences et arts dé Angers, travaux du comice horticole de Maine-et-Loire , 3e vol. n° 20, 1844. Annales de l' Auvergne ; t. XVII, mai à novembre 1844. L'Echo du monde savant; 1845, n° 19. L'Institut; 1845, nüS 584 et 585. Mémoires de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève ; t. X, 2e partie 1844. Proceedings of the royal Society oj Edinburgh ; 1835, n° 6 ; lutll' dû Iti t)oe. (rcol- //(? J*r’(ilicc . 2f . Ÿerie Tom . 2 Fl . VU Pcicf a 02? Jde sur 7 me ùcocle de gltce par MM. JDangcr d Vnpusiul Fig 3. (J /2 grandeur a a Piuite liquide bb Parti e en qlaec .valide lût j 2. % ipmuleur Gravé pm* le.r jï'èiw Aiirü , Rrte des 'Noyers» N? 35 LiPh.clo Srnto/t Kne Mofdnuvd/'ii N* 03 SÉANCE DU 17 MARS 1 8 1 5 . £27 1835-1836, n° 7 ; 1 836, n° 9; 1836-1837, n° 10; 1837, n° 1 1 : 1837-1838, n® 12; 1 8 i 1- 1 842, n”s 19 et 20. Transactions of the royal Society of Edinburgh ; vol. XV, partie I !, 184 1-1842. P hilosophical Transactions of the royal Society of London , 1841, partie 1-2, 1842, partie 1. List of the royal Society of London ; 30 novembre 1841. Catalogue of the library of the royal Society of London ; in-8°, 265 p., London 18 4 I . Report of the eleventh meeting of the British Association for the advancement of science , held at Plymouth in July 18 41 ; in-8°, 471 p.# 7 pl. London, 1842. The Athenœum ; 1845, nos 906 et 907. The Mining Journal ; 18 Zt5, n°498. Boletin oficial de minas de Es pana ( Bulletin officiel des mines d’Espagne), 1 844- 1 845, nos 15 à 18. La Société reçoit encore de la part de 35 de ses membres l’ouvrage intitulé : Recherches sur les poissons fossiles , par M. Agassiz, 5 vol. in-4°, avec 5 cahiers de planches in-i°. M. Viquesnel fait conjointement avec M. Danger la coin- munication suivante : l\ote sur une géode de glace remplie de liquide et sur quel- ques uns des phénomènes que présentent la congélation de Veau et la fusion de la glace dans des vases de petite di- mension, par MM. Danger et A. Vicpiesnel. Dans la dernière séance, nous avons eu l'honneur de vous pré- senter un flacon renfermant un liquide dont la partie en contact avec les parois du vase et avec l’air était gelée, tandis que la partie intérieure avait conservé sa fluidité (voir Pl. VII, fig. lrc). La glace b qui constituait la géode était limpide, incolore et par- semée de cavités tubulaires. Ces espaces remplis d’air conver- geaient de la circonférence vers le centre , se montraient en abon- dance à la partie inférieure, en très petite quantité sur les côtés et en assez grand nombre à la partie supérieure pour en diminuer sensiblement la transparence. Les tubes atteignaient au maximum une longueur de 2 centimètres. Le liquide intérieure/, d’une teinte 328 SÉANCE DU 17 MARS 184 /É. un peu jaunâtre, se trouvait complètement circonscrit par la glace qui décrivait alentour une enveloppe continue, d’une forme ovoïde, à paroi lisse. En inclinant le vase dans différents sens, on déterminait le déplacement de quelques bulles d’air qui sortaient descavitésinférieun s, traversaient le liquide, se logeaient à sa par- tie supérieure et déprimaient sa surface. Les faits que nous venons de décrire, causés par des alterna- tives de température, ont servi de points de départ à une série d’expériences que nous avons entreprises dans le but d’étudier quelques uns des phénomènes présentés par la congélation de l’eau et la fusion de la glace. Nous vous demandons la permission d’ex- poser le résumé de"hos observations, avant de donner le résultat auquel nous sommes parvenus. Phénomènes développés par la congélation. — Le flacon dont nous avons parlé, exposé à une température suffisante pour ra- mener son contenu à l’état liquide, a été de nouveau soumis à la congélation. Le liquide parfaitement limpide renfermait un dépôt noirâtre, rassemblé en gros flocons au fond du vase. L’intensité du froid que nous avons produit artificiellement a donné un ré- sultat analogue au premier, sauf les modifications suivantes (voir PL VU, fig. 2) : les cavités remplies d’air étaient beaucoup plus effilées, plus serrées, plus nombreuses et réparties à peu près également dans toute la masse. Leur disposition en forme de tubes filamenteux donnait à la glace un aspect soyeux et troublait légèrement sa transparence. On distinguait une partie centrale, bombée en dessus, aplatie en dessous. Le dépôt floconneux noirâtre qui, dans la première expérience, existait en dissolution au milieu du liquide légèrement jaunâtre, se trouvait, dans la seconde, dispersé depuis le fond du vase jusqu’à 1 centimètre 1/2 de hauteur et s’arrêtait à la limite inférieure de la partie centrale. Ce noyau, composé d’une glace poreuse, comme le reste de la masse, représentait assez bien le corps d’un clypéastre, avec cette différence que les ambulacres, figurés par lestubesde la glace exté- rieure, cessaient de converger vers le centre du noyau à partir de son sommet; de ce point jusqu’à la surface en contact avec l’air, les cavités rayonnaient d’un centre disposé le long d’un cylindre vertical et décrivaient une légère courbure en s’éloignant du point de convergence. Ainsi dans le premier cas, les tubes se dirigeaient vers un point central placé au milieu de la masse et se trouvaient per- pendiculaires, non aux parois cylindriques du vase, mais au* parois d’une sphère idéale dont la circonférence aurait coïncidé SÉANCE DU 17 MARS 1845. 320 seulement avec quelques points extrêmes du cylindre. Dans le second cas, il existait deux centres d’où les tubes divergeaient d’une manière très différente ; l’un , comme dans la première ex- périence, émettait , vers le fond et vers les parois latérales du vase, ses rayons tubulahes, qui semblaient faire partie d’une splière coupée par la moitié; l’autre centre, disposé autour d’une ligne verticale, semblait s’être opposé au développement de la seconde moitié du sphéroïde, ou plutôt la partie supérieure de la glace représentait cette seconde moitié dont le centre aurait été déplacé. Un éventail privé de sa charnière , déchiré en deux parties égales et plié en sens inverse, peut donner une idée approximative de la disposition que nous essayons de décrire. Les tubes légèrement arqués, qui partaient de ce dernier centre linéaire, rappelaient les nervures latérales d’une feuille de fougère dont le limbe serait avorté. Ils semblent établir un passage à la forme en fougère qu’on pourrait peut-être regarder comme une modification delà forme divergente régulière; en d’autres termes, comme étant le résultat du déplacement d’un axe centi al. Dans la première expérience , le liquide avait gelé en repos dans l’intérieur du laboratoire; dans la seconde, le flacon soumis en plein air à un froid artificiel très intense, a été sorti de son mé- lange réfrigérant, au milieu dufjuel nous l avons remis immédia- tement jusqu’à parfaite consolidation du liquide. L’eau de Seine filtrée, et même l’eau distillée , placées dans les mêmes circonstances, nous ont présenté, en se solidifiant, des arrangements moléculaires absolument semblables à ceux de la première expérience. Ce n’est donc pas à la présence accidentelle d’un peu de savon, de matières charbonneuses et de poussière dans l’eau du premier vase, qu’on peut attribuer les phénomènes pré- cédemment décrits. Nous les avons obtenus, ces phénomènes, en abandonnant l’expérience à elle-même pendant un laps de temps plusou moins long. Toutes les fois que nous avons agité le ballon dans le mélange réfrigérant afin de hâter la congélation, nous avons déterminé la formation d’une masse fibreuse, opaque, com- posée de couches concentriques dont les fibres étaient perpendi- culaires aux parois du vase. Cette disposilion diffère de la première en ce que les fibres paraissent être plutôt l’effet d’un groupement moléculaire que causées par l’interposition de l’air, dans des tubes capillaires ; au reste nous n’avons pas cherché à éclaircir nos doutes sur cette question. Tantôt la glace, fibreuse, opaque et composée de couches concentriques, formait une enveloppe continue ; tantôt elle ne revêtait que certaines parties plus ou moins étendues des 330 SÉANCE DU 17 MARS 1845. pa»ois du vase. Les intervalles étaient remplis , soit par une glace diaphane parsemée de tubes divergents remplis d’air, soit par une glace translucide renfermant des dessins en feuilles de fougère. Dans le cours de nos expériences, nous avons cru remarquer que l’eau distillée privée d’air par lYbullition absorbe, en se re- froidissant, ce gaz avec une extrême facilité. Maintenue en ébul- lition pendant vingt minutes dans des ballons à étroite ou large ouverture, et soumise à la congélation lorsqu’elle fut descendue à la température ambiante , elle se solidifia en une masse limpide parsemée de cavités tubulaires, comme l’eau qui n’a pas été purgée d’air. Le dégagement des bulles qui traversaient le liquide pendant la fusion de la glace démontre évidemment la présence du gaz, dont les tubes étaient remplis et dont nous n avons pas soumis les principes à /’ analyse. JNIous sommes parvenus à empê- cher la formation des pores divergents, eu fermant, à l’aide du chalumeau, le col effilé du ballon, à la suite d’une ébullition prolongée. Dans cette circonstance, nous avons obtenu une masse translucide dans laquelle les molécules se groupent , de manière à représenter des feuilles de fougère. Phénomènes développés par Infusion . — Le retour de l’état solide à l’état liquide, observé sur les vases soumis aux expé- riences précédentes, nous a offert les faits suivants : lorsque la masse est prise en totalité, la fusion s’opère de l’extérieur à l’in- térieur; mais pour peu que le centre de la mas e ait échappé à la congélation , la fusion s’opère simultanément et à l’intérieur et à l’extérieur. L’action intérieure attaque les réseaux glacés qui traversent le liquide, ronge les aspérités et finit par produire une chambre ovoïde ou sphérique, à p. rois lisses et parfaitement déterminées. A mesure que la fusion avance , elle coupe les deux extrémités opposées des pores tubulaires disséminés dans la glace. L’air de ces cavités se dégage en petites bulles qui traversent le liquide intérieur ou extérieur , suivant la facilité qu’il trouve à prendre l’une ou l’autre direction L’enveloppe glacée perd ainsi peu à peu son aspect soyeux et devient de plus en plus dia- phane. Telle est l’origine de la géode que nous avons mise sous vos yeux. La fusion simultanée de la partie centrale qui se trouve privée de communication avec l’air , tend à démontrer qu’une partie de la chaleur ambiante traverse la glace sans la fondre. Un fait actuellement bien connu de toutes les personnes qui s’occupen d’intruments de précision, vient à l’appui de notre opinion. L’ex- périence avait appris , depuis plus de quinze ans, à l’un de nous SÉANCE DU 17 MARS 1845. 331 (M. Danger) , qu’il ne suffisait pas de plonger un thermomètre dans la glace réduite en bouillie, pour obtenir la température constante qui forme le zéro de l’échelle thermométriqne centi- grade. Le zéro des instruments qu’on établirait, sans prendre certaines précautions indispensables , pourrait varier d’un 1/2 degré et au-delà (1). Température tla liquide intérieur. — Ces deux données nous ont conduits à l’expérience suivante, que nous avons entreprise dans l’intention de mesurer la température de l’eau renfermée dans la géode de glace : nous avons suspendu un thermomètre au centre d’un ballon d’essayeur, dont la capacité intérieure, jusqu’à la naissance du col , était de 5o centimètres cubes ou d’un ving- tième de litre ( voir pl. VII, fig. 3). Nous laissâmes le liquide se congeler et former une couche continue de plus d’un centimètre d’épaisseur. Ensuite l’appareil fut exposé , d’abord à l’ombre , puis pendant près d’une heure au soleil. Dans ces deux circonstances, la température ambiante étant de 15° 1/2 à l’ombre, le ther- momètre du ballon oscilla plusieurs fois entre un 1/2° et 3/4 de degré au-dessus de zéro , et finit par se fixer à 1/2°. La petite capacité du vase , sa forme ovoïde et le contact presque immédiat de la couche de glace avec le thermomètre, qui n’en était séparé que par une mince lame de liquide , sont des circonstances qui nous paraissent être les plus favorables pour établir une tem- pérature égale entre les parois glacées et l’eau contenue dans la géode. Les observations relatives à la détermination du zéro permettent de concevoir que , dans la même expérience exécutée sur une grande échelle, le thermomètre pourrait s’élever à plu- sieurs degrés au-dessus de la température de la glace fondante. M. Melloni a démontré que les corps solides , échauffés par la température ambiante, facilitent, par leur contact ou leur voisi- nage, la fusion de la neige et de la glace. La fusion intérieure que nous avons observée ne peut tenir aux mêmes causes. Le liquide se trouve circonscrit de toutes parts et privé de communication di- (0 M. Danger obtient le zéro thermomélrique en plongeant ses in- struments clans une bouillie d'eau et de glace triturée; ce mélange est enveloppé de toutes parts d’une couche sèche de glace , réduite en petits fragments. Le tout est disposé au centre d’un système de parois minces alternativement blanches , peu conductrices , brillantes , etc.; système dont l’emploi neutralise l’action de la chaleur environnante. Au moyen de ces précautions, on obtient en été un bain qui conserve pendant 2/j heures une température invariable. SEANCE DU 17 MARS 1815. 332 recte avec l’air. La chaleur ne peut lui arriver qu’à travers une couche continue de glace. L’absence ou la présence d’un thermo- mètre, c’est-à-dire d’un corps solide plongé dans le liquide, n’apporte aucune modification apparente au phénomène de fusion intérieure. Conclusions . Phénomènes développés par la congélation. — Dans certaines circonstances , l’eau ordinaire en se solidifiant forme: 1° Une masse diaphane dont la transparence se trouve altérée par des cavités cylindriques remplies d’air. Tantôt les tubes sont perpendiculaires à la circonférence d’une sphère, quelle que soit d’ailleurs laformedes parois exposées à la congélation ; tantôt ils décrivent une courbure et divergentd’un centre disposé sur la lon- gueur d’un cylindre vertical, de manière à représenter un panache. 2° Une masse translucide dans laquelle se dessinent des fi- gures analogues aux feuilles de fougère. Ces dernières se déve- loppent particulièrement dans l’eau privée d’air. 3° Une masse opaque , fibreuse et composée de couches con- centriques dont les fibres convergent vers un centre unique. Cette disposition paraît avoir lieu sans interposition d’air et présente, d’après M. Desnoyers , une certaine analogie avec la texture des grêlons (1). (1) Les observateurs ne sont pas d’accord sur la forme primitive de la grêle. M. Desuoyers a recueilli un grêlon formé d’une glace translu- cide, dont l'intérieur présentait plusieurs couches concentriques et des stries divergeant du centre à la circonférence. Les stries provenaient d’un groupement moléculaire et non de l'interposition d’un gaz. D’après cette observation , il pense que la forme primitive de la grêle est une sphère qui éclaté en tombant. MM. Delcros , de IXœggéralh, Elie de Beaumont, Virlet, etc. , partagent cette opinion. M. L. h. Kaemlz et d'autres observateurs considèrent la forme pyra- midale comme étant la forme primitive de la grêle (Voir Cours complet de Météorologie j traduit et annoté par M. Ch. Marlius , un vol. in-8° , Paris i845). Les détails donnés par le physicien allemand peuvent se ré- sumer de la manière suivaute : les grêlons ont la forme d’une poire ou d’un champignon terminé par une surface arrondie, et présentent une masse opaque , analogue à la neige durcie. Les plus gros sont entourés d'une couche épaisse de glace et se composent de couches alternatives de neige et de glace. Tous les observateurs indiquent un noyau nei- geux. Souvent les grains ressemblent à des pyramides sphériques ou pyramides à trois faces , terminées par une base qui est une portion de sphère. D’après M. Arago , les grêlons , formés de glace transparente , sont SÉANCE DU 1? MARS 1 845. 333 La courbure des tubes et des feuilles de fougère nous paraît une modification de rayons rectilignes causée par le déplacement du centre de divergence. Le liquide jaunâtre, contenu dans la géode de glace que nous vous avons présentée (voir pl. VII, fig. lre),a laissé déposer les sub- stances colorantes qu’il tenait en dissolution. J1 semblerait donc qu’une congélation lente , produite naturellement , les avait con- < entrées dans le liquide intérieur, puisque la glace enveloppanie offrait une transparence parfaite. L’eau distillée et privée d’air par l’ébullition présente les mê- mes groupements moléculaires, à moins qu’on n’intercepte sa communication directe avec l’atmosplière. Phénomènes développés par Infusion. — La fusion d’une masse de glace homogène s’opère extérieurement par les parois exposées à la chaleur ambiante ; la fusion d’une masse de glace, dont le centre a échappé à la solidification , s’opère simultanément à l’in- térieur et à l’extérieur. Nous pensons que la fusion intérieure dépend de la différence d’action de la chaleur sur l’eau , à l’état solide et à l’état liquide. On sait que la quantité de chaleur né- cessaire pour fondre un kilogramme de glace à zéro, sans élever sa température, suffit pour faire passer un kilogramme d’eau de zéro à 76° de température ou , d’après de nouvelles expériences, à 79,1 (1) ; d’une autre part , on sait que les lois de la lumière et de la chaleur suivent une marche à peu près parallèle. Nous fondant sur ces principes généralement admis, nous pensons que la chaleur se partage en deux parties; l’une, absorbée par la glace, opère la fusion extérieure; l’autre pénètre la glace sans la fondre, de même que les rayons du soleil passent à travers le cristal sans élever sensiblement sa température. Cette dernière partie de chaleur, absorbée par l’eau, élève sa température et produit la liquéfaction des parois qui la circonscrivent de toutes parts. Il nous paraît naturel d’admettre, par analogie, que l’air contenu dans les cavités de la glace s’échauffe comme l’eau et produit des effets semblables. La cause de fusion que nous venons de vous signaler doit des gouttes de pluie qui tombent des nuages amenés par les vents du sud et qui gèlent en traversant les couches refroidies de l’air qui avoisinent le sol ( Annales de Chimie , vol. 55 , p. 4 18 ). (1) Recherches sur la chaleur latente de la fusion de la glace, par MM. de la Prévostaye et Paul Desains. ( Comptes-rendus hebdomadaires des séances de L’ Académie des Sciences , année i843). 334 SÉANCE DU 17 MARS 1815. avoir, suivant toutes les apparences, une action sur les phéno- mènes qui se passent journellement sous nos yeux. Elle doit contribuer , pour une somme quelconque , à la fusion périodique annuelle des glaciers , à la fonte des neiges , etc. Explication des figures de la planche Y 11. Figure 1 . L’espace compris entre les parois du vase et la ligne ponctuée représente le liquide produit par la fusion extérieure de la glace. L’espace désigné par la lettre b représente la glace et les cavités tubulaires dont elle est parsemée. A travers son épaisseur, on distingue, en a , l’intérieur de la géode, ses parois, figurées par une ligne noire à peu près circulaire, et le liquide contenu dans la cavité centrale et dont la partie supérieure est déprimée par des bulles d’air. Figure 2. L’eau du vase est gelée en totalité. La glace renferme une multitude de tubes capillaires figuréspar des lignes noires. La dispo- sition de ces cavités détermine deux zones distinctes : dans la partie inférieure, leur convergence vers un point central produit une es- pèce de noyau en forme de champignon ; dans la partie supérieure, les tubes s’épanouissent en forme de panache. Figure 3. Le réservoir du thermomètre plonge en a dans un es- pace rempli d’eau et circonscrit par une couche continue de glace désignée par la lettre b. M. d’Archiac communique, au nom de M. de Verneuil et au sien, les observations suivantes: Note sur une coupe du mont Pagnotte à Creil , prolongée en suivant le chemin de fer du Nord jusqu à Tartignj (Oise). La série des couches depuis le mont Pagnotte jusqu’au niveau de l’Oise, soit «à Pont-Sainte-Maxence, soit à Creil, est la plus complète que présente le terrain tertiaire dans un rayon de 15 lieues autour de Paris. Les six groupes de ce terrain y sont par- faitement distincts (PI. VII l,fig. 1). Le sommet de la butte appelée le mont Pagnotte , située dans la partie N. -E. delà forêt de Hallate , dont elle est le point culminant, est formé par la meulière ou calcaire lacustre supérieur , avec graines de chara medicaginida. Son épaisseur est d’environ 6 mètres; au-dessous (PI. VIII, fig . J) viennent les sables supérieurs consti- tuant une crête dirigée O.-E. vers le signal de Villeneuve. Dans la butte que surmonte le hameau et le château de Saint- SÉANCE DU 17 MARS 1845. 335 Christophe, on trouve, vers la base de ces sables, des marnes sa- bleuses blanches , grises ou verdâtres remplies de coquilles, et déjà indiquées par M. Graves, dans son excellente Statistique (Annuaire du département de l’Oise, 1834, p. 14). Elles ont été mises à découvert dans la nouvelle tranchée du chemin qui des- cend sous le mur du château et qui se dirige au N pour rejoindre la grande route. On y remarque, de plus, un lit très mince d’oolites brunes, peu régulières, généralement de forme ovoïde allongée, petites, dures et compactes, présentant à l’intérieur quelques zones concentriques et de petites cavités. Ces oolites sont composées de carbonate de chaux , d’argile et d’une assez grande quantité de fer hydraté. Nous avons recueilli dans ces marnes sableuses deux ou trois espèces de Cérites, une Natice, un Cyclostome et une Cyrène. Ces coquilles, à l’exception de la Natice, y sont répandues avec une extrême profusion. C’est probablement la seule localité où un banc de coquilles ait encore été signalé dans cette partie du bassin , à la base des sables supérieurs ; il correspond d’ailleurs à ceux qui sont depuis longtemps connus au centre et au S. du même bassin, sur- montant les marnes du calcaire lacustre moyen. De la discussion de ces espèces que nous indiquons ci-dessous (1), (i)Un des Cérites paraît être une variété minor du Ceriihium Cordieri, Desh., et se retrouve dans les sables de Houssell (Lirnbourg). Ce rapproche- ment, fait il y a déjà quelques années par M. Nyst, qui publie en ce mo- ment un beau travail sur les fossiles tertiaires de la Belgique, et à l'obli- geance de qui l’un de nous est redevable de beaucoup de fossiles de cette localité, nous paraît cependant devoir être examiné de nouveau. Quant à l’identité des coquilles des deux localités, elle est aussi complète que possi- ble. Une seconde espèce nous semble exiger aussi une nouvelle étude, car elle a sans doute été confondue avec le C. pUcatum, var. a Uam., dont elle diffère parles stries fines transverses, au nombre de deux, trois ou quatre, qui séparent toujours les rangées de tubercules, par le nombre de ces ran- gées, qui n’est que de trois au lieu de quatre, par la différence de gros- seur et l'irrégularité des tubercules de chaque rangée, ceux de la pre- mière ou de la partie supérieure des tours étant ordinairement les plus gros et formant alors une sorte de spirale qui fait paraître la suture plus profonde. Celte espèce se rapprocherait encore de C. neglectum , Desh., et la figure et la description que donne M. Nyst de son C. Galeotti nous laisse dans l'incertitude sur l identité de notre Cérite avec celui qu’il a ainsi nommé. Celle coquille , très abondante dans les sables du Lim- bourg, se trouve aussi dans les faluns de Léognan, près Bordeaux. Nous en avons séparé, quant à présent , mais seulement à titre de va- 336 SEANCE DU 17 MARS 1845. il résulte que l’une d’elles et peut-être deux sont nouvelles; une troisième est très répandue dans les couches argilo-sableuses de Kleyn-Spauwen, de Tongres, etc., dans la province du Limbourg; elle se retrouve dans les faluns des environs de bordeaux , mais sa présence dans le bassin de Paris nous paraît au moins douteuse , une quatrième serait une variété qui existe aussi dans le Limbourg et dont le type appartient aux sables moyens des environs de Senlis. La cinquième a son analogue dans le ci ag rouge du Suffolk, et enfin la sixième est identique avec une coquille du Limbourg et d’Erbach , que nous avons aussi trouvée dans le plastic clay des bords de la Tamise. Bien que les formes de la période tertiaire moyenne semblent dominer ici, on voit dans quelle incertitude on se trouverait si on n’avait, pour déterminer l’âge de cette cou- che, que les ressources de la zoologie. Au dessous viennent les marnes et les glaises supérieures au gypse, qui manque dans cette coupe. Elles sont gris bleuâtre et donnent lieu à de nombreuses sources. Les calcaires marneux blanchâtres avec Lymnœa longiscata , Planorbis rotnndatus , Paludina pusilla, leur succèdent plus bas, représentant l’étage inférieur du calcaire lacustre moyen ou calcaire de Saint-Ouen. La puissance de ces deux assises lacustres est d’environ 40 mètres. Les sables et grès moyens constituent la base de tous les mon- ticules de la forêt, qui reposent sur un plateau formé par le cal- riété. parce que nos échantillons sont incomplets , une coquille qui s’en distingue par sa forme plus conoïde, par ses tours plus déprimés et par ses trois rangées de granulations, plus égales, plus fines et plus régulière- ment espacées. Le Cyclostome , que nous proposons de nommer C. pticata , diffère du C. microstoma , Desh. , par sa forme générale plus courte , par le dernier tour beaucoup plus renflé, et surtout par les plis longitu- dinaux, réguliers, qu’on observe sur chaque tour, et qui disparaissent sur la base du dernier. La INatice, dont nous ne possédons qu’un individu peu complet, nous paraît identique avec la Natica glaucinoides , Sow. (non Desh.), du crag rouge du Suffolk. EnGn , la Cyrène se rapporte évidemment à la variété deltoïde de la Cyrena semistriata, Desh, , coquille très répandue aussi dans les sables du Limbourg avec les Gérites précédents , qui a été trouvée à Erbach par M. Galeotti . et que nous ne pouvons distinguer d une coquille que nous avons recueillie dans les sables argileux de l'étage des ligniles à Depfort et à Woolwich, près de Londres. Cette espèce n’avait pas encore été si- gnalée dans le bassin de Paris. 337 SÉANCE DU 17 MARS 1845. caire grossier. Celui-ci se relève sensiblement vers le N. , et ce relèvement est de 38 mètres sur une distance de 12,800 mètres. A la jonction des deux groupes on trouve des marnes sableuses, gris bleuâtre, glanconieuses exploitées dans la petite plaine que traverse la route au N. de Fleurine. Elles paraissent représenter une partie des marnes du calcaire grossier, et les lier aux sables qui les surmontent. La limite de ces derniers est à très peu près celle de la forêt elle-même ; au-delà, jusqu’à la descente deCreil, on marche sur le calcaire grossier recouvert d’une couche argileuse peu épaisse de l’alluvion ancienne. L’escarpement qui borde la route en descendant à Creil, pré- sente de haut en bas : 1° Calcaire fissile, sans solidité, sans stratification distincte, alternant avec des bancs plus réguliers et mieux suivis. . 8m,00 2° Calcaire en bancs épais , remplis de moules de co- quilles {Corbis pectunculus , Lucina variabilté , etc.). . . 6ra,00 3° Calcaire grossier subsrhisto'ide 0m,70 4° Calcaire sableux, jaunâtre, friable, formant une masse continue. 5m,00 5° Marne et grès calcarifère ou calcaire sableux en rognons 4m,00 Dans l’escarpement qui borde le chemin de Pont-Sainte Maxence , on voit au-dessous de ces couches : 6° Glauconie grossière et grès calcarifère glauconieux , gris ou jaunâtre .... 8m,00 7° Sable sans coquilles lm,00 8° Sable calcarifère ferrugineux avec une grande quan- tité de Turritella imbricataria , variété à, etc. . . 2m,00 9° Sable glauco-ferrugineux, quelquefois gris, renfer- mant un banc de sable zoné de brun et avec des veinules de chaux carbonatée pulvérulente 10m,00 Ces sables se continuent jusqu’au bord de la rivière dont les berges ne paraissent pas atteindre le niveau des lignites. Dans cette coupe, les caractères du calcaire grossier sont assez différents de ceux qu’on observe à 3 lieues au N. , sur les côtés de la route en descendant de la forêt de Hallate à Pont-Sainte- Maxence, et dont M. Graves a donné une coupe dans sa Statis- tique (1). Dans cette dernière localité, les bancs sont fort épais, très réguliers et fournissent des pierres d’appareil de la plus grande dimension. Les moules de Cerithium giganteum y sont fréquents, (i) Annuaire du département de l’Oise, 1 834 > P 17. Soc , Géol. Tome II, 2e série. 22 SÉANCE DU I 7 MARS 18)5. 338 tandis qu’à Creil , ils paraissent au moins liés rares, si même ifs existent On a vu q'?e sur ce dernier point, la roche est peu sus- ceptible de fournir des pierres de taille , et que dans toute la moitié inférieure de l’étage , elle passe à un calcaire sableux , friable , massif, sans fossiles , qui repose sur la glauconie grossière, Celle-ci , à Pont-Sainte-Maxence , offre à peu près la même composition qu’à Creil, et qu’à Saint- Vast et Saintine, près de Verberie ; elle repose également sur les sables inférieurs que ca- ractérisent, comme partout vers le haut, le lit de Turritella irn- bricataria , variété 5, avec la Neritina conoïdea , la Numnmlina planulntn , etc. La tranchée du chemin fer en face de Creil, est ouverte dans Fallu vion moderne de la vallée; au-dessous, on observe un dépôt de transport jaune, argilo-sableux , avec coquilles brisées. En suivant le chemin , après avoir traversé la route de Clermont, on trouve, avant d’arriver au premier pont (PI. VIII, fig. 2) , le sable jaune précédent, se relevant et renfermant de petits rognons endurcis. Il atteint bientôt une épaisseur de 3*“, 25. Des coquilles brisées et de petits fragments peu roulés de calcaire grossier infé- rieur, y sont disséminés çà et là. Le sol du chemin de fer est formé par le dépôt de cailloux diluvien du fond de la vallée. Ce sont des silex à demi roulés, généralement peu volumineux. Ces couches se continuent ainsi jusqu’après le troisième pont. Entre celui-ci et le quatrième, et avant Moncliy -Saint Eloy (PL VIII , fia, 3), l’escarpement de gauche présente, sur une longueur d’en- viron 125 mètres et une hauteur de 4 métrés, un dépôt ressem- blant assez à un fond de marais et formé d’une masse sableuse gris ou jaunâtre, zonée de brun avec des coquilles terrestres et la- custres analogues à celles qui vivent encore aux environs. Ce sont ; Lyninœa palustris , variété 5, L. ouata, Planorbis marginatus , P. vortex? Paludina imputa , Neritina Jluviatilis , Hélix nemoralis , H. hispida , H. rotundata , puis des tubes cylindriques irréguliers d'un calcaire tufacé, ressemblant assez à des tubes de friganes et un os long de mammifère. Au-dessous, on voit une espèce de calcaire sableux, tufacé, friable, jaunâtre, avec les mêmes co- quilles et des fragments de calcaire grossier peu roulés. Ce dépôt dont la stratification est ondulée et peu régulière, paraît s’être formé dans une dépression de 1 alluvion ancienne dont il nous représenterait la dernière phase. Il recouvre le diluvium sur lequel on marche constamment et dont la pente générale, jusque près de Clermont, est sensiblement la même que celle du chemin de fer. SEANCE DU 17 MARS 1815. 339 Entre Moncliy et le pont de Sailleville (Pl.VIII,./?#. 4), un es- carpement de 7 mètres de hauteur a mis à découvert l’alluvion ancienne, présentant vers sa partie moyenne de petits lits de cail- loux et de coquilles brisées, puis quelques zones brunes argilo- sableuses, et passant vers le bas à un sable gris-blanc avec points verts et cailloux. Le dépôt argilo-sableux s’abaisse ensuite, et avant Cauffry, les cailloux diluviens s’élevant à lm,25 au-dessus du chemin, reposent sur un sable glauconieux en place. A la hau- teur du village, le dépôt de transport caillouteux continuant à s’élever, des sables glauco-ferrugineux tertiaires viennent affleurer au pied du talus. De ce point au pont de Rantigny, on observe toujours, suivant la profondeur de la tranchée, Talluvion an- cienne peu épaisse(lm,25) avec veinules de cailloux à la base, puis au-dessous, le diluvium proprement dit, d’une épaisseur à peu près égale , et enfin des affleurements de sable tertiaire blanc un peu argileux. En s’approchant du pont, des glaises avec Cyrènes viennent s’intercaler entre ce sable et le diluvium pour disparaître bientôt après. Au-delà du pont, le talus de gauche montre, sur une hauteur de 4 mètres et une longueur de 140 mètres, un accident remar- quable ; c’est un plissement des glaises avec Huîtres et Cyrènes et du diluvium de cailloux roulés qui les recouvrait régulièrement avant la dislocation. Cette disposition est représentée PI. VIII, fis- 5 et 6. La fîg. 5 est une vue prise de face , et la fi%. 6 une vue prise obliquement par rapport à l’axe du chemin. Un élargissement de la voie en cet endroit a produit les angles que le talus présente à droite du dessin , et a permis d’apprécier toutes les circonstan- ces du phénomène. Vu dans son ensemble, cet accident est com- pris entre deux massifs argilo-sableux d’alluvion ancienne. De chaque côté, une couche irrégulière et subveriicale de cailloux diluviens s’interpose entre l’alluvion ancienne et la glaise tertiaire coquillière, puis vers le milieu, un troisième lambeau de cail- loux, situé à l’angle saillant du talus, se trouve compris entre deux plis des glaises auxquelles on reconnaît qu’il faisait suite avant le dérangement. On peut voir que les deux plis situés, l’un à droite et l’autre à gauche de ce lambeau de cailloux en forme de tétraèdre irrégulier, ne sont en réalité que le résultat d’un seul et même plissement des couches, coupées sous des angles et dans des directions différentes et obliques à la direction générale du plissement. Un autre pli ondulé s’observe à droite de la figure et marque de ce côté la limite du froncement. Cet accident dont nous ne connaissons point d’autre exemple SÉANCE DU 17 MA ES 1845. B 40 dans le terrain tertiaire des environs de Paris, paraît être le ré- sultat d’une pression latérale qui se serait exercée sur ce point à la fin du dépôt des cailloux roulés, et avant celui de l’alluvion ancienne qui le recouvre et l’enveloppe de toutes parts; on pour- rait concevoir également que le phénomène fût antérieur au dépôt de cailloux qui aurait revêtu le bombement formé par les argiles tertiaires et aurait été ensuite enveloppé à son tour par les sédi- ments argilo-sableux ; mais, à cette dernière hypothèse, on aurait à objecter que l’inclinaison des cailloux est trop rapide de chaque côté pour être naturelle. Le chemin de ferdeCreilà Clermont étant constamment au-des- sus du niveau ordinaire des argiles à lignites, on voit que leur appa- rition en cet endroit ne peut être attribuée à un glissement, et qu’elle a été causée à la fois par un plissement et par un soulèvement. L’é- tendue de ce plissement est d’ailleurs très bornée, car le talus opposé du chemin qui , à la vérité , se trouve en dehors de la direction du pli , n’en présente aucune trace et est entière- ment formé par le dépôt argilo-sableux en place. Quant au con- tact immédiat du diluvium et des argiles coquillières de l’étage des lignites, il résulte de la dénudation antérieure des couches ter- tiaires, comme on le voit sur d’autres points de cette coupe. En continuant à s’avancer , on trouve , au-delà du pont de Breuil-le-Vert (PI. VII 1,,/%. 7), les cailloux roulés surmontés de l’alluvion ancienne et recouvrant un amas de sable tertiaire gris, jaune et blanc; puis ils s’abaissent au niveau du chemin et remon- tent peu après au-dessus d’un nouvel amas de sable tertiaire blanc. Un banc de sable brun sépare les deux dépôts. Un peu avant Pont-de-Pierre, la tranchée atteint la craie blanche avec silex, après avoir recoupé des traces de sable vert appartenant à la glau- conie inférieure que recouvre sur les pentes de la colline de Cler- mont une assez grande épaisseur d alluvion ancienne. Entre la grande route et le pont de Ramecourt (PL VIII, fig- 8>> des déblais très considérables ont mis à découvert sur une hau- teur de 8 à 9 mètres, 4 mètres de craie à silex, puis, au-dessus, des couches tertiaires peu régulières de glaises brunes et jaunes, et des veinules d’argile renfermant des Huîtres. Le tout est sur- monté de sable tertiaire glauconieux et ferrugineux. Au-delà de la Brèche et de la ferme de Saint Remy , on marche sur l’alluvion et les cailloux diluviens reposant sur la craie. Cette dernière ne tarde pas à se relever pour être recouverte par le dépôt argilo- sableux avec silex. Jusqu’à Saint-Just, on ne trouve plus ensuite que de faibles ondulations de la craie entamées çà et là. 341 SÉANCE DU 17 MARS 1845. A Saint-Just (PI. VIII, fig. 9), la surface de la craie a été pro- fondément sillonnée et découpée. Elle est surmontée d’une argile brune, au-dessus de laquelle vient, sur une épaisseur de 6 mètres, l’alluvion ancienne renfermant à sa base deux lits de cailloux peu roulés, tantôt séparés, tantôt réunis. Aune demi-lieue du bourgs le même dépôt argilo-sableux présente vers la base des silex brisés et assez gros, d’autres noirs très roulés, mais plus petits, et enfin des silex verts à leur surface et également très roulés. Avant le pont de Quinquampoix, les anfractuosités de la craie sont remplies par un sable vert séparé de l’alluvion ancienne par un lit de silex roulés. Au-delà du pont, la coupe est plus complète (PI. VIII, fig. 10), et à partir du lit de silex verts roulés, qui suit exactement les on- dulations de la craie, et dont l’épaisseur est de Om,25 à0m,30, on trouve un sable glauconieux et des grès quarzeux ferrugineux subordonnés à ces sables, sur une hauteur de 3m,50 à 4 mètres; au-dessus, est un petit lit de silex diluviens recouvert par l’allu- vion ancienne. Ces deux lits de silex, séparés dans le temps par toute la période tertiaire , se trouvent ici à quelques mètres de distance l’un de l’autre , et se continuent sans se confondre jusqu’à l’extrémité du talus. Cette coupe, quoique peu importante en elle-même, est cependant précieuse pour faire voir à quel degré de précision l’examen détaillé des dépôts permet d’arriver pour établir des distinctions réelles, lors même que la nature semble s’être plu à les effacer; car ici il y a une continuité et une liaison appa- rente entre les couches tertiaires les plus anciennes, le lit de cail- loux diluviens et l’alluvion sableuse qui recouvre le tout. Les grès précédents sont exploités à quelques centaines de mètres à l’O. du chemin de fer. Ils sont brisés, diversementinclinés, reposent sur les sables comme dans la tranchée et sont recouverts par l’allu- vionancienne. L’épaisseur des bancsestde0,50 à 1 mètre. Ils ne sont point continus et renferment une très grande quantité de moules et d’empreintes de fossiles. Le grès est quarzeux , d’un gris blan- châtre, et les parois des vides laissés par les coquilles dont le test a disparu , sont recouvertes d’un enduit de peroxide de fer hy- draté. Parmi ces moules et ces empreintes nous avons reconnu les fossiles suivants : Crassatella sulcata Lam. ; Crusscitella (indét.) ; Lucitia conforta Desh. ; L. scalaris id. ; Cytherea (indét.) ; Venericarclia multiçostata Lam.; Cardium obliquant Lam. ; C. porulosum id., variété, c. nor. sp. Ce moule, de la dimension du C. hybridant Desli. et du C. fragile Mel , paraît s’en distinguer par sa forme plus oblique, à 342 SÉANCE DU 17 MARS 1845. moins que cette forme ne soit le résultat d’une compression de la coquille pendant le moulage, et alors on pourrait le rapporter au C. hfbridum. Il est difficile, d’ailleurs, de dire si les empreintes du test qu’on observe dans la roche proviennent de cette coquille ou des deux précédentes, auxquelles on pourrait les rapporter égale- ment, Pernci nov. sp. Les moules de cette coquille, qui était de la taille du P . Lamarhii Desh., sont très fréquents dans ces grès. Ostreci an gus ta Desh. et Asterias. Ainsi , la plupart de ces coquilles sont celles qui caractérisent l’étage de la glauconie inférieure auquel ces grès appartiennent, de même que ceux que l’on ob- serve sur plusieurs autres points de ce canton. Au pont de la Hérelle, la surface de la craie a été aussi forte- ment sillonnée» Elle est recouverte de cailloux diluviens envelop- pant des blocs de grès assez volumineux et surmontés par Fallu - vion ancienne. Enfin, delà jusqu’à Tartigny, le chemin de fer ne coupeplus que des monticules de craie blanche avec silex , quelquefois sur une hauteur de 15 à 18 mètres. On voit par ce qui précède , que lorsque la dénudation a été assez énergique pour enlever tout le terrain tertiaire , les silex verts et très roulés de sa base se sont mêlés à ceux qui prove- i aientde la dénudation de la craie, soitimmédiatementsous-jacente, soit à une certaine distance , laquelle devait être peu considérable vu l’état souvent à peine roulé des silex. Ce mélange s’observe par- ticulièrement près du pont qui est à 2 kilomètres au N. de Saint- Just. La continuité du dépôt argdo-sableux des plateaux de craie des environs de Tartigny et de Breteuil , avec celui du fond de la vallée de la Brèche entre Creil et Clermont, sur une hauteur ver- ticale de 100 mètres et une distance horizontale de 46 kilomètres, est ainsi mise hors de doute, et il en est de même du diluvium de cette vallée à son ouverture dans celle de l’Oise, par rapport au lit de silex brisé qui se trouve à la base de l’alluvion ancienne. Le di- ■ luvium de cailloux roulés, mélangés de sable qui occupe le fond 1 des vallées et s’élève plus ou moins sur leurs pentes, et l’alluvion j ancienne qui le recouvre dans toutes les positions , sont donc le résultat de deux phases du même phénomène , dont les diffé- ; rences, lorsqu’on les compare sur divers points, ont eu pour cause J des différences correspondantes dans la vitesse, la profondeur et la \ direction des eaux, et non des phénomènes réellement distincts, comme on pourrait être tenté de l’admettre au premier abord. Ainsi là où la section du courant était la plus grande et surtout SÉANCE DU 17 MARS 1815. 313 la plus profonde, c’est-à-dire vers le débouché de chaque vallée secondaire dans la vallée principale, le diluvium de cailloux est plus épais; les cailloux sont plus arrondis, et si les collines envi- ronnantes appartiennent au terrain tertiaire, on y trouve des fragments de roches, de coquilles et des sables de ce terrain, mélangés avec les silex provenant de la craie. L’alluvion ancienne qui surmonte alors le tout est plus sableuse et calcarifère , et les coquilles fluviatiles et terrestres entraînées des étangs, des marais ou des cours dYau voisins, y sont aussi plus ou moins abondantes. Au fur et à mesure qu’ou remonte les vallées du second ordre et qu’on s’éloigne du terrain tertiaire , le diluvium est moins sa- bleux , moins épais, renferme moins de coquilles et de roches ter- tiaires. L’alluvion ancienne est aussi moins sableuse, moins cal- carifère, l’alumine tend à prédominer, et les coquilles fluviatiles et terrestres ne s’y montrent plus que très rarement. Enfin sur les plateaux crayeux de la Picardie, la couche de silex est souvent très réduite, ou bien ceux-ci sont peu ou point roulés, excepté les cail- loux, qui, comme on l’a vu, ont une origine plus ancienne. Les silex sontenveloppésd’une glaise brune, très tenace, qui, vers le haut, se charge peu à peu de sable et passe ainsi au véritable lehm ou allu- vion ancienne. Lorsque ce dernier dépôt manque ou qu’il est très peu épais, on trouve dans les champs, comme nous l’avons dit, les silex qui ont été arrachés dans les premiers temps de la période tertiaire, mélangés avec ceux du commencement de la période di- luvienne (1). Les faits que nous avons rapportés et les opinions qu’ils nous ont suggérées sont, d’ailleurs, parfaitement d’accord avec ce que M. Buteux a écrit à ce sujet pour le département de la Somme, dans son Esquisse géologique publiée en 1843. Si nous embrassons maintenant le phénomène sur une plus (i) Nous ferons remarquer que, plus au N. , il existe une roue de craie blanche sans silex, dirigée du N.-O. au S.-E. , à travers les départements de la Somme, de l’Aisne et des Ardennes, et l'on ne trouve point de silex à la base de l’alluvion ancienne qui la recouvre sur les plateaux élevés et situés à une certaine distance des vallées ; mais, au-delà de celte zone, les silex rep araissent à la base de l’alluvion dès qu'ils se montrent dans la craie sous-jacente. Ces silex des plateaux, brisés, mais nullement roulés, sont alors parfaitement distincts de ceux du diluvium des vallées. Leur état et leur position semblent témoigner à la fois et de l’action dissol- vante des eaux qui les ont dégagés de leur gangue crayeuse et du faible pouvoir de transport de ces mêmes eaux. SÉANCE DU 17 MARS 1815. 34 4 grande échelle, par exemple, en comprenant le bassin hydrogra- phique de la Seine , dans lequel M. Eüe de Beaumont a démontré d’une mmière si ingénieuse ( Bull , de la Soc . P Idiomatique, séance du 26 août 1843) que ce phénomène avait eu lieu simultanément dans toutes ses parties, nous trouverons que partout les eaux dilu- viennes ont laissé des traces de leur passage, comparables à ce que nous venons de voir, c’est-à dire que le nombre, le volume et l’état plus ou moins roulé des cailloux est en rapport avec la section sup- posée des cours d’eau qui les ont transportés, avec leur pente et avec l’éloignement de leur point de départ. Ainsi, vers le thalweg des val- lées, les cailloux et les graviers forment des dépôts plus épais; ceux- ci, à moins de dispositions particulières dans la forme et la direction de la vallée, diminuent à mesure qu’on s’élève sur les pentes, et sur les plateaux, les cailloux manquent souvent ou sont à peine roulés. Nous venons de dire, à moins de dispositions particulières dans la forme et la direction de la vallée , parce qu’en effet un ré- trécissement ou un élargissement plus ou moins prononcés, des variations dans l’inclinaison des pentes, des changements de direc- tions plus ou moins brusques, la réunion d’affluents plus ou moins considérables et débouchant sous des angles plus ou moins ouverts , sont autant de causes de modifications dans les résultats du phénomène. Ces dépôts ne sont point stratifiés dans la véritable acception du mot; ils ne se présentent point en couches régulières, horizon- tales , continues et distinctes comme des sédiments formés dans les eaux de la mer ou des lacs. L’inégalité de leur épaisseur, la différence des niveaux auxquels on les observe, leur discontinuité et la variabilité de leurs caractères, même à de très petites distan- ces, sont autant de preuves qu’ils doivent leur existence à des eaux torrentielles, irrégulières dans leur volume, dans leur pouvoir de transport et qui, avec les débris des roches environnantes, ont aussi entraîné les ossements des mammifères qui peuplaient aupa- ravant le pays émergé. Ces derniers y sont d’autant plus rares qu’on remonte davantage les vallées, et dans l’allu vion ancienne on en trouve à peine quelques traces toujours plus altérées. On conçoit que les premiers torrents qui ont balayé le sol , ont du en- traîner dans ses dépressions tout ce qui se trouvait à sa surface, et une nouvelle génération de grands animaux ne reparut qu’après le dépôt de l’alluvion ancienne. Lorsque les eaux commencèrent à s’abaisser, leur plus grande force a continué à se trouver vers le milieu des vallées ; elles pou- vaient encore entraîner des cailloux sur leur fond et déposer sur les SÉANCE DU 17 MARS 1 845. 345 pentes les sédiments les plus légers tenus en suspension et sem- blables à ceux des plateaux qui étaient alors émergés ; puis , dans la dernière période du phénomène, les sédiments limoneux se sont déposés sur les cailloux roulés du fond des vallées et les ont plus ou moins recouverts. Cette dernière période a été sans doute la plus longue, et nous ne trouvons, en général, les Succinées, les Hélix, les Planorbes, les Lymnées et les Paludines que dans ces derniers dépôts argilo-sableux. Ces coquilles avaient pu se déve- lopper dans les flaques d’eau qui durent rester sur un certain nombre de points après l’abaissement général, de même que dans les ruisseaux qui alors se rendaient dans les vallées, tandis qu’à l’époque où se déposaient les sédiments terreux sur les plateaux, bien que le mouvement des eaux dût y être assez faible et com- parable à ce qui se passe aujourd’hui dans les vallées momentané- ment inondées, la grande quantité de sédiment dont ces eaux étaient chargées et l’absence de terres émergées dans le voisinage, ne permettaient pas plus aux coquilles fluviatiles et terrestres d’y vivre ou de s’y accumuler , que dans les vallées où la vitesse et la profondeur du courant facilitait le transport des cailloux et des blocs. Ainsi les sédiments des plateaux nous représentent à la fois la plus grande extension horizontale et la plus grande hauteur verti- cale du phénomène; ceux des vallées, sa plus grande force de transport au commencement et au milieu de la période, puis ses derniers produits à mesure que son énergie s’affaiblissait. Ces derniers dépôts diluviens qui ont immédiatement précédé les sé- diments de la période actuelle , s’en distinguent toujours par un raccordement plus ou moins marqué avec les pentes inférieures des collines, tandis que les dépôts modernes sont parfaitement horizontaux. Après celte communication M. d’Archiac donne lecture de l’extrait suivant d une lettre de M. de Longuemar. L’examen de la surface triangulaire comprise entre l’Yonne et l’Armance , et dans laquelle la zone crayeuse inférieure a été pro- fondément entamée par les eaux, m’a fait connaître que plusieurs étages du grès vert, s’étant peu élevés au-dessus du niveau des eaux courantes actuelles, n’ont pu venir affleurer sur la rive gauche de l’Yonne où le sol a été moins dénudé sur le prolonge- ment de cette même zone. Au mois de novembre dernier , j’ai donné, dans l’Annuaire du département de l’Yonne, une notice 316 SÉANCE DU 17 MARS 1845. complémentaire de mes premières études dans laquelle j’ai dé- veloppé ces observations, que je résumerai ici en peu de mots, en y joignant, pour plus de clarté, la coupe du mont Saint-Sulpice à Lignerolles (PI. VIII , fig. 11). Je retrouve d’abord, entre la craie grise à Ammonites et le ter- rain néocomien proprement dit, toutes les couches du green sand d’Angleterre, sinon complètes, du moins indiquées, et particulière- ment les sables plus ou moins ferrugineux qui séparent les marnes du gault des marnes à Exogyra subplicatn ou terrain aptien ; ensuite j’ai reconnu entre la craie blanche et les dernières couches oolitiques, l’existence de trois séries de dépôts complètement sé- parées les unes des autres par des abaissements subits survenus dans les niveaux des mers anciennes, lesquelles tendaient à se relever de nouveau progressivement pendant la formation de chaque série. La plus inférieure comprend les trois étages du terrain néocomien de ce pays, c’est-à-dire les calcaires grossiers horizontaux au bas des coteaux portlandiens , les marnes à lumachelles qui les ont recouverts en atteignant un niveau plus élevé , et des couches argilo-sableuses bigarrées avec moellons pétris de Cérites et sur- montant le tout. La seconde série comprend les marnes argileuses à grandes Exo- gyres, déposées au pied des pentes du terrain précédent , et qui s’élèvent à peine au-dessus du niveau de l’Yonne, du Soi in et de l’Armance (Gurgy, Rouvray, les Crouttes). Puis un massif de sables plus ou moins ferrugineux , blancs, jaunes . rouges ou ver- dâtres entrecoupé de lits d’argile et de bancs de grès ferrugineux. Ces couches atteignent les points les plus élevés du pays et consti- tuent des mamelons connus sous le nom de 7 bureaux. La troisième série commence par les couches marneuses et sa- blonneuses , contenant tous les fossiles propres au gault et qui constituent de petites collines à Bouilly, Rebourceaux, les Drillons, Beugnon et Soumaintrains. Au-dessus viennent dessables, puis des marnes argileuses bleues sans fossiles, que surmonte la craie grise à Ammonites. La craie blanche et les marnes crayeuses sans Ammonites qui lui succèdent, ne s’élèvent point aussi haut et sem- bleraient indiquer un nouvel abaissement, moins rapide toutefois que les précédents. Il est peu probable qu’un retrait brusque des eaux marines n’ait pas eu pour résultat d’entamer la surface du sol abandonné, et c’est effectivement ce qui paraît avoir eu lieu pour les sables du lower green sand, dans les excavations duquel les marnes du gault sont venues se déposer, en affectant souvent une inclinaison à l’E. SÉANCE DU 17 MARS 1845. 347 et au S.-E. , c’est-à-dire opposée à celle de la masse des grès verts qui plonge au N. -O. Peut-être trouverait-on dans cette circon- stance l’explication de la divergence qui existe entre quelques ob- servations antérieures qui font succéder immédiatement le gault aux marnes à Exogyra sinuata , et qui placent le grès ferrugineux à empreintes végétales dans la dépendance du gault au lieu de le laisser dans le lower green s and. Si l’on joint à cette cause d’er- reur celle déjà signalée du peu d’élévation qu’ont atteint les cou- ches les plus inférieures de chaque série , on se rendra facile- ment compte de la confusion que produit dans les divers étages des grès verts leur superposition , compliquée par l’érosion de quelques assises et par la différence des niveaux atteints par cha- cune d’elles. En outre, il est naturel de rencontrer élans les cou- ches inférieures d’une série les fossiles de la série antérieure en- traînés par les eaux lors de leur brusque abaissement. L’existence de la masse sableuse du lower green sa/id ne peut être mise en doute entre l’Armançon et le Serain , car la base de la plaine de Pontigny repose sur la marne à grandes Exogyres, si- gnalée dans le puits de Rouvray. Les côtes de l’Ordonnoie, com- posées de sables et de grès plus ou moins ferrugineux , s’élèvent au-dessus, et les marnes et sables à fossiles du gault constituent les buttes de Bouilly, Rebourceaux et la base du mont Saint Sulpiee, placées en avant d’eux, sur la même zone et en couches horizon taies, tandis que les sables de l’Ordonnoie plongent au N. -O. Des grès à petites Exogyres couronnent même cette côte et ont leur équivalent à Versigny, dans la plaine de l’Armançon , ce qui in- dique une inclinaison considérable. La comparaison des fossiles recueillis dans chaque terrain m’a porté à conclure que la plupart des espèces passaient d’un groupe à l’autre, mais que chaque groupe pouvait néanmoins être carac- térisé par la prédominance d’une espèce qui s’y était particulière- ment développée. Ne pouvant vous envoyer encore ce tableau au net, je me bornerai à faire remarquer que les calcaires grossiers néocomiens inférieurs sont pétris de Pectcn quinquecostatus , de Pholadomya, de Spatangus retusus , d’ Exogyra aquilina, falcijormis et subsinuata. Les marnes à lumaclielles sont remplies de petites Exogyres. Les couches bigarrées à moellons renferment particu- lièrement des Céi ites. Les marnes à grandesExogyres sont presque entièrement composées de débris de ces coquilles. Les sables fer- rugineux sont caractérisés par les empreintes végétales de dicoty- lédones, et les marnes et les sables du gault par Y Tnoccrarniis con- centrions, Y Ostrea carinata , Plieatula placunea , Ammonites intcrrnp - 348 SÉANCE DU 17 MARS 1845. tus. Les sables et les marnes bleus sont sans fossiles. La craie grise est remplie à? Ammonites recticostatus et radians , de Spalan- gus globulosus, tandis que la craie blanche et marneuse n’offre que des Spatangues, des fragments de Catillus et de polypiers. M. Rozet fait observer qu’on serait exposé à commettre des erreurs , si on classait uniquement les terrains d après leurs fossiles , puisqu’on trouve dans les terrains supérieurs des environs de Pont-Sainte-Maxence la même cyrène que dans l’argile de Londres. M. El ie de Beaumont fait remarquer que tandis que le diluvium de l’Yonne est caractérisé par les granités, celui de l’Oise l’est par lesNummulites. Le secrétaire donne lecture de l’extrait suivant d’une lettre de M. L. de Buch, adressée à M. Elie de Beaumont : Sur V existence du Muschelkalk dans les Alpes de la Lombardie et sur une Tri g onia qui parait le caractériser. M. Studer, en allant de Sondrio, par le passage de Vanina, à Bergamo, a pu saisir le profil de toute la chaîne. Suivi dans la vallée de la Brembana par des couches jurassiques, on entre tout- à-coup, à Camerata, dans une formation d’une argilite en cou- ches, qui s’enfonce sous le calcaire de Saint-Pellegrin. M. Studer trouve une ressemblance entre ces argilites et le keuper, et il est bon de saisir cette première impression , à cause de la présence d’une trigonie qui se trouve en abondance à Saint Pellegrin. Cette coquille dont la découverte est due à miss Emilia Whately, qui a séjourné aux bains de Saint-Pellegrin, paraissant trahir d’une manière évidente la présence du muschelkalk , inconnu jusqu’ici dans cette partie de l’Italie, elle mérite d’être connue particulière- ment , et c’est pour cette raison que je vous envoie un dessin que j’espère que M. de Humboldt vous remettra (PL IX, fig. 1, 2, 3). J’ajoute ici quelques mots pour remplacer une description. Trigo- nia IVhatelyœ ; c’est la Trigonia vulgaris ennoblis. Elle a toute la forme, la courbure en demi-cercle de la face antérieure qu’on voit figurée dans Goldfuss (tab. 135, fig. 16), et sa surface est cou- verte, d’une manière élégante, de ces stries fines d’accroissement qui sont si marquantes pour ces espèces de Trigonie. Mais elle est de plus ornée de plis longitudinaux qui, au nombre de six, se suivent depuis l’arête de l’area jusqu’au côté antérieur; et tous U de la Soe. &éol. de France' Zsüaouia. comme dans les espèces voisines, avec une tache costale blan- » che , une bande transverse, médiane , sinuée , de la même cou- »» leur , suivie de deux yeux noirs encadrés de blanc , s’alignant ex- » térieurementavec deux points blancs. L’extrémité de cette même m aile est un peu plus pâle , presque blanchâtre , et divisée, comme Soc « Géoi. Tome II, 2e série. ^5 386 SÉANCE DU 21 AVRIL 1845* » chez la plupart des espèces vivantes, par deux Signes marginales » brunes, parallèles. L’appendice caudal est un peu plus long que » dans le Rohria , mais situé de la même manière. La conservation » de l’échantillon permet de distinguer le dessin et probablement » la véritable couleur du papillon tel qu’il était avant son incrus- » tation. » Je ne connais pas assez les espèces des grenouilles exotiques, pour pouvoir les comparer à la Ranci ac/uensis , mais je puis assurer qu’elle diffère entièrement de celles qui vivent en Europe. J’at- tends qu’une occasion favorable me permette de décrire et de publier les individus d'insectes fossiles que depuis dix années je recueille dans les platrières d’Aix ; le nombre des espèces que je possède en ce moment s’élève à plus de soixante. M. Constant Prévost ajoute quelques nouvelles observa - tions à celles qu’il a depuis longtemps communiquées à la Société (séance du 21 février 1842, Bull. , t. XIII , p. 205), relativement à la coloration des grès des environs de Paris par divers oxides métalliques. « Dans une excursion géologique qu’il a faite récemment pour visiter les exploitations de grès d’Orsay, il a pu vérifier que la coloration des sables et grès, et en très grande partie celle des meulières qui les recouvrent, est accidentelle et lo- cale, et qu elle est due à des filtrations venues de la surface du sol, à une époque plus ou moins récente. Les graviers les plus superficiels sont eux -mêmes teints par les mêmes sub- stances métalliques. En suivant le progrès de la filtration à travers les argiles à meulières, on voit que la matière colo- rante a agi comme si elle avait été tenue en suspension ou en solution dans un liquide aqueux. » On sait qu’à Orsay les bancs de grès exploités occupent la partie supérieure des sables marins , et qu’ils sont recou- verts par 4 à 6 mètres au moins d’argile à meulières. Les pla- ques de silex meulières ne sont pas distribuées d’une ma- nière égale. Dans de certains points , elles sont presque au contact des sables et grès; dans d’autres, elles en sont sépa- rées par des lits argileux imperméables. Dans les premières localités, où la filtration est facile, les sables et grès inférieurs sont généralement colorés, tandis qu’ils sont d’un blanc pur SÉANCE DU 21 AVRIL 1845. 387 au-dessous des argiles compactes qui ont arrêté les filtra- tions. » Il est également évident que les bancs de grès étaient déjà consolidés, et même que leur surface avait été modelée et ravinée par l’action d’eaux courantes , avant que ies pre- miers dépôts du système des meulières fussent venus les re- couvrir. La surface de ces grès, mise à nu par l’exploitation, est, par place, maculée de noir, comme si on y avait jeté de l’encre, qui se serait étalée en rayonnant autour des points sur lesquels chaque goutte serait tombée. On observe aussi, au bord des fissures nombreuses qui coupent verticalement les bancs de grès, de grandes taches noires irrégulières , qui indiquent les points par lesquels les filtrations se sont faites à travers les grès. Ces fissures sont remplies, et leurs parois sont recouvertes d’un enduit plus ou moins épais de sub- stances métalliques d’un noir très foncé, qui pénètre plus où moins le grès en raison de sa plus ou moins grande du- reté. Enfin, on peut suivre les filtrations à travers des canaux sinueux ou sortes de puits à surface lisse et enduite d’hy- drate de manganèse coballifère, et voir celte matière s’éten- dre et colorer en noir bleu très foncé les sables inférieurs aux bancs de grès, comme le ferait de l’encre versée sur une niasse de sable. » Le liquide manganésifère et coballifère a pénétré, tantôt du sable d’un blanc pur, tantôt du sable déjà coloré en jaune par le fer hydroxidé. Ce fait et beaucoup d’autres indiquent que la coloration par le fer, postérieure au dépôt de sable et à la consolidation des grès, a été également produite par une filtration antérieure à celle du manganèse et du cobalt. 35 1 , 352 , 56o , 367 , 368 et 377 du mém. préc. de M. Dubois- Aymé. (2) Bulletin de la Société géologique , irC série, t. XIV, p. 36i et 362. (3) Bulletin de la Soc. géolog. , p. 36o et 061. (4) Bulletin de la Soc. géolog. , p, 36 1 et 062. SÉANCE DU 19 MAI 1845- 424 du bassin de l’Isthme. Guidé par l’opinion de M. J.-M. Le Père, qui croyait à tort que le N il y pénétrait dans ses plus grandes inondations , j’attribuai aux eaux de ce fleuve le brisement du plateau salin dont il est parlé, et j’en tirais des conclusions par analogie relativement à la Mer-Morte (1). La rectification des faits suffit pour renverser cette hypothèse , puisque le Nil n’y pénétra jamais. M. Dubois-Aymé donne une autre explication de ce genre de phénomène. Il trouve que ce plateau salin représentait en grand ce que nous voyons dans nos laboratoires lorsqu’une dissolution saline, renfermée dans une capsule , a été tellement concentrée qu’une croûte s’est formée à la surface , et s’est ensuite soulevée et brisée par l’évaporation du liquide qui était au-dessous. M. Dubois-Aymé ajoute qu’ils n’ont rien vu de semblable dans les autres parties de l’isthme; les parcelles d’hydrochlorate de soude trouvées ailleurs ne peuvent entrer en comparaison avec les masses qui existent ici. Les coquilles que l’on aperçoit dans ce bassin ne sont ni des coquilles fluviatiles, ni des coquilles fossiles, mais sont semblables à celles que la mer rejette sur ses grèves, et que Niebuhr a vues auprès de Soueys vivantes sur un rocher qui n’était couvert d’eau que par la marée , tandis qu’il a trouvé de semblables coquilles vides dans un lieu que la mer n’atteignait plus (2). M. Devilliers, qui accompagnait M. J.-M. Le Père, dit, dans son Journal de voyage (3), en parlant des lacs ou parties basses du grand bassin de l’Isthme, qu’il a traversé dans une étendue de 3 trois lieues en se dirigeant du Serapeum aux montagnes de Soueys, qu’on y remarquait pendant la première lieue du sulfate calcaire cristallisé en aiguilles rayonnantes , et par masses isolées d’environ 3 pieds de haut , qui avaient l’apparence de troncs de palmiers coupés. Le terrain s’amollit et descend : on trouve enfin de la boue et de l'eau extrêmement saumâtre, dans laquelle il lui a paru que le muriate de soude dominait plus que dans l’eau de mer. De l’autre côté , le terrain est fendu en quartiers de 15 à 20 pieds, qui ont environ 4 pieds de haut : l’eau les dissout et les divise. Les blocs sont composés de masses de muriate de soude , quelquefois très considérables , et de sables mélangés de petits cris- taux de sulfate de chaux. Après une lieue et demie de ce terrain (i) Bulletin de La Soc. géolog. , p. 563 , 37 5 , 376 et 385. (à) Voir aux p. 355-358 du mém. préc. de M. Dubois-Aymé. (3) Extrait du journal de voyage de M . Devilliers , ingénieur des ponts et chaussées, p. 379-382 , à la suite du mém. préc. de M. Dubois-Aymé. 3ÉA.MCE DU 4 9 MAI 1845. 425 tourmenté, le s >1 s’abaisse encore' il est humide et boueux. De l’autre côté on trouve , en s’élevant , quelques coquillages sur du sable; puis du sable sans coquilles sur lequel il y a du carbonate de chaux qui paraît se décomposer ; et enfin des cristaux de gypse rayonnant la pointe en bas. Le terrain est boursouflé et fendu, non comme par Reflet d’un retrait entre ses parties, mais, au contraire, comme si une plus grande extension les eut soulevées et brisées. Les parties les plus saillantes de ce terrain sont des masses de muriate de soude , qui présentent des crevasses de quelques pouces de largeur , à travers lesquelles M. Devilliers a sondé sans trouver le fond à 1 mètre de profondeur au-dessous du muriate de soude. J’ai donné en note , page 362 du tome XIV du Bulletin , Ire série , les niveaux comparés, d’après les nivellements géodésiques , de la Méditerranée, de la mer Rouge et du point le plus bas du bassin des Lacs Amers. C’est d’abord du bassin de l’Isthme qu’il faut entendre cette dernière indication, d’après ce que nous venons de dire plus haut. En outre, M. Dubois-Aymé fait observer que les ingénieurs français, quand ils parlent des hautes eaux delà mer Rouge, entendent toujours le niveau qu’elles atteignirent le 5 plu- viôse an vu (24 janvier 1799), à la marée haute, à 2,270 mètres au DL de Soueys; mais qu’il résulte des observations qu’ils ont faites à Soueys que la mer Rouge s’élève dans les marées ex- traordinaires à 2 pieds 6 pouces (0m,812) au-dessus de celle qui a servi de point de comparaison dans leur nivellement (1 ). Le poiut le plus bas de la ligne de nivellement dans le bassin de l’Isthme n’est donc pas seulement à 54 pieds 3 pouces 2 lignes fl7“,627), mais en réalité, à très peu près, à 56 pieds 9 pouces 2 lignes (en- viron I8m,439) au-dessous des plus hautes marées de la mer Rouge, c’est-à-dire que, si elles y retournaient, elle') y auraient parfois dans ce point cette profondeur. La dépression de ce même point au-dessous de la haute mer à Tyneli (Méditerranée) est d’environ 24 pieds (8m, 071). Ce bassin, partout inférieur à la mer Rouge , n’en est séparé que par une digue naturelle qui n’a qu’en- viron 5 à 600 mètres de largeur , si on la prend au point des plus hautes eaux, et 4 à 5,000 mètres si l’on prend seulement du ni- (î) Le niveau de la basse mer à Tvneh ( Méditerranée ) n'est donc pas seulement de 9“, 908, chiffre aujourd'hui stéréotypé, mais de 9“, 908 -f- ora,8i2 = 1 om _ 7 2 environ au-dessous du point qu’atteignent parfois les plus hautes eaux de la mer Rouge. La différence entre la haute et la basse mer à Tyneh n’est que de om,352. 426 SEANCE DU 19 MAI 18 45. veau de la haute marée du 24 janvier 1799. Le point le plus élevé de la ligne de nivellement à travers ces ensablements n’est que de 3 lignes au-dessus des plus hautes eaux delà mer bouge. Mais en supposant quelques faibles erreurs dans le nivellement, parce que les mires furent toujours placées dans les endroits les plus bas, et en faisant attention que la laisse , qui a servi aux ingénieurs à établir la limite des plus hautes marées, a pu leur donner une quantité trop forte de quelques pouces, attendu i’elfet de la poussée du flot et quelquefois du vent, il n’en résulte pas moins que sans s’en tenir à cette quantité précise de 3 lignes , du moins peut-on assurer que dans les marées extraordinaires , la mer Rouge s’élève presque au même niveau que quelques parties du terrain qui la sépare du bassin de l'Isthme. Au N. de ce bassin, la digue naturelle , analogue à celle qui le sépare au S. du golfe Arabique, atteint, et c’est dans le voisinage du Serapeum , une élévation d’au moins 7 pieds 10 lignes (2m,296) au-dessus des hautes eaux de la mer Rouge(l). Plus au N. encore, la plus grande partie du sol de l’Isthme paraît, en général du moins, inférieure au niveau de la mer Rouge. L’étendue du bassin de l’Isthme n’est pas bien connue. M. J.- M. Le Père, d une manière d’ailleurs assez vague, indique l’en- semble des bassins qu’il confond comme ayant environ 15 lieues de tour. Le bassin de l’Istlime serait donc présumé , d’après cela, avoir cette étendue, déduction faite de la superficie des bassins des Lacs Amers (voir le § suivant). Comme les ordonnées de la ligne de nivellement des ingénieurs français, combinées avec les indications de MM. J.-M. Le Père et Dubois-Aymé, nous parais- sent donner à la dépression du sol au-dessous du niveau des plus hautes eaux de la mer Rouge dans le sens du nivellement, seule- ment du point de départ sur cette mer jusque vers le Serapeum ou un peu au-delà, une longueur de 70 à 78 kilomètres, nous sommes porté à regarder cette étendue comme plus considérable. § 9. Lacs Amers , ou du Crocodile , etc. Les Lacs Amers {Lacas A/nari ) ou fontaines amères des anciens forment des lagunes et terrains marécageux désignés sur la grande carte d’Egypte , du dépôt de la guerre , sous les noms de Krah ou Krahah et de lac du Crocodile (Temsâh), sous lesquels ils sont maintenant connus. Ils sont au N. -O. et au N. du bassin de (i) Voir aux p. 342-346 et 349 du mém. préc, de M. Dubois-Ayraé’ SÉANCE DU 19 MAI 1845. 427 l’Isthme et au N. du Serapeam (1). M. Dubois-Aymé donne comme constant que ces lacs reçoivent les eaux du Nil dans les inonda- tions extraordinaires (2), et M. Devilliers dit que , dans la grande inondation de 1800, l’eau de ce fleuve se répandait dans deux vastes bassins ayant 0 à 7 lieues de circonférence , et indiqués sur la carte sous le nom de lac du Temsah (lac du Crocodile) (3). M. Devilliers ne pouvait apprécier cette étendue que par la vue de l’eau de l’inondation qui les avait envahis, et l’eau du Nil à ce moment paraît y être restée inférieure de plus de 11 pieds aux eaux de la mer Rouge. Leur ancien nom de Lacs J mers ne paraît laisser aucun doute sur leur extrême salure, quoique l’on puisse supposer que le la- vage des grandes inondations du Nil a pu la diminuer. La confu- sion que faisait M. J.- Al. Le Père, de ces bassins avec celui de risthme, semble prouver aussi qu’ils ont le même aspect salin. Cependant je ne trouve i ien de précis à cet égard indiqué par les ingénieurs français, si ce n’est la qualification de Marais salants donnée sur la carte aux lagunes dites Krah. Leur dépression au-dessous du niveau de la mer Rouge est géodésiquement constatée. M. Dubois-Aymé dit que c’est dans le bassin des Lacs Amers que devait nécessairement déboucher le canal de Plolémée. A 86,182 mètres de la mer Rouge , au point de la ligne de nivellement et de ce bassin où se perdent les traces du canal , la dépression du sol est de 12 pieds 7 pouces 1 ligne (4,n,089) au-dessous du niveau de la haute mer à Soueys. A 6,895 mètres plus loin , sur la partie de cette même ligne de nivellement qui se dirige versleKaiie, dans la vallée de Saba’h-byar (les Sept Puits), par laquelle l’eau du Nil se déverse dans les Lacs Amers , la dépression atteint 19 pieds 11 pouces 8 lignes (6m, 487) au-dessous de ce même niveau ; mais le nivellement n’indique nulle part pour ces bassins, comme il l’indique pour celui de l’Isthme, une dépression au-dessous du niveau de la Méditerranée. Du point indiqué de la vallée de Saba’h-byar au Kaire , il constate une dé- pression presque constante du sol au-dessous du niveau de la mer Rouge; cependant le niveau du sol se maintient toujours au- dessus de celui de la Méditerranée, sauf en un point du Ras-el- Ouady, où il semble y descendre dans la vallée habitée par les Arabes Toumylat. Cette vallée, par laquelle les grandis inon- (i ) Voir le § précédent, (2) Voir p. 549-35 1 du iném. préc. de M. Du bois- Aymé. (3) Voir la p. 080 du journal de voyage préc. de M. Devilliers. SEANCE DU 19 MAI 1845. 4 28 dations du Nil se répandent dans la vallée de Saba’h-byar et de là dans le lac du Crocodile, offre une dépression qui, sur une longueur de 3 kilomètres environ, est un peu inférieure au niveau de la Méditerranée, et atteint au Byr-Ras-el-Ouady (puits de la tête de la vallée) un maximum de 33 pieds 2 pouces 8 lignes (10m,798) au-dessous du niveau de la haute mer du 24 janvier 1799, à Soueys , et par conséquent au-dessous du niveau de la Méditerranée à Tyneh, de 2 pieds 8 pouces 8 lignes (On\884) à mer basse, et de 3 pieds 7 pouces 8 lignes (lm,236) à la haute mer (1). Mais je suis très disposé à penser que cette très légère dépression au-dessous de la Méditerranée, prise dans le lit de l’ancien canal , peut bien n’être que le résultat artificiel du creu- sement même de ce canal, et non celui d'un fait naturel. A 81 kilomètres environ du Mouqfâr, situé sur la ligne de ni- vellement dirigée vers le Kaire, à 97,117 mètres de la mer Rouge, le sol commence à se relever au-dessus du niveau des eaux de cette mer, puis y redescend encore une fois à la 753e station du nivelle- ment. Enfin , à 90 kilomètres environ du Mouqfâr, à 600 mètres environ au N. de la prise d’eau du canal de l’Abou-Meneggi , et à 9 kilomètres de Roudaq, ville qui n’est elle-même séparée du Kaire que par une plaine de 13 à 1,400 mètres, les eaux du Nil descendent au-dessous du niveau de la mer Rouge, car, le 4 décembre 1799, elles y étaient à 6 pieds 1 1 pouces 3 lignes (2m,253) au-dessous de la marée liante du 24 janvier de la même année, à Soueys. Au Meqyas de l île de Roudaq, à 105 kilomètres environ du Mouqfâr, le Nil, le 14 décembre 1799, avait ses eaux de 4 pieds 7 pouces 9 lignes (lm,509) au-dessous de la haute mer à Soueys. § 10. Lac Mœris , ou Birket-Qeroun. Le Birket-Qeroun est la cunette ou la partie la plus basse de l’an- cien lac Mœris ( lacas Mœridis ) . Il offre sensiblement l’étendue d’un immense bas-fond dont la profondeur, que nulle opération mo- i i) Mémoire sur La communication de La mer des Indes à La Méditerranée par La mer Rouge et l'isthme de Soueys, par M. J. -M. Le Père , ingénieur en chef, etc, — Description de l’Égypte. — État moderne — 2me édition in-8°, Paris 1822, t. XI. p. 37*58i. Ce mémoire contient, de la p. 3i8- 35 1 , un Extrait du journal historique et géographique du nivellement de l’isthme de Soueys par le canal des Deux Mers , de Soueys sur la mer Rouge à Tyneh sur la Méditerranée au Kaire et aux pyramides de Gyseh , qu’il faut voir particulièrement aux p. 628 et 34 1, SÉANCE DU 19 MAI 1845. 429 derne n’a vérifiée, peut très bien être celle indiquée par Hérodote, 50 orgyes (92 mètres) au-dessous des plus hautes eaux de ce lac. 51 cette profondeur n’était pas exacte dans remplacement des deux pyramides élevées par Mœris , rien ne s’oppose à c,: qu’elle puisse l’être pour tout autre point, car son sol paraît être très inférieur à celui du Nil, et par induction à celui de la Méditerranée (1). M. P.-D. Martin , l’un des ingénieurs de l’expédition d’Egypte, ajoute quelques autres renseignements sur le Birket-Qeroun (2). Dans l’état où il le vit, il lui parut avoir en un certain point une lieue de largeur; sa longueur est bien plus considérable. Il pense qu’on ne serait pas embarrassé de retrouver dans son bassin , tel qu’d est encore , l’immense étendue de 3,600 stades, qu’Hérodote attribuait au tour du lac Mœris dans les hautes eaux , remarquant d’ailleurs que les mesures données par cet historien ne doivent pas être regardées comme données avec une précision mathéma- tique. M. Martin a trouvé de l’eau très fortement salée dans le fond d’un vaste trou rond près d’une des Pyramides du labyrinthe, non loin de la ville de Médine, qui est par 29° 28' 48"lat. N. et 28° 41' 9" longit. orient, de Paris , et il signale sur le bord du Birket- Qeroun des salines exploitées et qui donnent un sel très beau et très estimé, au moyen de l’évaporation de l’eau salée qu’on tire de puits creusés à cet effet. Il dit qu’il n’a trouvé l’eau de ce lac que saumâtre, et que les chevaux et même plusieurs des domes- tiques en burent. Mais il rappelle l’assertion de Pococke , qui la trouve, dit-il, plus salée que Peau de la mer. Il concilie ce que cela semble avoir de contradictoire avec ce qu’il a vu lui-même, en faisant observer que Pococke visita ce lac un mois et demi plus tard dans la saison, et que peut être l’inondation du Nil, qui avait précédé le voyage de Pococke, avait été plus faible , tandis que celle qui avait précédé le sien avait été très abondante. § 11. Lacs de Natron . Les lacs de Natron [Nitrijodinœ ou Sebâhhah Natroun ) sont au nombre de six. Ils sont situés entre les parallèles de Myt-Salameh (î) Voir à la p. 218 du iném. préc. de Gr. Le Père. (2) Description hydrographique des provinces de Beny-Soueyf et de Fayoum, jpar P.-D. Martin, ingénieur au corps royal des ponts et chaussées. Description de l’Égypte. — État moderne. 2me édition , in 8° , t- XIV, i8q5, p. 1-72, et particulièrement aux pages 34, 09, 43, 47 et 63. 430 SÉANCE DU 19 MAI 1845. et de Terrâoeh sur le Nil, à 12 heures de marche (environ 48 kilomètres) à l’O. de Terrâneh , dans la partie centrale et la plus basse d’une vallée adjacente à la Basse-Egypte. Elle prend naissance entre les pyramides de Saqqârah et de Gyzeh et vient se terminer sur les confins de la province de Bahyreli au S. deMareos, capi- tale de l’ancienne Maréotite. M. Gratien Le Père pense que le bassin de ces lacs est inférieur au niveau de la Méditerranée (1). Quant à la nature et à l’abondance des sels de ces lacs de Nation, il est inutile de répéter ici ce que nous en avons dit dans notre mémoire précité (2). § 12. Fleuve sans eau y etc. Le sol du fleuve ou mer sans eau ( Bahr-Bclâ-mâ ) , qui va du S. au N. et part du Birket-Qeroun , doit être, suivant M. Gratien Le Père , inférieur à la Méditerranée (3) . Enfin cet ingénieur conclut que l’Isthme de Soueys , toute la Basse-Egypte, ainsi que toutes les plages adjacentes à i’O. jusque vers l’oasis d’Ammon dans les déserts de la Libye , appartiennent incontestablement au domaine d’une mer desséchée , que les vallées du Bahr-Belâ-mâ et des lacs de Nati on ont pu former ancien- nement des golfes semblables à ceux de la mer Rouge; qu’enfin les déserts de la Libye et de l’Afrique étant en générai regardés comme appartenant au sol d’une mer desséchée , les oasis , espèces d’îles cultivées ou cultivables que l’on trouve dispersées sur l’im- mensité de cette mer de sables ne sont que des bas-fonds tels qu’il en existe dans le sein des mers , et dont le fond est encore en partie inférieur au niveau actuel de la Méditerranée (4). § 13. Oasis de Syouah ou et Ammon. Hornemann, qui a visité l’oasis de Syouah ou d’Ammon, en septembre 1798 , signale en quelque sorte à tout moment (5) dans (1) Voir aux p, 2i5 et 219 du mém. préc. de Gr. Le Père. (2) Pages 377 et 378 du t. XIV, ire série, du Bulletin de la Société géo- logique de France. (3) Voir la p. 218 du mém. préc. de Gr. Le Père. (4) Voir p. 219 et 220 du mém. préc. de Gr. Le Père. (5) Voyage de F. Hornemann dans l’Afrique septentrionale depuis le Caire jusqu’à Mourzouk , capitale du royaume de Fezzan, traduction fran- çaise d’après le texte anglais, augmentée dénotés, etc. , par L. Langlés , 1 vol. in-8° en 2 parties , Paris , an XI ( i8o3 ) , p. i5 , 16 et 22. SÉANCE DU 19 MAI 1 845. 431 îe désert, à partir du Kaire et dans cette oasis, l’abondance du sel et des eaux salées à la surface du sol , et trouve que le nom de Bahr-Belâ-mâ (mer sans eaux) s’accorde bien avec l’aspect de cette contrée vaste et inculte. Mais tout en signalant l’abondance du sel et des eaux salées à la surface du sol dans l’oasis même de Syouah (1), dont le principal canton est, selon lui, une vallée d’environ 50 milles de tour renfermée par des rochers escarpés et stériles , et cet autre fait, non moins digne d’attention , que les eaux qui viennent des rochers ou montagnes voisines ou des sour- ces jaillissant dans la plaine se répandent dans la vallée et ne coulent jamais au-delà de son territoire (2), il n’en tire aucune induction quant à ses rapports de niveau avec la mer. Mais M. Cailliaud , qui a pu mieux étudier l’oasis de Syouah, nous fournit des faits beaucoup plus décisifs encore pour apprécier les rapports de niveau de cette oasis avec la Méditerranée (3). D’après ses observations , le chef lieu de l’oasis de Syouah est par les 29° 12' 29" de lat. N. et vers le 23e degré 18' de longitude à l’E. du méridien de Paris. Des montagnes écartées l’une de l’autre de deux lieues et demie déterminent la longueur du ter- ritoire dans le sens de l’E, à 10. ; sa largeur est de cinq quarts de lieue au plus du N. au S. Dans la partie de l’E., à l’extrémité, est une lagune d 'eau, salée qui s’étend vers le désert dans le N.-E. Du côté de l’O. un lac d 'eau saumâtre d’une lieue d’étendue, situé à une demi-lieue de la ville , réduit de ce côté les terres culti- vables à quelques champs. D’antres parties du terrain sont aban- données, à cause de la présence du sel dont le sol est rempli. La nature du terrain productif est une argile sablonneuse; mais tout le sol du vallon est pour ainsi dire miné par le sel qui s’y montre de toutes parts. Les environs de l’oasis en sont couverts. Le sel est comme agglutiné avec les sables et avec les terres, qu’il soulève et bouleverse. Il a souvent l’aspect de certaines laves , et il s’écrase avec bruit sous les pieds comme de légères scories. Les lacs sont tous d’eau salée (4). M. Cailliaud dit enfin que la chaux sulfatée est commune dans (1) ld. p. 3o , 3i et 47* (2) ld. p. 29 et 5o. (3) Voyage d Méroé , au fleuve Blanc , au-delà de Fâzoql , dans le midi du royaume de Sennâr , d Syouah et dans cinq autres oasis , fait dans les années 1819, 1820, 1821 et 1822 , par F. Cailliaud, de Nantes. 5 vol. in-8° et Atlas. Imprimerie Royale 1826. (4) Voyage précité de F. Caillaud , t. I, p. 82-85. SÉANCE DU 19 MAI 1 845. 432 les montagnes environnantes, ainsi que le muriate de soude (1). Assurément de pareilles indications suffiraient seules pour faire présumer, j’allais dire affirmer, la dépression de l’oasis du Syouah au-dessous du niveau de la Méditerranée. Mais M Cailliaud en apporte enfin une preuve plus positive encore, une preuve tirée d’observations barométriques. Malheureusement M. Cailliaud, quoique paraissant bien ob- server, était par goût plus antiquaire que naturaliste : aussi, tandis qu’il décrit dans de longues pages le moindre amas de briques qu’il rencontre et auquel il suppose une origine antique , il n’ac- corde à la démonstration de ce fait assez curieux que les quelques lignes suivantes, que j’emprunte textuellement à la page 86 du tome I de son voyage : « La moyenne des observations barométriques faites durant » douze jours au mois de décembre (il a séjourné à Syouah du 10 » au 23 décembre 1819) a donné, pour celles du matin de 7 à 8 » heures, 766 millim. 35; pour celles du midi à 1 heure, 766 » millim. 71 ; et pour celles de 4 à 5 heures du soir , 765 millim. » 58. » Et en note au bas de cette même page : « La moyenne de midi à 1 heure supposerait un abaissement » considérable au-dessous du niveau moyen de la Méditerranée , » niveau où le baromètre se tient à environ 763 millimètres. La » hauteur moyenne du thermomètre centigrade, pendant le même » temps , a été de 21°, 77. » Tout ce que nous savons de plus que ces lignes à l’égard de ces observations barométriques de M. Cailliaud , c’est qu’elles ont été faites avec un baromètre de Fortin , qui lui avait été accordé par le ministre de l’intérieur (2), et qu’il a campé pendant tout son sé- jour à l’oasis de Syouah dans une cour sous les murs de la ville , près du lieu où l’on a coutume d’exposer les dattes en vente (3). C’est donc là le point où ont été faites ces observations, c’est-à-dire qu’elles l’ont été dans un point que l’on a tout lieu de supposer n’être pas le plus déprimé de ce bassin , et être assez sensiblement au-dessus du niveau des eaux des lagunes et lacs d’eau salée de cette oasis. Malgré la brièveté de ces indications, les résultats remarquables obtenus par M. le commandant Delcros , pour évaluer la mesure (1) Id., p. 76 et 106. (2) Voyage précité de F. Caillaud , t. I , p. 2 et 3 1 4* (3) Id. , t. 1, p. 61. SÉANCE DU 19 MAJ 1815. 433 de la dépression du niveau de la Mer Morte , au moyen de la com- paraison d’observations barométriques rapportées à des moyennes, à défaut d’observations simultanées (1), nous ont engagé à ap- pliquer des calculs analogues aux observations faites à Syouah. M. Delcros, pour calculer la dépression du niveau de la Mer Morte, a admis pour hauteur moyenne de la colonne baromé- trique, sur les bords de la Méditerranée, 762 millimètres en- viron, ramenée à la température zéro. M. Cailliaud , dans sa note, ainsi que nous venons de le voir , admet, lui, environ 763 milli- mètres pour la hauteur du baromètre au niveau de la Méditer- ranée , mais il ne dit pas ramené à zéro température. Comme il donne, immédiatement après, la température 21°,77uentigrades pour température moyenne, il y a tout lieu de supposer que c’est la hauteur moyenne du baromètre, sur les bords de la Méditer- ranée, à cettê température de 21°, 77 qu’il a entendu indiquer, ce qui le met alors parfaitement d’accord avec M. Delcros (2). M. Cailliaud donne, ainsi que nous venons de le voir, trois moyennes d’observations barométriques : la première pour celles faites de sept à huit heures du matin , la seconde pour celles faites de midi à une heure, la troisième pour celles faites de quatre à cinq heures du soir; mais il ne donne pas d’observations baro- métriques pour le milieu de la nuit. 11 en résulte que la moyenne trop haute du milieu du jour ne serait pas compensée par la moyenne trop basse du milieu de la nuit. Si on estime en général les hauteurs trop faibles le matin ou le soir , on les estime trop fortes (î) Bulletin de la Société géologique de France , t. XIV, ire série, p 556-34o. (2) Eu effet le coefficient de dilatation du mercure étant pour un degré centigrade d’après Biol — — , d’après \' Annuaire du Bureau des Longi- 0412 0 54 tudes ----- , en multipliant le nombre 762 millimètres, pris par M. Del- cros, pour hauteur moyenne à la température zéro ,par ces co-efficients multipliés eux-mêmes par 22 , on aura la hauteur moyenne à 22 degrés centigrades. Ainsi o“*,762 ( 22 = om, 7660976 et om,j62 (22-}- 1 — — == om, 763o45. Le nombre 763 millimètres indiqué par M. Gail- Où O O liaud est donc bien la hauteur de la colonne barométrique moyenne sur les bords de la Méditerranée , calculée d une manière extrêmement ap- prochée à la température 2\°,77 centigrades. Soc. géol. Tom. II, 2e série. 2.8 434 SÉANCE DU 19 MAI 1845. entre midi et une heure. Nous avons donc pensé qu’une moyenne générale, seulement des observations faites de sept à huit heures du matin et de quatre à cinq heures du soir, nous donnerait, pour cal- culer la dépression de l’oasis de Syouah, un élément peut-être moins fautif, car la moyenne des températures à ces deux parties de la journée semble devoir approcher plus de la température moyenne 21° 77 que de la température extrême de midi à une heure. Ce- pendant, comme il est probable aussi que la moyenne tempéra- ture de Syouah, donnée par 1VÎ. Cailliaud , n’est déduite elle- même que d’observations thermométriques faites aux mêmes heures que celles barométriques, sans addition d’aucune obser- vation nocturne , nous donnons également le calcul de la moyenne générale de ses observations barométriques qui se trouverait par suite plus exactement en rapport avec cette moyenne tempéra- ture. Voici, d’après ces données, la dépression de l’oasis de Syouah au-dessous du niveau de la Méditerranée , déduite de la comparaison des hauteurs moyennes de la colonne barométrique à Syouah et sur les bords et au niveau de cette mer , au moyen des tables barométriques d’Oltmanns (1) , imprimées chaque an- née dans l 'Annuaire du Bureau des Longitudes . (1) Le même calcul effectué au moyen des tables barométriques de Biot, imprimées à Paris en 1811, m’a donné des résultats plus faibles eu moyenne de im,45. Ainsi j’ai trouvé pour la dépression de l’oasis de Syouah déduite des observations barométriques ci-dessus indiquées d’après les tables barométriques de Oltmanns. Biot 1° 37m,86 36m,4 2* 4i ,88 4° *2 3° 00 e? 27 ,76 4° 36 ,23 34 ,80 5“ 33 ,5 1 32 ,o5 Cette différence dans les résultats , suivant les tables employées , paraît provenir principalement de l’emploi , dans la construction des tables de M. Biot, d’un co-efïicient de dilatation du mercure trop fort, , 5412 tandis que, sans doute, celles d’Oltmanns ont été construites en faisant usage du co-efficient plus faible adopté dans Y Annuaire du Bureau OOOO des Longitudes. En outre, le premier nombre des tables de Biot étant 765 millimètres , on est obligé d’avoir recours à un certain artifice indiqué par l’auteur de ces tables pour y faire rentrer les nombres supé- SÉANCE DU 19 MAI 1845. 435 Moyennes des observations faites à Syouah : Hauteur du baro- mètre ramené à la température de 2i", -yj centigrades. Dépression de Syouali au-dessous du niveau de la Méditerranée 1° de 7 à 8 heures du matin, 766milK,35 37m,86 2° de midi à 1 heure , maxima 766 ,71 41”, 88 3° de 4 à 5 heures du soir , mini ma 765 ,56 28m,94 4° générale des 3 précédentes, 5° générale de 7 à 8 heures du matin 766 ,206 36”, 23 et de 4 à 5 heures du soir, 765 ,955 33”, 51 Nous n’a vous tenu aucun compte, dans ces calculs, de la correc- tion de la latitude, parce que cette correction serait ici tout-à-fait insignifiante , et ne pourrait en aucun cas dépasser ou même at- teindre 4 ou 6 centimètres. Mais, en tout cas, il est bon de re- marquer que cette correction , quelle quelle soit, serait additive, et que par conséquent elle tendrait à accroître et non à diminuer la différence de niveau (1). La dépression de l’oasis de Syouah , ou d’une partie de cette oasis au-dessous du niveau de la Méditerranée, est donc un fait parfaitement constaté. La mesure de cette dépression en certains points ne paraît pas être inférieure à 32 mètres au moins, et ex- cède probablement cette quantité. C’est, après la dépression du niveau de la Mer Morte, la plus profonde connue aujourd’hui, puisqu’il paraît maintenant certain , d’après le nivellement de M. Hommaire de Hell , que celle du niveau de la mer Caspienne ne dépasse pas beaucoup la moitié de cette altitude. Malte-Brun ne restreint pas l’étendue de l’oasis de Syouah à celle qui lui est attribuée par M Cailliaud , ni même à rieurs, et c’est le cas pour toutes les moyennes déduites des observations barométriques de M. Cailliaud. Sans doute, cet artifice ne peut conduire à une parfaite exactitude et contribue à altérer les résultats : aussi je pense qu’il faut considérer comme plus approchés de la vérité les chiffres déduits des tables d’Oltmanns. (1) Syouah, d’après M. Cailliaud, est situé par 290 12’ 29” de lat. nord, et n’est pas à 2 degrés de latitude des bords de la Méditerranée. M. Biot donne une table pour la correction de la latitude de 5 eu 5 degrés. Cette correction pourSo0, qui serait applicable, tant aux obser- vations faites à Syouah qu’à celles faites sur les bords de la Méditer- ranée , est de -1 de la différence de la longueur de la colonne baro- 700 métrique aux deux points comparés. Elle ne pourrait donc, en aucun cas, dépasser ici l\ ou 6 centimètres et serait loin d atteindre à cette mi- nime quantité, 436 SÉANCE DU 19 MAI 1845. celle plus considérable que lui donne assez vaguement Hei- nemann. « A 70 lieues N. -O. d’El-Ouâh- cl-Bahryeh , dit— » il (1), s’étend, sur une longueur de 55 lieues et sur une lar- » geur de 1 100 à 1700 toises, l’une des plus importantes oasis de » l’Egypte, celle de Syouali ou d’Ammon. La vallée dont elle est » formée se dirige du S.-E. au N. -O. » Et plus loin : « La vallée » peu profonde dans laquelle elle se trouve (l’oasis) est formée » par de vastes plateaux sablonneux qui la bordent au N., au » Tî.-E. et au S. Dans sa longueur totale , depuis Aray-Abou-el- » Balireyn jusqu’à Tarffayah, on compte neuf ou dix lacs salés. » L’espace compris entre le lac situé à 1 lieue des ruines du temple » de Jupiter Amrnon et le lac Arachyeli est le seul aujourd’hui » qui mérite dans cette vallée le nom d’oasis. Il a environ 25 lieues » de longueur. » L’état de divers points de cette partie de l’Egypte et delà Libye ne peut qu’être favorable à l’opinion de Malte-Brun , ainsi que nous allons le voir. § 14. Autres points au N.-E. de l'Afrique dont la dépression au-- dessous du niveau de la mer est extrêmement probable. En effet la dépression de niveau du sol de l’Afrique septen- trionale au-dessous de la Méditerranée , signalée à l’oasis de Syouah , n’est certainement pas restreinte à cette oasis circonscrite dans les limites que lui donne M. Cailliaud. Indépendamment des lacs et bassins de la Basse-Egypte, dont nous avons parlé au com- mencement de cette notice, la présence du sel marin à la surface du sol et celle de lacs d’eau très salée signalée sur un grand nombre de points de ces déserts , et dans des étendues fort consi- dérables, ne peuvent guère laisser aucun doute à cet égard. AI. Cailliaud, à partir du Fayoum jusqu’à Syouah, indique, pour ainsi dire à chaque pas , la présence de la soude mui iatée ou sel marin ; savoir : le sel à la superficie des collines du désert de Gou- batar-Aouara , à celui de El-Attyeh-Essemn (2) ; le sel dans la vallée d’El-Ayn-Ouara (la fontaine d’en bas), où est en même temps un petit lac ou marais d 'eau salée qui n’a qu’en viron 1/3 de lieue de long en été et atteint jusqu’à une lieue en hiver (3) ; (1) Précis de la Géographie universelle , par Malte-Brun . nouv. édition revue et corrigée par M. J.-J. -IN1 2 3 Huot , Paris 1 834 > C X , p. i5o et 1 5 1 . (2) Voyage précité de M. Cailliaud , t. 1, p. 3y et 38. (3) Voyage précité de M. Cailliaud , p. 4 1 • SÉANCE DU 19 MAI 1845. 437 une vaste plaine toute couverte et sillonnée par le sel , comme un champ nouvellement labouré , à l’ouest de la partie du désert appelée Sabakhah (1); de Veau extrêmement salée, une demi- heure avant El-Garah ( que Brown et Hornemann citent , sous les noms de Karet-am-el Sogheir et Oumn-Essogheir (2) ; la soude muriatée aux environs du village d’El-Garah (3) , au lieu nommé Ayhi (4) , sur d’immenses terrains en approchant de l’oasis de Syouali (5). Il parle enfin, sans l’avoir vu, du lac salé de l’île Ara- chyeh , situé à 25 lieues environ au N. -O. de Syouah , lac qui a 5 à 6 lieues de circonférence et qui contiendrait aussi, dit-on, des blocs de natron (6). Nous omettons tous les points où il ne parle que d’eau saumâtre , et nous ferons observer encore que sou- vent, lorsqu’il indique la présence du sel en un point particulier, il ajoute d’une manière générale que la même chose a lieu sur toutes ou presque toutes les collines ou montagnes de sa route. Ensuite , dans son voyage de Syouah à la petite oasis, M. Cail- îiaud signale, par 24° 18' de long orient, de Paris, la vallée de El- Arây Abou-el-Balireyn , qui s’étend du N. au S. dans une lon- gueur d’une lieue sur un quart de lieue de large , et dont le sol est couvert de soucie muriatée. Puis par 26° 44' de lat. et environ 24° 43' de long, orient, de Paris, au milieu des sables , le lac salé d’El-Bahreyn, long de près de 2 lieues de l'E. à l’O. sur une demi -lieue de largeur , ayant sur ses bords beaucoup de cris- taux rhomboïdes de chaux sulfatée , et ses bords aux extrémités O. et S. couverts de natron , et au S. une petite oasis. On lui a assuré que ce lac était profond et qu’il s’étendait jadis jusqu’à la partie du désert nommée El-Attyeh Tamatta, dont le sol est maintenant une terre sablonneuse imprégnée de sel avec un peu d’eau salée (J). Enfin , M. Cailliaud dit de l’oasis connue sous le nom de la pe- tite oasis , et dont un hameau, Zabou , est situé par 28° 21' 47" de lat. N. et par 26° 24' de long, à l’E. de Paris, que son sol est une argile sablonneuse, et que le sel marin y est répandu avec (1) Voyage précité de M. Cailliaud , p. 5o. (2) Voyage précité de M. Cailliaud, p . 5 1 . (3) Voyage précité de M. Cailliaud, p. 52. (4) Voyage précité de M. Cailliaud, p. 56. (5) Voyage précité de M. Cailliaud , p. 60. (6) Voyage précité de M. Cailliaud , p. 5 y et 249* (7) Voyage précité de M. Cailliaud , p. ic>4, j 36 , 1 38 et izjo. 438 SÉANCE DU f9 MAI 1845* profusion (1). Il ne donne aucune observation barométrique rela- tive à cette oasis. Mais un fait fort curieux, qu’il rapporte, sans en tirer d’ailleurs de conséquence , c’est la découverte qu’il a faite dans les grandes sourses de l’oasis de Syouah et dans la source nommée El-Ayn Taouyleh (la fontaine longue), la principale de la petite oasis , de l’ampullaire connue du lac Maréotis (2) ; ce qui semble indiquer qu’il y a eu, à une certaine époque de l’âge actuel, communication entre les eaux de ces trois points. § 15. Conclusions . Les lacs d’eau très salée sont tous , à de bien rares exceptions près, au-dessous du niveau des mers, et le sel qui couvre la sur- face du sol en un grand nombre de points ne peut guère être considéré que comme le dernier résultat , le résidu de la concen- tration des eaux marines. J’avais pensé, en conséquence, qu’une carte de l’Afrique où l’on noterait tous les lacs d’eau salée sans issue et tous les points où le sol est couvert de sel , depuis les contrées de la Basse-Egypte et de la Syrie dont nous venons de nous occuper et la grande plaine de sel de l’Abyssinie (3) , jus- qu’aux cuves et chaudières à sel du cap de Bonne-Espérance (4) , serait une véritable carte des dépressions de ce continent au-dessous du niveau des mers. Pour arriver à la construire , il faudrait lire à peu près minutieusement et ligne à ligne avec annotation tous les voyages faits en Afrique. J’avais commencé cette tâche pénible et ingrate , mais je n’ai pas eu le courage de l’achever. Dès le début cependant, la découverte , que j’ai faite en quelque sorte, de la page contenant les observations barométriques de M. Cailliaud à Syouah, dans son voyage, où elles semblent être restées ina- perçues et comme ensevelies sous les observations d’autre nature de ce savant antiquaire , est venue donner une confirmation à mes présomptions théoriques à cet égard, comme à celles de M. Gr. Le Père. (1) Voyage précité de M. Cailliaud. p. 162 et 175. (2) Voyage précité de M. Cailliaud, p. 71 , 72 et i63. (3) Voir p. 256-258, du t. I, de la traduction française d’après l an- glais, du Voyage en Abyssinie , de H. Sait, Paris 1816 , 2 vol. in-8°. (4) Voir t. I , p. 282 et t. II , p. 5 , 6 , 88 90 , 167 , 168 et 208-2 10 , de la traduction française d’après le suédois, annotée par Langlès , etc., de G. -P. Thunberg , Voyage au Japon par le cap de Bonne - Espérance , tes îles de la Sonde , etc., Paris , 1 796 , 4 vol . in-8°. SÉANCE DU 19 MAI 1845. 439 Je ne doute donc pas que l’Afrique , avec ses vastes déserts de sables et de sel, n’ait, comme l’Asie, une partie assez notable de sa surface au-dessous du niveau des mers voisines , ou du moins de leurs plus hautes eaux. M. d’Omalius présente un Ichthyodorulite provenant des environs de Namur, probablement du calcaire houiller, mais peut-être du calcaire dévonien. Ces deux dépôts se trouvant très rapprochés dans cette contrée, M. Vogt croit pouvoir rapporter ce fossile au genre Ctenacanthus , où il forme sans doute une espèce nouvelle. Le Secrétaire donne lecture du mémoire suivant: Recherches sur quelques unes des roches qui constituent la pro- vince des Asturies [Espagne), par M. Adrien Paillette; sui- vies d'une Notice sur les fossiles quelles renferment , par MM. de Verneuilet d’Archiac. INTRODUCTION. L’étude géologique complète de la province des Asturies serait un travail de trop longue haleine pour que je songe, malgré mes observations de trois années, à vouloir décrire la constitution du sol de ce pays accidenté. On manque d’ailleurs de carte géographique exacte, et les tracés qu’on pourrait asseoir sur la moins mauvaise de toutes , celle de Lopez , conduiraient évidemment à des conclusions erronées. L’immortel Jovellanos essaya bien , il est vrai , une description topographique de son pays; mais ses travaux, incomplets ou iné- dits , ne sont plus là que comme les témoins de son zèle infati- gable et de son immense capacité. Plus tard on entreprit encore de figurer en dessin la partie la plus importante des terrains carbonifères : si l’on n’a pas obtenu de bons résultats , on doit plutôt s’en prendre à l’état impuissant de la lithographie de l’époque qu’à la volonté des ingénieurs. Quoi qu’il en soit des efforts passés, on peut dire que nous devons à l’inspecteur général des mines D. Guillermo Schulz une excellente esquisse oryctognostique de la province. Elle a été publiée dans le Bulletin de la Société géologique , t. VIII , p. 325 , année 1 837. Nous n’y reviendrons pas. Ce travail 440 SÉANCE DU 19 MAI 1845. s’est encore accru de nouvelles publications sur le même sujet, qu’on peut trouver dans les Annales des mines ou dans le Bulletin officiel d’Espagne. Il sera au surplus complété par les nombreu- ses recherches auxquelles se livre annuellement l’auteur de l’excellente carte géologique de la Galice. Les détails qui suivent n’ont donc pour but que d’exprimer certains faits que nous avons coordonnés, afin d’encadrer les belles recherches de MM. de Ye i neuil et d’Archiac sur les fos- siles des Asturies, et d’amener à comprendre les résultats des essais auxquels je me suis livré. Je veux parler de l’examen chimique des charbons asturiens. La grande chaîne des Pyrénées, dont l'orientation générale est parfaitement définie au moyen d’une ligne qui joindrait le cap de Greus à la pointe du Figuier, éprouve vers les provinces de Biscaye une légère déviation qui la rapproche plus sensiblement de la ligne E.-Q. Ce n’est qu’en avançant vers la Galice que le relief du sol présente de grands changements presque perpendi- culaires ; car , dans l’énoncé précédent , je n’ai pas tenu compte de tous ceux partiels qui ont influencé ou modifié la direction générale pour en former une ligne brisée (1). Situées entre les montagnes de Santander et l’extrémité du soulèvement des Pyrénées, les Asturies offrent une complication peu commune, moins pourtant sous le rapport de la variété des roches que sous celui des accidents auxquels ont été soumises les diverses formations. Ainsi , vue d’une grande hauteur , la province asturienne se montrerait bornée au S. par les plateaux élevés des Castilles (terrain tertiaire émergé récemment) , au N. par l’océan Canta- brique , à l’E. par la portion de la Cordilière biscayenne se rap- portant au mouvement des ophites, enfin à l’O. par les terrains cristallins de la Galice. Terrain métamorphique. ■ — Au voisinage de cette province, une zone de schistes modifiés, lactés ou mâclifères (consejode Boal), identiquement pareils à ceux de Bretagne ou d’Estramadure, et comme eux entremêlés de quelques grauwackes , pourrait faire croire à l’existence du terrain métamorphique que les géologues anglais nommaient cambrien, si je n’avais reconnu qu’en Bretagne et en Asturies les schistes modifiés contenaient, quoique rarement, des fossiles de l’époque silurienne. (1) Mémoire de M. l’ingénieur Durocher, publié dans les Annales des mines , livraison >844- SÉAWChl DU 19 mai 1845. 441 Ce sont des roches de cet âge qui servent, pour ainsi dire 7 d’assiette ou de carcasse aux formations plus modernes , si re- muées qu’elles soient ; et elles dessinent une série de rides ballon- nées, contre lesquelles reposent les formations postérieures. Terrain silurien . — Sur tous les points de la province, à TE. comme à l’O. , au N. comme au S. , le centre de ces rides est composé d’une sorte de quartzite stratifié, passant au véritable grès blanc très quartzeux. Cette roche ne contient pas de fossiles définis, mais on y remarque quelquefois des parties tubulaires pareilles à celles de Mortain et du centre de la Bretagne. (Mon- tagne de la Ferai. — Quelques grès ou grès quartziteux entre Aviîès et Gijon. ) Les unes ont de l’analogie avec des Colonaria; les autres se dessinent, au contraire, en zigzags irréguliers, pareils aux dépôts que forment, à marée basse, les vers qui vivent dans les plages sableuses de la côte cantabrique (huelgas d’Avilès et de Vilia-Viciosa.-Arenal de Gijon, etc. , etc. ). Toutes les directions observées dans ces grès quartzeux (peut- être Caradoc sandstone) se sont constament tenus dans les liin ites N. 60° et N. 70° E. magnétique , soit qu’on les ait prises dans la partie occidentale (montagnes de Luarca, etc., etc.), soit dans celles du centre (la Ferai et la chaîne qui en est la suitey, soit enfin du côté de l’E. (Llanès nueva, etc. , etc.). Aussi les schistes argileux fossiles qui reposent le plus souvent sur ces grès quartzeux ont-ils généralement des directions et des pendages analogues. Ceux-ci varient très fréquemment, par suite même de la forme et de la disposition souvent ballonnée du groupe précédent. La coupe fig. 1, pl. XII, montre les schistes siluriens reposant sur une butte de quartzite ballonnée à Monte-Aguilero, vieille route d’Oviédo, entre Avilès et Ferrones. Je n’entre pas dans de plus grands détails sur l’ensemble dont je viens de parler , parce qu’il est tellement semblable à nos for- mations, si classiques aujourd’hui, de la Normandie et delà Bre- tagne (1), qu’en citant les caractères minéralogiques de ces roches dans les Asturies , ce serait rappeler ce qui a été si souvent décrit au sujet des provinces de l’ouest de la France. Il n’y a pas jusqu’à la végétation spontanée qui ne soit exactement la même. Terrain silurien supérieur . — Terrain dévonien. — Si rien jusqu’à présent ne s’est montré embarrassant, et s’il est assez facile de (i) Comme en Bretagne et en Normandie, on voit des accidents por p [lyriques (ruisseau des Orderias près Fayedo, etc., etc.). 442 SÉANCE DU 19 MAI 1845. conclure que je viens d’esquisser une partie des traits généraux de la période silurienne dans les Asturies , il n’est pas à beaucoup près aussi aisé de démêler les superpositions postérieures. Nous avons cherché néanmoins à marquer leur véritable place. Les études qui vont suivie montreront qu’il serait toutefois impru- dent de garantir qu’il ne reste pas à modifier les idées que nous pouvons émettre. Dans un pays aussi couvert de landes que l’est la province des Asturies , les exploitations souterraines aident souvent à classer ce que l’examen du sol n’indiquerait que très imparfaitement. La mine de Santa Maria del Mar ou d’Arnao fournira un bon exemple. Si des rives du Naïon, c’est-à-dire de la grande faille qui a si vio- lemment disloqué, de ce côté, la première chaîne de grès quartzi- teux parallèle à la mer , on se rend à la mine , on rencontre du côté de Santiago del Monte, avec directi on N. 60 à N. 70° E., des grès siluriens et des schistes de même âge , recouverts par des calcaires à enclines et à spirifers. Plus loin , les directions sont oblitérées, et on ne les retrouve plus aussi régulières que dans la grande vallée suivie par le chemin d’Avilès. Du côté de Santa Maria del Mar , à la chapelle de ce nom , existe une protubérance de grès quartzeux dont on ne saurait prendre la véritable direction. Au-dessus s’appliquent immédia- tement des schistes, une couche de houille longtemps exploitée, marchant ensemble sur S.-E. N. -O., avec pente faible au N. -E. On ne saurait non plus fixer d'une manière absolue la disposi- tion des couches du coteau qui regarde la mer. Cependant on voit , après le grès quartzeux de Santa Maria , des schistes et une série de calcaires souvent fendillés, sur lesquels se dessinent en relief des encl ines et des spirifers. Entre le puits abandonné de la Esperanza qui a rencontré tout le groupe, sans toucher le charbon exploitable, et l’océan Cantabrique, paraissent au jour plusieurs zon.s de calcaires qui ont une direction N. 60° E. p. 50° N. -O. Ce sont exactement les mêmes couches qui recouvrent le gîte schisteux avec combustible formant la mine d’Arnaoez ; ce sont elles qui contiennent, non loin du Puits del Arco , des Tercbratula prisca , ainsi que quelques autres fossiles connus dans le terrain dévonien. Les directions des schistes et autres roches charbonneuses sont à l’extrémité de la jetée N. 70° E., tandis qu’elles se montrent sous la forge de la mine N. 30° E. plus ou moins. Dans les deux cas, elles plongent vers le nord. Elles se relient ainsi à la couche dite SEANCE DU 19 MAÏ 1845. 44 3 del Ai co. qui marche depuis S. 1° E. jusqu’à S. 30° E. ou direc- tion I65ü-175° avec pente de 20° à E.-N.-E. Il y aurait donc dans ces parages un pli ou cassure du genre de celui que j’ai dessiné (/%•. 2; , ce qu’on ne saurait expli- quer autrement que par la présence d’une avancée de quartzite venant d’ Avancés. Cette coupe (fig. 2) montre les dislocations de l’Arnao ; elle est prise à l’affleurement de la couche del Aico. Elle montre le calcaire silurien S fortement incliné et bien reconnais- sable le long de la côte , les schistes argileux du toit et du mur SA , la couche de houille H de ]2 à 24 pieds, divisée en trois bancs par des nerfs de houille brouillée H', le poudingue à galets siliceux de quartzite P, le calcaire à TerebratuLa prisca C, puis d’autres espèces à la fois dévoniennes et siluriennes. Ainsi qu’on peut le voir sur le tableau d’analyses, le charbon d’Arnao rentre dans la classe des houilles sèches flambantes peu carbonées. Maintenant reste à décider si elles appartiennent au terrain silurien sur lequel elles reposent, et où l’on trouve pour- tant des espèces pénétrant dans la formation dévonienne, ou bien véritablement à cette dernière époque qui les recouvre immé- diatement en stratification concordante. Le peu d’empreintes que renferment les schistes charbonneux laissera longtemps peut-être cette question indécise. Mines de Ferrones . — Une autre localité des environs d’Avilès sera sans doute un jour le champ de bataille des géologues et des paléontologistes, lorsqu’ils voudront établir d’une manière fixe et positive l’âge de ces charbons : elle fournit, il est vrai, des moyens plus certains de détermination. Je veux parler du petit village de Ferrones, près duquel existent les gîtes des fossiles si abondants de Pelapaya, San Pedro, Detras de la Pena, etc. , etc. Là, malgré un bouleversement assez notable des couches, on ne voit pas moins reposer au toit de la houille, d’une façon assez uniforme et en suivant toutes les inflexions dont parle D. Guil- lermo Schulz , dans le n° 11 du Bulletin officiel des mines (1) , de grandes nappes calcaires entremêlées de petits lits de calcaire argileux rempli de corps organisés. Des Pentremites, desTérébra- tules , des Spirifers un peu brisés sont, avec des polypiers souvent énormes, ce qui se présente le plus abondamment dans la masse. (Voir plus loin la liste des fossiles de Ferrones, qui, selon MM. de Verneuil et d’Archiac, s’élèvent à près de trente espèces.) (î) Grand puits; puits del Aire ; entre ce point et la maison du curé , entre Monte Agudo et la chapelle de San Pedro , etc. , etc. 4 14 SÉANCE DU 19 MAI 1845. La plus grande partie de ces fossiles se répète dans tous les cal- caires un peu argileux du fond de la vallée (derrière la maison) de Monte Agudo et le long des pentes ou ravins au-dessus du pres- bytère. Ils nous forcent à considérer ces terrains comme contem- porains des formations analogues et déjà connues de Boulogne- sur-Mer, de Ucbon en Normandie , d’Izé et de Ganard près de Rennes en Bretagne , et enfin peut-être à ceux de l’Eifel. Pour cela même , les couches de Ferrones seraient dans l’ho- rizon géologique de celles d’Arnao et de Santa Maria del Mar, et elles ne sauraient appartenir à la véritable formation car- bonifère. Comme les galeries de recoupement pour la mise en exploita- tion de la houille ont procuré , en outre, beaucoup d’empreintes de végétation aujourd’hui déposées à l’Ecole des Mines, leur examen fixera les incertitudes qui peuvent régner encore sur la présence au toit du charbon de coquilles à la fois dévoniennes et siluriennes. Cet ensemble nous dira s’il y a un véritable dépôt houiller entre le grès rouge ancien, qui sert de mur aux roches charbonneuses, et les calcaires dévoniens qui les recouvrent con- tinuellement... Peut-être, en raison de !a grande faille qui règne dans ces contrées sur une assez grande longueur, n*y verra-t-on qu’un renversement complet du système silurien.... Les travaux futurs le démontreront. La figure 3 montre la coupe F de la montagne de Ferrones, al- lant du puits de la ventilation à celui del Aire, c’est-à-dire à peu près du N. au S. ; on y distingue : G. Grès du mur avec empreintes végétales ; H. Couche de houille exploitée ; S. Schistes du toit remplis d’empreintes végétales ; F. Faille charbonneuse du puits San Juan de Pelapaya et du puits Perico ; P. Poudingue dont la position est mal définie ; C. Calcaire avec fossiles dévoniens et siluriens; K. Marnes rouges , peut-être terrain keuprique. Ces parages renferment une roche accidentelle fort bizarre , dont le rôle n’est pas encore parfaitement marqué. C’est un pou- dingue en bancs épais , irrégulier dans son allure, composé de deux calcaires anciens , unis par une autre pâte calcaire, et ren- fermant des débris de charbon. On y a rencontré des calamites carbonisés (I). (1) Ce poudingue ou brèche se présente aussi à Sa ma de Langreo SÉANCE DU 19 MAI 1845. 445 Il est également utile de remarquer que la houille de Ferrones (voir le tableau) est de l’espèce de celles dites à longue flamme et peu carbonées, de telle manière qu’entre les qualités inférieures de la mine dite del Valey à Arnao , celles supérieures du puits del Arco et les charbons des mines de Ferrones , le chimiste ren- contre une échelle de pureté ascendante en relation avec la posi- tion géologique. Au-dessus du terrain à combustible de Ferrones viennent en couche ^ horizontales ou peu inclinées, des marnes rouges, des grès , des poudingues d’une formation plus récente. Mine de Santo Firme. — Terrains carbonifères. — Le versant opposé de là montagne de Ferrones ( Pico Grande), véritable jalon fixé par la nature comme point de repère géologique , présente une série de grès alternant avec de rares bancs calcaires. Ils conduisent à la mine de Santo Firme , dont les nombreuses couches houillères ont depuis longtemps fixé l’attention des in- dustriels. Leur direction générale forme un arc double, dont l’orienta- tion vai ie de N. 20° à 30° E. ; mais il ne faut pourtant pas la con- fondre avec la courbe qui résulte de la trace du plan d’inclinai- son, coupant le cône de la montagne. Ces plans de plongement très rapides et souvent voisins de la verticale regardent PE.-S.-E. Le charbon qu’on extrait des nombreuses couches décrites par M. Scliulz dans le n° 10 du Bulletin officiel des mines , est de la qualité demi-collante, et jouit de propriétés chimiques qui per- mettraient de le ranger parmi les variétés de certains charbons du véritable terrain houiller , si les couches traversées, en 1843 , par la grande galerie n’avaient mis à découvert des productus iden- tiques à ceux de Visé en Belgique. Des recouvrements plus modernes empêchent de suivre la pro- longation des couches de Santo Firme , soit du côté de la fontaine de Juan Cuervo ou de Yillabona, soit dans la direction du pic del Aguila ou de Posada; la fig. 4 donne la coupe de la mon- tagne de Santo Firme du côté de Posada et perpendiculairement à la direction des couches. Malgré cela , et malgré le développe- ment du bassin crétacé de Rondiella et d’Ablès , il est impossible de douter un instant que les affleurements charbonneux de la rive gauche du Rio-Nova (paroisse de Yillapere) n’appartiennent et sur d’autres points des Asturies. Les noyaux les plus abondants sont d’un calcaire gris enfumé, et les autres de marbre blanc saccharoïde. SÉANCE DU 19 MAI 1845, 446 au même groupe et ne forment partie des terrains carbonifères. Mines du Rio Nom. — Là, dans une sorte de grand U à branches inégales, formé par les plissures du revers nord de la montagne de Naranco et reposant sur un calcaire un peu esquil- leux , paraît' une série de grès et de schistes renfermant de la houille. On y voit intercalés d’une manière parfaitement concordante des calcaires très fossilifères. La couche qui est en face du mou- lin de las Peruyeras et celle qui se dessine près du moulin du Regidorio ne laisseraient pas la question un seul instant dou- teuse, si déjà les nombreuses et belles empreintes de Lepidoden- dron, etc. , du grès del Picon et de la Josefina n’eussent indi- qué de la manière la plus claire que cet ensemble appartient à la formation carbonifère. Au centre du Naranco, sous la série précédente, se montre à l’horizon, comme une carène, l’étage du vieux grès rouge. En certains endroits, c’est un vrai minerai de fer siliceux. Dans d’autres, au contraire, il n’est représenté que par un grès ru- bané ferro-nianganésien. On peut dire qu’il repose visiblement de temps à autre sur des quarîzites ou grès quartzeux siluriens repliés et comme refoulés, de telle façon que sur le versant méridional paraît quelque chose de semblable à ce qui vient d’ètre décrit. Il est bon pourtant de prévenir que le développement du terrain carbonifère de ce côté n’est pas considérable, et qu’il donna lieu , il y a trois ou quatre ans, à une petite recherche sans résultats. Elle était ouverte en face de la Corridoria . non loin du point où il est recouvert par la formation crétacée du centre des Asturies. Mines de Mierès del Carnino. — Au S. d’Oviédo et au-delà du Nalon , après les schistes et grès siluriens qu’on voit entre le pont et le village d’Ollonego, se développe, en atteignant le sommet des montagnes, une immense formation carbonifère qui, abstrac- tion faite des mouvements produits par quelques grosses îles de calcaire d’une époque antérieure, marche sensiblement de l’E.- N.-E. un peu E. à l'O.-S.-Q. un peu O. C’est elle qui, en se bi- furquant et en se pliant autour des masses d'un calcaire qui peut être pris pour le métallifère des Anglais , constitue les bassins de Mierès, de La Riosa , de Tudela, etc., etc. Entre ces villages et ceux plus rapprochés de la chaîne il existe quelquefois des courbes d’une si grande dimension qu’on ne saurait saisir les vé- ritables relations des couches sans une topographie détaillée. SÉANCE DU 19 MAI 1845. 447 Je crois pourtant pouvoir dire que depuis les houilles anthra- citeuses siluriennes d’Aller , jusqu’à celles si collantes et si bonnes de Rinquintin (1) , on passe par toute la série des terrains car- bonifères. Sur l’étendue de pays que forme le groupe dont il est ici ques- tion on remarque dans l’étage carbonifère un nouveau caractère bien digne d’attention : c'est la présence d’un poudingue à galets ellipsoidaux de quarzite roulée réunis entre eux par une pâte siliceuse ou argileuse. Il alterne souvent avec des grès à emprein- tes, forme aussi à lui seul des couches puissantes, et mérite d’être étudié, depuis les mines d’Ollonego jusque près de la Pola de Lena. Les escarpements qui rendent si pittoresque la grande route de Castille, dans les environs du pont de Santullano, au-delà de Mierès, forment un véritable musée de botanique fossile de ces terrains de grès à empreintes. On en retrouve encore beau- coup dans les grès quartzeux modifiés du village de la Pena. La position anormale de celui-ci figure au milieu du bassin carbo- nifère des Asturies , et, sur près de 4 lieues d’étendue, un de ces phénomènes de sublimation métallique analogues à ceux de St-Etienne , etc. , etc. Da ns l’endroit qu’on nomme Castiello de Lena , aussi bien que dans le terrain carbonifère de Munon Cismero, des modifications analogues donnent à leur ensemble un caractère de spécialité, que nous retrouverons néanmoins sur un autre point des Astu- ries à Carabia , dans le groupe de Puerto Suebe (2). Il est bien probable que les terrains du centre de Mierès qu’on voit se prolonger dans la direction de l’E. appartiennent à l’en- semble des couches au milieu desquelles sont ouvertes , près de Sama de Langreo , les mines de feu le marquis de las Ma- rismas. Mines de Sama à Langreo. — Ces couches se suivent d’abord avec une admirable régularité , et ne sont interrompues qu’après une distance de 5 lieues espagnoles. Celles de Sama ou Langreo (voir la fig. 5 , coupe des couches (î) A Rinquintin on trouve au toit de la couche, dans le fer carbo- nalé, plusieurs Productus. (2) La brèche cinabrifèrc de la Pena à Mierès, les gîtes de mercure de Munon Gistnero et de Castiello de Lena, comme aussi celui de Ca* rabia à Golonga, s’ils n’acquièrent pas encore une grande importance industrielle, généraliseront du moins un fait géologique intéressant. 448 SÉANCE DU 19 MAI 1815. de Sama en Langreo d’après le plan de la mine. Le point P est à 398 varas au-dessus de l’océan Cantabrique au pont de Tu- riellas près de Sama) reposent d’un côté sur un calcaire pétri d’encrines au lieu dit de Paranza, tandis que de l’autre elles s’appuient ou s’arc-boutent contre les masses calcaires de Sobres- cobio. La première direction , exactement déterminée par les plans de lamine, suit N. 75° à 80° E.; puis elle passe à N.-N.-E. et arrive, enfin, par un mouvement insensible, à N. 30° E. C’est l’expression la plus exacte de l’orientation des veines de charbon du Monte Carbayn en Sierro , appartenant également aux héritiers de M. Aguado. Le groupe de Langreo se fait aussi remarquer par la présence du poudingue calcaire, qui a été signalé déjà à Ferrones. MM. Na- gelmakers et Fantet sont, je crois, les premiers qui l’aient re- connu, sur la rive droite du Nalon , un peu en amont du pont de Sama. Mines de la Venta de la Cruz et de Llerès. — ( Voir la coupe Jig. 6 , coupe prise à las Tejeras, près de la Venta de la Cruz.) c. Crêtes de calcaire carbonifère. a. Veine de charbon friable exploitée. b. Veine exploitée anciennement. d. Ligne de vieilles exploitations éboulées d' . Couches contournées, direction N. 65° E. p. 30 à 35° S.-E. Il ne serait pas impossible que les couches assez minces de charbon exploitées par les chaufourniers au hameau de la Llo- vera, près de la Venta de la Cruz, n’appartinssent à une époque un peu plus ancienne que les précédentes. Elles marchent au jour par N. 15° E. , et pendent de 70° vers l’E., formant une sorte de continuation de celles du Caudanal, dont la direction N. 10° E. semblerait plutôt être un contournement des couches qu’on a recherchées sous des nappes calcaires au lieu dit de las Tejeras. Et cependant celles-ci donnent à la boussole dans la galerie même direction N. 70° E., avec pente de 80°N.-N.-G. L’observateur éprouve vraiment de l’embarras et craint de se tromper au milieu d’une contrée aussi visiblement tourmentée. La confusion résulte surtout de plissures anormales; et s’il n’y avait pas une grande différence entre le charbon du calcaire à en- crines et ceux si véritablement bons du groupe des grès et schistes de la montagne de Carabavn, on fixerait difficilement les limites de séparation. Le charbon est encore de très bonne qualité versl’E. et du côté de Llerès, dans les mines appelées de los Pisones,qui regardent le SÉANCE DU 19 MAI 1845. 449 territoire de Na va. Mais alors les couches ont repris la direction N. 70° E., et se composent de schistes argileux, d’argiles schisteu- ses et de grès renfermant tous des empreintes végétales. La belle coupe naturelle que présente le chemin de Llerès à la Venta de la Cruz prouve d’une manière péremptoire que le système carbonifère repose ici sur les quartzites et les grès quart- zeux du terrain silurien , tandis qu’il est recouvert par des sables, des calcaires sableux et d’autres calcaires de la forma- tion crétacée du centre des Asturies. Si les observations précédentes, qui ont été faites dans la partie le mieux connue du bassin des Asturies, n’ont pas été exemptes de difficultés, la partie orientale présente au géologue des com- plications beaucoup plus grandes. Ainsi , pour peu qu’on tire de ce que nous avons consigné la conséquence que la majeure partie des couches marche , sauf quel- ques variations accidentelles, del’E. à l’O. (N. 70° E.) , il s’en faut beaucoup que tout soit aussi régulier dans ce qui va suivre. Terrains siluriens , dévoniens et carbonifères contournés. — D’au- tres études, étrangères au travail qui nous occupe, prouveraient qu’entre Avilès, Luanco, Oviédo, Sama et Gijon , les formations postérieures aux terrains carbonifères (keuper, lias et craie) n’ont pas éprouvé des dislocations aussi fortes que celles dont il va être question. Mines du groupe de Puerto Suebe . — Ces derniers caractères de grands dérangements que je nommerai du Puerto Suebe doivent probablement leur physionomie si particulière à quelques dykes amphiboliques qui affleurent dans la direction de l’Infierto, et qui, s'ils n’ont pas tous pu arriver jusqu’à la surface en d’autres loca- lités circonvoisines , ont dû pourtant exercer leur influence sou- terraine sur la constitution de ce groupe. Il est d’autant plus re- marquable qu’il se détache du centre de la grande Cordilière , s’avance jusqu’à la mer, et forme un angle d'environ 45° avec l’axe principal des vallées de la Sella et de Cangas de Onis, con- nues comme grandes vallées longitudinales des Asturies. Les gorges des chemins d’Oviédo à l’Infierto, un peu avant d’arriver à ce bourg , fixent assez bien les idées sur la position respective du calcaire carbonifère et des schistes ou grès siluriens. En entrant dans l’Inûerto ou à une certaine distance en aval, près du pont d’Entralgo, on voit {fig. 7, coupe prise près du pont d’Entralgo , c. Terrain carbonifère , cr. Sables, grès et calcaires sableux crétacés') Soc. géoi Tome II» a'- série, ucj 4 50 SÉANCE DU 19 MAI 1845. la superposition assez uniforme du terrain crétacé sur les tranches fortement relevées de roches appartenant à l’étage charbonneux • mais si l’on prend au contraire le chemin de Torazo, ces mêmes couches du terrain crétacé qui passent en direction du N. -S. à l’E. -O. se contournent de façon à passer aussi de l’horizontalité parfaite à un état de verticalité absolue ; et telle est la complication de ces désordres depuis la Pena de Piniella jusqu’au village, qu’on rencontre des bancs verticaux de calcaire nummulitique en stratification concordante avec des couches du keuper et d’autres de la formation carbonifère (voir la coupe fig. 8, prise dans le chemin de l’infierto à Torazo). La boussole indique pour les dernières directions N. 63° E.; mais elles remontent insensiblement sur la graduation , et, à une distance qui n’est pas très éloignée du point d’obervation que nous venons de citer, elles atteignent N.-E. S. -O. et même N. 20° E. En d’autres lieux, comme du côté de Lodena , Bo- nnes, etc., le terrain carbonifère se cache derechef sous la for- mation crétacée. Peu étudié jusqu’à ce jour, le dépôt de com- bustibles de Torazo ne présente pas e core de grandes richesses, et pourtant on y connaît quatre couches, dont une importante de lm,30, fournissant d’excellente houille. Mines de Binon. — Sans doute il nous sera plus aisé de raisonner sainement sur les phénomènes antérieurement énoncés, lorsqu’on aura bien déterminé le rôle de certain porphyre dont on trouve des traces non équivoques au levant de la bourgade de Casti llo. 11 pourra se faire aussi que les protubérances ou soulèvements de roches ignées nous amènent à savoir pourquoi le combustible de Binon n’est autre que de l’anthracite qu’on n’a pu encore utiliser, malgré l’abondance des veines et leur proximité du port de Villa- viciosa. Dans les environs de Binon , la direction dominante est celle de N. >E. S. -O. avec une inclinaison de 70° et plus vers le INI. -O. Ceci s’applique du moins aux grands affleurements de la formation carbonifère. Mines de Colunga. — Je ne crois pas qu’on puisse se dispenser d’admettre certaines relations entre les couches de Binon et les autres exploitations d’anthracite, aux environs de Colunga, dans la vallée de Biera. Pourtant les directions se rapprochent de la ligne N. -S., et on ne trouve marchant de l’E à l’O. que le cal- caire avec Spirifères, Encl ines, Polvpiers etc. , qui se montre au Canto del Sellon. Ce calcaire plonge au nord en nappe ondulée. Le Canto del Sellon , la métairie de Maradiello et celle de la SÉANCE DU 19 MAI 1845. 451 Torre procurent les moyens d’étudier la stratification. A la mine de la Torre, les grès ont tous le faciès de véritables grauwackes, si bien qu’en réunissant ces observations et celles faites à la mine ciel Cuerbo ou à celle du vallon de la Vana, il reste peu de doute sur les modifications qu’ont éprouvées les roches, non seulement dans leur structure minéralogique, mais encore dans leur posi- tion. La plupart des bancs ont une direction S. -E. JN.-O. Il eût été probablement pos ible de tirer les mêmes conclusions de mes études au moulin de la Surroquera, à la métairie Cancio et à Carandi , si , dans cette dernière région , assez éloignée de la première et traversée par les filets de cinabre de Carabia , je n’avais rencontré près du chalet Cancio d autres grès beaucoup moins modifiés, n’ayant presque plus le grain cristallin des pré- cédents et contenant de belles empreintes du terrain car- bonifère. Il est important de noter que jusqu’à ce jour tous les charbons découverts dans le district de Colunga à Liberdon , ou dans les alentours du Puerto Suebe, se sont montrés invariablement an- thracite ux. Mines de. Sotieilo et de la partie orientale des Asturies . — L’au- berge de Sotieilo est située dans la vallée de la Sella , près des bords de cette rivière et non loin des escarpements pittoresques qui ont déjà été dessinés pour montrer ce qui existe au pont d’Entralgo. On voit donc que les berges de la rivière présentent sur la rive droite des couches appartenant au terrain carbonifère, et sur celle de gauche la partie inférieure du terrain crétacé. On a fait , il y a quelque temps , des recherches de houille dans la région carbonifère composée de grès, de schistes et d’ar- giles schisteuses. On y a rencontré du charbon ; mais il est impos- sible jusqu’à présent de fixer la valeur de cette découverte. Dans le lit de la rivière de la Sella , les schistes sont verticaux , avec la direction E.-O. C’est elle qui représente aussi à peu près la position des couches dans la Riega de Sotieilo (dont la fig. 9 donne la coupe), premier point où l’on mit à jour une couche de charbon , recouverte en stratification discordante par un banc de sable argileux de la formation crétacée. Notons, en passant, que la houille provenant de ces travaux avait une structure feuilletée et comme remaniée. Un peu plus haut , on a reconnu à l aide d’une grande tranchée: 1° Des sables blancs , jaunes et rouges ; 2° Des argiles grises et noires, appartenant toutes à la formation crétacée ; 452 SÉANCE DU 10 MAI 1845. 3° Enfin, une espèce de couche de charbon d’environ 0m,80 de puissance, marchant par N. 70° E. et inclinant au S. de 70 à 80°. On a nommé cette couche mine de la Cabeza de Monès. (Voir la fig. 10, qui donne la coupe de la tranchée de la Cabeza de Monès.) Ces terrains modernes recouvrent tout l’espace qui s’étend jusqu’au hameau de Monès , derrière lequel se dressent des crêtes de calcaire à encrines. Au N. , au contraire , dans les vallons qui débouchent à la Sella, les grès sont dirigés par S. 80° E. Ces traces de terrain carbonifère ne sont pas très rares sur la rive droite de la Sella , toutes les fois surtout que , par un phéno- mène quelconque de dénudation ou de déchirement, la vue peut pénétrer en dessous du terrain crétacé. Sans indiquer une foule d’exemples, nous nous contenterons de citer celui qu’il est le plus facile de voir sur le chemin de Cangas de Onis, au pont de Galontro, avant d’arriver au hameau de Roncio. Quelques couches de grès et de schistes se montrent dans les ravins avec les empreintes les plus communes en Astu- ries (calamites, roseaux et fougères). Leur direction est N. 65° E. et leur pente 45° S.-S.-E. L’étude des environs de Cangas de Onis prouve qu’il y a par là un grand développement du groupe silurien. Il se prolonge du côté de Cobadonga , où commence la grande masse de calcaire métallifère de l’E. des Asturies (1). Le calcaire carbonifère reparaît néanmoins à la grande descente de las Estassadas ou Yuettas de Ricao , qui conduisent dans les vallées profondes du Cabralès. A las Estassadas, les fossiles les plus communs sont d’énormes encrines et des Bellérophons mal caractérisés; mais si l’on étudie les environs de Poo et d’Arenas en suivant les rives du Rio Carès , on rencontre sur celle de droite, et après avoir passé le pont, des couches calcaires où abondent le Productus puncta tus de Sowerby, le Productus costatus , Spirier semicircularis , Spirifer lin ea tus , Terebratula hastata et quelques espèces mal caractérisées de Solarium. Ces couches indi- quent à la boussole du mineur S. 75° à 80° E. en plongeant de 30° N.-N.-E. , tandis qu’un peu avant le confluent du Rio Cas- tano avec le Rio Carès, des grès blanchâtres ornés de superbes calamites et de quelques variétés de roseaux marquaient direction S. 80° E. pour 15 et 20° N.-TN.-E. (i) On a fait au milieu de ces calcaires de nombreuses recherches de plomb, de cuivre et de cobalt qui, soit anciennement, soit aujourd’hui, n’ont pas fourni de bons résultats. SEANCE DU 19 MAI 1845. 453 Couche du val de la Barca. Poo et Arenas en Cabralès . Un dé- sordre réel dans les strates de ces vallées abruptes et pittoresques se dénote toutes les fois qu’on observe avec attention les pen- dages ou les alignements des roches. Néanmoins ils ont une tendance à l’O. La couche de charbon de la Riega de val de la Barca marche E. O. avec 35° de pente au N. Elle a produit de bonne houille aux affleurements; mais elle n’a pas de puissance. Ici encore abondent les empreintes végétales , quelques fou- gères, des astérophyllies, etc. Le géologue qui traverse les gorges des ruisseaux Bidon et Ribelès , en cheminant vers Aranguas, peut constater à plusieurs reprises et de la manière la plus évidente la superposition du terrain carbonifère à la formation silurienne. Celle-ci est repré- sentée dans ces localités par des quartzites ou des grès blancs quartzeux. Il arrive que les deux étages plongent en sens inverse l'un de l’autre, et que les quartzites sont recouverts de schistes au-dessus desquels s’étendent les nappes calcaires de Penamellera. Je ne dirai pas que celles-ci n’appartiennent pas au lias , car j’ai rencontré dans des blocs anguleux provenant des hauteurs des bélemnites parfaitement marquées. Cette opinion pourrait aussi être confirmée par une étude approfondie des ravins qu’on traverse en allant à Trescarès. Ilsprésentent des coupes naturelles dans lesquelles on voit que la stratification , la couleur et les ca- ractères minéralogiques permettraient, jusqu’à un certain point, de séparer du calcaire de Penamellera ceux d’une date plus certaine reconnus en Cabralès. Allés. — A Allés, des quartzites, ou des roches de la même époque, ainsique d’autres appartenant vraisemblablement à la partie inférieure du groupe carbonifère, sont visiblement et au- trement dirigés et inclinés que des couches calcaires superposées , qui par conséquent devront être considérées comme plus mo- dernes. Au milieu des grès et des schistes carbonifères affleure non loin du village une tête de couche de houille, d’où les paysans ont. extrait quelque peu de combustible. D’Allès à Llonin, ainsi que dans tous les environs, de grands contournements rendent difficiles les observations, et leur enlè- vent, jusqu’à un certain point, tout degré de précision. Pour arriver à un pareil résultat, il serait indispensable d’examiner chacune des crêtes ou des points élevés, et peut-être ce travail pénible ne serait-il pas d’une utilité absolue. Au pied des montagnes, des quartzites, des schistes ardoisiers 4 5 4 SÉANCE DU 19 MAI 1815. et des grès ont direction générale S. -F. N.-O. avec inclinaison au N.-E. Dans les hauteurs, une nappe ou grand chapeau cal- caire dessine des escarpements bizarres couverts de chênes verts ou de hêtres. Abandamès . — Il est plus facile d’asseoir son opinion entre les villages d’ Allés et d’Abandamès. .. les terrains carbonifères y sont mieux développés. On voit aussi tout près d’Abandamès des grès, des schistes et des argiles schisteuses de cette formation , conte- nant dans leurs plans souvent délités des traces de fougères , de sphénoptères et de névroptères. Les schistes argileux dans lesquels se dessinent principalement ces plantes ont direction S -E. N.-O. , et varient de pendage depuis 25 , 30 jusqu’à 50° N.-O. Cet ensemble ne paraît pas avoir une grande étendue, puisqu’il n’en reste plus que des témoins assez rares dans le ruisseau qu’on traverse à une demi-lieue en aval du village. Les premiers schistes qu’on rencontre après les dernières maisons sont orientés par N. -S. p. 50° E. , tandis que certains bancs de grès marchent S. 60° E. avec inclinaison au N.-E. de 45 à 50°. Tousse cachent ensuite sous des couches d’un calcaire d’apparence crétacée. Des picots d’oursins et quelques coquilles mal définies sont les seuls restes organiques trouvés jusqu’à présent dans les calcaires sa- bleux de la partie inférieure de ces lits secondaires. Il est probable qu’on trouverait sa vraie position dans les contrées de Narganes et d’Andinas si on les étudiait avec plus de soin qu’on n’a pu le faire. Il y a par là grand nombre de directions S. 60° à 70° E. avec pente de 25° et 35° N.-E. Quelques autres points des Asturies où l’on voit les terrains silu- riens, carbonifères et dévoniens. — Jusqu’à présent il n’a été ques- tion que des localités les plus intéressantes , soit à cause des exploi tâtions qui y sont ouvertes , soit aussi parce qu’elles présentent des études géologiques plus faciles. Il y en a d’autres pourtant qui méritent d’être citées, quoique leur exploration nécessite plus de travail, et malgré le peu d’importance industrielle des couches de charbon reconnues. Dans ce nombre peut être classé Roncello , près de Cuevas del Mar, où l’on fit jadis quelques recherches sur des couches S. 70° E. p. 65° N. -N.-E. , appartenant à la région la plus basse des ter- rains carbonifères. Au milieu des champs qui séparent ces tenta- tives abandonnées de celles de Pria, il n’est pas rare de rencontrer des grès dirigés E.-O. alternant avec des calcaires charbonneux. Au monticule qu’on appelle mine de Pria ou de Pindalès , une tranchée , suivie d’une galerie , mit au jour des schistes aussi . SK 4 N CE DU 1 13 MAI 1845. 455 carbonifères, dont l’orientement général peut être évalué S. 75° E. avec une inclinaison de 65° vers le sud. Collera , dans les environs de Riba de Sella, est encore du même âge , et l’on n’y a pas trouvé de couche de houille vraiment exploitable. Ces lambeaux allongés de terrains carbonifères doivent donc être envisagés et étudiés plutôt au point de vue scientifique que sous le rapport industriel. Les Consejos de Quiros, deTebergaet de Somiedo sont d’autres points des Asturies où les formations siluriennes, dévoniennes et carbonifères présentent assez de développements ; mais elles sont en même temps très brouillées et d’une étude fort compliquée. On ne retrouve plus les couches dans leur état normal que vers la partie limitrophe de la vieille Castille , non loin de la source du Rio Sil, ou un peu plus bas, dans le Ponferrada. Nous nous proposons d’étudier d’unemanière tout-à -fait spéciale cette zone carbonifère, dans laquelle nous devons découvrir vrai- semblablement les relations qui existent entre les groupes char- bonneux du Portugal, du Ponferrada , des Asturies, de Léon et de Reynosa. Peut-être ces recherches nous conduiront-elles à les ranger dans le même horizon géologique que d'autres lambeaux de la chaîne des Pyrénées et de San-Juan de las Abadessas dans la Haute-Catalogne. C’est alors seulement que nous tirerons des conséquences et que nous proposerons des conclusions générales. En attendant, nous croyons que l’ensemble décrit précédemment, ainsi que les fossiles qui y ont été trouvés , mérite l’attention de tous les géologues sérieux. Premier Tableau d’essais faits sur les charbons des Asturies. 456 SÉANCE DU î 9 MAI i 845. ic v • © s c ’ < < . SB i“ = Ss ■ Æ «J l o . U !. t. " ' O T3 1 $ 5® « | I L 5 ” o « S c jo s ■zi o ■*« a 2 TT-ÛS-i.- .£ £ 3 u ra „ •ï » 8 ? 5 'O — bc etc ** a c ^ a oo *- P .«■SflS-g ® 3 o> s 43 « „ u CO o 3- .. 2 C3 lO O *4 > "O S °-®l U, _ _ C •- o o £,'« O. = 5 * e b ;go g-ô « U T3 § c u 0) c *S «s ” O) S ^ > "O O. C3 — ’ T 'a n-, „ <= ï X .5 3j2 g'® £ S O - « £fl ' . *"• C3 « © .2 « G, 3 0- ë •- •» ? -•H- § S' g © JS 8 « •"00 s© ^ *S2 t-sg » c t- U _ o x. a, M J , " ° _o o c - “ — .S’SVï llll HWWWWWWUU U g S _ 43 rO - « 3 i. h 3 4= A3 x <3 « -g « « 'Z. © £ ^ =_ ï O -O ® a P ® g a; « = g 'S © « '« — oj 33 3 33 5© © n ” '3 - O* *Æ >4 © S 43 S « 3 " M JOfcOS te te O J I0l00»00 0l0l'0)0i^l00»00l000000000000000000 ^■MO!CffllOI')0,if^O!0»hffihOhSia)0000)IOOîOOOOO!S9IOM Wï tir. S# (Tl «S# rr> — QQ ÇQ «=— Ql 1^. 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Nos connaissances sur la faunedes divers systèmes qui composent le terrain paléozoïque ne sont pas encore assez complètes ni déduites d’observations assez générales , pour qu’on puisse déterminer l’âge d’une partie quelconque de ce grand ensemble par la présence d’une seule espèce de fossiles ; mais il n’en est pas de même si l’on considère un certain nombre de fossiles trouvés dans le même lieu et dans des couches dont la liaison et les rapports sont bien établis : aussi la liste suivante des corps organisés, recueillis par M. Paillette dans les dépôts qu’il a si bien étudiés et décrits, nous permettra-t-elle de tirer quelques conclusions assez précises sur l’époque de leur formation , relativement à ce que l’on con- naît sur d’autres points de l’Europe. Après quelques généralités sur les caractères de cette faune ancienne des Asturies, nous pas- serons à la description des espèces. FOSSILES DU TERRAIN PALEOZOÏQUE DES ASTURIES (1). * Orthoceratites Joveilani , nov. sp.| Carclium.. .... (Voisin du Cardium\ aiœforme Sow. et identique avec, celui du calcaire de Néhou , Man- che ). * Terebratula subconcenlrica, nov. sp. * — Pelapayensis , id. — - Campomanesii , id. — Ferronesensis , id. — - Ezquerra , id. — Hispanica , id. * — Toreno, id. — reticularis , Schlot. ( T. prisca Daim. ). * — Oliviam , nov. sp 4 — Adrieni , id. — Daleidensis , Roem. * Spirifer Peltico , nov. sp. — Cabedanus , id. — heteroclitus , Defr. (sp.). — Cabanillas , nov. sp. — Verneuili, var. Murch. Orthis resupinata , Mart. (sp. ). — orbicuiaris , Sow. — crenistria , Phil. (sp.). Leptœna Murchisoni , d'Arch. et de Vern. — Dutertrii , Murch. Serpula omphalotes , Gold. Pentremites Pailleiti, de Vern. — Schutzii , nov. sp. AuLopora sorpens , Gold. Criserpia Michelini, Miln. Edw. Favosit.es polymorpka, Goldf — fibrosa , id. var. ramosa. Litliodendron cœspitosum, Gold. (i)Les espèces précédées d un astérisque * sont décrites ci-après SÉANCE DU 19 MAI 1845. 459 La prédominance des bracliiopodes sur 1^ s autres classes est, comme on sait, le caractère distinctif de la faune paléozoïque, de même que la prédominance des céplia S apodes , représentés par les Béleinnites, les Ammonites et d’autres genres à cloisons persil- lées, signale la faune secondaire. Parmi 1rs bracliiopodes qui forment les deux tiers des lossiles que nous possédons des Asturies , les plus remarquables par le développement exceptionnel qu’ils y ont pris sont les Térébratules du groupe des concentricœ , carac- térisées par des stries concentriques plus ou moins lamelleuses, par l’absence constante de deltidium et par une ouverture ronde toujours en contact avec le crochet de Sa valve ventrale. La Tere- bratula concentrica de Bucb , le type du groupe et telle que nous la connaissons dans le système dévonien du N. et de 10. de la France, en Angleterre, en Belgique, dans l’Eifel et en Russie, ne se trouve cependant point parmi nos Térébratules d’Espagne, mais six espèces , dont la première , que nous avons nommée suh- concentrica et qui a pu être regardée comme une variété de la T. concentrica , tant Ole en est voisine, viennent s’y rattacher par des caractères communs, tout eu présentant des formes qui s’en éloignent de plus en plus par des modifications successives. La présence d’un sillon sur le bourrelet est le caractère parti- culier qui vient relier entre elles ces formes si variées Ce sillon, à peine sensible dans la T. subconcentrica, que sa forme générale ar rondie, subelliptique et transvei se, ses grandes dimensions et la dis- position de ses stries distinguent du type du groupe, se joint, dans la T. Pelapayensis , à une forme subpentagcnale plus allongée, à une taille toujours moindre et à un angle apicial moins ouvert. Plus prononcé dans la T. Campomanesii , le sillon médian y est accompagné de plis et de sillons latéraux, et le front de la valve ventrale est peu différent de celui de la valve dorsale. Ses stries larges et lamelleuses à tous les âges ne permettent pas non plus de la confondre avec la T. Ferronesensis , chez laquelle le déve- loppement des quatre plis sur chaque valve , séparés par des sillons larges et profonds, et les stries constamment plus fines et plus serrées, viennent justifier cette distinction. Jusqu’ici les formes avaient pour ainsi dire oscillé entre des pentagones plus ou moins arrondis , ou des ellipses plus ou moins allongées; mais à partir de la T. Ezquerra. rallongement extrême des deux plis latéraux que nous avons vus naître dans la T. Cam- pomanesii et se prononcer davantage dans la T. Ferronesensis, fait prédominer les formes transverses. En même temps , l’angle api- cial devient plus ouvert , le sillon ventral est aussi profond que le 460 SÉANCE DU Î9 MAI 4 845 . sinus dorsal , le contour de la coquille passe à un heptagone , et sa surface se trouve divisée en cinq parties concaves , inégales» mais disposées symétriquement de chaque côté de l’axe, et qui se correspondent sur les deux valves. La T. Hispanica n’est que le résultat d’une plus grande extension et du relèvement des plis latéraux , qui se confondent alors avec la charnière. Celle-ci est droite et très longue , comme dans les Spirifer ailés. L’angle apicial est presque égal à deux droits, et le sillon du bourrelet est toujours aussi profond que le sinus. Enfin, la variété A de la T. Hispanica nous offre le dernier terme de cette série de transfor- mations, qui, en partant d’une coquille suborbiculaire , nous a conduits graduellement à une forme presque voisine de celle des Solen. Nous avons apporté toute notre attention à la délimitation de ces espèces, et l’examen d’un assez grand nombre d’individus de chacune d’elles, pris à divers âges, nous permet de penser que les coupes que nous avons établies ne sont pas sans fondement et qu’elles seront confirmées par la suite Parmi ces espèces, la 7. Pelapayensis se trouveaussi dans le système dévonien de l’Oural et de l’Eifel, la T. Ezquejra dans les calcaires de Néliou (Manche), Si nous continuons à rechercher les gisements déjà connus des autres fossiles de la liste précédente, nous verrons la T. Adrieni se représenter dans les calcaires de l’Eifel, la T. reticularis être commune aux systèmes silurien et dévonien du N. et de l’O. de l’Europe et la 7’. Daleidcnsis passer dans la grauwacke des bords du Rhin. Parmi les Spirifer , une variété du S. heteroclitus et une variété du S. Vcrneuili sont propres aux couches dévoniennes» Les trois autres espèces jusqu’à présent particulières au terrain des Asturies rappellent, par leur forme transverse et leurs plis simples, les caractères que le genre affectait, surtout pendant la période dévonienne. LesOrthis sont toutes trois connues. L’O. cre- nistnia est une variété dévonienne; l’O. resupinata esta la fois dévo- nienne et carbonifère; l’O. orbicularis est silurienne; mais l’iden- tité de ce dernier rapprochement nous laisse encore quelque in- certitude. Des deux espèces de Leptœna , l’une, le L. Butertrii , est fréquente dans les couches dévoniennes du Bas-Boulonnais , et l’autre, le L. Murchisoni (variété), dont le type appartient à la grauwacke de Siegen , est assez répandue dans les calcaires anciens de la Bretagne et de la Normandie. Parmi les polypiers deFerrones, 3 sont des espèces à la fois siluriennes et dévoniennes, et 2 sont exclusivement dévoniennes. La Scrpula omphalotes est un des fossiles les plus caractéristiques du lui de la soc. Géol. de France J. Delarue del Imp.LernercierâPajàs. SÉANCE DU 19 MAI 1 8 4 5 . 461 système dévonien , soit dans l’Europe occidentale, soit dans les diverses parties de la Russie. Enfin , la présence de deux espèces de Pentrémites, genre encore inconnu dans le système silurien, nous fournit un dernier argument pour rapporter les couches de Ferrones et de Pelapaya à l’époque dévonienne. En résumé , sur 31 espèces provenant de ces localités , 3, la T. DaleidensiSy Y O. orbicularis et le L. Murchisoni , sont siluriennes; 4 sont siluriennes et dévoniennes; 1 , Y O. resupinata , est dévo- nienne et carbonifère ; 8 sont ex< lusiment dévoniennes, et 15 sont nouvelles. De ces dernières, 3 ont été trouvées dans les couches dévoniennes d’autres pays , ce qui porterait à 11, ou au tiers envi- ron, les espèces connues comme étant exclusivement dévoniennes. Outre les fossiles de Ferrones , de Pelapaya et des environs, M. Paillette nous en a encore envoyé d’Arnaos, où les couches de véritable houille, qu’il a décrites dans son mémoire, paraissent être recouvertes par des calcaires analogues à ceux de Ferrones. Nous avons reconnu parmi les espèces qui sont en général moins bien conservées que les précédentes : les Terebratula reticularis ( prisca ) . T. Ezquerra , T. primipilaris (de Buch), Or tins resupinata, O. stria- tula , O. arachnoidea , et le Spirifer Pellico si caractéristique des cal- caires de Ferrones. On ne peut donc douter que les couches d’Ar- nao ne soient du meme âge que ces dernières (1). Quant aux fossiles deCabrales, dont nous devons aussi la con- naissance à M. Paillette , ils sont très distincts des précédents et annoncent , sans aucun doute , l’existence du véritable système carbonifère sur ce point. Ce sont les Productus semireticulatus Mart. ( antiquatus Sow. ) et ienuistriatus de Yern. , le Spirifer attentiatus ou striatus et le S. Mosquensis. DESCRIPTION DES ESPECES. Orthoceratites Jovellcini , nov. sp. PI. XIII, fig. 1 et 2. Coquille très grande , subconoïde dans le jeune âge, et parais- sant modifier sa forme en vieillissant pour devenir presque el- lipsoïdale ou subtriangulaire , à angles très arrondis. Cloisons nom- (i)Nous croyons devoir appeler l’attention sur ce fait, car c'est la pre- mière fois que l'on trouve des fossiles incontestablement dévoniens , ré- gulièrement superposés à des couches de combustible d une importance réelle. En effet , tous les grands dépôts houillers et antliracifères de l’Angleterre , de l’Amérique et de la Russie sont , comme on sait , supé- rieurs au système dévonien. 462 SÉANCE DU 19 MAI 1845. breuses et très rapprochées. Lorsque la coquille a 2 centimètres de diamètre, on en compte 8 dans la hauteur de 2 centimètres , et lorsqu’elle a atteint 9 centimètres, on n’en compte plus que 4 dans la même hauteur. Cloisons légèrement concaves, à bords un peu sinueux sur l’angle arrondi qui comprend le siphon , et sur le milieu du grand côté qui lui est opposé. Siphon madréporiforme situéprèsduborddans l’angle opposéau grand côté de la pyramide. Il est légèrement elliptique dans sa coupe et composé d’un axe ou tige centrale également elliptique, et d’où rayonnent de nom- breuses lamelles étroites, serrées, souvent anastomosées , et sem- blables à celles des Turbinolies. A l’endroit où le siphon traverse chaque cloison , la paroi de celle-ci s’infléchit, puis forme un canal qui se rétrécit vers le milieu de chaque chambre , et produit un étranglement donnant au siphon une disposition articulée ou en chapelet. Ces caractères paraissent être constants dans toute la hauteur de la coquille, quels que soient d’ailleurs son âge et sa forme. Grand diamètre à la partie supérieure 90 millimètres , petit diamètre 64. Cet Orthocératite , remarquable par sa forme , par ses dimen- sions , par le nombre des cloisons et par le caractère du siphon, offre au premier abord une grande analogie avec Y Orthoceratites triangularis que nous avons décrit et figuré ( Transact. geol. , Soc. of London , vol. VI , pl. XXVII, fig. 1), mais on reconnaît bientôt qu’il s’en distingue par des caractères de premier ordre, tels que la position et la nature du siphon ; ainsi, dans FO. trian- gularis, le siphon est simple et placé contre le grand côté de la py- ramide , tandis que dans Y O. Jovellani , il est madréporiforme et situé du côté opposé. En outre, la coquille est plus arrondie, pas- sant , à ce qu’il nous a semblé d’après les fragments de divers âges que nous possédons , par des formes successivement conoïde, ellipsoïdale et subtriangulaire déprimée. D rus ce dernier état , la symétrie parfaite que les inflexions des cloisons offrent sur le pourtour de la coquille ne permet pas d’attribuer sa forme à une compression accidentelle postérieure à l’existence de l’animal. On peut penser que, comme l’O. triangularis , cette espèce n’avait pas moins de 2 mètres de longueur. L’extrême rapproche- ment des cloisons et leur faible courbure la distinguent nettement de tous les Orthoceratites à siphon latéral des couches silu- riennes inférieures du JN. de l’Europe. Cette espèce provient du district de Ferrones ( Asturies ). pu» ne m soc uew m nauur i . . Terebratula si/èconcenirm ti j/ z T. . . . wapaymis n.sp j / j \mpomanesu n. sp 5 Teréwtula, Ezçuerm fi. T . /fispamca a 7 id .par. (M SÉANCE DU 19 MAI 1845. 463 Terebratula subconcentrica , nov. sp. PI. XIV, fig. 1, a, by c , d , e. Coquille transverse arrondie. Valves presque également pro- fondes, couvertes de stries concentriques, lamelleuses , assez écartées, au nombre de 9 à 15, suivant l’âge , et entre lesquelles se voient d’autres stries concentriques plus fines et d’autant plus nombreuses qu’elles s’éloignent davantage des crochets. Crochet de la valve dorsale arrondi , peu saillant et peu recourbé, percé d’une ouverture large, ronde et s’appuyant sur l’autre valve. Bord cardinal échancré au milieu pour recevoir le crochet de la valve ventrale. Angle apicial de 100°. Arêtes cardinales très courtes , se confondant avec les arêtes latérales vers le tiers supé- rieur de la coquille. Arêtes latérales arrondies, et formant avec le front une courbe continue, elliptique, faiblement infléchie au milieu. Sinus peu marqué par une dépression qui s’atténue vers les deux tiers de la coquille. Valve ventrale transverse , elliptique dans le jeune âge, mais s’allongeant en vieillissant Crochet petit. Bourrelet à peine sensible, divisé par un siilon médian qui re- monte jusqu’au crochet en s’affaiblissant. Longueur 46 millimètres, largeur 53 , épaisseur 20; les indi- vidus qui atteignent ces dimensions sont généralement plus al- longés et moins renflés que ceux dont la taille estinoindre. Cette coquille, qui tend ainsi à s’allonger et à se déprimer en vieillissant, diffère en cela de la plupart de celles qui l’avoi- sinent le plus. La T. subconcentrica se distingue de la T. concentrica de Buch, par son contour plus arrondi , par son sinus et son bourrelet beaucoup moins prononcés, par la présence d’un sillon médian sur ce dernier, par des stries lamelleuses concentriques, tou- jours moins nombreuses , plus espacées, et entre lesquelles on remarque des stries beaucoup plus fines et non lamelleuses. La plus grande largeur de la T. subconcentrica se trouve vers le tiers supérieur de la coquille, tandis que dans la T. concentrica elle est constamment au milieu ou à égale distance du crochet et du front. Cette espèce est fréquente à Ferrones et Poidetras de la Pena (Asturies); les plus grands individus proviennent de cette dernière localité. Terebratula Pelapayènsis , nov. sp. PL XIV, fig. 2, tf, b. Coquillepentagonale, arrondie sur les angles. Valves également 40 4 SÉANCE DD 19 31 AI 1 845. profondes, couvertes de stries transverses, concentriques, assez régulières , serrées , plus ou moins lamelleuses et un peu ondu- lées. Valve dorsale munie d’un crochet arrondi , renflé et re- courbé. Ouverture ronde, assez grande et louchant l’autre valve. Angle apicial de 85°. Bord cardinal profondément échancré au milieu. Arêtes cardinales se réunissant aux arêtes latérales par une courbe semi-circulaire. Arêtes latérales infléchies en dedans, et ressortant ensuite pour former le front faiblement relevé vers la valve ventrale. Sillon médian peu profond, et remontant jus- qu’à la pointe du crochet. Deux plis très arrondis, souvent obso- lètes ou même manquant tout-à-fait, limitent imparfaitement le sinus. Valve ventrale arrondie munie d’un crochet peu saillant. Bourrelet peu prononcé, divisé par un sillon médian moins pro- fond que celui de l’autre valve, qu’il rejoint sur le front. De chaque côté du bourrelet , deux faibles dépressions correspondent aux plis obsolètes de la valve dorsale. Longueur 16 millimètres, largeur 14, épaisseur 10 : on trouve des individus plus grands. Dans le jeune âge , cette espèce est plus arrondie ; la valve ventrale est moins profonde que la valve dorsale, et souvent le sinus et le bourrelet ne se prononcent que lors- qu’elle atteint la moitié de son développement. A l’état adulte, il y a des individus plus ou moins renflés, et les stries concentri- ques sont plus ou moins fines , serrées et lamelleuses. La plus grande épaisseur de la coquille est vers le tiers antérieur. Les bras spiraux , disposés comme dans la T. concentrica , occupent une as- sez grande partie de la cavité de ses valves. Cette coquille , dont nous avons pu comparer un grand nombre d’échantillons provenant de diverses localités , se distingue de la T. concentrica par sa forme moins trans verse , plus allongée et pentagonale, par son angle apicial plus petit qu’un droit, tandis qu’il est de 100°dans la T. concentrica ,par la présence d’un sillon sur le bourrelet et dans le sinus, lequel, sur cette dernièreespèce, est toujours plus ouvert et plus prononcé. Quantàla T. subconcen- trica , elle diffère de la 7’. Felapayensis par sa taille, qui devient très grande , par sa forme, beaucoup plus transverse, par ses crochets, plus petits, et par son double système de stries. Les individus jeunes des deux espèces ne sont pas moins différents que ceux qui ont atteint tout leur développement. Cette Térébratule est une des plus répandues dans les couches anciennes de Pelapaya et de Ferrones (Asturies). L’un de nous l’a trouvée dans les couches dévoniennes de laSerebrianka (Oural) SÉANCE DU 19 MAI 1845. 465 Terebratula Ccimpomanesii , nov. sp. PI. XIV, fig. 3, a, b , c , d. Coquille subrhotnboïdale, arrondie, renflée vers les crochets et déprimée sur les bords. Valves presque également gibbeuses, couvertes de stries concentriques, régulières , lamelleuses , égales et ondulées. Valve dorsale munie d’un crochet arrondi, assez recourbé , peu saillant. Ouverture ronde, grande, oblique à la charnière, et touchant par son bord inférieur le crochet de l’autre valve. Angle apicial de 95°. Bord cardinal échancré au milieu , arqué sur les côtés. Arêtes cardinales se confondant avec les arêtes latérales par unecourbe demi -circulaire. Front relevé sur la valve ventrale, et entaillé par l’extrémité d’un sillon étroit et profond qui occupe le milieu du sinus , et qui remonte jusqu’à la pointe du crochet. Sinus limité par deux plis larges , arrondis et peu prononcés, au-delà desquels se voient deux dépressions souvent peu sensibles. Valve ventrale , sub-elliptique et transverse. Cro- chet petit. Bourrelet divisé en deux par un large sillon médian qui remonte jusqu’au crochet, et qui , par sa jonction avec celui de l’autre valve, produit une échancrure plus ou moins pro- fonde sur le milieu du front. Sur les côtés du bourrelet , deux autres sillons plus larges viennent aboutir sur le bord frontal aux plis qui limitent le sinus dorsal. Longueur 25 millimètres, largeur 23, épaisseur 14. Cette espèce, assez variable , atteint quelquefois des dimensions plus grandes que celles que nous venons d’indiquer. Le sillon mé- dian de la valve dorsale , ordinairement assez ouvert, devient étroit et profond dans quelques individus , et dans ce cas les sil- lons latéraux sont également plus prononcés, et les lames concen- triques, plus épaisses et plus larges, sont finement plissées dans leur longueur. La T. Ccimpomanesii se distingue de la T. concentrica par sa forme plus allongée et par la présence d’un sillon médian et de deux sillons latéraux sur chaque valve; de la T. subconcentrica , par sa forme aussi plus allongée, par ses stries lamelleuses plus serrées , égales et plus nombreuses , par le crochet dorsal plus saillant et plus renfilé , et par des plis beaucoup plus prononcés ; enfin elle diffère de la T. Pelapayensis en ce qu’elle est au con- traire plus grande , plus orbiculaire , plus large , plus tranchante sur les bords, moins renflée vers le centre, et que ses plis sont plus larges et plus saillants. Se trouve avec les précédentes. Soc. gêol. Tome il, 2e série. 5c SÉANCE DU 19 MAI 1845. •466 Terebratula Ferronesensis , nov. sp. PI. Xi Y, fig. 4, a7 b , c, d. Coquille rhomboïdale. Valves également profondes, ornées de stries concentriques très fines , très serrées, ondulées, un peu lamelleuses, égales sur toute la coquille et à tous les âges. Valve dorsale pourvue d’un crochet large , arrondi , assez élevé , mais à peine recourbé; ouverture grande , ronde , et touchant le crochet delà petite valve. Angle apicial de 85°. Les arêtes cardinales se joignent aux arêtes latérales, en formant un angle arrondi un peu au-dessous du milieu de la longueur totale de la coquille. Les arêtes latérales, fortement sinueuses, se réunissent au front plus ou moins relevé sur la valve ventrale. Sinus large et pro- fond , remontant jusqu’à la pointe du crochet, et limité de chaque côté par un pli saillant, large, arrondi et continu. Deux autres plis de même largeur, situés sur les côtés et partant aussi du crochet, viennent aboutir, en s’atténuant, à l’angle que font les arêtes cardinales et latérales , laissant, entre eux elles plis qui bordent le sinus , une dépression de même largeur. La surface entière de la valve est ainsi divisée en cinq parties concaves à peu près égales , séparées par quatre plis arrondis de même grosseur. Valve ventrale munie d’un crochet petit , engagé dans une échan- crure de l’autre valve. Bourrelet saillant , divisé par un sillon médian assez large, mais toujours moins profond que le sinus. Les dépressions latérales qui limitent le bourrelet sont larges et profondes, et bordées par deux plis latéraux correspondant à ceux de la valve dorsale , et s’atténuant aussi vers le bord. Longueur 32 millimètres , largeur 29 , épaisseur 16. Dans un certain nombre d’individus, les plis latéraux, de même que les sillons de la valve dorsale , tendent à disparaître complè- tement vers les bords, et, le sinus restant toujours aussi profond, la valve ne paraît plus être alors divisée qu’en deux parties égales. Dans d’autres , le sillon du bourrelet ventral devient aussi large et aussi profond que les dépressions latérales, et cette même valve se trouve divisée en cinq parties concaves, égales, comme on l’a vu pour la valve dorsale. Un caractère remarquable de cette espèce, c’est que les plis sont toujours saillants dans la moitié supérieure des valves et jusqu’à la pointe des crochets, tandis qu’ils s’atténuent vers les bords et disparaissent même tout-à-fait avant de les atteindre. Certains individus sont plus allongés et d’autres plus larges que celui que nous avons fait figurer. Cette Térébratule diffère de la T. Campomanesii par sa forme S É A X CE DU 19 MAI 1815. 467 générale plus allongée , par ses plis et ses sillons beaucoup plus prononcés, par ses stries plus fines, plus serrées et plus constam- ment égales à tous les âges; enfin par le caractère même des plis que nous avons signalés en dernier lieu. Elle se distingue de la T. undata Defr. , qui se trouve à JNéhou (Manche), par son bour- relet divisé au lieu d’être simple , par ses deux sillons et par les deux plis latéraux de la valve dorsale qui manquent dans la co- quille du Cotentin. Se trouve avec les précédentes, particulièrement à Ferrones. Terebratulfi Ezqaerra , nov sp . PL XIV, fig. 5, a , 5, c, d. Coquille heptagone, transverse, déprimée, à contours angu- leux et lobés, à bords tranchants. Valves également profondes , couvertes de stries nombreuses, filiformes, transverses , régu- lières, équidistantes et un peu lamelleuses vers la charnière; valve dorsale munie d’un crochet petit, peu saillant, sans deltidium ni area , et percé d’un trou rond qui touche le crochet de l’autre valve; angle apicial de 126°; bord cardinal faiblement arqué ; arêtes cardinales brisées ; arêtes latérales concaves ; front profon- dément échancré dans toute sa largeur; sinus profond se conti- nuant jusqu’à la pointe du crochet et limité par deux côtes sail- lantes , arrondies et d’égale largeur dans toute leur étendue. Deux autres côtes semblables, partant aussi du crochet, divergent en faisant entre elles un angle de 102° ; elles se continuent jusqu’au bord où elles déterminent deux angles saillants à la jonction des arêtes cardinales et latérales , qui font entre elles un angle de 80°. Valve ventrale munie d’un crochet fort petit. Bourrelet divisé par un sillon médian, profond , aussi large que le sinus et limité par deux côtes qui se prolongent jusqu’au crochet. Deux autres côtes semblables, partant aussi du crochet en divergeant, vien- nent aboutir aux angles latéraux comme celles de la valve dorsale. La surface des valves est ainsi divisée en cinq parties, concaves, inégales, mais placées symétriquement des deux côtés de l’axe de la coquille , et qui se correspondent sur les deux valves. Dans le sinus, comme dans le sillon du bourrelet, les stries sont arquées en présentant leur concavité vers le front ; dans les dépressions la- térales , elles sont droites ou faiblement arquées dans le même sens, mais à partir des côtes latérales , elles remontent droit vers la charnière-, lorsqu’elles passent sur les côtes, ces stries s’inflé- chissent au contraire vers les bords , et leur concavité est tournée vers les crochets. SEANCE DU 19 MAI 1845. 468 Longueur 18 millim. , largeur 28, épaisseur 9. L’individu que nous avons fait représenter paraît être la forme la plus générale , mais il y en a qui sont plus renflés dans le sens de la largeur. Nous distinguerons, à titre de variété, une coquille plus longue, moins transverse, plus déprimée et dont les stries semblent être plus fines, plus serrées et plus lamelleuses. La T. Ezq uerra nous semble d’ailleurs trop différente des précédentes pour qu’il soit nécessaire d’en faire ressortir les caractères. Cette Térébratule provient de Pordetras de la Pena, entre Fer- rones et Boniellas (Asturies), où elle est très abondante; nous l’avons recueillie aussi à Nébou (Manche), dans des couches pro- bablement du même âge , et où elle constitue des variétés assez distinctes. Terebratula Hispanica , nov. sp. PI. XIV, fig. 6, e que l’on connaisse, pré- sente exactement la forme de certains spirifères ailés ; mais sa charnière a tous les caractères auxquels on reconnaît lesTérébra- tules du groupe des concentricœ. Le sillon qui divise le bourre- let , variable dans sa profondeur, est quelquefois presque aussi prononcé que le sinus de la valve dorsale , en sorte que le front et les côtés sont à peu près dans un même plan , comme clans le groupe des cinctœ. Ces deux caractères sont propres aux Térébra- tules et démontrent que pour les séparer des Spirifer il ne faut point attacher d’importance à la forme de la coquille , plus ou moins dilatée dans un sens ou dans l’autre , mais seulement à celle de l’ouverture, qui est indépendante de ces changements. Cette espèce se trouve à Ferrones. Terebratala Torer?o , nov. sp. PI. XIY, fig. 8, a, b , c d. Coquille sub-pentagonale. plus ou moins allongée. Valves éga- lement profondes , à bords tranchants, et renflées vers les cro- chets. Valve inférieure munie d’un crochet pointu , peu recourbé, terminé par une ouverture ronde qui s’appuie sur l’autre valve. Angle apicial de 80°, arêtes cardinales obliques, se joignant aux arêtes latérales , par une courbe régulièrement arrondie. Front large , tranchant , très légèrement infléchi au milieu , sinus peu profond se prolongeant jusqu’au crochet et se confondant presque avec les côtés , les plis qui le bordent étant à peine visibles. Le sinus est occupé dans toute sa largeur par des stries rayonnant du crochet. Ces stries sont en nombre variable de 12 à 24 , fines, inégales, peu régulières, quelquefois bifurquées. Sur les côtés de la valve , deux plis obsolètes, partant du crochet, aboutissent à l’angle arrondi que forment parleur réunion les arêtes cardinales et latérales. Toute la surface présente, comme dans d’autres espèces, une disposition finement chagrinée ou rugueuse , qui tient à la structure même du test, et qu’on retrouve sur chacune des lames superposées dont il se compose. Des stries d’accroissement con- centriques, inégalement espacées et plus ou moins prononcées , se voient çà et là depuis le crochet jusqu’au bord. Quelquefois elles deviennent très fines et régulières , comme dans quelques 470 SEANCE DU !9 MA i 1 8 4 O unes des espèces précédentes. Yalve ventrale renflée vers le cro- chet et déprimée vers les bords. Le bourrelet est remplacé par un sinus plat qui s’étend du crochet jusqu’au front, et qui est occupé par des stries semblables à celles du sinus dorsal. Les plis latéraux obsolètes, les stries d’accroissement et la ponctuation du test sont semblables à ce qui a été dit pour la valve dorsale. Longueur 25 millim. , largeur 20, épaisseur 12. Quelques individus plus allongés sont aussi plus renflés; les bords sont alors moins tranchants , et les crochets sont plus poin- tus. Il y en a dont la forme rappelle certaines variétés de la T . hastata. Variété A, fig. 9. Cette coquille, déprimée, anguleuse, à con- tours lobés, paraît résulter, otnine dans les espèces précédentes, du développement plus prononcé des plis qui n’existent qu’à l’état rudimentaire dans le type de l’espèce. Chaque valve porte quatre plis rayonnants, qui divisent la surface en cinq parties à peu près égales, dont les trois du milieu sont concaves. Ces dernières se correspondent de chaque côté de la coquille et produisent sur le bord trois échancrures profondes , qui représentent les arêtes latérales et le front. La T. Toreno pourrait encore se rattacher aux espèces que nous venons de décrire, par l’absence de deltidium et d'area , par un sinus sur chaque valve, par l’existence de quatre plis ou côtes plus ou moins prononcées, et par des stries concentriques, souvent, à la vérité, obsolètes et peu régulières. Les stries longi- tudinales sur la région médiane sont d’ailleurs un caractère qui jusqu’à présent ne s’est rencontré dans aucune autre espèce, et qu’il est plus remarquable encore de trouver associé à une ouver- ture privée de deltidium , si fréquente dans les Térébratules à stries concentriques, et très rare, au contraire, dans celles qui ont des stries longitudinales. Elle a été trouvée dans le Cerro de los Palacios, entre Belmes et Espial (Sierra Morena). Terebratula Oliviani , nov. sp. PL X1Y, fig. 10, b, c, d. Coquille elliptique. Valves inégalement profondes, couvertes de stries rayonnantes au nombre d’environ quatre-vingts, fines, très régulières , se continuant sans interruption ni bifurcation de la pointe du crochet jusqu’au bord. Valve dorsale régulièrement courbée en voûte et terminée par un crochet arrondi , petit, peu saillant quoique assez recourbé. Ouverture ronde, touchant l’autre SÉANCE DU 19 MAI 1845. 471 valve et perpendiculaire au bord cardinal. Angle apiciai de 95®. Arêtes cardinales se confondant par une courbe elliptique régu- lière avec les arêtes latérales et le front, de manière à former un bord continu et symétrique avec une inflexion à peine sensible sur le front. Valve ventrale de moitié moins profonde que la valve dorsale, crochet très peu saillant. Longueur 23 millim. , largeur 20, épaisseur 12. Cette Térébratule se distingue des espècesfinement striées, telles que certaines variétés de la T. reticularis ( prisca ) , par ses stries non dichotomes, et d’autres espèces voisines, par sa valve dorsale plus profonde que la valve ventrale. Ce caractère la rapproche- rait de la 7". Alinensis de Vern. , qui provient des calcaires dévo- niens de l’Oural , mais dont les stries sont dichotomes et dont le crochet est moins recourbé que dans l’espèce des Asturies. La T. Oliviani a été trouvée dans les calcaires argileux de Fer- rones. ÎWt'TyC-é J Terebratula Adrieni , nov. sp. Pi. XIV, fig. 10, ar 5, c, cl. Coquille sub-orbiculaire,un peu déprimée. Valves presque éga- lement profondes. Valve dorsale munie d’un crochet proémi- nent , arrondi , recourbé presque à angle droit et percé à son extrémité d’un trou rond , qui s’appuie sur un deltidium large formé de deux pièces. Area concave , s’élevant au tiers inférieur de l’ouverture. Surface occupée par 17 à 20 plis rayonnants, séparés par des intervalles égaux et profonds. Ces plis, sans se bifurquer, remontent jusqu’à la pointe du crochet, et occu- pent les deux tiers du pourtour de l’ouverture. Angle apiciai de 80°. Arêtes cardinales se réunissant aux arêtes latérales par une courbe arrondie qui se continue sur le front. Sinus à peine in- diqué par une dépression médiane, occupée par cinq plis. Valve ventrale un peu moins profonde que la valve dorsale. Crochet petit. Surface couverte de 17 à 19 plis rayonnants, semblables à ceux de l’autre valve. Le bourrelet, aussi peu prononcé que le sinus, en comprend cinq au milieu. Longueur 20 millim. , largeur 18 r épaisseur 12. On trouve des individus plus larges, plus déprimés , dont le crochet est moins renflé , et qui offrent une certaine ressemblance avec la T. lacunosa Mureh. Mais cette dernière a toujours le sinus et le bourrelet plus prononcés, les côtés plus élargis, le crochet plus petit et sans deltidium . La T, Adrieni diffère de la 472 SÉANCE DU 19 MAI î 8 4 5. T. protninula , C. Roetn. ( Rhein . Ueb. , pl. Y, fig. 3), par sa forme générale suborbiculaire au lieu d’être ovale allongée,, par son crochet plus renflé et plus recourbé , par son area moins élevée, que limite seulement le premier pli de chaque côté, tandis que dans la T. prominula l’area est nettement séparée du dos par une strie enfoncée. La T. Adrieni se trouve dans les couches des environs de Fer» rones. Nous la connaissons également dans les calcaires dévoniens de i’Eifel. Spirifer Pellico, nov. sp PI. XY, fig. 1, a , b , c, d. Coquille ailée , très transverse et un peu déprimée. Yalves également profondes. Yalve dorsale munie d’un crochet petit, pointu à l’extrémité et touchant le bord supérieur de l’area. Area très longue, concave, à bords presque parallèles; deltidium très surbaissé, composé d’une lame étroite, striée obliquement, pliée en forme de toit, arrondie en dessus , flexueuseen dessous , et faisant sur l’area une saillie plus ou moins prononcée. Deux petits tubercules situés au sommet touchent la pointe du cro- chet. Ouverture triangulaire très surbaissée, s’appuyant sur la ligne cardinale ; angle apicial presque égal à deux droits; arêtes cardinales formant avec les arêtes latérales un angle qui varie de 30 à 35°; front anguleux, occupé par un pli profond, qui cor- respond au sinus. Celui-ci est large et remonte jusqu’à la pointe du crochet. Au fond on remarque un ph arrondi qui le suit dans toute son étendue , et sur les côtés deux autres plis obsolètes. On compte, de chaque côté du sinus, 15 à 17 plis rayonnants, sépa- rés par des intervalles égaux et qui sont d’autant moins saillants qu’ils s’éloignent davantage du sinus vers les extrémités latérales. En se rapprochant du crochet et du sinus, l’angle saillant du pli est occupé par un petit bourrelet arrondi, lisse, qui disparaît en descendant vers le bord,.. Toute la surface de la valve est, en outre, couverte de stries trans verses , concentriques, très fines, très serrées et ondulées en passant sur les plis et dans les sillons. Yues à la loupe, elles paraissent très finement granuleuses, par suite de la structure du test qui est comme chagrinée. Yalve ven- trale terminée par un crochet petit, recourbé, faisant à peine saillie sur le bord cardinal ; bourrelet formé par un seul pli aigu très prononcé, partant du crochet et se prolongeant en forme de toit jusqu’à l’angle inférieur du sinus. On compte 17 à 18 plis Bull . de la soc Géol . de France SÉANCE DU !9 MAI 1845. 473 rayonnants de chaque côté , semblables à ceux de la valve dor- sale et traversés de même par des stries concentriques, fines et serrées Les plus grands individus ont : longueur 33 millim. , largeur 80 , épaisseur 22. Variété A, fig. 2 ,a,b. Cette variété est moins déprimée que le type de Tespèce ; les valves sont plus renflées dans le sens de la largeur, et la coquille devient subfusiforme; sa largeur restant la même, sa longueur est proportionnellement moindre et son épais- seur plus considérable. Le S. Pellico rappelle, par sa forme, plusieurs espèces déjà connues, telles que le S . Bouchardi Murch. ( Bulletin de la Soc. géol. , t. XI , pl. 11 , fig. 4) , qui porte au fond du sinus un petit pli , semblable à celui que nous venons d’indiquer ; mais la co- quille est beaucoup moins grande, ses stries écailleuses sont plus prononcées , et le petit sillon qui divise le bourrelet manque danfs le S. Pellico. Le S. speciosus de l’Eifel a le sinus entièrement lisse et les plis latéraux arrondis, moins nombreux, plus larges que les intervalles qui les séparent. Les S. macropterus et micropterus Gold., ne se trouvant généralement qu’à l’état d’empreintes plus ou moins imparfaites, sont des espèces trop mal connues, pour qu’on puisse leur assimiler avec certitude des coquilles de pays éloignés. Le Sp. extensus Sow. ( Trans. geol. Soc. , vol. V, pl. LIV, fig. 11 ) offre 7 sillons sur le bourrelet et 27 plis de chaque côté. La figure ne représente d’ailleurs qu’un moule imparfait et mal caractérisé; enfin, le S. convolutus Phil. (de Kon. , pl. X\ 1 1 , fig. 2 ) s’en rapproche également par sa forme générale , mais présente six plis dans le sinus et sur le bourrelet, et manque de deltidium, ainsi que des stries transverses, concentriques , si constantes dans le S. Pellico. Se trouve très fréquemment dans les couches de Ferrones. Spirifer Cabedanus , nov. sp. Pl, XV, fig. 3, a, b , c, d. Coquille subglobuleuse et un peu transverse. Valve dorsale deux fois plus profonde que la valve ventrale. Crochet renflé , proéminent, recourbé et pointu au sommet; area triangulaire plus ou moins élevée ; ouverture triangulaire, large, entièrement libre , bordée de deux lames linéaires , du crochet à la charnière. Angle apicial de 120°. Arêtes cardinales formant, avec les arêtes latérales, un angle presque droit. Ces dernières se recourbent en dessous, en décrivant un quart de cercle. Sinus profond, divisé SÉANCE DU 19 MAI 1845. 474 par im pli médian arrondi , qui remonte jusqu’à la pointe du crochet. De chaque côté du sinus, on compte douze plis rayon- nants arrondis, séparés par des sillons profonds , dont la largeur est égale à celle des plis. Yalve ventrale semi-circulaire ; crochet petit, faisant à peine saillie sur le bord cardinal; area très étroite, très surbaissée, ayant une ouverture triangulaire très basse, dont les côtés joignent sur la ligne cardinale ceux de l’ouverture dor- sale ; bourrelet divisé en deux par un sillon profond , qui remonte jusqu’au crochet ; douze plis rayonnants de chaque côté , sembla- bles à ceux de l’autre valve, sont séparés de même par des sillons égaux et profonds. Longueur 21 millim., largeur 30, épaisseur 17. Cette espèce est principalement caractérisée par un sillon sur le bourrelet et un pli dans le sinus , l’un et l’autre aussi prononcés que les sillons et les plis qui ornent la surface du reste de la co- quille, tandis que dans les autres spirifères, qui offrent également un sillon et un pli médian, ils sont toujours comparativement très faibles. Se trouve dans les calcaires de Ferrones. Spirifer heteroclitus , var. A. PI. XV, fig. 4, a, b , c, ci. Calceoia heteroclita , Defr. ; de Blainv. , malac., pl L , f. 5 ; sp. hete- roclitus de Buch, uber Detth., p. 4° ? Roemer, Rhein Ueberg., p. 70; de Kon. , Foss. de Belg. , p. 239, pl. XV bis, f. 2. Cette variété , que l’on devrait peut-être distinguer comme espèce , diffère de la coquille qui est si répandue dans les calcaires de l’Eifel par sa forme moins arrondie , par ses valves moins pro- fondes , par des sillons et des plis plus prononcés , plus nombreux et plus réguliers. L’area n’est d’ailleurs pas moins variable dans sa hauteur. Le crochet est tantôt droit et dans l’axe de la coquille , tantôt incliné à droite, à gauche ou recourbé en avant. INous aurions peut-être rapproché cette variété du S. subconicus , Sow (Trans. geol. doc., vol. VI, pl. LVIIj, f. 10) et Phil. ( Palœoz.foss ., pl. XXIX, f. 126) non Mart (1), si les descriptions et les figures laissaient moins a désirer. Quoi qu’il en soit, elle diffère beaucoup plus encore de l’espèce carbonifère, que M. de Koninck a réunie (1) Par ses dimensions , le nombre de ses plis, et surtout par son ou- verture large, toujours libre et dépourvue de lame médiane , le S. sub- conicus (Martin) diffère entièrement de l’espèce que MM. J. Sow. et Phill. lui ont assimilée. SÉANCE DU 19 MAI 1 8 4 5. 475 au Sp. heteroclitus , et qui n’a que trois plis au plus de chaque côté du bourrelet. Nous sommes donc pot tés à ptnser que ces trois variétés sont des espèces distinctes. On trouve aussi à Ferques , près de Boulogne , une quatrième variété à laquelle M. Bouchard a donné dans sa collection le nom de S. Demarlii. Toutes ces variétés ou espèces ont d’ailleurs un caractère com- mun fort important, c’est que les deux lamelles divergentes qui dans les Spirifères forment les parois de la fente triangulaire et séparent la cavité centrale des cavités latérales, sont ici conver- gentes et se réunissent sur la ligne médiane non loin de leur point de départ, comme le représente la fig. 5. Elles constituent alors une cloison qui partage les valves en deux parties égales. Cette disposition , qui rappelle celle des Pentamères , se ren- contre aussi dans des coquilles qui par tous les autres caractères appartiennent, soit aux Térébratules, comme les T. Schlothei- mi de Buch , et super s tes de Vern. , soit aux Orthis , comme les O. adscendens Eichw. , et plana Panel. , et c’est ce motif qui nous a empêchés de les réunir aux Pentamères. Dans ces diverses espèces , la valve ventrale ne paraît pas d’ailleurs offrir l’organi- sation qu’elle a dans les Pentamères, et nous n’y avons point dé- couvert les lames internes qui , en s’unissant à celles de la valve dorsale, divisent toute la coquille en trois compartiments. La cavité centrale, qui, dans les Pentamères, a une certaine profon- deur, est ici très limitée et se borne > un canal étroit, situé sous la fente triangulaire qui divise l’area. Cette fente est plus longue et plus étroite que dans la plupart des autres Spirifères. Elle est toujours fermée inférieurement par un deltidium et plus ordinai- rement ouverte au sommet. Cette ouverture, qui n’est probable- ment due qu’à une fracture résultant du peu de solidité du delti- dium dans le jeune âge , présente quelquefois cependant une forme régulièrement arrondie par le bas , et laisse voir au centre le pro- longement de la petite lame médiane dont nous venons de parler. Le S. heteroclitus a été recueilli dans les calcaires argileux de Ferrones; c’est une espèce en général très caractéristique du sys- tème dévonien en Europe. Une variété ou plutôt une espèce se trouve, comme nous avons dit, dans le calcaire carbonifère de Belgique. Spirijer Cabanillas , nov. sp. PL XV, fig* 6, a, b, c , d. Coquille subglobuleuse , à contours très arrondis. Valve dos - sale beaucoup plus profonde que la valve ventrale ; crochet renflé. 476 SÉANCE DU 19 MAI 1845. très recourbé , pointu au sommet; area concave, arquée , trian- gulaire , élevée , à surface treillissée par des stries perpendicu- laires et transverses; ouverture grande , bordée de chaque côté par une lame plus élevée, tranchante et un peu courbe; angle apicial de 95°; arêtes cardinales s’unissant par une courbe semi- circulaire aux arêtes latérales qui se continuent régulièrement jusqu’au front. Celui-ci est arqué et correspond au sinus, qui est large, assez profond, arrondi, se prolonge jusqu’à la pointe du crochet et présente dans quelques individus un pli obsolète au milieu. On compte de chaque côté du sinus quatre ou cinq plis lar- ges et arrondis, séparés par des sillons peu profonds qui s’atténuent vers la charnière. Valve ventrale formant les trois quarts d’un cercle tronqué par la charnière; crochet peu renflé, mais assez élevé pour donner lieu à une petite area surbaissée bien définie avec une large ouverture au milieu, et dont les côtés joignent ceux de l’ouverture dorsale sur la ligne cardinale* bourrelet ar- rondi , s’élargissant rapidement vers le front par la courbure brusque des sillons latéraux , et quelquefois divisé par une strie médiane peu prononcée ; quatre ou cinq plis arrondis sur les côtés, séparés par des sillons égaux peu profonds, s’affaiblissant en s’éloi- gnant du bourrelet. Des stries concentriques d’accroissement, fines et serrées , présentent parfois une certaine régularité. La surface du test, lorsqu’elle est intacte, est couverte de très petites aspéri- tés arrondies à la base, pointues au sommet, et très différentes de celles que nous avons signalées dans le S. Pellico , la Terebratula Toreno , etc. Longueur 22millim. , largeur 20, épaisseur 14. Cette espèce, qui rappelle au premier abord le S. verrucosu? Ziet. du lias, s’en distingue très bien par sa double area , par son crochet moins élevé, par son ouverture plus large et par la forme générale de la valve ventrale , suboibiculaire au lieu d’être tron- quée carrément. Le S. strigoplocus Vei n., du système dévonien de l’Oural (1) , diffère du S. Cabanillas par les stries microscopiques longitudinales qui couvrent les plis et par ses dimensions un peu moindres. Quant aux S. seocradicilis et insculpta Phil., le premier a l’area plus étroite , des plis moins nombreux , et le second des stries lamelleuses transverses. Le S. Cabanillas se trouve avec les précédents à Ferrones et à Pelapaya. ft) Géologie de la Russie d’Europe et des montagnes de l’Oural , vol. II , pl. IV, f. 2. SÉANCE DU 19 MAI 1845. 477 Leptœna Murchisoni , var. A. PI. XV, fig. 7, a} b, c. Orthis Murchisoni , d’Arch. et de Vern. . 1842 ,Transact. geol. Soc. Lond. , vol. VI, p. 371, pi. XXXVI, f. 2. Coquille semi-orbiculaire , fortement géniculée. Valve dorsale très convexe et dont la courbure , presque à angle droit avec le crochet, commence vers le milieu de la longueur; crochet petit, 11e dépassant pas le bord supérieur de l’area; celle-ci est étroite, à bords parallèles et couverte de stries verticales pectinées ; char- nière droite, égale à la plus grande largeur de la coquille; ouver- ture très étroite et fermée par un deltidiutn de même forme; surface de la valve couverte de quatorze à dix-sept plis élevés , anguleux, tranchants, quelquefois égaux, mais plus souvent sub- divisés, vers le commencement de la courbure ou même plus haut, en plusieurs autres plis fasciculés et couverts eux-mêmes de stries longitudinales très fines, nombreuses, dont quelques unes remon- tent jusqu’au crochet. Valve ventrale concave et ne laissant entre elle et l’autre valve qu’un espace très étroit; elle est couverte de plis, de sillons et de stries semblables à ceux de la valve dorsale. Longueur 31 millim. , largeur 44, épaisseur 9. Bien que nous regardions cette coquille comme une variété de celle que nous avons décrite et figurée dans notre mémoire sur les fossiles des terrains anciens des bords du Rhin , et qui n’était d’ailleurs qu’à l’état d’empreinte , nous ne nous dissimulons pas qu’elle en diffère par son contour plus semi-circulaire et par con- séquent moins allongé, par la longueur de la charnière, qui est égale à la plus grande largeur de la coquille, tandis que dans l’empreinte de Siegen la charnière est proportionnellement plus longue; enfin, parce que les plis sont plus anguleux, plus pro- fondément divisés, et que la coqudle est plus fortement et plus largement repliée en dessous ou géniculée. Lorsque nous décrivîmes cette espèce pour la première fois , nous ne connaissions que l’empreinte de sa valve ventrale, dans laquelle les larges côtes striées représentent les sillons. Nous n’a- vions point non plus séparé alors les Orthis des Leptœna , par le caractère de la forme de la valve ventrale; c’est pourquoi nous l’avions placée parmi les Orthis , d’où nous la retirons aujourd’hui. Dans les calcaires dévoniens de Ferrones. Nous la connaissons aussi dans la grauwacke de Siegen et de Daleiden sur les bords du Rhin , et sur divers points de la Bretagne et de la Normandie, tels que la rade de Brest , Izé près de Vitré , et Néhou, départe- ment de la Manche. 478 SÉANCE Dü 19 MAI 1815. Leptœna Dutertrii , var. A. PI. XV, fig. 8, <7, by c, cl. Ortliis Dutertrii , Murch., 1839-1840, Bull. Soc. géol. de Fr. , t. XI, p. 253, pl. 11* f. 6. Leptœna id. , de Ver a. , i845 , Géologie de la Russie d’Europe et des montagnes de l’Oural , t. 11, p. 220, pl. XIV, f. 2. Dans cette variété , la taille de la coquille est généralement moindre que dans le type de l’espèce. Les stries sont presque toutes égales un peu au-delà de leur bifurcation , tandis que dans la coquille qui a déjà été décrite on remarque, de distance en distance, des stries plus saillantes, et entre lesquelles se trouvent insérées les autres qui sont moins prononcées. Dans une série d’individus recueillis à Ferques, aux environs de Boulogne, on peut observer des passages graduels à la disposition que nous offrent les individus provenant des Asturies; pour tous les autres caractères, l’identité de ces derniers avec le Z. Dutertrii est com- plète. Se trouve dans les couches de Femmes et de Pelapaya (Astu- ries). Elle a été trouvée également dans des couches dévoniennes de l’O. de la France, de la Belgique et du centre de la Russie, avec quelques modifications qui peuvent être le résultat des cir- constances de climat et de lieu. Orthis orbicularis . PI. XV, fig. 9, a, b, cf d. Orthis orbicularis , J Sow., 1839, Murch. si/, syst. , p. 61 1 , pl. V, f. 16. Cette espèce appartient au groupe que nous avons désigné ailleurs sous le nom de Arcuato-striatœ , parce que les stries, en quittant le crochet, se recourbent en arrière jusque sur le bord cardinal; quoique voisine de l’O. hybrida et de l’O. lunata , elle s’en distingue par l’inégalité des valves, qui, dans ces deux es- pèces, sont presque également convexes. Par l’aplatissement de la valve ventrale, elle se rapproche des O. elegantula et basalis , mais sa valve dorsale est moins gibbeuse, le crochet moins proéminent et moins recourbé. Ce n’est qu’avec doute que nous réunissons cette coquille à l’O. orbicularis , le seul échantillon que nous possédions de cette espèce ne montrant pas sur le front la courbure prononcée qu’on remarque ici , et dont la convexité est tournée vers la valve dor- sale. Cependant M. J. Sowerby ayant indiqué dans sa description un sillon médian sur la valve ventrale, pareil à celui qui existe dans tous nos échantillons d’Espagne , il est probable que ce sillon SÉANCE DU 19 MAI 1845. 479 devait produire la même courbure sur la valve opposée. L’inté- rieur de la valve ventrale, fig. 9, r, rappelle celui des O. elegcintula et hybrida . excepté que le bouton tripartite médian est ici plus prononcé. C’est ce bouton qui vient fermer la fente triangulaire de la valve dorsale lorsque les valves sont réunies. Se trouve dans les calcaires argileux de Ferrones et de PeSa- paya (Asturies). L’O. orbicularis , à laquelle nous la rapportons provisoirement, n’a encore été signalée qu’en Angleterre, dans l’étage silurien de Ludlow. Pentremitcs Paiüetti. PI. XY, fig. 10, tf, b; 11, ée. . . f 4 Gonambo- iles. . . . traie plus ou moi loppée 1)4 Pronites. 20. crenistria , Phill. 21. arachnoidea , Phill. 22. subarachnoidea , d’A et de Vern. 25. umbraculum , Schlot 24. inflexa , Pand. 25. plana , Pand. 26. rustica , J. Sow. 27. Verneuili, Eichw. 28. anomal a , Schlot. 29. adscendens , Pand (zonala , Daim.). 50. hemipronites , von Buch. r31. calligramma , Daim 32. Id, var. orthambo- nites , von Buch. 35. moneta , Eichw. 4. extensa , Pand. Plis dichotomes / * 1 55. semicircularis , Eich, ) 56. obtusa, Pand. (cincta, ' Eichw.) Soc. gcot. Tome II, 2e série. 3i 482 SÉANCE DU 19 MAI 1845. Classification des Leptæna. A. Reticulalœ. j 1. ( B. Plicistriatœ. ....<_ a 2 l r re- plia tim radia tœ. a3 Productiformes 1)3 Non productiformes. D2 Re gulatïm radia tce. *4 a3 Plus ou moins bombées Sillons /a^ Valve/ entre les! dorsale ré- 1 stries, cou- 1 gulière - < verts de ) ment voû-i stries Ion- 1 te'e. . . \ gitudina -I 1}S> Valve ( les plus fi l dorsale gè- nes. . . \ niculée. . t»4 Sillons lisses ou striés transversalement. . „ Ij3 Tout-à-fait plates a ^ Plis trausverses obsolètes , non continus; stries longitudinales à peine visibles à l’œil nu Ij2 Plis transverses continus ; stries longitudi- nales très sensibles à l’œil nu ornala. , Eichw. j ftturçhisoni^ tFArch.' et de Vern. j Sedgwicki , d’Arch.' et de Vern. euglypha , Daim, Ouralensis , Vern. j deltoidea , Conrad, Dutertrii , Murch. asella , Vern. allernala , Conrad. Humboldti , Vern. sericea , J. Sow. j transvers, alis , Daim. obionga , Pand. / épis , Goldf. imbrex , Pand. Id. , variété. 1 transversa , Pand. ! convexa , Pand. j Fis chéri, Vern. quandrangularis , i Stein. nodulosa , Phi 1 1 . depressa , Sow., (ru-' gosa , Daim.), analoga, Phill. j distorla, J. Sow. j M. d’Archiac présente les observations suivantes : Lorsque nous communiquâmes à la Société, M. de Verneuilet moi, dans la séance du 4 avril 1842 , le résumé de nos considé- rations générales sur la faune du terrain paléozoïque , nous fîmes remarquer , parmi les conclusions auxquelles cette étude nous avait amenés, la proposition suivante : «Si l’on considère au con- » traire , disions-nous , le développement de l’organisme dans le » sens horizontal, géographiquement ou dans l’espace, on recon- » naît que les espèces qui se trouvent à la fois sur un grand nombre * de points et dans des pays très éloignés les uns des autres, sont » presque toujours celles qui ont vécu pendant la formation de plu- » sieurs systèmes successifs. » ( Bull . , t. XIII , p. 260. ) Cette proposition a été reproduite textuellement dans le mé- moire original qui parut l’automne suivant ( Transac . de la Soc. géol. de Londres , t. VI , p. 335). Comme explication de cette loi de la distribution de certaines espèces, nous disions (page 322), en parlant des Térébratules qui nous avaient présenté cette parti- cularité : «On peut en effet concevoir que les espèces dont I’organi- » sation était assez forte pour avoir vécu pendant plusieurs périodes » successives, devaient être aussi celles qui, dans le même temps, SEANCE DU 19 MAI 1845. 483 » avaient pu exister et se propager sous les conditions extérieures » les plus différentes. » A la réunion de l’association britannique tenue à Cork, au mois d’août 1843, M. Edouard Forbes a lu un mémoire inséré dans le 13e rapport publié par cette association en 1844, et qui est le résultat de ses observations sur la distribution des animaux marins inférieurs dans la mer Egée. Après un très grand nombre de re- cherches pendant lesquelles il a fait descendre la drague jusqu’à 1,380 pieds anglais (1,294 pieds-de-roi ou 420 mètres), il a divisé cette hauteur en huit régions , caractérisées par des formes géné- ralement distinctes, mais de profondeur très différente, la huitième, par exemple , ou la plus inférieure, étant à elle seule plus pro- fonde que les sept autres ensemble , et le nombre des espèces y étant aussi moindre que dans aucune des régions supérieures. M. Forbes donne ensuite les détails les plus précis sur l’orga- nisation de ces régions, sur le nombre de genres et d’espèces qui leur sont propres, et sur la proportion relative des espèces com- munes à deux, trois, quatre ou cinq d’entre elles ; puis, compa- rant la faune des mollusques de la mer Egée à eelle de l’Océan Atlantique qui baigne les côtes d’Espagne , de France et d’Angle- terre , il trouve que les espèces communes aux deux mers sont principalement celles qui , dans la mer Egée , vivent à la fois dans plusieurs des régions qu’il y a établies. Ainsi, sur 70 espèces qui sont communes à 5 régions , la moitié se retrouve depuis le détroit de Gibraltar juscpi’à la mer d’Allemagne. Sur les espèces com- munes à 4 régions, 1 / 3 vit dans l’Atlantique , et parmi celles qui parcourent moins de 4 régions, on n’en retrouve plus que 1/5 sur ces mêmes plages occidentales de l’Europe. D’où M. Forbes con- clut (page 171 du rapport) que plus une espèce parcourt de régions verticales , ou , en d’autres termes, plus elle vit à des profondeurs différentes sur le meme littoral , plus aussi elle se propage sur de plus grandes étendues en surface. Ces résultats, que M. Forbes a déduits de l’examen de la faune actuelle de la mer Egée, quelque intéressants qu’ils soient, ne peu- vent cependant être regardés que comme un corollaire de ce que nous avions reconnu pour la faune de transition. Ce savant con- sidère en effet les animaux marins vivant dans le même moment, sous des profondeurs d’eau et dans des circonstances physiques assez différentes, tandis que nous, nous les considérions dans plu- sieurs périodes successives; mais l’une de ces propositions entraîne nécessairement l’autre; car si, comme nous l’avons dit, les co- quilles qui ont pu vivre pendant plusieurs périodes, à cause dé SÉANCE DU 19 MAI 1815. 48 i leur organisation plus robuste , devaient être celles qui , toutes choses égales d’ailleurs , avaient pu exister aussi sur des points du globe très éloignés les uns des autres, il s’ensuit que, dans le même temps, ce sont également celles qui vivent sous des cir- constances les plus variées, soit en profondeur, soit en étendue géographique. Dans une note lue à la Société géologique de Londres, au mois de janvier 1844, M. Éd. Forbes , après avoir examiné les fossiles cré- tacés de Pondichéry, de Yerdachellum et de Triconopoly, sur la côte orientale de la presqu’île occidentale de l’Inde , dit encore , au sujet des espèces communes à ces dépôts et à la craie de l’Europe, qu’elles confirment le principe précédent, c’est-à-dire que l’é- tendue de la distribution géographique des espèces est ordinai- rement correspondante à l’étendue de leur distribution ou de leur existence dans le temps ( The quart, journ. of the geoL Soc. of London , n° 1 , fév. 1845). En rappelant ici une opinion que nous avions émise précédem- ment, notre but n’est point de réclamer une priorité qui n’a aucun intérêt pour la science , mais bien de faire remarquer la con- cordance des résultats obtenus par des voies si différentes, et cette circonstance assez particulière , que la distribution des espèces dans le sens vertical et horizontal avait été établie pour la faune la plus ancienne du globe avant de Pêtre pour celle qui vit encore sous nos yeux. Nous dirons de plus que, d’après M. Forbes (page 175), les espèces qui sont communes à la mer Egée et à l’Atlantique des côtes de France et d’Angleterre, vivent à d’assez grandes profon- deurs dans la première de ces mers, et augmentent en nombre à mesure qu’on descend, tandis que dans la seconde elles vivent sur le littoral. Ainsi, les parallèles de latitude vers le N . auraient leurs équivalents dans la profondeur, et de même qu’au-dessus du niveau de la mer les parallèles se trouvent représentés par des altitudes ou des régions botaniques , de même au-dessous de ce niveau ils seraient représentés par des régions distinctes d’animaux marins. Enfin , ces diverses observations démontrent combien on doit mettre de réserve dans l’étude des dépôts de sédiments que l’on rapproche ou que l’on sépare, suivant qu’ils renferment des fos- siles semblables ou différents ; car la même couche prise sur deux points éloignés dont les niveaux naturels différaient entre eux , de 100 mètres par exemple , pourra cependant présenter des associa- tions d’espèces très distinctes. Si , en outre , la distance horizontale SÉANCE DU 19 MAI 1845- 485 de ces points est assez considérable, si diverses circonstances em- pêchent de suivre constamment la couche pour apprécier la posi- tion première et l’ancien niveau relatif des deux points , on pourra attribuer les différences organiques que l’on observe , soit à des différences dans la profondeur de la nappe d’eau sous laquelle les animaux ont vécu, soit à celles qu’ont pu occasionner les distan- ces horizontales et la latitude. Dans l’un et l’autre cas , ces diffé- rences pourraient encore être telles , qu’on regarderait ces deux parties d’une même couche comme appartenant à des époques successives très distinctes. A l’appui de ces considérations M. Elie de Beaumont rap- pelle que M. Deshayes avait déjà fait remarquer que les ana- logues vivants des espèces éocènes se retrouvent en partie dans les mers du Sénégal. Les espèces éocènes encore vi- vantes se retrouvent dans toutes les mers. M. d’Archiac ajoute que la détermination de l’âge des cou- ches tertiaires , par la proportion des espèces actuellement vivantes quon y trouve, lui paraît soumise à des objections telles qu’elle ne peut être employée que d’une manière très générale, et qu’elle n’est pas susceptible de la précision qu’on a essayé de lui attribuer. D’abord, 1 espèce, qui est la base de tout le raisonnement, est elle-même mise en question. Les zoo- logistes les plus distingués sont plus ou moins en désaccord sur la réalité et sur les caractères de l’espèce. Tel d’entre eux peut sans doute asseoir son opinion sur des motifs dont nous ne sommes pas juge; mais il serait contraire à toute logique d’admettre comme base, dans une science, un principe em- prunté à une autre science, et sur lequel les personnes les plus compétentes ne sont point d’accord. Mais , en fût-il autrement, continue M. d’Archiac, l’appli- cation de ce moyen serait encore très difficile, d’abord parce qu’on ne connaît jamais toutes les espèces du dépôt que l’on considère, ni toutes les espèces vivantes; qu’on ignore égale- ment , dans les deux cas, le rapport des fractions aux nom- bres entiers ou absolus; que ces fractions changent, de part et d’autre, dans des proportions très différentes au fur et à mesure des nouvelles découvertes ; et ensuite parce que les faunes tertiaires étant localisées à peu près comme le sont les 486 SEANCE DU 19 MAI 1815. faunes actuelles, les coquilles d’un dépôt tertiaire donné ne doivent pas être comparées seulement à la faune actuelle en général, mais en particulier à celle qui vit dans la mer la plus rapprochée du dépôt en question. On doit tenir compte , en outre, de l’épaisseur du dépôt , de la nature de son fond, de sa hauteur absolue et relative , de son inclinaison natu relie, etc. , circonstances dont souvent plusieurs ne peuvent plus être appréciées aujourd’hui. Enfin, les recherches de M. Edouard Forbes montrent à combien de conditions doit répondre ce qu’on a appelé la méthode des nombres proportionnels, pour être réellement applicable; et l’exemple du crag, qui serait un dépôt tertiaire éocene pour un zoologiste suisse ou danois, miocène pour un zoologiste anglais, et pliocène pour un zoologiste français, doit nous prémunir contre un pareil mode de détermination. M. Virlet dit que M. Agassiz n’admet aucun fossile ter- tiaire identique avec les espèces actuelles. M. de Verneuil ajoute que, sur les côtes de Suède et de Norwége, là où la mer est assez profonde, M. le professeur Loven , de Stockholm, a observé parmi les mollusques une distribution verticale correspondant à leur distribution horizontale, suivant les latitudes. Ainsi, entre Gothenbourg et la Norwége, M. Loven a trouvé , à 80 toises de profon- deur, des espèces qui, sur la côte du Finmark, habitent à 20 toises; plusieurs espèces s’élèvent même sur cette dernière côte jusqu’à la région littorale, tandis que, dans le sud, elles se tiennent toujours à 12 ou 15 toises au-dessous du niveau de la mer. M. Elie de Beaumont, revenant sur celte question, dit que si l’opinion de M. Agassiz, relativement aux glaciers, est vraie, il ne sera pas étonnant de voir une grande extinction d’espèces à une pareille époque. M. Michelin, répondant «à M. Elie de Beaumont, annonce que, dans les polypiers fossiles qu’il a examinés des localités de laSuperga, de Tortone et d’Asti, il n’en a reconnu qu’un très petit nombre analogue à ceux qui vivent aujourd’hui ; que le Caryophillia ccespitosa , cité par M. de Golîegno à Castel- Arquato, n esl probablement que le Lithodendron granulosum SÉANCE DU i 9 MAI 184f>. 487 de Goldfuss , et qui! pense que c’est le grand froid qui a fait sans doute périr presque toutes les espèces de cette époque. M. Élie de Beaumont fait remarquer, à l’appui de toutes ces observations, que, dans les époques anciennes, les fossiles étaient Lien plus ressemblants, soit entre eux, soit dans des pays différents. Or, ceci prouve que la température de la mer était beaucoup plus uniforme qu’aujourd’hui , tant en profondeur qu’en allant de l’équateur aux pôles. Aujourd’hui, la température à la surface de la mer, à l’é- quateur, est de 27° 1/2, tandis qu’au fond elle est de 2°. 11 n’y a aucune raison de croire à ces différences autrefois. La température du fond de la Méditerranée est de 13°, ce qui est la température des hivers de cette mer dans les temps an- ciens, où il n’y avait pas de glaces polaires. Le fond de la mer de l’équateur devait être dans un état analogue, ce qui devait conduire à une répartition bien plus uniforme des es- pèces. M. Martins ajoute que, dans la mer Glaciale, entre le cap Nord et le Spitzberg, la différence entre la température de la surface et celle du fond s’élève à quelques degrés seule- ment, même lorsque les profondeurs sont de plusieurs cen- taines de mètres. Cela tient au mélange des eaux du Gulf- stream , qui apportent au cap Nord des graines de Mimosa scandens , avec les eaux refroidies par les glaces polaires. Cette faible différence de température a donné lieu à une grave erreur des navigateurs anglais. La pression de la co- lonne d’eau sur la cuvette du thermomètre compensant et au-delà la faible différence de température , ils ont cru à une augmentation de température avec la profondeur qu’ils expliquaient par la chaleur centrale. M. Elie de Beaumont dit que la très grande masse de la mer équatoriale est à une température très basse, et seule- ment d’un petit nombre de degrés au-dessus de zéro. M. J. Delanoue présente quelques remarques au sujet du passage suivant d’une lettre de M. Becquerel, récemment in- sérée dans le Bulletin de la Société ( 2e sér. , t. II, p. 222) : « Comme effet de transport dont l’origine électrique ne saurait être mise en doute, c’est ce qui s’est passé quand 488 SÉANCE DU 2 JUiN 1845. les pyrites aurifères de Bérézoff ont perdu leur soufre pour prendre de l’oxigène et de l'eau, sans changer de forme. On voit là l’action d’un courant électrique qui apporte un élé- ment et en enlève un autre. Le contact de l’or et de la py- rite, en présence de l’eau, à la surface du minéral, suffit pour commencer l’action, qui se propage ensuite de proche en proche jusqu’au milieu. » Je ne pense pas, dit M. J. Delanoue, que les pyrites de Bé- rézoff, pas plus que toute autre pyrite au maximum de sul- furation, FeS2, aient eu (quoi qu’on en dise) une origine plu- tonique, puisqu’elles se décomposent par la chaleur et n’ont été souvent soumises qu’à de bien faibles pressions. Elles ont donc été formées par voie aqueuse. Or, je ne m’explique pas l’agrégation possible d’un minéral dont le premier élément forme une pile qui devait, non pas attirer, mais décomposer tout autre élément similaire tendant à se grouper avec lui. Et quant à l’épigénie en elle-même, comment l’attribuer à la présence de l’or ou de tout autre corps étranger établissant un courant électrique, lorsque nous voyons si souvent des cristaux de pyrites converties de même, sans altération de formes, en hydrate de sesqui-oxide de fer? M. Michelin fait voir les échantillons dont il a parlé à la dernière séance. Séance du 2 juin 1845. PRÉSIDENCE DE M. ELIE DE BEAUMONT. M. Le Blanc , vice-secrétaire , donne lecture du procès- verbal de la dernière séance , dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance , M. le président proclame membre de la Société : M. le docteur A. Mengaldo , chevalier de la Couronne de Fer, ancien officier de la garde royale italienne, résidant à Venise (royaume Lombardo-Vénitien) , présenté par MM. Vb quesnel et de Pinteville. Le Président annonce ensuite cinq présentations. SEANCE DE 2 JUIN 1845. 489 DONS FAITS A LA SOCIETE. La Société reçoit : De la part de M. Alcide d’Orbigny, Paléontologie fran- çaise : Terrains crétacés , livraisons 97, 98; Terrains juras- siques , livraison 3 î . De la part de M. Lortet, Commission hydrométrique de Lyon; janvier et février 1845, 2 tableaux, Lyon, 1845. De la part de M. Michelin , Documents législatifs relatifs à V acquisition pour P Ecole royale des Mines de la collection mi- néralogique de M . le marquis de Drée , 4 broch. formant 23 p. , Paris , 1 845. De la part de M. Studer, Aperçu de la structure géologique des Alpes (extrait des nouvelles excursions de M. Desor), 2e édit., in-8», 34 p., 1 pl. , Neuchâtel, 1845. Comptes-rendus des séances de C Académie des sciences , 1845, 1er sem., t. XX, nos 20 et 21 . V Écho du monde savant , 1845, nos 37 à 40. L’Institut, 1845, nos 595 et 596. The American Journal of science and arts , by Silfiman , vol. XLV1I, n° 2, octobre 18 4 4. The Athenœum , 1845, n° 917. The Mining Journal 1845, n° 509. Correspondenzblatt , etc. (Journal de correspondance de la Société royale d’agriculture de Wurtemberg), nouvelle série, vol. XXVI; année 1844 , 2e vol., 1er cahier. Boletin oficial de minas de Espana , 1845 , nos 2 1 et 22. Le Secrétaire, au nom du Trésorier absent, donne lec- ture de l’état suivant. État des recettes et dépenses pendant les cinq mois qui viennent de s’écouler . Il y avait en caisse, au 3i décembre 1 844- » 758 fr. 25 c. La recette, depuis le 1er janvier dernier, s’élève à. 9,646 3o Total io,4o4 55 La dépense, depuis le ier janvier, s’élève à 8,537 o5 Keste en caisse, au5i mai 1,867 5o 490 SÉANCE DU 2 JUIN 1845. Dans la recette figure une somme de 2,400 francs pour la rentrée de huit cotisations une fois payées. Dans la dépense figure une somme de 2,396 fr. pour achat de rentes 5 0/0 sur l État. M. Michelin annonce la perte que nous venons de faire de notre confrère M. Huot , et demande la permission de pré- senter à la Société une courte notice sur sa vie et ses ou- vrages. O Le Président exprime les regrets de la Société pour la mort de notre savant collègue. Le Secrétaire donne lecture de la lettre suivante de M. Stiehler. Wernigerode am Hartz (Prusse), 22 mai i845. Je m’occupe à présent à composer un Mémoire sur les corps cy- lindroïdes , dont nos confrères , MM. d’Hombres-Firmas et Ley- merie , ont parlé , celui-là p. 63 du Bulletin , tom. X , celui-ci p. 118 , id. , et p. 313, tom. III , 2e partie, des Mémoires. Mon savant compatriote , M. Rlœden, a nommé ces corps stylolithes. Les stylolithes sont ou déterminées et parfaites , s’approchant plus ou moins de la forme cylindrique, ou indéterminées et impar- faites, ayant plus ou moins l’apparence d’une planche non rabo- tée de bois de sapin. D’après les échantillons recueillis en partie par moi, en partie par d’autres, ces corps énigmatiques se trouvent : 1 . Dans les terrains secondaires : a. Dans la formation de la craie; b. Dans la formation du Jura ; c. Dans la formation du lias ; d. Dans le groupe du trias Alberti ; aa. Dans la formation du Keuper ; bb. Dans la formation du muschelkalk ; cc. Dans la formation du Bunte Sandstein (dans le Roggenst in , le Hornmergel) ; e* dans la formation du zechstein , comme Rauchwacke arti- culée Freiesleben et Stængelkalk Hausmann; SÉANCE DU 2 JUIN 1845. 491 IL Dans les terrains de transition : a. le Thonschiefer , 1 du Hartz; par exem- b. rAlaunschiefer , f pie, à Buclienberg, c. le calcaire de transition, 1 près de Werhige- d. le Blattersteiri très chioritique, J rode; III. Dans les roches platoniques : a. Dans le Grunstein du Buclienberg; b. Dans le Grunstein-Porphyr du Mühlenthal, entre Elbinge- rode et Rubeland , près de Wernigerode. Il est digne de remarque que ces corps se trouvent constam- ment dans les roches et terrains qui se composent de carbonate de chaux joint à plus ou moins de carbonate de magnésie, et pour la plupart à une petite quantité de proto-carbonate de fer et de manganèse; rarement le proto-carbonate de fer tient lieu d’une portion plus grande de carbonate de magiésie. D’après mes recherches et observations je suis convaincu que ces corps doivent leur origine à la magnésie jointe au carbonate de chaux , et qu’ils sont formés : Ou par une transformation (métamorphisme) de la matrice , cau- sée par la pénétration de la magnésie introduite comme un élément hétérogène dans l’intérieur de la matrice; Ou par l’action de la magnésie comblant les intervalles vides (Kluftflæchen ) ou les intervalles des couches ( Schichtungs- flæchen) de la matrice ; Ou par sécrétion de la matière formante, qui sortit de la ma- trice. Les carbonates de chaux et de magnésie , en se joignant à peu ou point d’argile , à la silice et au fer , produisent les stj- lolithes ; quand la silice a la prépondérance sur les carbonates de chaux et de magnésie , elle produit fasbeste ligniforme : l’un et l’autre sont formés chimiquement. Très rarement des corps orga- nisés ont influencé, peut-être , la forme cylindrique des stylolithes parfaites. Dans le calcaire de transition du Buclienberg, j’ai trouvé des stylolithes en plaques (liegende Stylolithen) , qui pas- sent à l’asbeste ligniforme qui couvre les stylolithes. J’aurai l’honneur de présenter à la Société géologique un ex- trait de mon Mémoire. Mais en attendant j’ai désiré lui commu- niquer ces notions préliminaires. Dans 492 SÉANCE DU 16 JUIN 1815. L’ordre du jour appelle l’attention de la Société sur le lieu de sa prochaine réunion extraordinaire. M. Boubée propose Avallon, situé sur les limites de la craie et des terrains anciens. Cette proposition est adoptée. M. le Président annonce que le procès-verbal de Cham- béry paraîtra dans le courant de la semaine; ce procès verbal se compose de 16 à 17 feuilles d’impression. M. le Président espère que la réunion à A. vallon ne sera pas moins fructueuse pour la science que celle de Chambéry, et il annonce que là aussi il y des questions de moraines ou de prétendues mo- raines à soulever. Séance du 16 juin 1845. PRÉSIDENCE DE M. ELIE DE BEAUMONT. M. Le Blanc, vice-secrétaire, donne lecture du procès- verbal de la dernière séance , dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance , le Président proclame membres de la Société : MM. Ebelmen, ingénieur des mines, résidant à Paris, rue Crébiilon , 4, présenté par MM. Dufrénoy et É!ie de Beau- mont; Bayle, ingénieur des mines, résidant à Paris, rue Ma- dame, 24, présenté par MM. Dufrénoy et Élie de Beau- mont ; Delbos (Joseph) , à Bordeaux, place royale, 6* , présenté par MM. Yirlet et de Collegno; Boileau, élève ingénieur à l’Ecole des mines, à Paris, présenté par MM. Le Blanc et de Wegmann ; Le duc de Vicence , à Paris, présenté par MM. Le Blanc et de Wegmann. M. Elie de Beaumont offre un exemplaire du Rapport qu’il a fait a V Académie des sciences , le 12 mai dernier , sur un Mémoire de M. Pierre de T chihatchejf relatif à la consti- tution géologique de V Altaï (extrait des Comptes-rendus de SÉANCE DU 16 JUIN 1815. 4 93 V Académie des sciences , t. XX, séance du 12 mai 1845 ), in-4°, 26 pages. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : î> De la part de M. d’Omalius d’Halloy , Des races humaines ou Eléments d' ethnographie , in-8°, 208 p. Paris, 1845. De la part de M. Eugène Robert , Extrait du compte- rendu de la séance publique et annuelle de la Société royale et centrale d’ agriculture , qui a décerné une médaille d'or a M. E. Robert , pour la découverte et V application d’un pro- cédé ( phloioplastie ) propre à arrêter les ravages d'un in- secte qui fait périr les ormes , les pommiers , les frênes , etc. , et à régénérer ï écorce des arbres souffrants (extrait du Mo- niteur universel du 21 mai 1845); in-8°, 24 p. Paris, 1845. De la part de M. J. Four net , Sur la rubéfaction et la rouille des minerais et des roches (extrait des Annales de la Société royale d' agriculture } histoire naturelle et arts utiles de Lyon ) ; in- 8°, 28 p. Lyon, 1845. De la part de M. Leymerie, Exposition d'un plan pour la carte et la description géologique du département de la Haute- Garonne (extrait des Mémoires de V Académie des sciences de Toulouse , mars 1845); in-8°, 13 p. Toulouse, 1845. De la part de M. Thirria , Compte-rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l'année 1 84 4 ; in-4°, 195 p. Paris , 1845. De la part de M. Michelin , Table générale analytique et raisonnée des matières contenues dans les trente-six premières années du Bulletin de la Société d' encouragement pour l'industrie nationale, par M. Ch. Daclin; in-4°, 286 p. Paris, 1838. De la part de M. le ministre de la justice, Journal des Sa- vants , mai 1845. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences , 1844, 1er semestre, t. XX, nos 22 et 23. Bulletin de la Société de géographie , 3e série, t. 111, n° 17, mai 1845. Le Mémorial encyclopédique , avril 1845. L'Echo du monde savant , 1845, nos 41 à 44. SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 4 94 L'Institut , 1 8 45 , n° 598. 1° Report of the tenth meeting , etc. (Relation de la 10e as- semblée de l'association britannique pour l’avancement de la science, tenue à Glascow en août 1840) ; in-8°, 693 p. , 5 pl. Londres , 1841. 2° Report , etc. (Relation de la 12? assemblée de la même association, tenue à Manchester en juin 1842 ) ; in-8°, 3 47 p., 2 pl. Londres , 1843. The Athenœum , 1845, nos 918 à 920. The Mining Journal , 1 845 , noS 5 10 à 5 1 2. The Transactions of the royal Irish Academy , vol. XX , in 4°, 521 p. Dublin , 1845 Abhandlungen , etc. ( Bulletin de Société d’histoire natu- relle de Gorlitz) ; 3e vol., 1er et 2e cahiers, 1840 —1842; 4e vol., 1er cahier, 1 84 4. Boletin oficial de minas de Es pana , 1845 , n° 23. Memorie délia, reale Academia delle scienze di T orino , séria seconda, t. VI, in-4°. Turin, 1844. Le Secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Moreau, qui demande qu’on fixe au 5 septembre au plus tôt le jour de l’ouverture de la réunion extraordinaire à Avallon. La Société fixe ce jour au dimanche 14 septembre à midi. M. Bontemps, secrétaire de l’Académie de l’industrie, envoie des billets d’entrée à l’exposition de cet établissement pour les membres de la Société géologique. La Société vote des remerciements à M. Bontemps. En envoyant a la Société une Note sur la rubéfaction et la rouille des minerais et des roches , M. Fournet ajoute : Je joins à cet envoi quelques échantillons démonstratifs, sinon pour la marche de la théorie, du moins pour la marche de la nature. Vous avez un granité sain et un granité de la même car- rière pris à la superficie; le feldspaîh y est rubéfié. Un morceau de lias offre le jaune et le rouge rubanés; enfin deux cailloux ont, l’un une écorce jaune, et l’autre une écorce rouge. Vous verrez par le Mémoire que ces cailloux ont plus d’importance que ne le comporte leur aspect au premier abord. Je souhaite fort appeler l’attention de la Société sur ces phénomènes , parce SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 495 que, passant par d’autres mains que les miennes, on jettera pro- bablement du jour sur ce que j’ai laissé d’obscur. Je termine en ce moment un assez long mémoire dont une partie est sous presse. Il a pour objet un complément des for- mations lenticulaires : j’arrive à des résultats assez curieux pour la théorie des filons , et sitôt que ce Mémoire sera tiré complète- ment , je m’empresserai d’en adresser un exemplaire à la Société. M. Fournet adresse encote la note suivante sur L'état actuel des connaissances touchant les roches éruptives des environs de Lyon . Depuis mes publications sur les roches serpentineuses et por- phyritiques, j’ai continué mes études sur l’ensemble éruptif de nos environs; j’ai même cherché à les étendre en poussant mes excur- sions dans l’Ardèche , dans le Forez , l’Auvergne , en sorte que des aperçus nouveaux sont résultés de cette somme d’explorations, et l’extrait suivant de mon travail d’ensemble eu récapitulera les points capitaux. Dans la note actuelle , je laisse de côté la partie historique de la question ainsi que les droits de mes devanciers, me réservant de leur rendre autant qu’il dépendra de moi justice pleine et entière; on verra alors jusqu’à quel point la question était difficile, puisqu’il restait encore quelque chose à dire après de si nombreuses tentatives , et l’on voudra bien aussi m’excuser si comme tant d’autres, j’ai donné dans l’erreur. Les roches éruptives des environs de Lyon composent les classes générales suivantes : 1N° i. A. Granité. B. Miarolites ou syénifes. ]\° 2. Porphyres quarzifèrcs. N* 3. A. Dioriles. B. Serpentines. N° 1 . Classe des granités et miarolites ou syénites. Cette clause est très complexe : aussi m’a-t-elle présenté de grandes difficultés, surtout à cause du passage apparent de quel- ques uns de ses membres aux porphyres quarzifères, et aussi pour distinguer les effets de métamorphisme. Cependant je crois pou- voir actuellement y établir deux divisions principales, motivées par la présence au moins locale ou par l’absence absolue de l’am- phibole. La première division comprend l’ensemble granitique, et l’autre la division miarolitique ou syénitique. A. Division granitique. — Les granits normaux sont caractérisés 496 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. par la réunion granïtoïde du feldspath , du quarz et du mica ; mais en plaçant à côté toutes les roches associées , on voit que depuis la structure granitoïde jusqu’à la structure compacte ils offrent une infinité de textures et de compositions diverses dont les types sont énumérés dans la classification suivante : a Granités porphyroïdes. . b. Graniles à grains moyens, homogènes , veinés, homogènes , veinés. e. Granités à grains fins et granulites. d. Weisstein i: e. Leptynites. homogènes , schistoïdes. homogènes , chistoïdes. compactes , schistoïdes. f. Granités à grandes parties pegmatites et granités graphiques. g. Roche de quarz. h. Feldspath laminaire. t. Roche de quarz et feldspath. k. Roche de quarz et mica. a . En tête de cette division on doit ranger les granités porphy- roïdes et ceux à grain moyen , parce qu’étant toujours traversés par les autres , ils forment les masses les plus anciennes. Les deux variétés porphyroïde et à grain moyen s’unissent souvent par des transitions insensibles dont on peut voir des exemples à Dardilly et au Corandin , près de Brignais ; leur formation est donc ou pa- rallèle ou contemporaine. Cependant, dans quelques cas rares, le second paraît placé par le travers du premier. Le granité por- phyroïde présente la même pâte cristalline que le granité à grain moyen; mais elle enveloppe des cristaux de feldspath qui, dans nos environs, ne dépassent guère 0m, 05 , et qui, dans les environs d’Avallon , atteignent jusqu’à 0m,10 de longueur. Si cette accu- mulation des gros cristaux lui donne quelquefois l’apparence d’une roche à très gros grain, d’un autre côté aussi la prédomi- nance du mica brun vitreux change plus ou moins son apparence habituelle : ainsi il est généralement blanchâtre aux environs de Lyon, mais brunâtre en masse à St-Gohnier, etc. Il est d’ail- leurs sous-entendu que je fais ici abstraction de la rubéfaction et de la kaolinisation, qui ne sont que des altérations postérieures dont il faut faire abstraction dans la classification. Les plus beaux gîtes de ces roches porphyroïdes se trouvent à Avallon , SÉANCE DU K) JUIN 1845. 49? aux Ecouchets, à Narmagne, à St-Gohnier , entre les Ruines et Noirétable en Forez, à Dardilly , à Limonest, à Charbonnières et au Corendin. b. Le granit à grain moyen diffère aussi d’un point à l’autre par l’abondance du mica, qui d’ailleurs est généralement vitreux et brun ou blanc. La roche est quelquefois schistoïde , soit à cause de l’alignement particulier des lamelles du mica, soit à cause d’une sorte d’étirement qui se manifeste surtout par l’allonge- ment des globules du quartz. Les types diminuent dans le bas plateau lyonnais , à Briguais , Montagny, Oublias, Latour de Salvagny. c. Le granit à grain fin et le granulite ont la même composition que les granits ordinaires; mais leur grain est quelquefois réduit au point de simuler un grès très fui , et il faut le secours de la loupe pour distinguer les éléments, surtout quand la kaolinisation commence. Dans quelques cas ces roches paraissent dépendre des granits à grain moyen , et elles sont alors concentrées spécia- lement dans les embranchements de leurs puissants filons; mais elles forment le plus souvent des filons spéciaux qui traversent les précédents. Elles sont assez sujettes à se veiner par suite de la disposition des lamelles du mica ; on en a des exemples à Fran- cheville et surtout à Sorbier, près de St-Etienne. Dans cette der- nière localité , cette roche veinée ressemble à un métamorphisme siliceux de micaschiste, à cause de la blancheur générale de sa pâte et des belles ondulations du mica noir ; mais il est facile de s’assurer qu’elle contient non seulement le quartz , mais encore plus de feldspath , et d’ailleurs le grenat rouge y abonde sous la forme de petits points microscopiques. Si donc on voulait voir ici un métamorphisme , il faudrait le concevoir effectué , non seulement par silicification, mais encore par feldspathisation, ce qui serait un effet très complexe; d’ailleurs on ne voit pas clairement pourquoi cette action si intense se serait arrêtée d’une manière aussi brusque contre les micaschistes qui forment le toit de la masse. Enfin le granit la caractérise comme toutes les roches de cette classe. J’ajouterai encore que la plupart de nos filons grani- tiques sont essentiellement veinés. Les gîtes de ces granits fins et granulites sont excessivement nombreux dans tous nos environs : ainsi on les trouve à Franche- ville , Brignais, Dardilly . Dommartin , St-Bonnet-le-Ford, Izeron, Mont-d’Or, Pilât, Riveric, Boucivre , etc. , etc. Ils se montrent encore plus loin, à St-Gohnier, à Montés de Clermont, à Pont- Gibaud, à Pranal , aux Ecouchets, àMannagon, etc. Soc. Géol. Tome II, *2C série. 5.3 498 SÉANClî DU 16 JUIN 1845. d et c. Les weisstein et les leptynites peuvent être considérées comme étant le dernier degré d’oblitération des granits , en ce sens que le quartz et le mica sont souvent effacés si complètement qu’il en résulte des masses subcristallines (weisstein), des masses tout-à-fait compactes (leptynites) ; cette cristallinité ou cette com- pacité n’empêche d’ailleurs pas les roches en question d’être schisto'ides ou non. Elles limitent quelquefois les gîtes du granit à grain fin de manière à simuler alors le résultat d’un laminage: cependant elles forment encore des masses très puissantes; et à Sail-sous-Couzans en Forez, elles constituent entre autres des roches d’une hardiesse qui ne le cède en rien aux plus âpres des masses primordiales. Les weisstein les plus remarquables par leur texture suberistalline et leur pureté se trouvent auprès d’Or- liennas; quelques variétés roses de Brignais rappellent les pétro- silex roses de la Suède; enfin les leptynites le plus décidément schisteux se montrent principalement auprès de St Julien-Molin- Molette, à Briguais, à Francheville, où ils forment des filons bien caractérisés qui traversent les micaschistes. g . Les granits à grandes parties, les pegmatites et les granits gra- phiques ne sont que des variétés d’une même roche qui dépendent de la grosseur ou bien de la disposition particulière de leurs élé- ments ; le même filon contient assez souvent les trois types. Ils traversent presque toujours les granits à grains moyens ou por- phyres : cependant au pigeonnier de Ft ancheville , les pegma- tites forment aussi la couenne ou la bordure d’un grand filon de granit à grain moyen. Enfin, j’ai trouvé encore dans les environs du même village des leptynites qui, dans les renflements de leurs filons, présentaient du feldspath laminaire en gros nœuds, en sorte qu’il semblait avoir échappé aux effets du laminage et du refroi- dissement subit qui a constitué la masse qui le renferme. h , i, fi, /, ne sont que des cas particuliers associés aux granits à grandes parties et dus à la prédominance ou à l’absence de l’un ou de l’autre des éléments essentiels du granit proprement dit ; ils forment de même des filons rarement puissants. Les plus beaux gîtes des différentes roches (y compris les gra- nits à grandes parties) se montrent dans nos environs à Montagny, à Brignais, au Mont-d’Or, à Francheville Dommartin, etc., etc. Celui du Mont-Jeu, près d’Antin, est connu de tous les géofogues, et il m’a offert des échantillons qui ne le cèdent en rien à ceux de l’Oural. En résumé, les diverses masses précédentes montrent çà et là des passages Ve l’une à l’autre, ce qui tient à des circonstances de SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 499 cristallisation ; mais, en général, les dernières, à partir des granits à grain fin, traversent les premières en forme de filons qui sont tantôt nettement tranchés, tantôt comme fondus par les bords, et dans la plupart des cas intimement soudés à leurs épontes; on peut donc affirmer sans crainte d’erreur qu’elles ont succédé les unes aux autres dans la même période géologique. Les dernières ne constituent d’ailleurs que rarement des masses importantes, tandis que de vastes surfaces sont occupées par les granits porphy- roïdes et à grain moyen ; enfin elles contiennent comme minéraux caractéristiques les grenats rouges, microscopiques ou de la gros- seur d’un pois ; la tourmaline noire bacillaire; l’émeraude; la lépidolithe, le disthène, qui ne se trouvent pas dans les deux pre- miers types. En faisant donc abstraction de quelques cas particu- liers de cristallisation, on peut conclure de cet ensemble de faits que les premières éruptions granitiques ont eu pour effet la pro- duction des roches a et b , et que les autres ne sont que le résul- tat final de ce grand épanchement, ou que des récurrences, comme il est facile d’en observer dans tous les effets platoniques ou vol- caniques. En France, ces roches granitiques s’étendent depuis les Vosges jusque dans le Languedoc; elles ressemblent tellement par quel- ques uns de leurs plus minutieux détails minéralogiques aux échantillons types qui me sont venus de l’Allemagne et même de la Sibérie par M. Léonhard , qu’il est impossible de ne pas voir qu’elles sont autant de membres d’une seule et même formation. Vers le sud, elles se reproduisent d’une manière identique en Corse et à l’île d’Elbe, en sorte qu’il faut encore admettre l’extension de cette formation de ce côté , malgré les difficultés qui paraissent résulter des enchevêtrements avec les formations serpentineuses ; je ne puis du moins pas croire de prime abord et sans des preuves bien positives, que les produits plutoniques les plus uniformes que nous connaissions soient en rapport avec des éruptions d'époques très différentes les unes des autres. Partout où j’ai pu examiner en France ces roches granitiques, je les ai vues culbuter, déchirer et métamorphoser les micaschistes; quelques uns de leurs derniers termes ont pénétré jusque dans les schistes argileux non fossilifères de nos environs, en sorte que leur ensemble constitue le système éruptif le plus ancien : sachant en outre qu’il ne faut plus chercher à les différencier d’après leur couleur rouge , jaune-or, blanchâtre , il sera bien plus facile d’en suivre les traces sur le terrain , et de les indiquer dans les cartes géologiques. Cette circonstance permettra enfin de déterminer 500 SEANCE DU 16 JUIN 1845. leur allure, jusqu’à présent à peu près inconnue. Mais un travail aussi vaste ne peut évidemment pas être entrepris par un seul homme , et c’est à la réunion des efforts des géologues qu’est ré- servé l’accomplissement d’une des plus belles et des plus grandes tâches scientifiques. B. Division miarolitique ou syénitique * — Autrefois j’avais cru devoir réunir sous le nom de miarolite un ensemble de roches dans lequel je rangeais les granits de Chessy, les porphyres gra- nitoïdes de M. Gruner, les granits de Baveno et ceux du Jæ- gerthal dans les Vosges. Des explorations faites sur les lieux m’ont appris depuis qu’il fallait maintenir en dehors de ce cadre les porphyres granitoïdes , circonstance qui tend à disloquer la pre- mière réunion que j’avais tentée. Cependant il n’en reste pas moins positif que la roche de Cliessy, entre autres, offre quelque chose de spécial , surtout à cause de la présence de l’amphibole, du moins en certains points. En fera t-on par cela même une syénite ? Cela me paraît encore sujet à contestation , car cette syénite serait dans tous les cas très micacée : aussi cette compli- cation me porte à conserver ma dénomination jusqu’à nouvel ordre. D’un autre côté, j’avais réuni aux porphyres quartzifères les eurites, les pétrosilex ou les cornes rouges des mineurs de Chessy; je me suis encore assuré qu’elles étaient en connexion avec les miarolites , jouant, par rapport à celles-ci , le même rôle que les granolites , les weisstein et les leptynites jouent par rapport aux granits proprement dits. De là un ensemble de nouveaux documents qui détermine la classification géologique et minéra- logique suivante : a. Miarolite porphyroïde. b. Miarolite graniloïde à grain moyen. c. Miarolite à petit grain; gramilile des miarolites. d. Eurites, pétrosilex, corne rouge, ieptynite des miarolites. e. Miarolite à grandes parties ou pegmalite des miarolites. Je crois inutile d’insister longuement sur les caractères miné- ralogiques de ces roches, parce qu’ils ont été, pour la plupart, très amplement développés dans mes mémoires sur les Alpes. 11 suffira de faire observer que du moment où le grain diminue ou s’amplifie extraordinairement, le mica s’efface ; c’est du moins ce qui arrive pour tous les granulites et les pegmatites des miarolites que j’ai pu observer jusqu’à présent. On ne retrouve pas davan- tage dans ces roches la tourmaline et le grenat, qui sont si abon- SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 501 liants dans la plupart des membres du granit proprement dit ; et si ces caractères négatifs étaient généralisés , ils deviendraient d’une certaine importance pour la facilité des déterminations. Aux environs de Lyon, cette roche domine dans une région qui s’étend depuis les flancs de la chaîne de Boucivre jusqu’à Romaniche, et elle paraît former un vaste filon qui est inclus dans les granits du système précédent , de manière à le diviser en deux parties, l’une orientale, qui domine depuis la Provence jusqu’au Rhône, et l’autre occidentale, dont M. Griollière a reconnu l’extension, depuis le Boucivre jusque vers le confluent de la Souane avec l’Ozerque. Cette bande miarolitique a agi principalement sur les schistes argileux non fossilifères, et elle paraît être en connexion avec les mines de cuivre et de manga- nèse du pays, circonstance qui lui donne une certaine importance. Il ne me reste plus qu’à faire observer que j’ai placé la miarolite parallèlement avec les granits de la division précédente, parce que les deux roches ont agi simultanément sur les schistes argi- leux non fossilifères. Mais il ne faut pas prendre cet aperçu à la rigueur ; car il serait bien possible que la miarolite fût un peu plus moderne et qu’elle constituât un intermédiaire entre les vieux granits et les porphyres quarzifères. Je cherche en ce moment à éclairer cette nouvelle question. N° 2. Classe des porphyres quartzifères. Cette classe si importante présente encore quelques unes des subdivisions de texture qui ont été remarquées parmi les roches précédentes; l’on peut, entre autres, y observer une foule de passages entre la texture granitoïde et la texture compacte. Ce- pendant, le quartz et le mica commençant à devenir rares, on ne retrouve plus ces roches à grandes parties qui caractérisent si bien les granits et les miarolites, à moins qu’on ne veuille leur assimiler ces isolements quartzeux qui constituent les porphyres agatifères. Voici les principaux types de cette classe, tels qu’ils se trouvent dans nos environs : a. Porphyre granitoïde à gros cristaux. b . Porphyre granitoïde à grain moyen. ! rouge , blanc, avec ou sans pinile , noir. d. Porphyre à épi dote- 502 SÉANCE DU IG JUIN 1845. e. Porphyre agatifère ( appendice ) avec épidole. f. Porphyre granulilique. g. Porphyre leptynitiqne. h. Pâtes porphyriques avec mica. ... . . ( feldspath, i. Minette simple on avec < 1 ( quartz. k. Minettes compactes noires, brunes ou verdâtres. a. Le porphyre granitoïde à gros cristaux domine dans les mon- tagnes du Forez , depuis les environs de Noii étable jusqu’à Thiers; il se charge quelquefois d’un mica vert terne, qui se marie très agréablement avec les gros cristaux de feldspath rose, en sorte qu’il en résulte des roches de la plus grande beauté. Cependant, en général , cette roche est presque sans mica, quoi- que sa masse affecte toujours la texture granitoïde, par suite du mode d’enchevêtrement de ses divers feldspaths et de quelques globules de quartz. b. Les porphyres granitoïdes à grain moyen sont ceux qui ont été signalés par M. Grand comme se trouvant entre JBoën et les Ruines : ils sont séparés des précédents par une ramification du granit porphyroïde ancien , détachée du massif de Pierre sur autre ; peut-être encore cette ramification granitique n’est-elle autre chose qu’un vaste bloc, soulevé et pincé entre les érup- tions porphyriques. Le quartz en globules n’y est pas aussi rare qu’on l’avait supposé en premier lieu. c. Les deux roches précédentes présentent des oblitérations de la texture cristalline conduisant à une pâte compacte, renfer- mant des cristaux de quartz et de feldspath; il en résulte, en un mot, les porphyres quartzifères ordinaires les mieux carac- térisés, et ceux-ci sont si bien enchevêtrés par diffusion intime dans les porphyres granitoïdes à gros grain ou à grain moyen , qu’il est impossible de les regarder comme des formations diffé^ rentes. Ces passages se montrent entre autres auprès de Thiers et aux carrières de Soulagette. Les porphyres quartzifères des montagnes lyonnaises ont une pâte variable, quelquefois cristalline, quelquefois compacte, en sorte qu’ils présentent des passages aux variétés précédentes. Leurs couleurs sont assez variées; mais il n’existe aucun motif plausible qui puisse conduire à séparer, par exemple, les beaux porphyres à pâte noire compacte de Chenelette, d’avec les por- phyres rouges plus ou moins foncés ou clairs, et ceux-ci d’avec les porphyres blancs. Il ne faut donc pas confondre notre roche noire avec le mélaphyre pyroxénique, et à fortiori faut-il éviter SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 503 de commettre cette erreur pour les porphyres qui sont simple- ment colorés en rouge-brun. Ces porphyres quartzifères dominent dans les chaînes beaujolaises , depuis Tarare jusqu’au-delà de Beaujeu ; ils apparaissent encore dans les montagnes des deux rives de la Bruvenne , enfin on en retrouve des filons isolés à Chaponart, au Monl-d’Or lyonnais, à Ri ve-de-Gier , entre St- Symphorien-le-Château et St-Golmier; ils sont plus anciens que le terrain houiller, mais ils ont disloqué le terrain dévonien de Tarare, Fhizy , etc. Les filons talcifères qui les accompagnent sont quartzeux et barytiques ; les premiers se distinguent par leur aspect fortement agatisé , et il en existe de beaux exemples à Ste-Paule, à St-Romain de Popez; les autres contiennent de la galène à Chenelette et à Propières. e/, e. Les porphyres quartzifères qui percent aux environs de Bressieux, dans les bassins de la Brevenne, sont lignitijères ; quel- ques uns de ceux du Pilerat sont chargés d’épidote, en sorte qu’ils rappellent le Pixtazit-fels. M. Thiollière a découvert depuis peu, près de Buliy, une nouvelle variété, qui offre la double circonstance d’être agatifère et épidoteuse , en ce sens que des isolements de quartz hyalin et de cornaline y dessinent des amandes oblongues et fortement soudées à la pâte ; c’est dans ces amandes que l’épidote se distingue par la coloration vert jau- nâtre qu’elle imprime à une partie du quartz. f et g. La texture des porphyres granitoïdes à gros cristaux de Thiers , ainsi que des porphyres à grain moyen des environs de Boën , se modifie quelquefois par la perte du mica , du quartz et des cristaux feldspathiques , de manière à devenir simplement sublamellaire, en sorte qu’ils passent à des roches granulitiques ; d’autres veines comprises entre Trelin et Boën pourraient aussi être comparées avec les leptynites à cause de l’oblitération com- plète du grain. Sur le versant oriental du Torrion, près de Beaujeu, une dégé- nérescence plus ou moins complète du même genre s’est formée aux dépens d’un porphyre noir analogue à celui que l’on trouve sur l’autre versant de la même montagne ; il en résulte des es- pèces de schistes noirs , dont il serait impossible de spécifier la nature si l’on n’avait pas tonte la série qui conduit pas à pas de l’état cristallin à cet état leptynitique. h , /, k. J’ai déjà insisté, dans mes précédentes notices, sur te passage des porphyres quartzifères aux minettes ; on a vu qu’il s’effectue par des lamelles micacées qui s’ajoutent à la pâte euri- iique, et dont la surcharge finit par effacer le ciment d’une ma- 504 SÉANCE DU 16 JUIN 1815. nière à peu près complète. Cependant ces masses micacées con- tiennent encore çà et là quelques gros cristaux de feldspath, ou même des géodes creuses quartzeuses identiques aux géodes d’a* gâte. On a des exemples de l’un et l’autre cas à Chaponart et au Pelerat. Mais l’oblitération du mica conduit aussi à des roches noires, brunes ou verdâtres, massives, à aspect plus ou moins rude , dans lesquelles je n’ai jusqu’à présent trouvé qu’une seule fois de l’amphibole en petits cristaux aciculaires. Ces différentes roches sont-elles toutes en association avec les porphyres quartzi- fères ? c’est ce qui n’est pas encore positif : cependant il est hors de doute que des filons composés de minette micacée dans la partie médiane passent à l’état de minette noire compacte vers les parois. Ces minettes se montrent dans les environs de Chessy, au Pelerat, à Arjoux , à Tarare , à Romenèche , Saint-Gohnier, à Thiers ; mais ils ne forment que des filons d’une bien faible puissance , comparativement aux énormes masses granitiques ou porpliyriques qu’elles traversent : aussi peut-on les regarder, au moins dans la plupart des cas, comme le dernier produit des éja- eulations porphyriques. 11 est encore digne de remarque que ces roches se terminent en coins avant la rencontre du grès bigarré , qu’elles ne traversent jamais. N° 3. Classe des diorites et des serpentines. Les diorites, les amphibolites et les serpentines de nos contrées ne forment guère que des culots ou des filons isolés et générale- ment assez exigus pour qu’il soit difficile de les raccorder de ma- nière à constituer un ensemble aussi général que les roches des groupes précédents. Quoi qu’il en soit , voici les principaux ca- ractères des unes et des autres. La serpentine se montre à Saint-Julien-Molin-Molette, auprès de Pelunia , sur les montagnes entre Riverie et Saint- André la- Côte , enfin à Savigny et à Fleurieux près de l’Arbresle. Celle de Saint-Julien-Molin-Molette forme un monticule assez vaste, que son aspect aride fait distinguer de loin. Elle est schis- toïde, d’une couleur verte presque noire, offrant, dans une pâte rude, des lamelles taîqueuses très fines; le talc s’isole en outre sur divers points , et notamment vers la périphérie de l’amas, de manière à former des masses rayonnées autour d’un noyau cen- tral ellipsoïdal. Elle présente aussi quelques asbestes. A Pelunia, la même roche est plus compacte , moins talqueuse, veinée de parties blanches, que l’altération atmosphérique con- SÉANCE DU 16 JUIN 1815. ô 0 5 tribue surtout à mettre en évidence. Le culot est beaucoup plus petit que celui de Saint-Julien-M olin-Molette. La serpentine que l’on trouve vers Riverie est accompagnée de bronzite ; celle de Savigny contient une multitude considé- rable de globules de fer spathique qui, en se décomposant à l’air, laissent une. roche cariée comme une lave volcanique. Elle con- stitue donc une sorte de variolite. Parmi les matières qui l'ac- compagnent on peut signaler quelques portions de serpentine noble , de talc schistoïde et d’asbeste. L’ensemble de ces effleu- rements, qui se montrent toujours dans le fond des vallées sous la forme de gros rochers noirs, s’étend fort loin jusque vers Bressieux. A Fie srieux, des serpentines sont accompagnées de roches tal- queuses et d’amphibole passant à l’asbeste; ce filon paraît se pro- longer vers la Tourette , du moins un ancien échantillon porte l’indication de cette localité. Les diorites ont été reconnues principalement à Riverie et à Mornant. Elles constituent des culots et des filons ; leur texture est quelquefois régulière, à petits grains , offrant un mélange en parties à peu près égales d’amphibole noire et d’un feldspath blanc opaque qui leur est propre. Dans d’autres cas, ces deux minerais sont groupés de manière à constituer des marbrures ou des zones contournées comme seraient celles qui se formeraient dans une pâte hétérogène que l’on soumettrait à un brassage ; enfin elles sont encore rubanées longitudinalement. Quant à l’amphibolite, elle n’a été signalée jusqu’à présent que sur les bords de la Saône, près de l’île Barbe, et au clos Charrin , à Yaise ; l’absence ou du moins la rareté du feldspath est la seule chose qui la distingue des diorites. Si l’on considère maintenant la réunion des serpentines et des diorites, dans les massifs de Riverie et du Pilât, on pourra être tenté de croire qu’elles ont joué un rôle dans un des derniers soulèvements de ces montagnes, que M0 Elie de Beaumont place à l’époque du terrain jurassique ; mais jusqu’à présent on n’a pas de preuve directe de cette circonstance , car nulle part ces roches ne percent ces formations sédimentaires ; il existe des roches à Diollage , à Montmélas et près de Limas, qui se trouvent près du grès bigarré et du lias , mais elles ne les traversent pas da- vantage; on sait qu’il n’en est pas de même pour les serpentines de Neffiez en Languedoc et pour celles des Alpes, qui boulever- sent les grès bigarrés et le jurassique. Pour compléter ces renseignements , il nous resle à mention- 606 SEANCE Dü 16 JUIN 184 6. ner une dernière roche qui se montre auprès de Vaugneray. Au premier aspect, elle simule un granit à mica brun très abondant; mais, en l’examinant avec quelque attention, ou y remarque d’abord de l’amphibole noire tricotée avec le mica; puis on s’as- sure que le quartz y est très rare; enfin ce qu’on serait tenté de prendre pour du feldspa h n'en offre pas le clivage : c’est un mine- rai à cassure inégale, qui, traité à froid par les acides étendus d’eau, se dissout en laissant une gelée siliceuse. Serait-ce une variété de labrador? Quoi qu’il en soit, il me semble que cette roche exceptionnelle, qui a un développement assez considérable, doit être rangée dans le groupe serpentineux plutôt qu’ailleurs. Comme on le voit par ce rapide aperçu , nos roches éruptives se prêtent à des conclusions dignes de quelque attention ; et si tous les problèmes qu’elles offrent ne sont pas encore résolus , il faut s’en prendre d’abord à la difficulté qu’oppose à leur étude la cul- ture qui les cerne de toutes parts : chaque jour les gîtes s’effacent sous les efforts du cultivateur, et bientôt même une partie d’en- tre eux n’existera plus pour le géologue. Une stconde cause de retard est le défaut d’analyses ; on ne sait, par exemple, pas encore en quoi un leptynite des granits diffère d’une pâte euritique , et il serait à désirer que la Société géologique voulût bien user de son ascendant pour déterminer les chimistes à s’occuper du cadre géologique, qui leur offrira de plus belles chances d’être utiles que le cadre minéralogique, auquel ils ne pourront plus guère ajouter que quelques minéraux rares , et par conséquent sans aucune por- tée générale. M. Édouard Collomb adresse à M. le Président la note suivante sur les traces du phénomène erratique dans les Vosges. Wesserling , le 26 mai 1846. Monsieur , Je vous remercie de l’accueil bienveillant que vous avez bien voulu faire aux notes que j’ai eu l’honneur de vous envoyer le mois dernier. Aujourd’hui je prends la liberté de vous communi- quer quelques observations et expériences nouvelles dans l’espoir qu’elles pourront vous intéresser. Elles sont toutes relatives au phénomène erratique. C’est une chose curieuse que les faces nouvelles de cette question , à mesure qu’on l’étudie et qu’on se livre à l’observation des faits. Je croyais avoir tout vu dans nos SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 507 environs, et cependant en passant une revue générale de notre vallée avec une personne très instruite , M. de Billy, ingénieur en chef à Strasbourg, qui a l’habitude d’apporter une extrême prudence dans ses jugements, nous avons eu l’occasion défaire plusieurs remarques qui m’avaient échappé. D’un antre côté, nous avons supprimé plusieurs choses de mon catalogue entre autres la roche de Schliffels et celle du moulin d’Odern , que nous avons définitivement destituées de leur caractère erratique. M. de Billy a reconnu l’authenticité de la moraine de Wesser- ling, de celles de Mollau , de Krüth , de l’église d’Odern, de celle d’Urbès; nous avons évalué la masse de matériaux de celte dernière à trois millions de mètres cubes. Puis nous avons une nouvelle moraine bien caractérisée à signaler au village de Hus- sein , dont je vais m’occuper fie dresser un plan et une coupe. Il a reconnu également la roche striée du Glattstein , les blocs erra- tiques et les galets striés abondamment répandus sur toutes nos moraines ; il en a emporté beaucoup de bons exemplaires pour les collections de Strasbourg. Si vous en désirez pour la collection de l’École des mines, je serai charmé de vous en envoyer. Ensuite j’ai fait remarquer à M. de Billy une nouvelle roche striée en place , tout près du village de Fellering. Dans le dernier envoi que j’ai eu l’honneur de vous faire , il y avait quatre petits échantillons de cette roche, nos 68 , 69 , 70, 71 ; depuis lors j’en ai fait extraire de grands exemplaires de 6 à 8 décimètres carrés. Cette roche est remarquable en ce qu elle se trouve précisément en face de celle du Glattstein , de l’autre côté de la vallée, dont la largeur en cet endroit est réduite à 800 mètres environ. Elle est finement striée dans la partie supérieure d’un petit mont isolé qui s’appelle le Hasenbühl , à 70 mètres d’élévation au-dessus du niveau de la rivière; il est formé en partie de roches de sédiment en couches fortement inclinées, et en partie de roches cristallines d’eurite.Il est eu aval du village de Fellering , sur la rive gauche ; il touche presque à la montagne du Dengelberg, dont il n’est sé- paré que par un petit vallon pierreux. Les stries ne sont pas mar- quées sur la roche cristalline ; mais au point où cette roche cesse et où commence le schiste, elles apparaissent sur tonte la surface supérieure de ce monticule. La direction moyenne des stries est dans le sens de l’axe principal de la vallée. Il est en même temps parsemé de quelques blocs erratiques de granit blanc qui ne peu- vent provenir que des environs de Wildenstein. Du côté N. -O. cette roche est couverte d’un revêtement de terrain erratique avec galets striés. 508 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. En voici une coupe et un petit croquis. (PI. XYI , fig. I et 2.) Coupe du HasenbühL — - 70 mètres au-dessus du niveau de la rivière. S. Schiste. E. Eu ri te. T. Débris erratiques avec galets striés. B. Blocs erratiques de granit. ST. Stries erratiques, a. Amont. a'. Aval. Une exploration un peu rapide que j’ai faite récemment des vallées de Munster, de Guebwiller et de Massevaux, m’a dé- montré que les phénomènes erratiques y offrent des particularités dignes d’être mentionnées; c’est un travail à reprendre plus tard en détail. En attendant, je puis déjà vous signaler les points principaux où j’ai remarqué des faits nouveaux. Dans la vallée de Munster, c’est au village de Metzei al que les accumulations de débris commencent à se tasser sous forme de moraines, avec blocs et galets striés. Ces débris continuent sous di- verses formes à couvrir le sol et les flancs de cette vallée jusqu’au pied du Rothenbach. Dans la vallée de Massevaux, à Oberbruck, au débouché delà petite vallée latérale de Rimbach , se trouve une petite moraine , en partie démantelée par l’action des eaux ; les détritus restés en place m’ont offert tousles caractères désignés par les auteurs comme faisant partie du domaine erratique. Dans la même vallée , entre le petit lac de Seewen et le pied du Ballon d’Alsace, d’énormes dalles de roches granitoïdes sont polies, usées , arrondies et ont la plus grande ressemblance avec les roches polies qui entourent l’hospice du Grimsel en Suisse. Dans la vallée de Guebwiller, en supposant que le phénomène erratique dans cette localité ait pris naissance sur les pentes nord du Ballon le point où il s’est arrêté dans sa marche se trouve placé un peu enarrièredu village de Lautenbachzell. En amont de ce point on ne rencontre que débris glaciaires accumulés sous di- verses formes; en aval tous ces accidents disparaissent, et les amas de détritus qu’on y trouve prennent la forme de débris de trans- port aqueux. Les phénomènes que j’ai observés dans ces vallées n’ont point IJui/eJi/i t/e /a Sac. Ceo /. àfc Praj/re _ 2* Sérié 'P.JJ,P/.XVI,Pture 008 . Crâne par • /<’.>• f T ~îi>ri/ /if/. Eaeppe/Z/n Paris SÉA.NCE DU 16 JUIN 184 5. 509 une direction unique. Ils rayonnent autour des points culminants des Vosges. En prenant chaque sommet de nos principales mon- tagnes pour centre , et décrivant sur la carte un cercle autour d’un de ces centres , on remarque que les moraines frontales , c’est-à- dire les limites inférieures du phénomène, ne se sont pas étendues au delà d’un rayon de 10 kilomètres. J’ai encore à vous entretenir d’une expérience que je viens de faire sur les galets striés. Cette expérience a pour but d’étudier l’action d’un courant d’eau quelconque, d’une rivière ou d’une cascade , sur ces galets. Une cinquantaine de galets rayés, de roche schisteuse bleue, assez dure , recueillis sur la moraine de Wesserling , ont été mis dans un grand cylindre horizontal, creux, en fonte , de lm,30de longueur, sur 0m,50 de diamètre , fermé aux extrémités par deux disques en fonte et tournant sur son axe. Ces galets ont été préa- lablement mélangés avec un volume égal de sable de rivière et 25 litres cl’eau ; puis on a imprimé au cylindre un mouvement lent de 15 tours par minute seulement. (PI. XVI , fig. 3.) Ce mouvement de rotation, en agitant les galets, le sable et l’eau dans tous les sens , imite l’action produite dans la nature par le frottement de ces cailloux les uns contre les autres dans un cou- rant de rivière. Après 6 heures de mouvement on en a retiré quelques uns : les stries les plus délicates avaient déjà disparu ; il restait encore la trace des raies plus profondément dessinées. AP rès 20 heures de mouvement les stries ont complètement disparu ; il n’en reste pas trace sur les galets , qui ont pris l’aspect mat des galets de rivière. Un exemplaire de ces galets, partagé avant l’expérience en deux parties, dont l’une a été soumise au frottement et l’autre con- servée à part , représente très bien , lorsqu’on réunit les deux morceaux après l’expérience, l’action produite parle mouvement. Cette expérience vient confirmer l’opinion de M. Agassiz , qui dit que les galets rayés entraînés par les torrents des glaciers perdent leur burinage à peu de distance de leur origine pour prendre l’aspect mat et uni des galets de transport aqueux , et qu’on n’en trouve nulle part dans les torrents des Alpes, pas plus qu’au pied des cascades ou sur les bords des lacs, et que partout où l’on trouve des galets rayés, on a affaire à des accumulations de débris glaciaires. Elle nous prouve aussi que les stries de la roche en place, du Glattstein et du Hasenbühl , de même espèce schistoïde que les 510 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. galets et de burinage identique, seraient complètement détruites, si un courant d’eau , accompagné de sable, avait passé sur ces roches pendant vingt heures seulement. Ce court espace de temps aurait suffi pour faire disparaître les traces laissées par le frotte- ment erratique. Ce serait donc une erreur de supposer que les stries remar- quées sur les roches, dans différents pays, peuvent provenir de courants d’eau ou de boue. L’origine de ces courants est d'ail- leurs très problématique, et nous voyons, par l’expérience précé- dente, qu’ils produisent sur les roches un effet tout opposé, c’est- à-dire qu’ils détruisent les stries, au lieu de les provoquer. Une autre conséquence à tirer de cette même expérience est celle de l’âge relatif de certains dépôts meubles qui reposent sur les roches striées. Nous avons sur nos roches striées, et en particulier sur celle du Glattstein , dans les dépressions du terrain, un dépôt qui atteint quelquefois l’épaisseur de plusieurs mètres, composé de petits blocs de granit, de galets striés recouverts d’un peu de terre végétale. Ces dépôts sont postérieurs, sans doute, puisqu’ils recouvrent la roche en place , mais ils font partie intégrante de la même époque géologique , du même phénomène qui a donné lieu aux stries ; ils sont comme l’étage supérieur d’un même terrain. La roche a été striée pendant la période d’activité du glacier; puis, les circonstances géologiques ayant changé, les glaces se sont fondues , retirées : elles ont laissé s ir place les débris menus qu’elles étaient en voie de transporter ; nous les retrouvons sur le lieu même où ils ont été déposés, sans qu’ils aient subi aucun dérangement dans leur position II n’est guère possible de rap- porter ces débris à un diluvium postérieur, parce que, s’ils eussent été remaniés ou transportés par les eaux , ils auraient altéré la pureté et la netteté des stries qu’ils recouvrent : les stries auraient même complètement disparu de la surface de la roche , puisqu’un frottement de vingt heures les détruit. Les dépôts meubles recouvrant les roches striées, qui ont été remarqués dans le Nord, ont été considérés comme appartenant à une époque géologique postérieure. Cependant n’est-il pas pro- bable qu’ils sont de même nature que les nôtres? Et si l’on cher- chait bien , peut-être y trouverait-on des galets striés. Ce serait un indice certain que ces dépôts appartiennent à la fin de l’époque erratique. Si pendant la belle saison quelqu’un de vos savants ou vous- SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 51 1 même , monsieur, vouliez nous faire l’honneur de venir voir nos moraines et nos roches, il y aurait sans doute de nouvelles ob- servations à faire dans l’intérêt de la science. M. Le Blanc fait remarquer que dès 1837 ( séance extra- ordinaire à Porrentruy) il a signalé les moraines des Vosges comme correspondant à d’anciens glaciers , particulièrement dans les vallées de Saint-Amorin et de Gyrovagny ; que dans une séance précédente il est revenu sur cette question , et qu’il a indiqué les lacs des Vosges comme correspondant tous a d’anciens glaciers autour desquels on devait retrouver les traces du phénomène erratique. Des observations qui tendaient à établir la même vérité étaient faites simultané- ment par M. Hogard , dans une petite brochure qui a pour titre : Observations sur les traces des glaciers qui , a une époque reculée , paraissent avoir recouvert la chaîne des Vosges , etc. , extrait des Annales de la Société d émulation des Vosges , in-8°, 24 p. Épinal , 1840. M É lie de Beaumont lait remarquer qu’il ne partage pas les idées théoriques, mais qu’il regarde les observations de M. Goilomb comme très bien faites et très intéressantes. M. le Secrétaire donne lecture de l’extrait suivant d’une lettre de M. Wisse à M. Régnault : Sur une exploration du cratère du Rucu-Pichincha (république de 1 Equateur). Quoique Quito soit fort près du Pichinclia, ce sol volcanique est si tourmenté, si découpé par de profonds ravins, qu’il faut une grande journée de marche pour arriver au sommet. Je partis donc , le 14 janvier , à trois heures du soir , accompagné de mon meilleur élève, M. Garcia Moreno, pour aller coucher dans une ferme (Lloa) située dans une petite plaine au pied du volcan. Nous en partîmes le lendemain, à sept heures du matin, et nous montâmes avec nos mules jusqu’à la limite de la végétation , point où il fallut mettre pied à terre. Je laissai les bêtes aux soins de mon domestique , et nous commençâmes à grimper avec un Indien qui nous servait de guide. La pente sur laquelle nous montions est excessivement roide, et nous ne pouvions avancer qu’en décrivant des zigzags. A cela il faut ajouter que la partie supérieure du volcan est toute couverte d’une ponce menue, 512 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. dans laquelle on enfonce jusqu’à 2 décimètres, et qu’il faut faire les plus grands efforts pour ne pas reculer sur ce sol mouvant plus que l’on n’a avancé. Nous nous dirigions sur un pic que nous apercevions par instants, et dont nous atteignîmes le point le plus élevé à 11 heures et demie. Grand désappointement ! Un brouillard des plus épais ne nous permettait pas de voir à 15 mètres Là , je fis bouillir l’eau, je pris la hauteur baromé- trique , d’où je conclus l’altitude 4775m,60 de ce point Notre vue commença à pénétrer dans l’intérieur du noir et terrible cratère, mais sans pouvoir en atteindre le fond. Descen- dons au cratère ! telle fut notre exclamation ; et nous voilà lancés, comme des fous , dans l’entreprise la plus téméraire , et livrés à des périls que jamais homme , peut-être, n’avait osé af- fronter. Il était midi. Notre guide ne voulut plus nous suivre : nous lui laissâmes nos poachos , espèce de manteaux du pays, et tout ce qui pouvait gêner notre marche. Un grand chien des- cendit avec nous; mais bientôt, effrayé par les blocs de pierre qui se détachent continuellement des parois et roulent au fond du cratère avec un vacarme épouvantable , il tourna les talons et nous abandonna. Nous continuâmes notre pénible descente. Pendant ce temps-là, le vent chasse un peu les nuages, et nous découvrons le fond du cratère et son bord opposé. Enfin , nous nous trouvons dans un profond ravin, long, étroit, ouvert à notre gauche , et hérissé de toutes parts d’énormes masses de pierres détachées des parois. Au milieu se dessine un torrent, alors à sec Mon baromètre , suspendu à un gros bloc , me montre que nous avons descendu de plus de 300 mètres. Nous continuons notre route parla droite, et nous atteignons, par une pente assez douce , le point le plus bas de la crête qui sépare les deux cratères. Alors nous percevons plus fortement qu’auparavant l’odeur des vapeurs sulfureuses, dont nous étions déterminés à découvrir la source. Nous descendons donc, à la grâce de Dieu, sans savoir où nous arriverons, et suivant un chemin de plus en plus difficile , car les parois du second cratère sont plus roides que celles du premier Avant d’arriver au bas, nous découvrons un monticule, ou une presqu’île , placée au milieu du cratère ; nous voyons sur notre gauche les fumées que nous prenons d’abord pour des brouillards, et enfin de lon- gues zones jaunâtres qui couvrent çà et là le sol. Il n’y a plus de doute, nous arrivons aux bouches du volcan. Nous nous dirigeons sur ces traces sulfureuses, et nous gravissons le monticule. Nous atteignons d’abord les bouches d’où la vapeur sort abondante , SU A NC K DU K) JUIN 1845. 513 et avec un assez grand bruit. Là nous étions en communication directe avec le centre de la terre, peut-être avec nos antipodes de Sumatra. Nos pieds ne trouvent plus de roches solides; le sol n’est plus composé que de terre , cendre et soufre agglomérés. Cà et Là je vois des crevasses et des affaissements de 20 centimètres de profondeur. Je me couche à terre , et je fourre mon bras dans une des cheminées pour recueillir des cristaux de soufre. Il m’est impossible d'enfoncer beaucoup le bras à cause de la grande chaleur. Un thermomètre, qui ne montait qu’à 60 degrés, exposé à l’orifice, arriva en un clin d’œil au haut de sa course; à 20 centimètres de l’orifice , la chaleur est supérieure à celle de l'eau bouillante. Les cristaux aciculaires sont d’une grande limpidité et tapissent entièrement les parois des cheminées. Les vapeurs , d’une odeur de soufre brûlé et d’œufs pourris, ne m’incommodaient presque pas; mon compagnon recueillait dans son mouchoir les produits de ma pêche. La bouche où je mettais le bras avait 20 centimètres de diamètre ; je ne pouvais voir à plus d’un mètre de profondeur , car la cheminée se contournait en tous sens. Quatre autres cheminées que j’examinai présentaient le même aspect. Il y a des bouches qu’il nous eût été impossible d’atteindre, car il nous eût fallu pour cela traverser un espace aussi mouvant qu’une taupinière fraîchement remuée, et notre témérité avait ses limites. Nous pûmes faire le tour de toutes les bouches en a , excepté du côté b où il y a un arrachement profond et presque vertical, et dans la crête duquel nous ont paru placées les der- nières bouches du groupe a , groupe qui comprend environ dix orifices dispersés dans un espace à peu près circulaire de 15 mètres de diamètre. La crevasse gh m’a paru indiquer une prédisposition à l’éboulement des bouches a dans le cratère adventif et pro- fond b. La surface du sol en a était, en plusieurs endroits, à une température de 43 degrés. J’y recueillis une espèce de scorie verte et dure, à surface semi-vitrifiée , mince, et qui n’était pas plus large que la main. Elle était éparse de tous côtés et peu abondante. Elle était le produit de quelque petite éruption fort récente , car la surface des scories n’était salie ni par les cendres , ni par les vapeurs sulfureuses qui communiquent à tout leur couleur jaune. Les bouches en c sont disposées à peu près comme celles en a. L’entonnoir b est rempli de grosses pierres entre lesquelles sortent les vapeurs. Il est probable que c’est un petit cratère dû à une éruption récente, et que, depuis, il a été comblé en partie Soc. gèol. Tome II, 2e série. 55 514 séance du 16 juin 1845. par les éboulements des parois adjacentes qui sont encore presque verticales. Près du cratère 5, et vers le torrent ttt , on voit plusieurs tas de gros blocs de pierre , présentant , vus à quelque distance , exactement la forme de taupinières. Nous ne pûmes monter jus- qu’aux bouches cl et e dont nous voyions la fumée, car déjà la nuit approchait. Nous voyions également la bouche F du cratère, sans pouvoir nous donner la satisfaction de le reconnaître Il pleut très fort, et nous nous réfugions en C dans le torrent ttt. ... . , pour observer le baromètre sous un gros bloc. Malheur I Le baromètre n’est plus ! Il était quatre heures du soir. Ici commence le pathétique de nos aventures. La pluie et la neige tombent à torrents , en un clin d’œil , la presqu’île du cratère occidental est embrassée par deux grandes rivières; les ravina , plus commodes que le reste à grimper , nous ne pouvons les suivre, car ils sont pleins d’eau, et les nombreuses masses arrachées par la violence des eaux suivent habituellement ces ravins; l’artillerie du cratère fait de toutes parts un vacarme horrible , de gros blocs ricochent dix et vingt fois avant d’arriver au fond, en décrivant d’immenses trajectoires, et volant quel- quefois par-dessus nos têtes; l’écho vient augmenter mille fois ce redoutable tapage; les pierres auxquelles nous nous crampon- nons s’arrachent, et nous coulons en bas; tout est couvert d’eau, de boue et de neige. Nos mains sont glacées, et je ne puis recon- naître la forme des objets que j’empoigne ; nous mangeons de la neige pour tromper la faim, et nous nous asseyons à chaque pas pour respirer. Nous sommes en vue du cratère oriental, et nous parlons d’aller sortir par les ouvertures E; mais où serons- nous conduits?. Je suis toujours à l’avant-garde. Je gravis un rocher de peu de consistance ; arrivé au haut , le dernier effort que je fais avec le pied détache la masse : sauvez-vous , Garcia! Si mon pauvre compagnon n’eût pu s’effacer contre un autre rocher, il était mort. Nous appelons l’Indien, qui ne répond pas; sans doute, il ne peut nous entendre. Nous ne pouvons plus avancer, et nous revenons au projet de passer la nuit dans le cratère. Mais mouillés jusqu’aux os, sans vivres, il est certain que nous périssons dans la nuit; si nous voulons nous sauver , il ne faut pas laisser s’engourdir nos membres..... Laissons ici une grande lacune , et plaçons-nous au haut du cratère où nous nous trouvons à sept heures du soir. Là je mangeai deux grandes poignées de neige pour éteindre le feu qui me dévorait; j’en ai encore aujourd’hui tout le palais en lambeaux. SÉANCE DU 1 6 JUIN 1845. 515 Plus d’Indien; il est sans doute près des mules. Il est nuit depuis une heure , et la pluie continue à seaux. Nous nous laissons tomber sur la ponce , et , sans autre travail que celui de maintenir notre équilibre, nous arrivons au bas avec une rapidité étonnante. Nous crions, nous crions; rien , plus de guide , plus de domestiques , plus de mules. Abandonnés ! Nous marchons rapidement pour conserver quelque peu de chaleur; nous nous égarons , et je m’en aperçois. Alors il nous faut traverser un profond ravin pour nous rapprocher de ce que je croyais le bon chemin. Bientôt nous entendîmes aboyer des chiens , et peu après on répondit à nos cris. Nous étions sur la pente d’un grand ravin, d’où nous ne serions pas sortis sans le guide qui vint à notre secours. Nous étions dans une cabane vers neuf heures, après avoir fait environ trois lieues depuis le cratère. Là nous rencontrâmes nos déserteurs pleurant et nous croyant perdus depuis qu’ils avaient vu revenir le chien Le lende- main, nous retournâmes à la ferme, dont le propriétaire était fort inquiet à notre égard ; puis nous rentrâmes à Quito. Nous avions mal choisi le moment de notre expédition ; c’était vers la fin de la belle saison , mais nous ne devions pas croire que les pluies commenceraient juste le jour de notre des- cente. De tous les curieux et savants qui sont venus visiter le volcan, aucun n’est descendu dans le cratère. Il y a cent ans, les académi- ciens , après plusieurs tentatives , ont renoncé à entrer dans l’intérieur. Il fallait peut-être que deux fous effaçassent le mot impossible. La hauteur de laquelle nous sommes descendus , et que nous avons remontée ensuite , est plus grande que quatre fois la plus haute pyramide d’Egypte, cinq fois la tour de Stras- bourg. J’ai rapporté plusieurs roches du cratère, tout ce que pou- vaient renfermer nos poches : trachyte porphyrique à pâte rouge et à pâte jaune, avec cristaux blancs; trachyte à base très rouge, avec de nombreuses traces d’oxyde de fer ; conglomérats de soufre, cendres et feldspath calcinés; scories et soufre en cristaux. Les scories brûlent avec l’odeur de l’acide sulfureux et une belle flamme bleue, laissant un résidu pulvérulent et humide, que n’attaque pas l’acide azotique. Le porphyre à base rouge me paraît être celui qui domine dans le cratère. Le cratère, brun , noir, présente un aspect horriblement beau. Grand nombre de roches ont leurs cimes effilées en pointe comme des lances; des niasses hautes de 30 mètres , détachées sur trois côtés et ne 516 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. tenant plus que par la racine , sont inclinées vers le centre du cratère, comme se préparant à s’y précipiter. Le second cratère se rapproche plus de la forme circulaire que le premier. Je crois le cratère occidental plus récent que l’autre, car les bouches ac- tuelles y sont situées. Il est plus profond, ses parois sont plus roides , et la crête DDD , eliilée vers la gauche comme une lame de couteau, est arrondie vers le cratère de l’E. , tandis qu’elle est droite et verticale vers le cratère de i'O. Le cratère oriental me paraît comblé déjà en grande partie par les éboulements qui se font encore à chaque moment. Quelle force prodigieuse il a fallu pour lancer ces masses immenses, lors de l’ouverture du cratère actuel, sut tout si le cône, étant entier, avait 1000 mètres de hauteur de plus qu’aujourd’hui ! J’ai le projet d’aller, dans la belle saison prochaine, avec mon bon élève, faire une étude complète du volcan , et d’y passer une huitaine de jours, bien approvisionné, bien muni de tout le nécessaire. ISous tenterons de résoudre les questions suivantes: 1° lever du contour extérieur des cratères et des deux ouvertures vers l’O. et de l’intérieur; 2° reconnaissance des bouches volca- niques actuelles; 3° mesure des hauteurs; 4° composition géolo- gique des cratères. Ce serait un travail bien curieux, et surtout intéressant pour la ville de Quito. Le Pichinclia est donc loin d’être éteint , comme Je croient les Quintiniens, sur la foi des géologues qui ont examiné de loin les cratères. Je me propose de faire une belle collection de roches et de produits volcaniques, que j’enverrai à l’Ecole des Mines, car là aussi j’ai reçu un accueil pour lequel je dois de la reconnaissance. \oici quelques données physiques que j’ai prises dans mon expédition. i5 janvier à midi. ( a î Température de l'air libre 8°, îo \ Température du baromètre io°. (io \ Hauteur corrigée du baromètre.. . . 458mm,4o j Hauteur à on 4-7mm?bof Ebullition de l’eau à 85u, 16/ Hauteur barométrique calculée pour I 1 heure, et à la température de ioü, G 438mm.2o J Température de l’air libre 6°, o5 ) Température du baromètre 8°, 00 \ Hauteur corrigée du baromètre. . . . 455“*“, 80 \ Crête du Pichinclia en A. Hauteur du cratère oriental en B. Différence de hauteur calculée entre A et B = 028““, 80 yCtq> la ('heure SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 517 J’ai résumé sur une reconnaissance , dont vous avez le dessin , tout ce que mon crayon et mes souvenirs m’ont permis de con- server. Ce dessin comprend un plan et trois coupes transversales, le tout accompagné de légendes explicatives, qui forment un ré- sumé facile à consulter.... M. L. Frapolli donne lecture d'un Mémoire sur la dispo- sition du terrain silurien dans le Finistère , et spécialement dans la rade de Brest . Auteurs qui se sont occupés de la constitution géologie lie de la Bretagne. MM. Hérault , Puillon-Boblaye, de Gaumont, Deslongscliamps, Desnoyers, Paillette, Rivière, Toulmouclie, et plusieurs autres personnes, se sont occupés, sous des points de vue différents , de la constitution des terrains composant le grand massif qui oc- cupe la Bretagne, la Vendée et une partie de la Normandie. M. de Fourey vient de faire paraître les cartes géologiques cir- constanciées des départements du Finistère et des Côtes-du-Nord. M. Durocher, professeur à la faculté de Rennes, s’occupe aussi depuis longtemps de l’étude géologique des terrains de la Bre- tagne ; mais les résultats de ses observations ne sont pas encore publiés. Après le grand travail dont MM. Dufrénoy et E. de Beaumont ont doté leur pays , après surtout que M. Dufrénoy a publié son Mémoire substantiel sur l'dge et la composition des terrains de transition de l’O. de la France (1) , on ne saurait rien ajouter à la théorie deslois qui ont présidé au relief du sol dans lapresqu’île armoricaine. La théorie est désormais arrêtée , et je suis heureux de constater que ceux mêmes qui voulaient d’abord s’en éloigner ont été ramenés, par des observations ultérieures, à reconnaître l’exactitude des idées émises par ce dernier savant. Je me bornerai donc à l’énonciation de quelques faits concernant la position rela- tive des différents membres du terrain silurien dans le Finistère. Mais avant d’entrer en matière, je demande la permission de rappeler succinctement les traits principaux qui caractérisent la géologie de la Bretagne, sur lesquels tout le monde est à peu (î) Ann. des mines, oc série , t. XIV, 1 858. 518 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. près d’accord , et qui ont été dernièrement résumés avec tant de netteté par M. de Fdurcy (1). § 1. GÉOGÉNIE Dü SOL DE LA BRETAGNE ET DISTRIBUTION GÉOGRA- PHIQUE DES TERRAINS DANS LE FINISTERE. A. Traits géologiques qui caractérisent le sol de la Bretagne . Le relief actuel de la Bretagne est le résultat de plusieurs dépôts successifs interrompus par de violentes perturbations, par l’arrivée au jour et les éjections multipliées des roches feldspathi- ques et amphiboliques. 1° Après la solidification de la pellicule la plus superficielle du globe, la condensation des eaux à sa surface, et la formation de ces premiers sédiments dont l’âge relatif n’a pu encore être dé- terminé par les géologues, un grand dépôt avait eu lieu en Bre- tagne: c’est le terrain de transition inférieur ou terrain cambrien. 2° Par suite d’une première révolution à l’époque de la for- mation des montagnes connues sous le nom de système du West- moreland et du Hundsrück, les granités à petits grains ont été portés au jour; la direction de ce système est E.-N.-E. (E. 25° N. ). Les couches cambriennes ont été disloquées et plus ou moins relevées ; leur direction moyenne actuelle doit être en rapport avec celle de ce premier système de soulèvement. 3° Une seconde période de tranquillité a permis aux divisions su- périeures des terrains de transition de se déposer horizontalement au fond des nouvelles mers. En Bretagne, ces deux terrains sont réciproquement en stratification concordante (2). 4° « La seconde perturbation , dit M. Dufrénoy, a marqué la fin » des terrains de transition ; elle est imprimée en caractères ineffa- (î) Carte géologique du Finistère , par M. Eugène de Fourcy, ingénieur au corps royal des mines, Paris, imprimerie de Fain et Thunot , i844* (a) Le terrain dévonien n’avait pas encore élé élevé au rang d’une période particulière, et, vu la concordance avec les couches siluriennes sous-jacentes, cela u'étail pas possible d’après des observations limitées à la Bretagne : aussi M. Dufrénoy avait été obligé de laisser ces deux errains sous une même dénomination ; mais il avait entrevu celte divi- sion naturelle , et il l’avait clairement indiquée en partageant son terrain de transition moyen (si l'on regarde le terrain carbonifère comme constituant la partie supérieure des terrains anciens) en deux groupes SEANCE DU 16 JUIN 1845. 519 » çablesdans la direction des buttes de Clecy. » Un ensemble de fentes s’est formé à ce moment dans une direction moyenne E. 15° S.M. Dufrénoy rattache à la formation de ces fentes l’appari- tion des porphyres quartzifères qui ont rejeté les couches anthraxi- fères des bords de la Loire , et qui sont si abondants dans diffé- rentes parties de la Bretagne. Par suite de ce cataclysme, les gra- nités à petits grains ont été ébranlés; les couches cambriennes ont été nouvellement redressées, et les dépôts siluriens et dévoniens ont perdu à leur tour leur horizontalité primitive (1). 5e Le dépôt du terrain carbonifère repose à Littry > d’après des observations publiées par M Hérault, en stratification discordante sur les porphyres quartzifères; c’est en s’appuyant sur ces obser- vations que ML Dufrénoy a établi la priorité de ces roches par rap- port au terrain houiller. 6° D’après M. Élie de Beaumont (2)> « la côte , dirigée presque » du N. au S. , qui forme la limite occidentale du département de » la Manche , et différentes lignes de fractures, dirigées de même » dans le sens du méridien que présente le Bocage de Normandie, » doivent probablement leur origine première à des dislocations >» tenant au troisième système de soulèvements , celui qui , dans le >» nord de l’Angleterre, a relevé les couches carbonifères. >» Il n’est pas à ma connaissance qu’on ait indiqué jusqu’à pré- sent dans la Bretagne proprement dite des dislocations qui soient en rapport avec cet ordre de phénomènes : or je ne vois pas pour- quoi l’on refuserait d’admettre que la direction générale des côtes » qui, dans le Finistère, tronquent brusquement à 10. les deux grands plateaux granitiques, ait eu une même origine. L’a- distincts et indépendants, le groupe des quarzites et schistes ardoisiers et le groupe anthrax if ère. Il se fondait pour cela sur l’existence de poudin- gues au milieu du terrain et sur des considérations paiéonlologiques. (î) On a trouvé des fragments de porphyre quartzifère dans certains dépôts intercalés entre les couches d’anthracite des environs de Cha * lônnës. Ce fait, qui, au premier abord, paraîtrait devoir soulever des doutes sur la véritable place què les couches anthraxifères occupent dans la série géologique, ne prouvé pas autre chose sinon que les éruptions porphyriques ont continué pendant toute la période dévonienne , le sou- lèvement du terrain et la cessation des éruptions n’ayant eu lieu qü'après cette époque. (2) Recherches sur quelques unes des révolutions de la surface du globe (extrait joint à la traduction du Manuel géologique de M . de la Bêche , par M. Brochant: de Villiers ). 520 SÉANCE OU 16 JUIN 1845. uomalie que présente la presqu'île de Douarnenez et la Pointe- du-Raz est facile à expliquer si l’on réfléchit que cette langue de terre est due, ainsi que nous le verrons à la fin de ce travail, au soulèvement postérieur des granités à gros grains. Les fentes que j’ai observées dans le granité de plusieurs localités de la Bre- tagne et de la Normandie, et notamment près d’Avranches (1), viennent à l’appui de cette opinion. 7° Nouvelle révolution postérieure au dépôt du Zechstein, par laquelle des déchirements ont eu lieu dans la croûte terrestre, suivant une direction voisine de l’E.-O. (E. 5° S.) ; ces déchire- ments et les soulèvements qui en sont résultés font partie du 4° système de montagnes, celui des Pays-Bas et du sud du pays de Galles. Arrivée au jour des granités à gros grains et porphy- roïdes , des pegmatites, siénites , leptinites et de toutes les roches qui s’y rapportent. Ce cataclysme a laissé des traces profondes dans le pavs. Les terrains liouillers, qui avaient dû être disloqués parle 3e système de soulèvement, l’ont été encore une fois et bien plus énergiquement dans cette circonstance. 8“ ML Desnoyers, qui a beaucoup étudié le sol secondaire de la Bretagne et de la Normandie , et dont nous avons de beaux et sérieux travaux sur les lambeaux tertiaires de ces contrées, at- tribue l’apparition des masses amphiboliques si fréquentes dans le pays à un système de fentes qui se seraient formées dans une direction voisine du méridien , et qui se rattacheraient au sys- tème de Corse et de Sardaigne. Cette dernière convulsion a eu pour effet de modifier partiellement encore une fois les terrains pré- existants. L’origine des filons métallifères de Poullaouen et autres daterait probablement de cette époque. M. Dufrénoy pense que, soit l’éruption des amphibolites , soit la formation des filons plombifères, pourraient très bien se rapporter à plusieurs épo- ques différentes. M. de Fourcy attribue à cette même cause les dislocations qui ont modifié la disposition primitive du terrain (î) Je trouve dans mon Journal de voyage de la route d’Avranches à Mortain ce qui suit : Des fentes nombreuses séparent le granile de ma- nière à lui donner l’aspect d’une roche stratifiée dont les couches au- raient depuis om,5 jusqu’à 2m,oo et plus d’épaisseur. J’ai observé ces fentes dans trois carrières ou escarpements différents; elles sont très remarquables par la régularité de leur direction N. io° E. , et de leur inclinaison d’environ 8o° E. Les surfaces qui résultent de ces fentes ne présentent aucun indice de glissement. SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 521 silurien à l’extrémité de la presqu’île de Crozon. Nous verrons à la fin de ce petit travail jusqu’à quel point il nous est permis d’accepter cette hypothèse. 9° On observe dans différents endroits des lambeaux de fcr- rains tertiaires parfaitement horizontaux ; la nature des fossiles que l’on trouve dans quelques uns de ces dépôts les fait regarder comme appartenant aux époques miocène et pliocène. 10° Quelques formations modernes complètent ce tableau: ce sont des tourbières et des dépôts de coquilles marines actuelles. Aucune trace des autres révolutions qui ont bouleversé le globe n’a été jusqu’à présent remarquée en Bretagne; il ne serait cepen- dant pas impossible qu’on en découvrît, surtout si l’on s’attachait à faire des observations exactes et suivies sur la direction des failles et des fentes qui traversent les terrains stratifiés et les massifs granitiques. B. Distribution géographique des terrains dans le Finistère . La distribution géographique de ces différents terrains et l’exis- tence de la presqu’île elle-même sont la conséquence des acci- dents cjue le sol de la Bretagne a éprouvés. M. Boblaye a fait remarquer, il y a longtemps (1), que depuis la Vendée et le Calvados jusqu’à l’extrémité occidentale des terres, deux longs plateaux granitiques opposent une digue puissante aux envahissements de la mer. Ils sont séparés par une dépres- sion longitudinale dont la direction moyenne E. 15° S. coïncide avec la direction normale des formations siluriennes. C’est dans cette vaste dépression que se trouve renfermée la presque totalité dt s couches sédimentaires de la contrée. Ces couches peuvent être considérées comme faisant partie de deux massifs stratifiés princi- paux, dont le plus étendu, situé dans le bassin oriental de la pres- qu’île , va plonger sous les dépôts oolithiques et crétacés dans la grande plaine du nord de la France; dont l’autre , plus circons- crit, forme le centre du Finistère et disparaît à l’ouest sous les vagues de l’Océan. Les couches siluriennes occupent la plus grande partie de ces deux bassins; le terrain cambrien ne paraît que sur une surface beaucoup plus restreinte. On ne trouve en Bretagne que des lambeaux des terrains dévonien et carbonifère. Ainsi, le terrain cambrien qui se montre sur une étendue con- sidérable dans le Bocage normand, où il n’est recouvert que par (i) Mémoires du Muséum d histoire naturelle , t. XV. 522 SÉANCE M 16 JUIN 1845. des plaques de terrain silurien , paraît beaucoup plus rarement à la surface dans la Bretagne proprement dite ; ici on ne peut l’é- tudier que lorsqu’il déborde de dessous le terrain silurien , ou qu’il perce du milieu de ce même terrain. Mais les couches cam- briennes, ayant été les premières à se déposer, ont dû subir l’in- fluence de tous les dérangements postérieurs : aussi leur délimi- tation est-elle extrêmement difficile. Les granités à petits grains se trouvent principalement concentrés dans le vaste plateau du sud qui occupe la partie méridionale du Finistère et presque tout le Morbihan ; deux grandes bandes de ces mêmes granités apparte- nant au plateau septentrional se montrent à découvert au nord de Brest et dans les environs de Guerlesquin. Le terrain silurien recouvre presque toute la surface de la dépression centrale. M. Dufrénoy a remarqué le terrain dévonien aux environs d’Huelgoat, d’ingrande et de Chalonnes. On observe sur les bords de la Loire les porphyres quartzifères qui forment une série de buttes alignées suivant la direction propre de ces roches érup- tives. On les voit avec un aspect minéralogique un peu différent, et profondément décomposés, se présenter aux environs de Poul- laouen et d’Huelgoat , et remplir de leurs masses refroidies les nombreuses ouvertures qui se sont pratiquées dans ce point; vé- ritables boutonnières , si l’on me permet de me servir d’une ex- pression familière à M. de Beaumont, qui ont été ouvertes irré- gulièrement à la surface du sol , et qui servent à fixer l’écorce sédimentaire à la portion solidifiée du no vau central. Enfin ces mêmes porphyres se montrent en une multitude de points dans la rade de Brest, aux environs de Rennes, de Paimpol , de Gou- rin, et dans d’autres parties de la Bretagne. Le terrain carbonifère a été étudié à Littry, près de Quimper et de Kergogne, et à Bléden à l’extrémité de la Bretagne, non loin d’Audierne. Le massif granitique d’Huelgoat , les granités au sud de Morlaix , ceux de Guelevain et de Rostrenen , plusieurs autres masses intercalées dans les granités plus anciens à petits grains , ainsi qu’on les voit au nord du Conquet, et qui ont relevé les couches houillères évidemment antérieures de la presqu’île de Douarnenez , appar- tiennent aux granités à gros grains et porphyroïdes . Les siénites qui se lient à ces roches sont répandues abondamment au nord de Morlaix. Les masses ignées connues dans le pays par leur nom générique de roches amphiboliques , ainsi que M. Dufrénoy l’a fait remarquer, n’appartiennent probablement pas toutes à une même époque d’éruption , et j’ajouterai que si l’on doit en juger d’après leurs caractères minéralogiques , quelquefois très ci i Hé- SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 523 rents, on peut présumer qu’une étude sérieuse de leur composi- tion chimique nous révélera des différences bien plus essentielles dans leur nature. Quoi qu’il en soit, ces masses d’éruption , aux- quelles on donne assez souvent des noms arbitraires ou géné- riques, tels qu’amphibolite, roche feldspathique, roche verte, roche de mica, etc. , sont répandues abondamment sur le sol du Finistère ; c’est dans les environs de Poullaouen et de la rade qu’on en a indiqué le plus grand nombre, peut-être parce que ces localités ont été étudiées mieux que le reste du pays. On ne connaît aucun lambeau tertiaire un peu considérable dans le Fi- nistère, si ce n’est celui de Toulven, près de Quimper, étudié par M. Rivière, et certains dépôts de sable peu importants et assez problématiques, tels que celui qu’on rencontre dans la rade, au-dessus des falaises, entre Lauveoc et le Fret, et qu’on exploite à l’usage de la fonderie de l’arsenal de Brest. Je n’hésite pas à regarder ce dernier dépôt comme tertiaire , en m’appuyant pour cela sur l’opinion de M. Durocher, qui, ayant parcouru la Bretagne en tous sens, peut par conséquent mieux que personne apprécier les analogies que présentent ces lambeaux de terrains sans suite. Je ne parlerai point des restes de dépôts tertiaires qui existent dans les autres départements du massif breton , car cela m’écarterait de mon but. Quant à la grande dénudation posté- rieure qui a rasé et façonné la surface actuelle de la Bretagne, je ne pourrais rien dire de bien précis; les débris diluviens sont rares et peu marqués. M. Dufrénoy a caractérisé ce phénomène aussi bien qu’il est permis de le fait e d’après nos connaissances actuelles : «11 me semble, dit-il , qu’une cause générale a nivelé » ces montagnes, et l’existence sur un grand nombre de som- » mités de petites plaques tertiaires vient appuyer cette présomp- » tion. » Les matériaux qui ont dit résulter de ce nivellement ont été probablement entraînés au loin dans la mer par la violence des causes agissantes. On trouve des tourbières modernes dans l’in- térieur du Finistère. Les dépôts de coquilles de la Manche des en- virons de Morlaix sont importants pour l’industrie (1). La conformation des côtes de la Bretagne, le cours de ses ri- vières, le relief et la direction des petites chaînes de montagnes qu’elle possède, sont intimement liés avec la composition du sol et les ébranlements auxquels il a été soumis. (l) Aucun dépôt calcaire n’étant connu dans l intérieur du Finistère, ou en transporte jusqu’à Pouilaouen pour les services de l’usine. 524 SÉANCE DU f6 JUIN 1845. § 2. MOYENS d’ÉTUDIER LE TERRAIN SILURIEN EN BRETAGNE, ET APERÇU GÉNÉRAL DE LA RADE DE BREST. A. — Sous quel point de vue j 3 ai étudié le terrain silurien de Bretagne. La première chose à faire pour quiconque veut s’occuper de l’étude d’un massif géologique est de se former un itinéraire qui lui permette de voir successivement les différentes formations dont se compose le massif, et de bien observer les relations na- turelles réciproques de ses diverses parties. Or, si, lorsqu’on se propose cl’étudier les terrains de transition de la Bretagne , et le terrain silurien en particulier, l’on jette un coup d’œil sur la grande carte géologique de France, on aperçoit facilement l’allure générale des couches, et l’on est bientôt fixé sur la route que l’on doit suivre pour couper les différents affleurements, et ar- river à une connaissance exacte des superpositions et de la dis- position de ces terrains. Mais de nombreuses difficultés se pré- sentaient devant moi : l’intérieur de la Bretagne est tellement bouleversé, rasé, recouvert partout de terre végétale; les grès, qui seuls présentent leurs flancs à découvert, sont tellement frac- turés ; la végétation est si vigoureuse partout où elle est favorisée par la décomposition facile des schistes et du granité , partout où l’imperméabilité des roches massives entretient une humidité continuelle, que l’observation des couches du sol devient ex- trêmement difficile, et n’est guère possible qu’à l’œil exercé des géologues les plus habiles. Peu confiant dans mes propres forces, j’ai suivi pas à pas les observations de M. Dufrénoy dans la haute Bretagne J’ai parcouru les bords de la Loire et sa belle coupe du terrain de grès et d’ardoises entre Nantes et Rennes; j’ai été dans la plupart des points visités par lui dans le Bocage normand ; je suis allé voir les terrains anciens du Calvados et de la Manche. L’étude des couches du sol dans la Normandie a pu fixer mes idées sur l’existence de deux terrains de transition, et de la super- position discordante et immédiate du grès silurien sur les schistes plus anciens (1). Le pays entre Nantes et Rennes m’a donné une (ï) Ke pouvant répéter ici tous les exemples que M. Dufrénoy donne tle celle superposition dans le Calvados et dans la Manche, je me bor- nerai à citer les hauteurs de Guilberville entre Saim-Lo et. Vire, et les environs de Mortain. Lorsque de celle dernière ville on s’éloigne à l’O. sur le chemin des forges de Bourbe-Houge , on voit s'élever au N. de la route, et presque parallèlement avec celle-ci, une grande crête escarpée ispy v'V Jcnc TomJI PlXMHPaqcJ. Mort ;un /// >// <>■//.//■• i/r Z,’, Jun '■/>/ Phsjv/nent des sdnsfes; Faidd/emad paj' la. clalarr; Em/Jfto, de Porphyre el de Hérsanton. u/ de ta f ruade de /' Annoriffli Tn/ohife SÉANCE DU IG JUIN 1845. 525 esquisse de la composition et de la disposition du terrain silurien lui-même. Il me restait encore une grande étendue de terrains anciens à étudier, toute la partie comprise dans la Basse-I3re- tagne. Malheureusement pour moi, M. Dufrénoy n’avait pas entrepris une étude spéciale de ce dernier pays ; les données qu’il possédait déjà lui suffisaient pour arrêter ses théories générales. La carte géologique du Finistère par M. de Fourcy n’avait pas encore été publiée lorsque je me trouvais dans ce département vers la fin de l’été de 1 844. La position relative des schistes luisants des montagnes d’Arrhée et des grès qui se trouvent à leurs pieds ou sur leurs flancs, l'infériorité de ces mêmes grès par rapport aux autres parties du terrain silurien , étaient encore douteuses pour quelques esprits. J’ai voulu acquérir une conviction à cet et très ravinée de grès silurien ; celle crête, qui s’étend sur une longueur de plus de trois lieues, court dans la direction normale E. i5° S.; la surface du sol descend vers le S. et met à découvert des couches li és in- clinées de schistes appartenant au terrain cambrien ; ces mêmes roches sont exploitées dans le bas de la vallée derrière les escarpements aux- quels les forges sont adossées ; leur discordance, par rapport aux cou- ches de grès qu’on voit supérieurement , paraît évidente. Ce fait, de l'exactitude duquel j’ai pu me convaincre dans mes courses, a été re- connu par M. Dufrénoy. On traverse le même chaînon de grès au N. de Morlain et tout près de la ville, sur les routes réunies de Vire et d’A- vranches. Les tiges perpendiculaires aux couches d’un fossile qui n’a pas encore été déterminé, met en évidence le peu d inclinaison qu’elles ont. A peine a-t-on dépassé le petit col que la route traverse, on voit au-delà du ruisseau , sur sa droite, un chemin qui conduit à une exploi- tation de fer hydroxydé. En suivant ce petit chemin, on se trouve bientôt en face d’une longue tranchée , large de 5 à 6 mètres, sur une profondeur de i5 à 20 mètres, pratiquée au milieu de schistes presque verticaux. Celte exploitation sc trouve à peu près exactement au N. de Morlain et à une demi-lieue de celte ville; la substance ferrugineuse hydroxvdée a pénétré certaines couches; celte pénétration paraît avoir eu lieu après le redressement cl la dénudation des schistes, car les matières les plus riches en minerai sont celles qui composent, la tranche supérieure des couches qui viennent affleurer au jour. Plus on s’enfonce, plus le schiste devient pauvre , et au-delà d’un certaine profondeur il finit par être lout- à-fait stérile. Les couches schisteurcs ainsi mises à découvert sur leur côté sont presque verticales; elles plongent cependant toujours un peu vers le S. ; leur direction est environ E. i5° à 20° N. Cette direction et cette inclinaison les rapprochent du terrain cambrien. La coupe théo- rique des environs de Morlain, du N. au S. , qui résulte de ces obser- vations, serait celle qu’on voit pl. XVlll, fig. î. 526 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. égard; je visitai aux environs de Poullaouen le centre du massif silurien, j’en étudiai successivement toutes les assises par une coupe des montagnes d’Arrhée. Mais cette partie du pays est très bouleversée par les éruptions postérieures, le sol en est également recouvert et caché par la terre végétale et par la culture; il au- rait fallu le parcourir dans plusieurs directions. JNe pouvant don- ner beaucoup de temps à ces recherches, j’ai pu, si l’on veut, me foi mer une opinion personnelle sur le gisement de ces terrains, mais elle n’était point encore appuyée par ces preuves convain- cantes qui rendent l’observateur bien assuré de son fait, et en l’absence desquelles, de peur d’être induit en erreur, on ne doit jamais hasarder de théories. En de telles circonstances, j’ai pensé que le rivage de la mer pourrait seul, par ses falaises, me per- mettre d’arriver promptement à mon but , et j’y ai dirigé mes observations. Nous avons déjà vu que le bassin du Fi- nistère se dirige de l’E. à l’O. , s’abaisse peu à peu et va se perdre sous les eaux de la rade et de la baie de Douarnenez. Or, la direction des couches séditnentaires du pays étant peu éloignée de l’E.-O. , les côtes qui bordent cette partie de l’Atlantique sont coupées de manière à mettre successivement à nu sur les falaises toutes les couches qui sont renfermées entre les deux grands pla^ leaux granitiques du S. et du N. Cette circonstance rend assez faciles les observations stratigraphiques. M. Dufrénoy avait pris son point de départ du massif de Rennes, et en avait tiré par ana- logie des conclusions sur la disposition du terrain silurien dans le reste de la Bretagne ; j’ai pensé que ma tâche serait moins difficile en essayant de tirer quelques inductions d’après la disposition du même terrain sur les côtes de la rade. Mon travail aurait l’avaii’ tage d’arriver aux mêmes conclusions par l’étude d’un point diffé- rent. C’est en procédant d’une manière analogue que nous pour- rons parvenir à constater l’existence du terrain cambrien dans le Finistère par des considérations autres que celles de discordances de superposition. B. — Aperçu général de la rade de Brest - La rade de Brest est presque complètement renfermée au mi- lieu du terrain silurien , qui en forme le fond et la plus grande partie des côtes ; la superposition des couches , leur stratification, les fossiles qu’elles contiennent, tout concorde à bien déterminer l’âge de ce terrain. Les mouvements subis par lui, la différence de dureté des roches qui le composent , les îlots fréquents de ma- SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 527 tières ignées qui ont percé au jour dans ces parages, ont contribué à rendre les côtes très découpées et à former ces anses nombreuses, ces pointes saillantes, ces larges et profondes rivières dans les- quelles la marée remonte de plusieurs lieues et qui caractérisent en général les côtes de la Bretagne , mais plus spécialement encore celles de la presqu’île du Finistère. Toutes les côtes de la rade et de la baie deDouarnenezse ressemblent; elles sont généralement abruptes, dépouillées de végétation, d’une hauteur qui varie entre 30 et 100 mètres ; elles sont terminées par des falaises qui , dans l’intérieur de la rade, ont ordinairement 10 à 20 mètres de hauteur à pic ; l’action incessante des vagues de l’Océan .unie à la disposition différente des couches, augmente à l’O. de la pres- qu’île de Kelern la hauteur des falaises verticales jusqu’à 40 et 50 mètres. Plusieurs causes concourent à rendre tristes et mornes les côtes dans cette partie du Finistère: l’élévation peu variée qui les rend uniformes et monotones au loin ; leur déboisement ab- solu et presque général, provenant de ce qu’elles sont ordinaire- ment constituées par le grès siliceux, qui, étant par sa nature très peu décomposable, ne donneque des surfaces arides et stériles; la violence avec laquelle les vents de FO. soufflent très souvent avec une grande constance pendant plusieurs semaines, et qui contribue pour beaucoup à empêcher la végétation des arbres; l’étendue des marées, qui viennent les ravager même là où elles seraient à l’abri de la fureur des tempêtes, tout ajoute à la sévérité de ce tableau , jusqu’à ces fortifications à demi délabrées qui couronnent les hauteurs de la rade. La dépression qui donne heu à la rade de Brest a une longueur de l’E. à l’O. de plus de 2 myriamètres , depuis Roscanvel , dans la presqu’île de Kelern , jusqu’à Laudevenec , près de la rivière de Châteaulin; elle a une largeur d’environ 10 kilomètres de Brest à Lanveoc. Limitée auJ\. par les granités du plateau septen- trional et par les terrains qui y sont appuyés, elle baigne à l’O. et au S. les côtes siluriennes des presqu’îles de Kelern et de Crozon. Un grand promontoire, ou pour mieux dire une série de promontoires, s’avancent du N. -E. et la partagent en deux vastes bassins : c’est Y Armorique. § 3. TERRAIN CAMBRIEN DANS LA RADE DE BREST. Il n’entre pas dans la tâche que je me suis imposée d’examiner dans cette rade , par des observations directes , la superposition des terrains silurien et cambrien ; je m’en rapporte donc, pour tout ce 528 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. qui regarde ce dernier terrain , à ce qu’en ont dit et M. Dufrénoy et M. de Fourcy. Les côtes au N. de la rade , à droite et à gauche de la ville de Brest , sont constituées par des gneiss ou des schistes altérés qui s’appuient sur les granités du plateau N., et qui , à cause de leur direction , de la direction générale de la côte E. 20° N. , jointes à l’état avancé de métamorphisme dans lequel ils se trouvent, sont regardés comme cambriens. D’après M. de Fourcy, les mêmes schistes sont visibles à l’E. de Ja rade, au pied des hauteurs qui s’élèvent sur la rive gauche de la rivière de Lan- dernau ; ils disparaissent sous les grès qui constituent le plateau de l’Armorique et par lesquels commence le terrain silurien. De l’autre côté de la rade, le grès silurien forme la pointe des Espa- gnols, à l’extrémité septentrionale de la presqu’île de Kelern. Le terrain silurien entoure toutes les autres parties de la rade. § 4. SERRA1N SILURIEN SUR LES COTES DU F1NISTLRE. A. — Côte O. de Lctnvcoc , île Longue , presqu’île de Kelern. Transportons-nous à Lanveoc ; au centre du massif silurien, placé sur une pointe saillante de la presqu’île de Crozon , au mi- lieu de la rade et à égale distance de presque toutes les côtes qu’on a à visiter, soit du côté de celle-ci ou de la baie de Douarnenez; cet endroit est très propreà servir de point de départ pour l’étude du terrain. Ajoutez-y la facilité d’y avoir un bon logement et de se procurer de petits canots pour faire la traversée des différents bras de mer. En avant de Lanveoc se trouve une pointe sur laquelle est bâti le fort du même nom. La direction apparente de cette pointe est vers le N. ; mais la direction réelle des couches estE. 15° à 20°N. ; elles sont régulièrement relevées vers le S. , leur inclinaison IN. étant d’environ 45° (voyez le plan et la coupe de la côte O. de Lanveoc, pl. XVIII ,./?£. 3). L’extrémité de la pointe est formée par des couches d’un calcaire noirâtre, demi-cristallin, et qui a été pendant quelque temps en exploitation ; on ne peut la voir qu’aux époques des plus basses marées. Si maintenant nous sui- vons la côte à l’O. de cette pointe , au pied des falaises et par une mer très basse , en partant du calcaire nous rencontrerons d’abord des grauwackes et de puissantes couches de grès qui alternent avec elles et avec quelques schistes ; ce sont ces couches qui consti- tuent le petit promontoire sur lequel est bâti le fort. Le grès ren- ferme quelques fossiles. AL de Yerneuil, qui a bien voulu donner 529 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. un coup d’œil à la petite collection que j’ai rapportée de la rade , y a reconnu Y Orthis striatula , un petit Spirifcr qui paraît être le micropterus, et deux ou trois autres fossiles non encore détermi- nés. Plus loin on voit des schistes imprégnés d’hydroxyde de fer qui, dans plusieurs endroits, constitue un véritable minerai. Suivent des alternances degrés, de grauwacke et de schistes; mais ces derniers sont toujours peu abondants , et les grès sont plus grossiers et moins blancs que ceux qu’on a vus sous le fort de Lanveoc. L’inclinaison des couches va en augmentant; elles sont souvent pîissées et même renversées; cela fait que les directions que l’on prendrait dans cette localité avec la boussole ne pour- raient représenter l’allure véritable du terrain. L’alternance des grès, des grauwackesetdes schistes continue jusqu’au joncl géolo- gique de l’anse du Fret. J’appelle fond géologique la partie de l’anse où se trouvent les couches les plus inférieures qui soient coupées par la mer en cet endroit. La direction moyenne des couches est E. 25°N. , leur inclinaison augmente jusqu’à 60°. Si de ce point on s’éloigne de la côte pour remonter sur le plateau, on se trouve pres- que immédiatement sur la grande masse des grès par lesquels il est formé. A partir du fond géologique de l’anse du Fret, la côte, qui était dirigée jusqu’à présent vers le S. -O., se replie un peu vers 1 O. Or, si de ce point l’on continue son chemin vers l’étang, on ren- contre, en remontant, les mêmes couches sur lesquelles on était des- cendu pendant la première moitié de la course. D’abord les grès, sch istes et grauwackes ; puisles couches de schiste, argile schisteuse et hydroxyde de fer ; des grès avec peu de schistes ( le même grès qui passe sous le fort de Lanveoc); des schistes avec quelques minces couches de grès ; enfin des schistes fétides, noir bleuâtre, renfer- mant une grande quantité de nodules d’un calcaire noir très ana- logue par son aspect à celui qui affleure sous le fort. Les schistes qui renferment ces nodules ont une couleur bleu foncé toute particulière ; ils contiennent de nombreuses empreintes orga- niques et sont très fétides. A chaque coup de marteau , des gaz puants, produits de la décomposition des anciens habitants de la mer silurienne, se dégagent de leur prison séculaire, et l odeur en est parfois assez forte pour qu’elle devienne incommode. La direction des couches est ici E. 25° IN. ; l’inclinaison r, 0° N. J’ai rapporté de cette localité un grand nombre d’échantillons avec des empreintes d’animaux, mais en général mal conservées. Parmi les fossiles déterminables on y trouve le Pleuroclyctium problema- ticum , Calymena macrophtalma , P entameras galeatus , Tcrebratula, Soc. Géol. Tonie II, 2e série. 54 SEANCE DE 16 JUIN 1845. 530 concentrica , une Leptœnci voisine de la transver salis , un Cyataphyl - ou Pctrea , un Orthocère ou Orthis , une grande quantité de frag- ments de rigtv cl' Encrines non déterminés , de petites tiges bran- chues que bondirait appartenir à des végétaux (1), et diffé- rentes autres empreintes méconnaissables ou non étudiées. Nous sommes ainsi arrivé à la dernière petite proéminence qui se ren- contre sur cette côte avantde rejoindre la pointe qui défend l’en- trée de l’étang du Fret; et géologiquement parlant, nous sommes à la hauteur du calcaire qui se trouve au pied du fort de Lanveoc. La coupe pl. XYIÏI , fig. 3, peut donner une idée de la superposi- tion des couches dans l’étendue de côte que nous avons parcourue depuis ce fort. Elle nous représente un calcaire, 5, qui a été pendant quelque temps en exploitation , et qu’on ne voit qu’aux époques des plus basses marées. Ce calcaire repose sur une série de couches alternantes de grauwacke, de grès, de schistes, le tout formant un ensemble dont l’épaisseur peut être évaluée moyennement à 3 ou 400 mètres au plus ; ces couches font passage aux grès qui constituent les plateaux de la presqu’île de Crozon. Si, à partir de la proéminence indiquée ci-dessus, on continue d’avancer vers l’ouest, puisque la côte ne change pas de direction et qu’elle tourne même quelque peu au nord , on remontera né- cessairement au-dessus du calcaire sur les formations siluriennes supérieures. Les couches qu’on rencontre lorsqu’on remonte des schistes fétides avec nodules calcaires, que j’appellerai doréna- vant la région calcaire , jusqu’à l’étang du Fret, sont : des schistes feuilletés; quelques grauwaekes schisteuses; quelques schistes avec nodules calcaires, mais dans lesquels je n’ai pas vu d’em- preintes organiques; enfin des schistes et des grauwaekes schis- teuses. La couleur dominante de toutes ces couches est le brun verdâtre ; à marée basse on les voit , rasées par la mer , former de longs sillons sur la grève, circonstance qui permet de prendre leur direction avec plus de certitude qu’on ne peut le faire dans la plupart des cas. La direction ainsi prise m’a donné N.-E., 2° à 5° N. Devant la digue de gravier qui ferme l’étang du Fret, et au-delà jusqu’au village de ce nom, l’alternance des schistes avec quelques minces bandes de grauwacke se continue. La direction de ces couches est toujours N.-E. ; l’inclinaison en est assez forte (i) C’est egalement à l’obligeance de M, de Verneuii que je dois ia détermination de ces fossiles et de quelques autres que j’aurai l’occasion de citer dans le courant de ce travail. SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 531 vers le N. -O., mais il est difficile de l’apprécier, car les affleure- ments ne sont visibles que sur les sillons de la grève. Depuis le Fret jusqu’aux racines de cette langue de terre qu’on appelle File Longue, la côte se dirige vers le N. -O. ; elle est formée en entier par des schistes. A moitié chemin environ, près de la pointe de Restellen , la direction des couches schisteuses est E. , 25° N. ; en approchant de File Longue, les schistes reprennent une direc- tion N.-E. Cette terre, qui en réalité n’est qu’une presqu’île dont l’isthme, recouvert par du gravier , est occupé par les eaux aux temps des grandes marées d’équinoxe, doit probablement son origine aux masses de porphyre quàrtzifère qu’elle renferme, et dont les vastes carrières fournissent de pavés Brest et les autres villes des environs ; on m’a assuré que l’on envoyait de ces pavés jusqu’à Bordeaux. Les deux tiers de File Longue, et notamment toute sa partie antérieure, sont occupés par ces porphyres. Ils sont naturel- lement verdâtres, et rougissent par l’exposition à l’air. Ce change- ment de couleur, que j’ai souvent entendu rappeler par M. E. de Beaumont, est assez habituel aux porphyres : aussi j’ai remarqué un changement analogue dans quelques porphyres d’Italie; aux environs de Poullaouen , tous les porphyres paraissent être d’un jaune brunâtre, mais ce résultat est dû à Fétat avancé de décom- position dans lequel ils se trouvent ; car si l’on est assez heureux pour tomber sur une surface récemment mise à découvert et oit la décomposition n’ait pénétré qu’à demi , on retrouve la couleur rouge plus ou moins foncée. Il est probable qu’à de plus grandes profondeurs la roche n’ayant pas été atteinte par l’influence des agents atmosphériques, on la trouverait avec sa couleur primi- tive. On explique ces changements de couleur comme étant le résultat de modifications dans Fétat chimique du fer contenu dans la roche. Aux alentours de ces masses éruptives , les schistes ne sont guère altérés en aucune manière 5 mais ayant été par elles bouleversés et soulevés, leur direction doit nécessairement être très variable. Depuis la petite pointe au N. de File Longue, qu’on appelle la pointe de Pacbanel , et sur toute la côte , jusqu’à l’anse de St- Gildas, qui sépare cette colline de la presqu’île des Renards, 011 voit l’éruption d’une espèce de pétro-silex blanchâtre. Ce même pétro-silex s’était déjà montré au milieu des schistes sur la grève un peu avant l’Ile Longue ; on peut le voir de nou- veau avant d’arriver à Fîle des Renards. Au fond de l'anse elle- 532 SÉANCE DU 16 JUIN 1815. même et y formant une petite pointe , parait une masse noire d’amphibole et de mica, se décomposant par boules, et qui ap- partient à ces espèces de rocbes connues sous le nom générique de Rersanton , qui acquièrent une si grande importance dans la partie orientale de la rade. Les schistes qui entourent ces roches ignées sont encore inaltérés; leur direction est souvent N.-S. Mais il suffit de dépasser File des Renards , autre presqu'île qui est en partie recouverte par les hautes mers , pour que les schistes reprennent la direction d’auparavant. Vers le milieu de la côte qui s’étend entre cette île et l’isthme de Kelern , les schistes se montrent sur la grève avec une direction E. 15° S., leur inclinaison étant de 15° N. A ce point , les couches changent d’inclinaison, et l’inflexion qui a lieu se présente du côté de sa concavité. On peut encore observer que ces couches ne sont pas simplement plissées , mais qu’elles sont aussi relevées par leurs tranches dans un autre sens, comme si un soulèvement postérieur avait eu lieu vers le S.~0. Bientôt après., même avant d’arriver à la presqu’île de Kelern, on voit les schistes se maintenir dans la direction ordinaire N.-E. , mais ayant une inclinaison de 45° S. Les schistes qu’on rencontre sur ce point de la côte appar- tiennent à la partie la plus supérieure des couches siluriennes de la rade. On y trouve des empreintes très bien caractérisées du Spirifcr speciosus , et de la Lcptœna Murchisoni , la même qui se trouve à Siegen , dans le département de la Manche , à Vitré , et dans les Asturies; un grand Spirifère indéterminé , le même qu’on trouve près de Nehou , dans le Cotentin; une autre Leptœna ou Conetes à stries très fines ; la Terebratala u^ndata ? et une autre Térébratule striée, mais peu reconnaissable; plusieurs autres em- preintes en trop mauvais état pour être déterminées. Sur la côte, immédiatement avant les fortifications de l’isthme , on voit encore des couches de schistes dirigées comme à l’ordi- naire N.-E. , avec une inclinaison d’environ 45° S. Mais si l’on traverse l’isthme et que l’on se porte sur la côte opposée vers l’anse de Camaret, on est tout étonné de trouver des couches de grès là où l’on s’attendait à rencontrer la continuation des couches schisteuses qu’on avait quittées tout-à-l’heure. La décep- tion est d’autant plus étonnante que, par leur direction, ces grès paraissent n’être que la continuation des couches de schistes. Cette circonstance cependant , qui paraîtrait au premier abord une anomalie inexplicable, est parfaitement d’accord avec l’obser- vation que nous avons faite au point d’inflexion des couches sur SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 533 la côte E. , c’est-à-dire qu’elles paraissaient avoir été soulevées par leurs tranches vers le S -O. Ce fait ne paraîtra pas extraor- dinaire si l’on admet que le terrain silurien ayant été déjà bou- leversé et plissé une première fois , a été postérieurement soulevé dans un sens opposé à la direction du premier ridement. Dans les fossés mêmes des fortifications , on voit de nombreuses couches de grès alternant avec quelques schistes; la direction est toujours à peu près la même, N.-E. Ces couches sont probablement supé- rieures à celles de l’anse de Camaret. L’aspect des côtes est toujours en rapport avec la nature des couches du sol. Depuis l’étang du Fret jusqu’à l’isthme de Kelern, les côtes sont formées exclusivement par les schistes brun verdâtre : aussi elles sont constamment basses , et , au temps du reflux , marécageuses. Les promontoires élevés de l’Ile Longue et de la pointe de Pacbanel, les deux îles de Moore et de Tre- beran , les différentes autres pointes qui s’élèvent même légère- ment au-dessus de la mer , sont les résultats du soulèvement des porphyres et des autres masses ignées. Au-delà du camp fortifié de Kelern, si l’on avance toujours sur la côte E. , après quelques bouleversements dans les couches , on rencontre dans la partie la plus rétrécie du second isthme les schistes ayant leur direction habituelle N.-E. , et une inclinaison de 20° à 25° S.-E. Cette direction générale des schistes est, du reste, souvent modifiée par des accidents locaux. Ainsi à la première pointe de la presqu’île , à l’E. de Kérinouf , les schistes sont bouleversés par de nombreux épanchements irréguliers d’une roche noirâtre qu’on peut rapporter au kersanton; elle se dé- compose, comme toutes les roches de ce genre , en formant des boules à couches concentriques , et devient brune à l’air. Cette roche est analogue à celle que j’ai indiquée au fond de la petite anse de St-Gildas, avant l’île des Renards. Parfois la roche mas- sive s’est infiltrée entre les couches schisteuses de manière à pa- raître stratifiée (voyez la pl. XVIII , fig. 8). 11 est très curieux d’observer l’éruption de cette roche qui s’est injectée dans les schistes de mille manières étranges. Ceux-ci ne sont pas altérés au contact de la roche ignée , mais ils sont très bouleversés. Dans la petite anse qui suit, après le saillant que forme l’éruption indi- quée ci-dessus , les schistes reprennent leur direction ordinaire N.-E.; inclinaison S.-E. Peu loin de là, environ à la hauteur de Lanvernorsal , les couches conservant la même direction, et leur inclinaison dans le même sens vers F S. -O . on se trouve de SÉANCK DU 16 JUIN 1845. f- O /. 554 nouveau au milieu de schistes bleu foncé et renfermant des nodules calcaires ; des couches peu puissantes d’un calcaire bleu- noirâtre y sont intercalées ; les fossiles dont on voit les emprein- tes au milieu de ces schistes bitumineux et de ces calcaires sont analogues à ceux que nous avons trouvés dans la même position sur la côte O. de Lanveoc , et tout aussi abondants. Tout nous rappelle le calcaire que noos avons vu , soit au pied du fort de Lanveoc, soit sur la côte entre cette localité et le Fret. Ainsi, de la région calcaire où nous nous trouvions avant l’étang du Fret, nous sommes remontés sur les schistes jusqu’à leur inflexion après File des Renards; là, un changement d’incli- naison dans ces mêmes schistes nous a fait redescendre sur les couches inférieures , et tout en suivant la côte , après avoir passé sur la région des schistes, nous venons de nous retrouver de nouveau dans la région calcaire. De nombreuses veines de spath traversent ici les couches cal- caires et les schistes; ces veines paraissent dues à une concrétion postérieure. A une certaine hauteur au milieu de cette région , une couche entière de calcaire de 0m,30 de puissance a disparu, et a été remplacée par une matière argileuse brune et par du quartz hyalin qui s’est cristallisé imparfaitement et en forme de concrétions perpendiculaires au plan de la couche; les cristaux de quartz qui se sont ainsi formés sont très aplatis et paraissent tenir à la fois de la forme du quartz et de celle du calcaire ( pl. XVIII, fig. 10). Ce remplacement se répète encore plus loin; les concrétions quartzeuses qui s’y sont formées occupent probable- ment la place d’anciennes veines de spath. Cette région des cal- caires se prolonge sur la côte jusqu’en face du Roscanvel et au- delà. Des grauwackes alternent en couches minces avec ces cal- caires ; elles ont quelquefois leur surface supérieure crispée comme celle du sable des grèves à marée basse, et de petites nervures très saillantes sont couchées et serpentent sur cette sur- face; ces nervures ressemblent aux grosses veines qui marquent la partie supérieure d’une main robuste, lorsqu’elle est abandon- née à son propre poids (pl. XVIII ,fig. 11). Cet aspect de la surface supérieure de la couche est assez fréquent dans les grauwackes de cette localité. Il y a même des couches qui sont comme recou- vertes par ces nervures, qui ressemblent alors à ces espèces de vers de sable que les coquillages rejettent , et qu’on voit parfois en si grande abondance sur les grèves à mer basse. En voyant ce phénomène, je me demandais si ces espèces de tubes saillants SÉANCE QU 16 JUIN 1 8 1 5. 535 ne correspondaient point à des parties plus siliceuses , qui auraient résisté mieux que le reste de la surface de la couche à Faction des agents atmosphériques et des eaux de la mer de l’époque silurienne. Quelquefois les schistes sont comme amyg- dalaires et affectent en grand la structure du gneiss, dont les amandes quartzeuses seraient remplacées par de gros noyaux aplatis de grauwacke (pl. XVIII, fig. 16). Près de la pointe de Iloscanvel, la direction des couches est N. -N.-E.; finclinaison 50® S.-E. I*a côte suit ici à peu près cette direction, en sorte que Pon continue toujours à marcher sur la région calcaire. A l’épau- lernent de Postermen , on est très près des grès. Peu après cet épaulement on voit paraître les couches de grès de dessous le calcaire. Leur direction, telle qu’on l’observe dans l’intérieur de l’épaulement qui vient après celui de Postermen , est encore N.-N.-E. ; leur inclinaison est vers le S.-E. La côte suit ici tou- jours plus la direction des couches, et le grès forme lui-même par son inclinaison la pente de la colline , ou , pour parler avec plus de vérité , il constitue une croupe convexe sur laquelle s’ap- puyaient naguère encore les calcaires , schistes et grauwackes de la région calcaire , et dont le côté est ici battu par les vagues de la rade (pl. XVIII , fig. 12). Plus tard , à la hauteur environ des Lès , les grès alternant en grosses couches avec quelques schistes ont la direction ordinaire N.-E. , mais Finclinaison est N. -O. La pointe des Espagnols est formée de grès qui alternent avec quel- ques schistes ; leur direction est toujours N.-E. ; Finclinaison 45° S.-E. Par cette inclinaison , le grès reposerait sur les schistes cambriens , que M. de Fourcy indique sur sa carte du Finistère comme formant la côte de l’Atlantique , depuis la pointe des Espagnols jusqu’auprès de Kerjean. Il m’a été impossible de voir ce terrain : car la mer étant mauvaise et la côte très escarpée , je n’ai pu descendre les falaises ; mais son existence en cet en- droit me paraît très probable : car, après tout, ce ne serait que la continuation des mêmes couches qui supportent les grès si- luriens au S. delà rivière de Landernau. Or, si l’on cherche la direction moyenne qu’on obtient par la jonction de la côte N. -O. de la presqu’île de Kelern avec les crêtes siluriennes des grès de Landernau, on a E. 20° N. environ , résultat qui se rap- proche beaucoup de la direction normale cambrienne. En continuant vers le S. , depuis le fort de Cornouailles jus- qu’auprès de Fépaulemênt , à l’embouchure de la petite rivière qui partage en longueur la presqu’île, on ne trouve que des 536 SEA.NCE Dü 16 JUIN 1845. grè; qui affleurent sur des falaises à pic de 40 et 50 mètres de hauteur verticale ; ils sont inclinés vers le S.-E. Sous ce dernier épaulement , on voit les calcaires s’appuyer très distinctement sur les couches de grès, qui s’abaissent pour redescendre dans la vallée qui constitue l’isthme de Frégoudan. Je ferai remar- quer que c’est la quatrième fois, depuis Lanveoc, que nous ren- controns, soit de véritables couches calcaires exploitées , soit des schistes bleuâtres avec nodules calcaires, et toujours dans la même position; toujours s’appuyant sur les grès ou sur quelques alternances de grès , grauwackes et schistes qui font passage aux grès inférieurs. Ici encore, comme tout-à-l’heure, nous retrouvons les calcaires recouverts par des schistes ; on n’a pour cela qu’à continuer sa route vers le village de Frégoudan et la côte E. ; car si l’on suit la côte O , on remonte presque immédiatement sur les grès qui forment les hauteurs du camp de Kelern. Résumons-nous : cette excursion depuis Lanveoc jusqu’à la pointe des Espagnols nous explique tout le mécanisme du ter- rain silurien dans la rade. TJn dépôt puissant de grès alternant avec quelques couches de schistes ou de grauwackes, et relevés du côté du Goulet, s’appuie sur les couches cambriennes, et forme la base du terrain. A mesure que les couches de grès s’abaissent et descendent au-dessous du niveau de la mer, d’autres couches vien- nent les recouvrir; ce sont d’abord quelques alternances de grau- wackes , grès et très peu de schistes ; puis les schistes noir bleuâ- tre avec quelques bandes de grauwackes, et les calcaires; enfin un dépôt puissant de couches schisteuses avec quelques grauwackes alternantes, dont l’ensemble n’embrasse pas moins de 5 kil. sur la côte, depuis Roscanvel jusqu’au-delà de l’étang du Fret; là , l’inclinaison a changé ; tout le système se relève vers le S.-E. ; de dessous les schistes brun verdâtre apparaissent de nouveau les schistes noir bleuâtre bitumineux , renfermant des couches ou des nodules calcaires, et caractérisés par la présence de nombreux fossiles propres de ces couches ; viennent ensuite quelques alter- nances de grès , de grauwackes et de schistes , dont l’ensemble peut être évalué à 2 ou 300 mètres , et l’on se retrouve de nou- veau sur le système des grès qui s’étendent au loin , et forment les plateaux de l’intérieur. Après tout ce que nous venons d’observer, je crois que nous serons dans le vrai en disant : 1° que la ligne suivie depuis la pointe des Espagnols jusqu’au fond géologique de l’anse du Fret , et au plateau qui s’élève au-delà de ce point, n’est que la section d’une grande vallée fermée|par l’inflexion SEANCE DU 16 JUIN 1845. Ô37 des couches siluriennes; 2° que cette inflexion a eu lieu dans une direction E.-S.-E. , ou, ce qui revient au même, que la direction moyenne des couches dans toute son étendue est environ E.-N.-E. ; 3° que le fond de cette vallée est formé par un système de grès que nous appellerons région des grès , dans lesquels s’emboîtent successivement les schistes et calcaires de la région calcaire , puis les nombreuses couches de schistes brun verdâtre, de la région des schistes et des grauwaehes (1) ; 4° que le terrain silurien ici ne se trouve pas seulement relevé au N. et au S. , mais qu’il l’a été également vers 10. , et que ce der- nier soulèvement s’est fait postérieurement dans une direction à peuprès N. -S., ainsi qu’on a pu l’observer sur l’isthme de Kelern. B. Cote à TE. du fort de Lanveoc. À PE* du fort de Lanveoc, vers la pointe de Penarvir et au- delà, la côte se replie un peu vers le sud; suivons-la, afin de pé- nétrer dans ce massif des grès inférieurs dont nous n’avons abordé que les limites à 10. du fort. A côté de la cale il y a une petite pointe qui s’avance dans la mer. Derrière cette pointe, les couches ont été usées et détruites par les vagues , de manière à l’isoler de la falaise. La petite pro- éminence est formée par les couches du grès supérieur au minerai de fer, sur lesquelles est bâti le fort. La partie creusée corres- pond aux schistes avec minerai de fer, et fait suite aux couches ferrugineuses de la côte ouest. Le minerai est ici moins abondant que sur cette dernière côte; mais on le voit distinctement, à l’état de fer oligiste , former une couclie régulière de Om,5 , et plu- sieurs autres petites bandes encore. La couche qui est ainsi for- mée de fer oligiste est pétrie de coquilles. La direction est E. 15 à 20° N. ; l’inclinaison 40° N. Au quart environ du chemin entre Lanveoc et la pointe de Penarvir on voit bien avant, dans la marée basse, quelques couches calcaires peu puissantes ; elles sont dans une position analogue à celle du calcaire qui paraît sous le fort. Après l’affleurement du minerai de fer, les couches, ( î ) si r on n'avait égard qu’à ce qui a lieu sur les côtes O. du Finistère , cette région ne devrait s’appeler que région des schistes ; mais les grau- waekes, qui ne se montrent ici qu’en faibles alternances , prennent un développement considérable dans i’E. du département. 538 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. sauf quelques petites exceptions, prennent très régulièrement la direction E. 20° à 25° N. , et l’inclinaison 40° N. -O. Plus tard , on peut s’apercevoir facilement qu’on redescend plu- sieurs couches de grès. A moitié chemin du fort à la pointe de Penarvir , il y a une interruption dans la falaise; la côte devient tout-à-coup basse et couverte de broussailles ; mais on retrouve bientôt de nouveau les couches de grès. Seulement, leur direc- tion a changé : elle est N. -O. ; l’inclinaison 35° N.-E. Cette inclinaison , qui change ainsi subitement dans un endroit où il n’y a point dérochés éruptives, nous avertit qu’il y a dans cette localité un plissement du terrain, une espèce de ride, dont nous avons parcouru obliquement la section ; la partie convexe de la ride , la partie la plus élevée du pli devrait se trouver précisé- ment là où nous avons remarqué l’interruption de la falaise ; ce dernier résultat est très naturel ; les couches de grès ont dû être plus fracturées en ce point que sur les flancs de la ride , et par- tant elles ont dû être plus sensibles à la dénudation. Sur la pointe de Penarvir elle-même, les grès ont une direction N. 20° O. en- viron, et une inclinaison d’environ 10° O. Cet endroit paraîtrait correspondre à un ridement secondaire situé sur le flanc méridional de la ride principale , car les couches ne sont ni très relevées ni fracturées. Tout le long de la côte , jusqu’au fond de la baie de Poulmic, on voit des couches de grès qui forment la croupe, sauf quelques petites ondulations , se maintenir à peu près à la même hauteur ; elles s’abaissent cependant un peu vers le S. et vont se perdre sous les eaux au fond de l’anse de Poulmic , où l’on doit probablement voir les alternances des couches qui se trouvent partout entre les grès et les calcaires. La marée, qui était déjà très haute, m’a empêché de vérifier cette dernière conjecture. Au-delà de la baie on remonte sur le plateau , qui est constitué par les grès (pl. XYIÏî ,fig. 3). Cette nouvelle excursion nous a amené à reconnaître que non seulement le système des grès se trouve à la partie inférieure du terrain silurien , mais qu’il constitue entre Lanvoec et le fond de l’anse de Poulmic une ride , une espèce de croupe , sur les deux flancs de laquelle viennent s’appuyer les systèmes supérieurs. La direction de la côte depuis la cale de Lanveoc jusqu’à la pointe de Penarvir étant presque exactement E. -O, , et la ride du terrain étant coupée obliquement par cette direction ? il s’ensuit que l’al- lure des rides est à peu près E.-N.-E. , direction analogue à celle que j’ai trouvée pour les couches siluriennes de la côte O. et de la SÉANCE DU J 6 JUIN 1845. 539 presqu’île de Kelern. J’ajouterai que îa ride entière paraît plonger légèrement vers TE. ; ce fait est analogue à celui que Ton observe près de la baie de Camaret. Les deux plateaux delà presqu’île de Kelern et de Lanvoec sont formés par les grès ; la vallée intermé- diaire qui constitue le fond de la rade est occupée par les dépôts supérieurs. Au-delà de la pointe des Espagnols, les grès du premier plateau s’appuient sur des couches cambriennes ; au S, de la pointe de Penarvir, ceux du second se replient pour former une autre petite dépression et recevoir de nouveau les régions siluriennes supérieures. G. — Ile Ronde.— Côtes de l’ Armorique. A présent que nous sommes bien fixé à l’égard de la disposition des couches du sol sur les côtes N. de la presqu’île de Crozon , traversons la rade, et voyons si nos conclusions peuvent être con- firmées par P observation des côtes de l’Armorique. Cette contrée offre une série de promontoires qui, par leur direction N.-E, , si nos conclusions sont exactes, doivent former autant de rides où la région des grès se montrera souvent à nu, et qui seront sépa- rées par des vallées au fond desquelles ces mêmes grès seront re- couverts par la région des calcaires et par celle des schistes et des grauwackes. Sur la côte O. de l’Armorique , au S. du bras de mer dans le- quel vient se jeter la rivière de Landernau , se montrent, ainsi que nous l’avons indiqué, les grès siluriens couronnant les couches cambriennes. Peu loin du moulin de Kerdrein, on voit s’élever au-dessus du niveau de la mer quelques alternances de différentes couches y et bientôt , avant même d’arriver au fort du Corbeau , on marche sur les schistes et les calcaires de îa région calcaire. Le fort du Corbeau est bâti sur une masse porphyrique ; les couches degrés alternant avec quelques schistes s’appuient sur cette masse. Leur direction prise immédiatement sous le fort , au S. de îa pointe de même nom , est N.-E. ; l’inclinaison presque verticale. Si , à marée basse , on suit la côte jusqu’à la pointe saillante qui est au S. du fort Corbeau , on reconnaîtra toujours la région calcaire s’ap- puyant sur des alternances de grès, de schistes et de grauwackes qui forment partout la pente de la côte ; comme à Lanveoc , le haut du plateau est occupé par la région des grès. Si après avoir tra- versé la grève on arrive à la pointe de Rernivié au N. de celle de l’ Armorique , on la voit constituée par des grès. Ces grès sont en 540 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. couches très inclinées et bouleversées ; leur direction parait être E. 20° N. Au S. de cette pointe il y a une plage basse ; elle est occupée par des schistes dont on voit les tranches au milieu de la grève , et qui me paraissent appartenir à la région calcaire. Sur le côté septentrional de la pointe de l’Armorique elle-même et au N. du fort de ce nom , on trouve encore cette région bien ca- ractérisée par des couches calcaires assez puissantes ; leur direction est N.-N.-E. ; l’inclinaison 40° O. ; elles s’appuient donc évidem- ment sur les grès qui se montrent à très peu de distance , et elles les recouvrent. Des schistes noirs très fossilifères, ettout-à-fait ana- logues à ceux de la côte de Lanveoc et de la presqu’île de Kelern , accompagnent les calcaires. Le fort de l’Armorique est bâti sur des schistes et des grau- wackes alternant ensemble et supérieurs aux calcaires; des érup- tions de kersanton ont bouleversé tous ces environs et ont modifié les directions des couches. Au sud de la pointe extrême, en face de l’ïie Ronde , on voit des couches de schistes et de grauwackes alternantes ; leur direc- tion est presque exactement N. -S. , l’inclinaison de 20° environ N.-E. Cette direction et cette inclinaison anormales sont dues à Faction des éruptions amphiboliques. En se tournant vers l’O., sur la côte au S. du fort , on aperçoit presque de suite la région des calcaires sortir de dessous les schistes et les grauwackes. Le dépôt calcaire est ici très puissant ; ses couches très épaisses alternent avec des schistes feuilletés , des schistes noirs ou bleuâ- tres , dont quelques uns sont de véritables conglomérats de fos- siles. La direction des couches est toujours à peu près N. -S. : l’inclinaison est assez variable ; on peut l’évaluer moyennement à 40° O. L’aspect du calcaire n’est pas uniforme ; il y a des cou- ches dont la structure minéralogique ressemble beaucoup à celle de certains calcaires à entroques de Bourgogne, d’autres sont compactes et sonores , d’autres pétries de fossiles. La couleur se rapproche généralement du bleu foncé, quelquefois du bleu clair ; elle est même un peu violette ou rougeâtre dans les derniers bancs. Ce calcaire était exploité à l’époque de mon passage. Au-dessous des calcaires, et à la limite inférieure de cette ré- gion , se trouvent les schistes bleuâtres bitumineux entremêlés à des schistes jaunâtres ou verdâtres avec de nombreuses em- preintes organiques. Parmi celles que j’ai pu rapporter , soit des calcaires, soit des schistes, de cette localité , se trouvent : le Te- rebratula un data , le Retepora rrtiformfs et un autre Rctcpora , SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 541 un Lcptœna voisin du transversale , le même qu’on a vu sur la côte de Lanveoc, un Cyatophyllum ou Petrea , le même qu’à Lanveoc, un Lithodendron , des fragments de tiges de plusieurs espèces d’encrines indéterminables et analogues à celles qu’on a vues dans la localité précitée , de petites tiges branchues égale» ment indéterminables et parfaitement ressemblantes à celles de Lanveoc. Lorsqu’on s’éloigne un peu de la pointe , avant d’arriver aux escarpements de grès , on voit au-dessus des couches calcaires une masse de kersanton dont on ne distingue point les racines ; au premier abord, on la dirait stratifiée : cette masse se prolonge à travers la petite presqu’ile jusque sur la côte septentrionale. En avançant toujours davantage le long de la côte sud , on re- trouve le grès au-dessous du calcaire. Jusqu’à ces grands rochers de grès qui forment une petite pointe vers le midi, les couches marchent toujours dans le même sens ; mais aussitôt qu’on a dépassé cette espèce de promontoire , les couches de grès qui forment le flanc de la côte reprennent la direction générale N.-E. , avec une inclinaison sud d’environ 70°. Plus on s’enfonce dans l’anse de Lauberlach , plus les couches de grès bouleversés par les kersantons sont redressées , presque verticales et même ren- versées. Sur le haut du plateau , on rencontre du schiste altéré , intercalé au milieu des couches de grès. Ceux-ci, alternant avec quelques schistes, continuent de se montrer très abruptes sur la côte jusqu’au fond de l’anse , où l’on peut voir de nouveau sor- tir de dessous les eaux, et dans la même position que partout ailleurs, la région calcaire (pl. XVIII, fig . 7). L’Ile Ronde n’est séparée de la pointe de l’Armorique, dont elle est en quelque sorte la continuation , que par un canal assez étroit. Placée en face de l’extrémité orientale de l’Ile Longue et du fort du même nom , assise entre les deux grands bassins de la rade, elle paraît appelée par sa position à jouer un rôle impoi- tant dans la défense de cette dernière : aussi le corps du génie a-t-il fait cesser les travaux de l’exploitation du calcaire qui me- naçaient de la détruire. Trois formations différentes se donnent rendez-vous sur ce petit espace de terre qui n’atteint guère que 200 mètres de long sur 150 mètres de large. Des schistes brunâtres et des couches minces de grauwacke , avec Orthis virgalata ( Cho - netes identique aux individus de l’Eiffel), Spirifer mi cr opteras , tiges d’encrines et différentes autres empreintes indéterminables, occupent le côté N. -O. de l’île et recouvrent d’une épaisseur d’au 542 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. moins 30 mètres le calcaire qui affleure au côté S.-E, Leur direc- tion est N.-E. , l’inclinaison de 20° environ N. -O. Sur le côté N. de ces schistes, un chapeau de kersanton les recouvre ; véritable champignon d’origine ignée , dont on ne voit ni le pied ni la ra- cine. On dirait que cette roche a exercé quelque influence sur les schistes, car ils présentent une tendance à l’aspect ardoisier qui n’est pas commune aux schistes de cette région et de cette contrée. Sur la côte orientale de File, la région calcaire s’annonce par une petite couche de cette roche de 0m,8 , enclavée au mi- lieu des schistes , et se montre ensuite au-dessous de la région schisteuse , par des affleurements de couches calcaires, dont la puissance est d’environ 10 à 12 mètres. La direction et l’inclinaison de ces couches sont les mêmes que celles des schistes. Le calcaire est noir-bleuâtre, presque cristallin , et renferme plusieurs filons de spath dont quelques parties présentent de très beaux clivages rhomboédriques. ïl est pétri de fossiles siluriens, parmi lesquels on distingue : les Strom a top hora concentrica , Fcivosites Gothlan- dica? et des fragments de Terebrcitules P d’ Orthis , etc., non re- connaissables. Les schistes marno - bitumineux de cette région sont à la partie supérieure de la masse calcaire ; ils renferment un Spirifer voisin du micrcpterus ; le Tercbratula Valcnbergii de Goldfuss , ou bien une variété du Terebratulci Wilsonii , YOr- this lunata. Sur la plage , à l’extrémité sud de File , on voit des schistes feuilletés, presque toujours recouverts par la mer, et qui appartiennent à la partie inférieure de la région calcaire ( coupe et plan de File Ronde (pl. XVIII9j%. 4). Nous avons signalé l’existence de la région calcaire au fond de l’anse de Lauberlach. La côte qui, du fond de ce bras de mer, s’étend jusqu’à la pointe de Rosegat , suit à peu près la direction des couches, N..-E. ; elle est formée en entier par des alternances de grès, de grauwackes et de schistes , analogues à celles que nous avons pu étudier sur la côte O. de Lanveoc ; les couches sont in- clinées vers le N. -O. d’environ 45°. Une telle inclinaison, mise en regard de l’inclinaison des grès sur la côte opposée, répond très bien à l’idée que l’anse de Lauberlach ne soit qu’un bassin formé par la région de grès , et dont le fond serait occupé par les calcaires qu'on voit affleurer à Femboucbure de la rivière (pl. XVIII, JSg. 7). A FO. de la pointe de Rosegat,. on se trouve toujours dans la région des alternances de grès et de schistes. La direction des couches est N.-N.-E.; l’inclinaison 50° N. -O. Lorsqu’on tourne SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 543 la pointe, les grès et les schistes deviennent presque verticaux, et finissent par avoir une tendance à l’inclinaison S.-E, La première partie de la côte S. entre le bras de Lauberlach et celui de Baoulas est formée de schistes appartenant surtout à la région des calcaires ; quelques petites couches calcaires sont même visibles; on peut s’en convaincre en suivant la plage à marée basse. Ces schistes reposent sur les grès qui forment la croupe de la presqu’île. Leur direction est toujours N.-E., et ils sont presque verticaux. Au milieu de cette première partie de la côte on voit apparaître une roche ignée; elle a percé entre les couches les plus inférieures de la région calcaire qui s’appuyaient sur les grès, et elle les a redressées et même quelquefois renver- sées au moyen de son poids et de sa pression d’épanchement ( pi. XYIiï ,Jïg. 6). Déjà au loin on peut juger par sa couleur que ce n’est point un de ces mamelons si fréquents de roches amphi- boliques , qui sont toujours profondément décomposés à leur surface; c’est pourquoi j’avais d’abord pris cette roche massive pour un relèvement des grès, supportant sur leurs flancs les couches des régions supérieures ; puis à mesure que j’avançais et que les contournements des schistes à l’approche de la roche sous-jacente se développaient de plus en plus devant moi , je finis par croire à la présence d’un épanchement de pétrosilex ou de quelque porphyre semblable à ceux de File Longue. Mais quel ne fut pas mon étonnement , lorsqu’étant arrivé près de la roche en question, et ayant réussi à en enlever un échantillon qui m’of- frait des cassures fraîches, je trouvai que c’était un véritable granité ! Ce granité , qui serait ainsi arrivé à la surface après le dépôt du terrain silurien, est à grains très petits, beaucoup plus petits même que ceux du véritable granité à petits grains; la couleur de son feldspath est rougeâtre , le mica en est vert bru- nâtre ; il renferme des fragments de schistes empâtés , qui ne sont point altérés ; l’ayant examiné plus tard à la loupe avec beaucoup de soin , j’ai pu m’assurer de la parfaite cristallisation du feldspath, qui me paraît de Forthose. L’émersion d’un granité à petits grains postérieur au milieu des couches siluriennes est un fait absolument exceptionnel dans la Bretagne. Ce fait me paraît ce- pendant se rattacher aux lois générales de la cristallisation par voie ignée, qui exige pour se développer une chaleur soutenue , de la tranquillité et un refroidissement lent. Dès l’année 1842, notre savant confrère M. Angelot , dans un de ces beaux et nombreux travaux sur la physique du globe , dont il a enrichi le 544 SÉANCE DU 16 JUIN 1 845. Bulletin de la Société géologique, avait émis l’opinion que la struc- ture de certains filons de granité à grains fins enclavés dans des roches préexistantes pouvait être regardée comme l’effet d’un re- froidissement rapide dans leur contact avec les parois de la roche déjà solidifiée. Or , le granité que nous avons sous les yeux ne forme qu’une très petite masse , une espèce de colonne entourée par les couches sédimentaii es Si nous ajoutons que son émersion a pu avoir lieu sous les eaux , nous aurons là des causes suffi- santes pour expliquer le refroidissement prompt qui a dû em- pêcher le développement de la cristallisation dans cette partie superficielle et isolée de la masse granitique. Bien ne s’oppose donc à ce que l’on regarde ce granité comme absolument étranger aux anciens granités à petits grains, qui ont soulevé les terrains cambriens , et comme contemporain des granités porphyro'ides qu’on voit dans les autres parties du Finistère , et qui , étant sortis dans des conditions différentes, ont acquis une structure plus parfaite. Ce granité est le représentant dans la rade de ces por- phyres micacés des Vosges, que M. E. de Beaumont a décrits, et qui établissent le passage des porphyres quartzifères au granité porphyroïde, lorsque la dimension des grains de ce dernier est parvenue à sa dernière limite de ténuité. Tout près de l’entrée du bras de Daoulas, le grès se relève un peu au-dessus du niveau des basses marées, et on le voit former une croupe qui soutient les schistes inférieurs de la région calcaire. La presqu’île de Rosegat n’est autre chose qu’une grande croupe, une grande ride de la région des grès : aussi ces derniers en forment-ils tout le plateau. Nous pouvons en dire autant de la pointe de l’Armorique, car là-bas comme ici nous avons vu la région des grès courbés en une grande croupe former le corps des terres ; là-bas comme ici des deux côtés de la presqu’île , nous avons vu les couches de la région calcaire sortir de la mer, et rendre témoignage de leur superposition immédiate. Or , ce même fait s’est présenté à nous du côté de la presqu’île de Ke- lern , et sur les côtes opposées de Lanveoc ; c’était la même région calcaire bien désignée par les mêmes roches , les mêmes fossiles, la même disposition générale. L’existence de cette région des calcaires est un fait si caractéristique sur toutes ces côtes , qu’il devient d’un puissant secours pour bien comprendre l’al- lure du terrain; c’est une espèce à' horizon géognostique , suivant l’heureuse expression de M. de Humboldt, qui sert merveii'eu- SÉANCE DU IG JUIN 1845. 545 sement à orienter le géologue dans ces parages ; les mêmes ser- vices que les grès rendent à l’égard de la division des anciens terrains de transition sont prêtés par le calcaire à l’observateur qui s’occupe de la disposition du terrain silurien. De même, nous pouvons désormais assimiler la racle entière à l’anse de Lau- berlacb. Nous avons indiqué que celle-ci était un bassin formé par la région des grès dans laquelle venait s’emboîter la région des calcaires. Nous pouvons dire à présent que la rade de Brest n’est qu’une vaste dépression constituée par les divers bassins que les grès siluriens y forment , et dans lesquels vient s’emboîter la région des calcaires. Mais nous croyons pouvoir également affirmer que ceux-ci supportent eux-mêmes la région schisteuse; car nous avons vu les schistes reposer sur les calcaires à l’ile Bonde , nous les avons vus entre deux affleurements de la région calcaire se plisser et former une étendue de côte de plus de 5 kil. à l’O. de la rade. Et si nous mettons en regard les divers bassins de la rade avec les groupes de la presqu’île de Kelern , de l’Ar- morique , de Rosegat, de Pénarvir, il deviendra évident que le partage des terres et des mers dans la rade , abstraction faite des petites complications que peuvent avoir causées les révolutions postérieures ou les éjections des masses amphiboliques , est le ré- sultat du ridement subi parle terrain silurien immédiatement après son dépôt ; surtout quand on y ajoute les effets de la dénudation qui a dû arracher toutes les parties les moins résistantes de la région inférieure et les calcaires et les schistes, partout où ils n’étaient pas protégés par les digues solides des grès plissés et sous-jacents. Comment a pu se faire le ridement , dans quelles directions et à quelle époque? c’est ce que nous examinerons à la fin de ce travail. Pour le moment, continuons à chercher , pendant quelque temps encore , des preuves à l’appui de ces assertions. Nous sommes sur la côte méridionale de Rosegat, en face de Traoulierz ; la côte tourne vers le N.-E. ; nous entrons dans le bras de mer de Daoulas ; la région des calcaires est dépassée , et nous nous trouvons au milieu des schistes supérieurs. A marée basse on voit , sur plusieurs pointes de suite , de petites masses de kersanton , profondément décomposées, brunes, à contours arrondis , qui forment les parties saillantes de la côte. Ils ont percé à travers les schistes , qu’ils ont bouleversés et qui les re- couvrent en partie. A ces petites masses pyroïdes près, depuis l’entrée jusqu’au fond du bras de Daoulas, la côte est basse et formée par des schistes contournés, mais non altérés. Soc. GéoL Tome II, 2° série. 55 546 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. Les deux pointes qui terminent la petite presqu'île ou se trouve Rorsgtien , au fond du bras de Daoulas , doivent leur existence à l’émersion d’un porphyre nankin ( couleur due à la décomposition). Une ligne conduite par l’extrémité des deux pointes donne la direction E. 15°S., direction que M. Dufrénoy a observée dans les porphyres de la Loire. Sur celle des deux pointes qui est plus à l’O. , on peut observer un fait assez remar- quable ; c’est l’éruption par la même cheminée du porphyre dont j’ai parlé et du kersanton. Ce kersanton est décomposé comme à l’ordinaire , brun , et rempli de mica qui se sépare facilement par feuillets. Le porphyre pénètre dans les schistes ; il repose et sur les mêmes schistes et sur la roche amphibolique ; cette der- nière semble être arrivée à l’état pâteux , car elle forme un ma- melon qu’on voit à marée basse ; elle supporte le porphyre en plusieurs endroits et paraît l’avoir soulevé. C’est à l’action du kersanton qu’il faut attribuer, je crois, le renversement des schistes qu’on voit entre les deux pointes. Je ferai observer que toutes ces émersions de roches ignées que j’ai signalées depuis l’entrée du bras de Daoulas n’ont pas été indiquées jusqu’à présent, et qu’on ne les voit point sur la carte géologique du Fi- nistère qui existe à la Société. Sur ces deux petites masses de porphyre , viennent s’appuyer les schistes bitumineux et à nodules delà région calcaire; ils sont très tourmentés, ainsi que les schistes inférieurs de la légion des schistes et des grauwackes qui les recouvrent dans quelques endroits. Ce point est un mo- dèle en petit de la disposition générale du terrain silurien et du plissement qu’il a subi (pl. XVIII, 9). On peut également remarquer, d’après ce que l’on voit sur cette falaise, combien la détermination des directions et des inclinaisons devient quelque- fois difficile, et avec quelles précautions il faut procéder lorsque des couches ne sont visibles que sur de petites étendues. Sans parler des directions, qui, les schistes étant contournés, vont en tous sens, dans l’exemple que nous avons sous les yeux, on pourrait croire que les couches sont inclinées suivant la direction de a 5, et qu’elles s’appuient de cette manière sur le porphyre qui les aurait soulevées ; et pour ma part j’avoue que c’est ainsi que j’en aurais jugé , si l’habitude acquise , pendant plusieurs jours de suite , de reconnaître les couches de la région calcaire qui se trouvent à la partie inférieure, et la présence de la petite bande de grauwacke c ci qui forme une saillie au milieu des schistes, ne m’avaient éclairé sur le véritable gisement des SÉANCE DU 10 JUIN 1845. 547 couches. Les divisions suivant a b ne sont que le résultat du fendillement, mais d’un fendillement extrêmement régulier , dû probablement à l’action de la chaleur de la niasse porphyrique ; il serait arrivé ici aux schistes ce qui arrive aux cendres d’un ci- gare en combustion; le fendillement s’est opéré perpendiculai- rement à l’action de la chaleur. Une troisième cause d’erreur, les feuillets de dépôt affectant une direction oblique aux couches , sont désignés par la disposition des paillettes de mica. D. — Presqu'île de Crozon. — Baie de Douarnenez . En parcourant du N. au S. le centre de la presqu’île de Crozon depuis Lanveoc jusqu’à la grève de Morgat, on traverse deux grandes rides de la région des grès. Entre ces deux grandes rides saillantes, il existe un renfoncement qui constitue au milieu de la presqu’île une vallée longitudinale. Les alternances qui font passage à la région calcaire reposent dans la petite dépression ; on voit même paraître dans plusieurs endroits, et notamment au-dessous de Tremaïdic, les schistes qui accompagnent cette région ; je n’y ai pas vu de couches calcaires proprement dites. La côte septentrionale de la baie de Douarnenez , depuis la grève de Morgat jusqu’à l’anse de l’Aber , est recouverte par les grès et quelquës schistes quasi-ardoisiers , appartenant aux al- ternances que nous avons si souvent indiquées entre la région des grès et celle des calcaires : aussi ces derniers ne manquent pas de se montrer aussitôt que l’abaissement du terrain , dans le petit bassin de l’Aber, leur a permis de se conserver à l’abri des ravages «le la dénudation (pl. XVII, coupe « 5 , et pl. XYJII , fig. 13). Le petit bassin que je viens de nommer est assez intéressant pour que nous en relevions les traits principaux. L’anse de l’Aber n’est submergée dans sa plus grande partie que par les hautes marées. Dans les temps ordinaires , une grève assez étendue et des dunes séparent de la rivière de l’Aber la côte méridionale du plateau de Crozon. Au-delà de la rivière, qui journellement est balayée par la marée, on voit s’élever une série de hauteurs en général très abruptes , qui commencent au nord par la petite presqu’île de Rosan et se continuent jusqu’à l’extrémité S. -O. de l’île de l’Aber; elles ne sont interrompues que par la grève qui, dans les temps ordinaires, rattache cette île au continent. A l’ex- trémité septentrionale de la petite presqu’île de Rosan se trouve 548 SÊANC1! DU 16 JUIN 1845. une carrière et un four à chaux de la propriété de M. Bourassin de Quimper, dont le nom est bien connu dans le département pour son zèle pour tout ce qui regarde les arts et les sciences minéra- logiques. Les couches de ce calcaire , qui sont assez puissantes, ont dans la carrière elle-même une direction à peu près JN.-E. , inclinaison N. -O. Cette inclinaison anormale , et qui , au premier abord, pourrait tromper à B endroit de leur véritable position, •par rapport aux grès qui s’élèvent au nord , est due aux boule- versements quelles ont subis, dans cette localité, par l’éruption d’une roche plutonienne d’une couleur gris cendrée , que les ou- vriers de la carrière appellent Tufau. Les bancs calcaires se ter- minent brusquement et sont inclinés vers le contact de cette roche (pi. XVIII ,fig. 14). A une portée de fusil plus au sud, les cou- ches calcaires ont une direction N.-N.-E. ; leur inclinaison est de 50° S.-E. ; cette inclinaison est absolument contraire à celle que les couches avaient dans la carrière ; elles s’appuient donc ici sur la roche éruptive. L’aspect minéralogique du calcaire est le même que celui des calcaires de la rade ; il est d’un bleu plus ou moins foncé. Lorsque de la presqu’île de Rosan on s’avance vers l’île de l’Aber , on rencontre d’abord des schistes , puis de nouveau la région calcaire^, ayant ici une forte inclinaison N. -O. ; ensuite les alternances de la région des grès qui sortent de dessous les calcaires. Toutes ces couches sont très bouleversées ; mais , en général , elles ne sont point altérées par la masse éruptive , dont les épanchements se continuent jusqu’à l’extrême pointe. Les dis- locations que le sol a subies dans cet endroit sont si nombreuses et si variées, que l’on ne peut compter aucunement sur les direc- tions et les inclinaisons. 11 est néanmoins évident, pour celui qui a visité le terrain silurien des autres parties du Finistère, qu’ici, tout aussi bien que de l’autre côté de la presqu’île , les mêmes régions de ce terrain se reproduisent avec le même ordre de su- perposition. Du côté opposé de l’île de l’Aber , sur les côtes S. et S. -O. , on voit encore tout le terrain bouleversé par la roche ignée, dont les éruptions sont très nombreuses , et qui parfois s’est déversée sur les couches préexistantes. Ces couches suivent une direction moyenne E. 25° N. ; elles ont une inclinaison d’environ 50° N. -O. Cette direction et cette inclinaison sont précisément celles que doivent avoir les couches, dans cette localité, si l’on admet qu’au- delà du bassin de l’Aber la région des grès se relève pour former SÉANCE DU 16 JUIN 1845, 549 la grande ride du Menez-Homme , qui vient expirer avec la]mon- tagne du Guern à la pointe de Treboulle (voyez plan et coupe , pi. XVIII, fig. 13). Plus au sud , le fond de la baie de Douarnenez est borné par les schistes qui occupent les abords de la Lieue de Grève. Les grès, après s’être relevés encore une fois, pour former les hauteurs qui sont derrière la pointe de Kerwigen , paraissent cesser bientôt , ainsi que tout le terrain silurien , pour laisser à découvert les schistes que M. de Fourcy a désignés sur sa carte comme appar- tenant au terrain cambrien. 5 5. Résumé général sur le terrain silurien dans le Finistère, RAPPROCHEMENT DE SES PARTIES AVEC CELLES DU GRAND BASSIN SI- LURIEN ORIENTAL. Par suite de la disposition du massif silurien dans le bassin central du Finistère , on peut arriver à une étude assez compètle de ce terrain , au moyen de deux coupes du nord au sud. L’une s’étend de Morlaix à Gourin et à Quimper , et traverse la chaîne d’Arrhée et les Montagnes Noires. L’autre, de Brest à Douarnenez, longe les côtes occidentales du département ; c’est celle que nous venons d’étudier. Les deux coupes sont assez compliquées ; dans l’une comme dans l’autre , le terrain est soumis aux mêmes lois, aux lois que M. Dufrénoy avait été conduit à établir par l’étude du terrain de transition de Nantes à Rennes et dans le Bocage normand. A. — Chaîne d' Arrhée et Montagnes Noires. M. Dufrénoy , et après lui M. de Fourcy , ont reconnu que les grès siluriens venaient s’appuyer contre les schistes luisants cambriens qui constituent les montagnes d’Arrhée ; ces grès , accompagnés quelquefois par des poudingues , après avoir formé le vaste bassin de Poullaouen, dans lequel reposent la partie su- périeure du terrain silurien et les couches devoniennes, se mon- trent de nouveau sur les hauteurs des Montagnes Noires ; iis y forment jusqu’à trois rides parallèles (1) , et autant de bassins (i)Ces rides ne sont pas d’une longueur indéfinie, mais elles s’éten- dent, sous forme de protubérances allongées, sur 5, 4 lieues ou plus de longueur, avec des largeurs variables, mais qui ne dépassent guère, en. général , une demi-Jieue, 550 SEANCE DU 16 JUIN 1845. remplis par les schistes , et viennent se heurter en définitive contre les formations cambriennes relevées par le plateau grani- tique du midi. Le grand mamelon du granité à gros grains d'Huelgoat, injecté après coup , n’a point changé la disposition générale du terrain , mais il a pu déranger les couches du sol dans ses environs les plus immédiats ; c’est ce que l’on observe sur la route de Morlaix à Poullaouen, au nord de Berrien ; les schistes luisants et satinés des montagnes d’Arrliée , soulevés par le granité du Cloître, et qui ordinairement plongent vers le sud , présentent ici une inclinaison septentrionale très marquée : ce résultat anormal ne peut être dû qu’à l’action postérieure des granités à gros grains. C’est à ces mêmes granités que l’on doit attribuer le relèvement des grès au JN.-O. de Squiriou. B. — Côtes ouest du Finistère. Le long des côtes de la rade et de la baie de Douarnenez, dans l’Armorique, et, dans la presqu’île de Crozon , les rides du ter- rain silurien sont plus multipliées, et sont loin de présenter la régularité et l’étendue qu’on observe , par exemple , dans celles des Montagnes Noires. En dehors de cela, des bouleverse- ments postérieurs ont modifié ici encore une fois la grandeur et la forme des bassins intermédiaires. Cependant la disposition gé- nérale du terrain que M. Dufrénoy a indiquée, dans sa coupe de Bennes à Nantes, est aussi vraie pour le massif oriental du Finis- tère que pour sa partie la plus occidentale. Dans la contrée silu- rienne que nous avons étudiée , lorsqu’on rencontre une de ces longues collines, une de ces rides puissantes qui la sillonnent , on est sûr de marcher sur la région des grès ; partout où le terrain fléchit pour former les vallées intermédiaires , on trouve des cal- caires ou des indices de la région calcaire , et lorsque les bassins sont assez étendus, on remonte jusque sur la région des schistes et des grauwackes. La dénudation , qui a creusé de larges vallées au milieu des plateaux tertiaires , n’a contribué aucunement à augmenter les inégalités du sol dans ce pays ; ayant à faire à des matières d’une dureté fort différente, l’action des eaux diluviennes s’est limitée à égaliser autant que possible les couches disloquées, en enlevant les moins résistantes, lorsqu’elles se trouvaient en saillie , et en émoussant les aspérités des plus dures. Partout où la section des rides formait une courbure , les schistes n’ont pu résister aux courants, et le grès a été mis à nu; les couches de grès SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 551 sont très bouleversées et brisées sur la crête de ces nervures , et il est le plus souvent fort difficile d’en distinguer la stratification : c’est bien ce qui devait arriver par les efforts du ridement , mais c’est en même temps ce qui empêche souvent d’en reconnaître la véritable direction , dont on ne peut s’assurer qu’en parcourant de longues étendues de chemin. Partout où le terrain formait des sillons, les régions supérieures, soutenues sur les côtés par la dureté des grès, ont été respectées ; elles se sont conservées, et on les retrouve d’autant plus puissantes que les bassins sont plus profonds. C’est ainsique les petites rainures qui partagent longi- tudinalement la presqu’île de Crozon ne renferment que quel- ques traces de la région des calcaires et de celle des schistes , tandis que dans le bassin à l’est de la rade, ceux du fond*de la baie de Douarnenez et de Poullaouen contiennent un nombre de plus en plus grand de couches supérieures non emportées, et que si les dépressions des environs de la rade et de la baie de Douarnenez renferment la région calcaire et celle des schistes siluriens, celle de Poullaouen supporte même des couches devo- niennes. C. — - Distribution des grès, des calcaires , et des schistes et grau- waches dans les trois régions siluriennes , et dans les différentes parties du Finistère. Il ne faut pas prendre minéralogiquement à la lettre les déno- minations que nous donnons aux différentes parties du terrain silurien du Finistère. Ainsi, la région des grès n’est pas exclusi- vement formée par cette roche ; ce sont des couches de grès al- ternant avec des schistes et quelques grauwackes. |Mais ces schistes sont en général différents, par leur aspect, de ceux qui constituent la véritable région schisteuse : ils sont desséchés , si l’on me permet de m’exprimer ainsi; en d’autres termes, ils sont quelquefois plus feuilletés; d’autres fois ils prennent l’aspect ardoisier , ou sont enclins à la division pseudo-régulière ; quel- quefois même ils sont dans un état de métamorphisme très avancé. Les schistes intercalés étant beaucoup plus décomposa- bles que les grès , ceux-ci font toujours saillie , et dominent par conséquent sur les plateaux ; mais au fond je crois que les schistes et les grauwackes ensemble ont concouru presque autant que les grès à la formation de la région inférieure du terrain , et il s’en faut que ceux-ci soient partout également puissants ; leurs cou- 552 seance nu Ifl juin 1845. elles l’emportent souvent , et sont quelquefois inférieures en puis-* sance aux schistes intercalés.  l’approche de la région moyenne, les alternances de schistes et de grauwaekes deviennent plus fre- quentes. Les grès cessent complètement dans les deux régions supérieures. La région des calcaires est toujours indiquée par des schistes noirs-bleuâtres, bitumineux, puants, renfermant en grande abon- dance certaines espèces de fossiles. Les calcaires proprement dits se trouvent renfermés entre ces schistes sous forme de nodules ou de grandes lentilles aplaties qui deviennent de véritables couches pour l’observateur : c’est ce qui explique l’abondance de cette roche dans quelques localités, tandis que dans d’autres à peine si l’on s’aperçoit de sa, présence. On n’a pas trouvé jusqu’à ce jour de calcaires dans l’est du département ; devrons-nous conclure, d’après cela, que la région médiane des calcaires n’est qu’un fait purement exceptionnel limité au bassin de la rade? Cela pourrait se concevoir si , à l’époque du dépôt des matières résultant soit des débris de couches plus anciennes remaniées , soit de la décomposition et désagrégation des roches ignées , le terrain eût été disposé par bassins comme aujourd’hui. Mais le plissement est postérieur , la mer silurienne recouvrait tout le massif : le calcaire existe près de Kelern , aussi bien qu’à l’extré- mité orientale de la rade près de F embouchure de la rivière de Châteaulin • nous l’avons vu se montrer sur les côtes de la baie de Douarnenez , et toujours dans la même position : des calcaires analogues sont exploités dans plusieurs localités du bassin orien- tal. Pourquoi cette région, qui se montre comme un fait général dans tout le terrain, qui recouvre le fond de tous les bassins et sil- lons des grès siluriens dans l’ouest du Finistère, n’existerait-eîle pas même à l’état de rudiment, à quelques lieues de là , dans le grand bassin de Poullaouen ? Ne devons- nous pas plutôt croire que l’absence d’affleurements riches, et les difficultés d’observa- tion dans un terrain aussi couvert que l’intérieur du Finistère , ont peut-être dérobé jusqu’à présent ce trésor aux recherches de 1 industrie? Est-ce que toutes les lentilles calcaires qui peu- vent exister au fond de ce bassin auraient disparu comme les nombreux cristaux de spath qui faisaient partie du filon d’Huël- goat, et dont les moules fréquents de quartz pseudo-morphique nous attestent l’existence? Nous ne le pensons pas ; quelque trou de sonde nous éclairera peut-être un jour sur cette question. En attendaut, on pourrait regarder les nodules de fer carbonate, SEANCE DU t 6 JUIN 1845. 553 trouvés près de Poullaouen, et analysés par M. Pernollet , di- recteur de ces mines , comme étant un indice de masses calcaires peu éloignées. Sous l’influence de l’épanchement des roches sili- ceuses, si fréquentes dans la contrée, une partie du calcaire aurait été décomposée ; le fer qui , ainsi que nous avons vu aux envi- rons de Lanvéoc , existe à l’état peroxidé dans le voisinage de la région calcaire, aurait absorbé l’acide carbonique devenu libre : des sources minérales l’auraient entraîné, à l’état de carbonate, jusqu’à la surface. IVi. Ebelmen a démontré dernièrement (1) que le fer déposé , à l’état de peroxide , pouvait être réduit par les matières organiques : or , il suffit que des fentes aient amené l’a- cide carbonique, qui se dégageait sur du fer en contact avec des restes organiques , pour que les réactions que nous avons indi- quées tout-à-l’héure aient pu avoir lieu. Dans la région supérieure, que j’appelle des schistes et des grauwackes, le partage entre ces deux roches est assez inégal; dans l’O. de la rade, les schistes sont de beaucoup les plus abon- dants: les grauwackes ne se montrent que par des nodules [Jég. 16, pl. XYIII) , ou par des bandes {fig. 9, pl. XVIII), et des couches minces intercalées au milieu de la masse schisteuse. Dans l’E. et dans le bassin de Poullaouen , cette dernière roche paraîtrait beaucoup plus abondante ; elle arrive même à exclure les schistes sur de certaines étendues , mais il m’est impossible d’accorder qu’elle forme à elle seule exclusivement un système silurien su- périeur; l’alternance de nombreuses couches de schistes , même là où les grauwackes sont le plus puissantes, comme par exemple dans le grand bassin de l’E. du département, n’est point contes- table , lorsqu’on ne se borne pas à l’étude de quelques carrières, qui naturellement sont toujours ouvertes dans la grauwaeke. Je suis plutôt porté à croire, et le fait observé sur la côte de Ke- lern (fig. 16, pl. XYIII) me confirme dans mon opinion, que la grauwaeke est renfermée au milieu des schistes sous forme de grands bancs aplatis , à la manière des calcaires : or , elle n’a ni l’importance ni l’existence propre de ces derniers , pour qu’on soit autorisé à en faire une formation indépendante ; en effet la grauwaeke n’est que le dépôt de la partie la plus grossière des débris des couches schisteuses plus anciennes; c’est en quelque sorte le sable des terrains de transition argileux : cr, ces sables ()) Comptes-rendus des séances de t’ Académie des sciences. — Séance du 19 mai i845. 554 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. ont dû se déposer par plaques et de préférence là où des courants ou la disposition du sol étaient le plus favorables à leur dépôt; différant en cela des parties les plus ténues, qui, pouvant rester plus longtemps en suspension dans les eaux , ont dû se déposer en grandes strates sur toute l’étendue des mers. D. — - Minerais métalliques dans VO. du Finistère. Mais si la rade est bien fournie de calcaires , elle ne possède point ces dépôts argentifères , ces filons de plomb et de zinc qui font la richesse et l’orgueil des environs d’Huëlgoat et de Poul- îaouen. Cependant M. Durocher paraît avoir trouvé des indices de minerais de cuivre sur un point de la côte près de lîle de l’Aber (baie de Douarnenez); j’ai trouvé dans mes courses des traces de blende, dans un grès bleuâtre de la région des alter- nances tout près de Lanvéoc , sur la côte qui du fort conduit à l’étang du Fret; j’ai rencontré dans plusieurs localités du fer oligiste ou du fer hydroxidé brun. Le gisement de ces minerais de fer est même assez curieux ; ils paraissent avoir remplacé les couches de schistes à la limite de la région des grès et de celle des calcaires; c’est au moins dans une position semblable qu’on les voit sur les côtes de la rade près de Lanvéoc, et dans le petit bassin de l’Aber ; les minerais de fer du Poulmic et de Landé- vénec ont une position analogue. A ce propos, je citerai deux faits qui peuvent nous mettre à même d’expliquer l’origine de ces dépôts. Le premier est indiqué par M. de Fourcy , qui remarque que les minerais de fer du terrain cambrien « ne sont point dis- » séminés au hasard dans la formation , mais qu’on les trouve » en voisinage des roches ignées soit granitiques , soit amphibo- » liques » , auxquelles roches ils paraissent se rattacher par leur origine. Le second a été observé par M. d’Omalius d’Halloy dans la Belgique. Par suite d’une révolution postérieure au terrain houiller , les couches carbonifères et celles des terrains plus an- ciens existant dans ce pays présentent des plissements analogues à ceux que l’on observe dans la Bretagne. M. d’Omalius d’Halloy, qui parle de ce phénomène dans son excellent Coup d’œil sur la géologie de la Belgique (1) , fait observer que les dépôts mé- tallifères du pays se trouvent toujours à la limite des systèmes calcareux et quarzo-scliisteux de M. Dumont. En se fondant sur (i) Bruxelles , 1842. 555 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. cette observation , l’illustre géologue attribue ces dépôts à l’effet d’une sublimation qui se serait opérée lors du ridement, et il explique le fait de la position particulière des amas métalliques par la considération que les matières volatilisées ont dû se frayer un passage vers la partie supérieure des bords des bassins, là où la pression des masses se faisait sentir le moins. Ne devrait- on pas voir un résultat de ces deux faits dans le gisement constant des minerais de fer et des autres traces de métaux que nous avons indiqués dans le terrain silurien à la limite de la région des grès avec la région calcaire ? E. — - Métamorphisme des roches siluriennes. Je ne prétends pas aborder dans ce petit travail la grande question du métamorphisme des roches de sédiment; non que la Bretagne ne présente une série de faits de ce genre très remarquables, mais après ce qu’en ont dit MM. Dufrénoy et E. de Beaumont; et mon savant compatriote M. de Collegno (1), une étude sur ce sujet exigerait une suite d’expériences et d’ana- lyses, que le défaut de temps , au moment de partir pour un long voyage dans le Nord, m’empêche d’exécuter dès à présent*; je me réserve de me livrer à ce travail lorsque j’en aurai le loisir. Je ferai tout simplement remarquer, après M. de Fourcy, que le terrain silurien est en général peu modifié, même au contact des granités, et que si le terrain cambrien a subi parfois en Bretagne de profonds changements, par lesquels des minéraux tels que les micas , la staurotide , la tourmaline, ont pu y être introduits, les couches siluriennes dans leur altération la plus prononcée ne présentent guère que des macles. Encore ce n’est pas dans le Finistère que le métamorphisme du terrain silurien est le plus avancé; les grandes macles bien développées ne se trouvent que dans les schistes qui environnent les granités du Morbihan près des forges des Salles entre Pontivy et Rostrenen. Ces schistes étant très altérés et leurs directions pouvant induire en erreur à cause de circonstances locales, tant qu’on n’avait pas trouvé de fossiles on a dû les regarder comme cambriens : c’est ainsi qu’ils avaient été classés originairement par M. Dufrénoy , qui lui- (1) Sur le métamorphisme des roches de sédiment et en particulier sur celui des dépôts de combustibles , par M. IJ. de Collegno. doyen de la Faculté des sciences. Bordeaux . 1842. 556 SEANCE DU 16 JUIN 1845. même cependant, guidé par son intuition supérieure , avait cru devoir faire ses réserves à ce sujet (1) ; plus tard on y a trouvé des fossiles tout-à-fait analogues à ceux que l’on rencontre dans les autres massifs siluriens de la Bretagne, et qui paraissent ap- partenir à la faune de cette époque (2). Ce fait doit être placé au nombre de ceux qui tous les jours viennent démentir les conclusions les plus fondées d’après tout ce qui était connu aupa- ravant. Aujourd’hui M. Bufrénoy lui-même , dans son amour pour la vérité scientifique , n’hésite pas à reconnaître que cette circonstance nouvelle doit modifier les vues des géologues sur cette partie de la Bretagne. M. Dufrénoy réunit désormais les (1) Je trouve dans le Mémoire de M. Dufrénoy Sur les terrains anciens du N. -O. de la France ( Ann . des Mines, 3e série , t. XIV, i838, p. ü3o) ce qui suit : « Dans la Carte géologique de France j’ai essayé de faire la distinction » des deux terrains de transition sur toute îa surface de la Bretagne; je » regarde comme à peu près exactes les limites que j’en ai tracées pour les » terrains au N. de la bande granitique; quant à celles du centre de la » Bretagne et des montagnes d’Arrliée , je ne possède que peu de don- » nées positives pour les marquer ; les directions des couches , quelque- a fois incertaines, et les analogies des roches ont été mes seuls guides. » (2) M. Boblaye ( Comptes-rendus des séances de l’Académie des sciences , 1er sem. 1808, p. 186) avait découvert des empreintes fossiles appartenant à des Orlliis et à des Trilobiles du genre Calymène dans des schistes ma- clifères, à 200 mètres S.-E. de l’étang des Salles, mais les maclesde ces schistes n’étaient pas très développées; c’était cependant déjà une preuve matérielle et visible en faveur des théories du métamorphisme. M. Dufré- noy a rapporté ensuite des échantillons d'une beauté remarquable , dans lesquels on voit en même temps des macles dans leur état de développe- ment le plus parfait, et des empreintes tout-à-fait caractérisées de Spiri- lères , d’Orthis , de Trilobites. Dans une de mes excursions en Bretagne , dans l’été de 1844, j’ai été assez heureux pour trouver dans le bassin même du grand étang , alors presque desséché , des schistes luisants renfermant en même temps et dans un même échantillon de grosses macles, de om,o4 elom,o5 de long, sur 6 et 8 millimètres de côté, et des empreintes ferrugi- neuses parmi lesquelles on peut aisément reconnaître des Orlhis , dont l’aspect est lout-à-fait analogue à celui de certains fossiles de la rade de Brest. Un de ces échantillons présente avec la plus grande évidence le passage insensible qui a lieu entre les schistes et les macles à leurs ex- trémités, et par conséquent la formation postérieure incontestable de ces minéraux qui se sont développés par des influences métamorphiques, (pl. XVlII.fe. ,7). SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 557 couches métamorphiques des environs de Pontivy aux autres parties du terrain silurien. Sur les côtes du Finistère ce n’est que dans la région infé- rieure, au milieu des grès, que j’ai pu observer dans les schistes un état d’altération bien sensible; le grès lui même n’est que peu modifié ; dans la région calcaire et à ses limites les schistes montrent souvent de la tendance à devenir ardoisiers, mais ils ne sont point assez altérés pour être de véritables ardoises ; ou lorsqu’ils le sont, ce sont de mauvaises ardoises, car il paraîtrait que la chaleur n’a pas agi ici assez lentement pour permettre à la fissilité de se développer sans que la continuité des plaques fût interrompue. Les porphyres quartzifères , qui ont agi si for- tement sur les schistes siluriens dans le département des Côtes- du-Nord , n’ont eu presque aucune influence modifiante sur ^ceux du Finistère (1). Nulle part je n’ai vu de traces de mé- tamorphisme dans le voisinage, soit de ces porphyres, soit des amphibolites. M. Duroclier paraît cependant avoir rencontré à proximité des épanchements de l’île de l’Aber une roche pro- fondément modifiée par la chaleur, et dans laquelle il aurait même reconnu des vestiges d’organisation. F. — Révolutions subies par le terrain silurien dans le Finistère. — Partage des terres et des mers. Le plus ancien des terrains de transition avait été disloqué par un mouvement soudain. En même temps les granités à petits grains étaient apparus à travers de larges ouvertures qui s’étaient faites dans l’écorce terrestre, parallèlement à un grand cercle dont M. de Beaumont indique la direction N.-E. un peu E. Relevées entre les deux grands plateaux granitiques de la Bre- (1) C’est un fait connu que l'émersion d’une même roche n’a pas tou- jours exercé au même degré son influence modifiante sur les couches environnantes ; souvent même cette influence a été nulle. Je saisis celte occasion pour annoncer une observation qui tendrait à confirmer le fait que le métamorphisme a pu être souvent le résultat de la combinaison de plusieurs causes, et que quelquefois des influences chimiques, qui ne sont pas encore complètement appréciées, ont pu se joindre à l’action delà chaleur, ainsi que M. de Buch l’a fait observer à l’égard des dolo- mies. Les schistes exploités à Angers, pour ardoises, sont traversés par une multitude de veines et de filons de quartz. Ayant examiné avec soin les parties du schiste en contact avec ces fiions , je n’ai pu y reconnaître 558 SÉANCE DU 16 JUIN 1845. tagne, les couches cambriennes devaient présenter deux incli- naisons principales vers le N. -O. et vers le S* -O. ; peut-être même quelques rides se formèrent-elles en même temps dans ce terrain, ainsi contraint de subir la force d’épancliement des deux grandes masses pâteuses ; c’est du moins ce que l’on est conduit à admettre par l’étude du sol cambrien dans le Bocage normand. Le second terrain de transition s’était déposé ; son dépôt avait été suivi par celui des couches de transition supérieures : entre ces deux terrains, également reconnus dans les limites de la Bretagne, aucune discordance, aucun bouleversement apparent n’est arrivé dans ce pays. Les couches du premier reposaient tranquillement sur les tranches des formations plus anciennes, préalablement re- dressées et en partie altérées. Les sédiments devoniens conti- nuaient la série de ces dépôts horizontaux. Le terrain silurien était formé à la base par un système de couches rigides , dures, peu altérables par la décomposition ; ses parties supérieures étaient molles, plus flexibles, plus exposées aux ravages des eaux et des agents atmosphériques , les couches devoniennes étant, par leur nature, impuissantes à les protéger. Un nouvel ébranlement a eu lieu alors à la surface de la terre ; d’énormes fractures se sont ouvertes suivant une direction voisine de l’E. 15° S., les masses granitiques ont reçu une nouvelle impulsion, des porphyres quartzifères se sont fait jour dans bon nombre de localités. Les couches cambriennes déjà inclinées ont été redres- sées encore une fois , mais cette fois obliquement au premier soulèvement ; le mouvement s’est fait autant sur leurs tranches inférieures que sur leurs plans. Les couches des terrains de tran- sition supérieurs, ébranlées par les efforts récents des granités, ont alors perdu leur horizontalité primitive ; ces terrains, pressés dans un espace plus restreint, ont été contraints de se plisser sous les efforts combinés des masses d’émersion. Si le mouvement eût été simple de sa nature , ce plissement aurait toujours eu lieu dans une direction E. 15° S. parallèle au soulèvement. Les chaînes de montagnes provenant du ridement du terrain seraient toutes aucune modification ; mais dans un endroit où le quartz se trouvait accompagné par du calcaire, des pyrites de fer, de la blende, de la ga- lène et de la baryte sulfatée, l’altération de la roche encaissante était très visible; cette roche devenait calcarifère, elle perdait presque com- plètement sa fissililé ardoisière, et elle n’avait plus la couleur noire bril- lante des ardoises, taudis que son grain paraissait plus grossier. SEANCE DU 16 JUIN 1845. 559 parallèles entre elles , comme les couches qui plongent sur leurs côtés le sont par rapport aux rides du terrain : aussi cette direc- tion générale se trouve empreinte dans la direction de la grande vallée silurienne centrale du N. -O, de la France. « Mais les dislocations siluriennes qu’éprouve un terrain , dit » M. Dufrénoy , dont la stratification a déjà été dérangée , peu- » vent avoir pour résultat de faire glisser les couches suivant des » fissures déjà faites, et non suivant la direction que la force agis- » santé imprimerait au terrain s’il était vierge de tout soulève- » ment. » Et M. E. de Beaumont, dans son mémoire constitutif sur les soulèvements des montagnes, avait déjà fait remarquer que les couches houillères de la Belgique et du grand bassin du nord de la France avaient été plissées par suite de la révolution à laquelle il a douné le nom de système de soulèvement des Pays-Bas et du Pays de Galles, et « que les plis se sont produits » pour moitié suivant la direction de ce soulèvement , et pour » l’autre moitié suivant les directions des dislocations que pré- » sentaient déjà en chaque point les couches les plus anciennes » affectées par des bouleversements antérieurs. » En Bretagne, le terrain cambrien était au dessous ; il avait été déjà relevé sui- vant une direction différente; par le nouveau soulèvement au- quel ses propres couches étaient soumises , il a dû modifier les mouvements des terrains dont il était le support ; le redresse- ment des couches cambriennes a dû produire nécessairement un raccourcissement dans la ligne de section supérieure de leurs tranches dénudées. Ce fait , qui découle du mécanisme même de l’action des masses intérieures, et que M. de Beaumont rappelle souvent dans ses leçons orales , a puissamment aidé au plissement des dépôts superposés, et il a souvent contribué à en changer la direction ; j’ai essayé de la représenter de mon mieux dans la fe- 15 de la pl. XVIII. L’influence du mouvement des couches cambriennes sur le plissement silurien a dû être d’autant plus grande qu’elles avaient été originairement moins relevées , et qu’elles l’ont été davantage lors du soulèvement post-devonien. Supposez l’inclinaison antérieure des couches cambriennes très grande, et vous aurez une prépondérance de la direction silurienne dans le plissement; supposez-la au contraire faible, le raccourcis- sement de la section supérieure des tranches sera d’autant plus considérable, le plissement se fera presque uniquement par cette action , et la direction cambrienne dominera dans les rides du ter- rain. C’est cette dernière explication qu’il faut adopter pour toutes SÉANCE DU 16 JUIN 1845. 560 les parties du massif silurien qui affectent la direction E. 25° N., ou à peu près, et notamment pour les terrains de la rade de Brest. Il découle de ces considérations qu’on ne doit avoir égard qu’aux directions générales d’un terrain , et que , dans le cas actuel , plusieurs systèmes de couches bien caractérisées comme étant siluriennes peuvent être disposées parallèlement suivant la direction cambrienne ou toute autre direction , sans que pour cela elles cessent d’appartenir au terrain silurien. En d’autres mots, on ne pourra pas ranger un système de couches dans l’étage cambrien , par exemple , par la seule considération de leur direc- tion E. 25° N. Or, dans le Finistère , trois mouvements principaux ont contri- bué à donner au soi silurien son relief actuel. D’abord la pertur- bation post-cambrienne, dont les effets ont survécu dans le nord du département à toutes les révolutions postérieures; le soulève- ment des porphyres quarîzifères, dont on peut voir les traces dans la chaîne des montagnes d’Argol , et l’éruption des granités à gros grains, qui n’est venue que plus tard modifier dans un sens E.-O. une grande partie des dispositions qui avaient été créées auparavant; c’est dans le sud du département que les indices de leur action sont le plus sensibles. Comme nous l’avons vu dès le commencement de ce travail, deux autres mouvements ont agi du N. au S. ; mais les traces de leurs ravages ne sont point aussi gé- nérales que celles des trois révolutions que nous venons d’indi- quer. Traces des dislocations post-cambriennes dans le Finistère ; Ar* moriqite ; montagnes d’Arrhée. — La trace des modifications cam- briennes dans le Finistère nous est conservée par deux ridements principaux, dont chacun se compose de plusieurs plis. Le premier constitue la presqu’île de l’Armorique, la rade presque tout en- tière et le nord de la presqu’île de Kelern. Le second forme la chaîne des montagnes d’Àrrhée et , dans sa continuation , les hauteurs de Quimerch et la ride centrale de la presqu’île de Crozon, depuis la rivière de Châteaulin jusqu’à cette dernière localité. Ces directions anormales qu’affecte le terrain silurien du nord du Finistère sont une des meilleures preuves de la présence du terrain cambrien au-dessous des grès qui forment la base du premier; elles sont l’effet de cette présence; elles n’existeraient pas sans cela. Supposons donc pour un moment que les discor- dances de stratification ne fussent pas là pour nous éclairer sur ce sujet, le fait de la superposition des deux terrains cambrien SÉANCE DU 16 JUIN 1 845. 501 moraines, l’un des sujets dont la cause est la plus controversée » aujourd’hui parmi les géologues. » Certainement la cause des stries tracées sur les rochers, iden- tiques avec celles des roches frottées par les glaciers actuels , et de ces apparences de moraines sur des points où on n’a jamais vil de glaciers, et dont la position orogéograpliique s’oppose à ce qu’il y en ait jamais eu , est un sujet de controverse. Mais les faits se multiplient, et beaucoup d’hommes éminents, à la tête desquels marche le célèbre Agassiz, veulent démontrer l’existence d’anciens glaciers sur tous les points où gisent des lambeaux de débris comparables à des moraines, accompagnés de stries sur les roches voisines, quelle que soit l’altitude des lieux. Les suppositions d’hivers plus rigoureux que ceux connus, d’une aberration dans la série du décroissement de la chaleur terrestre, de grandes taches sur le globe du soleil , etc., etc., ne suffisent aucunement pour rendre compte du phénomène. D’après ce que l’observation nous a révélé , un glacier, un véritable glacier , capable de former des moraines et de tracer des stries sur les roches, ne peut exister que dans une vallée , et dans une vallée dont l’altitude , à son origine, atteigne au moins la limite des neiges perpétuelles; de plus, il faut que le fond de cette vallée ait une pente assez forte pour que le glacier puisse se mouvoir; au-dessous d’une certaine pente , la glace resterait collée au sol , il n’y aurait pas ce qu’on appelle glacier. On a reconnu des traces d’anciens glaciers dans les Vosges , dont tous les sommets restent bien au-dessous de la limite des neiges perpétuelles. On en a cité dans d’autres chaînes de mon- tagnes encore moins élevées ; s’il en existe dans le Morvan, sur- tout auprès d’A va lion , le phénomène doit paraître encore bien plus extraordinaire. Je prie mes confrères réunis dans cette ville, et auxquels j’ai grand regret de ne pouvoir me joindre, de bien constater les faits, de voir si les apparences de mo- 66Û RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , raines , si les stries sur les roches sont dans des vallées ou sur le prolongement des vallées; si le fond de ces vallées a une incli- naison assez forte pour que les glaces aient pu glisser. Je me rap- pelle que M. El ie de Beaumont a fait remarquer l’insuffisance de la pente du fond de certaines vallées dans lesquelles on a cité des traces d’anciens glaciers. On ne connaît dans les Alpes aucun gla- cier qui se meuve, dans une étendue de 5 kilomètres, sur une pente notablement inférieure à 3°. Beaucoup de faits parfaitement décrits paraissent prouver ce- pendant qu’il existe des apparences de moraines avec des stries sur les rochers , non seulement dans plusieurs vallées dont la pente du thalweg est très faible , mais encore sur des plateaux , et cela dans des pays où il est physiquement impossible qu’il ait existé des glaciers depuis l’ordre actuel des choses. Si cependant ces faits établissent clairement l’existence d’anciens glaciers , faudra- t-il en conclure que notre globe s’est échauffé depuis une cer- taine époque, au lieu de se refroidir, comme l’annoncent la paléontologie et la théorie de la chaleur ; qu’il a existé , à une certaine époque, des hivers plus rigoureux et plus longs que les nôtres , etc. ? Non, certainement non; j’aime mieux admettre des mouvements de la croûte terrestre , qui ont diminué l’altitude des lieux où l’on trouve aujourd’hui des traces d’anciens gla- ciers, et où il est impossible qu’il se forme actuellement des glaciers. Dans mon travail sur les irrégularités de la structure de la croûte du globe (1), j’ai montré que cette croûte s’était souvent plissée sous l’influence des forces intérieures , dont l’action est permanente ; que ces plis avaient donné naissance aux chaînes de montagnes, et que les soulèvements sur certains points avaient dû entraîner des abaissements sur d’autres. Dans ma note, sur les Alpes Dauphinoises (2), il a été établi qu’où se trouvent aujourd’hui des montagnes de 4,000 mètres de hauteur existait jadis une mer de 1000 mètres de profon- deur. Ici, le mouvement de la croûte extérieure qui aurait été de 5000 mètres a suffi pour changer une région tropicale en une région glacée. Si maintenant il s’opérait en sens contraire il pro- duirait l’effet inverse, et les traces des glaciers actuels existeraient dans un pays où il gèlerait à peine. On n’a pas assez arrêté son attention sur l’influence de l’altitude relativement à la tempéra- (î) Mémoires de la Société géologique , 2 e série, t. I. (2) Uulletin de la Société géologique t 2e série ,1.1, p. 65 1 et suiv. DTJ 14 A.U 24 SEPTEMBRE 1815. 663 ture des lieux ; les animaux intertropicaux n’ont peut-être été détruits dans nos contrées que par l’élévation du sol ; il y a moins de deux mille ans que les éléphants vivaient dans le nord de l’Afrique , où il n’en existe plus un seul aujourd’hui. Ainsi donc . s’il est bien constaté qu’il existe des traces de gla- ciers dans les Vosges , dans le Morvan et dans d’autres contrées., dont l’élévation est bien inférieure à la limite des neiges perpé- tuelles , il faut en conclure que le sol de toutes ces contrées s’est naturellement abaissé ; et si les belles observations de M. Agassiz ne peuvent prouver qu’une grande partie de notre sol supportait jadis un manteau de glace , elles fourniront du moins de nouvelles preuves des grands mouvements de la croûte terrestre , pour les- quels nous avons déjà tant de faits incontestables. Le secrétaire donne ensuite lecture de la note suivante adressée à M. Michelin. Sur la formation des récifs madréporiques qui entourent Vile de la Guadeloupe et sur leur prompte reproduction , par M. Duchassaing , médecin à la Guadeloupe. « Les îles des Antilles sont entourées de falaises souvent à pic, et sur lesquelles les flots de la mer viennent se briser; cependant de distance en distance on rencontre des plages de sables plus ou moins étendues. Si l’on examine la partie des falaises qui est frappée par les vagues, on remarque qu’elle est d’une couleur rose due aux Nullipores dont elle est couverte, une submersion continuelle n’étant pas nécessaire à leur existence. Les Nullipora jcisciculata et cervicornis sont les plus communs; mais en se desséchant ils per- dent leur couleur rose. »» Lors des marées basses , l’on peut visiter fort loin les plages de sable, en n’ayant de l’eau que jusqu’à la ceinture. Voici ce que l’on remarque à une certaine distance; le fond de la mer paraît nuancé de toutes sortes de couleurs dues à diverses espèces de zoophytes. Les Madrépores palmé et cervieorne , et les Porites clavaires sont d’un jaune foncé. Les Zoanthes et les Mamillifères couvrant les roches à fleur d’eau sont bleus et verts. Enfin , dans quelques endroits plus profonds se montrent encore d’un rose foncé les Astrées argus et les Méandrines. » Dans cette promenade on ne foule aux pieds que des corps vivants qui laissent après tout ce qui les touche une matière vis- 664 REUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, queuse et filante, semblable à du blanc d’œuf. Au milieu de celte espèce de croûte, solide quelquefois, et souvent fragile, se trou- vent disséminés des Gorgones , des Plexaures, des Halymèdes , des Nésées, etc. » Tel est l’aspect que présente la mer jusqu’à la ceinture de récifs, que l’on appelle remparts ou cayes extérieures, et qui en- toure presque entièrement toutes les îles. Dans les très basses marées, on visite facilement ces récifs, et on peut s’y tenir presque à pied sec. Les larges solutions de continuité qu’ils pré- sentent d’espace en espace permettent aux navires d’entrer dans les ports. Ce ne sont pas seulement les Madrépores qui constituent l’ensemble de ces remparts, les Baîanes et les Serpules en com- posent une bonne partie. » Désireux de connaître la rapidité avec laquelle croissaient les grands Madrépores, je fis briser, il y a quelque temps, à l’anse Williams, près le bourg Saint-François , tous les pieds du Madré- pore prolifère, que j’ai trouvés ; eh bien, deux mois après, il y en avait un plus grand nombre qu’auparavant. Ce fait, au surplus, confirme une observation du docteur Labat (Voyage aux îles françaises d’Amérique). » Dans plusieurs localités, et notamment dans la partie nommée le Lamantin, on emploie de la manière suivante les gros poly- piers à faire de la chaux. Après les avoir brisés avec des barres de fer, on les met à terre pour laisser tomber en putréfaction la partie animale, puis on les met en tas et on les calcine. » Séance du lundi 1 5 septembre , PRÉSIDENCE DE M. MICHELIN. La séance est ouverte à sept heures du soir. M. Moreau est appelé à rendre compte de la course de la journée. La Société est partie pour Vassy à 8 heures du matin. Elle a été d’abord visiter, à un kilomètre de la ville, au lieu dit en Touillon , une carrière ouverte dans le calcaire à gry- pbées arquées. Cette coquille s'y présente en abondance; ruais les individus ne semblent pas tous appartenir à la même espèce et affectent des formes dont les unes se rapportent à DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 605 la Gryphœa arcuata de Sow. et les autres à la Gryphœa Mac - culochii du même auteur (1). Les Ammonites Bucklandi et stellaris s’y sont présentés en fragments très reconnaissables, ainsi que le Spirifer Walcoüi , des Terebratula et des P enta- crinites . A deux kilomètres de ce point , la Société a visité , près de l'église Saint-Valentin , une autre carrière ouverte dans le calcaire à gryphées arquées, mais où les fossiles étaient mieux conservés. M. Moreau fait remarquer qu’on n’y trouve plus d’autres gryphées que la véritable Gryphœa arcuata , ni d’autres Ammonites que X Ammonites Bucklandi ; qu’enfin le Spirifer qu’on y rencontre n’est plus le S. Walcotii , mais un autre plus petit et moins strié. Pour lui , cette couche serait la partie supérieure du calcaire à gryphées arquées , tandis que la partie exploitée dans la carrière précédente serait la partie inférieure. D’ailleurs cette remarque ne lui appartient pas ; elle a été d’abord faite par M. de Charmasse, qui a observé la même distribution de fossiles et la même superposition des deux parties de cette formation aux environs de Nolay (Saône-et-Loire) et dans tout le lias des environs d’Autun. D après les indications de M. Moreau , M. Virlet et plusieurs autres membres recueillent des échantillons de calcaire contenant des nids de sulfate de baryte. Us sont répandus çà et là dans la masse du calcaire qui devient cris- tallin aux points de contact. Dans les échantillons recueillis, et tous sans liaison entre eux, la Barytine est accompagnée de fer hydraté, de fer carbonate spathique brunissant et parfois de Pyrite de fer et de Galène. On a trouvé aussi dans cette carrière des Peignes, des morceaux de bois pétrifié , changés , en presque totalité , en carbonate de chaux: seulement, les cavités sont remplies de poussière d’oxyde de fer. De l’autre côté de la route, la So- ciété visite une autre carrière appartenant, comme celle de Touillon, à la partie inférieure du calcaire à gryphées arquées. (i) M. Rozet avait déjà signalé en Bourgogne l'association dans le lias inférieur de la Gryphea oblirjuata , Sow. , à la G. arcuata ( Bull, de la Soc. v t. XII, p. ifio). 666 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , Elle renferme surtout la Terebratula varians , le Cricopora ele irans de Blainville et des tiges d’encrines. La Société s’est dirigée ensuite vers un champ couvert de débris de Bélemnites. La plus ordinaire est celle qui a été désignée d’abord sous le nom d ' Actinocamax fusiformis et que M. d'Orbigny a nommée Belemnites clavalus . Il ne s’en trouve aucune isolée entière; on ne trouve que la partie alvéolaire ou l’extrémité. Plusieurs espèces sont assez communes : ce sont les B. umbilicatuset Bruguierianus. Les actions atmosphé- riques les ont presque toutes fendues longitudinalement. Les autres fossiles qui les accompagnent sont : les Terebratula numismalis et rirnosa caractéristiques de cette couche: deux Spirijer , qui sont différents de ceux du calcaire à gryphées arquées, et dont l’un est très petit; les débris d’ Ammonites y sont très abondants et appartiennent aux Davœi , plaid- costatus y fimbriatus et hybridus . On y rencontre aussi des tiges d’encrines rondes, anguleuses ou se rapprochant de celles du calcaire à gryphées arquées. Le système de couches auxquelles appartiennent ces fossiles est supérieur a ce dernier. La roche est un calcaire très argileux. o De là , la Société s’est rendue à la fabrique de ciment de Vassy, où elle a été très bien accueillie par M. Garnier fils, qui a conduit la Société dans la manufacture et lui a montré tous les détails de ce bel établissement. La Société a examiné quelques carrières environnantes, où plusieurs membres ont recueilli des fossiles, mais en petit nombre, le mauvais temps ne leur ayant pas permis de s’y arrêter. A Vassy, les carrières sont ouvertes dans deux systèmes de couches très différents, l’un éminemment calcaire , d’où l’on extrait toute la pierre à bâtir; l’autre argileux, dont les rares bancs calcaires fournissent la matière première du ci- ment de Vassy. Le premier, et le plus inférieur, peut se dé- signer sous le nom de calcaire à Gryphœa Cymbium , à cause de l’abondance de ce fossile qui y prédomine. Les Bélemnites y sont aussi très abondantes, mais on n’y rencontre plus le Belemnites clavatus . Les fossiles que l’on y trouve assez fré- quemment sont les Ammonites margaritatus , A. arcuatus et A. fimbriatus, le Pecten œquivalvis , les Terebratula quadri- DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 667 fida , T. cingens , T. tetraedra , T. vcirians et beaucoup d’au- tres se rapprochant du T. quadrifida . On trouve encore un Spirifer se rapprochant, pour la forme et la taille, du Spirifer Walcotii; il y a enfin du bois fossile assez semblable, pour l’état de conservation, à celui décrit plus haut dans l’étage inférieur. Les bancs calcaires sont séparés par des bancs peu épais d’une argile calcarifère. Ce système est surmonté par un étage argileux , d’où l’on extrait le ciment de Vassy, et qui se compose d’une argile schisteuse, très résistante à la carrière et se réduisant, par l’action des agents atmosphéri- ques, en une argile très propre à la fabrication des tuiles. On y rencontre des bancs rares de calcaire très argileux. Leur épaisseur moyenne est de 1 à 2 décimètres. L’inférieur est le plus épais , il atteint de 0m,40 à 0m,80 ; c’est surtout lui qu’on exploite pour en faire du ciment. Ils sont séparés par 3 ou 4 mètres d’argile schisteuse. La carrière que la Société a visitée a présenté toutes les circonstances que l’on vient de mentionner. Elle est exploitée à ciel ouvert. On enlève les bancs de schiste et de calcaire sur une profondeur de 10 à 12 mètres , jusqu’à ce qu’on soit arrivé au gros banc qui fournit le ciment et qui est le dernier que l’on exploite. Le ciment est conduit de là à l’établissement par un chemin de fer. Dans cette carrière , la Société a remarqué de beaux filons de chaux carbonatée blanche , cristallisée , qui la traversent dans toute son étendue. Les cristallisations sont de formes très variées, et souvent accompagnées de pyrite de fer , tantôt au-dessus , tantôt au-dessous , ou enclavées dans le calcaire même ; M. Moreau en possède un morceau qui contient des cubes de pyrite dans l’intérieur des cristaux de calcaire. M. Virlet voit dans cette association et cet enchevêtrement curieux, assez fréquent dans les filons , la preuve de l’origine commune, et pour lui évidemment plutonique , de la pyrite et du calcaire. Ces fentes sont toutes dirigées parallèlement entre elles, et cela sur toute l’étendue de la montagne, comme s’en est assuré M. Garnuchot, l’un des directeurs de l’éta- blissement. Leur direction générale est celle du soulèvement de la Côte d’Or , ou E. environ 40,J N. , et leur inclinaison 6G8 REUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , esc toujours vers le N.-O., relevant par conséquent vers le Morvan. Dans un canal creusé dans ce terrain, deux fentes consécutives ont présenté une inclinaison en sens inverse. La Société a observé aussi qu’une faille, qui paraît avoir la même direction, avait donné lieu à un glissement de terrain qui avait abaissé d’un côté les couches à ciment au niveau du calcaire à Gryphœa Cymhium. Un membre a découvert dans un des bancs de ciment un fragment d’os bien con- servé. Les Ammonites et les Bélemnites que l’on y trouve sont à peu près les mêmes que celles du calcaire inférieur: seulement, elles offrent presque toutes à la surface, ainsi que les autres fossiles, une couche mince de sulfure de fer. Les Ammonites les plus ordinaires sont les suivantes : Ammo- nites annulât ns , Desplacei , commuais , assez bien conservées , mais dont on ne peut avoir que le moule intérieur , et les A. serpentinus et heterophyllus , qui sont grandes, très aplaties, èt dont l’on ne rencontre souvent que des empreintes re- couvertes d’un enduit pyriteux, que les autres espèces au con- traire offrent rarement. Les autres fossiles sont des Posi- donia, quelques Aptychus et des débris de Sauriens, tels que des vertèbres, une côte et une mâchoire d ' Ichthyosaurus . On trouve encore dans cette carrière quelques bois fossiles à l’état charbonneux , dont la cassure terne n’offre plus de traces d’organisation. Ces lignites brûlent avec flamme, et forme- raient un excellent combustible s’ils étaient assez abondants pour être exploités. On y rencontre assez fréquemment des troncs aplatis, que les ouvriers désignent sous le nom de planches. Ces planches ont 3 ou 4 mètres de long, 0m,4 à 0m,7 de large et une épaisseur de 0m,03 à 0m,04. Elles sont disposées dans le sens de la stratification. Les alternances de schiste et de calcaire se prolongent sur toute la hauteur de la butte de Vassy, c’est-à-dire sur à peu près 80 à 100 mètres : seulement, à une certaine hauteur, les fossiles changent. A 20 mètres, par exemple, on rencontre dans les petits bancs calcaires les Ammonites JValcotù , elegans , cornucopia et plusieurs autres espèces. La seule Belemnites qu’on y rencontre est presque cylin- drique et offre une dépression longitudinale. Souvent elle DU 14 AU 21 SEPTEMBRE 1815. G 69 est recouverte d’une croûte qui semblerait être du sul- fate de chaux, très abondant d’ailleurs dans ce terrain, et qui serait dû à la décomposition des pyrites. Les autres fossiles sont la Fungia mactra , les Nucula Hcun- meri et rostraiis, le Turbo ornât us , un Pleurotomaria assez rare, plusieurs autres coquilles turbinées , de très petits Pecten , dont on ne voit que le moule intérieur, enfin une Posidonia rarement bien conservée. Malgré le temps pluvieux , la majeure partie de la Société s’est dirigée vers Tour-de-Pré. Le village est situé sur une colline en regard de Vassy ; la petite vallée qui les sépare est creusée dans le calcaire à Gryphœa Cymbium. En montant, la Société retrouve , comme à Vassy , les argiles schisteuses et les bancs à ciment, dont les tranches affleurent dans le chemin. La Société visite ensuite deux carrières situées, l’une à droite, l’autre à gauche du chemin du village qui suit la crête de la colline. L’une est creusée dans le calcaire à en- troques ; l’autre l’est dans une couche qui lui est superposée, et qui consiste en un calcaire bleuâtre compacte, qui con- tient des oolites d’oxyde de fer et qui présente tous les fossiles que l’on rapporte ordinairement à l’oolite ferrugi- neuse. Les plus communs sont : les T erebratula biplicata , T . globata , T . in/lata , T. concilia et T . spinosa , plus rare que les précédentes. On y trouve assez rarement une Bé- iemnite qui pourrait se rapporter au bessinus ou au cana - liculatus . On y rencontre aussi l’ Ammonites Mortensis et plusieurs autres non décrites, un Nautilus assez rare, de nombreux Gervillia , quelques Ttigonia. En descendant pour retourner à Vassy, la Société a visité un autre monti- cule composé en grande partie comme ceux de Vassy et de Tour-de-Pré, mais dont le sommet est composé d’une espèce d’argile, très chargée de grains de quartz, et peut-être de mica , qui lui donnent l’aspect d’un grès. Ce grès se trouve à la partie supérieure des marnes à ciment. En descendant de cette butte et en remontant sur celle de Vassy, la Société a retrouvé la succession des couches indiquée plus haut. De Vassy elle est ensuite revenue à Avallon. Après cet exposé, le secrétaire donne la coupe théorique' G 70 REUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , du terrain de lias parcouru dans la journée, indiquant leur ordre de superposition et leur épaisseur présumée au maxi- mum : Calcaire à enlroques no mètres. Marnes schisteuses avec bancs de calcaire à ciment. . 5o Bancs calcaires à ttryphœa Cymbium 5 Marnes argileuses sans fossiles à septaria calcaires.. 5o Les mêmes marnes avec bans calcaires très argileux à Belemnites cLavatus 3 Calcaire à gryphées arquées 5 Calcaire infra-lias 5 Arkoses Il fait ensuite remarquer que la seule couche sur laquelle la Société ait passé sans la voir est l’assise argilo-marneuse sans coquilles , qui sépare , dans la coupe , la couche à Be- lemnites clavatus de la couche à Gryphœa Cymbium. Cette couche constitue la colline sur laquelle la Société est montée en se rendant de St-Valentin au plateau sur lequel est bâti le village même de Vassy. Quant à préciser où finit le lias et où commence l’oolite inférieure, M. Moreau ne pense pas qu’on puisse séparer du lias le calcaire à Gryphœa Cymbium , ni les marnes qui lui sont supérieures. M. Cotteau est du même avis , et en cela il se conforme à l’opinion de M. d’Orbigny, qui après avoir étudié l’étage basique sur beaucoup de points, a compris dans le lias toutes les couches inférieures au calcaire à entroques. M. Leymerie répond que cette question est très grave, qu’elle a été fortement agitée à l’époque où M. Elie de Beau- mont eut à se prononcer sur le même sujet, à l’occasion de la carte géologique de France; qu’après y avoir bien ré- fléchi , ce savant s’était décidé à ne pas comprendre les cou- ches à Gryphœa Cymbium dans le lias; que c’était surtout la comparaison des terrains d’Angleterre et de France qui l’avait décidé, et que c’était la seule coupure entre le lias et le terrain oolitique inférieur qui pût s’appliquer à ces deux pays. M. Cotteau dit que les fossiles sont pour lui un des guides DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 671 les plus surs pour la classification des terrains et des diverses assises que la Société a eu occasion d’étudier. Si on considère les fossiles des terrains observés aujourd’hui , on verra que certains fossiles caractéristiques passent des couches à Be- lemnites clavatus à celles à Gryphœa Cymbium , tels que les Spirifer , X Ammonites fimbriatus et margaritatus , les Belem- nites umbUicalus et Bruguierianus , fossiles qui ne remontent pas plus haut et ne se trouvent que dans ces deux couches. M. Leyinerie répond que les fossiles ne sont pas pour lui un caractère toujours bien sur, et qu’il préfère s’en rap- porter aux raisons qui ont déterminé M. Elie de Beaumont; à A. vallon la Société ne voit qu’un seul lieu , tandis que ce géologue ne s’est prononcé qu’après avoir suivi les couches d’Angleterre en France, qu’a près avoir observé celles qui semblaient mieux conserver le même caractère par leur nature et par leurs fossiles dans les deux pays. M. Moreau dit qu’il est loin de vouloir juger les faits ob- servés en Angleterre, et classer des terrains qu’il ne connaît pas d’après ce qu’il a vu aux environs d’Avalion : seulement, il ajoute que la série des terrains observés aux environs d’ Aval- Ion existe aussi dans tout l’Auxois; que la Société pourra la voir prochainement à Seinur, et que M. de Bonnard l’a observée aussi sur toute la zone du lias qui entoure le massif granitique du Morvan. Séance du 16 septembre 1845. PRÉSIDENCE DE M. MICHELIN. La séance est ouverte à 7 heures du soir. M. Moreau met sous les yeux de la Société un échantillon de pyroméride trouvée pour la première fois en Fiance, au ballon de Giromagny, par M. Rameau fils , en 4845. La Société a commencé par visiter les Chaumes près d’Avalion , localité signalée par M. de Bonnard comme un gisement d’arkose|coquillière. La plupart des membres en 672 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, ont recueilli des échantillons, avec des empreintes de Gry- phœa , d’ Ammonites , de Spondÿlus , de Spirifer , de Pentacri - etc. On y a rencontré à peu près toutes les coquilles du calcaire à gryphées arquées, moins les Bélemnites , qui se trouvent très rarement dans la partie inférieure de ce cal- caire, dont l’arkose serait, suivant M. Moreau, l’équiva- lent. Les coquilles ont perdu leur test, et n’ont laissé que des empreintes extérieures et intérieures qui sont d’une grande netteté. La roche qui les renferme est éminemment quart - zeuse, avec des nids et des taches de barytine ; quelquefois le vide de la coquille en est rempli ; assez souvent aussi il est tapissé de cristaux de silice. La cassure de la roche tire sur le gris verdâtre. Dans l’endroit où la Société a récolté les pre- miers échantillons, ils reposaient sur l’arkose granitoïde. Ils proviennent tous vraisemblablement de blocs situés plus haut et constituant une partie du sol du bois communal appelé le Bois-Dieu. Là ils reposent sur des calcaires lumachelles de l’infra-lias, fait que la Société n’a pas eu le temps de remar- quer : ce qui coïncide parfaitement avec le fait signalé à Semur, dans la mine de fer de Thoste , par M. J. M. Gueux, direc- teur. (Voir plus loin le compte-rendu des séances à Semur.) La Société a reconnu , dans plusieurs carrières ou vertes sur le plateau des Chaumes, que l’arkose granitoïde en con- stitue toute la surface; puis elle a traversé la vallée du Cousin , creusée entièrement dans le granité , pour retrouver encore aux Pannats , à la même hauteur que sur les Chaumes , les mêmes couches mieux développées. Là, M. Moreau a lait remarquer à la Société le passage du granité à l’arkose grani- toïde , par l’injection de filons de quartz et de barytine. A ces filons se lient de petites assises horizontales de silice et de barytine , s’étendant au milieu du granité, qui présente alors une apparence arénacé. Les assises deviennent de plus en plus nombreuses à mesure que I on s’élève 5 elles augmen- tent aussi de puissance, et finissent par constituer une masse d’arkose granitoïde, qui a quelquefois jusqu’à 2 ou 3 mètres d’épaisseur. Cette arkose renferme, outre la barytine, qui souvent est prédominante, du fluate de chaux et de la galène. Au-des- DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1 8 \ 5 , G 73 sus de cette masse, la Société a remarqué l’argile de l’infra- lias, durcie au contact de Tarkose. L’argile pénétrée de silice a environ 70 à 80 centimètres d’épaisseur. Plusieurs membres ont pu se procurer des échantillons présentant à la fois l’arkose granitoïde et l’argile durcie. M. Virlet a fait observer des filons de cette argile durcie, pénétrant dans l’arkose granitoïde, qu’il regarde comme n’étant là que le granité un peu altéré et réagrégé par la silice. Au-dessus, cette argile, à l’état ordinaire, alterne avec des bancs de cal- caire siliceux, dans lequel on peut reconnaître les coquilles du calcaire lumachelle , de finfra-lias , surtout dans les échantillons exposés depuis longtemps à l’influence des agents atmosphériques. Enfin , on trouve sur une surface de deux ou trois ares, recouvrant tout le système précédent , le calcaire lumachelle de l’infra-lias non altéré. Le mauvais temps a empêché la Société de pouvoir observer tous ces faits avec détail. En montant dans Marant, le terrain présente un granité passant au gneiss et contenant des cristaux de feldspath d’une grande dimension. Quelques uns atteignent jusqu’à 10 centimètres. C’est dans cette roche que se trouve un filon de 3 à 4 mètres de puissance, d’un porphyre rouge quartzi- fère chargé de pinite. Les cristaux de feldspath sont très altérés, et la pinite souvent décolorée. Pour le voir mieux développé, la Société s’est transportée à un autre point du même village, situé au N.-O. La roche était la même, mais moins altérée. Le porphyre s’étend sur une longueur de 4 à 5 kilomètres de Marant à Magny; c’est au moulin Gadoue, à l’endroit où il traverse la rivière , qu’il est plus facile de l’observer. Les deux rives présentent des escar- pements où le filon atteint 20 mètres de puissance. Sa direction , relevée par M. Virlet, est N. 12 à 13° O. De Marant, la Société est allée à Villers-Nonains, en s’ar- rêtant seulement à un kilomètre de Marant, pour voir une roche noire, d’apparence granitoïde, très dure, renfermant beaucoup de mica et pénétrée de filons d’une autre espèce de roche granitoïde blanche. Le gneiss s’est présenté dans les pierres cassées pour l’entretien de la route. A Auxonne, 67 4 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON, on a pu le voir en place. A Villiers-Nonains , une partie des membres de la Société s’est rendue à une fouille faite dans le terrain houiller, près de la rivière du Trinquelin. Laroche la plus abondante qu’on observe dans les déblais de la fouille est un schiste très quartzeux, traversé par des filons de quartz. Le reste est composé de blocs de grès houiller, à élé- ments grossiers, passant au poudingue et renfermant des lits de schiste avec des traces de combustible. L’entrée de la galerie a présenté les mêmes roches , dont les couches se relèvent presque verticalement , dans le sens de la vallée, c’est-à-dire de l’E. à l’O. 11 est demeuré évident pour la Société que la fouille avait été mal dirigée, puisque après avoir percé perpendiculairement à leur direction les cou- ches du terrain houiller, on était arrivé aux roches qui devaient constituer originairement un terrain inférieur et qu’on y a continué la galerie. La direction de cette bande de terrain houiller étant perpendiculaire à la rivière du Trin- quelin, les escarpements de la rive opposée à celle où se trouve la fouille présentent une coupe intéressante, où la Société a retrouvé les mêmes couches. Cette bande houillère, qui commence à Villers-Nonaîns, s’étend en ligne droite jusqu’à Ruffey , près de Semur, en montrant des affleurements de schistes et de grès sur toute la ligne. On a même commencé à la Charmée à extraire du combustible; mais la couche, qui paraissait d’abord présenter quelques chances de réussite dans l’exploitation , s’est bientôt trouvée épuisée. Le combustible était une houille très sèche tout-à-fait impropre aux travaux de forge, mais qui était très avantageuse pour la cuisson du ciment de Vassy. Le mau- vais temps empêcha la Société d’aller plus loin visiter les porphyres qui se montrent de chaque côté de cette bande houillère. La direction du filon de porphyre décrit plus haut coupe celle du terrain houiller presque à angle droit. M. Virlet fait remarquer la ressemblance frappante du terrain houiller de Yillers-Nonains avec celui de Saône-et- Loire ; il s’appuie ici sur des schistes dioritiques modifiés, qui paraissent même passer plus haut à une véritable dio- rite, ainsi que l’annoncent les blocs roulés par la rivière. 11 DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. G75 considère aussi le granité observé près de Marant comme une modification de schistes micacés , identiques avec ceux qu’on observe sur quelques points du département de Saône- et-Loire; le schiste prend aussi la texture gneissique par suite d’injections latérales de quartz, entre les feuillets de la roche. A Villers-Nonains même, un bloc lui a fourni la confirmation de cette manière de voir. M. Hébert fait remarquer que les observations faites pen- dant cette course sur le terrain d’arkose confirment la théorie exposée depuis longtemps par M. Moreau sur leur mode de formation (1). M. Moreau reprend succinctement la manière dont il con- çoit la formation des arkoses. La roche appelée arkose co- quillière ne serait pour lui qu’un mélange de calcaire, qui se déposait , avec le produit des éruptions quartzeuses qui avaient lieu en même temps, ou peu de temps auparavant , et qui couvrait le fond de la mer où se déposaient les cal- caires. M. Virlet répond que tout ce que la Société a pu ob- server jusqu’ici lui semble bien démontrer que l’injection de la silice n’a eu lieu que postérieurement à la formation des couches qui s’en trouvent modifiées. Ce que l’on appelle ici , très improprement selon lui , des arkoses ne sont que différentes roches métamorphosées à une même époque par la pénétration du quartz; phénomène du reste assez fré- quent dans la nature et dont il a décrit des exemples très remarquables aux environs de St-Etienne (Loire). Là ce sont les schistes anciens et les roches houillères qui ont particulièrement été injectées (2). M. Moreau répond que les éruptions quartzeuses ont eu lieu pendant toute la durée de la formation du lias, puis- qu’aux Pannats on trouve des couches bien réglées de cal- caire coquillier, pénétrées de silice et de barytine, alternant avec des bancs d’argile non altérée : donc pour lui ces cou- ches sont contemporaines des éruptions quartzeuses; car si (1) Bull, de la Soc., ire série, t. X, p. 24g- (2) Bull, de la Soe., t. I, 2 e série, p. 83 1. Soc. géol. Tome II, 2e série. 44 676 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , la pénétration avait eu lieu par l’action de filons venant de bas en haut, les argiles auraient été altérées comme les cal- caires. Il faut observer de plus que le tout repose sur l’ar- kose granitoïde , que c’est seulement au contact qu’une portion de l’argile est pénétrée de silice , et que par consé- quent l’action pénétrante de la silice , venant d’en bas , n’a eu aucune influence dans la formation des bancs calcaires sili- ceux qui alternent avec l’argile. M. Yirlet soutient, au contraire, que cette transformation siliceuse est due à une pénétration postérieure de la silice, surgie en même temps que les différentes substances métal- liques et minérales essentiellement plutoniques qui l’accom- pagnent ordinairement. Il ne comprendrait pas comment les coquilles fossiles des couches modifiées auraient pu vivre dans les parages ou des éjections de quartz, de sulfures de plomb et de fer, de fluorine, de barytirie , etc. , se se- raient opérées en même temps que les couches qui les ren- ferment se déposaient. La haute température seule qu’exi- geait le surgissement de semblables matières aurait suffi pour rendre leur existence impossible, quand bien même on n’admettrait pas qu’elles étaient accompagnées de sub- stances acides qui devaient rendre le milieu où elles surgis- saient tout-à-fait impropre au développement des êtres or- ganisés. Le fait du remplissage de quelques coquilles par de la barytine ou par du quartz cristallisé, fait signalé aux Pan- nats par M. Moreau lui-même, paraît d’ailleurs à M. Virlet tout-à-fait démonstratif de la postériorité du phénomène. Il arrive très souvent, comme c’est ici le cas, sur plu- sieurs points, que dans les injections analogues, certains bancs n’en sont pas affectés , tandis que d’autres placés au- dessus sont au contraire tout-à-fait pénétrés ; il suffit pour cela d’une simple différence dans la structure des roches, ou de toute autre circonstance qu?on ne peut pas toujours apprécier à la surface. Certaines hyalomictes schisteuses, par exemple, se présentent parfois en zones isolées au milieu des masses schisteuses , dont elles ne sont que des parties modi- fiées par des injections quartzeuses latérales tout-à-fait analogues. DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 677 Quant à la séparation des substances congénères , c’est , ajoute M. Virlet, un phénomène fréquent dans les terrains métallifères et à filons; il en a cité des exemples remarqua- bles dans les mines de plomb argentifère de Macot et des Cévennes, et dans les filons de quartz ferrugineux de La Tour, près St-Ëtienne ( Bull t. Ier, 2* sér., p. 810 et 836). Ainsi l'isolement de la baryte et des autres substances qui l’accompagnent n’a rien, selon lui, qui puisse surprendre ; ces substances ont bien pu aller se loger à de grandes dis- tances dans les cavités, soit du calcaire à gryphées, soit de tout autres roches , pendant que la silice , qui lui a très pro- bablement servi de flux, restait dans les filons générateurs , ou ne s’étendait que fort peu dans les roches voisines de ces filons. Il a expliqué, dans le mémoire précédemment cité , la tendance qu’a surtout eue la silice à se séparer des autres substances avec lesquelles elle a surgi. Quelle que soit au sur- plus la manière d’envisager ces phénomènes de pénétrations siliceuses et métalliques , comme elles ne dépassent pas dans ce pays certaines couches , elles lui paraissent susceptibles d’y amener l’établissement d’un horizon géologique , qui pourrait peut-être mettre, par la suite, sur la voie de cer- tains faits dont on n’a pas encore la clef. M. Leymerie dit que, pour lui, l’arkose est, comme pour M. Moreau , l’effet d’eaux thermales quartzifères , mais qu’il partage l’opinion de M. Virlet sur la formation de la roche des Chaumes, et qu’il croit quelle est le résultat d’une modi- fication des couches calcaires déjà déposées. Pour lui, les traces de barytine trouvées à différentes hauteurs dans le lias seraient aussi la conséquence des émissions de quartz venues postérieurement. Il cite, comme présentant un fait identique, les géodes de Couzon (Rhône). Outre la bary- tine, elles renferment delà silice cristallisée en aiguilles, et on croirait, si l’on ne connaissait pas le gisement, qu’elles proviennent de roches ignées. M. Moreau dit qu’il n’a jamais rencontré la silice avec la galène et la barytine dans le lias des environs d’Avallon; que du reste il attribuait cette absence de la silice à une sorte de départ qui aurait eu lieu au contact des eaux char- 678 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , gées de calcaire. Il croit les géodes de Couzou formées par des éruptions postérieures au dépôt des couches calcaires. M. Yirlet fait observer que cette formation de géodes et de rognons de substances particulières au milieu de couches calcaires ou argileuses, se rapporte au phénomène des dé- placements moléculaires dont il a entretenu précédemment la Société ( Bull . , t. Il, 2e sér., p. 198) ; il n’a par conséquent rien de commun avec celui des injections plutoniques. M. Virlet donne ensuite lecture de la note suivante. Sur la nécessité de supprimer en géologie le mot arkose. Je n’ai jamais mieux compris les inconvénients du mot arkose que depuis que je suis arrivé à Avallon ; car les significations toutes différentes que chacun semble vouloir lui attribuer me paraissent de nature à amener une véritable confusion , très fâ- cheuse pour la science. M. Brongniart, en créant le mot arkose pour désigner certaines variétés de grès, lui a donné un sens plutôt minéralogique que géologique ; il l'a caractérisé comme étant une roche cT agrégation hétérogène , a texture grenue , essentiellement composée de grains de quartz hyalin et de grains de feldspath ou laminaire , ou compacte , ou argiloïde . Si ce nouveau nom ainsi défini avait un certain avan- tage pour classer minéralogiquement des grès exclusivement com- posés de quartz et de feldspath à divers états, il avait de graves in- convénients sous le rapport géologique : d’abord , parce que rien n’étant plus variable que les roches d’agrégation mécanique , il peut se faire qu’une même masse de grès à l’état d’arkose à la partie inférieure devienne un grès psammitc ou un grès macigno à la partie supérieure, ou passe même à un poudingue, en sorte qu’une même roche, un même banc devrait recevoir plusieurs noms si l’on ne voulait pas confondre sous un seul différentes es- pèces ou variétés minéralogiques. Un autre inconvénient, plus grave, selon moi, de considérer les roches seulement sous le rapport minéralogique , c’est de faire souvent confondre des choses qui, bien que composées des mêmes éléments, peuvent cependant être géologiquement très différentes. Ainsi la plupart des grès dévoniens et houillers étant de véritables arkoses minéralogiques , devraient se trouver réunis , d’après ce principe , aux différents grès du trias et d’autres formations plus récentes, avec des grès tertiaires et même avec des sables tout-à- DIT 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 679 fait récents, auxquels il ne manque que la cohésion pour former de véritables arkoses. M. d’Omalius d’Halloy, dans sa nouvelle classification des ro- ches considérées minéralogiquement , a encore étendu la significa- tion du mot arkose. m’applique , non seulement aux roches d’a- grégation , mais aussi aux roches cristallines composées de quartz et de feldspath ; en sorte que pour lui certaines pegmatites , et entre autres les pegmatites hébraïques , certains greisens , etc., sont aussi des arkoses minéralogiques. Il a donc augmenté un peu plus les inconvénients géologiques de ce mot. M. de Bonnard , dans son excellente Notice géognostique sur quelques parties de la Bourgogne , a donné à l’arkose une significa- tion toute géologique ; et si l’on se reporte à l’époque déjà fort ancienne où il a cherché par cette désignation à caractériser un terrain qui n’avait pas encore été classé géologiquement , l’emploi du mot arkose, dans ce sens , quoiqu'un autre lui eût été préfé- rable, était beaucoup plus spécieux ; car ii avait pour but de faire entrer dans la série géologique un nouveau terme quLpouvait avoir autant de valeur qu’en avait alors le mot alpin, qui cepen- dant a fini par disparaître de la nomenclature du moment où l’on a eu reconnu que les calcaires et les grès dits alpins ne for- maient pas un terrain particulier, mais devaient être rapportés , soit au terrain jurassique , soit au terrain crayeux. Sous le nom d’arkose, M. de Bonnard a particulièrement com- pris des roches agrégées ou friables, formées de débris granitiques, reposant immédiatement sur le granité lui-même , et offrant par- fois avec celui-ci une espèce de passage plus apparent que réel, mais qui s’explique d’autant plus facilement que souvent ces masses incohérentes, nommées Arène ou Krain dans différentes lo- calités de la Bourgogne , et Gore dans les environs de Lyon , ne sont que du granité désagrégé sur place ou remanié par les eaux. Dans le premier cas, je ne vois pas la nécessité d’enlever au granité altéré , mais resté en place, son nom pour lui en suhstituer un autre ; dans le second , ii y a à envisager l’époque et le mode de remaniement , qui peuvent être bien différents , suivant les localités. Les arkoses résultant du remaniement sont-elles contemporaines ou presque contemporaines de l’époque granitique ? Ont-elles une origine analogue à celle de certains conglomérats trachytiques et basaltiques auxquels le surgissement des tracliytes et des basaltes ont donné lieu? C’était l’opinion de Boblaye, qui, dans un ar- ticle sur l’ Arkose , inséré dans le Dictionnaire pittoresque d’histoire 680 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , naturelle , cite , aux environs de Nantes et de Pontivy, des arkoses en veines et en filons dans les schistes anciens , comme le granité lui-même. Je pense, au contraire, qu’une partie des arkoses de la Bourgogne ont une origine arénacée , à la manière des grès ordinaires, et appartiennent en grande partie aux grès keupé- riens inférieurs de ce pays (grès keupériens moyens des Vosges); grès qui, lorsqu’ils ne sont pas modifiés, sont généralement à teintes blanchâtres ou verdâtres , le plus souvent à l’état d’arkose proprement dite, mais quelquefois passant à des grès siliceux voi- sins des quartzites. Ces arkoses keupériennes reposent fréquemment sans intermédiaire sur le granité , comme , par exemple , à Re- milly, près de Sombernon , où MM. Dury, de Chollet et moi nous avons pu les observer en allant visiter les carrières de granité qu’on y exploite pour le pavage des rues de Dijon. Là ces grès arkosiens sont recouverts par les marnes irisées, avec gypses, etc. ; mais ailleurs ils paraissent tout-à-fait indépendants. C’est ainsi qu’on les observe isolés, reposant immédiatement sur le granité aux environs d’Autun, à, Auxy, à Saint-Emiland, dans les bois de Montjeu, etc. Dans le Charolais, les fameux grès des Bois-Francs qu’on ex- ploite pour pavés , pour meules , et comme pierres réfractaires, appartiennent aux arkoses keupériennes et affectent les mêmes circonstances géologiques qu’aux environs d’Autun. Arkose chromif ère desEcouchets (Saône-et-Loire) appartient , au contraire , au grès bigarré , qui , dans cette localité , a été modifié par des pénétrations et injections siliceuses chromifères postérieures, exactement comme le lias, l’infra-lias et les autres terrains des environs d’Avallon l’ont été sur plusieurs points par des phénomènes siliceux analogues , mais où la barytine , la fluo- rine , les sulfates de cuivre , de fer et de plomb , l’hydrate et le carbonate de fer, etc., ont remplacé l’oxyde de chrome- Enfin la plupart des géologues du pays donnent encore au mot arkose une valeur tout-à-fait différente des significations que je viens de passer succinctement en revue ; ils l’appliquent au phéno- mène de silicification désigné ci-dessus, et ils l’appellent phénomène arkosien : or, comme ce phénomène a affecté à la fois plusieurs ter- rains, il en résulte que voilà le mot arkose devenu en quelque sorte synonyme de métamorphisme . Sans doute on conçoit que des ro- ches, bien que très différentes entre elles, ayant été modifiées postérieurement à leur formation, par les mêmes agents plutoni- ques, aient pu acquérir certains caractères d’analogies minéralo- giques ; mais je ne vois aucun motif raisonnable pour donner à la fois au calcaire à gryphées arquées , resté d’ailleurs si bien ca- Dü 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 681 ractérisé par tous ses autres fossiles , aux argiles et aux calcaires coquilliers infra-liasiques , ainsi qu’aux grès et aux arènes , le nom générique d’arkose , par cela seul que ces roches ont , les unes et les autres, été affectées des mêmes modifications, quand surtout un peu plus loin on se trouve obligé de leur conserver leurs noms , parce que là elles n’ont subi aucun changement. Il suffirait donc d’ajouter tout bonnement une épithète pour indi- quer ces modifications et la manière dont on peut les concevoir, comme, par exemple grès , lias silicifiés ; arène , argile , lunia- chelles silici fiées, etc. En résumé , le mot arkose est un de ces mots malheureux , sans valeur, qui ne servent qu’à embrouiller les questions, et à susciter des discussions interminables et sans but. Je crois donc que s’il peut être encore conservé en minéralogie , pour désigner une certaine variété de grès à éléments définis , il faut s’empresser de le bannir de la nomenclature géologique, par suite de la diffi- culté de pouvoir lui donner un sens géologique précis et qui puisse être adopté par tout le monde (1). M. Michelin annonce avoir reçu plusieurs échantillons de marbre de la fabrique de M. Hélie à Noyers, et offerts par ce dernier à la Société. Les marbres ont été extraits de carrières situées à Cours près Noyers, et exploitées par M. Honoré Gariel. M. Rathier, qui a visité ces carrières, dit que les couches qui fournissent le marbre sont situées entre la grande oolite et l’Oxford clay. il constitue tantôt un accident dans un cal- caire jaunâtre, comme à Noyers même, tantôt, comme à Cours, ce sont des couches qui ont de 20 à 50 centimètres d’épaisseur. La position de ce marbre est constante; à Châtel- Gérard , à Fulvy, à Royers ÿ à Cours, il repose immédiate- ment sur la grande oolite. Dans l’arrondissement de Ton- nerre, au-dessus des couches contenant ce marbre, se trouvent des bancs de calcaire et d’argile renfermant d’immenses quan- tités de Térébratules et de Polypiers , et supportant l’argile d’Oxford. M. Yirlet ajoute que la veille, après avoir quitté la (i) Voir les diverses opinions émises sur ce sujet à la Réunion extraor- dinaire à Autun, en i836 , Bull, de la Soc. géol,t itc sér., t. VII. 682 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, Société à Vassy, à l’instant où elle retournait à Avallon, il s’est rendu seul à la carrière du Buisson-des-Varennes , située près de Lucy-le-Bois , pour observer des calcaires semblables aux marbres de Noyers, et reposant, comme ces derniers, immédiatement au-dessus de la grande oolite. Il a reconnu que cette carrière , appartenant à 1VL. Honoré Gariel, et que sans le mauvais temps la Société devait aussi visiter, aboutissait précisément vers l’E. à une grande taille dont les circonstances du terrain ne lui ont pas permis de reconnaître la largeur et la hauteur. Elle est remplie par une argile plastique jaunâtre , renfermant des blocs et des débris calcaires plus ou moins volumineux , détachés du terrain. M. Virlet se proposait d’examiner les calcaires rouges, dont les échantillons trouvés à Vassy avaient excité sa curiosité. Malheureusement, les bancs, nuancés de teintes rubigineuses, ne forment là que les assises les plus superficielles, et rie permettent pas de bien juger des phénomènes qui ont déterminé cette coloration. Séance du vendredi 19 septembre 1845. PRÉSIDENCE DE M. MICHELIN. La séance est ouverte à 7 heures du soir. M. Moreau , secrétaire , rend compte de la course du mer- credi 17 septembre. La Société, au sortir de la ville, sur la nouvelle route de Paris, au lieu dit la Croix-Sirot , a visité un dépôt d’argile renfermant des cailloux et des blocs arrondis. Les uns sont des silex tout-à-fait analogues à ceux de la craie, les autres des grès passant à des poudingues à ciment siliceux. Ce dépôt repose ici sur le calcaire à gryphées arquées ; au Gros-Mont , près Taroiseau , sur la grande oolite, et à Châtel-Censoir , sur le coral rag. La Société s’est rendue de là à Pontaubei t. Avant d'arriver au village , elle a visité Une carrière ouverte dans l’arkose , et dans laquelle plusieurs membres ont recueilli des échan- tillons contenant delà galène, de la fluorine et de la barytine. DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 683 En descendant la petite vallée qui conduit au village, on a reconnu dans la tranchée de la route les couches suivantes en allant de haut en bas : sables diluviens appartenant à lin dépôt de cailloux roulés qu’on retrouve dans l’intérieur même du village ; calcaires pénétrés de silice et de bary tine ; arkose granitoïde, puis l'arène et enfin le granité. Le village même est situé sur un monticule dont la base est granitique , et qui est composé, sur une élévation de plus de 20 mètres, de sables et de cailloux roulés. Ces sables se montrent de tous les côtés; la Société en observe une fort belle coupe dans une fouille nouvellement faite au milieu du village pour les fondations d’une maison. La voici telle qu elle a été recueillie par M. Virlet. Le fond de l’excavation montre une assise de 7 pieds de gros sable assez uniforme; au-dessus vient une autre assise de 2 pieds de sable plus gros, avec de gros galets irrégulièrement mé- langés, puis un second lit de sable sans galets; au-dessus une deuxième zone de gros sable avec un mélange de gros galets ; enfin le dépôt s# termine par 6 à 7 pieds de sable comme l’assise du fond, mais renfermant çà et là quelques blocs anguleux de granité ou de pegmatite; on remarque aussi dans cette assise des grains de limonite. Ces sables sont entièrement formés de détritus granitiques , et parmi les blocs plus ou moins volumineux qu’ils renferment, on en distingue de granile, de gneiss, de pegmatite, de quartz et d’arkose, mais jamais de calcaire. La Société tout entière ne voit là qu’un phénomène dilu- vien qu’explique la position même du dépôt. Il est placé, en effet, au débouché d’une vallée granitique très étroite, dans une plaine, en face de montagnes calcaires qui ont dû con- tribuer, avec l’élargissement du lit de la rivière et la pente moins torrentielle, à déterminer ce dépôt. Amené là par une catastrophe soudaine, une crue extraordinaire et subite des eaux du Cousin, les cailloux et les sables ont naturellement dû s’y arrêter et s’y amonceler. L’absence de calcaire et la nature des débris composant ce dépôt concordent parfaite- ment avec cette explication, car ce sont précisément ceux des roches qui forment les deux rives du Cousin , dépour- 681 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , vues de calcaire jusqu’à Pontaubert. Ainsi tout semble indi- quer que la cause qui a amené là cet énorme dépôt venait du massif du Morvan, et personne n’a eu la pensée que ce pouvait être une moraine. En descendant la rivière, la vallée est couverte, sur une épaisseur de plusieurs mètres, de sables et de cailloux qui se relient très régulièrement avec ceux de Pontaubert. On peut en voir une belle coupe dans la berge de la rivière près de la papeterie au Vault. A une lieue plus bas, à Yallone , ces dépôts diminuent d’épais- seur, ne se trouvent plus dans la vallée qu’à la hauteur des grandes eaux , et ne se présentent plus alors que comme un phénomène alluvien. Au sortir du village, à droite, dans un chemin creux, après avoir passé le ruisseau d’Islaud , la Société va examiner un autre gîte d’arkose signalé par M. de Bonnard, et où les phénomènes se produisent sous un jour tout particulier; on y voit des blocs de granité de 1 à 2 mètres cubes, et des fragments anguleux plus petits engagés dans une pâte de cal- caire ferrugineux qui contient de la galène , de la barytine et un peu de silice. Le granité a éprouvé des altérations très sensibles, le feld- spath est presque entièrement passé à l’état de kaolin, et le mica est devenu verdâtre. Deux opinions sont émises sur la formation de ces masses granitiques : les uns veulent y voir avec M. Leymerie une stratification, et par conséquent une alternance de l’arkose granitoïde avec le calcaire; les autres pensent avec M. Virlet, au contraire, que ces apparences ne sont pas réelles, qu’elles tiennent à ce que les blocs de gra- nité détachés de la masse principale, quoique restés en place , ont de très grandes dimensions en longueur par rap- port à leur peu d’épaisseur , ce qui leur donne cette appa- rence de stratification , mais qu’ils ne sont que reliés entre eux par la matière calcaire qui est venue postérieurement les envelopper. Quantà l’altération, M. Moreau pense qu’elle ne s’est pas faite sur place, et il fait remarquer que ce fait vient à l’appui de l’hypothèse qu’il a émise que dans certaines localités les émissions quartzeuses avaient été contemporaines du dépôt DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 685 calcaire ; il ne peut comprendre autrement cette pâte calcaire pénétrée des mêmes minéraux que l’arkose et qui entoure de tous côtés les blocs granitiques. La Société se dirige vers le Gros-Mont, en suivant la route de Vézelay. Au lieu dit la Plante-Martin , elle observe sur la route une coupe de 4 à 5 mètres dans le calcaire à Gryphœa Cymbium qui repose sur des marnes sans coquilles, et qui est identique, dans sa nature , ses fossiles et sa posi- tion géologique avec celui que la Société a observé à Yassy. M. Virlet y trouve un très grand échantillon d’un polypier très branchu que l’on rencontre assez fréquemment dans divers étages du lias des environs d’Avallon, et que M. Mi- chelin regarde comme une nouvelle espèce de Ceriopora. Plus haut, on voit les argiles schisteuses et le calcaire à ciment de Vassy qui leur est subordonné; au-dessus vien- nent les premiers affleurements du calcaire à entroques. Au contact de l’argile et du calcaire il existe une petite source , et à son sujet M. Moreau fait observer que toutes les sources un peu considérables des environs d’Avallon se trouvent dans celte position. Les plus remarquables des environs sont celles de Damecy-sur-Vault, Givry, Girolles, Àunay, Lucy-le-Bois, Dissangis; cette dernière pourrait faire tourner un moulin. M. Rozet, dans son mémoire sur les montagnes qui sépa- rent la Loire de la Saône , indique en cet endroit un passage des argiles au calcaire à entroques; mais la Société ne peut constater le fait à cause des cultures. Le calcaire à entro- ques se présente là avec les caractères que lui a assignés M. de Bonnard. A part les entroques, les autres fossiles y sont rares. Une carrière ouverte dans la partie supérieure de ce calcaire en a fourni à peine quelques uns peu reconnais- sables ; la partie inférieure en contact avec l’argile en ren- ferme davantage^ la partie tout-àd'ait supérieure en contact avec la couche à Terebratula spinosa et T. biplieata , etc., se trouve à Tour-de-Pré percée de trous de pholades et autres animaux perforants. Ces trous , très nombreux et très rap- prochés, donnent à la surface de ce banc un aspect tout singulier. 686 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , Quittant alors la route , la Société se dirige à travers champs sur la butte de Gros-Mont. A en juger par les frag- ments qui recouvrent le sol , elle traverse, pour arriver au sommet, un système de couches désigné par M. Lacordaire sous le nom de calcaire à bucardes à cause de l’abondance de la Pholadomya protei t et par M. de Bonnard sous celui de calcaire blanc jaunâtre marneux. A une certaine hauteur, au milieu de ce système, on rencontre des nids de luma- chelles entièrement composés de Peignes dont le test noir se détache sur le fond gris de la pierre. Ces Peignes offrent plusieurs espèces dont le test est ordinairement lisse; on y rencontre aussi la Mya script a , des Modiolci , des Pinna , le Mytilus amplus , des Ammonites , des pattes de crustacés. Il passe dans la partie supérieure à un calcaire moins marneux, moins feuilleté, renfermant des Gervillia et la Pholadomya Vezelayi de M. Lajoye. Ce calcaire est séparé de la formation oolilique par une couche de marnes cal- caires, où la Pholadomia Vezelayi est très commune. Cette couche est caractérisée par une Ammonites , souvent défor- mée et à tours très enveloppants. Arrivée sur la friche qui sert de base à la butte même de Gros-Mont, la Société a remarqué en place une lumachelle formée de coquilles dont le test a disparu, mais dans lesquelles pourtant on distingue des formes de Terebratula et d’ Ammonites , et aussi quelques polypiers analogues à ceux du forest marble de Ranville (Calvados). M. Michelin a reconnu parmi eux des Ceriopora} des Diastopora , et notamment la Fungia orbulithes de Lamou- roux. Enfin , sur le plateau est la grande oolite parfaite- ment reconnaissable. La roche est dénudée sur un kilomètre de longueur ; les fossiles y sont rares et mal définis. A l’extrémité de ce plateau qui regarde Yézelay, dans une petite dépression , entre deux éminences calcaires , se trou- vent des blocs degrés accompagnés de sables et de silex (I). (1) Le massif de collines où se trouvent ces blocs est isolé de tout le pays environnant par les vallées de la Cure et du Cousin qui le bordent, l'une à l’est , l’autre à l'ouest , et vont le terminer au nord en se joignant l’une à l’autre. La différence de niveau entre le fond de ces vallées et le sommet de» collines où se trouvent les blocs, est de 200 mètres. L’ouver- DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 687 Le premier que la Société a rencontré, et qui est le plus haut sur la montagne, a près de 3 mètres cubes. Il a ses angles émoussés. Son grain est assez fin et homogène: seule- ment, on y rencontre fréquemment de petits galets de la grosseur d’un pois. Tous les autres sont de forme et de com- position identique. Ils sont dispersés sur une ligne à peu près droite et dans le fond d’une légère dépression. Du premier bloc aux autres , il y a de 2 à 300 mètres de distance. Les deux blocs qu’on rencontre ensuite sont adossés et ont chacun au moins 7 à 8 mètres cubes , à en juger d’après la partie hors de terre. A 50 mètres plus loin , on en trouve un quatrième de même volume que ces derniers, puis quelques autres plus petits. Ils sont accompagnés de sables provenant de leur désagrégation. Le sable, ainsi que les blocs de grès, ont une couleur rouge, quelquefois très prononcée, et il s’y mêle même des oxydes de fer; ils atteignent, en cer- tains endroits, plus de 7 mètres de profondeur, ainsi qu’on a pu le voir dans une fouille pratiquée à 20 mètres au-dessus du bloc le plus élevé. Diverses autres fouilles ont été faites pour rechercher d’autres blocs, mais sans résultats. On n’a rencontré que de l’argile, des silex et du minerai de fer, le tout mélangé de sable. Deux hypothèses principales ont été émises sur l’origine de ces blocs. Les uns les regardent comme un reste des grès néocomiens en place, les autres comme des restes de ces grès, mais remaniés et déposés là à l’époque des terrains ter- tiaires moyens. M. Yirlet pense que ces masses de grès rouge, à grains fins, tout-à-fait identiques avec les sables qui les enveloppent encore en partie, pourraient bien être le résultat d’une ag- glutination qui se serait faite sur place, ainsi que cela a eu lieu pour les blocs qu’on observe isolés au milieu de la plu- part des dépôts sableux, quoique ceux-ci soient restés incohé- rents ( Bulletin , t. II , 2e série, p. 202 ). Une partie des sables turc des vallées est de 3 à 4 kilomètres. Du côté du midi, le massif pré- senta un escarpement qui regarde le granité. 688 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, enveloppants auraient été entraînés parles dénudations pos- térieures de la surface, tandis que les blocs étaient beaucoup trop lourds pour avoir pu être transportés bien loin. Cette manière d’envisager la formation de blocs de grès de Gros- Mont n’empêche pas , selon M. Virlet, qu’ils ne puissent, ainsi que les sables, se lier au phénomène qui a déterminé l’horizon rouge signalé par M. Leymerie dans toutes les col- lines environnantes. M. Moreau fait observer qu’il existe sur le même massif de montagnes à 4 kilomètres de là , au lieu dit les Grands Bois , un autre dépôt de grès beaucoup moins tenace , mais qui est mélangé de calcaire compacte ou cristallisé en masses assez volumineuses. lise désagrège plus facilement; sa cou- leur tire sur le blanc, tandis que celui de Gros-Mont est rouge- blanc. Il ne se présente pas en blocs, et semble former une masse plus continue ; mais du reste il est toujours accidentel au milieu du calcaire qui l’entoure de tous côtés, et dont il paraît avoir rempli une fente. Il est probable que ces deux dépôts sont dus au même phénomène. En allant à Taroiseau, la Société a remarqué deux car- rières à ciel ouvert de 10 à 12 mètres de profondeur prati- quées dans le calcaire à entroques. La Société, conduite par M. d’Assay, chez lequel elle avait été reçue avec beaucoup de prévenance, s’est rendue à Pierre- Perthuis, où se présentent en grand les phénomènes de l’arkose. Le pays tire son nom d’une arcade naturelle, que l’on va visiter comme l’une des belles curiosités du pays, et qui se détache de l’escarpement. Le flanc de la colline forme un des appuis de la voûte, qui n’est elle-même qu’une continuation du plateau d’arkose qui fait le front de l’es- carpement, et le second pilier est en partie formé par des filons de quartz. La Société a vu, au-dessus du plateau, en arrivant de Taroiseau, l’argile durcie. La partie superficielle renferme aussi quelques parties calcaires. La roche d’arkose renferme sur quelques points, outre ses minéraux habi- tuels, silice, barytine et fluorine, des mouches de cuivre carbonate vert et bleu, provenant sans doute de la décom- position des pyrites. Le croquis, fîg. lre, pi. XX, dessiné par DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 689 M. Virlet, ainsi que les détails suivants, également recueillis par lui, donnera une idée suffisante de sa disposition et de sa composition. La partie supérieure aa) qui forme en même temps tout le plateau d’arkose qui domine de ce côté la vallée de la Cure, est composée d’une énorme masse amor- phe de quartz, mélangé de nombreux noyanx et veinules de barytine, de fluorine, etc. ; elle présente aussi des cavités géodiques et des fentes où la silice s’est cristallisée. Là, rien n’indique plus à quelle roche il faut rapporter cette masse silicifiée , dont les caractères originaires ont été complète- ment modifiés; b b représente la couche d’arène (granité remanié) également silicifiée et pénétrée de filons latéraux de quartz, qui lui donnent une apparence de stratification; c c est le granité aussi souvent pénétré de silice dans les parties supérieures, et dont les anfractuosités ont été nivelées par l’arène; enfin, d d d indique des filons de quartz blanc laiteux, tandis que toute la masse silicifiée a un fond général gris-noirâtre, dû, sans nul doute, aux éléments de la roche imbibée. En descendant de l’escarpement vers le pré où coule la Cure, la Société a pu observer sur un long développement la même succession de roches , d’abord le plateau d’arkose siliceuse , avec indices de stratification horizontale , formant une espèce de manteau au-dessus de l’escarpement, puis le dépôt d’arène remplissant les inégalités du granité qui s’élève plus ou moins selon les endroits Dans l’arène , des lits minces de silice, avec fluorine et barytine, paraissent augmenter en nombre et en épaisseur à mesure qu’on s’élève, et finissent par constituer une masse presque toute siliceuse de 3 a b mètres, qui forme le front de l’escarpement. Toutes ces couches se lient par de nombreux filons de même nature , qui se perdent généralement dans le banc d’arkose, quoique plusieurs le traversent. Ceux des membres qui ont suivi le fond de la vallée pour se rendre au pont de la Cure ont pu voir , à l’endroit où elle se rétrécit beaucoup, et qu’on appelle l’étranglement de Pierre-Perthuis , de belles masses de granité devenu très dur et çrès siliceux par suite delà pénétration du quartz, qui y forme de nombreuses 690 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , veinules. L’escarpement presque vertical qu’il forme près du pont est tout couvert d’un lichen noirâtre ( Umbilicaria pustulata ), qui, selon M. Yirlet, accompagne toujours les grandes masses de quartz; il donne de loin à la roche un aspect tout particulier. En montant aux ruines du château de Pierre-Perthuis , qui appartint au sire Enguerrand de Marigny, la Société marche sur la tranche de beaux filons de quartz, qui traversent le granité, et dont la direction générale est à peu près N.-S. L’heure avancée force la Société à se rendre directement à Yézelay, où elle arrive à la nuit. M. Cotteau, secrétaire, rend compte des faits observés dans les journées des 18 et 19 septembre. En descendant la pente de la montagne sur laquelle est bâtie Vézelay, la Société a vu se développer, inférieurement au calcaire compacte de la grande oolite qui en forme le som- met, des couches marno-calcaires où abondent les Pholado- myes. Ces couches , successivement appelées calcaire à Bu - cardes par M. Lacordaire, calcaire blanc- jaunâtre marneux par M. de Bonnard, calcaire à Pholadomyes par M. Lajoye, semblent par leur position correspondre au jullers \ earth des Anglais. Au pied de la montagne, des carrières sont creusées dans la partie inférieure de cette assise; là les couches se présentent plus compactes et moins marneuses; les fossiles y sont rares; les Pholadomyes, si nombreuses à la partie su- périeure, n’apparaissent pas encore; une Ammonite grande et plate, appartenant probablement à une espèce nouvelle, caractérise cette couche avec quelques , Pintia et quelques Modiola. A 1 kilomètre environ, se présente la partie supé- rieure , bien plus riche en fossiles ; puis au-dessus repose , en stratification concordante, la grande oolite : c’est d’abord un calcaire peu résistant , d’apparence schisteuse , sans fos- siles, et qui passe insensiblement à un calcaire compacte et fortement oolitique. La grande oolite n’a pas dans cet en- droit plus de 20 mètres d’épaisseur , et elle est promptement recouverte par des argiles et des sables rougeâtres , où abon- dent des rognons de calcaire siliceux ; avec ces argiles se DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 691 trouvent, clans beaucoup de localités, sans que cependant la Société ait pu les observer en cet endroit, des bancs cal- caires pétris, en quelque sorte, de débris de corps organisés; ce ne sont que des fragments de crinoïdes, des pointes d’Our- sins, des polypiers appartenant aux genres Eschura , Cerio- pora , Astrea , etc. Certaines dalles sont pleines de polypiers; dans quelques unes abondent des Terebratula , dans d’autres des Avicula. Ces différentes couches, supérieures à la grande oolite, qui forme dans le département de l’Yonne et dans les départements voisins un horizon certain , et inférieures à l’étage oxfordien, correspondent probablement au cornbrash , au forest marble et au Bradjord clay des Anglais, sans cepen- dant les représenter identiquement. En descendant la montagne , la Société a pu constater quelques affleurements des bancs calcaires, pétris de cri- noïdes et de polypiers supérieurs à la grande oolite, qui au-dessous se montre déjà plus compacte et plus puissante. Au fond de la vallée, entre Chamoux et Asnières, apparais- sent les couches supérieures du calcaire blanc-jaunâtre marneux; pendant plus d’un kilomètre, les travaux exécutés pour la route les ont mises à découvert; de nombreux fossiles jonchent le sol , et la Société a pu y recueillir, avec la Pko- ladomya Vezelayi ( Mya Vezelayi d’Arch.) , qui est le fos- sile dominant , beaucoup d’espèces appartenant aux genres Ammonites , Nanti lus , Pleurotomaria , Ostrea , Pecten , Lima , Mytilus , Cardium , Gervillia , Isocardia , Area , Trigonia , Pholadomya , Lutraria et Terebratula. Une belle carapace de crustacé a été trouvée par un des membres de la Société. Plusieurs des genres fossiles qu’on recueille dans cette couche caractérisent de nos jours les stations vaseuses et leur réunion dans ce terrain s’explique par la nature mar- neuse des couches qui les renferment. La plupart des Phola- domya , légèrement inclinées, le tube en haut, se trouvent encore dans la position où elles ont vécu. La grande oolite reparaît ensuite et acquiert un puissant développement dans les carrières d’Avrigny, où elle est exploitée en grand et fournit pour les constructions une excellente pierre dure. Les fossiles y sont rares; la roche, disposée en banc* très Soc. géol. Tome II, a® série. 45 GO 2 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , épais, est grisâtre, fortement oolitique et à cassure terreuse. D’Avrigny à Chatel-Censoir, la grande oolite forme, et le fond des vallées, et la base des montagnes qui sont couron- nées par les bancs à polypiers et à crinoïdes, dont la Société avait constaté les affleurements avant d arriver à Chamoux. A Chatel-Censoir, cet ensemble de couches est recouvert par un lambeau oxfordien, dont l’épaisseur est très mince, mais qui contient de nombreux fossiles de l’étage oxfordien , tels que les Nautilus giganteus , Ammonites biplex , Ammonites cor- datus,Belernnites hastatas, Gryphœa dilatata , Pecten fibrosus , Disaster propinquus . AChatel Censoir, la Société, reçue avec beaucoup de dis- tinction par la famille de M. Gustave Cotteau, a passé quelques heures à examiner sa nombreuse collection. Au sortir de la ville , l’Oxford clay plonge rapidement sous le coral-rag , qui acquiert dans cette localité une grande épaisseur : couronnant d’abord le sommet des montagnes, il la constitue bientôt tout entière. Ces premières couches coralliennes ne contiennent ni les Nerinea, ni les Diceras , si abondantes dans la partie moyenne et supérieure; elles sont cependant facilement reconnaissables à leur couleur blanche, à leur texture saccha- roïde, aux Peclen , aux Lima , aux grosses tiges d ' Apiocrinites, aux nombreux polypiers qu’on y rencontre. A un kilomètre environ de Chatel-Censoir, une partie des membres s’est arrêtée pour recueillir des fossilesdu coral-rag dans une carrière creusée sur le flanc de la montagne , pen- dant que le reste de la Société , traversant la rivière de l’Yonne, et gravissant la montagne opposée, située au-dessus du hameau de Magny, visitait une traînée de blocs erratiques qui s’étend sur les roches dénudées du coral-rag , à 100 mè- tres environ au-dessus du niveau de la rivière. Ces blocs , qui atteignent plusieurs mètres cubes de volume, sont pour la plupart des poudingues composés de silex unis par un ciment de grès quartzeux. Les silex appartiennent sans aucun doute au terrain crétacé. Un des membres en a détaché un fragment avec le moule d’un oursin de la craie , le Discoïdea eonica d’Agassiz, qui assignait ainsi à ces blocs une origine certaine. DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. G9 Continuant à suivre la vallée de l’Yonne, la Société est arrivée au hameau de Saussois ; pressée par le temps, elle n’a pu admirer qu’un instant les roches coralliennes qui, taillées à pic, présentent sur leurs flancs de profondes ondu- lations , se projettent au-dessus de la rivière qui coule à leur base et atteignent jusqu’à 70 mètres d’élévation. Les champs voisins sont entièrement recouverts d’ Astrea , de Meandrina , de Caryophyllia et d’énormes Lithodendron. Traversant toujours le coral-rag, la Société est arrivée au village d’Avigny,aux environs duquel elle a constaté la pré- sence de sables et de cailloux diluviens. De là à Vermanton , la nuit a empêché la Société de constater le passage du co- ral-rag à l’étage oxfordien supérieur, puissante couche cal- caréo-marneuse qui constitue le sol sur lequel est bâtie la ville de Vermanton. Le lendemain matin la Société est allée visiter une pro- fonde tranchée exécutée dans les couches de l’Oxford clay supérieur, pour l’ouverture de la route de Paris à Lyon. En cet endroit, cet étage acquiert un immense dévelop- pement et constitue toute la montagne, qui a plus de 200 mètres d’élévation. Il se compose de calcaires compactes à cassure eonchoïde , disposés en bancs peu épais et alter- nant avec des marnes. Les fossiles, rares dans rensemble de cette couche, se retrouvent plus nombreux à la partie su- périeure où abondent les Pholadomya , les Cardium , les Pecten , les Lima. , les Mytilns^ les Pinna, etc , etc., et un Am- monites voisin de V Ammonites bipiex (Sowerby ). Dans cette couche se sont manifestés plusieurs glissements qui suivent tous à peu près la même direction ; on s’est ensuite dirigé vers le village d’Arcy en traversant toujours les calcaires marneux de l’Oxford clay supérieur. Les grottes d’Arcy sont situées à un kilomètre environ du village de ce nom , sur les bords de la Cure, dans les couches de l’Oxford clay moyen. La Société les a visitées, conduite par le propriétaire M. le comte Destutt d’ Assay. Deux heures ont été consacrées à admi- rer les nombreuses stalactites qui, variant à l’infini de forme et de grosseur, là s’élancent en colonnes légères, ici s’étalent en draperies transparentes , et partout tapissent la voûte de bi- 694 REUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, zarres pendentifs. Les cailloux roules granitiques et quartzeux qu’on retrouve sous les stalagmites , les traces d’érosion que présente la voûte, prouvent qu’un courant a longtemps par- couru ces grottes. Un os d’éléphant qu’on y a trouvé il y a quelques années confirme l’opinion de la plupart des mem- bres de la Société qui ont rattaché le creusement des grottes d’Arcy à l’époque diluvienne. Elles sont habitées par une multitude de chauves-souris dont les excréments amoncelés forment des amas comparables au guano, et qu’on pourrait peut-être utiliser comme engrais. La longueur absolue de ces grottes, relevées avec beaucoup de soin par M. Belgrand, est de 876 mètres (v. pl. XX, fig. 12). La Société, après avoir examiné au haut de la montagne dans laquelle sont creusées les grottes une carrière ouverte dans l’ooîite corallienne , a traversé la Cure, et se dirigeant vers Avallon , a successivement passé en revue : l°les cou- ches oxfordiennes que caractérisent de nombreux rognons de silex mêlés au calcaire, et où quelques membres ont re- cueilli des fragments de Gryphœa dilatata et d’ Ammonites biplex; 2° les couches supérieures à la grande oolite, cou» ches tantôt calcaires, tantôt marneuses, où abondent les Terebratula et les Polypiers ; 3° la grande oolite si bien dé- veloppée à Saint-Morée ; 4° inférieurement à la grande oolite, le calcaire blanc-jaunâtre et ses nombreuses P holadomya ,* 5® l’oolite inférieure et le calcaire à entroques ; 6° enfin les différentes assises du lias. A un kilomètre environ d’Avallon , la Société , dirigée par M. Belgrand, a constaté une faille profonde qui abaisse brusquement les couches à Gryphœa Cymbium au niveau de l’infra-lias. L’infra-lias, ou couche du lias inférieur au calcaire à Gryphœa arcuata , est dans cet endroit très bien développé, et la Société, avant de rentrer à Avallon, a pu y recueillir de nombreux fossiles, des Ammonites , des Modiola9 des Pla - giostoma , des Pecten , des Lima , des Plicatula , des Terebratula et des plaquettes entièrement composées de moules de Sine- muria . Le secrétaire, résumant ensuite dans une coupe théorique les différents terrains observés dans cette excursion de trois DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 695 jours , trace le tableau suivant, dans lequel les nombreuses couches jurassiques que la Société a successivement étudiées sont réunies en quatre étages distincts, qui correspondent selon lui aux mêmes étages observés non seulement en France, mais en Angleterre. Si dans l’étude de ces nom- breuses couches, ajoute le secrétaire, on faisait abstraction de la paléontologie , il serait bien difficile d’assigner à cha- cune l’horizon qui lui convient , tant les caractères minéra- logiques sont variables, tant la superposition est parfois dif- ficile à saisir. Tableau des étages inférieurs et moyens du terrain jurassique aux environs d' A vallon* Étage oxfoi'dien . Étage de la grande oolite. . . Étage de Foolite inférieure. . 1 htage basique, Coral-rag. Oxford clay supérieur. Oxford clay moyen. Oxford clay inférieur. Couche remplaçant le cornbrash , le forest inarble, le Bradford clay. Grande oolite. Fullers’ earth. Oolite inférieure. Calcaire à entroques. /Marnes supérieures. Calcaire à Gryphœa Cymbium. Marnes sans fossiles. Marnes à petites Bélemnites. Calcaire à Gryphœa arcuata. La discussion s’ouvre ensuite sur le rapport des deux se- crétaires. M. Virlet d’Aoust , à l’occasion des blocs erratiques ob- servés près de Chatel-Censoir , sur la montagne de Magny, ajoute que la direction des blocs est O.-N.-O. àE.-S.-E., qu’ils forment une traînée remarquable et présentent tous les carac- tères d’une moraine latérale , sans cependant admettre pour cela qu’ils aient pour origine ce mode de dépôt; il ne croit pas qu’on puisse se prononcer sur cette simple observation locale. Quant aux arkoses observées au sortir de Pontaubert dans la course du 17, il pense qu’elles constituent véritable- ment la roche arkosienne, telle qu’il la comprend, telle que ()96 RÉUNION extraordinaire a a vallon , l a comprise celui qui le premier a donné à une roche le nom iïcirkose; le granité, tantôt en grains, tantôt en bloc , a été relié, pénétré et imbibé par les éruptions siliceuses et les autres substances qui accompagnaient la silice. M. Leymerie, répondant à M. Virlet , pense que les ar- koses de Pontaubert ne diffèrent en rien des arkoses précé- demment observées; c’est un phénomène identique qui a produit les unes et les autres : seulement, à Pontaubert, le granité était sur place lorsqu'il a été pénétré par la silice , quia constitué une arkose granitoïde stratifiée. Les blocs de Chatel-Censoir , selon M. Leymerie, doivent être rattachés aux grès observés sur les flancs de la montagne de Gros-Mont. Si du sommet de Gros-Mont on jette les yeux autour de soi, on s’aperçoit bientôt que la vallée et les collines voisines sont entièrement recouvertes d’argile et de sables rougeâtres, qui se prolongent au loin; ces sables , ces argiles, ces blocs de grès, ou de poudingues, sont dus, sui- vant M. Leymerie, à la même cause; ce terrain lui semble être tertiaire et devoir se lier à un dépôt qui existe très bien développé dans l’Aube, au-dessus de l’argile plastique; il en a toute la physionomie et pourrait bien en être la con- tinuation. M. Yirlet admet l’idée de M. Leymerie quant aux blocs de Gros-Mont, qui paraissent bien se lier au phénomène tertiaire qui a produit la rubéfaction environnante; mais il ne pense pas que ceux de la montagne de Magny, quoique très pro- bablement tertiaires aussi , soient dus au même phénomène; leur composition et leur manière d’être lui paraissent telle- ment différentes des blocs de Gros-Mont , qu’il ne lui paraît pas possible d'admettre une même origine. M. Leymerie parle ensuite de certains fossiles observés par lui dans la collection de M. Cotteau, et rapportés par ce dernier à l'étage oxfordien supérieur; dans le départe- ment de l’Aube, ces fossiles se trouvent dans le kimmeridge clay. C’est un exemple qui prouve, ajoute M. Leymerie, à quelles graves erreurs pourrait entraîner l’abus de la paléon- tologie. M. Robineau-Desvoisdy fait une communication tendant DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1846. 697 à prouver l’origine des grès micacés et des silex qu’on re- trouve à la surface de la formation jurassique. Il regrette que la Société n’ait pas eu plus de temps à sa disposition ; en une journée il l’aurait conduite sur les terrains coralliens, portlandiens et néocomiens, sur les sables, les grès, les argiles, la craie et les argiles sableuses à silex de la Puisaye. M. Des- voisdy expose qu’en Puisaye les sables et les grès ferrugineux forment un terrain particulier entre l’Yonne et la Loire; que ces grès et ces sables y acquièrent parfois une puissance con- sidérable, qu’ils reposent toujours sur le gault et le néoco- mien, qu’ils peuvent entièrement recouvrir pour gagner le portlandien ; il les a vus s’avancer sur le coral-rag ; il connaît même une saisonnière tout-à-fait sur ce coral-ra£. Il désire o que cette formation devienne l’objet d’une étude particulière et reçoive un nom spécial. En attendant , il propose celui de sables ou grès salviens ou de Saint-Sauveur. Il expose ensuite que la craie verte et même la craie blanche sont en recouvrement sur ces sables et ces grès; o * que les agiles sableuses avec rognons de silex couvrent en- suite cette même craie, qu’elles imprègnent et frappent de métamorphisme; que la silice a franchi les sables et les grès; qu’elle a gagné et imprégné également les terrains néoco- rnien et portlandien. Il en résulte pour lui que ces sables , ces grès , cette craie et ces silex ont autrefois recouvert les terrains observés à Magny près Chatel-Censoir , où leur puissance était peu considérable, et qu’ils ont en presque totalité été entraînés par les eaux , à l’époque de la catastrophe qui creusa nos vallées actuelles ; toutefois ils n’ont pas été si nettement ba- layés qu’ils n’aient laissé sur place une petite partie solide de leur masse et de leurs fragments. Telle est, selon lui , l’origine des blocs étudiés dans la journée d’avant-hier , et que quelques membres considèrent comme erratiques. M. Robineau ne comprend dans son explication que les grès observés près de Chatel-Censoir; il ne prétend pas pour le moment étendre cette même explication jusqu’aux grès de Gros-Mont et d’Avallon. Il termine en disant : La craie et les silex qui dominent 698 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , aujourd’hui les montagnes de Fontaine et de Bouliy prou- vent qu’autrefois son niveau pouvait aisément s’étendre jus- qu’à A vallon ; lorsque le soulèvement du granité du Morvan et de la périphérie du bassin de Paris eut lieu , il en résulta un affaissement médium , une sorte de cuvier où se préci- pitèrent les diverses masses des terrains entraînés par les eaux; telle est la véritable origine des énormes alluvions qui comblent ce bassin et lui donnent l’aspect qu’il offre aujour- d’hui. Il est donc nécessaire, pour le bien comprendre, d’étudier les différents terrains qui ont supérieurement con- couru à sa formation. M. Virlet fait remarquer ensuite que les grottes d'Arcy , dont il a relevé la direction à l’aide de la boussole, traver- sent la montagne à peu près en ligne droite et suivent exac- tement la direction du méridien magnétique. Il rappelle à ce sujet qu’elles lui ont paru confirmer mieux qu’aucune autre la théorie pour laquelle il croit devoir reclamer la priorité (voir Bull., t. Il, III, IV et VI) , sa- voir : que la cause première et indispensable de l'existence des cavernes se trouve dans les dislocations de la croûte du globe. Les fractures existant une fois dans le sol, différentes causes secondaires , comme des émanations gazeuses, le passage d’eaux minérales, acides ou thermales , la pénétra- tion des eaux de la surface, des courants, des éboule- ments, etc., etc., ont pu contribuer isolément, ou tour à tour, ou même quelquefois simultanément, à leur donner ies for- mes actuelles. La meilleure preuve de la coïncidence des cavernes avec les lignes de fractures se tire, selon lui, de la présence même des nombreuses stalactites et stalagmites, qui rendent par leurs dispositions bizarres, ces excavations naturelles , un objet de si grande curiosité pour les amateurs; car leur formation n’est que la conséquence de ces frac- tures, qui permettent aux eaux de s’infiltrer et de déposer, sous forme de concrétions . le carbonate de chaux qu’elles contiennent. Les fractures qui ont donné lieu à la formation des grottes d’Arcy sont inclinées de l’E. à 10. , ce qu’on peut très bien observer à l’entrée de celle dite la Rocheteuse , ainsi désignée DU I 4 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 099 parce qu’elle ne présente pas de concrétions et ce qui s’ac- cuse, dans celle que la Société a visitée, par la disposition des masses stalactitiques qui occupent particulièrement le côté oriental où aboutit la partie supérieure de la fracture. Il est facile de reconnaître, ajoute M. Virlet, aux diffé- rentes lignes de niveaux et aux sillons arrondis qu’on observe le long des parois latérales , que cette caverne a jadis servi de passage «à un courant souterrain , courant qui très proba» bleinent était formé, comme l’a dit M. Arraut dans la des- cription qu’il en a donnée , d’une partie des eaux de la Cure, et cela est d’autant plus probable que le phénomène se re- produit actuellement dans une troisième grotte , appelée les Goulettes , que la Société a observée un peu plus loin , et dont l’ouverture, située au niveau actuel de la rivière, reçoit par infiltration une partie île ses eaux , qui vont ensuite sortir de l’autre côté de la montagne, où elles font mouvoir, dit-on, un moulin. M. Virlet rappelle, à ce sujet, qu’on a là une ex- plication bien simple du phénomène des katavothrons de la Grèce, espèce de gouffres où toutes les eaux des nombreuses plaines fermées de cette contrée vont se perdre, pour aller surgir ensuite au loin et former ces kephalovrysis (têtes de sources ou sources-mères') , qui donnent naissance à quelques uns des fleuves les plus fameux de l’antiquité. Enfin , M. Virlet ajoute encore, en terminant, qu’indépendamment de la présence du dépôt d’arène ou de gravier qu’on trouve au- dessous des stalagmites et qui recouvre des limons ou al- terne avec eux , gravier qui a été reconnu être tout-à-fait le même que celui que charrie actuellement la rivière, il trouve encore une preuve de l’existence d’un courant rapide à tra- vers la grotte, dans les espèces de pots ou trous coniques en forme de pains de sucre, qu’on remarque dans l'embran- chement latéral. Il regarde ces trous, dont la profondeur est de 2 à 3 pieds, comme le résultat d’une perforation due au tournoiement des eaux et des graviers qu’elles entraînaient, et comme tout-à-fait identiques avec ceux qu’on désigne sous les noms de pots ou de marmites de géants et qu’on observe à la surface du sol , dans plusieurs contrées. Les marmites de la grotte d’Arcy ont été perforées a travers la 700 REUNION EXTRAORDINAIRES A AVALLON, couche stalagmitique qui forme le sol actuel, ce qui indique qu’il y a eu intermittence dans le passage du courant qui l’a traversée, car les stalagmites n’ont pu se déposer qu’après l’émersion du sol. On pourrait peut-être trouver une expli- cation à cette circonstance curieuse, en supposant qu’à l’époque où le lit de la rivière se trouvait déjà creusé bien au-dessous de la grotte , les eaux se sont trouvées relevées à son niveau, soit par un barrage , soit par quelque grande crue. Le secrétaire donne connaissance de la note suivante : Note sur V arkose coquillière , par M. Deschamps , pharmacien à Avallon. Parmi les terrains qui composent le sol de l’arrondissement d’ Avallon, et qui ont été étudiés par M. de Bonnard, on en ren- contre deux qu’il a nommés, il y a déjà longtemps, arkose cris- talline et arkose coquillière. M. de Bonnard pensait que l’arkose cristalline contenait des débris de corps organisés , que sa texture rendait invisibles , et que l’arkose coquillière était de l’arkose cristalline altérée , dans laquelle les fossiles étaient très visibles. Mais cette hypothèse n’est pas admissible , parce que l’arkose coquillière n’est pas une alté- ration de l’arkose cristalline , et parce que si l’arkose cristalline contenait des fossiles, il serait très facile de les distinguer, car les Uni o hybrida , les Gryphea arcuata , les Spirifer pinguis et Walcotii , certaines Terebratula et quelques Ammonites , sont trop volumineuses pour pouvoir être entièrement dissimulées. M. Malinowski, professeur à Semur, pense , si je l’ai bien com- pris, que les mollusques qui se trouvent dans cette couche ont été en contact avec une dissolution aqueuse de silice , qui leur a per- mis de vivre , d’absorber de la silice , de la transmettre à leur co - quille et de se l’approprier insensiblement, jusqu’à ce que leur matière organique fût entièrement silicifiée , etc. Cette théorie de la formation de l’arkose coquillière ne me paraît pas pouvoir être admise , parce que la silice , à cet état , n’aurait pu produire qu’une imprégnation analogue à celle que l’on rencontre dans les calcaires supérieurs. M. Virlet d’Aoust pense qu’un filon de quarz est sorti, s’est répandu sur le calcaire à gryphées et Fa pénétré. Cette opinion DU i4 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 701 est trop intimement liée à celle de M. Moreau pour que je cherche à l’en séparer. M. Leymerie pense que le calcaire à gryphées arquées existait, qu’il a été pénétré par de la vapeur de silice , et que cette idée peut être adoptée, quoiqu’elle soit en dehors des lois chimiques, parce que la chimie est incapable d’expliquer certains phéno- mènes. Je reconnais, avec M. Leymerie, que la chimie est impuis- sante , mais je ne crois pas qu’on puisse la devancer sans craindre de commettre des erreurs. Sans la chimie, que pourrait le géo- logue sur la coloration des roches? Comment aurait-il appris que la matière colorante de l’améthyste était due à du ferrate sodique ? etc. Admettons un instant, avec M. Leymerie, que la silice était volatile, et recherchons ce qui est arrivé. La silice, à cette époque, devait être assujettie aux lois qui règlent la volatilisation , devait, d’après sa nature , avoir son point de condensation très près de son point de volatisation , et ne pouvait que se condenser, en affectant différents états, au-dessous du calcaire à gryphées ar- quées. En supposant que l’acide silicique puisse être entraîné, comme l’acide borique , par la vapeur d’eau , ce qui est impos- sible, on ne pourrait pas encore expliquer la métamorphose de ce calcaire; car en admettant ce nouvel état de la silice, on serait forcé de reconnaître que son action comme agent chimique devait être extrêmement faible , et que son action , comme agent méca- nique, devait être nulle. M. Moreau admet que cette arkose a été formée , parce que l’arkose cristalline s’est répandue au-dessous ou à la surface du calcaire à gryphées arquées et l’a empâté à l’époque où ce calcaire était en voie de formation. Cette opinion ne me paraît pas susceptible d’être admise, parce qu’en supposant que l’arkose cristalline jouissait , à l’époque de sa sortie, du maximum de fluidité que peuvent atteindre les ma- tières de cette nature, on serait encore très embarrassé, non pour recouvrir le calcaire lumachelle ou le calcaire à gryphées arquées, mais pour expliquer leur pénétration , etc. ; car, ou la mer recou- vrait ces calcaires , ou elle était retirée depuis peu de temps , ou bien elle était retirée depuis longtemps, et ces calcaires étaient à sec. Dans le premier cas, la matière arkosienne eût été étonnée, refroidie à sa surface, et aurait perdu , quand bien même la tem- pérature de l’eau eût été à 100°, toutes les propriétés qui pou- vaient la rendre apte à produire l’action annoncée. Il en aurait été de même dans le second cas, et même dans le troisième > 702 REUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON, parce que la surface de l’arkose se serait refroidie au contact d’un corps moins chaud, et n’aurait pu que recouvrir le calcaire. Les théories de ces savants géologues ne pouvant pas rendre compte de ce qui s’est passé lors de l’éruption arkosienne, cher- chons à expliquer autrement ce phénomène , qui doit être rangé dans les vraies métamorphoses. Lorsque i’arkose souleva la croûte terrestre pour se répandre à sa surface, elle avait une consistance pâteuse, peu fluide, et peu susceptible de former des coulées, car elle se déposa en roches saillantes, qui, dans beaucoup d’endroits, couronnent du granité plus ou moins altéré. A cette époque, le calcaire lumachelle et le calcaire à gryphées arquées devaient être déjà anciens , puis- qu’on trouve les fossiles de ces arkoses parvenus au terme de leur croissance. Lorsque l’éruption se fit jour, elle ne sortit pas seule du sein de la terre, car elle fut accompagnée par une quantité plus ou moins considérable de gaz carbonique, sulfureux, sulfhydrique , etc. ; d’eau chargée d’acides, au nombre desquels on doit placer, comme le plus important, l’acide chlorhydrique. Ces acides ren- contrèrent des silicates, enlevèrent les tbases de ces silicates, et retinrent en dissolution plus ou moins complète l’acide silicique. Une partie de cette dissolution, étendue ou non par l’eau de la mer, éprouva un de ces mouvements moléculaires si fréquents dans les corps qui ont plusieurs formes allotropiques , et une partie de l’acide silicique se déposa , pour former notre grès arko- sien , en retenant un peu d’alumine , un peu de chaux et plus ou moins de fer. Cette manière d’expliquer les phénomènes arkosiens ne doit pas paraître extraordinaire, car on sait : Que les éruptions sont accompagnées de gaz, d’acides plus ou moins énergiques , etc. ; Que le silicium est un des corps simples qui se présentent avec plusieurs formes allotropiques ; Que les silicates se divisent en silicates facilement altérables par les acides , et en silicates non altérables par les acides éner- giques qui ne restent que peu de temps en contact avec ces roches ; Que la différence qui existe entre ces silicates tient à ce que les premiers contiennent le silicium A, et les derniers le silicium B ; Que l’acide silicique qui correspond au silicium B est inso- luble, tandis que l’acide silicique qui correspond au silicium A est soluble dans l’eau et dans l’eau acidulée; DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1815. 703 Que cette dissolution peut laisser cristalliser la silice ou l’aban- donner sous forme de stalactites ou sous forme de gelée ; Que le silicium A que contient cette silice passe au silicium B, non seulement par une élévation de température, mais encore à la température ordinaire , comme les corps qui ont plusieurs états allotropiques passent de l’un à l’autre , avec le temps , avec ou sans élévation de température. S’il n’y a rien dans cette manière d’expliquer les phénomènes arkosiens qui puisse paraître extraordinaire, il est donc possible de conclure : Que l’arkose coquillière n’est pas de l’arkose cristalline altérée ; Que l’éruption arkosienne était pâteuse, et qu’elle n’a pu pé nétrer le calcaire à gryphées arquées ; Que cette éruption a été accompagnée de beaucoup de gaz et de beaucoup d’acides qui ont agi sur les silicates, en dissolvant les bases et mettant en liberté l’acide silicique A dans une eau acide ; Que cette eau acide a décomposé le calcaire lumachelle et le calcaire à gryphées arquées ; Que la silice s’est substituée au calcaire ; Que dans quelques circonstances le dépôt de silice s’est fait assez lentement pour que la silice puisse cristalliser ; Que peut-être la température à laquelle les roches voisines de l’éruption arkosienne ont pu être portées a facilité ce changement moléculaire et donné beaucoup de solidité à certaines parties de ces roches ; Que l’arkose coquillière doit être considérée comme une méta- morphose du calcaire à gryphées arquées, et non comme une arkose ; Et enfin, que cette métamorphose peut servir à fixer l’âge de l’éruption arkosienne. M. Leymerie , répondant à M. Deschamps, dit que, sans vouloir réfuter sa théorie, il pense qu’il a examiné la ques- tion peut-être un peu plus en chimiste qu’en géologue. Il faut considérer d'un peu plus haut les phénomènes à la suite desquels ont eu lieu la formation des arkoses , et ne pas oublier que la nature a eu à sa disposition des moyens bien plus puissants que ceux dont on peut faire l’essai dans un laboratoire; si jusqu’ici les chimistes n’ont pu sublimer la silice, c’est qu’ils n’ont point à leur aide les instruments nécessaires. M. Leymerie ajoute qu’il n’explique pas , comme 704 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , le prétend M. Deschamps, l’imbibition de la silice au tra- vers des roches granitiques, à l’aide de la sublimation; il n'a recours à ce dernier moyen que pour expliquer la pré- sence de la galène, de la fluorine, etc. A l’appui de ce qu’il avance, il cite plusieurs exemples de cristallisation par su- blimation. M. Yirlet d’Aoust ajoute que dans les usines à plomb on trouve souvent des cristaux de galène produits par voie de sublimation; que dans les cheminées de certains foyers de forge, il se forme journellement des espèces de stalac- tites de peroxyde de fer, ce qui ne peut évidemment avoir lieu que par volatilisation ; il ne voit donc pas pourquoi on n’admettrait pas que la silice ait pu aussi être amenée à l’état de vapeur, surtout lorsqu'on fait intervenir, comme le fait M. Deschamps lui-même, certains acides: mais parce que nous n’avons pas encore trouvé le moyen de rendre cette substance volatile, ce n’est pas une raison d’en conclure que la nature ne possède pas ce moyen. Il n’y a pas bien longtemps encore que nous regardions ce corps comme tout-à-fait infusible; cependant un physicien, M. Gaudin , est parvenu à le fondre et à le filer comme du verre; et un chimiste, M. Ebelmen , à la suite d’un travail sur les éthers siliciques, est parvenu à reproduire artificiellement plusieurs espèces de minéraux siliceux. M. Virlet pense, au reste, qu’il n’y a même pas besoin d’admettre aucune hypothèse pour recon- naître que la silice a pu surgir à l’état de fluidité ignée ; qu’il suffit de remarquer que, combinée avec d’autres corps, elle peut devenir très fusible, et qu’elle forme en effet un des principaux éléments du verre et du cristal. Le fer et le manganèse, également si peu fusibles par eux-mêmes, de- viennent au contraire des fondants très énergiques lorsqu’ils sont combinés avec d’autres corps ; ainsi l’on sait , par exemple , que toute terre réfractaire cesse de l’être lorsqu’on la mélange d’une très petite quantité d’oxyde de fer ou de manganèse. Or, comme la silice paraît avoir rarement surgi seule , elle peut être regardée cemme l’élément d’un verre particulier, fondu dans le grand creuset de la terre, d’où certaines causes l’ont fait surgir à sa surface. DU 14 AU 21 SEPTEMBRE 1815. 705 M. Royer fait les communications suivantes : 1° Note sur les terrains jurassiques supérieurs et moyens de la Haute-Marne , par M. E. Royer. Les faits que la Société géologique de France a observés dans le département de l’Yonne et la difficulté que l’étage jurassique moyen de ce pays offre à une division chronologique normale m’ont engagé à dire quelques mots sur la composition de ce même terrain dans la Haute-Marne , où il me semble plus régulière- ment constitué, me proposant d’amener, par la comparaison, l’éclaircissement des parties encore obscures de ces terrains. Les terrains de la grande série géologique qui existent dans la Haute-Marne se présentent dans un ordre régulier , formant les uns au-dessus des autres des étages dont la nature, alternativement marneuse et tendre, calcaire et dure, se traduit ostensiblement à la surface, aux yeux de l’observateur, par des bandes sensible- ment parallèles de plaines et d’escarpements ; c’est ainsi que chacun des étages des terrains jurassique et basique se distingue de la manière la plus nette et la plus tranchée , par ses formes topographiques, aux yeux les moins exercés. Les terrains crétacé inférieur et néocomien occupent la partie basse de l’arrondissement de Vassy ; le terrain portlandien , après s’être élevé de dessous les assises néocomiennes , vient présenter les têtes de ses couches, en formant une suite d’escarpements qui, à partir de Bar-sur-Aube , s’étendent, en traversant le départe- ment par Biaise et Donjeux,vers Houdelaincourt , dans le dépar- tement de la Meuse. Les marnes kimméridiennes constituent les pentes de cette série de collines, et s’appuient sur les parties supé- rieures de l’étage jurassique moyen , qui forment des plaines à leurs pieds. Les calcaires durs, compactes, oolitiques et coral- liens qui constituent cette partie supérieure de l’étage moyen forment à leur tour une arête qui se dessine en une chaîne paral- lèle à la première , s’étendant de Châtillon-sur- Seine par Château- Villain, Bologne et Andelot, vers Neuf- Château ; cette arête, plus prononcée que la première, varie dans sa forme, suivant que les terrains qui la composent sont plus ou moins durs et coralliens , ou plus ou moins tendres et marneux ; dans le premier cas , des roches dures présentent des escarpements quelquefois verticaux ; dans le second , des pentes prolongées annoncent îa facile désa- grégation de la roche. Les marnes oxfordiennes ressortent en collines ou contre-forts ondulés au pied de cette chaîne de hau- TOC) RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , leurs; vers les vallées du Rognon à Andelot, et de la Marne à Roocourt et Soncourt, le terrain corallien, composé dérochés résistant à la décomposition , donne aux coteaux la forme de fa- laises élevées au-dessus de la plaine; à partir delà Marne, à mesure que l’on s’avance vers l’Aujon, et l’Aube à Maranville et Clervaux, le terrain corallien proprement dit disparaît, la nature compacte et marneuse prend le dessus, les marnes oxfordiennes deviennent plus puissantes, et occupent une plus large zone: aussi les vallées où coulent ces rivières sont bordées jusque vers Château-Villain et Montigny de coteaux à pentes douces et al- longées. A la base des marnes oxfordiennes commence une plaine constituée par la partie supérieure du premier étage jurassique. En descendant la série, les mêmes phénomènes se répètent, oc- casionnés par les marnes de Bradford, les marnes supérieures du lias , les marnes inférieures du même terrain, et enfin par les marnes irisées, chacun de ces terrains tendres étant couronné par un terrain dur. L’observateur placé dans la plaine, à une cer- taine distance de l’une de ces chaînes, en parcourt de l’œil l’é- tendue; il saisit avec la plus grande facilité le rapport que les assises qui lui présentent leurs tranches ont avec celles sur les- quelles elles reposent, et qu’il voit s’enfoncer sous elles ; la division en étages lui paraît alors facile et naturelle; pour lui chaque étage sera une chaîne de collines , et s’arrêtera là où la pente cessera ; et, en effet, là où la pente cesse, là aussi le sol change de nature. Les terrains (jurassiques, basique et keupérien) sont donc, dans la Haute-Marne, parfaitement divisés et distincts; il se présentent en étages réguliers et assez nettement accusés par leurs formes orographiques, pour que l’on puisse, à priori , les distinguer sans avoir recours en quelque sorte aux caractères minéralogiques et paléoutologiques. La forme orographique est du reste, ainsi que l’on doit le comprendre d’après ce que je viens de dire, la consé- quence de la nature minéralogique. Les caractères paléontolo- giques constituent la principale base sur laquelle on doit établir la division des terrains ; l’ensemble d’un certain nombre d’espèces fossiles caractérise un terrain ; souvent même quelques unes s’y concentrent, et, ce qui est plus encore, ne sortent point de cer- taines assises très circonscrites et peu puissantes; mais la suite de cette notice fera voir que si l’on veut diviser les terrains jurassi- ques en plusieurs étages , la délimitation de ce que l’on a appelé terrains jurassiques moyen et supérieur ne pourra être la consé- quence des caractères paléontologiques, mais plutôt de la nature minéralogique. DU 14 AU *24 SEPTEMBRE 1845. 07 J’ai dit que les terrains jurassique et liasique se dessinent en masses formant des arêtes parallèles dominant des dépressions; voici , en termes succincts , comment se composent , en allant de haut en bas , les deux masses jurassiques supérieure et moyenne; pour plus de clarté , je désignerai par une lettre chacune des sous-divisions de ces terrains. Il existe dans la Haute-Marne et la Meuse une formation locale qui doit se rattacher au terrain jurassique supérieur , et qui vient s’interposer entre lui et le terrain néocomien : je veux parler de l’oolite du Barrois; comme elle n’entre point dans mon sujet, je n’en parlerai pas ici. A. Le terrain portlandien est une masse fort puissante , com- posée d’assises de calcaires différents par leur texture, et reposant les unes sur les autres , savoir : en allant de haut en bas, a , cal- caires grossiers, perforés et cariés , ayant l’aspect des meulières tertiaires; b , calcaires marno-compactes , noduleux et fragmen- taires, contenant une série de bancs ooliliques à oolites très fines que l’on a prises dans le département de l’Aube pour l’oolite du Barrois, et se terminant à leur base par des marnes grisâtres et blanches ; c, calcaires compactes, à pâte fine, lithographique, à cassure conchoïde, devenant à leur base déplus en plus mar- neux; et passant aux marnes kimméridiennes (v.jtëg-. 11, pl. XX). B. Sous le terrain portlandien existent les marnes kimméri- diennes; cette formation, également puissante, bien caractérisée par une allure régulière et constante et par l’ensemble de ses fossiles, peut se diviser en plusieurs petits étages alternativement calcaires et marneux. C. Sous les marnes kimméridiennes se présente un terrain composé principalement de calcaires ; à leur partie supérieure ils sont grossiers, noduleux, et renferment des bancs oolitiques d’un gris jaunâtre, avec taches bleues, alternant avec des marnes; à leur partie inférieure , ils sont compactes, à cassure conchoïde, divisés en petits bancs nombreux , et se terminent par quelques gros bancs très durs, à structure fissde et raboteuse; cette divi- sion a été assimilée au calcaire à astartes. L. Immédiatement sous ces bancs repose l’oolite corallienne, terrain calcaire qui, par ses fossiles et ses caractères minéralogi- ques bien tranchés et constants, peut servir d’horizon géologique; les oolites qui composent cette roche passent par tous les degrés de grosseur, depuis celle d’un grain de navette jusqu’à celle d’une noisette. L’on y rencontre des bancs compactes, crayeux , Soc. Géol. Tome 11 série. 4fi 708 rp;ünion extraordinaire a a vallon, et d’autres grumeleux, à texture lâche; tous ces calcaires sont généralement d’une grande blancheur. E. A l’exception de l’oolite qui , ainsi que je le dirai , s’affai- blit au point de disparaître presque complètement, les quatre divisions que je viens de signaler ont une allure généralement constante et facile à saisir. Il n’en est pas de même du terrain corallien ; c’est ainsi que je crois devoir désigner les bancs très variables qui remplissent l’intervalle compris entre l’oolite co- rallienne et les marnes oxfordiennes; à la partie supérieure l’on trouve toujours des calcaires compactes, grossiers et en gros bancs, et une assise oolitique à fines ooli tes ; mais au-dessous, le terrain présente deux aspects tout-à-fait différents, suivant les localités où il s’est formé: a , le plus souvent ce sont des calcaires compactes, à cassure conclioide, en bancs parfaitement stratifiés; à mesure que l’on descend, ils deviennent marneux , bleuâtres , ils alternent avec des marnes schisteuses qui finissent par prédo- miner , et passent au groupe suivant , qui est l’oxfordien supé- rieur ; tel est l’un des aspects de ce terrain ; b , dans la seconde manière d’être , les calcaires sont grumeleux , renferment une grande quantité de polypiers et de coraux empâtés, sont mal stratifiés, et ont, en un mot, tous les caractères du calcaire coral- lien ordinaire ; à leur base , ils deviennent également marneux , tout en conservant l’aspect grumeleux , et passent aussi aux marnes oxfordiennes supérieures, qui ont contracté, elles aussi, ce ca- ractère grumeleux à leur partie supérieure en contact avec le terrain corallien. Ces deux manières d’être de ce terrain sont parallèles ; les roches de l’une et de l’autre se sont déposées à la même époque, et paraissent n’être que la continuation les unes des autres; pendant qu’un sédiment fin s’accumulait au fond de la mer , et donnait lieu à la formation de roches compactes , se stratifiant paisiblement, à côté, des récifs de coraux s’élevaient au milieu de ces bancs , empêchaient leur stratification régulière , et détruisaient leur uniformité. Il est donc impossible de séparer ces deux manières d’être synchroniques ; et quoique les roches com- pactes soient privées de coraux , il faut les ranger néanmoins dans le terrain corallien. F. Le terrain oxfordien supérieur est composé de marnes d’un gris bleuâtre, alternant avec des calcaires marneux qui passent , ainsi que je l’ai dit , aux roches coralliennes ; elles sont presque sans fossiles. G. La division des marnes oxfordiennes moyennes se compose 7 DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 709 à sa partie supérieure , de calcaires d’un blanc jaunâtre, en gros bancs, et au-dessous de marnes grises. H. Enfin, les marnes oxfordiennes inférieures ont aussi , à leur partie supérieure, une masse calcaire, et au-dessous des marnes d’un bleu grisâtre; ces derniers deviennent jaunâtres à leur base en prenant du calcaire et en se chargeant de globules de fer oolitique ; elles sont alors remarquables par la grande quantité de fossiles qu’elles renferment et le minerai de fer que l’on y exploite ; elles forment la base de cet étage et reposent sur les calcaires dépendant du cornbrash des Anglais ou dalle nacrée. Je ne m’étendrai pas davantage en descendant ; tout ce qui doit être le sujet de cette notice est compris dans les divisions que je viens de nommer, encadrées en quelque sorte entre l’oolite du Barrois ou terrain portlandien supérieur et le cornbrash. J’ai recueilli un assez grand nombre de fossiles de ces terrains : malheureusement il n’en est qu’un petit nombre de déterminés dans ma collection: je vais donner ici une liste de ceux dont les noms me sont connus; quelques uns de ces fossiles sont intéres- sants, soit parce qu’ils se présentent dans plusieurs des divisions désignées ci-dessus , soit parce qu’ils se rencontrent à un niveau géologique où MM. Thirria et Thurmann ne les ont point indi- qués (peut-être pourrais-je en dire la raison). A. Terrain portlandien. Gryphæa virgula . Ostrea Isocardia orbicularis . Trigonia clavellata. Mya donacina. Mytilus. ...... Gerviliiai Terebratula Pterocerus oceani. Natica Ammonites (environ 9 espèces). Cidarites elegans. Clypeaster Brongnartii. Spatangus B. Marnes kimméridiennes . Gryphæa virgula . * — . bruntrutana . * Ostrea solitaria . * Isocardia excentrica. Axinus obscurus. Terebratula biplicata. B alla Natica turbiniformis. Hérita hemis plier ica. Melania striata. * — in fia ta. Trigonia clavellata. — costata. Pholadomya acuticosta. — protei. Nerinea Ammonites ( environ 12 espèces). Nautilus giganteus . Cidarites „ * Mya Meriani. Mytilus Gervillia * Tellina incerta. 710 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , C. Calcaires à As tartes. Gryphœa virgula . ¥ Ostrea solitaria. * Isocardia excentrica. * — inflata. Trigohia costaia. * Pholadomya protêt. Mya Meriani. * Mytilus plicalus. — pectinatus. * Tellina incerta. Terebratuta. ...... * Avicula Gesneri. * Lucina Etsgaudiœ. * Pterocerus oceani. Natica turbiniformis. Hérita hemispherica. * Nerinea suprajuransis. * BosUllaria TV erneri. Trochus Bourgueti. Ammonites ( 2 ou 3 espèces). Nautilus giganteus . Cidariles Pavonia tuberosa. D. Oolite corallienne. Isocardia excentrica. Trigonia clavellala. — costata. Pholadomya protei. Mytilus plicatus. Terebratula * Avicula Gesneri. Nerinea . Diceras arietina. * A piocrinites rotundus . A garicia crassa. Meahdrina rastellina. E. a. Calcaires coralliens compactes. * Gryphœa bruntrutana. * Ostrea solitaria. * Isocardia excentrica. * — inflata . Trigonia. ....... * Pholadomya protei. * Mytilus plicatus. — pectinatus. Terebratula * Avicula Gesneri. * Perna plana . b. Calcaires * Ostrea solitaria. * Isocardia excentrica. ® Mytilus plicatus. — pectinatus. Pecten Belemnites Royerianus. Cidarites Pecten Diceras arietina. * Pterocerus oceani. Natica turbiniformis. * Nerinea suprajuransis. Nautilus giganteus. Cidarites Blumenbachii. Echinus hieroglyphicus. * Apiocrinites rotundus. Bhodocrinites echinatus. Serpula s proprement dits. Echinus hieroglyphicus. Pcntacrinites scalaris. Cnemidium bulbosum. * Âstrea microconos. Lithodendron Serpula gordialis. La plupart des fossiles qui composent ces listes sont cités par MM. Thirria et Thurmami , dans les deux ouvrages où ils ont DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 711 établi , d’une manière plus complète que cela n’avait été fait jusqu’alors, la division des terrains jurassiques; j’ai marqué d’une étoile ceux sur lesquels l’attention doit se fixer comme y étant spécialement nommés. En comparant les listes de ces fossiles données dans ces deux ouvrages, on verra qu’ils ne sont point distribués, dans le Jura et la Haute-Saône , comme dans le bassin parisien , au moins en apparence , car il serait plus juste peut-être de dire que les terrains dans lesquels ils se trouvent ne sont pas nommés toujours de même. Les fossiles suivants : Gryphœa bruntrutana. Isocardia excenirica. — inflata. Pholadomya protei. Mytilus plicatus ( Modiola ). Âvicula Gesneri. Perna plana. Pterocerus oceani. Nerinea supraj uransis. Apiocrinites' rotundus. Astrea microconos .. ne descendent point, dans la Haute-Saône et le Jura, suivant les ouvrages de MM. Thirria et Thurmann , au-dessous de l’oolite corallienne; la plupart même restent dans le terrain portlandien et les marnes kimméridiennes : aussi les a-t-on regardés comme carac- térisant l’étage supérieur jurassique. Dans la Haute-Marne, tous ces fossiles se trouvent au-dessous de cette oolithe , dans les cal- caires coralliens; la plupart sont fort rares au-dessus et très communs au-dessous, et quelques uns même, comme l’ Apiocrinites rotundus et la Perna plana, ne se trouvent point au-dessus. De ce fait, on ne conclura pas assurément que ces calcaires coralliens doivent appartenir aux marnes kimméridiennes ; il est plus ra- tionnel de penser que ces fossiles se trouvent dans divers terrains. Quand des fossiles se sont trouvés concentrés dans une certaine série de roches, on a pu les faire servir à limiter un terrain en le faisant s’arrêter là où ces fossiles s’arrêtent; par la même raison, quand il a existé une dispersion d’un certain nombre d’espèces dans des roches de différents âges superposées, l’on conçoit que l’on a pu souvent confondre ces roches , ou les rattacher entre elles et n’en faire qu’un même terrain. Mais si d’autres caractères ou d autres circonstances viennent à établir une distinction, évidente entre ces roches, il faudra bien adopter cette distinction, malgré la communauté d’un certain nombre de fossiles; c’est, il tne semble, ce qui arrive ici, où l’oolite corallienne établit une division naturelle. Partout où l’oolite corallienne manque, on a pu ne former qu’un même terrain des calcaires à astartes et des calcaires coralliens compactes , reposant sans limites dis- 712 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , tinctes l’un sur l’autre; mais quand l’oolite corallienne s'est trouvée entre eux deux , force a bien été de les séparer. Dans le centre de la Haute-Marne, vers Vignory et La Motlie , l’oolite en bancs puissants sépare de la manière la plus nette les cal- caires à astartes des calcaires coralliens compactes ou proprement dits; mais à mesure que l’on s’avance vers l’Aube, cette oolite diminue de puissance, puis elle disparaît complètement quand l’on arrive sur cette rivière dans les environs de Clervaux, et ce n’est qu’à grand’peine que l’on découvre quelques fossiles qui lui assignent sa place: alors les calcaires à astartes reposent im- médiatement sur les calcaires coralliens compactes si bien déve- loppés dans cette localité , et peuvent être confondus avec eux , d’autant plus facilement que beaucoup de fossiles leur sont communs, comme on vient de le voir. Les espèces indiquées comme appartenant, dans la Haute-Saône et le Jura, à l’étage supérieur, ne lui sont donc plus spéciales, car il n’est pas pos- sible de rattacher les roches de la Haute-Marne, qui les contien- nent, à cet étage; l’oolite corallienne est là qui s’y oppose et oblige à les laisser dans le calcaire corallien de l’étage moyen ; la même raison s’oppose à la réunion de ces roches au calcaire à astartes, quoique des astartes puissent s’y rencontrer, parce qu’alors il faudrait encadrer l’oolite corallienne au milieu des calcaires à astartes. Ces observations me conduisent à d’autres d’une plus grande importance. L’étude de la distribution dans les terrains jurassi- ques supérieur et moyen de la Haute-Marne des fossiles, no- tamment de ceux nommés par MM. Thirria et Thurmann, comme appartenant aux groupes portlandien et kimméridien de la Bour- gogne et du Jura , la comparaison des roches des deux bassins , quant à leur nature minéralogique, leur position et leur appa- rence intérieure, établissent entre ces terrains, dans les deux bassins, une différence dont j’ai cherché depuis longtemps à me rendre compte. Dans la Haute-Marne , c’est dans les calcaires coralliens compactes , dans les calcaires à astartes , surtout à leur partie supérieure , et à la base des marnes kimméridiennes que se trouve le plus grand nombre des fossiles cités par MM. Thirria et Thurmann dans leurs groupes portlandien et kimméridien; il est remarquable que ces fossiles, à l’exception de deux ou trois espèces , ne montent point dans la partie supérieure de nos marnes kimméridiennes et dans notre T. portlandien ; ce qui l’est peut-être autant, c’est l’absence dans les listes de MM. Thirria et Thurmann des ammonites, qui y sont seulement représentées DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845- *13 par de rares individus appartenant à deux espèces, tandis que les groupes portlandien et kimméridien parisiens en contiennent un très grand appartenant à plus de vingt espèces. Si des fos- siles on passe à l’examen des roches , on trouve les mêmes dif- férences dans les roches nommées de même , et les mêmes rap- prochements entre les roches dites portlandiennes de la Bour- gogne, du Jura , et celles qui, dans la Haute-Marne, s’étendent des marnes kimméridiennes aux calcaires coralliens. Je hasarderai donc ici une opinion qui peut-être paraîtra hardie, mais dont la comparaison attentive des terrains jurassiques des deux bassins fera peut-être plus tard reconnaître la justesse, c’est que le puis- sant terrain auquel nous avons donné les noms de portlandien et de kimméridien dans le bassin de Paris ne paraît pas exister dans la Franche-Comté et le Jura. Mais les calcaires supérieurs du terrain à astartes , c’est-à-dire ceux que j’ai dit précédemment être grossiers , noduleux et marneux , avec bancs oolitiques jau- nâtres, que l’on pourrait rattacher avec plus de justesse peut être aux marnes kimméridiennes avec lesquelles ils sont en contact; ceux , enfin , qui précisément renferment la majeure partie des fossiles que j’ai cités dans ce terrain y auraient acquis une puis- sance assez considérable pour représenter ces groupes. Le terrain jurassique aurait pu, en effet, s’arrêter là dans le bassin bour- guignon , tandis qu’il aurait continué à se déposer dans le bassin parisien, et y aurait pris ce développement que nous lui connais- sons. Quelques unes des espèces de Mollusques ont continué à vivre pendant ce développement ; mais on voit que la plupart ont cessé d’exister, tandis que d’autres sont venues peupler la mer. L’absence complète dans notre T. portlandien et nos marnes kim- méridiennes de la Nerinea suprojuransis , si remarquable et si abondante dans notre calcaire à astartes et dans le T. portlandien de la Haute-Saône (Chargey) et du Jura (Fontenois, Soleure),est surtout remarquable; je rappellerai en passant ce que j’ai dit des Ammonites. Ce qui a donné chez moi de la force à cette idée , c’est la ressemblance frappante que j’ai trouvée aux calcaires portlandiens dans une carrière à Fontenois, près de Porrentruy , dans celle de Chargey, près de Gray, à une partie de ceux des carrières si connues de Soleure , avec ceux de la partie supérieure de nos calcaires à astartes que j’ai dit être oolitiques, d’un blanc jaunâtre avec taches bleues. M. Thurmann a éprouvé lui-même une grande difficulté dans l’étude des groupes portlandien et co rallien du Jura ; il dit [Soulèvements jurassiques , 2e cahier, p. 12) qu’il est très difficile de se rendre compte des différents aspects 714 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AYALLON , que présentent les roches corallien nés et portlandiennes, quand on considère les groupes coralliens et portlandiens comme deux groupes superposés , et non pas comme deux manières d’être différentes, quoique syn bioniques d’une même division; et ailleurs [Soulèvements jurassiques, lel cahier, p. 1 1), qu’il est sou- vent fort difficile de distinguer, dans les relations géognostiques , les roches de la division portlandienne de celles du calcaire à astartes et même du calcaire à nérinées. Je cite seulement ces deux passages de l’ouvrage de M. Thurmann , comme indiquant plus spécialement les observations qu’il y a consignées. Si, dans le Jura, si admirablement étudié par M. Thurmann, notre T. port- landien eût existé, et qu’il y eût été séparé du T. corallien par la puissante masse de marnes kimméridiennes que nous avons dans lé bassin de Paris, ce géologue n’eut pu confondre ces deux ter- rains, les réunir et les regarder comme synchroniques. Mais supposez que dans certains points du Jura, comme il arrive dans le bas in parisien, notamment à Clervaux , ainsi que je l’ai dit, l’oolite corallienne vienne à manquer, le calcaire à astartes, ainsi que sa partie supérieure, considérée comme T. portlandien, se trouvera en contact avec les calcaires coralliens, qui pourront être compactes et contenir les mêmes fossiles , comme dans la Haute- Marne; ces terrains seront alors très facilement confondus et réunis en un seul, que Ton nommera, soit portlandien, soit co- rallien. Les études et les doutes de M. Thurmann viennent donc donner de la force à l’opinion que j’ai émise. Je résumerai ainsi ces conjectures, que je soumets à l’étude des géologues. Tout notre terrain jurassique supérieur manque dans la Bourgogne et la chaîne du Jura; les terrains portlandien et kimméridien de M. Thirria , dans la Haute-Saône, consistent dans le développement de la base des marnes kimméridiennes et de la partie supérieure du calcaire à astartes du bassin de Paris; le ter- rain portlandien de M. Thurmann, dans le Jura, est le même , les roches coralliennes compactes y ont été réunies quelquefois quand l’oolite corallienne a manqué. Je répéterai ici , toutefois, que je ne prétends donner ces observations que comme des conjec- tures probables. 2° Comparaison des terrains jurassiques de l'Yonne ave c ceux de la Haute -Marne , par M. E. Royer. La Société géologique a vu le lias soit dans les environs d’Aval- lon . soit à Semur ; j’ai pu le comparer avec ce même ter- DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 715 rain dans la Haute-Marne ; il est composé de la même manière dans les deux départements: cependant dans le dernier il est plus puissant, il occupe une plus grande surface horizontale, et sa division en étage est plus nettement accusée orograpliiquement. Dans l’un et l’autre pays ce sont : à l’étage supérieur, les marnes jaunes; à l’étage moyen, des calcaires à Gryphœa Cymbium, avec marnes d’un gris bleuâtre au-dessous; à l’étage inférieur, des calcaires à Gryphœa arcuata ; dans la Haute-Marne, on joint à ce dernier le grès dit quadersandstein. M. Thirria n’a point adopté cette division pour la Haute-Saône. Les grandes roches éboulées sur les pentes de la montagne voisine du château de Chevigny près de Semur, appartenant à l’oolite inférieure, ont la plus grande ressemblance avec les mêmes bancs qui forment tous les plateaux qui environnent la ville de Langres , et supportent cette ville même ; l’érosion et la destruction successive des argiles du lias supérieur qui les supportent occasionnent les éboulements de ces bancs sur le contours des plat; aux , et leur donnent cette ressemblance avec de vieilles murailles démantelées. Les calcaires blancs-jaunâtres marneux, observés par la Société à Gros-Mont, à Vézelay, et avant d’arriver à Asnières, me paraissent occuper la place des marnes à Ostrea acuminata de la Haute-Marne, mal- gré l’absence de fossiles caractéristiques , si abondants dans ce dernier département. La Société géologique n’a pu malheureuse- ment, faute de temps, observer les relations qui existent entre la partie supérieure des groupes oolitiques ou étage jurassique inférieur et les marnes oxfordiennes. J’arrive aux terrains moyen et supérieur dont j’ai donné les principaux caractères dans la Haute-Marne. La Société géologique, après avoir traversé les bois qui couronnent les hauteurs qui sé- parent la Cure de l’Yonne , a suivi un long vallon qui l’a con- duite à Chatel-Censoir, sur les bords de cette dernière rivière. Le calcaire blanc-jaunâtre , la grande oolite et le forest marble se sont successivement présentés dans les coteaux qui bordent ce vallon jusqu’à Chatel-Censoir, ayant une pente uniforme vers le N. ou le N. -O. En quittant ce village , je m’attendais, comme la succession géologique le voulait, à trouver les différentes divi- sions des marnes oxfordiennes, puis enfin le terrain corallien ; mais à une certaine distance , près d’un pont où la Société géolo- gique a traversé le ruisseau de Chatel-Censoir, pour aller observer des grès de transport , nous avons tout-à-coup trouvé au niveau du sol de la vallée des calcaires oolitiques grumeleux, appartenant évidemment à l’oolite corallienne, puis au hameau du Saussois 7 1 (j RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, près de Alerry, à 3 kilom. de Chatel-Censoir, d’immenses rochers verticaux appartenant au calcaire corallien , très remarquables par leurs formes gigantesques et leur résistance à la désagréga- tion et la manière bizarre dont les agents destructeurs ont agi sur eux ; montés sur ces rochers par un chemin difficile , d’abon- dants fossiles , appartenant à des polypiers, ont suffisamment ca- ractérisé ce terrain ; et enfin, en continuant à monter dans les champs , dans la direction du village d’A vigny , des calcaires oolitiques à nérinées et à dicérates ont annoncé de nouveau l’oolite corallienne , mais cette fois à un niveau bien supérieur au premier gîte. Il était donc évident que toute la masse des marnes oxfordiennes nous avait échappé ; nous étions passés tout-à-coup du forest marble à la partie supérieure du terrain corallien ; puis nous avions trouvé sa partie inférieure, et enfin une seconde fois sa partie supérieure. Quelle est la cause de cette absence du groupe oxfordieu et de ces oscillations? C’est une question que je me suis faite , mais dont la solution demande une étude suivie du terrain. Cette cause ne peut être que l’une des suivantes : 1° le terrain oxfordien peut manquer dans cette loca- lité , soit parce qu’il ne s’y sera pas formé, soit parce qu’il aura été enlevé après son dépôt par des courants qui auront mis à nu le terrain jurassique inférieur sur lequel le T. corallien sera venu se déposer sans intermédiaire ; 2° il peut exister dans le voi- sinage de Chatel-Censoir des failles ou de simples ploiements qui auront dérangé la position et l’inclinaison régulière et normale des strates. M. Cotteau, qui a si bien étudié le sol du départe- ment de l’Yonne , admet la première de ces causes; il pense que dans ce département il existe plusieurs localités où le groupe oxfordien manque , et ou le groupe corallien repose immédiate- ment sur l’étage jurassique inférieur: cependant, indépendam- ment des difficultés que cette explication me paraît présenter en elle-même dans cette localité . elle ne peut rendre compte que d’une partie des phénomènes observés , c’est-à-dire de l’absence des marnes oxfordiennes, mais elle laisse entière la difficulté des oscillations ou changements de niveau qui existent dans les ter- rains qui s’étendent de Chatel-Censoir à Avigny; par la seconde cause , on se rend plus facilement compte et du manque de marnes oxfordiennes et des restants des formations suivantes. L’oolite corallienne est, on le sait, très bien caractérisée par ses fossiles, sa texture minéralogique et sa blancheur remarqua- ble , eu égard à la couleur grisâtre des roches sur lesquelles elle repose ou qui la recouvrent ; elle peut servir en quelque DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 717 sorte d’horizon. Je ne puis douter que la masse oolitique que la Société a observée près du pont, au niveau du sol de la vallée, ne fasse partie de cette oolite comme celle qu’elle a vue au-dessus des grands rochers en allant à Avigny , et cependant en donnant aux roches du premier gîte la pente ordinaire des couches , on arriverait à Avigny à un niveau considérablement inférieur au second gîte , inférieur aux grands rochers du Saussois , qui cependant, géologiquement parlant, sont couronnés par cette oolite; et si l’on a recours aux failles, il faudra admettre que les deux gîtes d’oolite appartiennent à deux assises différentes , dont l’une sera supérieure et l’autre inférieure aux rochers coralliens du Saussois , ce qui ne paraît pas exister, ainsi que je viens de le dire. Des failles seules me semblent donc expliquer cette excep- tion à la pente régulière des couches ; une première faille rap- prochée de Cliatel-Censoir, dont le bord sud sera resté plus élevé que le bord nord , aura fait descendre les marnes oxfordiennes et le corallien proprement dit à un niveau assez bas pour qu’ils ne puissent affleurer même au pied des coteaux dans la vallée , et restent cachés par l’oolite et les terrains qui la recouvrent ; une seconde faille parallèle à la première, dont au contraire le bord nord sera élevé au-dessus de l’autre , aura ramené au jour le terrain corallien proprement dit ; mais les marnes oxfordiennes, déjà fort abaissées par leur pente naturelle, n’auront pu repa- raître au jour J’aurais pu dire tout simplement que le terrain compris entre deux failles parallèles est descendu au-dessous de son niveau naturel; l’explication eût été plus simple. Au lieu de cassures on peut admettre de simples ploiements des strates. Ces sortes de dislocations, si communes dans les montagnes ou dans leur voisinage, ne sont point rares non plus dans les pays de plaines; la Franche-Comté en est sillonnée, l’ouvrage de M.Thirria en fait foi. M. Cornuel ( Mémoires de la Société géologique de France , t. IV, p. 271 , et pl. XIII et XIV) et M. Thirria ( An- nales des Mines , t. XV, p. 43 et pl. I) en ont décrit quelques unes dans la Haute-Marne , et j’espère ajouter plus tard à ce qu’ont dit ces géologues des documents assez positifs pour ne laisser aucun doute sur l’existence de ces dislocations dans la Meuse, la Haute-Marne et l’Aube; je citerai seulement ici la lo- calité de Ferrières dans le second de ces départements , vue aussi par MM. Thirria et Cornuel . où il existe deux failles parallèles avec affaissement entre les deux. Pour ne pas sortir de l’Yonne , la Société géologique n’a-t-elle pas vu le ploiement considérable qu’éprouvent les rochers dans lesquels sont creusées Les grottes. 718 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , d’Arcy, lequel est probablement la cause première de ces grottes? Je livre ces réflexions, auxquelles je ne veux attacher quel’impor- tanceque l’on peutdonner à de simples conjectures, à M. Cotteau, qui , placé sur les lieux, peut éclaircir ces faits avec ce zèle qu’il apporte dans l’étude géologique du département de l’Yonne. Je n’ai plus que quelques mots à dire du terrain oxfordien su- périeur que la Société a visité à Yermenton; il me paraît être le même que j’ai indiqué sous la lettre F dans la Haute-Marne ; l’alternance de marnes grises et de bancs marno-calcaires, et la rareté des fossiles caractérise ce terrain dans les deux pays (voyez les coupes fi g. 10 et 11 , pl. XX ). 3° Note sur les grottes cl’ Arcy , par M. Ern. Royer. La vallée de la Cure forme des sinuosités très prononcées , les coteaux qui la flanquent offrant alternativement des golfes et des promontoires en regard les uns des autres et qui se correspondent; c’est dans un de ces promontoires auquel est adossé le village d’Arcy que sont creusées les grottes que la Société géologique a visitées ( fi g. 7, pl. XX). Ce cap est composé de roches appar- tenant au groupe corallien; les grands rochers verticaux ou sur- plombants que le dessin [Jig, 5, pl. XX) indique en «, sont caractérisés par les polypiers de ce terrain , et l’oolite coral- lienne existe à leur sommet. La grotte principale est un long corridor ondulé, s’élargissant et se rétrécissant alternativement, mais sensiblement dirigé en ligne droite et traversant le coteau d’un côté à l’autre sur une longueur qui, d’après M. Belgrand, est de 876 mètres ; on y entre après être monté sur un talus d’éboulement de quelques mètres de hauteur, et en pénétrant sous un rocher faisant partie des escar- pements qui dominent la vallée ; à peine y est-on entré que l’on descend par une pente aussi forte que celle que l’on a gravie pour atteindre l’ouverture jusqu’au niveau de la rivière , ce que l’on reconnaît par la présence d’une flaque d’eau qui , se perdant à la vue sous les rochers dans l’obscurité, ne permet pas de juger de son étendue. Il n’entre point dans mon sujet de raconter toutes les beautés féeriques de cette immense caverne , de peindre ces milliers de colonnes aux formes fantastiques , tantôt éclairées d’une vive lumière, tantôt disparaissant dans l’obscurité, au- cune description ne pourrait donner une idée de cet admirable spectacle ; mon but est seulement de dire quel a pu être l’origine de cette grotte, La Société a pu constater le passage , à une époque DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 18'» 5. 718 fort reculée, des eaux de la Cure par ce couloir souterrain ; le gravier et les galets composés, comme celui de cette rivière, de granité et d’autres roches que l’on y trouve sous la croûte sta- lagmitique qui forme le sol, sont les témoins irrécusables de ce passage. L’ouverture était autrefois , sans doute, beaucoup plus large et plus basse ; elle aura été obstruée en partie par le talus d’éboulement qui est amoncelé au pied du coteau., Du côté op- posé de ce coteau, dans le lieu où la grotte doit aboutir, des sources d’eau vive annoncent que l’eau n’a pas encore abandonné com- plètement ce passage, et qu’il s’en écoule encore peut-être dans les cailloux et les fragments de roches qui jonchent le sol, ou par quelques fentes inférieures {fig. 8). A quelque distance de cette caverne principale , aujourd’hui livrée à la curiosité de l’homme , il en existe d’autres où l’on ne peut pénétrer, parce qu’elles sont encore remplies par les eaux de la rivière. L’une d’elles présente son ouverture complètement à la base des rochers, qui ne sont point ici bordés de talus d’ébou - lement. Les eaux de la Cure , après avoir traversé le terrain allu- vien qui forme le sol de la vallée , reparaissent au pied de ces ro- chers et se précipitent en bouillonnant dans cette grotte , dont les préposés au flottage du bois destiné à l’approvisionnement de Paris sont obligés de fermer l’entrée par un grillage pour empêcher le bois de s’y perdre dans les moments de débordements. Les eaux reparaissent également près du village d’Arcy (Jîg- 9 ). Il est donc évident que l’excavation des grottes d’Arcy est due au passage des eaux de la Cure ; mais il me semble que ces eaux n’auraient pas pris cette direction , qu’elles n’auraient point pénétré à travers un coteau composé de roches compactes , si elles n’avaient trouvé quelques fissures ouvertes par une cause étrangère et antérieure qui leur aient donné un premier passage. Quand on est placé dans la vallée , en amont du promontoire d’Arcy, et que l’on jette les yeux vers les escarpements par les- quels il se termine brusquement de ce côté, on voit que les bancs qui composent ces rochers plongent fortement depuis le point b jusqu’au point c (fig. 5), puis que leur inclinaison diminue in- sensiblement, et qu’ils finissent par devenir à peu près horizon- taux, décrivant ainsi une courbe dont la concavité est en dessus et regarde le ciel. La plus forte inclinaison mesurée par M. Yirlet est d’environ 12° ; elle est trop en contradiction avec l’horizon- talité ou au moins avec la pente très peu prononcée des terrains jurassiques, et particulièrement de ceux de cette partie du bassin de Paris , trop en opposition avec la position horizontale toute 720 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, voisine des mêmes roches , pour permettre de l’attribuer à autre chose qu’à une dislocation postérieure à la formation de ces ter- rains. Il serait trop long de développer les raisons qui doivent faire repousser l’opinion de leur formation dans cette position inclinée, et comme je pense que cette idée inadmissible n’est arri- vée à personne, ce développement est inutile. Une dislocation produite soit par le soulèvement de la partie b , soit au contraire par l’affaissement de la partie cl , est donc la cause de cette cour- bure; l’un ou l’autre a dû produire les mêmes effets. Les roches, arrivées déjà à un grand degré de dureté , et par conséquent de rigidité , n’ont pu se prêter au ploiement qu’elles avaient à subir sans se rompre • les ruptures ont du être d’autant plus nom- breuses et prononcées qu’elles s’opéraient dans des bancs plus éloignés du centre du cercle dont ils étaient appelés à faire une partie de la circonférence, ou, pour parler plus clairement, plus larges et plus nombreuses dans les bancs inférieurs que dans les supérieurs ; par la même raison, la plupart ont pu rester cachées dans la profondeur ou bien être masquées aujourd’hui par les talus d’éboulements {Jig. 6 ). Il est donc probable que les roches qui constituent le promon- toire qui est traversé par les grottes d’Arcy sont interrompues par des fissures à peu près verticales, dues à la courbure de ces roches. Ce sont ces fissures que les eaux auront suivies, agrandies ; leur action aura été d'autant plus active qu’arrivant par ce che- min beaucoup plus court au même niveau que par le lit de la ri- vière , leur pente était plus rapide. La séance est levée à onze heures. Séance du 20 septembre à Se mur. PRÉSIDENCE DE M. MICHELIN. M. le Président remercie d’abord, au nom de la Société géologique de France , les membres de la Société des sciences naturelles de Semur de l’accueil bienveillant qu’ils ont fait aux membres qui sont venus visiter les environs de cette ville. M. Cotteau donne lecture du procès-verbal , qui est DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 721 adopté; puis il rend compte des observations que la Société a faites dans la journée du 20 septembre. La route que la Société a suivie pour se rendre d’A vallon à Semur n'a offert que peu d’intérêt. Dans le fond des val- lées règne toujours le granité , au-dessus duquel vient l’infra- lias, c’est-à dire les couches inférieures aux calcaires à Gry - phœa arcuata , puis le calcaire à Gryphœa arcuata, où abonde X Ammonites bisulcatus. A un kilomètre environ de Semur, la Société géologique a été reçue par les membres de la Société de Semur, et , accompagnée par eux , elle a été visiter une brèche osseuse qui se trouve à quelques kilomètres de la ville, au sommet de la montagne de Gra , à la base du calcaire à entroques; en s’y rendant elle a traversé les diffé- rentes couches du lias, et elle a pu constater leur identité minéralogique et paléontologique avec les mêmes couches observées à Vassy dans la course du 15 septembre; elle a de plus remarqué à la partie supérieure du calcaire à Gry- phœa arcuata une couche où abonde une petite Térébratule, probablement la T erebratula variabilis. Plusieurs ouvriers ayant fouillé la brèche osseuse, la Société a pu recueillir un grand nombre d’ossements brisés appartenant à l’Eléphant , au Bœuf, à l’Aurochs, au Cheval, etc. Les collections de Semur contiennent en outre des ossements de Cerf, de Bou- quetin, de Castor , d’Ours, et de plus des fragments de granité et des silex provenant également de celte brèche osseuse; tous ces débris sont disséminés dans une argile rougeâtre. Au même horizon, et se prolongeant au loin sur les flancs de la montagne de Cra, la Société a remarqué un conglomérat formé des roches brisées du calcaire à entro- ques; ce conglomérat se lie d’une manière intime à la brèche osseuse , et paraît être de même origine. M. Robineau attribue la formation de la brèche à la vio- lence d’un courant diluvien qui, se faisant jour au travers du calcaire à Entroques, plus meuble en cet endroit, aurait accumulé dans les anfractuosités du sol déchiré les débris d’ossements qu’on y rencontre aujourd’hui en si grande abondance. M. Robineau ajoute que parmi les ossements il a rencontré des os de petits animaux. 722 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , M. Nodot pense que cette brèche osseuse doit être consi- dérée comme une portion détachée d’une caverne qui occu- pait autrefois la partie supérieure de la montagne; il en est de même des roches qui forment barre au-dessous de la brèche; ces faits d’ailleurs ressortent naturellement de l’ob- servation des lieux. Quant aux ossements qui existent dans le travertin ferrugineux de la brèche , on les trouve fracturés et non roulés. Il possède même une tête d humérus brisée et aplatie, dont, les morceaux n’ont pu être retenus ensemble que par la gélatine des os; ce qui prouve que ces dépôts os- sifères n’ont pas été accumulés lentement et successivement , mais déposés par une force puissante et instantanée. M. Bourjot pense que les os ont pu être apportés de très loin , peut-être du plateau central de l’Auvergne, par un courant qui les aurait agglomérés sur les flancs du calcaire à Entroques; ils ont pu être brisés dans la chair même, qui persiste longtemps sur les corps en décomposition , et avoir ainsi été préservés du frottement. M. Leymerie pense que la formation de la brèche osseuse de Semur se rattache au grand phénomène diluvien , dont les traces se retrouvent au fond des vallées, comme sur les flancs et les sommets des montagnes. Dans les dépôts dilu- viens on a presque toujours trouvé des dents d Eléphants; dans certaines localités elles ont été recueillies en abon- dance; dans la vallée de Villeberlin , dans l’Aube, on en a rencontré une vingtaine. Gomme les débris d’Eléphant ca- ractérisent les terrains diluviens, leur découverte dans la brèche osseuse de Semur assigne à celle-ci une origine et un âge certains. Il fut une époque, ajoute M. Leymerie, où les couches du calcaire à Entroques qui maintenant cou- ronnent le sommet des montagnes n’étaient point interrom- pues, et où la profonde vallée qui s’étend entre Semur et la montagne de Cra n’existait pas encore. Lorsque com- mencèrent les phénomènes diluviens ; lorsque , profitant d’une dislocation antérieure, les eaux creusèrent la vallée, elles agirent avec plus de force sur les marnes inférieures, qu elles entraînèrent ; les bancs du calcaire à Entroques sur- plombèrent et formèrent une sorte de caverne dans laquelle DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 723 se sont déposés les ossements qu’on y trouve aujourd’hui ; puis à la fin de l’époque diluvienne les roches s’affaissèrent et le sol prit sa configuration actuelle. M. Robineau adopte l’opinion de M. Leymerie sur les effets des courants diluviens. M. Malinowsky dit qu'on a trouvé, mêlés aux ossements , des silex aigus travaillés par la main de l’homme, ce qui pourrait faire attribuer à ces débris une origine différente de celle qu’on leur assigne. M. Nodot pense que la forme quelque peu aiguë des silex cités par M. Malinowsky est due au hasard. M. Royer cite une caverne près de Châtiilon-sur-Seine, observée par M. Beaudouin, où se trouvent des ossements et des silex travaillés par l’homme; mais les silex sont toujours à la partie supérieure et nullement confondus avec les osse- ments. Séance du 21 septembre , a Semur . PRÉSIDENCE DE M. MICHELIN. M. Cotteau , secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente , qui est adopté. Il rend compte ensuite de l’excursion faite dans la journée du 21. La journée a été consacrée par la Société à visiter le ter- rain houiller de Ruffey et le minerai de fer exploité à Thoste et à Beauregard, dans les couches du lias inférieur au cal- caire à Gryphœa arcucita. Les fouilles faites à Ruffey ont 3 mètres à peine de profondeur; les matériaux qu’on en a extraits sont encore gisants sur le sol : c’est un anthracite brillant, lamelleux, et qui s’exfolie facilement; on trouve mêlée à cet anthracite une roche d’apparence plutonique, que quelques membres ont regardée comme de l’eurite, et le plus grand nombre , comme le grès qui accompagne ordi- nairement le terrain houiller et qui aurait été modifié par le contact des terrains ignés. Ce lambeau de terrain houiller se rattache évidemment par sa nature et par sa position au Soc. géol. Toni. II, 2e série. 47 724 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , terrain houiller observé par la Société près de Villiers-No- nains. La Société s’est ensuite dirigée vers le village de Thoste; avant d’v arriver elle a traversé des champs où affleurent les couches ferrugineuses de l’infra-lias , et l’on a pu y re- cueillir de nombreuses valves de Sinemuria et d’Astarte , ainsi que quelques Astrea , changées en fer oligiste par un phénomène que la chimie ne peut expliquer. La Société , traversant ensuite le village de Thoste, a visité, dirigée par M. Jean-Marie , maître mineur, l’exploitation de minerai de fer située près de cette commune, dans des galeries souter- raines. Le minerai de fer est dans cette localité à l’état ter- reux; il repose sur des lumachelles alternant avec des tnarnes et peut avoir un mètre et demi d’épaisseur (1). Au-dessus du minerai de Thoste, M. Jean Marie a fait observer à la Société que les couches à Gryphœa arcuata qui recouvrent le minerai sont pénétrées de silice et de ba- rytine, et présentent tous les caractères de la formation ar- kosienne coquillière , tandis que les couches inférieures à minerai de fer n’offrent nulle part la trace des filons de quartz ou de baryte. La Société s’est ensuite dirigée vers Beauregard, où le minerai est exploité à ciel ouvert, et où la Société a pu constater très facilement la superposition du minerai aux lumachelles , et celle des couches à Gryphœa arcuata au minerai ; mais dans cette dernière localité , le cal- caire à Giyphœa arcuata n’est point imprégné de quartz comme à Thoste. Le minerai est, à Beauregard, moins ter- reux qu’à Thoste, et prend le nom de minerai en roche ; certaines plaquettes ferrugineuses sont pétries de Sinemuria , (1) Voici, d’après de récentes analyses, quelle est la composition du minerai de fer exploité à Thoste : Peroxyde de fer 0,608 Oxyde rouge de manganèse. . . o,o54 Alumine soluble 0,060 Argile .... 0,240 Eau et oxygène o,o58 1,000 DU H AU 24 SEPTEMBRE 1845. 725 adstarte , de T urritella, de Pecten , de Plagiostoma , etc., etc. Revenant ensuite à Semur, la Société, en gravissant la montagne granitique qui s’élève vis-à-vis le village de Beau- regard , a vu le granité traversé par de nombreux filons de quartz, dont quelques uns, surtout à la partie supérieure, avaient une teinte ferrugineuse, et semblaient prouver qu’à une certaine époque le fer, comme le quartz, s’était fait jour au travers des couches granitiques et les avait traversées avant de s’épancher à la surface. Dans toute cette excursion, la Société a été dirigée par M, Jean Marie, qui, ayant depuis longtemps étudié tous ces terrains , a communiqué ses observations à la Société, et a mis à la disposition de tous les nombreux et beaux échan- tillons recueillis dans le minerai de fer. Dans certaines localités où le minerai de fer a été autrefois exploité, M. Jean Marie a trouvé quelques pièces romaines, médailles intéressantes qui prouvent que du temps des Ro- mains les mines de fer des environs de Semur étaient con- nues et exploitées. Au retour de cette excursion, la Société a visité la collec- tion géologique de M. Boucaut; puis un banquet lui a été offert par la Société des sciences naturelles de Semur. La discussion s’engage à l’occasion des arkoses observées dans cette journée. M. Leymerie , revenant sur le mode de formation des ar- koses, dit qu’il adopte , à quelques nuances près, la théorie exposée depuis longtemps par M. Moreau; il admet comme probable que des éruptions quartzeuses ont eu lieu à diffé- rentes époques sur les flancs du massif ancien du Morvan. Quand les premières émissions ont eu lieu, il n’existait pas encore au-dessus du granité de terrain sédimentaire : aussi la silice a-t-eile pénétré seulement le granité et constitué ce qu’on appelle les arkoses granitoïdes. Plus tard, à l’époque où les terrains calcaires ont commencé à se déposer dans des mers où vivaient de nombreux mollusques, la silice a con- tinué à se faire jour, et alors elle a imbibé des couches cal- caires, elle a pénétré des coquilles dont le test a entièrement disparu, et les arkoses coquillières ont été formées; plus 7^6 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON, tard encore de nouveaux épanchements ont eu lieu , qui ont couvert la roche sans s’y mêler. Il croit que la formation des arkoses n’a pas été instantanée , mais quelle est due à des phénomènes successifs qui ont manifesté leurs effets avant, pendant et après le dépôt des premières couches sédimen- taires. En admettant cette théorie , M. Leymerie pense qu’il est parfaitement d’accord avec M, Moreau; mais il en diffère un peu, lorsqu’il cherche à expliquer la nature des éruptions quartzeuses qui ont contribué à la formation des arkoses. D’après M. Moreau, la silice a dû arriver à l’état pâteux; quant à lui, et il ne fait que reproduire une opinion déjà émise par M. Rozet , il croit que la silice , lorsqu’elle a pro- duit les effets qu’on a constatés aujourd’hui, était tenue en dissolution dans des eaux thermales qui filtraient au travers des couches granitiques ou calcaires, et y déposaient les matières dont elles étaient saturées. Il se passait alors un phénomène à peu près pareil à celui que produisent en Is- lande les geysers, ces vastes jets d’eau bouillante qui con- tiennent une quantité de silice tellement grande, que le sol sur lequel leurs eaux s’écoulent en est promptement im- prégné. La vapeur que dégageaient les eaux thermales ser- vait de véhicule aux molécules de barytine, de fluorine, d’azurite, etc. , qu’on retrouve disséminées dans les roches granitiques et calcaires, et dont il serait si difficile d’expli- quer autrement la présence. Dans les couches de Finfra-lias apparaît aux environs de Semur un autre phénomène qui , loin de porter atteinte à cette théorie, vient lui prêter un nouvel appui : c’est la présence du fer. Ce phénomène, ajoute M. Leymerie , est essentiellement thermal, et ce qui le prouve, c’est la nature du fer, c’est l’état du minerai qui le contient. Le fer est souvent oîigiste : or, pour que le fer se déposât à cet état , une grande chaleur était nécessaire ; il est donc rationnel de supposer que les eaux qui ont amené le fer dans les couches de l’infra-lias étaient thermales, comme celles qui tenaient la silice en dissolution. Pendant que le fer se déposait, il y a eu un temps d’arrêt dans les érup- tions quartzeuses, puis de nouveau la silice s’est fait jour, et elie a pénétré , comme on a pu le voir à Thoste, les couches DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. Y27 supérieures au minerai. Elle ne s’est point, il est vrai, ré- pandue dans le minerai ; mais elle Fa sans aucun doute tra- versé, et bien qu’on ne les ait pas encore constatées, si l’on cherchait attentivement , on y trouverait assurément les traces de son passage. M. Hébert demande à M. Levmerie s’il explique par les eaux thermales la formation de toutes les arkoses, et s’il n’admet l'existence d’aucun filon igné; il cite le (ilon de Pierre-Perthuis, qui, formé d’un puissant massif quartzeux , n’a pu être évidemment produit par des eaux thermales. Pour lui, les filons ignés se montrent à chaque pas, traversant le granité et pénétrant la formation arkosienne. M. Leymerie répond que la formation de toutes les arkoses s’explique naturellement par les eaux thermales, sans l’inter- vention de filons ignés; il n’a pas assez examiné le quartz de Pierre-Perthuis pour être certain s’il se rapporte à la for- mation de l’arkose, ou s’il n’est pas simplement contempo- rain du granité. M. Nodot pense que les arkoses ne doivent pas être consi- dérés comme des terrains , mais bien comme des pénétrations produites par des éruptions quartzeuses. Ces modifications ne sont que locales; on peut même dire quelles sont es- sentiellement propres aux arrondissements de Semur et d’Avallon. L’on ne rencontre les terrains arkosés que là où se trouvent des filons quartzeux. Ces derniers se rencontrent sur la ligne des thalwegs des rivières du Cousin, du Serein et de l’Àrmançon , qu’ils coupent en travers; et, lorsqu’on suit leur direction , on ne tarde pas à découvrir la limite de leur épanchement sur les hauteurs qui bordent le lit de ces rivières. La puissance des couches silicifiées est toujours en raison directe de la force des filons quartzeux. Si le quartz s’est épanché sur les sables granitiques , il les a ci- mentés et a constitué l’arkose granitoïde; si, au contraire, il a pénétré dans le lias , il y a eu substitution d’éléments , puis- que dans la partie la plus rapprochée des filons quartzeux , l’arkose ne contient aucune particule calcaire, tandis que dans les parties plus éloignées, là où la force d’épanchement diminuait d’intensité, les particules siliceuses sont unies au 728 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , calcaire et constituent alors un calcaire siliceux, clans lequel la proportion de silice est variable; elle diminue même gra- duellement jusqu’à ce qu’elle ait totalement cédé la place au calcaire. Les grès à gros grains observés à Semur, sur la route de Saulieu, et qui sont subordonnés au granité, ne doivent pas être confondus avec les arkoses , puisqu’ils n’ont aucune communication avec les filons quartzeux. Ce sont des psarn- mites qui alternent avec des grès à grains fins. M. Nodot présente un premier essai des poteries faites avec du kaolin non lavé, provenant du hameau de Champ- Morlin ; ce kaolin existe au milieu du granité, en filons de 60 à 80 centimètres de largeur, et d’une profondeur in- connue. Ils s’étendent sur une ligne qui court du S. au N. et disparaissent au contact du lias. Ces vases sont très durs, sonores et résistants; ils supportent très bien la chaleur. M. Nodot ajoute qu’il va être fait de nouveaux essais avec ce kaolin; il en rendra compte en donnant la coupe des filons. Le Secrétaire donne lecture de considérations archéologi- ques sur la Bélemnite de M. Nodot, dans lesquelles ce fossile est considéré principalement dans ses rapports avec rhistoire et la mythologie des Gaulois. Il donne ensuite lecture de la note suivante. Sur les stries et les moraines des glaciers de la vallée d'Aoste, par M. le chanoine Gai. D’après les observations que j’ai faites, dans la vallée d’Aoste , sur les stries et les moraines des glaciers, je commencerai par dire que j’étais d’abord incrédule sur l’existence de stries glaciales sur des roches en place, dans des lieux où l’on ne peut admettre l’existence de glaciers sans une anomalie extraordinaire et d’une très longue durée dans l’abaissement de la température , et sans un déluge de neige , eu égard à l’étendue du sol et à la hauteur où l’on supposerait que ces glaciers seraient parvenus , et qu’ils au- raient longtemps occupés; ce qui me paraissait et me paraît en- core aujourd’hui incroyable. DU 1 4 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 729 Cependant, en comparant très attentivement les stries et le poli des roches produits par les glaciers actuels avec ceux qu’on re- marque sur des roches éloignées de plusieurs lieues des glaciers, je me suis convaincu et persuadé de l’identité. Je ne me bornai pas néanmoins là; mais j’examinai, avec la même attention les roches polies par l’eau dans divers courants , par le passage des ava- lanches, et les roches qui subissent l’action des pluies et de la fonte des neiges. L’eau courante qui charrie du sable , du gravier , des cail- loux , etc., creuse les roches en les polissant ; ces creux sont en général d’une forme ovale, et quelle que soit la polissure , ils ne présentent point de stries. Si parfois il paraît y en avoir, ce ne sont que les couches de la roche qui saillent , tandis que les stries glaciales sont presque toujours transversales , et forment un angle avec la direction des couches de la roche. Si ces stries eussent été produites par un courant d’eau, ou le passage d’une avalanche, ou l’action de la pluie, ou la fonte des neiges, elles auraient infailliblement une direction opposée à celles qu’elles présentent. D’ailleurs , quelques unes au moins de ces roches polies et striées par des glaciers sont dans des lieux où jamais il n’y eut ni ava- lanche, ni courant d’eau , ni lac , vérité dont on peut facilement avoir la conviction en voyant les localités. Cette année (1845), dans les premiers jours d’avril , des ouvriers mirent à découvert une roche en place, à dix minutes environ au levant de la cité d’Aoste , à l’extrémité et au midi du chemin de Beauregard, à l’angle N.-E. d’une vigne. Cette roche , exposée au midi , avait été préservée de l’action des rayons solaires, qui , avec la pluie et la fonte des neiges , altèrent la surface des pierres et les dé- composent , car elle était couverte de débris de blocs erratiques et de terre. La largeur de la roche de l’ouest à l’est est de 7 mètres environ; sa surface perpendiculaire du côté du midi est plate ; elle s’est montrée avec son beau poli strié dans sa partie supé- rieure seulement , sur une largeur d’un mètre environ; la partie inférieure , quoique plate, est toute brute • le glacier ne l’a pas atteinte. Le poli est ascendant de 2 pieds environ de l’ouest à l’est , et le sol dans lequel cette roche est en place est fortement incliné du nord au midi. Cette roche, qui était comme une nou- velle charte pour le géologue , fut malheureusement minée pres- que entièrement par îe propriétaire de la vigne ; il en reste cepen- dant encore deux petites parties qui paraissent à fleur d’un mur qu’on y a fait , où l’on voit encore le poli et les stries. Les environs sont couverts de plusieurs blocs erratiques, comme 730 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , on le remarque dans tous les lieux où l’on trouve des roches striées ; entre autres il y en a un granitique énorme à 200 pas environ sur la ligne et au couchant de ladite roche , lequel a ses angles vifs, représente une mitre et en porte le nom , la Mitra , qu’il a donné à la vigne où il est majestueusement placé. Son volume et sa forme lui méritent une visite de la part des géologues ; on voit , en considérant sa base large , qu’il a été dé- posé lentement sur le terrain qu’il occupe , car il n’est point en- foncé. La roche susdite était aussi environnée de gravier. Sur la même colline de Beauregard, au N. -O. de la roche dont je viens de parler, on en voit d’autres qui ont une surface polie hors de la terre, et conservant quelques traces de stries dans les endroits moins exposés au soleil. MM. les chanoines Carrel et Basonin les ont aussi remarquées. C’est au premier que je dois la pre- mière impulsion à l’étude des roches striées, et au second la nou- velle de la découverte des rochesde Beauregard, que nous avons examinées tous trois avec grande satisfaction. Les stries de ces di- verses roches ont toutes la même direction de l’ouest à l’est ; si elles eussent été l’effet d’un courant d’eau, du passage d’avalanches, de la pluie ou de la fonte des neiges, leur direction serait infail- liblement du nord au sud, suivant la pente de la colline , outre qu’il est évident qu’il n’y a jamais eu d’eau courante ni d’ava- lanche proprement dite sur ce point. Quant aux roches qui se trouvent sur le passage des avalanches, elles présentent une surface plutôt usée que polie, par le frotte- ment ou le choc des bois et des cailloux, ou pierres entraînées par ces grandes masses de neige; je n’y ai vu aucune strie. J’ai dit sur le passage , car les roches qui se trouvent dans le bas-fond où l’avalanche s’arrête pourraient être polies et striées , vu que l’avalanche, quand elle est fort considérable et qu’elle dure longtemps avant de fondre , prend la nature d’un petit glacier temporaire ; on y remarque à peu près les mêmes révolutions ; la neige se glace , elle présente diverses voûtes à sa base , sa sur- face se crevasse , etc. ; c’est ce que j’ai remarqué cette année à Pré-Saint-Didier, à l’avalanche deChampex, qui descend annuel- lement d’un vallon qui est au N.-Q. du mont Grammont, et laquelle , à la fin du mois de juillet, avait encore, à vue d’œil , 6 mètres environ au-dessus du sol. Malgré mes observations réitérées dans divers lieux , sur des roches saillantes et sur des blocs depuis plusieurs siècles enfouis à une grande profondeur dans un sol soumis à des gouttières, et où l’eau parfois séjournait après les grandes pluies, jusqu’à ce DTJ 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 731 qu’elle se fût toute filtrée, je n’ai jamais connu des polis striés; mais j’ai remarqué que les blocs qu’on extrayait par le moyen des fouilles, et que l’eau en se filtrant avait recouverts d’une vase fine, se décomposaient facilement après qu’ils avaient été quelque temps exposés à l’air. Maintenant , je passe à l’époque de la polis- sure des roches en position , et de leurs stries que j’ai examinées. Je ne crois pas me tromper en disant qu’elles sont de l’époque diluvienne . En voici les raisons : 1° ces roches ne sont point striées au-dessous du niveau du terrain diluvien; les polis striés sont sur le terrain des blocs erratiques et des coquilles marines aussi er- ratiques dans la vallée d’Aoste , dont je fais une collection. J’en ai de divers sites de la vallée, dans lesquels il n’y a aucune roche calcaire coquillière , ce qui prouve que la mer y a passé sans y séjourner longtemps. 2° Plusieurs de ces roches en place se trouvent dans des vallées de dénudation et dans des bas-fonds, où les glaciers n’auraient pu atteindre avant que le déluge les eût mis à découvert , ce qui me paraît incontestable, en considérant à quelle hauteur la vallée principale et quelques vallées latérales étaient avant le déluge par la 'découverte des lits antédiluviens de la Doire et de cer- tains torrents, celui de Yalsavaranche , celui de Cogne et du Bultier, qui vient se jeter dans la Boire, au S.-E. de la cité d’Aoste, et qui lui donne le nom de Doire Baltée. Le lit primitif de ce dernier se montre au midi du hameau de Condemine à Gignod, sur la route d’Aoste , au grand Saint-Bernard, là où elle fait un angle. Au côté gauche de l’angle, en montant, si l’on observe attentivement , on pourra suivre ce lit sur un bon trajet. Son lit actuel est environ vingt minutes plus bas. Tout le sol de la vallée de Yalpelline, dont le versant d’ouest est Gignod, et au fond occidental de laquelle coule maintenant ce torrent , devait naturellement être à cette hauteur; cette vallée a une lieue en- viron de largeur. Ce sol aurait couvert avant le déluge, à une grande profondeur , certaines roches en place, sur lesquelles on voit les stries. Ap rès ces observations, il se présente une question fort grave : comment supposer un glacier qui aurait envahi le val d’Aoste en long et en large, jusqu’à la hauteur où l’on trouve des blocs er- ratiques, c’est-à-dire jusqu’à la hauteur du petit Saint-Bernard, ou plus haut encore, car on y trouve également des blocs? Ce système de glacier gigantesque offre de grandes difficultés. 1° Il faudrait un déluge de neige pour former un tel glacier; car on sait qu’il faut de la neige pour former un glacier , et non 732 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , de l’eau. Le lac Penus , à côté de l’hospice du grand Saint-Ber- nard , n’a jamais formé un glacier, quoiqu’il soit bien plus élevé et moins exposé au soleil que bien des glaciers qui occupent un sol fort inférieur et plus exposé au midi , et qui croissent même quelquefois sous une température qui paraîtrait devoir les faire diminuer. Il faudrait donc admettre un vrai déluge de neige, car l’eau du grand cataclysme n’aurait point formé un glacier ; et l’on ne voit pas non plus que la glace de l’eau soit soumise au mou- vement des glaciers , et forme des stries et des cannelures sur les roches voisines. Ce serait recourir à un nouveau prodige sans raison , ce me semble. 2° Il est bien probable que le déluge aura causé un abaisse- ment dans la température; mais est-il vraisemblable que ce re- froidissement ait continué pendant plusieurs années, c’est-à-dire assez longtemps pour que la neige qui serait tombée à plusieurs reprises ^et en grande quantité pût former un glacier "universel? Deux raisons s’y opposent • l’une , c’est qu’il faudrait une trop grande et trop longue irrégularité ou anomalie dans le cours de la nature ; l’autre, c’est que, par un grand froid , on n’a point de neige, comme l’expérience le prouve. 3° De plus, les partisans d’un glacier uni et immense suppo- sent qu’il n’aurait pas existé au-dessus de la ligne où l’on cesse de trouver, dit-on, des blocs erratiques. Or, cela paraît inadmis- sible; car les neiges sont habituellement plus abondantes sur les collines et dans les plaines; et si c’était vrai qu’on ne trouvât pas des blocs erratiques depuis une certaine hauteur inférieure aux montagnes, le poli et les stries de celles-ci devraient, à défaut de blocs erratiques, nous attester l’existence des glaciers qui se for- ment sur des pentes même fort inclinées, comme on le voit sur plusieurs montagnes. 4° Les glaciers bouleversent le sol qu’ils occupent, détruisent et aplanissent les protubérances qu’ils rencontrent en s’avançant. C’est ainsi que je vis , en 1817, le glacier du Berrier, alias de la Brenva, au pied du Mont-Blanc, bouleversant le terrain sur lequel était la chapelle de Notre-Dame, laquelle fut détruite par cette cause physique, et non par des ordres supérieurs ... , comme on l’a avancé dans le Nouvel Itinéraire des vallées du Mont-Blanc , 2e édit. Genève , 1829, pag. 255. On l’a reconstruite plus haut. On voit tout près, à l’angle S.-E. , la roche calcaire polie et striée par le glacier, on ne sait à quelle époque. Un glacier s’enfonce dans le terrain qui s’oppose à son accroissement, le soulève et le détruit en se couvrant lui-même d’une partie de ses débris, en- DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 733 gloutissant dans ses crevasses ce qui ne reste pas à la surface , faisant faire dans la suite diverses évolutions à des corps solides. Ainsi un glacier universel, ou des glaciers qui, provenant des diverses vallées latérales, se seraient réunis dans la vallée princi- pale, et l’auraient toute envahie, auraient infailliblement dé- truit les dépôts diluviens, dont les uns s’élèvent fort haut en forme d’arête, les autres en terres, etc. Or, ces dépôts n’ont point été soumis à l’empire destructeur des glaciers, car ils subsistent. Je citerai seulement l’arête remarquable, dite vulgairement la hecca (montagne) blanche , qui fait angle avec la vallée étroite où elle gît, dans la commune de Pollein, à deux lieues et demie environ de la cité d’Aoste, au S.-E. ; on ne peut pas regarder cette arête comme une moraine. Je parlerai encore d’un tertre de forme conique, qu’on voit à une petite demi- lieue au levant d’Aoste , en suivant le sentier agréable qui est à la droite du grand ruisseau Baudin ; il est tout près et au levant du hameau dit le Crest , dans la commune de Saint-Christophe. Les paysans appellent ce promontoire le chantier du Crest. C’est un tertre graveleux, isolé, parfaitement conique, contenant des blocs erratiques bien enfoncés et beaucoup de cailloux arrondis, trans- portés et ainsi agglomérés par le terrain boueux diluvien. Je citerai encore la belle côte de Gargantua, à une demi-lieue au S. -O. de la cité, laquelle est transversale à la direction de la vallée; mais les preuves de ce genre ne manquent pas. 5° Si l’on suppose que les glaciers, commençant à se former sur les montagnes ou à leur pied, se soient avancés progressivement jusqu’à ce qu’enfin ils auraient occupé toute la surface de la vallée en amont et en aval, l’on doit admettre un espace de temps indéfini pour qu’ils pussent atteindre les limites du sol qu’ils auraient parcouru , en considérant le temps qu’ils mettent actuellement à parcourir un certain espace, outre qu’il est reconnu que les gla- ciers augmentent et diminuent alternativement, quoiqu’on ne puisse dire que cette alternative arrive régulièrement chaque sept ans. Un observateur digne de foi m’a dit qu’une année le glacier delà Brenvaaavancéde7 pieds dans l’espace de quinze jours. Cette année (1845) l’on m’a aussi rapporté qu’il a gagné 137 pieds de terrain depuis le 10 décembre 1844 jusqu’au 10 juillet suivant . sauf erreur dans le mode d’observation. 6° L’absence du poli et des stries sur des montagnes et des roches où l’on devrait en trouver s’il y avait eu un glacier universel, dépose contre cette hypothèse. Je conçois, et l’expérience prouve que dans plusieurs endroits ces stries ont dù disparaître par l’ai- 734 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , tération survenue à la surface de certaines montagnes et de plu- sieurs roches en place ; mais en considérant qu’un certain nombre de montagnes et de roches sont de la même qualité que celles qui présentent des stries, qu’elles ne sont pas plus exposées aux agents atmosphériques , on est naturellement porté à croire que l’absence totale des stries prouve l’absence d’un glacier qui les aurait formées s’il y eût existé. Je me borne à une observation : le glacier de la Brenva, à Courmayeur, a laissé sur la montagne méridionale les stries bien marquées jusqu’à un quart de lieue environ de distance de la limite actuelle , et l’on voit la roche polie à une grande hauteur; les habitants de Courmayeur appel- lent cette montagne polie la liaisin) elle est calcaire. Que le géologue se donne la peine de suivre cette chaîne de montagnes jusqu’à Saint-Didier , et qu’il examine encore la chaîne attique à la droite de la Doire jusqu’à la Margax, sur une échelle de 2 lieues, il n’apercevra plus aucun poli ni aucune strie, soit sur les flancs nus des montagnes, soit sur les roches en place, depuis la ligne de déniât cation bien sensible à un quart de lieue à peu près au midi du glacier. L’observation sur les moraines donnera le même ré- sultat. Les montagnes dont je viens de parler sont calcaires comme celle qu’on voit polie et striée ; c’est précisément le cal- caire qui se prête le plus à la polissure des glaciers et aux stries ; d’ailleurs, j’ai remarqué sur ce poli un vernis qui rend en quelque manière la surface de la roche imperméable aux fluides atmosphériques , comme la patine préserve les médailles de toute altération. 7° En considérant que sur le même sol il y a des blocs erra- tiques superposés , et d’autres ensevelis et fort enfoncés , il est naturel de conclure que ceux-ci ont été emportés et enveloppés par un courant boueux. En comparant la quantité de pierres qu’on voit sur les glaciers les plus bas, car les plus élevés n’en ont que fort peu ou point , avec le nombre infini de débris erra- tiques qu’on voit sur le sol alpin, dans des lieux même à l’abri des ravins, on ne peut raisonnablement admettre que tous ces transports soient dus aux glaciers. Quand on voit les blocs em- portés et déposés par des torrents qui débordent avec fureur, on n’a pas de difficulté à reconnaître que l’invasion subite de l’Océan aura eu une force qui échappe aux calculs des hydrolo- gues , d’autant plus que le globe terrestre aura subi alors des se- cousses qui lui auront imprimé un mouvement ondulatoire tel que des blocs auront pu facilement du versant d’une montagne tomber sur le versant opposé ou dans la plaine. Les moraines des 735 DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. anciens glaciers n’auront pas été toutes formées des débris transportés par les glaciers , mais bien des pierres et du gravier , qu’ils ont rencontrés sur les terrains qu’ils ont occupés, comme il arrive encore maintenant. 8° J’ai remarqué en parcourant la colline septentrionale de la vallée d’Aoste, sur une longueur de plusieurs lieues, que la série des blocs erratiques granitiques est interrompue de loin en loin, et que l’espèce de granité varie à peu près en droiture des diverses vallées secondaires qui se penchent sur la principale ; on ne peut donc supposer un glacier continu qui, partant du Mont- Blanc, aurait envahi toute la colline septentrionale d’Aoste. Ces dépôts me paraissent donc avoir été faits par des glaciers divers, provenant de diverses vallées, et en comparant les espèces des blocs erratiques de diverses régions avec celles qui constituent les montagnes, on pourrait reconnaître le point de départ de chaque glacier. On a dit que sur la colline méridionale de la vallée d’Aoste , on ne trouve point de blocs erratiques de granité , et l’on a ajouté que cela s’explique en supposant deux glaciers provenant l’un du Mont-Blanc, et l’autre de la vallée latérale méridionale de Cogne, qui serait descendu par Aymarille, et qui, arrivé à la vallée principale, aurait pris la direction de celle-ci à l’est, en s’avan- çant parallèlement au glacier de Courmayeur, qui aurait tenu la gauche. L’on a supposé qu’il n’y avait point de roche granitique sur la ligne que parcourait le glacier de Cogne , depuis le point du [départ, et l’on a envisagé la longue et haute colline dite la Serra, convergente à l’entrée orientale de la vallée d’Aoste, comme une moraine du glacier qui aurait couvert le côté septentrional de cette vallée dans toute sa longueur. Cette hypothèse est ingénieuse ; mais elle ne me paraît pas ad- missible : premièrement , pour plusieurs des raisons sus-exposées ; secondement, elle est basée sur la fausse supposition qu’il n’y a point de blocs granitiques sur la ligne qu’aurait parcourue le glacier méridional d’Aoste; car, sans parler de ceux que j’ai trouvés bien haut sur la colline à la droite de la Doire , en par- tant de Courmayeur, j’en ai aussi vu à l’entrée de la vallée qui con- duit à Cogne , à une lieue de distance au midi de la vallée prin- cipale, en faisant tout récemment une excursion jusqu’au célèbre aqueduc romain, appelé le Pondel ; ils se présentèrent sur le bord du chemin à droite, en montant le premier, à cinq minutes au- dessus du hameau qui porte le nom de la Poià (la montée), Ce bloc ail pieds environ de long et 6 de large ; on a construit 736 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , un oratoire dessus , dit l’oratoire de Bioley (nom de celui qui le fit faire); à cinq minutes plus haut se trouve le second bloc gra- nitique, et en suivant le sentier tendant au Pondel, on voit un troisième bloc granitique roulé, au lieu dit les Prés du Rafort. Les montagnes voisines de l’un et de l’autre versant sont cal- caires. Je n’ai pas poussé mes recherches plus loin de ce côté-là ; mais cela suffit pour conclure que la direction des dépôts dilu- viens vers l’E.-N.-E. est due à celle du courant violent qui a poussé de ce côté, d’autant plus qu’on trouve bien enfoncés dans le sol de la colline septentrionale certains blocs énormes de manganèse, qui paraissent provenir des montagnes méridionales ou gît cette roche. Quant à la colline de la Serra , je ne crains pas de la dire diluvienne, après de Saussure , qui , en parlant des deux collines qui sont dans la plaine à l’entrée orientale de la vallée d’Aoste , s’énonce ainsi : « .... Ne désignent-elles pas évidemment les bords » du courant qui s’évasait en débouchant hors de cette vallée ?... » Je ne sais si je ne me fais point illusion ; mais il me semble qu’à » moins d’avoir des attestations de témoins oculaires, on ne peut » pas imaginer des monuments qui prouvent la vérité d’un fait » avec plus d’énergie (1). » D’ailleurs, cette colline serait une moraine monstre, sans pareille parmi celles qu’on reconnaît être telles , du moins parmi celles que j’ai vues de quelques uns de nos grands glaciers. Maintenant j’émets une opinion que je crois m’être propre: aussi je l’avance avec timidité, en la soumettant au jugement des savants. Elle me paraît simple et à l’abri des difficultés très graves, pour ne pas dire insolubles, qu’on élève contre les partisans de ces mers de glaces continues dans le sens exposé , et de celles dans lesquelles se jettent les antagonistes des stries , qui attestent évidemment l’existence d’anciens glaciers dans des lieux où il ne pourrait y en avoir aujourd'hui. A mon avis, le déluge a soulevé les glaciers ; le courant les a transportés , et les eaux en baissant et en se retirant en ont déposé en divers endroits, où ils auront certainement passé plusieurs années avant de se dissoudre par la liquéfaction; ce qui se conçoit facilement, si l’on considère qu’une avalanche qui n’est qu’une partie mi- nime en comparaison d’un glacier, dure quelquefois une année ou plus avant de disparaître complètement. La température 0 Voyages dans les Alpes , n° 977 ; voyez aussi les n°* 319, 978 et 2ûo3. DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 737 ayant dû être refroidie après le déluge, aura conservé les gla- ciers erratiques , et même des neiges plus fréquentes les auront alimentés pendant quelque temps. Si cette opinion acquiert de la certitude en se vérifiant par des observations que d’autres plus éclairés pourront faire , elle deviendra une nouvelle preuve du grand cataclysme mosaïque. Je ne prétends pas généraliser les conséquences que je crois devoir tirer de mes observations , mais je me borne à la vallée d’Aoste. J’ai remarqué qu’en calculant approximativement la quantité que telle ou telle roche en place a perdue par le frottement du glacier, et sachant combien ce frottement est corrosif, on voit que le glacier n’a pas séjourné longtemps clans son lieu d’exil. J’ai trouvé, mais rarement , des blocs erratiques polis et striés ; il y en a un , entre autres , à la gauche du chemin de Beauregard, à quelques pas au-dessus du ruisseau Baudin; il est de serpentine dure; il paraît conserver la place qu’il occupa lors du déluge ; ses angles sont abattus , arrondis, et sa surface très peu convexe est polie et striée ; ce qui paraît encore indiquer qu’après avoir été roulé’, il fut soumis à l’action d’un glacier qui vint postérieu- rement s’arrêter sur le même sol , ce qui se prouve encore par le grand nombre de blocs erratiques qui sont du côté septentrional de ce chemin , dont on s’est servi pour le mur qui soutient le terrain supérieur, qui paraît ne devoir son élévation brusque et considérable au-dessus de l’inférieur qu’à l’action du même glacier qui , en le soulevant par son flanc septentrional , en fit comme sa moraine , et cette élévation continue tout le long du même chemin, excepté le promontoire déroché par lequel il passe, et où l’on remarque la roche polie, quoique la surface en ait été un peu altérée par diverses causes. La grande étendue d’une moraine ne doit pas étonner, attendu que divers glaciers alpins ont plusieurs lieues de longueur. Je finis par une observation qui me paraît digne d’être aussi faite dans d’autres vallées : c’est qu’on voit certaines montagnes polies à une hauteur où les glaciers actuels ne paraissent avoir pu atteindre; ce seront donc des glaciers antédiluviens qui les auront polies; et en examinant les limites de ce poli, on pourra juger et de l’élévation du sol dans ces endroits à l’époque anté- diluvienne, et de l’étendue des glaciers. M. Bourjot remercie ensuite la Société des sciences na- 738 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON, turelles de Semur de la réception qu’elle a faite aux membres de la Société géologique de France. Séance du 22 septembre à A vallon. PRÉSIDENCE DE M. MICHELIN. La séance est ouverte à 7 heures. M. Cotteau, secrétaire, donne le résumé suivant des courses faites à Semur dans les journées du samedi 20 et dimanche 21 octobre. M. Hébert fait remarquer que les faits observés dans les excursions précédentes lui paraissent contredire la théorie exposée par M. Leymerie, et d’après laquelle la silification du calcaire à gryphées arquées serait due à des sources d’eau chaude chargées de silice ou geysers. Le terrain parcouru par la Société est entièrement ferru- gineux, d’une étendue de plus de 4 kil. de longueur, sur 2 de largeur, et d’une épaisseur de 6 à 8 mètres. Cet espace de terrain parfaitement horizontal, circonscrit dans plus de la moitié de son contour par le Serein, dont il forme la rive gauche , doit évidemment l’abondance de l’oxyde de fer qu’il renferme aux filons ferrugineux qui sillonnent la rive opposée, entièrement granitique. Le voisinage des filons, quartzeux lorsque le calcaire est silieifié, ferrugineux lors- qu’il est ferrifère, ne permet pas de douter que les filons ne soient la cause de ces modifications. Quant à décider si ces modifications ont eu lieu pendant le dépôt du calcaire à gryphées arquées, comme le veut M. Moreau, ou après ce dépôt, comme le pense M. Virlet; sans se dissimuler que la dernière opinion pourrait être sou- tenue, M. Hébert rappelle que les carrières de Thoste et de Beauregard ont montré des bancs nombreux de calcaire et d’argiles alternant ensemble, sur une épaisseur de plus de 6 mètres; que ces couches , dont il a recueilli un certain nombre d’échantillons pris à des hauteurs différentes , sont DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 739 bien horizontales jusque dans le voisinage du granité; que le peroxyde de fer s’y trouve répandu partout d’une manière presque uniforme, cristallisé seulement lorsqu’il se substitue au test des coquilles ; qu’aucune apparence de sublimation ne s’y manifeste. Il préfère admettre que les éruptions fer- rugineuses ont eu lieu pendant le dépôt des couches cal- caires, de manière que les filons pouvaient percer le sol à la fois sur le rivage de la mer et sous les eaux qui se trouvaient ainsi chargées d’oxyde de fer , plutôt que d’adopter l’hypo- thèse d’une éruption postérieure à la consolidation des dé- pôts. De plus ces bancs ferrugineux contiennent des couches entièrement composées de coquilles. En brisant la roche, il est presque impossible de voir autre chose qu’une agglomé- ration de coquilles. Il serait assez naturel de penser que les éruptions ferrugineuses ont contribué à la destruction in- stantanée de tous ces animaux. L’arkose coquillière d’Avalîon n’est pas moins contraire à la théorie des sources thermales. La Société a examiné à la montée des Pannats , près d’Avallon , un filon de quartz tra- versant verticalement le granité, et venant s’épancher à la surface de cette roche , sous une couche d’argile durcie par le contact. Cette argile n’est point pénétrée parle filon, elle contient seulement dans des fissures intérieures des cristaux de quartz. Bientôt au-dessus de cette argile on retrouve l’ar- kose coquillière , c’est-à-dire le calcaire à gryphées arquées silicifiées. Voyez la coupe fig. 2, pl. XX. La liaison intime qui existe entre le filon de quartz, l’ar- gile durcie et injectée de silice et le calcaire silicifié ne permet pas de faire intervenir ici des geysers. Il résulterait des faits précédents que l’apparition des filons de quartz, et par conséquent la formation de l’arkose coquillière, constituerait une époque géologique bien pré- cise, et qui serait celle du dépôt des couches de calcaire où abonde la Gryphœa arcuata . Le phénomène des éruptions ferrugineuses de Thoste et de Beauregard serait antérieur, ou du moins ne se serait point prolongé aussi longtemps; car , dans la carrière de Soc. géol. Tome II, 2P série. 48 740 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, Beauregard, M. Hebert a constaté que le banc supérieur, qui n’est autre, en cet endroit, que le calcaire à Gryphœa arcuata , n’est point ferrugineux ; son épaisseur est de 0m,50; au-des- sous vient un autre banc de Üm,l5 , qui n’est point non plus ferrugineux; puis se présente une couche d’argile barriolée de 0m,10 à 0m,20 ; puis enfin les bancs ferrugineux, où la présence de l’oxyde de fer se manifeste tout d’un coup avec une grande abondance. Si l’on admettait pour l’introduction du fer dans ces couches la théorie du métamorphisme , on ne verrait pas pourquoi l’action métamorphique se serait arrêtée sur tous les points, quelle que fût l’épaisseur du dépôt, à la couche à gryphées arquées. A. Thoste, le dépôt ferrugineux est beaucoup moins épais qu’à Beauregard; et cependant là aussi, au-dessus des bancs ferrugineux, se voit le même calcaire à gryphées arquées non ferrugineux, mais avec la particularité curieuse d’être silicifère : ce qui s’ac- corde avec les idées précédentes. Les couches ferrugineuses, quoique inférieures au calcaire à gryphées arquées , con- tiennent cependant aussi cette coquille passée à l’état de fer oligiste. Mais elle y est rare. Ce dépôt ne doit donc pas être séparé du lias , dont il est la partie inférieure. Au-dessous on retrouve l’arkose grani- toïde, puis le granité, sans intermédiaire. On n’a pas eu l’occasion de constater l’existence des couches qu’on peut rapporter à des formations antérieures au lias. M. Leymerie répond que l’état de fer oligiste , sous lequel se présente ici l’oxyde de fer , ne permet guère de supposer qu’il ait été formé par une simple sublimation dans des fentes de filon; tandis que cela s’explique naturellement dans l’hy- pothèse d’eaux thermales émise par lui. M. Moreau dit qu’à l’instant des émissions quartzeuses qui se faisaient au fond et près du bord de la mer, la température de l’eau était très élevée, et que pour dissoudre les substances que dissolvent les eaux thermales , il n’est pas nécessaire de supposer que ces eaux aient pénétré dans les fentes du granit pour en ressortir après s’être chargées de ces substances. Les eaux en contact avec la matière des filons pouvaient , à cette Dü 14 AU 2 4 SEPTEMBRE 1845. 741 température, dissoudre ces substances et produire les mêmes effets que les eaux thermales. M. Moreau lit les deux notes suivantes de M. D’Avout, et dépose sur le bureau des échantillons que l’auteur offre à l’appui de sa communication. 1 ° De l’âge du terrain de transition situé à V extrémité sud du massif granitique du Morvan. A l’extrémité S. du massif granitique du Morvan, il existe sur les bords de la Loire , au S. -O. de Bourbon-Lancy, un lambeau de terrain de transition, reste d’autant plus précieux des forma- tions de cette époque, qu’il est unique dans cette partie de la France. Ce terrain a été indiqué sur la carte de MM. Êlie de Beaumont et Dufrenoy, comme appartenant au groupe du ter- rain de transition; mais nulle part, dans l’explication de la carte, ils ne lui ont assigné un rang dans l’échelle de cette formation. Doit-il être considéré comme faisant partie du système devonien , du système silurien, ou de l’étage inférieur sans fossiles du sys- tème cambrien, que nous nous proposons de nommer cumberlan dien? telle est la question que je viens soulever ; elle ne manque ni d’intérêt ni d’à-propos , puisque cette contrée forme le complé- ment du massif, qui est l’objet des études présentes de la Société. Limites du terrain. Cî lambeau de terrain est, ainsi que nous l’avons dit, borné au S. et à l’O. par la Loire , dont il forme les montagnes qui en dessinent le bassin du côté de la Bourgogne. 11 s’étend jusqu’au bord de la Loire, dont les alluvions modernes recouvrent les extrémités , en formant une bande étroite entre le fleuve et la montagne. Au N. et à l’E., la carte de France l’indique comme limité par la route de Bourbon-Lancy à Digoin; il nous semble que l’on doit reculer cette limite un peu plus loin, et la bornera une ligne qui passerait à 3 kilomètres environ de Bourbon -Lancy sur la route de cette ville à Autun, qui traverserait Chalmoux , serait tangente à la montagne de Chizeuil , et aboutirait à la Loire à moitié dis- tance de Perigny et de Saint- Agnan-sur-Loire. 742 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A A VALLON , Composition du terrain. Ce terrain est d’une composition très simple et très uniforme , la masse principale est formée de schistes qui varient de dureté depuis une consistance tendre facilement rayée à l’ongle, jusqu’à la plus grande dureté, suivant qu’ils s’éloignent ou se rapprochent des montagnes euritiques de Bourbon-Lancy , ou granitoïdes de Mont etdeNeuvy. Ces schistes sont gris-verdâtre et terreux pour l’espèce tendre, verdâtre jusqu’au vert foncé, approchant du noir, pour l’espèce dure; dans les parties avoisinant les montagnes qui le limitent, il prend une couleur tout-à-fait noire ou rouge brique ; il paraît alors sensiblement modifié ; dans d’autres points il contient de petits cristaux empâtés. La matière la plus répandue ensuite est le quartz qui pénètre dans un grand nombre de cas et s’incorpore avec la pâte schisteuse sans paraître en altérer bien sensiblement la nature ; outre le quartz en filons considérables qui se rencontre fréquemment , le terrain est semé de noyaux amygdaloides de quartz, soit englobés dans la roche , soit rendus libres dans le terrain formé de ses dé- bris ; dans ce cas, il est toujours d’un blanc laiteux très pur ; d’autres fois, enfin, on le trouve affectant des formes cristallines. Aux deux matières précédentes vient se joindre, surtout dans les parties qui se rapprochent de la Loire vers Aupont, Gilly, etc. , des blocs calcaires , dont la pâte est d’un bleu noirâtre, d’une texture cristalline, traversés de filets blancs, mais surtout mêlés presque toujours d’une quantité considérable de quartz sous toutes les formes, cristaux, couches aplaties, grains, etc. ; d’autres fois dans les calcaires qui se rapprochent du centre du massif, vers le château de Jarsaillon (commune de Chalmoux) , il paraît mêlé au schiste, dont il adopte les formes et la texture satinée. Soumis à une grossière analyse , après avoir été réduits en chaux, les calcaires d’ Aupont et de Gilly, traités par l’acide hydrochlorique , ont donné des résidus siliceux, mais très peu d'argile, tandis que ceux de Jarsaillon, au contraire, en con- tiennent une très forte proportion. Absence des fossiles. Ce qui caractérise particulièrement les roches que nous venons de décrire, c’est l’absence complète de tous fossiles et de tout reste DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 743 de corps organisés ; j’ai fait tous mes efforts pour en trouver* j’ai examiné des quantités de roches sur les points les plus distants et à des profondeurs variées , nulle part je n’ai trouvé trace de fos- siles. Les calcaires de Diou (Allier) renferment , dit-on , de rares entroques, je n’en ai pas vu apparence dans ceux de Gilly, qui n’en sont séparés que par la Loire. Disposition des couches. Les assises puissantes des schistes de tout ce terrain sont en gé- néral très inclinées, et dans diverses directions suivant la forme des montagnes; mais elles plongent en général vers l’O. Dans toutes les parties où le schiste n’est pas altéré fortement , il se délite en lames souvent assez minces, comme vers Aupont ; ses masses se détachent en plaques affectant des formes pseudo- régulières , satinées et luisantes ; les plans de clivage sont très inclinés par rapport aux strates générales. Le quartz, comme nous l’avons dit, a pénétré dans une foule de points , et se présente tantôt en véritables filons , tantôt en couches mêlées aux strates, tantôt en masses amygdaloïdes, depuis la grosseur d’un grain de sable jusqu’à celle d’un petit melon. Quant au calcaire, on le rencontre en général en blocs assez gros près de Gilly , Aupont , et sur les points où on l’exploite comme pierre à chaux, ou bien en gros noyaux, toujours au mi- lieu des schistes plus ou moins délités et convertis en argile , mais jamais en couches suivies et assez considérables pour engager à l’exploiter pour pierre de construction. Age de cette formation. Je n’ai jamais rencontré d’autres roches que celles qui viennent d’être décrites ; doit-on placer ce terrain à la partie la plus basse de ce qu’on nommait le système cambrien ? MM. Élie de Beaumont et Dufrénoy , dans l’explication de la carte de France , ne disent rien de particulier sur ce terrain ; ils expriment, en thèse générale, que les lambeaux de terrains de transition, disséminés sur les bords de la Loire, paraissent ap- partenir aux deux systèmes dévonien et silurien, et ils admettent, avec M. Grüner, que le troisième étage existe dans le départe- ment de la Loire, à cause des débris de schiste lydien , qui se 744 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON, retrouvent dans les grès des terrains de transition du Forez et de Tarare. M. Boulanger, ingénieur des mines à Moulins (1), regarde le système silurien comme le seul qui se rencontre dans le départe- ment de l’Ailier ; mais il infère de l’analogie de ces terrains avec ceux de la Loire et de Saône-et-Loire , qu’ils formaient tous autrefois la même nappe , qui a été déchirée par les bouleverse- ments qui ont formé les bassins de la Loire et de la Saône ; toute- fois, comme M. Grüner, il constate dans les grès des débris de terrains de transition plus anciens. N’ayantpaseu connaissance du mémoire de M.Rozet sur les mon- tagnes entre la Saône et la Loire, j’ignore s’il a donné une opinion sur l’âge des terrains qui nous occupent. Mais si l’on rapproche les caractères des roches décrites plus haut de tous ceux au moyen desquels les géologues qui se sont occupés des terrains de transi- tion ont défini l’étage cambrien , on y trouvera une analogie des plus frappantes, je dirai presque une identité parfaite dans certains cas, et dans tous aucune ressemblance avec ceux qui distinguent les formations siluriennes. En effet, dans les monta- gnes de la Loire , la base du système renferme des schistes verts , du quartz lydien; dans la montagne Noire, ce sont des schistes talqueux,des calcaires esquilleux qui se fendillent; aux Bullats, ce sont des schistes noirs qui donnent au terrain l’apparence des schistes houillers , ce qui a été cause d’essais infructueux. En Bretagne, où le terrain cambrien est plus développé, il se compose presque exclusivement de schistes luisants et satinés, et parfois de calcaires esquilleux; celui de Cherbourg ne contient que des roches schisteuses ; à Arriz, ce sont des schistes verdâtres, luisants, esquilleux, contenant des mâcles très petites, des veines de quartz , etc. Et dans toutes ces circonstances , on ne trouve que peu ou point de fossiles , et seulement, quand on en rencontre , c’est à la partie qui les rapproche du système silurien. Le terrain qui nous occupe a la plus grande analogie avec ceux de la chaîne du Forez et de Tarare , de la montagne Noire et de la Bretagne , qu’on regardait comme la partie inférieure du groupe des terrains de transition; il n’y a pas jusqu’à l’analogie tirée de sa ressemblance avec les schistes houillers qu’on y retrouve; je citerai à l’appui les essais infructueux faits ces dernières années par MM. Cockerill (x) Statistique géologique et miner al urgique de V Allier, p. 96, 107. DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. 745 et autres industriels dans les environs de Bourbon-Lancy et de Jarsaillon , et qu’on a abandonnés après avoir reconnu l’erreur. Analogie avec le terrain du Cumberland . Si les caractères du terrain de Saône-et-Loire avec ceux étu- diés en France , offrent une ressemblance très grande , l’analogie est encore plus bien plus frappante si on les rapproche de ceux du Cumberland , que M. Sedgwick décrit sous le nom de cam- brien. On croirait, en effet, dans sa description, lire celle du terrain qui nous occupe : aussi est-ce surtout dans cette forma- tion que l’on doit, à mon avis , ranger le terrain dont j’ai indi- qué la limite. Les systèmes dévonien et silurien pourront être représentés dans ces contrées par quelques lambeaux striés aux extrémités de la limite tracée : ainsi , à Bourbon-Lancy, on trouve un grès qui contient des traces de schistes anciens , et à Saint- Agnan-sur-Loire se remarque une assise de grauwacke d’une pâte rouge remplie de débris schisteux ; mais , je le répète , ces in- dices du système silurien ne se rencontrent qu’au-delà des limites tracées précédemment au terrain que nous regardons comme devant être rangé dans la partie inférieure du système cambrien, que je propose de désigner sous le nom de système cumber- landien. 2° Sur Vâge de la montagne de Chizeuil , et des filons de quartz des terrains de transition environnants . La montagne de Chizeuil , sur les flancs de laquelle repose le terrain qui vientde nous occuper, a déjà été décrite par MM. Rozet et Landriot (1). Je n’en ferai donc pas une description détaillée; je rappellerai seulement qu’elle est entièrement composée de quartz à tous les états, depuis l’état compacte le plus dur, jusqu’à la consistance poreuse d’une véritable ponce. Au quartz se trouve associé et mêlé le fer, également à tous les états d’oxydation. Il s’en sépare parfois pour prendre l’apparence de scories de forges, de concrétions imitant presque les stalactites ; tantôt il se trouve mêlé abondam- ment avec le mica, qui le parsème de ses brillantes paillettes; d’autres fois il présente lui-même les couleurs irisées les plus (1) Bull, de la Soc., t. IX, p. 202, 746 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , vives, puis offre par dessus les parties boursouflées des cristaux de quartz coloré par l’oxyde de 1er; enfin, du mélange intime et très varié de ces deux composants résulte une roche d’un rouge- noir qui est exploitée pour pierre de taille commune; elle est souvent remplie de cavités géodiques et scoriacées. On a essayé plusieurs fois d’exploiter cette roche comme mine de fer ; mais on n’en a jamais retiré qu’un fer aigre. La montagne est limitée à l’O. par les terrains de transition décrits plus haut , et qui s’étendent jusqu’à son pied; sa base est formée comme les collines qui l’entoUrent de granité porphyroïde, qui ne paraît pas se lier avec la calotte quartzo-ferrugineuse qui, selon que l’a dit M. Landriot , présente un dôme formé par un épanchement de quartz qui a été sans doute favorisé par les dis- locations du sol, lors des soulèvements qui l’ont agité; c’est , en un mot, un filon de quartz qui s’est fait jour à travers les gra- nités. Mais à quelle époque a eu lieu cet épanchement? Comme le filon ne paraît avoir éprouvé aucune dislocation, on doit ad- mettre qu’il est postérieur à la montagne et que l’épanchement est venu à la suite du soulèvement de la masse granitique ; or, ce soulèvement répond à l’apparition du granité porphyroïde, qui n’a eu lieu qu’après le dépôt du système silurien : ainsi l’épanche- ment de Chizeuil serait postérieur à cette formation, qui nous donne une limite inférieure ^ mais comment trouver l’autre? Or, la masse granitique n’ayant été recouverte par aucune formation depuis son soulèvement, il est probable que l’épanchement a dû suivre de près la dislocation du terrain sur lequel il repose. Cette probabilité se trouve encore appuyée par les nombreux filons de quartz que nous avons signalés dans les terrains de tran- sition; là tout porte à croire que les filons ont suivi de près le dépôt des terrains avec lesquels ils sont mêlés d’une manière intime, où ils. ont pénétré de tous côtés, et sans avoir l’apparence d’avoir éprouvé de grandes résistances. L’épanchement de ce quartz est sans doute contemporain de celui auquel on doit les calcaires primitifs en masses isolées de ces terrains, lesquelles ont dû être formées comme les travertins des sources thermales; au moins cette hypothèse ne semble plus devoir être mise en doute depuis les travaux de M. Yirlet et le mémoire sur les filons qu’il a présenté en 1844 à la réunion ex- traordinaire de Chambéry : aussi , d’après ses explications , ne mettons-nous pas en doute que les calcaires du terrain cambrien ont été amenés dans cette formation en même temps que les 747 DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1 8 4 Ô . masses de quartz , et sont contemporains de ce terrain otî bien sont de très peu postérieurs. Quant au fdon qui a donné naissance à la montagne de Chi- zeuil, il n’est certainement pas antérieur au soulèvement du granité porphyroïde; mais s’il est probable qu’il a eu lieu à l’époque de ce soulèvement , rien ne nous atteste cependant qu’il ne lui soit pas postérieur. A la suite de cette communication , une discussion s’en- gage sur les filons quartzeux dont parle M. d’Avout et dont il cherche à préciser lage. M. de Charmasse pense que ces filons sont les précurseurs de ceux qui ont formé l’arkose ; mais que, comme l’a dit M. Rozet dans son mémoire sur les montagnes qui sépa- rent la Saône de la Loire , les éjections quartzeuses ont duré sans interruption depuis le commencement du dépôt des terrains stratifiés jusqu’au lias. 11 ajoute que la montagne de Chizeuil est une preuve de l’éjection simultanée des matières quartzeuses et ferrugi- neuses, qui ont formé une montagne au lieu de former une nappe. M. de Charmasse fait ensuite les deux communications sui- vantes, et dépose sur le bureau des échantillons à l’appui. 1° Sur la non- association de la houille avec les porphyres dans le bassin d' Autun , par M. Desplaces de Charmasse. Lors de la réunion de la Société géologique de France à Autun, en 1836 , deux de ses membres ont observé une couche de houille qui leur sembla intercalée dans les porphyres, et cette observa- tion, consignée dans le Bulletin, t. vii, p. 327, est devenue un fait classique déjà cité dans plusieurs ouvrages de géologie. Ce fait de l’injection des porphyres dans le terrain houiller, admis par les uns, rejeté par les autres, nous parut, à M. l’abbé Landriot et à moi, mériter d’être examiné de nouveau en ce qui concernait notre localité; en conséquence, nous nous rendîmes au pont de la Vesvre , où, malgré tout le soin que nous apportâ- mes à explorer la montagne du Larcy , il nous fut impossible de retrouver la coupe insérée au Bulletin; mais si nous n’avons pu 7i8 RÉUNION UXTRAORDIN AlKii A AVALLOA , vérifier l’exactitude de cette coupe, nous avons du moins fait quelques observations dont le résultat a été de nous inspirer des doutes sérieux sur l’existence du fait qu’elle semblait démontrer. La montagne du Larcy , située au débouché du vallon de la Petite Verrière , dans le bassin d’ Autan , forme au milieu du ter- rain houiller un petit promontoire porpliyrique dirigé du N.-O. au S.-E. , dont la pente présente , du côté de l’O. , un escarpement qui occupe environ le tiers inférieur de la montagne. Le terrain houiller entoure sa base à l’E. et au S. en se relevant vers elle ; mais du côté de l’O. il ne forme plus qu’une bande étroite située à peu près à la partie supérieure de l’escarpement composé en entier, ainsi que le sommet de la montagne, par une roche por- phyrique, voy. pl. XX, le plan fig. 3 et la coupe fig. 4. Cette bande, que nous avons pu suivre sur une longueur d’en- viron 300 mètres, montre sa tranche presque horizontale sur plu- sieurs points dépouillés de végétation, et nous avons reconnu qu’elle se rattache par une de ses extrémités au terrain houiller qui recouvre vers le S. le pied de la montagne , et que la direc- tion est la même que celle du promontoire sur les flancs duquel elle repose avec une faible inclinaison ; dans quelques points elle présente des dérangements qui correspondent, ainsi que nous avons pu le voir dans une carrière, à des fentes ou failles qui se trouvent dans le porphyre , lesquelles sont quelquefois remplies par une matière argileuse mêlée de galets. L’espace compris entre la tranche du terrain houiller et le sommet de la montagne où le porphyre se montre traversé par de nombreuses veines de quartz est occupé par des éboulements assez considérables qui nous ont empêchés , malgré les fouilles que nous avons fait pratiquer, de voir si le porphyre du sommet s’étendait sur le terrain houiller, ou si celui-ci y était simplement adossé. Un puits de recherches foncé il y a quelques années, et qui a traversé le terrain houiller sur une épaisseur de 45 mètres , a rencontré des poudingues dont les galets étaient composés entiè- rement aux dépens du porphyre de la montagne du Larcy. Dans une tranchée que nous avons fait ouvrir près des anciens travaux, nous avons trouvé de la houille pénétrée de silice , et empâtant des fragments argileux de grès et de porphyre, et les roches sous-jacentes présentaient des fissures remplies par de la houille. Les roches du terrain houiller nous ont paru généralement avoir subi une certaine altération ; les parties schisteuses ou argU 749 DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845. leuses décolorées et durcies ressemblent à certaines roches eunu- ques; les grès gris-verdâtre clair, tachés de jaune , ont perdu les caractères primitifs de cettej roche, et peuvent facilement être confondus avec les porphyres; la houille ne présente point l’as- pect du coke comme dans le voisinage des dykes de basalte , mais elle n’est que peu bitumineuse , et sa combustion est rendue difficile par le réseau siliceux qui pénètre dans les plus petites de ses fissures. Enfin , nous avons remarqué qu’aucune roche autre que le porphyre, auquel est attribué le soulèvement, ne se montre dans le voisinage. En résumé , nous n’avons pas vu le porphyre recouvrir le terrain houiller ou en envelopper des fragments, tandis qu’au contraire nous avons vu la houille et les poudingues qui l’ac- compagnent empâter des débris du porphyre, et s’insinuer dans ses fissures ; nous nous sommes assurés qu’une portion notable du terrain houiller est composée aux dépens des porphyres auxquels on attribue son soulèvement. JNous pensons que quel- ques unes des roches présentées comme des eurites ou des por- phyres , n’étaient autres que des schistes ou des grès altérés , et que leur aspect particulier est dû plutôt à leur pénétration par de la silice, qu’à une action occasionnée par les porphyres qui, dans le Morvan , ne paraissent pas avoir produit une altération sensible sur les roches qu’ils ont traversées; enfin, il nous a été impossible de comprendre comment une masse de porphyre sur- gissant à l’état de fusion pâteuse , aurait pu s’insinuer précisé- ment entre le terrain houiller et les roches qui le supportaient, sans avoir soulevé quelques portions de ces derniers. Quant à la position qu’occupe cette bande de terrain houiller, nous pensons qu’on peut, sans avoir recours à une éruption de matières ignées , l’expliquer en supposant qu’elle a été détachée et portée à la place où on l’observe par une faille opérée dans le sens de la vallée de la petite Verrière, tout près de l’affleu- rement des couches du terrain houiller, et parallèlement à leur direction. Depuis ces observations, que j’ai faites avec M. l’abbé Lan- driot, j’ai visité la localité d ' Esnot, citée aussi à l’appui du fait de la pénétration des porphyres dans le terrain houiller. Il est certain que les tentatives d’exploitation qui ont eu lieu ont été faites sur une houille de qualité médiocre associée à des porphyres , et que c’est souvent en traversant cette roche que l’on est arrivé jusqu’à elle. Mais en me rappelant ce que j’avais 7Ô0 REUNION EX T K AO. K JDI MAIRE A AVALLON , vu dans les anciens travaux, et après un examen attentif de la localité, j’ai été convaincu que la houille formait des veines et des filons dans le porphyre dont elle enveloppait des masses plus ou moins considérables , tandis qu’au contraire je n’ai jamais vu ce même porphyre renfermer aucuns débris du terrain houiller. Les localités de Collonge et de la Chaume de Maine , où se ren- contrent quelques lambeaux détachés du bassin d’Autun , m’ont présenté le même phénomène. D’après ce qui précède, je suis convaincu que les prétendues eurites pénétrant dans la houille, près le pont de la Vesvre> ne sont autre chose que les roches du terrain houiller modifiées par l’action de la silice , dont on voit de nombreux filons dans les environs , et que les vrais porphyres consolidés depuis longtemps présentaient des crevasses profondes et diversement ramifiées, qui ont été remplies par la houille au moment de son dépôt, en même temps qu elle en enveloppait des blocs plus ou moins volu- mineux , de manière à former une sorte de brèche à laquelle elle sert de ciment. 2° Sur V âge des roches porphyriques du Morvan. A l’occasion des recherches précédentes, faites avec M. l’abbé Landriot, je crois qu’il est à propos de dire quelques mots de l’âge des roches porphyriques du Morvan. J’ai positivement reconnu dans cette contrée des porphyres de deux époques distinctes : les porphyres noirs et les porphyres rouges quartzifères. Les premiers, qui sont les plus anciens, va- rient considérablement , tant sous le rapport de la nature de la roche que sous celui de la couleur; ils se composent ordinaire- ment d’un pétrosilex coloré en noir par une substance que je crois être du mica extrêmement divisé, qui passe au porphyre par l’adjonction de cristaux de feldspath. Ils contiennent souvent des lames d’un mica talqueux noir verdâtre, et quelquefois du quartz qui s’y trouve disséminé plutôt en grains irréguliers ou en globules qu’en cristaux. Leur couleur est le noir , le violet , le blanc, le jaunâtre, le rougeâtre, le gris ou le vert plus ou moins foncé; tantôt la roche est extrêmement compacte et dure, d’autres fois elle est terreuse, ou bien encore elle prend une tex- ture granitoïde. Dans ce cas, la matière colorante noire s’isole de la pâte et se dispose en petits amas, en paillettes, ou forme un enduit mince sur les surfaces de clivage du feldspath. Quelquefois DU 14 AU 24 SEPTEMBRE 1845* 751 elle renferme des galets de quartz et de différentes sortes de ro- ches qui, dans une cassure fraîche, semblent à moitié fondus dans sa pâte, mais qui forment des saillies très apparentes sur les surfaces exposées depuis longtemps aux influences atmosphéri- ques. Dans plusieurs localités, ses fissures sont remplies par des veinules de carbonate de chaux d’un blanc nacré. Plus rarement cette substance s’y trouve disséminée en parcelles très ténues qui la rendent effervescente dans les acides, ou bien elle se réunit en nodules qui la font passer à une roche amygdaloïde. Ces roches sont le plus souvent massives, et ne présentent aucun indice de stratification; cependant, sur quelques points, on les voit passer à des schistes qui sont tantôt argileux et ressemblent alors à ceux des terrains de transition, tantôt, au contraire, ils sont complètement pétrosiliceux et compactes, de telle sorte que leur structure ne peut être soupçonnée que lorsque leurs surfaces ont été longtemps exposées à l’air. Dans ce cas, ces surfaces présen- tent des stries parallèles tantôt droites, tantôt contournées, ou bien des zones minces, alternativement blanches et noires, ou enfin des cristaux de feldspath , disposés en lignes parallèles. Ces traces schisteuses se dirigent à peu près du N. au S., absolument comme les graüwackes signalées sur les bords de la Loire, par MM. Manès et Rozet , et de plus elles sont sur leur prolongement. Quant à la position que ces roches occupent les unes par rap- port aux autres, je n’ai pu observer aucune régularité; toutes les variétés de couleur et de texture passent les unes aux autres pour ainsi dire à chaque instant; cependant, en les considérant dans leur ensemble, on voit qu’elles sont d’autant plus compactes et cristallines que l’on s’avance du S. au N. Ainsi , en partant de la Pierre-Ecrite pour aller vers la Loire, on trouvera d’abord des roches granitoïdes qui, sous la latitude de Château-Chinon se transformeront en roches compactes, lesquelles, au pied du mont Beuvray, contiendront déjà des galets; puis, au S. de Luzy, les schistes avec graüwackes domineront jusqu’à la Loire. Les porphyres noirs en masses puissantes et étendues composent la majeure partie des montagnes du Morvan et forment leurs sommets élevés de plus de 900 mètres au-dessus de la mer. Au fond des vallées ils passent souvent à la variété granitoïde, et sont associés à des masses de porphyres rouges qui y forment de nom- breux et puissants filons. Du côté de l’O. ils disparaissent sous les terrains secondaires du Nivernais, mais du côté de l’E. ils s’ap- puient sur des granités dans lesquels je ne les ai jamais vus péné- 752 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVÀLLON , trer en filons. Les seules substances minérales disséminées que j’y aie rencontrées sont des cristaux d’amphibole et des pyrites de fer et de cuivre en parcelles très ténues. Ainsi donc, nous voyons les porphyres noirs du Morvan sou- vent désignés par les noms de trapp, d’eurite, de diorite , etc. , roches d’origine ignée et formant autant de termes de la série , passer insensiblement à des roches stratifiées classées dans les ter- rains de transition; d’un autre côté, nous ne les rencontrons jamais en filons dans le granité ni dans aucune autre roche, et nous ne voyons pas davantage les bouches d’éruption qui auraient pu vomir un si prodigieux amas de matières. En présence de ces faits , et en les rapprochant de ceux qui ont suggéré à M. Virlet d’Aoust la théorie des roches d’imbibition (1), n’est-il pas naturel de considérer les porphyres noirs du Morvan comme étant une modification des différentes roches qui constituent les terrains de transition des bords de la Loire, modification qui aurait été le résultat d’une action métamorphique exercée par une cause que l’on pourrait rapporter aux éruptions du porphyre rouge , quoi- que certains faits semblent démontrer que leur influence a été presque nulle. Ainsi se trouverait expliquée naturellement la pré- sence, au milieu des porphyres de Champ-Robert , d’une couche assez puissante de marbre blanc qui , dans cette hypothèse, serait un lambeau de calcaire silurien ou carbonifère. Les porphyres rouges diffèrent des précédents par le quartz qu’ils contiennent en abondance, par leur couleur plus claire et par leur gisement qui leur assigne une origine différente. Leur texture est tantôt granitoïde et tantôt compacte ; leur couleur oscille entre le jaunâtre , le rouge de brique et le gris ; le quartz y est presque toujours en globules ou en cristaux plus ou moins parfaits. Comme principes accidentels, ils renferment de la pinite et du mica brun-verdâtre à peu près semblable à celui des porphyres noirs. Ils sont dépourvus de sulfures métalliques et ne font pas effervescence dans les acides. Au lieu de former des masses étendues , ils ne se montrent qu’en filons, culots ou coulées peu considérables formant de petites collines. L’épaisseur de ces filons est toujours assez grande , et ils s’étendent souvent fort loin ; témoin celui de Lormes , que l’on peut suivre jusqu’auprès d’A vallon, après un trajet de plus de sept lieues. Leur texture et leur composition est sujette à varier (1) Bull, de la Soe 1. 1, ae série, p. 845 et 849. DU 14 AU 21 SEPTEMBRE 1 8 i 5. 753 dans de certaines limites, suivant le point où on les observe, et dans leurs croisements je n’ai jamais pu constater de ces rejets, qui semblent indiquer plusieurs éruptions successives. L’altération subie par les roches à travers lesquelles ils se sont fait jour m’a paru presque nulle, au moins dans les détails; à Chastellux,un filon de porphyre soudé à un granité à grains fins, n’a pas changé la couleur de celui-ci à plus de 1 centimètre de profondeur; àLormes, le granité à gros grains paraît trituré jusqu’à une certaine distance du filon ; mais cette trituration pa- raît plutôt être le fait du frottement ou des chocs répétés des parois de la fracture que celui du passage de la matière ignée ; enfin , entre Saint-Prix et la Boutière , à 2 kilomètres de ce der- nier hameau; sur la rive gauche de la rivière, on voit dans l’es- carpement un magnifique filon qui traverse, sans les altérer, les porphyres noirs de la variété schistoïde. Dans cette localité on peut voir, à la manière dont les cristaux du porphyre sont dis- posés par rapport à la roche encaissante , qu’ils étaient formés et en suspension dans une pâte visqueuse , douée d’un mouvement d’ascension. Il est à remarquer, malgré ces faits, que si l’on considère dans son ensemble l’association des porphyres rouges avec les terrains de transition, on verra que ceux-ci sont d’autant plus dépouillés de leurs caractères primitifs , qu’ils sont plus rapprochés des régions où les porphyres rouges sont le plus développés. Les porphyres rouges traversent indistinctement les deux for- mations de granité du Morvan, et les porphyres noirs, en formant un vaste système de filons orientés environ N. 20° E. , qui s’étend sur une longueur de 25 lieues , depuis les environs de Bourbon- Lancy jusqu’auprès d’Avallon. On les observe surtout au fond des vallées où ils sont très puissants et d’où on les voit s’élancer en se ramifiant à travers les granités et les porphyres noirs sur lesquels ils s’épanchent quelquefois. Les sommets des plus hautes montagnes , comme le Beuvray, le Brulé , la Gravelle , en sont presque complètement dépourvus. Les roches qui accompagnent le terrain houiller de la Vesvre et d’Esnot étant de celles qui appartiennent aux porphyres noirs, n’ont pu y être injectées puisqu’elles sont contemporaines des terrains de transition; ainsi donc, j’ai été conduit par un autre ordre de considération , à repousser l’hypothèse des éruptions de porphyre à l’époque du dépôt des terrains houillers du bassin d’Autun, 754 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A AVALLON , ETC. M. Michelin, président, prend la parole pour remercier , au nom de la Société géologique de France, les autorités de la ville d’Avallon, pour le bienveillant accueil qu’elles lui ont fait , et leur en témoigne toute sa reconnaissance. Il déclare que la session extraordinaire de 1845 est close. La Séance est levée à 9 heures et demie. TABLEAU INDICATIF DES DONS REÇUS PAR LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANGE , depuis le 4 novembre 1844 jusqu au 16 juin 1845. DONATEURS. ©Utîrafle0, Clirto, COUptS , portrait0, ftc. MM. AGASSI^ (L.) . . , i® Essai sur la classification des poissons (extrait de la 18e et dernière livraison des Recherches sur les poissons fossiles ), in-fol. , xxxn pages. Neuchâtel, 1844. 2° Essai sur la classification des poissons (extrait de la ï8« et dernière livraison des Recherches sur les poissons fossiles ), in-fol., pag. 165-172. Neuchâtel, 1 844-- 3° Tableau général des poissons fossiles rangés par terrains (extrait de l’introduction des Recherches sur tes poissons fossiles ), in-4°, pag. xxxiii-xlix. Neuchâtel, 1 844 * 4® Monographie des poissons fossiles du vieux grès rouge ; texte et planches, ire et ae livraisons. Neuchâtel, 1 844- 5° Monographie d7 Echinodermes vivants et fossiles , 4 livrai- sons in~4°. texte et planches, avec Y Anatomie du genre Echinus , par Valentin , 9 planches in-fol. Neuchâtel , i858 , 1841 , i84a. , 6° Études critiques sur tes mollusques fossiles, Z livraisons in-4°. texte et planches. Neuchâtel, 1840-1842. 7° Histoire naturelle des poissons d’eau douce de l'Europe centrale, in-8°. t. Ier, 326 pages, atlas de planches in-fol. Neuchâtel , 1842. 8° Etudes sur les glaciers , in-8®, 346 pages, atlas de planches 1ALSÂMO - cm- in-fol. Neuchâtel , 1840. VE1II., ..... Storia, etc. (Histoire du genre Gordius ), in-4°» ®4 pages, 1 planche. Milan, i843. Soc, Géol. , Tome II, 2 e série. 49 756 BARKTÉOITD (F. M. BEAUDOIN (Ju- les) . . BERGMAN! (Jo- seph) BI,AMCHET(Roi>.). BOMÎEAM (J.)* . BOUBÉE (Nérée). BOUE (le Dr A.) . . BROMN ( H.-G ). . BUCKM1D (W.). ÜARRE1 (le cha- noine Georges). . . CJATUIilnO ( T.- A. ).. DONS FAITS A LA SOCIETE De l’origine des lacs , etc. (thèse pour le doctorat ès sciences)', in-4°, 42 pages, 2 planches. Paris., 1 844 - Description géologique de l'arrondissement de Ckâtillon [Côte- d’Or), in-8°, i,e partie, 121 pages. Châtillon-sur-Seine , i844. Untersuchungen, e te ( Recherches sur les Francs Valaisans dans le canton des Grisons et le Voraiberg) , in-8°, 108 pages, 1 carte. Vienne, 1 84 4* i° Aperçu de l’ histoire géologique des terrains tertiaires du canton de Vaud , in-8°, 9 pages. Vevey, i843. 20 Essai sur l’histoire naturelle des environs de Vevey, in-8°, 62 pages. Vevey, i843. 10 Analyse chimique des eaux minérales d’Aix , en Savoie , in-8°, 288 pages, 2 (ahl. Chambéry, 1 838. 20 Recherches chimiques , etc. , sur les eaux de Challes , en Savoie, in-8°, 1 5 pages. Chambéry, i843. i° Manuel élémentaire de géologie appliquée à l’agriculture et à l'industrie, 4e édition, in- 18, 396 pages, 1 planche. Paris, 1842. a0 Tableau de l’état du globe à ses différents âges (atlas, 1er tableau) , 4e édition, 1 feuille colombier, gravée et co- loriée. Paris , i845. 3° Tableau figuratif de la structure minérale du globe (atlas, 2e tableau), 1 feuille colombier, gravée et coloriée. Paris, i839. 4° Les chemins de fer et l’amendement des terres, in-8®, 3o pages. Paris, 1 844* Essai d’une carte géologique du globe terrestre , 1 feuille grand aigle. Paris, iS45. U ber Ichthyosauren , etc. (Sur les lehthyosaures des schistes basiques des environs.de Roll , en Wurtemberg), (extrait du Jahr. f. min. geot. , i844)i in-8®, pag. 385*4o8, î pi. Address, etc. (Adresse au maire et aux membres du comité du puits artésien de Southampton , 27 juillet 1 84 4 ) » in-8°, xi pages. Southampton , 1 844 - i° Notice sur quelques observations météorologiques faites à Aoste en i843 (extrait de la Bibliothèque universelle de Genève, mai i844); in-8°, 12 pages, 1 tableau. Genève, i844. 20 Notice sur les observations météorologiques faites à Aos>e en 1842 (extrait de la Bibt. univ. de Genève , février 1 844) » in-8°, 16 pages, i planche. Genève, i844* i’> Dei massi erratici , etc. (Des blocs erratiques qui se voient sur les montagnes et dans les vallées adjacentes de l’État vénitien) , in-8°, 11 pages. 1 844- 20 Trattalo , etc. (Traité de la constitution géognostico- physique des terrains, d’alluvion ou post-diluviens des pro- vinces vénitiennes), in-8°, 167 pages. Padouc, 1 M44 * 3° Suite caverne, etc. (Sur les cavernps des provinces véni- tiennes), in-4% 91 pages, 9 planches. Venise, iS44- GEOLOGIQUE DE FRANCE. 161 CHEVALIER (Eu- gène) CLAUSSEN (le che- valier de) COImI*EGNO (H. de). Le conseil général du département du Gard COTTA (Bernharb\ BA1A (James D.). . BARWIN (Ch.). . B ELUSSE (Achille' BESHAYIS. . . . ©ESFIMES (LECHE' valier). ...... BESPÏHE fils (Constant). . . V oyage autour du monde sur ta corvette la Bonite, en i836 et 1.837 (ML Vaillant, capitaine); géologie et minéralogie, 1 vol. in-8°, 419 pages, 5 planches. Paris, 1 844 - Essai d’une nomenclature et classification des roches , d'après leurs caractères chimiques y minéralogiques et géologiques , in -8°, 35 pages. Bruxelles, 1845. Esquisse d’une carte géologique de l’Italie, nouvelle édition , corrigée et augmentée. 1 feuille grand aigle. Paris, 1844. Statistique du département du Gard , par M. Hector Rivoire , 2 vol. in-4°, avec une carte du département du Gard. Nîmes, 1842. Geognostische Wanderungen , etc. ( Excursions géognostiques à Meissen , etc.), in-8°, 64 pages , 3 planches. Dresde et Leipsick, .S38. i° A System of minera togy, etc. (Système de minéralogie comprenant les plus récentes découvertes), 2e édition, 633 pages avec figures intercalées dans le texte et 4 planches. New-York et Londres, 1 844- 20 Reply, etc. ( Réplique à la défense d’accusation de plagiat de M. Coutbouy) , (extrait du Journal amèric. des sciences et arts, vol. XLVI , noi), iu-8°, 8 pages. 1843. Geological observations on the volcanic Islands, etc. ( Obser- vations géologiques sur les îles volcaniques, et quelques courtes notes sur la géologie de l’Australie et du cap de Bonne-Espérance), in-8°, 169 pages, 1 planche. Londres, i844. . i° Note sur l’emploi des gaz d’un fourneau à cuivre de Rei- chelsdorf ( Hesse - Electorale) ( extrait des Annales des mines , 4e série, t. IV), in-8°, pag. 54i-552. Paris. 20 Note sur le Dipyre (extrait des Annales des mines , 4e sé- rie, t. IV),iu-8°, pag. 609-616. Paris. 3° Mémoire sur la préparation mécanique de la calamine dans la Haute-Silésie , u.e partie ( extrait des Annales des mines , t. VI , i844 ) • io 8°, pag. 2 1 3-2 jo, 3 planches. Paris , i844- 4° Analyse de la grèenovite (extrait des Annales des mines , 1. VI , 1 844 ) > in-8% pag. 325-536. Paris, 1 844- Histoire naturelle des animaux sans vertèbres . par J. -B. -P. -A. de Lamarck, 2e édition , revue et augmentée par MM. Des- hayes et H. Milne Edwards , in-8°, t. IX, 728 pages. Paris, i845 ; t. X, 638 pages. Paris , 1 844- i° Recherches sur les grêles auxquelles sont exposés les Élats de terre ferme de S . M. le roi de Sardaigne , in-4°, 22 pages , 4 tableaux. Turin. 20 Observations sur les grêles tombées en 1840, etc., in-80, 4i pages. Turin, 1 844- , Manuel topographique et médical de l’étranger aux eaux d’ Aix, en Savoie, in-8°, 3o6 pages, 2 planches, 1 tableau. Ann- ci, i843. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ 758 POMEBîGET. Aperçu sur les eaux minérales de Chaltes , en Savoie , in-S% 39 pages. Chambéry, 1 84 1 • 9UBOCHEE . . . Essai pour servir à la classification du terrain de transition des Pyrénées (extrait du t. VI des Annules des mines , ) 844 ) , in-8°, 100 pages, 2 planches. Paris, 1 844- FAVRE (Alphonse) Remarques sur les anthracites des Alpes (extrait du t. VI des Mémoires de la Soc. de phys. et d’hist. nat. de Genève) , FOURCY (Eugène in-4°. 26 pages, 2 planches. Genève, 1 84 4 • i° Carte géologique des Côtes-du-Nord (vote du conseil général du département, session de i836), 4 feuilles grand aigle , imprimerie lithographique de Kaeppelin. Paris, 1844. 20 Carte géologique des Côtes-du-Nord (notice explicative) , in-8°, 172 pages. Paris, 1 844* 3° Carte géologique du département du Finistère (vote du conseil général du département, session de i835). 6 feuilles colombier, imprimerie lith. de Kaeppelin. Paris, 1 844 • 4° Carte géologique du Finistère (notice explicative), iu-8°, 196 pages. Paris, 1 844* FOURNIT (J.). . . jo Sur l'état de surfusion du quartz dans les roches éruptives et dans les filons métallifères (extrait des Annales de la Soc . royale d'agric ., hist. nat., sciences et arts utiles de Lyon) , in-8°, 16 pages. Lyon , i843. 20 Observations sur ta disposition de certaines cristallisations des géodes ( extrait des mêmes Annales ) , in-8°, 9 pages. Lyon , i843. 3° Bssatisur les fions métallifères du département de l' Aveyron (extrait des mêmes Annales ), in -8°, 83 pages, 4 planches. Lyon . i843. 4° Du caractère d'association en minéralogie et en géologie (extrait des mêmes Annales , i844ou »845 ) , in-8°, 57 pag. 5° Mémoire sur la vaporisation du plomb , de ses alliages et combinaisons (extrait des Ann. de chimie et de physique , avril i834 ) in-8°, 32 pages Paris. 6° Sur ta volzine ou oxy-sulfure de zinc, de Rosiers, près Pontgibaud {Puy-de-Dôme) , in-8°, 16 pages. Clermont .. .. 70 Modification de ta théorie du traitement de la galène dans le fourneau à réverbère , in-8°, 14 pages. Paris 8° Notice sur la cristallisation des silicates vitreux , et sur ta couleur bleue des laitiers , in-8°, 12 pages ... 90 Rapport su* les travaux de la commission hydrométrique en i844 » présenté à M. le maire de Lyon , in-8°, 16 pages , 2 tableaux. Lyon, i845. io° Note sur la température des eaux du Rhône et sur leur rafraîchissement souterrain (extrait des Annales de la Soc. roy. d'agric ., etc., de Lyon), in-8°, !2 pages. Lyon...... 1 1° Aperçu sur quelques phénomènes chimiques et de cristalli- sation produits dans les filons (extrait des mêmes Annales) , in-8°, 35 pages. Lyon, 1 844- 3 2° Sur la rubéfaction et la rouille des minerais et des roches (extrait des mêmes Annales) , in-8°, 28 pages. L^on , i845. g* SAVAIS ( Paul ). GHIBEIIINI(F). GXUXiX (Giuseppe). . GUIBAX.. HERICART BS THÏÏRY (le VTE). HESSE B. (le d1' J.- F.-C.) JACKSORT (Charles T.) IACQÏÏEMONT ( Porphyre ) JACÇUEMOÏÏB (le baron J.). . . . J SHAM (L.-F.j. . . JOMARD (le baron). REIIHAÜ (B.-M.). HLÎ.IPSTSIM (le Dr A. de). KORTIKTCK (L. de). &AÏSSBS (J. -À,). GÉOLOGIQUE DE FRANCE. 759 Remarques sur les oiseaux fossiles (thèse de géologie), in-80, 45 pages. Paris, 1 844* Compendio , etc. ( Introduction à un abrégé de géographie ancienne et moderne) , in-18 , 16 pages. Brescia , 1844° Saggio statistico , etc. (Essai statistique de minéralogie utile de la Toscane , à l’usage des ingénieurs, des propriétaires , des médecins, des artistes, des manufacturiers et des com- merçants) , in-8«, 177 pages. Bologne, i843. i° Carte du département de la Meurthe , coloriée géolo- giquement , pour la statistique de ce département de M. Henri Lepage, 1 feuille colombier. Nancy, Pfeiffer , i844. 20 Mémoire sur le terrain jurassique delà Meurthe , in-80, 48 pages, 1 planche. Nancy, 1840. 3° Mémoire sur les terrains du département de la Meurthe , inférieurs au calcaire jurassique , in-8°, 34 pages. Nancy, 1842. 4° Notice sur la géologie du département de la Meurthe (extrait de la Statistique du département de la Meurthe , publiée par Henri Lepage), in-8°, 22 pages. Nancy, 1 843 . Lettre à M . te comte Rambuteau sur les chances de succès d'un puits artésien modèle à forer à Champgrenon , près Mâcon ( Haute-Saône ) (extrait des Annales de l'agriculture française , décembre 1 844) > in-8°, i5 pages, 1 planche. Paris, i844- Versuche uber magneiketlen , etc. ( Recherches sur la chaîne électrique et sur la propriété de ses anneaux, etc.), in-8°, 3oi pages, 3 planches. Marbourg, i844« Final report , etc. (Dernier rapport sur la géologie et la mi® néralogie de l’État du New-Hampshire , publié par ordre de la législature de cet État), in-4°. 376 pages, 10 planches. Concord, N. H., 1 844* Voyage dans l'Inde, par Victor Jacquemont, pendant les années 1828 à i832 ; texte et planches, 52e à 54e livraisons. Description historique de l'abbaye royale d'Hautecombe , in-8a, i45 pages. Chambéry, août i843. Nouveau traité des sciences géologiques , 2e édition, in-ia, 3g6 pages , 1 planche. Paris et Lyon , i844- Notice sur la vie et les ouvrages de C . L. Berthollet , in-8% 91 pages. Annecy, 1844 Gaea Norvégien (Géologie de la Norvège), ae cahier, in-fol., pag. 1 49 à 34o , 2 planches. Christiania , 1 844- Beitrage zur geologischen Kenntniss , etc. (Mémoire pour servir à la description géologique des Alpes orientales), ire et 2e livraisons. Giessen , i843. Description des animaux fossiles qui se trouvent dans le terrain houiller et dans le système supérieur du terrain anthracifère de la Belgique, 2 vol. in-4° avec planche. Liège, 1842-1844» Manuel des baigneurs aux eaux thermales de Brides en Savoie , in- 8°, 83 pages. Lyon , i855. 760 DONS FAITS A LA SOCIETE ÎiE BliAKTC. . . . . i° Mémoire sur le levé expéditif d'une position militaire (ex- trait du Mémorial de l’officier du génie), in-8°, pages, 2 planches. Paris, î844* 2» Note sur le niveau à réflexion de M. Buret , modifié , in-8°, 7 pages, i planche. 1 844* — Ce niveau est fabriqué chez M. Gravet , successeur de Lenoir, rue Cassette, i4» à Ï.-P..TQTOTCOÜRT Paris. (Charles). ..... Galerie des centenaires anciens et modernes , i vol. in-8°, 25o pages. Paris , :8^.2. LSYN£RIE (\.). . Exposition d'un plan pour la carte et la description géologique du département de la Haute-Garonne (extrait des Mèm. de l' Acad. des sc. de Toulouse , mars 1 845) , in-8°, i3 pages. iLOnrGUESKAR Toulouse, 1845. (I»E TOUZÉ de'. Terrains crétacés inférieurs compris entre T Yonne et l’Ar- mance , comparés à leurs équivalents géologiques de la rive gauche de l'Yonne (extrait de l’ Annuaire du département de l’Yonne , 1844), in-8°, 8 pages, 1 planche. Auxerre, 1845. IiôRTET (P. ). . . Documents pour servir à la géographie physique du bassin du Rhône (extrait des Annales de la Soc. royale d’agriculture de Lyon), in-8°, 44 pages, 5 planches, t tableau. Lyon, (843. 20 Commission hydrométrique de Lyon , janvier et février i845, IORTET etBM- 2 tableaux. Lyon, 1845. VAIS. Rapport a M. le maire de Lyon sur les observations recueillies parla commission hydrométrique, in-8°, 8 pages, 5 tableaux. LYBL et PARA- Ly°n 5 l844- UAY .... Beport, etc. ( Rapport sur une explosion qui a eu lieu dans les mines de Haswell, et sur les moyens de prévenir des ac- cidents semblables) , in-8®, 20 pages, 2 planches. Londres, 16U. MAUTIIffS (Ch ). . Essai sur la météorologie et la géographie botanique de la France (extrait de Patria , col. 177 à 28S et 4*3 à 492)» in-12. Paris , i844* MAUDUYT. . . . . Herpètologie de la Vienne , in-8°, 62 pages. Poitiers, i844* MEXiXiEVIXXE. . . Mémoires sur les sables tertiaires inférieurs du bassin de Paris (extrait des Annales des sciences géologiques , t. II), in-8°s MICHEE.IW (Har- 88 PaSeiS> 10 planches. Paris, 1 843. douin). . ...... i° Iconographie zoopliytologique ; Description par localités et terrains des polypiers fossiles de France et pays environ- nants, texte et planches, livraison i3 à 16. 20 Description des polypiers fossiles du bassin parisien ( groupe supracrètacè) (extrait de l’ Iconographie zoo phyto logique) , in-4°, 3i pages, 4 planches. Paris , 1844. 3° Documents législatifs relatifs à l'acquisition , pour l’Ecole royale des mines , de la collection minéralogique de M. le marquis de Drèe , 4 brochures de 23 pages. Paris, 1845. 4° Table générale analytique et raisonnée des matières conte- nues dans les trente-six premières années du Bulletin de la Société d'encouragement pour l’industrie nationale , par M. Ch, D-aclin , in- 4, 286 pages. Paris, i838. GEOLOGIQUE DE FRANCE. 761 Ministre de l’inté- rieur Les steppes de la mer Caspienne , le Caucase , la Crimée et ta Russie méridionale , par M. Xavier Homniaire de Hell, texte in-8°, livraisons x à 18; planches in- fol . , livraisons x à 18. Pari«, 1844. Ministre delà justice. Journal des savants, 1 844 9 juin à décembre; 184S, janvier Ministre de la maison à mai. du roi. Galeries historiques du palais de Versailles, t. VI, 2e partie, Ministre des travaux in- 8°, 5aj pages. Paris, 1844. publics i° Statistique minéralogique , géologique , métallurgique et 1 (JB - «L minéral urgique du déparlement de l’ Isère , par Émile Gtiey- mard , in-8°, 998 pages, S planches. Grenoble , i844- 20 Etude du bassin Iwuiller de Gresseissac ( Hérault ), faite en i838 par Napoléon Garella, in-40, 112 pages, allas de BEURCHISOM (R.- n planches in-fol. Paris, x843. I.)* . . • x° Address , etc. (Discours prononcé à la réunion anniversaire de la Société royale géologique de Londres le 27 mai 1844), in-8°, 92 pages. Londres, 1844. 20 Synopsis ofthe characters , etc. (Résumé des caractères des fossiles du calcaire carbonifère d’Irlande, par Frederick M’Coy, sous la direction de Robert Griffith), in 4°» 207 p. „ ©MASjlUS D’RAXi- 2 planches. Dublin , 1844. IiOlf (d’). . . . . Des races humaines ou éléments d’ ethnographie , in-8°, 208 p. Paris, 1845. ©RRIGSïlf (Alc. d’). Paléontologie française. Terrains crétacés , livraisons 79-98. Terrains jurassiques . livraisons 2i-3i. ORBIGMY (Ch. d’). Dictionnaire universel d’histoire naturelle , livraisons 49 à 62. ORSI ^le che valier ). Documents historiques sur tes eaux thermales du hameau des Bains , en Tarentaise , in-8°, 67 pages, 1 planche. Moutiers. ' i836. 0WE1 . . Report on the exlinct mammals of the Australia , e te. ( Rap- port sur les mammifères éteints de l’Australie , et sur la dis- tribution géographique des mammifères du pliocène et du post-pliocène en général), in-8°, 21 pages, 6 planches. Londres, 184 5. PAIXXETTE (Adr.). i° Ensayos quimicos , etc. (Essais chimiques de plusieurs com- bustibles des Asturies, in-8°, 10 pages, 2 tableaux. Oviédo, i844. 20 Apuntes historicos , etc. (Aperçus historiques sur les mines PEDRONI fils (F- des Asturies), in-8°, 4 pages. Ferrones, 1844* M.) Mémoire sur les poissons fossiles du département de la Gironde , PERSÎGlSnr (Fialin in-8°, s5 pages, 2 planches. Bordeaus, 1 845 . de). . ....... De la destination et de T utilité permanente des pyramides d’Egypte et de Nubie contre les irruptions sablonneuses du désert , in-8°, 256 pages, 6 planches. Paris, à 845. l*E2a % A (Cesare). . Saggio , etc. (Essai d’une nouvelle théorie de l’écorce ter- restre) , in- 12, i36 pages. Turin , 1 844- I?K€5T.'ET. .... Traité élémentaire de paléontologie , ou Histoire naturelle des animaux fossiles, t, Ier, in 8°, 368 pages, 18 planches* Paris, 1844. 762 DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ PILLA (Léopold). . POEE© (Carlo). . PRÉVOST (Cons- tant) KâULIN (Victor). i° Sopra la produz'one , etc. (Sur la production des flammes dans les volcans , et sur les conséquences qu’on peut en tirer), in 4 * 28 pages, 2 planches. Lucques , i844- 20 Ricerche, etc. (Recherches sur la vraie position géolo- gique du terrain du macigno en Italie et dans le midi de l'Europe, suivies de quelques lettres sur le terrain crétacé des Alpes vénitiennes) , in-8°, 4o pages. Pise , i845. Malacologia , etc. ( Malacologie terrestre et fluviatile de la province de Côme) , in-8°, i4o pages, 2 planches. Milan, i838. Un plan en relief de file Julia . i° Géologie de la France , ier cah. in-12 (extrait de Patria , pag. 290-41 H, 3 planches. Paris, octobre i844» 20 Note sur un nouveau genre de gaslèropode (Deshayesia) du terrain tertiaire du bassin de Paris (extrait du Magasin de zoologie , etc., de M. Guérin-Méneville, 12e livraison, i844. Mémoire minéralogique et géologique sur les roches dioritiques de la France occidentale (extrait du Uull. de la Soc. géol. de France ) , in-8°, 46 pages. Paris , i844« i° Une planche in-fol. représentant les fossiles de la rade de Bell-Sound (Spitzberg). 20 Une planche in-fol. représentant la Paléontologie de la Nouvelle-Zemble et du nord de la Russie. 3o Extrait du Compte-rendu de la séance publique et annuelle de la Soc. royale et centr. d’agric . , qui a décerné une mé- daille d'or à M. Eug. Robert , pour la découverte et l'appli- cation d’un procédé (phloioplastie) propre a arrêter tes ra- vages d’un insecte qui fait périr les ormes , les pommiers „ les frênes , etc. , et à régénérer l’écorce des arbres souffrants (extrait du Moniteur universel du 21 mai i845) , in-B01, 24 pages. Paris , 1 845. ROGERS (Henri D.). Description , etc. (Description de la géologie de l’État de £ïew- Jersey), in 8°, 3oi pages. Philadelphie, i84o. 20 Second, third , foarlh , fifth , sixlh annual report , etc. (2e, 3e, 4e, 5e, 6e rapport annuel sur la description géolo- gique de l’État de Pensylvanie), 5 brochures in-8°. Har- risbourg, i838, 1839 184t>, *841, 1842. 5° Report of the progress , etc. (Rapport sur les progrès de la description géologique de l’État de Virginie pendant l’année 1839), in-8o} 161 pages. Richmond, 1840. 4° Contributions to the geology , etc. (Recherches sur la géo- logie des États-Unis), in-8°, pag. 298 à 544, 6 planches. Philadelphie, 1843. SCORTIGÀGNA. Su lia formazione geologica , etc. (Sur la formation géologique de la colline dite la Favorita , près Longino) , in-8°, 23 pag., 2 planches. Vérone, i836. SIMMS (F.-W.). , Practicat tunelling , etc. (Traité pratique de la construction des tunnels), in-4°, 174 pages, 12 planches et figures dans le texte. Londres, 1844. RIVIÈRES (A.). . . ROBERT (le Dr Eu- gène). . ...... GÉOLOGIQUE DE FRANCE. 763 SOCQUET (J.-M.). Essai sur les eaux minérales de la Perrière , près Moutiers , en Savoie , in-8°, 3i5 pages, 1 planche. Paris, etc., 1824. STIEHEER (A. -W.). Ueber die Bildung der Steinkolde , etc. (Sur la formation de la houille, d’après Lindley et Hulton, etc.), in-8°, 69 pages. STAUVE ( 0. > . . Brunswick , 1 843. Détermination des positions géographiques de Novgorod , Moscou , Biazan , Lipelsk, Voronèje et Toula (extrait du Bull, de la classe physico-mathématique de C Acad. impèr . des sciences de St-Pèlersbourg , t. 11), in-40, 18 pages. St-Pétersbourg, 1843. STRUVE { W. ). . . Resultate, etc. ( Résultats des mesures astronomiques et trigo» nométriques prises, de 1816 à 1819, en Livonie) (extrait des Mèm. de T Acad, impériale des sciences de St-Péters- bourg ; sc. math.) , in-4°, 86 pages, 2 planches. St-Péters- bourg, 1 844» STUBER (B.). . . . io Hauteurs barométriques prises dans le Piémont , te Valais et en Savoie , in*4°> 4 pages; sans indication d’année. 20 Aperçu de la structure géologique des Alpes (extrait des Nouvelles excursions de M. Desor) , 2e édition , in-8°, 34 p, TCHÎHATCHEFF 1 planche. Neufchâtel , i845. (Pierre de). . . . . Coup d’œil sur la constitution géologique des provinces méri- TEISSIER ROI- IiAMB (Jules). . dionales du royaume de Naples, in-8°, 285 pages, 1 carte, 1 planche. Berlin, 1842. De Nîmes et de ses eaux , jn-8°, I i Ie partie , pag. 43 1 à 812 , et xl p., 5 planche. Nîmes, i 844- THÎRRIA . . . . . Compte-rendu des travaux des ingénieurs des mines pendant l'année i844. in-4°> 195 pages. Paris, i845. VUULA(A .et F. -B.). Sul/a costiluzione , etc. (Sur la constitution géologique el WEGMAM (de) géognostique de la Brianza . et notamment sur le terrain et Ch. d’OEBI- crétacé), in-8°, 46 pages, 1 carte et 2 planches. Milan, 1844. G MIT . . . Dictionnaire d'histoire naturelle , in-8°, t. Ier, ire partie. Paris, 1844. WIMTER (DE). . . Dispulatio geologica inauguralis de metamorphicorum saxo - rum origine, sive brevis conspectus hypogenoerum format io- num ; pars prior, (thèse pour le doctorat, soutenue le 10 WOE SKI (A. -N.). . mai 1844, à Leyde), in 8°, 62 pages. Leyde, 1 844* Mémoire sur te gisement du bassin anthraxifère dans le dépar- tement de Maine-et-Loire , et sur ses relations géologiques avec divers terrains qui t’avoisinent et qui le recouvrent (extrait du 2e volume du Compte-rendu de la onzième ses- sion du Congrès scientifique de France) , in-8°, 44 pages, 2 planches. Angers, 1 844- UGMO ^Achille de). Introduzione allô studio délia geologia , parte prima, in-4° 121 pages. Padova , 1840. DONS FAITS A LA SOCIETE OUVRAGES REÇUS PAR LA SOCIÉTÉ EN ÉCHANGE d DE SES PUBLICATIONS. Abhandlungen, etc. (Mémoires de l'Académie des sciences de Berlin pour iS4î). Abhandlungen , etc. (Mémoires de la Société d’histoire naturelle de Gœrlitz). 3e vol., ier et 2e cahiers, 1840-1842, 4e vol., i«r vol. 1844. Actes de la Société helvétique des sciences naturelles, 28e session, juillet i843. Actes de la Société linnéenne de Bordeaux. Tome XII, 3e livraison, 26 février 1843. The American Journal , etc. (Journal américain des sciences et des arts, dirigé par MM. Silliman) , vol. XLV, n° 2, juillet à septembre 1 843 ; vol. XLVI , nos 1 et 2 , octobre i843 à mars i844 î vol. XLV II , nü» 1 et 2 , juillet et oc- tobre 1844; vol. XLYIIi , n° 1, janvier i845. Annales des mines , 1 843 , 6e livraison ; 1 844 * livraisons 1 à 6. Annales scientifiques , littéraires et industrielles de l'Auvergne , nos de juillet i843 à décembre 1844 » i845 , janvier et février. Annales de la Société d’ agriculture , etc., du Puy , i84i — 1842. Arsberœttelse , etc. (Compte-rendu annuel des travaux et découvertes botani- ques de l'année i838, par M. Joh.-Em. Wikstroem, publié le 3i mars 1839), in-8°, 644 pages. Stockholm , 1842. Arsberœttelse , etc. ( Compte-rendu annuel des progrès de la chimie et de la minéralogie, par M. J. Berzélius, publié ie 3i mars i844) * in-8°, 552 pages. Stockholm, i844* Arsberœttelse , etc. (Compte-rendu annuel des progrès de la zoologie de 1840 à 1842 , 3e partie, crustacés et vers de Linné, par M. S. Lovén), in-8°, 392 p. Stockholm, 1 844- The Athenœum , nos 869 à 920. Auszug aus der Uebersicht , etc. (Revue des travaux et des développements de la Société d’agriculture de Silésie pendant l’année i843, par le prof. Goep- pert), in 4°, 86 pages. Bericht , etc. ( Analyse des Mémoires présentés à l’Académie des sciences de Berlin) de juillet 1843 à juin i844- Boletin enciclopèdico , etc. ( Bulletin encyclopédique de la Société des amis du pays), i844, septembre; i845, janvier à mars. Boletin oficial de minas de Espana (Bulletin officiel des mines d’Espagne ) , 1844 , no* 1 à 23. GÉOLOGIQUE DE FRANCE. 765 Boston Journal, etc. (Journa! d'histoire naturelle de Boston), vol. IV, nos 3 et 4» i843—i844. Bulletin de l' Académie des sciences et belles-lettres de Bruxelles , tome XI, nos 4 à8, avril — aoûl i84i. Bulletin de la Société de géographie , nos d’avril à décembre 1844 j 1 84-5 , janvier à mai. Bulletin de la Société industrielle d' Angers , no» 4 à 6 , i5e année. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse , nos 87 — 89. Bulletin de la Société des sciences naturelles de Neufchâtel , i843 — 1 844» Comptes-rendus des séances de l'Académie des sciences, i8i4, >er semestre, t. XVIII, n°s 25, 26, et table du ier semestre; 1844 > 2e semestre, t. XIX, n°» 1 à 27; i845, i«r semestre, t. XX, nos 1 à 23. Correspondenzblatt !, etc. (Bulletin de la correspondance de la Société royale d’agriculture de Wurtemberg) , année 1844, ier, 2e et 3e cahiers; 2e vol. , icr cahier. Del hongelige danske videnskabernes selsbaks afhandlinger . etc. (Mémoires d’histoire naturelle et de mathématiques de la Société royale des sciences de Danemark ) , t. X , 1843. L'Echo du monde savant , 1 ie année, 1 8 4 4 * 1er semestre , n08 48 à 5 1 ; 2e se- mestre, n°s 1 à 5 1 ; i845 , ier semestre , nos j à 44* Extrait du programme de la Société hollandaise des sciences à Harlem pour l'année i844* L'Institut , i844» nos 54.7 — 598. Journal d’agriculture pratique et d’économie rurale pour le Midi de la France , 2e série , t. VI, 1 843 , pag. 353 à 384. Journal of the Bombay brunch royal asiatic Society, n° 5, avril 1 843 ; n» 6, oc- tobre 1843. Kong l. Vetenskaps-Academiens , etc. ( Mémoires de i’Académie royale de Stock- holm, pour l’année 1842), in-8°, 876 pages, 5 planches. Stockholm , i843. Mémoires couronnés et Mémoires des savants étrangers , publiés par l’Académie royale de Bruxelles, t. XVI , i843 , 407 pages, 18 planches. Bruxelles, i844> Mémoires de la Société d'agriculture, sciences et arts d'Angers , 5e vol., 3e livraison. i844» Mémoires de la Société d'agriculture , sciences , arts et belles-lettres du depar- tement de l'Aube , 1 84 3 — 1 844 » nos 87 — 90. Mémoires de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève , tome X , 2e partie. i844* Mémoires de ta Société royale des sciences , de t’ agriculture et des arts de Lille , année 1842. Mémoires de l’Académie royale de Metz, XXVe année , i S4 3 — 1 844» Mémorial encyclopédique , 1 844 » mai , juin , juillet; z845 , avril. Memorie délia reale Aca-iemia , etc. (Mémoires de l’Académie royale des sciences de Turin), 2e série, t. V, 1 843 ; t. VI, 1844. The Mining Journal , n°*46i — 5i2. Neue Zeitschrift j elc. (Nouveau .Tournai du Ferdinandeum pour le Tyrol et le Vorarlberg), 2e fascic. , i844- Novorum aclorum , etc, (Premier supplément du Xle vol. des Nouveaux Actes de l’Académie des curieux de la nature), in-4°, 5i2 pages , i3 planches. Breslau et Bonn , 1 84 3. — T. XX , parties 1 et 2 , 1 843 — 1 844. 766 DONS FAITS A LA SOCIETE Oversigt, etc- (Bulletin des séances de l’Académie royale des sciences de Stockholm pour l’année i844)»in-8°, nos i à 7, 166 pages. Oversigt , etc. (Bulletin des travaux de la Société royale des sciences de Dane- mark en i843 ) , in-8°, 128 pages. Copenhague, 1844. Philosophical Transactions , etc. (Transactions philosophiques de la Société royale de Londres pour l'année 1 844) 5 i84i? ire et 2® parties; 1842, i,e partie; iS44 » 2e partie. Précis analytique des travaux de l’ Académie royale des sciences , etc . , de Rouen pendant l’ année 1 844» Transactions of the gcological Society of London , vol. IV. i845, part. I, n«>s 94 à 96, et part. 11 , n° 97. Proceedings , etc. ( Procès-verbaux de la Société d’histoire naturelle de Boston) , du 6 janvier i 84 1 au 17 avril 1844 , in-8o, 176 pages. Proceedings , etc. ( Procès-verbaux de la Société royale d’Édimbourg ), i835 — i836, n0 7; i836, n° 9; 1806 — 1837, no 10 ; 1837, non; 1837 — i838, n° 12 ; 1841 — 1842 , nos 19 et 20 ; i844 > nos «3 et 24 ; i845 , no 6. Programmes des prix proposés pour 1845 par la Société royale des sciences , de l’agricultures et des arts de Lille , 8 pages in-4°. Recueil des actes de la séance publique de l' Académie impériale des sciences de Saint-Pétersbourg , tenue le 29 décembre 1 843 , in-4°> 72 pages. Saint-Pé- tersbourg, 1 844- Report of the tenth , eleventh , twelfth , thirteenth meetings , etc. (Relation des 10e, 11e, 1 2e et i3e assemblées de l’Association britannique pour l’avancement de la science, tenues à Glasgow, en août t84o; à Plymouth, en juillet 1 84 > ; à Manchester, en juin 1842 ; et à Cork , en août 1842 ) , 4 vol- in-8«. Londres , 1 84 ! 9 184a, i843, 1844. Royal Society 0 f London. List , 5o novembre 1841. — Catalogue of the library, in-8°, 265 pages. Londres, i84i. Séance générale , etc., de la Société royale d'agriculture de Paris , le 16 juin 1 844 • Paris, 1 844- Socièté d'agriculture , sciences et arts d’Angers ; Travaux du comice horticole de Maine-et-Loire , 3e vol , n° 20. 1 844- Société géologique de France ( plusieurs membres de la). Recherches sur tes poissons fossiles y par M. Agassiz , 5 vol. in-4°, avec 5 cahiers de planches in-fol. S indien des gottingisclien Bereinsy etc. (Travaux de la Société des amis des mines de Gottingue), i844,in-8°, pag. io5 à 220. Tal, etc. (Discours prononcé par M. Hans Jærta, président de l’Académie royale des sciences de Stockholm , le 3i août 1839 , pour le centième anniver- saire de la fondation de l’Académie ) , in-8°, 40 pages. Stockholm, i843. Tal , etc. (Discours prononcé par M. C. G. Von Brinkman , président de l’Aca- démie des sciences de Stockholm, le 3i mars 1 843 ) , in-8°, 12 pages. Stock- holm , 1843. Thirly-first annual report , etc. ( Trente-unième rapport annuel de la Société royale géologique de Cornouailles , avec le discours du Président et les com- munications et notes lues à la Société), in-8°, 218 pages, 2 planches. Penzance , 1844. Transactions oflhe Cambridge philosophical Society, vol, VIII, part. III, 1844. Transactions of the royal geologicat Society of Cornxvall , L V, i843. GÉOLOGIQUE DE FRANCE. 767 Transactions y etc. (Transactions de la Société royale d’Édimbourg), t. XV, 1 844- — Vol. XV, part. I ! , 1841 — 1842. Transactions of the royal Irish Academy , vol XX, in-4°j 52i pages. Dublin, 1 845. Twenty-ninth and thirtieth , etc. (29e et 3oR Rapports annuels de la réunion de la Société géologique du Cornouailles), 1842 — 1843. 768 DONS FAITS A LA SOCIETE GÉOLOGIQUE DE FRANCE. DONATEURS . MM. COEHÜEL. . . . G AS T AL© I. . . STOBIECH.Ï, . . ROCHES ET CORPS ORGANISÉS FOSSILES. Deux échantillons de fossiles des environs de TVassy (Haute-Marne) 2 Fragment de la tige d’une Pentacrinite de la colline de Turin 1 Deux échantillons de Spirulites , et pièces détachées de la coquille d’un Oscabrion 2 Trois échantillons de roches des marnes jurassiques de Propriac ( Drôme) 5 Total. . . . 8 NOMBRE d’échantillons. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE. TABLE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS POUR LE DEUXIÈME VOLUME. (DEUXIÈME SÉRIE. ) Année 1844 à 1845 A Afrique septentrionale. Sur une dé- pression probable dans celte partie de la t* rre , p. 3^9 et 4i6 Agassiz. Sur des roches striées de la Suisse, p. 273. — des Vosges, p. 394. Agent. Choix d’un nouvel agent , p. } 1 » 97. Ain. Sur la molasse de Charrix , p. 5/|. Allemagne N. -O. Notes diverses, p. 638. Allier. Manganèse à Saligny, p. 3yi. Alpes. Remarques sur les anthracites, p. 616. — Terrain erratique sur leur revers méridional, p. 284. Alpes lombardes. Note sur le calcaire rouge, p. 60 et 365. Trigonie du rnuscbelkalk à Bergame, p 348. — Caractères des couches jurassiques supérieures , p. 35g. Alpes vénitiennes. Présence desCrioce- ras, p. 356 et 3j6. — Sur leurs ca- vernes , p. 599. Angelot. Sur la dépression de certai- nes parties de l’Afrique septentrio- nale, notamment de l’oasis d’Atn- mon , p. 4ï6« ârchiac (d’). Analyse de ses Eludes sur la formation crétacée des versants N. et N. -O du plateau central de la France (bassin de Paris), p. 142. — Coupe du mont Pagnoite à Taitigny (Oise), p.334, une planche. — Fossiles paléozoïques des Asturies , classifica- tion des Orthis et des Leptœna , p. 48o. — Sur la distribution géogra- phique des Mollusques et leurs analo- gues vivants, p. 482. — Discussions diverses, p. 34, 86, 107, i34, 198. Ardèche. Terrain numraulitique, p. 26. — Lignite de Saint-Jùst, p. 568. Argent natif àù lac Supérieur, p. 317. Arhoses. Examen de celles des environs d’Avallon et sur leur formation , p. 67 1, 695, 725, 738. — Note sur l’ar- kose coquillière d’Avallon , p. 700. Ascension (île de 1’). Note sur sa géolo- gie , p. 609. Association en minéralogie et en géo- logie , p. 582. Aude. Sur le terrain à Nummulites(épi- crétacé), p. iî, 270. — Opinion de M. Deshayes sur certains fossiles de ce terrain , p. 33. Autriche. Blocs erratiques près de Vienne , p. 2 66. Aveyron. Filons métallifères , p. 587. Avoot (d’). Age du terrain de transi- tion de Bourbon-Lancy et delà mon- tagne de Cbizeuil (Saône-et-Loire), p. 741 et 745. Aymard. Note sur des ossements hu- mains dans un bloc du volcan de De- nise (Haute-Loire), p. 107. 770 TABLE DÉS MATIERES B Bailky. Marne à infusoires de Char- leslown (Etats-Unis), p. 648. Baléares (îles). Coupe de Elle de Ma- jorque , p. i54. Basaltes deGergovia (Auvergne) < t âge des calcaires qui y paraissent inter- calés, p. 97. Beaumont (Elie de). Remarques sur quelques parties du terrain crétacé du bassin de Paris, p. i53. — Sur les roches polies et striées, p. 278. - — Fragments de grès dans des basaltes, p. 317. — Fusion des glaces par la sortie de roches ignées au Cotopaxi , -p. 4o6. — L’axe du globe n’a pas été déplacé , p. 573. — Discussions di- verses , p. 248, 266, 5a4, 348, 366, 4oi, 485, 568. Becquerel. Sur les déplacements molé- culaires dans les roches, p. 222. Belgique . Position du grès de Luxem- bourg, p. 91. — Température d’un puits artésien près de Luxembourg, p. 653. Bbbnard. Sur un calcaire du terrain jurassique, appelé molasse dans l’Ain, p. 54. Beyricii. Sur les terrains secondaires de la Silésie, p. 63p. Bibliographie , p. 5, 5o , 95, 116, i35, i4 1 , 197, 256, 269, 3o4 , 325, Calcaires saccharoïdes de. la Toscane, p. i65. Cap Vert (îles du). Sur Saint Yago, p. 606. Caspienne ( mer ). Sa connexion an- cienne avec la mer Noire, p. 643. Catullo. Sur les cavernes des provin- ces vénitiennes, p. 699. Cavernes dansles provinces vénitiennes, p. 599 — Grotte d’Arcy ( Yonne ), p. 693 , 698 et 718. Charpentier (de). Phénomènes erra- tiques des Pyrénées , p. 4°3. Cher. Sur la constitution géologique du Sancerrois, p. 84. Chronologie des terrains et synchro- nisme des formations, p. 366. Clément Mullet. Rapport sur la ges- tion du trésorier pendant l’année i844 . P* 262. 358, 375, 3g3 , 407*489, 4p3, 638- Blànchet. Terrains tertiaires dû can- ton de Vaud , p. 593. Bontkmps. Observation, p. 124. Boubée. Graphtolitesdansles Pyrénées, p. 401. Bouches- du Bhône. Grenouille et Lépi- doptère fossiles à Aix , p. 383. Boüé. Sur les causes qui peuvent pro- duire des effets semblables à ceux des glaciers, p. 110. — Sur des courants d’eau de mer dans les îles Ioniennes, p. n4 — Réclamation, p. 1 1 5 . Bourjot. Observations diverses, p. 26, 722 , 737. Brachiopodes divers des Asturies , p. 463. — Classification des Orthis et des Leptœna , p. 480. Braun. Plantes fossiles d’Æningeu (Suisse), p. 640 Brésil. Nouvelles mines de diamant , p. 654. Bretagne. Ses traits géologiques, p. 5l8. Buch (de). Trigonia TVhatelyce du muschelkalk de Bergame , p. 348, une planche. — Caractères des cou- ches jurassiques supérieures du midi de l’Europe, p. 359. — Du granité et du gneiss sous le rapport des for- mes extérieures . p, 617. Budget pour 184 5, p. 258. c Collegno (de) Note sur les terrains tertiaires de la Toscane, p. 58. — Note sur le calcaire rouge des Alpes lombardes, p. 60 et 365. — Terrain erratique du revers méridional des Alpes, p. 284. — Marmite de géants dans le Tarn, p. 323. — Roches striées à Genève, p 3g8. — Discussions di- verses , p. 3o3 , 383 , 4o4 , 4-i 5. Collomb ( Ed.). Effets des avalanches et structure des couches de neige dans les Vosges, p. 394. — Sur les traces du phénomène erratique (glaciers) dans les Vosges, une planche, p. 5o 6. Comptes du trésorier , p. 11, 35p, 489. — Rapport sur les comptes , p. 262. Coquand. Sur les terrains stratifiés de la Toscane et de l’ile d’Elbe, p, 1 55. Introduction, p. 1 55. Schistes cristallins, 157. Calcaires saccha- ET DES AUTEURS. 771 ÿoïdes, i65 Formation jurassique, > 79. Formation crétacée , 192, une planche. — Sur les terrains tertiaires de la Toscane, p. 377. — Grenouille et Lépidoptère fossiles à Aix, en Pro- vence , p. 383. Cornlkl. Entomostraeésdansle terrain néocomien de la Haute-Marne, p. 52. — Analyse de son Mémoire, p. io5. Corse. — Serpentine , terrain silurien , p. 364- Côles-du-Nord. Constitution géologi- que de ce département , p. ia5. Côte-d'Or. Observations sur diverses parties, p. 86. — Excursion de la So- ciété à Semur, p. 720. Cotte ad. Position du terrain aptien de i’Yonne, p. 89. — Coupe théorique des terrains des environs d'Avallon. Observation , p. 670, Courants d'eau de mer se précipitant dans l’intérieur de quelques unes des îles Ioniennes, p. 1 1 4* Crinoides des Asturies, p. 479* Crioceras dans les Alpes vénitiennes, p. 356. 376 et 574. Cuivre natif Au lac Supérieur, p. 317. Cuivre pyriteux en filon dans le terrain jurassique de la Drôme , p. 4°* Cycadées fossiles. Résumé d’un Mémoire sur ces végétaux, p. 55. D Danger. Sur une géode de glace et la congélation de l’eau, p. 327. Darwin. Observations géologiques sur les îles volcaniques de Saint-Yago (Cap- Vert), Maurice, Saint-Paul, l’Ascension, Sainte-Hélène et l’ar- chipel des Galapagos, p. 606. Dauphiné. Nouvelles observations sur les gîtes de spilite, p. 35. Dkane. Ornithichnites du Connecticut, p. 267. Dklânoue Minerais de manganèse d’Excideuil (Dordogne), p. 388. — Discussions, p. 391, 487. Delta de l’Aar dans le lac de Rrienz , p. 1 18. Déplacements moléculaires dans les ro- ches, postérieurs à leur dépôt, p. 198, 222 et 487. Dbschamps. Note sur l’arkose coquil- lière des environs d’Avallon, p. 700. E Egypte. D. stination des pyramides , p. 364. — Dépression de l’oasis de Syouah et de différents lacs, p. 4*6. Ehrenberg. Influence des Infusoires sur la formation des cendres volcani- ques , p. 646. Eicuwald. Connexion ancienne des mers Noire et Caspienne , p. 643. Elbe (île d’). Sur ses terrains stratifiés, p. 1 55. Elections. Commissions, bureau et con- seil, p. i3g. — Bureau de la réunion extraordinaire à Avallon , p. 660. Soc. géol. Tome II, 2e série. Deshaybs. Opinion sur certains fossiles du terrain à Nummuliles des Pyré- nées, p. 33. — Discussions diverses, p. 35, io5, 374, 574. Desplaces de Charmasse. Sur la non- association de la houille avec les por- phyres dans le bassin d’Autun , p. 747. — Sur l'âge des roches porpby- riques du Morvan (Saône-et-Loire), p. ~5o. — Discussions diverses, p. .747* Diamant. Nouvelles mines au Brésil , p. 654. Dordogne. Minerais de manganèse d’E x- eideuil, p. 389. Drôme. Filon de cuivre pyriteux dans le terrain jurassique, p. 4o. Duchassaing. Sur la formation des ré- cifs madréporiques à la Guadeloupe, p. 663. Entomostracês dansleterrain néocomien delà Haute- Mai ne, p. 52 et io5. Equateur ^ ( Rep. de F ). Exploration du cratère du Rucu - Pichincha, p. 5ii. Erman. Indication des roches de la Russie asiatique, p. 635. — - Stries diluviennes en Finlande , p. 656. Espagne. Sur quelques unes des roches qui constituent les Asturies et sur les fossiles du terrain paléozoïque, p. 459. — ■ Sur la géognosie de la Cata- logne et d’une partie de l’Aragon , 5o 772 TABLE DES MATIERES p. 624. — Formations tertiaires du centre de l’Espagne , p. 65 1 . Esqüerra Del Bayo. Sur les formations tertiaires du centre de l’Espagne et ies anciennes digues du bassin du Douro, p. 63 1. Etats romains. Constitution géologique Faune fossile du terrain paléozoïque de la Russie, p. 56g. — Des terrains ju- rassiques supérieurs et moyens de la Haute-Marne, p. 709. Fauverge. Lignite de Saint-J ust ( Ar- dèche), p. 568. Fa\he. Sur les anthracites des Alpes , p. 616. — Considérations géologiques sur le mont Salève, p. 638. Feldspaths. Leurs caractères et leur de- gré d'importance dans la nature , p. 60. Fer titane dans les alluvions de la Loire à Orléans, p. 282. Filons métallifères de l’Aveyron, p. 587. Finistère. Sur le terrain silurien , no- tamment celui de Brest , p. 5 17. Finlande . Roches striées , p. 63 6. Fqurnet. Sur les roches éruptives des Gal. Sur les stries et les moraines des glaciers de la vallée d’Aoste en Pié- mont , p. 728. Galapagos (Archipel des). Note sur sa géologie, p. 6i3. Gard. Roches striées à Beaucaire, p. 3o6. Gastaldi. Pentacrinites dans le terrain de la colline de Turin, p. 53 et 198. Géographie ancienne des contrées qui environnent la Méditerranée, p. 349. Gervais (Paul) présente sa thèse sur les oiseaux fossiles, p. 9. — Obser- vation, p. no. Girard. Sur les terrains des environs de Magdebourg, p. 638. Gjroux. Observations sur diverses par- ties de la Côte-d’Or, p. 86. Gizek. Blocs erratiques près de Vienne, p. 266, Glace. Sur sa formation , p. 327. Glaciers. Leurs mouvements dans le Tyrol , p. 81 . — ■ En Savoie , p. 83. — Nouvelles observations sur celui du versant de l’Adriatique, p. 4®£L Etats- Unis. Cuivre et argent natifs du lac Supérieur, p. 317. — Marmites de géants dans le New-Hampshire, p. 319. — Reptile fossile de l’Ala- bama , p. 649. environs de Lyon , 4g5. — Etat de surfusion du quartz dans les roches éruptives et les filons métallifères, p. 579. — - Du caractère d’association en minéralogie et en géologie, p. 582. — Sur les filons métallifères de l’A- veyron , p. 587. Fourcy (de). Constitution géologique du département des Côtes-du-Nord , p. 125. — Terrains ignés, id. — Ter- rain de transition, p. i3o. — Terrain tertiaire, p. i33. Frapolli. Sur la disposition du terrain silurien dans le Finistère, et notam- ment à Brest, deux planches, p. 517. Géogénie et distribution des ter- rains, p. 5 18. — Moyens de les étu- dier, p. 524. — Terrain silurien, p. 528. — Résumé général, dislocations, p. 549. du Faulhorn en Suisse, p. 223. — Leurs traces dans les Vosges, p. 249, 5o6.— -Causes de leur ancienne exis- tence dans des contrées où il ne peut plus en exister. — Causes qui peuvent produire des effets semblables à ceux des glaciers , p. 1 10 et 3a4. — Dans les Vosges, p. 394. Goeppbrt. Résumé d’un Mémoire sur les Cycadées fossiles, p. 55. — Ré- sumé d'un Mémoire sur les plantes fossiles en général, p.362. -—Lignite de l’Agger, p. 65o. Granité et gneiss. Sous le rapport des formes extérieures , p. 617. Graphtolites dans les Pyrénées, p. 4oi. Gras. Nouvelles observations sur les gîtes de spili le du Dauphiné, p. 35. Greensand ( lower ) de l’ile de Wight , p. 4i. Guadeloupe. Sur la formation des récifs madréporiques, p. 663. Guieerlet. Sur h sphonolites du Rhon- gebirge , p. 638» ET DES AUTEURS, 773 H aid de Fkud. Mouvements de glaciers dans le Tyrol septentrional, p. 8i. Ha idikgeb. Sur la Piauzite, p, 654. Hébert. Sur la formation des arkoses, p. 758. — Discussions diverses , p. 675 et 727. Hélène ( lie de Sainte-). Note sur sa géo- logie, p. 609. Hoffmann. Sur les environs du lac Bai- kal , en Sibérie , p. 644. Hogard. Traces d'anciens glaciers dans les Vosges, p. 249, une planche. Hombres-Firm as (d’). Sur les mines de mercure de Ripa en Toscane, p. 267 . Homme fossile dans une roche volcani- que de Denise (Haute-Loire), p. 107. Hümboldt (de). Note sur son ouvrage intitulé Kosmos , p. 652. I Inde. Tortue fossile , p. 649. Infusoires fossiles. De la craie , p. 648. D’une marne de Charlestown , id, — Leur influence dans la formation des cendres volcaniques, p. 646. J ackson. Argent natif du lac Supérieur, p. 317. — ■ Marmites de géants dans le Keilhau. Note sur la géognosie de la Norvège , p» 636. Lavini (Spada). Sur la constitution de l’ilalie centrale, une planche, p. 4o8. Terrains tertiaires, p. 409. Terrains crétacés, p. 412. Ter- rains jurassiques , p. 4 >3. Le Blanc. — Discussions diverses, p. 84 , 122 , 270, 280, 377, 5i 1. Lrconte. Observation, p. 280. Lkymerie. Terrain à Nummulites (épi- crétacé) des Gorbières et de la Mon- tagne Noire (Aude), p. 1 1 . — Lettre sur le terrain à Nummulites des Cor- bières, p. 270. — Observations sur Insectes fossiles. Lépidoptère à Aix, (Bouches-du-Rhône), p. 384. Ioniennes (îles). Courants d’eau de mer qui se précipitent dans l’intérieur de quelques unes , p. ii4* New-Hampshire , p. 319. Kocu. Reptile fossile de l’Alabama, p. 649. une note de M. Fitton sur le lower greensand de l’île de Wight et sur le terrain néocomien en général, p. 41. — Sur les arkoses, p. 677, 696, 703, 725, 740. — Discussions diverses, p. 34. 47, 670, 696, 722. Loire {Haute-). Ossements humains au volcan de Denise, p. 107. — Manga- nèse à Brioude , p. 390. Loiret. Fer titané dans les alluvions de la Loire à Orléans, p. 282. Longuëm ar (de). Sur le terrain crétacé entre l’Yonne et i’Armance, p. 345. M Maestrk. Géognosie delà Catalogne j M alinowsky. Observations diverses, et d’une partie de l'Aragon , p. 624. I p. 725, 774 TABLE DES MATIERES Manganèse . Minerais d’Excideuil , p. | 38g. — De 1" Allier, p. Sgi. Marmites de géants dans le New- Hampshirc, p. 3ig. — En Savoie, p. 32 1. — Dans le Tarn, p. 523. Marne ( Haute - ). Entomostracés dans le terrain néocomien , p. 52. — Sur les terrains jurassiques supérieurs et moyens, p. 705. — Comparaison de ces terrains avec ceux de l’Yonne, p. 7*4- , , . Martins. Mouvements de glaciers en Savoie, p. 83. — Sur le delta de l’Aar dans le lac deBrienz, p. 118. — Nouvelles observations sur le glacier du Faulhorn, p. 223 , une planche. Accroissement, p. 225. Ablation, 227. Courbes noires, p. 236. Stratification, 241. Structure rubanée , 243. — Roches striées par des glaciers, 280. — Transport par les glaces flottantes, p. 5o3. Marmite de géants en Savoie, p. 32 10 — Discussions diverses, p. 248, 3o5, 325. Maurice {Ile). Note sur sa géologie , p. 608. Mellbvillb. Observation, p. 125. Membres nouveaux , p. 5, 48, g5, 116, i35, i4i,268,3o4,325,357, 5;5, 3g3 , 4o6 , 488 , 4gs. Mercure sulfuré. Mine de Ripa en Tos- cane , p. 267. Métamorphisme du granité, p. 282. 3i6. — Des roches siluriennes dans le Fi- nistère , p. 555. Michelin. Observations , p. 4M» 486, 681, 754. Moreau. Coupe théorique du lias des environs d’Avallon . p. 6;o. — Sur les arkoses , p. 675, 677, 740. — Discussions diverses , p. 671 et 688. N Naümann. Sur la carte géologique de la Saxe , p. 63g. Naples {royaume de). Production de flammes au Vésuve , p. 5g5, Nodot. Sur les arkoses, p. 727. — Ob- servations , p. 722. Norvège. Note sur sa géologie, p, 636. O Oise. Coupe du mont Pagnotte à Tar- tigny, p. 334. Oiseaux fossiles. De localités diverses, p. g. — Ornithichnites du Connec- ticut, p. 266. Omalius d’Halloy (d’). Sur le grès de Luxembourg, p. gi. — Discussions diverses, p. 38g, 3g2, 3gg,4o5. Paillette. Recherches sur quelques unes des roches qui constituent les Asturies, p. 4 5g. — Coupe dans Pile de Majorque, p. i54 — Inondations dans les Pyrénées-Orientales, p. 255. Paléontologie Exposé de quelques lois, p. 621. Paris {bassin de). Analysed’un Mémoire sur le terrain crétacé, p. i4^. Paul {Ile de Saint-) Note sur sa géolo- gie^»» 60g. Pentacrimtes dans le terrain tertiaire de la colline de Turin , p. 53, 198 et Orbigny (Aie. d’). Discussions diver- ses, p. 34 , 47, 53, 377. Orsini. Sur la constitution géologique de l’Italie centrale , une planche, p. 4o8. Orthoceras Jovellani. Des Asturies, p. 461 . P 574; dans le terrain tertiaire de Bia- ritz (Basses-Pyrénées), p. 53. Persigny (de). Destination des pyra- mides d'Egypte, p. 364- Pérou. Fusion de la glace du Cotopaxi par une éruption , p. 4<>6. Piauzite. Nouvelle résine fossile , p. 654. I Pictet. Lois paléontologiques , p. 621. ' Piémont. Penlacrinites dans le terrain j tertiaire de la colline de Turin, p. 53 et 574. — Peu d’analogues vivants dans les Polypiers , p. 486 — Sur les te T DES AUTEURS. stries et les moraines des glaciers de la vallée d'Aoste, p. 728. Pilla. Notice géologique relative au creusement d’un puits artésien près Livourne , une planche , p. 402, — Sur la production des flammes dans les volcans , notamment au Vésuve, p. 5^5. PiNTfiviLLE (de). Age de la marne de Pachino, en Sicile, p. 33. Planches du Bulletin. I, p. 37. II, p. 120. III , p. 161. IV, p. 198. V, p. 223. VI, 249. VII, o. 327. VIII , p. 334. IX, p. 348. X, p. 402 XI, p. 4o8. XII, p. 439. XIII . p 461. XIV, p 463. XV. p. 472. XVI , P. 5o8. XVII , p. 5 17. XVI11 , p. 5a5. N IX , p Su. XX, 65g. Plum'cke. Position du schiste cuivreux do Mamfeld , p. 638. P om bl. Sur les basaltes de Gergovia (Auvergne) et l'âge des calcaires qui y paraissent intercalés, 97. — Végé- taux fossiles nouveaux du calcaire grossier parisien , p. 307. — Manga- nèse à Brioude, p. 390. — Discussions diverses, p. 10, iïo, i35. Porphyres. Ils ne sont pas associés à la houille dans le bassin d’Autun , p. Quartz. Son état de surfusion dans les I roches éruptives et les filons métalli- J Hameau. Découverte de la pyroméride dans les Vosges, p. 67!. Rathier. Sur la position du marbre de Cours, près de Noyers (Yonne), p. 681. Paulin. Oiseau fossileà Brie-stir-Marne, p. 10. — Analyse d’un Mémoire sur la constitution géologique du Sancer- rois (Cher), p. 84. — - Discussions diverses, p. 94 et iq4- Reaoe. Infusoires de la cra'e . p. 648. Bècifs rnadrèporiques. Sur leur forma- tion à la Guadeloupe , p 663. Reptiles fossiles. Grenouille à Aix (Bouches-du-Rhône), p. 383. — Reptile de l’Alabama , p. 649- — Tortue de l’Himalaya , p. 649. Rhône. Sur les roches éruptives des en- virons de Lyon , p. 496. Rivière. Observation sur le mol Spilite, 775 7 4 /• — Leur âge dans le Morvan ( Saône-et-Loire), p. 750. Prévost (C.). Sur le terrain niimmu- li tique de la Sicile et considérations générales à ce sujet, p. 27. — Alté- rations des pierres exposées à l’air, p. 124 — Formation des rognons siliceux dans les roches, p. 223. — Sur la chronologie des terrains et le synchronisme des formations, p. 366. — Coloration des grès de Paris par des oxydes métalliques , p. 386, — — Discussions diverses, p. 110, 121, 593. Puits artésien dans le Luxembourg. Température observée, p. 653. Puy-de-Dôme. Basaltes de Gergovia et âge des calcaires qui y paraissent in- tercalés, p. 97. — Roches striées à Lempdes , p. 3o6. Pyramides d’Egypte. Leur destination, p. 364. Pyrénées. Phénomènes erratiques , p. 4o5. Pyrénées (Basses-). Pentacrinites dans le terrain tertiaire de B aritz, p. 53. Pyrénées- Orientales. Inondations, p, 2.55. fères, p. 579, p 39. — Mémoire sur les feldspath*, p. 60. Considérations préliminai- res , p. 60. Feldspalhs essentiels , p. 64. Felspaths accidentels, p. 69. Remarques sur les feldspaths essen- tiels, p. 73. — Discussions diverse*, p. 48 et 282. Robrrt (E.). Altérations et modifica- tions dans la structure des pierres ex- posées à Pair, p. 122. — Fer titané dans les alluvions de la Loire à Or- léans , p. 282. Robineau-Desvoisdv. Note sur la Pui- saye, dans l'Yonne, p. 697. — Obser- vations diverses , p. 721 et 723. Roches striées de la Suisse, p. 27a, 3o5, 3g8. — Des Vosges, 277 et 394. — Des Monts-Dore , p. 3o6. — Dans le Gard , id. — En Finlande , p. 636. — Sur les stries et les moraines des gla- 5 o. 776 2 AELE DES MATIERES ciers fie la vallée d’Aoste, en Pié- mont, p. 728. Koykh. Sur les terrains jurassiques su- périeurs et moyens de la Haute- Marne, p. jo5. — Comparaison de ces terrains avec ceux de l’Yonne, p. 714. — Noie sur les grottes d’Ar< y (Yonne), p. 718. — Observations di- verses, p. 723. Roys (marquis de). Terrain nutnmuli- tique dans l’Ardèche, p. 26. — Ho- ches striées à Beaucaire , p. 5o6. — ; Discussions diverses, p. 47, i53. Rozet. Dyke et coulée de wacke en Auvergne, p. io5. — Roches striées sur les bords de l’Ailier, p. 006. — Sur la cause de l’existence d’anciens glaciers dans des contrées où il ne peut en exister, p. 661 . — Discussions diverses , p. 198, 266, 348, 356. Russie asiatique. Indication de ses ro- ches, p 635, Russie d’ Europe. Résumé sur sa faune paléozoïque, p, 569. S Saône-et-Loire. Coquilles marines ré- centes à Tournus , p. 281. — Terrain de transition de Bourbon-Lancy, p, 74 1 * — Age de la montagne de Chi- zeuil, p. 745, — Sur la non-associa- tion de la houille avec les porphyres dans le bassin d’Autun.p. 747. — Age des roches porphyriques du Morvan, p. 760. Savoie. Mouvements desglaciers, p. 83. — ■ Marmites de géants dans la vallée de l'Arve , p. 5z 1 . — Sur le mont Sa- lève , p. 633, Saxe. Sur sa carte géologique, p, 639. Schistes cristallins de la Toscane, p. Seine . Végétaux fossiles du calcaire grossier, p. 307. Seine-et-Oise. Coloration des grès d’Or- say, p. 386. Sibérie. Vallées de l’Altaï dues à des dislocations, p. 399, — Sur les envi- rons du lac Baïkal , p. 644- Sicile. Sur le terrain nummulitique , p. 26.— Age de la marne de Pachino, p. 33. ^ Silcsie. Sur les terrains secondaires , p. 639. Soulèvements subis par le terrain silu- rien du Finistère, p. 55y. Spilites. Nouvelles observations sur les gîtes du Dauphiné , p. 35. Stiehleb. Sur les stylolites , p. 490. Stobikcki. Filon de cuivre p) riteux dans le terrain jurassique de la Drôme, p. 4o. Structure des pierres modifiée par Pcx* position à l’air, p, 122. Sty/olytes. Recherches sur ces corps, p. 490. Suisse. Sur le delta de l’Aar dans le lac de Brienz , p. 1 18. — Nouvelles ob- servations sur le glacier du Faulhorn, p. 223. — Roches striées, p. 273, 3o5, 398. — Terrains tertiaires du canton de Vaud, p. 5g3, — Végétaux fossiles d’Æningen, p. 640, T Tarn . Marmites de géants près d’Alby, p. 323. j Tchihatchbff (de). Résume d’un Mé- moire de M. Gœppert sur les Cyca- dées fossiles, p. 55. — Vallées dues j à des dislocations dans l’Altaï, p. 399. — Discussions, p. 10. Terrain aptien . Sa position dans l’Yonne, p. 89. Terrain crétacé. Analyse d’un Mémoire sur ce terrain dans le bas-in de Paris, p. 142. — De la Toscane , p. 1 55 . — — Dans l’Yonne , p. 345, — Des Etats romains, p. 412. Terrain erratique du revers méridional des Alpes, p. 284. Terrains ignés anciens des Côtes-du- Nord, p. 125. Terrain jurassique de la Toscane, p. 179. — Des Etats romains, p. 4*3. — Supérieur des Alpes lombardes , p. 359. — Supérieurs et moyens de la Haute-Marne , p. yo5. — Position du grès de Luxembourg , p. 91. Terrain néocomien. Sur sa position , P- 44 Terrain à Nummulites (épicrétacé) des Corbières et de la montagne Noire , ET DES AUTEURS. 777 p» 1 1 et 270. — Dans l’Ardèche, p 26. — Delà Sicile, p. 27. — Opinion île M. Deshayes sur certains fossiles de ce terrain , p. 33. Terrains tertiaires de la Toscane, p, 58 el'hyy. — DesCôtes-du Nord,p. i33. — Des Etats romains, p. 4<>9- — Du canton de Vaud, p. 5g3. — Du cen- tre de l’Espagne. Terrains de transition des Côtes-du- Nord, p. i3o. — Silurien et dévonien dans les Asturies, p. 4^9. — Silurien dans le Finistère, p. 017. — De Bourbon- Lancy ( Saône-et- Loire ) , p. 741. Toscane. Sur les terrains tertiaires , p. 58 et 377. — Sur les terrains stra- tifiés, p. i55» — Mine de mercure de Ripa, p. 267. — Essai de puits artésien à Livourne , p. 402. Triçonia Whatelyce du muschelkalk de Bergame, une planche, p. 348. Tyrol. Mouvements de glaciers, p. 81. V F allées dues à des dislocations dans l’Altaï, p. 399. Végétaux fossiles. Description de quel- ques espèces d’Auvergne, p. 102. — Nouveaux du calcaire grossier des environs de Paris, p. 307. — D’OEningen en Suisse , p. 640. — Résumé d’un Mémoire sur les plan- tes fossiles en général , p. 36a. Yernruil (db). Coupe du mont Pagnotte à Tartigny (Oise), une planche, p. 334. — Fossiles paléozoïques des As- turies, p. 458. — Résumé sur la faune paléozoïque delà Russie, p. 569. — Observations , p. 3o5 et 4^6* Vienne. Ichthyosarcolites près de Lou- dun, p. 53. Viqubsnel. Sur une géode de glace et la congélation de l’eau, p. 327. — Observations , p. 3o6. V iBf.BT. Sur l’origine des spilites, p. 3g. — Age de divers granités et porphy- res , p. 1 34. — Sur des déplacements PVight (île de). Observations sur le lovrer greensand, p. 4i* Wisse. Exploration du cratère du Yonne. Position du terrain aptien , p. 89. — Terrain crétacé entre l’Yonne et i’Armance , p. 345. — Réunion extraordinaire de la Société à Aval- Ion , p. 660. Excursion à Vassy, p. 664. A Villers-Nonains, p. 67 j A Vézelay , p. 682, De Vézelay à moléculaires dans les roches , posté- rieurs à leur dépôt, p. 198, une plan- che.— Coquilles marines récentes à Tourous , p. 281. — Notes sur la géo- graphie ancienne et sur une dépres- sion dans l’Afrique septentrionale, p. 349. — Origine de minerais de man- ganèse , p. 390. — Sur les arkoses et sur la nécessité de supprimer ce mot, p. 675 , 676 , 678 , 695. 704. — Sur les grottes d’Arcy, p. 698. — Discus- sions diverses, p. 33, 124, 223, 282, 317, 388 , 392 , 4oi, 674, 678 , 681 , 687, 696. Volcans. Exploration du cratère du Rucu-Pichincha , p. 5 11. — Sur la production des flammes, p. 595. Vosges. Traces d’anciens glaciers , p. 249 et 5oô. — Roches striées , p. 277 et 394. — Eff. t des avalanches, struc- ture des couches de neige, p. 3g4. — Présence de la pyroméride, p. 671. Rucu-Pichincha ( Equateur^), une planche , p. 5i 1 . Vermanlon, p. 690. De Verman- ton à Avallon, par les grottes d’Arcy. p. 693. — Sur les grottes d’Arcy, p. 718. — Comparaison des terrains jurassiques avec ceux de la Haute- Marne , p. 714. 778 TABLE DES MATIERES ET DES AUTEURS, Z Ztcwo (du). Crioceras dans les Alpes vénitiennes , p. 356 et 376. — Pen- tacrinites dans le terrain tertiaire de la colline de Turin , p. 574. ZifPB. Galet de quartz dans le granité p. 266 et 282. FIN DE LA TABLE, ERRATA. Page 267, ligne 1, au lieu de: Newalled Sandstone, lisez : New red Sandslone. Page 5 12, ligne 19, au lieu de: zostéoroïdes, lisez: zostéroïdes. — ligne 29, au lieu de: bellonisana, lisez: bellovisaua. Page 3i4» ligne i3, au lieu de: Brachydon, Usez: Brachyodon. — ligne 33, au lieu de : penastroïdes, lisez: pinastroïdes. Page 3i5, ligne 7, au lieu de: cocciformis, lisez: cocoiformis. Page 3 16, ligne 22, au lieu de : Brimout, Usez : Brimont. Page 335, ligne 2 de la note, au lieu de: Housselt, Usez: Hasselt. Page 55o, ligne 7 de la note, au lieu de : souscription. Usez : suscription. Page 563, ligne 3 1 , au lieu de: Bolia, Usez: Bolea. — ligne 39, au lieu de : Blandowskianai , Usez : Brandrowskanus. Page 4°6, ligne 6 et 9, au lieu de : Gatapoxi, Usez: Cotopaxi. Page 4 1 1 , ligne i3, au lieu de : Martra, Usez : Maelra. Page 522, ligne 3o, au lieu de: Bléden, Usez : Cléden. Page 52 3, ligne \l\ , au lieu de: Lauveoc, Usez: Lanveoc. Page 527, ligne 29, au lieu de: Laudevenec, Usez: Landcvenec. Page 528, ligne i5, au lieu de : Serrajn, Usez : Terrain. Page 536, lignes 5 et i3, au lieu de: Frégoudan, Usez: Trégoudan. Page 538, ligne 34, au lieu de: Lanvoec, Usez: Lanveoc. Page 539, ligne 4, au lieu de: Lanvoec, Usez: Lanvcoc. — ligne 34, au lieu de: fort Corbeau, Usez : fort du Corbeau. Page 547, ligne 26, au lieu de : coupe a 6, Usez: coupe A B. Page56i, lignes 36 et 37, au lieu de: Penarviz, Usez: Penarvir. Page 568, ligne 21, au lieu de: Sirènes, Usez : Cyrènes. Page 6o5, ligne 5i , au lieu de : Cotus, Usez: Gotlus. PageG 1 4 , ligne 1, au lieu de: Alberinale, Usez: Albemarle. Page 65 1, lignes 9 et 3o, au lieu de: Dinormis, Usez: Dinornis. Page 65g, ligne 33, 2e col., au lieu de : Pryan , Usez P^éjan. — ligne dernière , au lieu de : Vildide, Usez : Vildied. Page 665, ligne i3, au lieu de : supérieure , Usez: inférieure. — ligne i5, au lieu de: inférieure , Usez : supérieure. Page 707, ligne 22, au lieu de: fig. 1 1, Usez : fig. 10. Page 7i5, ligne 3, au lieu de : un très grand appartenant à , Usez : un très grand nombre appartenant à Page 715, ligne 22, au lieu de : malgré l’absence de fossiles caracléris- 4 ‘ tiques si abondants, lisez: malgré l’absence de ce fossile caractéris- tique si abondant.... Page 716, ligne 3, au lieu de : par leurs formes gigantesques et leur résistance, lisez: par leurs formes gigantesques, leur résistance Page 716, ligne 38, au lieu de: restants, lisez: ressauts.... Page 717, ligne 9, au lieu de: et si l’on a recours aux failles , lisez : et si l’on n’a recours aux failles..,. Planche I. Au lieu de : 2e série, t. 1, lisez : 2e série, t. II. Planche XVII , à la page 517. Au lieu de : Le Tret, lisez: Le Fret. On a omis le petit rond qui indique le village, et qui doit être rétabli devant le nom. Au lieu de: Lamernorsal , lisez : Lanvernorsal. Devant le nom du village de Trémaïdic, on a omis le petit rond qui indique que c’est un village. Les fortifications de /'isthme de Kelern ont été omises. Les rapports de longueur entre le plan et la coupe manquent d’exactitude. Le porphyre quartzifère du fort du Corbeau a reçu une étendue exagérée. On a écrit « Gap la Chèvre » dans une anse. Planche XVIII, page 525. Figure 2. - — On a omis la flèche et les plumes dans la ligne N. -S. du plan des directions. Cette ligne est perpendiculaire à la légende , et la pointe de la flèche [signe du N.) doit se trouver du côté de la figure. Figure 3. — Dans la coupe on a représenté les couches qui ne doivent avoir qu’une pente de 45° comme si elles atteignaient une inclinaison de plus de 6o°, et l’on a disposé les lettres A , B , de manière à retourner complète- ment la coupe par rapport au plan. Figure.G. — On a omis la légende : « Granité au milieu des schistes silu- riens ». Figure 9. — Elle est mal exécutée ; une partie du porphyre est restée en blanc , l’autre a reçu les signes du granité , de manière à faire croire à deux roches différentes et notamment à un granité qui n’existe point. Les divi- sions parallèles aux couches sont indiquées trop distinctement. Figure t5. — La ligne du premier niveau des granités vient aboutir au dessus, au lieu de passer au dessous du dépôt silurien. Planche XX. Figure 1 1. — Dans la case où sont inscrits les mots marnes oxfordiennes supérieures, moyennes, inférieures, les mots supérieures et inférieures ont été changés de place « ;r/:: 1*. : î . Uîî ; iîl : V‘ 1 {?.*! • i*î :* : ; ISÎpnîSB ' ïââ