FESSES VE JUL . Un sy DS PL TT Ke ; NON UE iv ” ul sur) ALU v A AS" Dal pri + La v: & ht = Rats 4 ë x LL LUE AA Ft 7 8 » OP > SS < AT. è ill as. POEURLRRR P" à T1 A RL LL nn VU | TE IP OP AURAS Pt . en 1 Ja: Tu \' Vwv L| > w T-X Ed A. LS LE LU ATEN À NE vu NO CS AIRE PEL ane PRMMa Lt | Pi, AÈR RS d vv bte TMS TE MA -J CL CL. pris ur Er AT PP CR ou LP TN » L RU | ‘ CLR 6. 2 por D ; PL RE LU ÉRA Vote do à MACRO PAIN UT que pes 12 DAT CNISE SE Ve .. 485 | < EU | à ; ALL ve eut AA 4 LA IN bd ht: D os an LU u AE f ñ q : | RUE Mhitiiee ge AU 11 + LT url te ÿ y “lv, à À l'A ltiiiten à LES + LCR “ hit ml FT RAT | LS CURE _." | PRE Les” | A MATHIEU MEN RE Marmara One en CNE cerf 1e a unie ON N È LEE LL CU TE RAS AAA & tencaonttls INT LU Ce Ven 9 vu « A EEE EUEUCRRe Sr ‘+ Ta re 1» APCE RRRR ES, LA | : ee a Add » ant nn Ie Ne ess re alle St LR PE [fl vou a | |] voby 54 4 dé ent Crrur | tn _ PU UE à CET LE $ 12 rene © TR | ( PRO PR PRATERMEE NIET CUT + 5 LM | ee pa LE AT 20) pe ot me spin AU Pl Are | 1 SE No xt ÉAAALZITRU LL LECELELE EN IEERELL EEE D rate ERA LE er PA ERP EL EM EP PCR … ne 227 LT PL EEE LE EPP PT D Le FE PACE ù UN ANT AE La lal v'9Ÿr AP TEEN A FE à. 14 ee 4 F lu AN TE OT) ACTE À ds LL LA ivre 1" L < VE | M. et PH . 1 AA hs - 4.4 M MeV Venere val ur SRSIER THAT PANDA TT NP TTL LL ete pi AAQUE RE Dane D TU PLLL eg a LL LL | D PARENT ngg puaunl| ie fers (it APE ne A RSS DS TR RES gg VUE, PL | TAR Sa # 4 en “ CHLS 54 LEA Lan mPRA AA An DOI EST) Î | UE Lalr + CAN E à | is : REUTERS à SL CUR sgh } AGEN 4e : NA da | - 4 + = AA + EN "ue Ain AU | +r1L DRAP ASvEreesin - JP | LT PET CRE LS + CE F Ne nr, A4” CA M An 7 à | NM v-v $ «\ # Ua Va. [l LUE y" «v4r ENT A4l|ll {his PL MNT HAVE PERRET | | À és Q LL TU LL LUE LE NNRRMRANEr AHTCI - Î D: 8 . L! CRE Ch ar LT , FEI: AAITRS RL D) nu 4 AA Hu mere Va et £ TEL nn | 44 Des he > “y LIL V v1 | ER as Ve VUE y vu : À ee ee | ss APRES < } Li UN 2 + MAÉ \ + e En | DL ADO : danrnrmenss Are né à "un " vvE ùt wa] | LT TA | AREA SMETS ANTRAMAEEE - = e, È DEL SL NST a! L LAS AA EN AR | | “ Jin PE nerf AC CM LORS AA A "à : DA Mg ss: Ti tu sell LLC ñ DER su os. Ÿ LT 2 =! | D D NU APP à Le) é RAT NA a & SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE QUATRIÈME SÉRIE TOME PREMIER SOU MST : 46 OX - 72 CONTE Le ANA SE ATIONAL SE 19O1 LUI Le. PARIS AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE 28, rue Serpente, VI 19O1 4e Série, t. KL — 1901. — N° 1. BULLETIN ISOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE at FRANCE. i (CETTE SOCIÉTÉ, FONDÉE LE 11 MARS. 1830, A ÉTÉ "AUTORISÉE ET RECONNUE COMME ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PAR PAR ORDONNANGE DU RO Du 3 AVRIL 1832) QUATRIÈME SÉRIE TOME. PREMIER. © || à . É < Feuilles 1-6. Le Planches _I-[f. Liste des dons : a. . VS AG ee TION AL MUSÉE fe el î PARIS AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE 28, rue Serpente, VI Se | 1901 = £ Le Bulletin parait par livraisons médaueltes. - Juin 1901 ORALE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRAN( Première Série (1830-1843) Does : Er. Tome lie 00 Epuisé Tome X. — 518 p. 4 PI, - Tome IL — 478 p. 3 PI. . 30 | Tome XI. — 516 p. 5 PI. _Tomes IL, IV, V, VI . Epuisés Tome XIL — 566 p. 12 PI. . Tome VIE — oo p. 7 PL... 12 | Tome XL —*,: 7"). Epuisé. Tome VIIL — 444 p. 9 PI. . 7x2 ie XIV. — ce p. 12 PL. 5 Tome AX=#S08 p.90 ble 16 Table générale et analytique de la rre Série, par M. É Carez, Deuxième Série (844 1872) Er. de Fo î Tomes I, IX, III, IV. . Epuisés Tome XVII. — 888 -P. T1 PI. . Tome V. — 676 p. 9 PI. . 30 | Tome XVIIL — 838 p. 16 PI, + Tome VI —" "48 p.15 Pl. © ro |Tomes XIX/ XX 0 Epuisés Éd Eome, NIL-=: 1852 pxr) Pl ‘19 |elomes XXI = 562%p. 7 El Tome VIII. — 659 p. 10 Pl... 12 | Tome XXIL — 596p. 6 PI. . - Tome IX. — 644 p. 4 PI. . 12 | Tome XXII — 854 p. 14 Pl. 12 Tome X.:— 646 p. to Pl, . 12 | Tome XXIV.— SJo p. 11, Pl. : 12 Tome XI, — 792 p. 11 PI. . 12 | Tome XXV.— 1018 p. 9 PI. . x Tome XIL — 1364 p. 36 PI. . 30 | Tome XXVI. — 1196 p. 8 PL. . . Tome XIII — 900 p. 16 PI. . 12 | Tome XXVII. — 720 p. 14 PL. . 16 - Tome XIV. — 915 p. 15 Pl. . 12 | Tome XXVIIL — 384 p. 2 PI. . Tome XV.— 815 p. 15 PL. . 12 | Tome XXIX.— 764 peux PL. OS Tome XVI) "1198 ;p. 20 Pl. 90. ù es Table générale ét analytique des T: 1 à Lo e par M. E. Dadcre È Table des T. XXI à XXIX, par MM. E. a et A. BIOGHE, AGE Troisième Série (1873-1900) Er : ÿ se LÉ PAL, it Pl. . 16 | Tome : XV.—1026p 3 Pl. © Tome I. — 586 p. Tome IL — 996 p. 20 PL. 16 | Tome XVI — 1940 p. 38 Pl... 26. Tome III. — goo p. 18 PI. . 16 | Tome XVII — 987 p. 27 PL. . 2% Tome IV. — 857 p. 22 PI. . 16 | Tome XVIIL — 1062 p. 27 PI... 2/ Tome V. — 968 p. 16 PI. . 16 | Tome XIX.— 1536 p. 29 PL. . & - Tome VI — 813 p. 19 Pl: . 20 | Tome = XX.— 760 p. 16 Pl 80 Tome VII — 859 p. 22 PL. . 28 | Tome XXI. — 889 p. 23 PL. Tome VII. — So p. 23 PL. . 20 | Tome XXII. — 979 p. 24 PI. . 30. Tome IX. — 786 p. 17 PI, . 20 | Tome XXII. —-1068 p. 27 Pl: Tome X. — 743 p. 16 PI. . 20 | Tome XXIV.— 1326 p. 39 PL. . 30. : Tome XL — 984 p. 179 PI. . 20 | Tome XXV — 2 P. 2 ie _ Tome XIL — 90 p. 30 PI. . 24 | Tome XXVI.— 1004 b: . Tome XIII — 1000 p. 21 Pl. .- 24 | Tome XXVII. À Tome XIV. — 931 p. 27-P1. . 24 Tome XX VIIL. Table générale et analytique des T. I à XX, par M. MEN SES KE réparation) na Mémoires de la Société géologique de Druice (3 séries), 31 ne si Comptes-rendus des réunions extraordinaires de la Société, 48. vol. D’Archiac. — Histoire des Progrès de la Géologie, 8 volumes. < Ouvrages de Fontannes, 53 volumes. a SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE Sérnes du 7 Janvier 19O1 PRÉSIDENCE DE M. A. DE LAPPARENT, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procës-verbal de la dernière séance. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membre de la Société : M. Daniloff, Eugène, présenté par MM. Dereims et Blayac. Cinq nouveaux membres sont présentés. Le Président donne lecture d’une lettre de M. Edmond Pellat, annonçant la mort de M. Huguenin, membre de la Société depuis 1875, décédé à Valence-sur-Rhône (Drôme), au mois de septembre dernier. « Tous les géologues qui ont exploré, depuis une trentaine d'années, la montagne de Crussol, située tout au bord du Rhône, en face de Valence, ont certainement conservé le souvenir de ce confrère modeste et aimable dont le plus grand plaisir était de les conduire et de se charger de fossiles recueillis à leur intention, plutôt que pour enrichir sa propre collection. Bien des Collections publiques en France et à l'Étranger ont recu de lui des séries de fossiles du Jurassique supérieur de Crussol. C’est à lui que Fon- tannes a dû la plupart des Ammonites de Crussol décrites et figurées dans ses ouvrages. » l On procède ensuite, conformément aux dispositions du Règle- ment, à l'élection d’un Président pour l’année 1901. M. Léon Carez, ayant obtenu 129 voix sur 145 votants, est élu Président de la Société en remplacement de M. A. de Lapparent. 6 SÉANCE DU 7 JANVIER IQOI Sont ensuite nommés successivement : Vice-présidents : MM. E. HAuG, E. VAN DEN BRoOECK, DEREIMS et R. NickLës. Membres du Conseil : MM. A. de LAPPARENT, H. DOUVILLÉ, A. BoIsTEL, G. DozLrus et J. BLAyYAcC. Avant de lever la séance, M. de Lapparent s'excuse de ne pou- voir assister à la prochaine séance. Il remercie les membres de la Société du bienveillant concours qu'ils lui ont apporté pendant sa présidence. Par suite de ces élections, le Bureau et le Conseil sont composés, pour 1901, de la façon suivante : BUREAU Président : M. L. CAREZz. ._. Vice-présidents : M. E. Hauc. | M.E. Van pen Brorck. | M. Dererms. | M. R. Nrcxrës. Secrétaires : Pour la France : Pour l'Etranger : M. L. GENTIL. M. L. PERVINQUIÈRE. Vice-Secrétaires : M. L. Mémin. | M. J. GrraAuo. Trésorier : Archiviste : M. Léon JANET. M. G. RAMOND. CONSEIL MM. Marcel BERTRAND. | MM. Emm.de MARGERIE MM. A. de LAPPARENT. J. BERGERON. A. GAUDRY. H. DouviLLé. M. BouLe. Munier-CHALMAS. A. BoIsTEL. J. BLAyYAC. P. TERMIER. Gustave DoLLFUSs.. Dans sa séance du 21 janvier, le Conseil a fixé de la manière suivante, la composition des Commissions pour 1901 : 1° Commission du Bulletin : MM. Emm. de MARGERIE, À. de LAPPARENT, Marcellin Boure, Gustave DorLrus, J. BLAYAC. 20 Commission des Mémoires de Géologie : MM. Marcel BERTRAND, MUNIER- CHALMASs, H. DouviLré. 3 Commission des Mémoires de Paléontologie : MM. Marcellin Bourse, H. Douvizré, Albert GAuDpry, E. HAUG, MuNIER-CHALMAS, ZEILLER. 4° Commission de Comptabilité : MM. H. DouvizLé, P. TERMIER, A. BoisrEL. 5° Commission des Archives et de la Bibliothèque : MM. Emm. de MARGERIE, A. THÉVENIN, J. BrAyAC. Séance du 21 Janvier 1901 PRÉSIDENCE DE M. A. BOISTEL, VICE-PRÉSIDENT SORTANT, PUIS DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. M. A. Boistel, Vice-président sortant, prononce l'allocution suivante : « Messieurs, — L’empêchement qui tient aujourd'hui éloigné de nous notre cher Président, et qu'il vous a exposé lui-même lors de notre dernière réunion, m'assure la bonne fortune, en même temps que le périlleux devoir, de saluer à la fois en votre nom le bureau sortant de 1900 et le nouveau bureau de 1901. « La Société géologique a eu, pendant l'année qui vient de s’écouler, l’insignie honneur de tenir un rang de premier ordre dans le Congrès international de Géologie réuni à Paris à l’occasion de l'Exposition universelle. Ce sont ses membres qui ont dirigé toutes les excursions auxquelles les congressistes ont été appelés à prendre part dans la France entière. Et vous avez tous apprécié avec quelle autorité et quel généreux dévouement notre éminent Président a traduit vos sentiments intimes, lors de la réception offerte par la Société aux membres du Congrès. Son nom s'est trouvé ainsi associé à celui de l’illustre Président du Congrès lui-même, dont la brillante hospitalité a laissé chez tous le plus durable souvenir. « Votre activité scientifique n’a nullement été détournée de ses recherches ordinaires, ni par la préparation du Congrès, ni par la rédaction du Livret-guide ou des publications préliminaires faites dans notre Bulletin. Le volume de 1900, malgré l'absence d'une Réunion extraordinaire propre à la Société et malgré le défaut de comptes-rendus d’excursions, se présentera à vous avec des dimensions aussi considérables, sinon plus, que ses devanciers. Ainsi se trouveront calmées les craintes exprimées, il y a deux ans, à cette place même par le Président sortant. Il n’y a pas lieu de redouter un ralentissement dans la fécondité de vos travaux. Les séances que nous avons tenues depuis la fin des vacances écar- tent même toute appréhension, que le Congrès international n'ait » ) SÉANCE DU 21 JANVIER IQOI exercé sur l’ardeur de vos investigations l'effet... sédatif, qui a paru produit par le dernier Congrès de Russie. « Le zèle de nos infatigables secrétaires est resté à la hauteur de la tâche plus ardue qui leur incombait; la publication très prochaine des derniers fascicules du Bulletin pour l’année 1900, témoignera hautement du soin et du talent qu'ils ont apporté à l'exécution de leur mandat. Je leur exprime tous vos remerci- ments, et félicite la Société de conserver encore une année leur précieux concours. « Je suis heureux de souhaiter la bienvenue aux savants distin- gués que vous avez appelés au Bureau pour l’année 1907, spéciale- ment à ceux dont une publication magistrale ou le courage héroïque ont tout récemment illustré les noms. Dans le choix de notre Prési- dent, vos suffrages ont entendu couronner une carrière déjà longue entièrement consacrée à la science et à l'étude approfondie des problèmes ardus et compliqués que présente l’une des plus belles régions de la France. Vous avez voulu exprimer la haute estime dans laquelle vous tenez les beaux travaux qui ont été le fruit de ces recherches. J’adresse à M. Carez mes plus chaleureux compliments et je l'invite à venir prendre sa place au fauteuil de la présidence. » M. L. Carez, Président de la Société, prend place au bureau : « Messieurs et chers Confrères, « Permettez-moi de vous adresser mes plus vifs remerciments de m'avoir appelé, par la presque unanimité de vos suffrages, à l'honneur de présider vos séances pendant l’année qui commence. Ce n'est pas cependant sans une certaine appréhension que je prends possession du fauteuil, en me rappelant la manière dont il a été occupé par M. de Lapparent en l'année 1900: je vous demanderai de perdre le souvenir de la brillante présidence qui vient de finir, pour ne pas faire entre 1900 et IQ01, une comparai- son trop fée rable à cette dernière année. ( Votre indulgence me sera d'autant plus nécessaire que la tâche promet d’être plus difficile ; vous savez tous en effet que les années qui suivent celles où ont eu lieu des expositions univer- selles et des congrès, sont généralement peu fécondes en travaux originaux ; il tient à vous, Messieurs et chers Confrères, de mon- trer que les occupations spéciales de l’année qui vient de s’écouler n'ont pas interrompu vos études. « L'ordre du jour de cette première séance est d’ailleurs bien rempli. C’est d'un bon augure pour l'avenir. SÉANCE DU 21 JANVIER IOO01I (o) « De plus, j'ai le plaisir de compter parmi ceux qui doivent prendre la parole aujourd’hui notre confrère, M. Molengraaff, géo- logue de l’État de la République Sud-Africaine, qui a choisi la Société géologique de France pour faire connaître les importants résultats de ses études sur l'Afrique du Sud. Nous le remercions de - ne pas avoir douté du sympathique accueil qui lui était réservé parmi nous. « En terminant, Messieurs, je vous proposerai de voter des remerciments au bureau sortant et en particulier à M. Gentil et à M. Janet, qui ont dirigé avec tant de zèle les services du Secrétariat et de la Trésorerie. Nous serons heureux de pouvoir profiter encore cette année de leur dévouement et de leur expérience ». Le Président proclame membres de la Société : MM. Dallemagne, Henri, Chef d'exploitation des mines de la Haute Bidassoa, à Irun., présenté par MM. Gentil et Mémin. Houdant, Pierre-Ferdinand, Licencié ès-sciences, pré- senté par MM. Gentil et Mémin. Savornin, Préparateur de géologie à l’École des Sciences d'Alger, présenté par MM. Ficheur et Vasseur. Miquel, Emmanuel, Commandant du Génie, à Valence (Espagne), présenté par MM. José Landerer et Gustave Dollfus. Le Commandant Barré, Professeur à l'École d’applica- tion de l’Artillerie et du Génie, à Fontainebleau, pré- senté par MM. de Lapparent et de Margerie. Le Président donne lecture de la lettre suivante de M. Ernest Van den Broeck, Vice-président de la Société pour 1901 : « Monsieur le Président, « Ai-je besoin de vous dire avec quels sentiments de gratitude et de profonde reconnaissance, j'ai appris, par les soins de M. le Secrétaire, que la Société géologique de France a bien voulu me faire l'insigne honneur de m'élire parmi ses vice-présidents pour l'année 4901. « Je me sentirais, en conscience, fort indigne d'un tel hommage, si je ne me rendais compte que j'ai à le partager avec le nombreux groupe de mes collègues et amis de la Société belge de Géologie qui sont mes collaborateurs dévoués dans l'œuvre toute spéciale que nous avons entreprise en Belgique. consistant à joindre aux pro- 10 SÉANCE DU 21 JANVIER 1901 grès et à la diffusion de la Science géologique, la démonstration. sous des formes multiples, de son précieux rôle utilitaire. « C'est done comme un hommage impersonnel et collectif, qu'en ma qualité de Secrétaire général de la Société belge de Géologie, j'accepte avec reconnaissance un titre qui resserrera encore les liens confraternels des géologues des deux pays et qui me crée envers mes confrères de France des devoirs que je m’effor- cerai de remplir dans la mesure de mes moyens. « Veuillez agréer, Monsieur le Président, avec mes respectueu- ses salutations, l'expression réitérée des sentiments de profonde gratitude qui m'animent envers les membres de la Société géolo- gique de France et que je vous prie de bien vouloir leur trans- mettre ». Le Président transmet à la Société les remerciments de M. René Nicklès, pour le témoignage de sympathie que lui donnent ses confrères en le choisissant comme vice-président. M. Carez présente, de la part de l’auteur, deux nouvelles feuilles de la Carte géologique détaillée de la province de Barcelona, par M. le chanoine Jaime Almera L'une d'elles contient la région tertiaire (région du Rio Foix et de la Llacuna); l’autre est la deuxième édition de la carte des environs de Barcelona. M. Carez se fait un plaisir d'adresser à notre infatigable et si savant confrère, les remercîiments de la Société ; il félicite M. Almera d'avoir pris l'initiative et mené à bien à lui seul une œuvre aussi considérable que le lever d'une carte géologique détaillée de toute une provinee. M. Almera envoie également pour la bibliothèque de la Société les brochures suivantes : 1. Sobre el Mapa geologico de Tarrasa por D. Domingo Palet > Barba, y la Memoria que le accompaña.—°. Sobre el descubri- miento de la fauna de Saint-Cassien en el Trias de nuestra pro- vincia. — 3. Sobre las especies Acerotherium lemanense, Mastodon longirostris, »- un Elephas descubiertos en esta provincia de Bar- celona. M. Peron offre à la Société une note publiée par dom Aurélien Valette, Sur des radioles d'oursins du Rauracien de l Yonne. M. Peron à fait suivre ce mémoire d’une note faisant connaître les conditions toutes particulières du gisement des radioles décrits. Ce n'est pas, en effet, dans les calcaires rauraciens eux-mêmes SÉANCE DU 21 JANVIER IOOI II qu'on les trouve, mais bien dans des sables argileux et ferrugineux qui remplissent des poches ou cheminées percées par les eaux dans la masse des calcaires coralliens. Ces dépôts de remplissage ne sont pas tertiaires comme on l’a annoncé, ce sont de simples résidus de décalcification contenant parfois en abondance non seulement des radioles; mais une foule de petits fossiles, toujours rauraciens, et composés surtout d'arti- cles isolés, de parties dissociées d'Echinides, de Crinoïdes, etc.. généralement très bien conservés. M. Peron, en offrant à la Société le premier fascicule de ses Etudes paléontologiques sur les terrains du département de l'Yonne, explique qu’il a entrepris la publication de ce travail principalement pour donner l'authenticité nécessaire à un grand nombre de fossiles nommés dans leurs Prodromes par d'Orbigny et par Cotteau, mais restés non décrits et non figurés. Ce premier fascicule ne comprend que les Céphalopodes et les Gastropodes de l'étage néocomien de l'Yonne, dont 116 espèces sont examinées, révisées et pour la plupart décrites à nouveau. Sur ce nombre, 15 avaient été nommées par d'Orbigny ou par Cotteau, mais n'avaient pas été décrites et figurées et 23 sont com- plètement nouvelles. Enfin 10 espèces, déjà établies, doivent dispa- raître des catalogues comme faisant double emploi avec d'autres plus anciennement connues. M. Peron, tout en se proposant de revenir avec détail sur cette question quand il aura terminé la publication de toute la faune néocomienne, croit devoir signaler dès maintenant, à propos des Gastropodes, les grandes affinités de cette faune avec celle du Jurassique supérieur coralligène de l'Yonne et sa différence pro- fonde avec celle des étages crétaciques superposés au Néocomien. M. Munier-Chalmas présente, de la part de M. Louis Bureau. un important travail intitulé : Notice sur la géologr'ie de la Loire- Inférieure, formant un volume de 522 pages avec plusieurs plan- ches et de nombreuses coupes, figures et cartes dans le texte. Dans cette monographie très documentée notre savant confrère expose ses recherches personnelles sur les terrains primaires et tertiaires de la Basse-Bretagne. [Il serait à désirer que de pareils travaux fussent faits pour toutes nos régions françaises. 12 SÉANCE DU 21 JANVIER 1001 M. Ph. Glangeaud fait une communication Sur les dômes de Saint-Cyprien (Dordogne), Fumel et Sauveterre (Lot-et-Garonne). L'étude de ces dômes fournit des données importantes aux points de vue géologique, dynamique, paléogéographique et géophysique. Elle montre qu'ils étaient déjà esquissés au Crétacé inférieur, de même que ceux de Chapdeuil, de Mareuil (Dordogne) et de Jonzac (ile d'Oléron), que l’auteur a fait connaître récemment. Les mouvements du sol qui eurent lieu, dès le Portlandien infé- rieur, ne chassèrent pas seulement la mer Jurassique vers les Pyrénées, mais donnèrent aussi naissance à un système de plis, de direction nord-ouest, parallèles aux plis hercyniens du Massif Central et de la Bretagne. En certains points de ces plis, s’édifièrent des dômes que l'érosion décapita en partie durant l’Infracrétacé. La mer cénomanienne recouvrit les derniers de ces dômes, tandis que le dôme de Saint-Cyprien formait une île couverte de végétation au milieu de la mer et que sur ses bords s’étendaient des lagunes saumâtres (lignites avec gypse). Les dômes de Fumel et de Sauveterre étaient rattachés à la terre ferme et le Quercy était émergé en grande partie. La discordance des dépôts crétacés et du Jurassique atteint par places 450. Au Turonien, eut lieu une importante transgression marine. Tous les dômes signalés plus haut furent immergés, jusqu'au Maëstrichtien. | Les refoulements latéraux qui accompagnèrent le soulèvement des Pyrénées, à l’Oligocène, accentuèrent le système de plis nord- ouest et les dômes furent de nouveau érigés en collines dont quelques-unes atteignaient 600 mètres de haut, c’est-à-dire une altitude supérieure à la Bretagne et à une grande partie du Massif central actuels. L'érosion postoligocène les a de nouveau arasés, car ils ne dépas- sent pas aujourd'hui l'altitude 300. Au niveau des vallées du Lot et de la Dordogne. cette érosion dépasse 500 mètres. En dehors des considérations qui précèdent, ces dômes, dont le noyau est virgu- lien et portlandien et les flancs cénomaniens, turoniens et séno- niens, constituent des unités géographiques très spéciales au milieu de l’uniformité de la région crétacée de l’Aquitaine. GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE DU TRANSVAAL par M. G.-A.-F, MOLENGRAAFF. (PLANCHES I-11). Au cours de mes excursions dans le Transvaal en 1898 et en 1899, j'ai recueilli de nombreuses observations sur la géologie de ce pays ; on trouvera le résumé de ces observations dans le présent travail. Les étude: préliminaires, indispensables à exécuter. avant de songer au lever géologique systématique de la région. furent le motif de ces tournées géologiques. Enfin, en 1899, le Volksraad de la République Sud-Africaine décida de nommer le personnel nécessaire au fonctionnement du Service géologique: on sait comment la malheureuse guerre qui attriste l'Afrique Australe a réduit à néant la réalisation de ce projet. Les recherches géologiques dans le Transvaal sont considérable- ment facilitées par la sécheresse et la douceur d’un climat favorisé d'une atmosphère toujours limpide et par la rareté de la végétation. La simplicité de la tectonique, dans ses grands traïts, vient encore aider le géologue. Néanmoins, quelques difficultés contrebalancent ces avantages ; c’est ainsi que les roches en place sont cachées à la vue, sur de vastes espaces, par des dépôts superficiels très récents : sables éoliens ou b/own-sand, tufs calcaires. etc. et queles coupes. soit naturelles, soit artificielles, permettant de vérifier la succes- sion des couches, font le plus souvent défaut. De plus, et c’est peut-être là l'obstacle le plus sérieux, on n’a pas encore trouvé de fossiles déterminables dans les formations sédimentaires du Transvaal, exception faite cependant pour celle dite : Xarroo supérieur. On comprendra des lors, pourquoi la carte géologique, qui accompagne cette communication, doit être considérée comme une 14 G.-A.-F. MOLENGRAAFF o1 Janv. simple esquisse schématique, destinée à donner une idée générale de la position et de l’étendue des diverses formations qui consti- tuent le sol de la République. La planimétrie de cette carte est extraite de celle de F. Jxppe (Map of the Transvaal, Prétoria 1899)'. L'orographie pour laquelle il n'existe aucune bonne carte, a été établie à l’aide de divers documents; pour quelques districts, entre autres, pour celui de Waterberg, je me suis inspiré des croquis relevés pendant les recherches préliminaires du Service géologique. La partie géolo- gique est basée pour la plus grande part sur mes travaux personnels, cependant, j'ai utilisé les renseignements de MM. D. Drarer et D. DorrreL pour les districts de Rustenburg et de Marico et, en outre, j'ai profité des indications données par les différentes publications citées à la fin de cette note, par exemple, de la carte géologique de M. HArcx (22) *, pour une partie du Witwatersrand. En faisant abstraction des formations jurassiques, crétacées et plus récentes, voisines du littoral, les divers terrains de la Répu- blique Sud-Africaine peuvent être groupés dans les trois grandes divisions suivantes, énumérées de haut en bas : IIT. — Système du Karroo ; IT. — Système du Cap; I. — Système primaire Sud-Africain. Cette classification des assises géologiques de l'Afrique Australe était déjà adoptée, pour la Colonie du Cap, par M. Baïn ?, et pour l'Afrique Australe entière par M. Schenck {. J'ai moi-même adopté les dénominations de ce dernier auteur. 1. La carte cadastrale de F. Jeppe complètement terminée et même impri- mée, n’a jamais été mise en vente. F. Jeppe l’avait dressée dans le service du Landmeter-Generaal du Transvaal ; il mourut en 1898 avant de l'avoir termi- née. Son fils, C.-F.-W. Jeppe, a continué et achevé l’œuvre de son père, mais n’a pu profiter de son travail ; il fut tué sur le champ de bataille de Spioen- kop le 24 janvier 1900. 2. Les chiffres en caractères gras, placés dans les notes infrapaginales, après les noms d’auteurs, renvoient aux numéros correspondants de la liste bibliographique qui termine cette note. Les nombres placés entre crochets, dans le texte, après les noms de pro- priétés, sont ceux qui correspondent à ces mêmes propriétés, sur la carte de F. JePpe ; ils sont indispensables pour l'intelligence du texte, un grand nombre de propriétés d’un même district portant des noms identiques. 3. A. Geddes BAIN, 1, p. 175. 4. A. SCHENGK, 45. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 15 I. — SYSTÈME PRIMAIRE SUD-AFRICAIN Le Système primaire Sud-Africain est formé par des terrains stratifiés associés à de nombreux massifs intrusifs de granite. Les oranites de ces différents massifs ont une grande ressemblance entre eux et se rapprochent également de ceux de la Colonie du Cap. J’ai réuni leurs divers types sous le nom de granite ancien, pour les distinguer de certains granites qui jouent un rôle impor- tant dans les régions du centre du Transvaal et qui sont d'un âge beaucoup plus récent. GRANITE ANCIEN. — Le granite ancien est généralement un granite à biotite, ou un granite à amphibole et biotite, plus rare- ment un granite à deux micas et quelquefois un granite à musco- vite. L'élément feldspathique est représenté aussi bien par l’orthose que par les plagioclases et le microcline. Les granites à microcline ! abondent dans les massifs situés entre Prétoria et Johannesburg, et à l’ouest de Klerksdorp. Le granite ancien et les schistes adjacents sont traversés par de nombreux filons de pegmatite, qui offrent en plusieurs points de très beaux échantillons de pegmatite graphique -. Dans le Swazie- land, près d'Embabaan, on trouve de la cassitérite * dans ces filons de pegmatite, et c'est dans ces mêmes filons qu'ont dû prendre naissance les minéraux, tels que : la monazite, l’æschynite, le corin- don que l’on trouve assez fréquemment associés avec le minerai d’étain dans les sables et les graviers des torrents de ce district. Rocxes STRATIFIÉES. — Les terrains stratifiés peuvent être divisés en deux groupes. 1. Pour la description pétrographique de cette roche voir : G.-A.-F. Moren- GRAAFF, 30, p. 184. >, À signaler, en particulier, les très belles pegmatites graphiques que l’on rencontre près de la gare de Krokodilpoort, dans le district de Lijdenburg, et sur la propriété Windsor {190], dans le district de Bloemhof. 3. Dans ces filons, les cristaux de cassitérite affectent une forme rare ; ils sont allongés considérablement dans la direction de l’arête (x11) : (111), ce qui leur donne un aspect tout à fait monoclinique. Voir pour leur descrip- tion : G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 32, p. 143, fig. 8. 10 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. L'un de ces groupes est caractérisé par des roches clastiques. Il comprend des phyllades, des quartzites, des conglomérats, des orès, des schistes, des lydiennes, des’ argilites et très rarement des calcaires. Par contre, l’autre groupe est caractérisé par de vrais schistes cristallophylliens, comme : l’amphibolite, les schistes chloriteux, les schistes à séricite, les taleschistes, les micaschistes, les quartzites schisteux, ete. Les micaschistes sont cependant rares dans ce dernier groupe. Quant à l’amphibole des amphibolites, elle appartient généralement à la variété acti- note ; il conviendrait donc de donner à ces roches le nom de schistes actinotiques. Plusieurs auteurs, en se basant sur les carac- tères différentiels de ces deux groupes, ont voulu considérer deux formations distinctes dans le Système primaire Sud-Africain. C'est ainsi que M. Gibson ! a admis : un groupe inférieur formé de gneiss, de schistes et de granites, et un groupe supérieur, groupe des schistes et quartzites inférieurs (lower quartzite and shale group). - Cohen “au contraire considérait le Système primaire Sud-Africain comme une formation unique (Grundgebirge) et Schenck * était de la même opinion en le nommant : Süd-Afrikanische-Primär- formation. Je suis en parfait accord avec ces deux derniers auteurs. On peut, en effet, constater que partout les vrais schistes cristallophylliens sont limités au pourtour des massifs de granite. Tout le Système primaire Sud-Africain représente donc une série unique, dont les roches sont fortement modifiées dans leur struc- ture par le métamorphisme de contact, produit par l’intrusion du granite. Dans la zone de contact, les schistes se sont différenciés à l'infini en donnant de nombreux types caractérisés par la présence d’une grande variété de minéraux de contact, comme la staurotide, l’andalousite, l’ottrélite, le grenat, le corindon, etc. #. Cependant, dans les régions où le Système primaire Sud-Africain est bien développé comme dans le district de Barberton et dans le Witwatersrand, il est préférable, pour des raisons d’ailleurs pure- I. W. GiBsow, 18, p. 420. 2. E. CouEn, dans P.-H. Daxms, 9, p. 90. 3. A. SCHENCK, 45, p. 225. 4. Une série de ces roches métamorphiques réunie par M. E. Cohen, près de Marabastad. dans le district du Zoutpansberg, a été décrite par M. J. Gürz, 19, p. 163 et suivantes. ; De très beaux types de ces roches métamorphiques forment les roches auxquelles j'ai donné le nom de roches porphyroides à corindon et de schistes à corindon, roches que l'on trouve dans piusieurs localités autour du massif granitique de Vredefort. Pour leur description, voir : G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 30, p. 198. É L4 js y ; £ I901I GÉOLOGIE DE LA REPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 19 ment pratiques, de distinguer une série inférieure voisine du gra- nite intrusif, consistant en schistes cristallophylliens, et une série supérieure, formée par des roches d’origine clastique, nommée la série de Barberton ou la série de Hospital-hill \. GÎTES AURIFÈRES. — Dans les environs de Barberton on trouve, dans les terrains de ce Système primaire, les mines d’or, dont l'exploitation, à l’époque où les conglomérats fameux du Witwa- tersrand furent découverts, en 1885 et 1886, atteignait son maximum de développement. Les couches de Barberton sont redressées presque à la verticale et fortement plissées ; l’or s’y trouve large- ment répandu, sans affectionner un niveau particulier ou s’asso- cier à une roche spéciale. C'est ainsi qu'on trouve les veines de quartz aurifère tantôt dans les assises de la série de Barberton, ce qui est le cas ordinaire dans le district de Barberton ; tantôt dans des schistes métamor- phiques et cristallophylliens, comme dans les mines de Forbes- reef, près de Steynsdorp, à la limite du Swazieland, dans la mine de Three-sisters, au sud-est de Kaap-Muiden, dans la mine de Woodstock, près de Jamestown: plus à l’ouest, sur la même rangée, dans la mine de North Sheba, et tantôt même dans le granite, tout près de sa surface de contact avec les schistes envi- ronnants. comme dans la mine de la Cataracte, un peu au sud de la mine de North Sheba. La position de ces gisements aurifères est en relation intime avec les accidents orogéniques. En eflet, souvent on trouve l’or dans des filons-couches de quartz, disposés suivant des plans de glissement (district de Moodies), d’autres fois le quartz aurifère remplit des fentes et des cassures, qui suivent généralement avec plus ou moins d'exactitude la direction et l’inclinaison des strates, d’autres fois encore les veines de quariz aurifère forment des réseaux diverse- ment ramifiés. Ce dernier mode se rencontre dans les points où les dislocations dues aux mouvements orogéniques ont été aussi vio- lentes que compliquées (environs de la célèbre mine de Sheba). 1. Les couches de Hospital-hill, au nord de Johannesburg, sont exactement l'équivalent des couches de Barberton. Cependant beaucoup de géologues n’ont pas admis cette identité, et de cette divergence de vues est résultée la plus regrettable confusion. C’est ainsi que M. HarTcux (23, p.77) sépare ses Hospital-hill series de ses Archæan rocks et leur donne une place à la base de son Système du Cap. Pour M. Scuencx la série de Barberton forme une partie de ses Swasi- Schichten et la série de Hospital-hill constitue la partie inférieure de sa Kap-Formation. 29 Juin 1991. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — » 18 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. Dans toutes ces régions, d’ailleurs, les strates encaissantes du quartz aurifère sont plus où moins imprégnées d’or. De cette dispo- sition des veines aurifères il résulte que dans le district de Bar- berton on peut distinguer quelques zones aurifères d’une faible largeur, mais d’une longueur très grande. Ces zones ont la même direction que l’axe de redressement ou de plissement des collines, et, par suite, cette direction et l’inclinaison des couches correspon- dent grosso-modo à la direction et à l'inclinaison des assises de la formation elle-même !. Les gisements d’or situés : sur la propriété Klipval [33] (district de Piet-Retief), sur la propriété Wonderfontein [486] (district de Vrijheid), dans le Murchison-range, à Marabastad, à Eersteling (district du Zoutpanshberg), aussi bien que la plupart de ceux de la Rhodesia ? et du Manica portugais * sont comparables aux gites aurifères du district de Barberton ‘. Dans le Hospital-hill, au nord de Johannesburg, on a trouvé des gisements de quartz aurifère analogues à ceux de Barberton, mais leur teneur en or était trop faible pour qu'ils aient une valeur économique. L’analogie du développement de certaines assises du Système primaire dans des régions du Transvaal très éloignées l’une de l'autre est fort remarquable. Un groupe de roches très caractéris- tiques, auquel les mineurs du Witwatersrand ont donné le nom local de Hospital-hill-slate, sert de repère, dans tout le pays, pour : reconnaître l’existence de la série de Barberton. Ce sont des roches schisteuses et quartzeuses fortement chargées de magnétite, dont le type le plus saillant est une roche rubannée, composée de minces assises alternantes, de quartz blanc, de jaspe rouge et de magné- te noire. Cetie roche, trouvée en 1873 par M. Cohen, a été décrite par M. Gôtz 5, qui lui a donné le nom de Magnetit-Quarzit- Schiefer. Elle était alors désignée par les mineurs des champs d’or de Marabastad sous le nom de calico-rock. » TECTONIQUE ET SITUATION STRATIGRAPHIQUE. — Les couches du terrain primaire sont presque partout fortement redressées, 1. Pour des détails sur le champ aurifère de Barberton, voir : A. BORDEAUX, 2, p. 274 et suivantes. 2. A.-R. SAwyER. The goldfields of Mashonaland, 43. 3. A.-R. SAWYER. The Portuguese Manica goldfield. Trans. of the Fed Instit. of Mining Engineers, June 1900. Ponte 1901. 44. 4. A. BORDEAUX, 2, p. 324. 5. E. COHEN, 4, p. 511. 6. J. Gôrz, 19, p. 164. I9OI GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 19 plissées et disloquées et, par suite, les roches qui les compo- sent sont énergiquement métamorphisées par pression. Ces mouvements de refoulement ont été la résultante de l’action de forces orogéniques qui s’exerçaient en général du sud au nord. Il en résulte que la direction des strates dans les bandes de schistes qui apparaissent fréquemment au milieu du granite ancien, aussi bien que la direction de ces bandes elles-mêmes, est très souvent orientée sensiblement de l’ouest à l’est. Cependant cette règle souffre beaucoup d’exceptions : dans le district de Vrijheid, par exemple, et dans le district de Piet-Retief la direction des assises du Système primaire, comme celle des crêtes des montagnes de la région, est tantôt N.O.-S.E., tantôt N.-S. Quand un massif de gra- nite est entièrement entouré de schistes, on constate que la direc- tion des strates environnantes est en général parfaitement tangen- tielle à la périphérie du massif. Si l'on suit de l’est à l'ouest la zone de terrain primaire entre le fleuve du Krokodil et le fleuve de Komati, on voit la direction des strates, d’abord est-ouest, se courber au sud, près de Sheba-hill et, tout en entourant le massif de granite de Barberton, redevenir E.-O. sur les flancs nord et sud du massif, dans les collines du Noord-Kaap et dans celles de Moodies ; enfin les schistes disparaissent avec le granite sous les grès de Kantoor, qui appartiennent à la formation du Cap, super- posée en discordance aux assises du Système primaire. Le panorama dont on jouit du sommet de lescarpement de Duivels-Kantoor, à 1800 mètres d'altitude, est l’un des plus beaux paysages géologiques que l’on puisse rêver. Aux premiers plans, à 4oo mètres en contre-bas, on voit Le terrain granitique de Barberton qui, de cette hauteur, paraît être une plaine, accidentée en réalité par de nombreuses collines aux formes aiguës, formées par l’affleu- rement de dykes de diabases traversant le granite. Ce terrain granitique est, du reste, très difficile à parcourir ; il est sillonné par de nombreux et profonds ravinements, auxquels on donne le nom local de dongas ! qui, vus du point élevé où l'observateur est placé, ont l’aspect de troncs d'arbres ramifiés à l'infini. Tout autour de ce terrain granitique, on aperçoit, disposées en demi cercle, les collines aux flancs abrupts et aux arètes tranchantes de la série de Barberton ?. On voit le granite et les schistes environnants, le long d’une ligne nord-sud, disparaître sous les terrains du Système 1. Mot emprunté à la langue Zoulou. 2. Ces collines se succédant les unes les autres avec une multitude et une diversité de formes extraordinaires, donnent au paysage un caractère alpestre. 20 G.-A.-F. MOLENGRAAFY 21 Janv. du Cap, qui leur est superposé sous une inclinaison d'environ 79° à l'ouest ; l'observateur qui regarde vers l’ouest a donc devant lui un panorama absolument différent de celui de l’est ; à l’ouest, les montagnes prennent des formes tabulaires, formes qu'une érosion longtemps prolongée engendre dans les couches sédimentaires peu inclinées. Le même phénomène se présente plus net et peut-être encore plus séduisant pour l'œil tout autour du massif granitique de Vre- defort (État libre d'Orange). Ce massif, en forme de vaste dôme à courbure peu accentuée, est entouré en demi-cercle par cinq ran- gées de collines dans lesquelles la direction des strates change dans le même sens en restant toujours sensiblement parallèle à la périphérie du massif de granite. Les deux rangées les plus rappro- chées du granite appartiennent à la série de Barberton, puis vien- nent deux rangées appartenant à la série du Witwatersrand !, et enfin une rangée de collines plus hautes formées par des diabases amygdaloïides et des porphyrites diabasiques. Placé au centre du massif granitique, on se croirait dans l’arène d’un vaste amphi- théâtre entouré d'un hémicyele de cinq gradins naturels gigan- tesques. La disposition des terrains primaires autour du massif graniti- que, entre Johannesburg et Prétoria, quoique en principe analogue, est rendue très obscure par la complication des phénomènes orogé- niques et la superposition des strates de la formation du Cap. Les mouvements de redressement et de plissement semblent avoir été, en quelques localités, contemporains des intrusions de granite ancien ; néanmoins, dans la grande majorité des cas, ils semblent leur être postérieurs, comme on peut le déduire de la structure nettement gneissique et cataclasique, qui est assez fré- quente sur les bords des massifs granitiques. Le granite et les schistes environnants, tous deux altérés par ces actions dynami- ques, se confondent souvent et toute trace d’une ligne de démar- cation disparaît. Dans le Witwatersrand il n'y a pas eu, en général, plissement des couches de la série de Hospital-hill et dans la plus grande partie du Rand, par exemple au nord du marketsquare de Johannesburg, les couches de Hospital-hill sont représentées par une seule série _ 1. Les exploitations de conglomérats aurifères dans ces assises sont connues sous le nom de Champs d’or du Vaal. Elles n’ont pas jusqu’à pré- sent répondu à l’attente des exploitants, cependant leur avenir ne me semble pas décourageant. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 21 d'assises consécutives, qui n’est pas doublée par des phénomènes de plissement. En allant de haut en bas, on peut distinguer les groupes d'assises ci-dessous. Les couches pouvant servir de repères par leurs carac- tères propres plus persistants sont indiquées par une astérique (*) (voir fig. r et fig. 2). * Rand propre ; Braamfontein Mein Fig. 1. — Coupe des couches de la série de Hospital- hill, dans le Witwa- tersrand central, à Johannesburg, montrant les principales couches de repère. — Echelle 1/40.000°. m) Série du Main-reef. *l) Red-bar, grès rougeâtre ; couche de repère très constante près de la série du Main-reef. Epaisseur, 1 à 2 mètres. k) Grès à séricite et grès grossier avec quelques couches minces d’argilite et de conglomérat. Epaisseur moyenne 500 mètres. *j) Quartzite vert. Ce quartzite est caractérisé par une couleur verdâtre surtoutsur la surface exposée à l’action de l’atmosphère. Epaisseur,95 mètres. i) Grès jaunâtre formant un banc mince. Epaisseur, 30 mètres. h) Argilite rouge. Epaisseur, 60 mètres. *g) Hospital-hill-slate typique ; cette roche est souvent plissée d’une façon extrêmement curieuse. Epaisseur, 130 mètres. *f) Quartzite blanc tacheté. Les taches rouges ou brunâtres sont causées par la précipitation d’un hydroxyde de fer dans de petits vides laissés par des fragments de feldspaths kaolinisés et enlevés partiellement. Epaisseur, 1 à 3 mètres. e) Argilite ferrugineuse rouge ou brunâtre, red-shale, offrant un clivage assez net parallèle ou un peu oblique au plan de stratification. Cette argilite est rendue un peu luisante par la présence de très petits feuillets de mica muscovite. Epaisseur, 225 mètres. *d) Quartzites à ripple-marks : ce sont des quartzites blanes ou rougeâtres. Dans la partie centrale du Witwatersrand cette bande de quartzites est très facilement reconnaissable, en ce qu’elle forme un petit escarpement unila- téral, au pied duquel s'étend souvent un terrain marécageux. Epaisseur moyenne 20 mètres. c) Complexe d’argilites rouges foncées ferrugineuses, connu sous le nom de black-shales, parce que leur couleur devient rapidement noire lors- qu’elles sont exposées à l'action de l’air. Epaisseur 330 mètres. *b) Quartzite du Rand-proper. Cette roche a subi un dynamométamorphisme intense. Ce massif quartzitique se sépare généralement en deux bancs de quartzite blanc très épais, entre lesquels est intercalée une argilite à séricite satinée p, qui est souvent un peu quartzeuse et très nettement ondulée. Gette argilite renferme dans quelques localités des veinules irrégulières de quartz à pyrite, qui ont quelquefois attiré l'attention des prospecteurs. Epaisseur moyenne, 160 mètres. 29 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. a) Schistes du versant nord du Rand-proper ; ce sont des schistes à séri- cite ou des schistes à actinote. Ces schistes font souvent défaut et dans ce cas le quartzite du Rand proper repose directement sur le granite. 2. Granite ancien. Malgré la simplicité stratigraphique relative de la série de Hospital-hill la pression orogénique exercée du sud au nord a été très énergique contre le massif de granite qui a joué ici le rôle de butoir. Il en est résulté de nombreuses dislocations, des failles, ( Care de M S. Chute d'eau Z See nef de Witpoortje X RE À NN N IN = Fe 7 SE? NN NN TK &S 5 NC NON KR NN à NT ] Îr J NN KR Fig. 2. — Coupe des couches de la série de Hospital-Hill, dans le Witwatersrand occidental. — Echeile 1/40.000. m) Série du Main lieef ; *l) Red Bar ; k) Grès à séricite, schistes et minces assises de conglomérat aurifère (Bankets):, #7) Quartzite verdätre ; J) Schistes et grès intercalés entre les bancs de quartzite verdâtre : « i) Schistes et diabases : h) Argilite rouge ; h) Argilite rouge très ferrugineuse : *9) Couches de Hospital-Hill ; *f) Quartzite blanc tacheté ; e) Argilite rouge luisante ou red-shale ; *d) Quartzite à ripple-marks ; : ce) Argilite rouge foncée ou black-shale ; *b) Quartzite dynamométamorphisé ; b) Argilite à séricite satinée et froissée (crumpled) ; a) Schistes à séricite et à actinote ; 2. Granite ancien. des glissements et souvent même une structure en écailles. C’est ainsi que la grande majorité des failles, qu'on a rencontrées au cours de l'exploitation des mines d’or du Witwatersrand, ont le caractère des failles inverses de rejet (hrust-faults). Les accidents qui ont produit la structure anormale, qui n'est d'ailleurs pas encore entièrement expliquée, de la série de Hospital-hill à Pest de Johannesburg sont, en principe. des phénomènes de glisse- ment le long de plans! qui traversaient sous un angle très 1. C’est certainement une bien grande erreur d'expliquer, comme M. Gisson l'a fait, cette répétition locale des couches du Witwatersrand par des plis I9O1 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 23 obtus les plans de stratification des couches. Le résultat a été un dédoublement local, ou plutôt une répétition locale d’une partie des couches de Hospital-hill. A Jeppe’s-hill, et de là jusqu'à Rietfontein, ce phénomène s’est trouvé compliqué, à l'excès, par le plissement d'une nappe appartenant à des couches tout à fait supérieures de la série aurifère, couches que l'on trouve main- tenant, dans un lambeau limité par deux grandes failles, séparées du grand ensemble de la série aurifère du Witwatersrand par plusieurs assises appartenant à la série de Hospital-hill. Plus à l’ouest, dans la partie dite normale du Witwatersrand, on trouve les mêmes glissements, mais les plans de glissement étant en concordance parfaite avec les plans de stratification, ces accidents n'ont pas changé la succession normale des strates. Seulement on trouve la preuve des mouvements occasionnés par les énormes pressions subies, dans les miroirs fréquents et dans le plissement intime des diverses assises elles-mêmes. CONGLOMÉRATS AURIFÈRES DU WITWATERSRAND. — Une série de terrains !, appartenant à la partie supérieure du Système primaire, a acquis une célébrité et une importance extraordinaires, parce qu'elle comprend les fameux bankets, elle est constituée par les con- olomérats aurifères du Witwatersrand. Cette série est composée de orès, d'argilites et de conglomérats. Les grès sont ou tendres et alors généralement rougeûtres, comme le red-bar, ou plus durs et passant aux quartzites. Les argilites sont plus ou moins ferrugineuses et généralement offrent diverses formes de passage, du type fran- chement schisteux aux grès. Toutes les roches de cette série, les conglomérats aussi bien que les grès et les argilites. sont caracté- risées par une teneur en séricite telle, qu'elles ont une apparence plus ou moins schisteuse. Cette série du Witwatersrand possède une grande épaisseur, évaluée par M. de Launay ? à environ 7500 mètres. renversés et couchés. Dans aucune partie du Witwatersrand je n'ai trouvé des successions inverses de strates comme celles que cet auteur a figurées dans ses coupes (par exemple fig. 6) et cette erreur provient de ce qu'il a confondu les quartzites verts (fig. 1, j) avec les quartzites du Rand-proper (fig. r b)et la /lospital-hill-slate typique (fig. 1, g) avec les argilites ferrugi- neuses (fig. r, c). Dans la plus grande partie du Rand la succession des strates est normale et on n’y trouve ni répétition, ni succession inverse des couches, comme M. G18s0N l'a indiqué dans sa coupe schématique, 18. pl. X, fig. t. 1. Je crois inutile de donner une description détaillée du terrain aurifère du Witwatersrand, car il existe, sur ce sujet, de nombreux mémoires bien connus. Je me bornerai à renvoyer le lecteur aux ouvrages de MM.de LAUNAY, Harcea et CHALMERS, et TRUSCOTT. . 2. de LAUNAY, 27. 24 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. On trouve l’or répandu surtout dans les conglomérats et beaucoup moins dans les quartzites. Les galets des conglomérats semblent être dépourvus d’or et au point de vue pratique on peut dire que l'or est restreint au ciment pyriteux du conglomérat ou banket. De haut en bas on peut distinguer dans la partie centrale du Witwatersrand quatre bandes de conglomérats aurifères : La série d’Elsburg ; . La série du Kimberley-reef ; La série du Bird-reef ; La série du Main-reef. = À © ER La série du Main-reef est la seule qui ait une grande importance économique ; toutes les mines d’or du Witwatersrand se trouvent dans cette série !. Ces différentes séries ont des caractères assez bien définis et possèdent des couches assez caractéristiques pour servir de repères utiles dans les forages profonds qu'on a fait au sud de la ligne d’affleurement du Main-reef, dans le but de se convaincre de la persistance de cette série de bankets riches pour l’exploita- tion des deep-levels. Cependant à Fest et à l’ouest, principalement au-delà des grandes failles de Boksburg, à l’est, et de Witpoortje, à l’ouest, la succession des strates aurifères, qui est typique pour la partie centrale près de Johannesburg, se modifie graduellement. La série d'Elsburg est très différente des autres : au lieu d’être formée par un nombre restreint de bancs de conglomérats à petits galets de quartz bien définis, elle consiste en un grand nombre de lits de conglomérats se confondant plus ou moins les uns avec les autres. Les galets y sont beaucoup plus volumineux ? que dans les autres reefs et une forte proportion de la roche, considérée dans sa totalité, n’est pas du quartz, mais est dérivée de roches diverses, surtout de quartzites. Au Witwatersrand on a généralement, et avec juste raison, pris comme point de départ, dans les recherches des affleurements du Main-reef, les couches de la Hospital-hill-slate, parce qu'elles ne sont presque jamais cachées à la vue et sont très faciles à carac- tériser. Cependant on a souvent commis des erreurs, en ne tenant 1. Il s’en suit que je regarde le Botha's-reef et le Battery-reef, à l’ouest de la faille de Witpoortje, le Xleinfontein-reef et le Van Ryn’s-reef, à l’est de la faille de Bocksburg, comme les équivalents de la série du Main-reef dans la partie centrale du Rand. 2. Dans les autres reefs, par exemple dans le Main-reef, les galets volu- mineux ne font pas entièrement défaut, mais ils y sont rares. C’est ainsi que j'ai reçu, gràce à l’obligeance de M. WALKER, inspecteur des mines, quelques galets de 25 centimètres de diamètre, provenant de la mine de Langlaagte dans le Main-reef. I901 . GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 25 pas suflisamment compte de ce fait, que la distance horizontale entre les deux lignes d’affleurement de la Hospital-hill-slate et du Main-reef doit varier en même temps que l'inclinaison des strates intercalées et aussi suivant que l'épaisseur de ces strates augmente ou diminue. En’ comparant les figures 1 et 2, on voit de suite que, dans le Rand occidental, la distance entre ces deux lignes d’affleurement doit être beaucoup plus grande que dans le Rand central, car les couches du quartzite vert ont un dévelop- pement plus considérable dans les environs de Krugersdorp que dans le voisinage de Johannesburg. La série du Witwatersrand affleure aussi avec des caractères très analogues à celles qu’elle présente au Witwatersrand : ro Dans les environs de Heïdelberg où elle a une direction E.-O. ou N. E.-S. O. et une inclinaison au N. ou au N.-0.; ce sont les mines de Heidelberg ; 20 Tout autour du massif de granite de Vredefort, en formant un demi-cercle ; les couches sont redressées verticalement ou même renversées, avec inclinaison vers le granite ; ce sont les mines d’or du Vaal (PI. I, coupe 1); 3% Dans les environs de Klerksdorp et de Rietkuil ; ce sont les mines d'or de Klerksdorp. Ici la direction des strates est en moyenne N.-S. avec des inelinaisons variables. Dans toutes ces localités on a trouvé des conglomérats aurifères, dont les meilleurs et les plus riches sont regardés, avec plus ou moins de justesse, comme les équivalents de la série du Main-reef dans le Witwatersrand. Si l'on examine sur la carte la direction et l’inclinaison des strates de cette série dans les diverses contrées que nous venons d'indi- quer, et si l’on tient compte de ce fait que l'inclinaison des assises diminue en général à une certaine distance de la ligne d’affleure- ment et atteint finalement à peu près pour la série du Witwaters- rand, considérée dans son ensemble, une valeur moyenne de 25 à 30 degrés, constatée au sud à des profondeurs de plus de 500 mètres, on voit avec évidence que la série du Witwatersrand, dans le sud du Transvaal. forme une cuvette courbée ! ; c'est là le bassin du Witwatersrand. On a pu suivre les limites de cette cuvette au-delà des lignes d’affleurement, grâce à des sondages, forés dans les terrains qui lui sont superposés. C'est ainsi qu'on a pu constater son existence sous la série de la dolomie et sous celle du Black- reef, appartenant toutes les deux au Système du Cap; on l'a 1. G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 30, p. 177. 26 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. retrouvée également sous les couches du Système du Karroo, et même sous les Systèmes du Cap et du Karroo superposés, comme à l’est de Boksburg (district de Heidelberg). La stratigraphie des terrains aurifères du Witwatersrand étant assez compliquée et encore peu connue, il n’est pas étonnant de voir quelques auteurs faire de cette série une formation distincte, en discordance sur la série de Hospital-hill. Mes recherches n’ont pas confirmé cette opinion. Les couches aurifères du Witwatersrand paraissent être partout en concordance avec celles de la série de Hospital-hill et, du reste, les études faites dans diverses régions du Transvaal ont démontré que les conches aurifères de la région de Johannesburg devaient être regardées comme intimement liées aux autres divisions du Système primaire Sud-Africain, dont elles formaient. localement en ce point, la NE < S.0 Magasin de Dynarute Mine d'or de Denny Dalton In ô \ Fig. 3 — Coupe passant par la mine d'or de Denny-Dalton (distriet de Vrijheid). montrant des conglomérats aurifères (Bankets) identiques à ceux du Witwatersrand, intercalés entre les couches de la série de Bar- berton (série de Hospital-hill). — Echelle 1/15.000°. 12, Conglomérat de Dwyka ; f, Schistes ferrugineux, épaisseur 3"1 ; m, Schistes el schistes ardoisiers à muscovite, ép. 18,8 ; d, Diabase, ép. 9,4 ; À, Argi- lites, ép. 62,8: q", Quartzites, ép. 6,3; q"', Couches de Hospital-hill et jaspes, ép. 15,7 ; s. Schistes satinés, ép. 12,50 ; q', Quartzites, ép. 18,10 ; B Banlket et quartzite, ép. 31,4 ; q, Schistes et quartzites. ? partie supérieure. En outre, j'ai trouvé dans le distriet de Vrijheïd !, sur les propriétés Rondspring [135], Dipka [590] et Mahlone [524] et sur la propriété de la Compagnie de Denny-Dalton, de véritables bankets où conglomérats aurifères et d’autres dépôts qu'on ne pour-- rait distinguer de ceux de la série du Witwatersrand (voir fig. 3): ces bankets et ces dépôts étaient intercalés en concordance entre des couches appartenant à la série de Barberton et avaient absolu- ment l'aspect des roches de la série de Hospital-hill, près de Johannesburg. Cependant il faut reconnaître que l’on a rencontré dans les conglomérats, dits d’Elsburg, à la partie supérieure de la série du Witwatersrand, des galets d’une roche que l'on retrouve dans la série de Hospital-hill, ce qui tendrait à prouver que ces der- 1. G.-A,-F, MOLENGRAAFF, 34, p. 37. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 27 niers conglomérats avaient déjà été exposés aux agents de l'érosion et de la dénudation quand se déposèrent les couches d'Elsburg. IL est done évident que la totalité des assises, de la base de la série de Hospital-hill aux schistes d'Elsburg, quoique disposée en concordance apparente, ne peut représenter une série absolument ininterrompue. Il doit exister, tout au moins localement, une discordance entre la série du Witwatersrand entière on seulement sa partie supérieure et celle de Hospital-hil]. RoCHES AMYGDALOIDES DU WITWATERSRAND. — La série du Witwatersrand, que nous regarderons donc comme produite par un fort développement local de la partie supérieure du Système primaire Sud-Africain dans le Sud et le Sud-Ouest du Transvaal, est recouverte par des masses énormes de roches diabasiques d'épanchement. Elles couvrent une très grande étendue, car on les trouve reposant sur la série des grès et des conglomérats aurifères, dans le Klipriviersberg au sud de Johannesburg, dans les environs de Heidelberg, dans la zone aurifère autour du massif de granite de Vredefort et dans les environs de Klerksdorp. Dans le Klipri- viersberg., où l'épaisseur de cette série éruptive dépasse 800 mètres, on constate qu'elle est formée par des diabases amygdaloïdes, qui reposent sur les couches d'Elsburg ; au-dessus viennent des porphy- rites diabasiques auxquelles sont superposées, de nouveau, des dia- bases amygdaloïdes. Cette même succession se retrouve dans la série éruptive qui entoure le massif de Vredefort. Dans le sud- ouest du Transvaal, où les couches du Système primaire Sud-Afri- cain sont presque horizontales, ces diabases amygdaloïdes occu- pent une très grande étendue {. On y trouve des porphyrites quartzifères intercalées entre les roches amygdaloïdes diabasiques et mélaphyriques, ce qui prouve que la région à été soumise alternativement à des éruptions de roches basiques et à des éruptions de roches plus acides. Ces porphyrites quartzifères ? sont de très belles roches, qui avaient déjà attiré l’attention des pre- miers explorateurs comme MM. Hübner * et Cohen. Elles offrent une grande résistance aux agents de dénudation et forment par con- séquent des terrains plus élevés, des groupes de collines où elles affleurent, comme dans les Makwassiebergen (district de Wolma- r. M.E. Cohen, en 1873, avait déjà fait observer avec raison que ces diabases amygdaloïdes du Vaal étaient plus anciennes que les diabases du Système du Karroo. Voir : E. COuEN, 7, p. 210. 2, Voir pour leur description pétrographique : P. DaHms, 9, p. 108, et G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 30, p. 213. 3. A. HüBner, 25, p. 82. 28 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. ransstad), et dans les collines près de Klerksdorp, le long du Schoonspruit. En outre, on trouve développé, dans le Système primaire de ce district, une série importante de tufs diabasiques silicifiés et de schistes cornéens qu'on n’a jamais rencontrés ailleurs. Ces schistes siliceux ont un aspect à peu près semblable aux lits de silex, qui sont très fréquents dans la série des dolomies du Sys- tème du Cap !. On ne peut assurer que les roches amygdaloïdes du Witwaters- rand forment avec les couches du Witwatersrand sous-jacentes une série absolument ininterrompue ; seulement des observations précises ont démontré que, sans aucun doute possible, les érup- tions de ces diabases amygdaloïdes ont eu lieu après la formation de toutes les couches aurifères de la série du Witwatersrand et qu'elles sont antérieures à la période dans laquelle les couches de la série du Black-reef se sont formées. GÎTES MÉTALLIFÈRES DIVERS. — En dehors de l'or, dont les gise- ments principaux viennent d'être mentionnés, on trouve encore quelques autres minerais dans le Système primaire et la nature de leurs gisements se rapproche beaucoup de celle des gîtes aurifères ; on les trouve généralement dans des veines qui ont la même direction et le même pendage que les strates encaissantes. C’est ainsi qu’on a trouvé le cinabre dans un schiste à séricite de la vallée du Lomati, l’'antimonite dans des amphibolites près de Forbes-reef dans le Swazieland, près de Komati au nord de Steynsdorp, et dans la mine de Gravelotte non loin de Leïjds- dorp, où l'or natif est associé à de l’antimonite. De la crocoïse bien . cristallisée se trouve dans une veine de contact associée à un dyke de diabase qui traverse les schistes à staurotide près de Darkton, dans le Swazieland. | Des gisements intéressants de minerais de cuivre ont été décou- verts récemment dans une amphibolite ?, qui forme des bandes étroites dans le granite, sur la propriété Goudhoek [498] dans le sud du district de Vrijheid. Du reste, les mines de quartz aurifère sont souvent relativement riches en minerais de fer et de cuivre comme par exemple sur la propriété Doornhoek [340] (district 1. En 1890, cette similitude m'a induit en erreur, lorsque j'ai cru retrouver la formation de la dolomie dans les falaises des environs de Hartebeesfontein (district de Potchetstrom) qui sont constituées par ces schistes siliceux, Voir : 30, p. 261. 2. Il est bien possible que cette amphibolite ne soit autre chose qu'une diabase fortement altérée et ouralitisée, - 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 20 de Vrijheid), dans les mines d’or de Noord Kaap au nord du massif granitique de Barberton et dans la mine de Sheba Queen, près de Steynsdorp, où est exploité un gîte filonien qui n'est pas encore bien étudié, mais qui semble être un vrai filon de fracture. Rocxes ÉRUPTIVES. — Le terrain primaire et le granite ancien sont recoupés par de nombreux dykes de roches éruptives, pour la plupart des diabases. Dans les terrains stratifiés on trouve souvent des bancs de diabase, souvent d’une grande épaisseur, intercalés en discordance entre les strates de ces terrains. AFFLEUREMENTS ET AGE. — Le terrain primaire affleure dans tout le Lage-veld ou pays bas, c'est-à-dire dans une zone de terrain moins ou peu élevé, qui s'étend entre le Hooge veld, le haut pla- teau du Transvaal, et la frontière de l'est, sauf toutefois une bande de 16 kilomètres de largeur moyenne, le long de cette frontière, bande composée de terrains appartenant au Système du Karroo supérieur et situés du côté oriental de la grande faille de l'est(PL. IT, coupe 2). Dans le district de Vrijheid, le Système primaire est en partie recouvert par des dépôts du Système du Karroo. Dans le district du Zoutpansberg il occupe de vastes étendues, mais la géologie de ce district est encore très peu connue. Il en est de même pour les districts de Wolmaransstad et de Bloemhof, au sud-ouest du Transvaal, où le Système primaire aflleure largement, mais est caché à la vue, en bien des points, par des dépôts du Karroo infé- rieur et par des sédiments superficiels plus récents. Dans toute la partie centrale du Transvaal le Système du Cap est superposé en discordance au Système primaire et ce dernier affleure, seulement là où le premier est entièrement dénudé, dans le grand massif où sont exploitées les mines d'or de Johannesburg, dans les environs de Heidelberg, au sud-ouest de Krugersdorp et dans le beau _ massif de Vredefort (PI. IT, coupe 1). L'âge du Système primaire Sud-Africain dans le Transvaal est inconnu. Cependant dans la Colonie du Cap une formation, sans aucun doute dévonienne, est superposée en discordance aux couches de Malmesbury et aux massifs de granite intrusif qui traversent ces mêmes couches. Or, la série de Malmesbury appar- tient au Système primaire Sud-Africain, ce dernier doit donc être prédévonien, c’est-à-dire silurien ou précambrien. 30 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. II. — SYSTÈME DU CAP Les cinq divisions suivantes, énumérées de haut en bas, forment le Système du Cap : >. Série du grès du Waterberg : 4. Série plutonique du Boschveld ; 3. Série de Prétoria ; Série des dolomies ; Série du Black-reef. = D Dans une très grande partie de l'Afrique australe on trouve disposée en discordance au-dessus du Système primaire une suc- cession très épaisse de couches, que l’on peut diviser en trois étages bien nets. Dans la Colonie du Cap ce sont : 3. Couches des Wittebergen ; >. Couches du Bokkeveld ; 1. Grès de la Montagne de la Table. Dans le Transvaal ce sont : 3. Série de Prétoria ; 2. Série des dolomies ; 1. Série du Black-reef. Les couches du Bokkeveld sont les seules assises antérieures à celles du Karroo, dans lesquelles on ait trouvé des fossiles (orga- nismes marins appartenant au Dévonien inférieur). Les recherches des Services géologiques de la Colonie du Cap et de la République Sud-Africaine dans ces dernières années ont permis de conclure que ces trois étages s'équivalent dans les deux pays. Par suite, la grande transgression, qui vint déposer les grès de la Montagne de la Table en discordance sur les schistes de Mal- mesbury, est bien la même que celle qui fit se former les couches de la série du Black-reef en discordance sur le Système primaire du Transvaal. Néanmoins on est encore loin de pouvoir établir un parallélisme parfait entre les subdivisions du Système du Cap dans la Colonie du Cap et celles de ce même Système dans le Transvaal. Au Transvaal, aucun fossile déterminable n’a été encore trouvé dans ces formations et les analogies pétrographiques ne constituent pas un appui suffisant pour synchroniser exactement ces couches. Certes il existe une ressemblance frappante entre le grès de la Montagne de la Table, dans la Colonie du Cap, et celui de la série du Black-reef, dans la partie orientale du Transvaal; mais si l’on 1907 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 31 compare les autres étages, les couches du Bokkeveld et des Wittebergen d’un côté et les couches des dolomies et de Prétoria de l’autre, on constate que presque toute analogie pétrographique fait défaut. Une solution ne tardera pas à intervenir, tandis qu'augmentent, dans l'Afrique australe, les progrès de la géologie. I. — SÉRIE DU BLACK-REEF La série du Black-reef est formée par des quartzites foncés, des arkoses, des grès, des schistes ardoisiers, des grauwackes et des conglomérats aurifères. Son épaisseur est très variable. Au nord, dans les montagnes de Makapan et de Chunie, elle peut être évaluée à 500 mètres, et à Lijdenburg elle atteint 300 mètres en moyenne; vers le sud son épaisseur descend à environ 6o mètres à Duivelskantoor. Au sud de Prétoria, dans le Witwa- tersrand et à Klerksdorp elle ne dépasse pas 40 mètres, et autour du massif de Vredefort son développement est très faible. Les strates du Black-reef ont été désignées par des noms différents suivant les diverses régions où elles étaient développées, parce qu'on à ignoré assez longtemps que ces divers groupes s’équiva- laient les uns les autres. En 1898 j'ai étendu le nom de Série du Black-reef à toutes ces couches, identiques dans tout le pays !. Jusqu’alors on appliquait en général ce nom, seulement à la partie de cette formation déve- loppée dans Le bassin du Witwatersrand, au sud de Johannesburg. A Klerksdorp on la désignait sous le nom de Série du Bosch- rand, au nord du Witwatersrand elle formait la Série de Kromdraai, tandis que dans la partie orientale de l'État on la nommait srès de Kantoor et grès du Drakensberg ?. STRATIGRAPHIE. — La ligne d’affleurement des gres du Black- reef, quoique souvent assez sinueuse, est généralement très facile à suivre sur le terrain, parce que ces roches forment un escarpement peu élevé et légèrement boisé, contrastant avec les plaines, pres- que partout dépourvues d'arbres. Les nombreuses failles transver- sales qui recoupent cet escarpement, sont décelées par des déni- vellations et des fractures correspondantes. Sur le versant nord du massif de granite, entre Johannesburg et Prétoria, où le terrain a une pente générale vers le nord, l’affleurement des grès du Black- reef, qui reposent sur ce granite, forme un mur naturel que les 1. Voir G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 32, P. 124. 2, J.-G. BousquEr, 3. 39 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. habitants du pays ont utilisé pour la construction de réservoirs d'eau, en choisissant les fentes naturelles qui l’interrompent, résultat de diaclases ou de failles, pour établir les écluses leur per- mettant de dispenser ainsi méthodiquement, les eaux nécessaires à l'irrigation des terres. N.N.0. Rooipan S.S.E. (283) Gatsrand Fig 4. — Coupe schématique du bord du bassin du Witwatersrand à Won- derfontein, au sud-ouest de Krugersdorp (d’après D. Draper, Trans. Geol. Soc. Soulh. Africa, II, part IV, 1897). 6, Série de Prétoria ou du Magaliesberg; 5, Série des dolomies ; 4. Série du Black-reef ; 2, Granite ancien ; 16, Grès et conglomérats du Witwaters- rand ; 14, Couches de Barberton ou de Hospital-Hill. La série du Black-reef, s'étant déposée en discordance sur le Système primaire, repose. suivant les points considérés, sur des roches très différentes les unes des autres, quoiqu'appartenant à ce Système. C'est ainsi qu'on trouve le Black-reef au sud du Klipriviersberg reposant sur les diabases amygdaloïdes du Witwa- tersrand ; à Klerksdorp, il est contigu à des assises différentes appartenant à cette même série, alors que, dans les environs de Krugersdorp, il est superposé aux étages aurifères de la région. Au nord-ouest de Krugersdorp, on voit la série du Black-reef reposer sur la série de Hospital-hill, les strates des deux syste- mes étant dans des directions perpendiculaires l’une à l’autre. Plus au nord dans les mines de Kromdraai, le Black-reef est sup- porté en discordance par des conglomérats schisteux, qui consti- tuent dans cette partie du Système primaire un faciès encore peu étudié. Encore plus loin, au sud de Prétoria, on voit la série du Black-reef reposer directement sur le granite. Dans l’escarpe- ment oriental du haut plateau du Transvaal aussi bien que dans les montagnes de Makapan et de Chunie, on trouve tantôt le granite, tantôt des schistes cristallophylliens ou des schistes de la série de Barberton en discordance évidente au-dessous de la série du Black-reef (voir fig. 10 et pl. IT). GÎrES AURIFÈRES. — Tout à fait à la base ou près de la base de cette série existent un ou plusieurs bancs de conglomérats plus ou moins aurifères. Le terme Black-reef a été employé pour I901I GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 33 la première fois par les mineurs du Rand pour désigner ce con- glomérat aurifère, qui se trouvait être à son affleurement d’une couleur plus foncée que les autres conglomérats déjà rencontrés au dessous des diabases amygdaloïdes du Klipriviersberg. Plus tard on a constaté que ce conglomérat se trouve presque constam- ment à la base de la même série, mais qu'il n’est pas toujours aurifère. Sa caractéristique est de renfermer des galets d’un plus grand nombre de roches différentes que les conglomérats aurifères de la série du Witwatersrand. Le Black-reef a été exploité au sud du Klipriviersberg. dans le Boschrand près de Klerksdorp, et à Duivels-Kantoor, dans le district de Lijdenburg. Cette exploitation n'a pas donné de bons résultats, surtout à cause de la répartition inégale de l'or dans le conglomérat. Des parties (shoots — chemi- nées) riches ou très riches alternent avec des parties stériles de grande étendue. La direction et l’inclinaison des strates du Black-reef au sud de Johannesburg se trouvent être accidentellement presque les mêmes que celles de la nappe de diabase amygdaloïde et des grès d'Elsburg sous-jacents; cette disposition a retardé longtemps la détermination de la position exacte du Black-reef et de tout le Système du Cap dans les parties en relation avec les terrains aurifères du Witwatersrand. C’est une des causes qui ont porté les géologues à considérer les grès aurifères du Witwatersrand comme la partie inférieure du Système du Cap, en les mettant en parallèle avec le grès de la Montagne de la Table 1. Bien au contraire, la série aurifère du Witwatersrand fait partie du Système primaire et est beaucoup plus ancienne que le Système du Cap: la concordance apparente du Black-reef sur la série du Witwatersrand auprès du Klipriviers est purement acci- dentelle et locale ; d’ailleurs dans les environs de Krugersdorp on voit les grès et les conglomérats du Witwatersrand disparaître sous les grès du Black-reef, avec lesquels ils sont, en ce point, en discordance évidente. M. Hatch, à qui nous devons la meilleure carte géologique ? 1. En 1890 j'ai fait la même erreur en réunissant dans un seul étage (étage inf. du Système du Cap) la série du Witwatersrand aux diabases amygda- loïdes et à la série du Black-reef, étage que je nommais alors série du Boschrand, 30, p. 209. Mes idées sur la stratigraphie du Transvaal ont été considérablement modifiées depuis la publication des résultats que j'avais obtenus en 1890 après un trop court séjour dans le pays. 2. F.-H. Harcu, 22. Une curieuse erreur existe sur cette carte : tout autour du massif de Vredefort l'affleurement de la série du Black-reef a été donné entre la dolomie et les couches du Gatsrand, tandis qu’il devrait être placé 29 Juin 1901. — T. rer, Bull. Soc. Géol. Fr. — 3 34 | G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. publiée sur la partie sud du Transvaal, donne assez exactement la position du Black-reef dans le bassin du Witwatersrand ; mais il est très curieux qu'il ignore absolument la présence de cette même série du Black-reef au-dessous de la dolomie au nord de Krugers- dorp et plus loin, sur le versant nord du massif granitique, entre Johannesburg et Prétoria, où pourtant la série du Black-reef affleure entre la dolomie qui la couronne et le granite sous-jacent. Les conglomérats sont, en ces points, faiblement développés à la base de la série et ne contiennent plus que des traces d’or ; si bien que M. Hatch ignore même leur existence. IL considère le Black-reef comme un dépôt spécial de remaniement, limité au bassin aurifère du Witwatersrand. Je crois cette opinion erronée; il me paraît clair que dans cette série du Black-reef, qui provient naturelle- ment du remaniement des débris des formations plus anciennes, il pouvait à la base se former des conglomérats riches en or, comme au Klipriviersberg, puisque les couches aurifères du Wit- watersrand affleuraient à une petite distance, tandis que, en même temps, sur le massif de granite, au nord de Johannesburg, des dépôts se constituaient, qui étaient presque dépourvus d’or, mais où les arkoses étaient bien développées. N. Krokodi rio. LA Fig. 5. — Coupe près de la mine de Kromdraai (d’après les documents fournis par M. Dorffel, ingénieur-conseil de la C*). — Echelle des longueurs 1/7.500° environ ; échelle des hauteurs 1/6.000". 5. Dolomies [Gr, Galena-reef; Tr, Tweefontein-reef |. 4 K. Schistes ardoisiers dits Xromdraai-slales, 13 à 16 m. q. Quartzite supérieur avec bandes d’argilite interca- 4. Série du lées, 5 à 7 mètres. _Black-reef, 4Kr. Filon-couche aurifère de quartz à arsénopyrite, “aotnesen ? dit Kromdaai-reef, o m. 50 à 1 mètre. 19 à:20° vers Argilite, o m. 50. le nord. qg. Quartzite inférieur, 6 mètres. 4c. Grès et conglomérats aurifères, 1 mètre. 1c. Conglomérat schisteux du Système primaire, inclinaison 35° vers lO.N.O. entre la dolomie et les diabases amygdaloïdes. Cette erreur, qui se-retrouve dans les coupes qui accompagnent la carte, donne une fausse idée de la stratigraphie de cette région ; les failles compliquées, dessinées dans ces coupes, ne réussissent pas à rendre la tectonique compréhensible. igot GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 35 Dans le district de Lijdenburg il existe dans les grès de la série du Black-reef, auxquels on a donné là le nom local de grès du Drakensberg, un filon-couche aurifère de quartz et de minerai de fer. Ce filon qui est intercalé entre deux bancs de grès est exploité en plusieurs localités, par exemple sur la propriété Erasmushoop, ou il a reçu le nom de Sherwell-reef. ._ À Kromdraai, au nord de Krugersdorp, où on peut étudier la série du Black-reef dans les exploitations minières, on trouve un filon-couche de quartz aurifère associé à un lit de schistes ardoi- siers et intercalé entre deux bancs de quartzites: la succession des strates est donnée dans la légende de la figure 5. L'or dans ce filon-couche est associé à l’arsénopyrite et à la pyrite ; il a été exploité avec succès. Les schistes ardoisiers, aux- quels on a donné le nom de Xromdraai-slates, forment un horizon constant d’une très grande étendue. Dans la partie inférieure de la série de la dolomie, qui repose en concordance sur la série du Black-reef, se trouvent intercalés près de sa base des schistes ardoisiers, qui ont beaucoup d’analogie avec les Kromdraai-slates, d’où il résulte que la limite entre la dolomie et la série du Black-reef sous-jacente est peu tranchée, et doit être placée à la base du banc de dolomie le plus inférieur de la série. 2. — SÉRIE DE LA DOLOMIE La série de la dolomie est constituée par des assises de dolomie et de calcaire dolomitique bleu foncé ou noirâtre de 10 centimètres à 3 mètres d'épaisseur alternant avec des bandes minces de silex. Parfois, comme je l'ai observé près de Vereeniging, on trouve les silex en rognons, disposés selon des sortes de plans de stratification comme dans la craie d'Europe. Les bandes de silex offrent plus de résistance aux forces dénudatrices et sont aussi moins solubles dans l’eau que la dolomie et par conséquent elles forment des crêtes sallantes et donnent un aspect comme strié aux roches de cette formation, vues de quelque distance. Dans la partie inférieure les bancs de dolomie sont beaucoup plus épais que dans la partie supérieure, où les bandes de silex tendent à prédominer. Il en résulte que les assises inférieures de la dolomie sont souvent pro- fondément érodées, et cachées par des dépots plus récents, tandis 1. J.-G. BousQuET, 3, p. 38, et Nico Browx. The succession of the rocks in the Pilgrims’ Rest district. Trans. of the geol. Society of South Africa, I, p- 3. Johannesburg, 1893. 36 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. que les couches supérieures affleurent, en formant des escarpe- ments caractéristiques. Dans les terrains où ces couches supé- rieures riches en silex affleurent, on trouve le sol tellement cou- vert de leurs débris qu'un examen très minutieux peut seul révéler la dolomie, comme comprimée entre les bandes de silex saillants. Ce phénomène explique comment plusieurs observateurs ont pu exagérer outre mesure le rôle des silex de la dolomie !. Cette différence entre les zones supérieures et les zones inférieures se manifeste surtout dans les points où la formation a une inclinaison moyenne, il est compréhensible qu'aussitôt qu'elle se trouve fortement redressée ou sensiblement horizontale, ces différences puissent disparaître. _La position plus ou moins inclinée des couches de la dolomie a une grande influence sur son pouvoir de résistance contre les agents dénudateurs. Si elle se trouve dans une position horizontale ou très peu inclinée, quoiqu'elle ne soit pas dure et relativement très soluble, elle se comporte dans la topographie comme un élément assez réfractaire, parce que les couches de silex offrent l’une après l’autre une forte résistance à l’action de l’eau et du vent. Bien différents sont les résultats des actions extérieures lorsque les couches sont fortement inclinées ou verticales; alors les couches de silex se brisent, dès que les lits de dolomie intercalés sont corrodés jusqu'à une certaine profondeur, et la dénudation fait un progrès rapide. Par conséquent la dolomie constitue un élément très reconnaissable dans la topographie partout où sa position est horizontale, mais que l’on doit chercher seulement dans les vallées, où elle est souvent cachée par des dépôts super- ficiels plus ou moins marécageux, pou où ses couches sont fortement inclinées. La surface de la dolomie exposée à l’air libre est rugueuse et sillonnée de rides, aussi les boers lui ont-ils donné le nom carac- téristique d'Olifants-klip, parce que sa surface usée a beaucoup de ressemblance avec la peau d’un éléphant. Le paysage dans les terrains où domine la dolomie ressemble beaucoup à celui du Karst autrichien. Les grottes, les gouffres et les abîmes y sont très nombreux. Ces grottes sont souvent en partie comblées par du calcaire stalagmitique ? et des dépôts d’un tuf ou travertin cal- 1. W.-H. PENNING a donné à cette formation le nom de chalcedolite, 40, p. 576, et 41, p. 456. 2. Beaucoup de ces grottes sont très belles et dignes d’être visitées. L’une d'elles, découverte en 1897, à Sterkfontein [68], au nord de Krugersdorp, était une splendide curiosité naturelle ; des draperies stalagmitiques tapissaient 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 37 caire souvent assez riche en débris osseux. Parfois on trouve de vraies brèches à ossements dans ces cavernes. L'étude de ces ossements qui fournira sans doute des résultats intéressants n'a pas encore été faite. Jusqu'à présent on y a rencontré exclusive- ment les restes d’une faune pleistocène. Î Souvent les ruisseaux se perdent dans les fissures du sol et forment des cours d’eau souterrains parcourant des séries de grottes irrégulières, où la rivière s'épanche parfois en lacs souter- rains. C’est ainsi que la Mooiï-Rivier se perd près de Wonder- fontein et qu'en aval de ce point la majeure partie de ses eaux suit un cours souterrain; 42 kilomètres plus loin elle quitte la dolomie en formant une source célèbre appelée Gerhardminne- bron, dont le débit est sensiblement supérieur à celui de la rivière au moment de sa perte, grâce aux affluents cachés. Cette dolomie a une valeur économique considérable pour le pays, parce que l’eau des grandes pluies de la saison humide, de décembre à mars, s'infiltre rapidement dans la roche fracturée et caverneuse, qui forme ainsi un réseau de réservoirs d'une immense capacité. Cette réserve d’eau accumulée réapparaît à la surface par un grand nombre de fortes sources, qui diminuent à peine de débit, durant la saison sèche. C'est à ces sources remarquablement constantes que presque toutes les rivières pérennes de la moitié occidentale du Transvaal doivent leur existence, telles sont le Hartsrivier, le Malmani, le Malopo, le Schoonspruit, le Mooirivier, le Kliprivier, le Krokodilrivier, l'Aapiesrivier, le Pienaarsrivier, le Marico, etc. Quant à la position de la série des dolomies on estime, en général, aujourd'hui, qu’elle est superposée absolument en concordance à la série du Black-reef, ce qui est confirmé partout par les exploi- tations minières, tantôt dans la série du Black-reef, tantôt dans les niveaux inférieurs de la série dolomitique (fig. 5 et pl. IT). En général, la dolomie a un développement très uniforme et elle est très facile à reconnaître sur le terrain. Elle s'étend sur une très grande partie du Transvaal et bien au delà des frontières de ce pays ; ainsi elle atteint un développement énorme dans le Campbellrand (Griqualand-west) et dans le Han-Ami-Plateau (pays de Namaqua), où elle a été reconnue par M. Schenck. ses parois, les stalactites étaient entièrement recouverts de superbes cristalli- sations d’aragonite. Les nombreux visiteurs, venus de Johannesburg, ont détruit en quelques semaines cette merveille. La grotte étant une propriété privée, le Gouvernement ra malheureusement pas pu intervenir, 38 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. GÎTES MÉTALLIFÈRES. — La formation dolomitique renferme partout un assez grand nombre de filons-couches de quartz miné- ralisé et près de sa base et de son sommet quelques bandes de schistes intercalés. Dans la partie centrale du Transvaal on trouve (fig. 5), près de la base de la dolomie, un complexe de schistes et d’ardoises, accompagné par un filon-couche à pyrite, manganèse et or. Ces schistes ont reçu le nom de Tweefontein-slates et le filon celui de Tweefontein-reef. Cette zone aurifère est très persis- tante et je l’ai retrouvée presque partout où la base de la dolomie affleure. Sa forte teneur en manganèse est très caractéristique et souvent l'étage est représenté par un banc épais d'une terre manganésifère et aurifère avec des veinules irrégulières de quartz. Cette zone est, jusqu'à présent, très peu exploitée, cependant on doit y compter les dépôts aurifères intéressants de Barrett's Berlin! (pl. II, coupes 2 et 3) et de Spitskop, sur l’escarpement oriental du haut plateau dans le district de Lijdenburg. La zone aurifère a ici un développement plus grand et sa composition est considérablement modifiée par l'influence d’éruptions diabasiques ; cette diabase, profondément décomposée, forme une espèce de latérite, qui se confond avec la terre manganésifère mélangée des débris des assises supérieures de la dolomie, que la dénudation a fait entièrement disparaître. Les gisements de Barrett's Berlin sont exploités à ciel ouvert. Les grès du Black-reef, qui sont sous-jacents à ces dépôts auri- fères, affleurent partiellement sur le magnifique escarpement de Duivels-Kantoor. Sur la surface plus ou moins rugueuse du grès on exploite des alluvions de petite étendue, dans lesquelles on a trouvé pendant plus d’une dizaine d'années de nombreuses pépites d'or. La grosse pépite de 52 onces ?, que l’on a pu voir à l'Expo- sition universelle de Paris en 1900, au pavillon de la République Sud-Africaine, provient de ce gisement. Elle a été trouvée en 1898 sur la grande route et porte encore les marques des roues des voi- tures qui l’ont rencontrée. L'or de ces champs aurifères paraît provenir de la dolomie, aujourd’hui disparue grâce à l'érosion, et le gisement du précieux métal en représente les derniers résidus, dans lesquels l'or est venu se concentrer. Du sud de Prétoria au district de Marico à l’ouest, on trouve dans la dolomie inférieure une seconde zone minéralisée, qui est très souvent interrompue, C’est un filon-couche plombifère aecom- pagné d’une bande de schistes; il est situé dans la formation dolo- 1. Voir G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 32, p. 134. 2. L’once troy anglaise vaut 31 grammes, 103496. I9OI GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE . 39 mitique à une soixantaine de mètres plus haut que le Tweefon- tein-reef. En général, comme à Kromdraai, c'est un filon avec des épontes nettes, la gangue est formée de quartz avec un peu de fluorine: on y trouve seulement des minerais de plomb, galène, cérusite et pyromorphite. Mais il n'est pas rare que ce filon s’élargisse en une série de poches; dans ce cas, la minérali- sation est plus complexe, on a trouvé dans ces poches les miné- raux suivants : galène, blende, smithsonite (zinkspath), calamine (kieselzinkerz), pyrite, malachite, cinabre, tale, calcite et fluo- rine !. Tout autour de ces gîtes minéraux la dolomie est impré- gnée de nombreux cristaux de trémolite ou de talc; ce dernier minéral doit, ici, être regardé comme un produit de décompo- sition de la trémolite. Fig. 6. — Formes d’érosions dans les grès de la série du Black-reef à Duivels-Kantoor. Dans la partie orientale du Transvaal (district de Lijdenburg), les filons-couches minéralisés, notamment à la base et près du sommet de la formation, sont beaucoup plus nombreux. Ils sont pour la plupart aurifères et sont largement exploités *. Outre l'or 1. En 1893 j'ai décrit un de ces gisements dans la dolomie du district de Marico, voir 29, p. 190. Je pense maintenant avoir commis une erreur en représentant (page 152) les couches de la dolomie comme reposant en discor- dance sur des schistes, qui affleuraient dans le voisinage avec une faible inclinaison au nord. Ces schistes sont très probablement des schistes inter- calés en concordance dans la dolomie. 2. Pour des détails sur ces gisements voir : J.-G. Bousquer, 3, p. 37, et A. BORDEAUX, 2, p. 300 et suivantes. 40 G-A.“F: MOLENGRAAFF 21 Janv. et le quartz on trouve dans ces filons des minerais de fer, de cuivre et de manganèse. Dans le district de Marico on exploite des vrais filons de quartz aurifères. Ces filons ont été rencontrés dans les environs des sources de la rivière de Malmani et leurs exploitations sont les champs d’or du Malmani. Il s'agit ici de filons verticaux avec une direction moyenne N.N.E.-S.S.O. dans la dolomie. Ce quartz contient beaucoup d’or visible et quelques-uns de ces filons, comme le Mitchell-reef et le Pioneer-reef ont procuré de superbes échantillons. Outre l'or et la pyrite altérée ou limonite, on y trouve de petites quantités de minerais de cuivre : malachite, azurite, bornite ! (érubescite) et chalcopyrite. L'exploitation de ces filons n'a pas donné jusqu'à présent des résultats bien satisfaisants, parce que leur teneur en or est trop variable et qu'il s'est élevé des difficultés techniques dues à la présence des masses énormes d’eau fournies par la dolomie encaissante fracturée. Dans le district de Lijdenburg on peut distinguer, dans la dolomie, un groupe supérieur et un groupe inférieur de filons aurifères. Le groupe inférieur comprend des filons du type de Tweefontein ; ces filons sont riches en manganèse. Les mines de Spitskop et de Barretts Berlin mentionnées plus haut, appar- tiennent à ce groupe; cet horizon est connu des mineurs du dis- trict sous le nom de Digger's leaders (PI. IT, coupe 3). La plupart des filons exploités dans ce district font partie du groupe supérieur ; ils sont caractérisés par une certaine teneur en minerais de cuivre qui font entièrement défaut dans les filons du groupe inférieur. Dans le district de Lijdenburg la série des dolomies est bien plus qu'ailleurs recoupée par des dykes de diabase; des bancs intrusifs intercalés forment souvent le toit ou le mur des filons-couches auri- fères. On ne pourrait nier qu'il existe une certaine relation entre ces roches éruptives et la répartition de l'or dans cette formation ?. ÉPAISSEUR ET AGE. — L’épaisseur de la série de la dolomie peut être évaluée à 800 mètres dans le bassin du Witwatersrand, à 1500 aux environs de Prétoria, à 500 mètres près de Godwan, à 800 mètres dans les environs de Lijdenburg et à 1200 mètres dans les montagnes de Makapan. 1. Pour des détails sur ces gisements voir : G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 30, p- 254, et M. FRANCKE, 16. 2. J.-G. BOUSQUET, 3, p. 39 et p. 40-44. Consulter pour la stratigraphie du Système du Cap la coupe de M. A. STARK, communiquée par M. Nicoc-BRowWN, reproduite dans la planche II [coupe 3] (M. Nicor-Brown The succession of the rocks in the Pilgrim’s Rest District. Trans. of the geol. Society of South Africa, IL, p. 1. Johannesburg, 1897). I90I GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 4x Jusqu'à présent on ne peut, d'une manière directe, fixer l'age de la série de la dolomie. IL est vrai que M. Cohen! y a men- tionné des banes siliceux dont les surfaces corrodées portaient des empreintes de tiges de Crinoïdes et de Brachiopodes ressem- blant à des espèces des genres Orthis et Chonetes. ce qui les ferait attribuer au Palaéozoïque. Mais ces indications sont très vagues et, jusqu'à présent. elles n'ont pas été confirmées par des observations nouvelles. Nous avons déjà vu plus haut que limite inférieure de la série de la dolomie n'est pas bien marquée, mais le doute est encore bien plus grand pour la limite supérieure. Le fait que près de son sommet on trouve quelques couches d'argilites intercalées dans la dolomie et plus haut quelques bandes de silex intercalées dans des schistes ardoisiers et dans des argilites, qu'on ne pourrait distin- guer de ceux de la série suivante, rend déjà plus ou moins arbitraire le niveau où doit se trouver la limite entre la série de la dolomie et les couches de Prétoria, qui lui sont superposées en concordance. Mais cette difficulté est encore exagérée : les nombreuses grottes et cavernes de la dolomie ont produit des affaissements si fréquents. dans la partie supérieure de la dolomie, que généralement les cou- ches sont très disloquées dans la zone de contact entre la dolomie et les couches de Prétoria, offrant une surface ondulée irrégulière. RocnEs ÉRUPTIVES. — On peut trouver partout des dykes de diabase dans la dolomie, mais cependant ils y sont plutôt rares. Des bandes intrusives intercalées sont fréquentes dans le district de Lijdenburg mais semblent être rares ailleurs. Près de Ottoshoop un important dyke d'un gabbro à quartz et amphibole ? assez inté- ressant coupe la série dolomitique ; la belle roche de Wonderfon- tein qui est employée, à Johannesburg, comme pierre de cons- truction, vient d'une syénitporphyre à anorthose, qui forme égale- ment un dyke énorme au travers de la dolomie. 3. — SÉRIE DE PRÉTORIA * Les couches de Prétoria sont formées par une suecession souvent répétée de schistes ardoisiers, d'argilites, de quartzites, et de bancs de diabase intercalés. Les affleurements des quartzites, qui résis- 1. Communiqué par M. P. Dans, 9, p. 118. >. Pour la description pétrographique de cette roche, voir : G.-A.-F. MOLEN- GRAAFF, 30, p. 221. 3. En 1890 je considérais à tort cette série comme faisant partie du Système primaire, 30, p. 205. 42 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. tent aux forces dénudatrices, forment sur le sol des rides ou des escarpements, qu'on peut suivre sur des distances énormes. Cha- cun de ces quartzites, possédant des caractères assez constants, constitue une couche de repère d’une très grande valeur pour la stratigraphie spéciale de cette série. Choisissons pour exemple le terrain entre Prétoria et le fleuve du Krokodil, où la série de Prétoria est largement développée. Ce terrain est formé de trois rangées de collines de direction ouest-est, séparées l’une de l'autre par de larges vallées. La plus septentrionale forme le Magaliesberg, rangée imposante, s’élevant à 200 mètres au-dessus des plaines environnantes ; on peut le suivre comme un mur gigantesque sur une distance de quelques centaines de kilomè- tres, sans que sa crête cesse d’être à la même altitude (1600 m. en moyenne) ou que son escarpement méridional presque vertical devienne moins menaçant. La seconde rangée est celle de Das- poort !; la troisième, près de Prétoria, porte le nom de Timeball- range. Les crêtes de ces collines ne sont autres que les affleure- ments des bancs de quartzite, tandis qu’on doit chercher dans les vallées les argilites intercalées. L'inclinaison des strates de la série de Prétoria étant en moyenne de 25 à /{o° au nord, la plongée de toutes ces collines vers le nord correspond à l’angle de l'inclinaison des strates et par conséquent est faible, tandis que le versant nord est très escarpé. De haut en bas on peut distinguer dans cette série aux environs de Prétoria les assises suivantes : Grès et argilites arénacés au nord du Magaliesberg. 23. Grès grossier. 22 Quartzites du Magaliesberg, formant un groupe quartzitique d'en- viron 175 mètres d'épaisseur, divisé en deux par une bande d’argi- lite arénacée. Les strates 23 et 22 forment le sol et la crête du versant nord du Magaliesberg. 21. Argilite. ._20. Diabase. 19. Roches cornéennes du versant sud du Magaliesberg. 18. Succession répétée d’argilites et de bancs de diabase intercalés. 17. Quartzite de Daspoort. Ce quartzite forme la crête et le sol du ver- sant nord des collines de la rangée de Daspoort. 16. Diabase intrusive à gros grains. 15. Schiste ardoiïisier en couches épaisses, employé comme pierre de construction dans les fondations des édifices à Prétoria. Ces schistes ardoisiers sont exploités près de Daspoort, sur la rive droite de l’Aapiesrivier, au nord de Prétoria, et sur le versant sud du Meyntjes-Kop. 1. Sur la carte de JEPPE cette rangée est dénommée Witwatersberg. IOOI GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 43 14. Arpgilite. 13. Grès ferrugineux brun-violet. 12. Argilite et diabase. 11. Diabase amygdaloiïde. 10. Argilites et nombreux bancs de diabase intrusive intercalés alterna- tivement. On trouve aussi quelques bancs minces de roches quartzitiques intercalés dans la partie inférieure de ce groupe. 9. Quartzite blanc. 8. Grès noir à magnétite ; le ciment de magnétite est très riche et son volume est bien supérieur à celui des grains de quartz. Cette roche est un bon minerai de fer. À Les assises 9 et 8 forment le sol et la crête du versant nord des collines de la rangée de Timeball ; les affleurements noirs de la roche à magnétite contrastent vivement, même vus d’une grande distance, avec ceux du quartzite blanc. 7. Quartzite et grès à stratification transversale très marquée. 6. Grès fortement chargé de magnétite, dont la surface, corrodée par les agents atmosphériques, offre des figures bizarres. 5. Argilite. 4. Quartzite. 3. Argilite. 2. Schiste ardoisier, donnant les belles dalles utilisées à Prétoria. Ces schistes ardoisiers sont exploités dans de vastes carrières sur le versant sud de la colline, couronnée par le fort de Klapperkop. 1. Argilite jaunâtre, avec une ou deux bandes de silex intercalés çà et là ; on peut regarder ces assises comme les strates de passage à la série des dolomies sous-jacente. | Banc supérieur de dolomie et de silex de la série des Dolomies. On peut évaluer l'épaisseur de ces couches comme suit : 20. Vallée au nord des montagnes du Magalies, 100 mètres. 19. Montagnes du Magalies, 400 mètres. 18. Vallée du Magalies, 800 mètres. 15-17. Rangée de Daspoort, 250 mètres. 10-14. Vallée à l’ouest de Prétoria, 650 mètres. 1-9. Rangée du Timeball, 400 mètres. La composition des couches de Prétoria est constante dans la partie centrale et orientale du pays. Quelques-uns des étages de repères énumérés ci-dessus sont encore reconnaissables avec à peu près les mêmes caractères, dans le distriet de Lijdenburg, c'est-à-dire à une distance de plus de 200 kilomètres de Prétoria. C'est ainsi qu'on doit considérer l’épais banc de quartzite à travers lequel on a percé le tunnel du chemin de fer, entre les stations de Waterval-Boven et de Waterval-Onder !, comme l'équivalent du quartzite de Daspoort et le banc de grès et de quartzite à 4 magnétite, qui est traversé en tranchées par le chemin de fer à 1. Résidence du Président Kruger, après la conquête de Prétoria. TA G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. Nooïtgedacht! comme l'équivalent du grès à magnétite de Tuneball- hill. Ces bancs de quartzites se distinguent très bien dans la topographie, en formant des kransen très marqués le long de tout l’escarpement oriental du haut plateau dans le district de Lijden- Fig. 9. — Les Kransen de la série de Prétoria entre Waterval-Boven et Waterval-Onder. 9 burg *. Dans le bassin du Witwatersrand, où les couches de Prétoria sont représentées par un complexe, qui à reçu le nom local de Couches du Gatsrand, leur développement offre aussi beaucoup d'analogie ; seulement les grès et les diabases y jouent un plus grand rôle que dans les environs de Prétoria. Jusqu'à présent on a rencontré seulement dans quelques localités des marnes et des calcaires intercalés dans les argilites de la moitié supérieure de la série de Prétoria : par exemple à Van Lenneps- kopje à une petite distance du village de Waterval-Boven ?. Les recherches de fossiles, dans ces couches, n’ont pas été couronnées de succès. La présence, dans les argilites de la partie supérieure de la série près de Belfast, d'un banc de calcaire un peu argileux est intéressante à noter; ce calcaire est d'un grain très fin et homo- gène, 1l pourrait, comme on en a fait l'expérience à Johannesburg, être employé comme pierre lithographique. Grâce à sa couleur 1. Camp des prisonniers anglais après la prise de Prétoria. 2. Voir 32, fig. 5, et 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 4» et à son aspect tacheté, il pourrait former aussi une très belle pierre ornementale, un marbre pour constructions. A l'ouest du méridien de Prétoria le caractère des schistes de Prétoria, et particulièrement celui des argilites, commence à se modifier, les derniers devenant de plus en plus ferrugineux. À l’ouest de Buiskop les couches de Prétoria sont principalement représentées par des schistes, qui ont une certaine ressemblance avec les schistes ferrugineux de la série de Hospital-hill. Dans le district de Marico, les argilites de cette même série sont plus dures et plus ferrugineuses que dans les environs de Prétoria. Au delà de la frontière, dans le Griqualand-west, les couches de Prétoria, reposant sur les dolomies du Campbellrand, sont très dures et ferrugineuses, et en grande partie formées par des jaspes !, entre les assises minces desquels on trouve des bandes d’une amphibole rare appelée crocidolite. GÎTES MÉTALLIFÈRES. — Il résulte des recherches effectuées jusqu'à présent que les couches de Prétoria ne sont pas très riches en gîtes métallifères. Dans la partie inférieure on trouve des filons-couches de quartz aurifère, qui offrent une très grande analogie avec ceux qu'on trouve dans la dolomie. On a commencé l'exploitation de ces veines à Koesterfontein [108] et à Blauwbank [104], à l’ouest de Krugersdorp, mais sans obtenir de résultats favorables. On doit placer dans un niveau un peu supérieur les gisements de Scheer- poort [150], à une trentaine de kilomètres au nord de Krugersdorp, dont on a essayé l'exploitation plusieurs fois sans succès. On à été plus heureux dans le district de Lijdenburg, où l’on à exploité avec profit le filon-couche de quartz aurifère, nommé Bewitts-reef, situé près de la base de la série de Prétoria, aux environs de Frankfort -. On a trouvé dans les parties supérieures de la série de Prétoria des filons cuprifères et plombifères dans les districts de Prétoria, Rustenburg et Lijdenburg. Les minerais de ces filons renferment une certaine proportion d'argent, aussi leurs exploitations sont- elles indiquées comme mines d'argent. TECTONIQUE ET ROGHES ÉRUPIIVES. — Il existe des relations évidentes entre la répartition de ces filons et Les accidents tecto- niques liés aux phénomènes d'intrusion et d’éruption des roches 1. G.-W. Srow, 49, p. 581. 2. J.-G. BousQUET, 3, p. 44. 46 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. de la série plutonienne du Boschveld; en analysant cette der- nière, nous étudierons en détail ces gîtes métallifères. Les couches de Prétoria sont traversées par un grand nombre de dykes de diabase et de nombreux banes de cette roche y sont intercalés. On peut étudier facilement les relations entre ces dykes et les bancs ou les dépôts stratifiés de la série de Prétoria dans la remarquable tranchée du chemin de fer entre Belfast et Godwan. Pour toute la série, j'ai compté dans cette coupe 56 bancs de diabase d’une épaisseur de plus de 3 mètres et un très grand nombre d'une moindre épaisseur. On y trouve quelques bancs d’une diabase amygdaloïde, qui peuvent être contemporains de la formation de la série, mais les entre-bancs Fig. 8. — Dyke de diabase formant un banc intrusif, au kilomètre 219 du chemin de fer de Komatipoort à Prétoria. — Echelle 1/1000°. s, Argilite de la série de Prétoria ; s, Argilite durcie ; à, Diabase. de diabase sont intrusifs, ce qui est prouvé par la transformation métamorphique en roche cornéenne observable très souvent dans les argilites, au-dessus aussi bien qu'au-dessous des bancs de dia- base. On voit par exemple dans la coupe de la fig. 8 des dykes de diabase qui s’épanchent en formant des bancs intrusifs. Le méta- morphisme de con- Meynies Kop tact peut être étudié avec facilité tout près de Prétoria à Meyntjeskop, sur un Fig. 9. — Diabase intrusive dans les couches de la banc épais d'une série de Prétoria, près de Prétoria. diabase à gros grains q;, Quartzite de Daspoort, épaisseur 17 mètres ; intercalé entre le dy Quartzite altéré chargé d’épidote et d’acti- quartzite de Das- note ; 5, Diabase gabbroïque à gros grains, ép. poort au-dessus et 16 m.; S, Argilite ques ; s, Schiste ardoisier Te argilite des en couches épaisses, ép. 35 m. sous. Au contact on trouve l’argilite durcie et beaucoup moins fissile qu'un peu plus bas où elle n'est pas altérée, tandis que le quartzite, durci égale- ment, est, dans le voisinage du contact avec la diabase, chargé de petits cristaux d’épidote et d’actinote en gerbes (fig. 9). 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 47 Les couches du Système du Cap, disposées comme nous l'avons déjà dit en discordance manifeste sur celles du Système primaire !, ne sont généralement pas redressées fortement, l'angle de l’incli- naison ne dépasse guère, dans tout le district de Lijdenburg, 7 à 15°. Mais il y a, pourtant, d'assez nombreuses exceptions. Tout autour du massif de granite de Vredefort, le Système du Cap a subi des mouvements de même ordre que le Système primaire sous-jacent ; la position verticale en est résultée pour les strates de la série du Black-reef et de la dolomie (pl. IT, coupe 1); l'angle de redressement va en diminuant graduellement dans les couches superposées du Gatsrand, qui appartiennent à la série de Prétoria. Les mêmes constatations peuvent être faites dans les montagnes de Makapan (fig. ro); là l’inclinaison moyenne des strates dans le Système du Cap en discordance évidente sur le Système pri- maire ne dépasse pas 20° partout où la direction des strates est nord-sud, mais ces mêmes couches sont redressées verticalement partout où la direction des strates est de l’ouest à l’est. Nos con- naissances sur la structure géologique du Transvaal ne sont encore suflisantes que sur des points trop éloignés les uns des autres pour pouvoir expliquer les causes plus ou moins locales des phénomènes de redressement du Système du Cap. Mais on peut apprécier avec plus de justesse les phénomènes qui ont été’ le résultat de l’inclinaison des strates du Système du Cap vers un centre commun dans la partie centrale du Transvaal. On voit, dans le pays au nord de Prétoria, l’inclinaison des strates de ce Système se diriger et aller en augmentant vers la région nommée Boschveld, où, comme nous le verrons plus loin, des intrusions et des éruptions d'un magma riche en soude ont eu lieu après la période de formation des couches de Prétoria. Ces dernières sont, jus- qu'à une certaine distance de ce bassin de roches ignées, redressées, disloquées et même quelquefois courbées en larges plissements. AFFLEUREMENTS. — Les lignes d’affleurement et l'inclinaison des couches de Prétoria et du Black-reef indiquées sur la carte (Planche 1) peuvent donner une idée du relief du territoire occupé par l'étage inférieur du Système du Cap. Au nord de Prétoria on voit le bassin du Boschveld environné de tous côtés par une bande du terrain de l'étage inférieur du Système du Cap, seule- ment interrompue au sud-est, où elle est cachée par les dépôts du Karroo superposés. et au nord, où le grand pli qui sépare le bassin 1. Les coupes de la Planche II donnent une bonne idée de la position discor- dante du Système du Cap sur les terrains anciens. 48 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. du Boschveld du bassin du Waterberg est en partie caché par les roches ignées et les grès de l'étage supérieur. Sur les deux côtés, est et ouest, du bassin du Waterberg, le prolongement de cette bande, formée par l'étage inférieur du Système du Cap, est très peu connu, la région n'ayant pas été explorée au point de vue géologique. On voit aussi comment les couches du Système du Cap, à la limite méridionale du Boschveld, sont en connexion par- faite avec celles du bassin, ou mieux du fossé, du Witwatersrand, dont la continuation au sud-est est cachée sous les dépôts du Karroo. Un lambeau isolé qui affleure près.de la frontière occiden- tale de la République annonce l’énorme développement du Système du Cap dans le Griqualand-west et le Bechuanaland. 4. — SÉRIE PLUTONIENNE DU BOSCHVELD J'ai donné ce nom à un groupe de roches intrusives et éruptives, ayant pour caractère commun une forte teneur en soude, et dont l'ascension a eu lieu après la période de formation de la série de Prétoria et avant celle du système du Karroo. . GRANITE ROUGE. — Un des représentants typique de ce groupe est le granite rouge, roche qui occupe une vaste surface au nord des Magaliesbergen, dans le Boschveld, et qui avait déjà attiré, il y a trente ans, l'attention des premiers explorateurs, Mauch, Hübner et Cohen. Ce granite rouge est une roche grenue, composée de feldspath rouge, généralement de l'anorthose ou de l’orthose, de quartz et de petites quantités d'amphibole fortement pléochroïque et de biotite. La faible proportion des constituants foncés donne à ce granite en place une couleur rougeâtre, les parties superficielles . décomposées étant grises ou blanchâtres. Le plus souvent ce granite, quoique grenu, possède une structure micropegmatoïde parfaite : ce type est très constant et j'en ai récolté des échantil- lons impossibles à distinguer les uns des autres en des localités distantes l’une de l’autre de plusieurs centaines de kilomètres, à Krokodilpoort [411] et à Honignestkrans [121], au nord du Maga- liesberg (district de Prétoria), à Klipfontein (district du Waterberg) et sur le versant nord du Botha’s berg (district de Middelburg). Dans les anciennes descriptions géologiques du Transvaal, entre autres dans celle de Schenck, à laquelle on a donné le plus d’auto- rité, les auteurs ne soupçonnent pas la différence entre ce granite rouge et le granite ancien et regardent la région du Boschveld comme appartenant au terrain primaire. Cette erreur a créé des 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE difficultés stratigraphiques de plus en plus insurmontables à mesure que nos connaissances sur la struc- ture géologique du pays augmen- taient. Toutes les difficultés se résolvent d’elle-mêmes, aussitôt que l’on admet que le granite rouge et les autres roches plutoniennes qui l’accompagnent sont d’une époque plus récente que le granite du Système primaire, c'est-à-dire que leur ascension est postérieure à la période de genèse de la série de Prétoria. La situation géologique du gra- nite rouge est montrée nettement dans la coupe 1 (PL. ID). Si, partant du massif granitique situé entre Johannesburg et Prétoria, on se dirige vers le nord, on voit com- ment ce granite est recouvert par la série du Black-reef, et comment se succèdent, d'abord les dolomies, puis la série de Prétoria, toujours avec pendage vers le nord. On rencontre ensuite superposés aux couches de Prétoria, au nord du Magaliesberg, le granite rouge et, à sa base, des norites et des roches syénitiques. Si, des environs de Lijdenburg, nous nous dirigions vers l’ouest, nous aurions exacte- ment la même succession (PI. IT, coupes 2 et 3). Là aussi la série du Black-reef (grès de Kantoor et grès du Drakensberg) repose en discor- dance sur le granite ancien et les schistes du terrain primaire, au- dessus.se trouve la dolomie, et au- dessus de la dolomie, dans les mon- tagnes de Steenkamp, repose la série de Prétoria, toujours avec une 12 Juin 1901. — ‘TT. rer, Pa l'a la 0. oupe prise au nord du Transvaal, montrant les divisions du Système du Cap en discordance sur le ol ” 0. — € J Bull. Soc. Géol. Système primaire. — Echelle des longueurs 1/750.000°. 10, Grès du Waterberg ; 104, Conglomérat de base; 8, Granite rouge; 7, Norite; Cg, Calcaire à grossulaire ; 6, Schistes ardoisiers, grès, quartzites et diabases de la série de Prétoria : 5, Dolomies, calcaires et silex de la série des dolomies ; 4, Quartzites, grès, schistes et grauwackes de la série du Black-reef ; 2, Granite ancien ; 1. Schistes crystallophylliens fortement redressés, du Système primaire Sud-Africain. D 20 G.-A.-F. MOLENGRAAFE 21 Janv. inclinaison vers l’ouest, allant en augmentant de 5° à 25°. Enfin dans les montagnes de Botha et dans le pays de Secoecoeni, le granite rouge recouvre la série de Prétoria, avec à sa base des syénites et des norites accompagnées de gisements de magnétite.La même suite se rencontre dans les montagnes de Makapan (fig. 10). À Button’skop la série du Black-reef avec pendage vers l’ouest, repose en discor- dance sur les schistes dans lesquels se trouve la mine d’or d’Eerste- ling et sur le granite ancien. Au-dessus du Black-reef vient la dolo- mie,surmontée par les couches de Prétoria et, à la partie supérieure, près de Piet-Potgietersrust, par le granite rouge, ayant encore une fois à sa base de la norite. Cette norite donne naissance, près de ce dernier village, à des collines fracturées, ayant l'aspect des collines dites Zwartkoppies et Pyramides, sur le versant nord du Magaliesberg. Le tableau comparatif suivant donne les principaux caractères du granite ancien et du granite rouge. Granite ancien Généralement couleur grise plus ou moins foncée, assez rarement cou- leur rouge !. Dans la majorité des cas granite à biotite ou granite à biotite et amphi- bole, assez souvent aussi granite à deux micas et rarement granite à muscovite. Elément feldspatique représenté en grande partie par du microcline et du plagioclase. Structure micropegmatoide incon- nue. Veines à pegmatite très communes donnant à la roche une apparence entrelardée. Roches de profondeur toujours exclusivement de la famille grani- tique. Roches pouvant être regardées comme des représentants d’épanche- ment de la famille du granite, incon- nues. Granite rouge Presque toujours couleur rouge. Généralement granite à amphibole et biotite, quelquefois granite à am- phibole et rarement granite à biotite. La muscovite n’a jamais été ren- contrée. Elément feldspatique représenté presque exclusivement par l’anor- those et l’orthose. Structure micropegmatoïde en gé- néral admirablement développée et caractéristique. Veines de pegmatite pas encore rencontrées. Roches de profondeur de la famille granitique, de la famille syénitique et de la famille gabbroïque, associées au granite rouge suivant une certaine loi. Dans le terrain du granite rouge on trouve assez souvent des roches très diverses, pouvant être regardées comme des types d’épanchement des familles de roches: de profondeur ci-dessus. 1. J'ai trouvé des variétés rouges du granite ancien, assez rares, dans le massif de Vredefort, dans quelques localités du district de Vrijheïd, et grâce à des forages, sur la propriété Vlakfontein {442}, près du Modderfontein G. M. Co. É 1901 On ne trouve guère, sauf tout près du contact avec les schistes environ- nants, de ségrégations des éléments les plus basiques. GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 51 On voit aussi bien sur une grande que sur une petite échelle la ségré- gation des élémentsles plus basiques se présenter d’une manière très mar- quée. C’est ainsi qu'on trouve l’am- phibole dans le granite rouge (qui du reste est assez pauvre en éléments foncés) accumulée dans des masses dediverses dimensions, qui devraient être nommés des amphibolites (horn- blendefels). La distribution relative des gra- nites rouges, des syénites, des nori- tes et des gîtes métallifères dans ces norites peut être imputée à des phé- nomènes de ségrégations (Voir plus loin). Schistes cristallophylliens incon- nus dans la zone du granite rouge. Schistes crystallophylliens assez répandus dans la zone du granite ancien. Ils forment souvent des ban- des d’une grande étendue et dans le voisinage le granite a souvent une structure parallèle et se transforme en des variétés gneissiques ou am- phibolitiques. Nombreux dykes de diabase. Dykes de diabase manquant ou assez rares. Ce tableau montre jusqu'à l'évidence que le granite ancien et le granite rouge sont des éléments si fondamentalement différents qu'ils ne peuvent être l’un l'équivalent de l'autre. I est d'ailleurs impossible de les confondre lorsqu'on a vu leur gisement et l'aspect qu'ils impriment au paysage. SyÉnires. — En outre du granite rouge on trouve en abondance, dans le Boschveld, d’autres types de roches de profondeur non moins intéressantes, telles que la syénite à néphéline (éléolite), la syénite à anorthose et la norite. La syénite à éléolite qui, entre autres, forme un massif d'une étendue médiocre sur les propriétés Zeekoegat [287] et Leeuw- fontein [320], au nord des Magalieshbergen, est représenté par toute une série de variétés. dont les types grenus peuvent être comptés parmi les représentants Les plus beaux, jusqu'à présent connus, de cette roche. Leur surface offre un aspect curieux ; elle est creusée de petits trous soit hexagonaux, soit quadratiques, empreintes en creux des grands cristaux de néphéline, qui, se décomposant plus facilement que le reste de la roche, ont complè- tement disparu. À une petite profondeur, l’éléolite est parfaitement inaltérée. Les grands cristaux d’anorthose, des macles de Carlsbad pa ’ G.-A.-F. MOLENGRAAFEF 21 J all V. très aplaties suivant (o10) sont orientées presque parallèlement. Cette disposition donne à la roche entière une sorte de clivage !. La syénite à anorthose, type pour lequel M. Henderson ? a pro- posé le nom de hatherlite, forme des massifs nombreux et de grande étendue. Je les ai trouvés au nord des Magaliesbergen sur les propriétés Waterval [125], Leeuwfontein [30] et Zeekoegat [285] et, sur le versant nord du Botha’s-berg, dans la propriété Blinkwater [77]. Ces massifs de syénite présentent des types syénitiques très variés, parmi eux la syénite à titanite etla syénite à pistacite, cette dernière étant une variété de décomposition assez répandue. NORITE ET MAGNÉTITE. — À la périphérie de la zone du granite rouge on trouve presque partout des norites, dont les gisements se reconnaissent aisément dans la topographie aux formes bien accentuées des collines formées par cette roche. On les a trouvées au nord de Zeerust, à Alewijnspoort [210] (district de Marico), au nord de Rustenburg et de là dans une zone presque ininterrompue, les Zwartkoppies, le long du versant nord des Magaliesbergen, jusque dans les environs de Prétoria, sur le versant nord des Botha’s bergen (district de Middelburg) et près de Piet-Potgieters- rust, le long du versant occidental des montagnes de Makapan. Ces norites sont de belles roches qui présentent plusieurs variétés, tantôt à enstatite, tantôt à hypersthène ou bien à hyper- sthène et diallage. Elles ont été l’objet d’une étude détaillée pétro- graphique et chimique par M. Henderson *. Des pyroxénites, composées uniquement d'enstatite, sont souvent combinées à la 1. Jusqu’alors la néphéline avait été trouvée dans le Transvaal par COHEN, seulement dans une syénite près du Hexrivier, dans la rangée du Zwart- koppies, située également au nord des Magaliesbergen. Cette syénite à néphéline a été décrite par M. WëLriNG; la néphéline n’y est visible qu’au microscope. Voir E.-A. WÜüLFING, 58, p. 16. 2. M. HENDERSON a donné une très bonne description de cette roche. Je lai également étudiée en plaques minces et je serais tenté de lui donner le nom de syénite anorthosique à amphibole et pyroxène (Anorthoklas-Amphibol- : Pyroxen-Syenit). Henderson préfère appliquer des noms séparés aux roches à anorthose et propose dans ce cas le nom de Hatherlite. Ce nom serait bon s’il n'y avait erreur de localité ; cette roche affleure, il est vrai, non loin de l’ancienne fabrique de poudre et sur l'emplacement de l’ancienne fabrique de dynamite dans la propriété Leeuwfontein [320], mais cette fabrique n’a rien de commun avec la © Éerste Fabrieken » ou la fabrique de Hatherley, qui est située au versant sud des Magaliesbergen sur les affleurements de la série de Prétoria. Voir J.-A.-L. HENDERSON, 24, p. 4-et suivantes. 3. J.-A.-L. HENDERSON, 24, p. 10-42. I9O1 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 53 norite. À Alewijnspoort (district de Marico) !, ces roches à enstatite sont grenues, à grains de dimensions médiocres, tandis que dans les collines, dites Pyramides, au nord de Prétoria, elles sont composées de cristaux d’enstatite d’une longueur qui dépasse souvent dix centimètres. Ces norites ont une importance écono- mique; en effet, des amas lenticulaires de magnétite fortement attractive et très pure leur sont associés, formant des gîtes métal- lifères d'une très grande étendue. Ce sont les meilleurs gîtes ferrifères du pays. Il n’est pas difficile de prouver que la magnétite est un produit de ségrégation de la norite, car on peut observer partout que la teneur en magnétite, dont la présence comme constituant normal est toujours cons- tatée sous le microscope, va en augmentant, à mesure qu'on s'approche des'amas de magnétite pure ; enfin tous les éléments de la norite étant disparus, sauf la magnétite, il reste un minerai de magnétite pure. Il est certain, que, lorsque, dans l’avenir, l'indus- trie du fer se développera dans le pays, ces gisements atteindront une importance considérable. J'ai trouvé des gisements de chromite associée à la norite dans quelques localités, par exemple sur la propriété Zilikatsnek [359], au nord du Magaliesberg. Ces gisements sont très peu étudiés et on ne saurait encore se former une idée de leur étendue ou de leur importance. Pour ce qui est des relations entre eux des types principaux de ces roches, on constate que le granite rouge occupe le centre de ce vaste terrain plutonien et que les autres types sont restreints à la zone périphérique ; la norite doit être recherchée dans la zone la plus périphérique et une bande de roches syénitiques, qui ne sont cependant pas développées d’une manière aussi régulière et aussi uniforme que la norite, la sépare du granite. On trouve donc, en schématisant les faits, dans cette immense formation plutonienne une succession de roches de plus en plus basiques en se dirigeant du centre à la périphérie. En outre des roches intrusives de profondeur cette même région est très riche en roches éruptives de types fort différents. Dans une partie du domaine du granite rouge, c’est-à-dire dans le district du Waterberg, on trouve associé au granite rouge des types por- phyriques. On y trouve quelquefois, comme à Magalakwiens-00g, des porphyres pétrosiliceux à quartz globulaire, et plus communé- 1. Nous devons à M. HENDERSON, 24, p. 38-41, une description pétrogra- phique et une analyse de cette belle roche. 54 ; G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. ment des felsophyres. Les porphyres à pinitoïde de ce district sont très caractéristiques, ce sont des felsophyres, dans lesquels les phénocristaux de feldspath sont entièrement altérés en pinitoide, le tout formant une belle roche rouge à taches vertes. Bien plus importantes et bien plus variées sont les roches d’épan- chement qu'on trouve près de la périphérie du Boschveld. Parfois ce sont des porphyres, qui pourraient être regardés comme le faciès éruptif des syénites et des norites, comme par exemple le type porphyrique de syénite à anorthose des Pilandsbergen (district de Rustenburg), décrit par M. Henderson ! sous le nom de pilandite. Mais en général les relations sont plus complexes. Citons comme preuve ce qu’on trouve dans la coupe le long du fleuve Pienaar, sur le versant nord du Magaliesberg. On voit sur la propriété Baviaanskloof les quartzites supérieurs du Magaliesberg traversés par de nombreux dykes de composition très variée et, plus au nord, sur la propriété Zeekoegat [287], on voit ces mêmes strates recouvertes en concordance apparente par des dépôts éruptifs stratifiés, des brèches et des agglomérats éruptifs, des tufs silicifiés, des lits de scories transformés en brèches de roches amygdaloïdes, tous ces types alternant avec des bancs assez épais de roches porphyriques très variées, ressemblant tantôt à des rhyolithes et à des felsophyres, tantôt à des andésites à amphibole, tantôt à des basaltes, tous représentants d'anciennes coulées de. roches d’épanchement. L'intrusion et les éruptions des roches de cette série plutonienne doivent avoir été accompagnées par des émanations gazeuses. Dans le granite rouge les gaz, qui se dégageaient, ont été chargés de composés fluorés. En effet la fluorine est associée régulièrement aux roches d’épanchement du groupe du granite rouge, et elle est un des minéraux les plus constants dans les cavités de ces roches. Mais il en résulte aussi que la majorité des filons qui parcourent le granite rouge sont des gîtes d’émanation. Dans le district du Waterberg, par exemple, le massif des porphyres quartzifères et des felsophyres est recoupé par de nombreux filons. La gangue est bréchiforme et consiste en fragments des murs, sur les parois des- quels ont cristallisé les cristaux de quartz en rosette. Le vide restant est occupé par de l’hématite seule ou par de l’hématite et de la fluorine. Dans quelques localités, par exemple à Welgevonden, les filons sont plus.importants ; on constate alors que la partie du filon, voisine du toit, est entièrement composée de quartz, tandis 1. J.-A.-L. HENDERSON, 24, p. 46. IOOT GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 99 que la partie voisine du mur est composée de fer oligiste, de fluorine et de quartz. L'épaisseur du fer oligiste avec fluorine varie de 1 à 3 mètres. Ce fer oligiste est très pur et le quartz qui l'accompagne est aurifère. On en a tenté l’exploitation, mais la proportion d’or est trop variable pour que l’on ait obtenu des résultats satisfaisants. La même gangue de quartz et de fer oligiste a été trouvée dans l'Albert-silver-mine, située dans le granite rouge, à 79 kilomètres est-nord-est de Prétoria. Le principal minerai de cette exploita- tion est une bornite argentifère. | En outre, dans les autres veines de la série plutonienne du Boschveld, l'influence des émanations gazeuses est révélée par ce fait que les roches en contact avec les filons sont profondément imprégnées par des composés métalliques. Ce phénomène est constaté, par exemple, dans les filons qu'on rencontre sur le ver- sant nord du Botha’s berg, sur les propriétés Rhenosterhoek [110] et Laatste-drift [82]. Ces filons traversent la syénite à anorthose et la norite et contiennent des minerais sulfurés de fer, de cuivre et même, dans la dernière localité, des minerais de cobalt. Une imprégnation profonde des murs de granite rouge a été constatée, dans le filon aurifère de l’Albert-silver-mine, mentionnée plus haut. Les gîtes minéraux dans le Boschveld sont du reste encore peu connus et n’ont pas été étudiés méthodiquement !. Cette série plutonienne offre, abstraction faite de la géologie locale, un intérêt général, parce qu'elle augmente nos connaïs- sances en ce qui concerne l'étude de l'influence des masses intru- sives et éruptives sur la tectonique des strates au travers desquelles elles se frayent un passage. On trouve là un curieux exemple de phénomènes, sur l’origine desquels les opinions émises actuelle- ment varient et différent des opinions anciennes. Au commencement de ce siècle la majorité des géologues, après Léopold de Buch et Elie de Beaumont, pensaient que les chaînes de montagnes résultaient de soulèvements produits par l’ascen- sion des roches plutoniennes, qu'on rencontre généralement sur leur axe central, comme par exemple dans les Alpes, où elles forment les cimes culminantes. Les roches plutoniennes étaient ainsi, par leur ascension, la cause directe du redressement et du 1. Je n’ai pu moi-même visiter que quelques-uns des gisements signalés ici et je dois la plupart des renseignements ci-dessus à M. DoRFrFEL, ingé- nieur des Henderson’s Transvaal Estates Limited, compagnie propriétaire de tous les gisements de cobalt découverts jusqu’à ce jour au Transvaal. 56 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. refoulement des couches sédimentaires, qui S'appuient contre le noyau cristallin. Plus tard, lorsque l’étude des terrains volcaniques eut montré que les strates, à travers lesquelles les roches éruptives se font jour, ne sont guère disloquées, et après qu'on eut étudié de plus près la tectonique des chaînes de montagnes, on se convainquit de plus en plus que ces roches plutoniennes jouaient un rôle vraiment passif dans la genèse des accidents orogéniques. C'est à cette époque que fut publiée la découverte des laccolithes dans les Henry-mountains. On ne put nier que, le soulèvement des terrains, qui forment la couverture sédimentaire de ces intumes- cences, était bien dû, directement, à l’intrusion de masses trachy- tiques. Plus tard on constata que l’affaissement., l'effondrement de strates préexistantes dans un magma intrusif, peut produire des perturbations tectoniques considérables, phénomènes décrits magistralement dans l’œuvre classique de M. Brügger sur les phénomènes plutoniques dans le bassin de Christiania. En même temps que se développaient ces idées, le rôle joué par les roches intrusives et éruptives était mieux délimité. On admet- tait, que l'influence des roches nettement éruptives sur la position des strates environnantes était presque nulle, tandis que celle des roches intrusives était, au contraire, généralement considérable, L'étude des intrusions du Boschveld, au Transvaal, montre que la position des terrains stratifiés environnants est considéra- blement modifiée, et que tous ces accidents tectoniques peuvent être regardés comme les conséquences, tantôt de l’intrusion même d'une énorme masse de magma, tantôt de mouvements d’affaisse- ment dans ce même magma. Les modifications apportées aux couches du Système du Cap par l’intrusion de la série plutonienne du Boschveld peuvent être résumées ainsi : a) En premier lieu les roches du Système du Cap, et plus spécia- lement celles de la série de Prétoria, dont la zone de contact avec les roches intrusives est presque la seule accessible, sont modifiées à de grandes distances par le métamorphisme de contact. IL est vrai que, dans les quartzites du Magaliesberg, ce métamorphisme est peu ou pas apparent, mais dans les argilites sous-jacentes l'effet est très marqué. Celles-ci sont très fréquemment altérées en phyl- lades noduleuses, chargées d’andalousite ou de chiastolite. Les schistes à chiastolite des environs de Zeerust (district de Marico) 7 1001 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE F 27 sont bien connus !, mais les schistes de Kromdraai [422] (district de Middelburg), sont encore plus beaux : ce sont des phyllades mica- cées noduleuses, chargées de staurotide et d’andalousite. La stau- rotide y forme des macles en croix de Saint-André très nettes et l’andalousite s'est développée en prismes de 5-8 centimètres de longueur, extrêmement frais, roses et pellucides. Des lambeaux, quelquefois de grandes dimensions, de couches de la série de Pré- toria, sont assez souvent rencontrés, entièrement enveloppés par les roches intrusives ; dans ces cas, réalisés dans la région au nord du Magaliesberg et à l’est du fleuve Pienaar, le métamorphisme de contact est très intense et les quartzites eux-mêmes sont fortement altérés, endurcis et épidotisés. b) En outre, de nombreux dykes traversent le Système du Cap tout autour du massif intrusif du Boschveld ; leur composition est très variée, mais leur étude est à peine commencée. Souvent ils pénètrent dans le Système du Cap jusqu'à de très grandes dis- tances. C'est ainsi que le fameux dyke de Wonderfontein, mentionné déjà par Hübner (voir ci-dessus, p. 42), est formé par une magni- fique variété de syénite à anorthose, qui traverse la dolomie et est largement exploitée pour la construction des édifices à Johannes- burg. Souvent ces dykes sont très riches en fragments arrachés aux couches du Système du Cap. Ces fragments sont alors forte- ment métamorphisés ; quelquefois aussi ces mêmes fragments sont si nombreux que l’on a de vraies brèches éruptives, dans lesquelles la substance éruptive joue le rôle effacé d'un ciment. Un très bel exemple de ces brèches éruptives est la brèche de Derde-Poort [469], à huit kilomètres nord-est de Prétoria. C'est un dyke épais, traversant la chaîne du Magaliesberg ; il renferme en abondance des fragments, souvent de grandes dimensions, de dolomie recristallisée et quelquefois chargée de grossulaire et d'autres roches de la série de Prétoria, énergiquement métamor- phisées. Le ciment éruptif de cette roche est caractérisé par de grandes plaques de biotite. c) Les dislocations tectoniques qui se sont produites dans le Système du Cap, durant la période d'activité plutonienne, sont des plus instructives. Les strates de ce Système, à une certaine époque, se sont aflaissées dans et au-dessous du magma interne el il est résulté de cet effondrement, que, tout autour du bassin plutonique. les strates du Système du Cap s'inclinent vers un 1. Voir pour leur description 30, p. 202. 58 G.-A.-F. MOLENGRAAFF or Janv. centre commun. De fait, l’inclinaison, facilement observable, surtout dans les couches de Prétoria, est partout dirigée vers le Boschveld (voir la carte, PI. D). Le cas le plus simple se trouve représenté dans la coupe sché- matique du granite ancien entre Prétoria et Johannesburg au nord (PI. IT, Coupe 1). On voit tout le Système inférieur du Cap courbé et affaissé simplement, sous la série plutonienne, en conser- vant la succession normale ininterrompue de ces strates. Cette simplicité se maintient de Prétoria à l’ouest, jusqu'aux environs de Rustenburg et la figure représente exactement ce qu’on peut obser- ver en allant de Prétoria, directement vers le nord par le Wonder- boomspoort. Maïs à l’est du Wonderboomspoort cette allure primi- tive si simple ne persiste pas longtemps et au-delà, dans la vallée du fleuve Pienaar, on constate déjà un mode d’affaissement diffé- rent du précédent (fig. 11}. Il s’est formé une série de cassures parallèles, de failles à gradins (Staffelbrüche), dans le bloc af- Fig. 11. — Coupe théorique montrant le mode d’affais- faissé du Système sement de la série de Prétoria vers le Boschveld A Can et les failles à gradins (Staffelbrüche), dont les l fentes sont injectées de roches éruptives variées, appartenant toutes à la série plutonienne du tre une série de Boschveld. collines, formées 9, Roches éruptives de la série plutonienne du Bosch- de strates du veld ; 6, Quartzites et grès du Magaliesberg ; Système du Cap à, Diabases intercalées. : 4 et par suite on rencon- dirigées toutes dans la même direction, parallèlement à la périphérie de la zone plutonienne, et séparées l’une de l’autre par des vallées, dans lesquelles on peut trouver les afileurements de roches appartenant à la série du Boschveld. Ces collines ont tous leurs escarpements faisant face au sud, tandis que leurs versants septentrionaux ont une pente très faible. En règle générale, elles sont formées exclu- sivement de couches de là série de Prétoria, mais il peut arriver, si le rejet d’une de ces failles est exceptionnellement fort, que la dolomie vienne affleurer à son tour sur l’escarpement. GîrEes MÉTALLIFÈRES. — Il n’est pas étonnant qu'une région aussi tourmentée par les forces intérieures soit très riche en dykes et en filons métallifères. En réalité je crois que tous les filons métallifères rencontrés avec une direction moyenne ouest-est, dans diverses zones parallèles, tantôt dans les couches de la série de Prétoria, IOO1 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 59 tañtôt dans des roches appartenant à la série plutonienne du Boschveld, à l’est du fleuve Pienaar (districts de Prétoria et de Middelburg), sont liés d'une manière plus ou moins directe aux dislocations dont je viens de parler. Ces gîtes métallifères sont disposés dans les zones suivantes à peu près parallèles, suivant une direction moyenne est-ouesL. x) La zone de la Willows-silver-mine, des mines de Boschkop [295], de Oudezwaanskraal [537] et de la Transvaal-silver-mine, toutes situées dans le même niveau géologique, c'est-à-dire dans les argilites, entre le quartzite de Daspoort et les quartzites du Magaliesberg. Ce sont de vrais filons de cassure à peu près verti- caux. Les fentes sont le plus souvent, ce qu'on peut observer le mieux dans la Willows-mine, partiellement remplies de diabase formant un dyke, et pour le reste plus ou moins minéralisé. La gangue identique de tous ces filons est une sidérose possédant une teneur assez forte en magnésie et en manganèse. Ce carbonate est, à l’état frais, de couleur brunâtre très claire, et passe rapidement par l’action des agents atmosphériques, au brun foncé et plus tard au brun noirâtre. Le minerai est formé par de la chalcopyrite, de la pyrite, de la tétraédrite à antimoine (panabase), de l’azurite et de la malachite: à cette association de minéraux vient se joindre, dans le filon d'Oudezwaanskraal, l'arsénopyrite et dans le filon du Transvaal-silver-mine, de la galène, de la cérusite et de la crocoïse. Les minerais de ces filons renfermant de l'argent sont connus comme mines de ce métal. L'argent se trouve surtout dans la tétraédrite. Ces mines ont été activement exploitées il y a une dizaine d'années, mais elles sont maintenant abandonnées et il est impossible d'en étudier les gisements en détail. 8) La zone des filons plombifères situés dans le niveau supérieur des quartzites du Magaliesberg. Les fentes sont en partie injectées par une diabase, et en partie remplies de minerai de plomb ; on y trouve du quartz, de la calcite, de la galène, de la pyromorphite, de la cérusite et, en très petites quantités, de la blende et de la cala- mine. Je citerai comme type, dans cette zone, le filon plombifère situé sur la propriété Edendale [458] (distriet de Prétoria). Des filons 1. L’azurite de la Willows-mine est bien cristallisée et ses cristaux modi- fiés sont fort beaux. Voir G.-A.-F. MoLENGRAArF, 29, p. 156. Les cristaux de cérusite, qui sont décrits dans cette communication comme provenant du Willows-mine, ont été en réalité trouvés dans la Transvaal-silver-mine, comme j'ai pu, plus tard, le constater moi-même, Go G-.A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. identiques m ont été indiqués sur cette zone dans le district de Rustenburg, mais je ne les ai pas visités moi-même. y) La zone des filons de cobalt de Balmoral. Ces filons sont situés dans le même niveau géologique que la zone précédente, c'est-à-dire dans la partie supérieure des couches du Magaliesberg, etil est probable que ces deux zones sont identiques, et que la même série de cassures est remplie de minerais de plomb dans les environs de Prétoria et de minerai de cobalt plus à l’est. La gangue däns ces filons est une espèce de roche cornée, large- ment imprégnée de cristaux d’actinote et de smaltine, dont toutes les petites fissures sont tapissées de cristallisations d'érythrine. à) La zone de filons située dans la norite à la base de la série plutonienne du Boschveld. Sur la propriété Laatste-drift [82] (dis- trict de Middelburg) on trouve, dans ces filons, de la pyrite, de la chalcopyrite et de la smaltine. Ils renferment une forte proportion d'or se chiffrant à 8 à ro onces par tonne. À Rhenosterhoek [r10| (district de Middelburg), un filon analogue est entièrement rempli de pyrite massive très pure. La norite encaissant ces filons est complètement imprégnée de sulfures. e) La zone de filons cuprifères dans Le granite rouge qui renferme la Albert-silver-mine à 85 kilomètres est-nord-est de Prétoria. Le filon est vertical avec une direction est-ouest. Le mur est formé par un granite porphyritique à anorthose. La gangue consiste en quartz et fer oligiste. Le minerai principal est une bornine argentifère, qui est accompagnée de chalcopyrite, de cuprite, de chalcosine, d’azurite et de malachite. Le filon est en partie injecté de diabase. La teneur en argent de la bornine de cette mine s'élève à 4o onces par tonne. On a trouvé, dans les environs, des filons ana- logues et parallèles : celui de la propriété Roodepoort [359] mérite d’être mentionné. La gangue de ce filon est une sidérose, ayant une forte teneur en magnésie et en manganèse, identique à celle de la zone du Willows-mine, ce qui montre bien la parenté de ces zones de gîtes métallifères. Des gisements analogues ne sont pas rares dans le district de Rustenburg. Le gisement riche en cobalt de la propriété Kruisrivier [85], dans le district de Middelburg ‘, paraît être situé dans la zone des quartzites supérieurs du Magaliesberg. Le minerai est de la smal- tine, renfermant de 3 à 4 onces d’or par tonne. Cet affleurement 1. H. OEHMICHEN, 37, p. 271. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE (Qui d'un lambeau de rocher !, appartenant au Système du Cap, envi- ronné de tous côtés par la série plutonienne du Boschveld, doit probablement être expliqué par des accidents tectoniques du même ordre que ceux que nous avons décrits plus haut (voir page 58). Maintenant que nous avons montré qu'il semble exister une relation entre les mouvements d’affaissement du Système du Cap et la formation du bassin plutonien du Boschveld, il n’est pas moins intéressant de noter que, sous l'influence de ces mouve- ments, des tensions se sont développées, qui ont favorisé des dislo- cations tectoniques très complexes, des plissements et des failles obliques à grand rejet. C’est ainsi que s’est formé le grand pli des couches du Système du (Cap, séparant, suivant la direction approximative O.S.O.-E.N.E., le bassin plutonien du Boschveld de celui du Waterberg. Ce pli forme le prolongement au sud- ouest des montagnes de Makapan et disparaît ensuite sous des dépôts plus récents. C'est probablement le prolongement de ce même pli qui affleure de nouveau dans les collines situées un peu à l’ouest de Buiskop, dans l’angle sud-ouest du district du Waterberg. Mais il est bon de dire que le calcaire dolomitique et les quartzites et grès superposés qu'on trouve dans ces collines et qui seraient les représentants de la série des dolomies et de celle de Prétoria offrent, comme nous l’avons déjà fait remarquer plus haut, des différences considérables avec les types normaux de ces roches. Il est clair que, si cette interprétation est exacte, les couches du Système du Cap, sur les deux flanes de ce pli, se sont affaissées dans le magma plutonien. Tous ces phénomènes de tension se manifestent d’une façon très remarquable, aussitôt que la périphérie du terrain plutonien forme un angle rentrant. C'est ce qui arrive à une vingtaine de kilo- mètres à l’est-nord-est de Prétoria, près de Franspoort. On voit la chaîne du Magaliesberg, dont la direction était ouest-est au nord de Prétoria, se recourber brusquement au sud-est. De même les deux autres rangées de collines de la série de Prétoria, la rangée du Daspoort et la rangée du Time-ball se courbent parallèlement à la première. L'inclinaison des strates reste dirigée vers le granite rouge, c’est-à-dire qu’elle se modifie en même temps que la direc- tion des rangées de collines, du nord au nord-est. Ces mouvements complexes ont créé des forces orogéniques qui, dans la rangée 1. Ce lambeau est trop petit pour pouvoir être indiqué à l'échelle de la carte (PI. D). 62 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. extérieure de la courbure, la chaine du Magaliesberg, ont dû amener une extension en longueur ; la chaîne du Magaliesberg s'est fracturée; les fentes ont formé ces gorges naturelles, appelées par les boers poorten !, et suivies par les chemins de pénétration. Généralement ces fentes sent injectées de matière éruptive et on y doit chercher un grand nombre des dykes intéressants qui rayon- nent du terrain plutonien du Boschveld. C'est ainsi, entre autres, que la belle brèche de Derde-Poort est injectée dans la fente qui traverse la chaîne de Magaliesberg à Derde-Poort. Dans les deux rangées intérieures de la courbure, les forces orogéniques ont eu un effet contraire ; elles se sont manifestées par de fortes pressions dans un sens un peu oblique à la direction des strates ; la production de failles très obliques à grand rejet en a été le résultat. J’ai pu cons- tater ? que le groupement si pittoresque des collines, dans les envi- rons de Prétoria, aussi bien que l’origine des magnifiques sources de l’Aapiesrivier sont dus à ces accidents. Par analogie, on peut supposer à bon droit qu'il existe, entre les divers terrains du Système du Cap, des relations très intéressantes partout où la périphérie du terrain plutonien forme une: courbe très convexe, forçant la ligne d’affleurement du Système du Cap à se courber dans le même sens ; comme au nord de Lijdenburg, près du fleuve Olifants, où on voit la direction du Système du Cap qui est à Lijdenburg N.-S., se couder brusquement à angle droit pour devenir dans les montagnes de Chunie O.-E. et même O.$.0.- E.N.E. Les documents géologiques sur cette région font malheu- reusement défaut. ROCHES AMYGDALOÏDES DU BoscaveLzb. — Le granite rouge et les roches qui l’accompagnent sont recouverts, dans une partie du Boschveld, le Springbokolakte, par une nappe énorme d’une roche amygdaloïde basique, dont les cavités sont remplies de calcite transparente, de zéolithes nombreuses, surtout de scolésite et de heulandite, d’agate et d’opale, cette dernière souvent sous la forme transparente appelée hyalite. Généralement cette roche amygda- loïde est masquée par des dépôts superficiels, c'est-à-dire par un tuf calcaire, à son tour en général couronné par une argile ou limon très riche en matière organique, à laquelle on a donné le nom local 1. Poort est un mot hollandais signifiant porte ; ce mot est très bien choisi ; on le retrouve avec le même sens dans la « porta westphalica » du Weser et dans le « eiserner Thor » du Donau. 2. Une étude topographique et géologique détaillée des terrains disloqués dans les environs de Prétoria était en préparation, avant la guerre, à Prétoria. J'en publierai les résultats ultérieurement. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 63 de turf ou tourbe. Les excavations faites pour l'exploitation du tuf calcaire destiné à une fabrique de ciment près de Prétoria, aussi bien que les tranchées le long du chemin de fer de Prétoria à Nijlstroom, ont prouvé que partout dans le Springbokvlakte cette roche amygdaloïde, à laquelle j'ai donné le nom de roche amy gda- loïide du Boschveld, se trouve au-dessous de ces dépôts superfi- ciels. Cette nappe, à laquelle le Springbokvlakte doit sa surface absolument plate !, embrasse approximativement une surface de 3410 kilomètres carrés. L'épanchement de la roche amygdaloïde du Boschveld doit avoir été postérieur à l’intrusion du granite rouge, et on ne s’avancerait pas trop, en regardant cet épanche- ment comme la phase de clôture de la période d'activité pluto- nienne dans le Boschveld. HISTORIQUE DES INTRUSIONS. — Quant aux centres d'éruptions dans le Boschveld, nous ne pouvons pas encore les localiser. Seulement il me paraît probable que la saline, située à environ 4o kilomètres au nord de Prétoria, sur la propriété Zoutpan [467], qui possède une forme en cratère presque parfaite *, constitue l’un de ces centres. Sa situation au milieu de roches de granite rouge à gros grains, bien certainement d'origine intrusive, nous force à supposer que les produits éruptifs déposés autour de ce centre: ont été déja déblayés entièrement par les phénomènes de dénudation. En l’état actuel de nos connaissances, qui embrassent des par- ües trop éloignées de la région, l’ordre chronologique des phases éruptives dans le Boschveld ne peut être que soupçonné. IL sem- blerait que cette activité a commencé par l’intrusion d'un magma riche en soude dans les couches du Système du Cap, dont la posi- tion devait être alors plus ou moins horizontale. Dans ce massif, qui pouvait être en forme de laccolithe, la distribution du magma était telle que vers la périphérie la basicité augmentait, tandis que vers la partie centrale et supérieure le magma était acide et granitique. Plus tard le toit sédimentaire du massif intrusif fut détruit et les couches du Système du Cap s'affaissèrent de tous côtés dans le magma plutonique. Ces couches furent alors courbées, fracturées et plissées, et, les fentes et les failles furent in) ectées des matières éruptives que l’on rencontre aujourd'hui, sous forme de dykes, au travers des assises du Système du Cap. En même temps 1. Le Springbokvlakte est la seule véritable plaine du Transvaal ; les plaines monotomes du Karroo supérieur elles-mêmes offrent à côté d’elle un aspect onduleux. Elle est située à 1.000 mètres environ au-dessus du niveau de la mer. 2. Voir la description et les figures données par M. E. CoHeN, 8. 64 G.-A.-#, MOLENGRAAFEF 21 Janv. les roches ascendantes se forcaient, çà et là, un passage vers l'extérieur et des couches de débris volcaniques alternant avec des coulées de laves se formaient. Il est bien probable que l’activité volcanique, postérieurement à ces affaissements, continua encore un certain temps et que c'est à cette dernière période qu'est due la nappe énorme de roches amygdaloïdes du Boschveld. Les limites de la zone occupée par la série plutonienne ne sont pas encore entièrement tracées. Au sud-est (voir la carte, PL D, dans le district de Middelburg, elle est recouverte par les dépôts du Karroo et, dans le distriet du Waterberg, par Le grès du Water- berg ; la partie septentrionale du bassin plutonien du Waterberg est du reste entièrement inexplorée. On peut estimer que la série plutonienne du Boschveld oceupe au total une surface de plus de 60.000 kilomètres carrés. De cette énorme étendue, une cinquan- taine de kilomètres carrés à peine ont été étudiés. Quelles décou- vertes pétrographiques ! ne reste-t-il pas à faire dans les explora- tions futures ! 5. — GRÈSs DU WATERBERG On trouve dans le district du Waterberg une formation gréseuse, qui repose sur le granite, sur le porphyre pétrosiliceux et sur le felsophyre du Waterberg. En général, ce grès affecte une position horizontale, mais, partout où le granite rouge où les porphyres sous-Jjacents forment des dômes, on voit les strates inférieures du grès appliquées sur ces élévations plus ou moins recourbées (PI. IT, coupe 1, et fig. 10). On retrouve cette même formation sur le granite rouge, ou du moins associée à des roches éruptives de cette série, dans les districts de Middelburg et de Prétoria, mais beaucoup moins développée que dans le district du Waterberg. La série des grès de Waterberg est formée presque exclusive- ment de grès, et en partie de brèches et de conglomérats. Les schistes y jouent un rôle très effacé. A la base de cette série on trouve généralement quelques couches de conglomérats, qui ont une cou- leur rouge tacheté frappante. Ce conglomérat basal est composé de galets de diverses roches cimentées, souvent très peu arrondis. On trouve, parmi les galets, des jaspes rouges, des quartzites schisteux à magnétite ?, des quartzites schisteux à muscovite, des quartzites 1. Le musée du Service géologique de la République Sud-Africaine à Pré- toria possède une très belle collection de roches de cette série, dont l'étude a été interrompue par la guerre. 2. La jaspe rouge et le quartzite à magnétite sont tous les deux des repré- sentants de la Hospital-hill-slate, voir page 18. TOO GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 65 blancs, du quartz, de la lydite; toutes ces roches appartiennent à la série de Barberton du Système primaire. C’est aux nombreux fragments de jaspe rouge que ces bancs de conglomérat doivent leur aspect rouge tacheté. Le ciment est arénacé ou quartziteux et contient généralement un peu d'hématite, de pyrite et de très rares traces d’or. En outre de ces conglomérats de base on trouve des galets répandus en petites quantités dans tout le complexe du grès. La couleur de ce grès est rouge, mais varie du blanc rougeûtre jus- qu'au rouge foncé. Le grès rouge de Buiskop donne les meilleures pierres à bâtir connues dans le pays. Une stratification diagonale est très commune dans cette formation. Les dykes de roches éruptives sont rares dans les grès du Waterberg: sur le plateau du Palala, j'ai trouvé quelques dykes de diabase et, en plusieurs localités, j’ai observé des dykes de felso-. phyres. En outre, des filons de quartz avec hématite, ressemblant beaucoup aux veines qu'on trouve dans les felsophyres sous- jacents, ne sont pas rares dans ce grès. Le grès du Waterberg occupe un vaste espace dans le district du Waterberg et forme le plateau central de ce district, appelé plateau du Palala. Ce plateau est terminé au nord, au sud et à l’est par des escarpements. Celui du sud, connu sous le nom de Zandriviers- bergen, a 105 kilomètres de long. L’altitude moyenne du plateau du Palala est 1400 mètres, et l’un des points culminants, le pic de Hanglip, atteint l'altitude de 1800 mètres. L’épaisseur moyenne de la série des grès du Waterberg doit être estimée, dans le plateau de Palala, à 1000 mètres. En dehors du plateau du Palala, le grès du Waterberg se pré- sente sous forme de lambeaux plus ou moins isolés, qui, tous, ont la forme classique tabulaire des montagnes gréseuses. C’est ainsi qu'on trouve ce grès dans le Kranskop, près de Nijlstroom, dans les Badsbergen, au sud du district du Waterberg, dans les collines à sommets aplatis, près de l’Elandsrivier, et dans plusieurs localités du district de Middelburg !. J'ai trouvé sur le plateau du Palala, dans une grauwacke, placée très haut dans cette série de grès, des empreintes de tiges de Crinoïdes indéterminables ; mais on n'a pas encore découvert le moindre fossile déterminable dans cette formation. En recher- 1. Sur la carte géologique de l’Afrique du sud de E.-J. Dunn, 14, ces grès dans le district du Waterberg et dans le district de Middelburg ont été réunis avec justesse dans la même formation, et séparés des grès et des quartzites de Lijdenburg plus anciens, aussi bien que des grès du Karroo plus récents. 13 Juin 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 5 66 G.-A.-F. MOLENGRAAFF o1 Janv. chant la position de cette série par rapport aux autres formations du Transvaal on se heurte à de grands obstacles. Il est bien certain que, jusqu'à présent, on a trouvé cette série de grès, dans le district du Waterberg, reposant toujours sur des roches de la série plutonienne du Boschveld. Mais, si on en déduit que la série des grès est plus jeune que la série plutonienne sous- jacente, on se trouve en présence de grandes difficultés, si l’on cherche à expliquer comment le felsophyre, qui traverse le grès du Waterberg çà et là en dykes, peut avoir avec le felsophyre sur lequel ce grès repose une analogie si grande, que ces deux roches semblent identiques même après l'examen le plus minutieux. Une autre difliculté provient du conglomérat de base. Sur les rives du fleuve Pienaar, dans le district de Prétoria, on trouve des bancs de conglomérats qui ressemblent, jusqu'à l'identité, aux conglomérats de base de la série des grès dans le district du Waterberg et semblent être intercalés ou du moins associés à des bancs de roches éruptives stratifiées de la série plutonienne. Pourtant on voit ces mêmes roches éruptives se continuer en forme de dykes à travers ces bancs de conglomérats. Cette con- tradiction apparente ne peut être expliquée qu'en admettant que les bancs de conglomérats étaient en réalité préexistants aux roches éruptives, mais furent engloutis et en partie traversés par ces mêmes roches éruptives. On pourrait donner une explication plus ou moins satisfaisante de tous ces phénomènes, en admettant que la série du grès du Waterberg était originairement un étage du Système du Cap, déposé exactement en concordance sur la série de Prétoria, et que plus tard les roches de la série plutonienne du Boschveld se sont forcé, en forme de laccolithe, une place entre ces deux étages, la série de Prétoria formant la base et la série du grès du Waterberg formant le toit du laccolithe. Mais nous pensons qu'il vaut mieux attendre de nouvelles études pour résoudre cette question. Nous admettrons, provisoi- rement, que la série du grès du Waterberg est l’étage supérieur du Système du Cap, en attendant que de nouvelles recherches fournissent les données nécessaires pour déterminer d’une manière plus précise leur position dans l’ensemble des formations succes- sives de l’Afrique du Sud. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE (ep) Le | III. — SYSTÈME DU KARROO Le Système du Karroo au Transvaal repose en discordance sur les formations précédentes plus anciennes et offre en général une position normale horizontale. Dans ce Système il faut distin- guer deux subdivisions principales, le Xarroo inférieur et le Karroo supérieur. 1. — KARROO INFÉRIEUR En général, les strates du Karroo inférieur sont horizontales, quoiqu'elles suivent plus ou moins les ondulations du terrain sur lequel elles sont déposées. Dans toute l'Afrique australe les géologues ont accepté la subdivision du Karroo inférieur en deux étages, le conglomérat de Dwyka et les couches d’'Ecca. Le conglomérat de Dwyka est caractérisé par la présence dans sa masse de nombreux blocs et cailloux de provenances diverses, qui offrent des volumes variant depuis celui de simples grains jusqu'à ceux de blocs, pouvant peser plus d’une tonne. Ces fragments sont tantôt parsemés, CPE RRE S. tantôt réunis en un en- Mont Shongololo semble tassé et très 14 b ; : At:176 serré, dans un ciment em 2 n) : gris ou bleu très foncé 5 - à & Keba Sprurt à grains très fins, qui, (893) exposé aux agents atmosphériques, se transforme en une ar- gile gris-jaunâtre com- Fig. 12. — Coupe montrant la discordance du pacte On ne peut dans Système du Karroo sur le Système primaire îl di Ge d dans le district de Vrijheid. — Echelle a sposition de ces 1/15.000°. ; débris, reconnaïire au Formation du Hoogeveld : 14 b, Grès supérieur: cun ordre et leur arran- 14a, Grès inférieur ; — 13, Couches d’Ecca ; gement ne dépend nul- 12, Conglomérat de Dwyka ; 1, Couches de lement de leur volume Barberton et schistes eristallophylliens; h, ou de leur forme. Ils Honor ont en général leurs arètes arrondies, mais ne sont pas sphériques ou ellipsoides comme des galets, et ils sont fréquemment sur un 68 G.-A.-F, MOLENGRAAFF 21 Janv. ou plusieurs côtés couverts d’un ou plusieurs systèmes de stries parallèles. Ce sont des blocs et des cailloux striés. Cette courte description s'applique à la partie du Dwyka, disposée en bancs, pouvant atteindre une vingtaine de mètres d'épaisseur, qui ne montrent aucun indice de stratification. Alter- nant avec ces bancs non stratifiés, on trouve, dans cette même formation, des dépôts stratifiés contenant en quelques endroits des cailloux en grande abondance, tandis qu'ailleurs les cailloux sont rares ou absolument absents. Les couches d'Ecca sont en général constituées par une boue fine, durcie, sans cailloux ; et il est très rare qu’on y trouve quelques gros blocs. L'Ecca-shale typique est une espèce d’argi- lite foncée, à grains très fins qui en raison de sa structure pseudo- sphéroïdale ou concrétionnée, se brise si facilement en petits fragments, qu’il est difficile d'en obtenir un morceau non frac- turé de la grosseur du poing. Entre ces argilites friables alternent cependant, çà et là, des schistes ardoïsiers, qui donnent une bonne pierre de construction. Tous les caractères distinctifs des couches d'Ecca se retrouvent dans les parties stratifiées du Dwyka et au point de vue pétrographique on pourrait dire que les véritables couches d'Ecea et le conglomérat de Dwyka sont interstratifiés. Le pr NME Fig. 13. — La montagne Gotshe et la propriété Mooiklip, vue du sud. — Même légende. Le conglomérat de Dwyka a une importance plus que locale; il a attiré l'attention de tous les explorateurs qui se sont occupés du sol de l'Afrique du Sud. M. Bain !, M. Wyley et plus tard M. Moulle : le considéraient comme étant d'origine éruptive et lui donnaient respectivement 1. À. GEDDES BAIN, 1. 2. M. A. MouLze, 36. TOOT GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 69 les noms de claystone-porphyry, trap-conglomerate et brèche mélaphy rique. M. Sutherland ! fut le premier qui, en 1868, émit la théorie de l'origine glaciaire de ce remarquable conglomérat. Il le regardait comme un vaste dépôt morainique de l’époque permienne. Cette théorie fut acceptée très favorablement par les géologues qui s'étaient occupés de l'étude des sols de l’Inde et dé l'Australie, mais pour l'Afrique du Sud elle ne fut pas admise sans conteste. Cependant MM. Griesbach *, Stow * et Schenck * étaient les apôtres de cette théorie et lui donnaient un ferme appui. M. Dunn ;, tout en acceptant l’origine erratique des cailloux de Dwyka, le regardait comme un drift glaciaire, apporté et déposé là par des glaces flottantes. M. Green f rejetait la théorie glaciaire et voyait dans le conglo- mérat de Dwyka un dépôt de plage formé le long d’une côte, qui se retirait durant une période de transgression. MM. Draper, Hatch 7, Sawyer et plusieurs autres géologues de la région don- naient la préférence à des théories, qui exigeaient une origine éruptive pour ce conglomérat. Mes recherches dans le district de Vrijheid, pleinement confir- mées plus tard par des études dans plusieurs autres districts du Transvaal et spécialement le long de la rivière du Vaal, dans le Griqualand-west, m'ont convaincu que le conglomérat de Dwyka et Les couches d’Ecca doivent être indubitablement regardés comme des dépôts d'origine glaciaire, datant probablement de la période permienne. Examinons d'abord quelle est la position de ces dépôts dans les régions qui m'ont fourni la majorité des documents, la province de Vrijheïd et le Griqualand-west. On pourrait discuter le synchronisme du dépôt du conglomérat glaciaire du Griqualand-west et du Transvaal occidental, de la partie méridionale de la Colonie du Cap, du Natal et enfin du Transvaal oriental et méridional, et la réunion de toutes ces forma- tons sous le nom de conglomérat de Dwy ka. Cependant on cons- tate que partout ces dépôts glaciaires anciens reposent sur des P.-C. SUTHERLAND, 51. C.-L. GRIESBACH, 21, p. 535. . G.-W. Srow, Manuscrit inédit. A. SCHENCK, 46 et 46. E.-J. Dunx, 13. . A.-H. GREEN, 20, p. 243 et p. 267. F.-H. Harcu, 23, p. 100. VI DotLHER 70 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. couches appartenant au Système du Cap ou au Système primaire et qu'ils sont couronnés par des couches du Karroo supérieur, Ce fait constaté me paraît une raison suflisante pour ne pas introduire un élément de doute dans la question du synchronisme des dépôts glaciaires des diverses régions de l'Afrique du Sud, doute qui ne ferait que compliquer un problème déjà ardu. Le district de Vrijheid appartient au Gebrolken-veld et la difté- rence entre la partie occidentale et la partie orientale du district est grande. La partie occidentale est la continuation du Hooge-veld, quoique le caractère de haut plateau, qu'on trouve très typique plus à l’ouest soit ici fortement modifié par l'action érosive de nombreuses rivières. Dans leur cours vers l’est, jusqu'à l'Océan Indien elles divisent le pays en bandes de terrains élevés d'altitude de 400 pieds au-dessus du niveau de la mer, séparées les unes des autres par des vallées profondes. Ces vallées s’élargissent, se réunissent et deviennent de plus en plus nombreuses en allant à l’est, si bien, que finalement il ne reste plus que des lambeaux isolés de ces terrains élevés. La partie occidentale du district a donc l'aspect d'un haut plateau, entrecoupé de vallées profondes, tandis que la partie orientale est un pays bas plus ou moins acci- denté, sur lequel s'élèvent, par places, des montagnes plus ou moins hautes, dont les sommets aplatis atteignent en général à peu près la même altitude que le plateau occidental. Les cours d’eau principaux sont le Pongolo qui forme la limite entre ce district et celui de Piet-Retief, l'Umkusi, l'Umvolosi noir et J'Umvolosi blanc. Le premier et le dernier sont les plus puissants et se déroulent dans des vallées plus profondes que les autres. S. : Zn Taba-'nkulu Mont Shongololo N. LIRE DÉCORS ED: Umkoesberg ! Pongolo riv. 335 ESS DELL LLC TLC É D RRETTES N7 Fig. 14. — Coupe dans le district de Vrijheid, montrant le Système du Karroo superposé aux terrains primaires. — Echelle des longueurs 1/1.000.000°. Formation du Hooge-veld : 14b, Grès supérieur ; 14 a, Grès inférieur ; — 13, Cou- ches d’Ecca ; 12, Conglomérat de Dwyka ; 2, Granite ancien ; r, Couches de Barberton et schistes cristallophylliens ; h, Horizon houiller ; &, Diabase. Dans le district de Vrijheid on rencontre les formations sui- vantes : le Système primaire, représenté par des schistes cristallo- phylliens, la série de Barberton et des massifs de granite intrusif. Les couches du terrain primaire sont toujours redressées, quel- 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 71 quefois jusqu'à la verticale, comme, par exemple, dans le district de Barberton. Le terrain primaire affleure là seulement où l'érosion a fait assez de progrès pour enlever la totalité des assises du Karroo, qui le recouvrent horizontalement en discordance. C'est ainsi qu'on doit chercher le terrain primaire en premier lieu au fond des grandes vallées du Pongolo et de l'Umvolosi blane, mais cependant en dehors de ces vallées le terrain primaire vient affleurer en plusieurs points à travers la couverture des strates horizontales superposées du Karroo. Le Système du Karroo est très facile à étudier dans les nombreuses gorges des torrents qui le recoupent, en donnant de fort belles coupes naturelles, par exemple dans la gorge du Hlengeni, sur le versant nord de la montagne d'Ingomo t. L'étude comparative de ces coupes qui révèlent tous les carac- tères du conglomérat de Dwyka et des couches d’Ecca résumées plus haut, m'a conduit aux conclusions suivantes : Le conglomérat de Dwyka, non stratifié, doit être considéré comme une moraine profonde au sens propre du mot, l'argile à blocaux d'un glacier gigantesque ou d'une calotte de glace de l’épo- que permienne, tandis que le Dwyka stratifié représente les dépôts glaciaires stratifiés. qui ont été déposés par les eaux de fonte du glacier au-dessous et au devant du glacier. Enfin les couches d'Ecca représentent les dépôts des torrents glaciaires et les sédiments amoncelés dans les lacs glaciaires du paysage morainique, prinei- palement durant la période de fonte et de retrait du glacier ou de la calotte glaciaire. Les couches d'Ecca permiennes peuvent donc. quant à leur genèse, être comparées aux dépôts du loess diluvien de l'Europe qui, abstraction faite des changements et des remanie- ments qu'ils ont subis ultérieurement, paraissent avoir eu pour origine la boue glaciaire déposée par les cours d’eau de fonte des glaces durant la période de retrait des glaciers quaternaires. Voici d’ailleurs quelques-uns des arguments qui militent en faveur de cette interprétation. 1° La surface des roches de la série de Barberton est burinée, polie et striée suivant une seule direction partout où elle était directement couverte par le conglomérat de Dwyka. La direction de ces stries est bien celle du mouvement du glacier ou de la 1. Voir G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 383, PI. IT, vis-à-vis p. 100. 72 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. calotte de glace, dont la moraine profonde burinaïit la surface des roches sous-jacentes. Cette moraine, solidifiée plus tard, est devenue le conglomé- St NNO._ rat de Dwyka. 2. J'ai moi-même obser- vé ces stries glaciaires : a) Sur la propriété à ; Doornpan [177] (dis- Fig. 15. — Conglomérat de Dwyka (12) reposant et de Nana nl sur les couches de Barberton (1) (propriété rict de Vrijheid) ; ns Doornpan [177], district de Vrijheid). La sur- les gorges de plusieurs face des schistes argileux quartzitiques de ruisseaux, qui, se pré- la série de Barberton est polie et striée dans cipitant de la montagne la direction indiquée par les flèches. Le poli et les stries sont des plus nets au point K, ; LE où les schistes sous-jacents viennent d’appa- Creuse leur lit à travers raître sous le conglomérat de Dwyka. Le le conglomérat de plan PP’ ne correspond ni aux plans de Dwyka et ont atteint la Stratification, ni aux plans de clivage des surface des argilites et schistes. 6 9-0 des schistes ardoisiers durs et fortement redressés, appartenant à la série de Barberton (voir fig. 15 et pl. x). du Hlangweni, ont Fig. 16. — Roche moutonnée [quartzite de la série de Barberton (1)] émer- geant du conglomérat de Dwyka (r2) sus-jacent qui l'entoure. Le quart- zite est poli et strié dans la direction indiquée par les stries et les flèches. (Propriété de Nauwpoort {556] district de Vrijheid). b) Sur la propriété de Nauwpoort [556], près du Zwart- Umwvolosi dans le district de Vrijheid, où quelques collines, formées par un quartzite de la série de Barberton, font saillie au travers du conglomérat de Dwyka, qui les entoure complète- ment. Ces collines, hautes d’une quinzaine de mètres, ont ‘leur surface si parfaitement polie, que l’image du soleil S'y trouve réfléchie comme dans un miroir convexe. IL est impossible de gravir à cheval ces petites collines, parce que le sabot du cheval ne peut prendre prise sur leur sol. Ce sont, en définitive, de véritables roches moutonnées, dont toute la surface est non seulement complètement polie, mais aussi cannelée par de nom- breuses et fines stries parallèles. Il est fort intéressant de noter, 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE ge que les stries sur ces collines ne sont pas limitées à un seul côté, celui d’où venait la pression, mais que toute la surface offre le même aspect: le poli et les stries ont donc été produites par NNO. S.S-E. Fig. 17. — Conglomérat de Dwyka (12) reposant sur la surface ondulée des couches de Barberton (1) (propriété des Mines d’or de Denny-Dalton). La surface des grès schisteux, conglomérats et quartzites de la série de Barberton sous le conglomérat est polie et striée dans la direction indi- quée par les flèches. une masse en mouvement non-seulement assez puissante et assez lourde pour pouvoir polir et graver les roches les plus dures, mais encore assez plastique pour pouvoir suivre les ondulations du terrain. Des glaciers de grande épaisseur sont les seules masses connues qui puissent répondre à ces desiderata. dont quelques lambeaux le recouvrent encore. — Ile du Vaal, près de Riverton (Griqualand-west). c) Sur les propriétés Vlakhæk [548] et Tusschenbeide [411] (district de Vrijheid), près de la mine d’or de Denny Dalton, où l’on rencontre des stries très nettes sur les surfaces polies des quartzites et des grès quartzitiques de la série de Barberton (fig. 17). 74 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. d) Sur la propriété Blauwbank [58]. où la surface d'un granite à amphibole est polie et striée. e) Le long du Vaal, près de Riverton, dans le Griqualand-west. La surface d’une diabase (passant à une diabase amygdaloïde) du Système primaire, probablement de la série du Witwatersrand, est polie et striée partout où elle apparaît au-dessous du conglomérat de Dwyka qui lui est superposé. Les croquis (fig. 18 et 19) faits sur Fig. 19. — Paysage morainique, près de Riverton ; la roche diabasique du Système primaire, qui aflleure au-dessous du conglomérat de Dwyka, est d 2 D 0 polie et striée très nettement. place en 1899 peuvent donner une idée de la topographie morai- nique de ces localités. Stow avait déja, en 1880, observé les phénomènes glaciaires dans le Griqualand-west et l'endroit repré- senté par le croquis ci-dessus, avait semblé si typique à Stow qu'il l'avait aussi dessiné du même point de vue !. On voit dans 1. G.-W. Srow a décrit d’une manière très exacte dans un manuserit posthume encore inédit les phénomènes glaciaires dans la province de Griqualand-west. J'ai eu l’occasion de contrôler sur place plusieurs de ces observations et de ces cartes et j'ai pu me convaincre de leur exactitude. Quoique plusieurs des interprétations et des conclusions de cet auteur ne puis- sent plus être acceptées aujourd'hui, entre autres la supposition d’une seconde période glaciaire diluvienne dans l'Afrique du Sud, voir : 48, p. 534, ses recherches remarquables, n’en sont pas moins dignes du plus grand intérêt. Ce manuserit original appartient à la Geological Society of South Africa et je me suis chargé d’en diriger la publication, dès que les fonds nécessaires auront été réunis. M. Dunx (Voir : E.-J. Dunx, 13, p. 9) a également trouvé des stries glaciaires sur une argilite dure, immédiatement sous-jacente au _ 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 79 la petite île au milieu du Vaal, les roches de diabase parfaitement polies transformées en roches moutonnées et encore partiellement recouvertes par des lambeaux du conglomérat de Dwyka en place. Les stries glaciaires sont dirigées sur ces roches dans le sens per- pendiculaire à celui du courant du fleuve et le fait que Stow a observé et dessiné ces stries en 1880, dans absolument les mêmes conditions que moi-même en 1899. prouve que le pouvoir érosif des eaux du Vaal sur ces marques, en dix-neuf ans, n'ést pas appré- ciable. Dans toutes les localités citées, dans le district de Vrijheid et dans la province de Griqualand-west, j'ai trouvé le conglo- mérat de Dwyka in situ dans le voisinage immédiat des surfaces polies et striées des roches plus anciennes et Les stries sont plus nettes et plus distinctes, près de la limite des deux formations, c'est-à-dire là où les roches sous-jacentes ! viennent affleurer. La direction des stries est : dans le district de Vrijheid : à Doornpan et dans plusieurs localités voisines, dans un rayon d’un kilomètre, S. 28° E., à NauwpoortS. 56° E., à Tuschenbeiïde près de la mine de Denny Dalton, $S. 33° E. Dans la province du Griqualand- west, à Riverton et dans plusieurs autres localités elle varie de E. 6° N. à E. 9° N. Dans le Griqualand-west la direction générale du mouvement a été E.N.E.-O.S.0. et le conglomérat de Dwyka renferme en abondance des blocs d'un porphyre quartzifère à plagioclase très typique qui affleure dans les régions situées plus à l’est et au nord- est, par exemple dans les districts de Bloemhof et dans les collines du Makwassie (district de Wolmaransstad). Dans le district de Vrijheid le sens du mouvement morainique n'est pas encore déter- miné avec certitude, mais toutes mes observations plaident en faveur d’un mouvement du S.E. au N.0O. conglomérat de Dwyka près du confluent des rivières du Vaal et de l'Orange. En discutant l’origine de ces stries, il dit : & It seems probable that this surface formed part of the shelving floor of the lake, and that icebergs were driven aground by the wind, thus scratching and grooving the rocks; the melting of the icebergs would cause their Stones, earth, etc., Lo be depo- sited on the ice-scratched floor, thus forming the conglomerate ». Cette théorie me semble très mal fondée; le seul fait, qu'on trouve ces stries sur les roches sous-jacentes et sur des distances de plusieurs dizaines de kilo- mètres, toutes dans la même direction, formant par conséquent un seul système ininterrompu de stries, est absolument incompatible avec la théorie des & icebergs » chassés par le vent. 1. Dans notre cas c’est le Système primaire. Srow a observé aussi dans le Griqualand-west des stries glaciaires sur des quartziles, appartenant au Système du Cap et très probablement à la série du Black-reef (manuscrit inédit). 76 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. M. Griesbach !, aussi bien que M. Sutherland ?, a remarqué des stries au-dessous du conglomérat de Dwyka sur la surface des grès, qui appartiennent très probablement à la série du Black- reef et sont équivalents au grès de la Montagne de la Table de la Colonie du Cap; mais il n'avait pas d'opinion sur la direction du mouvement des glaciers permiens dans le Natal. 2° Il existe quant à la structure et à la composition une analogie parfaite entre une argile à blocaux et le conglomérat du Dwyka. Seulement dans ce dernier le ciment argileux ? est endurei, silicifié et plus ou moins recristallisé, ce qui, étant donné l’ancienneté du Dwyka, s'explique aisément par des actions mécaniques et chimi- ques sous la pression des strates superposées du Karroo supérieur. En beaucoup d’endroits ou le Dwyka s’est trouvé depuis longtemps exposé à l’action de l'atmosphère, il s’est altéré à nouveau # en une espèce d'argile à blocaux et toutes les différences disparaissent. Le conglomérat de Dwyka renferme partout en abondance des cailloux striés. J’en ai trouvé dans beaucoup de localités du district de Vrijheid, sur la propriété Atholi [85], près d'Amsterdam (district d’Ermelo), dans les environs de Vereeniging et près de la mine d’or de Modderfontein (district de Heidelberg), sur plusieurs points du district de Bloemhof, et au delà de la frontière de l'Etat, le long de la rivière du Vaal, en aval de Fourteenstreams, et dans bien d'autres endroits dans la Colonie du Cap et dans le Natal. 1. K.-L. GRIEsBACH, 21, p. 60, dit: Grooves, quite similar to those in the Alps, occur in great abundance on the sandstone of the Infumi River, about 20 miles south of Durban ». 2. P.-C. SUTHERLAND, 52, p. 515, dit : « The old sandstones, which lie immediately beneath the boulderclay have their upper surfaces, in many instances, deeply grooved and striated, as if a semiplastic substance, contai- ming hard and angular fragments, had been passed over it with considerable pressure ». 3. Dans le Dwyka frais le ciment montre à l'examen macroscopique une texture tant soit peu cristalline bien différente de celle d’une argile, ce qui a suggéré sans doute à quelques-uns des observateurs l’idée de l’origine éruptive de cette roche. Maïs en examinant ce ciment sous le microscope, on constate qu’à l’origine il doit avoir été une boue contenant de nombreux petits fragments angulaires ou semi-angulaires de diverses roches et miné- raux avec prépondérance du quartz, mais que cependant, la texture clastique primitive a été largement modifiée par des phénomènes de recristallisation. 4. Dans les plaines du Karroo, dans la Colonie du Cap, où le climat est extrêmement sec, le conglomérat de Dwyka, quoique exposé à l’action de l'atmosphère depuis longtemps, ne montre guère de marques d’altération ou de décomposition. I9OI GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE jo) 3° Dans le conglomérat de Dwyka on trouve des dépôts stratifiés et non stratifiés, les uns alternant avec les autres. C'est justement ainsi que sont constitués tous les dépôts vraiment glaciaires. Les dépôts non-stratifiés, l'argile à blocaux, doivent appartenir à la moraine profonde stricto sensu, et les dépôts stratifiés sont for- més par les cours d’eau de fonte qui coulent au fond du glacier et s'en échappent. Plus le glacier est grand, plus le réseau de ces torrents glaciaires devient complexe et différencié. Leurs lits se déplacent comme ceux des autres fleuves ; ils disparaissent ou augmentent de débit et de nombre avec le retrait ou l’accroisse- ment des glaciers et le résultat final après une longue période de glaciation, doit être que les parties non-stratifiées des dépôts alter- nent en plusieurs places avec des parties stratifiées. Il est évident que vers le centre d'une grande nappe de glace ou d'une calotte glaciaire les dépôts morainiques seront assez pauvres en dépôts stratifiés ou même en manqueront, tandis qu'au contraire, près des bords du glacier, les dépôts stratifiés augmenteront en étendue et en puissance, et pourront même en quelques points avoir une plus grande importance que la véritable argile à blocaux non- stratifiée. Du reste, sur la bordure extrême des productions gla- ciaires, la marche en avant et le recul périodiques de la nappe glaciaire suffisent déjà à produire des alternatives de dépôts gla- ciaires stratifiés et non-stratifiés. Ces dépôts stratifiés peuvent être, tantôt très riches en cailloux plus ou moins arrondis, tantôt les cailloux peuvent y manquer complètement. IL va sans dire qu'on retrouvera dans ces dépôts tous les caractères des dépôts fluviatiles, comme par exemple la stratification diagonale et la succession brusque des lits de gros graviers à des boues fines. Les dépôts des eaux glaciaires diffèrent cependant des dépôts des fleuves ordinaires en ceci, qu'ils sont surtout composés d’une boue très fine, produite par la trituration des roches dans la moraine profonde. On pourrait rencontrer parfois dans cette boue fine des blocs de grandes dimensions, qui seraient tombés des moraines latérales, médianes ou terminales, par des crevasses. | Tous ces caractères sont représentés abondamment et avec une netteté parfaite dans les parties stratifiées du conglomérat de Dwyka et peuvent être étudiées à merveille dans les nombreuses coupes naturelles qu'offrent les gorges dans le district de Vrijheïd. En outre, on constate souvent qu'un banc de Dwyka stratifié, intercalé entre deux bancs de conglomérat de Dwyka non stratifiés, est dans sa partie supérieure refoulé et brouillé, phénomène qu’on 78 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. doit attribuer à la pression exercée par la moraine profonde, qui glissait sur ces couches et qu’on retrouve, reposant toujours au- dessus sous forme de banc de conglomérat non-stratifié. C’est un phénomène absolument analogue à celui qu’on a observé sous les moraines profondes des glaciers de la période glaciaire de la Scandinavie et de l'Écosse et qui est connu sous le nom de con- torted-drift. 4° Enfin, dans le conglomérat de Dwyka, se rencontrent des blocs de roches, affleurant à d'assez petites distances, mélés à d'autres débris provenant de régions lointaines; l’origine de quelques-uns de ces débris est d’autant plus obscure que ces roches n'ont pas encore été rencontrées in situ dans l'Afrique du Sud. Souvent le conglomérat de Dwyka a un caractère local par la prépondérance des débris d’une certaine roche sur les autres, ce qu’il n’est pas difficile d'expliquer. Lorsqu'un glacier se meut et qu'une certaine roche, que nous désignerons par À, affleure sur son parcours, ce glacier détache des morceaux de la roche A et les mêle aux autres débris. La moraine profonde sera alors en aval du point d’affleurement de la roche A, caractérisée par la présence, dans sa masse, d'une certaine proportion de fragments de la roche A, qu'on ne retrouvera pas en amont; et il en résultera que si cette proportion est assez forte, la moraine de fond aura un caractère local. J'ai observé souvent un tel caractère local dans le conglo- mérat de Dwyka ; à Vereeniging par exemple, où le conglomérat de Dwyka repose sur les dolomies du Système du Cap, qui affleu- rent à une courte distance, ce conglomérat abonde en cailloux striés de calcaire dolomitique que je n'ai jamais trouvé dans le conglomérat de Dwyka du district de Vrijheid. Ces caractères locaux, offrent un bon moyen de déterminer le sens du mouvement du glacier permien. C’est ainsi que, comme nous l'avons vu déjà plus haut, la présence de nombreux blocs de porphyre quartzifère à oligoclase dans le conglomérat de Dwyka, le long du Vaal, en aval de Fourteenstreams, nous prouve que le sens du mouvement doit avoir été là, de l'E.N.E. à l’'O.S.O. M. Dunn ! à déjà, en 1886, donné un exemple frappant du caractère local que prend quelquefois le Dwyka; il écrit : East of the Doornberg range (Griqualand-west) there is a complete absence of the yellow jasper and altered crocidolite, of which these hills consist, in the Dwyka conglomerate, while to the west of this range they are abundantb represented, mingled with the far-borne material. Un glacier, 1. E.-J. Dunx, 13, p: 9. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 79 ayant glissé de l’est à l’ouest à travers les terrains du Doornberg- range, aurait produit exactement ces phénomènes, mais je ne erois pas que jamais des glaces flottantes, comme le voudrait M. Dunn, pourraient donner de tels résultats. 5° La matière des couches d’'Ecca, est, quant à sa composition, parfaitement identique au ciment du conglomérat de Dwyka. C'est en somme une boue, durcie aujourd’hui, transportée par les eaux glaciaires et déposée soit dans les grands lacs, qui caractérisent le paysage morainique, soit dans le vaste champ d'inondation de cours d'eau torrentiels durant la période de fonte et de retrait de la nappe glaciaire. Les grands blocaux, d’ailleurs assez rarement rencontrés dans les argilites d'Ecca, ont peut-être été transportés par des glaçons flottants sur ces fleuves et ces lacs. 6° Si l’on accepte la théorie glaciaire, on peut se faire aisément une idée de la distribution erratique du conglomérat de Dwyka et des couches d’Ecca. Il serait diflicile d'expliquer autrement, com- ment, dans des terrains totalement dépourvus de failles, le Dwyka peut être trouvé à des altitudes très diverses, et en position nor- male malgré cette différence d'altitude. Avec la théorie glaciaire, cette difliculté disparait, si l’on admet qu’un grand glacier ou une calotte de glace, a buriné la surface des roches sous-jacentes, en restant assez plastique pour pouvoir suivre les accidents du terrain, les transformant en roches ou en collines moutonnées, polies et cannelées, et déposant ainsi sa moraine profonde simultanément à des altitudes bien différentes et pourtant en position normale. Il serait aussi diflicile d'expliquer comment l'épaisseur de ces forma- tions peut varier si fortement et comment, en quelques endroits, soit le conglomérat de Dwyka, soit les couches d’Ecca, soit tous les deux, peuvent manquer en-dessous des strates du Karroo supé- rieur, même dans des régions où le Karroo inférieur se trouve en général très bien développé. L'explication est simple, si on se sou- vient que sous les glaciers, et dans les régions qu'ils abandonnent par leur retrait, en quelques points, les effets de l'érosion sont prépondérants sur ceux de la sédimentation, tandis que dans les localités voisines, l'inverse se produit. En résumé, nous admettons que le conglomérat du Dwyka etles couches d’Ecca, c’est-à-dire le Karroo inférieur, sont d’origine glaciaire, et cette origine, nous n’en doutons pas, permettra d’expli- quer tous les caractères des couches du Karroo inférieur. Mais, on devra s'attendre à constater tous les phénomènes d’une glaciation 80 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. prolongée, et cela dans des proportions beaucoup plus grandes et plus imposantes que pour le diluvium de l'hémisphère nord. Il est certain que l’on doit admettre l'existence d’une calotte de glace de grande épaisseur et de très grande étendue, aussi bien qu'une durée fort longue de la période de glaciation, pour pouvoir expliquer l'épaisseur énorme ! et le développement si diversifié des dépôts glaciaires permiens de l’Afrique australe. Le problème de la glaciation dans l'Afrique du Sud, durant la période permo-carbonifère, offre plus qu'un intérêt local. Les recherches géologiques dans l'Inde et dans l'Australie ont prouvé qu’il existe dans ces contrées des formations d’une analogie frap- pante. Dans l'Inde c’est le Système du Gondwana qu’on pourrait identifier avec le Système du Karroo. A sa base on trouve les con- glomérats de Talchir, qui offrent tous les caractères d’une argile à blocaux, et sont absoïlument comparables au conglomérat de Dwyka. Les roches plus anciennes sous-jacentes (Vindhyan-limestones) ont été trouvées polies et striées dans plusieurs localités, entre autres près de Chanda, dans les provinces centrales de l’Inde ?. Les Tal- chir-shales sont associés à ce conglomérat ; ils possèdent tous les caractères des couches d’Ecca. Comme les couches d’Ecca, ils sont presque partout dépourvus de fossiles. Sur ces dépôts glaciaires reposent des grès, comparables au grès du Karroo supérieur, dans lesquels on a trouvé une flore à Glossopteris, très analogue à celle du Karroo. En Australie, les traces d’une glaciation ancienne ne sont pas moins nettes et les dépôts glaciaires, qui sont associés là aussi bien que dans le Salt-range de l’Inde, aux sédiments contenant des fossiles marins, ont établi que la glaciation de ces deux continents était contemporaine el avait eu lieu dans la dernière période de l’ère paléozoïque. Et les affinités générales entre le Système du Karroo et le Système du Gondwana sont si évidentes, qu'on peut aller plus loin et admettre que les dépôts glaciaires permiens de l'Afrique du Sud, de l’Inde et de l'Australie sont contemporains. Les dépôts glaciaires du Karroo inférieur ont sans doute couvert toute la moitié sud du Transvaal *. Dans l’est ils sont aujourd’hui 1. Le conglomérat de Dwyka atteint dans la Colonie du Cap une épaisseur de plus de 400 mètres. 2. R.-D. OLpHAM, 38, p. 160. 3. Je n’ai pas trouvé de dépôts du Karroo inférieur au nord de 260? latitude Sud. Il est vrai que M. Dunx a signalé, sur sa carte géologique du Transvaal, le conglomérat de Dwyka beaucoup plus au nord, dans le district jgof GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAÎNE 81 invisibles parce qu'ils sont recouverts par les strates du Karroo supérieur et ils affleurent seulement sur les escarpements du haut plateau vers l’est, c’est-à-dire dans la portion orientale des dis- tricts d'Ermelo et de Carolina et dans les districts de Piet-retief et de Vrijheid, où ils peuvent être étudiés facilement. Dans le Trans- vaal central, le Karroo supérieur diminue beaucoup d'épaisseur et le Karroo inférieur affleure çà et là, par exemple près de Vereeni- ging et de Mevyerton. dans plusieurs localités des environs de Heidelberg et de Boksburg, sur les propriétés Zuurbekom [9] et Syferfontein [32], etc. Enfin dans la partie occidentale le Karroo supérieur faisant défaut, le Karroo inférieur affleure très fréquem- ment. Cependant le Karroo inférieur a été dans cette région en grande partie enlevé par l'érosion et dans les régions où il existe encore, il est très souvent caché par des dépôts superficiels plus récents, comme des tufs calcaires et des dépôts éoliens de petite épaisseur (1 à { mètres). Le conglomérat de Dwyka prend une certaine importance écono- mique dans les environs de Vereeniging où le ciment, après avoir été séparé des blocs qu’il contient, est utilisé pour la fabrication de briques très résistantes, excellentes pour la construction des fours et des habitations. 2. — KARROO SUPÉRIEUR Les couches du Karroo supérieur sont presque toujours dans une position sensiblement normale et horizontale. Parfois elles sont un peu redressées ; elles ne sont jamais plissées, quoiqu’elles soient assez souvent disloquées par des failles qui ont par places mor- celé les terrains du Karroo supérieur en îlots, dont les strates correspondantes, tout en restant horizontales, se trouvent à des altitudes différentes. Le Karroo supérieur est formé par des grès, des argilites, des argilites arénacées, des argiles charbonneuses et des couches de houille !. Une stratification oblique est nettement indiquée dans ce Système et est surtout bien marquée dans les grès. du Waterberg, et mème dans les Blauwbergen, au-delà du tropique du Capri- corne, mais mes recherches m'ont prouvé que ces conglomérats dans le district du Waterberg ne sont pas glaciaires et forment la base du grès du Waterberg, et je crois probable que les conglomérats des Blauwbergen que je n’ai pas visités sont identiques à ceux du Waterberg. Voir : E.-J. Dunx, 14. 1. On rencontre assez rarement des couches marneuses dans lesquelles le calcaire s’est concentré en nodules. Près de Standerton, j'ai trouvé, dans un de ces nodules, une aile d’insecte orthoptère, très bien conservée. 13 Juillet 1901. — T. 1°. Bull. Soc. Géol. Fr. — 6 82 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. 1 De nombreux bancs de diabase (dolérite) sont intercalés en concordante parfaite entre les autres strates de cette formation. Dans ces bancs de diabase, le plus souvent une diabase à olivine, on peut observer généralement une disposition columnaire très nette. En outre tout le système est traversé par un véritable réseau de dykes de diabase du même type. La diabase du Karroo peut être facilement distinguée des diabases plus anciennes. Le type ordinaire de la diabase grenue du Karroo est connu par la popula- tion minière du Transvaal sous le nom de dolérite !. NivEAU HOUILLER. — Dans le Karroo supérieur du Transvaal, auquel j'ai provisoirement donné le nom de formation du Hoog'e- veld, on rencontre les couches de houille qui, en raison du déve- loppement toujours croissant de l’industrie minière au Witwa- tersrand (industrie qui exige de grandes quantités de combustible), constituent une richesse inappréciable pour le pays. Ce sont en général des charbons maigres, ne donnant pas de cokes et ne pouvant pas être employés dans les fonderies. Parfois leur teneur en soufre les rend dangereux, en ce que, exposés à l'air, la combustion spontanée est à craindre. Souvent ils renferment en plus ou moins grandes quantités des matières incombustibles. En somme ces charbons sont excellents seulement pour l'emploi dans les usines à vapeur et pour tous les usages domestiques. Les gisements en sont immenses et la partie déjà exploitée est minime *. Il est bien certain que les houillères de la République sud-africaine pourront suffire aux demandes de toute l'Afrique durant au moins une centaine d'années. Les couches de houille du Transvaal paraissent devoir être regardées comme des alluvions végétales, des dépôts de torrents. Les fragments de troncs de Sigillaria et de troncs, de tiges et de feuilles de diverses espèces de Glossopteris jouent un grand rôle dans la composition de la houille elle-même. Le toit des couches de houille renferme, comme on peut le constater facilement dans les mines de houille de Vereeniging de nombreux troncs couchés. Je crois qu’on peut admettre pour les houillères du Transvaal — du moins pour la plupart d’entre elles — un mode de formation ana- logue à celui que MM. Grand’Eury et Fayol ont admis pour les bassins houillers du Centre de la France. 1. E. CoHEN a donné une description pétrographique détaillée d’un bon nombre de ces diabases du Karroo supérieur, appartenant pour la plupart à l'étage inférieur, dit de Beaufort, ‘7, p. 220. 2. En 1898, la production annuelle s’évaluait à 2.000.000 de tonnes. 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 83 Les connaissances actuelles permettent de penser qu'il existe dans le Karroo supérieur du Transvaal un seul niveau géologique renfermant des couches de houille exploitables. On peut évaluer que ce niveau se trouve situé sur le haut plateau à une altitude variant entre 1200 et 1800 mètres. À première vue, ce niveau houiller paraît se trouver à des hauteurs très inégales dans la succession des strates du Karroo supérieur. À Vereeniging, à Meyerton et dans les environs de Boksburg, par exemple, le con- glomérat de Dwyka est situé à peu près directement sous les couches de houille, tandis que dans le district de Vrijheid, un complexe de grès et d’argilites de 200 à 300 mètres d'épaisseur les sépare du Karroo inférieur. Dans le district de Vrijheid on peut distinguer deux étages de grès dans la formation du Karroo supérieur. L'un, l'étage des grès inférieurs, est composé de bancs puissants de grès, gris bleuâtres, devenant jaunâtres à l’air. En voie de décomposition, ces grès acquièrent une structure sphéroïdale, souvent très nette. On trouve très fréquemment dans ces grès des fragments de bois pétrifiés ; près d’'Umkusiberg, sur la propriété du même nom, on rencontre en abondance des troncs d'arbres couchés et des rameaux pétrifiés, dirigés suivant diverses directions. Des impres- sions végétales, de feuilles, de tiges, etc., et de très minces veinules de houille sont assez fréquentes dans ces grès, mais les couches de houille exploitables y font entièrement défaut. Les grès de l’étage supérieur sont de couleur plus claire et possè- dent un ciment assez riche en kaolin. Ces grès passent parfois à des arkoses. On trouve intercalées entre leurs bancs des argilites et des couches de houille exploitables. La position du Système entier du Karroo dans le Transvaal devient plus compréhensible dès qu'on se rend compte que tout le Système s’amincit en allant de l’est à l’ouest. C'est ainsi que les grès, etc., qui sont sous-Jacents aux lits de houille dans le district de Vrijheid ne se retrouvent plus dans le centre du Transvaal. De méme on observe dans cette partie centrale du pays un nombre restreint de strates de grès, d’argilites et de diabases au-dessus des couches de houille, tandis que dans l’est des dépôts puissants repo- sent sur le terrain houiller. Ce développement des lits houillers, presque aussi considérable dans la région centrale que dans l’est, constitue un nouvel avantage. Le Karroo supérieur forme, seulement dans la partie sud-est du Transvaal, une nappe continue, rejoignant la vaste nappe du « 84 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. Karroo de l'Etat libre d'Orange. Le sous-sol des districts de Wak- kerstroom et de Standerton en est entièrement formé, celui des districts de Vrijheid, d'Utrecht, de Carolina, d’Ermelo, de Middel- burg, de Prétoria et de Heidelberg en est en partie composé. En outre de cette grande nappe homogène on trouve vers le nord et l'ouest, de nombreux petits lambeaux du Système du Karroo disposés en discordance sur les terrains primaires ou sur ceux du Système du Cap. C'est ainsi, qu'on trouve des îlots du Système du Karroo dans le domaine du South-rand-Coalfield et dans les envi- rons de Boksburg sur le terrain primaire, c’est-à-dire sur les couches de Hospital-hill ou sur celles du Witwatersrand; dans les environs de Vredefort sur le granite ancien; à Vereeniging et à Meyerton (district de Heidelberg), à Zuurbekom [9] et à Syferfontein [32] (district de Krugersdorp), et à Stilfontein [381] (district de Potehef- stroom), sur la dolomie ; dans les environs de Belfast, sur la série de Prétoria : à Waterval au nord de Prétoria, sur la norite et la syénite ; plus au nord encore à Hamanskraal (district de Pretoria) et dans quelques localités du district de Middelburg, sur le granite rouge. À l’ouest de Klerksdorp le Karroo supérieur n’a pas encore été rencontré. | Les lambeaux du Système du Karroo, qu'on trouve sur les dolo- mies, méritent une mention spéciale ; ils s'étendent en une ligne courbe, à l’ouest, au nord et à l’est des montagnes du Gatsrand, formées par des couches de la série de Prétoria. Ils sont situés, comme on peut le constater très facilement sur les propriétés Syferfontein et Zuurbekom, dans un terrain plat et sont entourés de tous côtés par des affleurements de roches de la série des dolo- mies. En réalité, ces lambeaux sont des compartiments du Système du Karroo qui se sont affaissés dans les strates de la série des dolo- inies sous-jacentes. Ces aflaissements ont été causés par l’eflon- drement de la clef de voute des cavernes de la dolomie. Le Système du Karroo qui jadis couvrait entièrement ce terrain, s’est trouvé plus tard détruit par la dénudation et l'érosion et maintenant est entièrement disparu, sauf dans ces localités, où il pouvait, par sa position plus basse, due à son affaissement, échapper à l'effet des forces dénudatrices. IL va sans dire que cet affaissement a modifié la position normale des couches de ces lambeaux et cela explique pourquoi on a trouvé dans le lambeau de Syferfontein une épaisse couche de houille ! redressée sous un angle d’au moins 4o°. Ces 1. La découverte de la belle couche de houille de Syferfontein a une grande importance, parce que la distance qui la sépare des mines du West-rand au 1901 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 89 lambeaux situés par conséquent à un niveau égal à celui de la dolo- mie, ont encore une autre importance économique. Ils forment des réservoirs d’eau en communication souterraine avec les réservoirs internes inépuisables de la formation dolomitique ; formés de grès, ils offrent beaucoup plus de facilités pour la construction de puits et pour les forages profonds nécessaires pour capter les eaux sou- terraines. À Zuurbekom on a foré des puits munis d'appareils élévatoires perfectionnés dans l’ilot du Karroo situé en ce point. Ces ouvrages fournissent par jour les 4.000.000 de gallons d’eau absolument pure qui servent à alimenter la ville de Johannesburg. Jusqu'en 1897 l'eau fournie par les compagnies des eaux de Johannesburg était insuffisante et impure ; la découverte et l'exploi- tation de la magnifique prise d’eau de Zuurbekom, ont apporté une amélioration considérable à l’état sanitaire de la ville, bienfait dont elle est redevable, tant à l'application des observations géolo- giques sur la région qu'au mérite de M. Draper ‘. On peut se faire l’idée suivante du mode de formation du Karroo supérieur. Après le retrait des glaciers ou de la calotte de glace de l'extension glaciaire permienne, le paysage morainique régnait dans cette région, où le conglomérat de Dwyka était en grande partie couvert et de tous côtés environné par les couches d’Ecca. L'érosion ne tardait pas à exercer son pouvoir destructif et les dépôts du Karroo inférieur furent sans doute, par places, remaniés complè- tement. Mais, en même temps, une série de sédiments commençait à se former qui constitue le Karroo supérieur. Ces dépôts d’eau douce s'accumulaient en partie dans les courants d’eau, en partie dans les lacs. C'étaient des grès et des argiles à stratification oblique et quelquefois aussi des couches de débris de végétaux apportés par les eaux torrentielles, couches qui sont devenues les lits de houille actuelle. A l’origine, ces sédiments furent déposés dans les dépressions d'origine glaciaire de la contrée et ils constituèrent ainsi des lambeaux, isolés les uns des autres. Mais plus tard, ces dépres- sions étant comblées, la formation du Karroo supérieur s'épancha, sans interruption, sur un large espace, embrassant une grande partie de l'Afrique australe. Une faible partie seulement de l'énorme développement du Système du Karroo, a persisté jusqu'à sud de Krugersdorp ne surpasse pas 25 kilomètres, tandis qu'auparavant ces mines devaient chercher leurs combustibles à des distances au moins trois fois plus grandes. 1. D. DRAPER, 11, p. 139. 86 G.-A.-F. MOLENGRAAFF o1 Janv. l'époque actuelle, le reste ayant été détruit pendant la période de dénudation qui suivit celle de sa formation, période qui d’ailleurs continue encore aujourd'hui. GRANDE FAILLE DE L'Esr. — Une dislocation très remarquable nous apporte les preuves indubitables, que les couches du Système du Karroo ont jadis eu vers l’est une extension beaucoup plus grande qu'aujourd'hui, ce qu'on pourrait du reste déjà déduire de la manière abrupte dont les couches du Système du Karroo se terminent dans les escarpements, à l’est du haut plateau du Trans- vaal et de l'Etat libre d'Orange. Dans la partie orientale du Transvaal on trouve, dirigé du nord au sud, une grande faille qu'on peut regarder, au point de vue géologique, comme la limite orientale du plateau continental de l'Afrique du Sud. J'ai appelé cet accident la grande faille de l'est !. Les régions situées à l’est de cette faille se sont affaissées par rapport à celles de l’ouest d'au moins 1500 mètres. Cette faille est située à une distance moyenne de 16 kilomètres de la frontière de la Colonie portugaise de Mozambique. Elle est toujours parallèle à la chaîne des montagnes du Lebombo, qu’elle longe et elle peut très probablement être regardée comme le prolongement septentrional de la grande faille, décrite par Griesbash, qui a abaissé au niveau de la mer, dans le Natal, les strates du Karroo inférieur, alors qu’elles atteignent dans les environs de Pieterma- ritzburg une altitude de 600 mètres. Dans le Transvaal la lèvre occidentale de la faille est toujours formée de granite ancien ou de schistes du Système primaire, tandis que la lèvre orientale est formée de grès, d'argilites à Glossopteris et de couches de houille apparte- nant au Karroo supérieur ; ces couches ont une inclinaison de 15 à 20° vers l’est. Ces dépôts, tout-à-fait identiques à ceux du Karroo supérieur du haut plateau, sont couronnés, en concordance, par les roches du Lebombo. Ces dernières sont des roches éruptives d'épanchement dont la partie inférieure, qui affleure dans les environs de Komatiepoort, sur le versant occidental des mon- tagnes de Lebombo, consiste en roches du groupe de la diabase et du mélaphyre avec une prépondérance de types amygdaloïdes. Il est bon de noter que, parmi ces roches amygdaloïdes, on trouve, près du pont du chemin de fer du Selati, sur la rivière du Croco- dile, des types qui sont caractérisés par des amygdales très allon- gées et ressemblent beaucoup aux roches amygdaloïdes du même 1 Voir : G.-A.-F. MOoLENGRAAFF, 32, p. 138, et PI. I. IOOI GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE (7 type, des monts Maluti dans l’État libre d'Orange, décrits par Cohen !. Ces dernières se trouvent au sommet de l'étage supérieur du Karroo supérieur. Nos connaissances sur les contrées du Karroo voisines de la chaîne du Lebombo, sont jusqu'à présent trop dissé- minées pour permettre de juger si cette ressemblance n'est pas purement accidentelle. Plus haut, dans la partie supérieure, c’est-à-dire dans la chaîne du Lebombo, on trouve des types plus acides, appartenant au groupe des felsophyres. Ces roches acides sont représentées par plusieurs variétés dont quelques-unes sont scoriacées et renferment, dans leurs cavités, de belles cristallisations de caleite et des zéolithes, tandis que quel- ques autres fournissent d'excellentes pierres à bâtir. Ces coulées de laves anciennes ont une inclinaison de 10° à 30° à l’est, pente qui correspond à l’inclinaison des strates de grès de la formation sous-jacente du Karroo supérieur. Toutes ces roches montrent une structure fluidale très nette. L'examen microscopique détaillé des nombreuses variétés de roches éruptives qu'on trouve en traver- sant la chaine du Lebombo, n’est pas encore terminé, aussi je les ai réunies provisoirement sous le nom de «roches du Lebombo ». La structure de la chaîne paraît être très uniforme sur de gran- des étendues, si l’on en juge par la description des roches trouvées par M. Cohen * qui la traversa, en 1873, près de Matalha Poort, à 20 kilomètres au sud de Komatiepoort; et par les échantillons que j'ai reçus de Pongolo-poort, point situé à 205 kilomètres encore plus au sud. On retrouve sur ces deux points les mêmes types de roches, que j'ai moi-même rencontrés dans la magnifique tranchée du chemin de fer entre les stations de Komatiepoort et d’'Inkomati. Dans la Colonie du Cap on a, en général, distingué dans le Karroo supérieur deux étages, l’éfage de Beaufort(Schenck et Feistmantel) ou Xarroo-beds (Green) et l'étage du Stormberg. Dans l'étage du Stormberg on admet avec M. Dunn les subdivisions suivantes, en allant de haut en bas : Volcanic-beds ; Cave-sandstone ; Red-beds ; . Molteno-beds. ei D EE 1. E. COHEN, 5. 2. E. Couex, 6, p. 67-91, donne une excellente description pétrographique des types de mélaphyres et de felsophyres du Lebombo, qu’il a rencontrés en traversant la chaîne. tele] G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. Dans les Molteno-beds se trouvent toutes les couches de houille exploitables de la Colonie du Cap. Ces couches carbonifères se distinguent, au Cap, par la présence d'une flore à Thinnfeldia odontopteroïdes, Sphenopteris elongata, Podozamites elongata, Baiera Schencki, Pecopteris, etc., et par l'absence des Glossop- teris. Elle a donc un caractère plus jeune que la flore à Sigillaria et Glossopteris, notamment Glossopteris Browniana et GI. indica, qui règne dans tous les terrains houillers connus du Transvaal ; mais c’est précisément, d'après O. Feistmantel !, par une flore identique que l'étage de Beaufort est caractérisé. Il en résulte que les terrains houillers du Transvaal, que j'ai réunis sous le nom de série du Hoogeveld, ne peuvent appartenir à l'étage du Stormberg, comme l'indiquent les cartes publiées par Dunn et Schenck. La série du Hoogeveld représente l'étage inférieur du Karroo supérieur et doit être considérée comme parallèle à l'étage de Beaufort de la colonie du Cap ?. M. R. Zeiller 3 l’a établi d’une manière indiscutable en se basant sur des preuves paléontologiques et mes recherches dans ces dernières années m'ont prouvé que la théorie de M. Schenck, d’après laquelle les couches de Beaufort étaient en transgression sur les dépôts du Karroo inférieur vers le Nord et les couches du Stormberg également en transgression sur les couches de Beaufort vers le Nord devait être rejetée. Dans le Transvaal, au contraire, le Karroo supérieur est exclusivement, ou du moins presque uniquement. représenté par son étage inférieur. Quant à l’âge de ces dépôts, les recherches de MM. Seward f et Leiller ont établi, qu'on pouvait admettre que l'étage inférieur du Karroo supérieur dans le Transvaal était permo-carbonifère. DÉPOTS PLUS RÉCENTS QUE CEUX DU KARROO Jusqu'à présent il n’a pas été rencontré dans le Transvaal de dépôts sédimentaires plus récents que ceux du Système du Karroo et toute la configuration du pays prouve qu’il y à régné une longue période de dénudation ÿ. Cela n'empêche pas, qu'on trouve eà et 1. O. FEISTMANTEL, 15. 2. En 1894, j'ai discuté cette même question et exprimé cette opinion, que le terrain houiller du Transvaal devait appartenir à un étage du Karroo, plus ancien que les Molteno-beds (30, p. 238). 3. R. ZeiLcer, 54, p. 374. . A.-C. SEWARD, 47, p. 02. . D, DRAPER, 12, p. 34. ot = 1900 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 89 là, des dépôts superficiels récents, comme des alluvions, des bancs de limonite, de dépôts éoliens, des tufs calcaires, ete., qui, cepen- dant, n’ont jamais qu’une importance locale. Parmi les roches éruptives, il est bien certain que la roche diamantifère est plus récente que les dépôts du Karroo, ear dans l'Etat libre d'Orange elle traverse les strates du Karroo supérieur. En 1897, on découvrit sur la propriété Rietfontein [501], dans le district de Prétoria, à 27 kilomètres à l’est de la capitale, un affleu- rement d'une roche, identique à la roche mère, bien connue, de Kimberley, et, par le lavage des terres de la surface, on ne tardait pas à y rencontrer des diamants. On a constaté, grâce à des tranchées et à des forages, qu'il s'agissait ici d'une vraie cheminée diamantifère, verticale, de forme cylindrique, remplie d'une brèche péridotique serpentinisée, identique en tous points à la kimberlite. Un peu plus tard on a découvert des gisements identiques sur la propriété Kaalfontein voisine de Rietfontein [507] et sur les pro- priétés Elandshoek [74] et Franspoort [426] ". Toutes ces cheminées sont situées dans des couches de la série de Prétoria et seulement dans celles de sa partie supérieure, les couches du Magaliesberg, c’est-à-dire dans une formation plus ancienne que celle du Karroo où se rencontrent les couches de houiïlle. Or, comme il n'existe pas, dans des niveaux plus bas que celui du Karroo, de couches renfermant une proportion de matières charbonneuses quelque peu importante, il en résulte, que la teneur en carbone, sous forme de diamant. de la brèche éruptive diaman- üfère ne peut pas être attribuée à des débris de roches houillères arrachés aux parois de la cheminée par le magma éruptif en voie d'ascension. Ces mines de diamant du Transvaal, situées dans un niveau géologique plus profond que les cheminées de la Colonie du Cap ou de l'Etat libre d'Orange, viennent à l'appui de la théorie qui veut que le diamant soit un élément primordial de la kimberlite. Du reste, après les remarquables expériences de M. Moiïssan, on pouvait soupçonner qu'à de grandes profondeurs, dans un magma éruplüf basique, le carbone ne pouvait cristalliser que dans sa modification la plus dense, le diamant. 1. Pour plus de détails sur ces gisements, voir : G.-A.-F. MOLENGRAAFF, 32, p. 144 et 31; et M. Francxe, 17. Aanhangsel B. 90 G.-A.-F. MOLENGRAAFF 21 Janv. Ouvrages consultés 1. A. GEDDES BAIN. — On the geology of Southern Africa. Trans. of the geol. Society, 2, vol. VIE, p. 175. London, 1856. 2. A. BorpeAux. — Etudes sur les champs aurifères de Lydenburg, de Kaap et du Charterland. Annales des Mines, 9, XI, p. 273. Paris, 1892. 3. J.-G. Bousquer. — De tegenwoordige toestand von de goudmijn-indus- trie in de Kaapformatie van de Lijdenburg goudvelden. Jaarrapport van den Staats-myningenieur orer het jaar 1896. Aanhangsel D., Pretoria, 1899. 4 E. ConEn. — Briefl. Mittheilung aus Süd-Afrika. Neues Jahrb. fur Mineralogie, etc., 1873, p. 511. 5. In. — Ueber eigenthümliche Melaphyrmandelsteine aus Süd-Afrika. Neues Jahrb., ete., 1875, p. 113 ; et In. Mandelstein aus den Maluti-bergen, Süd-Afrika. VNeues Jahrb. für Mineralogie, etc., 1880, I, p. 96. Stuttgart, 1880. 6. In. — Erläuternde Bemerkungen zu der Routenkarte einer Reise von Lijdenburg nach den Goldfeldern und von Lijdenburg nach der Delagoa-Baï im ôstlichen Süd-Afrika. 11 Jahresber. der geographischen Ges. in Ham- burg, 1855. 7. ID. — Geognostisch-petrographische Skizzen aus Süd-Afrika. 11, Neues Jahrbuch, etc., Beilage, Bd. V, p. 195, 1887. 8. Ip. — Daber eine nôrdlich von Pretoria (Transvaal) i im Granit gelegene Salzpfanne. Tschermak’s Min. und petr. Mittheilungen 2, XV. Wien, 1895. 9. P.-H. Daums. — Ueber einige Eruptivgesteine aus Transvaal in Süd- Afrika. Neues Jahrbuch für Mineralogie, etc. Beilage, Bd. VII, p. 90, 1890. 10 D. Drarer. — The Dwyka Conglomerate. Transactions of the geolo- gical Society of South Africa, I, p. 90. Johannesburg, 1896. 11. In. — On the coal deposits of South-Africa. Transactions of the geolo- gical Society of South Africa, Vol. II, p. 128. Johannesburg, 1898. 12. In. — A ramble through the geology of South Africa II. The denu- dation of the continent. Transactions of the geol. Society of South-Africa, Vol. I, p. 34. Johannesburg, 1898. 13. E.-J. Dunn.— Report on a supposed extensive deposit of coal underlying the central districts of the colony. Partiamentary Paper. Capetown, 1886. 144. Ip. — Geological sketch map of South-Africa. Melbourne, 1887. 15. ©. FersrMANTEL.— Uebersichtliche Darstellung der geologisch-palaeon- tologischen Verhältnisse Süd-Afrikas I Die Karrooformation und die dieselbe unterlagernden Schichten. Abhandl. der k. bühmischen Gesellschaft der Wissenschafte, 7, III. Prag, 1889. 16 M. FRANCKE. — Rapport over de Malmanie-goudvelden. Jaarrapport can den Staatsmyningenieur over het jaar 1897, Aanhangsel, B, Pretoria,1890. 17. In. — Rapport over den mijnbouw in het Pretoria-inspectieveld. pr van den Staatsmyningenieur over het jaar 1898. Pretoria, 1899. 18. W. GiBson. — The geology of the gold-bearing and associated rocks of + RS Transvaal. Quart. Journal of the geological Society, XLVIII, p. 404. London, 1892. 19 J. Gôrz. — Untersuchung einer Gesteinssuite aus ir Gegend der Goldfelder von Marabastad im nôrdlichen Transvaal. Neues Jahrb. fur Min., etc. Beilageband IV, p. 115, 1885. 20 A.-H. GREEN. — On the geology and physical geogr HenEEr of the Cape Colony. Quart. Journ. of the geol. Society, Vol. XLIV, p. 239. London, 1888. 1900 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE OZ 21. C.-L. GriesBacx — On the geology of Natal. Quart. Journ. of the geol. Society, Vol. XXVII, p. 53. London, 1871. 22. F.-H. Harca. — À geological map of the Southern Transvaal. London, 1897. 23. In. — A geological survey of the Witwatersrand and other districts in the Southern Transvaal. Quart. Journ. of the geol. Society, Vol. LIV, p. 73. London, 1898. 24. J.-A.-L. HENDERSON. — On certain Transvaal Norites, Gabbros and Pyroxenites and other South African rocks. London, 1898. 25. A. HüBner. — Geognostische Skizzen von den Süd-Afrikanischen Diamanten-Distrikten. Petermann’s Geogr. Mittheilungen, XVII, p. 81, 1871. 26. In. — Geognostische Skizzen aus Süd-Afrika. Petermann's Geogr. Mittheilungen, XVII, p. 422. Gotha, 1872. 27. M.-L. De LAuNAy. — Les mines d’or du Transvaal. Annales des Mines. 9, IX, p. 1. Paris, 1896. 28. K. Maucx. — Reisen in Süd-Afrika. Petermann's Geogr. Mittheilun- gen. Ergänzungsheft, 37. Gotha, 1874. 29. G.-A.-F. MorENGRAAFF. — Ueber einige Erz-und Mineralvorkommen in der Südafrikanischen Republik Transvaal. Zeitschr. für Krystallogra- phie, XXII, p. 150, 1893. 30. In — Beitrag zur Geologie der Umgegend der Goldfelder auf dem Hoogeveld in der Südafrikanischen Republik. Neues Jahrbuch für Minera- logie, etc. Beilageband IX, p. 174. Stuttgart, 1894. 31. In. — Diamonds at Rietfontein. Transactions of the geological Society of South Africa, Vol. II, p. 122. Johannesburg, 1898. 32. In. — Annual Report of the State Geologist of the South African Republic for the year 1897. Transactions of the geological Society of South Africa, Vol. IV, p. 119, Johannesburg, 1898. (Traduit du rapport officiel en hollandais. Groenboek, N° 16. Pretoria, 1898). 33. In. — The glacial origin of the Dwyka Conglomerate. Transactions of the Geological Society of South A frica, Vol. IV, p. 103. Johannesburg, 1898. 34. In. — Geologische Aufnahme der Süd-Afrikanischen Republik. Jahresbericht über das Jahr 1898, Pretoria, 1900. (Traduit du rapport officiel en hollandais. Groenboek, N° 16. Pretoria, 1899). 35. In. — Die Reïhenfolge und Correlation der geologischen Formationen in Süd-Afrika. Neues Jahrb. für Mineralogie, etc., 1900, I, p.113. Stuttgart, 1900. 36. M.-A. Mourze. — Mémoire sur la géologie générale et sur les mines de diamants de l’Afrique du Sud. Annales des Mines. Série VII. Année 1885, p. 192. Paris, 1885. 37. H. OEMIcHEN. — Goldhaltige Kobaltgänge in Transvaal. Zeitschr. für praktische Geologie. Bd. VII, p. 271. Berlin, 1899. 38. R.-D. OLpHAM. — A manual of the geology of India, Calcutta, 1895. 39. W.-H. PENNING. — A sketch of the high level coal-fields of South-Africa. Quart. Journal of the geological Society, Vol. XL, p. 650. London, 1884. 40. In. — A sketch of the gold-ields of Lydenburg and de Kaap in the Transvaal. Quart. Journal of the geological Society, Vol. XLI, p. 569, 1885. 41 Ip. À contribution to the geology of the Southern Transvaal. Quart. Journ. of the Geological Society, Vol. XLVII, p. 452, 1891. 42. A.-R. SAwyER. — The South Rand Coalfield and its connexion with the Witwatersrand Banket-Formation. Trans. of the Feder. Institution of Mining Engineers, Vol. XIV, Newcastle upon Tyne, 1898. 02 GÉOLOGIE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE 21 Janv. 43. A.-R. SAwYER. — The goldfields of Mashonaland. 44. In. — The Portuguese Manica goldfield. Transactions of the Fed. Instit. of Mining Engineers. Février 1900. London, 1901. 45. A. SCHENOK. — Geologische Skizze von Süd-Africa. Petermann’s Geogr. Mittheilungen. Bd. XXXIV, p. 225. Gotha, 1888. 46. In. — Ueber Glacial-erscheinungen in Süd-Afrika. Verhandl. des 8° Deutschen Geographentages zu Berlin, p. 145. Berlin, 1889. 47. A.-C. Sewarp. — Note on plant-remains from Vereeniging, Trans eal Quart. Journal of the geol. Society, LIV, p. 92. London, 1898. 48. G.-W.STrow.—On some points of South-African geology. Quart. Journal of the geol. Society, Vol. XXVII, p. 28, 50, 52, 497, 533 et 534. London, 1891. 49. In. — On the geology of Griqualand-West. Quart. Journal of the geol. Society, Vol. XXX, p. 581. London, 1874. b0O. E. Suess. — Das Antlitz der Erde I. Wien, 1885. 51. P.-C. SUTHERLAND. — On the geology of Natal. Durban, 1868. 52. In. — Notes on an ancient boulderelay of Natal. Quart. Journal of the geol. Society, Vol. XXVI, p. 514. London, 1870. 53. E.-A. WüLriNG. — Untersuchung eines Nephelin-syenits aus dem - mittleren Transvaal in Süd-Afrika. Neues Jahrb. fur Mineralogie, ete., 1888, Il, p. 16. Stuttgart, 1888. 64. R. ZerzLer. — Etude sur quelques plantes fossiles, en particulier Vertebraria et Glossopteris des environs de Johannesburg (Transvaal). B. S. G. F., 3, tome XXVI, p. 349. Paris, 1896. UNE SOLUTION PALÉONTOLOGIQUE LE NÉOGENE SUR LA FEUILLE DE MONTPELLIER par M. P.-G. de ROUVILLE. I. — Sous le titre, Une solulion paléontologique, nous annon- cions, il y a peu de temps, l'attribution définitive à l'horizon berriasien des calcaires à Serpules de La Valette. Nous nous faisons un devoir de rouvrir cette rubrique pour annoncer, cette fois, l'attribution, conforme aux conclusions de M. Roman, des calcaires miroitants crétacés de Saturargues et de l’'Hortus à l'horizon du Valanginien supérieur. M. Gennevaux. dont je signale pour la seconde fois le zèle géolo- gique, a bien voulu, sur ma prière, consacrer une de ses dernières excursions à la recherche de fossiles sur le lieu précis indiqué par M. Roman dans sa coupe du causse de Pompignan !; il en a recueilli un certain nombre, parmi lesquels notre collègue M. le professeur Kilian, à la compétence duquel nous les avons soumis, a reconnu les espèces suivantes : « Adulte de Hoplites pexiptychus Schl. — Roubaudi d'Orb. Hoplites Frantzi Kil. (— Ottmeri Neum. et Uhl. p. p.). Hoplites Albini Kil. Holcostephanus psilostomus Neum. et Uhl. Duvalia lata (Blainv. sp.). Hibolites jaculum Phil. Pholadomya elongata Münst. Arca cf. ferruginea. Vola (Janira). Valve plate. Pygurus rostratus Ag. Typique. » M. Kilian ajoute : ; « Cette faune appartient sans aucun doute au Valanginien supé- « rieur, malgré la présence de Hopl. Frantz et de Holcostephanus « af, psilostomus, formes plutôt hauteriviennes. « L'existence de Duvalia lata accuse son âge valanginien. « C’est à peu près le niveau du Fontanil, ou plutôt un peu plus « récent (le Py-gurus du Fontanil n'est pas le vrai rostratus) ». Le niveau des calcaires miroitants, si tant est que ce faciès ne se XD US. G. Fr, 28 5,4 XXNIP pM518 ut XXNVIIE) p: 774: 94 DE ROUVILLE 21 Janv. S.0. N.E Au sud de Au nord. à SE Vincent d Assas [ 1 Prades 139 Ruisseau L û Û Fig. 4. — Plan du territoire d’Assas-Viviers-Teyrani(Hérault). Echelle 1/160.000° environ. — Fig. 1-2-3. — Coupes suivant les directions (1), (2), G), du plan. 5, Calcaire oligocène à Limnæa longiscata ; 4, Poudingues et marnes (hori- zon de l’Anthracotherium) ; 3, Calcaire lacustre supérieur (Tongrien); L’, Lignites à Paleotherium de Viviers ; 2, Marnes et grès à Lophiodon ; L, Lignites de Teyran à Bulimus Hopei; 1, Calcaire lutétien contenant à Teyran : Bulimus Hopei M. de S., B. Seresi, Planorbis pseudoammonius Schl., Limnæa Michelini Desh., Strophostoma Lapicida Leufroy, Helix Marioni Desh., Pupa sp.; — 0, Horizon rouge (Garumnien de Leymerie) ; — Ne, Néocomien (Berriasien, Valanginien). ns IOO1 LE NÉOGÈNE SUR LA FEUILLE DE MONTPELLIER 99 reproduise pas en âge hauterivien, se trouve donc définitivement établi comme Valanginien supérieur. Desitum est disputari. Pourrons-nous en dire bientôt autant du Néogène lacustre de la feuille de Montpellier ? En attendant, nous appuyons, de nouvelles coupes, dans la note suivante, notre interprétation de 1895. %k II. — M. Gennevaux, témoin intelligent et attentif de l’applica- tion de la méthode de continuité, faite sous ses yeux, au complexe lacustre de Grabels-Coulondres !, a étendu le champ de ses obser- vations au territoire d'Assas-Viviers-Teyran, où le Bartonien a recu, sur la feuille de Montpellier, une extension qui ne nous parait pas lui convenir. | A cet effet. il a dressé le plan et les coupes ci-jointes dont l’inter- prétation, différente de celle qui leur a été donnée”, mettent en relief, à nouveau. et confirment la régularité et la netteté des éléments stratigraphiques de notre complexe lacustre. Ils montrent, de plus que nos schémas précédents !, un double niveau de lignite : l’un se rattachant à celui de La Caunette ou Lutétien, l’autre, à celui de Coulondres ou Priabonien ; le premier avait été déjà reconnu par M. Delage dans le calcaire à Planorbis pseudoammonius Schl. à Grabels, au point où la route, qui mène de ce village à la route de Grabels, est traversée par un remar- quable dyke basaltique. | Dans la nouvelle région, comme à St-Gely, le Bartonien sépare le calcaire à Bulimus Hopei M. de Serres, du calcaire à Melanopsis mansiana Noulet. Le lignite inférieur s’y trouve compris entre deux calcaires dont le supérieur ne fournit pas de Bulime. Enfin, le tout supporte le calcaire à Lymnæa longiscata Brong., en recouvrement immédiat et concordant, non pas sur le Bar- tonien, comme il a été dit ?, mais sur le Poudingue oligocène. Ce. poudingue, dans toute notre région, revendique l’allure indé- pendante, attribuée *, à tort selon nous, au Poudingue bartonien. La série de S'-Gely se présente donc dans la région d’Assas- Teyran, augmentée d’un terme distingué sous la rubrique L*? dans la Carte géologique de 1875. 1. B. S. G. F., [3], XXVIII, p. 602, 1900. 2. Coupes d’Assas et de Teyran. RoMAN, thèse, p. 170-185. 3. RomaAN, thèse, p. 121. SUR L’AGE DES ROCHES ÉRUPTIVES DU CAP D’AGGIO (ALPES-MARITIMES) par M. Léon BERTRAND. La communication intéressante faite par M. Guébhard dans la séance du 3 décembre dernier (Comptes-rendus sommaires, t. XX VIII, p. 149), où il indique que les tufs cinéritiques de Biot sont du Miocène supérieur, rajeunit notablement l’âge admis jusqu'ici généralement pour les éruptions de labradorites dans le Sud des Alpes-Maritimes. Il est d’ailleurs très vraisemblable que ces éruptions ne sont pas toutes contemporaines et que certaines d’entre elles datent de la fin du Pliocène ou même du Pléistocène !. En particulier, il me paraît certain, actuellement, que les érup- Lions qui ont donné naissance aux roches analogues situées au Cap d'Aggio et dans le voisinage doivent se rapporter à une date tres récente. Je ne connais d’ailleurs en ce point aucune roche éruptive en place, soit en coulée, soit en produits de projection. Le gise- ment du Cap d’Aggio est formé de produits de projection remaniés et stratifiés, formant un placage contre la falaise de calcaires juras- siques ; il en est de même pour un autre gisement situé à un kilo- mètre au nord-est, au fond d'une baie, presque en vue de Monaco, aussi au niveau de la mer. Dans ces deux gisements, on a de vérita- bles dépôts formés uniquement de matériaux éruptifs. Par contre, au-dessus de la gare de la Turbie, ces éléments sont disséminés au milieu d'un dépôt de galets de plage, probablement pléistocène ou au plus du Pliocène supérieur. De même, on retrouve les mêmes matériaux éruptifs dans une tranchée de la route de la Corniche, auprès de Monaco, au-dessus du second gisement du bord de la mer cité plus haut, dans une puissante formation bréchoïde qui me paraît à peu près contemporaine du remplissage des fentes du calcaire jurassique de Monaco, c’est-à-dire de la formation de la brèche ossifère de cette localité. Quant à l’origine de ces matériaux éruptifs, ils me paraissent provenir d’éruptions ayant eu lieu par une ou plusieurs cheminées situées actuellement sur l'emplacement de la mer, mais très près du rivage actuel ; leur âge serait très récent, car elles dateraient du Pléistocène ou, au plus, du Pliocène supérieur. 1. M. Ambayrac, déjà, a signalé deux gisements de ces roches dans les pou- dingues du delta du Var. Bulletin dela Société Gévlogiqne de France Note de M° GA.F MOLENGRAAFF À? Série. Tome I, — PL esce che 2 Aimée AY, FF 2° 26° Zen Piokard? / j; Le ET 3° fé art DE . ; 4 4 (is çE" If Terrains sédimentaires Seat mule, F FN ES CE — el éruptifs. 7, À BED en DISTRICTS ersrust Î \ { | 4 - : Se ; , Filons ct coucher aunpfèrer À pal Ne ) S (| Dépot per _ S. D} Waterberu, Chrome A Ce. II} Zoutpansbere ne - Cinabre Po Il | Rustenbure, 327 Er RO je IV | Prétoria. —_.— - Cuivre Diese, /2 V | Middelburg, Lau d oc épyplven di Lo + Diamant}. D VU Lijdenbure | 8 Fa — UT Are, 2777 — :| Sn VIL | Marico. É FE pin [Fermationduloofovel | "3207 2 ONE Vtt) ST VI | Lichtenburg. x D ee ares erhvtar loulle |. Fer oligire. | d / IX Potchelstr CS) cuve doburer 8 | 28: 4 otchels (room. El ; Gr —.— = Aagnérien ©] En»; ÿ yÉ Qn % X | Krugersdorp. Yi Shine d'Ecen 77 (Mr ÿ 7 e\ XÙ | Heidelberg. PALM Mines de Houila Ke £ Site = XI | Standerton. % Ë 2 à À XL | Carolina. 14 “A è Conglomérat de Dusyka XV | Lomelo. Orientauonset inolinaïson des! sonches } 7, li <> | \\ Wakkervs room mnt | GS éontahit hntité. " è DS breton | Fa AVE! Prot-Retiol. en, XVI! Bloemhof, — failles, [a XVI! Wolmaransstad Grès dn Waterberg Demos 7 A XIX | Utrecht déubass S. D Cmtorene géologiques) Æ Roches porphyroïdes du Q Mi fvaguritiock 2) 2 ET | ? HI EZ Granite rougo; wyéuree r EU dolite XX Vrijheid. Los À A rigreuce ; ec) Ê Norito, Mngnetite Série de Prétoria: crgilitasquartsitnr ct drahasun | À [e) | Rodsenckal # Sr Série des Dolomies. dlomies cétilen Série du Blaok-Reef: gré guurtetten hévtes 42 congloméruts, : js. Rp Materarand 7 rl fes et rules Ë CL prein dry ha AS et rS Ce] Granite ancien: 8 Sériade Barbenton we de | asia HT 6 du Witavte rad} ro nn parte sèrtes freiner grèr sur icite, onglets nef eres etes À NE Re | T Dr ne NE Ne \ / Era CNP) Î Vo wete Fu WE we PÈ bac ( ESQUISSE GÉOLOGIQUE 99 À sr DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE DU TRANSVAAL É Topographie et géologie KE, ' d'après les documents les plus récents et es travaux sur 1e terrain { FLN du Docteur GPA MOLENGRAAFF S Géologue de l'Etat. € 3 1.500.000 006 graaff , redefort ___ ars R. 1 1050 D _— RAP Rene ES ar ap À u 8 | e D00. Frontière . IMOÇAMBIQUE ine du >mbo | H b re La à LS Rad ad aan a 15b | | | | | | | | || Note de M' G A.F. Molengraatf. Bull. de la Soc. Céol. de franve. pee a ne Be, TL EL Cros ete LE Arnuee AAOE, Fig. ( __ Coupe schématique de la Vallée du Limpopo au Massif de Vredefort __ Échelle des longueurs 1/1000 000! SL N, Massif de Witwatersrand Vredefort LB auriféres Le to TE Hi RES Ch°* de Daspoort Brno sac h UE | d Badsbergen | (f* de Sijfarfontein ee Pmn 3 Knoppieslaagte Magaliesberg k Vallée de Zandrivieribery ï Vault. CRE ne D nl Prétoria me Springbok - vlakte ee ES Zwagerahogk 2er ea ME Plateau du Palala Erin ANS NA | ! Fpen : Pienaars R Buiskop Re Grost V Le Tati hop Une Un = AU 16 COCO NON le 9 { L Mg 2 Coupe schématique le Long du chemin de fer entre Belfast (iransvaan) et le territoire por tugais de Mocambique _ Schelle des longueurs 1/800.000° REPUBLIOUE SUD- AFRICAINE DA 4 4 “4 4 0 } « + L Hooge - Veld He * *: " “ee 9 Coupes veoloviques RS Barrett's Berlin L a e _ Ve | d © © uoo | d - | Duivelskantoor Frontière : Montagnes de granite dar Sign 1000 environs de Hrokodilpoort Crande faille Chaîne AO ODIQUE L st £ (AZ de ' de L'Est Lebombo * RP | 15b Roches ) fdritiquer 7 Mess hu The « Ho race 150 du Lebombo }paunquar st mélapyriquer pd ue de la JDE Mesa she igyera-lvadtors dyut olomie hrs du genaent de Marvell's 1e Aomation du Mooge-Veld : gras, argile, Acmillar . slrusbenser | Plumes 4 riler Mowlin 0€ vu Twveluntoinelont om, _ = " = = = A —— 11 Aochas amggdaloites du Wosvh-Velil ’ ONE De er en CUS CS PAPE e Nérie dis Mlauke Hoëls gros, guuréaims ; cylomens Pig.3_ Coupe de l'escarpement EST du Hooge-Veld, près de Pelorimseust d'apres les données de ME Stark _ Échelle des longueurs 140000! Ro Lwnyershock de Cranue rouge 8 Syenite à anarthore , à éléslite , sr 4 Mohar muggghiuhasdar du Kliprivier 0. E. 7 Norile 10. magnétite — Ur. cAromite 2 ronde arain EF £ . : D Svatéme primaire Frankfort Hooge Vel d Lisbon-Berlin Bee QS svp mére de purée DoUe Ed TTC RS + ï 8 Séme on . | 6 awurpennent, fred jun cdot r D'E7r ; | D - DL ee I nu . L ns Loue shites crgitalle s! La Mévie de Barbovton où du =: + F3 MUIONEUENN ( NE br Menus portes ES 1 LT TE En tLLL 117} /) {( Shintes , quartsitar, as 4 La | È RAS —— titi + ti 5 it Re mi Ep pq F roi MUTATION Et = CS shirtar erdeiriens + |qmquaurtarinr à muyndtite — phyllaube mdr CRE NEIL - agrée. diabaarer MS Auvnsus cles flloms Las plus supérieure = M dorsaux du Hewitt -Henf, à dt de cle le œuvre BL sé (LRU diplôme SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE L'objet de la Société est de concourir à l’avancement de la n général et particulièrement de faire connaitre le sol de la France, -même que dans ses rapports avec les arts industriels et l'agri- _ Arr. 3. — Le nombre des membres de la Société est illimité. Les Français et les étrangers peuvent également en faire partie. Il n’existe aucune dis- tinction entre les membres. se Arr. 4. — Pour faire partie de la Société, il faut s'être fait présenter dans une de ses séances par deux membres qui auront signé la présentation ?, avoir été proclamé dans la séance suivante par le Président et avoir reçu le de membre de la Société. SR DEAR À : s - ‘Arr. 6. — Le Trésorier ne remet le diplôme qu'après l’acquittement du droit d'entrée. ET ee FA Fete Arr. 38. — La Société tient ses séances habituelles à Paris, de Novembre - Anr. 39. — La Société se réunit deux fois par mois (Le 1t' et le 3 lundi PAR Me nn en se 1018 € \ we ART. 42 — Pour assister aux séances, les personnes étrangères à la Société doivent être présentées chaque fois par un de ses membres. ART. 46. — Les membres de la Société ne peuvent lire devant elle aucun _ ouvrage déjà imprimé. S à / AnT. 48. — Aucune communication ou discussion ne peut avoir lieu sur \ _des objets étrangers à la Géologie ou aux sciences qui s’y rattachent. ART. 50. — Chaque année, de Juillet à Novembre, la Société tiendra une u plusieurs séances extraordinaires sur un point qui aura été préalablement éterminé. RES - ! es _ Arm. 53. — Un bulletin périodique des travaux de la Société est délivré gratuitement à chaque membre. es | ART. 55. — ... Il ne peut être vendu aux personnes étrangères à la Société qu’au prix de la cotisation annuelle, Art. 58. — Les membres n’ont droit de recevoir que les volumes des années du Bulletin pour lesquelles ils ont payé leur cotisation. Toutefois, les volumes correspondant aux années antérieures à leur entrée dans la Société, leur sont cédés, après décision spéciale du Conseil et conformément à un arif déterminé. __ Arr. 60, — Quelle que soit la longueur des notes ou mémoires insérés au. Bulletin, les auteurs pourront en faire faire à leurs frais un tirage à part. - ART. 93. — Chaque membre paye : 1° un droit d'entrée ; »° une cotisation nnuelle ?. ju < Le droit d'entrée est fixé à la somme de 20 francs. 5 É membres à élire. = nes La cotisation annuelle est invariablement fixée à 30 francs. . La cotisation annuelle peut, au choix de chaque membre, être remplacée Ce droit pourra être augmenté par la suite, mais seulement pour les par le versement en capital d’une somme fixée par la Société en assemblée LT : x _ générale ?, qui, à moins de décision spéciale du Conseil, devra être placée. x. Les personnes qui désireraient faire partie de la Société et qui ne connaîtraient aucun membre qui püt les présenter, n'auront qu’à adresser une demande au Président, en exposant les titres qui justitient de leur dHASSON ee _o Le Conseil de la Société, afin de faciliter le recrutement de nouveaux embres, autorise, dorénavant, sur la demande des parrains, les personnes désirent faire partie de la Société à n’acquitter, la première année, que ur droit d'entrée en versant la somme de 20 fr. Le compte-rendu sommaire des séances de l’année courante leur sera envoyé gratuitement ; mais ils ne écevront le Bulletin que la deuxième année et devront alors payer la coti- sation de 30 francs. Ils jouiront aussi des autres droits et privilèges des membres de la Société. TRE 3. Cette somme est actuellement de 400 francs. hi Proclamation dun membre . . , .. . .. : S Nécrologie : M. HuGUENIN : . . les décisions suivantes prises par le Conseil : Bi Le : présentation. Deux pages au maximum sont accordées aux communications . . ment, les délais de publication ne Re ot pas toujours de soumettre une. de la Commission du Bulletin, sous les titres donnés par les auteurs. De . d'espèce ou de genre nouveau dont l’auteur n'a pas fourni une description Secrétaire de la Société qui se charge, dans ce cas, de veiller à à leur exécution, TABLE DES MATIÈRES (FASCICULE x, T ) Séance du 7 Janvier 1901 : Elections .:. . . Me one Composition du Dre se Ghasoil ee Be ; Séance du 21 Janvier 1901 : À. Boistez. —-Allocution: 3"); 0rRr RAR Rene RS L. Carez. — Allocution présidentielle ER GR UN de Proclamation de membres . .". .., £ Rd di Æ. VAN DEN Brozcx, R. Nickrès. — Correspondance. Rs en AR F J. ALmMERA, PERoN, Louis BUREAU. — Présentations d'ouvrages . . TD Te Ph. GLancraAUD. — Sur les dômes de Saïnt-Cyprien (Dordogne), Famel. ee HAS et Sauveterre (Lot-et-Garonne) . : AU 1. a G.-A.-F. MoLENGRAAFF. — Géologie de td Renubtidie SudAfricaine du: d. à ee, Transvaal (19 fig. dans le texte, PI. II), LS NPA EE RS Sn PS -G. de Rouvrzre. — Une solution, one nes — Le Néogène sur la feuille de Montpellier (4 fig. dans le texte) . an Léon BERTRAND. — Sur l’âg'e des roches éruptives du cap d'A, ggio QUES HAN Maritimes) . AR Ne jai D ARC CPAS ENS c AE in AVIS à À .. . . Le Secrétaire rappelle aux membres de la Société 6 géologique COMPTES- RENDUS SOMMAIRES : Les Comptes-rendus sommaires | des. séances paraissent dans les quinze jours qui suivent la séance. Les Notes et . Mémoires sont groupés par séance et leur ordre de succession est celui de la RTE ï originales. Une demi-page seulement est accordée aux observations faites . ‘en réponse à une communication originale ou pour des présentations d'ou- Re . vrages.. Les manuscrits, résumé ou _conelusions, observations, etc., des PAtrEl communications faites en séance, doivent parvenir au Secrétaire de la Société, 28, rue Serpente, Paris, VI, avant le mercredi qui suit SEE séance, à deux heures. Les manuscrits doivent être rédigés très. lisible- épreuve aux auteurs. - Ÿ BULLETIN : Les Comptes-rendus sommaires des séances sont cms au Bulletin. Les Notes et Mémoires sont publiés, in-extenso, après avis de { Il ne doit être publié 1e le Bulletin ou le Compte-Rendu aucun r accompagnée de figure. Le nom spécifique de tout fossile cité dose être suivi du nom de l’auteur qui à fait l'espèce. à Les demandes de tirages à part doivent être ie “abecieeient au. Le Seérétaite Gérant L. GENTIL. A 800 — Lille. Imp. LE BIGOT Frères. SORT EM | QUATRIÈME SÉRIE : * À | Feuilles 76: — tions LELVI. Liste des dons + dc ounn H UTioy £ | 1 ee. “Le Bulletin paraît par livraisons mensuelles _ Août 1901 EXTRAITS DU RÈGLEMENT DE LA SOCIÉTÉ . Géologie en général/et particulièrement de faire connaître le sol de la France, se tant en lui-même que dans ses rapports avec les arts industriels et l'agri- a culture. È 2 PRE ART. 3, — Le be des membres de il Société est illimité. Les Français | tee a et les! étrangers peuvent ésalement en faire partie, Il n’existe aucune dise L tincton entre les membres. à SE us une de ses séances par deux membres qui auront signé la présentation !, . + _ayoir été proclamé dans la séance suivante par le. Président et avoir Feu le. diplôme de membre de la Société. Arr. 6. — Le Trésorier ne remet le bio ‘qu'après Vacquitiement du | droit d'entrée. Re : ART. 38. — La Société tient ses séances habituelles et Paris, de Novembre ee à Juillet. ù ee à ART. 39. — La Société se réunit deux fois par IMOÏS (EE 1e et le 3° lundi | ES IC dus mois). sum ART. 42. — Pour assister aux séances, les personnes étrangères. à it Société doivent être présentées chaque fois par un de ses membres. ART. 46. — Les membres de la Société ne DÉRVRE lire devant elle. aucun FRE ouvrage déjà imprimé. k > ART. 48. — Aucune communication ou discussion ne. Peut avoir lieu sur des objets. élrangers à la Géologie ou aux sciences qui s’y rattachent. ART. 50. — Chaque année, de Juillet à ‘Novembre, la Société tiendra une ou plusieurs séances extraordinaires sur un point: qui aura été Dh en. Moon * … gratuitement à chaque membre. LENS Ness An. 59. -.. 1] ne peut être vendu aux personnes étrangères ci, Ja de 0 Societé qu'au u prix de la cotisation annuelle. — ÿ F ART. 08 — Les membres n'ont droit de recevoir que les ou des années du Bulletin pour lesquelles ils ont payé leur cotisation. Toutefois) les volumes correspondant aux années antérieures à leur entrée dans la Société, A VE Géair déterminé. RS AT ART. 60. — Quelle que soit la longueur des notes ou mémoires insérés au Pie > "Bulletin, les auteurs pourront-en faire faire à leurs frais un uürage à part. ART. 93. — Chaque membre paye : 1° un aroit d'entrée ; 2° une cotisation annuelle ?, . AR M Le droit d'entrée est fixé à la somme de: 20 francs. RU - ORAN Ce droit pourra être augmenté par. la suite, mais seulement. QUE les A ET _ membres à élire. FI EN Po PENSE ot . La cotisation annuelle est invariablement fixée Cr) 30 francs. SELON se . La cotisation annuelle peut, au choix de chaque membre, être remplacée Pie par le versement en capital d'une ‘somme fixée par la Société en assemblée PU PA ÉTÉ UE? one à moins de décision Spéciale du Conseil, devra Êe MUEe ae (LA 12 + = = — ee Les personnes qui He icats faire partie de da Société té ue ne. ae ES EE Le aucun membre qui pût'les présenter, n'auront qu’à adresser HR a une demandé au Président, en exposant Fe titres qui justifient de leur. 5 admission. Le Conseil de la Société, in de le recrutement de: nouveaux ou à autorise, dorénavant, sur la demande des parrains, les personnes désirent faire partie de la Société à n ’acquilter, la première année, que eur droit d'entrée en versant la somme de 20 fr. Le compte-rendu sommaire des séances de l’année coùrante leur sera envoyé gratuitement ; mais ils ne recevront le Bulletin que la deuxième année et devront alors. payer la coti- sation de 30 francs, IlS jouiront aussi des autres droits et PrNEARS des membres de la Société. 3. Cette somme est actuellement de oo francs, : : ru 2, — ob de Ja Société est de concourir à Va ca ik es Ress ART. 4. — Pour faire partie de la Societe, il faut s ‘être. fait ns dans - déterminé. . Re AS E Arr. 53 — Un don périodique des travaux de la Sbbiére est délivré ee leur sont cédés, après RASE Déni du Conseil et con REMOnERe à un : BA XX ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS par M. E. FOURNIER. La chaîne du Jura a été, depuis les débuts mêmes de la science géologique, l’objet d’études si nombreuses et si détaillées de la part de savants éminents tels que MM. Marcou, Thurmann, Thirria, Vézian, Parandier, Bertrand, Kilian, Résal, Lory, Choffat, Bour- geat !, etc., etc., qu'il semble quil y ait quelque témérité à prétendre qu’on puisse encore trouver du nouveau dans une région si bien connue. | Néanmoins, les nombreuses excursions géologiques et spéléolo- giques que nous avons faites dans celte région depuis 1896 nous ont permis de relever un grand nombre de coupes et de constater plusieurs phénomènes très intéressants au point de vue tectonique et qui avaient passé jusqu ici à peu près inaperçus, ou avaient été mis en lumière d’une manière insuffisante. En coordonnant ces phénomènes, nous sommes arrivé à nous faire de la structure géologique de la chaîne du Jura une conception qui, comme nous allons essayer de le montrer, diffère en bien des points de celle que l’on pouvait considérer jusqu'ici comme classique. Au point de vue tectonique on peut diviser le Jura Franc- Comtois en six zones qui sont en allant de l’est à l’ouest : I. La zone de la Haute-Chaîne, constituée par une épaisse masse de Jurassique supérieur, plus ou moins plissée, dans laquelle s'enchässent des chapelets de brachysynclinaux amygdaloïdes dont le noyau est occupé par le Crétacé et l’Infra-crétacé. IN. La zone des grands plateaux comprenant tous les étages du Supra et du Médiojurassique, avec failles d'importance variable. 1. Il sortirait absolument du cadre que nous nous sommes imposé d'entreprendre de donner ici un index bibliographique, même sommaire, des principaux travaux publiés sur cette région, nous nous contenterons dans le courant de cette étude de renvoyer le lecteur à ceux de ces travaux dans lesquels les questions tectoniques qui nous occupent ont été abordées. 18 Août 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 7 98 E. FOURNIER 21 Janv. IN. La zone plissée du Vignoble, composée de chapelets de brachyanticlinaux séparés les uns des autres par des bandes synclinales faillées. Les noyaux des brachyanticlinaux sont cons- titués par le Trias, le Lias et le Jurassique moyen. L’axe des bandes synclinales par le Jurassique supérieur. IV. La zone occidentale des plateaux limitant au nord-ouest la vallée moyenne du Doubs, depuis Montbéliard !. V. La zone des avant-monts du Jura et le pointement amygda- loïde ancien de la Serre. VI. La zone des bassins d’effondrement des vallées de l'Ognon et de la Saône. Cette dernière zone est limitée du côté de l’ouest par une série qui peut être considérée comme formant la bordure orientale du Bassin de Paris. Nous allons étudier successivement ces différentes zones, en n’insistant pour chacune d'elles que sur les faits nouveaux de nature à modifier l'interprétation qui en a été donnée jusqu'ici. ÏJ. Zone DE LA HaAurE-CHAÎNE OU ZONE DES BRACHYSYNCLINAUX CRÉTACÉS Cette zone s'étend sur la partie orientale des feuilles de Saint- Claude, Lons-le-Saulnier, Pontarlier, Ornans. Elle est particu- lièrement caractérisée sur ces deux dernières feuilles et surtout sur celle de Pontarlier où elle est formée d’une série de chapelets de brachysynclinaux et de brachyanticlinaux dont les axes sont dirigés sensiblement N.E.-S.O. C'est le Jurassique supérieur (Oxfordien, Rauracien et Virgulien) qui forme le noyau des brachyanticlinaux, tandis que l’axe des brachysynclinaux est constitué par l’Infracrétacé et la partie inférieure du Crétacé (Cénomanien). La structure amygdaloïde est beaucoup plus nette dans les chapelets synclinaux que dans les chapelets anticlinaux. On peut citer comme brachyanticlinaux typiques ceux du mont de Saint-Sorlin, du bois de Pierre-qui-Tourne, du Grand-Bois, de Montperreux, de Montpetot, etc. Comme brachysynelinaux il faut noter surtout ceux de Ronde-Fontaine, Remoray, Saint-Point, Mouthe, Châtel-Blanc et, en Suisse, celui du lac de Joux. 1. Dans une récente étude Sur les réseaux hydrographiques du Doubs et de la Loue, nous avons eu l’occasion de signaler l’existence de ces pre- mières zones et de montrer le rôle qu’elles jouent dans l'hydrographie. Ann. de Géographie, N° 45, 15 Mai 1900. I1OOI ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS 99 Quelques-uns de ces brachysynclinaux présentent sur l’un et l’autre de leurs flancs un déversement qui peut parfois atteindre une grande intensité. C’est ce qui se produit par exemple sur la partie moyenne du lac de Saint-Point entre Saint-Point et Bellerive (fig. r) et aussi entre Malbuisson et Chaudron. Fig. 1. — Coupe de la partie moyenne du lac de Saint-Point. Echelle 1/25.000° environ. Ag, Alluvions glaciaires ; et, Cénomanien ; c!, Gault ; Gun, Urgonien Gv, Hauterivien; cv, Valanginien; J7-6, Portlandien. L'intensité du déversement varie d’ailleurs d’une manière consi- dérable d'un point à un autre. Ainsi, tandis que les couches de calcaire cénomanien que l’on observe sur la rive droite du ruisseau du moulin de Chaudron, plongent avec une inclinaison inférieure à 45° sous le Gault et l’Urgonien, on voit les couches situées plus au nord se redresser rapidement de telle sorte que, sur le sentier qui conduit à la Source-Bleue, l'Hauterivien et le Valanginien présentent des couches à peu près verticales. Si l’on suit ces dernières dans la direction du Malbuisson on voit le renversement s'accentuer à tel point qu'en certains endroits le plongement vers le sud n’est plus que d’environ 45°. Des variations analogues s’observent dans les brachysynelinaux d'Oye et Pallet et de Remoray. Le brachysynclinal de Saint-Point est bordé de deux brachyanti- clinaux : au nord-est, par celui de Pierre-qui-Tourne dont l’axe est constitué par une crête astartienne ; au sud-est, par celui de Montperreux dont le noyau est en majeure partie constitué par le Virgulien mais qui laisse même apparaître, dans la profonde vallée où passe le chemin de fer de Pontarlier aux Hôpitaux-Neufs, un peu de Rauracien, d'Oxfordien et même de Bathonien. C’est dans ce même ravin, mais beaucoup plus au nord, près de la Fontaine intermittente (Fontaine-Ronde) que l’on observe une des coupes les plus singulières de la région. En effet, au fond de ce ravin, encaissé entre deux falaises abruptes de Jurassique, on 100 FE. FOURNIER o1 Janv. voit affleurer du Valanginien en couches horizontales, ainsi que le montre la figure 2. Le Jurassique supérieur qui surmonte ce Valan- ginien est lui-même en série renversée. Au premier abord, l’idée N.O. Font < Ronde Ch de Fer OUEROMMOMOMOMO Fig. 2. — Coupe à la Fontaine-Ronde. — Echelle 1/18.000°. Mème légende. — J5, Virgulien. qui se présente le plus naturellement à l'esprit, est qu'on a là affaire à une nappe de recouvrement dans le flanc renversé de laquelle les érosions qui ont creusé le ravin sont parvenues à mettre à nu le Valanginien. Si une pareille coupe se présentait avec une telle netteté dans les Alpes ou en Provence, beaucoup de N.O. SE. Fig, 3. — Coupe prise à 2 kilomètres au sud de la précédente. Echelle 1/20.000° environ. — Même légende. géologues n'hésiteraient pas un seul instant à y voir une preuve directe de l'existence d’une nappe charriée. Le seul fait que nous sommes ici dans la chaîne du Jura, que les travaux classiques des géologues les plus éminents nous ont habitué à considérer comme IQOI ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS I1OI un type de chaîne régulière, devait déjà nous mettre en garde contre cette interprétation. Nous avons donc entrepris de suivre le contact entre le Portlandien et le Valanginien afin de voir si l'allure des couches ne se modifierait pas dans une certaine direction. Or, à deux kilomètres environ au sud de la Fontaine-Ronde, nous avons vu les couches se relever et plonger en sens inverse à environ 45° de part et d'autre du thalweg ainsi que le montre la figure 3. Enfin, près de Touillon et Loutelet, au moment où la route va sortir du ravin pour déboucher dans la plaine glaciaire de Métabief, le relèvement s’accentue brusquement, les couches demeurent verticales et même normales, de sorte qu'une coupe relevée près de Métabief ou aux environs de Longueville (fig. 4), N.0. S.E. Mine de L ongueville « | Mire de Rouge Brief [l Fig. 4. — Coupe à la mine de Longueville. — Echelle 1/40.000° environ. Même légende. — Fe, Limonite. Nora. — Une partie de cette coupe a déjà été donnée par Résal. nous montre les couches infracrétacées (qui tout-à-l'heure sem- blaient recouvertes par le Jurassique) formant l’axe d’un synclinal. La conclusion s'impose : l'inclinaison des couches du Jurassique formant les flancs du synclinal s'accentue au fur et à mesure que l’on s'’avance vers le nord-est et cela à tel point que les deux flancs jurassiques se couchent jusqu’à l'horizontale et vien- nent se toucher au-dessus des couches infracrétacées. J'ai déjà signalé des faits tout-à-fait analogues en Provence ; plusieurs géologues les ont considérés comme une impossibilité. Ici ils sont visibles et partant, si on refuse de les admettre, on sera amené comme je le montrerai tout-à-l'heure. à la concep- tion qu'une grande partie de la chaîne du Jura est en recou- vrement. Tous les brachysynclinaux de la Haute-Chaîne ne présentent 102 E. FOURNIER 21 Janv. pas des phénomènes de renversement aussi accentués que ceux du lac de Saint-Point et de la Fontaine-Ronde mais un grand nombre présentent un renversement dans la partie médiane ou au moins un fort redressement dans l’un de leurs flancs ou dans tous les deux. Quand un flanc seulement est redressé ou renversé, c’est toujours le flanc sud-est, ce qui montre qu'il y a vers le nord-ouest une tendance à l’affaissement. Nous verrons tout-à- l'heure la même tendance se manifester dans les failles qui, comme l’a dit Thurmann d’une manière fort pittoresque & ont toujours le regard français ». Dans la Haute-Chaîne deux brachysynelinaux à os renversés sont toujours séparés par un brachyanticlinal à double déverse- ment; ainsi, par exemple, entre la Fontaine-Ronde et le lac de Saint-Point on observe la coupe représentée par la figure 5. N.0. DANS | Vallon |” S.E. M = “dela, es DT Font Aonde / 7 Le Cernois Ni 7 | ! 1 1 [ i Fig. 5. — Coupe entre la Fontaine-Ronde et le lac de Saint-Point. Echelle 1/40.000°. — Même légende. Ces brachysynclinaux et brachyanticlinaux s’orientent en cha- pelets dont la notion doit être, pour la Haute-Chaïîne, substituée à celle des chaînons parallèles ou, si l’on veut conserver le terme de chaînons, il importe de préciser qu’ils présentent des points d’ensellement! correspondant en réalité à des extrémités de brachyanticlinaux. Les cours d’eau ont profité de ces points d’ensellement pour passer d’une zone synclinale dans la suivante. Quant aux brachysynclinaux, ils sont tous occupés par des lacs, des tourbières ou des dépôts glaciaires ?. Il serait fastidieux de décrire ici tous les brachysynclinaux et brachyanticlinaux de la Haute-Chaîne, les mêmes phénomènes s'y reproduisant toujours 1. À. DE LAPPARENT. Leçons de géographie physique. 2. E. Fournier. Ann. de géogr., 10 février 1900. I9OI ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS 103 avec peu de modifications. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les feuilles de Lons le-Saulnier, Pontarlier et Ornans pour constater la généralité de cette structure. II. — ZONE DES GRANDS PLATEAUX La zone des plateaux offre peu d'intérêt au point de vue tecto- nique, les couches y sont sensiblement horizontales ; les seuls accidents importants consistent en failles. Une première série de failles sépare le haut plateau de la zone précédente, ce sont, en allant du sud au nord, les failles de Mour- nans, Courvière (Feuille de Lons-le-Saulnier), Sombacourt, Saint- Gorgon, Fuans, Luhier et Damprichard (Feuille d'Ornans). Le haut plateau (troisième plateau) est constitué par le Jurassique supérieur et principalement par l’Astartien, le Virgulien et le Portlandien ; son altitude moyenne est voisine de 800 mètres. Dans le Jura franc-comtois, il n'y a pas de limite tectonique bien nette entre le troisième et le deuxième plateau. Il faut aller jusque dans le Jura salinois pour trouver cette limite marquée par la grande faille de Montmahoux. Le deuxième plateau, dont l'altitude moyenne est voisine de 700 mètres, est constituée par du Jurassique moyen et par la partie inférieure du Jurassique supérieur. NO. SYE* Mamirolle l’Hopital du Le Valdahon Creux ! Re — nr Grosbais r : SOUS { eche Ja JE ‘ 7 J* Marais de Saône, ! Re < TE | J JÉ SET H3 Perd 0 0007 © = —_— » es Fig. 6. — Coupe de la zone des hauts plateaux. — Echelle 1/120.000°. F, Faille de Mamirolle; a, Alluvions et tourbières ; J5, Virgulien; J#, Astar- tien; J5, Rauracien; J?, Marnes oxfordiennes; Ji, Bathonien supérieur ; Jin, Bathonien ; Jiy, Bajocien (calc. à Entroques). Enfin le deuxième plateau est séparé du premier par la grande faille de Mamirolle et par les escarpements du Rauracien qui lui font suite vers le sud-ouest. Son altitude moyenne varie entre 4 et 50o mètres. En somme cette division des plateaux en trois zones est très artificielle, les failles qui, en certains points établis- sent une limite nette, s’atténuent dans une certaine direction et alors la délimitation disparaît. Les plissements qui affectent les couches de la région des plateaux sont de peu d'importance ; néanmoins ils sont suffisants pour donner naissance, à la surface 104 E. FOURNIER 21 Janv. des calcaires jurassiques, à des bassins fermés, privés d’écoule- ment superficiel et dont le rôle, au point de vue de l'hydrologie souterraine de la région, est considérable !. M. Parandier ? avait depuis longtemps déjà attiré l'attention des géologues sur l'intérêt considérable que présentent ces bassins. Depuis plusieurs années nous en avons entrepris l'étude au point de vue spéléologique et hydrologique ; cette étude fera ultérieurement l’objet d’un mémoire spécial. C'est aussi dans la zone des plateaux qu'abondent les grottes et les gouffres dont nous avons poursuivi l’étude depuis 1896 en collaboration avec M. Magnin #. L’uniformité de cette zone est telle qu'une seule coupe suffit pour en donner une idée générale nous donnons ici la coupe passant par Saône, Mamirolle, l'Hôpital Etalans et le Valdahon (fig. 6). III. ZONE PLISSÉE DU VIGNOBLE Nous avons désigné sous ce nom toute la région plissée comprise entre les plateaux orientaux que nous venons d'étudier et ceux situés à l’ouest de la vallée du Doubs. Cette zone est très large au nord de Salins où elle présente cinq chapelets de brachyanti- clinaux : ceux du Bois de la Côte, Liesle, la Bourrelière, Ronchaux \.0. S.E. Fig. 7. — Coupe de la Chapelle des Buis: — Echelle 1/35.000° environ. a, Alluvions et tourbières ; Jt-7, Poudingue du Portlandien supérieur ; J°,, Virgulien; J5,, Ptérocérien; J', Astartien; J, Rauracien; J2, Oxfordien; J',, Dalle nacrée; li, Toarvien; l3, Charmouthien; {2, Calcaire à Gryphées. et Derrière-le-Fray. Elle se rétrécit en avançant vers le nord ; ainsi, au niveau de Byans, elle ne présente plus que quatre cha- pelets : ceux des Chatelards, de Byans, d’Abbans-Dessus et de Vorges. Près de Besançon il n’en reste plus que deux : celui du 1. Dans la Haute Chaine les brachysynelinaux donnent aussi parfois naissance à des bassins fermés. 2. B. S. G. F., [3], XI, p. 441, 1883. 3. Mém. Soc. Spéléol., N° 21 et 24. 1901 ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS 109 Rosemont et de la Chapelle-des-Buis. Enfin, plus au nord, la zone anticlinale devient unique avec les brachyanticlinaux de Mont- Sous-Vence, Ougney-le-Bas, Grange-Villaley, Hyèvre-Paroisse, Clerval et Etouvans (carrière de la Reydans). Plus au nord enfin. cette zone plissée disparait, laissant en contact la zone IT et la zone IV que nous étudierons tout-à-l'heure. Cette zone plissée du Vignoble a été étudiée pour la première fois, au point de vue tecto- nique, par M. Marcel Bertrand !. Je lui ai moi-même consacré une courte étude dans la Feuille des Jeunes Naturalistes ?. Les brachyanticlinaux de cette zone ont leur axe constitué par le Trias, le Lias ou le Médiojurassique. Les bandes synclinales qui les séparent ont leur axe constitué par le Jurassique supérieur. J'ai montré qu'un certain nombre de brachyanticlinaux présen- N.0. SE a 7 Ravin de DS | / M Caillet DS DES NDS Fig. 8. — Coupe du Moulin-Caillet. — Echelle 1/20.000° environ. Même légende. — L',,, Rhétien et Hettangien; {#!, Keuper. taient un double déversement au nord-ouest et au sud-est: je ne reproduirai ici que la plus caractéristique de ces coupes, celle de la Chapelle-des-Buis, qui montre avec netteté ce double déverse- ment (fig. 7). La faille des Trois-Châtels conserve, tout le long du pli, une direction sensiblement verticale. M. Marcel Bertrand, dans son mémoire précité (fig. 8) lui donnait une obliquité qui allait en s accentuant dans la direction de Morre, de sorte qu'il considérait les rochers astartiens dans lesquels sont creusées les grottes de 1. Marcel BERTRAND. B. S. G. F.,[3], X, p. 119 et suivantes. 2. N° 336, 1898. 106 ‘E. FOURNIER 21 Janv. Saint-Léonard comme superposés par faille subhorizontale au Ptérocérien et au Virgulien que l’on voit affleurer le long de la route de Morre. Or, la grotte inférieure de Saint-Léonard s'ouvre presque au contact de la faille ; on devrait donc trouver, dans les galeries les plus inférieures de cette grotte, du Virgulien et du Ptérocérien ; j'ai pu vérifier qu'il n’en est rien et que les parties les plus profondes de la grotte sont encore dans l’Astartien. Une autre coupe qu'il nous faut encore citer, avant de quitter cette zone des brachyanticlinaux, c’est celle du Moulin-Caillet ! sur le flanc nord-ouest du brachyanticlinal de Vorges-Larnod. On observe là de l’Astartien recouvert presque horizontalement par du Bajocien. On pourrait même croire au premier abord que le Bajocien plonge sous le Trias, mais un examen plus approfondi montre qu’il y a une faille comme l'indique la figure 8. Quoi qu'il en soit la coupe est singulière ; et, si l’on se trouvait dans une région moins régulière que le Jura, on pourrait ici encore supposer que l’on est en présence du flanc renversé d’une nappe de recouvrement. Les raccords figurés sur la coupe indiquent l'interprétation que nous en donnons et qui est conforme à l’idée que nous nous sommes faite de cette zone plissée. IV. ZONE OCCIDENTALE DES PLATEAUX Cette zone qui limite au nord-ouest la vallée moyenne du Doubs depuis Montbéliard, comprend les plateaux.de Châtenois, Monte- villars, Arcey, Etrappe, Fontenelles, Val-de-Roulans, Marchaux, Chailluz, Saint-Fergeux, Dannemarie. La majeure partie de ces plateaux est constituée par-du Bajocien et du Bathonien surmontés d’Oxfordien et de Rauracien en série subhorizontale, avec quelques failles de peu d'importance généralement dirigées nord-sud. M. Marcel Bertrand a donné une coupe schématique de cette zone, qui a été reproduite dans le Traité de géologie de M. A. de Lapparent, 4° édit., p. 1980, fig. 813. Cette zone, dans sa partie septentrionale, s'appuie en concor- dance sur une série triasique complète qui repose elle-même sur le Trias formant la terminaison méridionale des Vosges. Plus au sud elle est séparée par une série de failles de la zone des avant- monts du Jura. Nous n’avons observé jusqu'ici aucune particularité remarquable dans cette zone, aussi ne nous y arrèêterons-nous pas plus longtemps. 1. Cette coupe a été donnée pour la première fois par M. Marcel BERTRAND. Loc. cit., p. 115. | I9OI ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS 107 V. ZONE DES AVANT-MONTS DU JURA Au nord-ouest de la zone précédente, s'étend un chapelet pres- que continu de brachyanticlinaux resserré entre les effondrements de la vallée de l'Ognon et les failles de bordure des plateaux occidentaux. Cette région a fait récem- ment l’objet d’une étude de M. J. Deprat !. Les brachyanticlinaux qui la consti- tuent sont tous déversés vers Le nord- ouest et le renversement atteint par- fois une telle intensité que les couches sont voisines de l'horizontale. L'axe de ces brachyanticlinaux est Fig. 9. — Brachyanticlinal de constitué par le Trias et le Lias. Nous dose ee RUE citerons ceux de Merey-Vieilley es He io : eprat. — Même légende. (fig. 9), celui au sud de Bonnay, ceux de Tallaneny, Châtillon, Miserey (fig. 10), Pouilley, Champagney, Mazerolles. Ces derniers ne présentent pas de déversement, mais une forte dis- symétrie; l’in- clinaison la plus forte étant celle du flanc nord- ouest. Les ÉCÉTAnS Fig. 10. — Brachyanticlinal de Miserey. — Echelle anciens des 1/40.000. — D’après M. JF. Deprat. — Même légende. Vosges que l'on voit, dans la partie septentrionale de la feuille de Montbéliard, disparaître sous le Trias (lequel s’enfouit lui-même sous le Juras- sique), reparaissent au sud-ouest de Besançon dans le massif amygdaloïde de la Serre, qui vient former comme un trait d'union entre les Vosges et le Plateau central. Le massif de la Serre a déjà fait l’objet de nombreux travaux de la part de MM. Jourdy, Bour- geat, et tout récemment de M. J. Deprat. Les terrains anciens qui constituent le noyau de la Serre ont été plissés très fortement, dès la surrection de la chaîne hercynienne comme le démontrent les lambeaux de grès vosgien qui, dans la partie centrale du massif, N.O. GE 1. J. DeprAT. Feuille des jeunes naturalistes, N° 345. 108 E. FOURNIER 21 Janv. reposent horizontalement sur les couches relevées des micaschistes et des gneiss. Le massif a subi ensuite, vers la fin de l’Eocène un second mouvement qui a redressé les couches triasiques et juras- siques sur tout son pourtour et les a même renversées sur une grande partie de sa bordure septentrionale ainsi que le montre la figure 11. Rochefort Forèt de la Serre , tr Carrière Moissey ve af Fig. 11. — Coupe du massif de la Serre. — Echelle 1/60.000° environ. Même légende. — A, Argiles à chailles; J;, Bathonien sup. ; Ju, Bathonien moyen et inf.; {, Muschelkalk; #,, Grès bigarré:; tv, Grès vosgien ; r?-l, Permien; :, Eurite; y, Granulite; £, Gneiss et micaschistes avec filons granulitiques. C’est par ce dernier mouvement que le massif de la Serre se rattache à la zone plissée des avant-monts. Quant au pli d'âge hercynien il a joué un rôle capital (déjà mis en Inmière par Jourdy dans la tectonique de toute la chaîne. C’est contre ce môle que sont venues se mouler les différentes zones plissées qui ont épousé sa direction générale. En constatant l'alternance régulière des zones plissées et des zones de plateaux que nous observons dans toute la chaîne, on est même en droit de se demander si, lors du mouvement hercynien, il ne se serait pas formé sur tout l’'emplace- ment de la chaîne du Jura une série d’aires anticlinales séparées par des zones synclinales destinées à devenir des géosynelinaux. Après la grande transgression triasique et jurassique le Jura franc comtois aurait donc présenté l’aspect indiqué dans la figure 12 (partie supérieure). Lorsqu'’à la fin de l'Eocène de nouveaux mouvements orogéniques se sont manifestés, les parties superposées aux géosynclinaux se seraient seules plissées, tandis que celles superposées aux aires anticlinales déjà très plissées, n'auraient subi que des fractures et formeraient les régions des plateaux (fig. 12, partie inférieure). * Deux des zones synclinales au moins (celle des bassins d’effon- drement de l'Ognon et de la Saône et celle de la Haute-Chaîne) ont été certainement à l’état de géosynclinaux pendant l’Infracrétacé !. 1. J. DEprar. Les bassins d’effondrement de l’Ognon et de la Saône. Loc. cit., et Etudes micrographiques sur le Jura septentrional. Soc. Hist. Nat. Doubs, 1900. IQOI ÉTUDE SUR LA TÉCTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS 109 Quant à la zone des brachyanticlinaux du Vignoble, la pénétra- tion du Portlandien supérieur (Chapelle-des-Buis, Montfaucon) sur sa bordure méridionale semble indiquer aussi que l’affaissement qui, dans l'Oxfordien, avait amené dans cette région une faune SE A DATI TTTS ALL LES Fig. 12. — Schéma du Jura franc-comtois avant et après les plissements e tertiaires. A, Aires anticlinales hercyniennes; G, Géosynclinaux hercyniens; C, Crétacé; ci, Infracrétacé; J°, Suprajurassique ; Jn, Mediojurassique ; l, Lias; t, Trias. — I. Zone des brachysynclinaux de la Haute-Chaïine. — II, Zone des grands plateaux. — II, Zone des brachyanticlinaux du Vignoble. — IV, Zone des plateaux occidentaux. — V, Zone des avant-monts du Jura. — Vls, Synclinaux crétacés de l’'Ognon. — VIs, Plateaux intermédiaires. VIe, Synclinaux crétacés de la vallée de la Saône. pélagique, a été suivi d’une émersion en masse vers la fin du Jurassique, émersion qui a affecté à la fois la zone du Vignoble et celle des plateaux. VI. ZONE DES BASSINS D'EFFONDREMENT DE L'OGNON ET DE LA SAÔNE. Les vallées de l’'Ognon et de la Saône sont jalonnées par une série de synclinaux crétacés souvent enfouis par faille dans le Jurassique ; ceux de l'Ognon sont presque tous renversés vers le nord-ouest, ceux de la Saône sont normaux. La ligne synelinale de l'Ognon est séparée de celle de la Saône par un plateau faillé qui semble avoir joué le rôle d’une aire anticlinale, et qui se trouve exactement dans le prolongement de l’axe du massif de la Serre. 110 : E. FOURNIER 21 Janv. Si l'hypothèse que nous avons émise tout-à-l’heure relativement au rôle des plis hercyniens du substratum est exacte, cette coupe s'explique tout simplement : le plateau est superposé à une aire N 0: à S.E. ; Vallée de l'Ognon Vallée de A Ms la Saone Plateau d'Autoreille RÉ Sr l) w LT dé Fig. 13. — Coupe à travers les bassins crétacés de l’Ognon et de la Saône et le plateau intermédiaire (En partie d’après M. J. Deprat). — Echelle 1/120.000° environ. Même légende. — JF, Portlandien. anticlinale ; les deux zones synclinales VI, et VI, (fig. 12) sont superposées à des géosynclinaux. La zone VI, est renversée car elle a subi directement l'effet des plissements éocènes ; la zone VI, est normale parce qu’elle a été protégée par l’aire anticlinale intermédiaire (fig. 13). Ce qu’il a de remarquable dans la zone de l'Ognon c'est l’inten- sité considérable que le renverse- ment peut attein- dre et qui va par- fois presque jus- qu'à l’horizontale comme le montre la figure 14. Or, si dans cette figure on faisait abstrac- tion de la faille qui sépare le Jurassique de la bordure nord-ouest du Crétacé du bassin, faille qui d’ailleurs n’est pas toujours très visible ; le Cré- tacé en question se présenterait exactement comme celui des bassins d’effondrement de Provence avec l'apparence d’un substra- tum récent mis à nu par l'érosion dans une nappe charriée, l'hypo- thèse paraît d’ailleurs si invraisemblable qu'on hésite à rapprocher ces coupes de celles des fig. 1, 2, 3, 5, 8, d'autant plus que la preuve directe de la non existence de la nappe est facile à faire. N.0. SE Fig. 14. — Echelle 1/25.000° environ. JE5, Virgulien et Astartien. IOOI ÉTUDE SUR LA TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS TT Plis transverses Nous ne voulons pas terminer cette étude sans dire quelques mots de la curieuse région qui s'étend sur la partie méridionale de la feuille de Besançon et sur la partie septentrionale de la feuille de Lons-le-Saulnier entre Grozon et Salins. M. Marcel Bertrand avait déjà montré que le Trias et le Lias de cette région étaient toujours séparés du Jurassique par une faille oblique dont le contour est sinueux !. J'ai montré plus récemment que cette faille était accompagnée d'un pli couché présentant, en certains points, un déversement considérable (Feuille des Jeunes Nat., loc. cit.) et que ce pli était transverse par rapport aux brachyanticlinaux du Vignoble. L’am- plitude du déversement étant déjà très grande près d’Aiglepierre j'avais été amené à rechercher si cette amplitude ne serait pas plus considérable encore dans d’autres parties du pli. Or, tout récein- ment, j'ai été, d'une manière tout-à-fait fortuite, mis sur la voie d'un phénomène très curieux relatif à ce pli. En classant les collections paléontologiques du Musée à Besançon j'avais remarqué plusieurs échantillons d’un petit Pecten(amusium) ressemblant à s’y méprendre au P. pumilus du Toarcien, empâté dans des marnes grises micacées identiques à celles du Lias supé- rieur et portant comme indications : Sondage de Grozon, au- dessous du gypse. S'il n’y avait eu qu'un seul échantillon, je n’y aurais prêté aucune attention et j'aurais considéré l'étiquette comme erronée. Mais il y en a trois portant les numéros 98, 29 et 34 de la collection des fossiles du Jura; l’un des échantillons renferme en outre des Possidonomyes. Tous sont donnés par M. Conrod. De plus, en classant les Céphalopodes de la même collection j'ai retrouvé de nouveau un Grammoceras striatulum ?, dans les mêmes marnes grises, indiqué également comme provenant du sondage de Grozon au-dessous du gypse. J'ai fait alors de nou- velles recherches et j'ai constaté que le Frère Ogérien, dans sa Géologie du Jura, indique précisément comme ayant été trouvé dans le sondage de Grozon « Ammonites striatulus et Pecten pumilus » et il ajoute à ce sujet : «Le puits d'exploitation de Grozon atteignait, à 5 mètres au-dessous du banc de sel, une couche de schistes bitumineux se débitant en minces feuillets très pyri- 1. Marcel BERTRAND. Loc. cit., et B. S. G. F., [3], XIE, p. 459. 2. Même collection, N° 34. 112 FOURNIER. — TECTONIQUE DU JURA FRANC-COMTOIS 21 Janv. teux, sur lesquels M. Pidancet a reconnu des Pecten et des empreintes d’Ammonites ». À Montmorot, près de Lons-le-Saulnier, dans la même bande triasique, le même auteur signale des fossiles toarciens sous le sel gemme : « Les échantillons de marne noire salifère de Montmorot nous ont offert quelques feuilles et tiges et une empreinte d'Ammonite que nous rapportons à Am. striatulus » !. IL y a donc lieu de supposer que le Trias de Grozon est bien renversé sur le Lias supérieur, ce qui indiquerait une pénétration assez considérable de la charnière synclinale. Nous ne voudrions pas néanmoins attacher à cette observation qui peut être discutée, plus d'importance qu'elle n'en mérite; quoi qu'il en soit, elle établit du moins, d'une façon certaine, que les prétendus fossiles marins du Keuper du Jura cités par Ogérien appartiennent au Lias supérieur. De nouvelles études de détail permettront de trancher la question tectonique. J'espère avoir pu montrer par ces quelques considérations que, même dans des régions, depuis longtemps étudiées, comme celle qui vient de faire l'objet de ce travail, il reste encore bien des observations nouvelles à glaner. 1. OGÉRIEN. Hist. nat. du Jura. Géologie, p. 90. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ A FACIES VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE par M. A. JOLEAUD. Préliminaires Le BARRÈMIEN à faciès vaseux pélagique (formations bathyales de M. Haug !) n’occupe pas des espaces très considérables en Algérie et en Tunisie, mais il s'y montre sur un assez grand nombre de points et sa richesse en fossiles, particulièrement en Ammonites pyriteu- ses, a depuis longtemps attiré l'attention des géologues. Coquand ? l’a signalé dans la province de Constantine, à l'Oued Chéniour, au Djebel Taïa, à Aïn Zaïrin (localité indiquée au sud- est de Constantine, mais non retrouvée jusqu’à présent) et à Chiria, près de Sétif. M. Nicklès ? l’a indiqué au Djebel Ouach (au nord-est de Cons- tantine) et à Medjez Sfa (près de Duvivier). M. Sayn‘ l’a étudié sur ces deux points. M. Pomeli l’a mentionné dans la vallée du Sig et au col des Ouled Ali, près de Sidi bel Abbès. M. Aubert 6 en a relevé plusieurs lambeaux en Tunisie. M. Repelin? l’a fait connaître de Sidi Merzoug, dans les environs d'Orléansville. 1. B. S. G. F., (3), XXVII, 1900, p. 621. 2. Mém. Soc. Emul. de la Provence, 1862, t. Il, p. 282. — Bull. Académie d’'Hippone, 1880, n° 15, p. 41. 3. C. R. Ac. Sc., CVIIL 7 janvier 1889, p. 75. 4. Feuille des jeunes naturalistes, octobre 1889, p. 164. — C. R. Ac. Se., CX, 30 juin 1890, p. 1381. — Bull. Soc. agriculture de Lyon, 1890. — B. S. G. F., (3), XXIV, 1896, p. 1162. 5. Descript. stratig. gén. de l'Algérie, p. 56, 1890. 6. Explication de la carte géol. prov. de la Tunisie, p. 9 et suiv., 1892. 7. Etude géologique des environs d’Orléansoille, p. 60, 1895. 27 Août 1901. — T. 1°. Bull. Soc. Géol. Fr. — 8 114 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. M. Blayac ! a décrit les affleurements du Djebel Daffa, du Djebel Taïa et de Medjez Sfa, dans le bassin de l’'Oued Cherf. M. Ficheur ? a découvert ceux du Djebel el Akhal (à l’ouest de Constantine) et du massif d’Arzew f. L’APTIEN à faciès vaseux pélagique a été indiqué par Coquand ? à Aïn Zaïrin ; à l’'Oued Chéniour ; près de l’'Oued el Nahar (affluent de J'Oued Cherf); dans la plaine de Temlouka ; à Chepka mta Sellaoua, au nord-est d'Oum el Bouaghi; au Djebel Babor, dans la Petite Kabylie ; à Sakkamoudi, sur la route d'Alger à Aumale et à Teniet el Haâd, ces deux derniers points dans la province d'Alger. L'un de ces affleurements, celui de l’'Oued Chéniour, a été depuis l’objet d’une exploration complète de la part de M. Blayac !. MM. Le Mesle #, Aubert 5 et Pervinquière f signalent cet étage en divers points de la Tunisie ? Il nous a été donné pendant un long séjour dans nos possessions de l’Afrique du nord, de pouvoir faire, à notre tour, sur ces for- mations, quelques études stratigraphiques et paléontologiques : nous en donnons un premier résumé dans la présente note. Environs de Constantine : le Djebel Ouach Au nord-est de Constantine s'élève un massif montagneux formé de puissantes assises de grès medjaniens, c’est le Djebel Ouach (la montagne sauvage), qui atteint 1.202 mètres à EI Hadjar es Safra (les pierres jaunes). Sur son flanc méridional s'étend ininterrompue une bande barrêmienne que nous avons reconnue sur une longueur de 12 kilomètres et dont nous avons tracé les limites sur la feuille d'El-Aria au 1/50.000°. Son altitude est ‘ comprise entre 6/40 et 900 mètres. | Large de 3 kilomètres en regard du rocher de Sidi Mcid, puis de 2 kilomètres seulement dans la traversée de l’Oued ben Dijelloul, 1. C. R. Ac. Sc., CXXII, 30 novembre 1896, p. 998. — B. S. G. F., (3), XXV, p- 524-034. — Ann. de l’Unie. de Grenoble, XI, n° 3, 1899. — Travaux du Laboratoire de Géol. de la Fac. Se. Grenoble, V, p. 19, 1899. 2. B.S. G.F., (3), XXVIL p. 5%, 1899, et in PoMEL et PouY ANNE, Annales des Mines, 9, XV, p. 191. 3. Mém. Soc. Emul. de Provence, 186», t. IL, p. 283. — Bull. Acad. d’Hippone, 1880, n° 15, p. 30 et suiv. 4. B.S$S. G. F., (3), XVII, p. 209, 1890. 5. Explication de la Carte géol. prove. de la Tunisie, p. 9 et suiv., 1892. 6. In DE LAPPARENT, Traité de géologie, 4° édition, p. 1294. 7. M. GENTIL vient de signaler une remarquable faune de cette époque à Arlal, dans le bassin de la Tafna (Ass. fr. Av. Sc. Congrès de Paris, 1900, p- 606) (Note ajoutée pendant l’impression). 115 # » ASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE À A FACIES V go cette bande se rétr la trouve plus üu on ne \ t encore vers l’est o écl , ‘6000°GL/1 9T[O 495 ‘Squooefpe SurexT97 Sop jo (ounuesuo) en pol np uorwarreg np onbr801098 AUILTD) — ‘I “SIA TE 1 < 147872 ; CL 889" 31S8/J-U0. CE ce JEduo ER — Gi De SE = = RG — 0 7 —_— Ge = di EG eN = 7 ER a Ù \ = PJIM10 JR IPIPEI} = EE NE = NE See EE LT PEN GS EE RE. RS ER; A A ERRSS=— RE CE lg =g36—— 7698 z | [ | | | l | [ | | [ | ( | | re | | | [ | | | | (l } : RES = 1: 6 =. PE = = — — Æ SE = Sen mn 0) ut EE ee ta A CA PU SeI|-EuJu] | NU M ; A . me”: Me L. D TH E De vouegZ777À iuelueqnby a de 1h — SN 2 Le D. some fuJeg 7e En Oo Sr E suo7 [dns VOWQUeg— ven. eusoom — 2 ASE | ES 7 Mn. * É (0 = EN HelUEWOUST _. “juieue90 7 TT) ausooml 7 30 Est) : D deuoan d — LP EEE pe RICE Sloi: Ole à D Os Un nn parfois que d'une centaine de mètres de largeur. ‘ rasses de l'Oued Zied, par des ter A , près Elle commence à l’ouest . En allant vers l’est on la voit s'élever jusqu à la . » , que l’on distingue de loin au-dessus des marnes noires du é supérieur grises Crétac 116 À. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ or Jan. cote 900, au-dessous du piton éocène 997. Partout ce terrain a été lortement entaillé par les eaux, maïs c’est surtout au-dessous de la route de la Pépinière du Djebel Ouach qu'il a été recoupé par de nombreux ravins. Leur collecteur, le Chabet el Beïda (le Ravin blanc) finit dans l'Oucd Dijelloul vers la cote 840. SSO. . NNE. Mara S‘Abdallah Couches 1082 a pPerssons DES en Eee Hadjar Touila ENE. Oued ss Re la Pépinière du Djebel Quach NO SERA NERE = = TE 2 S / Piste deBeniSlne S.E a ES Te = te _ Oued Bordj à frs A ee Re ile OI ben benTarrr ATX Fig. 2, 3 et 4. — Trois coupes dans le Barrêmien du Djebel Ouach. Echelle 1/60.000'; hauteurs triplées. P, Pliocène (fig. 2); mi, Miocène ; e, Medjanien ; mo, Montien ; d, Danien ; a, Aturien; T, Turonien ; bs, Barrêmien supérieur; P, zone à Pulchellia (fig. 4); L, zone à Leptoceras. Sur la rive gauche de cet Oued, qui ne tarit jamais tout à fait, le sol s'élève assez rapidement, forme un petit plateau près du Bordj ben Tarzi et atteint enfin 870 mètres, au-dessus d’un douar, sur la piste des Beni Sline. À partir de ce point l’affleurement n'est plus qu'un étroit ruban jaunâtre qui se tient entre 800 et 700 mètres. On croit le voir finir sous les grès de la cote 820, mais en franchissant le col entre les cotes 820 et 975 on le retrouve sur la rive gauche de l’Oued Gracha, d'où il se prolonge jusque vers l'Oued Kram, plus ou moins masqué dans la traversée des vallées par les éboulis de l’Eocène supérieur. La puissance du dépôt barrêmien du Djebel Ouach est d’à peu près 250 mètres. M. Sayn ! y a établi une succession de cinq assises distinctes, dont une sans fossiles et une autre caractérisée par des débris de Poissons. Nous n’y avons reconnu que trois zones seulement : 1. B. S. G. F., (3), XXIV, p. 1162. 1901 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 117 19 À la base, se trouvent des marnes noirâtres, alternant avec des calcaires marneux de même couleur, se divisant en plaquettes très minces qui renferment en abondance Zeptoceras cf. subtile Uhlig, plus rarement Crioceras cf. silesiacum Uhlig, ainsi que de nombreuses traces vermiformes très longues, larges de 3 à 4 millimètres seulement et portant de distance en distance de faibles retrécissements annulaires. 4 Ces couches ne se rencontrent que dans la vallée de l'Oued ben Djelloul. Elles acquièrent leur plus grand développement sur la rive gauche de cet Oued, au nord-est du Bordj ben Tarzi : leur puissance y est d'environ 80 mètres. 20 [Immédiatement au-dessus se montrent des marnes feuilletées grisâtres, intercalées de nombreux bancs calcaires blanchâtres de 20 à 30 centimètres d'épaisseur auxquels le Chabet el Beïda doit son nom. C’est la zone fossilifère par excellence et aussi la plus ravinée par les eaux. Il n’est pas rare qu’au pied des croupes, aux endroits où la pente diminue, abondent les Phylloceras, les Pulchellia, les Holcodiseus, les Leptoceras Cirtæ Coq. et L. ensis Coq. Les calcaires contiennent les mêmes fossiles, mais beaucoup plus rares et associés à des Aptychus à stries parallèles. Cet ensemble puissant de 80 à 90 mètres forme une partie des pentes qui descendent au-dessous de la route de la Pépinière, vers le fond de la vallée et remonte sur la rive gauche de l'Oued ben Djelloul jusqu'au petit plateau du Bordj ben Tarzi. 30 Enfin, l'étage se termine par 120 mètres de marnes feuilletées, en couches puissantes, bleuâtres d’abord, puis grisàtres et finale- ment jaunâtres au sommet. Elles renferment à leur partie inférieure des calcaires craquelés, esquilleux, grisâtres, veinés en tous sens de filonnets de calcite, que l’on retrouve d’ailleurs dans tous les marno-calcaires crétacés de la région. Dans leur partie moyenne se montrent des calcaires schistoïdes, facilement clivables en plaquettes riches en Macroscaphites, Hamulina, ete., et renfermant aussi des empreintes de fossiles végétaux. Dans les marnes, on voit des représentants des genres Phylloceras, Litoceras, Macros. caphites, Hamulina, Ptychoceras, Desmoceras, Silesites, Oppelia. La partie supérieure de cette zone est intercalée de plaquettes noires, parfois jaunâtres en dehors, contenant des écailles et des nageoires de Poissons, même de petits Poissons entiers. Souvent ces restes d'organismes se présentent sous une belle couleur azuréec. M. Sayn ! pense que ces plaquettes à Poissons et les marnes qui les accompagnent peuvent être aptiennes. 1. Loc. cit., p. 1162-1165. 118 - A, JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 91 Janv. Il ne nous a point paru possible de partager cette manière de voir, car nous avons recueilli tant au-dessus qu’au-dessous de ces” couches une série d’Ammonites que toutes nous avons trouvées dans les couches à Hamulina. Ce sont : Phylloceras cf. serum Oppel. Desmoceras strettostoma Uhlig. Phylloceras cf. Ernesti Uhlig. Desmoceras Angladei Coq. Phylloceras infundibulum d'Orb. Desmoceras Nabdalsa Coq. Lytoceras numidum Coq. Silesites Seranonis d’Orb. Lytoceras Duvali d'Orb. var. Desmoceras? Gouxi Sayn. Macroscaphites Yoani Puzos. Turbo Astaroth Coq. Macroscaphites Ficheuri Sayn. Nucula Ouachensis Coq. Ces couches à Poissons ne sont d’ailleurs autre chose que le calcaire fissile bitumineux de Coquand ! couronnant les marnes de la Vallée de Stafrens ? que ce géologue inclinait déjà à rapporter à l'Aptien, mais en laissant toutefois leur attribution définitive subordonnée à la découverte de fossiles caractéristiques. Ces fossiles existent et nous venons de les énumérer. Maïs il y a plus, M. Pomel ? a signalé dans la vallée du Sig, des «marnes schistoïdes contenant Scaphites Yoani et quelques débris de Poissons » qu’il rapporte au Barrêmien. N'y a-t-il pas identité entre ces dernières couches à Poissons et celles du Djebel Ouach. Il ne semble pas possible d’en douter et l'attribution des unes et des autres au Barrêmien paraît absolument rationnelle, nonobstant la présence de quelques Ammonites aptiennes dans nos marnes supérieures. Il faut ajouter aussi que l’Aptien inférieur et l’Aptien supérieur sont déjà représentés dans le voisinage de Constantine par les calcaires à Réquiénies et par ceux à Ostrea aquila d'Orb. et ÆEpiaster restrictus Gauthier #. L'ensemble du Barrêmien du Djebel Ouach nous a fourni plus de 160 espèces de fossiles, dont une centaine d’Ammonites. Nous avons cru utile de les réunir dans le tableau suivant en indiquant les couches dans lesquelles nous les avons recueillies, leur degré d’abondance ou de rareté et les différents étages de la série infracrétacée où elles ont été découvertes antérieurement. Nous mentionnons, à la suite de ce tableau, une vingtaine d'espèces signalées par MM. Coquand, Cotteau, Peron, Gauthier, Heinz et Sayn qui ont étudié le Djebel Ouach, espèces que nous n’avons pu retrouver, la plupart n'étant d’ailleurs pas figurées et étant insuffisamment décrites. Eu . Mém. Soc. Emul. de la Provence, 186», t: IT, p. 43. . C’estla vallée de l'OuedZied qui descend des hauteurs dela Mechta Tafrent. . Loc. cit., p. 56. . Ficneur, Loc. cit., p. 85. = ©œ D 4H 1901 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 119 IN IE pe an? 2 > = = SIN DES Let Del © AEUUE à - 2 © © DÉSIGNATION S| 2 s £ = = DES ESPÈCES Sent zml & a | & 2 = =) = 5 <°2 a 2 = ÉMIS © | À 8 © |2 |x OS n A (e) Se 2 2e A a à |A |Z De amees 2e PR gg qe ns ns Poissons indét. Traces vermiformes . Phi-lloceras aff. serum ADHEl se .. P. Thetys d'Orb. . . P. cf. Thetys Sayn. P. spec. indét.. P. Goreti Kilian 1? . P. cf. semisulcatum d'Orb. P.cf. Carlavantid'Orb.? P. cf. Ernesti Uhlig . PESpec-1ndét. P. Micipsa Coq. P. Et . Sayn. de PnSpec--indét. Lytoceras numidum COTE LÉAMÉEERERE L. spec. indét. ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique RS BaRRÈMIEN | SUPÉRIEUR OBSER V ATIONS CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES OU, PEU CONNUES NOUVELLES — |Syn. Am. Moreli d'Orb. { Voisin de PA. Thetys d'Orb. par sa coquille comprimée et sa ligne sutu- rale, mais s’en distinguant par ses tours ornés en travers de larges côtes, peu saïllantes, qui partent du pourtour de l'ombilic et vont directe- ment à la région ventrale, qu'elles tra- versent sans s’atténuer ; leur allure générale rappelle celle des côtes de Ph. infundibulum d’Orb. Tours moins larges, enroulement un peu moins rapide que dans le type de d’Or- bigny, les sillons y atteignant d’ail- leurs un peu plus de la moitié du tour. Rappelle aussi PA. Guettardi Rasp., mais à tours un peu plus comprimés, ombilic un peu plus étroit. Syn.-: Voisin de PA. Micipsa Coq., mais de grande {aille (23°n), renflé, orné de 4 sillons rectilignes. ? Am. Aspar Coq. Syn.: Am. Baborensis Coq. Voisin de PA. infundibulum d'Orb , mais plus renflé, orné de côtes sail- lantes dans la région ombilicale, divi- sées en fines stries sur la région ven- trale; la ligne suturale y est moins découpée. Rappelle un peu ZL. Jauberti d'Orb. par | à largeur de ses tours, mais ne pré- sente pas de carène ombilicale. 1. KrcrAN, Archives du Muséum d’Hist. nat. de Lyon, V,Mém. n°3, p. 5, pl. L fig.3. 2. KixrAN, B. S. G. F., (3), XXIIL, p. 765. P LR , , 120 A, JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ o1 Janv. AIRES ÉTAGES LE. & dans lesquels les & © a fossiles ont été S£| + |signalés en Europe DATE et en Am:rique OBSERVATIONS DÉSIGNATION LE NN : SOIN BARRÈMLEN CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES ES AIME MEANS: : re B |mial,s DES ESPÈCES Ée 2 2 | 2 | & | NOUVELLES OU PEU CONNUES EVA — el 22) EN EMEA æ) Fe © Ne) el < 8 £0 A eà fa = à Z Z =) el mn CR RS À Gommcen | cree | ce | CS | ŒRSEES Coeur | | Lytoceras crebrisulca- tum Ubhlig . ef. trans ulatum d'Orb ? . L.spec.indet. . L. L. spec. indel. . . L. Duvali dOrb. L. cf. Phestus Matheron Costidileus Hamilcar Coq. ! Macroscaphites cf. bino- dosus Uhlig . M. Yoani Puzos . M. Ficheuri Sayn . | Hamulina. subcylin- drica d'Orb. . . .. 3 |A.R. 2-3| KR. 2-3 | KR. 8 | JE SUINRS 2 |R.R. 3 (R.R a | JA 2-3 | A.R. SUIMR A.R. Rappelle un peu Lytoceras strangu- latum d'Orb. À accroissement relativement peu ra- pide, à .sillons non équidistants. Var. /brahim Coq. Ornementation plus fine et accroisse- ment plus rapide que dans le type. Coquille un peu comprimée, légèrement arrondie à son pourtour, sans sillons, à accroissement rapide. Spire com- posée de tours presque quadrangu- laires arrondis au bord, très légère- ment embrassants, apparents dans l'ombilic sur les deux tiers de leur largeur. Sur la coquille se dévelop- pent depuis le pourtour de l’ombilic de petites côtes transversales, à peine saillantes, droites, sans bifurcations, qui traversent la région ventrale, Ouverture presque carrée, arrondie aux quatre angles, très légèrement échancrée par le retour de la spire. Ress ventrale assez large, présen- tant un méplat. Ombilic large et sans profondeur. ‘Se distingue de Cost. ? par ses tours Grebenianus Tietze ? quadrangulaires et sa ligne suturale plus simple. Type (?). mutalion striatisulcata d'Orb. 3 et mutation afra Sayn #. 1. Journ. de Conchyliolog. , ©), U, p. 431, pl. XIV, fig. 16, 17. — Mém. S. G. F., (), V,, 1° partie. p. 142, Si II, fe. 16, 17: — Mém. Soc. d’'Emulation de la ramener Il, p. 284, pl. 1, fig. 11, 12. °. Jahrbuch der K. K. geol. Reichsanstalt, XXIT, p. 74. 3. KicrAN, Ann. Univ. Grenoble, NII, n° x, 1896. 4. KILIAN, B. S. G. F., (3), XXI, p. 371. 1901 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 121 ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe ; et.en Amérique OBSER V ATIONS DÉSIGNATION DES ESPÈCES BARHÈMIEN CARACTÈRES SAILLANTS nn... À DES ESPECES NOUVELLES OU PEU CONNUES Couches dans lesquelles les fossiles ont été recueillis | Degré d’abondance où de rareté | NÉOCOMIEN | INFÉRIEUR | SUPÉRIEUR Hamulina nov. spec. indet. Uhlig { . . .. Ptychoceras cf. læve ath. : Bochianites cf. neoco- miensis d'Orb. B.? spec. indet. Pulchellia compressis- SUMIA A OLD MENTON |P. cf. Schlumbergeri ANicklès,?.., .:.. PPtnov- spec. : .". : . KR. Pulch. du groupe compressissima Gerhardt 3 : l'allure générale des côtes y est à peu près la même que dans Pulch. Malladæ Nicklès +. mais sa région ventrale nettement bicarénée, son premier lobe latéral beaucoup plus profondément divisé et plus long suffisent à l'en distinguer. P. Sauvageaui Herm. . ÉÉROVAISDEC Due ee . Pulch du groupe compressissima ù Gerhardt 5 se distinguant nettement par la forle épaisseur de ses tours vers l'ombilic, leur faible épaisseur vers la région ventrale, ses flancs, lisses jusqu'au maximum d'épaisseur, qui est couronné de 5 tubercules peu saillants, très larges, de chacun des- quels partent 3 côles peu élevées. qui, arrivées au tiers externe du tour, deviennent plus épaisses et plus larges, se rétrécissent ensuite et finissent par s'étaler de nouveau au contact de la carène. P. Changarnieri Sayn. P. Ouachensis Coq. . P. Lorioli Nicklès T . . On n'y observe pas de faisceaux de 4 ou à côtes, mais seulement des fais- ceaux de 2 ou 3 côtes. 1. Denkschriften der math.-naturw. Classe d. k. k. Akademie der Wissen- chaften, 46, p. 216, pl. XIII, fig 6, 8. 2. Mém. S. G. F., (4), UL, p. 38, p. VIIL, fig. 9, 10. 3. Neues Jarbuch fur Min. Géol., II, suppl. 1898. 4. Mem. S. G. F., (4), UE, p. 46, pl. VI, fig. 14. 5. Loc. cit. 6. NickLËs, Géol. des env. d’Alicante et de Valence, 1891. ». Mém. S. G. F.,(4), IL, p. 53, pl. VI, fig. 8. 122 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ o1 Janv. ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique OBSER V ATIONS = BARRÈMIEN CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES NOUVELLES OU PEU CONNUES DÉSIGNATION DES ESPÈCES | Couches dans lesquelles | SUPÉRIEUR \ les fossiles ont été recueillis OCOMIEN RIEUR à s) É FÉ APTIEN | ‘} | Degré d'abondance ou de rareté LN | IN Pulchellia Heinzi Coq. 174 ÉCRAN 2 |R.R. Pulch. du groupe compressissima Gerhardt { qui rappelle un peu Pulch. coronatoides par une rangée de tuber- cules sur le pourtour de l'ombilic ; en diffère par son accroissement beaucoup plus rapide, son ombilic i moins profond et surtout ses côtes tuberculées vers la région ventrale. 2-3 |R. R. FE 2 |R.R. Pulch. du groupe compressissima Gerhardt {, voisine de Pulch. hopli- tiformis Sayn, mais s'en distinguant par sa région ventrale assez large, un peu arrondie sur les bords et formée de deux surfaces très légère- ment convexes, séparées par un sillon à bords arrondis ; par ses côtes fines et nombreuses, rarement bifurquées, qui finissent dans le sillon ventral sans s'épaissir sensiblement ; par son‘ ombilic assez large, sa spire compri- mée. P. coronatoides Sayn . NO VAISDeC NE P. hoplitiformis Sayn . 2 RÉN OV ISDEC ER 2 . KR. Pulch. du groupe compressissima Gerhardt !, assez voisine de Pulch. Damremonti Sayn, mais s’en distin- guant par ses côles moins nombreu- ses et d'abord dirigées en avant, par le petit nombre d'entre elles qui sont bifurquées, par son ombilice plus étroit, par ses tours plus convexes, par son canal ventral beaucoup plus étroit et moins profond, par sa région ventrale moins large et plus arrondie. P. Damremonti Sayn .| 2 |R.R. P. coralliophila Fee et Pony an . 2 |R.R: = 2 |R.R. R. R. DE R.R. — P. subcaicedi Sayn P. cf. Caicedi Karsten . P. provincialis d'Orb. . D D 1. Loc. cit. 2. Bull. Soc. Statist. de l'Isère, (4), I, p- 30, pl I, fig. 2-3. 1907 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 195 ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe 2 nue 25| < = 2 LT - : 27| = et en Amérique OBSER V ATIONS DÉSIGNATION ASIN RE È ge| à BARRÈMIEN CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES EAN 7 | ==. : al E ÉMREUE EE DES ESPÈCES le ë » |E Ê NOUVELLES OU PEU CONNUES 22 & 5 | = |£ | à SAINS MRINCRINERLEARIES S) 50 Le) EE el = à 5) A | |slé comes | CCEREEES GR PEER eg =—— Re ÇCÇ Pulch. du groupe de P. compressis- sima Gerhardt 1, rappelle par beau- coup de ses caractères P. provincinhs d'Orb. var. Lindigi Karsten ?, s'en distingue par sa région siphonale plus large, plus nettement bicarénée. ses tubercules moins profondément échan- crés, ses tours plus larges, à accrois- sement plus rapide, ses côtes plus grosses, fortement anguleuses en par- fant de l’ombilic, s'effaçant presque complètement avant de former leur tubercule (mais ne prenant pas la forme de deuxième tubercule canali- culé, comme le montrent les Ammo- nites de Colombie), ses tours plus nettement quadrangulaires, les tuber- cules de sa région siphonale étant absolument abrupts au-dessus du canal et n'y formant aucune pente. Pulch. du groupe de P. compressis- sima Gerhardt 1, voisine de la précé- dente, mais s'en distinguant par ses tours bien moins épais pour un dia- mètre égal, ses côtes moins saillantes au pourtour de l'ombilic, ses tuber- cules ventraux moins larges et moins élevés, son ombilic plus petit, sa région ventrale plus large, son ouver- ture à peine rectangulaire. Elle se distingue de P. provincialis d'Orb. par ses tours moins épais, ses tuber- cules siphonaunx moins accentués, ses côles très rarement bifurquées, sa région ventrale plus large et plus largement canaliculée. IRÉRRON ISDC Ne PASpec-andet.1..:#. "109 \R°:1R. P. Zeilleri Nicklès 3. .| 2 |R.R P, Masylæi Coq..‘. . .| 2 |R.R. A. C Desmoceras strettosto- ma Uhlig . . . . . .|2-3 D. Seguenzæ Coq... . .| 3 | KR. G [M] di SIP VON TE ce 1. Loc. cit. 2. Die geognostiche Verhältnisse Neu-Grenadas, pl. I, f. 5. 3. Mém. S. G. F., Paléont , (D, 1,.n° 4, p. 14, pl. I, fig. 12-16 ; pl. I, fig. 4. 4. Mém. S. G. F.,(), V, 1° partie, p. 14 , pl. IL, fig. 14-15. — Journal de Conchyol., I, p. 430, pl. XIV, fig 14-15. — Unxic. Denkschriften der mâäth.- naturw. Classe d. k. k. Akademie der Wissenchaften, 1883, 46, p. 247. 5. Mém. Soc. Emul. de la Provénce, t. Il, 1896, p. 168. 6. PaquiEr. Bull. Soc. Stat. Isère, (4), V, p. 299. 124 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L’'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique OBSER V ATIONS EE RS BARRÈMIEN CARATÈRES SAILLANTS 2 d DES ESPÈCES NOUVELLES OU PEU CONNUES DÉSIGNATION DES ESPÈCES Couches dans lesquelles les fossiles ont été recueillis | SUPÉRIEUR APTIEN | NÉOCOMIEN | INFÉRIEUR pe) | Degré d’abondance ou de rareté Voisin de Desm. impressum d'Orb,, mais à sillons longitudinaux moins prononcés. D. Nabdalsa Coq. . . .|253| KR. Syn.: Amm. Monicæ Heinz. : D. aff. Nabdalsa Sayn.| 3 D. Angladei Sayn . . .| 3 D. getulinum Coq. . .| 3 Desmoceras sp.indet. .| 3 A. R. —| , Syn. : ? Am. cicer. Coq. — ? Am. ) Oxyntas. Coq. D, ? cirtense Sayn. . .| 3 D. Vocontium Sayn et LOVE EE D. Gouxi Sayn . .|l2-8|A.cC. Syn.:? Am. Monicæ Coq. — Desm. difficile Sayn. D. cf. difficile d'Orb. .| 2 |[R.R. | Silesites Seranonis d'Orb en ere S+ aff. Seranonis Sayn |2-3 |A. C. Syn.: Am. impare-costatus Coq. — Am. Oxyntas Heinz. S. interpositus Coq. .| 3 |A.R. —? Oppelia nov. spec. . .| 3 | R. Se distingue de Opp. Nisus d'Orb. par sa ligne suturale moins finement découpée et son 2e lobe latéral plus dissymétrique. Opp. Nisoïdes Sarra- zin 4 s'en sépare par sa selle sipho- nale plus large, plus finement décou- pée, son lobe latéral moins dissymé- trique, sa re selle latérale plus profondément divisée en deux au sommet, moins fortement échancrée sur les côtés. La dissymétrie du 1°" lobe latéral et sa 1" selle latérale étroite et profondément divisée la différen- cient de Opp. Haugi Sarrazin #. Ses selles très étroites, surtout à leur base, l'éloignent des Opp. aptiennes et la rapprochent de Upp. subradiata. O. cf. aptiana Sarraz. “| 3 |R.R. — Holcodiscus Gastaldi LOL TIENNE RENTE 1, NickLës. C. R. Ac. Sc., CVIHL, p. 74. 2. KicraAn. B. S. G. F., (3), XXI, p. 744. 3. Bull. Soc. Statist. de l'Isère, (4), UE, p. 24, pl. I fig. 7-8. 4. B. S. G. F.,(), XXI, p. 149 et suiv., pl. IV, VI. 1901 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 195 RS 2 Cr LC m| © ÉTAGES =. Ê dans lesquels les = 2 é fossiles ont été CON signalés en Europe T-| = | eten Amérique OBSERVATION 2 + & © © pee — DÉSIGNATION |£E| © | | res Sel © BaRHÈMIEN CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES CS z | ——_— È : . È ë lle lz DES ESPÈCES BONE 2 | © | 2 | £ | NOUVELLES OU PEU CONNUES ANNEES EN EN TE 0. Te © fs ; SENS © | & | |< n 5 D] & M No AU MEN A = |A nn | me | Ge | Ce | es À S | Holcodiscus diverse- costatus Coq. . . . Type, var. à côtes fines et var. à côles ombilicales fortes et un peu tubercu- leuses au point de bifurcation. Se distingue de Hole. diverse-costatus Coq. par sa coquille assez convexe, ses flancs non aplatis, ses côtes un peu plus fortes, bifurquées plus tôt, l'absence de méplat sur la région ventrale, où les côtes s'accentuent, ses tubercules bien moins nombreux (9 au lieu de 18-20), son ouverture hexagonale plus large que haute ; son ornementation néanmoins assez fine la différencie facilement de Hotc. Caillaudi d'Orb. Pispeciindet. 00 MMA —? Syn. (var.) Hole. Geronimæ Sayn. Ê H.metamorphicus Coq. H. spec-indet-cu. 0 Voisin d'Aolc. metamorphicus Coq.. mais à enroulement plus rapide, à côtes non bifurqées après le tuber- cule ombilical, à région ventrale lisse, à tubercules plus nombreux et plus aigus. Voisin de Hole. algirus Sayn par la forme de ses tubercules siphunaux, s'en distinguant par ses 6 rangées de tubercules, ses tours hexagonaux plus larges que hauts à ombilic bien moins profond, à région ventrale à peu près lisse. H. Vermina Coq. . D H. algirus Sayn. . . .| 2 HÉHenOontCOM MN) Ammonites Henoni Coq. nous a paru, d'après sa ligne suturale, devoir être rangée dans ie genre Holcodiscus. H. menglonensis Sayn. H. astieriformis Sayn. H. cf. Perezi d'Orb. Sophonisba Coq. D à D à 3 Et var. tenuis Sayn. 1. Nicxrès. Mém. S. G. F., Paléont., 4, L 2. — NicxLès, Geol. env. de Valence et Alicante, 1891. — Kicran. Ann. geol. univ, VII, p. 500 et HAUG, p. 972. 2. NickLès. Géol. env. Valence et Alicante. — KicrAw. B. S. G. F., (3), XXII, P- 744. 3. Nickrès. C. R. Ac. Sc., CVIIL, p. 74. . 126 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique : OBSERVATIONS 2,2 BARRÊMIEN CARACTÈRES SAILLANTS 0 « DES ESPECES NOUVELLES OÙ PEU CONNUES DÉSIGNATION DES ESPÈCES Couches dans lesquelles les fossiles ont été recueillis |] NÉOCOMIEN | INFÉRIEUR | SUPÉRIEUR APTIEN: no | Degré d'abondance ou de rareté Holc. du groupe de Holc. Sophonisba Sayn, à coquille formée de tours très larges, à accroissement assez rapide à flancs anguleux, ornés autour de l'ombilic de 12 à 13 tubercules très longs, aigus, se recourbant en arrière quand ils sont complètement déve- ; loppés, tous situés aux points de bifurcation des côtes qui sont assez fortes et saillantes ; deuxième ranvée de tubercules ventraux semblabies aux précédents, mais plus écartés les uns des autres; région ventrale extrèmement large ; lobes et selles à peine découpés ; premier lobe latéral moitié moins long que le ventral; les tubercules siphonaux n’apparais- sent qu assez tard et s'allongent avec l'âge ; ils deviennent souvent alors bifides ; au diamètre de 19 m. m. le tubercule ombilical a°4 m. m. de l diamètre à la base. Holcodiscus nov. spec. D H. aff. druentiacus KG REP OE SP IEE H. spec. indet . . . . . D e D | Voisin de Holc. Morleti Kilian, par la disposition de ses côtes autour de l'ombilic, mais s'en distinguant par la finesse de son ornementation qui rappelle par ce caractère celle de H. menglonensis Sayn. b d Hoplites Lamoricieri SAV EE CNE Eee H. cf. Beskidensis CREME RE ENEMERE R. — H. Gelimer Coq. .. | 3|R D D. p D Nous rapportons à cette espèce des Hoplites voisins de l'espèce précé- dente qui nous ont paru répondre à la figure de Heinz ? à tours assez larges, à côtes’ bifurquées, et tuber- cules peu saillants, à ornementation très atténuée sur la région ventrale, qui est assez nettement bicarénée. Voisin de Acanth. Cornueli d'Orb.. mais plus renflé, à côtes bitubercu- lées moins saillantes, s'aplatissant | vers la région ventrale. Acanthoceras spec.ind.| 2 |R.R. 1. Denkschriften der math.-nat. Cl. d. k. k, Akad. d. Wiss., 46, p. 292, pl. XX, fig. 12. 2, Foss. décr. par Coquand, pl. IV. 1901 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 127 DÉSIGNATION DES ESPÈCES Couches dans lesquelles les fossiles ont été recueillis | Degré d’abondance ou de rareté | NÉOGOMIEN Acanthoceras cf. nodo- socostatum d'Orb.. Crioceras aff. Emerici EVENE RER IN SR | C. ef. silesiacum Uhlig.| r |R.R. C. cf. breve d’Orb. 3 |R.R. GMESpuindet "0 10-31)/A0 CC: CPISpuindel Ne 2-3| FR. Toxoceras spec indet.|9-3|A.R. T. Ouachense Coq. . GITE T. Henoni Coq. . : . .| 3 | FR. HRSpeC under ee Ce-R Re T. spec. indet. . 2-3| R. T. spec. indet, 2 |R.R. A. aff. Matheroni d'Orb.| 3 à Heteroceras cf. Astieri AdOPDE UNS A3 À ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique Re. BARRÊMIEN APTIEN OBSER V ATIONS CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES NOUVELLES OÙ PEU CONNUES Fragment de coquille droit, à tours absolument lisses, à lignes suturales très rapprochées les unes des autres, à section subcirculaire. Coquille ornée de côtes non tuberculées devenant seulement plus saillantes sur la région ventrale qu'elles tra- versent en s'incurvant. Rappelle Toxoceras Royeri d'Orb; coquille ornée de côtes inégales, les unes plus saillantes portant sur cha- que flanc trois tubercules vers la région ventrale ; les autres beaucoup plus faibles non tuberculées. Assez voisin du précédent. Coquille ornée de côtes souvent bifur- quée s'accentuant généralement au voisinage du point de bifurcation et sur la région ventrale où elles s'in- terrompent; section ovale. Coquille ovale, ornée de côtes inter- rompues sur la région ventrale, por- tant six tubercules, ceux de cette dernière région étant les plus accen- tués ; toutes les côtes simples et assez fortes. Rappelle un peu Zox. Emerici d'Orb., coquille à seclion octogonale, plus large que haute, ornée de fortes côtes simples, ornées de trois tubercules très saillants sur chaque côté; les dites côtes Ss'atténuent sur la région ven- trale. Coquille ornée de fortes côtes obli- ques, portant 3 tubercules ; de côles fines et peu saillantes, alternant avec elles; section ovale; premier lobe latéral très developpé. 128 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique OBSER VATIONS Re. SE CR BaRRÊMIEN CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES NOUVELLES OU PEU CONNUES DÉSIGNATION DES ESPÈCES Couches dans lesquelles les fossiles ont été recueillis | NÉOCOMIEN po | Degré d'abondance ou de rareté EE Leptoceras ensis Coq. . L'aspect général est celui de Zept. Ciriæ Coq., avec cette différence que les côtes ne sont ni interrompues, ni tuberculées sur la région ventrale ; la ligne suturale indique nettement un Leptoceras. L.?spec. indet. . - . . Coquille semblable à la précédente mais présentant de distance en dis- tance une forte côte comme dans Toxoceras annularis d'Orb.; ligne suturale invisible. L. Cirtæ Coq. : L. spec. indet. Sayn. . .R. Selles à peine échancrées à leur partie supérieure par un léger lobule. L. cf. subtile Uhlig Aptychus spec indet. Belemnites Fallauxi (DIN CPC NET TN B. cf. pistilliformis BL. . carpaticus Uhlig ? . . minaret Rasp . ef. poly gonalis Biv. ; : Subfusiforme avec deux sillons à peine -spec. indet. - . . - à indiqués sur toute la longueur du rostre qui est marqué de ponctua- tions semblables à celles de Bel. Baudouini d'Orb. spec. indet de Conique avec deux sillons semblables FRE PANEUE é à ceux de la précédente, et, vers la pointe, un troisième sillon profondé- ment creusé ; pas de ponctuations. B. spec. indet ACNUR R Conique sans trace apparente de sillons. Duvalia cf. binervia Rasp. . D. spec. indet. 4 D. cf. Grasi Duval. . D. cf. Emerici Blainv. Rhynchoteuthis Henoni CO NC ARMENNE _Phasianella Myrmidon Coq. Es pa Rappelle Duv. binervia Rasp. 1. Denkschriften der math.-naturw. Classe der k.k. Akademie der Wissen- chaften, 46. p. 177, pl. I, fig. 4, 14. >. Id., p. 177, pl. 3, fig. 1. I901 - A FACIÈS VASEUX:PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 129 its ÉTAGES ne = dans lesquels les ÉS | ME fossiles ont élé — TZ [b] . 2 SOIT signalés en Europe : T=| = et en Amérique OBSER V ATIONS DESIGN ATION SE e mr oi CRE BARRÈMIEN CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES SE < 2 : A = el PIN DES ESPÈCES BONNE SEE LÉ 25| = | 4 | 2 | 2 | À | NOUVELLES OU PEU CONNUES ° a ? © je) AR S F SN EANINS NN EN EE () 221 re = De) Ne < 2 EN EEE A E | CSS | ons | CS ES RS 0 Turbo Mezetule Coq. SAIT T. Astaroth Coq. SUR R T. spec. indet. 3 | R. Plus gros que les précédents et à tours fortement arrondis, sans côtes, ni stries visibles. T. spec. indet.. . . . .| 3 |R.R Semblable au précédent, mais beaucoup 3 plus petit, à tours bien moins larges. Trochus cf. barremensis d’Orb. . 3 | R. — T. spec. indet, 22 PE À tours anguleux, sans stries d'accrois- sement. Cerithium spec. indet.| » |R.R. Astarte acutirostris Coq. : 2 |R.R. A.? spec. indet. . .| 2 [R.R Lucina sculpta Phill. .[ 9-3 |A.R. Syn. : ? Lucina Zamma Coq. Neæra Tanit Coq. . .| 2 |R.R. Nucula OuachensisCoq.| 2 | R. N. spec indet. 2 |[R.R Nuculina Ouachensis Coq. ë 2 | KR. N. spec. indet. on 1 IR Leda cf. scapha d’Orb 2 |[R.R.| — Arca spec. indet. 3 [R.R. Tapes? spec. indet. 3 [R.R. Tellina? spec. indet. 2 |R.R. Pecten alpinus d'Orb. 2 |R KR. — Inoceramus spec.indet.| 2 |[R.R. Ostrea spec. indet. 2 |R.R. Cardium spec. ind. 3 | R. C. spec. indet,. OO RIRARE Glossothyris cf. RiDOe pus Roœm. RU = = | = Toxaster? spec. nds 2 |A. C Collyrites ardua Peron et Gauthier . SRE Trochocyathus?sp. nt 3 | KR. 1. Aa Sp. ind 23" R: R. 27 Août 1901. — T. 1er. Bull, Soc. Géol. Fr. — 9 130 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. Les autres espèces indiquées au Djebel Ouach par les divers géologues qui ont étudié ce gisement et que nous n'avons pu retrouver sont : Belemnites subfusiformis d’Orb. t. Ammonites Emmelina Coq. ? Aptychus Numida Coq. ! Straparollus inexpectatus Coq. ? Aptychus Caïd Coq :. Cerithium Henoni Coq. ? Ammonites Nisus d'Orb. ‘ Nucula Henoni Coq. * Ammonites diphyllus d'Orb. ? Cardium modestius Coq. * Ammonites Grasianus d'Orb. ? Collyrites ovulum Desor Cerithium Adherbal Coq. * Collyrites ardua Peron et Gauthier ‘ Nuculana nana Coq. * Pulchellia sp. indet. Sayn Metaporhinus Heinzi Coq. * Lytoceras Jauberti d'Orb. f Belemnites Orbignyi Duval ? Silesites cf. oulpes Coq. Ammonites Sinzora Coq. ? Holcodiscus aff. Sophonisba Sayn ? Ammonites Gurzil Coq. * Holcodiscus nov. spec. Sayn ? Ammonites Gildon Coq. * Hoplites aff. asperrimus Sayn Ammonites Mazuca Coq. * Belemnites semicanaliculatus B1v. Il ressort du tableau précédent que les caractères généraux de la faune barrémienne du Djebel Ouach peuvent se résumer ainsi : a) Caractères communs aux assises inférieures et supérieures. 1° Extrême abondance des individus dans les espèces des genres Phylloceras, Hamulina et Crioceras s. 1. (déjà existants dans la mer néocomienne). | 2° Rareté relative des individus dans les espèces des genres Costidiscus, Macroscaphites, Pulchellia, Silesites, Holcodiscus (qui apparaissent pour la première fois dans la région méditerra- néenne à l'époque barrémienne, à de rares exceptions près). 3 Persistance des Dupalia des groupes binervia et Emerici, qui dans cette région caractérisent généralement le Valanginien (Mon- tagne de Lure, etc.) ?. b) Caractères particuliers aux assises inférieures : 1° Multiplicité des espèces dans les genres Pulchellia avec 23 espèces et Holcodiscus !° avec 15 espèces, genres dont le plus grand 1. CoquaAnD. Mém. S. G. F., (2), V, 1'° partie, p. 111. 2. CoquaAnDp. Mém. de la Soc. d’émul. de la Provence, t. I, p. 42. 3. Coquanp. Bull. Acad. Hippone, 15, p. 82, 123, 224, et Suppl., p. 363 à 370, 359, 383, 386, 3953. 4. COTTEAU, PÉRON et GAUTHIER. Annales des Sciences géologiques, 1884. Echinides de l'Algérie, p. 64-65. 5. Heinz. Foss. décrits par Coquand, pl. photog. I. 6. SAyN. Feuille des jeunes Natur., octobre 1889, p. 1664 7. SAYN. Bull. Soc. Agriculture de Lyon, 1890. 8. Heinz in Papier. Bull. Acad. Hippone, n° 98, p. 106. 9. C’est l'existence de ces formes qui avait fait comprendre à tort, le Barrè- mien d'Algérie dans le Valanginien {Pomer. Desc.strat. gén. de l'Algérie, p.59). 10. M. PELLAT (B. S. G. F., (3), XXII, p. 426) signale l’existence à Brouzet TOOI A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 131 développement a lieu dans le Barrêmien inférieur (horizon de Combe-Petite de la montagne de Lure). 20 Persistance d’un Phylloceras du groupe semisulcatum (groupe généralement considéré comme éteint avant la période barré- mienne) !. c) Caractères particuliers aux assises supérieures : 10 Petit nombre des espèces dans les genres Macroscaphiltes et Silesites, chacun avec trois espèces, Costidiscus avec deux espèces, Heteroceras avec une espèce seulement, genres caractéristiques du Barrémien supérieur (horizon de Monteyron de la Montagne de Lure). 20 Existence simultanée d'espèces franchement barrêmiennes et de quelques espèces considérées plutôt comme aptiennes appar- tenant aux genres Phylloceras, Lytoceras, Oppelia, Ancyloceras. Les Pulchellidés, si bien représentées au Djebel Ouach, se retrou- vent, mais en moins grand nombre, sur quelques autres points barrêmiens de l'Algérie et de la Tunisie 2. Dans leur migration vers l’est, ces Ammonites de Colombie * ont ainsi passé au sud du massif ancien de la Méditerranée occidentale, comme elles passaient au nord pour gagner la province d’Alicante, les Baléares et plus loin la fosse préalpine. Toutefois ce changement de milieu ne paraît pas avoir favorisé leur multiplication : c’est. du moins, ce que semble indiquer la rareté des individus dans les différentes espèces et leur disparition presque complète dans le Barrêmien supérieur. En dehors du Barrêmien, voici les terrains qui se trouvent représentés dans la partie de la montagne qui nous intéresse, ainsi que dans l’espace qui la sépare de Constantine : a) Le Trras, près du couvent du Bon Pasteur avec ses calcaires jaunes de miel, ses marnes irisées et ses cargneules. b) L’Ixrrauras # dont les bancs puissants de calcaires bleuâtres et à Lussan (Gard) des Holcodiscus de Constantine, dans un faciès mixte à Spatangues et à Céphalopodes. 1. DE LAPPARENT. Traité de géologie, 4° édition, p. 1247. 2, Ce sont : Mendès (Pulch Sauvag'eaui), Sidi Merzoug (Pulch Sauvageaui) et Teniet el Haad (Pulch. compressissima) dans la région d’Orléansville ; Djebel el Akkal (Pulch. Sauvageaui) et Aïn Zaïrin (Pulch. Masylæi), dans les environs de Constantine ; Oued Cheniour (?) (Pulch. Masylæi), Djebel-Taïa (Pulch Ouachensis, Sauvageaui, Heinzi, coronatoides, ete), Guelma (Pulch. Sau)ageaui et 2 Pulch. nouvelles) et Medjez-Sfa (Pulch. Sauvageaui, compres- sissima, Zeilleri, etc.) dans le bassin de l'Oued Cherf; Hammam Lif (Pulch. Sauvageaui) en Tunisie. — [Arlal (Pulch. compressissima, Sauvageaui, pro- vincialis, Ouachensis), dans le bassin de la Tafna (Note ajoutée pendant l'impression) |. 3. Douvicré. B. S. G. F., (3), XX VII, p. 224. 4. M. DE LAPPARENT (Traité de géol., 4° édit., p. 1084) dit que les plaquettes 132 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. dolomitiques recouvrent le Trias. Nous y avons trouvé abondam- ment Mytilus psilonoti Quenstedt. c) L’APTiEN ! représenté au Djebel Salah et au Djebel Kelal par de puissantes masses calcaires à Réquiénies. d) Le CÉNOMANIEN ! du Djebel Sidi Mcid, formé par des calcaires grisâtres à Nerinea cf.Pailleteana d'Orb. et Caprinula Boissyid'Orb. e) Le TURONIEN ! qui surmonte le Cénomanien et est constitué par des calcaires gris à Sphæruliles et Hippurites cf. inferus Douvillé. f) L'EMSCHÉRIEN immédiatement au-dessus des formations pré- cédentes qui se reconnaît à ses calcaires blancs en dalles dans lesquels on a trouvé Micraster Peini Coq.? et où nous avons cons- taté la présence d’Ostrea proboscidea d'Archiac. £) L’ATURIEN qui recouvre en concordance l'Emschérien sur les flancs du Mansoura et sur le sommet du Djebel Sidi Mcid et a été relevé sur les bords du Djebel Kelal avec des marnes grisâtres con- tenant Zpiaster verrucosus Coq. ?, Thecideum cf. papillatum Bronn. et de petites Ammonites ferrugineuses, Baculites cf. anceps Lamk., Phylloceras (ou Pachydiscus) sp., Lrtoceras sp. h) Le Dante (?) dont les marnes grises renfermant des plaquettes de calcaire jaune à Inocérames couronnent l’Aturien et se super- posent directement au Barrêmien supérieur, à gauche et à droite de la route de la Pépinière. i) Le MonTIEN (??) “ caractérisé par des calcaires marneux jau- nâtres avec traces de végétaux (?) surmontant le Danien près du couvent du Bon Pasteur et au nord du rocher de Sidi Mecïd. J) L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR représenté à la surface de l’Aturien par quelques îlots de calcaires gris blanchâtres à silex et par des marnes bleuâtres. | k) L’EocÈE surÉRIEUR (Medjanien) 5 dont les grès quartziteux, avec lits d’argile, couvrent les sommets du Djebel Ouach en s'appuyant sur le Barrèmien et sur l’Aturien. l) L’OLIGOCÈNE INFÉRIEUR 6 aux argiles grises et roses à Hélices dentées de la rive droite de l’oued Zied. m-n) L'AQUITANIEN ! et le MiocÈNE au nord-ouest et au sud-est calcaires à Mytilus psilonoti pourraient bien indiquer l’'Hettangien à Souk- Ahras (BLayAc et GEenriz. B.8S. G. F., (3), XXV, p. 523). 1. Fioneur. B. S. G. F., (3), t. XX VII, p. 90. 2. Pomer. Descr. strat. gén. de l'Algérie, p. 98. 3. Bull. Acad. Hippone, n° 15, p. 230. 4. Une succession analogue des assises du Crétacé supérieur a été relevée en Tunisie par M. PERVINQUIÈRE (C. R. Ac. Sc., t. CXX VII, p. 789, et t. CXXXT, p. 563). 5. Frcneur. La Kabylie du Djurdjura, p. 221. — Ficneur. Ass. fr. Apanc. Se. Bordeaux, 1895, 2° partie, p. 574. 6. Ficaeur. B. S. G. F., G), XXI, p. 544. IOOI A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 1933 de la bande barrèmienne, représentés par des conglomérats rouges d'argile et de cailloux roulés, contenant parfois aussi de gros blocs de grès provenant de l'Eocène supérieur. o) Le PriocÈne du Djebel Sidi Mcid et du Mansoura comprenant des calcaires travertineux à Lymnées, intercalés de sables jaunes à Hippopotamus amphibius L. race major Cuv. et Elephas meridio- nalis Nesti. p) Le PLréisrocÈne des hauts niveaux des vallées d’érosion avec cailloux roulés quelquefois conglomérés. Nous nous proposons dans une prochaine note de faire une étude détaillée de ces diverses formations. L’affleurement barrêmien du Djebel Ouach fait partie d'un anticlinal dirigé nord-ouest sud-est. Au sud-est ses strates s’enfoncent sous le Medjanien et au nord sous le Crétacé supérieur, que surmontent de puissants dépôts aquitaniens. Au sud il est sur quelques points en contact avec l’'Eocène inférieur; partout ailleurs, c’est le Crétacé supérieur qui le recouvre. En face du rocher cénomano-turonien du Sidi Meiïd, ce dernier étage est réduit à une bande de 20 à 30 mètres de large, pincée entre deux failles. Plusieurs autres failles limitent d'ailleurs .le Barrêmien entre Sidi Mcid et l'Oued Zicd. Sur l’Oued Zied même, à l’ouest, le Barrêmien s’infléchit fortement en s’enfonçant sous les argiles de l'Oligocène inférieur de la rive droite du ravin. Partout c’est le Barrêmien supérieur qui est en contact avec les autres terrains, sauf dans le haut de la vallée de l'Oued ben Djelloul, où les éboulis de l'Éocène supérieur masquent les contacts en ne laissant apparaître que les couches à Leploceras. Ce n'est d'ailleurs que là, comme nous l'avons dit, que se montrent ces couches : leur forte inflexion vers le nord-ouest et le sud-est n’a pas permis aux autres Oueds qui ont entaillé le Barrêmien de les atteindre, pas plus d’ailleurs que la zone à Pulchellies. Le plissement barrêmien qui nous occupe semble dater de la fin de la période barrêmienne ou du commencement de la période aptienne. Il a vraisemblablement soulevé le Djebel Ouach au-dessus du niveau général des mers de l’époque aptienne, ou, tout au moins, amené les sédiments barrêmiens à une faible distance de ce niveau ; c’est sur les bords de cette terre émergée ou sur ce haut fond que se sont édifiées les formations néritiques coralligènes, aptiennes et crétacées dont les témoins actuels sont le Djebel Kelal, le 134 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. Djebel Salah, le Djebel Sidi Meid... et sans doute aussi le Djebel Oum Settas. Plus tard, à la fin de la période aturienne ou au commencement de la période danienne se produisit un affaissement général du littoral barrêmien, ou de la partie du haut fond voisine de celle où se formaient les calcaires ; il en résulta plusieurs failles dont la principale orientée nord-ouest sud-est est aujourd'hui en parte masquée quoique parfaitement visible encore sur divers points. Sa direction est exactement donnée par le Chabet el Houa. Environs de Guelma : le Dra el Kerroucha Au commencement de 1899, nous avons découvert au sud-ouest de Guelma, au lieu dit Dra el Kerroucha (la colline du chêne vert), un petit affleurement barrêmien de 3 kilomètres de long sur 2 kilomètres de large, dont nous avons tracé les limites sur la feuille de la carte d'état-major au 1/50.000°. Ce lambeau de Crétacé inférieur est profondément entaillé au sud-est par l'Oued el Rebate et par l’Oued Skroun, dans les thalwegs desquels passe la conduite d’eau qui alimente la ville. Au nord il est recoupé par plusieurs autres ravins, comme les précédents, tributaires de la Seybouse. Les terrains qui avoisinent le Barrêmien du Dra el Kerroucha sont : a) L'ÉocÈxe supérteur (Medjanien) dont les grès alternant avec des argiles le recouvrent à l’ouest, au sud et sur une grande partie de son flanc oriental (Kef en Nessara) ; b) Le MiocÈNe INFÉRIEUR (Cartennien) ! qui s'appuie sur lui au nord-est et qui est formé d’argiles grises contenant en abondance des cristaux de gypse et des masses de gypse amorphe exploitées. Ce terrain forme toute la rive gauche de la Seybouse en face de Guelma. Il nous a fourni quelques Hélices gypseuses indétermi- nables. c) Le PLIOCÈNE, constitué surtout par des calcaires gris ou roses absolument identiques à ceux du même étage de Constantine : ils recouvrent les argiles cartenniennes, notamment au sud-ouest de la ville. d) Le PLÉISTOCÈNE formé sur certains points par des tufs à tiges de plantes, sur d’autres points par des cailloux roulés, des sables, des limons. 1. Fournez. Richesse minérale de l'Algérie, I, p. 172, 182. — Pomer. Descr. strat. gén. de l'Algérie, p. 162. 1901 A FACIÉS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 199 Quant au Barrémien lui-même il rappelle absolument les couches à Hamulina du Djebel-Ouach par sa constitution lithologique. LS SE RES Œ — == DZ FE; Pléistocene Pliocene == Eocène sup” — Ve djanien) — Barrémien Fig. 5. — Carte géologique du Barrèmien de Guelma et des terrains adjacents. Echelle : 1/50.000°. Il est d’ailleurs aussi riche que lui en fossiles. Nous en avons recueillis, en peu de temps, près de cinquante espèces, dont 52 Ammonites. En voici la liste. 136 A, JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. VE ÉTAGES eo £ S dans lesquels les À fossiles ont élé = signalés en Europe : = et en Amérique OBSERVATIONS DÉSIGNATION > — à © BaRRèMIEN DRE | Das ho Ë 2 CARACTÈRES SAILLANTS E È Fe = Z DES ESPÈCES A 2 | à |.5 S NOUVELLES OU PEU CONNUES © = el T © = (se A D © Ne 5 | == Ne) [2 & » |A | |> A Ce un « Es OS CORNE | CREED | Phylloceras aff. serum Oppel à .[A. C.|— | — | — P. Thetys d'Orb. JR R|—|—|—|— P. Goreti Kilian. .|R.R. cn P. cf. Ernesti Uhlig. .| R. — | — P. infundibulum d'Orb. Lytoceras spec. indet. Semblable au Lytoceras spec. indet. voisin du L. Jauberti du Djebel Ouach. Dre EJ © L.crebrisulcatum Uhlig. L. cf. SirOnenie Une d'Orb.? ..... .. .[R. R|—|—|—|— L. spec. indet. . . . .| KR. Semblable au Lytoceras spec. indet. voisin du L. Strangulatum du Djebel Ouach. ue Yoani Puzos?. . . .[R. R. ES M. cf. pires d Orb. ? | R. Le Hamulina spec. indet.| R. Rappelle am. nov. spec. indet. du Djebel Ouach, mais à côles beaucoup plus fortes, à ligne suturale moins découpée. H. spec. indet. . . . .| R. Rappelle un peu Hamulina tenuis Repelin 1. H. spec. indet. . . . .|A.C Coquille lisse, à section circulaire: ligne suturale assez simple. H.cf. Royerianad’'Orb.?| R. — Bochianites spec. ind.|[R.R. Pulchellia Sauvageaui Hérmnite ne TR = PNOMMSDEC TE CINE Semblable à Pulchellia nov. spec. voisine de P. Malladæ du Djebel Ouach, FÉMSDEC Inde NES RE Voisine de Pulch. provincialis d'Orb. mais s'en distinguant aisément par son cmbilic plus large, ses côtes falciformes, simples, non tuberculées à l’ombilic. Ses tubercules ventraux sont bien canaliculés, mais 1ls sont moins larges et presque tranchants. Région ventrale anguleuse, Desmoceras strettosto- creusée d’un sillon assez étroit et profond. TAUPE LE TAS IC: D'AGoux IS ay AMC D. spec.indet. R.R Voisin de D. Gouxi Say n mais à accroissement bien moins rapide, à ombilic beaucoup plus large, à sillons plus coudés, à côtes plus : D : accentuées. Silesites aff. Seranonis Sayn. ; AONEC] VAN S interpositus Cr. .|A. . R. C. 1. B. S. G. F., (3), XX NI, p. 371, pl. VII, fig. 12. 190I A FACIÉS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 137 ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et em Amérique sd © 1 a À = l 5 DÉSIGNATION ln 4 È BARRÊMIEN DES ESPÈCES ë m | T A _ 5 |: |S 16/6 GE OMREMMENIRE Ke) (e} = ee A 2 e EE 5 el ES | NE VE =] nl un cms | oem | men | comes Holcodiscus spec. ind.[R.R. Ancyloceras”?spec.ind.[R. R. AL OS) DEAN EPENENONENC| A"? spec. indet -- A.? spec. indet. T. spec. indet. .. Leptoceras spec. indet Belemnites carpaticus WE EAENT B. minaret Raspail. . .| BASpec-üindet.. B. spec. indet. . . Duvalia ef. binervia Rp.| D. sp. indet. . .. D. cf. Grasi Duval D. cf. Emerici Blainv Turbo Sspec. indet. T. cf. Mezetule Coq. Lucina cf. sculpta Phill. Pygope spec. ind Toxaster? spec. indet.| OBSERVATIONS CARAGTÈRES. SAILLANTS DES ESPÈCES NOUVELLES ‘OU PEU CONNUES EUR PE EE EN EEE SIT EEE ERTERS Coquille suborbiculaire, à tours plus larges que hauts ornés de fines costules qui par- tent du pourtour de l’ombilic et traversent Ja région ventrale sans s'nfléchir ; les bifurcations y sont rares. 0 Coquille à section légèrement ovale ornée, de fines costules, peu saillantes, dont certaines se groupent en faisceaux pour former des tubercules aplatis et peu accentués. Coquille à section ovale ornée de côtes obli- ques qui s’élargissent et s'aplatissent vers la région ventrale. Voisin du précédent. à côtes beaucoup plus larges et moins saillantes. Orné de fortes côtes bituberculées, entre lesquelles se développent 3 à 5 côtes moins saillantes et non tuberculées ; section ovale ; courbure assez accentuée. Rappelle 7. Ouachense Coq., mais s’en dis- tingue par une ornementalion beaucoup plus fine, plus serrée et ses côtes non tubercunlées aussi saillantes que les côtes tuberculées. Très voisin de L. Cirtæ Coq., s'en distinguant par ses tubercules ventraux profondément divisés en deux. la partie externe étant plus large et plus saillante ; quelquefois deux cô- tes s'y réunissent pour former un tubercule ce qui n'a jamais lieu dans Z. Cirtæ Coq. Semblable à la 2° Belemnites spec. indet. du Djebel Ouach. Rostre non orné de sillons et d'un assez fort diamètre. Semblable à Duvalia spec. indet. du Djebel Ouach. Semblable au 4er Turbo spec. indet. du Djebel Ouach. 138 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. Cette faune, on le voit, se distingue de celle du Djebel Ouach par la rareté des types caractéristiques du Barrêmien inférieur : nous n’y avons trouvé que trois espèces de Pulchellia (représen- tées par neuf individus seulement) et un unique olcodiseus ; nous n’y avons point vu les couches à Leptoceras, qui cependant pourraient se montrer dans le fond de l’'Oued el Rebate. Par con- tre, les genres Phylloceras, Silesites, Hamulina y sont bien repré- sentés. Cette particularité, jointe à la présence de Macroscaphites et d’Heteroceras, doit faire placer le Barrêmien de Guelma, en grande partie tout au moins, au niveau des couches à Hamulina. du Djebel Ouach (Barrêmien supérieur). Il faut noter, d’ailleurs, pour achever de caractériser ce gisement, l'absence à peu près complète d'espèces à faciès aptien et comme à Constantine, la persistance des Duvalia des groupes binervia et Emerict. Ces observations paléontologiques semblent faire différer assez notablement l’affleurement barrémien du Dra el Kerroucha de ceux étudiés par M. Blayac ! sur d’autres points du bassin de l’'Oued Cherf. Au Djebel Taïa et à Medjez Sfa, particulièrement, les Pulchellia et les Holcodiscus paraissent bien moins rares qu’à Guelma ; mais les Céphalopodes déroulés ne semblent pas y être aussi abondants. Environs d'Hammam Lif: le Djebel Bou Kournine M. Aubert? a signalé l’existence au Djebel bou Kournine, près d’'Hammamn Lif, en Tunisie *, de dépôts infracrétacés, dont l’ensem- ble représenterait suivant lui tous les étages de ce système, depuis l'horizon à /loplites Roubaudi d'Orb. jusqu'à l’Aptien. La rareté des localités connues de l'Afrique du Nord, où l’on puisse voir une pareille succession dans le Crétacé inférieur à faciès vaseux pélagique nous a paru donner au Djebel bou Kournine une impor- tance toute particulière. Aussi ayant été appelé à passer un certain temps à Hammam Lif et à Grombalia avons-nous cherché à recon- naître et à noter, aussi exactement que possible, les caractères pétrographiques et paléontologiques qui pouvaient différencier les divers étages de l’Infracrétacé dans cette région. Cette étude nous 1. Loc. cit. 2. Explic. de la carte géol. prov. de la Tunisie, p. 8, ro. 3. Voir les feuilles de La Goulette et de Grombalia de la carte d'état-major au 1/0,000° de Tunisie. 1907 A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 139 paraissait, d’ailleurs, devoir compléter utilement celle que nous avions faite du Djebel Ouach. | Le Djebel bou Kournine (la montagne aux deux cornes), qui atteint la cote 576 à 3 kilomètres seulement du rivage, est formé par trois lignes de crètes parallèles, que séparent de profonds ravins, dont les uns, au nord, aboutissent au rivage du golfe de Tunis, et les autres, au sud, vont se perdre dans la. plaine de Mornak. Cette plaine est reliée à celle de Grombalia par le Kran- guet el Hadjaj, qui sépare le Djebel bou Kournine du Djebel Ressas (la montagne de plomb, 795 m.). Vers l’est, parallèlement à cette chaîne dont l’axe principal est formé de calcaires liasiques ! courent une série de saillies crétacées dont les plus remarquables sont, près du littoral, le Djebel Srara et le Djebel Halloufa. E.SE. O.N.0. ul Bordj Cedria À Carre (Potirolle) Djebel el Mokte ! l Oued. el Fsobi Fig. 6. — Coupe de l'Infracrétacé dans les environs d'Hammam Lif. Echelle : 1/100.000°; hauteurs triplées. all, Alluvions ; $S, Sénonien; T, Turonien; Cn, Cénomanien ; Ap, Aptien; B, Barrèêmien ; H, Hauterivien; V, Valanginien. Dans le fond de tous les principaux ravins entre Hammam Lif et Grombalia, sur une longueur de plus de 16 kilomètres, nous avons constaté la présence de l’Infracrétacé, qui forme ainsi toute une série de bandes parallèles. Les plus importantes sont : r° Celle du ravin d'El Habba entre les deux crêtes principales du Djebel bou Kournine, laquelle se prolonge vers le sud au-delà de Crétéville, sur le flanc ouest du Djebel Ressass. | 20 Celle de l'Oued el Ksob ou de Potinville (Bordj Cedria) entre le Djebel bou Kournine et le Djebel Srara ; elle s'épanouïit vers le sud-est dans le Djebel el Gouad et le Djebel el Khoridja. 3 Celle de l'oued Gattouna entre le Djebel Srara et le Djebel Halloufa. Dans cet ensemble de lambeaux infracrétacés nous avons distin- gué la série de couches ci-après : 1. À la base, des bancs de grès lustrés rougeûtres alternant avec 1. Frcmeur et Hauc. C. R. Ac. Sc., CXXII, p. 1354. 140 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. des marnes grisâtres : ces couches qui ne nous ont présenté que quelques Duvalia lata, un Lytoceras cf. quadrisulcatum d'Orb. et, dans la partie inférieure, Hoplites Roubaudi d'Orb., se montrent sur les deux flancs de l’arête qui va d'Hammam Lif au signal du Bou Kournine. É 2. Immédiatement au-dessus, du côté d'El Habba, des alternances de marnes grisâtres et de calcaires gris, en minces plaquettes, le tout assez pauvre en fossiles. Nous y avons rencontré Holcoste- phanus Astieri d'Orb., Duvalia cf. lata Blainv., Pygope spec. indet. 3. Des marnes grises à Duoalia dilatata Blainv., Due. Emerici Blainv.. ete. qui sont surtout développées vers Potinville, où elles renferment de nombreux Apty-chus. 4. Des marnes et marno-calcaires grisâtres se débitant en pla- ques, où MM. Aubert ! et Haug ? ont signalé Macroscaphites Yoani Puzos. Cette zone s’est montrée particulièrement fossilifère sur trois points : sur le côté droit du ravin d'El Habba, près de la ferme de Potinville, et, au nord-ouest du Djebel el Djemaa, du côté du Kranguet el Hadjaj. Elle est caractérisée par la présence d'Ammonites pyriteuses des genres Phylloceras, Pulchellia, etc. 5. Des marnes grisâtres à Duvalia Grasi Duval, au-dessus des précédentes, sur le flanc droit du ravin d'El Habba. 5. Des marnes d'un gris blanchätre alternant avec des calcaires jaunâtres à Phylloceras Guettardi Rasp., Desmoceras Emerici Rasp. Ces couches se montrent surtout très fossilifères près de la cote 169, non loin d’une source canalisée qui alimente un abreuvoir (Sebala) à la ferme d'El Habba. 7. Des marnes semblables aux précédentes à Belemnites semica- naliculatus Blainv. Cette succession nous à paru rappeler absolument celle de la Provence. Les couches r et 2 répondent au Valanginien, la couche 3 à l'Hauterivien, la couche 4 au Barrêmien, l'ensemble des couches 5, 6 et 7 à l’'Aptien. Dans ce dernier étage la division est très nette et absolument semblable à celle signalée par M. Kilian, dans la Montagne de Lure et par M. Leenhardt dans le Ventoux. La couche 5 répond au Bédoulien, la couche 6 au Gargasien inférieur, riche en Ammonites et la couche 7 à la zone à Belemnites semica- naliculatus qui couronne l’Aptien dans la Haute-Provence. Ces différentes zones nous ont fourni une soixantaine d'espèces fossiles dont voici la liste, avec l'indication de leur degré d’abon- dance ou de rareté sur les deux points principaux, où nous les avons recueillis. | 1. Loc. cit. 2, Revue génér. des Sciences, tome 7°, 1896, p. 1047. 1901 DÉSIGNATION DES ESPÈCES Points où les fossiles ont élé recueillis 1 uadrisul- Lytoceras cf. catum d'Or Foreslencons Astieri d'Orb. Û .[B. K. por DÉMO (DITES SIBUIRC Belemnites Pine Dre Catullo UE 2 Duvalia lata Blain. |. K. D. cf. lata Blainv. 12e D. dilatata Blainy. Eee D. Emerici Blainv. IP: Aptychus spec. indet.| P. Pygope spec. indet .[B.K Cidaris spec. indet, 1. Phytlloceras aff. serum ODLElE RENE ES AN IP BIK ct Thetys Sayn BK P. Micipsa Coq. .[B. K. P.infundibulum d'Orb |P.B.K. Jeneie RARE ù Sayn .|B. K. Lytoceras spec. ion BR Pulchellia Sauvageaui Hermite . PSS Desmoceras Nabdalsa Cor B. K D. aff. Nabdalsa ne P.B.K. .[B. K. D. getulinum Coq . D. cf. Parandieri d’Orb.| P. BK ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 14I { OBSER V ATIONS CARACTÈRES SAILLANTS DES ESPÈCES NOUVELLES OU PEU CONNUES H. Roubaudi 4 Orb. Syn.: Plus comprimée et plus aiguë que Duv. lata. En deux pièces, du groupe La- mellosi, à face externe por- tant de forts plis sinueux et à face interne ornée de fines stries parallèles au bord ex- terne n | =2 | signalés en Europe E LE et en Amérique S& | == | Néccw- | Barrè- : © | 2 = | mien | mien ami En Fe SU ATE 2 NASA IDD my = es ==] el 1° NÉOCOMIEN 1 RR——-——|—— 2R R|—=|— 1 |(R R.— 3 |(R.R.|— — 1-2| R. |— SARA SACS — 3 | R. |— SNA CE 2 |R.R. SMEUR- 2° BARRÉMIEN ER |—|——|— fe NRLIR. — LOIR NRE 4 ——— ——— 4 |R.R. === 4 |R.R. 4 |R.R. — 4 |R.R. 4 |R.R. 4 |R.R. — 4 |R.R. — 1. B. K. — Djebel bou Kournine. — P.— Potinville. 142 A. JOLEAUD. —ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. PE NÉ I ÉTAGES 2 a dans lesquels les 2 © fossiles ont été Ée. | alE = signalés ‘ee _ Europe OBSER V ATIONS DÉSIGNATION a) ENS us 7. DE | SNS TT 7 | CARACTÈRES SAILLANTS ce Fepicec RS ES En nne à a N DES ESPÈCES 52 | 8 | = | Né | Baré- | | 1 DES ESPÈCES NOUVELLES Lt) = = mien | mien EE se | OU PEU CONNUES £ = she ‘ & = Ne MEn Ne ex AAEMIE “ini in|a|un es | pe | ns C0 | GS CS | GES D.? cirtense Sayn. B. K.| 4 R R. — D Gouxt/Sayn …..\B.K:|M4 AMC: Silesites ‘aff Seranonis Sayn. DENT ARC) NAN RER S. interpositus Coq. BAC) NIRES — Oppelia spec. ind. . .fP.B.K| 4 |A.R. Holcodiscus nov. spec.| P. | 4 |[R KR. Semblable à AHolc. nov. spec. du Djebel Ouach. Leptoceras ? cf. ensis COUR EE BAS ARE Les côtes sont moins fortes que dans l'espèce de Coquand et rapprochent le ZLeptoceras du Bou Kournine de Lept. spec. indet. Sayn. Belemnites Fallauxi Turbo spec.indet. . |B.K. Cyelolites?? spec. ind.[B. K.; (DIN et 5 6 00 20) EEE En LAGUCE — Bntinaretitasp 0e 0 IRAN ASC —|—| — Duvalia cf. binervia LS D NL AMEN DO D qe EN ACC 4 n 3° APTIEN Phylloceras Goreti Kil.|B. K.| 6 |A.R. — P. Guettardi d'Orb. .|B.K.| 6 |R. C. —| |} P.infundibulum d'Orb.|B. K.| 6 | & —————|— Lytoceras ef. ane sulcatum d'Orb ? .[B.K.| 6 IR. R——}—)—}— —\1 accroissement un peu plus rapide, à dernier tour légère- ment aplati et à selles moins découpées que dans le type. L strangulatum" d'Orb.[B. K.| 6 | R —————— Du groupe de ZLyt. Juilleti Lytoceras spec indet. B°K° 6, RSR; d'Orb., présentant au pour- tour de l'ombilic de pelites costules, qui finissent brus- quement vers le tiers externe de la coquille, limitées par une fine arète de celle-ci, tandis que quelques - unes seulement assez espacées de- viennent plus saillantes en traversant la région ventrale. Par l'épaisseur de ses tours, l'enroulement de sa spire, la finesse de ses stries, il se rapproche du ZLyt. tenui- striatum Repelin 1. 1. B: SG EL, @) XVII p.267 1901 DÉSIGNATION DES ESPÈCES L.? spec. indet. Desmoceras cf. tostoma Uhlig . D. Nabdalsa Coq. D. Emerici Rasp. . D. spec. indet. SAV : nisba Coq. H. ? spec. indet. Acanthoceras cf. tini d'Orb. A. spec. indet,. culatus Blain. Turbo spec. indet. Points où les fossiles Ptychoceras læve Math.|B Oppelia Nisus d’Orb. ©. aptiana Sarrazin. . stret- D.? cf. Angladei Sayn.|B Silesites aff. Seranonis S. interpositus Coq. . Holcodiscus cf. Sopho- H. cf. Morleti Kilian Mar- Belemnites semicanali- Duvalia Grasi Duval A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE ou de rarelé Coucues ont été recueillis Degré d'abondance R. R. KOIMON NE: KeINON ME? K "6" \R:R. KING INR | GTR Role Ou (CE K | 6 |R.R. K| 6|R CIE © | 18 1 IIMONINNIRt RAIMONIEE K.| 6 |R.R. KING IR ER K.| 6 | R. K.| 6 |B.K. K.|6-7| C. K.|5-6| R. RAINGAIRSR ÉTAGES dans lesquels les fossiles ont été signalés en Europe et en Amérique CR EE Nénco- Barré- Aplien mien mien LT, De EN 090 NES a & | À 7 | 2|zsln|z|» pi | OU) | A | O2 | | = es cons | exp SEE 143 OBSERVATIONS CARACTÈRES SAILLANTS OU PEU CONNUES Individu de petite dimension très aplati, rappelant Amm. Abd-el-Kader Coq. 1; s'en distinguant par ses côtes non groupées en faisceaux autour de l'ombilic ; ses côtes sont d'ailleurs plus saillantes que dans l'espèce d'Aïn Zaïrin. Présente de fines costules sur presque toute la largeur du tour ; des sillons plus droits et dont les bords forment au pourtour de la région sipho- nale une légère saillie au- dessus du reste de la coquille Voisin de Desm. latidorsatum Michelin, à paroi ombilicale plus élevée et abrupte, à tours plus larges el moins hauts, àaccroissement moins rapide, à selles moins pro- fondément découpées. 1. Mém. S. G. F., (2), NV, 1'° partie, p. 147, pl. IL, fig. 8-9. DES ESPÈCES RER EE EE EU A PR ER ES VC RSR 2 144 A. JOLEAUD. — ÉTUDE DE L'INFRACRÉTACÉ 21 Janv. Le Néocomien, comme on le voit, se montre très pauvre en fossiles, particulièrement vers la base, où nous n’avons recueilli que deux Ammonites pyriteuses. Vers le sommet, les fossiles pyri- teux disparaissent et les Duvalia prennent un grand développe- ment, surtout comme individus. Le Barrêmien est représenté par un deuxième niveau à Ammo- nites pyriteuses. Les faunes de ses différents affleurements, assez semblables les unes aux autres, sont bien plus pauvres que celles de Guelma et du Djebel Ouach. Elles n’offrent ni l'abondance des individus du genre Phylloceras, ni les nombreuses espèces de Pulchellia et Holcodiscus du second, ni la richesse en Phylloceras, Desmoceras et Hamulina du premier. A l'exception de Phylloce- ras infundibulum d'Orb., les Ammonites y sont rares, particuliè- rement celles des genres caractéristiques du Barrèmien inférieur, Pulchellia (4 individus, 1 espèce), Holcodiscus (x individu), Lepto- ceras(xr individu douteux). Il en est de même des Gastropodes et des Echinides. Nous n’y avons recueilli ni Lamellibranches ni Poly- piers. Enfin quelques Ammonites à faciès aptien figurent dans la liste : elles proviennent peut-être des couches supérieures d’où elles ont pu être entraînées par les eaux qui ont profondément raviné les flancs des mamelons infracrétacés. L'ensemble de la faune indiquerait plutôt, comme à Guelma, le Barrèmien supérieur. Il est fort possible d’ailleurs que le Barrêmien inférieur existe à la base de cette assise, mais les éboulis qui la masquent ne permettent pas de l'y observer. L'Aptien nous présente un troisième niveau à Ammonites pyri- teuses, compris entre deux horizons où les Ammonites font com- plètement défaut et où nous n'avons pu recueillir que de rares Bélémnites. Les caractères de l’Antien sont, d’ailleurs, sensible- ment les mêmes que ceux du Barrêmien supérieur. Les espèces seules diffèrent. C’est ainsi que Phylloceras Guettardi Rasp. et Desmoceras Emerici Rasp. sont aussi communs que l’étaient précé- dement Phylloceras infundibulum d’'Orb. et Desmoceras Gouxi Sayn. Toutefois il convient de remarquer qu'ici se produit un fait analogue à celui constaté à l’Oued Cheniour par M. Blayac !, la persistance de genres considérés comme essentiellement barré- miens, tels que Holcodiscus et Silesites. Un caractère négatif curieux de cette faune est l’absence complète du genre Hoplites, habituellement si abondant à ce niveau en Provence, et même en Tunisie, où l'indique M. Pervinquière ?. En dehors des Céphalo- TO CACU 2. in DE LAPPARENT. Traité de géol., 4° édition, p. 1294. IJOI A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 149 podes, l’Aptien ne nous a présenté d’autres fossiles qu'un Gastro- pode en très mauvais état, d’ailleurs. Dans le voisinage de l’Infracrétacé d’Hammam Lif on a reconnu la présence du Lias, de l'Oxfordien, du Jurassique supérieur, du Cénomanien et du Turonien. Ces terrains ont fait l'objet d’un grand nombre d’études, particulièrement de MM. Rolland !, Le Mesle ?. Aubert ?, Baltzer *, Ficheur 5, Haug 5, etc. Sur le flanc nord” du Djebel Halloufa des marnes grisätres appartenant à l’Eocène inférieur (?) nous ont fourni, Aturia spec. ind., Terebratula sp. ind. et des Polypiers tous pyriteux. La Chebka Tebaga En dehors des faunes des trois régions que nous venons d'étudier et où nous avons fait des recherches personnelles assez longues, il nous a été donné d'examiner un certain nombre de fossiles prove- nant de la Chebka Tebaga, à 6 kilomètres au nord de l'exploitation d'antimoine de Hamimat, sur le flanc nord du Raz el Bred. Indé- pendamment de quelques espèces qui nous ont paru nouvelles, nous y avons reconnu Phylloceras infundibulum d'Orb., Desmo- ceras getulinum Coq., Belemnites cf. pistilliformis Blainv. Cette faune qui semble indiquer le Barrêmien supérieur ou l’Aptien inférieur, paraît en tous cas bien différente de celle du Néocomien indiquée par Coquand5 au Djebel Hamimat. Il n’est pas impossible, d'ailleurs, que le Néocomien existe sur ce point au-dessous des couches barrêmiennes ou aptiennes. Résumé En résumé, l’'Infracrétacé à faciès vaseux pélagique, nous a paru présenter dans le Nord de l'Afrique, la série suivante, où la suc- cession des zones est sensiblement la même que celle à laquelle se sont arrêtés MM. Munier-Chalmas et de Lapparent 7 pour le Midi de la France : 1. C. R. Ac. Sc., CI; — B. S. G. F., 6), XVI, p. 847; XVI, p. 129; XVI, P- 29, etc. 2. Exploration scientifique de la Tunisie; B.S. G. F., (3), XVII, p. 209, etc. 3. B. S. G. F., (3), XVII, p. 334: — Curte géol. prov. de la Tunisie et texte explicatif. 4. N. Jahrb., 1893. T. I. 5. Ficugur et Hauc. C. R. Ac. Sc., CXXII, p. 1354. — Hauc. Revue génér. des Sciences, 7° année, 1896, p. 1047. — À. F. À. S., Saint-Etienne, 1897. 6. Mém. S. G. F., (2), V, 1° partie. p. 91. 7. B. S. G. F., (3). XXI, p. 464 et suiv. 27 Août 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — ro 146 JOLEAUD. INFRACRÉTACÉ A FACIÈS VASEUX PÉLAGIQUE 21 Janv. 9° Marnes à Belemnites semicanaliculatus. GARGASIEN 8° Marno-calcaires à Phylloceras Guettardi et Desmoceras Æ = Emerici. < BÉDOULIEN 7° Marnes à Duvalia Grasi. Zi supérieur 6° Marno-calcaires à Macroscaphites, Silesites, Hamu- É lina et Poissons. (eal < L ee ana 5° Marnes à Pulchellia et Holcodiscus. = 4° Calcaires à Leptoceras cf. subtile. (se Æ HAUTERIVIEN 3° Marnes à Duvaliaïdilatata, Duv. Emerici et Aptychus. a 2° Marno-calcaires à Holcostephanus Astieri et Duvalia & | VALANGINIEN lata. E :( 1° Grès à Hoplites Roubaudi et Lytoceras quadrisulcatum. Malgré cette succession si nette et dont le synchronisme avec l’Infracrétacé de la Haute-Provence est frappant, on ne saurait contester l'intime liaison de ces différentes assises entre elles, liaison qui constitue d’ailleurs le caractère essentiel des formations bathyales et qui se manifeste non seulement par une grande unifor- mité dans la constitution lithologique, maïs encore par la préexis- tence ou la persistance d’espèces fossiles en dehors de la zone dans laquelle on les a souvent considérées comme absolument localisées. C’est ainsi que M. Blayac à Medjez Sfa et nous-même au Djebel Ouach, avons constaté la persistance dans le Barrêmien inférieur de ZLissoceras Grasi, Phylloceras semisulcatum, etc. ; que nous avons recueilli dans le Barrêmien supérieur du Djebel- Ouach un certain nombre de fossiles habituellement aptiens, tandis que M. Blayac observait à l’Oued Cheniour et nous-même à Hammam Lif la persistance dans l’Aptien de Sïlesites, Desmoce- ras et Holcodiscus à faciès nettement barrémiens. En terminant cette étude nous devons adresser tous nos remer- ciements à M. Ficheur, dont les savants conseils nous ont été d’un précieux secours dans nos recherches. NOTE SUR LE FONÇAGE DU PUITS ARTHUR DE BUYER EXÉCUTÉ PAR LA SOCIÉTÉ DES HOUILLÈRES DE RONCHAMP (HAUTE-SAÔNE) par M. Mathieu MIEG. Le fonçage du puits n° 11 & Arthur de Buyer », exécuté par la Société des Houillères de Ronchamp, a été achevé au commence- ment du mois de novembre Los et a atteint la profondeur de 1.010 mètres. La Société géologique de France ayant eu l’occasion d'examiner les premiers travaux de forage, lors de sa visite à Ronchamp, pendant la réunion extraordinaire de 1897, il m'a semblé intéres- sant de compléter la note parue dans le bulletin de la Société à l’occasion de l'excursion du 3 septembre ! de cette année. C’est au mois d'octobre 1892 que fut décidée la création au sud-ouest du puits du Magny, d’un nouveau siège d'exploitation, devant comprendre deux fus chacun de 4 mètres de diamètre dans œuvre, destinés l’un à l'extraction de la houille, l’autre à l’aérage des travaux. Le plongement sud-ouest du terrain houiller avec une forte pente — environ 30 centimètres par mètre — faisait prévoir que l'exploitation atteindrait une profondeur d'environ 1000 mètres, mais pourrait être réduite à environ 900 mètres, à. cause du rejet de 100 mètres produit par la faille constatée dans la galerie de recherche creusée au puits du Magny. Ces prévisions ont été pleinement justifiées par les travaux, car la première couche de houille a été rencontrée vers 852 mètres de profondeur et la seconde vers 875 mètres. Les travaux de fonçage du puits Arthur de Buyer, commencés au début de l’année 1895 ont été achevés en novembre 1900, et on est en train de creuser les travers bancs pour la construction des recettes. Il aura donc fallu un peu moins de six années pour mener à bien cet important travail. Étant donné le point choisi pour 6 2. 0S. CF, [3], XX, p: 1005, 1897- Je tiens à remercier le Directeur des Houillères M. L. Poussigue, M. l’ingé- nieur Eaucillon et les employés de la mine pour l’empressement qu'ils ont mis à me fournir les renseignements dont j'avais besoin pour ma note. 148 M. MIEG 21 Janv. l'emplacement du nouveau puits d'extraction, les travaux ont dû être commencés dans le grès bigarré. La coupe complète des terrains traversés, de haut en bas, pendant le fonçage du puits est la suivante : PROFONDEUR ÉPAISSEUR Grestbigarre es LR APE TR AR OMAN GO 6o° Grès fin violacé, passant à la base au grès vosgien. 60° à 70" 10" Grès vosgien, avec nombreux galets de quartz et partiesableuse aa base PP PP NEC O0 200 20” Grès rouge, épaisseur 39 mètres environ. \ a v Argile rouge massive, puis argilolithes } L & bariolées plus stratifiées, ép. 156 m.env, E E Alternances de grès, de brèches avec un| < É peu d'argile, puis argile avec petites n veines de grès, ép. 76 mètres env. Grès rouge à grain fin avec brèches et = un peu d'argile, ép. 66 mètres env. à Grès avec brèches dominantes. ép. 115 | & , * 90" à 76,"56 67456 meêtres env. = Argile avec quelques bancs de grès, ép-| à Ë 160 mètres env. É Alternances de poudingues violacés et 4 d’argilolithes avec empreintes de feuil- S les de Cordaïtes (entre 710 et 912") ép. | £ 1$ mètres env. À Grès et poudingues violacés avec quel- ques brèches, ép. 44 mètres 56 env. Alternances de grès et de grès schisteux avec empreintes de Cordaïites,ete., dansles parties schisteuses, épaisseur 87 m. 84 environ. Schistes avec nodules de carbonate de - fer, puis schistes houillers fins, ép. 8 m. 4o env. Première couche.— 3 bancs de houille séparés par des grès schisteux, dont le plus épais d'environ o m. 80, les deux autres de o m. 20. Grès grossier avec troncs de Calamites, ép. : £ 64°56 10 à 11 mèêtres env. ? ÿ s à # : , à 114794 Deux petits bancs de houïille de 0"20 séparés Ky880 Le par 2 mètres de schiste houiller, ép. 2 m. 40 env. Schiste houiller, ép. o m. 80 env. Deuxième couche, comprenant environ 1 m. 60 d'ouverture de houille avec intercalation de 2 bancs minces de grès, puis o m. 4o de grès et un nouveau banc de houille d’environ o m. 80, ép. 2 m. 80 env. Grès houïiller, ép. 1 mètre env. TERRAIN HOUILLER PROPREMENT DIT 1901 : NOTE SUR LE FONÇAGE DU PUITS (ARTHUR DE BUYER) 149 PROFONDEUR ÉPAISSEUR Terrain talqueux.—Tuf de porphyre pétrosili- pe ceux blanchâtre avec forts filons de calcaire | £ dolomitique, ép. 56 m. 20 env. £ se Petit filon de houille de o m. 10, représentation | £ pone9 de de la couche de Mourière, ép. o m. 10 env. a se 12120 Terrain talqueux, ép. 6 mètres env. À Schistes de la grauwacke carbonifère, ép. | £ 68 m. 90 env. S Observations générales sur les terrains traversés. — Ainsi que je l'ai indiqué dans ma précédente note, le grès bigarré repose en stratification concordante sur le grès des Vosges, et le passage d’un étage à l’autre se fait insensiblement, de sorte qu'il est impossible d'établir une ligne de démarcation. Les bancs ont une pente de 8 centimètres par mètre. Le grès vosgien repose également en stratification concordante sur le grès rouge. Les bancs du grès bigarré et du grès des Vosges sont aquifères, aussi a-t-on constaté dans les deux puits à la profondeur de 90 mètres, une venue d’eau de 300 mètres cubes par 24 heures. Afin d'empêcher l’eau de péné- trer dans l'intérieur des puits, un cuvelage en fonte, absolument étanche, est établi sur les cent premiers mètres, puis à partir de cette profondeur, étant donné l’imperméabilité du grès rouge, le revêtement des puits est, pour l’un d'eux en moellons taillés, et pour l’autre en moellons artificiels de ciment. En dehors des faits signalés précédemment, le grès bigarré et le grès vosgien n'ont présenté aucune particularité à mentionner, sauf que le grès vosgien, — comme dans la coupe du moulin des Battans — a une épaisseur très réduite et renferme des bancs sableux, friables à la base. Le grès rouge permien, a été traversé sur une épaisseur considé- rable, d'environ 674 m. 56. Les brèches de la partie supérieure et moyenne du Permien, — particulièrement entre 400 à 600 mètres de profondeur — sont à éléments anguleux et renferment des fragments de grès ferrugineux ou siliceux, de porphyre violacé, plus ou moins décomposé, de schistes de transition, et des cristaux isolés de feldspath et de quartz. Les poudingues violacés de la base du Permien contiennent des cailloux roulés d’un grès siliceux violacé, mélangés de fragments de porphyre violacé et de grains de quartz cimentés par une pâte ferrugineuse. Les brèches du Permien contiennent divers minéraux, de la calcite, de la dolomie, de la barytine, de la pyrite et des traces de fer oligiste. 150 M. MIEG 21 Janv. Les argilolithes de la base du Permien n’ont pas fourni de tiges Doinee mais seulement quelques empreintes de feuilles de Cordaités. Comme accident de terrain il y a lieu de signaler, vers 410 mètres et vers 675 mètres, deux petits accidents de faille, dont le dernier, dans le sens de la houillère, relève la partie sud des terrains traversés. Le terrain houiller — ainsi que je l'ai fait observer précédem- ment — plonge au sud-ouest avec une forte pente constante (envi- ron 30 centimètres par mètre) et conserve dans tous les plans de cette orientation une épaisseur constante. Au puits Arthur de Buyer, le terrain houïiller a été traversé sur une épaisseur d'environ 114 m. 24, et de 170 m. 54, si on y ajoute le terrain talqueux de la base, y compris le petit banc de houille de 10 centimètres qui représente la couche de Mourière. La partie supérieure du terrain houiller, jusqu'à la première couche de houille, s’est montrée exclusivement composée de grès, de grès schisteux et de schiste plus ou moins fin, avec nodules de carbonate de fer dans les derniers mètres qui avoisinent la houille. On remarquera l'absence des poudingues houillers, ren- contrés au milieu des bancs de grès, en d’autres points du bassin, notamment au puits du Chanois, où ils sont formés d'éléments faiblement roulés de roches cristallines : porphyre pétrosiliceux et porphyrite mélangées de fragments de schiste de transition ver- dâtre et de grains de quartz. Les empreintes végétales renfermées dans les schistes houillers jusqu’au voisinage de la première couche sont variées et ne diffè- rent pas sensiblement de celles rencontrées sur d’autres points, dans les exploitations de la houillère. On y constate l'abondance des empreintes de feuilles et de fruits de Cordaïtes, mélangées avec deux espèces de Sigillaires : S. tessellata, S. elliptica; de nombreux Pecopteris, Cyclopteris, Asterophyllites, Annularia ; quelques Lepidodendron, ete., flore fossile qui, d’après l'abbé Boulay ! semble correspondre à une période assez longue de dépôt qui atteint la base du terrain houiller supérieur. D'après M. Grand’ Eury ? la flore de Ronchamp présente tant d’analogie avec celle d'Épinac, près d'Autun, que la continuité des couches houillères d’un point à l’autre semble probable. Les schistes houillers contenaient également quelques fragments 1. B. S. H. N., Colmar 1879-1880, p. 32. 2. GRAND’Eury, Flore carbonifère du département de la Loire, 1873. 1901 NOTE SUR LE FONÇAGE DU PUITS ( ARTHUR DE BUYER } 151 de Poissons ganoïdes palæoniscidés, à corps trapu, écailles rhom- boïdales ornées de lignes longitudinales qui (d’après des échantil- lons plus complets de la collection Édouard Doll de Mulhouse, provenant des déblais du puits Saint-Charles à Ronchamp, que j'ai pu étudier), se rapprochent du genre ÆElaveria Sauvage, de Commentry. Les grès houillers, assez grossiers, qui se rencontrent entre la première et la seconde couche de houille renferment d'assez nom- breux troncs de Calamites, C. cannoeformis ?, ayant jusqu'à r mètre à 1 m. 10 de longueur. D'après les observations et les dessins qui m'ont été communiqués par l'ingénieur chargé de la direction des travaux, M. Faucillon, certains de ces troncs, légèrement infléchis vers la base et terminés en pointe, étaient dans une position per- pendiculaire à la stratification et présentaient l'apparence de tiges en place. Comme accidents de faille, il y a lieu de signaler la faille ren- contrée au midi du puits, qui ramène la première couche au niveau de la petite couche intermédiaire. Cette faille supprime les schistes houillers, généralement très riches en empreintes végé- tales, qui séparent la première couche de la couche intermédiaire. Un accident de faille de peu d'importance a également été cons- taté dans la seconde couche. Les roches talqueuses de la base du terrain houiller ont été très exactement décrites par M. Collot dans sa note sur les roches du bassin de Ronchamps !. Ce sont des tufs de porphyre pétrosiliceux blanchâtres, légèrement rosâtres, formés de fragments feldspa- thiques blanes, anguleux, renfermant des grains de quartz bipy- ramidé. Les granulations lumineuses de ce tuf forment des traînées dans la matière amorphe, où sont noyés les cristaux anciens de quartz et d'orthose, ceux-ci peu nombreux et petits. Ces tufs qui ont été rencontrés sur plus de 50 mètres d'épaisseur au puits Arthur de Buyer, étaient traversés par d’épais filons de calcaire dolomitique, riche en fer, avec cristaux, recouverts de mouches de pyrite. La dénomination de roche talqueuse donnée par les mineurs à ces tufs provient de ce qu'ils ont parfois — comme dans certains échantillons comprimés et un peu schisteux, que je possède, pro- venant du puits du Chanois — un toucher légèrement talqueux, savonneux. 1. CorLor. Note sur les roches du bassin de Ronchamp. B. S. G. F., [3], XXV, p. 1017-1018 (1897). 152 M. MIEG 21 Janv. À 935 mètres de profondeur s’est rencontré encore un petit filon de houille de 10 centimètres d'épaisseur, qui est le représentant de la couche de Mourière et correspond à la base du terrain houiller. Le petit banc de schiste siliceux qui vient en dessous offre déjà beaucoup d’analogie avec les schistes à Sphenopteris et à Cyclopteris de la grauwacke carbonifère de Bourbach-le-Bas. Une dernière empreinte végétale, peu déterminable, a été ren- contrée, vers la limite du terrain talqueux, à la profondeur de 940 mètres dans un schiste siliceux. Les schistes anciens du Carbonifère inférieur, sur lesquels le Houiller est discordant, commencent à la profondeur de 941 mètres et se continuent jusqu'à 1010 mètres, profondeur à laquelle a été arrêté le fonçage du puits Arthur de Buyer. Application de la théorie de M. Fayol au bassin houiller de Ronchamp.— Lors de la réunion extraordinaire de la Société géolo- gique à Belfort (séance du 4 septembre 1897 à Belfort), M. Collot avait appelé l'attention de ses confrères sur la conformité de dispo- sition du bassin houiller de Ronchamp avec celle que lui assigne- rait la théorie de M. Fayol. La théorie des deltas houillers semble en effet s appliquer parfaitement à ce bassin. Le terrain houiller de Ronchamp, déposé dans la grande dépres- sion carbonifère qui s'étend au sud du système des ballons de la falaise vosgienne, s'épanouit à l’ouest sur une grande épaisseur — plus de 150 mètres au puits du Chanoïs — pour se terminer en pointe et disparaître peu à peu entièrement vers l’est. Les couches de houille de la région — au nombre de trois avec la couche intermédiaire — sont affectées de la même manière ; elles s’amincissent au levant et arrivent à n'en plus constituer qu'une seule qui disparaît complètement. Les bancs de schistes et de grès qui séparent les trois couches du système de Ronchamp vont également en augmentant vers le couchant par l’amplification de barres qui deviennent des banes épais. D'après les observations de M. Trautmann !, les bancs de pou- dingues houillers s’amincissent et deviennent de moins en moins nombreux, à mesure qu'on avance vers le sud-est. Ainsi au son- dage de Malbouhans on a traversé treize bancs de poudingues, d'une épaisseur totale de 46 mètres, sur 126 mètres de terrain 1. E. TRAUTMANN. Etude des gites minéraux de la France. Ministère des Travaux publics. Bassin houiller de Ronchamp. Paris, Quantin, 1855, v. p. 112-113. IOO1T NOTE SUR LE FONÇGAGE DU PUITS € ARTHUR DE BUYER } 153 houiller; au puits Sainte-Marie, trois bancs seulement de 20 mètres d'épaisseur ensemble, sur 120 mètres de terrain houiller ; à Sainte-Pauline on ne trouve plus qu'un banc de 6 à 7 mètres, sur une épaisseur de 60 mètres de terrain houiller. Les faits que nous venons de citer, et particulièrement l’amin- cissement progressif et la disparition du bassin houiller de Ronchamp vers l’est et le sud-est, permettent de conclure, avec M. Trautmann ! que le courant qui a charrié et amené dans le bassin, tant les roches que les matières végétales, venait du nord- ouest, de terres basses émergées entre les Vosges, les Ardennes et le Morvan. Les gros galets des poudingues se sont déposés les premiers, — il est évident que certains éléments de ces conglomé- rats ont dû être empruntés au terrain talqueux et aux schistes carbonifères qui occupent le fond du bassin, — puis les sables et les schistes se déposèrent à leur tour, et, aux époques où le courant charriait de notables quantités d'éléments ligneux, ceux-ci ont été en général amenés plus loin pour former les couches de houille. M. Trautmann a fait observer en outre, que même à ces époques, les eaux charriaient des sables et des argiles, qui se sont inter- calés entre les dépôts ligneux, de préférence à leur entrée dans le bassin de dépôt. La grande division des couches de houille vers le nord-ouest les rend en effet inexploitables, tandis que c’est vers le centre du bassin qu'elles sont le plus régulières. Quant aux troncs de Calamites, présentant l'apparence de tiges en place, observés dans le fonçage du puits Arthur de Buyer, ils ne sauraient pas contredire la théorie des deltas et des troncs charriés par les eaux torrentielles, puisque de nombreux troncs, présentant les caractères de troncs en place, ont été également observés à Commentry, et que M. Fayol lui-même a démontré que dans un courant rapide, nombre de végétaux, füt-ce même des frondes de fougères, gardent la station verticale, pour ne commencer à se coucher que quand leur pied a touché le fond. 1. Ouv. cité, p. 112. Séance du 4 Février 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président annonce la mort de M. G.Chatin, Membre de l’Ins- titut. Les études spéciales. auxquelles il s’était adonné, ne l’empê- chaient pas de s'intéresser vivement aux travaux de la Société géologique, dont il était membre à vie depuis 1858. Quatre nouveaux membres sont présentés. M. Toucas donne quelques détails complémentaires de sa note du 5 décembré 1808, Sur l’évolution des Hippurites. Il fait connaîlre que, pour le moment, il n’est pas possible d’ad- mettre un type ancestral commun ayant servi d’origine à tous les groupes d'Hippurites. Quatre formes ont apparu simultanément dans le premier niveau à Hippurites (Angoumien moyen à Pira- diolites cornupastoris) : Hipp. resectus Defrance, Hipp. Requient Matheron, Hipp. inferus Douvillé et une forme nouvelle qui est la forme ancienne de Aippurites petrocoriensis Douvillé, différant de celle-ci par son arète cardinale tronquée. Ce sont les quatre types primitifs des grandes divisions établies par M. Douvillé, Hipp. resectus pour les Hippurites à pores polygonaux, Hipp. Requieni pour les Hippurites à pores linéaires, Hipp. inferus et Hipp. petrocoriensis, forme ancienne, pour les Hippurites à pores réticulés. | Chacune de ces trois grandes branches comprend plusieurs groupes, dont on peut suivre l’évolution depuis le type primitif jusqu’à son extinction. 1° HIPPURITES A PORES RÉTICULÉS. Dans cette première branche on distingue deux groupes princi- paux, donnant naissance à un sous-groupe. « ( Groupe de l'Hipp. galloprovincialis Matheron. l | Sous-groupe de l’'Hipp. Moulinsi d'Hombres Firmas. Groupe de l’Hipp. giganteus d'Hombres Firmas. Sous-groupe de l’Hipp. Oppeli Douvillé. La distinction entre ces deux groupes se fait sur le premier pilier, toujours court et non pédiculé dans le premier groupe, tandis SÉANCE DU 4 FÉVRIER IOO1I 199 qu'il est plus allongé et constamment pédiculé ou fortement rétréci à la base dans le deuxième groupe. Entre le groupe de l'Hipp. galloprovincialis et le sous-groupe de l'Hipp. Moulinsi, la distinction se porte sur l’arête cardinale, longue et lamelliforme dans le premier, encore saillante mais toujours triangulaire dans le sous-groupe. Dans le deuxième groupe, la distinction s'opère particulièrement sur la valve supérieure qui, en s'épaississant dans le. sous-groupe de l’Hipp. Oppeli, transforme les pores en pores subréticulés. Le groupe de l'Hipp. galloprovincialis a pour origine l’Hipp. petrocoriensis, forme ancienne, à arète cardinale tronquée, qu’on rencontre dans le premier niveau à Hippurites de la Provence, des Corbières et des Charentes. Il comprend en outre dans l’ordre de l’évolution : Hipp. petrocoriensis Douvillé. dans l’'Angoumien supérieur. :— marticensis Douvillé, forme ancienne de l’H. dans dentatus avec arète cardinale tronquée. le Coniacien et le — galloprovincialis. Santonien inf. — dentatus Matheron, dans le Santonien moyen. — Latus Matheron, dans le Santonien supérieur et le Campanien. Le sous-groupe de l'Hipp. Moulinsi débute dans l'Angoumien supérieur avec l’Hipp. Rousseli Douvillé, a arète cardinale tron- quée, et se continue avec Hipp. Moulinsi, à arète cardinale tronquée, dans le Coniacien. — sp. nov., forme récente de l’'Hipp. Moulinsi à arète cardinale arrondie, dans le Santonien. Le groupe de l'Hipp. giganteus a pour origine l'Æipp. inferus de l'Angoumien moyen et comprend en outre : Hipp. gosaviensis Douvillé. ) dans — sp. nov., forme ancienne de l’Hipp. gigan- l'Angoumien teus, avec arète cardinale tronquée.… supérieur. — giganteus, dans le Coniacien. — Jeani Douvillé, dans le Santonien inférieur. Enfin le sous-groupe de l’Hipp. Oppeli commence avec l'AHipp. Zurcheri Douvillé, du Coniacien, remplacé dans le Santonien inférieur par une forme plus récente à arète cardinale arrondie, et comprend en outre les quatre formes suivantes de la Province orientale : : Hipp. Bæhmi Douvillé. — inæquicostatus Munster: l probablement dans le — Oppeli Douvillé. Campanien. — vesiculosus Woodward, 196 SÉANCE DU {4 FÉVRIER I9O1 M. Douvillé rectifie une communication qu'il avait faite dans la séance du 17 décembre dernier, à propos d’un Foraminifère prove- nant d'Égypte et communiqué par notre confrère M. Fourtau. Le Secrétaire pour l'Etranger, M. Pervinquière, lui a signalé l’appa- rition toute récente d’une note de M. Blanckenhorn (Z. D. G. G., vol. LIL, p. 403) dans lequel il est question de ce fossile, précé- demment décrit par M. Chapman, sous le nom de Patellina æg'yp- tiensis (Geol. mag., dec. IV, vol. 7, p.3). Ce nom de Patellina est employé par les auteurs anglais, depuis Carpenter, pour les fossiles que les géologues du Continent dési- ‘gnent sous le nom d’Orbitolina. Carpenter a rejeté cette dénomi- nation, qui est plus ancienne, par la raison que « d’après l’usage suivi par un grand nombre de naturalistes, cette désinence indique unc forme vivante devant être rapprochée des Orbitolites fossiles. » Or cet usage n'était certainement pas accepté par d’Orbigny, l’auteur du genre, puisqu'il l’a établi exclusivement pour des formes fossiles. En outre Carpenter a indiqué lui-même les difté- rences qui distinguent ces formes fossiles des Patellina actuels, et notamment l'absence dans ces derniers, du fin réseau sous- épidermique qui est caractéristique pour les formes fossiles du terrain crétacé. En réalité les deux types Patellina actuel et Orbitolina crétacé, sont génériquement différents, et les deux noms ne doivent pas être confondus. Le fossile d'Egypte n'appartient pas au genre Orbitolina comme nous l’avons cru tout d’abord avec MM. Chapman et Schlumberger ; mais il représente seulement une forme voisine et nous adoptons, à ce point de vue, la manière de voir de M. Blanckenhorn. Comme dans les Orbitolines, il existe sur la face conique un épiderme strié concentriquement et imperforé, et au-dessous un réseau fin sous-épidermique, puis une couche corticale formée de cellules rectangulaires disposées en quinconce. Mais la partie centrale est formée de couches régulières séparées les unes des autres par des lamelles convexes perforées ; cette disposition est beaucoup plus simple que celle que l’on observe dans les Orbitolines vraies. Il faut donc adopter le nom nouveau de Dictyoconos (ou mieux Dictyoconus) proposé par M. Blanckenhorn. Ce fossile est indiqué. comme appartenant à l’'Eocène, et il est extrêmement intéressant de retrouver à cette époque, relativement récente, un représentant des Foraminifères à réseau sous-épidermique qui, jusqu’à présent, n'étaient connus que dans le terrain crétacé. ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES I. —SUR LE RATTACHEMENT A UNE SOUCHE COMMUNE DES DIVERSES ROCHES INTRUSIVES DU TERRAIN HOUILLER DU BRIAN- ÇONNAIS ; ta II. — SUR LES TRACHYTES (ORTHOPHYRES) DU TERRAIN HOUILLER DES GRANDES-ROUSSES, par M. Pierre TERMIER. Entre la vallée de l’Arc au nord, et les vallées du Vénéon et de la Gyronde au sud, le terrain houiller, qui joue, comme chacun sait, un rôle fort important dans la constitution de nos Alpes, renferme beaucoup de roches éruptives. J’ai montré, dès 1892 *, que, dans le massif des Grandes-Rousses, la bande anthracifère située sur le versant oriental de la chaîne présente, allernant avec les grès et les schistes, de nombreuses coulées de trachytes (orthophyres), des assises tufacées à débris trachytiques, et des bancs de conglomérats à galets de ces mêmes trachytes. D'autre part, on connaît, depuis Elie de Beaumont ?, l'existence, dans le terrain houiller du Briançonnais, d’amas intrusifs de roches dioritiques, au contact desquelles l’anthracite se change en graphite. Charles Lory ? a décrit, après Elie de Beaumont, le gisement des « por- phyres dioritiques » du col du Chardonnet, et a signalé des affleurements de roches analogues, sinon identiques, à Puy-Saint- André et à Prelles, au Sud de Briançon. De 1880 à 1884, deux ingénieurs du Corps des Mines, MM. Lachat et Küss, ont fait connaître le,« porphyre euritique » des Gardéolles, près de Saint- Chaffrey “. Enfin, les explorations entreprises dans la région briançonnaise par M. Kilian, par M. Lugeon, et par moi, en vue de l'exécution de la carte géologique au 80.000, ont amené la 1. P. TERMIER. Sur l’existence de la microgranulite et de l’orthophyre dans les Alpes françaises, C. R. Ac. Sc., t. CXV, 1892; Sur les roches de la série porphyrique dans les Alpes françaises, ibid., t. CXVI, 1893. — Ip. Le Massif des Grandes-Rousses. Bull. des Serv. de la Carte géolog., t. VI, 1894, n° 40. 2. E. de BEAuMoNT. Ann. des Sciences Naturelles, 1° série, t. XV, 1598. 3. Ch. Lory. Description géolog. du Dauphiné, $ 265. Paris-Grenoble, 1864. 4. Bull. Soc. des Sc. natur. du Sud-Est, 1884, p. 49-51; Bull. Soc. d'Etudes des Hautes-Alpes, t. IV, 1885, p. 456-459; et rapports inédits. 198 P. TERMIER 7 Févr. découverte de beaucoup d’autres amas intrusifs, et nous ont conduits peu à peu, M. Kilian et moi, à l’étude systématique des roches qui forment ces amas !. Dans le Briançonnais, comme dans les Grandes-Rousses, le terrain a été fouillé partout : et les travaux analytiques sur les roches éruptives du Carbonifère sont aujourd'hui assez avancés pour que l’on puisse dès à présent essayer une synthèse. Je me propose, dans les pages qui vont suivre, d'étudier successivement les roches intrusives du Houiller briançonnais et les trachytes du Houiller des Grandes-Rousses. Je ne rappellerai, des descriptions antérieures, stratigraphiques et pétrographiques, que ce qui sera indispensable pour l'intelligence de ma thèse. Et ma préoccupation sera de saisir le lien génétique par lequel se rattachent les unes aux autres certaines de ces roches, ou de montrer, au contraire, entre de certaines autres, des dissemblances fondamentales et essentielles. Cette préoccupation, que j’apporte ici, est, à l'heure actuelle, celle des lithologistes du monde entier. |, — Roches intrusives du Houiller briançonnais - J'ai déjà établi que les roches intrusives du terrain houiller du Briançonnais appartiennent à quatre types, en apparence fort différents, et qui s’écartent en effet les uns des autres, soit par leur structure, soit — ce qui est beaucoup plus important — par LE composition chimique. Ce sont : Des DIORITES QUARTZIFÈRES (quarzdiorit), à biotite et amphiBOlse Des micropioriTes (dioritporphyrit), assez analogues aux variétés basiques de l’estérellite Michel Lévy Goes diori-. tiques d'E. de Beaumont et de Ch: Lory);: Des MICROSYÉNITES (sy-enitporphyr) ; Des MICROGRANITES (granitporphyr), enfin, qui représentent le terme acide et alcalin dela série et qui sont les porphyres euritiques de MM. Lachat et Küss. 1. P. TERMIER. Sur l'élimination de la chaux, par métasomatose, dans lés roches éruptives basiques de la région. du Pelvoux. B. S. G. F., (3), XXVI — W. Kixran et P. Termier. Contribution à l’étude des microdiorites du Briançonnais. Zbid., XXVI. — P. TermiEer. Microgranites de la vallée de la Guisanne. Zbid., XXVIL — WW. Kicran. Excursion XIIF (Alpes du Dauphiné et de la Savoie), Livret-Guide du Congrès géolog. international de Paris, 1900. — P. TerMiIEerR. Excursion XII‘ (massif du Pelvoux et Brian- connais), lbidem. — P. TerMiIER, W. Kicran et M. LuGrow. Feuille « Briançon » de la Carte géologique détaillée de la France au 80.000, Paris, 1901. I9OI ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 199 DioRITES QUARTZIFÈRES. — J’ai découvert, il ÿ a quelques années, de nombreux blocs de diorites quartzifères à biotite et amphibole dans le Glaciaire de la vallée de la Guisanne, au pied de la forêt de Prorel. Comme ces blocs sont presque partout mêlés à des blocs de gneiss et de granite qui proviennent du massif du Pelvoux, j'ai longtemps cherché dans ce massif même le gisement des diorites, jusqu’au jour où je rencontrai deux lambeaux d’une ancienne moraine, montrant des débris de diorite mêlés à des blocs de grès et de poudingues houillers, sans aucun mélange de débris gneissiques ou granitiques. Les lambeaux dont je parle sont situés à la sortie de Monëêtier-les-Bains, sur la rive droite de la Guisanne, l’un sur le chemin des Grangettes, l’autre sur le chemin du col de l'Eychauda. IL était dès lors évident que les diorites proviennent des montagnes situées au nord de la Guisanne; et j'appelai, au mois d'août de 1899, l'attention de M. Kilian sur ces roches intéressantes, et sur la probabilité d’en rencontrer des aflleure- ments parmi les très nombreux affleurements de roches intrusives. Mon savant confrère et ami ne tarda pas, en effet, à me signaler l’existence, dans les environs du col du Chardonnet, de plusieurs amas inirusifs de diorites quartzifères, les unes identiques à celles du Glaciaire de la vallée de la Guisanne, les autres peu différentes et établissant un passage entre les vraies diorites et les micro- diorites. Dans les échantillons qui m'ont été remis par M. Kilian, aussi bien que dans ceux dont j'ai fait la récolte au sein du Glaciaire, on observe deux variétés de diorite quartzifère, l’une plus micacée, l’autre plus amphibolique. La variété riche en mica ressemble, de prime-abord, à un granite à grain fin. La structure est franchement granitoïde. La biotite est en voie de chloritisation, et la chlorite, très abondante, qui provient de cette attaque du mica, communique à tout l’ensemble de la roche une teinte verdâtre. La hornblende, de couleur verte, est plus ou moins abondante, mais moins abondante que le mica. Elle est assez bien conservée. Il y a du sphène. Les cristaux de feldspath, idiomorphes pour la plupart, souvent volumineux, sont toujours altérés, parfois même complètement kaolinisés : les moins altérés montrent encore des traces de mâcles répétées, et des ilots ou des liserés d’albite secondaire. Le feldspath originel était de l’andésine. Quant au quartz, il remplit les interstices des autres minéraux. La variété riche en amphibole renferme le plus souvent un peu de biotite. Neuf fois sur dix, elle n’est granitoïde qu’en apparence. Avec l’aide du microscope, on constate que les vides laissés par 160 P. TERMIER 7 Févr. les grands cristaux de hornblende et d'andésine sont remplis, non pas par le quartz seul, mais par une mosaïque granulitique (au sens Michel-Lévy) de quartz et de plagioclase (oligoclase ou andésine). Il y a d’ailleurs tous les passages entre la variété micacée et la variété amphibolique, de même qu'entre celle-ci et les véritables microdiorites. Voici deux analyses de diorites, qui montrent combien les deux variétés, micacée et amphibolique, sont, en réalité, voisines l’une de l’autre. Je transcris dans une troisième colonne la composition d’une microdiorite à grands cristaux de hornblende qui provient du Chardonnet (M. Kilian), et qui ne diffère des diorites que par une teneur en silice un peu moindre et une teneur un peu plus forte en fer et en magnésie : cette roche représente bien le type habituel et moyen des microdiorites de la région du Chardonnet. Diorite quartzifère Diorite quartzifère | du Chardonnet: du Chardonnet: variélé variété micacée. à amphibolique, Microdiorite du Chardonnet: type gris-noir à grands cristaux structure granitoïde à structure de hornblende ! intermédiaire DE ESSOR En | CORRE RE STORE ARTE NT 57,80 || A12OS . . . RACINE NE 19,70 DROLE Cr su Va 2,40 NOMME AT Re Len 4,14 MSOQMIME SUPREME 3,00 CAO EN EN RU MERREMRAErE 6,15 RO AUS Re RATS NL 1,37 NAN AO ER UE EEE c 3,10 || Perte par calcination . . 2,62 TO TA UNE 100,28 Dans ces trois roches, la métasomatose est, non seulement du mème genre, mais encore de la même intensité. Les analyses ci-dessus sont donc vraiment comparables, sans qu'il soit néces- saire de recourir à la restauration. On voit que la variété amphi- bolique, pauvre en mica, est, non seulement quant à la structure, mais aussi quant à la composition chimique, un intermédiaire entre les diorites micacées, franchement granitoïdes, et les vraies imicrodiorites, franchement porphyroïdes; et l’on voit, en outre, que les différences entre les types extrèmes se réduisent, en 1901 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES I6I somme, à peu de chose. Il y a, dans les trois types, la même abondance de feldspath, et presque les mêmes teneurs en potasse et soude. C'est par une moindre teneur en fer, magnésie et chaux, que la diorite micacée s’écarte des microdiorites. Quant à l’abon- danec de la silice, il n'y a pas lieu d'y attacher une grande importance, car nous verrons que, dans les microdiorites elles- mêmes, la proportion de SiO* varie de 52 à 64 °/.. La diorite ! micacée du Chardonnet est donc une forme granitoide du magma hypo-abyssique qui, dans la même région, s'est consolidé, le plus souvent, sous la forme microdioritique. L'identité des minéraux dans les microdiorites et dans la diorite, et l'existence (variétés amphiboliques de diorites) d’un passage continu, quant à la composition, et quant à la structure, entre ces deux types de roches, ne laissent aucun doute sur leur étroite parenté. La diorite micacée ne diffère de la moyenne des micro- diorites du Chardonnet que par une moindre teneur en chaux, magnésie et fer. Elle renferme tout autant de feldspath, et, sensiblement, le même feldspath; mais elle renferme moins d’amphibole et, en revanche, un peu plus de quartz et de mica noir. Cette forme granitoïde est d’ailleurs exceptionnelle, malgré l'épaisseur considérable (cent mètres et plus) qu'atteignent parfois les amas intrusifs. Sauf des cas très rares, il n’y a de structure parfaitement granitoïde que dans les roches micacées, et, d'autre part, les roches intrusives ayant la composition chimique de la diorite micacée n'ont presque jamais la structure microdioritique. Quant aux variétés intermédiaires, sortes de diorites à amphibole microdioritoides, où de microdiorites quasi-granitoïdes, elles sont très répandues dans la région du Chardonnet, et leur abondance ne semble guère moins grande que celle des microdiorites nette- ment porphyroïdes. Micropiorires. — C'est aux microdiorites qu'appartiennent la plupart des roches intrusives du Houiller briançonnais. Elles abondent sur les deux versants des montagnes du Chardonnet, du Raisin. du Vallon, lesquelles dominent Monèêtier-les-Bains et les Guibertes. MM. Lachat et Küss en ont signalé d’autres affleurements près de Névache, au dessus du chalet de Queyrellin ; et M. Kilian les a retrouvées dans la haute vallée de la Clarée, près des chalets de Laval et de Jadis. Ce sont encore des microdiorites qui 1. Je continue d'appeler cette roche diorite, en raison de son aspect exté- rieur, de sa composition minéralogique, et de sa structure. En réalité, ce n’est pas une roche abyssique, et, par conséquent, ce n’est pas une vraie diorite. 27 Août 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — rx 162 P. TERMIER 7 Févr, affleurent dans le haut du vallon de Fréjus, à la mine de graphite qui s'ouvre au sud-est de la Cucumelle. Les mêmes roches repa- raissent au débouché du vallon de Corvaria, vis-à-vis de Monëétier ; à Réotier, près de Guillestre, dans un anticlinal aigu qui amène au jour une mince bande de terrain houiller; et encore dans les environs de Prelles, sur les deux rives de la Durance. Aux affleurements, ces microdiorites sont souvent fort altérées. Les surfaces exposées à l’air ont une couleur grise, ou vert foncé, plus rarement une teinte brune, La cassure est vert clair, ou gris verdâtre, on enfin gris sombre. Les microdiorites laminées prennent l'aspect de chloritoschistes, de schistes talqueux, de schistes serpentineux de couleur foncée. Quand il y a eu, à la fois, laminage énergique et métasomatose profonde, on a des schistes bariolés, verts, noirs ou lie-de-vin. Dans la région du Chardonnet, on trouve en abondance des microdiorites relativement bien conservées, et permettant une étude pétrogranhique complète. On distingue alors deuxtypes : le type À, formé d’une pâte aphanitique de couleur noire ou vert-foncé, où nagent de grand cristaux de hornblende, lesquels ont parfois plus d’un centimètre de longueur; le type B, caractérisé par uné couleur plus claire, généralement vert grisâtre, par le dévelop- pement moindre des cristaux de hornblende, et par l'abondance des cristaux de feldspath, blancs ou vert clair, visibles à l’œil nu. Le type A faitimmédiatement songer à une porphyrite àhornblende; le type B, à certaines microdiorites (Quenast), ou encore à certains diabases à grain fin. J'ai montré que ces deux types ne sont pas essentiellement différents; qu'ils se mélangent dans les mêmes affleurements; qu’ils renferment les mêmes minéraux, présentant les mêmes formes et ayant suivi le même ordre de cristallisation ; et enfin qu'ils ont, à de très petites différences près, la même composition chimique. Ce sont de simples variétés de structure. La hornblende se transforme quelquefois en chlorite. Les grands cristaux de feldspath sont presque entièrement kaolinisés. Dans la pâte, chargée de chlorite, se développent des éponges secondaires de quartz. Cette pâte n’est jamais fluidale. Lorsqu'elle est relati- vement peu altérée, on voit qu’elle est granulitique, et qu'elle ressemble à celle de la microdiorite de Quenast ! (Belgique), ou encore à celle de l’estérellite (porphyre bleu de l’Estérel) ?. 1. DE LA VaLrée-PoussiN et Renan». Acad. Roy. de Belg. XLVIIL, 1879, n° 8, et mémoires couronnés, id., XL. | 2. Micugr-Lévy. Mémoire sur le porphyre bleu de l’Estérel. Bull. des Serv. de la Carte géolog., n° 57, t. IX, 1897-98. 901 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 163 La métasomatose a toujours commencé par l'ablation d’une partie de la chaux et la fixation d’eau et d’acide carbonique. J'insère ici quelques analyses de microdiorites du Chardonnet, le tableau de la composition de la roche moyenne du Chardonnet après restauration !, enfin les compositions de l’estérellite basique des Cours et du porphyre de Quenast. [<>] Leo] o À ONE NS EE SE : ONE SE < à EMA © = £ à SE > E = ÉNC| CRCN SÉRAERE E NME SM TE ONE © À 7 Où > |© à © +» 5 ce = & HE Eu NE n SE ù À E & = À © © o © 5 © & 5 © mA e = = = = Fe RER PRES | CENT EE À COEUR | GUESS ENS SiO?. 52,09 55,90 06,83 54,45 59,63 56,21 AlO* . 20,09 20,60 20,78 20,55 18,43 17,10 REC 4,84 4,06 3,55 Las 3 : le 7 85 eo — one FROPPER ES 4,36 [ RE ? \ MSC Re 3,82 3,00 2,38 2,08 CAD 5,52 7,18 7,12 ROSES, I.70 1,30 1,48 INA O MS EAU RU 3,2 3,92 4,02 H2Oket CO?» . 3,4 5,20 2,5 ————_————_—_— |__| _—…— | —————— | _——— || — ToTAL. IOT,12 Les microdiorites de la vallée de la Clarée présentent les mêmes types de composition et de structure. Elles sont, en général, beaucoup moins bien conservées que les roches du Chardonnet. Au débouché du vallon des Combes, sur la rive droite de la Durance, entre Sachas et le point 1183 de la carte d'État-Major, non loin de Prelles, afileurent trois amas intrusifs d’une roche verdâtre, fort semblable, par ses caractères extérieurs, à la microsyénite de Puy-Saint-André que je décrirai dans un instant. Le grain est beaucoup plus fin que dans les microdiorites du Chardonnet et de Névache ; la cassure est esquilleuse et rappelle celle des phonolites. Deux autres amas ont été signalés par M. Lugeon à un kilomètre environ au sud-est des précédents, sur la rive gauche de la Durance, et sont constitués par des roches analogues. Il y a d’ailleurs, dans ces roches des environs de Prelles, deux 1. P. TerRMIER. Sur l'élimination de la chaux par métasomatose dans les roches éruptives basiques de la région du Pelvoux, B. S. G. F., G), XXVI, P. 184. 104 P. TERMIER 7 Févr. types fort différents. L’amas le plus éloigné de la Durance (un peu à l’amont du village de Sachas) est fait d’une microdiorite relati- vement riche en quartz; la microdiorite des quatre autres amas est beaucoup moins acide. Voici les compositions chimiques de ces deux types de roches, dans leur état actuel, et leurs compositions probables, après restauration. EEE, MICRODIORITE ACIDE MicRODIORITE DE SACHAS BASIQUE DE SACHAS || HE Re Actuelle [Restaurée| Actuelle |Restauréel SION, GER Re GE 280 62 LATE O TR An TAN RE EU ER 18,80 18,5 I RON O PE PARA SR ee a OP EE Le 6,71 » DRE O PU RENTE ee A ET PANRE CAN PE TE » 6 ÉMOTION ERIC 2,05 2 CAO MN ARE NE RL 1,93 4,5 RO PE RE ERA LIU RTE 0,64 2 JNJÉLEX D RS SEE Re nn es PR 4,85 5 | Perte par calcination . . . . . 2,64 » OPA M UN TO T0 100,00 Il n'est pas douteux que ces roches n'aient perdu, par métaso- matose, une forte quantité de chaux et de potasse, la chaux ayant été enlevée au feldspath, et la potasse au mica noir ; mais, par contre, les teneurs en oxydes de fer, magnésie, alumine et soude, n’ont probablement varié que très peu pendant l’évolution métasomatique. Le deuxième type (type relativement basique, et, à l’origine, riche en hornblende) diffère donc des microdiorites moyennes du Chardonnet par une richesse en alcalis un peu plus grande, une prédominance plus marquée de la soude sur la potasse, une moindre teneur en chaux (hornblende très ferreuse et peu calcique) : il leur ressemble, au contraire, par les teneurs en silice, alumine, oxyde de fer et magnésie. Quant au premier type, il renferme beaucoup plus de quartz et un peu moins d’amphibole, Sauf cela, il n'y a pas de différence essentielle entre ce premier type et le second. Je rappelle ici les analyses, publiées par M. Michel-Lévy, de la variété acide et du type moyen de l’estérellite !. 1. Mrcuez-Lévy. Loc. cit., p. 235 (p. 19 du tirage à part). 1907 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 165 ESTÉRELLITE ACIDE EsTÉRELLITE MOYENNE (Orphelinat de Boulerie) (Grande carrière du Dramont) SO Re Ends its ue 63,47 ARR), RNA 61,58 AIO ER EN REL NÈE 2m ORE 18,56 Ha le SRE NEMEE 18,84 EXO SITE RENTE RENE SI 3,74 DEAN ARTE CE 4,68 MÉOPP PNR CALE Te NE EE MN RENTE 2,04 COL NES e 7,10 RS RE ee 107 0:09 FO), NE MERE 1,09 RTE TERRES 1,49 NERO) RTS RE 3,93 A D ce RSS A 4,27 EAOP LH ESRNTRNESE Er RU 0,40 ASE RERENPR SERRE ee 0,27 Perte par calcination .. 1,47 I EN Te UE 1,61 DODAL EL EME TOT:08 101,37 Ces deux variétés d’estérellite, qui diffèrent très peu l’une de l’autre, s'écartent de la microdiorite acide de Sachas par une teneur beaucoup plus grande (peut-être double à l’origine) en chaux, une teneur un peu plus faible en soude, et une proportion de fer notablement moindre. Le feldspath moyen est plus basique dans l’estérellite que dans la roche de Sachas ; et la hornblende de l’estérellite est riche en chaux et pauvre en fer, tandis que la hornblende des roches briançonnaises est riche en fer et pauvre en chaux. Malgré ces différences, qui sont loin d’être sans importance, la série des estérellites ressemble d’une façon frappante à la série des microdiorites briançonnaises : mais l’écart est beaucoup plus grand entre les microdiorites les plus basiques (Chardonnet) et les plus acides (Sachas), qu'entre l’estérellite acide de Boulerie et l’estérellite basique des Cours. M. Lugeon m'a signalé, en 1898, l'existence d’un affleurement de roche microdioritique près des chalets de Loriol, sur le versant occidental du massif de Pierre-Eyrautz, et m'a confié des échan- tillons détachés de cet affleurement. La roche des chalets de Loriol ressemble, extérieurement, aux microdiorites porphyroïdes du Chardonnet (type A). De grands cristaux de hornblende, d'un vert foncé, nagent dans une pâte compacte, translucide, d’un vert clair. Au microscope, on s'aperçoit que la structure est fluidale, et non plus granulitique ; fluidale à la façon de la structure des andésites ou des dacites. Cependant la roche est encore nettement hypo-abyssique, car la hornblende du premier temps de consolidation ne présente aucun phénomène de résorption ou de corrosion, et de plus, dans le deuxième temps de consolidation, le seul minéral magnésien qui se soit formé est encore la hornblende. Il n’y a pas un seul microlite d’augite. La composition chimique est d’ailleurs celle des microdiorites basiques 166 j P. TERMIER 7 Févr. du Chardonnet (52 à 54 °/, Si0*). La roche de Loriol est donc encore une microdiorite, et il n’y a aucun doute sur la nature intrusive de de son gisement. Ce fait de l'existence de microdiorites à structure fluidale méritait d’être signalé. On sait que l’estérellite n’est jamais fluidale, non plus que la microdiorite des Monts Henry, et que, d’une facon générale, la fluidalité est considérée comme un caractère des roches d’épanchement. Sauf la transformation, déjà constatée par Elie de Beaumont, de l’anthracite en graphite, l’intrusion microdioritique n’a été accom- pagnée d'aucun phénomène de contact. Nulle part, dans les gisements briançconnais étudiés jusqu'à ce jour, les schistes et les grès houillers qui touchent à la roche intrusive ne semblent modifiés par elle; et nulle part, non plus, la roche n’est autre près du contact que dans l’intérieur de l’amas. Il n'y a eu ni métamor- phisme exomorphe, ni métamorphisme endomorphe, ni différen- ciation dans les amas eux-mêmes. MrcrosvéniTEs. — C’est en 18099 que j'ai, pour la première fois. parlé des microsyénites de Puy-Saint-André !. Ces roches étaient connues de Ch. Lory, qui les considérait comme des variétés du porphyre dioritique. Elles forment, sous le village de Puy-Saint-André, à une heure de marche de Briançon, trois amas superposés, interstratifiés tous trois dans les assises houillères. La nouvelle route qui monte au village est, sur plusieurs centaines de mètres de longueur, creusée dans l’amas supérieur. Pour bien observer l’amas inférieur, c’est l'ancienne route qu'il faut prendre. Quant à l’amas intermédiaire, qui n’a guère plus de dix mètres de puissance, il affleure, en contre-bas de la nouvelle route, sur le versant de droite du grand ravin du Rif-Claret. Les épaisseurs de l’amas supérieur et de l’amas inférieur, comptées normalement aux strates houillères encaissantes, atteignent respectivement 60 et 100 mètres. Les trois amas sont parfaitement homogènes. Dans aucun d'eux, on n’observe la moindre trace d’une différenciation au voisinage du contact. La structure de la roche et sa composition chimique ne varient point. Les schistes et les grès encaissants n’ont subi aucune modification. Ces microsyénites sont des roches d’un gris sale ou d’un vert elair, ayant à l’œil nu l’aspect général des trachytes (orthophyres) des Grandes-Rousses. La cassure est esquilleuse, avec esquilles HUB S GENE) EVIL, p: 408. at I190I ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 167 translucides d’un gris très clair ou d’un vert très pâle : dans cette cassure, la roche apparaît compacte, semblable à un phonolite, et ne laisse voir à l'œil nu que de petites lamelles de feldspath (très nombreuses) et de rares grains d’un vert sombre qui sont de la chlorite. La poussière de la roche est d’un blanc sale. Au microscope, on voit nettement deux temps de consolidation. Les grands cristaux sont, la plupart, de feldspath, et les autres de chlorite, ce dernier minéral épigénisant d’une facon à peu près complète d'anciens individus de mica noir. Les cristaux feldspa- thiques renférment de nombreuses inclusions de chlorite et des grains de kaolin, et sont formés, pour le surplus. d’oligoclase à 18 ou 20 An. L’apatite, en prismes limpides, est assez abondante. La pâte est, le plus souvent, un feutrage de microlites dont les interstices sont garnis de chlorite et de quartz. Quelquefois, le quartz et le feldspath sont, dans la pâte, en quantités comparables : la structure devient alors microgranitique. Plus rarement, les microlites feldspathiques deviennent idiomorphes : ils donnent des sections rectangulaires allongées, qui s’orientent vaguement dans la roche et manifestent ainsi comme une tendance vers la structure fluidale. Ces microlites, en tout cas, paraissent appar- tenir à l’orthose. J'ai dit que les cristaux de chlorite sont des épigénies de biotite. Dans certains cas, la forme du mica noir est très reconnaissable: d’autres sections montrent des témoins, des sortes d’ilots, de la biotite originelle. Dans beaucoup d'individus, on voit nager, au milieu de la chlorite, des grains d’ilménite ou de sphène, ou encore des prismes de rutile. Voici quelques analyses de ces roches de Puy-Saint-André. 108 P. TERMIER "49 Févr Les trois échantillons analysés ont été pris en trois points distants les uns des autres de plusieurs centaines de mètres, et même l'échantillon I ne provient pas du même amas intrusif que les deux autres. La roche de Puy-Saïnt-André a donc une compo- sition chimique remarquablement constante. Sa - composition minéralogique actuelle est, en moyenne et approximativement : 13 °/ orthose, 42 albite, 12 anorthite, 8 chlorite et ilménite, 12 kaolin et 13 quartz. | On peut conclure de là que la roche originelle contenait, en nombres ronds, 80 °/, de feldspath, 10 °/, de biotite (avec un peu de magnétite), et 10 °/, de quartz. Îl n’y a d'incertitude que sur les proportions originelles des trois feldspaths, orthose, albite et anorthite. Maïs si l’on tient compte de ce fait que, dans toutes les roches de la région, l'anorthite est moins stable que l’albite, et celle-ci moins que l’orthose, on arrive à restreindre beaucoup le champ des hypothèses. En moyenne, la roche originelle de Puy-Saint-André devait s’écarter très peu du mélange minéralo- gique suivant : 14 °/, orthose, 45 albite, 18 anorthite, 11 biotite, 2 magnétite, 10 quartz; lequel Ro à la composition chimique suivante : SO NE AR RER RAP 62,52 ANR OBS ER PA RE CEE LEE PRISES 20,20 Fe OP SR ERP ETS pure 2,89 MSO ER NESS ER C EREEr 1,88 CORRE RER PER ne ne ann 3,82 KE ORAN ANR AR PRE Te nn 3,36 NA OM AN PARTIE ON ARRET AN 5,31 ODA 2 ne ie mens 99,94 Cette composition s’écarte de tous les types classiques. Aucune roche granitoïde connue ne contient pareilles proportions de silice, d'alumine, de chaux, de potasse et de soude. Le tableau ci-dessus fait songer à la fois à un granite (mais il y a trop d’alumine), à une syénite à feldspathoïdes (mais il y a trop de chaux), à une mon- zonite ! (mais il y a trop de soude, et pas assez de magnésie), à une diorite à quartz et mica (mais il y a trop d’alumine et trop d’alcalis). C’est qu’en effet la roche de Puy-Saint-André représente, non pas la forme hypo-abyssique d’une syénite, d’un granite, d’une monzonite ou d’une diorite, mais la forme hypo-abyssique de l'un de ces magmas préalablement différencié. Les ressemblances sont grandes entre la microsyénite de Puy- 1. Au sens de Brogger. IOOI ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 169 Saint-André et la microdiorite moyenne du Chardonnet. C'est la même richesse en feldspath, et la même structure: et les conditions de gisement sont identiques; et enfin, les microdiorites de Sachas forment entre ces roches un intermédiaire naturel, ou plutôt (puisqu'il y a deux types à Sachas) deux intermédiaires. En remplaçant peu à peu la hornblende par le mica noir, les grands cristaux d’andésine (ou de labrador) par des cristaux d'oligoclase, et les microlites d’andésine par des microlites d'orthose (ou d'anorthose), on passerait insensiblement du type Chardonnet à 52 °/, SiO*? au type microsyénitique de Puy-Saint-André. MICROGRANITES. — J'ai décrit ici-même !, en 1899, le microgra- nite des Gardéolles. qui forme, dans le terrain houiller, près du Villard-de-Saint-Chaffrey, sur la route du fort de l'Olive, trois amas intrusifs 2. Cette roche est le porphyre eurilique de MM. Lachat et Küss. On n’observe aucun phénomène de contact. Je me contente de rappeler que la roche des Gardéolles est très blanche ; qu’elle montre à l'œil nu, dans une pâte aphanitique, des grains de quartz et des individus de feldspath : que ce feldspath est, partie de l’orthose, partie de l’oligoclase-albite; que la pâte est granulitique et formée de quartz, orthose et albite; qu’enfin la roche moyenne tenait à l’origine, suivant toute vraisemblance : 22°], quartz, 4o albite, 93 orthose, 10 anorthite et 5 biotite. Et je transcris, en regard l’une de l’autre, la composition moyenne actuelle, et la composition originelle probable *. ROCHE MOYENNE ROCHE MOYENNE Actuelle Restaurée SO RE MM lim kerst) dr 71,90 MIT ti Te lee 50,05 AO: | AN une ua 18,10 MS PES REX HET 47 19,34 MIO LES or RE ns 0,36 SAR Be ME NE Se 0,85 GHOST RENAN ELEMENT IR 108 EE He FA A EE DUAL AVE 2,10 RÉORPALTENEAET ZE 0 RS enr 2,38 ST PRET. ER ts ,29 NACRE ne EUR SA ll 3,37 MT Er PES VAS EUNER 59 Perte par calcination . . . 2,99 ADO uen her Ex, Néant IGN RENE Oe 99,89 DA ONE PRE Te 99,85 PAS AGE), CXVIE /p-706: 2. L’un de ces amas a plus de cent mètres d'épaisseur. La roche n’y est pas différente au centre et sur les bords, et elle ne diffère pas non plus de la roche des deux autres amas, beaucoup moins épais. | 3. Une erreur importante s'était glissée dans mon premier essai de restauration (loco citato, p. 407). Je corrige ici cette erreur qui avait trait aux proportions relatives d’albite et d’orthose. 4. Il n’y a que de faibles traces d'oxyde de fer. 170 P. TERMIER 7 Févr. J'ai dit aussi qu'un microgranite, à peu près identique à celui des Gardéolles, a été découvert par M. Primat au Serre-Barbin, près de La Salle. Ce nouveau gisement, que j'ai visité en compagnie de M. Kilian, se compose de plusieurs amas intrusifs, de faible épaisseur !, affleurant au milieu des assises houillères horizontales. Résumé Er ConcLusions. — Les roches intrusives du terrain houiller briançonnais offrent de telles analogies de composition et de structure que l’on ne peut douter qu'elles ne forment une série continue, comparable aux plus belles suites lithologiques étudiées jusqu'à ce jour. Les principaux termes, actuellement connus, de cette série, avaient originellement, je veux dire avant toute métasomatose, les compositions approximatives suivantes : - Al°O* MgO | CaO | K:O | Na°O Microdiorites les plus DaASIQUES RS RE A 21 ) 4 8, I 4,5 Microd. moyennes 1. . | 54,5 20,5 8 SE 7, 1,5 4,9 Microd.moyennesIl. . | 56 20, 6,9 9,010) 2 5 Diorite quartzifère mi- CAC AT ee GO 19 6 3 6 2 4 Microdiorites acides. . | 62 18,9 6 2 4,5 2 ) Microsyénite . : . | 62;9 20 3 2 4 3,9 a] Microgranite. .."1.70,0 16,5 I I 2 4 E] On voit qu'en classant ces roches par ordre de teneur croissante en silice, on les classe du même coup par ordre de teneurs décroissantes en oxydes de fer, en magnésie et en chaux, et par ordre de richesse croissante en potasse. L’alumine ne varie presque pas, sauf dans les variétés où le quartz abonde ; et partout il y a beaucoup d'alumine, parce qu'il y a beaucoup de feldspath. Enfin, chose tout-à-fait remarquable, la richesse en soude — c'est-à-dire la proportion centésimale d'albite — est sensiblement constante. Si l’on ne regarde que les colonnes de la silice et de l'oxyde de 1. On peut compter au moins quatre amas superposés. 2, Dans ce tableau, la somme des nombres de chaque ligne horizontale est égale à 100. Les microdiorites moyennes I sont celles de la région du Chardonnet; les microdiorites II sont celles des environs de Sachas et de Prelles. IQOI ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 171 fer, on voit s’élargir un hiatus entre les microgranites et les micro- syénites; mais ce hiatus n'apparaît pas dans les autres colonnes. De même, par les teneurs en FeO et en K°O, la différence semble grande entre les microdiorites acides et les microsyénites ; mais, pour tous les autres éléments, le passage est insensible, L'ensemble du tableau donne au plus haut degré l'impression de la continuité. Quelle était la nature du magma profond d'où dérivèrent, par voie de différenciation, ces roches sœurs ? À cette question, il n’est pas possible de répondre d’une façon précise. La roche de profondeur, la roche aby-ssique qui correspond à ce magma, n’affleure nulle part dans la région. Tous les affleu- rements connus sont ypo-abyssiques, et formés de roches qui ont épuisé leur faculté de différenciation, en même temps qu'elles ont perdu tout pouvoir d'agir sur les sédiments encaissants. La seule manière d'approcher de la vérité c'est d'admettre que le magma profond contenait des quantités des divers magmas hypo- abyssiques proportionnelles à l'importance des aflleurements de chaque type. Cette proportionnalité n’est nullement certaine, mais elle est, tout au moins, vraisemblable. On obtient ainsi une évaluation grossière de la composition du magma abyssique, en affectant de coeflicients appropriés les sept types du tableau ci-dessus. Dans une première approximation, je propose d'attribuer à ces types les coeflicients suivants : Le coefficient {4 aux microdiorites les plus basiques; » 8 » moyennes Î]; » 2 » » IULS » 1 à la diorite quarzifère micacée; » 1 aux microdiorites acides; » 2 aux microsyénites ; » aux microgranites ; la somme des coeficients étant égale à vingt f. © Le magma abyssique, souche commune des roches intrusives du Houiller briançonnais, aurait eu, d’après ce calcul, la composition suivante (en négligeant, bien entendu, comme dans tout ce qui précède les éléments accessoires, TiO*, MnO, P*O*, qui ne se trouvent qu'à l’état de traces dans les roches briançonnaises) : 1. J'ai évalué ces coeflicients en tenant compte, pour la région que je n’ai pas moi-même parcourue, des levés géologiques exécutés par MM. Kilian et Lugeon, et des renseignements que ces excellents confrères ont bien voulu me donner à diverses reprises en me communiquant leurs échantillons. 172 PEUT P. TERMIER n Févr: SO OT MT ET EN A RENE ATOS Ed ee TR PR T0 070 MÉOERS e vne de AS ER MENT AUE 6,65 MIROIR TS EE 3,10 GaO TEMPS ERA ANNEE TEE RE 6,455 K°20O PRENONS AUTRES PULL Le 1,99 IN a ONE LE a AA PO er A Et 4,65 TOTAL. . . . . . 100,000 Cette composition diffère peu de celle de la diorite quartzifère micacée du Chardonnet, et elle est presque identique à celle de la microdiorite moyenne de Sachas et de Prelles. Elle correspond approximativement au mélange de : AlDITe,S UNE RIM RE MAR ANEU Pan 4o CEThOSe MATE RENE PT RnRE 10 AO DLL ER RER DENESC EME ARR LE 20 Brobile ms seu ef MP 5 Hornblende AMENER 20 Quartz. : 4 Fer oxydulé. I OTAT TIENNE 100 dont la composition serait : SION A UE AAA ONCE SEMAUSTEOS ATÉO ES, 22 RER PER PRET 0 OS ÉCRAN PA MA AA CAT CAES 5,90 NEO MR RTS ca 3,45 CAD EE LATE RME RPEE 5,93 RO NES Es PEU NE AR 2,09 NAS OREM PARENT CAEN EUR EEE 4,52 DÉAD L LE 99,17 Il est donc assez vraisemblable que le magma abyssique d’où dérivèrent, par voie de différenciation, les roches intrusives du Houiller briançonnais, soit un magma monzonitique (au sens de M. Brôgger). Si l'érosion mettait un jour à découvert la roche profonde qui est résultée de la consolidation de ce magma non différencié, on verrait une monzonite (Brôgger), c'est-à-dire une roche d’acidité moyenne, très riche en alumine, tenant peu de magnésie, et dans laquelle la somme des teneurs en alcalis serait à peu près égale à la teneur en chaux. Cette monzonite brianconnaise différerait toutefois de la mon- zonite classique du Tyrol ! par la prédominance très marquée de 1. D' W. C. BrôGGEr. Die Eruptivgesteine des Kristianiagebietes, II, die Eruptionsfolge der tr faischen, Eruptivgesteine bei Predazzo in Sudtyrol, Kristiania, 1899. 1901 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 193 la soude sur la potasse. Ce serait une monzonite sodique, ou à affinités akéritiques !; au lieu que dans la monzonite moyenne de Predazzo, la potasse et la soude sont en quantités presque égales. Mais cette différence n’est pas bien grande, et ce serait la seule différence. La monzonite dont j'entrevois l'existence sous nos Alpes briançonnaises pourrait, tout aussi bien que la monzonite classique, se rattacher pétrogénétiquement au Slammmagma ° des roches tyroliennes. Je rappelle en terminant que nous ne possédons aucune donnée sur l’âge des roches intrusives du Houiller briançonnais. Nulle part on ne les a trouvées à l’état de galets, ni dans les bancs de la formation houillère, ni dans les conglomérats permiens, ni dans les grès triasiques, ni dans les brèches du Lias. Il n’est pas invrai- semblable que leur « mise en place » se soit opérée pendant l’ère triasique. Il, — Trachytes (Orthophyres) des Grandes-Rousses. Sur les trachytes *, ou comme je les ai appelés jusqu'ici, les orthophyres des Grandes-Rousses, je n'ai à ajouter que bien peu de renseignements lithologiques et géologiques à mes précédents mémoires {. Ces trachytes sont des roches d’un vert clair (Château- Noir, glacier de la Selle, Saint-Christophe-en-Oisans), d’un gris clair (Le Freney-d'Oisans), ou d’un vert bleuâtre (col de la Croix- de-Fer). L'aspect de la cassure fraiche fait invinciblement songer aux phonolites. C’est la même compacité de la pâte, le même éclat cireux, la même cassure esquilleuse, la même translucidité. Il va sans dire que cet aspect phonolitique disparaît dans les variétés laminées qui sont, comme bien on pense, très fréquentes. Ces trachytes laminés ressemblent à des schistes à chlorite ou à séricite. 1. Je fais ici allusion à l’akérite de M. Brôgger. >, BrôGGer. Loc. cit., p. 158. Il existe une différence du même ordre entre le Stammmagma tyrolien et la tonalite qui en est la plus importante déri- vation. 3. Avec la plupart des lithologistes, je propose d’appeler trachytes toutes les roches d’épanchement qui ont la composition chimique des syénites, quels que soient d’ailleurs l’âge et l’état de conservation de ces roches d’épanchement. Les noms d’orthophyres et d’albitophyres, par lesquels on a longtemps désigné les vieux trachytes, me paraissent devoir tomber, peu à peu, en désuétude. 4. P. Termier. Le Massif des Grandes-Rousses, Bull. des Services de la Carte géolog., n° 4o, t. VI, p. 214, (p. 46 du tirage à part). 174 P. TERMIER 7 Févr. L’analogie avec les phonolites n’est plus aussi frappante quand on étudie la roche au microscope. Et d’abord, je n'ai, jusqu'ici, trouvé, dans les trachytes des Grandes-Rousses, aucune trace de la présence, actuelle ou originelle, des feldspathides : mais cet argument, purement négatif, ne suflirait pas, étant donné l’insta- bilité des feldspathides en général et de l’haüyne en particulier, et, d'autre part, la métasomatose profonde qu'ont subie la plupart des affleurements. En second lieu, les trachytes des Grandes- Rousses ne renferment pas de pyroxène, tandis que les pyroxènes verts, plus ou moins sodiques, plus ou moins voisins de l’ægirine, sont un élément, sinon nécessaire, au moins presque constant des phonolites. En troisième lieu, les microlites feldspathiques, même quand ils sont très aplatis parallèlement à 2’ (o10), ne sont pas disposés parallèlement à la surface de plus grand refroidissement. Pour ces diverses raisons, je crois que les trachytes des Grandes- Rousses sont de véritables trachytes, et non pas des phonolites. Je rappelle que ces roches sont très feldspathiques ; qu’elles ne renferment, en fait de minéraux magnésiens, que le mica noir ; que le quartz de première consolidation y est rare ; que la pâte renferme parfois du quartz, mais toujours en très petite quantité ; que les feldspaths dominants sont orthose et anorthose ; que ces deux espèces forment la plus grande partie de la pâte microlitique; que l’oligoclase est fréquent parmi les cristaux du premier stade. Je rappelle encore que les minéraux accessoires sont surtout le zircon ! et l’apatite. Le fer oxydulé, le fer titané, le sphène, géné- ralement peu répandus, prennent une certaine importance dans quelques échantillons. La pâte est presque toujours microlitique, avec ou sans fluida- lité ; elle est quelquefois granulitique (au sens de M. Michel-Lévy), surtout dans les variétés acides de la région Nord (col de la Croix- de-Fer). Les trachytes des Grandes-Rousses forment d’épaisses coulées, alternant avec les assises houillères. Dans les assises sédimen- taires qui surmontent ou séparent les coulées, il y a fréquemment des bancs épais de conglomérats trachytiques, où des galets de toute nature et de toute dimension sont mêlés à des cailloux roulés de la roche éruptive, et noyés dans un ciment gréseux rempli de 1. L’abondance du zircon est curieuse. On retrouve cette même extraor- dinaire diffusion du zircon dans les trachytes et les dacites du Carbonifère inférieur de la Loire et de la Saône-et-Loire (porphyres noirs de Gruüner), qui se rapprochent d’ailleurs des trachytes dauphinois par beaucoup d’autres caractères. 1901 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 195 débris feldspathiques. Ces conglomérats sont analogues aux grès porphyriques de la Loire. Dans certains bancs, les matériaux trachytiques, plus ou moins roulés, sont tout-à-lait prépondérants ; et l’on a aussi de véritables {ufs. Certaines coulées (Château-Noir, Freney) renferment en abondance des débris d’une roche de même composition chimique, mais de structure un peu différente (tendant vers la structure ophitique). IL y a enfin des coulées scoriacées. Cette venue trachytique, qui a duré pendant une partie de ‘époque stéphanienne, a été fort importante dans toute la région des Grandes-Rousses. Au Château-Noir, sur l’Alpe de Sarenne, l'épaisseur de la formation trachytique atteint cinq cents mètres. Au col de la Croix-de-Fer, les coulées et les couches de tufs, empi- lées les unes sur les autres, ont une puissance totale de plus de mille mètres; et comme elles sont relevées en anticlinal, le chemin muletier les traverse sur plus de deux kilomètres de longueur. Dans ces dernières années, j'ai découvert, dans les granites et les gneiss du massif du Pelvoux, au sud-est des Grandes-Rousses, quelques cheminées verticales, remplies par ces mêmes trachytes. La plus importante de ces cheminées — elle n'a pas moins de 5oo mètres de largeur — affleure, près du col de la Gandolière, dans la muraille abrupte qui domine le glacier de la Selle !. Une autre est visible sur le chemin de la Bérarde, dans le grand ravin qui déchire la montagne à un kilomètre environ de Saint-Chris- tophe-en-Oisans. Un filon plus petit est coupé par la route de Vénose à Saint-Christophe, non loin des Fontaines-Bénites. Ces trachytes filoniens ont presque la même composition, et à peu près la même structure, que le trachyte du Freney, lequel est nettement interstratifié dans la formation houillère. Je viens à la composition chimique des trachytes des Grandes- Rousses. C’est le seul point sur lequel je veuille, aujourd hui, insister ?. Voici quelques analyses, pour la plupart nouvelles, de ces roches : 1. L’écroulement de cette muraïlle donne naissance, sur le glacier, à une moraine spéciale dont la couleur verte contraste vivement avec la teinte blanche des moraines granitiques. 2. Dans les analyses d’orthophyres que j'ai publiées en 1894, dans mon mémoire sur le Massif des Grandes-Rousses, quelques nombres relatifs à Al203 et Fe203 sont fautifs, la séparation de ces deux oxydes étant restée imparfaite. 176 P. TERMIER 7 Févr, I IX | LEE | IN V VI | VII VIII IX X | XI | XII XIII ments EE Si02 .| 66,10! 66,041 67.50! 66,20| 65,50 | 63,80] 61,07! 62,06| 59,50 | 61,50| 62,30 | 62,30 | 63 46 A1203| 17,20 | 17,30 | 16,50! 16,30| 17,60 | 18,30| 19,25 | 18,75 | 19,85] 17,80) 17,70] 17,10 | 47,90! Fe203| 341| 440] 5,00! 4,40! 4,35| 4,11| 5,65] 3,85| 5,05| 6,95| 470| 5,20| 8,240 MgO.| 2,50| 2,20| 2,30! 2,60| 2,80| 2,25| 4,90] 1,40| 2,70| 3,65] 310] 3,40] 4,40! CaO .| 1,48| 4.60! 1,10| 0,90! 0,48! 258| 14,99| 1,05! 2,20|. 1,96| 2,10| 1,30] 4,02 K20 .| 495| 470! 3,38| 2,60! 455| 4,25| 5,50| 6,00| 4,32| 2,80! 491| 350) 2,20 Na20 | 313| 3,401 3,36| 2,80| 3,59| 92,74| 92,80| 5,19] 3,96| 2,95| 3,77| 4,40| 3,96 Perte par calci- nation| 2,37| 1,10] 1,60| 1,20| 1,87| 2,87| 1,60| 14,41| 4,551 3701 1,30] 2,20] 0,72 100,74 |100,74| 99,10 1100,74/101,10 | 99,76 | 99,71| 99,13 101,31 | 99,18 | 99,40 101,00 | Toraz.|101,14 I, II et I, Orthophyres du col de la Croix-de-Fer ; IV, Orthophyre pris sur l’arête qui domine à l’ouest les granges de La Balme ; V, Orthophyre du lac du Cerisier ; VI et VII Orthophyres de la carrière du Freney-d’Oisans ; - VI et IX, Orthophyres du Château-Noir; X, Orthophyre du glacier de Saint-Sorlin ; XI, Orthophyre de la crête au nord du lac du Cerisier ; XII, Orthophyre en coulées entre les granges de la Balme et le glacier de Saint-Sorlin ; XIII, Galet d’orthophyre dans une coulée orthophyrique du Château-Noir. En somme, Si0*° varie de 60 à 65; AlFO° de 16 à 20; Fe*O° de 4 à 8; MgO de 1,5 à 3,5; CaO de 0,5 à 2,5; l’ensemble des alcalis de 6 à 11, avec une légère prédominance de la potasse sur la soude. Ce sont là des caractères de trachytes à tendances liparitiques; et les différences entre les analyses du tableau ci-dessus sont de l’ordre des variations que l’on observe dans la composition des laves d'un même volcan. 6 Si l’on prend la moyenne des treize analyses, on trouve la com- position suivante, que l’on peut, avec grande vraisemblance, consi- dérer comme la composition moyenne (actuelle) des trachytes les mieux conservés des Grandes-Rousses. SO eee Do NEED A ee AUS DE AE OP ARE nn EE ST 0 RERO AE RC AE AC EE ARS Me One Le RAR DA Ur SO RS CAO NEUTRE PR RU SA T0 RO PE Qi RUES ES ARTS Na OS: SM 3,54 Perte par calcination 1,81 MOTTE EE O 0 0 1901 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANÇAISES 199 La restauration des trachytes des Grandes-Rousses peut se faire aisément, et sans grande incertitude. La métasomatose a consisté partout dans la chloritisation du mica noir, dans la destruction plus ou moins complète de l’anorthite du plagioclase, et enfin dans un commencement de kaolinisation des feldspaths alcalins. Dans les échantillons les plus frais — ceux qui ont été analysés — ce dernier phénomène, la kaolinisation, est souvent à peine sensible. La moyenne des tentatives de restauration conduit à un mélange originel de : 35 Albite 23 Orthose 12 Anorthite 19 Biotite 1 Apatite et zircon 3 Fer oxvduie 9 Quartz TOTAL . . 100 Ce mélange correspond à la composition suivante, qui me parait être, très approximativement, la composition originelle moyenne des trachytes des Grandes-Rousses : CDS er rat A PT UC UE 60,66 ATOS AE SAN ar time ie Rom IS:8n ROOMS ON NE 1 040 Mo OR RAA AE PNEUS ON) HiOïOT CAO AN ER MALE as TEE A2 RÉ OMENE MR CRUE CR A FES 30 INA OUR ne tn RP Pr NE TO DOTATE MNT MEME 90 0" Ces trachytes à mica noir représentent donc la forme effusive d'un magma syénitique. La composition ci-dessus est analogue à celle de divers trachytes classiques, de diverses syénites à biotite, de diverses microsyénites un peu quartzeuses. Je ne crois pas qu'il y ait de relations pétrogénétiques entre les trachytes des Grandes-Rousses et les roches intrusives du Houiller briançonnais. Sans doute, 11 y a un caractère commun : la très grande abondance du feldspath, et. comme conséquence, la faible teneur en magnésie. Mais, par contre, on ne trouve dans la série, si largement différenciée, des roches intrusives du Brian- connais, aucun type qui ait la composition d’un trachyte des Grandes-Rousses. Dans les roches intrusives à 6o ou 62 °/, SiO*, il y a trop de chaux, et trop de soude, et trop peu de potasse, pour que l’assimilation aux trachytes des Grandes-Rousses soit possible. 27 Août 1901. — T. 1er. Bull. Soc. Géol. Fr. — 12 173 ÉTUDES LITHOLOGIQUES DANS LES ALPES FRANCAISES 7 Févr. Il faut donc, ou bien admettre que le processus de différenciation a été, dans la région des Rousses, très différent de ce qu'il devait être, plus tard, dans le Briançonnais, ou. ce qui est plus probable, que les magmas fondamentaux étaient distinets. Nulle part, dans la région du Pelvoux, je ne connais, à l'heure actuelle, le moindre affleurement de syénite, qui, par sa compo- sition, fasse songer aux trachytes des Grandes-Rousses. La syénite du Lauvitel est fort différente, et différents sont aussi les curieux trachytes qui s’y rattachent, et différentes encore les minettes de Valjouffrey et du massif de Chaïllol. Le type trachyte des Grandes- Rousses est jusqu'ici, isolé dans les Alpes françaises. Je suis très porté à croire que c'est avec les roches carbonifères du Massif Central (Loire, Rhône, Saône-et-Loire), je veux dire avec les trachytes, les dacites et les phonolites réunis par Grüner sous le nom de porphyres noirs et par M. Michel-Lévy sous le nom d’orthophyres, que les trachytes des Grandes-Rousses ont chance de manifester une (consanguinity » plus ou moins lointaine. Mais les matériaux me manquent encore pour cette intéressante compa- raison |. 1. Dans mon mémoire, déjà cité, sur le Massif des Grandes-Rousses, je signale (p. 50) sous le nom de kersantite à amphibole une roche trouvée par M. Kilian dans le Houiller du Mont-Thabor. Je ne doute pas, aujourd’hui, que cette roche ne soit une microdiorite. En sorte que le type trachyte des Grandes-Rousses est confiné dans le voisinage de la Romanche, et ne dépasse pas, au Nord, le col de la Croix-de-Fer, à l'Est, le méridien de la Bérarde. — QUELQUES OBSERVATIONS DANS LA PARTIE MÉRIDIONALE DE LA CHAINE DE BELLEDONNE (ALPES DAUPHINOISES) par M. P. LORY. I — JuRASSIQUE Les calcaires qui prédominent dans les premières assises jurassiques de la Mateysine et du Beaumont (Calcaires de Lafjrey) présentent un faciès à Entroques et détritique, quelquefois bré- choïde. On l’a maintes fois déjà rapproché de celui que ce même terrain du Lias possède dans la zone du Briançonnais. L'étude micrographique confirme cette analogie; elle révèle notamment dans le calcaire de Laffrey la fréquence d’une structure oolithique pareille à celle que MM. Kilian et Hovelacque ont fait connaître dans le Lias intraalpin !. D’après ses caractères tant lithologiques que fauniques ?, ce faciès correspond à de faibles profondeurs. Son extension indique que sur la terminaison méridionale de Belledonne le fond de la mer liasique a présenté, jusque vers le Toarcien, une vaste saillie : du Bas-Valgaudemar aux environs de Vizille, elle divisait en deux branches le géosynclinal alpin à dépôts vaseux (fig. 1) ?. Si l’on compare les épaisseurs qui représentent le Lias inférieur et moyen sous chacun des faciès, il apparaît que la vitesse de descente était au moins cinq fois plus grande dans le géosyncelinal que sur le haut fonds : à celui-ci correspondait donc en profondeur une ride dont la hauteur croissait rapidement et devait avoir dépassé 300 mètres au moment où le régime sédimentaire est enfin devenu à peu près uniforme, c’est-à-dire vers la fin du Toarcien. 1. W. Kirran. Sur la structure microscopique des calcaires du Lias alpin (B. S. G. F., 19 juin 1899). — HoveLAcQuE et Kicran, Album de microphoto- graphies, Paris 1900, pl. IL, I, IV, VI. 2. Abondance des Gryphæa, etc. 3. Vers l’est et vers le sud, le tracé des limites de faciès a été établi d’après les travaux de MM. Haug, Kilian et Termier et d’après quelques renseigne- ments inédits, que ces savants ont eu l’obligeance de me communiquer. 180 P. LORY. — QUELQUES OBSERVATIONS DANS LA , 9 Févr. En constatant qu'il y a coïncidence entre la diminution de l'épais- seur des dépôts d’une part, de la profondeur qu'indique leur faciès de l’autre, on est porté à admettre une relation de cause à eflet entre la lenteur de l'affaisse- . D: Ë ment et la persistance de la à IF a saillie sur le fond. Cepen- À E RH dant, si cette relation a été LE na : réelle pour la région qui nous ee D dQisans À 4 È occupe, elle n'existe pas tou- no à \Laftrey gate 24e È i 5 jours; la vitesse de descente £é QT D RES peut être de même ordre dans tn: 3 une zone néritique que dans FA les géosynclinaux vaseux qui Te la bordent. M. Termier a a+ indiqué par exemple que, sous le faciès de calcaires à Entroques comme à la Mure, le Lias mesure vers Val- Fig. r. — Extension des faciès au Siné- louise, dans la zone du Brian- murien dans les Alpes dauphinoises. connais, € probablement 300 — Echelle : 1/2.000.00c!. x ; DRE ou 400 mètres d'épaisseur réelle » !, c’est-à-dire autant que sous le faciès vaseux dans certaines parties de la zone dauphinoise. Si la lenteur de son mouvement de descente a pu suffire à maintenir l’aire d'Aspres-Laffrey longtemps surélevée par rapport à ses voisines, il \. s. est cependant ve Laffrey Le Grand-Lac y Is emblable quune autre cause est interve- nue pour créer cette différencia- tion. 11 y a sur cette aire à la base du Jurassique une lacune importante, de hauteur variable suivant les points et qui peut s'élever jusqu’au Lias moyen *. Puis la sédimentation devient 1. Livret-Guide du Congrès de 1900, exc. XII, p. 27. 2. J'ai eu déjà l’occasion de la signaler, partie d’après mes prédécesseurs. partie d’après mes observations. Cf. notamment B. S. Statist. Isère, 4° série, LL V. p. 563 ct Eiv.-Guide Cong. géol. 1900, exc. XII. 1901 PARTIE MÉRIDIONALE DE LA CHAÎNE DË BELLEDONNE 181 générale, mais les dépôts contiennent ici en abondance des débris arrachés au substratum : les dimensions, le degré d'usure, la nature lithologique de ces éléments sont divers. A côté des grains de sable il y a des fragments atteignant jusqu'à la grosseur du poing, et tantôt anguleux, tantôt bien arrondis. La plupart sont formés par des roches du Trias (dolomies et calcaires) ou représentées dans ce système comme dans les terrains anciens (quartz, qui pour partie a vraisemblablement été repris au poudingue triasique dit « gratte ») ; mais d’autres galets proviennent bien des terrains anciens (grès du Houiller, schistes cristallins). Je citerai notamment la localité de Quet-en-Beaumont, où les galets abondent, groupés même par places en petites lentilles de conglomérat; ils appartiennent géné- ralement aux schistes cristallins et au quartz, les roches calcaréo- dolomitiques du Trias y sont peu ou pas représentées. Ce n’est pas à la base de la série seulement, dans la couche en transgression, que les galets se rencontrent, mais dans toute la hauteur des calcaires à Entroques, et parfois même cest vers Île sommet qu'ils sont le plus abondants. Cette nature et cette répartition des éléments détritiques impli- quent l’existence, et la persistance partielle jusqu'au Lias moyen, de hauts-fonds atteignant ou presque la surface de la mer et qui s'emplaçaient dans la moitié orientale de l'aire considérée, c’est à dire sur l'emplacement actuel des parties méridionales de Belle- donne !. De plus, si ces hauts-fonds avaient reçu une couverture continue de Trias, ils l'avaient à l’époque liasique perdue par places, notamment dans une portion du massif de la Salette. L'ensemble de ces caractères du Lias rend au moins fort probable une surélévation en dôme de l'aire Aspres-Laflrey au début du Jurassique, peut-être suivie d'autres mouvements plus localisés. D'ailleurs, en un point au moins le redressement tectonique des couches peut être directement observé. Lorsque l’on va depuis le bord nord de la Mateysine ? jusqu’à l'extrémité méridionale de la falaise du Grand-Lac, on voit la lacune entre le Trias et le Lias s’accroître à la fois par le haut et par le bas; le Trias est de plus en plus réduit par l'érosion ; le Lias, qui comprenait à Laffrey même quelques couches sinémuriennes (Arietites gr. de bisulcaius), débute directement dans la falaise par des calcaires et brèches à Bélemnites charmouthiennes (fig. 2). Il y avait donc bien là le pourtour d’une saillie anticlinale, sur laquelle la transgression empiétait graduellement. 1. Chaînons de Taillefer et du Tabor. massif de la Salette (p. p.). 2. Route de Laffrey à Séchilienne, à la sortie du premier de ces villages. 182 -P. LORY. — QUELQUES OBSERVATIONS DANS LA 7 Févr: II. — PLis ET VALLÉES: AU VOISINAGE DE TAILLEFER Les schistes cristallins des parties hautes de Belledonne portent encore, au voisinage de la gorge de la Romanche, des lambeaux discordants de Trias; Ch. Lory a décrit et figuré ceux de la mine de Brouflier et de la Croix de Chamrousse t. Comme dans les Rousses, ils sont formés surtout par du calcaire dolomitique, souvent d'apparence bréchoïde et passant à la cargneule. Grâce à ces lambeaux, il est possible de reconstituer en partie la tectonique alpine de la chaîne. Aïnsi dans Taillefer, au col entre le Rocher-Culasson et le Signal, vers 2700 mètres, les couches triasiques dessinent un synclinal (fig. 3) : il s’abaisse rapidement O. AE Petit-Taillefer S'UdeTaillefèer ou AT Culasson La 2e Fig. 3. — Vue prise sous le col du névé de Taiïllefer. T, Trias; ----- , Limite inférieure du Trias; X. Schistes cristallins sériciteux. vers le sud-ouest, jalonné par les lambeaux de la crête de l'Emay, sort du groupe de Taiïllefer et va se remplir de Lias à l’ouest de la vallée de la Roizonne, entre le Serre et la Chinarde. Du côté opposé, au nord, l'ensemble de la montagne s'abaisse brusquement de 600 à 800 mètres sur le plateau des Lacs *; là on voit trainer, notamment juste sous le col, des placages de Trias qui marquent le fond d'une dépression transversale, dominée au nord par les schistes cristallins du Grand-Galbert comme au sud par ceux de Taillefer. ; Ainsi, cette partie de Belledonne est faconnée par un triple système de ridements (fig. 4) : a) Surélévation longitudinale du massif central suivant une direction qui. dès au nord de Taillefer, est devenue nord-sud. 1. Descr. Dauphiné, p. p. 155, 185. Dans cet ouvrage, la roche qui forme ces lambeaux est appelée « calcaire magnésien du Lias ». 2, Lac Fourchu, lac Noir, etc. I9OI PARTIE MÉRIDIONALE DE LA CHAÎNE DE BELLEDONNE 183 b) Plis obliques N.-E.-S.-O., c'est-à-dire conservant à peu près la directiou qu'avaient, au nord de la Romanche, et l'axe de la chaîne et les ondulations longitudinales, par exemple les synclinaux triasiques de Chamrousse. C’est un nouvel exemple du cas que j'indiquais l’année dernière : ! outre les plis longitudinaux et transversaux, les chaînes peu- vent présenter, au voisinage des points où leur direction se mo- difie, des plis obliques ayant encore la direction qui était celle du ridement principal avant Pont du Péage o Pont RIT 07 ) a Séchihienne RER L Fe Tail l'inflexion. 3 Ë c) Ondulations transversales leCdSerre sn | s ga de À environ est-ouest: leur existence | avait été prévue et même leur : tracé indiqué avec une sûreté Ë magistrale par M. Termier *. à Les sommets de Taillefer appar- : tiennent à un anticlinal de ce Fig. 5. — Échelle 1/400.000°. système, à flanc nord presque ___ arcs der oete oo iee vertical, à flanc sud assez dou- synclinal; -—- -, Axe anticlinal. cement incliné ; il sépare les larges synclinaux du plateau des Lacs et du col de Vaunoire. Les principaux traits de la topographie sont nettement coor- donnés à ce réseau tectonique. La vallée de la Malsanne et partie de celle de la Roisonne sont des vallées longitudinales nord-sud. Les vallons du Recoin, de la Chartreuse de Prémol, du lac Achard #, etc., la gorge de la Romanche en amont du pont de Séchilienne, ainsi que plusieurs hauts vallons entre le Serre et le Tabor, appartiennent au système N.-E.-S.-0.; les premiers sont longitudinaux tandis que, la direction générale de la chaîne changeant. la seconde et les derniers se trouvent lui être obliques. Enfin. le plateau des Lacs, le vallon et le col de Vaunoire, sont des segments de synclinaux est-ouest, et sur le prolongement du premier se place # la gorge de la Romanche entre les ponts de Séchilienne et du Péage. 1. Types de vallées, in Soc. Statist. Isère, séance du 15 janv. 1900. 2. Grandes-Rousses, p. p. 113, 114. 116. 3. Qui a été capturé par un ravin affluent de la Romanche. 4. P. TERMIER. L. C., p. 118. SUR LA DÉCOUVERTE D'UN RHYNCHOTEUTHIS DANS LE SÉNONIEN DES ENVIRONS DE BEAUVAIS par M. L. THIOT. Dans cette note, l’auteur fait remarquer que l'étage sénonien n'avait fourni, jusqu'à présent, qu'un seul exemplaire de bec de ce genre qui a été trouvé à Chavot (Marne) et auquel d'Orbigny a donné, en 1847, le nom de Rhy-nchoteuthis Dutemplei; mais que cette espèce n'a pu être ni décrite, ni figurée dans le magistral ouvrage de d'Orbigny, par la raison qu'il en donne lui-même : que ce bec s'est perdu, on ne sait comment, le jour même où il lui parvint. L'exemplaire recueilli par M. Thiot au mois de mai dernier à Notre-Dame-du-Thil, près Beauvais, avec un autre Céphalopode assez bien conservé : Actlino- camax verus Miller, c’est-à-dire à la base de la craie à Bélemni- telles, est tout à fait intact. Il est figuré ci-contre en grandeur naturelle. Ses dimensions sont de 19 millimètres sur 10. M. de Grossouvre, à qui ce Rhynchoteuthis a été commu- niqué avec la Bélemnitelle rencontrée en même temps et que plu- sieurs paléontologistes supposaient être le jeune âge de Belemni- tella quadrata d'Orb., a bien voulu faire connaître à l’auteur « que « la Bélemnitelle était bien Actinocamax verus, qu’il ne connais- « sait pas de Rhynchoteuthis du même niveau et qu'il avait tout « lieu de supposer que c'était une espèce nouvelle ». M. Thiot pense que le Rhynchoteuthis qu'il a recueilli à Notre- Dame-du-Thil n’est pas du même niveau géologique que celui rencontré à Chavot, attendu que la craie de cette dernière localité, située aux portes d'Épernay, doit appartenir à la craie de Meudon et d'Epernay, renfermant Micraster Brongnarti Héb., c'est-à- dire à la partie tout à fait supérieure de la craie blanche (d'après les travaux de MM. Hébert, de Mercey et Peron), tandis que la craie de Notre-Dame-du-Thil appartient, au contraire, à la base de la craie de Reims, assise surmontant immédiatement la craie à Micraster corang'uinum Ag. D'ailleurs, le Rhynchoteuthis Dutemplei n'ayant été ni déerit, ni figuré, il n’est pas possible d'affirmer que l'exemplaire de Chavot et celui de Notre-Dame-du-Thil appartiennent à la mème espèce. Dessus Dessous Profil Rhynchoteuthis sp. n. G. N. Séance du 23% Février 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Sont proclamés membres de la Société : MM. Jules Peth6, Géologue en chef de l'Institut royal géolo- gique de Hongrie, présenté par MM. M. Cossmann et Gustave Dollfus. F. Bonnes, Professeur de géologie et de minéralogie à l'Ecole des Mineurs d’Alais (Gard), présenté par MM. G. de Rouville et Delage. A. de Richard, Ingénieur des mines, membre de la Société des Sciences de Bucarest (Roumanie), présenté par MM. Albert Gaudry et Léon Carez. Henri Douxami, Docteur ès-sciences, Professeur au Lycée Ampère à Lyon, présenté par MM.J. Bergeron et E. Haug. Six nouveaux membres sont présentés. Le Président annonce que M. P.-W. Stuart-Menteath, sur sa demande, ne fait plus partie de la Société. M. de Lapparent croit devoir appeler l'attention de la Société sur une publication récente de M. Amalitzky, relative aux fouilles que ce savant a exécutées sur les bords de la Dwina. Une lentille de grès meuble, intercalée dans les marnes d’eau douce du Permien supérieur, a fourni plusieurs squelettes entiers du Pareiasaurus, avec de nombreuses empreintes de Glossopteris et de Ganga- mopter!is. Ainsi, non seulement la flore, mais la faune des couches de Johannesburg, se retrouvent dans le Nord de la Russie, au niveau précis que M. Zeiller avait assigné à ces couches d’après leurs fossiles végélaux. D'autre part, il devient impossible de soutenir que l’éclosion de la flore à Glossopteris ait été déterminée, à la suite des phéno- mènes glaciaires de l'Afrique australe, de l'Australie et de l’Inde, par un changement de l'axe terrestre qui aurait placé l’un des pôles dans l’océan indien : car, dans ce cas, l'autre pôle n’aurait pas pu tomber dans le Nord de la Russie. 186 SÉANCE DU 25 FÉVRIER IQOI M. Haug attire l'attention de la Société, sur la carte représen- tant l'extension des glaciers permiens, que vient de publier M. Penck dans une note très importante sur les phénomènes gla- ciaires d'Australie. Comme complément aux observations de M. de Lapparent, M. Zeïller ajoute que les conclusions qu’il avait tirées de l'étude des plantes fossiles pour la détermination de l’âge des dépôts char- bonneux des environs de Johannesburg, rapportés par lui à l'étage ‘de Beaufort, ont été pleinement confirmées par M. le Dr Molen:- graaff. M. Draper, dans une étude insérée aux Transactions ofthe South African Geological Society. avait assimilé les couches de combustible du Transvaal aux Molteno beds, c'est-à-dire à l'étage de Stormberg, auquel appartiennent en effet les dépôts charbon- neux de la Colonie du Cap, mais qui renferme en réalité une flore bien différente de celle des dépôts similaires de la région de Johan- nesburg. M. Zeiïller a su de M. Molengraaff que celui-ci avait été amené finalement, par une étude stratigraphique approfondie, à rapporter ces derniers dépôts à l’étage de Beaufort, et qu’ainsi la géologie se retrouve une fois de plus en parfait accord avec la paléontologie végétale. M. A. de Lapparent met sous les yeux de la Société un oursin fossile, qui a été recueilli en 1892. par le Colonel Monteil, dans le Sahara oriental, sur la route du Tchad à Tripoli. un peu au sud de l'oasis de Bilma. Cet oursin a été reconnu, par M. Victor Gauthier, comme presque identique à un Échinide du Crétacé supérieur (Maëstrichtien) du Baloutchistan, décrit en 1897 par M. Noetling sous le nom de Protechinus paucituberculatus, nom qui doit être changé, selon la proposition de M. Lambert, en celui de Noetlingia paucituberculata, le genre Protechinus ayant été antérieurement | créé pour un autre oursin. M. de Lapparent fait ressortir les conséquences de cette trou- vaille, qui étend considérablement vers l’ouest le domaine de la mer crétacée en Afrique, et montre qu'alors la région du lac Tchad faisait partie, avec la Libye, la Nubie, l'Égypte et la Tunisie, d'un grand golfe méditerranéen, communiquant avec l'Inde par la Palestine et la Perse. L'oursin, que M. Gauthier regarde comme une espèce distincte, qu'il dédie au Colonel Monteil, sera l’objet, dans le Bulletin, d’une description avec figure (voir page 189 et pl. IT). SÉANCE DU 25 FÉVRIER IQOI 187 M. Léon Bertrand signale à la Société la découverte récente d’un squelette de Mammouth dans le remplissage d'une fente de cal- _caires liasiques, dans une tranchée de la ligne de chemin de fer en construction de Foix à Saint-Girons, au voisinage . Cadarcet (Ariège). M. Kilian attire l'attention sur la fréquence relative des Rhacophyllites du groupe Rh. mimatensis d'Orb. dans le Lias moyen des Alpes de Savoie. Parmi les très rares Ammonites de ce niveau, recueillies dans les ardoisières de Saint-Colomban-des-Villards (Maurienne) figurent à côté de quelques exemplaires d’Amaltheus margaritatus Pi plusieurs individus de Rhacophyllites libertus Gemm. (— mimatensis Menegh., p. p.) très bien conservés et absolument con- formes aux figures de cette espèce récemment figurés par divers auteurs italiens (Musée de Chambéry, coll. Lachat. coll. Villet : coll. Hollande). D'autre part, la seule Ammonite recueillie par M. Kilian aux environs de Moutiers (Savoie) est également une forme de ce groupe : Rhacophyllites Nardii Menegh. sp. (— RA. diopsis Gemm.).— Ces faits dénotent une aflinité de faune remar- quable entre le Lias des Alpes savoisiennes et les assises de même âge de la Lombardie et des régions méditerranéennes où les Rhacophyllites sont assez fréquents. — Si l'on considère en outre que ces formes spéciales se rencontrent aussi bien dans le « faciès dauphinois » (Saint-Colomban-des-Villards) que dans le « faciès briançonnais » du Lias (Moutiers) on voit dans cette répartition une nonvelle confirmation des rapports intimes qui lient la zone du Briançonnais à la zone dauphinoise voisine et qui empêcheront toujours les stratigraphes d'admettre l’origine exotique de la première seule de ces zones. SUR LES COUCHES A ORBITOÏDES DU PIÉMONT par M. SACCO. A la suite de la récente communication faite par M. Douvillé à la séance du 17 décembre 1900, sur les couches à Orbitoides des environs de Dax, l’auteur croit utile de présenter les observations suivantes. | 1. — Miogypsina irregularis Micht., dont Miogypsina globu- lina Micht. n’est probablement qu'une variété, ne se trouve pas dans l’Aquitanien de Villa Sacco (Turin), comme le dit M. Schlum- berger (probablement par suite d’une confusion des étiquettes de localité) dans son importante note Sur le genre Miogypsina (B.S. G. F. (3), XXVIIL. 1900), mais il se trouve fréquemment, parfois même en très grande abondance, dans l'Helvétien (spécialement dans l’Helvétien moyen-inférieur) de plusieurs localités des Collines de Turin, près de Villadeati, etc. Cependant M. irregularis se ren- contre aussi dans quelques points de l'Aquitanien (principalement supérieur) des Collines de Turin. >, — Lepidocyclina marginata Micht. [= Nummulites margi- nata Micht., 1841, ainsi que M. Douvillé l’a reconnu avec justesse (C.-R. S. G. F., 20 novembre 1899) après l'examen des exem- plaires que M. Sacco lui avait envoyés], est extraordinairement abondant dans l'Aquitanien de Villa Sacco et dans d’autres points des Collines de Turin, mais il se trouve également, quoique en général plus rarement, dans l’Æelvétien de ces Collines. 3. — 11 résulte de ce qui précède qu’en Piémont Lepidocyclina prédomine dans l’Aquitanien et Miogypsina dans l'Helvétien, mais qu'il n’existe pas une règle précise à ce sujet. 4. — L'Aquitanien typique, ainsi que M. Sacco l'entend, doit être placé dans le Miocène et non dans l’Oligocène comme l’on fait généralement : cette dernière interprétation est due au fait que, dans plusieurs régions de l’Europe, l’on a indiqué et l’on indique encore comme aqguitaniens des terrains qui sont, en réalité, plus anciens, c’est-à-dire vraiment oligocéniques, ainsi que M. Sacco l’a déjà bien des fois fait observer dans plusieurs ouvrages (voir: Note sur la classification des terrains tertiaires. C.-R. Cong. géol. intern. Zurich, 1894). | De cette confusion résultent des interprétations différentes sur la signification de l'Oligocène, lequel, justement compris, repré- sente, par contre, un ensemble assez naturel d’étages géologiques. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ÉCHINIDES FOSSILES par M. V. GAUTHIER !, (PLancHE I). VI. — Genre Norrzivcla Lambert, 1808. SyYNONYMIE : Protechinus Noetling (non Austin Protoechinus). Memoirs of the Geological Survey of India. — Fauna of Baluchistän, of the upper cretaceous (Maëstrichtien) beds. Série XVI, vol. I, part. 3, p. 14, pl. IL, fig. 3, 3°; pl. IL, fig. x, 1°, 1897. Noetlingia Lambert, Revue critique de Paléozoologie, ° année, N° 3, juillet 1898, p. 1°6. Diagnose du genre. — Oursin régulier, de la famille des Echinidæ, pouvant atteindre une très grande taille; forme circu- laire, ordinairement élevée, conique ou hémisphérique à la partie supérieure, plane ou pulvinée à la partie inférieure. Appareil apical peu développé, insuffisamment connu jusqu'à présent, montrant cinq plaques génitales en cercle et cinq plaques ocellaires dont les postérieures intercalées font partie du circuit périproctal ; les plaques ocellaires antérieures II, IIL, IV paraissent rejetées en dehors des génitales, mais l'état des exemplaires connus ne permet pas de l’aflirmer catégoriquement; ouverture anale peu étendue, circulaire ou légèrement ovale, entourée par les plaques apicales. Aires ambulacraires assez larges, égalant à peu près la moitié des aires interambulacraires ; zones porifères étroites, superficielles ou légèrement déprimées, allant en ligne droite du sommet au péristome; elles sont oligopores et comprennent trois paires de pores par plaque majeure : la paire du milieu est la plus externe; la paire inférieure placée directement au dessous et semblable est légèrement oblique et rentre un peu; la paire supérieure, bien plus rentrante que l'inférieure, est plus petite aussi et portée par une plaquette très réduite, resserrée entre les deux plaques voisines, de sorte que la zone porifère est formée par deux rangées verticales et bien distinctes de paires de pores; l’externe comprenant les deux grandes paires, un peu sinueuse par suite de l’obliquité de la paire inférieure; l’interne, formée par les petites paires abactinales, moins large et moins remplie, puis- 1. Voir B.S. F. G.. (3). XXV, p. 83x, 1897; XX VI, p. 344, 1899. 190 V. GAUTHIER 25 Févr. qu'elle ne comprend qu’une paire sur trois. Entre les zones porifères s'étendent plusieurs séries verticales de tubercules imperforés et incrénelés, de volume médiocre. Les aires interambulacraires portent à l’ambitus de nombreuses séries verticales de tubercules semblables à ceux des ambulacres, se réduisant à mesure qu’elles montent vers le sommet ou qu’elles descendent vers le péristome ; ces mêmes tubercules forment en même temps des rangées horizontales un peu obliques ; la zone miliaire est plus ou moins garnie à la partie supérieure. Face inférieure faisant défaut chez tous les exemplaires recueillis JS © ce jour; nous ne pouvons donc rien dire du péristome. M. Noetling le premier a décrit cet intéressant échinide et en a fait le type d'un genre nouveau Protechinus. Depuis, M. Lambert a fait observer: que ce nom générique avait déjà été employé par Austin (Protoechinus) pour un échinide très différent et a proposé de le remplacer par celui de Noetlingia, que j accepte et approuve très volontiers. M. Noetling a rapproché la disposition des paires de pores de son genre nouveau et des plaquettes qui les portent, des mêmes plaquettes chez le genre Psammechinus. Nous ferons une compa- raison analogue en remplaçant le genre Psammechinus par le genre Échinus, qui ne diffère point sous ce rapport, et qui nous donnera l'avantage de pouvoir examiner des exemplaires de taille égale. Dans les deux genres c’est la pairé médiane qui est la plus externe, mais, par contre, pendant que chez les Noetlingia c’est la paire abactinale (la supérieure) qui rentre le plus, chez les Echinus c'est l’actinale (l’inférieure) ; de sorte que si l’on établissait trois séries verticales avec les paires de pores, ce seraït la série formée par les paires inférieures qui serait au milieu chez les Noetlingia, et la série formée par les paires supérieures chez les Echinus. A ces observations qui appartiennent à M. Noetling nous äjouterons que chez les Æchinus les paires actinales et abactinales sont portées par des plaquettes entières dont l’inférieure est la plus développée, tandis que la paire médiane est placée sur une demi- plaquette; chez les Noetlingia la paire supérieure, moins dévelop- pée que les autres, est portée par une plaquette très réduite, la médiane est située sur une demi-plaquette dont l'extrémité interne se rétrécit et se recourbe pour soutenir la petite plaque; la paire inférieure seule occupe une plaquette entière, d’abord étroite, puis, au-delà des pores, occupant tout l’espace jusqu’à la suture du milieu de l’ambulacre: Ce sont des différences importantes qui suffisent pour justifier la création d’un genre nouveau. 190 CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ÉCHINIDES FOSSILES 191 L'espèce du Béloutchistän a été désignée par M. Noetling sous lé nom spécifique paucituberculatus et devient Noetlingia paucitu- berculata Noetling (sub Protechinus). Nous allons maintenant décrire une seconde espèce. NoETLiNGIA MonTEILt Gauthier, 1901. (PL. IL, lig. 1-3). Nous ne connaissons qu'un exemplaire de ce nouveau typé spécifique; il est incomplet, le sommet est gravement endommagé, la partie inférieure fait complètement défaut, et l’ensemble de ce qui reste a été poli par le frottement des sables sahariens. Dimensions : Diamètre, 110 millim.; hauteur du se 60 millim. Espèce de très grande taille, subcirculaire au pourtour, subhé- misphérique à la partie supérieure. — Appareil apical de dimen- sions médiocres, subcompact, en partie intercalaire, autant que nous pouvons nous en rendre compte; les plaques ocellaires I, V nous paraissent écarter les génitales et participer au cireuit du périprocte, les ocellaires antérieures II, IIT, IV seraient au con- traire rejetées au dehors. Aires ambulacraires légèrement renflées, relativement assez larges à la partie supérieure où elles égalent les deux tiers de l’aire interambulacraire correspondante, se développantà mesure qu’elles s'éloignent de l’apex, mesurant au pourtour inférieur vingt-quatre millimètres de largeur, presque la moitié des aires interambula- craires. Zones porifères faiblement déprimées, rectilignes, à bord externe presque onduleux par suite de l’obliquité de la plaquette actinale, offrant trois paires de pores par plaque majeure, disposées comme il a été dit dans la diagnose générique, de manière que les deux inférieures sont les plus grandes, et que la supérieure, fortement rentrante est moins développée et portée par une petite plaquette entourée par le bord rétréci de la demi-plaquette médiane. Les plaques majeures sont moins hautes que dans la plupart des espèces du genre Echinus qui présente d’ailleurs des variations assez sensibles sous ce rapport, et les paires de pores sont par conséquent très serrées. L'espace. interzonaire porte à lambitus environ huit rangées de tubercules médiocrement développés; ces rangées s’atténuent en montant vers le sommet où il n'en reste que deux. Aires interambulacraires légèrement déprimées au milieu, 192 V. GAUTHIER. — ÉTUDE DES ÉCHINIDES FOSSILES 3h FÉVR: étroites relativement près du sommet (15 millimètres), larges à l’ambitus où elles atteignent cinquante-cinq millimètres: elles portent en cet endroit jusqu'à dix-huit rangées verticales de tubercules semblables à ceux des ambulacres, qui disparaissent successivement en montant vers l’apex et se trouvent finalement réduites à deux. Ces tubercules forment en même temps des rangées horizontales un peu obliques. Le milieu de l’aire n’est pas dénudé à la partie supérieure et reste couvert de tubercules peu serrés mais se maintenant aussi longtemps que le permet le rétrécissement de l’aire. Le périprocte qui s'ouvre au milieu des plaques apicales est médiocrement étendu, comme nous l'avons dit, et légèrement ovale. Le reste du test nous est inconnu, et, par une fâcheuse coïncidence, aucun des exemplaires de M. Noetling n'a conservé sa face inférieure jusqu’au péristome. L’exemplaire que nous décrivons est très voisin des spécimens indiens décrits par M. Noetling; la taille est plus grande, la forme est moins conique et se termine plutôt en dôme; les tubercules sont plus gros, le milieu des aires interambulacraires est beaucoup moins nu; ces différences permettent de distinguer facilement les deux espèces. Le type indien N. paucituberculata a été recueilli dans les couches crétacées supérieures du Béloutchistän, accompagné de grands Æemipneustes dont deux sont attribués par M. Noetling à des espèces européennes, Hemipn. prrenaicus Hébert, Hemipn. Leymeriei Hébert. Il est très probable que notre exemplaire appartient au même horizon géologique ; M. le colonel Monteil l'a trouvé sur le sol, à Zau Saghaïr, au sud de Bilma, par environ 18° 23 08” de latitude nord dans le Sahara oriental, sur la route du lac Tchad à Tripoli, et l’a rapporté en France comme un souvenir de sa périlleuse et glorieuse excursion à travers les régions désolées de l'Afrique centrale. Nous sommes très heureux de pouvoir lui dédier cette précieuse espèce. EXPLICATION DE LA PLANCHE lIIl Fig. 1. — Noetlingia Monteili, vu de protil, grandeur naturelle. Fig. 2. — Le même, face supérieure. Fig. 3. — Portion d'aire ambulacraire, grossie. UN NOUVEAU CYCADEOIDEA par M. P. FLICHE: Dans les collections de l'Ecole forestière, figure, sous le nom de Mantellia, un fossile végétal envoyé, il y a déjà plusieurs années, par M. Charil des Mazures, alors inspecteur des forêts en Vendée et provenant de l’île de Dives (Vendée), près de l’Aïguillon sur Mer. Une étiquette de la main de Mathieu, alors professeur de sciences naturelles et sous-directeur de l'Ecole, porte que l’auteur de l’envoi n’a point indiqué de quel terrain provenait ce fossile ; mais que ce pourrait être l’Oxfordien ou le Corallien. Depuis l’époque où il rédigeait cette note, Mathieu semble avoir changé d'opinion, car la grande étiquette placée à côté de l’échantillon, exposé dans une vitrine, le réfère, avec doute, il est vrai, au Bathonien. Aujourd'hui, il faut rejeter, non seulement cette dernière manière de voir, mais considérer l'attribution au Corallien comme absolument certaine; l’île de Dives ne présentant que du Corallien comme on peut le voir sur la Carte géologique de France, au 80.000°, feuille de Fontenay. De plus la nature de la roche pour le Corallien, telle qu’elle est décrite par M. Boisselier, auteur de cette feuille, s'accorde parfaitement avec celle du fossile, tandis qu'il n'y a aucune analogie entre celle-ci et le calcaire bathonien de la même région. L'âge du fossile qui nous occupe est donc bien déterminé; en ce qui le concerne lui-même, il s’agit d’un moule, sans structure conservée; malgré cela il offre de l'intérêt, parce que son attribu- ton à une tige cycadéiforme est certaine, parce que de plus il présente des caractères assez précis pour qu'on puisse le placer parmi les Cycadeoidea, tels qu'on les entend aujourd'hui en Paléontologie, c’est-à-dire comme étant vraisemblablement des üges de Bennettitées. Or, tout ce qui touche à ce groupe de végétaux mérite une attention toute particulière, en raison des problèmes qu'il soulève encore et du rôle important qu'il a joué pendant la période jurassique et surtout le Crétacé inférieur. La tige de l’ile de Dives nous a été conservée, sous forme de moule, ainsi qu'il a été dit plus haut; celui-ci est formé par du calcaire et recouvert à sa surface par une mince couche d'oxyde de fer hydraté qui lui donne une couleur brune, assez claire d’ailleurs, toutes les fois que celle-ci est intacte. 5 Septembre 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 13 194 P. FLICHE 25 Févr. Ce moule est resté engagé, dans la roche encaissante, par une de ses faces, sur moitié environ de son épaisseur; la tige a très visiblement subi une compression qui non-seulement l’a aplatie mais l’a un peu déformée, de manière à en rejeter de côté l’extré- mité supérieure, un peu creuse, ce qui est un caractère de ces tiges, sur la face sortie de la roche, ce qui la rend très visible sur la figure, en 1, bien que la cavité renferme quelques concrétions, ainsi en 2, qu'on n'a osé enlever de peur de la dégrader. Sa “ + Q Le... 4 Fig. 1. — Cycadeoidea divensis n. Sp. Grandeur naturelle. Le moule n’est pas intact, un simple coup d'œil, jeté sur la figure, le montre fort bien; cependant on en possède visiblement la presque totalité, puisqu'on a, comme il vient d’être dit, l’extrémité supé- rieure ; puisqu à la base, la section de la roche, un peu en dessous 1901 UN NOUVEAU ( CYCADEOIDEA } 195 du fossile, montre que celui-ci ne l’atteint pas; d’un autre côté, si la portion du fossile, placée à la gauche du lecteur, n’est pas entière, la face opposée l'est à peu de chose près; la tige était donc courte et large; ce qui se rencontre si fréquemment chez les Cycadeoidea, probablement aussi, même sur le vif, la section transversale était plus ou moins elliptique. Aux caractères, déjà indiqués, rattachant la tige de Dives aux Cycadeoidea, s'en joignent de plus précis; ainsi les cadres si caractéristiques formés, autour des écailles, par les raments, sont souvent très visibles; ils le sont bien en particulier sur la figure entre 2 et 3, enfin il y a une insertion d'inflorescence très nette en 5. Il s’agit donc bien d'un Cy-cadeoidea, ce qui correspond au nom de Mantellia qui avait été donné à ce fossile, par Mathieu, sur les indications de Schimper ; de plus, il me semble qu’il s’agit d'une espèce non encore décrite. Par ses dimensions, par sa forme, les deux espèces dont elle se rapproche le plus, sont le Cycadeoidea prgmaea L. et Hutt. et le Polbopodium piclaviense Sap. Malgré le nom générique qui lui a été imposé par son auteur, cette dernière espèce semble, en effet, être aussi un Cycadeoidea ; de Saporta ! fait remarquer, lui-même, la très grande ressemblance de son Bolbopodium pictaviense avec le Cycadeoidea pygmaea L. et Huit., dont, par suite, il fait un Polbopodium; il ajoute un peu plus loin *, après avoir donné les caractères distinctifs, assez peu importants, sur lesquels il établit son nouveau genre : «Cependant les plus petites espèces de Clathropodium *, lorsqu'elles sont renflées en œuf ou conformées en nid, pourraient être aisément confondues avec les Bolbopodium, et l'étude des diverses catégo- ries des tiges n'est pas assez avancée ou même ne repose pas sur des principes assez fixes, pour permettre de tracer entre elles des limites parfaitement rigoureuses. » La petitesse des bases de pétioles, qui a fourni, à de Saporta, le principal caractère distinctif des Bolbopodium et qui n'a pas, je crois, la valeur que lui accordait l’'éminent paléontologiste, est en effet remarquable chez les deux seules espèces bien certaines attribuées à ce genre, chez l'espèce de Lindley et Hutton, plus encore que chez celle de Saporta. Ce caractère sépare nettement le fossile de Dives, comme le montre la plus simple comparaison de la figure qui le reproduit, avec celle du Fossil flora et de la Paléon- 1. Paléontologie française. Plantes Jurassiques. II, Cycadées, p. 256. 2. L. c., p. 258. 3. Genre établi aussi par de Saporta et qui est un synonyme des Cyca- deoidea. 196 P. FLICHE, — UN NOUVEAU € GYCADEOIDEA } 25 Févr. tologie française. La conséquence naturelle de ce fait est que les bases de pétioles recouvrant la tige sont beaucoup moins nom- breuses sur la première que sur les deux autres. Aucun autre Cyca- deoidea décrit ne présente, à ma connaissance, autant d'analogie, avec le fossile qui nous occupe, que les deux espèces dont il vient d'être question, mais il en est, on lé voit, très nettement distinet ; c'est done une espèce nouvelle. Comme il est assez bien conservé, pour être décrit, je lui impose un nom spécilique qui rappelle la localité où 11 a été trouvé et J'en donne la diagnose suivante : CYCADEOIDEA DIVENSIS n, 8p. — (. caudice humili, ovoideo subconico, strobiliformi: apice depresso, cicatrices inflorescen- tiarum præbente; altitudine 95 mill., diametro So müll. circiter metiente; peliolorum basibus rhombeis, 17-21 mill., latis 10-17 mil. allis obtecto; ramentorum stratis 1 mil. crassis. Ile de Dives (Charil des Mazures). Les dimensions données, dans cette diagnose, pour l'ensemble de la tige, doivent se rapprocher beaucoup de ce qu’elles sont réellement pour le diamètre transversal, sous la réserve de lexagé- ‘alion qui peut être due à l'écrasement de l'organe ; pour la hauteur, il y a plus d'incertitude quoique, pour les raisons exposées plus haut, on doive être en présence de l'organe presque entier. Les dimensions et les formes données pour les bases de pétioles, s'appliquent à celles qui, subérisées el accrues, forment la masse de la cuirasse protectrice de la tige et non à celles qui portaient encore des feuilles ou dont celles-ci venaient de se détacher à l'état de vie. Ces dernières ne dépassaient pas un centimètre de largeur. On voit que, non seulement la tige était peu volumineuse, mais que les bases de pétioles, tout en étant plus grandes que chez le Bolbopodium piclaviense de Saporta, sont encore fort petites ; cette exiguilé de la tige et des pélioles se retrouve chez les espèces décrites par M, Carruthevs et provenant certainement du Corallien du Sutherland, en Angleterre, Il y à dans cette exiguilé un fait qu'il est intéressant de rapprocher des dimensions très réduites aussi de la plupart des feuilles de Zamites, trouvées au même horizon en France, en Suisse et en Allemagne, ainsi Z. Feneonis Brong., Z. Morcaui Brong., Z. Acerosus Sap., Z. /ormosus Heer., Z. Renevieri Heer, Ce rapprochement offre de l'intérêt, puisque les Zamites, en grande partie, si ce n’est en totalité, paraissent de plus en plus certainement ! avoir été, comme le prétendait Williamson, les feuilles des Williamsonia et par suite des Bennettitées. 1, Voir notamment : A.-C. Sswanb. On the leaves of Bennettites. Procee- dings of the Cambridge Philosophical Society, vol. IX, pl V, p. 273. Séance du 4 Mars 1901 PRÉSIDENCE DE M, L. CAREZ, PRESIDENT M. L. Mémin, Vice-Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de , 1 la séance précédente, La rédaction de ce procès-verbal est adoptée, Sont proclamés membres de la Société : MM. Jacob, Ingénieur en chef des Mines, Directeur du Service géologique de l'Algérie, présenté par MM. Pouyanne et Ficheur. Paul Vincey, Ingénieur-Agronome, Professeur départe- mental d'Agriculture, présenté par MM, Gustave Dollfus et G. Ramond. Léopold Michel, Maitre de Conférences de minéralogie à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris, présenté par MM. KE. Haug et L. Gentil, Louis Mengaud, Licencié ès-sciences, présenté par MM. J. Bergeron et Léon Bertrand, Louis Boistel, présenté par MM. Munier-Chalmas et E, Haug, Schardt, Professeur de Géologie, à Neuchâtel (Suisse), présenté par MM. Marcel Bertrand et Emm,. de Margerie, M. Stanislas Meunier. — Origine de l'argile à silex. Je viens de lire dans la dernière livraison du Bulletin de la Société Géologique ({[3], XX VII, 1900, p. 809), une communication de M. A. de Grossouvre sur l'argile à silex des environs de Vierzon et je demande à présenter quelques observations sur les conclue sions de ce travail, qui touche un sujet que j'étudie moi-même depuis plusieurs années, Malgré les assertions de l’auteur, je crois qu'il s’agit réellement, dans les localités qu'il a décrites, du produit de la décalcification de la craie ; aucune de ses objections n'étant, suivant moi, justifiée, Tout d'abord, M. de Grossouvre insiste sur la blancheur de la roche pour écarter l’idée qu'elle provient de l'attaque de la craie. « Il n’est pas de craie, dit-il, même la plus blanche qui, attaquée par les acides faibles, ne laisse un résidu ferrugineux », Or, il est de nombreuses localités où l'argile à silex, parfaitement caracté- risée, se présente avec une blancheur éclatante et donne par la 198 SÉANCE DU {4 MARS IQOI cuisson un produit tout à fait blanc : une semblable ferre de pipe, dérivant de la craie par décalcification, se rencontre par exemple à Prépotin, près de Mortagne, où je l’ai étudiée avec détail. Une deuxième remarque concerne la présence dans l'argile d'une quantité considérable de silice soluble, qui semble à M. de Grossou- vre incompatible avec le caractère résiduel de la roche. Il faut pourtant constater que la silice soluble est un composant normal de toutes les craies, comme de bien d’autres roches sédimentaires et je me réserve de revenir sur cette question qui a une importance capitale quant à l’histoire de la silicification. La silice étant bien moins soluble que le carbonate de chaux, un mélange de ces deux corps, soumis aux acides très étendus, passe progressivement à l’état de silice pure, par disparition progressive du calcaire. Le beau travail de Ch., Friedel sur la cacholinisation des silex n’est pas à invoquer ici et c’est ce que suflirait à montrer la composition tout à fait normale des rognons dans l’argile à silex la mieux caracté- risée. On trouverait facilement des exemples bien plus singu- liers encore, en apparence, de la persistance de matériaux solu- bles dans des roches qui ont subi incontestablement la perte de certains de leurs éléments : je rappellerai seulement ici le calcaire grossier de Vaugirard qui est criblé de cavités laissées par la disso- lution des tests de ses coquilles, au milieu d’une masse générale de calcaire ambiant si complètement respecté qu'on y retrouve tous les détails de l’ornementation délicate des fossiles. Mais la troisième objection de M. de Grossouvre est plus insou- tenable encore et c'est surtout à cause d'elle que je présente ces observations à la Société. Il constate « que l'argile à silex ne cons- titue pas toujours un terrain superficiel et que souvent elle est recouverte par des roches d’âges divers ». J'ai étudié beaucoup de cas semblables et ils m'ont paru présen- ter cet intérêt tout spécial de nous renseigner, contrairement à ce que pensait Constant Prévost, sur le régime continental auquel ont été soumises certaines régions avant une submersion ultérieure. Le recouvrement de l'argile à silex par les calcaires lacustres à Sully- sur-Loire et à Romorantin que cite M. de Grossouvre indique un affaissement du sol précédemment continental et son envahisse- ment par les eaux douces, après que l’argile à silex s'était constituée. C’est, sans qu’on y fasse attention jusqu'ici, un ordre nouveau de considérations qui seront fécondes pour la paléogéographie. RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS par M. Ch. DEPÉRET, (PLaxcxes IV-V) La famille des Hyracothéridés (Prééquidés) est l’un des groupes les plus intéressants des Imparidigités éocènes, en raison de ses caractères très primitifs et de ses liaisons ancestrales avec la famille des Equidés, affinités qui ont été bien mises en lumière par les beaux travaux de Kowalewsky, de Rütimeyer, de M. Gaudry, de Me Pavlow, en Europe ; de Marsh, de Cope, de MM. Osborn et Wortman, en Amérique. A l’occasion d’une étude monographique que j'ai entreprise sur les animaux éocènes de Lissieu (Rhône), j'ai été amené à étudier avec soin les différents types d'Hyracothéridés européens, et à constater quil existait dans les travaux des paléontologistes précités, et par voie de conséquence dans le précieux Traité de paléontologie de M. le professeur Zittel, des interprétations diverses et parfois inexactes relativement aux caractères et aux limites des genres. IL m'a paru que ces divergences provenaient soit d’une fausse inter- prétation des types, soit de l’état encore incomplet des documents sur quelques-unes de ces formes animales. Les conclusions auxquelles je suis arrivé dans cette révision d'ensemble, pour laquelle j'ai utilisé toute une série de pièces nouvelles de l'Éocène moyen et supérieur du Midi de la France, mont paru avoir un intérêt assez général pour mériter d’être exposées dans cette Note. J'ai eu surtout en vue les formes euro- péennes du groupe ct je ne parlerai qu'à titre de citation rapide des formes américaines que je connais peu personnellement. Je laisserai également! de côté la recherche des formes ancestrales de la famille dans l'Éocène le plus inférieur et je ne remonterai pas au-delà de l'Hyracotherium de l'argile de Londres, qui est le genre type de la famille. J'étudierai successivement les genres Æyracotherium, Pach-- nolophus, Propalæotherium et Lophiotherium qui représentent les Hyracothéridés dans l’Éocène de l'Ancien Monde. 200 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars Genre HyracornerIuM Owen (Pliolophus Owen) Les limites de ce genre me semblent avoir été singulièrement exagérées. Il faut prendre pour type le crâne incomplet décrit en 1839 par Owen de l'argile de Londres à Herne Bay (Kent) sous le nom d'Hyracotherium leporinum !. Ce crâne montre la série com- plète des molaires supérieures, composée de 3 arrière-molaires et de 4 prémolaires. Les points importants de la structure de ces dents sont les suivants : arrière-molaires à 6 tubercules coniques, les deux intermédiaires bien développés aux deux lobes ; on voit à peine une tendance de ces tubercules intermédiaires à s’aligner sous forme de crêtes transverses ; bourrelet basilaire épais et con- tinu ; absence complète de colonnette médiane (mesostyle) sur la muraille externe ; denticule complémentaire de l’angle antéro- externe (paraslyle) peu développé. Prémolaires : p“ et p° triangu- laires à 5 tubercules coniques au lieu de 6, par suite de la dispari- tion du denticule postéro-interne ; p° allongée à une seule pointe médiane ; p! (connue seulement par l'alvéole), séparée de p? par un diastème, et de forme également allongée et étroite. Un crâne entier du même animal, extrait d’un nodule de l'argile de Londres près Harwich (Essex) a été figuré par Owen en 1858 sous le nom nouveau de Pliolophus vulpiceps *. D’après les indica- tions données par M. Lydekker (Catal. Brit. Mus. Mamm., part III, p. 11), ce crâne dont le moulage est assez répandu dans les collections européennes, a été brisé par accident, et il n'en subsiste plus qu'un fragment de la mâchoire et de la mandibule gauches. Les beaux dessins et les descriptions d'Owen permettent toutefois de suppléer à cette lacune. Le Pliolophus diffèrerait, selon Owen. de l'Hyracotherium par quelques particularités de structure des molaires supérieures : les tubercules intermédiaires seraient un peu moins distincts aux arrière-molaires et surtout au lobe postérieur de p‘; le cingulum basal serait moins continu ;.enfin dans Pliolophus, p' est en série continue avec les autres prémo- laires, alors qu’elle en est séparée par un petit intervalle dans l'Hyracotherium. Ces différences sont fort légères et on ne saurait 1. Descript. of the fossil remains of a Mammal and of a Bird of the London Clay. Transact. geol. Soc. London, 2: sér., t. VI, p. 203, pl. 2r, 1839. — Le même crâne est figuré dans : À history of british foss. Mammals, 1846, fig. 419. 2. Descr. of a small lophiodont Mammal from the London Clay. Quart. Journal geol. Society, 1957, t. XIV, p. 54, pl. Il et III. I9OI DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 201 leur attribuer une valeur générique ni même probablement spéei- fique. MM. Flower, Lydekker et Zittel me semblent avoir eu raison en réunissant ces deux formes animales sous le nom d’Hyraco- therium leporinum. Ce crâne du Pliolophus nous fait connaître en tous cas la struc- ture des molaires inférieures qui sont au nombre de sept, dont trois arrière-molaires et quatre prémolaires, la première ou p' étant écartée de p° par un léger intervalle; il est intéressant d'observer que cet intervalle est plus grand du côté droit que du côté gauche de la même mandibule et ce fait vient à l'appui de ce que je disais plus haut au sujet de la faible importance qu'il fal- laït attacher au plus ou moins d'écartement de la première prémo- laire p! dans la série des molaires supérieures. Les arrière-molaires ont quatre denticules distincts disposés en deux paires transverses, les externes avec une tendance crescen- toïde, les internes plus coniques ; m? possède en outre un petit tubercule intermédiaire au lobe antérieur ;: m° a un fort talon ou troisième lobe à deux pointes. Dans la série des quatre prémolaires, p£ est semblable à m!, mais plus petite; p° est plus étroite en avant à cause de l’atrophie du denticule antéro-interne ; p° et p' sont tranchantes, à une seule pointe, comprimée en travers, avec un petit talon plus développé dans p°?. Enfin, il faut signaler comme pour les dents de la mâchoire supérieure, l'existence d’un bourrelet basilaire bien accentué qui entoure toutes les dents de la mandibule, mais tend à s’effacer du côté interne. J'ai fait reproduire (pl. IV, fig. r) un dessin phototypique de la dentition supérieure de l’Ayracotherium d'après un troisième crâne, provenant aussi de l'argile de Londres et décrit par Owen !. Le moulage de cette pièce m'a été obligeamment envoyé par M. Smith Woodward du British Museum et montre, dans un état d'usure un peu plus avancé que dans les autres pièces décrites, la forme conique régulière des denticules de l’Hyracotherium. À côté de l'espèce type (/. leporinum), Owen a fait connaître dans le même horizon de l'argile de Londres à Kyson (Suffolk), une plus petite espèce qu'il a nommée Hyracotherium cuniculus ?. On ne connaît encore de cette forme que trois arrière-molaires et une prémolaire supérieures isolées. Les molaires ont quatre tuber- 1. Geol. Magazine, dec. 1, vol. IL, 1865, p. 339, pl. X. fig. 2. 2. Ann. Mag. nat. Hist., 1° série, t. VIII, p. 1, 1841. — In. Brit. fass, Mammals and Birds, 1846, p. 124, fig. 190-197. . 202 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars cules principaux coniques reliés au lobe antérieur par une crête légèrement renflée qui représente le tubercule intermédiaire : celui-ci n’est pas visible au lobe postérieur (au moins dans la figure d'Owen) et devait être sans doute extrêmement petit. Le bourrelet basilaire est épais et continu ; il n’existe pas de mésostyle. La prémolaire p#est triangulaire à cinq denticules comme dans la grande espèce. Je ne connais en Europe, en dehors de l'Angleterre, aucune forme animale que l’on puisse rapporter au genre Hyracotherium, tel du moins qu'il a été défini ci-dessus avec ses caractères buno- dontes essentiellement primitifs. Les espèces du calcaire grossier de Paris, d'Egerkingen, du Mauremont qui ont été attribués à ce genre doivent être, sûrement, rapportés à d'autres genres, ainsi que je l’indiquerai plus loin. On pourrait peut-être avoir quelque hésitation en ce qui concerne les types de l'Éocène inférieur de Ay, près Reims (niveau des sables à Térédines ou Sparnacien supérieur) que le D' Lemoine a fait connaître ! sous les noms de Propachynolophus Gaudryi et de Pachynolophus Maldani. Les pièces types du Propachynolophus Gaudryi (Lemoine, loc. cit. fig. 114-116) que j'ai étudiées au Muséum de Paris ?, consistent en une série de 7 molaires supérieures et en une partie de mandi- bule portant en place les 3 arrière-molaires et les deux dernières prémolaires. Les molaires supérieures diffèrent de celles de l'Hyracotherium par les denticules externes notablement compri- més, l’antérieur à tendance crescentiforme ; p# et p° sont triangu- laires à 5 denticules comme dans l’Ayracotherium. Dans son ensemble, la série dentaire supérieure est extrêmement voisine de celle du Pachynolophus et ne rappelle l'Hyracotherium que par le bourrelet basilaire plus épais et plus continu, et par la forme un peu plus carrée des arrière-molaires. Par contre les molaires infé- rieures ont leurs denticules internes et externes encore bien distincts à chaque lobe et n’ayarit qu'une bien faible tendance à se réunir en demi-croissants ; à ce dernier point de vue, le type des environs de Reims est plus voisin de l'Hyracotherium que du Pachynolophus. Dans l'ensemble, je trouve que les caractères de 1. Etude d’ensemble sur les dents des Mammif. foss. des environs de Reims. B. S. G. F., (3), XIX, 1891. p. 285, fig 109-119. 2. Les figures publiées par le D' Lemoine ne donnent pas une idée bien exacte des caractères de ces dents dont les denticules ont été trop schéma- tisés en cônes isolés etentourés de plis d’émail secondaires dont l’importance est visiblement exagérée. I9OI DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS : 203 Pachynolophus l'emportent sur ceux de Æyracotherium dans cette curieuse forme animale, qui constitue véritablement un pas- sage entre ces deux genres et pourrait justifier le nom de Propa- chynolophus imaginé par le D' Lemoine à titre de section des Pachynolophes. Le Pachynolophus Maldani Lemoine (loc. cit. fig. 117, 118) est représenté comme pièce type (coll. Mus. Paris) par un fragment de mandibule portant en place m>,m°?, m! brisée et p‘ avec un second lobe crescentoïde abaïssé ct un lobe antérieur à deux pointes. Les denticules externe et interne de chacun des lobes de ces molaires sont réunis par une crête transverse peu sensible, à peu près comme chez le P. Gaudryi. La partie antérieure de la mandibule que Lemoine a figurée en série continue avec cette pièce, ne s’y adapte pas, soit parce qu’il manque un fragment de l'os, soit parce qu’elle n’appartient pas au même sujet. Mais il existe dans la collection Lemoine une autre demi-mandibule complète montrant en série continue les 3 arrière-molaires, p très-usée, p° représentée par les racines et p? par deux alvéoles. Le P. Maldani avait done 6 molaires comme les vrais Pachynolophus, alors que le D' Lemoine attribue au P. Gaudryi 7 molaires inférieures sans preuve, je crois, bien évidente. On peut dire en résumé que ces formes de l’Éocène inférieur de Cuis sont intermédiaires entre l’Ayracotherium et le Pachyno- lophus, tout en restant plus voisines de ce dernier genre. L'Éocène inférieur de l'Amérique du Nord (horizons de Wasatch et de Wind River) contient un grand nombre d'espèces d'Hyraco- théridés, dont quelques-unes avaient constitué le genre Zohippus de Marsh ‘, mais qui ont été ensuite attribués par Cope * et par M. Wortman * au genre Jyracotherium : tels sont les A. tapirinum Cope, A. cristatum Wortm., Æ. craspedotum Cope, H. vasaccirnse Cope (— Eohippus validus Marsh sce. Wortman). Æ. index Cope (= Eohippus pernix Marsh sec. Wortman). Ces formes, dont M. Wortman a donné d'excellentes figures, présentent en effet un un grand nombre de caractères de l’Hyracotherium d'Angleterre, entr'autres un épais bourrelet basilaire continu aux molaires supérieures, et surtout la séparation des deux denticules interne et externe à chaque lobe des molaires inférieures. Je puis noter 1. Marsx. American Journal of science, 1856, t. XII, p. 4ot. 2. Cope. Eocene Vertebrates New Mexico, 1875. — Ip. Vertebr. tert. forma- tion of the West. — In. American Naturalist, 1881, p. 1ot8. 3. WorTMAN. Species of Hyracotherium.... Bull. amer. Mus. nat. History, t. I, art. VI, 1896. 204 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars pourtant, en utilisant les figures de M. Wortman et quelques spécimens originaux qu'a bien voulu m'adresser mon ami M. le professeur Osborn, que ces espèces américaines tendent par quel- ques points à se différencier du véritable Hyracotherium pour se rapprocher des Pachynolophus : les denticules des molaires supé- rieures (par exemple dans 7. index) sont beaucoup moins en cône régulier que dans l’Ayracotherium, les externes sont comprimés en travers, les intermédiaires s’allongent en crêtes transverses reliées aux tubercules internes correspondants ; le denticule supplémentaire de l’angle antéro-externe (parastyle) est aussi fort que dans les Pachynolophus. Aux molaires d’en bas, les denticules internes et externes, bien que conservant une certaine individua- lité, se réunissent cependant l’un à l’autre par une crête transverse indice du futur demi-croissant des Pachynolophus. En un mot les espèces américaines précitées me paraissent correspondre à un état d'évolution intermédiaire entre l’Hyracotherium et le Pachy-- nolophus et réaliser un stade qui n’est pas très éloigné de celui que je signalais un peu plus haut chez le Propachynolophus Gaudryi du D' Lemoine. C’est cet état d'évolution intermédiaire entre l’Hyracotherium et le Pachynolophus que Marsh avait désigné sous le nom d’ÆEohippus. Genre PAcHyNoLopHus Pomel C'est à propos de ce genre que me paraissent avoir été faites les confusions les plus fâcheuses, dont la responsabilité appartient surtout à Kowalevsky, ainsi qu'on le verra plus loin. Le nom de Pachynolophus a été créé par Pomel en 1847! pour un petit Pachyderme trouvé dans le calcaire grossier de Passy, dans les termes suivants : « Un autre Zophiodon de petite taille. « des mêmes couches de calcaire grossier de Passy, montre une « modification remarquable dans Fépaississement de la partie « médiane des collines transverses, qui l’a fait identifier au genre « Hyracotherium Owen. Ce Lophiodon ne paraît avoir que des « ressemblances éloignées avec ce dernier genre, que M. Owen « décrit et figure comme voisin sous ce rapport du Chæropotame, « ce qui n'est certes pas dans le fossile de Passy, comme j'ai pu « m'en assurer par les communications de M. Duval, qui en pos- « sède une série complète. Si le fossile d'Angleterre est congénère 1. Archives des Sciences physiques et naturelles de Genève, 1847, t. IV. p- 327. 1901 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS ; 205 « de celui-ci, ce ne peut au surplus être un animal de la famille « des Cochons, comme le dit M. de Blainville, car son astragale « qui se trouve dans les collections de l'École des Mines, est celui « d’un Imparidigité et d’un vrai Lophiodon. Celui de France devra « se nommer Z. Duvalii, et constituer, dans ce genre, avec le « cinquième Lophiodon d'Argenton, une section des Pachyno- lophus. » Cette citation montre jusqu’à l'évidence que l'espèce type du genre Pachynolophus est le P. Dupali. Les pièces types de cette espèce ont été figurées pour la première fois par Blainville ! sous le nom d'Ayracotherium de Passy : elles consistent en la série des six molaires supérieures isolées les unes des autres, des quatre dernières molaires inférieures également isolées, et en une double branche de mandibule incomplète en arrière, mais montrant des deux côtés la série des six molaires dans un état d'usure assez avancé. P. Gervais a reproduit en 1859 ? sous le nom exact de Pachynolophus Duvali un bon dessin des mêmes pièces où les six molaires d’en haut sont réunies en série continue, et précédées de deux petits alvéoles ayant dû loger une petite première prémolaire p! à deux racines. La branche droite de la mandibule figurée également par Gervais, d'après de Blaïin- ville, ne porte que six molaires précédées d’une longue barre qui les sépare d’une petite canine. J’ai recherché au Muséum de Paris les pièces en question que M. le professeur Gaudry a bien voulu me permettre d'étudier et de figurer à nouveau (pl. V, fig. 4-5). Une partie de ces précieuses pièces a dû être égarée, car j'ai pu retrouver seulement trois des molaires supérieures figurées par Blainville et Gervais; ces molaires sont la dernière m°, l’avant- dernière m°? et la dernière prémolaire p'. Pour la dentition infé- rieure, j'ai retrouvé les trois dernières molaires du côté droit et une autre du côté gauche très usées; ces dents paraissent être celles figurées par Blainville à l’état isolé. Mais si les pièces types du ?P. Duvali ont en partie disparu, je puis heureusement compléter les documents relatifs à la dentition supérieure des Pachynolophus grâce à la découverte faite par mon intelligent auxiliaire, M. Laurent Maurette, d'un magnifique crâne entier (pl. V, fig. 1) d’une espèce très voisine du P. Duvali dans les grès éocènes du Minervois (Hérault). Je me propose de décrire ce crâne en détail un peu plus tard, et pour le moment je me borne à le figurer par la face palatine avec la série des six molaires en À 1. Ostéographie, genre Lophiodon, pl. II, sous le nom d’Hyracotherium de Passy. 2. Zool. et paléont. françaises, > éd., 1859, p. 126, pl. 17, fig. 1-2. 206 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES {4 Mars place du côté gauche, précédées d'un long diastème qui les sépare de la care, et où l’on ne voit aucune trace de la première prémo- laire p . Cette absence de p' est le seul caractère important qui ue cette pièce du ?. Duvali de Paris et j'hésite beaucoup à red à cette différence une valeur spécifique, en raison de la variabilité avec laquelle p' persiste ou devient caduque chez beau- coup d'espèces de Pachydermes. Il devient facile, à l’aide de cet ensemble de documents, de préciser les caractères du genre Pachynolophus. Molaires supérieures au nombre de sept dans le type de Passy (d'après la figure de Gervais), impossible à contrôler aujourd'hui ; au nombre de six seulement dans le crâne du Minervois par suite de l’absence de p! Arrière-molaires supérieures, au nombre de trois, constituées par deux tubercules externes, moins franchement coniques que dans Hyracotherium, un peu comprimés en travers, mais comme dans ce dernier, dépourvus de colonnette médiane (mesostyle) au milieu de la muraille externe; deux tubercules intermédiaires en proportion bien moins gros que dans Æyracotherium, et ayant une tendance très nette à s'allonger surtout au lobe postérieur, en crête transverse perpendiculaire à la muraille; deux denticules internes moins coniques que dans Ayracotherium, assez fortement comprimés d'avant en arrière. Le bourrelet basilaire est beaucoup moins développé que dans Hyracotherium, mais en revanche, il s'épaissit et se relève à l'angle antéro-externe en une pointe sup- plémentaire (parasty le de M. Osborn), rappelant celle des Lophio- don, pointe qui est bien moins forte dans Hyracotherium Rd Prémolaires supérieures : la dernière p# et l'avant-dernière p* de forme triangulaire comme dans Hyracotherium, formées de cinq denticules, deux externes, deux intermédiaires extrêmement réduits (le postérieur à peine sensible), un denticule interne subco- nique qui correspond à celui du lobe antérieur. Le denticule postéro-interne a disparu, mais le bourrelet basilaire s’épaissit assez fortement à ce niveau, comme pour en remplir la place. p? est allongée avec une pointe principale et un talon arrondi postéro- interne. p! est à deux racines (dans le type de Passy) et fait défaut dans le crâne du Minervois. La dentition inférieure est encore mal connue : trois arrière- molaires constituées chacune par deux demi-croïssants comprimés d'avant en arrière, provenant de la fusion des deux tubercules interne et externe des Hyracotherium ; extrémités internes de ces demi-croissants formant des piliers épaissis qui marquent la place 1901 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 207 des denticules internes; le pilier médian souvent dédoublé à son sommet; m° avec un troisième lobe de forme elliptique. Trois prémolaires (dans la mandibule de Passy aujourd’hui disparue); p molariforme à deux demi-croissants, l’antérieur plus étroit; p° et surtout p° avec une pointe antérieure suivie d’un lobe postérieur plus abaissé ; pl fait défaut dans la mandibule type. Les caractères distinctifs des deux genres sont résumés dans le tableau suivant : Genre Hyracotherium (Type : H. leporinum Owen) MACHOIRE SUPÉRIEURE 3 M à six denticules de forme conique, les 2 externes presque régu- lièrement coniques, les intermédiai- res ayant à peine une légère tendance à s’allonger en crête transverse, les internes à peu près coniques. Bourrelet basilaire épais et continu, se relevant à peine à l’angle antéro- externe en un parastyle peu accentué. Pas de colonnette médiane (meso- style) sur la muraille. 4 P, les deux dernières p* et p°, triangulaires, à 5 denticules coniques, les intermédiaires assez forts et à peine comprimés. 2 _p° et p'! allongées ; p! parfois séparée de p°? par un diastème. MANDIBULE 3 M à 4 denticules distincts dispo- sés en deux rangées, les internes coniques, les externes subcrescenti- formes; m° avec un fort talon bitu- berculé. _4P:pfet p' à 4 denticules; p? et p‘ avec une pointe élevée et un lobe postérieur plus bas. Genre Pachynolophus (Type : P. Dupali Pomel MACHOIRE SUPÉRIEURE 3 M à six denticules, les externes comprimés en travers, les intermé- diaires aplatis en crêtes transverses, les internes subconiques, comprimés d’avant en arrière. Bourrelet basilaire très mince, presque effacé du côté interne, mais ‘en revanche relevé à l’angle antéro- externe en un fort parastyle, sail- lant en dehors. Pas de mesostyle. 4 P (ou 3 P suivant les spécimens), les deux dernières triangulaires à 5 denticules subconiques, les 2 inter- médiaires très petits, surtout Le pos- térieur. ‘p° allongée ; p' présente ou absente, mais toujours rapprochée de p4 MANDIBULE 3 M à deux demi-croissants com- primés en V; denticules médians internes, rapprochés, mais distincts au sommet; m° avec un talon de forme semi-circulaire. 3 P seuiement (mandibule type) : forme mal connue dans le détail. L'espèce type du genre, le Pachynolophus Duvali, est une toute petite espèce : dans la pièce type de Passy, la dernière molaire supérieure mesure 9 millim.; la dernière inférieure 12 millim. ; 208 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars les trois arrière-molaires inférieures réunies 28 millim. La figure reproduite par P. Gervais donne ‘43 mill. pour la série des six molaires supérieures ; cette même série mesure 42 mill. dans le crâne du Minervois,m° comptant dans cette longueur pour 9 mull. Mais à côté de cette petite forme, P. Gervais a fait connaître du calcaire grossier à Cérithes de Gentilly, une espèce un peu plus grande, qu’il a nommée Pachynolophus Prevosti'. Les pièces types de cette espèce, que j'ai pu étudier au Muséum de Paris et que je reproduis (pl. V, fig. 2), consistent en une arrière-molaire supé- rieure (vraisemblablement m°) mesurant 9 mill. 5 de longueur ; et une moitié de mandibule portant en place la série complète des six molaires mesurant 55 mill., m° étant pour 14 mill. 5 dans cette longueur. Le Muséum de Paris possède en outre de la même localité de Gentilly une série des cinq dernières molaires supé- rieures droites (pl. V, fig. 3), qui appartiennent, je crois, égale- ment au P. Prevosti. Le caractère distinctif le plus constant du P. Prevosti me paraît être la présence d’une ébauche de colonnette médiane entre les deux lobes de la muraille externe ; mais cette colonnette est encore tout-à-fait rudimentaire et ne rappelle que de fort loin le mesostyle si développé des genres Propalæotherium et Lophiotherium. Quant aux prémolaires p#et p°, elles sont triangulaires à cinq denticules comme chez le P. Duvali. En dehors du bassin de Paris, les vrais Pachynolophus sont assez rares. Rütimeyer a rapporté au P. Duvali quelques molaires supérieures du Sidérolithique d'Egerkingen ? qui peuvent bien en effet appartenir à ce type, mais je pense qu'il faut rapporter au genre Propalæotherium les pièces du même gisement ÿ qu'il a attribuées au ?P. Prevosti : la muraille de toutes ces molaires supé- rieures est en effet pourvue d'un fort mesostyle qui n’est jamais aussi développé chez les Pachynolophus. J'ai vu au Muséum de Paris, du calcaire éocène d'Argenton (Indre), une seule molaire supérieure et quelques molaires d'en bas pouvant être attribuées au P. Dupali. D'autres molaires plus fortes et munies d’une petite colonnette médiane sur la muraille ont été rapportées au P. Prevosti. Mais il me paraît certain qu’une partie au moins de ces dents, à côte médiane bien développée, doit être rapportée au Propalæotherium parvulum Laur. (5° Lophiodon d'Argenton, Blainville, pl. ID). Enfin Gervais a décrit, des grès éocènes du Minervois (grès de 1. Zool. et paléont. fr., 1859, p. 126, pl. 35, fig. 15-16. 2. Eoc. Saüg. ». eadtineen, 1892, pl. IL, Due 12-I4. 3. In., pl. I, fig. 6, 7, 8, 9, 10. 1901 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 200 Cesseras) sous le nom de Pachynolophus cesserasicus ! une espèce plus forte que le P. Prevosti et particulièrement caractérisée par la forme étroite et très allongée de sa dernière arrière-molaire inférieure. Quant aux formes de l’Eocène inférieur des environs de Reims (faune agéienne du D: Lemoine), tels que le P. Gaudryi et le P. Maldani, j'ai déjà eu l’occasion de dire plus haut (voir genre Hyracotherium) que ces formes constituaient à quelques égards une ‘transition entre les Ayracotherium et les Pachynolophus, tout en restant plus rapprochées de ces derniers. Je ne vois dans les formes américaines aucune espèce qui puisse rentrer d’une manière exacte dans la définition du genre Pachyno- lophus ; mais ainsi que je l’ai dit plus haut, les animaux de l’étage de Wasatch désignés comme Ayracotherium par les paléontolo- gistes américains sont en réalité très peu éloignés des Pachynolo- phus et constituent une sorte d’intermédiaire entre les deux genres. Les longs détails qui précèdent ne m'ont pas semblé inutiles pour préciser les caractères génériques des Pachynolophus, parce que ces caractères ont été méconnus par la plupart des paléontolo- gistes, depuis la publication de l'important mémoire de Kowa- levsky sur le développement des Ongulés ?. Ce savant paléontolo- giste prend pour type du genre Pachy-nolophus (fig. 8) une série de molaires m° m!p#qui proviennent (d'après le texte et l’explica- tion des planches) du calcaire grossier de Gentilly, près Paris. J'ignore absolument où l’auteur a pu observer cette pièce qui n'existe pas, à ma connaissance, dans les collections du Muséum de Paris. Maïs ce qui est bien certain, c'est qu’elle diffère complè- tement par tous ses caractères de ceux du type du genre Pachyno- lophus (P. Duvali) : 1° les arrière-molaires portent au milieu de la muraille externe un mesostyle bien développé qui manque aux Hyracotherium aussi bien qu'aux Pachynolophus ; 2° la dernière prémolaire p# est une dent subrectangulaire à six denticules (les deux internes existent), tandis que dans les deux genres précités, p* et p° sont triangulaires avec un seul denticule interne. Le prétendu Pach) nolophus de Kowalevsky n’est donc ni un Hyraco- therium, ni un Pachynolophus, ni même un Propalæotherium (dans ce genre, p‘ est aussi triangulaire à cinq denticules), et si 1. Zool. et paléont. fr., p. 125, pl. 18, fig. 8-8». 2. Monogr. d. Gattung Anthracotherium und Versuch ein naturl. Classif. d. foss. Hufthiere (Palæontographica, t. XXII, 1876, p. 207, pl. VI). 8 Septembre 1901. — T, rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 14 210 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars l’on peut s’en rapporter au dessin de l’auteur, il rentrerait plutôt dans les caractères du genre ZLophiotherium, tel qu'il sera défini plus loin. Je ne puis m'expliquer l'erreur de Kowalevsky que par quelque substitution d'étiquette dans les collections de l’auteur. Quoi qu'il en soit, la définition erronée du Pachynolophus de Kowalevsky est devenue classique, grâce aux travaux des paléon- tologistes qui ont suivi cette manière de voir, en particulier de Mne Marie Pavlow, dans son beau travail sur le développement des Equidés !, de M. Lydekker ? et surtout de M. le professeur Zittel dans son magistral Traité de paléontologie *. Partant de la définition du Pachynolophus de Kowalevsky #, c’est-à-dire d’un animal à molaires supérieures pourvues d’un mesostyle et à der- nière prémolaire à six denticules, M. Zittel est entraîné par un raisonnement d’ailleurs logique, à exclure des Pachynolophus le type même du genre, le P. Duvali, à cause de ses molaires sans mesostyle et de sa p{triangulaire à cinq denticules, et à le faire rentrer dans le genre Hyracotherium, dont il est en effet assez voisin. En réalité M. Zittel a groupé dans son genre Pachynolophus à la fois des Pachynolophus vrais (P. Gaudryi, P. Prevost), des Propalæotherium (P. parvulus), mais sa définition s'applique sur- tout à des Lophiotherium (Pachynolophus siderolithicus Pictet). J'ose espérer que les explications qui précèdent pourront apporter quelque lumière dans ces confusions presque inextricables. Genre PROPALÆOTHERIUM Gervais. Le genre Propalæotherium a été établi en 1849 par Gervais qui a su reconnaître avec sa sagacité habituelle, et malgré la pénurie des matériaux dont il disposait, les véritables affinités de cet animal. L'espèce type est le Propalæotherium isselanum (Palæo- therium isselanum Cuv. Blainv.), et les caractères du genre furent appuyés à l’origine à peu près exclusivement sur l'étude des molaires inférieures. Voici la diagnose donnée par Gervais en 1859 : 1. Bull. Soc. impér. d. naturalistes de Moscou, 1888, n° 1, pl. L, fig. 2. 2. Catal. foss. Mammalia Brit. Mus., 1886, part. IL, p. 15. 3. Traité de paléontologie, t. IV, p. 242, fig. 178-179. 4. M. Zittel reproduit (fig. 178) la figure déjà donnée par Kowalevsky, mais en lui donnant, sans doute par suite d’une erreur d’impression, le nom spécifique de Pachynolophus Desmaresti Gervais, qui n’a jamais existé 5. C. R. Ac. Sc., Paris, 1849, t. XXIX, p. 383 et 57. 6. Zool. et paléont. franç., 2° éd., 1859, p. 115. 1901 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 211 « Nombre total des molaires inconnu. Les supérieures assez sem- « blables à celles des Lophiodons, les inférieures ayant une dispo- « sition de leurs croissants intermédiaire à celle des Pachynolophes « et des Paléothériums, c’est-à-dire que les deux lobes ou collines « dont la forme est en croissant y sont placés bout à bout ; la « dernière de ces dents est pourvue d’un troisième lobe portant « sur la couronne une facette oblongue. » C’est à Rütimeyer ! et à M. Filhol * que nous devons des connaissances plus complètes sur les caractères du genre. J'ai pu réunir moi-même du gisement de Lissieu des séries dentaires complètes d’une petite espèce (LP. par- oulum Laur.) dont je donne des figures photographiques (pl. IV, fig. 2-3). Le nombre des molaires est de 7, c’est-à-dire qu’il y a, à la mandibule, une prémolaire de plus que dans le Pachynolophus ; ce fait est parfaitement établi par la demi-mandibule d’Issel figurée par M. Filhol (loc. cit., pl. XII, fig. 10 et 14) où l'on voit en place les trois arrière-molaires, les trois dernières prémolaires et les deux alvéoles de p' à deux racines. Les arrière-molaires d’en haut sont à six denticules et ont de grandes ressemblances avec celles des Pachynolophus. Elles s’en distinguent néanmoins très aisément au premier coup d'œil par l'existence d’une colonnette médiane (mesostyle) sur la muraille externe, caractère qui fait entièrement défaut chez l’Hyracothe- rium et le Pachynolophus. On peut noter en outre certaines nuances dans le degré de compression des denticules, plus prononcé en général dans le Propalæotherium : les denticules externes sont plus serrés en travers, les intermédiaires mieux alignés en crêtes transverses, les internes avec une tendance crescentiforme très accentuée. Les prémolaires supérieures sont au même degré d'évolution que chez Hyracotherium et Pachynolophus : les trois dernières sont triangulaires à cinq denticules, les deux intermédiaires relati- vement petits et allant en diminuant de p# vers p?. Le mesostyle existe encore dans p#, est tout-à-fait rudimentaire dans p* et a com- plètement disparu dans p°. p'est de forme allongée avec une pointe principale et un talon postéro-interne. La dentition inférieure ressemble aussi beaucoup à celle des Pachynolophus : les arrière-molaires sont formées de deux demi- croissants comprimés en V, dont le postérieur vient se terminer 1. Eoc. Saüg. v. Egerkingen, 1891 (Mém. Soc. paléont. suisse, t. XVII. 2. Vertébrés foss. d’Issel, 1886 (Mém. Soc. géol. France, (3), V). 212 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars en contre-bas de la muraille du croissant antérieur. Le point de jonction des deux croissants forme un pilier moins épais que dans Pachynolophus, mais également dédoublé au sommet. Les denti- cules internes sont en somme, moins individualisés que dans Pachynolophus, de sorte que les molaires se rapprochent davan- tage de l’aspect des molaires des Palæotherium. Des quatre prémolaires, la dernière p'est molariforme, avec un lobe antérieur un peu plus diminué. Dans p* le lobe postérieur s'abaisse tandis que le demi-croissant antérieur s'élève en une pointe saillante et tend à se dérouler en ligne droite. Dans p° et surtout dans p'il ne reste plus qu'une pointe principale suivie d'un petit talon très abaïissé. Je connais à l'heure actuelle quatre espèces de Propalæotherium : le type du genre, P. isselanum ! a été découvert à Issel, mais se retrouve à Argenton, à Egerkingen et à Lissieu. Dans cette espèce m$ d'en haut mesure 18 mill. ; m° inférieure à trois lobes mesure 2 mill. Le P. argentonicum ? Gervais est une forme un peu plus grande, mais bien voisine de la précédente (m3 supér. 22 mill. ; mÿ infé- rieure, 30 mill.). On l’a trouvée à Argenton, à Lissieu, à Egerkin- gen et à Buchweiler (Alsace). Une troisième espèce, beaucoup plus petite que les précédentes a été d'abord signalée par Cuvier à Argenton sous le nom de cinquième Lophiodon d'Argenton, puis désignée par Laurillard sous le nom de Zophiodon parvulum. C'est la même espèce qui a été retrouvée très abondamment à Egerkingen par Rütimeyer qui lui a donné le nom de Propalæotherium minutum. faut la désigner sous le nom de Propalæotherium parvulum : sa m° supérieure mesure 10 mill. 5: m° d'en bas 14 millim. L'espèce se trouve à Argenton, à Issel, à Lissieu et à Egerkingen. _ Enfin je me propose de décrire à Lissieu une forme encore beau- coup plus petite (m* inférieure 12 mill.) sous le nom de Propalæo- therium pr gmæunm. Je ne vois dans les types américains aucune forme rentrant exactement dans le genre Propalæotherium (molaires avec un mesostyle ; pi et p° triangulaires à 5 denticules). Mais le type des couches de Wind River décrit par Cope sous le nom de Ayr. venticolum, espèce dont M. Wortmann a fait le genre Protoro- 1. Palæotherium isselanum Blainv. Ostéogr., pl. VII. — Prop. isselanum Gervais. Zool. et pal. fr., 1859, pl. 29, fig. 5. 2. Palæotherium medium (d’'Argenton) Blainv. Ostéogr., pl. VII. toot DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 213 hippus est très rapproché du Propalæotherium par ses molaires supérieures avec un rudiment de mesostyle et sa p# triangulaire à. cinq denticules ; il se distingue du Propalæotherium par sa p° de forme quadrangulaire à quatre denticules , l'intermédiaire du deuxième lobe ayant totalement disparu. D'après la figure de M. Wortmann, (Loc. cit., fig. 15), il n'y aurait que six molaires à la mâchoire supérieure. Genre LopxioraeriuM Gervais Le Lophiotherium est le genre jusqu'ici le moins bien connu de la famille : aussi n'est-il pas étonnant que les paléontologistes d'Europe et d'Amérique aient pris ce nom dans les acceptions les plus diverses. Le genre a été créé par Gervais ! d’après trois fragments de mandibule provenant de l'Eocène supérieur des environs d'Alais (Gard) ; la plus complète de ces pièces, figurée par l’auteur (figure 10) porte en place les cinq dernières molaires {mi — p°) et les alvéoles doubles des deux premières prémolaires (p? — pi), ce qui fait en tout sept molaires pour la mâchoire infé- rieure. Un autre de ces fragments (fig. 11) montre en place les quatre prémolaires, et complète ainsi les données fournies par la figure 10. La diagnose de la dentition inférieure est indiquée par Gervais de la manière suivante : « Sept molaires inférieures ; les « quatre avant-molaires biradiculées, croissantes de la première à « la quatrième qui est déjà très sensiblement tapiroïde ; les trois «arrière-molaires à deux collines subobliques reliées entr'elles par «une crête en diagonale allant du milieu d’une colline au bord «externe de celle qui suit; la dernière pourvue d'un fort talon « simulant presque un troisième lobe ». Dans le texte qui suit cette diagnose, Gervais qui avait d'abord par erreur rapproché cet animal des Dichobune sous le nom de D. cervinum, indique fort bien ici les affinités du Lophiothcrium avec le groupe des Pachynolophes, dont il diffère par la présence de sept molaires au lieu de six (une prémolaire de plus) et par les denticules internes et externes moins distincts, mieux fondus en crêtes transverses. Ces observations sont très exactes et très-judicieuses ; mais elles ne pouvaient conduire à une appréciation définitive des aflinités du Lophiotherium, en l'absence de la dentition supérieure qui nous a fourni pour les autres genres de la famille des Hyracothéridés 1. Zool. et pal. fr., 1859, p. 114, pl. 11, fig. 10-12. 214 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars le critérium le plus sûr et le plus précis. Les molaires supérieures du Lophiotherium étaient inconnues de Gervais et elles l’étaient restées encore jusqu'ici, comme en témoigne la diagnose du genre dans le Traité de M. le professeur Zittel. J'ai eu la bonne fortune en reprenant les fouilles dans les localités du bassin d’Alais d’où provenaient les pièces types (Saint-Hippolyte de Caton) de retrou- ver le Lophiotherium en grande abondance : j'ai pu réunir dans les collections de l’Université de Lyon plus de cinquante demi- mandibules et trente-cinq demi-mâchoires supérieures plus ou moins complètes, qui me permettront de donner une description définitive des caractères de ce curieux genre (pl. IV, fig. 4-6). Mächoire supérieure. — On compte trois arrière-molaires et quatre prémolaires. Les arrière-molaires ont six denticules : deux externes subconiques légèrement comprimés en travers à peu près comme dans les Pachy-nolophus ; deux intermédiaires relativement assez gros et bien distincts, allongés en crêtes perpendiculaires à la muraille, surtout au lobe postérieur; deux internes subconiques, un peu comprimés d'avant en arrière à tendance beaucoup moins crescentoide que dans le Propalæotherium, et à peu près de la forme de ceux de Pachynolophus. Le bourrelet basilaire est assez bien développé quoique mince et il se relève en un fort mesostyle entre les deux denticules externes, et en outre à l'angle antéro- externe en un parastyle bien moins épais et moins saillant que dans Pachynolophus et Propalæotherium. Dans leur forme géné- rale, les arrière-molaires du Lophiotherium sont moins carrées, plus allongées en travers que dans Propalæotherium et surtout que dans Pachynolophus. m° est moins différente de m° et de mf que dans ces deux derniers genres, où le lobe postérieur de cette dent est moins développé que le lobe antérieur, d’où résulte pour m*une tendance à la forme sub-triangulaire : dans Lophiotherium, le lobe postérieur de m° est presque aussi fort que le lobe anté- rieur. Les prémolaires du Lophiotherium sont surtout intéressantes et présentent une structure très différente de celles des genres précé- demment étudiés. La dernière prémolaire p# est une dent molariforme à six denti- cules qui ne diffère de m! que par des dimensions un peu plus petites et par le mesostyle un peu plus atténué ; elle diffère donc complètement de p# triangulaire à cinq tubercules qui existait dans tous les autres genres de la famille depuis l’Hyracotherium jusqu’au Propalæotherium inclus. L’avant-dernière prémolaire p* offre une particularité des plus 1go1 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 219 curieuses : en général (dix exemplaires sur treize) c’est aussi une dent molariforme à six denticules de la même forme que pet seulement un peu plus petite. Mais sur quelques sujets du même gisement (qu'il est impossible de ne pas rapporter à la même espèce en raison de l'identité de tous les autres caractères), les deux denticules internes se rapprochent et se soudent l’un à l’autre de sorte que la couronne prend un aspect sub-triangulaire qui rappelle les prémolaires des Pachynolophus et des Propalæo- therium ; cependant la trace des deux denticules reste toujours plus ou moins complètement visible soit sous la forme de deux petits cercles d'usure accolés, soit sous celle d’un sillon vertical sur la muraille interne. Il y a chez ces individus comme une tendance atavique rappelant les prémolaires triangulaires des genres ances- traux du Zophiotherium. La deuxième prémolaire p° est triangulaire mais compte néan- moins six denticules : les deux externes très rapprochés, sans mesostyle : les deux intermédiaires tout petits, les deux internes presque entièrement soudés entr'eux en demi-croissant, mais pourtant encore distincts au sommet. La première prémolaire p! est plus allongée et plus triangulaire que p° avec ses deux denticules intermédiaires presque entière- ment atrophiés. Le bourrelet basilaire est en général très mince chez le ZLophio- therium : il est plus continu dans les arrière-molaires que dans les prémolaires où il disparaît presque du côté interne. En avant de la série continue des sept molaires, on voit chez le Lophiotherium une longue barre (23 millim.) qui les sépare d'une canine assez longue, pointue, aplatie en travers, avec deux bords tranchants en avant et en arrière. Les incisives me sont encore inconnues. Mandibule. — Il existe comme en haut trois arrière-molaires et quatre prémolaires. _ Les arrière-molaires ressemblent presque complètement à celles des Propalæotherium : elles sont formées chacune de deux demi- croissants comprimés en forme de V, le point de jonction des deux demi-croissants du côté interne de la couronne s’épaissit en un pilier vertical qui provient visiblement de l’accolement de deux denticules, dont les pointes restent encore bien distinctes sous forme d’un dédoublement du pilier interne à son sommet. La dernière m* porte un troisième lobe en demi-cercle, bien déve- loppé. Un bourrelet basilaire mince entoure ces dents sauf du côté interne où il est complètement effacé. 216 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars Des quatre prémolaires, les deux dernières p{ et p° sont tout-à- fait molariformes et ne diffèrent des arrière-molaires que par la forme un peu plus étroite du lobe antérieur, ce qui donne à l’ensemble de la couronne une tendance subtriangulaire. Dans p?, cette forme triangulaire est encore plus marquée, par suite de la tendance du demi-croissant antérieur à se prolonger en avant. La première prémolaire pl estune petite dent à deux racines composée d'une pointe triangulaire extérieure, suivie d'un talon bas qui représente le deuxième lobe. Le bourrelet basilaire est plus mince que celui des arrière-molaires, et il est également effacé du côté interne. En avant de la rangée continue des sept molaires, existe une barre-de vingt millim., précédée d’une canine pointue haute de douze millim., de forme moins comprimée en travers qu'à la mâchoire supérieure. Les incisives inférieures me sont encore inconnues. En résumé la dentition du Lophiotherium diffère essentiellement de celle des genres qui l’ont précédé dans l'Eocène inférieur et moyen par ses dernières prémolaires d'en haut et d’en bas tout-à- fait semblables comme structure aux arrière-molaires. Cette denti- tion homæodonte forme un contraste remarquable avec la dentition hétérodonte des Hyracotherium, des Pachynolophus, des Propa- læotherium et constitue un pas décisif dans le sens de l’évolution du groupe vers la dentition des Equidés. La comparaison entre les genres Pachynolophus, Propalæothe- rium et Lophiotherium est résumée dans le tableau suivant : Pachynolophus (Lype : P. Duvali Pom) à Dentition N LE L F É M supérieures à 6 den- ticules ; les 2 externes subconiques ; les 2 in- termédiaires petits et un peu allongés ; les internes subconiques, un peu comprimés d'avant en arrière. Propalæotherium (Type: P.isselanum BL.) M supérieures à 6den- ticules ; les 2 externes comprimés et allongés, les 2 intermédiaires allongés en crêtes trans- verses, les 2 internes à tendance crescentifor- me très nette. Lophiotherium (T. : L. ceroulum Gerv.) 3 — P 3 ss M supérieures allon- gées en travers à 6 den- ticules, les 2 externes subconiques, les 2 inter- médiaires assez gros et un peu allongés, les 2 internes subconiques, un peu comprimés d'avant en arrière. 1901 Pas de mesostyle. Parastyle fort et sail- lant en dehors. p* et p° triangulaires à5 denticules; p° allon- gée, p' présente ou ab- sente suivant les spé- cimens. M inférieures à deux demi-croissants ; denti- cules médians internes épaissis et distincts. p‘ molariforme ; les P antérieures peu con- nues. DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS Mesostyle bien déve- loppé. Parastyle assezfortet moins saillant dehors. p', p° et p° triangu- laires à 5 denticules. p! allongée. M inférieures à deux demi-croissants ; denti- cules médians internes moins épaissis et moins distincts. p‘ molariforme, le lo- be antérieur plus étroit. p*triangulaireen avant, avec lobe postérieur abaissé. p? et p' à une seule pointe antérieure, suivie d’un talon bas. 217 Mesostyle bien déve- loppé. Parastyle très petit et peu saillant. p“ et p’ molariformes à 6 denticules, les 2 in- ternes parfois soudés dans p*; p? triangu- laire, mais avec 2 den- ticules internes encore distincts. p! allongée. M inférieures à deux demi-croissants ; denti- cules médians internes épais et bien distincts. p‘etp° molariformes, le lobe antérieur plus étroit. p° triangulaire en avant avec lobe pos- térieur très abaissé. p' très petite avec une seule pointe antérieure et un talon bas. Le type du genre Lophiotherium est le L. cereulum Gervais !, petite espèce de l’Eocène supérieur du bassin d’Alais, dont j'ai pu retrouver le gisement, qui m'a fourni, ainsi que je l'ai dit plus haut, toutes les parties encore inconnues de la dentition supérieure. L'espèce se retrouve, je crois, dans les phosphorites du Quercy. Il faut certainement rapporter au genre Lophiotherium l'espèce du Sidérolithique du Mauremont (Vaud), que Pictet a décrite sous le nom de Hyracotherium siderolithicum * et que M. Zittel a ensuite rapporté à tort au genre Pachynolophus. On retrouve dans l'espèce de Pictet tous les caractères du ZLophiotherium : molaires allongées en travers à six tubereules peu comprimés, avec un fort mesostyle et un parastyle peu développé ; prémolaires p* et p® molariformes à six denticules (type homæodonte). L'ani- mal de Mauremont, dont je possède quelques dents isolées, est tellement voisin du ZL. ceroulum du Midi de la France qu’il me 1 Zool. et paléont. franç., 2° éd., 1859, p. 114, pl. XI, fig. 10-12. 2. Mémoire sur les animaux vertébrés trouvés dans le terrain sidéroli- thique du canton de Vaud. Matériaux pour la paléont. suisse, 1° sèr., 1855-59, p- 53, pl. IV, fig. r 4. 218 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars paraît même difficile de l’en séparer spécifiquement; peut-être la forme des molaires dans l’espèce suisse est-elle encore plus trans- verse que dans le type du bassin d’Alais, et les bourrelets basi- laires encore plus effacés. En revanche, je crois qu'il faut écarter du genre Lophiotherium toutes les molaires inférieures du andiran d'Egerkingen (Eocène moyen) que Rütimeyer ! a attribuées à ce genre sous les noms de Lophiotherium cervulum et de L. elegans. Ces dents me paraissent appartenir au Propalæotherium minutum à divers stades de leur sortie des alvéoles. J’ajouterai que la même conclu- sion me semble s'imposer pour toutes les molaires d'en haut et d'en bas que le même paléontologiste a rapportées à l'Hyracothe- rium siderolithicum de Pictet dans le gisement d’Egerkingen ? : la figure 18 de la planche II en particulier montre une prémolaire supérieure à cinq denticules tout à fait étrangère au genre Lophio- therium et qui me paraît identique à p* du Propalæotherium minutum. D'après ces observations, il n'existerait trace du genre Lophio- therium ni à Egerkingen, ni dans aucun autre gisement de l’Eocène moyen et ce genre serait exclusivement propre aux dépôts de l'Eocène supérieur (Alais, Mauremont, Phosphorites du Quercy). En Amérique, le type de l’étage de Bridger (Orohippus cuspi- datus Cope) ? et surtout les espèces de l'étage d'Uinta dont Marsh a fait le genre Epihippus * (Epihippus uintensis, gracilis et agilis Marsh) avec leurs dernières prémolaires p‘ et p° molariformes (quadrangulaires à six denticules) représentent un stade d’évolu- tion au moins extrêmement rapproché du Lophiotherium, si même ils ne doivent pas lui être réunis. Il est intéressant de remarquer que l'étage d'Uinta correspond comme niveau à l'Eocène supérieur d'Europe, c’est-à-dire à l'horizon exact du Lophiotherium. Résumé et conclusions Le type le plus primitif de la famille est sans conteste l'Hyra- cotherium de l'argile de Londres (Eocène inférieur) avec ses arrière-molaires supérieures à six denticules coniques (type buno- 1. Eocene Saugeth. v. Egerkingen, 1892, pl. II, fig. 13-16. 2, In., pl. I, fig. 17, 18, 19 et pl. D, fig. 17. 3. Cope. Wheeler Survey Report, p. 267. pl. LXV, fig. 18. — WoRTMAN, loc. cit., p. 108, fig. 18 4. Marsx. Amer. Journ.. 1891-75. — Scott. Mamm. Uinter formation, 1880. 1001 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 219 donte), entourées d'un épais bourrelet basilaire, sans mesostyle, et avec parastyle peu développé. La dentition supérieure est essen- tiellement hétérodonte, les dernières prémolaires étant triangu- laires à cinq denticules. La dentition inférieure est également d'un type primitif, chaque molaire étant formée de deux paires trans- verses de denticules distincts non reliés en deux demi-croissants comme cela aura lieu dans les formes plus évoluées. De ces quatre denticules, les deux internes sont restés coniques (bunodontes) tandis que les deux externes ont une tendance crescentiforme (sélénodonte) déjà très apparente. Les prémolaires inférieures se distinguent des arrière-molaires par la réduction et l’abaissement de leur lobe postérieur, de plus en plus accentués d'arrière en avant. Ce genre que l’on doit considérer comme la forme la plus archaïque du groupe est tout à fait spécial à l'Éocène inférieur du bassin de Londres. Le passage de l’Hyracotherium au Pachynolophus de l'Rocène moyen se fait par l'intermédiaire des intéressantes espèces de l'Eocène inférieur d'Ay, près Reims, décrites par le D' Lemoine sous les noms de Propachynolophus Gaudryi et de Pachynolo- phus Maldani. Dans la première de ces deux formes tout spécia- lement, on retrouve encore plusieurs caractères importants de l'Hyracotherium, tels que la forme presque carrée, à peine trans- verse des arrière-molaires supérieures entourées aussi d'un large bourrelet basilaire ; et la séparation des deux denticules de chaque lobe aux molaires d’en bas. Mais déjà les denticules des molaires supérieures ne sont plus aussi nettement bunodontes : les externes s'aplatissent un peu en travers; les intermédiaires et les internes s’allongent et tendent à se souder en deux crêtes perpendiculaires à la muraille. Les denticules des molaires d’en bas, quoique dis- tincts, montrent aussi une tendance à se souder en crêtes trans- verses et la forme sélénodonte des denticules externes y est plus accentuée que dans l’Hyracotherium. Il me paraît que les nombreuses espèces de l’étage de Wasatch en Amérique, que Marsh désignait sous le nom de £ohippus et que les paléontologistes américains rapportent aujourd’hui d'ordi- naire au genre Hyracotherium, sont en réalité dans un stade d'évolution tout à fait comparable aux espèces de Reims, c'est-a- dire intermédiaire entre l'Hyracotherium et les vrais Pachynolo- phus, mais bien plus voisin de ce dernier. Ces formes de l’'Eocène inférieur d'Europe et d'Amérique nous amènent aisément au Pachynolophus Pomel, genre qui a été mal interprété depuis l'important travail de Kowalevsky. Le type est. 290 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars le P. Duvali Pomel du Lutétien supérieur de Passy : c’est, comme l'Hyracotherium, un type hétérodonte avec arrière-molaires d’en haut quadrangulaires à six denticules et dernières prémolaires (pet p?) triangulaires à cinq denticules ; il ressemble aussi à l’'Hyracotherium par l'absence de mesostyle sur la muraille externe. Mais il s’écarte de ce dernier genre par d'autres caractè- res : aux molaires d'en haut, les denticules ne sont plus aussi buno- dontes, les externes sont aplatis en travers, les intermédiaires et les internes comprimés et allongés en deux crêtes transverses ; le parastyle a augmenté d'importance, mais en revanche le bour- relet basilaire s’atténue et s’efface même du côté interne. A la mandibule, il y a soudure complète entre le denticule interne et externe de chaque lobe et formation de deux demi-croissants (type sélénodonte) pour chaque molaire. Entre le Pachynolophus type et son contemporain le Propalæo- therium, il existe quelques intermédiaires. Chez le Pachynolophus Prevosti Gervais du Lutétien supérieur de Gentilly, espèce un peu plus grande que le P. Duvali, on peut constater déjà une ébauche de colonnette médiane (mesostyle) entre les deux lobes de la muraille des molaires supérieures. Cette même colonnette est un peu plus accentuée encore dans une espèce américaine de l'étage de Wind River (Lutétien) que M. Wortman a désignée sous le nom de Protorohippus venticolus sp. Cope; on peut noter en outre chez ce dernier la tendance crescentiforme des denticules internes aux molaires supérieures, caractère que nous retrouverons chez le Propalæotherium. Je serais même tenté de réunir la forme amé- ricaine à ce dernier genre, n'était la structure toute spéciale de l’avant-dernière prémolaire p° quadrangulaire allongée à quatre denticules, par suite du déplacement en dedans et de l'importance plus grande du denticule intermédiaire antérieur. Le Propalæotheriun Gervais (type P.1sselanum Blainv.) de ‘étage Lutétien, est assez voisin du Pachynolophus pour que d’éminents paléontologistes aient proposé de réunir les deux genres. Il se distingue dans l’ensemble par un degré plus avancé de spécialisation vers le groupe paléothérien : le fût des molaires supérieures est un peu plus élevé, la muraille plus plate et plus inclinée en dedans ; le mesostyle est devenu très fort et annonce la côte médiane des Paloplotherium et des Palæotherium. En même temps les denticules se modifient : les externes se compri- ment et s’allongent en demi-croissants qui évoluent vers le type sélénodonte du groupe paléothérien; les internes qui étaient seulement allongés dans le Pachynolophus, tendent visiblement LE] TOO DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 291 vers une structure crescentiforme. De même à la mandibule les deux demi-croissants de chaque molaire sont mieux dessinés, mieux soudés bout à bout l’un à l’autre, au point qu’il est parfois véritablement difficile de distinguer ces molaires de celles d’un Paloplotherium. Néanmoins les prémolaires supérieures sont toujours hétérodontes (triangulaires à cinq denticules) et ne se distinguent de celles du Pachynolophus que par un épaississement plus fort du bourrelet basilaire sur le bord postéro-interne, d’où résulte pour la couronne une forme générale plus arrondie en dedans, plus semblable à celle des Paloplotherium : 11 me paraît certain que le Propalæotherium représente, comme l’a si bien pres- senti Gervais, le type ancestral du rameau paléotherien, destiné à s'éteindre au début de l’Oligocène sans laisser de descendant. Revenant en arrière vers le Pachynolophus, type aux denticules assez primitifs et encore peu éloignés du type bunodonte, nous devons rattacher directement à ce genre une série de formes de l'Eocène supérieur d'Europe et d'Amérique qui vont se distinguer nettement de tous les types antérieurs par la modification de leurs prémolaires qui deviennent progressivement molariformes en marchant de la dernière vers les plus antérieures (types Aomæ- dontes) ; ces formes ont reçu en Amérique les noms d’Orohippus et de Epihippus Marsh ; en Europe de Lophiotherium. Ce dernier, le seul dont je m'occuperai ici, diffère du Pachy-no- lophus, en outre de ses prémolaires p# et p* molariformes à six denticules par ses arrière-molaires de forme plus transverse. ce qui tient en partie à la petitesse du parastyle, et par la présence d'un fort mesostyle. Mais malgré l'évolution hkomæodonte de la série dentaire supérieure et inférieure (qui indique une affinité très réelle avec le groupe des Equidés) il importe d'observer que cette transformation n’est pas accompagnée d’une évolution conco- mitante dans la forme des denticules ; ceux-ci sont encore remar- quablement primitifs, les externes à peine comprimés en travers, les intermédiaires assez gros et peu allongés, les internes nulle- ment crescentiformes. Le dégré d'évolution des denticules dans le sens sélénodonte n’est pas plus avancé que dans le Pachynolophus et l'est beaucoup moins assurément que dans Propalæotherium. C’est cet état primitif des denticules qui avait sans doute conduit Pictet à faire du ZLophiotherium siderolithicum une espèce du genre Hyracotherium dont il diffère radicalement par la structure des prémolaires. | De ces faits on peut conclure que le Lophiotherium représente le type terminal d’un rameau éteint, et ne saurait être considéré, L] 222 CH. DEPÉRET. — RÉVISION DES FORMES EUROPÉENNES 4 Mars pas plus que le Palæotherium, comme l’un des chaînons par lequel a passé l’évolution directe du groupe des Equidés. Cette évolution paraît plutôt devoir être reconstituée, ainsi que Marsh l’a indiqué depuis longtemps, par l'intermédiaire de l’Epihippus et du Meso- hippus américains. La distribution géologique comparée des divers types de la famille des Hyracothéridés en Europe et dans l'Amérique du Nord se trouve résumée dans le tableau suivant : Europe Amérique du Nord Étages EocÈNE à : Epihippus Marsh. Uinter SUPÉRIEUR Lo REUENR CENT | Orohippus Marsh. Bridger EOCÈNE Propalæotherium Gerv. à Wind- Moyen Pachynolophus Pomel. FRONTONENNS Ven. River EOCÈNE Propachynolophus Lem. è INFÉRIEUR | Âyracotherium Ow. IDD RIENUS MERS. N'est Il est remarquable que l’évolution du groupe est sensiblement parallèle, mais non tout-à-fait identique dans les deux mondes. Les types américains viennent fréquemment s’intercaler entre les types génériques européens, de manière à graduer encore mieux les transitions insensibles entre tous ces animaux : ainsi l’Eohippus de Marsh vient combler l'intervalle entre l’Hyracotherium et le Pachynolophus ; le Protorohippus de M. Wortman n'est qu'un Propalæotherium à caractères encore peu accentués ; l’'Orohippus montre le passage des types hétérodontes de l'Eocène inférieur et moyen aux types hkomæodontes de l'Eocène supérieur d'Europe (Lophiotherium) et d'Amérique (Epihippus). La série combinée des deux continents est l’une des plus continues que l’on puisse recon- naître dans le monde des Ongulés tertiaires. Quant à l’évolution générale du groupe, et bien qu’il soit néces- saire d’être très prudent en ce qui concerne l'indication des filiations directes, je suis disposé dans l’état actuel de nos con- naissances à la concevoir de la manière suivante : 1901 DE LA FAMILLE DES HYRACOTHÉRIDÉS 223 ACTUEL | Equidés | RAMEAUX ÉTEINTS . . ee. MToCÈNE | Anchitherium | OrzicocÈènxe | Mesohippus EOCcÈNE SUPÉRIEUR Epihippus Lophiotherium Palæotherium Anchilophus Paloplotherium EOcÈèNE | MOYEN or therium Protorohippus Pachynolophus Propachynolophus (Eohippus) EOCÈNE INFÉRIEUR Hyracotherium EXPLICATION DES PLANCHES IV ET V PLANCHE IV Fig. 1. —- Hyracotherium leporinum Owen. D’après un moulage du crâne provenant de l’argile de Londres à Herne-Bay, figuré par Owen (Geol. Mag. 1865, pl. X, fig. 2) et conservé au British Museum. Palais montrant à gauche les 3 M, p“, p* et les deux alvéoles de p?; à droite m°, m1, p‘, p‘'et p°. Figure grossie d’un cinquième. Longueur réelle des 3 M, 0,024 ; des trois dernières prémolaires, 0,020. Fig. 2. — Propalæotherium parvulum Laurillard sp. Sidérolithique Eocène de Lissieu (Rhône). Série des molaires supérieures gauches (3 M, 4 P) formée à l’aide de dents trouvées isolément. Figure grossie d'environ un quart. Longueur réelle des sept molaires, 0,058. Fig. 3. — Propalæotherium paroulum Laur. sp. Sidérolithique. Eocène de Lissieu. 29/ FORMES EUROPÉENNES DES HYRACOTHÉRIDÉS 4 Mars Série des molaires inférieures (3 M, 4 P) du même animal et du même gisement. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle, 0,066. Fig. 4. — Lophiotherium cervulum Gervais. Eocène supérieur de Saint- Hippolyte-de-Caton (Gard). Partie de maxillaire montrant les 3 M et les deux dernières P (p*, p°). Dans cet individu, p‘ est molariforme, mais p° n’a qu'un seul denticule interne formé par la soudure des deux denticules normaux. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des six molaires, 0,043. Fig. 5. — Lophiotherinm cervulum Gervais. Même gisement. Maxillaire droit avec la série des sept molaires (3 M, 4 P) séparées de la canine par une longue barre. Dans ce spécimen p? est (comme p° et p°) molariforme, avec deux denti- cules internes étroitement accolés ; p' allongé montre aussi deux denticules internes. Figure grossie d'environ un quart. Longueur réelle des sept molaires, 0,046. Fig. 6. — Lophiotherium cervulum Gerv. Même gisement. Branche droite de mandibule avec la série des sept molaires (3 M, 4 P); p° est submolariforme. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des sept molaires, 0,044. ! PLANCHE V Fig. 1. — Pachynolophus Duvali Pomel. Crâne provenant des grès éocènes du Minervois (Hérault). La pièce montre à gauche la série des six molaires (3 M, 3 P) ; il n’y a pas de p!; à droite m° et m°; la canine est séparée de p? par une longue barre. Figure légèrement grossie. Longueur réelle du crâne du bord incisif au bord postérieur du trou occipital. 0,13 ; longueur de la série des six molaires, 0,042. Fig. 2. — Pachynolophus Prevosti Gervais. Calcaire grossier supérieur de Nanterre : TYPE DE L'ESPÈCE, figuré par Gervais (Zool. et paléont. franc., pl. 35, fig 16). (Coll. Mus. Paris) Arrière-molaire supérieure probablement m°. Figure grossie d’un quart. Dimensions réelles : longueur, 0,009 ; largeur en avant, 0,011. Fig. 3. — Pachynolophus Prevosti Gervais. Calcaire grossier supérieur de Gentilly (Coll. Mus. Paris) Maxillaire supérieur gauche avec les 3 M et les deux dernières P (p* et p“). Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des cinq molaires, 0,043. Fig. 4. — Pachynolophus Duvali Pomel. Calcaire grossier supérieur de Passy (Coll. Mus. Paris). TYPE DU GENRE ET DE L'ESPÈCE. Trois dents isolées, les seules actuellement existantes de la série des six molaires figurées par Blainville et Gervais (Zool. et paléont. fr., pl 17, fig. x) et qui sont le type du genre Pachynolophus Pomel. Les figures représentent deux arrière-molaires, l’une droite, l’autre gauche (m2? probablement) et la dernière prémolaire p'. Figure grossie d’un quart. Dimensions réelles de m?: longueur, 0,008 ; largeur en avant, 0,010. 1901 EXISTENCE DU DÉVONIEN MOYEN DANS L'ILLE-ET-VILAINE 225 Fig. 5. — Pachynolophus Duvali Pomel. Calcaire grossier supérieur de Passy (Coll. Mus. Paris). L’un des TYPES DU GENRE ET DE L’ESPÈCE. Trois arrière-molaires inférieures droites séparées, me paraissant être les mêmes que celles figurées par Blainville sous le nom d’Xyracotherium de Passy (Ostéogr., g. Lophiodon, pl. I. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des trois molaires, 0,0285. SUR L'EXISTENCE DU DÉVONIEN MOYEN DANS L’ILLE-ET-VILAINE par M. P. LEBESCONTE Dans la séance de la Société géologique de France du 3 décem- bre 1900, M. Kerforne me conteste la priorité du niveau à Phacops Potieri dans l’Ille-et-Vilaine. J’ai d’autant lieu de m'étonner que nous sommes tous deux d'accord pour rapporter cette priorité à Marie Rouault, le géologue breton. C’est lui en effet qui, en 1853, a découvert à Gahard (Ille-et-Vilaine), ce niveau que M. Kerforne a aperçu en 1898 au musée géologique de Rennes. C’est aussi M. Barroïs qui, Le premier en 1894, a trouvé le même niveau avec Goniatites à Izé (Ille-et-Vilaine), Ma communica- tion ! à la Société avait pour but de signaler la découverte que javais faite sur plusieurs points de Gahard et de Saint-Aubin- d'Aubigné de l'étage à Anarcestes lateseptatus Beyr., représenté par une douzaine d'échantillons de cette Goniatite avec Phacops Potieri et la série la plus belle et la mieux conservée de fossiles. L'importance des niveaux pélagiques à Céphalopodes pour le classement des étages m'a paru suffisante pour motiver cette note. Le faciès pélagique qui y est décrit est parallèle aux calcaires à Phacops Potieri de Sablé, décrits par M. Œhlert ?. 1. LEBESCONTE. Sur l’existence du Dévonien moyen dans l’Ille-et-Vilaine. B. S. G. F., (3), XXVIL, 1900. 2. ŒuLert. C.-R. Ac. Sc., 21 février 1883. 5 Septembre 1901. — T. 1er. Bull. Soc. Géol. Fr. — 15 Séance du 18 Mars 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président annonce une nouvelle présentation. M. Field, de Zurich (Suisse), donne quelques renseignements sur les travaux du Concilium Bibliographicum, institution biblio- graphique fondée avec l’appui du gouvernement suisse, à la suite d’un vote du Congrès international de zoologie. Le but de cette œuvre est de créer un centre unique et interna- tional pour recueillir la bibliographie courante de certaines sciences et de donner des renseignements aux savants. On veut même substituer entièrement aux recherches bibliographiques person- nelles, toujours longues et laborieuses, une organisation bibliogra- phique collective et permanente. Pour prendre l'exemple de la paléontologie, chaque travail qui arrive au Concilium est dépouillé avec beaucoup de soin pour être enregistré sur plusieurs fiches selon les matières traitées. Aïnsi, un travail récent de M. Traquair sur les Poissons carbonifères du Comté de Fife (Ecosse) a donné lieu à quatre fiches imprimées, savoir : l'indication du travail dans le catalogue par nom d’auteur ; une seconde fiche sous la rubrique Poissons ; une troisième sous la rubrique Carbonifère, et une qua- trième au Comté de Fife, dans la partie géographique. Le Conei- lium possède, en outre, un catalogue manuscrit dans lequel on enregistre tous les espèces et genres nouveaux. L'ouvrage de M. Traquair donne la description de quatre espèces nouvelles et de deux nouveaux genres : Cælacanthopsis et Eucentrurus. Il fau- drait par conséquent établir six fiches manuscrites supplémentaires pour bien indexer ce travail. Toute personne peut faire venir l’ensemble des fiches sur la paléontologie ou sur n'importe quelle question, comme : Faune de la Haute-Garonne, Faune éocénique, ou bien fiches sur les Hippurites, les Trilobites ou n'importe quel autre groupe du règne animal. En terminant, M. Field fait appel aux paléontologistes pour qu'ils envoient leurs publications au siège central [Concilium Bibliographicum, Zurich Ve (Suisse)] afin de faciliter les travaux ‘de dépouillement. SÉANCE DU 18 MARS 1901 227 M. A. Toucas présente la deuxième partie de sa note Sur l’évo- lution des Hippurites. DEuxIÈME BRANCHE. — HIPPURITES A PORES POLYGONAUX. Ce n'est que dans l’Angoumien supérieur, avec l’Hippurttes Grossouvrei Douvillé, que l'on voit apparaître la première forme à pores franchement polygonaux. Cette deuxième branche n'aurait donc pas eu de représentant dans l'Angoumien moyen, au moment de l'apparition des premiers Hippurites. Il en résulte que l’origine probable des pores serait plutôt la forme linéaire, avec l'Hippurites Requieni Matheron, comme type ancestral. L'Hippurites resectus Defrance, avec ses pores arrondis et linéaï- res, se rapproche en effet beaucoup plus des Hippurites à pores linéaires que des Hippurites à pores polygonaux et peut être considéré comme une variété de l’Hipp. Requieni, à valve supérieure pustuleuse et à valve inférieure fortement costulée. Dans cette hypothèse, les pores, rétrécis à l’origine, se seraient élargis peu à peu de manière à former en premier lieu les pores réticulés, qui se seraient eux-mêmes transformés plus tard en pores polygonaux par suite de la disparition des denticules. Ainsi s’expliqueraient la présence simultanée des Hippurites Requieni et Hipp.resectus dans les bancs les plus anciens de l’An- goumien moyen, la brusque apparition dans ces mêmes couches des premières formes à pores réticulés, avec leurs pores, encore très petits et un peu allongés, et enfin l’arrivée plus tardive dans l'Angoumien supérieur des formes à pores franchement polygo- naux. La deuxième branche des Hippurites à pores polygonaux a formé trois groupes ayant apparu successivement : 1° Groupe de l’Hipp. sulcatus Defrance; op — l'Hipp. Toucasi d'Orbigny; ai — l'Hipp. variabilis Munier-Chalmas. Ces trois groupes out naturellement pour type primitif l’'Æipp. Grossouvrei, avec arète cardinale tronquée et les deux piliers rétrécis à la base, caractères distinctifs des formes primitives du groupe de l’Hipp. giganteus, ce qui ferait supposer que les Hippu- rites à pores polygonaux ont pour origine l’Aipp. inferus ou l’Hipp. £giganteus, forme ancienne. Le groupe de l’Hipp. sulcatus se distingue des deux autres par son arète cardinale constamment très saillante et le plus souvent lamelliforme, surtout dans le sous-groupe de l’Hipp. cornuvacci- num (formes spéciales à la Province orientale); en outre, la tron- cature de l’arète cardinale subsiste jusque dans les formes les plus 228 SÉANCE DU 18 MARS 1901 récentes. Dans ce groupe, l’évolution est moins accentuée, elle se fait plutôt dans le sens du développement de l’arète cardinale, tandis que dans les deux autres groupes l’arète cardinale, toujours triangulaire, perd assez rapidement sa troncature et s'atrophie peu à peu, au point de ne présenter d’abord plus qu’un simple bourrelet et disparaît même dans les formes les plus récentes. Dans le groupe de l’Hipp. variabilis, les pores sont encore plus simples et toujours disposés en rangées régulières ; les piliers sont très peu développés et sensiblement égaux. Le premier groupe comprend dans l’ordre de l’évolution : AS Hipp. Grossouvrei, dans l'Angoumien supérieur. LE i — l | Gaudryi Mun.-Chalmas, | dans le Coniacien et probable- — cornuvaccinum Bronn., à ment le Santonien. — Chaperi Douvillé, — sulcatus Defrance, dans le Santonien supérieur et le — Chalmasi Douvillé, Campanien inférieur. — Archiaci Mun.-Chalmas, dans le Campanien. Dans les environs de Gosau, l’Hipp. Grossouvrei paraît être remplacé par une variété à arète cardinale moins saillante, que M. Douvillé a désignée sous le nom d’Hipp. præsuleatus. L’Hipp. Chaperi est la seule forme de ce groupe à arète cardi- nale arrondie. Le deuxième groupe n’a apparu qu’au commencement du Conia- cien ; on y distingue : Hipp. Sp. nov., forme ancienne |, de l’Hipp. Toucasi d’Orb. | — sp. nov., forme ancienne de l’Hipp. CareziDouvillé — Toucasi d'Orb., — Carezi Douv., * dans le Coniacien. dans le Santonien. — sulcatissimus Douv., dans le Campanien inférieur. . — sulcatoides Douv., dans le Campanien moyen. Le troisième groupe commence seulement dans le Santonien et comprend : Hipp. Maestrei Vidal, — Peroni Douvillé, — variabilis Mun.-Chalmas, |) — colliciatus Woodward, | — Lapeirousei Goldf., — cornucopiæ Defrance, — Castroi Vidal, dans le Danien. dans le Santonien. dans le Campanien. dans le Maestrichtien. SÉANCE DU 18 MARS I9OI 220 NOTICE SUR LE NOUVEAU CLASSEMENT DE LA BIBLIOTHÈQUE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE La Bibliothèque de la Société comprend trois catégories de publications, classées séparément : 1° Les Ouvrages complets, brochures et tirages à part ; 2° Les Périodiques, Revues et:Collec- tions ; 3° Les Cartes, coupes et planches diverses. Chaque volume, brochure ou carte séparée, est pourvu d’une cote numérique qui permet de retrouver immédiatement sa place sur les rayons. En conséquence, lorsqu'on cherche un document, la première chose à faire est de consulter le Catalogue sur fiches, établi : 1° pour les Ouvrages, par ordre alphabétique des noms d'auteurs; 2° pour les Recueils, par ordre alphabétique des pays de publication, et, dans chaque pays, par ordre alphabétique des titres ; 3° pour les Cartes, par ordre géographique-alphabétique. Ce Catalogue est contenu dans un meuble spécial, placé au milieu de la salle de lecture, en entrant, à gauche. Chaque fiche renvoie à un numéro, qui est reproduit sur une pastille collée au dos du volume correspondant (au-dessus du titre, pour les brochures), ou, s’il s’agit d’une carte, inscrit sur ce document. . 5 1° Les Ouvrages, brochures ou tirages à part sont groupés en quatre formats, ayant chacun une numérotation distincte : Petit format : jusqu’à o m. 25 (in-32, in-18, in-12, petit in-8°) ; Moyen format : de o m. 25 à o m. 35 (gr. in-8o, in-4°); Grand format : de o m. 35 à o m. 50 (in-folio) ; Très grand format : au-dessus de o m. 50 (gr. in-folio, in-plano). On n’a pas cherché à faire un classement, soit par ordre métho- dique, soit par ordre alphabétique des noms d'auteurs, disposi- tions qui entraînent d’incessants remaniements. Toutefois, afin de modifier le moins possible l’état de choses qui existait précédem- ment, les volumes ont été placés sur les rayons à peu près dans l’ordre où ils se trouvaient rue des Grands-Augustins ; les nouveaux sont simplement mis à la suite, au fur et à mesure de leur arrivée. Les divisions numériques ont été établies de manière à permettre d’intercaler au Catalogue les accroissements futurs de ia Biblio- 230 SÉANCE DU I8 MARS IQOI thèque, pendant un grand nombre d'années, sans modifier le numé- rotage actuel, savoir : Pour le irès grand format : de I à I.000 : — grand — de 1.001 à 20.000 : — moyen — de 20.001 à 60.000 ; — petit — de 60.001 à ....... Au 31 décembre 1900, ces quatre groupes d’Ouvrages étaient représentés par les numéros suivants : Très grand format : I à 43, soit 43 Ouvrages. Grand — I.00I À I.195, — 195 — Moyen — 90.001 à 22.387, — 2.387 —, Petit — 60.001 à 67.337, — 7.335 — oO talent ete 9.892 — Le placement des Ouvrages sur les rayons est fait par travée, de gauche à droite, et en partant d’en bas, pour qu’on n'ait à déplacer le moins possible les livres lourds ou encombrants. Il n’y a qu'un seul rang de volumes. Au milieu de chaque travée est placée une pancarte, portant les numéros extrêmes des ouvrages qui y sont déposés. Les brochures, dans le numérotage, ne sont pas séparées des volumes ; toutefois, elles ont été réunies sur les rayons par groupes, et placées dans des cartons dont le dos porte les numéros correspondants. 2° Les Périodiques, Revues et Collections sont groupés, comme les Ouvrages, d’après le format ; les divisions numériques sont les mêmes, mais la cote est précédée de la lettre P. Actuellement, le très grand format n’est pas représenté ; ilreste, pour les trois autres catégories : Grand format : P 1.001 à P 1.005 — 5 Recueils. Moyen — P 20.001 à P 20.138 — 138 — Petit — P 60.001 à P 60.570 — 570 — Total En rene 713 — Chaque numéro, correspondant à un périodique donné, s'applique souvent à un grand nombre de volumes, dont la tomaison ou la date permettent de trouver facilement la place. En principe, le rangement des volumes sur les rayons a été fait par ordre géographique (pays de publication), c’est-à-dire, en. somme, par langues, comme dans l’ancien local. Toutefois, la totalité des Périodiques n'ayant pu trouver place dans la grande: salle dite pentagonale (à gauche du corridor d'entrée), — salle qui sert en mème temps de magasin pour les publications mises en. SÉANCE DU 18 MARS IOOI 231 vente par la Société, — un certain nombre de Recueils français, anglais et allemands, choisis parmi ceux qui sont le plus fréquem- ment consultés, ont été reportés dans la salle de lecture, où ils occupent les rayons placés soit dans les intervalles et au-dessus des fenêtres, soit aux murs de droite et de gauche (petits côtés de la salle). Pour les collections dont l’origine est très ancienne, on s’est contenté de déplacer les volumes qui correspondent aux vingt dernières années. Cette disposition est provisoire ; on peut espérer qu'elle sera modifiée dans un avenir plus ou moins long. En attendant, une liste complète des Recueils qui se trouvent, en tout ou en partie, dans la salle de lecture, est aflichée sur un carton, placé contre le meuble renfermant le Catalogue. Parmi ces Périodiques, on peut citer, outre les publications de la Société et celles des divers Congrès internationaux : Pour la France, les Annales des Mines, de Géographie, des Sciences géologiques, de la Société géologique du Nord ; YAn- nuaire géologique universel ; l Anthropologie ; les Archives et le Bulletin du Muséum d'Histoire Naturelle : les volumes de l’Asso- ciation française ; les Bulletins du Service de la Carte géologique et ceux des principales Sociétés savantes de Paris; les Comptes Rendus de l Académie des Sciences ; la Nature. | Pour l'Allemagne, le Veues Jahrbuch für Mineralogie, la Zeitschrift der deutschen geologischen Gesellschaft et les publi- cations du Service de la Carte géologique de Prusse. Pour l'Autriche, le Jahrbuch et les Verhandlungen de la Geolo- gische Reichsanstalt et les Sitzungsberichie de l'Académie de Vienne. Pour la Grande-Bretagne, les catalogues du British Museum, le Geological Magazine, les publications des Services géologiques de l'Angleterre, du Canada, de l'Écosse, de l’Inde, de l'Irlande et de la Nouvelle-Zélande ; celles de la Palæontographical Society, le Quarterly Journal de la Société géologique de Londres et les Recueils des autres Sociétés géologiques du Royaume-Uni; les volumes de la British Association et les Proceedings de la Société Royale. 3 Les Cartes, coupes et planches diverses imprimées ou manus- crites, sont numérotées sans séries distinctes. Cette partie comprend environ 600 numéros, placés, soit en face du meuble à fiches, pour les cartes en feuilles, soit à l’autre extrémité de la salle de lecture, à côté de la salle des séances, pour celles qui sont entoilées (cartons régionaux). Le groupement a lieu, autant que possible, par ordre géographique. La cote est précédée de la lettre C. 239 SÉANCE DU I8 MARS IQOI Dans chacune des catégories précédentes, tous les articles qui ont été déplacés sont représentés par un fantôme, c'est-à-dire par une petite planche de bois sur laquelle est inscrit le numéro corres- pondant, avec mention de l’endroit où se trouve l'ouvrage. Quelques ouvrages de référence (Catalogues, Dictionnaires, Traités, etc.), ont été réunis à l’entrée de la salle de lecture, où ils occupent une partie des travées I et 2. Un Registre-Inventaire, comprenant actuellement quatre volu- mes, donne le détail de tous les Ouvrages à part ou brochures que possède la Société, dans l'ordre des numéros ; on y trouve l’indica- _tion, pour chaque article, du nom de l’auteur, du titre de l'ouvrage, du lieu et de la date de publication, du format, du nombre de volumes, de la reliure et de la date d’entrée. IL n’y a pas d’inven- taire analogue pour les Périodiques. Le classement et le rangement de la Bibliothèque ont été faits par les soins de M. A. Maire, Bibliothécaire à la Sorbonne. Paris, le 9 mars 1901. Pour la Commission des Archives et de la Bibliothèque : Emm. de MARGERIE. FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA (PROVINCE DE LÉON, ESPAGNE) par M. D.-P, ŒHLERT (DEUXIÈME PARTIE)! (PLANCHE VI). SPIRIFER BOULEI, nov. sp. ŒIL. VL fig. 1). Coquille de grande taille, transverse, peu renflée, avec un pli médian et un sinus médiocrement accusés, couverte, sur toute sa surface, de côtes rayonnantes arrondies, régulières sur les parties latérales où elles sont au nombre de 12 à 13 de chaque côté ; elles sont toujours simples, sauf au voisinage du sinus et du bourrelet ou parfois on en compte deux ou trois qui, chez les individus âgés, se dichotomisent près du bord frontal. Le sinus, assez large et peu profond, est également couvert de côtes rayonnantes, mais celles-ci sont très inégales, irrégulière- ment espacées, et dichotomes ; on en compte 6 à 8 dont les deux médianes, un peu écartées l’une de l’autre, laissent entre elles une sorte de méplat formant le fond du sinus, et sur lequel appa- raissent quelques côtes secondaires, visibles seulement près du bord frontal chez les individus de grande taille. Le bourrelet, peu accusé, est un peu aplati au sommet; les côtes qui le cou- vrent sont réunies entre elles à la partie postérieure et indistinctes les unes des autres: elles s’individualisent et deviennent assez apparentes le long de leur parcours. — L’aréa ventrale, nettement délimitée, est beaucoup plus élevée que l’aréa dorsale qui est linéaire ; elle est convexe et renversée, de façon à faire presque un angle droit avec le plan des valves. Le crochet ventral, peu développé et peu recourbé, s'élève faiblement au-dessus de l’aréa. Le sommet dorsal, droit, dépasse à peine la ligne cardinale ; l'umbo dorsal est peu renflé, presque-aplati. 1. La première partie de ce travail a été publié dans le B.S.G.F., (3), XXIV, p. 814, pl. XXVI-XX VIII. 23/ D.-P. ŒHLERT 18 Mars Cette espèce appartient évidemment au groupe de Sp. Bischofi Roemer !; elle en diffère principalement par le nombre et le mode de distribution des plis, principalement dans le sinus et sur le bourrelet; les mêmes caractères séparent aussi cette forme de Sp. Dalendensis Steininger. Dans Sp. Jouberti? du Dévonien inférieur de l'ouest de la France, les côtes sont anguleuses, saïllantes, et plus nombreuses par suite de leur dichotomisation, caractère qui existe aussi sur les côtes du sinus et du bourrelet. Il n'existe pas de méplat au milieu du sinus dont la partie médiane est occupée par une côte assez forte, qu'accompagne de chaque côté une côte unique. Sur le bourrelet dorsal les côtes sont très nettement dichotomes et nombreuses. Sp. Boulet occupe en Espagne un niveau supérieur à ceux de Sp. Bischofi et Sp. Jonberti. Dans le Schoharie grit et le Corniferous sandstone d'Amérique, on trouve une espèce, S. Grieri Hall, qui se rapproche de celle-ci par son mode de plissement, mais qui s'en distingue toutefois facilement par le nombre moins considérable et la forme plus arrondie de ses côtes. De plus, le crochet ventral et le sommet dorsal sont beaucoup plus élevés, plus recourbés, et surtout plus rapprochés l’un de l’autre que dans notre espèce, par suite de la position de l’aréa qui, au lieu de faire presque un angle droit avec la ligne de commissure des valves, se trouve au contraire à peu près dans la place de celle-ci. | Nous signalerons encore, comme caractères différentiels, la plus grande profondeur du sinus du S. Grieri et le renflement remar- quable de la partie umbonale de sa valve dorsale. | SPIRIFER PELLICOI de Verneuil ? (B. S. G. F. (3), XXIV, pl. XX VU, fig. 25 à 27) De Verneuil a désigné sous ce nom une espèce trouvée dans les couches les plus récentes du Dévonien inférieur (caleaire de 1. Si l’on compare les figures données par Kayser (1878. Fauna Dev. d. Harz, pl. 24, fig. 4, et pl. Des fig. 23-24) avec celle qui existe dans l'ouvrage de Giebel (1858. Silur. d. Unter “harz, pl. 4, fig. 3) et qui doit être considérée comme le type, on remarque qu'il existe certaines différences. 2. ut 1879. Dévon. de la Sarthe. B. S. G. F., (3), VIL. p. 709, pl. XIV, fig. a us renvoyons pour la biographie de cette espèce et des formes affines, au travail si complet de M. Béclard, 1895. Les Spirifères du Coblenzien Belge, p. 199-219. Bul. Soc. Belge Géolog., t. IX. Mémoires. 1901 : FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 235 Ferrones), caractérisée par sa forme très transverse, ses côtes nombreuses, et qui possède un pli au milieu du sinus médian. L’au- teur ne la compare qu'incidemment au Spirifer macropterus Goldf. (= S. paradoxus Schlot.), parce qu'à cette époque cette dernière forme n'était connue que d’après des moules internes très imparfaits. Depuis, Schnur et Rœmer, ont figuré des spéci- mens mieux conservés, quelques-uns pourvus de leur test rappe- lant par leur aspect général le Sp. Pellicoi, mais ne possédant pas le pli unique du sinus médian, caractère différentiel de ces deux formes. Dans un récent travail, M. Béclard a figuré des moules internes de Spirifères coblenziens belges, très transverses, et ayant un pli au fond du sinus ; il les rattache à Sp. paradoxus, et admet ainsi entre cette espèce et Sp. Pellicoi une identité absolue, qui d’ailleurs avait été déjà signalée par de Koninck et Barrois. M. Béclard réunit au type de Schlotheim, Sp. paradoxus, les Sp. Hercyniæ, dunensis, macropterus, speciosus pro parte, phalæna groupant ainsi sous un même nom toutes les formes très transver- ses, à plis nombreux, avec ou sans côte médiane au fond du sinus, car ce caractère n'est, dit-il, « pas toujours apparent et disparait même complètement sur les moules internes ». Les preuves qu'il donne montrent évidemment combien la plupart de ces formes sont étroitement unies, mais elles ne nous ont pas apporté la conviction absolue que toutes celles-ci doivent être désignées sous un même nom spécifique, d'autant plus que dans beaucoup de spécimens figurés, le contour et l'aspect général sont souvent dissimulés par des phénomènes de compression, et que souvent les côtes ne paraissent pas toujours être de même nature ; quant aux caractères tirés des moules internes, ils nous semblent plutôt d’ordre de groupe, que d’ordre spécifique, car on les retrouve très analogues chez des espèces différentes d’un même groupe. En tous cas, en admettant que la réunion de Sp. Pellicoi et de Sp. paradoxus, puisse être faite avec beaucoup de vraisem- blance, nous conservons, tout au moins provisoirement, le nom de Pellicoi pour la forme d'Espagne, qui, dans cette région comme dans l’ouest de la France, occupe un niveau spécial (cal- caire de Ferrones et d’Arnao) (calcaire d’Erbray, grauwacke de Hierges) plus élevé que celui où l’on trouve Sp. paradoxus proprement dit. C’est pour nous une occasion d'insister sur la valeur du travail de M. Béclard ; l’érudition dont il a fait preuve et le mode de groupement des figures qui permet de comparer entre eux les. 236 D.-P. ŒHLERT 18 Mars types des différents paléontologistes, sont appelés à rendre les plus grands services; nous apprécions également l'esprit de synthèse de l’auteur, toutefois nous ne pouvons le suivre dans toutes les assimilations auxquelles il arrive, et nous ne pouvons accepter toutes les synonymies qu'il propose. C'est ainsi, pour ne parler que des espèces qui nous sont plus spécialement connues et que nous avons pu étudier d’après de nombreux spécimens, qu’il nous est impossible de réunir sous un mème nom: Spirifer hystericus Schlotheim, S. Rousseaui, S. læpvicosta, S. Venus, chacun d'eux possédant des caractères particuliers, bien constants, et occupant des couches spéciales. De même, nous ne pouvons considérer comme se rattachant à une seule espèce, Sp. Daleidensis Sitein., tous les Spirifères coblenziens ayant des côtes dichotomes dans le sinus et sur le bourrelet, tandis que ceux chez lesquels cette dichotomisation n'existe pas, devraient porter le nom de Sp. Trigeri. SPIRIFER (RETICULARIA) DEREIMSI, nov. sp. (PL VI, fig. » à 16). Coquille transverse, rhomboïdale, atteignant son maximum de largeur vers la moitié de la coquille, ou un peu en arrière de celle-ci. Valves presque également profondes, pourvues d’un sinus ventral et d’un bourrelet dorsal. Crochets saillants, celui de la valve ventrale dominant un peu celui de la valve dorsale, et devenant très rapprochés en se courbant l'un vers l’autre, mais sans jamais se toucher. Charnière droite, courte, accompagnée de deux aréas peu développées. Angles cardinaux arrondis. Ligne palléale subrectiligne sur les côtés, sinueuse au front. Commis- sure tranchante. Surface ornée de nombreuses lamelles d’accrois- sement concentriques, imbriquées, espacées à intervalles larges, et assez régulières ; ces lamelles sont traversées, perpendiculaire- : ment, par de très petits bourrelets rayonnants, très rapprochés, irréguliers, et interrompus par chacune des lamelles d’accrois- sement, au bord desquelles ils s'arrêtent brusquement, après s'être renflés et épaissis en des sortes de papilles qui servaient de base à des épines. Test imperforé. Valve ventrale avec un sinus étroit, arrondi, modérément-pro- fond, mais bien accentué, et partant de la pointe du crochet. Les parties latérales de la valve se bombent de chaque côté de ce sinus, puis retombent en pente douce vers la commissure latérale. 1901 FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 237 Crochet bien développé, à côtés arrondis, acuminé à son extré- mité. recourbé à angle droit au-dessus de l’aréa ventrale et dominant le sommet de l’autre valve. Aréa triangulaire, petite, surbaissée, assez nettement délimitée, un peu concave, et ren- versée obliquement par rapport au plan longitudinal des valves ; _sa surface est visiblement striée dans les deux sens. Toute la hauteur de l’aréa, depuis le crochet jusqu’à la ligne cardinale, est occupée par l'ouverture triangulaire, très large, qui occupe environ un tiers de sa longueur totale. Valve dorsale avec un bourrelet étroit, arrondi, modérément saillant, bien délimité depuis le sommet jusqu'au bord frontal par deux légères dépressions longitudinales ; sommet recourbé, saillant au-dessus du bord cardinal et surmontant une très étroite aréa située à peu près dans le plan de la valve. Les échantillons de cette espèce, varient un peu dans leur étendue en largeur, mais ils sont néanmoins toujours faciles à reconnaître, même lorsque la fine ornementation a disparu par décortication et que les valves paraissent lisses, à cause du Fig. 1. — Spirifer Dereimsi nov. sp. bourrelet et du sinus médians étroits et nettement accusés, ainsi que par leur aspect général. Un certain nombre de spécimens présentent sur les côtés quelques traces de côtes rayonnantes (3 ou 4) larges et obscures, montrant ainsi une tendance à la plicature des parties latérales des valves. Les coupes longitudi- 238 TD CHEDERIT NN 18 Mars nales et transversales que nous avons faites dans cette espèce nous ont fourni les caractères suivants : les plaques fovéales sont assez bien développées; les dents, fortement constituées, donnent naissance à deux longs cruras aux extrémités desquels apparais- sent deux apophyses triangulaires, indiquant l’existence d’une bandelette jugale qui a été résorbée ; les cônes spiraux dont la direction est un peu oblique, sont composés de neuf à dix tours. Ce Spirifer, par ses caractères généraux, aussi bien que par son mode d’ornementation, appartient évidemment aux fimbriati ; l'insuffisance des caractères chez nos échantillons, due à l’absence des épines qui d’ailleurs sont très exceptionnellement conservées, nous empêche de décider d’une façon précise à laquelle des deux subdivisions (unicispinei ou duplicispinei) il appartient. D'autant plus que MM. Hall et Clarke ! signalent à côté des unicispinei proprement dits, un groupe dont le développement est parallèle, qui, apparu dans le Niagara group, se poursuit jusqu'au sommet du Dévonien, et qui se rapproche des duplicispinei par la brièveté de sa ligne cardinale, son contour subcirculaire et les plis effacés de ses valves, caractères appartenant en propre au groupe des duplicispinei. Toutefois, à en juger d’après l’aspect extérieur, c’est à la sec- tion des duplicispinei, c’est-à-dire au groupe Reticularia, que doit se rapporter notre espèce. Le type de ce groupe, Sp. lineatus Martin, en est évidemment assez éloigné par sa forme arrondie, légèrement transverse, ou parfois allongée, ainsi que par l'absence d’un sinus et d’un bourrelet proprement dits: mais nous signa- lerons certains spécimens, entre autres celui que figura M'Coy lorsqu'il créa son genre Reticularia, dont le contour est rhom- boïdal, et chez lequel il existe un bourrelet et un sinus très nets. Nous retrouvons ces mêmes caractères chez les formes dévo- niennes, en particulier chez l'espèce des schistes de Budesheim, que M. Kayser ? a considérée comme une variété du Sp. lineatus, mais qui évidemment en est assez éloignée pour constituer une espèce distincte. Notre forme, qui occupe un niveau inférieur, s’en distingue par un crochet ventral beaucoup moins élevé et moins redressé, et son aréa ventrale beaucoup moins haute; à la valve ventrale au contraire, le crochet est plus saillant; enfin, le sinus, et principalement le bourrelet, sont beaucoup plus accentués, ce qui rend la commissure frontal plus sinueuse. 1. HALL et CLARKE. 1893. Pal. of N. Y., vol. VII, part. 2, p. 19. 2. KAYSER. 1891. Brach. Eifel. Zeit. Deut. Geo. Ges., t. XXIII, p. 582, pl. XIE fig. 2. LE 1901 FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 239 Dans les étages des grès d’Oriskany, du Helderberg supérieur et d'Hamilton on trouve une forme Sp. fimbriatus Conrad ! ; toutefois, d’après les figures données par Hall *, le contour palléal est plus largement arrondi, ce qui donne une forme moins rhomboïdale à l’ensemble de la coquille ; le pli médian est plus anguleux au sommet et ses côtés sont plus divergents ; les côtes latérales sont en général beaucoup plus accentuées ; le crochet ventral, plus haut, est moins recourbé; enfin le profil des deux espèces est très différent par suite du bombement régulièrement convexe des deux valves, chez Sp. fimbriatus, tandis que dans la forme d’Espagne, ce renflement n'existe que dans la région umbonale. Cette espèce a peut-être été trouvée déjà en Espagne, où elle aurait été désignée sous le nom de Sp. cureatus Schlotheim *. Sous ce nom, en effet, on a rattaché un grand nombre de formes sou- vent très différentes du type. Celui-ci a été très bien figuré par Schnur #, Quenstedt , Kayser 5, etc. ; il est remarquable, prin- cipalement par l’élévation exagérée du bourrelet, dont les talus se confondent avec les parties latérales, rendant ainsi la valve dorsale fortement carénée et le bord frontal très sinueux. Le crochet ventral est beaucoup moins développé, plus recourbé vers le sommet dorsal, de telle sorte que l’aréa est petite. CYRTINA HETEROCLITA Defrance, sp. var. intermedia Œbhlert. (PI. VI, fig. 17 à 34). C. heteroclita var. intermedia Œhlert, 1886. Ann. Soc. Géol., t. XIX, p. 42, pl. IL, fig, 29-34. Cyrtina heteroclita est représenté à Santa-Lucia par de nom- breux individus qui, en majeure partie, se rattachent à la variété que nous avons désignée sous le nom d’intermedia, pour indiquer qu'elle constitue un terme de passage entre le type de Defrance et d’autres formes à côtes plus nombreuses. Dans cette variété 1. Le nom de Sp. fimbriatus ayant été employé antérieurement à Conrad, par Morton 1836, M. Miller (1883. Amer. Palæoz. Fos., p. 298) a proposé de lui substituer celui de Conradana. HALL. 1867. Pal of NY. vol MM; p-t2r4 pl: 33; fig 1-21. . SCHLOTHEIM. 1820. Petref., p. 280, pl. XIX, fig. 2. . Scanur. 1853. Brach. Eifel, pl. XXXVI, fig. 2 a, b, c, d. . QuensTEDT 1871. Petref. Deutsch., pl. 55, fig. 23, 24. KAyser. 1889. Fauna des Hauptquarz., p. 96, pl. XVL, fig. 11. D XXE 240 D.-P. ŒHLERT - 18 Mars les côtes à un sommet arrondi, sont au nombre de 4 à 7 de chaque côté du pli médian, lequel est un peu aplati. L’aréa est tantôt légèrement arquée, tantôt complètement plane. Ces carac- tères permettent de la séparer de la variété mulüplicata de Davidson, et à plus forte raison de la forme de Ferrones dési- gnée par la lettre À par de Verneuil, à laquelle d'Orbigny donna plus tard le nom spécifique d’Hispanica, nom qui a été conservé par Mallada. Les spécimens que nous avons étudiés sont toujours de taille beaucoup plus petite que les diverses variétés signalées par M. Barrois en Espagne et décrites et figurées par lui!; ils en différent, en plus, par le nombre et la forme de leurs côtes, ainsi que par les rapports qui existent entre la longueur de la ligne cardinale, le développement de l’aréa et le bombement des valves. On trouve également en Amérique, ainsi que l’a fait remarquer judicieusement M. Whidborne (Devon Fauna, t. Il, p. 112), des variétés montrant une gradation ascendante vers les formes à plis plus nombreux. Nous citerons comme exemple le Cyrtina Dalmani (Hall. P. N. Y., vol. 3, p. 206, pl. 24, fig. 2), qui est évidemment un équivalent du C. intermedia d'Europe dont il se rapproche du reste par tout l’ensemble des caractères. Cyrtina heteroclita est une forme qu'on rencontre dans toutes les assises du Dévonien, et dont l’extension horizontale est égale- ment très grande; à ces deux faits, si l’on ajoute que les spécimens sont souvent très nombreux dans une même couche, et surtout que certains caractères de l'espèce ont quelque chose d’excessif, tels que l'inégalité des valves, le développement du crochet ventral, — qui entraîne souvent une torsion de cette région de la coquille, — et enfin une grande diversité dans le nombre des plis, on voit combien cette forme se trouve dans des conditions favorables pour qu'apparaissent toutes sortes de variations étroitement groupées autour du type, mais pouvant cependant être séparées de celui-ci, soit qu'on les considère comme de simples variétés, soit qu'on en fasse des espèces distinctes, suivant le point de vue auquel on se place. Qu'il nous suffise de rappeler et de rapprocher en les comparant, la variété lœvis Kayser, du Dévonien moyen de l’Eifel, caractérisée par sa surface lisse ou à côtes à peine distinctes; la variété À. de Verneuil, du Dévonien moyen de Ferrones (— C. hispanica d'Orbigny, 1850), dont les côtes sont très nettes et très nombreuses, et la variété Demarli du 1. Loc. cit. pl. X, fig. 8, p. 260. 1901 FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 241 Frasnien de Ferques, qui possède les caractères de la précédente, mais chez laquelle la division du bourrelet vient indiquer une nouvelle tendance à la multiplicité des plis. En Amérique, les modifications sont encore plus profondes et les caractères qui séparent entre eux les Cy-rtina de ce groupe, sont devenus assez importants pour nécessiter la création, non plus de simples varié- tés comme en Europe, mais d'espèces très nettement caractérisées (Ex. : C. biplicata, rostrata, curvilineata, eïc.). Toutes ces formes extrêmes, qu’on peut naturellement relier les unes aux autres par une série de types intermédiaires, tout en fournissant les preuves d’une variabilité extrême, montrent en même temps que, malgré cette malléabilité, le type heteroclita pris dans son sens le plus large, reste constant et conserve ses caractères primordiaux. L'un d’eux qui, d’ailleurs, a une valeur générique et sert à caractériser le genre Cyrtina, consiste dans la disposition des plaques dentales et du septum de la valve ventrale. Ce fut ce caractère qui servit de base à Davidson pour établir son genre Cyrtina et le séparer de Cyrtia, avec lequel il avait été confondu jusqu'alors par suite de son aspect externe, si semblable à première vue. L'existence des perforations du test dans le premier de ces deux groupes, et leur absence dans le second, n'avait pas semblé un motif suffisant pour une distinction géné- rique. Quant aux spires, on soupçonnait bien leur présence dans le nouveau genre Cyrtina, mais on n’avait pu la vérifier, David- son s’'appuya donc seulement sur la disposition de la chambre en forme de V (« V shaped chamber ») située à la valve ventrale, et constituée d’après lui par la convergence des plaques dentales, s’'unissant vers le milieu de leur parcours pour former un septum médian : disposition qu'il comparait à l’auget ventral de Pen- tamerus (Conchidium) Knighti. Les coupes qu’il donne pl. XIV, fig. 8, semblent, en effet, confirmer cette vue, d’après laquelle le septum est formé par la réunion des deux lamelles dentales accolées. Nous ferons toutefois remarquer que dès cette époque, Bouchard avait reconnu que dans C. Demarli, le septum se continue jusqu'au-dessous du deltidium, au milieu de l’espace resté libre entre les plaques dentales. Ce caractère, que David- son considère comme spécial à C, Demarli et qu’il n'avait pas retrouvé, disait-il, chez C. heteroclita et C. septosa, pouvait cepen- dant être constaté dans ces deux formes, car la figure de C. hete- roclita publiée antérieurement par l’auteur lui-même, dans son Introduction à étude des Brachiopodes (pl. VI, fig. 64) montre bien l'existence du prolongement du septum dans cette partie des 5 Septembre 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 16 240 D.-P. ŒHLERT 18 Mars valves. Quant au C. septosa, on peut également y observer l’exis- tence de ce même caractère, car dans l’une des figures (Davidson. Brit. Carb. Brach., pl. XIV, fig. 10) représentant un moule interne, on voit que le remplissage de l’auget ventral est fendu longitudinalement, et qu'une partie de la lame septale libre est encore conservée en place. D'ailleurs, la plupart des échantillons de Cyrtina. lorsqu'ils sont bien conservés, laissent souvent voir le prolongement du septum qui apparaît au fond du foramen comme une petite lame fine et tranchante ; celle-ci, bien que n'étant pas mentionnée dans les descriptions, est en général indiquée dans les figures. L'importance du septum et des plaques dentales, ainsi que la genèse et le rôle de ces cloisons, ont été récemment mis en lumière par M. Beecher, et par M. Clarke. L'étude qu'ils en ont faite d'une façon générale et les conclusions qu'ils en ont tirées pou- vant être éclairées par un examen minutieux de la structure du sommet ventral de Cyrtina heteroclita et de ses formes alliées, nous avons pratiqué un grand nombre de sections qui nous per- mettent d'apporter quelques faits nouveaux. Rappelons tout d'abord qu'il y a lieu de distinguer le deltidium formé d'une pièce Fig. 2. — a, Deltidium de Clitambonites ; b, Plaques deltidiales de Magellania; c, Pseudo deltidium de Cyrtina. unique (Clitambonites) (fig. 2, a), et les plaques deltidiales : ces dernières pouvant rester distinctes (WMagellania) (fig. 2, b), ou bien se souder si intimement sur la ligne médiane qu'elles prennent l'apparence d’une pièce simple ou pseudodeltidium (Cyrtina) (fig. 2, e) 1. D'après les vues de M. Beecher, interprétant les recherches embryogéniques de Kowalewsky sur Thecidea (Lacazella) et Cis- tella, le deltidium et les plaques deltidiales, bien que remplissant le même rôle, n’ont ni la même origine, ni la même structure. En 1. MM. Hall et Clarke ont proposé le nom de deltarium pour l’ensemble des plaques deltidiales désunies ou soudées, et celui de deltaria pour chacune d'elles prise séparément. 1901 FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 243 effet, tandis que le deltidium, qui apparait dès les premiers stades embryonnaires. est sécrété par le troisième lobe, ou lobe caudal, dont il occupe la face dorsale, les plaques deltidiales au contraire sont une dépendance du lobe moyen;-elles se montrent longtemps après les stades larvaires et sont sécrétées par des expansions de la partie ventrale du manteau qui enveloppe le pédoncule. Gomme conséquence, on constate certaines différences entre la structure du deltidium et celle des plaques deltidiales : par exemple, le deltidium ne présente jamais de perforations, alors même que les valves en sont pourvues, tandis que les plaques deltidiales au contraire sont perforées ou imperforées, suivant que ce caractère existe ou non dans les valves. Ainsi protégé du côté externe, la base du pédoncule l’est égale- ment, dans bien des cas, à l’intérieur même de la valve ventrale, par le développement et la convergence des plaques dentales, réunies suivant la ligne médiane, pour former ce qu'on appelait autrefois l’auget ventral et ce que MM. Hall et Clarke désignent actuellement sous le nom de spondylium. Le spondylium, rudi- mentaire ou très développé, qui ne serait qu'une modification de la gaine pédonculaire originaire, a toujours eu, à un moment du développement, sa contre-partie correspondante qui est le delti- dium: ces deux pièces forment un ensemble, ou protodeltidium, qui laisse au centre une cavité à section plus ou moins triangulaire, que nous désignerons sous le nom de chambre pédonculaire. Le spondylium étant constitué par les plaques dentales, qui chez un certain nombre de genres se réunissent et se prolongent jusqu’au fond de la valve, on peut se demander si, dans ce cas, ce prolongement est dû à la continuation des plaques réunies et accolées, ou s’il existe une cloison médiane indépendante cons- tituant le véritable septum. Les modifications que l’on observe dans la direction des plaques dentales qui, suivant les groupes, peuvent être divergentes, parallèles, ou convergentes, et s'unissent parfois en restant visiblement accolées, comme dans les Penta- meridæ, sembleraient prouver à première vue que le mode de construction est toujours le même, si certains genres, Spiriferina par exemple, ne nous montraient un septum central isolé et bien développé, existant concurremment avec deux plaques den- tales bien distinctes. La série de sections que nous donnons ici (fig. 3, I à IV) a été faite sur un spécimen de Spiriferina rostrata, provenant du Lias supérieur d’Albarracin, Espagne; l'étude des caractères internes de cette espèce nous a été facilitée par les nombreux 244 D.-P. ŒHLERT 18 Mars échantillons que M. Dereims a recueillis dans cette localité, et qu'il a bien voulu nous abandonner. Les coupes montrent non seulement la disposition des plaques dentales et du septum, mais aussi leur structure. Fig. 3. — Sections de Spirierina rostrata. On constate premièrement que ces cloisons, résultant d’un repli interne du manteau, sont constituées par deux couches accolées l’une à l’autre et dont l'épaisseur variable indique que la sécrétion calcaire a été plus: abondante sur certains points; de plus, on voit que les plaques dentales réunies d’abord à l'extrémité du septum (coupe 1) par une callosité interne, s’en détachent bientôt (coupe IT), en gardant seulement la protubérance interne qui ne disparaît que graduellement. Le septum devenu libre diminue alors de hauteur, en même temps que les plaques dentales s’amin- cissent et finissent par se rompre, montrant alors dans les coupes d'une part, leurs extrémités adhérant au fond de la valve; de l’autre, c’est-à-dire de chaque côté de l’ouverture triangulaire, leur point d’origine qui bientôt va supporter les dents. Ces caractères si précis chez Spiriferina, — soit, l'existence d'un septum et de plaques dentales, — se retrouvent également chez Cyrtina, mais cette fois modifiés et en quelque sorte cachés par suite de la fusion de ces plaques sur la ligne médiane. Le prolongement du septum au milieu de la cavité pédonculaire de Cyrtina, dont nous avons déjà parlé plus haut et qui a été signalé pour la première fois par Bouchard, est nettement figuré IOOI FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 245 dans les coupes données par MM. Hall et Clarke ; ces auteurs ont non seulement montré d’une facon évidente l'existence de ce caractère, mais ont encore indiqué qu'à la rencontre du septum et des deux plaques dentales, il existe une chambre tubulaire qui, ainsi qu'ils l’ont observé chez Cy-rtina rostrata, paraît être traver- sée par le septum médian, venant la diviser, disent-ils, d’une façon irrégulière en deux compartiments. Cet appareil serait, d'après eux, l'homologue du tube de Syringothyris. Les coupes, au nombre de plus de 500, que nous avons faites sur des crochets ventraux de plusieurs espèces de Cyrtina pro- venant de France, d’Allemagne, de Bohème, d'Angleterre et d'Espagne, nous ont montré qu'on pouvait, à l’aide d'échantillons dans de meilleures conditions, pousser plus loin l'étude de cet appareil interne et arriver à des conclusions plus précises. Les faits observés étant bien constants dans toutes les espèces que nous avons examinées, nous avons figuré de préférence les coupes faites dans un spécimen de Cyrtina hispanica d'Orb. (— C. hete- rocly ta var. À, de Verneuil) dont la taille, plus considérable que celle de tous les autres échantillons qui nous ont passé par les mains, nous à permis d'obtenir plus de 40 sections dans le seul sommet de la valve ventrale; cet échantillon a de plus l'avantage de provenir d’un gisement où la différenciation entre le remplis- sage interne et Le test est très accusée et en facilite l'étude. K KW AN jh MI HN Nue le 14 DD) SNS ns ! Qi NES CN Fig. 4. — Sections de l'extrémité apicale du crochet ventral de Cyrtina heteroclita, passant à la hauteur du foramen. Lorsqu'on use le crochet ventral suivant une série de plans per- pendiculaires à celui de l’aréa, on remarque d’abord la cavité pédon- culaire largement ouverte, et pourvue au fond d’une petite crête à sommet très aigu. Cette crête bientôt s'élargit, se renfle, et on y distingue alors une cavité centrale, à section piriforme, divisée en deux parties par une cloison médiane très ténue; cet appareil, que nous désignerons sous le nom de fichorhinum à cause de sa forme 246 D.-P. ŒHLERT 18 Mars et de sa disposition cloisonnée, est situé sur le prolongement du septum médian (fig. 4) dont il n’est d’ailleurs que la continuation !; Fig. 5. — Section de Cyrtina heteroclita commençant à atteindre le pseudodeltidium. le septum médian, bien que très mince, laisse cependant très nettement distincte dla ligne de séparation entre les deux lamelles qui le constituent, ligne qui se poursuit également dans la cloison divisant la cavité piriforme. Le septum est flanqué des deux plaques dentales qui sont venues s’accoler contre lui; par suite de cette disposition, le septum, dans cette par- tie de la valve, ne se trouvant plus en contact avec le manteau, cesse de | se développer en épais- Kig. 6. — Section très grossie du spon- seur, de même que les dylium et du tichorhinum. plaques dentales ne peu- vent plus s’accroître que du côté externe. Le septum médian, 1. La double tubulure qui existe dans le tichorhinum étant très petite, son remplissage ne s’est pas toujours effectué d’une façon complète à l’aide des matières étrangères qui ont pénétré dans la cavité palléale et dans le spondylium, et c’est pourquoi elle est souvent occupée par un dépôt de carbonate de chaux. Du reste, il arrive souvent, ainsi qu’on le voit en faisant des sections, que la coquille n’est remplie qu’en partie par des matières terreuses : argile, sable, ou boue calcaire; celles-ci n’occupent dans ce cas que la partie des valves qui se trouve la plus inférieure par rapport à la station, d’ailleurs variable, prise après la mort de l’animal et elles laissent alors au sommet une chambre vide dans laquelle l’eau char- gée de carbonate de chaux est venue former une masse cristalline. TOOI FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 247 bien que très mince, conserve cependant son individualité entre les deux plaques dentales et, en général, est très distinct dans les coupes, tout au moins dans la partie apicale de la valve ventrale; on y distingue même les deux fines lamelles qui le constituent sur toute sa longueur. Par suite de l’accole- ment des deux plaques dentales sur chacun de ses côtés, le sep- tum, ne se trouvant plus en con- tact avec le manteau, n’a pu accroître son développement externe et c’est ce qui explique son peu d'épaisseur. Les coupes suivantes montrent comment tout l’ensemble de cet appareil continue à recevoir des couches calcaires, qui viennent se dépo- ser sur les parois de la cloison : médiane en remontant un peu le long des plaques dentales : on remarque, dans l'épaisseur de celles-ci, une série de zones concentriques indiquant leur mode d’accroissement et faisant prévoir la façon dont elles vont se terminer contre le septum. Bientôt, en effet, on les voit s'amincir de chaque côté du tichorhinum, puis s’interrom- pre, en laissant seulement à la base de ce dernier, quelques traces qui disparaissent rapide- ment. Le septum reste alors seul, montrant toujours à son extrémité la section complète du tichorhinum qu'on voit encore pendant quelque temps et qui finit elle-même par deve- Fig. 5. — Section montrant à l’inté- rieur des plaques dentales, les traces des denis. Fig. 5 — Section montrant le mode d’accroissement des plaques den- tales et la continuité du septum entre celles-ci. nir incomplète par suite de l'interruption qui se produit dans 248 D.-P. ŒHLERT 18 Mars les parties latérales. Celles-ci disparaissent graduellement, ne laissant bientôt plus qu'une expansion de forme transverse à V4 ce ’ D : C F / 24 > | / \ 9. — Sections montrant la façon dont les parois du spondylium s'interrompent pour laisser le tichorhinum libre. Fig. ce] l'extrémité du septum et un léger renflement indiquant la base du tichorhinum ; ces caractères s’effacent à leur tour et il ne reste plus que la base du septum. ZE Îl | \ Fig. 10. — Sections successives du tichorhinum montrant la façon dont on le voit disparaître. LS Dans cette série de coupes, le pseudodeltidium n'apparaît qu’à la section représentée fig. 5, les coupes précédentes se’ trouvant au niveau du foramen. Le pseudodeltidium est nettement perforé et a une structure analogue à celle des valves ; il est limité laté- ralement par la base des plaques dentales qui ne présentent aucune trace de perforations. Quant à la suture médiane indi- quant la jonction des deux plaques deltidiales, elle a dû s’effacer et nous n'avons pu constater sa présence. Si l’on essaie, d’après ces coupes, de reconstituer la disposition IQOI FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 249 générale des cloisons, on voit tout d'abord que le sommet de la valve ventrale est divisé en trois compartiments, dont l'un, plus petit, forme la chambre pédonculaire, constituant un spondylium analogue comme forme à celui des Pentamères, mais en différant par sa structure ; en effet, chez ces derniers la cloison médiane est constituée seulement par les deux plaques dentales devenues parallèles et accolées, tandis que dans Cyrtina cette cloison a comme partie fondamentale un septum initial bien distinct, contre lequel viennent s’apposer les plaques dentales, tout cet ensemble s’augmentant par des dépôts latéraux successifs. _ Du fond du spondylium s'élève le tichorhinum, faisant une assez forte saillie, mais laissant toutefois dans la partie antérieure un large espace libre pour le pédonceule ; en se reportant aux coupes, on voit que les plaques dentales viennent s'appliquer contre la base du tichorhinum qui fait partie intégrante du septum dont il n’est que la continuation. Quant au rôle de cet appareil, il reste encore hypothétique; nous pensons, toutefois, qu'il pouvait servir à loger les muscles pédonculaires ventraux : ceux-ci cheminant graduellement vers l'avant, en même temps que s’allongeait cette sorte de cornet à double compartiment. Cette disposition de muscles, logés dans des cavités tubulaires plus ou moins développées, se retrouve d’ailleurs dans d’autres genres, et en particulier dans Douvillina (D. Duter- trei) parmi les Articulés, et dans Trimerella (T. grandis) parmi les Inarticulés. L'identification faite par MM. Hall et Clarke, entre la chambre tubulaire de Cyrtina et le tube fendu de Syringothyris, ne nous paraît pas suflisamment établie, car dans le premier cas cet appareil est une dépendance du septum, tandis que dans l’autre il est produit par les plaques dentales ; de plus, la portion du tube de Syringo- thyris, placé à l'arrière de la cloison KT transverse, sa fente longitudinale, l’ab- sence de division interne, lui donnent Fig. tr. — Section trans- un ensemble tout différent (fig. 11); faute versale du crochet de la d'échantillons bien conservés, nous valve ventrale de Syrin- » à = : gothyris (Davidson). n'avons pu en étudier la structure, mais nous pensons d’après les figures qui ont été données par Winchell, Davidson, Hall et Clarke, que la cloison transversale peut être comparée aux deux callosités qui, chez Spiriferina, relient les plaques dentales entre elles pour former le spondylium (fig. 3): ces protubérances, ainsi que le montrent nos coupes, disparaissent assez rapidement dans ce dernier genre, mais chez certains Spiri- 250 ŒHLERT. — FOSSILES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA 18 Mars fères, Spirifer Verneuilli par exemple (fig. 12), elles ont une plus grande importance et se voient sur presque toute la hauteur de Fig. 12. — Section transversale de Spirifer Verneuilli. l’aréa, sous la forme d'une cloison transversale (fig. 12 a) qui se prolonge en deux crêtes aiguës (fig. 12b). EXPLICATION DE LA PLANCHE VI Fig. 1. — Spirifer Boulei, n. sp : gr. nat. Fig. 2 à 16. — Reticularia Dereimsi, n. Sp.; gr. nat. Fig. 19 à 34. — Cyrtina heteroclita Defrance, var. intermedia Œhlert; 17, gr. nat.; 18 à 3%, gross. 1 1/2. Divers spécimens, pour montrer combien cette espèce est variable, en conservant toujours néanmoins les caractères qui lui sont propres. Séance du 1° Avril 1901. PRESIDENCE DE M. L. CAREZ, PRESIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membre de la Société : M. Pierre Espinas, Licencié ès-sciences, présenté par MM. Haug et Gentil. Une nouvelle présentation est annoncée. M. Albert Gaudry présente à la Société géologique un tirage à part de la note sur les découvertes de Sokolki, adressée derniè- rement à l'Académie des Sciences par M. Amalitzky ; il montre en même temps des photographies envoyées par le savant géologue russe, et s'exprime ainsi : Je crois devoir appeler l'attention des membres de la Société géologique sur les fouilles que M. Amalitzky a entreprises dans le Permien du bassin de la Dwina supérieure à Sokolki, gouver- nement de Vologda, nord-est de la Russie. M. Amalitzky nous annonce qu'il a déjà découvert quinze à vingt squelettes de Pareiasaurus dont quelques-uns atteignent une longueur de 4 mètres, quatre squelettes de reptiles longs de 2 mètres, offrant de la ressemblance avec les Rhopalodontes, des ossements de Dicynodontes, beaucoup de Théromorphes nouveaux et probable- ment des Dinosauriens, enfin, quelques squelettes de Stégocé- phales (Melanerpeton et autres). Nous ne pouvions nous attendre à voir un pareil rassemblement de grands quadrupèdes dans un terrain qu'on attribue au Pri- maire, et nous sommes embarrassés pour dire ce qui marque la limite des Êtres primaires et des Êtres secondaires. Je crois être l'interprète des sentiments de nos confrères, en envoyant nos vœux à l’habile explorateur du Permien de Sokolki, pour la conti- nuation de ses étonnantes fouilles. M. E. de Martonne offre à la Société plusieurs brochures dont il est l’auteur : 1° Le levé topographique des cirques de Gauri et Galcescu (Massif du Paringu) (Extr. Bul. Societätii Inginerilor si industriasilor de Mine Bucarest. 1900, 42 p., carte au 10.000€). — 2° Contribution à l'étude de la Période glaciaire dans les Kar- pates méridionales (Extr. Bul. de la Soc. géol. de France, 1900). — 259 SÉANCE DU If AVRIL IQOI 3 Recherches sur la période glaciaire dans les Karpates méridio- nales (Extr. Bul. Soc. des Sc. de Bucarest, 1900, 60 p., 9 fig., 4 pl.). — {4° Sur la formation des cirques, communication faite au Congrès des Sociétés savantes à la Sorbonne en 1900 (Extr. des Annales de Géographie, X, 1901). -— 5° La Roumanie (Extr. de la Grande Encyclopédie, in-12, 92 p.). M. Emm. de Margerie présente, au nom des auteurs : MM. L. Duparc, L. Mrazec et F. Pearce, la carte géologique du Massif du Mont-Blanc. M. Aug. Dollot: Sur les travaux en cours d'exécution du Métropolitain, entre la Place de l'Étoile et la Place de la Nation, par les Boulevards extérieurs. Les puits de sondage creusés en 1900 sur les boulevards de la Chapelle et de la Villette et cette année boulevard de la Chapelle, aux abords du Chemin de fer du Nord, ont montré que dans cette zone, l'épaisseur du travertin de Saint-Ouen atteignait 20 mètres. Aux deux tiers de la hauteur il existe une récurrence marine, en deux couches, qu’on retrouve boulevard de Courcelles et boulevard de la Chapelle, en concordance d'altitude. Le gypse a été l’objet d’une exploitation intensive entre le Chemin de fer du Nord et le Chemin de fer de l'Est, dans le travertin. On a pu s’en rendre compte par les puits qui en ont traversé toutes les couches, d’une puissance totale d'environ 6 mètres, et d'anciennes galeries remblayées. Les fouilles de fondation des piles du viaduc, près du Chemin de fer du Nord, à l’ouest. ont permis de reconnaître la position exacte des marnes à Pholadomya ludensis, de la quatrième masse du. gypse et des sables verts. La quatrième masse du gypse est formée de deux couches : celle supérieure ayant o m. 93 et celle inférieure 1 m. 14 d'épaisseur moyenne, séparées par de petits bancs de marne, gypse, calcaire et sable, sur une épaisseur d'environ o m. 87. À l'est, entre le Chemin de fer du Nord et la rue de la Chapelle, les puits qui ont près de 30 mètres de profondeur, ont été descendus jusqu'à l’eau, qui correspond au niveau supérieur des sables de Beauchamp caractérisés en cet endroit par une couche calcaire fassilifère. L'altitude du sommet des sables de Beauchamp, boulevard de la Chapelle, concorde avec celle reconnue par un forage, boulevard de Courcelles. | Séance du 135 Avril 1901 PRÉSIDENCE DE M. E. HAUG, VICE-PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membre de la Société : M. Emile-Edouard Lonclas, Chef de gare à Ollioules (Var), présenté par MM. Peron et Michalet. Le Président souhaite la bienvenue à M. Carl Schmidt, Profes- seur de géologie à l’Université de Bâle. Le Président annonce que le Congrès national des Sociétés françaises de géographie tiendra, à Nancy, sa XXII session, du 1er au 5 août 1901. I1 donne lecture d’une lettre du Ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, l’informant que la Société royale de Londres vient d'entreprendre la publication d’un Répertoire international de bibliographie scientifique comprenant annuellement 17 volu- mes, dont quatre seront consacrés à la Minéralogie, la Géologie, la Géographie mathématique et physique, la Paléontologie. Le prix de chaque volume séparé variera entre les limites extrêmes de ro et 45 francs. M. P. Lory, présente deux notes : 1° Les cirques de montagne (Ext. Revue des Alpes Dauphinoises) ; 2° Sur les principaux éypes de vallées des Chaînes Subalpines dans l'Isère et les Hautes-Alpes, et sur leurs rapports avec la tectonique (Ext. Bull. Soc. Statistique de l'Isère). Le Président constate avec plaisir que des auteurs de plus en plus nombreux s'occupent de cette captivante question des cirques et de l'érosion glaciaire, qui, tout récemment, a fait l'objet de si beaux travaux de la part de MM. Richter, Penck, W. M. Davis et de notre confrère M. de Martonne. DÉCOUVERTE DE CALCAIRE A NUMMULITES, DANS LE PETIT SYNCLINAL DE LA GOURRE, PRÈS DE SÉDERON (DROME) par M. W. KILIAN Ce gisement, découvert par l’auteur, à 4o kil. à l'ouest de Sisteron et non loin du Mont Ventoux, est distant d'environ 65 kil. de l’affleurement nummulitique de Faucon (Basses-Alpes), décrit par M. Haug, le plus occidental qu’on connût jusqu’à présent dans les Alpes françaises. IL se compose d'assises verticales pincées dans les calcaires du Crétacé inférieur. Le calcaire de la Gourre est fortement -zoogène et cristallin, à rares grains de glauconite, il se délite en dalles et contient à côté d'Huitres et de Pecten indéterminables, de très nombreux et très beaux Bryozoaires, des Lithothamnium d’une conservation remarquable, des débris d’Echinodermes et de nombreux Foraminifères (? Gyp- sina, Textularia, Millioles, etc.) parmi lesquels des Nummulites de très petite taille, très souvent détruits par la recristallisation qu'a subie la roche. Reconnues d’abord, avec la plus grande netteté, dans des préparations (détermination confirmée par M. le Be Steinmann), ces petites Nummulites ont été retrouvées par M. Kilian, au moyen de la loupe, dans des échantillons quil vient de recueillir à la Gourre, au cours d’une récente exploration de cette localité, qu'il vient de visiter à nouveau avec le plus grand soin. Une note détaillée fera connaître les résultats de l'examen microscopique des nouvelles préparations de ce calcaire qui vont être faites et qui permettront peut-être de fixer définitivement l’âge du Calcaire à petites Nummulites de la Gourre qui est en relations avec des sables, des argiles bariolées et des marnes à galets calcaires analogues à ceux du gisement oligocène d'Eyga- layes, décrit par M. Paquier et peu éloigné de Séderon. On conçoit facilement l'importance qu'aurait pour l’histoire des mers éogènes dans le bassin du Rhône, la détermination exacte de ce lambeau marin situé dans une portion des Chaînes subalpines qui passait pour être restée en dehors du domaine maritime jusqu'à l’époque du Miocène inférieur. En tous cas, la découverte de cal- caire à Nummulites, près de Séderon, permet d'ores et déjà d’aflir- mer qu'il convient de reporter le rivage de la mer nummulitique bien plus à l’ouest qu'on ne l’admettait jusqu à présent. OBSERVATIONS STRATIGRAPHIQUES DANS LE NORD DU MASSIF DU VERCORS par M. P. LORY. On connaît la division longitudinale très nette du massif du Vercors en deux parties, délimitées par le pied ouest de l'anti- clinal de Fourvoirie, c'est-à-dire, sur la plus grande partie de la longueur de ce pli, par la ligne d’étirement qui l'accidente, la célèbre faille de Voreppe. Seule la partie située à l’est est au point de vue tectonique le prolongement de la Chartreuse. : Dans la partie de la bande occidentale comprise sur la feuille Grenoble au 80.000", la série stratigraphique présente nombre de particularités intéressantes, indiquées d'ailleurs depuis longtemps, pour la plupart, par A. Gras et Ch. Lory. Depuis le Portlandien, étage le plus ancien qui affleure, jusqu’à l'Urgonien, cette série est continue !. Je rappelle que la limite du faciès subrécifal à Polypiers et Chamacées, qui, au sud de l'Isère, se dirigeait vers le sud-ouest à l’époque du Portlandien et du Ber- riasien (calcaires de l'Echaillon), se déplace au Valanginien moyen: jusqu au sud de Saint-Gervais ces calcaires blanes massifs, oolithi- ques par places, forment une intercalation puissante dans les couches du Fontanil. Après le dépôt des calcaires urgoniens supérieurs (Aptien inférieur), les lacunes et les ravinements apparaissent. C'est d'abord l'absence du Gargasien, complète dans la partie étudiée, puisque les « couches supérieures à Orbitolines » font défaut au nord de Romeyère. M. Paquier, qui a discuté avec beaucoup de sagacité les interprétations que l'on peut donner de cette lacune ?, adopte l’idée, formulée par Ch. Lory en 1852 5, d'un exhaussement du Vercors au Gargasien, suivi d’une dénudation ; mais il regarde une émersion comme peu probable, et effectivement les courants de transgression du Gault peuvent avoir suffi à produire un décapage général du fond. L'importance de cette dénudation a varié suivant les points : elle « n’a laissé subsister que de petits lambeaux des marnes à Orbitolites et a rongé d’une manière 1. J’ai résumé ses caractères les plus saillants dans les Not. géol. sur divers points des Alpes françaises (en collab. avec M. Kilian, 1900). 2. Diois et Baronnies, p. 215, 216, 221. 2922. 3. Chartreuse, p. 95. 256 P. LORY. — OBSERVATIONS STRATIGRAPHIQUES 15 Avril inégales les couches supérieures des calcaires à Caprotines ! ». Ces inégalités paraissent indiquer des ébauches de ridements, M. Paquier l’a fait observer (L. c., p. 222) pour les lambeaux de marnes, qui doivent être les traces de synelinaux. Inversement, les points où la masse calcaire supérieure de l'Urgonien est nota- blement réduite (ce cas existe, contrairement à ce que pense notre confrère), devaient appartenir à des anticlinaux. Il y a de ces points près de Feyssole et près de Veurey : dans cette dernière localité, le long de la Varaize, moins de dix mètres séparent le Gault de lits marneux à Orbitolines appartenant à l’assise moyenne de l’Urgonien. Le Gault inférieur, le calcaire dit « lumachelle », débute aux Ecouges par une plaquette à faciès zoogène spécialement net, chargée de Spongiaires (Cupulochonia ?) et d’Alectryonia du groupe de flabellata. Le grès phosphaté, qui plus à l’est repré- sente le reste du Gault, fait défaut dans cette bande au nord de Romeyère. D'ailleurs on voit l'épaisseur de la lumachelle elle-même varier de 7 à 2 mètres, et, en quelques points, elle manque entre l'Urgonien et le Sénonien. La lacune, qui, dans tous ces massifs subalpins du nord, existe sous le Campanien, descend donc ici plus bas que d'habitude; elle monte aussi plus haut, comme Ch..Lory l'avait mis en évidence ? : les premières cou- ches sénoniennes ne correspondent qu'au sommet des lauzes à Bryozoaires , ou même plus au sud, appartiennent déjà aux calcaires à silex # C’est la région occidentale qui a dû fournir les graviers de Gault répandus aux environs de Grenoble jusque dans cette seconde assise du Sénonien. Cette partie du massif a dû rester surélevée plus longtemps que le reste à la suite des mouvements antésénoniens. Les mouvements éogènes y ont été plus sensibles encore : il Y avait des saillies formées dès l’Eocène inférieur, alors que les crevasses de lapiaz, les puits, les grottes, creusés dans ce territoire 1. Ch. Lory, p. 7%. 2. Cf. notamment Descr. Dauphiné, p. 356. 3. Cf. P. Lory, B. S. G. F, G), XXVIIL, p. 781. La constitution de ces premières couches est bien voisine de celle des lauzes supérieures, figurée par MM Hovelacque et Kilian (Atb. de Microphotographies), et s’éloi- gne au contraire de celles des calcaires à silex, à petits Foraminifères et spicules, qui les recouvrent. — C’est par suite d’un lapsus, évident d’ail- leurs, que dans l’article ci-dessus il est question de la partie « orientale » du Vercors, au lieu de « occidentale ». 4: V. PAQUIER, op. €., p. 280. Note de M.V. Gauthier Brice Ceoll de France. Æ% Série. T. I. PI. III (Séance du 25 Février 1901) F.Gauthier del.et lith. Imp.Lemercier, Paris. No etlingia Monter ei. 0 de « D (2 (9) >erel 7 Bull. Soc. Géol. de France AUDE pie MD ATNP IE NNINT (Séance du 4 Mars 1901) Clichés Sohier Phototypie Sohier. Champigny-s/Marne Révision des Hvracothéridés européens nn. e D «7 dv. Bull. Soc. Géol. de France RSS ÉTie A I PIN UV À (Séance du 4 Mars 1901) Clichés Sohier Phototypie Sohier. Champigny-s/Marne Révision des Hvracothéridés européens Vote de DiC OD.-P. Ch lect BulMSoc Séol de Hrance, Le Série 34 De G. Pilarski imp. 27, Rue de Coulmiers, Paris Fossiles Dévoniens de Santa-Lucia : | Président : M. L. Carez. | Vice-présidents : : sn? se DEN Brook. . M: Derenis, . M. R. NickLËS. | Secrétaires : ; Po l'Etranger : à k M. di Pervinet ÈRE. | Vice- Secrétai ires : | Lee Je Gnaun. N ‘Archiviste : S M. G. one _ Membres du Conseil : MM. Enm. ie A. GAUDRY. NES H. DS MuniErR-CHALMAS. A. BoISTEL. JR P. TERMIER. ele Gustave DorLrus.. | 35e. 50 ex. | 75en. | 100 ex. | 150ex. | 200ex. | 230 ex. Vs 63 30 sr 20 rotr-ro| 12fe 35| 418.75 | 176. 40|20îr.78 ho |7 8 80| 9. 12 Golr4 95|179 » Eu 50 {5 D: -7 »|7 golro rof1r 35/12 60! 5:80) 15.10 | 6 10! 6. 7.90! 8 85| 9 86 90 13 85 | 4 45 RE) EE TT ra) 50 P. | bol 7» 8 25! 9 »|ro » TABLE DES MATIÈRES (FASGIQULE 2 TOME De Séance du 21 Janvier 1901 (suite) : È Pas E. Fournier — Etude sur la BAUME du Jura franc-comtois (14 fig,» - dans'le; texte)-sé ses ER PS RSS RS EE ESS CRE SET] A. JorrAup. — Contribution à l'étude de l'nfracrétacé à faciès vaseux … pélagique en Algérie -et-en Tunisie (4 fig et 2 cartes GEL Je Texte). MANIERE AT Aa PA CARE PER A SR ‘: T13 M. Mc. — Note sur le foncage du puits Arthur de Buyer Re par Ft la Société des houillères de Ronchamp (Haute-Saône) . . 1 Séance du 4 Février 1901 : Mere : Nécrologie : MG. CHAN. 4-0 ER PR Ress Bd | Toucas. — Sur l’évolution des Hippurites 22,2%. 0) EN Ex + Douvicé.—Surun Foraminifère d'Egypte communiqué par M: FouRTAU : (rectification à la communication du 17 Décembre 1900) . . .. "156. P. TermiER. — Études lithologiques dans les Alpes françaises. :. 155. P. Lorx. — Quelques observations dans la partie méridionale de la chaine de Belledonne (Alpes dauphinoises) (4 iig. dans le texte). “179. L, Tnior. — Sur la découverte d’un Rhynchoteuthis dans le Sénonien M di des environs de Beauvais (rs. dans le texte) =: 0 184 Séance du 55 Février 1901 : ee Proclamation de membres . ... ::. Re D ace PT On À deLAPPARENT.— À propos des découvertes de a. Amatit:ky en Russie . 185 E. Hävc,:Zriiren : = "Observations. M ET, Ni se 186 A. de LAPPARENT, — Découverte d'un Echinide nouveau dans le Sahara oriental. RES LS, PRADA NP SRE 186» L. BERTRAND.— Découverte d'un squélette de Mammouth dans l'Ariège = 187 = Kicran. — Sur la fréquence. de certains Rhaconhyllites dans le Lias AT Mmôgendes: Apes de SAVOURER E CMOS PRESS 187 SAcco — Sur les couches à Orbitoides du Piémont . : 1880 V. GAUTHIER. — Contribution à l’élude des Re Se (PL ‘I. ‘189 P. Fuicue. — Un nouveau Cycadéoidea (r fig. dans le texte). . . . : . 193 AC Séance du 4 Mars 1901: ee Proclamation de membres. . 2 4. 2. 0 DS A . 197 Stanislas MEUNIER. — Origine de l'argile à silex . , ei -197 Ch. Depérer. — Revision des Hyracothéridés européens Pi. IV). 199 P. LeBksconre. — Sur l'existence du Dévonien moyen dans PIllecet PE IQ RES a tabs den Cat ME EURE TANS PRIE Séance du 18 Mars 1901. : CS Fier. — Les travaux du Concilium Bibliographieum, . , . ... . . 296 -À. Toucas. — Sur l’évolution des Hippurites. . ... , :,.& En 227. Æ E. de MARGERIE. — Nolice sur le nouveau classement de la ‘bibliothèque pe de la Société géologique de France. .. 51... ee 229 D.-P. Œnrert. — Fossiles dévoniens de Santa-Lucia (Province de Ë - Léon, Espagne). Deuxième partie I. VD RIRES SUN S Séance du 1° Avril 1901 : : Proclamation d'un membre + : 5, ., 8. 7. RC oi Albert GAUDRY. — Sur les découvertes de M. Amalitzk 7 en Russie. RE ST E. de MARTONNr, Emm.de MARGERIE. — Présentations d'ouvrages : . 251. Aug. DoLrroT. — Sur les travaux en cours d'éxécution du Métropolitain de Paris, entre la Place de L'Étoile et la Place de la Nation, a parles boulevards extérieurs. . RS RO TN ERP ne HS DOI ES Séance du 15 Avril r90t: | Proclamation d'un membres. PEL PERLE 0e Le QD CE 1 208 W. Kicran. — Découverte de calcaire à AN. ummulites, dans le petit syn- clinal de la Gourre, près de Séderon (Drôme) . . : . , =... 254 P: ne. Observations siratigraphiques dans le Nord du Massif du : BPCOTS NS Vite NN ant D NE RUN EE NN RS MN AR ci, Liste des dons : D. Re Le Secrétaire-Gérant, L. GENTIL. 800 — Lille. Imp. LE BIGOT Frères. | ET RECONNUE COMME ROI DU 3 AVRIL, 1832) | Feuilles 17 ; 27 ; Liste des dons : c. PARIS ÈGE DE LA, SOCIÉTÉ GÉOLOG GIQUE DE FRANCE | 88, | rue Serpente, VI 1901 Le Bulletin parait par livraisons mensuélles Octobre 1901 | EXTRAITS DU RÉGLEMENT DE a ART. 2. — - L'objet de la Société est de concourir à D de. | Géologie en el et particulièrement de faire connaître le sol de la Franc. tant en lui-même que dans ses rapports avec les arts industriels et Va: ‘culture. fr _ Anr. 3. — Le nombre des membres de la Société est ilimité. Les Ho et les étrangers peuvent également en faire partie. Il n'existe aucune di tinction entre les membres. LR ART. 4. — Pour faire partie de la Société, il faut s'être fait présenter dans “une de ses séances par deux membres qui auront signé la présentation 1, 1e avoir été proclamé dans la séance suivante pes le Président et avoir ee le diplôme de membre de la Société. ë Arr. 6. — Le Trésorier ne remet le diplôme ne après l'acquittement du droit d'entrée. - à | Arr. 38. — La Société tient ses séances habituelles à Paris, de Novembre à Juillet. de _ ART. 39. — La Souiete se réunit deux fois par mois Œe 1 ‘et le Es lundi - du mois). 4 À # FE ART. 42. — Pour assister aux séances, les personnes on à Ra ep Société doivent être présentées chaque fois par un de ses membres. … : _ ART. 46. — Les membres de la Société ne pOvent lire devant elle aucun ne ouvrage déjà imprimé. ART. 48. — Aucune communication ou discussion ne peut avoir he su des objets étrangers à la Géologie ou aux sciences qui s’y rattachent. ART. 50. — Chaque année, de Juillet à Novembre, la Société tiendra une. ou plusieurs séances extraordinaires sur un point qui aura été PHARES déterminé. , LE ART. 53. — Un bulletin périodique des travaux de la Société est délivré gratuitement à chaque membre. - ART. 50. — ... Il ne peut être vendu aux personnes étrangères. à de Société qu'au prix de la cotisation annuelle. de — Anr. 58 — Les membres n’ont droit de recevoir que les nones re années du Bulletin pour lesquelles ils ont payé leur cotisation. Toutefois, Les volumes correspondant aux années antérieures à leur entrée dans la Soci É. leur sont cédés, après décision spéciale du Conseil et conformément à à un. AC atari déterminé. 5 __ Ar. 60. — Quelle que soit la longueur des notes ou mémoires insérés at à _ Bulletin, les auteurs pourront en faire faire à leurs frais un tirage à part. +. ART. 75: — Chaque membre paye : : un droit d'entrée ; 2° une cotisation - annuelle ? : Le droit d'entrée est fixé à la somme de 20 francs. Ce droit pourra être augmenté par la suite, mais seulement pour. les membres à élire. ee La cotisation annuelle est invariablement fixée à 30 francs. ; . La cotisation annuelle peut, au choix de chaque membre, être remplacée par le versement en capital d'une somme fixée par la Société en assemblée générale ?, qui, à moins de décision spéciale du Conseil, devra Ge placée. 5 PTE Les personnes qui désireraient faire partie de la Société et qui ne constant aucun membre qui püt les présenter, n'auront qu'à adresser une demande au Frnens en exposant les titres qui JR pRee de É admission. FL 2. Le Conseil de la Société, afin de faciliter le recrutement de nouveaux membres, autorise, dorénavant, sur la demande des parrains, les personnes ‘ désirent faire partie de la Société à n ’acquilter, la première année, que se eur droit d'entrée en versant la somme de 20 fr. Le compte-rendu sommaire FENTE des séances de l’année courante leur sera envoyé gratuitement; mais üs ne RER recevront le Bulletin que la deuxième année et dévront alors payer la coti- RÉNAR VEA sation de 3o francs. Ils jouiront aussi des autres droits et. DE ges : membres de la Société. ; rt 3. Cette somme est actuellement de 400 francs. sn E- RS nn RE ds 7 1901 DANS LE NORD DU MASSIF DU VERCORS 2917 émergé, s'emplissaient de sables réfractaires !. Car, entre autres raisons, il fallait des pentes notables pour permettre aux ruisseaux de transporter les gros galets de calcaires crétacés demi-roulés que l’on voit çà et là se mêler aux sables. Maïs c’est surtout la transgression burdigalienne ? qui met en évidence le redressement des couches : il est en général d'autant plus marqué (Ch. Lory a insisté sur ce fait) que l’on est plus loin des chaînes alpines. Il y a par endroïts, comme vers la scierie des Ecouges, une véritable discordance. Vers l’est, il devait y avoir un haut fonds vers Planfay (massif de la Chartreuse), où localement le substratum est l’Urgonien comme à l'ouest. En résumé, antérieurement aux grands plissements on constate une différenciation de la bordure occidentale par rapport au reste des massifs calcaires, les mouvements orogéniques y étant moins insensibles et l’affaissement à certaines époques plus tardif et plus lent. Manifestement, durant une grande partie du Secondaire cette bande s’est trouvée voisine du bord du géosyneclinal alpin. TECTONIQUE. — La tectonique des massifs subalpins au voisinage de la cluse de l'Isère est presque entièrement bien connue. Voici cependant quelques points que je puis signaler : 1°. Une faille, du système de celles qui ont déterminé l'emplacement de la cluse, dédouble la barre valanginienne du Fontanil et devait délimiter, avec celle que M. Kilian a figurée sous Aïzy ?, un compartiment abaïissé transversalement. — 2°. Un curieux dédoublement se pro- duit dans le synclinal Veurey-Rencurel, au ravin de la Rivière, avec relaiement de la « faille » de Voreppe par une ligne d'’étire- ment extérieure. — 3°. Il y a dédoublement temporaire et dépres- sion transversale de l’anticlinal de Montaud au-dessus de Saint- Gervais : le cours inférieur de la Drevenne a emprunté cette dépression. — 4°. À l’est se place, au bord interne des massifs calcaires, un chapelet de dômes, ceux du Rocher de l'Ours, du Moucherotte, du Berluchon, séparés par les rentrants synclinaux, plus ou moins étirés, du col de l’Arc et de l'Isère #. La retombée du dôme du Moucherotte vers l’est est très visible, surtout du Peuil-de-Claix à Seyssins. Elle est tranchée orthogonalement, sans 1. Voir in KicrAN, Ann. Univ. Grenoble, t. X, l'exposé de cette formation des sables éocènes par ruissellement et décalcification.. 2. Elle amène d’abord dans l’ouest la formation de calcaires gréseux à Bryozoaires, très riches en Pecten præscabriusculus et P. du gr. de restitu- tensis. 3. Livret-Guide Congrès 1900, Exc. XII, PL. I. 4. D’après les observations de Ch. Lory, de M. Kilian et les miennes. 3 Octobre 1901. — T. 1. Bull. Soc. Géol. Fr. — 17 258 DISCORDANCE DU CAMBRIEN SUR LE PRÉCAMBRIEN 15 Avril en être autrement affectée, par l'extrémité nord, coudée presque à angle droit, de l’anticlinal linéaire de Saint-Ange !, ce pli se com- porte donc comme un élément tectonique postérieur. C’est un bon argument à l'appui de l’idée que j'avais émise déjà ? sur la structure de cette partie du Bord subalpin et de son voisinage : superposition de deux sortes d'éléments tectoniques formés successivement, des dômes ayant précédé, cas d'ailleurs si fréquent, les éléments linéaires qui constituent iei un petit faisceau déversé vers l’inté- rieur des Alpes. DISCORDANCE DU CAMBRIEN SUR LE PRÉCAMBRIEN PRÈS DE RENNES par M. F. KERFORNE La pénéplaine précambrienne de Rennes est limitée au sud par les hauteurs cambriennes de Pont-Réan. Malgré la longueur et la netteté topographique de la ligne de contact, on n'avait pu y constater encore la discordance signalée ailleurs entre le Cambrien et le Précambrien. Elle existe cependant et j'ai pu l’observer avec toute la netteté et la précision désirables. A 4 kil. 5 à l’est de Pont-Réan, un peu au nord de la bifureation des routes de Laillé à Bruz et de Laillé à Saint-Erblon, une carrière est ouverte à la limite des deux formations. La coupe ci-contre montre Ce qu'on y observe. Le Précambrien est repré- senté par des schistes argileux Fig. 1. — Discordance du Cambrien bleu-verdâtre, jaunâtres par sur le Précambrien au sud de , ï . Rennes. décoloration, entremélés de très nombreux petits bancs de grès argileux de couleur bleu-verdä- tre, en général assez foncée (— Grauwacke de quelques auteurs). Ces petits bancs sont bien calibrés et coupés de nombreuses dia- X, Précambrien ; C, Cambrien. 1. Pli signalé par M. Kilian, C.-R. Ca. g. pour 1895, p. 108. 2. Plis refoulés vers Belledonne. C.-R. Ac. Sc., 26 déc. 1898. 1901 DISCORDANCE DU CAMBRIEN SUR LE PRÉCAMBRIEN 259 clases perpendiculaires au plan de stratification ; par suite de cette disposition ils se débitent naturellement en petits paralléli- pipèdes plus ou moins réguliers ; on les utilise pour l'empierrement des routes. Quelques filonnets de quartz blanc laïteux's’observent chere: Ces couches dessinent un pli en S et plongent au sud. Dans la partie méridionale de la carrière, elles supportent sur leur tranche les assises cambriennes ayant même plongement mais une plus grande inclinaison sud. Le Cambrien est formé à sa base de schistes argilo-siliceux vert clair, à texture compacte et à schistosité à peu près verticale, faisant par conséquent un angle assez prononcé avec le plan de stratification. A quelques mètres au sud, dans une seconde petite carrière, on observe le passage de ces schistes verts aux schistes rouges typiques. Ce passage est graduel et présente des intercalations alternativement vertes et rouges ; la texture des schistes verts est la même que celle des schistes rouges. IL ne saurait y avoir aucun doute sur leur assimilation au Cambrien. En étudiant les premiers bancs reposant sur le Précambrien, on constate qu'il ne s’y trouve pas de poudingue comparable lithologiquement à celui de Montfort, Oignies, etc; mais, à une quinzaine de centimètres de hauteur dans le schiste se trouvent des petits galets empruntés aux bancs gréso-argileux du Précambrien sous-jacent. Ces galets sont très peu roulés ; quelques-uns ont la forme de parallélipipèdes à arêtes arrondies. Ces faits confirment la discordance observée et montrent qu’au début du Cambrien, les grès argileux précambriens étaient déjà coupés de diaclases et se débitaient en parallélipipèdes comme à l'époque actuelle. OBSER VATIONS GÉOLOGIQUES A SUMATRA ET A BORNÉO par M. Carl SCHMIDT I. — SUuMATRA Les traits généraux de la constitution géologique des parties sud de l’île de Sumatra sont particulièrement nets sur une coupe transversale de l’île allant du sud-ouest au nord-est, de l'île d'En- gano dans la mer des Indes, à l'ile de Bangka dans la mer de Chine, en passant par Manna au sud de Benkoulen, le volcan Dempo, Lahat et Palembang. (Voir la coupe p. 263). Toute cette région a été étudiée, d’une manière générale, par R.-D.-M. Ver- beck. Cet auteur a publié en 1881 une description topographique et géologique de la partie sud de Sumatra avec une carte à l’échelle de 1/500.000 !, et en 1897 une monographie de l’île de Bangka ?. La côte sud-ouest de Sumatra, ainsi que les iles qui longent cette côte, sont formées par des sédiments tertiaires renfermant de la houille. Ce Tertiaire, attribué au Miocène et au Pliocène, constitue au sud de Benkoulen une série de couches, plongeant au sud-ouest et s’élevant à l'opposé à une altitude de 300 m., pour venir buter le long d’une faille contre des couches paléozoïques fortement redressées. Cette zone bordière tertiaire de l’île a dans cette région une largeur de 30 kilomètres environ. La « chaîne centrale » constitue une région large d'environ 5o kilomètres, où nous trouvons des calcaires siliceux et des schistes paléozoïques fortement plissés, du granite et des roches volcaniques récentes. Ces dernières couvrent une grande étendue ; elles forment toute la partie nord-est de la chaîne centrale et supportent le Dempo, volcan en activité, de 3.176 m. de haut. Vers le nord-est comme au sud-ouest la chaîne centrale est séparée par une faille d’un porland tertiaire. À partir du bord de la chaîne centrale près de Lahat sur une longueur de 210 kilomètres, s'étend le bas-pays de Palembang, 1 Jaarboek van het Mijnwezen in Nederlandsch Oost-Indie. Jaargang X, eerste Deel 188r. 2. Ibid. Jaargang XXI, 1895. OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES À SUMATRA ET A BORNÉO 261 traversé par le Mousi et ses affluents. D’après la carte de Verbeck, tout ce pays est couvert par le « Zeediluvium » ou par le « Rivier, alluvium » ; ce n’est que dans le voisinage des montagnes dans le sud-ouest que la carte de cet auteur indique quelques affleure- ments isolés de Tertiaire et de roches éruptives. Grâce à des puits, profonds de 5 à 10 mètres, on peut constater presque partout, au- dessous d’une couche d’allupium ou de latérite, la roche en place, constituée soit par du Tertiaire, soit par des roches volcaniques. La plus grande partie est formée par le Néogène, dont les couches forment des plis plus ou moins redressés et arasés. Les couches que l’on peut attribuer au Miocène sont des cal- caires gréseux. On les trouve vers l’ouest en bordure de la chaîne centrale, mais j'ai pu les constater aussi, plus à l’est, dans le bas- pays, où elles forment, souvent accompagnées de roches éruptives, les noyaux des anticlinaux. C’est ainsi que le Miocène se trouve au Boukit ! Pendopo entre le Mousi et le Lematang, près de Mela- moum au sud du Lalang, et près de Bioukou à l’ouest de Palem- bang, où l’on a rencontré au-dessous de marnes pliocènes des cal- caires, probablement miocènes, métamorphisés au contact avec une roche éruptive. La plus grande partie de la région est occupée par des marnes, que nous envisageons avec Verbeck comme pliocènes. La puis- sance de ces marnes est au moins de 2000 mètres. On trouve disséminés çà et là, quelquefois en assez grand nombre, des fossiles tels que Conus, Fusus, Tellina. Des lignites associés à des grès, qui s’intercalent dans 1e marnes, sont assez répandus et forment des bancs ayant jusqu'à 5 mètres d'épaisseur. Ces lignites occupent localement des niveaux bien déterminés. — Les couches du Pliocène et du Miocène sont en parfaite concordance, et leur séparation est peu tranchée. La direction des plis du Néogène montre un parallélisme remar- quable avec la direction de la chaîne centrale. Dans les hautes parties de la résidence de Palembang la chaîne centrale forme un arc, qui est convexe vers le sud-ouest; au nord-ouest de la même résidence la chaîne centrale est dirigée vers l’ouest-nord-ouest. De même les plis du Tertiaire sont dirigés : E.-O. entre l'Ogan et le Lematang, S.E.-N.0. et S.S.E.-N.N.O. dans les environs du Mousi et du Rawas et enfin E.S.E.-O.N.0O. au sud du fleuve Lalang (Voir la carte de Verbeck). Au milieu des couches tertiaires du « vorland » on rencontre 1. Boukit (Boekit) veut dire « colline ». 262 C. SCHMIDT 15 Avril des massifs de roches volcaniques, qui n'ont plus la forme de cratères. Verbeck mentionne de semblables massifs dans le Miocène du « Goemai-Gebergte » au sud de Tebing-Tinggi dans le Pliocène entre le Enim et le Lematang à l’est de Lahat. Sur ce dernier point on voit surgir de la plaine une chaîne de montagnes boisées, dont la longueur du nord au sud est à peu près de 30 kil. et qui se termine vers le nord par le sommet pointu du Boukit Serillo (600 m.), dont l'ascension n’a jamais été faite. La roche du Boukit Serillo mentionnée par Verbeck ! est une andésite grise à hornblende et à augite avec une pâte microlitique. La hornblende verte est très décomposée et a donné, comme produit de décomposition, surtout de la titanite. La roche, prise en entier, contient 0,87 °} de TiO*, tandis que dans les éléments basiques seuls, dont la densité est supérieure à 3, la teneur en TiO* monte à 2,77 °}.. À peu de distance du Boukit Serillo, au Boukit Besar, j'ai trouvé des andésites à augite avec du Péridot, et j'ai vu dans les ravins descendant de ces montagnes des blocs d'une roche d’un aspect absolument dioritique. En outre des massifs éruptifs du Boukit Serillo et du Boukit Besar, la région possède un autre petit massif du même genre, que nous avons découvert au Boukit Pendopo, au milieu du pays tertiaire entre le Mousi et le Lematang, sur la frontière des dépar- tements de Mousi Ilir et de Tebing-Tinggi, à 130 kilomètres ouest de Palembang. La roche éruptive forme en ce point une petite cime arrondie, boisée, qui s'élève à r00 mètres au-dessus du pays, couvert de « Bosch ». J'ai pu suivre le contact entre la masse éruptive et Le Tertiaire seulement vers le nord et vers l’est. Au nord-est du Boukit Pendopo on rencontre les marnes du Pliocène, qui plongent à 10°-20° vers le nord-est et au pied de la colline même on voit surgir sur une longueur de 300 à 500 mètres les gros bancs de calcaires gréseux, miocènes, inclinés de 30° à 70° vers le nord-est. La partie du massif éruptif lui-même que j'ai pu étudier couvre une surface d’un demi-kilomètre carré à peu près, et sur cette petite étendue l’on trouve une très grande différentiation des roches. Au sommet de la colline, c’est-à-dire à une distance de {400 mètres de la bordure du massif, on trouve une roche à grain moyen holocristalline, qui a l'aspect d’une diorite (Var. D. Les éléments essentiels de la roche sont un labrador basique et le diallage, la texture est ophitique : nous avons donc au centre 1 LOC CU Apar20: ‘Soit ‘4 Soyuem ‘L ‘ sorrerquey soAndni9 soyooy ‘2 © sayreseq ‘saqu999r saArdnro S2W0Y “a ‘ So49Jtp0439d som) ‘d * sonbrozopyed sagsiyos ‘À £ imortoyjur ou9001 ‘x ueAow AUQ90TN ‘G ‘ MOHYANS 9U990IJ 19 2U9001[q “€ *000°00G°I/I 2I[9U9H — ‘EAJEUMS 9p pns np J9 EH8UEY 9P IJOI ‘Uo006 — 2P__ 2P7IOxuOoY ! UDSUIDT U9rpuU] UE 99 () LD MN RS o dure 1IWO JO 4 x Dr 5 ° Es UL 1 ñ CN Z = IT = = : Æ à s = _ ; _ : odopu2]-ny20g ' I 29709 - 15209 1 X 150077 Guvqtoey Juequele4 ep sÂeqj-seg > ee HNERREEST ui À ni À Dur FORTS 7 RNA AAA ail À e L Er AA Ÿ nr ZZNAESNNK ESS Y DD ON TJ ï ù | =. oUIY) eYPueg 9P 710179] Prnpr]- sure, 9 Z9 jt eysuesg 264 C. SCHMIDT 15 Avril | du Boukit Pendopo un gabbro ophitique. À une distance de °5o mètres environ de ce gabbro vers la périphérie du massif j'ai recueilli une roche verte, à texture porphyrique (Var. ID). L'élé- ment de première consolidation est un labrador, la pâte est holocristalline et se compose de bytownite, d’augite et de quartz. Je désigne cette roche comme porphyrite augitique à quartz. Partout où j'ai pu constater le contact de la roche éruptive avec le Miocène, j'ai trouvé des variétés, plus ou moins fraîches, qui ont un aspect franchement andésitique (Var. IID. On y distingue à l’œil nu, dans une pâte violacée, des cristaux de feldspath d’une longueur de 2 millimètres en moyenne. Ce feldspath, de première consolidation, est un oligoclase basique; l’autre élément du pre- mier stade est une hornblende décomposée. La pâte offre au microscope une fluidalité marquée, et se compose d'une matière feldspathique confusément cristallisée. La roche est, d’après sa composition minéralogique, une porphyrite à amphibole ou une andésite à hornblende. Les trois types de roches ont été analysés dans le laboratoire de M. Duparc à Genève. Voici les résultats de cet examen : Var. I Var. II Var. III SIO2 PRE LS EMURrES 45,15 53,21 67,35 ALORS 16,06 20,25 15,00 Fe OP ErUEr 5,23 1,99 3,76 REOARAMERAIMNTE ATEN 4,45 6,05 1,68 Mo OS Pas hr 12,74 1,68 1,05 CaO PME T ANS 10,79 6,04 1,83 Na OM E Te : 1,74 3,22 4,63 ROLE RATES 1,77 2,01 2,12 Perte au feu. . . . 2,88 4,49 2,83 100,83 99,44 100,85 Le gabbro ophitique (Var. 1) montre la composition moyenne des diabases, la porphyrite augitique (Var. ID celle des porphy- rites augitiques et des andésites, tandis que la porphyrüe à amphibole où l’andésite à hornblende (Var. ID se distingue des andésites les plus acides par sa faible teneur en chaux et se rap- proche des roches trachytiques. On peut présumer que cette liaison intime de roches diabasiques avec des types andésitiques et trachytiques se retrouve en d’autres points de l’île de Sumatra, par exemple dans le massif du Boukit Serillo et du Boukit Besar. Il en est de même, d’après Verbeck !, 1. Loc. cil. p. 118. 1901 OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES A SUMATRA ET A BORNÉO 265 sur le versant est de la montagne Amboung-Bras située à 100 kilo- mètres à l’ouest du Boukit Pendopo. Un troisième affleurement, de roche éruptive, au milieu du Ter- tiaire, est à signaler à 45 kilomètres à l’ouest de Palembang entre le Mousi et le Banjou-Asin. On y a observé sur une longueur de 20 kilomètres des sources de naphte, qui ont donné lieu à des son- dages pétrolifères. On a rencontré au-dessous de marnes, à 5o mètres de profondeur, des calcaires grenus, blancs et gris (calcaire miocène, métamorphisé au contact avec une roche érup- tive), puis vers 100 à 200 mètres une liparite, du type des névadites. Au nord-est du bas-pays de Palembang, qui s'étend sur le Tertiaire et des roches éruptives, est située l’île de Bangka, où l'on ne rencontre que des granites et des schistes paléozoïques fortement plissés. C’est ainsi que la continuation de la pénin- sule de Malacca vers le sud-est est formée par Bangka, Billiton et les îles Karimoun au nord de Java. Les eaux peu profondes du détroit de Bangka semblent tout d’abord former la limite entre le Tertiaire de Sumatra et les régions paléozoïques de Bangka. Verbeck ! indique l’île Lucipara, située très près de la côte de Sumatra, comme constituée par des grès paléozoïques et 1l sup- pose que la limite des roches anciennes vers le sud est voisine .de la ligne qui va de Lucipara à Kebatou. (Voir Xaart, N° 7. Verbeck. Bangka en Billiton). Mais à Palembang M. G. Fischer m'a fait voir des granites absolument identiques aux granites caractéristiques de Bangka. M. Fischer a trouvé ces granites dans le pays marécageux situé à 63 kilomètres à l’est de Palembang et 77 kilomètres à l’ouest de Lucipara. D’après cette observation il existerait donc au sud des grès paléozoïques de Lucipara et sur l’île même de Sumatra un nouveau massif granitique. La limite entre le noyau paléozoïque de l'archi- pel malais et la région du Tertiaire de l’île de Sumatra passerait donc par le bas-pays de Palembang et c'est là que nous aurions à admettre l'existence d’une grande faille. Au cours de mes recherches j'ai eu l’occasion de faire quelques observations sur la formation de la latérite. Pour pouvoir mesu- rer le plongement des couches du Tertiaire il fallait presque toujours creuser des puits à travers la latérite. C’est aïnsi que par exemple j'ai pu constater la présence, en place, des marnes grises 1. Geol. Beschr. van Bangka en Billiton, p. 53 et 83. 266 C. SCHMIDT 15 Avril sableuses du Pliocène en couches minces dès la profondeur de 4 mètres. Entre { mètres et 3 mètres de profondeur ces marnes ont une teinte jaunâtre ou rougeâtre due à la présence de l’oxyde de fer ; elles conservent néanmoins leur schistosité. De la profondeur de 3 mètres à la surface on rencontre une masse argileuse homo- gène d’un rouge ou d’un jaune très vif, c'est la latérite ordinaire du pays. J'ai fait faire dans mon laboratoire, par le Dr Hinden, l’ana- lyse de ces trois types de roches, et l’on a trouvé : I II III A la profondeur de. . . . 5 m. 3 m. 5 I M. SOL PEN Ne 68,66 69,55 73,50 AIO AR A ES 14,28 15,69 15,68 REZ OS PER SE UMARELER 4,69 3,46 3,87 MOMENT RE 2,16 0,58 0,18 Na ONE EME rte 0,26 0,09 KO APRES ne Ne 0,96 0,78 PERS AU EU à: Lo, 10,63 8,60 5,79 100,72 99,10 99,85 Je me propose de continuer l'étude de ces types en établissant le processus de la décomposition des marnes pliocènes, qui semble être de toute autre nature que dans les granites, dont la latériti- sation a été étudiée par M. Bauer. II. — Bornéo. Mes observations géologiques sur Bornéo se rapportent exclu- sivement aux côtes nord-ouest du « British North Borneo ». J'ai étudié, en particulier, les terrains de l’Eocène pétrolifère de Labuan et des localités voisines du Sultanat de Brunei. Th. Posewitz ! expose dans son ouvrage sur la géologie de Bornéo les traits généraux de la géologie de cette contrée; ces notions peuvent être complétées par les publications de J. Motley ? et de J. E. Tennison- Woods à. La région tertiaire forme au nord-ouest de Bornéo une zone bordière, le long de la côte, large de 60 à 100 kilomètres. Ce sont des schistes argileux, des grès, des conglomérats, qui renferment de la houille et sont pétrolifères. On les envisage comme éocènes. 1. Th. Posewrrz. Borneo, Berlin, Friedlænder, 1880. 2. J. Morrey. Report on the geological phenomena of the island of Labuan. Quart. Journ. geol. soc., 1853, p. 54. 3. J. E. Texnison-Woops. The Borneo coal fields. Vature, 1885. Vol. 3r. I9O1I OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES À SUMATRA ET A BORNÉO 267 Ces dépôts sont affectés de plis aux allures sinueuses maïs ayant en général une direction S.O.-N.E. Ce sont presque partout des plis droits, arasés. Le nord de l'ile de Labuan est traversé par un pli déjeté vers le nord-ouest. En beaucoup de points, on constate la présence de sources de naphte et de volcans de boue, dont l’affleurement est aligné le long de la direction des plis et dont la situation est sans exception sur les axes de ces plis. C’est ainsi que, sur l’axe d’un de ces plis, eut lieu près de la côte de la péninsule de Klias, à l’est de Labuan, une éruption boueuse, dont le résultat fut la formation d’une nouvelle île, le 21 septembre 1897. Cette éruption fut précédée de quelques heures par deux violentes secousses de tremblement de terre, dont le point de départ se trouvait probablement dans l’ile de Mindanao (Phi- lippines) et qui causèrent de grands désastres. Ce même ébran- lement fut ressenti jusqu'en Europe !. Le mécanisme de la forma- tion de cette île nous semble fort simple. Dans l’axe de ce pli droit, arasé, s'était amassée au milieu des couches sableuses une masse boueuse, mêlée de naphte et de gaz. Les pressions développées par des secousses sismiques ont poussé toute cette masse vers le haut, soulevant le fond de la mer peu profonde. L’île ainsi formée avait 230 mètres de long, 140 mètres de large, et une hauteur de 20 mètres. Le choc des vagues contre les matières meubles qui la constituent a déjà diminué son étendue et la fera disparaître en peu d'années. La formation de cette île est sans doute analogue à celle de l’ile Kumani, qui surgit en mai 1861 dans la mer Caspienne *. Les gisements de pétrole que j'ai étudiés et que l’on commença à exploiter dans l'archipel malais, il y a à peu près douze années, sont tous d'âge tertiaire. On les trouve dans l'Eocène, dans le Miocène et dans le Pliocène ; ils n'ont pas de niveau stratigra- phique défini et sont toujours liés à des couches sableusces, inter- calées dans des marnes ou des argiles. J'ai pu constater aussi bien à Sumatra et à Java qu’à Bornéo que les gîtes vraiment productifs sont toujours, sans exception, localisés dans l’axe d’anticlinaux surbaissés, dont les flancs possèdent un pendage maximum de 50° environ. 1. Voir : G. AGAMEMNONE. I terremoti nell’isola di Labuan (Borneo) del 21 settembre 1897. Atti R. Acad. dei Lincei, Roma, 1898. Rendic. Vol. VII, 2° seM., Œ. 155. 2 Voir H. AgBicx. Ueber eine im caspischen Meere erschienene Insel. Mémoires de l’Académie impériale des Sciences de St-Péterbourg, VII sér., DNS: F1800: Séance du 6 Mai 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président annonce deux présentations. Il fait part du décès de M. Henri Porteret, membre de la Société depuis 1806. En annonçant la nomination de M. René Zeïiller à l'Académie des Sciences, il se fait l'interprète des membres de la Société pour présenter ses félicitations à l’éminent paléontologiste. M. le D' Labat offre à la Société une brochure dont il est l’auteur, intitulée: Climat et eaux minérales de l'Angleterre (Paris, Baïllière, 1900). M. J. Bergeron offre à la Société, au nom de M. le Dr Imbeaux, un volume qu'il vient de faire paraître et qui est le premier d’une publication sur L'alimentation en eau et l'assainissement des villes à l'Exposition universelle de 1900. Il porte en sous-titre : Compte- rendu des derniers progrès et de l'état actuel de la science sur ces questions, et il le justifie pleinement. En effet, l'examen de tout ce qui se trouvait disséminé dans l’exposition, concernant ces deux questions, n’occupe qu’une quinzaine de pages ; par contre le reste du volume, c’est-à-dire plus de trois cents pages, est consacré uniquement à l’alimentation des villes en eau. Le paragraphe concernant la provenance des eaux est un vrai traité sommaire d'hydro-géologie, écrit avec une compétence peu commune. M. le Dr Imbeaux, en effet, depuis 1897, époque à laquelle il fit paraître un ouvrage sur Les eaux potables et leur rôle hygiénique dans le département de Meurthe-et-Moselle, qui produisit une grande impression dans le monde médical parce qu'il apprit aux hygiénistes qu'ils pouvaienttrouver des auxiliaires dans les géologues, n’a cessé d’étudier la question de la recherche des eaux en France comme à l'étranger. Dans le présent volume il a résumé ses connaissances comme hygiéniste, comme géologue et comme ingénieur, pour le plus grand profit de ses lecteurs. M. J. Bergeron, à propos de la communication faite par M. C. Schmidt dans la dernière séance à laquelle il n’a pu assister, signale Le fait qu'en Roumanie les principaux gisements de pétrole SÉANCE DU 6 MAI IOO1I 269 sont situés également dans des anticlinaux. Son élève et ami M. Goldberg a été à même de le constater, en particulier dans le district de Campina. Il lui a paru intéressant d'attirer l'attention sur cette similitude des gisements en des régions si éloignées l’une de l’autre, la théorie de l’origine du pétrole ne pouvant s'établir ._ que par la comparaison des principaux gîtes entre eux. M. G. Dollfus présente à la Société géologique un opuscule de M. Rutot, actuellement président de la Société belge de géologie, d'hydrologie et de paléontologie, dans lequel il a examiné la cireu- laire ministérielle française récente sur l'instruction des projets pour l'alimentation en eaux des communes de France. Il observe que le programme très intéressant qui a été dressé pour cette étude est fort voisin de celui qui a été préconisé en Belgi- que par M. Van den Broeck dès 1890 et qui donne la première place à l'enquête géologique. C'est un grand honneur pour notre science, mais c’est aussi une tâche difficile, car la responsabilité des ques- tions pratiques qui va incomber aux géologues qui ont accepté ces fonctions s’en trouvera considérablement accrue. À moins de faire seulement du rapport géologique une simple formalité administra- tive de plus, le géologue sera forcé de donner un avis comprenant les voies et moyens nécessaires pour prendre possession de l’eau signalée, il devra indiquer les côtés défectueux des projets présentés et les corrections qu’il jugera indispensables d'y faire apporter. Mais ces études seront d'autre part pour le géologue un ensei- gnement très important, il groupera des détails souvent perdus, il aura entre les mains des moyens d'action matérielle : sondages, tranchées, nivellements, etc., qui lui font trop souvent défaut dans ses études théoriques habituelles et dont le manque se fait parli- culièrement sentir dans la construction des cartes. M. G. Dollfus offre à la Société, de la part de M. E. Van den Broeck, une brochure quil vient de publier sous le titre de Dossier hydrologique du régime aquifère en terrain calcaire. Rôle de la géologie dans les recherches et études des travaux d'eaux alimentaires. La circulation des eaux souterraines en terrain calcaire, rocheux ou crayeux est très différente de ce qu'elle est dans tous les autres terrains, et il est impossible d’en donner une théorie qui soit vraie dans tous les cas. M. Van den Broeck en développe des exemples tirés de l'examen du calcaire carbonifère de Tournai en couches un peu inelinées, du calcaire dévônien de Rémouchamp 270 SÉANCE DU 6 MAI IOO1 très redressé, de divers calcaires de Han-Rochefort qui sont très plissés. Fréquemment le bassin hydrologique ne correspond pas au bassin géographique et l'intervention d’une stratigraphie de détail est nécessaire pour déterminer l’origine réelle et la nature des sources. L'auteur qui a autrefois déjà si heureusement exposé le rôle du géologue au premier plan dans la recherche des eaux alimentaires, développe aujourd’hui son programme en faisant entrer en ligne de compte les méthodes nouvelles pour la recherche des parcours souterrains avec l’emploi de la fluorescéine, de la levure de bière, ou l’analyse des nitrates. Notre aimable vice- président tiendra volontiers des exemplaires de son travail à la disposition de ceux de nos confrères qui voudront lui en faire la demande, ils trouveront certainement dans ce petit volume, les questions de polémique mises de côté, une foule de renseignements qu ils arriveront à dégager utilement. À propos de la transmission de la note de M. Rutot par M. G..-F. Dollfus, M. G. Ramond informe la Société qu'il a échangé plu- sieurs lettres avec MM. Van den Broeck, Putzeys, Ingénieur des eaux de la Ville de Bruxelles, etc. Il résulterait de ces correspondances que, en Belgique comme en France —, on préfère toujours, pour l'alimentation des villes, une bonne eau de source aux eaux de rivière ou à celles des nappes superficielles, filtrées : le filtrage n'est qu'un pis-aller. Mais on le pratiquerait, paraît-il, en Belgique, dans d'excellentes conditions, et qui répondent aux prescriptions de la plus rigoureuse hygiène. M. G. Dollfus présente à la Société une courte note extraite du dernier numéro de la Feuille des Jeunes Naturalistes sur l'Étage cénomanien en Angleterre, d’après la classification nou- velle proposée par M. Jukes Browne. Il s’agit toujours de la place à donner à la Gaize (Étage vraconien Renevier). La conclusion actuelle de M. Jukes Browne est de la réunir, au sommet d’une part avec les couches de Warminster à Pecten asper et à la base, d'autre part avec les couches de Folkestone à Ammonites inter- ruptus et À. mamillaris (Allin d'Orbigny); il forme ainsi de ces trois horizons un nouvel étage auquel il a donné le nom de Selbor- nien. Nous avons déjà fait observer avec de nombreux géologues français que la fapne des couches à Am. rostratus (Gaïze) avait plus de rapports avec le Cénomanien qu’avec l’Albien et que cette limite était tracée déjà par la paléontologie, mais il y a plus, sion laisse de côté cet argument malgré sa valeur, il nous reste des raisons stratigraphiques considérables pour rejeter l'édifice com- SÉANCE DU 6 MAI IQO1I 271 pliqué que nous propose M. Jukes Browne, car son Selbornien se trouverait coupé en deux et au-dessus de son tiers inférieur, par une des plus grandes discordances, un des ravinements les plus intenses, une transformation géographique des plus vastes que nous ait révélé l'étude des terrains secondaires, je veux dire la transgression cénomanienne. Certainement la disparition de l’Albien et la mutilation du Cénomanien ne trouveront aucun écho. M. Léon Janet appelle l'attention de la Société géologique sur le rôle que vont être appelés à jouer les collaborateurs du service de la carte géologique de France, dans l'instruction des projets pour l’alimentation des communes en eau potable. Une circulaire de M. le Président du Conseil, Ministre de l’Inté- rieur, en date du 10 décembre 1900, a invité les Préfets à faire débuter cette instruction par un examen géologique. | Ultérieurement un géologue a été désigné pour chaque dépar- tement, sur la proposition de M. le directeur du Service de la carte géologique de France. On ne peut que se féliciter de voir la géologie intervenir officielle- ment dans ces questions; nous avons montré, l’année dernière, dans une conférence insérée au Bulletin ! combien il était regrettable de voir statuer sur des projets d'alimentation en eau potable sans étudier les causes de contamination auxquelles les eaux à capter pouvaient être exposées. Le résultat sera de montrer rapidement les services que peut rendre une science, regardée quelquefois bien à tort par ceux qui ne la connaissent pas comme dénuée d'applications pratiques. M. E. Haug dépose sur le bureau la 726° livraison de la Grande Encyclopédie, renfermant un article sur le Silurien, qu'il vient de publier. M. G. Ramond offre à la Société, pour sa Bibliothèque, un ouvrage, publié par la Commission impériale du Japon à l’Exposi- tion universelle de 1900 : « Les Mines du Japon, rédigé par le Bureau des Mines (Ministère de l'Agriculture et du Commerce). » Ce volume renferme, indépendamment de nombreux renseigne- ments techniques, de courtes Notices géologiques et minéralogiques sur les principaux gîtes miniers de l'Empire du Soleil levant, des diagrammes, une carte générale, etc. Il est intéressant de constater les progrès si rapides du Japon dans la voie de la civilisation. 1. Voir) 3° série, tome XXVIIL, page 532, année 1900. SUR L'AGE DES SCHISTES DU ROZEL (MANCHE) par M. A. BIGOT Ces schistes dans lesquels M. Lebesconte ! a signalé son Montfortia Rhedonensis ne sont pas précambriens. En 1890 ? j'avais rapporté ces schistes au niveau des schistes de Saint-Lô, mais les explorations faites depuis pour la feuille «les Pieux » m'ont conduit à modifier cette opinion. Le rapport sur les explorations de 1898, inséré dans le Compte- rendu des collaborateurs de la Carte géologique * est en partie consacré à la discussion de cette question et à montrer que : 1° Les brèches porphyriques très cristallines de Saint-Germain- le-Gaïllard et Bricquebosq. signalées pour la première fois dans cette note, sont surmontées par les arkoses avec galets de roches variées qui forment dans la région la base du Cambrien. L’attri- bution au Précambrien des schistes qui bordent au sud ces arkoses, donnée comme douteuse dans le rapport, a été admise définitivement en 1899. 2° Les arkoses de la base du Cambrien sont recouverts par les schistes du Rozel, formant une large bande S.O.-N.E. qui s'étend jusqu'à Cherbourg où ces schistes deviennent sériciteux. 3° Ces schistes plongent au nord-ouest sous le grès armoricain. 4° La largeur de cette bande n’exprime pas la puissance réelle des schistes parce qu'elle est exagérée par des failles et des plis ; cette épaisseur ne serait d’ailleurs pas surprenante, puisque cet horizon schisteux correspond probablement à deux niveaux, l’infé- rieur schisteux, le supérieur gréseux (grès feldspathiques déve- loppés au nord du synclinal entre les arkoses et le grès armoricain). Les relations des schistes cambriens avec les arkoses et le grès armoricain sont particulièrement nettes dans la région du Rozel, comme le montre la coupe ci-jointe. Cet important développement de schistes n’est point spécial au bord sud du synclinal de Siouville. Il se montre sur la feuille « Cherbourg » où M. Le Cornu a rapporté au Cambrien les schistes de Hardinvast et Tollevast inférieurs au grès armori- 1. LEBESCONTE. Briovérien et Silurien en Bretagne et dans l’ouest de la France. B. S. G. F., (3), XXVIIL, 1900, p. 8x9. 2. Bicor. Archéen et Cambrien dans le nord du Massif Breton, 1890, p. 116. 3. B. Sere. Carte Géol., N° 69, avril 1899. SUR L'AGE DES SCHISTES DU ROZEL 0) cain, et dont les caractères lithologiques sont identiques à ceux des schistes du Rozel. Le faciès schisteux est aussi très déve- loppé sur la feuille « Barneville » où les schistes de Carteret, avec pistes d'Annélides (Falaise de Dennemont) et bancs de calcaires oolithiques (les Douits) ne sont séparés du grès armo- ricain du Bosquet que par une assise très réduite de grès feld- spathiques. Enfin, au centre du synclinal de la zone Bocaine, L aLande MH. o chet APE Ang Tars Beer Atee NS s5 CO SN - [l - SIL R j LS Te t + IHAMENR RDS È SR AT TER Sen ESA EUR RTE RER Sa 3 at X P 1 v3 dé = Xe, Brèches porphyriques précambriennes ; Sp, Conglomérats de base du Cambrien ; Sa, Schistes du Rozel; S!, Grès armoricain ; S?, Schistes à Calymmènes ; S%, Grès de May ; d?, Schistes et calcaires de Néhou; y; Granite ; ÿ*, Microgranulite ; F, Faille. particulièrement aux environs de Saint-Rémy, le faciès schisteux du Cambrien acquiert une grande puissance, et les dalles du Pont- à-la-Mousse présentent comme celles de Carteret des pistes d’Anné- lides et des bancs de calcaires oolithiques. Nous rappelons qu'Hébert a déjà signalé ! des traces organiques dans les schistes du Rozel qu’il rapportait aux schistes de Saint- Lô. M. Dollfus a fait également connaître dans les schistes des Moitiers d’Allonne (— Schistes de Carteret et de Rozel) des sortes de nodules qu'il a décrits sous le nom de Palæactis veluta et dans lesquels il a trouvé des articles de Crinoïdes. 1. B. S. G. F., (3), XIV, 1886, p. 733. 3 Octobre 1901. — T. 1. Bull. Soc. Géol. Fr. — 18 Séance du 20 Mai 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Sont proclamés membres de la Société : MM. Seguenza, Luigi, Assistant de géologie à l’Université de Messine, présenté par MM. Depéret et Carez ; Brouet, Chimiste de la Station agronomique de Laon, présenté par MM. A. de Lapparent et Stuer. M. L. Gentil offre à la Société un tirage à part d’une note très résumée sur la Stratigraphie du bassin de la Tafna (terrain pri- maire et secondaire) qu'il a présentée à l'Association française pour l'avancement des Sciences (Congrès de Paris, 1900). M. le Dr A. Labat offre à la Société, une brochure dont il est l’auteur, intitulée : Climat et eaux minérales d'Espagne. Dans ce travail l’auteur montre les rapports étroits qui existent entre le sol de l'Espagne, son climat et ses eaux minérales. Après avoir résumé les conditions climatériques et la struc- ture géologique de la péninsule il passe en revue les stations d'eaux minérales. ; Dans la région volcanique de Calatrava, Hervideros Fuente- Santa, eau alcaline gazeuse. La rareté de ce groupe d'eau est due à l'absence de volcans éteints analogues à ceux de notre Massif Central, aussi bien qu'au manque presque absolu des roches éruptives tertiaires. Orduña, Cestona, Molinar, etc., possèdent des eaux salées en connexion avec les ophites. Quelques-unes de ces eaux sont à la fois séléniteuses et sulfureuses. Le plus grand nombre des eaux minérales sont, comme l'avait pensé Elie de Beaumont, en relation avec les gîtes métallifères _si nombreux et si variés. Les sources salées et sulfureuses de Ontaneda y Alceda, Puente-Viesgo et Caldas de Besaya dans la province de Santander, Archena et Fortuna, près Murcie, sortent comme chez nous des terrains triasiques. La présence d’un grand gisement tertiaire de sel (chlorure et sulfate de sodium, gypse) dans les Castilles explique l'abondance des eaux purgatives : Loeches, Carabaña, Rubinat; on les recueille SÉANCE DU 20 MAI IOOI 275 en creusant des puits, ce sont des eaux de lixiviation. Elles ne sont pas comparables aux sources jaillissant de la profondeur ; au point de vue de l’origine elles peuvent être comparées aux eaux ferru- gineuses engendrées par le lavage des pyrites. Les eaux sulfureuses, le plus souvent froides, sont en grand nombre. On les trouve sur le versant nord Cantabrique. L'eau d’'Archena est à la fois chlorurée et sulfurée, association rare en France, aussi commune en Espagne qu’en Italie. Le versant pyré- néen espagnol est bien plus pauvre en eaux sulfureuses que le versant français. Viennent en dernier lieu, les eaux qui naïssent dans le gra- nite. Peu minéralisées, elles ont par contre, une température élevée et un débit abondant. La complexité des éléments des eaux espagnoles a forcé M. Labat à rejeter la classification chimique des auteurs, et à adopter la division en groupes régionaux en rapport avec la constitution géologique du sol. M. G.-F. Dollfus communique à la Société des échantillons d’un fossile très intéressant qu'il a reçu de notre confrère M. Welsch, de l'Université de Poitiers, par l'intermédiaire de Mr: la Comtesse Le Cointre, qui s’est dévouée à collectionner les coquilles fossiles du Miocène de la Touraine. Il s’agit de spécimens recueillis dans un gisement extrêmement limité situé vers la pointe de l’île d'Oléron (Feuille Tour-de-Chassiron de la carte géologique) et dont le niveau n'avait pu être précisé, c’est probablement l’espèce dont Marès, Beltremieux, Boissellier ont parlé sous le nom de Cardita Jouannett, mais c’est une espèce bien différente qui est la Cardita striatissima Nyst in Cailliaud, espèce abondante dans les sables tertiaires supérieurs de la Basse-Loire, et caractéristique du Miocène supérieur de cette région pour lequel j'ai proposé la création d'un étage Redonien (type à Rennes). Cette espèce n’est connue ni dans le Bordelais, ni en Touraine, nous ne la connaissons ni dans le Pliocène, ni dans les mers actuelles. Elle se trouve dans une série de gisements isolés qui, de l’île d'Oléron, se suivent en Vendée, à Challens et la Chapelle-Hermier (M. Wallerant); Palluau (M. Dumas); Vieille-Vigne, Montaigu (D° Mignen) ; Aigrefeuille (M. Vasseur) ; puis dans divers gisements des environs de Nantes, comme la Dixmerie, près Loroux-Botterau (MM. Bureau, Dumas, Caïlliaud, etc.). Puis à St-Clément-de-la-Place, près Angers (Bar- din); Sceaux, Thorigné, Coutigné, gisements autrefois explorés par Defrance; dans les grès ferrugineux de la Forêt de Gâvre 276 SÉANCE DU 20 MAI IQO1 (M. Davy): nous venons de la recueillir à Beaulieu. près Laval (M. Œhlert), puis à Apigné, près Rennes (M. Lebesconte) ; enfin elle est abondante à Gourbesville (Manche); elle est ainsi présente sur une étendue de plus de quatre cents kilomètres du sud au nord. J'ai examiné la faune de tous ces ilots et de quelques autres moins importants qui présentent une grande uniformité et j'ai pu déter- miner plus de 350 espèces dont un bon nombre sont nouvelles. Cette faune est bien distincte de celle de la Touraine sur laquelle elle repose, elle est distincte du Pliocène par ses tendances franche- ment méridionales (genres Cypræa, Conus, Voluta, Fusus, Pleuro- toma, Cerithium, etc.). Plus récente qu'aucun des gisements du Golfe bordelais, elle est plus ancienne que les dépôts pliocènes classiques de l’est de l'Angleterre et de la Belgique, c’est un terme miocène supérieur marin qui était mal connu jusqu'ici en Europe. Il reste dans le Pliocène : le gîte du Bosc d’Aubigny (Périers) et celui de Redon (Ille-et-Vilaine) respectivement dans le Cotentin et la Bretagne. M. G. Dollfus sur une question de M. Boistel qui lui demande quelle place doit occuper le nouvel étage Redonien relativement au Pontien, répond qu'il lui est très difficile pour le moment d'indiquer ce synchronisme ; il s’agit de bassins com- plètement étrangers les uns aux autres au point de vue strati- graphique, et sans fossiles communs. Il n’y a pas trace jusqu'ici dans l’ouest de couches à Congéries, cependant leur niveau ne lui paraît pas devoir être fort éloigné du Redonien, il y a seulement dans les fossiles de la Dixmerie appartenant au Musée de Nantes un fragment de Potamides qu'on peut rapporter au P. Basteroti et qui favorise cette ma- nière de voir. Sur une question de M. de Lapparent qui demande si ces dépots ne sont pas au niveau de l’Anversien de Belgique, M. Dollfus répond qu'ici encore nous sommes en présence de bassins très différents, car il estime que le détroit du Pas-de-Calais n’était pas encore ouvert et que la faune du Cotentin présente un aspect sensiblement plus méridional ; de tous les dépôts bel- ges ce sont des sables d'Anvers à Pectunculus pilosus que les dépôts de l’ouest se rapprochent le plus. Enfin M. Dollfus annonce avoir reçu une lettre de notre confrère M. J. Almera de Barcelone qui lui demande s'il n’est pas disposé à mettre la faune des sables tertiaires supérieurs de l’ouest au niveau du Sahélien d’Algérie, M. Dollfus pense SÉANCE DU 20 MAI IQOI SES que cette assimilation est probable, mais il se réserve de pré- ciser tous ces synchronismes lorsqu'il aura terminé la description de toute la belle faune qu'il a en mains. M. Bourgeat. — Sur un filon de minerai de zinc dans la Combe des Prés (Jura). J'ai l'honneur de signaler à la Société géologique un filon de minerai de zinc, que j'ai découvert récemment dans la Combe des Prés, au nord de Saint-Claude, dans le Jura. Si l’on veut bien se reporter à la note que j'ai publiée dans le Bulletin de 1896 (page 489 et suivantes) sur les particularités stratigraphiques et tectoniques de cette Combe, on remarquera, en particulier, dans la carte qui l'accompagne, qu'au nord-ouest du hameau des Près de Valfin, le Jurassique inférieur se trouve divisé en compartiments qui ont glissé horizontalement les uns à côté des autres suivant les lignes de décrochement. Ces lignes jalonnent, comme on peut le voir sur la même carte, ou des sources ou des puits perdus, dont la succession est réglée par le degré de perméa- bilité des couches. Jusqu'ici je n'avais remarqué, suivant ces lignes, que quelques traces de friction. Mais ce printemps, ayant suivi en détail la fracture qui sépare les deux compartiments À et B de ma carte, j y ai constaté une traînée d’argile rougeâtre, accompagnée de rognons de pyrite et d'oxyde de fer avec des blocs carriés d’un gris jaunâtre d’une grande densité. Frappé de leur ressemblance avec la calamine, j'en ai recueilli quelques-uns, que j'ai fait analyser aux laboratoires de notre Faculté libre de Lille par MM. Wavelet et Raquet. Tous les deux y ont trouvé du fer. de la chaux, de la silice, de l'argile, mais surtout une quantité de zinc qui peut monter jusqu’à 50 °/, et qui est surtout à l’état de carbonate. La traînée d'argile rouge qui contient ce minerai se montre d'une façon presque continue, sur une longueur d'une vingtaine de mètres et avec une largeur qui varie de quelques centimètres à 8o centimètres. Elle s'enfonce presque verticalement dans le sol et présente tous les caractères d’un filon. À son contact, le calcaire bathonien présente des veines de cristallisation manifestes. Comme par ailleurs il longe une cassure qui n’a pu se produire qu'au moment de la surrection du Jura, c'est-à-dire, après le Miocène, le remplissage de la fente serait postérieur à cette époque et la venue du zinc serait de date récente. Je me propose ‘étudier le fait plus en détail et de voir si les autres lignes de décrochement n'auraient pas des filons analogues. Séance générale annuelle du 30 Mai 1901 PRÉSIDENCE DE M. A. DE LAPPARENT, Président sortant M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. M. A. de Lapparent prononce l’allocution suivante : € MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES, « L'année 1900 a été marquée, pour la Société Géologique de France, par deux événements importants, bien faits pour signaler à notre attention cette dernière étape du siècle. « Le premier est la huitième session du Congrès géologique international, tenue à Paris à l’occasion de l'Exposition Univer- selle. Les plus éminents de nos collègues ont rivalisé de zèle et de dévouement pour assurer le succès de cette réunion qui, au lieu de se trouver noyée, comme on aurait pu le craindre, dans la splendeur de la grande fête, a revêtu au contraire son éclat exceptionnel. « C'était vraiment la France géologique qui faisait aux étran- gers les honneurs de ses richesses avec une abondante libéralité, vivement appréciée de tous nos hôtes. Notre Compagnie a pu s’y associer directement, dès l’ouverture du Congrès, par un acte spécial d’hospitalité qui a laissé les meilleurs souvenirs, et n’a pas peu contribué à établir, entre les congressistes, l’esprit de franche cordialité qu'on a vu régner parmi eux jusqu'à la fin. « L'autre événement est le changement de local qui, de la rue des Grands-Augustins, où nous avions fait un séjour de plus de trente ans, nous a amenés dans le Palais des Sociétés Savantes. C'est la quatrième fois, depuis sa fondation, que notre Société change ainsi de demeure, comme s’il était dans la destinée des géologues, voyageurs par essence, de ne pas pratiquer avec excès le culte des anciennes murailles. « Quelques appréciations qu’ait pu rencontrer cette mesure prise après mûre délibération par la majorité du Conseil, il est un fait que personne ne contestera, c’est le progrès réalisé pour ALLOCUTION PRÉSIDENTIELLE 279 l'installation de notre bibliothèque. Ce rare trésor, qui va s’en- richissant chaque jour, est enfin logé dans des conditions dignes de lui, et propres à en faciliter grandement l’usage, par l’espace et la lumière dont il est maintenant doté. « Or, s’il est incontestable que notre Société traverse des temps difficiles ; s’il est vrai que nos ordres du jour souffrent rare- ment de pléthore ; si la salle de nos séances, malgré son exi- guité, se montre toujours suflisante pour l’auditoire qui la fré- quente ; en revanche la masse de nos livres et de nos cartes subit un accroissement rapide et constant. Puisque cet élément était le seul en progrès, c’est à sa mise en pleine valeur qu'il convenait de tout subordonner. Les hommes de science qui vien- nent chaque jour y chercher des lumières ne se plaindront sûrement pas du nouvel arrangement. « Quant aux difficultés auxquelles j'ai fait allusion, elles sont inhérentes à la nature d’une société, qui évolue comme la science qu’elle personnifie, et ne peut espérer de vivre éternel- lement dans les mêmes errements. De même qu'aujourd'hui la plupart des gisements classiques des environs de Paris, ceux que nous exploitions avec avidité dans notre jeunesse, ont disparu sous des constructions et des boulevards, ainsi l’activité de nos collègues a dû se reporter sur des contrées de plus en plus loin- taines. D'autre part, le progrès même de la géologie a amené l’éclosion de centres scientifiques distincts, dont plusieurs n’ont peut-être pas gardé, dans leur développement, la mesure la plus propre à concilier les intérêts locaux ou spéciaux avec ceux d’une institution centrale qui, par son passé, mérite respect et gratitude. « C’est à nous, mes chers collègues, de nous ingénier à main- tenir, par nos constants efforts, la belle et féconde union qui a été si longtemps le principal privilège de la Géologie française. N'oublions pas que si celle-ci fait encore très bonne figure dans le monde, on le doit en grande partie aux traditions de ce centre d'activité commune, que nos fondateurs ont su établir il y a plus de soixante-dix ans, non pas en se contentant de copier les mo- dèles de ce genre qui pouvaient exister ailleurs, mais en impri- mant à la nouvelle fondation, par l’heureuse institution des réu- nions extraordinaires, un caractère tout spécial d'intimité et d'union. De cette façon, à force de se fréquenter au grand air tous les géologues français sont véritablement devenus des cama- rades, heureux de travailler ensemble sous le même ciel, et de discuter, dans la plus grande cordialité, les questions qui surgis- saient au fur et à mesure de leurs études. 280 A. DE LAPPARENT 30 Mai « Ne laissons pas se relâcher l’antique fidélité à nos réunions de quinzaine, où, pour trouver de l'intérêt, il n’est pas à la rigueur nécessaire d'apporter des communications nouvelles et laborieu- sement préparées. Ne suflirait-il pas qu'au plaisir de se retrouver en famille, vint se joindre celui de causer ensemble des questions à l’ordre du jour, avec la simplicité et l’abandon qui régnaient, dit-on, à l’Académie des sciences, à l’époque où le public n’y était pas admis ? € Laissez-moi prêcher pour l'attachement à cette coutume, dont j'ai pour ma part si bien goûté les avantages, en vous citant, comme le meilleur modèle à suivre, l'admirable exemple de notre président du dernier Congrès, M. Albert Gaudry. Membre de notre Société depuis cinquante-trois ans, il s’est fait un devoir de ne manquer aux séances qu’en cas d’absolue nécessité ; et je suis sûr qu il eût été aujourd'hui à sa place, sans le deuil aussi cruel qu'inattendu qui vient d’attrister son foyer. Nous serons unanimes à lui adresser, en cette occasion, le témoignage d’une sympathie d'autant plus profonde que, parmi les géologues, il n’en est pas un qui n'ait pu apprécier les mérites excep- tionnels, comme l’incomparable bienveillance, de la compagne dont l’appui lui est désormais enlevé. « Les deuils, hélas! tiennent nécessairement une grande place dans les devoirs que nous impose cette Assemblée annuelle. Du 1°" janvier 1900 au 1° janvier 1901, la Société a perdu 16 de ses membres. Je voudrais donner à chacun le légitime éloge qui lui est dû; mais vous me pardonnerez si je me contente ici d’une brève énumération. « Ge sont : l’abbé BARDIN, qui connaissait si bien les faluns de l’Armorique, et dont la perte prive l’Université libre d'Angers d’un précieux collaborateur ; M. H. Bécor; le docteur BEZANGÇON, dont la respectable et originale figure restera familière à tous ceux qui fréquentent le laboratoire de l'Ecole des Mines, héritier des richesses que ce patient et soigneux collectionneur avait accumulées durant sa longue carrière; le R. P. BLor ; M. CAMERÉ, inspecteur-général des ponts et chaussées, l’un de ceux qui, les premiers, ont vraiment débrouillé l’intéressante région de Nice ; M. Haxs Bruno Gæeinirz, le savant géologue saxon, l'actif cham- pion du Dy-as, inscrit sur nos listes depuis 1847 et qui plus d’une fois a marqué, par des témoignages explicites, son affection pour notre pays; MM. GROUSSELLE DE BLANCHEFACE et JAGor ; M. HUGUENIN, dont les consciencieuses recherches ont tant servi 1901 ALLOCUTION PRÉSIDENTIELLE 281 à élucider la question des calcaires jurassiques de Crussol ; le docteur PauLz MARËs, un des premiers pionniers de la géologie africaine ; M. MaAR10oN, de Marseille, dont le nom reste indissolu- blement lié à celui de M. de Saporta et à qui nous devons de si précieux travaux sur les flores tertiaires et crétacées de la région provençale et languedocienne ; M. ALPHONSE MrLNE-EpwaARDs, l’éminent directeur du Muséum, si fin connaisseur en Oiseaux fossiles, digne continuateur d'un père dont les paléontologistes gardent le nom avec reconnaissance ; M. Reverière ; M. Tarpy, l’infatigable ramasseur d'échantillons que tant de fois, au cours des excursions de la Société, on a vu charger ses épaules de poids invraisemblables pour y trouver la matière de communi- cations où les idées originales ne manquaient pas; M.Tuiéry, si prématurément enlevé quand il donnait de si bonnes espé- rances pour l'avenir ; enfin M. pe VassarT D'Hozier, l’un de nos plus anciens membres. « Les morts de 1901 appartiendront à mon successeur. Cependant il en est un que je ne saurais me résigner à ne pas saluer dès aujourd’hui de mon hommage : c’est notre doyen d'âge, et du même coup le doyen des géologues du monde entier, M. l'inspecteur général PArANDIER. Depuis 1833 il était membre de notre Société, et la verte vieillesse de ce contemporain de Thurmann nous laissait espérer que par lui nous aurions enfin la satisfaction de compter un centenaire parmi les géologues fran- çais. La mort vient de le prendre, il y a moins de huit jours, dans sa belle solitude d’Arbois, au moment où il achevait sa quatre-vingt-dix-septième année, sans qu'il ait connu de défail- lance ; en pleine possession, non seulement de ses facultés, mais de son zèle géologique, dont il donnait encore la preuve, il y a moins d'un an, quand il nous adressait pour notre bibliothèque, d'anciennes notes nous ramenant aux temps héroïques de la géologie jurassienne. Nulle perte ne saurait nous être plus sensible que celle de ce dernier représentant du groupe de nos fondateurs; et nul, j'ose le dire, ne la ressent plus vivement que votre président d'aujourd'hui chez qui la bienveillance du savant géologue franc-comtois évoque les plus anciens souvenirs auxquels il lui soit possible de remonter. « J'ajoute qu'à toutes les raisons qui peuvent porter votre Société à honorer la mémoire de son doyen se joint depuis hier un devoir étroit de reconnaissance; car nous venons d'être informés que le vénéré défunt n’avait pas oublié notre compa- 282 A. DE LAPPARENT 30 Mai gnie dans son testament, et à ce titre de bienfaiteur son nom figurera toujours sur nos listes. « Mais il nous faut écarter ces douloureux épisodes, pour regarder devant nous, en cherchant, dans l’activité de nos jeunes confrères, des motifs d'encouragement pour l’avenir. Ces motifs ne nous font heureusement pas défaut, quand nous considérons la liste de nos lauréats. Cette année, c’est à M. PAQUIER que revient le prix Fontannes, pour ses belles études sur les Baronnies du Diois. Le mérite de l’œuvre apparaîtra plus claïi- rement encore, si je rappelle que les deux concurrents, dont la Commission a dû examiner les titres du même coup, MM. Léon _ Bertrand et Douxami, avaient, l’un et l’autre, produit des tra- vaux entièrement dignes du prix. C’est avec le regret de n’en pouvoir accorder qu'un seul que la commission s’est prononcée pour M. Paquier, heureuse du moins de constater que, par la valeur du fonds comme par le fini de la forme, l'ouvrage du géologue dauphinois eut à coup sûr entraîné le suffrage du fon- dateur même du prix. « Si notre Société ne dispose pas, envers les travailleurs dignes d'encouragement, de toutes les ressources dont elle aïme- rait à se faire la dispensatrice, du moins se présente parfois, pour elle, des occasions qu’elle est heureuse de saisir pour récompenser les services rendus à la science. C'est ainsi que, cette année, la libéralité de notre confrère, M. le docteur LABAT, nous ayant mis en possession d’une série reliée de 25 volumes de notre Bulletin, le Conseil a pensé que le meilleur usage à en faire était d’en gratifier un de nos dévoués secrétaires. « Tous ceux qui ont passé par ce poste savent combien il exige de dévouement et de zèle. À coup sûr, après soixante-douze ans d'expérience, sommes-nous certains de rencontrer toujours ces vertus dans le groupe de nos jeunes confrères. Néanmoins les circonstances ne sont plus tout à fait les mêmes. Dans les ‘temps de florissante activité de notre Société, on pouvait se sentir suffisamment payé de ses peines par l’honneur de tra- vailler sous les yeux d’un Elie de Beaumont, d'un Constant Prévost, d’un Deshayes, d’un Verneuil, d’un Daubrée, comme aussi par la satisfaction de sentir son nom attaché à la publication d’un Bulletin d’où partait à chaque instant l'annonce de découvertes nouvelles. Peut-être aujourd'hui faut-il encore plus d’abnégation pour remplir des charges devenues d’ailleurs plus lourdes; et en 1901 ALLOCUTION PRÉSIDENTIELLE 283 cela j'envisage, non seulement les devoirs du secrétaire, mais aussi ceux de l’archiviste et du trésorier. « Il serait donc bon que, de temps en temps, la Société fût en mesure de reconnaître les services rendus, non certes par un salaire, mais par un témoignage effectif et tangible de sa gratitude. Le don du docteur Labat offrait une occasion d’inau- gurer ce système, et on a pensé que le bénéficiaire le mieux indiqué serait M. Brayac, dont l’activité a dû s'exercer durant une période assez dure et qui a réussi à rendre, à nos publi- cations, une exactitude toujours difficile à maintenir. Puissions- nous, dans l’avenir, retrouver de semblables occasions ! Puissent- elles même devenir assez fréquentes pour passer à l'état de constante pratique ! Quand on arrive à lâge où l’activité scien- tifique est forcée de se ralentir, quel meilleur emploi pourrait-on faire des collections longtemps accumulées du Bulletin, devenues parfois plus encombrantes qu'utiles, sinon de s'arranger de façon à les faire passer, comme un précieux instrument de travail, entre les mains de jeunes géologues dont elles stimuleront le zèle, en leur montrant que déjà leurs efforts sont appréciés ! « Permettez-moi, mes chers confrères, de m’arrêter sur ce vœu. Le moyen que je viens d'indiquer fait partie de ceux auxquels il nous est commandé de réfléchir, afin de ne pas laisser déchoir la Société que nous aimons. Cherchons à rendre de plus en plus solide le faisceau qui nous unit les uns aux autres, et qui a déjà cimenté tant de sérieuses amitiés. Aimons à venir ici, pour nous retremper à la fois au contact des anciens qui gardent nos traditions, et des jeunes entre les mains desquels passera un jour l’action directrice ; et que chacun de nous se fasse scrupule de nuire par des absences qui ne seraient que des oublis, au charme ou à l'intérêt de ces réunions de la famille géologique ». En terminant son allocution, M. de Lapparent salue la présence à l'assemblée générale, du vénéré M. Victor Raulin, devenu, depuis le décès de MM. Parandier et Geinitz, le doyen de notre Société. Il donne ensuite lecture du Rapport ci-dessous, et remet à M. V. PAQuiIER, la médaille du Prix Fontannes, qui lui est décerné. RAPPORT AU NOM DE LA SOUS-COMMISSION DU PRIX FONTANNES par M. À. de LAPPARENT La majorité de la sous-commission a été d'avis qu'il y avait lieu de donner le premier rang à M. V. Paquier, en raison de ses Recherches géologiques sur le Diois et les Baronnies orientales. Cette région offre l'avantage de permettre, en ce qui concerne le terrain crétacé inférieur, une analyse détaillée des zones paléon- tologiques, grâce à l’uniformité du faciès vaseux à Céphalopodes, attestant un mode de sédimentation mieux soustrait que partout ailleurs aux influences locales. De plus, l'observation du passage des couches ammonitifères du Diois aux assises urgoniennes du Vercors méridional doit fournir les éléments d'un parallélisme de détail entre ces formations d’allure si diverse. Toute cette tache, on peut le dire, a été parfaitement remplie par M. Paquier. Il ne semble plus maintenant qu’il doive rester de doutes, ni sur la succession des zones d'Ammonites du Ber- riasien, du Valanginien, de l’Hauterivien et du Barrémien dans la région Delphino-Provencale, ni sur le partage qu'il y a lieu de faire, entre le Barrémien et l’Aptien, des calcaires LOUER urgo- niens ainsi que des marnes à Orbitolines. Au cours de ses recherches, M. Paquier a su réunir d’impor- tantes observations sur la date d'apparition des différents types de Chamacés, notamment sur les premiers représentants authen- tiques du genre Caprina, que l’auteur fait remonter jusque dans l’Aptien inférieur, ainsi que sur ceux du genre Pachytraga, pré- curseur des Caprotines. Ces constatations paraissent destinées à exercer une heureuse influence sur la solution des problèmes que soulèvent les calcaires à Caprines du Texas et du Mexique. À ces descriptions stratigraphiques, très précises et présentées avec beaucoup de méthode, M. Paquier a, joint de très intéres- santes cartes schématiques, faisant connaître, depuis le Barrêmien jusqu'au Campanien, la distribution géographique des principaux faciés dans la région Delphino-Provencçale. L'ouvrage se termine par une étude tectonique entièrement neuve, qui fait ressortir l’allure des aires synclinales, si bien représentées dans la topographie par des dépressions elliptiques, et accuse l'indépendance des plis du Vercors relativement à ceux SÉANCE GÉNÉRALE, ANNUELLE DU 30 MAI 1901 289 du Diois, dont aucun d’ailleurs n'entre en contact avec les acci- dents ardesciens de la bordure du Massif central. Tous les éléments tectoniques de la contrée peuvent être définis comme formant les plus septentrionaux des plis de la Provence repris et chevauchés par les plissements alpins, tout en gardant les signes extérieurs de leur première origine. Tels sont les traits dominants de ce travail qui par la valeur des résultats obtenus, comme par l’ordre et le soin apportés à leur exposé, mérite de passer pour un modèle du genre. M. Paquier remercie la Commission du Prix Fontannes et la Société en ces termes : MEssIEURs, « Lorsque je parcourais les montagnes arides de la Drôme, j'étais loin de songer à la si flatteuse récompense dont vous venez de couronner mes efforts. Les remerciments que je vous exprime sont d'autant plus sincères que je considère le Prix Fontannes non seulement comme la plus haute consécration de mes études antérieures mais encore comme un gage particulière- ment précieux pour l'avenir. Je ne puis enfin oublier, en ce moment, que le mémoire qui a rallié la majorité de vos suffrages, a été élaboré dans le Laboratoire de Géologie de l'Université de Grenoble, où des savants tels que Ch. Lory et mon maître M. Kilian ont toujours maintenu si haut le niveau des études géologiques ». 286 SÉANCE GÉNÉRALE ANNUELLE DU 30 MAI 1901 M. V. Paquier fait, au nom de M. Zlatarski, de Sofia, et au ‘sien, une communication Sur l'âge des couches urgoniennes de Bulgarie. | Dans la vallée du Lom, aux environs de Bessarbov et de Roustchouck, on trouve sur de grandes surfaces un système de calcaires blanchâtres compacts à cassure conchoïdale alternant avec des calcaires blancs poreux, très tendres, souvent oolithiques et parfois à Orbitolines et à débris de Polypiers et d’Echino- dermes. On y rencontre Orbitolina discoidea À. Gras, O. conoïidea A. Gr., Hemicidaris clunifera Ag., sp., Janira aff. atava Rœm., Panopæa neocomiensis Leym., Requienia ammonia Goldf. sp. Ces calcaires de la rive droite du Danube passent latéralement au sud à des marnes et des calcaires marneux à Céphalopodes barrémiens qui ont fourni : Nautilus neocomiensis d'Orb., Macro- scaphites aff. Yvoani Puzos sp., Heteroceras Astieri d'Orb., Desmo- ceras difficile d'Orb., D. Charrieri d'Orb., Holcodiscus Caillaudi d'Orb., A. aff. Gastaldii d’Orb., Crioceras Emerici Lev., Cr. Hoheneggeri UhI. Cette faune est tout à fait barrémienne, et il n’y a aucun type bedoulien, il en faut donc conclure que les calcaires urgoniens de la vallée du Lom sont d'âge barrémien vraisembla- blement supérieur à cause de la présence d’Heteroceras. Vers le sud de la région occupée par des calcaires blancs on trouve une large bande de calcaires grisâtres compacts et plus ou moins marneux affleurant à Lovetch et à Tirnovo. On y rencontre des Rudistes, Matheronia Lovetchensis Zlatarski sp., M. Lovet- chensis var. Drinovi Zlatarski, des Orbitolina, O. discoidea A. Gras, O. conoidea A. Gr. Ils reposent sur des marnes calcaires à Heteraster oblongus d’Orb. et appartiennent aussi au Barrémien. M. Paquier compare ensuite les faunes de Rudistes urgoniens de Bulgarie et de Suisse à celle de France. En Bulgarie, les calcaires de la vallée du Lom à Requienia ammonia renferment, outre T'oucasia carinata, des Ichthyosarco- lithes, forme qui n’était pas signalée dans des assises plus anciennes que l’Albien supérieur. On y rencontre également un type de Requienia nouveau, chez lequel la valve supérieure est surélevée dans la région postérieure comme chez Toucasia. Les couches de Tirnovo et Lovetch renferment, outre les grandes Matheronia du gr. M. Lovetchensis, des Gyropleura de grande taille, tout à fait analogues à celles que fournit le Cénomanien supérieur de l’ouest de la France. On y recueille enfin des Pachy-- traga au moins très voisines de P. paradoxa Pict. sp. SÉANCE GÉNÉRALE ANNUELLE DU 30 MAI IOO! 297 Grâce à la complaisance de M. Renevier, l’auteur a pu s assurer que les Requienia à valve supérieure surélevée de Bulgarie sont fréquentes dans l’Urgonien suisse, mais en France la seule localité qui à sa connaissance en fournisse est Châtillon-de-Michaille. De même Matheronia Lovetchensis var. Drinovi ne se rencontre en France que dans les calcaires urgoniens inférieurs (Barrémien supé- rieur) de la Puyaz, près Annecy. Seunes et Kerforne. — Observations sur un gisement ter- tiaire des bords de la Vilaine aux environs de Rennes. Il ya quelques années, au moment de la construction des tram- ways départementaux, on a commencé à exploiter par dragages les alluvions de la Vilaine, non loin du gisement sablo-argileux d'Api- gné. À un certain moment la drague ramena des fragments sablo- gréseux à débris de coquilles marines et de nombreuses Ostrea qui furent recueillies par plusieurs personnes et notamment par M. Bézier, conservateur du Musée d'Histoire Naturelle de Rennes. Le propriétaire de la carrière, M. Rosetzki, m’ayant averti que les dragages étaient repris dans la direction des couches fossili- fères, j'ai été visiter l'exploitation avec M. Kerforne. D’après les données des dragages, nous avons relevé la succession suivante : a) Terre végétale et limon : r mètre environ. b) Graviers de la Vilaine essentiellement quartziteux : 4 à 6 mètres. — Ils descendent plus bas que le lit de la Vilaine. c) Suivant les points, la drague ramène tantôt des sables falu- niens souvent agglomérés, tantôt des blocs d’argiles noires présen- tant de nombreux petits galets quartzeux, gréseux ou schisteux. Les sables et les argiles renferment les mêmes fossiles ; cependant les sables sont plus riches en Ostrea, Arca, Pectunculus de grande taille. La faune est la même que celle du gisement d’Apigné dont M. G. Dollfus a entrepris l'étude : Ostrea aff. edulis, O. ind. ; Arca Noé, A. barbata, A. sp.; Pectunculus Deshayest, etc. ; Venus, Cardita, Cardium, Chama, ete.; Fissurella italica, Emarginula, Pleurotoma incrassata, Trochus, Natica, Nassa limata, Ancil- laria, Eulima inflexa, Voluta aff. Lamberti, Rissoa, Cerithium (Bittium) reticulatum, Dentalium brevifissum, Vermetus carinalus, Balanophyllia italica, Crrptangia, etc. Nous n'avons pas encore pu établir d’une façon certaine les rapports des sables et argiles en question avec leur substratum, mais ces dépôts sont certainement plus récents que les faluns de Bretagne dont les couches supérieures ont fourni, comme l’on sait, des restes de Mammifères : Mastodon, Dinotherium, Hipparion, etc. -288 SÉANCE GÉNÉRALE ANNUELLE DU 30 MAI IQOI M. G. Dollfus a eu l’occasion d'examiner au Musée de Rennes, avec MM. Seunes et Kerforne, l'Ostrea citée par ses auteurs et d’après ses notes elle doit prendre le nom d'Ostrea edulis Lin. var. ungulata Nyst. 1835 (Coq. et polyp. foss. Belgique, p. 325, pl. VIIT, fig. 8; pl. IX, fig. 8) découverte originairement dans le sable noir de Kiel, près Anvers. Cette espèce est inconnue dans les faluns de la Touraine, mais elle est abondante dans les gisements de la Loire-Inférieure comme la Dixmerie, le Pigeon Blanc, la Gauvinière, le Marché Giraud en Vieillevigne, etc., on la trouve également dans le Cotentin à Gourbesville, Rauville-la-Place (Lyell), Saint-Georges de Bohon, pouvant aider à caractériser le vaste horizon miocène supérieur dont j'ai parlé dans la dernière séance. J’ajouterai qu’un forage exécuté à Carentan par MM. Lippmann et C° a rencontré cette même variété de l’Ostrea edulis dans des conditions analogues à celle de Rennes, à 24 mètres de profondeur sous une série d’argiles grises sableuses, formant un lit de vingt centimètres d'épaisseur, au contact des marnes rouges du Trias, profondément ravinées en ce point. ÉTAT ACTUEL EN BELGIQUE L DE L'ÉTUDE DES CORRÉLATIONS GRISOUTO-SISMIQUES par M. E. VAN DEN BROECK. Cette communication a surtout pour but d'apporter à la Société la primeur des dernières observations relatives à l’état actuel, en Belgique, de l'étude de la Géophysique et de la Météorologie endo- gène, spécialement appliquées à la recherche des corrélations grisouto-sismiques. Il serait à désirer que ces études prennent une plus grande extension en France où, il y a déjà quinze ans, une première tentative a fourni de précieux éléments d'appréciation. Etant donné l'ampleur du programme des études de la Géophy- sique, science cependant née il y a à peine un quart de siècle; vu aussi la multiplicité des points de vue à traiter dans l'exposé des corrélations, étroitement liées, qu’elle évoque et qui intéressent à la fois le géologue, le physicien, le météorologue et bien d’autres encore, tels que le mineur, il ne peut être question d’entrer ici ÉTUDE DES CORRÉLATIONS GRISOUTO-SISMIQUES 289 dans les développements d’un exposé général, même synthétique. Les curieuses révélations fournies par l'étude des résultats obtenus par les pendules horizontaux et autres, destinés à la recherche des déviations de la verticale, comme de ceux obtenus par les instru- ments microsismiques et magnétiques pourront fournir la matière d’une communication ultérieure. Aujourd'hui, nous nous canton- nerons dans le domaine des corrélations paraissant exister entre certains phénomènes sismiques et les dégagements grisouteux. Cette étude a été entreprise par la Société belge de géologie, qui, en 1898, a fondé la Section permanente d'étude du grisou, consti- tuée en vue de la recherche des lois éventuelles de prévision des périodes d'activité grisouteuse et de danger minier. Les premiers travaux sur les corrélations grisouto-sismiques, ont été publiés en 1874 par M. M. S. de Rossi, en Italie. Depuis lors, de nombreux travaux sur ce sujet ont été publiés par MM. Davison, Millne et Walton Brown, en Angleterre ; de Chancourtoïs, Lallemand, Chesneau, F. Laur, Canu et Fortin, en France; Milne-: au Japon; Zenger, en Hongrie; Forel, en Suisse !. En Belgique enfin, la récente mise en discussion, en 1898, par MM. L. Gérard, E. Harzé, E. Lagrange et Van den Broeck, de la question des corrélations grisouto-sismiques avait été précédée, depuis 1887, d'appels et d’exposés dus à M. A. Lancaster et à divers autres auteurs et publicistes qui ont ainsi mis en lumière, depuis longtemps en Belgique, le vif intérêt qui s'attache à ces recherches de corrélations endogènes, que d’aucuns persistent toutefois à ne considérer que comme de simples « coïncidences ». Au point de vue expérimental et de la vérification scientifique, trois pays ont tenté des essais pratiques dans cette direction : l'Angleterre, la France et le Japon. Ce sont respectivement : l'insuffisance et la non appropriation des appareils, la décroissance locale de l’activité grisouteuse et une catastrophe ayant détruit les installations qui ont, à Marsden (Durham), à Hérin (Anzin) et à Takoshima, empêché la continuation normale des expériences. Celles-ci, malgré des conditions défavorables, ont fourni, à Mars- den comme à Hérin, des données irrécusables montrant non seule- ment la réalité de certaines corrélations, mais encore la possibilité 1. C’est l'Académie des Sciences de Paris qui, en 1887, a publié le texte de la « loi de Forel » disant qu’il faut redoubler de précautions contre le grisou les jours qui suivent un tremblement de terre dont l’aire sismique s’est étendue jusqu’au territoire de la mine à protéger. 3 Octobre 1901. — T. 1°. Bull. Soc. Géol. Er. — 19 290 E. VAN DEN BROECK. — ÉTAT ACTUEL EN BELGIQUE 30 Mai de trouver dans l'avertissement préalable microsismique un véri- table précurseur de l’activité grisouteuse. Dans le cas très net de ce genre, qu'il a signalé en 1898 (d’après M. Chesneau), dans sa confé- rence faite devant la Société géologique du Nord, à Béthune ! et qui est relatif à des phénomènes constatés en décembre 1886, simultanément à Hérin, à Marsden et en Belgique, M. Van den Broeck a rappelé, qu’en contraste avec l’avertissement microsis- mique fourni dans les deux postes français et anglais, la dépres- sion barométrique considérable qui a accompagné ces phénomènes endogènes, les a suivis et non précédés. Le maximum microsismi- que s’est montré, à Hérin, neuf heures avant le maximum grisou- teux, qui a été suivi à douze heures d'intervalle par le maximum de la dépression barométrique ?. Cette question des rapports existant entre les dégagements du grisou et les dépressions barométriques, qui précèdent parfois, en effet, certaines des manifestations de grisou * a donné lieu, en divers pays, à de vifs débats. Ceux-ci cependant eussent pu être évités si l’on n'avait pas voulu généraliser des observations s'appliquant à des cas très différents dans leur essence. Il est facile d'apprécier la différence profonde qui existe entre les conditions où se trouve le grisou à faible pression, et de débit relativement restreint, emmagasiné dans les déblais, remblais, vieux travaux, chantiers abandonnés, etc., et le grisou occlus, peut-être à l’état liquide ou solide, ou, en tout cas, en tension considérable, dans les pores du charbon, où le manomètre, appliqué aux trous de sonde, soi-disant purgeurs, le montre exister avec des écarts parfois considérables de pression pour de très minimes distances. C’est la détente brusque, le changement d'état de ce grisou (qui, sous cette forme, échappe aux variations de la pression atmosphé- rique), qui est le grand fléau du mineur et tel est surtout le phéno- mène dont il s’agit de rechercher les causes, sans doute multiples. 1. E. VAN DEN BroEcx. La Météorologie endogène et le Grisou. Causerie faite le 3 juillet 1898 à l’occasion de la session extraordinaire, à Béthune, de la Société géologique du Nord. Ann. Soc. Géol. du Nord, t. 27, p. 150-174. 2, E. VAN DEN BRoEGK. Les prévisions grisouteuses. Recherches prélimi- naires faites à l’occasion des « avertissements » de M. F. Laur. Analyse des faits et observations complémentaires relatives à l'exposé des données four- nies par les éléments magnétiques. Bull. Soc. belge de Géol., t. XII, 1898, Mém. p. 13-44. 3. E. VAN DEN BroEcx. Les manifestations grisouteuses et leur prévision dans ses rapports avec la Météorologie endogène et avec la Météorologie atmosphérique. Rapports lus au V* Congrès intern. d'Hydrol. médicale, de Climatologie et de Géologie de Liège, en 1898. 1901 DE L'ÉTUDE DES CORRÉLATIONS GRISOUTO-SISMIQUES 201 Grâce aux pertectionnements incessants apportés, dans les régions minières de la plupart des pays, aux facteurs matériels de l'éclairage, de l’aérage, du tir des mines, de l’organisation des travaux préparatoires et de la conduite des travaux d’exploita- tion, le grisou à faible pression, le seul qui puisse se montrer influencé dans ses phases d'activité par les dépressions atmosphé- riques, n'est plus aujourd'hui pour le mineur un ennemi bien dangereux. Mais il n’en est nullement de même pour le grisou renfermé à haute pression dans la roche, où on l'y trouve parfois dénoncé par le manomètre comme existant à 20, 30 et 40 atmos- phères et plus encore! L’ennemi en un mot, c’est le grisou des dégagements instantanés : ce fléau de certaines régions minières belges en particulier et qui se présente aussi, sous des formes parfois un peu différentes dans d’autres pays, comme les sudden outburst en Angleterre, les phénomènes de l'espèce observés en Allemagne et ailleurs ; fléau dont enfin certains charbonnages du bassin de la Loire, comme à Saint-Etienne, commencent à leur tour à être incommodés. C’est l'étude corrélative de divers phénomènes microsismiques et plus spécialement de certaines ondes ou vagues terrestres d’origine interne — décelées par les merveillenx instruments dont dispose actuellement la Géophysique, tels par exemple que le pendule horizontal triple — qui, plus encore que la répercussion directe des secousses sismiques proprement dites, paraît devoir constituer l'objectif des chercheurs en tant que ausculto-précurseur de l’exaltation grisouteuse. Les études et recherches de la Géophy- sique se trouvent ainsi intimement rattachées à celles des corré- lations grisouto-sismiques. Déjà grâce à la généreuse intervention de M. E. Solvay, M. Eug. Lagrange, professeur de physique à l’École militaire belge, a pu se trouver matériellement à même de réaliser le projet, conçu par lui, d’un observatoire souterrain de Géophysique, édifié à Uccle- lez-Bruxelles, organisé et outillé suivant ses plans. Il est à remarquer que récerament la Commission internationale de géophysique dont fait partie pour la France M. Kilian, de Grenoble, a décidé la création d’un réseau européen de postes de même nature et employant les mêmes instruments. De son côté, la Société belge de Géologie, à l’aide des ressources spéciales dont elle dispose à cet effet, par suite de multiples libé- ralités, s'occupe en ce moment, d'organiser le poste souterrain grisouto-sismique qu'elle avait, dès 1898, décidé d'établir dans les 202 E. VAN DEN BROECK. — ÉTAT ACTUEL EN BELGIQUE 30 Mai profondeurs du charbonnage grisouteux de l’Agrappe, près Mons. La récente catastrophe du Grand-Buisson, à Wasmes (Hainaut) a de nouveau attiré l’attention du public belge sur les utiles travaux de la Société. De nouvelles libéralités, dues à M. Beernaert, Ministre d'Etat et Président de la Section permanente d’études du grisou, ainsi qu’à d’autres donateurs, ont encore augmenté les ressources dont dispose la Société. Les généreux philanthropes qui, avec M. E. Solvay, constituent le Comité de patronage de la Section du Grisou, viennent de rendre à la science un nouveau service dont M. Van den Broeck est heureux de les remercier ici publiquement. M. le sénateur G. Montefiore-Levi, vient de mettre une somme de deux mille francs à la disposition du Comité du grisou, pour la réalisation d’un des principaux desiderata de la Société : l’organisation d’un poste externe géophysique et de comparaison, qui sera situé sur le bord méridional de la grande faille du midi, soit au bois de Colfontaine et à proximité du poste souterrain (à 819 m.) actuellement en organisation à l’Agrappe et situé au nord de la dite faille. Pour l'édification de ce poste à profondeur minière, l'Administration de la Société anonyme des Charbonnages belges, son éminent directeur M. I. Isaac et son personnel tech- nique (M. l'ingénieur Abrassart en tête) se sont mis à l'entière disposition de la Société belge de Géologie. De son côté, un autre donateur M. A. Urban, administrateur-directeur de la Société anonyme de Carrières de Quenast, outre l'octroi d'un don per- sonnel fort important, s'est engagé à faire édifier, organiser et outiller complètement un poste géophysique de comparaison, qui présentera cet intérêt spécial, exceptionnel même, d'être établi sur un massif cristallin éruptif, qui le mettra ainsi en relation directe avec les parties internes profondes de l’ossature du globe et avec leurs manifestations endogènes propres. Enfin, M. Ad. Greiner, le directeur général de la Société Cockerill, aidé par quelques amis, exploitants de houillères du bassin de Liège, se met à la disposition du Comité pour organiser de même, aux frais de ce groupe régional, un poste souterrain grisouto-sismique, identique à celui de l’Agrappe, et qui sera installé dans une mine grisouteuse du bassin liégeois, en même temps, peut-être, qu'un poste complémentaire et externe de comparaison. Ce magnifique et généreux élan, dans lequel l'initiative privée s’est largement vue aider par certains des pouvoirs provinciaux belges et qui permet actuellement à la Société belge de Géologie de réaliser le projet que lui avait soumis, il y a trois ans, M. Van I9O1 DE L'ÉTUDE DES CORRÉLATIONS GRISOUTO-SISMIQUES 203 den Broeck, constitue un réconfortant exemple dont la Belgique a le droit d’être fière et dont les résultats dépasseront peut-être un jour en intérêt humanitaire et économique tout ce que l’optimisme des initiateurs peut prévoir aujourd'hui. Quant à ceux qui doute- raient encore de l'opportunité de s'engager résolument dans ces voies nouvelles — mais dont la France peut s'honorer d’avoir, dès 1886, éclairé expérimentalement les premières étapes — on peut se contenter de leur répondre par ces paroles d'un collègue sceptique, éminent et haut fonctionnaire des Mines belges actuelle- ment en retraite et qui, tout en ne partageant pas les espérances des initiateurs de la Société belge de Géologie, a répété à l’occasion de nos recherches et de nos espoirs, cette noble pensée d'un illustre savant français, déclarant que celui qui, en dehors des sciences mathématiques, prononce le mot impossible, commet une impru- dence. En terminant sa communication M. Van den Broeck émet l'espoir que cette organisation en voie d'exécution en Belgique, d’un réseau d’observatoires géophysiques et grisouto-sismiques, destinés à l'étude des phénomènes endogènes affectant certaines parties du vaste bassin houiller franco-belge, aura sa réper- cussion et son extension, si désirable, dans Les parties françaises du bassin. Il l'espère d’autant plus que c’est dans l’une des fosses du charbonnage d’Anzin qu'a été fournie naguère la démonstration de l'existence réelle de certaines corrélations grisouto-sismiques et de la possibilité des prévisions espérées. Celles-ci se fussent mon- trées plus constantes et plus frappantes encore si l’on avait possédé alors les appareils spéciaux dont dispose la Science d'aujourd'hui et si, d'autre part, les dégagements grisouteux de la fosse d’Hérin, où se firent ces premières expériences, ne s’étaient pas graduelle- ment amoindris, au point de venir finalement se classer dans la catégorie de ceux, à très faible pression et de minime débit, qui échappent pour ainsi dire complètement à l'influence des actions endogènes et sismiques. Séance du 3 Juin 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président annonce une présentation. Le Président fait part à la Société de la reprise des cours pro- fessés par M. Zujovié, à la Faculté des Sciences de Belgrade. M. Haug annonce à la Société la mort du célèbre paléontologiste suédois, G. Lindstrôm, dont les magnifiques travaux sur les faunes siluriennes de l’île de Gothland sont connus de tous. M. Emmn. de Margerie présente au nom de M. le D' Francisco P. Moreno un exemplaire des Documents publiés par le (Grouver- nement Argentin sur la question des limites de la République avec le Chili (4 vol. in-folio). Cet ouvrage, où il n’est question qu’incidemment de Géologie proprement dite, renferme un grand nombre de renseignements nouveaux sur l’orographie de la partie australe de la Chaîne des Andes, et en particulier de superbes panoramas en similigravure. Parmi les faits d'intérêt général que ces planches mettent en évi- dence, on doit citer surtout une série de cas typiques de captures de cours d’eau, nés dans les plaines de Patagonie et actuellement tributaires du Pacifique, d’où résulte une fréquente discordance entre la ligne des points culminants et la ligne de partage, reportée à l’est des Cordillères. M. de Margerie dépose en même temps sur le bureau le numéro du 15 mai des Annales de Géographie, dans lequel M. L. Gallois a résumé ces publications en reproduisant les photographies les plus caractéristiques. M. G. Dollfus offre une brochure qu'il vient de publier inti- tulée : Note géologique sur les eaux de Rouen, lettre à M. Garnier, expert. Dans ce travail, il a examiné l’origine des grosses sources de la vallée du Robec qui ont été aménagées pour l’alimentation de la ville de Rouen, il y a une trentaine d'années, et qui sont actuelle- ment le sujet d’un procès. SÉANCE DU 3 JUIN 1OO1 205 Après avoir décrit la série des terrains des environs de Rouen, leur épaisseur, leur perméabilité, leur inclinaison, il a expliqué que la basse vallée du Robec coule en contre-pente de l’inclinaison géologique des couches. La région anticlinale formée par l'argile kiméridgienne est située à Saint-Sever sous la plaine basse de la rive gauche de la Seine, en face de Rouen; de ce faubourg, toutes les couches plongent suivant une inclinaison semi-circulaire vers le nord-est. La ville même est bâtie sur l’Aptien et le Cénomanien qui plongent dans la même direction. Les falaises au-dessus de la ville sont dans la craie turonienne, épaisse de 80 mètres, et la craie sénonienne apparaît seulement en arrière des crêtes pour s’incliner au nord sous le plateau, en augmentant progressivement d'épaisseur. Ce régime de pente au nord prend fin à Fontaine-sous- Préaux dans la vallée de Darnetal, et à Monville dans la vallée de Déville ; au-delà de ces points les couches remontent lentement au nord et atteignent le pays de Bray, après quelques faibles ondu- lations. Or, les fortes sources de Fontaine-sous-Préaux, correspondent à la ligne synclinale basse située entre les deux relèvements de couches, et en même temps à l’affleurement bas, au fond de la vallée, du Turonien moyen, des couches de craie marneuse à Tere- bratulina gracilis, les moins perméables de toute la masse. Il faut noter, d'autre part, que le bassin du Robec, en amont des sources, est absolument sec, que sa surface géographique est tout à fait insuffisante pour pouvoir fournir le volume d’eau débité (720 litres par seconde), de telle sorte qu’il est nécessaire de rechercher une origine souterraine assez éloignée pour les eaux de Rouen, en accord avec leur volume et la régularité remarquable de leur débit. L'auteur n'hésite pas à supposer qu’elles arrivent du pays de Bray, des environs de Sommery. Il n’y a d’ailleurs ni bétoires, ni avens, ni point d’engouffrement naturel des eaux sur les plateaux dans le voisinage. Les sources utilisées proviennent d'un cours d’eau sou- terrain, transversal, que la vallée a mis à découvert en s’appro- foudissant, elles n’appartiennent pas à son bassin hydrographique naturel. M. Léon Janet se demande si la couche à Terebratulina gra- cilis joue un rôle hydrologique aussi important que l'indique M. G. Dollfus. Il ne présente cette observation que sous toutes réserves, puisqu'il n'a jamais visité la vallée du Robec, mais il tient à faire remarquer que dans les régions relativement voisines de l’Avre, de l'Eure et de l’Iton, qu’il a étudiées en détail, la couche 206 SÉANCE DU 3 JUIN 1901 à Terebratulina gracilis présente un certain nombre de diaclases, qui la rendent perméable en grand, comme les autres assises de la craie. On voit, dans ces conditions, les eaux souterraines passer avec facilité du Sénonien dans le Turonien et le Cénomanien, et vice-versà. Il est peut-être permis de supposer que la vallée supé- rieure du Robec reste sèche tant que son thalweg se trouve au- dessus du niveau piézométrique de la nappe souterraine de la région, et présente une série de sources dès que ce thalweg se trouve au-dessous du niveau piézométrique. M. G. Dollfus ne peut accepter l'explication proposée par M. Janet et qui suppose, en principe, une uniformité dans la com- position de la craie qui n'existe pas en réalité, ne faisant pas entrer, non plus, en ligne de compte l’importante question de l’inclinaison des couches. Il est impossible de baser uniquement l'hydraulique de la région crétacée sur le plan d’eau des puits, il existe des cours d'eaux sou- terrains qui en sont indépendants, etc. Les principes posés par M. Janet ne permettent pas d'expliquer pourquoi le niveau piézo- métrique de la vallée arrive en affleurement à Fontaine-sous-Préaux plutôt qu’en quelqu’autre point. M. Lebesconte. — Sur la position des schistes du Rozel (Manche). Je suis complètement d'accord avec M. Bigot pour placer ces schistes (lie-de-vin à la base, verdâtres au sommet) dans le Cam- brien. Les Montfortia Rhedonensis, que j'ai décrits, ne viennent pas de ces couches, maïs des schistes inférieurs (bande de Saint- Germaïn-le-Gaillard) situés sous les brèches porphyriques, aussi ai-je eu bien soin d'indiquer dans ma note sur le Briovérien que ces fossiles provenaient des schistes légèrement micacés qui sont sous les arkoses et les brèches porphyriques au sud-est de la pointe Rozel. Ces schistes sont rangés avec raison par M. Bigot dans le Précambrien. ÉTUDE COMPARÉE DES SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES DE L’ISSER DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHONE PREUVES QUE LEUR FORMATION EST DUE A DES OSCILLATIONS EUSTATIQUES DU NIVEAU DE BASE par M. de LAMOTHE. Dans la note que j'ai publiée en 1899 sur les anciennes plages et terrasses du bassin de l’Isser !, j'ai cherché à préciser les pha- ses successives parlesquelles avait du passer ce bassin, depuis la fin du Pliocène marin, pour arriver à son état actuel; jai, en outre, établi, que les conclusions tirées de l'étude de l’Isser pou- vaient s'étendre à une partie au moins de la côte algérienne. La présente note a pour objet de montrer que des phénomènes com- parables, et même identiques, semblent s'être produits pendant le même laps de temps, dans des bassins très éloignés, tributaires de la Méditerranée septentrionale ou de la mer du Nord. Mais avant d'aborder cet essai de paléogéographie, 1l me paraît utile et même nécessaire de résumer très brièvement les faits constatés dans l’Isser, en insistant sur quelques points dont l'in- térêt ou l'importance n’ont peut-être pas été suffisamment mis en relief dans ma note de 1899, et en profitant de cette occasion pour rectifier quelques fautes d'impression et légères inexactitudes de détail qui s’y sont glissées. CuaprrRe [. — Résumé des faits observés dans l'Isser = 1° L’embouchure de l'Isser a conservé des traces très nettes d’une série continue de phénomènes alternatifs d’érosion et de remblai, dont les plus anciens datent de la fin du Pliocène marin, tandis que les plus récents appartiennent à l'époque actuelle *. 1. de LAmorue. Note sur les anciennes plages et terrasses du bassin de l'Isser et de quelques autres bassins de la côte algérienne. B. S. G. F., (3), XX VII, p. 257 et seq. 2. Consulter les feuilles de Ménerville et de Palestro de la carte géologique de l'Algérie à 1/50.000, et la planche III qui est jointe à ma note précitée, 208 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Le nombre de ces périodes alternatives d’érosion et de remblai encore observables, a été de six; elles sont marquées par six niveaux de cailloutis, formant pour la plupart des terrasses étagées, bien distinctes les unes des autres (fig. x). | Sidi Feredy “652 Fig. 1. — Coupe schématique de la vallée de l’Isser près de l'embouchure. y. Liparites et granites : x, Labradorites et andésites ; p,, Marnes bleues du Pliocène inférieur ; 1, Caïlloutis et plage de 200-205 m. (1 niveau) ; 2, Id. de 130-150 m. (2° niveau) ; 3, Id. de la haute terrasse (3° niveau) ; 4, Id. de la moyenne terrasse (4° niveau) ; 5 et 6, Id. des basses terrasses (5° et 6° niveaux) ; g, Galets roulés à 430 m. d’altitude. — La largeur de la zone occupée par les alluvions entre les deux massifs éruptifs est d'environ 13 kilomètres. Les altitudes relatives de ces divers niveaux au voisinage de l'embouchure !, sont exprimées par les nombres ci-après : TNMIVeAU LC EN NN EE RS ORAN 205 ME 2€ Er EN AA D AA LG SC CS 5) 3e A SARA Cp LE NSP en 93 à 95 4° A Pan Eat ce GTR Ar DOTE 55 à 57 5° UT RE RO PS AT TRE ER Er Lee 28 à 30 6° NC Me D HE AN 2 EN EURE 15 à 16m ? Il y a lieu de remarquer qu'entre les 3° et 4° niveaux il s’est produit un léger déplacement négatif horizontal du niveau de base qui a eu pour effet de diminuer l'altitude relative des terrasses plus anciennes; si l’on en tient compte, l’altitude relative du 3° niveau devient 98-100 m. Les terrasses sont surtout développées au voisinage de l’embou- chure où les principales (5°, 4° et 5° niveaux) peuvent se suivre pendant plusieurs kilomètres ; elles se morcellent en approchant 1. Dans tout ce mémoire, l'expression altitude relative signifie altitude au-dessus des eaux d’étiage du cours d’eau actuel. 2. L'altitude de ce niveau qui est en dehors de la vallée actuelle de l’Isser est prise par rapport au niveau de la mer. 3. Ces limites sont probablement un peu faibles; elles sont basées sur la détermination d’un seul lambeau, celui de Blad Guitoun. IOOI DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 209 de la région montagneuse et semblent disparaître un peu en amont de Palestro ; en même temps leurs altitudes relatives augmentent sensiblement. Ces altitudes augmenteront encore dans l'avenir, car l’Isser, qui ne possède pas dans la région de Palestro son profil d'équilibre et dont les pentes sont relativement fortes (4 à 5 millim. par mètre dans les gorges), continue à creuser son lit. 20 L’épaisseur primitive des nappes alluviales ne peut pour la plupart d’entre elles être déterminée avec précision, soit en raison des dénudations qu’elles ont subies (1° et 2° niveaux), soit parce qu'elles se réduisent presque toutes à une mince bordure, et que rien n'indique la largeur originelle de la nappe et surtout la posi- tion du thalweg correspondant. Cependant. en ce qui concerne le 2° niveau, la comparaison des cotes des bases et des sommets de tous les lambeaux que j'y ai rapportés, me conduit à penser que l'épaisseur a dû atteindre au moins 40 m. Pour le 5° niveau, dont il existe une section transversale presque complète !, l'épaisseur réelle a dû être très voisine de 35 m. Enfin, pour les 4° et 5° niveaux, les épaisseurs mesurées près du bord axial ?, c’est-à-dire du bord le plus rapproché de l'axe de la vallée, sont respectivement de 4o à 45 m. pour le 4° niveau, de 28 à 30 m. pour le 5°. Mais ces nombres sont des minima et il est fort probable que les épaisseurs maxima ont été supérieures de quelques mètres au moins. Vers l’amont, à Palestro, les épaisseurs observées paraissent diminuer d’une facon notable. 3° En l’absence de fossiles caractéristiques, j'ai été conduit par des considérations tirées surtout de l’état de conservation des terrasses et de leur groupement, à classer provisoirement les deux premiers niveaux dans le Pliocène supérieur, et les quatre autres dans le Pleistocène *. La terrasse du 3° niveau dont l’altitude au- dessus du thalweg est voisine de 93 m., serait par suite une haute terrasse ; celle de 55 à 57 m. (4° niveau) pourrait être appelée moyenne terrasse, et celles de 28 à 30 m. et de 15 à 16 m. (5° et 6° niveaux) représenteraient les basses terrasses. 1. de LAMOTHE. Op. cit., fig. 5, p. 274. 2, C’est le bord que les géologues suisses appellent externe, tandis qu’ils appliquent le qualificatif interne au bord qui longe les pentes de la vallée. Ces dénominations peu rationnelles me paraissent devoir être rejetées, car elles ne peuvent qu’engendrer des confusions. 3. de LAMOTHE. Op. cit., 1899, p. 288. 300 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Les cailloutis plus anciens que la haute terrasse correspon- draient aux graviers de plateau ou Deckenschotter de la vallée du Rhin. 4 Les 1", 2° et $° nappes sont nettement indépendantes ; elles se sont accumulées dans des lits différents comme direction, altitude et profondeur (fig. 1). Les cailloutis du 3° niveau (haute terrasse) sont également indépendants de ceux du 4° puisqu'ils occupent un chenal distinct. On a ici la preuve matérielle que non seulement le creusement de la vallée qui a précédé le remblayage n’a pas amené celle-ci à la profondeur du thalweg actuel, mais que son fond est même resté à près de 63 m. au dessus de ce thalweg !. Ce fond serait donc plus élevé de quelques mètres que la surface supérieure de la moyenne terrasse de 55 m., s’il ne s'était pas produit dans l’inter- valle un léger déplacement horizontal du niveau de base qui a eu pour conséquence le relèvement du thalweg actuel. Les 4°, 5° et 6° niveaux forment un groupe bien tranché; ils sont emboîtés partiellement. L'ignorance dans laquelle nous sommes de leur épaisseur exacte, ne permet pas de fixer d’une façon précise l'altitude de leurs bases ; il est probable que la base de la moyenne terrasse s'élevait à une dizaine de mètres au plus au-dessus du thalweg actuel et que celle des deux autres en était très voisine, peut-être même a-t-elle été plus basse. 5° Les haute et moyenne terrasses (3° et 4° niveaux) sont couvertes d'un limon fin, jaunâtre, très argileux, renfermant de nombreuses concrétions calcaires. L’épaisseur de ce limon a probablement dépassé 20 m. pour chacune d'elles. Je n'y ai pas observé de traces certaines de stratification: il est vrai que la plupart des coupes sont très mauvaises. Sauf de rares exceptions le limon semble faire défaut sur les autres niveaux, ou n’y être représenté que par une couche mince. Un limon également jaunâtre, présentant parfois des traces de stratification horizon- tale couvre le fond de la vallée de l'Isser depuis l'embouchure jusqu’en amont de Blad Guitoun ; l’Isser y a creusé son lit sur 8 à 10 m. de profondeur. Il diffère du limon des terrasses par l'absence des concrétions. 6° Les principaux niveaux de cailloutis se lient à leur extrémité aval à des plages, en général remarquablement conservées ; les 1. Voir dans ma note de 1899 la fig. 5, p. 274. T9OT DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 301 autres se terminent à des cotes qui concordent avec celles de plages ou de débris de plages situés dans le voisinage. Les altitudes de la mer correspondant à ces plages sont très approximative- ment données par le tableau ci-dessous : DAMIVEAU. . + ee à à à ce EE 900 4) 200 M: 2° M OR RE PTS MAP ELTO ÉD A ERA Ne ET ARENRNE ES D nf Ÿe 98 à 100 4° NT ONE SE NT LE e0 Oo 55 5° M AN lai ee tte DONNER 30 6° RE RC Re © ILES ue 16 15 à 17 Il n’est pas impossible qu'il y ait eu des plages et des niveaux de cailloutis plus élevés ; car j'ai trouvé à des altitudes de 350 et même 430 m. (fig. 1). des traces de plages qui me paraissent certaines !. Peut-être ces anciennes plages marquent-elles d’an- ciens niveaux de la mer du Pliocène inférieur, dont l'altitude, comme je l'ai montré, a dû être beaucoup plus grande que celle marquée par les marnes bleues et les mollasses ?. La plage de 15-17 m. se retrouve très nette sur un certain nom- bre de points de la côte algérienne. Au contraire, le niveau de cailloutis correspondant n'apparaît qu'exceptionnellement dans l’'Isser et dans les autres vallées. Cela tient à ce que le lit actuel de la plupart des rivières, occupe le mème emplacement que celui correspondant aux niveaux de 15 et de 30 m. On conçoit que, dans ces conditions, l'érosion qui a suivi la formation de la nappe de 15 m. en ait le plus souvent supprimé les traces dans toutes les vallées étroites parcourues par des cours d’eau puissants ou à allures torrentielles. La régularité même avec laquelle les différents niveaux de plages se reproduisent sur un certain nombre de points de la côte algérienne semble indiquer, indépendamment des conséquences que je développerai plus loin, que la Méditerranée est, depuis le Pliocène supérieur tout au moins, privée de marées. Nous verrons en effet dans le chapitre II que la concordance des altitudes des anciennes plages sur de grandes étendues est incompatible avec l'existence des marées. 7° Ainsi que je l’ai montré *, le lien qui existe entre les plages et les nappes alluviales dont les terrasses représentent les débris, et la formation des unes et des autres, ne peuvent s'expliquer que 1. de Lamorne. Op. cit., p. 268 et 297. 2. ID , p. 290. 3. Ip., p. 290 et seq. 302 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin par des oscillations verticales du niveau de base, c’est-à-dire de la ligne de rivage. IL est absolument impossible de lattribuer à une cause agissant vers l’amont comme on a tenté de le faire pour les terrasses de la vallée du Rhin. D’une manière générale, il semble que l’abaissement de cette ligne de rivage (mouvement négatif de M. Suess) ait été prédominant à partir du Pliocène supérieur ; mais ce mouvement négalif n'a pas été continu ; il a été périodiquement interrompu par des mouvements positifs d'amplitude plus faible. Chaque mouvement négatif a déterminé une phase d’érosion et d’approfondissement de la vallée; chaque mouvement positif a été au contraire la cause d’une phase de remplissage. L’épaisseur du remblai à l'embouchure marque à peu près l'amplitude du mouvement positif. Ploc.supT Pleistocene (Deckenschotter) à = £ £ RES À £ % Niveau de Niveau À S S CE 200-205m. de É n a E = $ Ÿ 200m. à 4 LS o Ÿ Ke] 130-I50m. © ÿ Ur è FAN , CA ë Ÿ y SRE y à LR L ÿ : © Ÿ à +» y & ù È Ve AO À HUE RS D Die à È ES (> Lit actuel \Z RS ER = R. d 100—105?17 : û D o sser I00m. Mvwveau de 12 rer MZ \ 7 Fig. 2. — Diagramme des oscillations verticales du niveau de base à l’embou- chure de l’Isser, pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène. — Echelle des hauteurs : 1 millim. pour 5 mètres. _ On peut représenter par le diagramme de la figure 2, la succes- sion de ces oscillations verticales du niveau de base à l’embou- chure de l’Isser !. Les parties en pointillé sont hypothétiques ; 1. Ce diagramme doit être substitué à celui que j'avais donné à la page 291 de ma note sur l’Isser; il est plus complet et quelques inexactitudes de détail ont été rectifiées. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 303 rien n'indique dans l'Isser ce qui s’est passé antérieurement au re niveau ; mais il semble, comme je l’ai dit plus haut, que la ligne de rivage ait été beaucoup plus élevée et qu'il y ait eu un mouvement négatif considérable après le Pliocène marin. D'autre part l'absence de sondages et de données précises sur les épais- seurs des nappes des 1er, 2° et 6Geniveaux, ne permet pas de fixer exactement l'amplitude des oscillations correspondantes. Toute- fois, il est probable, en raison de la largeur de la vallée que le substratum en aval de Blad Guitoun et jusqu’à l'embouchure, doit se trouver à une certaine profondeur au-dessous du thalweg actuel. Il n’est pas inutile de rappeler, à ce propos, que dans la Mitidja, des sondages nombreux ont établi que la vallée avait été creusée à près de 200 m. au-dessous du niveau de la mer, puis remblayée. L'état actuel parait correspondre à une période de stabilité relative de la ligne de rivage marquant, soit la fin d'un mouve- ment négatif, soit, beaucoup plus probablement, celle d’un mou- vement positif. En tous cas, il n'y a dans l’'Isser, aucune trace de déplacement historique ou récent de la ligne de rivage, abstraction faite des légers changements dus à des causes locales : courants, vents, apports du fleuve, etc. 8 Indépendamment des pariations verticales, le niveau de base a subi dans l’Isser des déplacements horizontaux de très faible étendue, et qui n'ont pas modifié sensiblement les lignes de rivage : celles-ci sont restées voisines et à peu près parallèles. On peut en conclure que la dépression méditerranéenne présentait déjà à la fin du Pliocène marin, le long de la côte algérienne, des pentes rapides et une profondeur notablement supérieure à l'amplitude des variations du niveau de base, et que la configuration générale de la côte n'a pas subi de changements sensibles depuis cette époque. 9° Le parallélisme des nappes alluviales des 3%, 4° et 5° niveaux et leur faible accroissement d'altitude jusqu'à Blad Guitoun prouvent que déjà à l’époque du 3° niveau, le fleuve avait à peu près réalisé un profil d'équilibre à pentes très faibles entre l'embou- chure et le débouché des gorges. Les oscillations ultérieures du niveau de base ont eu seulement pour effet d’abaisser ou de relever le lit de quantités sensiblement égales à leur amplitude. 10° Je terminerai ce résumé en appelant l'attention sur la longue durée qu'a dû exiger la succession des phénomènes constatés dans l’Isser depuis la fin du Pliocène marin. Il ne parait pas 304 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin douteux que les mouvements positifs ont dû s’accômplir avec une très grande lenteur. Un mouvement rapide aurait reporté brus- quement la ligne de rivage dans l’intérieur des terres, et le com- blement du golfe ainsi formé aurait donné naissance à des couches inclinées comme celles des deltas. Or, nulle part dans l’Isser, même au voisinage immédiat des anciennes plages, il n'existe de traces de cette inclinaison : les alluvions des différents niveaux y sont rigoureusement parallèles au thalweg. En ce qui concerne la vitesse des mouvements négatifs, je ne. vois aucun argument décisif à invoquer dans un sens ou dans l’autre. On remarquera cependant que l'intervalle entre un mou- vement négatif et le mouvement positif suivant, a dû être chaque fois suffisamment long pour permettre au fleuve de reconquérir son profil d'équilibre, au moins dans la partie inférieure de son Cours. CuapiTREe II. — Examen des difficultés que présente la comparaison des résultats obtenus dans l'Isser avec les observations similaires faites dans d’autres régions. Les résultats que je viens d'exposer ne sont pas spéciaux au bassin de l’Isser. Ainsi que je l’ai indiqué !, les lignes de rivage paraissent avoir subi, sur une partie notable de la côte algérienne, une même série d’oscillations verticales, synchroniques, et d’am- plitudes correspondantes à celles de l'Isser, qui ont également déterminé dans les vallées des phases alternatives d’érosion et de remblai. La manifestation sur des étendues aussi considérables et pen- dant une aussi longue période de phénomènes d’un rythme aussi régulier, est difficilement conciliable avec l'hypothèse de mouve- ments propres de la lithosphère, et on est par suite logiquement conduit à attribuer ces oscillations des lignes de rivage à des mou- vements alternativement positifs et négatifs de la surface de la Méditerranée et des mers en communication avec elle pendant la même période de temps :. Mais, si cette conception est exacte, si ces mouvements eusta- 1. de LAMOTHE. Op. cit., 1899, p. 297 et seq. 2. Observation déjà faite dans ma note sur l’Isser, p. 300. — Cette conclu- sion ne vise, bien entendu, que les mouvements qui ont eu lieu pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène, et je n’ai nuilement la pensée de l’étendre aux périodes antérieures. I9OI DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 305 tiques ont eu réellement lieu, on doit évidemment en retrouver les traces dans d’autres régions du globe, partout où des mouve- ments propres de la lithosphère, ou des causes locales, ne les ont pas effacées ou défigurées par la superposition de leurs effets. . On saisit immédiatement l'intérêt que présenteraient au point de vue géologique la recherche et l'étude comparée de ces traces sur un grand nombre de points du globe. Si, en effet, on pouvait établir que les lignes de rivage ont subi ailleurs que sur la côte algérienne des oscillations identiques à celles observées sur cette côte, et que les vallées correspondantes ont été le théâtre de phé- nomènes alternatifs d’érosion et de remblai comparables à ceux constatés dans l’Isser, on aurait le droit de conclure : 1° que des oscillations eustatiques se succédant dans le même ordre et avec le même rythme que sur la côte algérienne, ont affecté la surface des mers pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène ; 2° que les portions de la lithosphère où l’on retrouve des systèmes de terrasses régulières semblables à celui de l’Isser, sont restées relativement fixes pendant le même laps de temps: 3° enfin, que la formation de ces terrasses est due exclusivement aux oscillations du niveau de base et ne peut être attribuée, comme on a tenté de le faire, à des causes accidentelles ou locales, sans relation avec les variations de ce niveau. Il est inutile d'insister sur l'importance qu’auraient ces conclusions au point de vue de l’histoire géologique à partir du Pliocène supérieur. Malheureusement le problème, sous sa forme générale, n’est pas susceptible, actuellement du moins, d’une solution. On ne peut demander à un même géologue de le résoudre à l’aide de recherches personnelles, et, d'autre part, les matériaux nécessaires pour un travail de cabinet sont le plus souvent ou trop rudimen- taires, ou trop peu précis, ou même trop sujets à caution pour pouvoir être utilisés dans une étude dont les résultats dépendent entièrement de la précision des données. Les causes de cette insuflisance des documents concernant les anciennes plages et terrasses, sont assez importantes pour mériter un rapide examen ; leur exposé servira d’ailleurs à expliquer et à justifier la méthode suivie dans ce mémoire. 1° ]mpossibilité d'utiliser actuellement les matériaux fournis par l'étude des anciennes lignes de rivage. L'étude comparée des anciennes lignes de rivage ne peut con- duire à des résultats pratiques que si l'on parvient tout d’abord \ 5 Octobre 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 20 306 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin à déterminer dans chaque région, et pour chacune des lignes de rivage observées, le niveau moyen de la mer qui lui correspond. Or, il suflit d'examiner les phénomènes actuels pour se rendre compte des obstacles qui s'opposent, dans la plupart des cas, à cette détermination. Les traces de l’action de la mer (cordons littoraux, plateformes Lttorales) ne correspondent qu'exceptionnellement au niveau de la mer qui les a produites. Dans les mers sans marées, les écarts entre les formations littorales et le niveau de la mer sont en général très faibles : J'ai cependant constaté, en Algérie, que l'amplitude totale de ces écarts pouvait accidentellement atteindre 4 à 5 m. 1. Il en est tout autrement dans les océans à marées. Plusieurs plages peuvent correspondre à un même niveau moyen de la mer, et Les écarts entre la plateforme des basses mers d’une part, celle des hautes mers et le cordon littoral des tempêtes d’autre part, variables sur chaque point avec l'amplitude des marées, dépassent fréquemment 10 mètres ; en outre, ces variations peuvent sur des points très rapprochés d’une même côte, passer d’une quantité voisine de zéro au maximum *. D'un autre côté, l’amplitude des marées est elle-même liée à la configuration des côtes, à la répartition des terres et des mers, à la profondeur de ces dernières, et toutes ces particularités doivent nécessairement varier avec chaque modification de la ligne de rivage et par conséquent, avec les mouvements positifs ou négatifs. Enfin, si les mouvements eustatiques ont été lents, comme certains indices permettent de le supposer, il a pu se former, surtout pendant les périodes négatives, des plateformes littorales auxquelles ne correspondent dans les vallées aucune terrasse. La série des plages pourra par suite présenter localement un nombre de termes plus grand que celle des terrasses. Ainsi, même dans les cas où les traces des anciens rivages seraient intactes, où la dénudation, le ruissellement sur les pentes, la présence d'anciennes dunes, n'auraient pas altéré leurs altitudes originelles, la comparaison des observations faites dans des régions éloignées sera le plus souvent à peu près impossible, tant que l’on ne parviendra pas à éliminer la part d'influence des marées dans les altitudes observées, élimination qui jusqu’à présent, n’a, je crois, jamais été tentée. . de LAMOTHE. Op. cit. 1899, p. 299. 2. À l’entrée de la baie de Fundy, l'amplitude des marees est Semlernent de 2 m. 70; elle atteint 16 m. au fond de la baie. 1001 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 307 Il convient d’ajouter que les altitudes ont été rarement déter- minées par des procédés rigoureux, sauf dans les pays qui possè- dent des cartes à grande échelle (1/25.000 au moins) et que, par suite, les nombres obtenus n’offrent pas, en général, la précision nécessaire. On ne peut guère espérer, dans l’avenir, combler entièrement ces lacunes. Dans beaucoup de régions, le nombre des observations sera toujours nécessairement très restreint. Les causes de des- truction des anciennes plages ont été, en effet, très nombreuses, et leur disparition est un fait beaucoup plus général que leur conser- vation. Sur les côtes escarpées, quelques rares galets sont souvent les seuls témoins de l’action de la mer (Sidi Féredj et pentes de Bouzaréah à l’ouest d'Alger). Sur les côtes plates ou peu inclinées, c'est à une distance plus ou moins grande dans l’intérieur qu’il faudrait rechercher les traces des plages les plus anciennes; mais. si l’on réfléchit que la dénudation du bassin hydrographique a dû, depuis l’époque dela plage de 200 m. par exemple, atteindre une valeur équivalente sur une partie de sa surface, on concevra sans peine que la probabilité de retrouver ces traces soit extrêmement faible. L'action de l’homme sur les côtes occupées par les peuples primitifs !, la végétation dans les pays équatoriaux, la présence de glaciers, ont aussi, à des degrés divers, contribué à la dispa- rition des anciennes lignes de rivage. On comprendra donc qu’en présence de toutes les difficultés que je viens d'exposer, j'aie été amené à renoncer dans ce premier essai d'étude comparée, à faire porter les comparaisons sur les anciennes lignes de rivage, et à me borner à l’utilisation des matériaux concernant les terrasses fluviales. On ne peut, pour le moment, que souhaiter avec M. Geikie * que l'étude de ces ancien- nes lignes de rivage soit l’objet, dans l'avenir, de recherches méthodiques et précises : la multiplicité et la précision des résultats permettront seuls de faire la part des influences per- turbatrices et d'obtenir des données comparables *. 1. Observation de Robert, citée par Suess. La Face de la terre, édit. fran- çaise, IL, p. 21. 2. A. Gerxix. De la coopération internationale dans les investigations géologiques. Mémoire présenté au Congrès géologique international de 1900, P: 6. 3. Pour montrer l'intérêt de ces recherches, je citerai le relevé suivant des anciennes plages de la baie Murray (Commission géologique du Canada. Rapport de progrès jusqu’en 1863, p. 979). On y a observé quatre plages à 30, 308 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 93 Juin 2 Difficultés de l'étude comparée des anciennes terrasses fluviales. Malgré l'abondance des matériaux, cette étude soulève encore un certain nombre de difficultés qui limitent fatalement le nombre des documents utilisables : elles proviennent surtout du manque de précision de la plupart des observations. En général, la déter- mination des altitudes laisse à désirer. Quelques auteurs se sont bornés à donner des altitudes absolues : ce renseignement est sans valeur, et il est impossible d'en tirer parti, si des cartes topogra- phiques à grande échelle ou la connaissance du profil longitudinal du cours d’eau ne permettent pas d’en déduire les altitudes rela- tives. D’autres se contentent d'encadrer les niveaux entre des limites trop vagues pour qu'on puisse les comparer. Dans les pays comme la France, où les cartes à grande échelle font défaut, une détermination rigoureuse n'est possible que dans des cas très rares, et par suite un grand nombre d'observations demeurent inutilisables. Trop souvent les altitudes ont été prises à la surface supérieure des terrasses, sans faire abstraction des limons, des cônes de déjection latéraux, des dépôts glaciaires qui en ont relevé le niveau, ou sans tenir compte des ravinements qui ont déprimé cette surface. Des erreurs de 8 à ro m. et plus, peuvent être la conséquence de ces oublis. La connaissance préalable du profil longitudinal du cours d’eau est nécessaire pour comparer des terrasses situées sur des points éloignés d’une même vallée, car je montrerai dans les paragraphes consacrés aux vallées du Rhône et de la Moselle, l'influence consi- dérable que peut exercer l’état de ce profil sur leurs altitudes relatives. Or,.je ne crois pas qu'aucun géologue s’en soit jusqu’à présent préoccupé. Nous verrons également (chapitre V) que les comparaisons ne peuvent utilement porter que sur des portions de vallée 4 pentes très faibles où le profil d'équilibre non seulement est à peu près atteint actuellement, mais était déjà réalisé à l’époque de la formation des plus anciennes terrasses. Les altitudes relatives des terrasses et leurs intervalles croissent en effet très rapidement avec les pentes des cours d’eau, et les comparaisons qui porteraient sur des 100, 182, 326 pieds. Ces nombres convertis en mètres (pied anglais — 0 m. 305) deviennent respectivement : 9 m. — 30 m,5 — 55 m.5 — 99m. 43. Il est difficile de ne pas être frappé des analogies de cette série avec celle de l’Isser, les trois derniers termes concordant d’une façon absolue dans les deux séries. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE. DU RHIN ET DU RHÔNE 309 , régions où l’évolution du profil a été très différente, ne pourraient aboutir à aucun résultat pratique. Enfin, on remarquera qu'il était indispensable, surtout dans une tentative qui est, je crois, la première de ce genre, de ne choisir comme sujets de comparaison que des régions assez rapprochées pour permettre d'étudier sur place et de résoudre au besoin de visu les diflicultés d'interprétation que peuvent incidemment faire naître les travaux dont elles ont été l’objet. Pour ces différentes raisons, l'étude comparative des terrasses fluviales que j'ai entreprise dans ce mémoire s’est trouvée limitée en dehors de l’Isser, aux vallées de la Moselle, du Rhin et du Rhône. Dans la Moselle, j'ai utilisé pour la région en amont de Toul, les recherches que j'Y poursuis depuis une vingtaine d'années, recherches qui ont été notablement facilitées par les levers de précision à 1/20.000 du service du Génie. Grâce aux travaux de M. Grebe dans les environs de Trèves, j'ai pu essayer de donner une idée générale de la série complète des formations alluviales de cette vallée. Dans la vallée du Rhin pour des raisons que j'indiquerai au chapitre IIT, je me suis borné à bien préciser la série des terrasses des environs de Bâle, telle qu’elle résulte des travaux de du Pasquier et de M. Gutzwiller. Dans la vallée du Rhône, le seul système de terrasses bien caractérisé et bien conservé est, Jusqu'à présent, celui que M. Depéret a signalé dans les environs de Valence, et dont la carte géologique détaillée donne le tracé. En utilisant les différents nivellements exécutés dans cette région et les cotes de la carte qui sont en général très exactes !, j'ai pu déterminer avec une très grande précision les altitudes de la plupart des niveaux, et il m'a paru possible, par suite, d'utiliser les données relatives aux terrasses de Valence au même titre que celles fournies par les autres vallées. Bien que mes recherches aient été limitées aux quatre vallées précitées, et même à des portions restreintes de plusieurs d’entre elles, les résultats obtenus concordent d’une façon si remarquable, que l'extension aux vallées du Rhin, du Rhône et de la Moselle des conclusions tirées de l’étude de l’Isser apparaîtra, je l'espère, comme suflisamment justifiée. 1. Cette observation ne s'applique, bien entendu, qu’à la feuille de Valence. 310 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin CxaPITRE III. — Etude des terrasses de la Moselle, du Rhin et du Rhône I. — Vallée de la Moselle Dans le mémoire que j’ai publié en 1897 sur les terrains de transport du bassin de la haute Moselle !, j'ai signalé l'existence en aval de Noir-Gueux de plusieurs terrasses et niveaux de cail- loutis. Grâce à une exploration récente de la plus grande partie de la vallée en amont de Toul, je puis en donner aujourd’hui un aperçu un peu plus complet et plus précis. Toutefois, comme en l’absence de cartes à grande échelle, il était matériellement impossible de déterminer et de suivre les niveaux sur toute cette étendue, je me suis borné à étudier les points où ces niveaux étaient le mieux conservés et où les lepers de précision permettaient une détermination rigoureuse des altitudes *. Je terminerai cette étude de la haute Moselle par un résumé très succinct des résultats auxquels sont arrivés les géologues allemands dans la basse Moselle, de façon à donner une idée de l’évolution de l’ensemble de la vallée à partir du Pliocène supérieur. A. — La Moselle en amont de Metz * 1° ABSENCE DE TERRASSES DANS L'INTÉRIEUR DU MASSIF VOSGIEN Dans l’intérieur de l’île montagneuse des Vosges *, le bassin de la Moselle ne présente aucunes traces de terrasses. Les pentes, jusqu'au voisinage des points culminants du plateau vosgien, sont fréquemment recouvertes de galets roulés dont la présence prouve 1. de Lamorxe. Note sur les terrains de transport du bassin de la haute Moselle, 1897. B. S G. F., (3), XXV, pages 378 et seq. 2. Presque toutes les altitudes indiquées ont été prises sur les levers à 1/20.000. 7 3. Consulter les feuilles 69 (Nancy), 70 (Lunéville), 85 (Epinal) de la carte géologique détaillée à 1/80.000, ainsi que la carte à 1/200.000 jointe à ma note précitée. 4. J'emprunte cette expression à E. de Beaumont; elle exprime d’une façon saisissante la saillie actuelle du massif vosgien par rapport aux régions circonvoisines. — Durrénoy et E. de BEAUMONT. Explic. de la Carte géologique de France. I. Les Vosges. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 311. que le creusement des vallées du bassin, sur une étendue verticale de 4oo m. au moins, a été un phénomène progressif. Mais ces cailloutis ne forment qu'exceptionnellement des dépôts d’une puissance appréciable (crète de la rive gauche de la Moselle entre Château-Lambert et le Mont-de-Fourches, la Demoiselle, Bois de la Feigne au N. O. de Longuet, etc.), et il ne me paraît pas possible, pour le moment du moins, de tirer aucune conclusion de la comparaison de leurs altitudes relatives. On remarquera, du reste, que les plus anciens de ces dépôts se sont formés à une époque où les cours d’eau de la région montagneuse n'avaient certainement pas encore acquis leur profil d'équilibre, ou plus exactement réalisé la continuité de leurs pentes; leurs lits devaient être encore interrompus par des rapides et des chutes !. Dans ces conditions, ainsi que je le montrerai dans le chapitre V, les nappes qu'ils ont formées ne peuvent avoir aucun lien avec les nappes régulières de la zone extra-montagneuse, et leur étude ne présente dès lors qu'un intérêt secondaire, au point de vue qui nous occupe. On ne doit pas perdre de vue, en outre, qu'il est à peu près impossible d'expliquer les particularités des dépôts de transport de l’île vosgienne sans admettre l'intervention de mou- vements positifs ou négatifs, affectant le massif vosgien sans agir sur les régions circonvoisines ?. Cette intervention, qui a néces- sairement modifié les positions relatives des dépôts, rend très difficiles les recherches qui les concernent. Il existe, il est vrai, en amont de Remiremont, dans le fond même de la vallée principale et de ses aflluents, des accumulations de sables et de galets roulés qui occupent des étendues souvent considérables le long du cours d’eau et présentent quelque analo- gie avec les terrasses régulières (sablons de Bussang, de Remen- villers, de Rupt, du Vacceux, de Travexin, de Sainte-Anne, près Remiremont, des Goujoux, etc.). Mais on reconnaît bien vite en les étudiant qu'aucune confusion n’est possible. Ces dépôts ne forment pas une bordure continue, conservant, par rapport au thalweg, une altitude constante ou variant d'une façon régulière ; ils sont au contraire disposés en gradins suecessifs, superposés comme des marches d’escaliers ; la comparaison de leurs altitudes absolues et leur stratification inclinée le plus souvent à 25° ou 30, ne laissent aucun doute sur leur origine lacustre : comme je l'ai 1. C’est la conséquence nécessaire de la disposition du grès vosgien en gradins d’altitude croissante de la périphérie de l'Ile vers l’intérieur. 2. de LAMOTKE. Op. cit., 1897, p. 435 et seq, 312 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin démontré ! il est impossible de concevoir leur formation sans faire intervenir une nappe d’eau dont le niveau se serait abaïssé par saccades depuis la cote 620 jusqu'à la cote 406. En aval de Remiremont, ou plus exactement à partir du con- fluent de la Moselle et de la Moselotte, on voit brusquement apparaître sur les deux rives de la Moselle de larges terrasses alluviales à surface très souvent plane, dont l’altitude au-dessus du thalweg ne dépasse pas 25 à 30 m., et que, malgré d'assez nombreuses lacunes, on peut suivre vers l’aval bien au-delà de la frontière. Si l’on ne pénétrait pas dans les détails, on serait tenté d'y voir une formation homogène et de considérer leur ensemble comme représentant une basse terrasse. Il est facile de montrer que cette interprétation ne serait pas fondée. : Aïnsi que je l’ai fait déja remarquer ? cet ensemble est en réalité formé de deux zones séparées par l'accident topographique de Noir-Gueux, et bien distinctes par tous leurs caractères (ie) la Madeleine Barrage de Noir Gueux a COUR For Û : ï : OULETLC 1re 'S FReruremont Longuet L 27 Pont d'Eloyes Station l'ologne 34295 jo OS ER nie | 365 erv. 397 356 Saut duBroc, Su = 1365 B Wacua = horirontale de 3(.om Fig. 3. — Coupe schématique des alluvions de la Moselle entre Remiremont et le Saut du Broc. — Echelle approximative des longueurs : 1 millim. pour 146 mètres. s, Affleurement de gneiss granulitique ; ti, Grès vosgien ;: A, Terrasses lacustres à stratification inclinée ; B, Basse terrasse à stratification hori- zontale ; B’, Gradin inférieur de la basse terrasse. a. — En amont de Noir-Gueux, la surface de tous les lambeaux est contenue dans un même plan dont l’horizontalité est presque absolue sur près de 7 kil. (407 m. 25 La Madeleine, 406 m. 8 plateau de Longuet) {. L’altitude des terrasses au-dessus du thalweg va par suite en croissant d’une facon notable de l’amont vers laval (25 in. 5 à la Madeleine, 33 m. vis-à-vis Longuet). 1. de Lamotue. Op. cit., 1897, p. 398 et seq. Voir aussi la planche XVII. 2. de LAMOTHE. Op. cit., 1897, p. 400, 403. La carte jointe à cette note a nettement séparé ces deux zones. 3. Cette figure est destinée à remplacer celle de la page 399 du mémoire de 1897 qui par suite d’une erreur de gravure avait été mal disposée. 4. Cotes fournies par les plans à 1/20.000. 1901 DE L’ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 313 En aval d’Eloyes, au contraire, la surface supérieure de tous les lambeaux est contenue dans deux plans inclinés parallèles au thalweg, c’est-à-dire dont les altitudes relatives ne varient pas sensiblement jusqu’à Metz et même jusqu’à Trèves. b. — En amont de Noir-Gueux, la stratification est partout incli- née à 27° ou 30°, sauf dans les coupures faites par les eaux, où elle est horizontale. Les couches inclinées sont recouvertes d’une nappe horizontale de galets qui forme la surface supérieure de la terrasse. Toutes les coupes fraîches que j'ai vues depuis vingt-deux ans démontrent d’une façon très nette cette structure et je ne puis m'expliquer quelle ait pu être niée ‘. (La Madeleine, Saint-Etienne, le Châtelet, usine Béchamp, tranchées exécutées pour l'établissement du canal de la Moselle entre Saint-Nabord et Noir-Gueux en 1883). En aval d’Eloyes la stratification est toujours parallèle au thalweg, c’est-à-dire sensiblement horizontale: elle est marquée par l’intercalation de lentilles de sable et de graviers, et par l’horizontalité habituelle des grands axes des galets. (Gravières d’Arches, d’Archettes, de la Vierge, d’Epinal, de Châtel, de Thaon, de Charmes. ..,etc.). c. — En amont de Noir-Gueux, il y a absence complète de blocs dans les alluvions en couches inclinées qui sont formées exclusi- vement de petits matériaux et où le sable joue un rôle considé- rable, souvent prépondérant. Les blocs ne se rencontrent que dans les coupures faites par les eaux (talus de Saint-Etienne près du pont de Remiremont) et à la surface des dépôts surtout au voisi- nage des pentes. À partir de Noir-Gueux, le sable devient beaucoup moins abon- dant et jusqu’à une distance assez grande des Vosges, ne joue plus qu'un rôle subordonné par rapport aux galets. Des blocs d’origine généralement rapprochée se montrent surtout au voisinage de Noir-Gueux ; leur volume habituellement faible (1/2 m. c.) peut atteindre exceptionnellement 5 m. €. (bloc de granulite au sud-est de la gare d’'Eloyes). Ces blocs ne semblent pas avoir dépassé Dognéville : ceux que Hogard y a signalés étaient de petite dimension et provenaient du massif granulitique d'Epinal. A Thaon, près de la gare, les plus gros ont 30 à 35 cent. de diamètre. Les blocs sont toujours arrondis et même roulés, quand ils sont d’origine lointaine ; les seuls blocs anguleux sont ceux qui ont été l’objet d’une exploitation ou qui proviennent des pentes voi- 1. B.S. G. F. Réunion extraordinaire à Remiremont. Note de M. Bleicher, (3), XXV, p. 924. 314 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin sines. Ceux qui ont leurs arêtes faiblement émoussées sont toujours d'origine très rapprochée. d. — Les dépôts en amont de Noir-Gueux sont caractérisés par l'extrême rareté des granites à amphibole caractéristiques des Ballons d'Alsace et de Servance !; maïs ces roches n’y font pas défaut, comme on l’a prétendu à tort (B. S. G. F. (3), XXV, p. 925) ; j'en ai trouvé dans presque toutes les sablières. Ces mêmes roches ne se rencontrent avec quelque fréquence ‘que dans les coupures de la Moselle (placage à structure torren- tielle contre les pentes de la terrasse de Saint-Etienne, coupure de Noir-Gueux, etc.), et dans le lit de la rivière. En aval de Noir-Gueux les granites feuille morte qui ne se montrent qu'exceptionnellement dans le barrage, sauf sur la rive gauche, apparaissent en grand nombre dans la terrasse basse à partir de la gare d’Eloyes. On voit qu'il est impossible de considérer les dépôts situés en aval de Noir-Gueux comme le prolongement de ceux situés dans la cuvette de Remiremont. Ce sont des dépôts formés dans des conditions absolument différentes, à tous les points de vue : les premiers sont nettement fluviatiles, les seconds franchement lacustres. La basse terrasse ne commence par suite qu'en aval de Noir-Gueux ou plus exactement, près d'Eloyes, où se termine l'accident topographique de Noir-Gueux et où la Moselle franchit la grande faille qui limite vers l’ouest l'Ile vosgienne. On peut dire par conséquent que la basse terrasse n'existe actuellement qu'en dehors du massif vosgien. 2° BASSES TERRASSES ?. La basse terrasse, dont je viens d'indiquer les caractères géné- raux, borde la vallée de la Moselle en aval d'Eloyes jusqu'à Toul, et même bien au-delà vers l'aval, puisqu'on en retrouve des traces à Metz, à Trèves, etc. Elle est parfois continue sur de grandes étendues ; sa largeur transversale peut atteindre 700 m. (Pouxeux) et exceptionnellement 1400 m. (au sud de Chavelot). 1. La variété qui constitue les sommets de ces Ballons est connue dans les arts sous le nom de granite feuille morte, terme dont je me servirai à l’avenir pour abréger. Voir ma note de 1897, p. 416. 2. Il est à peu près impossible de suivre ces terrasses sur la feuille d’'Epinal où la plupart des lambeaux en aval d’'Epinal n’ont pas été figurés; elles sont au contraire très bien représentées sur la carte de de Billy, à la même échelle, publiée il y a 50 ans. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE. DU RHIN ET DU RHÔNE 319 \ Elle est essentiellement formée de sable et de galets roulés en parfait état de conservation; la stratification est horizontale. Le limon n’y joue qu'un rôle accessoire, il fait le plus souvent défaut et son épaisseur, quand il existe, est toujours très faible (o m. 5o à 1 m.) sauf au voisinage des pentes. (Charmes, rive droite). L'épaisseur totale des alluvions de la basse terrasse est très variable, par suite des dénudations qu'elle a subies. Entre Eloyes et Pouxeux, entre Epinal et Chavelot, entre Girmont et Vaxon- court, elle atteint au moins 20 m.; à Thaon, elle a dû s'élever très probablement à 30 m. Elle est en général beaucoup plus faible, et parfois même, les cailloutis ne forment qu'une couche de quelques décimètres sur la plateforme rocheuse qui correspond en partie à l’ancien fond de la vallée. La basse terrasse se compose en réalité de deux niveaux bien distincts, quoique emboîtés, l’un de 20 m., l’autre de 30 m. En aval d’Epinal, le niveau le plus bas est de beaucoup le plus développé et le seul qui soit à peu près intact: c’est lui qui forme presque entièrement les larges terrasses que suit la voie ferrée entre Epinal et Thaon (terrasses de la gare d'Epinal, de Golbey, de Thaon t, de Girmont à Vaxoncourt !, de Charmes à Chamagne, du Bois de la Ville en aval de Toul, etc...). Plusieurs de ces terrasses n'offrent aucune pente transversale appréciable malgré leur grande largeur. D’après les levers de précision, l'altitude de ce niveau est comprise entre 19 et 21 m.; elle est le plus souvent égale à 250 m. Au voisinage des pentes et surtout dans les rentrants de la vallée, on observe à la surface de la terrasse de 20 m., sur un grand nombre de points, des cailloutis de même nature qui s'élèvent à 5- 10 m. au-dessus de cette surface. Ce sont les débris d’une nappe plus ancienne qui s'élevait à 30 m. au-dessus de la Moselle: la nappe de 20 m. s’est, en partie, formée à ses dépens et y est emboîtée. Parmi les points où les observations sont les plus faciles je citerai les suivants : Au sud de la route de Mirecourt, près de Golbey, une grande gravière en exploitation s'élève exactement à 345 m.. dominant la terrasse de la gare de 8 m. et la rivière de 27 à 28 m. Une partie de la large terrasse qui s'étend de Golbey à Chavelot est encore à 26-28 m. A l’ouest de la gare de Thaon la coupe est particulière- 1, Teintée comme Muschelkalk sur la carte d’Epinal. 316 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin ment nette comme le montre la figure 4 : il y a une petite plate- forme de cailloutis granitiques à 331 m. (30 m. au-dessus de la Moselle) et une autre qui supporte la gare à 321 m. (19 à 20 m. au- dessus de la Moselle). Entre Nomexy et Vincey, le mamelon 309 Bois de Thaon 377.8 L Ésssesçgessvet Gare dé Thaon Ù Moselle SN 30 tr horixontale de 3oom. Fig. 4. — Coupe des terrasses de la rive gauche de la Moselle à Thaon. — Echelle approximative des longueurs : 1 millim. pour 32 mètres. L, Limon argileux recouvrant les cailloutis de la moyenne terrasse ; M, Gra- din supérieur de la basse terrasse ; B, Gradin inférieur : {,, Muschelkalk. de la carte d'état-major est formé de cailloutis stratifiés qui mar- quent à peu près l’ancien niveau de la nappe alluviale, à 27 m. au-dessus de la Moselle. Le niveau de 30 m. est certainement représenté dans la forêt de Charmes : maïs il m'a été impossible, faute de cartes à grande échelle, de l'y suivre. On l’observe à Méréville, entre ce village et Pont-Saint-Vincent. Au nord-est de Toul, la partie supérieure des cailloutis de Bois-la-Ville, en partie masquée par du limon, forme à 28-30 m. au-dessus de la Moselle une plateforme bien distincte de celle de 20 m. qui en borde le pied, et le petit plateau alluvial qui supporte la batterie de Gondreville, sur la rive droite, est également à 30 m. Enfin, à Metz !, le vaste plateau du Sablon entre la Seille et la Moselle est à 30 m. au-dessus de la rivière ; l'épaisseur des allu- vions est de 12 à 15 m. En amont d'Epinal, on retrouve jusqu'à Arches des débris plus ou moins étendus des nappes que je viens de décrire. Celui de la Vierge (1500 m. en amont) est le plus important, il forme une bordure dont la largeur peut atteindre 40 à 50 m. et que l’on peut suivre presque sans interruption sur la rive droite sur 2 k. 5 jusqu'en face de Dinozé. En approchant des pentes les cailloutis disparaissent et sont recouverts par une couche épaisse de sable à galets de quartz blanc provenant par ruissellement du grès vosgien des pentes voisines. Si l’on tient compte de cette particu- 1. JAcquorT. Descript. géol. de la Moselle, p. 310 et seq. — ScHuMmACHERr. Mittheilungen der geolog.Landesanstalt von Elsass-Lothringen, p. XXXII et seq., tome IV. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 217 larité, on peut admettre que l'altitude relative de la terrasse de la Vierge est de 30 m. au plus. Un petit lambeau de la même nappe se montre au sud de la gare de Dinozé, à l'altitude de 27-30 m. A Arches (fig. 8) l’église est bâtie sur une vaste plateforme de 250 m. de largeur, sans pente transversale, qui s'étend d’une façon continue sur près de 800 m. depuis Arches jusqu'au débouché de la vallée de la Niche. Son altitude est de 16 m. 5. Vis-à-vis, sur l’autre rive de la Niche, on trouve superposés deux lambeaux d'alluvions, l’un à 16-17 m., l’autre à 30 m. La grande plateforme de grès vosgien qui domine la rive droite du vallon de Géroménil, en amont et en aval du village, est en aval bordée par un placage de cailloutis granitiques avec sable blanc très bien lavé qui forme un replat très net à 596 m., dominant par suite le thalweg de 26 m. Comme on ne peut pas suivre ces cailloutis jusqu'à Arches et que d'autre part la rapidité des pentes de la vallée est très grande (0.0078) il est diflicile de dire à quel niveau de la basse terrasse ils correspondent. En face d’Arches, la terrasse sur laquelle est bâti le village d’Archettes est en partie formée par un cône de déjection dont la tête est dans Le ravin de Mossoux : il n y a donc pas lieu d’en tenir compte ; mais au nord de l’église, il existe encore un petit lambeau correspondant exacte- ment à celui d’Arches. Plus à l’est, la vaste plateforme qui s'étend entre la Niche, le Saut du Broc et Pouxeux, est à 365 m. 6, par conséquent à 17 m. au-dessus de la Moselle. Enfin, toutes les terrasses qui bordent les deux rives depuis Pouxeux jusqu'à la halte d’Eloyes sont uniformément à 19-20 m. au-dessus de la Moselle (fig. 3). Bien que cette altitude soit exactement la même que celle des terrasses du niveau inférieur en aval d'Épinal, il est impossible de considérer les terrasses situées entre Eloyes et Pouxeux comme appartenant à ce niveau. Il suflit pour s'en rendre compte de jeter les yeux sur le profil longitudinal de la Moselle donné par la figure 5. Ce profil montre qu'en aval de Thaon, la Moselle possède à peu près son profil d'équilibre et a réalisé la con- tinuité des pentes, tandis qu'en amont, jusquà Remiremont, son lit présente un double bombement formé par la granulite de C en D, par le grès vosgien de D en E, puis par des alluvions de profondeur inconnue jusqu'à Remiremont. Cest à un de ces bombements qu'est dû le Saut du Broc, cataracte en miniature de 7 à 8 m. 31$ DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin .- Si la période actuelle a une durée suffisamment longue, la Moselle finira par régulariser son lit entre Thaon et Remiremont et suivra à peu près le profil marqué en pointillé. Lorsque ce tra- vail sera terminé, les altitudes relatives de toutes les terrasses de cette région se trouveront augmentées de quantités variables suivant leur position par rapport aux bombements. Il faut donc, si l’on veut les comparer à celles de la région en aval de Thaon, qui, pendant le même temps, n'auront éprouvé que des variations 3'altitude très faibles, leur faire subir au préalable une correction additive plus ou moins grande. » © a = à + CO S RS © .É® eo È # DÉMOS CRUE = OR SRE RS SRE 2 CLS SOIR SELLES © nm LS SE à MC à à SR LPS à à » ? . î SSD S & Ô Ë Ë 3 SRS TERESA S Où & SUD DES NIES ï l Ca < ë NS, QE See S À | ÿ S È SI Ÿ È S SAR | ê Q d T7 [ È À Ÿ È FSES “ I > à à à ! ë S. 5 1 | Ÿ a & l à ss \ Ÿ à ; 1 Le È & ' ! l S 1 , 1! — ï l 1 1 1 [ [ 1 l ï À -horixontale de \186m. 255 ai 35 ro Ce OS. Fig. 5. — Profil longitudinal de la vallée de la Moselle entre Frouard et le Thillot (Eaux moyennes). — Echelle : longueurs 1 millim. pour 2 kilom.; hauteurs 1 millim. pour 10 mètres. Entre Pouxeux et Eloyes cette correction peut, avec une grande probabilité, être évaluée au minimum à 10-12 m., le Saut du Broc représentant à lui seul près de 8 m. ; l'altitude finale des terrasses de cette zone atteindrait donc 29-31 m. A Arches, la correction serait de 3 à 4 m.; enfin à la Vierge elle s’élèverait à 4 ou 5 m. Aïnsi, lorsque la régularisation du lit sera terminée, les basses terrasses entre Epinal et Eloyes comprendront deux niveaux : l’un de 30-52 m. au moins (exceptionnellement 34 à 35 m. à la Vierge), l’autre de 20 m., qui seront le prolongement des deux niveaux de 20 et de 30 m. signalés en aval d’Epinal. On verra dans le chapitre V que le léger écart d'altitude que présente la terrasse de la Vierge est la conséquence des lois qui régissent la formation des nappes alluviales. Age de la basse terrasse. L'âge de la basse terrasse, considérée dans son ensemble, est nettement fixé par les nombreux fossiles qu'on y a trouvés, notam- 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 319 ment à Toul !, à Metz ?, et près de Schweich en aval de Trèves *. Ils proviennent surtout d’'Ælephas primigenius et de Rhinoceros tichorinus. À Metz, on les a recueillis dans la terrasse de 30 m. A Toul, ceux des fortifications proviennent plutôt du niveau inférieur de la basse terrasse; ceux du vallon de l’Ingressin sont peut-être plus anciens et pourraient appartenir à un débris de la moyenne terrasse dont il sera question plus loin. On peut, je crois, considérer comme immédiatement antérieurs au remblai qui constitue la basse terrasse, et comme contempo- rains de la fin du creusement qui a précédé ce remblaiï, les lignites étudiés par M. Fliche à la base des cailloutis de Jarville #. Aucune coupe cotée n'ayant, à ma connaissance du moins, été publiée, il ne m'est pas possible de dire actuellement si ces lignites sont à la base du niveau de 30 m. ou à la base de celui de 0 m. On y a trouvé Larix Europæa, Picea excelsa, Pinus Montana, Alnus viridis, Alnus incana, Betula alba (forme pubescens). M. Fliche a cru pouvoir conclure de cette association que la région était couverte par une forêt à caractère boréal très accentué. Liaison entre la basse terrasse et les dépôts lacustres de la région de Remiremont. , Nous avons vu que la zone des basses terrasses fluviales se terminait à l’amont près d’Eloyes, et que celle des terrasses lacustres s’arrêtait à l’aval près de Noir-Gueux (fig. 3). Entre ces deux zones se place une forme topographique des plus remarqua- bles, le barrage de Noir-Gueux, signalée depuis longtemps par Hogard, et dont j'ai rappelé en 1897 * les caractères principaux et prouvé l’origine alluviale et latérale (fig. 6 et 7). Je me bornerai donc ici à appeler l’attention sur les particula- rités topographiques du barrage, notamment sur celles qui définis- sent ses rapports avec les dépôts qu'il sépare. Vu d’amont, le barrage de Noir-Gueux a l'aspect d’une digue gigantesque de 50 m. de hauteur et de 1600 m. de longueur, jetée d’une rive à l’autre de la Moselle, dans l’axe du vallon de la 1 Husson. Origine de l'espèce humaine dans les environs de Toul, 1865. Réunion de huit brochures publiées de 1864 à 1867. Carte géol. détaillée 1/80.000 Nancy. Légende. 2, JAcquoT. Descrip. géol. du département de la Moselle. 3. Erlaüterungen zur geol. specialkarten von Preussen. Blatt Sweich. 4. Fricue. Sur les lignites quaternaires des environs de Jarville. C. R. Ac. Se. 10 mai 1875. — Ip. Note sur la flore des lignites du nord-est de la France. B. S. G. F.,(3), XXV, p. 959 et seq. 5. de LAMortue. Op. cit. 1897, p. 415 et seq. 390 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Suche, et à travers laquelle les eaux s’échappent par une étroite coupure, large de 4o m. à peine à la base, de 300 m. au sommet. Ce caractère de digue ou de barrage transversal est d'autant plus saisissant que la vallée en amont, sur 7 à 800 mètres, semble avoir été déblayée presque complètement jusqu'au niveau de la Moselle, des alluvions qui l’encombraient, de sorte qu'entre le pied de la digue et l'extrémité de la terrasse de Longuet, il existe une vaste dépression qui a tous les caractères d’un cirque d'érosion. pie ; | Pentes de HORS Noir Gueux Fossard o horixontale de 370m. Fig. 6. — Coupe transversale du barrage de Noir-Gueux.— Echelle approxi- mative des longueurs : 1 millim. pour 16 mètres. y, Gneiss et granulites. Barrage de Noir Gueux Pont en amont. Care de A d'Eloyes Pouxeux ÿ TEEN QU EEE IG ch Halte ces a 399 DV —— —— Do 7 507 65 0 © 0. re - Re e 2 20 lo Po LT 5 oo ON DE TT = DO nnon METRE 33 horixontale de 35om. Fig. 7. — Schéma montrant l'élévation du barrage de Noir-Gueux sur la rive gauche de la Moselle et son raccordement avec la basse terrasse. — Echelle approximative des longueurs 1 millim. pour 56 mètres. AB, Cône de déjection avec ses terrasses d’érosion ; CC, Basse terrasse de 19 à 20 mètres; ç, Affleurement de gneiss granulitique à la base du barrage. En aval, l'aspect est tout différent : le barrage de Noir-Gueux forme simplement une digue irrégulière dominant de 10 à 15 m. au plus la nappe alluviale remarquablement plane qui s'étend au nord jusqu'à la gare d'Eloyes où commence la terrasse basse. Cette nappe alluviale dont la pente générale est 4 ou 5 fois plus forte que celle de la Moselle actuelle (0,008 à o,o1r au lieu de 0,002) présente plusieurs ressauts successifs, correspondant à des terrasses d’érosion, qui tous convergent vers la coupure de Noir-Gueux. Il en résulte que l'altitude du barrage qui, à Noir- Gueux atteint 5o m. au-dessus de la rivière, tombe à 20 m. un peu en aval de la gare d'Éloyes. Il est impossible de ne pas être frappé de la concordance appa- 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 321 rente qui se manifeste entre ces particularités topographiques et celles qui caractérisent les amphithéâtres morainiques. Nous retrouvons à Noir-Gueux la digue formée par la moraine frontale, le cône de déjection ou de transition qui la raccorde à la basse terrasse, la dépression centrale avec ses dépôts lacustres : il est même intéressant de constater que les caractères extérieurs de l'accident de Noir-Gueux sont beaucoup plus nets que ceux de beaucoup d’amphithéâtres morainiques, surtout én ce qui concerne les formations lacustres. Celles-ci, en amont de Noir-Gueux, se sont élevées à la cote 407, c'est-à-dire à 34 m. au-dessus du fond de la coupure actuelle ; on a donc ici la preuve que pendant leur dépôt, la coupure était complètement fermée, jusqu’à une altitude très peu inférieure à celle du sommet de la digue. En réalité, les analogies s’arrêtent aux particularités superfi- cielles et, malgré les affirmations des géologues qui n'ont étudié Noir-Gueux qu’à ce point de vue, je ne puis que maintenir les conclusions de ma note de 1897 qui, du reste, n'ont pas été réfutées. Comme je l’ai exposé, l’origine alluviale et latérale du barrage de Noir-Gueux est nettement établie par les faits ci-après : 1° La structure de la partie supérieure du barrage est nettement torrentielle : elle n’est pas morainique. Les éléments sont roulés, généralement petits, associés à du sable fin bien lavé; les blocs sont relativement rares, leur volume est en général très faible (1/2 m. c.), presque tous portent des traces de l’action des eaux. Par un contraste saisissant, les pentes des deux rives de la Moselle à l’est et à l’ouest de Noir-Gueux, sont couvertes de blocs erra- tiques parfois énormes (50 m. c.), souvent anguleux, qui s'élèvent jusque sur les points culminants, à 400 m. au-dessus de la vallée. 2 La base sud du barrage semble formée de sable fin, lavé, en couches stratifiées horizontalement (sablière au pied sud de la digue ouverte en 1877), et par places, de couches de sable et de graviem plongeant vers l'amont sous des angles de 30 à 35°. 30 La plupart des éléments sont originaires du massif de Fossard. Les types caractéristiques des Ballons (granite feuille morte, schistes du Carbonifère) y sont très rares, sauf au voisinage de la rive gauche, tandis qu’ils abondent, comme je l’ai dit plus haut, dans les parties inférieures du cône de transition et dans la basse terrasse avec laquelle il se raccorde !. | 1. Dans une note parue il y a quelques jours dans le tome XII du Bulletin des Services de la carte, M. Delebecque objecte que, d’après la carte, les torrents de la Suche et des Charbonniers paraissent de trop minime impor- tance, pour avoir pu produire une accumulation de matériaux aussi consi- 5 Octobre 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 21 322 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Ces faits, et surtout la différence de composition existant entre le barrage et les dépôts qui l’encadrent à l’amont et à l’aval, sont évidemment inconciliables avec l’idée d’une origine glaciaire. IL est impossible, en effet, dans cette hypothèse, de comprendre com- ment un glacier aurait pu simultanément édifier une moraine ter- minale où les roches caractéristiques de la haute Moselle font défaut, et donner naïssance néanmoins à des basses terrasses où ces mêmes roches abondent. Pendant son recul, le même glacier aurait dû accumuler en amont du barrage des dépôts lacustres privés de ces mêmes éléments. On doit par conséquent considérer le barrage de Noir-Gueux comme un exemple typique d’une forme topographique regardée jusqu'à présent comme caractéristique de l'intervention des glaciers, et due cependant à des causes tout à fait différentes. 3° TERRASSE DE 50 À 60 MÈTRES Au-dessus des basses terrasses, on observe sur un grand nombre de points des lambeaux plus ou moins étendus d’une terrasse plus élevée dont l’altitude est comprise entre 50 et 60 m. Bois du Chanot Archettes sof Plateau ds SE dArches @ Re me ! Plateau dArchettes Eglisei Moselle dArckhes D lér— ; B RES = 17 Re œ te Ur 47. Aorixontale de 30om. Fig. 8. — Coupe transversale de la vallée de la Moselle près d’Arches. Echelle approximative des longueurs : 1 millim. pour 66 mètres. tin, Grès bigarré: tv, Grès vosgien ; M, Moyenne terrasse; B, Basse ter- rasse ; b, Blocs erratiques. — Les alluvions sont indiquées par de petits cercles. Le plateau d’Archettes et le Bois du Chanot sont au deuxième plan. C’est dans le bassin d’Arches que ce niveau est le plus remarqua- blement développé. Tout le bord sud du plateau de Tannières (fig. 8) entre le confluent de la Vologne et le vallon de Mossoux, dérable que celle du barrage. Je regrette que M. Delebecque n'ait pas eu le loisir de remonter ces deux torrents; il aurait constaté qu'ils ont en projection chacun près de 2.800 m. de développement, avec 437 m. de ditfté- rence de niveau, et sont alimentés par d'immenses bassins de réception. Je reviendrai du reste sur cette question dans une note spéciale. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 323 est formé par une terrasse alluviale dont la largeur peut atteindre 700 m., et dont l'épaisseur s’élève à près de 4o m. !. L’altitude atteint 405 m. à hauteur du Saut du Broc, soit 50 m. au-dessus de la Moselle. Vis-à-vis, le plateau d'Arches est également bordé par une terrasse de cailloutis assez étroite, mais dont les débris s'étendent encore par places sur le grès vosgien du plateau jusqu’à l'altitude de 396 m. (53 m. au-dessus de la Moselle). Tout le plateau au N.-O d’'Archettes est recouvert par une masse énorme de caïilloutis dont l'épaisseur dépasse certainement 20 m. et atteint très probablement 35 à 4£o m. au-dessus des escar- pements du grès vosgien. Le plateau a été très raviné, mais les points culminants qui s'élèvent à 398 m. permettent de fixer l'altitude minimum de la nappe alluviale à 58 m. au-dessus de la Moselle. Enfin dans le ravin au sud de Pouxeux, une petite terrasse allu- viale s'élève à 405 m., soit 50 m. au-dessus de la Moselle. On voit que si l’on tient compte pour ces divers lambeaux de leur position par rapport au Saut du Broc, leurs altitudes relatives sont comprises entre 56 et 62 m. Les alluvions qui constituent ces terrasses sont formées de cailloutis stratifiés horizontalement *. Les galets granitiques y abondent, et parmi eux j'ai noté, surtout sur le plateau d’Ar- chettes, des granites feuille morte assez nombreux, en moins grande quantité toutefois que dans la basse terrasse ; les galets granitiques sont en général en bon état; seuls les granites feuille morte recueillis à la surface des champs, sont souvent très altérés. Quelques blocs de gneiss ou de granulite, dont les plus gros peu- vent cuber 3/4 m. c., sont encore visibles à la surface, notamment près de la forêt de Tannières. A hauteur d’'Epinal, les collines de la rive gauche sont couvertes d’une nappe épaisse de cailloutis surmontés de limons qui souvent en masquent complètement les affleurements. Ces limons qui constituent la « terre des bois » sont formés d’une argile jaune 1. Ce lambeau n’est pas indiqué sur la carte géologique, non plus que les cailloutis du plateau d’Archettes. Voir la carte jointe à ma note de 1897. Je ferai remarquer à cette occasion que M. Bleicher (B. S. G. F.,(3), XXV, p. 926) m'a prêté à tort l'opinion que les cailloutis de Tannières étaient d’origine lacustre. Déjà, en 1897, j'en faisais une terrasse fluviale. 2. Gravière ouverte en 1881 sur le talus sud du plateau de Tannières, gravière au sud de Pouxeux. 324 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin d'ocre parfois jaspée de blanc !; leur épaisseur peut atteindre et même dépasser 10 m. Les cailloutis comprennent des galets roulés de toutes les roches du bassin en amont : ce sont principalement des quartzites du grès vosgien auxquelles s'associent des galets de roches cristalli- nes (gneiss, granulites, granitites, porphyres divers). Les quartzites se montrent presque seuls à la surface et les roches cristallines n'apparaissent que dans la profondeur, très souvent altérées. C'est cette particularité qui a trompé Hogard ; n'ayant pas eu l’occasion de voir des coupes profondes, il a été amené à considérer ces alluvions comme exclusivement formées de quartzites du grès vosgien, et à imaginer pour expliquer ce phénomène, le moulage en glace de toute la région *. L'altitude de la masse de caïlloutis peut être déterminée facile- ment dans le bois de la Louvroy (champ de manœuvre à l’ouest d'Epinal) ; elle s’élève sur ce point à 377 m., dominant par consé- quent la Moselle de 59 à 60 m. au plus. Sur le plateau de Boiïs- l'Abbé, un peu au nord, les sondages exécutés lors de la construc- tion du fort ont traversé, avant d'atteindre les sables caillouteux une épaisseur moyenne de 5 m. d'argile (0,50 de terre végétale, 2 m. 30 d'argile jaunâtre, 1 m. 50 d'argile rougeâtre avec quelques galets, 1 m. argile jaune avec galets); les cailloutis y sont par suite à l’altitude de 375 m. environ, soit 60 m. au-dessus du niveau de la Moselle, nombre qui concorde avec le précédent. Les mêmes cailloutis recouverts de limon forment les plateaux qui séparent la Moselle de l’'Avière, et même une partie de ceux qui bordent la rive gauche de cet affluent ; ils s'étendent également sur la rive droite de la Moselle et sont très développés près de Cha- tel et en aval. L’altitude de la nappe, abstraction faite des limons, est comprise entre bo et 6o m. *, mais plutôt voisine de 60 m. À Charmes, les cailloutis couvrent la plus grande partie de la forêt et s'élèvent également à une soixantaine de mètres. Malheu- 1. Hocarp. Syst. des Vosges, 1837, p. 190. — LevarLois. Aperçu de la constit. géol. du départ. de la Meurthe, 1862. 2. Hocarp. Coup d’œil sur le terrain erratique des Vosges, 1851; Recher- ches sur les formations erratiques, 1858. Voir à ce sujet ma note de 1897, p. 392 et seq. 3. Ces dépôts n’ont été bien représentés que sur la carte géologique de de Billy, à 1/80.000. Sur la feuille d’'Epinal de la carte géologique détaillée, on les a désignés sous le signe P; mais on a omis les cailloutis et limons des bois de la Louvroy et on a marqué a! les cailloutis des Hauts Caiïilloux qui appartiennent au niveau de 50 à 60 m. et auraient dû par suite être mar- qués P. I9OI DE L ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 325 reusement, ainsi que je l’ai déjà dit, l'absence de cartes à grande échelle, et en outre la présence de limons, rendent impossible le tracé des niveaux !. A l’Ermitage à 15 kil. en aval de Charmes, les mêmes cailloutis comprenant des quartzites et des débris granitiques forment une vaste terrasse élevée de 54 m. ? au-dessus de la Moselle. Enfin, au sud-ouest de Toul, le vaste plateau jurassique de Boïs- le-Comte (Point 257) est recouvert de sables et de galets dont l'épaisseur dépasse probablement une dizaine de mètres et qui dominent de 54 m. la Moselle. Bien que les quartzites du grès vosgien y soient prépondérants, on y trouve de nombreux galets granitiques bien conservés, dont le grand axe peut atteindre 0 m. 10; une mince couche de limon recouvre par places les cailloutis ?. En résumé, on trouve entre Jarménil et Toul des traces très nettes d’une nappe alluviale formant le plus souvent terrasse et dont l'altitude au-dessus du thalweg, voisine de 55 m. à Toul, paraît près d'Epinal se rapprocher de 60. Sa composition est très sensiblement différente de celle de la basse terrasse par suite de la prédominance des quartzites ; les granites feuille morte qui autour d’Archettes sont déjà un peu moins fréquents que dans la basse terrasse, semblent faire défaut en aval d’'Epinal ; du moins je n’en ai pas encore trouvé. Cette absence peut, il est vrai, s'expliquer par la plus grande altérabilité de cette roche, et on peut supposer qu'on en trouverait des débris si l’on disposait de coupes profondes. En outre, il est impossible de concevoir la présence des galets de cette nature dans les graviers de l'Ingressin, près d'Ecrouves (N.-O. de Toul), si l’on n’admet pas qu'ils provien- nent de la nappe de Bois-le-Comte. On est donc autorisé à con- clure que la nappe de 50-60 m. a été formée par une ancienne Moselle plus élevée de 50-60 que.la Moselle actuelle et prenant comme elle sa source dans les Ballons d'Alsace et de Servance. 1. Le signe a! a été sur la feuille de Lunéville affecté à tort à l’ensemble des dépôts de la forêt de Charmes. 2 Cote approximative; ce dépôt n’est pas marqué sur la feuille de Lunéville. 3. Les limons de Chaudeney qui occupent sur la rive droite de la Moselle en face du plateau de Bois-le-Comte une situation analogue, ont, d'après Braconnier, la composition ci-après : silice 644, alumine 207, peroxyde de fer 50, chaux 9, magnésie 1, acide phosphorique 1, 2, perte au feu 92 (Descript. géol. et agron. des terrains de Meurthe et Moselle, p. 397 et 398). 396 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Aucun reste de Vertébrés n’a été jusqu’à présent à ma connaïis- sance du moins, trouvé dans la terrasse de 50-60 m. A l’époque de la construction du canal de l’Est, vers 1876, les fouilles exécutées au col de Bois-l’Abbé (3 kil. N.-O. d’Epinal) ont coupé une petite tourbière où l’on a recueilli un certain nombre de débris végétaux plus ou moins transformés en lignite, et quelques traces d’Insectes. M. Fliche qui les a déterminés ! a, d’après des renseignements fournis par le service des travaux, mais sans donner aucune coupe, admis que cette tourbière était située à la base des cailloutis qui affleurent dans le col. En outre, partant de cette idée qu'il n’y a eu qu'un seul creusement suivi d’un comblement, il a logiquement conclu que les deux dépôts de Jarville et de Boisl’Abbé, situés à la base des cailloutis, étaient synchroniques, contemporains de la fin du creusement de la vallée, et antérieurs à son remplissage par les alluvions. Mais cette déduction se trouve tout d’abord en opposition avec les preuves que j'ai données de l'indépendance des basses terrasses et de la terrasse de 55 m., et la suite de ce travail montrera que cette indépendance n’est pas particulière aux terrasses précitées et appartient aux six niveaux de cailloutis de la vallée de la Moselle, chacun d’eux correspondant à une phase de remblaï séparée de la précédente par une phase d'érosion. D'autre part la superposition des cailloutis de Bois-l'Abbé sur la tourbe n’est nullement certaine. La coupe des terrains traversés par le canal, que le service des Ponts-et-Chaussées a bien voulu me communiquer, ne montre sur le tracé, qu'une seule tourbière qui doit par suite être la même que celle qui a fourni les débris fossiles. Cette tourbière dont l’altitude est de 361 m., se trouve à 4o m. au-dessus de la Moselle, à 7 ou 8 m. au-dessous du col. Elle repose sur des argiles jaunes identiques à celles qui couvrent le plateau de Bois-lAbbé et en continuité avec elles ; elle doit done leur être postérieure, et par conséquent être également pos- térieure à la formation de la nappe de 55 m. La coupe n'indique pas qu’elle ait été recouverte par des eail- loutis ; ce recouvrement, en admettant qu'il ait eu lieu, s’explique- rait tout naturellement par le ruissellement, phénomène fréquent toutes les fois que des terrains meubles couvrent les pentes *. 1. Fircue. Sur les lignites quaternaires de Bois-l'Abbé, près d'Epinal. C. R. Ac. Sc., 3 déc. 1883. — In. Note sur la flore des lignites..., du nord- est de la France. B. S. G. F., (3), XXV, p. 959. 2, Je citerai comme un exemple typique le recouvrement des cailloutis du niveau de 30 m. par les argiles du Lias au col du Mauvais Lieu entre 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 327 Enfin la position de la tourbière à l’origine même du vallon du col, prouve qu’elle est postérieure au profil actuel de la vallée : elle n’eut certainement pas, dans le cas contraire, résisté aux dénudations qui ont précédé et suivi la formation de la basse terrasse. Pour ces divers motifs, je considère la tourbière de Bois-l’Abbé comme appartenant au Néo-pleistocène, c’est-à-dire comme pos- térieure à toutes les terrasses ; elle serait par suite séparée de celle de Jarville (si toutefois celle-ci occupe réellement la place qui lui a été assignée) par tout l'intervalle de temps qui a néces- sité : 1° la formation de la nappe de comblement dont la basse ter- rasse est un débris, 2° le creusement de cette nappe. Cette conclusion n’infirme d’ailleurs en rien les considérations climatologiques que M. Fliche a basées sur l’examen de la floré de Bois-l Abbé et que je n’ai pas à discuter ici, mais elle montre que ces considérations ne s'appliquent pas à la terrasse de 55 m. qui est beaucoup plus ancienne. 4° NIVEAUX DE CAILLOUTIS PLUS ÉLEVÉS QUE LES PRÉCÉDENTS Niveau de 100 mètres. Au-dessus des trois niveaux précités, il n’existe plus que des amas irréguliers de galets ne présentant nulle part les caractères de terrasses. Il est néanmoins fort remarquable que les princi- paux d’entre eux se rencontrent exclusivement à des altitudes voisines de 100 m. Les deux plus remarquables en aval d’'Epinal sont ceux de Flavigny et de l’'Ermitage. Au sud de Flavigny (8 kil. sud-est de Pont-Saint-Vincent) !, les hauteurs qui bordent la rive gauche de la Moselle sont couvertes de galets roulés, principalement de quartzites du grès vosgien, auxquels s'associent d'assez nombreux galets roulés . de roches cristallines bien conservées (granites, gneiss.. etc.) ; les granites feuille morte font défaut. Le limon forme la majeure partie du monticule situé à l'ouest de la grande route et l’altitude réelle du point le plus élevé atteint par les cailloutis est très approximativement de 100 m. Nancy et Flavigny (Gopron. Du passage des eaux et des alluvions anciennes de la Moselle dans les bassins de la Moselle et de la Meuse, 1873). 1. Feuille de Nancy, carte géologique détaillée. Lambeau marqué P. La cote 354 a été placée par erreur sur la route; elle s'applique au sommet du plateau P, comme j'ai pu m'en assurer sur les plans à 1/20.000. La Moselle sous le grand pont de Flavigny est à 226 m. 358 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Au-dessus de la terrasse de 54 m. de l'Érmitage dont j'ai parlé plus haut, on trouve une deuxième nappe de cailloutis qui forme le plateau entre la ferme et Saint-Remimont, plateau dont l'altitude est de 347 m. !. L’altitude de la nappe est par suite de 100 à 103 m. au-dessus de la Moselle. Indépendamment des quartzites qui prédominent on y rencontre d'assez nombreux galets roulés de micro-granulite et de granite, non altérés. Je n'y ai pas vu de granites feuille morte. On doit considérer comme appartenant au même niveau les argiles avec galets quartzeux qui couronnent les hauteurs de la rive droite de la Moselle au-dessus de Châtel, entre ce village, Moriville et Zincourt et s'élèvent jusqu'à l’altitude de 103 m. au-dessus de la rivière *. On peut également y rattacher les cailloutis exclusivement quartzeux qui couronnent le plateau entre Lay-Saint-Remy et Pagny-sur-Meuse 5. Les galets, qui ont souvent o m. 10 de grand axe, parfois le double, s'étendent au sud sur la pente nord du bois de Pagny et disparaissent brusquement à peu près à la cote 300. Plus haut on ne trouve plus que de petits galets très disséminés et qui correspondent sans doute à des nappes plus anciennes. Le creusement effectué par la Moselle depuis le transport des cail- loutis de Pagny peut par suite être évalué à une centaine de mètres ‘. En amont d'Epinal et jusqu'à Eloyes on ne trouve plus actuelle- ment près de la Moselle aucun dépôt que l’on puisse considérer comme ayant appartenu à la nappe de 100 m. Mais en 1877 on voyait encore près du sommet du fort d’Arches, sur la pente est, une petite terrasse de 3 à 4 m. d'épaisseur formée de couches alternantes horizontales de sables fins, de graviers et de galets remarquablement roulés ; quelques blocs de 1/2 m. c. à 1/3 m. c. arrondis ou même roulés de granulite, de gneiss granulitique et de granitite à amphibole, étaient dispersés à la surface, ou même enchâssés dans les alluvions ; des blocs plus volumineux encore 1 Dépôt marqué P sur la feuille de Lunéville de la carte géologique détaillée. 2. Hogarp. Recherches sur les formations erratiques, p. 65 et seq. 3. La cote du plateau au nord de la grande route, d’après le plan à 1/20.000; est de 288 m. et non de 299, comme l’indique la carte d’'Etat-Major. 4. La suite de cette note démontrera que les pentes de la Moselle n’ont pas sensiblement varié pendant tout le Pleistocène, au moins en aval d'Epinal. ae 1907 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 329 de grès vosgien détachés des pentes encaissantes leur étaient associés. J'y ai noté plusieurs granites feuille morte roulés dont un de o m. 0 de grand axe. Ce dépôt a été entièrement exploité ; son altitude que j'ai eu heureusement l’idée de déterminer à cette époque était de 446 m., soit 90 m. au-dessus de la Moselle !. On peut aussi avec une grande probabilité considérer comme appartenant à un ancien niveau de 100 m. la nappe de cailloutis du seuil de Dounoux (S.-O. d'Epinal). Le plateau presque hori- zontal qui forme col entre le Coney, affluent de la Saône, et la Moselle, est couvert d’une couche de cailloutis remarquablement stratifiés, dont l'épaisseur sur quelques points doit atteindre au moins 13 à 14 m. Les galets, généralement petits (exceptionnelle- ment 20 à 30 c.) proviennent des Vosges; les granites abondent et sont en bon état de conservation ; je n'y ai jamais rencontré de granites feuille morte. L’altitude du seuil étant de 428 m..et la Moselle à Arches, situé à 8 kil., étant à la cote 342,75, on voit que le creusement qui s’est effectué depuis le dépôt des cailloutis de Dounoux peut être évalué avec une très grande approximation à une centaine de mètres ?; par suite, il est logique de les rap- porter au même niveau que les précédents. L'absence des granites feuille morte semble indiquer que ces cailloutis sont le produit d'une rivière vosgienne autre que la Moselle et qu'il est impos- sible de préciser actuellement. J'ajouterai que le seuil de Dounoux offre un remarquable exem- ple de l'effet produit par la décapitation d’un cours d'eau. Le Coney privé des eaux vosgiennes, a créé en aval du seuil un lit profond et étroit, dont les pentes se relèvent rapidement vers le col. En résumé, entre Toul et les Vosges, il y a des traces très nettes d’une nappe de 100 m. environ ; cette nappe n'a pas jusqu’à pré- sent fourni de galets provenant des ballons d'Alsace et de Ser- vance, sauf près du fort d'Arches. Niveaux supérieurs à 100 mètres. Au-dessus du niveau de 100 m. on ne rencontre plus que des galets isolés, dispersés à la surface du sol, ou encastrés dans des fissures du substratum remplies de limons argileux provenant de la dissolution des calcaires ; leur grand axe dépasse rarement O M. 20. 1. Le saut du Broc se trouvant un peu en aval, l’altitude de ce dépôt est en réalité de 100 m., si l’on effectue la correction indiquée plus haut. 2. La pente de la Moselle est de 0,002. 330 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin D’après le capitaine du génie Bois qui a dirigé d’importants travaux de captation d’eau dans la forêt de Haye, des galets de quartzite et de grès couvrent les légers bombements de tous les points culminants, mais semblent concentrés au voisinage des vallées de la Meurthe et de la Moselle !. À 2,400 m. au nord de Chaligney (près Pont-Saint-Vincent), ils atteignent la cote 419 qui est un des points culminants de la forêt, et se trouvent par suite à 200 m. au-dessus de la Moselle, cotée 217, à Pont-Saint-Vincent ? ; ils y remplissent des poches du Bathonien ; leur volume varie depuis la grosseur d’un œuf de pigeon jusqu’à celle du poing ; quelques-uns dépassent ces dimensions : le plus gros était un grès siliceux de 0,28 de grand axe. Les mêmes galets se retrouvent dans les carrières à l’ouest de Nancy à 160-170 m. au-dessus de la Meurthe ; ils abondent près de la ferme Sainte-Catherine 3. Husson en a signalé dans le bois de Romont, près Toul, à la côte 376 “; enfin Buvignier les a observés dans la Meuse, il y a 5o ans, jusqu’à 200 m. au-dessus du thalweg. En dehors des galets de quartz, de quartzite et de grès siliceux qui sont de beaucoup les plus nombreux, on a trouvé quelques rares galets granitiques et même des sables granitiques (Meuse, forêt de Haye) 5. Ces traînées de galets ne se rattachent à aucun niveau, et c’est seulement par analogie, et en se basant sur les observations faites dans la basse Moselle, que l’on peut, ainsi qu'on le verra plus loin, déterminer leur véritable signification. B. — La Moselle en aval de Metz Bien que je n’aie pas eu l’occasion de parcourir la vallée de la Moselle en aval de Metz, il m’a paru utile et même nécessaire de dire quelques mots des études faites par les géologues allemands 4 dans la basse Moselle et d’en comparer les résultats à ceux obtenus dans la haute vallée. Ces études qui ne portent, à ma connaissance du moins, que sur la partie comprise entre Metz èt Schweich (en aval de Trèves), sont de valeur très inégale. Les plus anciennes datent d’une époque où 1. Je dois ces renseignements à l’obligeance de M. le capitaine Bois. 2, L’autre point culminant de la forêt est au Camp Romain, à 420 m. d'altitude, près de Ludres. 3. BLeicner. Guide du géologue en Lorraine, p. 197. — Bull. Soc. belge géolog., XIIL, 1899, p. 92, 93, 105. Voir aussi ma note de 1897, page 394. 4. Hussox. Origine de l’espèce humaine dans les environs de Toul., 1867. — La côte 376 est à 180 m. au-dessus de la Moselle prolongée vers Pagny. 5, Buvianier. Sfatist. géolog. de la Meuse, 1852. — BLEICHER, op. cit. 1901 DE L’ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 331 les questions concernant les terrasses n'avaient pas encore éveillé l'attention ; le plus souvent, les observations de cette époque sont trop peu précises pour qu'il soit possible d’en tirer parti. Tel est le cas des feuilles et notices de la Geologische specialkarte von Preussen und der Thüringischen staaten 1/25.000 — 1880 *, de la Geolog. übersichtskarte des Wesilichen Deutsch-Lothringen 1/80.000 — 1886 et même de la feuille et notice de Sierck de la carte géologique d’Alsace-Lorraine à l'échelle de 1/25.000 éditée en 1880. Les seuls travaux réellement utilisables sont ceux que Grebe a publiés à partir de 1885 et notamment les notices et cartes de Trèves, Welschbillig, Schweich et Pfalzel *. L'auteur y a signalé l'existence de six niveaux de terrasses ou de cailloutis qui sont les suivants : CNIVEATNE EN PERRIER 15 à 20 m. 5 — PRE RAR SR TE 30 m. environ. 4 — AR RE PE PRE TOI EL 4o à 50 m. 3, — MT dr PE LOU TS 2 — PER Te OU DR COTE SIDA TS O TD: Tr — AT CUP EN ASE 00 MNEVITONE D'après les cartes, des limons argileux semblent particulière- ment développés sur les 2°, 3° et 4° niveaux *. Il est impossible de ne pas être frappé de l'extraordinaire con- cordance qui existe entre cette série et celle de la haute Moselle, du moins entre 15 et roo m. Nous retrouvons dans cet intervalle le même nombre de niveaux à des altitudes presque identiques. Il n'y a discordance que pour le 4° niveau dont les limites dans la basse Moselle sont comprises entre ‘40 et 50 m., tandis qu’elles varient entre 5o et 6o m. dans la haute Moselle. Mais il suffit de faire le relevé sur les cartes précitées de tous les lambeaux rapportés par l’auteur à ce niveau pour constater que, dans la réalité, leurs altitudes sont pour la plupart comprises entre 45 et 56 m. On ne doit pas perdre de vue, d’ailleurs, que ces lambeaux . 1. Feuilles de Perl, Beuren, et Wincheringen. >. Erlaüterungen zur geolog. Specialkarte von Preussen.... 1/25.000. Blätt. Trier, Welschbillig, Schweich und Pfalzel 1892. — La feuille Schôn- berg publiée en 1898 ne renferme qu'un tout petit lambeau du cours de la Moselle et n'apporte aucune donnée nouvelle. 3. Je crois devoir faire quelques réserves sur la valeur des niveaux de 30 et de 200 m. qui ne me paraissent pas concorder tout à fait avec les indica- tions fournies par l'examen des tracés, et qui, en tous cas, ne sont repré- sentés que par un trop petit nombre de lambeaux pour que leur existence puisse être considérée comme certaine dans les limites des feuilles publiées. 332 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin sont situés dans une vallée très étroite, qu'ils ont été pour la plu- part très dénudés et qu’en outre ils sont couverts de limons : la détermination précise de la limite supérieure des caïlloutis est donc le plus souvent très diflicile, sinon impossible. En ce qui concerne l'absence dans la haute Moselle des rer et 2e niveaux (200 m. et 130-150 m.) nous verrons dans le chapitre V que l'extension vers l’amont des nappes alluviales régulières formées sous l'influence des variations du niveau de base, dépend de l’exten- sion dans cette direction du profil d'équilibre. Si, à l’époque où les nappes correspondant aux deux premiers niveaux se formaient à Trèves, le profil d'équilibre ne remontaït pas en amont de cette ville, les alluvions que la Moselle déposait au même moment dans la région de Toul ne pouvaient avoir aucun lien avec elles ; les débris de ces alluvions que nous rencontrons à Toul jusqu’à 200 m. au-dessus du thalweg, représenteraient simplement, dans ce cas, le travail de régularisation du cours de la rivière. Mais il me paraît très vraisemblable qu'il n’en a pas été tout à faitainsi, et que déjà à l’époque du niveau de 200 m. la Moselle devait avoir à peu près conquis son profil d'équilibre jusqu’au pied des Vosges, c'est-à-dire jusqu'au voisinage d'Eloyes. En effet, on remarquera tout d’abord que le parallélisme des terrasses des divers niveaux entre 20 m. et 100 m. jusqu’en amont d'Epinal, prouve qu’à l’époque du niveau de 100 m., la zone du profil d'équilibre s’étendait au moins jusqu’à Arches, et que les pentes de ce profil y étaient déjà réduites au minimum compa- tible avec les conditions topographiques et hydrographiques, puisqu'elles n’ont subi que des changements peu considérables depuis cette époque sur une étendue de plus de 500 kil. à partir du niveau de base. Cette précocité de l’évolution de la Moselle ne surprendra pas, si l’on réfléchit qu'elle est simplement la consé- quence de la très faible inclinaison du bassin, à partir des Vosges : la pente générale, en effet, atteint à peine 0,0008, et est par suite infé- rieure de plus de moitié à la pente actuelle de la rivière à Charmes. Mais, s’il en était déjà ainsi à l’époque du niveau de 100 m., il est bien difficile de ne pas admettre que le profil d'équilibre était également réalisé antérieurement quoique peut-être avec des pentes un peu plus fortes. Le contraire serait d'autant plus surprenant que, pour conquérir son profil d'équilibre jusqu'à Trèves, à l’époque des deux niveaux les plus anciens, la Moselle a dû creuser son lit dans les roches très dures du Dévonien, tandis qu’au même moment, en amont de Sierck, elle n'avait qu'à affouiller et à dénuder les couches en général peu consistantes du Trias et du Lias. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 333 L'hypothèse de l'extension des deux plus anciens niveaux jus- qu'aux environs d'Épinal, et peut-être même plus en amont jus- qu'au pied des Vosges, se présente donc comme très vraisemblable, et on peut en conclure que les cailloutis de Toul et du plateau de Haye représentent les débris de ces deux anciennes nappes. Leur destruction plus ou moins complète dans la haute Moselle, leur conservation dans la basse, seraient en connexion avec la nature des terrains traversés par la rivière et ses affluents. Résumé. — En résumé, on trouve dans la Moselle, en dehors des Vosges, six niveaux de cailloutis qui sont les suivants : 1° niveau 200 m. environ (basse Moselle). 2% — 130 à 190 m. id. 3 — 100 m. (haute êt basse Moselle). & — 45 à 56 m. (basse Moselle), 50 à 60 m. (haute Moselle). 5 — 30 m. (haute et basse Moselle). CEE 15-20 m. (basse Moselle), 20 m. (haute Moselle). L'altitude relative du 4° niveau dans la haute Moselle, paraît être un peu plus forte que dans la basse Moselle. Les /°, 5€ et 6e niveaux sont plus ou moins emboîtés ; les cail- loutis des 2e, 3e et 4° sont fréquemment recouverts par des limons argileux (lehm) ; il n'y a pas de vrai lœæss !. Dans l’intérieur du massif vosgien, il n'y a pas de traces nettes de terrasses régulières, et il'est actuellement impossible de ratta- cher les lambeaux de cailloutis qu'on y observe aux niveaux extra-vosgiens. Je montrerai dans le chapitre IV que la comparaison de ces données avec celles fournies par l'étude des autres bassins, con- duit à admettre, à partir du niveau le plus élevé, une série de périodes d’érosion, séparées par des périodes de remblai, le plus ancien remblai datant du Pliocène supérieur. Au début, la haute Moselle et ses affluents ont coulé, en dehors des Vosges, et à fortiori dans l’intérieur du massif, à un niveau de 200 m. au moins plus élevé qu'aujourd'hui. En même temps, les cours d’eau ont subi de grands déplacements horizontaux, comme le prouve ce fait que la haute Moselle actuelle n’est bordée sur une partie de son cours que par des hauteurs à peine supérieu- res à 100 m. couvertes de cailloutis de ce niveau. C’est pendant cette première période que se sont produits les changements de cours les plus importants, les uns dans l’intérieur 1. Lepsius. Geolog. von Deutschland, I, p. 228. 334 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin des Vosges (passage de la Moselle par la dépression d'Ecromagny, puis par Bellefontaine) !, les autres en dehors de l'Ile vosgienne. Je ne dirai rien des premiers dont l’âge reste très problémati- que pour les raisons indiquées plus haut. Parmi les derniers, je citerai le passage des eaux vosgiennes par Dounoux à l’époque probablement du niveau de 100 m., et à la même époque leur , passage par le col de Foug. L’écoulement vers la Meuse a même dû commencer beaucoup plus tôt, peut-être déjà à l’époque du niveau de 200 m.; en tous cas, il a cessé avant la formation de la nappe de 50-60 m. dont les matériaux ont été incontestable- ment charriés par la Moselle. On conçoit que pendant ces divagations du cours d’eau, de vastes ablations horizontales aient eu lieu dans l’intérieur du bassin, facilitées par la faible résistance des roches du plateau lorrain. Ce sont ces érosions qui ont fait disparaître sur le plateau de Haye les assises jurassiques depuis le Bajocien jusqu'au Rau- racien, et y ont apporté les galets vosgiens que l’on y rencontre ?. Leur transport s'explique naturellement par l’approfondissement progressif du lit, et il n’est nullement nécessaire de recourir à l'hypothèse d’un plan incliné partant du sommet des Vosges. Cest probablement à l’époque du niveau de 30 m. que s'est formé, à la suite de mouvements orogéniques et dans des condi- tions encore très obscures, le grand lac qui a occupé la vallée de la haute Moselle, en amont d'Eloyes ?. Cette période lacustre a du être relativement courte puisque déjà à l’époque de la nappe de 20 m. la Moselle avait coupé le comblement du bassin entre Remiremont et Noir-Gueux, et queses alluvions traversant la digue contribuaient à l'édification de cette nappe. Comme dernière conclusion j'ajouterai que les faits observés conduisent à abandonner définitivement le diluvium à galets quartzeux de Hogard ‘. Les éléments granitiques paraissent avoir existé dans toute la série des terrasses de la Moselle et lorsqu'ils font localement défaut, on est en droit d’attribuer leur absence soit à l’altération des granites, soit à l'insuffisance des coupes. 1. de LAMOTHE. Op. cit., 1897, p. 439 et planche. 2. Voir à ce sujet BLeicuer. Guide du géologue en Lorraine, p. 87 et seq. — Bull. de la Soc. belge de géologie, XIII, 1899, p. 182 et seq. 3. de LaAMoTue. Op. cit., 1897, p. 398-412 et carte. 4. de LAMOTHE. Op. cit., 1897, p. 392-398 et 417. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 339 II. — Vallée du Rhin près de Bâle Dans la vallée du Rhin, les seuls travaux utilisables actuellement, en raison de leur précision, sont, à ma connaissance du moins, ceux que les géologues suisses ont consacrés aux régions en amont de Bâle. Toutefois, il y a lieu de remarquer qu’en amont de Rheïn- felden le Rhin n’a pas réalisé ou retrouvé son profil d'équilibre et qu’en outre la présence des glaciers et des limons rend, en général, très difficile la détermination rigoureuse des niveaux. D’autre part, en aval de Bâle, la plupart des terrasses plongent d’une façon anormale vers la plaine d’Alsace, et ne tardent pas à disparaître, ce qui semble indiquer que la plaine du Rhin a éprouvé des mouve- ments propres et a été le théâtre de phénomènes qui ont inter- rompu la continuité des terrasses et modifié leurs relations. Dans ces conditions on est amené à limiter les recherches aux environs immédiats de Bâle, où heureusement les terrasses et niveaux de cailloutis sont remarquablement développés et for- ment une série qui paraît complète. Du Pasquier !, dans les mémoires où il a étudié les formations fluvio-glaciaires du nord de la Suisse, n'avait signalé que trois niveaux qu'il considérait comme étant en connexion chacun avec une glaciation : une basse terrasse de 28 m. à Bâle, de 35 m. vers Turgi, en relation avec les moraines de la dernière extension (moraines internes) ; une haute terrasse de 90-100 m. en relation avec les moraines du maximum d'extension (moraines externes) ; enfin, un niveau à éléments fréquemment altérés (læcherige nagelfluh, Deckenschotter) de 180-200 m., représentant les pro- duits d’une glaciation plus ancienne. M. Guizwiller ? qui s’est plus particulièrement occupé des envi- rons de Bâle, y a reconnu cinq niveaux quil a étudiés et définis dans un travail remarquable par sa clarté et sa précision et qui devrait servir de modèle aux géologues trop nombreux qui n’étu- dient les terrains de transport qu'au point de vue des formes extérieures et sans tenir aucun compte de leur composition. Je vais exposer rapidement les conclusions auxquelles conduit l'examen des travaux de ces deux géologues, et je chercherai à déterminer d’une façon plus précise encore, s’il est possible, le 1. du Pasquier. Die fluvioglacialen ablagerungen der Nord Schweiz, 1891. — Ip. Les alluvions glaciaires de la Suisse (Archives des sc. phys. et nat. de Genève, 1891). 2. GurzwizLer. Die diluvialbildungen der Umgebung von Basel, 1895 — Consulter aussi : du PASQUIER, PENCK et BRücKNER. Le système glaciaire des Alpes, 1894. 336 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin nombre et les altitudes relatives des différents niveaux de cailloutis des environs de Bâle. À. — Passe terrasse. À Bâle, d’après le tableau de du Pasquier ‘, la basse terrasse de la rive gauche est à 28 m. au-dessus du Rhin ; mais, en réalité, ce nombre doit être porté à 31 m., le niveau moyen du Rhin étant de 249 et non de 252 m. ?. Cette altitude relative semble se mainte- nir à peu près constante jusqu’à Koblenz, c’est-à-dire que pendant 62 kil., la terrasse reste sensiblement parallèle au Rhin (31 m. à Saäckingen, 30 m. à Koblenz). M. Gutzwiller a, il est vrai, indiqué pour la terrasse de Bâle un nombre plus fort, 36 m. au lieu de 31 m. La différence pro- vient de ce qu’il n’a pas cherché à éliminer l'influence des cônes de déjection de la Birse et de la Birsig, dont du Pasquier a tenu compte *. Le nombre donné par du Pasquier, rectifié comme il vient d'être dit, doit donc être préféré à celui de M. Gutzwiller, du moins pour une étude comparative. En amont de Bâle, la basse terrasse est formée, par places, de deux gradins ; il y a un niveau bien caractérisé de 15 à 20 m. à Rheinfelden et à Schweizerhalle au nord-est de Muttenz ‘. En aval de Bâle, les divers gradins de la basse terrasse s’abais- sent rapidement et disparaissent successivement ; il n'y en a plus de traces à Breisach. B. — faute terrasse. D'après M. Guizwiller 5 les collines au sud et au sud-ouest de Bâle sont couvertes de puissantes nappes de cailloutis qui forment au-dessus de la basse terrasse quatre gradins distincts. Les deux plus élevés devant être considérés comme du Deckenschotter, je ne m'occuperai dans ce paragraphe que des deux autres. a. Gradin supérieur. — Le plus élevé de ces deux gradins cor- respond à la haute terrasse de du Pasquier. Il n'existe pas en aval de Bâle ; mais près de cette ville on l’observe au Bruderholz et au Rütihard où il s'élève à 350 m. (99-101 m. au-dessus du Rhin). En amoni l'extension de ce gradin a été déterminée par du Pasquier qui l’a signalé en particulier à Pratteln (98 m.), à Gibenach, entre Wallbach et Môhlin, entre Koblenzet Rietheim (93 m.), à Zweiïdlen, dans le Klettgau et dans le Rafz 6. du Pasquier. Die fluvioglac., p. 12. GUTZWILLER. Op. cit., p. 58. du PASQUIER. Op. cit., p. 14. Observation personnelle. , GurzwiLLer. Op. cit., p. 558 et seq., p. 675. du PAsQuIER. Die fluviogl., p. 35-45-46. Les all. glac., p. 58. DORE Œ D 1901 DE L’ISSÉR, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 337 b. Gradin inférieur. — Le gradin inférieur se montre sur la rive gauche du Rhin près de Bâle au pied de la pente nord du Bruderholz, à Gundeldingen et à St. Margarethen; on le suit jusqu’à Allschwyl; un peu au nord il s’abaisse rapidement et disparaît sous la basse terrasse en aval de Sierenz *. Sur la rive droite, on le retrouve à Wyhlen ? ei à Otlingen ; il paraît faire défaut plus au nord. En amont de Bâle, on n’a pas encore signalé son existence, à ma connaissance du moins; je ne serais pas surpris qu’une étude de détail et des coupes favorables permissent un jour d'en retrouver les traces. Il est fort remarquable que l'altitude relative des différents lambeaux de ce gradin soit sensiblement la même, bien qu'ils soient séparés par la large vallée du Rhin et par des distances qui, sur la rive droite, s'élèvent à 9 kil. En effet l'altitude absolue est de 311 m. à Wyhlen, de 304 à Allschwyl, de 300 m. à Otlingen. A St. Margarethen, les cailloutis de ce niveau ne m'ont pas paru dépasser 309 m., nombre qui est même probablement un peu fort. I1 en résulte que, si l'on prend les altitudes par rapport au Rhin, on trouve qu’elles sont toutes comprises entre 56 et 60 m. # M. Gutzwiller considère ce gradin et le précédent comme appar- tenant tous deux à la haute terrasse, bien qu’actuellement le pied du gradin de 100 m. soit séparé de la surface supérieure du gradin de 56 m. par des affleurements tertiaires. c. Deckenschotter. Le Deckenschotter des environs de Bâle appartient, d'après M. Gutzwiller, à deux niveaux : Le plus récent (jüngerer Deckenschotter) comprend les cail- loutis de Rheinfelden, Mônchenstein, Wenzweiler, Schônenbuch “. D'après les données de l’auteur et celles de du Pasquier, on peut admettre que l'altitude relative de la partie supérieure de ces lambeaux est comprise entre 130 et 150 m. *. 1. GUTZWILLER. Op. cit., p. 558. 2. GUTZWILLER. Op. cit., p. 562-631. 3. Rhin vis-à-vis Wyhlen 254, à Bâle 249, à Allschwyl, en le supposant prolongé dans cette direction : 247 m., vis à vis d'Otlingen 244 m.; altitudes relatives correspondantes : 57, 60, 57, 56. 4 Les deux gradins les plus élevés dont il a été fait mention précédem- ment à propos de la haute terrasse appartiennent à ce niveau. 5. GuTzWILLER, Op. cit., p. 587 et 591. — du PASQUIER, die fluvioglac., p.74. A Rheinfelden les cailloutis du Büche s'élèvent à 398 m.; au sud de Känzeli (auf dem Berg), j'ai constaté la présence de très nombreux petits galets quartzeux de ce niveau jusqu’à la cote 4o7 (entre Les cotes 403 et 418); au- dessus il n’y a plus que du lehm. L’altitude relative des cailloutis de Rhein- felden serait par suite comprise entre 135 et 144, le Rhin étant à 265. A Mônchenstein les cailloutis s'élèvent à environ 400 d’après M. Gutzwiller; 5 Octobre 1901. — T. 1e. Bull. Soc. Géol. Fr. — 22 338 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Le plus ancien (oberelsässischer Deckenschotter) comprendrait les cailloutis les plus élevés du Sundgau, notamment ceux d'Ober- hagenthal (alt. 520 m. soit 270 in. au-dessus du Rhin prolongé). M. Gutzwiller considère ces derniers comme contemporains des cailloutis de l’est de la Suisse et comme un produit fluvio- glaciaire de glaciers qui occupaient l’ouest de la Suisse et s’avan- çaient jusqu'au voisinage de Bâle. Les cailloutis de Rheinfelden sont le produit d’une glaciation plus récente, antérieure toutefois à celle de la haute terrasse. ! Si j'ai bien compris les idées de M. Gutzwiller, il semble que la succession des phénomènes qui se sont accomplis dans la vallée du Rhin près de Bâle, à partir de la formation du plus ancien Deckenschotter ait été, dans ses grandes lignes, la suivante : Pendant une première glaciation, les glaciers de l’ouest de la Suisse ont accumulé les caïlloutis les plus élevés du Sundgau ; le Rhin s’écoulait alors vers le bassin de la Saône et, comme nous le verrons plus loin, son altitude devait être de 200-230 m. environ plus élevée qu'aujourd'hui !. La retraite des glaciers a déterminé un creusement général qui a dû atteindre une centaine de mètres; en même temps, un affaissement de la région entre la Forêt-Noire et les Vosges obli- geait le Rhin à abandonner la direction du sud-ouest et à se diriger vers le nord. Une nouvelle glaciation a amené la formation du 2° niveau du Deckenschotter ; elle a été suivie de la retraite des glaces et d’un _ creusement qui a amené les vallées à une profondeur très voisine de celle qu’elles ont actuellement. Puis ont eu lieu successivement la grande glaciation de la haute terrasse (3 glaciation) qui a déterminé un remblai de 100 m., la retraite des glaces et le creusement des vallées jusqu’au niveau actuel, une nouvelle invasion des glaciers (4° glaciation) avec rem- blai de 30 m. (basse terrasse), enfin leur retraite définitive. On voit que, contrairement à ce qui s’est passé dans l’Isser, il y aurait eu après les caïlloutis de 130-150 m. creusement presque je les ai suivis dans les vignes près de Grut jusqu’à 393. L’altitude relative est donc de 139-146 m. par rapport au Rhin coté 254. 1. Je crois devoir faire ici quelques réserves sur cette théorie en ce qui concerne la vallée du Doubs. J’ai pu récemment constater l'identité des caïllou- tis des forêts de Chaux et d’Arne, y compris ceux d’Azans, avec ceux du Sund- gau : j'ai notamment retrouvé sur ces divers points les silex à Radiolaires et les quartzites gris verdâtres caractéristiques des dépôts du Sundgau; l’origine rhénane de ces cailloutis n’est donc pas douteuse. Mais je crois leur âge beau- coup plus récent et les circonstances de leur formation un peu différentes. Je traiterai cette question dans une note spéciale. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHAN ET DU RHÔNE 339 total de la vallée, remblai de 100 m., déblai, formation du remblai de 30 m. et enfin établissement du régime actuel ; la basse terrasse se trouverait par suite presque complètement emboîtée dans la haute, totalement même d’après du Pasquier, tandis que dans l’Isser elle n’est emboîtée que dans la moyenne terrasse. Je démontrerai dans le chapitre IV qu'il est impossible d'admet- tre dans son intégrité cette succession de phénomènes, et que notamment le creusement après le niveau de 130-150 m. n'est pas descendu au-dessous de 60 m., qu'il y a une moyenne terrasse indépendante de la haute et enfin que la basse terrasse n’est emboîtée que dans la moyenne. En résumé, les terrasses et niveaux de cailloutis des environs immédiats de Bâle forment une série très nette qui est la suivante : Traces d’une terrasse de 15 à 20 m. (emboîtée dans celle de 31 m.). Terrasse de 31 m. (basse terrasse). Terrasse de 56 à 60 m. (gradin inférieur de la haute terrasse de M. Gutzwiller). Terrasse de 99 à rot m. (haute terrasse). Terrasse et cailloutis de 130 à 150 m. Enfin, au-dessus de ce dernier niveau, on trouve dans le Sundgau des débris d'anciennes alluvions dont l'altitude actuelle au-dessus du Rhin s'élève à environ 270 m. Mais cette altitude est certai- nement supérieure au creusement réellement effectué depuis cette époque. Pour s’en rendre compte, il suflit de remarquer que leurs divers lambeaux semblent avoir fait partie d’une nappe ou plutôt d'un cône de déjection qui s’abaisse rapidement vers le nord et le N.-O. (490 m. à Bettlach, 460 à Volkensberg) !. La compa- raison des pentes Irchel-Oberhagenthal d’une part, Rheinsberg- Môünchenstein-Schônenbuch d'autre part, conduirait à une con- clusion analogue. On peut donc, je crois, considérer comme assez probable que le niveau du Rhin contemporain de la formation de ces cailloutis ne devait pas s'élever à beaucoup plus de 200-230 m. au-dessus du niveau actuel. III. — Vallée du Rhône prés de Valence M. Depéret qui a fait pour le Service de la carte géologique détaillée (feuille de Valence) une étude minutieuse et approfondie des anciennes terrasses du Rhône et de l’Isère ? les a classées ainsi qu'il suit, en commençant par les plus récentes : 1. GUTZWILLER. Op. cit., p. 578 et 580. 9. Voir aussi Bulletin des services de la carte, tome VIII, p. 115 et tome VI, p- &. 340 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin 6. Basse terrasse, dite de Valence. 15 à 20m. >. Moyenne terrasse, dite de Romans. 40 à 5o m. au-dessus de l'Isère et du Rhône. . Haute terrasse, dite du Séminaire de Valence, de 20 à 30 m. plus élevée que les précédentes. PLEISTOCÈNE. . Fe 3. Niveau de cailloutis de 90 m. Id. 130 à 190 m. ne Id. 200 et au-delà. D PLIOCÈNE. . L'examen sur le terrain de ces divers niveaux, m'a conduit à apporter à cette série quelques modifications de détail que je vais indiquer brièvement. 1° La basse terrasse de Valence est à 21 m. au-dessus du Rhône !. Ce relief ne varie pas sensiblement entre Valence et Tain; car le plateau de St-Georges présente à peu près la même altitude relative. La pente de la basse terrasse est donc, dans cette région, très voisine de celle du Rhône qui est de 0,00057. La terrasse de Romans est à 168 m. d'altitude absolue, soit 32 m. au-dessus de l'Isère ? ;: sa surface se relève rapidement vers le nord par suite de la présence d’une série de cônes de déjection formés par les torrents de la rive droite. Si l’on suit la terrasse sur la rive gauche, où les torrents n'ont joué qu'un rôle négligeable on voit son altitude relative diminuer progressivement ; elle n’est plus que de 25 m. à Pont de l'Isère *, ce qui correspond à une pente de o,o0o21. Un peu au sud du château d’Armoillet, la ter- rasse cesse brusquement à la cote 130 environ; toute sa partie aval a été emportée par la dénudation ; il est évident qu’en raison de sa pente, elle devait à peu de distance atteindre le niveau de la terrasse de Valence. On remarquera, en outre, qu'à hauteur d'Armoillet, la terrasse est dominée vers l’est par un plateau qui fait partie de la nappe d’'Alixan dont je parlerai dans un moment : la terrasse de Romans occupe donc ici la même position que celle de Valence par rapport à la terrasse du Séminaire. Sur la rive droite la terrasse de Romans se termine brusquement au-dessus du Rhône par une falaise de 15 m. que l’on peut suivre depuis Tain jusqu’à Pont de l'Isère. : 1. Repère de la statue de Championnet 123 m. 253. Rhône à l’étiage 102 m. 63. Repère de la cathédrale, 126,83. — Repère de la gare, 124,19. — Repère du polygone, 126,17. On ne doit pas perdre de vue qu’une partie du tertre de la vieille ville doit sa surélévation d’ailleurs très faible à l’action de l’homme. 2. C’est la cote du plateau à l’est de la gare. Repère de la gare 167 m. 50. L’Isère est à 136 m. sous le pont de Romans. 3. Cote du confluent de l'Isère : 106,5. Pente entre le confluent et Romans, 0,0013. 1901 DE LISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 341 Ces faits et l'examen du terrain ne laissent aucun doute sur l'identité de formation et d'âge des deux terrasses de Valence et de Romans : elles représentent toutes deux les débris d’une nappe alluviale qui a remblayé au même moment le fond de l'Isère et du Rhône. Lorsque la période de creusement est arrivée, le Rhône dont le profil d'équilibre était à peu près atteint s’est abaissé de quan- tités égales entre Tain et Valence, tandis que l’Isère s’est encaissée de quantités croissantes de l’aval vers l’amont. La formation de la falaise de Tain-Pont de l'Isère est un phénomène normal, qui se produit toutes les fois que le cours d’eau principal vient creuser, en se déplaçant, les cônes de déjection de ses affluents (fig. 17). 2° Au-dessus de la terrasse de Valence (fig. 9) on trouve la ter- x rasse du Séminaire dont le bord est à 45-46 m. au-dessus du sans de Plateau SSD RETOURS - xde la gare | SÉRuTTE Plaine d'Aliran D re , 199 Zsére 168 C-;; tde Romans LE LATE es, horizontale de 1ovm. Fig. 9. — Coupe entre Valence et Romans. Echelle approximative des longueurs : r millim. pour 173 mètres. A, Terrasse de Valence ; B, Terrasse du Séminaire; C, Terrasse des Bayanins ; D, Terrasse de Romans : m, Mollasse marine. Rhône !. C’est l’extrémité d’un ancien lit de l'Isère qui forme la plaine d'Alixan en remontant vers le nord avec une pente de 0,0025. Il se termine au-dessus de l'Isère, près de Romans, par une falaise qui, aux Bayanins, domine cette rivière de 53 m. La . terrasse des Bayanins est l'équivalent dans l'Isère de la terrasse du Séminaire. 3° Sur le massif mollassique qui s'étend entre Chateauneuf d'Isère et Saint-Marcel, on trouve deux autres nappes : la re, (p!° de la carte) remarquablement conservée, forme le vaste pla- teau de Foullouse, à 194 d'altitude, soit 88 m. au-dessus du Rhône ; la 2e (p'b), très morcelée, atteint au Télégraphe la cote 247, soit 138 m. au-dessus du Rhône. 4° Enfin, j'ai constaté l'existence à Glun et au pied du plateau qui s'étend entre les Aïguilles et les Robins (rive gauche de l'Isère) d’une terrasse basse de 7 à 8 m. 1. Repère du Séminaire sur la route de Chabeuil, 146 m. 917. La nappe de cailloutis s’élève à 2 m. plus haut. 342 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin En résumé les environs immédiats de Valence offrent une suc- cession de terrasses d’une remarquable netteté, comparables à ce point de vue à la série de Bâle ou à celle de l’Isser, et dont les altitudes par suite de circonstances particulières peuvent être déterminées avec une rigoureuse exactitude. La série de ces ter- rasses est donnée par le tableau ci-dessous : J'ai placé en regard celle de la carte, pour montrer que le désaccord ne porte en réalité que sur l’'individualité des terrasses de Romans et de Valence. SÉRIE RÉSULTANT des considérations qui précèdent dans les environs immédiats de Valence SÉRIE DONNÉE par la Carte géol. détaillée pour l’ensemble de la feuille de Valence OBSERVATIONS Terrasse de7à 8m. à Glun, » Les deux terrasses, basses sont em- boîtées. Basse terrasse ou terrasse rasse de Romans, de de 21 m. au-dessus du 4o à 50 m. au-dessus du Rhône, ayant pour Rhône et de l'Isère. équivalent dans l'Isère la terrasse de Romans (32 m. au-dessus de l'Isère à Romans). On verra dans le Chap. IV que: cette terrasse est Terrasse du Séminaire de Valence (45-46 m. au- Haute terrasse ou ter- rasse du Séminaire de 20 ou 30 m. plus élevée que les précédentes. Niveau de cailloutis de 90 m. Niveau de cailloutis de 130-150. [Niveau de cailloutis de 200 m. et au-delà. de Valence 15-25 m. Moyenne terrasse ou ter- [ au pied des Robins. Basse terrasse de Valence dessus du Rhône), ayant pour équivalent à Ro- mans, la terrasse des Bayanins (53 m. au-des- sus de l’Isère). Cailloutis du plateau de Foullouse à 88 m. Niveau de cailloutis de 138 m. » Ce en réalité une moyenne ter- rasse. Ce niveau corres- pond comme on le verra à la h' terrasse du Rhin et de l’Isser. niveau n’est pas représenté dans les envi- rons immédiats de Valence. IQOI DE L’ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 343 CHapiTRe IV. — Comparaison des résultats et conclusions En relevant par vallée et en disposant dans des colonnes paral- lèles toutes les terrasses signalées dans les chapitres I et II, on obtient le tableau suivant : VALLÉE VALLÉE É VALLÉE Nes DE DE LA ETES DU RHÔNE L’ISSER MOSELLE 5 A VAL des 5 ; ENCE | OBSERVATIONS SOS E P = Lac éri NIVEAUX ge ee © & | Série Des Plages [Terrasses] amont de 5 bservée | “°rrigée de Metz | Trèves A CNE TE AND) en er ra 200-205 |200-205| Traces de| 200 m. |220-230| 200 200 1 En tenant niveau cailloutis |environ ? 4 et et compte du dépla- jusqu'à au-delà | au-delà | cementihorizon- 200 m. tal du niveau de au dessus la base (chap. I). du thal- 2 At $ Pr itude très tel douteuse, voir 5 chapitre III. 5 ss ee | 3 Limiles rec- RS 135-145|130-150 130-150|130-150| 138 148 | tifiées conformé- ment aux indica- tions du chapitre ge II] ; celles de Gre- à 98-100| 98-100| Débris | 100 | 100 88 98, | be étaient de:40- niveau 1 re 50. nappede # Limites in- 100 m. certaines, plutôt Le un peu faibles. : 55 55-57 | 54-60 | 45-56 | 56-6o | 45-46 | 55-56 niveau à 0 < 30 28-30 30 30 31 21 31 niveau : L'examen de ce tableau donne lieu à diverses observations et conduit à des conclusions que je vais développer. 1° Le premier fait qui se degage de l’examen d’ensemble de ce tableau, c’est l'existence dans chacune des quatre vallées considé- rées, de six niveaux de cailloutis, compris à très peu près entre les mêmes limites d'altitude par rapport au fond des vallées actuelles. On remarque en outre qu'il y a partout deux niveaux au-dessus de 100 m. et quatre entre o et 100 m. 344 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Ces analogies sont d'autant plus frappantes que trois des vallées appartiennent à des bassins indépendants, tributaires soit de l'Océan, soit de la Méditerranée, et que l’une d'elles est séparée des autres par la large dépression méditerranéenne. 2° Si nous procédons à l'examen de détail, nous voyons que dans les trois bassins de l’Isser, de la Moselle et du Rhin, ily a une concordance presque parfaite des altitudes des cinq niveaux les plus récents, surtout si l’on prend comme série type celle des plages de l’Isser ou celle des terrasses dans laquelle on a effectué pour le 3% niveau la correction de 5 m. correspondant au dépla- cement horizontal du niveau de base, La concordance est particu- lièrement frappante pour les niveaux de 100, 30 et 15-20 m. Pour le niveau de 50-60 m. les altitudes minima de tous les lambeaux bien conservés sont comprises en général entre 54 et 59 m. Elles tendent peut-être dans la haute Moselle à dépasser légèrement 6o mètres, ce qui est conforme aux lois que j’exposerai dans le chapitre V ; dans la basse Moselle les nombres trouvés sont un peu plus faibles : fait qui s'explique naturellement par cette circonstance que les caïlloutis observés se trouvent sur les flancs d’une vallée étroite et profonde où ils ont été ‘très dénudés, tandis que dans la haute Moselle, ils couronnent des plateaux élevés, où ils ont été protégés contre les dénudations par le substratum rocheux (Archettes, Tannières, ete.). Le 2e niveau (130-150 m.) est le seul dont l'existence pourrait faire naître quelques doutes en raison de l’écart de 20 m. qui existe entre les limites qui le définissent. Mais on ne doit pas perdre de vue que ce niveau par suite de son ancienneté n’est représenté que par des lambeaux très dénudés. Il n’en est done que plus remarquable que malgré cette cause d’erreur, les différents géolo- gues qui ont étudié les vallées précitées soient arrivés à renfermer tous ces lambeaux dans des limites identiques, et en définitive assez resserrées, aussi bien dans l’Isser que dans le Rhône, la Moselle ou le Rhin. D’après les données recueillies dans l’Isser l'altitude réelle de ce niveau a dû être très voisine de 140-145 m. En ce qui concerne le r° niveau, les écarts constatés doivent nécessairement être encore plus grands que pour le 2° niveau, soit en raison de sa dénudation plus avancée, soit parce que le profil d'équilibre n'était pas encore réalisé ou l'était avec des pentes notablement plus fortes qu'aujourd'hui. On remarquera néanmoins que dans presque toutes les vallées ce niveau semble voisin de 200 m. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 345 La seule anomalie sérieuse est celle que présente la série du Rhône, et elle peut paraître d'autant plus grave qu'elle porte sur tous les niveaux. Mais il est facile de montrer qu’elle est seulement apparente. En comparant, en effet, les cinq niveaux les plus récents du Rhône avec ceux de la série de l’Isser, on voit que l'écart des nombres qui les définissent est constant et uniformément égal à 10 M. environ. 272% Si donc l’on augmente de 10 m. chacun de ces nombres on obtient la série suivante : 19-18 m., 31 m., 55-56 m., 98 m., 148 m., qui concorde d’une façon aussi parfaite qu’on peut le souhaiter avec celle de l’Isser. Cet écart constant entre les deux séries est la conséquence de l’état actuel du profil longitudinal du Rhône à Valence, comme le montre la figure 10, établie à l’aide des documents que le service des Ponts et Chaussées a bien voulu me communiquer. + S [ce] L'el Re à ? È o ns & ze à à S oo © U Ce) D + © D DRE ST SRE Si E ù RNCS SU ESS D re : RSS RE e ANSE AT à 0 de Ÿ CREER 2ZA © 2 Q D D © CS HZ rat L RES LE DEN $ SNS S CMS NEUS US RAT ch ÉRESNDS sIROS LATE PR t OMS S 1 l 1 1 à CRU ÈS ME j i ( ERTANE Ÿ SRE DES" JS DEA I 1 i 1 DE = NS | pe M CN “ ENT 1 L ï 1 [ ! i [l l Delta h AXTA 1 DEEE È B b F @) | a) © à) ne Cà 14.6 18.8 228 33.) 12.5 137 1 102 CLS Fig. 10. — Profil longitudinal du Rhône entre la mer et Lyon (Etiage). — Echelle : des hauteurs 1 millim. pour 8 mètres ; des longueurs 1 millim. pour 2 kilomètres. : On voit sur cette figure que le lit du fleuve, malgré la faiblesse de ses pentes, présente encore entre Pont-Saint-Esprit et Lyon un bombement sensible dont l'effet doit être nécessairement de diminüer toutes les altitudes relatives des anciennes terrasses. À Valence, la valeur de cette diminution peut avec une très grande probabilité être évaluée à une dizaine de mètres. Si le Rhône régularisait son lit et établissuit la continuité des pentes entre la mer et le confluent de l’Aïn, ce bombement dispa- raîtrait, le lit suivrait à peu près le tracé marqué en pointüllé et 346 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin les altitudes relatives de toutes les terrasses des environs immé- diats de Valence se trouveraient augmentées de 10 m. Cet état actuel du lit provient-il de ce que le Rhône n’a pa encore atteint son prolil d'équilibre, ou bien est-il dû à ce que ce profil, après avoir été atteint, a été ultérieurement modifié par les cônes de déjection des rivières torrentielles, telles que la Drôme et l'Isère ? La deuxième hypothèse me paraît de beaucoup la plus vraisemblable, mais je ne puis actuellement trancher cette ques- tion faute de documents. En résumé, en effectuant dans la série du Rhône une même correction, justifiée par l’état du profil du fleuve, on la rend entièrement comparable aux trois autres, et l'on peut dès lors considérer la série des terrasses des quatre vallées étudiées comme rigoureusement concordante. 3° La répartition des limons offre également des analogies remarquables. Dans le Rhin et l’Isser, des limons d’un caractère particulier, nettement différents des limons actuels, enveloppent la zone comprise entre les niveaux de 100 et de 30 m. :; ils font défaut sur ce dernier; dans la Moselle des limons argileux cou- vrent le niveau de 50-60 m. (haute Moselle) et accidentellement celui de 100 m. ; ils semblent faire défaut ou être très réduits sur le niveau de 30 m. Dans le Rhône, près de Valence, on constate également l'absence des limons sur la basse terrasse, et leur présence sur le niveau de 90 m. (plateau au sud de Valence). 4° On ne peut évidemment attribuer au hasard des coïnci- dences aussi remarquables, qui portent à la fois sur le nombre des niveaux et sur les altitudes relatives de la plupart d’entre eux. Il n’est pas davantage possible d'admettre que les observa- tions des divers auteurs ont été plus ou moins influencées par celles de leurs devanciers. A l’époque où j'ai rédigé ma note sur l'Isser, je n'avais pas encore eu l’occasion d'étudier les travaux de Grebe, ni ceux de du Pasquier, et les divergences réelles ou apparentes qui existent entre les résultats obtenus par Grebe, du Pasquier et M. Depéret prouvent la complète DEC des recherches de ces géologues... On est donc nécessairement amené à conclure qu'une seule et même cause, agissant simultanément et de la même façon dans les bassins précités a déterminé la formation des nappes alluviales et des terrasses. Cette cause n’a certainement pas agi à l'amont de la zone occupée par les terrasses, comme du Pas- 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 347 quier a tenté de le prouver pour la vallée du Rhin. L'absence de toute trace d'anciens glaciers dans la vallée de l’Isser, leur présence très douteuse dans le bassin de la Moselle, en tous cas limitée au voisinage des crêtes et aux parties hautes des vallées ! constitueraient déjà des objections sérieuses. Mais, même en admettant la réalité de ces anciens glaciers, leur intervention dans la formation des terrasses soulèverait de nombreuses difii- cultés. J'examinerai dans le chapitre V celles qui se rapportent au mécanisme même de cette intervention, tel que l'ont exposé du Pasquier, Penck et Brückner *?, et je me bornerai ici à faire remarquer qu'il est impossible dans cette hypothèse, de concevoir comment des glaciers issus de massifs aussi différents à tous les points de vue (altitude, superficie, nature des roches, etc...) que les massifs du Djurdjura, du Dira, des Vosges et des Alpes occidentales, auraient pu cependant déterminer dans les vallées correspondantes le même nombre d’alternatives d’érosion et de remblai, se traduisant finalement par la formation de terrasses étagées situées aux mêmes altitudes relatives, les unes au voisi- nage immédiat de l'embouchure, les autres au pied même des massifs à plusieurs centaines de kilomètres de cette embouchure *. Ainsi, on ne peut douter que la cause qui a produit les nap- pes alluviales et les terrasses a dû nécessairement agir à l'aval de celles-ci, et il est dès lors impossible d'en imaginer une autre que l’oscillation verticale du niveau de base. Je rappellerai, en effet, brièvement, que, dans mon mémoire sur l'Isser, j'ai démontré que l'hypothèse de déplacements exclusivement horizontaux était inacceptable en raison de la configuration même de la côte et des relations qui existent à l'embouchure de l'Isser entre les plages et les terrasses *. D'autre part, l'hypothèse de mouvements verticaux exclusivement négatifs, est inconciliable avec le fait 1. de Lamorwe. Op. cit., 1897, p. 432 et 433. >. Pencx, du Pasquier et BRückNER. Le Système glaciaire des Alpes, 1894. 3. Je crois devoir rappeler que dans une note récente (PASNGEEAC); XXVIIL p..1004) où il a réfuté très nettement l'argument du surcreuse- ment, invoqué en faveur de la théorie de l'érosion glaciaire, M. Kilian a appelé l'attention sur l'intérêt qu’il y aurait à rechercher dans quelle me- sure les déplacements du niveau de base ont pu se répercuter dans les val- lées alpines, et combiner leurs effets avec ceux résultant des oscillations des glaciers. Pour M. Kilian, il est impossible d’attribuer aux glaciers les creusements successifs de certaines vallées, et l'intervention d’une cause agissant de l'aval vers l'amont, lui paraît, dans certains cas, s’accorder beau- coup mieux avec les faits observés. 4. de Lamore. Op. cit., 1899, p. 28/4 et 290. 348 DK LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin que les nappes alluviales présentent à l'embouchure même des épaisseurs considérables, car il est impossible de concevoir, sans faire intervenir des mouvements positifs, comment le fleuve aurait pu d’abord creuser son lit très au-dessous du niveau de la mer, et ensuite le remblayer. 59 On doit par conséquent considérer, sinon comme rigoureu- sement démontré, du moins comme extrêmement probable, que la formation des terrasses dans les trois bassins du Rhin, du Rhône et de l’'Isser, est exclusivement due à une succession. d’oscillations verticales qui ont affecté simultanément et de la même façon les niveaux de base de ces trois bassins. Ces oscillations alternativement positives et négatives ont déterminé dans chacun des bassins précités des phénomènes alternatifs de remblayage et d’érosion, le remblayage corres- pondant aux mouvements positifs, l’érosion aux mouvements négatifs. Si l’on prend comme base les données résultant de l’étude de l'Isser, puisque les phénomènes ont été identiques dans tous les bassins, on voit que la plus ancienne phase de remblai dont on puisse encore observer des traces distinctes correspond à une époque où les cours d’eau coulaient à 200 m. au moins au-dessus des thalwegs actuels !. D’après l'épaisseur des cailloutis de ce niveau dans la vallée du Rhin ?, on peut, je crois, admettre provisoirement que ce rem- blai avait été précédé d’un creusement qui avait approfondi les vallées jusqu’à une altitude de 150 m. environ par rapport au thalweg actuel. A partir du remblai de 200 m. jusqu'à l’époque actuelle, le creusement des vallées s’est opéré par étapes successives, au nombre de six, séparées par des périodes de remblayage. Chaque phase d’érosion a amené le thalweg à un niveau plus bas que celui qu'il avait atteint à la fin de la période d’érosion précédente, chaque phase de remblai l’a relevé d'une quantité plus faible que celle dont il s'était abaïissé. Ces alternatives d’érosion et de remblayage se sont succédé 1. Il n’est nullement impossible qu’il y ait eu des nappes de cailloutis plus anciennes, contemporaines de la fin du Pliocène marin ou du commencement du Pliocène supérieur : les galets de Sidi-Féredj et des pentes de Bouzaréah signalés dans ma note sur l’Isser représentent peut-être les débris des plages correspondantes. 2. 5o m. environ à l’Irchel. — Voir GUTrzWILLER. Op. cit. p. 613. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 349 comme l'indique le diagramme de la fig. 2, diagramme qui a été établi pour l'Isser, mais qui, pour les raisons exposées, s’appli- que entièrement aux autres bassins !. L'altitude du thalweg à la fin de chaque remblayage est donnée par les maxima, celle de la fin de chaque période d'érosion est donnée par les minima. Les maxima sont pour la plupart exac- tement connus; quelques-uns des minima sont incertains, par - suite de l'ignorance dans laquelle nous sommes de l'épaisseur réelle des nappes alluviales correspondantes : le seul minimum dont la position soit bien déterminée est celui qui a précédé la formation de la haute terrasse ; il est dans l’Isser, à environ 63 m. au-dessus du thalweg actuel, en tenant compte du déplacement horizontal du niveau de base. La portion du tracé correspondant aux phénomènes qui se sont accomplis après le niveau de 15-20 m. a été laissée en pointillé : il est en effet très difficile de décider si l’état actuel qui paraît caractérisé partout par la stabilité absolue du niveau de base correspond à un minimum ou à un maximum: en d’autres termes, si nous sommes à la fin d'une phase d’érosion ou d’une phase de remblai. Comme je l’ai déjà dit, cette dernière hypothèse me paraît la plus vraisemblable. Les mouvements positifs semblent avoir été extrêmement lents, ainsi que je l’ai démontré pour l’Isser ?. En ce qui concerne les mouvements négatifs, l’Isser ne fournit aucune indication précise ; mais on peut, je crois, conclure de l'intégrité transversale com- plète des nappes alluviales du seuil de Dounoux et d'Alixan, que le mouvement négatif qui a suivi leur formation n'a pas été instantané, ni même très rapide. S'il en avait été autrement, la Moselle et le Rhin auraient eu le temps de se creuser un chenal plus ou moins profond dans la direction qu'ils suivaient au moment où le mouvement s’est produit. L'ensemble de ces faits indique en outre que le temps qui s’est écoulé entre la formation des cailloutis de 200 m. et l’époque actuelle a dû être extrêmement considérable. Enfin, il semble que dans les trois bassins, il n’y a pas eu de déplacement horizontal du niveau de base pendant les mouvements positifs, en d’autres termes, que les embouchures à la fin de ces mouvements, se sont retrouvées à peu près sur la même verticale, du moins pour les niveaux compris entre o et 100 m., et peut-être aussi pour celui de 130-150 m. Nous verrons en effet dans le 1. Voir aussi le tableau synoptique placé à la fin de ce chapitre. 2. Voir Chapitre I. 350 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin chapitre V que des déplacements horizontaux un peu considé- rables auraient nécessairement modifié les intervalles des terrasses successives. 6° La concordance des variations du niveau de base entre des bassins dont les embouchures sont aussi éloignées et indépen- dantes, ne peut s'expliquer dans l'hypothèse de mouvements pro- pres de la lithosphère. Je l’ai déjà fait ressortir dans mon mémoire sur l’Isser, en ce qui concerne la côte algérienne ‘. et l’impossi- bilité est encore plus évidente dans le cas présent. Il est déjà bien difficile, en effet, d'imaginer qu'une zone de l'écorce terrestre aussi hétérogène que celle qui comprend les bassins du Rhin, du Rhône et de l’'Isser, zone dont les différents compartiments ont, à des époques variées, joué d'une façon indépendante. ait pu pen- dant le Pliocène supérieur et le Pleistocène, sur une étendue qui embrasse 15° de latitude, éprouver des mouvements synchroniques, d’amplitudes rigoureusement concordantes. Cette supposition paraîtra encore plus inadmissible, si l’on réfléchit que cette zone est séparée en deux parties par la fosse méditerranéenne. | On est ainsi amené à attribuer exclusivement les variations du niveau de base à des oscillations de la masse océanique, c’est-à- dire à ces mouvements généraux que M. Suess a qualifiés d’eusta- tiques, et, comme conséquence, à admettre que la plus grande partie de la surface occupée par les bassins du Rhin, du Rhône, de l’Isser et une notable portion du littoral ont fait partie pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène d’une zone relativement fixe de la lithosphère. Je dis la plus grande partie, parce qu’en réalité la conclusion n’exclue nullement la possibilité de mouvements locaux, tels que ceux qui ont peut-être déterminé la formation par effondrement des grands lacs alpins, l’affaissement relativement lent de la plaine du Rhin en aval de Bâle et de celle de la Bresse ?, ou celui de portions plus ou moins étendues le long de certaines lignes de rivage. 7° Du moment où les variations du niveau de base sont dues à des mouvements eustatiques, il semble évident que l’on doit sur d'autres parties du globe, retrouver des traces d'anciennes plages et de systèmes de terrasses, dont les altitudes relatives et les intervalles concordent avec ceux observés dans l’Isser, sous les réserves toutefois qui seront indiquées dans le chapitre V. 1. de LAMOTHE. Op. cil , p. 300. 2, Voir DELAFONT et DEPÉRET. Les terrains tertiaires de la Bresse. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 3o1 Je suis fermement convaincu que le jour où, grâce à la multi- plicité des observations, l’on parviendra à éliminer des données concernant les anciennes plages, les écarts attribuables aux ma- rées, et où des cartes à grande échelle et des procédés de mesure rigoureux permettront de déterminer avec précision les altitudes relatives des plages et des terrasses, on constatera sur un grand nombre de points l’existence de systèmes de plages et de terrasses identiques à ceux de l'Isser. A ce point de vue, la succession des anciennes plages de la baie Murray que j'ai citée dans le chapitre II est un indice qui mérite de ne pas être négligé. Mais il importe aussi de ne pas perdre de vue que la stabilité d’une zone plus ou moins étendue de la lithosphère pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène n'implique pas nécessairement celle des zones voisines, et qu'un grand nombre de faits semblent même indiquer que certaines régions de cette lithosphère ont subi pendant les mêmes périodes des mouvements propres dont les effets se sont superposés à ceux des mouvements eustatiques, et ont dû modifier dans ces régions les intervalles et même le nombre des terrasses et des plages. Si, comme je l'espère, les conclusions de ce mémoire sont con- firmées dans l'avenir, on disposera pour les recherches que je viens d'indiquer, d'une série type de plages et de terrasses établies sur des données rigoureuses, à laquelle on pourra rapporter toutes les observations, et qui permettra par comparaison, de déterminer . les compartiments de la lithosphère qui sont restés relativement fixes pendant les périodes précitées et ceux qui ont éprouvé des mouvements propres. Dans le prochain chapitre, j'indiquerai quelques règles pratiques qui pourront servir de guide pour ces études comparatives. La série type de l’Isser pourra, en outre, être utilisée comme une sorte de table ou d'échelle chronologique, du moins pour les régions qui ont été affectées de la même façon par les mouvements eustatiques ; elle permettra d’assigner des dates comparables à tous les évènements importants que l’on pourra rattacher à des terrasses ou à des plages déterminées. J’aiessayé, dans le tableau qui termine ce chapitre, de le faire pour quelques-uns des phénomènes de capture dont la vallée de la Moselle a été le théâtre, phénomènes dont j'avais déjà parlé dans ma note de 1897; j'espère être en mesure bientôt de le tenter pour des phénomènes analogues plus compliqués, qui se sont produits dans d’autres bassins. , 352 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin 8 Age des terrasses et des plages. Leur désignation. — Les graviers des basses terrasses du Rhône et de la Moselle, et la plage de 15-17 m. en Algérie, sont, en dehors des limons et du loess, les seules alluvions qui jusqu’à présent aient fourni des débris de Vertébrés. La faune est caractérisée dans le Rhin et la Moselle par ÆElephas primigenius et Rhinoceros tichorinus, en Algérie, par Æl. Yolensis 1. L'absence de tout débris de Vertébrés dans les moyenne et haute terrasses et dans le Deckenschotter ne permet pas de déterminer leur âge d’une façon précise. En se basant sur des analogies de position, d’ailleurs très discu- tables, du Pasquier a admis, avec réserve il est vrai, que la haute terrasse était caractérisée par Æl. antiquus et le Deckenschotter par Ël. meridionalis ; il a par suite classé ce dernier dépôt dans le Pliocène supérieur, et la haute terrasse dans le Pleistocène ?. M. Gutzwiller a rangé au contraire tous les niveaux de caïlloutis dans le Pleistocène, en admettant toutefois que les plus élevés du Sundgau pouvaient correspondre à la partie la plus récente du Pliocène supérieur. Dans l’Isser, ainsi que je l'ai rappelé dans le premier chapitre de ce mémoire, j'ai été amené, en m'appuyant sur des considéra- tions d'un ordre tout à fait différent, à classer dans le Pliocène supérieur les deux plus anciens niveaux (200-205 et 130-150 m.) et dans le Pleistocène les quatre terrasses de 100 m., 55-57 m., 30 m. et 15-17 m. Cette classification concordant avec celle de du Pasquier pour le Rhin. je crois que l’on peut sans inconvénient et à titre provi- soire la conserver, en l’étendant aux vallées de la Moselle et du Rhône. J'admettrai donc que dans toutes les vallées étudiées dans ce mémoire, les deux niveaux plus anciens que celui de 100 m. font partie du Pliocène supérieur, tandis que les quatre autres font partie du Pleistocène. Le niveau de 100 m. pourrait par suite être appelé haute terrasse, celui de 50-60 m. moyenne terrasse; les deux niveaux de 30 et 15-20 m. constitueraient les basses terrasses. Je ne cacherai pas toutefois que ces qualificatifs offrent le grand inconvénient d’être susceptibles de varier. Si, par exemple, les idées de M. Gutzwiller étaient confirmées par la paléontologie, le niveau de 100 m. cesserait d’être le plus élevé du Pleistocène, 1. de LaAMorue. Note de 1899, p. 285. 2, du Pasquier. Die fluviogl., p. 67 et 99 et seq. — Les all. glaciaires, p. 66. 1001 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 353 et l’on ne voit pas dès lors comment on pourrait lui maintenir la . Qualification de haute terrasse. Il serait donc plus logique de renoncer à ces qualifications et de désigner les niveaux d’après leur altitude relative. C’est la solution que j'ai adoptée dans le tableau synoptique ci-après. 9° Les conséquences auxquelles nous sommes arrivés conduisent à rejeter définitivement les deux théories qui ont tenté jusqu’à présent d'expliquer la formation des terrasses, et que je vais rappeler sommairement. La plus ancienne, qui a été soutenue par Hitchcok, Réineven, Mübhlberg, etc., envisageait les terrasses comme le produit de l'érosion par les eaux d’une puissante nappe de comblement préexistante ; elles étaient la résultante de deux actions simulta- nées : d’une part l’oscillation périodique du thalweg de part et d'autre de l'axe idéal de la vallée, conséquence nécessaire des lois de l’'hydraulique, d'autre part, l’abaissement vertical de ce même thalweg par suite de l'érosion. Cette théorie a été, en ce qui con- cerne le Rhin, réfutée avec une grande netteté par du Pasquier ! et tout ce qui précède montre qu’elle est également inconciliable avec les faits observés dans l'Isser, lé Rhône et la Moselle 2. : En même temps qu'il réfutait les idées de Mühlberg, du Pasquier attribuait la formation des terrasses et des nappes alluviales de la vallée du Rhin aux oscillations des glaciers. Je reviendrai dans le prochain chapitre sur le mécanisme de cette théorie, et j'en mon- trerai les difficultés et les contradictions. Je me bornerai donc ici à rappeler ce que j’ai dit plus haut, c’est que la concordance des systèmes de terrasses dans des bassins aussi différents à tous les points de vue que ceux étudiés dans cette note, exclut la possibilité d'une origine commune en rapport avec des phénomènes qui se seraient produits à l'amont de ces terrasses. On doit également admettre comme conséquence de ce qui précède, que contrairement aux idées de du Pasquier, il existe dans 1. du Pasquier. Die fluvioglacialen, p. 38 et seq. 2. Je crois devoir faire remarquer toutefois que si la théorie précitée ne permet pas d'expliquer la formation des terrasses régulières, elle s’applique très bien à la formation pendant la période d’érosion, de ces plateformes inclinées rocheuses, disposées par étages dans certaines vallées (Moselle, Doubs, etc.) où elles supportent souvent des cailloutis. 11 n’est pas douteux, en outre, qu'un certain nombre de petites terrasses accidentelles, comme on en rencontre dans toutes les vallées, ne doivent leur existence aux causes signalées par Mühlberg et ses prédécesseurs, c’est-à-dire à l’érosion d'un remblai préexistant. 6 Octobre 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 93 354 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin le Rhin, à Bâle même, de même que dans l’Isser, le Rhône et la Moselle, une moyenne terrasse bien distincte de la haute, dans laquelle elle n’est pas emboîtée. Cette moyenne terrasse serait représentée par les lambeaux que M. Gutzwiller a désignés sous le nom de gradin inférieur de la haute terrasse !. En outre, il n'y a pas eu creusement de la totalité de la vallée avant la formation de la nappe de 100 m.; ce creusement a dû s'arrêter à une soixan- taine de mètres au-dessus du thalweg actuel. Théorie de du Pasquier Théorie déduite de l'étude de l’Isser Dechenschotter Fig. 11. — Schéma indiquant comparativement les analogies et les différences de la théorie de du Pasquier et de celle déduite de l'étude de l'Isser. J’ai cherché dans la figure 11 à représenter d’une façon schéma- tique la formation des vallées dans les idées de du Pasquier et dans la théorie que je viens d’exposer. On pourra saisir ainsi plus facilement les rapports et les différences des deux théories. 10° Le tableau synoptique ci-après permet d’embrasser d'un seul coup d'œil les résultats énoncés dans les chapitres précédents ; j'ai en outre indiqué dans la dernière colonne les glaciations corres- pondant aux terrasses, telles que les admet M. Gutzwiller. Ainsi qu’on le verra dans le chapitre V, la théorie de du Pas- quier, comme la mienne d’ailleurs, conduit à admettre autant de glaciations que de terrasses régulières. Il devrait done, logique- ment, exister une glaciation correspondant à la moyenne terrasse, et une autre à la terrasse de 15-20 m., l’individualité de ces deux terrasses n'étant pas, je crois, contestable. Le fait que l’on n’a pas signalé jusqu’à présent les débris de leurs moraines n'est pas une preuve décisive contre cette conclusion, car les recherches n'ont guère été dirigées dans cet ordre d'idées. Il suffirait d’ailleurs, en ce qui concerne la glaciation de la moyenne terrasse, que la durée du maximum ait été courte et que la position des moraines termi- 1. Voir à ce sujet : GUTZWILLER. Op. cit., p. 671 et seq. TOOI DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 355 nales ait été peu différente de celle des moraines de la glaciation suivante pour qu'il y ait fort peu de chances d’en retrouver les traces. En ce qui concerne la glaciation de la terrasse de 15-20 m. on remarquera que ses limites extrêmes étant en amont des moraines internes, se sont trouvées le plus souvent en amont de la zone du profil d'équilibre, où se forment les terrasses régulières. Ses rapports de position et d'âge avec les terrasses doivent donc être très incertains et difficiles à établir dans la plupart des cas. Les considérations développées dans le chapitre V élucideront les points douteux et serviront également de réponse aux diverses objections que soulève la théorie exposée dans ce mémoire. Je n’ai pas cru devoir faire mention du loess; sa formation n’est pas nécessairement liée à celle des terrasses. et d'autre part, les circonstances qui l'ont accompagnée sont encore trop obscures pour qu'il soit possible d’essayer de les interpréter dans la théorie des oscillations du niveau de base. CuaApiTRe V. — Considérations théoriques sur la formation des terrasses et sur leurs relations avec les glaciers L'étude comparative des anciennes terrasses a porté presque exclusivement sur des portions de vallées où les pentes actuelles des cours d’eau sont très faibles, où non seulement le profil d'équilibre peut être considéré comme à peu près atteint, mais encore où tout semble indiquer que ce profil était déjà réalisé à une époque très ancienne. C'est grâce à cette circonstance, due en partie au hasard, que les comparaisons ont été faciles, les con- cordances d’une netteté saisissante, et les conclusions précises. Il est certain, en effet, que si j'avais eu à comparer des données obtenues dans des régions où l’évolution a été très différente sui- vant les vallées, et où les pentes des cours d’eau ont subi pendant cette évolution des variations analogues à celles observées dans l'Isère, il m’eut été très probablement impossible d’en tirer parti et de saisir les relations existantes entre les systèmes de terrasses. Il m'a donc paru que, sans entreprendre une étude complète des lois qui régissent la formation des terrasses, étude qui exigerait un temps et des matériaux dont je ne dispose pas actuellement, il pourrait être utile, pour les recherches ultérieures, de mettre en évidence le mécanisme probable de cette formation et surtout de faire ressortir l'influence que les circonstances accessoires (dépla- Tableau synoptique résu lu: CÈNE deltas actuels. Sens et amplitude du Altitude du niveau Nature Notations VALLÉE DE LISSE D mouvement eustatique qui | de base à la fin du | des phénomènes admises pour S a amené le niveau de base | mouvement par qui se sont les dépôts RE = à l'altitude indiquée rapport au niveau accomplis correspondants dans la colonne suivante. | actuel de la mer. | dans les vallées. et synonymie. PLAGES = ne. Cailloutis de Sidi- Feredj et de Bou- ? ? ? ? > zareah (près Al- è | ger). | | Négatif. 150 m. ? Érosion. » » » ï Niveau de Plage de 200-215m|Cailloutis D 200-205 m. envir.| desOulad-el-Bor, || 205m°de : Positif 50-60 m. 200-205 m. Remblai. ae 1 i d D ù j Terrasse Cailloutis } Négatif de 100 m. ? 100-105 m. Érosion. de 200-205 m. » lad-el-Bo 205 m. n = | —— a 7 Niveau de Plages de 135- | Nappe«d 4 L< j s 3 F on Positif 40 m. environ. 130-150 m. Remblai. ASDNSO Tu 150008 de LR (0) 4130-15 (0 H PE dl ê a Terrasse Lambeaux Négatif de 75 à 80 m. SRE de 130-150 m. nappe ci Bi © environ. Se) me Érosion. 2 Lalla-Tou di-Benno | Nappe de, (3° lit de | Positif 35-37 m. 98-100 m. Remblai. Niveau de 100 m. 98-100 m. cA : æ) A nl a ——_—_—_—_—_—_—_— | ——_——_—_—_—_—_— | ————————————…—…—…— — | —————————— | ————————…— ca ; a Terrasse Terre = de 100 m. de 93-9: — | Négatif de 90 m. environ. 10 m. ? Érosion. (Heu leresse). » 4 SRE nu _ à 9 Niveau e Nappe de. ni : Positif 45 m. environ. 55 m Remblai. 0 ED 0. 59 m. (4° lit de OA B EN Tan een eee are ace colin ces coclssR 0 A Tee Tes RS RE o me de 50-60 m. € Ë À Négatif 55 im. envirun. 0 ? Érosion. (Moyenne lerr.). » 55-57 H ë Nappe à H Positif 30 m. environ. 30 m. Remblai. Niveaa de 30 m 30 m. (5° lit de! ( ci ; Terrasse Terr = Négalif de ? ÿ) Erosion. de 30 m. » de 28% =) (Basse terrasse). ë 2 : \ | Ge Te ME : iveau TE Nappe de” (7) Positif de ? 15-20 m. Remblai. de 13-°0 m. 15-17 m. (6° lit de ED RUE Terr. de 15-20 m. Terre De 9 9 ne Négatif de ? ? Érosion. lasse Cana » de 154 NEO- un Remblai. Limons dt PLÉISTO- Positif de ? Niveau actuel. Formation des » » Lit act EEE EE its exposés dans ce mémoire. VALLÉE DE LA MOSELLE ———— —— BASSE MOSELLE PHÉNOMÈNES DE CAPTURE VALLÉE du RHIN près de Bâle VALLÉE es Glaciations ntes RHONE [entre Romans et | sh vallée près de Valence 2 Je Gonnent du Rhin À À | —————— | —_————————————— | —"——— | ——— = = 5 Nappe de | Ecoulement d'eaux |Cône detransition| Nappe de 200 m. Glaciation du = 200 m. vosgiennes dans la du Sundgau sel et au-delà signa- niveau de = environ. Meuse par Pagny. terminant vers| lée au N.-E. dela 200-230 m. 2 - | 200-230 m. (Ohe-| feuille de Valence 2: == rels ‘ässischere par M. Depéret. 8 Deckenschotter). = Terrasse de Terrasses supér’ Recul 3 200 m. » du Sundgau. » » des Glaciers. = environ. Re Re Rss | | "2 RURAL nn Nappe de Nappe de 130- |Nappe du Télé- Glaciation du E 130-150 m. 150 m. (Jüngerer| graphe entre Va- niveau de £ ? Deckenschotter). | lence et Château- ? 130-150 m. 5 neuf d'Isère. Ê sie use = Terrasse Terrasses de 130-|Lambeau de la Recul _ de 150 m. à Rhein-| nappe ci-dessus des Glaciers. 2 130-150 m. felden, Monchen-| à 138 m. (148 m.) ? a stein etc. au Télégraphe. $ = D Nappe |Formation des cailloutis Nappe Nappe du plateau Glaciation du ni- E de de Foug et de Pagny. de de veau de 100 m. = 100 m. {Passage d'eaux vosgien- 99-100 m. Foullouse. » où du maximum s nes dans la Saône par d'extension, Mo- ® Dounoux. raines externes. S Re | tsar » | Terrasse |Les eaux Vosgiennes|Terrasse de 93-|Terrasse de 88 m. Recul Es A r-| de 100 m. | cessent de se déverser| 101 m. au Rüti-| à l'e-t du Château des Glaciers 2 = i- dans la Meuse et dans| hard, Bruderholz d’Armoillet » = Ï- la Saône. Etablissement| etc. (98 m). 2 £ ÿ- du chenal dela Moselle. A 5 e. $ $ De PR Me Louer, NPA ent" E Nappe d'Alixan s À 4 np de » Nappe de 58-60 m. » (ancien lit de ? é ê j l'Isère). & © = |__| | —_—__—— |__| ——…—……——_ — —"”…” —."_. | <- Terrasse Terrasse de 56-60m|Terrasse de 45- a ë de (gradin infér. de] 46 m. du Sémi-| Terrasse des 9 m à 45-56 m. 4 la h'e terrasse de] naire de Valence| Bayanins 53 m. É 5 o M. Gutzwiller). | (55-56 m.). a È EEE ——————— ||" Û" | œ À Nappe Nappe de Nappe Glaciation du ni- LÉ de » Nappe de 31 m. Valence et de de veau de 30 m.| © € 30 m Saint-Georges. Romans. Moraines intern.| 2 5 =, © | || | ———_……—….….…—”— ÛÛ an = Terrasse Terrasse de 31 m. | Terrasse de 21 m. Terrasse Recul & Ê de » à Bâle. à Valence de Romans. des Glaciers. | © 8 30 m (31 m.). 32 m. à Romans. Sc EE VGEÇÇ>ZGR RM GE mm PS Nappe Nappe Nappe basse des £ È de » Nappe de 15-20 m. de 7 à 8 m. Robins, près de 7 LS) 15-20 m à Glun. Pont de l'Isère. Et @ nn RSR ee RER 9 UE is ne Et Ur GER 50 2e |RERUNE SF MER e PR MR AU ST CA APR, MS NS gs a = le |Terrasse de 4 Terrasse Terrasse de 7-8 m.) Terr. basse des 9 45-20 m. ? de 15-20 m. (17-48 m.). |Robins (7 à 8 m.). k g = EE —— 2 — » | OBSERVATIONS en tenant compte du déplacement horizontal du niveau de base (voir Chapitre I). 3 98-100 m., Tableau synoptique résuman|jes fait Etage | Altitude du niveau | de base à la fin du mouvement par rapport au niveau actuel de la mer. Sens et amplitude du | mouvement euslalique qui | a amené le niveau de base | à l'altitude indiquée dans la colonne suivante. Nature des phénomènes qui se sont accomplis dans les vallées. Notations VALLÉE DE LISSER admises pour les dépots correspondants et synonymie. I NAPPES ET TERHASSFS PLAGES , | | © Cailloutis de Sidi- | | Feredj et de Bou- 9 » | » zareah (près Al- 7 ? ; | ger). SUPERIEUR PLIOCENE STOCENE La | À ( ———— 150 m. ? Erosion. Négalf. Positif 50-60 m. 200-205 m. Remblaiï. Plage de200-215m|Cailloutis de 20h des Oulad-el-Bor,| 205 m. des Oula@ el-Bor, 1°” lit d l'Isser. Niveau de 200-205 m, envir. —————— 9 100-105 m, Erosion. Cailloutis des On lad-el-Bor Terrasse de 200-205 m. FA » Posilif 40 m,. environ, 130-150 m. Remblaï. Négatil de 76 h 80 m. environ, 53 m. A — a — i Positif 45:47 m,. 98-100 m. Lrosion. Remblai. Erosion. FA D A RE ere en pe EÆ A4 ‘5 fu 4 : e Négatif de 90 m, environ. 10 m. ? Positif 45 m. environ. 55 mi, \% = me [en © À Négalif 66 in, environ 0? Positif 4 m. environ, 30 m Négalif de ? Positif de ? 15-20 m. Négatif de ? SUPÉRIEUR _. D = er ef 1 ” — ? Positif de ? Niveau actuel. 205 m. Niveau de Plages de 135- | Nappe du 2° li 1 ñ re UE. 130-150 m, 145 m. 1 de l’Isser 130-150 m. Terrasse Lambeaux de le 130-150 m. nappe ci-dessus Es À Lalla-Touila, Si di-Bennor ele. Nappe de 93-08 m (3* lit de l'Issen. Niveau de 100 m. 98-100 m s exposés dans ce mémoire. yALLÉE DE LA MOSELLE EE TU BASSE BAUTÉ LE MOSELLE DLOSELL ns : » Es * » EE Nappe de à 200 m. environ. relative. — Terrasse de 200 m. environ. Nappe de 130-150 m. et de Ja forët de Haye entre 100 et 200 m Terrasse de 130-150 m. Galets roulés des plateaux des environs de Toul Mippe ile 100 m. 100 m. it, ——_—_————— 7 ns | Terrasse Terrasse de 93-95 m. à de 100 m. (Haute terrasse). EE Caill. de | Terrasse 100® : Ar. de 100 m. Li bes, Ermi- lage, Rlavi- guy, Pagny- sur-Meuse, —— VALLÉE VALLÉE du du RHIN RHONE ès a ne T. N PHÉNOMÈNES DE CAPTURE près de Bâle près de Valence ? en » » » a ee Écoulement d'eaux [Cône de transition Nappe de 200 m. du Sundgau sel et au-delà signu- terminant vers| lée au N.-E. dela 200-230 m. (Ohe-| feuille de Valence rels ‘issischere par M. Depéret. Deckenschotter). vosgiennes dans la Meuse par Pagny. Terrasses supér’ » du Sundgau. » Nappe de 130- [Nappe du Télé- s 150 m. (Jüngerer| graphe entre Va- lence et Château- neuf d'Isère. Deckenschotter). Terrasses de 130-|Lambeau de la 150 m. à Rhein-| nappe ci-dessus felden, Mônchen-| à 138 m. (148 m.) stein etc. au Télégraphe. Formation des cailloutis Nappe Nappe du plateau l de Foug et de Pagny. de de Passage d'eaux vosgien- 99-100 m. loullouse, nes dans la Saône par Dounoux. VALLÉE de l'ISÈRE entre Romans et le confluent du Rhône el —_———— Glaciations correspondantes dans là vallée du Rhin CRT EVA ET NL 7 | » Glaciation du niveau de 200-230 m, ——_—_—_—_— Recul des Glaciers, Glaciation du niveau de 130-150 m, Recul des Glaciers, Glaciation du ni- veau de 100 m, où du maximum d'extension, Mo- ruines externes, ———————_— Les eaux Vosgiennes|Terrasse de 93-|Terrasse de 88 m. cessent de se déverser| 101 m, au Rüti-| à l'e t du Château d'Armoillet (98 m). dans la Meuse et dans la Saône. Etablissement du chenal de la Moselle. hard, Bruderholz etc. E v: x. 55-570 Nu 2 3 Nive ss Nappe de 5ô s. ©appe de || Nappe d Remblai. % 80-60 55 m. (as lit de l'Isserle | 54:40 mm, 155 ee » Nappe de 58-60 m. » a Be —-_# Et 5 7 ur ' sso T F —————————— | ——— 1 Fetrats es : | at Lérrasse Terrasse de56-60m| Terrasse LUS 45- iro REA CICUR NE » 55-57 m. 44 ne (gradin infér. de] 46 m. du Sémi- Erosion . (Moyenne lerr.). 55-57 1 Ù m. 45-56 m. » 18 Hitanrase la AV En ’ en" RE — M. Gutzwiller). (55-56 m.). Fi : 28-30 | X ———_…— Nappe de 28-3 Nappe N | : 5° lit de l'Isse À Nappe Nappe de Fanblais RECRUE Fe De à: 7-33 m, AL » Nappe de 31 m. Valence et de dom Saint-Georges. na ES ER 4 se T SE Terrasse di ni. rue Terrasse Terrasse de 31 Terrasse de 21 m Érosion de 30 m. » de = Ni de errasse de 31 m, | Terrass F se Ù (Basse terrasse) m, 30 m » à Bâle, à Valence ER PRE Ë De (31 m.). A em ns. Nappe de 15-16 pe Na Remblai Niveau 15-17 m. (6e Et de l'Iss r de : Nappe | de Aeo on 15.20 » Nappe de 15-20 m.| de7à 8m. ——— Eure à Glun. £ Terrassé “rrasse 4 EE — Terr. de 13-20 m. eÎTer Erosion. HS BA » de 15-16 nm. Trans : Er etrakto a 7 ir, ER 4 de 15-20 m. (17-18 m.). £ EE Poe 4e Remblai. Formation des » » deltas actuels. » » 2 Ses Er | ER PE Le Nappe d'Alixun (ancien lit de l'Isère). Terrasse des Bayanins 53 m, Nappe de Romans. Terrasse de Romans. 32 m. à Romans. Nappe basse des Robins, près de Pont de l'Isère. Terr. basse des Robins (7 à 8 m.). Recul des Glaciers "3 qd Ù nn ‘E 1 Ë ? a m à UNE —————— | 5 El G] Nn 2 ‘à d © q LA 1 Car SENS 12 E d © 2 US e A A ® Gluciation du ni-| . "8", , H @ © veau de 40 m, PAM Moraines intern.| 4 ,'# = 90 n qd Recul El 5 É des Glaciers, | P £ E EN “= à 2 g 38€ El ? £2: Ag o + Rene <= © n CR n © 42 fs) A © “ns” Alger. s représentent le OBSERVATIONS ément aux indications du Chap. IV. S augmentées de 40 m. conform terrasse du nivesu de base (voir Chapitre I). 358 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin cements horizontaux äu niveau de base, état du profil d’équilibre… etc.), peuvent exercer sur la distribution des terrasses, sur leurs intervalles et sur leurs altitudes par rapport aux thalwegs actuels. Je me placerai exclusivement, pour cette étude, dans l'hypothèse que les oscillations verticales du niveau de base ont eu lieu dans l’ordre et avec les amplitudes constatées dans l’Isser, à partir d’un niveau voisin de 200 m. Je complèterai cet exposé en montrant qu'en dehors de toute autre considération, les objections que soulève dans la théorie glaciaire l’explication des formes topographiques si remarquables que l’on observe aux points de contact des nappes alluviales et des moraines de la dernière extension, sufliraient pour faire écarter cette théorie. I. — Mécanisme de la formation des terrasses A. — Les oscillations du niveau de base sont exclusivement verticales Envisageons d’abord ce premier cas qui est évidemment excep- tionnel ; il peut cependant se réaliser dans les mouvements néga- tifs lorsque le cours d’eau débouche dans une mer dont la profon- deur croît très rapidement, et dans les mouvements positifs, lorsque l'amplitude de ceux-ci est assez faible ou leur lenteur assez grande pour permettre le comblement de la zone immergée, ainsi que nous l’avons vu dans l’Isser. Considérons un grand fleuve prenant sa source dans un massif élevé, à une altitude très supérieure à celle de la zone de 200 m. dans laquelle se sont produites les oscillations. D’après les exemples que nous avons sous les yeux, le profil longitudinal comprend deux parties : l’une inférieure AB (fig. 12) où le profil d'équilibre est à peu près atteint et où la continuité des pentes est plus ou moins parfaite; l’autre supérieure BG où les pentes sont discontinues, et où le lit présente une succession de ressauts et de rapides séparés par des sections à pente relati- vement douce et même à contrepente (dépressions lacustres) !. Si le niveau de base reste invariable, le cours d’eau effectuera dans la zone BC le comblement des dépressions, coupera les bar- 1. Consulter à ce sujet de la Noë et de MARGERIE : Les formes du terrain, p. 52 et seq. et p. 95. — de LappARENT. Leçons de géog.-phys., 2 édit., 4° et 8° leçons. I9OI DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 359 rages rocheux et en définitive, remblaiera partout où une pente faible succède à une pente plus forte, creusera partout où une pente forte succède à une pente plus douce. Ces opérations oppo- sées aboutiront finalement à la régularisation du profil, d’abord dans les biefs successifs, puis dans l’ensemble de la zone BC, et cette régularisation aura pour effet de prolonger peu à peu vers l’amont la fzone AB. En même temps la courbure de celle-ci achè- vera de se régulariser et s’aplatira de plus en plus : les profils successifs du lit seront représentés par les tracés Ab, Ab’, etc. Zone des terrasses irrégulières Zone du profil d'équilibre et des terrasses régulières Nioeau de base prinutif Ai “ai 4 ” =====-- da! LE ALL EURE : se ER RP ae x Fig. 12. — Schéma de la formation des terrasses régulières et irrégulières dans l'hypothèse des oscillations du niveau de base. 1° Cas d’un mouvement positif. — Supposons maintenant qu’un mouvement positif de faible amplitude amène le niveau de base en À”; rien ne sera changé à ce qui se passait dans la zone BC ; le fleuve continuera à y creuser son lit ou à le remblayer, comme précédemment. Dans la zone AB, au contraire, il y aura remblai de toute la partie inférieure AA°B. Le nouveau profil sera, en principe, plus aplati que le précédent, et par suite, l'épaisseur du remblai égale, à l'embouchure, à l’amplitude du mouvement positif, ira en dimi- nuant vers l’amont d'autant plus rapidement que les variations de pente du lit primitif AB seront plus fortes. L'extension du remblai vers l’amont sera donc nécessairement limitée. Du reste, abstraction faite de toute considération d'épaisseur, il est évident qu'il doit en être ainsi. En effet, même dans un cours d’eau dont le profil d'équilibre est complètement atteint, il doit y avoir un point en amont duquel aucun dépôt n’est possible, puisque dans la partie supérieure le profil tend à se rapprocher de la verticale. l La répercussion des mouvements positifs doit pour ces deux raisons cesser de se faire sentir à une certaine distance de l’embou- chure. Aucune donnée toutefois ne permet de préciser cette distance. 360 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Dans les vallées étudiées dans ce mémoire, les pentes des nappes alluviales dont la formation est due à des mouvements positifs, sont toujours très faibles : la plus forte (0,0025) est celle de la terrasse du Séminaire ; Du Pasquier cite pour des cailloutis de vallées latérales situées très en amont de Bâle et qui paraissent se raccorder à des terrasses régulières, des pentes de 0,012 !. En considérant ce qui se passe dans les torrents des Hautes-Alpes, je serais assez disposé à admettre que, {héoriquement, des nappes régulières de remblai dues à une variation positive du niveau de base peuvent s'étendre à partir de l'embouchure jusqu'aux régions où apparaissent les cônes de déjection des grands torrents et se raccorder à ceux qui ont atteint leur pente-limite, telle que Surell l’a définie ?. Dans cette manière de voir les nappes alluviales en connexion avec les mouvements du niveau de base pourraient finalement atteindre des pentes de près de 6 à 7 °/.. J’ignore tou- tefois s’il y a des exemples d’une pareille continuité. Dans les cours d’eau qui n’ont pas atteint leur profil d'équilibre, il est évident que la répercussion des mouvements positifs ne devra pas, en général, se faire sentir au-delà des premiers obsta- cles qui interrompent la continuité des pentes à moins que ceux-ci n'aient un relief inférieur à l’épaisseur finale du remblai. 2 Cas d'un mouvement négatif. Si le niveau de base s’abaisse de A’ en A”, l’embouchure s’abaissera d'autant et le fleuve créera à partir de ce point un nouveau profil d'équilibre qui rétrogradera progressivement vers l’amont. Le remblai A’AB, précédemment formé, constituera une terrasse longitudinale dont l'altitude relative sera, à l'embouchure, égale à l'amplitude du mouvement négatif. Au début, cette altitude ira en diminuant vers l’amont, mais si la période d’érosion a une durée suffisamment longue, elle tendra à devenir égale à ce qu'elle est à l'embouchure, puis progressive- ment croissante de l’aval vers l’amont, à mesure que le profil d'équilibre s’aplatira davantage et tendra à se confondre avec les tracés À’’a, A”a’. Pendant ce temps, dans la zone BC, la marche des phénomènes ne sera en rien modifiée. Les érosions et les remblaïs continueront sans être ni accélérés, ni retardés. Sur certains points par consé- quent, le fleuve créera également des terrasses longitudinales ; 1. du Pasquier. Die fluvioglac., p. 96. 2. SuRELL. Etude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841, p. 18 et 22. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 361 9 mais celles-ci n'auront aucun rapport avec celles de la zone AB : elles seront discontinues, limitées à des bassins distincts, leurs altitudes au-dessus du thalweg seront quelconques et indépen- dantes de. leur âge, les plus basses n'étant pas nécessairement les plus récentes; leurs épaisseurs seront extrêmement variables : il sera, en général, impossible de les rattacher aux terrasses de la zone d'équilibre. Si l'on conserve à ces dernières la qualification de régulières ou normales que du Pasquier leur a donnée !, en partant d’un ordre d'idées tout-à-fait différent, il convient de qua- lifier les premières d’irrégulières ou anormales. Dans les Alpes, les terrasses irrégulières sont très fréquentes : je citerai dans le Dauphiné celles de Lanslebourg, des hautes vallées du Drac et de la Durance, etc. Ainsi, en dehors de toute intervention des glaciers, la théorie nous montre que dans un grand bassin fluvial les oscillations du niveau de base et le processus normal de l'érosion suffisent pour déterminer la formation de terrasses régulières, continues, dans la zone inférieure où le profil d'équilibre est plus ou moins réalisé, et, au contraire de terrasses localisées et irrégulières dans la zone supérieure où ce profil n'existe pas. Influence des irrégularités du profil longitudinal. — Dans ce qui précède, j'ai supposé que le fleuve avait à peu près com- plètement réalisé son profil d'équilibre dans la partie inférieure de son cours, avant le commencement du mouvement positif. Si l’on en Juge par les irrégularités du lit de la Moselle (fig. 5), du Rhône autour de Valence (fig. 10), du Rhin en amont de Bâle et en aval de Mayence, il semble que cette condition soit actuellement rarement réalisée, même dans les grands cours d’eau, et il est par conséquent très probable qu'elle ne l’a pas été dans le passé ?. Ces irrégularités n'exerceront aucune influence sur l’extension des remblais, à la condition toutefois que leur relief soit plus faible que l'amplitude des mouvements positifs ; elles seront finale- ment noyées dans la nappe alluviale dont elles pourront, dans certains cas, diminuer l'épaisseur. Mais, comme elles doivent leur origine à des causes variées 1. du PASsQUIER. Les Alluvions glaciaires, p. 5x. 2. Il importe toutefois de noter que ces irrégularités ne se sont pas néces- sairement reproduites sur les mêmes points aux différentes époques de l’histoire de la vallée. Si l’anomalie de Valence doit être attribuée, comme je le pense, aux apports latéraux de l'Isère, elle a dù être beaucoup moins marquée dans le passé, puisque les anciens lits ont été, en général, beaucoup plus larges que le lit actuel. 362 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin (inégale résistance des roches à l'érosion, apports latéraux, acci- dents tectoniques, etc...) dont une partie peut continuer à agir pendant la formation du remblai, le profil final de la nappe alluviale pourra présenter également des irrégularités plus ou moins considérables qui modifieront nécessairement, sur les points où elles existent, les altitudes absolues et relatives de la nappe et, par conséquent, des terrasses. En général, ces irrégu- larités seront difficilement observables sur les anciennes nappes en raison des modifications que leur surface a subies ultérieure- ment (dénudation, ruissellement, etc..….). Si un mouvement négatif succède au mouvement positif, l’éro- sion fera réapparaître les irrégularités antérieures du profil, et il pourra arriver que le cours d’eau fixé par un obstacle résistant se maintienne plus ou moins longtemps à un niveau plus élevé que la base des remblaïs, en formant sur ce point des rapides ou des chutes. C'est à une circonstance de ce genre que du Pasquier a attribué la formation des Laufen de la vallée du Rhin, et il est possible que celle du Saut du Broc soit due à une cause analogue *. Il importe, dans ce cas, de ne pas perdre de vue, que les altitudes relatives des terrasses étant mesurées par rapport au thalweg final, l’irrégularité du profil longitudinal de ce thalweg aura pour effet de réduire localement ces altitudes d’une façon souvent très notable, comme nous l’avons vu pour les terrasses du Rhône et pour celles de la haute Moselle. 30 Cas d’une succession d'’oscillations verticales. Jusqu'ici, j'ai examiné à peu près exclusivement les phénomènes que détermineraient dans les vallées actuelles, l’intervention de mouvements positifs ou négatifs du niveau de base. Il n’y a aucun motif pour ne pas admettre que des phénomènes identiques se sont accomplis dans ces vallées pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène sous l'influence des oscillations eustatiques dont j'ai démontré l'existence. D’après ce que nous savons de l’évolution du profil des grands cours d’eau, l'étendue de la zone du profil d'équilibre a dû, en général, être d'autant plus restreinte et les pentes de ce profil ont dû être d'autant plus fortes, que l’on consi- dère des lits plus anciens. D’autre part, le fait de l'extension jus- qu'au pied des Vosges de toutes les terrasses pleistocènes, la coexistence à Bâle et à Valence de tous les niveaux à partir de celui de 130-150 m., prouvent que dans ces vallées, l'intervalle entre chaque mouvement négatif et le mouvement positif suivant 1. du Pasquier, Die fluviogl..., p. 2. 1901 DE L’ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 363 a été suffisamment long pour permettre aux cours d’eau de recréer chaque fois leur profil d'équilibre sur des étendues à peu près équivalentes, avec des pentes au plus égales à celles du lit précé- dent, et qui, en général, ont été plus faibles. Ceci posé, si l’on imagine une succession d’oscillations eustati- ques, analogues à celles observées dans l’Isser, et abaissant cha- que fois davantage le niveau de base d’un cours d’eau, depuis l'altitude de 200 m. environ, jusqu’au niveau actuel, on peut prévoir qu'elles détermineront dans la vallée, les phénomènes ci-après : a. — Le creusement de la vallée ne sera pas continu ; il s’opérera par une succession de phases d'érosion séparées par des phases de remblai; ces phases donneront naïssance dans la partie infé- rieure du cours d’eau, à un sys- tème de terrasses régulières à aber d'altitude décroissante à partir iveeude FR des plus anciennes, et disposées comme le montre la fig. 15. ie ss Ni de b in al. b. — L'étendue de ces terras- Fe ZEN ses sera d'autant plus restreinte Fig. 13. — Schéma de la formation vers l’amont qu’elles seront plus db sssiene Messe anciennes. La zone où on les observe empiètera donc de plus en plus sur celle des terrasses irrégulières, et il arrivera par suite que des terrasses de ces deux catégories seront superposées dans un même profil, les terrasses irrégulières étant en général les plus élevées. Les traits pleins marquent l'étendue et les positions successives de la zone des terrasses régulières. €. — Le résultat immédiat de chaque mouvement négatif sera de faire perdre au cours d’eau le profil d'équilibre dans les parties où il était déjà réalisé, et, par conséquent, de le rajeunir. Mais. comme nous l’avons vu, les grandes cours d’eau ont presque tou- jours eu le temps de recréer ce profil par érosion régressive sur une étendue au moins aussi grande et souvent plus considérable. Le nouveau profil sera en général plus aplati que le précédent. d. — Comme conséquence, et abstraction faite des petites irrégu- larités du lit dont j'ai parlé plus haut, les altitudes relatives d’une même terrasse iront en croissant de l'aval vers l’amont, et cet accroissement sera d'autant plus rapide que la terrasse sera plus ancienne et que les pentes du cours d’eau actuel différeront davantage de celles du lit correspondant à la terrasse ; il en sera de même des intervalles de deux terrasses consécutives, 364 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin Cet accroissement des intervalles aura pour effet de diminuer ou même de supprimer l’emboîtement des terrasses. e. — On conçoit, comme cas particulier, que si, à une époque quelconque de son évolution, un grand cours d’eau, grâce à des circonstances topographiques spéciales, est parvenu à réaliser un profil d'équilibre avec le minimum de pente compatible avec les conditions hydrographiques, sur une grande étendue de son cours, les lits successifs devront à partir de ce moment être sensiblement parallèles les uns aux autres, c'est-à-dire que leurs altitudes rela- tives et leurs intervalles ne varieront plus d’une façon appréciable dans cette étendue. Ces circonstances topographiques semblent s'être rencontrées dans les bassins du Rhin, de la Moselle et du Rhône dès les plus anciens niveaux, et ce fait est la conséquence de la très faible altitude de ces trois cours d’eau à leur sortie des grands massifs où ils prennent leur source, relativement à la distance qui les sépare de l'embouchure. J’ai déjà, plus haut, cité l'exemple de la Moselle; je me bornerai à ajouter qu'à Bâle, les alluvions du niveau de 130-150 m. atteignent au plus l'altitude de 400 m., bien qu’elles soient à 600 kil. de l'embouchure; ce qui correspond, en tenant compte de l'altitude du niveau de base, à une pente d’envi- ron 0,0004. On ne doit pas s'étonner qu'avec des pentes initiales aussi faibles, les profils successifs du fleuve aient pu, au moins à partir du niveau précité, demeurer sensiblement parallèles, et que les altitudes relatives des terrasses à Bâle soient les mêmes que celles des terrasses formées à l'embouchure de l'Isser. f. — La loi d’accroissement des altitudes relatives et des inter- valles se vérifie déjà assez bien, à Palestro ! dans l’Isser, quoique cette localité soit seulement à 40 kil. de la mer. Ce résultat est dû à la briéveté du parcours de l'Isser (150 kil. environ) et à la rapide augmentation des pentes qui en est la conséquence 3, Dans la vallée du Rhin, au contraire, l'accroissement n’est pas encore appréciable à Bâle ; il ne devient sensible qu'en amont où, d'après du Pasquier, les pentes moyennes des terrasses de la région entre Bâle et le Rafz! sont les suivantes : Deckenschotter de la vallée principale. . . 0,005 Haute terrasse EN EN NE 0 00 Bassetenrasse CR TN CREER NID; 00It Rhin actuel ERNEST CE RO DONT 1. de LAMOTHE. Op., 1899, p. 282. 2. Actuellement la pente entre la mer et Blad Guitoun est de 0,0012. Elle est de 0,0023 entre Blad Guitoun et les gorges de Palestro, et de 0,0047 dans les gorges. 3. du PAsqurER. Die fluviogl., p. 16, 17, 47, 96. T901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 369 Je crois toutefois devoir faire remarquer que, bien que ces résultats concordent avec la théorie, on peut élever quelques doutes sur leur exactitude, l’auteur n'ayant pas tenu suffisamment compte de ce fait que le Rhin n’a pas encore retrouvé son profil d'équilibre en amont de Rheïnfelden. Dans les grands affluents, la vérification de la loi ressort avec beaucoup plus de netteté. Cela provient de ce fait bien connu que les pentes des affluents sont en général beaucoup plus rapides que celles du cours d’eau dont ils sont tributaires. L’Isère en offre un exemple remarquable. Nous avons vu que les pentes des trois lits successifs de l'Isère, reconnus entre Romans et Valence étaient les suivantes : 0,0013 (lit actuel), o,0021 (lit de la basse terrasse de Romans), 0,0025 (lit de la moyenne terrasse). 11 en résulte que la moyenne terrasse qui domine le Rhône à Valence de 46 m., domine l'Isère de 53 m. à Romans et d'environ 100 m. à Saint- Marcellin, où MM. Depéret et Kilian l'ont retrouvée !. Pour la basse terrasse, je n'ai pas d’autres données que celles que j’ai recueillies entre Valence et Romans. Son altitude, qui devait être voisine de 21 m. au confluent atteint déjà 32 m. à Romans. On voit par ces deux exemples combien il est indispensable de tenir compte des pentes des cours d’eau dans l'étude comparative des terrasses d’une même vallée, et à fortiori des terrasses situées dans des bassins indépendants. g. — Si le cours d’eau n’a qu'un très faible débit et surtout si sa source et son embouchure sont très rapprochées, les phénomènes seront sensiblement différents. Considérons un cours d’eau prin- cipal dont le lit est AB (fig. 14) et deux affluents, l’un CA d'un parcours très restreint prenant sa source dans un massif très peu élevé, l’autre BD très étendu et s’alimen- Fig. 14. — Schéma montrant les difré- tanbta un maccis dune grande rences que présente ee marche de c 7 l'érosion suivant limportance des altitude. La figure montre, bassins hydrographiques. sans qu'il soit nécessaire d'in- sister, que lorsque le niveau du cours d’eau principal se sera abaissé en A°B’, l’affluent CA aura pris le tracé CA’, beaucoup plus rapide que le précédent, tandis que le tracé du cours d'eau Cours deau em me me A B 1. Bulletin des Services de la carte, VUL, p. 15. 366 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin B'D’ sera en général plus aplati que BD, du moins au voisinage du confluent. L’altitude relative de la nappe de cailloutis corres- pondant au lit AC ira donc en diminuant de À vers OC, tandis que celle de la nappe BD ira en augmentant de B vers l’amont. Les mouvements négatifs du niveau de base auront done ici pour effet, non seulement de rajeunir périodiquement le réseau hydro- graphique, mais encore, dans certains cas, tels que celui de l’affluent CA, d’éloigner de plus en plus le cours d’eau de la vieillesse et même de la maturité. Les faits de ce genre sont très nombreux, on les observe notam- ment dans les cours d'eau décapités. Je citerai comme exemple typique la disposition si remarquable du bassin du Cosey, par rapport aux alluvions du seuil de Dounoux. Il est facile de montrer l'intérêt de ces observations au point de vue de la recherche et de l’étude des anciennes terrasses. De petits affluents ou même de grands cours d’eau provenant de régions peu élevées, pour lesquelles une variation du niveau de base de 200 m. est relativement considérable, pourront à un âge avancé rouler des galets, alors qu'aux époques antérieures ils ne roulaient que du sable (Loire et Allier ?). La tendance inverse est au contraire très marquée dans les cours d’eau issus des grands massifs monta- gneux (Isère à Grenoble). En outre, il pourra arriver que des dépôts caractérisés par une faune ancienne se montrent à une très faible altitude au-dessus de cours d’eau originaires de massifs peu élevés, tandis que des dépôts de même âge se rencontreront à des altitudes considérables dans des vallées de régions montagneuses. B. — Le niveau de base ne subit que des déplacements horizontaux Examinons maintenant le cas où les déplacements du niveau de base sont exclusivement horizontaux, circonstance qui peut se produire à la suite de la formation de deltas, d’effondrements le long de la ligne de rivage, d’érosions marines, etc. Je qualifierai ces déplacements de positifs ou de négatifs suivant qu'ils ont pour effet de reporter le niveau de base dans l’intérieur des terres ou au contraire de l’éloigner vers la mer. Supposons (fig. 15) ! un cours d’eau débouchant dans la mer en 1. Dans les fig. 15 et 16, j'ai, pour la commodité du dessin, tracé les cours d’eau en ligne droite au lieu de les raccorder tangentiellement au niveau de base. IOOI DE LISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 367 A, et TT une ancienne terrasse. Si le niveau de base rétrograde en A’ il se formera un nouveau thalweg AB’ à un niveau plus bas que le précédent. Le dépla- cement positif du niveau de base aura donc pour effet de déterminer un nou- vel approfondissement de la vallée et d'augmenter Fig. 19. — Cas où les déplacements du les altitudes des terrasses niveau de base sont exclusivement hori- CE zontaux. préexistantes. Si au contraire le niveau de base s’avance en A”, à la suite de la formation d'un delta A”’CA, ce déplacement négatif aura pour conséquence la formation d’un lit A”B” et les altitudes des ter- rasses seront toutes diminuées. C. — Le niveau de base se déplace à la fois verticalement et horizontalement Il est facile maintenant de comprendre ce qui se passera si le niveau de base est affecté simultanément de mouvements verti- caux et horizontaux. Ce sera évidemment le cas le plus fréquent et, en général, comme on peut s'en rendre compte sur la fig. 16, les mouvements verticaux se- ront accompagnés de déplace- ments horizontaux de même signe qui tendront à détruire partiellement ou totalement leurs effets. Fig. 16. — Cas où le niveau de base L'altitude relative d’une ter- se déplace à la fois verticalement En EUX : fs et horizontalement. rasse AB formée à la suite d’un mouvement négatif AC pourra donc présenter des écarts considé- rables, dans des bassins différents, suivant l'importance plus ou moins grande du déplacement horizontal A’C, importance qui pourra être encore accrue par la formation d’un delta. La figure montre également qu'à la suite d’un même mouvement positif Aa, amenant le niveau de base en m, le remblai qui se formera ne s’élèvera en ab que si le cours d'eau parvient à rem- blayer tout l’espace aAm. Dans le cas contraire, l'épaisseur du remblai sera notablement réduite et les intervalles entre ce rem- blai et les terrasses antérieurement formées se trouveront aug- mentés d'autant. 368 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin On conçoit combien pourront être considérables, et variables en même temps, les effets de ces perturbations sur les altitudes relatives, les épaisseurs et les intervalles des nappes alluviales, et par suite les difficultés qui pourront en résulter dans une étude comparée des systèmes de terrasses de bassins indépendants. Dans bien des cas heureusement, ces influences perturba- trices semblent avoir été très faibles, ou s'être compensées, et il est facile d'en saisir la raison. Beaucoup de cours d’eau à leur embouchure sont encore entourés de hauteurs qui atteignent 100 à 900 m., et qui sont prolongées au-dessous du niveau de la mer par des pentes assez rapides. Comme d'autre part le phénomène des terrasses est compris dans une zone dont l'altitude ne dépasse pas sensiblement 200 m... il en résulte que pour tous ces cours d’eau, les mouvements négatifs n’ont pas dû déterminer en général de dépla- cements horizontaux très considérables du niveau de base, surtout pendant le Pleistocène. En ce qui concerne les mouvements posi- tifs, on remarquera que leur faible amplitude et la lenteur avec laquelle ils paraissent s'être accomplis, ont dû presque toujours permettre le remblayage total de la zone immergée. C’est en partie pour ces diverses raisons, et indépendamment de la faiblesse des pentes, que les séries de terrasses du Rhin, du Rhône et de l'Isser doivent d'être restées entièrement comparables. Les résultats eussent été très différents si les recherches avaient porté sur des vallées situées dans des massifs de faible altitude, où un abaissement vertical du niveau de base de 200 m., entraînerait de grands déplacements horizontaux. Si l’on considère, pour fixer les idées, une région dont la topographie serait analogue à celle du bassin de la Loire entre son embouchure et Nevers, il serait facile, à l’aide d’un graphique comme celui de la figure 16, de montrer que les terrasses les plus basses s’étendront seules plus ou moins loin vers l’amont, tandis que les autres disparaîtront de l’amont vers l’aval à des distances d’autant plus grandes du rivage actuel qu'elles seront plus anciennes ; elles sembleront converger vers l'aval ; il y aura, suivant les cas, condensation dans un espace vertical restreint de plusieurs nappes alluviales, suppression de certaines d’entre elles, et même recouvrement de nappes anciennes par de plus récentes. Je ne crois pas devoir insister sur ces phéno- mènes, mais il était nécessaire d'appeler sur eux l'attention. Pour étudier les effets des mouvements positifs, j'ai admis que ces mouvements avaient eu une amplitude très faible, comparable à celle des mouvements de même sens observés dans l’Isser. Il est IOO1 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 369 facile de comprendre les raisons de cette restriction. Un mouve- ment positif d'amplitude un peu considérable (4 à 500 m. par exemple), amènerait dans tous les bassins étudiés, le niveau de base, à une altitude où le profil d'équilibre n’est pas encore atteint. Aucun remblai ne pourrait se former en amont et le creusement du lit continuerait comme précédemment. Des phénomènes analogues se produiraient, du reste, même dans une vallée où le profil d'équilibre est complètement réalisé entre la source et l'embouchure, si le niveau de base s'élevait jusqu’au point où les pentes deviennent trop rapides pour permettre le dépôt des sédiments. Là encore la puissance érosive des eaux continuerait seule à exercer son action dans les mêmes conditions qu'avant le déplacement du niveau. Ces considérations permettent de comprendre comment les auteurs du mémoire sur « Les terrains tertiaires de la Bresse », ont pu être amenés à admettre que les mouvements positifs, de même que les mouvements négatifs déterminaient l’approfondis- sement des vallées. La conclusion qu'ils ont tirée de la figure schématique de la page 177 de leur travail est géométriquement exacte; mais ils ont attribué au déplacement du niveau de base une action à laquelle il est resté étranger et qui s'exercçait anté- rieurement à ce déplacement. D. — Nécessité d'éliminer de la série des terrasses régulières certaines formes dont l’origine est complètement différente Dans l'étude et la recherche des terrasses régulières il est indispensable d'éliminer certaines formes accidentelles qui pré- sentent de très grandes analogies avec elles, mais dont l’origine est en connexion avec des causes locales en partie indépendantes des variations du niveau de base. Le plus souvent ces formes résultent de l'érosion par le cours d'eau principal des cônes de déjection au moyen desquels les affluents se raccordent avec lui quand leurs pentes sont beaucoup plus rapides. Il est facile de se rendre compte de leur mode de formation. Considérons (fig. 17) une section AB du cours d’eau principal passant par un affluent BDM, dont les pentes sont beaucoup plus rapides, et le volume d’eau assez considérable pour lui donner une grande capacité de transport. Le raccordement des deux nap- 1. Decaronr et Derérer. Les terrains tertiaires de la Bresse, p. 179 et seq. 6 Octobre 1901. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 24 370 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin pes alluviales se fera par un cône BDC, qui refoulera vers la rive opposée À le cours d’eau principal (Isère à Valence, Drac à Grenoble, etc...) Ce refoulement sera d'autant plus grand que le cours d'eau principal sera moins encaissé, et aura des pentes plus faibles. Si ce dernier, pour une . 0 vi tuent cause quelconque, se déplace rene D: N ee IDE RENE ultérieurement vers sa rive droite, il creusera le cône de l’affluent jusqu’en C, et détermi- Fig. 17. — Mode de formation nera la formation d’un talus ASS FRS eee: d’érosion DC, et par conséquent d’une terrasse. L’étendue transversale de cette terrasse, son déve- loppement longitudinal et sa hauteur pourront varier dans des limites très considérables, qui dépendront de la largeur de la vallée principale, de l’extension du cône dans cette vallée, de la pente de l’afiluent et enfin de l’importance du déplacement latéral du cours d’eau principal. Lorsque la pente du cône sera peu sensible (cône du Drac à Grenoble) la pseudo-terrasse d’érosion aura toutes les apparences d’une vraie terrasse dont il pourra être très difficile de la distinguer. Ce phénomène est très fréquent dans les Alpes, et je l’ai observé dans beaucoup d’autres régions (terrasse de Sainte-Egrève à Grenoble, terrasse entre Tain et Pont de l'Isère citée au cha- pitre II etc.). S1 à la suite d’un mouvement négatif le cours d’eau principal s'abaisse en IH, il formera une nouvelle terrasse EH, bien distincte de CD, et qui seule fera partie de la série des ter- rasses régulières. Un fait de ce genre se produirait à Grenoble, si l'Isère creusait son lit de 30 m. par exemple en se jetant en même temps sur sa rive gauche vers Echirolles : il se formerait deux terrasses, l’une de 30 m. dans la vallée principale ; l’autre de 5o à 60 m. d'altitude au-dessus de l'Isère à la traversée du cône de déjection du Drac: la première seule appartiendrait à la série des terrasses régulières. On remarquera que le creusement du cône ayant pour eflet d’abaisser le niveau de base de l’affluent, celui-ci devra également creuser son lit en y créant de petites terrasses d’érosion, confor- mément à la théorie de Mühlberg. Telle est l’origine de celles que l’on observe au Saut des Chèvres près de Pont de l'Isère. Il est évident que toutes ces terrasses accidentelles ne doivent pas compter dans la série normale des terrasses d’une vallée, et 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 371 doivent même en être éliminées avec le plus grand soin. Je pro- pose de les distinguer sous le nom de fausses terrasses. A cette catégorie on peut rattacher les anciens deltas si fréquents dans tous les pays de montagnes. La plupart de ceux que j'ai étudiés forment de véritables terrasses qui peuvent occasionner de graves erreurs d'interprétation lorsqu'aucune coupe ne permet d'étudier leur structure interne. Je citerai. parmi les plus remar- quables : le delta de Saint-Laurent-du-Pont (Isère), celui de Pontar- lier, tous les deltas torrentiels de la haute Moselle, dont quelques- uns ont parfois l’aspect de vastes terrasses longitudinales (Bussang, sablons du Thillot, sablons de Remenvillers, terrasses entre Remi- remont et Noir-Gueux, Cresson, etc..….). E. — Loi relative à l’épaisseur des terrasses régulières Du moment où la formation des terrasses régulières est due à l'intervention de mouvements positifs, il est évident que leur épaisseur, du moins à l’embouchure, doit dépendre avant tout de l’amplitude de ces mouvements, et qu’elle doit être indépendante de la puissance d’érosion et de transport du cours d’eau et de l'importance du massif où 1l prend sa source. Les épaisseurs mesurées à l'embouchure des différents cours d’eau doivent donc être égales, si les mouvements positifs qui ont donné naissance aux nappes correspondantes ont eux-mêmes été égaux, et si aucune cause perturbatrice (déplacement horizontal du niveau de base par exemple), n’a altéré cette égalité. Malheureusement je ne connais aucun document qui permette de vérifier l’exactitude de cette déduction théorique aux embou- chures du Rhin et du Rhône. Vers l’amont, les épaisseurs doivent diminuer progressivement ; cette diminution doit naturellement être plus rapide dans les affluents. On ne doit pas perdre de vue que ces épaisseurs peuvent localement présenter des variations très considérables dues soit aux irrégularités du profil longitudinal, soit surtout à la présence de cônes de déjection d’origine latérale. Si l’on remarque qu’il existe une concordance presque parfaite, au moins à partir de la haute terrasse, entre les altitudes relatives des différentes nappes de cailloutis des environs de Bâle et de la haute Moselle, d’une part, et celles de l’Isser à son embouchure, d'autre part, et que par conséquent ces nappes ont dû être sensi- blement parallèles entre elles et aux thalwegs actuels, on pourra 392 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DÉS VALLÉES 3 Juin admettre avec quelque vraisemblance que l'épaisseur de ces nap- pes à dû rester à peu près constante entre l'embouchure et le point où on les observe aujourd’hui. On peut donc sans commettre de grossières erreurs comparer entre elles les épaisseurs des terrasses des environs de Bâle, de la haute Moselle, de l’Isser et même du Rhône. Le tableau ci-dessous est le relevé des épaisseurs que j'ai pu déterminer par moi-même, ou extraire des travaux cités dans ce mémoire ; j'y ai joint quelques observations relatives aux ter- rasses de la Durance faites par M. Kilian !. RHÔNE HAUTE- NIVEAUX ISSER ET DURANCE RHIN OBSERVATIONS SRE MOSELLE | coms memes | @pemmerenemmemns | eme eee | ms | comen emmener pe | 200" à % 1 Nombre douteux. 2 Nombre probable- ment un peu faible. 5o" à 20 à 40" l'Irchel 30-190" ho" ! a bo'aus ; 130-190 «Ô 4 Rh sud 3 Nombre certaine- R | À MERDE ment trop laible.: À elaen # Gurzwiven. Die NT : Ha ee à diluvial., p. 613. Haute ter- 30! ? 30 à 40 10"auBru-| ; lu P ; Di ee LES du Pasquier. Die ‘asse de | envirot SA z | 4 ARCS de ÉPNILLATEN qee DoMz diluvial., p.74. Don- 99 à 100 Rü " = né comme maximum. “ » Q ütuiharc 6 Gurzwucer. Op. \ Run Qu DIR na YS 562. Moyenne | 4o à 4 30 » 35 à 40" | Quelques | P 90 terrasse à à mètres GurzwiLuer. LIRE. à è ; F p. 22, Ce nombre à) < \chettes € < ae 0 à Romans Archettes | au plus correspond done dun )0 maximum, Basse ter- | 28 à 30" 21" 30" GO 32" à Bâle rasse de au au à près de 30" moins à| moins | Thaon |l’axedela Valence vallée 7 3 Basse ter- » 20° rasse de au 19-20" moins La plupart des nombres de ce tableau sont des minima. On ne doit pas perdre de vue, en effet, que les débris des anciennes terrasses représentent le plus souvent le bord même de la nappe dont ils ont fait partie, et que pendant l'érosion de cette nappe, le cours d’eau attaquant nécessairement de préférence les parties les 1. KictAN. Réunion extraordinaire dans les Basses-Alpes. B. S. G. E., (3), XXII, p. 8or, 805, 806, 814, 815. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 373 plus aflouillables, a dû déblayer le lit sur les points où les allu- vions présentaient le maximum d'épaisseur. La partie la plus épaisse des anciennes nappes n’a été conservée que dans les rares circonstances où le creusement s’est effectué dans une direction très différente de celle suivie par le cours d’eau pendant le remblai (niveau de 100 m. de l’Isser) !. Sous cette réserve, et malgré le petit nombre des données, il est impossible de ne pas être frappé des analogies qui existent entre les épaisseurs des terrasses d’un même niveau appartenant à des bassins qui diffèrent cependant par tous leurs caractères (surface, volume et vitesse des eaux, nature des matériaux, présence ou absence de glaciers. ..). Le fait est surtout frappant pour la basse terrasse. F. — Observations concernant la recherche et l'étude comparée des terrasses Les considérations qui précèdent ne résolvent pas toutes les questions que peut soulever la formation des terrasses régulières dans l'hypothèse où je me suis placé; quelques-unes exigeraient des développements incompatibles avec les limites imposées à cette note; d’autres ne sont pas actuellement susceptibles d’une solution. Parmi ces questions, je citerai celle qui est relative à la perturbation exercée sur la formation des terrasses par l’interpo- sition d’un lac ou d’une zone d’affaissement. Les anomalies que présentent les terrasses dans la Bresse, dans la plaine du Rhin entre Bâle et Bingen, dans celle de Münich, sont probablement liées à des phénomènes de cet ordre. J'y reviendrai peut-être un jour. Quoi qu'il en soit, et malgré leurs lacunes, ces considérations pourront servir de guide dans les recherches ultérieures, et c’est pour ce motif que je crois utile d'en résumer brièvement les consé- quences les plus intéressantes à ce point de vue. 1° La première chose à faire avant d'entreprendre l'étude des terrasses d’une vallée, est de déterminer très exactement le profil longitudinal du cours d’eau, surtout dans la partie où le profil d'équilibre est réalisé ou à peu près. La connaissance de ce profil facilitera l’élimination des terrasses irrégulières : elle évitera de rechercher des terrasses régulières dans des régions où elles n'ont pas pu exister. L'examen du terrain, la considération des épaisseurs permet- tront souvent de distinguer les fausses terrasses. 1. Voir ma note sur l’Isser, p. 274, fig. 5 et planche III. 354 DE LAMOTHA. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin 2° Dans l'étude de détail, on devra tout d'abord faire abstrac- tion des limons, à moins qu'ils ne soient le produit du régime normal et permanent du cours d'eau. On déterminera ensuite le niveau le plus élevé atteint par les cailloutis, en ne perdant pas de vue que près des pentes et au débouché des ravins latéraux, ce niveau peut être considérablement relevé par les apports de toute nature. L’emboîtement de certaines terrasses rendra très difficile la distinction des niveaux. surtout quand la dénudation a effacé les formes caractéristiques. Il peut dans ce dernier cas occasionner des mélanges et des superpositions anormales de faunes, dont il est indispensable de tenir compte. Les cailloutis les plus anciens sont toujours ravinés et dénudés, et comme ils ont eu une épaisseur considérable, les lambeaux d'une même nappe se montrent souvent à des altitudes très différentes. L’altitude primitive ne pourra dans ce cas être retrouvée que par la comparaison des altitudes d’un grand nombre de lambeaux. On pourra parfois reconnaître les niveaux en se plaçant à une certaine distance en face et en se guidant sur les formes générales du ter- rain, comme l’a indiqué du Pasquier ; j'ai apprécié dans la Moselle et dans l’Isser la justesse de cette observation. La connaissance des variations que présente la composition des nappes alluviales dans le sens vertical, sera dans bien des cas d’un grand secours (Rhin, Doubs). La détermination des altitudes relatives devra être faite aussi exactement que possible, une erreur de quelques mètres pouvant fausser les résultats, en raison de la faiblesse des intervalles qui séparent les terrasses. Il serait imprudent de compter sur le baromètre, à moins de répéter 8 à 10 fois les mêmes opérations dans des circonstances différentes de température et de pression, ainsi que je l’ai fait dans les Vosges de 1877 à 1585, avant de pouvoir utiliser les levers de précision. On ne devra pas perdre de vue que les altitudes relatives croissent de l’aval vers l’amont et d'autant plus rapidement que les terrasses sont plus anciennes et les pentes du thalweg plus rapides. Cette notion devra toujours être présente à l'esprit quand on cherchera à suivre les terrasses. L'examen de la nature et de l’état de conservation des cailloutis pourra faciliter cette dernière opération. Les géologues suisses nous ont donné dans cet ordre d'idées un exemple qu'il serait désirable de voir imiter en France où l’on affecte trop souvent de laisser systématiquement de côté tout ce qui concerne la distribu- tion des roches dans les terrasses et les dépôts erratiques. Je 1901 DE L’ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 375 ferai toutefois remarquer, à cette occasion, que les faits obser- vés dans la Moselle prouvent que les données déduites de l’alté- ration plus ou moins grande des galets n’ont qu’une valeur très relative, et ne doivent être interprétées qu'avec prudence. 3 Ce travail local terminé, si l'on veut procéder à la compa- raison des terrasses observées avec celles d’un autre bassin, on devra tout d’abord, s’il y a eu des déplacements horizontaux du niveau de base, rapporter toutes les altitudes relatives à une même position de ce niveau, opération délicate pour laquelle la connais- sance des anciennes plages pourra fournir d’utiles indications. Les comparaisons ne devront porter que sur des régions où les pentes des thalwegs actuels sont comparables, et où l’on peut . admettre que l’évolution du profil longitudinal a été sensiblement la même. Il serait illogique, en effet, de comparer à priori les terrasses de vallées à pentes faibles avec celles de vallées à pentes relativement fortes. En principe, il sera préférable de limiter les comparaisons à des régions où les pentes actuelles sont également faibles. Dans tous les cas, on devra attacher plus d'importance au nombre des niveaux de cailloutis existant dans une zone d'altitude donnée et à leurs intervalles, qu’à la concordance rigoureuse des altitudes relatives. IT. — Obiections que soulève la théorie de l’origine glaciaire des terrasses et de la formation du complexe glaciaire Dans les conclusions du chapitre IV, je me suis contenté de faire remarquer que la concordance des systèmes de terrasses dans les quatre bassins étudiés, excluait la possibilité de leur formation par l’action d’une cause commune agissant à l’amont, ce qui conduisait à écarter l'hypothèse de l'intervention des glaciers. Il me reste à montrer que cette hypothèse telle qu'elle a été présentée par ses auteurs, soulève des objections nombreuses qui, en dehors de toute autre considération, sufliraient pour en justifier le rejet. Dans cette hypothèse, dont je rappelle sommairement les données essentielles, la formation des terrasses est liée exclusive- ment à la présence des glaciers et aux grandes oscillations de leur extrémité aval . À chaque glaciation, quelle qu’en soit la cause, 1. Consulter les ouvrages déjà cités de du Pasquier et le Système glaciaire des Alpes, de Penck, du Pasquier et Brückner. 376 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin les glaciers s’avancent dans les vallées préexistantes, précédés d’un comblement fluvial, formé de l'excédent des matériaux fournis aux rivières par le véhicule glaciaire !. A chaque phase d'arrêt correspond un complexe glaciaire et fluvio-glaciaire de moraines et d’alluvions formant un tout contemporain de genèse indissoluble ? Ce complexe quand il est intact, comme c’est souvent le cas. pour les moraïnes internes, comprend un amphithéâtre moraini- que avec sa dépression centrale, et un cône de déjection partant des moraines (cône de transition), à un niveau beaucoup plus élevé que le fond de la dépression centrale et servant de nappe de raccordement avec les vastes plaines ou terrasses régulières qui s'étendent au loin vers l'aval. Pendant la phase de retraite des glaciers en amont des moraines terminales, le matériel charrié s’est déposé dans la dépression centrale, c’est-à-dire en contrebas des terrasses extérieures, et les cours d'eau ainsi déchargés ont commencé au sein des moraines et des terrasses extérieures, leur travail d’érosion. Ce phénomène s’est renouvelé autant de fois qu'il y a eu de glaciations. L'idée d’une variation de la ligne de rivage doit être écartée : elle n’est justifiée par aucan fait; elle est même en opposition avec les faits ?. La théorie de l’origine glaciaire des terrasses est, on le voit, tout l'opposé de celle à laquelle nous a conduit l'étude comparée de ces mêmes terrasses dans divers bassins. Tandis que dans la première, la cause de la formation des terrasses doit être cherchée vers la tête des vallées, et est liée à la présence des glaciers, dans la seconde la cause a agi exclusivement à l'extrémité aval des vallées et ne peut être que l’oscillation du niveau de base. Je vais exposer aussi brièvement que possible les observations que suggère l’examen de cette doctrine. 17e observation. — Dans la théorie glaciaire, le remblai des vallées est la conséquence de la progression des glaciers, le creu- sement du remblai et même du substratum est lié à leur recul. Or, les faits actuellement observables sont en contradiction avec le principe même de cette double connexion. Dans les hautes régions alpines, on peut constater à chaque pas que les apports des plus modestes torrents sont presque toujours 1. du PAsquIER. Les all. glaciaires, p. 56. 2. Système glaciaire, p. 12. 3. du PasquiLR. Die fluvioglacialen..., p. 59 et seq. — Les all. glac., p. 57. 1901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 357 au moins aussi considérables, sinon plus, que les moraines des plus grands glaciers, malgré l’extrême disproportion des bassins d'alimentation, et je ne crois pas qu’il existe dans les Alpes beau- coup de moraines dont la puissance puisse être comparée aux cônes de déjection des grands torrents des Alpes françaises, tels que ceux de Boscodon, de Rioubourdoux, de Baudon, des Vachères, de Manival !, etc. Il est donc diflicile, quand on réfléchit aux cir- constances dans lesquelles se produisent les affouillements des bassins de réception des torrents, de ne pas admettre que si ceux- ci étaient remplis de glace, l'alimentation des cônes de déjection serait sinon supprimée, du moins extrêmement réduite. D'autre part, la majeure partie des matériaux transportés par les glaciers, est empruntée aux éboulis qui s’accumulent sur les pentes encaissantes, sous l'influence des agents atmosphériques ; la présence d’une couverture de glace en limitant la formation de ces éboulis doit nécessairement réduire en même temps l’impor- tance des moraines qu’ils alimentent. Il résulte de ces deux données que les glaciers et leurs névés doivent être considérés plutôt comme des agents protecteurs du sol qu'ils recouvrent que comme des agents d’érosion, et que le résultat immédiat de leur extension doit être de diminuer la quan- tité totale des débris susceptibles d’être charriés. L'alimentation en matériaux de toutes grosseurs, des rivières issues de ces glaciers (à l'exception peut-être de la boue glaciaire), doit donc aller en diminuant pendant la progression des giaces et en augmentant pendant leur retraite, et il est dès lors absolument illogique de faire dépendre la formation du remblai de cette progression et son creusement, de cette retraite. Pour échapper à cette contradiction, les auteurs de la théorie glaciaire ont, fort habilement, imaginé de faire intervenir la dépression centrale, et supposé qu’au début de la retraite, les matériaux se déposant dans cette dépression ne pouvaient plus atteindre le cône de transition et le niveau supérieur des terrasses. Les eaux débarrassées des matériaux qu’elles charriaient devaient done nécessairement creuser la barrière formée par la moraine terminale et la nappe alluviale. Il me suflira, je crois, de faire remarquer qu’en raison de la très faible capacité de la dépression centrale, son comblement n’a pas pu exiger un temps bien considérable, et que cette opération aussitôt terminée, les eaux surchargées de nouveau de maté- 1. Les déjections du Boscodon (Hautes-Alpes) s'élèvent à 73 m. 20, et la largeur du lit est de 3,330 m. (Surell). 378 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin riaux, ont dû cesser de creuser et ont recommencé à alluvionner comme auparavant. Il n’est, en outre, nullement évident que le creusement du barrage morainique ait pu atteindre pendant ce comblement une profondeur notable, puisque les eaux le franchis- saient sans vitesse. Ainsi, non seulement le creusement des nappes alluviales n'apparaît pas comme la conséquence nécessaire de la retraite des glaciers, mais l'on serait plutôt conduit à considérer cette retraite comme une nouvelle cause de remblai. Enfin, il convient de noter que dans la théorie glaciaire, les nappes alluviales correspondant aux glaciations successives, et par suite les terrasses qui en dérivent, devraient toutes converger vers l'embouchure, puisque le niveau de base est supposé inva- riable. Or cette convergence ne se manifeste certainement pas dans le Rhône, car il existe à l'embouchure, ou à peu de distance en amont, plusieurs niveaux de cailloutis dont le plus élevé d’après la carte géologique, est encore à 145 m. au-dessus du Rhône, sur le parallèle d'Avignon. 2e observation. — Le mode de formation de la dépression centrale soulève également de sérieuses objections. 11 n'existe aucun fait qui autorise, par analogie, à supposer que les anciens glaciers ont été capables d’édifier à leur extrémité terminale, des barrages continus élevés de 50 à 60 m. au-dessus de leur fond ; les moraines terminales des glaciers actuels sont, en effet, toujours largement éventrées vis-à-vis du débouché du torrent sous-glaciaire. Or, dans les anciens glaciers, le volume des eaux de fusion a dû être bien plus considérable que dans les glaciers actuels, comme le prouvent les faits observés au Groënland, et comme l’admet d’ailleurs du Pasquier. D'autre part, la masse de matériaux char- riés a été d’autant plus faible que le glacier approchait davantage de son maximum ; enfin, l’accumulation de ces matériaux sur le front du glacier, non seulement n’est pas instantanée, mais est au contraire très lente, tandis que l'écoulement des eaux de fusion est continu. Pour ces diverses raisons, il est bien difficile d’admet- tre que les torrents issus des anciens glaciers n'aient pas été capables de maintenir la liberté de leur chenal et d'empêcher la formation d’un barrage transversal continu. Du Pasquier qui a sans doute entrevu l’objection, a cherché à expliquer l’édification du barrage et en même temps celle du cône de transition, en supposant que l’eau de fusion s’échappait de la base du glacier sous la forme d’une multitude de petits filets et I9OI DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 379 non en une masse unique. Il est possible qu'un phénomène de ce genre puisse se produire sur un plateau, mais il ne se produira certainement pas dans une vallée plus ou moins encaissée, comme celle de l’Aar, de la Reuss, de l'Isère ou du Rhône. Les lois du mouvement des glaciers sont celles de l’eau, et, par suite, le profil du lit sous-glaciaire, sauf dans le cas où le glacier coule sur un cône de déjection, doit nécessairement être concave. Les eaux de fusion se rassembleront donc dans la partie la plus basse du profil transversal et formeront un cours d’eau unique. L'hypothèse de du Pasquier semble n'être qu’une réédition de la théorie du rouleau compresseur de Hogard, au moyen de laquelle ce géolo- gue, assimilant la marche des glaciers à celle d’un eylindre, expli- quait le nivellement longitudinal et transversal des nappes allu- viales ; elle est comme cette dernière en contradiction complète avec les lois expérimentales du mouvement des glaciers, et doit par suite être rejetée. 3e observation. — Du Pasquier paraît avoir attaché une grande importance à l'existence d’un faciès endogène et d’un faciès exogène du phénomène des terrasses par rapport aux moraines !. Je me bornerai à faire remarquer que la disparition des terrasses régulières en amont des moraines s'explique d’une façon beaucoup plus simple dans la théorie que j'ai développée. En effet : a. — Comme je l’ai montré plus haut, les terrassés régu- lières sont spéciales à la zone où le profil d'équilibre a été atteint ; elles ne la franchissent que rarement vers l’amont où l’on ne rencon- tre que des terrasses localisées et irrégulières ; b. — Les glaciers ne paraissent pas en général s'être beaucoup avancés sur la zone où le profil d'équilibre était atteint, sauf peut-être à l'époque de leur maximum d'extension ; par conséquent la plus grande partie de ces terrasses régulières doit normalement se montrer à l’aval des moraines de la glaciation correspondante ; c. — Pendant leur recul, les glaciers ont dû raviner et détruire la majeure partie des terrasses régulières sur lesquelles ils avaient coulé et après leur départ définitif, la dénudation dont les effets sont d'autant plus grands que l’on se rapproche davantage des régions montagneuses, a achevé leur œuvre. ge observation. — Ainsi que l’a fait remarquer M. de Lappa- rent ?, le phénomène des terrasses ne peut être une conséquence exclusive du régime glaciaire, puisque nous retrouvons des sys- 1. du PAsQUIER. All. glaciaires, p. 52. 2. de LAPPARENT, Traité de géologie, {° édit., p. 1633. 380 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin tèmes de terrasses dans des vallées comme celle de la Somme, où il n’y a jamais eu de glaciers. Les faits observés dans l’Isser sont encore plus concluants, puisqu’à l'embouchure, les terrasses et les plages sont en connexion intime. Il y aurait donc eu, dans des bassins très voisins, des systèmes de terrasses formés les uns par l'intervention exclusive des glaciers, les autres sous l'empire de conditions absolument différentes : ce qui est bien improbable. 5me observation. — La concordance des épaisseurs est une objection non moins grave. Les données que j'ai citées plus haut montrent, en eflet, que l'épaisseur de terrasses de même altitude relative et que l’on peut considérer comme synchroniques est indépendante de l’importance des massifs. Dans la théorie glaciaire cette épaisseur devrait au contraire être proportionnelle à cette importance. 6me observation. — Il ne paraîtra peut-être pas hors de propos, de rappeler ici que la région en amont et en aval du barrage de Noir-Gueux qui représente au point de vue topographique un appareil glaciaire complet, a été cependant exclusivement façonnée par les eaux, sans aucune intervention de la glace. On voit, en résumé, que non seulement la théorie de l’origine glaciaire des nappes alluviales et des terrasses est contredite par les faits exposés dans ce mémoire, mais que le mécanisme même de leur formation soulève de sérieuses objections. Elle doit donc être complètement rejetée. Faut-il en conclure qu’il n'existe aucun lien, même indirect, entre la marche des glaciers et la formation des nappes alluviales et des terrasses ? Je ne le pense pas, et je crois même que d’après les rapports d'âge et de position qui semblent exister entre les glaciations et certaines terrasses, on est dans une certaine me- sure autorisé à admettre l'existence de ce lien comme probable. Sa nature me paraît pouvoir être déduite des considérations ci-après : Les mouvements positifs en étendant le domaine mari- time, les mouvements négatifs en le restreignant, doivent néces- sairement amener des modifications dans le climat, modifications très faibles sans doute, mais dont l'effet sur les glaciers peut devenir considérable si la durée du phénomène est suffisamment prolongée. L'influence des mouvements négatifs est encore accrue par l’affaissement de la nappe de glace consécutif du creusement de la vallée : il suflit pour se rendre compte de la valeur de cette influence de remarquer qu'après la formation de la nappe de 901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE 381 130-190 m., il y a eu antérieurement à la haute terrasse un creu- sement de 90m. dans la zone du profil d'équilibre. J’ajouterai que quelques géologues ont reconnu implicitement la connexion entre les oscillations du niveau de base et les mouvements des glaciers en faisant coïncider une partie de leurs périodes interglaciaires avec des émersions !. On peut donc admettre comme vraisemblable que les mouvements positifs ont en principe provoqué la progression des glaciers et que les mouvements négatifs ont au contraire déterminé leur retraite, et conclure par conséquent que, comme dans la théorie glaciaire, la progression des glaciers a coïncidé avec la formation des nappes alluviales et leur retraïte avec le creusement de ces nappes. Mais, tandis que dans la théorie glaciaire, c’est la marche du glacier qui provoque suivant son sens le remblai ou le creusement, dans l'hypothèse où je me suis placé, c’est l'oscillation du niveau de base qui règle le sens de cette marche, en provoquant en même temps le remblai ou l'érosion. Il n'y a donc pas de lien direct de cause à effet, entre la formation des nappes alluviales et des terrasses et les mouvements des glaciers, mais seulement un lien indirect, dû à ce que ces divers phénomènes sont sous la dépen- dance d’une même cause, l’oscillation du niveau de base. En partant de ces données et en appliquant aux glaciers les lois qui régissent l’évolution des cours d’eau, je me suis assuré qu'il était facile de donner une explication rationnelle et simple des particularités observées au contact des glaciers de la dernière extension et de la terrasse basse, et notamment de la formation du complexe glaciaire. Mais cette explication m'’entraïnerait en dehors du cadre et des limites imposées à cette note et il me paraît préférable de l’ajourner pour le moment. Quoi qu'il en soit, on peut, semble-t-il, concevoir ainsi qu'il suit la marche des phénomènes glaciaires dans les Alpes occidentales. La surrection des grands massifs montagneux à la fin du Pliocène marin et les conditions climatériques résultant de la position élevée du niveau de base, expliquent l’apparition et l'invasion des glaciers alpins. Si le niveau de base était resté invariable, ces glaciers auraient progressé d’une façon plus ou moins continue jusqu'à un maximum correspondant à l’état d'équilibre entre les causes favorables à l'extension et les causes opposées, et ils s’y seraient maintenus. Mais les oscillations du niveau de base ont, à deux reprises, interrompu la continuité de cette progression et 1. Voir J. Gerxie. The great ice age, 3: edit., p. 607 et seq. x 382 DE LAMOTHE. — SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES 3 Juin déterminé de grandes oscillations dans la masse glacée (glacia- tions des niveaux de 200-230 m. et de 130-150 m.). Le grand mouvement négatif qui a suivi le maximum d'extension (glaciation de la haute terrasse), a définitivement rompu l’équi- libre entre les causes d'extension et les causes opposées, au profit de ces dernières, et la retraite générale des glaciers a commencé, interrompue seulement par des poussées en avant dues aux mou- vements positifs qui ont amené la formation des nappes de la moyenne et de la basse terrasse. Résumé final Ce long mémoire peut se résumer en quelques lignes. L'étude comparée des systèmes de terrasses de l'Isser, de la Moselle, du Rhin à Bâle et du Rhône à Valence, démontre que ces systèmes, abstraction faite du niveau le plus élevé, sont presque identiques et superposables. On retrouve partout, dans une zone de 200 m. d'altitude environ au-dessus des thalwegs, six niveaux de cailloutis, séparés par les mêmes intervalles dans les différentes vallées, et si l’on tient compte de l’état actuel du profil d'équilibre, on constate que les altitudes relatives sont partout les mêmes. Ces faits ne peuvent s'expliquer qu’en admettant que les nappes alluviales et les terrasses se sont formées sous l'influence d’oscil- lations eustatiques, à résultante négative, qui ont affecté de la même façon les niveaux de base et ont déterminé dans les vallées étudiées des alternatives d’érosion et de remblai, qui ont peu à peu amené celles-ei à leur état actuel. Les mouvements positifs ont été très lents ; les mouvements négatifs paraissent n'avoir été ni instantanés, ni même très rapides. Réciproquement, en admettant la réalité de ces oscillations, il est facile d'expliquer et de prévoir la plupart des particularités que présentent la formation et la distribution de terrasses. On est ainsi conduit à rejeter la théorie qui fait dépendre la formation des nappes alluviales et des terrasses des oscillations des glaciers. Enfin, les alternatives de creusement et de remblai qui ont déterminé la formation des vallées, ne peuvent se concevoir qu'en admettant qu'une période de temps d’une durée extrême- ment considérable nous sépare de l'époque où ont apparu les cail- loutis du niveau le plus élevé. I901 DE L'ISSER, DE LA MOSELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE SOMMAIRE INTRODUCTION . o CHAPITRE I. — Résores des as Genres ire Pier : CHAPITRE II. — Examen des difficultés que soulève la RERO . résultats obtenus dans l’Isser avec les observations similaires faites dans d’autres régions. 1° Impossibilité d'utiliser actuellement les maté riaux fournis par l’étude des anciennes plages. . 2° Difficultés de l’étude comparée des anciennes terrasses fluviales. CHAPITRE II. — Etude des terrasses de la Moeetle “ Rhin 6 di Phone, I. — Vallée de la Moselle. L RE AE EE EN RDA ES IL. — Vallée du Rhin près de Bâle. . . . . . .. III. — Vallée du Rhône près de Valence. CHAPITRE IV. — Comparaison des résultats et conclusions. À CHAPITRE V. — Considérations théoriques sur la formation des ter- rasses et leurs relations avec les glaciers. I — MÉCANISME DE LA FORMATION DES TERRASSES. . A.— Les oscillations du niveau de base sont exclusi- vement verticales. B. — Le niveau de base ne subit me de éprcaments horizontaux C. — Le niveau de base se ériace à à F Bis anale ment et horizontalement. : : D. — Nécessité d'éliminer de la série des masses régulières certaines formes dont l’origine est toute différente. d te E. — Loirelative à l'épaisseur de. terrasses rérolères. F. — Observations concernant la recherche et l’étude comparée des terrasses. Act NÉS TEE II. — OBJECTIONS QUE SOULÈVE LA THÉORIE DE L'ORIGINE GLACIAIRE DES TERRASSES ET DE LA FOR- MATION DU COMPLEXE GLACIAIRE . RÉSUMÉ RINATE RE UC DEN PAR M NTI NE LANAP UE ANR AT ARE TEE 383 Pages 297 297 À la suite de cette communication, M. E. Haug présente les observations suivantes : Les résultats théoriques de l’importante communication du colonel de Lamothe sont la conclusion logique du beau travail sur les terrasses de l'Isser qui a paru il y a deux ans dans notre Bulletin. Un grand nombre de lecteurs de ce travail avait certainement conclu dans le même sens et M. Kilian en particulier a appliqué aux vallées alpines la théorie des creuse- ments successifs à la suite de changements successifs dans le niveau 384 SÉANCE DU 3 JUIN I9OI de base. ! En ce qui me concerne, j'ai également envisagé la possi- bilité de cette interprétation des terrasses ?, mais les faits que l’on observe dans les vallées de plusieurs cours d’eau alpins m'ont convaincu du danger qu'il y aurait à la généraliser. Si l’on suit les terrasses en aval, on constate que leurs différences d'altitude s’'atténuent graduellement, en même temps qu’elles se rapprochent du thalweg actuel. Finalement les nappes de galets correspondant à chacune d’elles se trouvent au-dessous des actuelles et elles sont superposées en succession normale, au lieu d’être « emboîtées » comme précédemment, Sur les côtes septentrionales de la Médi- terranée on cherche en vain des «(plages soulevées » qui se raccor- deraient avec les terrasses du Rhône et de la Durance. La meilleure interprétation des terrasses des vallées me paraît tou- jours être celle qui admet des alternances périodiques d’alluvion- nement et de creusement dues à des variations météorologiques, qui elles-mêmes ont déterminé une succession de périodes gla- claires et interglaciaires. Dans tous les cas les observations si précises du colonel de Lamothe fourniront une base précieuse à toutes les discussions ultérieures du problème des terrasses et il serait à souhaiter que des travaux analogues fussent entrepris dans toutes les grandes vallées de l’Europe occidentale. M. G. Dollfus croit qu'on peut faire des objections importantes à la théorie de M. de Lamothe. Il ne peut séparer les périodes de creusement des périodes de dépôt, ce sont deux aspects du même phénomène. Il a fallu pour-:les uns, comme pour les autres, un volume d’eau considérable, équivalent. Pour les terrasses quater- naires de la vallée de la Seine, il ne lui a pas été possible de relever de niveaux constants; les graviers s'élèvent généralement jusqu'à une trentaine de mètres au-dessus du fleuve, plus haut et brusque- ment il n'existe plus de trace de creusement violent. Les fleuves torrentiels pleistocènes arrachaient en certains points de leurs berges des débris qu'ils allaient déposer en aval, et en des points où la rapidité de leur cours était momentanément ou localement moins grande; ces débris étaient vingt fois repris et redéposés avant d'atteindre le niveau de repos de base. Il n’y a aucune apparence de mouvements périodiques. 1. W. KirrAN. Observations à la suite d’une note de M. Fr. Arnaud. Bull. Soc. dauphin. d’ethnol. et d’anthropol., t. VI, n° 2, p. 191, 1898. — Ip. Note sur le «surcreusement » des vallées alpines. B. S. G. F., (3), XXVILL, p. 1004- 1003, 1900. 2. Art. QUATERNAIRE, Grande Encyclopédie, t. XXVII, p. 1109. NOUVEAUX DOCUMENTS RELATIFS A LA GÉOLOGIE DES ALPES FRANCAISES par MM. W.KILIAN et P. TERMIER. A. — Sur quelques roches nouvelles ou peu connues des Alpes françaises. B. — Matériaux pour l'étude des gabbros et de leur cortège de schistes cristallins dans le Queyras et le Briançonnais. C. — Contributions à la connaissance des « schistes lustrés » du Brian- connais et du Queyras. D. — Sur queiques schistes cristallins de la zone du Piémont. Plus de dix années d’explorations dans les Alpes françaises, durant lesquelles un grand nombre de courses communes et l’habi- tude que nous avons prise de nous soumettre mutuellement les résultats de nos recherches nous ont facilité la solution de maints problèmes délicats, nous permettent aujourd'hui de livrer à la publicité, en notre nom commun, quelques documents qui ne ren- trent que difficilement dans les mémoires que chacun de nous se propose de consacrer à des régions déterminées de la chaîne. Les détails stratigraphiques que l’on va lire sont généralement dus aux observations de M. W. Kilian; tout ce qui concerne les descriptions pétrographiques et les conclusions qui dérivent de l'examen litho- logique doit être attribué à M. P. Termier. À. — Sur quelques roches nouvelles ou peu connues des Alpes françaises I. — ANDÉSITE DE GUILLESTRE Le long du torrent du Guil, en amont de Guillestre et en aval de la Maison du Roi, se montrent de grandes masses d’une roche éruptive dont l'existence a longtemps passé inaperçue. Ces affleu- rements attirent cependant l'attention du géologue par la teinte foncée qu'ils donnent aux parois rocheuses qui encaissent le cours d’eau en cet endroit. Cette gorge sombre et profonde est dominée de très haut par la route du Queyras. 12 Octobre 1go1. — T. 1er. Bull. Soc. Géol. Fr. — 25 386 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin Signalée pour la première fois par Ch. Lory, en 1883, dans une « Note sur deux faits nouveaux de la Géologie du Briançonnais », insérée dans le Bulletin de la Société géologique de France ([3|, XII, p. 119), où le célèbre géologue alpin lui consacre quelques lignes, la roche de Guillestre a été sommairement décrite à ce moment, mais sans faire l’objet d’une diagnose détaillée; Lory se borne à constater qu'elle est inférieure aux quartzites triasiques et qu'elle constitue le noyau d’un pli anticlinal. Il la qualifie de «porphyre massif » et la rapproche du porphyre de la Windgaelle dans les Alpes suisses, tout en remarquant qu’elle « paraît pré- senter des caractères pétrographiques un peu différents » ; il la rapporte, comme cette dernière, à l’époque permienne. En 18917, l’un de nous! mentionna de nouveau cette roche, — dont des échantillons avaient été communiqués à M. Michel-Lévy qui y avait reconnu une porphyrite, — en ajoutant qu'elle ne traverse pas les quartzites du Trias inférieur et qu'on la retrouve en galets et en fragments dans la plupart des conglomérats permiens de la région (L'Argentière, etc). Depuis lors, les environs de Guillestre ont fait l’objet ? d’explo- rations détaillées qui ont mis en évidence la structure compliquée de cette région. Un profil parallèle au Guil, publié par l’un de nous dans le Bulletin du Service de la Carte géologique de France ?, montre la place qu’occupe la roche éruptive de Guillestre dans la série des assises : elle forme la partie axiale d’une voûte anticlinale qui ne permet pas de reconnaître son substratum, mais qui laisse voir, immédiatement au-dessus, les quartzites du Trias inférieur, surmontés eux-mêmes par toute la série sédimentaire au-dessus de laquelle réapparaissent une seconde fois, par l'effet d’un pli couché, à flanc inverse étiré, les calcaires du Trias de la montagne de Saphie, également reployés en voûte. La roche occupe donc le niveau du Permien; quoique la gorge du Guïl ne montre pas les couches sur lesquelles elle repose, elle présente les allures d’une masse interstratifiée. L'épaisseur de la masse éruptive est de plus de 200 mètres. Quant aux galets qui se rencontrent à la base du Permien, un examen micrographique auquel les a soumis M. Termier, a montré qu'il s'agissait surtout de rhyolithes. Ajoutons que les environs de Guillestre appartien- 1. W. Kirian. Notes sur l’histoire et la structure géologique des chaînes alpines de la Maurienne, etc. B. S. G. F., (3), XIX, p. 571, 1891. 2. W. Kicran. Nouvelles observations géologiques dans les Alpes delphino- provençales. B. S. C. G. F., n° 95, 1900. 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 397 nent à la portion occidentale de la zone du Briançonnais, dont toutes Les assises ont Le faciès caractéristique. La roche de Guillestre se présente, à l'œil nu, sous deux aspects différents : tantôt elle est compacte, d’un vert foncé avec quelques cristaux de feldspath plus clairs ; tantôt, et c’est le cas Le plus fréquent, elle est d’un rouge violacé et montre, dans une pâte lie-de-vin, des cristaux, blanchâtres ou verdâtres, de feldspath, qui mesurent jusqu'à 3 et 4 millimètres de longueur. Les variétés lie-de-vin sont les mieux conservées. Quant aux échantillons verts, ils sont très altérés, souvent schisteux et presque méconnaissables. Au microscope, les échantillons lie-de-vin montrent les éléments suivants : De grands cristaux de feldspath, formant environ le tiers de la masse totale de la roche, bien idiomorphes, mâclés, criblés de petites inclusions de kaolin, de chlorite, et présentant les carac- tères d’une oligoclase-albite ; Des prismes courts et trapus d’apatite rouge polychroïque ; De nombreuses sections d’un minéral magnésien (probablement hornblende) entièrement épigénisé par magnétite, chlorite, calcite, sphène, et peut-être aussi tale ou mica blanc ; De nombreux grains de magnétite ; Enfin une pâte holocristalline très chargée d’oligiste en fibrilles ténues et formée, pour le surplus, d’un feutrage feldspathique dont l'analyse optique n'est pas possible. La composition chimique est la suivante (analyse d’un échan- tillon lie-de-vin, par M. Pisani) : SO Re LU Moment MEUS 58,50 ATOS EN TRY EDS A, SNMP 19,80 Re O PAP TRE NE AT 2 AT ETATS 3,01 THE O) re DES Er RE TEA REA RAA 1,41 MSC USSR EC ET AS PAT IR Rae 410 CO) RO Re Ru 3,10 KCOPMR SRE ERTN A" M AU SPAS RER 1,00 NOR RRTREUCE ARE SL M TANEE NC MERE 6,80 OR M Se in LT 4e 0 NE D ESES 2,10 CORPS ES AA PES 0,40 Total. 100,32 En comparant cette analyse aux résultats de l’étude microgra- phique, on voit que la composition minéralogique actuelle de la roche de Guillestre est très sensiblement la suivante : 388 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin 5 ‘}, d’un feldspath oligoclase-albite à 12 An, 3 ‘|, oligiste et magnétite, 1 ‘}, calcite, x ‘}, sphène, 0,5 °}, apatite, 6 °/, orthose, 5 °‘} chlorite, 2 ‘|, quartz libre, 6,5°/, kaolin. Total. . . . 100 La restauration de la roche est facile. On peut admettre qu'elle a perdu, par métasomatose, environ 10 ,, d'anorthite, le vide laissé par le dépôt de cette anorthite étant actuellement comblé par le kaolin, une partie de la chlorite et une partie de la calcite. La roche originelle contenait ainsi environ 95 °/, de sa masse d’un feldspath triclinique (moyen) à 25 An, c’est-à-dire d’un oligo- clase. C’était donc une andésite relativement alcaline, renfermant d’ailleurs un peu d’orthose, et voisine, par conséquent, des tra- chyandésites. Ce nom d’andésile (rigoureusement synonyme de celui de por-- phyrite dont on s’est servi pour désigner la même roche) implique l’idée que la roche de Guillestre est une roche d’épanchement. Cest, en effet, l'hypothèse qui semble la plus plausible, d'après les caractères généraux et la structure. Mais il peut se faire que ce gisement de Guillestre soit réelle- ment laccolithique ; et dans ce cas le nom de microdiorite convien- drait mieux que celui d'andésite. Cette microdiorite serait inter- médiaire entre les microsyénites de Puy-Saint André et les roches basiques du Chardonnet et de Prelles ; mais elle s’en écarterait par beaucoup de caractères. Il convient d'indiquer ce rapproche- ment sans y insister davantage, et on peut considérer jusqu'à nouvel ordre la roche de Guillestre comme distincte des roches intrusives du Houïiller briançonnais. L’apatite rouge de l’andésite de Guillestre a fait l’objet d'une note spéciale de l’un de nous !. Cette apatite rappelle, par la plupart de ses propriétés les apatites cérifères de Norwège, signa- lées par M. Brôgger. 1. P. TerMier. Bull. Soc. franc. de Minéralogie, t. XXIL, p. 48. 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 389 2. — NOUVEAUX GISEMENTS DE MICRODIORITE Il convient de signaler la découverte de nouveaux affleurements de microDIORITE au col du Raisin et près du col de Buffère, dans le bassin de la Guisanne, ainsi qu’au nord-est de Réotier, sur la rive droite de la Durance. Ce dernier gisement, le plus méridional de tous ceux qui ont été découverts jusqu’à présent, est situé sur la limite occidentale de la zone du Briançonnais, dans une bande anticlinale houillère appar- tenant à un faisceau de plis qui va s’enfoncer sous le Flysch au Plan-de-Phazy après avoir fait apparaître un noyau de granite (type Pelvoux). Située plus à l’est et absolument distincte du gise- ment de roches vertes de Réotier dont nous avons parlé dans des notes précédentes !, la microdiorite que nous signalons iei affleure non loin de la crête de la montagne qui longe la rive droite de la Durance, à peu près en face de la gare de Montdauphin et au nord-est du pont du chemin de fer. Elle est interstratifiée dans les grès houillers. L'identité de cette roche avec celles qui abondent dans le Houiller des environs de Briançon ?, mérite d’être souli- gnée, car elle est ici très voisine d’un pointement de granite du type Pelvoux, dont on ne peut tectoniquement la séparer. Voici Les diagnoses de ces roches : Roche éruptive verte, entre Réotier et Champcella (préparation N° 5 74) *. — Microdiorite (indubitablement), dont les grands felds- paths sont kaolinisés et dont la hornblende est entièrement trans- formée en chlorite. La pâte est formée de petits cristaux feldspa- thiques et d’assez nombreux grains de quartz. Roche éruptive du col du Raisin (préparations N° 1-11). — Microdiorite, type relativement basique, analogue, sinon identi- que, à celui de Chardonnet. Affleure en massifs interstratifiés de 5 à 20 m. d'épaisseur; on y a exploité de la galène. 1. Kizran et Termier. Sur quelques roches éruptives des Alpes françaises. B. S. G. F., (3), XXI, p. 395. — In. Note sur deux types pétrographiques, etc. 1d., (3), XXVI, p. 355. 2. TERMIER et KictaN. Contributions à l'étude des microdiorites du Brian- connais. B. S. G. F., (3), XXVI, p. 348. — TerMmier. Sur le rattachement à une souche commune des roches intrusives du Houiller briançonnais. 1bid., G), I p 157, 1907. | 3. Les numéros mentionnés entre parenthèses se rapportent aux prépara- tions et aux échantillons conservés dans les collections de la Faculté des Sciences de Grenoble. 390 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin Roche éruptive du fond du cirque du Raisin (préparations N° 15 et 16). — Microdiorite du même type, mais ici la roche est très altérée. Microdiorite du col du Raisin (préparations N° 225-224). — Même type. Microdiorite, entre Rochenoire et le col de Buffère (prépara- tions N° 29-31). — Même type que celui du Chardonnet, sans aucune particularité intéressante. Roche interstratifiée dans le Houiller au nord-ouest du col de Buffère (préparations N° 254 et 255). — Microdiorite du type du Chardonnet. 3. — MICROGRANITE DE SERRE-BARBIN Cette roche est à peu près identique au microgranite des Gar- déolles, près Briançon, décrit en 1899 par l’un de nous !. Dans cette localité de Serre-Barbin, située sur la rive gauche de la Guisanne, en aval des Guibertes, on observe, près d’une galerie de mines creusée pour la recherche du mispickel, quatre filons- couches de .microgranite, épais de 1 à 5 mètres et inclinés vers le sud-est. Ces filons alternent régulièrement avec les bancs du terrain houiller. L'aspect de la roche est assez variable : on distingue des variétés euritiques et des variétés fibreuses, étirées par le dynamo- métamorphisme, qui ont l'aspect de schistes quartziteux. La couleur est d’un gris clair. M. Termier a étudié plusieurs préparations du microgranite de Serre-Barbin ; voici le résultat de son examen : Microgranite de Serre-Barbin (préparations N° 17 à 25). — Grands cristaux de quartz, de mica noir entièrement chloritisé, de feldspath presque entièrement kaolinisé. Quelques sections felds- pathiques montrent encore les caractères d’un plagioclase très voisin de l’albite, mais qui n’est probablement pas le plagioclase originel. Pâte excessivement fine, faite de quartz et d'orthose. Quelques échantillons sont froissés et laminés avec large déve- loppement de mica blanc secondaire (à l'œil nu, aspect schistoïde et satiné). 1. TEerRMIER. Microgranites de la vallée de la Guisanne. B. S. G. F., G), XX VII, p. 399, 1899. I9O1 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 391 4. — BRÈCHES ET GNEISS DU GLACIAIRE DE LA MATHEYSINE Il existe non loin de la Mure (Isère), sur une langue de terre qui sépare le lac de Latfrey du lac de Petit-Chat, une série de gros blocs erratiques d'aspect bréchoïde et de provenance exacte incon- nue, qu'il a semblé intéressant de soumettre à un examen appro- fondi. D'après la disposition générale des dépôts glaciaires dans la région des lacs !, le glacier qui a pu amener ces blocs au point où on les trouve actuellement devait venir du nord (chaîne de Belledonne} et non, comme on le croyait, du sud (massif du Pel- VOuX). ‘ Voici la diagnose de cette roche donnée par M. Termier : Brèches dans le Glaciaire, entre Laffrey et Petit-Chat(prépara- tion N° 677). — Débris et blocs d’une aplite d’un blanc rosé, très elcaline (albite et orthose), et peu quartzeuse, d’un type analogue à celui du Pelvoux. Le ciment est de la sidérose ou de la calcite englobant dans sa cristallisation d'innombrables débris plus petits et comme une poussière de la même roche et aussi de roches chloriteuses. Ces brèches sont des remplissages de fentes, failles et filons ; on peut les observer en beaucoup de points du Pelvoux et des Grandes Rousses. Sur le même plateau et dans la même traînée glaciaire, on trouve, près du lac Mort, des fragments de gneiss ; M. Termier en a fait l'examen micrographique, qui l’a conduit au résultat sui- vant : Gneiss blanc, Glaciaire du lac Mort, laminé (préparation No 623). — « Ce type m'est inconnu, et je ne pense pas qu'il provienne du massif du Pelvoux. » B. — Matériaux pour l’étude des gabbros et de leur cortège de schistes cristallins dans le Queyras et dans le Briançonnais L'étude approfondie que l’un de nous a faite d’une partie du Queyras, en vue de l'établissement des feuilles « Aiguilles » ? et « Larche » de la Carte géologique détaillée de la France lui a fourni l’occasion de porter son attention sur les «roches vertes » 1. Voir à ce sujet: W. Kruian. Bull. Serv. Carte géol. de Fr., N° 75 (1900). 2, W. Kilian. Feuille Aiguilles, in C. R. des Collaborateurs. Bull. Serv. Carte géol. de France, N° 63, tome X, 1898, p. 735 (avec figures). 392 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin qui forment une série de massifs aux environs d’Abriès et qui appartiennent toutes au groupe des gabbros. Il lui a été possible d'observer ainsi une série de faits curieux qui peuvent se résumer comme suit : a) Les gabbros, qui constituent ici des masses énormes (Pelvas, Punta Gastaldi, Viso, etc.) traversées de filonnets d’albite et d’épi- dote, sont intimement liés aux serpentines dont il est souvent impossible de les séparer sur la carte. Aux gabbros et à leurs variétés sont associés en outre des variolites, des diabases, des ophites et des schistes serpentineux. b) Plusieurs des massifs de roches éruptives du Queyras ont une structure nettement anticlinale que le laminage de la roche éruptive rend très visible ; ce fait est particulièrement net dans la crète qui court de la brèche Bouchet au col de Malaure, et qui pré- sente plusieurs plis isoclinaux de roches vertes au milieu des schistes lustrés (fig. 2). Cette disposition a été figurée par l’un de nous en 1808. €) La plupart de ces massifs, et notamment ceux dont la dispo- ‘ sition anticlinale est visi- ble, sont séparés des schis- tes lustrés environnants par une assise plus ou moins épaisse (3 à 20 mè- tres) de marbres tabulai- res, parfois phylliteux (Pelvas, Bric-Bouchet, Médille, Taïllante, col Agnel, Valante) qui est, ainsi que l’avait déjà re- marqué Ch. Lory entre le Fig. 1. — Coupe relevée au sud de l'Echalp col Vieux et la Chalp (ou (Queyras). l'Echalp), fréquemment 6, Gabbros ; s, Serpentine ; lte, Marbres coupée d'intercalations cristallins avec intrusions de gabbros; répétées et de filonnets À, Eboulis ; uv, Carrière de marbre. de roches vertes ! (fig. r). E. 0. Point 2l,9{, Les gabbros, souvent totalement ou partiellement transformés en serpentine, forment donc une série de pointements anticlinaux, entourés de marbres phylliteux, au milieu des schistes lustrés. On remarque dans ces massifs les types suivants : 1. À la Taillante (près du lac Foréant) on observe plusieurs alternances de calcaires marbres et de gabbros laminés. pes *QUILIOU 99 SIMOQH ‘NA { SUNOUH H S91ISNI S9S149S ‘99 one) SIQEI “299 { Souquoduos Jo sorqqen ‘9 cs “(ouuoarpeit o19mquouj) sexAon()-jneH 91 SUEP ‘9INEIEI 2P [09 9[ 19 FOU2NO-OUA I AAJU9 99AIISGO UOISS999NS — ‘& "SL mn TS FRANCAISES ALPES » GEOLOGIE DES zoyon0f 2492.17 | 2AnTIPAT 9P 109 ‘TS'S | O'NN 1901 394 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin 1) Euphotide à diallage généralement plus ou moins ouralitisé ou épigénisé (trémolite, bastite, glaucophane), avec chlorite, épi- dote, albite secondaire et quartz (Villanova) ; 2) Des roches schisteuses à zoïsite, sphène, actinote, chlorite, trémolite, glaucophane, séricite, épidote, parfois pyritifères (Bric- Bouchet), résultant de la transformation des gabbros ; 3) Micaschiste à épidote, zoïsite, sphène, chlorite, séricite, orthose et quartz, provenant probablement de la recristallisation d’une roche éruptive. Les gabbros du Pelvas sont riches en filonnets de minéraux intéressants (anorthite, épidote, prehnite, zoïsite). Au col Péas, M. Zürcher a récolté de la serpentine compacte vert pâle, translucide sur les bords, dont l’aspect rappelle la jadéite. De ces observations, ainsi que de celles qui ont été faites au Mont-Genèvre (W. Kilian, in C.-R. Ac. Sc., 5 juillet 1897), on peut conclure : a) Que les roches basiques du Queyras et du Briançonnais sont interstratifiées dans la partie inférieure des schistes lustrés et ont été injectées dans certains bancs calcaires (marbres phylliteux) qui accompagnent ces schistes ; b) Que ces roches étaient déjà consolidées lorsqu'ont eu lieu les mouvements alpins qui ont plissé les nappes éruptives (ou les laccolithes), au même titre que les couches sédimentaires. Ces faits sont très favorables à l'opinion des géologues qui con- sidèrent comme provenant d’une venue mésozoïque les roches vertes du massif du Mont-Genèvre, du Viso et du Queyras ; mais ils pourraient toutefois se concilier sans grandes diflicultés avec l'hypothèse de M. Steinmann, qui a émis l’idée que les éruptions semblables des Grisons dataient de l’époque éocène t. Ce que l’on peut aflirmer néanmoins avec certitude, c’est que ces roches ne sont ni antérieures au Trias moyen, ni postérieures à l’Eocène supérieur, ce qu'atteste du reste nettement le fait que les micaschistes qui en dérivent par laminage (voir plus bas) se rencon- trent en galets, à l’état remanié, dans les brèches du Flysch (Oli- gocène), en plusieurs points du Briançonnais ; elles sont à fortiori sûrement antérieures au principal plissement alpin. Il est à remarquer que nulle part, dans les Alpes françaises, on ne connaît de filons qui puissent être considérés comme les chemi- nées d'émission de ces roches vertes. 1. STEINMANN. Geologische Beobachtungen in den Alpen. Ber. d. Naturf, Gesellsch. zu Freiburg i. B. vol. X, N°, 1897. M 1907 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 395 Dans la portion du Briançonnais connue sous le nom de « massif du Mont-Genèvre » il existe également des affleurements assez étendus de gabbros connus depuis longtemps et de réputa- tion classique. Quoique nous n’ayons rien d’important à ajouter à ce qui a été publié récemment sur les conditions de gisements et sur les relations des divers types éruptifs du Mont-Genèvre ! — dont une monographie détaillée offrirait sans doute beaucoup d'intérêt, — on trouvera plus bas la description micrographique (faite par M. Termier) d'accidents intéressants de l’euphotide de ce massif, d’après des échantillons prélevés par l’un de nous (M. Kilian) sur des blocs erratiques, à 1 kilomètre environ à l’ouest de l’Hospice du Mont-Genèvre. Voici les résultats de l’examen micrographique (fait par M. Termier) de quelques-uns des types dont il vient d’être question. a. — GABBROS MASSIFS Roche du mont Pelvas * (préparation No 282). — Gabbro décomposé (euphotide) (fig. 3). À l'œil nu : roche à grands cristaux de diallage à reflets _ métalliques, se détachant sur un fond feldspathique vert clair. Le microscope ne montre plus que quelques cristaux de diallage en voie d’ouralitisation (trémolite) et d’hydratation (bastite). La plus grande partie de la roche (jadis feldspathique), est devenue un fouillis de lamelles de chlorite et d’aiguilles de zoïsite. On 1. Coce et GREGoRY. The variolitic Rocks of Mont-Genèvre. Quart. Journ. Geol. Soc., mai 1890, t. XXI, p. 295. (La bibliographie antérieure du Mont- Genèvre se trouve très complètement indiquée dans cet ouvrage). — W. Kicrax. Sur un gisement de syénite dans le massif du Mont-Genèvre. C. R. Ac Se., 5 juillet 1897; C. R. des Collaborateurs du Serv. de la Carte géol. de France pour 1900. — P. Termier. Livret-Guide du Congrès géologique international, 1900. Excursion XIII*. 2. Le mont Pelvas (Paravas des Italiens) ou Bric- d'Urine est entièrement constitué, dans ses parties hautes, par une euphotide à grands eristaux de feldspaths blanes et belles lamelles de bronzite. Cette roche passe, par places, à une serpentine foncée et à des schistes serpentineux avec amiante soyeuse. En d’autres points, on voit l’euphotide transformée en une roche schisteuse d’un vert clair. De nombreux filonnets d’anorthite, d’épidote et de zoïsite avec prehnite traversent la roche. Sur le flanc méridional, le gabbro est nettement séparé de la masse des schistes lustrés par une bande de marbres phylliteux; une bande identique apparaît au nord de Pelvas, sous les éboulis. Le laccolithe éruptif du Pelvas de structure très FREE à celui du Viso se continue sur territoire italien. 396 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin aperçoit entre ces aiguilles un fond d’albite secondaire. Çà et là, un peu de quartz secondaire. La variété de zoïsite décrite en 1890 par M. Termier !, sous le nom de zoisite sans disper- sion, est particulièrement fré- quente dans les schistes prove- nant de la métasomatose des gabbros. On sait que cette zoï- site doit être appelée zoïsite ÿ, et qu'elle diffère de la zoïsite classique (zoisile x) par la posi- tion du plan des axes optiques et par le sens de la dispersion. Il convient, du reste, d'ajouter que des filonnets, traversant les roches vertes du Pelvas, con- Fig. 3. — Coupe du mont Pelvas tiennent de la prehnite incolore, (versant nord). de la zoïsite © et de l’épidote en ü, Gabbro et roches voisines (Prasi- grosses baguettes, et de l’'albite nites, ete.) ; lie, Marbres tabu- à 12 9/6 An. en beaux et non- laires ; L i lustrés. : ; Lt, Schistes lustrés Met else. >. Euphotide des blocs erratiques de Château-Queyras (pré- paration N° 260). — Roche d’un vert foncé à grands cristaux bronzés et quelques cristaux feldspathiques blancs ; çà et là, des mouches de pyrite. Au microscope, on reconnait un gabbro décomposé : agrégat de grands cristaux de diallage partiellement épigénisés par du glauco- phane. Interstices remplis par un agrégat pœcilitique de chlorite et d’épidote. Ces interstices correspondent vraisemblablement aux anciens feldspaths. Les blocs qui ont fourni cette roche viennent très probablement du col de Péas. 3. Euphotide altérée des blocs erratiques des environs de Guil- lestre (sortie du Queyras) (préparations N° 556 et 254). — Cette roche contient des enclaves assez volumineuses de glaucophanite formant des taches noires bien visibles sur les blocs erratiques (La Viste, près Guillestre). 1. Étude sur la constitution géolog. du massif de la Vanoise. Bult. de la Carte géolog de la France, N° 20, t. IL, p. 398. 2. Ces minéraux ont été étudiés par M. Termier (Bull. de la Soc. fran- çaise de Minéralogie, t. XXI et XXII). 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 397 La roche elle-même est un agrégat grenu de diallage ouralitisé, saussurite, hornblende brune et pyrite, avec veines et nids irrégu- liers de serpentine. Épidote et produits fibreux de transformation. La serpentine a donné naissance à de nombreux cristaux de horn- blende verte et à des aiguilles, parfois très longues, le plus souvent courtes et enchevêtrées, de trémolite. 4. Roche recueillie à Saint-Véran (Queyras) (préparation M 593). — Euphotide décomposée : veinules de calcite entourant des noyaux de serpentine fibreuse ou colloïde. Désignée dans le pays et exploitée comme marbre sous le nom d'Ophicalce. - 5. Parties noirûâtres, adélogènes, formant des sortes d'enclaves au milieu de l'euphotide du Mont-Genèvre (préparations N° 10, 17 et 20). — Échantillons prélevés par M. Kilian sur un bloc erratique de gabbro à grands cristaux, à 1 kil. de l’'Hospice, sur la route de Briançon. Gabbroporphyrite, c'est-à-dire forme hypo-abyssique du gabbro. Roche formée d’une pâte microlitique feldspathique arborisée englobant de grands cristaux corrodés de plagioclase. La pâte est holocristalline. Les fins microlithes de feldspath (andésine) sont dis- posés en rosettes, sphérolites, dendrites, etc. Entre eux, s’obser- vent des grains de zoïsite, plus rarement d'épidote, et d’autres de chlorite et de serpentine provenant les uns et les autres de la décomposition d’un pyroxène. Le plagioclase de première consoli- dation est en partie saussuritisé, c'est-à-dire épigénisé par la zoïsite et l’épidote : ce qui reste de matière feldspathique est du labrador relativement acide. Nombreux nids et nombreuses veinules d’épi- dote et de zoïsite. La plaque N° 20 montre de nombreux indices de laminage. Dans la même plaque, on voit une région où la pâte se serpentinise : elle est alors envahie par une matière fibreuse dis- posée en houppes, ‘et qui est probablement du chrysotile. 6. Même provenance (préparation N° 19).— Type ophitique de la gabbroporphyrite. On dirait un diabase. Lamelles très aplaties de feldspath andésine (en voie de saussuritisation) cimentées par de vastes plages de diallage aux trois quarts serpentinisé. Nom- breux nids d’épidote et de zoïisite. 7. Méme provenance (préparations N° 16 et 21). — Roches serpentinisées et zéolithisées, provenant sans doute de types analo- gues aux précédents. Une matière serpentineuse verdâtre, isotrope, parfois chargée de petits grains d’épidote, forme des sortes de len- 398 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin ülles, ou mieux des poupées aux contours arrondis. Ces poupées sont englobées dans un feutrage de zéolithes variées où apparaît parfois (plaque N° 16), comme un îlot, un témoin de la pâte à struc- ture arborisée des roches précédentes. La plaque N°21 montre des indices certains d’un violent laminage. Il y a de nombreux nids sphériques, remplis par de l’épidote et de la zoïsite. 8. Même provenance (préparation N° 1 1).— Serpentine isotrope renfermant des grains bruns de sphène et des grains noirs d’ilmé- nite, et aussi des fragments anguleux de feldspath ayant échappé à la destruction générale. Grains d’épidote et de zoïsite. Veinules d’albite et d’épidote. On a l’impression que ces préparations ont été prélevées non pas sur des enclaves de l’euphotide, mais sur une forme de bor- dure de cette même roche (« Grenzfacies »). Les structures porphyritiques et ophitiques sont tout à fait intéressantes et dans un état de conservation que l’on n’eût pas osé espérer. d'. — AUTRES ROCHES VOISINES DES GABBROS 9. Roche duù Chenaillet (préparation N° 575). — Diabase à structure sphérolitique. Cette roche a la composition chimique d'un gabbro très feldspathique dont le pyroxène est entièrement chloritisé. Le feldspath actuel est de l’andésine, mais il y a très certainement un peu de décalcification. 10. Roche du Chenaillet (préparation N° 582). — Diabase à ouralite. Cette roche ne diffère de la précédente que par un grain plus gros, une structure enchevèêtrée (et non sphérolitique), et une moindre décalcification. L'ouralite, qui épigénise le pyroxène ori- ginel, est elle-même en voie de transformation (chlorite). Ces deux roches, en somme, se rattachent au même magma gabbroïque, dont elles représentent des formes filoniennes ou hypo-aby ssiques. b. — GABBROS SCHISTEUX ET ALTÉRÉS Les types granitoides massifs des gabbros dont nous venons de donner quelques diagnoses passent manifestement, en une foule de points, à des roches laminées et schisteuses !, revêtant l’aspect 1. Les géologues italiens ont décrit en détails les types schisteux (serpen- ünoschistes, épidotites, zoïsitites, gastaldites, stéatitoschistes, prasinites, schistes lawsonitiques, amphibolites et chloritoschistes, etc., etc.) qui déri- 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 399 de schistes et de gneiss chloriteux, et dont l'examen microscopi- que seul permet de reconnaître la nature éruptive. La série de ces roches comprend des types intéressants résultant, selon toute vraisemblance, de la transformation de gabbros et de roches éruptives basiques. Ils ressemblent à ceux que les géologues italiens ont décrits, sauf le n° 256 (de Bobbio), qui est remarquable comme roche à zoïsite &. Il a semblé intéressant d’en étudier quelques échantillons collec- tionnés par l’un de nous (M. Kilian) et qui ont fourni à l’autre (M. Termier) les résultats suivants : 11. Échantillon du mont Pelvas (préparation N° 283). A l'œil nu, cette roche ressemble à un quartzite verdâtre mou- cheté de blanc. . Au microscope : gabbro décomposé, renfermant encore beau- coup de diallage, épidote, zoïsite et chlorite envahissant tout le reste de la roche. Cà et là, un fond d’albite secondaire. La zoïsite est de la variété 6. 12. Roche du mont Pelvas, accompagnant les gabbros (pré- paration N° 275). A l’œil nu : roche d’un vert clair, à éléments non distincts, d'aspect fibreux. Au microscope : roche schisteuse à chlorite, zoïsite et sphène. Un peu d’actinote. Origine incertaine, probablement roche éruptive décomposée. 13. Id. (préparation N° 27305). — Roche plus compacte, à grains très fins, formés de zoïsite, chlorite, actinote et sphène. 14. Roche de Villanova (Piémont) (préparation N° 26%). A l'œil nu : apparence d’un schiste chloriteux vert, moucheté de taches grisâtres. Au microscope : roche à actinote, chlorite, zoïsite, épidote, albite et sphène. Résulte de la transformation d’une roche basique. La roche de Villanova est également associée à des serpentines et en relation avec les schistes lustrés. 15 ÆEchantillon de même provenance (Villanova) (préparation N° 264%). — Roche analogue et de même origine : grenat, chlorite, vent par métamorphisme des roches vertes (gabbros et diabases) intercalées dans les schistes lustrés. Voir les travaux de MM. Novarese (Boll. R. Com. geol., 1895, N° 2), Franchi, etc. 400 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin actinote, albite, quartz. La chlorite est ici notablement biréfrin- gente. Type intéressant; sans doute gabbro transformé. Cette roche est d’un vert foncé et un peu schisteuse à l’œil nu. 17. Roche associée aux gabbros du Bric-Bouchet (préparation N° 265). — Fouillis d’aiguilles d’actinote, extrémement fines, avec grains d'épidote très nombreux et quelques grains de sphène. Probablement même origine que la suivante (N° 284). 18. Roche du Bric-Bouchet (préparation No 28%). À l'œil nu : roche d’un vert foncé, à éléments peu distincts, légè- rement schisteuse, avec filonnets d’un vert plus clair, jaunâtre. Au microscope, on reconnaît: épidote, glaucophane, chlorite, un peu de sphène. Fond général d’albite secondaire. C’est proba- blement une roche éruptive basique, entièrement recristallisée. 19. Echantillon recueilli en amont de Bobbio (Piémont) (pré- paration N° 256). — Roche schisteuse formée, pour la plus grande partie, de zoïsite $ et d’albite, avec un feutrage plus ou moins serré de lamelles de trémolite et une petite quantité de séricite. La zoïsite, qui est du type spécial dont il a été parlé plus haut, contient quelques grains de zoïsite ordinaire et des grains très rares d'épidote. L’albite est irrégulièrement répartie. C’est elle qui forme les taches blanches, bien visibles dans la cassure de la roche. La densité moyenne de la roche est d'environ 2.85. A remarquer l'absence absolue du quartz. C’est un type très curieux de gabbro (ou de roche analogue aux gabbros) entièrement recristallisé. 20. Roche recueillie au Bric-Bouchet, accompagnant les gab- bros (préparation N° 27g). — Schiste soyeux, très gaufré, d’un blanc verdâtre luisant, au toucher gras. Au microscope : schiste pyritifère à zones alternées de chlorite et de trémolite. Dans toutes les zones, traînées de petits sphènes. Dans les zones de trémolite, surtout dans leur partie médiane, il y a un feutrage de séricite. Tous les cristaux sont excessivement fins. Ce type de roche verte est peu commun. 21. Roche de même provenance (préparation N° 263). — Ser- pentine d’un vert foncé ; provient sans doute de la transformation d’un gabbro. 22. Echantillon de même origine (préparation N° 2631is). — Roche à épidote, chlorite, albite et glaucophane. 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 4OT 23. Roche verte recueillie dans le Glaciaire, près Virieu-le- Grand (Ain) (préparation N° 634). — Roche entièrement trans- formée en un fouillis cristallisé de glaucophane, chlorite, zoïsite et sphène. Provient sans nul doute du Permien métamorphique de la Haute- Maurienne ou de la Haute-Tarentaise, plus probablement de la Haute-Maurienne (Villarodin ou Entre-Deux-Eaux). C’est un bon échantillon minéralogique de glaucophane et un bon échantillon pétrographique de prasinite. 24. Schiste serpentineux de Combe-Brémond, vallée de l'Ubaye (Basses-Alpes) (préparation N° 592). — Poussière de sphène et d’épidote et feutrage d'’aiguilles orientées de mica blanc. Ces aiguilles sont excessivement fines. Peu de quartz visible, en plages très petites et très confuses. Un peu (très peu) de serpentine. Schiste métamorphique associé aux schistes lustrés et aux serpentines. Il convient d'étudier, à la suite des gabbros et de leurs modifi- cations, des micaschistes et des roches cristallines d'un type spécial dont l’âge et la nature ont été pendant quelque temps un problème et dont les rapports avec les euphotides et les « roches vertes » n'ont été précisés que depuis peu. En 1898, l’un de nous (M. Kilian) découvrit à l’Alpet et près du col de la Lauze {, au nord du col du Mont-Genèvre, des schistes cristallins d’une nature parti- culière, qu'il n’hésita pas à reconnaître comme étant identiques à une partie des roches dont M. Termier ? avait, peu auparavant, signalé l’existence dans les massifs de l’'Eychauda et de Serre- Chevalier, et que ce savant était porté à considérer comme des micaschistes d'âge tertiaire. Au col de la Lauze, ces schistes se montrent interstratifiés dans des schistes calcaires fort analogues aux schistes lustrés et accompagnés de marbres cristallins tabu- laires et bleutés, identiques à ceux qui existaient dans le voisinage des affleurements de serpentines et de gabbros. A la suite de ces constatations, l’un de nous (M. Kilian) écrivait, en 1899 (Compte- Rendu des Collaborateurs in Bull. Serv. Carte géol. de France, N° 69, t. X, p. 105) : « Ce sont des amygdales de roches éruptives 1. C.R. Ac. Sc., 7 nov. 1898. 2. TERMIER. Sur les terrains cristallins d’âge probablement tertiaire des montagnes de l’'Eychauda, etc. B. S. G. F., (3), XXII, p. 572 (189). 12 Octobre 1901. — T. rœr. Bull. Soc. Géol. Fr, — 26 {02 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin laminées, exactement comme le sont les intercalations de « roches vertes » (schistes à actinote, zoïsite, etc..., prasinites et amphibo- lites) du Queyras et du Piémont. Les masses éruptives existaient avant le plissement principal de la région et ce n’est que par le dynamométamorphisme qu'elles ont été transformées en schistes. » Des schistes analogues se continuent dans le vallon de la Baisse ! jusqu’au pied ouest du Chaberton, où ils constituent un bon type de prasinite. — Peu après, M. Kilian découvrit, au sud de Brian- con (au col Tronchet et à Villargaudin) deux autres affleure- ments de ces micaschistes, toujours interstratifiés dans les schistes lustrés et en rapport avec des marbres cristallins. Au col Tron- chet, les micaschistes passent même par places à une véritable variolite étirée dont la structure est encore bien reconnaissable. On verra par les diagnoses qui suivent et qui sont dues à la compétence spéciale de M. Termier, que l'examen microscopique a confirmé, en grande partie, les conclusions énoncées plus haut par M. Kilian. L'identité des roches cristallines du col Tronchet et des roches cristallines du Mont-Genèvre peut être considérée comme prouvée ; les schistes cristallins de l’Alpet, du col Tronchet, de Prorel, de Serre-Chevalier ?, de l'Eychauda, sont de l’avis même de M. Termier, soit des schistes argileux métamorphisés par l’in- trusion des gabbros, soit des gabbros recristallisés. Les gabbros ne sont abondants qu'au Mont-Genèvre, au Chaberton, et au col Tronchet ; dans les autres gisements cristallins, ils sont beaucoup plus rares, et, ce qui domine, c’est leur auréole, formée de schistes argileux modifiés et transformés en cornéennes (hornfels) par l’in- trusion éruptive voisine, puis laminés après ledit métamorphisme. Voici les diagnoses de quelques-unes de ces roches, établies par M. Termier : 25. Roche dure d'aspect compact, associée aux micaschistes de l’'Alpet (préparations N° 257 à 244). — C'est une cornéenne nettement orientée, schisteuse, à cassure esquilleuse et à esquilles translucides. Le microscope y montre des lits quartzeux, et d’autres quartzo-sériciteux ou quartzo-chloriteux, alternant ensemble. Le grain est très fin. Il n'y a plus de feldspath dans la roche ; mais 1. MM. Cole et Gregory avaient signalé, sous le nom de Greenstone Schists, des roches analogues affleurant dans le massif du Chaberton. 2, M. Termier a toutefois excepté de cette conclusion un lambeau de gneiss analogue aux gneiss de la Levanna qu’il considère comme anté- triasique. Ce lambeau affleure à la montagne de Serre-Chevalier, à l’ouest de Briançon. 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 403 il se pourrait fort bien qu'une partie du mica blanc résultât de l’écrasement, du laminage et de la transformation chimique d'un feldspath alcalin originel. Il y a même des raisons pour qu'il en soit ainsi : Mais ces raisons ne sont pas décisives. M. Termier ajoute : « Je ne crois pas qu'une semblable roche « ait jamais été une roche éruptive. Elle est trop quartzeuse pour « cela. Maïs je crois qu’il faut l’attribuer à un schiste argileux « originel modifié et transformé en cornéenne (hornfels) par « l’intrusion voisine d’une roche éruptive (laquelle peut très bien « avoir été basique) puis laminé encore après ledit métamor- « phisme. » 26. Roche verte, vallon de la Baisse, pied ouest de Chaberton (préparation N° 228). — Prasinite à glaucophane. Agrégat schis- teux, orienté, de glaucophane, épidote, chlorite, sphène, albite, quartz. Le grain est très fin. Probablement gabbro laminé et recristallisé après laminage. Ce type est fréquent dans les pietre verdi italiennes. On le retrouve à la Vanoise, parmi les roches que j'ai (M. Termier) appelées amphi- bolites à glaucophane et glaucophanites. Ici nous avons un type parfait de prasinite. 27. Micaschistes du col Tronchet (préparations Nes 229, 230, 231). — Schistes à quartz, chlorite et mica blanc, largement cristallisé, sans feldspath. Ce type est banal. On le rencontre fré- quemment à Serre-Chevalier. M. Termier ajoute : « C’est de ces « schistes là, ou de schistes analogues que je ne crois pas qu'on « puisse dire qu’ils ont été jadis des roches éruptives. Or ces « schistes forment la grande masse des lambeaux cristallins de « Serre-Chevalier et de l’'Eychauda ; ceci vous explique que je me « sois élevé contre votre idée d'attribuer {ous ces terrains cris- « tallins à des roches éruptives laminées. Mais je crois de plus « en plus que ce sont des schistes argileux rendus cristallins, « avant tout métamorphisme dynamique, par l'influence calori- « fique et chimique émanée d’une roche profonde. » 28. Micaschiste du col Tronchet (préparations N° 225, 226, 227). — Même roche que ci-dessus, mais d’un grain plus fin, quartz, chlorite, séricite, petits sphènes, petits grains d’ilménite. 29. Micaschistes de Villargaudin (préparations N° 245 à 248). — Schistes quartzo-sériciteux à grain très fin, sans chlorite ni feldspath (sauf de très petits et très rares grains d’albite). C’est le type Le plus répandu dans le lambeau Prorel-Serre-Chevalier. On le retrouve dans tous les pays de micaschistes, quelle que soit l’origine 404 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin de la cristallinité : mais la ressemblance, quant à la structure, est surtout avec des cornéennes (hornkieselschiefer), sauf que dans les cornéennes classiques qui proviennent de l'influence du granite, le mica noir joue un rôle prépondérant. € Il y a lieu d’insister sur la faible teneur de ces micaschistes en fer et magnésie. Ceci ne prouve point que la cristallinité ne soit pas attribuable à l'influence du gabbro. Il a pu n’y avoir ici qu’une influence calorifique, et d’ailleurs chacun sait que les roches basi- ques peuvent être accompagnées de fumerolles riches en silicium et en métaux alcalins. » 30. Variolite dans les micaschistes du col Tronchet. M. Termier écrit au sujet de cette roche : « Je ne doute pas qu'il ne s'agisse ici de la variolite de la Durance ; maïs elle est fort altérée. C’est un agrégat confus de petits prismes d’épidote, de lamelles de chlorite et de grains de quartz entourant des globules presque entièrement quartzifères où l’on ne trouve rien du sphéro- lite originel, si ce n’est la forme sphérique. « L’échantillon n'en est pas moins intéressant. Il prouve, je crois, sans conteste possible, l'identité des roches cristallines du col Tronchet et des roches cristallines du Mont-Genèvre. «€ En rapprochant cette donnée de celles que j'ai déjà, j'arrive à cette idée que les schistes cristallins de l’Alpet, du col Tronchet, de Prorel, de Serre-Chevalier, de l’'Eychauda sont, pour la plupart des schistes argileux métamorphisés par l’intrusion des gabbros. Le gabbro lui-même apparaîtrait au Mont-Genèvre, au Chaberton, au col Tronchet : dans les autres gisements cristallins, il serait beaucoup plus rare et ce que nous voyons ne serait guère que son auréole. » C. — Contributions à la connaissance des schistes lustrés: du Briançonnais et du Queyras Les schistes lustrés (calcschistes, schistes calcaréo-talqueux) qui ont, dans les Alpes du Piémont, un développement si considérable, pénètrent sur le territoire français au Mont-Genèvre et dans le sud du Briançonnais, où ils occupent la plus grande partie du Haut- Queyras; ils ont une teinte grisâtre, noirâtre, parfois brunâtre, un aspect à la fois fibreux et lustré, et se montrent formés d’une association de calcite et de quartz avec mica blanc, chlorite, ilmé- nite, rutile, etc. De petits bancs (dalles) de calcaires cristallins noirâtres y sont intercalés à plusieurs niveaux. Leur épaisseur, 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 405 assurément énorme, semble plus considérable encore par suite de la structure isoclinale qui règne dans la région. — Ils renferment, près de Césanne, des bancs siliceux à Radiolaires et des schistes versicolores. | Il semble possible d'y distinguer deux subdivisions ; c’est ainsi que les schistes lustrés du Gondran, près Briançon, présentent, comme l’un de nous l’a signalé il y a quelques années déjà !, deux types bien distincts, quoiqu'il soit presqu'impossible de les déli- miter rigoureusement. a) Des schistes calcaires, avec bancs de calcaires parfois siliceux, zones lie-de-vin et verdâtres, rappelant les schistes lustrés de Césanne avec leurs accidents siliceux à Radiolaires. À Maurin, dans la vallée de l'Ubaye, comme à Césanne et au Mont-Genèvre (Rocher de la Perdrix, près du Gondran, Rocher du Renard, Rocher des Douaniers, près du col Bousson), on voit en outre apparaître, dans les schistes lustrés inférieurs, au voisinage de la serpentine, des schistes calcarifères rouges et verts, parfois injectés de serpentine, ou influencés par son voisinage, et alternant avec des lits de calcaires phylliteux, souvent marbreux. À cette portion inférieure des schistes lustrés, nous croyons également devoir rattacher un ensemble de schistes calcaires gris, de marbres zonés, de bancs quartzeux versicolores, avoisinant les serpentines et les calcaires triasiques sous-jacents, dont l’âge exact est incertain, et qui ont été désignés par une teinte spéciale et le symbole T sur la feuille Briançon de la carte géologique de France. C'est encore au complexe des schistes lustrés qu'appartiennent des assises de marbres cristallins zonés qui entourent les gabbros du mont Pelvas, de Taillante, de Médille, etc. On les observe également au contact de la serpentine et des gabbros, à la Chalp, dans le Haut-Queyras, où Ch. Lory les avait déjà remarqués et où ils sont exploités dans une carrière. Ils existent aussi entre le Bric-Bouchet et Le col de Malaure (fig. 2). On les retrouve au col Tronchet, près Brunissard, où ils séparent les schistes lustrés typiques d’une bande de variolite laminée et de micaschistes d’origine éruptive (v. plus haut). Enfin, au nord du Mont-Genèvre, au col de la Lauze, près de l’Alpet, les mêmes marbres se montrent au milieu des schistes, dans le voisinage même d’intercalations de micaschistes dérivant des roches éruptives basiques. Dans tous ces gisements, les caractères de ces marbres zonés 1. C. R. Ac. Sc., 5 juillet 1897. — W. KicrAw. Sur un gisement de syénite dans le massif du Mont-Genèvre (Hautes-Alpes). 406 WW. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin restent les mêmes : ce sont des marbres tabulaires, et des calcaires: phylliteux formés de calcite cristalline avec rutile, séricite, un peu de quartz, se débitant en dalles d’un aspect cireux, et présentant des colorations variées, souvent grises ou Jaunâtres. Dans le Queyras, ils affleurent dans les anticlinaux dont le noyau est occupé par les gabbros au Bric-Bouchet, au Pelvas et près de la Chalp (exploitations) (fig. r et 2); sur le flanc de la montagne de Rochebrune, ces couches sont plus schisteuses et prennent un faciès très analogue à celui des schistes lustrés. Elles supportent là les calcaires triasiques par suite d’un renversement des couches dû au refoulement vers l’est d’un vaste anticlinal tria- sique. Dans la Haute-Ubaye, M. Marcel Bertrand et l’un de nous les ont observées à la base des schistes lustrés. b) La portion supérieure de l'étage schisteux est formée de schistes plus fins, plus argileux, avec bancs de grès micacés et lits de calcaire siliceux à patine brune et scoriacée, présentant une grande analogie avec le Flysch, dont M. Termier est tenté de les rapprocher. Ces schistes forment la partie ouest du plateau de Gondran. On les retrouve à Villargaudin, près de Château-Queyras, où ils contrastent également avec les schistes lustrés proprement dits, plus calcaires, du ravin de Soulier et du Haut-Queyras. Ils sont peut-être tertiaires, mais rien, en dehors de leur aspect litho- logique, ne permet de le prouver; (leur aspect est identique à celui du Flysch de Prorel » ! : schistes satinés, avec rares interca- lations calcaires et nombreux lits de quartzites bruns. Malgré ces caractères assez spéciaux, il ne semble pas cependant possible de tracer une limite précise entre ces schistes et les schistes lustrés ordinaires que nous venons de décrire. Cette division supérieure mérite de faire l’objet d’études appro- fondies. La position stratigraphique de l’ensemble schisteux qui vient d’être décrit a donné lieu à de longues discussions ?. 1. TERMIER in Notice Feuille Briançon. Carte géol. de France, 1900. 2. Les schistes lustrés (calcschistes) de la zone du Piémont ont été tour à tour placés dans le Trias (Ch. Lory), dans le Paléozoïque et le Prépaléozoïque [MM. Gastaldi, Zaccagna. (Ils ont été décrits comme prépaléozoïques par M. Zaccagna, et seulement comme précarbonifères par M. Franchi, qui a du reste depuis lors modifié son opinion. Puis M. Novarese a admis la possibilité de trouver des fossiles dans les lentilles calcaires intercalées dans les calc- schistes «schistes lustrés » de la vallée du Pellice), Potier, M. Bertrand, Kilian, Termier, Gregory], puis considérés de nouveau comme triasiques et même peut-être liasiques, par M. Marcel Bertrand, alors que M. Steinmann va, dans 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 407 Il résulte des observations de l’un de nous que les schistes lustrés du Queyras !, avec leur cortège de marbres tabulaires et de roches les Grisons, jusqu’à en faire partiellement du Tertiaire, et que les seuls fossiles qui y aient été rencontrés jusqu’à ces dernières années sont des Radio- laires sans signification stratigraphique précise, découverts à Césanne, par M. Parona. Après avoir, en 1892, avec MM. Zaccagna, M. Bertrand, Potier, ete, décrit les schistes lustrés de la Haute-Ubaye comme antérieurs au Carbonifère, j’ai longtemps hésité à admettre que les conclusions auxquelles s’est arrêté en dernier lieu, et à la suite de recherches minutieuses, M. Marcel Bertrand, s’appliquassent aux schistes du Queyras et de la Haute-Ubaye. Jusqu'en 1897, je croyais en effet que l’âge triasico-liasique attribué par ce dernier aux schistes lustrés ne devait être admis comme certain que pour une partie des couches ainsi désignées, et j’admettais, notamment pour les types du Queyras, la possibilité d’une ancienneté plus grande. Je me suis fait depuis un devoir et un plaisir de déclarer que les résultats consignés ci-après m'ont définitive- meni rallié à la manière de voir de M. M. Bertrand, et que je considère comme acquise la preuve que les schistes lustrés de la Hte-Ubaye, aussi bien que ceux du Queyras, du Mont-Genèvre, de la Maurienne et de la Tarentaise sont posté- rieurs au Trias inférieur et, probablement, pour une grande partie liasiques. Il est utile de remarquer que cette interprétation de l’âge des schistes lustrés, tout en se rapprochant beaucoup de celle à laquelle s'était arrêté Ch. Lory, en diffère cependant profondément en ce sens que, pour ce dernier, les schistes lustrés étant triasiques, étaient considérés comme plus anciens que les calcaires magnésiens de Rochebrune, Château-Queyras et Briançon, qu'il mettait dans le Lias, tandis que, dans notre manière de voir, les schistes lustrés sont plus récents que les calcaires mentionnés plus haut, ces derniers devant incontestablement, ainsi qu'une grande partie des cal- caires du Briançonnais, être attribués au Trias. Les schistes lustrés (caleschistes) ont fait l’objet de la part de nos confrères italiens de nombreuses publications parmi lesquelles il convient de citer celles de MM. Gastaldi, Zaccagna, Mattirolo, Portis, Franchi et G. de Stefano, Stella, Virgilio. M. Franchi notamment, a publié en 1898 (Bull. R. Comit. geol. d’Italia) un très intéressant historique des diverses opinions émises depuis le milieu du siècle au sujet de cette importante formation. Nous renvoyons le lecteur à son mémoire ainsi qu'aux résultats nouveaux qu’il a apportés en faveur de l’attri- bution de ces schistes au Trias et au Lias. M. Franchi a découvert en Italie, dans les schistes lustrés et dans les calcaires qui leur sont subordonnés en un certain nombre de points, des fossiles qui rendent leur àge mésozoïque incon- testable. D’après les détails précieux recueillis par ce savant, beaucoup de ces faunes sont triasiques, notamment celles qu'ont fournies les calcaires auxquels les schistes lustrés passent insensiblement par la base. Dans les schistes eux-mêmes, M. Franchi signale des lentilles de brèches qui rappellent nos brèches liasiques (brèches du Télégraphe); il mentionne aussi des schistes à Bélemnites; de-sorte qu'il est probable qu’une notable portion des schistes lustrés appartient au Lias. (FrANcur. Sull eta mesozoïca della Zona delle pietre verdi nelle Alpi occi- dentali. Boll. del R. Comitato geol. d'Italia, 1898-1900). W. Krzran. 1. Bull. Serv. Carte géol. de France, N° 63, t. X, p. 135, 1898-1899. 408 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin vertes, ont, à l’ouest, comme substratum, les calcaires dolomitiques dits «calcaires à Gyroporelles » du Trias ! (sous lesquels ils semblent souvent s’enfoncer par l'effet de dislocations que nous avons décrites avec M. Zürcher), alors qu à = S. z . ie DRE l’est (vallée du Pellice, Haute- ù . D ? _ Gi ornée Ubaye), ils vont s'appuyer nee sur un système de grès, de CERN S : quartzites et de schistes Moines & : o : . (gneiss et micaschistes des Italiens) probablement per- mo-carbonifères et compre- nant peut-être aussi les quart- À \ zites du Trias inférieur. Fig. 4. — Coupe relevée au sud-est agi aa . 22 oies Qnares, ESLATEMArqUerEnOUNE 3 EE que, partout où ils existent, Ct-h, Calcaires triasiques ; G-t*, Gypses I © histeslle ee triasiques ; lt, Schistes lustrés. CÉNEAS SE de Este Le (a) du type classique succèdent immédiatement aux cargneules ou aux calcaires triasiques ? sans interposition de marbres jurassiques supérieurs ; ce fait est parti- culièrement net à Château-Queyras où les rapports des schistes et des calcaires sont faciles à étudier (v. C. R. des collaborateurs, pour 1897, in Bull. Serv. carte géolog., t. X, n° 63 (1898) ; note de MM. Kilian et Zürcher). Il en est de même dans le Briançonnais, où quand ils apparaïssent, les autres faciès (Trias supérieur, Lias, Malm et marbres EJ de la feuille Briançon de la Carte géologique de France), semblent s’évanouir, € comme si le faciès « schistes 1. Dans les environs de Château-Queyras, la succession des assises est la suivante, de bas en haut (fig. 4): . Quartzites du Trias inférieur. . Mince assise de cargneules et de calcaires phylliteux. . Calcaires triasiques du type ordinaire (puissants). . Gypses. Schistes lustrés du type normal avec bancs marbreux. 6. Schistes lustrés supérieurs de Villargaudin. Pour les environs de Château-Queyras, consulter en outre : M. BERTRAND. B.S.G.F., (3), XXI, p. 154, 1894. — W. Kicran et P. Termier. Sur quelques roches éruptives des Alpes françaises. B. S. G. F., (3), XXIIL, 1895, p. 400. — W. Kizran et Ph. ZürcHer. C. R. Collab. Serv. carte géol. de France, in Bull. Sere. Carte géol. de France, N° 63, t. X, 1898, p. 144. — W. Kizran. Id., id., P. 135. 2. Près de Maurin (Basses-Alpes), dans le vallon de Mary (côté sud), au col Girardin, etc., on voit très bien la partie supérieure des calcaires tria- siques prendre une structure schisteuse et passer insensiblement aux schistes lustrés. QE © D 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 409 lustrés » s’étendait à toute la série sédimentaire, depuis le Trias moyen jusqu’à l'Oligocène » !. La conclusion qui s'impose est de considérer les schistes lustrés comme représentant tout au moins le Trias supérieur et le Lias, sur- tout si l’on considère que l'on peut voir en certains points de nos Alpes (Bonneval-les-Bains, Moutiers en Tarentaise) des assises incontestablement liasiques prendre le faciès « lustré » et la struc- ture des schistes du Queyras. Les laccolithes de roches vertes (gabbros, etc.), les marbres tabulaires et phylliteux et les schistes siliceux versicolores appartiennent à la base de ce complexe schis- teux, ainsi que le montre leur présence constante dans l’axe des anticlinaux. Voici quelques analyses micrographiques ? se rapportant aux schistes lustrés et à leur cortège de marbres, de schistes siliceux, etc. a. — SCHISTES ET COUCHES DIVERSES INTERCALÉES DANS LES SCHISTES 1. À Césanne, des bancs siliceux, sortes de quartzites à ciment calcaire, sont intercalés dans ces schistes sur le chemin de Bousson. Nous en avons fait faire plusieurs préparations (n° 594, 589, 600) qui montrent au microscope une association de plages cristallines de quartz et de calcite. Cette dernière domine parfois et forme des filonnets. Dans plusieurs échantillons (n° G. 602, G. 600, 582, etc.) on distingue, malgré la cristallinité, des traces de structure orga- nique sous la forme d’une série de glomérules et de petites taches circulaires. A l’œil nu : roche schisteuse à surface lustrée, verte ou lie-de- vin : tranche d’un brun grisätre, ou noirâtre, d'aspect subcristal- lin, avec mouchetures de chalcopyrite et de malachite. Ces intercalations, malgré leur teneur en silice, font efferves- cence avec les acides. On sait que c’est dans des bancs analogues, affleurant également près de Césanne, que M. Parona a découvert une faune de Radio- laires dont il a fait connaître les principales formes. Malgré un examen attentif nous n'avons pu, dans nos échantillons, rien découvrir qui rappelle des Radiolaires. 2. Echantillon prélevé dans le voisinage de la serpentine, près de Césanne(ltalie) sur le chemin de Bousson (préparation No 582). 1. Kicran et TermiEr. Notice de la feuille Briançon de la Carte géol., de France, 1901. ns 2. Dues pour la plupart à M. Termier. 4xo W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin — Schiste lie-de-vin, ou verdâtre par place, faisant effervescence sur la tranche ; le microscope montre des grains de quartzite et de quartz et permet en outre de reconnaître une structure organi- que bien certaine : suite de canaux et de lacunes pouvant provenir d'un Polypier ou d’un Hydrozoaire et assez analogues à ce que l’on observe dans les galets de Jurassique supérieur rose renfer- més dans les conglomérats éogènes du massif de l’Eychauda. Des matières amorphes verdâtres, rougeâtres et noirâtres, sont dissé- minées dans la roche. 3. Intercalation siliceuse dans les schistes lustrés. Césanne (préparations N° 554 et 556). — Quartzite fin, avec un peu d’orthose et de nombreux filonnets de calcite. Nids de calcite, souvent rhomboédriques, au milieu de la masse quartzeuse. 4. Id. (préparation N° 577). — Marbre avec plusieurs noyaux ou galets d’une serpentine à péridot. 5. Id. Calcschiste de Césanne (préparation N° G. 589). — Roche rubannée, faisant effervescence avec les acides, mais présen- tant des zones siliceuses et des mouches de chalcopyrite et de malachite. — Teinte d’un brun grisätre sur la tranche ; verte et lie-de-vin sur les surfaces schisteuses, qui sont lustrées. Au microscope : mosaïque de quartz fin et de calcite cristalline, cette dernière formant des filonnets. Un peu de pyrite. — Zones phylliteuses excessivement minces. Traces de structure organique. 6. Schistes de Césanne (préparation N° 599). — Cette roche est formée de quartz en petits grains irréguliers parmi lesquels on trouve, formant région, des grains beaucoup plus gros. La roche est criblée d’une multitude de grains d’oligiste opaques ou transpa- rents (dans ce cas de couleur brune), qui sont souvent disposés en files dans un cristal de quartz. Quelques lamelles clairsemées de chlorite verte polychroïque ; puis dans les cassures, hématite et produits ferrugineux. — (Diagnose de M. Dupare). ; 7. Intercalations dans les schistes lustrés. Césanne (Italie). Roche verte et violette (préparation N° G. 600). — Fait efferves- cence avec les acides. Au microscope : roche très cristalline à grandes plages et grumeaux de calcite. On distingue des éraces d'organismes (Polypiers ?) sous la forme de glomérules qui parais- sent représenter des loges circulaires; au milieu une sorte de réseau visible malgré la cristallinité (recristallisation) de l’ensem- ble. Ces traces organiques rappellent celles qui s’observent dans certains marbres roses du Jurassique supérieur briançonnais,. 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES BIT 8. Schiste de Césanne (vert et violet) (préparation N° G. 602). — Quartzite recristallisé, quartz grenu fin ; zones plus grossières ; zones souillées de produits ferrugineux. Très peu de chlorite, un peu de calcite. À remarquer l’absence de séricite. Traces d'une structure organique analogue à celle de la préparation précédente. 9. Schiste de Villanova (Piémont) (préparation N° 250). — Schiste lustré, type banal. Quartz, calcite, mica blanc, chlorite, ilménite, rutile, limonite secondaire. A l’œil nu, ce sont des schistes noirâtres assez feuilletés, lui- sants et satinés. Ils sont ici, moins calcaires et plus feuilletés que ne le sont d'ordinaire les schistes lustrés typiques. 10. L'un de nous a fait connaître, en 1895 !, l’analyse microgra- phique, faite par M. Michel-Lévy, des schistes lustrés de Château- Queyras. Dans cette localité, en effet, des bancs de quartzites sont intercalés dans ces schistes lustrés. M. Termier y a reconnu beaucoup de sidérose et de nombreuses aiguilles de-séricite sans orientation dominante. 11. Calcaire intercalé dans les schistes lustrés. Château- Queyras (préparation N° 594). — Calcaire cristallin à grains fins, noirâtre. Au microscope : mosaïque de calcite et de quartz. Type ordinaire des calcaires intercalés dans les schistes lustrés : beaucoup de calcite avec un peu de quartz et de pyrite. Ce type est très fréquent, d’après M. Termier, dans les schistes lustrés de Savoie. 12. Calcaire cristallin en bancs dans les schistes lustrés de Chateau-Queyras (échantillon N° 527). — Teinte d’un gris noirâtre avec zones colorées en brun par la limonite. Ce calcaire est légèrement schisteux ; il fait effervescence avec l’acide chlorhy- drique. 13. Schiste lustré du col de Malrif (échantillon D. 5701). — Schiste gris, luisant et satiné ; fait effervescence avec les acides. 14. Schistes lustrés pris sur la route contournant le fort Quey-- ras, sur la rive gauche du Guil. — Cette roche est beaucoup moins satinée et beaucoup plus calcaire. C’est un calcaire schisteux noi- râtre faisant vive effervescence avec l’acide chlorhydrique. 15. Schistes lustrés de la Combe de Soulier (Queyras). — Fait effervescence avec l'acide chlorhydrique. Certains bancs sont plutôt des marbres schisteux formés de fines strates de calcite PIS NC TG) ECUIL ip 407 412 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin cristalline, séparées par des lits de séricite qui donnent à la tranche de cette roche un faux aspect gneissique. La couleur est d’un gris noirâtre avec bandes plus claires sur la tranche, correspon- dant aux lits de calcite. Les lames de séricite sont bien visibles sur les surfaces de stratification qui ont un aspect satiné. La roche se débite en dalles, et ne rappelle en rien les schistes du Goudran. 16. Aux environs de Château-Queyras, près du hameau de Paquier, ainsi qu'à Villargaudin, affleurent également des schistes lustrés d’un type spécial, différant des schistes lustrés typiques de Soulier et de Château-Queyras, et que nous considérons comme formant un groupe de schistes lustrés supérieurs (v. plus haut), plus récents que les précédents. Nous croyons intéressant de reproduire ici, à titre de compa- raison, le résultat de l'examen qu'a bien voulu faire M. le Profes- seur Duparc d'échantillons de schistes lustrés recueillis par l’un de nous à Maurin (Basses-Alpes). 17. Schistes lustrés de Maurin (Ubaye) (préparation N° 5 75). — Cette roche est essentiellement formée de calcite et de quartz. On y trouve cependant un peu d’orthose et d’oligoclase, puis des aiguilles de rutile. Le quartz est en grains détritiques ainsi que l’orthose. L’oligoclase est très rare. La calcite, élément principal, forme de gros grains à clivages p (xoï1r) nets, quelquefois mâclés selon b!, qui semblent mouler les autres éléments. — (Diagnose de M. Duparc).’ 18. D'autres préparations de ces schistes de Maurin, examinées par M. Termier, montrent toujours du quartz et de la calcite en agrégat très-cristallin, avec orthose ou albite et un feldspath triclinique très-probablement développé sur place. Le ciment est calcaire : on remarque des matières charbonneuses ou ferrugi- neuses noires. La roche fait penser à une arkose ou à un schiste granulitisé. 19. Calcaire triasique schisteux de Combe-Brémond, vallée de l'Ubaye (échantillon N° 615). — Ce calcaire, très gaufré et « plissoté », appartient au complexe des schistes lustrés ; ilest fin, subcristallin, d’un gris bleuâtre, à cassure esquilleuse. La surface altérée présente des lits en relief qui dessinent nettement des petits plis de détail. — (Diagnose de M. Termier). 20. Schistes lustrés de Saint-Véran (Hautes-Alpes) recueillis dans le voisinage de la serpentine (préparation N° 275). — 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 413 M. Michel-Lévy a examiné des préparations de cette roche. Voici la diagnose qu’il nous en a donnée : Beaux micaschistes ou schistes micacés, à quartz très grenu, en mosaïque, à phyllites bien formées en grosses fibres (mica noir, mica blanc); les zones quartzeuses avec un peu de chlorite. Type X de la carte géologique de France. 21. Schiste lustré (liasique) de Bourg-Saint-Maurice (Le Cha- telard), recueilli par M. Kilian. — Roche consistant en un calcaire gris noir très cristallin, en lamelles cristallisées, laminé, un peu lustré, pas de séricite visible; effervescence vive avec l’acide chlorhydrique. 22. Echantillon de la collection Ch. Lory (1886). Bourg Saint- Maurice (Le Chatelard). — Schistes calcaréo-micacés du Trias supérieur ou liasique. — Même composition que le précédent. b. — MARBRES ET CALCAIRES SUBORDONNÉS AUX SCHISTES LUSTRÉS INFÉRIEURS 23. Galcaire triasique et serpentine, col de Bousson, près Brian- çon (préparation N° 8). — Très curieux échantillon : calcaire laminé et recristallisé, avec veinules contournées, fragmentées, étirées, remplies soit par de la chlorite pennine magnifique, soit par un mica jaune polychroïque et très biréfringent. Pas de serpen- tine. Le mica et la chlorite renferment des grains de sphène. En somme, c'est un calcaire phylliteux froissé après le développement des phyllites ; à noter l’absence de quartz. 24. Marbre, col Tronchet, près Arvieux (préparation N° 7 2).— Marbre rappelant les marbres phylliteux du Trias de la Vanoise. Beaucoup de quartz en grains irréguliers, nuageux, sans forme et sans lois de répartition. Assez nombreuses paillettes de mica blanc disposées sans ordre. Pas d'apparence de laminage. Pas de miné- raux de métamorphisme. 25. Marbre gris-jaunâtre du Mont - Genèvre (échantillon D. 6428). — Finement cristallin, en plaquettes; fait effervescence avec l'acide chlorhydrique. 26. Marbre calcaire de Maurin. — Finement cristallin, en pla- quettes ; fait effervescence avec l'acide chlorhydrique; d'un gris jaunâtre. 27. Calcaire phy lliteux du pied nord-ouest du Mont-Pelvas (pré- paration N° 280). — Au microscope : marbre phylliteux, type 414 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin banal : peu de séricite, peu de quartz; pas de feldspath. À l'œil nu, la roche présente une couleur blanc-jaunâtre et une structure un peu fibreuse, quoique nettement marbreuse. On remarque des paillettes de phyllites éparses. 28. Marbre de la Chalp ou l’'Echalp (Haut-Queyras) (prépa- ration N° 25 7). — Calcaire cristallin d’un blanc verdâtre, bleuâtre et grisâtre, taches vertes avec tendance à la schistosité et paillettes phylliteuses éparses sur les surfaces. Au microscope : marbre, avec paquets de petits rutiles à l’intérieur des phyllites. Celles-ci sont chlorite et séricite. SE 29. Marbre de la Chalp (préparation N° 107). — Marbre à grain fin, fortement laminé postérieurement à la cristallisation de la majeure partie des individus de calcite. Lits et joints garnis de minces lamelles de muscovite. Très nombreux grains de quartz à contours nuageux : la plupart de ces grains semblent être posté- rieurs au laminage. Pas de feldspath ni d’autres minéraux. L’as- pect est celui de beaucoup de marbres triasiques. Aucune trace d'organismes. A l’œil nu, c'est un calcaire gris bleuâtre cristallin ; traces de schistosité et paillettes de séricite. 30. Marbre de la Chalp Qréperere Ne 87). — Même struc- ture et mêmes caractères. 31. Marbre du col Tronchet (préparations N° 72 et 735). — En contact avec les roches vertes laminées. Mosaïque de calcite cristalline, fine dans l’échantillon N° 2, plus grosse dans le N° 55. D. Sur quelques schistes cristallins de la zone du Piémont Les couches les plus anciennes du Haut-Queyras sont celles qui supportent les schistes lustrés ; elles aflleurent sur territoire français au sud de la contrée qui fait l’objet de la présente étude, près du col du Longet, mais leur plus grand développement est atteint sur le versant italien des Alpes cottiennes. En étendant ses recherches aux parties voisines des Alpes pié- montaises ! et, en particulier, à la vallée du Pellice, l’un de nous a pu s'assurer en effet que les schistes lustrés du Haut-Queyras vont s'appuyer vers l’est, par l'intermédiaire de schistes serpenti- neux et d'intercalations éruptives de roches basiques (Villanova), ou de schistes à zoiïsite, sur un ensemble de schistes plus ou moins 1. W. Kizran. Feuille d’Aiguilles, in C. R. Collab. 1892, Bull. Serv. Carte géol. de France, N° 63, t. X, 1898, p. 135. TOOI GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 415 cristallins, rapportés par la plupart des géologues italiens au Ter- rain Primitif (Prépaléozoïque) et dont certaines assises ont été décrites comme de véritables gneiss !. Ces couches ont toutes un pendage régulier vers l’ouest comme, du reste aussi, Les schistes lus- trés de la région française. En examinant de près ces « schistes cristallins » et ces (gneiss » de la vallée du Pellice, notamment aux environs de Bobbio, de Torre-Pellice et de Luserna, nous avons reconnu qu'ils s'éloignent beaucoup, comme aspect macroscopique, des schistes et gneiss précarbonifères de nos Alpes françaises (Belledonne, Pelvoux, Mont-Blanc, etc.), du Plateau central et des régions classiques. Ce sont des schistes sériciteux, des quartzites phylliteux et feldspathiques, des micaschistes à épidote (Bobbio, près du pont), fort analogues aux assises métamorphiques, d’ori- gine incontestablement sédimentaire, de certains de nos massifs alpins, comme, par exemple, de la Vanoise. IL est à remarquer également que des anthracites ont été signalés dans ces couches par M. Maggiore et que plusieurs de nos confrères italiens y ont mentionné la présence de graphite. Ces conclusions n’excluent pas l’existence de roches granitoïdes véritables dans d’autres points du bassin du Pellice, l'un de nous en ayant rencontré dans les alluvions du bas de la vallée; mais il est intéressant de constater qu’en suivant la coupe naturelle que donne la vallée principale, du col Lacroix à la plaine, on ne rencontre ni granite, nt aucun représentant incontestable de la série prépaléozoique. On peut dire, d’après ce qui précède, que sur le versant italien, le système des schistes lustrés et des roches vertes s'appuie sur une puissante série de micaschistes et de roches gneissiformes souvent graphiteuses (quartzites feldspathiques à. microcline, orthose et surtout albite, à mica blanc, avec chlorite et sphène, micaschistes quartzeux à albite, avec pyrite, sphène, zoïsite, rutile, calcite et feldspaths divers). Certaines de ces assises rappellent vivement les quartzites werféniens, ainsi que les grès permiens et houillers dynamométamorphisés de certaines parties des Alpes de Savoie, et doivent être considérées comme des sédiments anté- triasiques puissamment modifiés. — On a désigné, sur la feuille 1. Nos confrères italiens ont publié un grand nombre de notices sur les gneiss du Piémont; nous ne pouvons songer à les citer toutes ici et nous rappellerons simplement les noms de MM. Zaccagna, Novarese, Virgilio, ainsi qu'une étude en langue anglaise due à M. Gregory (Grecory. The wealdensian Gneisses. Quart. Journ. Geol. Soc.), nous réservant de résumer dans une autre occasion les conclusions de ces nombreux mémoires. 416 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin Aiguilles de la carte géologique de France, par une teinte spéciale (xx), cet ensemble de schistes cristallins sans y établir les subdi- visions de détail qui pourraient y être distinguées. Ces roches, qui ont été examinées au microscope par M. Ter- mier et dont on trouve l’analogue dans tous les terrains métamor- phiques, sont absolument différentes des roches cristallophylliennes anciennes du Plateau central, du Pelvoux ou du Mont-Blanc. . Telle paraît aussi être l'opinion de certains de nos confrères italiens ; M. Franchi par exemple écrivait en 1898 : « quoique nous soyons disposés à rajeunir de beaucoup les gneiss, nos idées sur leur origine et sur leur âge n'ont pas encore pris une forme défini- tive; cependant il est bien acquis, pour nous aussi, que les micaschistes, les schistes graphiteux associés avec eux, sont des schistes métamorphiques ». — Le même auteur (Loc. cit., p.238) croît qu’il convient d’attribuer au Permo-carbonifère à faciès cristallin, les roches graphitiques de la vallée du Pellice et une partie du «gneiss central » des géolôgues italiens. Les schistes cristallins micacés qui, plus au sud, au col du Longet, vers la Haute-Ubaye, servent de substratum à la série des schistes lustrés mésozoïques, appartiennent très probablement comme nous l'avons dit plus haut à ce même ensemble. Ils ontété signalés par Ch. Lory ! comme des micaschistes et des gneiss anciens à mica blanc, faisant partie de la bordure qui fermait au midi le grand bassin houiller des Alpes. Sur la carte du Briançonnais, cet auteur les a figurés comme appartenant au Terrain Primitif. M. Zaccagna ? les a également considérés comme anciens ; ils sont confondus sur sa carte avec les schistes lustrés (calcschistes) que cet auteur attribue au Prépaléozoïque, en une «zone des micaschistes » distincte de celle du « gneiss central ». En 1892 *, l’un de nous (M. Kilian) eut l’occasion de les men- tionner et de donner, d’après une obligeante communication de M. Michel-Lévy, leur composition microscopique (quartzites à mica blanc, chlorite et glaucophane); il les considérait alors comme très anciens et certainement antéhouillers. Plus tard, M. Marcel Bertrand # dit, en parlant de ces roches, qu'elles lui ont rappelé celles du Permo-Houiller et même du Permo-Houiller très supérieur ; il les rapproche de celles de la 1. Descr. géol. du Dauphiné, p. 282, 288 et 290. 2, ZAGCAGNA. Sulla geologia delle Alpi occidentali. Boll. R. Comit. Geol., 1887. SRB LSAGTE NO) EC pr 0871587 4. B. S. G. F., (G), XXI, p. 174, 1894. TO: GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 4x5 crête du glacier d'Etache dans le massif d'Ambin, c’est-à-dire de véritables quartzites feuilletés dans lesquels le rôle des lits phylli- teux intercalés reste tout à fait subordonné. L’altération par les agents atmosphériques fait, d’après lui, ressortir leur analogie avec d’autres types détritiques des Alpes. Enfin M. Franchi ! les a attribués récemment au Permo-Carbonifère. Depuis lors la connaissance approfondie de nos Alpes résultant de douze années d’explorations a conduit M. Kilian à la conviction que les gneiss et micaschistes du col du Longet sont moins anciens : qu il ne le croyait en 1892, et qu’ils représentent un type métamor- phique du Permo-Carbonifère comprenant encore, peut-être, les quartzites du Trias inférieur. L'étude microscopique, faite par M. Termier, des schistes cris- tallins dont il vient d’être question, a donné les résultats suivants: « 1. « Gneiss » de Luserna (Piémont) (préparation N° 275). — À l’œil nu, cette roche, exploitée pour dalles et carrelages, a une apparence gris-clair ou jaunâtre et une cassure esquilleuse et sub- cristalline, semblable à celle des quartzites triasiques. Les surfaces parallèles à la schistosité sont moirées de paillettes de muscovite. Au microscope, c’est un quartzite à feldspaths (sorte de lepty- nite) avec très peu de mica blanc. Les feldspaths sont : microcline, orthose, albite, un peu zonés. 2. Schiste cristallin pris au nord du bourg de Torre-Pellice (Piémont) (préparation N° 269). — A l'œil nu : cette roche a l’aspect d’un micaschiste à muscovite coupé de petits bancs à allures de quartzites. Au microscope : micaschiste à mica blanc. Type banal, très cristallin. -Beaucoup de feldspath développé in situ. Ce feldspath est : orthose, microcline et albite. 3. Schiste cristallin de Bobbio (Piémont) (préparation N° 2576). — Roche d’un gris verdâtre, grenue ; quelques taches d’épidote, rappelant beaucoup par son aspect certains grès houillers très métamorphiques ; un peu schisteuse, avec paillettes de séricite sur les surfaces de schistosité. Au microscope, c'est un micaschiste d’un type intéressant, avec épidote et zoïsite, sphène, chlorite, séricite, orthose et quartz. Le quartz et le feldspath sont allotriomorphes. Le quartz domine. L'un et l’autre, mais surtout le feldspath, sont criblés d’inclusions de chlorite. 1. Boll. R. Com. geol. d'Italia, série IL, t. IX, p. 243, 1898. 19 Octobre 1901. — T. 1°. Bull. Soc. Géol. Fr. — 27 418 W. KILIAN ET P. TERMIER 3 Juin C’est probablement un produit de recristallisation d’une roche éruptive. 4. Roche schisteuse, blanche, à feuillets nacrés, recueillie à Torre-Pellice (Piémont) au nord du bourg (préparation N° 271). Au microscope : micaschiste quartzeux à albite, avec un peu de pyrite, sphène, zoïsite, rutile, calcite. Type banal, maïs très haute eristallinité. 5. Schiste cristallin de Bobbio (Piémont) (préparation N° 276). — Roche gneissiforme d'un gris verdâtre, avec taches d’oxyde de fer. On distingue à l'œil nu un fond blanchâtre avec lits de phyl- lites verdâtres assez espacés. Au microscope, c’est un quartzite à feldspaths, assez analogue à ceux de Luserna, mais il y a des lits plus continus de mica blanc, avec un peu de chlorite et de sphène. Feldspaths parfois très gros, surtout albite, en agrégats allotriomorphes avec Le quartz. Il y a des lits purement quartzeux. 6. Echantillon de schiste cristallin recueilli en amont de Bobbio (préparation N° 262). — Au microscope : quartzite à mica blanc, avec un peu de feldspath développé in situ. Type très métamorphique, mais banal. A l’œil nu : apparence d’un quartzite schisteux, avec séricite sur les surfaces de schistosité ; teinte gris verdûtre. 7. Schiste cristallin pris en amont de Bobbio (préparation N° 265). — Même nature que le N° 262. Type banal que l’on retrouve dans tous les terrains cristallins. A l’æœil nu, la roche est de teinte un peu plus claire que la précédente. Ces types sont peu caractéristiques ; l’on peut trouver leur ana- logue dans tous les terrains métamorphiques ; il y a dans la Vanoise des roches bien comparables. Les gneiss de la Levanna ontun type tout autre que celui des roches de Bobbio, à cause de l’abon- dance des gros feldspaths, maïs cette différence n’est pas essentielle. En tout cas les roches en question sont dans leur ensemble, abso- lument différentes des roches cristallophylliennes du Plateau Central, du Pelvoux ou du Mont-Blanc. Il est intéressant de rapprocher ces roches des « gneïss » du col du Longet qui occupent la même position stratigraphique. M. Michel-Lévy a bien voulu examiner des préparations de ces 1901 GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 419 schistes cristallins, recueillis par nous en 1891 au col du Longet (altitude 2672 mètres) où ils forment égalément le substratum des schistes lustrés. Voici le résultat de son étude : 1. Schiste ou mieux quartzite, à mica blanc et glaucophane. Composition sommaire : quartz, mica blanc en partie sériciteux, en partie lamelleux (c'est-à-dire en grandes lamelles). Chlorite abondante. Enfin, dans certaines traînées, calcite et prismes de glaucophane peu coloré, mais bien caractérisé avec son poly- chroïsme : suivant ng — bleu azur pâle. — nm — violet pâle. — np — jaune très pâle. L'aspect général rappelle un schiste du € ou du X (partie supé- rieure des schistes cristallins de la légende de la carte géologique détaillée de la France). M. Duparc a reconnu dans des préparations de même prove- nance de la muscovite, du sphène, de la magnétite, du rutile et du zircon. 2. Schiste très feldspathisé, probablement granulitisé. 3. Schiste très cristallin, avec microcline développé en place. Glandules d’oligoclase. Présenterait, d’après M. Michel-Lévy, un type plus ancien que le Permien. 4. Micaschiste voisin de €? de la carte, très cristallin. Un peu de feldspath; beaucoup de quartz non détritique, formé sur place. Grandes lamelles de muscovite. Le mica blanc est froissé par le dynamométamorphisme ; ses axes sont rapprochés. D’autres échantillons, recueillis dans le même ensemble, égale-. ment au col du Longet, ont fourni à M. Termier les diagnoses suivantes : a) Quartzite phylliteux du col du Longet(préparation N° 588). — Quartz et mica blanc, chlorite rare. Pas de feldspath, si ce n’est dans des filonnets transversaux (albite). Roche détritique. La plus grande partie du mica paraît sédi- mentaire. Quartz entièremeut recristallisé. Archéen, Houiller ou Permien. b) Sous les schistes lustrés, col du Longet (préparation N° 529). — Schiste quartzeux avec apatite, ilménite et très fins rutiles. Séricite et chlorite. Feldspaths (orthose) développés in situ. Aspect des schistes permiens de la Vanoise. 420 KILIAN ET TERMIER. — GÉOLOGIE DES ALPES FRANÇAISES 3 Juin c) (préparation N° 538). — Même diagnose. Pas ou très peu de feldspath. d) (préparation N° 544). — Même diagnose. Pas ou très peu de feldspath. e) (préparation N° 544tis). — Mème gisement. Même diagnose. Zircon en plus. En outre : mica noir froissé et décoloré : gros noyaux d’orthose et de microcline cassés et froissés. Il ne serait pas impossible que ces noyaux fussent d'anciens galets ; mais ils sont recristallisés sur les bords. En tout cas beaucoup de petits feldspaths (orthose, microcline) développés in situ. En somme : grande analogie avec certains schistes permiens de la Vanoise. M. Haug fait remarquer que la base des schistes lustrés du Briançonnais et du Piémont ne peut plus guère être envisagée comme triasique depuis que M. Franchi a trouvé, dans des cal- caires qui forment dans leur masse des pointements anticlinaux et cela en plusieurs localités, un fossile essentiellement caractéris- tique du Trias le plus élevé, Pleurotomaria solitaria, qui occupe ce niveau depuis les Alpes orientales jusqu'en Calabre. La partie inférieure des schistes lustrés est incontestablement liasique, leur partie supérieure peut très bien être attribuée à l'Éocène ou à l’'Oligocène, comme dans les Grisons. Séance du 17 Juin 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membre de la Société : M. Louis Rambaud, Docteur en médecine, présenté par MM. Stanislas Meunier et G. Ramond. Il annonce une présentation. Le Président fait part à la Société de la mort de M. Bleicher, assassiné dans son laboratoire de l'Ecole de Pharmacie de Nancy. Il rappelle que M. Bleicher est venu encore tout récemment faire une intéressante communication à la Société géologique et exprime tous les regrets que cause aux géologues la perte si imprévue d’un confrère aimé et estimé de tous. M. G. Dollfus présente à la Société le moulage d’un fossile très remarquable qui vient de lui être envoyé par notre confrère M. Davy et provenant de la carrière des fours à chaux de la Barrette, près Noyal-sur-Bruz (Loire-Inf.). C’est un Pélécypode qui a été désigné par Millet sous le nom de Venus fallax. Cette forme appartient au même groupe que Venus aglauræ Hoernes (non Brongniart) et Venus excentrica Agassiz, qui sont répandues dans le Miocène du Midi. Le Venus fallax paraît caractériser le Miocène supérieur de l’ouest et a été rencontré déjà à Sceaux, à Thorigné, Saint-Clément-de-la-Place et par fragments à Beaulieu. Cette forme n'est pas connue dans les faluns de la Touraine. Commandant 0. Barré. — Sur la morphogénie de la région de Fontainebleau. L'étude que j'ai entreprise de la morphogénie de la région de Fontainebleau m'a conduit à établir une carte géologique au 1/20.000 du territoire de la forêt. J’ai ainsi eu l’occasion de relever plusieurs faits qui présentent un certain intérêt. 1° Tout d’abord j'ai constaté que la classification des bandes gréseuses et interbandes sableuses indiquée par M. Douvillé devait être modifiée dans une certaine mesure, et qu’il fallait compter, depuis Melun jusqu'a Bourron, sept bandes gréseuses et six inter- 422 SÉANCE DU 17 JUIN IQOI bandes sableuses, indépendamment des filets sableux qui s’inter- calent dans les bandes gréseuses, et d’une bande gréseuse annexe de la bande d’Apremont et qui n'est point signalée sur la feuille de Melun de la carte géologique à 1/80.000. 2° J'ai ensuite remarqué que les tables gréseuses étaient divisées en éléments longitudinaux parallèles par des dénivellations qui se poursuivent régulièrement d’un bout à l’autre de la forêt et qui ont eu une grande importance au point de vue de la sculpture du sol. Des mesures de grande précision, effectuées à ma demande par MM. les capitaines Soulié et Vigniane, professeur et professeur- adjoint de topographie à l'Ecole d'application, m'ont permis d'obtenir plusieurs coupes transversales d’une même bande gré- seuse, et ces coupes montrent que les dénivellations ont une allure aussi régulière que la bande dont elles font partie. J'incline à penser que ces différences de niveau ont été produites par de petites cassures contemporaines des grandes ondulations tertiaires de la région parisienne dont elles ne seraient qu’une conséquence. La disposition des longs promontoires qui se détachent symétri- quement du plateau axial de la forêt dans les bandes sableuses ainsi que celle des monts isolés, me font penser que des dénivella- tions analogues existent dans l’étendue de ces bandes, mais je n'ai pu les constater matériellement, par suite de la difliculté qu'on a de rencontrer des couches de-repère bien en place dans les affleure- ments du calcaire de Beauce sur les pentes. 30 J'ai enfin trouvé, dans le canton de la Petite-Haie, un gise- ment de véritables graviers alternant avec des lits de sable qui a tous les caractères d’un dépôt fluviatile. Cette découverte, en con- tradiction avec ce que l’on croyait établi, montre qu'il y a eu à un certain moment de véritables cours d’eau dans la région. La nature des graviers qui semblent provenir tous du calcaire de Beauce, indique que les courants d’érosion étaient absolument locaux. L’altitude du gisement qui est notablement inférieure à celle des cailloux roulés du plateau de Bois-le-Roï, montre que le dépôt fluviatile observé est postérieur au dépôt de ces cailloux, c’est-à- dire franchement pléistocène. Il y aurait donc eu dans la sculpture du sol de la région deux phases ; l’une, pléistocène, pendant laquelle les précipitations atmosphériques auraient dépassé les facultés d'absorption des sables de Fontainebleau et du calcaire de Brie sous-jacentet qui aurait vu des eaux courantes dans le territoire de la forêt ; l’autre, post-pléistocène, pendant laquelle se serait établi le régime des vallées sèches et se serait déposé presque sur place le manteau de débris non roulés qui avait été seul remarqué jusqu iei. SUR LE DÉVONIEN DE TAILLEFER ET LE CARBONIFÈRE DE VISÉ (BELGIQUE) par M. BOURGEAT Après avoir visité plusieurs fois dans mes excursions les forma- tions dévoniennes de Taillefer au sud de Namur et les formations carbonifères de Visé au nord de Liège, j'ai cru que, tout en ren- dant hommage aux remarquables travaux dont elles ont été l’objet, je pourrais très modestement rapporter ici quelques-unes des observations que j'y ai faites. I. — DévonIEN DE TAILLEFER Le Dévonien de Taillefer est celui qu’on observe près de la gare de ce nom. Il commence du côté du nord par les poudingues rou- ges amarantes dits de Burnot qui reposent eux-mêmes en concor- dance sur les formations plus anciennes des grès de Vireux. Au-dessus des poudingues, mais sans qu'on puisse établir une ligne de séparation tranchée, se montre la grauwacke également rouge amarante, dite grauwacke de Hierges. Cette grauwacke est bien visible au sortir de la gare et un peu vers le sud où elle est entaillée par un ruisseau débouchant sur la rive droite de la Meuse. M. Gosselet l’y a signalé depuis longtemps avec ses caractères propres au faciès nord du bassin de Dinant ‘. Il a fait connaître aussi dans une coupe sommaire la série des calcaires qui viennent au-dessus et qu'il rapporte partie à son Givétien, partie à son Frasnien. La question de savoir où finit dans ces calcaires l'étage de Givet pour faire place à celui de Frasne ne m'a guère préoccupé. Mais ce qui m'a frappé ce sont les intercalations de la grauwacke aux premières assises calcaires, intercalations qui se répètent plu- sieurs fois, comme l'indique la coupe ci-jointe (fig. 1). On constate même, comme je l'ai noté dans l’assise n° 3, des grauwackes vertes enclavées dans le calcaire et portant à leur surface des trous qui proviennent de la destruction par les agents atmosphé- riques des tiges d'Encrines dont elles sont pétries. Ce n’est que 1. Annales de la Société géologique du Nord, tome LL, p. 59 et 6o. 424 BOURGEAT. — SUR LE DÉVONIEN DE TAILLEFER 19 Juin peu à peu que le calcaire se dégage de la grauwacke pour former des saillies riches en Polypiers, et chez la plupart desquelles les traces de stratification ont disparu. Un tel enchevêtrement de la grauwacke aux calcaires indique entre ces deux dépôts une liaison intime. Elle ne peut guère à mon avis se concilier avec l’idée que si les schistes à Calcéoles manquent là, entre le calcaire et la grauwacke, c’est par le fait d'une transgressivité de la mer givétienne qui aurait débordé celle des schistes à Calcéoles. Ou ces schistes à Calcéoles se trou- veront à Taillefer avec leur faune propre dans l’une ou l’autre des intercalations supérieures de la grauwacke, ou, s'ils ne s'y trouvent pas, il faudra, ce me semble, admettre qu'ils ne sont pas déposés là. N Marbrerie S Fig. 1. — Contact du Givétien et de la grauwacke à Taillefer. Echelle des longueurs 1/1.200° ; hauteurs quadruplées. 1. Alternance de calcaire et de grauwacke; 2. Calcaire noir en lits régu- liers: 3. Alternance de cale. et de grauwacke (Polypiers). Cyatophyllum quadrigeminum. Couches vertes à Encrines; 4. Calc. massif à Aceroularia Davidsoni; 5. Schiste argileux couvert par la végétation; 6. Calc. noir à Cyatophyllum cœspitosum, Stringocephalus Burtini; 7. Calc. à Stroma- topores, Favosites cervicornis ; 8. Calc. compact bien lité, Spirifer Ver- neuili; 9. Calc. à Stromatopores (marbre florence); 10. Alternance de schiste et de cale. à Spirifer Verneuili. Je me permets jusqu'à preuve du contraire de me ranger à cette dernière solution, je la crois fondée sur ce fait que déjà dans la partie sud du bassin de Dinant les schistes à Calcéoles ont des épaisseurs très variables, qu'ils se coupent souvent de lentilles calcaires et que leur faune typique subit des modifications corres- pondantes, les Calcéoles étant tantôt très DGNE OMÉTSES, tantôt au contraire extrêmement rares. Je croirais donc que sur une partie du Condroz, pendant que les schistes à Calcéoles se formaient plus au sud, les conditions troublées de la sédimentation ne permettaient que la formation de poudingues et de grauwacke et constituaient des milieux où les fossiles habituels des schistes ne pouvaient vivre. Cela expli- querait comment les schistes à Calcéoles sont si rares au nord du bassin de Dinant. 1001 ET LE CARBONIFÈRE DE VISÉ 25 9 IT. — CARBONIFÈRE DE VISÉ Le Carbonifère de Visé, étudié successivement par MM. Horion, Gosselet et Dewalque !, peut être observé soit le long du cours de la Meuse en des carrières dont le front est parallèle au fleuve, soit plus à l’est le long de la Bervine, où ses affleurements ont été exploités pour la fabrication de la chaux. IL est en plusieurs points recouvert par des dépôts crétacés du Danien, qui ont été décrits par M. Horion, et qui ne m'occuperont pas ici. Je me contenterai même pour ne pas compliquer cette note de ne rapporter en quelques détails que la coupe que j'en ai prise d'Argenteau à Visé. Cette coupe n'est pas absolument complète, car du côté d’'Argenteau la végétation cache une partie des assises. Voici ce qu'on observe au sortir d'Argenteau : 1. Vis-à-vis le pont et sous le château même d’Argenteau appa- raît dans les pentes boisées un calcaire B sans stratification nette dont la couleur est d’un blanc tacheté de gris et qui est par places couvert de tiges d'Encrines." Quelques fissures discontinues a, qui s’y rencontrent semblent accuser un pendage assez marqué vers le sud. Sa surface supérieure est percée de poches remplies d’une argile blanchâtre avec lits de phtanites noirs à surface ferru- gineuse. Ces phtanites sont remplis de moules d’'Encrines et contiennent un certain nombre d'espèces fossiles. nl Four de Richelle Ch% d'rgenteau S k | NEC LA Carrière Andrien iciele de UE ET ER Ÿ a ES IE: IAE + MAN HRE Fo + + Et ++ Laos Re Fig. 2 — Coupe du Carbonifère entre Argenteau et Visé suivant le cours de la Meuse. — Echelle des longueurs 1/20.000°; hauteurs décuplées. A, Phtanites à Encrines; B, Calcaire massif avec lignes a marquant vaguement la stratification; C, Dolomie massive. , 2. Un peu plus au nord en regard du four à chaux de Richelle, après une interruption due aux broussailles et aux bois, on observe les mêmes calcaires mais à un niveau plus élevé. Au-dessous d’eux, 1. Horrow. Sur les terrains primaires des environs de Visé. B. S. G. F., (2), XX, p. 7966. — Horion et Gossezer. Le calcaire de Visé. Annales de la Société géologique du Nord, tome XX, p. 194. — GossererT. Sur les relations du terrain dévonien et du terrain carbonifère à Visé. C. R., 1892, p. 1242. — DEWALQUE. Annales Société géologique de Belgique, tome X, p. 176. 426 BOURGEAT. — SUR LE DÉVONIEN DE TAILLEFER 17Juin et se liant intimement à eux se remarquent des calcaires plus clairs, puis enfin des dolomies C. 3. Les dolomies font saillie d’une façon très irrégulière. au milieu du calcaire et se lient aussi à lui d’une façon très intime, comme l’a si justement fait remarquer M. Gosselet. Les mêmes fissures irrégulières a semblent indiquer que la stratification devient horizontale puis subit un pendage vers le nord. 4. Plus loin en se rapprochant de Visé on retrouve les calcaires gris dont la surface de contact avec les lits de phtanites s’abaisse au point d'atteindre le niveau de la route à l'entrée de Visé. Toute la surface supérieure du calcaire est sillonnée de nombreuses poches analogues à celle d’Argenteau. 5. Les plissements des assises d'argile et des lits à phtanites dans les poches prouvent que celles-ci se sont creusées après le dépôt des phtanites. Elles se présentent comme un résultat de l’action de l’eau le long de certaines fissures presque verticales dont on peut voir le prolongement en dessous dans les calcaires. Par l’effet de cette action, le calcaire aurait été dissous et l'argile, qui en forme le résidu, se serait plissée en même temps que les lits de phtanites pour remplir les poches. 6. Les fossiles que l'on trouve soit dans les argiles blanches soit dans les phtanites sont la continuation avec des changements graduels de la faune des calcaires. Il y a donc entre les calcaires d'en haut et les phtanites une continuité paléontologique analogue à la continuité stratigraphique signalée entre les dolomies et Les calcaires d'en bas. 7. Les phtanites, en assises bien nettes affectent dans leur ensemble, c’est-à-dire abstraction faite de leurs infléchissements dans les poches, un pendage parallèle à celui que les lignes de fissures faisaient supposer au calcaire. 8. Dans la masse du calcaire on observe beaucoup de Polypiers du groupe des Siromatapores, et beaucoup de traces organiques qui ressemblent aux restes de ZLithothamnium du mont Aïmé. Ce calcaire se présente done comme un calcaire construit. Il offre du reste beaucoup d’analogie dans sa physionomie avec le calcaire zoogène de Waulsort. 9. Son épaisseur peut être de 55 à 6o mètres. Dans les parties tout-à-fait inférieures, c’est-à-dire au voisinage de la dolomie de Richelle, j'ai pu recueillir des nos de minerai de cuivre, soit à l’état de chalcopyrite, soit à l’état de malachite. 10. La faune à partir des dolomies paraît être la suivante : Dans les dolomies Rhynchonella cuboides avec Productus 1901 ET LE CARBONIFÈRE DE VISÉ 427 sublæpis, P. semireticulatus qui sont surtout abondants dans le passage de la dolomie au calcaire. Au-dessus de ces dolomies et en montant vers les phtanites : Productus semireticulatus, fimbriatus, punctatus, Evomphalus Jragilis, puis peu à peu Productus giganteus et Cora avec Spirifer convolutus, Spirifer trigonalis et glaber. À la base des phtanites et dans les argiles blanches, Productus semireticulatus, Spirifer glaber, Bellerophon tangentialis. Au milieu et au sommet des phtanites Spirifer glaber, Pro- ductus punctatus et d’autres Productus de petite taille. À ne voir que la faune, sans les liaisons intimes des assises d’en bas, on serait tenté d'admettre une lacune entre les calcaires et les dolomies. Rhynchonella cuboïdes des dolomies est en effet regardée comme caractéristique du Frasnien. En admettant qu'elle soit restée exclusivement parquée à ce niveau, il faudrait conclure que tout le Famennien manque à Visé. Il faudrait admet- tre aussi, si l’on s’en tient strictement aux indications de la faune, qu’il y a encore au-dessous du carbonifère de Visé absence du Tournaisien si riche en Spirifer tornacensis. La chose est-elle possible et n'est-ce pas exagérer l’importance de la faune que de placer une lacune immense où tous les carac- tères stratigraphiques semblent indiquer qu’il n’y en a pas eu? Ne vaudrait-il pas mieux songer qu'on se trouve là en présence de formations zoogènes qui ont une faune à part? Si l’on se rappelle que Rhynchonella cuboïdes se rencontre souvent dans les massifs construits de calcaire qui émergent des schistes frasniens et même famenniens des environs de Givet, serait-il téméraire de croire qu à Visé elle s’est prolongée dans un massif construit qui s'est formé durant tout le Frasnien et le Famennien ? Quant à l'absence du Spirifer tornacensis elle s’expliquerait de la même facon. Ce Spirifer serait abondant à Tournai où existaient des fonds vaseux favorables à son développement, comme l’indiquent les calcschistes noirs de cette localité. Mais il n'aurait pu vivre à Visé au voisinage des récifs où se rencon- trent du reste les Productus sublævis et semireliculatus qu'on retrouve à Tournai. Mon avis serait donc que les formations de Visé représentent tout le calcaire carbonifère et n’en sont qu'un faciès spécial. L'APTIEN DES ENVIRONS D’UZÈS (GARD) par M. Edm. PELLAT. Sur la feuille 222 de la carte géologique détaillée (feuille d’Avi- gnon) M. Carez a divisé l’Aptien de cette région en trois assises qui sont de haut en bas : Calcaires à Discoides decoratus (40 m.). Marnes à Belemnites semicanaliculatus (100 m.). Marnes et calcaires à grands Céphalopodes (20 m.). Ces trois assises peuvent être étudiées dans de bonnes conditions au nord-ouest et au sad d’Uzès. La berge de la rive droite de la petite rivière de la Seynes et un ravin perpendiculaire à la rivière, au sud-est et très près de Serviers, montrent un très bel affleurement de l’Aptien inférieur (Bédoulien), affleurement qui a été soigneusement exploré par le frère Sallustien, directeur des écoles libres d’Uzès, et par M. Allard, géologue à Tarascon. Je viens d’y recueillir de nombreux fossiles. Sur la retombée nord-est d’un dôme arasé, formé de calcaires barrémiens à Requiénies, on voit, au contact avec ces calcaires, dans le ravin, des marno-calcaires jaunâtres à Ostrea aquila, Corbis: corrugatla, surmontés d’argiles sableuses noirâtres à Plicatula placunea, Terebratula sella, Toxaster Collegnoi, etc., que recou- vrent des marnes et des calcaires noirâtres remplis de Céphalo- podes de grande taille (Ancyloceras, Acanthoceras Stobiescki, Hoplites Deshayesi, etc.), associés à de nombreuses Ostrea aquila et à d'autres Bivalves : c’est l’Aptien inférieur. Les cultures empêchent de voir, quand on se dirige vers Ser- viers, les marnes à Belemnites semicanaliculaltus (Aptien supé- rieur — Gargasien), mais la retombée sud-ouest du même anti- clinal montre dans des ravins, lorsque l’on se dirige vers Arpail- largues, un beau développement de ces marnes. Je n’ai pas recueilli d’'Ammonites sur ce point, mais les mêmes couches renferment, au nord-est d’Uzès, près de Saint-Quentin, Oppelia nisus, Hoplites gargasensis, Macroscaphites striatosulcatus. M. Carez attribue aussi à l’Aptien supérieur les marno-caleaires glauconieux noirätres à Discoides decoratus dont la retombée nord-est d’un autre anticlinal, presque parallèle à celui de Ser- viers, montre, à Malaigue, un très intéressant affleurement et qui constituent l’escarpement situé entre Montaren et Serviers, L'APTIEN DES ENVIRONS D'UZÈS 429 escarpement longé par la route et la voie ferrée. Ces marno- calcaires à Discoïdes et Orbitolines plongent dans cette colline fortement au nord et sont recouverts par des couches, insuffisam- ment étudiées encore, appartenant au Cénomanien et au Turonien. Au sud du hameau de Malaigue un dôme que longe la route de Nîmes, est formé de calcaire barrémien, à Requienies. La retombée nord-ouest est creusée dans les marno-calcaires aptiens. Tout con- tre le hameau de Malaiguc on a, dans un chemin creux, la coupe suivante : 4° Grès calcarifères jaunâtres en plaquettes, avec rares Orbitolines et débris de fossiles indéterminables ; 4 } 3° Marnes sableuses jaunâtres et verdâtres, glauconieuses (rares Holaster latissimus !, quelques Orbitolines) ; 2° Marno-calcaires noirâtres, verdàtres, vers le haut, très glauconieux, remplis de Discoides decoratus. On y trouve d’autres Oursins que M. Lambert a bien voulu étudier (Phytllobrissus Kiliani Lamb., espèce qui n’était connue que dans l’Aptien de Barcelone, Hemi- diadema rugosum Ag., Toxaster cf. Collegnoi Sism.), Terebratella cf. Astieriana, d'assez rares Belemnites semicanaliculatus et quel- ques Orbitolines ; 1° Marno-calcaires noirâtres à Belemnites semicanaliculatus, Ostrea aquila. D'après M. Carez, les couches 2, 3 et 4 sont aptiennes ; le Gault manquerait dans cette région. D’autres auteurs classent ces cou- ches dans le Gault. Je ferai connaître les motifs qui militent en faveur de ces deux opinions. 1. Holaster latissimus est cité de l’'Aptien supérieur, mais est surtout abon- dant dans le Gault (à Clar) et dans le Cénomanien (au Havre). CONTRIBUTION A LA GÉOLOGIE DES CORBIÈRES par M. À. de GROSSOUVRE. Je me propose seulement de signaler ici diverses observations qui peuvent avoir quelque intérêt pour la géologie de ce pays et être susceptibles de servir de point de départ pour de nouvelles recherches. I. — COUPE DE L'EAU SALÉE AU COL DU Linas. On a donné à diverses reprises des coupes plus ou moins diffé- rentes des terrains qui, des marnes rouges à gypse et à quartz bipyramidé d’où émergent les eaux de la Sals, s'étendent jus- qu'aux calcaires à Hippurites turoniens afileurant sur le revers méridional de la croupe, vers la métairie du Linas, où ils plongent sous les couches sénoniennes. En montant au col, des calcaires gréseux m'ont fourni des Orbi- tolines que M. Douvillé, qui a bien voulu les examiner, rapporte à Orbitolina lenticularis, espèce de l’Aptien. À un niveau plus élevé j'ai recueilli une autre série d’Orbito- lines, Orbitolina plana, var. mamillata, du niveau de Fouras. On voit donc que la série des terrains doit être plus complète qu'on ne l’a indiqué d'ordinaire. II. — CoucHES RENVERSÉES DE LA CHAÎNE DE SAINT-ANTOINE DE GALAMUS. Dans les calcaires subordonnés aux marnes à Ichthyosarcolithes et à Orbitolines de la série renversée de Cubières, j'ai rencontré un Rudiste que M. Douvillé, d’après l’étude de son test, rapporte au genre Schiosia. Il est intéressant de constater que la faune de Rudistes de la Province orientale pénètre dans la région pyré- néenne et y prend contact avec la faune à Ichthyosarcolithes, Caprines et Caprinules de la Province occidentale. Sous la masse calcaire (jurassique et infracrétacée) du Pic de Bugarach et au-dessus des marnes sénoniennes à Micraster se trouve un horizon marneux avec Orbitolines qui, d’après M. Dou- villé, se rapportent à l’espèce de Vinport, près Tercis, et indiquent un niveau albien. À Gabachou (Ariège), près de Freychenet, les calcaires à Capri- nes, supérieurs aux couches sénoniennes et recouverts par l’Infra- crétacé, renferment au contraire l'espèce de Fouras, Orbitolina plana, var. mamillata. SUR LE TERRAIN A SILEX DU SUD-OUEST DU BASSIN DE PARIS 43I : IL. — SÉNONIEN DES ENVIRONS DE RENNES-LES-BAINS. La collection de l'Ecole des Mines renferme un échantillon de Mitrocaprina Bay ani, espèce des couches à Hippurites de Benaïx et Leychert (Ariège), rapporté par Bayan et étiqueté comme prove- nant des environs de Rennes-les-Bains. Sur la demande de M. Dou- villé, j'ai vérifié dans mes récoltes des Corbières si je n'y retrouvais pas cette espèce et j'ai pu constater que je l’avais recueillie dans les couches à Hippurites du Santonien supérieur qui afileurent à La Forët, à l’ouest des Croutets. La présence de ce fossile dans les Corbières est ainsi confirmée en même temps que le niveau qu'il y occupe se trouve précisé. k Dans les marnes à Micraster des environs de Rennes, c’est-à- dire dans la zone à Mortoniceras texanum, j'ai recueilli un fragment d'Ammonite absolument identique au Phylloceras glanegg'ense Redtenbacher, sp., des couches de Gosau des environs de Salz- bourg. A cette espèce se rapporte peut-être Ammonites Traski Gabb des couches à Poissons de Sahel-Alma (Liban). Enfin je signalerai la présence dans le Santonien des Corbières d'une Ammonite qui me paraît devoir être identifiée à cette forme si particulière de Desmoceras caractérisée par une quille ventrale, Desmoceras sugata Forbes, de l'Hindoustan. Ainsi s'affirme encore une fois la liaison des faunes de cette der- nière région avec celles de l’Eurasie occidentale, liaison sur laquelle j'ai déjà appelé l’attention en 1896 (B. S. G. F., (3), XXIV, p. 86) et que sont venues confirmer toute une série d'observations ulté- rieures, en particulier la découverte en Tunisie de la faune campa- nienne à petites Ammonites ferrugineuses de Sidi-Abd-el-Kerim due à M. Pervinquière. NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LE TERRAIN A SILEX DU SUD-OUEST DU BASSIN DE PARIS par M. A. de GROSSOUVRE. J'ai, dans une communication précédente, cherché à démontrer que le terrain du sud-ouest du Bassin de Paris désigné sous le nom d'argile à silex ne peut être assimilé à l'argile à silex qui est un résidu de décalcification par les agents météoriques. Depuis lors, j'ai envoyé un échantillon de la roche de Vierzon à notre 432 TERRAIN A SILEX DU SUD-OUEST DU BASSIN DE PARIS 17 Juin vice-président, M. E. Van den Broeck, dont la compétence sur ce sujet est incontestée et qui a publié un mémoire classique sur les phénomènes d’altération des dépôts superficiels sous l'influence des eaux météoriques. Notre confrère a eu l’amabilité d'étudier cette roche et voici ce qu'il nr'écrit : « Après avoir examiné avec soin l'échantillon de silice hydratée soluble, sorte d’opale non organique, que vous avez bien voulu m'envoyer, je l’ai passé à notre collègue, chimiste au Musée. « Nous sommes d'accord tous deux pour reconnaître que ce dépôt n'a rien à voir avec l'argile à silex type normal et bien connu qui n'est sûrement qu'un produit d’altération. « Ceci n’est certes pas de même origine que l'argile à silex... » Je suis heureux de voir confirmée par les études personnelles de notre confrère la thèse que j'ai soutenue et j'espère que le secours de son autorité finira par convaincre ceux que mes arguments n'avaient pu ébranler. Je crois donc qu'aujourd'hui la question peut, par tous ceux qui voudront bien l’étudier sans parti pris, être considérée comme tranchée et que l’on devra reconnaître que l’on a confondu sous le nom d'argile à silex des terrains fort différents. Il conviendrait de désigner chacun d'eux par un nom spécial. Une question de nomenclature se pose d’abord : à quel terrain doit-on réserver le terme d'argile à silex ? Il faudrait savoir dans quel sens cette expression a été employée en premier lieu, mais je n'ai pas sous la main les moyens de faire cette recherche. Je rappellerai seulement qu'autrefois l'argile à silex, produit d’altération, a souvent été nommée Pief à silex. Si le nom d'argile à silex ne peut être donné au terrain à silex du sud-ouest de Paris, on pourrait peut-être conserver à la terre siliceuse celui de Vierzonite qui lui a été autrefois, je crois, attribué dans le commerce lorsqu'elle était utilisée comme matière absorbante de la nitroglycérine dans la fabrication de la dynamite : le terrain lui-même s’appellerait alors Vierzonite à silex. Il resterait à étudier la genèse de cette curieuse roche. Président : M. L. e. . Vice-présidents : ME Vanr DEN Bronck. | M. Done. | M.R. Nroxrès. | Secrétaires + Pour l'Etranger : ÿ M. Le PERVINQUIÈRE. de : s | M. J. Gmau». ‘ -_ Archiviste : M. G. Ramonn. : Membres du Da : | MM. Emm.de MarceriEe | MM. A. de pee : A. GAUDRY. CH Dour. 71 -Munier-CHALMAS. APS DOTÉ TER US -P. TERMIER. Gustave DoLEFUus. 25 e ex. | 50 ex. | 75 ex. | 100 ex. | 150 ex. | 200 ex. 250 ex. 2 : 1 rofr.10o|11fr 35|r14fr.55|x9tr.4ol2ofr.75 « 8 8o| 9 8ol12 Golr4 75|17 » I le AU 7 »| 7 gol1o 1rof11 35/12 6o quart de a 3 :| 6 r1o| 6 95| 7 go! 8 85| 9 85 uitième de feuille .:.|2 9 5| 5 ‘10| 5 75| 6 35|7 » rture spéc. avec titre.l4 Ë 5 Ë 7 925| 8& 25] g »lio »1 Fo Lo GE | Vercors. us > A Dee F KERFORNE. - — Discordance _ Cambrien. sûr de a er vie d Rennes (£ fig. dans le ue AE an ; 6 He dans le texte) . ‘Séance du 6 Mai Top 0 à 2 “ “ e a >. Nécrolor cie : M. Henri PORTERET. . . . ES JS BRRGERON. — Observations à la note de M. Fo à ImBE Aux, RUTOT, VAN DEN re eo E- Hau tations d'ouvrages | RASE RE pau G. Dozrrus. — Sur l'étage cénomanien en Angleterre _ Léon JANET. — Communication - . Brcor. — Sur l’âge, des schistes du Rozel (Manche) qi bg. à dan | Séance. du 20 Mai 1901 : RO Re Proclamation le NeMbnes Ed EN ARS EN RS AA L. Gen, D: À. LABAT. — Présentations d'ouvrages 2. G.-F. Dorxrus. — Un. nouveau gisement de Cardita Striatissi A AQURS RL l'étage Redamen 4. RD ee e | BOURGEAT. — Sur. un Ji ilon de minerai . sine c dans la Combe de (Jura). LE RER ES Rd An A ae ee OO ENT LS Séance générale annuelle du tre Mai 190 ee ee SEA de LAPPARENT. — Allocution présidentielle . NE nie — Rapport au ROM. de la Sous- ommi sion d EN R OMAN ST NS IN Ne ee te PAQUIER. == Remerciements. PE ne Snvxus et M = Ocoatons sur un on. tertia | ue de la sons aux environs de. Rennes. Re Ron grisoutosismiques . PR Re co eee D : Séance du S Juin 1901 : ï AÉRER ES NEA - De MARGERIE, G. DoLLFUS. - _ Présentations d'ouvrages Ace L'Péon JANET, OUbSerPaRons ei Ce NA ne. … LeBEsCONTE — Sur la position des schistes du. Rozel (Manche) De Lamorus. — Etude comparée des s stèmes de terrasses des val Le ve) ne La Moselle, du Rhin et du Ft 4 fig. dan texte DB APCE NE : E. Haue, G. Dorxrus. — Observations CR — sn :W. Kixran et P. TEeRMIER. — Nouveaux : documents Fete äl 7 des Alpes françaises (4 tig. dans le texte) . E. Hauc. — Observations. SA Se no eee Séance du 17 Juin 1go1: in EX de AR ERDPES 0 NE Re cNécrotontes: M DERIQRER 24 0) 0 0 Lo 0 GE Dorrrbs.: — Communication RE SE ES jommandant 10} BARRÉ. — Sur la morphogénie de d région de Fonta nebleau. . . .. ne Hé ae ei Bo RGFAT. — Sur le Débonien. de Tailefer et le Carbonifère de Visé (Belgique) (2 fig. dans le texte) . Rae à -Edm, PezraT. — L’Aptien des environs “œUsès (Gard). Ne A. de GROSSOUVRE. : — Contribution à la géologie des Corbie se ‘In. y <= Nouvelles observations sur le terrain il sud-ouest du bassin de run a. : ie ie | ‘800 — Lille, imp LE BIGOT Frères. OCIÈTÉ GOLOGIQL U E ee EF EF R A N re E ne ETTE SOCIÉTÉ, FONDÉE LE 11 MARS 1830, À ÉTÉ AUTORISÉE ET RECONNUE IcouME TABLISSSMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE, PAR ORDONNANCE DU ROI DU 3 AVRIE 1852) TOME PREMIER || _ Feuilles 28-43. — Planches VII-XHI. :. Liste des dons : d.. PARIS ON mu de U SIbGR DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE. DE FRANCE | < 5 _&8, rue Serpente, VI” ni _Le Bulletin paraît par livralésns mensuelles ee Mars ue RE Rte # Le . annuelle ?. \ ae Géologie en général et particulièrement de faire connaître le sol de la France, * tant en lui-même que dans ses rapports avec les arts industriels et l'agri- culture. A AIS PE admission. à EXTRAITS DU RÈGLEMENT DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE + ArT. 2. — L'objet de la Société est de-concourir à l'avancement de la Arr. 3. — Le nombre des membres de la Société est illimité. Les Français et les étrangers peuvent également en faire partie. Il n'existe aucune dis- tinction entre les membres. ae See # -AnRT. 4. — Pour faire partie de la Société, il faut s'être fait présenter dans une de ses séances par deux membres qui auront signé la présentation, avoir été proclamé dans la séance suivante par le Président et avoir reçu le diplôme de membre de la Société. \ - + 4 NRA ie - Arr. 6. — Le Trésorier ne remet le diplôme qu'après l’acquittement du droit d'entrée. ; Die LA Re Arr. 38. — La Société tient ses séances habituelles à Paris, de Novembre … à Juillet. | SA a De ART. 39. — La Société se réunit deux fois par mois (Le 1° et le 3 lundi du mois). Ve je RTE ART. 42. — Pour assister aux séances, les personnes étrangères & la Société doivent être présentées chaque fois par un de ses membres. SR ART. 46. — Les membres de la Société ne peuvent lire devant elle aucun ouvrage déjà imprimé. DUAE FEVRIER ART. 48. — Aucune communication ou discussion ne peut avoir lieu sur des objets étrangers à la Géologie ou aux sciences qui s’y rattachent. ART. 50. — Chaque année, de Juillet à Novembre, la Société tiendra une ou plusieurs séances extraordinaires sur un point qui aura été préalablement déterminé, 5e, SRE PEAR ESE ARE Arr. 53. — Uibulletin périodique des travaux de la Société est délivré ins e gratuitement à chaque membre. FUSIONNER ES ART. 55.— ... Il ne peut être vendu aux personnes étrangères à la Société qu'au prix de la cotisation annuelle. d. por Ÿ __ Arr. 8. — Les membres n’ont droit de recevoir que les volumes des années du Bulletin pour lesquelles ils ont payé leur cotisation. Toutefois, les |: nn &, La £ » . À » La "+ volumes correspondant aux années antérieures à leur entrée dans la Société, leur sont cédés, après décision spéciale du Conseil et conformément à un tarif déterminé. le rss ART. 60. — Quelle que soït la longueur des notes ou mémoires insérés au: Bulletin, les auteurs pourront en faire faire à leurs frais un tirage à part. : ART, 73. — Chaque membre paye 4 à un droit d'entrée ; » une cotisation à *e Le droit d'entrée est fixé à la somme de 20 francs. M REC Ce droit pourra être augmenté par la suite, mais seulement pour les : membres à élire. ; GE PRE es AE La cotisation annuelle’ est invariablement fixée à 30 francs. Se ct La cotisation annuelle peut, au choix de chaque membre, être remplacée par le versement en capital d’une somme fixée par la Société en assemblée " générale », qui, à moins de décision spéciale du Conseil, devra être placée. | 1. Les personnes qui désireraient faire partie de la Société et qui ne connaïtraient aucun membre qui pût les présenter, n’auront qu'à adresser -une demande au Président, en exposant les titres qui justifient de leur 2. Le Conseil de la Société, afin de faciliter le recrutement de nouveaux … membres, autorise, dorénavant, sur la demande des parrains, les personnes . ui désirent faire partie de la Société à n’acquitter, la première année, que eur droit d'entrée en versant la somme de 20.fr. Le compte-rendu sommaire des séances de l’année courante leur sera envoyé gratuitement; mais ils n recevront le Bulletin que la deuxième année et devront alors payer la coti-. sation de 3o francs. Ils jouiront aussi des autres droits et privilèges des mernbres de la Société. Fo LOST ‘3. Cette somme est actuellement de 400 francs. NE SUR L'EXTENSION DE LA MER AQUITANIENNE DANS L’ENTRE-DEUX-MERS (GIRONDE) par M. E. FALLOT J'ai insisté à diverses reprises sur les dépôts aquitaniens de cette région naturelle de la Gironde, qui est comprise entre la Garonne et la Dordogne. Dans la Motice relative à une carte géologique des environs de Bordeaux que j'ai publiée en 1895 !, j'ai donné une description stratigraphique de ces formations et, dans un travail subséquent ?, j'ai montré l'intérêt que présentent ces dépôts, au point de vue de la formation géographique de la région précitée. Il résultait de ces recherches : 1° que l’on pouvait rencontrer un peu partout dans l’Entre-Deux-Mers, sur le calcaire à Astéries et aussi sur son faciès latéral oriental (la mollasse inférieure de l'Agenais), des lambeaux d’argiles ou de calcaires lacustres appar- tenant à l'Aquitanien inférieur; 2° que dans certains points parti- culièrement élevés et particulièrement respectés par les érosions postérieures, il existait des témoins de l’Aquitanien moyen marin sous deux formes : une argile grise à Ostrea aginensis Tourn. et une sorte de mollasse jaune à Scutelles et Amphiopes, placée au- dessus. J’indiquais ces formations marines dans les communes de Mou- rens, Saint-Martial, Castelvieil et Gornac et je montrais l’analogie que les couches mollassiques présentaient avec celles de Sainte- Croix-du-Mont; je dois ajouter avec la partie inférieure de celles-ci, car nulle part au nord de cette dernière localité, je n’ai rencontré — au moins jusqu'ici — les bancs d’Ostrea undata Lk., qui y forment, d’une manière si remarquable, toute la partie supérieure de l’Aquitanien moyen. J’ai depuis cette époque continué mes recherches, et j'ai pu constater que la mer aquitanienne avait pénétré plus loin encore que je ne l’avais indiqué alors. En explorant les buttes qui sont situées entre Soussac et Cazaugitat, j'ai pu constater la présence dans ces points de l’Aquitanien inférieur lacustre et j'ai pu 1. Mém. Soc. Sc. phys. et nat. de Bordeaux, 1895. 2. Bull. Soc. géogr. commerciale de Bordeaux, 19° année, p. 418, 1806. 2 Janvier 1902. — T. 1er. Bull. Soc. Géol. Fr. — 28 434 E. FALLOT. — SUR L'EXTENSION 17 Juin ramasser au-dessus, à l'altitude de 138 mètres, au Moulin Launay (à l’est de la ruine), des morceaux assez nombreux de l'O. aginen- sis. Cela indique bien l'invasion de la mer aquitanienne dans la partie nord de l'Entre-Deux-Mers; ici l'argile a été délayée et enlevée par des courants torrentiels postérieurs et il n'est resté sur le calcaire lacustre (sans fossiles du reste) d’un blanc éclatant qui forme la butte la plus élevée de l’Entre-Deux-Mers, que des débris de l’Huître si caractéristique du Bazadais et d’un grand nombre de localités du Lot-et-Garonne. La mer aquitanienne me paraît donc avoir formé une sorte de golfe dont les bords et les extrémités étaient jalonnés par des couches à O. aginensis et qui s’étalait dans une sorte de synelinal dont la concavité se fait particulièrement remarquer entre Cadillac et Saint-Macaire (fig. 1) sous les coteaux de Sainte-Croix-du- N.O. Violle SÉECroix-du-Mont S.E- Eglise Fig. 1. — L’Aquitanien;dans les coteaux de Saïinte-Croix-du-Mont. Mont !. Ce golfe s'étendait vers le nord et atteignait les environs de Soussac (fig. 2). Allait-il plus loin, c’est ce que j'ignore; mais je ne le crois pas. Au-delà de Soussac les couches se relèvent rapide- ment vers le nord et, on trouve successivement le calcaire à Astéries, très typique entre cette commune et la vallée de la Durège, puis au-dessous le calcaire lacustre à silex dit de Castillon, qui forme le haut des buttes qui entourent Gensac et Pessac-sur- 1. Je rappelle que l’Aquitanien inférieur est formé généralement sous Sainte-Croix du Mont par des marnes et des calcaires d’eau douce, que l'Aquitanien moyen, constitué en bas par une sorte de mollasse calcaire jaune à Scutelles, O. producta R. et D. etc., est formé dans sa partie supé- rieure par des bancs à Ostrea undata Lk. et que ceux-ci sont surmontés dans deux ou trois points par des lambeaux — trop restreints pour être indiqués sur la coupe — de calcaire d’eau douce, représentant probablement des vestiges de l’'Aquitanien supérieur; Tournouëér en a signalé un à Violle, M. Linder en cite également et l’on peut en voir un, consistant en plaquettes à Dreissensia et Potamides, dans la propriété de M. Minvielle. 1901 DE LA MER AQUITANIENNE DANS L’ENTRE-DEUX-MERS 435 Dordogne; et enfin on arrive au bord de cette rivière sur la mollasse du Fronsadais, c’est-à-dire que l’on rencontre les assises du Stampien, puis du Sannoisien. A l’ouest d’une ligne passant à peu près par Cadillac-Saint-Brice, Je n’ai pas trouvé un seul lambeau d’Aquitanien marin; je n’en ai pas vu non plus à l’est d’une ligne passant par Verdelais-Sauve- terre-Cazaugitat, sauf dans les environs de La Réole. Quand on s'élève au nord-est de cette ville, qui est bâtie sur le calcaire à Astéries, on aperçoit des moulins à vent placés sur des buttes qui dominent d’une façon très pittoresque la vallée de la Garonne !. Vs A D et ES 58 \ eo Û LA ons F, Lr str Vers S:Ferme \, 7 7 fléiien eMoneséur 5 Martial 5 \ LaRéole;, Fig. 2. — Carte indiquant la disposition probable de la mer aquitanienne dans la Gironde. — Échelle 1/550.000°. Sous les moulins supérieurs dits du Mirail, à l'altitude de 110 à 120 mètres, on rencontre le calcaire lacustre blanc de l’Aquitanien inférieur, et au nord du hameau qui porte le même nom, on trouve par dessus, en grande abondance, l'O. aginensis, souvent d’assez 1. Voy. TournouËr. B. S, G. F., (2), XXVI, p. 1000; RAurzIN. Note sur un aperçu de la carte géol. de la Gironde, 1875 (Bull. Soc. géogr. comm. Bordeaux). — Voyez aussi Benoist. Actes Soc. Linn., t. XXXV, p. xxur. 430 É. FALLOT. — SUR L'EXTENSION 19 Juin grande taille et valvée. Les mêmes fossiles se voient aussi à l’est de l'habitation désignée sous le nom de Duprat dans la carte au 1/40.000 de la Gironde. En suivant le chemin qui du Mirail va rejoindre la grand’route de La Réole à Monségur, on remarque, dans les talus de la route côté est, un calcaire jaune marin à débris de fossiles, dans lesquels j'ai cru reconnaître O. producta KR. et D. et qui ne serait autre chose qu'un petit lambeau d’Aquitanien marin occupant probable- ment la place des mollasses décrites plus haut, mais d’un faciès un peu différent !. Sur la route de La Réole à Monségur et sur celle de La Réole à Rolet, on retrouve le calcaire lacustre de l'Aquitanien inférieur, surtout autour des localités désignées sous le nom de Gravillouse (Graveilleuse). J'ai vainement recherché jusqu'ici des lambeaux aquitaniens au nord et à l’est de ce point. Je ne l’ai pas trouvé aux environs de Monségur, ni entre Monségur et les buttes de Cazaugitat. La butte du moulin de Rochet qui occupe l'altitude 108 mètres, un peu au nord-ouest de Saint-Ferme, et qui pourrait se trouver dans les conditions géographiques requises pour cela, ne m'en a offert aucun vestige. : Il paraîtrait donc naturel de penser que le lambeau des envi- rons de La Réole dépendait de quelque petit golfe secondaire communiquant avec la mer aquitanienne qui recouvrait le Baza- dais et qui s’étendait de là vers l’ouest et le sud-ouest, en envoyant une baie plus importante découper la partie centrale de l'Entre- Deux-Mers que j'ai décrite auparavant et que l’on pourrait appeler le golfe de Gornac. Je donne ces conclusions au point de vue de la disposition de la mer aquitanienne sous les plus expresses réserves. Il en est de même pour les contours de cette mer plus au sud, notamment aux environs de Landiras et de Villagrains. Il est possible que le rivage n'ait pas été continu entre ces deux localités placées sur un bombement crétacé tant de fois décrit; il se pourrait qu'un bras de mer eût pénétré entre les deux et que le lambeau cerétacé de Villagrains ait formé à cette époque une île complètement isolée ; je n'ai jusqu'ici aucun renseignement à ce sujet. Quant au rivage de la mer aquitanienne plus au nord dans le Bordelais, il est très nettement accusé par les dépôts saumâtres à Cerites et Veritina Ferussaci Recluz, de l’Aquitanien inférieur qui pourraient être considérés comme les témoins d’au- 1. Quant aux vestiges d'Aquitanien supérieur qui pourraient exister dans ce point, leur attribution stratigraphique me paraît encore douteuse. 1901 DE LA MER AQUITANIENNE DANS L'ENTRE-DEUX-MERS 437 tant d’estuaires dans lesquels aboutissaient les déversoirs du grand lac de l'Entre-Deux-Mers. Tels sont les résultats que j'ai pu retirer de mes observations. J'ajoute que la mer aquitanienne a laissé des dépôts bien plus à l’est dans le Lot-et-Garonne. Sous ce rapport les environs d’Aiguil- Jon, de Nérac, de Casteljaloux sont fort intéressants, mais toutes ces localités sont placées sous une latitude plus méridionale. Quant à la faune des lambeaux aquitaniens marins de l’Entre- Deux-Mers, elle est peu abondante ; les Amphiopes et les Scutelles _ qui en constituent la partie véritablement digne d'intérêt sont très rarement entières et d’une étude difficile à cause de leur encroû- tement. Je crois ces dernières différentes d’une Scutelle à ambu- lacres très larges, que Tournouër a signalée aux environs de Pindères (Lot-et-Garonne) (et qu'il a désignée sous le nom de Scutella Bonali n. sp.). Les études que j'ai faites autour de la localité indiquée par notre regretté confrère, me portent à croire que cette espèce occupe un niveau un peu supérieur. Malgré toutes mes recherches, je ne l’ai guère trouvée qu'en morceaux, et cela au-dessus d’un calcaire rempli de Planorbes, qui par son aspect général se rapporte au calcaire gris de l’Agenais (Aquitanien supérieur). Je me propose, du reste, de revenir sur cette question et de publier les Echinides intéressants de la mollasse aquita- nienne de l'Entre-Deux-Mers. Mes explorations dans cette région m'ont amené à faire une autre observation. Je suis enclin à penser qu'il existe pour ainsi dire partout sur le calcaire à Astéries un dépôt argileux grisâtre avec conérétions calcaires qui passe insensiblement au calcaire lacustre de l’Aquitanien inférieur. Tournouër n'avait pas été sans remarquer cette formation qu'il avait étudiée de l’autre côté de la Garonne (rive gauche) et qu'il avait rattachée au Tongrien. Mes recherches dans l'Entre-Deux-Mers m'engagent au contraire à la rattacher plutôt à l’Aquitanien inférieur et à en faire le premier témoin de la période de régression de la mer qui a suivi si géné- ralement dans le Sud-Ouest de la France la période tongrienne. L'observation que je consigne ici et que j'avais faite déjà ailleurs me paraît concorder avec les constatations formulées par Pigeon dans sa remarquable Carte géologique de la Gironde, achevée en 1861. J'ai pu, depuis la publication de ma carte des environs de Bordeaux, me pracurer un exemplaire de ce travail qui n’a jamais été mis en vente, et j'ai observé que Pigeon indiquait tout autour des parties saillantes du calcaire à Astéries de l’'Entre-Deux- Mers qu'il appelle grande formation marine, une bande de ce x 438 FALLOT. MER AQUITANIENNE DANS L'ENTRE-DEUX-MERS 179 Juin qu'il nomme la formation lacustre moyenne ; ce n’est autre chose évidemment que les argiles à concrétions calcaires, passant dans certains points au calcaire lacustre de l’Aquitanien inférieur. J'ajoute que ce fidèle observateur a parfaitement indiqué aux environs de Mourens, de Gornac, de Castelvieil, de petits lam- beaux de ce qu'il appelle la formation marine moy-enne, et qui n'est autre chose que de l’Aquitanien moyen !. Malheureusement la carte est sans texte, et il est difficile, en l'absence de celui-ci, de comparer les désignations de Pigeon avec. celles de la nomenclature actuelle. J'ai été néanmoins très heureux, par l'interprétation des faits, de me trouver d'accord avec un observateur dont je n'avais jamais pu me procurer le travail et qui — pour l’époque — a établi de la façon la plus sagace et la plus remarquable, une carte géologique de la Gironde à petite échelle. M. Fallot fait connaître les résultats d’un nouveau sondage arté- sien à Bordeaux (La Bastide). Les sables quartzeux à Nummulites du Lutétien auraient été atteints vers 226 mètres de profondeur et, à 244 mètres, d’après les renseignements du chef-sondeur, le débit de l’eau jaillissante aurait été de 2.900 litres à la minute. Le puits a été continué jusqu'à 314 mètres, toujours dans les couches à Nummulites ; le plus souvent sous la forme de sables, elles pré- sentent de temps en temps des grès en plaquettes très durs et des veines d'argile. Les Nummulites, très abondantes, sont générale- ment usées et difliciles à déterminer. Les formes les plus nettes (vers 275 m.) semblent se rapporter à N. lucasana, mais ilyena d’autres plus grandes. Le débit à 314 mètres, tel qu'il a été calculé le 22 mars dernier, était d'environ 2.230 litres à la minute: il aurait donc sensiblement diminué. Au point de vue géologique, ce sondage est particulièrement intéressant, en ce qu'il nous montre une fois de plus, sous Bordeaux. la constance des sables à Nummu- lites, inférieurs au calcaire grossier de Blaye, et leur importance capitale comme niveau d'eau. 1. Pigeon avait du reste suivi les indications de Drouot (Voy. Actes Acad. Bordeaux, 1839, p. 649) qui appelle 2° terrain d’eau douce la « formation lacustre moyenne » et mollasse coquillière la «formation marine moyenne ». Ce dernier auteur a remarquablement décrit sous ces noms anciens l’Aqui- tanien inférieur et l’Aquitanien moyen. Séance du 4 Novembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président annonce trois présentations. M. Albert Gaudry fait hommage à la Société, au nom de M. le professeur Capellini, d'un mémoire intitulé : Balenottera mioce- nica del Monte Titano, republica di San Marino; in-olio, avec 2 planches, Bologne, 1901. Des ouvriers, exploitant le calcaire miocène du Monte Titano, pour fournir des pierres au nouveau palais de la Régence de San Marino, ont mis à découvert un animal de la famille des Baleines. C’est un travail énorme que l'extraction d’un si grand Cétacé. Notre savant confrère de Bologne, dont tous les géologues connaissent le dévouement à la science, n’a pas reculé devant cette lourde tâche. Il a été aidé par le gouvernement italien. La tête a été d'abord en partie dégagée, et on en a fait un moulage grossier qui a été envoyé à l'exposition internationale de Paris, puis donné au Muséum. Plus récemment, elle a été dégagée complétement avec les os du squelette qui l'accompagnaïent, et aujourd’hui M. Capellini nous annonce que c’est une des merveilles du Musée géologique de Bologne. Le Cétacé de San Marino est inscrit sous le nom d'Aulocetus sammarinensis. M. Albert Gaudry présente ensuite une note intitulée : Sur la similitude des dents de l'Homme et de quelques animaux. Cette note a été faite à propos du Congrès international d’anthropo- logie et publiée dans la Revue que dirigent MM. Boule et Verneau (L'Anthropologie, XI, 1907, p. 95. 14 fig. dans le texte). C'est une addition aux ingénieuses recherches de Cope, d'Osborn et des autres savants qui ont mis en lumière la ressemblance des molaires supérieures des animaux du Torréjon et de celles de l'Homme. Il n'est pas toujours facile de déterminer avec des pièces isolées si on est en présence de restes d'Homme ou de Singe. On peut cependant faire les remarques suivantes : La face de l'Homme est {ho SÉANCE DU {4 NOVEMBRE IOQOI droite ; la face droite est en rapport avec le raccourcissement des mâchoires ; ce raccourcissement entraîne celui des dents. Le raccourcissement des dents molaires porte sur la diminution d’un de leurs denticules. A la mâchoire supérieure, il se produit sur le deuxième denticule interne. La note présentée à la Société ren- ferme des figures d’un Oreopithecus, d’un Dryopithecus, d’un Orang-outan, d’un Gorille, d’un Gibbon, d'un Chimpanzé, d’un Homme prognathe (Australien), d'un Homme orthognathe (Fran- çais); on peut suivre, sur ces figures, l’'amoindrissement du deuxième denticule interne. La même note montre une figure des molaires supérieures de l’Arctocy on de Cernay, où l’état du deuxième denticule interne, comme chez quelques fossiles du Torréjon, est le même que chez les Hommes de race élevée. Tandis que les dents se sont agrandies et compliquées, pendant les temps géologiques, chez les animaux dont la nutrition est la principale fonction, elles se sont simplifiées chez les êtres qui pensent et où le développement des os a pour but essentiel d’envelopper un vaste cerveau. M. Cossmann dépose sur le Bureau, pour la Bibliothèque de la Société, un exemplaire d’une petite brochure, intitulée : Additions à la faune nummulitique de l'Egypte, et publiée il y a quelques mois, par le Bulletin de l’Institut égyptien. La communication en a été faite dans l’une des dernières séances de 1900 ; elle comporte 30 p. de texte et 35 pl. en phototypie. La faune éocénique de l'Egypte a été déjà étudiée parle professeur Mayer-Eymar, qui a recueilli beaucoup de fossiles dans divers gisements du territoire égyptien. IL a identifié plusieurs de ces espèces avec celles du Bassin de Paris ; mais d’après l'examen que j'ai fait de nouveaux matériaux recueillis par notre confrère M. Fourtau, et assez bien conservés avec leur test, on peut être à peu près certain qu’il n’y a, pour ainsi dire, aucune espèce iden- tique à celles des environs de Paris, quoique l’aspect général de cette faune soit, génériquement, tout-à-fait semblable. M. Cossmann offre également à la Bibliothèque de la Société, la quatrième livraison de ses Essais de Paléoconchologie com- parée, parue au mois d'octobre dernier. Cette livraison, qui comprend environ 300 pages de texte et 10 planches phototypées, traite des familles : Fusidæ, Turbinellidæ, Chrysodomidæ, Pyra- mimitridæ, Strepturidæ, Buccinidæ, Nassidæ, Collumbellidæ, formant un ensemble assez homogène parmi les Gastropodes, et SÉANCE DU {4 NOVEMBRE 19O1I A4x 1 chez lesquelles le canal siphonal, d’abord très long et rectiligne, se modifie successivement pour se réduire finalement à une profonde échancrure basale. Le classement des fossiles appartenant à tous ces différents groupes ne laisse pas que de présenter de très sérieuses difficultés, altendu que le paléontologiste est obligé de se guider souvent d'après des caractères peu apparents, pour placer des coquilles, d'un aspect à peu près semblables, dans des genres qui peuvent même ne pas appartenir à la même famille. Trois des familles précitées sont nouvelles ; le nombre des genres nouveaux n’est pas considérable, mais leur groupement a donné lieu à quelques rectifications importantes. Au point de vue phylogénétique, une constatation ressort immé- diatement : c’est l’origine relativement récente des Fusidæ et Buccinidæ, dont l'ancienneté ne remonte guère au-delà des couches crétaciques tout à fait supérieurès ; les formes néoco- . \ » 0 e + Û + , . Q \ miennes, — et à Jorliort jurassiques, — quon attribuait à ces familles sont des échantillons mal conservés d’Alaria ou de Purpurina. Cette quatrième livraison se termine par une table alphabétique, générale, de toutes les espèces citées dans les quatre premières livraisons, de manière que le lecteur puisse immédiatement savoir dans quels genres elles ont été transportées ou conservées. M. A. de Lapparent présente, de la part de l’auteur, M. F. Kerforne, l'étude de la région silurique occidentale de la pres- qu'ile de Crozon (Finistère). Il fait ressortir les mérites de ce travail, qui imprime à nos connaissances sur cette région de l’Armorique une précision toute particulière. M. Munier-Chalmas ajoute que le travail de M. Kerforne, présenté comme sujet de thèse de doctorat en Sorbonne, mérite d'attirer l'attention des géologues ; c’est une contribution impor- tante à la géologie si intéressante de la Bretagne. M. Douvillé présente à la Société des échantillons de Rudistes provenant de localités nouvelles et intéressantes : 1° Une série d'Hippurites envoyées par un ancien élève de l'Ecole des Mines, M. l'ingénieur Agababoff, de Bakou. Ils proviennent du Petit-Caucase au N. de la pointe du lac Goktscha et dans le voisinage du point où se rencontrent les limites des trois gouvernements d'Elisabethpol, d'Erivan et de Tiflis (sommet de A0) SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1IQO1I la chaîne de montagne au nord-ouest du village de Dilijan, à 5 ou 6 kilomètres du monastère arménien Hagharzine, gouvernement d'Elisabethpol). Ces échantillons sont assez bien conservés mais ce ne sont que des tronçons, la valve supérieure manque et il n’a pas encore été possible d’avoir une bonne coupe de l’appareil cardinal. Ils appartiennent tous à la même espèce; l’arête cardi- nale est tronquée, les deux piliers sont pincés à la base et la dispo- sition générale rappelle celles des 1. presuleatus et Chalmasi. 20 Un $roupe de deux Radiolites, rappelant le À. angeiodes, pro- venant de la rive droite de l’Euphrate, près de Keban. Ce qui donne un intérêt particulier à cette localité c’est qu’elle se trouve dans le voisinage immédiat de Hakim Khan, d'où l’on suppose provenir les Hippurites rapportés autrefois par Loftus. Cet échantillon fait partie de l’ancienne collection de l'École des Mines. M. H. Dallemagne. — Ze creusement de la vallée de la Bidassoa. La vallée de la Bidassoa présente un exemple frappant de creu- sement rapide par les eaux de fonte des glaciers quaternaires des Pyrénées comme il est facile de le constater en suivant la rivière, depuis la Venta-de-Yanci jusqu'à Fontarrabie. On remarque de place en place, à une hauteur de 15 à 20 mètres environ au-dessus du niveau actuel des eaux du fleuve, des dépôts alluvionnaires composés de cailloux roulés, d’argiles ocreuses et de sables renfermant toutes les variétés de roches de la vallée. Les galets ont parfois des dimensions atteignant un demi-mètre cube. À ce même niveau les calcaires de Vera sont fortement rongés. Les dépôts les plus importants occupent la rive droite. Cependant il existe sur la rive gauche un important dépôt à Lastaola, en face de Biriatou, et un autre à Fontarrabie. Ce dernier repose à 20 mètres au-dessus du niveau de la mer en discordance sur les schistes turoniens qui constituent la partie ouest de la plage de Fontarrabie, en face la Villa Polita. L'importance de ce dépôt avait fait penser que l’Oarso-Ibaïi qui se jette actuellement dans le port de Pasajes, devait déverser ses eaux à Fontarrabie. Cette version me semble devoir être abandonnée car j'ai trouvé dans ces alluvions des galets d'ophite qui ne peuvent provenir que de la Bidassoa, la vallée de l'Oarso ne renfermant aucune trace de cette roche. La rapidité du creusement du lit de la Bidassoa semble indéniable si l’on remarque qu'il n’existe aucun autre dépôt entre la ligne relativement continue des alluvions que je viens de signaler et celles qui se déposent actuellement dans le lit du fleuve. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE J9OI 443 Sayn et Roman. — Composition du Barrêmien sur la rive droite du Rhône dans la région de Viviers. En suivant les berges de la rivière de l’Escoutaye, à partir du village deSaint-Thomé et en se dirigeant vers l’ouest, on peut obser- ver une succession très nette de la partie inférieure de cet étage. La série barrêmienne vient butter par faille un peu à l'est de Saint-Thomé contre des calcaires gris-bleu compacts que l'on peut classer dans l’Aptien inférieur (Bedoulien) par leur analogie avec les calcaires exploités au hameau de Saint-Alban, et fossilifères en ce point. Le village de Saint-Thomé est construit sur un escarpement bar- rêmien dont la composition est la suivante : Au pied de la falaise, sur le bord de la rivière, la série débute par des calcaires marneux avec Crioceras du groupe de Kæchlini Astier de grande taille, accompagnés de grands Desmoceras ordi- nairement écrasés. 2. Au niveau de la route, s’observe un banc de calcaire marneux intercalé entre les marnes avec nombreux Molcodiscus fallax Matheron accompagnés de quelques formes du même genre et de Pulchellia. Un peu au delà du village de Saint-Thomé les escarpements de la rive gauche puis ceux de la rive droite de la rivière viennent compléter la coupe du Barrêmien. La série débute par des calcaires marneux à Crioceras Kæchlini et Ancyloceras Tabarelli Astier. Au dessus viennent des bancs marneux avec nombreux Hamu- lina de petite taille accompagnés d’AHolcodiscus et de quelques Pulchellia. La coupe interrompue par les alluvions se continue sur la rive droite, par des banes de calcaire plus compacts avec Desmoceras du gr. difficile et Desmoceras Fabrei Torcapel, bien typique. L'ensemble est surmonté par des bancs calcaires bien visibles au niveau de la rivière où abondent Pulchellia compressissima et Pulchellia pulchella. Le Barrèmien inférieur paraît se terminer par des assises mar- neuses intercalées entre des bancs de calcaire et renfermant quel- ques fossiles pyriteux, Leptoceras et Pulchellia aff. provincialis d'Orb. Le Barrêmien supérieur est formé de calcaires blancs en bancs épais, peu fossilifères ; nous avons pu cependant observer quelques débris d’Heteroceras Giraudi Kil. qui ne semblent laisser aucun doute sur leur âge, SUR LE GRAPHISME DE LA CARTE DU SUD-OUEST DES ALPES-MARITIMES par M. A. GUÉBHARD L'auteur est heureux de faire hommage à la Société, en même temps que de deux mémoires parus dans les Comptes rendus de l'Association française pour l'avancement des Sciences ?, de la première épreuve définitive, excellemment gravée par M. Wubrer, de sa Carte géologique au 1/80.000 du S.-0. des Alpes-Mari- times, appelée à paraître prochainement dans le volume du Con- grès géologique international de 1900, et qui comprend toute la partie principale, un peu rognée au nord et au sud, mais étendue à l’est jusqu'au Var, de la carte manuscrite, limitée, à l’ouest, à la Siagne, présentée à la Société dans la séance du 2 avril 1900 ? comme première amorce d’un ensemble cartographique qui, dans le plan primitif de l’auteur, était destiné à montrer oi ionennent le raccord des plis du Var avec ceux de la Durance. Appelé, dans des conditions trop honorables pour qu'il s’y pût soustraire, à anticiper sa publication, M. Guébhard n’insistera pas sur les faits de recoupements et étoilements de plis que fait ressortir, malgré l'absence de la planche de coupes qui en constituera le complément nécessaire, la seule vue de cette carte, mieux que les explications du mémoire auquel elle sert d'illustration. Mais, à la suite d'observations diverses, dont l'autorité ne le disputait qu'à : la bienveillance, sur l'originalité du graphisme de ce travail de simple géologue amateur, il semble indispensable de revenir, par quelques explications détaillées, sur l'assurance, antérieurement donnée, que, si réellement quelques particularités apparaissent, elles ne sont nullement dues à un parti-pris de systématisation personnelle, mais se sont peu à peu impérieusement imposées comme une émanation invincible de l'observation des faits, au fur 1. Note parvenue au secrétariat le 1° juillet rgo1 et présentée à la Séance de la Réunion extraordinaire du 3 septembre 1901 à Lausanne. 2. Les problèmes tectoniques de la commune d’Escragnolles (A.-M.) avec 3 figures, 1 carte en couleurs et planche de coupes superposables (A. F. 4.58. XXIX, 580). — Sur quelques gisements nouveaux de plantes tertiaires dans le sud-est de la Provence, en collaboration avec M. L. LAURENT (A. F. A. S., XXIX, 555). 3. B. S. G. F., (3), XXVIU, 268. SUR LE GRAPHISME DE LA CARTE DES ALPES-MARITIMES 449 et à mesure qu'étaient serrés de plus en plus près sur le terrain les contours des premières cartes, au 1/50.000, de Saint-Vallier-de- Thiey (A.-M.) ! et de Mons (Var) * : premiers essais d'apprenti géologue absolument dénués d'artifice, où il n’est pourtant pas difficile de retrouver tous les éléments de ces formes particulières de courbes qui, par leur répétition, devaient fatalement, à la longue, faire sauter aux yeux l'existence d’une loi générale des tracés, laquelle, une fois formulée, devait à son tour très légitimement être prise pour guide dans les cas exceptionnels où l'observation topographique, par suite de diflicultés matérielles, aurait laissé place à quelque incertitude non résolue sur le terrain. Comment se ferait-il que, par leur simple réduction au 1/80.000, ces contours, de plus en plus précisés par d’incessantes campagnes de révision, eussent vu leur « air de vérité » se transformer en un air suspect ? Serait-ce uniquement que la concentration forcée, à si petite échelle, sans en rien laisser perdre, d'une masse inaccoutumée de minuscules détails ; ou encore la subdivision rigoureusement effectuée, grâce à une lente éducation de l’œil et une patiente recherche de fossiles, obligeamment déterminés par M.W. Kilian, du Jurassique en neuf bandes, de l’Infralias en deux et du Trias supérieur lui-même (mais ceci un peu plus artificiellement), en trois ; serait-ce que tout cela, multipliant et resserrant les contours au point de dépasser presque les ressourses chromatiques de la lithographie, aurait sufli à donner à l’ensemble, par condensation, un aspect réellement différent de celui des cartes, longtemps dites « détaillées », déjà publiées officiellement à même échelle, mais où il est impossible que chaque centimètre carré de surface figurée représente la même somme d'observations, la même dépense de forces physiques et mentales que dans l'œuvre indépendante et bénévole du modeste villageois qui, détaché de toutes choses, attaché à celle-là seule, jamais retenu par sa grandeur à aucun rivage, distrait de son but par aucune fonction, gêné dans le présent par aucun lien, poussé vers l'avenir par aucune ambition, matériellement libre, enfin, dans toute l’acception du mot, libre de s’asservir librement à un travail librement choisi, et de consacrer uniquement toutes ses ressources au culte de la Science pour elle- même, a pu multiplier presque à l'infini par le facteur Temps ses efforts continüment concentrés sur une tâche unique, et ainsi, d'infi- nitésimaux qu'ils pouvaient paraître, les transformer en une somme intégrale, de physionomie peut-être inattendue, mais finalement DA HA ANS RCXTEL 480 pl AVTTNe EAVIITT- 2. Bull. de la Soc. d’études scientifiques de Draguignan, XX, 225-320, 1897. El 446 A. GUÉBHARDe — SUR LE GRAPHISME 4 Nov. aussi acceptable que celle que peuvent donner des efforts plus importants comme valeur et plus autorisés comme marque, mais aussi plus éparpillés dans l’espaee, et clairsemés dans le temps ? Force fut pourtant à l’auteur, regardant son œuvre moins immo- destement, de reconnaître qu'il devait y avoir encore autre chose, et qu’à côté de l'originalité certaine de la méthode d'observation, peut- être fallait-1l s’en prendre à celle des lieux observés, ou de la part interprétative de l'observateur. À voir, dans la variété régionale des diverses parties de la carte, l'espèce de monotonie harmonique des contours, avec répétition fréquente de certaines formes fonda- mentales peu nombreuses, on est tenté de se demander si ce n’est point par un effet de l’art plutôt que de la nature que se résout à un graphique si simple en sa complexité l’apparent chaos de régions particulièrement tourmentées, représenté, en définitive, par un réseau qui, à force de braver paradoxalement le réseau orographique, finit par lui emprunter cette propriété fondamentale de faire sauter aux yeux, quoique non figurées, les lignes de. maximum de courbure des surfaces représentées, — axes tectoniques de plissement, dans un cas, lignes de plus grande pente dans l’autre. Mais, d’abord, pourquoi ne voudrait-on pas que le système des lignes de niveau géologiques eût de commun avec celui des lignes de niveau topographiques un certain parallélisme ondulatoire des courbes, si celles-ci toujours représentent l'intersection de la surface érodée du globe avec un système d’autres surfaces, paral- lèles elles-mêmes entre elles et à peu près équidistantes, simple- ment planes et horizontales, dans un cas, courbes et plus ou moins cylindriques, dans l’autre ? Or, une constatation facile à faire relativement au Jurassique, ossature de la région, est que ses 300 à 400 mètres d'épaisseur sont très nettement formés d’assises parallèles, et d’étages très sensible- ment égaux en puissance. Ne le fussent-ils pas, comme souvent l'Oxfordien, épaissi au détriment de son substratum, que cela n'empécherait pas cette conclusion forcée, que toute cette masse, régulièrement feuilletée, ayant toujours subi en bloc toutes les déformations, plissures, ruptures, etc., et finalement toutes les érosions qui en mettent actuellement à jour les tranches, celles-ci doivent, dans leur ensemble, conserver toujours l’aspect jaspé que donnerait, de quelque manière qu’on le déchiquète, un cahier de feuilles de papier, plié, chiffonné, déchiré, découpé, où l’indivi- dualité de chaque pli, si on la recherche, se retrouve dans l’orien- tation suivant un axe commun des sommets de courbes fermées analogues à celles d’un bois veiné. t 1901 DE LA CARTE DU SUD-OUEST DES ALPES-MARITIMES 447 Ce sont ces formes de courbes qui devaient ressortir fatalement de la carte d’une telle région, pour peu que cette carte fût exacte, et c’est ce qui ne manqua pas de me frapper dès mes premières publications, faites assurément — et pour cause — en dehors de tout part-pris théorique. Mais constater un fait n’est rien si l’on n'en sait chercher la raison et tirer les conséquences. Observer n'est que le commencement de la science : réfléchir, en doit être l'indispensable suite, et conclure le profitable but. Ainsi fus-je amené à formuler d'abord, (en la restreignant, d’ailleurs, stricte- ment au champ de mes observations personnelles), cette loi de l'orientation générale des sommets (ou points de maximum de cour- bure des contours géologiques) sur certaines lignes qui sont les traces terrestres des surfaces axiales de plissement ; puis à constater que cela ne pouvait être dû qu'à la structure régulièrement feuil- letée de l’ossature jurassique de la région étudiée et au parallélisme ordinaire des strates, peu ou point transgressives. Aussi est-il curieux de rapprocher a posteriori, de ce fait de simple observation, la formule théorique à laquelle aboutissait par le calcul, en 1887, M. G. Coutagne, dans une remarquable étude mathématique, qu'il a bien voulu me communiquer, sur L'emploi de curtes géologiques spéciales pour l'étude des ploiements, contournements et ruptures que présentent les terrains stratifiés . « Il est à remarquer, dit M. Coutagne, que les formes géomé- triques élémentaires auxquelles le géologue sera ramené sont en beaucoup plus petit nombre que celles que le topographe a l’occasion de figurer; car, tandis que la surface du sol peut pré- senter les ondulations et les accidents les plus divers, les surfaces de séparation,.des strates, primitivement planes, puis ployées et tordues, sont devenues développables; d'un autre côté, la résis- tance à l’écrasement dans le sens de la normale aux strates, est une seconde cause qui est venue limiter le nombre des dispositions possibles, en assujettissant en quelque sorte les surfaces de lit à constituer un ensemble de nappes parallèles. En fait, ces surfaces de lit peuvent être assimilées, le plus souvent, à des surtaces cylindriques à directrices sinusoïdales, et beaucoup plus rarement à des surfaces coniques ou gauches. » En vérité cette dernière assimilation n’est qu’assez exceptionnel- lement réalisée dans nos régions à plissements entrecroisés, où le surplissement de chaque pli, qu’il s'agisse de l’anticlinal ou du synclinal, a ondulé sinusoïdalement les génératrices elles-mêmes 3. Bulletin de la Soc. linnéenne de Lyon, 7 nov. 1881. 448 A. GUÉBHARD. — SUR LE GRAPHISME 4 Nov. du cylindre primitif et égrené celui-ci, le long de son axe, en aliter- natives de renflements et rétrécissements, en chapelets de dômes ou de cuvettes plus ou moins ellipsoïdaux, raccordés par des cols ou gorges plus ou moins hyperboloïdaux. Mais n'est-il pas remarquable que l’humble géologue, simple- ment astreint à l'observation méticuleuse et au rendu consciencieux du terrain, soit arrivé, d’une manière tout-à-fait indépendante, et par l'emploi, très terre à terre et sans préjugé, des simples moyens de tout le monde !, à des formules qui rappellent presque littérale- ment celles du distingué théoricien et à des constatations qui per- mettraient d'appliquer au vulgaire contour géologique, ou ligne d'intersection des surfaces de lit elles-mêmes avec la surface du sol, certaines des propriétés attribuées par le caleul à la « surface stratigraphique », pure entité géométrique, de M. Coutagne ? Et n'est-il pas vraiment curieux encore que celui-ci ait été conduit de son côté à noter des cas bien déterminés où sa figuration devient quasiment indépendante des accidents topographiques de la surface du sol ? ? Laissant aux calculateurs moins déshabitués que moi-même de l'usage des hautes mathématiques, le soin de dire le pourquoi de ces singulières coïincidences, je me borne à les signaler sans y cher- cher superflûment un argument de plus à l’appui de constatations directement émanées des faits et indépendantes de toute théorie. Mais si, après avoir vu celles-ei se vérifier constamment et ne jamais se démentir, à l'épreuve quotidienne d'observations indé- finiment répétées, j'ai fini par les ériger en règles et les prendre pour guides, à leur tour, dans la recherche de faits nouveaux ou l'interprétation de faits douteux, n'était-ce pas là procéder suivant la plus stricte méthode scientifique, qui veut qu'on se serve du connu pour aller à l'inconnu, et de celui-ci pour constamment vérifier l’autre ? Certes, je ne saurais prétendre, avec l'extension de plus en plus 1. Toutes les désignations littérales des terrains, dans ma carte, ont été empruntées sans discussion au panneau des Alpes du Service des Mines à l'Exposition. 2. Il est vrai que cette indépendance, dans mes tracés, n’est presque jamais qu'appa:ente et limitée aux petits accidents, tandis qu’il est facile, au con- traire, de constater partout la très étroite dépendance du relief orographique et du figuré géologique, mais, cela, dans les grandes lignes et nullement sui- vant l'antique tradition qui faisait suivre servilement au contour géologique dans nos pays à stratification presque toujours redressée, tout comme aux environs de Paris, les plus petites et souvent les plus imprécises sinuosités de la vulgaire courbe de niveau. 1901 DE LA CARTE DU SUD-OUEST DES ALPES-MARITIMES 449 grande de mes recherches, avoir, comme au temps de mes pre- mières monographies, suivi pas à pas des contours complets avant de lies arrêter sur le papier. Mais si, après m'être transporté succes- sivement dans chaque centre à peu près habitable de ma région, tout le temps nécessaire pour parcourir autant de fois qu'il fallait chacun des sentiers du cadastre, et tous les points douteux en dehors ; après avoir repéré à quelques mètres près, sur les plans d'assemblage de chaque commune, complétés. eux-mêmes, au besoin, de toutes les indications utiles des plans parcellaires au 1/2.500 ou 1/1.250, chaque affleurement, chaque pendage, chaque accident, fixé par l'écrit, le dessin, la photographie, les moindres particularités ; lorsque je m’essaie, presque toujours en face du terrain lui-même, à relier en contours définitifs tous les points de recoupement notés sur la trame serrée du réseau des chemins cadastraux, autrement exacte que celle des routes de l’Etat-major ; si, alors, il reste, par extraordinaire, un tant soit peu de jeu, n’est-ce pas à bon droit que je prends pour guide sur le papier, où il a été toujours, le premier, fixé avec certitude, cet axe synclinal qui m'a servi de guide sur le terrain, où il a été toujours, le premier, l’objet de mes recherches ? Et s’il m’est arrivé parfois, après avoir rigoureusement tracé les parties connues de cet axe, de me servir d'une hypothétique prolon- gation de ce vrai fil d'Ariane pour prévoir, d’un simple petit coup de crayon, des faits qu’ensuite, à travers Les plus grands obstacles matériels, je trouvais sans cesse et comme mathématiquement conformes à la prévision établie, devinant presque à coup sûr, de très loin, l'existence et jusqu'à la position de certains lambeaux de terrains récents posés comme jalons synclinaux au milieu des plus anciens, sans qu'aucun gros accident orographique n'attirât l'œil sur eux, ne suis-je pas en droit de voir là la consécration la meil- leure d’une méthode de travail qui, sortie directement de l’obser- vation des faits, arrive à en prévoir d’autres, par un contrôle perpétuel et presque infaillible d'elle-même ? Et si, après avoir constaté cent fois, dans les ravins les plus profonds, sur les sommets les plus ardus, comment toujours et partout l'accident orographique, sous la dépendance immédiate de l'accident géologique, n’a sur la figuration de celui-ci en plan qu'une influence ou presque nulle ou franchement exagérante, suivant qu’il est ou perpendiculaire, ou longitudinal, j'ai laissé à certaines de mes courbes cette sorte de rigidité qui traverse imperturbable les ondulations des courbes de niveau ordinaires, me reprochera- t-on d’avoir peut-être exagéré par places un fait réellement observé 9 Janvier 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 29 450 A. GUÉBHARD. — SUR LE GRAPHISME 4 Nov. en maintes autres, et de ne m'être point livré à cette facile simu- lation d’exactitude qui, venue des pays à stratification presque horizontale, se contente de modeler simplement sur les lignes d'altitude les bandes d’affleurements ? Et si, enfin, depuis l’époque où, partant de la « table rase » de Descartes, je m'’exerçais timidement à épeler l'alphabet de la géologie locale, j'ai vu toujours revenir sous mes yeux, comme des caractères élémentaires, certaines formes spéciales de contours, correspondant à certaines formes déterminées d'accidents, me tiendra-t-on rigueur de les avoir exceptionnellement appliquées, plutôt que la fantaisie pure, à tel cas demeuré douteux ? N'est-ce pas ainsi que sont obligés de faire les déchiffreurs de langues inconnues, lorsqu après s'être rendus maîtres de quelques lettres radicales du mot, s'ils ne peuvent deviner les autres, ils les interpolent d’après les connaissances préalablement acquises ? En vérité le cas n’a pas été fréquent, et ce n’est point me vanter, après le temps que j'y ai mis, que de dire qu’en possession enfin à peu près complète de mon alphabet tout entier, je n’ai rien écrit que je n’eusse lu au grand livre de Nature, rien traduit que je n’eusse compris. Certes je n'ai jamais su séparer l'observation du raison- nement, mais pas davantage celui-ci de celle-là. Des yeux pour voir, un cerveau pour comprendre et puis pour guider : voilà définie la part de «coeflicient personnel » qui a pu entrer dans des tracés, dont beaucoup sont, chacun pourra s’en convaincre sur le terrain, comme de strictes photographies de la réalité vue en affleurements dénudés sur le flanc aride de nos monts. C’est avant tout une œuvre de sincérité que j'ai voulu faire : de sincérité réfléchie, évidemment, mais aucunement systématique, et toujours obéissant aux faits, sans chercher à leur commander. Et je ne crains pas d’aflirmer, si large part que j'aime à faire à l’errare humanum est, que partout où semblera inexact un recoupement de contour et de chemin, ce sera presque toujours celui-ci et non celui-là qui aura été fautivement tracé !. Si, après cela, je suis arrivé à réaliser ce désidératum élémentaire, si rarement rempli par les meilleures cartes topographiques, de montrer en chaque point ce qui est, et rien autre, c’est-à-dire de pou- voir servir de guide sûr à l’excursionniste; si j'ai satisfait l'ambition 1. J'ai eu la bonne fortune d’avoir la primeur, pour ma carte, du fond topographique revisé de l’Etat-Major. Gràce à cela, ont disparu beaucoup de discordances ; maïs pas toutes, car certains tracés de routes sont encore incorrects (par exemple à l’ouest de la célèbre Collette de Clars), et je mai jamais voulu fausser pour eux mes contours géologiques. 1901 DE LA CARTE DU SUD-OUEST DES ALPES-MARITIMES 451 de fournir au penseur, fût-ce sous une forme inclassique, quelques suggestions de structure et au géologue une image facilement saisissable. non pas de mes conceptions a priori transportées sur le terrain, mais de la constitution réelle, si pénible à déchifirer, d'un coin de la terre de Provence ; si surtout viennent bientôt, de la part des hautes compétences, les vérifications appelées de tous mes vœux ; que m'importera, novateur sans le savoir et sans le vouloir, que le « trop-vrai » ait pu, de prime abord, paraître invraisemblable, et le « pas-encore-vu », en attendant l’accoutu- mance, intriguer ou même choquer l'œil ? NOTE SUR LA LIMITE MÉRIDIONALE DU NÉOCOMIEN DANS LES ALPES-MARITIMES par M. A. GUÉBHARD. Lorsque M. Collot, comme conclusion de son importante « Description des terrains crétacés dans une partie de la Basse Pro- vence», résuma dans un graphique très intéressant « l'extension approximative des étages crétacés dans la Basse Provence ! », je fus frappé, pour ce qui concerne la limite du Néocomien dans les Alpes-Maritimes, d’une singulière discordance entre le texte et la planche. Tandis que le texte disait très justement que « la limite de la mer néocomienne s’avançait par... Brovès, Saint-Vallier, Caussols, Vence, Nice,» le dessin faisait, à partir de Brovès, remonter le rivage néocomien bien au nord de la rive cénomanienne, laissant fort au sud et Saint-Vallier et même Caussols. Or, si le Néocomien, qui se montre à Caussols presque aussi puissant qu'à Escragnolles, quoique toujours dépourvu de sa base valanginienne, n’est plus, à Saint-Vallier, qu'à l’état de lambeaux de bordure très réduits d'épaisseur, il n’est pas moins certain que l’un de ces lambeaux se montre au sud comme le dernier représentant du Crétacé, vertica- lement pincé entre le Jurassique et le poudingue infra-nummuli- tique, au quartier d'Arboin. C’est donc le texte de M. Collot qui avait raison et je crois répondre au très honorable scrupule qu’a toujours mis cet auteur à rectifier lui-même ses tracés au fur et à mesure des documenta- tions nouvelles, en apportant ici la contribution de mes observa- tions personnelles dans la région. 1. B.S. G. !.., (3), XVII, p. 49, 1889; et (3), XIX, p. 39, 1890. 452 A. GUÉBHARD. — SUR LA LIMITE MÉRIDIONALE 4 Nov. Si l’on s’avance à l’est, il est parfaitement certain, comme le faisait remarquer M. Potier à l’excursion de Vence de la Réunion extraordinaire de 1877 ! qu’on peut voir, à Vence, sur de grandes étendues, le Cénomanien directement superposé aux calcaires blancs du Jurassique supérieur. Sans aller si loin, la même chose est constatable à l’est du village de Tourrettes-sur-Loup (qu'il ne faut pas confondre avec le Tourrette-Levens de l’autre côté du Var, au nord de Nice). Mais, à quelque cinq cent mètres au-delà, au bord même de la grande route, avant d'arriver aux sablières de roche éruptive que recouvre nettement le poudingue de base de la Mollasse ?, on peut voir la coupe d’une petite voûte néoco- mienne parfaitement caractérisée, avec son double faciès barré- mien glauconieux et hauterivien oolithique ferrugineux. De même, sur l’autre bordure crétacée du synelinal nummulitique nord-sud qui descend à l’est de Vence, j'ai récolté, au fond du Val Estrèche, à la limite des communes de Saint-Jeannet et La Gaude, dans un lambeau mis à jour par l'érosion du vallon et ancier- nement signalé par M. H. Ambayrac, de nombreux fossiles barrêmiens et hauteriviens, que M. W. Kilian, avec son obli- geance accoutumée, a bien voulu déterminer, et trouvés des plus intéressants par leur ressemblance avec la faune d’Eze, — et, ajou- terai-je, avec celle de Gairaut, près Nice. Encore plus au sud, un autre lambeau situé sur le vieux chemin de Vence à La Gaude, juste à la limite des deux communes, m'a donné encore des fossiles barrêmiens bien caractérisés. Il est vrai que pour les multiples lambeaux crétacés, les derniers au sud, qui garnissent les estuaires synclinaux du bassin pliocène de La Colle, mes notes ne mentionnent que le Cénomanien seul, de sorte que j'ai eu peut-être tort, trompé par mes souvenirs, qui, presque partout, comme dans le percement du grand tunnel de Saint-Jeannet, me montraient le Gault et le Néocomien présents sinon visibles sous le Cénomanien, de marquer ces lambeaux, sur ma carte, cf, au lieu de cft. Mais il ne résulte pas moins de toutes ces constatations que, d’une manière générale, depuis Brovès, où se rencontrent, d’après M. Collot, les deux lignes de rivage du Néocomien et du Cénomanien, jusqu'aux environs de Nice, où M. de Riaz a fait dernièrement, d’une manière 1. B. S. G. F.,G), V, p. 735. 2. S'agit-il d’une autre roche que celle des labradorites de Biot ? Je ne sais encore, Mais, en tout cas, ce ne peut être qu’une autre éruption, puisque les déterminations de fossiles dues à M. Depéret, ont établi l’âge au plus pontien de l’immense nappe de Biot. 1901 DU NÉOCOMIEN DANS LES ALPES-MARITIMES 453 très détaillée, le relevé de tous les affleurements connus !, ces: deux lignes ont dû toujours sensiblement se confondre, et que c'est précisément à la persistance de ce rivage, et aux érosions consécutives, bien plutôt qu'à une transgression, qu'a été due la disparition locale des roches côtières néocomiennes, simplement rejetées ailleurs, avec le Gault, à cause de leur nature argileuse et lubréfiante, au fond des grands plis ultérieurs. Tout au plus, faudrait-il, peut-être, faire faire à la ligne de M. Gollot une légère pointe au nord, en forme d’accolade, vers le. centre, tectoniquement si remarquable, du Saut-du-Loup, où le Néocomien, qui, pourtant, jalonne de petits lambeaux synclinaux tout le haut plateau de Saint-Barnabé, au sud de Coursegoules, n’est pas très sûrement constatable auprès de Gourdon, et plus du tout en dessous de Courmes, où se voient bien le Gault et le Cénoma- nien. Mais cela ne serait point fait pour modifier un tracé au 1/200.000, qui reste, somme toute, parfaitement exact ?. SUR L'EXISTENCE DU LUTÉTIEN SUPÉRIEUR (GALCAIRE GROSSIER SUPÉRIEUR) DANS LA VALLÉE DE LA SEINE ENTRE VILLENAUXE ET MONTEREAU ET A VILLIERS-SAINT-GEORGES, AU NORD DE PROVINS par M. H. THOMAS J'ai signalé l’an dernier (B.S. G.F., [3], XX VIII, p. 76) l'existence du Lutétien supérieur en divers points de la feuille de Provins où il n'avait pas encore été cité, notamment à Cormeaux et à Nesles- la-Reposte. | A cette époque, je n’avais pas étudié complètement les environs de Villiers-Saint-Georges ; depuis lors j'ai rapporté du fond de la 1. B. S. G. F., (3), XXVII, 411, 1899 et XX VIII, 764, 1900. 2. Preuve, avec bien d’autres, de la justesse de l'observation de M. Collot, sur «l’unité du golfe crétacé de la Basse-Provence », qui, jusqu’à la fin du Cénomanien, aurait continué, à travers les changements de nature des eaux. et de leurs habitants, à déposer ses sédiments parallèlement les uns aux autres et à étendre ainsi, au delà même du Jurassique, cette structure feuil- letée que mettent en relief les formes particulières des contours de ma carte du S.-O. des Alpes-Maritimes. 454 LUTÉTIEN SUPÉRIEUR DANS LA VALLÉE DE LA SEINE 4 Nov. tranchée, qui précède au sud la vallée de l’Aubetin, sur la ligne ferrée en construction, des calcaires très durs contenant empâtés dans la roche, des fossiles que M. Munier-Chalmas a bien voulu examiner et dans lesquels il a reconnu : Planorbis Chertieri Desh. et une Paludine voisine de celle du calcaire de Longpont. Récemment, je suis retourné à Villiers-Saint-Georges, dans la même tranchée et j'y ai recueilli des échantillons contenant avec Planorbis Chertieri, Limnea Bervillei Desh. et Paludina inter- media Desh., appartenant tous trois au niveau du Calcaire grossier supérieur. Dans la même note, j’indiquais également que, sur la pente de la grande falaise qui borde la vallée de la Seine en aval de Villenauxe, il existait à Blunay et à Salins, au dessus de l’argile sparnacienne, des calcaires tantôt marneux, tantôt grenus, tantôt à grain fin et d'aspect lithographique, que leur allure me faisait rattacher au Lutétien, bien que je n'y eusse encore trouvé aucun fossile. Les explorations que j'ai faites cette année, tant pour achever la carte de Provins que pour commencer celle de Sens, m'ont fourni la preuve que cette assimilation était exacte. En effet, à Courbeton, près de Montereau, j'ai recueilli dans ces calcaires des échantillons contenant, très reconnaissables dans les empreintes ou dans des moulages, de nombreux échantillons de Potamides tristriatus Lmk., appartenant au Lutétien. Plus loin, en aval, près de la station de la Grande-Paroisse, M. Lioret, de Monte- reau, m'a signalé dans une carrière abandonnée, des calcaires repo- sant directement sur l'argile rose du Sparnacien et qui contiennent Limnea Bervillei Desh. et Planorbis pseudo-ammonius Schloth., que j'avais déjà signalés à Saint-Brice dans le Lutétien supérieur de la vallée de la Voulzie (Bull. carte géol., n° 80, p. 19). Les fossiles de Courbeton et ceux de la Grande-Paroisse confir- ment ainsi nettement l'existence du Lutétien supérieur dans la vallée de l’Aubetin et dans la vallée de la haute Seine. Grâce au concours empressé de M. Laville, j’ai pu déterminer mes fossiles en les comparant à ceux de la collection du regretté D: Bezançon, mise très obligeamment à ma disposition par M. Douvillé. UN CRANE DE BŒUF MUSQUÉ, DES EYZIES (DORDOGNE) par M. Edouard HARLÉ. En examinant dernièrement un grand nombre d’ossements recueillis par M. Galou, dans diverses grottes de la Gorge d’Enfer, aux Eyzies (Dordogne), j'Y ai reconnu une portion de crâne de Bœufmusqué.Les restes de Bœuf musqué sont par- tout considérés comme rares et, en France,comme extrêmement ra- res. Il m'a donc paru intéressant de signaler cette nouvelle pièce, qui fait mainte- nant partie de ma collection !. Cette portion de crâne com- prend une partie des frontaux.avec l’amorce de l’un des orbites; une partie des cornes ; les pariétaux inti- mement soudés ensemble ; l’occi- pital, y compris le basi-occipital ; une grande partie des temporaux, avec la portion mastoïdienne et Le rocher; une partie du sphénoïde. Crâne de Bœuf musqué, des Eyzies (Dordogne). Vue prise de l'arrière suivant une direction à 45° avec le dessus du cràne et avec l’occiput. — Echelle 1/2. . 1. J'avais, pour l’étudier, les dessins, descriptions ou cotes d’une trentaine de crânes de Bœuf musqué, actuels ou fossiles. En outre, j’ai examiné de près, ces jours-ci, cinq crânes de Bœuf musqué, tous actuels, dont deux à Munich, grâce à M. Schlosser, et trois à Bäle, grâce à M. Stehlin 456 É. HARLÉ 4 Nov. Lorsqu'elle a été découverte, les cornes étaient bien plus complètes. Mais M. Galou ayant voulu procéder à un nettoyage parfait, a employé, sans précaution, une brosse dure et a enlevé ainsi, avec l'argile, la plus grande partie des cornes, bien moins solides que le reste. Ce qui subsiste encore des cornes est formé de tissu spongieux, sauf une grande cavité à la base de chacune. Les cornes sont implantées non seulement sur les frontaux, mais aussi sur les pariétaux, caractère qui, d’après Boyd Dawkins !, n'existe chez d’autres ruminants cavi- cornes que la Girafe, le Gnu mâle et le Bœuf musqué mâle adulte. Le dessus du crâne est plat, sauf, dans l’axe, un creux dans l'os unique résultant de la soudure des pariétaux, tout près de la suture de cet os avec l’occipital. Son épaisseur est considérable. Les bases des cornes étaient séparées par un intervalle étroit et long, que l’on recon- naît bien malgré les avaries causées par le brossage énergique de M. Galou. Les orbites étaient en saillie forte et brusque. L'occiput, à angle droit avec le dessus du crâne, est très haut et presque carré. L’occipital déborde légèrement et uniformément sur le dessus du crâne et sa partie supérieure présente, vers l'arrière, un fort renflement qui descend en angle suivant l’axe. Les condyles occipitaux sont presque dans le plan de locciput, et, au total, l’occiput est plat. Le basi-occipital a ses côtés parallèles. et répond en cela et pour le reste à la description donnée par Boyd Dawkins ? Voici; en centimètres, quelques-unes des dimensions de ce crâne : Largeur du front à l’origine de la saillie des orbites, ou plu- tôt : double de sa moitié de gauche, seule bien conservée. 12,5 Distance de cette ligne au plan de l’occiput . . . . . . . 1275 Plus faible épaisseur du crâne dans l'intervalle de la base des cornes. . .- . . : : k : À EE 2,5 Moindre largeur de Bienvellle sniRe le bec “oc cornes. . . 2 Longueur occupée par une corne sur le bord du crâne . . . 9.5 Largeur de l’occiput (occipital et temporal) ou plutôt : le double de sa moitié de gauche, seule en parfait état. . . . 15 Hauteur de l’occiput mesurée depuis le haut du trou occipital. 8, — — — le dessous des condyles. 11,5 L'angle du plan de l’occiput avec celui du dessus du crâne est de 105 degrés. Les sutures sont généralement très marquées, ce qui montre que l’âge du sujet n’était pas avancé. La comparaison des dimensions de ce crâne avec celles, très variables, d'autres crânes de Bœuf musqué, montre que l'individu 1. Boyd Dawxis. The British pleistocene Mammalia, Part V, Ovibos moschatus, 1872, p. 6. 2. Boyd Dawxixs. L. c., p. 5. UN CRANE DE BŒUF MUSQUÉ DES EYZIES 457 dont il provient était de taille moyenne, plutôt même petite ; mais il n'avait pas encore atteint son complet développement. J'ai acquis aussi de M. Galou, l'extrémité inférieure d'un méta- carpien et celle d’un métatarsien, ayant respectivement 67 et 63 millimètres de largeur. Les dimensions de ces os, leur ressem- blance avec ceux de Mouton et leurs autres caractères, m'ont convaincu qu'ils sont aussi de Bœuf musqué !. M. Galou m'a dit avoir trouvé ce crâne et ces os dans une petite grotte qui est située à 55 m. en aval de l’axe de la grande grotte de la Gorge d’'Enfer, sous le chemin, et à 95 m. du débouché du vallon. En examinant des terres que M. Galou nra dit avoir extraites de cette petite grotte, j y ai trouvé. en abondance, des restes de Renne et des silex dont la plupart sont de type magda- lénien, mais dont quelques-uns se rapprochent des racloirs moustériens. Les seules pièces de Bœuf musqué que l’on avait trouvées jusqu'ici, dans le sud-ouest de la France, sont quelques os des pattes signalés par Lartet et qui provenaient de l’une des petites grottes du même vallon, avec des restes de Ursus spelœus, Felis spelæa, Canis lupus, Canis vulpes, Cerous tarandus, Bos sp., Capra ibex et des silex de type magdalénien et peut-être aussi de type moustérien ?, Je ne sais si cette petite grotte est la même que celle explorée par M. Galou. On n’a pas trouvé, dans le sud-ouest de la France, d’autres ossements de Bœuf musqué. Il est vrai qu'on a cru reconnaître ce ruminant dans deux gravures préhistoriques magdaléniennes recueillies dans des grottes de cette même région : l’une de ces gravures provient de la grotte de Marsoulas (Haute-Garonne) et a été publiée dans Matériaux, 1885, p. 348, fig. 101; l’autre a été découverte dans la grotte de Raymonden (Dordogne) par M. Hardy, qui l’a figurée dans sa brochure La station quater- naire de Raymonden, 1891, pl. III. Mais les cornes de l'animal représenté par ces gravures sont étroites à la base, elles sont implantées bien en dedans de la limite du profil de la tête, elles se dirigent entièrement de bas en haut. Au contraire, chez le 1. Les caractères du métacarpien et du métatarsien de Bœuf musqué sont donnés par Boyd Dawxins (4. c., p. 8 et 9) et par Tscerskr (Wissenschaft- liche Resultate Janalandes Expedition, IV, 1892, p. 164, 179 et 183, et pl. IV, dans Mém. Acad. St-Pétersbourg, t. XL). Je possède aussi des dessins de ces os que j'ai fait faire, il y a longtemps. pour me documenter, d’après un sujet actuel appartenant à la K. Landwirthschaftliche Hochschule de Berlin. 2. LarrTer. B. S G. F.. 3 avril 1865; Comptes Rendus Acad. des Sc., 21 août 1865; Reliquiæ aquitanicæ, p, 182 et 281. 458 É. HARLÉ. — UN CRANE DE BŒUF MUSQUÉ DES EYZIES 4 Nov. Bœuf musqué, les cornes sont très larges à la base, elles sont implantées à la limite même du profil de la tête et se dirigent de haut en bas, sauf la pointe extrême. Ces gravures font ressortir encore d’autres différences avec le Bœuf musqué. Je suis persuadé que leurs auteurs n'avaient nullement l'intention de figurer le Bœuf musqué, mais le Bison, animal alors très commun dans le sud-ouest de la France. M. Nehring a prouvé, il y a déjà longtemps, pour l'Allemagne et les régions voisines, que l'extrême fin du Quaternaire a été marquée par la prédominance d'une faune de forêts, que cette faune a été précédée par celle qui vit actuellement dans les steppes de la Russie d'Europe et d'Asie, enfin que la faune de steppes a été précédée elle-même par celle qui vit maintenant dans les régions très froides de l'extrême nord de l'Asie et de l'Amérique. J’ai signalé, bien des fois, dans le sud-ouest de la France, la faune de forêts et la faune de steppes. Mais la faune des régions très froides s'y trouve-t-elle aussi ? M. Nehring a détaillé la faune actuelle des régions très froides et celle des steppes !. Leur comparaison montre que les Mammifères qui vivent dans ces régions très froides et non dans les steppes, sont les suivants : 1° et 2° deux espèces de Lemmings ; 3 le Renard polaire; 4° le Bœuf musqué. Or, dans le sud-ouest de la France, aucun reste de Lemming n’a jamais été découvert; des restes de Renard polaire n’ont été signalés, en très petit nombre d’ailleurs, que dans deux gisements ?; des restes de Bœuf musqué, fort rares, dans un ou deux seulement. Il est done probable que le sud-ouest de la France n’a pas subi le climat de froid extrême et qu'il a seulement reçu, d'une manière exception- nelle, la visite de quelques-uns de ses représentants. Si d’ailleurs, comme on l’admet, le Renne n’a pas été au sud des Pyrénées, il est naturel que les Lemmings. le Renard polaire et le Bœuf musqué se soient tenus, en général, assez loin en decà. 1. NEHRING. Tundren und Sleppen, 1890, p. 20-21 et p. 67-69. 2. Dans la grotte de Raymonden (Dordogne) : Gaupry. C. R Ac Se., 25 août 1890. (Pièces découvertes par MM. Hardyet Féaux). Et dans une crevasse, aux Champs-Gaillards, près Châteauneuf-sur-Charente (Charente): BouLe et CHAUVET C.R. Ac. Sc., 8 mai 1899. PREMIÈRE NOTE SUR LES ORBITOIDES par M. Ch. SCHLUMBERGER (PLaANcxes VII-IX) Dans son intéressant travail sur «l’Age des couches traversées par le canal de Panama » ! notre confrère M. Douvillé a eu l’occa- sion de s’occuper des Orbitoides quise rencontrent en grande abon- dance dans certaines tranchées du canal. A ce propos il a consacré un chapitre à l'historique de ce genre et à la distribution des espèces dans les diflérents terrains. Adoptant les noms proposés antérieurement par Gümbel et par M. Munier-Chalmas l’auteur con- clut que les Orbitoides vrais caractérisent le terrain crétacé, les Orthophragmina M.-Ch., à loges rectangulaires l’Eocène et les Lepidocyclina Gümb., à loges médianes arrondies ou hexagonales l'Oligocène. Du reste le savant géologue hollandais Verbeek en étudiant les nombreux Orbitoides qu'il a découverts à Java était déjà arrivé antérieurement à des conclusions analogues. Dans son travail de 1897 - et dans son grand ouvrage sur Java? il indiquait que les Discocyelina (Orthophragmina) caractérisent le Tertiaire ancien (qu'il divise provisoirement en Éocène et Oligocène) et que les Lepidocyclina appartiennent au Miocène. Ces constatations, si elles se confirment, comine il semble, dans différentes régions, ont une grande importance stratigraphique mais elles dépendent d’une question importante : la connaissance exacte des espèces chez les Orbitoïdes que l’on rencontre. Or il est incontestable qu’à ce point de vue il règne encore une certaine incertitude et que l’on trouve dans les ouvrages classiques, comme celui de Gümbel, des erreurs regrettables. Les anciens auteurs n’ont, en général, laissé que de trop courtes descriptions des espèces et ceux qui les ont accompagnées de figures n'avaient pas à leur disposition les moyens précis que nous procurent actuellement la photographie et la phototypie. Je crois donc qu’il est utile d'entreprendre une révision de nos Orbitoïdes et c’est dans ce but que j'ai l'honneur de présenter à la Société une première note sur les Orbitoïdes de la Craie. 1. B. S. G. F., (3), XX VI, 1898. 2. Naturw. Tydschrift v. Nederland Indie, 1891. p. 101-108. 3. Descript. geolog. de Java et Madura, par Verbeek-Fennema, 1896 460 CH. SCHLUMBERGER 4 Nov. Mais avant d'aborder mon sujet je tiens à exprimer mes remercie- . ments à mon ami, M. Douvillé, qui a mis à ma disposition les collec- tions de l’École des Mines et les recherches bibliographiques qu'i- avait rassemblées; à notre confrère M. Bigot, professeur de géologie à l'Université de Caen, qui m'a communiqué les Orbitoïdes de la collection Defrance déposée au Musée de Caen ; à M. le D: A. Koch, professeur à l’Université de Budapest, qui, sur la recom- mandation de M. Zittel, m'a gracieusement envoyé une nombreuse série de Foraminifères du terrain éocène supérieur de Klausenburg en Transylvanie. Defrance a consacré en 1823 un article du « Dictionnaire des Sciences naturelles » au genre «Licophre ». Il a emprunté ce genre à Denis de Montfort ! tout en constatant que figure et description de cet auteur sont à peu près méconnaissables. Néanmoins de Montfort ayant pris pour type de son genre la figure publiée par Fichtel ét Moll ? sous le nom de Nautilus lenticularis, Defrance croit reconnaître dans cette figure des coquilles crétacées que l’on trouve à Maestricht, à Mirambeau (Charente-Inf.) et à Mérignac, et l'espèce de Mérignac lui paraît identique à celle de Fichtel et Moll. Quant à celle que l’on rencontre à Maestricht et que Fortis ? a nommé «Discolithe lentiforme » elle diffère de la précédente et de celle de Transylvanie par des tubercules de la surface beaucoup plus petits. Enfin, Defrance donne le nom de Zicophris Faujasi à l'espèce trouvée à Mirambeau. Tel est le résumé de l’article du Dictionnaire des Sciences natu- relles qui n’est accompagné d’aucune figure, mais qui soulève deux questions importantes à élucider : quels sont les Orbitoides de Klausenburg (Koloswar en Transylvanie) qui ont servi aux descriptions et aux figures de Fichtel et Moll, et quels sont les Orbitoides que Defrance avait à sa disposition. La réponse à la première sueston m a été fournie par M. A. Koch, qui a résidé de longues années à Klausenburg et qui en connaît admirablement les terrains. Dans l’abondante provision de sables lavés de l'Eocène supérieur qu’il m'a envoyée, il n’y avait pas trace d’Orbitoides mais une quantité considérable de Nummulites plus ou moins bien conservées. Dans la lettre accompagnant son envoi, M. Koch énumère sept espèces de Nummulites des marnes à Bryol zoùres. et ajoute qu'il a trouvé de rares Orbitoïdes (O. tenella 1 Denis DE Monrrorr. Conchyl. systématique, 1802. > Ficxrez ur Mozz. Testacea microscopica, pl VII fig. a, b. 3. Forris. Mém. p. servir à l’Hist. nat. et principalement à l’oryctographie de l'Italie, t. IT. Paris, 1802, 1901 PREMIÈRE NOTE SUR LES ORBITOÏDES 461 Gümbel, ©. raricostata Gümbel) dans ces mêmes marnes, mais loin de Klausenburg. Il est donc à peu près certain que Fichtel et Moll dans leur travail si remarquable pour une époque où l’on ignorait ce que c'est qu'un Foraminifère, ont figuré à la planche 7 sous le nom de Nautilus lenticularis des Nummulites et ils ont soin de dire p. 56 qu’elles sont très abondantes à Klausenburg. La simili- tude que les auteurs ont cru constater entre ces figures et certains Orbitoïdes tombe à néant. Quant à la seconde question il a sufli pour la résoudre de s'adresser à l’obligeance de M. Bigot. IL m'a communiqué tous les Orbitoïdes de la collection Defrance. Cette petite série se compose de cinq tubes de verre avec les échan- tillons collés sur papier bleu et étiquetés par Defrance lui-même. L'un de ces tubes contient cinq individus assez petits avec la mention « Licophre lentillé, Licophris lenticularis (Montfort) de Mérignac ». C’est incontestablement ! l'espèce décrite par Gümbel = sous le nom d'O. burdigalensis et que j'ai reporté après examen dans le genre My-ogypsina :. Trois autres tubes renferment vingt { échantillons d’une seule et même espèce étiquetés : « Licophre de Faujas (Defr.) Licophris Faujasi Mirambeau ». Cette espèce n’est autre que celle que l’on retueille si abondamment dans la Craie blanche à Royan, ainsi que je le montrerai plus loin et connue sous le nom de Orbitoides media. Defrance n'ayant pas joint de figure à sa détermination spécifique, d’après les règles de la nomenclature, l'espèce Orbi- toides Faujasi tombe en désuétude devant l'espèce créée par d’Archiac et figurée par d'Orbigny. Le cinquième tube plus volumineux que les autres présente deux lignes d'individus. La supérieure avec dix exemplaires est étiquetée « Discolithes lentiforme Fortis, pl. 2, fig. n. o., Faujas pl. 34, fig. 1-4 » ; la seconde avec neuf exemplaires est étiquetée : « Licophre lentillé. L. lenticularis var. B (Defr.) Maestricht. » Les dix-neuf échantillons de ce tube sont à l’exception d’un seul, de la même espèce. Dans son article précité, Defrance renvoie le lecteur aux travaux de Fortis ÿ et de Faujas de Saint-Fond 5 qui tous deux ont donné des figures des Orbitoïdes de Maestricht. 1. Douvizzé. Op. cit. 2. GÜüMBEL. Beiträge zur Foraminiferenf. der Nordalpinen Eocängebirge. Munich, 1868. 3. B S. G. F., (3), XXNIIL, p. 327, 1900. 4. Cinq de ces individus déjà en partie usés m'ont servi, avec l’autorisation de M. Bigot à faire des sections minces, un sixième a été photographié. 5. Forris. Mémoire sur les Discolithes, t. II, 1802. Journal de Physique ? 6. FauyAs de Saint-Fonp. Histoire naturelle de la Montagne St-Pierre, 1799. 462 CH. SCHLUMBERGER 4 Nov. Faujas de Saint-Fond, professeur au Muséum, a publié en 1599 son « Histoire de la Montagne Saint-Pierre de Maestricht » et il cite d’après une lettre du Journal de Physique les recherches de Fortis sur les Discolithes. Cette lettre dont je n’ai pas retrouvé la date, est naturellement antérieure au « Mémoire de Fortis (datant de 1802) pour servir à l'histoire naturelle et principalement à l'oryctographie de l'Italie et pays adjacents ». Dans son Tome Il, page 97, se trouve le «Mémoire sur les Discolithes » avec figures. Fortis donne les diagnoses très succinctes ! des deux espèces d'Orbitoides (Discolithes) que l'on rencontre à Maestricht. L’une, la plus grande et la moins abondante, est caractérisée par un mamelon central sur une des faces alors que l’autre face en est dépourvue (fig. N. O.); l’autre, plus petite et plus abondante, est couverte extérieurement de nombreuses protubérances (fig. n. o.). Faujas confirme la présence de ces deux espèces à Maestricht mais tous deux emploient les termes lenticulaire et lentiforme, simplement comme qualificatifs de la forme extérieure et non comme désignation spécifique, et on a vu plus haut que Defrance en étiquetant sa collection a employé les deux termes pour une seule et même espèce. Il y a donc lieu de les désigner d’une manière plus précise et je proposerai de donner à la plus grande qui sur l’une des faces présente un mamelon central, le nom de Orbitoïdes apiculata n. sp., et à la plus petite celui de Orbitoïdes minor n. sp. Des Orbitoides en général. Orgrroïpes d’Orbigny, 1847 ?. Le genre Orbitoïides créé par d’Orbigny est un genre de Fora- minifères éteint qui paraît cantonné dans le Crétacé et le Tertiaire. La forme générale de leur plasmostracum est celle d’un disque lenticulaire plus ou moins surélevé au centre et aminci sur le bord de la circonférence. Dans certaines espèces le contour du disque devient polygonal et souvent les angles du polygone se prolongent en épines plus ou moins nombreuses qui produisent un ensemble étoilé. Quelle que soit leur forme extérieure les Orbitoïdes sont cons- 1. Discolithes admussus lenticularis, vix convexus laevis sine maculis, pl. I, fig n.0. — Discolithes lentiformis una tantum superficia in verrucum prominula, altera plana, pl. II, fig. N. O. 2. Prodrome de Paléontologie, 1850. 1901 PREMIÈRE NOTE SUR LES ORBITOÏDES 463 truits intérieurement de la même manière. Dans le plan qui passe par le bord externe on trouve au centre une loge sphérique ou un amas plus ou moins diffus de loges embryonnaires enveloppées par une épaisse paroi. Autour de cet embryon sont disposées circulairement des loges à contour tantôt quadrangulaire tantôt ogival; ces cycles de loges se continuent en grand nombre jusqu’au bord du disque et jusqu’à l'extrémité des pointes lorsque le bord est étoilé. C’est le plan des loges équatoriales, maïs ce plan est souvent convexe, ondulé ou parfois replié comme une selle. Au-dessus et au-dessous des loges équatoriales viennent s'em- piler plus ou moins régulièrement des séries de loges déprimées généralement plus abondantes au centre, ce sont les loges laté- rales. Leur ensemble est traversé par des piliers coniques de calcaire fibreux, perpendiculaires au plan médian qui vont s’élar- gissant vers la surface et y constituent des saillies de forme variée. Toutes les loges équatoriales et latérales ont des parois perforées et c’est par les perforations des dernières loges latérales situées à la surface entre les piliers que le protoplasme communiquait avec l'extérieur. La plupart des Orbitoïdes que j'ai examiné sont dimorphes. La forme À (mégasphérique) présente une grande loge initiale ou un embryon multiloculaire tandis que la forme B (microsphérique) de la même espèce commence par une minuscule loge sphérique entourée de cycles de loges équatoriales beaucoup plus petites que les correspondantes de la forme A. En présence du grand nombre d'espèces on a dû songer à établir pour les Orbitoïdes des sous-genres. En effet, Gümbel ! en 1868 a proposé les cinq sous-genres suivants: Discocyclina, Rhipido- cyclina, Aktinocyclina, Asterocyclina et Lepidocyclina. Cette subdivision était surtout basée sur la forme extérieure des Orbi- toïdes et en partie seulement sur les caractères internes. Aïnsi les quatre premiers sous-genres étaient supposés avoir des loges équatoriales rectangulaires. Or, Gümbel ne pouvait pas prévoir que l’on trouverait des Asterocyclina à loges équatoriales arrondies. 11 paraît plus rationnel de s’en tenir aux caractères de construc- tion interne et de réduire les groupes aux quatre suivants : 1° Genre Orbitoïdes, à loges équatoriales rhombiques augmen- tant assez sensiblement en hauteur vers la circonférence où elles sont fréquemment subdivisées ; perforations des cloisons assez fortes. Type : Orbitoides media. 1. GÜMBEL. Op. cit. 464 CH. SCHLUMBERGER 4 Nov. 2 Genre Orthophragmina !, à loges équatoriales parallélipé- diques. Type : Orbitoïides Prattü. 3 Genre Lepidocyclina, à loges équatoriales arrondies ou hexa- gonales, cloisons à perforations fines. Type : Orbitoides Mantelli ?. À ces trois groupes il convient d’en ajouter un quatrième. 4° Genre Myogypsina *, créé par M. Sacco, à embryon spiralé plus ou moins excentrique, loges équatoriales lancéolées. Type : M. irregularis. Description des espèces ORBITOÏDES MEDIA d'Archiac (PI. VIL, fig. 1-9). Licophris Faujasi Defrance, 1823. Orbitolites media d'Archiac, 1835. Orbitoides media d'Orbigny, 1852. D'Archiac { a décrit sommairement en 1835 l’Orbitoides media de Royan (sous le nom d’Orbitolites) en faisant bien ressortir les caractères externes, et il est d'autant plus singulier qu’il le confonde avec la figure que Faujas de Saint-Fond a publiée pour un Orbi- toide de Maestricht. L'espèce media tomberait donc en désuétude si d'Orbigny à ne l'avait pas reprise en 1852 en donnant une courte description et une figure très exacte pour l'extérieur, mais une coupe un peu fantaisiste. L'Orbitoïides media a un plasmostracum discoïdal, lentiforme, dont l'épaisseur au centre est environ du tiers du diamètre. Du sommet partent en étoile de nombreuses petites côtes qui se bifur- quent plus ou moins et sont suivies de côtes onduleuses ou de boutons saillants jusqu’au bord (PI. VII, fig. 1-3). Dans une section de la forme A (mégasphérique), dans le plan des loges équatoriales $ (PI. VII, fig. 6 et 7), on observe au centre une 1. MuniEerR-CHaArMAs. Etude du Tithonique, du Crétacé et du Tertiaire du Vicentin, 1891. Thèse de doctorat, p. 18. 2. Voir Douviczé. Op. cit. 3. B. S. G.F., (3), XXVIIL, p. 357, 1900. . Mém. de la Soc. géolog. de France, (r), I, 1835. . Cours élémentaire de Paléontologie, p. 852, fig. 557. 6. Il faut remarquer que les loges équatoriales sont rarement dans un plan rigoureusement plan, de sorte qu’il est difficile de faire figurer dans une sec- tion l’ensemble des loges. GLS [901 PREMIÈRE NOTE SUR LES ORBITOÏDES 465 formation embryonnaire composée d’une assez grande loge ovalaire à paroi épaisse subdivisée en quatre parties par trois cloisons minces, dont deux parallèles et une transversale !. C’est autour de cet embryon que se groupent en cycles successifs les loges équa- toriales à contour demi-circulaire. La nouvelle loge d’un cyele se place exactement au-dessus de l’espace de deux loges du cyele précédent : il en résulte que les parois latérales des loges parais- sent se continuer sur deux systèmes de courbes qui se croisent et produisent sur la coupe un effet de moirage. Vers la circonférence les loges équatoriales augmentent en dimension (PI. VIL, fig. 7). Dans la section transversale de la forme A (PI. VII, fig. 5) on retrouve les mêmes caractères embryonnaires et on constate que les loges équatoriales extrêmes se subdivisent dans la hauteur. Les loges latérales très surbaissées ont une ouverture moindre que l'épaisseur de leur cloison, les piliers qui les traversent s’amassent vers le centre et font à peu près disparaître les loges latérales. La fig. 4 de la pl. VII reproduit la forme B (microsphérique), avec une très petite loge initiale. D’Archiac signale des individus de 50 millim., mais parmi les nombreux Orbitoïdes que j'ai examinés dans les collections, les plus grands dépassaient à peine 10 millimètres. Habitat. — Dordonien à Royan et les environs, Saint-Georges, Suzac; à Mirambeau (Defrance), Maurens (Isère), Beaumont de Périgord. : Observation. — La figure r de la pl. VII, représente un des indi- vidus de la collection Defrance étiquetés L. Faujasi, les fig. 4et7 (PL. VID) sont des coupes de deux individus de la même collection. ORBITOÏDES APICULATA D. Sp. (PL. VIL, fig. x, 4, 63; PL IX, fig. r et 4). Plasmostracum discoïdal lenticulaire. Sur l’une des faces on aper- çoit une pointe saillante centrale qui n'existe pas de l’autre côté. Sur tout le reste des surfaces externes sont disséminées assez irrégulièrement de nombreuses protubérances (PI. VITE, fig. x). Les sections équatoriales des formes A et B de cette espèce sont reproduites par les figures 1 et 4 de la pl. IX; dans la première on trouve au centre une grande loge initiale à cloison épaisse subdivi- 1. Cette cloison transversale disparaît souvent dans les préparations, elle parait appartenir à une première loge initiale sphérique située en dehors du plan des autres loges embryonnaires. 19 Janvier 1902. -— T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 30 466 CH. SCHLUMBERGER 4 Nov sée en quatre par trois cloisons minces en triangle ; dans la seconde, la loge embryonnaire est extrêmement petite et à peine visible sur la photographie. Les loges équatoriales ont un contour circulaire et prennent parfois suivant la hauteur à laquelle elles sont sec- tionnées un aspect ovalaire. Dans la section médiane perpendiculaire au disque de la forme À, pl. VILL, fig. 6, la grande loge initiale n’est divisée qu’en trois par deux cloisons minces. On constate que les loges équatoriales augmentent rapidement en hauteur, sont subdivisées vers la cir- conférence et que les loges latérales très nombreuses et très surbaïs- sées, sont traversées par de nombreux piliers qui, au centre, for- ment un tout compact. La différence des deux faces est bien marquée dans cette figure, dans la fig. 4, pl. VIII, qui donne la forme B de l’espèce, la pointe que l’on devrait voir à gauche de la figure a disparu pendant la pré- paration. Les plus grands échantillons trouvés atteignent 10 millim. de diamètre. | Habitat. — Dordonien. Maestricht, Maurens (Dordogne). Observation. — Un individu de cette espèce figure dans la collection Defrance. ORBITOÏDES MINOR n. Sp. (PL. VI, fig. 2, 3, 5, ; PL IX, fig. 2 et 3). Cet Orbitoïde, très abondant à Maestricht, a un plasmostracum discoïdal peu renflé au centre, dont les deux faces sont sembla- bles et recouvertes de nombreuses nodosités régulièrement distri- buées sur toute la surface. Les figures 2 et 3 de la pl. VIII repré- sentent deux individus bien conservés, la figure 2 de la pl. IX, un exemplaire un peu usé. En examinant les sections équatoriales et transversales (PI. IX, fig. 3 et PL. VIIL, fig. 5), on reconnaît de suite le caractère interne qui différencie cette espèce de la précédente ; en effet on trouve au centre une petite loge sphérique suivie d’une loge circulaire plus grande, enveloppées toutes deux d’une cloison épaisse. Les loges équatoriales sont plus petites que dans ©. apiculata et augmentent relativement moins en hauteur. Les loges latérales très surbaissées sont parcourues par de nombreux piliers sur toute l'étendue du diamètre ; ils vont abou- tir à la surface pour y former les nodosités que j'ai signalées. Leur diamètre n'atteint guère que 5 à 6 millimètres. Habitat. — Dordonien. Craie de Maestricht, très commun. 1901 PREMIÈRE NOTE SUR LES ORBITOÏDES 467 EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE VII Fig. 1. — Orbitoides media d’Archiac (L. Faujasi de la coll. Defrance). Mirambeau. Gr. 5/1. Fig. 2-3. — — — d’Archiac. Royan. Gr. 5/17. Fig. 4. — — — d’'Archiac. Section transversale. Forme B (de la collection Defrance). Gr. 13/1. Fig. 5. — — — d’Archiac. Section transversale. Forme A, Royan. Gr. 13/1. Fig. 6-7. — — — d’Archiac. Sections équatoriales. Formes A; fig. 6, de Royan; fig. 7, Mirambeau. Gr. 12/1. PLANCHE VIII Fig. 1. — Orbitoides apiculata Schlumb. de Maestricht. Gr. 5/1. Fig. 2-3. — — ‘ minor Schlumb. de Maestricht. Gr. 9/1. Fig. 4. — — apiculata Schlumb. Section transversale. Forme B, de Maurens. Gr. 13/1. Fig. 5 — — minor Schlumb. Section transversale. Forme A, de Maestricht. Gr. 13/1. Fig. 6. — — apiculata Schlumb. Section transversale. Forme A, de Maestricht. Gr. 20/1. PLANCHE IX Fig. 1. — Orbitoides apiculata Schlumb. Section équatoriale. Forme À, de Maestricht. Gr. 13/1. Fig. 2. — — minor Schlumb. Individu usé, de Maestricht. Gr. 9/1. LRO ST = — Schlumb. Section équatoriale. Forme A, de Maestricht. Gr. 14/1. Fig. 4. — — apiculata Schlumb. Section équatoriale. Forme B, de Maurens. Gr. 13/1. M. Douvillé insiste sur l'importance que présente le groupe des Orbitoïdes au point de vue de leur répartition dans la série des couches ; on sait que les Orbitoides proprement dits caractérisent la Craie la plus supérieure (d’après M. Arnaud, elles apparaissent à la partie supérieure du Campanien), les Orthophrag mina sont spé- ciales à l’Eocène, les Lepidocyclina ne se rencontrent, tout au moins en Europe et en Amérique, que dans l’Oligocène ; enfin les Miogypsina apparaissent dès la base du Miocène. Dans ces con- ditions une étude détaillée des espèces présenterait un très grand intérêt et permettrait très vraisemblablement d'établir d’une ma- nière précise le synchronisme souvent douteux des couches dans lesquelles on les rencontre ; il est donc vivement à souhaïter que notre confrère nous donne rapidement la suite de ce premier travail. Séance du 18 Novembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Gentil, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de:la dernière séance. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membres de la Société : MM. René de Lamothe, présenté par MM. Léon de Lamothe et Munier-Chalmas ; Jean-Marc Bel, Ingénieur civil des Min. présenté par MM. Carnot et Termier ; Le commandant Azéma, présenté par MM. A. Gaudry et M. Boule. Il annonce quatre présentations. Le Président annonce que le Zoe Congrès des Sociétés savantes s'ouvrira à la Sorbonne, le 1° avril 1902. 11 présente trois fiches d'essai établies par la Commission chargée par le VIII Congrès géologique international d’étudier le projet de réédition des types d'espèces fossiles. Le Président de cette Commission, M. le D’ Karl A. Von Zittel, et le secrétaire, M. D.-P. Œhlert, demandent aux paléontologues de bien vouloir leur transmettre les observations que leur suggèreront l'examen de ces fiches d’essai, dont la disposition pourra être modifiée suivant les désirs exprimés par la majorité des paléontologues consultés. Les types choisis sont : Ogygia Guettardi Brongniart 1822 ; Ammonites Masseanus d'Orbigny 1843 ; HAE Nicklesi Core 1889. La Sous-Commission française a pu, grâce à une subvention qui lui a été généreusement accordée, subvenir aux premiers frais de cette publication. Elle pense pouvoir envoyer aux paléontologues une première livraison d’une dizaine de fiches, dont la distribution gratuite servirait à faire connaître l’œuvre. Les observations relatives à ces fiches d’essai, devront être trans- mises avant le 1°’ janvier 1902. A partir de cette date, l’absence de réponse sera considérée comme équivalente à une approbation. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE IQO1 469 M. Douxami présente une note intitulée : Etude sur la vallée du Rhône aux environs de Bellegarde, qu'il vient de publier dans le Bulletin des Services de la Carte Géologique de France. M. Douvillé présente à la Société plusieurs notes de M. Laville, préparateur au laboratoire de Paléontologie de l'Ecole des Mines, qui ont paru dans les Mémoires de la Société d’Anthropologie (Couches infra-néolithiques et néolithiques stratifiées dans la vallée de la Seine; Coupe de la carrière de Saint-Prest, Silex taillés, etc.). Elles renferment une série de coupes intéressantes relevées dans les dépôts meubles de la vallée de la Seine, ainsi qu'une coupe détaillée de la sablière de Saint-Prest, où les couches inférieures à Elephas meridionalis sont ravinées par des dépôts plus récents dans lesquels on a trouvé des silex taillés de forme acheuléenne. M. G.-F. Dollfus présente, au nom de M. F.-W. Harmer, une brochure extraite du Journal de la Société géologique de Londres : Sur l'influence des vents sur le climat pendant l'époque pléisto- cène. — Une application paléométéorologique de quelques pro- blèmes géologiques. Les vents forment actuellement des cordons Bittoraux coquilliers du côté droit du régime des trajectoires cyclo- niques périodiques dans l'hémisphère nord. Il ne se forme plus de dépôts coquilliers sur la côte orientale de l’Angleterre. L'auteur cherche à reconstituer les conditions météorologiques générales qui ont.existé au moment du dépôt des Crags. Il en déduit un dépla- cement progressif de deux centres cycloniques de froïd et de hautes pressions autour du globe à la hauteur du 60° parallèle, ramenant périodiquement des périodes glaciaires. M. G.-F. Dollfus offre à la Société deux notes dont il est l’auteur : r° Des derniers mouvements du sol dans les bassins de la Seine et de la Loire (Ex. du C.-R. du VIII: Congrès géol. international 1900) ; 2° Structure du bassin de Paris (Ex. du C.-R. de l'A. F. A. S., 4 août 1900). M. Douvillé à recueilli pendant la course. du Chablais, au- dessus du hameau du Lens d’Aulph, des échantillons d’un calcaire siliceux en plaquettes, provenant du système de la Brèche supé- rieure (partie moyenne de la Brèche supérieure, d’après une communication toute récente de M. Lugeon). Ce calcaire présen- tait sur les surfaces exposées à l’air de petites concrétions arron- dies de un millimètre environ de diamètre et des points ferrugi- 470 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE IQOI neux beaucoup plus petits ; l'examen de la roche taillée en plaques minces, a montré que ces points ferrugineux étaient constitués par des Radiolaires assez bien conservés, paraissant appartenir aux genres Cœnosphera, Sethocapsa, Lithocampe et Stichocapsa ; le second de ces genres n’a encore été signalé à l’état fossile que dans les schistes à Apiychus des Alpes bavaroises et dans les jaspes du Nagelfluh de Suisse, auxquels on attribue un âge tithonique ; les deux derniers genres sont aussi principalement abondants dans ces mêmes gisements. La présence des Radiolaires dans les couches les plus élevées du Jurassique supérieur, paraît d’ailleurs avoir un grand caractère de généralité dans la région alpine et dans ses environs immédiats : M. Cayeux les a signalés dans le Tithonique de l'Ardèche, et M. Rust en a décrit une faune très riche recueillie dans le Jurassique supérieur de l'Italie. La faune de Radiolaïires du Lens d’Aulph, quoique moins riche, présente cependant des aflinités très marquées avec celles qui ont été décrites de ce niveau et son attribution au Jurassique supérieur ne paraît pas douteuse. C’est la confirmation de l’âge que M. Lugeon avait attribué précédemment à la Brèche du Chablais. AU SUJET D'UNE ROCHE DE LA PUISAYE (YONNE) par M. PERON J’ai l'honneur d'offrir à la Société une petite note que j'ai publiée dans le Bulletin de la Société des Sciences de l’Yonne, au sujet d’une roche dont l'exploitation est en essai dans le sud de ce département. A cette note d’un intérêt purement local, je voudrais ajouter ici quelques observations plus spécialement géologiques qui m'ont été suggérées par la lecture des notes récentes de M. de Grossouvre, sur l’Argile à silex du département du Cher. A propos de la diversité de ce dépôt, notre confrère a soulevé un problème intéressant pour la solution duquel ma note semble apporter quelques données utiles. La roche qui fait l’objet de cette note est une terre que, sur divers points de la Puisaye, on désigne sous le nom impropre de Kaolin et qu'on cherche à utiliser pour la fabrication des pâtes céramiques. C’est une terre ou pierre blanche, farineuse, très légère, composée principalement de silice pulvérulente avec une AU SUJET D'UNE ROCHE DE LA PUISAYE 471 proportion variable et parfois très faible d’alumine et quelques traces de chaux et de magnésie. D'après une analyse que j'ai récemment obtenue de l'Ecole des Mines, un échantillon comprenait 41 °/, de silice soluble dans une solution de potasse caustique et 52 °/, de silice insoluble. Tous ces caractères sont exactement ceux de cette roche du département du Cher dont M. de Grossouvre nous a entretenus et qu'il a désignée sous le nom de Vierzonite. Cette terre blanche de Vierzon, qui est exploitée dans plusieurs localités pour la fabrication des cazettes de porcelaineries, appar- tient à cette formation superficielle que, dans le Cher et autres régions voisines, on a rattachée à la grande formation de l’Argile à silex du bassin de Paris. M. de Grossouvre, cependant, a fait observer qu’en raison de ses éléments, en grande partie solubles, en raison de l’absence complète de fer, etc., la terre de Vierzon différait essentiellement de l’Argile à silex proprement dite qui n’est, comme on l’admet généralement, qu'un produit d’altération et de décalcification des roches locales. En conséquence, notre confrère a séparé les deux formations et a proposé de désigner sous le nom spécial de « Vierzonite à silex», le terrain qui renferme la terre blanche siliceuse de Vierzon. Notre terre blanche siliceuse de la Puisaye, malgré ses analogies de composition et même de gisement avec celle du Cher, ne sau- rait être attribuée à ce terrain superficiel ainsi dénommé par M. de Grossouvre. Elle est bien plus ancienne. On: peut, à la vérité, en douter parfois, car elle est, sur divers points, extraite à l’aide de puits creusés à travers l’Argile à silex, et, comme notre roche elle-même renferme beaucoup de silex qui se mêlent à ceux du terrain superposé, on peut être induit en erreur. La distinction cependant est facile. La roche est toujours très différente et ses silex, très gros, blancs, branchus, cornus, non usés, sont faciles à reconnaître. J'ai d’ailleurs signalé, dans ma note, des gisements où la situa- tion stratigraphique de la roche blanche est parfaitement obser- vable et où, en outre, cette roche est fossilifère. Il est ainsi facile de constater qu’elle appartient à une assise bien déterminée de la base de l’étage cénomanien. Elle est bien stratifiée au-dessus des argiles à ocre exploitées dans cette région et n’est, en réalité, qu'une forme particulière de l’assise et de la roche si con- nues sous le nom de Gaize. J'ai eu l’occasion de causer de cette question avec mon ami, M. de Grossouvre, et je lui ai envoyé quelques échantillons de la 472 PERON. — AU SUJET D'UNE ROCHE DE LA PUISAYE 18 Nov. pierre de la Puisaye. Notre confrère y a observé à la loupe quelques éléments qui font défaut dans la Vierzonite, comme du mica, des grains de sable très fins, etc. Il l’a, au contraire, trouvée semblable à d’autres terres exploitées, notamment dans l’Indre, qu’il a lui- même placées dans le Cénomanien. Il convient d’autre part de rappeler que M. de Grossouvre, indiquant dans son important mémoire sur le terrain crétacé du sud-ouest du bassin de Paris !, la composition de ce terrain dans la vallée du Cher, nous a donné une succession déjà signalée par M. Douvillé dans la légende de la carte géologique (feuille de Bourges) qui rappelle exactement celle connue dans la Puisaye, c’est-à-dire, au-dessus des graviers phosphatés du Gault supérieur, une assise de Gaize glauconieuse dont la partie supérieure, au contact des sables de Vierzon, montre sur certains points des sables kaolineux assez purs pour être employés dans les porcelaineries et parfois, au même niveau, des ocres qui jadis ont été exploitées. Il y a dans tous ces faits des coïncidences qui appellent l’atten- tion. Il est d'autant plus utile de les étudier que les divers gise- ments de Vierzonite signalés par notre confrère sont tous situés sur la zone d’affleurement de l'étage cénomanien. L’un d'eux, celui de Saint-Fargeau (Yonne), m'est très particulièrement connu, et il y a 37 ans que j'y ai signalé l'existence de la Gaize cénomanienne. Comme l’a dit M. de Grossouvre, le problème de la genèse de la Vierzonite reste à étudier. Ne semble-t-il pas possible, d’après les faits que je viens d’énoncer et malgré les quelques différences de structure constatées par M. de Grossouvre, qu'il y ait une certaine communauté d’origine entre cette vierzonite et notre gaize blanche de ta Puisaye ? La Vierzonite, comme l’a parfaitement démontré notre confrère, ne peut être considérée comme un produit de décalcification. Elle est donc indépendante de l’Argile à silex. Maïs ne pourrait-elle être le résultat d’un simple remaniement local de la Gaïze, antérieur à la formation de l’Argile à silex ? M. Douvillé rappelle qu'il a en effet signalé il y a quelque vingt- cinq ans, la présence de couches de Gaïze dans le Cénomanien au nord de Bourges. 1. B. S. G. F., G), XVI, p. 490. SUR LA FAUNE ET L’AGE DES CALCAIRES A RUDISTES DE LA DOBROGEA par M. V. PAQUIER. Grâce à la complaisance de M. Douvillé, l'auteur a pu examiner la série de moules internes de Rudistes de cette prove- nance offerte à l'Ecole des Mines par M. Anastasiu. Ces fossiles ont tous été recueillis dans les falaises du Danube à Cernavoda et proviennent donc d’un seul et même niveau. À l’aide de contre- moulages en gélatine il a été aisé d'obtenir des reconstitutions très fidèles de myo-cardinaux et c’est sur l’examen de sem- blables documents dont l'authenticité est indéniable que sont fondées les déterminations suivantes. Diceras ! sp. Forme de taille moyenne bien reconnaissable à ses lames myophores, rappelle assez D. Beyrichi var. communis Boehm, de Stramberg. Heterodiceras sp. nov. Forme de taille moyenne; à la valve gauche très vraisemblablement fixée, l'impression myophore postérieure est portée sur une lame saillante comme chez Valletia, la dent latérale postérieure PII est parfaitement reconnaissable, par contre l’anté- rieure AIÏ faible et conique comme chez les formes inverses n'offre plus que les traces de la fossette antérieure. La fosse cardinale posté- rieure 3ab’ est moins spacieuse que chez H. Luci. A la valve droite, l'impression myophore postérieure est également portée sur une lame saillante, la dent postérieure 3 ab, beaucoup moins robuste que chez l’espèce citée plus haut, n’est presque pas déversée, l’antérieur AI est fort réduite. L'ensemble des caractères de cet appareil cardinal en voie de réduc- tion et de transformation annonce ainsi celui de Valletia. Matheronia sp. gr. de M. gryphoides Math. Forme d’assez grande taille rappelant certains types de l’Urgonien de Bulgarie. Valletia sp. aff. Tombecki Mun.-Chalm. Forme de taille moyenne, équivalve, bien caractérisée par la disposition de ses impressions myophores. Monopleura sp. Forme droite, allongée, de grande taille. rappelant M. imbricata Math. Id. Forme enroulée, à charnière robuste, analogue à certains types bulgares. Comme on le voit, la faune de Rudistes de la Dobrogea offre un intérêt considérable à cause de l'association jusqu'à ce jour 1. La présence de Diceras dans ces assises, déjà entrevue par Peters, m'avait été en outre indiquée verbalement par M. Douvillé. 474 GROUPE INVERSE ET NORMAL CHEZ LES CHAMACÉES 18 Nov. inconnue de types caractéristiques du Jurassique, Diceras et Heterodiceras, avec ceux du Crétacé, Valletia, Monopleura. Dans ces conditions l'attribution d’un semblable niveau à l'Urgonien devient insoutenable. Sa position stratigraphique exacte est sans doute délicate à préciser, néanmoins comme à considérer la fré- quence relative des types, il s’agit d’une faune de Monopleura, de Valletia et de Matheronia rappelant assez celle du Valanginien supérieur mais vieillie par la persistance de Diceras et d'Heterodi- ceras, On pourrait au moins provisoirement rapporter les calcaires à Rudistes de Cernavoda à la base du Crétacé (Berriasien ou Valanginien inférieur). M. Douvillé insiste sur la grande importance que présente l'association des genres de Rudistes signalés à Cernavoda par M. Paquier. Il croit se rappeler toutefois que les échantillons recueillis par M. Anastasiu provenaient des deux rives du Danube et il serait prudent de s'assurer que la faune est bien la même des deux côtés. SUR LES RELATIONS DU GROUPE INVERSE AVEC LE GROUPE NORMAL CHEZ LES CHAMACÉES par M. V. PAQUIER. MM. Douvillé et F. Bernard ont fait remarquer qu’à cause de la présence, à la valve gauche de certains Diceras, d’un rudiment de dent postérieure PII, et de la tendance à l’atrophie de la dent antérieure AT à la valve droite d’Heterodiceras et surtout de Matheronia, disposition rappelant alors celle de la valve homo- logue de Valletia, les formes inverses paraissent dériver des normales par le développement progressif de PII et l’atrophie de AI. A la suite de l'examen d’une nombreuse série de prépa- rations d'Helerodiceras Luci Defr. sp., de l'Heterodiceras de la Dobrogea et de Valletia Tombecki Mun.-Chalm., M. Paquier croit pouvoir formuler les remarques suivantes : La dent postérieure PIT existe foujours à la valve gauche d'Heterodiceras Luct, aussi bien sur les exemplaires de l'Echaillon et du Bois de Mounier (Gard) que sur ceux même de Stramberg 1901 SUR L'ORIGINE DES KLIPPES DES CARPATHES 475 (à en juger par certaines figures données par M. Boehm) et s’y place à la suite d’une longue nymphe ligamentaire. Chez l’ Heterodiceras de la Dobrogea cette nymphe se raccourcit et la dent postérieure qui la suit s'éloigne du bord ventral. En même temps les impres- sions musculaires postérieures sont alors portées sur les lames et comme on l’a vu plus haut, l’ensemble des caractères de l’appareil cardinal en voie d'atténuation et de transformation annonce nette- ment Valletia. Dans ce dernier genre, chez V. Tombecki Mun.- Chalm., à la valve gauche, la nymphe ligamentaire s’est encore raccourcie et recouvre partiellement la dent PII qui a encore pro- gressé vers le bord dorsal, tout en restant généralement rudimen- taire, toutefois, chez certains exemplaires la saillie de cet organe s’'accentue, le ligament vient se loger dans une dépression creusée à sa base et c’est alors la disposition connue chez Monopleura et un grand nombre de formes inverses. Ainsi donc, Heterodiceras Luci, l’Heterodiceras de la Dobrogea et Valletia constituent une série qui montre la dérivation des formes inverses ou Rudistes proprement dits aux dépens des Dicératinés par un processus déjà clairement pressenti par M. Douvillé et qui consiste essentielle- ment dans Le développement progressif de la dent postérieure P IT à la valve gauche et l’atrophie, puis la disparition totale, à la valve droite, de la dent antérieure AT. SUR L'ORIGINE DES KLIPPES DES CARPATHES par M. Romulus SEVASTOS. Deux théories ont été émises par les géologues autrichiens sur l’origine des klippes. M. Neumayr attribue aux klippes une origine profonde ; il explique leur arrivée à la surface par des mouvements tectoniques et par la différence d'’élasticité et de dureté des calcaires et des grès. Pendant le plissement le calcaire moins élastique a éclaté en lambeaux ; la poussée continuant à se faire sentir a contraint ces lambeaux à s'enfoncer comme des coins, dans les grès superposés plus tendres. Postérieurement les agents atmosphériques en démantelant les grès ont isolé les klippes calcaires, M. V. Uhlig attribue une extension plus grande aux klippes et il les considère comme formés, non seulement par des roches 476 SEVASTOS. SUR L ORIGINE DES KLIPPES DES CARPATHES 18 Nov. Jurassiques, mais encore par des massifs identiques en apparence, de plus en plus anciens jusqu'aux schistes cristallins. Il admet que les klippes ne sont autre chose que des îles, contemporaines des dépôts qui les entourent. Entre autres arguments, il cite ce fait que les couches de grès dans le voisinage de la klippe sont presque toujours inclinées. Parcourant depuis plusieurs années les Carpathes moldaves (dis- trict de Neamtz et Suceava), j'ai pu observer de nombreux klippes. En suivant la vallée d’un affluent du Bistritza, le ruisseau Farcasa, j'ai rencontré une coupe naturelle qui me parait démontrer nette- ment, dans le sens de Neumayr, l’origine profonde des klippes. Aux pieds de la falaise les couches se trouvent à découvert, sur une hauteur d’une dizaine de mètres. Un petit rocher de calcaire jurassique, compact, gris, est dressé verticalement en face de la corniche de grès massif; sur la gauche, les bancs de grès massif sont couchés vers l’est. Les plus inférieurs sont constitués par un grès grossier, dont les éléments atteignent jusqu'à 8 millim. et diminuent au fur et à mesure qu'on monte dans la série. Les couches s’arrêtent brus- quement à droite contre un banc vertical de grès, avec les mêmes éléments, mais beaucoup plus gros; ce grès indique que le banc appartient à une couche inférieure à celles qu'on peut voir à la surface. Un peu plus à droite, en face de la klippe, les blocs de grès sont accumulés sans ordre, mais vers l’euest la stratification devient de nouveau régulière et les couches s’inclinent dans cette direction. Cette disposition des couches démontre donc les faits suivants : 1° Le banc vertical a été relevé et poussé de la profondeur jusqu’à la position actuelle ; 2° le morcellement des bancs de grès est dû à une poussée de bas en haut, et, les couches étant brisées justement au dessus de la klippe, elle seule a pu en être cause; 3 le plissement des couches a été concomitant avec la force qui a soulevé la klippe; 4° la klippe est arrivée de la profondeur. Les agents atmosphériques en enlevant le Flysch ainsi disloqué et préparé pour l'érosion isoleront le bloc calcaire loin de la falaise, le transformant en klippe typique de petite dimension. SUR LES - POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS par M. F. PRIEM. (PLancHes X Er XD). SOMMAIRE Niveaux divers de l’Eocène inférieur des environs de Reims. — Elasmo- branches. Acanthias orpiensis Winkler sp., Squatina Gaudryi n. sp., Odontaspis Rutoti Winkler sp., Odontaspis elegans Agassiz sp., Lamna striata Winkler sp. — Holocéphales. — Téléostomes. Amia robusta n. sp., Amia (Pappichthys) Barroisi Leriche sp., Lepidosteus suessionensis P. Gervais, Arius? Lemoinei n. sp., Phyllodus Gaudryi n. sp., Egerlonia isodonta Cocchi, Nummopalatus Vaillanti n.sp., Nummopalatus paucidens n. sp., Labridæ indéterminés, Embiotocidæ ? indéterminés, Sparidæ. — Résumé. Niveaux divers de l’Eocène inférieur des environs de Reims M. le docteur Lemoine a signalé a plusieurs reprises la présence de Poissons dans l'Eocène le plus inférieur des environs de: Reims !, où il a distingué à la base le Cernaysien (de la localité de Cernay), et plus haut l’A géien (de la localité d'Ay). Il y a peu d'années, le docteur Lemoine ? a étudié les divers niveaux de la faune cernaysienne.Ces niveaux sont de bas en haut: 1. LEMOINE. Recherches sur les ossements fossiles des terrains tertiaires des environs de Reims. Ann. Sc. nat. zoo1., 6° sér., t. VII, n° 1, 1878, p. 5. — Ib. Recherches sur les Oiseaux fossiles des terrains tertiaires inférieurs des environs de Reims, r° partie. Reims, 1878, p. 56 et 65 ; 2° partie. Reims, 1881, p- 96, 797, 79. — In. Communication sur les ossements fossiles des terrains tertiaires inférieurs des environs de Reims. Ass. franc. Ae. Sc. Congrès de Montpellier, 1879, p. 585-599. — LEMoINE et AUMONIER. Communication Sur les terrains tertiaires des environs de Reims. Ass. franç. Av. Sc. Congrès de Reims, 1880, p. 605-620. — Lemoine. Sur l’ensemble des recherches paléonto- logiques faites dans les terrains tertiaires inférieurs des environs de Reims. C. R. Ac. Sc., CIV, p. 403. Paris, 14 février 1887. 2, Lemoine. Etude sur les couches de l’Eocène inférieur rémois qui contien- nent la faune cernaysienne et sur deux types nouveaux de cette faune. B.S. G. F., (3), XXIV, 1896, p. 333-334, pl. XIV, 458 F. PRIEM 18 Nov. 10 Les sables de Chälons-sur-Vesle : 2 Les marnes et calcaire de Rilly; 3° Le conglomérat de Cernay. Les couches qui surmontent immédiatement le Cernaysien, comprennent, d’après le docteur Lemoine, de bas en haut : 1° Les marnes lacustres supérieures de Chenay, Rilly, Berru, etc ; 2 Les argiles à lignites (Berru, Rilly, Trépail, etc.); 3° Les sables à Unio et Teredina d’Ay, Chavot, Cuis, Avenay, Mont Bernon. Ces sables contiennent la faune que M. Lemoine appelle agéienne. Les diverses assises du Cernaysien du docteur Lemoine, y compris le conglomérat de Cernay, se rangent à la base de l’Eocène inférieur, avec les sables de Bracheux dans l'étage thanétien 1. Avec les lignites du Soissonnais, l’argile plastique et les fausses glaises, les marnes supérieures de Chenay et les sables d'Ay (Agéien) se rangent dans l’étage sparnacien ; au-dessus se trouvent les sables de Cuise-la-Motte (étage y-présien). Le docteur Lemoine cite des Poissons, pour le Cernaysien, dans les sables de Chälons-sur-Vesle et dans le conglomérat de Cernay. Les sables de Chälons-sur-Vesle contiennent d’après lui des pièces maxillaires assez intactes de Chimères (Les Chauffours), des vertè- bres et dents de Squales, des plaques dentaires de Myliobatis, des boucles de Raïes (Les Chauffours). Pour le conglomérat de Cernay, la nomenclature est plus longue. On y trouverait : TÉLÉOSTÉENS ACANTHOPTÉRYGIENS ; Sparidés, plaques dentaires (Cernay) ; ; » PHysostTomEs : Stratodontidés : Enchodus (Cernay); GanoïDpes : Amiadés : Pappichthys (Cernay) ; HoLocéPpALEs : Chiméridés : Edaphodon (Les Chauffours) ; PLAGIOSTOMES : Myliobatidés : Myliobatis (Chenay, Cernay et autres localités) ; » Lamnidés : Odontaspis (Cernay et autres loca- lités); Lamna (nombreuses localités); Otodus (nombreuses localités). Quant aux sables à Unio et Teredina de l’Agéien, l’auteur ? dit que les Poissons sont des Amiadés (Pappichthys) ; des Lépidostées 1. A. de L'APPARENT. Traité de Géologie, 4° édition, 1900, p. 1420. 2. LEMoINE. Recherches sur les Oiseaux fossiles des environs de Reims. 1° partie. Reims, 1878, p. 65 ; 2° partie. Reims, 1881, p. 79. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 479 (Clastes), des Sparoïdes, des Phyllodus ; les restes de Myliobates sont encore assez nombreux, les dents de Squales sont rares. Tout récemment M. Leriche ! a publié un intéressant travail sur les Poissons des sables à Unio et Teredina des environs d’'Epernay (Marne), d’après les matériaux recueillis par MM. Dutemple et Diart et conservés à l’Université de Lille. Les pièces proviennent de Cuis, Chavot, Avize, Monthelon; M. Leriche y distingue les espèces suivantes : FORMES MARINES FORMES D'EAU DOUCE Egertonia Gosseleti Leriche. Silurus ? Gaudryi Leriche ?. Nummopalatus Sauvagei Leriche. Arius Duternplei Leriche. » trapezoidalis Leriche. Amia Lemoinei Leriche. Odontaspis elegans Agassiz sp. Pappichthys Barroisi Leriche. » contortidens Agassiz. Lepidosteus suessionensis P. Ger- » cuspidata Agassiz Sp. vais. » certicalis Agassiz. Lamna ? obliqua Agassiz sp. » striata Winkler sp. Myliobatis sp. Le docteur Lemoine a légué à la collection de Paléontologie du Muséum les fossiles qu'il avait recueillis avec tant de soin et de persévérance. J’ai pu étudier, grâce à l’obligeance de M. Gaudry, les restes de Poissons de la collection Lemoine. Notre regretté confrère avait certainement l'intention d'étudier ces Poissons. Dans une note présentée à l’Académie des Sciences (C. R., 14 février 1887) et ayant pour titre : Sur l’ensemble des recherches paléonto- logiques faites dans les terrains tertiaires inférieurs des environs de Reims, il dit : « J’ai l'honneur de présenter à l’Académie les dessins relatifs à 25 espèces de Poissons, se subdivisant en Poissons Téléostéens (6 espèces), Cartilagineux (10 espèces), et Poissons Ganoïdes (6 espèces). Ces derniers offrent cet intérêt spécial, qu'ils appartiennent aux familles des Lépidostés et des Amiadés que l’on rencontre encore dans les grands fleuves d'Amérique ». Mr: Ve Lemoine et le fils de notre confrère, M. Léon Lemoine, docteur en droit, ont bien voulu rechercher sur ma demande les 1. Lericue. Faune ichthyologique des sables à Unios et Térédines des environs d'Epernay (Marne). Annales de la Société géologique du Nord. Lille, t. XXIX, 1900 (séance du 11 juillet), p. 193-196, pl. I et IT et 5 fig. dans le texte. 2. M. Leriche a été amené depuis à rapprocher les épines de Siluridés en question du genre Pimelodus. Silurus ? Gaudryi devient ainsi Pimelodus Gaudryi Leriche (Contribution à l'étude des Siluridés fossiles. Annales de la Société géologique du Nord, Lille, t. XXX, 1901, p. 165-166). 480 F. PRIEM 18 Nov: dessins exécutés par le docteur Lemoine et me les montrer. Ii avait figuré, sans indication d'espèces, des dents de Squales, des chevrons et piquauts de Myliobatidés, des restes de Chiméroïdes, des frag- ments d'Amiadés (vertèbres, mâchoires, parasphénoïdes), sous le titre commun d'Amiadés du conglomérat de Cernay, et d’autres, sous le titre d'Amiadés des sables supérieurs (Agéien), des restes de Lépidostées des mêmes sables (écailles, plaques osseuses, ver- tèbres, fragments de mâchoires), des dents de Sparidés et une plaque de Phyllodus dont je parlerai plus loin. Il y a aussi sous le nom de Myledaphus des croquis dont je dirai quelques mots à propos des Sparidés. Dans la collection aujourd’hui au Muséum, le docteur Lemoine avait généralement rangé à part les Poissons du Cernaysien et de l’Agéien; mais il est rare que les localités d’origine soient parfaitement indiquées. Nous étudierons ici ces Poissons dans leur ordre zoologique. 1° Élasmobranches Les Elasmobranches de la collection Lemoine appartiennent aux espèces suivantes : Acanthias orpiensis Winkler sp. Odontaspis eleg'ans Agassiz sp. Squatina Gaudryi n. sp. Lamna macrota Agassiz sp. Myliobatis Dixoni Ag. (plaques » striata Winkler sp. dentaires et chevrons isolés). » verticalis Agassiz. Myliobatis acutus Ag. (aiguillon). » Vincenti Winkler sp. » sp. (aiguillon). Otodus obliquus Agassiz. Aetobatis irregularis Ag. (frag- Oxyrhina Desori Agassiz. ment de chevron). Carcharodon auriculatus Blv. sp. Odontaspis Rutoti Winkler sp. Galeocerdo latidens Agassiz. » cuspidata Agassiz Sp. Vertèbres de Squales !. Pour certains de ces restes la provenance est indiquée : il s’agit des sables de Châlons-sur-Vesle, de ceux du niveau de Bracheux et du conglomérat de Cernay. Pour les autres la provenance de ces dents et autres débris n’est pas donnée : ils peuvent provenir aussi bien de l’Agéien que du Cernaysien. Toutefois, le docteur Lemoine a remarqué lui-même que les dents de Squales sont rares dans l'Agéien et il dit qu’elles sont communes dans les sables de 1. Il faut citer aussi deux dents d’'Hybodonte de provenance douteuse ressemblant beaucoup à celles du genre crétacé Synechodus ; elles provien- nent peut-être du Cernaysien. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 481 Chälons-sur-Vesle et dans le conglomérat de Cernay. La plupart des débris cités plus haut ont probablement été trouvés dans le Cernaysien. Dans la collection Lemoine, il n’y a que deux petits chevrons de Myliobatis et quelques petites vertèbres de Squales qui proviennent sûrement de l’Agéien. Cependant, M. Leriche a signalé dans l’Agéien, comme on l’a vu plus haut, un bon nombre des espèces d’Elasmobranches que nous avons déterminées. Ces espèces se trouvent pour la plupart aux différents niveaux de l’Eocène et M. A. Smith Woodward leur a consacré récemment un important travail !. Nous n'en examinerons que quelques-unes, qui nous paraissent donner lieu à des remarques intéressantes. ACANTHIAS ORPIENSIS Winkler sp. (PI. XI, fig. 21-22). Il y a dans la collection Lemoine des petites dents, provenant probablement du Cernaysien, à racine large et basse, avec un cône principal précédé d’un bord tranchant finement crénelé et légèrement arqué; en arrière du cône principal, après une encoche, se trouvent quelques denticules. Le cône principal pousse sur la racine, à la face externe, un prolongement descendant, et à la face interne un autre prolongement presque horizontal. Il y a quelques petits plis à la base du bord antérieur de la couronne sur la face interne. Une de ces dents présente une petite encoche sur le bord antérieur. Ces dents présentent les plus grandes analogies avec des denis du Heersien d'Orp-le-Grand en Belgique (étage thanétien) décrite par Winkler sous le nom de Votidanus orpiensis ? et rapportées maintenant au genre Acanthigs.M.A. Smith Woodward * en a cité de semblables dans l’Eocène inférieur de Chislehurst en Angle- terre (couches de Woolwich et de Reading, étage sparnacien le plus inférieur, à la limite du Thanétien). Le professeur K. Bassani a signalé récemment cette espèce dans le calcaire éocène de Gassino (Piémont) ‘. 1. À. Smirx Woopwarp. Notes on the teeth of Sharks and Skates from english eocene formations. Proc. Geol. Ass., t. XVI, 1899, p. 1-14, pl. L. 2. WinkLer. Mémoire sur quelques restes de Poissons du système heersien. Arch. Musée Teyler, t. IV, 1856, p. 12-13, pl. I, fig. 13-19. 3. À. Smirn WoopwaARDp. Loc. cit., p. 2, pl. I, fig. 1-2. 4. EF. BaAssanr. Ittiofauna del calcare eocenico di Gassino in Piemonte. Attli R. Acad. Napoli, 2° série, t. IX, n° 13, 1899, p. 27-28, pl. IL, fig. 18-20. 19 Janvier 1902. — T. 1°". Bull. Soc. Géol. Fr. — 31 - 482 k. PRIEM 18 Nov. SQUATINA GAUDRYI n. Sp. (PI. XI, fig. 23-94). La collection Lemoine renferme une vingtaine de dents de Squatina ; une provient de Prouilly (Marne), et a été trouvée dans les sables du niveau de Bracheux, une autre de Chenay (niveau des sables de Chälons-sur-Vesle), deux de Montbré (Marne); pour les autres la localité n’est pas indiquée. Toutes ces dents sont semblables. Elles sont petites, à racine large et plate, portant en- dessous une dépression ; la couronne, dépourvue de denticules latéraux, pousse un prolongement descendant sur la racine à la face externe et un prolongement presque horizontal à la face interne. Certaines de ces dents sont plus larges et plus bassès que les autres et appartiennent aux côtés des mâchoires. Ces dents appartiennent à une même espèce du genre Squatina. Déjà une espèce de Squatina avait été signalée par Graves ! dans les sables de Cuise-la-Motte (étage yprésien) ; elle avait été appelée par Pomel Squatina Gravesi, mais ni décrite, ni figurée ; nous n’en avons l'indication que par Graves, indication reproduite par Gervais. Winkler ? a décrit et figuré des dents de Squatina du Heer- sien d'Orp-le-Grand sous le nom de Trigonodus primus (Squatina prima Winkler sp.)°. Les dents de Squatina de la collection Lemoine ont une racine moins trapue et une couronne moins recourbée que celles de S. prima ; leur couronne est droite ou très faiblement courbée ; d’autre part, nous ne pouvons les identifier avec certitude à Squatina Gravesi Pomel. Nous en ferons une espèce à part sous le nom de Squaltina Gaudryi. Une dent analogue conservée au Muséum (Collection Deshayes 1873) provient d'Hermonville, près Reims (niveau non indiqué : il y a à Hermonwville le Calcaire grossier et la Glauconie qui sépare ce calcaire des sables de Cuise). M. A. Smith Woodward t a figuré des dents de Squatina des couches de Woolwich et de Reading (étage sparnacien inférieur) et 1. GRAVES. Essai sur la topographie géognostique du département de l'Oise. Beauvais, 1847, p. 590. — GER vaAIs. Zoologie et Paléontologie françaises, 1" édi- tion, 1848-52. Explication des planches LXVII à LXXX. Poiss. foss., p.3; 2° édition, 1859, p. 517. 2. WinxLer. Loc. cit., p. 13-14, pl. L, fig. 18-21. 3. NoerunG. Sitzungsb. naturf. Freund. Gesellsch. Berlin, 1886, p. 16. 4. A. Smrrn Woopwarp. Loc. cit., p. 2, pl. I, fig. 3-5. I901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 483 du London-Clay (étage yprésien ou sparnacien supérieur), maïs ne leur a pas donné de nom spécifique. Elles me paraissent être identiques à celles de l’Eocène de Reims. Oponraspis Rurori Winkler sp. (PI. XI, fig. 25-96). Cette espèce est caractérisée par ses dents à face interne lisse ; il y a deux paires de denticules latéraux pointus dont l’externe est le plus petit; il peut y avoir d’ailleurs une autre paire de denti- cules encore plus externes et plus insignifiants. A la face externe, la ligne de base de la couronne forme un angle rentrant et porte de petits plis longitudinaux très serrés. Dans la collection Lemoine cette espèce est représentée par de nombreux exemplaires de dents antérieures et de dents latérales de différentes tailles. La plupart de ces dents n’ont pas de lieu de provenance certaine ; cependant une a été trouvée à Montbré, une autre à Sézanne, , O. Rutoti est commun dans les couches éocènes inférieures de Belgique (Heersien, Landénien, Yprésien) ; c’est là que Winkler lPavait trouvé, il l’a décrit sous le nom d’Ofodus Rutoti !. M. A. Woodward l’a signalé dans les sables de Reculvers, Kent (étage thanétien) ?. La collection de Paléontologie du Muséum renferme des dents d’Odontaspis Rutoti mêlées à des dents de Lamna Vincent Winkler sp. provenant de Cuise-la-Motte et que j'ai eu l’occasion de déterminer, ainsi que ces dents de Lamna Vincenti. On voit que Odontaspis Rutoti commun dans l’Eocène inférieur de Belgique et d'Angleterre se trouve aussi dans les niveaux inférieurs de l'Eocène du bassin de Paris. ODONTASPIS ELEGANS Agassiz sp. (PI. XI, fig. 27-28). On doit réserver le nom d'O. elegans à des dents dont le type a été figuré par Agassiz comme provenant de Sheppey ?. Les dents 1. WinkLer. Loc. cit., p. 4-7, pl. I, fig. 3-4, et A. Smrrx Woopwarp. Cata- logue of the fossil Fishes in the British Museum, part l, 1889, p. 361. 2. À. SMITH WoopwaRD. Proc. Geol. Ass , 1899, p. 7, pl. L, fig. ro-11. 3. AGaAssrz. Rech. Poiss. foss., t. IL, 1843, p. 369, pl. 40b, fig. 94. — O. JAEKEL. Unter- tertiare Selachier aus Südrussland. Mém. Comité géologique. Saint- Pétersbourg, t. IX, n° 4, 1895, p. 29-30, pl. I, fig. 8-19. — A. Suirm WoobWARD. Proc. Geol. Ass., 1899, p. 8-9, pl. I, fig. 15-18. 484 F. PRIEM 18 Nov. plus larges et à striation moins nette attribuées généralement à O. elegans ne sont autres que les dents antérieures de Lamna macrota Agassiz sp. (espèce également attribuée au genre Odon- taspis par le docteur Jaekel). Les dents antérieures d’'O. elegans typique sont étroites, hautes, à courbure peu prononcée, fortement striées sur la face interne et avec de petits denticules latéraux pointus. Les dents latérales sont également minces, striées, mais moins élevées et avec des denti- cules latéraux pointus relativement plus grands. Beaucoup de ces dents se trouvent dans la collection Lemoine. Certaines proviennent de Chenay (niveau des sables de Châlons- sur-Vesle) ; d’autres des Chauffours (conglomérat de Cernay) ; elles sont accompagnées de dents d'Odontaspis cuspidata Agassiz sp. L'espèce, qu'on trouve abondamment aux divers niveaux de l’Eocène, date donc de l’Eocène le plus inférieur. Je pense qu'il faut rapporter à O. elegans les dents que M. Leri- che ! signale dans l’Agéien de Cuis et qu'il appelle ©. contortidens. Cette dernière espèce ne paraît se montrer qu’à partir de l’'Oligo- cène ou de l'Eocène le plus supérieur. LAMNA sTRIATA Winkler sp. (PI. XI, fig. 29-30). Il y a dans la collection Lemoine de petites dents assez nom- breuses ayant tout au plus o m. or de longueur totale et le plus souvent de 6 à 8 millimètres seulement. Sur la face interne de la couronne, il ya des stries peu prononcées et qui ne s'étendent généralement pas loin de la base. Les denticules latéraux sont pointus. Les dents sont remarquables par leur racine basse et s'étendant en largeur, de sorte que l’angle des deux branches de racine est très ouvert. Je rapporte ces dents à Lamna striata Winkler sp. Winkler avait donné le nom d'Ofodus striatus à de petites dents semblables provenant du Heersien de Belgique ?. Les dents de la collection se trouvaient avec des dents d’'Odontaspis cuspidata et de ©. elegans de Chäâlons-sur-Vesle et proviennent probablement de cette localité. M. Leriche * signale cette espèce dans l’Agéien de Cuis. 1. LEricHe. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 192. 2. WinkLer. Loc. cit , p. 8-9, pl. L, fig. 7-9. — A. Smirx Woopwarp. Cata- logue, part I, 1889, p. 409. 3. Lericug. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 195. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 489 La collection Lemoine renferme des vertèbres de Squales assez nombreuses, provenant du Cernaysien des Chauffours et appar- tiennent probablement à des Odontaspis ou à des Lamna. Il ÿ a aussi de plus petites vertèbres de Squales dont quelques-unes proviennent de l’Agéien. 2° Holocéphales EDAPHODON BUGKLANDI Agassiz. La collection Lemoine renferme des restes d’un Chiméroïde qui est Edaphodon Bucklandi Agassiz. Il est représenté par des dents mandibulaires assez bien conservées provenant des Chauffours, (sables de Châlons-sur-Vesle et conglomérat de Cernay). Quelques débris de Chiméroïde trouvés à Prouilly (sables de Bracheux) appartiennent probablement à la même espèce. Cette espèce a été signalée dans le London-Clay dans les cou- ches de Bagshot et de Bracklesham en Angleterre, dans le Bruxellien de Belgique, et par suite à des niveaux assez élevés de l’Eocène. Sa présence dans le Cernaysien montre qu'elle date de l’Eocène le plus inférieur. Signalons enfin dans l’Agéien des fragments indéterminables d’Ichthyodorulites. 8° Téléostomes Ordre des Actinopterygii Sous-ordre des Protospondyli — Famille des Amiadæ AMIA ROBUSTA N. SP. (PI. X, fig. 1-13, et fig. 1-3 du texte). M. Lemoine a recueilli à Cernay, dans le conglomérat, de nom- breux débris d’un Amiadé qui pouvait atteindre une taille consi- dérable. Il y a de nombreuses vertèbres aplaties, biconcaves,avec un petit trou pour la notocorde, placé un peu plus haut que le milieu de la vertèbre. Elles présentent comme celles d'Amia de doubles facettes articulaires pour les épines neurales, qui s’attachaient à deux vertèbres successives (figure 1 du texte). Quelques vertèbres ont encore les restes de prolongements transverses (parapophyses).. Celles-ci peuvent être placées à un niveau élevé sur le centre 486 F. PRIEM 18 Nov. vertébral ou à un niveau assez bas. Dans le premier cas, il s’agit de vertèbres antérieures et dans le second de vertèbres posté- rieures. A la face inférieure il y a deux fossettes longitudinales étroïi- tes (fig. 2 du texte). Les plus grandes vertèbres qui sont les vertèbres antérieures ont une longueur (épaisseur) petite par rapport aux deux autres dimen- sions. Leur diamètre transverse (largeur) est considérable par rap- port à la hauteur; la plus grande Fig. 1-2. — Amia robusta n. sp. Conglomérat de Cernay.— Ver- largeur est vers le haut au niveau tèbre n° I de la première série, du trou de la notocorde ; elle dimi- vue (fig. 1) de dessus et vue (fig. 2) de dessous. Grandeur naturelle. nue vers le bas, de sorte que les vertèbres tendent à se terminer en pointe. Dans les vertèbres posté- rieures ou caudales, la longueur (épaisseur) est relativement plus grande, la hauteur diffère moins de la largeur, de sorte que la vertèbre tend à devenir circulaire. Voici les dimensions expri- mées en millimètres pour sept vertèbres, dont les trois dernières appartiennent à la région postérieure : L Il III IV V VI VII Longueur (épaisseur) . 12 12 LORD STUNT D HAUTEUR EE 2 NOT 20 33 GODIN Gt 0 L'ArSeUr ASE NES 4o 38 35 27 20 Il y a d’autres débris ayant appartenu au même Amiadé de grande taille. Tels sont des os dentaires à face externe rugueuse et sculptée, et présentant à la face interne un sillon profond, s’éten- dant d’une extrémité à l’autre et s’ouvrant en avant ; et un fragment de maxillaire avec un morceau de la partie sus-alvéolaire. Sur ces fragments de mâchoires on voit les dépressions où s’attachaient les dents ; elles sont basses, presque carrées ou rectangulaires avec la grande dimension transverse par rapport à l'os, et avec les angles grossièrement arrondis. D’autres restes sont : un grand basioccipital, un parasphénoiïde de fortes dimensions avec l’aire dentaire couverte de petits denti- cules, et un morceau de plaque osseuse de la tête semé de nom- breuses rugosités. Cette espèce devait présenter de grandes variations de taille. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 487 Voici une seconde série de vertèbres dont les dimensions sont exprimées en millimètres : I Il IIL AR IV UN VI VII Longueur (épaisseur). 9,5 6,5 7 821155 04 6:51000,0 Hauteur RER 0 10,9). 10 OR TS D ARTOS 9,5 LATE PONE NON SOON CPS CS ME II,D 0 10,0 Il y a aussi de nombreuses vertèbres plus petites, formant un troisième groupe, dont voici les dimensions pour trois échantillons: I Il IIT Longueur (épaisseur). . . . . 3,5 3,5 4,5 HAUtEUTISE PER ANR A 0. 3j 8,5 8 ATOS 0 10,2 9 9 8 Mais ces diverses vertèbres ont la même forme que les grandes, et on peut leur faire correspondre pour les dimensions des basiocei- pitaux des fragments de maxillaires, de dentaires (fig. 3 du texte), et des fragments de parasphénoïdes qui ne diffèrent que par la taille de ceux qui correspondent aux grandes vertèbres. Sur tous les os des mâchoires on voit des alvéoles bas à angles grossièrement arrondis, presque carrés ou rectangu- Fig. 5. — Amia robusta n. laires avec la plus grande dimension SIL re transverse par rapport à l’os. On est A ee en ni. obligé de rapporter ces fragments de dentaire. Grandeur na- grandeur variée à la même espèce. turelle. Parmi les débris les plus complets des | individus de petite taille il faut signaler des maxillaires. La partie antérieure qui chez le vivant était cachée par le prémaxillaire est relevée, dépourvue de dents; à la suite vient une partie plus mince, plus comprimée, pourvue d’alvéoles; à la surface, il y a des rugosités formant des lignes longitudinales. On croit noter aussi des dents isolées et un fragment d’os de la région palatine (palatin ou ptérygoïide) couvert de petits denticules. | En résumé, les débris d’Amiadé trouvés à Cernay doivent appar- tenir à une même espèce présentant de grandes variations de taille mais pouvant devenir très forte. Ainsi chez l’'Amia calpa actuel, long d'environ o m. 66, les vertèbres ont une hauteur etune longueur qui atteignent à peine le tiers de celles des plus grands individus de Cernay. Ceux-ci devaient par suite avoir environ 2 mètres de long, tandis que les plus petits individus avait la taille de l’Amia calva. 488 F. PRIEM 18 Nov. M. Lemoine rapportait les restes d’Amiadé de Cernay au genre Pappichthys créé par Cope !, et en effet les pièces de Cernay ressemblent beaucoup à celles figurées par Cope et provenant de l'Eocène du Wyoming. Suivant Cope Pappichthys ditfère d’'Amia, en ce que les os des mâchoires ne portent qu’une seule série de dents au lieu de plusieurs, et en ce que les vertèbres antérieures sont plus aplaties et ont un diamètre plus grand. Mais l’auteur lui-même ne paraît pas accorder à ces caractères une valeur définitive. D'ailleurs M. E. T. Newton ? fait remarquer que, chez : l'Amia actuel, il n’y a de rangées de dents supplémentaires que sur l'os splénial; les dentaires, maxillaires et prémaxillaires ne portent réellement qu’une seule rangée de dents: Je signalerai à ce propos un fragment de maxillaire de l Amiadé de Cernay où, entre les grands alvéoles internes, il y a quelques alvéoles externes plus petits, paraissant indiquer des dents supplémentaires vers le dehors, ce qui irait encore à l'encontre de la diagnose du genre Pappichihys. En somme, le genre Pappichthys de Cope, ne paraît pas devoir être distingué du genre Amia de Linné. C'est à ce dernier genre que nous rapporterons le Poisson de Cernay sous le nom d'Amia robusta n. sp. AmiA (Parpicarays) Barroisr Leriche I. X, fig. 14-16). Une petite espèce d’Amiadé a été trouvée dans l’Agéien à Cuis et Monthelon par M. Leriche ?. Il l'a appelée Pappichthys Barroisi. On doit rapporter à cette espèce d'assez nombreux fragments d'Amiadé de la collection Lemoine, provenant de l’Agéien. Les vertèbres ont tous les caractères de celles des Poissons du genre Amia. Elles sont de petite taille et rappellent par leurs dimensions les plus petites vertèbres d'Amia robusta. Leur longueur (épaisseur) esten moyenne de 3 millim. 5, leur hauteur de 7 à 8, leur largeur de 9 millim. Il y en a même de plus petites dont 1. Cope. Ann. Report U. S. Geol. Surv. Territories, 1872 (1873), p. 634, et Report U. S. Geol. Surv. Terr., t. IIL, 1883 (1884) : The Vertebrata of the ter- tiary formations of the West, p. 56-61, pl. II, fig. 52-59, pl. IT et IV. — Cope réunissait à son genre Pappichthys le genre Hypamia et le sous-genre Pro- tamia de Leidy (Proc. Acad. Nat. Sc. Philadelphia, 1873, P. 98). 2. E.-T. NewrTon. On the remains of Amia from Oligocene strata in the isle of Wight Quart. Journ. Geol. Soc. London, t. LV, 1899, p. 2. 3. Lericne. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 185-187, pl. IL, fig. 1, 3-16 et fig. 3 dans le texte. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 489 les dimensions ne dépassent pas pour la longueur 2 millim. 5, pour la hauteur 3 et pour la largeur 4,5. Ces vertèbres sont accompagnées de fragments de maxillaires et de dentaires. Les maxillaires ont la surfacé externe couverte de lignes longitudinales ; les dentaires ont la surface externe rugueuse et présentent sur la face interne une forte rainure. Les alvéoles diffèrent de ceux de l’Amia robusta ; leurs bords sont plus élevés, ils sont bien arrondis, circulaires ou ovales. * Il paraît donc y avoir dans l’Agéien une espèce d'Amia distincte de l’Amia robusta, plus petite, atteignant la taille de l’Amia caloa actuel. Cette espèce nommée par M. Leriche Pappichthys Barroisi doit être rangée comme les autres espèces du genre Pappichthys dans le genre Amia. Nous rapporterons à la même espèce des plaques osseuses de la tête couvertes de rugosités et qui ressem- blent à celles que M. Leriche a rapportées à Pappichthys Barroisi. La collection Lemoine de l’Agéien renferme aussi deux vertèbres d'Amia plus grandes, ayant comme dimensions : I IL Longueur (épaisseur). . . . . . . 6 4,5 Haute UMTS AUS REA 12,5 IL APPEL EN MRA. D NIE NUE RME 16 15,5 Elles ne différent de celles de l'Amia Barroisi que par la taille et appartiennent probablement à la même espèce. D’après ce qui précède, il y a dans le conglomérat de Cernay une espèce d’'Amia, l'Amia robusta, présentant de grandes variations de taille, mais pouvant atteindre au moins le triple de la taille de l’Amia calva actuel, et dans l’Agéien une espèce, l'Amia Barroisi, rappelant davantage l'espèce vivante. M. Leriche ! a établi pour une vertèbre caudale trouvée dans l'Agéien de Cuis une autre espèce sous le nom d’Amia Lemoine. Sous-ordre des Actheospondyli. — Famille des Lepidosteidæ LEPIDOSTEUS SUESSIONENSIS ‘P. Gervais (PI. XI, fig. 1-8). Le genre Lepidosteus est représenté dans la collection de l’'Agéien du docteur Lemoine par de nombreux débris, malheureusement très fragmentaires. 1. LeRICHE. Ann. Soc. géol. Nord, XXIX, 1900, p. 183-185, fig. 2 du texte. 490 + F. PRIEM 18 Nov. Il y a d’abord des vertèbres opisthocæliques bien caractéris- tiques, peu allongées, avec les ares neuraux et les bases des apo- physes transverses, la partie postérieure d’un parasphénoïde, de nombreux fragments de plaques osseuses de la tête avec des rugosités de ganoïne disposées en lignes ramifiées et irrégulière- ment confluentes. On trouve aussi un fragment d'os à apophyse montante qui paraît être un prémaxillaire ; il y a en place deux grosses dents sillonnées et sur le bord externe de petits trous répondant à de petites dents qui ont disparu: deux autres fragments qui ont probablement appartenu à la mâchoire supérieure présentent une seule série de dents sillonnées à la base, dont quelques-unes seule- ment sont conservées. On doit noter aussi un fragment de mandi- bule à surface rugueuse, présentant les alvéoles de deux fortes dents ; le bord de ces alvéoles porte des stries qui se dirigent vers l'intérieur. Sur le bord externe on voit les alvéoles de dents plus petites. II y a aussi des dents détachées, pointues et sillonnées, qui appartiennent sûrement à un Lepidosteus. La collection Lemoine renferme toute une série d’écailles, mon- trant les diverses formes des écailles de Lepidosteus : rhombiques régulières de la région des flancs, allongées et irrégulières comme celles de la région centrale, canaliculées comme celles de la région latérale !. Ces écailles sont pour la plupart assez petites et lisses. Il y en aussi de beaucoup plus grandes, généralement lisses, mais dont quelques-unes présentent des rugosités. Agassiz avait décrit sous le non de Lepidotus Maximiliani des écailles lisses provenant du Caleaire grossier de Paris ?, Il s’agit là d'un véritable Lepidosteus. C'est à la même espèce L. M aximiliani, que M. Vasseur rapporte les pièces : vertèbres. écailles, plaques céphaliques, portions de mâchoires, etc., trouvées à Neaufles dans les fausses glaises (étage sparnacien). P. Gervais ? avait rapporté des pièces des mâchoires trouvées dans les lignites du Soissonnais (étage sparnacien), à une espèce qu'il désignait sous le nom de Lepidosteus suessionensis. M. Vasseur regarde Z. Suessionensis, 1. AGAssiz. Rech. sur les Poiss. foss., t. IX, 9° partie (1839-44), p. 29-32, pl. B. G. Vasseur. Sur la couche à Lépidostées de argile de Neaufles-Saint-Martin, près Gisors. B. S. G. F., (3), t. IV, 1856, p. 295-304, pl. VI. 2. AGassiz. Rech. sur les Poiss. foss., t. IL rr° partie, p. 9 et 268, pl. 29c, fig. 8-r1. 3. GERVAIS. Zool. et Paléont. franç., 1'° édition, 1848-52. Expl. des planches LIT à LXVI, p. 4, pl. LVUL, fig. 3-5 ; °° édition, 1859, p. 517, pl. 58, fig. 3-5. — Comptes-rendus Académie des Sciences, t. LXXIX, 1874, p. 846. 1001 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 491 comme identique à L. Maximiliani. Gervais a cité L. Maximiliani à Cuise-la-Motte ! ; il y est représenté par des écailles. M. Leriche ? a récemment étudié les restes de Lepidosteus de l'Agéien (Cuis, Monthelon, Chavot, Avize). Il remarque que L. Maximiliani Agassiz a été établi sur quelques écailles lisses, et que celles-ci se présentent chez tous les Lépidosteés, dans des proportions variant suivant les espèces. Rien n'autorise d'après lui à rapporter tous les Lepidosteés du bassin de Paris à L. Maximi- liani du Lutétien et il vaut mieux conserver pour les Lepidosteés du Sparnacien le nom de Lepidosteus suessionensis, en plaçant aussi dans cette espèce le Lépidosteé de Neaufles. Nous adoptons cette opinion. Nous rangerons dans la même espèce des écailles de Lepidosteés provenant du calcaire à lignites (argile plastique) de Coulommes (Marne); elles font partie de la collection de Saint- Marceau conservée au Muséum (n° 141, catalogue 1872) : ces écailles sont grandes et présentent des rugosités; elles proviennent de la partie antérieure du corps. Le Muséum possède quelques écailles de Lepidosteus provenant de l’Yprésien de Cuise-la-Motte et un fragment de maxillaire de même provenance portant encore une dent striée à la base (collec- tion d'Archiac, cat. 50). On ne peut pas les rapporter avec certi- tudes à Lepidosteus suessionensis ou à L. Maximiliant. Cope ? avait créé un genre Clastes pour les fragments de Lepidostéidés trouvés dans l'Eocène du Wyoming et, avec le docteur Lemoine, il regardait comme appartenant au même genre les débris de Lepidostéidés trouvés dans l’Eocène inférieur des environs de Reims. Mais le genre Clastes de Cope est imparfaite- ment caractérisé et se confond très probablement avec le genre Lepidosteus de Lacépède “. 1. Gervais. Zool. et Paléont. franç., 1'° édition. Expl. des planches LXVII à LXXX. Poissons, p. 2, pl. LXVIL fig. 9-13 ; 2° édit., 1859, p. 516, pl. 67, fig. 9-13. >. Lericue. Ann. Soc. géol. du Nord, t. XXIX, 1900, p. 187-191, pl. IL, fig. 17- 4x et fig. 4 dans le texte. 3. Core. Ann. Rep. U. S. Geol. Surv. Terr., 1872 (1873), p. 633. — Rep. U.S. Geol. Surv. Terr., t. IL : The Vertebrata of the tertiary formations of the West, 1883 (1884), p. 29-31 et p. 52-56, pl. I, fig. 6; pl, IL, fig. 25-45 et 50-52. 4. À. Smirm Woopwanrp. Cat. foss. Fishes Brit Mus,, t. IT, 1899, p. 442-445. — C.-R. Easrman. Fossils Lepidosteids from the Green River shales of Wyo- ming. Bull. Mus. Comp. Zool. at Harvard College, t. XXXVI, n° 3, p. 68. Cambridge, Mass., 1900. 492 F. PRIEM 18 Nov. Sous-ordre des Nematognathi. — Famille des Siluridæ Il y a dans la collection de l’Agéien du docteur Lemoine de nombreux fragments de piquants de nageoires qui appartienent sans aucun doute à des Siluridés. M. Leriche ! a récemment décrit sous le nom de Pimelodus Gaudryi (PI. XI, fig. 13) des piquants dorsaux et un fragment de piquant pectoral de Siluridé trouvés dans l’Agéien de Cuis et de Monthelon. Il a en outre rapporté ? à une autre espèce nouvelle : Arius Dutemplei (PI. XT, fig. r2) des piquants dorsaux et pectoraux de l’'Agéien de Cuis et de Chavot. Dans la collection de l’'Agéien du docteur Lemoine, il y a des piquants dorsaux de Pimelodus Gaudryi et un fragment qui doit être considéré comme un morceau de piquant dorsal d’Arius Dutemplei. Mais en outre, on y trouve des fragments de piquants de Siluridé indiquant au moins une espèce nouvelle. ARIUS ? LEMOINEI n. sp. (PI. XI, fig. 9-11). Un fragment assez complet, fort et massif, présente une partie de l'extrémité basilaire. Celle-ci est nettement dissymétrique et indique qu'il s’agit d'un piquant de nageoire pectorale droite. La face antérieure forme une carène dépourvue de tubercules ; la face postérieure est creusée d’un sillon large à la base. Les faces latérales sont ornées de côtes longitudinales irrégulières, noueuses, entre lesquelles on voit de petites dépressions arrondies. A la base y a de petits tubercules et on remarque aussi vers la base des traces de petits tubercules formant une rangée près du bord du sillon postérieur. Ce fragment (PI. XI, fig. 9-10), composé de deux morceaux qui s’ajustent très bien, a une longueur totale de o m. 057; la plus grande largeur à la base est de o m. 02 et l'épaisseur à la base 0 m. 015. Un autre débris plus étroit, avec le même mode d’ornementation, mais où les côtes longitudinales sont plus marquées, paraît avoir appartenu à l'extrémité distale du même piquant. M. Vaillant, professeur au Muséum, a bien voulu examiner ces 1. LERICHE. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 180-181, pl. I, fig. 7512 ; t. XXX, 1901, p. 165-166. 2. LERICHE. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, p. 181-183, pl. I, fig. 13-15. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 493 fragments. Ils appartiennent certaînement à un Siluridé voisin des Arius ou des Bagrus ; mais le genre n’est pas susceptible d’une détermination précise. Nous les attribuerons provisoirement au genre Arius et les rapporterons à une espèce nouvelle : Arius ? Lemoinei. Un autre fragment (PL. XI, fig. 11) sans la partie basilaire est plus comprimé que les précédents ; l’'ornementation est très analogue à celle des fragments précédents ; elle consiste sur les faces latérales en quelques fortes côtes longitudinales régulières entre lesquelles il y a de nombreuses dépressions arrondies; la face antérieure forme une carène dépourvue de tubercules, les bords du sillon postérieur sont lisses. La longueur de ce fragment est de o m. 032, sa largeur est de o m. 009, son épaisseur de o m. 005. Je pense qu'il faut le regarder comme un morceau de piquant dorsal qui pourrait appartenir à la même espèce. Parmi les nombreux frag- ments des plaques crâniennes de l’Agéien, il y en a peut-être qui ont appartenu à l’armure céphalique de ces divers Siluridés. Les Siluridés sont rares dans le Tertiaire d'Europe, mais cepen- dant y sont représentés dès l’Eocène ; dans le London-Clay de Sheppey on trouve Bucklandium diluvii Kônig ! ; dans les couches de Brancklesham et de Barton, il y a : Arius Egertoni Dixon sp., Arius ? bartonensis A. S. Woodward, Arius crassus Koken *. Il paraît y avoir aussi des Siluridés dans l’Eocène de Belgique *. Cope # a décrit des Siluridés de l'Eocène d'Amérique (couches de Bridger). Il en a fait le genre Rhineastes, qui se trouve aussi dans les Amyzonbeds que Cope place entre l'Eocène et le Miocène. Les Siluridés de l'Eocène d'Amérique paraissent différents de ceux de l’Eocène des environs de Reims. e 1. À. Smirx Woopwanrp. Note on Bucklandium diluvii Kônig, a Siluroïd Fish from the London-Clay of Sheppey. Proc. Zool. Soc. London, 18389, p. 208- 210, pl. XXII. 2. A. Smirx WoopwarDp. On some remains of Siluroïd Fishes from British Eocene formations. Geol. Mag, dec. HI, vol. IV, 1887. p. 303-307, 3 fig. — E.-T. Newron. A contribution to the history of Eocene Siluroid Fishes. Proc. Zool Soc. London, 1889, p. 201-207, pl. XXI. 3. Le Ho. Préliminaires d’un mémoire sur les Poissons tertiaires de Bel- gique, 1871, P. 15. 4. Cors. The Vertebrata of the tertiary formations of the West, 1883 (1884), p. 62-67 et p. 747-748, pl. V, fig. 1-17. k 494 F. PRIEM 18 Nov. Sous-ordre des Pharyngognathi. — Famille des Labridæ Cocchi ! décrit sous Le nom de Pharyngodopilidæ des dentitions pharyngiennes de Poissons labroïdes des terrains tertiaires. Les dents globuleuses ou lamelliformes sont serrées les unes contre les autres et, sous les dents fonctionnelles, les dents de remplacement sont en piles. Il y a une ou deux plaques pharyngiennes supé- rieures dont la face masticatrice est plus ou moins convexe et une plaque pharyngienne inférieure, dont la face masticatrice est de forme plus ou moins concave. On en distingue quatre genres : Phyllodus Agassiz, Egertonia Cocchi et Taurinichthys Cocchi, possédant une seule plaque pharyngienne supérieure, et Nummo- palatus Rouault (Labrodon P. Gervais, Pharyngodopilus Cocchi) où 1l y en a deux. PHyYLLODuSs GAUDRYI n. sp. ŒIL. XI, fig. 14, et fig. 4 du texte). Dans la collection de l’'Agéien du docteur Lemoine, se trouve une plaque pharyngienne de Phyllodus. La face triturante est (PI. XI, fig. 14) concave à la partie antérieure et se relève en arrière; la face opposée est convexe. Il s’agit donc, d’après les descriptions de Cocchi, d’une plaque pharyngienne inférieure. La partie antérieure n’est pas tout-à-fait entière et la partie posté- rieure manque aussi en partie. Il y a une rangée médiane de grandes dents principales, allongées dans le sens transversal. Les dents secondaires placées obliquement dans les intervalles des dents principales sont bien conservées sur le côté droit: enfin les dents du pourtour ou accessoires, de forme globuleuse, ne sont bien conservées que sur la partie antérieure du côté droit. En avant les séries verticales présentent quatre étages de dents super- posées, et en arrière sept et même huit étages. La dent principale postérieure, visible sur la face triturante, a son bord postérieur convexe, son bord antérieur légèrement concave ; devant se trouve la plus grande dent dont les bords antérieurs et postérieurs sont presque droits. Viennent enfin trois dents principales de grandeur décroissante, la plus antérieure est la plus petite ; le bord postérieur de ces dents est concave et le 1. Coccar. Monographia dei Pharyngodopilidae, nuova famiglia di Piese Labroïdi. Firenze, 1864. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 499 bord antérieur convexe. Les dents secondaires placées oblique- ment par rapport aux dents principales sont assez régulièrement ovales, et les dents accessoires sont, comme nous l’avons vu, globuleuses. Sur la face inférieure (fig. 4 du texte), les dents sont concaves et plus grandes que les dents correspon- dantes de la face masticatrice. Cette plaque a des rapports avec Phyl- lodus marginalis Agassiz: du London- Clay; mais en diffère par ses dents prin- cipales antérieures plus arquées et plus étroites dans le sens longitudinal. Cette plaque agéienne doit être considérée comme une espèce nouvelle pour laquelle nous proposons le nom de Phyllodus Fig. 4. — Phyllodus Gau- Gaudryi. c dryi n. sp. Agéien. Pla- Le genre Phyllodus a été signalé par que pharyngienne infé- Reuss dans le Crétacé de Bohême(P.cre- Tïieure, vue de dessous. . £ : è Grandeur naturelle. taceus Reuss); mais cette détermination est discutable. Il est très répandu dans l’Eocène inférieur, surtout dans le London-Clay de Sheppey, où treize espèces ou variétés ont été décrites. Pomel ! a nommé plusieurs espèces des sables de Cuise- la-Motte (étage yprésien) : P. Duvali, P. inconstans, P. Levesqui, Je latidens, mais ne les a ni décrites ni figurées. Gervais ? a figuré des Phy llodus de l'Eocène du bassin de Paris. Celui de Cuise-la- Motte figuré sous le nom de P. marginalis? (PI. LXVIL, fig. 5-5 a) rappelle surtout d’après Cocchi * P. speciosus Cocchi du London- Clay. Suivant lui, le Phyllodus de la pl. LXVIIL, fig. 30-30 a provenant des sables de Rétheuil, Aisne (étage yprésien) serait très voisin de P. medius Agassiz du London-Clay; il l'appelle provisoirement P. (rerpaisi parce que Gervais regarde comme analogue de cette plaque celle qu'il figure pl. LXVIIL, fig. 31-31 a et qui provient de Cuise-la-Motte. Maïs d’après M. Sauvage #, cette dernière doit être rapporté au genre Nummopalatus. La collection du Muséum renferme une pile isolée de dents de 1. GRAVES. Topographie géognostique du département de l'Oise, p. 558. 2. P. Gervais. Zoologie et Paléontologie françaises, 1° édition, 1848-52. Expl. des planches LXVII à LXXX. Poiss. foss., p. 2-3, pl. LXVIL, fig. 5-6; pl. LXVIL, fig. 30-31. — 2° édition, 1859, p. 516, pl. 67, fig. 5-6 ; pl. 68, fig. 30-37. 3. Coccur. Loc. cit., p. 53, pl. Il, fig. 10-12, et p. 56-57. 4. SAuvA&z. Note sur le genre Nummopalatus et sur les espèces de ce genre trouvées dans les terrains tertiaires de la France. B.S. G.F.,(3), IL, 1855, p.617. 496 F. PRIEM 18 Nov. Phyllodus provenant des sables inférieurs de Pierrefonds (Ypré- sien) et faisant partie de la collection Watelet (1873). Les dents ont l’un des bords latéraux tronqué, tandis que l’autre est plus étroit et arrondi. Il s’agit probablement d’une espèce distincte à la fois de P. marginalis et de P. Gaudryi. EGERTONIA ISODONTA Cocchi. (PL. XI, fig. 15). Dans le genre Eg£ertonia les plaques pharyngiennes sont cou- vertes de dents circulaires disposées en piles et serrées les unes contre les autres. Cocchi ! en a décrit une espèce unique de Sheppey, à laquelle il a donné le nom d’Z. isodonta à cause de l'égalité de toutes les dents. La collection de l’Agéien du docteur Lemoine renferme des fragments de plaque d’Ægertonia ; les dents du centre sont un peu plus grandes que celles du pourtour aux- quelles elles passent d’ailleurs insensiblement. Nous ne pensons pas qu'il y ait là une différence spécifique avec £. isodonta et c’est à cette espèce de Cocchi que nous rapportons les fragments en question ainsi que d’autres fragments d’Égertonia couverts de dents plus petites que celles d’Æ. isodonta, mais presque égales entre elles. M. Leriche ? a trouvé dans l’Agéien de Cuis une plaque pharyn- gienne supérieure d'Egertonia, qu'il a rapporté à une espèce nouvelle sous le nom d'Æ. Gosseleti parce qu'il y a une légère inégalité entre les dents du centre et celles du pourtour, mais il dit qu'elles passent graduellement des unes aux autres. Nous pensons que cette espèce Egertonia Gosseleti doit être confondue avec FE. isodonta. Nous rappelons que Cornuel *? a rapporté au genre Egertonia, sous le nom de Æ. gaultina une plaque pharyngienne du Gault de Moutier-en-der (Haute-Marne). 1. Coco. Loc. cit., p. 57-59, pl. IV, fig. 1-2. 2. Lericxe. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 175-176, fig. 1 du texte, et pl. L, fig. r et 14. 3. CornueL. Description de débris de Poissons fossiles, provenant princi- palement du calcaire néocomien du département de la Haute-Marne. B. S. G. F., ), V, 1897, p. 620, pl. XI, fig. 31-32. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 497 Genre NUMMOPALATUS Le genre MNummopalatus très commun dans le Miocène, et représenté, comme on l’a vu, dans les sables de Cuiïse, a laissé dans l’Agéien les restes de plusieurs espèces. M. Leriche ! a trouvé dans l’Agéien de Cuis des plaques pharyn- giennes supérieures de Nummopalatus couvertes de dents planes, contiguës, à contour polygonal ou arrondi, dont les plus grandes se trouvent au centre. Il en a fait deux espèces différant surtout par la forme des plaques : N. Sauvagei et N. trapezoïdalis. Ces deux espèces sont représentées dans la collection de l’Agéien du docteur Lemoine, mais cette collection paraît renfermer deux’ autres espèces nouvelles de Nummopalatus. NUMMOPALATUS VAILLANTI n. sp. (PI. XI, fig. 16-19). Il y a des fragments de plaques de Nummopalatus couverts de dents planes et circulaires. Deux fragments plus complets appar- tiennent à des plaques pharyngiennes supérieures. Les dents les plus grandes de la face triturante sont à la partie postérieure; puis viennent des dents plus petites, et sur le bord antérieur il y a une double série de dents dont la forme est triangulaire. Nous figurons un fragment de plaque pharyngienne supérieure droite où cette disposition se voit bien. Il y a une trentaine de dents. Sur la face supérieure les dents sont moins nombreuses que sur la face tritu- rante ; elles sont circulaires et concaves. Sur le bord postérieur les dents sont disposées en quatre étages. Ces fragments indiquent une espèce nouvelle, que nous dédions'à M. Léon Vaillant, profes- seur au Muséum. NUMMOPALATUS PAUCIDENS n. Sp. (PI. XI, fig. 18). Une petite plaque pharyngienne supérieure gauche, de l’Agéien, constitue une autre espèce nouvelle. Elle ne présente qu'une vingtaine de dents sur la face masticatrice. Celles du centre de la plaque sont circulaires et aplaties ; celles des bords sont en forme 1. LerICHE. Loc. cit., p. 197-199, pl. L, fig. 2-24, fig. 3-5 et 3a-6a. 23 Janvier 1902. — T. rt. Bull. Soc. Géol. Fr. — 32 498 : F. PRIEM 18 Nov. de croissant et disposées suivant trois rangées superposées. Le bord antérieur est légèrement courbe, le bord postérieur est recti- ligne, de même les bords externe et interne qui se raccordent avec le bord antérieur par un angle arrondi ; ils sont parallèles entre eux, de sorte que la plaque a à peu près la forme d’un trapèze dont les deux bases sont les côtés externe et interne. Sur la face supé- rieure les dents sont très légèrement concaves, un peu plus grandes et moins nombreuses que celles de la face triturante. La longueur maxima de la plaque près du bord interne est de 8 millim., sa largeur de 9 millim. 5, et l'épaisseur de 3 millim. 5. À cause du petit nombre des dents, nous donnerons à cette espèce le nom de Nummopalatus paucidens. LABRIDÆ INDÉTERMINÉS (PI. XI, fig. 19-20 et fig. 5-6 du texte). La collection du conglomérat de Cernay contient un certain nombre de fragments de plaques portant des dents triturantes remarquables. Elles sont creuses, tout d’une venue, cylindriques avec un sommet arrondi et lisses. Il y a en particulier une plaque assez complète, allongée (PI. XI, fig. 19) portant de ces dents hautes, irrégulièrement placées et qui, en disparaissant, ont laissé en certains points des dépressions assez profondes sur l'os; à la partie postérieure, il y a des dents plus petites et arrondies. M. Léon Vail- lant a eu l'obligeance de me montrer des den- titions pharyngiennes de Labridæ des genres Tautoga (côte atlantique des Etats-Unis) et Cheilinus (Océan Pacifique), qui ont de grandes analogies avec ces plaques du Cer- naysien. La plaque dont nous venons de parler Fig. 5-6. — Labridé est probablement un pharyngien supérieur indéterminé de d’un Labridé voisin du genre T'autoga actuel. l'Agéien. Frag- On doit en rapprocher des dents isolées et . mn ut aussi des plaques portant des dents allongées, La . face tritu- à Sommet plat ou arrondi, mais plus effilées rante (fig.5)etde que celles dont nous venons de parler et quel- profil (fig. 6). Au quefois légèment coniques. Elles proviennent Su de gran- Jes unes du Cernaysien, les autres de l’Agéien : (fig. 5 et 6 du texte). Un fragment de plaque tout pareil accompagne dans la collection du Muséum (collection d'Archiac, cat. 50) un morceau de maxillaire de Lepidosteus et provient de Cuise-la-Motte. . IQ0T POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 499 En résumé, il y a dans le Cernaysien et l’Agéien des Labridæ indéterminés se rapprochant des genres Tautoga et Cheilinus actuels. M. Leriche a signalé dans les couches à Unios et Térédines de Cuis un fragment de pharyngien d'un Labridé intéterminé !. EMBIoTOCIDÆ ? INDÉTERMINÉS (Fig. 7-10 du texte). Dans la collection du conglomé- rat de Cernay du docteur Lemoine, on trouve des fragments de pla- ques pharyngiennes portant de nombreuses dents arrondies, extré- mement serrées et constituant un véritable pavage. Au-dessous il y a des dents de remplacement. Les dents sont généralement usées ; les dents intactes, à sommet bombé, montrent à la loupe de fines stries qui partent du bombement supé- rieur et se dirigent vers la base; celle-ci présente un léger étran- glement. La collection contient aussi des dents isolées, plus gran- des, où ces caractères sont bien visibles. Ces plaques, couvertes d’un pavage de dents, doivent avoir appartenu à des Poissons broyeurs voisins des Labridæ. Elles rappel- lent beaucoup la dentition pharyn- gienne de l'espèce actuelle Dama- lichthys argyrosomus Girard sp., - de la Côte pacifique de l'Amérique du Nord, que M. Léon Vaillant, à qui j'ai soumis les fragments du 10 Fig. 7-10. — Embiotocidé? indéter- miné du conglomérat de Cer- nay. Plaques pharyngiennes. Fragment vu de dessus (fig. 7) et de profil (fig. 8) ; autre frag- ment vu de dessus (fig. 9) et de profil (fig. 10). — Toutes ces figures au double de grandeur. Cernaysien, a bien voulu m'indiquer et me permettre d'examiner. 1. LERICHE. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 179, pl. I, fig. 6. 500 F. PRIEM : 18 Nov. Le genre Damalichthys appartient à la famille des Embiotocidæ, Poissons vivipares qu'on rattache généralement aux Pharyngogna- thes et qui ont également les pharyngiens inférieurs unis !. Ces Poissons habitent la côte pacifique de l'Amérique du Nord et celle du Japon. Une espèce : Hysterocarpus Traski Gibbons, vit dans les rivières de la Californie centrale. Avec quelque doute, j’attribue à cette famille des Embiotocidæ les débris dont il vient d’être question. Sous-ordre des Percomorphi. — Famille des Sparidæ Le docteur Lemoine avait signalé dans le niveau le plus inférieur du Cernaysien (sables de Chälons-sur-Vesle) des dents du genre américain Myledaphus Cope qui, suivant lui, devait être rapproché des Sparoïdes *. Ce genre se trouve dans lé groupe de Laramie en Amérique. Grâce à l’'obligeance de M. Charles R. Eastman de Har- vard College, Cambridge (Massachusetts), j'ai pu trouver la diagnose du genre Myledaphus *. Dans ce genre les dents forment un pavage hexagonal; elles sont plus larges que longues ; la couronne est divisée en deux parties égales par une ligne dirigée dans le sens de la longueur. D’un côté de la ligne il'y a des stries transversales qui n'existent pas de l’autre côté. La racine est courte, droite et divisée en deux suivant le petit diamètre de la dent. L'auteur ne distingue qu'une espèce, A7. bipartitus. Suivant Cope les affinités du genre ne peuvent être établies. La forme de la couronne rappelle certaines Raïes et celle de la racine rappelle aussi les Elasmo- branches. Je n'ai pu trouver dans la collection Lemoine aucune pièce répondant à la diagnose de Cope. Parmi les dessins que m’a mon- trés M. Léon Lemoine, j'ai vu des croquis portant comme titre : M)ledaphus ; mais je ne leur trouve aucun rapport avec le MHyle- 1. JORDAN et EVERMANN les placent dans un sous-ordre à part, celui des Holconoti (The Fishes of North and Middle America. Bull. U. S. Nat. Museum, n° 47. Washington, 1898, part IL, p. 1493). 2. Lemoine. Recherches sur les Oiseaux fossiles des terrains tertiaires infé- rieurs des environs de Reims, 1° partie, 1878, p. 56. — Communication sur les ossements fossiles des terrains tertiaires inférieurs des environs de Reims. Ass. franç. Ap. Sc. Congrès de Montpellier, 1879, p. 585-594. — LEMOINE et AuUMONIER. Communication sur les terrains tertiaires des environs de Reims. Ass. franç. Av. Sc. Congrès de Reims, 1880, p. 605-620. j 3. Cope. Description of some Vertebrata remains from the Fort-Union beds of Montana. Proc. Acad. Nat. Sc. Philadelphia, t. XXVIII, 1856, p. 260-261. 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS O1 daphus de Cope, et elles rappellent plutôt les plaques que je rapporte à un Embiotocidé indéterminé. Il n'y a pas d’autres restes de Sparoïdes dans la collection Lemoine que des dents détachées, rondes, plates, provenant du Cernaysien, et qui paraissait appartenir au genre Chrysophrys.Ge genre est représenté dans les sables de Cuise-la-Motte !. Citons enfin dans la collection Lemoine des vertèbres de Poissons osseux de genres indéterminés. Il y en a de diverses tailles. Elles proviennent en partie de l’Agéien; d’autres sont de provenance inconnue (Cernaysien ou Agéien ?). Résumé L'Éocène inférieur des environs de Reims renferme-un grand nombre d'Elasmobranches provenant soit du Cernaysien (Tha- nétien), soit de l’Agéien (Sparnacien supérieur). Ceux de la collec- tion Lemoine proviennent surtout des sables de Châlons-sur-Vesle et du conglomérat de Cernay. La plupart des espèces dont nous avons donné plus haut la liste se retrouvent, comme nous l’avons déjà dit, à des niveaux plus élevés de l’Éocène. Il est intéressant de signaler Squatina Gaudryi n. sp. et des espèces trouvées d’abord dans les couches éocènes les plus inférieures de Belgique : Acanthias orpiensis Winkler sp., Odontaspis Rutoti Winkler sp., Lamna striata Winkler sp. Les Holocéphales sont représentés dans le Cernaysien par Æda- phodon Bucklandi Agassiz, qui se trouve également à des niveaux plus élevés de l’Éocène. Il y a aussi des fragments indéterminables d'Ichthyodorulites. La faune de Téléostomes du conglomérat de Cernay est carac- térisée par la présence d’un Amia, Amia robusta n. sp., avec de grandes variations de taille, mais pouvant atteindre trois fois au moins la taille d’Amia calva actuel. IL y a en outre des Labridæ indéterminés, voisins des genres Tautoga (côte atlantique des _ États-Unis) et Cheilinus (Océan Pacifique et Océan Indien actuels), des Embiotocidæ indéterminés, voisins de Damalichthys actuel de la côte pacifique de l'Amérique du Nord et des dents détachées de Sparidæ (Chrysophrys). Les Téléostomes de l’Agéien sont d’abord des Amiadæ : Amia (Pappichthys) Barroisi Leriche, A. Lemoineti Leriche et des Lepi- 1. GERVAIS. Zoologie et Paléontologie françaises. 1'° édition, 1848-52. Explic. des planches LXVII à LXXX. Poiss. foss., p. 3, et 2° édition, 1859, p. 517. 5o2 F. PRIEM 18 Nov. dosteidæ : Lepidosteus suessionensis P. Gervais. D’autres Poissons remarquables sont des Siluridæ : Pimelodus Gaudryi Leriche, Arius Dutemplei Leriche, Arius ? Lemoinei n. sp. Il y aussi de nombreux Labridæ des genres Phyllodus, Egertonia et Nummo- palatus, Phyllodus Gaudryi n. sp., Egertonia isodonta Cocchi, Nummopalatus Sauvagei Leriche, N. trapezoidalis Leriche, N. paucidens n. sp., N. Vaillanti n. sp. ; en outre il y a des Labridæ indéterminés, voisins des genres T'autoga et Cheilinus. Le mélange de formes d’eau douce comme les Amiadæ, les Lepi- dosteidæ et les Siluridæ ! et de formes marines comme les Elas- mobranches, les Holocéphales, les Labridæ et les Sparidæ montre que les couches cernaysiennes et agéiennes se sout déposées dans ‘un estuaire où se déversaient des cours d’eau. On peut noter l’abondance dans ces couches de Poissons littoraux à dents tritu- rantes, propres à broyer les coquilles des Mollusques. Ainsi que le remarque M. Leriche ?, les sables agéiens, qui ren- ferment à la fois les genres Amia, Lepidosteus et des Siluridæ, présentent un ensemble de formes d’eau douce rappelant celui CE couches de Bridger en Amérique. Le genre Amia paraît s’être montré plus tôt en Europe qu’en Amérique. Il est abondamment répandu dans le conglomérat de Cernay qui appartient à l'Éocène le plus inférieur (Thanétien), tandis qu’en Amérique le genre Amia (Pappichthys) n’est bien représenté que dans les couches de Bridger (Wyoming) qui, d’après leur faune de Mammifères, doivent être rapprochées du Lutétien (Éocène moyen). Il y a cependant, d'après Cope, des restes d'Amia (Pappichthy"s) mêlés à des Mammifères du groupe de Wasatch dans les couches de Wind River ? ; le groupe de Wasatch est rapporté à l'Éocène inférieur, mais à l'étage sparna- cien ; il est donc plus récent que le Thanétien. La faune de Mam- mifères du conglomérat de Cernay rapproche ce dernier du groupe de Puerco, où jusqu'ici on n’a pas signalé de Poissons. Le genre Lepidosteus (Clastes) paraît avoir débuté en Amérique, dans les couches de Bridger (Lutétien), tandis qu'en Europe on le trouve en France, dans l’Agéien (Sparnacien) #, et en Angleterre dans les couches de Woolwich et de Reading, qui sont rattachées aussi au Sparnacien ÿ. 1. Certaines espèces du genre Arius vivent dans la mer, au voisinage des côtes. 2. Lericue. Ann. Soc. géol. Nord, t. XXIX, 1900, p. 195. 3. Coprs. The tertiary formations of the West, p. 57. 4. À. Smirx Woopwanp. Catalogue, t. IL, p. 445. 5. A. de LAPPARENT. Traité de Géologie, 4° édition, 1900, p. 1425. / 1901 POISSONS DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE REIMS 503 Ainsi les genres Amia et Lepidosteus semblent avoir paru plus tôt en Europe qu’en Amérique; mais ils s’y sont éteints avec l’Oli- gocène supérieur ou le Miocène inférieur (couches de Messel près Darmstadt; Lepidosteus StrausiKinkelin, À mia Kehreri Andreae) ! tandis qu'en Amérique ils existent encore. 1. ANDREAE. Beitrage zur Kenntniss der fossilen Fische des Mainzer Bec- kens. Abh. der Senckenberg naturf. Gesells., t. XVIII, 1894, p. 351-360. EXPLICATION DES PLANCHES (Les échantillons sont représentés grandeur naturelle et sans retouches). PLANCHE X Fig 1. — Amia robusta n. sp. Conglomérat de Cernay. Vertèbre n° I de la 1° série, vue de la face antérieure. Fig. 2. — Id. Vertèbre n° III de la 1° série, vue antérieure. Fig. 3 — Id. Vertèbre n° IV tte la 1° série, vue antérieure. Fig. 4. — Id. Vertèbre n° VII (caudale) de la r'° série, vue antérieure. Fig. 5. — Id. Vertèbre ne III de la 2° série, vue antérieure. Fig. 6. — Id. Vertèbre n° V (caudale) de la 2° série, vue antérieure. Fig. 9. — Id. Basioccipital d’un individu de moyenne taille, vue de dessus. Fig. 8. — Id. Parasphénoïde d’un individu de grande taille, vue inférieure, Fig. 9.-— Id. Fragment d’os dentaire, vue externe. Fig. 10. — Id. Même fragment, vue interne. Fig. 11. — Id. Maxillaire d’un individu de petite taille, vue inférieure. Fig. 12. — Id. Fragment de maxillaire avec alvéoles externes et internes. Fig. 13. — 1d. Mème fragment, vu sur la face latérale interne. Fig. 14. — Amia (Pappichthys) Barroisi Leriche sp. Agéien. Vertèbre abdo- minale, vue antérieure. Fig. 15. — Id. Vertèbre caudale, vue antérieure. Fig. 16. — Id. Fragment d’os dentaire, vu de dessus. PLANcHE XI Fig. 1. — Lepidosteus suessionensis P. Gervais. Agéien. Vertèbre, vue par la face postérieure. Fig. 2. — Id. Vertèbre vue par la face antérieure. Fig. 3. — Id. Fragment de plaque osseuse de la tête. Fig. 4. — Id. Kcaïlle de la région des flancs, face externe. Fig. 5. — Id. Ecaille de la ligne latérale, face interne. Fig. 6. — Id. Fragment d'os dentaire, vue supérieure. Fig. 9. — Id. Fragment de maxillaire, vue externe. Fig. 8. — Id. Fragment de prémaxillaire, vue externe. Fig. 9. — Arius? Lemoinei n. sp. Agéien. Piquant de nageoïire pectorale droite, vue latérale. Fig. 10. — Id. Vue postérieure. Fig. 11. — Mème espèce. Fragment de piquant dorsal, vue latérale. Fig. 12. — Arius Dutemplei Leriche. Agéien. Piquant dorsal, vue latérale. Fig. 13. — Pimelodus Gaudryi Leriche. Agéien. Piquant dorsal, vue latérale. Fig. 14. — Phyllodus Gaudryi n. sp. Agéien. Plaque pharyngienne inférieure. 504 F. PRIEM. — POISSONS DES ENVIRONS DE REIMS 18 Nov. Fig. 15. — Egertonia isodonta Cocchi. Agéien. Plaque pharyngienne supé- rieure, vue par la face triturante. ” Fig. 16. — Nummopalatus Vaillanti n. sp. Agéien. Fragment de plaque pha- ryngienne supérieure, vue par la face triturante. Fig. 179. — Id. Vue de profil. Fig. 18. — Nummopalatus paucidens n. sp. Plaque pharyngienne supérieure, vue par la face triturante. Fig. 19. — Labridé indét., voisin de Tautoga actuel. Conglomérat de Cernay. Plaque pharyngienne supérieure, vue par la face triturante. Fig. 20. — Id. Fragment vu de profil. Fig. 21-22. — Acanthias orpiensis Winkler sp. Cernaysien. Fig. 21, dent vue de la face interne ; fig. 22, dent vue par la face externe. Fig. 23-24. — Squalina Gaudryi n. sp. Cernaysien. Fig. 23, dent antérieure, face externe ; fig. 24, dent latérale, face interne. Fig. 25-26. — Odontaspis Rutoti Winkler sp. Cernaysien ? Fig. 25, dent anté- rieure, face externe ; fig. 26, dent latérale, face interne. Fig. 27-28. — Odontaspis elegans Agassiz sp. Cernaysien. Fig. 27, dent anté- rieure, face interne ; fig. 28, dent antéro-latérale, face externe. Fig. 29-30. — Lamna striata Winkler sp. Cernaysien (sables de Châlons-sur - Vesle). Fig. 29, dent antérieure, face externe ; fig. 30, dent laté- rale, face interne. : Après la communication, de M. Priem, M. Albert Gaudry s'exprime ainsi : Je dois adresser des remerciements à M. Priem, qui nous donne l’appui de son talent pour la détermination, souvent difficile, des Poissons de notre galerie de Paléontologie. L'étude qu'il vient de faire des Poissons de la collection du D: Lemoine est particu- lièrement utile, car le gisement de Cernay est notre plus ancien gisement de vertébrés tertiaires et, à ce titre, il offre un grand intérêt pour les questions d’origine. On ne peut manquer d’être frappé des rapports qui existent entre l’Arctocy-on de Cernay et le Clænodon du Torréjon, entre le Plesiadapis de Cernay, l’'Haplo- conus et d’autres fossiles du Torréjon, entre le Plesidissacus de Cernay et le Dissacus du Torréjon, entre le Veoplagiaulax de Cernay, le Neoplagiaulax et le Ptilodus du Torréjon, entre le reptile de Cernay appelé Simædosaurus par Gervais et Lemoine, et le Champsosaurus du Nouveau-Mexique. M. Priem, par son examen attentif des Amia et des Labroïdes de Cernay, nous montre que les Poissons, aussi bien que les Mammifères et les Reptiles, révèlent un lien entre l’Ancien et le Nouveau Continent dans les premiers temps de l’ère tertiaire. Les Poissons de l’Agéien de Lemoine, d’après M. Leriche et M. Priem, contribuent à faire supposer que ces liens ont persisté pendant l’époque du Wasatch et peut-être même plus tard. ; LES ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES par M. A. PERON. Au-dessus du Cénomanien dont l'étude est facilitée par de nom- breux restes organisés les autres assises du Crétacique supérieur ‘des Alpes-Maritimes sont mal connues. L’épaisseur considérable de ces assises, leur uniformité pétro- graphique, les fréquents accidents qui les ont disloquées et enfin la grande rareté des fossiles déterminables et caractéristiques sont autant d'obstacles qui en rendent l'étude ingrate et ditlicile et n’ont pas permis encore d'y bien reconnaître les divers horizons connus dans les autres régions, ni même d'y délimiter les étages principaux. En 1877, lors de la réunion extraordinaire de la Société géolo- gique de France à Nice, Hébert, expliquant aux assistants la succession des assises au col de Braus, entre l’Escarène et Sospel, signalait un étage cénomanien bien caractérisé; mais, au-dessus, il ne pouvait plus que mentionner une épaisse série de 150 mètres de craie marneuse en disant simplement : « Nous n'avons pu reconnaître l’âge de cette assise ». à Quelques années après, grâce aux recherches de M. Fallot !, nous sortons de l'ignorance dans laquelle nous étions sur ce terrain crétacique du sud-est. : Quelques coupes habilement relevées sur divers points des Alpes-Maritimes font faire un progrès notable à nos connaissances et, si les détails font encore défaut, si les subdivisions ne sont pas encore distinguées, du moins avons-nous une notion plus nette sur l’ensemble de la formation et sur la succession des assises. Dans la même année, c’est-à-dire en 1882, M. Toucas ? nous a signalé l'existence aux environs de Nice de divers fossiles impor- tants, dont nous parlerons ci-après, qui se trouvent également dans la craie à Rudistes de la Provence et des Corbières. Plus tard, en 1892 M. Ambayrac, en 1893 M. Baron et, en 1896 M. Léon Bertrand, nous ont donné quelques renseignements, notamment sur les environs de Puget-Théniers, sur Menton, sur la vallée supérieure du Var, autour du Dôme de Barrot, etc. 1. Recherches sur le terrain crét. du sud-est de la France. Paris, 1882. 2. B.S. G. F. (3), X, p. 198. 506 A. PERON 18 Nov. Enfin, plus récemment encore, M. de Riaz a communiqué à la Société géologique les importants résultats de ses recherches qui embrassent toute la série crétacée des Alpes-Maritimes et nous a fait connaître de nombreux détails locaux. Malgré tous ces travaux nous sommes encore loin d’avoir une connaissance suffisante de ces terrains et, au moins en ce qui concerne les étages supérieurs, les renseignements publiés jusqu'ici sont bien sommaires, souvent contradictoires et parfois même erronés. En ce qui concerne l’importante question de la classification des assises, j'ai le regret de ne pouvoir partager la manière de voir de plusieurs de mes devanciers et je crois utile d’en faire connaître ici les motifs. Ce n’est pas pour la première fois, d’ailleurs, que je m’essaye à une classification des couches du Crétacique supérieur des environs de Nice. Un séjour assez prolongé que j'ai fait jadis dans ce pays m'en avait déjà donné une certaine connaissance et, en 1877, alors que je discutais la question de l’âge des couches à Hippurites et à Echinides de la Provence, j'ai signalé les environs de Nice comme particulièrement instructifs à ce sujet. En concluant, j'aflirmais que la série crétacée de la Palarea était l'équivalent de la série des couches à Micraster du Beausset et des calcaires à Echinides des Corbières. J'ai quelque plaisir, je l'avoue, à rappeler ici cette affirmation; car les recherches que j'ai poursuivies dans ces dernières années ont pleinement confirmé mes prévisions. Elles me permettent maintenant de préciser et d'établir un parallélisme rigoureux entre les horizons du Crétacique supérieur des environs de Nice et ceux des autres régions. Ce n’est guère que dans quelques localités voisines de Puget- Théniers, ou dans les vallées des Paillons, au nord de Nice, ou encore dans les environs de Menton que l'on peut étudier la série complète du Crétacique supérieur. Toutes les localités, en effet, ne sont pas également favorables pour suivre le développement des assises et pour en recueillir les fossiles caractéristiques. Les plissements et Les fractures des couches en interrompent fréquem- ment la succession normale et, souvent aussi, l’écrasement qu’elles ont subi en ont déformé les fossiles en les rendant méconnaissables. Avec un peu d'habitude et d'exercice, cependant, on parvient à s'y reconnaître au milieu de ces masses assez uniformes et on peut distinguer les horizons. | 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 907 En résumé, à partir des dernières assises où l’on rencontre des fossiles nettement cénomaniens, c’est-à-dire à partir des marnes à Holaster subglobosus, le Crétacique supérieur comprend : 1° Une masse de bancs calcaires durs, serrés, bien lités, gris ou blanchâtres, parfois gréseux et parfois glauconieux, vers la base desquels se place, à un point qui reste à déterminer, la séparation du Cénomanien et du Turonien. Dans cette masse, de cent mètres environ d'épaisseur, presque partout dépourvue de restes organisés, on rencontre cependant un niveau fossilifère qui appartient nettement à l’étage turonien ; 2° Une succession, d’égale puissance à peu près, dans laquelle les bancs calcaires de la série précédente s’espacent de plus en plus, deviennent eux-mêmes plus marneux et sont séparés par des inters- tices marneux de plus en plus épais. Cette grande assise de marnes fissiles, très délitées et friables à la surface, est d’une grande monotonie et d'un gris plus ou moins foncé. Les fossiles rares et le plus souvent mal conservés consistent surtout en Inocérames, Echinides et Spongiaires. 3 Une dernière série dans laquelle les bancs calcaires redeviennent plus serrés, plus épais, plus compacts et les interca- lations marneuses moins dominantes. Cette dernière série de couches, moins puissante que les précédentes, s’y relie intime- ment. Elle a la même couleur noirâtre, la même monotonie et le même faciès que l’assise médiane. Ses fossiles sont analogues mais les espèces y sont distinctes. Cette dernière série se rencontre bien plus rarement que les précédentes. Les calcaires qui la composent sont exploités comme pierre à ciment à Contes et à Font-de-Jarrier. Ces trois divisions, établies seulement sur l'aspect lithologique des assises, paraissent pouvoir correspondre sensiblement aux trois étages turonien, emschérien et aturien de la nomenclature actuellement en usage. Nous allons examiner successivement la composition et les caractères de chacun d’eux. Étage turonien Les assises, qui constituent cet étage dans les Alpes-Maritimes, sont les plus ingrates et les plus difficiles à déterminer. Tous les auteurs qui ont étudié la région, n’ont mentionné l’existence du Turonien qu'avec réserve et incertitude. M. Fallot, qui a donné sur ces terrains les détails de beaucoup 508 A. PERON 18 Nov. les plus complets, n’a pu attribuer qu'avec un point de doute à l'étage turonien, dans sa coupe de Saint-Laurent, une masse calcaire d’une centaine de mètres d'épaisseur, dans laquelle il a recueilli un Inoceramus, déterminé 7. problematicus Schloth. Les Inocerames semblent, en effet, les fossiles les plus répandus dans ces assises crétacées et c’est avec raison que M. Fallot a dit que leur déter- mination serait indispensable pour établir des divisions dans ces couches si indéchiffrables de la craie des Basses-Alpes et des Alpes-Maritimes !. Malheureusement, cette détermination est généralement malaisée. Les Inocerames ne se trouvent, le plus souvent, que bien incomplets et à l’état de moule interne, et ce sont des fossiles d'autant plus difficiles à déterminer exactement que, pour beaucoup d’espèces, les types sont mal définis et fort incertains. Il existe cependant, dans cette masse de calcaires, certains bancs un peu fossilifères qui, en raison de la faune qu’ils renferment, peuvent être, en toute sécurité, attribués au Turonien et même au Turonien supérieur. Nous devons signaler tout d'abord ces calcaires, qui ont été exploités au Cap Martin sur la route, entre Menton et Roquebrune, dans une petite carrière que M. de Riaz a mentionnée derrière la caserne des chasseurs-alpins. Ce petit niveau fossilifère est situé au-dessus d’une épaisse série de calcaires, qu'on voit se développer en suivant la route de Roquebrune et qui se composent de bancs serrés, parfois épais, très résistants, jaunâtres et gris, quelquefois gréseux, quelquefois sublithographiques et paraissant sans fossiles, autant du moins qu'on en peut juger; car ces bancs, visibles seulement par leur tranche, se présentent dans de très mauvaises conditions pour la recherche des fossiles. Les seules couches fossilifères que nous ayons observées sont visibles, comme nous venons de le dire, dans une petite exploitation, aujourd’hui abandonnée. Elles s’y trouvent, d’ailleurs, comme les autres, dans de mauvaises conditions pour l’étude et le gisement a été rapidement épuisé. Ce sont quelques assises, grises, blanchâtres par places et subgréseuses, fortement inclinées au nord-ouest. J'y ai recueilli : Terebratula semiglobosa Sowerby, plusieurs exemplaires ; Micraster Leskei Des Moulins (— M. breviporus auctorum), plusieurs exemplaires médiocres mais bien reconnaissables et bien 1. Loc. cit., p. 213. 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 509 : typiques; Hemiaster sp.; Cidaris cf. subvesiculosa d'Orb., pla- ques et radioles; Tylocidaris clavigera Kœnig, un seul radiole de petite taille maïs bien conservé; Pentagonaster sp., articles isolés. Cette petite faune, quoique une partie de ses espèces se retrou- vent encore dans l'étage sénonien, est bien caractéristique de la craie turonienne supérieure du Bassin de Paris et notamment de celle des environs de Joigny. Nous ne pouvons hésiter à mettre sur ce niveau le gisement qui la renferme. C'est, évidemment, encore à ce même niveau qu'il faut attribuer cet autre petit gisement signalé par M. Baron dans le lit du Gorbio, à la limite de l'octroi de Menton, et dans lequel il a indiqué des baguettes de Cidaris,un petit Wicraster, non dénommé, un Æchinocorys, Terebratula semiglobosa et Rhynchonella. M. Baron a considéré ces couches comme l’équivalent des calcaires à ciment de Contes-les-Pins et les attribue au Sénonien supérieur. C’est là une conclusion qui ne peut être acceptée. Au nord de Nice, dans la vallée du Païllon, le même Turonien me parait représenté, un peu en amont de la Trinité-Victor par des calcaires compacts dans lesquels j'ai recueilli Micraster Leskei Des Moulins, en médiocre état. Ces mêmes calcaires se représentent, plus au nord, à Pont-de- Peille et autres localités. Dans l’ouest des Alpes-Maritimes nous pouvons, en étudiant les travaux de MM. Fallot, Ambayrac et Léon Bertrand, reconnaître assez facilement l'existence, sur plusieurs points, du même niveau turonien dont nous venons de parler. Si, par exemple, nous examinons la coupe des Granges de Villars, sur la route de Nice à Roquesteron, donnée par M. Fallot !, nous constatons que ce savant mentionne : au-dessus de grès siliceux et glauconieux à fossiles cénomaniens, une assise, n° 12, composée de marnes gris-blanchâtre avec bancs calcaréo-gréseux intercalés qui renferment l'erebratula semiglobosa Sow. et «de petits Micraster qui semblent être de jeunes individus du Micraster Normanniæ Bucaille ». Or le M. Normanniæ Bucaille, ayant été institué pour des exemplaires de grande taille que tout le monde, et notamment Cotteau et M. Lambert, réunissaient au M. Leskei (M. breviporus), il est facile de reconnaître que les petits oursins recueillis par M. Fallot doivent être de vrais M. Leskei. La situation stratigraphique de cette espèce, dans la coupe 7. Loc. cit. p. 130. 510 A. PERON 18 Nov. donnée par M. Fallot, est d’ailleurs parfaitement normale car, outre qu'elle se trouve au-dessus de l'étage cénomanien, elle se trouve aussi au-dessous de couches où l’auteur mentionne une faune que nous verrons être propre à l'étage sénonien inférieur. Sans aucun doute encore, c’est au Turonien qu'il faut attribuer l’assise qui, sous le n° 8, figure dans la coupe relevée par M. Fallot ! sur la rive gauche de l’Estéron, parallèlement à la route de Nice. Cette assise est située au-dessus de bancs où se trouve l’Ostrea columba Deshayes de grande taille et au-dessous de marnes à fos- siles sénoniens et, elle-même, renferme Ter2bratula semiglobosa, Holaster placenta Agassiz et Spongiaires nombreux. On voit, en résumé, d'après ces exemples, qu'il existe certai- nement de nombreuses localités où la présence de l’étage turonien peut être aflirmée. Il semble qu’à l’aide de ces repères on pourra parvenir à établir la continuité de l'étage et à opérer la distinction, non réalisée jusqu'ici, du Turonien et du Sénonien. Étage emschérien Conformément à la nomenclature proposée par MM. Munier- Chalmas et de Lapparent, nous désignons sous ce nom la partie inférieure de l’étage sénonien d’Alcide d'Orbigny. comprenant les sous-étages coniacien et santonien de Coquand. C’est la portion du Crétacique supérieur la plus largement représentée dans les Alpes- Maritimes. Quoique les fossiles y soient peu variés et, en général, médiocrement conservés, l'étage est très suffisamment caractérisé, par sa faune, pour qu’il n’y ait aucun doute sur l’âge de la formation. Nous n'avons pu, jusqu'ici, y distinguer les deux horizons, inférieur et supérieur, c’est-à-dire le Coniacien et le Santonien. Il convient, à mon avis, de faire débuter l’Emschérien un peu au-dessus des calcaires turoniens, vers le point où des assises marneuses viennent, en égale épaisseur, alterner avec les bancs calcaires. Ces premières assises ne m'ont pas fourni de fossiles. C’est, par conséquent, arbitrairement que nous plaçons à ce point la limite des deux étages mais, peu au-dessus de ce point, commencent à apparaitre d’assez nombreux fossiles, Znoceramus, Echinocorys, Micraster et Spongiaires et quelques espèces plus rares mais très caractéristiques, que nous allons indiquer. 1. Loc. cit. p. 124. 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES II Ces fossiles sont généralement déformés, écrasés, encroûtés de calcaire tenace et le plus souvent d’une détermination difficile. On en trouve dans de nombreuses couches successives, mais un niveau se fait remarquer plus particulièrement par l'abondance des Micraster et un autre par l'abondance des Spongiaires. J’ai retrouvé ces niveaux spéciaux dans de nombreuses localités et ils existent non seulement dans l’Emschérien du nord de Nice, mais à Puget-Théniers et auprès de Menton. Dans ces assises supérieures, l'Emschérien devient de plus en plus marneux. Les marnes, d’un gris assez uniforme et seulement parfois plus foncé, sont extrêmement fissiles et friables. Toutes les parties exposées à l’action des agents atmosphériques sont délitées en menus fragments anguleux. Il en résulte que, dans cette partie de l'étage, il est fort difficile de recueillir des fossiles entiers et en bon état. Il n’y a guère que quelques Spongiaires, à squelette siliceux, que l’on peut retrouver intacts. Je signale les ravins de Gando, le grand talus de la rive gauche du Paillon, en face la villa Cauvini, la montée de Pointe-de-Contes à la Palarea comme donnant une belle vue et une bonne coupe de cette puissante série marneuse de l’Emschérien dont les lits, bien stratifiés et plongeant au nord-est, forment une masse rubannée d’un effet remarquable. Parfois, dans cette masse, on distingue avec une netteté frappante quelques accidents locaux fort curieux comme des plis sinueux, des cassures avec chutes brusques, etc., qui donnent, pour ainsi dire en miniature, une reproduction de grands accidents de la tectonique alpine. D’autres fois, notamment dans la haute vallée du Var, ces mêmes assises perdent leur allure régulière et deviennent extrêmement tourmentées, contournées et repliées, à ce point qu’on ne peut plus en discerner la stratification. Dans la vallée du Païllon, où ces strates restent régulières et peu disloquées, on voit très nettement qu'elles sont surmontées en parfaite concordance par les calcaires marneux qui, comme nous le verrons, constituent le Sénonien supérieur ou Aturien. Des recherches poursuivies avec persévérance, tant par moi- même que par le Commandant Caziot, nous ont mis en possession d’un grand nombre de fossiles parmi lesquels nous avons reconnu quelques espèces intéressantes et très précieuses pour la détermina- tion de l’âge de ces terrains. Nous ne pouvons nous borner à une énumération et il paraît utile d’entrer dans quelques détails au sujet de ces fossiles. 512 A. PERON 18 Nov. MoRTONICERAS TEXANUM Rœmer Cette ammonite, très caractéristique de l’Emschérien supérieur, aussi bien dans le nord de l'Europe que dans la Provence, dans les Corbières, dans le nord de l’Afrique, en Palestine, en Amérique, etc., paraît avoir été rencontrée assez fréquemment dans les Alpes- Maritimes. M. Fallot, en effet, l’a mentionnée dans les couches de la montée de Saint-Laurent, M. de Grossouvre, près de l’Escarène, M. Franchi, près de Sospel et M. Toucas, aux environs de Nice, en . compagnie d’Ammonites pailletteanus d'Orb. Au musée de Menton il en existe un gros exemplaire, que, malgré son mauvais état, M. de Riaz a reconnu comme Mortoniceras texanum. Cependant, le gisement de ce fossile n'avait pu être précisé, non plus que son niveau stratigraphique. J'ai eu, l'hiver dernier, la bonne fortune d’en rencontrer plusieurs exemplaires bien caracté- risés dans des bancs de calcaire marneux, gris, micacé, teinté parfois de rouille, que l’on rencontre à un point assez élevé sur la route de Contes-les-Pins à Châteauneuf-ville-vieille ou Madone-de- Contes. Ces bancs sont assez fossilifères et ils renferment notam- ment, de nombreux Micraster. C'est de ce gisement que provien- nent, comme nous le dirons ci-après, Wicraster arenatus Sismonda, Holaster integer Desor, etc. BACGULITES INCURVATUS Dujardin Les fossiles que j'attribue à cette espèce consistent seulement en fragments assez courts sur lesquels je ne puis distinguer aucune trace de cloisons. Cependant, par leur taille, par la forme elliptique de leur section, par l’absence de sillons transversaux et surtout par l'existence de tubercules espacés qui ornent le bord externe, ils paraissent pouvoir être assimilés avec sécurité à l'espèce, connue dans la craie santo- nienne de la Touraine, à laquelle Dujardin a donné le nom de Baculites incurvatus. C’est à la Trinité que j'ai recueilli ces fossiles. PLEUROTOMARIA Cf. ROYANA d'Orbigny Exemplaire unique, à l’état de moule interne, de très grande taille, en cône bas, à tours convexes, montrant très nettement sur le milieu du tour la trace du sinus. Ce moule ressemble absolument 1001 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES D19 à certains moules que j'ai recueillis dans la craie supérieure de la Dordogne et qui m'ont paru être des individus de grande taille du Pleurotomaria royana d'Orbigny. Ce moule a été recueilli à la Trinité-Victor, dans les calcaires durs, redressés presque verticalement, que l’on rencontre à droite, en pénétrant dans le petit vallon étroit, entre les deux moulins, sur la rive droite du Paillon. INOCERAMUS DIGITATUS Sowerby C'est là une des espèces les plus importantes que nous ayons rencontrées. Elle est assez fréquente dans le Crétacique supérieur des Alpes-Maritimes où, cependant, M. Toucas seul l'a citée jusqu'ici. C’est un des compagnons habituels de Mortoniceras texanum et, comme ce dernier, on le rencontre aussi bien dans le Crétacique supérieur du nord de l'Europe que dans celui du Midi. C’est toujours dans l'Emschérien supérieur ou Santonien qu’on le rencontre et on peut considérer /noceramus digitatus comme l’un des fossiles les plus caractéristiques de ce niveau. J'en ai rencontré un important gisement, en compagnie du Commandant Caziot, sur la montée de Contes-les-Pins à la Madone, dans un sentier de traverse de la route. Les individus, de très grande taille, y sont nombreux mais enchevêtrés et d'autant plus difficiles à obtenir intacts que la roche est très tenace. Plus haut, dans la direction de la Madone, j'en ai encore trouvé de belles empreintes dans une couche, très inclinée au nord, qui appartient sans doute au même niveau stratigraphique que le gisement rencontré au dessous. C’est dans une couche un peu plus marneuse, très voisine de celle-ci, que j'ai recueilli Mortoniceras texanum Ræœmer, Micraster arenatus Sismonda, etc. Indépendamment de ces gisements nous en connaissons mainte- nant d'assez nombreux. Le Commandant Caziot a, en effet, retrouvé notre espèce à la Trinité-Victor, puis au moulin Gaetti, sur la route de Peille, et, enfin, entre Pointe-de-Contes et Contes-les-Pins. | Enfin, c'est évidemment à l’Inoceramus digitatus qu'il faut attribuer ces empreintes de grands bivalves flabelliformes, dont MM. Ambayrac et de Riaz ont parlé et qu'ils ont rapportés au genre Trichites dont ils ont, en effet, si singulièrement l’aspect. M. Ambayrac a signalé ce fossile au Valcros et M. de Riaz, près de Menton. Il est à remarquer qu’il existe au musée de Nice un bon exem- 23 Janvier 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 33 514 A. PERON 18 Nov. plaire d’/noceramus digitatus. Je l'y avais remarqué, il a quelques années, mais, en l'absence totale d'indication eten raison de l’exis- tence dans la même vitrine, de nombreux fossiles, Hippurites et autres, de la Provence, j'avais pensé qu'il pouvait provenir des environs du Beausset. Il me paraît maintenant certain qu'il provient de la vallée du Paillon. Comme on le voit, /noceramus digitatus est un fossile assez répandu dans les Alpes-Maritimes et, comme il est, en même temps, très reconnaissable et très caractéristique, il peut être d’un très grand secours pour déterminer sur la carte détaillée de la région l'extension de l’étage emschérien. INOCERAMUS Sp. nov. Parmi les /noceramus fort nombreux des couches emschériennes l'espèce la plus répandue est une petite coquille qui ne me paraît pouvoir être assimilée sûrement à aucune des espèces connues. C'est un /noceramus de taille toujours assez petite, méquivalve, peu renflé, à crochets contigus, celui de la grande valve assez recourbé. La surface est garnie, comme dans la plupart des espèces, de plis concentriques assez serrés; mais il existe, en outre, des costules concentriques fines et nombreuses qui garnissent aussi bien les plis que leurs intervalles et qui ne ressemblent nullement aux stries ou aux lamelles d’accroissement que l’on observe dans beaucoup d'espèces connues. Je ne possède encore que des exemplaires un peu insuflisants pour faire figurer l’espèce. Je l’ai rencontrée à la Trinité, à Gando, à Pointe-de-Contes, à Menton, etc. Je dois mentionner encore ici une autre espèce dont je ne puis malheureusement préciser suffisamment les caractères. Elle est de grande taille, très déprimée, ornée de plis, gros et espacés, mais cependant moins gros et plus serrés que ceux d'Znoceramus Cripsü. En outre ils n’ont pas la forme transverse et un peu renflée de ce dernier. J’ai bien vu, en place, quelques exemplaires assez bons de cette nouvelle forme d’Inocerame, maïs je n’ai jamais pu en recueillir que des fragments très insuflisants. Je ne puis donc mentionner l'espèce que pour mémoire. OsTREA HiPpopopiUM Nills. J'ai démontré dans un autre mémoire, que les Huîtres, générale- ment désignées sous ce nom, n'étaient que des variétés jeunes et 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 915 largement fixées d espèces diverses du groupe des Pycnodontes, comme Ostrea vesiculosa Guéranger, O. proboscidea d’Archiac, O. Costei Coquand et surtout ©. vesicularis Lamarck. C’est donc contre ma manière de voir et parce que je ne trouve pas de nom certain à leur appliquer, que je désigne ici sous le nom d’O. hippo- podium, de nombreux petits Ostrea que l’on rencontre, très fréquemment, fixés sur d’autres fossiles, principalement sur les Micraster et sur les Spongiaires. Ces Ostrea, de petite taille, représentés toujours exclusivement par des valves inférieures largement attachées, sont, comme forme, comme taille et comme mode de fixation, parfaitement identiques à ceux que nous trouvons si fréquemment sur nos Oursins de la - craie du Bassin de Paris et à ceux qu'ont représentés, sous le nom d'Ostrea hippopodium, plusieurs auteurs et particulièrement Reuss !. Ces jeunes Ostrea n'ont pas d'importance au point de vue strati- graphique, car on en trouve de semblables à tous les niveaux du Crétacique supérieur. IL est néanmoins utile de les mentionner, car ils impriment encore un certain cachet de ressemblance entre notre faune du Crétacique niçois et celle de la Craie du nord. SPONGIAIRES Les Eponges fossiles sont très abondantes dans le Crétacique des Alpes-Maritimes. _ M. Léon Bertrand, parlant de la rareté des fossiles détermi- nables qu’on rencontre dans ce terrain, cite avec les Micraster écrasés et les Inocerames, qu’on ne peut avoir qu’en fragments, des Spongiaires calcaires, encroûtés de calcaire marneux, qu'on ne peut même pas étudier par décalcification. M. de Riaz cité, en plusieurs localités, des Spongiaires siliceux abondants, dont de grands exemplaires cupuliformes. Des citations semblables ont été faites par MM. Fallot, Ambayrac, etc., mais je ne vois pas qu'aucune tentative ait été faite pour la détermination de ces nombreux Spongiaires. Cependant des recherches un peu attentives permettent d’en recueillir des exemplaires en bon état et suflisamment dégagés de la gangue pour qu'on en puisse observer, au moins, tous les princi- paux caractères externes. C’est ainsi que j'ai pu en réunir une nombreuse série et y reconnaître plusieurs formes bien connues par leurs caractères morphologiques et par les détails de leur structure. 1. Die Versteinerungen des Bômischen Kreideformation, pl. XXIX. 516 A. PERON 18 Nov. Pour d’autres échantillons, la détermination est incertaine et je me borne à signaler leurs affinités apparentes. Tous ces Spongiaires proviennent principalement de la Trinité, de Pointe-de-Contes et de la route de Contes à la Madone. Siphonia Kœnigi Mantell (sub Verrucospongia cfr. damæcornis Choanites). Rœmer. Siphonia radiciformis Phill. (sub Cupulospongia cfr. auriformis Rœ- Spongia). mer. Terea cfr. elongata Michelin. » cfr. contorta (sub Chenendopora marginata Michelin Achilleum). » aurita Rœmer. » Sp. » tenuis Rœmer. Tubulospongia cfr. nulliporella. Amorphospongia ramosa Mantell. Porosphæra globosa Von Hague- now. Toutes les espèces citées ci-dessus existent dans la Craie du bas- sin anglo-parisien et, en particulier, dans l’étage sénonien, mais plusieurs d’entre elles ont été signalées dans la craie à Belemnitella quadrata, c'est-à-dire dans l’Aturien, en même temps que dans l'Emschérien. ECHINIDES Les Echinides sont les fossiles les plus connus parmi ceux du Crétacique supérieur de Nice et Les seuls qui aient été mis en œuvre jusqu'ici pour la connaissance de ce terrain. Dès 1843, Sismonda, dans un mémoire spécial sur les Echinides fossiles du comté de Nice, en faisait connaître de nombreuses espèces parmi lesquels cinq Micraster, des Holaster, Echinocorys et quelques Oursins réguliers qui ne paraissent pas avoir été retrouvés depuis. Tout récemment, M. Lambert qui a eu en communication de nombreux matériaux recueillis par M. de Riaz et aussi par MM. Gauthier, Michalet, etc., a procédé à une révision des Micraster niçois et étudié diverses questions de nomenclature, d'identité des formes et de dénominations. Il reste cependant encore à dire sur ces Oursins, moins sur leur détermination propre que sur le niveau stratigraphique qu'ils occupent et qui ne me paraît pas avoir été toujours correctement interprété. Je discuterai ces questions en traitant de chacune des espèces, non seulement de l'Emschérien mais de l’Aturien, mais je ne mentionnerai ici que les espèces que j'ai recueillies et que j'ai pu étudier, m'abstenant de parler de plusieurs formes citées à Nice par divers auteurs et que je n'y ai pas rencontrées. 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 917 MICRASTER DECIPIENS Bayle — M. cor-testudinarium auctor. (non Goldfuss). J'ai recueilli au moins quatre exemplaires en bon état qui parais- sent pouvoir être assimilés avec sécurité à l’espèce si répandue dans l’Emschérien du Bassin de Paris. Deux d’entre ces exemplaires sont bien typiques. Les deux autres, plus grands et un peu plus arrondis, constituent une variété. Je les ai soumis à l’examen de M. Gauthier et ce savant estime qu’en raison de la disposition de l’ambulacre antérieur on peut y voir cette forme du Micraster cor-testudinarium que M. Lambert a nommée Micrasier icaunensis. Mes exemplaires ont été recueillis à Menton, à Gando, à Canta- ron et à la Trinité. MICRASTER COR-ANGUINUM Klein Un seul de mes exemplaires peut être sûrement rapporté à cette espèce. Il a été recueilli par un ouvrier de la fabrique de ciment de Font-de-Jarrier, mais ne provient pas, au dire de cet ouvrier, des calcaires exploités dans cette usine. Il est en effet un peu usé au pourtour et paraît avoir été ramassé dans quelque sentier des envi- rons. Quoi qu'il en soit, c’est un Oursin qui, par sa taille, sa partie postérieure rétrécie, sa forme un peu renflée et arrondie, son apex un peu en arrière, la structure de ses ambulacres et enfin la position de son périprocte et la forme de sa lèvre paraît se rap- porter exactement au Micraster cor-anguinum typique. Nous l'avons, chez M. Gauthier, comparé à de bons exemplaires de cette espèce provenant de la craie de Gravesend et notre confrère l’a reconnu bien conforme. MiCRASTER G18BuSs Lamarck M. Lambert a consacré à cette espèce une longue et savante discussion et est parvenu à en débrouiller l'historique assez confus. D’après notre très érudit confrère et ami, on doit prendre pour type de cette espèce exclusivement l'individu décrit par Lamarck en 1816 et figuré dans l'Encyclopédie et on doit admettre que cette forme de AZ. gibbus est celle de Nice. Le type de Lamarck, cependant, a été décrit sans indication de provenance et il semble improbable qu'il ait été cherché aussi loin alors que des formes similaires existent abondamment dans la Craie du Bassin de Paris. 518 A. PERON 18 Nov. Quoi qu'il en soit, je pense que ces Oursins des environs de Nice qu’on a, de divers côtés, appelés Micraster gibbus, ne sont pas encore suflisamment connus et qu'il s’est produit là quelque confusion analogue à celle qui s’est produite dans la Craie du Bassin de Paris pour les formes gibbeuses qu’on y rencontre dans plusieurs niveaux successifs et qui ont été distinguées sous les noms de Micraster senonensis Lambert pour l'espèce du Sénonien inférieur et de M. fastigatus Gauthier pour celle de la craie à Belemnitella quadrata. Il est à remarquer d’ailleurs que M. Gauthier attribuait au vrai M. gibbus les individus dont M. Lambert a fait M. senonensis et que, vice-versa, M. Lambert considère comme 1. gibbus, l’'Oursin que M. Gauthier a nommé }{. fastigatus !. M. Lambert a fait figurer, comme néotypes de M. gibbus, deux exemplaires des environs de Nice, dont l’un, représenté de profil, est de la collection Michalet, et Fautre, figuré sur la face supérieure (pl. XIT, fig. 4) et de profil (fig. 5), est de la collection Gauthier ?. J'ai pu examiner les originaux de ces deux Oursins. Ils ne me paraissent pas identiques. Le premier, dont je parlerai plus loin, est celui de la craie supérieure à B. quadrata, c’est à dire M. fas- ligatus. Quant au deuxième, après l'avoir comparé aux nombreux individus que j'ai recueillis dans l’'Emschérien, je crois pouvoir conclure qu'il provient de ce dernier étage. Je n’en possède pas d'aussi élevé, car la presque totalité des Oursins de ce niveau sont déformés, mais par sa taille plus grande, par sa forme plus allon- gée, par ses ambulacres plus longs et plus profonds, ce Micraster est bien conforme à mes exemplaires et je suis convaincu de leur identité spécifique. Mais ce Micraster que, à l'exemple de M. Lambert, nous appel- lerons M. gibbus, ne me paraît pas identique aux autres individus également gibbeux et subconiques, mais plus petits, plus cordifor- mes, à ambulacres plus courts et plus étroits, que nous avons recueillis à Font-de-Jarrier dans un niveau plus élevé. Ces Micraster aturiens, dont nous parlerons ci-après, nous paraïis- sent bien identiques au M. fastigatus Gauthier de la craie à B. quadrata de Reims et nous avons adopté cette détermination avec d'autant plus de confiance que ces M. fastig'alus sont accompagnés, à Font-de-Jarrier, d’une autre espèce M. pseudogly phus de Gros- souvre qui se retrouve également à Reims associée à M. fastigatus. 1. Monog. gen. Micraster, p. 228. 2. B.S. G. F. (3), XXIV, p. 313. (Il existe entre les planches et leur expli- cation un désaccord que nous corrigeons ici). 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES D19 Nous pensons donc qu’il y a lieu de distinguer dans le Crétacé supérieur niçois deux espèces de ces Micraster gibbeux, à ambu- lacre impair semblable aux autres, dont M. Gauthier a proposé de faire le genre Gibbaster. Il est même encore une autre espèce, Micraster arenatus, dont nous allons parler, qui doit rentrer dans ce genre Gibbaster. MICRASTER ARENATUS Sismonda Le type de cette espèce de Sismonda provient des calcaires crétacés, riches en Micraster, que l’on rencontre sur la route de Contes-les-Pins, à la Madone de Contes (Châteauneuf). L'espèce a été rencontrée au même endroit, il y a quelques années, par M. de Riaz et reconnue par M. Lambert, auquel les individus ont été communiqués. C'est une forme assez mal connue, en résumé, car Sismonda n’en a représenté que la face supérieure d’un individu, peut-être un peu exceptionnel. Le profil, la face inférieure, la forme et la position du périprocte restent inconnus. Dans ces conditions, il n’est pas très étonnant que l'espèce soit restée ignorée et n'ait pas été citée par les auteurs. Il est d’ailleurs évident qu'elle est, au moins, fort voisine de Micraster Matheroni Desor et c'est sous ce dernier nom que figurent, tant à l'Ecole des Mines, à Paris, qu'au Musée de Nice, les grands Micraster arrondis, qui sans doute représentent l'espèce de Sismonda. J'en ai moi-même recueilli deux exemplaires dont l’un provient du gisement même de Sismonda, c’est-à-dire, de la route de la Madone et l’autre des environs de Pont-de-Peille. Ils sont, comme le type, grands, larges et arrondis et leurs ambulacres, longs et peu profonds, sont tous à peu près semblables, ce qui doit les faire classer dans le groupe Gtbbaster de M. Gauthier. Malheureu- sement ils sont un peu déformés et je ne puis en donner le profil exact. J’ai pu comparer ces exemplaires à de bons Wicraster Matheroni que je possède, tant du Beausset que de Rennes-les-Baiïins, et, malgré l’avis de M. Lambert, je crois que ces espèces pourraient être réunies. Il y a lieu, d’ailleurs, de faire observer ici que, contrairement à ce qu'a pensé M. de Riaz, Micraster arenatus n'est pas une espèce du Sénonien supérieur, mais bien une espèce purement santonienne. On le trouve, à la Madone de Contes, en compagnie 520 A. PERON 18 Nov. de Mortoniceras texanum Rœm., /noceramus digitatus Sow., Holaster integer Desor, etc. ; c’est-à-dire avec les fossiles, qui, au Beausset et dans les Corbières, sont les compagnons fidèles de Micraster Matheroni d'Orb. et M. corbaricus Lambeit (= M. brevis auctorum). ECHINOCORYS VULGARIS Breyn. J'ai recueilli de nombreux exemplaires d'Echinocorys dans divers horizons du Crétacé supérieur niçois et, quoique la plupart fussent en très mauvais état, il m'a été possible d'y reconnaître différentes formes représentant, vraisemblablement, plusieurs des variétés eonnues dans la Craïe du bassin parisien. L'Echinocorys vulgaris que j'ai rencontré dans les couches emschériennes du pays niçois est toujours déformé ou fragmenté et ses caractères sont malaisés à étudier. Cependant j'en ai trouvé de passables dans le nord-ouest de Menton et, à l’aide de tous ces matériaux, j'ai pu reconnaître que l'espèce est toujours de petite taille, à pourtour anguleux et non rétréci, à carène posté- rieure assez prononcée. Ce sont exactement les caractères du petit Echinocorys que l’on trouve abondamment dans les Corbières en compagnie des Micraster corbaricus ei M. Matheroni et c’est là un trait de ressemblance de plus entre le Sénonien niçois et celui de la Provence et des Pyrénées. Ce petit Echinocorys de Rennes-les-Bains, communiqué par moi à divers spécialistes, avait été considéré, notamment par Cotteau, comme représentant la variété Æ. striata de Lamarck !. Ce rappro- chement me paraît douteux, car mes individus sont bien différents de ceux figurés par Goldfuss sous le nom d’Echinocorys striata Lamk., mais, quoiqu'il en soit, comme il est utile de distinguer mes Echinocorys emschériens de ceux du niveau supérieur, je leur appliquerai ce nom en attendant la classification si nécessaire de ces divers Oursins. ; HOLASTER INTEGER Desor Deux exemplaires recueillis, l’un par moi-même à la Madone de Contes, l’autre par M. Caziot, dans le ravin de Cantaron, me paraissent pouvoir être correctement désignés sous ce nom. Ils sont tous deux assez mal conservés, mais on y retrouve facile- ment tous les caractères des Holaster integer des Corbières, c’est- 1. BeRON. Calcaire à Echinides de Rennes-les-Bains. B. S. G. F., (2), V, p. 521. IOO1 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES D21 à-dire la grande taille, la forme presque orbiculaire, le sillon antérieur élargi, les divers détails des ambulacres, etc. Holaster integer se trouve dans les Corbières en compagnie de Mortoniceras texanum, Inoceramus digitatus, comme se trou- vent aussi nos Holaster de l’Emschérien niçois. EcmNoconus Gi&GAs ? Cotteau Je mentionne, pour mémoire, sous ce nom, un grand exemplaire d'Echinoconus malheureusement déformé et un peu incomplet qui m'a été donné par un médecin de Menton comme ayant été trouvé dans les environs de ce pays. Il a bien la taille et la plupart des caractères des £chinoconus gigas des petites Pyrénées de la Haute-Garonne. On distingue dans la gangue de ce fossile de nombreux Foraminifères, Cristel- laria et autres. EMPREINTE VÉGÉTALE. Je veux encore mentionner ici une empreinte que j'ai rencontrée dans les calcaires marneux noirâtres qui occupent à peu près le centre du pli synclinal de la Trinité-Victor dont nous parlerons plus loin. Ces calcaires foncés, micacés, parfois charbonneux, se trouvent un peu en aval de la couche à Spongiaires dont nous avons parlé. Cette empreinte est noirâtre, charbonneuse, rubannée et nette- ment divisée en deux parties égales par une nervure centrale bien dessinée. M. Fliche, le distingué spécialiste, auquel nous avons soumis notre fossile, nous a donné à son sujet les renseignements suivants : (c’est sans conteste une empreinte végétale. Il me semble également hors de doute qu'il s’agit d'un grand fragment de végétal terrestre. Quelques traces de nervures secondaires, la médiane étant bien prononcée, font même un peu songer à ce qu'on voit chez certaines Protéacées, maïs ceci est trop vague et n’est pas une donnée dont on puisse tirer parti ». Si maintenant nous examinons l’ensemble de la faune dont nous venons d'énumérer les espèces, nous voyons que toute cette faune, sans exception, se retrouve dans l’Emschérien supérieur, c’est-à-dire dans l'étage santonien de Coquand, aussi bien dans le nord que dans le midi de la France. En ce qui concerne plus particulièrement la craie du Beausset et des Corbières, quoique le Crétacique supérieur de Nice n’aït encore 522 A. PERON 18 Nov. donné aucun reste d'Hippurites ou de Radiolites, la correspondance n'en est pas moins très bien établie. Les Mortoniceras texanum, Inoceramus digitatus. Holaster integer. Micraster Matheroni, M. corbaricus, Echinocorys striata., sont des formes qui, toutes très caractéristiques, se retrouvent dans la grande assise marneuse qui sépare les niveaux hippuritiques inférieurs et que, depuis longtemps, tous les géologues ont, comme nous l’avions proposé, classée dans l’étage santonien malgré la vive opposition des géo- logues les plus autorisés de cette époque. Ce terrain des Alpes-Maritimes, quoique si voisin de celui de la Provence, ne revêt cependant pas. comme ce dernier, le faciès hippuritique et récifal, mais se rattache au contraire, au point de vue du faciès, au Crétacique supérieur du nord de la France. Il cons- titue donc par sa faune une sorte de trait d'union entreces formations contemporaines et cependant si disparates du nord et du midi. Comment se fait-il que ce Crétacique des Alpes-Maritimes, si rapproché de celui de la Provence, n'en ait pas le faciès et soit au contraire semblable à celui des régions relativement très éloignées du nord de la France ? Quelques géologues ont déjà abordé ce problème, mais les explications tirées soit de l'existence de deux mers distinctes, soit des conditions bathymétriques différentes des sédiments crétacés des deux gisements voisins, ne reposent encore que sur des données un peu insuflisantes. Un élément d’apprécia- tion fait encore défaut, c’est une connaissance plus complète de la formation crétacée dans la partie septentrionale de la région alpine. Étage aturien Cet étage du Crétacique supérieur ne parait être représenté jusqu'ici, dans les Alpes-Maritimes, que par sa subdivision infé- rieure, c'est-à-dire par l'étage campanien de Coquand. Nous ne connaissons encore, en effet, aucune assise qui puisse être placée sur le niveau du Maëstrichtien ou du Dordonien. L’Aturien infé- rieur, lui-même, ne semble pas être complet. Il est d’ailleurs très peu répandu dans la région et ce n’est guère qu'au nord de Nice, au pourtour du massif éocène de Contes-l'Escarène, que nous le voyons bien nettement représenté. | M. de Riaz a bien classé sur l’horizon de la craie de Meudon, diverses couches de la presqu'île de Saint-Hospice, près Baulieu !, et celles de la Madone de Contes, qui renferment Micraster are- L BIS ICS HONG) pee 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 523 natus, mais, comme nous l’avons démontré ci-dessus, l’âge de cet Oursin n’a pas étécorrectement interprété et, d'autre part, les autres fossiles, assez nombreux, recueillis par M. de Riaz à Saint-Hospice, ne sont pas de nature à établir l’âge campanien de ce gisement. De même encore, contrairement à l'avis exprimé par M. Baron et, partiellement, par M. de Riaz, je pense que les couches du Cré- tacique supérieur qui affleurent autour de Menton ne représentent que les étages turonien et emschérien. Je ne connais jusqu'ici aucun fossile qui permette d'admettre dans cette région la présence de l'Aturien et encore moins celle du Danien que quelques explo- rateurs y ont signalé. Il y a lieu même d’aller plus loin et je crois pouvoir conclure que les seules couches connues que l’on attribue généralement, dans les environs de Nice, à la Craie supérieure, ne représentent que la zone inférieure de l’étage campanien, c’est-à-dire la craie de Reims à Belemnitella quadrata, à l'exclusion de la craie de Meudon à Magas pumilus et Belemnitella mucronata (sans B. quadrata). Nous développerons ci-après les motifs qui ont déterminé cette manière de voir. Les assises qui, au nord de Nice, nous paraissent constituer l'Aturien, ressemblent beaucoup à celles de l'Emschérien. Il semble impossible, en l’état de nos connaissances, d'indiquer un point précis où il convient de placer la séparation des deux étages. Nous avons dit plus haut que l’Aturien devait être considéré comme débutant vers le point où les marnes de l’Emschérien supé- rieur font place à des bancs calcaires de plus en plus serrés et épais, mais la transition entre les deux séries est très ménagée et les calcaires de l’Aturien conservent encore des lits marneux interstratifiés semblables à ceux de l'étage précédent, quoique moins épais. Ces marnes et calcaires sont également gris, parfois noirä- tres, teintés de rouille par places, micacés, à grain fin, parfois sublithographiques. Leur stratification demeure aussi nette et aussi régulière que dans l’Emschérien. Il semble seulement qu'en raison sans doute de la rigidité et de la résistance des gros bancs calcaires, ces assises supérieures ont été moins écrasées par les pressions latérales et les fossiles y sont moins déformés et en meilleur état. Ces bancs de calcaire marneux sont largement exploités pour la fabrication du ciment et de la chaux hydraulique, tant à l'usine de Contes-les-Pins qu'à celle de Font-de-Jarrier, où naguére on n’exploitait que le calcaire nummulitique. Grâce à cette circons- tance on a pu obtenir, provenant de ces couches, plusieurs bons 2/ A. PERON 18 Nov. ot fossiles en meilleur état de conservation que ceux que les explora- teurs peuvent habituellement recueillir eux mêmes à la surface du sol. Ces fossiles, qui ne sont pas complètement les mêmes dans les deux usines, sont surtout, à Contes-les-Pins, des Ammonites et, à Font-de-Jarrier, des Echinides. Les uns et les autres sont également précieux pour la détermination de l’âge des gisements, car les mêmes espèces sont connues dans plusieurs autres régions et, toujours, c'est l'étage aturien inférieur qu’elles habitent. Nous allons les examiner ci-après. Un croquis du front de taille des carrières de Contes-les-Pins a été donné par M. Fallot ! d’après un dessin de M. Baron. Il ne m'a pas paru que les couches présentassent, dans cette carrière, les allures irrégulières et les inégalités d'épaisseur que montre le croquis en question. Elles sont, au contraire, bien litées et d'une inclinaison uniforme. La couleur des calcaires et des marnes est parfois très foncée, presque noire et on y trouve même, intercalées, quelques veinules charbonneuses. On y rencontre aussi quelques rognons de pyrite. Les fossiles n’y sont pas très abondants et, seuls, les Inocerames paraissent un peu fréquents. J'y ai recueilli des exemplaires bien typiques d’/noceramus Cripsü Mantell. D'après les indications de M. Baron, les Ammonites existeraient dans tous les bancs supérieurs de la carrière etles Micraster dans les bancs inférieurs. Je ne suis pas en mesure de donner des renseignements à ce sujet. Il est rare qu'un visiteur ait l’occasion de recueillir lui-même les Ammonites. Je n'en ai trouvé moi-même qu'un fragment et encore se trouvait-il dans des déblais et débris non en place. Quant à : celles que les ouvriers m'ont données, je n’ai pu avoir sur la couche d'où elles provenaient, que des renseignements incertains. En ce qui concerne les Aicraster je n’en ai pas trouvé dans la carrière même. C’est seulement à une certaine distance et, dans des couches un peu inférieures, en effet, aux calcaires exploités que j en ai rencontré un mauvais spécimen. M. Fallot a cité dans la carrière de Contes-les-Pins plusieurs espèces d’Ammonites connues, l’une dans la Craie du sud-ouest, les autres dans le Crétacé des Indes orientales. Je n’ai pas retrouvé ces espèces. La seule que j'y ai recueillie est Pachydiscus Levyi de Grossouvre, Ce doit être là la forme la plus fréquente, car j'en ai 1 JDE N CE UIDe, TR 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 529 rapporté quatre individus en bon état dont deux de grande taille. Ilme paraît probable, d'ailleurs, que c’est à cette même espèce qu'il faut attribuer l'Ammonite que M. Fallot a désignée sous le nom d'A. ootacodensis Stoliczka, cette espèce de l'Inde ayant, en effet, sensiblement l’ornementation et la forme de Pachydiscus Levyt. Le P. Leoyi n’est pas absolument spécial au gisement de Contes- les-Pins. Il existe aussi dans la Charente et M. de Grossouvre le signale aux environs de Montmoreau, dans l’assise P'de M. Arnaud, c’est-à-dire dans le Campanien inférieur. Une autre espèce de Contes-les-Pins, que je n'ai pas retrouvée, mais que M. de Grossouvre a étudiée dans la collection de la Sorbonne, le Mortoniceras campaniense de Gross., a exactement la même signification stratigraphique. On la retrouve à Mont- moreau et dans plusieurs autres localités au même niveau du Campanien inférieur. Nous verrons que les Oursins confirment parfaitement ce classement. Un des faits intéressants qu'on observe dans les carrières de Contes, c’est que, comme nous le montre très bien le croquis de M. Baron, les calcaires crétacés y sont surmontés par le terrain nummulitique dont un banc puissant forme le couronnement du front de taille. J'ai suivi avec attention sur un certain parcours la ligne de contact de ce bane, mais je n'ai pu y reconnaître aucune trace nette de discordance entre les assises ou d'interruption sédi- mentaire. Il m'a semblé qu'à Font-de-Jarrier, où la situation est encore semblable, il en était de même. Dans cette localité les gros bancs gréseux remplis de Nummulites par lesquels débute l’Bocène sont faciles à suivre et à distinguer même de loin, et ils m'ont paru se modeler très régulièrement et en parfaite concordance sur les derniers bancs du Crétacé. Cependant, d’après la coupe de ce gisement donnée par Hébert”, en 1877, les dernières assises du Crétacé, qui contiennent, disait-il, les mêmes espèces que la craie de Bidart, présenteraient au contact du Nummulitique une surface ravinée, corrodée et percée par les Lithophages. D'autre part, non loin de Font-de-Jarrier, sur les hauteurs mêmes de la Palarea, notre confrère M. Caziot a observé une discordance de stratification très marquée entre le Crétacé et le Nummulitique et il considère ce dernier terrain comme enclavé dans le premier, contre lequel il vient buter. 1. B. S. G. F. (3) V, p. 809. 526 A. PERON 18 Nov. Il semble possible qu'il en soit, en effet, ainsi. M. Léon Bertrand a montré que dans le nord des Alpes-Maritimes le terrain nummu- litique est très souvent en discordance angulaire sur son substra- tum et qu'il repose indifféremment sur les différents termes du terrain crétacé et même sur le Jurassique !. Ce ne serait, d’après notre confrère, que dans le centre des synclinaux, comme par exemple à Puget-Théniers, qu’il y a concordance absolue entre le Crétacé supérieur et le Nummulitique. Ces faits s'expliquent aisément et sont tout à fait normaux. Ils concordent avec nos observations, desquelles il résulte que la série crétacée supérieure est très incomplète dans les affleurements visibles de la région niçoise et qu’il y manque non seulement l'étage danien, mais encore le Maëstrichtien et même le Campanien supérieur. Le terme le plus élevé que nous connaïssions du Crétacé niçois, c'est-à-dire l’Aturien inférieur, ne paraît visible que sur le bord de la grande cuvette où s’est déposé le Nummulitique de l'Escarène. Partout ailleurs, même au col de Braus, où cependant la succession semble régulière et continue, nous ne connaissons pas l’Aturien bien caractérisé. Il semble donc possible que les termes supérieurs du Crétacé soient plus ou moins masqués par le terrain tertiaire. Dans diverses localités de l’ouest niçois, notamment aux environs de Puget-Théniers, on remarque, entre les marnes crétacées et le Nummulitique, une intercalation parfois épaisse de poudingues et de cailloux roulés qui témoignent d’un changement considérable dans les conditions sédimentaires et dans la distribution des rivages. Cette lacune que nous constatons dans la série crétacée supé- rieure résulte-t-elle d'une émersion de la contrée avant le dépôt du Maëstrichtien et d’une interruption sédimentaire qui expli- querait les traces signalées par M. Hébert à Font-de-Jarrier ou bien résulte-t-elle d’une ablation de ces couches crétacées supérieures postérieurement à leur dépôt ? Il semble difficile de répondre d’une manière certaine à cette question, mais nous adoptons plus volon- tiers la deuxième version qui explique mieux l’inconstance, l’irré- gularité et la situation des lambeaux de couches aturiennes qui ont survécu et que nous connaissons aujourd'hui. La constatation de l'existence de l’Aturien exclusivement sur le bord de la cuvette nummulitique de l’Escarène, c’est-à-dire sur le versant nord du grand anticlinal dont on voit l’axe près du 1. Loc. cit, p. 64. 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 927 Pont-de-Peille, est de nature à appeler l'attention et Je me suis demandé pourquoi, sur le versant sud de cet anticlinal, on ne retrouvait pas l’affleurement de l'étage en question. M. Fallot ! a donné, dans l’ouvrage que nous avons déjà fré- quemment cité, une coupe de la retombée sud de cet anticlinal relevée sur la rive droite du Paillon, entre le Pont-de-Peille et la Trinité-Victor. Nous y voyons la série continue des couches du Cénomanien, du Turonien et de l'Emschérien, mais, malheureuse- ment, cette coupe est arrêtée au point même où elle serait le plus intéressante, c'est-à-dire au point, à peu près, où devrait apparaître l'Aturien. Je crois que, si M. Fallot a arrêté sa coupe à ce point, c’est parce qu'il existe là un nouvel accident tectonique, qui est venu inter- rompre la succession régulière et la continuité des assises. Notre confrère, M. de Riaz, a donné dans sa note déjà citée, une esquisse schématique de cet accident, mais ses recherches trop rapides ne lui ont pas permis de l’interpréter complètement. Il me paraît utile de reprendre cette question dont j'ai poursuivi la solution dans plusieurs excursions, que M. Caziot a complétées depuis, de manière à ne laisser inexplorée aucune portion des couches. Pour plus de clarté, je reprendrai la question au point où la laissée M. de Riaz et je reproduirai ci-dessous son petit croquis, lequel fait suite à la coupe don- née par M. Fallot de la succes- sion des assises crétacées sur la rive droite du Païllon entre le Pont-de-Peille et la Trinité- Victor. Le petit schema ci-contre (fig. 1) représente un groupe de Fig. 1. couches très redressées et dispo- sées en éventail que l’on observe à hauteur de la Trinité, entre les deux moulins situés sur la rive droite. D'après la légende de la figure, les assises x, 2, 3, 4 sont des bancs sans fossiles, l’assise 5 est dénommée couche à Inocerames et le n° 6, couche à Micraster. M. de Riaz déclare, d’ailleurs, qu'il lui est impossible de dire si la couche à Inocerames est au- dessus ou au-dessous des Micraster. Je pense tout d’abord qu’il n’y a pas lieu de faire cette distinction de couches à Inocerames et de couches à Wicraster. Elle est plutôt M LOC-ICiL., p.198: 528 A. PERON 18 Nov. de nature à induire en erreur. Il y a des Inocerames dans toutes ces couches et, à peu près, en égale abondance. Quant aux Wicraster, s'ils sont, en réalité, un peu plus fréquents dans un des banes, à la base de la coupe, il n’en est pas moins certain que j'en ai trouvé dans sept ou huit niveaux successifs et sur plus de 60 mètres d'épais- seur de couches. Mais ce n’est là qu'un petit côté de la question et l’important est de rétablir la succession normale des couches et de montrer leur situation respective qui est beaucoup plus compliquée que ne le montre le croquis ci-dessus. Les couches 5 et 6 de M. de Riaz sont sensiblement les dernières de la coupe de M. Fallot dont toutes les assises, depuis le Céno- manien jusqu'au Sénonien, sont régulièrement superposées et fortement inclinées au sud, sous un angle qui atteint parfois 80°. Ces couches 5 et 6 du croquis ci-dessus, qui suivent exactement le mouvement des précédentes, sont donc en situation normale. On peut les considérer comme appartenant à la base du Sénonien-Emschérien, car, peu au-dessous, j'ai recueilli un petit Micraster qui paraît pouvoir être rapporté au M. Leskei du Turo- nien supérieur. Ces premières assises du Sénonien sont peu fossilifères ou, du moins, elles se présentent dans des conditions défavorables pour la collecte des fossiles. De même que beaucoup d’autres qu'on voit le long du sentier, elles ne présentent guère à l'observateur qu'une tranche redressée dont on ne peut voir que le bas et qui, d’ailleurs, a été déjà épuisée par les précédents visiteurs. Mais si l’on peut gravir un peu sur le flanc de la montagne et, si, surtout, on veut bien pénétrer dans un petit vallon ou ravin très caillouteux qui entaille le milieu des assises 5 et 4, on rencontre de grands banes, en plans fortement inclinés et pas toujours accessibles mais présen- tant de larges surfaces dénudées sur lesquelles les fossiles, assez rares d’ailleurs, sont parfaitement visibles. Une couche fossilifère qui semble avoir échappé aux recherches de M. de Riaz, se voit à l’entrée même du petit vallon dont nous parlons, sur le versant sud, et se continue même jusqu’au sentier qui suit le canal de dérivation du moulin. C'est une couche de calcaire marneux gris, remplie de Spongiaires et surtout de Tubu- lospongia nulliporella Rœm., Chenendopora aurita Rœm., Cupu- lospongia, etc. Elle est encore, comme les couches situées en amont, fortement inclinée vers le sud et leur est visiblement super- posée. C’est un très bon point de repère, car l'abondance des Eponges permet de la retrouver facilement. , IJO1 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 929 Tout cet ensemble appartient encore, incontestablement, à l'Emschérien, car, presque immédiatement au-dessous de la couche à Eponges, j'ai rencontré un Micraster assez bien conservé, excep- tionnellement, qui peut être sûrement déterminé M. decipiens Bayle. En aval de la couche à Spongiaires, en suivant le canal de déri- vation, on rencontre encore des assises marneuses inclinées vers le sud, puis, on arrive à une partie très troublée, parfois cachée par les cultures, parfois montrant des strates verticales où les couches sont comme schistoïdes, écrasées, laminées par une pres- sion énergique, très tourmentées dans leur allure et remplies de veinules irrégulières, cristallines. Dans cette portion de couches nous n'avons aperçu aucun fossile, ce qui se comprend aisément. C’est au delà de cette partie tourmentée que les strates chan- gent d’inclinaison et commencent à plonger au nord sous un angle d'abord voisin de 80° et qui diminue un peu plus au sud. Cette série inverse, si l’on se borne à l’examiner le long du sentier, n'apparaît que très incomplète et à peu près sans fossiles. Certains bancs, écrasés dans le bas par la compression, semblent avoir été refoulés dans la hauteur et c’est seulement à un certain niveau au-dessus de la vallée qu’on les voit s’intercaler entre les assises marneuses schistoïdes et écrasées. En réalité, cette série qui, dans le bas, semble un peu différente de la première se compose, comme celle-ci, de marnes et de calcaires durs alternants, très puissants, et elle nous a fourni exactement les mêmes fossiles, Spongiaires, Znoceramus, Micraster et Echinocorys, semblablement distribués et en aussi mauvais état. En résumé, après comparaison de toutes ces couches, il m'a paru que la série inverse n’était que le pendage de la série normale et que nous nous trouvions, à la Trinité, en présence d’un pli synclinal très aigu dans l’intérieur duquel les couches ont été broyées, repoussées en hauteur et repliées les unes sur les autres. On peut voir même, sur le versant droit du ravin dont nous avons parlé ci-dessus, un endroit où les bancs, presque verticaux, ont leur tranche supérieure recouverte par des calcaires horizon- taux comme si une cassure était survenue qui a couché ces derniers sur les bancs redressés. | Ce grand pli synclinal de la Trinité semble n'avoir affecté que les assises emschériennes. Nulle part, dans cette série, je n’ai rien vu qui puisse représenter l’Aturien. Nous représentons dans le schéma ci-contre la disposition des assises dans cette portion de la vallée du Paillon, comprise entre le moulin de la Trinité-Victor et l’usine de Font-de-Jarrier. 93 Janvier 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 34 530 A. PERON 18 Nov. En suivant la série, du côté sud du synclinal, on la voit interrompue près du moulin, par un vallon assez profond, creusé dans une partie marneuse et les cultures ne permettent plus de discerner la succession des couches. On ne les revoit avec quelque netteté que dans le massif qui sépare la route de Saint-André de la vallée du Païllon. Là, nous retrouvons des bancs assez tour- mentés qui n'ont pas fourni de fossiles et qui paraissent appartenir au Turonien ou au Cénomanien. Ils forment sans doute le pendage des calcaires de Drap et s'étendent jusqu’au massif des grands calcaires rigides du terrain jurassique qui semblent avoir été le butoir contre lequel les assises crétacées ont été poussées et écrasées. S. Pont de Peille N. ne 1 1 1 1 1 [ ! l l ! 1 l i 7 à 7 TAN LA er Qi NT R NS ï C Niveau du Paillon. NN \ NES Fig. 2. — Profil schématique des assises du Crétacique supérieur entre La Trinité et Font-de-Jarrier. Echelle des longueurs 1/40.000 environ ; hauteurs très exagérées. À, Marnes cénomaniennes; B, Turonien; C, Emschérien; D, Aturien infé- rieur ; E, Calcaires nummulitiques. Nous avons ainsi, dans la vallée du Paillon, un aperçu de ces grands accidents tectoniques qui au nord-ouest de la région niçoise, sur les rives du Var et dans les montagnes de Levens et de Coaraze, ont si singulièrement bouleversé et tourmentéles couches crétacées. Les géologues que passionne, à si juste titre, l’étude de ces gran- dioses manifestations des forces mécaniques qui ont donné à nos montagnes leur structure parfois si compliquée, en trouveront : dans ces régions de curieux effets. Les coupes nombreuses qui illustrent la très intéressante notice de M. Ambayrac sur les lignes de Nice à Grasse et à Puget-Théniers, nous montrent quelques-uns de ces singuliers effets. On y trouve de curieuses représentations des allures torturées et des plissements compliqués et bizarres que les compressions latérales contre les massifs jurassiques ont impri- més aux assises, relativement malléables, du Crétacique supérieur. Nous avons déjà donné ci-dessus un aperçu des motifs qui nous portent à classer dans l’Aturien inférieur et même, exclusivement, I90I ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 531 dans la zone la plus ancienne de cet étage, les calcaires à ciment de Contes-les-Pins et de toute la bordure sud de la cuvette nummuli- tique de l’Escarène. | Il est nécessaire maintenant d'entrer dans quelques détails à ce sujet et notamment d'examiner la faune que renferment ces calcai- res et qui me paraît justifier la classification que j'ai adoptée. Nous donnerons donc ci-après la liste des espèces recueillies, en l’accompagnant des commentaires utiles à la cause. Pacaypiscus Levi de Grossouvre C’est, comme nous l’avons dit, l'Ammonite la plus fréquente dans la carrière de Contes-les-Pins. Nous en avons rapporté quatre individus dont l’un mesure 31 centimètres de diamètre et montre l’ornementation très bien conservée. D’après M. de Grossouvre, cette espèce se retrouve, dans la Charente, dans la couche P' de M. Arnaud, c’est-à-dire dans le Campanien inférieur. Il en est de même d’une autre espèce, Mortoniceras campa- niense, provenant aussi des carrières de Contes, que M. de Gros- souvre a examiné dans la collection de la Sorbonne. Je n’ai pas retrouvé cette Ammonite, non plus que quelques autres signalées par M. Fallot. Il me paraît que celle que ce savant a mentionnée sous le nom d'A. ootacodensis Stolicezka doit être la même que Pachydiscus Leoyi. APTYCHUS LEPTOPHYLLUS Sharpe A. leptophyllus Sharpe. Descrip. of the fossil remains of the mollusca found in the chalk of England, p. 55, pl XXIV, fig. 1. A. leptophyllus Stolley. Die Kreide Schleswig-Holsteins, p. 229, pl. VIII, fig. 2-4. Exemplaire unique mais en bon état, recueilli dans les couches qui forment la base de la barre calcaire de Font-de-Jarrier Cet exemplaire a bien la taille, la forme et tous les caractères des Aptychus leptophyllus de la craie à Belemnitella quadrata de Lägerdorf et de la craie supérieure de Brighton. Ixoceramus Cripsr Mantell J'ai recueilli plusieurs exemplaires d’I. Cripsü. Deux sont en : très bon état et tout à fait typiques. Ils proviennent, l’un des carrières de Contes, l’autre de la montée de la Palarea. 532 A. PERON : 18 Nov. En outre j'ai rencontré au-dessous des calcaires de Font-de- Jarrier un exemplaire plus petit, de forme très oblique, qui me paraît être celui que M. Fallot a nommé /noceramus Cripsii var. giarielensis. M. Ambayrac a signalé l'espèce au nord du cimetière de Puget- Théniers. Inoceramus Cripsi est un fossile commun dans la craie à Belemnitella quadrata de Reïms où il se trouve avec les Echinides que nous allons mentionner. OsTREA HippopopiIuM Nills. Je mentionne encore ici cette espèce dont j'ai déjà parlé à propos des fossiles emschériens. Elle est beaucoup plus rare dans l'étage aturien et ne s’y rencontre que fixée sur quelques Oursins. MICRASTER FASTIGATUS Gauthier Malgré l'avis de M. Lambert! qui pense que cette espèce pourrait être réunie au vrai Micraster gibbus, c’est sous le nom de A. fas- ligatus que je crois devoir mentionner les Oursins gibbeux qu’on rencontre dans les calcaires de Font-de-Jarrier. J’ai dit plus haut, en parlant des Micraster gibbus de l’Emschérien, que, sur les deux exemplaires néotypes de cette espèce figurés par M. Lambert ?, l’un, celui de M. Michalet, me paraissait être Micraster fastigatus, tandis que l’autre, de la collection Gauthier, plus grand, plus allongé, plus convexe et relativement moins conique à la face supé- rieure, me paraissait semblable aux exemplaires qu’on rencontre dans l’Emschérien. Tous deux sont bien indiqués comme provenant de la Palarea, mais cette indication, inipropre d’ailleurs, comprend tout aussi bien les calcaires et marnes emschériens de la montée de la Palarea que les calcaires aturiens de Font-de-Jarrier et jusqu'ici aucune distinction n'a été faite entre ces deux horizons. C’est là une cause de confusion, car chacun d’eux contient des Gibbaster (Micraster gibbeux à ambulacre impair à peu près sem- blable aux autres) et ceux du niveau inférieur paraissent toujours beaucoup plus grands, plus longs, moins coniques que ceux du niveau supérieur. Vraisemblablement, c’est aux exemplaires de ce dernier niveau, 1. Monog. genre Micraster, p. 228. 2. B. S. G. F. (3), XXIV, XII. I901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 933 généralement mieux conservés et mieux connus, que les auteurs ont dû appliquer le nom de Wicraster gibbus. Il resulterait même de l'explication des figures de A7. gibbus données par M. Lambert que notre confrère et ami considère son échantillon, figuré sous le no 3, c’est-à-dire celui de M. Michalet, comme la forme typique, l’autre, celui de M. Gauthier, n’en étant qu’une variété grande, plus allongée que le type. Mais, malgré la savante discussion destinée à débrouiller son identité et la synonymie que M. Lambert a consacrée à Micraster gibbus, il ne semble pas prouvé que le type original, auquel Lamarck a pour la première fois appliqué ce nom, soit réellement celui de l’Aturien de Font-de-Jarrier. 11 paraît donc préférable, sans rien préjuger d’ailleurs de cette question que nous réservons à la grande compétence de notre ami, de désigner ici l’'Oursin qui nous occupe sous le nom de Wicraster fastigatus, le point essentiel pour nous étant, non pas d'élucider la question de synonymie, mais de déclarer simplement que nos exemplaires de Font-de- Jarrier nous paraissent, de tous points, identiques aux Oursins de la craie de Reims, auxquels M. Gauthier a donné ce nom. Nous avons sous les yeux, en y comprenant l’Oursin de M. Michalet, quatre exemplaires de ce Micraster fastigatus.! Ils sont tous bien semblables, de taille assez petite, larges vers le milieu, cordiformes, à face inférieure plane, à face supérieure très élevée et subconique, à ambulacres courts, très peu profonds, tous com- posés de pores allongés et conjugués. Le sillon antérieur est profond à l’ambitus, mais moins que dans l'espèce suivante et le péristome reste un peu éloigné du bord antérieur. Les différences qui permettent de distinguer ces exemplaires des Micraster gibbus de l’Emschérien consistent surtout, comme je viens le dire, dans leur taille bien moindre, dans leur forme plus courte, plus cordiforme, etc., mais en outre dans leurs ambulacres plus courts et moins profonds. MicrastTer Gorrscner Stolley , Die Kreide Schleswig-Holsteins, p. 257, pl. 8, fig. 4 (1892). — M. glyphus Gauihier in Peron. Notes hist. ter. de Craie, p. 233, pl. VI, fig. 6, 7, 1887 (Non Schlüter 1869). — M. pseudogly-- phus de Grossouvre.— M. Schrôderi Siolley. Loc. cit., p. 258, pl. VII, fig. 5, et pl. IX, fig. 1. Avec l'espèce précédente on trouve assez fréquemment à Font- de-Jarrier un autre Micraster plus grand, plus allongé, plus 53/4 A. PERON 18 Nov. longuement acuminé:à la partie postérieure, moins gibbeux au dessus, à péristome Des en avant, avec lèvre sternale visible dans le sillon ambulacraire. Je possède cinq individus de ce Micraster dont trois en très bon état. Le plus grand atteint 70 millimètres de longueur et 6o milli- mètres de largeur, en avant de l’apex. C'est très probablement à la même forme qu appartient le Micraster recueilli dans le même gisement par M. Fallot et que ce savant signale comme très acuminé. Il se rapporte peut-être, dit-il, au Micraster cordatus Agassiz et est identique à des Micraster recueillis par M. Hébert dans la craie à Belemnitelles de Pologne. M. Lambert !, qui a étudié les Oursins de Font-de-Jarrier recueillis par M. de Riaz, a rapporté ceux qui nous occupent au Micraster Brongniarti Hébert, de Meudon, mais en en faisant une variété distincte sous le nom de var. Sismondæ. Notre savant ami ajoute d’ailleurs, d'autre part, qu’on arrivera probablement un jour à séparer cette variété Sismondæ des M. Brongniart types du Bassin de Paris. J'ai comparé minutieusement mes Wicraster de Font-de-Jarrier à la nombreuse série que je possède des Micraster pseudoglyphus de la craie de Reims (M. glhphus Gauthier) et je trouve parmi ces derniers des individus bien identiques aux premiers. D'autre part M. Lambert a reconnu que le Micraster pseudo- glphus était identique à ceux de la craie à PB. quadrala du Schleswig appelés par M. Stolley M. Schrôderi et M. Gotischei et que ces derniers noms étant plus anciens, celui de pseudogl-- phus devait être abandonné. Nous admettons cette manière de voir d'autant plus volontiers que, depuis longtemps, nous avons reconnu l'identité de nos Oursins de Reims avec ceux de la craie à B. quadrata du nord de l’Europe ? L'examen des descriptions et des figures données par M. Stolley nous a confirmé dans cette opinion en ce qui concerne les Oursins de Lägerdorf mais, ici, une petite difficulté se présente pour l’adop- tion d’un nom. M. Stolley a décrit deux espèces, A. Gottschei et M. Schrüderi, que M. Lambert considère comme devant être réunies. Notre confrère a adopté le second de ces noms pour les deux formes et n’a pas fait connaître la raison de ce choix. Cependant M. Gottschei vient le premier dans l’énumération et la description des espèces et, à défaut d’autre indication, ce nom pourrait être considéré comme étant le plus ancien et devant, par 1. In de Rraz. B. S. G. F. XX NII, p. 417, et Monog. genre Micraster, p. 200. 2. Hist. terr. de craie, p. 76-77. 1901 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 939 conséquent, être appliqué à l’espèce. D'autre part, je dois recon- naître que par sa grande taille et par sa forme plus progressive- ment amincie à l'arrière, l'individu figuré (pl. VIIL fig. 4) par M. Stolley, sous le nom de A. Gottschei est encore plus semblable aux miens que celui représenté par la fig. 5 de la même planche comme type de M. Schrüderi. Il y a donc là quelques raisons qui me paraissent militer pour l'adoption du premier de ces noms. Devons-nous, maintenant, à l'exemple de M. Lambert, consi- dérer nos Oursins comme une simple variété de Micraster Bron- gniarti ? c’est là une question que je considérerais comme oiseuse s’il ne s’y mêlait un petit intérêt stratigraphique. Le M. Gottschei ou M. pseudoglyphus, se montre bien dans la craie de Meudon en même temps que dans la craie à Belemnitella quadrata, mais je ne crois pas que le vrai Wicraster Brongniarti de Meudon ait été jusqu'ici trouvé dans la craie à B.quadrata.Cest donc une forme un peu plus récente que la première et dont le type doit rester exclusivement l’Oursin à pourtour un peu rhomboïdal, à partie postérieure peu acuminée et peu obliquement tronquée, que M. Hébert a figuré sous ce nom !. Sans doute,on peut trouver, à Meudon même, des individus à caractères mixtes qui établissent la transition entre les deux formes, maïs, je Le répète, dans la craie à B. quadrata la forme pseudoglyphus seule se montre. C’est donc cette dernière qui est la plus ancienne. C'est l'espèce mère dont M. Brongniarti n'est qu'un descendant et une variation. Il semble plus logique d'envisager ainsi la question que de faire de l'ancêtre une variété de ses enfants. EcriNnocorys vuLGaris Klein. var. g1bba Je n’ai recueilli moi-même dans les calcaires aturiens qu'un mauvais fragment d'Echinocorys. Mais il m'en a été donné, comme provenant de Font-de-Jarrier, deux exemplaires qui, quoique un peu déformés, sont détermi- nables. Ils sont de taille beaucoup plus grande que tous les Echinocorys rencontrés dans l’Emschérien. Leur forme élevée et régulièrement convexe sur la face supérieure, leur pourtour un peu caréné et leur base non rétrécie les rapprochent incontestable- ment des Echinocorys que l’on rencontre si fréquemment dans la craie de Reims à Belemnitella quadrata et que nous avions, sans certitude d’ailleurs, désignés sous le nom de var. striata ?. 1. Mém. S. G. F., 2° sér., t. V, °° partie, pl. XXIX, fig. 14. 2. Hist. terr. de craie, p. 75. 536 ÉTAGES CRÉTACIQUES SUPÉRIEURS DES ALPES-MARITIMES 18 Nov. Résumé Pour nous en tenir exclusivement aux fossiles que nous avons sous les yeux, nous devons établir ainsi qu'il suit la petite faune qui nous est connue de l'étage aturien des environs de Nice. Pachydiscus Levyi de Grossouvre. Micraster fastigatus Gauthier. Aptychus leptophyllus Sharpe. » Gottschei Stolley. Inoceramus Cripsii Mantell. Echinocorys vulgaris Klein. Ostrea hippopodium Nills. Porosphæra globosa Von Hag. Et quelques Spongiaires indéter- minés. | Toutes ces espèces sont propres à la craie à Pelemnitella quadrata du nord de la France et me paraissent justifier le classement des couches qui les renferment à la base de l'étage aturien, c’est à-dire dans le sous-étage campanien inférieur. A propos de la communication de M. Peron, M. Toucas fait connaître qu'en 1877, lors de la réunion extraordinaire de la Société dans les Alpes-Maritimes, il a recueilli lui-même dans la coupe de l’'Escarène, au col de Braus, au-dessus des couches glauconieuses à Ammonites mamillaris Brug. du Gault, de nombreux fossiles cénomaniens, parmi lesquels, Am. Mantelli Sow., Turrilites cos- tatus Lam., Holaster subglobosus Leske, Discoïidea cylindrica Ag. Le Turonien lui a paru être représenté par.une couche mar- neuse renfermant un Inocérame de forme allongée, voisin de Inoceramus labiatus, et de grandes Ostrea columba. Les calcaires supérieurs, qui appartiennent à l’Emschérien, lui ont fourni un bel échantillon d’Znoc. digitatus et quelques Micraster. M. Potier a recueilli dans ces calcaires Mortoniceras texanum. Plus haut, dans des calcaires probablement aturiens, M. Toucas a rencontré de nombreux /noc. Cripsü et d’autres Micraster, qui, dans sa note du 16 janvier 1882, avaient été désignés sous le nom de ÆZ. cor-- anguinum et que M. Peron attribue au 7. fastigatus. Séance du 2 Décembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT M. L. Mémin, Vice-Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membres de la Société : MM. l'abbé Delépine, Licencié ès-sciences, présenté par MM. de Lapparent et l'abbé Bourgeat ; Gilbert Garde, Préparateur de géologie et de minéralogie à l’Université de Clermont-Ferrand, présenté par MM. Julien et Ph. Glangeaud ; Robert Douvillé, présenté par MM. Marcel Bertrand et . Munier-Chalmas ; Michel-Lévy, Garde général des eaux et forêts, présenté par MM. de Lapparent et Munier-Chalmas. Il annonce deux présentations. Le Président présente le diplôme de médaille d’or décerné à la Société géologique de France, pour sa coopération à l'Exposition universelle de 1900. Il communique à la Société, la lettre suivante que lui adresse M. Ficheur : & J'ai le profond regret de vous annoncer la mort de M. Pouyanne, décédé le 23 novembre, à l’âge de 66 ans. «M. Pouyanne, Inspecteur général des Mines en retraite, Directeur du Service de la Carte géologique de l'Algérie pendant près de 20 ans, laisse son nom associé à celui de Pomel dans l’histoire des progrès les plus considérables de la Géologie algérienne. « Toute sa carrière, entièrement passée en Algérie depuis 1859, d’abord comme Ingénieur des Mines à Tlemcen, puis}à Alger, où il devint Ingénieur en chef, puis Inspecteur général, l'avait pro- fondément attaché à ce pays dont il avait fait sa patrie d'adoption À Son association à la direction de la Carte Géologique avec le regretté Pomel, avec lequel il fut toujours en parfaite communauté d'idées, fut des plus fécondes en heureux résultats. « M. Pouyanne sut donner, en 1882, aux travaux de la Carte 538 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1901 Géologique une impulsion nouvelle, s’entourant de collaborateurs sur lesquels il conserva la plus grande influénce par sa haute valeur, par ses conseils toujours empreints de la plus grande bienveillance, et par les précieux encouragements qu'il ne cessait de leur distribuer. Tous ceux qui l’ont approché ont conservé une impression inoubliable du charme de sa conversation, de son esprit finement critique en matière scientifique et de la variété de ses connaissances dans toutes les branches des sciences. « M. Pouyanne a consacré la première partie de sa carrière à l'exploration détaillée de la subdivision de Tlemcen, dont il a donné la description, avec une Carte géologique à 1/400.000, dans un mémoire d’une rigoureuse précision, Conçu avec une extrême réserve pour les questions non élucidées. En 1879, il fut chargé, par le Ministère des Travaux Publics, d’une mission d’études dans le Sud-Oranais et la région saharienne, relative aux tracés projetés du Transsaharien. M. Pouyanne en rapporta des documents nou- veaux sur la géologie de la chaîne des Ksour et des indications précieuses sur la géographie du Sahara, qui furent publiés en 1886. « Si M. Pouyanne a été trop réservé dans la publication des nombreuses observations géologiques qu’il avait recueillies tant dans ses explorations que dans les tournées de son important service, c’est qu'il n'avait d'autre pensée que d’en faire profiter Les recherches ultérieures, distribuant à ses collaborateurs, avec le plus entier désintéressement, les précieuses indications dont il eut pu se faire un mérite personnel. Le concours empressé qu'il voulut bien apporter, facilita dans une large mesure l’organisation de la Réunion de la Société géologique en Algérie, en 1896, où il fut acclamé Président d'honneur. « La Société Géologique de France ne peut oublier que c’est sous la direction de Pouyanne et Pomel que parurent successivement les trois éditions de la Carte Géologique générale de l'Algérie, témoignant dans chacune d'elles des progrès réalisés. « M. Pouyanne laisse, par sa bonté et sa bienveillance inalté- rables, aussi bien que par le mérite de sa haute valeur, un souvenir immuable dans la mémoire de tous ceux qui l’ont connu et apprécié ». Le Président annonce que M. de Lapparent, ne pouvant assister à la séance, l’a chargé d'offrir à la Société, de la part de l’auteur, M. Ph. Négris, un ouvrage intitulé : Plissements et dislocations de l'écorce terrestre en Grèce; leurs rapports avec les phénomènes glaciaires et les efjondrements dans l'Océan Atlantique. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1901 939 M. Nicklès dépose sur le bureau, au nom de l’auteur, M. Authelin, des Votes stratigraphiques sur l’est du Bassin de Paris comprenant : 1° Sur le Toarcien et la région comprise entre Sion (M.-et-M.) et Bourmont (Haute-Marne); 2° Note préliminaire sur la zone à Harpoceras concavum dans le nord de la Lorraine. Il offre à la Société un tirage à part de sa note: Contributions à l'étude des terrains secondaires au sud des Cévennes : Trias et Jurassique de la Montagne Noire (Ex. B. S: G. F., [3], XXVI, 1899). M. Léon Janet fait une conférence de géologie appliquée sur l'alimentation des villes en eau potable par la méthode des sources artificielles. M. A. Guébhard signale la trouvaille qu’il a faite de deux lambeaux de Miocène lacustre sur la rive gauche de la Siagne, au confin septentrional de la commune de Saint-Cézaire (A.-M.) avec celle de Saint-Vallier-de-Thiey. L'un de ces lambeaux, situé à quelques mètres au-dessus de la borne du kilomètre 16 de la route de grande communication n° 5, de Saint-Cézaire à Saint-Vallier, au nord de la bastide de Mauvans, se présente sous la forme de blocs ensablés d’un calcaire marneux compact où des sections de Limnées et de Planorbes se distinguent. à la cassure, au milieu des marbrures irrégulièrement réticulées d’un lacis brunâtre sur fond plus clair. A la surface, la lente corrosion des eaux a fait saillir en une sorte de eloisonnement spongieux les parties brunes et détaché quelques Planorbes de moyenne taille, cf. Mantelli Dunker ou præcorneus Fisch. et Tourn., qui ne sont pas suflisants pour une détermina!ion précise. Mais suivons vers l’ouest le synclinal de poudingue supérieur en bordure duquel le calcaire précité se montre écrasé par pli- faille contre le. Bathonien inférieur, jusque en vue de la Siagne, un peu avant la petite gorge par laquelle le synclinal, insensible- _ment élevé de 660 à 970 m., va se précipiter à 330 m. pour passer à la localité célèbre de Casteou d'Infer : nous pourrons voir, à une centaine de mètres à l’ouest de la bastide de Camplong (les champs longs, à eause de l’étroitesse de la bande synelinale culti- vée), des bancs d’un calcaire marneux qui, par places, se débite assez facilement au marteau en laissant échapper des fossiles reconnaissables. L’Æelix sy leana Klein s’est montrée à M. Depéret parfaitement typique, en compagnie d’une autre de plus petite espèce, et du Planorbis Mantelli Dunker non douteux, ce qui suflit 540 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE IOOI à caractériser un horizon nettement intermédiaire entre le Torto- nien et le Pontien et à justifier une fois de plus l'identification à laquelle j'ai été amené déjà par deux autres voies ! du Poudingue de Saint-Vallier-de-Thiey avec celui de la Durance. D'autre part, et quoique, sous une autre forme, l'existence de lignites d’eau douce à Saint-Vallier-de-Thiey et l'observation récente que j'ai faite, à Casteou d'Infer même, d’un banc de cal- caire saumâtre en dessous des célèbres marnes à Cerithium diabol, eussent pu faire prévoir ces faits nouveaux, il est intéressant de noter cette prolongation, vers l’est, des dépôts d’eau douce que la feuille de Castellane arrêtait beaucoup plus à l’ouest et qui, après avoir été déjà notés à l’état oligocène ou éocène en bordure du bassin de La Roque-Esclapon, viennent à présent, sur la feuille de Nice, à l’ouest de la limite du Nummulitique marin ?, donner un pendant aux dépôts connus de la ceinture orientale (calcaires siliceux et marnes vertes de la descente sur la Cagne de l’ancien chemin de Vence à Saint-Jeannet), ainsi qu’à un curieux lambeau de calcaire à Cérithes que j'ai eu l’occasion de trouver au sud de La Colle-sur-Loup, au lieu dit La Tour, avec fossiles saumâtres, encore à déterminer. M. A. Guébhard mentionne l'existence qu'il a notée, dans le nord-est du département du Var, d’un horizon supérieur du Cré- tacé, caractérisé par le mélange de restes de Crustacés à d’innom- brables moulages parfois très bien conservés d’un Gastropode qui reste à déterminer. Remarqué pour la première fois au haut de la descente de la Colle des Bouis sur le village de Bargême (Var), grâce à cette particularité locale que les restes assez abondants de Callianassa s'y présentent avec une couleur rouge très vive, sur- tout sous la pluie, cet horizon s’étend certainement bien au-delà, avec son faciès gréseux en plaquettes jaune foncé ou vert clair. L'étude des fossiles qu'a l’obligeance de faire en ce moment, à Marseille, M. Repelin, permettra sans doute de préciser l’âge de ce curieux dépôt, presque certainement postérieur au Cénomanien. M. A. Guébhard ayant observé au sud-est de Saint-Jeannet (A.-M.) un faciès inférieur du Miocène, souvent bréchoïde ou en 1. B. S. G. F., (3), XXVIIL, p. 326 et 914 (1900). 2. Sur la prolongation même du synelinal de Casteou d’Infer-Camplong- Mauvans, en cherchant d’autres traces de calcaires lacustres, j'ai trouvé, au sud de Saint-Vallier, au lieu dit le Jas-Neuf, un lambeau priabonien de grès tendre riche en Echinides, en bordure du petit contour de m‘* qui figure sur ma carte du S.-O. des Alpes-Maritimes, au-dessus de l'inscription le Pré de Merle. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1901 54x poudingue aggloméré, mais parfois aussi argilo-sableux, qui sem- blait devoir être séparé de l’étage bien caractérisé de la mollasse burdigalienne, en a soumis les fossiles à M. Depéret, qui y a reconnu Pecten Tournali M. de Serres, Terebratula cf. persinuosa d'Algérie, Ostrea cf. squamosa ou Velaini. C’est donc encore du Burdigalien inférieur, et il n’y avait pas lieu à désignation spéciale sur la carte où cela n'aurait dessiné, d’ailleurs, qu'une simple bande de bordure, au lieu dit la Prée, au sud du grand tunnel de Saint-Jeannet. A propos de l'identité des niveaux à Rudistes, dans les falaises nord et sud du Danube à Cernavoda (Dobrogea), M. V. Paquier fait remarquer que les moulés de Rudistes examinés par lui prove- naient tous de la falaise méridionale, à trois exemplaires près, recueillis dans la berge nord et qui se trouvent rapportés dans la liste à Diceras sp., et à Monopleura sp., forme enroulée. Dans ces conditions, bien que les coupes publiées-par M. Anastasiu ! paraissent établir clairement la continuité de la couche à Rudistes de part et d'autre du Danube et que l'aspect des fossiles des deux provenances soit rigoureusement le même, la coexistence de Diceras avec Monopleura dans les calcaires de la rive nord et celle d'Heterodiceras avec Valletia, Monopleura et Matheronia dans le niveau de la rive sud, association de formes jurassiques et crétacées dans les deux gisements, n’en persiste pas moins. Au sujet de la communication de MM. Sayn et Roman (Compo- silion du Barrémien sur la rive droite du Rhône, dans la région de Viviers), M. Paquier fait observer que la succession des assises de l’escarpement que surmonte Saint-Thomé, ne permet pas d'observer l'extrême base du Barrémien qui se trouve marquée par le banc glauconieux à Pulchellia, Holcodiscus, que M. Sayn a précisément fait connaître le premier, à Cobonne. Ce niveau, bien développé sur la route de Saint-Thomé à Valvignières (Ardèche), se retrouve d’ailleurs avec tous ses carac- tères dans l’affleurement néocomien de la rive gauche du Rhône entre Loriol, Marsanne et Condillac (Drôme). 1. Contribution à l'étude géologique de la Dobrogea /Roumanie). Terrains secondaires, p. 102. Paris, 1898. LES PYCNODONTES DU JURASSIQUE SUPÉRIEUR DU BOULONNAIS par M. H.-E, SAUVAGE. (PLANCHE XID. Depuis que nous avons fait connaître en 1867 ! et en 1880 ? les Pyenodontes trouvés dans le Jurassique supérieur du Boulonnais, l’état de nos connaissances sur ces Poissons s’est augmenté. M. Beaugrand a donné au Musée de Boulogne sa belle collection locale; M. G. Lennier a bien voulu nous communiquer les Poissons faisant partie de la collection Bouchard-Chantereaux conservée au Musée d'histoire naturelle du Havre dont il a la direction. C’est l'étude de ces nouveaux matériaux qui fait l’objet de la présente notice. 1. Gyropus Cuviert Agassiz (ALIEN, 5) 1833-44. Gyrodus Cuvieri Agassiz. Poissons fossiles, t. Il, 2 partie, p. 230, pl. IXIX a, fig. 21-23. 1867. Gyrodus Cuvieri H.-E. Sauvage. Cat. Poiss. form. second. Bou- lonnais. Mém. Soc. Acad. Boulogne-sur-Mer, 1. IL, p. 43, pl. IL, fig. 15. 1895. Gyrodus Cuvieri Smith Woodward. Cat. foss. fishe British Museum, t. II, p. 240. 1867. Pycnodus Larteti H.-E. Sauvage. Loc. cit , p. 33, pl. IL fig. 1. 1901. Gyrodus Larteti Leriche. Ann. Soc. géol. du Nord, t. XXX, p. 163, pl. V, fig. 19. Cette espèce, du Kimméridgien supérieur du Dorsetshire, du VWillshire, du Cambridshire, a été trouvée au même niveau à Fumel (Lot-et-Garonne) et dans le Boulonnais. Agassiz signale que les plus beaux exemplaires se trouvent à Boulogne, dans la collection Bouchard-Chantereaux. 1. Catalogue des Poissons des formations secondaires du Boulonnais. Mém. Soc. Académique de Boulogne-sur-Mer, t. II. 2. Synopsis des Poissons et des Reptiles des terrains jurassiques de Bou- logne-sur-Mer. B. S. G. F., [3], VILL p. 524. LES PYCNODONTES DU JURASSIQUE SUPÉRIEUR DU BOULONNAIS 543 Le Musée du Havre possède, en effet, deux spléniaux en con- nexion provenant de cette collection. Les dents de la série principale, au nombre de 11, sont un peu plus larges que longues et décroissent régulièrement de grandeur. Dents de la série interne arrondies, de même grandeur que les dents de la rangée interne de la série externe ; dents externes de cette série grandes, bien plus larges que longues, de forme ovalaire, diminuant régulièrement de grandeur. Ornementation des dents s’effaçant par l’usure. Dents de la série principale portant un gros mamelon très rugueux, avec un enfoncement et un tubercule à la partie centrale, entouré de fortes rugosités. Dents de la série interne avec un petit mamelon au centre d'une dépression et de fortes rugosités. Mème ornementation aux dents internes de la série externe. Dents externes de cette dernière série renflées avec une partie déprimée au centre, très rugueuses au bord antérieur. Le Musée de Boulogne (collection Dutertre-Delporte) possède deux vomers provenant du poudingue de Chatillon (Portlandien inférieur, zone à Perisphinctes Bleicheri de Loriol). Longueur du vomer, 80 mill., largeur à la partie postérieure, 37. Dents de la rangée médiane contiguës, arrondies, diminuant régu- lièrement de grandeur, granuleuses, sur un plan peu élevé au-dessus des dents externes ; largeur de la rangée principale sensiblement égale à la largeur des deux rangées latérales. Dents externes grandes, de forme triangulaire, relevées en un sommet très granu- leux. Dents de la rangée intermédiaire plus petites, arrondies, avec une dépression centrale portant un bourrelet granuleux ; une couronne de gros tubercules à la base de la dent. Ornementation des dents s’effaçant rapidement par l’usure. Nous avons désigné en 1867, sous le nom de Pycnodus Larteti, n. sp., un splénial de petite taille provenant du Portlandien infé- rieur des falaises de Boulogne, splénial qui a été rapporté au genre Gyrodus par A. Smith Woodward, en 1895; c’est au Gyrodus Larteti que Leriche, en 1901, a rapporté un splénial provenant du même niveau que le type de l'espèce. Des spléniaux récemment recueillis dans le Kimmeridgien, zone à Pholadomy a hortulana et dans le Portlandien inférieur, zone à Stephanoceras portlandicum du Boulonnais, montrent que G.. Lar- teli est le jeune âge de G. Cuvieri, l’exemplaire figuré par Leriche en étant l’âge moyen. Ces spléniaux présentent quelques différences ‘avec le type de l'espèce, mais, ainsi que le note Smith Woodward, la forme, le degré d'usure et l’ornementation des dents principales varient beaucoup chez Gyrodus Cuvieri. 544 H.-E. SAUVAGE 2 Déc. 2. GYRODUS UMBILICUS Agassiz (PL. XIL, fig. 4, 5). 1833-44. Gyrodus umbilicus Agassiz. Loc. cit., p.227, pl. IXIX à, fig:27-28. 1867. » » H.-E. Sauvage. Loc. cit., p. 41, pl. Il, fig. 12. 1895. » » Smith Woodward. Loc. cit., p. 239. Vomer grand, 85 mill. Dents de la rangée principale arrondies, contiguës, sur un plan plus élevé que les dents des rangées laté- rales, aussi larges que ces deux rangées, relevées en un faible bourrelet portant une dépression centrale, un peu excavée en arrière de ce bourrelet. Dents de la rangée intermédiaire un peu plus petites que celles de la rangée externe, irrégulièrement allongées d’arrière en avant, relevées à leur partie centrale, qui porte une dépression. Dents de la rangée externe tronquées au bord externe, relevées en cône comme chez G. Cuvieri, dont G. umbilicus diffère par l’ornementation des dents. Ainsi que l'indique Smith Woodward, il est probable que l’on doit réunir G. umbilicus à G. jurassicus. En tout cas le vomer que possède le Musée de Boulogne et qui provient de la partie supé- rieure du Kimméridgien, ne peut être séparé de G. umbilicus Agassiz. L 3. Gyropus DUTERTREI Sauvage 1867. Pycnodus Dutertrei H.-E. Sauvage. Loc. cit., p. 38, pl. IL, fig. 8. ?1869. Gyrodus coccoderma Egerton. Quart. Journ. Geol. Soc., t. XXV, p. 363. ? 1805. » » Smith Woodward. Loc. cit., p. 243. Vomer long de 55 mill. Dents de la rangée principale arrondies, contiguës, sur un plan plus élevé que les dents des rangées latérales, sensiblement aussi larges que ces deux rangées. Dents de la rangée intermédiaire aussi grandes que celles de la rangée externe, arrondies, portant une dépression centrale entourée d’un faible bourrelet. Dents de la rangée externe obtusément coniques. Portlandien inférieur (Portlandien français). — Kimméridgien supérieur, zone à Reineikia pseudomutabilis de Loriol, et Aspido- ceras longispinum Sow. Espèce voisine de G. Cuvieri et G. umbilicus ; en diffère par les dents beaucoup plus lisses. Smith Woodward met, avec doute, en synonymie G. subconti- I90Ï PYCNODONTES DU JURASSIQUE SUPÉRIEUR DU BOULONNAIS 545 guidens Sauvage, et G. coccoderma Egerton, cette dernière espèce du Kimméridgien du Dorsetshire et du Cambridgeshire ; c’est avec G. Dutertrei qu'il faut comparer l'espèce d'Angleterre ; nous ne trouvons que de faibles différences entre les deux espèces. Nous avons, en 1867, figuré comme pharyngien de Pycnodus Dutertrei une pièce dentaire que Smith Woodward (Op. cit., P. 102) considère comme les spléniaux d’un ZLepidotus, sans doute L. afjinis Fricke, du Corallien supérieur et du Kimméridgien du Hanovre ; nous nous rangeons à cette manière de voir ; nous pensons toutefois que ce n’est pas à l’espèce du Hanovre, maïs à une espèce non encore déterminée, que doit être rapportée la pièce trouvée à Boulogne. 4. GYRODUS SUBCONTIGUIDENS Sauvage 1867. Pycnodus subcontiguidens H.-E. Sauvage. Loc. cit., p. 36, pl. II, fig. 10, 11. Vomer long de 45 mill. Dents de la partie principale arrondies à la partie postérieure du vomer, un peu allongées dans la partie antérieure, sur un plan beaucoup plus élevé que les dents des rangées latérales, aussi grandes que ces deux rangées. Dents de la rangée intermédiaire un peu séparées, de même grandeur que celles de la rangée externe, arrondies ou longitudinalement allon- gées. Dents de la rangée externe obtusément coniques, peu relevées. Toutes les dents lisses. Kimméridgien supérieur. Espèce tres voisine de G. Dutertrei ; en diffère toutefois par les dents de la rangée principale moins régulièrement arrondies, situées sur un plan plus élevé, les dents intermédiaires un peu allongées. 6. MEsopon AFriINIs Nicolet (PI. XI, fig. 6). 1860. Pycnodus afjinis Nicolet in Pictet. Rept. et Poiss. Jura neuchä- telois, p. 50, pl. XII, XXI bis, XIX, fig. 1. 1895. Mesodon affinis Smith Woodward. Cat. foss. fishe British Mus., IPS enr Cette espèce, du Kimméridgien supérieur de Suisse, a été trouvée au même niveau à Fumel (Lot-et-Garonne) et à Boulogne. Un splénial provenant de cette dernière localité et conservé dans la collection Bouchard-Chantereaux au Musée du Havre, 18 Février 1902. == T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. = 35 546 H.-E. SAUVAGE 2 Déc. indique une espèce de grande taille. Les dents de la série prineipale sont un peu plus de deux fois aussi larges que longues, arrondies aux extrémités, non contiguës, de forme ovalaire. Dents de la série interne petites, irrégulièrement arrondies. Dents de la série externe disposées irrégulièrement suivant quatre rangées ; deux dents hors série près de la rangée principale. Les dents bien conservées de la série externe ont l’ornementation des dents de Gyrodus : un bourrelet central dans une dépression d’où rayonnent de fortes rugosités ; l’ornementation disparaît rapidement par l’usure. Dans la restauration de Pycnodus (Mesodon) afjinis, Pictet figure trois rangées de dents à la série interne ; ces rangées sont, au plus, du même nombre de dents. L'exemplaire que nous figurons fait partie de la collection Bou- chard-Chantereaux au Musée du Havre. 7. MesoDon LENNIERI n. sp. (PL. XII, fig. 9). Espèce établie sur un fragment de splénial de 55 mill. de large à la partie postérieure. A la série principale les trois dents postérieures sont allongées transversalement, près de trois fois aussi larges que longues, à extrémité externe arrondie, à extrémité interne moins large, recourbée en avant comme chez Anomædus subclavalus Agassiz, du Crétacique supérieur; les dents plus antérieures sont beaucoup plus petites, irrégulièrement arrondies. Série interne avec une seule rangée de dents petites, arrondies. Dents de la série externe petites, irrégulières, disposées probablement suivant trois rangées. Diffère de tous les autres Aesodon du Jurassique supérieur par la forme des dents de la partie postérieure de la série principale (collection Bouchard-Chantereaux au Musée du Havre). 8. MEesopoN BOUCHARDI n. sp. (PL. XII, fig. 7, 8). Espèce établie sur un fragment de splénial de 53 mill. de large à la partie postérieure. Dents de la partie principale de grandeur très inégale ; la dent postérieure est ovalaire, deux fois aussi large que longue ; les suivantes diminuent brusquement de grandeur. Espace séparant les dents de la série principale de la symphyse large, avec deux rangées de dents petites, irrégulières, irrégulièrement disposées. 1901 PYCNODONTES DU JURASSIQUE SUPÉRIEUR DU BOULONNAIS 547 Série externe composée d’au moins trois rangées de dents petites, . irrégulières, irrégulièrement disposées. Voisin de Mesodon granulatus Münster, du Corallien et du Kimméridgien du Hanovre, du Wurtemberg et du sud de l’Angle- terre, en diffère par la largeur de l’espace symphysaire, les dents de la série principale décroissant beaucoup plus rapidement. Nous rapportons à WMesodon Bouchardi un vomer de 70 mill. de long sur 42 de large à la partie postérieure, bombé comme celui des Cæœlodus, sans doute par suite d'usure. Dents de la rangée principale largement espacées, ovalaires, la dent postérieure une fois et demie aussi large que longue ; dents antérieures arrondies. Dents de la rangée interne de la série externe grandes, irréguliè- rement arrondies, plus grandes que les dents de la série plus externe; une rangée de dents plus petites et irrégulières sur le côté externe du vomer ; quelques petites dents hors série entre la première et la seconde rangée de dents. Nous avons désigné en 1879 !, sous le nom d’Uranoplosus Cotteaui, n. sp., un vomer trouvé dans le Corallien supérieur du département de l’Yonne. Ce vomer diffère de celui des Mesodon types par une rangée supplémentaire et externe de dents latérales, les dents étant ainsi disposées sur 7 rangées, au lieu de 5 ; de plus, on voit des dents intercalaires. Cope ? a accepté le genre Uranoplosus et yY a rapporté deux espèces du Crétacique inférieur d'Oklahoma (Etats-Unis) : U. arc-. tatus Cope ; U. flectidens Cope. Le Mesodon Bouchardi, par la rangée externe et supplémentaire de dents au vomer, rentre dans le genre Uranoplosus ; Smith Woodward * indiquant que dans le genre Mesodon les rangées latérales de dents au vomer peuvent être irrégulières, d'un autre côté le splénial d’'Uranoplosus (U. Bouchardi) ne pouvant être séparé de celui des Mesodon, nous considérons provisoirement Uranoplosus comme un sous-genre de Mesodon. 9. MESODON sp. (PI. XII, fig. 12). Vomer de forme triangulaire. Dents de la rangée principale espacées, irrégulièrement ovalaires, plus grandes que les deux 1. Etude sur les Poissons et les Reptiles des terrains crétacés et jurassiques supérieurs de l'Yonne. Bull. Soc. Sc. hist. et nat. de l'Yonne, 3° sér., t. I. 2. Journ. Acad. nat. Sc. Philad., t. IX, 1894. 3. Cat. fossil fishes British Museum, t. II, p. 199, 1895. 548 H.-E. SAUVAGE 2 Déc. rangées latérales. Dents de ces rangées irrégulières, sensiblement de même grandeur. Grès de Questrecque, Astartien, zone à Pygurus jurensis Roëm. 10. MESsODON aff. GRANULATUSs Münster 1880. Mesodon lævior H.-E. Sauvage. B. S. G. F., (3), VIIL p. 529, pl. XIX, fig. 4, 4a (non Fricke). Le fragment de vomer que nous avons figuré sous le nom de M. lævior Fricke, ne doit pas, suivant Smith Woodward (loc. cit., p. 207), être rapporté à l’espèce du Kimméridgien de Hanovre ; par l’écartement des dents de la rangée principale, ce vomer paraît devoir plutôt être comparé à Mesodon granulatus Münster. Dents de la rangée principale séparées, ovalaires, une fois et demie aussi larges que longues : dents de la rangée intermédiaire irrégulièrement arrondies, un peu plus grandes que celles de la rangée externe. | Kimméridgien supérieur. 11. MEsopon RIGAUxI n. sp. 1880. Mesodon granulatus H.-E. Sauvage. B. S. G. F., (3), VII, p. 528, pl. XIX, fig. 5 (non Münster nec Fricke). Nous avons rapporté à M. granulatus Münster, du Corallien et du Kimméridgien du Hanovre, du Wurtemberg et du Kimmé- ridgien de Weymouth, un splénial provenant du Kimméridgien supérieur de Boulogne. Nous pensons que ce splénial indique une espèce distincte, caractérisée par quatre rangées de dents à la série externe. Dents de la rangée principale ovalaires, deux fois aussi larges que longues, contiguës, aussi larges que la série externe, décrois- sant régulièrement de grandeur. Dents de la série interne petites, sur une rangée. Dents de la série externe sur quatre rangées, arrondies, sensiblement de même grandeur, à part la seconde rangée où les dents sont plus petites. Toutes les dents lisses. Espèce représentée au Musée de Boulogne, par trois spléniaux provenant du Kimméridgien supérieur. Deux spléniaux du Port- landien moyen et du Portlandien supérieur. I907 PYCNODONTES DU JURASSIQUE SUPÉRIEUR DU BOULONNAIS 549 12. MEsoDON MoriNIcus Sauvage (PI. XII, fig. ro). 1880. Mesodon morinicus H.-E. Sauvage. B.S. G. F., (3), VILLE, p. 598, pl. XIX, fig. 2. Nous avons désigné sous ce nom une portion de splénial parais- sant provenir des couches inférieures du Portlandien de nos falaises et faisant partie de la collection de l'Ecole des Mines. Les caractères de l’exemplaire type sont : Dents antérieures de la rangée principale arrondies, dents posté- rieures ovalaires, un peu plus larges que longues. Petites dents à la série interne. Dents de la série externe de forme irrégulière, les dents de la rangée interne étant les plus grandes. Les dents bien conservées sont granuleuses, des plis irréguliers rayonnant du centre, qui est déprimé avec un bourrelet granuleux. Le Musée du Havre (collection Bouchard-Chantereaux) possède deux spléniaux que l’on doit rapporter à M. morinicus. Les dents de la série interne sont disposées suivant deux ou trois rangées ; la série externe se compose de cinq ou six rangées de dents irrégu- lièrement distribuées. Deux fragments de spléniaux conservés au Musée de Boulogne proviennent de la partie inférieure du Portlandien français. 13. MESODON SIMULANS n. Sp. (PI: XII, fig. rx). Splénial de forme triangulaire. Dents de la rangée principale un peu séparées, une fois et demie aussi larges que longues, avec l'extrémité interne un peu moins large. Dents de Ia rangée interne petites. Trois rangées de dents à la série externe, les dents de la rangée interne étant les plus grandes ; les dents des deux autres rangées sensiblement de même grandeur, espacées, irrégulières. Portlandien inférieur. A part trois rangées de dents au lieu de deux à la série externe, cette espèce ressemble à ?’>cnodus (Microdon) vicinus Cornuel, de l’'Oolithe vacuolaire de la Haute-Marne. 14. ATHRODON DOUVILLEI Sauvage Portlandien inférieur. La 15. ATHRODON BOLONIENSIS Sauvage Kimméridgien inférieur, zone à Pholadomy a hortulana. 550 PYCNODONTES DU JURASSIQUE SUPÉRIEUR DU BOULONNAIS 2 Déc. 16. CŒLODUS SUPRAJURENSIS Sp. (PI. XIL, fig. 13). Vomer de petite taille. Dents de la rangée principale espacées, ovalaires, arrondies aux extrémités, aussi larges que les deux autres rangées. Dents des deux rangées latérales sensiblement de même grandeur, irrégulières. Toutes les dents lisses. Difière de C. Mantelli Ag., par la forme des dents de la rangée rincipale. Voisin de la forme désignée par J. Cornuel sous lenom de ? Pycnodus Mantelli Ag. Deux vomers au Musée de Boulogne, Portlandien-Purbeckien de la carrière du Mont Rouge, près Wimille. 19. CœŒLODUS sp. (PI. XI, fig. 14). On doit, peut-être, regarder comme une anomalie de Cæœlodus suprajurensis un vomer provenant des mêmes couches. Les dents sont disposées irrégulièrement, irrégulières, de grandeur inégale, celles de la rangée principale étant, les unes ovalaires, les autres arrondies. k EXPLICATION DE LA PLANCHE XII Fig. 1. — Gyrodus Cuvieri Agassiz. Spleniaux. Musée du Havre (collection Bouchard-Chantereaux). Kimméridgien supérieur. Fig. 2. — Même espèce. Vomer. Musée de Boulogne. Kimméridgien supé- rieur à. Fig. 3. — Même espèce (Gyrodus Larteti Sauvage). Splénial. Musée de Boulogne. Kimméridgien. Zone à Pholadomya hortulana. Fig. 4. — Gyrodus umbilicus Agassiz. Vomer. Musée de Boulogne. Portlan- dien inférieur. Fig. 5. — Même espèce. Vomer. Musée de Boulogne. Portlandien supérieur. Fig. 6. — Mesodon afjinis Nicolet. Splénial. Musée du Havre. Fig. 7. — Mesodon Bouchardi n. sp. Splénial. Musée du Havre. Fig. 8. — Même espèce. Vomer. Musée du Havre. Fig. 9. — Mesodon Lennieri n. sp. Splénial. Musée du Havre. Fig. 10. — Mesodon morinicus Sauvage. Splénial. Musée du Havre. Fig. 11. — Mesodon simulans n. sp. Splénial. Musée de Boulogne. Portlan- dien inférieur. ne Fig. 12. — Mesodon sp. Vomer. Musée de Boulogne. Astartien. Zone à Pygurus jurensis. Fig. 13. — Cæœlodus suprajurensis n. sp. Vomer. Musée de Boulogne. Port- landien-Purbeckien. Fig. 14. — Cœlodus sp. Même collection, même niveau. « Toutes les figures sont de grandeur naturelle, REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS par M. Marcellin BOULE : La nomenclature et la synonymie des espèces européennes de Machairodus sont fort embrouillées. J'avais pu m'en rendre compte, il y a une dizaine d’années, en étudiant des débris de ce genre provenant des terrains pliocènes du Velay. Tout récemment j'ai reçu une canine de Machairodus de la région pyrénéenne et, quand j'ai voulu la déterminer, j'ai éprouvé quelques diflicultés à me reconnaître au milieu des travaux contradictoires qu'on a publiés sur les espèces de Machairodus du Miocène supérieur, du Pliocène et du Quaternaire. Je ne veux pas refaire l’histoire du genre Machairodus que divers paléontologistes ont parfaitement écrite !. Je me propose simplement d'exposer, d’une façon aussi brève et aussi claire que possible, les caractères des diverses espèces de Machairodus des terrains tertiaires et quaternaires d'Europe, en attribuant à chacune de ces espèces le nom qu’elle doit porter d’après les règles établies pour la nomenclature. J'aurai à m'occuper surtout de la canine supérieure, d’abord parce que cette dent, étant très spécialisée dans le genre Machai- rodus, doit a priori fournir de bons caractères pour la spécifi- cation, ensuite et surtout parce que c’est la seule partie que nous connaissions chez presque toutes les espèces décrites ou signalées jusqu'à ce jour. Nous avons l'avantage d’avoir, dans les collections du Muséum, soit en nature, soit en moulages, la plupart des documents qui ont servi à établir ces espèces. Beaucoup d'auteurs ont fait des confu- sions parce qu’ils n'avaient pas de tels matériaux à leur disposition, ou bien parce qu'ils se sont contentés de reproduire les indications erronées fournies par leurs prédécesseurs. Je dois dire toutefois que la liste des espèces donnée par Zittel 1. Voir notamment : Albert GAupry, Animaux fossiles et géologie de V’Attique, p. 106. — Fagrinr, Machairodus del Valdarno superiore, Boll, del R. Comitato geologico d'Italia, XXI, p. 122, l< 552 M. BOULE 2 Déc. dans son Traité de Paléontologie (IV, p. 679) est très correcte ; le travail que je publie arrive aux mêmes conclusions. Je crois cepen- dant qu’il sera de quelque utilité, d'abord parce qu'il expose les raisons sur lesquelles s'appuie cette terminologie, ce que n’a pu faire Zittel dans son Traité, ensuite parce qu’on y trouvera grou- pées les reproductions de beaucoup de documents épars dans diverses publications et dont le rapprochement éclaire les questions de nomenclature ; enfin, il permettra au lecteur de déterminer faci- lement les dents de Machaïrodus des gisements européens. La principale confusion résulte de ce qu’on donne le nom de Machairodus cultridens, correspondant à l'espèce la plus ancienne- ment connue et dénommée, à des formes bien différentes-les unes des autres. Il faut d’abord établir ce qu'est le Machairodus cultridens. MACHAIRODUS CULTRIDENS, Cuvier. On sait que le mot cultridens a été imaginé par Cuvier pour désigner un animal qu'il croyait appartenir au genre Ursus, mais qui avait des canines aplaties, en forme de lame de poignard !. Cuvier n’a eu à sa disposition et même n’a connu que trois docu- ments : 1° un morceau de canine; 2° le moulage d’une canine complète du Val d’Arno; 3° un dessin de canine provenant du Cabinet de Darmstadt. Voici comment il s'exprime : ? « Les Ours des couches meubles du Val d’Arno diffèrent, comme je l’ai dit, de ceux des cavernes d'Allemagne par les trois petites molaires qu'ils ont distinctes ; maïs on vient de leur trouver un caractère encore plus marqué dans leurs canines comprimées au point qu'un de leurs diamètres ne fait pas le tiers de l’autre. En outre, le bord concave de ces canines est tranchant. Notre Muséum possède une portion d’une de ces dents et le modèle peint d’une entière qui est au cabinet de Florence. Il doit l’une et l’autre à la générosité du feu grand-duc. 1. Ceci se passait en 1824. C’est seulement quatre ans plus tard, en 1898, que Bravard rapporta cette forme de canines à un animal voisin des Felis et ce n’est qu'en 1832 que Kaup créa le genre Machairodus. Cette histoire du genre n’a rien à voir dans la question qui nous occupe en ce moment. J’ajouterai cependant qu’au point de vue historique, le terme Meganthereon, créé en 1828 comme nom de genre par Croizet et Jobert, devrait être préféré à celui de Machairodus; mais ce dernier est mainte- nant employé par tout le monde : il serait puéril de vouloir encore changer. 2. Cuvier, Ossements fossiles, 2° édition, partie II du vol. V, p. 516; ou bien /{° édition, t. VII, p. 309. Fig. 1 et 2. — Canines supérieures des deux espèces de Machairodus de Perrier, en grandeur naturelle. Fac-similé des figures de l'ouvrage de Devèze de Chabrol et Bouillet. 554 ‘ M. BOULE 2 Déc. « Je trouve parmi les dessins fossiles du cabinet de Darmstadt Fig. 3 et 4. — Photographies des pièces étu- diées par Cuvier ; gr. nat. A, moulage d’une canine entière du Val d’Arno ; B, fragment d’une canine du Val d’Arno. Coll. de Paléontologie du Muséum. qui m'ont été envoyés par M. Schleyermacher, celui d’une canine comprimée qui me paraît ressembler de tous points à celles de Toscane ; c’est ce qui me détermine à changer le nom d’efruscus que j'avais donné à cet Ours, en celui de cultridens. » Ainsi Cuvier a réuni, sous un même nom spéci- fique, deux animaux d’âges et de gisements très diffé- rents : celui auquel ont appartenu les canines aplaties du Pliocène du Val d’Arno et celui auquel a appartenu la canine aplatie dont il avait vu un dessin et qui provenait du Miocène supérieur d’Ep- pelsheim. Mais il est clair que son jugement a été porté sur les pièces du Val d’Arno et non sur le dessin du cabinet de Darmstadt, celui-ci ne lui ayant servi que pour faire une assimi- lation d’ailleurs erronée. La question serait done très simple s'il n’y avait qu’une espèce de Machai- rodus: au Val d’Arno. Mais, en Italie comme en Auvergne, les terrains pliocènes renferment deux sortes bien différentes de canines supérieures de Machairodus et ces deux formes ont été connues à peu près simultanément, puisqu'elles à" 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 555 figurent eôte à côte sur la même planche, dans le mémoire de Devèze de Chabrol et Bouillet !, le premier à ma connaissance où des dents de Machairodus aient été représentées (fig. r et 2). Dans l'ouvrage de Croizet et Jobert ?, publié un an plus tard, nous voyons les deux types dessinés, l'un sous le nom de Cultridens Issiodorensis, l’autre sous celui de Cultridens Etueriarum. Enfin Bravard ? a également fait connaître les deux formes. Il est très facile de distinguer ces deux sortes de canines. Elles sont de grandeur inégale. La petite est en même temps plus fine, plus étroite, on pourrait dire plus élégante ; elle est dépourvue de crénelures sur ses bords tranchants (fig. 2 à 5); la seconde, plus grande, est relativement plus large; ses bords tranchants sont finements crénelés, comme les dents de Mosasaures (fig. 1 et 10). Il s’agit de savoir à quelle sorte de dents appartiennent celles que Cuvier a pu étudier. J'ai retrouvé facilement, dans les collections du Muséum, les pièces auxquelles l’illustre savant fait allusion (N° 618-620 du catalogue A. C.). J'en donne ici des figures (3 et 4) qui permettront de lever tous les doutes sur ce qu'on doit appeler Machairodus: cultridens, si l'on veut, à l'exemple de tous les paléontologistes . ayant écrit sur cette question, conserver la dénomination de Cuvier. Celle-ci doit s'appliquer aux canines de dimensions plus petites, plus étroites, aux bords tranchants dépourvus de créne- lures. On remarquera que Cuvier n’a pas parlé de ces crénelures, ce qui suflirait à prouver, même dans le cas où nous ne les connai- trions pas, que les pièces examinées par lui en étaient dépourvues. C’est malheureusement ce que n'a pas compris Bravard {. Ayant découvert à Perrier une belle portion de tête d’un Felis muni de canines cultriformes du premier type, il a pu démontrer : 1° que ces canines n'étaient pas des canines d'Ours, comme l'avait cru Cuvier et comme l'avaient admis Croizet et Jobert; 2° que la mâchoire supérieure, qu'il venait de découvrir, appartenait à l'animal que Croizet et Jobert, décrivant sa mâchoire inférieure, avaient appelé Felis meganthereon ou plus simplement Megan- 1. Devèze pe Cuagroz et Bourzzer, Essai géologique sur les environs d’Issoire, in-f°, 1827, p. 96 et pl. XX VI, fig. 1 à 5. >. Crorzer et JoserTt, Recherches sur les ossements fossiles du Puy-de- Dôme, & livr., pl. I des Ours, fig. 1 et 6 et pl. VIL, fig. 4-6. Explication des planches sur la couverture en papier jaune de la 8e livraison. 3. Bravarp, Monographie de la montagne de Perrier, 1828, pl. IT, fig. 5-6 et IO-I1. 4. Loc. cit., p. 141 et suiv. 596 ® M. BOULE a Déc. thereon. Mais, comme Bravard connaissait aussi les dents crénelées Fig. 5. — Canine supérieure de Machairodus cultridens ; gr. nat. Coll. Croizet, gale- rie de Paléontologie du Mu- séum. et plus grandes, il appela celles-ci Felis cultridens. A partir de ce moment, la confu- sion créée par Bravard se retrouve dans les travaux de la plupart des paléontologistes : Kaup, Blainville, Suess, MM. Albert Gaudry, Lydek- ker, etc. Pictet ! et Gervais * ont employé le nom de cultridens pour désigner à la fois la grande et la petite forme de Perrier, qu'ils ont considérées comme deux simples races d’une même espèce. Il est aujourd'hui impossible de partager cette dernière opinion. Les deux formes de Machairodus, distin- guées, dès l’origine, par les paléon- tologistes auvergnats, doivent être désignées par deux noms différents. D’après l’exposé qui précède, il est clair que le nom spécifique de cultri- dens doit être réservé au Machai- _rodus pliocène du Val d’Arno ou de l'Auvergne, dont la taille était à peu près celle d’une Panthère, qui avait des canines supérieures relativement étroites et dépourvues de crénelures. Le nom de Meganthereon, employé dans un sens spécifique, doit tomber en synonymie comme étant plus récent. Nous allons maintenant passer en revue les formes de Machairodus trouvées dans les gisements européens de diverses époques et nous serons ainsi amenés à déterminer le nom que doivent porter les grandes canines crénelées de l’Auvergne ou du Val d’Arno. 1. Traité de paléontologie, p. 230. 2. Zoologie et paléontologie françaises, 2° édit., p. 231. 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 957 MACHAIRODUS APHANISTUS, Kaup (Machairodus d'Eppelsheim et de Pikermi) Nous savons que Cuvier a vu le dessin d’une canine d'Eppels- heim. Cette canine a été représentée par Kaup !. Elle ressemble beaucoup (fig. 6) aux grandes canines du Pliocène du Val d’Arno et de l'Auvergne ; elle porte des crénelures comme celles-ci. Aussi Kaup lui a-t-il donné le nom de Machairodus cultridens et son exemple a été suivi par la plupart des paléontologistes. En même temps, Kaup désignait sous les noms de Felis aphanista et d’Agno- terium antiquum, diverses dents d’un grand Chat trouvées dans le même gisement. Certaines étaient crénelées comme la canine, mais Kaup ne sut d’abord pas établir de rapprochements entre les deux catégories de dents. Ce n’est que beaucoup plus tard, en 1859, qu'il rapporta tous ces débris au Hachairodus cultridens ?. Entre temps, Wagner * puis Roth et Wagner { décrivirent quelques pièces de Pikermi, notamment une belle portion de tète munie de sa mâchoire ‘inférieure, sous les noms de Felis gigantea et de Machairodus leoninus. Je reproduis ici (fig. 7) le dessin d’une canine par Roth et Wagner. Enfin M. Albert Gaudry, considérant comme établie l'identité des deux animaux de Pikermi et d'Eppelsheñm, les étudia sous le nom de Wachairodus cultridens 5. Nous connaissons maintenant la véritable nature du Machai- rodus cultridens et nous savons qu'il ne faut plus employer ce nom pour désigner la grande forme de Aachairodus à canines crénelées d'Eppelsheim; il nous faut revenir, non pas comme l’a fait M. Schlosser 5 à l'expression de leoninus qui est beaucoup plus récente, mais à celle d’aphanistus créée par Kaup, pour des débris bien caractérisés et bien figurés. Le Machairodus aphanistus, Kaup, du Miocène supérieur d’Ep- pelsheïm, de Pikermi, de Samos, de Baltavar, du mont Léberon, de Maragha, est donc la seconde espèce du genre au point de vue historique ; elle diffère de la première, ou J/achairodus cultridens, par sa taille plus forte, comparable à celle d’un grand Lion, par 1. Kawr, Description d’ossements fossiles de Mammifères..., 1832, p. 24, Carnivores, pl. I, fig. 5. 2. Neues Jahrbuch von Leonhard und Bronn, $ 2570. 3. Abhand. der Bayer. Akad. der Wissens. vol. 5, pl. IL, fig. 6, 1848. 4. Id., vol. VIL, pl. IX, fig. 1-5, 1854. | 5. Albert GAuDRY, Animaux fossiles et géologie de l’Attique, p. 109. 6. ScrLosser, Die Affen... p. 436. Fig. 6. — Canine supérieure du Fig. 7. — Canine supérieure du Machairodus dEppelsheim ; gr. Machairodus de Pikermi: gr. nat. Calque de la figure donnée nat. Calque de la figure donnée par Kaup. par Roth et Wagner. | 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 9959 sa canine supérieure, grande, large, crénelée, par le développement relativement plus considérable de sa troisième prémolaire infé- rieure, par la forme différente de la carnassière supérieure; je reviendrai plus loin sur ce dernier caractère. MACHAIRODUS LATIDENS, Owen La troisième espèce, dans l’ordre chronologique, est le Machai- rodus latidens, du Pléistocène d'Angleterre. Boyd-Dawkins ! a raconté l’histoire de la découverte, dans la caverne de Kent’s Hole, par Mac Enery, des quelques dents signalées ou décrites par Owen ? sous le nom de Machairodus latidens. Le Muséum possède des moulages de trois de ces dents, deux canines et une incisive supérieures ; ils ont été donnés à Blainville par Mac Enery et les originaux correspondants sont ceux qui ont été figurés par Boyd-Dawkins. Nous pouvons donc les comparer facilement aux débris que nous avons des espèces précédentes. | Les canines de Kents Hole (fig. 8 et 9), très différentes des canines du Machairodus cultridens, sont à la fois moins allongées et plus élargies; leurs bords tranchants présentent de fortes crénelures. On peut aussi les distinguer de celles du A. aphanistus, dont la longueur est beaucoup plus considérable, mais qui sont pro- _portionnellement plus étroites. De plus, dans le 1. latidens, les bords tranchants sont plus amincis, les crénelures paraissent plus fortes. Les Machairodus quaternaires sont très rares. Gervais * a décrit deux dents provenant de la caverne de la Baume, dans le Jura : une canine inférieure et une moitié de carnassière infé- rieure ; il les a rapportées au 47. latidens. M. D’Ault du Mesnil # a figuré un morceau de canine supérieure trouvé dans les graviers quaternaires les plus inférieurs des environs d’Abbeville. Il est difficile d'affirmer, d’après ce dessin, qu'il s’agit de la même espèce ; mais cela est probable. | J'ai reçu moi-même, d’une grotte fouillée à Montmaurin (Haute- Garonne) par mon ami M. Cartailhac, une canine supérieure dont la forme générale est identique à celle des canines d'Angleterre. 1. Pleistocene Mammalia, part IV, p. 185. 2. British Fossil Mammals, 1846, p. 176. : 3. Zool. et Paléont. générales, 1, 1867, p. 78, pl. XVII, fig. 3 et 4. 4. In La Société, l’école et le laboratoire d'anthropologie de Paris à l'Exposition universelle de 1889, p. 191, fig. 34. 560 M. BOULE 2 Déc. Zittel a signalé la découverte du 17. latidens en Ligurie ; si cette indication se rapporte, comme je le suppose, à la grotte des Fées, \ \ \ \ \ Fig. 8 et 9. — Canines supérieures du Machairodus latidens de Kent’s Hole. A, canine gauche vue sur sa face externe ; B, canine droite vue sur sa face interne ; gr. nat. Calques des figures données par Boyd-Dawkins. décrite par MM. Issel et Amerano !, elle est erronée : j'ai pu m'assurer de visu que la dent trouvée dans cette grotte et attribuée d'abord à un Machairodus, a appartenu à un Cétacé. 1. Cf. L’Anthropologie, t. IX, p, 211. I9OI REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHATRODUS 561 ”- MACHAIRODUS CRENATIDENS. Fabrini. Nous devons maintenant nous demander ce que devient l'espèce du Pliocène d'Auvergne et d'Italie à grandes canines cré- nelées. Nous avons vu que la plupart des auteurs la dési- gnent sous le nom de cultri- dens et appellent meg'anthe- reon la petite forme à dents lisses. Pour ces paléontolo- gistes, le grand Machairodus pliocène du Val d’Arno et de Perrier appartient à la même espèce que le Machairodus du Miocène supérieur d'Ep- pelsheim et de Pikermi. D'autres noms lui ont été donnés en France et en Italie. On a trouvé, aux environs du Puy, à Sainzelles, plu- sieurs dents de Hachairodus. Aymard les a désignées sous le nom de M. Sainzelli. Ger- vais ! a figuré une incisive. Une canine supérieure, trou- vée à Ceyssaguet, près du Puy (fig. 12), ressemble tout à fait aux grandes canines de Perrier ou du Val d’Arno. Il semble donc qu’on pourrait appeler le grand Machairo- dus des divers gisements pliocènes M. Sainzelli. Mais ARE . , . . . . “ | il faut convenir que les indi- Fig. 10. — Fu. Ne \ pe 2 : supérieure gauche Ro. - cations données pa Aymard ratios Ni À et Gervais pourraient parai- natidens, vue sur la NS À tre insuffisantes. face externe ; gr. nat. Calque de la figure En 1890, M. Fabrini* a donnée par M.Fabrini. 1. Zoologie et paléontologie françaises, 2° édit., p. 231. 2. Ï Machairodus del Valdarno superiore. Boll. del R. Comitato geologico d'Italia, XXI, p. 121 et p. 161, avec 3 pl. 18 Février 1902. — T. rer. Bull. Soc Géol. Fr — 536 2 562 M. BOULE 2 Déc. repris l'étude détaillée des restes de Machairodus qui se trouvent au Musée de Florence. Il a eu le mérite de dissiper l’équivoque qui avait régné dans la science depuis Cuvier et de désigner, sous son vrai nom de cultridens, la forme à canines étroites et sans crénelures. Il aensuite étudié les formes à grandes canines crénelées sur les deux bords tranchants et il leur a donné le nom de Machai- rodus crenatidens. Il a montré comment la canine supérieure de cette espèce (fig. 10), peut se distinguer de la dent cultriforme du M. aphanistus.Celle-ci est plus droite, moins ineurvée ; la couronne est beaucoup plus développée que la racine, ce qui est Le contraire chez M. crenatidens. Il est facile de trouver d’autres différences en comparant les figures de Roth et Wagner, ou mieux les moulages des pièces de Pikermi que nous avons au Muséum, avec les figures de M. Fabrini. C’est ainsi que la carnassière supérieure du M. aphanistus a son . lobe antérieur, de forme bifide, relativement très développé, puis- qu’il représente presque le tiers de la longueur totale de la dent, tandis que chez M. crenatidens, comme chez les Felis, ce premier lobe, très réduit, ne représente environ que le 1/4 ou même le 1/5 de la longueur. Je donne ici (fig. 11) les contours au trait des carnassières supérieures gauches de divers Hachairodus, pour montrer les diffé- rences que ces dents présentent dans la forme de leur premier lobe. J'y ai joint deux figures de carnassières de Lion des cavernes, une carnassière de lait et une carnassière d’adulte. On verra que la dent de lait du Lion présente aussi un lobe bifide. C’est un souvenir ancestral de l’état par lequel ont passé un certain nombre de Félins primitifs et quelques espèces de Machairodus, moins évoluées que les autres à cet égard. On peut aussi distinguer le M. crenatidens du M. latidens; les canines de l’espèce quaternaire sont plus petites et ont une forme générale un peu différente. (Comparer la fig. 10 avec les fig. 8 et 9). Ainsi la dénomination de crenatidens, bien que relativement très récente et s'appliquant à l’une des formes les plus anciennement connues, doit être retenue pour désigner la grande espèce de Machairodus à canines crénelées du Val d’Arno en Italie et de Perrier en Auvergne. ë Les Machairodus provenant de deux localités pliocènes des environs du Puy, Sainzelles et Ceyssaguet !, me paraissent devoir 1. M. Boure. Description géologique du Velay, p. 188 et p. 205. Bull. du Service de la Carte géologique de France, N° 28. 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 563 Machairodus palmidens. Sansan. Galerie de Paléontologie du Muséum. Machairodus Jourdani. La Grive-Saint- Alban. D’après une figure de M. Depéret. Machairodus aphanistus dé Pikermi, d'après un moulage d’une pièce du Musée de Munich. Galerie de Paléon- tologie du Muséum. Machairodus cultridens de Perrier. Coll. Croizet au Muséum. Machairodus crenatidens du Val d’Arno. D’après une figure de M. Fabrini. Felis leo var. spelæa. Carnassière de lait. Quaternaire de Châteauneuf- sur-Charente. Coll. Chauvet au Mu- séum. Felis leo var. spelæa. Carnassière d’a- dulte. Quaternaire de Vence. Coll. Bourguignat, au Muséum. AG Fig. 11. — Profils des carnassières supérieures gauches de divers Félins fossiles, vues sur la face externe, sauf celle du M. Jourdani qui est vue sur la face interne. Grandeur naturelle. 564 M. BOULE 2 Déc. Fig. 12. — Dents de Machairodus crenatidens, de Ceyssaguet (Haute-Loire). Grandeur naturelle. À, canine supérieure droite vue par sa face interne ; B, la même vue par son bord postérieur ; C, les crénelures grossies ; D, 3° prémolaire gauche, vue par sa face externe ; E, la même, vue par sa face interne. Coll. Vinay à Corsac, près Le Puy. 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 569 rentrer dans la même espèce, Cela est certain pour le Wachai- rodus de Ceyssaguet, dont on trouvera ici les débris figurés pour la première fois. Ces restes font partie de la belle collection de fossiles recueillie autrefois par Vinay, et que la famille de ce regretté savant voulut bien mettre à ma disposition au moment où je faisais mes études sur la géologie du Velay. Ils consistent en une canine supérieure cassée aux deux extrémités et en une troi- sième prémolaire gauche (fig. 12). La forme et les dimensions de ces dents n'offrent pas de différences sensibles avec les dents - analogues du M. crenatidens d'Italie. En 1888, M. Aymard m'autorisa à dessiner les dents du Machai- rodus de Sainzelles qui se trouvent actuellement au musée du Puy. Je reproduis ici (fig. 13 et 14), la photographie de ces dessins exécutés fidèlement à la chambre claire. Ils représentent des Fig.13. Dents inférieures de Machairodus crenatidens de Sainzelles (Haute- Loire) ; grandeur naturelle. A, A’, 1'° ou 2° incisive gauche ; B, B’, 3° inci- sive droite ; C, canine. Coll. Aymard, au Musée du Puy. incisives, une canine inférieure, une dernière prémolaire et une carnassière inférieures. Toutes ces dents, sauf la carnassière, sont plus ou moins ornées de crénelures sur leurs bords tranchants. Elles accusent un animal notablement plus grand que le M. crena- tidens du Val d’'Arno et atteignant presque la taille du Smilodon d'Amérique. La carnassière est remarquable. Si, d'un côté, les circonstances de sa découverte, l'aspect comprimé et tranchant de sa couronne doivent la faire attribuer à un Machairodus plutôt qu'à un grand Felis, d’un autre côté, son développement en longueur est vrai- ment extraordinaire. Cette dent mesure en effet 34 millim. tandis 566 M. BOULE 2 Déc. que chez le M. crenatidens du Val d’Arno elle ne paraît pas dépasser 31 millim. et que sur le magnifique exemplaire du Fig. 14. — Molaires ;inférieures [de Machairodus crenatidens, de Sainzelles (Haute-Loire). Gran- deur naturelle. A, À’, A”, 4° prémolaire gauche, vue par sa face externe, en dessus et par sa face . interne ; B, B’, B”, carnassière gauche, vue par sa face externe, en dessus et par sa face interne. Coll. Aymard, au Musée du Puy. Smilodon du Mu- séum, pourtant de taille très considé- rable, elle n’atteint que 29 millim. Les proportions relatives de cette carnassière et de la dernière prémolaire qui la-précède sont d’ailleurs sensible- ment les mêmes que chez le M. crenati- dens représenté par la figure 5, pl. IV, du mémoire de M. Fa- brini. Il est donc probable que le Ha- chairodus de Sain- zelles n’est simple- ment qu'un individu ou qu'une variété particulièrement ro- buste du M. crenati- dens. Il est curieux d'observer que le même gisement a fourni la tête d’une Hyène se rappro- chant beaucoup, par tous ses caractères anatomiques, de l'Hyæna Perrieri, également de Per- rier etduVald’Arno, mais en différant par ses dimensions relativement énormes f. On a signalé plusieurs fois des débris de Hachairodus dans le 1. M. Bouze, Description" de l'Hyæna brevirostris du Pliocène de Sain- zelles, près Le Puy (Haute-Loire). Ann. des Sciences naturelles, Zoologie, t. XV, p. 87, pl. I. 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 567 Forest-bed d'Angleterre. C’est d’abord un fragment de canine supé- rieure décrite par Ray-Lankester !, mais non déterminée spécifi- quement. C’est, plus tard, une mandibule décrite par MM. Back- house et Lydekker ?. Les savants anglais, égarés par la synonymie trompeuse qui avait alors cours dans la science et privés de termes de comparaison, ne purent arriver à une détermination précise. C’est avec raison, selon moi, que M. Fabrini considère les pièces trouvées dans Le Forest-bed comme se rapportant au M. crenatidens. MacHarropus NesTiANUS, Fabrini. Parmi les restes de Machairodus qu’il a eus à sa disposition, M. Fabrini a distingué une mâchoire supérieure et une mâchoire inférieure. d’ailleurs assez mal conservées, sous le nom de M. Nes- tianus. Ces pièces indiqueraient un animal voisin, comme taille, du M. crenatidens, mais qui aurait eu la face plus allongée. La canine supérieure ressemble à celle du M. crenatidens, quoiqu'elle soitun peu moins robuste ; mais elle en diffère surtout parce qu’elle n'est crénelée que sur son bord concave ou postérieur. En outre, la mandibule présente un espace libre, ou diastème, entre la troisième et la quatrième prémolaires. Ilest possible que ces différences soient accidentelles et n'aient pas une grande valeur. Peut-être avons- nous à faire simplement à une variation individuelle, un peu aberrante, du À. crenatidens ou même, en ce qui concerne la canine, à de simples différences sexuelles. Ilest bon, à ce point de vue, de faire remarquer que les gise- ments pliocènes de l'Auvergne ont aussi fourni des canines de la forme crenatidens, mais dépourvue, comme le A. Nestianus, du Val d’Arno, de crénelures au bord antérieur *. AUTRES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS Afin de rendre ce travail plus utile au point de vue pratique des déterminations, je vais compléter l’énumération critique des diverses espèces de Machairodus rencontrées dans les gisements européens. Le plus ancien représentant du genre a été signalé dans les phosphorites du Quercy par M. H. Filhol, d’après des morceaux 1. Geological Magazine, VI, 1869, p. 440, pl. XVI. 2. Quat. Journ. geolog. Society, XL, 1886, p. 309, pl. X. 3. BrAvaRD. Loc. cit., fig. 10 de la pl 568 M. BOULE 2 Déc. de canines dentelées, qui n ont pas été figurés. Ces débris dénote- raient une espèce de grande taille à laquelle M. Filhol a donné le nom de 7. insignis. Nous savons d’ailleurs que les phosphorites ont livré, non-seulement des Félidés qu’on peut considérer comme évoluant vers le type Machairodus (Ælu- rictis, Ælurogale), mais encore des formes plus spécialisées, à certains égards (Eusmi- lus), que les Hachairodus eux-mêmes. À Sansan, on a découvert, depuis long- temps, un véritable Machairodus, le M. palmidens, dont un beau crâne se trouve dans les galeries de Paléontologie du Mu- séum. Cette espèce, de la taille du Guépard, plus petite par conséquent que le M. cul- tridens, a ses canines supérieures créne- lées, mais relativement peu développées (fig. 15); sa carnassière supérieure paraît avoir le premier lobe bifide, du moins autant qu’on puisse en juger dans l’état d'usure où se trouvent les dents que nous possédons (Voy. fig. 11). | A La Grive-Saint-Alban, M. Filhol ! a fait connaître quelques dents (une canine Fig. 15. — Canine supé- Supérieure, une quatrième prémolaire et rieure de Machairo- une carnassière inférieures) d’une espèce dus palmidens; San- intermédiaire, comme grandeur, entre le ES M. cultridens et le M. aphanistus et qu'il la galerie de Paléon- à aPpelée Machairodus Jourdani. Bien tologie du Muséum. qu’elle soit mutilée à ses deux extrémités, la canine accuse une forme assez particu- lière (fig. 16) : la couronne est moins développée et moins large que la racine ; celle-ci est moins eflilée, plus obtuse que dans les autres espèces *. M. Filhol a appelé l'attention sur un caractère intéressant de la dernière prémolaire, dont le lobe antérieur, le 1. Archives du Muséum de Lyon, II, 1881, p. 56, pl. IV, fig. 3 à 5. 2. La figure de cette dent, donnée par M. Filhol, ne montre pas de créne- lures. M. Chantre a eu la bonté d'examiner pour moi la pièce originale. Il m'a écrit qu’elle a des crénelures sur le bord antérieur ou convexe; ces crénelures, étant très fines, étaient passées inaperçues. Pourtant, quand on est prévenu, on peut les reconnaître même sur le moulage de cette pièce que nous avons au Muséum. 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 569 lobe postérieur et le talon sont à peu près également développés ; cette disposition donne à la dent une forme assez particulière, qui se trouve également dans le Ma- chairodus de Sansan (Voy. fig. 19). _ Le Hyænictis germanica de Steinheim, décrit par Fraas, paraît devoir se rapporter à la même espèce. Le Miocène supérieur d'Eppels- heim, de Pikermi, de Maragha renferme beaucoup de restes de Felis qui ont fait l’objet de descrip- tions assez diffuses. Kaup ? avait décrit sous le nom de Felis ogygia, un morceau de mandibule remarquable par le développement relativement consi- dérable du diastème séparant la canine de la troisième prémolaire et destiné à livrer passage à la canine supérieure. Kittl ? a trouvé à Maragha une forme voisine qu'il a appelée Machairodus orientalis et Weithofer “ a donné le nom de Machairodus Schlosseri à des pièces de taille un peu plus forte provenant de Pikermi. Zittel 5 admet que toutes ces espèces n'en forment qu’une, qu'il appelle Ma- chairodus ogygius, et M. Schlos- ser 6 ne paraît pas éloigné de par- tager la même opinion. Pour ma part, je serais tenté d'aller plus loin. Les raisons qui ont poussé MM. Weithofer et Fig. 16. — Canine supérieure de Machairodus Jourdani de La Grive-Saint- Alban. Grand. natur. D’après la fig. donnée par M. Filhol et un moulage du Musée de Lyon. Schlosser à rapporter ces divers morceaux au genre WMachairodus . Loc. cit. . Traité de paléontologie, p. 679. . Die Affen..., p. 442. DORE © D mi . Wurt. Jahresb., 1885, p. 319, pl. IV. . Ann. Hofmus. Wien, 1887, p. 329, pl. XIV et XV. . Beitr. Pal. Oest.-Ung., 1888, p. 233, pl. XE, fig. 1 à 7. 570 M. BOULE Mo iDée ne me paraissent pas convaincantes. Le diastème est loin d’être aussi étendu que chez les véritables Machairodus ; la canine infé- rieure est aussi développée que chez beaucoup de Felis actuels de même taille ; les molaires n’ont pas l’aspect comprimé et tranchant Machairodus palmidens, de San- san. Galerie de Paléontologie du Muséum. Machairodus Jourdani, de La Grive-Saint-Alban. D’après un moulage d’une pièce du Musée de Lyon. Coll. de Paléontologie du Muséum. Machairodus aphanistus,de Piker- mi. D’après un moulage d’une pièce du Musée de Munich. Coll. de Paléontologie du Mu- séum. Machairodus cultridens, de Per- rier. Coll. Croizet à la galerie de Paléontologie du Muséum. Machairodus crenatidens, du Val d’Arno. D’après une figure de M. Fabrini. Fig. 17. — Dernière prémolaire et carnassière inférieures gauches de diverses espèces de Machairodus. Grandeur naturelle. des molaires de Machairodus, elles sont épaisses comme dans les Felis. Enfin, la mandibule a son bord inférieur droit et ne présente aucune trace de l’expansion ou saillie verticale si caractéristique des Machairodus, : IQ0T REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 571 Les Felis ou Machairodus priscus, Kaup, antediluvianus, Kaup, leiodon, Weith., d'Eppelsheim ou de Pikermi, reposent sur des documents trop incomplets pour qu'on puisse les prendre en consi- dération. Le Machairodus maritimus de Christol ! n’a jamais été décrit ni figuré ; il n'y a pas lieu d'en tenir compte, au moins pour le moment. RÉSUMÉ ET TABLEAU SYNOPTIQUE Il ne me reste plus qu’à résumer les détails qui précèdent en un tableau synoptique présentant les caractères différentiels des espèces de Machairodus qui sont bien établies. Ce tableau per- mettra d’arriver à leur détermination avec la plus grande facilité. Canines sans crénelures ; lobe anté- A. Ani- maux d’une taille voisine de celle de la MACHAIRODUS : Félidés caracté- risés par leurs canines supé- rieures €ultri- formes,la réduc- tion,ennombre et en grandeur, deleurs prémo- laires, l’aspect aminci, tran- chant,detoutes leurs dents, dont les bords [B- Ani- coupants sont | Maux ornés où non le la de crénelures. | taille du Lion. Panthère. rieur de la carnassière supérieure à une seule pointe; 4° prémolaire inférieure à trois lobes . . . . . Canines crêne- lées; carnassiè- re supér. avec un lobe antér. bifide ; 4° prém. infér. à quatre \ lobes subégaux. Canines créne- lées sur les deux bords tran- chants. Canines relative- ment petites. . Canines grandes, à racines très larges, plus dé- veloppéesquela couronne ,. . . A couronne plus développée que la racine ; lobe antérieur de la carnassière bi- fide URSS A couronne plus ‘recourbée que dans la forme précédente, lobe antérieur de la carnassière su- périeure à une seule pointe. . Canines plus courtes que les précédentes; crénelures plus accentuées. M. CULTRIDENS. M. PALMIDENS. M. JourDANI. M. APHANISTUS. Û M. CGRENATIDENS. . M. LATIDENS. Canines crénelées sur le bord pos- | térieur seulement . 0 NT ONESTrANUS: 1. B.S, G. F., 1849, p. 170. | 572 M. BOULE 2 Déc. Au point de vue stratigraphique, les espèces dont j'ai parlé se répartissent ainsi : QUATERNAIRE : M. latidens. PLIOCÈNE : M. cultridens, M. crenatidens, M. Nestianus. MiocÈNE SUPÉRIEUR : M. aphanistus, et (?) M. ogygius. MiocÈNE MOYEN : M. palmidens, M. Jourdani. OLIGOCÈNE : M. insignis (?). J'aurais voulu dresser, pour le genre Machairodus, un tableau montrant les affinités des diverses espèces dans l’espace et dans le temps, c’est-à-dire un tableau analogue à celui que M. Albert Gaudry et moi avons donné pour les Ours et les Hyènes !, mais les essais auxquels je me suis livré sont trop peu satisfaisants pour que je les reproduise ici. Pourtant ils m'ont permis de faire quelques remarques inté- ressantes. Les premiers Machairodus sont moins spécialisés que les derniers, ce qui est conforme aux lois de l’évolution. Les Machairodus du Miocène moyen ont leurs canines relativement petites, leurs carnassières supérieures présentent un premier lobe bifide; leurs dernières prémolaires inférieures ont un aspect particulier dû au développement du talon, qui acquiert presque la valeur d’un quatrième denticule. Dans le 47. aphanistus, du Miocène supérieur, la canine a pris un développement considérable ; la dernière prémolaire inférieure a réduit son quatrième lobe à l'état de talon pour prendre l'aspect d’une dent de Felis actuel, mais la carnassière supérieure a con- servé son premier lobe bifide. Le M. neogœus, ou Smilodon, d'Amérique, a gardé un souvenir de cet état de choses, car sa carnassière supérieure ressemble beaucoup à celle du M. aphanistus et peut-être la forme améri- caine descend-elle, plus ou moins directement, de la forme du Miocène supérieur européen. Le Smilodon est d’ailleurs, à d’autres égards, le type le plus spécialisé, le plus achevé, du genre Machaï- rodus. Au Pliocène, les Machairodus de nos pays ont perdu les traits particuliers qui distinguaient la carnassière supérieure et la dernière prémolaire inférieure de leurs prédécesseurs. Ces dents sont maintenant établies tout à fait sur le plan de celles des Felis actuels ; mais il n’est pas douteux que ces espèces ont passé par 1. Matériaux pour l’histoire des temps quaternaires, faseic. 4, 1892. 1901 REVISION DES ESPÈCES EUROPÉENNES DE MACHAIRODUS 573 l'état antérieur, puisque, aussi bien chez les Machairodus que chez les Felis actuels, la dentition de lait rappelle et reproduit cet état antérieur. Le M. cultridens du Pliocène est une forme remarquable par l'absence de crénelures ; nous ne lui connaissons ni ascendants, ni descendants directs. Le M. crenatidens et le M. latidens paraissent être bien voisins ; le second pourrait bien n'être qu'un descendant diminué du premier. Les canines se ressemblent beaucoup dans les deux espèces, mais nous ne connaissons le A. latidens que très imparfaitement ; il serait imprudent, en ce moment, d'aller plus loin dans cette voie des rapprochements. LE CÉNOMANIEN | DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES par M. A. MICHALET. Les couches cénomaniennes que l’on rencontre sur divers points des environs de Toulon font toutes partie du grand bassin crétacé au centre duquel se trouve le Sénonien du Beausset, de la Cadière et du Castellet, que recouvrent, par places, le Danien saumâtre à Melanopsis et Cyrènes et des couches de Trias dont l'apparition, au sein de ce Crétacé supérieur, donne lieu à des discussions aussi ardues que savantes. Le bassin crétacé du Beausset est formé de vastes demi-cereles à peu près concentriques. Ceux qui décrivent la plus grande courbe, et représentent la craie la plus inférieure, se dégagent, au nord de Cassis, des masses crétacées de même niveau qui occu- pent tant de place au sud-est du département des Bouches-du- Rhône. Ils viennent, par Cuges, le sud de Signes et le nord du Revest, former, à l’est de Toulon, le sommet de Coudon, repren- nent la courbe par les hauteurs du Faron, de Beaumont, du cap Gros, la terminent par celles du Grand et du Petit Cerveau et disparaissent vers le nord de Bandol. Presque tous les autres étages crétacés, moyens et supérieurs, forment en dedans de cette première courbe, d’autres demi-cereles analogues. Le bassin crétacé du Beausset est bien connu des géologues. Il a été l'objet de travaux importants, et, surtout, d’une description détaillée, dans les Mémoires de la Société géologique de France, par M. A. Toucas. Seulement, tous les points d’un aussi vaste ensemble, n'ont pu être observés, chacun, avec la même précision. L'intérêt des recherches s’est concentré sur quelques-uns d’entre eux, d’un accès plus facile, ou bien où les investigations et les discussions scientifiques pouvaient aboutir à des conclusions de plus grande portée. En tête de ces derniers, il faut placer le Crétacé supérieur qui, LE CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 979 avec ses successions de niveaux à Hippurites et, plus encore, ses superpositions de Trias, a attiré depuis longtemps les préférences des géologues. La Société géologique de France a tenu, en 1891, une de ses sessions extraordinaires en Provence, au cours de laquelle M. Marcel Bertrand a cherché à faire accepter par tous, sur place et en présence même des faits géologiques à expliquer, ses théories sur le recouvrement par le Trias des couches crétacées du Beausset. ; Je ne viens pas me mêler aux débats qu'ont soulevés ces théories. L'objet de ce travail est plus modeste. Tout en continuant à m'oc- cuper de la faune échinitique des environs de Toulon, dont j'ai étudié les espèces bathoniennes dans une première note !, je viens, à propos des espèces cénomaniennes de cette même région, parler de quelques points des couches cénomaniennes du bassin crétacé du Beausset, jusqu'ici un peu délaissées par les travaux précédents. La première partie de ce travail, de beaucoup la principale, a trait surtout à un ou deux petits lambeaux cénomaniens, égarés et comme perdus au milieu de l’'Urgonien, et qui m'ont offert cepen- dant, bien des espèces non encore signalées dans les couches du bassin, en premier lieu plusieurs espèces spéciales jusqu’à présent à la faune de l'Algérie. Les couches cénomaniennes des alentours du Revest sont presque tout l’objet de cette étude. Je dirai aussi quelques mots des couches de même horizon du Val d’Aren. I. — Couches cénomaniennes du Revest Dans son mémoire sur les lerrains crétacés des environs du Beausset ?, M. A. Toucas a décrit avec beaucoup de détails, les couches cénomaniennes du bassin crétacé, d’abord à leur première apparition à l'ouest du bassin, à Cassis, où elles constituent le banc dit des Lombards, puis un peu plus loin, toujours à l’ouest, dans les environs de la Bedoule, enfin au nord et au nord-est de leur pourtour, dans les localités de la Dalmasse, de la Barralière et de Turben. Il y a distingué trois niveaux, les deux premiers, en allant de bas en haut, répartis chacun en trois assises, le dernier n’en formant qu’une seule. Le niveau le plus inférieur de M. A. Toucas représente la Craie 1. B. S. G. F., (3), XXII, p. 50. 2. Mémoires de la Société Géologique de France, 2° partie, t. IX. ° 576 A. MICHALET 2 Déc. inférieure de Rouen, ce qu'on est convenu d'appeler le Rhoto- magien. La faune échinitique qu'il y catalogue se compose dans l’assise la plus profonde, celle du banc des Lombards, seulement de quatre espèces : Holaster subglobosus Agassiz. Discoïdea cylindrica Agassiz. Hemiaster bufo Desor. — subuculus Klein. dans l’assise intermédiaire, très riche en Echinides, de : Holaster suborbicularis Agassiz. Pyrina. — bicarinatus Agassiz. Echinoconus Rhotomagensis d’Orb. — carinatus Agassiz. — Bargesi d'Orbigny. Hermiaster bufo Desor. Discoïidea subuculus Klein. — Sp. nov. — Forgemolli Coquand. Pygaulus Toucasi d’Orbigny (cette Holectypus crassus Cotteau. espèce avec doute). Cidaris gibberula Agassiz. Caratomus trigonopygus Desor. — Sorigneti Desor. Catopygus carinatus Agassiz. — vesiculosa Goldfuss. Oolopygus Barg'esi d'Orbigny. Glyphocyphus radiatus Desor. enfin dans la plus haute assise de : Hemiaster sp. nov. Pygaster truncatus Agassiz. Pyrina. Orthopsis granularis Cotteau(cette Codiopsis doma Agassiz. espèce avec doute). Anorthopygusorbicularis Cotteau. Goniopygus Menardi Agassiz. Le Cénomanien moyen et le Cénomanien supérieur de M. A. Toucas, correspondent au Carentonien. La liste des Echinides n’y comprend, pour le Cénomanien moyen, qu'un Hemiaster indéterminé comme espèce, et Pygaulus sub- æqualis Agassiz, et pour le Cénomanien supérieur que : Hederodiadema Lybicum Cotteau. Hemiaster Toucasi d’Orbigny. Hemiaster Orbignyi Desor. Pseudodiadema variolare, variété Roissyi Cotteau. Cette faune échinitique, déjà fort belle, a été enrichie encore, pour les couches de Cassis et de la Bedoule, par les recherches de M. V. Gauthier qui, dans une courte mais précieuse note sur les Echinides du département des Bouches-du-Rhône, publiée en 1880 (A. F. A. S. Congrès de Reims), mentionne, comme recueil- lies dans ces localités, les espèces suivantes que j'ai moi-même récoltées presque toutes aux gisements indiqués : TOO CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 977 Cidaris Dixoni Cotteau. — la Be- doule. Peltastes acanthoïdes Agassiz. — la Bedoule, Cassis. Glyphocyphus intermedius Cotteau _— la Bedoule. Orthopsis miliaris Cotteau. — la Bedoule. Goniopygus major Agassiz. — la Bedoule. Cottaldia Benettiæ Cotteau. — la Bedoule. Echinoconus castanea dOrbigny. Pyrina Bargesana d'Orbigny. — la Bedoule. Catopygus columbarius d’Archiac. — la Bedoule. Pygaulus macropygus Desor.— la Bedoule, Cassis. Epiaster distinctus d’Orbigny. — la Bedoule, Cassis. — crassissimus d'Orbigny. — Cassis. — VilleiCoquand.—Cassis. Hemiaster similis d’Orbigny. — Roquefort, près la Bedoule. — la Bedoule. Holaster Toucasi Coquand. — — sp. nov. — la Bedoule. Cassis. Pyrina atacina Cotteau. — la — sp. nov. — Cassis. Bedoule._ Cardiaster sp. nov. — Cassis. — Sp. nov. — la Bedoule. A très peu d’exceptions près, provenant sans doute surtout de différences d'appréciation des caractères spécitiques à retrouver sur des échantillons de plus ou moins bonne conservation, M. V. Gauthier cite, aussi, dans sa liste des Echinides cénomaniens des Bouches-du-Rhône, les espèces énumérées déjà par M. A. Toucas. Mais ni M. V. Gauthier ni moi, n'avons pas toujours récolté ces dernières dans la même assise où les a rencontrées M. A. Toucas, bien que toujours au même niveau Rhotomagien ou Carentonien. Je renvoie au mémoire de M. A. Toucas pour toutes les autres espèces qui, en dehors des Echinides, composent la faune des couches cénomaniennes depuis Cassis jusqu'à Turben. J'ajouterai seulement aux listes de M. A. Toucas trois espèces que j'ai recueillies et qui n’y figurent pas : ? Mitra cancellata d'Orbigny, dont jai trouvé trois bons échantillons au banc des Lombards. La présence, déjà à ce niveau, de cette espèce est intéressante parce qu’on la retrouve dans le Morna- sien de Saint-Cyr-de-Provence, non loin de là. Lithodomus carentonensis d'Orbigny. — La Bedoule, seconde assise du Cénomanien intérieur de M. Toucas. Janira cometa d'Orbigny. — Un seul mais très bon et incontestable exemplaire d’une espèce non encore signalée, non seulement dans le Cénomanien du bassin du Beausset, mais, je crois, en Provence. Il provient du Carentonien de la Bedoule. 1. Les exemplaires de ces trois espèces, comme ceux de toutes les autres que je citerai du Revest ou du Val d’Aren, ont été examinés par M. Peron. Je 22 Février 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 37 578 A. MICHALET 2 Déc. À partir de la description du gisement de Turben jusqu'au Val d’Aren, le mémoire de M. A. Toucas s'en tient à des généralités quand il parle du Cénomanien du bassin crétacé du Beausset. Elles se résument à dire que les couches cénomaniennes tournent de Turben au Val d'Aren par les Pigeourets, Orvès, le Revest, Cimaï et Sainte-Anne d’'Evenos, — que des grès très friables et sans fossiles, doivent à Orvès, comme plus au nord dans le pour- tour, représenter le Cénomanien inférieur et qu'ils sont surmontés par un calcaire gris compact, avec traces de Requienia, qui consti- tuerait l’assise inférieuie du Cénomanien moyen, de M. A. Toucas, — qu'on relrouve au Revest, le gisement des Ostrea biauriculata, Jlabellata, columba, et, très probablement aussi, le Cénomanien supérieur. Il est vrai, qu'un an après la publication de son mémoire, c’est- à-dire en 1874, M. A. Toucas a donné une coupe de la Caoume, où il analyse de cette façon le Cénomanien du Revest, en allant de bas en haut : Deux bancs de calcaire marneux contenant, l’inférieur : Ostrea flabellata et, le supérieur: Ostrea columba et Hemiaster Toueasi. Au-dessus, deux autres bancs de calcaire compact, l’inférieur à Caprina adversa d'Oxb., le supérieur à Sphæruliles, ces quatre bancs formant une épaisseur de 65 mètres. En 1876, dans une note insérée au Bulletin de la Société géolo- gique !, M. A. Toucas à apporté un changement important aux divisions des couches cénomaniennes de son mémoire. Il a réuni les couches à Ostracées, aux couches à Heterodiadema liby cum, n’adimettant plus, dans le Cénomanien, que les deux grandes divisions de Cénomanien supérieur et Cénomanien inférieur. Il a, ensuite, entre autres modifications secondaires, sacrifié, à Turben, son Cénomanien inférieur, et reconnu que les couches à Ostracées y reposaient directement sur l'Uigonien, teinté sur la carte jointe à son mémoire en Gault problématique et en Cénomanien infé- rieur. En ce qui regarde notre étude spéciale des Echinides, M. A. Toucas a remplacé aussi, à ce moment, dans son Cénomanien supérieur, composé des deux couches à Ostracées et à Heterodia- dema liby cum, l'espèce de son mémoire : Pseudodiadema vario- lare, Variété Roissyi, par deux autres espèces : Pseudodiadema Roissyi Cotteau, ?P. Marticense Cotteau. - tiens à le déclarer pour donner à mes déterminations l’autorité de ce savant paléontologiste, et aussi pour lui offrir publiquement l’expression de ma vive gratitude. 1. B. S. G. F., (3), IV, p. 309 (6 mars 1876). cé 1901 CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 579 Enfin, en 1891, justifiant sa coupe de Caoume, publiée en 1874, et que M. M. Bertrand trouvait incomplète, il redonne les mêmes divisions de sa coupe, en ce qui concerne le Cénomanien, mais en ajoutant l’Hemiaster Orbignyi aux espèces du plus haut banc marneux, et en remplaçant, dans le plus haut calcaire compact supérieur, le genre Sphærulites, indiqué en 1874 sans espèce, par le Radiolites Sharpei Bayle. . Cette même année, et au moment de la réunion de la Société Géologique en Provence, dans le compte-rendu de la course à Turben, M. M. Bertrand, après avoir, je crois à tort, mentionné, dans le Cénomanien de la Barralière, l'Ostrea Tisnei Coq., espèce sénonienne qu'on trouve avec les Hippurites mais à laquelle peuvent ressembler certains exemplaires d'Ostrea flabellata, remarquait qu on y a rencontré aussi plusieurs fragments de Cera- ites Vibrayei et l’Hemiaster Orbignyi. Parlant ensuite de l’allure et de la physionomie générales des couches cénomaniennes dans le bassin du Beausset, il ajoutait que sur le bord septentrional du bassin, au Revest, l'Urgonien n'était séparé du Turonien que par un Cénomanien à faciès littoral (Ostracées et couches saumâtres), avec un mince lit de bauxite à sa base, tandis que le bord méri- dional offre encore la série complète de l’Aptien marneux et du Cénomanien à silex. Voilà, à ma connaissance, tout ce qui a été dit sur le Cénomanien du Revest. Il me reste à indiquer la rencontre faite, à mes côtés, par notre confrère, M. Curet, dans les bancs à Ostracées de Turben, c'est-à- dire dans le Cénomanien supérieur, de deux espèces d’Echinides spéciales, jusqu à cette partie du pourtour du bassin, au Céno- manien inférieur : Hemiaster bufo et Peltastes acanthoïdes. Jusqu à l'endroit appelé « Lei Mouar », les Morts, c’est-à-dire le point culminant qu'atteint le chemin d'Orvés au Revest, et où se trouve la séparation des deux régions d'Orvés et du Revest, je n'ai _pour ainsi dire pas à modifier ce que je viens de rappeler. Il y a seulement à observer que l’ensemble des couches cénomaniennes qui, derrière les deux bergeries d'Orvés, situées au nord de la ferme du même nom, présente à peu de chose près, je ne dirai pas la richesse de faune de Turben, mais la physionomie générale du célèbre gisement, va en se rétrécissant et en s’abaissant sensible- ment jusqu'au dessous du point «les Morts » situé dans le Ligérien. On vient de faire dans la région d’Orvés, comme dans celle du Revest, des sondages de bauxite, à la rencontre de l’Urgonien et du Cénomanien. Celui qu’on a pratiqué le plus près de Turben se 580 A. MICHALET _2 Déc. trouve précisément derrière les bergeries d’Orvés dont je viens de parler. Or c’est comme d’un sommet qu’on voit de là un autre sondage, où la bauxite a été un peu plus abondante et qu’on a creusé au Jas de Clotet, en face la Font-de-Martin située au sud, au commencement des hauteurs ligériennes. Le Gardonien paraît être plus épais qu’à Turben, à partir des environs du premier sondage, etau second, au Jas de Clotet, on a trouvé dans le Gardonnien, du lignite de l’épaisseur d’un mètre. Au-dessus de la couche à Ostrea qui surmonte le premier sondage, une assise à Caprines d’une grande épaisseur, s'étend jusqu’au Ligérien, mais elle s’amincit beaucoup et s'abaisse comme les autres en se dirigeant vers les Morts. Là, et près de roches urgoniennes, toutes rougies par la bauxite, au pied desquelles on n’a cependant pas fait de fouilles, une grande faille soulève le Cénomanien et fait déborder le Ligérien, étranglé lui aussi aux Morts, jusque sur l’Urgonien. Le Ligérien possède presque à l'endroit précis où il couvre l’Urgo- nien un beau gisement d’Oursins, de Gastropodes, d’Arches, etc. Au point culminant des Morts, le Ligérien occupe donc seul le sommet avec l'Urgonien. Il tourne rapidement de là vers le sud: ouest et laisse la place à l’'Urgonien qui, excepté dans ce dernier sens, étale, à partir des Morts, des masses considérables. Elles profilent, au nord-est, les arètes de Fieraquet, de Carène et mille autres au-dessous desquelles elles s'étendent en côteaux innom- brables, en face des Olivières et de Tourris, et remontent ensuite plus à l’est encore, pour former la hauteur du Coudon. De la crête ou barre de Fieraquet, comme on l'appelle dans le pays, l'Urgonien descend au sud jusqu’à la source de Dardennes. Au milieu de ce trajet, il a un ressaut très marqué, puis deux autres plis ou failles moins importants l’amènent assez près des carrières ouvertes au pied des sables blancs ligériens qui s'élèvent presque perpendiculairement au nord-ouest du Revest et près du village. Une notable partie de cette vaste surface urgonienne est teintée en Cénomanien dans la carte de M. A. Toucas. Mais la carte géo- logique de Toulon, de M. M. Bertrand, lui a fait subir presque toutes les modifications nécessaires pour la région que nous étudions. Dans plusieurs endroits de l’espace qu'il couvre du haut de la barre de Fieraquet à la source de Dardennes, l'Urgonien supporte des sortes d'ilots cénomaniens, quelquefois surmontés eux-mêmes de Ligérien. Le plus remarquable de tous, se trouve tout-à-fait au-dessous du 1901 CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 581 point où la barre de Fieraquet, s’abaissant légèrement depuis les Morts, se perd, du côté de l’est, dans celle de Carène. Le Cénoma- nien et le Ligérien qui le recouvre y sont complètement isolés au milieu de l’'Urgonien. A l'ouest un grand sondage de bauxite et, au sud, des traces évidentes de ce minéral, des roches rougies, des quantités de fragments en place, ne laïsseraient aucun doute, si l’on pouvait se méprendre, dans la région, sur la nature de la roche urgonienne. 3 Cet ilot est situé dans la propriété M. Isnard (ancienne propriété À. Arène) qui borde, au nord, la route projetée de Signes, et dans la propriété P. Ortigues qui confine, à l’ouest, à la première. Mais la partie la plus intéressante des couches cénomaniennes est culti- vée, au moins d’une culture sommaire, dans la propriété M. Isnard, et elle ne l’est pas dans l’autre. - - À sept ou huit cents mètres environ des Morts, et à une centaine de mètres du pied de la barre urgonienne que recouvre un poudin- guc d'abord compact, puis désagrégé, on voit ce poudingue céder la place à des bancs ligériens de calcaire jaunâtre peu marneux et sans fossiles, d’une épaisseur de 15 à 20 mètres, au-dessous des- quels on rencontre d'abord un banc ligérien très marneux et fossi- lifère, puis les bancs cénomaniens. L'ilot ligérien-cénomanien est incliné, comme la barre urgo- nienne, du nord-est au sud-ouest, et malheureusement les bancs fossilifères ne peuvent être explorés comme ils le mériteraient. Ils émergent à peine en effet, et n'occupent qu'une très petite partie de la place prise par la culture au haut de la propriété Isnard presque tout entière située sur le poudingue urgonien désagrégré. Le banc ligérien fossilifère n'a qu’une très petite épaisseur diffi- cilement appréciable, puisque ses fossiles sont mêlés aux fossiles cénomaniens. Au-dessous de lui et plus marneux encore, complè- tement délités, les premiers bancs cénomaniens, d’un calcaire blanchâtre, excessivement fossilifére, ont une épaisseur de 8 à 10 mètres. Après eux apparaissent d’autres bancs cénomaniens jaunä- tres, d'épaisseur à peu près égale mais de faune beaucoup moins riche. Plus bas se montre un mince Gardonien et quelques Poly- piers. Le tout, après avoir traversé, en biaisant, du nord-est au sud-ouest, les deux propriétés, disparaît à la fin de la seconde, à l'endroit où celle-ci est cotoyée par le chemin de la bergerie Prosper Barthélemy. Le poudingue urgonien ou la roche urgo- nienne teintée de bauxite l'entourent de toute part. Le Ligérien marneux renferme en abondance Linthia Verneuili Desor sp., dont beaucoup d'exemplaires de bonne conservation, 582 A. MICHALET 2 Déc. mais il contient aussi quelques ÆEpiaster meridanensis Cotteau, quelques Hemiaster Gauthieri Peron. Le premier niveau cénomanien qui lui succède m'a offert une faune tellement riche et, surtout, composée de tant d'espèces encore inconnues dans les couches cénomaniennes du bassin crétacé du Beausset, que la première inspiration de ce travail est venue de cette récolte inespérée. Voici la liste des espèces recueillies, et elle impose tout d’abord cette remarque importante qu'en raison de l’incontestable mélange qu'on y rencontre des faunes rhotomagienne et carentonienne, de l'absence marquée de Rudistes et de la présence, au contraire, de plusieurs des espèces de l'Algérie, on aurait quelque droit de se croire en face d’un de ces gisements cénomaniens de l'Algérie auxquels M. Peron a démontré, avec tant de preuves à l'appui, qu'on ne pouvait appliquer les divisions du Cénomanien d'Europe : Neolobites (Ceratites) Vibrayei d'Orbigny, rares mais beaux exemplaires. Natica subexcavata Thomas et Pe- ron, détermination probable, rare. © Nerinea monilifera d'Orbigny, dé- termination probable, rare. Globiconcha ponderosa Coquand, assez rare. Pterodontainflata d’Orbigny,assez rare. Fusus sp. ? assez rare. Ostrea columba Lamark, rès com- mun. — suborbiculata Lamark, va- riété striée, assez rare. — flabellata Goldfuss, moins commun que ©. columba. — biauriculata Lamark, assez commun. — olisoponensis Coq., assez rare mais beaux exempl. — africanaCoquand. une dou- zaine d'exemplaires, pres- que tous de bonne con- servalion. Plicatula Reynesi Coquand, d’une très grande abondance. J’en ai soumis à l'examen de M. Peron une série d'environ 50 très bons exemplaires et cepaléontologiste éminent, qui connaît si bien la faune d’Algéric, a trouvé que cette série montreit des passa- ges tellement évidents de Plica- tula Reynesi Coquand à Plica- tula batnensis Coquand, qu’il en était amené à penser que les deux espèces n’en faisaient qu’une ; l'espèce devant garder le nom de PI. Reynesi, le plus ancien. Lima cenomanensis d'Orbigny, dé- termination probable, rare. Peclen virgatus Nilsson, pas trop : rare. ne — evanescens Coquand, pas trop rare. — subacutus Lamk., pas trop rare. — elongatus d’Orbigny, pas trop rare. Janira Dutrugei Coquand, com- mun. — Dutemplei d'Orb., exem- plaires jeunes,détermina- tion probable : pas trop rare. IOOI Janira phaseola d’Orbigny, rare. Pinna quadrangularis Goldfuss, détermination très probable : rare. Arca Trigeri Coquand, détermi- nation probable : rare. Cardita sp.? rare. Cardium, voisin de C. Vidali Coq., détermination probable : rare. Radiolites,.... deux exemplaires malheureusement indétermina- . bles comme espèce. Isocardia aquilina Coquand, va- riété plus épaisse, moins élargie que le type de Batna, à crochets plus gros et moins rapprochés. ‘On ne peut rapporter qu’à celte espèce les échantillons récoltés: rare. Arcopagia numismalis d'Orbigny, assez commun. Dosinia Forgemolli Coq., assez commun. Panopea striata d’Orbigny, assez rare. Terebratula phaseolina Lamk. très abondant. Terebratella Menardi d'Orbigny, très rare. = Santonensis d’Orb., très rare. Holaster suborbicularis Ag., abon- dant, et les exemplaires, en gé- néral, de bonne conservation. CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 583 Hemiaster batnensis Coq., un seul exemplaire à ce gise- ment. M. V. Gauthier avait déjà rencontré cette espèce dans le Cénomanien de Gueule d'Enfer, près les Mar- tigues. — Orbignyi Des., 6 exem- plaires de bonne con- servation. — bufo Desor, une dizaine de bons exemplaires. — pseudo-Fourneti Peron et Gauthier, 1 exem- plaire incontestable, 6 douteux. — Desvauxi Coq.,1 exem- plaire,mais où la bou- che est invisible. On affirmerait sans cela. Archiacia scandalina Aguassiz, 4 exemplaires dont l’un très beau. Echinobrissus. .… indéterminable spécifiquement. Cottaldia Benettiæ Cotteau, 2exem- plaires bien conservés. Heterodiadema libycum Cotteau, rare, 2 seuls exemplaires. Diplopodia variolaris Brong. sp., commun, presque aussi abon- dant qu'Aolaster suborbicularis. Pseudodiadema Guerangeri Cot- teau ou P. tenue Peron, 1 seul exemplaire. M. Jacquinet a récolté aussi à Fieraquet, presque toutes ces espèces. L’abondance de Plicatula Reynesi, espèce spéciale jusqu'ici à la faune d'Algérie, et qui n'avait jamais été rencontrée dans les couches cénomaniennes du bassin crétacé du Beausset, rend plus significative la présence des autres espèces d'Algérie recueillies seulement en petit nombre, et semble rendre aussi plus certaine la détermination de celles que leur état de conservation n'a permis de spécifier que d'une façon probable. Elle accentue encore le 584 A. MICHALET 2 Déc. mélange des espèces du Cénomanien inférieur et du Cénomanien supérieur qui rend ce gisement de Fieraquet plus semblable à ceux d'Algérie qu’à ceux rencontrés jusqu'à ce jour en Provence. Au-dessous de ce premier niveau se trouvent d’autres banes cénomaniens jaunâtres, presque aussi marneux etaussi épais, assez développés dans la propriété P. Ortigues, mais qui ne contiennent que des Ostrea columba, flabellata, biauriculata, la première espèce surtout. Malgré de longues recherches, je n’y ai jamais pu recueillir d’autres espèces. Le petit lit gardonien, qui leur succède, n’a que des fossiles de petite taille et de mauvaise conservation, j'ai récolté au-dessous quelques Cyclolites spinosa de Does et Cycloseris provincialis Edwards et Haime. Quand on quitte les propriétés M. Isnard et P. Ortigues, on rencontre immédiatement à la lisière de cette dernière, du côté de l’ouest, un chemin charretier qui descend vers la nouvelle route projetée de Signes. C’est le même qui conduit à la ber- gerie Prosper Barthélemy et au sondage de bauxite le plus haut du côté des Morts, dans la région du Revest. On marche quelque temps sur l’'Urgonien, mais au moment où on va rejoindre la route, on retrouve la bauxite, le Gardonien et, dans une tranchée de la route, à une trentaine de mètres du point où l’on s’y engage, les deux niveaux cénomaniens, et le Ligérien. Là un parapet longe le côté sud de la route à l’endroit appelé Ragadu. C’est une repro- duction, en petit, du gisement de Fieraquet. J’y ai récolté de bons échantillons de Diplopodia variolaris et de Holaster sub- orbicularis, dans le calcaire marneux blanc supérieur, des Pecten virgatus, subacutus, beaucoup de Plicatules et d'Ostrea. Le gise- ment de Ragadu n'a offert, seul, trois exemplaires, dont l’un très beau, d’une espèce que Fieraquet n’a pas donnée : Cidaris rhoto- magensis Cotteau, test. Le Ligérien y contient, comme à Fieraquet, surtout des Linthia Verneuili. ; Le gisement de Ragadu est aussi isolé au milieu de l’'Urgonien, que l’on retrouve tout autour, sauf au nord. De ce côté les couches : ligériennes et cénomaniennes, qui ne font qu’affleurer à Ragadu, remontent, les dernières disparaissant rapidement sous le Ligérien, rejoindre, vers les Morts, la masse ligérienne qui, de ce point, tourne vers le sud-ouest. Si, au lieu de parcourir la nouvelle route de Signes qui, de Ragadu, conduit au village du Revest par de nombreux tournants et qui entame longtemps l’Urgonien, on suit, vers le nord, la direction des bancs cénomaniens et ligériens qui émergent à > it 1901 CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 589 Ragadu, mais sont bientôt couverts par les pins et les broussailles, on parvient, à moins de 100 mètres plus haut, à un sentier qui va rejoindre à l’ouest le chemin qui, des Morts, descend au village du Revest. A la rencontre précise de ce chemin, l’Urgonien réapparaît au delà du Ligérien qui vient de Ragadu mais bien au-dessus de lui par le grand ressaut pli ou faille, dont j'ai parlé, formant une sorte d’arète horizontale dont les flancs sont creusés de nombreuses carrières d'exploitation de la roche urgonienne et que coupe, beaucoup plus bas, la route de Signes. De cette même jonction de chemins et de sentiers, on aperçoit alors très bien la pente de Ficraquet et son gisement entouré d'Urgonien. Si l’on se retourne du côté du village, au sud-ouest, on a, à sa gauche, la suite du chemin qui vient des Morts, chemin tracé jusque là dans le Ligérien, mais où à partir d'ici, émergent les têtes de roches urgoniennes, à sa droite la masse ligérienne qui vient toucher l’Urgonien à quelques pas, et devant soi, un nouveau sondage de bauxite pratiqué tout à côté du carrefour. Ce sondage a été fait à la plus haute de quelques restanques d'oliviers appartenant à M. L. Pomet, et n’a donné qu'une petite quantité de minerai, abondonné sur place. Si, en se tenant à la lisière de l’Urgonien, on descend les restanques d’oliviers qui vont en s’élargissant, on trouve plus bas dans la première restanque plantée de vignes (propriété H. Castellan), un autre sondage plus important de bauxite. Après la bauxite du haut comme après celle du bas, si l'on recoupe les couches, on retrouve la faune saumâtre, surtout dans les déblais des sondages, puis des bancs de calcaire grameleux, jaunâtres et bleuâtres sans fossiles et enfin des bancs semblables à Ostrea surtout flabellata. Si l'on s’avance toujours à travers les couches, on voit bientôt réapparaître, immédiatement après ces bancs à Ostrea, et à moins de 200 mètres de celui qu'on a laissé derrière soi, un nouvel Urgonien plus haut de quelques mètres que les bancs à Ostrea auxquels il succède. Il n’a pas dans ce dernier pli, plus de 50 mètres d'épaisseur, et, de nouveau après lui, dans la propriété Teisseire, on voit les roches teintées de rouge éclatant, de nombreux fragments de bauxite en place ou épars, puis, faisant suite à une couche très peu épaisse à Polypiers, un nouveau Gardonien, qui mérite une mention spéciale. _. Il a une épaisseur de 10 à 12 mètres et constitue, avec le gise- ment de Tourris, les deux plus importants g'sements que l’on connaisse de la faune gardonienne de la région. Les espèces déterminables qu'on y rencontre sont : 586 A. MICHALET 2 Déc. Melania subcorrug'ata Cossmann, abondant. Plusieurs espèces de Cyclas, des Unio, des Cyrena de plusieurs espèces également, mais de détermination spécifique difficile. Enfin une espèce nouvelle et très remarquable de WMelanopsis dont j'ai recueilli plusieurs beaux exemplaires. Au Gardonien succèdent des bancs de calcaire gris jaunâtre, grumeleux et marneux d’abord, puis de plus en plus compacts, de 8 à 9 mètres d'épaisseur, à Ostrea flabellata très abondant, puis un banc de calcaire blanchâtre, d’un mètre au plus, pétri d’Ostrea columba, dans lequel j'ai recueilli deux exemplaires de très grande taille d’Hemiaster batnensis, quelques Holaster suborbicularis et trois ou quatre Plicatules. S 4 Sept à huit mètres de calcaire blanc très compact, où, malgré de nombreuses recherches, je n’ai pas rencontré les traces d’un seul fossile, mais qui ont toute la physionomie du Cénomanien à Caprines d'Orvès, recouvrent le banc à Ostrea columba, et viennent butter, semble-t-il contre le Ligérien, à moins qu’une dénudation, qui paraît avoir été considérable sur ce point, dans les bancs de ce dernier, ne puisse expliquer la différence actuelle de niveau. Tout cet ensemble des couches cénomaniennes de la propriété Teisseire qui traverse au sud, à l'exception peut-être du Cénoma- nien supérieur, la route de Signes venant de Ragadu et tracée jusque là dans l'Urgonien, remonte au nord, vers la propriété de M. Vidal, au lieu dit Foncevierre, qui est déjà dans le Ligérien, les couches s'amoindrissant et disparaissant peu à peu les unes sous les autres à la rencontre de la masse ligérienné. L'incli- naison des couches cénomanicnnes, qui s'élargit lentement depuis celles des propriétés Pomet et Castellan, arrive à être à la propriété Teisseire, celle du Ligérien ct de l’'Angoumien qui sont à la base de Caoume. Un petit lambeau cénomanien se montre au-dessus et non loin de la source de Dardennes, du côté du Revest, entre l'Urgonien et le Ligérien. On y trouve la bauxite, un petit lit gardonien très pauvre en fossiles, des calcaires grumeleux sans fossiles, des marnes et des calcaires à Ostrea flabellata, où j'ai recueilli aussi quelques Janira Dutemplei, enfin des calcaires très compacts avec, particularité remarquable pour le mélange des espèces cénoma- niennes, des Ostrea carinata incrustés dans la roche dure. Je n'ai jamais trouvé un seul Oursin dans ce Cénomanien. ‘ Eufin de la source de Dardennes, mais du côté opposé au village, on peut, avec quelques disparitions sous le Ligérien, suivre le Cénomanien jusqu'au château de Tourris. Il y est encore au-dessus 1901 CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 587 de l’Urgonien, de la bauxite et du Gardonien. Les travaux de la Compagnie des Eaux de Toulon ont rencontré et extrait ces deux derniers en quantité. Le Cénomanien marin de Tourris n'a rien de remarquable, mais les bancs gardoniens y sont au moins aussi développés que dans la propriété Teisseire, au Revest, et les fossiles assez bien conservés y abondent. La faune est la même qu'au Revest. Il y a, en outre, une espèce de Glauconia, dont les exemplaires sont difficiles à déterminer spécifiquement. Les Cyclas y sont plus abondants et bien mieux conservés. Une espèce est très voisine de Cyclas g'alloprovincialis Matheron. Au-dessus, dans les bancs marins et jusqu'au Ligérien, je n'ai recueilli que des Oslrea flabellaita, quelques ©. columba, quelques Janira, mais jamais non plus aucun Echinide. IT — Couches du Val d’Aren Je n'ai que quelques mots à dire du Cénomanien du Val d’Aren, relié aux couches de même étage du Revest, par celles des Garniers, de Cimaï et des environs de Sainte-Anne d'Evenos. La faune y est très pauvre et plutôt encore par la qualité, que par l’absence proprement dite des fossiles. Elle est toute différente de celle du Revest. On n’y rencontre que des espèces rhotoma- giennes, Echinides ou autres, et pas un seul débris d'Ostrea de n importe quelle espèce, qui puisse indiquer l'horizon supérieur. Dans son mémoire, M. A. Toucas croit y avoir reconnu deux au moins des assises de son Cénomanien inférieur de Cassis et de la Bedoule, les plus profondes. Je ne suis pas complètement de son avis. Je crois que les espèces y sont réparties d’une facon un peu différente qu'à l'ouest du bassin crétacé, et qu'on ne peut établir d'identité absolue entre les deux extrémités du bassin, bien qu'il y ait une incontestable similitude. Dans les environs de la propriété La Toulousane, qui est, pour ainsi dire, à l'entrée du Val d’Aren, du côté de Sainte-Anne d Evenos, j'ai récolté, sur le bord même du chemin qui traverse le Val d’Aren. en aliant rejoindre la route du Beausset à Ollioules, une très grande quantité de radioles de Cidaris Sorigneti Desor, dans un grès jaune très friable qui n'a aucun correspondant à Cassis ou à la Bedoule. Un peu avant d’arriver au pied même du Grand-Cerveau, j'ai trouvé dans des grès gris blanchâtres, au contact même des 588 A. MICHALET 2 Déc. sables ligériens, des masses d'Echinides si roulés qu’on ne peut plus guère appeler de tels échantillons que des moules d'Echinides. On peut y reconnaître cependant la forme de la plupart des espèces du Rhotomagien de Cassis et de la Bedoule, de cette dernière localité surtout : Holaster subglobosus Agassiz. d'autres Holaster, sans doute suborbicularis. Oolopygus Bargesi d'Orbigny. des Pyrina, des Echinoconus. Holecty pus crassus Gotteau, etc. Ces grès existent tout le long du Val d’Aren, à la limite même du Ligérien, mais ils sont presque partout couverts par la végé- tation. Cependant, sept ou huit cents mètres avant d’arriver sous la caverne de l'Homme sauvage, « l’hommè-fa », ils sont à peu près nus et on peut y faire d’amples moissons de ces Echinides roulés. Ces grès, je l'ai dit, confinent aux sables ligériens, ils forment donc là le plus haut niveau cénomanien. Au-dessous d'eux, en montant vers l’Aptien, j'ai récolté, dans un calcaire gris compact, vers l'extrémité ouest du Val d’Aren, plusieurs bons exemplaires de Codiopsis doma Agassiz, plusieurs Discoïdea subuculus Klein et un Pyrina aff. Bargesi d'Orbigny. Enfin tout-à-fait près de la route du Beausset à Bandol, dans les dernières roches cénomaniennes qui sont en face de la ferme La Corse, avant le ruisseau, j'ai pu recueillir de nombreuses espèces. C’est un calcaire gris foncé qui, autant qu’on peut en juger, doit être là le dernier terme cénomanien. À sa partie supé- rieure placée le plus bas, puisqu’au Val d'Aren les couches sont renversées, il est déjà d’une grande dureté, mais encore abordable au marteau. Il m'a offert beaucoup d’exemplaires d’une grosse Térébratule, souvent très bien conservée, qu'on ne peut rappro- cher que de T'erebratula biplicata Defrance, dont elle paraît être une variété de taille et de forme assez anormales. Il est juste d'ajouter que Davidson a réuni 7. biplicata à T. Dutemplei, à laquelle ressemble beaucoup aussi cette Térébratule. En se rapprochant de l’Aptien, le calcaire devient d’une compa- cité très grande, à laquelle on ne peut guère comparer, dans la région, que celle du banc ferrugineux des Lombards, à Cassis, et malheureusement c’est là que se trouvent les plus nombreux fossiles, qu’on ne peut extraire qu’en les brisant comme à Cassis. J’ai pu cependant obtenir en assez bon état : I901I Ostrea carinata Lamark. assez abondant. Pecten asper Lamark, un seul exemplaire. Terebratula (Kingena) Heberti d'Orbigny, rare. Terebirostra lyra d'Orb.,commun. CÉNOMANIEN DES ENVIRONS DE TOULON ET SES ÉCHINIDES 589 . Rhynchonella Cuvierid'Orb.,abon- dant. — Lamarki d'Orbigny, moins abondant. Discoïdea subuculus Klein, rare. Anorthopygus orbicularis Cotteau, un seul exemplaire. J’ai recueilli aussi cette espèce à la Bedoule, quoique M. A. Tou- cas ne l'y mentionne pas dans son mémoire. Peltastes acanthoïdes Agassiz, un seul exemplaire. Détermination non certaine mais très probable. Cidaris vesiculosa Goldfuss, rare. — Sorigneti Desor, pas trop rare. Les grès jaunes des environs de La Toulousane, qui m'ont paru confiner en ce point à l’Aptien sont sans doute l'équivalent de ce niveau. Quelques uns des fossiles du calcaire compact qui avoisine Ia route de Bandol sont ferrugineux, et leur couleur, comme l’extrême dureté de la roche donnent à ce gisement une ressemblance avec celui de Cassis quoique sa faune ressemble surtout à celle de la Bedoule. SUR L'ALIMENTATION DES VILLES EN EAU POTABLE PAR LA MÉTHODE DES SOURCES ARTIFICIELLES RÉSUMÉ DE LA CONFÉRENCE FAITE A LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE par M. Léon JANET. Les sources alimentées par des nappes dont le gisement géolo-. gique se trouve dans des terrains fissurés, spécialement dans des calcaires, sont exposées à de nombreuses causes de contamination. — On peut améliorer la qualité de ces sources, dites vauclusiennes, par de bons ouvrages de captage, et des travaux de protection ayant pour but d'empêcher l’arrivée directe, à la nappe souterraine, de grosses masses d’eau contaminée, mais il est très diflicile d'obtenir une eau présentant toutes les garanties désirables. Ce sont des sources alimentées par des nappes circulant dans des sables fins qui peuvent seules être mises à l'abri de toutes les causes de contamination. 590 L. JANET. — ALIMENTATION DES VILLES EN EAU POTABLE 2 Déc. Malheureusement, il n’y a pas de grosses sources sortant des couches de sables fins ; ceux-ci, en raison de leur nature ébouleuse, ne permettent pas la formation des larges canaux souterrains, qui seraient nécessaires à un grand débit. Si le volume d'eau obtenu par un mètre de galerie captante pratiquée dans les sables fins est toujours restreint, cela résulte de ce que l’alimentation de la nappe par les précipitations atmosphé- riques est faible dans nos régions. Mais si l’on vient à déverser artificiellement, dans le périmètre d'alimentation, un volume d'eau beaucoup plus grand que celui fourni par les pluies, on recueillera dans la galerie un volume d’eau bien supérieur à la quantité primitivement fournie. Il est prudent, lorsqu'on le peut, de choisir une nappe à déver- sement périphérique, dans une butte isolée, constituée à la partie supérieure par une puissante couche de sable, reposant sur une couche d'argile. L’affleurement de cette couche d'argile forme une courbe fermée, et tout le long de cette ligne d’affleurement, se trouve un cordon de pelites sources. Si l’on vient à déverser par petits filets une grande quantité d’eau au sommet de la colline le debit des sources naturelles augmentera et de nouvelles sources apparaitront au voisinage de la ligne d'aflleurement. Il y aura donc trois éléments essentiels à considérer: 1° un appareil distributeur répartissant l’eau en petits filets sur toute la surface de la butte ; 2° un appareil filtrant, constitué par une couche naturelle de sables fins assez puissante pour présenter toute garantie pendant une longue suite de siècles, et reposant sur une couche argileuse ; 3° un appareil collecteur comprenant une galerie de captage établie à la base de la couche sableuse. L'eau à déverser sera simplement empruntée à la rivière voisine et élevée au sommet de la butte ; on la distribuera au moyen d'un réseau de conduites de dimensions décroissantes, en cherchant à imiter le plus possible le phénomène de la pluie. On la fera absor- ber par le sable dans de petits bassins quand celui-ci affleurera ou des puisards arrivant jusqu'au sable, lorsqu'il sera recouvert par une couche imperméable. Il ne devra arriver à chaque point d'absorption qu'un volume d’eau extrêmement faible. Comme couche filtrante, on doit choisir un sable marin très fin, bien constant comme grosseur de grain, ne contenant pas d’inter- calations argilcuses. On ne fera passer à travers le sable qu’une tranche annuelle décuple de celle que donnent les précipitations atmosphériques, soit 7 à 8 mètres par an. | La couche argileuse, sur laquelle repose le sable devra être 1901 PAR LA MÉTHODE DES SOURCES ARTIFICIELLES 391 rigoureusement imperméable ; autrement l’eau passerait dans des couches inférieures, et pourrait ne ressortir que très loin du point d'absorption. \ Les bassins ou puisards se colmateront au bout d’un certain temps : il en faudra donc un double jeu, lun en fonctionnement, l’autre en réparation. " L'exécution de la galerie captante dans les sables boulants présentera de grosses diflicultés techniques ; celles-ci ne paraissent cependant pas insurmontables, puisque certaines villes s’alimen- tent au moyen de galeries de cette nature. La galerie, qui se trouvera au de la ligne d’affleurement de la couche d'argile, pourra d’ailleurs être exécutée avant.que le déversement d'eau ait été commencé. L'eau aura à la sortie une tempéralure voisine de celle des eaux de sources, pourvu que l'épaisseur de la tranche annuelle d’eau absorbée, soit beaucoup moindre que l'épaisseur de la couche de sable. Elle sera donc à la fois fraîche et aseptique. La méthode n’a rien de commun avec celle des bassins filtrants, où l’on peut passer à travers le sabie, un volume de 700 à 800 mètres cubes par mètre carré. Les bactéries passent en assez grand nombre, et l’eau fournie a la température des eaux de rivières. La ville de Paris se trouve dans des conditions très favorables pour l'application de la méthode. Il existe, en effet, au nord de la capitale une série de buttes formées de sables de Fontainebleau reposant sur les marnes à Huïtres. En choisissant la plus grande de ces buttes, la butte de Montmo- rency, on obtiendrait facilement les cinq mètres cubes par seconde, qui sont réclamés comme complément d'alimentation. Les sables de Fontainebleau, d’une épaisseur de 5o mètres, sont surmontés de 5 à 6 mètres de meulières de Beauce et reposent sur les marnes à Huitres, les glaises vertes et les marnes supra- gypseuses, formant une série imperméable d'une vingtaine de mètres d'épaisseur. L'eau à déverser sur la butte peut ètre empruntée à la rivière d'Oise, qui coule à une faible distance de là. On pourrait établir sur le sommet des puisards d'absorption, en damier, distants de 5o mètres, au nombre de 8000, et absorbant chacun un volume de 5/8 de litre par seconde. L'eau, après filtration, serait encore à une altitude suflisante pour être distribuée. Il serait très désirable qu’une municipalité consentit à s'imposer les sacrifices nécessaires pour faire l'application de la méthode. 592 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE IQO1 M. Imbeaux rappelle que c’est l'ingénieur allemand Thiern qui a eu le premier l'idée de créer des nappes souterraines artifi- cielles : en 1858, il présentait un projet de ce genre pour Stralsund qui ne l’adopta pas, mais un peu après il put réaliser son idée à Essen, sur la Ruhr. En Suède, M. Richert, dans une brochure spéciale, a exposé la question et décrit les travaux faits à Udde- valla et à Gothenbourg : il est regrettable que tout cela soit passé à peu près inaperçu à l'Exposition de 1900. M. Imbeaux a exécuté en 1899 un renforcement artificiel de Le nappe des alluvions de la vallée de la Moselle, captée à Messein par une galerie filtrante alimentant Nancy : l’eau de la rivière a été amenée à 25 ou 30 mètres au-delà de la face arrière de la galerie et déversée dans le gravier par les barbacanes d’un aqueduc débitant parallèle à la galerie ; de plus, pour assurer une meilleure filtration on a intercalé une tranche de sable fin de 2 mètres à 3 m. d'épaisseur. Le colmatage de ce sable a été rapide et il faut songer à le remplacer, mais l'augmentation de débit de la galerie a été très notable et la qualité de l’eau a été au moins égale à ce qu’elle étail précédemment. La ville de Chemnitz avait aussi opéré un renforcement de la nappe alimentant ses puits filtrants, mais elle a aussi constaté un colmatage rapide. Il faut en conclure qu'il y aura grand intérêt à obtenir la clarification préalable des eaux à amener dans les bassins d'infiltration, soit en les laissant se dépo- ser dans des bassins de sédimentation, soit en les faisant passer dans des filtres dégrossisseurs. M. H. Boursault. — Quelle que soit l'importance de la surali- mentation de la nappe contenue daus les sables de Fontainebleau, je crois que l’on peut compter sur l’imperméabilité pratiquement absolue des marnes et argiles sous-jacentes, malgré les dislocations si fréquentes de ces couches. -J’ai signalé à ce point de vue, dans mon travail sur la recherche des eaux, la grande différence qui existe entre les roches dures et les marnes ou argiles : Les roches dures et compactes se brisent et donnent des frac- tures d'autant plus nettes, que la cohésion et la dureté sont plus grandes ; les canaux ainsi formés restent libres et éminemment propres à la circulation de l’eau. Au contraire, avec les roches grasses, peu cohérentes et surtout plastiques, les fragments se resserrent et bouchent les fissures au fur et à mesure de leur formation. Les argiles subissent ainsi des plissements et des frac- tures importantes sans donner lieu au moindre passage d’eau ; elles sont donc presque toujours un support parfait pour les nappes. Pour la suralimentation des nappes d’eau dans les sables, je SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE IQOI 593 crains, comme M. Imbeaux, qu’il n’y ait de graves difficultés pro- duites par le colmatage ou d’une façon plus générale par diminu- tion de la perméabilité primitive. Les éléments des sables, dans les parties situées hors de la nappe peuvent en effet être enrobés dans des parcelles plus ou moins argileuses qui, une fois imbibées, se délayent, se déplacent et bouchent les canaux. Avec les sables de Fontainebleau, ce danger est évidemment très faible, mais le simple transport des fragments cristallins les plus fins amènera certainement l’obstruc- üon lente, mais cependant très sensible des vides primitifs. Il peut ainsi se produire un colmatage assez rapide avec les eaux les plus limpides. M. G. Dollfus pense que la principale objection au projet de M. Janet est d'ordre technique ; la difficulté de construction pour les galeries collectrices des eaux filtrées lui parait très grande. Aucune des méthodes employées jusqu'ici ne lui paraît applicable aux nombreux kilomètres à développer au flanc des collines sableuses : ni les fascines des Hollandais, ni les lames de verre de M. Putzeys, ni les vases poreux de M. Lippmann, ni les récents siphons, ne lui paraissent répondre à un programme pratique. C’est supposer résolue la question des «sables boulants » à l’étude chez nos confrères belges, et qui paraît si diflicile. Au point de vue de l’infiltration il y a lieu de tenir compte également de la composition très différente des eaux pluviales et des eaux de rivière. Les eaux atmosphériques sont chargées d'oxygène et d’acide carbonique, elles ont un pouvoir chimique très actif, tandis que les eaux de l'Oise sont chargées de carbonate de chaux et d'azote et se présentent comme conservatrices. Les eaux ne parais- sent se grouper en rivières qu'après avoir épuisé leur pouvoir agressif et modificateur. M. Babinet dit que la méthôde sera très chère dans son appli- cation, et que l'exécution de la galerie captante présentera de sérieuses difficultés. IL est improbable qu'aucune municipalité puisse faire un essai de ce genre, car M. Janet n’ignore pas que le moindre serait terriblement coûteux. Il jugerait beaucoup plus économique, et au moins aussi sûr, de filtrer artificiellement les eaux des sources vauclusiennes, si l’on veut éviter à tout prix le risque des maladies d’origine hydrique. Cette opération ne dimi- nuerait guère leur fraîcheur. M. Bigot craint que dans la pratique le colmatage dont on vient de parler ne soit un sérieux inconvénient pour l’épuration des -22 Février 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 38 594 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1QO01 eaux qui parviendront aux sources arüficielles. Cette épuration est un phénomène chimique, accompli par des microorganismes fonctionnant dans des conditions d’existence très étroites ; il est à craindre que le colmatage ne modifie ces conditions d’une manière défavorable. M. Janet répond que le colmatage des points d'absorption ne se produira qu'après un temps assez long, si la quantité d’eau à absor- ber est faible. Quant aux difficultés d'exécution de la galerie col- lective, et de captage de l’eau, elles sont sérieuses, mais peuvent être surmontées. M. Boursault dit qu'en effet la difficulté du captage des eaux dans les sables est classique et que M. Janet a raison d'y voir non pas un obstacle insurmontable, mais une difliculté pour l’appli- cation de la méthode des sources artificielles qu’il préconise. Dans le nord de la France et en Belgique, les accidents et les échecs de forages exécutés dans les sables landéniens sont fréquents. Je peux également citer quelques faits typiques aux environs même de Paris, vers le nord. Quand on examine, dans cette région, l’allure de la nappe puis- sante supportée par l'argile plastique, on voit que son niveau piézométrique recoupe successivement les diverses formations supérieures, par suite du plongement général vers Paris. Or, à la station de Survilliers, l’eau rencontrée à 35 mètres du sol dans les sables du Soissonnais ne peut être extraite que lente- ment, à raison de 3 mètres cubes à l'heure. A la gare de Villiers-le-Bel, le niveau piézométrique est à 17 m. dans les sables de Beauchamp ; un ancien puits fournissait péni- blement 4 in. cubes avec entraînement de sable. Dans une nou- velle installation, à quelques mètres de la première, j'ai fait arrêter le puits à grande section avant le niveau de l’eau et continuer ensuite par un forage étanche dans toute la traversée des sables, et librement ouvert jusqu’au calcaire grossier moyen sur lequel on sest arrêté. Dans ces conditions, le résultat a été excellent, le débit, en eau absolument exempte de sable, est de 20 m. cubes à l'heure avec une dénivellation de moins de 2 mètres. Le Président remercie M. Léon Janet de la conférence si inté- ressante qu'il vient de faire. La connaissance du sol de la France est maintenant assez avancée pour qu'il soit possible de rechercher les applications pratiques de la géologie. On doit savoir gré à M. Janet d’être entré, l’un des premiers, dans une voie qui promet de mener à d'importants résultats. Séance du 16 Décembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. L. CAREZ, PRÉSIDENT Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance précé- dente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. Le Président proclame membres de la Société : MM. Max Le Couppey de la Forest, Ingénieur-agronome, Secrétaire de la Commission d’études des eaux, présenté par MM. Van den Broeck et Léon Janet ; Maxime Bourdon, présenté par MM. Van den Broeck et Léon Janet. Le Président communique à la Société une circulaire de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Caen. L'Académie met au concours, pour le prix Le Sauvage (2000 francs) à décerner en 1904, le sujet suivant : ( Etudier, au point de vue de l’origine et du gisement en Normandie, une ou plusieurs substances minérales susceptibles d'exploitation ». Les mémoires, rédigés en français, devront être envoyés au Secrétaire au plus tard le 31 décembre 1903. Chaque mémoire, non signé, portera une devise qui sera répétée sur un pli cacheté contenant le nom et l'adresse de l’auteur. M. Albert Gaudry met sous les yeux de la Société des repré- sentations de l'Okapi, communiquées par M. Ray Lankester. Ce sont des photographies de deux crânes et un dessin colorié du curieux animal de l’Ouganda, remonté, d’après les instructions de l'éminent directeur du British Museum, avec les pièces envoyées par Sir Harry Johnston. M. Albert Gaudry présente en même temps le dessin du squelette de l’Æel/ladotherium de Pikermi pour qu’on puisse comparer l'animal miocène avec son survivant actuel, légèrement modifié. e M. Douvillé offre à la Société, de la part de l’auteur, M. G. de Angelis d'Ossat, une note Sur une forme singulière d’une colonie d’Aspidiseus cristatus Xænig, sp. (Extr. Feuille des Jeunes Naturalistes). M. de Lapparent annonce que, dans sa séance de ce jour, l'Académie des Sciences a décerné le prix Delesse à M. Gasron Vasseur, pour l’ensemble de ses beaux travaux sur les terrains tertiaires de l’Aquitaine et du Languedoc. 596 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE IQOI M. G. Dollfus présente au nom de M. Ph. Dautzenberg et en son nom une brochure intitulée : Nouvelle liste des Pélécypodes et des Brachiopodes fossiles du Miocène moyen du Nord-Ouest de la France. C’est une simple liste extraite du Journal de Conchyliologie, comme dernier appel fait à leurs confrères, qui voudraient bien communiquer aux auteurs les documents et les fossiles qu'ils possèdent du Miocène de la Touraine et de l'Ouest, avant la mise à l'impression d’un mémoire paléontologique, plus développé sur le même sujet, qui est actuellement fort avancé. M. Haug dépose la note suivante : Sur le pli couché des Diablerets. Dans un remarquable travail intitulé « Recherches sur l’origine des vallées des Alpes occidentales », que les « Annales de Géogra- phie » ont récemment publié, M. Maurice Lugeon, entre autres questions relatives à la-tectonique des Alpes occidentales, discute également « l'accident géologique qui fait que le pli de Moreles est relayé par la haute masse des Diablerets ». L’explication qu’en donne mon excellent collaborateur et ami, m'oblige à une reven- dication de priorité dont je me serais certainement dispensé s’il ne s'agissait pas d'un accident tectonique dont l'interprétation — donnée par moi dès 1894 — modifie du tout au tout la notion, adoptée précédemment par tous les auteurs, de la continuité des Hautes Chaïnes calcaires de la Savoie avec celles de la Suisse. D'après M. Lugeon !, le relaiement des plis du massif de Morcles par ceux du massif des Diablerets & a été expliqué par deux hypothèses : disparition des plis sous un nouveau régime de plis perpendiculaires, provenant de l’intérieur des Alpes (Haug, C.-R. somm. Soc. géol., 24 juin 1895); pli transversal accusé jusqu’au pli-faille (Lugeon, la Région de la Brèche du Chablais, p. 239) ». « Je crois aujourd’hui », continue M. Lugeon, « que la masse des Diablerets doit être considérée comme un vaste pli couché, qui vient se superposer à celui de Morcles au point où ce dernier s’abaisse. La direction N.-S. des affleurements dans le Val de Treiscœurs n’est due qu’à l'érosion et au fait que la nappe du pli couché des Diablerets plonge vers le N.-E., comme celle de Morcles. Dans ces conditions, la nappe des Diablerets a dû anciennement recouvrir une bonne partie de celle de Morcles, bien au-delà, vers l’ouest, de ses limites actuelles, détermi- nées par celte grande entaille concentrique qui sépare les deux massifs ». 1. Ann. de Géogr., 10° année, p. 415. SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE IQO1I 597 M. Lugeon abandonne donc maintenant son ancienne interpré- tation du «pli transversal accusé jusqu’au pli-faille ». J'en suis d'autant plus heureux que celle à laquelle il arrive aujourd'hui est en réalité identique avec ma manière de voir. Il s’en serait certainement rendu compte, si, au lieu de citer une des notes préli- minaires dans lesquelles j'ai exposé très sommairement mon idée du relaiement !, il avait lu les quelques pages, accompagnées d’une carte schématique, que j'ai consacrées à la question dans mes « Études sur la tectonique des Alpes Suisses » ?. Il y aurait trouvé notamment, les deux passages suivants, qui ne laissent, je crois, planer aucun doute sur mon interprétation : « Le pli (de la Lizerne et des Diablerets) étant très couché, les bandes de terrains qui représentent l’affleurement de son flanc normal sont presque horizontales : celle qui correspond au Jurassique supé- rieur peut être suivie vers l’ouest jusqu'au Vélard, au-dessus d’'Anzeindaz ; la bande de Néocomien s'étend jusqu'aux Rochers du Vent; celle de l’Urgonien, jusqu’au sommet principal des Diablerets (3251 m.). A l’ouest de ce sommet nous nous trouvons dans la région de la charnière anticlinale... L’anticlinal des Diablerets est donc couché sur une très grande largeur ; il s’étend par dessus la zone du Néocomien à Céphalopodes, qui s’introduit comme un coin entre les Diablerets et le Muveran; il s'étend aussi sur la zone triasique et jurassique de Bex, qu’il recouvre au sud de Taveyannaz ». Ainsi donc, j'ai non seulement indiqué, dès 1894, le relaiement des plis de Morcles-Muveran par un faisceau de plis plus interne, mais j'ai établi également que le plus extérieur de ces plis, celui de la Lizerne et des Diablerets, se déverse vers l’ouest, par-dessus plusieurs éléments tectoniques distincts. Comme, depuis quelques années, on attache une importance de plus en plus grande à l’empilement, dans les zones extérieures des Alpes, de plis couchés dont la racine est située plus en arrière, j'ai tenu à rappeler que, en ce qui concerne les Diablerets, j'ai été le premier à donner une interprétation que M. Lugeon adopte pleinement aujourd'hui et qui entraîne la conclusion que les Hautes Chaînes calcaires Suisses constituent le prolongement tectonique de la zone du Briançonnais. 1. Ni dans la note citée par M. Lugeon, ni dans deux notes précédentes (C.-R. somm. Soc. géol., 19 mars 1894, et C.-R. Ac. Sc. du même jour) je n’ai parlé de « disparition des plis sous un nouveau régime de plis perpendicu- laires ». 2. B. S. G. F., (3), XXIV, p. 558-564, 1896. RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ La Commission a vérifié les comptes présentés par le Trésorier pour l’année 1900, ils sont reproduits dans le tableau À, rappro- chés des chiffres correspondants pour 1899 et des prévisions pour 1901; un second tableau B résume l’ensemble des opérations effectuées par la Société pendant l’année 1900. Recettes Les revenus ordinaires sont en augmentation de 283 fr. 75, par suite du placement de fonds résultant du legs Prestwich ; cette augmentation n'aura tout son effet qu’en 1901. La plus-value des cotisations arriérées signalée l’année dernière, a eu pour consé- quence une diminution notable sur le chiffre correspondant de 1900, qui retombe au-dessous de celui de 1898. Les cotisations courantes sont en progrès depuis deux ans, il en est de même des cotisations anticipées qui ont remonté cette année de 390 francs; on ne peut tirer aucune conclusion bien ferme de ces oscillations, qui en fait sont très irrégulières. Si l’on fait le décompte des cotisations qui se rapportent effectivement à l'exercice 1900, on voit que leur nombre est inférieur de 10 à celui de l'exercice précédent : la diminution du nombre des membres déjà bien souvent signalée est donc loin d’être enrayée, comme on avait pu le croire un moment. Les droits d'entrée sont retombés au chiffre très bas de 260 francs. Les recettes provenant de la vente du Bulletin, sont par contre en progression assez notable, près de 500 francs ; maïs la vente des Mémoires de Paléontologie continue à faiblir. Au total les recettes ordinaires sont en augmentation de 461 fr. 35 sur celles de 1899. Dépenses Abstraction faite du loyer, les frais généraux ont passé de 4.319 fr. 33 à 4.528 fr. 25 ; ils présentent ainsi une légère augmen- tation de 210 fr. 92. La dépense de loyer s’est abaissée de 4.408 fr. 80 à 2.202 fr. 45; mais c’est un gain tout fortuit, et qui résulte uniquement du jeu des loyers d'avance, résultant de l’expiration de l’ancien bail. Il n’en est pas moins arrivé fort à propos pour IOOI RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ 099 compenser une partie des dépenses de la nouvelle installation. Par contre les dépenses d'impression du Bulletin ont atteint un niveau anormal et manifestement exagéré. Nous disions l’année dernière qu’il était prudent de ne pas dépasser le chiffre de 8.500 francs : or les frais d'impression du Bulletin seul (t. XX VIID se sont élevés à 10.509 fr. 35 (dont 4.094 fr. o5 pour les planches et dessins dans le texte), et dans cette somme n’est pas comprise la réunion extraordinaire du tome XXVII, qui doit être comptée dans la même année. Les frais correspondants étaient évalués à 1500 francs, ce qui portera la dépense totale de frais d'impression du Bulletin à environ 12.000 francs, soit une augmentativn de 3.500 francs sur le chiffre de 1899. Cette augmentation est: tout à fait hors de proportion avec les ressources réelles de la Société, et il est nécessaire d'appeler tout particulièrement sur ce point l'attention du Bureau, de la commission du Bulletin et du Conseil. Nous devons signaler également le retard fâcheux et tout à fait anormal apporté à l'impression de la réunion extraordinaire ; c'est la première fois depuis nombre d'années, qu'il n’a pas été possible de faire figurer cette dépense dans le budget correspondant. Il faut espérer qu'il ne s’agit que d'un fait tout exceptionnel et qui ne se reproduira pas à l'avenir. Le Compte-rendu sommaire avait diminué l’année dernière de 200 francs, et nous avions fait honneur de cette diminution au zèle de nos Secrétaires. Cette année la dépense a augmenté de 396 francs, c'est-à-dire qu’elle a presque doublé, et cependant nous avons tout lieu de penser que le zèle de nos Secrétaires n’a aucunement faibli; c’est l'abondance des communications faites à nos séances qui est la seule cause de cette augmentation. Le chapitre des Mémoires Fe Paléontologie est cette année complètement vide. Malgré tous les efforts du Bureau et du Conseil, cette publication n'arrive pas à reprendre sa marche normale ; les conséquences -fâcheuses du traité Carré et Naud s’exagèrent de plus en plus ; nous attendons toujours la fin du tome IX et les insuft- sances de recettes à la charge de la Société, qui étaient de 900 francs environ pour le tome VIII sont prévues de plus de 1.200 francs pour le tome IX. De ce fait, une double charge s’imposera à l'exercice 1901, qui aura à faire face non seulement à la liquidation du tome IX, mais encore à l’impression du tome X. Du reste une partie seulement des dépenses afférentes à ce dernier volume incombera à l’exercice en cours, par suite des retards difficiles à éviter dans l’organisation du nouveau régime de publication directe, adopté par la Société. 600 RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ 16 Déc. A Comptes de 1900 et projeW RECETTES ne PRÉVUES| |, ns PRÉVUES || pour 1900 pour "30 : 4° Ordinaires Revenus nets . . . . . . . . . . . | 4.860,15| 4.900 »|l 5.089,90| 5.090 | Cotisations arriérées. . . . . . . . 830 »| Goo » 390 »| 450. | » courantes . . . . . . . | 10.290 »|10.200 »| 10.380 »|10.350 D} » ARLICIDÉES EE EE 750 »| 900 »| 1.140 »| 1.050 » Droits ENTRÉE NRA RENE TE 54o »|] boo » 260 »| 300 »}; Diversiet dons: eee 106 »| » &io »| 100 »l\ 17.669, 90|17.340 »| nt 17.376, 15|17.100 Ÿÿ 2° Vente des Publications à Bulletin et tables . . . . . . . . . | 2.995,95) 2.800 »| 3.279,85| 3.000 »| | | Mémoires de Géologie . . . . . . . 245,10 300 » 169,40 200 »| » _de Paléontologie. . . . . 920 »| 200 » » » M Ouvrages de Fontannes . . . . .. 124,05] 100 » 83,45] 100 >» Souscription ministérielle . . . . . | 1.000 »| 1.000 »| 1.000 »| 1.000 »] 4.365,10! 4.400 »| 4.532,70 » "I Total des Recettes. . . . . . . . . |21.941,25/21.500 * »|22.202, 60 » Q # # « Ÿ { Frais généraux à retrancher. . . . | 8.726,13| 9.800 »| 6.730,70 » Dotation des publications . . . . . |13.015,12|11.700 »|19.491,90 » En caisse au commencement de L l'exercice ON re 500 0) 2300702 00 Ut » |. Aliénation de capital . . . . .. » » 3.000 ») ‘» 1 ACTIF DISPONIBLE. . . . . |14.614,91| 14.000, 76|20.772, 66 » 1901 de budget pour 1901 DÉPENSES 1° Frais généraux Personnel : Appointements. . . . . Gratifications . . . . . Indemnité de logement. Loyer effectif, assurances, contribut. Chauffage et éclairage LITOUNEr OERRMERE ER R EabDhobheques A et LOUER ee. Frais de bureau. TR CONGO SNMP ERRENTE BAUER RER Ne D te 2120, — nteine Ts rite le 20 Frais des Publications Bulletin, exercice courant (1900). . Compte-rendu sommaire. . . . . . Port du Bulletin et du Compte-rendu. Mémoires de Paléontologie. . . …. Table de la 3° série 8° Dépenses extraordinaires Contribution aux prix. . . . . . . Catalogue de la Donne Déménagement . . . . .. Indemnité au personnel . . . . . . Frais de réception du Congrès. . . Dépenses totales (autres que les frais généraux). —+ En caisse en fin d'exercice. . — Manque _ Total égal à l'actif disponible. . 1899 1.800 » 150 » 4.408, 80 614,85 457, to 519,95 442,95 271,88 60,60 8.726, 13 8.505,25 400,85 926, 35 899 » » 10.731,4d 0, 30 1.982, 40 1.582,70 12,314, 15 —-2 500,76 » 14.614,91 PRÉVUES pour 1900 25.000 » 10.999 ,24 14.000, 76 © RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ 1900 » » 1.800 150 2.202, 45 495, 55 318,20 949, 35 361,70 236.85 216,60 .730, 70 10.509, 35 770, 25 1.246 » » »» .531,60 12 » .098, 05 .462, 40 100 » 846, 20 Où = 7.506, 65 20.038,25 + 734,41 » 20.772, 66 Gor PRÉVUES pour 1901 1.800 » 150 » . 500 » 4 400 » 250 » 300 » 600 » 400 » 250 » I00 » 8.750 » 8.000 » 500 » 1.000 » 3.000 » 1.000 » 13.500 » ») 900 » 1.000 100 » » 2.000 » 15.500 » » » » 602 RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ B RECETTES 1° Ordinaires REVENUS pee ae RU LE AN 5.089. 90 Cotisations, droits d'entrée et divers. . . 12.580 ) 2° Vente des publications Bulletin et Mémoires de Géologie . . . . 3.449, 25 Mémoires de Paléontologie . . » Ouvrages de Fontannes. . 83, 45 Souscription ministérielle. . 1.000 ) 3° Locatives Produit des sous-locations. . . . . 1.658, 35 4 Compte capital Cotisation à vie. . . . . . . 400 » Legs Prestwich . . A MBarotte., de mul B. Fontannes . c. Viquesnel. 5° Fonds spéciaux 6° Encaisse au 4er Janvier 1900 Budget ordinaire . . Fonds spéciaux. . . . Compte capital. . . . MATE ere MenlerMilent rer [re = .| 9:719,90 507, bo 650 » 332,25 2.300, 76 448, 51 2.577,65 16 Déc. Résumé des comptes 17.669, 90 4,532, 70 1.658, 35 10.119, 90 1.489, 75 35.470,60 5.326, 92 40.797,52 M 1901 RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ 603 de l'Exercice 1900 DÉPENSES 40 Ordinaires Personnel, loyer, chauffage et éclairage. Mobilier et bibliothèque . . . .. As 1.267, 59 Frais de bureau, ports de lettres et divers. 819,15 8.389, 09 20 Frais des publications Bulletin (r900). . . . . D ÉNANE EN 10.509, 35 | Compte-rendu sommaire . . : . . .. 776, 25 Fortdu Bulletin et du C., Lignite ; présentait plus 10, Lignite ; 1, Argile grise. fréquemment l’as- 9, Marne blanche ; pect marneux, certains bancs devenant tout à fait blancs. Les couches de lignite étaient assez peu épaisses ; néanmoins les déblais en présentaient 1. Je signalerai l’abondance relative (une quinzaine d'exemplaires) du Planorbis Bigueti Font. assez rare dans les formations pliocènes où il a été signalé tout d’abord. 2. Il y a lieu aussi de corriger ou de compléter les rapprochements indi- qués à l'égard de deux Limnées comprises dans cette liste. L'une rapprochée par M. Depéret du Limnæa auricularia L., me paraît, soit dans les exem- plaires de Mollon, soit dans ceux de Jurancieu, ressembler beaucoup plus au L. ovata Beck; car, malgré la jeunesse des exemplaires, on peut constater que le labre, dès son insertion sur le dernier tour, descend en suivant la I9OT DANS L’ANSE DU BAS-BUGEY 661 un tas d’une dizaine de mètres cubes; beaucoup d'échantillons offraient même (comme autrefois à Soblay) du bois tout à fait intact à peine teinté en brun par l'effet de la lente décomposition qu'il avait subie. Les fossiles étaient les mêmes que dans la coupe la plus haute et se présentaient dans les mêmes conditions. L'inclinaison des couches de ces deux tranchées inférieures était beaucoup moindre que dans la supérieure ; elles étaient presque horizontales ; à peine pouvait-on y noter une légère inclinaison vers l’est, quoique la direction des travaux fût, là aussi, perpendi- culaire à la plus grande pente du terrain et à la falaise jurassique voisine (V. fig. 2). Il serait intéressant de rapprocher de ces deux coupes celles que M. Depéret avait relevées au printemps de la même année près de Soblay, à Confranchette, dans l’exploitation signalée plus haut. On y verrait, si mes souvenirs sont exacts, une structure du terrain tout à fait analogue. On peut, malgré les lacunes qui subsistent encore, considérer cette structure comme représentant la compo- sition de la moitié supérieure des couches pontiennes de ces deux localités. L'année suivante, en 1899, l'aspect des travaux avait entière- ment changé. Les trois tranchées étaient complètement éboulées et ne présentaient plus rien de reconnaissable. Celle du haut était abandonnée ; on avait foré un puits dans le voisinage. Les deux du bas, réunies en une seule, servaient d’amorce à une galerie hori- zontale, où l’on avait rencontré, disait-on, un banc de lignite de plus d’un mètre d'épaisseur ; le boisage intérieur ne permettait plus d'y rien voir, et, après plusieurs tentatives infructucuses de soutènement, on se décidait à élever une façade en maçonnerie pour l'entrée de la galerie !. | Mais, outre le puits signalé plus haut, on avait pratiqué des sondages en plusieurs points du vallon. J’ai pu obtenir communi- cation des coupes relevées dans ces divers travaux. La carte de la fig. 3 indique la place :les sondages opérés. Dans l'élévation (fig. 4), tous les travaux sont projetés sur un plan passant par la ligne XY de la carte précédente. D’après une note accompagnant ce tableau des sondages, l’incli- forme générale de la coquille au lieu de remonter et de s’étaler comme le lobe supérieur de l'oreille humaine. L’autre, rapprochée du ZL. palustris Drap., doit être plus spécialement comparée à la L. gingivala Goupil, variété de cette espèce ou du L glabra Dup. suivant les auteurs. I. Au-dessus de cette facade, élevée pendant la saison suivante, on voyait encore en 1900, 4 m. d'argile bleuâtre présentant des parties jaunes ou rouges. 662 A. BOISTEL. — COUPES DU MIOCÈNE DE LA BRESSE 16 Déc. naison des couches constatée dans le puits « se fait contre la mon- tagne et non dans le mêmæsens que la pente du sol. » L’obser- vation est conforme aux constatations faites dans la tranchée voisine, comme on l’a vu ci-dessus ; mais il résulte également de l'étude précédente qu’il serait téméraire de la généraliser à toutes les couches du coteau. On voit d’ailleurs que dans cette coupe du puits le pendage indiqué pour les couches supérieures ne se main- tient pas pour les couches placées au-dessous de la cote de 328 m, La face du puits dessinée est la face sud, celle qui se trouve du côté d’'Ambronay. Cette série de coupes constitue un document qu’il importait de ne pas laisser perdre pour la connaissance du Miocène de la région. Mais mal- heureusement on ne sauraitentirer des conclusions bien précises sur la structure géné- rale du coteau qu’elles ont en __a+ quelque sortedis- séqué. On n’aper- çoit aucune cons- tance, aucune continuité dans Echelle env. 1/15.000. Cote en mètres, au-dessus du niveau de la route d'Ambronay à Saint-Jean-le-Vieux, des points où ont été opérés les sondages : À, 16,64; B, »2,86; les bancs dont la C, 33,37; D, 36,48 ; E, 34,65 ; F, 40,33; G, 44,80 ; H, présence a été , 3372; I, 83,35; K, 82,45; L, 46,53; Ouverture du révélée; on ne * Puits, 88,28. 2 peut même con- jecturer comment ils se raccordent entre eux, ni par conséquent constater s'ils présentent une inclinaison uniforme dans un sens ou dans l’autre. On se demande même, au point de vue industriel, comment ces études ont pu faire naître l'espoir d’une exploitation régulière des lignites. Ce défaut d’unité se comprend parfaitement, si l’on songe aux nombreux glissements ou affaissements auxquels sont sujets des terrains essentiellement argileux, et dont on voit la trace palpable sur place dans la configuration en cascade des prairies qui les recouvrent. — Le défaut de renseignements précis sur la-nature de l’argile, ou des autres couches non exploitables, 1901 DANS L’ANSE DU BAS-BUGEY 663 aux différents niveaux; sur la présence ou l’absence de coquilles, sur leurs espèces, peut également inspirer des regrets. Le voile qui cachait à nos regards ce coin de la science n’est qu'en partie soulevé ; contentons-nous pour le moment de constater ce qui nous est acquis. | Les sondages pratiqués dans la partie supérieure du coteau me paraissent avoir une valeur documentaire supérieure aux autres, parce qu'ils ont dû rencontrer des couches non atteintes par l'érosion, restées par conséquent dans leur position primitive, ou faiblement déplacées par quelque glissement restreint. Ce sont les forages qui portent les lettres L, I, K, H, et le puits; en somme ceux qui sont situés entire les deux ruisseaux, sur la rive droite de la SE. branche venant du sud. Les don- ; nées qu’ils fournissent viennent confirmer par des observations en profondeur ce qu’avaient révélé les constatations faites dans les tran- Cale chées superficielles : alternance Nr CE Te à Fig. 4. — Coupe suivant la ligne XY de la carte de la fig. 3. — Hauteurs décuplées. — Le lignite pur est indiqué en noir; le lignite terreux est indiqué par des hachures ; l’épaisseur des couches de lignites est indiquée en chiffres maigres. dans la moitié supérieure du coteau, de touches peu épaisses d’argiles et de lignites, plus ou moins pures ou plus ou moins mélangées ensemble; avec variations dans la composition de l’ar- gile depuis l’état à peu près pur et compact jusqu'à la marne très calcaire et même jusqu’au tuf calcaire. Au contraire les sondages dont l’orifice est au-dessous de 295 m. d'altitude, ceux qui sont placés sur la rive gauche du ruisseau venant du sud, me paraissent fournir des renseignements beaucoup moins sûrs. Car ces parties basses ont pu recevoir, par des glissements 664 A. BOISTEL. — COUPES DU MIOCÈNE DE LA BRESSE 16 Déc. ou des descentes de terrain sur place, des matériaux venus de beaucoup plus haut. Il faut d’ailleurs remarquer que chacun de ces sondages, À, B, C, D, E, F, n’a rencontré à peu près qu’une seule couche de lignite dont la présence, ainsi qu'on vient de le dire, peut être accidentelle. La documentation est presque nulle en ce qui concerne la nature des autres couches, sauf pour celles qui sont notées comme lignite terreux. Il est bien préférable, pour toute la région inférieure, de demander nos renseignements à quelques coupes naturelles qui, ici heureusement ne nous font pas défaut. Les points où les couches tertiaires ! sont directement observables et très probable- ment dans leur position primitive sont au nombre de 4, et marqués par les lettres à, b, c, d, dans les figures 3 et 4. La coupe la plus intéressante au point de vue stratigraphique est celle qui correspond à la lettre a. Je l'avais déjà signalée à la Société au commencement de 1808 ?; mais je n'avais pu à cette époque en faire qu’une étude un peu superficielle ; notre confrère M. Mermier l’avait visitée également *, mais ses recherches avaient porté sur une couche différente de celle qui avait alors attiré principalement mon attention. Cet escarpement naturel tourné au nord est bien visible de loin, notamment de l’autre côté du vallon, du point 335 de la carte de l’État-major ; mais il est d’un abord très diflicile au milieu des bois, des broussailles et des hautes herbes. IL à une quinzaine de mètres de large sur 8 à 10 m. de haut. On ne peut constater aucune inclinaison appréciable des couches, bien qu'il soit exactement dirigé de l’ouest à l’est. Voici la coupe prise de haut en bas : 4. Marne calcaire grisâtre, sèche et dure avec Pla- norbes et Limnées, etc. . . . . RE 0e 0) 3. Marne ligniteuse Line avec Helix Nantiess ae. I m. 2, Argile très finement sableuse gris bleuâtre assez foncé avec Bithinia leberonensis, Néritines, Valvata vanciana, Unio, etc. . . . 5e CACDINME 1. Argile grise un peu bleuâtre, sorrecte. sans fossiles sHvisible sur LA MR Ne PP STI La marne supérieure est tout à fait pareille à celle que J'avais trouvée en 1897 dans les déblais d’un sondage antérieur, et à celles que j'ai signalées à plusieurs niveaux dans les tranchées 1. Je néglige les cailloutis plus récents, éboulés sur le flanc des ravins, qui ne présentent pas d'intérêt au point de vue de l'étude actuelle. 2. Voir B. S. G. F., (3), XXVI, 1898, p. 26 et suiv. 3. Voir Ibid. 1901 DANS L’ANSE DU BAS-BUGEY 665 de 1898. Elle rappelle par tous ses caractères physiques, par sa faune, par la conservation imparfaite de ses fossiles, souvent écrasés, les marnes de Mollon-Rivière. Ce sont les Planorbes et les Limnées qui y dominent, avec les diverses variétés du Bithinia leberonensis, et les Nematurella ovata et lugdunensis. On peut la considérer comme constituant le début de la zone supérieure, décrite jusqu'ici, dont elle inaugure le régime. La couche brune ligniteuse, facile à piocher, est le gisement spécial de l'Helix Nayliesi Mich. ; on peut en recueillir des échan- tillons assez bien conservés ; c’est en tout cas la meïlleure localité que je connaisse dans le département de l’Aïn pour la récolte de ce fossile ; il y est en meilleur état que dans le talus classique de Druillat. L'argile très finement sableuse qui vient au-dessous, bien que paraissant au premier aspect peu fossilifère, est la plus riche en espèces variées, la plupart de très petite taille. C'est très proba- blement à elle que s'était attaqué M. Mermier en 1897. Voici les mollusques que m'ont fournis trois ou quatre explorations très attentives : Helix Nayliesi Mich. (relativement bien conservé comme dans la couche brune supérieure). Vertigo Dupuyi Mich. (un exemplaire appartenant à la forme un peu effilée de l’espèce). Planorbis heriacensis Font. (bons exemplaires). — Philippei Loc. (très bien conservé avec ses stries très fines à la fois longitudinales et transverses). * Bithinia leberonensis Fisch. et Tourn. — — var. neyronensis Loc. — _ veneria Font. ? Nematurella ovata Bronn. — lugdunensis Tournouër. Emmericia canaliculata Brus. Valvata kupensis Fusch. : — vanciana Tourn., var. neyronensis Loc. -— sibinensis Neum., v. Sayni Font. Neritina Philippei Tourn. (assez abondante et très bien conser- vée avec ses couleurs). Pisidium Idanicum Loc. Chara (graines). Succinea sp. (trouvée par M. Mermier en 1897). Enfin à la base, en grande partie cachée par les éboulis des couches supérieures, commence l'argile gris-bleuâtre, devenant légèrement jaunâtre quand elle est exposée à l'air ou aux infiltra- 666 A. BOISTEL. — COUPES DU MIOCÈNE DE LA BRESSE 16 Déc. tions, que l'on peut considérer comme formant la masse principale du coteau dans toute sa moitié inférieure, à partir de l’altitude de 290 m. C’est elle que l’on retrouve uniquement au point c, où elle forme le lit même du ruisseau sur une hauteur de 3 à {4 mètres et où elle l’'encombre même par places de ses blocs éboulés, anguleux et résistant très longtemps à l’action de l'érosion. C’est encore elle que l’on revoit, sur un mètre au plus, au point d, sur l’une des berges du ruisseau. Dans ces trois endroits on n’y rencontre pas de fossiles en place; mais le lit du ruisseau contient des Mela- nopsis, même dans la branche venant du midi, où ils ne peuvent pas provenir du gisement dont il va être question. La coupe b, située également dans le lit du ruisseau, mais sur la branche qui vient de l’est, à 150 m. en amont du confluent, nous offre une couche sableuse très fossilifère et très intéressante, qui, jusqu’à nouvel ordre, ne se présente que comme un accident transitoire au milieu de l’épais dépôt argileux. En effet cette couche est surmontée, dans la partie visible, d’un banc d'argile de 3 m. d'épaisseur qui la relie à la base de la coupe a; et elle a au- dessous d'elle un banc semblable de 3 mètres également qui semble se rattacher à l'argile des coupes c et d. Seulement cette masse inférieure d'argile contient à sa partie supérieure des Unios et des Planorbes et présente deux petits bancs de lignite de 0,15 à 0,20 d'épaisseur, échelonnés le premier à 0,20 au-dessous de la surface de l'argile et le second à 0,20 au-dessous du précédent. La couche fossilifère est un sable jaune tufeux assez grossier, très ferrugineux par places, en deux bancs séparés par un bane de 0,20 de sable gris plus fin; elle mesure en tout 1 m. 80 à 2 m. d'épaisseur. Un commencement de galerie horizontale avait été pratiqué dans cette couche ; et le toit de la galerie était tapissé d'Unios ; mais ce travail n’a pas été poussé plus loin que 3 à 4 m. et il est à craindre que les éboulements auxquels il donnera lieu ne masquent le gisement déjà difficile à trouver et à aborder. Cette couche contient à profusion l'Unio atavus Partsch. var. Sayni Font. et le Melanopsis Depereti Boistel dont j'ai déjà donné la description !. La liste de 15 espèces ou variétés que j'ai présentée en même temps ne s’est pas accrue depuis; je la repro- duis succinctement ici, puisque j'aurai à discuter les conclusions auxquelles elle conduit : Unio atavus Partsch, var. Sayni ‘Helix Jourdani Mich.; Font., avecla sous-variété ectata Melanopsis Kleini Kürr, var. Va- Font. ; lentinensis Font; 1. B.S. G. F., (3), XXVI, 1898, p. 28. T901 __ DANS L’ANSE DU BAS-BUGEY 667 Bithinia leberonensis Fisch. et ciana Tourn., var: neyronensis Tourn. avec var. delphinensis Loc. ; Font. et v. neyronensis Font. ; Neritina Philippei Tourn. et N. Nematurella ovata Bronn. et N. Dumortieri Font. ; lugdunensis Tourn ; Triptychia Terveri Mich. Valvata Kupensis Fuchs et V.Van- Vitrina nov. sp. En somme l’ensemble de la coupe du coteau d’Ambronay peut se résumer ainsi : Nombreuses alternances d'argile et de lignite avec mélange à certains niveaux; argiles pures ou plus ou moins calcaires, passant à des marnes blanchâtres et sèches; grands Planorbis heriacensis Font. et 4 autres espèces; Limnées; Helix Nayliesi Mich., sou- vent écrasés, principalement dans les marnes sèches et au voisinage des lignites (20 m.). St tee ae re à Lacune dans les observations (14 m. 50). . . . . . . Marne semblable à celles de la couche supérieure, 0,50 Marneligniteuse brune avec Helix Nayliesi Mich., etc. Argile finement sableuse gris bleuâtre, avec tossiles nombreux et bien conservés. : ns ete ONE Argile compacte gris bleuâtre (3 mn). RENTE Lacune dans les observations (10 m.). . . . . . Argile compacte gris bleuâtre (3 m.) . è Sable jaune, tufeux, assez grossier ; avec un lit 4e 0 cent. de sable gris au milieu ; nombreux fossiles : Unios, Melanopsis Kleini et M. Depereti . . . . . . . Argile compacte gris bleuâtre, avec fossiles au som- met, et deux bancs de lignite de 20 cent. près du sommel (3 m.). ce A M Un de Lacune dans le drenatane a dd ONML) ES TRE Argile semblable (3 m.) . Ne RME: Lacune dans les re de ni). AE Aroileisemblabie (tm) re Lacune jusqu'au niveau de la route. . . 35 m. 5 m. 16 m. 2 mi. 21m. L'étude des travaux exécutés sur la commune de Saint-Jean-le- Vieux dans le vallon de Saint-Cyr, n’est pas de nature à faire varier ces données fondamentales sur la composition du Miocène dans la région. Ces travaux se sont bornés à l'ouverture d'une galerie horizontale dirigée, non plus vers la montagne, c'est-à-dire 663 A. BOISTEL. — COUPES DU MIOCÈNE DE LA BRESSE 16 Déc. vers l’est, mais vers le sud, de manière à entamer le mamelon 335 de la carte de l’État-major. Autant que j'ai pu l’apprécier (car je n'ai pas eu de cote exacte), elle est à peu près à la même hauteur que celle d’Ambronay, c’est-à-dire aux environs de 315 m. d'altitude. Voici la coupe que j’ai relevée, sans avoir pu constater aucune inclinaison des couches soit dans le front de taille de la façade de la galerie, dirigé est-ouest, soit dans les flanes de la tran- chée d'approche, dirigés nord-sud. N S? 19 Argileremaniée "EF MD 20 18, Argile verdâtre et marnes SÈChES A sr CEE GS 0 1, LD ONITEUS EEE 00 16, Argile lignieuse "PSG ED 15, Argile gris jaunâtre soie . 0,20 14 itligniteux PERS 070 15, Aroilemverdaire CENTRE Mo IDE lHemtieune, à 00 à 0 4 0 à One 01) AURAUS ABRIS © ot à à 0 © à 10, Marne blanchâtre. . . . 0,30 9, Argile noir-bleuûtre, fossile fère US SUP ES EN ESP 8, Marne Tchats SN SMMOT 50 DONNEES UE 200, à: : TO 6, Marne blanchâtre .. . . . 0,30 BIDON AMEL, 5: à oO RTE TOO 6 à Hit 3 PNENTEUX MCE ME PRET SD 2, Argile Pleure EN 0 50 = l TH ArSIleMOITAtrE NL ES RE Fig. 5 On trouve dans cette coupe la même alternance d'argile plus ou moins calcaire et de lignites (peu abondants d'ailleurs), que dans toutes celles qui se réfèrent à la moitié supérieure du vallon d’Ambronay. Son seul intérêt stratigraphique est donc de nous permettre d'affirmer la constance de composition de la formation néogène le long de la falaise jurassique. Au point de vue paléontologique, je n’y ai trouvé de coquilles que dans la couche d’un mètre d'argile noir-bleuâtre qui occupe le milieu de la coupe (n° 9). Ce sont seulement les petites espèces de Planorbes, de Limnées, de Bithinies et de Valvées, rencontrées au même niveau dans le vallon voisin. Je ne puis y signaler aucun exemplaire bien conservé et bien certain des Valoata sibinensis Neum. et hellenica Tourn., qui ont été recueillies à moins d’un 1901 DANS L’ANSE DU BAS-BUGEY 669 kilomètre de là, mais à un niveau plus bas, tout près des premières maisons de Saint-Jean-le-Vieux, dans le chemin de Cheminand. ke Il y a lieu, avec ces données, de revenir sur la question de l’âge de ces gisements. J'avais, dans une note précédente, indiqué comme possible, et même comme présentant une certaine proba- bilité relative, le classement du gisement d’Ambronay dans le Pliocène, à cause de la grande ressemblance à la fois pétrogra- phique et paléontologique de ses marnes supérieures avec celles de Mollon-Rivière. L'étude plus approfondie, dont les résultats vien- nent d'être résumés, m'amène à écarter tout à fait cette hypo- thèse. La dissection dont les coteaux de Saint-Jean-le-Vieux à Ambronay ont été l’objet, n’a révélé dans les dépôts néogènes aucune discontinuité ; grande uniformité d’allures ; pas de discor- dances angulaires sérieuses dans la stratification ; pas de trace de ravinement ni d'exposition à l’air entre les sédiments qui se succèdent, soit en hauteur, soit latéralement. Il serait bien témé- raire, dans ces conditions, de supposer une différence d'âge et d'époque entre quelques-uns de ces dépôts, si des arguments paléontologiques décisifs n’imposent pas cette solution. Or, parmi les raisons de cet ordre, qui déjà présentaient beaucoup de pour et de contre, la principale de celles qui pouvaient faire pencher la balance en faveur du Pliocène doit disparaître par les considéra- tions suivantes. J'avais indiqué comme récolté par moi dans le premier sondage antérieur à 1897, l'Emmericia pliocenica Sacco, signalé tout récemment alors dans les marnes de Mollon-Ravin. Mais, dans une visite que je fis aux tranchées déjà ébuulées de Confranchette en septembre 1898, je récoltai parmi les déblais des fragments d'une marne très riche en fossiles, qui contenait avec d’autres espèces bien connues !, une petite coquille entierement nouvelle pour la faune française, l’Emmericia canaliculata 1. Les échantillons sont en général très bien conservés et très frais. En voici la liste : Helix Nayliesi Mich. (débris, mais Planorbis Bigueti Font. (abondant. très frais et absolument recon- et très bien conservé). naissables). Limnæa cf. ovata Beck. Vertigo Dupuyi Mich. — cf. gingivata Goupil. Planorbis heriacensis Font. Ancylus Neumayri Font. — Philippei Loc. (trèsbeaux, Vivipara ventricosa Mich. quoique jeunes, Dimen- Bithinia leberonensis Fisch. et Tourn. sion, I cent. à). avec ses deux variétés. — umbilicatus L. ° Emmericia. canaliculata Brus. Valvata marginata Mich. G70 A. BOISTEL. — COUPES DU MIOCÈNE DE LA BRESSE 16 Déc. Brusina, notablement différente de l’'Emmericia pliocenica Sacco. Une dizaine d'exemplaires très frais et parfaitement intacts permettent de l’étudier très exactement. Or, en comparant ces exemplaires avec mon échantillon de Jurancieu, je constatai facilement une identité complète !. Il s'ensuit que les aflinités de 1. Lors de la présentation de ce travail à la séance du 16 décembre de la Société, je n'avais pas encore identifié cette coquille avec l'Emmericia cana- liculata Brus. Je m'étais fié à la description et à la figure données par M. Brusina dans ses Binnen Mollusken aus Dalmatien, etc. Agram, 1874, p.58; pl. IV, fig. 4-6; et j'avais dû constater, à côté d’une ressemblance générale, des différences très notables, qui me semblaient s'opposer absolument à ce que les deux coquiiles pussent appartenir à la même espèce. Depuis ce moment, grâce à l’obligeance inépuisable de M. Cossmann, dont je le remercie vivement, j'ai pu avoir communication de la nouvelle et superbe publication de M. Brusina, intitulée en français : Matériaux pour la Faune malacologique néogène de la Dalmatie, de la Croatie et de la Slavonie, etc., in-4°, Agram, 1897 ; et j'ai pu y étudier à la planche VII, fig. 22-24, une nouvelle figure de l'espèce, très bien dessinée au grossissement 7/1. Le doute alors m'était plus possible ; je retrouvai dans cette figure tous les caractères essentiels de la coquille de Confranchette. Le labre de celle-ci est un peu moins épaissi et le bord columellaire un peu moins évasé vers son extrémité antérieure, ce qui donne à l'ouverture une forme plus régulièrement arrondie ; mais ces difté- rences, qui ne paraissent pas tenir seulement à un âge plus avancé de la coquille, semblent pouvoir donner lieu uniquement à l'établissement d’une simple variété que je propose d'appeler idanica. Quoique M. Brusina à la page 21 de son nouveau mémoire, renvoie formellement à son ancien travail, on peut se demander s'il a bien eu sous les yeux la même coquille. S'il s’agis- sait d'auteurs différents, on serait tenté de refuser au second le droit de s’ap- proprier le nom donné par le premier. Mais, comme il s’agit du même auteur’ on ne peut accuser que le crayon de son dessinateur de 1874. L’Emmericia canaliculata (v. fig. 6) se distingue essentiellement de ses congénères par la forme de son labre qui s’évase régulièrement en déerivant (vu de dos) une gorge exacte- ment demi-cylindrique, termi- née vers le bord par un bour- relet assez mince, et, lui-même, régulièrement cylindrique. C'est très probablement cette gorge, semblable à une gouge, reliant le labre au dernier tour, qui lui a valu son nom. Mais il n’y en a pas même un Fig. 6. — Ermmmericia canaliculata Brusina. soupçon dans le dessin pas Echantillon de Confranchette grossi 7 fois. plus que dans la description de 1874. Dans cette ancienne figure, le péristome est aussi beaucoup plus épais et beaucoup plus large, presque dédoublé par un sillon médian bien accentué; le bord columellaire se détache beaucoup moins longuement dans le prolongement de la columelle ; entin la sinuosité du labre (vu de profil), au lieu de se dessiner dès son origine 1901 DANS L’ANSE DU BAS-BUGEY 671 ce gisement sont bien plutôt avec le Pontien inférieur qu'avec le Plaisancien. Les autres arguments paléontologiques en faveur du Pliocène ne paraissent pas coneluants par eux-mêmes : la détermination de l’'Helix Magnini Loc. ou tersannensis Loc. est très douteuse; quant à moi, je n'ai jamais trouvé aux différents niveaux et spécialement dans la marne sableuse bleuâtre de l’escarpement a, que l’Helix contre l’avant-dernier tour et de s’arrêter au 1/5 de la hauteur du labre, ne commence qu'à une certaine distance de lavant-dernier tour, à environ 1/5 de la hauteur du labre, pour se prolonger jusqu’à la moitié et même un peu au-delà. L'espèce est indiquée comme provenant de la riche localité de Miotié en Dalmatie; le premier mémoire mentionne aussi Sin] (Gorutita) du même pays, mais le second mémoire ne reproduit pas cette mention. Le niveau exact de la faune de Mioëié ne parait pas absolument {ixé; car, si dans sa plus ancienne publication M. Brusina semble la ranger dans le Pliocène, il dit dans la nouvelle (p. XV): « La faune Dalmate, celle de la Bosnie méridionale et de l’'Herzégovine peuvent à mon avis être aussi miocène (souligné). » La séparation paléontologique du Pontien et du Plaisancien paraît être aussi délicate dans ces pays que dans les localités des environs de Lyon. Ajoutons que la carte géologique des côtes de l'Autriche-Hongrie publiée par M. Gardo dans son mémoire sur les Liburnische Stufe (Abhandlungen der K. K. geol. Reichsanstalt, tome XIII [1889], fasc. 1), teinte en Miocène le petit lambeau néogène qu’elle indique à Mioëié. En tout cas, l'espèce appartient bien à l'horizon géologique auquel les autres documents permettent de rapporter les couches de Confranchette et d’'Ambronay. Cette espèce diffère très notablement de l’'Emmericia pliocenica Sacco (Mém. Acad. di Torino, 1886 [t. 37], pl. 1, fig. 19, sous le genre Stalioa, changé ensuite pour le g. Emmericia; Ibid., 1888, t. 37, p. 84); qui présente un sommet beaucoup plus plat et plus obtus, une spire à arêtes très nota- blement convexes, des tours également plus convexes: des varices irrégulières assez nombreuses au dernier tour ; un labre beaucoup plus épaissi; un petit tubercule très bien marqué à l'angle postérieur de l'ouverture; celle-ci est très élargie et presque carrée dans son ensemble par suite de l’évasement du labre près de son origine; enfin le bord columellaire est largement réfléchi et notablement épaissi sur le dernier tour. Il sera utile d'étudier de près les deux échantillons recueillis à Mollon en 1894, et nommés Emmericia pliocenica, pour voir s’ils appartiennent bien à cette espèce ou s’ils ne doivent pas plutôt être rapportés au canaliculata. En effet, je possède un fragment réduit au dernier tour, mais bien conservé, recueilli à Mollon dans la même excursion, dont l’ouverture et le labre ont exactement la forme qui vient d’être décrite, et dont le dernier tour ne présente aucune apparence de varices. La figure donnée par M. Depéret (B. S. G. F.,[3], XXI, pl. XXIV, fig. 10, et texte page 719) présente des carac- tères intermédiaires ; çar elle a l'ouverture et le labre de l’espèce de Confran- chette; l'angle postérieur de l’ouverture ne porte pas le tubereule caracté- ristique de l’autre espèce; mais la spire est conoïde et obtuse et le dernier tour semble présenter une faible varice longitudinale dans le prolongement en arrière du bord columellaire, 672 A. BOISTEL. — COUPES DU MIOCÈNE DE LA BRESSE 16 Déc. Nayliesi Mich. De même les quelques Unio que j'ai pu y rencon- trer me paraissent rentrer dans l’Unio atavus Partsch., comme ceux des sables tufeux à Melanopsis Depereti. Le Valoata van- ciana Loc. devra être considéré comme ayant commencé beaucoup plus tôt qu’on ne le supposait jusqu'ici. Le Bithinia leberonensis a été trouvé à tous les niveaux du Pontien, il commence même dans les marnes de Confranchette, qui appartiennent au niveau le plus inférieur de cet étage dans la région. Le Weritina Philippe Loc., que j'ai trouvé en assez grand nombre dans l’escarpement a, a déjà commencé plus bas, dans le sable tufeux à Melanopsis Depereti, dont l’âge miocène ne m'a jamais paru faire aucun doute. Enfin nous pourrons ainsi conserver toute sa valeur, comme distinctive du Pontien, au Melanopsis Aleini Kurr. qui restera confiné, comme il l’a été jusqu'ici, dans cet étage et même dans sa partie un peu inférieure. On y ajoutera comme caractéristique le Melanopsis Depereti d’Ambronay et les Valvata hellenica Tourn. var. cabeolinsis Font. et sibinensis Neum. var. Sayni Font., du gisement le plus rapproché de Saïint-Jean-le-Vieux, au voisinage immédiat des deux dents de Dinotherium giganteum. 3% Il ne sera pas inutile de résumer dans une coupe générale toutes les données actuellement acquises sur la bordure miocène des terrains jurassiques du Bas-Bugey. Cette coupe sera dirigée sensiblement nord-sud comme cette bordure elle-même, mais avec une légère inflexion vers le nord-est, au nord du village de Douvres, et vers le sud-est, au sud de ce point. Mais, pour en justifier l'allure générale, il faut d'abord consi- gner ici une observation qui n’a pas encore été signalée. Dans une excursion que M. Depéret a eu l’amabilité de faire avec moi pour discuter sur place les divers problèmes soulevés par la géologie de la région, nous avons trouvé dans le vallon de l'Ecotay, près Jujurieu, un coude brusque du ruisseau qui nous a fourni une coupe nord-sud des sables tortoniens dans lesquels est creusé ce vallon. Or, tandis que la coupe est-ouest, qui m'avait donné de nombreux fossiles !, ne révélait aucune inclinaison des couches, la 1. Lors de cette visite, le torrent avait enlevé la plus grande partie de la couche fossilifère qui, paraît-il, ne se prolongeait pas beaucoup en profon- deur sous le coteau. Dans les parties alors à découvert, M. Depéret n'a fait observer que les galets de quartzite étaient peu nombreux, et qu'il y avait beaucoup de galets de divers calcaires très durs, faciles à confondre avec les quartzites, car ils prennent comme eux des teintes empruntées au sable encaissant, notamment les teintes ferrugineuses. Il devenait dès lors douteux que les très nombreux quartzites qu’on observe à diverses hauteurs sur le 1901 DANS L'ANSE DU BAS-BUGEY 673 nouvelle coupe, moins fossilifère, montrait un pendage de 30° environ vers le sud. Dans le chemin qui descend du bois de Charmontay vers le hameau de La Route on constate une incli- naison semblable ; de la sorte, les couches visibles en ce point doivent passer sous celles que l’on observe au fond du vallon voisin de l’Ecotay et sous celles du versant sud de ce vallon. Comme les coteaux qui encadrent ce vallon ont environ 80 m. de hauteur, on peut évaluer à près de 200 m. la puissance de l'étage tortonien dans sa partie visible en cet endroit. A l’appui de ces observations, il convient de noter, tout en haut de cette formation et adossé directement à la falaise jurassique, sur l’ancien chemin .du hameau de Cuquen au hameau de Brègne, la présence d’un grès calcaire bleuâtre, qui, suivant un renseignement donné par un habitant éclairé du pays, se retrouve dans tous les sondages qu'on fait sous la plaine entre Jujurieu et Saint-Jean-le-Vieux. Ce grès passe ainsi vers le sud, sur 1 kilomètre environ de distance horizontale, de l'altitude de 340 m. au-dessous de la cote 250. flane sud du bois de Charmontay (v. B. S. G. F.,[3], XXVL, p. 11 et 20) appar- tiennent réellement au Tortonien. De plus, en les visitant de près, M. Depéret a été frappé de ce que le sable qui les accompagne, quoique très analogue au sable tortonien sous-jacent, ne présentait pas les traces de stratification qu’on trouve dans celui-ci. Il aurait donc au moins subi un remaniement au moment du dépôt de ces quartzites. Je suis heureux de mw’incliner ici devant la justesse de ces observations et devant l’autorité du savant maître, dont j'ai cru pouvoir combattre certaines solutions, précisément en ce qui concerne les cailloutis en question. Ils ne sont pas tortoniens; mais viennent-ils de glaciers pliocènes? C’est ce que je me suis permis de contester, et ce que je me réserve de discuter encore dans une prochaine communication. Sur un autre point encore, je me plais à reconnaître spontanément, après une nouvelle étude de la localité, la préférence qu'il y a lieu d'accorder à une interprétation présentée dans leur bel ouvrage sur «La Bresse » par MM. Delafond et Depéret. Il s’agit de la coupe du coteau de Varambon. La figure donnée par eux et reproduite par moi au B. S. G. F., (3), XXVL, p. 16, me semble maintenant plus conforme à la vérité des faits que celle que je proposais, 1bid., p. 18. Ce qui m'a paru trancher la question en ce sens, c’est la visite d’un petit ravin, très étroit, caché par les buissons et que de la route on prendrait pour une simple haie; il est à peu près à égale distance ; 5 ArT. 60. — Quelle que soit la: longueur des notes où mémoires insérés au Bulletin, les auteurs pourront en faire faire à leurs frais un tirage à par ART. 793. — Chaque membre vues 1° un droit d'entrée ; 2° une 2 cotisation annuelle ?. À : s Le droit d’entrée est fixé à la somme de 20 francs. Ce droit pourra être augmenté par la suite, mais seulement pour les _ membres à élire à La cotisation annuelle est invariablement fixée à 30 francs. RER Fe La cotisation annuelle peut, au choix de chaque. membre, être remplacée par le versement en capital d'ane somme fixée par la Société en assemblée: générale ÿ AU à moins de Leu spéciale du Conseil, devra être 1e Eee 1. Les personnes qui D ou faire partie de là Société et qui connaïtraient aucun membre qui pût les présenter, n ‘auront qu'à adresser - une demande au Président, en exposant les titres que justifient \ de leur admission. £ Fe >. Le Conseil de la Société, afin de faciliter le recrutement de nes membres, autorise, dorénavant, sur la demande des parrains, les personnes ui désirent faire partie de la Société à n'ac quilter, la première année, que eur droit d'entrée en versant la somme de 20 fr. Le compte-rendu Sommaire des séances de l’année courante leur sera envoyé gratuitement ; mais ils ne. recevront le Bulletin que ‘la deuxième année et dévront alors payer la coti sation de 30 francs Ils jouiront aussi Le autres droits «e pee des po de la Société. se D CARD . Cette somme est actuellement de 400 Trénes. ë < é SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE RÉUNION EXTRAORDINAIRE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE A LAUSANNE ET DANS IE CELABI AIS du Mardi 3 Septembre au Mercredi 11 Septembre 1907 Les membres de la Société qui ont assisté à la Réunion extra- ordinaire sont : MM. A. Biocxe. à MM. A. de LAPPARENT. G. BroUET. Maurice LuGEoN. _Jean BRUNHES. Jean MIQUEL. L. CAREz. L. PERVINQUIÈRE. H. DouviLLé. E. RENEvVIER. H. Douxami. J. RéÉvir. E. FicHeur. F. ReyMmonp. E. Hauc. A. de Rraz. Armand JANET. Etienne RiTrer. E. JoRISSEN. H. SAGE. W.. KizrAN. Carl Scamipr. R. LANGLASSÉ. G. STEINMANN. Les personnes étrangères à la Société ayant pris part aux excur- sions sont : M. P. BERTHON. MM. KeïpEL. Mae BiocHE. MouLsi. MM. R. DouviLré. PREISWERK. F. JaAccarp. L. ROLLIER. Paul JAccARD. STEINMANN (fils). JACOB. STUART-MENTEATH. Assistaient en outre à l’excursion du 3 septembre, les membres de la Société vaudoise des Sciences naturelles dont les noms suivent : MM. AmAnn, Brezxr, DELESSERT, de RAYDMAINE, GuiNAnD, LApor, Murisier, PELET, Por- CHET, SCHENCK. 8 Mai 1902. — T. 1°". Bull. Soc. Géol. Fr. — 4, PROGRAMME DES EXCURSIONS proposé par M. M. LUGEON Lundi 2 Septembre. — Rendez-vous préliminaire à l'hôtel Beau- Site, place Monibenon, à Lausanne, pour les membres qui arriveront dans la journée. Les chambres seront retenues à l’avance. Déjeuner et dîner à l’hôtel. Visite des musées et promenade dans les environs si le désir en est exprimé. Mardi 3 Septembre. — Rendez-vous définitif au Musée de Géologie (4, place de la Cathédrale), à 10 heures. [Le train de Paris arrive à 8 h. 4o (heure suisse)]. Visite des collections. — Séance d'ouverture, constitution du Bureau. Æxposé général des courses par M. Lugeon. À 12 h. 30, lunch à l'hôtel Beau-Site. Après-midi. — Ztude du Tertiaire du vallon de la Paudèze. — Départ à 2 heures : vallon de la Paudèze ; Rochette ; Pont de Belmont ; Les Daillettes. Retour à Lausanne par le tramway. A 7 heures, dîner à l'hôtel Beau-Site. Mercredi 4 Septembre. — Tour du Haut-Lac ; environs du Bou- veret, Saint-Gingolph et Meillerie, vallée du Rhône jusqu’à Monthey. Départ d’'Ouchy à 6 h. 35 par le bateau longeant la côte suisse. — On voit successivement du bateau: Terrasses lacusires des environs de Pully et de Lutry ; Lutry-Cully, crêtes monoclinales de la Molasse, glissement d’'Epesse ; couches de poudingue aquitanien de Lavaux; synclinal molassique du Pèlerin ; delta de la Veveyse ; molasse rouge mamelonnée par le glacier du Rhône entre Vevey et Clarens ; Préalpes de Montreux, dont la géologie compliquée sera expliquée du bateau ; la plaine du Rhône ; le Bataillère (chute sous-lacustre du Rhône dans le _ Léman), Bouveret, Saint-Gingolph. — Arrivée à Meillérie, à 9 h. 10. — Excursion à l’ouest de Meillerie. — Meillerie à Saint-Gingolph par Locum. Déjeuner à Saint-Gingolph vers 1 heure. De Saint-Gingolph au Bouveret par le Fenalet. — Du Bouveret à Monthey en voiture : Préalpes médianes (voir Lugeon : La région de la Brèche du Chablais, pp. 264-267). Le Grammont ; les Evouettes ; la Porte du Sex ; Vouvry ; Vionnaz. Arrivée à Monthey vers 8 heures, dîner et coucher à Monthey. Jeudi 5 Septembre. — Le matin, promenade dans les environs de Monthey. — Etude du Sos rene des Préalpes médianes (voir Lugeon : La région de la Brèche du Chablais, p} 235). Déjeuner à Monthey. Après-midi. — De Monthey à Champéry en voiture. — Le Val d’Illiez. Dîner à Champéry (alt. : 1070 m.). — Séance le soir à 8 heures et demie. — Coucher à Champéry (Hôtel de la Dent-du-Midi). — PROGRAMME DES EXCURSIONS 679 Vendredi 6 Septembre. — Départ matinal à pied de Champéry pour la Croix de Culet, Pointe de l’'Haut, Morgins. — Effets expédiés directement à Morgins. Porteurs pour les provisions. Cette journée est consacrée à l'étude d’une région disloquée à l’exirême (Pour le détail, voir Lugeon : La région de la Brèche, pp. 147, 163, 198-183, 208 219, 227, 233-235, 244-247). De Champéry à Culet (1966 m.); montée à la Porte du Soleil (GIE mn-)s La Tovassière (2015 m.) ; La Chaux (1904 m.). Dîner et coucher à Morgins (alt. 1314 m.). Samedi 7 Septembre. — Ænvirons de Morg'ins ; départ à pied par le massif de Tréveneusaz sur Vouvry. — Effets expédiés directement à Vouvry. Porteurs pour les provisions. Journée consacrée à l’étude du contact du massif de la Brèche et des Préalpes médianes du massif de Tréveneusaz (voir Lugeon : La région de la Brèche, pp. 142-145, 156-163, 182-184, 188-193). Col de Morgins (1375 m.) ; Portes de Morgins (1794 m.) ; Mont Cor- beau (1995 m.) ; Bellevue (2030 m.) (Tréveneusaz) ; Draversaz. Départ par le chemin de fer à 5 h. 25 (heure suisse), arrivée à Thonon à 5 h. 47 (heure française). Diner à Thonon (Hôtel de l'Europe), à 6 heures. — Séance le soir à 8 heures et demie. — Coucher à Thonon. Dimanche 8 Septembre. — Départ en voiture à 8 heures pour le Biot et Saint-Jean d’Aulph avec arrêts nombreux. — Ætude des Préalpes médianes et de leur contact avec le Massif de la Brèche. Environs de Thonon. Gorges de la Drance ; aiguille de Feterne ; l'Armône; Pont de l'Eglise ; Reyvroz; Bioge ; la Vernaz ; la Forclaz; le Jouy; visite au Pont-du-Diable, perte de la Drance. Déjeuner au Jotiy, vers midi. Nicodez; Pont de Dimery; Pont de Convaloup; Seÿtroux ; gorges d'Ombre. Dîner et coucher à Saint-Jean d’Aulph. Lundi 9 Septembre. — Départ de Saint-Jean à 5 h. du matin, à pied, pour Brion, le col de Lens, le lac de Montriond, Morzine. — Effets expédiés directement à Morzine. Porteurs pour les provisions. Etude du pli frontal du Massif de la Brèche (voir Lugeon : La région de la Brèche, pp. 152-154, 200-207). — Dîner à Morzine. Séance le soir à 8 heures et demie. — Coucher à Morzine (Hôtel Muffa). Mardi 10 Septembre. — Départ à pied pour Taninge par la Mouille- Ronde et la Rosière. — Effets expédiés directement à Taninge. Porteurs pour les provisions. Etude des Klippes cristallines des Géts (voir Lugeon : La région de la Brèche, pp. 29-40, 247-251). Les Atraix ; la Mouille-Ronde; le Tourne, serpentine ; traversée dans le Flysch jusqu'aux Bonnes ; Klippe basique dans le Flysch; à la Rosière, pointement important de granite et roches basiques ; descente raide sur Taninge au travers des terrains 680 PROGRAMME DES EXCURSIONS ci-après, en superposition normale : Brèche supérieure, Schistes ardoi- siers, Brèche inférieure, Schistes liasiques, calcaire dolomitique du Trias, Houiller. Diner à Taninge. — Coucher à Taninge (Hôtel des Balances). Mercredi 11 Septembre. — Promenades dans les environs de Taninge. — Ravin du Foron. | Déjeuner à Taninge à midi. — Séance de clôture à une heure et demie, Retour facultatif sur Genève par le tramway de la vallée du Giffre jusqu’à Annemasse. DOCUMENTS A CONSULTER La région à parcourir a été presque entièrement décrite dans l’ou- vrage : La région de la Brèche du Chablais, par Maurice Lugeon (Bull. Services Carte géol. de France, N° 49. Paris, Béranger, 15, rue des Saints-Pères, 17 fr. 25). — Une liste bibliographique complète (jusqu’en 189) se trouve dans cet ouvrage auquel nous renvoyons le lecteur Une description générale du territoire des Préalpes y est donnée. Bibliographie depuis 1895 1897. — E. Hauc, Le Problème des Préalpes (Revue générale des Sciences, 15 septembre 1897). 1898. — H. Scuarpr, Les régions exotiques du versant nord des Alpes suisses (Bull. Soc. vaud. Sc. nat., vol. XXXIV, Bull. 128). 1899. — E. Hauc, Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses (Bull. Soc. vaud. Sc. nat., vol. XXXV, Bull. 132). 1900. — H. ScxArpr, Encore les régions exotiques (Bull. Soc. vaud. Sc. nat., vol. XXX VI, Bull. 156). 1901. — M. LuGEoN, Sur la découverte d’une racine des Préalpes suisses (C. R. Ac. des Sc., 7 janvier 1901). 1901. — M. Luceon et G. RoEssINGER, Géologie de la Haute vallée de Lauenen (Arch. Sc. phys. et nat., 4° sér., t. XD). Cartes 1. Carte géologique de France au 1/80.000. Feuille 150, Thonon ; Feuille 160 bis, Annecy (Paris, Béranger, 15, rue des Saints-Pères, 6 fr. la feuille, non entoilée). 2. Carte géologique du Val d’Illiez au 1/50.000, par Maurice Lugeon (Pi. VIII, Bull. Carte géol. de Fr. N° 49). 3. Carte géologique suisse au1/100.000, feuille XVI, 2e édition, feuille XVII (xo francs la feuille, non entoilée). 4. Carte topographique suisse (Atlas Siegfried) 1/25.000, feuilles 466 (Bouveret) ; 474 (Vouvry); 474 bis (Pas de Morgins); 476 (Bex) ; 483 (Saint-Maurice) (1 franc la feuille, non entoilée). Séance d'ouverture, Mardi 3 Septembre 1901 PRÉSIDENCE DE M LÉON CAREZ, Puis de M. MAURICE LUGEON, Président de la Réunion. La Société se réunit à 10 heures, au Musée de Géologie de Lausanne. M. Léon Carez, Président de la Société, prononce l’allocution suivante : « Messieurs et chers confrères. — En déclarant ouverte la Réu- nion extraordinaire de 19071, je vous rappelle qu'aux termes du règlement de notre Société, un bureau spécial doit être nommé pour la durée de la session. Mon rôle en tant que Président annuel se borne donc à présider à l'élection. « Je tiens pourtant auparavant à exprimer à M. Lugeon toute la gratitude que nous lui devons pour avoir accepté la charge de diriger nos courses de cette année. « Nos Réunions extraordinaires, dont la tradition ininterrompue remonte à plus de soixante ans, ont toujours largement contribué aux progrès de la géologie et à l'établissement de sentiments plus intimes de bonne confraternité entre les géologues, mais celle qui commence aujourd'hui aura certainement une importance excep- tionnelle. Grâce aux travaux d’un certain nombre de géologues, nous allons en effet pouvoir étudier non pas seulement des faits d'intérêt purement régional, mais des phénomènes tectoniques grandioses, dont la possibilité même est encore discutée, et qui, s'ils sont démontrés, ne sont certainement pas limités à la région du Chablais. « L’honneur d'avoir trouvé une solution aux problèmes si difli- ciles du pays que nous allons parcourir, revient en grande partie aux géologues suisses ; aussi avons-nous choisi la ville de Lau- sanne pour y tenir notre première séance. C'est pour cette même raison que je vous demande de rendre un hommage bien mérité au géologue éminent qui a consacré sa vie à l'étude du pays que nous allons visiter et des régions voisines, et que nous avons le plaisir de voir aujourd'hui parmi nous : je vous propose de nommer M. le Professeur Renevier, président d'honneur de la Réunion extraordinaire de la Société géologique de France en 1901. » LS 682 SÉANCE D'OUVERTURE, MARDI 3 SEPTEMBRE 1901 On procède ensuite à la constitution du Bureau : M. E. RENEVIER est élu président d'honneur, M. Maurice LucEox est élu président; il est assisté de MM. E. Rirrer, vice-président ; R. LANGLASSÉ, trésorier ; H. Douxami, secrétaire. M. E. Renevier remercie la Société géologique de France du grand honneur qu’elle lui fait et regrette que son état de santé ne D permette pas de l'accompagner sur le terrain ; mais il est parti- culièrement heureux de voir son élève, actuellement son jeune collègue à l'Université de Lausanne, M. M. Lugeon, la guider. I1 salue cordialement la Société géologique de France au nom de la Société géologique suisse dont il est le Président et lui souhaite en terminant une bonne et belle excursion tant sur le ter- ritoire suisse que dans le Chablais. M. Carez répond : « Je remercie M. le Professeur Renevier de ses bons souhaits et je le prie d'être notre interprète auprès des membres de la Société géologique suisse. «Avant d'inviter M. Lugeon à prendre place au fauteuil, j'ai le regret de vous annoncer la perte d’un de nos confrères, dont la nouvelle est parvenue à notre connaissance depuis notre dernière réunion : le comte DE Limur, l’un des plus anciens membres de notre Société, qui s’occupait rs de minéralogie, est décédé récemment à Vannes. « Enfin, j'ai l'honneur de vous présenter, au nom du bureau du Congrès géologique international de 1900, les volumes du Compte- rendu de ce Congrès. Grâce à l’activité et au dévouement de M. Barrois, secrétaire général, et des autres secrétaires du Congrès, les Comptes-rendus ont été publiés avec une rapidité à laquelle les sessions précédentes ne nous avaient pas habitués; ils ont paru dix mois seulement après la clôture du Congrès. «Ces volumes ne le cèdent pourtant pas en importance à leurs devanciers par le nombre et l’intérêt des communications qui y sont insérées et qui traitent de la géologie des pays les plus divers. J’attirerai particulièrement l'attention sur le Lexique pétrogra- phique qui n’occupe pas moins de trois cents pages de texte et qui a été adopté par la Commission internationale de pétrographie ». Par suite de la présentation faite dans la séance du 17 juin 1901, le Président proclame membre de la Société géologique de France : M. Edward Jorissen, présenté par MM. E. Haug et L. Gentil. SÉANCE D'OUVERTURE, MARDI 3 SEPTEMBRE IQOI 683 M. Carez dépose sur le bureau une note de M. A. Guébhard accompagnée de la première épreuve définitive de sa Carte géolo- gique au 1/80.000 du $. O. des Alpes-Maritimes !. M. Lugeon prend place au Bureau : M. Maurice Lugeon remercie vivement la Société de l’honneur qu’elle lui fait en l’appelant à la présidence et en le chargeant de diriger la Réunion extraordinaire. Comme l’a très bien dit M. Carez, le problème du Chablais n’est pas un de ceux dont l'importance est purement locale, il s’agit ici d’une théorie dont l'édification peut avoir une portée considérable dans les synthèses. Dans un rapide exposé M. Lugeon indique les raisons princi- pales qui obligent à chercher, dans de grands recouvrements, l'origine de cette région alpine. Il cite l’anecdote suivante, pour montrer quelles ont été les difficultés à vaincre. Un jour, dans le vallon du Foron, à Taninge, M. Marcel Bertrand et lui trouvèrent des calcaires sous le Carbonifère, au pied d’un énorme massif dont le centre étudié par M. Michel-Lévy présentait des lambeaux de roches cristallines. C’étaient là peut-être des calcaires houillers mais l’étude microscopique montra qu'il s’agissait de roches créta- ciques ! Depuis lors, les levés détaillés de la géologie du Chablais apportèrent surprises sur surprises ; ce fut entre autres la découverte inattendue de la disparition des Hautes-Alpes sous les Préalpes ; puis la conception provisoire du pli à déversement périphérique, remplacée plus tard par l'hypothèse des grandes nappes de char- riage. Aujourd’hui la manière de comprendre les faits évolue encore, non dans le sens de l’origine par transport de tout le Chablais, qui aux yeux de M. M. Lugeon ne peut plus être suspectée, mais dans le sens du procédé mécanique employé par la nature pour opérer de pareils déplacements de l’écorce terrestre. Des faits nouveaux éclairent de plus en plus cette question; par exemple la découverte de la racine d’une partie de la zone interne, puis le laminage extraordinaire de cette même zone, démontrés par M. Roessinger, l’un des élèves de M. Lugeon, enfin la nouvelle interprétation de la formation des Klippes du val d’Illiez et du massif de Tréveneusaz. M. Lugeon montre que le problème du Chablais est, au fond, le même que celui qu'offrent les Alpes de Glaris. 1. Cette note a été insérée au compte-rendu de la séance du {4 novembre 1901 ROIS GC. (LL p: 4). 68/4 L. ROLLIER. — SUR L'AGE DU CONGLOMÉRAT SUBALPIN La conférence de M. Lugeon, complétée à la suite de nouvelles recherches !, fait l’objet du mémoire inséré plus loin p. 723. En terminant, M. Maurice Lugeon convie ses confrères de la Société à la vérification de son hypothèse, affirmant qu’il n’hésitera pas à modifier sa théorie du charriage, s’il est démontré que les faits sur lesquels il s'appuie peuvent être logiquèment interprétés d’une autre façon. Le soir, à l'issue du dîner, dont le vin était offert par la Société vaudoise des Sciences naturelles, M. le Professeur Paul JAccarD souhaite la bienvenue à la Société géologique de France au nom des savants vaudois. SUR L’AGE DU CONGLOMÉRAT SUBALPIN OÙ NAGELFLUH DE LA SUISSE ? par M. L. ROLLIER Sur la Carte géologique de la Suisse au 1/100.000 et dans les ouvrages qui s’y rapportent, on peut voir que le Conglomérat sub- alpin, calcaire ou polygénique, est marqué mi, mm et ms, c’est-à- dire qu’il est rapporté à la &« Molasse d’eau douce inférieure, à la Molasse marine et à la Molasse d’eau douce supérieure. » La première comprenant des molasses à bancs calcaires, des marnes rouges, etc., est rapportée généralement à l'étage aquitanien (cal- caires de la Beauce à Helix Ramondi), avec lequel il convient de terminer l’Oligocène (« Aeltere Molasse » de v. Gümbel). Des coupes relevéespar moi sur larive droite du lac de Constance, dans le Bregenzerwald, les cantons de Saint-Gall et d’Appenzell (voir aussi les matériaux publiés dans Beiträge zur geolog. Karte der Schweiz, Lief. 14, I.) montrent que les poudingues calcaires ou polygéniques commencent seulement au-dessus de l’Aquitanien. En particulier le conglomérat du Gäàbris, comme du reste celui du Speer, du Rossberg, du Righi, etc., ne sont pas autre chose que 1. Ces nouvelles recherches ont été communiquées à la Société, par M. Lugeon, à la séance du 17 fevrier 1902. 2. M. Rollier n'étant pas membre de la Société, l'insertion de cette note a été décidée par le Conseil, OU CNAGELFLUH }) DE LA SUISSE 685 le prolongement du Nagelfluh et de la molasse marine de Saint-Gall (Helvétien), qui contient des intercalations de grès coquillier (Muschelsandstein, Seelaffe) appartenant au faciès subjurassien. La molasse dite granitique de Sainte-Marguerite (S. Margare- then), avec le grès coquillier (Seelaffe) de Rorschach et de Rheineck, constituent un faciès à peu près sans poudingue du même étage, qui se continue vers l’est dans le soubassement du Pfänder et dans l’anticlinal du Bregenzerwald, où ils sont également sans galets. Par contre les grands rochers du Pfänder (palier de Fluh et de la Gebhardskirche), qui débutent par des bancs farcis d’'Ostrea giengensis avec les charbons du Wirtachtobel, les bancs marins fossilifères de Hirschberg et les marnes rouges intercalées dans les conglomérats du sommet de la montagne sont de la molasse supérieure à l'Helvétien. Ce Nagelfluh du Pfänder si nettement délimité envoie quel- ques bancs du même conglomérat dans la molasse thurgovienne au nord de Saint-Gall (Sitterbrücke, bancs rouges). ' On le retrouve dans un synclinal chevauché par le Flysch au Schwarzenberg (Chapelle de Kehl à Haselstauden), surmontant des grès à molettes (Schleifsteine, Wetzsteine), exploités dans toute cette région, et alternant avec des plaquettes à Cardium commune, comme dans la molasse de Saint-Gall et dans le Muschelsandstein du Jura. Le Nagelfluh subalpin est ainsi limité par une grande ligne de cassure ou de chevauchement au pied des Préalpes suisses, puis- qu'il est miocène, et que la molasse oligocène est éliminée ou pincée sur une grande partie de cette ligne. Séance du Jeudi 5 Septembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. M. LUGEON, PRÉSIDENT La séance a lieu sous la véranda de l'Hôtel de la Dent-du-Midi, à Champéry. M. Douxami, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. M. Maurice Lugeon rend compte des excursions des 3, 4 et 5 septembre. Excursion du 3 Septembre, Le tramway conduit la Société au pont de la Peraudettaz, à l’est de Lausanne. En ce point la Vuachère, l’un des nombreux ruisseaux tributaires du Léman, fait un coude brusque; sa direction N.S. devient E. O. Les cours des autres ruisseaux des environs immé- diats de la ville, le Flon et la Mèbre, subissent un changement de direction analogue. Cet accident est dû à la rencontre des moraines latérales du glacier du Rhône, qui s'étendent transversalement à la direction générale de la ligne de plus grande pente du pays molassique. | La Société longe ensuite les pentes de la Molasse, couvertes de dépôts morainiques peu épais, et atteint un site qui domine le vallon de la Paudèze. Elle aperçoit les couches de molasse à lignite (Aquitanien) plongeant vers les Alpes. C’est là que depuis longtemps on exploite les lits de houille célèbres par la flore et la faune que la Société a pu examiner au musée de Lausanne. Le ravin est monoclinal ; les couches du versant droit plongeant vers le thalweg sont affouil- lées à leur base. Cet affouillement a donné lieu, notamment le 3 octobre 1888, à des glissements assez importants. La Société constate que les traces. du dernier glissement sont encore très visibles malgré les cultures qui couvrent le terrain. De longitu- dinale la vallée devient transversale à Rochette, où se voit une belle coupe de l’Aquitanien : alternance de grès et de marnes avec quelques bancs de calcaires fétides remplis de Limnées_et de Planorbes. Le banc supérieur de l’escarpement fournit en abon- dance Helix Ramondi. Sous ces banes à lignite apparaît en concor- EXCURSION DU 3 SEPTEMBRE 687 dance une molasse rougeâtre, que Maillard avait considérée comme représentant la molasse rouge de Vevey. T'out l’ensemble, incliné vers les Alpes, repose sur la rive droite, par l'intermédiaire d’une faille, sur des couches de molasse à Néri- tines. Sur cette rive droite, la concordance paraît complète. M. Lugeon fait remarquer que Maillard considérait cette molasse à Néritines (renfermant à sa partie inférieure des veines de gypse fibreux que la Société a pu examiner en amont du Pont de Bel- mont), comme supérieure à la molasse rougeâtre. Au lieu de voir là un bassin effondré, M. Lugeon considère la superposition de la molasse rougeûtre à la molasse à Néritines, comme une superpo- sition anormale par chevauchement. La Société constate la présence de Néritines. Une discussion s'engage sur l’âge relatif de ces molasses. M. Rollier considère la molasse rougeâtre comme supérieure à la molasse à Néri- tines; elle ne représenterait pas la molasse rouge de Vevey, mais un horizon plus élevé, tout à fait indépendant. Cette attribution paraissant préférable à celle de M. Lugeon, celui-ci s y rallie sans difficulté. Il est en effet incontestable que cette molasse rougeûtre bariolée diffère de la molasse rouge de Vevey. Cette manière de voir simplifie du reste la tectonique de ces molasses (fig: 1). N.0. ANT S.E. Bovereaz { pe Pont de Belmont 67217 \ RS 525% Belmont SIS La Chan Alt.300o!" Fig. 1. — Coupe du contact de la région molassique horizontale avec la région de la molasse plissée. À gauche, territoires plans de la molasse horizontale ; à droite, molasse plongeant contre les Alpes — Echelle : 1/29.000. 1, Molasse burdigalienne ; 2, Molasse à lignite (Aquitanien) avec deux banes de lignite ; 3, Molasse rougeûtre (bariolée) ; 4, Molasse à Néritines (Aqui tanien) ; EF, F, Plan de chevauchement. Plus haut, la Société retrouve des bancs de molasse que M. Lugeon considère comme la continuation des couches à Néri- tines. Une trouvaille récente de M. Roessinger prouve qu'il s’agit indubitablement de couches aquitaniennes. IL a recueilli, sur la route entre le Rosiaz et le pont de fer de la Chandelard, des fragments de côtes d'Anthracotherium, dans des couches reposant 688 EXCURSION DU 4 SEPTEMBRE nettement sur la molasse burdigalienne fossilifère ; il y a là une superposition anormale incontestable : un chevauchement des molasses inférieures sur des couches plus récentes. La Société examine le vallon si typique de la Chandelard et se rend ensuite sur les Daillettes, d’où elle peut voir la remarquable coupure, par le vallon, de ce que les auteurs suisses ont appelé l'axe anticlinal de la Molasse suisse. À gauche, au nord-ouest, on voit les couches qui plongent faiblement du côté du Jura, puis décrivent vers la droite de grands ares de cercles superposés. M. Lugeon explique que cette différence d’allure des molasses, plissées et horizontales, introduit dans le paysage des deux régions molassiques de la Suisse des différences considérables. Sur la molasse horizontale règnent les paysages ouverts, les grandes plaines coupées par des cañons aux escarpements verticaux, sépa- rés par les terrasses inclinées des bancs tendres. La topographie de la molasse inclinée offre par contre le caractère alpin avec ses vallons aux formes arrondies. Après avoir contemplé ce dernier pli de la poussée alpine, la Société rentre à Lausanne. Excursion du 4 Septembre. En quittant Ouchy la Société longe en bateau à vapeur le rivage suisse du Léman. M. Lugeon explique la géologie de la côte ; malgré l’inclémence du temps, la Société peut constater les faits qui lui sont signalés. La Société débarque à Meillerie. Elle se dirige vers l’ouest pour étudier l’une des coupes sur lesquelles A. Favre s’est appuyé dans la détermination des terrains liasique et triasique du Chablais. On longe d’abord les escarpements verticaux du Lias moyen. L'épais- seur si considérable de ces calcaires siliceux laisse penser à quel- ques-uns des géologues présents que des plis monoclinaux existent peut-être dans cet ensemble. M. Lugeon fait remarquer que l’on coupe les couches obliquement à leur direction, ce qui leur donne une épaisseur exagérée. Toutefois certaines couches plus tendres représentent peut-être un pli pincé du Lias supérieur. Dans la carrière du Maupas les membres de la Société consta- tent la présence du Trias supérieur, formé par des couches de calcaire dolomitique alternant avec des marnes verdâtres. Les cou- ches rhétiennes attirent particulièrement l'attention. T'erebratula gregaria est récoltée en abondance avec quelques autres fossiles. Les couches hettangiennes sont malheureusement épuisées. On constate cependant la présence de Pecten valoniensis. EXCURSION DU 4 SEPTEMBRE 689 La Société revient vers le village de Meillerie qu'elle traverse et longe les grands éboulis des carrières à moellons du Lias moyen. Ce terme prend ici la place que devrait oceuper le Dogger. En effet, sous ces couches liasiques incontestables, on trouve le Toar- cien fossilifère s'appuyant sur le Lias moyen que la Société a étudié en allant au Maupas. Vers l'est ce même Lias supérieur repose sur le Lias moyen, et c'est ainsi au cœur du synclinal, en discordance mécanique sur le Lias supérieur vertical, que se déve- loppe le grand escarpement de Lias moyen exploité. Cette étrange disposition ne peut s'expliquer que par un pli couché ramenant le Lias moyen sur le Lias supérieur, phénomène accompagné d'un glissement sur la surface de ce dernier terrain. Une série d’'Ammonites a été récoltée dans ce Lias supérieur ; les espèces suivantes ont été reconnues : Harpoceras fallaciosum Bayle, Lr-toceras fimbriatum Sow. A Locum, la Société étudie les couches de calcaire à Entroques du Lias moyen. Quelques Ammonites et Bélemnites sont récoltées. Au centre de la carrière, un affleurement de Rhétien fournit un grand nombre de fossiles, en particulier de très belles plaquettes à Avicula contorta. Quelque cent mètres plus loin, la Société constate à nouveau la présence du Trias supérieur. De Locum à Saint-Gingolph, on remarque les grands éboulis du pied du Pic de Blanchard, où l'on exploite des calcaires du Malm pour la fabrication de la chaux. Les calcaires en place des environs sont, en effet, trop chargés de silice pour cet usage. E. _Colla chenaz 0. . Le: 6007 CARE Bouveret Se TD RE ; ous Ce OS DE SAS à -. Eboulis ss. | St Gingolph == == Ca SE ce Ie en 1 roug° Fig. 2. — Position des afileurements entre Bouveret et Saint-Gingolph. Hauteurs très exagérées. A la sortie de Saint-Gingolph, au Fenalet, au pied des grands escarpements des Préalpes médianes, la Société constate la présence de la molasse rouge. Plus loin, au dessus d’une carrière, la super- position des Cargneules sur le Flysch est nettement constatable. Le rapport entre la molasse et le Flysch, sous la forme de grès, n’est pas clairement établi. 690 EXCURSION DU 4 SEPTEMBRE Toutefois, lorsque l’on observe la côte, à une certaine distance, en bateau, connaissant la position exacte des affleurements, on peut reconstruire avec assez de sûreté la position réciproque des couches. La molasse du Fenalet s'enfonce au sud-est au pied d’une pente assez prononcée, à l'extrémité de laquelle se trouve la carrière de Flysch. Cette disposition ne peut s'expliquer que par une dispa- rition de la molasse sous ce Flysch. Ce dernier terrain serait localement étiré au Fenalet, où l’on rencontre les cargneules dans le voisinage immédiat de la molasse. Ainsi que le montre le croquis (fig. 2), il y aurait un synclinal très évasé entre Saint- Gingolph et le Bouveret. MM. Douvillé, Douxami et Lugeon sont d'accord pour voir dans les grès du Fenalet une forme du Flysch supérieur. La molasse rouge est étudiée près du Bouveret où elle est coupée par la route et exploitée en carrière. M. Lugeon explique que cette molasse rouge est située à environ 10 kilomètres à l’intérieur des Préalpes, car en avant du Bouveret plusieurs plis des Préalpes médianes sont absents ainsi que toute la zone bordière !. M. Douvillé fait remarquer que les couches rouges schisteuses alternent au Fenalet avec des bancs de grès verdâtre, qui pour lui se rattachent nettement au Flysch. Il faudrait donc considérer la molasse rouge de Saint-Gingolph simplement comme la partie supérieure du Flysch. Cette formation serait ainsi toute différente des couclies des environs de Lausanne vues par la Société dans la course du 3 septembre dans le vallon de la Paudèze, course dans laquelle cette opinion avait déjà été émise par M. Rollier. Au Fenalet, il n'y a pas de trace de la moindre discordance entre le Flysch et la Molasse rouge. MM. Douvillé et Douxami sont d'avis, pour éviter toute confusion et bien marquer la place qu'occupe réellement la for- mation connue sous le nom de Molasse rouge du val d'Illiez, de se servir plutôt du terme de Flysch rouge ou Flysch bariolé, qui a déjà été proposé par quelques auteurs. Du Bouveret à Monthey l’excursion se poursuit en voiture. Aux Evouettes, M. Lugeon esquisse les grands traits de la géologie du Grammont. 1. LuGEox. La région de la Brèche du Chablais, p. 264. EXCURSION DU {4 SEPTEMBRE 691 Les pentes qui regardent du côté du lac sont formées du haut en bas par les couches suivantes, en suivant l’arète qui descend vers Saint-Gingolph : 1. Lias à Entroques au sommet du Grammont avec une inttrcalation schisteuse à Bival- ves. : 2. Calcaire dolomitique du Trias. A ES AR MERS EE GR PLI-FAILLE 3. Malm. 4. Crétacique supérieur. SYNCLINAL 5. Malm. 6. Dogger. 7 8 9 (0) ANTICLINAL Lias supérieur. Lias inférieur. Trias à la Fritaz. ANTICLINAL . Lias inférieur. 11. Lias supérieur. SYNCLINAL 12. Lias inférieur. 13. Moraine recouvrant le Rhétien et le Trias, ANTICLINAL supportés par la molasse rouge. Le Rhétien a été en effet découvert par M. Lugeon, au Prolet, à l’ouest de Saint-Gingolph. La coupe du Grammont montre ainsi des plis superposés dont le plus supérieur présente un laminage complet entre le Trias et le Malm. De petits lambeaux du Lias, qui manquent dans la coupe ci-dessus, se voient, reposant directement sur le Malm, à la Croix- d’Allex, sommet à l’est du Grammont. La vallée des Evouettes est taillée dans l’anticlinal du sommet du Grammont; le pli s’abaisse considérablement vers la vallée du Rhône. C’est là un phénomène qui est très caractéristique de tous les premiers plis des Préalpes dans cette vallée. M. Lugeon a déjà attiré l’attention sur cette remarquable ondulation des plis !. Les anticlinaux se sont tous transformés en vallées, tandis que les synclinaux ont en général formé les crêtes. À Vouvry, la Société pénètre dans la deuxième grande vallée anticlinale, rompue jusqu’au Trias, qui afileure dans le versant gauche au nord de Vouvry accompagné par le Rhétien exploité en carrière. L’anticlinal de Vouvry est très déjeté dans les environs de Miex, où le Dogger, par écrasement du Malm, est presque en 1. Lucrow. Recherches sur l’origine des vallées des Alpes occidentales. Annales de Géographie, Juill. et Nov. 1901. 692 EXCURSION DU 5 SEPTEMBRE contact avec le Crétacé du synclinal. Ce dernier est écrasé à un tel point qu'il forme presque un noyau d’étranglement. Le bas de la vallée de Vouvry présente deux cônes de déjection emboîtés l’un dans l’autre. Le plus ancien possède une pente plus forte que celle du cône actuel. Comme on sait que la génératrice des cônes est d'autant plus tangente à l'horizontale que le cours d’eau est plus important, il semblerait qu'à un moment donné, après la dernière glaciation, le torrent de la vallée de Vouvry ait été moins volumineux que de nos jours. Le long de la route on a pu contempler le rôle topographique des calcaires du Malm qui forment de remarquables escarpements. A Pierre-à-Perret, M. Lugeon explique les dislocations si curieuses que présentent ce synclinal de Flysch et le pli-faille de la Tornettaz. L’étranglement considérable du flanc normal du synclinal attire l'attention. On constate en effet, dans la partie visible la plus profonde du pli, un amincissement considérable du Jurassique supérieur. À sa partie supérieure le pli est régulier. C'est un fait à peu près constant dans les Préalpes que les accidents stratigraphiques sont développés au maximum dans les parties profondes des plis, tandis qu’une régularité remarquable règne dans les parties élevées. Près de Muraz la Société profite d’une accalmie qui disperse le brouillard pour examiner une des plus belles coupes naturelles des Préalpes. Sous les grandes masses triasiques de Tréveneusaz, on voit apparaître avec une allure très régulière une épaisseur énorme de molasse rouge, prolongement de celle que l’on avait vue au Bouveret s’enfoncer sous la nappe de charriage. En outre, les plis autochtones de Collombey et de Muraz sortent du Flysch, lui-même recouvert par la molasse. On constate donc en ce point un des faits les plus importants pour la théorie du charriage : la disparition, sous les Préalpes sans racines, des plis à faciès helvé- tique. Excursion du 5 Septembre. La matinée est consacrée à l’étude des plis autochtones à peine entrevus la veille. Sur le pli de Collombey la Société longe la moraine de Monthey, formée uniquement par des blocs de granite du massif du Trient, débris probables d’une aiguille du massif du Mont-Blanc écroulée sur les glaciers quaternaires. C'est tout d’abord la fameuse Pierre-à-Dzo, dédiée à de Char- EXCURSION DU © SEPTEMBRE 693 pentier, puis les énormes blocs que l’on exploite un peu partout. Par un heureux hasard la Société peut examiner un reste encore vierge de la moraine : d'énormes blocs moussus, entassés les uns sur les autres, dans une superbe forêt de châtaigniers. » Après avoir rencontré, près de Muraz, l'Urgonien et l'Hauterivien à Entroques, et de nouveau la réapparition de la molasse rouge, la Société rentre à Monthey. Dans l'après-midi course en voitures à Champéry. L'exemple remarquable de surcreusement que présente l'entrée de la vallée, . avec une terrasse qui se poursuit jusque près de Troistorrents, atüre l'attention. La Société examine avec intérêt, près du Pas, les couches inférieures de la molasse rouge. A l’arrivée à Champéry une éclaircie permet enfin d'apprécier la grande arête de la Dent du Midi, dont M. Lugeon explique la tectonique. M. H. Douvillé a été frappé par l'identité de la molasse rouge .du Bouveret avec celle observée par la Société près de Monthey et dans le Val d'’Illiez et admet parfaitement l'hypothèse de M. Lugeon, que ces deux molasses rouges se raccordent par dessous les plis des Préalpes. A la suite de cet exposé M. Haug fait ressortir les analogies de faciès tout à fait frappantes que présentent non seulement le Rhétien mais encore le Lias tout entier et le Dogger avec les couches synchroniques des environs de Digne et avec celles des lambeaux de recouvrement de l'Ubaye. L'identité, dans les trois régions, des calcaires massifs avec silex du Lias moyen est parti- culièrement remarquable. En ce qui concerne la molasse rouge, la ressemblance de celle du Bouveret et du val d’Illiez avec celle des Basses-Alpes est non moins grande. M. Haug concède l'identité parfaite des deux molasses sur lesquelles s’appuient respectivement le bord externe et le bord interne des Préalpes, mais il n’admet pas que de leur identité résulte nécessairement leur continuité souterraine par dessous les Préalpes. La continuité peut avoir existé par dessus cette zone, l'érosion ayant détruit la partie intermédiaire. D'ailleurs, la distance actuelle des deux affleurements est de près de 15 km., de sorte que, dans l'hypothèse de l'éventail composé des Préalpes, l’étranglement de la zone prétendue exotique n'a rien d'excessif. M. Douxami rappelle qu'il s’est déjà élevé dans l’un de ses travaux contre l'emploi du terme de molasse rouge. Il n’y a 8 Mai 1902. — T. rer, Bull. Soc. Géol. Fr. — 45 694 EXCURSION DU 5 SEPTEMBRE aucune comparaison possible ni comme âge, ni comme faciès, entre la molasse rouge du Bouveret et les couches bariolées que la Société a étudiées aux environs de Lausanne, pas plus qu'avec celles du pied du Jura ou de la région de Bellegarde et de Cham- béry. Il y a par contre identité entre les couches rouges de Vevey sur la rive droite du Léman et entre celles du Bouveret et du val d'Illiez. Ces couches sont d’ailleurs, à Saint-Gingolph comme dans le val d’'Illiez, de la façon la plus nette la partie supérieure du Flysch : il est impossible de mettre une limite exacte entre les deux formations. Il signale, sans que le fait puisse être invoqué en faveur de l’une ou l’autre des deux hypothèses dont vient de parler M. Haug, l'existence dans le Flysch du val d’Illiez, sous la Valerette et sous les Portes-du-Soleil, près des châlets du Crosey, de bancs de pou- dingue polygénique, rappelant tout à fait ceux des Voirons en avant des Préalpes. | M. Steinmann considère la molasse rouge du Bouveret et de la vallée d'Illiez comme la partie la plus élevée du Flysch et en formant seulement un faciès de couleur différente, comme il y a des couches de couleur semblable à la base du Flysch. Peut-être est-elle l'équivalent du Ralligsandstein des bords du lac de Thoune. Il serait évidemment à désirer qu’on la distinguât des sédiments de couleur rouge qui se trouvent dans la vraie molasse, peut-être à des niveaux différents, mais qui ne sont pas liés avec le Flysch normal comme la Molasse rouge du Chablais. On a attribué à cette formation un rôle important pour prouver que les Préalpes médianes forment une nappe sans racine en pro- fondeur. Mais il est bien possible que la molasse ait existé partout, ou du moins sur une grande partie de la région chablaisienne, et qu'elle ait été enlevée pour la plus grande partie. A cet égard, l’ana- logie avec les couches dites Wangschichten, qui appartiennent à la Craie supérieure, probablement au Sénonien, et qui ont été dénu- dées pour la plus grande partie avant le dépôt des couches à Num- mulites de l’Eocène moyen, est évidente. M. Steinmann attire l'attention de la Société sur le fait, mis en évidence par les coupes de M. Lugeon, que les plis que l’on a vus hier entre le Bouveret et Vionnaz, le long de la vallée du Rhône, sont formés par des plis-failles, tandis que dans le profil parallèle de la vallée, mais un peu plus à l'intérieur, on voit les mêmes plis presque normaux et seulement un peu déjetés à l’ouest. IL paraît bien que cette différence n’est que le résultat de l’inflexion générale EXCURSION DU 5 SEPTEMBRE 695 des chaines vers la vallée du Rhône, parce que le changement de la tectonique s'accomplit dans le même niveau des plis. En tout cas cette disposition régulière des plis et des plis-failles ne ressemble point du tout à la structure irrégulière et anormale des nappes charriées, si bien connues, de la Basse-Provence et des Klippes de la Suisse du Nord entre le lac de Thoune et la vallée du Rhin; elle se rattache plutôt au plissement normal, qui caractérise les chaînes enracinées du Jura suisse. | M. Lugeon répond à M. Steinmann à propos de l'observation qu'il vient de faire. Si les coupes montrent en effet que les plis sont plus étirés en profondeur, c’est là, pour lui, le simple résultat de l’étirement plus grand qui doit se produire dans les nappes près de leur plan de charriage; dans les parties hautes, les masses soht plus tranquilles. Les règles trouvées en Provence par M. Marcel Bertrand, règles que vient aussi d'évoquer M. Stein- mann contre l’hypothèse du charriage des Préalpes, ne sont pas nécessairement applicables dans des masses aussi puissantes et uniformes que celles du Chablais. Les différents terrains des Préalpes forment des unités extrêmement épaisses; la disparition d’une couche peut être beaucoup moins visible qu'en Provence. Sous ce rapport, les zones indépendantes qui constituent les Préalpes présentent de très grandes variations. Dans la zone interne, qui forme le contact des Préalpes et des Hautes-Alpes, Les lacunes tectoniques sont peut-être plus exagérées encore que dans les mon- lagnes charriées du Sud de la France. Dans cette zone interne, il n'y a pour ainsi dire aucun contact normal. Dans les Préalpes médianes les écrasements sont particulièrement plus sensibles dans les parties basses des plis que dans les parties supérieures de ceux-ci, c’est-à-dire près de la charnière. Enfin, la région la plus supérieure, celle de la Brèche, présente des étirements et des dispositions très peu marquées. Ainsi la stratigraphie spéciale que l’on constate dans les nappes de la Provence est, dans le Chablais, exagérée en ce qui concerne les parties profondes ; dans les masses supérieures, ces dispositions particulières se révèlent en partie, mais semblent toutefois absentes dans les régions les plus super- ficielles. Séance du Samedi 7 Septembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. M. LUGEON, PRÉSIDENT La séance a lieu dans la salle à manger de l'Hôtel de l’Europe, à Thonon. Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance précé- dente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. M. Maurice Lugeon rend compte des excursions des 6 et 7 septembre. Excursion du 6 Septembre. En partant de Champéry, la Société suit le chemin du col de Coux. Elle atteint bientôt les grès du Flysch, au milieu desquels on voit poindre sous A yerne un affleurement de Crétacique supé- rieur. C’est le bas d’une lame très continue de ce terrain, incluse entièrement dans le Flysch et se pinçant complètement en profon- deur; en effet, à environ 150 mètres plus bas, dans le thalweg de la Vièze, on constate la présence du Néocomien du pli autochtone de Champéry. j A Antevenaz, on entre dans les accidents jurassiques des klippes. Ce sont tout d'abord des fragments de calcaires du Malm reposant sur le Flysch; malgré la pluie, la Société peut apercevoir les contournements de la klippe de Savonnaz. M. Lugeon explique comment il avait été amené à considérer certaines couches de schistes gréseux comme Lias supérieur (carte au 1/50.000) alors qu’elles appartiennent en réalité au Flysch, selon sa première opi- nion (carte au 1/80.000). Dans ses premières recherches, il cherchait à voir des plis dans ces masses si étranges. Aujourd'hui, il est reconnu, comme il a été dit par M. Lugeon à la séance d'ouverture, que ce sont des lames plus ou moins indé- pendantes de terrains mésozoïques enfoncés dans le Flysch et contournées sur elles-mêmes. Il est inutile de rechercher des traces de plis étirés, d’anticlinaux et de synclinaux écrasés. Il n’y a pour ainsi dire plus de lignes directrices, car à chaque instant ces bandes mésozoïques s’écrasent totalement et disparaissent de la surface du sol. La montagne de Culet est formée par des lames à peu près EXCURSION DU 6 SEPTEMBRE 697 planes empilées dans du Flysch et plongeant vers l’ouest et le sud- ouest. Les montagnes de Savonnaz et de Ripaille sont formées au contraire par des lames contournées sur elles-mêmes. La notion du sens de déjettement du pli n’est plus applicable. Cette tecto- nique extraordinaire est celle de toute la zone interne des Préalpes. Les écailles qui la constituent s’amincissent toutes en profondeur. A la Barmettaz, la Société rencontre une de ces lames. C’est un affleurement de Malm pénétrant dans le Flysch. Malgré la persistance du mauvais temps, la plupart des excur- sionnistes se dirigent vers le sommet de Culet. Sur le Flysch qui recouvre la bande de terrain secondaire du soubassement de Culet on constate l'existence de la lame indépendante de Crétacique supé- rieur du sommet. Chemin faisant, un fait nouveau montre quelle est l'étrangeté de ces dislocations. Au milieu du Flysch, MM. de Lapparent, Sieinmann, Lugeon et quelques autres membres décou- vrent une lentille, de deux mètres d'épaisseur, de Crétacique supé- rieur. C’est un fragment étiré de la lame indépendante de Créta- cique. Ces multiples lames plongées dans le Flysch et qui, en s’em- pilant les unes sur les autres, ont formé les klippes du Val d'Illiez, s'étirent toutes en profondeur. La démonstration absolue en est faite sur place. Du sommet de Culet, sous le cirque glaciaire de Marcheulin, M. Lugeon montre la paroi isolée de Malm de Au-Vent. Elle est séparée de son prolongement dans la paroi orientale de Culet par un étranglement total. Or, en allant vers Champalin, on constate non seulement la disparition de cette paroi jurassique de Au-Vent, mais, en outre, on en trouve des fragments complètement isolés dans le Flysch, ainsi que des débris de cargneule du Trias. Considérées en grand, ces lames étirées et étranglées de Culet constituent donc une sorte de brèche de dislocation, aux éléments géants, dont la pâte est formée par le Flysch. De Champalin, la Société longe les grands escarpements du massif de la Brèche, au pied du gradin triasique. A la Porte-du- Soleil l’aspect caractéristique du massif se montre amplement avec la faille si nette de la Tête-du-Géant !. La Société se trouve ici à côté de l’écaille indépendante du Lias à Gryphées de la Pointe-de- l’'Haut, appartenant encore à la zone interne des Préalpes. Quelques- uns des membres trouvent des traces de Gryphées récoltées déjà par M. Lugeon. Les excursionnistes se dirigent vers la Tovassière. C’est là que se trouvent les débris très étirés des Préalpes médianes, dont la 1. Luceow. La région de la Brèche du Chäblais, fig. 22. 698 EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE présence en cet endroit acquiert une importance considérable, car elle démontre l'absence de racine du massif de la Brèche. M. Lugeon insiste particulièrement sur ces débris extrêmement laminés. Ils représentent, en effet, la réapparition, sur le versant sud du massif de la Brèche, des Préalpes médianes, que l’on voit au nord s’enfoncer sous ce massif. Il est curieux de constater que les Préalpes médianes, dont les terrains ont une épaisseur de plusieurs centaines de mètres, lorsqu'ils sont développés normalement dans les plis réguliers du Chablais, sont ici réduites à deux ou trois mètres de puissance. Aïlleurs, dans l’ouest, les Préalpes médianes sont même entière- ment laminées; il en existe encore des fragments à l’état de len- tilles de Crétacique supérieur au col de la Golèze et au-dessus de Samoëns. On rejoint ensuite la croupe de Flysch de Champey. Un peu plus loin, au point 1904 (La Chaux), on traverse un grand lambeau de recouvrement, appartenant au système de la Brèche. ” Ce lambeau est en continuité avec le Houiller de la Foilleusaz dont l’affleurement est beaucoup plus considérable qu'il n’est indiqué sur la carte au 1/50.000. Les grès grossiers supposés permiens se rattachent très probablement au Trias. Enfin, en descendant sur Morgins, la Société traverse Le Flysch, substratum de ces lambeaux de recouvrement. Excursion du 7 Septembre. La Société se dirige vers le Pas-de-Morgins. Elle longe l’étang de Morgins, placé dans une vallée dont la formation est due à la capture du torrent de Morgins par la Vièze de Champéry. Elle remarque successivement l’écaille indépendante du Lias à Gry- phées, puis l’écaille avec couches renversées des Préalpes médianes, sur laquelle repose directement l’escarpement du massif de la Brèche. C’est donc une coupe semblable à celle que l’on a vue la veille à la Pointe-de-l'Haut. Dans ce parcours de cinq cents mètres on rencontre trois systèmes tectoniques absolument indépendants se superposant : Zone interne, Préalpes médianes et région de la Brèche. | Du Pas-de-Morgins on monte vers Tréveneusaz en suivant le pied du massif de la Brèche. De place en place la Société constate les traces des Préalpes médianes sous la forme d’affleurements de Crétacique supérieur. Au col de Derrière-des-Portes, qui domine la vallée de Draversaz, une coupe très intéressante est relevée. Elle montre la pénétration EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE 699 vers l’ouest des Préalpes médianes sous la région de la Brèche par l'intermédiaire d’une écaille indépendante. De l’ouest à l’est on remarque de haut en bas la succession de couches suivantes : Calcaire liasique du massif de la Brèche ; Flysch ; « Opalinien » à Posidonomyes ; Flysch ; Crétacique supérieur ; Malm. Les trois derniers terrains s’élèvent sur l’arête de Tréveneusaz (Bellevue 20/45 m.), dont le sommet est formé par le Malm. Au sommet de Tréveneusaz, on domine un cirque, d’origine glaciaire, avec un fond plat et de petites moraines. En descendant sur Draversaz, la Société atteint de nouveau la base du massif de la Brèche avec des gypses très développés. Un intérêt particulier s’attachait au parcours du vallon de Draversaz. Dans son mémoire sur le Chablais, M. M. Lugeon avait décrit des plis dirigés vers la vallée du Rhône, c’est-à-dire que, influencé encore par la théorie transitoire du pli de la Brèche à déversement périphérique, il avait interprété ainsi une coupe naturelle, sans charnière, que présente le soubassement de la montagne d’Onnaz (voir, Lugeon : Région de la Brèche du Chablais, p. 158). En réalité il s’agit d’une écaille allongée que la coupe naturelle montre suivant une coupe parallèle à la direction de poussée qui s’est faite vers le nord et non vers l’est. À Draversaz, on remarque dans l'escarpement l’écaille en question. Vers les chalets de Draversaz, M. Lugeon signale l'existence d’une couche spéciale accompagnant le Crétacique. C’est un calcaire rouge spathique dans lequel on récolte de nombreuses petites dents de Poissons. Pour M. Lugeon, on est en présence d’une couche particulière du Crétacique supé- rieur, dont il existe un deuxième affleurement dans les Préalpes bernoises à la Luglenalp, au sud du Niederhorn (massif des Spielgaerten). M. Steinmann est plutôt porté à en faire un niveau inférieur, peut-être du Néocomien. De Draversaz aux Places, les excursionnistes continuent à longer le pied du grand escarpement du massif de la Brèche et descendent ensuite sur Vionnaz, le long du grand synclinal de Flysch qui précède vers le nord le pli-faille de Tréveneusaz. Ce massif isolé, ainsi qu’on peut s’en rendre compte dans cette descente, ne peut non plus former un pli dirigé vers la vallée du Rhône. Le front du 700 EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE pli-faille est bien parallèle aux autres plis, c’est-à-dire est-ouest. Le massif de Tréveneusaz est donc ainsi une vaste voûte se termi- nant en avant par un pli-faille et se différenciant des anticlinaux pli-faillés des Préalpes uniquement par un plus grand rayon de courbure. Et c'est dans l’axe de cette voûte, dont le tablier est formé par des terrains des Préalpes médianes, que se voient la molasse rouge et les deux plis à faciès helvétiques (plis autoch- tones de Collombey et de Muraz étudiés les 4 et 5 septembre). En résumé, la Société a pu constater, dans ces deux journées, la régularité de la pénétration des Préalpes médianes sous le massif de la Brèche, et en outre, comme faits nouveaux, elle a pu se convaincre que la klippe de Culet devait être interprétée comme une série de lames se perdant dans le Flysch, et que l’on ne pouvait plus voir dans Tréveneusaz des plis dirigés vers la vallée du Rhône. De Vionnaz, la Société se rend à Vouvry et ensuite à Thonon par le chemin de fer. M. W. Kilian exprime ses regrets de ne pouvoir, par suite de circonstances indépendantes de sa volonté, suivre entièrement les excursions de la Réunion extraordinaire. J1 ajoute qu’il les a en grande partie faites en 18935, sous la direction de MM. Lugeon et Renevier, avec les membres de la Société géologique suisse. Aujourd’hui il tient particulièrement à rendre hommage à la grande activité et aux travaux si remarquables de M. Lugeon. En 1893, l'hypothèse préconisée par M. Lugeon pour expliquer la structure des Préalpes était la théorie du pli {en champignon ». Peu de temps après, notre confrère a exposé avec beaucoup de clarté et discuté avec une grande loyauté, dans son admirable thèse, les diverses hypothèses relatives à la question des Klippes et des Préalpes. Sans prendre parti d'une façon absolue, il proclama cependant ouvertement alors sa préférence pour la théorie du «charriage » proposée par M. Schardt. Depuis lors, la découverte — que nous devons également à la saga- cité de M. Lugeon — des «racines » de la zone interne des Préalpes dans la haute vallée du Rhône, a introduit un élément nouveau dans le problème en écartant définitivement l'hypothèse d’une origine lointaine et même transalpine, en rendant désormais oiseuse l'intervention d’un phénomène spécial, distinct du méca- nisme normal des plissements alpins, eten montrant nettement que c'est dans le voisinage même des Préalpes qu’il convient de cher- cher leur origine. M. Kilian établit ensuite une comparaison entre la région des EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE TOI Préalpes et celle du massif de Prorel dans le Briançonnais si magistralement étudiée par M. Termier, avec ses annexes explo- rées par M. Lugeon et par lui-même. Là aussi, la première hypothèse (émise par M. Termier) fut celle d’une série de nappes de charriage d’origine « exotique » étalées avant le plissement principal de la région; mais les faits vinrent bientôt montrer qu'il s'agissait simplement de plis étirés couchés et superposés, puis reployés par un mouvement postérieur d'importance secondaire ; des fragments étendus des flancs inverses de ces plis existent et la «racine » incontestable de plusieurs des « écailles » de M. Termier a été découverte près de Montdauphin (Kilian et Haug) ainsi qu’à l’est de la Durance (Kilian). (Voir Bull. Serv. Carte géol. de France, n° 75, 1900). Le phénomène des Préalpes, comme celui du Briançonnais, n’est dès lors qu'un cas excessif du processus de striction (plissement) qui a donné naissance à la chaîne alpine ; des groupes entiers de plis ont été refoulés sur les plis limitrophes, mais sans qu'il se soit produit, semble-t-il, entre la « racine ».et la portion couchée et étirée (« charriée ») d'autre rupture ou discontinuité que celles qu'a créées l'érosion postérieure à toutes dislocations. M. Kilian croit qu'il importe beaucoup de distinguer ce méca- nisme, soit du glissement grandiose qu'avait imaginé M. Schardt pour expliquer à la fois la formation des Préalpes, leur origine exotique, la provenance de cailloux transalpins dans les brèches du Flysch et l’origine de certains lacs suisses, soit de la production des « grands charriages » sans flanc inverse, s'étant produits avant le plissement principal de la chaîne sur des centaines de kilomètres d’étendue, tels qu’il ont été, à maintes reprises, invoqués pendant ces derniers temps ou cités par MM. M. Bertrand, pour la Provence et le bassin du Gard, Termier, pour le Briançonnais, Rothpletz, pour les Alpes de Glaris et le Rhaeticon. Les Préalpes, pas plus que le Briançonnais, ne peuvent désormais être considérées comme des exemples de cette nature spéciale de dislocations. Il est nécessaire de dissiper l’équivoque que le terme de « char- riage » peut faire naître ou entretient à cet égard. Tout en démontrant le peu de probabilité de l'existence d'un éventail préalpin autochtone et homogène, il semble que la découverte des « racines » des Préalpes condamne la solution du charriage lointain préconisée par M. Schardt et à laquelle s'était rattaché en dernier lieu M. Lugeon. L'ensemble des Préalpes devrait sa structure à un mécanisme comparable à celui qui, sous une forme notablement moins compliquée, a donné naïssance au 702 EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE massif de la Brèche, dans lequel bien peu de personnes songeraient encore, après les belles recherches de M. Lugeon, à voir autre chose qu'un vaste pli couché. M. Haug rappelle que l'hypothèse du recouvrement de l’ensem- ble des Préalpes a été émise dès 1884 par M. Marcel Bertrand. Grâce aux efforts juxtaposés de M. Hans Schardt et de M. Lugeon elle a pris corps dans ces dernières années, mais, malgré les remarquables travaux dont les Préalpes ont été l’objet, le char- riage de cette zone étrange a conservé son caractère hypothétique. Personnellement, tout en n'étant nullement un adversaire des grands recouvrements et des charriages lointains, M. Haug a été amené à discuter à plusieurs reprises ! les arguments au moyen desquels M. Schardt et M. Lugeon ont cherché à démontrer l’ori- gine «exotique » des Préalpes. Ces arguments sont de deux sortes, stratigraphiques et tecto- niques. Les arguments stratigraphiques peuvent être aisément réduits à leur juste valeur; d’ailleurs une découverte récente de M. Lugeon, sur le versant sud des Wildstrubel, vient apporter un puissant appui aux objections de M. Haug. En effet, si dans ce massif, qui appartient incontestablement aux Hautes-Chaînes calcaires, le Néocomien prend « un faciès uniforme schisteux, qui s'étend à l'Urgonien », le contraste entre le «faciès vindélicien » et le «faciès helvétique » disparaît et toute la démonstration stratigraphique de M. Schardt s'effondre. M. Haug n'attache pas plus de valeur aux arguments tectoniques, car toutes les coupes des Préalpes publiées jusqu'à ce Jour peuvent sans difficulté s’expliquer par l'hypothèse d'un éventail composé imbriqué. Les coupes données par M. Schardt dans le Livret-Guide — dont les coupes plus récentes du même auteur ne diffèrent d’ailleurs que par des additions tout-à-fait hypothétiques — sont, en particulier, parfaitement conciliables avec cette conception. M. Haug n'a nullement contesté la réalité des faits observés dans les Préalpes par ses prédécesseurs — quoique M. Schardt cherche à insinuer le contraire —., il s’est même basé sur ces faits pour édifier son hypothèse de l'éventail composé imbriqué, dont la possibilité mécanique est démontrée par les expériences de M. Baï- - ley Willis. Cependant il est juste de remarquer que plusieurs des faits sur 1. V. en particulier : Emile HauG. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses. Bull. Soc. vaud. Se. Nat., vol. XXXWV, n° 132, 1899. EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE 703 lesquels M. Haug s'était appuyé pour conclure à un déversement bilatéral des plis des Préalpes ont été depuis reconnus inexacts, Aïnsi, pour ne parler que des régions visitées les jours précédents par la Société, les plis à concavité tournée vers l'intérieur des Préalpes, que M. Lugeon avait cru voir dans les pointements jurassiques des environs de Champéry, n’existeraient pas. Il est done prudent de réserver toute interprétation de ces masses étranges et en particulier celle de la « lame » de Culet pour le moment où M. Lugeon en aura publié une étude définitive, basée sur de nouveaux levés géologiques. Tout récemment, M. Lugeon a invoqué un fait nouveau d’une grande importance comme argument décisif en faveur du recou- vrement de l’ensemble des Préalpes. IL s’agit de la découverte de la « racine » d’une des zones constituant les Préalpes. Cette racine est située en pleine région des Hautes-Chaïnes calcaires, nous voilà donc bien loin de l’origine transalpine des Préalpes ! M. Haug pense d’ailleurs qu’il serait prématuré d'étendre dès à présent à l’ensemble des Préalpes une conclusion qui ne s’impose encore que pour l’unique zone interne. Il regrette que la Société géologique, conviée à discuter l'hypothèse du charriage des Préalpes, se trouve en présence d’un problème dont la solution est maintenant cherchée dans une autre région, dans le massif des Wildstrubel, région dont aucune coupe n’a encore été publiée et dont l'étude est loin d’être achevée. Dans tous les cas, il semble bien que les faits observés au cours de la réunion ne peuvent être invoqués comme absolument décisifs soit pour soit contre l’une des deux hypothèses en présence. Si des découvertes nouvelles venaient établir l'existence d’autres racines dans les chaînes intériefres des Alpes, M. Haug n'hésite- rait pas à se rallier aux conclusions de M. Lugeon, mais il pense qu’en tout état de cause, c’est aux partisans du charriage qu'in- combe la charge de fournir les preuves en faveur de leur hypo- thèse et que, en aucun cas, ce n’est aux géologues qui envisagent les Préalpes comme en place que revient l'obligation de démontrer la non-existence du recouvrement. Il est certaines hypothèses qui par leur essence même sont irréfutables. En ce qui concerne la nappe supérieure des Préalpes, la Brèche du Chablais, M. Haug s'est entièrement rallié depuis longtemps à l'interprétation de M. Lugeon, ses regrets n’en sont pas moins grands de ne pouvoir prendre part aux trois dernières journées de la réunion, dans lesquelles la Société étudiera plus particulière- ment le massif de la Brèche. Il aurait surtout désiré revoir la charnière frontale de ce massif. 704 EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE Les membres de la Réunion y verront certainement un argument puissant en faveur du recouvrement de la Brèche et ils se deman- deront quelle conséquence il convient de tirer de l’assertion sui- vante de M. Schardt : « La présence d’une charnière anticlinale dans l'une ou l’autre des couches de la zone bordière m'aurait apparu bien plutôt comme un argument contre le charriage loin- tain ». En bonne logique, M. Schardt devrait donc nier que la Brèche soit charriée et la considérer comme en place, alors que son substratum serait charrié ! M. Lugeon répond à M. Haug en maintenant complètement son interprétation relative à la lame de Crétacique de Culet. Si certains faits peuvent être interprétés autrement, par suite de ses nouvelles découvertes, il maintient absolument le fait que la lame se termine en profondeur. Quant à la Géologie expérimentale sur laquelle on s’est appuyé, il rappelle les expériences, la plupart du temps très malheureuses, de cette science de cabinet. M. Schmidt pense qu’il faut insister sur ce fait que le problème des Klippes et des Préalpes dites exotiques ne commence que là où la direction générale des Alpes change du S.-N. au S.O.-N.E., là où la Molasse de la Suisse se rétrécit entre le Jura et les Alpes. En admettant que les grandes masses des Alpes du Chablais et des Préalpes romandes suisses soient des lambeaux de recouvrement venus de l’intérieur de la chaîne alpine, on éprouve le besoin de chercher ces mêmes sédiments qui forment les lambeaux, en place dans l’intérieur des Alpes. Or il est bien vrai que, dans la zone du Briançonnais, en France et en Italie, la série des sédiments, assez complète, a le même caractère méditerranéen qui est particulier aux nappes exotiques. En suivant la zone du Briançonnais vers le N. E. dans les Alpes suisses, on voit de plus en plus se développer le faciès si uniforme des schistes lustrés. Dans les Alpes du Valais il y a encore la Brèche du Télégraphe que l’on peut suivre depuis le col Ferret jusqu’au delà de la vallée de Bagne, ainsi que le « Pontiskalk », qui correspond probablement à un niveau du Trias alpin. On trouve en effet, dans les régions exotiques, ces deux formations bien développées, tandis qu’elles manquent dans les Hautes-Alpes calcaires. Quant aux autres sédiments des Préalpes exotiques, ils ne présentent certainement aucune analogie avec les sédiments situés au sud du Rhône et du Rhin, tandis qu’on voit, sur beaucoup de points, les schistes lustrés se développer graduellement comme EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE 705 faciès des couches jurassiques des Hautes-Alpes. La structure et la composition des Alpes centrales est, du reste, simple et assez bien connue pour que l’on doive rejeter absolument la supposition que les formations des Préalpes exotiques ont existé jamais au-dessus des gneiss des Alpes centrales, c’est-à-dire qu’elles viennent de la zone briançonnaise de la Suisse. M. Lugeon se déclare enchanté des remarques de M. Schmidt. Celui-ci a observé que les seuls terrains conservés dans les monta- gnes valaisanes, au sud du Rhône, sont semblables à ceux d’une partie du Chablaïs. Mais le Malm et le Crétacique n’ont pas été conservés dans les Hautes-Alpes ; on ne peut en conclure qu'ils ne s'y trouvaient pas. Aïnsi l’'Urgonien des Hautes-Alpes passe au sud à un faciès vaseux, de sorte que le Néocomien à Céphalopodes trouve son origine dans un grand géosynelinal qui devait régner sur l'emplacement des Alpes valaisanes. M. Steinmann expose les difficultés auxquelles se heurte Ja théorie du charriage. Pour lui les Préalpes médianes — au moins — sont enracinées et forment des chaînes plus ou moins régulières. Leurs bords internes et latéraux sont seuls déjetés au-dessus du Flysch des Hautes-Alpes calcaires et se relient seuls aux klippes de la Suisse du Nord, à structure compliquée et imbriquée. 11 demande à M. Lugeon s’il y a identité complète entre les faciès au-delà des Wildstrubel et ceux des Préalpes et si en particulier les couches si caractéristiques des Préalpes, comme celles du Trias moyen à Diplopores, et les couches rouges y ont été rencontrées. M. Lugeon répond à M. Steinmann que tous les terrains que l'on retrouve dans la zone interne des Préalpes en regard des racines qui ont été découvertes sont les mêmes sans exception. Ainsi l’'Oxfordien à Phylloceras tortisulcatum, le Rhétien, le Trias sont les mêmes : il n y a donc pas de doute à avoir à ce sujet. La racine d’une des zones des Préalpes a été trouvée sous la forme d'un pli simple, élémentaire et peu éloigné. Puisque la masse de la Brèche du Chablais est en recouvrement indiscutable, et que la zone interne des Préalpes médianes n’est formée que par des plis dont on trouve la racine, comment alors concevoir l'ensemble des Préalpes médianes autrement que comme une nappe charriée de même ordre que les deux autres. Séance du Lundi 9 Septembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. M. LUGEON, PRÉSIDENT La séance a lieu dans la salle à manger de l'Hôtel Muffat, à Morzine. Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. M. Maurice Lugeon rend compte des excursions des 8 et 9 sep- tembre. Excursion du 8 Septembre. Au départ de Thonon la route se déroule sur les terrasses post- glaciaires de la Drance. Celle-ci s’y creuse une grande plaine d’allu- . vions, qui se prolonge par un delta dans le Léman. En approchant du cours d’eau, la route atteint les bords coupés du grand cône fluvio-glaciaire de la Drance. Près du Pont-des-Français, la Société constate l'alternance des bancs marneux et des cailloutis. L’érosion par des ravinements remarquables a isolé de petites pyramides couvertes de buissons protecteurs. Les matériaux qui constituent l'énorme masse fluvio-glaciaire : sont presque exclusivement d'origine locale. On y retrouve toutes les roches du Chablais. Les nombreux blocs erratiques de protogine, que l’on exploite dans le thalweg de la Drance, proviennent de la surface du plateau. Ils ont glissé dans la vallée au fur et à mesure des progrès de l'érosion. Ces dépôts glaciaires alpins, superposés au fluvio-glaciaire local, appartiennent probablement aux moraines internes. Le cône glaciaire de la Drance serait donc l’œuvre de la deuxième glaciation. A quelque cent mètres en amont du Pont-des-Français, la Société constate la présence du Flysch soit au bord de la route, soit sur la rive gauche de la Drance. Ces schistes et grès micacés appartiennent à la zone bordière des Préalpes. Leur présence en ce point nous montre la constance de ces zones et celle de leurs relations réciproques. En effet ces roches arénacées plongent sous le gypse triasique de la grande carrière d’Armoy visitée par la Société. L'exploitation se fait à ciel ouvert et en galerie. Partout le gypse est recouvert par le Glaciaire. EXCURSION DU S SEPTEMBRE 907 A partir de ce gisement triasique jusqu'à Saint-Jean-d’Aulph. la Société étudiera en détail les divers plis des Préalpes médianes dont les levés géologiques sont dus à M. Renevier. Le pli anticlinal de la montagne d'Hermone, profondément coupé par la Drance, ne montre, le long du torrent, que son noyau triasique. À l'Épine, l’anticlinal est érodé jusqu’au gypse. La Société constate la superposition des calcaires et marnes verdâtres du Trias sur ce gypse. De hautes parois de cailloutis fluvio-gla- ciaires recouvrent ce Trias. Au Pont-de-l’Eglise les couches triasi- ques, redressées jusqu'à la verticale, annoncent le premier synclinal. En effet, la Société rencontre bientôt le Rhétien et ses fossiles caractéristiques : Aoicula contorta Portl., Placunopsis alpina Winkl., Bactryllium striolatum Heer. - Plus loin les couches du Lias inférieur et moyen déterminent un rétrécissement de la gorge, qui s'ouvre à nouveau au passage des schistes argileux du Lias supérieur. Ce terrain forme le noyau synclinal au-delà duquel la série déjà observée se répète en sens inverse, jusqu'au noyau anticlinal triasique du deuxième pli, au Pont-de-Bioge. Le synclinal de la Vernaz attire l’attention de la Société par deux faits intéressants. Entre le Dogger et le Jurassique supérieur apparaissent les couches de calcaires rouges de l’'Oxfordien, C’est un terrain que la Société n'avait pas encore rencontré. A la Vernaz les couches sont exploitées et utilisées comme marbre. M. Lugeon attire ensuite l’attention sur l’inflexion transversale très manifeste de ce synclinal, dont le noyau de Jurassique supé- rieur forme une barre en forme de V largement ouvert. On peut, dans la coupure de la barre jurassique, observer les couches axiales du synclinal plongeant vers le thalweg. Cette descente des bancs est accompagnée de plissotements transversaux au plisse- ment principal t!. L’anticlinal de la Forclaz, qui suit le synelinal de la Vernaz, présente au centre une grande masse de calcaire du Lias moyen, qui forme un bourrelet sur les pentes de la montagne. Le Dogger particulièrement épais est étudié le long de la route. IL est ici représenté par le faciès à Zoophy cos. | De la route, la Société examine la remarquable succession de barres calcaires de Jurassique supérieur qui se présentent en amont. Elles descendent l’une après l’autre vers la Drance et 1. Luceon. Recherches sur l'origine des vallées des Alpes occidentales. Annales de Géographie, Juill. et Nov. 1901. 708 EXCURSION DU 8 SEPTEMBRE remontent le versant opposé. Les deux premières barres forment le synclinal du Jotty, avec son noyau de Crétacique supérieur. Nulle part, dans le Chablais, les plis ne montrent une si remar- quable inflexion synclinale transverse, accompagnée de l'angle rentrant si caractéristique des plis. Ici aussi apparaît la disposition réciproque des anticlinaux largement ouverts et des synclinaux étroits, pincés. Ces barres calcaires du Malm sont traversées par le torrent dans des fissures étroites. Au Jotty, d'énormes blocs forment un pont naturel. La Société profite des galeries récemment aménagées pour visiter la gorge. M. Jean Brunhes montre que les deux parois de la gorge de la Dranse sont constituées par un assemblage étonnamment continu de surfaces intactes, quoiqu'incomplètes, d'anciennes marmites de géants. Il fait remarquer que c’est un des cas très nets où la surface des deux parois, élant conservée telle qu’elle devait être au moment même de l’approfondissement premier de la gorge, porte un témoi- gnage irréfutable en faveur du mode d'opérer qui a été suivi pour cet approfondissement. De part et d’autre on reconnaît, même par endroits avec une évidence surprenante, les formes évasées d’une même marmite, qui a laissé ainsi sur les parois opposées des formes qui se complètent. On peut suivre pas à pas et reconstituer l’histoire et le jeu des tourbillons ; on voit comment plusieurs tourbillons de petit rayon ont été tout à coup remplacés par un tourbillon plus puissant, qui a unifié les petites marmites déjà formées : et celles- ci, à peine discernables aujourd'hui, aboutissent à l’une de ces marmites énormes, telle qu’on en voit en plusieurs parties de la gorge ; puis le grand tourbillon lui-même s'est décomposé en tour- billons moindres ; et la marmite énorme, à la paroi très renflée, se décompose en plusieurs marmites, qui font succéder des cavités multiples à la grande cavité. C'est là un tronçon de gorge qu'il faut rapprocher des gorges suisses de l’Aar, de la Tamina, du Trient, ete. La partie d’amont de la gorge de la Dranse est sensi- blement plus ouverte et plus large que la partie d’aval: le sillon creusé par les tourbillons est moins étroit : de là, sur les bords, quelques types caractérisés de marmites de géants que les tour- billons ont délaissées avant de les avoir achevées ; ces marmites présentent généralement dans leurs fonds une protubérance de forme conique qui est, comme M. Brunhes l’a établi, le signe distinctif des marmites interrompues. M. Brunhes signale encore différents faits généraux, très visibles EXCURSION DU 8 SEPTEMBRE 709 dans cette gorge de la Dranse, concernant soit les formes des parois ou du fond des diverses marmites, soit les matériaux qui ont servi d'instruments aux tourbillons travailleurs. L'anticlinal de Nicodez rompu jusqu’au Trias arrête l’attention de la Société avec, le long du chemin du versant droit, sa succes- sion régulière du Crétacique au Lias moyen. L’angle rentrant des plis s’exagère dans la partie en amont de la Baume. En effet, le synclinal du mont Ouzon donne lieu à une bande très développée de Crétacique supérieur, qui s’allonge paral- lèlement à la Drance et n’est coupée par cette dernière qu'au Pont- de-Couvaloup sous le Biot. L’inflexion horizontale du pli s'étend en ce point sur environ deux kilomètres. En même temps, le pli présente une inflexion synclinale transverse très évidente. Au mont Ouzon le Flysch s'élève à l'altitude de 1500 mètres, tandis que, sur la Drance, il atteint 900 mètres, au Pont-de-Couvaloup. En amont de la Baume le Fluvio-glaciaire est remplacé par les moraines formant plusieurs lignes de collines avec de petites dépressions centrales. La Drance, gênée dans son écoulement, a dû se frayer un passage vers la gauche. Son cours surimposé forme une gorge au Pont-de-Couvaloup. Dans les couches du Crétacique supérieur de la gorge les mem- bres de la Société récoltent des fragments d'Inocérames et des Ostrea, ce dernier fossile inconnu jusqu'à ce jour dans ce terrain. La vallée se rétrécit considérablement au-dessous d'Ombre au passage d'un anticlinal. IL est constaté que les couches portées comme Néocomien sur la carte au 1/80.000 appartiennent en réalité au Crétacique supérieur. La gorge présente un exemple très net de surimposition glaciaire. A côté de l’ancien thalweg comblé par la moraine, la Drance s’est creusé une étroite gorge. La route ne peut franchir cet accident que par un tunnel !. M. Lugeon fait remarquer à ce sujet combien le talent d’obser- vation des géologues qui examinent successivement une même région peut progresser graduellement. En 1893, lors du passage de la Société géologique suisse dans ces parages, ce superbe exemple d’épigénie, l’un des plus beaux que l’on puisse voir, n'avait pas été remarqué. Au Bas de Thex, une énorme masse de calcaire du Malm attire les regards par son caractère imposant. Les couches verticales 1. LuGEow. Sur la fréquence dans les Alpes de gorges épigénétiques, etc. Bull. Labor. de géol. Univ. de Lausanne, n° 2, 1901, et Bull. Soc. vaud. Sc. nat., 1901. , 22 Mai 1902. -— T, zer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 46 10 EXCURSION DU Q SEPTEMBRE semblent sortir de terre comme un immense dyke. Cet anticlinal si aigu, coupé au sud-est par une faille, est la continuation du pli du mont Chauffé. Il présente ce même caractère de masse très redressée, qui caractérise la chaîne des Gastlosen, dans les Alpes. fribourgeoises. C’est sans conteste la continuation du même phé- nomène. | Enfin la Société pénètre dans le vaste synclinal de Flysch de Saint-Jean-d'Aulph; en aval s'élève la barre du massif de la Brèche. M. Steinmann a l’heureuse chance de trouver sur un bloc errant de Brèche supérieure une Huiître du type de l'Ostrea gregaria du Jurassique supérieur. C’est le premier fossile de ce genre trouvé dans la Brèche du Chablais. Excursion du 9 Septembre. La course est consacrée à l'étude du fameux pli frontal plon- geant du massif de la Brèche. | En partant de Saint-Jean, la Société s'élève rapidement sur les pentes du Flysch, dont les couches plongent fortement du eôté de la barre de Brèche supérieure, que l’on ne tarde pas à traverser; puis viennent successivement : les schistes ardoisiers, une bande très étroite de Brèche inférieure, les quartzites du Trias, le Permien, et subitement les couches particulièrement froissées de Crétacique supérieur. On a franchi ainsi une série de couches presque verti- cales, qui cependant n’ont pas racine en profondeur, ainsi qu'en témoigne la coupe que l’on peut faire dans la vallée de Charmy, près Abondance, où l’on voit ce Crétacique passer sous l’ensemble de ces couches redressées, et se perdre dans le Flysch qui précède à l’ouest le massif de la Brèche. C’est donc un pli complètement retourné, un anticlinal dont la charnière est placée comme celle d'un synclinal étroit, qui forme ici le front du massif de la Brèche. La Société s'arrête longuement au col de Brion, où M. Lugeon explique la coupe visible, une des plus tourmentées qu'offre le Chablais. La coupe donnée par M. Lugeon dans son ouvrage sur le Cha- blais (fig. 43 c.), est reconnue exacte. Il y aurait même lieu d'y ajouter encore une petite bande isolée de Brèche, dans les schistes ardoisiers du col. Ainsi, une coupe partant du sommet situé à l'ouest du col de Brion jusqu’au delà du point 1966 présente la succession suivante : EXCURSION DU Q SEPTEMBRE JIX Brèche supérieure. Schistes ardoisiers. Calcaire dolomitique du Trias. Quartzite. Cargneule. Schistes ardoisiers. Bancs de Brèche. Schistes ardoisiers. Permien et quartzites du Trias triturés. Brèche inférieure. Cargneule. Ne Crétacique supérieur. Du col de Brion on domine un cirque torrentiel, dit des Dames- du-Moulin. Les quartzites ainsi que les bancs isolés de Brèche Y pénètrent. Mais, de l’autre côté du cirque, sur l’arète de la Pointe- de-la-Corne, la structure est beaucoup plus simple. En superposant les deux coupes, on peut connaître la vraie nature de cette étrange dislocation (fig. 3). Û F N Pre de JaCorne / (l Ilysch : Fig. 3. — Coupe du pli frontal plongeant du massif de la Brèche. ï Echelle : 1/20.000 environ. C, Calcaire dolomitique ou cargneule ; Q, Quartzites du Trias. On voit que la tête plongeante de quartzites a été complètement isolée de sa racine. Pour se faire une idée de la genèse d’une telle dislocation, il est bon de rétablir l’état qui a précédé celui pendant lequel la striction si considérable a redressé les couches. Il y a un intérêt théorique important dans l'étude de cette coupe du col du Brion. On voit tout d’abord combien la poussée, lors- qu’elle atteint son paroxysme, tend à redresser verticalement les 712 EXCURSION DU OQ SEPTEMBRE couches, puis on voit qu'un terrain qui occupait primitivement un plan continu, comme cela devait être le cas pour le Trias, peut se disposer suivant plusieurs plans qui ne paraissent pas avoir de relations les uns avec les autres ; ainsi des séries verticales peuvent être des séries chevauchantes. En outre, on voit comment des séries de couches redressées, que l’on considère souvent comme un simple régime de plis isoclinaux, peuvent provenir parfois de dislocations les plus étranges. Autrement dit une série isoclinale peut ne pas être toujours formée de plis simples côte à côte. Il peut en être ainsi de séries cristallines très redressées. Fig. 4. — Pli frontal du massif de la Brèche avant la fin de l’arrêt du mouvement de chevauchement (coupe théorique). Les excursionnistes longent ensuite la masse de Brèche infé- rieure aux couches verticales, du point 1966, et retrouvent le Crétacique supérieur de l’anticlinal qui isole la région du Pic de la Corne du reste du massif de la Brèche. En se dirigeant vers le col de Lens, la Société parcourt la coupe complète de la Brèche inférieure et des schistes ardoisiers. Les couches de la Brèche inférieure sont formées par des alternances de bancs de Brèche et de calcaire à Entroques. Dans ces derniers on rencontre quelques tronçons de Bélemnites de type liasique. M. Lugeon attire l'attention sur les nombreux débris de bois sili- cifié que l’on trouve dans le dernier niveau des schistes ardoisiers au-dessus des chalets du Lens d'Aulph, près du col de ce nom. Les Polypiers, que M. Lugeon avait ramassés sous le Roc de Tavaneuse dans la Brèche inférieure, ne sont pas retrouvés, mais MM. Schmidt et Steinmann récoltent, par contre, de très beaux exemplaires de ces mêmes fossiles(Stylina) dans les lapiés de Brèche supérieure qui s'étendent sous les rochers d’Entre-deux-Pertuis !. 1. M. Douvillé avant recueilli en ce point des plaquettes de calcaire siliceux qui lui paraissaient renfermer des traces d'organismes ; l'examen de la roche EXCURSION DU 9 SEPTEMBRE 713 La Société en descendant sur le lac de Montriond coupe la Brèche supérieure, les schistes ardoisiers, et au bord du lac, grâce à une carrière nouvelle, elle constate la présence de la Brèche inférieure invisible en ce point jusqu'à ce jour. M. Reymond demande si le calcaire à Entroques observé hier après le déjeuner appartient bien au Lias, ce faciès étant dans toute la région lyonnaise et jurassienne tout à fait caractéristique du Jurassique moyen. : M. Lugeon répond que des fossiles du Lias moyen ont été trouvés dans ce calcaire à Entroques des Préalpes : on ne peut avoir aucun doute sur l’âge de ces couches. Parmi les fossiles récoltés on peut citer : Lytoceras fimbriatum Sow., Arietites raricostatus Ziet. M. Steinmann a été frappé, dans l'étude que la Société vient de faire des plis des Préalpes, de la singularité que présente le dernier pli rencontré. Tandis que les premiers plis situés près de la plaine sont très réguliers. le dernier pli avant la région de la Brèche est beaucoup plus compliqué : il tient à le faire remarquer à la Société sans en tirer pour le moment aucune conséquence. Il y a dans le dernier pli des Préalpes médianes un changement assez brusque du régime ordinaire des Préalpes, qui ne s’explique pas par le voisinage de la masse de la Brèche, mais qui prépare en quelque sorte la région si curieuse de la Brèche. M. Schmidt voudrait, en laissant de côté la tectonique de la région de la Brèche, s'occuper de la Brèche elle-même et de sa nature pétrographique. Après les descriptions données par MM. A. Favre, Schardt et Lugeon, il a été étonné de constater aujourd'hui que la Brèche est en réalité constituée par une série de calcaires plus ou moins coralligènes, de calcaires d'origine peu profonde, ayant englobé des matériaux plus ou moins roulés et arrondis, provenant de côtes plus ou moins éloignées. Lorsque ces éléments font défaut, on voit apparaître la vraie nature de la roche, comme les calcaires noirs à Entroques de la Brèche inférieure, les schistes de la Brèche moyenne et les calcaires de la Brèche supé- rieure, rappelant tout à fait le «(Hochgebirgskalk » des Alpes suisses. Tous ces éléments n’ont pas une origine lointaine et sont venus de tout près, d’un rivage peu éloigné des mers jurassiques. taillée en plaques minces lui a permis de constater la présence d’un assez grand nombre de Radiolaires (voir B.S.G. F.,[4], I, p. 469, 18 nov. 1901). [ Note ajoutée pendant l'impression]. 714 EXCURSION DU 9 SEPTEMBRE M. Lugeon rappelle ce qu’il a écrit sur la Brèche du Chablais. Pour lui, c’est nettement un faciès côtier et il a déjà déterminé la position de la côte où s’alimentait la Brèche, vers le nord. Il remarque que, en tout état de choses, elle n’a pu se former aux dépens des Préalpes médianes, car certains éléments de la Brèche sont en effet inconnus dans ces Préalpes médianes. Il ajoute encore que dans sa description déjà longue il a largement fait mention des bancs calcaires et calcaréo-schisteux. C’est même l'étude aussi précise que possible de ces calcaires, ainsi qu'il a pu la faire dans ce travail de très longue haleine qu'a demandé le Chablais, qui lui a permis de déterminer la position du rivage qui, en s’écroulant, a formé la Brèche. C'est cette étude détaillée qui lui a permis de réfuter complètement les explications de la formation de ce terrain qu'avaient données Gilliéron et M. Schardt, qui y voyaient des « Klippes » entourées de masses détritiques. Les variations de composition des calcaires ne lui ont pas échappé, quoiqu'’elles paraissent nouvelles à M. Schmidt. L’expression de « Brèche du Chablais » a peut-être laissé croire qu'il s'agissait d’une immense épaisseur de terrains exclusivement détritiques, mais M. Lugeon, en publiant quelques relevés très détaillés et très minutieux de successions de couches, a montré suffisamment, lui semble-t-il, ce que ce terme générique de brèche voulait dire. Cette expression a au moins autant de valeur que celle. de « Hochgebirgskalk » de Escher dont se sert M. Schmidt. Quant à l’âge de cette grande épaisseur de terrain, aucun doute ne peut plus guère régner. L'ensemble formé par la Brèche infé- rieure et ses calcaires à Entroques, ainsi que leur passage latéral aux calcaires schisteux et plaquetés, aux schistes, désignés sous le terme de schistes inférieurs, appartient incontestablement à tout le Lias, du Rhétien au Lias supérieur. Les schistes ardoisiers sont probablement du Jurassique moyen et le niveau de la Brèche supé- rieure, parfois exclusivement formée par des calcaires gris com- pacts, ainsi que M. Lugeon l’a amplement fait remarquer dans son mémoire, appartiendrait au Jurassique supérieur, à moins que même encore du Crétacique inférieur n’y soit représenté. M. Brunbhes fait remarquer qu'à sa connaissance aucun fait d'océanographie n'autorise l'hypothèse d’un transport lointain de gros matériaux par les courants marins et demande si M. Steinmann connaît un point des Océans où une roche analogue à la Brèche se forme actuellement. EXCURSION DU Q SEPTEMBRE 719 M. Steinmann montre que le phénomène des brèches et des conglomérats est un phénomène général que l'on peut rencontrer à tous les niveaux et que, dans aucun cas, on ne connaît le mode de formation de ce sédiment, bien qu'il puisse, comme dans le cas des grès vosgiens, s'étendre sur des surfaces considérables. M. Révil fait remarquer que les calcaires à Entroques de la Brèche inférieure, que l’on a vus en allant du col de Brion aux chalets de Lens, se présentent avec des caractères analogues à ceux des roches du Lias inférieur qui se rencontrent dans le vallon de Roselen, sur le flanc ouest du synclinal dans lequel se termine, par des pointements multiples, le massif amygdaloïde du Mont Blanc. Il regrette vivement de n'avoir pu assister à la première partie de l’excursion, mais ce qui l’a vivement frappé dans les coupes des régions visitées pendant les deux journées de course de Thonon à Saint-Jean-d’Aulph et de cette localité à Morzine, ce sont les difté- rences tectoniques que présentent la région des Préalpes médianes et celle du massif de la Brèche. Dans la première région les plis sont très réguliers et rappellent même ceux du Jura, tandis que dans la seconde les couches offrent des contournements multiples et des superpositions anormales surtout sur le bord frontal. C'est ainsi qu'en montant au col de Brion, on a vu les quartzites du Trias et les couches rouges du Permien reposer sur le Crétacé supérieur avec lambeaux de Flysch. Il lui semble qu’il y a là deux zones à régime bien différent et qu'il y aurait lieu de tenir compte de cette différence — sur laquelle il lui semble qu’on n’a pas assez insisté — dans toute interprétation destinée à expliquer la nature des mouvements qui ont produit les plissements si difliciles à inter- préter des Préalpes chablaisiennes et romandes. Séance de clôture du Mercredi 11 Septembre 1901 PRÉSIDENCE DE M. M. LUGEON, PRÉSIDENT La séance a lieu à une heure et demie, dans la salle à manger de l'Hôtel des Balances, à Taninge. Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance précé- dente. La rédaction de ce procès-verbal est adoptée. M. Lugeon rend compte des excursions des 10 et 11 septembre. Excursion du 10 Septembre. De Morzine, la Société s'élève sur les contreforts morainiques et ne tarde pas à atteindre les deux pointements des Attraix, qui sont étudiés en détail. De là elle se rend par les chalets de Cha- vannes à la Mouille-Ronde, l’un des plus importants gisements de roche éruptive. ; À partir du Chalet du Tournes, le brouillard force les membres de la Réunion à modifier pour la première fois le programme. On abandonne la direction du gisement de serpentine pour longer les crêtes. Cette variante offre un avantage inattendu. En effet, non _loïn du point 1512, la Société rencontre un affleurement curieux de gros bancs de silex, inconnu jusqu'ici. M. Lugeon pense que cette roche doit être probablement liée à celles des klippes de roches éruptives. C’est la première fois qu’une telle masse siliceuse est signalée dans le Flysch du Chablais. Elle abonde par places dans certains points du Flysch du Simmenthal. Aux Bonnes, il est fait une bonne moisson de roches vertes. A la Rosière, le mauvais temps ne permet pas l'étude détaillée de l’affleurement de granite. Excursion du 11 Septembre. Les membres de la Réunion visitent les environs immédiats de Taninge. Dans le vallon du Foron, ils constatent la présence du Flysch, surmonté par le Crétacique et butant par faille contre le Trias du massif de la Brèche. Par une heureuse chance, on peut voir, sur EXCURSION DU II SEPTEMBRE gp | \ la rive droite du torrent, à quelques mètres du Crétacique, un afileurement de Houiller. C'est sous lui que se dirige très nette- ment le Crétacique. Un peu plus en amont, sur la rive droite, la Société examine les débris de Houiller amenés au jour par un puits de recherche récent. On récolte quelques fossiles, en particulier un fragment de tronc de Calamites. Après avoir constaté l'existence de petites failles locales qui ramènent le Trias dans le vallon, les géologues se dirigent vers la butte dite Sur-le-Rocher, pour y voir le quartzite du Trias et les aflleurements de Crétacique. Ces derniers n’ont malheureusement pu être retrouvés ; ils avaient été constatés en 1893, et, depuis lors, la végétation les a probablement recouverts. La constatation de leur existence avait du reste une importance relative, car la présence du même terrain dans la gorge du Foron est amplement suffisante pour démontrer, sous le massif de la Brèche, l'existence des Préalpes médianes à l'état d’une lame de faible épaisseur. Au pied du monticule de Sur-le-Rocher, une constatation intéressante est faite. Des schistes qui n'avaient pu être déterminés jusqu'ici, sont nettement reconnus comme appar- tenant au Lias supérieur (voir Lugeon: La région de la Brèche du Chablais, schistes S, fig. 33). Ils représentent simplement le prolongement de la bande du Lias de Matringe-Prèle (Pointe d'Orchez). M. Révil demande quelles sont les relations qui existent entre les faits observés dans la matinée et les faits observés par la Société dans la zone bordière étudiée précédemment et la zone interne dans la vallée de Champéry. M. Lugeon répond que la zone bordière manque complètement à Taninge comme d’ailleurs à Bonneville. La zone interne du val d'Illiez a également disparu. Pour lui, le Flysch constaté le matin serait le Flysch inférieur à la Brèche, comme le prouverait l'existence sur le Flysch du col de Chatillon, en face de Taninge, de l’autre côté du Giffre, de klippes de Trias, de Lias et de Malm et même d’après M. Douxami, de lambeaux de Brèche du Chablais. M. Douxami demande quelle est l’origine du Glaciaire constaté la veille au départ de Montriond et quels sont les rapports de ces dépôts avec ceux que la Société a déjà étudiés les jours précédents de Thonon à Saint-Jean-d'Aulph. A propos du Flysch du plateau des Gets, d’après M. Lugeon, une partie serait du Flysch supérieur au massif de la Brèche et une partie proviendrait du Flysch infé- ph te EXCURSION DU Ii SEPTEMBRE rieur à ce massif ramené au-dessus de la Brèche par le charriage. Il serait intéressant, à son avis, si la chose est possible, de pouvoir les distinguer: les conclusions, au point de vue de l’origine des blocs de roches cristallines étudiés par la Société ne pourraient être les mêmes, suivant que ces blocs seraient intercalés dans l’un ou l’autre de ces deux Flysch. M. Lugeon répond que les blocs de protogine de Morzine proviennent du glacier du Rhône et signale à la Société l'existence d’un bloc de protogine d’origine glaciaire sur le plateau de Flysch au-dessus de Montriond. Ce bloc a été découvert par M. Tavernier, de Taninge. Il profite de cette occasion pour rendre un juste hommage à la mémoire de ce géologue local, qui, le premier, avait découvert le gisement de granite de la Rosière, dont il avait compris tout l'intérêt et attiré, autant qu'il était en son pouvoir, l'attention des géologues sur ce fait. M. Douvillé a été frappé de l’analogie que présente la coupe de Taninge avec celles qu’il a pu relever aux environs de Kienthal. Il signale aussi la grande analogie qu’elle présente avec les régions de Spiez et du Stockhorn, où la zone bordière et la zone des Hautes Alpes calcaires viennent se rejoindre sous la région du Flysch du Niesen. M. L. Carez prend la parole en ces termes : « Au moment de nous séparer, je suis certain d’être l'interprète de tous ceux qui ont assisté à la réunion, en remerciant chaleureu- sement M. Lugeon de nous avoir guidés d’une manière si intéres- sante dans la région qu'il a étudiée avec tant de persévérance et de succès. En demandant à notre confrère de vouloir bien nous con- duire dans le Chablais, je craignais d’obéir à un sentiment égoïste : désireux depuis longtemps de visiter cette région, pour laquelle tant d'explications différentes avaient été proposées, je redoutais un peu de ne pas être accompagné par un nombre suflisant de nos confrères. L'événement m'a heureusement détrompé, et c’est avec plaisir que je constate l'empressement avec lequel Français et Étrangers ont répondu à notre appel, sans se laisser rebuter par les difficultés matérielles d’une excursion en pays montagneux, ni par l’absence de beaux gîtes fossilifères. € Dans l’œuvre de M. Lugeon, comme dans toute étude analogue, EXOURSTOREp II SEPTEMBRE 719 il y a nécessairement deux parties : l’une qui est l'exposé des faits d'observation, l’autre qui cherche à expliquer les phénomènes ayant amené l’état de choses actuel. « Pour la première partie, aucune contestation ne s’est élevée pendant la Réunion ; nous avons tous rendu un hommage mérité à la sagacité avec laquelle M. Lugeon avait su distinguer les étages et établir les successions dans un pays particulièrement difficile. « En ce qui concerne la partie théorique de l’œuvre de M. Lugeon, nous avons pu constater que plusieurs de nos confrères la considé- raient au début comme n'étant pas étayée de preuves assez nom- breuses et assez solides ; beaucoup hésitaient à admettre la série de phénomènes compliqués que nécessite l’explication de notre savant guide. Mais il m'a semblé que chaque journée de courses amenait une ou plusieurs conversions, et que ceux-mêmes quine se sont pas encore tout à fait rendus semblent hésitants et moins opposés qu'au départ aux hypothèses qui nous ont été exposées avec tant de lucidité. « Pour ma part, je n'hésite pas à dire que, venu avec l’idée que l'imagination avait ‘joué un grand rôle dans les théories de M. Lugeon, je quitte au contraire le Chablais bien convaincu de la justesse des vues qu'il a exprimées. « Je vous propose, Messieurs, de voter les plus vifs remercie- ments à M. Lugeon, mais en même temps de ne pas oublier notre Trésorier, M. Langlassé, qui nous a rendu le service de décharger notre Président d’une partie de l’organisation matérielle de l’exeur- sion. » M. Révil, au nom de l’Académie de Savoie, dontilest membre, et qui a déjà décerné l’un de ses prix au beau travail de M. Lugeon sur le Chablais, et au nom de la Société d'histoire naturelle de Savoie, dont il est président, remercie M. Lugeon d’avoir dirigé une excursion aussi intéressante que celle à laquelle il vient d'as- sister dans cette région du Chablais où M. A. Favre avait con- sidéré ses excursions comme une épreuve de patience. Le massif est en effet particulièrement diflicile à étudier ; il est heureux de constater, comme vient de le faire remarquer M. le Président de la Société géologique de France, qu'il n’y a rien à reprendre aux observations de faits qui restent entières. Pour les théories, si celle relative à la région de la Brèche est admise sans conteste, il avoue qu'il attendra encore de nouveaux faits pour admettre complèle- ment et définitivement celle relative à l’ensemble des Préalpes. Comme Savoyard, il félicite tout particulièrement M. Lugeon 720 EXCURSION DU II SEPTEMBRE d’avoir choisi pour l'étudier d’une façon aussi complète qu'il l'a fait une des plus belles contrées de la Savoie, jusqu'ici beaucoup trop peu et trop mal connue. M. M. Lugeon remercie vivement MM. L. Carez, H. Douvillé et J. Révil de leurs aimables paroles. Il est heureux de constater que le programme a pu être suivi de point en point, et ses indica- tions contrôlées par ses confrères de la Société géologique. Il voit avec plaisir la grande majorité des excursionnistes partager l’idée du recouvrement des Préalpes. D’autre part, si plusieurs des membres de la réunion, et non des moins éminents, ne veulent absolument pas accepter la théorie des grandes nappes recou- vrantes, il ne pense pas qu'il y ait lieu de s’en étonner. Léopold de Buch n’a, en effet, jamais voulu admettre la théorie glaciaire : la théorie des nappes de charriage aura sans aucun doute aussi des adversaires irréductibles. Mais M. Lugeon estime toutefois qu'il sera difficile d'émettre une théorie différente expliquant avec autant de simplicité toutes les difficultés accumulées dans le Chablais. Il n'éprouve aucune crainte sur l'avenir réservé à la théorie du recouvrement. Déjà des faits nouveaux, d’une simplicité étonnante, découverts dans les Alpes bernoïses, sont inexplicables dans une hypothèse différente ou plutôt ne présentent pas même d’ambiguïté possible. M. M. Lugeon tient encore à exprimer ses remerciements aux savants de France qui lui ont fait étudier le Chablais et l’ont puissamment aidé, à MM. Michel-Lévy et Marcel Bertrand, et en Suisse, à son maitre, le président honoraire de la réunion, M. Renevier. Après avoir transmis les remerciements de la Société au Secré- taire et au Trésorier, dont la collaboration zélée a aidé au succès de l’excursion, le Président déclare close la Réunion extraordinaire de 1901. NOTE SUR LE RHÉTIEN ET LE LIAS DU COL DE COUX (VAL D’ILLIEZ) par M. H. PREISWERK !. Après avoir quitté à Morzine la Société géologique, le 10 septem- bre, j'ai été étudier, sur les conseils de M. Maurice Lugeon, l’inté- ressant profil du col de Coux, qui sépare la vallée de la Drance du Biot, de celle de Champéry (val d'Illiez). J'ai pu constater la pré- sence d’un nouveau gisement fossilifère du Rhétien et du Lias de la région de la Brèche du Chablais. A la hauteur du col on voit, au sud, les couches du Crétacé et du calcaire nummu- litique des Hautes Alpes à faciès helvé- tiques formant un grand anticlinal bor- dé par le Flysch. Celui-ci plonge fai- blement au nord entre Vannez (2136 m.) et Bostan (2411 m.) et forme la dé- pression du col. Au nord du col, le Flysch et la masse exotique des Préal- pesformentunesuite continue monocli- L) Æ Fig. 5. — Coupe du bord du massif de la Brèche au col de Coux.— Echelle approximative 1/2.000. 1, Flysch ; 2, Permien (Verrucano) ; 3, Quartzite ; 7) 2 L Fi ae L 4, Cargneule ; 5, Calcaires dolomitiques du nale de sédiments *. Trias ; 6, Rhétien fossilifère. La série de cou- ches en recouvrement commence ici par du Permien (Verrucano) et par les quartzites. Sur ces bancs s'élève un escarpement de car- gneules et de calcaires dolomitiques recouverts par des schistes noirs ‘. Ceux-ci sont particulièrement bien visibles le long d'un 1. Note insérée au Bulletin, par décision du Conseil. 2. Voir Carte topographique suisse, feuille 483, coloriée géologiquement par M. Lugeon (Région de la Brèche du Chablais, pl. VID. 3. LuGeow. La région de la Brèche du Chablais, fig. 40. In. id., p. 50. 922 PREISWERK. — SUR LE RHÉTIEN ET LE LIAS DU COL DE COUX petit sentier montant du col de Coux sur une arète herbeuse, qui, du sommet du Vannez (2136 m.), se dirige vers l’ouest. Dans les schistes on voit quelques intercalations de calcaires noirs, qui deviennent de plus en plus abondantes vers le haut, Dans quelques bancs on voit déjà des brèches: elles font partie, d’après la carte géologique au 1/80.000, du niveau des schistes inférieurs de la zone de la Brèche. Environ à 10 m. au-dessus du Trias on remarque quelques fines traces de sections de fossiles dans les bancs calcaires. Ceux-e1 sont particulièrement riches en fossiles sur le côté nord de l'arête, à quelques mètres au nord-ouest de l'endroit où le sentier atteint la crête. Les couches affleurent ici sur la pente rapide, débarrassées de végétation. J'ai trouvé en ce point de bons exemplaires d'Avicula contorta ainsi que d'autres fossiles nombreux. Je dois à l’obligeance de M. Karl Strübin de Bâle les déterminations suivantes : Cardium rhæticum Mer., Ancmia Mortilleti Stopp., Modiola minuta Gldf., Leda sp. En outre, comme dans d’autres gisements rhétiens de la région, la roche contient de nombreux Polypiers. Dans le voisinage j'ai encore trouvé, malheureusement dans des blocs éboulés, qui proviennent certainement de couches immé- diatement supérieures au Rhétien, des sections de Bélemnites et Pentacrinus tuberculatus Mäll., contenus dans un calcaire argileux schisteux étiré. Ce gisement de Rhétien et de Lias du col de Coux correspond exactement à celui décrit par M. Lugeon à Jutteninge, dans la vallée du Giffre, et au Chalet-Neuf, au nord de Morgins. La découverte de ces couches, qui me paraissent faire partie d'une série bien continue, contribuera à étayer la détermination due à MM. Rene- vier et Lugeon de l’âge du complexe de la Brèche du Chablais et à préciser sa division stratigraphique. LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE par M. Maurice LUGEON,. (PLancues XIV-XVII). SOMMAIRE Introduction. I. — Le pourtour des Préalpes. — 1. Contact des Préalpes et des Hautes Alpes. — 2. Contact des Préalpes avec la région molassique. II. — Les zones tectoniques indépendantes des Préalpes. — 1. Aminecisse- ment des Préalpes vers le sud dans le Chablais. — 2. La zone bordière. — 3. La zone interne. — 4. Influence des plis des Hautes Alpes. — 5. Réfutation de l'hypothèse de l’éventail composé imbriqué. — 6. Existe-t-il trois ou quatre zones indépendantes dans les Préalpes ? III. — Les Préalpes n’ont point de racines. — 1. Plusieurs faits péremp- toires, en faveur de l'absence de racine du massif de la Brèche, sont du même ordre que ceux qui servent à démontrer l'absence de racine des Préalpes médianes. — 2. La racine de la zone interne. — 3. Les Préalpes médianes ne peuvent avoir de racines. IV. — Les grandes nappes des Alpes suisses. Phénomènes semblables à ceux du Chablais. — 1. Quelques mots sur les Klippes. — 2. La tectonique des Préalpes n’est pas propre à cette chaîne ; elle est celle de la presque totalité des Alpes calcaires suisses. — 3. Enchaînement des Préalpes et des Hautes Alpes calcaires. — 4. Les plis réguliers des Préalpes médianes sont des éléments de constitution des nappes de recouvrement. — 5. Les Alpes calcaires à faciès helvétique sont formées par des nappes, tout comme les Préalpes : A). Le problème du double pli glaronnais ; B). Les nappes supé- rieures glaronnaises ; C). La nappe inférieure glaronnaise ; D). La nappe du Falknis ; E). La nappe du Rhäticon et les Alpes de Bavière, V.— Le mécanisme des grandes nappes alpines.— 1. À propos du Flysch. — 2. Les remarques stratigraphiques de M. Haug. — 3. Le mécanisme des grandes nappes alpines. ; 724 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Introduction En août 1891, mon maître, M. le professeur Eugène Renevier, de Lausanne, et le professeur Auguste Jaccard du Locle, furent convoqués dans le Chablais par M. Michel-Lévy, directeur du Service de la carte géologique de France, pour apporter quelques éclaireissements à un point douteux de la géologie de la région. Les deux savants suisses différaient d'opinion sur l’âge des car- gneules et du gypse, que l’un d’eux considérait comme jurassiques, tandis que l’autre les attribuaït au Trias. De plus, à cette époque, une autre école plaçait dans l’Eocène les mêmes roches de la même région. Du 13 au 15 août la petite troupe, dont je faisais partie, par- courut les montagnes comprises entre Samoëns et Morzine. Les observations rassemblées ne réussissant pas à mettre d'accord les savants suisses, je fus chargé d'étudier plus à fond ce problème difficile. Ce ne fut pas sans quelques appréhensions que je. m'apprétais à parcourir une région dont Alphonse Favre disait : «A l'exception de quelques localités privilégiées, j'ai, en général, regardé mes excursions en Chablais comme une épreuve de patience ». Cette étude fut pour moi pleine de surprises. M. Michel-Lévy venait de décrire les pointements de roches éruptives des montagnes des Gets !, au centre d’une immense cuvette de Flysch, dans une position des plus étranges. Cette même année (1891), je réussis à subdiviser les grandes masses des Brèches, substratum de ce Flysch ; puis, en 1892, vint la découverte, en compagnie de M. Marcel Bertrand, du Crétacique sous le Car- bonifère de Taninge, et quelques semaines plus tard je pouvais constater la disparition des Hautes Chaînes calcaires sous les Préalpes. Les idées de Suess pénétraient à ce moment en France ; comment ne pas songer à les appliquer, armés comme nous l’étions de faits si nouveaux ? ? Les pointements éruptifs des Gets n'étaient- ils pas les débris, les sommets écrasés et étirés d'un horst? Dans les temps jurassiques ce môle n’aurait-il pas formé, par écroule- 1. Micuer-Lévy. Etude sur les pointements de roches cristallines qui appa- raissent au milieu du Chablais, des Gets aux Fenils. B. S. C. G. F., n° 27, 1892. >. M. Lucrox. Région comprise entre la partie moyenne de la vallée du Gilfre et le haut des vallées de Bellevaux et du Biot (Haute-Savoie). B. S. G: F., (8), XX,-p- 334. DES ALPES DU CHABLAÏS ET DE LA SUISSE 725 ment, cette grande masse de Brèches qui semblait l’entourer? Et, lors de la poussée alpine, le horst hercynien formant buttoir n’auraitil pas forcé les chaînes du Chablais à se mouler sur lui, alors qu’il se déversait sur les Hautes Alpes? Telle fut une pre- mière conception théorique. Sur ces entrefaites, M. Marcel Bertrand ! avait étudié la mon- tagne la plus occidentale du Chablais, le Môle. Elle constituait pour lui la prolongation des plis des Hautes Alpes calcaires de la rive gauche de l’Arve. C'était, semblait-il, un exemple grandiose d’une de ces grandes « Schaarung », d’un de ces grands angles ren- trants des plis, semblable à celui signalé par M. Suess dans les montagnes de l'Inde. Déjà en 1884, M. M. Bertrand “ avait émis l'hypothèse des énormes masses de recouvrement poussées de l'inté- rieur des Alpes vers le nord. Son étude sur le Môle, dominée par l'idée du rebroussement des plis, ne lui apporta cependant aucun argument en faveur de sa première conception. 1l en résultait pour moi une plus grande confiance dans l'hypothèse du Horst. En 1893, mes recherches ne firent que démontrer l’étrangeté d’allure de ces montagnes. Partout, sous la grande nappe du massif triaso-jurassique de la Brèche, je trouvais le Flysch! Alors le fameux horst hercynien avait-il non seulement résisté à la poussée alpine, mais encore forcé son enveloppe à se déverser de tous les côtés ? Certainement, les faits étaient bien démonstratifs. Et, comme, en 1893, la Société géologique suisse fit une course dans le Chablais, dont j'eus la direction pendant quatre journées, il fallut bien essayer de donner une théorie et c'est alors que fut émise l'hypothèse du pli à déversement périphérique, dont la con- ception devait me poursuivre dans la suite *. Le célèbre pli en champignon semblait avoir pour lui bien de la vraisemblance, puisque je pensais montrer, dans le val d'Illiez, un double pli, analogue à celui de Glaris, alors à peu près incontesté. En présen- tant cette hypothèse à la réunion de la Société helvétique à Lau- sanne, j'avais indiqué, sans la discuter, une hypothèse que M. Marcel Bertrand m'avait signalée verbalement, pendant une courte halte, au chalet de Lens d’Aulph : «un jour l’on dira peut-être que le massif de la Brèche est un lambeau de recouvrement un peu plus grand que d’autres ». L'invraisemblance de cette opinion 1. M. Berrrans. Le Môleet les collines du Faucigny. B.S.C.G.F., n°32, 1892. 2, M. BERTRAND. Rapport sur la structure des Alpes de Glaris et du bassin houiller du Nord. B.S G.F., (3), XIL, p. 318. 3. M. Lucxon. Région de la Brèche du Chablais, son rôle vis-à-vis des Préalpes extérieures, etc. Ecl. geol. Hele., IV, p. 110. 1e" Juin 1902. — T, 1er, Bull. Soc. Géol. Fr. — 47 726 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT m'avait fait développer avec d'autant plus de force l'hypothèse du pli circulaire. Je pus convaincre alors M. Schardt de l’âge juras- sique de la Brèche du Chablais. En novembre 1803, inspiré par l'hypothèse de 1884 de M. Marcel Bertrand, connaissant sans doute les résultats principaux de mes études tectoniques, car j'avais été le premier à donner une vue d'ensemble d'une des unités tectoniques préalpines, M. Schardt amplifia en la développant l'hypothèse des grandes masses recou- vrantes. Il s’appuyait sur les faits nouveaux que les géologues alpins avaient accumulés depuis 1884. Toutes les montagnes du Chablais sont les restes les moins morcelés d’une immense nappe de charriage !. M. Schardt abandonnaiït ainsi complètement l'hypo- thèse qu'il venait d'émettre ? en 1891 et 1893. La géologie du Chablais entrait dès cette époque dans une phase nouvelle. La conception de la nappe recouvrante me parut d’abord inadmissible. Comment abandonner du jour au lendemain l'hypo- thèse qui paraissait la plus simple! Mais déjà après la campagne de 1894, je ne doutais plus de l'absence de racine sous le massif de. la Brèche et je présentai alors une hypothèse intermédiaire ?. De cette théorie peut-être trop délaissée dans la suite, quelques lignes d'ordre stratigraphique méritent d'être prises en considération. En 1895, de retour d’une campagne dans les montagnes exotiques des Annes et de Sulens, en Savoie, j'étais à peu près convaincu du recouvrement général des Préalpes superposées à des terrains plus jeunes qu’elles. Les faits observés dans ces Ælippes avaient seuls amené une conviction que les arguments alors trop incom- plets de M. Schardt n'avaient pu étayer jusqu'à ce jour #. En rédigeant mon mémoire sur le Chablais pendant l’année 1895 (Les planches ont été dessinées en 1894-1895, à une époque où je ne croyais pas à la possibilité du charriage), je m'aperçus que tous les faits étudiés étaient décidément contraires à l’hypothèse du ph circulaire ou de l’éventail imbriqué. 1. H. ScnArDT. Origine des Préalpes romandes. Zclogæ geol. Hele., IN, P. 149, 1893. - 2. H. ScxArpr. Excursion de la Société géol. suisse, etc. Eclogæ geol. Helw., IL, p. 528, 1890-1892. — Ip. Coup d’œil sur la structure géologique des envi- rons de Montreux. Bull. Soc. vaud. Sc. nat., XXIX, p. 241, 1893. “ M. LuGeon. Sur l’origine des Préalpes romandes. HF Soc. vaud. Se. , XXXI, p. xxx, 1895. du “Je n’ai eu communication d'aucun document inédit provenant de M. Schardt ; il n’a remis seulement quelques échantillons de roches de la région même que je venais d'étudier, ce qui n’était guère de nature à exercer sur mes opinions une action décisive. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 725 L'idée première du horst a donc été pour moi utile, ce fut une garantie, psychologiquement expérimentale. Ces faits, qu'une idée préconçue aurait pu dénaturer, venaient, au contraire, à l’appui de l'hypothèse des grandes nappes charriées, lorsque j'essayais pour la première fois d’en faire une synthèse complète. Les faits tecto- niques surtout ont fait ma conviction, tant leur valeur est supé- rieure à celle des arguments stratigraphiques. En terminant mon ouvrage !, où j'ai cherché à faire preuve de la plus grande impar- tialité, ma récapitulation fut influencée par l'autorité de mes maîtres de France. Ayant vu en trois années se succéder tant d'hypothèses et considérant ce qu'il restait encore à faire pour étayer solidement l'hypothèse du charriage, je n'ai pas osé conclure. Quelques mois plus tard, après avoir pesé tous les arguments, je devenais et j'allais rester un défenseur fervent de la théorie des déplacements à distance de fragments de la couverture sédimen- taire de l’écorce terrestre ?. Depuis, ma conviction n’a fait que se consolider. Ainsi, dans ces quelques années, la géologie alpine a évolué avec une rapidité rappelant celle des temps où, dans un autre ordre d'idées, Buckland et Brongniart pénétraient dans les Alpes et où Studer faisait ses premières campagnes. Aujourd'hui, après cinq ans de nouvelles recherches dans les Alpes, je pense être à même de modifier la théorie que j'ai déve- loppée, ou, pour mieux dire, je crois pouvoir en proposer une autre, dans laquelle le problème du Chablais n’est qu’un des fac- teurs. Ce n’est plus une partie du versant septentrional de la chaîne alpine qui a marché vers le nord en grandes nappes, c’est presque l’ensemble du versant qui regarde le nord qui est charrié. Je vais essayer de développer dans ces pages la thèse suivante : 1° le front nord de la chaîne alpine, de l’Arve à Salzbourg, est formé par de grandes nappes superposées, qui couvrent complètement le vrai front autochtone caché en profondeur ; > le phénomène des grandes nappes se propage dans les régions profondes des gneiss. Je ne considère ce travail que comme une note préliminaire. T1 est peu probable que je puisse donner la synthèse définitive, mais j'espère ouvrir ainsi une voie nouvelle à mes successeurs. 1. M. Luceon. La région de la Brèche du Chablais. B. S. C. G. F., VII, n° 49, 1895-1896. 2. M. Luceow. Les grandes dislocations des Alpes de Savoie. Bull. Soc. vaud. Sc. nat., XXXII, p. xxXVI1, 1896. 928 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT I. — Le pourtour des Préalpes Là où les Alpes subissent leur grande courbure qui, de la direction française sud-nord, les amène dans la direction suisse ouest-est, un ensemble montagneux, tout autre par son aspect que ceux qui l'avoisinent, dépasse en deux saillies concentriques la ligne frontière assez régulière de la grande chaîne. Ces bourrelets proéminents, localisés entre l’Arve, le Rhône et l’Aar, constituent les Préalpes : d'une part les Préalpes du Chablais et d'autre part les Préalpes suisses. 1. — ConraACr DES PRÉALPES ET DES HAUTES ALPES Si vers l'extérieur l’étrangeté de cette zone du Chablais apparaît au premier coup d'œil, il en est encore de même dans l'intérieur. Une ligne de cols très bien marqués sépare les Préalpes des Hautes Alpes calcaires. Celles-ci, qui forment le front des Alpes, aux deux extrémités des Préalpes, sont relayées par celles-là et s'étendent en arrière d'elles. Presque partout, sauf en avant du massif des Diablerets, les plis des Hautes Alpes disparaissent sous les terrains plus anciens des Préalpes. Les deux zones en présence diffèrent non seulement par les terrains qui les consti- tuent, mais encore par les dislocations qu’on y découvre. Deux genres de faciès sont en présence, deux styles tectoniques se font vis-à-vis. Tous les auteurs sont d'accord sur ce point. Le problème stratigraphique et le problème tectonique de cette dualité deman- dent à la fois une solution. Cherchons tout d’abord à résoudre les questions relatives aux dislocations, et délimitons maintenant, dans ce sens, le domaine préalpin. Malgré la position singulière des Diablerets, on peut établir une première loi : Les plis des Hautes Alpes calcaires disparaissent sous les Préalpes. Marchons de la vallée de l’Arve vers celle de l'Aar. L’anticlinal droit de Cluses, appartenant au régime des Hautes Alpes, s'enfonce sous le Flysch de la prolongation nord du Désert de Platé. Or, directement sur le Flysch qui recouvre ce pli, s'étendent des lam- beaux de terrains plus anciens de Trias, appartenant au massif du Chablais. Ainsi qu’il résulte des travaux de Maillard, de M. Ritter et des miens, ce pli semble ressortir à Barmaz dans la vallée de Champéry. Entre ces deux points, le pli du Bostan s'enfonce, près de Samoëns, sous la masse de la Brèche du Chablais (fig. 2, pl. XIV). Dans la vallée du Rhône, le phénomène est d’une ampleur 120 DE LA SUISSE ET urassiques de Trévèneusaz, on 1as0-] e DU CHABLAIS DES ALPES randiose. Sous les masses tr voit sortir deux plis des Hautes Alpes, à Collombey et à Muraz (fig. x, pl. XIV). © Le] 0 ‘000'‘001/1 2[[2U9H — ‘UBIIANJY PUEI)-SOOION op Ju Jisseur np o9ss1d J9 ogyonos oddeu ej op snssop-ne ‘surdeoad sure) so] suep sJororqeI( Sop oddeu er op quexqouod uto) ‘sodpy soinerf sop 19 Sodpegiq Sop 198009 — "c ‘SA £ 579557 cp 109 G196 “0 * GI z CC mblre 2 210046) WUOJ] ENT cRpurru}puneg 6391 “s UBOf" 191 979] FX zeuueAoAe] nn *000"001/1 9[[2 424 ‘SATOION 9P AU2Q EI 9P 1uPAB uo sodjearqg sop J9 sodjy Somnepf Sop 1983009 np odn09 — ‘1 ‘STA wo HV VS = 7 MAS a TGS: NS SSS jeyuoIY TT \ \ \\reusf Qu D} à terre Li \ SSSR N (il \ L NN NN ÿ V7 LE 2 ï EE _——S — or ES Gen > TN {my ep oe FEES aa AS AT 086% PRCIGIE ET PAGJEA84) 53 S9[2L0N 9P F9. LS Ses 5e RS Re on t : Dans la grande ici, se complique entre le Rhône jusqu ut être suivie sur la feuille XVII, au 100.,000°, de la si simple énomène » En complétant en un seul point la carte de M. Renevier !, nous pouvons cependant nous assurer de sa continuité, 1. Cette description pe Carte géologique suisse, légèrement modifiée comme sui Le ph et les Diablerets. 730 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Je tiens, avant d’aller plus loin, à rendre un juste et légitime hommage à mon maître, l’auteur de la Monographie des Hautes Alpes vaudoises. Les déductions nouvelles qui vont être déve- loppées, je les dois au travail de M. Renevier, tant à son livre, qu'à sa carte au 1/50.000. Sans ces œuvres, où les faits ont été accumulés avec une grande impartialité, il ne m'aurait pas été possible de définir si rapidement les dislocations d'ensemble de ces montagnes. Dans la région des Alpes de Bex, les Préalpes sont limitées par une écaille de Néocomien à Céphalopodes, reposant sur le Flysch des Hautes Alpes. La superposition est évidente dans les collines de Chiètre, où le monticule de la Tour du Duin, constitué par ce Néocomien, repose sur le Flysch, en formant un petit lambeau isolé (fig. 1). Ce lambeau n’est qu'un fragment de lécaille qui remonte jusqu'aux hauteurs de Javernaz. Lorsque l’on est placé sur les collines de Chiètre, on voit très bien le flanc normal infé- rieur du grand pli couché de Morcles former un grand genou sous le Flysch qui supporte l’écaille. Si maintenant nous étudions une coupe un peu plus interne (fig. 2), nous constatons que le grand pli couché de Morcles s’est abaissé considérablement. Le Flysch du noyau synclinal a dis- . paru ; il est caché dans la profondeur, et en avant de la charnière du pli couché, charnière si admirablement visible dans l’arète d'Argentine !, nous continuons à constater le repos du Néocomien étendue de Néocomien qui est au nord du massif de la Dent de Morcles, de même que dans celui qui forme les collines de Chiètre (collines isolées dans la vallée du Rhône, entre Lavey, Chatel et Bex), il y a lieu de prolonger la bande de Flysch, qui longe le pied d'Argentine et passe par Ausannaz, jusqu’à la Rosseline et de là par les ravins qui descendent sur Chatel, jusqu'aux coliines de Chiètre. Cette bande de Flysch sépare donc complètement les terrains des Hautes Alpes de ceux des Préalpes (Voir E. Renxvier. Mono- graphie des Hautes Alpes vaudoises, p. 451, 452). La description peut être aussi suivie sur la Carte géologique des Alpes vaudoises à 1/50.000, par M. RENEVIER. 1. C’est le fameux phénomène que M. Renevier a décrit sous le nom de torsion hélicoïdale des couches, parce que les couches sont renversées sous le Lion d'Argentine (RENEVIER, loc. cil., coupe n° 9), verticales plus loin et normales au col des Essets, sous la tour d’Anzeindaz. La torsion hélicoïdale n’est qu’une apparence trompeuse due à l'érosion, qui a coupé la charnière obliquement à sa direction. Si l’on prend une ligne oblique à l’axe du pli, on peut évidemment croire à la torsion, mais si l’on a soin de suivre une ligne qui soit un lieu géométrique par rapport à l’axe du pli, c’est-à-dire une paral- lèle à cet axe, on s'aperçoit qu’il n’y a pas torsion. M. Renevier s’est expli- qué plus tard à propos de ce plissement : «L’affleurement urgonien présente ainsi une apparence de torsion hélicoïde qui résulte de l’obliquité des plis par rapport à l'érosion, » (E. Renevier. Excursion de la Soc. géol. suisse dans les Alpes vaudoises, p. 91). ‘ DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE à Céphalopodes sur le même Flysch Hautes Alpes. Une coupe un peu plus interne encore nous montre cet enfouisse- ment graduel du pli de Morcles : on ne voit plus à la surface du sol que le flanc normal supérieur du pli (coupes 6 et 7 de M. Renevier). Ce flanc nor- mal est lui-même plissé par des plis de forme jurassienne ayant déjà une assez large amplitude. Ces plis ont longtemps caché la vraie nature du plisse- ment profond, qui est tou- jours le grand pli couché de Morcles, peut-être plus atténué, mais toujours existant (fig. 3, coupe AA). Les études de M. Ritter ! nous ont montré que le grand pli couché de la Dent du Midi ne s’étei- gnait pas si rapidement qu'on le pensait vers le sud-ouest. Il en est de même du pli de Morcles vers le nord-est. Il n’est pas remplacé, ainsi que le pense M. Haug *, par une série de plis droits. Ceux- ci ne sont que des aceci- dents de la couverture du pli principal, qui reste le grand pli couché de la Dent du Midi-Dent de 1. E. Rirrer. La bordure sud-ouest du Mont-Blanc. B. S. C. G. F., IX, 1897-1898. us n Tour S'Martin S) NS $ & S > : ! So S À À lo ES N | | 2. Ô 15) LS ll ù ne d Ô QU à è \K SI 5 "«Ÿ ‘à [7] “Se sl 5 9... | so & ES c 9 % DoTe A2 CA | d NERESCES \ £ \\ ol \ n \ ASS | \ Ÿ Ni | uw \ S | = \ Q NY a l KA ; 1 NS STRES NE | DNS [l ESS | è | R à © Len À Fig. 3. — Les trois grandes nappes superposées des Hautes Alpes. Les plis frontaux sont en retrait les uns par rapport ou le Nummulitique aux autres. Les deux nappes supérieures recouvrent l’écaille de Néocomien à Céphalopodes des Préalpes. — Echelle 1/100.000. — A cause de l’inflexion des nappes dans le sens opposé à l'observateur, la coupe BB a été relevée de 500 mètres. Les coupes se présentent done comme si la grande inflexion des nappes et de leurs plis n'existait pas. I Co ei er (go) un 2. HauG. Etude sur la tectonique des Alpes suisses. B. S. G. F., (3), XXIV, p. 560, 1896. 732 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Morcles. L'écaille de Néocomien à Céphalopedes : repose donc tour à tour sur le flanc normal inférieur du grand pli (fig. 1), c’est- à-dire forme pour ainsi dire son noyau synelinal, puis en avant de la charnière, enfin à la Tour d’Anzeindaz et plus loin, sur le flanc normal supérieur ! (fig. 2). La loi du repos anormal des Préalpes sur les Hautes Alpes ne présente donc en avant du massif de Morcles aucune exception. Cependant, sur l’écaille de Néocomien à Céphalopodes s'étend le grand massif des Diablerets, qui relaye le massif de Morcles. Nous devons cette notion du relayement à M. Haug. C'est lui qui a signalé pour la première fois l'importance de cet accident consi- dérable, en se basant sur les faits accumulés avec beaucoup de rigueur par M. Renevier. Mais mon explication diffère de celle donnée par mon savant collègue !. J'ai déjà indiqué très sommai- rement ma manière de voir ?, Je vais la développer plus ample- ment, afin de montrer que le repos anormal des Préalpes est indiscutable. Là encore ce sont les érosions qui viennent troubler la nature . pourtant si simple du phénomène. M. Haug a voulu voir dans les Diablerets des plis à direction N.E.-S.0., déversés à l’ouest sur le massif de Morcles ; celui-ci — je viens de le faire voir — doit être considéré, dans son ensemble, comme un grand pli couché, agré- menté de plissements secondaires de la carapace du flanc normal supérieur. Pour moi, le massif des Diablerets forme dans sa totalité un grand pli couché, de la même nature que celui de Morcles et simplement superposé à ce dernier. Sur le grand pli couché de Morcles et de la Dent du Midi il a dû exister un deuxième pli tout aussi considérable, maïs il a été entiè- rement détruit par l'érosion. Comme le noyau eristallin de la prolongation des Aïguilles-Rouges, sur lequel repose le pli de Morcles, s'enfonce vers le nord-est ?, sitôt que les altitudes devien- nent assez basses, la massedu pli supérieur occupe alors la surface du sol, couvrant complètement et définitivement le pli inférieur, et couvrant en même temps avec ce dernier l'écaille de Néocomien à Céphalopodes, ainsi que l’a du reste très justement remarqué M. Haug. = Etudions cette question en détail : 1. E. Hauc. Etude sur la tectonique des Alpes suisses. B.S. G. F., (3), XXIV. 2. Luceon. Recherches sur l’origine des vallées des Alpes occidentales. Annales de Géographie, vol. X, p. 415, 1891. S41D id pl 37, ptT4 DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 199 M. Haug, dans la carte tectonique qui accompagne son travail, se basant sur les travaux de M. Renevier, fait décrire aux char- nières des plis des Diablerets des sinuosités à concavité dirigée vers l’est. Appuyons-nous sur ces mêmes travaux. La direction vraie du synclinal de la Pointe de la Houille est à peu près S.O.-N.E. En effet, en examinant la grande paroi des Diablerets qui domine Anzeindaz sur la photographie de l’ouvrage classique de M. Renevier !, on voit cette paroi orientée ouest-est, à peu près comme le pli. Si celui-ci est déversé vers le nord, sa charnière doit être, cela est évident, coupée très obliquement par la paroi; c’est ce que l’on constate d’ailleurs en examinant la lon- gueur de l’aflleurement de l'Urgonien de la charnière. De quel côté le pli se continue-t-il, sinon vers le sud-ouest, c'est-à-dire au-dessus. du massif de Morcles? Or M. Haug admet que ce pli a une direc- tion nord-sud. D'où peut provenir une telle différence d’interpréta- tion ? M. Haug se base sur une coupe de M. Renevier (cliché 24, p- 211; reproduit par M. Haug, fig. 4), où l’on voit le pli en question déversé non seulement vers l’ouest, comme le voudrait M. Haug, mais même vers le sud. À cette interprétation des coupes de M. Renevier opposons M. Renevier lui-même ; dans la coupe 5 de son ouvrage, il dessine ce même pli très nettement déversé et même plongeant vers le nord. Ge cliché est le résultat d’une double erreur graphique, très excusable, qui a échappé à l’auteur, celui-ci n’ayant guère eu en vue par ce croquis, ainsi qu'il résulte de la lecture du texte, que de fixer exactement la position des couches fossili- fères. Si l’on essaye de faire la même coupe nord-sud, on constate que le pli s'ouvre au nord, puisque la charnière synelinale se trouve dans la paroi qui regarde vers le sud ! (voir la photographie de M. Renevier). De plus, l'erreur est double, comme je l'ai dit plus haut, car l’auteur ajoute dans ce même croquis un anticlinal couché vers le sud. Or, si dans sa coupe n° 5, M. Renevier ne se prononce pas sur ce point, la photographie citée plus haut nous enlève toute incertitude. Ne voit-on pas à droite un anticlinal de Malm coupé, grâce à un contrefort (voir la carte géologique des Alpes vaudoises au 1/50.000), transversalement à sa direction ! Or c’est vers le nord que regarde exactement cette charnière. Où pouvait donc se con- ünuer ce pli, sinon vers l'ouest, c’est-à-dire par dessus le massif de Morcles ? L'on pourrait faire le même raisonnement avec le petit synelinal de Culan, avec l’anticHnal de Chatillon et du Coin 1. E. RENEVIER. Monographie des Hautes Alpes vaudoises, PI. IL. 534 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT (fig. 2). Cela suffit pour démontrer que les plis de la Lizerne (Mont Gond) ne sont pas déversés vers l’ouest, que ce ne sont pas de simples anticlinaux déjetés, mais que c'est l’ensemble d’un très grand pli couché vers le nord-ouest, formant toute la masse des Diablerets. La Lizerne a coupé le pli par une vallée descendant suivant une ligne à peu près parallèle à la ligne de plus grande pente de la surface moyenne du grand pli couché. C’est une vallée transversale d'un genre spécial. Elle s'écoule en entamant les plis de la nappe supérieure du grand pli couché de Morcles, dont le noyau synclinal est caché en profondeur, en tranchant en même temps entièrement, dans sa partie supérieure, toute la nappe des Diablerets, du Flysch au Trias, parallèlement à la direction de poussée. C’est donc une vallée à la fois transversale et monoclinale ! J'ai montré que c'était là la disposition générale des vallées alpines dans les grands plis couchés !. Partout semble régner la même harmonie dans ce dédale apparent des Alpes. Et de même que l’on pourrait, dans la vallée de l’Arve, construire les courbes de raccord des plis («Luftlinien ») transversalement à la vallée, si l'on ne possédait pas les importants travaux de M. E. Ritter, de même pourrait-on commettre la même erreur dans le cas qui nous occupe. De cette démonstration, montrant que la charnière du noyau jurassique du pli est tournée vers le nord-ouest, il résulte que tout le pli a été poussé vers le nord-ouest. Ainsi la masse des Diablerets forme bien un grand pli couché superposé à celui de Morcles (fig. 3). Quand j'aurai terminé l’étude des Alpes qui s'étendent des Dia- blerets à la Kander, je donnerai de ces faits une démonstration absolue, si la courte esquisse ci-dessus laisse encore subsister des doutes. | ï Aux Diablerets, du reste, nous retrouvons absolument les mêmes allures tectoniques que celles qui ont été décrites par M. Ritter dans le Mont Joly. Le grand pli couché des Diablerets n’est peut- être que la réapparition du pli VI de M. Ritter, pli supérieur au pli de la Dent du Midi-Dent de Morcles ; ce pli VI «très manifeste sur les deux versants du massif de Platé, disparaît plus loin au nord-est, enlevé par l'érosion » ?. C’est lui, ou son homolôgue, que nous retrouvons dans la nappe des Diablerets, sitôt que les alii- tudes de la grande zone d’abaissement des plis entre les massifs des Aiïguilles-Rouges et du Finsteraarhorn sont devenues suffisam- 1. Lucron. Recherches sur l’origine des vallées des Alpes occidentales. Ann. de Géographie, p. 409. 1907. 2. E. Rirrer. Le massif du Haut Giffre. B. S. C. G. F.,t. X, p. 21, 1898-1899. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 70 ment basses pour qu'il ait été respecté par l'érosion. Aïnsi la complication étrange qui se présente dans le contact des Préalpes et des Hautes Alpes, dans les environs des Diablerets, s'explique facilement si l’on fait intervenir le grand pli couché qui n'avait pas encore été défini jusqu'à ce jour. . Ce pli pénètre comme un coin dans la partie interne des Préal- pes (fig. 2). À Anzeindaz, en effet, le Néocomien à Céphalopodes s'enfonce dans la direction de la grande paroi des Diablerets, tandis : qu à Taveyannaz le Dogger repose sur les grès verts éocènes. C'est donc grâce à la grande entaille du Pas-de-Cheville, due à l'érosion, que nous pouvons à la fois connaître l’existence du grand pli couché des Diablerets et la pénétration si profonde sous ce pli des Préalpes, représentées ici par l’écaille de Néocomien à Céphalopodes. Plus à l’ouest, à Sergnement, les grès de Taveyannaz du Nummulitique reposent même sur une écaille de Trias. Si cette profonde dépression du Pas-de-Cheville n'existait pas, rien, à la surface du pays, ne nous indiquerait l'existence de la grande nappe des Diablerets, de même que rien à la surface du flanc normal du pli de Morcles, lorsqu'il disparaît sous le pli des Diablerets, ne nous révèle l'existence de sa continuation en pro- fondeur. Nous n’y voyons que des plis simples, à peine déjetés, même droits. Ce n’est qu'au delà de la grande zone d'abaissement, d'ennoyage des plis, lorsque celle-ci se relève en avant du Balm- horn. que l’on peut espérer voir ressortir le pli de Morcles. Dans quelques années je serai à même, je l'espère, de m'expliquer sur cette hypothèse, qui peut paraître aujourd’hui hasardée. Elle se base sur des données intéressantes, que je possède déjà, mais elle a surtout pour elle l'appui que lui donne la persistance du phéno- mène des grands plis couchés, amorcé par M. Ritter dans le Mont Joly et que je poursuis jusqu’à la Kander. Ainsi que le montre la figure 3, la charnière du pli des Diable- rets dépasse de beaucoup celle du pli de Morcles. Nous verrons plus tard l'importance considérable de ce fait. Mais ce n'est pas tout ; lorsque l'on observe les paroïs du flanc droit du grand cirque du Creux de Champ, situé en avant des Diablerets, on voit un grand pli couché de Néocomien, dans le noyau duquel est taillé le Sex Rouge (fig. 3, coupe B). M. Renevier a très nettement dessiné, sur la carte, ce pli!, qui, au premier abord, semble faire partie de la nappe des Diablerets, comme une sorte de pli supérieur un peu plus avancé. En réalité, ce n'est 1. RENEVIER., Monographie des Hautes Alpes vaudoises, cliché 40, p. 266. 736 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT point le cas. En effet, si l'Urgonien renversé de ce pli devait rejoindre l’une des barres urgoniennes de la paroi nord des Dia- blerets, ce ne pourrait être que celle qui couronne le sommet de cette dernière montagne. Or il ne peut en être ainsi, puisque les Diablerets, au lieu d’être recouverts par du Néocomien, ce qui, dans cette alternative, serait indispensable, présentent au contraire des lambeaux de Nummulitique (au sommet et à la Tour de Saint- Martin). Ainsi toute la masse du Sex Rouge forme la téte anti- clinale ou, si l’on veut, le pli frontal d'une troisième nappe superposée à celle des Diablerets ! Comme cette dernière, comme celle de Morcles, cette nappe ne se révèlerait pas à la surface du pays, si de profondes entailles ne nous démontraient son existence. Les coupes du Sanetsch publiées par M. Renevier ne montrent en effet que des plis déjetés, analo- gues à ceux que montre la carapace, c’est-à-dire le flanc normal, _des nappes des Diablerets et de Moreles. C’est le Creux de Champ qui, entaillant si profondément la montagne, nous dévoile sa curieuse structure. Les plis du Schlauchhorn, du Sanetsch, et, plus loin, les plis du Wildhorn et du Wildstrubel ne sont que les détails superficiels d’une nappe de recouvrement considérable. Où s’amorce la troisième nappe dont nous venons d'établir l'existence ? C’est dans le Mont Gond que nous trouvons le noyau jurassique. En effet, le Nummulitique et l'Urgonien, qui forment le couronnement des Diablerets et les lapiés de Zanfleuron, dispa- raissent tour à tour, près de Miet, sous le Néocomien du Mont Gond. Ce terrain passait done au-dessus des Diablerets pour rejoindre le pli plongeant du Sex Rouge (fig. 3, coupe B). La démonstration est encore plus rigoureuse si nous suivons le Néocomien du Sex Rouge par l'Oldenhorn, le Sanetschhorn, le col du Sanetsch, pour le poursuivre jusqu’au Mont Gond. Il y a toujours continuité. Or, dans la dépression que représentent les lapiés de Zanfleuron, entourés de montagnes néocomiennes, nous trouvons le Nummulitique reposant normalement sur l’'Urgonien. Ceci serait inexplicable si le grand pli couché dont je pense avoir établi la réalité n'existait pas. Nous avons vu que la nappe des Diablerets dépassait celle de Moreles ; celle du Mont Gond-Wildhorn dépasse à son tour celle des Diablerets. J’insiste dès maintenant sur la régularité de ce « déferlement » vers le nord, toujours plus accusé au fur et à mesure que nous montons dans les nappes supérieures. Nous en ürerons bientôt un argument d’une puissance considérable en faveur de l’origine lointaine des Préalpes romandes. er: DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 797 A partir du Creux de Champ, c’est la nappe du Mont Gond qui vient en contact avec les Préalpes. Cette disposition ne cesse plus jusque dans la vallée d’Adelboden et sans doute jusqu'au lac de Thoune. La nappe s'enfonce sous les Préalpes avec une régularité qui ne laisse aucun doute sur sa nature. M. Quereau ! l’a montré dans la vallée de la Lenk. Je l'ai indiqué aussi dans mon ouvrage sur le Chablais et j'ai, en outre, mentionné que les plis des Hautes Alpes (qui ne sont donc que les plis superficiels du flanc normal de la grande nappe du Mont Gond-Wildhorn-Wildetrubel) dispa- raissaient en oblique, tour à tour, sous la nappe préalpine. Cette superposition paraît extrêmement simple en surface, mais nous ne savons pas s'il n'existe pas en profondeur des accidents aussi . singuliers que celui de l’écaille de Néocomien à Céphalopodes des Alpes Vaudoises. Les progrès des sciences géologiques nous feront peu à peu connaître dans leurs détails ces accidents ; pour le moment il me suflit d’avoir établi nettement que les Hautes Alpes s’enfoncent en grandes nappes sous la masse préalpine. 2. — CONTACT DES PRÉALPES ET DE LA RÉGION MOLASSIQUE Je n’'insisterai pas particulièrement ici sur le repos anormal du bord interne des Préalpes sur la Molasse. Partout, ce dernier terrain disparaît sous les Préalpes, sans excepter le Môle, pour lequel je me suis trouvé en contradiction avec M. Marcel Bertrand. Cette montagne repose bien sur un substratum molassique; au- dessus d'Eponney, près d’Aïse par exemple, la Molasse s'enfonce sans aucun doute et très visiblement: sous la cargneule du Trias. Cette manière de voir est d'ailleurs fortifiée par les résultats de mes nouvelles études : toutes les fois que j'ai pu parcourir à nouveau le front des Préalpes, je n'ai trouvé que la confirmation de cette loi déjà formulée : les Préalpes reposent partout sur un substratum tertiaire. IL. — Les zones tectoniques indépendantes des Préalpes Lorsque l’on examine la fig. 1 de la pl. XIV, on voit que nous distinguons seulement deux zones indépendantes très nettement superposées : celle des Préalpes médianes et sur elle celle de la 1. QuEREAU. Ueber die Grenzzone zwischen Hochalpen und Freiburger Alpen im Bereiche des oberen Simmenthales. Naturf. Gesellsch. 2. Frei- Oro br, Bd IX) H- 2, D. 122, 1899. 738 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Brèche. J'ai suffisamment insisté sur la différence stratigraphique de ces deux régions pour qu'il soit inutile de m'’étendre encore ici sur ce même sujet. Ce sont les relations tectoniques qui doivent maintenant fixer notre attention. I. — AMINCISSEMENT DES PRÉALPES MÉDIANES VERS LE SUD DANS LE CHABLAIS Admettons que la région de la Brèche forme une nappe de recouvrement. Examinons comment s'établit le contact avec les couches sous-jacentes du côté sud. Dans la coupe, fig. 1, pl. XIW, on voit que les Préalpes médianes existent très développées sous la région de la Brèche. L’épais massif de Tréveneusaz n’est nullement écrasé. Une grande corniche regarde du côté de la Dent du Midi. En consultant la carte géologique au 1/80.000 (feuille de Thonon) et en comparant la fig. 1, pl. XIV avec la fig. 2, pl. XV, on voit que les couches des Préalpes médianes sont laminées peu à peu vers l’ouest, la grande masse de Tréveneusaz étant réduite, au col de Morgins, à une simple écaille. Quelques kilomètres plus loin, à la Pointe de l’'Haut (fig. 1, pl. XV), on ne trouve plus que quelques blocs épars représentant ces Préalpes médianes, et enfin, au col de Coux, ces dernières ont totalement disparu. Il est incontestable que cette disparition est le fait d’un laminage intense. Donc, en passant sous le massif de la Brèche, les Préalpes médianes s’amincissent de plus en plus du nord vers le sud. Le massif de Tréveneusaz semble faire-exception; ce qui résulte en partie de la profonde coupure de la vallée du Rhône. C'est-à-dire que le massif de la Brèche, étant ici plus restreint à cause des érosions, ne couvre plus entièrement les Préalpes médianes vers le sud. Le massif de Tréveneusaz nous montre ce que doivent être ces der- nières sous le massif de la Brèche, là où on ne les voit pas, par exemple entre Saint-Jean-d’Aulph et Le col de Coux (fig. 2, pl. XV). Cette absence des Préalpes sous la Brèche est prouvée par l’exis- tence, au sud du massif de Tréveneusaz, à Champ Long !, d'un lambeau de recouvrement du massif de la Brèche (fig. 2, pl. XV), reposant directement sur le Flysch des Hautes Alpes. C'est le même Flysch sur lequel, plus au nord, repose le massif de Tréve- neusaz par l'intermédiaire de la Molasse rouge. Telle est la raison pour laquelle, dans l'hypothèse générale du charriage, je rapproche 1. M. Luceon. La région de la Brèche du Chablais, pl. VIIL et carte au 1/80.000. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 739 les deux plans de chevauchement dans la direction du sud (fig. 1, pl. XIV). Sans doute, je ne veux point aflirmer que cet amincissement des Préalpes médianes jusqu'à leur disparition totale doive être la règle absolue, mais j'estime qu'elles tendent à s’amincir ainsi. Cette interprétation paraît encore plus légitime si on étudie la vallée du Giffre, où j'ai pu suivre pas à pas, de la région à l’ouest de Taninge jusqu'au col de la Golèze (fig, 3, pl. XV), cet écrasement parfaitement visible. La Pointe d'Orchez repose sur le Flysch des Hautes Alpes. Que sont donc devenues les Préalpes médianes à Taninge ? Elles ne sont plus représentées que par une lame de Crétacique (coupe 4, pl. XV), et plus loin elles disparaissent _complètement. 2. — LA ZONE BORDIÈRE En avant des Préalpes médianes existe une zone totalement indépendante, formée, dans les Voirons et les Pléyades, par des bandes de Malm ou de Crétacique enveloppées dans le Flysch. Cet ensemble qui repose sur la Molasse disparaît sous le Trias des Préalpes médianes. Si dans les deux montagnes la structure peut être et a été long- temps interprétée comme étant le résultat de simples plis déjetés, combien est différente la réalité lorsque l'érosion nous permet d'établir le régime des vraies dislocations, comme dans les collines du Faucigny, si magistralement décrites par M. Marcel Bertrand !. De même, l'étude fort intéressante de M. Ch. Sarasin sur les environs de Châtel-Saint-Denis ? nous apprend que les dislocations doivent être envisagées comme des écailles superposées. Il n’y a, à proprement parler, plus de plis. Dans les collines du Faucigny, les lacunes tectoniques sont la règle. Là, l'absence fort heureuse de Flysch nous laisse voir la vraie nature des dislocations, cachées aux Voirons par le manteau trompeur de ce terrain. Or c’est justement sur les Voirons que M. Haug ? s'appuie pour dire que notre interprétation est invraisemblable. Seuls, en effet, les Voirons ne peuvent nous donner des documents bien péremp- toires, puisque tout l'intérieur de leur sol nous est caché. Mais 1. M. BerTRAND. Le Môle et les collines du Faucigny. B. S. C. G. F., n° 3, 1892-1803. 2. Ch. SARASIN. Les formations infracrétaciques de la chaîne Pléyades- Corbettes-Niremont. Arch. des Se, phys. et nat., 4° pér., t. XII, nov. 19or7. 3. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses Bull. Soc. vaud., XXXV, p. 155, 1899. 740 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT cette constitution interne nous pouvons la définir si nous étudions les montagnes qui bordent l’Arve en avant du Môle. II a fallu toute la, science tectonique de M. Marcel Bertrand pour arriver à déchiffrer et à décrire la vraie nature du sol des collines du Faucigny et par conséquent de la zone bordière. De son côté, M. Sarasin arrive à la conclusion qu'il s’est produit un chevau- chement considérable de cette zone bordière sur la Molasse. C'est là la confirmation de ce que j'ai écrit à propos des collines du Faucigny. Voyons maintenant comment se comporte cette zone bordière vis-à-vis des Préalpes médianes ? Tout comme ces dernières, qui sont laminées sous la région de la Brèche, la zone bordière s'écrase Jusqu'à une disparition totale sous les Préalpes médianes. Je viens de donner la démonstration de cette loi en me basant sur ce qui se passe dans les collines du Faucigny et dans les Pléyades. J'insisterai encore sur ces dernières. Rien n’est plus évident, dans la région de Montreux, que la pénétration de la zone bordière sous les Préalpes médianes. Or, de l’autre côté du Léman, entre le Bouveret et Saint-Gingolph, M. Schardt a le premier fait remarquer que les chaînes médianes reposent directement sur la Molasse rouge, cette même Molasse sur laquelle est couchée, sur l'autre rive du lac, la zone bordière. I1 faut donc bien que cette dernière ait disparu, c’est-à-dire qu'elle soit totalement laminée. Si nous ne la retrouvons plus au Bouveret, c'est qu'ici l'érosion a atteint plus en arrière la nappe des Préalpes médianes; ce qui est démontré par l’absence des plis que l’on voit sur la rive vaudoise du Léman, où la création de la fosse du Léman a moins indenté la grande nappe de charriage. Nous sommes au Bouveret dans une partie plus interne du plan de recouvrement, et il est évident que, si la zone bordière est absente, c’est qu'elle a été laminée. On voit donc qu'une très grande harmonie règne dans ces dislo- cations. Comme les Préalpes médianes sont laminées sous le massif de la Brèche, de même la zone bordière est laminée sous les chaînes médianes. 3. — LA ZONE INTERNE La zone interne forme une série d’écailles implantées dans le Flysch, ainsi que M. Roessinger ! et moi l’avons prouvé, ainsi que je l’ai indiqué sur place à la Société géologique de France dans la 1. M. LuGeon et G. RozssiNGer. Géologie de la baute vallée de Lauenen. Arch. Se. phys. et nat., 4° pér., t.. XI, janv: 1907. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 4x montagne de Culet. M. Schardt a aussi insisté sur les dislocations particulièrement violentes que cette région a subies dans la région de Bex. Je crois avoir démontré que cette dernière région, en s'enfonçant avec l'énorme épaisseur de Flysch du Niesen qui l'accompagne, est laminée en profondeur sous les Préalpes médianes jusqu'à sa disparition totale. Je me suis appuyé pour cela sur ce qui se passe dans la région de Bex. L’écaille la plus inférieure est celle formée par le Néoco- mien à Céphalopodes. Il repose sur le Flysch des Hautes Alpes et est recouvert par du Trias. Quand des Hautes Alpes nous péné- trons dans les Préalpes, nous constatons la disparition de cette lame de Néocomien dans les environs de Bex, où le Trias repose alors directement sur le Flysch (fig. 1). Maintenant, si nous quittons la région de Bex, où la zone interne est si développée, pour passer sur l’autre versant de la vallée du Rhône, nous constatons que cette zone interne, qui partout, du Rhône à l'A ar, disparaît sous les Préalpes médianes, n'existe plus. Qu'est-elle devenue, car ici les Préalpes médianes reposent, par l'intermédiaire, il est vrai, de la Molasse rouge (que plusieurs géologues ont du reste la tendance à attribuer à un niveau supé- rieur du Flysch), sur le Flysch des Hautes Alpes? Sur la rive gauche du Rhône l'érosion a atteint plus profondément la nappe entière des Préalpes, comme on le constate par l'apparition des plis profonds à faciès helvétiques de Collombey (fig. 1, pl. XIV). Cette circonstance exceptionnelle nous permet justement de constater l'absence complète de la zone interne. Ce n’est que plus loin, dans la montagne de Culet, qui domine Champéry, que réapparaît cette zone interne sous la forme d’écailles. Elles se laminent aussi en profondeur, dans le Flysch, substratum de la région de la Brèche, car les Préalpes médianes, ainsi que nous l'avons vu, sont ici écrasées. Je laisse à mon élève M. Roessinger, le soin de démontrer avec les détails les plus précis, dans un tra- vail qui va bientôt paraître, ce laminage en profondeur de quel- ques-unes des écailles assez entamées par l'érosion des environs de Lauenen, dans le canton de Berne. M. Haug cherche à expliquer cette absence de la zone interne dans le bas du Val d’Illiez en se plaçant à un tout autre point de vue, lorsqu'il essaie de démontrer l'existence de l’éventail composé imbriqué ! dont je nie complètement l'existence. Il écrit ceci : «à l'approche de la vallée du Rhône, tous les 1. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses. Bull. Soc. vaud., XXXV, p. 156, 1899. 3 Juin 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 48 742 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT accidents de la zone des cols tournent à peu près à angle droit, passant de la direction N.E.-S.0O. à la direction S.E.-N.0., pour venir se raccorder avec les plis de la vallée de la Grande-Eau, grossièrement parallèles à ceux de la zone des cols, mais déversés en sens inverse ». Ainsi, en regard de la vallée du Rhône, la zone interne se plisserait dans la direction de la vallée; les plis ne seraient pas assez étendus vers l’ouest et cela nous expliquerait la non existence de cette zone sous le massif de Tréveneusaz. M. Haug étaye son opinion sur des arguments tirés de l'étude des cartes, tandis que les résultats que j'ai obtenus par l'étude du terrain lui- même me font rejeter absolument l'hypothèse de mon confrère. Là encore l'erreur provient, ainsi que l’a du reste pressenii M. Haug, d’une part de la confusion graphique qui s’est présentée à ses yeux entre la direction des couches et leur intersection à la surface, tout comme dans son explication des Diablerets ; puis, d'autre part, de l’oubli de l'existence des inflexions transverses. Ce sont ces dernières qui ici viennent encore compliquer le problème. On sait que la partie inférieure de la vallée du Rhône s'écoule suivant l’axe d’une ondulation transversale !. A la hauteur d’Aigle, en remontant, l’ondulation quitte la vallée et pénètre dans les montagnes de Bex. Les terrains situés entre cette ligne d’abaisse- ment des plis et le Rhône doivent donc être généralement inclinés vers l’est. Or, comme il est d’usage de considérer le sens du déver- sement et par conséquent la direction de la poussée en se basant sur la ligne de plus grande pente des couches, il est évident qu’en ne connaissant pas l’existence de cette ligne d’abaissement, on commet l'erreur dans laquelle est tombé M. Haug. Une autre ligne d’abaissement des plis et écailles existe encore à l’est de la Grande-Eau des Ormonts. Les couches plongent alors vers le nord-est dans les flancs droits de la vallée. On voit, inter- calé dans le Flysch, une lame de terrain jurassique. C’est elle qui se prolonge de l’autre côté de la vallée dans le Chamossaire, qui est une écaille de la zone interne, débarrassée en grande partie, grâce à l’altitude, du manteau de Flysch qui la recouvrait en ce point et qui la recouvre encore dans sa partie nord. Cette écaille plonge légèrement au nord-est, mais cela ne signifie pas qu'elle soit déversée au sud-ouest vers la vallée du Rhône, puisque cette inclinaison vers le nord-est est due simplement à l’abaissement des plis. De plus, il est intéressant de savoir ce que devient cette écaille du Chamossaire. Elle se prolonge jusque dans la vallée de 1. LuUGEoN. Recherches sur l’origine des vallées des Alpes occidentales. Ann. de Géog., p. 410-415, pl. 37, 1901. "À be: D DES ALPES DÜ CHABLAIS ET DE LA SUISSE 743 Lauenen, où M. Roessinger l’a retrouvée. Si donc, pour M. Haug, elle paraît être, dans le Chamossaire, le bord sud d’un massif à déversement périphérique, cela est exclusivement dû à son isole- ment, à l'altitude et à l’érosion. Cette écaille du Chamossaire, nous la retrouvons dans le Val d'Illiez. C’est elle qui forme la zone indépendante liasique de Morgins et de la pointe de l'Haut. On ne peut donc songer à voir une poussée vers la vallée du Rhône. De même que les plis des Préalpes médianes traversent la vallée du Rhône en y subissant une inflexion et un rebroussement, de même que les Hautes Alpes se continuent de la Dent de Morcles dans la Dent du Midi, de même aussi la zone interne se continue des Alpes vaudoises dans le Val d'Illiez. La disparition momentanée de la zone interne entre Troistorrents et Monthey, sous le massif de Tréveneusaz, n'est que la conséquence de l’amincissement en profondeur jusqu'à la disparition de cette zone interne. Il est évident que ces conclusions s'adaptent également au substratum du Chamossaire. Les montagnes gypsifères de Bex, situées au-dessous des couches du Chamossaire, présentent le même régime d’écailles que celui de la vallée de Lauenen, modifié par l'existence d’une ondulation synchinale transverse, et modifié de plus par une action tectonique, qui, jusqu'ici, n'avait pas encore attiré l'attention et sur laquelle je crois devoir insister. Abe En examinant la fig. 2, on voit que les Diablerets se terminent, pour employer une image commune, comme le soc d'une charrue planté dans le sol. Si l’on étudie la carte géologique avec l’idée que ces Diablerets constituent le front d'une nappe de recouvre- ment, on cherche où pouvait se continuer son bord marginal du côté de l’ouest. IL s’y prolongeait jusqu’à une distance que nous ne pouvons plus apprécier en raison de l'absence complète de tous débris lui appartenant. Un autre phénomène témoigne de l'existence de cette nappe en avant du pli de Morcles, en face de la région salifère de Bex. La zone interne paraît relativement simple, lorsque l'on fait une coupe qui passe par le col du Pillon, parce que l’on n'aperçoit d'elle que la partie qui repose sur le front de la grande nappe du Mont Gond. Quand on fait une coupe qui passe par les Diablerets (fig. 3), la complication apparaît brusquement. Sur le « soc de charrue » et sous lui, l'on voit des écailles de la zone interne; la ‘ simplicité du col du Pillon n’est donc qu'apparente. Si l'érosion avait atteint de plus grandes profondeurs, l'on verrait sous la nappe des Diablerets, apparaissant sous celle du Mont Gond, la 744 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT continuation de l’écaille du Néocomien à Céphalopodes, c'est-à-dire la zone interne. Il est évident que, si cette zone interne, ainsi que nous l'avons montré, est subdivisée, digitée pour ainsi dire, par le soc pénétrant de la nappe des Diablerets, c’est certainement en avant de ce front de la nappe intrusive que l’écrasement, et par conséquent la complication, doit atteindre son maximum. Or, si dans la région située en avant de la nappe des Diablerets, là où cette nappe existe encore, nous ne commençons qu'à pressentir la dislocation du sol, poussée à l'extrême, et si en ce point nous ne pouvons pas voir l'endroit caché en profondeur, où le maximum est atteint, la région salifère de Bex nous montre l'effet produit. Là, par un heureux hasard, l'érosion a profondément excavé les montagnes, grâce à l'existence de la vallée du Rhône, grâce aussi au relèvement général du substratum cristallin sous le pli de Moreles, grâce enfin aux ondulations transverses de la vallée de la Grande Eau et à celle qui avoisine la vallée du Rhône. L’érosion a enlevé la prolongation du soc, mais elle a laissé en avant @la terre remuée par ce soc » : cette «terre bousculée par lui », c'est la région salifère de Bex, où les complications tectoniques attei- gnent le maximum, ainsi que nous l’a révélé à plusieurs reprises M. Schardt. Ces étranges dislocations constituent donc un système déjà très étiré d’écailles nombreuses, compliqué par des ondulations trans- verses, au milieu duquel a pénétré une masse qui s’est enfoncée comme un coin. J'ai indiqué cette disposition de la masse péné- trante dans la fig. 2. Un peu plus à l’ouest, le coin n'est plus repré- senté que par les grès de Taveyannaz, qui appartiennent au Flysch, puis il disparaît, enlevé par l'érosion. Sa prolongation nous est révélée par les dislocations de la masse qui existe encore et qui se trouve en avant des masses refoulées par le soc disparu. Les Diablerets reposent sur l’écaille de Néocomien à Céphalopodes, puis, près de Sergnement, la Cargneule triasique s’intercale entre ce Néocomien et les grès de Taveyannaz, appartenant aux Diable- rets. Cette Cargneule est recouverte plus loin par du Lias supé- rieur. Ce dernier s'infléchit, ainsi que l’a montré M. Renevier : à Colieux il est à peu près vertical ; dans le ravin d’Aiguerosse il repose sur la Cargneule. Il épouse ainsi le contournement du coin de grès de Taveyannaz de Porreyre. Nous pouvons done montrer, dans la zone intérne, l’amorce du contournement dû à la masse pénétrante. Il y aura lieu plus tard d’en rechercher plus loin l'effet. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE . 745 4. — INFLUENCE DES PLIS DES HAUTES ALPES Nous avons vu que les Préalpes médianes du Chablais reposent, dans le bord qui regarde du côté des Hautes Alpes, sur le Flysch ou la Molasse rouge (Tréveneusaz), lorsque ces Préalpes ne sont pas cachées par la grande masse de la Brèche du Chablais. Dans les Alpes bernoises, ainsi que j'ai pu m'en. assurer sur le terrain, les chaînes médianes reposent, avec une grande régularité, sur la zone du Flysch du Niesen. Il en est ainsi des Spielgärten et de l’'Amselgrat, près de Saint-Stephan. Là, les Préalpes médianes disparaissent sous la nappe recouvrante de la Hornfluh ; la corniche triaso-jurassique ne réapparaît au jour que dans le massif de la Gummfluh, toujours reposant sur le Flysch. Les exceptions ne commencent à se faire sentir qu'à partir de la vallée de l’Etivaz et jusqu'à la vallée du Rhône. M. Haug ! s’est appuyé sur cette disposition locale pour infirmer la généralité d'un fait qui est incontestable aux yeux des géologues préalpins, à savoir la super- position anormale de toutes les Préalpes médianes sur le Flysch. « Si la limite extérieure des Préalpes médianes, dit-il, est en réalité une ligne de contact anormal qui se poursuit depuis le Môle jusqu'à Blumenstein, sans autre interruption que celle des dépôts pléistocènes et du lac de Genève, il n’en est pas de même de leur limite intérieure, de leur ligne de contact avec la zone de Flysch du Niesen. J’admets volontiers que de Wimmis à la Gummfluh le Trias qui constitue la base de la corniche limitant la zone médiane des Préalpes repose partout sur le Flysch du Niesen, quoique la démonstration n’en ait pas encore été fournie, mais il est incontestable que plus au sud c’est précisément l’inverse qui a lieu, et M. Schardt lui-même a publié une coupe qui montre que dans la vallée de la Grande-Eau, c’est au contraire le Flysch de la zone du Niesen qui repose sur le Trias. » Cette exception incontestable est due à la répercussion lointaine des nappes des Diablerets et du Mont Gond dans les Préalpes. C'est M. Roessinger qui a attiré mon attention sur la relation, visible sur les cartes, des Diablerets et du renversement de la corniche des Préalpes médianes. Je crois pouvoir en donner main- tenant l’explication. En avant des masses encore existantes de ces nappes, on voit la 1. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses Bull, Soc. vaud., XXXW, P. 150, 1899. 746 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT corniche des Préalpes médianes subir une inflexion remarquable. Elle est est-ouest dans la Gummiluh. Puis au Mont d'Or, qui repré- sente la continuation incontestable de la Gummflubh, la direction devient N.N.E.-S.S.O. et, enfin, le long des rochers triasiques de la Cheneau, elle est N.E.-S.0. Les exceptions n'apparaissent qu'au point où la direction change. Ainsi, entre la vallée de l'Etivaz et de l’Hongrin, la corniche triasique est en partie cachée par le Flysch du Niesen, qui vient ici recouvrir la corniche de Trias, alors qu’il pénètre sous lui dans la Gummfluh. Ce changement d’allure peut s'expliquer par l'existence d'un pli du substratum triasique des Préalpes médianes, ainsi que je le montre par la fig. 4, coupe B B. Ce renversement se fait sentir exactement en avant de la péné- tration dans le sol de la nappe du Mont Gond. C’est cette dernière qui, accompagnée de la nappe des Diablerets, a refoulé sur un par- cours bien défini la zone interne. Nous savons que les relations normales des Préalpes et des Hautes Alpes souffrent une exception sous les Diablerets, grâce à l'avancement de la nappe que repré- sente cette dernière montagne et de la nappe du Mont Gond. En général, comme nous l'avons montré, les Préalpes reposent sur les Hautes Alpes. En général aussi, la zone interne disparaît sous les Préalpes; cela a lieu partout, sauf aussi en avant des Diablerets, et en avant de leur prolongation virtuelle. Je crois avoir prouvé qu’à l’ouest de la nappe actuelle des Diablerets, celle-ci se prolongeait sur le pli de Morcles; elle a été enlevée par l'érosion, elle est virtuelle, mais sa présence antérieure est accusée à la fois par les dislocations étranges de la région salifère de Bex et par le repos passager de la zone interne sur les Préalpes médianes, de l’Etivaz à la vallée du Rhône. En effet, si nous recherchons ce qui se passe à l’ouest de la vallée de l'Hongrin, nous voyons le Flysch du Niesen reposer sur le Mont d'Or, continuation de la Gunimfluh !. Puis, entre le Mont-d'Or et la Grande Eau, la corniche triasique disparaît encore sous le Flysch, et, dans les flancs du Chamossaire, nous voyons le Trias plonger sous les écailles superposées qui constituent cette dernière montagne. Au bord de la vallée du Rhône, les couches sont verticales, puis brusquement elles devien- nent horizontales dans la colline de Saint-Triphon, d’où elles rejoi- gnent le massif de Tréveneusaz, sur lequel nous allons revenir plus loin. À partir de Saint-Triphon La disposition anormale a cessé. On pourra élever une série d’objections à cette manière de voir, 1. E. FAvRE et Scnarpr. Description géologique des Préalpes du canton de Vaud, etc. Mat. carte géol. suisse, Liv. 22, pl. XVII, fig. 3. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 747 bien que l'harmonie qui règne entre les relations de ces diverses masses indépendantes, nappe des Diablerets, zone interne et Préalpes médianes, soit, semble-t-il, d’une valeur telle que les contradictions n'auront à l’avenir que des bases bien peu solides. On pourra poser la question suivante : Pourquoi les nappes des Diablerets et du Mont Gond-Wildhorn, qui se prolongent dans l’ensemble de la région des Hautes Alpes bernoiïises, n’ont-elles qu'une influence locale, pourquoi n'ont-elles changé les relations réciproques des masses tectoniquement indépendantes que dans les Alpes de Bex et entre la Gummfluh et le Rhône ? La réponse à cette question n'est pas de l’ordre restreint des faits préalpins ; elle doit s'élever à des considérations générales sur la manière dont se comportent les grandes nappes de recouvrement. On a pu constater combien dans ces pages j'ai cherché à élargir le problème des Préalpes, en me basant sur des dislocations des Hautes Alpes. On concoit facilement que le problème n'est plus localisé à la seule région qui est ici en discussion ; les Hautes Alpes entrent en jeu au même titre que les Préalpes, et l’on verra plus loin que ce sont elles qui nous donneront la réponse définitive. Je chercheraï donc des points de comparaison dans d’autres régions des Alpes, puisque toute la chaîne paraît avoir été, dans son front nord, sous le coup des mêmes dislocations immenses. Dans mon mémoire sur les Bauges ! j'écrivais (p. 92) : « Aïnsi des phénomènes extrêmement puissants peuvent se passer en profondeur sans qu'ils s'accusent à la surface autrement que par de grandes ondulations qui peuvent même à la rigueur être totale- ment absentes »; puis plus loin (p. 110): «... dans les plis du Mont Joly, d'après les coupes de mon collègue M. Ritter, c’est bien en avant aussi, vers l’extérieur de la chaîne, que les char- nières correspondant aux noyaux aigus anticlinaux profonds doivent être recherchées sous la forme des grandes boucles arron- dies des couches superficielles. » Toute la réponse au problème qui nous occupe se trouve dans ces deux phrases. Ici, que sont les anticlinaux profonds ? Ce sont les nappes du Mont Gond-Wildhorn et des Diablerets. A l’est du col du Pillon, le pli frontal de ces nappes est caché sous la masse recouvrante de la zone interne. Nous nous trouvons à la surface de la grande nappe pénétrante. Or nous savons par les coupes si instructives de mon ami M. Ritter que, lorsque des nappes sont superposées, il y a 1. M. Luceow. Les dislocations des Bauges. B. S. C. G. F., XI, 1900. 748 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT une concordance absolue entre les différents terrains qui les constituent. Cela est si vrai que l’on avait, avant les travaux de MM. M. Bertrand et Ritter, toujours considéré le Mont Joly en Savoie comme une énorme masse simple et d’allure tranquille, alors qu’elle est formée par des nappes empilées. C’est donc en avant du front de ces nappes cachées ‘en profondeur, à partir du Pillon vers l’est, que l’effet doit se répercuter sur une étendue de bien des kilomètres. Jusqu'à ce jour, l’on n’avait jamais songé, et moi- même pas plus que mes prédécesseurs, à voir dans les plis simples des Hautes Alpes bernoïses, sur lesquels repose la zone interne, autre chose que des plis en place, simplement déjetés. En réalité, ils ne sont que les plis superficiels de la carapace (le flanc normal) d’une grande nappe. Le pli frontal est en profondeur. C’est donc en profondeur seulement, dans le sol, que peut se faire sentir son action vers l’avant. Si nous recherchons où doit se trouver ici la partie préalpine qui doit être influencée par les contournements de ce pli frontal enfoui, nous voyons que c’est au-dessous de la nappe des Préalpes médianes que le phénomène doit se répercuter. Voilà pourquoi de la Gummfluh vers l’est les grandes nspRes des Hautes Alpes n'ont aucune influence en surface. Lorsque le pli frontal sort de dessous les masses qui le voilent à la surface, c’est-à-dire lorsque le relèvement général — dû sans doute à une cause profonde (relèvement du noyau cristallin) — est suflisant pour que, grâce aux altitudes plus élevées de l’en- semble, l'érosion ait pu atteindre et par suite nous laisser voir la zone influencée par ce pli frontal, aussitôt nous voyons les condi- tions lectoniques changer. C’est ainsi que dans la vallée de Gsteig le pli frontal de la nappe du Mont Gond est situé peut-être de 500 à 1000 mètres en profondeur. Rien à la surface ne révèle alors son existence, pas plus que dans la région du Mont Joly, et cela en vertu des lois que j'ai reconnues et formulées dans mon ouvrage sur les Bauges. Mais quand ce pli sort dans le flanc droit du Creux de Champ sur un substratum placé à plus de 1000 mètres d'alti- tude, immédiatement les contournements vers l'avant apparaissent aussi à la surface du sol, et cela avec une régularité typique, susceptible de devenir classique : la corniche des Préalpes mé- dianes, qui reposait sur le Flysch dans la Gummflub, se renverse, et c’est le Flysch du Niesen qui le recouvre. Puis, lorsque la nappe des Diablerets sort elle aussi du sol, voilée qu’elle était jusqu'alors par la nappe du Mont Gond, en même temps la partie de la zone interne, située en avant, s'étale, montre par des dislocations extrêmes l'influence de cette masse pénétrante du pli frontal. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 749 Réunissant son effet à celui de la nappe du Mont Gond, elle exagère sa puissance; elle rejette la zone interne sur les Préalpes médianes. Ainsi les plis frontaux des nappes de recouvrement des Hautes Alpes font sentir leur effet, uniquement vers l'avant, jusqu'à une dizaine de kilomètres. Voilà la raison de cette anomalie que présentent la zone interne et la corniche des Préalpes médianes, anomalie localisée en surface là où les nappes des Hautes Alpes apparaissent en surface, c’est-à- dire lorsque la zone d'influence des grandes nappes des Hautes Alpes nous est révélée par le fait d'une érosion assez pro- fonde, et cette érosion n’a pu atteindre une profondeur suffisante que là où les altitudes ont été assez considérables, grâce au relè- vement vers l’ouest du substratum cristallin. Nous pouvons tirer de ces faits deux conclusions importantes : r° dans les Préalpes et les Hautes Alpes bernoiïses des dislocations très intenses doivent exister en profondeur, que. nous ne voyons pas, mais que nous pressentons ; 2° dans les Hautes Alpes vaudoises, la nappe des Diablerets recouvrait jadis, avec celle du Mont Gond, le grand pli couché de Morcles, puisque l'effet de leurs plis frontaux continue à se faire sentir jusqu'à la vallée du Rhône. C'est pour cette raison que j'ai parlé plus haut de la continuation virtuelle de la nappe des Diablerets. Nous avons maintenant la preuve de cette continuation. L'effet de ces nappes supérieures à celle de la Dent de Morcles-Dent du Midi cesse de se faire sentir à partir de la vallée du Rhône, parce que, grâce au relèvement général dû au massif cristallin, et à l'importance que prend dans la Dent du Midi la nappe inférieure, leur zone d’influence vers l'avant était supérieure en altitude à la nappe des Préalpes. Non seulement l’on voit ici combien le problème des Préalpes prend une ampleur inattendue, mais l’on voit intervenir déjà la relation nouvelle, qui n'avait jamais été présentée, de ces Préalpes et des Hautes Alpes. Elles ne sont pas aussi étrangères les unes aux autres qu'il ne doive y avoir des points communs entre elles. J’ai été de ceux qui ont cru avec le plus de conviction à la séparation complète de l’histoire des deux chaînes en présence. Il ne me coûte pas, aujourd'hui, de reconnaître mon erreur et de la réparer en émettant des vues nouvelles, susceptibles d'expliquer toutes les contradictions passées. 750 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT 5. — RÉFUTATION DE L'HYPOTHÈSE DE L'ÉVENTAIL COMPOSÉ IMBRIQUÉ L'hypothèse de l'éventail composé imbriqué de M. Haug, ainsi qu'il le dit lui-même, s’appuie aussi bien sur les coupes anciennes de divers auteurs que sur la partie réellement observée de coupes récentes. Les géologues préalpins vont plus loin. Ils ne se conten- tent pas exclusivement de la partie observée des coupes ; l’expé- rience leur a appris que, dans un tel domaine, il faut toujours interpréter la partie observée d’une coupe en la reliant avec celle d’une voisine plus profonde ; il ne faut jamais oublier les relations réciproques des coupes ainsi observées, aussi bien dans le sens vertical que dans le sens horizontal. C’est ce que j'ai négligé parfois de faire, quand j'ai publié mon mémoire sur le Chablais: il me manquait l'expérience que dix années d’études sur le terrain, et dix années de contact avec nombre de collègues distingués m'ont fait acquérir. Je vais à la fois réparer mon erreur première et résumer les arguments qui montreront l'impossibilité de l'hypo-" thèse de l’éventail imbriqué. Mon collègue et ami M. Haug fait de la zone bordière des Voi- rons le bord extérieur de son éventail: mais il passe sous silence les collines du Faucigny. J'ai montré précédemment que celles-ci étaient formées de terrains s’étirant en profondeur jusqu'à leur disparition. Ainsi une branche manque à l'éventail. M. Haug s'appuie sur le contournement supposé en direction des plis de la zone interne, en face de la vallée du Rhône. Il ne compte pas avec l'influence des inflexions transverses et leur effet sur les altitudes. J’ai montré plus haut que ce contournement était inconciliable avec les faits. Ainsi la branche intérieure de l'éventail fait défaut. ; M. Haug s'appuie sur la non-continuité de la corniche triasique qui regarde du côté des Hautes Alpes. Cette observation est très importante et très juste, mais j'ai montré que ces exceplions sont localisées et dues à un accident puissant, sur lequel on n'avait pas encore attiré l'attention; elles n'infirment pas l’ensemble du phéno- mène, à savoir que partout le Flysch s'enfonce sous les Préalpes médianes, et, dans le cas des exceptions, il le fait par un contour- nement évident du bord de la nappe (fig. 4, BB). M. Haug conteste que les contacts anormaux des Préalpes médianes sur le Flysch de la zone bordière et sur le Flysch du Niesen ou du Val d'Illiez soient l’affleurement du plan de chevau- DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE ï TOI chement, les deux bords de cette nappe des Préalpes médianes : €... jy vois par contre, dit-il !, des chevauchements tout à fait analogues à ceux de l'intérieur de l'éventail, celui-ei (contact anormal sous la Gummfluh) se comportant comme le pli-faille du Rübli; celui-là (contact anormal du pied du Moléson) comme le pli-faille de la Laitmaire (chaîne des Gastlosen) ». Gette remarque est vraie si l’on n’envisage que des coupes; elle est erronée lorsque l’on considère la troisième dimension des accidents, c'est-à-dire la longueur de la trace. Or, les plis-failles du Rübli et de la Laitmaire ne s'étendent pas indéfiniment. Lorsqu'on les poursuit, l’on voit _que celui-ci se transforme en voûte dans le Chablais, d’une part, et au-dessus d'Erlenbach, dans le Simmenthal, d'autre part, que celui-là se réduit seulement au chaïînon du Rübli. Toute autre est la trace du plan de chevauchement critiqué. Elle est fermée et ne présente une exception de forme qu'entre le Mont d'Or et le bord du Rhône. M. Haug s'appuie enfin sur les plis déversés vers le sud. M. Schardt ? a déjà répondu sur ce point en expliquant comment de petits plis en retour pouvaient exister dans de telles nappes de recouvrement, sans qu'ils infirment l'allure des grands plis d’en- semble, qui sont toujours dirigés vers le nord. Mais mon collègue de Paris s'appuie sur des faits que j'ai signalés. Je suis là évidem- ment le coupable, car j'ai le regret de dire que ces faits ont été mal interprétés par moi-même. Il s’agit tout d’abord des Klippes du Val d’Illiez. Lorsque j'ai rédigé mon mémoire sur le Chablais, mes coupes étaient déjà dessinées et imprimées dans l’idée du pli en champignon. En voyant dans la Klippe de Savonnaz des charnières tournées vers le sud, j'avais, à tort, conclu que le massif de Culet était déversé aussi vers les Hautes Alpes. En réalité, cette Klippe de Culet est formée par des lames superposées disparaissant par écrasement dans le Flysch. Quant à Savonnaz, il s'agit d’une lame repliée sur elle-même. C’est, de tout l’ensemble de la zone interne, le seul point où peut-être un plissement très secondaire semble s'être dirigé du côté sud. Or, partant de la considération d’une masse aussi tourmentée, mais si locale qu'est Savonnaz, il n’est pas prudent d'infirmer toute la généralité du phénomène qui nous montre toujours que les plis principaux sont tournés vers le nord. Et 1. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses. Bull. Soc. vaud. Sc. nat., vol. XXXV, p. 154, 1899. 2. H ScHarpr. Encore les régions exotiques. Bull. Soc. vaud., vol. XXX VI, P. 166. 792 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT déjà, dans l’état d'esprit où je me trouvais en rédigeant ma mono- graphie de la Région de la Brèche, j'ai dû, cependant, ne pas prendre en considération cet accident secondaire de Savonnaz, détail unique insignifiant, se perdant dans la multitude des faits d'ordre contraire. Puis j'ai commis une erreur plus grave encore en interprétant les plis de Tréveneusaz. J'ai cru voir des plis dirigés vers la vallée du Rhône, trompé que j'ai été par les intersections. Ce massif est formé par une grande plaque de terrains des Préalpes médianes, s'incurvant vers le nord et butant, par un pli-faille E N.E.-0.S.0., contre le synelinal de Flysch de Vionnaz. C’est done un anticlinal pli-faillé, qui ne se distingue des autres plis des Préalpes que par un plus grand rayon de courbure. En outre, Tréveneusaz est séparé du massif de la Brèche, qui le recouvre, par une lame indé- pendante, formée par un noyau de Jurassique supérieur. Elle est coupée parallèlement à sa direction nord-sud par le vallon de Draversaz. Cette section, qui montre un noyau de Malm au-dessus et au-dessous duquel on voit du Crétacique, m'avait alors paru comme un pli déversé vers l’est, J'avais commis là l’erreur com- mune, où l’on tombe si facilement lorsque l’on interprète des plis couchés ou des écailles entamées par l'érosion. Je le regrette, ear mon confrère s’est spécialement appuyé sur les points où j'étais en faute; ma seule consolation est que l'hypothèse de l'éventail composé imbriqué était née avant la publication de mes erreurs. Puisque Tréveneusaz n'est pas couché vers la vallée du Rhône, on voit que tous les plis des Préalpes médianes se continuent de part et d'autre des montagnes qui bordent le fleuve ; il en est de même de la zone interne, ainsi que je l’ai démontré à nouveau plus haut. | Il ne reste plus rien, me semble-t-il, des arguments tectoniques de M. Haug en faveur de son hypothèse. Si j'ai commis un oubli, je serai toujours prêt à le réparer. Je suis convaincu par avance que l'argument que j'aurais à critiquer sera facilement réfuté, car je donnerai plus loin les preuves de l'absence de racine des Préalpes. 6. — Y A-T-IL 3 OU 4 ZONES INDÉPENDANTES DANS LES PRÉALPES ? On sait que M. Schardt a émis l'hypothèse saisissante que la zone externe ou bordière des Pléyades-Voirons-collines du Fau- cigny}était formée de fragments arrachés à la zone interne et entraînés en avant par le chevauchement des Préalpes médianes, Fa DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 753 Lorsque l’on suit la zone interne (y compris le Flysch du Niesen) du côté du lac de Thoune, on voit qu'elle se rapproche de plus en plus de la zone externe, par l’amincissement des Préalpes mé- dianes qui les séparent. D'autre part, dans le Chablais, la Brèche du col de Chatillon, qui est le dernier témoin de la zone du Niesen, se rapproche considérablement des collines du Faucigny. De plus enfin, l’on trouve, dans les champs, le long de la route de Chatillon à Marignier, vers l’Abbe, maison à l’ouest du point 546, des affleurements de ces grès du Niesen, ici placés sous les escar- pements liasiques de la Pointe d'Orchez. Ainsi, plus nous péné- trons en profondeur, plus nous voyons la zone interne chercher pour ainsi dire à rejoindre la zone externe. Ce fait, lié à celui que ces deux zones se terminent chacune en profondeur par un amin- cissement successif, lié aussi à la présence, dans ces deux zones, des mêmes terrains mésozoïques (Néocomien, Malm, Lias à Gryphées, etc.), nous autorisent-ils à les considérer comme un même en- semble tectonique ? Si les dislocations et les terrains mésozoïques répondent par l’affirmative, il n’en est pas de même du Flysch, qui se différencie très nettement dans la zone externe de celui de la zone interne, ainsi que l’a démontré M. Sarasin !. Quel est celui des deux argu- ments contraires, semble-t-il, qui doit nous entraîner? Celui basé sur la tectonique et les terrains mésozoïques a incontestablement plus de valeur, car les faciès de ces terrains sont sujets à moins de variation que ceux du Flysch, mais il n’en reste pas moins vrai que ces derniers ont une grande importance. Nous sommes donc iei en présence d’une difliculté non encore résolue. Ce n’est pas affaiblir notre démonstration que de montrer nous-mêmes ce qu’il nous manque encore. Je me suis demandé quelquefois si ce Flysch de la zone externe n’appartenait pas aux Préalpes médianes. En effet, ce Flysch est le même que celui que l’on trouve sous les Klippes de la Suisse allemande. Or, celles-ci ne sont que des fragments de la nappe des Préalpes médianes, comme l’ont montré MM. Hugi et Tobler. Ainsi ce Flysch est toujours lié avec ces dernières. Si le même terrain qui recouvre les Préalpes médianes, dans les syncli- naux, ne se différenciait pas de celui de la zone externe, on serait tenté de considérer celui-ci comme le flanc renversé de la nappe de ces Préalpes. En marchant, la nappe aurait entraîné des fragments de la zone interne, qui auraient pénétré en-écaille dans le Flysch étranger à elles-mêmes. Ainsi, dans cette manière de voir, la zone 1. SARASIN. De l’origine des roches exotiques du Flysch. Arch. Sc. phys. et nat. Genève, 1894. 794 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMEN‘! externe serait très complexe. Nous verrons plus loin quel méca- nisme l’on pourrait invoquer pour expliquer pourquoi ce ne sont guère que les terrains du Jurassique et du Crétacique qui ont pu être enveloppés par le Flysch de la zone bordière. Fig. 4. — Coupes schémaliques des nappes des Préalpes. — AA, Coupe à travers le Chablais ; BB, Coupe sur la rive droite de la vallée du Rhône (cette coupe montre le renversement local des Préalpes médianes en avant de la zone interne poussée par la nappe des Diablerets). \ O, Plis autochtones ; 1, Pli de Morcles ; 2, Nappe des Diablerets ; 4, Zone interne et zone externe, formant ainsi comme une zone ceinture ; 5, Préal- pes médianes ; 6, Région de la Brèche. Quoi qu'il en soit, les Préalpes doivent être représentés par le schéma de la figure 4. : Il nous reste maintenant à démontrer l'absence de racine des Préalpes. IT. — Les Préalpes n’ont point de racines Une seule hypothèse, celle de l'éventail composé imbriqué, si brillamment défendue par mon savant ami M. Haug, était opposée à celle que je défends ici. Je crois l'avoir réfutée, comme je vais chercher à réfuter par avance les autres hypothèses du même ordre qui pourraient naître encore. J’ai expliqué pourquoi je n'avais pas osé conclure dans mon mémoire sur le Chablais : cependant les arguments que j'ai donnés pouvant être présentés sous une autre forme et un fait nouveau, considérable, m'amenant à une nouvelle explication, je crois devoir reprendre très brièvement la démonstration de l'absence de racine. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 799 I. — PLUSIEURS FAITS PÉREMPTOIRES EN FAVEUR DE L'ABSENCE DE RACINE DU MASSIF DE LA BRÈCHE SONT DU MÊME ORDRE QUE CEUX QUI SERVENT A DÉMONTRER L’ABSENCE DE RACINE DES PRÉALPES MÉDIANES Nous savons que les Préalpes sont formées par 3 zones indépen- dantes. Dans mon ouvrage sur la région de la Brèche du Chablais, j'ai démontré, d’une manière définitive, l'absence de racine de cette région de la Brèche. Personne, jusqu'ici, ne s’est opposé à cette interprétation. Dans les Préalpes bernoises il est encore plus facile de montrer l'absence de racine, car la région de la Brèche de la Hornfluh est beaucoup plus morcelée ; ses fragments surnagent, pour ainsi dire, sur le Flysch et dans les synclinaux des Préalpes médianes. On trouve un pli frontal, mais il n’est pas aussi régulier que celui que j'ai découvert dans le Chablais sur le flanc droit du vallon de Charmy. Dans la petite chaîne qui domine Zweisimmen, on trouve ce pli frontal très disloqué, pénétrant dans le Flysch, comme il le fait au-dessus de Saint-Jean-d’Aulph, dans la vallée de la Drance t. La complication est peut-être encore plus grande dans le Simmenthal que dans cette dernière localité, à cause de l'em- mêlement de la nappe de la Brèche avec les Préalpes médianes, mais le phénomène est le même. La chaîne Rothihorn-Spielgärten- Ganthorn * représente, dans le canton de Berne, exactement ce qu'est le massif de Tréveneusaz sur la rive gauche du Rhône ; VA mselgrat, qui est dans la prolongation de cette chaine, rappelle l’écaille du col de Morgins. La ressemblance est complète. A l’ouest du col de Morgins, les Préalpes médianes disparaissent, écrasées, sous le massif de la Brèche. Il en est de même à l’ouest de l’Amselgrat. Ce n’est que dans la chaîne de la Gummiluh que l’on voit réapparaître les Préalpes médianes. Afin d’éloigner tous les doutes qui pourraient rester dans l'esprit de quelques géologues, relativement à l'absence de racine, sous le massif de la Brèche du Chablais, si les arguments que j'ai donnés dans mon mémoire de 1896 ne leur suflisaient pas, je donne une coupe de la nappe de la Brèche dans le massif de la Hornfluh (fig. 5). Nulle part, grâce aux érosions qui pénètrent dans les couches pro- fondes, on ne peut mieux voir le Klysch sous les roches triaso- 1. Lucron. La région de la Brèche du Chablais, pp. 200-207. 2. Voir Carte géologique suisse, feuille XVII. 756 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Jurassiques. Nulle part, dans le Chablais, il ne m'a été possible de trouver une coupe aussi démonstrative. La masse pénétrante du D) Hornfluh la de Massif SE) N. © z Ja de Vallee 2 Kleine Simme rat ‘Arnsel Fa 18g Alt.o® ES — (Maurice Lugeon et Fred. Jaccard). Fig. 5. — Coupe du Massif de la Hornfluh. Échelle 1/7 9000 environ. pli frontal est semblable à celle qui domine Saint-Jean-d’Aulph, mais le phénomène est encore plus compliqué. On se rappelle l'hypothèse que j'ai émise en 1895 pour expliquer la position si singu- lière des roches éruptives en plein dans le Flysch qui recou- vre le massif de la Brèche. J'ai supposé que c'étaient des sortes de « copeaux » qui avaient accompli une marche relative en arrière, lors de la pénétra- tion de la nappe de recouvre- ment dans le Flysch !. Or, mes élèves, M. G. Roessinger et K. Jaccard ?, ce dernier simulta- nément avec M. H. Schardt, ont constaté ces mêmes roches exo- tiques isolées dans le substra- tum de Flysch du massif de la Hornfluh. Il n’en existe qu’un seul exemple, dans une position tectonique semblable, dans le Chablais (celui des Farquets). Cette découverte est impor- tante ; elle vient corroborer notre hypothèse. Aïnsi les régions des Brèches sont des régions sans racines. Plusieurs faits qui m'ont per- mis de démontrer l’absence de racines sous le massif de la Brè- che du Chablais sont du même ordre que ceux qui servent à nous démontrer la même absence 1. LuGrox. La région de la Brèche du Chablais, p. 240. 2. G. ROEssiNGER et Bonarp. Les roches cristallines de la Hornfluh. Bull. Soc. vaud. Sc. nat., vol. XXX VII, pp. 471, 1901. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 797 sous les Préalpes médianes. Avant de les examiner, arrêtons-nous encore au pli frontal. M. Haug s'appuie en particulier sur l’absence de la charnière frontale des Préalpes médianes pour nier l'hypothèse du recou- vrement général de cette région alpine. Cependant si nous consi- dérons la fig. 3, pl. XV, nous voyons que le massif de la Brèche n'y présente aucune charnière frontale, donc en se basant sur cette coupe, M. Haug pourrait aussi en déduire l'absence de racine. Mais M. Haug admet ! que la limite extérieure des Préalpes médianes est une ligne de contact anormal, qui se poursuit depuis le Môle jusqu'à Blumenstein ; il admet, avec l’ensemble des géo- logues, que ce contact anormal est dû à un chevauchement ?. Mais un chevauchement est toujours, lui aussi, terminé par une char- nière frontale. Nos grands phénomènes de recouvrement ne sont, au fond, que des chevauchements de très grande amplitude. M. Haug ne devrait donc pas admettre le chevauchement du bord externe des Préalpes médianes, puisque la charnière frontale n'existe pas. Si la charnière frontale des Préalpes médianes est absente, c’est qu'elle a été simplement enlevée par l'érosion. Mais il est un massif où elle ne devait pas être bien lointaine, où, me semble-t-il, elle est encore en partie conservée, dans les terrains liasiques. Je veux parler du Môle. En examinant la coupe 10, pl. IIT, de mon mémoire sur le Chablais, on voit combien cette coupe rappelle les empilements de plis, ceux, par exemple, du front des Diablerets. Du reste, dans le cas particulier, cette absence de pli frontal a une importance relativement minime et il me semble inutile d'insister. Je me suis appuyé particulièrement, pour démontrer l'absence de racine du massif de la Brèche du Chablais, sur le fait que le pli synclinal si simple et si régulier, que représente tout le massif, ne se termine pas aux deux extrémités de son axe. « Ce pli s'arrête brusquement aux vallées du Giffre et du Rhône et sous ses extré- mités au sud-est et au nord-ouest nous voyons pénétrer le Flysch * ». Un pli dont les deux extrémités de l'axe reposent sur des terrains plus jeunes ne peut avoir racine en profondeur. Or, ce raisonnement, qui à été accepté pour le massif de la Brèche, peut être appliqué aux Préalpes médianes. 1. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses, P-. 150. , E. HauG. Id., p. 152 : «Si ce chevauchement était contesté... ». 3. Luceow. La région de la Brèche du Chablais, p. 225. 3 Juin 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 49 558 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT C'est la vallée de l’Arve qui va nous fournir des arguments péremptoires, que j'ai déjà exposés en partie dans mon mémoire sur fe Chablais !. Quelle hypothèse, autre que celle d’une nappe de recouvrement, pourra permettre d'expliquer la présence de quelques lambeaux Jjurassiques retrouvés par moi, à la Turche, sur les masses de Flsch qui s'élèvent vers le Désert de Platé ? Ces deux gros blocs de Jurassique ne représentent-ils pas des fragments des Préalpes médianes et ne nous apprennent-ils pas que cette nappe de recouvrement étail jadis plus étendue? Ces lambeaux de recouvrement nous disent quel fut le chemin suivi par la nappe préalpine. Je ne vois guère quelle théorie pourront, émettre les adversaires de celle que je défends ici pour expliquer la présence de ces témoins gênants. A l'avance je m'inscris contre l'explication qui pourrait peut-être être donnée, qui considérerait ces lambeaux comme des fragments d’un pli venu du nord, de dessous le massif de la Brèche, paralle- lement à la vallée du Giffre. Ce pli serait écrasé à sa racine. Une telle hypothèse serait d’ailleurs facile à réfuter. Les blocs de la Turche sont comparables aux lambeaux isolés qui appartiennent au massif de la Brèche. Ils surnagent sur le Flÿsch des Hautes Alpes. Ceci nous montre bien que ces montagnes jouent, vis-à-vis des Préalpes médianes, le rôle que ces dernières jouent vis-à-vis de la région des Brèches. Ce sont des masses qui se recouvrent les ynes les autres. Et ce qui est une preuve pour le massif de la Brèche doit l'être aussi pour les Préalpes médianes. Les Préalpes médianes sont coupées, transversalement, par l'érosion de la vallée de l’Arve, dans le Môle et dans la Pointe d’Orchez. Or les plis qui les forment sont superposés à des terrains plus jeunes qu'eux. Ils ne peuvent donc avoir racine en profondeur etil s'ensuit que les Préalpes médianes en entier sont sans racines. Voyons les faits qui m'autorisent à établir cette importante conclusion. On sait qu'à Taninge (fig. 4, pl. XV) les Préalpes médianes en entier ne sont représentées que par une lame de Crétacique supé- rieur reposant sur le Fly-sch des Hautes Alpes, et recouvert direc- tement par le Carbonifère du massif de la Brèche. Ainsi, en ce point, les Préalpes médianes n'ont pas racine en profondeur. 1. Je prie le lecteur de m’exeuser de citer si souvent ce mémoire, j'y suis forcé par l’oubli, dans les discussions ultérieures, des arguments que j'estime importants, arguments qui se sont perdus parmi le grand nombre des autres, au milieu de l'énorme accumulation de faits que j'ai apportés. > DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 799 Toute la rive gauche du Giffre est occupée par le Flysch des Hautes Alpes, sur lequel repose, à Chatillon, un lambeau de Flysch, homologue de celui du Niesen (brèche à éléments granitiques), soit de la zone interne des Préalpes. Ce Flysch des Hautes Alpes, avec son compagnon, occupe toute la partie basse de l'extrémité orientale du massif de la Pointe d'Orchez. On sait que partout les Hautes Alpes s'enfoncent sous la zone interne et celle-ci sous les Préalpes médianes. Dans ces conditions, nous pouvons dire que toute l'extrémité est de la Pointe d'Orchez repose sur le Flysch. La démonstration est péremptoire, si l’on sait que vers le point 546, sur la route de Chatillon à Marignier !, on constate le Flysch au pied des escarpements liasiques. Aïnsi voilà un premier ensemble des Préalpes médianes, un des chaînons axiaux du fameux éventail imbriqué qui repose sur le Flysch. Je reviendrai sur ce fait important: mais passons main- tenant au Môle. Je maintiens que les plis du Môle sont couchés sur la Molasse rouge. Or, sur quoi repose cette Molasse, sinon sur le Flysch des Hautes Alpes ? Et comme, à quelques kilomètres de là, nous savons que la Pointe d'Orchez repose sur ce Flysch, comment veut-on, entre eux deux, trouver place pour une racine des Préalpes ? Il ne faut pas oublier, non plus, que les plis préalpins du Môle et de la Pointe d'Orchez arrivent à angle droit sur la direction des plis haut-alpins de la rive gauche de l’Arve. Alors de deux choses l'une : ou bien ce sont les plis des Hautes Alpes qui sont barrés, ou bien ce sont ceux des Préalpes. En réalité, ce ne sont ni les uns ni les autres. Les plis préalpins sont brusquement coupés par les parois du Môle et de la Pointe d'Orchez. Cela se voit aussi bien sur la carte que sur le terrain. Les plis des Hautes Alpes, au contraire, s’abaissent, se serrent au voisinage de la vallée de l’Arve. Z! faut bien que les plis préalpins meurent quelque part, et, s'ils ne le font pas au voisinage de la vallée de l’Arve, c'est qu’ils se continuent. Et où se prolongeaient-ils? Il n’y a qu'une seule réponse : Leur continuation ne pouvait se faire qu'au-dessus des plis hauts-alpins de la rive gauche! Ei l'énorme masse des Annes, cette montagne préalpine isolée, juchée sur les plis des Hautes Alpes, à quelques kilomètres de là, est le témoin le plus éloquent en faveur de notre manière de voir. Je n’insiste pas à nouveau sur le passage des plis hauts-alpins à 1. Cet affleurement n’est pas indiqué sur la carte au 1/80.000 : je l'ai décou- vert après l'impression de cette dernière. 760 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMEN! travers la vallée de l’Arve; j'ai précédemment attiré l'attention sur l'argument important que l’on en pouvait tirer. M. Haug, en combattant l'hypothèse du substratum tertiaire des Préalpes, écrit ce qui suit : « Des travaux d'art permettent quel- . quefois de reconnaître le substratum sous la masse en recouvre-. ment elle-même, d’autre fois l'érosion fournit une coupe naturelle assez profonde pour que le substratum apparaisse en certains points. » À défaut de travaux d’art, nous avons l’œuvre de l’érosion. Et n'est-ce point en plein axe des Préalpes que nous voyons l’extré- mité de la Pointe d’Orchez surnager sur le Flysch ? Et où peut se continuer le pli anticlinal de Vellard, dont un des flancs repose sur le Tertiaire ? Il se continue par Matringe ; de là, il rejoint la vallée de la Drance de Bellevaux, forme l’un des plis qui afileu- rent en aval de Saint-Jean d’'Aulph — en plein cœur des Préalpes, continue par l’anticlinal de Cercle près Bonnevaux et finalement atteint la vallée du Rhône à Vouvry ou près de Tanary. Les plis de Vésine ! (2013 m.), plus intérieurs, qui ont à peu près disparu, lorsqu'ils atteignaient la vallée du Giffre (ils sont repré- sentés par l’écaille de Crétacique de Taninge), reposant là, plus certainement encore, sur le Flysch, se prolongent par le Mont Chaufté jusqu'à Vouvry, dans la vallée du Rhône. Les adversaires de la théorie préalpine ne veulent pas admettre que la Molasse rouge du Bouveret rejoigne en profondeur celle du Val d'Illiez, ainsi que je l’ai dessiné sur la fig. 1, pl. XIV. Ils admettent cependant — inconséquence que je ne puis com- prendre — que le Crétacique du vallon de Charmy, qui disparait sous le massif de la Brèche, est bien celui qui ressort à la Pointe de l’Haut, dans le Val de Morgins, et lorsque nous appliquons un raisonnement rigoureusement semblable, quand il s’agit des Préalpes médianes et de la Molasse rouge, nous nous heurtons à leur opposition. Or, maintenant, nous pouvons montrer, ainsi que nous venons de le faire, que le pli anticlinal de Vouvry (fig. 1, pl. XIV) se continue par le Mont Chaufté, par l’anticlinal faillé de Thex (fig. 2, pl. XIV), de là, sous les montagnes de Flysch, dans les plis de Vésine et ensuite dans la vallée du Giffre, où, sous lui, nous voyons apparaître le Flysch; nous pouvons montrer ainsi que le pli le plus rapproché de l’axe dans la vallée transversale du Rhône doit possétler aussi sous lui un substratum de Flysch. Je crois inutile de pousser plus loin les arguments qui militent 1. Feuille d'Annecy, point 2013 m., à l’ouest de la Pointe de Chalune. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 76I en faveur du substratum tertiaire des Préalpes médianes. Si les adversaires de notre manière de voir ne trouvent pas dans ces lignes de quoi satisfaire leur demande de preuves, c’est qu'à leurs yeux il en sera toujours ainsi. 2. — LA RACINE DE LA ZONE INTERNE Supposons que les arguments que je viens d’accumuler, en me basant sur la vallée de l’Arve, ne soient pas suflisants pour démon- tirer l'absence de racine des Préalpes médianes. Il est un autre genre de preuves qui vient encore heureusement à notre secours, en éclairant d’un jour nouveau le problème. Nous trouvons la réponse définitive dans les Hautes Alpes calcaires, et il est vrai- ment surprenant qu'elle n’ait pas jusqu'ici apparu aux yeux des explorateurs. C’est peut-être parce que ces preuves se trouvent dans les solitudes, si peu abordables, des hautes régions inhospi- talières des Wildstrubel, au centre des Alpes bernoïises. Escala- dons les flancs de la vallée de la Simme jusque sur le sommet du Wetzsteinhorn, qui domine la Plaine-Morte et contemplons les cimes environnantes !. Notre regard est arrêté vers le sud par une épaisse paroi de cal- caire du Jurassique supérieur, qui forme la montagne de la Chaux. C'est un vaste pli couché, élémentaire, qui prend sa racine dans les hauteurs dominant Sierre. Un éperon se détache de la paroi ; c'est le Mont Tubang, lambeau isolé de Jurassique fossilifère, reposant sur les grès nummulitiques. De là, une paroi, de Juras- sique également, flanc renversé du grand pli couché, s'avance vers nous, en dominant la Plaine-Morte, recouverte par les neiges. Elle s’allonge ainsi jusqu'au Rohibachstein. Puis, d’autres frag- ments isolés forment comme de grandes ruines sur le Laufboden- : horn. Le pli n’est pas fermé, on n’y voit pass encore la charnière frontale. Où donc se trouve-t-elle ? Avancçons-nous veis ce Laufbo- denhorn et regardons l'abîime. Une énorme masse des mêmes calcaires jurassiques, située dans le fond de la vallée, au Räzliberg, 1. Voir la Carte géologique suisse au 1/100.000, feuille XVI. Les levés géolo- giques sont très inexects. mais cepcnéant ils peuvent être utilisés pour cette première démonstration. J'ai passé sur ces hauteurs bien des journées, sous la tente, à en faire la revision, qui sera publiée plus tard. Ce que je donne aujourd'hui, ce ne sont donc que les résultats préliminaires d'une étude encore inachevée. Mon travail s'appuie sur une exploration complète. J’ai parcouru ce massif dans tous les sens, et malgré les difficultés du terrain tout a été contrôlé par le marteau. 762 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT nous montre la continuation que nous cherchons. La masse juras- sique fait partie des écailles de la zone interne. Ainsi les Préalpes sont liées avec les Hautes Alpes. Cet énorme pli couché que nous venons de reconstruire sans difliculté, tant les affleurements font, de la solution du problème, un jeu des plus simples, n’est qu'un pli supérieur, superposé à celui du Mont Gend, dont j'ai révélé l'existence dans les pages qui précèdent. Ce pli très étiré en pénétrant dans la zone interne suit les con- tournements des plis du flanc normal de la nappe du Mont Gond- Wildhorn. Et c’est là du reste un des caractères communs aux écailles de la zone interne : elles suivent toujours les ondulations des plis des Hautes Alpes, sur lesquels elles reposent. Ici, dans cette zone, les synclinaux hauts-alpins contiennent des noyaux d'Oxfordien, de Malm, de Trias, ete. Ces écailles accu- mulées — résultats de l’étirement à l'extrême des grands plis couchés — forment des séries où les lacunes tectoniques sont la règle dominante, séries entassées les unes sur les autres en par- faite concordance. M. Roessinger montrera ces étranges allures dans un prochain mémoire. Ainsi un des plis des Préalpes peut être reconstitué dans son ensemble dès sa racine Jusqu'à sa tête enfouie en écaille dans la zone interne. Ce n’est que dans les Wildstrubel que l’on pouvait avoir la chance de retrouver un des plis supérieurs des trois nappes super- posées, que nous avons reconstruites dans les premières pages du présent travail. La raison en est fort simple. Nous avons vu que les nappes des Diablerets et du Mont Gond formaient, dans leur ensemble, des plans descendant vers l’est transversalement à leur direction de poussée. Ce vaste abaissement des axes se fait sentir jusqu'aux Wildstrubel, à peu près à mi-distance entre les massifs cristallins de Morcles et du Finsteraarhorn. Plus loin les plis se relèvent. Nous devons donc perdre à tout jamais l'espoir de retrouver un autre pli des Préalpes encore attaché à sa racine. Cela a d’ailleurs peu d'importance, il sufjit, en effet, d’avoir trouvé l’un d'eux pour que tout le reste s’enchaïne. La zone interne est formée par trois grands régimes principaux d’écailles !. Il est ainsi probable que deux autres grands plis, pour le moins, devaient être superposés à celui que des débris nous 1. Il y a en réalité une quinzaine d’écailles dont plusieurs sont réduites à l’état de traînées de blocs pincés dans le Kiysch. Ce ne sont que les digita- tions par étirement d’un petit nombre de plis. La zone de Flysch du Niesen doit être considérée comme la quatrième écaille principale. 25 Ti DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 763 permettent de reconstruire avec la même sûreté que quand nous avons affaire à un anticlinal droit quelconque. Avant d'aller plus loin, je désire répondre à une objection pro- bable. Si une des écailles au moins de la zone interne provient des Hautes Alpes, pourquoi n'y rencontrons-nous pas l'Urgonien si caractéristique de ces dernières ? La réponse est aisée. J'ai indiqué dans une note très courte ! que l’Urgonien passe vers le sud, dans les Wildstrubel, à un faciès vaseux, autrement dit prend une forme barrémienne, en particulier dans le grand pli couché que nous venons de décrire. Or, si dans ce pli, qui est le plus septentrional de ceux qui ont fourni la zone interne, nous trouvons déjà l’Urgonien sous la forme barrémienne, seule forme connue dans les Préalpes, raison de plus pour qu’il en soit ainsi dans les plis plus méridionaux, dont nous ne pouvons reconstruire la racine, mais dont la tête seule nous est connue, enfouie en écaille dans les sédiments de Flysch préalpins. Cela est certain, puisque ces plis inférieurs ne peuvent venir que de régions plus méridionales par rapport à celles où nous trouvons l’Urgonien sur les hauteurs et le front des Wildstrubel. Mais ce n’est pas tout. Les terrains qui forment la zone interne — du moins en avant du pli que nous reconstruisons — sont les mêmes que ceux qui forment les Hautes Alpes sur leur versant méridional donunänt la vallée du Rhône. Cela n’a pas été une de nos moindres chances ? que de retrouver dans la zone interne, et cela avant d’avoir reconstruit le pli dont nous venons de parler, le Malm, l’Oxfordien à Phylloceras: tortisulcatum, le Lias, le Trias, entièrement semblables à ceux que l'on constate dans les environs de Sierre. Nous ajouterons encore que si l’Aptien, le Gault, ne sont pas connus dans la zone interne, c’est que justement ils manquent dans les territoires méridionaux d’où proviennent les terrains du grand pli que nous venons de reconstruire. Nous sa*ons que les terrains mésozoïques de la zone externe sont les mêmes que ceux de la zone interne. M. Schardt à même supposé que l’une était arrachée de l’autre. Ce sont surtout les terrains Jurassiques et crétaciques que l'on trouve en écailles dans 1. LuUGroN Première communication préliminaire sur la géologie de la région comprise entre le Sanetsch et la Kander. Eclogæ geol. Hele., vol. 6, P. 497, 1900. 2. LuGEoN et ROEssiNGER. Géologie de la Haute vallée de Lauenen. Archives des Se. phys. et nat. Genève, janvier 1901. 764 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT la zone externe. Le Lias et le Trias n'y sont qu'à l'état de « blocs exotiques » ! noyés dans le Flysch. Dans la zone interne, les terrains mésozoïques jeunes consti- tuent surtout les écailles inférieures, telle, par exemple, celle formée par le Néocomien à Céphalopodes accompagné de Malm qui repose sur le pli de Morcles. Les écailles supérieures sont surtout formées de terrains liasiques et triasiques. Si done la zone externe a été formée en partie aux dépens de l’interne, elle n’a guère bénéficié que des écailles inférieures de cette dernière. I peut paraître très singulier que l’on n’y trouve que le$ écailles les plus profondes et non les autres et qu’elle ne contienne rien du Flysch du Niesen, placé immédiatement sous le plan de recouvre- ment des Préalpes médianes. Quelle est donc la cause qui a pu arrêter l'entraînement vers l'avant d’une partie de ces écailles? Nous avons vu que seule l’écaille inférieure n’est pas atteinte par l'effet du refoulement des nappes des Diablerets et du Mont Gond- Wildhorn, du moins dans le voisinage de la vallée du Rhône. Les autres, au contraire, sont contournées sur elles-mêmes, à tel point qu’elles essaient de passer par dessus les Préalpes médianes (fig. 4, BB). Le phénomène est visible des bords du Rhône jusqu’à la vallée de l’Hongrin. J'ai insisté sur ce fait et j’ai fait remarquer qu’au delà de ce point le contournement doit se faire en profondeur, qu'il est invisible à la surface. Nous le retrouvons sitôt que l'érosion est assez profonde. En effet, la chaîne du Niesen forme à son extrémité orientale comme une tête anticlinale emmurée par le contournement des Préalpes médianes ?. A Wimmis, le Flysch pénètre sous les Préalpes médianes, tandis que de l’autre côté de la Kander *, où il aurait dû se prolonger, nous voyons les plis de ces chaînes médianes, en partie cachées sous le Glaciaire, s'allonger dans un territoire qui était autrefois recouvert par le Flysch du Niesen. Or ce Flysch du Niesen doit être considéré comme un pli ou une écaille au même titre que celles qui forment son substratum. Nous voyons done qu'une partie de la zone interne, contournée par l'influence à distance des plis frontaux des nappes des Hautes Alpes, s'efforce de culbuter la nappe préalpine et de passer par dessus, alors que la vraie position devrait être 1. GILLIÉRON. Mat. Carte géol. suisse, 12° et 18° livr , 1885. 2. M. Douvicré considère aussi le Niesen comme une tête anticlinale (Observation géologique dans les environs d’Interlaken. B. S. G, F,, [3|, XX VIII, p 57, 1900). 3. Voir Carte géologique suisse, feuille XII, DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 765 au-dessous. Ainsi, une partie a cherché à passer par le haut. Seules les écailles inférieures, formant probablement des lames plus allongées dans la direction du nord, n'ont été victimes que par- tiellement de ce mouvement vers le haut; elles ont pu être alors entraînées par le bas, là où elles ne subissaient pas l’action des coins pénétrants des nappes des Hautes Alpes. Or, justement dans les Alpes vaudoises, l’écaille indépendante de ces mouvements est La seule dont on retrouve des terrains dans les Pléyades, c’est-à- dire dans la zone externe. Toutes les autres écailles ont été arrêtées dans ce mouvement, ou n’ont pu passer qu'à l'état fragmentaire, formant les blocs exotiques du Gurnigel. Si l'explication que je donne maintenant ne paraît pas assez étayée, c'est que nous manquons encore de documents, mais l’on voit qu'une analyse un peu serrée des faits connus nous amène à établir une relation si singulière entre les écailles des deux zones, que la probabilité de leur liaison ancienne en est plutôt affermie qu'affaiblie. Si les deux zones interne et externe sont bien consti- tuées par les mêmes écailles, elles représenteraient une sorte de zone marginale ou zone ceinture, bords des nappes les plus infé- rieurs des Préalpes. 3. — Les PRÉALPES MÉDIANES NE PEUVENT AVOIR DE RACINE Le recouvrement du massif de la Brèche sur les Préalpes médianes ne peut être contesté. Ce massif ne peut venir que de l’intérieur des Alpes, ainsi qu'en témoigne son pli frontal. Sous les Préalpes médianes s'enfonce la zone interne. Cette zone interne ne peut venir que du sud, de l’intérieur des Alpes, ainsi que le prouve la racine que j'ai découverte. Ainsi les Préalpes médianes sont comprises entre denx nappes de recouvrement ; elles ne peuvent donc avoir racine en profondeur, et elles ne peuvent venir que du sud, de l'intérieur des Alpes. IV. — Les grandes nappes des Alpes suisses. Phénomènes semblables à ceux du Chablais La découverte de la racine d’une des nappes des Préalpes, l'existence de plusieurs nappes empilées dans les Hautes Alpes, au lieu et place des plis à types jurassiens que l’on croyait y voir, conduisent à de nouvelles généralisations relatives à la géologie 766 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT du versant nord des Alpes. Peu à peu nous marchons vers la synthèse. Je vais tenter cet essai de coordination, bien que la tâche me paraïisse considérable. Cette tentative aura l'avantage de montrer. je le crois du moins, quels sont les arguments qui nous manquent encore pour renforcer et faire triompher définiti- vement la théorie des grands mouvements vers le nord. 1. — QUELQUES MOTS: SUR LES KLIPPES Jusqu'ici, je n'ai pas parlé des Alippes, ces montagnes exotiques à faciès préalpin, placées au milieu des chaînons à faciès helvé- tique. Il est évident que le sort de ces petits massifs est lié à celui des Préalpes. Ils ne représentent que l'extension longitudinale des nappes de recouvrement, dont les plus étendues sont localisées dans la zone du Chablais. L'une de ces Klippes cependant mérite que nous nous y arrêtions quelques instants. C'est celle du Giswy- lerstock, près du Brünig, qui vient de faire l'objet d'un mémoire très intéressant et très détaillé dû à M. Hugi ‘. Mon confrère arrive à la conclusion que les terrains qui constituent le Rothspitz. le Jänzimattherg et le Giswylerstock sont bien les restes d’une nappe de recouvrement. Pour lui, le mouvement vient du nord, de cette fameuse chaîne vindélicienne, que personne n’a jamais cons- tatée et que ses défenseurs placent sous les sédiments de la plaine suisse, sorte de chaîne sous-molassique, comparable aux chaînes sous-marines. A l’appui de l’idée d'une poussée venue du nord. M. Hugi consi- dère la remarquable charnière de la Rossfluh, l'une des plus belles des Alpes, comme une charnière synelinale ouverte vers le sud (fig. 6). J’ai parcouru la région attentivement ; j'ai acquis des résultats inverses de ceux de mon confrère. Pour moi la Rossfluh est formée par une charnière anticlinale faisant par conséquent partie d’un pli couché vers le nord. M. Hugi a trouvé, dans une série de blocs éboulés au pied de la Rossfluh, un fossile caractéristique du Muschelkalk, Retzia trigonella. Il suppose que les couches qui contiennent ce fossile passent au pied de la paroi, et, dans ces conditions, les bancs qui les dominent, devant être plus récents et se trouvant au cœur de la charnière, le pli doit être un synelinal. Voici ce qui m'autorise à ne pas accepter les arguments de M. Hugi. Les roches à Retzia ne constituent pas un affleurement 1. E. Huar. Die Klippenregion von Giswyl. Denkschr. schw. naturf. Gest ll- sch., 2, 1900. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE : 767 de roches en place. Ce sont des blocs éboulés. Certainement ils ne proviennent pas du pied de la paroi. Ils ne peuvent provenir que de la partie élevée de la paroi et par conséquent du noyau du pli. Dans ces conditions, puisque le Muschelkalk est la roche la plus ancienne du pli et qu’elle ne peut se trouver qu’au centre de ce dernier, celui-ci ne peut être qu'un anticlinal. Dans ce cas, le pli de la Rossfluh, loin de venir à l'encontre de la théorie que je défends, lui apporte, au contraire, un argument péremptoire. Le pli de la Schafnase n’est alors qu’un fragment d’une tête anticlinale d’un pli supérieur à celui de la Rossfluh et séparé d'elle par un synclinal renversé, ainsi que cela est normalement le cas dans les nappes. En outre, une petite faille locale, que j'ai constatée et qui passe par la Furgge, a permis à ce deuxième anticlinal de s’abaisser. N. Rosslluh "E : Schafnase - "»0767 Msndi Jénzimattherg ALU ES 0 ï rhoth û Bothspitz 18467 DA | FE 2 7 Muse 20087 27 667 à 1 (l D ÉE - F Ÿ fr 2 S Se == = ÉPETE Le LUI D = = ES 7 Sn — UE) SR Rs HET ER EE ne TCUCTES de > -— = - s Horg Crée L MT RARE Fig. 6. — Coupe de la Klippe du Giswylerstock modifiée dans l'hypothèse de plis venus du sud. — Echelle 1/100.000. M. Hugi s'appuie encore sur un fait intéressant. Il remarque que la série du substratum présente le maximum de dislocations sur le bord sud de la Klippe. S'appuyant sur l'autorité de M. Rothpletz, il dit que ce fait s'explique aisément, car il est clair, ajoute-t-il, que, dans le transport d’une masse, l'effet mécanique doit être le plus fort vers son front. Cela est possible, maïs, dans le cas particulier, il est facile de démontrer que Ja limite sud du Giswylerstock ne correspond absolument pas avec le front de la nappe, puisque celle-ci vient du sud; et même encore, si l'hypothèse de la venue du nord nous était démontrée, cette même limite ne correspondrait pas davantage avec le front. Il faut un pli frontal pour limiter une nappe; les Klippes du Giswylerstock ne sont que les débris épars d’un grand recouvrement; l'érosion a taillé, morcelé cette nappe; la limite sud n’est qu’une limite d’érosion. Ainsi donc ce maximum _de dislocation du substratum, dont M. Hugi a montré l'existence, s’est fait en un point quelconque sous la nappe. Il n'apporte aucun argument pour l’une ou l’autre des hypothèses. 768 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Et j'ajouterai encore une remarque. Les petites dislocations du substratum en question sont visibles là où les couches sont très nettement différenciées les unes des autres ; mais qui nous dit que dans les masses homogènes du Flysch de la limite nord il n’en soit pas de même? Et si la dolomie recouvrante du voisinage de ces petits accidents locaux paraît particulièrement disloquée, c’est qu'elle se trouve sur le plan de charriage. Aïlleurs, le contact est invisible. L’argument n’a donc aucune importance. Ainsi aucun des faits signalé par M. Hugi n’est contraire à la venue du sud, bien au contraire, puisque je montre que la Rossfluh est un remarquable anticlinal couché vers le nord. Si j'insiste particulièrement sur le Giswylerstock, c’est que les adversaires de la théorie que nous défendons ont cru trouver contre nous des faits péremptoires dans cette montagne. Ces fameux plis poussés vers le sud n'existent que dans les coupes dessinées : €... c’est précisément ce déversement vers le sud que les partisans du déversement uniforme, dans toute l’Europe, des plis vers le nord ne peuvent se résoudre à admettre », a écrit le plus brillant adver- saire de notre manière de voir, M. Haug !, en analysant le mémoire de M. Hugi. En effet, des plis du genre de ceux de la Rossfluh ne peuvent nous embärrasser, bien au contraire, ils confirment notre hypothèse et viennent à son appui. Quant à la théorie mécanique de M. Hugi, je ne la discuterai pas longuement, car ses arguments sont déjà tombés. Les deux poussées qu'il invoque sont difficiles à comprendre ; si la première (Giswylerstock) est dirigée dans le sens opposé à celui où M. Hugi pensait le faire venir, la deuxième n'est que pure hypothèse, aucune charnière n'étant conservée. J’ajouterai encore un fait. J'ai découvert, avec un de mes élèves, M. F. Jaccard, un lambeau de Flysch, entre le Dogger du Jänzi- mattberg et le Trias que l’on croyait former son substratum; cela vient nous montrer une étrange parenté de dislocation avec celles qui, dans les Préalpes, nous offrent le plus de difficultés. Une hypothèse basée sur des lambeaux épars comme ceux qu'offre le Giswylerstock ne peut donc infirmer l’ensemble consi- dérable des faits préalpins. Quoi qu’il en soit, il est de mon devoir de rendre un juste et mérité hommage à mon confrère bernois. Il a attiré l’attention sur ces rochers perdus, qu'il a décrits avec une grande clarté. Les autres Klippes de la Suisse ne présentent rien qui soit . Ë. Hauc. Revue annuelle de géologie. Revue générale des Sciences, 11° année, p. 1335, 1900. DES ALPES DU CHABLAÏS ET DE LA SUISSE 769 contraire à l’hypothèse de grands plis venus de l'intérieur des Alpes. Des deux régions exotiques de la Savoie, celle des Annes, présente, dans la montagne d’Auferrand et d’Almet, un pli synclinal important déversé au nord, c’est-à-dire vers les Préalpes. Il n’y a là rien de contraire à la théorie que nous défendons. Quant à la Klippe de Sulens, il résulte des études que nous avons faites, M. Haug et moi !, que certaines écailles inférieures présentent des charnières dirigées vers l'extérieur de la chaîne ; il n’y a qu'un pli local qui soit disposé en sens inverse. La masse liasique de la montagne proprement dite de Sulens, que nous avions interprétée comme un synclinal déversé vers le sud-est, peut être tout aussi bien considérée comme formée par deux anticlinaux plongeants superposés, provoqués par une poussée dirigée vers le nord-ouest. L'absence de charnière ne permet pas de faire le choix entre les deux hypothèses. à Cette rapide récapitulation de la tectonique des Klippes nous montre qu'aucun fait n’est contraire à l'hypothèse du charriage vers l'extérieur de la chaîne, et que bon nombre de données, telles que des charnières qui ne présentent pas d'ambiguité possible, viennent, par contre, à l’appui de cette hypothèse. Forts de ce que nous a montré cette récapitulation, reprenons notre problème, en cherchant nos preuves dans les Préalpes. 2, — LA TECTONIQUE DES PRÉALPES N’EST PAS PROPRE A CETTE CHAÎNE ; ELLE EST CELLE DE LA PRESQUE TOTALITÉ DES ÂLPES CALCAIRES SUISSES ! Le titre de ce paragraphe résume notre nouvelle conception. Celle-ci se base à la fois sur les excellents travaux, justement célèbres, de mes prédécesseurs, parmi lesquels je signalerai les travaux de Escher, et de MM. Baltzer, Heim et Renevier ; elle se base aussi, et pour beaucoup, sur les brillants résultats acquis dans les Alpes par mes maîtres et mes collègues du Service de la Carte géologique de France, M. Marcel Bertrand et MM. Termier, Haug, Kilian et Ritter, et elle s'appuie encore sur les faits que j'ai pu accumuler depuis 1895. Je pars du principe, qui est actuellement démontré, que les Préalpes ne peuvent venir que de l’intérieur des Alpes. C’est un 1. HauG et Luceo. Note préliminaire sur la géologie de la montagne de Sulens. Bull. Soc. d’hist. nat. de la Savoie, 1897. 990 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT fait que je tiens pour absolument acquis ; les pages de ce mémoire auront sufli, j en suis persuadé, à nous rallier définitivement les indécis. Dans leur contact avec les Hautes Alpes, les Préalpes présentent la région la plus disloquée, la partie interne de la zone ceinture. Ce ne sont plus des plis que l’on y voit, mais des écailles empilées les unes sur les autres, si étirées parfois, qu’elles ne forment plus que les grains disjoints d’un chapelet gigantesque. Quelle diffé- rence de style tectonique avec celui des plis couchés aux belles charnières des Hautes Alpes, qui senfoncent sous cette zone interne. Il semblerait que la nature, en créant ces deux régions, ait cherché à mettre en opposition l’irrégularité extrême de l’une avec la grande régularité des charnières anticlinales de l'autre. Zt cependant ces deux systèmes sont intimement liés, puisque l'une des écailles de la zone interne est la continuation d'un des grands plis couchés des Hautes Alpes. Cette constatation a une importance considérable. Lorsque j'écrivais mon ouvrage sur le Chablais, l'existence de grar ds plis couchés superposés dans les Hautes Alpes calcaires était encore ignorée. On ne connaissait que le grand pli couché de la Dent du Midi-Dent de Morcles, mais l’on croyait qu'il se terminait très rapidement vers ses deux extrémités. IL n'était que l'exagération partielle des plis droits que l'on croyait voir dans les Alpes vaudoises et dans les Hautes Chaînes calcaires de Savoie. Dans ces conditions, la brusque apparition d un immense système charrié au-dessus d’un ensemble plissé d’une façon presque juras- sienne (à l'exception locale de la Dent du Midi et de la Dent de Morcles) avait laissé supposer à M. Schardt et à moi-même que la masse préalpine avait été transportée de loin et amenée sur son emplacement actuel par un phénomène spécial. Nous nous plai- sions à comparer ce charriage à une sorte d’immense glissement, dû aux lois de la pesanteur. Pour mon compte, si je n’ai pas insisté sur cette conception nouvelle. j'ai néanmoins une part très grosse de responsabilité, puisque j'ai terminé mon mémoire en dévelop- pant cette hypothèse et en exposant le mécanisme qui devait l'expliquer. Voici quelle était ma conception ! : « Le mouvement alpin, pré- lude des dislocations qui allaient durer jusqu'au Miocène supé- rieur, aurait commencé à se faire sentir dans les temps éocènes par un bombement général de la zone centrale de l'éventail alpin. 1. LuGEoN. La région de la Brèche du Chablais, pp. 300-307. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE TI Les rides primordiales auraient été effacées par ce mouvement plus intense. Du sommet ou des flancs de ce dôme, immergé encore sous les eaux nummulitiques, se seraient décollées des masses considérables, formant une grande bande : les Préalpes médianes, et les débris de cette nappe, les Xlippes. La masse glis- sante entraînant une quantité considérable de terrains cristallins, aurait alimenté le Flysch en formation, suivant l'hypothèse de M. Schardt. La masse aurait franchi toute la largeur du Brian- connais. La surélévation continuelle des Alpes en arrière de la nappe, soulèvement coïncidant avec le retrait de la mer éocène, se traduisait par un acheminement continuel. En arrière de la nappe, un appel de matière provoqué par les masses plus atfais- sées, sur lesquelles s'effectuait le glissement, provoquait la forma- tion d'un deuxième pli couché, plus récent que le premier, c'est la région de la Brèche.... Avant que ce recouvrement du massif de la Brèche se soit eflectué, les Préalpes médianes auraient dans leur marche arraché la zone bordière et la zone intérieure... C’est alors que toute cette masse de terrain franchit les Hautes Alpes, déterminant un champ d'aflaissement qui permît sa conser- vation par sa plus faible altitude. Ce champ d'affaissement pro- duisant un appel de matière, les plis de la Dent du Midi-Moreles, dans leur partie libre, s'exagéraient sous la forme de grands plis couchés qui, s'ils se fussent un peu plus étendus, auraient même pu se superposer à la grande nappe exotique, comme en arrière s'étaient déjà superposés les massifs des Brèches du Chablais et de la Hornfluh. » Cette explication hypothétique s'était formée dans notre esprit à cause de la diflérence si considérable qui paraissait exister entre les Hautes Alpes et les Préalpes, ainsi que je J'ai dit plus haut. La connaissance que nous avions de ces premières montagnes se basait sur des travaux très détaillés, tels que ceux de MM. Rene- vier et Haug et de Maillard. Aucun d'eux ne révélait les grands plis couchés que nous connaissons aujourd'hui. Si à l'époque nous avions été armés comme nous le sommes aujourd'hui, certainement le problème des Préalpes se serait présenté à nos yeux sous une face différente. En arrière des Klippes de Savoie, MM. M. Bertrand et Ritter ont montré l'extension d'immenses plis couchés superposés. Au sud des Klippes de la Suisse allemande, MM. Marcel Bertrand et Gelliez ont montré l'existence d’une grande nappe dirigée vers le . nord, telle que déjà l’un d’eux l’avait conçue en 1884. En arrière des Préalpes bernoises et vaudoises j’ai montré, dans le présent 752 M. LUGEON. —— LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT travail, l'existence de trois nappes superposées, recouvertes par une quatrième ; celle-ci plus détruite par l'érosion, mais très heureusement encore assez conservée pour que nous puissions voir sa liaison intime avec une des écailles de la zone interne des Préalpes. Ces quatre grandes nappes ont toutes leurs racines dus le flanc droit de la vallée du Rhône. Aïnsi les Hautes Alpes bernoises sont formées par l'empilement de quatre grandes nappes dont nous connaissons les racines. L'une de ces nappes se continue dans les Préalpes, et celles-ci sont formées par d'autres nappes plus grandes encore. Comme d'une part l’une d'elles est rattachée avec sa racine, comme nous voyons d'autre part un développement progressif des nappes des Hautes Alpes de la plus basse vers la plus haute, il doit s’en suivre que les nappes les plus éloignées et les plus hautes formant les Préalpes devaient à l’origine être liées avec leurs racines. Entre le pli de Morcles et la nappe du Mont Gond-Wildhorn, il J a un enchaînement manifeste. Plus nous montons dans la série des nappes. plus nous voyons le phénomène s'exagérer. Nous ne pouvons pas faire une exception mécanique pour expliquer les Préalpes, puisque les nappes qui les constituent ne sont que l’exa- gération des mêmes phénomènes, des inférieures aux supérieures. Voilà ce que nous ne pouvions savoir jusqu'à ce jour et pourquoi nous avions été entrainés à des conceptions hardies. Aujourd’hui nous voyons que le phénomène des Préalpes est le résultat normal des manifestations mécaniques qui ont créé les Alpes suisses. Les Préalpes ne forment pas un cas particulier mais sont l'expression normale, la plus exagérée, d’un phénomène général, celui du déjettement des Alpes vers le nord. Au lieu d’être un cas particulier le problème des Préalpes n’est qu’un détail. On voit alors combien l’origine lointaine des Préalpes s’impose nécessairement. mais combien la théorie se transforme et se renou- velle. Ce n’est plus un fragment de la couverture sédimentaire des . Alpes qui a marché vers le nord, mais presque toute la couverture. On voit, en outre, combien la conception actuelle de la chaîne alpine doit être modifiée, combien il y a lieu de la renouveler et nous ne sommes encore qu'au début de la future interprétation des Alpes; nous ne faisons qu’entrevoir ce que nous réserve l'étude détaillée de la partie interne de ces montagnes. Avant que l'érosion ait détruit les attaches des nappes réal avec leurs racines il devait se trouver superposé entre les massifs du Mont Blanc et du Finsteraahorn, là où sont les Hautes Alpes = y 773 DES ALPES DU CHABLAIS ET DÈE LA SUISSE \ . SOTQUIQUI2S SINONGUOT S9P 19 SIN9NEU S9P SOJ9U9H — ‘UISS9P NP 91nJ99] EI oo mod onb eJ quos au soddeu say a1que S9SSre] SOPIA SO'T ‘UIeJ{ NP SJuaurauimoquo»s sa] anbrpur souerpou sodye2rq ser suep 11ex3 9qnop 9 — ‘9nuUUOIUr MONSUO] AUN,P JS9 PNS 9] SIA uO1edJou9d eJ JUOP ‘osseION ‘IN ‘ ou991q er op oddex ‘8 ‘sauerpour sodpeoxq sap odden ‘£ ‘ ouxoqur ouoz ej e quowojqeqoud soyoexie ‘S201q 19 Saj[re99 s2p jueuaquoo ‘eroods yosAyy un ed oouroy ‘OUJ9/X9 9U07 ‘9 { U9SOIN NP 9SÂIA np ‘aquepuodopur quowoqeqoaid ‘odden ‘Y9 ‘ suxoqur ouoz e7 ep soddeu soxmy ‘9 ‘e ‘ uJIoqUI oU0Z EI 2p amoraqur oddex ‘ÿ ‘(enbrun yd np esouyiod {qu suep ‘srren) op anoodns nd np orqeqord oddeu) . 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LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT région de la Brèche, que comme une nappe de recouvrement, c’est- à-dire comme une nappe qui, primitivement, devait être liée avec sa racine, il nous est possible de construire une coupe qui repré- sente ce qu'était l’état d'empilement du front nord de la chaîne alpine (fig. 7). L'examen de cette coupe du front nord des Alpes nous permet quelques considérations intéressantes. L'une d'elles est basée sur la marche exagérée, si manifeste vers l'avant. des nappes supé- rieures, comparées aux inférieures. C’est une règle constante; il n'y a que la nappe de la Brèche (n° 8) qui fasse exception, peut- être aussi la zone externe, qui demandera encore des études très détaillées. Le mécanisme que nous devons invoquer pour expli- quer la nappe la plus simple, réduite à un grand pli couché, celle de Morcles, doit être appliqué à la nappe la plus étendue, puisque celle-ci n’est que l'extension d’un phénomène qui, en fait, est le même. Or la seule explication que nous pouvons donner du pli de Morcles est ce que nous désignons communément sous l'expression d'effet de la force tangentielle. Ce terme n’est pas plus susceptible d'explication que le mot gravitation, mais il satisfait pour le moment notre esprit. C'est cette force tangentielle qui a donné lieu à la poussée de ces immenses nappes ; ce n’est donc plus ce phénomène spécial d’un grand glissement, que nous invoquions dans la théorie des nappes de charriages. De cette manière, nous faisons rentrer les grands déplacements de fragments de l'écorce terrestre, ceux du moins des Alpes que nous étudions, dans les lois d’un phénomène normal. 4. — LES PLIS RÉGULIERS DES PRÉALPES MÉDIANES SONT DES ÉLÉMENTS DE CONSTITUTION DES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Les Hautes Alpes calcaires bernoises et vaudoises présentent à leur surface des plis déjetés ou couchés tellement simples que l’on n'avait jamais pensé jusqu'ici à les considérer comme les détails de la carapace de grandes nappes superposées. Il y a là une différence fondamentale avec l'allure si plane de la surface d’autres grandes nappes déjà connues, comme celles décrites par M. Ritter, ou encore comme la nappe classique du double-pli de Glaris. Cepen- dant, on aperçoit déjà entre les coupes de M. Ritter et celles de M. Heim une différence sensible. Les premières possèdent des plis secondaires. Si l'érosion n'avait pas entamé profondément ces nappes superposées, il eut été difficile de les deviner; il eut été DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 779 téméraire, je dirais même impossible de les concevoir. Dans les Hautes Alpes calcaires bernoïses et vaudoises, ces nappes sont un peu plus plissées. Les nappes de la Provence le sont encore davan- tage. La grande masse, sans racine, des Préalpes médianes est plus régulièrement ondulée, et cependant les plis présentent de très fréquentes lacunes, des accidents, surtout dans les parties basses. On voit que les nappes de recouvrement ont des styles très différents les uns des autres dans leurs plis secondaires. Ainsi donc on ne saurait opposer à la théorie du recouvrement ces plis à aspect jurassien des Préalpes médianes, cela d'autant plus que personne ne sait encore ce qui se passe en profondeur sous le Jura. Tantôt les nappes de recouvrement s’avancent avec une régularité qui est certainement plus incompréhensible que ne l’est l'inverse ; tantôt elles se plissent, et chacun des plis se déverse dans le sens général du mouvement: on dirait qu’il cherche à sortir et à constituer un nouveau pli frontal d’une nappe indépen- dante supérieure à celle dont il est né. Je ne puis m'étendre ici sur la valeur théorique considérable de ces faits. J'y reviendrai cer- tainement plus tard. Contentons-nous de voir, dans cette tendance | que présentent les nappes à se plisser, un fait propre à leur genèse. Ce fait nous montre cependant comment les nappes peuvent se digiter et par exagération de cette digitation donner lieu à plusieurs nappes superposées. Or, nous voyons que ce mécanisme ne sort pas de la conception actuelle du mouvement tangentiel. I lui est propre. Nous avons vu comment les Préalpes ont dû être liées primitivement à leurs racines, puisque j'ai retrouvé l’une d'elles. Autrement dit, les grandes nappes qui, en s’empilant, ont formé les Préalpes, ne se différencient pas plus par la marche, qu’elles ne se différencient en fait, des grandes nappes de recouvrement incontestées. Ainsi donc, le plissement des Préalpes médianes doit être considéré comme un plissement génétique. Telle n'était pas, nous le reconnaissons, la manière de comprendre à la fois la naïs- sance de ces grandes nappes et leur plissement dans la théorie des charriages. Nos idées se sont modifiées. Cela est permis, lorsqu'il s’agit de tels problèmes, elles se modifieront peut-être encore, car la Science est toujours perfectible. 5. — LxEs ALPES CALCAIRES A FACIÈS HELVÉTIQUE SONT FORMÉES PAR DES NAPPES TOUT COMME LES PRÉALPES Je me réserve de montrer bientôt ce que deviennent vers l’est les nappes des Diablerets et de Morcles. Vers le sud-ouest, 776 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT M. Ritter a montré que l’on pouvait les suivre jusqu’à la vallée du Doron. Incontestablement elles se continuaient plus au sud encore et peut-être montrera-t-on un jour la liaison de ces nappes avec celles du Briançonnais, décrites par M. Termier, et celles décou- vertes dans l'Ubaye par MM. Haug et Kilian. En Suisse, ces nappes s’agrandissent ; d’intérieures, qu’elles sont en France, elles viennent occuper le bord de la chaîne, s’étalent dans les Préalpes en une grande masse que l'érosion a respectée à cause de la faible altitude. La généralité du phénomène des grandes nappes ne nous permet pas de dire, en raison de la position des Préalpes dans une région affaissée, que cet affaissement est dû à leur action, à leur poids. L'origine du bassin du Léman n'a rien à voir avec le phénomène du recouvrement. Jusqu'où s’étendaient en France, vers l’est, ces nappes venues de l'intérieur des Alpes ? Les Klippes des Annes et de Sulens ne nous renseignent pas suffisamment. Sous elles nous voyons appa- raître ce que l’on est encore en droit de considérer comme des plis en place. Mais, à partir de la vallée, de l'Arve jusqu’à la vallée del Aar, nous ne connaissons plus le front nord autochtone de la chaîne alpine : il est enfoui dans les profondeurs du sol ! A). Le Problème du double-pli de Glaris. Vers l’ouest les nappes que nous avons déerites se continuent. Celle du Wildhorn se prolonge avec une régularité remarquable ; c'est elle qui forme probablement l’une des nappes plongeantes (pli nord) de Glaris et qui se termine, ainsi que nous le verrons, dans le Sentis et la chaîne du Pilate. Ce n’est que dans le Wild- strubel et le Wildhorn que cette nappe est liée avec sa racine: aillèurs, il y a une discontinuité complète, due simplement à l'érosion, entre la tête anticlinale des nappes et leur point de départ. Nous verrons plus loin où se trouvent les plis frontaux de la nappe glaronnaise. C’est ce défaut de continuité auquel est imputable l'hypothèse du double-pli. Chacun connaît les coupes très remar- quables de M. Heim. Les plis frontaux des deux plis couchés poussés hypothétiquement l’un contre l’autre sont représentés par des courbes de raccord, qui simulent les charnières en regard, ainsi que l’exige la théorie. Quand les deux plis couchés opposés s’égrènent en petits lam- beaux de recouvrement, comme cela se voit en particulier près du Hausstock, il devient impossible de dire s'ils appartiennent à l’un ou à l’autre des plis. Chacune des courbes qui simulent les char- 779 DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE nières aurait droit à en prendre possession. ‘Le grand lambeau de la Sardona (frontière est du canton de Glaris) peut, de même, aussi pas np nuoA onbrun td un,p oseiodAu,] suep odno) ‘ga ‘ (IA 1youd ‘A ‘ré ‘Sunprrqs#iqon op snwustuegooy) td eçqnop np osoyiodAuy suep tu ‘W saade;p 2dno) ‘yy ‘000001/1 [949 ‘U9PTIEID S9P odnon — ‘8 ‘SI \ | y pion Puy jh ve CA LE bien appartenir à un des plis qu'à l’autre, car les étirements, la EE 096€ LR |. yD0/SSOIu1) Û g£6z 72076 ISSN] n Lu 6 ; u9t}ony] U9[M ‘N t les mêmes dans les lambeaux et les deux plis supposés en présence. C’est pour cette raison, en partie, que ique son tratigraph » série S 778 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT _M. Marcel Bertrand !, déjà en 1884, a signalé ces difficultés. A la notion des deux plis il a proposé de substituer celle du pli unique. Les célèbres charnières anticlinales dessinées en pointillé sur les coupes n’ont jamais été trouvées complètement fermées, et ici on est en droit de les exiger, puisque c’est sur elles que se base surtout la théorie. Dans le massif des Clariden, M. Heïim consi- dère le coin de Malin du Griesstock comme la fameuse charnière anticlinale tant cherchée. Il n’est pas difficile de montrer (fig. 8) qu'il ne s'agit en réalité que d’un simple repli du flanc médian d’un pli unique venant du sud, flanc médian de Jurassique, que l’on suit très loin dans la vallée de la Linth. | Nous verrons plus loin que les recherches de M. Burckhardt parlent elles aussi contre l'hypothèse du double-pli. - Dans une étude récente, M. Piperoff ? maintient l’hypothèse du double-pli de Glaris d’après les preuves qu'il pense avoir trouvées dans le Calanda. Je crois plutôt que les matériaux qu'il a réunis avec grand soin peuvent servir à démontrer le contraire, ou sinon, à montrer dans le Calanda, comme ailleurs, la continuelle absence de la charnière du pli sud. En effet, non loin du Calanda, au Rin- gelspitz, on voit un lambeau perdu sur le Flysch du pli méridional. Sur une bande étirée de Jurassique repose du Verrucano (Per- mien). C’est une partie du flanc médian de l’anticlinal sud. Examinons ce que devient vers l’est ce Flysch, qui forme le syn- clinal du pli sud. Il repose normalement sur le Crétacique que l’on suit jusque dans le Calfeuserthal, de là dans les hauteurs qui. dominent Vättis; puis il va former le pli anticlinal inférieur à charnière connue du Calanda. Ce pli se fait donc sentir unique- ment dans le flanc normal du synclinal du pli sud. Il n’est qu'un de ces nombreux plis déjetés que l’on voit dans le Flysch des coupes de M. Heim. C’est le premier de ces plis en comptant à partir du sud. Le pli supérieur du Calanda ne peut donc représenter que le pli anticlinal sud, ainsi que le dit M. Piperoff lui-même. Or, dans le Calanda, la charnière du pli, ainsi que je l’ai dit, est inconnue. La plupart des coupes de M. Piperoff sont très démonstratives sous ce rapport, sauf le profil I et IL, où l’auteur dessine la charnière. Ce résultat n’est, j'en suis convaincu, qu'un artifice involontaire du dessin. Ainsi, le profil II montre des couches de Jurassique supé- rieur plongeant au nord-ouest, alors que les plongements indiqués .- M. BerTrAN»D. Rapport de structure des Alpes de Glaris et du bassin Res du Nord. B S. G. F., (3), XIX, p. 318, 1884. 2. Prrerorr. Geologie des Chlencia. Mat. Carte géol. suisse, 37° nl 1897. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 779 sur la carte sont vers le sud-est. L’anticlinal ne se ferme pas. Il'en est de même dans la coupe I. Le profil V, d’après M. Piperoff, est très démonstratif ; mais il suffit de considérer l’Aelplikopf, et l’on en a le droit, comme un simple repli du flanc médian du grand pli couché, et non comme la charnière, pour ramener à sa juste valeur l'argument que l’on peut tirer de la situation de ce sommet. Ainsi, le Calanda n'apporte aucune preuve en faveur du pli sud fermé. Il est cependant un certain nombre de faits constatés par M. Heiïm qui paraissent démontrer l'existence du pli sud, limité en étendue vers le nord. Ainsi, en particulier, la coupe du Ringelspitz!. Le Malm du flanc médian est à peu près complètement étiré et de ce fait l’anticlinal paraît fermé dans le Jurassique supérieur. Comment se peut-il alors que, dans l'hypothèse du pli unique, l’on puisse retrouver du Malm dans la base des Churfirsten ? Les exemples de plis couchés qui montrent un écrasement total du flanc médian en arrière de parties plus avancées où celui-ci existe pleinement développé ne sont pas rares. Il n’y a qu’à observer les coupes de M. Heim lui-même (ainsi celle du col du Panix), pour s’en convaincre ?. Il en est de même au Ringelspitz. Non loin de là, au Vorab, le Malm du flanc médian est nettement développé. La coupe du Ringelspitz ne présente donc qu’un écrasement local. Le pli-faille s'y accentue plus près de la charnière synclinale que dans les autres coupes. Une autre difficulté en faveur de l'existence du pli sud vient de l'absence presque constante du Malm sur le flanc normal du pli sud, flanc normal qui, il est vrai; est presque toujours absent, détruit qu'il est par érosion ; mais s’il avait été conservé, n’y trouverait-on pas des schistes des Grisons, car le pli normal montre la Sernifite s’enfonçant au sud sous ces schistes ? Alors comment se peut-il, dans l'hypothèse du pli unique, que nous trouvions ce Malm, si remarquablement développé sur le flanc normal, au Mürtschenstock, dans les Churtirsten et dans toute l'immense région au nord du col du Klausen ? Cette objection paraît péremptoire. Il est incontestable que, pour le moment, c’est l’argument le plus puissant à opposer à l'hypothèse du pli unique. Poursuivons plus attentivement cette question difficile. Quand nous cherchons à nous figurer ce que devient le Malm normal du Calanda vers le sud, nous devons forcément admettre qu'il disparaît sous les 1. HEiM. Mat. Carte géol. suisse, 25° livr., pl. II, profil 14. 2. Heïm. Loc. cit., pl. IT, profil 10. 780 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT schistes qui forment les montagnes de Coiïre. Ici donc les schistes reposeraient sur le Malm; plus loin, dès Ilanz, ils reposent sur le Verrucano. Quel que soit leur âge, qu'ils soient éocènes, comme certains auteurs veulent l’admettre pour le Prätigau, qu'ils soient liasiques, ils reposent par transgression stratigraphique, dans le. premier cas, ou par transgression mécanique, dans le deuxième cas, puisque le Malm du Calanda repose lui-même sur le Ver- rucano. Nous pouvons donc expliquer la disparition du Malm vers le sud de deux manières différentes, mais nous avouons que le problème est encore obscur. Nous avons accumulé assez de preuves, avec celles que nous verrons plus loin, contre l'hypothèse du double-pli, en nous servant de matériaux qui ont été apportés par les auteurs ou les défenseurs de cette conception, que nous pouvons nous demander si la dernière preuve, tirée de ces obscurs schistes des Grisons peut oui ou non nous faire fléchir. A travers la Suisse, les masses calcaires du pli nord de Glaris sont jointes à celles où, dans le Wildhorn, nous constatons l’attache avec leur racine. C’est là un fait tellement indiscutable que l'argument tiré des schistes lustrés des Grisons perd complètement sa valeur. L’explication de ces masses considérables de Malm sur le flanc normal du pli nord ne pourra être donnée que lorsque nous connaï- trons la genèse même du mouvement qui a créé le grand pli unique. Nous ne sommes pas encore arrivés à cette explication, à la théorie des grandes nappes de recouvrement, aussi ne cherche- rai-je pas ici à la donner. Nos recherches ne sont pas encore assez avancées et le problème est peut-être insoluble. Quoi qu'il en soit, les preuves sont telles que l'hypothèse du pli unique, due- à M. Marcel Bertrand, doit remplacer la brillante hypothèse d'Escher de la Linth et de M. Heim. En écrivant cette phrase, je tiens à dire que cette manière de voir n’infirme en rien l'admiration profonde que je témoigne pour les travaux des deux grands maîtres zuri- chois et particulièrement pour ceux de M. Heiïm, un de mes maîtres. Sans leurs efforts, lorsque l'on se rappelle les contro- verses qu'a soulevées la théorie des Alpes glaronnaises, nous ne serions pas dans la voie du progrès où nous nous trouvons. À chacun suffit sa tâche. Le présent chapitre n’est, si je ne me trompe, qu’un essai de perfectionnement partiel de cet impérissable et fécond ouvrage le « Mechanismus der Gebirgsbildung ». A Lo to x Que reste-t-il alors, en Suisse, sur le versant nord des Alpes, des plis autochtones, des vrais plis en place du front nord de la DES ALPES DU CHABTAIS ET DE LA SUISSE 781 chaîne ? La chaîne du Pilate et ses ramifications jusqu’au Sentis, de même que les montagnes à faciès helvétiques, limitées au sud par la vallée du Klônthal, le Pragel, l’Isenthal, sont peut-être en place, semble-t-il. Les travaux de M. Burckhardt ! nous permettent de juger cette question. B). Les nappes supérieures glaronnaises. Le Glärnisch présente un empilement de plis qui paraissent terminer la nappe de Glaris. La tête anticlinale du pli supérieur est implantée dans le Flysch du flanc gauche de la vallée du Klôn- thal. C’est ce Flysch qui limite d’une manière si rigoureuse la nappe de Glaris, au-delà duquel elle disparaît, et qui nous permet de la suivre dans les Alpes suisses. En suivant ce Tertiaire, nous le voyons former une mince bande sous les montagnes du nord du Klônthal, jusqu'à Näfels. Ainsi, le pli frontal de la nappe gla- ronnaise doit se propager sous des montagnes supposées en place. Et c'est ce Flysch et ce Nummulitique que nous voyons disparaître sous les alluvions à Näfels. . La pénétration du Flysch sous les montagnes au nord du Klôn- thal a une signification beaucoup plus considérable qu'on ne l’a admis jusqu'ici. Puisque le Nummulitique du flanc supérieur de la nappe de Glaris pénètre sous les montagnes du nord du Klônthal, c’est que celles-ci elles-mêmes ne possèdent pas de racine en profondeur. Elles ne forment que les restes d’une nappe que j'appellerai la nappe supérieure de Glaris. Il n'est pas difticile de le prouver. Pour cela, étudions les coupes très remarquables dessinées par M. Burckhardt. Le Nummulitique qui pénètre sous la chaîne de Wiggis, au- dessus de Netstall, se voit sous toute cette chaîne, jusqu’à Näfels. Nous pouvons le considérer comme formant un synclinal plon- geant qui s'ouvre en avant de la chaïne dans le vallon qui domine Oberurnen. La liaison du Nummulitique de Näfels avec celui qui domine Oberurnen est cachée par des éboulis sur un kilomètre et demi. Mais on ne peut avoir aucun doute sur cette liaison. Au- dessus de Näfels, le flanc renversé de ce synclinal plongeant est remarquable par la présence de marnes à Gr7phæ& Escheri. Xl en est de même à Hohlweg, au-dessus d’Oberurnen. Dans ces deux 1. BurcknArpT. Monographie der Kreideketten zwischen Klônthal, Sihl und Linth. Mat. Carte géol. suisse, 35° livr., 1896. 782 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT parties, le flanc normal possède les grès verts à Nummulites. Pour qui connaît l'extrême variabilité des faciès du Nummulitique, la présence, dans les deux synclinaux, des marnes à Gryphæa Escheri est très significative. C’est incontestablement le même pli sise qui se continue de Näfels jusqu’au-dessus d’Oberurnen. Ainsi, dans la vallée de la Linth, tout comme dans les vallées de l’Arve, du Chablais, du Rhône, plus l’érosion nous permet de voir en profondeur, plus nous constatons que le Tertiaire pénètre sous les masses. Mais d’autres faits viennent encore nous éclairer. Si la liaison, sous les éboulis de Näfels, des deux Nummulitiques dont je viens de parler, était contestée, nous n’aurions qu’à nous adresser au Néocomien, qui, lui, forme une bande continue. Je sais bien qu'ici une autre supposition pourrait être présentée. Elle dirait que la portion du territoire occupé par l’éboulis coïncide avec la racine d'un éventail. Il serait déjà fort curieux de constater cette coïnei- dence. Puis, dans la partie qui serait sur cette racine d’éventail, donc au-dessus des lieux où la striction aurait été maximale, nous voyons les couches du Néocomien particulièrement tranquilles. Enfin, les deux flancs de cet éventail supposé présenteraient des plis et replis toujours dirigés vers le nord. M. Burckhardt a signalé quelques faits qui viennent nous mon- trer que sur cttte bande oblique de Nummulitique des parois du Wiggis existe bien une nappe. Près de Wiggisalp, notre confrère signale une lentille ! de Sénonien dans le Nummulitique. Il en signale encore une autre dans le Flysch du nord de la chaîne, sous le Riseten. Ce sont des lambeaux de lame de charriage, et c’est un phénomène commun aux deux terrains tertiaires dont je suppose la liaison souterraine. Si la lentille de Wiggisalp était explicable à la rigueur dans un synclinal aussi couché et où l’écrasement a pu être considérable, celle du pied du Riseten est inexplicable dans un synclinal qui paraît tranquille, si ce synclinal n’est pas lié avec le précédent, ne forme pas le synclinal couché sous la nappe supérieure de Glaris. Mais ce n’est pas tout encore. La nappe de recouvrement présente, à la base, des couches particuliè- rement étirées. Escher les a déjà considérées comme faisant partie d'un flanc médian. Moesch voulait en faire du Jurassique supé- rieur. M. Burckhardt ? n’y a point trouvé de fossiles; il en fait de l’'Urgonien, mais il avoue n'être pas certain de cette détermina- 1. BurckHanprT. Loc. cit., fig. 29, pl. VI. 2. BurckHARDT. Loc. cit., pp. 130-131. des surfaces DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 783 tion. Il dit qu'incontestablement ce calcaire est plus jeune que le Néocomien, ear il repose sur ce terrain au Krautlistock. Cela n’est Ù ù pas une preuve, car je pourrais tout aussi bien dire que puisque dans la paroi de Wig- gis il repose sous le Néocomien, c’est que ce dernier est plus jeune que lui. Là n'est du reste pas le point im- portant. Ce qu'il faut ne pas oublier, c’est que nulle part ce terrain n’est en liaison avec l’Urgonien normal fos- silifère qui, comme on le sait, couvre de gran- dans la chaîne de Wiggis. Au- trement dit, je crois de- voir contester {outes les lignes de raccord dessinées par M. Burc- khardt et déterminant un anticlinal que mon collègue indique sous le chiffre 5, anticlinal qui forme les plis de la nappe du côté du sud. Jamais la charnière de ce pli n’a été consta- tée !. Je l’ai vainement cherchée sur le terrain. Elle n'existe pas. Elle n'existe du reste nulle part au sud des monta- gnes du nord du Klôn- thal, pas plus dans les flancs de l'Ochsenhorn que dans ceux de Wiggis. Nappe de V RDREE Ê _Fluhber -— SE — w Glärnisch _ - AN CC 2 2 AS Deyenkett ) / 2 Cours de la Trnt2 2 érieure. . — Coupe de la nappe supérieure de Glaris et de l’extrémité de la nappe inf 19. 9 F e supérieure, ont été ramenées dans le plan de la coupe. La chaîne de Wageten est supposée indépen- Les nappes de Räderten et du Fluhberg, digitations de la nappe glaronnais » dante de la nappe inférieure (voir p. 790). Echelle : I, Nappeinférieure; II, Pli des Silbern ; IL, Nappe de Wiggio ; IV, N. de Räderten; V. N. de Fluhberg. I1/100000, Ainsi les montagnes de Wiggis doivent être considérées comme une nappe de recouvrement superposée à celle de Glaris. Elles 1. La charnière indiquée par Burckhardt au Krautlistock (profil 15, pl. IV) n’est pas en accord avec ses levés. 784 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Jouent vis-à-vis de cette dernière le rôle que joue le massif de la PBrèche du Chablais vis-à-vis des Préalpes médianes. Elles ne forment que la nappe supérieure de Glaris (fig. 9). On voit donc que le problème de la Brèche du Chablais n’est pas isolé, mais se retrouve en plein cœur des chaînes à faciès helvé- tiques. M. Burckhardt a montré que les chaines au nord du Klônthal présentaient un fait vraiment extraordinaire, celui de plis trans- versaux, si bien marqués, si accentués, qu'ils sont, d’après ses coupes, comparables aux plis longitudinaux. J'ai cru à ces plis transversaux. C'était même ainsi, si l’on s’en rappelle, que je croyais expliquer en 1896 le relaiement des plis de Morcles par ceux des Diablerets. Les recherches sur le terrain m'ont montré, comme je l’ai écrit plus haut, que les Diablerets ne pouvaient former qu'une nappe indépendante de celle de Moreles. Ici, dans les montagnes du Klônthal, ainsi que j'ai pu m'en assurer sur place, il faut aussi remplacer la notion de ces plis transver- saux par celle des nappes. Nulle part la charnière des plis transversaux, imaginés par M. Burckhardt, n'est visible. On peut analyser aussi attentivement que l’on veut les parois de la Ganthôhe, dans le haut Wäggithal, celles de la Zindlenspitz, dans la vallée de l’Obersee, on ne voit aucun contournement dans le Néocomien qui soit dirigé vers l’est, ainsi que le voudrait l'hypothèse du pli transversal. M. Burckhardt dessine au pied de ces anticlinaux transversaux imaginaires un petit synclinal (I et II des coupes de M. Burckhardt). La charnière de ce petit pli est de même inconnue. Ainsi, les preuves de: ces plis transversaux n'existent pas. Vous pouvons donc donner une toute autre interprétation de ces phénomènes : Nous avons vu antérieurement (p. 775) que les nappes de recou- vrement présentaient la tendance à la formation de plis secondaires | dans leur flanc normal, que ces plis se pressaient dans le sens de la poussée et que chacun d’eux pour aïnsi dire cherchait à créer une nappe indépendante. C'est ce qui s’est produit dans les mon- tagnes du nord du Klônthal. Chacune des régions séparées par les fameux plis transversaux forme une digitation de la nappe, que nous allons examiner de plus près. Tout d’abord, je constate que chacun de ces massifs se termine. vers le nord par une charnière très nette. Je constate, en outre, que chacun de ces contournements des couches est brusquement DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 785 coupé à l’est par les vallées transversales. Celui du Fluhberg est coupé par l'Aabach ; celui du Scheinberg est raviné puis coupé par le bassin de l’Obersee. Le pli synclinal du sommet de Wiggis, qui n’est qu un détail de la nappe du même nom, est coupé par la vallée de la Linth. Nous pouvons donc nous demander jusqu'où continuaient vers l'est ces plis brusquement interrompus : ils se continuatent les uns sur les autres. Le petit synclinal du sommet de Wiggis représente la charnière d’un pli supérieur qui forme le massif du Rädertenstock. Dans ces conditions, on voit combien la disposition de ces chaînes du nord du Klônthal, que M. Burckhardt avait cru expliquer par un mécanisme spécial, rentre dans le cas connu des nappes de recouvrement dont le plan est oblique à la surface moyenne du sol. La nappe du Wiggis, ou nappe supérieure de Glaris, poussée vers le nord, s'enfonce vers l’ouest, transversalement à sa direction de poussée, sous la nappe plus supérieure de la chaîne du Räder- tenstock. Cette deuxième nappe est encore enracinée au col de Lachen avec celle de Wiggis ; elle n’en est que la bifurcation. C’est un phénomène tout à fait semblable à ceux décrits par M. Ritter et à ceux de la nappe du Wildhorn par rapport à celle des Diablerets et de celle-ci par rapport à celle de Morcles. Enfin, plus loin, nous voyons la nappe du Rädertenstock se contourner sur elle-même, former le synclinal du chaînon de l’Ochsenkopf et donner lieu à une nappe supérieure encore, à celle du Fluhberg, sous laquelle elle s'enfonce. Ainsi, si faisant abstraction des effets de l'érosion sur ces nappes, qui ont élé coupées successivement par un plan d'érosion, dont l'altitude moyenne, tangente aux sommets, est comprise entre 2000 et 2200 mètres, nous restituons les parties perdues, nous aurons, au-dessus de la vallée de la Linth, cinq nappes supeïrpo- sées (fig. 9). Ainsi comprise, Voyons ce que devient vers l’ouest la nappe la plus élevée (fig. 9, V). À partir du col du Pragel, c’est cette digitation supérieure qui, seule, repose sur le front de la nappe de Glaris ; les digitations inférieures ont cessé de vivre à la sur- face et ne doivent pas aller bien loin vers l’ouest, car leur amorce disparaît aussi. Du col du Pragel jusqu'à Sisikon, on voit, à la surface du sol, le Nummulitique du flanc normal de la nappe glaronnaise ; c’est un synclinal. Non loin de ce pli, on constate le pli synclinal renversé très connu de l’Axenstrasse. On connaît la coupe donnée par + 786 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT M. Heim de ce singulier synclinal, qui montre qu'au lieu de s'ouvrir par le haut, comme tous les plis de son espèce, il se ferme au contraire. Il doit être considéré comme un pli de la nappe infé- rieure glaronnaise. Autrement dit, celle-ci se digite dans la coupe du lac des Quatre-Cantons en deux plis anticlinaux, l’un au sud, l’autre au nord du synelinal retourné ci-dessus. Si nous cherchons maintenant ce que devient vers l’ouest le synclinal de Pragel-Sisikon, c’est-à-dire dans les masses de l'Uri- rothstock, nous pouvons croire, d’après les descriptions de Moesch, qu'il se ferme aussi par le haut, c'est-à-dire que Les nappes indé- pendantes du nord du Klünthal, du Pragel et de la vallée de Sisikon se rattachent à la nappe glaronnaise, à l’ouest du lac des Quatre-Cantons, jusque dans les Hautes Alpes bernoises. Nous voyons donc qu'en marchant de l’est vers l’ouest, nous arrivons à la même conclusion que celle à laquelle sont arrivés MM. M. Bertrand et Golliez !, en marchant dans un sens opposé, à savoir que la chaîne du Brisen forme une nappe supérieure à la nappe glaronnaise. Les plis de la chaîne du Brisen se continuent jusqu’au lac de Thoune par le bas du Melchtal et par le Brienzerhorn, qui repré- sente le front de la nappe; c’est ainsi que l'ont déjà compris, en 1895, MM. M. Bertrand et Golliez. De là, ce front rejoint vraisem- blablement la nappe du Wildhorn-Mont Gond. Ainsi, une des chaînes que l’on aurait pu croire encore en place, celle qui s'étend des montagnes du nord du Klônthal jusqu'au Brienzerhorn, en longeant le sud de la région des Klippes, forme une nappe de recouvrement parfois digitée dépendante de la nappe inférieure de Glaris à partir du lac des Quatre-Cantons vers l’ouest ; elle est sans relation apparente avec cette dernière à cause de l'érosion, à partir du lac des Quatre-Cantons vers l’est. Nous verrons que ces nappes se lient entre elles dans les Churfirsten. . CO). La nappe inférieure glaronnaise. Revenons à la vallée de la Linth. La nappe digitée de recouvrement des montagnes du nord du Klônthal a été aussi mise en évidence par M. Rothpletz ?. Mais une grande divergence de vues nous sépare. Pour M. Rothpletz, la nappe a été poussée vers le sud-ouest; pour nous, elle l’a été 1. BERTRAND et GoLLiez. Les chaînes septentrionales des Alpes bernoises. B. S. G. F., (3), XXV, p. 568, 1897. D? Ronmnnr. Das geotectonische Problem. der Glarner Alpen, voir ne x. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 787 vers le nord. Un des facteurs les plus importants qui détermine la direction de poussée des nappes est incontestablement la position du pli frontal. Cette direction doit être perpendiculaire à ce pli. Ici il n’y a pas d'ambiguité possible. Le front de la nappe la plus basse est est-vuest, celui de la nappe du milieu est est ouest dans le Kamm (au nord-ouest de l’Obersee) ; le front est de nouveau . est-ouest dans le Fluhberg. Les nappes ne peuvent donc être venues que du sud. Cependant la nappe du milieu, celle du Räder- tenstock, présente une inflexion de direction dans le Scheinberg, elle devient N.E.-S.0. Cette direction, il est vrai, est exagérée par D — D = ES | Do Ex EE ETISTANN £ \ \ fl, 1) : / PR ES) Nappe \Le PP \ ReNLUEnENN \ N Glaris Glärnisch | Fig. 10. — La nappe supérieure glaronnaise subdivisée en trois nappes indépendantes dans les montagnes du nord du Klônthal ; modelé en supposant que l’érosion nait coupé les nappes que dans leur prolongation vers l’est. la forme de l’affleurement, c’est-à-dire à cause de l’érosion, mais elle paraît néanmoins existante. L’explication ne me paraît pas difficile. Lorsque des nappes se digitent, elles paraissent se con- duire comme les vagues de la mer qui se relayent les unes les autres en cherchant à déferler parallèlement au rivage. L’effort de poussée paraît cesser par épuisement à un moment donné, ou plutôt le retard de la vague est tel, que de deux vagues successives la seconde rejoint souvent la première. Il se forme ainsi, en pre- nant un point de comparaison plus commun, un {uyautage du bord 788 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT frontal des nappes, mais au lieu que ce tuyautage soit perpendi- culaire au bord de l’étoffe, comme ceux que font les repasseuses, il est oblique au front général de la nappe. Nous pouvons représens ce phénomène par la fig. ro. Ainsi les nappes du nord du Klônthal viennent bien du sud. Ces nappes s’étendaient-elles vers l’est? Les recherches de M. Haug ! et les travaux de M. Rothpletz ? viennent nous répondre par l’affirmative. La nappe de Wiggis se révèle sous la forme d'un grand lam- beau de recouvrement, qui occupe toute la couverture supérieure du Gross Fahrlen (fig. 10). Plus à l’est encore, l'érosion a entaillé trop profondément le bord sud du lac de Wallenstadt, pour que nous puissions songer à retrouver les débris de cette nappe, mais, dans le massif des Chur- firsten, il semble bien qu’elle se continue. D’après les levés de la carte suisse et les coupes de MM. Heim et Rothpletz, on constate, ainsi que ce dernier l’a, du reste, fait remarquer, deux coupes de nappes superposées, dans les flancs qui dominent le lac. Comme la nappe de Wiggis est immédiatement superposée à la nappe infé- rieure de Glaris, c’est elle qui formerait la nappe la plus élevée et, par conséquent, toute la ligne des crêtes des Churfirsten. Mais, ainsi qu'on peut le constater dans les Churfirsten, le syn- clinal qui sépare les deux nappes se ferme. On voit la charnière éocène pénétrer obliquement dans la montagne. Aïnsi, ici les deux nappes tendent à se rattacher directement l’une à l’autre, comme cela se passe à l’ouest du lac des Quatre-Cantons. Les contourne- ments des couches dans le Mürsischenstock sont l’amorce, dans le Jurassique, de la nappe supérieure de Glaris, se digitant de la nappe inférieure. #4 Revenons en arrière et voyons ce que devient le front de la nappe de Glaris vers le nord. Si les admirables travaux de M. Heim nous renseignent avec une exactitude rigoureuse sur les faits relatifs aux parties internes de la nappe, les documents man- quent un peu en ce qui la concerne au nord. Cependant, grâce aux travaux de M. Burckhardt, de M. Baltzer sur le Glärnisch et grâce aux coupes de M. Heim, nous pouvons tenter le dernier effort qui nous reste à accomplir. 1. E. Hauc. Sur les hautes chaînes calcaires de Suisse. B. S. G. F., C.-R., sommaire, 2% juin 1899. 2. RotTPLeTz. Das geotectonische Problem der Glarner Alpen, pl. XI. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 789 La nappe de Glaris est la plus inférieure, c'est elle qui s'enfonce le plus profondément vers le nord ; pouvons-nous jamais espérer en rencontrer le pli frontal ? Evidemment. Une méthode simple consisterait à partir des Wildstrubel et à parcourir toutes les Alpes suisses en faisant des levés de détail. Cherchons cependant dès à présent si, dans les faits connus des Alpes de la Suisse orientale, nous ne trouvons point des preuves suffisantes. Les travaux de M. Baltzer ont montré que le Glärnisch est formé par un empilement de plis, que Ka dernière coupe de M. Heim représente de la manière suivante : Sur un socle de Flysch s'élève la série normale du Jurassique à l’'Urgonien, qui en forme le terme le plus élevé. Sur ce derniér se trouve une épaisseur de Néocomien, couronnée de nouveau par l’'Urgonien. Ce pli supérieur ne possède pas de charnière. Nous ne trouvons la tête anticlinale que dans la chaîne du Deyenstock-Mättlistock, ainsi que l’a indiqué pour la première fois M. Haug ?, ainsi que, peu après, l’a démontré fort élé- gamment M. Ra ce IL y a donc, formant le sommet du Glär- misch, un pli couché considérable, digitation de la nappe de Glaris. Ce pli couché, qui ne s’est pas individualisé ici en une nappe bien importante, s’accentue de plus en plus vers l’ouest et forme une belle nappe dans les Silbern (Pli B, fig. 3, pl. XVT). Il diminue d’ampleur au bord du lac des Quatre-Cantons (fig. 4, pl. XVI). De l’autre côté de la Linth, ce pli donne lieu à des complications cer- taines dans le Schild, où M. Rothpleiz veut voir une nappe indé- pendante. Je crois que, dans le Schild, ce qui embarrasse c’est la charnière de ce pli secondaire, car de même que ce pli s'arrête au Deyenstock et ne forme pas une nappe au même titre que les autres, de même, dans l’est de la vallée de la Linth, nous ne consta- tons pas sa prolongation au-delà du Schild ; sous le lambeau de recouvrement du Gross Fahrlen, qui représente la nappe de Wiggis, nous ne constatons que la seule nappe inférieure de Glaris. En effet, sur l'immense étendue de la Sernifite (Permien) de cette dernière nappe, nous voyons la série entière jusqu’au Nummu- litique et sur celui-ci le lambeau de recouvrement du Gross Fabrlen. Il n’y a pas trace d’une autre nappe. La base du Glärnisch se continue ainsi sous la nappe supérieure qui forme les montagnes de Wiggis; celles-ci reposent, ainsi que je l'ai montré plus haut, sur le Nummulitique de la nappe infé- 1. Hem. Geologie der Hochalpen zwischen Reuss und Rhein. Mat. Carte géol. suisse, 25° livr., profil 8, pl. IT. 2. Em. Hauc. B.S, G. F. C.-R. somm., 24 juin 1895. 5 Juin 1902. — T. 1er. + Bull. Soc. Géol. Fr. — 5x 590 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT rieure de Glaris, dont nous voyons tour à tour les couches dispa- raître dans le sol d’alluvion de la Linth (fig. 9 et ro). Où se trouve la charnière frontale de cette nappe qui plonge ainsi dans le sol? J'ai déjà montré la liaison intime qui existait entre le synclinal d'Oberurnen et celui des parois du Wiggis. Ces deux synclinaux n'en forment qu'un. Vous pouvons donc nous demander si la petite chaîne qui commence au Kôpfler pour finir à Oberurnen, soit la chaîne de Wageten, ne représente pas la sortie de la nappe glaronnaise inférieure, soit son pli frontal ou une digitation de celui-ci !. | Nous touchons certainement ici au point le plus délicat de la géologie du versant nord. Si le pli anticlinal en question n’est pas ou le pli frontal ou un repli de celui-ci, s’il en est indépendant, ne peut posséder une racine en profondeur. En effet, la nappe inférieure de Glaris, si elle ne sort pas, en _ partie du moins, dans ce pli, doit se continuer plus en avant, sous ce pli: dans ce cas, celui-ci ne peut avoir de racine et, dans cette hypothèse ?, il doit appartenir à une tête de pli détaché de sa racine inconnue. Cela revient au même, au point de vue de l’origine méca- nique de ce pli isolé qui ne pourrait venir que du sud, et quelle que soit la solution que l’on préfère, celle que l’on choisit amène un changement complet dans la manière de comprendre les pre- miers plis des Alpes suisses. Serrons encore le problème de plus près. Si la première solution paraît la plus naturelle, elle a cependant contre elle certains faits importants. Par exemple, si la similitude du Nummulitique qui s'appuie sur l’anticlinal de Wageten et sur la nappe pénétrante à Näfels est complète, il ne paraît pas en être de même de tous les autres terrains. Ainsi M. Burckhardt, dans la carte qui accompagne son mémoire ÿ, signale du Gault dans le pli de Wageten, tandis que la nappe pénétrante n’en possède point. Puis la nappe inférieure de Glaris contient, d’après le même géologue, un faciès particulier du Néoco- mien, dit faciès méridional, tandis que le pli de Wageten, qui se rattache à celui du Pilate et au Sentis, doit, fort probablement, comme ces dernières montagnes, être caractérisé par le faciès -septentrional. Voilà bien des preuves, semble-t-il, contre la liaison possible de ce pli de Wageten avec la nappe de Glaris. 1. Hypothèse exprimée par la fig. 10. 2. Hypothèse exprimée par la fig. 9. 3. BurckHARDT. Monographie der Kreideketten, etc., pl. I. L DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 791 Jusqu’aux recherches de M. Burckhardt sur le groupe du Klôn- thal, on a confondu, dans la Suisse allemande, l’Albien avec le Cénomanien (Vraconnien, couches à Turrilites Bergeri) sous le classique nom de Gault. La carte de notre collègue citée plus haut ne fait malheureusement que reproduire, pour la chaîne de Wage- ten, les contours qu’il avait publiés antérieurement, avant d’établir la subdivision des deux étages, ce qui fait que nous ne pouvons savoir si l’Albien absent du pli inférieur de Glaris, près de Näfels, est présent sur le Wageten. À Näfels, M. Burckhardt signale le Cénomanien, qui existe partout dans ces chaînes, tandis qu'il n’est représenté que près du Kôpfler, dans la chaîne du Wageten !. Nous ne pouvons donc malheureusement être éclairés sur la pré- sence ou l’absence de l’Albien au Wageten. Pour le Néocomien, j'abandonnerai les expressions de faciès nord et de faciès sud. Les nappes du nord du Klônthal, soit les nappes supérieures de Glaris (Wiggis, Räderten et Fluhberg), viennent du sud et contiennent ce que M. Burckhardi appelle le faciès nord, à cause de sa position géographique actuelle. Cette expression, de même que la deuxième, pouvant causer des confu- sions, je remplacerai dans la suite l'expression de faciès sud par celle de faciès S, et le faciès nord par l'expression de faciès N. Le faciès N est nettement localisé dans les plis ou nappes qui occupent les chaînes septentrionales, le faciès S dans les méri- dionales. Dans les montagnes au nord du Klônthal, la nappe infé- rieure de Glaris (Deyenstock) est caractérisée par le faciès S. Que cette nappe, vienne du nord ou du sud, il est tncontestable que ces affleurements à faciès S se continuent par ceux de la base (sous le Nummulitique) du Gros Fahrlen (est de Näfels) et ceux-ci dans les Churfirsten. Or, dans cette dernière chaîne, c’est le faciès N qui est développé, autant qu'on peut en juger d’après les travaux de Moesch ?. Toutefois si nous comparons tout le Crétacique des Churfirsten à la succession des couches trouvées par M. Burckhardt, nous constatons, toujours d’après Moesch *, que le faciès N n’est pas absolument pur. Ainsi, l’Aptien supérieur en est absent, puis le Valangien possède, par places, il est vrai, un calcaire ressem- blant à l’Urgonien (Gambsberg). Mais ce ne sont là que des 1. M. BuRCKHARDT me communique que l’indication de Cénomanien au Kôpfler est une erreur due au lithographe. Les points rouges de la carte auraient dù se trouver dans le jaune du Nummulitique. 2. Mosscu. Geologische Beschreibung der Kalk- und Schiefergebirge zwi- schen Reuss- und Kienthal. Mat. Carte géol. suisse, 24° Livr., III‘ partie, oi 3. Morscu. Mat. Carte géol. suisse, 14° livr., II° partie, 8x. 792 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT variations relativement peu importantes. Elles nous montrent toutefois que le faciès S doit passer au faciès N vers le nord, puisque les couches sont continues, coupées seulement par la vallée de la Linth et le lac de Wallenstadt. Or, que représentent les Churfirsten dans la théorie du pli unique de Glaris ? J!S représentent la tête anticlinale, le pli frontal (ou une digitation de celui-ci) de la grande nappe poussée vers le nord, ainsi que je l’ai démontré, en faisant remarquer que, dans ces Chur- firsten, la nappe supérieure, dont nous connaissons le pli frontal regardant vers le nord, se joignait à la nappe inférieure, pour fina- lement n’en faire plus qu'une seule, dans l’est de la montagne. Nous n'avons plus qu'une simple déduction à faire pour résoudre le problème, à savoir : les Churfirsten, parties des nappes de Glaris poussées vers le nord, semblent liés au Sentis par les massifs crétaciques du Gulmen !. Le Gulmen fait partie de la nappe supérieure de Glaris. Le Mattstock appartient aussi à la même nappe. La nappe inférieure se continue au pied de ces nappes, le long du lac de Wallenstadt, jusqu'au Strahlegg: elle disparaît momentanément à la vue sous les eaux du lac, mais elle sort de nouveau, un peu plus à l’ouest, dans Le petit pi de Fly, Celui-ci est la continuation évidente du pli de Wageten ° Nous arrivons donc par des voies très détournées à la solution du problème. La réponse, basée sur les travaux nombreux de mes prédécesseurs, ne peut être à mes yeux que la suivante : La nappe inférieure de Glaris sort, à partir de la Linth vers l’ouest, en avant de toutes les autres nappes. Le pli frontal forme les chat- nons discontinus qui, du Wageten, s'étendent par le Pilate, la Schrattenfluh et le Justisthal jusqu'au lac de Thoune. Peut-être que, plus loin vers l’ouest, ce pli rejoint celui des Diablerets ou de la Dent du Midi-Morcles. C’est ce que les travaux futurs montreront. A l’ouest de la Linth, le pli frontal de la nappe inférieure de Glaris disparait presque totalement ; à la surface du sol on ne voit que le pli frontal de la nappe supérieure, constituant le Sentis. Ainsi les premiers plis frontaux des Alpes du versant nord de la Suisse, dans lesquels on aurait pu croire que les grands phéno- 1. Is ne sont séparés à la surface, à part le grand synclinal de Wildhaus, que par le Flysch anticlinal de Auf der Hôhe. : 2. Ce pli ferait un angle rentrant au passage de la Linth. C’est un phéno- mène fort fréquent dans les vallées, qui a été décrit par M. Marcel Bertrand et que j'ai montré de mon côté. La nappe supérieure forme aussi le mème angle, particulièrement bien visible sur la carte au 1/100.000. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 703 mènes des nappes n'étaient pas représentés, ont la même origine que le reste du versant nord. Ces plis de la chaîne du Pilate sont les têtes, émergées du Fly sch, de la nappe la plus profonde. Ce gigantesque phénomène ne paraît pas avoir échappé à l'esprit critique et voyant de M. Suess. Je crois ici n'avoir fait que déve- lopper l’idée renfermée dans une phrase du grand savant viennois, qui, en décrivant le panorama du Hohentwiel, s’écrie : «Et au-delà de l'Untersee, derrière la sombre silhouette de la ville de Cons- tance et la surface miroitante du lac, s’échafaudent les grands plis du Sentis, semblables à un flot montant de l'écorce terrestre en mouvement » |. Une objection viendra immédiatement à l'esprit. Beaucoup de mes confrères ne voudront pas se résoudre à discuter ainsi la position de montagnes qui, comme le Sentis et le Pilate, semblent avoir l'aspect de barrières bien enracinées. M. Burckhardt ? n’a-t-il pas montré justement que ces premiers plis sont bien sur leurs raci- nes ? J'avais considéré sa démonstration comme absolue, lorsque j'écrivais mon ouvrage sur le Chablais. Il est aisé cependant de montrer que les plis si bien étudiés par M. Burckhardt n’ont pas l'aspect normal de plis du front d'une chaïne qui s'éteint, se meurt dans une plaine. Ces premiers plis frontaux ne montrent-ils pas de puissantes et étranges dislocations ? Tantôt c’est l’Urgonien qui s'écrase, estlaminé, tantôt ce sont des fragments isolés de Séno- nien transportés en plein Flysch. Combien y a-t-il de petites failles, de plans de frictions ! Il est des croquis de l’auteur qui rappellent de vraies injections (fig. 28 c, 28 d). Et les coupes du Pilate, par Kaufmann, ne montrent-elles pas, comme celles du Sentis, d’Escher, ce caractère d’étirement et ces empilements cinq à six fois répétés, par places, de coins urgoniens dans le Néocomien ! Les énormes murailles de ces deux montagnes rappellent étrangement le style des grands plis frontaux des Diablerets et dans leurs détails elles font penser au front nord des Préalpes médianes. Comme dans les Diablerets, comme à Morcles, comme à la Dent du Midi nous y voyons ce développement si considérable des terrains néocomiens, comme s'ils s'étaient accumulés dans les charnières, par une sorte d’entassement par nourriture, laissant en arrière les roches dures du Jurassique. Ce phénomène a été admirablement démontré par les coupes de mon ami M. Ritter dans la vallée de l’Arve. 1. SuEss. La Face de la Terre, vol. I, p. 261. 2. BurckHARDT. Die Kontaktzone von Kreide und Tertiär, ete. Mat. Carte géol. suisse, 32° livraison, 1893. 794 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Quelle différence n’y a-t-il pas entre ce front des premiers plis des Alpes suisses et la disparition graduelle des plis des Alpes françaises du Génevois, des Bauges, de la Chartreuse, du Vercors, du Diois, de la Drôme! Ici c’est l'effacement successif des plis que nous voyons; en Suisse, c’est le contact brutal, le déchirement. Quelle différence encore entre ces plis alpins et ceux du Jura qui leur font face et qui s’enfouissent, en mourant lentement sous la plaine molassique. Et ces contrecoups intenses qu’a subis la molasse de la Suisse comparés à l’allure tranquille de ce terrain, en avant du Génevois et des Bauges par exemple ! Ce sont d'autres phéno- mènes dont ont été victimes les plis frontaux de la chaîne suisse. Un autre mécanisme est apparu, ou plutôt une action inconnue dans les Alpes françaises se présente ici. Le vrai front autochtone de la chaîne est partout invisible, il est caché en profondeur et ce que nous voyons en surface ne sont que les têtes de nappes de recouvrement émergeant de l'intérieur de la chaîne des Alpes. Il est encore une autre objection que l’on pourrait m'opposer, . c’est celle qu’on baserait sur les découvertes de M. Lorenz ! dans le Fläscherberg, sur les bords du Rhin. L'étude de cette montagne a amené l’auteur à remplacer la notion du double-pli glaronnais par celle extrêmement compliquée du pli circulaire ({Bogenfalite »): Je la tiens pour inconciliable avec tout ce que nous connaissons de l’ensemble de la chaîne alpine. J'oppose tout d’abord à la conception de M. Lorenz un premier fait, tiré de ses propres recherches et qui me semble contraire à ses conclusions. Les plis du Fläscherberg sont déversés vers le nord-ouest, si bien que M. Lorenz a orienté sa coupe de détail dans cette direction. Des plis, ou plutôt des sections de plis, comme ceux qu'offre la petite montagne en question, ne peuvent pas être déversés dans plusieurs directions. Il n’y en a qu'une seule : c’est vers le nord-ouest. M. Lorenz, dans les coupes rayon- nantes qu'il a publiées ? du pli circulaire-de Glaris, oriente la 1. LORENZ. Monographie des Fläscherbergs. Mat. Carte géol. suisse, o° livr., 1900. 2. Lorenz. Loc. cit., pl. IV. M. Lorenz fait remarquer qu'il y a dans le Fläscherberg deux sortes de plis se croisant à angle droit. Il compare ce phénomène à celui décrit par Burckhardt. Nous avons fait justice des plis transversaux du nord du Klônthal. Le deuxième système de plis de M. Lorenz consiste simplement en inflexions d’axe. Comme lui, jai montré, dans mon ouvrage sur les Bauges, que ces inflexions ont été probablement antérieures au plissement définitif, mais ces inflexions ne sont pas à opposer et à placer sur la même ligne que les plis que chacun a admis jusqu'ici. Si nous confon- dions les inflexions et les plissements, nous aurions des « Bogenfalten » un peu partout. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE Arc coupe du Fläscherberg dans la direction de poussée qui est néces- saire pour étayer son hypothèse (Profil ID). Or, cette direction n'est pas le nord-ouest, ainsi que les plis l’indiquent, mais le sud-ouest. Ceci suffit pour infirmer complètement l'hypothèse en question. eu, s 2 a —+ D LS NS De Fig. 11. — L’extrémité E. de la nappe de Glaris disparaissant sous les nappes du Falknis et du Rhäticon. À À, Nappe inférieure glaronnaise ; B, Nappe supérieure ; LL, Premier pli autochtone ; MM, Pli dit pli sud du double pli, soit racine des nappes de Glaris ; R, Ringelspitz ; Fb, Fläscherberg ; Fa, Falknis. En outre, M. Lorenz, toujours pour étayer l'hypothèse de son pli circulaire, donne une coupe (Profil IV) qui n’a jamais été 796 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT observée sur le terrain. Le pli qu'il suppose est formé à 90 degrés du plus voisin, observé dans l'extrémité de la chaîne du Calanda, ce qui est évidemment inadmissible. Ainsi l'hypothèse de la « Glarner Bogenfalte » est combattue par les propres résultats des travaux de son auteur. Dans ces conditions, que représente le Fläscherberg? C'est un fragment du flanc normal de la nappe de Glaris, le dernier reste visible avant l’enfoncement général de cette nappe, au-delà du Rhin, sous les montagnes du Vorarlberg. C’est la répétition de ce que nous montrent les Alpes vaudoises quand nous constatons la pénétration du pli de Moreles sous celui des Diablerets et la pénétration de celui-ci sous la nappe du Mont Gond-Wildhorn. Ce sont les mêmes phénomènes que M. Ritter a décrits le premier dans les Alpes de Savoie. Ce sont eux, toujours les mêmes, qui ont donné lieu aux mêmes erreurs : confusion du plan incliné de la nappe — plan incliné obliquement ou transver- salement — avec la direction de poussée. Ce sont eux qui doivent être interprétés à nouveau, conformément à la même vue générale. La fig. 11 indique quelle est la position du Fläscherberg dans la grande nappe glaronnaise. D). La nappe du Falknis. Allons plus loin encore. Dans un travail très récent !, M. Lorenz donne le résultat de ses très belles recherches dans le Rhäticon. L'auteur insiste encore sur son hypothèse du pli circulaire, puis il décrit les nappes du Falknis et les bords de celle du Rhätikon. Voyons si ce dernier travail présente des résultats qui peuvent être opposés à notre théorie du déplacement général vers le nord. La ressemblance avec le Chablais est ici complète. Sur les plis à faciès helvétiques, que le dernier témoin du Fläscherberg repré- sente, s'élève le massif du Falknis avec les faciès chablaisiens, les faciès des Klippes (faciès vindéliciens). La position relative des masses est la même, ainsi la nappe des Préalpes médianes se retrouve ici à la base du Rhäticon en repos sur les plis des Hautes Alpes calcaires. ï C’est là un fait d'une très rimes importance, dont nous sommes redevables aux géologues de Fribourg, à M. Steinmänn et à son élève. r Th. Lorewz. Geologische Studien im Grenzgebirge zwischen helvetischer und RES Facies. IL. Teil, Südlicher Rhaetikon. Naturf. Gesellsch. lrei- burg , Bd. XII, p. 34, 1901. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE JE) M. Lorenz suppose que ces plis sont aussi déversés vers le centre de son pli circulaire glaronnais. Examinons ses coupes. L'auteur dit que ces masses du Falkais se distin- guent du Flä- scherberg par leur structure en écailles. Cela est vrai pour une barre de Malm pincée à la base dans le FKlysch; mais ce n’est plus le cas dans la par- tie supérieure. Il n'y a qu'à consi- dérer les coupes de M. Lorenz pour s'en con- vaincre. L'ana- logie avec les Préalpes est com- plète. A la base, l’écaille, comme dans la zone externe, plus haut les plis plus déje- tés, mais d’un ordre semblable à ceux du Cha- blais. Ces plis sont déjetés vers le nord et non vers le sud-ouest, comme le suppose M. Lorenz. Ici encore la démons- tration est facile, avec des levés géologiques aussi Cl}, OH", o | IS hi te 21 IR ol! ET AT 21 Es PAS \ \ \ \ A 9 C2 soigneusement (a de M. Lorenz. Coupes super- 2 eves dianes de l’est, d’après les 1 é , orientées S.E.-N.0., montrant la disposition Fig. 12. — Les plis du Falknis ou Préalpes m faits que les siens. » posées eme. suivant une immense lentille plissée sur elle-m Echelle 1/100.000. (couches rouges); Q, Partie triturée (Quetschzone) érieur » ; à, Crétacique sup éocomien comparable à la zone interne des Préalpes ; X, Ecaille de Malm comp UN AA... GG, Niveau de la mer des coupes AA... GG. érieur ; ] 2 M, Jurassique sup 2 arable à la zone externe des Préalpes 708 : M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT L'auteur publie une série de coupes transversales les unes par rapport aux autres et se coupant. Les mêmes plis sont indiqués tantôt déversés au sud-ouest dans une des séries, tantôt déversés au nord-ouest dans l’autre. Il faut choisir, car des plis si courts ne. peuvent être déversés dans deux sens. Or, le sens de la poussée indiquée par les quelques charnières visibles dans le Jurassique ou dans le Flysch du Falknis est le nord. Ce sont donc les coupes S.E.-N.0. de M. Lorenz qui s’approchent le plus de la vérité. En superposant une série de coupes orientées sensiblement nord-sud, faites aussi rigoureusement que possible d’après les propres travaux de M. Lorenz, en ayant soin de prendre en consi- dération le plongement général de l'axe des plis vers l’est. on voit (fig. 12) combien ces plis s'emboîtent admirablement les uns dans les autres et cela sans aucun artifice de dessin. C'est donc bien vers le nord ou le nord-ouest qu'ont été poussées les masses du Falknis. Elles sont les débris d’une nappe dont je rechercherai plus loin la position possible de la racine. Cette direction du nord nous est indiquée par un accident remar- quable. Dans la partie est du bord du Rhäticon s’élend un massif curieux, celui des Kirchlispitzen. C’est une tête anticlinale de Juras- sique, enveloppée dans le Crétacique supérieur (Sénonien, couches rouges) et plongeant dans le Flysch. Par opposition à la masse du Falknis, où M. Lorenz veut voir des écailles et où j'ai montré des plis, il considère le style tectonique des Kirchlispitzen comme étant celui des Klippes. Il me semble que cette analogie est fort spécieuse. Les Klippes étant des débris de nappes morcelées par l'érosion, la même structure doit s’y révéler. Si la nappe était parti- culièrement disloquée, si elle montrait des lacunes de certaines couches dues à l’action mécanique, il en serait de même de la Klippe, c’est-à-dire du lambeau de recouvrement. Les plis du Falknis sont nettement la continuation de celui des Kirchlispitzen, ainsi qu'en témoignent une série de petits fragments conservés entre les deux au pied de la paroi du Rhäticon. Or, l’anticlinal plongeant qui nous occupe est orienté de l’est à l’ouest. Il provient donc ou d’une poussée du nord, ou d’une poussée du sud. Mais, comme ses couches plongent dans la direction du nord, il n’y a plus de doute : la tête anticlinale plongeante, c’est-à-dire complètement retournée sur elle-même, des Kirchlispitzen ne formait qu'un des plis de la nappe du Falknis avant la destruction. de celle-ci par l'érosion, tête semblable à ces plis retournés que M. M. Bertrand a cités dans la Provence et que j'ai montrés dans le front du massif de la Brèche du Chablais. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 799 Ainsi la nappe du Falknis-est, elle aussi, poussée vers le nord sur le Klysch du Prätigau, qui repose lui-même sur la nappe glaronnaise. E). La nappe du Rhäticon et des Alpes de Bavière. Sur la nappe du Falknis en apparaît une autre. Elle est formée par les masses triasiques qui s'étendent du côté des Alpes bava- roises. Ainsi que la coupe naturelle de la vallée du Rhin le démontre, cette nappe nouvelle repose sur le Flysch, que l’on voit aussi pénétrer partout sous elle dans le bas de la vallée de Mon- tafon. Cette nappe, elle aussi, ne peut venir que du sud. Il ne serait pas logique de ne pas admettre le mouvement vers le nord, après ce que je crois avoir démontré. Dans l’Algäu et dans le reste de la Bavière, le Flysch pénètre partout sous les montagnes iriasiques. De même que nous voyons sur le territoire suisse les nappes se relayer au front de la chaîne, celle du Rhäticon relaye la nappe glaronnaise. Celle-ci n'apparaît plus, dans les Alpes allemandes, que sous la forme de plis régu- liers qui émergent du Flysch. Ils représentent la continuation du pli frontal du Sentis. A la vallée de l'IIT ces plis disparaissent sous la grande nappe triasique. Cette disparition est des plus remar- quables. La nappe glaronnaise a pris fin à la surface du sol. Toute- fois, elle paraît se continuer longtemps encore vers l’est. Près du Schliersee, au sud de Munich, quelques plis à faciès helvétique sortent du sol, pour disparaître aussitôt sous les contreforts du Wendelstein, masse triasico-jurassique, dans laquelle j'ai retrouvé la trace de beaux plis couchés, interprétés comme des failles par M. Eb. Fraas. Ce même Wendelstein repose sur le Flysch. Enfin, pour montrer encore, sans insister davantage, la conti- nuité vers l’est des phénomènes de recouvrement, je citerai le Lias, trouvé sous les territoires salifères des Alpes de Salzbourg, qui est d’un faciès différent de celui que l'on voit à la surface du sol. Partout, sur le front nord de la chaîne alpine, de grandes vagues de la lithosphère se sont pressées, les unes sur les autres, dans la direction de l’avant-pays molassique. Revenons à la vallée du Rhin. Grâce aux travaux de Theobald, nous pouvons suivre le bord, coupé par l'érosion, de la nappe du Rhäticon. Nous la voyons contourner l’est du Prätigau sous la forme d’une énorme muraille. 800 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT De Klosters la nappe s'avance manifestement sur son substratum de schistes des Grisons, en formant l'important massif des monta- gnes d’Arosa. Partout, dans le fond des vallées de Plessur et de Parpan, nous voyons ces schistes pénétrer sous la masse dont les plis sont déversés vers le nord-ouest, ainsi que l’on peut s’en assurer en examinant les tracés géologiques de Theobald. Les plis ne suivent pas le bord de la nappe ; ils sont nettement interrompus par ce bord, c’est-à-dire coupés par l'érosion à leur extrémité. Ainsi, la nappe du Rhäticon est encore en liaison avec sa racine, qui ne peut se trouver que vers le sud-est, peut-être sous les mon- tagnes gneissiques de l’est de la vallée de Davos. Le groupe du Falknis, avons-nous vu, représente, par ses faciès et sa position tectonique sur les nappes des Hautes Alpes, exacte- ment ce que sont les Préalpes médianes dans le Chablais. Dans ces conditions, la nappe du Rhäticcn représente, au point de vue tectonique, la nappe de la Brèche du Chablais. Nous savons (p. 938) que vers le sud, sous le massif de la Brèche. les Préalpes médianes s’amincissent jusqu’à leur écrasement total, dans les montagnes du val d'Illiez par exemple. La nappe du Palknis subit le même sort. À partir de la Drusenfluh (Kirchlispitz), dans le Prâtigau, elle ne paraît plus exister sous la nappe du Rhäticon, du moins si l’on se base sur les travaux de Theobald. Elle paraît détachée de sa racine par laminage, par étirement. Ainsi, nous trouvons partout la répétition des mêmes phénomènes, mais dans les Grisons nous pouvons espérer trouver la racine de cette nappe qui en est détachée. L’amorce de la nappe doit suivre celle du Rhäticon ; elle doit contourner, comme cette dernière, tout le Prätigau et elle doit s’enfoncer sous le massif d’Arosa. Là, en effet, ainsi qu'il résulte des travaux de Theobald, l’on voit, formant la chaîne qui s’étend du Rothhorn au Weiïisshorn, un grand anticlinal complexe de gneiss recouvert de terrains sédi- mentaires et de roches éruptives. Dans la vallée d’'Urden, M. Stein- mann ! à, en particulier, rencontré du Malm à Radiolaires. C’est le même, me semble-t-il, que celui du Falknis. En outre, un fait important vient encore à l'appui de notre hypothèse. Les montagnes d’Arosa sont caractérisées par un déve- loppement remarquable de roches basiques. Or, entre la nappe du Falknis et celle du Rhäticon se trouvent des gisements sporadiques de-ces roches basiques, écrasés en lentilles. Ce sont 1. STEINMANN. Geologische Beobachtungen in den Alpen. Naturf. Gesell. zu Freiburg i. Br., t. X, n° 2, 1895. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 801 des fragments transportés vers le nord, derniers restes respectés par le laminage. On connaît de ces affleurements dans le Falknis, mais les plus beaux sont incontestablement dans l’Algäu, toujours à la base des montagnes triasiques qui sont la continuation de celles du Rhäticon. J'ai parcouru autrefois l'Algäu et j'ai étudié ces gisements, dont la position anormale m'avait intrigué. J'ai déjà fait remarquer ! que ces gîtes n'étaient pas dans une position normale : « Ces roches sont situées sur la ligne de faille à laquelle s'arrêtent les masses triasiques de l’Algäu. Or, cet accident n'est pas dû à une faille verticale, mais à une vraie ligne de chevauche- ment... Il y a donc une analogie frappante entre les gisements bavaroiïs et les gisements chablaisiens ». Je ne savais pas, en écrivant ces lignes, être si près de la vérité. Me serais-je douté qu'il régnait dans les Alpes du versant nord - une harmonie aussi grandiose ! Aujourd'hui seulement nous commençons à voir l’étonnante simplicité du versant nord des Alpes. Qu'il y a loin entre notre temps et celui où de Saussure écrivait : €... j ai reconnu qu'on pouvait presque assurer qu'il n'y a dans les Alpes rien de constant que leur variété » ! La nappe du Rhäticon est encore attachée à sa racine, mais une immense partie a déjà été détruite par l'érosion. Elle devait s'étendre jadis sur tout le Prätigau par l'intermédiaire de la nappe du Falknis, entièrement laminée ou non, et celle-ci, en tout cas, devait recouvrir toutes les nappes glaronnaises, car elle représente les Préalpes médianes. Les Klippes d'Iberg (Schwytz), avec leurs roches éruptives basiques, nous montrent jusqu'où au moins s’étendait vers le nord l’une des grandes nappes supérieures de la Suisse. Ainsi une partie de la racine des Préalpes médianes est connue. Tôt ou tard, maintenant que la trace de cette racine est amorcée, nous la poursuivrons vers l’ouest à travers la Suisse, au sud des nappes du Chablais. Ainsi que je viens de le montrer, les rapports du Prätigau et du Rhäticon sont tout autres que ceux que pensait voir M. Suess *. Il n’y a pas d’efflondrement dans le Prätigau. Le Rhäticon a bien été charrié horizontalement. Lorsque, des hauteurs de la 1. LuGrox. La région de la Brèche du Chablais, pp. 39-40. 2. Suess. La Face de la terre, vol. 1, pp. 179. 802 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Scesaplana, on contemple les vertes collines du Prätigau, ce n’est pas une fosse d’effondrement que l’on domine, mais le substra- tum, mis à jour par l'érosion, de la nappe charriée sur laquelle on se trouve. Et ce n’est point une cassure qui limite ces terrains sédimentaires vers l’est, à leur contact avec les gneïss de la Sil- vretta. Ceux-ci ne forment que le noyau anticlinal de la nappe. * * * Dans le massif d’Arosa les plis de la nappe du Rhäticon sont poussés vers le nord-ouest; dans les montagnes bavaroises ils regardent le nord. Cela nous explique peut-être pourquoi cette nappe, tout d’abord oblique à la direction de la chaine, dans ses parties internes, finit par arriver sur le front. A partir de l’Ill, en Bavière, elle relaie toutes les autres nappes. C’est, en grand, ce que nous montrent les digitations de la nappe supérieure de Glaris au nord du Klônthal. Il sembleraït que la nappe du Rhäticon soit comparable aux vagues de la mer, qui, poussées par un vent oblique vers le rivage, déferlent parallèlement à celui-ci. Aïnsi, la grande nappe du Rhäticon se range parallèlement au rivage des Alpes, sitôt qu'elle l’a atteint. | À V. — Le mécanisme des grandes nappes alpines J'ai cherché à démontrer, dans les pages qui précèdent, que le versant nord de la chaîne alpine, de l’Arve jusqu’à Salzbourg, au moins, est formé par d'immenses nappes superposées. Sur toute cette grande étendue nous ne connaissons pas le front autochtone véritable : il doit être caché en profondeur. Les couches en place apparaissent sur le bord du massif cristallin de la première zone alpine. Elles forment les plis que l’on voit sous le Flysch de la nappe inférieure de Glaris, puis, toute la chaîne qui, du Tôdi, s'étend en un cortège de hauts sommets par le Titlis, la Jungfrau et le Breithorn. Nous voyons encore ces couches en place sous le pli couché de la Dent de Morcles et de la Dent du Midi. Enfin elles s’'épanouissent dans les chaînes du Genevois, les Bauges et la Chartreuse, où elles rejoignent les premiers plis du Jura. I. — À PROPOS DU FLyscH L'une des grandes singularités des nappes charriées est l'abon- dance du Flysch, sur lequel et dans lequel elles paraissent avoir DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 803 progressé. Ce terrain présente, en outre, des brèches à cailloux exotiques, sur lesquelles on a beaucoup discuté. M. Sarasin ! a montré que les cailloux cristallins de ces brèches ne pouvaient provenir que du sud, ce qui a fait supposer à M. Schardt que ce Flysch devait sa formation à des mouvements orogéniques, qu'il - provenait de la destruction des nappes au fur et à mesure de leur avancement dans les eaux de la mer éocène. J'ai autrefois essayé d’étayer cette hypothèse en montrant que les brèches à blocs exotiques avoisinaient toujours les plans de chevauchement. Après l'étude générale que nous venons de faire on sent combien cette explication est peu satisfaisante. Les raisons qui m'obligent à chercher une autre interprétation de l’origine du Flysch sont basées sur la liaison intime des nappes de recouvrement des Hautes Alpes avec les nappes préalpines. C’est le même phénomène qui a été la cause de l'avancement vers le nord des deux groupes de nappes. Le Flysch des Hautes Alpes aurait dû tout aussi bien se former aux dépens des nappes de ces montagnes, qu'il s'est pro- duit, dans l'hypothèse citée ci-dessus, aux dépens des nappes pré- ‘alpines. Dans le Flysch qui soutient la nappe glaronnaise nous ne trouvons pas de blocs exotiques. Ceux-ci n'apparaissent dans les synclinaux des Hautes Alpes que lorsque ces plis contiennent des lambeaux de recouvrement, soit des Klippes, de la nappe pré- ‘alpine, comme à Habkern. J'arrive donc à l’idée que le Klysch à blocs exotiques des Préalpes est un terrain qui a été transporté par les grandes pous- sées vers le nord, comme tout le reste, mais qu'il était déjà formé avec les caractères que nous lui connaissons avant le charriage. Je rends ici un juste hommage à mon collègue M. Haug qui s’est élevé vigoureusement contre cette hypothèse de la formation du Flysch aux dépens des nappes charriées. «IL est difficile, dit:l, de se figurer comment la nappe de recouvrement des Préalpes est à la fois postérieure au Flysch, puisqu'elle repose sur ce terrain, et contemporaine, puisqu'elle a fourni les éléments à sa sédimenta- tion » ?. Aujourd’hui, en me basant sur les résultats obtenus par l'étude comparée que je viens de faire, je ne puis que me ranger à l'opinion de mon savant ami de la Sorbonne. Le Flysch des Préalpes est le terrain le plus récent qui ait été charrié. Par les recherches que mon élève M. Roessinger a faites dans 1. SARASIN. De l’origine des roches exotiques du Flysch. Arch. Sc. phys. et nat. Genève, 1894. 2. E. HauG. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses. Bull. Soc. vaud. Sc. nat., vol. XXXV, p. 159 1899. 804 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT la zone interne des Préalpes, recherches que j'ai contrôlées, nous distinguons toujours aisément les produits les plus écrasés des écailles d’avec les brèches du Flysch. Lorsque les écailles s’étirent jusqu’à ne plus former que de gros blocs épars dans le Klysch, lorsqu'elles sont réduites à des brèches de dislocation, celles-ci se distinguent toujours des brèches du Flysch à lits réguliers. Je crois maintenant que les arguments de M. Haug se rappro- chent beaucoup plus de la vérité : (Je conçois, dit-il, que l’on attribue à une nappe de recouvrement en partie détruite par les agents atmosphériques, des blocs exotiques épars à la surface du Flysch ou englobés dans les couches tout à fait supérieures de ce terrain, comme ceux de Habkern ou ceux qui entourent les Klippes d'Iberg, mais il m'est impossible de concevoir le rapport qui peut exister entre une nappe de charriage et des blocs disposés en lits réguliers alternant avec un Flysch à éléments fins, et pour- tant beaucoup des brèches du Flysch se présentent dans ces condi- tions » !. | La distinction que fait M. Haug est très importante. IL y a brèche et brèche dans le Flysch. Les unes, qui se trouvent à la base des nappes sous la forme de gros blocs exotiques, peuvent n'être, à la rigueur, que des brèches de dislocation formées pen- dant la marche de la nappe aux dépens de la base, résultat d’un laminage extrême. C’est ainsi que l'on voit dans la région de Lauenen, que l’on constate dans les Klippes du Val d'Illiez, en plein Flysch, des alignements de blocs d’une roche plus ancienne, particulièrement les roches dures. Ce sont des débris d’écailles étirées en lentilles. À cause de l’absence du flanc médian, la tritu- ration n’a pu s'effectuer qu'aux dépens des terrains les plus infé- rieurs des nappes, en contact par conséquent avec le Flysch. Mais la brèche qui se forme ainsi n’est pas synchronique du dépôt de Flysch, elle s’est formée par voie mécanique après et peut-être longtemps après le dépôt de celui-ci. Toutes autres, en effet, sont les brèches comme celles qui forment le Niesen, comme les brèches-poudingues de la zone externe des Préalpes. Ce sont des roches formées en couches régulièrement superposées, comme celles que l’on voit, en repos normal, dans le grand synclinal de la Simme (poudingue de la Mocausa). Ces brèches et poudingues se sont formés en place dans l’intérieur de la chaîne sous leur forme actuelle. On les connaît du reste en place dans l’intérieur des Alpes, le long d'une grande bande qui se pour- 1. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses, P- 159. FT ; DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 805 suit des Aiguilles d’Arves au Chapieux, en France, et se continue probablement jusqu’en Italie. MM. Kilian et Révil ! signalent la parenté de cette brèche avec celle de Chatillon en Savoie, dernier affleurement, dans les Préalpes du Chablais, de la brèche du Niesen. Je ne crois pas devoir insister davantage sur la remarque impor- tante et décisive faite par M. Haug. Elle se justifie pleinement en distinguant deux terrains probablement fort différents. 2. — À PROPOS DES REMARQUES STRATIGRAPHIQUES DE M. HAUG M. Haug s'oppose à la théorie de la nappe de charriage pré- alpine, en raison de la parenté des terrains des Hautes Alpes et des Préalpes. Je tiens à dire combien plusieurs des arguments de mon savant confrère et ami sont légitimes et ont été pleinement confir- més en ce qui concerne les zones interne et externe des Préalpes. Avec M. Roessinger, j'ai retrouvé dans les Alpes de Lauenen, c’est-à-dire dans la zone interne, fous les terrains de la zone à faciès helvétique voisine, et l’on a vu plus haut que c’est là dans Les: versants de la vallée du Rhône, que j'ai trouvé la racine. M. Haug a donc raison lorsqu'il objecte que les terrains des Préalpes des zones interne et externe ne sont pas si exotiques que nous avions cru l’établir. J’ajouterai encore que la découverte que j'ai faite du passage du faciès urgonien au faciès barrémien, en allant vers le sud, dans le massif des Wildstrubel, apporte une nouvelle clarté dans la question du Néocomien à Céphalopodes de la zone interne des Préalpes vaudoises. L'origine des zones interne et externe des Préalpes me parait résolue ©. 11 reste la question de la région des Brèches j jurassiques et des Préalpes médianes. % . Avant d'aller plus loin, quelques considérations s'imposent. Je viens de montrer que les Préalpes médianes sont, dans l’est, représentées par le massif du Falknis, et la région de la Brèche par la grande nappe du Rhäticon. Les Klippes d’Iberg sont, elles aussi, liées à l’histoire de la nappe du Falknis par la présence des célèbres roches éruptives basiques, qui, nous l’avons vu, se rencon- 1. Kicrax et Réviz. Une excursion géologique en Tarentaise. Bull. Soc. d’hist. naturelle de Savoie, 1893. 2. J'ai d’ailleurs trouvé dans les Hautes Alpes bernoiïses le faciès nodu- . leux du Malm, équivalent des couches de Birmensdorf, que l’on connaît bien développé à Châtel-Saint-Denis, dans la zone externe. 6 Juin 1902. — T. 1®%. Bull. Soc. Géol. Fr, — 52 806 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT trent dans les racines, soit dans les montagnes au nord de Davos. Ces roches se continuent dans l'Oberhalbstein. Nous sommes ici au sud-est des Klippes d’Iberg et à 70 à So kilometres de distance. La liaison de la nappe du Rhäticon avec sa racine ne peut laisser de doute ; la manière dont la nappe du Falknis suit celle du Rhà- ticon, dans son développement visible à la surface, ne peut laisser non plus aucune ambiguïté. Ces nappes, qui sont coupées par la vallée de Parpan (sud de Coire) et la vallée de l’'Oberhalbstein, se continuaient vers l’ouest ou le sud-ouest. À mesure que nous allons de l’est à l’ouest, du Falknis vers les Klippes, la racine s'éloigne de plus en plus (voir la carte, pl. XVIH). C'est là un fait que nous devons considérer comme le résultat de l'érosion. Suivant les coupes nord-sud, nous constaions les dis- tances suivantes : 1° Nappe du Rhäticon, en continuité parfaite avec sa racine, suivant une coupe qui passe par Klosters et la Sulzfluh. 20 La nappe est brusquement coupée comme à l’emporte-pièce et nous voyons, là où elle s’étendait, la région du Flysch du Prâätigau. Suivant une coupe qui passe par la Scesaplana et Langwies, la distance qui sépare l'extrémité de la nappe du Rhä- ticon d'avec sa racine est de 30 kilomètres environ; pour la nappe du Falknis, la distance est de 26 kilomètres environ. 3° La nappe est de nouveau entamée, dans la partie attachée avec la racine, par la vallée de Parpan et de l’'Oberhalbstein, autre- ment dit, la partie sud semble reculer, parce que son substratum apparaît, grâce à l'érosion. Aussitôt les distances augmentent’; environ 60 kilomètres séparent la racine de la tête de la nappe, suivant le front supposé qui reliait Iberg au Falknis. La vallée de l'Oberhalbstein est, en effet, caractérisée par de nombreux affleurements de roches basiques plus ou moins méta- morphiques jusqu’à la schistosité (schistes verts et rouges des Grisons). Elles sont accompagnées de roches triasiques, comme le petit massif du Potschanga, supportées par les schistes des Grisons. Sous ces derniers, enfin, commence à apparaître l'immense massif cristallin de l’Adula. Les schistes des Grisons s'étendent jusqu'au col du Septimer et s’enfoncent vers l’ouest sous les massifs grani- tiques du Piz d’'Err et du Julier. A la Maloggia, la superposition du granite sur le Trias et les schistes des Grisons est manifeste, d’après Theobald, dans le Monte di Gravasalvas. Là encore, je ne pense pas qu'il s'agisse d’un recouvrement vers l’ouest, ainsi que pourrait le faire croire le plongement des couches vers l’est. L'Oberhalbstein est comparable au Prâtigau. La nappe s'enfonce DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 807 vers l’ouest, comme elle le fait au-dessus du Falknis; mais son mouvement doit être aussi vers le nord, toutefois, il est possible que la région granitique du Julier Hae une nappe supérieure, indépendante de celle du Rhäticon. L'avenir nous réserve encore bien des surprises et tout laisse croire que c’est dans les Alpes orientales que les grands recouvrements paraissent s'être conservés dans leur ensemble, non morcelés. Si la région granitique du Piz d'Err est bien réellement charriée vers le nord, le phénomène prend une ampleur inattendue; c’est léneeral des Alpes de l'Engadine qui a été charrié. Un certain nombre de faits parlent en faveur du déversement vers le nord. Au Falo, dans la vallée de Bergün, Theobald signale un lambeau de recouvrement de granite au nord des régions grani- tiques. Au Julier, le synclinal liasique du Val d’Agnelli, synelinal qui serait un pli secondaire de la nappe, est déversé vers le nord. Je n’irai pas beaucoup plus loin dans cette tentative de démonstra- tion, je me contenterai de poser le problème dont les solutions définitives seront certainement grandioses. Il embrassera une grande partie des Alpes orientales. Du reste, les déductions que nous sommes déjà à même de faire sont tout aussi considérables. En cherchant où se trouve la racine des nappes du Falknis et du Rhäticon, nous cotoyons, en vain, les flancs du Parpan et de l’Oberhalbstein. Ici nous sommes, à Tinzen, par exemple, à 70 kilomètres environ de la ligne qui relie les Klippes d'Iberg au Falknis, c’est-à-dire au front de la nappe détruite des Préalpes médianes. Au Septimer, nous sommes à une distance de près de 90 kilomètres. La nappe a dû se mouvoir sur ces énormes étendues. N'’a-t-elle transporté que des terrains sédimentaires”? IL n’y a pas de raison pour que ces grands mou- vements se soient localisés dans les terrains tertiaires et secon- daires à l’exclusion des masses gneissiques et granitiques. Ces masses énormes de poudingues à éléments cristallins de la molasse de la Suisse allemande sont-elles exclusivement des produits détri- tiques du Flysch? Il ne nous est pas possible de répondre. Quand nous voyons que du granite, comme celui du Piz d’Err, entre dans la formation de plis couchés, nous pouvons nous demander si l'immense région, actuellement détruite, des nappes préalpines, qui a couvert jadis entièrement les Alpes suisses, ne se présentait pas, avant l’érosion, sous l’aspect d’une vraie chaîne normalement enra- cinée? Nous reconstruisons ainsi par la pensée un ensemble qui, s’il était encore complet, présenterait à nos yeux quelque.chose d'aussi gigantesque que ces Alpes de l’Engadine, amorce des Alpes orien- . 8u8 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT tales. Et aujourd’hui que nous n'avons plus à notre disposition que les fragments de ces immenses nappes nous n'hésitons pas à conclure. L'hypothèse qui, de toutes les Alpes orientales, ne feraït qu’une ou plusieurs nappes de charriage paraît ainsi moins auda- cieuse. Pour les Préalpes nous avons, il est vrai, la preuve directe, décisive, tandis qu'ici il nous manque un des éléments de la démonstration ; nous ne pouvons pas prouver que les granites aient été entraînés très loin. Si nous poursuivons notre hypothèse, nous voyons que ce serait au sud de l’Engadine qu'il faudrait rechercher la racine de la nappe du Rhäticon. « C'est à cette hypothèse invraisemblable et actuellement invérifiable, a écrit M. Haug !, que seront obligés d’avoir recours les partisans des Préalpes ». On voit que mon savant ami, qui connait si bien les Alpes, qualifie d’invraisemblable ce que je crois aujourd’hui vrai- semblable. «Si donc, dit-il plus loin, le recouvrement des Préalpes venait à être démontré au moyen de preuves locales (et non par des arguments tirés de la tectonique des zones intérieures des Alpes occidentales ou de la nature des faciès), l'interprétation que l’on devrait donner de ce recouvrement et des relations entre les Préalpes et le Rhäticon serait bien diflérente de celle que M. Schardt a imaginée ». Si donc les preuves que j'ai données en me basant sur la coupe des vallées du Rhône et de l’Arve ne paraissent pas décisives aux yeux de mon collègue de la Sorbonne, celles tirées de la coupe de la vallée du Rhin sous le Falknis sont * indiscutables. La vallée du Rhin, plus profonde que celle du Rhône, permet en effet de voir partout le Flysch sous la nappe. Le jour où l'hypothèse de la poussée vers le nord d’une immense . région des Alpes orientales sera un fait acquis dans la géologie, mon savant ami aüra sa part légitime dans l’énoncé de cette hypo- thèse hardie. : PL” Cherchons à fixer l'emplacement de la racine des Préalpes? Nous venons d’être conduits à évaluer à 90 à 90 kilomètres la valeur du charriage de la nappe du Rhäticon. J'ai donc le droit de pousser, au sud des Préalpes médianes, des investigations sur une distance de 70 à 90 kilomètres dans le but de trouver leur racine. Cette recherche a déjà été faite par M. Haug. Tour à tour, il a 1. E. Hauc. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses, P. 149. | DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 809 montré l'impossibilité de trouver la racine tant cherchée, soit dans la zone des Aiguilles d’Arve et du Val Ferret, soit sur les massifs de l’Aar et du Gothard, soit sur la bande du Grand Saint-Bernard, moins encore sur le massif cristallin du Monte Leone et dans la zone des Schistes lustrés du Val Bedretto et du Lugnetz. Mon collègue et ami considère enfin la zone du Piémont. J’admets l'impossibilité probable de la découverte de la racine dans les régions que je viens de citer, sauf celle du Piémont, et là M. Haug, si précis, si concluant dans tout son très remarquable travail, hésite un instant. De la part d’un savant habitué à manier magis- tralement les questions de faciès cette hésitation indique, peut- être, la voie à suivre. M. Haug dit que dans la partie méridionale de la zone du Pié- mont, les plis sont déversés vers l’est, c'est-à-dire vers l'intérieur de l’arc alpin. Si l’on examine les plongements déterminés par Rolle !, on voit que le déversement décisif vers le sud-est se trouve à quelques kilomètres au nord de la zone des amphibolites d’Ivrée. La distance qui sépare ces points des Préalpes médianes est d’en- viron 80 kilomètres, chiffre voisin de celui que nous avons trouvé dans les Grisons, en suivant le bord continu de la nappe du Rhä- ticon. Il n’y a donc pas d'impossibilité à faire provenir les Préalpes médianes de régions si lointaines. Si nous suivons vers l’est la ligne ainsi amorcée, nous rejoignons sensiblement le Val Bregaglia et l'Engadine, c’est-à-dire que nous allons rejoindre la nappe du Piz d'Err. Au nord de cette ligne, le déversement vers le nord atteint une puissance considérable. Nous voyons des coins de Trias s’effiler dans le massif gneisssique de l’Adula. Ce sont de grands plis couchés vers le nord et non vers l’ouest, ainsi qu’il semble résulter de la coupe de Rolle. Ces longs affleurements triasiques du Val . di S. Giacomo et du Val Mesolcina sont coupés parallèlement à leur direction de poussée, maïs les nappes qui les constituent s’inclinent à l’est. Là encore, Rolle a fait la confusion, que nous avons plusieurs fois constatée, entre la direction de poussée et l’ondulation transversale des nappes ?. Ces grands plis couchés s’'amorcent au sud, sous le Piz Pombi pour l’un, sous le Piz 1. Rozze. Mat. Carte géol. suisse, 23° livr., 1881. 2. La direction méridienne des couches des Alpes tessinoises a frappé L. de Buch, Escher et Studer. Ce dernier pensait voir le résultat d’une schis- tosité ou la trace d'anciennes montagnes qui entouraient le Piémont avant la naissance des Alpes (SrupeR, Geol. der Schweiz, vol. I, p. 234). Il s’agit donc d’une disposition monoclinale due à l’inflexion des plis couchés perpendi- culairement à leur direction de poussée, C'est le même phénomène qu'aux Diablerets, au nord du Klônthal, au Falknis, au Rhäticon, etc. 810 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT Stella pour l’autre. Les massifs gneissiques du Piz Pombi et du Piz Stella forment les noyaux anticlinaux de ces grands plis déversés vers le nord. Or, c’est le massif de la Suretta (Piz Stella), qui soutient les schistes des Grisons du Val d’Avers et de l’Oberhalbstein ; sur ces schistes apparaît la nappe granitique du Piz d'Err et du Julier, dont la racine doit être encore plus méri- dionale. Au sud, nous nous trouvons dans des régions aux couches très redressées, en particulier la zone d’amphibolites, qui s'étend de Gera à Bellinzona, et les gneiss qui la cotoient au nord. Le plongement est tantôt méridional, tantôt septentrional. Trouve- rons-nous dans cétte disposition une impossibilité à la poussée vers le nord dé la nappe préalpine? Non. Les couches déjetées vers le sud sont très redressées, et l’on peut facilement voir que, en coupe, la racine d’une nappe peut localement être déversée en sens inverse de la direction de poussée de la nappe. | Ainsi que l’a pressenti M. Haug, tout en combattant l'hypothèse à laquelle nous revenons, c’est bien sur cette zone amphibolique d'Ivrée ou dans son voisinage le plus immédiat que doit se trouver la racine des Préalpes médianes. En parlant de la Dent Blanche et du Mont Rose, mon collègue de la Sorbonne dit lui-même : &IL est possible et même probable que ces massifs centraux, disposés en dômes ou en éventails, aient constitué, avant leur démantèle- ment, les racines de grands plis couchés, déversés vers le nord, mais aucun de ces plis, en raison de leur faible développement longitudinal n’a pu former une partie quelconque de la zone des Préalpes, si ce n’est, tout au plus, les lambeaux de brèche juras- sique du Chablais et du Simmenthal » !. Ainsi M. Haug, qui admet que la région de la Brèche du Chablais est un fragment de nappe de recouvrement, est obligé lui-même de chercher, bien qu'avec une contrainte évidente, la racine de la région des Brèches sur les hauts massifs valaisans. Or, il y a 60 kilomètres de la Dent Blanche à la Hornfluh et 70 jusqu’au Mont Rose. C’est involontairement une pétition de principe que fait mon savant ami quand il dit : &« mais aucun de ces plis, en raison de leur faible développement dans le sens longitudinal, n’a pu former une partie quelconque de la zone des Préalpes ». J’ai montré, en 1896, dans mon mémoire sur le Chablais, que les deux massifs de Brèche de la Hornfluh et du Chablais ne devaient former au début qu’une seule nappe. Cela fait 90 kilomètres de longueur de front. 1. E. HauG. Les régions dites exotiques du versant nord des Alpes suisses. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE "8Tr Ce n’est pas peu de chose, et M. Tobler, trouvant des blocs exoti- ques de Brèche dans les Klippes de Schwytz, montre que cette nappe était encore beaucoup plus grande. Cela est vrai puisqu'elle rejoignait fort probablement celle du Rhäticon. Le peu de déve- loppement longitudinal des dômes centraux n'est pas non plus contraire à la formation des grandes nappes. Prenons par exemple le massif du Finsteraarhorn à ses deux extrémités. C’est sur lui que sont nées les nappes glaronnaises. Elles continuent à exister dans le grand ensellement qui sépare ce massif de celui du Mont Blanc, de même lorsque le massif du Finsteraarhorn disparaît sous les masses du Tôüdi. En résumé, mon confrère, M. Haug, a montré avec son érudition habituelle que les Préalpes médianes ne peuvent provenir des montagnes valaisannes. J’ai montré de mon côté, en me basant sur les faits préalpins eux-mêmes, en me basant sur la direction de poussée, toujours vers le nord, des nappes des Alpes à faciès helvétique, en m'appuyant sur les faits si concluants des nappes du Falknis et du Rhäticon que les Préalpes médianes ne peuvent provenir que du sud. Il n’y a donc plus à choisir, alors même que notre esprit ne peut concevoir ces grands mouvements de 80 à 90 kilomètres, il faut les admettre. Les Préalpes médianes, dans l’état actuel de nos connaissances, ne peuvent provenir que de la région des schistes cristallins et des gneiss du Tessin, fort proba- blement de la zone d’amphibolites. Là elles s’étendaient, liées avec les nappes du Falknis, comme la région des Brèches est liée avec la nappe du Rhäticon. Telles sont les conclusions qui m'ont été suggérées par les travaux de mon savant confrère et ami !. 3. — LE MÉCANISME DES GRANDES NAPPES ALPINES . Est-ce en profondeur, est-ce en surface que se sont produits ces mouvements gigantesques de la croûte terrestre? Sont-ils localisés dans les parties superficielles de la lithosphère ou se continuent-ils encore plus bas? Il ne m'appartient pas de conclure, mais il est certaines notions qui paraissent s'imposer. 1. Il est possible qu’une partie de la zone interne provienne de la zone du Val Ferret, car le Flysch du Niesen ne contient guère que des roches de la première zone alpine. Le Flysch de la zone externe, avec ses cailloux de granite, lequel est semblable en tout point à celui des Alpes du versant sud, exige en tout cas un transport d’une région beaucoup plus lointaine. 812 M, LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT A). Les trois groupes de nappes des Alpes suisses Les nappes des Alpes se subdivisent en trois groupes très mani- festement indépendants. a) Les nappes à racines externes, comprenant les grands plis couchés de Glaris et leur continuation à travers toute la Suisse, dans les Wildstrubel, dans les Alpes vaudoises et jusque dans le Mont Joly où nous perdons leur trace. Dans ces nappes est com- prise, en tout cas, une partie de la zone interne des Préalpes. b) Entre les nappes à racines externes, ou à faciès helvétique, et les nappes préalpines, on rencontre un régime de grands plis couchés, souvent fort étendus, constituant, par places, de vraies nappes. c) Les nappes à racines internes naissant sur une ligne plus méridionale et comprenant : «. Préalpes médianes et leur continuation dans les Klippes de la Savoie, vers le sud-ouest, et les Klippes de la Suisse allemande et le Falknis, vers l’ouest ; 8. La nappe de la Brèche du Chablais et de la Hornfluh, com- prenant la nappe homologue du Rhäticon. % 1° Les nappes à racines internes sont plus étendues que les externes; elles arrivent même à dépasser ces dernières vers le nord, confirmant ainsi, en grand, ce que nous avons vu pour les nappes des Alpes bernoises, c’est-à-dire que plus la racine est lointaine, plus est grand le chemin parcouru par la nappe. Dans l’ensemble, les nappes suivent cette loi qui de vérifiée, du moins dans les Alpes suisses !. La position des racines des nappes externes n’est pas difficile à 1. Il n’y a que le massif de la Brèche du Chablais qui présente une excep- tion. Cette anomalie pourra peut-être s'expliquer le jour où l’on trouvera la vraie position de la racine. A partir de la Linth jusqu'à l’Aar, la nappe supérieure de Glaris fait aussi exception. Dans les plis qui forment la nappe du Mont Joly, on observe aussi, d’après les coupes de M. RiTTER, une semblable tendance qui, cependant, n'est pas absolue. Le « saute-mouton » des plis apparaît d’une façon schématique dans la PL I de cet auteur (Bull. Serv. Carte géol. de France, vol. 9, Bull. 60, 1897- 1898). L’escalade de la nappe supérieure est remarquable dans la coupe publiée par M. Kilian, d’après ses travaux et ceux de M. Haug (Kirran et Hauc, C.-R. Ac. Sc., 7 août 1899, et Kirran, pl. I, Bull. Serv. Carte géol. de Fr., t. XI, Bull. 55, 1899-1900). ‘DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 813 déterminer par rapport aux éléments voisins considérés comme stables. Ces racines avoisinent toujours les moles cristallins de la première zone alpine. Les nappes des Alpes vaudoises et bernoises prennent racine sur le versant sud de la prolongation du massif cristallin du Mont Blanc, plus loin à l’est sur l’axe ou le versant sud du massif du Finsteraarhorn. Il en est de même des nappes glaronnaises. MM. Bertrand et Ritter ont montré que les plis du Mont Joly naissaient de l'extrémité du massif cristallin du Prarion. Quand les massifs cristallins plongent dans la profondeur du sol, les nappes n’en continuent pas moins. Elles épousent, par leur forme en voûte surbaissée, la forme du massif invisible qu’elles recouvrent. Dans ce vaste «déferlement », des nappes à racine externe, vers l'extérieur de la chaîne, il paraît incontestable que les massifs cristallins hercyniens ont joué le classique rôle du horst, de J'«écueil ». On dirait que, ne pouvant satisfaire à la poussée alpine, celle-ci s’est exercée avec plus de puissance sur les espaces voisins capables d’en être victimes. Le rôle passif des massifs cris- tallins semble apparaître plus nettement que jamais. Non seule- ment ils ont montré cette passivité que les célèbres travaux de M. Baltzer ‘ ont bien mis en évidence dans son étude sur les coins calcaires du massif du Finsteraarhorn, mais ils ont encore été pour ainsi dire incapables de participer autant que le reste à la contraction. Celle-ci pour se satisfaire s’est alors exercée avec un redoublement de puissance sur les régions avoisinantes. Toute- fois, les massifs cristallins de la première zone alpine n’ont pas été complètement indifférents. Leurs couches enracinées, verticales fort probablement, se sont laminées vers le haut ou vers le bas; la résultante de la poussée a agi ainsi perpendiculairement, ou à peu près, à la direction de cette poussée. a Ve 2 Entre les nappes à racines externes ou nappes de la première zone alpine et celles à racines internes, s’étend la grande région des Alpes valaisannes, formées de grands plis déversés, bien mani- festes dans les vallées latérales du Valais. Ces plis peuvent même se coucher, présenter des aliures de nappe, comme dans l’exemple remarquable du Simplon, où l’anticlinal des gneiss d’Antigorio est couché sur plus de cinq kilomètres, pour atteindre 20 kilomètres 1. BALTZER. Der Kontact zwischen Gneiss und Kalk in den Berner Alpen. Mat. Carte géol. suisse, 20° livr , 1880. 814 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT d'après les travaux de Gerlach et une coupe de M. Schmidt. Vers l'est, ce pli considérable paraît cesser. Le massif tessinois apparaît comme un immense dôme. Si l'on regarde attentivement la carte, on s'aperçoit que le pli des gneiss d’Antigorio ne peut cesser aussi rapidement, mais qu'il se continue invisible sous les Alpes tessi- noises, dont le dôme apparent n'est fort probablement que la carapace, c'est-à-dire le flanc normal de l'immense pli couché. W est en tout cas certain que le grand pli couché se prolonge suivant sa direction axiale, très loin sous le massif du Tessin. Toujours est-il qu’à partir du Val Mesolcina, c’est-à-dire du Bernardin, un grand pli, couché vers le nord, ainsi que je l’ai montré plus haut, remplace le soi-disant dôme du Tessin et que ce nouveau pli du Tambohorn (très déversé, puisqu'il a donné lieu, suivant M. Heim, aux lambeaux de recouvrement du Steilerhorn) est remplacé, à son tour, dès le Splügen, par le dernier pli couché de la Suretta, celui qui, du Piz Stella, s'étend jusqu’à Andeer. Ainsi, à l’est et à l’ouest du « dôme tessinois », partout où l'érosion a été assez profonde, nous voyons de très grands plis couchés. Il devient évident alors que le dôme n'est que la carapace d’une grande nappe. Revenons vers l’ouest. On sait que, d'après les coupes de MM. Schardt et Golliez !, le pli couché vers le nord de gneiss d’Antigorio du Simplon est recouvert par le pli du Monte Leone déversé en sens inverse. Ce phénomène m'a toujours paru étrange; il me le semble encore plus aujourd'hui, car nous trouvons là l'unique fait de ce genre dans les Alpes suisses, où il n'existe aucun autre pli en retour donnant lieu à une sorte de double-pli. Les coupes très semblables, publiées par MM. Schardt et Golliez, sont en accord complet avec les levés de Gerlach. C’est lui qui, le premier, a pressenti et a même dessiné, il y a près de vingt ans, l’anticlinal couché des gneiss d’Antigorio *, le fait est donc indiscutable. Si l’on essaye de suivre sur la carte * les gneiss du Monte Leone, on les voit con- tourner par le Simplon, le noyau anticlinal des gneiss d’Antigorio. Autrement dit, nous constatons, chose absolument nouvelle et étrange, un pli qui, de N.E.-S.0., devient N.-S., pour se poursuivre O.-E. dans les montagnes qui dominent le flanc droit du Val de 1. ScHARDT. Livret-ouide géologique dans le Jura et les Alpes de la Suisse, pl. X — Gozzrez. Id., fig. 8. 2. GERLACH. Mat. Carte g'éol. suisse, 26° livr., 1883. — Voir aussi : ZELLER, Ein geologisches Querprofil durch die Centralalpen. Bern, 1895 ; ScaMipr, Geologie de Zermatt et sa situation dans le système alpin. Arch. Sc. phys. et nat., t. XXXIV. Genève, 1895. 3. Feuille XVII, Atlas géologique suisse. LA SUISSE = ) DES ALPES DU CHABLAIS ET DI profondeur, c’est-à-dire le grand pli de gneiss d'Antigorio poussé Gondo. Cette constatation n’est pas conforme à ce que montre la vers le nord ou le nord-ouest, "S91)SNI S21S149S ‘‘Y9S *000°008/I 9J[949H — ‘OHOBTUY,.P [A OI 19 WIOUIO,] 2p JISSeu 1 ste Re odn09 — ‘ÿr 84 SS2 22 ER = CE S Æ CE CROP, P 700 LR LL E. 2 DE l — _— ET I x : 1 NU PES nl 1/2 LEie d eços SR murs ps RE ST oqpuES On | À u10442 0796 D. Ro . sŸ6E 18€€ | Le CR TRE 2 LIOUUa UIOTUa zs msng 0SeT HEC 10) HE PET TN an ‘oyqissod uornjos otugrxnop oun onbrpur o9ppmuiod QUSIL UT ‘OHOSTUY,P SSHUN ‘FU? { AUOT AJUOIL NP SSWUY ‘TJ Ur) ‘ S21ISNI Sa1SI49S ‘*Y26 ‘000°008/I 219494 — ‘uojdurs np Jisseur np 2dnon — ‘gr "SIT EN 7 D NZ / ie ES D? 1 Ne LS EX pl ds CSST X 1 \ SN RE l AIN LEE SE, a DT DU à: M À ji Ÿ TT 1 / 1/11} NAS NY SZ D. DD \ 1 ) I ST LU ao ss ( __— 1 JOIE. “œllçz ? BTS) or 1 Je —=————7T7 7. woouomy,q “O'N tale, soit dans le massif de » é orien t émi 2 En outre, à son extr l’Ofenhorn, au moment où les gneiss du Monte Leone cessent, 816 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT nous les voyons s'étaler sur les Schistes lustrés (fig. 14). Ce n’est pas ainsi que finissent ordinairement les racines des grands plis couchés. Tout reviendrait done à considérer le massif du Monte Leone non comme un pli couché déversé vers le sud, mais comme une tête anticlinale d’un pli supérieur à celui des gneiss d’Antigorio et s'amorçant en arrière de celui-ci (fig. 13). La racine se trouverait -dans cette bande de gneiss, qui, du village de Seehorn, se dirige vers Crevola. C’est, on le voit, une explication nouvelle de la coupe du Simplon que je soumets à la critique. C’est une hypothèse plus satisfaisante à mes yeux que celle qui a été donnée par Gerlach et ses succes- seurs. Du reste, la percée du tunnel du Simplon vérifiera l’une ou l’autre de ces explications. Si nous cherchons maintenant ce que deviennent vers l'ouest ces plis couchés, nous les voyons, grâce à l’enfoncement rapide du plan axial, disparaître sous le massif du Weïissmies. De tels acei- dents ne peuvent se terminer brusquement. Ils doivent se continuer en profondeur. Or, vers le sud-ouest, nous voyons le dôme du Mont Rose. Nous pouvons nous demander si ce massif ne repré- sente pas aussi la carapace d'un énorme pli couché analogue à celui du Simplon, analogue à celui que je suppose exister sous le massif septentrional du Tessin. L'état actuel des levés géologiques ne nous permet pas de nous prononcer, mais, quand on voit, au sud, dans le Val Gressoney, un grand synclinal de Schistes lustrés déversé vers le nord, le « dôme » apparaît comme un mode de plissement anormal au milieu de cet immense ensemble de plis couchés. Le massif gneissique de la Dent Blanche, qui paraît déversé, sur le territoire suisse du moins, sur les Schistes lustrés, laisse voir que le phénomène continue à s’y développer. Il en est de même du massif gneissique du Combin, si nettement déversé vers le nord, sitôt que sa direction devient S.O.-N.E. (coupe du Val d'Herens). Aïnsi, une série de plis couchés paraissent se presser contre les massifs hercyniens de la première zone alpine. Ils n’ont pu les franchir !. Ce sort était réservé à des nappes plus internes encore. 3 Lorsque l'érosion nous permet d'étudier la racine des grands plis couchés, nous constatons un fait extrêmement important. Les 1. L'avenir montrera s'ils ont donné naissance à des écailles de la zone interne des Préalpes. ù DES ALPES DU CHABLAIS EL DE LA SUISSE 817, couches s y montrent fortement redressées, beaucoup plus que la nappe, puisque celle-ci peut devenir horizontale et mème plon- geante, ce qui paraît du reste une loi assez générale, dans les Alpes du moins. Les coupes de M. Ritter sont, sous ce rapport encore, extrêmement démonstratives ! Ainsi donc, si l’érosion vient à entamer considérablement les nappes, nous ne voyons plus sur le sol que des plis monoclinaux très redressés et très difficiles à discerner les uns des autres, tant la compression a été énergique. Or, au sud du grand massif gneissique du Tessin, nous entrons justement dans un massif de couches très redressées, presque verti- cales, formées par des gneiss et par les amphibolites. Ce système, qui, vers l’est, se continue du côté de Bellinzona et de Chiavenna, qui, vers l’ouest, s'infléchit et passe au sud du Mont Rose, doit représenter les racines des nappes préalpines. Ces nappes si nomades ne peuvent venir que de là, car entre les nappes à faciès helvétique et ces régions s'étendent des nappes dont nous connais- sons les charnières. Les couches de ces régions méridionales oscil- lent sur une certaine largeur autour de la verticale, puis le plonge- ment se décide et nous voyons alors les plis nettement déversés vers le sud faisant partie du régime extra-alpin, c’est-à-dire des Dinarides, selon le terme employé par M. Suess. Nous voyons donc que dans les Alpes suisses un écrasement s’est fait sentir partout avec un violent mouvement vers l’avant- pays molassique. Une seule bande paraît ne pas avoir été culbutée, c’est celle des massifs hercyniens de la première zone alpine. Tout le reste a fléchi devant cette immense poussée venue de l’intérieur de l'arc alpin. L’effet a été d'intensité variable, mais toujours il a plié les Alpes comme les panneaux d’un paravent couché. Les nappes à faciès helvétique, c’est-à-dire les nappes à racines externes, ont réussi à franchir la ligne des horsts hercyniens. Les nappes centrales ont été arrêtées par cette sorte de barrière, dont elles sont séparées par un épais bourrelet de Schistes lustrés, qui 1. La nappe du Mont Joly cesse brusquement dans les environs d’Albert- : ville. Le phénomène très constant des nappes à faciès helvétique qui se poursuit du Rhin à travers toute la Suisse jusqu’à l'Isère ne peut cesser brusquement, il faut admettre que l'érosion ne permet plus d’en voir le développement sur le massif de Belledonne et peut-être du Pelvoux. Les plis monoclinaux décrits par M. Termier dans les Grandes-Rousses sont peut- être les racines de ces nappes entièrement disparues. Peut-être arriverons- nous un jour à en faire la démonstration. 818 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT joue ici le rôle d’un Flysch secondaire. Les nappes à racine interne ou nappes préalpines ont réussi à vaincre la distance et peut-être l'obstacle, accompagnées par leurs immenses revête- ments de Flysch tertiaire. Formés sans doute dans les mêmes conditions de sédimentation pélagique, les Flyschs triasiques et jurassiques, c’est-à-dire les Schistes lustrés, et le Flysch tertiaire ont joué le même rôle dans les manifestations tectoniques. Peut- être n'est-ce là qu’un concours de circonstances ; peut-être faut-il voir dans ce parallélisme, bien indiqué par M. Marcel Bertrand !, le résultat d'un phénomène qui nous échappe encore. B). Le mouvement. Des nappes des terrains secondaires nous sommes descendus dans les nappes des terrains primaires. Aussi profondément que le permettent nos investigations, presque partout nous voyons se manifester la marche vers le nord. Où ce phénomène prend-il fin? Toute la chaîne n’a-t-elle pas été portée vers l'avant-pays ? Est-ce en surface, est-ce en profondeur que se sont faites ces marches colossales ? Il est difficile de répondre. Dans mon ouvrage sur le Chablais je m'étais arrêté à l’idée d’un mouvement superficiel dû à la pesanteur. Aujourd’hui j'incline pour le mouvement tangentiel, comme mouvement de départ tout au moins. En effet, nous voyons qu'entre le pli couché de Morcles et ceux de Glaris nous possé- dons tous les stades de grandeur. La nappe inférieure glaronnaise s’étend sur trente kilomètres environ, et nous constatons que la nappe du Rhäticon, plus grande encore, est en continuité parfaite avec sa racine. C’est pourquoi je ne pense plus aujourd'hui que ces nappes en général se soient déroulées en abandonnant leurs racines. Toutefois, un mécanisme spécial permet cependant qu'elles marchent encore, alors que leur liaison n’est plus complète. Nous voyons, en effet, que la nappe des Préalpes médianes et celle du Falknis se laminent par places complètement, vers le sud, sous les grands recouvrements de la Brèche ou sous celui du Rhäticon. Cela s'explique de la manière suivante. Parties à la suite de mou- vements indépendants, les deux nappes finissent par former une nappe unique dans leur marche. Si l’une est animée d’une plus grande vitesse que la voisine, elle peut communiquer son mouve- ment et entraîner plus rapidement cette dernière que le ferait sa 1. M. BERTRAND. Structure des Alpes françaises et récurrence de certains faciès sédimentaires. Congrès géologique international, VI° session. Zurich, 1894. . DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 819 propre marche. La nappe ainsi entraînée devient pour ainsi dire satellite. Son front marchant, grâce à la communication du mouve- ment de la nappe voisine, plus vite que sa partie radicale, il y a détachement. Le mouvement doit être différentiel pendant un cer- tain temps, il se fait une lamination qui peut être totale. Ce sont de ces nappes devenues satellites qui se transforment en ce que nous avons désigné, à la suite d’une explication un peu différente, sous le terme de lames de charriage, dont l’amincissement et l’égrainement n’ont pas de limite. Les Préalpes médianes ont failli, ainsi que leur prolongation dans le Falknis, devenir des lames de charriage. Je dis failli, car nous ne pourrons jamais savoir si l’écra- sement vers le sud, sous la nappe de la Brèche ou du Rhäticon, a été total. Nous savons que dans la zone interne des Préalpes les lami- nages atteignent leur plus grande intensité. Il n’y a plus pour ainsi dire de contacts normaux. Partout des termes stratigraphi- ques manquent, mais ces absences sont certainement des lacunes tectoniques. Or. les nappes des Préalpes médianes et de la Brèche ont dû incontestablement passer sur cette zone interne. C'est peut- être là l'explication de ce laminage exagéré, résultat de mouve- ments différentiels souvent répétés. Nous avons appris aussi que les Préalpes médianes et la zone interne ont subi l’influence des nappes des Hautes Alpes à faciès helvétique. Les plis frontaux de ces dernières, ainsi que je l’ai montré dans le chapitre premier, se répercutent dans les Préalpes. Les nappes à faciès helvétique, c’est-à-dire les nappes à racines externes, sont donc postérieures aux nappes préalpines et, en conséquence, elles se sont très nettement formées en profondeur après et peut-être aussi pendant le passage de ces nappes des Préalpes. Nous voyons donc que, dans ces mouvements de transport, presque concomitants, ce sont les nappes les plus internes qui se sont formées les premières. Quand la contraction alpine s’est fait sentir, venant des régions méditerranéennes, deux zones ont tout d’abord cédé. Ce sont les zones de première poussée. L'une, très rapprochée de la poussée, a donné lieu à deux énormes plis cou- chés, nappes des Préalpes médianes et des Brèches ; l’autre a donné lieu aux premiers plis, qui ont cherché à franchir les espaces occupés en profondeur par l’ancienne pénéplaine hercynienne, ce sont les plis couchés de la zone interne des Préalpes. Ces premiers mouvements ont dû se faire sentir dans des régions relativement superficielles de l’écorce terrestre, puisque nous voyons que ces 820 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT premières nappes sont les plus élevées dans la série; mais les masses de Flysch du Niesen, que l’on peut évaluer à plus de mille mètres de puissance, nous montrent que l’épais revêtement dans lequel se sont développées ces nappes devait être considérable. C’est alors que prennent naissance les nappes les plus profondes. La poussée tangentielle continuant à se faire sentir se traduit, non seulement sur les nappes déjà en mouvement, maïs elle fait encore naître d’autres grands plis de deuxième poussée qui, aussi, se subdivisent en deux séries. L'une se crée entre les deux zones de poussée maximale aux dépens des régions profondes des gneiss ; la deuxième se développe dans les terrains à faciès helvétique, en avant des racines des nappes de la zone interne des Préalpes et sous cés nappes, dans le voisinage des régions cristallines de la première zone alpine. On voit ainsi que la force tangentielle se serait exercée plus longtemps sur les zones et les nappes de pre- mière poussée, d’où, sans doute, leur développement si intense. Enfin, la poussée, continuant à se faire sentir, donne lieu à une contraction plus intense encore. Les Alpes prennent enfin naïs- sance en relief. Les nappes déjà plissées se plissent probablement encore davantage; elles se bombent sur elles-mêmes, simulant même des dômes, et les massifs cristallins comprimés de la pre- mière zone alpine s'élèvent sur eux-mêmes par une croissance verticale de leurs couches déjà très redressées. Les nappes à faciès helvétique qui les recouvrent doivent alors se distendre ; d’'hori- zontales, ou à peu près, elles s’incurvent sur ces régions cristal- lines des horsts hercyniens. Elles sont appelées à occuper une plus large surface que celle qui leur avait été donnée par leur propre extension ; elles doivent donc s’affaisser sur elles-mêmes par failles plus ou moins verticales. C'est là, probablement, la cause de ces failles si considérables que j'ai rencontrées dans les hauts massifs des Wildstrubel, là où les nappes sont encore conservées sur le massif cristallin hercynien. Telle est, à grands traits, l’ébauche d’une théorie qui sera sans doute modifiée dans l’avenir, au fur et à mesure que nous connai- trons mieux les rapports réciproques des nappes. Les chaînes de montagnes naissent des grands géosynclinaux. Elles sont la réaction exagérée d’un phénomène qui s’exagérait trop. Nous devons done voir dans ces immenses épaisseurs encore conservées de Flysch le dernier des sédiments si puissants qui emplissaient la grande dépression méditerranéenne. Ge serait DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE Sor pendant l’Oligocène que tes mouvements considérables se seraient fait sentir, se perpétuant jusque dans le Miocène. La molasse rouge et les poudingues aquitaniens disparaissent sous les Préalpes et sous le pli frontal de la nappe inférieure de Glaris. Or, on sait que les poudingues se sont formés aux dépens des nappes préalpines qui les recouvrent. Ainsi le mouvement de charriage paraît s'être effectué en surface dans le voisinage de la région molassique. Il se peut donc que le mécanisme superficiel que j'avais invoqué jadis se soit réalisé partiellement, mais sous une autre forme, c’est-à-dire que, sous l'influence de la contraction dernière, les masses qui s'étaient mues en profondeur se sont enfin trahies à la surface, entraînées peut-être vers l’avant par les mouve- ments plus profonds, c’est-à-dire par les grandes nappes des Alpes à faciès helvétique qui se développaient sous les nappes pré- alpines. Toutefois, surtout lorsque l’on considère les plis empilés du Môle, c’est-à-dire la partie la mieux conservée du front des Préalpes médianes, l’on sent que ces replis n’ont certainement pu se faire à l’air libre. Pour se contourner sur eux-mêmes il leur fallait un poids nécessaire que l’on peut, à la rigueur, trouver dans leur masse elle-même. Mais, tous les plis frontaux bien conservés se montrent, la plupart du temps, toujours ensevelis dans un ter. rain quelconque. Est-ce donc dans la molasse elle-même que sont venus s’empiler ces derniers plis frontaux des « vagues » alpines ? Il m’a toujours été difficile d'admettre que la molasse ait couvert jadis les nappes alpines, car jamais jusqu'ici elle n’a été rencontrée dans les pli-failles où elle aurait dû se conserver. Aujourd’hui que la question se pose de nouveau sous une toute autre forme, je me demande si ce n’est pas la molasse qui a formé la surface de raccord entre les nappes et l’avant-pays ? Les plis si intenses, parfois, que l’on voit dans la zone plissée de la molasse, accusent- ils peut-être l'existence de mouvements profonds ? Si oui, la molasse pénétrerait en synclinal sous les nappes. Nous serions ainsi amenés à considérer la fin du phénomène des grandes nappes par le mécanisme tout hypothétique suivant. Supposons la nappe arrivée à une dizaine de kilomètres de son emplacement actuel entièrement recouverte par son énorme manteau de Flysch. Le soulévement vers le haut des noyaux hercyniens commence à se faire sentir, il met en saillie la nappe préalpine. Celle-ci s’érode dans ces régions surélevées et alimente de ses débris les épaisses masses molassiques qui se déposent sur la partie frontale et au loin en avant. La contraction alpine continue à se faire sentir. C'est alors que se déroulent les grands plis couchés des Alpes à 12 Juin 1902. — T. rer. Bull. Soc. Géol. Fr. — 53 822 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT faciès helvétique, au moment où les Préalpes sont déjà détachées par érosion de leurs racines. Dans ces conditions, ce n’est plus sur les nappes préalpines que se fait sentir la force tangentielle, mais au-dessous, en arrière et en avant d'elles. Elles surnagent pour ainsi dire et accomplissent un mouvement relatif en bloc vers l'avant, sous la molasse qui se contracte sous elles. Ce mouvement se serait effectué sans amener nécessairement un plissement plus intense des Préalpes. Ce serait là, peut-être, la raison de l’absence de molasse dans leurs pli-failles. Arrive ensuite la mise générale en saillie, dernier mouvement de la contraction alpine, ainsi que je l’ai montré plus haut ; toute la molasse qui recouvre les Préalpes est démantelée, emportée, et le phénomène se modifie pour être celui qui apparaît aux yeux des géologues comme une des plus grandes manifestations de l’écorce terrestre. On voit combien le raccord de ces nappes avec la molasse est un problème spécial, tout aussi difli- cile à résoudre, sinon davantage, que celui qui nous a préoccupé jusqu'ici. | Ces dernières lignes ne sont que des hypothèses ; celles-ci sont nécessaires à l'esprit humain et cette nécessité sera ma seule excuse si un jour ou l’autre je dois, pour ces derniers phénomènes de raccord, modifier ma conception, comme je l’ai déjà fait. NOTE AJOUTÉE PENDANT L'IMPRESSION J'aurais voulu soumettre ce travail au fur et à mesure de sa rédaction à un de mes maîtres, M. le Professeur Heim. Je n'ai pu lui en faire part que quelques jours après son retour d’un long voyage, alors que le présent mémoire était sur le point de sortir des presses. | Nous avons discuté ensemble une bonne et mémorable journée en présence de ces superbes reliefs géologiques que possède le Musée de l'École Polytechnique de Zurich. Mais si les circons- tances ne m'ont pas permis de bénéficier de la saine et utile critique que m'aurait adressée le grand géologue zurichois, et qui aurait amené un peu de perfection dans mon travail, je bénéficie cepen- dant encore, à la dernière heure, de l’aide si aimable et si cordiale de l’auteur du « Mechanismus der Gebirgsbildung. » De même qu'à Paris, mon ami si dévoué M. Haug m'a apporté le secours de sa conviction nouvelle, de même mon excellent et DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 823 vénéré maître M. Heim me donne l'appui de sa haute autorité et d’une nouvelle preuve d'estime en m'’autorisant à publier la lettre ci-dessous. Mon mémoire est certes critiquable en bien des points, mais, à voir les marques d'encouragement et d'approbation qui me sont témoignées, je crois n'être pas trop éloigné de la réalité. Ces pages, écrites si hâtivement en quelques semaines, ne doivent être consi- dérées que comme une de ces lueurs d’aurore qui annoncent l’approche du grand jour. Qu'il me soit permis de remercier ici encore un de mes maîtres, le professeur F.-A. Forel, pour l’aide considérable qu'il m'a pro- diguée pendant ma rédaction. Lausanne, 2 juin 1902. Lettre ouverte de M. le Professeur A. Heim à M. le Professeur M. Lugeon € MoN CHER COLLÈGUE, « Après que vous m'avez exposé votre essai d'explication des plis des Alpes calcaires de la Suisse et après les discussions que nous avons eues ensemble, j'ai examiné de nouveau la plupart de mes observations de ces dernières années. Je ne puis pas encore dire que je sois arrivé à une conviction définitive, cependant j'incline fortement en faveur de votre manière de voir. « Mes raisons sont les suivantes. « Votre théorie des plis de nos Alpes calcaires m'explique une quantité de faits qui, jusqu ici, étaient restés pour moi énigmati- quês. Je mentionne principalement les suivants : « a) Que l'énorme masse de Jurassique du Glärnisch-Ortstock- Kinzigpass et de l'Urirothstock, au-dessus de la vallée de la Reuss, se termine sans racine visible et que la terminaison surnage sur du Néocomien et de l’Eocène plissés. « b) Que je n’ai jamais pu trouver, au-dessus (soit au nord) de la ligne synclinale éocène Sissikon-Pragelpass-Bättlis-Leistkamm, les traces d’une charnière sud au pli anticlinal couché qui forme les pentes crétaciques âvec le plongement nord de leurs couches. « c) Les effrayantes complications sous le Glärnisch et au Schild, que j'ai suivies de très près avec M. Oberholzer, durant 82/4 M. LUGEON. — LES GRANDES NAPPES DE RECOUVREMENT ces dernières années, semblent être DEEMEeUD plus COMPÉRESSS en se basant sur votre théorie. « d) Le fait que les faciès crétaciques et éocènes de la zone du Bifertenstock-Calanda ressemblent davantage à ceux de la chaîne nord qu'à ceux de la zone intermédiaire du Titlis-Windgälle- -Lin- thal, où lé Crétacique est très réduit, est compréhensible d’après votre théorie. « e) Il en est de même de faits releve par Burckhardi sur les variations des faciès crétaciques des deux côtés de la zone éocène Sissikon-Bättlis. Les deux côtés de cette zone étaient Dee plus éloignés à l’origine que nous ne l’avions admis jusqu'ici. « f) Depuis que. MM. Suess et M. Bertrand m'ont exprimé leur conviction que le double pli glaronnais devait être un pli unique venu du sud, je n’ai perdu aucune occasion de chercher à ce propos un criterium qui jugeàt la question. « Mes nombreuses observations anciennes et nouvelles dans !a région du « Lochseitenkalk », c’est-à-dire dans le flanc médian renversé de ce grand chevauchement, ne m'ont jusqu'ici laissé reconnaître que des masses éocènes entraînées’ par un mouvement du Verrucano qui les surmonte, vers le nord et jamais vers le sud. C'est, en somme, le résultat de mouvements relatifs de la couver- ture du Verrucano vers le nord. _« g) Le fait que le Lias, qui rappelle beaucoup les Sous des Grisons dans les montagnes au sud du lac de Wallenstadt et au Kussalpealmpass, dans le haut Bisithal, tandis que ce terrain est faiblement développé, ou manque même totalement, entre la Windgälle, le Tôdi et Vättis, est compréhensible d’après la théorie de MM. M. Bertrand, Suess et Lugeon, ce qui n'était pas le cas jusqu'ici. « h) La nouvelle théorie se heurte bien à quelques difficultés de détail (Griesstock, Zwülfihorn, ete.), mais elles me semblent de peu d'importance et seront sans doute aisément surmontables, En revanche, bien des points obscurs ou difficilement compréhensibles qui m'ont arrêté jusqu’à présent paraissent résolus (Rothstock avec Panixerpass, Gelberberg, Neuenkamm, Mattstock, terminai- son orientale des Churfirsten, etc., etc.). « Pour le moment, il ne s'agit pas ici, du reste, des détails du phénomène, mais de son sale. «€ Dans le détail il y aura peut-être, ici et là, des io ifiea He à apporter dans les raccords que vous avez établis dans les nappes chevauchantes. Aïnsi, par exémple, je pense que la chaîne de. DES ALPES DU CHABLAIS ET DE LA SUISSE 829 la Righihochfluh doit être jointe à l’anticlinal de Morschach plutôt qu'à la région crétacique au sud de Fluelen, etc. « Ces modifications n’allèreront cependant pas le fait principal, à savoir que nos plis crétaciques surnagent sur l’Eocène et que leurs racines sont situées au loin, vers le sud, dans le voisinage des massifs centraux. « Je suis très heureux de pouvoir vous dire que: votre théorie m'apparaît comme une lumière nouvelle qui m'éclaire sur bien des points ; c’est pour moi un grand plaisir de reprendre, sous ces points de vue rajeunis, l'étude de régions, à moi si connues et qui m'ont occupé si longtemps. « En tout cas, votre théorie, si étonnante, presque effrayante au premier abord, mérite l'examen objectif le plus attentif. On a souri jadis quand, dans le « Mechanismus der Gebirgsbildung », j'ai parlé du double pli glaronnais ; ensuite sont venues la théorie des Klippes, puis les hardies conceptions de M. Schardt sur les charriages, maintenant arrivent vos surchevauchements (Ueber- überfaltung). « On peut dire aussi que dans ces études suécessives notre esprit s'est graduellement exercé à concevoir de mieux en mieux le mécanisme de la formation des Alpes. Les nouvelles théories se sont échafaudées en s'appuyant sur les anciennes. Mais cela m'est une vraie joie personnelle de reconnaître que mes élèves vont plus loin que moi et m'apprennent à accepter des idées devant lesquelles je n'étais jusqu’à présent arrêté. « Zurich, 31 Mai 1902. € Alb. Her ». TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES Séance du 7 Janvier 1901 : L 7 Proclamation d’un nouveau membre : M. Eug. DANILOFF . . . . . .. Een CCM PEUGUENIN. 25e 0. NE EN RSS RUN SA TC ON MP AOC BAECULON SERA Eee pr NAN TARE Le trm Este EEE Le Spote ITLEe I TE Séance du 21 Janvier 1901 : AM BoISsrer. — AlloOCutION. 2. 00, . + PT EE ET à & MACAREZ Allocution présidentielle TN NN NN Proclamation de nouveaux membres : MM. H. DALLEMAGNE, P.-F. Hou- DANT, SAVORNIN, Emm. Miquer,, le commandant O. BARRÉ. . . E. VAN DEN BROECK, R. NickLÈès. — Correspondance . . . . . : . . .. J. ALMERA, PERON, Louis BUREAU. — Présentations d'ouvrages . . . Ph. GLANGEAUD. — Sur les dômes de Saint-Cyprien (Dordogne), Fumel et Sauveterre (Lot-et-Garonne). . . . . . . . . . G.-A.-F. MOLENGRAAFF. — Géologie de la République Sud-Africaine du Transvaal (19 fig. dans le texte, PI. I-ID . P.-G. de Rouvizze. — Une solution paléontologique. — Le Néogène sur la feuille de Montpellier (4 fig. dans le texte). Léon BERTRAND. — Sur l’âge des roches éruptives du cap d’Aggio CARE SMATIEMTES) EE MEET CNE E. Fournier. — Étude sur la tectonique du Jura franc-comtois (14 fig. OTSAIELERTO) EN RUE AN LEARN ED NU CR NRA TRS A. JorkauD. — Contribution à l'étude de l’Infracrétacé à faciès vaseux : e pélagique en Algérie et en Tunisie (4 fig. et 2 cartes TANSAERTER OO) A ET Le Pr one dE TR M. Mic. — Note sur le fonçage du puits Arthur de Buyer, exécuté par - la Société des houïllères de Ronchamp (Haute-Saône). . Séance du 4 Février 1901 : PRO EE EN CRC ATEN PEN ne ON CO RE AA EEE À" ToucAs.— Sur l’évolution des Hippurites . . . . . . . : . . . … . . D Où Où a @ 3 DouviLLé. — Sur un Foraminifère d'Egypte communiqué par M. Four- TAU (rectification à la communication du 17 Décembre TO 0 O0) NEA ARE ER Lien NE ARE NT ANR SECTE P. TERMIER. — Études lithologiques dans les Alpes françaises. , . . P. Lory. — Quelques observations dans la partie méridionale de la chaîne de Belledonne (Alpes dauphinoises) (4 fig. dans LERTERLE) NS RAR RU R d Lr tnne e t C I R US L. Tnior. — Sur la découverte d’un Rhynchoteuthis dans le Sénonien des environs de Beauvais (1 fig. dans le texte). . . . . 828 TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES Séance du 25 Février 1901 : Proclamation de nouveaux membres : MM. J. Pernô, F. Bonnes, A. de RICHARD, 1H DOUX AMIS PRG EN ETES EN ARCS 2 Dee A. de LAPPARENT. — À propos des fscnnenes de M. Amalitzky en RUSSIE TE LUN ENR SN E Een e Ro HAS UG ZEIELER ObSErVAtIONnS EN RER EC As A. de LAPPARENT. — Découverte d’un Echinide nouveau de le Sahara oriental. "6 her ete pe CD PRE Léon BERTRAND. — Découverte d’un squelette de Mammouth dans PATIESES OT ANT TR ete CROIRE KicrAN. — Sur la fréquence de certains Rhacophyllites dans le Lias moyendes Alpes delSa Voie NN EN PET RE SAcco. — Sur les couches à Orbitoïdes du Piémont ., . . _. . . .. V. Gautuigr. — Contribution à l’étude des Echinides fossiles (PI. UD). P. Fuicne. — Un nouveau Cycadeoidea (1 fig. dans le texte). . . . . . Séance du 4 Mars 1901 : Proclamation de nouveaux membres : MM. JAcos, P. Vince, Léopold Micouez, L. MENGAUD, L. BoISTEL, SCHARDT. . . . . . . . . . . Stanislas MEUNIER. — Origine de l'argile à silex. . . . . . . . . . . . Ch. DEPÉRET. — Revision des formes européennes de la famille des Hyracothéridés (PLAIVEM) a CN RE P. LEBESCONTE. — Sur l’existence du Dévonien moyen dans l’Ille-et- NOT RSR NE SRE M een PA CES AS Go ce Séance du 18 Mars 1901 : Frezp. — Les travaux du Concilium Bibliographicum . . . . . . .. APSTOUCAS ASUDLÉVOIUUON ES EHIDDUrITES EN NC RE E. de MARGERIE. — Notice sur le nouveau classement de la bibliothèque de la Société géologique de France. D.-P. Œurerrt. — Fossiles dévoniens de Santa-Lucia (Province de Den Espagne). Deuxième partie (12 fig. dans le texte, BLENDER SE Te A se ER ET RS RES SC Séance du 1° Avril 1901 : Proclamation d’un membre : M. P. Espinas . . . . . . - Albert GAuDrY. — Sur les découvertes de M. Amalitzky en Russie. . E. de MARTONNE, Emm. de MARGERIE. -— Présentations d'ouvrages. . . Aug. DorrotT. — Sur les travaux en cours d'exécution du Métropolitain de Paris, entre la Place de l'Étoile et la Place de la Nation, par les boulevards extérieurs. . . . . . . . Séance du 15 Avril 1901 : Proclamation d’un membre : M. E.-E. LoncLas. . . . . . . . . . . . . Répertoire international de bibliographie scientifique. . . . . ARE P'iPorRS Présentation dOUVrASeS AMENER W. Kicran. — Découverte de calcaire à Nummulites, dans le petit syn- clinal de la Gourre, près de Séderon (Drôme). . P. Lory. — Observations rames dans le Nord du Massif du VerCOrSE LLsra tte ch Ses PERRIER RE 197 197 199 295 296 297 229 ce G. DoLLrus. — Présentation d’une brochure : Note colonnes sur té eaux de Rouen, . . . . . TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES 829 F. Kerrore. — Discordance du Cambrien sur le Précambrien près de Rennes (1 fig. dans le texte) . PR PE ARE RAS SS Carl Scamiptr. — Observations géologiques à Smatra Ces à ane Cisihedans te texte) 1 ME EM ESERE 260 Séance du 6 Mai 1901 : Nécrologie : MAC NTISPORTERET CE 268 J. BERGERON. — Observations à la note LÉ M. C. ane à 268 Dr Lagar, E. Hauc, G. RAmonp. — Présentations d'ouvrages. . . - . Le. -27T Dr IMBEAUX, J. BERGERON, G. DoLcrus, RUTOT, E. VAN DEN BROEGK, G. Ramonp, Léon JANET. — Présentations d'ouvrages et observa- tions sur l’alimentation des villes en eau potable. . . . . . . 268-271 G.Dozzrus. - Présentation d’une note sur l'étage cénomanien en Angle- terre . DEAR 270 A. BraotT. — Sur l’âge des sunetes du Rozel Manche) Ge. bre le texte) . PSN LR EE RENTREE Re ET ee CAT) Séance du 20 Mai 1901 : Proclamation de nouveaux membres : MM. Luigi SEGUENZA. BROUET. 274 L. Genrtiz, D' A. LABAT. — Présentations d'ouvrages. 274 G.-F. DorLzrus. — Un nouveau gisement de Cardita NL et l'étage Redonien . . : . . . . DURE 279 BourGEAT. — Sur un filon de minerai de zinc dans la Combe de Prés GPA) RS EME RER RQ Re PM RTS FE Nr RE E Séante générale annuelle du 30 Mai 1901 : A. de LAPPARENT. — Allocution présidentielle . . . . 278 Ip. — Nécrologie : MM. l'abbé BARDIN, H. on D Br- ZANCÇON, le R.-P. BLor, CAMERÉ, H.-B. GEINITZ, GROUSSELLE DE BLANCHEFACE, JAGOR, HUGUENIN, D:'P.Marès, Mart1oN, Alphonse MIiLNE-EDWARDS, REVELIÈRE, TArDy, Tniéry, de VAssarT D'Ho- ZIER, PARANDIER. . . . MIRE EE TN RAS OST Ip. — Rapport au nom de la Sims Commiegon du Prix Fontannes, attribution du prix à M. PAQUIER . 284 PAQUIER = Remerciements. MU. UM RME Le 279 Paquier et ZLATARSKI. — Sur l’âge des sonne urgoniennes de Brie 286 PAquiEr. — Comparaison des faunes de Rudistes urgoniens de Bul- garie, de Suisse et de France . . . . Ads 286 SEUNES et KERFORNE. — Observations sur un ont tantiaiee de bords de la Vilaine aux environs de Rennes. 287 G. Dozcrus. — Observations au sujet de la note de MM. Seunes et Ker- forne . . 165 E. VAN DEN BROECK. — État nel en D Rare de l'étude LS ie tions grisouto-sismiques. 288 Séance du 3 Juin 1901 : Nécrologie : M. G. Linpsrrôm. GE 294 . F.-P. Moreno. — Présentation doter, 294 830 TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES C2 Léon JANET. — Observations au sujet de la note de M. Dollfus . . . , 295 LEBESCONTE. — Sur la position des schistes du Rozel (Manche), . . . 296 De LAMOTHE. — Étude comparée des systèmes de terrasses des vallées de l'Isser, de la Moselle, du Rhin et du Rhône (17 fig. dans 'le'texle) NET TERAENERRREREE 297 E. HauG, G. DOLLFUS. — Observations. LE MM NES 85-2084 W. Kuran et P. TerMIEr. — Nouveaux ne ce te à la géologie des Alpes françaises (4 fig. dans le texte). 385 E. HauG. — Observations au sujet de la note de MM. Kilian.et Termier. 420 Séance du 17 Juin 1901 : Proclamation d’un nouveau membre : M. Louis RAMBAUP . . . . . . . 421 Nécrologie M BLFIGHER 0 0 Ce NT TOUR rene 421 G. DozLFrus. — Présentation du moulage d’un De es échoue deWenus Jallar MR EEE EPS 421 O. BARRé. — Sur la morphogénie de la région 1e Fontainebleau. . . . 421 BourGEAT. — Sur le Dévonien de Taillefer et le Carbonifère de Visé (Belgique) (2 Jig. dans le texte) . . . . . . . : . . . VOS Edim. PEezzar. — L’Aptien des environs d'Uzès (Gard) . 4 LR INR A. de GRossouvre. — Contribution à la géologie des Core PUS CT In.. * — Nouvelles observations sur le terrain à silex du sud-ouest du bassin de Paris, . . . . . . 0 431 E. KALLoOT. — Sur l'extension de la mer aquitanienne dans l'Entre- à Deux-Mers (Gironde) (2 fig. dans le texte). . . . . . 433 Ib. — Un nouveau sondage artésien à Bordeaux-la-Bastide. 150 Séance du 4 Novembre 1901 : A. GAupry. — Présentation d’un mémoire de M. Capellini, sur la découverte d’un Cétacé fossile à San-Marino . . . . 439 I. — Présentation d’une note : Sur la similitude des dents de l'Homme et de quelques animaux. . . . . . . . . . 43% CossMANN, À. de LAPPARENT. — Présentations d'ouvrages . . . . . . 4h4o-44x H. Douvizcé. — Présentation d'échantillons de Rudistes provenant du Petit-Caucase et de la rive droite de l’'Euphrate, près dE KéDan ere le OT ENS MENT H. DALLEMAGNE. — Le creusement de la vallée de la Bidascea PONT SAYN et RoMmAN. — Composition du Barrèmien sur la rive droite du Rhône dans la région de Viviers. . . . . . A. GUÉBHARD. — Surle graphisme de la carte du sud-ouest des res. Maritimes: 2211-20 ea REMISE AAN Ib. — Note sur la limite méridionale du Néocomien dans lesPAlpes=Maritimes MER CE CN EEE 45T H. Tomas. — Sur l’existence du Lutétien supérieur dans la vallée de la Seine, entre Villenauxe et Montereau, et à Villiers- Saint-Georges, au nord de Provins . .. À 453 E. Harzé. — Un crâne de Bœuf musqué, des Eyzies (Dordesne) & Fes : dans le Mexte). AS SMS MR EEAEE 455 Ch. SCHLUMBERGER. — Première note sur les Orbitoïdes (PI. VII-IX). . 459 H. Douvizzé. — Observations au sujet de la note de M. Schlumberger. 467 TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES 831 Séance du 18 Novembre 1901 : Proclamation de nouveaux membres : MM. René de LAMOTHE, J.-M. BEL, leTCOMMÉENZEMA ES ECC CET NT I08 Karl A. von ZrrTeLz et D.-P. ŒurerrT. — Pr Bhente ton de ae fase de la réédition des types d'espèces fossiles 468 DouxaAmi, LAvILLE, G.-F, DozLrus. — Présentations d'ouvrages . . . . 469 H. Douvirzé. — Sur un calcaire siliceux de la Brèche du Chablais. . 469 PERON. — Au sujet d’une roche de la Puisaye (Yonne). . : . . . , .. 470 H. Douvicré. — Observation au sujet de la note de M. ae RME 452 V. PAquIER. — Sur la faune et l’âge des calcaires à Rudistes de là DODEO Des SE AN PR RSA Mn ee AE 473 H. Douvizcé. — Observation au el de a note de M. Pope de Er A V. PAQUIER. — - Sur les relations du groupe inverse avec le groupe normal chez les Chamacées . . . . . . RE TAiE. R. Sevasros. — Sur l’origine des Klippes des Carpathes. . . . . DOTE F. PRIEM. — Sur les Poissons de l’Éocène inférieur des environs de Reims (10 fig. dans le texte, PI. X et XD. ....... 477 A. Gaupry. — Observations au sujet de la note de M. Priem . . . . 504 A. PERON. — Les étages crétaciques supérieurs des entire (2 fig. dans le texte). EURE MON OR SOS CA 50) Toucas. — Observations à propos de à nendre de M. Porn 530 Séance du 2? Décembre 1901 : Proclamation de nouveaux membres : MM, l'abbé DELÉPINE, G. GARDE, Robert DoUvVILLE, MIGHEL-LEVY 0.0 OU EN 0 Ficaeur. — Nécrologie : M. POUYANNE. . . . . . . . . . . ST MP ER 0 0 7] Ph. NéGris, NICKLÈS, AUTHELIN. — FH t ons douanes: . . . . 038-539 A. GUÉBHARD. — Deux lambeaux de Miocène lacustre sur la rive à gauche de la Siagne, commune de St-Cézaire (A.-M.) 539 Ib. — Un horizon supérieur du Crétace dans le départe- MERDAUMN AT EN 540 Ip. — Faciès inférieur du Miocne : à ne na A _M. j. 540 V. PAQuIER. — Sur la faune et l’âge des calcaires à Rudistes de la Dobrogea, observations . . . . ONE I. — Observations au sujet de la note de MM. Eagre : oran © Composition du Barrèmien sur la rive droite du Rhône, dans la région de Viviers. . . . . . . . . . . DAT H.-E. SAuvAGE. — Les Pycnodontes du Jurassique supérieur du Bou- lonnais (PI. XIT). Ds HR RE 542 M. Bourx. — Revision des espèces SHRNAS Nes de acte nn oe 9. LAN SEE Re) EEE 591 A.MicuAEET. — Le Cénomanien des environs = de Toulon et ses hinides D Léon JANET. — Conférence sur l'alimentation des villes en eau potable par la méthode des sources artificielles. . . . . . . . 589 IMBEAUX, BoursauLzr, G. Dorzrus, BABINET, Bicor. — Observations 592-594 Séance du 16 Décembre 1901 : Proclamation de nouveaux membres : M. Le CouPPEY DE LA FOREST, M. BourDoN . . . 599 Albert Gaupry.— L'Okapi de l Gael et P'Helladotherium de Piken: mi 59 832 © TABLE GÉNÉRALE DES MATIÉRÉS G. de ANGES D’'Ossar, G. Dorrrus et Pb. DAUTZENBERG. — Présentations dOUVrASCS EEE RER CREER SE Got Em. HauG. — Sur le pli ie, de. Diabler el | 596 _ Douvizré. — Rapport de la Commission de Done ie 598 A. THEVENIN. — Sur la découverte d’Arachnides dans leterrain crie pe de Commentry (PI. XIID . MM oi vu 6o5 A. GuÉBHARD. — Sur la théorie génétique des DA DUE rene d'accidents récents en plein Jurassique inférieur dans le sud-ouest des A MER È FH el une carte dans le texte). . È LT MMOTES A. de LAPPARENT, HAUG. — Observations à propos de a. communica- tion de M. Guébhard 0 623 R. Fourrau. — Notes pour servir à l'étude des Échinides fossiles d'Égypte BEA EGIUe Re 623 H. Douvizré. — Éocène de Royan . . . .. ; PRÉ 627 A. de LAPPARENT. — Observation à propos de Ta) ohne de M-Douvillé 7475270 UNE PO RER 636 Ch. Barrois. — Note sur les Graptolites de la Grrene et leurs rela- tions avec les étages graptolitiques de France . . 637 Em. CHANEL. — Quelques remarques sur les phénomènes orogéniques et la formation des grottes et des cluses dans le Jura M'érIATO nl RSA NN ER ER RER se One TIRE 646 CossMANN. — Sur quelques grandes Me de de HÉbece (4 fig. dans le texte). . 652 A. BolsTEL. — Quelques coupes du Mec de (a Sncsse es ner du Bas-Bugey (7 fig. dans le leate) . . . . . 657 COMPTE-RENDU DE LA RÉUNION EXTRAORDINAIRE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE A LAUSANNE ET DANS LE CHABLAIS EN IQO01 Liste des membres ayant pris part à la Réunion extraordinaire de 1901. 677 Programme des excursions ; ie nee 678 Bibliographie concernant la Fée shaendinaine ae o 680 Séance du 3 Septembre 1901, à Lausanne : Léon CAREZ:— "Allocution: 22% 0000 EE NN TERRE EMEA RARE . 681 Constitution du Bureau EM MEN NC 682 E. RENEVIER. — Allocution. . . . Serie 682 L. CAREZ. — Nécrologie : M. DE Marre — Pientition nl C. E du CONGTÉS AP RE NN ER RE SRE PER 682 Proclamation d’un nouveau Fe be € M. Edw. JORISSEN. . . . 682 M. LuGEeon. — Allocution présidentielle . . 683 L. RozuiEr. — Sur l’âge du conglomérat bal ou NageUjluh dE le SUIS SENS TEL A Le ER ER Re PAT CARRE 684 Séance du 5 Septembre 1901, à Champéry : M. LucEon. — Compte-rendu de l’excursion du 3 septembre dans les environs de Lausanne (1 fig. dans le texte) . 686 Ib. — Compte-rendu de l’excursion du 4 septembre de Cuerr à Monthey (1 fig. dans le texte). . . . . . . . . . . 688-690 H. Douvizé, DouxaAMI. — Observations . . . . . . . . ... . : : . . . 690 TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES 833 M. Luceon. — Compte-rendu de l’excursion du 5 septembre dans les environs de Monthey et de Monthey à Le da 692-699 H. Douvizcé, HAuG, DouxamI. — Observations . . :°. . . . . 1 1609 SHEINNANNe —— OlSerVAtIOns,. 0.00 NS 0 NS CCE NO Séance du 7 Septembre 1901, à Thonon : M Lucron. — Compte-rendu de l’exeursion du 6 septembre, de Cham- péry à Morgins . . . . ROC OM AE OMR Life 696 I. — Compte-rendu de Een cesion du 7 septembre dans Ee environs Te MOrSINS ETC NT Er 698-704-7505 W. KizraAN. — Observations . . . . . . . . . . . .. AE To bar no 700 Em. HauG. — Observations . . . . . CT NES CE ET RE 071702 SCHMIDT. — Observations. "1. 0 NH HUAMIN. , td CDN STEINMANN. — Observations... .. RL EE PE TION - Séance du 9 Septembre 1901, à Morzine : M. Luceon. — Compte-rendu de l'excursion du 8 septembre, de Thonon aNSaint-Jean-AUIDREMEN PRET CCR 706-709 JEAnPBRUNRES — ObServVAtIONS 0.0. CM Ne ENCORE 708 M. LucEon. — Compte-rendu de l’excursion du 9 septembre, de Saint- Jean-d'Aulph à Morzine (1 fig. dans le texte). . 710-713-714 REYMOND, STEINMANN, SCHMIDT. — Observations . . . . . . . . . . . . .713 BRUNES HO DSERVALIONS LUN MUR ERNST CN NN ONE 714 Réviz. — Observations. . . . . . . - . . . . . RE LP EAN EME «3 715 Séance du 11 Septembre 1901, à Taninge : M. Luceow. — Compte-rendu de l’excursion du 10 septembre, de Mor- PINENAAPANINPEN EEE ME er EUR ME 710 Ip. — Compte-rendu de l’excursion du 11 none dans les : CNATON SITE PEER . + . + 716-719-718 RMI EDOLSMrE- ObSERVATIONS EE AR 915 DOUVIPDE SE ODSELVATIONS EME MEL PT To RS CRETE 718 EMCAREZ— AIllOGUtIONMES eee Je SE RE NIMES RERO Béarn AllOoCutonEM UN, 0, ARE res den EEE 719 ÉUGEONSE AANLOCUILON EE AL ENNEMI ON NE Ne 720 H. Preirswerk. — Note sur le Rhétien et le Lias du col de Coux (Val de) OM rSdanstleexLe) ERREURS 721 M. Lucron. — Les grandes nappes de recouvrement des Alpes du Chablais et de la Suisse (14 fig. dans Le texte; pl. XIV- MOTTE EE CE AE DIVERS LA EE Me he a OU te due bit ic 723 A. Herm. — Lettre ouverte à M. M. Linea NS NE ET 823 HADIe SP MP derniere Rs lus Le SSP DONCRNI RENAN EE 827 Date de publication des Hamas os romposent le t. I (4° série). ‘860 EC ee anis ete e rome FAST ME pe MIND GES 860 FIN DE LA TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS A Aggio. Sur l’âge des roches éruptives du cap d’—, par M. Léon Bertrand, 96. ; Algérie. Contribution à l'étude de l’Infracrétacé à faciès vaseux péla- gique en — et en Tunisie, par M. A. Joleaud, 97. — Etude com- parée des systèmes de terrasses des vallées de l’Isser (—), de la Moselle. du Rhin et du Rhône, par M. de Lamothe, 297. Allocutions. M. Boistel, 7; M. Carez, 8, 68r, 718; M. de Lapparent, 278 ; M. Lugeon, 683, 720; M. Renevier, 682 ; M. Révil, 719. ALMERA (Jaime). Envois d'ouvrages, 10. ANGES D'OssAT. Présentation d’ou- vrage, 595. Alpes. Etudes lithologiques dans les — françaises, par M. Pierre Ter- mier, 157. — Quelques observations dans la partie méridionale de la chaîne de Belledonne (— dauphi- noises), par M. Lory, 179. — Sur les Rhacophyllites du Lias des — de Savoie, par M. Kilian, 187. — Nou- veaux documents relatifs à la géo- logie des — françaises, par MM. Kilian et Termier, 385 — Réunion extraordinaire de la Société géolo- gique de France à Lausanne et dans les -— du Chablais, par M. M Lugeon, 677. — Les grandes nappes de recouvrement des — du Chablais et de la Suisse, par M. M. Lugeon (pl. XIV-XVID, 933. Alpes-Maritimes. Sur le graphisme de la carte du sud-ouest des —, par M. Guébhard, 444. — Note sur la limite méridionale du Néocomien dans les —, par M. Guébhard, 451. — Les étages crétaciques supé- rieurs des —, par M. Peron, 505. — Lambeaux de Miocène lacustre sur la rive gauche de la Siagne (—), par M. Guébhard, 539. — Sur un faciès inférieur du Miocène infé- rieur, par M. Guébhard, 540. — Sur la théorie génetique des appa- ritions singulières d'accidents ré- cents en plein Jurassique inférieur dans le sud-ouest des —, par M. Guébhard, 612. Aplien. L’— des environs d’Uzès (Gard), par M. Pellat, 428. Aquitanien. Sur l'extension de la mer -ne dans l’Entre-deux Mers (Gironde), par M. Fallot, 433. Arachnides. Sur la découverte d— dans le terrain houiller de Com- mentry, par M. Thevenin (PI. XIID), 605. Argile à silex. Origine de l—, par M. Stanislas Meunier, 192. Ariège. Sur la découverte d’un Mam- mouth dans l’—, par M. Léon Ber- trand, 187 AUTHELIN. Présentation d'ouvrage, 539. B BABINET. Observations à la confé- rence de M. Janet sur l’alimenta- tion des villes en eau potabie, 593. BArpiN. Nécrologie, 280. BARRÉ (Commandant O.). Sur la morphogénie des environs de Fon- tainebleau, 421. 3 Barrèmien. Composition du — sur la rive droite du Rhône dans la région de Viviers, par MM. Sayn et Roman, 445. Barrois. Note sur les Graptolites de la Catalogne et leurs relations avec ee étages graptolitiques de France, 633. TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS L Beauvais. Sur la découverte d'un Rhynchoteuthis dans le Sénonien des environs de —, par M. L. Thiot, 184. Bécor. Nécrologie, 280. Belgique Etat actuel en — de l'étude des corrélations grisouto-sismi- ques, par M. Van den Broeck, 588. — Sur le Dévonien de Taillefer et le Carbonifère de Visé (—), par M. Bourgeat, 425. : Belledonne. Quelques observations dans la partie méridionale de la chaine de — (Alpes dauphinoises), par M. P. Lory, 179. BERGERON. Présentation d'ouvrages, 268. — Observation à propos des gisements de pétrole, 268. BcerTRAND (Léon). Sur l’âge desroches éruptives du cap d'Aggio, 96. — Sur la découverte d’un Mammouth dans l'Ariège, 187. BEzaANcow. Notice nécrologique sur —, 280 ; e Bibliothèque. Notice sur le nouveau classement de la — de la Société géologique de France, par M. de Margerie, 229. Bidassoa. Le creusement de la vallée de la —, par M. H. Dallemagne, //42. Brceor. Sur l’âge des schistes du - Rozel (Manche), 272. — Observa- tions à la conférence de M. Janet sur l'alimentation des villes en eau potable, 593. : Bzeicxer. Nécrologie, 420. Bzor (R.-P.) Nécrologie, 280. Bœuf re Un crâne de — des Eyzies (Dordogne), par M. Harlé, 454. BorsTEL (A.). Allocution, 7. — Obser- vation, 276. — Quelques coupes du Miocène de la Bresse dans l’anse du Bas-Bugey, 657. Bornéo. Observations géologiques à Sumatra et à —, par M. Carl Schmidt, 260. Bouze (Marcellin). Revision des « , Id. id, 3. Plan des contours géologiques des affleurements dans la région des accidents paradoxaux (1/80.000) 4. Coupe suivant la ligne C de la fig. 3. . 5. Coupe suivant la ligne B de la fig. 3. 6. Coupe suivant la ligne A de la fig. 3 7. Schéma de la formation d’une proéminence QE couches anciennes sous le lambeau discontinu de couches récentes . M. CossMaAnx. — 1. Charnières de la valve gauche de Vera pla- A. BOISTEL. nicosta L. et de V. densata Conr. ë . Charnières de la valve droite de Vencricundis Dee nicosta L. et de V. densata Conr. 1. Coupe dans le vallon de Jurancieu. 2: Id . Plan du vallon de Jurancien (1/15. 000). . Coupe suivant la ligne XY de la carte de a fig. 3. . Coupe dans le vallon de Saint-Cyr. . Emmericia canaliculata Brusina . . . Profil entre Ambérieu et Jujurieu LL JR ; q à ans KT Te CPE RL ESA he CE j LISTE DES FIGURES ET DES CARTES Réunion extraordinaire à Lausanne et dans le Chablais M. LUGEON. — 1. En: PREISWERK. — M. LucEow. — 1. LI 9. D L{. Coupe du contact de la région molassique horizon- tale avec la région de la molasse plissée. . Position des aflleurements entre Bouveret et Sant GIRLOÏDR PNR MELLE URI . Coupe du pli frontal Heneset dl massif de la BLCCREN A RNNANPAE E TMEEXT Len. nn: . Coupe théorique oh hotel du an cit de de. Brèche avant la fin de l’arrêt du mouvement du chevauchement. Coupe du bord du Das if ce Ia Eire au si de COUR : : Coupe du one des Haries Lines ï Fe. Re colLee en avant de la Dent de Morcles . ; Contact des Préalpes et des Hautes res cor pénétrant de la nappe des Diablerets dans les terrains préalpins, au-dessus de la nappe couchée et plissée du massif Dent de Morcles - Grand Muveran . . . Les trois grandes nappes senc des Hhmies Alpes. . Coupes eronarques des Sennes da Pr is . Coupe du massif de la Hornfluh . . . .. . Coupe de la klippe du Giswylerstock mai fans l'hypothèse de plis venus du sud. . Coupe schématique du front nord de la déôue alpine à travers les Hautes Alpes bernoïises et les MN à CAN SRE EN Cire . Coupe des Clariden. Coupe de la nappe Hpenerre Ge eee Gr de l'extrémité de la nappe inférieure . . . La nappe supérieure glaronnaise mi orece en trois nappes indépendantes dans les montagnes dunord dus lon tRal MEME LEE EE . L’extrémité de la nappé de Glaris disparaissant sous les nappes du Falknis et du Rhäticon. . . Les plis du Falknis sous les Préalpes médianes de l’est, d’après les levés de M. Lorenz. Coupe du massif du Simplon Coupe à travers le massif de l’Ofenhorn et le Val ADS OLDIO NE NAS MEME FIN DE LA LISTE DES FIGURES ET DES CARTES 899 687 LISTE DES PLANCHES PL. [. — G-A.-F. MOLENGRAAFF. — ESQUISSE GÉOLOGIQUE DE LA RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE DU TRANSVAAL. — I/1.500.000. PI. IL. — In. — RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE, COUPES GÉOLOGIQUES. — Fig. r. Coupe schématique de la vallée de Limpopo au massif de Vrede- fort (échelle des longueurs 1/1.000.000). — Fig. 2. Coupe schéma- tique le long du chemin de fer entre Belfast (Transvaal) et le territoire portugais de Moçambique (échelle des longueurs 1/800.000). — Fig. 3. Coupe de l’escarpement est du Hooge-Veld, près de Pelgrimsrust, d’après les données de M. Stark (échelle des longueurs 1/10.000). PL. IT. — V. GAUTHIER. — NOETLINGIA MONTEILI GAUTHIER. — Fig. 1. Noetlin- gia Monteili, vu de profil, grandeur naturelle. — Fig. 2. Le même, face supérieure. — Fig. 3. Portion d’aire ambulacraire grossie. PI. IV. — Ch. DEPÉRET. — REVISION DES HYRACOTHÉRIDÉS EUROPÉENS. — Fig. 1. Hyracotherium leporinum Owen. D’après un moulage du crâne provenant de l’argile de Londres à Herne-Bay, figuré par Owen (Geol. Mag, 1865, pl. X, fig. 2) et conservé au British Museum. Palais montrant à gauche les 3 M, p', p* et les deux alvéoles de p°; à droite m°, m', p‘, p° et p°. Figure grossie d’un cinquième. Longueur réelle des 3 M, 0,024 ; des trois dernières prémolaires, 0,020. - Fig. 2. Propalæotherium parvulum Laurillard sp. Sidé- rolithique. Eocène de Lissieu (Rhône). Série des molaires supé- rieures gauches (3 M, 4 P) formée à l’aide de dents trouvées isolé- ment. Figure grossie d’environ un quart. Longueur réelle des sept molaires, 0,058. — Fig. 3. Propalæotherium parvulum Laur. sp. Sidérolithique. Eocène de Lissieu. Série des molaires inférieures G M, 4 P) du même animal et du même gisement. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle, 0,066. — Fig. 4. Lophiotherium cer- vulum Gervais. Eocène supérieur de Saint-Hippolyte-de-Caton (Gard). Partie de maxillaire montrant les 3 M et les deux der- nières P (p*, p*). Dans cet individu, p‘ est molariforme, mais p° n’a qu'un seul denticule interne formé par la soudure des deux denticules normaux. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des six molaires, 0,043. — Fig. 5. Lophiotherium cervulum Ger- vais. Même gisement. Maxillaire droit avec la série des sept mo- laires (3 M, 4 P) séparées de la canine par une longue barre. Dans ce spécimen p? est (comme p* et p*) molariforme, avec deux den- ticules internes étroitement accolés; p! allongé montre aussi deux denticules internes. Figure grossie d'environ un quart. Longueur réelle des sept molaires, 0,046. — Fig. 6. Lophiotherium cervulum Gerv. Même gisement. Branche droite de mandibule avec la série des sept molaires (3 M, 4 P); p° est submolariforme. Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des sept molaires, 0,044. LISTE DES PLANCHES 857 PL V.— In — In. — Fig. 1. Pachynolophus Duvali Pomel. Crâne provenant des grès éocènes du Minervois (Hérault). La pièce montre à gauche la série des six molaires (3 M, 3 P) ; il n’y ‘a pas de pt; à droite m* et m°; la canine est séparée de p° par une longue barre. Figure lé; sement grossie. Longueur réelle du crâne du bord inci- sif au bord postérieur du trou occipital, 0,13 ; longueur de la série des six molaires, 0,042. — Fig. 2. Pachynolophus Prevosti Gervais. Calcaire grossier supérieur de Nanterre : TYPE DE L’ESPÈCE, figuré par Gervais (Zool. et paléont. franç., pl. 35, fig. 16). (Coll. Mus. Paris). Arrière-molaire supérieure probable- ment m? Figure grossie d’un quart. Dimensions réelles : lon- gueur, 0,009 ; largeur en avant, o,o11. — Fig. 3. Pachynolophus Prevosti Gervais. Calcaire grossier supérieur de Gentilly (Coll. Mus. Paris). Maxillaire supérieur gauche avec les 3 M et les deux dernières P (p* et p*). Figure grossie d’un quart. Longueur réelle des cinq molaires, 0,043. — Fig. 4. Pachynolophus Duvali Pomel. Caleaire grossier supérieur de Passy (Coll. Mus. Paris) TYPE DU GENRE ET DE L'ESPÈCE. Trois dents isolées, les seules actuellement existantes de la série des six molaires figurées par Blainville et Gervais (Zool. et paléont. fr., pl. 17, fig. 1) et qui sont le type du genre Pachynolophus Pomel. Les figures représentent deux arrière-molaires, l’une droite, l’autre gauche (m? probablement) et la dernière prémolaire p‘. Figure grossie d’un quart. Dimen- sions réelles de m? : longueur, o 008 ; largeur en avant, 0,010. — Fig. 5. Pachynolophus Duvali Pomel. Calcaire grossier supérieur de Passy (Coll. Mus. Paris). L'un des TYPES DU GENRE ET DE L’ESPÈCE. Trois arrière-molaires inférieures droites séparées, me paraissant être les mêmes que celles figurées par Blainville sous le nom d’'Hyracotherium de Passy (Ostéogr., g. Lophiodon, pl. ID). Figure grossie de 1/4. Long. réelle des trois molaires, 0,0285. PL. VI. — D.-P. ŒuLerT. — FossiLES DÉVONIENS DE SANTA-LUCIA. — Fig. 1. Spirifer Boulei, n. sp.; gr. nat. — Fig. 2 à 16. Reticularia Dereimsi, n. Sp.; gr. nat. — Fig. 17 à 34. Cyrtina heteroclita Defr., var. intermedia Œhlert : 17, gr. nat. ; 18 à 34, gross. 1 1/2. PL VII. — Ch. SCHLUMBERGER. — ORBITOIDES MEDIA d’'ARCHIAC. — Fig. 1. Orbitoides media d'Archiac (L. Faujasi de la coll. Defrance). Mirambeau. Gr. 5/1. — Fig. 2-3. O. media d’'Archiac. Royan. Gr. 5/1. — Fig. 4. O. media d’Archiac. Section transversale. Forme B (de la collection Defrance). Gr. 13/1. — Fig. 5. O. media d'Archiac. Section transversale. Forme A, Royan. Gr. 13/1. — Fig. 6-7. O. media d'Archiac. Sections équatoriales. Formes A; fig. 6, de Royan; fig. 7, Mirambeau. Gr. 12/1. PI. VIII. — ID. — ORBITOIDES APICULATA SCHLUMB. ; O. MINOR SCHLUMB. — Fig. 1. Orbitoides apiculata Schlumb. de Maestricht. Gr. 5/1. — Fig. 2-3. O. minor Schlumb. de Maestricht. Gr. 9/1. — Fig. 4. O. apiculata Schlumb. Section transversale. Forme B, de Maurens Gr. 13/1. — Fig. 5. O. minor Schlumb. Section transversale. Forme À, de Maestricht. Gr. 13/1. — Fig. 6. O. apiculata Schlumb. Section transversale. Forme A, de Maestricht. Gr. 20/1. 858 LISTE DES PLANCHES 6 PI.IX — In. — Ip. — Fig. 1. Orbitoides apiculata Schlumb. Section équato- riale. Forme A, de Maestricht. Gr. 13/1. — Fig. 2. ©. minor Schlumb. Individu usé, de Maestricht. Gr. 9/1. — Fig. 3. O. minor Schlumb. Section équatoriale. Forme A, de Maestricht. Gr. 14/1. — Fig. 4. O. apiculata Schlumb. Section équatoriale. Forme B, de Maurens, Gr. 13/1. | PI. X. — F. PRIEM. — PoissONs DE L'ÉOCÈNE INFÉRIEUR DES ENVIRONS DE Reims. — Fig. 1. Amia robusta n. sp. Conglomérat de Cernay. Vertèbre n° I de la 1° série, vue de la face antérieure. — Fig. 2. Id. Vertèbre n° III de la 1° série, vue antérieure. — Fig. 3 Id. Vertèbre n° IV de la 1° série, vue antérieure — Fig. 4. Id. Ver- tèbre n° VII (caudale) de la r'° série, vue antérieure. — Fig. 5. Id. Vertèbre no III de la 2° série, vue antérieure. — Fig. 6. Id. Ver- tèbre n° V (caudale) de la 2° série, vue antérieure. -— Fig. 9. Id. Basioccipital d’un individu de moyenne taille, vue de dessus — Fig. 8. Id. Parasphénoïde d’un individu de grande taille, vue inférieure. — Fig. 9. /d. Fragment d’os dentaire, vue externe. — Fig. 10. 14. Mème fragment, vue interne. — Fig. 11. Id. Maxillaire d’un individu de petite taille, vue inférieure. — Fig. 12. Id. Fragment de maxillaire avec alvéoles externes et internes — Fig. 13. 1d. Même fragment, vu sur la face latérale interne. — Fig. 14. Amia (Pappichthys) Barroiïsi Leriche sp. Agéien. Vertèbre abdominale, vue antérieure. — Fig. 15. 1d. Vertèbre caudale, vue antérieure. — Fig. 16. Id. Fragment d’os dentaire, vu de dessus. PL XI. — In. — In. — Fig. 1. Lepidosteus suessionensis P. Gervais. Agéien. Vertèbre, vue par la face postérieure. — Fig. 2. Id. Vertèbre vue par la face antérieure. — Fig. 3. Id. Fragment de plaque osseuse de la tête. — Fig. 4. Id. Ecaille de la région des flanes, face externe. — Fig 5. 14. Kcaille de la ligne latérale, face interne. — Fig. 6. Id. Fragment d’os dentaire, vue supérieure. — Fig. 9. Id. Fragment de maxillaire, vue externe. — Fig. 8. Id. Fragment de prémaxillaire, vue externe. — Fig. 9. Arius? Lemoinei n sp. Agéien. Piquant de nageoire pectorale droite, vue latérale. — Fig. 10. /d. Vue postérieure. — Fig. 11. Mème espèce. Fragment de piquant dorsal, vue latérale. — Fig. 12. Arius Dutemplei Leriche. Agéien. Piquant dorsal, vue latérale. — Fig. 13. Pime- lodus Gaudryi Leriche. Agéien. Piquant dorsal, vue latérale. — Fie. 14. Phyllodus Gaudryi n. sp. Agéien. Plaque pharyngienne | inférieure. — Fig. 15. Égertonia isodonta Cocchi. Agéien. Plaque pharyngienne supérieure, vue par la face triturante. — Fig. 16. Nummopalatus Vaillanti n. sp. Agéien.. Fragment de plaque pharyngienne supérieure, vue par la face triturante. — Fig. 15. Id. Vue de profil. — Fig. 18. Nummopalatus paucidens n. sp. Plaque pharyngienne supérieure, vue par la face triturante. — Fig. 19. Labridé indét., voisin de Tautoga actuel. Conglomérat de Cernay. Plaque pharyngienne supérieure, vue par la face triturante. — Fig. 20. Id. Fragment vu de profil. — Fig. 21-22. Acanthias orpiensis Winkler sp. Cernaysien. Fig. 21, dent vue de la face interne; fig. 22, dent vue par la face externe. — Fig. 23-24. Squatina Gaudryi n. sp. Cernaysien. Fig. 23, dent anté- éd LISTE DES PLANCHES 899 rieure, face externe; fig. 24, dent latérale, face interne. — Fig. 25-26. Odontaspis Rutoti Winkler sp. Cernaysien? Fig. 25, dent antérieure, face externe; fig. 26, dent latérale, face interne — Fig. 27-28. Odontaspis elegans Agassiz sp. Cernaysien. Fig. 97, dent antérieure, face interne; fig. 28, dent antéro-latérale, face externe. — Fig. 29-30. Lamna striata Winkler sp. Cernaysien (sables de Chälons-sur-Vesle). Fig 29, dent antérieure, face externe; fig. 30, dent latérale, face interne. PI. XII. — H.-E, SAUVAGE. — PYCNODONTES JURASSIQUES DU BOULONNAIS. — Fig. 1 Gyrodus Cuvieri Agassiz. Spleniaux. Musée du Harre (collection Bouchard-Chantereaux). Kimméridgien supérieur — Fig. 2. Même espèce. Vomer. Musée de Boulogne. Kimméridgien supérieur. — Fig. 3. Même espèce (Gyrodus Larteti Sauvage). Splénial. Musée de Boulogne. Kimméridgien. Zone à Pholadomya hortulana. — Fig. 4. Gyrodus umbilicus Agassiz. Vomer. Musée de Boulogne. Portlandien inférieur. — Fig. 5. Même espèce. Vomer. Musée de Boulogne. Portlandien supérieur. — Fig 6. Mesodon affinis Nicolet. Splénial. Musée du Havre. — Fig 9. Mesodon Bouchardi n. sp. Splénial. Musée du Havre. — Fig. 8. Même espèce. Vomer. Musée du Havre. — Fig. 9. Mesodon Lennieri n. sp. Splénial. Musée du Havre. — Fig. 10. Mesodon morinicus Sauvage, Splénial. Musée du Havre. — Fig. 11. Mesodon simulans n. sp. Splénial. Musée de Boulogne. Portlandien infé- rieur. — Fig. 12. Mesodon sp. Vomer. Musée de Boulogne. Astar- tien. Zone à Pygurus jurensis. — Fig. 13. Cœlodus suprajurensis n. sp. Vomer. Musée de Boulogne. Portlandien-Purbeckien. — Fig. 14. Cœlodus sp. Mème collection, même niveau. PI. XIII. — A. THEVENIN. — ARACHNIDES DU HOUILLER DE COMMENTRY. — Fig. 1. Eotrogulus Fayoli sp., grossi 2 fois. — Fig. 2. Nemasto- moides Élaveris sp., grossi 3 fois. PI XIV. — Maurice LuGEoN. — COUPES DANS LA RÉGION DE LA BRÈCHE DU CHABLAIS ET LES PRÉALPES (échelle 1/50.000). — Fig. 1. Coupe du flane gauche de la vallée du Rhône. — Fig. 2. Coupe du flanc droit de la vallée de la Drance du Biot. PI. XV. — Ip. — In. — Fig. r. Coupe du massif de la Brèche et de la zone interne des Préalpes, pli couché de la Dent du Midi. — Fig. 2. Coupe du Val de Morgins au Val d'Illiez. — Fig. 3. Coupe à travers le massif de la Brèche du Chablais au nord de la vallée du Giffre. — Fig. 4. Environs de Taninge. PI. XVI. — Ip. — CoUPES A TRAVI RS LE VERSANT NORD DES ALPES DE LA SUISSE CENTRALE ET ORIENTALE, dans l’hypothèse des grands plis couchés vers le nord, d’après les travaux de MM. Escher de la Linth, Moesch, A. Heim et Lugeon. Échelle 1/150.000. PI. XVII: — Ip. — CARTE STRUCTURALE DES ALPES DE SAVOIE ET DE LA SUISSE. Echelle 1/750.000. DATE DE PUBLICATION DES FASCICULES QUI COMPOSENT CE VOLUME Fascicule 1 — (feuilles 1-6, PI. I-IL), juin 19017. — 2—( — 9-16, PI. II-IV), août 1901. — 3—( — 17-27), octobre 1901. — k—( — 28-43, PL VII-XIN), mars 1902. — 5—( — 44-55, PI. XIV-XVID, juin 1902. ERRATA DU TOME XX VII (3° série) Réponse DE M. G. DoLLFUS, À LA NOTE DE M. DE GROSSOUVRE, INTITULÉE : Sur l’Oligocène et le Miocène du bassin de Paris P. 995, ligne 6, au lieu de : Grès de Beauce, lire : Grès de Brenne. — — 9, — Cheoruelles, — Chevenelles, près Chi- tenay. ERRATA DU TOME PREMIER (4° série) ÉTUDE COMPARÉE DES SYSTÈMES DE TERRASSES DES VALLÉES DE L'ISSER, DE LA MOsELLE, DU RHIN ET DU RHÔNE, PAR M. DE LAMOTHE : P. 39, ligne 24, au lieu de : J’ajouterai, lire : J’ajouteraiincidemment. EE ON — c. Deckenschotler, — C.— Deckenschotter. 340, — 34-35, — au-dessus du — à l’ouest. Rhône, 343, tableau, col.6, — 220-230, — 200-230. 345, lég. de la fig., — 1 millim. pour — 1 millim. pour 4 kilome-. 2 kilomètres, tres. 349, ligne 28, — Rhin, — Rhône. 350, — 31, — celui, — le déplacement. 356, tableau, col.2, — positif 50-60 m., — positif 50-60 m.? 364, ligne 31, — conséquence , — conséquence 2. 364, — 35, — Rafz !, — Rafz?. 368, — 12, — compris dans, — compris au voisinage du niveau de base dans. 369, — 20, — exacte, — exacte. LOS ren - Zome J AN GZ ST £ Vivear de la Aer Zepr 2e7 Z 9022. Note de ME Maumec LUGEON { | | | | | _—————- Cime de l'Est (DEdu Midi) Massif de la Brè =. Draversaz Chenalier StAndré 737 765 che du Tour de Don zoo Chablais _ Outannei s ie de Vouvry l Figl. Coupe du: flanc gauche de la Vallée du Rhône | | ra Linleux S-fT a Chalavernayre GE Armone (Plane fouche } D Fig.2. Coupe du flanc droit MÉDIANES de Pointe do Cercle Cours de la Prance Ten d'Aulph RFC E sue Es DEEE KKNNSE PE Lpr) © 7 3 Bas de Thex la Vallée de la Dran + (Les Préalpes médianes d'après M.Renevier) | | ce du Biot Tavaneuse D ani Fe de Nantaux AC Vouvr » ———— TN Molasse. : É MASSIF PAT trim. Echelle : EAN = Bouveret DE Arvoriar tènte Lonre Le DIN 17 Péri 002, arc Lines BRÊCHE Lea Hautforte awût ] NWo. Moillovio AV'évearr_dle La Her SE. Aéneute_ cle ler Her ui en ET OS ÆeSerre __ Tome L ___ PUXT_ 77 Férrier LIO0Z. au Val d'llliez SSE. et Champ lon LE ® Val d ‘ Jlliez Brèche A nferieure A \ LUS ne R —— À à RE Sn Rite Ÿ RO à = = LES = is tua De - en — Fig. # Environs de Taninges È is à $ RS ji = LR N S à S AS: es Suets Se à É $ Roc.d'Avonnez 5 NT N De R s A sas 3 56 à O NS K pe L Î 2e = J TRE 5 î y (4 # 3 Pa 1 A Ÿ 4 UE Z | Note de M Maurice LUGEON. Dent du Midi 2-7" Sx6om (. Coupe du massif de la Brèche et de la Zone interne des Préalpes, Pli couché de la Dent du Midi 7 | \ n 11 Pointe dé l'Haut 2186 TR ur TE 2) 4 Ver 10 à Hautdu Val a 7 supo Méde Culot : 5% Val d '{iez n_— V7 Morgins APN L'ENT so < VELPP = à. CT 2 Ce, = = F al de Lio À > Be, jy Lens cé F2 UE x» \ Zone interne des Préalpes nt LA 5 5 Montagne des Gets ÿ MPALE La Tourne $ Ÿ La Rosière ro i S & : à = À. : F LI $” < à : Ê Ÿ | & à & S THON MES“ 1 ‘ LT Brèche supérieur & S < E Son, UE ardoisions | = PS RC A PR TT urs = rèc srieu = » Brè inférie —û ——— istes s —ks rmhedux, FN TRS Crétacé) (débris de Préa, ra =" la _ frites BESRRES à | =? méd, | Echelle 0 000 = : L: = ROSE Zome 1 PET 17 Féonier 4902. Fig. 2. Coupe du Val de Morëins au Val d'Illiez NN. SSE, Le Corbeau ; Sur la Fbinte Val de Morgins 1904 nef Champ long Es - pot jun cu tes Fr s TS >... à > Li = Val d''{lliex & rieur =. - #7 Savoloyres Brache 72 "= nn Tres LeS LEE neu le HE oute p ” CEE: —— > : re = = put t cr > Ê TR x SP 3 (An < Î Z fly ONE KO Morgins + ÆVWiveau. de la Mer … Fig. # Environs de Taninÿos £SE 0 £. è È y te 1544 à Ë — RER FT ; TChantemerle NT PEL Fi a <'f pl fi / CAN = i Ÿ PAR Roc des Sueta ÿq x | # Hoc.d'Avonnoz > DE ,, pi : 11 CO La ue, , À EPA A #22 Cru < ET | 4 — ) NS: Lies svp A LM Fe . À Elar int! d = en | ue La ve, % À ut Plis autohtones a = Bulletin de la Socéte géologique de France Note de M.Maurice LUGEON LES RE lome Le PLXVI= 17 Févr er 1902. pa Coupes a travers le versant nord des Alpes de la Suisse centrale et orientale dans l'hypothèse des grands plis couchés vers le nord dapres les travaux de MM .Escher de la Linth,Moesch,A.Heim et M.Lugeon. Nord e Mademser ronal Weisstannerthal __ — = — Churlirsten Chaine du _— J ASentis Lac de Wälenstadt S'Johann Figi . Vallce du Rluin N W'erssg'andstock LD Spitz merlen Matbstock Dieter. Vallee du lin ; E— Cemslayrstock a Col de Pragel Märenberg x 1 © Dr -usberg 1 Sand: lp r. LL où Urnerboden, oise | Silberen Up KL luberg mes SS Silthal Fi6.3 > Ve Higi Hoch Fluh 10.4 EN Brunnen { ES LAS 4 NE de \ A Ur£fonien et ; L — > a : RS $ Se FETertiaire EE 8 Néocomien FA Vurassique FÆArias et Permien FSSchistes cristallins Crétacé sup. Echelle: ——— HANSTS PPS A EIRE 150.000 Lac des Quatre Cantons A,Nappe inférieure; B,Nappe du sommet du Glärnisch—Deyenstock—Silbern;C;Nappe supérieure. Maurice Lugeon del. ERP nee ee lerla02, eV , Tome T[,PIXVI, 17 F LRocheron del. 2 }Tome I, PLXVI, 17 Février190 érie 4S de Lhesheron LUCERNES. Note de M.Maurice LUGEON Bulletm de la Societé _geologique de France. ës F À El E +\TF TF : é d un ki EF ++ Î Ga Û à ! cs u si 5 N ice LUGEO CARTE STRUCTURALE des ALPES de SAVOIE et de la SUISSE par Maur .000 Le Echelle: 750 sop Soddoy sep saddoy ÿ Q ET 8 : 5 à ÿ— S à Fi à ÿ À Si S S Se Ed SR FR Ha S à Ë Di 3 FA 3 EX à ST ÿ à à Se À Si S. + À RS à CE a SOULIJLO SAIIDA 1 des Préalpes . 5 À SHULLIQUR ODAI samnovi Sep Sedo 7727772 gs À * < Gun À $ S F] à S à er Q S ES % RS à TS S SON = (ll L Terrains en place ouparticipant aux grands plis des regions gneissiques. + + + Grandes étendues de Flysch des régions en place. des Diablerets. AE À à ‘ii à si S VAS > 2 li: MNT È side È S LS à È PE PS Gneiss et granite. Épars coréenne î + PE d'Ivree. | À l: ja f ET + rh Pa; Séance du 9 Septembre 1907 à Morzine : ue ï LuGroN. — Compte-rendu de l’excursion du 8 septembre . . . . : 906-509 uns = UbSerpations 40 Vo ii. ere - 2908 LuUGEOoN. — Compte-rendu. de nee dus 9 ‘séntenibre (4 fig. dans le texte) . ue É 1, CORO7A3-714 YMOND, STENMANN, Écumrvr, dues Bo 2 Obsehvutions 713-714-95 Séance du 11 Septembre r901 à Taninge : Lucson. — Compte-rendu de l’excursion du 10 septembre . 2. g16 In. — Id. id. I1 id. He 716-713-718 Révir, Douxamtr, Douvicré, - Observations =.) Nu “77-718 LE Carez, RÉVIL, Luceow. — Allocutions. . 55 PPS RRR TL Se “719-720 H. Preiswerx. — Note sur le Rhétien et. Le Lis % Da “de Coux {Val LR des bg dans lé tEvte) ETES ARE 72%) Maurice LuGEoN. — Les grandes nappes de recouvrement des es Fe Tables, ele... JR RIRE AR men e e robn) Le Scarctoite Géant L. MÉMIN. ECLOGÆ GEOLOGICÆ. HELVETIZÆ à ner a ä 5 . _ Recueil périodique de la Société géologique suisse, publié un son Président. — Périodicité irrégulière ; 3 à 4 Brass Ph à par an. — Contient annuellement, outre les été, une Revue géologique suisse et des Noticés: ou wi, ‘oires d'amplitude variée, souvent avec planches, ou set Sdans le texte. Fa Pas d'abounement proprement dit: pour recevoir ce : Recueil s'inscrire comme Membre de la Societe géologique : | suisse el payer la cotisation annuelle de 9 franes. M. E. Renevier, pro Univer= CHRPAELE ie adresser au ANNE Chablais et de la Suisse (x4 fig. dans Le texte, PL XIV-XVIT). . 753 F 3 25 ex. | 30 ex. | 7ü ex. | 100 ex. [0e Une feuille entière. x 30 |8fr 20 |rofr 10 rat Rs xger a 19 of 2 | Trois quarts de feuille 8 80] 9 80/12" 60 ne Une demi-feuille. …. APR D ON 1) 90 10 Un quart de feuille... DUEO 10! 6 96/7. | Un huitième de feuille .…. ( 45 d « 1o|°5 Couverture spée. avec titre.|4 FE 50[ 7 25| 8 tr TABLE DES MATIÈRES (FASCICULE 5, TO] Compte-rendu de la Réunion extraordinaire de da Sücié _ sanneet dans le Chablais en 1901 : M rte des membres ayant assisté à la nan “Programme des ERCUPSLONS RS ER Documents à BOTSUUTEIS PEAR TRE ME _ Séance du 3 Septembre 1901 à Lausanne : én CAREZ. — Allocution , . EN _Constilution du Bureau :. . , .. .. LME ARES ‘E: RENEVIER, — Akocution: : ... . . . . dés Ne PE L: Caruz. — Nécrologie : M. de Du. — Présentation Proclamation d'un nouveau mernbre : M. E, JORISSEN. | Maurice LUGrON. . — Allucution . RD ARR Er ne RSA _ Séance du Septembre 1901 à à Champéry : 5 ÿ nn LUGEON. -— + Compte-rendu de- L'exeursion du ü septembre Glig NE le texte) . è à D. — Comple- rendu- -de lenbarsion du 4. seplembre (a ig PES TERLE ARTS RC Re RSS 5 H. FÉES Douxamr. — and : M: Luexon. — Compte-rendu de l’excursion du 5 se nnne H Douviiré, E HAUG, DouxAMI, STRINMANN. — - Observations. . Séance du 7 Septembre 1901 à. Thonon : + : Eh M. HAS CORRE de l'excursion du septembre i — a ANA id. Cx FES LISTE DES OUVRAGES REÇUS EN DON OÙ EN ÉCHANGE PAR LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE Supplément au tome 1°" du Bulletin de la Société Géologique de France. à ABRÉVIATIONS Abh. — Abhandlungen. Ac. — Academie, Accademia, Akademie, Academy, etc. AFAS — Association française pour l’avancement des Sciences Ain — Américain, America, American. Ann — Annales, Annali, Annalen, Annuel, Annual, etc. Arch — Archives, Archiv, Archivà, etc. Bd — Baud. B. S — Bulletin de la Société, Bollettino della Società(B. — Bulletin, etc.). Bur — Bureau. C. G. À — Service de la carte géologique de l'Algérie. C. G.F. — Service de la carte géologique de France. CAGE — Congrès géologique international. CR. — Compte Rendu (RC. — Rendiconti). D. — Deutsch. Dep' — Département, Department. ng. — English. Erdk. — Erdkunde. Ergh. — Ergänzungsheft. Fasc — Fascicule (Hf. — Heft). Er. — France, de France, Français. Geog — Géographie, ique, isch, y, ical, ià, etc. Geol. — Géologie, ique, ià, isch, y, ieal, etc. Ges — Gesellschaft. H. N — Histoire Naturelle, Historia Natural. hgg. — herausgegeben. I. — Impérial (K. K. — Impérial et royal). Inst — Institut(Gion). It. — Jialià. Jahrb. — Jahrbuch. Jahrber. — Jahresbericht. Jahrg. — Jahrgang. Journ. — Journal. Mag. — Magazine. Mitt. — Mitteilungen. Nat. — Nature(l), Naturaliste (N. H. — Natural History). Nat. — National (Nac. — Nacional). Ost. — Osterreich (Autriche, Autrichien). Philos. — Philosophical. Proc. — Proceedings. R. — Royal, Regal, Reichs, ete. (K. K. — lmpérial et royal). Rec. — Records. Rep. — Report. Repub. — République, Republica, etc. SC. — Sciences, tifique, zà (Ci. =- Ciencia), etc. Schr. — Schriften. Sitzher. — Sitzungsberichte. Soc. — Société, Società, Sociedad, Society, ete. Trans. — Transactions. U.S. Geol. Surv. — United States Geological Survey. Ung — Ungarn (Hongrie, Hongrois, etc.). Ver. — Verein. Verh. — Verhandlungen. Wiss. — (der) Wissenschaft(en), wissenschaftlich, ete. Zeitsch. — Zeitschrift. Zool. — Zoologie, y, ique, isch, etc. Exemple : Philadelphie. Journ. Ac. of Natural Sc., (2), XII, 1, 1898. — Lisez : Journal of the Academy of Natural Sciences at Philadelphy, 2° série, tome XII, N° 1, 1898. PISTE CDS MOUMRAGES REÇUS EN DON OU EN ÉCHANGE SOCIÉRE CL OBOGIQUEMDEMAERANCE Séance du 21 Janvier 1901 1° NON PÉRIODIQUES Angelis d'Ossat (G. de). Congresso geologico internationale, VIII Sessione : 1900, Parigi. Ex. B. S. Geog. italiana, fase. 12, 1900, 8°, 7 p. Rome, 1900. — Relazione del Congresso Geol. internat., VIII Sessione ; 1900, Parigi. Ex. B.S. Geol. italiana, vol. XIX, fase. 3 (p. cxxx-cxL). Rome, 1900. Almera (D: D. Jaime). Sobre el Mapa geol. de Terrasa por D. Domingo Palet y Barba y la Memoria que le acompaña. Ex. Bol. R. Ac. de Ci. y Arts de Barcelona, oct. 1899, 4°, 3 p. ._ — Sobre el desenbrimiento de la fauna de Saint-Cassian en el Trias de nuestra Provincia. Ex. Id., oct. 1899, 4°, 4 p. — Sobre las especies Acerotherium Lemanense, Mastodon longirostris y un Elephas descobiertos en esta provincia de Barce- lona. Ex. Id., oct. 1899, 4°, 3 p. s Bodenbeuder (D: Guillermo). Los Minerales su descripciôn y anälisis con especialidad de los existentes en la Repub. Argentina. In-12, 306 p. Cordoba (R. A.), 1899. — Comunicationes Mineras y Mineralôgicas. Ex. Bol. Ac. Nac. de Ci. de Cérdoba, t. XVI, p. 206 et suiv., 8°, 42 p. (1900). Bureau (L. et Ed.). Notice sur la Géol. de la Loire-Inférieure. Ex. de «Nantes et la Loire-Inférieure », t. III, 8°, 522 p., 3 pl., r ‘carte géol. Nantes, 1900. Choffat (P.). Aperçu sur la Géol. du Portugal. Ex. de «Le Portugal au point de vue agricole », gr. 4°,48 p.,1 pl. de coupes coloriées. Lisbonne, 1900. Forster (D' Adolf E.). Verzeichnis von Photographien aus Osterreich-Ungarn. Petit 4°, 32 p. Vienne (Autriche), 1899. Glangeaud(Ph.). Les terrains secondaires de l’Aquitaine. Ex. du Livret-Guide C. G. L., 28 p., fig. dans le texte, pl. coloriée. Paris, 1900. — L'enseignement de la Minéralogie à la Faculté des Sciences de Clermont-Ferrand.— Lecon d'ouverture. 8, 14 p. Clermont, 1899. DONS. — SÉANCE DU 21 JANVIER 1QO01 ES — Le volcan de Gravenoire et les sources minérales de Royat. Ex. CR. Ac. Sc., 3 p., juin 1900. — Les minéraux du Crétacé de l’Aquitaine. Ex. Id., 3 p. — Les faciès et les conditions de dépôt du Turonien de l’Aqui- taine. Ex. Id., 3 p., décembre 1899. Koch (D' Anton). Die Tertiarbildungen des Beckens der Sieben- bürgischen Landestheïle. II, Neogen Abtheïlung. Gr. 8, 370 p., fig. dans le texte, 2 pl. de coupes coloriées. Budapest, 1900. Müllner (Johann). Die Seen aus Reschen-Scheidek. — Eine limno- logische Studie. Ex. Geog. Abh. hgg. von Prof. A. Penck, in Wien, Bd. VII, Hf. 1, gr. 8°, 45 p., 2 pl. doubles. Vienne (Autriche), 1900. Nagele (E.). Verlags-Verzeichniss der E. Schweizerbast's schen Verlags handlung (1826-1901). 8’, 121 p. Stuttgard, 1901. Neuburger (H.). Quelques Notes sur le Pétrole dans le départe- ment d'Oran (Réunion d'Etudes algériennes). 8°, 26 p. Paris, 1900. Nicklès (R.). Feuille de Saint-Affrique. Ex. B. C. G. F., 8, 2 p. mai 1900. — Sur un Aptychus de Sonninia du Bajocien des environs de Nancy. Ex. B.S. Sc. de Nancy, 4 p., 2 pl. phot. Nancy, 1900. — CR. de la course du 18 août 1898 à Varangéville et à Saulxures (Réunion extraord. de la Soc. belge de géol. à Nancy et dans les Vosges). Ex. B. S. belge de Géol., t. XIII (1899), 8°, p. 107-119, fig. dans le texte. Penck (A.). Die Kiszeiten Australiens. Ex. Zeitsch. d. Gesells. für Erdkunde zu Berlin, Bd. XXXV, 1900, p. 239-286, 1 pl. double, 8°. Berlin, 1900. — Geomorphologische Studien aus der Herzegowina. Ex. Zeitsch. der D. und Ost. Alpenvereins, Jahrg. 1900, Bd. XXXI, 8°, p. 25-41, fig. dans le texte. — Die Kiszeit auf der Balkanhalbinsel. Ex.«Globus», Bd. LXX VIN, n° 9, 4°, p. 133-178, fig. dans le texte, août-septembre 1900. Péron. Au sujet du gisement d'Échinides de Maïlly-le-Château. Ex. B.S. Sc. hist. et nat. de l'Yonne (2° semestre 1898), 8°, 4 p., fig. dans le texte. Auxerre, 1900. — Etudes paléontologiques sur les terrains du département de l'Yonne : Céphalopodes et Gastropodes de l'étage Néocomien. Ex. Id. (2° sem. 1899), 153 p., 4 pl. Valette (Dom Aurélien). Note sur quelques radioles d'Echinides du Corallien inférieur du département de l'Yonne. Ex. Id. (2 sem. 1398), 30 p., 1 pl. Richter (E.). Les variations périodiques des glaciers. 5° rapport, 1899. Ex. Arch. Sc. phys. et nat. de Genève, t. X, 1900, 8°, 20 p. Genève, 1900. DONS. — SÉANCE DU 21 JANVIER 1QOT à) -Schardt (H.). Encore les « Régions exotiques ». Réplique aux attaques de M. €. Haug. Ex. B. S. vaudoise des Sc. nat., vol. XXX VI, n° 156, &, p. 147-169. Lausanne, 1900. Birkenmajer (Ludwik Antoni). Nikolaj Kopernik. (Czèsè Pierwska Studia nad Pracomi Kopernika oraz matiervaly Biogra- fitezne. 4°, 711 p. Cracovie, 1900. 2° CARTES _ Mapa topogràfico y geologico detallado de la Provincia de Barce- lona (au 40.000°) : 1° Région tertiaire (Cuenca del Rio-Foix y la Ilacuna) : 2° Région primaire (Contornos de la Capital). (Géologie, par D. Jaime Almera : topographie, par D. Eduardo Brosa). Barcelone, 1900. 3° PÉRIODIQUES France. — Charlieu. Bull. Soc. Sc. Nat. de Tarare. V, 11, 1900. Lille. Soc. Géol. du N. Ann. XXIX, 3, 1900. Lancry, Cleenewerck, Debacker : Découverte d’un navire profondément enseveli dans les sables de Dunkerque, p. 133-159. — A. Six : Analyse d’un mémoire du D: J. Lorié sur les eaux salines, ferrugineuses et alcalines de la Hollande, p. 160-172. — Leriche : Faune ichthyologique des sables à Unios et Térédines des environs d’'Epernay (Marne), p. 172-176. Paris. Ac. Sc. CR. CXXXI, 25-27, 1900 ; CXXXII, 1-2, 19017. N° °6, 1900 : A. Bresson : Sur l’âge des massifs granitiques de Cauterets et du Néouvielle (Hautes-P yrénées) et d’une partie des formations anciennes qui les bordent, p. 1255-1958. — P. Choffat : Sur le Crétacique de Mozambique, p- 1258-1260. — H. Arctowski : Les calottes glaciaires des régions antarcti- ques, p. 1260-1262. — N° 27 : Table du tome CXXX. — N°5, 1901 : M. Lugeon : Sur la découverte d’une racine des Préalpes suisses, p. 45-47. — N° 2: A. Tour- nouer : Sur le Néomylodon et sur l'animal mystérieux de la Patagonie, p.96-97. — Ann. de Géographie. X, 49, 19017. E. de Martonne : Sur la formation des cirques, p. 10-17. — La Géographie. Il, 12, 1900 ; IT, 1, 1901. N° 1, 1907 : J. Giraud : Le problème du Tanganyika, d’après M. Moore, p. 30-33. — J. Giraud : L’érosion glaciaire, d’après M. le Prof. Davis, p. 47-51. — Le Naturaliste. 331, 1900 ; 332, 1901. 331 : St. Meunier : La sédimentation souterraine, p. 281-284. — 332: P.-A.-H. Fritel : Les reptiles fossiles des environs de Paris, p. 5-9. — La Nature. 1439-1443. 1440 : P. Mougin : Le glacier de Tète-Rousse, p. 67-70. — Feuille des Jeunes Naturalistes. (4), XXXI, 1, 1901. M. Piroutet : Nouvelles stations préhistoriques aux environs de Salins et d’Arbois (Jin), p. 82-93. Che DONS. — SÉANCE DU 21 JANVIER IOOT — Soc. d’Anthropologie. Bull. (5), I, 3, 1900. — L’Anthropologie. XI, 5, 1900. — Journal de Conchyliologie. XLVITT, 4, 1900. — Revue de Paléozoologie. V, 1, r9o1. — Mém. Soc. de Spéléologie. IV, 24, 1900. — Journal des Savants. Novembre et décembre 1900. — Soc. Fr. de Minéralogie. Bull. XXIIT, 8, 1900. — Soc. botanique de Fr. Bull. (3), VI, 9, 1900. — Club Alpin Fr. Bull. mensuel. 12, 1900. Saint-Etienne. Société de l'Industrie minérale (CR. mensuels). Décembre 1900. — Bull. Soc. Ind. minérale. XIV, 4, 1900. Allemagne. — Berlin. Zeitsch. D. Geol. Ges. LIT, 3, 1900. M. Blanckenhorn : Neues zur Géologie und Paläontologie Ægyptens. II. 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Pal. 12, 1900 ; 1, 1901. 12, 1900 : F. Broili : Zur Fauna der Pachycardien-tufte der Seier Alp, p. 369- 373. — Schroeder van der Kolk : Beiträge zur Kenntniss der Gesteine aus den Molukken. III. Gesteine aus Buru, p. 373-375. — P. Oppenheim : Noch einmal über die grossen Lucinen des Macigno im Appennin, p. 375-379. — J. Leh- mann : Eigenthümliche Art von Schischtenbildung, p. 379. — X.: Wilhelm Waagen (Nekrolog). — 1, 1901 : G. Brandes : Vorläufige Mittheilung über ein Profil in Kohlen- und Gyps-Keuper bei Thale am Harz, p. 1-6. — E. Fraas : Scheinbare Glacialerscheinungen im Schônbuch nôrdlich Tübingen, p. 6-10. — E. Koken : Die Glacialerscheinungen im Schônbuch, p. 10-15. — N. Jabhrb. für Min. Geol. Pal. Fac. I, x, roor. F. von Huene : Kleine palàäontologische Mittheilungen, p. 1-9, 2 pl. — M. Schwarzmann : Zur Krystallophotogrammetrie. Exacte bildliche Darstellung, Hilfstabellen, Instrumente und Modelle, p. 9-18, 1 pl. — J.-F. Pompeckj : Aucel- len im Frankischen Jura, p. 18-36, 1 pl. — Zeitsch. für Naturwiss. F. Wiegers : Ueber Aetzungserscheinungen an Gyps, p. 267-275, 1 pl. — J. Fahrenhorst: Ueber ein Vorkommen von Dolomit bei Magdeburg, p. 275-309. Australie. — Brisbane. Queensland Geol. Surv. 82, 1900. B. Dunstan : The Permo-Carboniferous Coal Measures of Clermont and associated formations, p. 1-18, 1 carte, 6 pl. 2 Budapest. Foldtani Kôzlôny. XXX, | Autriche-Hongrie. 5-7, 1900. M. Pälfy : Neuere Beitrage zur Geologie des Cserhât, p. 177-181. — J. Kocsis : Beitràge zu den geologischen Verhältnissen der alttertiaren Schichten des Bükk-Gebirges, p. 181-185. — P. Treitz : Eintheilung der Bodenarten, p. 187-205. Belgique. — Bruxelles. Bull. Soc. belge de Géol., Pal. et Hydrologie. (2), IV, 2-3, 1900. G. Simoens : La faille d'Hoversin, p. 25-34, 1 pl. — G. Simoens : La faille de Walcourt, p. 35-38. — E. van den Broeck : Les dépôts à Iguanodons de Ber- nissart et leur transfert dans l’étage purbeckien ou aquilonien du Jurassique supérieur, p. 39-112. — M. Mourlon : L’étude des applications est le meilleur adjuvant du progrès scientifique en géologie, p. 128-132. Liège. Ann. Soc. Géol. de Belgique. XX VIT, 3, 1900. H. Buttgenbach : Description des fluorines du sol belge, p. 113-123. — H. de Dorlodot : Note sur le CR. de la session extraordinaire de la Société géolo- gique de Belgique, tenue à Hastière, à Beauraing et à Houyet, le 31 août, 1, 2 et 3 septembre 1875, p. 123-141. — H. de Dorlodot : Le calcaire carbonifère de Fonds-de-Tohaux et de la vallée de la Lesse, p. 141-224. 8 DONS. — SÉANCE DU 21 JANVIER IOO1 Canada. — Ottawa. Proc. and Trans. ofthe R. Soc. (2), V, 1899. R.-W. Ells : Canadian geological nomenclature, p. 3-39. — G.-F. Matthew : Studies on Cambrian Faunas. n°3. 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Tornquist : Researches in to the Monograptidae of the Scanian Ras - trites Beds, p. 1-5, 4 pl. — A. Hennig : Kullens kristalliniska bergarter. 2, Den postsiluriska gängformation, p. 1-34. Suisse. — Berne. Beitrage zur geol. Karte der Schweiz. 40, 1900. Th. Lorenz : Monographie des Flàscherberges, p. 1-63, 1 carte, 5 pl. Genève. Arch. Sc. phys. et nat. (4). X, 12, 1900. L. Duparc : Note sur la région cuprifère de l’extrémité N.-E. de la péninsule de Kewenaw (Lac supérieur), p. 518-539. Lausanne. Eclogae Geol. Helvetiae. VI, 5, 1900. Schardt et Sarasin : Revue géologique suisse pour l’année 1899, p. 393-450. Neufchatel. Soc. Neufchateloise des Sc. nat. Bull. XXVI, 1897-98 (1898). L. Rollier : Excursions géologiques à travers l’Ardenne, p. 59-78. — L. Rol- lier : Une poche d’Albien dans les gorges de la Reuse, p. 89-98. — L. Rollier : Note sur les surfaces des roches polies et striées par dislocation, p. 98-100. — E. Baumberger et H. Moulin : La série néocomienne à Valengin, p. 150-211. — H. Schardt : Sur l’origine des sources vauclusiennes du Mont-de-Chamblou, P. 211-230. — H. Schardt : Sur un lambeau de calcaire cénomanien dans le Néocomien de Cressier, p. 239-251. — M. de Tribolet : Auguste de Montmollin et le terrain crétacé du Jura, p. 367-387. — L. Favre : Jules Marcou, géologue, Notice bibliographique, p. 387-390. — Table générale des matières 1832-1897. 10 DONS. — SÉANCE DU {4 FÉVRIER IQOI Séance du 4 Février 1901 1° NON PÉRIODIQUES Allen (J.-A.). List of Birds collected in the district of Santa Marta, Columbia, by M. Herbert H. Smith. Ex. Bul. Amer. Museum of N. H., vol. XII, art. XIV, 8°, p. 117-183, 25 août 1900. New-York, 1900. Bensley (B.-A.). A Cranial variation in Macropus Bennetti. Ex Id., vol. XIIL, art. XIL, p. 109-110, fig. dans le texte. Bresson (A.). Sur l’âge des massifs granitiques de Gauterets et du Néouvielle (Hautes-Pyrénées), et d’une partie des formations anciennes qui les bordent. Ex. CR. Ac. Se., 24 décembre 1900, 3 p. Douxami (Henri). Etudes sur Les terrains tertiaires du Dauphiné, de la Savoie et de la Suisse occidentale. 8, 315 p., 4 pl phot., x pl. coupes, 1 carte coloriée. Lyon, 1896 (Publié chez Masson et C*, Paris). — Le Tertiaire des environs de Sainte-Croix (Jura Vaudois). Ex. Eclog. Geol. Helvetiæ, IV, janvier 1896, 8°, 5 p. — Étude géol. de la vallée de Couz et de la rive droite du Guiers-Vif. Ex. B. S. H. N. de la Savoie, 8°, 6 p. Chambéry, 1896. — La Géographie physique, son objet, sa méthode et ses appli- cations. Ex. Id., 8, 27 p. Chambéry, 1899. Douxami et Révil. Note sur les terrains tertiaires du Plateau des Déserts, près Chambéry (Savoie). Ex. Bull. S. C. G., tome X (1898-1899), n° 65, 8°, 26 p., 1 carte, fig. dans le texte. | Gidley (J.- W.). À new species of Pleistocene Horse from the staked Plains of Texas. Ex. Bull. American Museum of N. H., vol. XII, art. XII, p. 111-116, 18 août 1900, 8°, New-York, 1900. Ordonez (Ezequiel). Les volcans du Val de Santiago (Mexique). Ex. B. S. «Antonio Alzate», Mexico. 8°, p. 299-326, tome XIV, année 1899- 1900, pl. IV-IX. 2° PÉRIODIQUES France. — Asniens. Bull. Soc. Linnéenne du N. de la Fr., XV, 330, 1900. Bourg. Bull. Soc. Sc. Nat. et Archéol. de l’Ain. XXI, 4, 1900. Moulins. Rev. Sc. du Bourbonnais, janvier 1901. Guettard : Notes sur les environs de Vichy et sur la découverte des volcans éteints en Auvergne (d’après un manuscrit de 1751), p. 5-13. Paris. CR. du Congr. des Soc. Sav. de Paris et des Dép", 1900. B. Renault : Sur la diversité du travail des Bactériacées fossiles, p. 178-194. — E. Martel : Du mode de remplissage des Cavernes, p. 194-196. —- Vauthier : DONS. — SÉANCE DU 4 FÉVRIER 1001 II Régime et tracés des cours d’eau (inondations, alluvions), p. 196-234. — C.Duf- fart : Rôle de la magnétite et de l’alios dans la classification géologique du terrain landais, p. 224-220. — Vaillant : Rapport sur un travail de M. Sauvage intitulé: Les vertébrés du terrain kimméridgien sup. de Fumel (Lot-et- Garonne), p. 229-230. — Feuille des Jeunes Naturalistes. (4), XXXI, 364, r9or. — Le Naturaliste. 335, 1901. — Ann. des Mines. (9), XVIII, 10, 1900. — Ac. Sc. CR. CXXXII, 3-4, 1907. _3:F. Wallerant : De la symétrie apparente dans les cristaux, p. 178-180. — A. Lacroix : Sur l’origine de l’or de Madagascar, p. 180-182. — L. Bertrand : Sur l’âge des roches éruptives du cap d’Aggio (Alpes-Maritimes), p. 182-184. — Ph. Glangeaud : Les dômes de Saint-Cyprien (Dordogne); Sauveterre et Fumel (Lot-et-Garonne), p. 184-187. — 4: V. Paquier : Sur la présence du genre Caprina dans l’Urgonien, p. 229-231. — La Nature. 1444-1445, 1901. — Bull. de la Carte géol. de la France et des topographies sou- terraines. Bull. XI, 71-78 (1899-1900). 51: A. Lacroix : Le granite des Pyrénées et ses phénomènes de contact, p- 1-67. — 72 : G. Mouret : Aperçu sur la géologie de la partie sud-ouest du Plateau central de la France, p. 1-38, 2 pl., x carte. — 53 : Comptes-rendus des collaborateurs pour la campagne de 1899, p. 1-136. — 74: J. Roussel : Contribution à l’étude géologique des Pyrénées, p. 1-25. — 95: W. Kilian : Nouvelles observations géologiques dans les Alpes delphino-provençales, p. 1-19, 1 pl. — 76 : M. Boule : Géologie des environs d’Aurillac et observa- tions nouvelles sur le Cantal, p. 1-79, 1 pl., 1 carte. — 77 : M. Lugeon : Les dislocations des Bauges (Savoie), p. 1-12, 5 pl., 1 carte. — 78 : E. Fournier : I. Etudes sur le régime des eaux dans le Quercy depuis l’'Eocène supérieur jusqu’à l’époque actuelle, p. 1-13 ; IL. Etudes géologiques sur le Haut-Quercy, p. 14-26. Saint-Etienne. Bull. Soc. Ind. minérale. XIV, 4, 1900. Villefranche. Bull. Soc. Sc. et Arts du Beaujolais. I, 4, 1900. Allemagne. — Berlin. Sitzungsber. K. Preussischen Ak. Wiss. 39-53, 1900. V. Richtofen : Ueber Gestalt und Gliederung einer Grundlinie in der Mor- phologie Ost-Asiens, p. 888-925. — Van’t Hofï et H. van Euler-Chelpin : Unter- suchungen über die Bildungsverhältnisse der oceanischen Salzablagerungen, insbesondere des Stassfurter Salzlagers, p. 1018-1023 et p. 1142-1150. — M. Bauer : Beitrage zur Kenntniss der niederhessischen Basalte, p. 1023-1039. — Zeitsch. f. Praktische Geol. VII, 12, 1900. J. Blaas : Ueber ein Eisenerz-Vorkommen im Stubaithale, p. 369-370. — J.- H.-L. Vogt: Weitere Untersuchungen uber die Ausscheidungen von Titan- Eisenerzen in basischen Eruptivgesteinen, p. 370-382. — Ges, für Erdh. Verh. XX VII, 9-10, 1900. 12 DONS. — SÉANCE DU {4 FÉVRIER 1901 — Zeïtsch. d. Ges. für Erdk. XXX V, #4, 1900. A. Penck : Die Eiszeiten Australiens, p. 239-286, 1 carte. Gotha. Petermanns Mitt. XLVIT, r. rgo1. G. Schweinfurt : Am westlichen Rande des Nilthales zwischen Farschut et Kom Ombo, p. 1-11, 1 carte, avec profils géol. Leipzig. Erläut. zur geol. Specialkarte des Kôn. Sachsen. H. Müller : Die Erzgänge des Freiberger Bergrevieres, p. 1-350, 5 pL., 1 carte. Stuttgard. N. Jahrb. für Min. Geol. Pal. XIII, Beilage-Band, 3, 1901. J. Beykirch : Ueber den Strontianit des Munsterlandes, p. 389-434. — E. Sommerfeldt : Thermochemische und thermodynamische Methoden, ange- wandt auf des Vorgang der Bildung von Mischkristallen, p. 434-469. — K. Solger : Ueber die Benutzung der Lichttiguren geatzter Kristallflächen zur krystallographischen Bestimmung der Aetzfiguren, p. 469-506. — Centralblatt für Min. Geol. Pal. 2-3, r9o7. 2: F. v. Huene : Beitrage zur Beurtheilung der Brachiopoden, p. 33-45. — R.-V. Matteucei : Salmiac vom Vesuvkrater, p 45-43. — R.-V. Matteucci : Sil- berführender Bleiglanz vom Monta Somma, p. 47-48. — R.-V. Matteucci : Das Vorkommen des Breislakits bei der Vesuveruption von 1895-1899, p. 48-50. — 3 : A. 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