on 2 ar di on mn 9h Peer EE ésé mate . PRE er ET ne sonde er nb DO age Te — _ — EE ne AU Se Le s R le Pi HE 1 SJ "a à (] a « 5 nl 4 = « { € ( € # « el ô € & { s nl « s DS e € le AL « « « « rÔ ce CP Sc prcenb is “ # _ SES SRE DES SSSS SSS RS RÈSES 4 cs ENCRES , 27 WWE W=GibE on: lave rs) à: LR ER SR RS FT À À PAPE ST IE D'AIT BULLETIN DE LA = - s, NATIONALE D'ACCLIMA DE FRANCE BULLETIN Société Nationale d'Acelimatation de France FONDÉE LE 10 FÉVRIER 1854 RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE Par Décret du 26 février 1855 ANNÉE #90 17 = ANNÉE / : PARIS AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ tLONA l vaut DE FRANCE : (Revue des Sciences naturelles appliquées) 47 ANNÉE JANVIER 1900 SOMMAIRE + “ Extraits de la correspondance : PSE URENaRAen ee Mn. ee... ne Ne Estraits et analyses : SOUPLET. — Le dressaneide l'léphants. seu ur een, Le 26 iété ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions ne es AMteUES des articles insérés dans le Bulletin. a ——— ASS ES méme Un numéro 2 francs : pour les membres de la Société 4 fr. 50 Û ; AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACGLIMATATION DE FRANCE 41, RUE DE LILLE, 41 : PARIS ET! A LA LIBRAIRIE GERF, Â2, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les. DÉSINTECTANT , ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, Scientifiquement dérr sntrée, antage de n'être »' Toxique ni Cor Hémostatique et Stv:tique puissant. Adopté Par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et La Dlupart des Services d'Hygiene et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire, RTE LA énéneux rosif, LA Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques ct Prospectus : SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs-Bourgeois (vi-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ia ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Ni Pour ev;.r les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRESYL-JEYES. Maîson fondco en 1872 Plus do 400 Médailles ot 12 Prix d'honneur Hédaliié d'or, Prix d'ensemble, Paris 1896 AVOIT ELLIER àMANTES (S.-4.0. COUVEUSES ARTIFICIBLLES MATÉRIEL D'ÉLEVAGE Volailles de Race ŒUFS$ À COUVER Race puro do Moudan ©,988 CHIENS de chasse dresse, Bnvol franco du Catalogue {llustes. MAISON A PARIS | Lis, Fauteuils, Vitres et Appareils Mécaniques k Pour MAIL/AMDES et BLESSES DUPONT Fabtbrevetés.g.d.g. Fournisseur des Hôpitaux à PARIS 10, Rue Hautefeuille au coin de la rue Serpente 3 (près l’Ecole-ce-Médecine) #M DRE RU: Les plus hautes Récompenses aux Expos Françaises et Étrangères. M ge te ranco du Catalogne — TELEPHONE EESTI VOITURE mue au moyen de 1 ou 2 leviers. ande envoi Î SRI LES _ANEMIE, GASTRALGIE, COLIQUES NEPHRÉTQUES, GRAVELLE, ARTHRITISME RECONSTITUANTE, Hinéelntoutes kB CONVALESCENCES . SUR L'ACCLIMATATION ET L'ÉLEVAGE DES NANDOUS (RHEA AMERICANA) Lhrtes 4 EN NORMANDIE ENT par Paul UGINET (|) Les Nandous comprennent plusieurs espèces de gros Oi- seaux qui habitent les régions tempérées de l'Amérique du Sud. L'espèce la mieux connue, vulgairement appelée Autruche d'Amérique, plus petite de moitié que l’Autruche africaine, présente une teinte uniforme grisàtre, plus foncée sur le dos; le mâle a le bas du cou noir, ainsi que le devant de la poi- trine. Le Nandou à l'état sauvage est un Oiseau très farouche, mais nous verrons par la suite que l’on peut facilement l’ap- privoiser et le rendre sociable. Bien que sa course soit très rapide, il est cependant facile de le prendre, car il ne suit pas une ligne droite, il oblique fréquemment de droite à gauche. La nourriture des Nandous se compose de graines et d'herbe. Voici maintenant les renseignements recueillis pendant l'essai d’acclimatation de deux Nandous confiés à nos soins par la Sociélé d’Acclimatation au mois de mai 1896. Le sexe de ces deux animaux était présumé masculin et nous avons pu constater avec regret pour nos essais de reproduction que malheureusement il en était ainsi. Ces deux animaux, dès leur arrivée, furent enfermés dans une étable afin de les délasser de la fatigue du voyage. Au bout de trois ou quatre jours, ayant essayé de les lâcher dans un pré, nous eûmes à regretter cette tentative, car les deux Nandous, se voyant absolument libres, se livrèrent à une course vertigineuse autour de l’enclos, et finalement sau- () Communication faite en séance générale le 8 décembre 1899. Bull. Soc. nat. Accl, Fr. 1900. — 1. 2 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. tèrent un petit ruisseau large de 1*25 qui entoure la pro- priété et nous sépare de celle du voisin ; il fallut une bonne heure de course au milieu des choux, carottes et autres lé- gumes, pour reprendre nos deux fugitifs. Je résolus donc d’enfermer mes deux Nandous et de ne plus les laisser en liberté complète. Je fis faire pour mes pensionnaires un petit bracelet pour chacune de leurs pattes (ce bracelet était en cuir avec un anneau permettant d’at- tacher une entrave quelconque). Pendant une huitaine de jours, mes deux Oiseaux furent attachés au piquet au moyen d’une longue chaîne mesurant » mètres. On venait les changer de place deux fois par jour comme l’on fait pour les Vaches mises au pàaturage. Après cette semaine de captivité relativement étroite, je rendais la liberté à mes Nandous, mais craignant une nou- velle escapade, je munis mes Oiseaux d’une nouvelle entrave leur permettant de faire des enjambées de 0"50, de cette facon, il m'aurait été facile de les rattraper en cas de fuite. On trouvera peut-être ce procédé barbare, mais mon but étant de faire de mes élèves des animaux dociles et pas fa- rouches, venant à la parole et ne craignant pas les personnes chargées de leur entretien, je tenais surtout à les tenir con- finés dans l’herbage qui leur était destiné. On verra par la suite que j'ai pleinement réussi. J'oubliais de dire que mes Nandous causèrent tout d'abord une certaine frayeur aux autres animaux de la ferme, mais cela ne dura que quelques jours, ettout le monde vécut bien- tôt en très bonne intelligence. Mes Nandous restèrent pendant quatre mois avec leurs en- traves ; à cette époque, quoique farouches encore, ils ne cherchaient nullement à sortir de leur pré. Au mois de novembre, je pris la résolution d'enfermer mes deux Nandous dans un vaste local, ils se familiarisèrent avec les serviteurs de la ferme et devinrent de jour en jour moins sauvages. La nourriture de ces Oiseaux, du mois de mai au mois de novembre, consista en 250 grammes de pain par jour et par tête, plus un litre de Maïs; mais ce grain n'était d'aucune utilité pour eux, car ils ne le digéraient pas. Je joignais à cette nourriture les épluchures ménagères telles que salade, pommes de terre, etc., etc., dont ils étaient très friands ; à ACCLIMATATION ET ÉLEVAGE DES NANDOUS. 3 tout cela venait s'ajouter l'herbe qu'ils paissaient avec abon- dance. Du mois de novembre au mois de mai de l’année sui- vante, c’est-à-dire pendant l'hiver, mes pensionnaires re- curent la même nourriture que les'mois précédents, avec cette différence que le Maïs était donné cuit ; de cette facon, nous n'avions plus de déchets inutiles. Notre but étant d'élever les Nandous comme les autres ani- maux de la ferme, c’est-à-dire sans régime spécial, nous ré- solûmes de supprimer les rations journalières de grains, nous ne leur donnâmes que 250 grammes de pair tous les matins et cela pour nos deux Oiseaux. Cette distribution de pain fut continuée jusqu'au mois de juillet, et à partir de ce moment, aucune nourriture particulière ne leur fut donnée. Notre détermination de supprimer toute sorte de nourri- ture vint de la constatation que nous fimes en voyant les Nandous manger de l’herbe en grande quantité, et surtout, absorber force prunes, poires, qui tombaient des arbres dont la cour est couverte ; ces Oiseaux mangent de tous les fruits, excepté des pommes. Nous n'avons eu pendant l'été de 1897, qu'à nous louer de notre essai de domestication. Les Nandous, de moins en moins sauvages, venaient sans crainte au devant de nous, ils se laissaient même prendre par le cou, et leur plaisir alors était, tandis que nous les caressions, de chercher à nous faire reculer, chose facile pour eux qui sont doués d’une grande force. Parfois même, ils cherchaient à s'emparer de notre couvre-chef, et lorsqu'ils y parvenaient, ils se sauvaient fiers de leur conquête. Au mois de novembre nous avons enfermé nos deux Nan- dous, et nous résolümes, pour compléter nos essais d’accli- matation, de les nourrir comme les Vaches de notre ferme; nous leur donnâmes 20 livres de betteraves {coupées au coupe-racines), et nous eùmes la satisfaction de les voir très friands de cette nouvelle nourriture; ils passèrent ainsi l'hiver en stabulation, ne recevant uniquement que des bette- raves. Notre excellent collègue, M. Debreuil, peut attester leur parfait état, car il a recu un de ces Nandous mâles, qui venait de passer l'hiver au régime cité plus haut. Notre but était donc atteint, nous sommes parvenus à nourrir les Nandous comme les autres animaux de la ferme, 4 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. sans aucuns frais supplémentaires. De cette facon, l'élevage de ces Oiseaux devient pratique et rémunérateur, puisque la nourriture consiste, l'été, en herbe consommée au pâturage libre ; de préférence dans un pré contenant des arbres frui- tiers afin de faire profiter les Nandous du glanage des fruits ; et l'hiver, en une distribution de betteraves. Voilà les résultats obtenus pour l’acclimatation ; malheu- reusement nous n’avons pu, bien à regret, nous occuper de la reproduction, nos deux sujets étant des mâles. Nous espérons toutefois que l’année 1899 sera pour nous plus intéressante, car, grâce à l’amabilité de M. le Secrétaire général de la Sociélé d’Acclimatalion, nous avons pu entrer en relations avec un de nos collègues, M. Debreuil, qui a bien voulu échanger un Nandou femelle contre un de nos mâles. Actuellement (28 juin 1899) cette femelle, habituée depuis longtemps à la captivité chez M. Debreuil, a déjà pondu qua- torze œufs,et notre mâle couve d’une facon suivie les dix œufs que nous lui avons confiés. Nous nous ferons un devoir de poursuivre nos essais d'ac- climatation et surtout de reproduction, avec assiduité, et nous tiendrons la Société au courant des résultats que nous aurons obtenus. LE FIGUIER DE BARBARIE (OPUNTIA FICUS INDICA) ET SES VARIÉTÉS (1) par le D' WEBER, Membre du Conseil de la Société. Président de la Section de Botanique. Depuis quelques années, on s’est beaucoup occupé de l’uti- lité et surtout des qualités nutritives de l’'Opunlia ou « Cac- lus », connu sous le nom de Figuier de Barbarie ou Figuier d'Inde, qui depuis la découverte de l'Amérique a été intro- duit (2) sur le littoral de la Méditerranée et en particulier dans le nord de l'Afrique, où il nous offre un des plus remar- quables exemples d’une parfaite acclimatation. Non seulement son fruit est l’objet d’une immense consommation en Algérie et en Tunisie, ainsi qu’en Sicile et dans le Sud de l'Espagne, mais encore les rameaux charnus de diverses variétés plus ou moins inermes peuvent y servir de nourriture au bétail en cas de disette de fourrages verts. Si tout le monde est parfaitement d'accord sur la grande utilité de ces végétaux, il n’en est pas de méme de leur dé- termination scientifique ni de leurs caractères spécifiques. Quel est le nom botanique du Figuier de Barbarie ? Les di- verses formes qui sont cultivées sous ce nom, et parmi les- quelles les colons distinguent des variétés épineuses et des variétés inermes, appartiennent-elles à une même espèce ou constituent-elles des espèces distinctes ? Telles sont les questions que je voudrais essayer de ré- soudre dans la présente communication. Si l’on consulte les ouvrages classiques qui se sont occupés (1) Communication faite en séance générale le 8 décembre 1899. (2) Les Arabes donnent à la Figue de Barbarie le nom de Karmouss enn N'sarra, c’est-à-dire Figue des Nazaréens (des chrétiens), ce qui indique bien qu’ils la considèrent comme étant d’introduction récente. Les anciens auteurs arabes, antérieurs à la découverte de l’A mérique, n’en font aucune mention. 6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. de la description et de la nomenclature des diverses espèces classées dans le vaste genre Opuntia, on est forcé de consta- ter que la plus grande confusion n’a cessé de régner à ce point de vue, et que la synonymie des espèces décrites est, encore aujourd'hui, extrêmement embrouillée. Autrefois, faute de notions précises, on réunissait le plus souvent toutes les espèces, grandes ou petites, épineuses ou non épineuses, sous le nom de Cactus Opuntia. Ce nom vague et banal est encore employé de nos jours dans la plupart des livres non-scientifiques, pour désigner indifféremment toutes les espèces cultivées. Cependant déjà Linné avait senti la nécessité de distinguer plusieurs espèces. Il réserva le nom de Cactus Opuñtia à une espèce de petite taille, plus ou moins décombante ou ram- pante, originaire des États-Unis, que l'on appelle aujour- d'hui Opuntia vulgaris et qui est aussi répandue que rustique dans nos jardins. Quant aux espèces de grande taille, Linné se borna à en distinguer trois. A la première, il donna le nom de Cactus Ficus indica, par lequel il a évidemment voulu désigner le Figuier d'Inde ou de Barbarie, cultivé dans les régions médi- terranéennes. Il lui assigna comme caractère distinctif «les “épines sétacées ». Il donna le nom de Caclus Tuña à sa deuxième espèce de grande taille, qu’il différencie par « ses épines subulées ». Enfin il appelle Cactus cochenillifer une espèce qui sert à élever la Cochenille et qui se reconnait à ses articles oblongs, dépourvus d'épines et à ses fleurs rouges de forme allongée presque tubuleuse. Malheureusement la nomenclature des Opuntia de Linné a le défaut d’être plus théorique que pratique et de n'être nul- lement conforme à la réalité. Il suffit de remarquer que plu- sieurs espèces différentes servent à l'élevage de la Cochenille, et que d'autre part, celles qui produisent le fruit bien connu sous le nom de Figue de Barbarie sont loin d’avoir toujours des « épines sétacées », car elles sont souvent armées d'ai- guillons très vigoureux ; elles ne peuvent cependant étre con- fondues avec les Opuntia épineux que Linné appelle Cactus Tuna, car les fruits de ces derniers sont rouges, gorgés de suc Carmin, tandis que les véritables Figues de Barbarie sont plus ou moins jaunâtres ou jaune abricot à peine rosé, à chair jaune ou verdätre et suc incolore. LE FIGUIER DE BARBARIE. , 7 Quand on réfléchit, en outre, que généralement les grands Opuntia sont difficiles à distinguer à l’état stérile, qu'ils ne fleurissent que rarement dans nos serres, et que la plupart des auteurs, dans leurs classifications et descriptions, n’ont pu se baser que sur les caractères de la tige et des aiguillons, et non sur ceux de la fructification, on comprend qu'il en soit résulté une confusion presque inextricable. Ainsi, par exemple, on trouve dans les Plantes grasses (1) de Decandolle, sous le n° 137, deux très belles figures dues au pinceau du célèbre peintre de fleurs Redouté. La première, à fleur rose, paraît douteuse. (C’est probablement l'Opuntia nigricans, décrit vers la même époque par Haworth). Mais la seconde représente indubitablement une forme épineuse du Figuier de Barbarie, à en juger par son fruit qui est très ca- ractéristique. Or, Decandolle réunit ces deux figures, très dis- semblables, sous un seul nom, celui de Cactus cochenillifer, auquel certainement ni l’une ni l’autre n’ont aucun droit. Il est vrai que vingt-cinq ans plus tard, dans la Revue des Cactées, ainsi que dans le Tome IIT du Prodromus, Decan- dolle déclare qu'il s’est trompé, et que son prétendu Cactus cochenillifer est un Cactus Tuna. Mais là, il est encore dans l'erreur, car le fruit dont il donne une figure et une coupe excellentes, differe essentiellement de celui du Cactus Tuna et ne peut aphartenir qu’à une forme du groupe Ficus indica. Decandolle donne encore dans ses Plantes grasses, sous le n° 138, la figure d'un « Cactus Opuntia Tuna », qui n’est certainement pas l’Opuntia Tuna de la généralité des auteurs, mais doit être rapporté à l'espèce brésilienne bien connue au- jourd’hui sous le nom de Opuntia monacantha , ainsi que l’auteur l’a reconnu lui-même dans le Prodromus. En outre, dans le même ouvrage, également sous le n° 138, Decandolle donne la figure, avec fleur, d’un « Cactus Opun- lia inermis », qu'il ne faut pas confondre avec les variétés « inermes » de l’Opuntia Ficus indica, dont il diffère par sa taille beaucoup moindre et par son fruit plus petit, rouge et non comestible (2). (1) Paris, 1799 et années suivantes. (2) L'Opuntia inermis de Decandolle est d’après son propre témoignage dans le t. III du Prodromus, synonyme de l'Opuntia strict de Haworth, espèce de _ taille réduite, quoique érigée et non rampante, qui par son fruit gorgé de suc carmin se rapproche de l'Opuntia vulgaris. L'Opuntia inermis DC, connu éga- 8 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Ces exemples suffisent pour montrer dans quel état de con- fusion se trouvait la nomenclature des Opuntia pendant le premier quart du xix® siècle. En ce qui concerne le Figuier de Barbarie, dont nous avons à nous occuper spécialement ici, les auteurs l’appelaïent les uns Cactus Opuntia tout court, les autres faussement Opun- lia vulgaris, d’autres Opuntia Ficus indica, ce dernier nom désignant plus spécialement les formes glabres ou peu épi- neuses, tandis que les formes plus épineuses recevaient le nom impropre d'Opuntia Tuna, ou celui d'Opuntia maxima, qui leur était déjà donné du temps de Tournefort (1) et de Miller. En 1826, un botaniste italien, le professeur Tenore, de Naples, frappé des différences entre les Figuiers d'Inde non épineux, ordinairement cultivés dans le pays napolitain, et certains Figuiers épineux qui se trouvent également à Naples et surtout en Sicile, proposa de donner à ces derniers, carac- térisés par leurs aïiguillons blancs rigides, le nom d'Opuntia Amyclæa (du nom de l’ancienne ville romaine Amyclæ, au- jourd’hui Monticelli, où il les avait remarqués pour la pre- mière fois). Il en donna une description détaillée et une figure assez exacte, qui s'appliquent parfaitement au Figuier de Bar- barie épineux d'Algérie, tant sous le rapport des aiguillons que sous le rapport du fruit. Le nom proposé par Tenore fut adopté par tous les bota- nistes, et en particulier par Decandolle lui-même, ensuite par le prince de Salm, Pfeiffer, Lemaire, etc. Gussone, dans son excellent Synopsis de la flore de Sicile (1842), indique, comme naturalisées dans cetteile, deux es- pèces d'Opunlia : lo Op. Ficus indica, à articles peu épineux ; 2 Op. Amyclæa, à articles armés d’aiguillons blancs rigides. Ces deux espèces produisent toutes deux des fruits iden- lement sous le nom d’'Opuntia vulgaris balearica, est plus rustique que l'Opuntia Ficus indica, et est naturalisé dans le Roussillon, en Catalogne et aux Baléares, mais ne paraît pas se trouver en Algérie (?) Son fruit n’est pas, ou peu, comestible, (4) Ficus Indica, seu Opuntia maxima, folio spinoso, latissimo et longissimo. — Tournefort, Jnstitutiones rei herbarie, Paris, 1719, tome I, p. 239. LE FIGUIER DE BARBARIE. 9 tiques, du type bien connu de la Figue de Barbarie. Aux yeux de Gussone, leur parenté est très étroite, et il fait ob- server lui-même que, abstraction faite des aiguillons, elles se ressemblent tellement que la seconde semble n'être qu'une variété épineuse de la première. Mais cette dernière manière de voir n’a pas, jusqu’à pré- sent, été adoptée par les botanistes modernes. Ils consi- dèrent -tous la présence ou l’absence des aïguillons, leur nombre, leur forme, leur couleur, etc., comme des caractères essentiels sur lesquels ils basent non seulement la détermi- nation des espèces, mais encore la formation des sections dans lesquelles ils subdivisent le genre Opuntia : Grandispincsæ, Parvispinosæ, Spinosissimæ, Subinermes, Criniferæ, Al- bispinæ, Flavispinæ, Fulvispinæ, elc. Si l’on voulait se conformer à l’usage des auteurs qui font actuellement loi en la matière, il faudrait donc admettre que les Figuiers de Barbarie, cultivés dans les pays méditerra- néens, appartiennent à deux espèces distinctes, Op. Ficus Indica et Op. Amycliæa, selon qu'ils sont plus ou moins inermes, ou plus ou moins épineux. Cette opinion, quoique généralement admise, me paraît ab- solument erronée. Les formes générales des deux prétendues espèces sont les mêmes, leurs caractères botaniques propre- ment dits, c'est-à-dire la fleur et le fruit, sont à peu près identiques et doivent, à mon avis, être considérés comme les plus essentiels. Quant aux caractères tirés des épines, ils ne sont constants et ne se perpétuent que parce q'e ces végé- taux sont exclusivement multipliés par boutures. Si on fai- sait des essais de reproduction par graines, et si on suivait les plantes nées de ces semis, on verrait sans aucun doute des formes épineuses nées des graines de la forme inerme, et vice versa. Ces expériences seraient intéressantes à tenter, et je pense que la Société d’Acclimaiation devrait faire appel dans ce but à nos collègues d'Algérie ou de Tunisie. Mais, dès à présent, je puis affirmer que mon opinion est partagée par plusieurs cultivateurs ou colons expérimentés, qui m'ont certifié que, d'après leurs propres observations, les Figuiers de Barbarie « inermes » ne sont que le produit d’une sélection propagée indéfiniment par le bouturage. 10 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. A défaut d’essais directs sur les Figuiers de Barbarie, que je n’ai pas eu l’occasion d’instituer moi-même, je puis du reste citer des exemples probants, que j'ai observés sur d’autres espèces. J’ai recueilli jadis moi-même, au Mexique, des graines d’un des Opuntia les plus estimés par les Mexicains des environs de Queretaro, qui le cultivent avec soin près de leurs habita- tions, sous le nom de Tuna camuessa. Cet Opuntia, renommé pour son gros et excellent fruit rouge-sang, a d'énormes ar- ticles orbiculaires, épais et glauques, à peu près complète- mentinermes, à tel point qu’on est obligé de défendre les planta- tions par des clôtures contre le bétail qui les dévorerait infail- liblement s’il pouvait s’en approcher. Les plantes, nées de ces graines authentiquement issues d’une plante inerme, furent cultivées par mes soins, soit en France soit en Algérie, et, à mon grand étonnement, devinrent toutes extrêmement épi- neuses. Elles furent reconnues pour appartenir à l'espèce dé- crite sous le nom d'Opunlia robusta ou Op. flavicans, que les auteurs classiques (qui, tous, se copient les uns les autres) rangent dans la section des Albispinæ quoique les aiguillons soient bien plus souvent jaunes que blanchâtres. Dans le cas que je viens de citer, un Opuntia inerme a donné naissance à des semis épineux. Mais quelquefois c'est l'inverse. En 1898, je reçus, des environs d'Acapulco, des échantillons secs, avec fruits, d’un petit Opuntia rampant,que les indigènes appellent Tuna del Suelo (du sol), et qui était hérissé de longs aiguillons acérés blancs. J'étais persuadé que c'était une espèce nouvelle ; maïs l’année suivante, je cons- tatai, non sans surprise, que les plantes nées de ces graines étaient absolument inermes et n'étaient autre chose que l'Opuntia decumbens, introduit dès 1830, et rangé par les au- teurs classiques dans la section des Subinermes, où je n'aurais certes pas eu l’idée de chercher une plante aussi épineuse. Dans d’autres genres de la famille des Cactées, on peut ob- server des faits analogues. Un des grands Cereus les plus fréquemment plantés dans l'Amérique du Sud, pour son fruit comestible semblable à une très grosse prune rouge à chair blanche, le Cereus Jaïnacaru, est ordinairement armé d’ai- guillons vigoureux. Mais on trouve aux Antilles et au Vene- zuela une forme inerme, décrite comme espèce distincte sous le nom de Cereus lepidotus. Au Brésil, il y a également une LE FIGUIER DE BARBARIE. A1 forme inerme, probablement identique à la précédente, et dé- crite sous le nom de Cereus Hildmannianus. Nous avons recu, il y a quelques années, de la Guadeloupe, des graines et des plantes vivantes absolument inermes du Cereus lepi- dotus. Eh bien, les jeunes plantes nées de ces graines sont aussi épineuses que des semis de Cereus Jamacaru, dont il est jusqu’à présent impossible de les distinguer. Ces exemples suftiront pour démontrer combien les carac- tères tirés des aiguillons sont variables, et combien les classi- fications basées sur eux sont vaines et fausses. Pour en revenir à nos Figuiers de Barbarie, épineux ou non, je propose donc de les considérer tous, jusqu’à preuve contraire, comme appartenant à une espèce unique, à laquelle revient tout naturellement le nom linnéen d'Opuntia Ficus indica. On pourra subdiviser l'espèce en deux variétés : 1° var. inermis ; 2 var. armata. Mais il sera souvent diffi- cile, pour certaines formes intermédiaires, de les ranger avec précision dans l’une ou dans l’autre variété. Elles auront toutes un caractère commun, c’est le fruit: À fruclibus eorum cognoscelis e0S. Je dois ajouter que, sans doute, c’est faute de renseigne- ments précis que le professeur Tenore, et d’après lui Gus- sone, ont dit que les fruits de l’Opuntia épineux qu'ils appellent Amyciæa, sont plus petits et moins savoureux que ceux du Figuier d'Inde « noble » (Tenore) ou inerme. Je sais de source certaine qu’en Algérie les fruits des formes épi- neuses ne sont pas moins recherchés et estimés que ceux des formes inermes, qui sont du reste moins répandus. Nos col- lègues algériens pourront encore nous renseigner exactement sur ce point, et tous les détails qu'ils voudront bien nous fournir à cet égard, seront reçus avec reconnaissance. Au Mexique, on cultive un assez grand nombre d'Oyuntia de diverses espèces, et particulièrement certaines variétés obtenues par une sélection continuée pendant une série de siècles. Il est, en effet, hors de doute que les anciens Mexi- cains cultivaient le Nopal ou Cpuntia depuis les temps les plus reculés. La plupart de ces variétés, spécialement recher- chées, semblent appartenir au groupe des Ficus indica, par exemple celles qui portent les noms de Tuna de Castilla, Al- 12 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. fajayuca, Mansa, Amarilla, Blanca, Verde, Pelona, Tem- pranilla, etc. D’autres constituent des espèces distinctes, par exemple la célèbre Tuna Cardona (1) de San Luis Potosi (Opuntia Cardona Web.), la Tuna camuessa de Queretaro (Opuntia robusla var. inermis), la Duraznilla, c'est-à-dire petite pêche (Opuntia leucotricha), etc. Malheureusement tous ces différents types, qui font au Mexique l’objet d’une immense consommation, sont encore très imparfaitement connus chez nous. Les graines qui ont été rapportées par différents explorateurs, ont généralement donné des plantes plus ou moins différentes des variétés de choix cultivées au Mexique ; celles-ci ne pourront être intro- duites, avec leurs qualités natives, que par l’envoi de plantes vivantes ou de boutures. C'est dans ce sens que les voyageurs et les acclimateurs devront diriger leurs efforts. (1) L'Opuntia Cardona n'est pas synonyme d'Opuntia streptacantha Lem., comme je l’ai dit ailleurs, par erreur. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. SÉANCE GÉNÉRALE DU 8 DÉCEMBRE 1899. PRÉSIDENCE DE M. WEBER, MEMBRE DU CONSEIL. Le procès-verbal de la dernière séance de la session ayant été, suivant l'usage, soumis à l'approbation du Conseil, il n’en est pas donné lecture. Décisions pu CoNsEIz. Dans sa séance du 5 juillet 1899, le Conseil a décidé d'offrir à la Chambre de Commerce de Paris, dont la Bibliothèque a été récemment détruite par un incendie, le plus grand nombre possible de volumes du Bulletin, le Manuel de l’Acclimateur de Charies Naudin et divers autres ouvrages en double dont la Société peut disposer. MM. de Guerne, Mersey et Raveret-Wattel ont été délégués pour représenter la Sociélé au Congrès d’Aquiculture et de Pêche réuni à Biarritz-Bayonne du 25 au 31 juillet sous la présidence de M. Georges Roché. MM. Canu, Debreuil et Maurice Lonquéty ont été délégués, d'autre part, pour représenter la Sociélé au Congrès de l’As- sociation française pour l'avancement des sciences réuni à Boulogne-sur-Mer dans les derniers jours du mois de sep- tembre, sous la présidence de M. le professeur Brouardel. PROCLAMATION DE NOUVEAUX MEMBRES. M. le Président proclame les noms des Membres admis par le Conseil depuis la dernière séance générale : MM. PRÉSENTATEURS. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. À. Milne-Edwards. AMHERST (Lady Florence), Didlington Hall, Brandon, Norfolk (Angleterre). MM. BARRAU DE MURATEL (Émile DE), docteur en médecine, La Sabartarié, par Castres (Tarn). BEGOUEN (Vicomte), Les He par Saint- Girons (Ariège). BESSON, horticulteur, 178, rue de France, à Nice (Alpes-Maritimes). directeur de la Kherson BRAUNER (Alexandre), Banque, rue de Gimnose, (Russie). La Vauzx (Comte Henry DE), 122, avenue des Champs-Élysées, Paris. LEPRINCE (D'), 24, rue Singer, à Paris. Maire (Joseph-Paul-Émile), inspecteur des Eaux et Forêts, 102, rue de Vau- girard, Paris. Mayer (Nicolas), villa Marthe, chemin des Baumettes, Nice (Alpes-Maritimes). PETROCOKINO (E.), négociant, rue Grecque, Odessa (Russie). LEMOINE, à Croissy (Seine-et-Oise). | brigade du cadre de réserve, 33, rue de ROTHWILLER (Baron Ernest), général ” Berri, Paris. Les institutions suivantes sont également admises comme Membres de la Soctiélé : JARDIN BOTANIQUE, Saïgon (Cochinchine). ; MISSION PROTESTANTE FRANÇAISE, Fiana - rantsoa (Betsileo), Madagascar. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. PRÉSENTATEURS. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. Raveret-Wattel. Baron J. de Guerne. Oustalet. Wacquez. Baron J. de Guerne. Roland-Gosselin. Weber. Général de Depp. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. Milne-Edwards. Baron J. de Guerne. Oustalet. Baron J. de Guerne. De Lamarche. Le Myÿre de Vilers. { De Lamarche. A. Odin. Raveret-Wattel. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. L. Mersey. Abbé Charruaud. Debreuil. Mérel. Général de Depp. : Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. D' Weber. Baron J. de Guerne. Imbert. Le Myre de Vilers. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. Milhe-Poutingon. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 15 DÉPOUILLEMENT DE LA CORRESPONDANCE. En l'absence de M. Mérel, secrétaire des séances, qui s’ex- cuse de ne pouvoir assister à la réunion, M. le Secrétaire général procède au dépouillement de la correspondance. Il fait d'abord observer que la dernière séance de la Société, postérieure à la séance générale ordinaire du 26 mai, a été en réalité la séance publique annuelle, dans laquelle a eu lieu la distribution des récompenses. Cette réunion a été tenue le 25 juin 1899, sous la présidence de M. Binger, Membre du Conseil, Directeur des affaires d’Afrique au Ministère des Co- lonies, ayant pour assesseurs M. Camille Guy, représentant le Ministre des Colonies, et M. le D' Ballay, Gouverneur de la Guinée française. On sait que le caractère de cette séance était particulièrement colonial et qu’une conférence avec pro- jections y a été faite par M. Dybowski, Directeur du Jardin colonial de Vincennes. Une très volumineuse correspondance a été la conséquence de cette séance; il est sans intérêt d’énu- mérer ici les remerciements adressés à la Société par les lauréats ainsi que par les différentes personnes qui avaient été invitées à assister à la distribution des récompenses. Les travaux de la Sociélé sont effectivement repris depuis le mois d'octobre, deux petites Expositions d'Oiseaux et de Plantes, les 4 et 5° de la série inaugurée en mars, ayant eu lieu les 21-23 octobre et les 10 et 11 novembre. M. le Secrétaire général rappelle à ce propos que la 6° et dernière de ces Expositions s'organise en ce moment. Elle comprendra de petits Échassiers et de petits Palmipèdes, des fruits et des légumes exotiques. Ce sera sans doute l’une des plus intéressantes de la série. Enfin, avant de donner connaissance des lettres les plus importantes recues pendant la période des vacances, M. le Secrétaire général fait observer qu'il en sera négligé un très grand nombre relatives à de simples demandes de renseigne- ments, envois de graines, remerciements, etc. De même, l’ordre du jour de cette séance de rentrée étant fort chargé, il ne sera pas question aujourd’hui des divers Congrès auxquels la Société d'Acclimalation a été repré- sentée par des délégués qui ont — (ous sans exceplion — ce qui est un fait rare, rempli le mandat dont ils étaient investisd 16 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Notifications, renseignements, avis divers, généra- lités. — Depuis la dernière séance, la Sociélé a recu avis du décès de MM. le pasteur Henry Paumier, le comte de Rien- court, J.-R. Goubie, l'artiste bien connu si habile à peindre les Oiseaux, Maurice de Barrau de Muratel. La Société a éprouvé une perte très sensible en la personne de M. Henry Lévêque de Vilmorin, décédé le 23 août, qui dirigea pendant longtemps, avec la plus grande autorité, les travaux de la Section de Botanique, qui fut Membre du Con- seil et Vice-Président de la Société. M. François Decaux, Vice-Président de la Section d'Ento- mologie, s’est éteint le 13 août, après une longue maladie. Bien que ce décès soit survenu en pleines vacances, M. le Secrétaire général, de passage à Paris, a pu représenter la Société aux funérailles de ce collègue dévoué et dont le Bulletin à publié un grand nombre de travaux. Enfin, tout récemment, vient encore de disparaître M. le baron d'Hamonville (fin novembre 1899). Bien connu par ses travaux ornithologiques et par l'intérêt qu’il portait à la pro- tection des Oiseaux utiles, il était délégué de la Société d’Ac- climatation, à laquelle il a rendu dans maintes circonstances de très réels services. — M. Alexandre Besson remercie de son admission. — M. le Ministre de l'Instruction publique, à la date du 28 novembre, rappelle une circulaire antérieure invitant toutes les Sociétés savantes de France à lui fournir des renseignements statistiques, bibliographiques et historiques en vue de la participation de ces Sociétés à l'Exposition universelle de 1900. Un espace leur sera réservé dans les locaux affectés à la classe 3 (Enseignement supérieur). — M. le Ministre de l'Agriculture informe M. le Président qu’il met à la disposition de la Société une médaille d’or grand module pour être donnée en prix au nom du Gouvernement pendant l’année 1900. — M.F. Sikora, naturaliste chargé par le Gouvernement autrichien d’une mission scientifique à Madagascar, envoie la liste des photographies concernant la zoologie et la bota- nique prises par lui en ce pays et qui peuvent intéresser les ES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 17 Membres de la Société d’Acclimatation. La dimension et le prix des épreuves sont indiqués sur un catalogue imprimé. Mammifères. — M. A. Guesde écrit de la Guadeloupe que la Chambre d'agriculture de la Pointe-à-Pitre, dont il est se- crétaire, l'a chargé d'introduire dans la colonie le Hérisson, qu’elle considère comme un auxiliaire utile pour la destruc- tion des Insectes. Les plantations semblent être, en effet, de plus en plus ravagées depuis que la Mangouste, importée à la Guadeloupe pour détruire les Rats, s’est livrée à la chasse des ennemis naturels des Insectes, comme les Lézards et les petits Oiseaux, dont elle détruit, soit les œufs, soit les jeunes couvées. — M. Paul Serre adresse de San Francisco une notice sur les Phoques considérés comme nuisibles au développement des Saumons. Ces Carnassiers aquatiques se nourrissent presque exclusivement de ces Poissons, dont ils font une des- truction considérable. La lettre de M. Serre sera insérée au Bulletin. Ornithologie, Aviculture.— Lady Florence Amherst (Mb) demande des renseignements sur les Poules de la race Braekel, dont elle désirerait connaître les points caractéris- tiques. Elle voudrait également connaître de bons éleveurs de cette race. — M. H. Mesnier, commissaire du Gouvernement francais à l'Exposition d’Aviculture de Saint-Pétersbourg, annonce que la Société d'Acclimatation a reçu. à l'occasion de cette Ex- position, un diplôme d'honneur pour l’ensemble de ses publi: cations d’Ornithologie et d’Aviculture théorique et pratique. — M. Charles Couvreux (Mb), délégué par le Conseil pour représenter la Sociélé à l'Exposition internationale et au Con- grès d'Aviculture organisés à Saint-Pétersbourg au mois de mai dernier, envoie une nombreuse série de documents im- primés concernant ce Congrès et cette Exposition. Il en sera tiré parti pour donner une idée d'ensemble du Congrès, en particulier, lequel a été fort intéressant. — M. Chaneac demande des renseignements au sujet de la création d'un élevage de volailles qu'il se propose d'établir à Aurec (Haute-Loire). Il demande en outre des renseigne- Bull. Soc. nat, Accl. Fr. 1900. — 2. 18 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. ments sur les couveuses artificielles dont il désire faire l’ac- quisition. Aquiculture. — M. Serre, dans la lettre précitée, signale la découverte, aux Etats-Unis, d'un Batracien remarquable, vivant dans les eaux souterraines à San-Marcos (Texas). Il envoie le dessin, de grandeur naturelle, de cet animal, type d’un genre nouveau qui a recu le nom de Typhlomolge Rathbuni. Un exemplaire de ce Batracien singulier est actuel- lement vivant dans l'aquarium de l’Institution Smithsonienne à Washington (15 juin 1899). — M. F. Troussier demande des renseignements pour ar- river à peupler de Truites arc-en-ciel un petit étang dont il est propriétaire à Allevard-les-Bains (Isère). Par les soins de M. le Secrétaire général, M. Troussier a été mis en rapports avec M. le comte de Galbert, délégué de la Société d’Accli- matation à Grenoble, et qui est précisément un excellent pisciculteur. Entomologie. — M. Pilastre (Mb) demande des renseigne- ments sur des Insectes qui causent de grands dégats dans un bois de Pins de sa propriété de Jalmain (Seine-et-Marne). Sur l'invitation qui lui en a été faite par M. le Secrétaire gé- néral, M. Pilastre a adressé à la Société des échantillons de ces Insectes à différents états de développement, ainsi que des fragments de bois attaqué par eux. L'envoi a été soumis à l'examen de M. Marchal, secrétaire de la Section d'Ento- mologie. Il s’agit d'Hyménoptères du groupe des Tenthredes (Lophirus pini). M. Marchal conseille divers modes de des- truction. La note qu'il a bien voulu rédiger pour M. Pilastre ayant un caractère d'intérêt général, sera publiée au Bullelin. — M. Maisonneuve (Mb), pharmacien à Nantes, proteste contre l'usage, recommandé peut-être un peu légèrement, du cyanure de potassium pour la destruction des Altises de la Vigne. Une note très complète rédigée par lui à ce sujet, et où il est également traité d'autres GÉURES. sera publiée dans le Bulletin. .. Botanique — Culture. — M. le Dr Harmand, Ministre de France à Tokio, adresse, par l'intermédiaire du Ministre-des Affaires étrangères, une notice de M. Ernest Sallow sur la culture du Bambou au Japon. — Renvoi à la Section de-Bota- PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 19 nique. Des remerciements ont été adressés à M. Harmand, ainsi qu'à M. le Ministre des Affaires étrangères. — M. Sarrazin, vétérinaire en second, envoie une série de notes sur quelques Végétaux utiles du Soudan français. — Renvoi aux Sections de Botanique et de Colonisation. — La Direction du Jardin des Plantes de l’Université de Montpellier envoie le catalogue des graines récoltées dans l'Etablissement en 1899 et qui pourront être mises à la dispo- sition des botanistes dans le courant de l’année 1900. — M. G. Magne (Mb), délégué par le Conseil pour repré- senter la Société à l'Exposition internationale d'Horticulture ouverte en mai dernier à Saint-Pétersbourg, adresse un rap- port sur cette Exposition. IL a recu partout un accueil des plus aimables et espère avoir créé en Russie des relations qui pourront être utiles. (Le rapport de M. Magne est publié dans le Bulletin de 1899.) — Le D' Lecler (Mb) adresse de Rouillac (Charente) le fruit d'une plante originaire du Mexique et qui vient bien en pleine terre à l’exposition du midi à Bressuire (Deux-Sèvres). M. Le- cler demande la détermination de cette plante. — D'après M. Hua qui a bien voulu l’examiner, il s’agit d'une Asclépiadée l'Araujia ou Physianlhus albens, originaire de l'Amérique méridionale et fréquemment cultivée dans le Midi de la France. — M. Henri Degron (Mb) signale à l’attention de la Société les Vignes de Syrie et du Japon qu'il cultive dans sa propriété de Crespières, en Seine-et-Oise; ces plantes, introduites par lui voici plus de vingt ans, ont prospéré sous le climat de Paris, et la Société d’Horticullture de Meulan, qui les a exa- minées récemment, a décerné à M. Degron une grande mé- daille de vermeil. Sur la demande qui lui en a été faite par M. le Secrétaire général, M. Degron enverra des renseigne- ments plus complets sur ses Vignes que les Membres de la Société pourront également aller voir dans la bonne saison. — M. A.-P. Kotliaroff écrit de Kiew (Russie), à la date du 20 novembre, pour demander des renseignements sur le Stachys affinis dont il désire entreprendre la culture. Il prie la Sociélé de lui en procurer des tubercules ou de lui indiquer où il pourrait en acheter. 20 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Colonisation. — Le R. P. Bichet, supérieur de la Mission de Sainte-Anne au Fernan-Vaz, remerciant la Société de la médaille qui lui a été décernée pour le dressage d’un jeune Eléphant d'Afrique, adresse quelques détails nouveaux sur cet animal. On est parvenu à l’atteler à une voiture et à le diriger avec des rénes fixées à la trompe, chose qui semble n'avoir jamais été faite jusqu'à présent. Le R. P. Bichet an- nonce l'envoi prochain d'un rapport d'ensemble sur l'œuvre de colonisation agricole poursuivie depuis près de vingt ans au Fernan-Vaz par la Mission de Sainte-Anne. — M. V. Autran, chef d'exploration au Congo français, re- mercie la Sociélé de la médaille qui lui a été décernée et annonce sa prochaine arrivée en France. Il enverra prochai- nement une série de documents réunis par ses soins et qui pourront intéresser la Société, surtout au point de vue de la botanique et de la colonisation. — LeR.P. Camboué adresse d’Arivarinamo (Madagascar), à la date du 19 mai 1899, divers renseignements concernant, entre autres choses, l'emploi des Bœufs (Zébus) porteurs et l'élevage des Araignées productrices de soie. Le P. Camboué se plaint du manque de fourrages pour l'élevage du bétail et prie la Société d'Acclimatation de l'aider à répandre à Mada- gascar le Cactus inerme qui semble pouvoir fournir un four- rage des plus utiles dans les parties sèches de la colonie. Les documents ci-dessus seront publiés au Builetin. — M. Sarrazin, vétérinaire en second au Soudan, adresse un mémoire sur la production du Caoutchouc au Soudan français. — Renvoi à la Section coloniale (1). — M. Escande, de la Mission protestante française, envoie de Fianarantsoa (Madagascar), à la date du 8 septembre 1899, divers renseignements sur les Plantes utiles ou ornementales dont il a pratiqué l'essai; il sollicite l'envoi de graines pou- vant être cultivées avec quelques chances de succès. — M. Paul Bourdarie (Mb) annonce, à la date du 5 no- vembre 1899, son prochain départ pour le Congo. Il vient d'accepter les fonctions de Secrétaire général de la Société des Sultanats du Haut-Oubangui. M. Bourdarie regrette de (4) Le mémoire de M. Sarrazin, parvenu à læ Société pendant les vacances a été soumis à la Commission de publication qui l’a fait insérer au Bulletin. Voir le volume de 1899. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 2] ne pouvoir s'occuper désormais, avec toute l’activité qu'il eût désiré, de la domestication de l’Eléphant d'Afrique. Il ne ces- sera pas cependant de poursuivre sur place l’étude pratique de la question, et il espère que la Société d'Acclimatation voudra bien, de son côté, continuer l’œuvre d'’utile propa- gande entreprise sous ses auspices. M. Bourdarie se tiendra, du reste, en rapport avec la Société et s’efforcera de lui en- voyer tous les documents de nature à l’intéresser. Cheptels, distribution de cocons, de graines. etc. — M. Paul Uginet (Mb) adresse un rapport sur l'acclimatation et l'élevage du Nandou en Normandie {Voir ci-dessus, page 1). Ses observations ont été faites sur des Oiseaux qu'il avait recus en cheptel de la Société. L'élevage semblait devoir réussir lorsque l’un des deux Nandous fut victime d’un meurtre. Des malfaiteurs se sont introduits dans la propriété de M. Üginet à Penne-de-Pie, près Honfleur, et ont tué l'Oiseau au moyen d’une arme pointue. Un certificat du vété- rinaire accompagne la lettre de M. Uginet. Ces documents seront publiés dans le Bulletin. L'Oiseau tué était une femelle, Elle avait déjà heureusement pondu un certain nombre d'œufs que le mâle a continué à couver. — M. Kopperhorn offre à la Société un certain nombre de cocons d’Attacus cynthia. Ceux-ci ont été immédiatement distribués afin d'éviter des pertes regrettables par suite d’éclo- sions hâtives. M. le Secrétaire général en ayant offert un lot important à la Société entomologique de France, des remer- ciements sont envoyés à ce propos. — M. Obscur, instituteur à Charenton, remercie également des cocons qui lui ont été adressés. — Le laboratoire d'Entomologie du Museum d'Histoire na- turelle en avait recu un assez grand nombre, destinés à obtenir, pour la collection d’entomologie appliquée que M. le professeur Bouvier y organise actuellement, les diverses phases du développement de l’Atfacus cynthia. M. Lesne écrit, à la date du 13 juillet, que l'élevage n'a pas réussi. — La Société a recu, le ler septembre, de M. Rivière, Di- recteur du Jardin d'Essai d'Alger, un certain nombre de ra- quettes du véritable Cactus inerme. Plusieurs d’entre elles portaient des fruits à l'état de maturité. Ces échantillons, en 92 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. l'absence de M. Weber, membre du Conseil, qui avait biem voulu se charger d’en faire l’étude, ont été partagés entre M. Simon, horticulteur à Saint-Ouen, et M. Roland-Gosselin, délégué de la Société à Villefranche (Alpes-Maritimes). Grâce aux soins de ces Messieurs, M. le D' Weber a pu se livrer ultérieurement à l'examen des spécimens, qui lui ont fourni les éléments d’un travail destiné à la Socrété. — Les distributions de graines, toujours très actives, ont donné lieu à de nombreuses correspondances, tant pour les demandes que pour les remerciements. Ces lettres ne sau- raient être résumées ici. Il convient, toutefois, de signaler les remerciements de M. le D’ Ballay, Gouverneur de la Guinée française, auquel la Société a pu remettre, lors de son départ pour la colonie, fin novembre 1899, un lot important de graines. — M. le Ministre des Colonies remercie la Société de l'en- voi d’une nombreuse collection de graines, provenant de diverses parties du monde et qui a été offerte au Jardin colo- nial de Nogent-sur-Marne. — D'autre part, M. J. Dybowski, directeur de ce Jardin, remerciant également la Sociélé de ces graines, propose de mettre les ressources spéciales de l'établissement à la dispo- sition de la Société pour tirer le meilleur parti possible des envois qui lui sont adressés. Beaucoup de graines sont diffi- ciles à faire germer et comme l’on s'occupe spécialement de la question au Jardin colonial, il serait sans doute possible d'y obtenir des résultats que n'atteindraient pas les amateurs. — M. le Président de Biarrilz-Association remercie des graines de Pitlosporum dont une série lui a été adressée à titre gracieux. COMMUNICATIONS ORALES. Présentation d'ouvrage. — M. Ch. Rivière, Directeur du Jardin d’Essai du Hamma à Alger, offre à la Société un volume intitulé : Manuel pratique de l'Agriculture algérienne qu'il vient de publier en collaboration avec M. Lecq, Inspecteur de l'Agriculture en Algérie. Dans cet ouvrage, qui ne comprend pas moins de 1200 pages, les auteurs se sont efforcés de donner un apercu aussi complet que possible de l'Agriculture PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 93 dans l'Afrique du Nord. M. Rivière s’est plu à rendre hom- mage, en maintes circonstances, à la Société d’Acclimatation dont les travaux particulièrement actifs en Algérie, il y a une vingtaine d'années, ont beaucoup contribué à améliorer l'Agriculture dans ce pays et à empêcher des essais d’acclima- tation qui n'auraient eu pour résultat que d’occasionner des dépenses inutiles. M. le Président remercie M. Rivière et le félicite, ainsi que son collaborateur, d’avoir mené à bien cette œuvre impor- tante dont la haute valeur sera appréciée non seulement en Algérie, mais encore dans tous les milieux où l’on s'intéresse au développement agricole des colonies. — M. le Dr Maclaud {Mb), fait une communication sur l’éle- vage des Bœufs dans la Guinée française et au Fouta-Djalon. Ses observations ont été recueillies au cours de la dernière mission accomplie par lui dans ce pays et pendant le long séjour qu'il a fait à Konakry en qualité de médecin de l’hôpital. L'espèce du Fouta-Djalon n’est pas le Bœuf à bosse si répandu en Afrique. C’est un petit Bœuf dont le poids n'excède pas 250 kilos. La race paraît assez robuste, car elle a résisté à cer- taines épizooties très meurtrières et dont l’une a sévi en 1892. Pendant la saison des pluies, les habitants cantonnent le bétail sur les hauts plateaux où il trouve à se nourrir, mais pendant la saison sèche, l'herbe manque souvent et les animaux suc- combent en grand nombre; on ne donne de soins véritables qu'aux jeunes; il serait à désirer qu'une sélection fût faite parmi les reproducteurs. L’Administration qui acceptait des Bœufs en paiement de l'impôt s'était préoccupée d'en con- server un certain nombre et y était parvenue en les nour- rissant de fourrages secs. Il semble résulter des faits qui viennent d'être exposés qu’un élevage rationnel aurait quelque chance de réussir dans la contrée d’où l’exportation pourrait se faire vers différents points de la côte, peut-être même aux Canaries et jusqu’en Europe. M. le Président remercie M. le D' Maclaud de sa communi- cation et exprime l'espoir qu'il aura le loisir de la rédiger avant son prochain départ pour la Guinée. — M. Charles Debreuil (Mb) annonce que la Sociélé a pu obtenir d'un grand importateur, qui désire garder l’anonyme, des Tinamous roux en parfait état à un prix avantageux. 24 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Ces :Oiseaux pourront être laissés à 30 francs le couple aux Membres de la Sociélé d'Acclimalation,mais à eux seulement. M. le Secrétaire général dit que cette communication sera transmise sans retard par la voie du Journal à tous les Membres de la Société dont beaucoup se hâteront certaine- ment d'en profiter. — M. Paul Chappellier (Mb) présente les produits de ses dernières cultures d’Ignames et insiste particulièrement sur les résultats qu'il a obtenus par la culture de tubercules en- voyés de Marseille par M. Heckel. Les résultats ne sont pas satisfaisants, les tubercules ayant une fâcheuse tendance à reprendre leur allongement primitif, M. Debreuil avait bien voulu cultiver dans sa propriété de Melun l’un des échan- tillons venus de Marseille. Les résultats obtenus par lui sont identiques à ceux constatés par M. Chappellier dans l'Or- léanais. La communication de M. Chappellier sera insérée au Bullelin. — Au nom de M. Roland-Gosselin (Mb), lecture est donnée d'une communication sur les propriétés ignifuges des Opunltia. Des expériences ont été faites chez lui à Villefranche-sur-Mer, en présence d'une Commission militaire, pour se rendre compte de la protection que peuvent donner autour d'une pou- drière des haïes épaisses de Cactées. Le compte rendu de ces expériences, dont le résultat semble des plus favorables, est exposé avec détails par M. Roland Gosselin dont le mémoire sera publié in extenso. — M. Clément, président de la Section d'Entomologie, présente diverses observations concernant les Bombyciens séricigènes, l’Atfacus (Faidherbea bauhinicæ) du Sénégal et l'A. cynthia, dont les cocons lui ont été remis par la Société. La note de M. Clément sera publiée au Bulletin. — M.le D° Weber communique le résultat de ses études sur le Cactus inerme, études faites en grande partie d’après les échantillons envoyés par M. Rivière et dont il a été ques- tion plus haut. La communication de M. Weber sera insérée au Bullelin (voir ci-dessus, page 5). — M. Charles Rivière relate un certain nombre de faits observés au Jardin d'Essai du Hamma pendant l'été de 1899 et qui résultent de la température exceptionnelle de cette PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 25 saison. C'est ainsi qu'un jour à midi, le thermomètre, exposé au soleil, atteignait 68°; la température, à une profondeur de 030 dans le sol, était de 38". Les expériences faites sur les Bananiers ont montré que la température de la sève attei- gnait chez ces végétaux jusqu’à 38°. Le Caféier a fleuri, mais les fleurs n’ont pu être fécondées à cause de la violence du sirocco. Des dattes sont arrivées à maturité au mois de no- vembre. Malheureusement ces chaleurs intenses ont eu des résultats désastreux sur certaines plantes. Des Bananiers, par exemple, en plein développement, ont été tués par ces chaleurs. La floraison d’un Bambou (Bambusa spinosa) cultivé de- puis longtemps à Alger a pu être observée pour la première fois. Une particularité qui a sans doute contribué à empêcher d’apercevoir plus tôt les inflorescences de cette espèce, c'est que celles-ci se montrent très bas sur la souche même au lieu d’apparaitre sur les tiges. M. Rivière signale en passant l’uti- lité que pourrait avoir le B. spinosa au point de vue des clô- tures et même de la défense militaire. Sa végétation inextri- cable et ses fortes épines permettraient d'en faire des haïes infranchissables. Pour le Secrélaire des séances empêché, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. MEURTRE D'UN NANDOU. Pennedepie, par Honfleur, le 2 juillet 1899, Monsieur le Secrétaire général, Un acte de la dernière méchanceté a ‘été commis chez moi, jeudi 29 juin, entre six et sept heures du soir; on a pénétré dans ma pro- priété et, au moyen d’une arme pointue, on a tué la femelle Nandou que la Société d’Acclimatation m'avait confiée. Ci-inclus le certificat du vétérinaire qui a pratiqué l’autopsie. Plainte a été portée à la gen- darmerie du canton afin de découvrir la brute qui a commis ce méfait. De plus, j'offre, par l'intermédiaire du journai de la localité, une 26 BULLETIN DE LA SOCIETÉ D’ACCLIMATATION prime de cent francs à la personne qui fera connaître le ou les cou- pables. 11 est regrettable, pour mes travaux d’acclimatation, que cet acte inqualifiable ait été commis car, comme vous pourrez vous en rendre compte par le rapport que je vous adresse (1), j’ai complètement réussi à élever les Nandous d’une façon pratique, et, si la reproduction était assurée, ces animaux pourraient devenir très utiles et d’un élevage très rémunérateur. La femelle Nandou avait pondu quatorze œufs; onze sont en incu- bation sous le mâle, mais je ne sais si, par suite de la mort de la femelle, celui-ci pourra continuer l’incubation jusqu'au 4 août, époque à laquelle doit avoir lieu l’éclosion. Veuillez agréer, etc. PAUL UGINET. G. VENTRILLON MÉDECIN-VÉTÉRINAIRE Honfleur. Je soussigné, certifie avoir procédé hier à l’autopsie d’un Nandou femelle, chez M. Paul Uginet, rentier à la Planche-de-Pierre, com- mune de Pennedepie. canton d'Honfleur. L'animal présentait au tiers supérieur de la cuisse gauche une blessure du diamètre d'un demi- centimètre environ sur une profondeur de dix centimétres, causée par un instrument pointu [canne à épée, tiers-point, etc.). L'artère et le nerf fémoral étaient sectionnés. Le Nandou est mort par suite de l'hé- morragie considérable qui a suivi l’accident. Fait à Honfleur, le 30 juin 1899. Signé : G. VENTRILLON. EXTRAITS ET ANALYSES. LE DRESSAGE DE L'ELÉPHANT (2). par P. Hacner-SouPLer. I Historique. Outre les Eléphants de combat qu'on lançait contre les prisonniers de guerre et qu’on faisait se battre avec des Taureaux et des bêtes (1) Voir ci-dessus, page 1. (2) L'intérêt particulier que les Membres de la Société d’Acclimatation et le public témoignent depuis quelque temps à tout ce qui concerne les Éléphants EXTRAITS ET ANALYSES. 27 féroces, Rome vit des Elephants dressés et même fort bien dressés, d’après la relation de Pline: « Dans les combats de gladiateurs que donna Germanicus. les Eléphants, dit-il, exécutèrent des mouvements grossiers ressemblant à une sorte de danse; leurs exercices ordinaires étaient de jeter dans les airs des armes que le vent ne pouvait dé- tourner, de figurer entre eux des attaques de gladiateurs et de se livrer aux ébals folâtres de la pyrrhique; puis ils marchèrent sur la corde tendue; quatre Eléphants en emportaient dans une litière un cinquième représentant une nouvelle accouchée et dans des salles pleines de peuple, ils allèrent prendre place à table, en marchant à travers les lits avec tant de ménagements qu'ils ne touchèrent aucun des buveurs. Il est très curieux de les voir aller de bas en haut sur des cordes (2), mais ce qui l’est encore davantage c’est de les voir aller de haut en bas; Mercianus, trois fois Consul, rapporte qu'un Eléphant avait appris à tracer les caractères grecs et qu’on lui faisait écrire en celte langue ces mots-ci: C’est moi qui ai écrit ces mots et consacré les dépouilles celtiques. » Au moyen âge, quelques Eléphants furent amenés en Europe; nous n'avons pas de renseignements bien précis sur leurs talents; on ‘sait seulement qu'ils se mettaient à genoux devant leur cornac et se bais- saient pour permettre qu’on escaladât leur montagne, ce qui émer- veillait le peuple. Le Calife flaroun-al-Raschid envoya un bel Eléphant à Charlemagne en 802; il répondait au nom d’Abwlabas; il mourut en 810, disent les annalistes. Saint-Louis offrit un Eléphant à Henri III d'Angleterre, en 1255. M. Delisle a communiqué dernièrement à l’Aca- démie des Inscriptions deux mandements d'Henri IV ayant trait à un Pachyderme amené des Indes et entretenu à Dieppe aux frais du bureau des Trésoriers de France. Cet animal resta un an en France, puis fut offert par le Roi en 1592 à Elisabeth d'Angleterre. Citons encore l’Elé- phant de Cremone amené par Frédéric 11 qui le tenait du prêtre Jean. Les premiers Eléphants dressés apparaissent à peu près en même temps en Angleterre et en France aux foires de 1771 et de 1772. Laurent Franconi en a montré deux aux Parisiens : Baba et Kaouny. À notre époque les plus habiles dresseurs de Proboscidiens, outre les bateieurs Indiens, sont les Lockart, d'anciens clowns qui ont long- temps travaillé dans les Indes, et les nombreux employés du grand marchand d'animaux de Hambourg: William Iagenbeck. nous engage à reproduire le présent article. il est extrait d’un livre publié par la Maison Didot, 56, rue Jacob à Paris, et intitulé Le dressage des animaux. Les figures qui en illustrent le texte nous ont été obligeamment communiquées par l'éditeur. (Rédaction.) (2) À vrai dire, je crois que les cordes employées pour leurs équilibres étaient de solides poutres, qui, de très loin, dans les vastes arènes antiques, ne parais— Saient pas aussi grosses qu’elles l’étaient réellement. Led ete ne + LÉ ESTNE 28 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Il 4 Théorie et pratique. Ceux qui écrivent sur les bêtes ont en général le pelit travers de les Fig. 1. — Eléphant présenté par Laurent Franconi. (D'après une gravure du xvr1° siècle). montrer plus belles ou plus laides, plus intelligentes ou plus étranges qu’elles ne le sont réellement, cela à seule fin de les rendre éminem- entré loreulle de Pr Fig. 2. — Le même Eléphant dans un autre exercice. ment intéressantes et particulièrement dignes d’être peintes. Quand il s’agit de l'intelligence des espèces inférieures, l'abus de ce procédé est EXTRAITS ET ANALYSES. 29 visible, mais lorsqu'il est question des animaux supérieurs, on risque beaucoup moins d’être démenti; il semble en effet que rien ne soit impossible de la part du Chien, du Singe ou de l’Eléphant. Certes, l’histoire anecdotique de ce dernier est riche en épisodes! On peut la lire dans les travaux de M. Romanes et nous n’avons pas l'intention de la recommencer; il nous suffira de rappeler qu'après le Singe et le Chien, les grands Pachydermes indiens (1) sont tes animaux qui offrent le plus de ressources au dresseur. Le développement de leur intelligence est dû certainement au grard développement de leur nez; on a pu dire, à juste raison, qu'ils ont « le nez dans la main »; la trompe n'est-elle pas une sorte de main? Elle s’enroule autour des objets, les palpe, les retourne, transmet au cerveau des renseignements sûrs, confirme et complète les impres- sions fournies par les autres sens, régularise enfin le jugement, en permettant à la bête de coordonner ses idées et de leur comparer la réalité des choses. L'habileté de l’Eléphant à utiliser sa trompe est merveilleuse; avec elle, il sait défaire le nœud d’une corde. Que dis-je? Il peut jongler. M. Thomas Anquetil a raconté qu’on lui fit voir près des mines d’Ava, un Pachyderme d'une adresse surprenante ; à cinquante pas, il ne man- quait jamais le Palmier latanier contre lequel on l'avait exercé à lancer des pierres. Ensuite prenant plusieurs anneaux de fer, il les jetait en l’air et les recevait au bout de sa trompe, comme le baton- niste que l’on rencontrait autrefois sur les places de Paris le faisait avec sa canne. Enfin, il débouchaïit admirablement une bouteille de Soda-water. 11 est donc bien établi qu’une trompe peut être aussi souple qu'une main et cette constatation suffit à expliquer l'intelli- gence admirable du plus gros des Quadrupèdes. L'Eléphant sauvage s’apprivoise très vite. S'il est, au début, un peu turbulent, on le prive de nourriture pendant quelques jours, il ne tarde pas à composer. Cet animal si différent du Chien par sa forme et son genre de vie, se dresse cependant par l’application de la même théorie. En général, il obéit aux signes, il comprend la mimique, on peut donc le persuader d'exécuter certains exercices, il suffit ensuite de les lui faire répéter jusqu’à ce qu'il finisse par les exécuter au commandement, comme en rêve, avec un entier abandon de la volonté. On le dressera, de cette facon à monter sur une cuve retournée, à se coucher, à souffler dans une trompette, à s'asseoir devant une table servie, à sonner le garcon d'hôtel, à faire partir un coup de pistolet, à tourner la manivelle d'un orgue de Barbarie, à passer sur des bouteilles de bois munies de petites plates-formes, etc. Ce sont là les exercices classiques de nos jours. (1) On a dressé des Eléphants d'Afrique mais non sans de grandes difficultés. En effet, quoi qu’on en ait dit, cet Eléphant est bien moins doué que l’autre, toute question d'élevage mise à part. 30 BULLEIIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Il est bien évident qu'il peut se trouver que la bête refuse d’obéir à certaines injonctions, dans ce cas, et aussi pour obtenir des mouve- ments qu’il est impossible d'expliquer par des gestes, on a recours à la correction, comme, dans les mêmes circonstances, on en use avec le Chien et le Singe. M. J. Romanes raconte d’après Sir E. Tennant que, fréquemment, les Eléphants de l'Inde se couchent par terre et meurent quand, pour la première fois, on veut leur imposer le harnais. Les indigènes disent alors que « le cœur des captifs s’est brisé ». Le fait est peut-être exact pour les animaux tout récemment capturés; mais rien de semblable n’est jamais arrivé à ma connaissance dans un cirque, quand un cornac sévit contre un Eléphant; je n'ai jamais eu le spectacle cruel de ce désespoir muet; en revanche, j'ai assisté à de belles colères. Celle du Pachyderme de la foire de Noventa Vizentina demeurera tristement célèbre. Son cornac, un Wurtembergeois du nom de Bauer, venait dele corriger assez brutalement, quand la bête le saisit avec sa trompe et le lança contre un des montants de la baraque. Bauer fut tué sur le coup. L'Eléphant s’acharna sur son cadavre avec une fureur épouvantable, sa colère dura plusieurs heures ; personne n'osait approcher de ce démon qui menaçait de démolir la ménagerie; on ne voulait pas tirer sur lui de peur de redoubler sa rage si la première décharge ne le tuait point; enfin on pensa à l’empoisonner. avec de la strychnine. Nous sommes loin de la poétique et touchante aventure du « cœur brisé ». Y a-t-il une méthode réglée de correction pour l’'Eléphant ? J'avoue que j'ai vu employer des procédés bien différents et cela sans surprise, car nous avons l'exemple du Cheval, dont le dressage, bien qu'ayant fait l’objet d'un nombre incommensurable de travaux souvent remar- quables, est cependant loin d’être fixé. Je vais donc, sans légiférer, me contenter de rapporter ce que j'ai vu le plus fréquemment ; comme le but a été souvent atteint sous mes yeux, il faut bien en conclure que les moyens employés avaient du bon. La plupart des dresseurs s’arment de grands crochets en fer assez pointus et s’en servent comme de gaffes pour manier cette masse de chair énorme qu'on appelle un Eléphant; d'autre part, des bâtons, munis de pointes d’acier, servant à piquer la bête aux bons endroits, particulièrement dans le cou et sousl'oreille, à cet endroit, on entretient presque toujours une plaie saignante. La‘lèvre inférieure qui est longue et pend assez stupidement quand l'animal renverse sa trompe sur sa tête élait tout indiquée pour recevoir un appareil analogue à ceux que lon met aux Chevaux difficiles lorsqu'on les tond. Les jambes sont munies de cercles à pointes intérieures auxquels sont attachées des cordes Menacés d’un pareil arsenal renouvelé de l’Inquisition, les malheureux Eléphants ont tout bénéfice à composer. C'est ce qu'ils finissent du reste par faire après quelques accès de rage plus ou moins périlleux EXTRAITS ET ANALYSES. 31 pour le cornac. Par la correction, on arrive à leur apprendre les prin- cipaux mouvements des Chevaux, la valse, le pas espagnol etc., on leur apprend même la cabrade, comme à de simples Chevaux arabes. Fig. 3. — L'Eiéphant Se/im, monté par Miss Stéphanie, C'est quelquefois une rude besogne, mais, le résultat une fois acquis, la bête sur ses larges pieds de derrière a une assiette admirable. J’ai vu réussir ce dressage avec une sorle de cavecon compliqué: l'animal savait déjà faire le beau, à l'instar d’un Caniche, on le poussait en avant 32 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATALION. et, en faisant agir le cavecon, on l’empêchait autant que possible, ie poser les pieds de devant sur le sol. Il ne faut pas trop s’émerveiller de la délicatesse des Eléphants qui enjambent leur dresseur couché parterre; c’est en effet presque loujours en leur piquant la plante des pieds qu’on les a forcés, à prendre ces précautions personnelles. Les numéros d’Eléphants se sont multipliés dans une grande pro- portion, depuis une quinzaine d'années, c'est-à-dire depuis l'apparition dans nos cirques de ceux présentés par les frères Lockart. La plupart de ces numéros sont un peu uniformes et trop visiblement copiés sur le même modèle. Il faut, pour qu'ils ne deviennent pas tout à fait ennuyeux, que la manœuvre des appareils soit admirablement réglée et que les servants l’exéculent aussi rapidement que ponctuellement, autrement, le poids des cuves et de ces poutres et leur volume deviendraient une cause de lenteur insupportable. On a essayé, ces dernières années, de raffiner sur le dressage classique et nous devons ici tresser une couronne d'immortelles à William Hagenbeck qui, le premier, a fait monter un Eléphant sur un tricycle et aussi, au nègre Thompson qui place dans la bouche de deux de ses monstrueux élèves les extrémités d'une corde sur laquelle il monte et se tient en équilibre. Ce qui « perd le métier » de dresseur d’Eléphants, c’est l’exhibilion de Gypsys et de Babas nuilement dressés dans les pièces à grand spec- tacle plus ou moins inspirées de Jules Verne. La curiosité des spectateurs en est émoussée et les directeurs de cirque sentent bien que les fra:s énormes d’un xwmeéro d'Eléphants ne sont plus que difficilement compensés par l’empressement du public à venir applaudir les Pachy- dermes savants. Savez-vous quels sont les plus recherchés? Ce sont les nains. La revue l'Arliste, feuille allemande qui sert d’organe aux acrobates et aux dresseurs est remplie depuis quelque temps de réclames pompeuses qui toutes annoncent : « Les plus petits Eléphants du monde ». On les exhibe avec des Poneys et des Chiens « pour faire ressortir leur petite taille » dit-on. Or, ce calcul est plutôt un joli contresens puisqu'il détruit le contraste. Ajoutons que nombre de ces nains sont destinés à grandir; cependant quelques-uns — monstres décadents — sont d’authentiques Tom- Pouces (1). (1) P. Hachet-Souplet, Le dressage des animaux, p. 131-139. DE LA MATIONALE D'ACCLHATAT _ (Revue des Sciences naturelles appliquées) —— 472 ANNÉE —— FEVRIER 1900 SOMMAIRE ROUESSART. — {es Mammifères à acclimater et à domestiquer en France et dans es Colonies françaises ......... I BI A EM UNE SE CE) AT RITES CAMP RIT 33. . CLÉMENT. — Remarques sur des éducations d’{étacus banhinie et cynthia.... “Et CAMBONE. — Travaux de colonisation agricole à Madagascar 0eme ant 55 . Extraits de la correspondance : Le Zophyrus pini, Hyménoptère nuisible aux Pins : moyens de le détruire. ......... 58 nvoi de graines au Jardin colonial par la Société d’Acclimatation................ ü8 Egtraits et analyses : ploi des Bœufs porteurs à Madagascar a culture du Figuier en Grèce. a Société ne prend sous sa respensabilité aucune des opinions es par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. me DU 1 747 Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 . AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACGLIMATATION DE FRANCE 41, RUE DE LILLE, 41 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois 0 CRÉSYL- | DÉSINFECTANT ANTISEPTIQUE EE Ni Corrosif Pour ev..sr les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRESYL-JEYES. Maisen fenéée en 1872 Plus de 400 Médailles ot 12 Prix d’hepaou Halle d'or, Prix d'ensemble, Paris 139$ ELLIER àMANTES(S.--0. COU V EUSES ARTIPICIELLES MATÉRIEL D'ÉLEVASGE Velailles de Race ŒUFS À COUVER Base pure de Heudan 0,88 CHIENS de chasse dressés. Hnvol franco de Catalogue (Illustré. MAISON À PARIS À Pl. du Théâtre-Prançeu EAU MINÉRALE GAZEUSE, déclarée d'INTERET PUBLIC (Décret du 7Avri|1888) a en LR ANEMIE, GASTRALGIE, COLIQ JEYES / Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement dérr sntrée, l'immense avantage de n'être »'. Toxique ni Corrosif. Hémostatique et Stv:tique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales /eterinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Prefecture de 11 Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques ct Prospectus : SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs-Bourgeoïs (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. 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Cependant, à côté des Membres de notre Sociélé qui me font aujourd'hui l'honneur de m'’en- | tendre et qui sont tous familiers avec les questions qui cons- ; tituent l’objet journalier de nos études, il est peut-être ; d'autres personnes qui viennent ici pour la premiere fois et qui, n'ayant pas eu l’occasion de raisonner sur cet objet, hésiteront sans doute à admettre qu'il soit encore utile, je dirai même nécessaire, à notre époque, d’acclimater et de domestiquer des animaux. C’est pour elles que je crois devoir entrer dans quelques considérations préliminaires que je ne ferai, d’ailleurs, qu'effleurer. En voyant, dans cette fin de siècle, l'énorme développement pris par les machines, on est tenté de croire que l’homme, grâce à son intelligence, est en état de se passer des produc- tions de la Nature. Rien n’est plus faux cependant, et si l’on veut se donner la peine d’y réfléchir un instant, on sera forcé de reconnaître qu’en faisant fonctionner ces machines, l’homme #e fait qu'utiliser SOUS UNE AUTRE FORME [es pr0- duclions el les forces de la Nature. J'ajouterai qu'il ne le fait pas toujours sous la forme la plus économique au point de vue de l'équilibre général de ces productions et de ces forces. (1) Voir Bulletin 1899, page 169, l’allocution prononcée par M. A. Milne- Edwards (de l’Institut), directeur du Muséum d'Histoire naturelle, à l'ouverture de cette conférence. Bull. Soc. nat, Accl, Fr, 1900, — 3, 34 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Que voyons-nous, en effet, autour de nous? Les chemins de fer et les automobiles tendent partout à remplacer le Che- val, cette force animée dont le nom restera, quand même, at- taché à l'unité de force. Mais ces véhicules variés consomment du charbon de terre, du pétrole, de l'électricité, c'est-à-dire sous une forme plus ou moins déguisée, des produits naturels emmagasinés dans le sol et dont les statisticiens nous pré- disent déjà, à brève échéance, l'épuisement total. Que ren- dent-ils en échange, leur travail terminé? Fort peu de chose : quelques cendres, un peu de vapeur et de fumée. ‘Enfin, la machine elle-même s’use et nécessite, de la part de l’homme, un nouvel effort, un nouveau travail, une nouvelle dépense pour la remplacer. Tout autre est le rôle de l'animal vivant dans l’économie générale de la Nature. Le Cheval, puisque c'est lui surtout qui est en cause, n’a besoin que de l’herbe de nos campagnes, et cette herbe ne fera défaut que lorsque le soleil cessera de réchauffer notre globe, Le Cheval se repro- duit de lui-même et ses descendants perpétuent sa force. En= fin, il fournit un fumier précieux qui rend au sol les matières minérales dont ce sol a besoin pour nourrir les plantes dont l'animal, à son tour, se nourrit. C'est donc à tort que des esprits superficiels ont cru pouvoir prédire La fin du Cheval, qui, même à côté des machines, trouvera toujours son utilité et son emploi. Mais soyons de notre temps; admettons la supériorité de l'automobile sur le Cheval, et passons à un autre de nos animaux domestiques, le Bœuf, qui nous est plus utile encore, puisqu'il forme, avec le pain, la base de notre alimentation. Ici, la vérité de ce que je disais tout à l'heure éclate plus manifestement encore. Je ne sache pas, en effet, que nos chimistes, malgré leur science, aient réussi à fabriquer de toute pièce, c’est-à-dire, bien entendu, au moyen de matières purement minérales, un morceau de chair, un morceau de viande. Et dussent-ils réaliser un jour cette utopie, que la Nature montrerait encore sa supériorité en fabriquant cette précieuse substance d’une façon beaucoup plus pratique, beaucoup plus économique à tous les points de vue, par l’en- tremise de l’animal vivant. Or, vous le savez comme moi, les animaux de boucherie, si nombreux qu'ils soient dans un pays agricole comme la France, sont cependant insuflisants pour que l’on puisse LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU A DOMESTIQUER. 35 affirmer que tous les habitants de ce pays sont à même de manger,chaque jour, seulement quelques grammes de viande. Le prix seul de cette viande, qui augmente d'année en année, suffit pour le prouver. La France ne suffit pas à sa propre consommation, puisqu'elle importe annuellement 200,000 têtes de gros bétail, et cependant elle ne produit pas tout ce qu’elle pourrait produire. L'Angleterre possède vingt-sept bœufs par kilomètre carré, tandis que la France, dont le sol est tout aussi fertile, n’en a que vingt-un pour la même surface. Nous pourrions donc augmenter, sans inconvénient, notre produc- tion de près d’un quart. Notez, en passant, que le paysan, l’agriculteur, qui produit cette viande de boucherie, est celui qui en mange le moins. ï À défaut des animaux domestiques, les animaux sauvages dé notre pays nous offrent-ils des ressources pour notre alimentation? Vous savez tous qu'il n’en est rien. Chaque année, les doléances des chasseurs nous prouvent toute l'é- tendue du mal. Le gibier est devenu si rare dans nos cam- pagnes et nos forêts que, malgré le prix élevé de cette mar- chandise, on importe annuellement, en France, pour 6,000,000 de francs (six millions) de gibier étranger. C'est bien là un aliment de luxe. Ces considérations, absolument topiques, suffisent, je crois, pour vous montrer tout l'intérêt qui s'attache à l’acclimatation et à la domestication d'animaux exotiques susceptibles d’aug- menter nos ressources alimentaires. Maïs avant d'aller plus loin, je dois répondre à deux objections que l’on est, peut- être, sur le point de me faire. Au lieu d'introduire de nouvelles espèces, plus ou moins difficiles à acclimater, ne vaudrait-il pas mieux chercher simplement à augmenter et à améliorer la production des races domestiques que nous possédons déjà? — Cette intro- duction de nouvelles espèces n'est-elle pas, en outre, de nature à nuire au développement de nos espèces indigènes ou de nos races domestiques ? A la première objection, je répondrai que nous sommes absolument d'accord. Mais améliorer nos races domestiques, c’est faire de la Zootechnie, et bien que la Société d’Accli- matatlion ait souvent l’occasion de s'occuper de cette science, qu’elle est loin de dédaigner, nous sommes forcés de convenir qu'elle sort un peu de notre programme. Par contre, les deux ET LS mes 36 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. sciences se donnent la main ou se confondent lorsqu'il s’agit d'introduire des races domestiques exotiques qui, par leur croisement avec nos races indigènes,améliorent ou régénèrent la production de ces races. Est-il besoin de vous rappeler le Cheval arabe qui, importé en Europe, est devenu la souche du Cheval anglais de pur-sang, qui lui-même sert constam- ment à l'amélioration de nos races indigènes; le Mouton mé- rinos importé d'Espagne; la Chèvre de Cachemire importée d'Asie, et d'autres encore qu'il serait facile de vous citer? A la seconde objection, je dirai qu’en ce qui concerne les animaux domestiques, les quelques exemples que je viens de rappeler prouvent surabondamment que les races importées, en connaissance de cause, ne peuvent nuire aux races indi- gènes, pourvu, bien entendu, que l’on dirige les croisements conformément aux règles de la Zootechnie. En ce qui con- cerne les animaux sauvages, la pénurie de nos forêts ne laisse-t-elle pas le champ libre à toutes les entreprises? Et d’ailleurs, en cherchant à augmenter le nombre des représen- tants de notre faune, nous aurons soin d’imiter la Nature qui partout nous montre une admirable variété, tout en évitant cette concurrence, cette lulle pour la vie, qui résulte de la présence, dans une même faune, d'espèces trop semblables. Même à notre époque, où la faune est singulièrement dimi- nuée, ne voyons-nous pas deux espèces de Cerfs, le grand Cerf et le Chevreuil, sans parler du Daïim, vivre en bonne intelligence dans nos forêts, sans doute parce qu'ils n’ont pas exactement la même taille, les mêmes habitudes, la même nourriture? Sans remonter au delà de l’époque historique, nous voyons qu’au temps de Jules César, cette faune compre- nait, en outre, l’Elan (Cervus alces) et deux grands Bœufs sauvages, l’'Urus (Bos primigenius) et l’Aurochs (Bison europæus), qui n'ont disparu, selon toute probabilité, qu’en raison de la chasse qu’on leur a faite. Malgré le déboisement du sol, il y a place encore, dans nos forêts, pour une grande variété de gibier. Et ce que je viens de dire des animaux sauvages peut s’ap- pliquer, sur une moindre échelle, aux animaux domestiques. Sans doute le nombre de têtes de bétail que l'on peut élever sur l'étendue d’une ferme est forcément limité et propor- tionné à cette étendue. Mais lorsque le nombre des Bœufs aura atteint le chiffre qui ne peut être dépassé, il y aura place TON LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU A DOMESTIQUER. 31 encore pour des Moutons qui trouvent à se nourrir là où les Bœufs ont déjà passé. Le Porc, dont la nourriture est diffé- rente, aura sa place à part et sera souvent la seule viande de boucherie que se permette l'agriculteur. La Chèvre trouvera sa pâture sur les terrains incultes que dédaigne le Mouton; l’'Ane et le Mulet remplaceront le Cheval dans les contrées arides et montagneuses et se contenteront d’une nourriture plus frugale. La variété des élevages est donc ici, comme dans les forèts, une source de richesse, un moyen d'utiliser toutes les productions que la Nature dispense à peu de frais. Je crois en avoir assez dit pour légitimer les tentatives d’acclimatation et de domestication dont je désire vous parler. Arrétons-nous un instant aux moyens pratiques qui les rendent possibles ou les facilitent. Je dirai peu de choses sur le choix des animaux à accli- mater. L'observation des espèces plus ou moins nombreuses qui vivent dans les ménageries ou dans les jardins zoolo- giques, permet de fixer ce choix sur celles qui montrent le plus d'aptitude à s’acclimater et qui présentent le plus d’uti- lité, au point de vue qui nous occupe. La manière de se les procurer ne doit pas nous arrêter davantage. Il existe dans les grands ports de mer, à Ham- bourg, à Londres, à Marseille, des marchands d’animaux vivants qui servent généralement d'intermédiaires entre les pays d'origine et les établissements publics ou privés qui se proposent d’acclimater des animaux exotiques. Ceux-ci, à leur tour, peuvent servir de pépinières et céder ou échanger leurs produits contre ceux des établissements similaires. En général les animaux encore jeunes, maïs n'ayant plus besoin des soins de leurs parents, s’acclimatent et se plient mieux à la domesticité que les adultes. Il est encore préférable d’avoir des animaux nés dans le pays où l’on veut les acclimater, ou tout au moins nés en captivité, quand il est possible de s’en procurer, car ceux-ci peuvent être considérés déjà comme à demi acclimatés, ou comme plus faciles à domestiquer. La domestication de presque tous nos animaux domestiques remonte à l'époque préhistorique, alors que l'homme, encore à demi-sauvage, n’appliquait aucune règle fixe à l'élevage des animaux dont il s’entourait pour en tirer profit plus facilement et plus régulièrement que de ceux qu’il tuait à la 38 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. chasse. Aujourd'hui, que nous bénéficions de l'expérience des siècles passés, que nous possédons en outre la science et tous les perfectionnements que procure la civilisation moderne, il serait étonnant que nous ne puissions réussir aussi bien, sinon mieux, que nos ancêtres de l'âge de pierre. Les exemples que je vous ai déjà cités, ceux que nous voyons tous les jours dans nos Jardins zoologiques, prouvent que l’accli- matation et la domestication des animaux sont choses rela- tivement faciles. En règle générale on peut dire que l'acclimatation sera beaucoup plus rapide lorsque l’animal aura été préalablement domestiqué dans son pays d’origine. L'Éléphant, le Chameau, le Lama, le Cobaye (ou Cochon d'Inde), sont des exemples de ce fait dont les fournisseurs ordinaires de nos ménageries ont fait leur profit. Il est rare, aujourd'hui, qu'ils transportent immédiatement en Europe des animaux sauvages récemment capturés ; ils ont soin de les habituer à la captivité, qui est la première forme de la domesticité, en les gardant quelques mois à terre dans le port d'où ils doivent être embarqués pour leur destination nouvelle. Supposons maintenant l'animal, ou mieux le couple d’ani- maux nécessaire pour acclimater une espèce, transporté dans notre pays; examinons les soins qu’il conviendra de lui donner. L'art de soigner les animaux dans les ménageries est d’ori- gine récente. Au siècle dernier, les animaux exotiques que l'on conservait vivants, n'étaient qu'un objet de vaine curio- sité; on les considérait comme destinés fatalement à périr, et l'on n'avait même pas l’idée ou le désir de les faire se re- produire. Les soins qu’on leur donnait se ressentaient singu- lièrement de cette indifférence. Mais lorsque l’idée d’acclimater ces animaux eut fait quelques progrès, lorsque l’on se fut aperçu qu'avec la moitié des soins que l'on donne à un Cheval ou à un Chien de luxe, ces animaux vivaient et prospéraient sous un climat très différent de celui de leur pays d'origine; lorsqu'on les eut vu se reproduire sans difficulté et leurs produits s'élever comme ceux de nos animaux domestiques, l'opinion changea et l'on reconnut l'avantage que l’on peut tirer de cet éle- vage pourvu que l'on se donne la peine de s’en occuper sérieusement. LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU A DOMESTIQUER. 39 L'expérience a détruit certains préjugés qui existaient autrefois. On a constaté notamment que les animaux origi- naires des régions chaudes supportaient mieux nos hivers que les animaux des régions arctiques ne supportent les fortes chaleurs de nos étés. En réalité, ce n’est pas le climat qui constitue la principale difficulté; je n’en veux pour preuve que la rapidité avec laquelle nos animaux domestiques, transportés sur tous les points du globe, s'y sont presque par- tout acclimatés, au point d’y vivre à l'état sauvage, aussi bien que sous la protection de l’homme. Il serait imprudent, néanmoins, de lâcher dans nos forêts des animaux récemment débarqués, dans un but d’acclimata- tion. Il convient de les garder quelque temps dans des parcs ou des Jardins zoologiques. Maïs les soins qu'ils réclament sont relativement bornés. Pour les Herbivores, qui sont presque les seuls qu'il y ait utilité à acclimater, un enclos plus ou moins vaste, suivant l’espace dont on dispose et le nombre des animaux, permettra de les observer sans les in- quiéter. Le sol sera sec, en partie semé d'herbe, et suffisam- ment élevé pour que la pluie n’y séjourne pas; quelques arbres donneront de l'ombrage. Une cabane très rustique bâtie sur le point le plus élevé, avec de la paille pour litière, abritera les animaux contre le froid de la nuit ou la trop grande cha- leur du milieu du jour. Un abreuvoir en pierre dont l’eau se renouvellera facilement complètera l'installation. Pendant les hivers rigoureux, on augmentera la litière et l’on placera chaque jour dans la cabane la nourriture et l’eau que les animaux ne sauraient se procurer lorsque le sol est gelé ou couvert de neige. Une difficulté plus sérieuse s'attache à la reproduction et à l'élevage des jeunes. Les animaux de notre pays ont leurs petits au printemps, époque favorable puisque ces petits au- ront devant eux toute la belle saison pour s'élever. Les ani- maux des pays chauds, où l'hiver est remplacé par la saison des pluies, mettent bas généralement à une autre époque. C’est ce qui a lieu, notamment pour l'Axis et les autres Cerfs de l'Inde et de l’Indo-Chine. Dans cette région intertropicale, les plus fortes chaleurs sont en avril et les pluies viennent immédiatement après, de mai en septembre. C’est après cette saison pluvieuse, en octobre, que naissent les petits, de telle sorte que leur naissance coïncide précisément avec le com- 40 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. mencement de notre hiver, d’où la nécessité de les entourer de soins tout particuliers. Il y a donc, dans l’acclimatation de ces espèces des pays chauds, au point de vue de la reproduction, une période cri- tique qui menace les femelles d’avortement, ou les jeunes, lorsqu'ils sont nés, d’une mort prématurée. Au bout d'un ou deux ans, cependant, l'influence du nouveau climat se fait sentir ; les femelles, d’ailleurs, s’acclimatent avec plus ou moins de facilité, car on remarque, sous ce rapport, de grandes différences individuelles. Dans un troupeau d’Axis, on voit d'abord ces femelles mettre bas à toutes les époques de l’année, comme si leur gestation s'était prolongée d’un temps variable sous l'influence de l'hiver (fait qui s’observe déjà chez la femelle de notre Chevreuil indigène). Puis au bout de deux ou trois ans, cette gestation se régularise et l’on . voit toutes les femelles mettre bas au printemps comme celles de nos Cerfs indigènes. On peut dire alors que l'espèce est réellement acclimatée; mise en liberté dans un grand parc, elle supportera désormais notre climat aussi bien que nos espèces indigènes. Les Jardins zoologiques et les Jardins d'essai ou d’acclima tation sont donc d’une haute importance au point de vue qui nous occupe ici. La ménagerie du Muséum. de Paris, créée, il y a un siècle, dans un coin du Jardin des Plantes, a servi de modèle à la plupart des établissements du même genre fondés en France et à l'étranger. Resserrée dans l'étroit espace de l'enceinte d’une grande ville, cette ménagerie a pourtant fait, pour l’acclimatation, beauccup plus que d’autres établisse- ments parés de noms pompeux. Les traditions fondées par Buffon, par Daubenton, par Geoffroy Saint-Hilaire, s’y sont conservées vivaces, et le Directeur actuel du Muséum, qui me fait aujourd'hui l'honneur de présider cette conférence, a mis tous ses efforts à leur donner une sanction pratique. À plusieurs reprises, et grâce à l'initiative de M. A. Milne- Edwards, le Muséum a läché, dans les forêts de l'État, des Cerfs nés et élevés à la ménagerie du Jardin des Plantes. Ces essais ont parfaitement réussi : ce précieux gibier s’est accli- maté dans ces forêts réservées, et le Président de la Répu- blique ou ses invités ont pu se donner le luxe de tirer, aux portes mêmes de Paris, des Cerfs que l’on ne voit d'ordinaire _en liberté que dans les forêts de l'Extrême-Orient. LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU A DOMESTIQUER. 41 La Société d’Acclimatalion a possédé autrefois un Jardin d'essai dont elle a dû se défaire pour des raisons d'ordre intérieur. Aujourd'hui elle compte surtout sur l'initiative privée de ceux de ses Membres qui possédant des parcs, grands et petits, s'adonnent avec amour, je puis même dire avec passion, à l'élevage des espèces à acclimater. C’est dans cette voie surtout qu'est l'avenir de l’acclimatation. Vous en pourrez juger par les résultats déjà obtenus. Quelques-uns de ces parcs privés sont restés célèbres. Un des premiers et des mieux connus, fut celui du duc de Derby, à Knowsley, en Angleterre, désigné sous le nom de Ména- gerie de Knotwsley, et dont un magnifique atlas de planches coloriées, représentant les animaux qui y ont vécu, nous a conservé le souvenir (1846). Un certain nombre de grands propriétaires anglais ont imité cet exemple. Les délégués de notre Sociélé au dernier Congrès de Zoologie, à Cambridge (août 1898), ont pu visiter le parc de Woburn-Abbey, où le Duc de Bedford a réuni à grands frais presque toutes les espèces de Cerfs connues dans le monde entier, sans parler de beaucoup d’autres animaux. Le parc de Tring (dans le comté d'Herts), qui appartient à notre collègue, Sir L.-W. Rothschild, est également remarquable. En Italie, à San-Donato, près Florence, le prince Demidoff a possédé, vers 1850, un parc de ce genre, et le roi d'Italie entretenait, ou entretient encore, à la Mandria près Turin, un parc d’acclimatation dont les résultats ont été publiés, dans notre Bulletin, par son directeur M. Comba. Il existe également, en Allemagne, des établissements de ce genre. La France n'est pas restée en arrière de ce mouvement. Il me suffira de citer les noms de MM. Arthur Touchard, Pierre- Amédée Pichot, le comte de Riocourt, le marquis d'Hervey de Saint-Denys, Cornély et Sharland, qui ont possédé, à dif- férentes époques, des parcs d’acclimatation, et dont le Bulle- lin de notre Sociélé a enregistré d'année en année les efforts et les heureux résultats. La plupart de ces courageux éleveurs sont lauréats de notre Sociélé. Plus près de nous, c’est M. Pays-Mellier qui continue ces nobles traditions, dépensant sans compter sa fortune pour le plus grand bien de la science et de son pays. Son parc de La Pataudière est un modèle du genre. Il suffit de lire le rap- port étendu que M. Pays-Mellier vient de nous adresser, et 42 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION, que l’on peut lire dans le Bullelin de la Sociélé d’'Acclimata- tion (1), pour se faire uneidée de l'importance de ses élevages et du soin qu'il apporte à tous ses essais. Maïs ce qui me plait surtout, c’est la verve et l'humour plein de naturel que l’au- teur déploie dans ces pages sans prétention, en .nous rap- portant les faits et gestes de ses pensionnaires à quatre pattes. J'aimerais à vous raconter les promenades du Phasco- lome Piéru, suivant comme un Chien le vieux Florimond à la recherche des œufs de Fourmis ; les pêches miraculeuses de la Loutre Pepita rapportant le Poisson à son maître: les rancunes et les incartades souvent dangereuses de ses. deux Cabiais, qui montrent tout au moins, chez ces gros Rongeurs, une intelligence qu’on ne leur supposait pas. Maïs je crain- drais de déflorer cet attachant récit que vous voudrez tous lire dans le texte même sans en passer une ligne. Enfin je ne puis m'empêcher de vous citer le nom de M. Debreuil, l’un de nos Membres les plus dévoués et les plus actifs, qui dans sa propriété de Melun commence à marcher sur les traces de ses devanciers. Mais il est temps d'entrer dans notre sujet et de vous mon- trer, à côté des espèces déjà acclimatées, grâce aux efforts persévérants des hommes dont je viens de vous citer les noms, celles qui ont pris place plus récemment dans nos Jar- dins d'essais, et qui réclament encore tous nos soins avant de passer dans nos forêts ou dans nos fermes. Je ne chercherai pas, ici, à vous donner la liste complète de tous ces animaux : le temps me manquerait pour cela. Je m'en tiendrai aux espèces qui présentent un intérêt d'actualité, en prenant mes exemples parmi les Mammifères qui seuls doivent nous occu- per aujourd'hui. Presque tous ceux qu'il conviendrait d’aceli- mater appartiennent aux ordres des Rongeurs, des Pachy- dermes, des Ruminants et des Marsupiaux. Commencons, si vous le voulez bien, par les Rongeurs. LE Mara. — Le Rongeur que l’on désigne sous ce nom et sous celui de Lièvre de Patagonie, est le Dolicholis patago- nica des naturalistes. Il n’a rien, d’ailleurs, du Lièvre ni du Lapin, si ce n’est la taille approximative et l'agilité à la course. Par ses caractères, il se rapproche davantage du Co- (1) Voir Bulletin 1899, pages 137, 174 et 319. Tr Del | LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU A DOMESTIQUER: 43 baye, ou Cochon d'Inde, importé comme lui d'Amérique, à titre d'espèce alimentaire, et qui serait complètement délaissé aujourd'hui, en raison de sa petite taille qui en fait un maigre rôti, s’il n'avait trouvé un dernier asile dans le laboratoire des physiologistes. Le Mara, notablement plus grand qu'un Lièvre, est beaucoup plus digne de l'attention des éleveurs et de celle des gourmets. On sait qu'il est originaire des plaines (Pampas) de la République Argentine où il vit par petites bandes, ne se creusant pas de terrier, trouvant un abri suffisant dans les buissons et les hautes herbes. Trans- porté en Europe, il s'accommode bien de notre climat et l'on en voit aujourd’hui dans tous les jardins zoologiques. MM. A. Pichot, Touchard, Cornély et Sharland ont pu les faire se reproduire et élever les jeunes sans difficultés. Il suffit de leur donner un enclos herbeux entouré d’un treillage. Ils sont peu timides et s’apprivoisent au point d'entrer dans les maisons et de venir à l'appel quand on leur offre un morceau de pain ou decarotte. Ils sont très hauts sur pattes, avec celles de derrière plus longues, mais ils gardent la croupe assez basse comme un animal qui a les reins brisés; dans la course rapide ils ont l'allure des petits Cerfs tels que le Muntjac. Ils s’assoient comme les Chiens. S'il est vrai que les adultes ne vivent pas dans un terrier, les jeunes, tout au moins, recherchent un abri quelconque. Les premiers qu'ait élevés M. A. Pichot s'étaient blottis sous un coffre d’écurie. Ils étaient d’ailleurs, comme ceux du Cobaye, en état de courir dès leur naissance. Ils allaient têter leur mère et revenaient dormir sous l'abri qu'ils avaient choisi. Actuellement on construit généralement dans l’enclos où l’on élève des Maras une petite cabane très basse et re- couverte de terre où les femelles mettent bas et qui sert de refuge aux petits jusqu'à ce qu'ils soient en état de se suffire à eux-mêmes. Toute espece de nourriture leur convient : herbe, branchages, carottes, légumes de toute sorte. Ils supportent des froids de — 21°; pendant les hivers rigoureux de 1879-80 et de 1890-91, ils restaient tapis dans la neige sans chercher un meilleur abri. | Cette espèce si rustique et si frugale serait une excellente acquisition pour nos fermes. Sa chair est excellente, et bien que les portées ne soient ordinairement que de deux petits, on a déjà constaté une. augmentation dans ce nombre qui, L4 * BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. sous l'influence de la domesticité, est souvent de trois et pourrait peut-être s'augmenter encore. Une seconde espèce, qui paraît bien distincte, le Dolicholis salinicola, ainsi nommé à cause de sa préférence pour les terrains salés, pourrait s'acclimater dans nos régions maritimes, dites de prés-salés et dans les choils de l'Algérie et de la Tunisie. Passons maintenant à d'autres groupes de Mammifères et d'abord aux Pachydermes. L'ÉLÉPHANT D'AFRIQUE. — Si la domestication de ce puis- sant animal n'intéresse pas la mère-patrie, elle est d'une im- portance de premier ordre pour nos colonies d'Afrique et surtout pour la plus belle d’entre elles, le Congo. Je n'ai pas l'intention de recommencer ici les instructives conférences faites récemment devant vous par M. Bourdarie et par notre dévoué Secrétaire général M. le baron de Guerne. On vous a démontré que cette domestication était possible et même facile : elle n’exige que des capitaux qu'il s’agit de réunir pour fonder, sur les lieux mêmes, une ferme d'élevage. C'est dans ce but qu'a été créé, par notre Sociélé, le Comité de l'Eléphant d'Afrique. Déjà les souscriptions nous arrivent, et le Conseil municipal de la ville de Paris, désireux d’encou- rager la production de l'ivoire, s'est inscrit pour une somme de 1,000 francs. Nous espérons que tous ces efforts ne reste- ront pas vains. Déjà nos courageux missionnaires, qui ne négligent aucune occasion d'être utiles à la science et à leur pays, ont donné l'exemple Ils peuvent montrer aujourd'hui le premier Élé- phant d'Afrique qui ait été domestiqué dans les temps mo- dernes. C’est à la mission du Fernan-Vaz, dans le Nord du Congo, que s'est réalisé ce premier dressage. Un jeune Élé- phant, âgé actuellement de cinq à six ans, avait été pris vivant, au milieu d’une bande de vingt individus, par des Pahouins. Le R. P. Bulléon nous a raconté, d’une facon pitto- resque, les circonstances de cette capture. Amené à la mission et d'abord attaché par le pied à un solide poteau, on résolut de le dompter par la faim. Au bout de quelques jours, le jeune Éléphant acceptait sa nourriture de la main des missionnaires. Aujourd'hui il est complètement apprivoisé et montre une réelle affection pour le Supérieur. Très familier, il connaît le LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU A DOMESTIQUER. 45 son de la cloche appelant les Pères au réfectoire, et il y est toujours rendu le premier : il sait en ouvrir la porte quand on a la malice de la lui fermer au nez. On l’a dressé à trainer d'abord une poutre, puis un chariot construit exprès pour lui et à tirer ainsi une charge de 600 kilogrammes, c’est-à-dire à faire le travail de vingt nègres. Enfin, on l’a habitué à porter un homme assis sur son cou à la manière de l'Éléphant indien. Aujourd'hui il traine un break léger pouvant contenir des voyageurs. On peut donc affirmer que la domestication de l’Éléphant d'Afrique est un fait accompli. Reste la question de reproduction en captivité dont la pos- sibilité a été niée par tant d'auteurs. Maïs on sait que, pour l'Éléphant d'Asie, c'est seulement la question d'économie qui empêche de rechercher cette reproduction. Étant donnée la lenteur avec laquelle croît l'Éléphant, on trouve plus simple de confier cette reproduction à la Nature et de ne capturer que des Éléphants ayant déjà atteint tout leur développement et pouvant être utilisés après un dressage de quelques mois. D'ailleurs cette reproduction en captivité a été constatée à plusieurs reprises au dépôt de remonte de l’armée anglaise en Birmanie : les femelles pleines n’en continuent pas moins à faire leur service jusqu’au moment de la mise bas. Il en sera de même, très certainement, de l'Éléphant d'Afrique, si la domestication de l’espèce doit être considérée comme le seul moyen de sauver ce magnifique animal d’une destruction complète. Les ZiBres.— C'est encore pour nos colonies d'Afrique que nous vous proposerons de domestiquer le Zèbre, cette remarquable espèce du genre Cheval « plus belle toute nue, suivant l'expression de Buffon, que le Cheval couvert du plus brillant harnais ». Moins fort que l'Éléphant, mais aussi robuste que le Cheval, le Zèbre serait un précieux auxiliaire en Afrique, pays dont il est originaire, puisque les transports s’y font encore à dos d'homme ou au moyen de lourds cha- riots traîinés par des bœufs. Le Cheval et le Mulet n’y vivent que difficilement, surtout dans les régions où ils sont exposés aux piqüres de la Mouche tsé-tsé (Glossina morsitans), qui les fait mourir en quelques heures, tandis que les animaux indigènes sont à l’abri de ce fiéau. Il existe plusieurs espèces de Zèbres, mais un fait doulou- 46 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. reux à constater pour le zoologiste, c'est que deux de ces espèces, le Quagga (Æquus quagga) et le Zèbre de Burchell (E. Burchelli), ont été complètement détruites par l'homme depuis le commencement de ce siècle. Aussi la chasse des espèces qui survivent est-elle formellement interdite dans toute l'étendue des colonies anglaises et allemandes où l'on trouve de ces animaux. Les espèces qui vivent encore sont au nombre de quatre. Ce sont : 1° le Zèbre proprement dit, ou de Montagne (Zquus zebra), confiné dans les régions montagneuses au Nord-Ouest dé la colonie du Cap; 2 le Zèbre de Grévy (£. Grevyi), récem- ment décrit par MM. Milne-Edwards et Oustalet, et qui habite l’autre extrémité du continent africain, c'est-à-dire les mon- tagnes de l'Est de l’'Abyssinie, le Choa et les steppes du Somali, qui s'étendent presque jusqu’à la mer Rouge : d'après cet ha- bitat, on peut affirmer que c'est l’Æippotigre dont parlent les auteurs grecs et romains; 3° le Zèbre de Chapmann (£. Chap- manni), confondu jusque dans ces derniers temps, sous le nom de Daw, avec le Zèbre de Burchell; c’est l'espèce dont la distribution géographique est la plus étendue, puisqu'elle occupe, dans l'Est et le Sud de l'Afrique, tout l’espace qui sépare les deux autres espèces; aussi présente-t-elle de nom- breuses variétés; 4° enfin, le Zèbre de Foa (£. Foai) que M. Prazak et moi venons de faire connaître (1), d’après le beau spécimen rapporté par M. E. Foa de son dernier voyage en Afrique. C’est aussi une espèce montagnarde, provenant des régions accidentées situées sur la rive gauche ou septentrio-, nale du Bas-Zambèze. Elle forme jusqu'à un certain point la transition entre l'Æ. Grevyi et l'E. Chapmanni. L'espèce la plus commune aujourd’hui dans nos jardins zoologiques est le Zèbre de Chapmann. Maïs nous n’en con- naissons guère, à l'état vivant, que les variétés à jambes blanches ou incomplètement rayées qui nous viennent des plaines de l'Afrique orientale allemande, du Mozambique, du Transvaal ou du Zoulouland. Dans l’intérieur du continent, notamment dans la région des Grands-Lacs et dans les plaines du Haut-Zambèze, on trouve des variétés ou sous- espèces de plus grande taille et complètement rayées jusqu'au sabot. Telle est celle que j'ai décrite récemment, d'accord (1) Bulletin du Muséum d'histoire naturelle, séance du 28 novembre 1899. LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU À DOMESTIQUER. 47 avec M. Prazak, sous le nom d’Equus Chapmanni zambe- siensis, et qui provient du pays des Barotzés. Ce sont ces grandes et belles variétés qu'il conviendrait surtout de do- mestiquer. Il n'existe pas de Zèbres au Congo proprement dit, c'est-à- dire dans cette vaste cuvette formée de terrains d’alluvions, constituant ie bassin du grand fleuve qui donne son nom à toute la région. Ces animaux, en effet, préfèrent, comme tous les Chevaux sauvages, les terrains secs et élevés, les mon- tagnes et les steppes. Mais il en existe au Sud, notamment dans cette partie des possessions portugaises de l'Afrique occidentale qu'on appelle le Benguela; il en existe aussi à l'Est dans la partie du Congo belge qui confine à la région des Grands Lacs. C’est dans ces deux régions qu’il convien- drait de capturer vivants des jeunes qui, selon toute proba- bilité, s'acclimateraient bien au Congo et pourraient y devenir la souche de races domestiques propres à remplacer le Cheval. Ce qui est certain, c'est que toutes les espèces de. Zèbres s’acclimatent bien en Europe, et qu'on pourrait en tirer parti, si la concurrence des automobiles ne nous menacçait déjà d'une surabondance de Chevaux. Contrairement aux préjugés ayant cours autrefois, l'expérience a montré que les Zèbres, pris jeunes, ne sont pas plus difiiciles à dresser que les Che- vaux. « J'ai vu, dit M. Cossar Ewart, des Zèbres en captivité parfaitement dociles, et j'ai eu en ma possession une femelle, capturée très jeune au Transvaal, qui était, dès le début, aussi obéissante, aussi douce et aussi sûre que n'importe quel poney. » M. Saint-Yves Ménard, en France, a obtenu les mêmes résultats : il a pu atteler des Zèbres à des voitures légères et les conduire à grandes guides, sur une route, à des allures variées. Ces animaux se prêtent également à la selle ; en ce moment (décembre 1899), on peut voir à Paris, sur un de nos théâtres du boulevard, un Zèbre de l'espèce Equus Chapmanni, entrer en scène monté par une femme. C’est bien là le comble de la domestication pour un Zèbre. Un autre préjugé, également détruit, est celui qui consistait à prétendre que le croisement du Cheval et du Zèbre était impossible. Déjà, en 1815, F. Cuvier avait obtenu des hybrides de ce genre. Plus récemment M. le baron de Parana, au Brésil, a croisé avec un plein succès le Zèbre et la Jument. De son côté, M. Cossar Ewart, d'Edimbourg, a obtenu de 48 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. magnifiques mulets en croisant le Daw mâle avec des Juments de races Poney et Irlandaïise. Les lecteurs de notre Bulletin sont au courant de ces essais dont les résuitats sont des plus encourageants. En France, les races landaïses et des Pyrénées conviendraient bien pour ce métissage. Nous obtiendrions ainsi des Mulets mieux en état de résister au climat de l'Afrique intertropicale que le produit du Baudet et de la Jument, et possédant, avec l’immunité contre la Mouche tsé-tsé, la doci- lité héréditaire de nos races chevalines. Les CERFSs. — Si nous passons aux Ruminants, nous trou- vons d’abord les Cerfs dont on peut dire que toutes les espèces s’acclimatent parfaitement dans nos régions tempérées. Celles qui sont originaires des régions septentrionales de l’Asie et de l'Amérique s’habituent plus facilement, comme on le con- çcoit, à nos hivers. Tels sont l'Elaphurus davidianus ou Cerf à queue de Bison, qui nous vient de la Mongolie, et le Wapiti (Cervus canadensis) qui remplace notre grand Cerf au Ca- nada et dans le nord des États-Unis. Mais je ne vous pro- poserai pas de lâcher ces grandes espèces dans nos forêts où elles feraient concurrence à notre Cerf d'Europe et pourraient même le supplanter sans aucun bénéfice pour nos chasseurs. Le Wapiti, en particulier, devient quelquefois dangereux pour l’homme qu'il attaque sans provocation. Une espèce beaucoup plus convenable, au point de vue qui nous occupe ici, est le Cerf sika (Cervus sika), originaire du Japon et dont la taille tient le milieu entre celle du Daim et celle du Chevreuil. Son pelage d'hiver est d’un brun foncé et sans taches; en été, ce pelage s’éclaircit et montre des taches blanches; les fesses sont blanches en toute saison. Le climat du Japon étant analogue à celui de l'Angleterre, on ne s’éton- nera pas que l'espèce se soit d’abord acclimatée dans les Iles Britanniques. C’est en 1858 que le Vicomte Powerscourt fit venir le premier couple dans son parc de Racecourse, en Irlande. En 1890, les Sikas s'étaient multipliés au point qu’on en comptait plus de cent, bien que l’on en ait tué chaque année deux ou trois. Aujourd’hui cette espèce est répandue dans tous les grands parcs d'Angleterre et du Continent. On en voit un petit troupeau au Jardin des Plantes. Le Sika est très décoratif, surtout lorsque toute la bande s’enfuit en sau- tant à travers les buissons et les taillis. Il a beaucoup de goût s Le Line né et Ci ss re, à LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OU À DOMESTIQUER- 49 « pour le Maïs : il aime aussi le sel et l’on doit mettre à sa disposition, dans un endroit sec, des blocs de cette substance qu’il puisse lécher de temps en temps. C’est une excellente venaison que l’on voit aujourd’hui, assez souvent, à l’étalage des grands marchands de gibier. Le gigot est à peu près de la taille de celui du Chevreuil, et on le vend ordinairement sous ce nom. C'est une des espèces que l'Administration du Muséum a fait lâcher, il y a quelques années, dans les parties réservées de la forêt de Rambouillet. Le Cerf axis (Cervus ais) est une espèce plus belle, mais aussi plus délicate, attendu qu’elle est originaire des régions chaudes de l’Inde et de l'Indo-Chine. Cependant elle est accli- matée depuis plus de cinquante ans dans les parcs de France, d'Angleterre et d'Allemagne. On en voit dans le parc de Horsham appartenant à Sir E. G. Loder, dans celui de Ludwigsburg en Allemagne, et depuis 1869 dans la forêt de Saint-Germain. Dans les premiers temps, comme je vous l’ai dit, les petits périssaient presque tous parce qu'ils naissaient en hiver, mais depuis que les femelles mettent bas au prin- temps, les jeunes réussissent beaucoup mieux. Le Cerf-Cochon (Cervus porceinus), bien qu'originaire des mêmes contrées, est plus rustique, mais aussi moins élégant. Le marquis d’Hervey de Saint-Denys le recommandait sur- tout parce qu'il ne détruit pas d'arbustes ni de feuillages comme les autres Cerfs et les Chèvres. Il se contente de l'herbe et des fourrages qu'on lui donne. M. Pays-Mellier, à la Patau- _ dière, se loue beaucoup de la facilité de son élevage. En toute saison, les petits s'élèvent aisément : ils résistent aux froids les plus rigoureux. Toujours gras, bien portants, ils se con- tentent au besoin des restes des autres animaux, et cependant leur chair est excellente. Ils s’apprivoisent sans peine, sui- vant leur gardien dans la campagne sans crainte des Chiens. Cette espèce serait donc, de tous les Cerfs, celui qu'il serait le plus facile de domestiquer dans nos fermes, où il devien- drait pour nos paysans ce qu'est le Renne pour les Lapons et les Esquimaux. Le Cerf-Cochon est déjà de petite taille, mais les Cervules ou Muntjacs sont plus petits encore, n'ayant généralement que la taille d’un Mara ou d’un Lièvre. On en connaît plu- sieurs espèces originaires de l’Indo-Chine et du sud de la Chine. Le Cervulus Reevesi et le Cervulus lacrymans peuvent Buli. Soc. nat. Accl. Fr. 1900. — 4 50 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. être considérés comme acclimatés en France. On en voit dans la plupart des Jardins zoologiques : leurs formes sont élégantes, leur démarche gracieuse ; leur bois, petit, simplement fourchu et porté sur un pédoncule est aussi décoratif que celui du Chevreuil. Les petits s'élèvent bien malgré le froid. Ces ani- maux résistent aux hivers les plus rigoureux (1879-80) sans autre abri qu'une cabane mal close. Pendant le jour, on les voit se coucher sur la neige. Plusieurs couples de Cervulus Reevesi ont été lächés à Rambouillet. Cette espèce se recom- mande pour les parcs de peu d’étendue, et sa petite taille ôte toute espèce de danger à ses coups de corne. Cependant, si l’on redoutait ses attaques pour de jeunes enfants, on trouverait encore, dans la famille des Cerfs, une espèce de la même taille et dépourvue de cornes dans les deux sexes. C'est l'Aydropoles inermis de Chine, vulgairement appelé Chevrotain prolifique bien que ce soit un véritable Cerf et non un Chevrotain. Son nom SpéCique lui vient du nombre de ses petits qui est de quatre à six à chaque portée. En 18717, feu Cornély avait acheté un couple qui lui donna la première année trois petits dont deux survécurent; en 1878, il eut sept naissances et quatre en 1879. Ces résultats sont encourageants. Le mâle se distingue de la femelle par des canines qui lui sortent de la bouche, mais sa morsure est sans danger. ANTILOPES. — Les Antilopes nous offrent une variété encore plus grande que les Cerfs, et beaucoup d'espèces peuvent déjà être considérées comme acclimatées. Le temps me manque pour vous les signaler toutes : je vous citerai seulement quelques exemples. Le Nilgaut (Boselaphus tragocamelus) est une espèce grande comme un petit Cheval, originaire de l’Inde où on le chasse à courre comme le Cerf en France. Au parc de la Mandria, en Italie, M. Comba avait lâché, en 1862, une dizaine d'individus: dix ans après il en possédait cent soixante-douze têtes, vivant en toute liberté dans ce parc. La chair de cette espèce est excellente. - L'Élan du Cap (Oreas canna) est plus gros encore, souvent aussi volumineux qu’un Bœuf. Il est aujourd'hui parfaitement acclimaté dans nos parcs. Ses habitudes calmes rappellent les Bovidés. Il pourrait fournir d'excellente viande de bou- cherie. LES MAMMIFÈRES A ACCLIMATER OÙ A DOMESTIQUER. 51 Le Kob du Sénégal (Xobus koba ou Sing-sing), bien que provenant d'un pays plus rapproché de l’Equateur, s’ac- climate également bien en France. En 1880, M. Brière de l'Isle avait envoyé un male et deux femelles au Muséum. Ces femelles ont produit dix petits jusqu’en 1887. Ces animaux sont très rustiques et vivent bien à l’air libre en toute saison. Beaucoup d’autres espèces d’Antilopes ou de Gazelles sont dans le même cas. KANGOUROUS ET PHASCOLOME. — Quelques mots seulement de ces Marsupiaux originaires de la Nouvelle-Hollande et qui s’'acclimatent bien en Europe. Les Kangourous, en raison de leurs allures singulières, sont très décoratifs et conviennent surtout dans les parcs où le terrain est accidenté, montueux ou rocailleux. Ils se reproduisent bien en Europe. Leur chair est très bonne et leur peau sert à faire des gants et des four- rures. En Prusse, en 1890, on pouvait voir une bande de Kangourous géants lâchés dans un état de liberté presque complète. Leur nourriture est celle de tous les Herbivores. Il en existe une grande quantité d'espèces dont la taille et les couleurs sont variées : on peut voir la plupart de ces espèces dans le parc de Tring, en Angleterre, appartenant à notre collègue Sir W. Rothschild. Le Phascolome ou Wombat (Phascolomys wombal), avec ses formes trapues et qui rappellent celles d’un jeune Ourson, a la dentition d’un Rongeur. Dans la Tasmanie, son pays natal, c'est le compagnon des pécheurs qui l’élèvent sans aucun soin ; il rôde autour des cabanes comme un Chien. En Europe il vit très bien et se reproduit même en captivité; chaque portée est de trois à quatre petits. Il se nourrit de four- rages, de carottes et aime beaucoup le lait. Malgré son carac- . tère stupide, il s’attache à la personne qui s'occupe de lui et la suit comme un Chien: tel le fameux Piéru de M. Pays- Mellier dont je vous ai déjà cité le nom (1). Sa chair délicate pourrait encore être améliorée. Sa peau fournit une fourrure d'un brun fauve, chaude, moelleuse, épaisse, dont on fait des manchons, des tours de cou, des doublures, etc. Le Phasco- lome, en un mot, est encore un de ces animaux qu'il y aurait - lieu de domestiquer dans nos fermes. (1) Voir Bulletin, 1899, page 176. 52 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Je m'arrête ici, Mesdames et Messieurs, non pas que j'aie épuisé mon sujet, loin de 1à, mais parce que je craindrais d’a- buser de votre attention. Par les résultats déjà obtenus dans cette voie féconde de l’acclimatation et de la domestication, vous pouvez voir que les obstacles s’aplanissent d'eux- mêmes, grace aux ressources inépuisables de la Nature, lors- qu’on sait solliciter son aide avec persévérance et qu'on a la ferme volonté de réussir. Pour faire de l’acclimatation, il n’est pas nécessaire de dépenser des millions ou de posséder un comté d'Angleterre, Une propriété de quelques hectares est largement suffisante et l'achat des animaux vivants n'exige qu'une somme relativement insignifiante : une paire de Muntjacs coûte 150 fr.; de Cerfs-Cochons, 300 fr.; de Sikas 350 fr., et cette première dépense est bientôt largement com- pensée par le produit des élevages. Je conseille, surtout aux débutants, de se borner à l’éle- vage d’une seule espèce, choisie avec discernement suivant l'étendue et la nature du terrain dont on dispose : le Mara ou le Cerf-Cochon, par exemple. Un seul essai, poussé avec con- viction et persévérance pendant plusieurs années, sera plus profitable et plus honorable pour son auteur que dix essais menés de front sans résultats appréciables. Je rappelle aussi aux éleveurs que la Sociélé d'Acctimatalion est toujours prête à les aider, non seulement en leur offrant les conseils de ses spécialistes, mais encore en leur procurant des cheptels qu'elle peut, presque toujours trouver, dans de bonnes con- ditions, chez les Membres mêmes de la Sociélé. Ils peuvent ainsi se procurer, à peu de frais, les animaux dont ils veulent essayer l'élevage. Ceux qui s’engageront dans cette voie, outre le plaisir qu'ils en éprouveront certainement, auront de plus la satisfaction d'avoir bien mérité de l’humanité et de leur patrie. 53 REMARQUES SUR DES ÉDUCATIONS D’'ATTACUS BAUHINIÆ ET CYNTHIA FAITES A PARIS par A.-L. CLÉMENT, Président de la Section d'Entomologie (1). J'ai l'honneur de présenter à la Société deux observations relatives à des Bombyciens séricigènes. La première a trait à une espèce du Sénégal, Attacus (Faidherbea) bauhiniæ, dont cinq cocons m'avaient été remis il y a plus d’un an par M. de Guerne. L'un d'eux était déjà éclos, et un autre était rempli de Chalcidiens qui avaient vécu aux dépens de la Chrysalide. Les trois derniers ont donné leur papillon, mais à des époques très éloignées les unes des autres. La première éclosion, en effet, a eu lieu en août, la deuxième en septembre (un mois plus tard), et la troisième en novembre. Les deux premiers papillons étaient des mâles, le troisième une femelle. L'irrégularité de ces éclosions montre que notre climat ne se prête nullement à l'éducation de cette belle espèce dont la chenille, d’ailleurs, vit sur des plantes exclusivement équa- toriales. Mais comme la soie produite par cette chenille est très belle, je crois qu'elle mériterait qu’on s’en occupe sérieuse- ment dans les colonies françaises d'Afrique. Ma dernière observation est relative à l’Atlacus cynthia. J’en ai élevé plusieurs pontes cet automne en nourrissant les chenilles exciusivement de Lilas. Ces chenilles ainsi alimen- tées ne m'ont paru présenter aucune différence avec celles nourries de feuilles d’Ailante, mais les cocons sont d’une teinte plus vive qui rappelle assez celle des cocons d'Attacus arrindia. (1) Communication faite en séance générale le 8 décembre 1899, 54 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Les chaleurs tardives de l’année 1899 m'ont amené de cette éducation plusieurs éclosions dont les Papillons sont nor- maux. Je compte sur les éclosions du printemps pour faire de nouvelles éducations avec le Lilas et montrer à l'Exposition de 1900 cet Insecte vivant, sous ses divers états, dans le but d'appeler de nouveau l'attention sur ce séricigène dont le cocon pourrait parfaitement être utilisé dans l’industrie et qui vit maintenant depuis plus de vingt ans à l'état sauvage sous le climat de Paris. 55 TRAVAUX DE COLONISATION AGRICOLE À MADAGASCAR (1) par Paul CAMBOUÉ, Missionnaire à Arivonimamo (Madagascar). Arivonimamo, 19 mai 1899, Madagascar (Imérina). Monsieur le Secrélaire général de ta Société nationale d'Acclimatation de France, Paris. Veuillez tout d’abord agréer mes sentiments de reconnais- sance pour le bon accueil que vous avez bien voulu me faire pendant mon séjour à Paris. Depuis mon retour à Madagas- car, chaque malle de France m'’apportant le Bullelin de la Sociélé, active encore ma gratitude. Depuis longtemps j'’au- rais dû vous le dire, mais les diverses étapes de ma vie de- puis huit mois m’avaient conduit bien, bien loin de l’acclima- tation. En arrivant à Tananarive, chargé de la procuration de la Mission centrale, je dus, quelque temps après, rem- placer l’aumônier de l'hôpital militaire de Soavinandriana. Puis la création d’une École d'agriculture dans l’ouest de l’Imérina m'a conduit à Arivonimamo, chef-lieu du cercle mi- litaire de ce nom. C’est de là que je vous écris ces quelques lignes, au milieu des sollicitudes d’un établissement agricole et petite ferme-école pour nos jeunes Hovas de la région. J'y joins une petite note sur l'Emploi des Bœufs porteurs à Madagascar (2), extraite du Journal officiel de la colonie du 15 mai dernier, afin de compléter les quelques détails que j'eus l'honneur de donner à la Sociélé sur ce sujet, lors de mon voyage en France. L'École professionnelle de Tananarive a poussé activement, dans un sens pratique, mes essais de soie de la grande Arai- (4) Lettre lue en Séance générale le 8 décembre 1899 et à la Section de Colo- nisation le 8 janvier 1900. (2) Voir ci-après, page 60. 56 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. gnée Halabe de Madagascar (1), et son zélé directeur, M. Nogué, arrivera, je l'espère, à faire confectionner pour l'Exposition de 1900, une quantité suffisante de tissu en soie de Halabe pour encourager de nouveaux efforts dans le sens de son exploitation industrielle. Icimême, à Arivonimamo, je compte installer dans quelques semaines une machine à tisser la soie de ÆZalabe du modèle de celles employées par l'Ecole professionnelle de Tanana- rive, dans la petite magnanerie que nous essaierons de créer parallèlement à notre modeste ferme-école. Une des grosses difficultés pour l'élevage de nos Bovidés est le manque de fourrage frais durant la saison sèche, qui dure ici de mai à novembre. J’ai entendu dire grand bien, à ce sujet, du Cactus inerme d'Algérie, qui résiste aux grandes sécheresses et peut fournir un bon fourrage frais aux Zébus. J'en ai vu quelques pieds au Jardin d’Essai de Nanisahana, près de Tananarive ; mais je n’ai pu m'en procurer la moindre part. Je serai bien reconnaissant à la Société d’Acclimata- lion de France si elle pouvait m'en faire envoyer quelques spécimens pour les planter et essayer leur acclimatation à Arivonimamo, en vue de servir à la nourriture des Bovidés de notre petite ferme-école. Permettez-moi de recommander à la Sociélé et à ses Membres soucieux du progrès de l'influence française à Ma- dagascar par l’agriculture, notre école ou ferme d’Arivoni- mamo, chef-lieu d’une région du centre de Madagascar des plus intéressantes et que connaît bien votre honorable pré- sident, M. Le Myre de Vilers, qui a déjà beaucoup encouragé nos efforts en Imérina, et à qui je vous prie de vouloir bien faire agréer l'hommage de ma respectueuse reconnaissance. Veuillez agréer, etc. (1) Voir Bulletin de la Société d’Acclimatation, 1887, Aranéides utiles et nuisibles de Madagascar, et Revue des Sciences naturelles appliquées, 1892, 1% semestre, La soie d'Araigrée. 57 EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. PROGRES DU DRESSAGE D'UN ÉLÉPHANT D'AFRIQUE AU FERNAN-VAZ (1). Sainte-Anne (Fernan-Vaz), le 15 août 1899. Monsieur le Secrétaire général, Je viens de recevoir votre leltre m'annonçant que la Societé d’Accli- #atalion nous avait décerné une grande médaille d’argent, pour récompenser les efforts que nous avions faits pour dresser et domesti- quer l'Eléphant d'Afrique. Nous avons élé heureux et fiers de celte distineclion, et je viens au- jourd’hui, monsieur le Secrétaire général, vous prier d'être auprès des Membres de la Société l'interprète de nos sentiments de remerciements et de reconnaissancz2. Je me ferai un plaisir, un devoir même, de renseigner le Conseil sur l'ensemble de notre œuvre, œuvre essentiellement de colonisation agricole, seul moyen de vraie civilisation en Afrique, œuvre à laquelle je me dévoue depuis bientôt vingt années. Je voudrais pouvoir le faire aujourd’hui, mais hélas ! le temps me manque, le courrier devant partir immédiatement pour le Cap Lopez. Je me contenterai de vous signaler un progrès obtenu par notre jeune élève Fritz. Nous avons pu l’atteler à un.break, et nous sommes parvenus à le diriger par une méthode qui n’a pas été, à ma connaissance, encore employée, car dans les Indes, les cornacs dirigent ces animaux en les piquant sur la tête. Nous sommes arrivés à diriger Fritz au moyen de rênes passées au- tour de sa trompe, el auxquelles il obéit docilement. Je me permets de vous envoyer deux petites photographies instan- tanées représentant Fritz dans ce nouvel attelage. Dans le break se trouvent M. le Commissaire général du Gouvernement et son Secré- taire visitant nos plantations. Je vous prie d’agréer, etc. G. BICHET, Supérieur de la Mission de Sainte-Anne au Fernan-Vaz. >< (1) Voir Bulletin de la Société d’Acclimatation, février 1899. 58 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. LE ZLophyrus pini, HYMÉNOPTÈRE NUISIBLE AUX PINS; MOYENS DE LE DÉTRUIRE (1). Les Insectes nuisibles aux Pins que vous m'avez adressés sont des larves de Zophyrus pini. L’Insecte parfait est un Hyménoptère du groupe des Tenthrèdes. Il apparaît deux ou trois fois en avril-mai, puis en juillet, et enfin en septembre-octobre. Le meilleur moyen de des- truction consiste à réunir en tas pendant l'hiver les aiguilles de Pin tombées qui se trouvent auprès des arbres et sur lesquelles se trouvent fixés les cocons de ces larves. On met ensuite le feu à ces tas d’aiguilles. On devra aussi pratiquer l’échenillage, et pour cela on secouera les arbres le matin, alors que les larves sont encore engourdies, et on les recueillera sur des draps pour les écraser ensuite. Après avoir débar- rassé un arbre, il sera bon de mettre au pied de la cendre ou de la chaux vive, de facon à empêcher les larves qui auraient pu échapper de remonter. On pourra de la même facon, ou par l'emploi de bandes goudron- nées mises à la base des arbres, empêcher les progrès d’une invasion. Si l’on tient à sauvegarder tout un bouquet d’arbres, on pourra l'en- tourer d'un fossé à parois verticales. La destruction des cocons en hiver est encore le procédé le plus sûr et le plus pratique. Si vous pouviez me faire faire un nouvel envoi avec échantillons des dégats et larves en assez grand nombre pour faire l'élevage, je vous en serais bien reconnaissant. — Cela serait uiile pour la collection de la Séafion entomologique de Paris. Recevez l'assurance, etc. D' PAUL MARCHAL, Secrétaire de la Section d’Entomologie. ES ENVOIS DE GRAINES FAITS AU JARDIN COLONIAL PAR LA SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. Le 25 août 1899. Monsieur le Député et cher Collègue, Vous avez bien voulu faire adresser au Jardin Colonial une nom- breuse collection de graines provenant de diverses parties du monde. J’ai l'honneur de vous en accuser réception et vous prie d’agréer mes sincères remerciements pour cet important envoi. Parmi les graines (1) Note transmise à M. Pilastre, Membre de la Société, en réponse à une demande de renseignements adressée par lui au Secrétariat. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 29 qui le composent, il en est qui présentent un réel intérêt. Toutes seront semées au Jardin Colonial, et je ne manquerai pas de vous tenir au courant des résultats qui auront pu être obtenus. Veuillez agréer, etc. Le Ministre des Colonies, ALBERT DECRAIS. Nogent-sur-Marne, le 21 septembre 1899. Monsieur le Président, La Société d'Acclimatation a bien voulu mettre à la disposition du Jardin colonial un lot de graines qui ont été immédiatement semées et dont un grand nombre ont pu germer grâce aux soins particuliers ct aux conditions spécialement favorables dans lesquelles les semis ont été effectués. Le Jardin colonial pourra ainsi ou enrichir ses collections ou envoyer dans les Jardins d'essai des colonies un certain nombre de plantes intéressantes. Je ne puis donc que vous renouveler l'expression de ma vive gratitude. L'action de la Société d'Acclimatation concourt au même but que celle de l'Administration : faire connaître et propager le plus rapide- ment possible les espèces utiles en distribuant des semences. La pensée m'est donc venue que le Jardin colonial pourrait en cette cir- constance aider la Société d’Acclimatation dans son œuvre. En effet, il arrive souvent qu’un grand nombre de graines envoyées par la Sociéfé ne germent pas. La raison en est dans ce que la plupart des semences des plantes de nos colonies perdent rapidement leurs facultés germinatives ou exigent des précautions spéciales soit pour leur transport, soit pour leur semis. Or, lorsque des Membres de la So- ciété, peu versés dans les pratiquessouvent très délicates du semis des graines tropicales, éprouvent des échecs, ils se découragent ou accusent même la Société de ne leur envoyer que de mauvaises semences. Il serait possible, semble-l-il, de remédier à un semblable état de choses en opérant de la facon suivante : Le Jardin colonial à qui toutes les graines seraient envoyées dès leur arrivée à la Societé en ferait l'épreuve préalable. Il rendrait ensuite ces graines à la Société d’Acclimatation en accompagnant l’envoi d’une note indiquant la proportion des graines bonnes et des précautions à prendre pour en assurer la germination. Si besoin en était, les se- mences seraient par ses soins mises en stratification et renvoyées germées. Enfin, dans le cas de graines absolument délicates, celles-ci seraient semées et les plants tenus à la disposition de la Société d'Ac- climatation. De cette facon la Société n'agirait plus qu’à coup sûr, ne distribuant 60 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. que des semences de bonne qualité et capables de donner rapidement d'heureux résultats. Les graines ne seraient plus perdues et la propa- gation des bonnes espèces se ferait d’une facon plus sûre et plus rapide. 5 Si la Societé d'Acclimatation veut accepter le concours du Jardin colonial, celui-ci lui est dès aujourd’hui acquis d’une facon complète. Veuiilez agréer, etc. Le Directeur du Jardin Colonial, J. DYBOWSKI. 19 octobre 1899. A 1, Le Myre de Vilers, President de la Société Nationale d'Acclimatalion. Monsieur le Président et cher Collègue, Vous avez bien voulu faire parvenir au Jardin Colonial diverses semences dont la propagation peut présenter un réel intérêt au point de vue colonial. J'ai l'honneur de vous adresser mes sincères remerci- ments de celte nouvelle preuve d'intérêt que vous voulez bien porter au développement de notre établissement agricole. Sous peu, vous recevrez, par les soins de l’Administralion du Jardin colonial, un relevé des résultats qui auraient été obtenus à la suite du semis des graines provenant de la Sociélé d'A cclimalation. Veuillez agréer, etc. Le Ministre des Colonies, ALBERT DECGRAIS. EXTRAITS ET ANALYSES. SUR L'EMPLOI DES BŒUFs (ZÉBUS) PORTEURS A MADAGASCAR. Le capitaine Collin, commandant le cercle annexe de Mahabo (deuxième territoire militaire), vient de faire un intéressant essai de dressage et d'utilisation de Bœufs porteurs qu’il a peu à peu réussi à substituer aux bourjanes (1) pour le ravitaillement des postes de sa (1) On nomme ici Bourjanes les porteurs indigènes qui font le transport des colis et des voyageurs. EXTRAITS ET ANALYSES. 61 circonscriplion administrative. Les Sakalaves du Ménabé, et en géné- ral toutes les populations de la côte Ouest, peu laborieuses, répugnent surtout au métier de bourjane, que les nécessités de l'occupation du pays nous ont malheureusement jusqu'ici obligé à imposer à un assez grand nombre d'indigènes. L'heureuse initiative du capitaine Collin, outre qu'elle simplifiera la question, si complexe dans cette région, du transport des approvisionnements nécessaires aux troupes, améliorera la siluation de la population indigène et contribuera puissamment à faire accepter notre implantation dans le pays. L'utilisation du Bœuf comme animal porteur n’est pas nouvelle à Madagascar. Dans presque loutes les parties de l’île, il a été plus ou moins employé, mais toujours sur une pelite échelle, probablement à cause de l’insignifiance des relations commerciales. Dans le cercle acluel de Mahabo, notamment, le gouverneur hova Razafindrazaka avait déjà, sous l’ancien Gouvernement malgache, réussi à vulgariser, dans une certaine mesure, l'usage des Bœufs por- teurs dans la population émigrée du plateau central, la population autochtone étant inhabile au dressage de ces animaux. Le dressage, dans le cercle de Mahabo, a élé effectué conformément à l'instruction de M. le Chef du Service vétérinaire, approuvée par le Gouverneur général à la date du 1°" août 1898. L'animal est d’abord apprivoisé et dompté. Un anneau en fer, muni d’une corde, est passe au travers de la cloison séparant les narines et sert d’appareil de contention. Plus tard, lorsque l'animal est complète- ment dressé, un simple licol suffit. Au début du dressage, les Bœufs sont exercés à porler, pendant environ deux heures par jour, des charges progressives allant de 20 à 80 kilos. Le bât employé se compose essentiellement de deux arcades en bois réunies à leur sommet par une traverse et à leurs extrémités par deux entreloises. À ces extrémités s'adaptent les étriers de bât, égale- ment en bois et mobiles autour d'une charnière. Les arcades sont doublées en dessous de coussins épais et souples destinés à protéger le dos de l'animal. Le bât lui-même, lorsqu'il est mis en place, repose sur une matelassure faile d’un sac de toile bourré de paille de riz. Il est assujetti au moyen d’une sangle en peau de Bœuf passant sous le ventre de l'animal. Les charges sont maintenues à l’appui de bât au moyen de cordes fixées, d’une part aux étriers et de l’autre à la traverse qui unit les arcades. En un mot, le bât du Bœuf porteur ne diffère du bât de Mulet que par son évidement central et l'indépendance de la matelassure. Tous les bâts en service dans le cercle ont été confectionnés par un milicien betziléo exerçant la profession de charpentier avant son incor- poration, de sorte que la création de ce matériel n’a occasionné au- cune dépense. Le cercle de Mahabo dispose actuellement de cinquante Bœufs por= 62 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. teurs dont le rendement est sensiblement le même que celui de deux cents bourjanes, un Bœuf équivalant à quatre bourjanes comme agent de transport. Ils sont conduits par des miliciens et des tirailleurs. Depuis le 20 février 1899, grâce à cette heureuse innovation, aucun bourjane n’a été employé dans le cercle pour le service des troupes. Le poids des denrées transportées par animal a varié de 50 à 70 kilos, mais il n’est pas douteux que, l’entraîinement aidant, ce poids puisse être considérablement augmenté. En résumé, le capitaine Collin a très heureusement résolu le pro- blème des transports dans sa circonscription, et il est permis d’'espé- rer que la diminution des charges qui pesaient naguëre sur la popula- tion, du fait du ravitaillement des troupes, sera d’un effet heureux sur la population définitive de la région de Mahabo. Extrait du Journal officiel de Madagascar (15 mai 1899). >< LA CULTURE DU FIGUIER EN GRÈCE. Le Figuier est cultivé dans toute la Grèce, mais principalement dans certaines provinces méridionales du Péloponèse, notamment dans la Messénie et dans la province de Calamata, ainsi que dans quelques- unes des îles : Andros, Tinos et l'Eubée. En Messénie, le Figuier est un arbre de 4 à 5 mètres de hauteur qui vient aussi bien dans les terrains argileux et calcaires que dans les sols sablonneux, et sur les collines aussi bien que dans les vallées et les plaines. Les différentes espèces de Figuiers cultivés en Messeénie sont : le Caprifiguier {Figuier sauvage) dont les fruits ne mûrissent pas et ne sont pas mangeables. Les Caprifigues servent exclusivement à la caprification. Elles se subdivisent en plusieurs catégories dont la meilleure est la CAliveria, petites figues de couleur miel foncé qui servent à caprifier les figues des vergers. Viennent ensuite les Kokinokentria, les Opsimokentria et les Aporo- kRentria, ces dernières de qualité inférieure. Les Figuiers cultivés se distinguent par les dénominations sui- vantes : Avgossikia (Figuier d'œuf), dont les fruits ont la forme et la grosseur d'un œuf et sont tantôt verdâtres, lantôt violacés. Ces figues sont les meilleures de Calamata; elles se mangent à l’état frais. La première catégorie est mûre en mai; la deuxième, qui est la moins bonne, müûrit en août et septembre; AC di EE ai AA TE V ë EVA EXTRAITS ET ANALYSES. 63 Kontroumbossikia, dont les fruits vert pâle se mangent aussi à l’état frais ; D Vouvalossikia, figues très grandes et de couleur jaunâtre ; Kokinossikia, figues pelites, carminées ou violacées, trés douces et fort recherchées. Ces fruits sont consommés à l’étal frais: on les fait également sécher; Livanossikia, figues blanches et vertes ; Ormathossikia (Figuier chapelet). C’est le Figuier qui donne presque exclusivement les bonnes figues sèches de Calamata si connues dans le commerce. Ses figues, grandes, de couleur verte, une fois dessé- chées, deviennent or paille; elles ne mürissent qu’en juillet ou août, sont beaucoup plus sucrées mais moins succulentes et moins fraîches que les précédentes; c’est pourquoi elles se mangent à l’élat sec. La multiplication des Figuiers se fait ordinairement en Messénie par boutures ; elle se pratique également par la greffe, sur des Caprifigues, de figues nalurelles de semence ou d’autres variétés. En Messénie,le Figuier est cultivé, soit séparément dans des vergers spéciaux, soit avec l’Olivier, rarement avec la Vigne. Les plantations se font ordinairement en octobre et en février ou mars. La culture annuelle du Figuier se fait de la manière suivante: A la fin d'octobre, après la chute des feuilles, on procède d'abord au dé- chaussement de l'arbre; autour de sa racine, on creuse un bassin d’un diamètre de 2 à 3 mètres qui est destiné à recevoir les eaux des pluies de l’automne. En décembre ou janvier, on donne un labour, puis, au mois de mars, un binage, en suivant une direction perpendiculaire à celle du labour; et un mois après, soit en avril ou mai, un hersage. Enfin, au mois de juillet, dans les terres sèches qui se trouvent sur les collines au Midi, quelques cultivateurs buttent les racines afin de les préserver des rayons brülarts du soleil. L'encrais n’abonde pas en Messénie, l'élevage du bétail ne corres- pondant pas aux étendues cultivées; aussi le Figuier n’en recoit qu'une faible proportion. Cependant ceux qui sont cultivés sur les collines sont fumés régulièrement afin de conserver leur fécondité. On n'émonde jamais le Figuier; quelquefois seulement on le dé- barrasse des branches sèches, mais sans se servir de la serpe. La fructification est très favorisée par le climat. Presque tous les boutons à fruits se développent et mürissent, au cours de l'été, mais successivement, les uns après les autres. Les figues qui sont prés de la base du bourgeon sont les premières à mûrir. Ainsi il arrive à l’Or- mathossikia que les petites figues qui sont à l'extrémité des bourgeons mûrissent plus tard ou tombent avant de mûrir complètement. Cette fructification graduée s’observe surtout au Caprifiguier. Chez les va- riétés tardives il arrive cependant que les bourgeons à fruit n’arrivent pas à sortir à temps de leur état embryonnaire avant l'hiver et, restant 64 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION ainsi sur l'arbre, se développent l’été suivant; les cicatrices des feuilles de l’année précédente donnent alors naissance aux figues pré- coces ou « figues fleurs » qui sont plus succulentes ordinairement que celles de l'été et se prêtent moins bien au séchage. La caprification est en usage dans toute la Messénie et, ainsi qu’à Smyrne, elle y est considérée comme la condition s/ne qua non de la culture du Figuier. Et comime plus des deux tiers des Figues déjà formées et développées tombent de l’arbre, on applique ce procédé dans le but de conserver et de faire mûrir sur l’arbre le plus de fruits possible. La caprification se fait en mai ou juin, des que le petit orifice de la figue qui se trouve au centre de la partie opposée à la base, c’est-à- dire l'œil, a commencé à laisser jaillir une petite goutte de liquide dense. Alors on accroche sur les branches une sorte de chapelet formé de caprifigues enfilées de jonc. Les caprifigues contiennent des In- sectes connus sous le nom de Cynips psenes qui en sortent et pénètrent dans la figue par l'œil ouvert en y provoquant une irritation qui fait ailirer vers le fruil une plus grande quantité de sève. L'œil alors se ferme petit à petit et le fruit grossit. Le danger de la chute est ainsi écarté et un mois après la figue est mûre. La caprification n'aboutit pas si elle est faite soit trop tôt, quand l'œil est encore trop serré, ou trop tard, quand il est trop ouvert et que la chute de la figue est proche et imminente. Or, comme les figues, aussi bien que les caprifigues, ne müûrissent pas en même temps, on se trouve obligé de répéter cetle opération au moins trois fois afin que toutes les figues puissent en bénéficier. Les caprifigues récemment recueillies sont considérées comme les plus efficaces car elles con- tiennent encore tous leurs Insectes. Lorsque les caprifigues sont trop chères et que la caprification de- vient alors l'opération la plus coûteuse de la culiure de la figue, les cullivateurs, pour obvier à cet inconvénient, plantent dans les vergers mêmes, et à côté des Figuiers, des Caprifiguiers d'espèces analogues pour que la caprification se fasse d'elle-même. Pendant les années 1892, 1893, 1894, 1895, 1896 et 1897 ont été exportés de Grèce 84,473,000 kilogr. de figues représentant une valeur totale de 16,797,000 fr., donnant ainsi une moyenne annuelle de 14,078,927 kilogr. d'une valeur de 2,799,600 fr., soit 0 fr. 20 le kilo- gramme. (Feuille d'informations du Ministère de l'Agriculture.) 30 décembre 1899. DE LA NATIONALE D'ACCLIMATATION ï (Revue des Sciences naturelles appliquées) ’ 47 ANNÉE MARS-AVRIL 1900 ’ SOMMAIRE " SERRE. — Notes de Zoologie pure et appliquée, recueillies en Californie... ,.. 3. sent ROLAND-GOSSELIN. — Documents sur les qualités ignifuges des Opuntia. 73 RABUT. — A propos de la sélection du Bananier UMA ARE MEET TI Extraits des procès-verbaux des Séances de la Société : s génécales du 22 décembre 1899 et du 26 janvier 1900..........,.....e....e _ 80-85 tion (Mammifères). — Séances des 8 janvier ét 5 février .................... 89-91 ction (Ounithologie-Aviculture). — Séances des 15 janvier et 13 février. ......... 93-95 Section (Aquiculture). — Séances des 29 janvier et 26 février... ................ 96-99 Section (Entomologie). — Séances des 22 janvier et 19 février .,................ 101-103 Section (Botanique). — Séances des 16 janvier et 28 février .................... 105-107 Le ion (Colonisation). — Séances des 8 janvier et 5 février. .................... 109-112 Extraits de la correspondance : LECLERC. — Araujia sericifera en pleine terre dans l’ouest de la France ........ 114 nn EST IE Gino Hilele +... ..........-....... A HARBETOET Pis. = lies Hancorma.:..:..:........................ HS pe Extraits et Analyses : LNÉ-EDWARDS. — Les Éléphants de la ménagerie du Muséum de Paris.... 117 RRE. — Lettres de Californie. ........................es.verscovreeee 118 2 JORE. — La culture et le commerce des Bananes à Costa-Rica ........:.... 125 La Societé ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions ses par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. ES Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, RUE DE LILLE, 41 PARIS ET À LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE We: Le Bulletin paraît tous les mois. DÉSINFECTA ANTISEPTIQUE f Le seul joignant à son Efficacité, Scientifquement dér pntrée, l'immense avantage de n'être »°, Toxique ni C Hémostatique et Stvrytique puissant. AGopie par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Sant: de l'Armée, la Préfecture de La Seine ef la plupart des Sevvices d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu indispens2àble dans la pratique vétérinaire, RER DR PR Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques ct Prospectus : SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs - Bourgeois (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour èv..cr les nembreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRÉSYL-JEYES. 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Phoques (Otaries) et Saumons. — Introduction de Faisans. — Passage d’Ibis. — Découverte au Texas du 7’yphlomolge Rathbuni, Batracien cavernicole. — Essai d’ostréiculture, — Réglementation de la pêche aux Crevettes. Pour faire suite à ma précédente communication (adressée à la Société zoologique de France) et dont vous devez avoir connaissance (2), je vous entretiendrai de la question des Phoques et des Saumons, fort intéressante pour les biolo- gistes, et qui a pris, ici, une nouvelle tournure. _ Les colonies de Phoques devaient être réduites, et les pêcheurs nageaient... dans la joie. Le Département du Trésor, après enquête, avait donné l’autorisation au Com- mandant du 12° district des Phares et Signaux de permettre à la Commission âes Pécheries de Californie, d'envoyer des chasseurs aux Iles Farallones à Ano-Nuevo, Point Reyes et autres réserves, afin d'y tuer des Phoques. Il était interdit à ces chasseurs de tuer des Oiseaux ou tout autre animal, autre que les « Sea Lions ». De plus, les Phoques tués de- vaient être dépecés ou enterrés. Aussitôt que l'autorisation du Gouvernement fédéral fut parvenue à San-Francisco de tuer les Phoques des Iles Faral- lones, une expédition, composée de quatre hommes, porteurs de 3,000 cartouches, et dirigée par le Commissaire des Pé- cheries A. Wilson et L. Green, qui chassèrent les Phoques aux Farallones il y a vingt ans, quittait ce port, sur un re- morqueur, pour commencer le massacre. Les femelles et les jeunes Phoques n'étaient pas encore rassemblés sur les rochers à l’arrivée de l'expédition aux iles, (1) Communication lue en séance générale le 8 décembre 1899. (2) Voir ci-après. Les Mammifères dont il s’agit ici et que l’auteur désigne sous le nom de Phoques sont en réalité des Otaries (Rédaction). Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1900. — 5. 66 BULLETIN DE LA SOCIÉLÉ D’ACCLIMATATION. mais une quarantaine de mäles (Phoques gris) furent tués sur le « Saddle Rock ». Ces animaux, habitués à une douce quiétude, se rendant parfaitement compte du danger qu'ils couraient, commen- cèrent à disparaître des Farallones, comme ils avaient dis- paru à Point Reyes après le premier coup de feu de leurs exterminateurs. Un petit canot à vapeur dut être envoyé sur le Sacramento et ses tributaires, en raison des plaintes formulées par les pêcheurs que les Phoques, chassés des rocs de l'Océan, où ils avaient élu domicile, avaient remonté le cours des rivières et y détruisaient une grande quantité de Poissons. Une seconde expédition, envoyée à Ano-Nuevo sur la côte, et commandée par le capitaine Scott, aurait tué 125 mâles en tirant d’un petit steamer, les rookeries (roches où sont établies les colonies) ayant été désertés après le premier coup de feu. Le massacre des Phoques était donc à peine commencé qu'un télégramme envoyé de Washington par le Secrétaire du Trésor, intimait l’ordre d’avoir à le cesser immédiatement ; la permission, précédemment accordée, était annulée, et les chasseurs devaient quitter sans retard les réserves du Gou- vernement. Le Président de la Commission des Pécheries demandait aussitôt, par lettre, la cause de ce revirement, en rappelant les pétitions qui avaient démontré la nécessité de réduire le nombre des Phoques sur la côte du Pacifique ; les avis favo- rables des Professeurs Joräan et Gilbert, de l'Université de Stanford et de M. Harkness, ex-président de l’Académie des Sciences de Californie. Le premier demandait seulement que le gros Phoque gris (Eumelopias), devenu rare, füt res- pecté. Le Président de la Commission des Pécheries rappelait, en outre, que l'État de Californie est adonné à l’agriculture et à l’industrie des mines qui ont accaparé un grand nombre de rivières dans lesquelles les Poissons ne peuvent plus déposer leurs œufs et se reproduire naturellement ; 2° que l'État dé- pense des sommes importantes pour repeupler ces rivières de Saumons ; au printemps de l’année 1898, quarante millions d'alevins y auraient été déposés par les soins des établisse- ments de pisciculture. .NOTES DE Z0OLOGIE PURE ET APPLIQUÉE.. 61 Or, pendant dix ou quinze ans, les Phoques n’ent pas été le moins du monde molestés. Auparavant ils étaient chassés pour leur peau et leur huile, mais depuis que le prix de ces marchandises est tombé très bas, la chasse en a cessé; ces animaux se seraient alors multipliés à un tel point, qu'ils consomment aujourd'hui plus de Poissons que tous les ha- bitants de l'État réunis. Deux fois par an, au printemps et à l'automne, quand les Saumons remontent le cours des rivières, un grand nombre de Phoques les suivent jusqu'à 100 milles dans l’intérieur et ne se contentent pas de s’en nourrir, mais en tuent beaucoup pour satisfaire leur passion de chasse aquatique. Ils dé- truisent les filets des pêcheurs qui valent de 2 à 3,000 francs et ceux-ci en sont réduits à se munir d’une carabine, afin de fenir les Veaux marins à distance. On considère ici que les « Sea Lions » sont aussi nuisibles dans l’eau que les Coyotes (Chacals de Californie) le sont sur terre, et les contribuables refusent de faire les frais de pro- pagation du Saumon dans les rivières simplement pour as- surer une nourriture délicate aux Phoques ; d’autre part, on affirme que, si des protestations de la part de savants, ha- bitant l'est des États-Unis, ont eu lieu, cela tient à ce qu'ils s'imaginent que l'intention des pêcheurs de l'Ouest est de reléguer les Phoques dans la même catégorie que les Ichthyo- saures et les Palæœosaures, etc., alors qu’ils désirent simple- ment réduire à 10,090 le nombre de ces animaux qui est aujourd'hui de 30,000. Toutes les colonies de Phoques de la côte ne sont pas éta- blies sur les terrains du Gouvernement, sur les réserves el’Administration des Phares et Signaux, cela est fort vrai: toutefois, ces animaux, plus malins qu'on ne pense, se sont portés en grand nombre vers les endroits où on les laissait tranquilles, et s’y réfugieront de plus en plus si la permission accordée aux chasseurs de les tuer en tous lieux n’est pas maintenue. Les chasseurs des Farallones qui sont revenus à San-Fran- cisco, assurent qu’à cette époque (milieu de juin), ils auraient eu la chance de tuer un grand nombre de Phoques gris. Un des mâles qu'ils auraient approché mesurait environ 14 pieds de long, avait une ensolure de 4 pieds de circonférence et pouvait peser 3,000 livres. 68 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Si les Commissaires des Pécheries ont dû abandonner la chasse aux Phoques sur les réserves du Gouvernement aux Farallones, à Ano-Nuevo, Seal Rocks, etc., ils ont l'intention de la continuer à Point-Reyes, l'île Purissima et Point Arena qui ne sont pas sous le contrôle du Gouvernement fédéral, où des colonies de Phoques existent, jusqu’au moment, tou- tefois, où tous ces animaux auront jugé bon de se réfugier sous la tutelle de l'Administration des Phares et Signaux. Un journal de San-Jose (Californie) s'élevait dernièrement contre les prétentions de la Commission des Pécheries en ces termes : « Après avoir exterminé le Buffle, le Bison, l'Elan, et de nombreuses espèces animales quadrupèdes et volatiles, le bouillant Américain, qui, en matière de gibier et de nourriture ne voit pas à un pouce plus loin que son nez, a commencé une croisade contre les Phoques. Il a déclaré avec une gravité comique que les Phoques détruisent les Saumons et que, par conséquent, ils doivent disparaître. N'est-il pas singulier qu'il y a soixante ans, avant l'intrusion de l’homme blanc sur leurs domaines, les Saumons et les Sea Lions se trouvaient en grande quantité sur la côte du Pacifique et vivaient en assez bonne compagnie ? Nous croyons fort que ce ne sont pas les Phoques qui ont détruit le Saumon dans ces parages, mais bien les pêcheurs et les metteurs en conserve qui, pendant de longues années ont dragué la baie de San-Francisco, les détroits, les rivières de San-Joaquin et de Sacramento, avec les filets et qu’il a été souvent impossible aux Saumons de gagner les bancs où ils avaient l'habitude de frayer, sinon de retourner à l'Océan. La pêche en temps prohibé et avec des filets à mailles plus étroites que celles fixées par les règlements, la demande croissante des met- teurs en conserve qui, de leur côté, ne parvenaient pas à suffire aux ordres qu'ils recevaient des marchés américairs et étrangers, ont dé— truit le Saumon et aujourd'hui on charge les Lions de mer de ce me- fait, par ignorance crasse, ou dans l’espoir de détourner les respon- sabilités. Les Phoques de Californie sont ure des plus grandes attrac- tions de la côte, on traverse le continent pour les voir, mais ils doivent disparaître après tant d’autres êtres gênants, sans oublier les Indiens, premiers propriétaires du sol. » Répondant à la demande d'explications formulée par le Président de la Commission des Pécheries californiennes, le Bureau biologique du Département d'Agriculture à Washing- ton aurait avoué que la suspension de l’autorisation préala - blement accordée de chasser les Phoques sur les réserves du Gouvernement était due aux protestations énergiques de la NOTES DE ZOOLOGIE PURE ET APPLIQUÉE. 69 Commission fédérale des Pêcheries, du Secrétaire d’'Agricul- ture, du Président de la Ligue américaine des Sports, du Directeur du Jardin zoologique de la ville de New-York, etc. « 11 me semble, aurait répondu fort judicieusement M. Palmer, du Bureau biologique, que l'estimation faite par la Commission califor- nienne des Pêcheries, que plus de 20,000 Phoques vivaient dans un rayon de 50 milles autour de San-Francisco et que ces Mammifères détruisent de 20 à 40 °/, des Saumons qui rentrent dans les baies et les rivières, est un peu exagérée. Je ne crois pas qu'aucune étude spéciale ait jamais été entreprise pour s’assurer de l’espèce de Poisson pré- férée par les Phoques et de la quantité nécessaire à l’un d’eux pour se sustenter. Peut-être avez-vous consulté certains documents dignes de foi à ce sujet, et dans ce cas je vous serai obligé de me les désigner afin que je m’y réfère moi-même (cela ne manque pas d'ironie). Etes- vous bien certain que le Phoque Zalophus est responsable des dom- mages faits aux filets des pêcheurs et non le Phoque des côtes, Phoca, : NS PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 97 dine. Cette Revue imprimée en plusieurs langues (russe, francais, al- lemand, anglais, ilalien), réalise un des vœux les plus importants qui aient élé formulés au Congrès international de pêche tenu à Bergen en 1898. Le Rédacteur en chef prie toutes les personnes qui s’inté- ressent aux questions de pisciculture et de Pêche, de vouloir bien faire connaître dans leur pays, cette Revue qui paraîtra quatre fois par an. M. de Guerne donne lecture d’un article qui en est extrait et qui a pour titre: Acclimatation des Saumons du Pacifique dans les grands lacs les Etats-Unis. M. le Secrétaire général dépose sur le bureau divers mémoires, entre autres des notices de M. P. Serre sur les Phoques (Otaries) et les ‘Saumons en Californie. Lecture est donnée d’une communication de M. le D’ Pettit, sur l'empoisonnement de Saumons de fontaine par une Bactérie. Les études de l’auteur ont porté sur des Saumons de fontaine trouvés morts à Melun chez M. Debreuil qui les conservait dans une pièce d’eau, alimentée par une source, située dans sa propriélé. M. Debreuil attribue la mort des Poissons à la malveillance ; depuis l'accident, d’autres Saumons ont été placés à l’endroit même où les premiers ont péri; aucun accident ne s’est produit. Il y a donc lieu de croire que si les premiers Poissons avaient succombé à une maladie microbienne, les autres seraient morts également. M. le Président dit que des épidémies d'origine microbienne pa- raissent êire plus fréquentes qu’on ne le pense; mais le Poisson ne meurt pas toujours, ainsi, M. Perrier a communique dernièrement au Docteur Charrin, des Brochets vivants dont la chair était devenue verte à peu près comme celle des Orphies (Belone vulgaris), c'étaient des Brochets d'étang. M. Charrin cherche à résoudre la question qui n'est pas encore élucidée et M. Perrier rappelle que chez l'homme même, divers microorganismes colorés apparaissent dans certains cas pathologiques (exemple : pus bleu). Quoi qu'il en soit, ces Brochets à chair verte ne semblent pas être mauvais pour l'alimentation, mais leur coloration les rend suspects et les marchands ne veulent pas en recevoir. M. de Guerne dit qu’il y a dans nos cours d'eau des Poissons dont la chair prend parfois exceplionnellement une teinte rougeâtre, il rap- pelle l'envoi de Carpes saumonées de l’étang des Settons (Nièvre) fait à la Société par M. le comte d’Esterno et au sujet desquelles M. Boigeol avait été prié de rédiger un rapport. M. Perrier dit que divers Crustacés de la famille des Ostracodes, tels que les Cypris, doivent leur coloration rouge à une maladie micro- bienne; cette question a du reste été étudiée par M. Metchnikoff. A propos de Poissons saumonés, M. de Lamarche lit une lettre de M. Emile Maison qui a pêché dans le Loir des Carpes, des Brêmes et Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 4900. — 7 98 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. des Chevaines dont la chair était parfailement saumonée; ces Pois- sons auraient un goût plus fin que ceux à chair blanche. M. Mersey dit, à titre d'indication, que le Loir est cité comme un des cours d'eau les plus favorables au développement du Poisson, les- espèces qui vivent dans cetle rivière y trouvent peut-être une nourri- ture particulière, en tous cas très abondante et qui influe sur la colo- ration de leur chair. L'ordre du jour appelle l'examen du programme du Congrès d’Aqui- culture et de Pêche qui doit se réunir en septembre 1900 pendant l'Exposition universelle. M. de Guerne en résume les traits principaux el donne lecture d’une lettre de M. Cacheux, président de la VI Sec- tion de ce Congrés. Celui-ci intéresse la Sociéfé d'Acclimatation à beaucoup d’égards, plusieurs de ses Membres en font partie, et c'est précisément M. Ed- mond Perrier, le président de la Section, qui dirige les travaux du. Comité d'organisation du Congrès. Afin que la Société d’Acclimatation prenne une part active au Con-- grès, M. le Secrétaire général propose que la Section d’Aquiculture, suivant l’exemple donné dans d’autres Sections pour des Congrès de. nature différente, provoque une enquête sur diverses questions; l’une- d’elles concernerait, par exemple, les pêches maritimes, une autre l’a- quiculture en eau douce; le résultat des enquêtes serait communiqué au Congrès au nom de la Société d’Acclimatation- La discussion étant ouverle sur ce point, l'assemblée décide qu’il y a lieu de provoquer deux enquêtes. À propos des questions à mettre à l’étude, M. le Président et M. le Secrétaire général pensent que pour l'eau douce, l'histoire de l'acclimatation en France des Salmonides. originaires de la Californie, constitue un excellent sujet d'enquête. Diverses observations sont faites à ce propos. M. Jeunet s'élève contre les introductions de Saumons de Cali-— fornie, tant préconisées il y a une dizaine d'années et que les Alle- mands, qui sont des pisciculteurs très habiles, repoussent généra- lement aujourd'hui. D'après M. de Guerne, le public, trompé par l'appellation même de Saumon, s'est imaginé qu'il verrait bientôt dans les fleuves de France des Poissons énormes; seule la réclame faite par des gens qu'il ne convient pas de nommer ici, a été énorme et le Saumon de Californie a fait dépenser beaucoup d'argent sans résultats pratiques, en dehors toutefois de ceux d’une expérience réalisée. Effectivement, que les résultats soient bons ou mauvais, il s’agit. toujours de faits acquis, même si la lecon coûte un peu cher. Pour rentrer dans le domaine pratique, il paraît plus sage de recommander l'élevage du Saumon de fonlaine auquel on fera bien d’ailleurs d'en- lever ce nom fallacieux de Saumon. Il est fait pour tromper, d'autant que ce prétendu Saumon est un Salvelinus voisin de l'Omble-Cheyalier, PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 99 qu'il est de petile taille et n’a point les habitudes anadromes de la plupart des vrais Saumons. Cela ne l'empêche point d’ailleurs d’être excellent à manger. M. Debreuil appuie l’opinion exprimée par M. le Secrétaire général et déclare que pour sa part et malgré la mort si regrettable de la plu- part de ses Poissons, il est décidé à continuer l'élevage du Salvelinus fontinalis. Revenant aux queslions pouvant motiver une enquête dans le do- maine maritime, M. le Président déclare que l'ostréiculture lui semble devoir être écartée. Certaines études préoccupent vivement les per- sonnes qui s’adonnent à la pisciculture en eau salée, il s’agit de la période dite critique chez les alevins, période de mortalité excessive et qui sera supprimée par l'alimentation rationnelle des jeunes Poissons avant la résorption de la vésicule vitelline. Cette question, d'ordre à la fois pratique et scientifique, pourrait faire l’objet d’une enquête auprès de spécialistes qui la traiteront certainement avec autant d'intérêt que de compétence. L'Assemblée consultée, adopte les propositions concernant les deux questions à mettre à l’élude pour les enquêtes dont les resultats seront présentés au prochain Congrès d’Aquiculture et de Pêche et décide que l'examen du questionnaire qu’elles comportent figurera à l’ordre du jour de l’une des prochaines séances. Le Secrétaire-adjoint, BRUYÈRE. SÉANCE DU 26 FÉVRIER 1900, PRÉSIDENCE DE M. EDMOND PERRIER (DE L'INSTITUT), PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu el adopte. Il est procédé au dépouillement de la correspondance; celle-ci comprend, parmi les imprimés, un catalogue synoptique des Poissons du département de la Marne, dont plusieurs exemplaires sont offerts par l’auteur, M. II. Petit. Ce travail, présenté sous forme de tableau, peut être affiché et sera particulièrement utile aux pêcheurs. M. G. Radde, directeur du Muséum d'histoire naturelle de Tiflis, adresse à la Société une élude de M. L. Berg sur la faune ichtyolo- gique du Caucase. Il lui envoie également une notice de M. S. Ka- mensky sur les Cyprinides du Caucase. Ce travail fait suite à la mo- nographie des Salmonides de cette région commencée par M. Ka- wraisky. Il est de même illustré de phototypies. Ces figures rendront certainement de grands services pour l'identification des espèces. 100 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. A ce propos, M. Cacheux fait observer qu'il serait fort utile d'avoi! en France des collections de figures analogues. Elles pourraient être utilisées même dans les écoles primaires. M. de Guerne estime qu'il conviendrait pour cet usage d’avoir des planches coloriées, et la pho- totypie, qui se prête à une grande exactitude scientifique, comporte difficilement la couleur. Il faudrait, du reste, pour répandre des planches de Poissons dans les écoles, en faire un très grand tirage. Le point de vue est bien différent de celui d'une monographie scien- tifique. M. le comte de Scey demande quels sont les meilleurs procédés de conservation des filets employés en eau douce. M. Vinciguerra, directeur de la Slation de pisciculture de Rome, demande des renseignements sur les Aéherina presbyter et Boyeri. X1 désire se procurer des spécimens de ces Poissons provenant des côtes de l’ouest et du midi de la France, pour les comparer à ceux du même genre qui vivent sur le litloral italien. M. Cardozo de Belhencourt, directeur du Moniteur maritime, cher- chant à identifier les espèces de Raies qui sont pêchées communé- ment par les marins anglais, s'adresse à la Société pour obtenir les noms vulgaires français correspondant aux appellations anglaises, ainsi que la détermination scientifique de ces Poissons. M. Gibert, propriétaire de l'établissement de pisciculture de Roche- taillée (Loire), signale le préjudice que lui cause la Compagnie con- cessionnaire des réservoirs d'eau d'alimentation de la ville de Saint- Étienne. Cette Compagnie fait de temps à autre, et sans avis préa- lable, déverser de grandes quantités d’eau inutile au service régulier dont elle est chargée ; ces mouvements d’eau imprévus gênent beau- coup les opérations de la pisciculture. Il demande si la Société ne pourrait pas intervenir auprès des autorilés compétentes pour modifier celte manière de faire, qui ne profite à personne. M. Gibert, dans la seconde partie de sa lettre, indique la composi- tion d'une pâtée qu'il fait distribuer aux Truites arc-en-ciel et qui semble très favorable au développement de ces Poissons. M. Fontaine, ingénieur des Ponts et Chaussées en retraite, commu nique à la Section, en sollicitant son avis, le projet d'un petit établis- sement de pisciculture qui doit être créé par l'usine du Creusot, de concert avec l'Administration des Ponts et Chaussées. On n’y trai- tera, au début, que dix à douze mille œufs de Salmonides, mais il convient de ménager la place pour les agrandissements successifs. Une discussion s'engage à propos du projet que M. Fontaine a bien. voulu soumettre à l'approbation de la Section. Les plans en sont très étudiés, mais leur exécution paraît devoir être assez coûteuse, et plu- sieurs des assistants croient devoir faire quelques réserves à cet égard. M. le Secrétaire général rappelle qu'une distribution d'œufs de PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 101 Truite arc-en-ciel est actuellement préparée par les soins de la So- ciété. Plusieurs demandes sont arrivées déjà, adressées par un certain nombre de Membres et, en outre, par des établissements publics comme l'École d'Agriculture de Beaune et celle du Lézardean, dans le Finistère. À propos de cette dernière, quelques réserves doivent être faites ; la région où est située l’École de Lézardeau est, en effet, très favorable au développement des Salmonides indigènes et il ne paraît pas indispensable, à priori, d'y introduire la Truite arc-en-ciel. Lecture est donnée d’une note sur l’état actuel de la pisciculture d’eau doute en Algérie. Les résultats des essais entrepris jusqu’à présent dans la colonie sont peu satisfaisants. La plupart des eaux algériennes contiennent de la magnésie et, en outre, les cendres pro- venant des incendies, fréquents dans ces régions, et qui tombent dans les rivières, empoisonnent les eaux. Cette note, extraite du Manuel pratique de l'Agriculture algérienne, par MM. Rivière et H. Lecq, sera publiée au Bulletin. M. Perrier, président du Comité d'organisation du Congrès inter- national d'Aquiculture et de Pêche, qui doit se réunir en septembre 1900, donne quelques renseignements sur l’état actuel des travaux de préparation de ce Congrès. Un grand nombre d'étrangers attirés par l'Exposition universelle ont envoyé leur adhésion. Le Secrétaire, A. BOIGEOL. 4 SECTION (ENTOMOLOGIE). SÉANCE DU 22 JANVIER 1900. PRÉSIDENCE DE M. CLÉMENT, PRÉSIDENT. Avant de procéder au renouvellement du bureau, M. le Président informe la Section que M. François Decaux, Vice-Président de la Section, est décédé pendant les vacances. Ses funérailles ont eu lieu le 15 août et M. le Secrétaire général, de passage à Paris, a pu y représenter la Société M. Clément résume la carrière du défunt. Il rappelle ses principales études d’entomologie appliquée et propose qu’une lettre de condoléance signée du Président et du Secrétaire, soit adressée au nom de la Section, à M€ Decaux. Il est procédé aux élections. Sont élus : Président : M. Clément; Vice-Président : M. Maurice Sédillot ; Secrétaire : M. Marchal; Secrétaire-adjoint : M. Lesne. 102 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. M. Clément est en outre délégué pour représenter la Section à la Commission des récompenses. Il est procédé au dépouillement de la correspondance. Celle-ci comprend un grand nombre de documents imprimés, notamment des brochures envoyées par le Service entomologique des États-Unis à Washington. Lecture est donnée d’un résumé très substantiel publié dans le Manuel pratique de l'agriculture algérienne de MM. Rivière et Lecq, récemment paru, sur la question des Acridiens, leur histoire naturelle et les moyens de défense contre ces Insectes. Cette lecture provoque diverses observations de la part de MM. De- breuil, Clément et de Guerne. La Section est d'avis qu'il est intéres- sant de publier la notice de MM. Kivière et Lecq, laquelle présente un bon résumé d’une question très importante au point de vue de l'agriculture en Algérie. M. Charles Patin, consul honoraire de Belgique en Colombie, de- mande l’avis de la Section sur la dégénérescence du Bombyæx mori dans les climats intertropicaux et sur les moyens d'y remédier. Il vou- drait savoir également si la Société s'est occupée de l'élevage et de la propagalion de l'Affacus aurota et de ses variétés. Dans l'affirma- tive, M. Patin demande quelle est l'appréciation qui a été faite de ce séricigène. M. le Président donne un certain nombre d'indications concernant la participation des apiculteurs à l'Exposition de 1900, il rappelle qu'un Congrès spécial d’Apiculture doit se réunir l’été prochain. Des documents plus complets sur ce Congrès seront communiqués par M. le Président dans une séance ultérieure. M. Clément annonce qu’un cours d'Entomologie agricole va être fait par lui sous les auspices de la Société centrale d’Apiculture. Cet enseignement spécial et qui peut rendre de grands services, manquait jusqu'ici à Paris bien que certaines lecons concernant la matière soient professées au Muséum d'histoire naturelle, à l’Institut national agronomique ou même au Luxembourg, soit à l'occasion des Insectes nuisibles aux arbres fruitiers, soit au cours même d’Apiculture orga- nisé depuis longtemps par la Société. C’est au Luxembourg que sera professé le cours d'Entomologie agricole. Sa lecon d'ouverture est fixée au mardi 6 février, elle aura lieu dans le pavillon de la pépinière sous la présidence de M. E.-L. Bouvier, professeur d'Entomologie au Muséum d'histoire naturelle. Les lecons continueront les samedi et mardi de chaque semaine. Des démonstrations et des visites se ratta- chant au sujet traité dans le cours seront annoncées ullérieurement. M. Bouvier a bien voulu autoriser les auditeurs du cours à visiter les collections d’entomologie du Muséum à des heures réservées et il PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 103 veut bien les inviter également à suivre les excursions organisées par ses soins. Pour le Secrétaire empêché, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. SÉANCE DU 19 FÉVRIER 1900. PRÉSIDENCE DE M. CLÉMENT, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. Il est procédé au dépouillement de la correspondance. Me Decaux remercie la Section du témoignage de sympathie qu’elle a bien voulu lui adresser à l’occasion de la mort de son mari. Elle envoie un cer- tain nombre de brochures publiées par celui-ci et qui seront distri- buées aux spécialistes lorsque la Bibliothèque de la Sociélé y aura prélevé sa part. Le D' Maclaud, qui vient d’être nommé Administrateur des Colo- nies, annonce son prochain départ pour la Guinée française. Il de- mande qu’on veuille bien lui adresser un questionnaire sur l’apiculture qu’il remplira pendant son séjour en Afrique. Lors de ses voyages “antérieurs, son attention a déjà été appelée sur la production du miel -et le parti qu'on pourrait tirer de cette substance que les nègres ap- précient beaucoup. Me Coni (de la Perrière) rend compte des résultats obtenus par l'élevage des Affacus cynthia dont les cocons lui avaient été donnés par la Sociélé. M. le Secrétaire général dépose sur le bureau le tirage à part de la conférence sur L’Abeille, son élevage et ses produits, faite le 9 mai dernier dans la grande salle de la Société par M. Clément sous la présidence de M. Railliet. L’allocution de celui-ci précède la conférence qui est elle-même illustrée d’une nombreuse série de figures. Les clichés en ont été très obligeamment prêtés par la Société centrale d’Apiculture, par M. Raymond Gariel, le constructeur bien connu, et par la Librairie Larousse. On sait, d’ailleurs, que M. Gariel avait envoyé pour la con- férence de M. Clément toute une série d'appareils qui sont restés exposés pendant quelques jours, au moment de l'Exposition de vo- lailles naines organisée par la Société. M. Clément remercie M. le Secrétaire général du soin qu’il a pris de faire paraître sa conférence au Bulletin et d'en préparer un tirage à part qui se présente sous une forme très agréable. Il souhaite que cette petite publication contribue à répandre le goût de l’apiculture, 104% BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. mais il ajoute que les leçons de choses sont peut-être encore plus importantes que la lecture en ces matières. En conséquence, M. le Président exprime l'espoir que la Société d’Acclimatation complétera tôt. ou tard, en ce qui concerne l'Apiculture, le programme des Exposi- tions spéciales organisées par ses soins pour les Oiseaux de volière et de basse-cour pendart l’année 1899. Au sujet des appareils d’apiculture, M. le Secrétaire genéral dit qu'on pourrait non seulement montrer au public les appareils modernes ac- tuellement en usage, mais encore des restes d’ustensiles anciens et. divers objets d’ethnographie concernant l’Apiculture. M. de Guerne ajoute que le D' Hamy a découvert, dans des tombeaux berbères, des ruches absolument semblables à celles qui sont encore employées aujourd'hui dans le nord de l'Afrique. M. Clément présente à la Section un Insecte qui a causé des ra- vages considérables un peu partout pendant l'été de 1899. C’est un Coléoptère voisin des Chrysomélides, la Galéruque de l’Orme, Galerucæ æœunthomelena Schrank. Il a eu à s'occuper de cet Insecte à propos de dégâts considérables qui lui ont été sivnalés par M. Wuirion dans le parc de Saint-Gratien, près d'Enghien. Les grandes dimensions des Ormes attaqués rendent très difficile l'emploi des procédés de destruc- tion directe. Aussi M. Clément a-t-il conseillé de bêcher la terre aw pied des arbres afin de rendre plus malaisé le retour et l'ascension des. larves ayant pu tomber des branches. Pour la même raison, les troncs devront être badigeonnés au goudron jusqu’à une certaine hauteur, et des volailles lâchées dans le voisinage des arbres afin de faciliter læ destruction des Insectes qui pourraient se trouver sur le sol, On se: fera une idée de leur abondance par le simple énoncé de ce fait, observé en juillet et en août 1899 par M. Wuirion, qu'en certains en- droits, sous les arbres, il y avait une accumulation de larves et de nymphes atteignant jusqu’à 10 centimètres d'épaisseur. Il ne faut pas trop compter cependant sur le succès à cause de l’éloignement des grandes branches sur lesquelles vivent les parasites el qui sont à pew près inaccessibles. Le moyen radical consisterait à abattre les arbres et à les brûler, mais c’est un procédé que n’adopteront jamais les pro- priétaires, surtout lorsqu'il s’agit d’arbres très vieux et qui sont con- servés comme des ornements exceptionnels d’un parc. Une discussion s’engage au sujet des insecticides. M. Chappellier dit qu'il n’arrive pas à détruire les Blattes dont il a déjà entretenu la Societé. Ces Insectes se multiplient toujours dans la maison qu'il habite à Paris, dans le X° arrondissement, malgré tous les moyens mis en œuvre pour les faire disparaître. M. Debreuil demande quel est le meilleur procédé pour détruire le Puceron lanigère. D’après M. le Président, les émulsions de pétrole sont très recommandables, airsi que l’eau de savon elle-même, mais il faut avoir beaucoup de persévérance et renouveler très souvent PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 105 l'application de ces remèdes simples qui sont encore les meilleurs. M. le Secrétaire général annonce que l’ouverture du cours d'Entomo- logie agricole professé par M. Clément, sous les auspices de la Société centrale d'Apiculture,et dont il a été question dans la dernière séance, a eu lieu le 6 février au pavillon du Luxembourg. M. E.-L. Bouvier, professeur d'Entomologie au Muséum, a prononcé, au début de ia séance, une allocution très goûtée dans laquelle il a indiqué le but et l'utilité pratique de l'enseignement nouveau créé par M. Clément. M. de Guerne se félicite d’avoir pu, en assistant à cette lecon d'ouver- ture, donner à M. Clément un témoignage de l'intérêt que prend la Société d'Acclimatation à l'œuvre qu’il poursuit avec beaucoup de zèle et de désintéressement. La correspondance imprimée comprend les résultats de l'enquête séricicole faite par le Ministère de l'Agriculture pour l’année 1599. Elle comprend, en outre, une série de documents sur la production du miel ou de la cire dans les colonies françaises. Lecture est donnée d’une partie d’entre eux. Leur intérêt semble assez grand pour que la Section émette le vœu de les voir reproduire dans le Bulletin. Ces documents ont été recueillis par les soins de l'Office colonial. Une discussion s'engage au sujet du Congrès d’Apiculture qui doit se réunir l'été prochain et auquel la Section sera sans doute amenée à s'intéresser. M. le Président dit que le programme de ce Congrès n’a pas encore paru, mais qu'il sera certainement publié lors de la pro- chaine séance de la Section, au mois de mars. Il pourra y être exa- miné et discuté. M. de Guerne ajoute que le questionnaire, dont il a été parlé précédemment au sujet de la demande du D' Maclaud, pour- rait être éludié également à ceite occasion. L'Assemblée consultée, adopte cette opinion et décide que la rédaction du questionnaire sera mise à l’ordre du jour de la séance du 19 mars. Pour les Secrétaires empéches, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. DASECIDION NB OMNNTIOUIE) SÉANCE DU 16 JANVIER 1900. PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEBER, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. L'ordre du jour appelle le renouvellement du bureau pour l’année 1900. Sont nommés à l’unanimité: AT j à ir bon : Lis 406 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Président : M. le D' Weber; Vice-président : M. Morot; Secrétaire : M. C. de Lamarche; Secrétaire-adjoint : M. H. Coupin. M. Weber est également nommé délégué pour représenter la Section à la Commission des récompenses. M. le Secrétaire général remet à M. Magne, aux applaudissements de l’Assemblée, la médaille de vermeil qu'a valu à celui-ci la magni- fique série de Chrysanthèmes à grandes fleurs exposée par lui en no- vembre 1899, lors de la 5° Exposition (Serins et Plantes) organisée par la Société. M. Magne avait d’ailleurs montré également en cette cir- constance, outre ses Chrysanthèmes, de fort belles plantes vertes. Le Secrétaire procède au dépouillement de la correspondance. Lecture est donnée d'une lettre de M. le D' Zenk à Sori (Italie); celui-ci se propose de pratiquer la culture des Truffes et demande que la Société veuille bien lui indiquer où il pourrait se procurer des semences de ce Cryplogame et quels sont les ouvrages les plus utiles à consulter à cet égard. Il sera répondu à M. le D' Zenk, mais il sera difficile de lui fournir à ce sujet des renseignements précis, le mode de reproduction et de culture de la Truffe n'ayant pas encore été jusqu'ici bien nettement déterminé. M. Paul Serre écrit de San-Francisco (Californie) qu'il a rédigé il y a quelques mois un rapport sur les bois de Californie et dont il est possible de prendre connaissance à l'Office national du Commerce, rue Feydeau, 3, à Paris. M. Serre s’est efforcé surtout de faire ressortir les qualités d’une essence californienne, le Redro0d, Bois rouge dont ila même envoyé des graines afin qu'on essayât de l’acclimater dans les régions brumeuses des Vosges. M. Morel adresse quelques renseignements sur le Ginko biloba, dont les graines distribuées par la Société, ont été envoyées de Milan par M. Igino Cocchi; M. le Président rappelle à celte occasion que le Ginko, qu’on acclimate aujourd'hui sous le climat de Paris, apparte- nait dans les temps préhistoriques à la flore parisienne. Il est donné lecture de plusieurs leltres de Membres de la Société demandant à recevoir un certain nombre de graines mises en dis- tribution. M. le Secrétaire général présente une graine d'Avocat (Persea gra- tissima) envoyée par M. Ch. Rivière, directeur du Jardin d'Essai du Hamma, et un Carolinea macrocarpa, ayant la même origine ; il dépose en même temps sur le bureau une Courge comestible, de couleur écarlate, envoyée par M. Debreuil et provenant de graines récollées à Châtellerault par M. Beauchaine. Enfin M. le Secrétaire général soumet à l'examen de la Section des graines d’Arachide envoyées par M. Charles Palin, consul général honoraire de Belgique en Colombie. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 107 Ces Arachides, qui ont été déjà présentées à la Section coloniale, ne paraissent pas différer en volume et en qualité de celles que l'on recoit habituellement du Sénégal. M. le comte Borromeo annonce un envoi de graines récoltées par lui dans sa propriété du Lac Majeur. M. Prochawsky envoie de Nice un grand nombre de graines inté- ressantes provenant de ses cultures. La liste de ces graines sera pu- bliée dans le Journal et elles seront mises à la disposition des Membres de la Société. M. le Secrétaire général annonce que M. L. Duval, horticulteur à Versailles, fera, le 1° février prochain, dans la grande salle de la Société, une conférence, accompagnée de projections, sur les Or- chidées exoliques, leur récolte et leur culture. Il prie les Membres de la Section de vouloir bien lui donner les adresses de personnes pou- vant être invilées à assister à cette conférence. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. SÉANCE DU 28 FÉVRIER 1900 PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEBER, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la derniére séance est lu et adopté. A l’occasion de la lettre signalée dans le procès-verbal et par laquelle M. le D' Zenk demande des renseignements sur la culture des Truffes, M. M. de Vilmorin cite comme pouvant être utilement consultés à ce sujet, l'Almanach du Trufficulteur pour 1900 par Bosredon: la Truffe et sa production par Mouillefert; les spores de la Truffe par de Gra- mont, enfin l'ouvrage très important de notre collègue, M. Chatin, dont les premières études ont été publiées dans les comptes rendus de l’Académie des Sciences. Les ouvrages suivants sont offerts à la Sociélé par M. Challamel, éditeur : 1° Gommes et résines d'origine exotique par le D' Hubert Jacob de Cordemoy ; 2° Le Cucaoyer; sa culéure ef son exploitation dans tous des pays de production, par M. H. Jumelle, professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Marseille. M. Hua fait hommage d’un mémoire intitulé : Sur une des sources du caoutchouc du Soudan français. Ce mémoire, publié dans le Bulletin du Museum d'Histoire naturelle, jette une certaine lumière sur une ques- tion fort embrouillée et qu’il importe d’éclaircir tant au point de vue de la science que de la pratique. Il est procédé au dépouillement de la correspondance : M. O'Shea, directeur de la Sociélé d’'Acclimatation du golfe de 108 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Gascogne, récemment créée à Biarritz, demande à la Société de vouloir bien lui envoyer des graines pour les pépinières qu’elle compte établir. M. de Vilmorin fait connaître que sur la demande de la Société il vient d'envoyer à M. Heckel, à Marseille, des tubercules et des bul- billes d’Ignames de Farges. M. Kottliaroff, de Kiew, remercie la Société pour les tubercules de Stachys affinis qu’elle lui a envoyés et qui lui sont parvenus en bon état; il demande quelques renseignements sur la culture et la pré- paration de ce lésume. M. À. de Saint-Quentin, qui a cultivé des Courgettes d'Egypte offertes à la Soriélé par M. Debreuil, fait connaître que cette Cucurbi- tacée ne lui a pas paru recommandable au point de vue alimentaire, mais que cela tient sans doute à ce qu'il ne l’a pas consommée au moment convenable. M. Debreuil, qui assiste à la séance, déclare que pour présenter toutes leurs qualités, les Courgettes d'Egypte doivent être consommées lorsque le fruit est encore jeune et au moment où la fleur s’en détache. M. Proschawsky, de Nice, écrit qu'il a lu dans diverses Revues d’horticulture que le Musa ensete pouvait être utilisé comme légume: il demande quelle est la partie de la plante employée à cet usage et s’il est nécessaire, dans ce cas d’arracher la plante entière. M. le Président fait observer à ce sujet que dans certaines régions de l’Extrême-Orient, les espèces du genre Musa sont utilisées comme fourrage et très recherchées par les Éléphants. M. Mailles fait observer que le Musa ensete mutilé comme il vient d’être dit, pour ne parler que de cette espèce, périrait infailliblement. Lecture est donnée d’une note de M. Trabut, d'Alger, sur le Touï, Euphorbiacée dont le bois, d’après l’auteur, pourrait peut-être être utilisé industriellement. M. le Président offre à la Sociélé des graines d’une Cucurbitacée cultivée en Alsace sous le nom de Concombre d’hiver. Ce lézsume, qui paraît peu connu, en dehors de la région alsacienne, se conserve pen- dant toute la mauvaise saison et peut êlre consommé en salade, ou soumis à la cuisson. M. de Vilmorin offre des graines de Rosa inoschata de Chine, espèce trés florifere et tellement rustique qu'elle peut résister à une tempéra- ture de "150: M. le D' Clos, directeur du Jardin botanique de Toulouse, envoie un certain nombre de graines, parmi lesquelles des graines d’'Acacia relinoides, que les jardiniers du Midi désignent ordinairement sous le nom d’Acacia floribunda. M. le Président fait observer que l'A. dealbata, vendu dans les rues de Paris sous le nom de Wimosa et qui est très sensible au froid, peut facilement supporter des températures relative- ment basses lorsqu'il est greffé sur l'A. retinoides. " me à oui bu à . | di PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 109 M. Mailles offre des graines de Chenopodium Bonus-Henricus, dont les feuilles peuvent être consommées comme succédanées de l'Epinard ; elles en ont la saveur. L'Épinard ne peut être utilement employé qu’en hiver et au commencement du printemps, tandis que le C‘henopodium, présenté par M. Mailles, peut être cueilli pendant tout l'été. La plante a en outre l'avantage d’être vivace. M. le Secrétaire général entretient la Section de la cullure de la Ramie et du Comité spécial qui vient d’être créé pour étudier cette plante au point de vue de sa culture et de son utilisation industrielle. Un Congrès a été institué pour s'occuper de cette question à l’'Expo- sition universelle de 1900. Le Comité cherche en ce moment, aux environs de Paris, un terrain dans lequel on pourra faire quelques plantations de Ramie; les tiges serviraient à des expériences pratiques, La culture de la Ramie pourrait devenir une source considérable de revenus dans certaines colonies françaises où le climat et la nature du sol permettraient de faire chaque année trois coupes de cette plante. Le Congrès s’occupera également des divers procédés pour la préparation des tiges. Jusqu'ici, en effet, on n’a trouvé aucun moyen économique et rapide pour procéder industriellement au dégommage des fibres de la Ramie et c’est surtout cetle raison qui a entravé le développement de la culture de cet excellent textile. | M. Magne résume un travail qu’il a présenté à la Societé sur la cul- ture des plantes alpines dans les jardins et particulièrement sur les procédés qu'il emploie avec succès pour les plantes qu’il cultive lui- même. Ce travail fort intéressant sera inséré au Bulletin. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. 6e SECTION (COLONISATION). SÉANCE DU 8 JANVIER 1900. PRÉSIDENCE DE M. MILHE-POUTINGON, PRÉSIDENT. M. Milhe-Poutingon prie M. Le Myre de Vilers, Président de la Sociélé, et qui assiste à la séance, de vouloir bien prendre place au bureau. 11 est procédé au dépouillement de la correspondance. Elle comprend une lettre du R. P. Camboué donnant divers rensei- gnements sur les travaux de colonisation agricole poursuivis à Mada- gascar. Cette lettre est accompagnée d’un extrait du Journal officiel de la Colonie concernant l’attelage des Zébus. (Voir Bulletin,p.55 el 61.) 110 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. M. Escande, de la Mission protestante française à Fianarantsoa (Madagascar), adresse une demande de graines et envoie diverses observations sur des plantes acclimatées par ses soins. M. Charles Patin, consul général honoraire de Belgique en Colombie, envoie des graines d’Arachides sur la qualité desquelles il demande l’avis de la Section. Il ne semble pas que ces graines soient supérieures en volume et en qualité aux bonnes sortes du Sénégal. Reste à savoir quels peuvent être le rendement cultural et la teneur en huile des Arachides en question. M. Jaboulay, industriel à Izieux (Loire), qui se propose de faire de la sériciculture en Nouvelle-Calédonie, demande des renseignements à ce sujet. Il est procédé au renouvellement du bureau. Sont élus : Président : M. Milhe-Poutingon; Vice-Président : M. Francois; Secrétaires : MM. Bocher et Fron. Ce dernier remplace M. Bourdarie, actuellement au Congo, et qui a prié la Section de le relever de ses fonctions. A ce propos, M. le Prési- dent fait connaître que M. Bourdarie, bien que momentanément éloi- gné de la Sociéfé, n'oublie pas l'intérêt qu’elle porte aux questions de colonisation agricole. Il a, d’ailleurs, recu de M. Bourdarie, avant son départ, l'assurance que celui-ci adresserait à la Section les documents intéressants qu'il pourrait recueillir. M. Milhe-Poutingon remercie ensuite la Section d’avoir bien voulu lui confier de nouveau les fonctions de Président, bien qu'il les ait fort mal remplies l’année dernière. Pendant le long séjour qu'il a fait au Sénégal, il a dû se priver du plaisir de présider les séances. M. Francois l’a remplacé avec beaucoup de zèle et mérite à ce sujet la reconnaissance de ses collègues. On peut juger, d’ailleurs, par les travaux qui ont élé présentés, de l'aclivité de la Section pendant l’année 1899. Des récompenses importantes ont été décernées par la Société dans le domaine colonial. La médaille d’or, remise par M. Le Myre de Vilers au général Galliéni au moment même de son arrivée en France, est la plus importante des récompenses décernées l’année derniere. La grande médaille d'argent attribuée au R. P. Bichet etles médailles de l'° classe décernées à M Autran, à Libreville, et au R. P. Sébire, directeur du Jardin d'Essai de Thiès, montrent que la Société a su distinguer des mérites lrès divers. M. le Président est heureux de pouvoir présenter ses félicitations au R. P. Sébire, qui assiste à la séance. M. le Président, sur l'invitation qui lui en est faite par M. Le Myre de Vilers, résume ensuite rapidement le voyage qu’il a accompli en 1899 sur la côte occidentale d'Afrique et particulièrement au Sénégal. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 114 Son attention s’est portée spécialement sur la production agricole et tout ce qui concerne les cultures. Déjà l’importance de l’acclimatation se fait sentir par les changements introduits dans l'alimentation des colons, grâce à l'usage des plantes potagères européennes récemment importées dans le pays. Ici encore il convient de signaler les persévé- rants efforts de plusieurs lauréats de la Sociéfé, comme le P. Sébire et le R. P. Bichet, les frères de l’Instruction chrétienne, etc., qui, séjour— nant longtemps dans les mêmes régions et s’efforçcant de mettre en valeur de pelits domaines, arrivent à des résultats vraiment remar- quables et que ne pourraient que plus difficilement obtenir des Sociélés occupées de grandes affaires. Quant à l’acclimatation des plantes économiques, elle doit être étudiée avec beaucoup de soin. Il faut être très circonspect et ne pas préconiser trop vite la culture en grand de certains végétaux, le Caoutchouc de Céara, par exemple, qui a tenté bien des colons à la côte occidentale d'Afrique, à cause de sa croissance rapide. Il semble ne pas justifier, tout au moins dans cette région, l'engouement dont il a élé récemment l'objet. Mieux vaut con- tinuer à faire au Sénégal de bonnes récoltes d'Arachides que de planter à grands frais du Céara dont la végétation sera très belle, mais qui, par suite des changements des conditions de milieu, donnera infini- ment moirs de caoutchouc que dans son pays d’origine. L’Adminis- tration elle-même ne s’est peut-être pas loujours assez mise en garde contre l'enthousiasme, provoqué par la réussite d'essais entrepris sur une trop petite échelle. Il vaudrait mieux le plus souvent récompenser des expériences déjà faites, plutôt que d’allouer des primes à des recherches nouvelles et incertaines. M. Le Myre de Vilers insiste sur l'importance de la communication de M. le Président dont il partage absolument la manière de voir en l'étencant, d’ailleurs, à d’autres colonies que le Sénégal. Pendant un siècle, l'Administration s’est à peine préoccupée de la production agricole des colonies, et voici qu'elle se lance tout à coup dans des essais d'ordre varié dont les résullats sont escomptés avec quelque im- prudence Toutes les tentatives d’acclimatation présentent un intérêt scientifique indiscutable, mais ce serait faire fausse route et nuire à la cause de l’acclimatation elle-même que de transporter trop légèrement dans le domaine pratique le résultat d'expériences faites sur une pelite échelle et pendant peu de temps. L’on se prépare ainsi des mécomptes certains, el il paraît sage d'agir, dans bien des cas, comme l’a fait M. Milhe-Poutingon, en présentant à M. le Gouverneur du Sénégal de justes observations concernant, par exemple, la culture du Caout- chouc de Céara. M. Godefroy-Lebeuf présente une série de jeunes plants de Caféiers de variélés choisies et qui ont été greffés sur le Cofea liherica, acqué- rant ainsi une rusticité des plus avantageuses. M.le Président remercie M. Godefroy-Lebeuf de sa communication et de la peine qu'il a prise 112 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. de faire apporter au siège de la Société toute une série de jeunes Caféiers qu'il invite l'assistance à examiner avant de quitter la salle. L'un des Secrétaires : H. BOCHER. SÉANCE DU 5 FÉVRIER 1900. PRÉSIDENCE DE M. MILHE-POUTINGON, PRÉSIDENT. il est procédé au dépouillement de la correspondance. M. Charles Patin, consul général honoraire de Belgique en Colom- bie, offre une notice de M. Emile de Wildeman sur un Cacaoyer nou- veau, le Theobroma Kalagua, découvert en Colombie par M. Patin. Un extrait du journal Ze Congo belge est également envoyé par M. Patin. 11 s’agit de l'emploi des déchets de culture pour produire de l'alcool pouvant être employé à l'éclairage. M. Patin a appliqué lui- même en Colombie le procédé dont il s’agit. Enfin, M. Patin annonce le prochain envoi d'un travail sur les avan- tages que présente la culture des Vanilliers sur les Zatropha curcas. M. Duchemin adresse une lettre concernant les maladies des Caféiers. La Compagnie française du Rio-Sinu demande des renseignements sur une maladie de l'espèce bovine et qui cause d'assez graudes pertes en Colombie: « Les indigènes désignent cette affection sous les noms de 6ejegan ou culebrilla. Elle atteint principalement les Veaux de six à dix mois. Voici quelle est sa marche : le Veau rentre le soir au corral bien por- tant; le lendemain malin, il tête comme à l'ordinaire, mais on re- marque alors une légère boîterie d’une patte antérieure, et l’on sent une ecchymose sous la peau, un peu en arrière du défaut de l'épaule. Avant midi l'animal est mort. Si l’on écorche le cadavre, on voit sur le corps des plaques noirâtres comme du sang décomposé, et l'intérieur de la peau est taché aux endroits correspondants. On ne connaît en Colombie aucun remède à cette maladie. » D'après les informations prises par les soins de M. le Secrétaire général auprès des spécialistes les plus autorisés, MM. Nocard et Moussu, de l'Ecole vétérinaire d’Alfort, entre autres, il s'agirait d’une maladie actuellement bien étudiée, le Charbon symptomatique. MM. Ar- loing, Cornevin et Thomas en ont écrit la monographie, publiée par la librairie Asselin et Houzeau à Paris. Enfin, M. Arloing, directeur de l'École vétérinaire de Lyon, s'est occupé spécialement de la vaccina- tion contre cette maladie. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 413 M. Gaston Landes, professeur d'Histoire naturelle au Lycée de Saint- Pierre de la Martinique, commissaire à l'Exposition de 1900, fait une communication sur le commerce des fruits tropicaux entre la France et ses colonies des Antilles. Après avoir insisté sur le développement pris par ce commerce entre la Jamaïque et New-York, il montre que la rapidité des relations actuelles entre la Martinique et la France permet de fonder de grandes espérances sur l’avenir d’un trafic ana- logue entre les Antilles et la France. Le commerce pourrait porter principalement sur les bonnes variétés de Mangues, les Sapotilles, les Pommes cythères, etc. La Compagnie générale transatlantique fait en ce moment à bord des paquebots ra- pides de la ligne des Antilles-Colon des essais pour assurer la bonne conservation des fruits par des glacières spéciales. IL y a tout lieu de croire qu'on pourra bientôt déguster à Paris les fruits de la Martinique et que des arrivages réguliers se succéderont à de courts intervalles pendant l’Exposilion universelle. M. le Président remercie M. Landes de son importante communica- tion et fait ressortir tout l'intérêt que les premieres tentatives de la Compagnie transatlantique peuvent offrir pour le commerce extérieur de la France et pour le développement de la cullure des fruits aux Antilles. Diverses observations sont échangées à propos des questions sou- levées par M. Landes. MM. de Bonand, Hédiard, Debreuil prennent successivement la parole, et M. de Guerne décrit les bananeries des Canaries qu’il a eu l’occasion de visiter en avril 1899 et les cultures d'Ananas pratiquées en serre aux Acores, spécialement à San-Miguel. M. de Guerne a visité ces dernières cultures il y a une dizaine d’an- nées; mais nulle part, dans les archipels océaniques, il n’a vu de marche aux fruits aussi bien approvisionné que celui de Funchal, à Madère. Beaucoup de fruits de cette île sont régulièrement transportés en Angleterre. M. Francois, Vice-Président de la Section, présente avec commen- taire, à l’appuis une fort belle série de projections faites avec les pho- tographies rapportées d’une mission scientifique accomplie par lui il y a quelques années aux Nouvelles-Hébrides. L'un des Secrétaires, G. FRON. Bull, Soc, nat, Acel, Fr. 4900. — 8 41% EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. Araujia sericifer4 EN PLEINE TERRE DANS L'OUEST DE LA FRANCE. Rouillac (Charente), le 28 octobre 1899. M. le Secrétaire général, je vous adresse une boite renfermant une fleur et un jeune fruit d’une plante qu'on m'a dit venir du Mexique et qui pousse bien en pleine terre à l'exposition du midi à Bressuire (Deux-Sèvres). Cette plante, qui est sarmenteuse, a la singulière pro- priélé d'attirer, quand elle est en fleurs, les Papillons qui sont faits pri- sonniers lorsqu'ils introduisent leur trompe dans la fleur et meurent suspendus par cet organe. En coupant le pédoncule du fruit que je vous adresse il est sorli un suc blanc laiteux en assez grande abon- dance, est-ce un caoutchouc ? Je vous serais reconnaissant si vous pouviez me donner le nom de cette plante qui se trouve communément dans les villas de Cannes m'a dit la personne qui m'en a donné un pied que par prudence je conserverai en serre cet hiver. Recevez, etc. D' LECLeEr. Note de M. Hua, Secretaire du Conseil, concernant la plante en question. La plante envoyée par le D' Lecler est une Asclepiadacée de l'Amérique du Sud : l’Araujia sericifera, connue aussi sous le nom d'Araujia albens et de Physianthus albens. Elle est commune au Brésil méridional et se retrouve au Pérou et au Chili. Dans cette dernière régicn, elle est cultivée dans les jardins et y est appelée Jasmin de Tucuman. Le latex blanc, très fréquent chez les plantes de cette famille, ne produit pas de caoutchouc. De SUR LE GINKO BILOBA. 11 décembre 1899. Mon cher Secrétaire général, Permettez-moi d’insister sur l'importance du cadeau fait à la Socée/é d’Acclimatation par notre collègue M. Igino Cocchi, qui cultive si bien le Ginko biloba. Je regrette bien de n’avoir pu faire sa connaissance quand je suis passé dernièrement en Italie. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE, 445 Le Ginko biloba n'est pas, à vrai dire, un arbre rare aujourd’hui. Pour ma part, j'en ai deux à Auteuil, dans l'Oise. Mais ce qui est rare, c'est l’arbre mâle et, par conséquent, la graine. La plante est dioïque, et longtemps l’on n’a eu que des pieds femelles; pour la première fois à Genève, si je ne me trompe, il y a vingt ou trente ans, on obtint ces graines, et ce fut un événement horticole. Ne distribuez donc pas avec trop de libéralité les graines que nous possédons. A mon retour en avril prochain, j'espère pouvoir rapporter de Syrie un grand nombre de graines; j'ai à cœur de pouvoir être utile, par l'intermédiaire de la Société d'Acclimatation, à nos explorateurs, à nos missionnaires, à nos colons. J’oubliais de noter un fait assez curieux concernant le Ginko biloba ; cet arbre, importé en Europe, à ce que je crois, vers la moitié de ce siècle, a été retrouvé dans les terrains du vieux Paris; il a fait partie de la flore lutécienne à l’époque tertiaire. H. MOREL: >< LES HANCORNIA (PLANTES A CAOUTCHOUC) ET AUTRES VÉGÉTAUX D'UTILITÉ OU D'ORNEMENT DE SAINT-PAUL (BRÉSIL). Le caoutchouc fourni par le latex des arbres du genre Hancornia est sans conteste un produit de tout premier ordre: seul celui de l’Æevea du Para l’égale. À tous égards, les Hancornia méritent la préférence pour la grande culture. Tandis que les Hevea, de même que le Manihot Glaziowi, ne peuvent s'éloigner de l’équateur sous peine de périr ou de ne donner que des résultats aléatoires ; les Æancornia occupent une aire géogra- phique immense s'étendant depuis l'équateur jusqu’au 36° de latitude sud : ils bravent le soleil brülant des tropiques tout aussi bien que les gelées de notre zone tempérée froide. Les Hevea sont extrêmement exigeants quant à la richesse des ter- rains en humus et en eau; ce sont des arbres à racines aquatiques les trois quarts de l’année : les Hancornia au contraire, ne demandent que les terrains les plus maigres, les plus secs, les plus arides, l'humidité prolongée les tue. Malheureusement, la durée de la faculté germinative des graines des Hancornia est très courte : elle s'éteint au bout de douze à quinze jours. Leur expédition en Europe est donc bors de question. Reste à trouver le moyen de les conserver. Une autre difficulié a empêché jusqu'ici le transport des Hancornia vers d’autres régions; c’est la nature du rôle physiologique de leur pivot, organe essentiel de nutrition pendant le premier âge. Le moindre ébranlement de ce pivot, pendant le repiquage ou pendant la mise en 446 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. pots, entraîne immanquablement la mort des jeunes plantes. Il fallait trouver un moyen d'éviter le traumatisme d’un si délicat organe et découvrir un procédé de culture qui permit le transport des jeunes plantes à de grandes distances. C’est ce que nous sommes parvenus à réaliser après des tâtonnements et déboires sans nombre. Aujourd’hui nous nous trouvons en état de livrer en Europe des milliers d'exem- plaires vivants de /lancornia, préparés et emballés de telle sorte qu'ils puissent continuer le voyage jusqu’en Afrique ou en Asie. Les Hancornia dont nous pouvons disposer appartiennent à trois espèces différentes : 19 Hancornia speciosa, variété connue depuis longtemps; donnant de 1 à 5 kilogr. de caoutchouc par pied et par an. Le fruit est bon à manger, surtout en confiture ; 2° Hancornia à fruit globuleux, nouveau; de la zone la plus froide de l'Etat de Saint-Paul ; donnant de 5 à 10 kilogr. de caoutchouc par pied et par an. Bon fruit; 30 Hancornia à fruit pyriforme (Hancornia Barrettoi Naudin) tout dernièrement découvert; de notre zone la plus chaude, frontière de Saint-Paul et Minas; gros arbre à haute futaie, se plaisant bien dans les sols pas trop secs, ni trop arides; du climat le plus sain de notre région sous-tropicale. C'est le roi des arbres à caoutchouc, donnant d’un seul coup et d'une seule saignée jusqu’à 15 kilogr. du plus beau caoutchouc. Son fruit est délicieux. La meilleure époque pour l'expédition des plantes est depuis avril jusqu’en septembre. Le climat de Saint-Paul étant le même que celui de Madagascar, les Æancornia doivent y retrouver leur habitat naturel. Pour la pleine réussite des envois, il est de toute convenance que les jeunes plantes soient élevées dans de petites caisses en bois d’une forme spéciale en vue de leur pivot (30 centim. de hauteur sur 10 à 12 de largeur et autant de longueur, presque un tuyau). Il faudra donc un certain délai après l'arrivée des commandes pour que les plantes puissent être expédiées. Nous appelons fortement l’attention des amateurs sur les Melasto= macées du Brésil, incontestablement les plus beaux arbres d'ornement du monde. Leurs graines ne germant pas par les moyens connus, force est bien d'accepter la seule ressource des exemplaires vivants, en pots, pour leur introduction en Europe. Signalons également les Myrtacées du genre Ewgenia, E. cauliflora (Jaboticaba et Cambouca), dont l'aspect est si original, quand l'arbre est tout chargé de fruits mûrs, noirs ou jaune d'or, collés contre l'écorce des branches, de tout le tronc et même des racines à décou- vert. Beaux fruits, très bons et très sains, les meilleurs du Brésil. Les colons européens y trouveraient un régal dans les possessions sub-tropicales. EXTRAITS ET ANALYSES. 147 Nous avons à l'étude 1,400 variétés de Vignes hybrides (Sino-brési- liennes), obtenues par le croisement du Vifis Carrieri, originaire de la Chine et de différents Vifis vinifera servant comme pères. Ce sont des plantes vraiment remarquables par la vigueur de leur végétation et leur splendide feuillage. Il se peut que ces hybrides soient appelés à un grand avenir dans les colonies, où la Vigne d'Europe s’est montrée jusqu'ici réfractaire à la culture. Nous avons également à l'étude un bon nombre de plantes à caout- chouc, indigènes, tout à fait inédiles, des lianes, des arbrisseaux et des arbres. Parmi elles se trouvent quelques Euphorbiacées (des Mu- nthot surtout) dignes de la plus sérieuse attention. Saint-Paul, le 1°" janvier 1900. L. P. BARRETTO ET FILS. EXTRAITS ET ANALYSES. LES ÉLÉPHANTS DÉ LA MÉNAGERIE DU MUSÉUM DE PARIS Par A. Mizne-Epwanrps, (de l’Institut), Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Le Muséum possède en ce moment quatre Éléphants ; l’une des paires provient d'Afrique et l’autre d'Asie. Le mâle africain, nommé Saïd, est arrivé le 8 avril 1883; il avait alors environ sept ans; il a donc aujourd’hui plus de vingt ans. Il est de grande taille, malheureusement ses défenses ont mal poussé, par suite de l'habitude qu’il a toujours eue de les user contre les murailles. La femelle est jeune ; offerte au Président de la République, M. Félix Faure, par l'Empereur Ménélick, elle a pris place au Muséum le 1°" juin 1897; elle était âgée de cinq ans, d’un caractère très doux et obéissant facilement à son gardien. Tous les matins, pendant ses promenades dans la ménagerie, elle se laisse monter et on la dirige aisément. Sa taille au garrot qui était de 1”,45, est maintenant de 1,87. L'Éléphant d'Asie mâle, Koulcb, est un don du D' Hahn, qui l'avait recu en cadeau du roi de Cambodge; nous le possédons depuis le 28 octobre 1894 ; il avait quatre ans environ et ne pesait que 226 kilo- grammes; il mesurait 1"12 et il a actuellement 1”83. C’est le plus intelligent de tous nos Éléphants; il sait ouvrir les crémones des portes, dévisser les boutons qui les retiennent et il exige de ses gardiens une surveillance continuelle. 118 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Souvent il exécute des actes parfaitement raisonnés et basés sur les observations qu’il a faites; il aime beaucoup le pain et les promeneurs lui en donnent largement, mais parfois les morceaux tombent dans l'intervalle qui sépare la grille du parc où il est enfermé de la balus- trade sur laquelle s’appuie le public. Il est impossible aux visiteurs de le reprendre; impossible aussi à Koutch de le ramasser; ce serait le supplice de Tantale, s'il n'avait imaginé un procédé très ingénieux : passant l'extrémité de sa trompe entre les barreaux de la grille, il vise attentivement le morceau de pain et souffle avec force, de facon à l'envoyer dans l'allée aux pieds de la personne qui l’avait jeté. Celle-ci n’a plus qu’à le ramasser pour l’offrir de nouveau à l’intelligent animal, qui répète celte manœuvre autant de fois qu’on le désire. Pendant l'été les douches lui sont très agréables, et chaque fois que les jardiniers arrosent les allées, il vient leur demander de diriger le jet d’eau sur lui; il prend alors les positions les plus bizarres, tantôt sur le dos, tantôt sur le ventre, soulevant ses oreilles, ouvrant sa bouche où l’eau ruisselle en cascades, et il prend un plaisir extrême à cette opération. S'il peut saisir la lance du tuyau avec sa trompe, il en fait un usage fort judicieux, se douchant avec beaucoup d'adresse de la tête à la queue. Sarit, l'Éléphant femelle, appartient à la race dite des ÉZéphants blancs; elle est de couleur brique foncée, parsemée de petites taches roses; elle vient du Cambodge et nous a été donnée par M. Doumer, Gouverneur général de l’Indo-Chine. À son arrivée en avril 1899, elle mesurail 157 et a gagné depuis 13 centimètres. Moins intelligente que Koutch, elle sait pourtant remercier ceux qui lui offrent du pain et leur exprimer sa reconnaissance par de nom- breuses génuflexions. Elle est plus délicate et plus sensible au froid que les Éléphants ordinaires et, pendant l'hiver, il faut la tenir dans une retraite bien chauflée. Elle sort néanmoins tous les jours avec ses jeunes compagnons et le meilleur accord règne entre eux (1). < LÉTTRES DE CALIFORNIE. par P. SERRE, de San-Francisco. Phoques (Otaries) et Saumons. — Le gibier à plumes. — Pisciculture et pêche, Roccus lineatus. — Notes diverses sur les Salmonides. — Prix et commerce des conserves de Saumon. Je crois devoir vous adresser quelques informations intéressantes (1) Extrait du Bullerin du Museum d'Histoire naturelle, 1899, n° 8. EXTRAITS ET ANALYSES. 119 relatives à la destruction partielle des colonies de Phoques (Otaries) de la côte du Pacifique que les pêcheurs et les fabricants de conserves de Saumons réclament à cor et à cri depuis vingt ans, et dont les démar- ches réitérées en ces derniers temps, semblent devoir être couronnées de succès. Si les délégations, pétitions, résolutions, etc., n’avaient eu aucun succès jusqu'alors, la raison en était que les « Sea lions » (Lions de mer), étaient protégés par une loi de l'État de Californie qui date de 1866 et défend de tirer et même d'importuner ces animaux dans les parages du « Cliff House » (Maison du Rocher), à San-Francisco et, plus au Nord, sur une longueur de 10 milles, sur la côte du district de Santa Cruz. D'autre part, en dehors de ces limites fixées, des ordon- nances locales ou des règlements du Département du Trésor, du Bureau des Phares, elc., prohibent absolument la chasse aux Phoques. Les restrictions apportées en la matière par le Gouvernement n’ont eu pour but œue de faire cesser les vols ou les déprédations que les chas- seurs commettaient sur les propriétés domaniales, ainsi que les luttes sanglantes qui s’engageaient entre eux. Jusqu'ici les Phoques du « Clif House », qui vivent sur des rochers à 100 mètres du rivage, ont été une des grandes attractions de San- Francisco, mais les intérêts des pêcheurs semblent avoir été sacrifiés, en ce sens que la protection légale dont ces Amphibies sont l’objet, leur a permis de se multiplier rapidement, et l’on sait qu un Phoque adulte mange journellement une grande quantité de Poissons, de 40 à 50 livres, assure-t-on. Une nouvelle pétition formulée par le sénateur Perkins, de Cali- fornie, vient d’être adressée au Secrétaire du Trésor, Gage, à V/a- shington, demandant l'autorisation d'envoyer des chasseurs aux îles Farallones, à 30 milles de la côte, à Point-Reyes, Point-Arena, Ano- Nuevo, etc., où vivent paisiblement d’imporlantes colonies de Phoques pendant la saison d’accouplement, en mai et juin, avec mission d’y tuer un grand nombre de ces animaux. Le président de la Commission locale des Pêcheries croit que cette autorisation sera enfin accordée; en ce cas, des contrats seraient passés avec des chasseurs adroilts. Un de ces spécialistes prétend pouvoir tuer 15.000 de ces Amphibies, du 10 juin au ]5 juillet, sur les récifs situés au nord des Farallones, où ils abondent. On estime à 25.000 le nombre des Phoques qui vivent sur la côte du Pacifique, et quand bien même on réduirait le nombre des animaux adultes à 10.000, la consommation de Poissons qu’ils feraient journel- lement atteindrait 500.000 livres au bas mot, étant donné qu’ils ont l'habitude, une fois repus, de jouer avec les Poissons et de les blesser mortellement d'un coup de dent. 5 Les pêcheurs se plaignent également ici que les filets qu'ils emploient, pour la pêche du Saumon notamment, et qui coûtent de 420 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 500 à 2000 francs pièce, sont parfois percés par les Phoques lorsqu'ils contiennent du Poisson, et que non seulement le filet est abîmé, mais que les prisonniers qui ne sont pas mangés s’empressent de déguerpir par l'ouverture faite. Le Phoque de Californie se trouve sur la côte du Pacifique entre l'extrémité sud de la Basse-Califoruie (Mexique) et le milieu de la mer de Bebring. Il est de taille plus petite que le Phoque des îles Pribylof et Aléoutiennes. En dehors du Lion marin de Californie, espèce prédominante sur la côte, on trouve aux îles Farallones quelques-uns des Phoques qui vivent aux îles Pribylof. Le Phoque tacheté et le Phoque gris se voient dans les endroits fréquentés par les Otaries. Le Phoque à trompe, autrefois abondant, n’esl plus qu’un visiteur occasionnel. Les mâles adultes de l’espèce californienne pésent environ 1.000 livres; certains de ces animaux atteignent le poids de 3,000 livres. Leur longueur varie entre 14 et 20 pieds. Les moustaches d’un gros mâle qui, en raison de sa force, n’a pas élé attaqué par ses congénères, se vendent jusqu’à 3 dollars 25, soit environ 16 fr. 90, sur cette place; celles des mâles de moyenne taille ont moins de valeur commerciale, des poils ayant été cassés ou arrachés au cours des combats qu'ils se livrent entre eux. Ces poils de moustache sont envoyés en Chine, où garnis d’une monture d’or ou d'argent, ils servent de cure-dents. Le fiel de Phoque se vend jusqu’à 2 dollars 50 aux Mongols, qui en péparent un onguent excel- lent, d’après eux, contre les rnumatismes et autres maladies similaires. Un membre de la Commission des Pêcheries est allé à Point-Reyes en compagnie d’un chasseur afin de commencer à exterminer les colonies qui se trouvent en cet endroit, mais comme les Phoques ne sont pas des animaux aussi stupides qu’on le croit généralement, à peine a-t-on tiré sur quelques-uns d’entre eux que toute la colonie a subitement disparu, on la croit partie aux Farallones. Ces Amphibies aiment à digérer en paix, et quand ils ont dans l'estomac un Saumon de 18 livres, comme on vient de le constater récemment ici, c’est bien le moins qu'ils restent tranquilles pour se l’assimiler. Certaines personnes, et non des moins sensées, prétendent que si les Poissons deviennent rares dans les baies de San-Francisco et de San-Pablo, cela tient à ce que des tonnes de petits Poissons, ne mesurant pas plus d’un pouce de longueur, sont détruits par les pêcheurs italiens et chinois qui se servent de filets dont les mailles n’ont pas un demi-pouce et sont encore rétrécies par la mousse marine qui les tapisse. On attend maintenant une réponse du Gouvernement pour aller tuer es Phoques sur les propriétés domaniales. Je dois dire qu'on veut, non exterminer complètement les « Sea-lions » mais diminuer la quantité de mâles de 90 pour 100. Je vous tiendrai au courant de la décision qui aura élé prise en haut lieu. EXTRAITS ET ANALYSES, 124 L 2 Ç DOS © Je me permettrai maintenant de passer en revue le gibier à plumes le plus commun sur la côte du Pacifique. Je dois tout d’abord parler du « swift winged Dove » Pigeon à l’aile rapide, qui abonde en Cali- fornie depuis la côte jusque sur les Sierras. Cet Oiseau fait son nid dans les buissons, les arbrisseaux, et, peu effrayé de la présence de l'Homme, dans les arbres des vergers. Pendant les grandes chaleurs, on voit les Doves se tenir par douzaines à l'ombre sous les arbres et notamment sous les Sycomores. En certains endroits, on les rencontre par compagnies de mille et plus. Au sud de la Californie, dans les déserts de Mojave, on trouve également le Dove, épris de solitude aussi bien que de civilisation; toutefois il ne s’écarte pas à plus de quelques milles d’un ruisseau. En raison de son vol rapide, qui lui a valu le nom de « swift winged », le Pigeon de Californie, dont la chair n’est pas à dédaigner, se joue fort bien des chasseurs dont le plomb ne fait souvent que causer des dommages aux plumes de sa longue queue. La Caille de montagne (mountain Quail; Oreortyæ pictus) est moins abondante en Californie que la Caille (Colin) des vallées (valley Quail; Calipepla californica). Celle-ci a cependant de nombreux ennemis, à commencer par | Homme. La Caille de montagne porte sur la tête deux longues et jolies plumes; la gorge et les flancs sont de couleur brun foncé ; le ventre, également brun, est strié de raies transversales noires et blanches; le cou est gris foncé. Cet Oiseau vit sur le sommet des montagnes; parmi les « sugar Pines » (Pins à sucre) et autres essences qui croissent à une haute altitude. Dans le nord de l’Elat, on la trouve dans les endroits montagneux où la couche de neige n’est pas trop épaisse, ainsi que sur les collines, - en compagnie de la Caille des vallées. Dans l'Etat d'Orégon, situé au nord de la Californie, la « mountain Quail » est commune, le pays étant tres accidenté. La chasse à la Caille des montagnes, souvent périlleuse, n’est que rarement heureuse, cet Oiseau étant très sauvage et tout au moins aussi rusé que le chasseur. Un grand nombre de Cailles des vallées sont détruites chaque année par les Chats sauvages et les Coyottes. Parmi le gros gibier à plumes qui se fait de plus en plus rare sur la côte du Pacifique, on cite le « ruffed Grouse et le « dusky Grouse ». Le premier de ces Oiseaux (Bonasa wmbellus) se chasse dans le nord de la Californie et surtout dans l'Etat d’Orégon, où il se tient dans les profondeurs des forêts de Cèdre, de Pin sucré, etc. Le mâle possède autour du cou un collier de plumes brunes et peut être chassé facile- ment quand il s’accouple, car, à cette époque, son roucoulement bruyant décèle sa présence. « Le ruffed Grouse » qu’on trouve sur la côte du Pacifique est à peu 122 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. près de la même grosseur que celui des Etats de l'Est, mais ses teintes brunes sont plus foncées, La femelle pond de douze à quinze œufs, ainsi que celle du « dusky Grouse » (Dendragapus obscurus). Dans les endroits sauvages, on trouve des compagnies de ces Oiseaux, qui se laissent assez facilement approcher. X x La Commission des Pêcheries des États-Unis est parvenue, par une distribution bien ordonnée d'œufs et d'alevins d'Aloses (qui a nécessité une dépense totale de 42,000 dollars), à accroître les prises annuelles de 150 0/0 en l’espace de quatorze ans. En 1885, il avait été pêché cinq millions d’Aloses dans les eaux américaines, contre treize mil- lions en 1898. Le prix de ce Poisson aurait baissé de plus de 80 0/0. . La somme dépensée sur la côte du Pacifique pour propager l’Alose a été de 5,000 dollars et actuellement, on y pêche annuellement de un à deux millions de ces Foissons. On a également peuple les eaux de la côte de « striped Bass (Bar rayé ; Roccus lineatus). Ce Poisson provient des rivières de l'État de New-Jersey, et, placé à deux reprises différentes, en 1879 et en 1882, dans la baie de San-Francisco, il s'y est parfaitement acclimaté et mulliplié. Les Bars rayés nagent par bandes, aussi a-t-on dû pro- hiber à une certaine époque la pêche de tout Poisson de cette espèce pesant moins de 8 livres. La limite de poids a été ensuite réduite à 3 livres et actuellement, vu l'abondance de « striped Bass », on permet de pêcher tout Poisson dont le poids dépasse une livre. On estime que 500,000 livres de Bar ont élé vendues à San-Francisco, l’année dernière. On trouve maintenant, le Æoccus linealus tout le long de la côte de Californie ; toutefois son quartier général est toujours dans la baie de San-Francisco et les rivières qui s'y jettent. Ce Poisson mange une grande quantité de Carpes également intro- duites dans les eaux californiennes. On s’en est souvent assuré en ouvrant ces animaux voraces. Les Bars se pêchent avec deux filets différents : le « gill net » de 60 à 70 brasses de long sur 14 pieds de largeur, dont les mailles, de 6 pouces carrés 1/2, retiennent prisonnier le Poisson qui a commis l'imprudence d'y engager la tête, et les « purse seines » de 200 pieds de long sur 14 de large, dans lesquels les Bars s'engagent comme dans une nasse. Un bateau aurait pêché dans une même journée douze cents Bars pesant en moyenne 5 livres chacun. Jusqu’en 1888, le prix maximum de ce Poisson sur le marché de San-Francisco atteignait 1 $ (5 fr. 20) la livre; actuellement, on l’y détaille à 6 cents la livre, les pêcheurs recevant des marchands un prix moyen de 2 cents 1/2. Sur le marché de New-York, à proximité des eaux de l'Atlantique, EXTRAITS ET ANALYSES. 123 où furent recueillis les premiers « striped Bass » importés en Cali- fornie, ce Poisson se vendait, en juin dernier de 10 à 18 cents la livre. Dans le cas où cette espèce de Roccus ne serait pas connue en France, il y aurait intérêt pour nos populations maritimes à l’intro- duire dans nos eaux, étant données la finesse de sa chair, la rapidité avec laquelle il se multiplie, et la condescendance avec laquelle il consent à vivre à proximité de la côte, à la portée de son plus grand ennemi, le pêcheur. +4 Les établissements de pisciculture de l'État de Californie se sont surtout intéressés à la propagation du Saumon commun (Salmo salar) et du Saumon à tête d'acier (Salmo Gaïrdneri). Quarante millions d’alevins de ces deux espèces ont été distribués par eux en 1898. Les cinq établissements de la rivière Columbia (État d’Orégon) ont déposé dans les rivières de la côte vingt millions d’alevins et une nouvelle siation établie à Baker's Lake [État de Washington) distribuera l’année prochaine des alevins de deux espèces de Saumons (blue Back : Dos bleu; Oncorhynchus nerka et Silver Salmon, Saumon ar- genté; Oncorhynchus Kisuich) qu'elle est spécialement chargée de propager. En 1898, les Stations des États de Montana, Colorado et Dakota ont distribué six millions d’alevins de Truites dans les territoires situés à l’ouest du Missouri. Celles des États d'Jowa, d'Illinois, du Missouri et du Texas ont produit un million d'’alevins de « black Basses (Bars noirs; Micropterus salmoïdes) et de « rainbow Trout » (Salmo irideus) ou Truite arc en ciel. Les Slations spéciales de Bullockville (Georgie), Bryans Point (Vir- ginie), Havre de Grâce et Gloucester ont distribué 240 millions d’Ale- vins d’Alose dans la Fioride et dans le Massachusets. Dans ce dernier État sont élablis deux énormes établissements spéciaux pour la repro- duction des Poissons de mer (Morue, Carrelet, Merlan) ainsi que des Homards. Il aurait été distribué, en 1898, par ces Stations, 200 mil- lions d’alevins de Morue, 40 millions de Carrelet et 100 millions d'œufs de Homard. Les établissements des grands lacs ont distribué 500 millions d’ale- vins de Truite, de Hareng (?) de Brochet, de Perche, etc. Les statistiques fédérales des pêcheries des grands lacs (Supérieur, Michigan, Huron, Érié et Onlario), qui vont être publiées cette année, accuseront certainement une exlension énorme des pêcheries. Déjà, au cours de la précédente période décennale, c'est-à-dire de 1880 à 1890, le nombre des pêcheries avait augmenté de 53 0/0 ; le capital engagé dans les pêcheries de 110 0/0 et les prises de Poissons de 68 à 118 millions de livres, soit 70 0/0. Seul, le lac Ontario, qu'on ne considère plus comme un facteur en la matière, aurait accusé une 194 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. décroissance dans l’industrie de la pêche. En 1890, 107 vapeurs et 3,876 voiliers montés par 6,996 matelots et officiers constituaient la flotte de pêche des lacs. Peu de personnes se rendent un compte exact de la rapidité avec laquelle les Poissons se multiplient dans ces lacs. D'autre part, les immigrants des contrées maritimes européennes et particulièrement de la Norvège, de la Suède, de l'Allemagne, du Da- nemark et de la Finlande se sont fixés autour des grands lacs et con- trôlent aujourd'hui l'industrie de la pêche dans ces régions, comme les Bretons et les Écossais la contrôlent au Canada et les Portugais et les Italiens sur la côte du Pacifique. Les deux tiers de la pêche des lacs consistent en Harengs (?), Truites, Esturgeons et White fishes (Poissons blancs ; Coregonus clupei- formis). La pêche de la Truite des lacs (lake Trout, Sa/velinus namaycush) qui est, après le Hareng (?) et le White fish, le Poisson le plus abondant des eaux de ces régions, a augmenté, de 1880 à 1890, de 65 0/0. x *Xx * Je vais maintenant vous entretenir du commerce, sur cette côte, des Saumons, dont j'ai dit quelques mots en parlant de leurs pires ennemis après l'Homme, les Phoques. La saison de la pêche du Saumon vient de s'ouvrir en avril sur la rivière Columbia dans l’État d’Orégon, et s'annonce comme excellente, tant pour les fabricants de conserves qui ont des débouchés assurés, que pour les pêcheurs qui toucheront l’ancien prix de 5 cents par livre, d'après un accord conclu entre les usiniers. Eu raison du grand nombre de jeunes Saumons déposés dans la rivière Columbia et ses iributaires il y a quelques années, on s'attend à faire des prises importantes. Une partie notable du capital nécessaire aux fabricants de conserves est fournie par des capita- listes de San-Francisco; plusieurs centaines d'hommes sont en- voyés annuellement de ce port aux pêcheries, et la Reine du Pacifique serait toujours le principal marché de distribution des con- serves de Saumon. La législature de l'État d'Orégon a d'ailleurs favorisé la propagation du Saumon dans la rivière Columbia et ses affluents et elle a protégé l’industrie des conserves. Un grand nombre d'établissements de pisciculture ont été créés et plusieurs millions de jeunes Saumons ont été déposés dans ces rivières il y a quatre ans; on croit que 90 p. 100 de ces alevins ont vécu. Cette année (1899), les « Hatcheries » (Établissements de pisciculture) produiront prés de 30 millions d’alevins qui assureront de belles prises au cours des années qui suivront. Les rivières de l'Alaska, elles, se dépeupleraient graduellement, car les « Hatcheries » manquent dans ces parages, tandis que les pêcheurs augmentent en nombre. Toutes les « Canneries » de Saumon (Établis- sements de mise en conserve) de la côte nord du Pacifique sont pros- pères, plusieurs de nos compatriotes font intelligemment valoir leurs EXTRAITS ET ANALYSES. 125 capitaux dans cette branche de commerce qui est encore appelée à se développer, il y aurait de la place pour d’autres Français entre- prenants. Les marchés anglais offrent surtout de gros débouchés aux conserves de Saumon, le voilier Hala vient de charger 54.826 caisses de Saumon de la rivière Fraser pour Liverpool. Les prix, en 1899, augmenteront, les caisses et le fer blanc étant en hausse (1). >< LA CULTURE ET LE COMMERCE DES BANANES AU COsTa-Rica; Par Emile Joe, Consul et chargé d’affaires de France au Costa-Rica (2), Les bananes sont, après le café, le plus important produit d'expor- tation du Costa-Rica. La culture de ces fruits augmente chaque jour, et les bénéfices qu'y trouvent les planteurs sont considérables. Exportation de Bananes cn 1897-1898. Valeur en francs. BOB Reese +... 2.331.036 régimes, valant 4.645.451 fr. 30 c. DOUTER cel. 069.691 — 3.891.919 35 En plus pour 1898. 365.405 — 753.501 fr. 95 c. La production en 1898 est la plus forte qu'on ait eue jusqu’à ce jour. On croit cependant qu’elle sera presque doublée dès cette année. De grandes compagnies américaines se sont, en effet, récemment for- mées pour la culture et l’achat des bananes sur la côte de l’Atlantique où l’on trouve, dans les environs de Limon, de vastes étendues de terres favorables à ce riche produit. Non seulement ces fruits ont augmente en quantité ces dernières années, mais leur qualité, comme grosseur surtout, s’est encore amé- liorée, grâce à l'expérience et à une culture plus raisonnée. D'immenses champs de Bananiers, avoisinant Limon, sont au- jourd'hui cultivés à la charrue et aussi proprement tenus qu'un jardin. Les bons terrains de bananes doivent être abrités contre les grands vents, très riches en humus et humides sans être marécageux. Les terres situées sur les bords des rivières qui débordent aux grandes eaux et laissent ensuite un limon fertilisant sont les plus recherchées. (1) Extrait du Bulletin de la Société zoologique de France, 1899. (2) Extrait d’un Rapport sur la situation économique et commerciale de la République de Costa-Rica en 1898-99, 126 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Un climat pluvieux est, en outre, nécessaire pour les grosses et belles productions. Les grandes plantations de Bananiers du Costa-Rica se trouvent toutes dans les environs de Limon et s’étendent de la côte à une qua- rantaine de kilomètres dans l’intérieur, sans dépasser toutefois une altitude d'environ 200 mètres. Il y pleut, pour ainsi dire, toute l’année, et le climat très chaud et humide est des plus durs. Les noirs seuls peuvent y travailler impunément. Dans ces riches terrains de la côte atlantique, où la production de bananes est énorme, cette culture donne aux planteurs des bénéfices réellement extraordinaires. Plusieurs propriétés ont donné 100 0/0 et même plus dès la seconde année. : Voici, du reste, le détail des frais de plantation et de culture d’une manrana, plantée en Bananiers. La manrana, mesure locale, équivaut exactement à 6,988 mètres carrés 96, soit un peu plus des deux tiers d’un hectare. Dans le calcul qui va suivre, nous ne tiendrons pas compte de la valeur du terrain qui, en forêt, peut varier, au Costa-Rica, de 5 francs à 200 francs la #anzana, selon sa situation et sa qualité. Un terrain, aussi bon qu'il soit, éloigné des voies de communica- tion, n’a, en effet, pour ainsi dire, aucune valeur, les frais de création de route et de transport risquant d’absorber tous les bénéfices qu’on en pourrait tirer. C'est ainsi qu’une concession de terrains de 100,000, ou même d’un million d'hectares et plus, n’a aucune valeur tant qu’elle n’est pas desservie par des voies de communication pratiques. Notre conquête de Madagascar serait sans aucun profit pour nous, si nous n’y établissions au plus tôt quelques grandes voies de com- munication. Nous laisserons donc ici de côte la valeur du terrain qui peut varier à l'infini et ne présente, du reste, aucun intérêt pour ce que nous voulons démontrer. Nous supposerons simplement, dans les environs de Limon, un terrain bon pour la culture du Bananier et ayant des moyens de communication normaux. Dans ces conditions, la plantation en forêt d'une #”anzana de Ba- paniers coûte environ 200 francs. Cette plantation donne une récolte dès la première année, et sa durée moyenne de production est de sept à dix ans. On compte que la production moyenne d'une #7anzana de Banariers est de 20 à 25 régimes par mois. Ces régimes se vendent actuellement, livrés sur la voie ferrée qui dessert cette région, un prix moyen de 1 fr. 35 chacun. On calcule, d'autre part, que chaque régime occasionne une dé- peuse moyenne de ( fr. 40 pour frais de cullure, de coupe et de trans- port à la station. EXTRAITS ET ANALYSES. 127 Donc une #”anzana donnant en un mois vingt régimes produira (20 X 1 fr. 35) 27 francs. En déduisant les frais, c’est-à-dire 20 X 0,40, soit 8 francs, on aura un bénéfice net de 19 francs par mois et par manzana, où de 228 francs par an. D'après ce calcul, où j'ai pris des chiffres minimum pour ne rien exagérer, les frais de plantation (200 francs) seraient donc couverts dès la première année, et il resterait, en outre, un bénéfice de 28 francs. Dès la seconde année, chaque #74n74na donnera 228 francs de béné- fice par an, et cela pendant sept ou dix ans. Une propriété de 100 smanzanas, ce qui est peu dans ces pays où le terrain est presque sans valeur, donnerait donc un bénéfice annuel de plus de 20,000 fr. Cet énorme profit doit être évidemment diminué, puisque nous n'avons pas lenu compte de la valeur du terrain, ni des frais de chemins d'exploitation, ni des dépenses occasionnées par la construc- tion des maisons nécessaires aux travailleurs. Les frais d'administration sont, d'autre part, assez élevés, les agenis qui consentent à vivre dans ces régions malsaines se faisant bien payer. Mais, quelles que soient ces diverses dépenses, variables sui- vant la siluation des terrains exploités, les grands planteurs de bananes du Costa-Rica retirent en moyenne un bénéfice net de 50 à 60 0/0. Pour atteindre ce magnifique résultat, il ne suffit pas cependant de posséder de grandes et belles plantations de Bananiers. fl faut avoir, en outre, le débouché régulier de ses fruits qui, lorsqu'ils ont atteint leur grosseur normale, doivent être cueillis avant leur pleine maturité, sous peine d’être perdus pour l'exportation. Les bananes sont, en effet, jusqu'à présent consommées fraîches aux États-Unis et doivent y être vendues sans retard. On n'a pas encore trouvé le moyen de les utiliser autrement avec profit. On pré- tend cependant qu’elles peuvent donner une bonne farine et servir pour la confiserie. Deux grandes compagnies exportent actuellement toutes les bananes du Costa-Rica que les propriétaires leur livrent le long des voies ferrées traversant les plantaiions. Ces compagnies s'engagent, par contrat, à acneter à un prix déterminé et pendant toute l’année tous les fruits qui leur seront fournis en bon état de malurité. Elles sont, du reste, elles-mêmes, propriétaires d'immenses terrains plantés de Bananiers. Depuis cette année (1899), ces compagnies chargent de trois à quatre vapeurs par semaine pour l'exportation des fruits à New-York (sept jours) ou à la Nouvelle-Orléans (cinq jours). Chaque bateau est amé- nagé de facon à recevoir 20 à 30,000 régimes. Ces fruits arrivant mûrs aux États-Unis doivent y être consommés dans le plus bref délai possible, ce qui demande une nouvelle et puis- 128 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. sante organisation, nécessaire pour la vente rapide de ce produit. Les bananes du Costa-Rica sont très appréciées aux États-Unis où elles se vendent, paraît-il, de 3 à 4 fraucs le régime. Plusieurs de nos compatriotes possèdent des plantations de Bananiers ou des intérêts dans des compagnies bananières. Les principaux plan- teurs français sont MM. Léon Laprade et Napoléon Millet. Si, dans ce rapport général, nous avons insisté d’une facon toute particulière sur la culture et la vente des bananes, c'est dans l'espoir de faire peut-êire profiter de nos indications certaines colonies fran- caises de la côte occidentale d'Afrique. Jusqu'à présent, les bananes n'ont, pour ainsi dire, été exportées qu’aux États-Unis où la consommation de ce fruit augmente chaque jour. Mais cette mode, qui répond peut-être à un besoin, va probable- ment s'étendre jusqu’à l’Europe. Le Gouvernement anglais, toujours pratique, toujours le premier quand il y a, dans le monde, un bénéfice à réaliser, vient, en effet, d'accorder une subvention de 250,000 francs par an à une compaguie maritime, la Jamaîca Fruit and Produce Association, qui doit faire le transport des bananes de Kingston (Jamaïque) à Southampton. Une vitesse de 15 nœuds est imposée aux navires. Certaines de nos colonies de la Côte occidentale d’Afrique (Sé- négal, Guinée, etc.), étant plus rapprochées de l'Europe que la Ja- maïque et tous les autres pays producteurs de bananes, peut-être pourrait-on y trouver des terrains et des climats propres à la culture de ces fruits ? Dans ce cas, la France ayant la bonne fortune de posséder les terri- toires intertropicaux, nécessaires à cette culture, les plus rapprochés de l’Europe, pourrait devenir un jour la maîtresse du marché des bananes sur notre vieux continent, si le goût de ce fruit venait à s'y développer comme aux États-Unis. Les bananes livrées à la consommation seront, en effet, d'autant moins chères et de meilleure qualité que leur transport en bateau aura été de plus courte durée. C'est là, croyons-nous, une question intéressante pour nos grandes compagnies françaises qui se proposent de mettre en valeur nos pos- sessions de l'Afrique équatoriale. Mais, avant de se lancer dans une pareille entreprise, nous leur conseillons vivement d'envoyer ici des agents spéciaux qui se rendront compte sur place des avantages de cette culture et de l'organisation délicate et puissante qu'elle comporte pour en tirer de gros bénéfices. DE LA A run (Revue des Sciences naturelles : appliquées) — ————— 47: ANNÉE MAI 1900 SOMMAIRE &. DEBREUIL. — Elevages de Maras et de Cerfs axis à Melun (Séine- et- Marne)... OLOTNITSKY. — Le Poisson combattant de Siam (B21ta pugnax) et sa reprodaction ( en ERIC PC OR OUPS LPC ONRE ss... So E als ne nr Maxime CORNU. — Allocution prononcée le 17 février 1500 (conférence d M. Ê pe Duval Extraits des procès-verbaux des Séances la Societé : ances générales du DS Pénrien Et dit 237 iMans 1000. 2 en sa ci dé dures l out Mie) Dance dun mars [O0D 2er 2 hs as eo. danses >= Section (Ornithologie-Aviculture). — Séance du 12 mars 1900..........,.........., éction (Aquiculture). — Séance du-26 mars 1900...........:.:.........,....... Section (Enlomologie). — Séance du 19 mars 190 . Re D ES mini ge à RCE perhon Polanque)---— Séance du. 20 mars 1900......:.:22............. ..,.... 65 Section (Colonisation). — Séance du 5 mars 1900. . ANA ra AAC “e Troisième Congres ornitholog aique international (participation de la Société d’ Acclimatation SDL DAV AU) en se co eme ee POSTERS PR a on pain De De dune net eee D ionnanre euriles finamous. ,..... SeURE Pre re ie nn eee 0 D — sur les Nandous ........ D ee . rose ana Da anger de l'emploi de l’arséniate de soude pour la destruction des Alsises de la Vigne ot D Re ee ue Pa toie he ol ne TX FOR A TRE re nises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr, 50 AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Le 41, RUE DE LILLE, 41 | È __ PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE- ANNE sur les Orchidées).............. RE da An ee Re ee ton 1 ANT it _ La Société ne ui sous sa Le aucune des opinions w Le Bulletin paraît tous les mcis DÉSINTECTANT ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, eux à _Scientifiquement dér ontrée, l'immense avantage de n'être »’, Toxique ni Corrosif. Hémostatique et Styptique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et la PHPRE des Services d'Hygiène el de Désinfection des Départements. 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Is avaient pour nourriture de l’avoine, quelques carottes, du pain et l'herbe qu'ils pouvaient brouter. Dès les premiers jours, le mâle parut malade; il continuait néanmoins à bien manger, mais sa maigreur devint extrême. Les Maras avaient immédiatement adopté le hangar, et ils avaient creusé un terrier d'environ 5 mètres de long, sous les ballots de tourbe. Cette retraite, dont ils bouchaïient l’entrée dès que la nuit venait, était très sûre, très chaude et, de plus, très hygiénique, la tourbe étant antiseptique. Le mâle sortait de moins en moins, il paraissait marcher avec peine, et ses flancs battaient précipitamment. Un matin, six semaines après son arrivée, il fut trouvé mort à l’entrée du trou. Notre collègue, M. Remy Saint-Loup, voulut bien en faire l’autopsie, et ses conclusions furent que l’animal était mort de tuberculose généralisée, Le hangar fut désinfecté, le terrier comblé, et, au bout d'un (1) Communication faite le 5 janvier 1900 à la Section des Mammifères, Bull. Soc. nat, Accl. Fr. 1900. — 9 430 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. mois, voyant la femelle se bien porter, je fis revenir un autre mâle. Celui-ci paraissait très vigoureux, mais deux mois après son arrivée, lui aussi mourait. M. le D' Phisalix, assistant au Muséum, déclara, dans une note fort intéressante parue dans le Bullelin du Muséuin (1), que l'animal était mort tuber- culeux. Si ces Maras m'ont été livrés sans le germe de la tuber- culose, je ne sais à quoi attribuer leur maladie, car ils étaient, chez moi, dans des conditions très saines, et sauf des Rats qui vivaient en assez grand nombre autour de leur terrier, rien ne pouvait les contagionner. Depuis, voulant changer le sang de mes animaux, je n'ai pas trouvé à remplacer les deux mâles. La femelle paraît en bon état. Malgré ces insuccès, et bien que, à mon avis, le Mara puisse difficilement, en France, devenir un gibier, c'est-à-dire un animal de chasse, vivant à l’état sauvage, je crois qu'il ne faut pas abandonner son élevage. Il est, en effet, lorsqu'il se trouve dans de bonnes condi- tions de santé, plus résistant que le Cochon d'Inde. Il est moins prolifique, mais il est plus gros. Grâce aux terriers qu'il creuse, et dont il sait avec soin boucher l'entrée, il peut subir les rigueurs de notre climat sans avoir trop à en souffrir. Lorsque le Mara s’est éloigné de son terrier, il se défend mal contre les Chiens, les fauves et les braconniers; il n’en reste pas moins fort intéressant au point de vue de l'agrément et au point de vue comestible. Il s'apprivoise facilement et, dans une prairie, une troupe de Maras est d'un effet charmant; rien n’est amusant comme de voir courir ce petit animal, que ses bonds originaux font ressembler à un jouet mécanique. Sa chair est bonne, et elle peut venir varier heureusement le menu du meilleur des diners. Enfin, sa fourrure n'est pas sans valeur et pourrait être employée pour nos vétements. À ces divers points de vue, je crois donc devoir conseiller à mes collègues de continuer son élevage et son acclimatation. (1) Voir ci-après. ÉLEVAGES DE MARAS ÊT DE CERFS ‘AXIS. #44 CERFS AXIS. En avril 1899, j'ai fait venir de Marseille un couple ‘de Cerfs axis adultes. — La femelle était née en France, le mâle était importé. Je les ai placés dans un petit parc d'une contenance d’'en- xiron 1,000 mètres, entouré de grillage de 3 mètres de haut. Dans ce parc, ombragé par de grands arbres et planté, dans une de ses parties, d'un taillis touffu, se trouve un petit bassin à eau courante et une écurie en planches. Le 4äécher est toujours une opération délicate; malgré toutes mes précautions, le mâle, au sortir de la boîte, pris d’affolement, se précipita, de toutes ses forces, sur les gril- lages et les pieux de la clôture. Isefit ainsi de telles blessures à la tête et aux jambes, qu'au bout de peu de temps, il se laissa tomber anéanti dans ‘un coin. Ne voulant pas assister plus longtemps à son suicide, j'étais parti, persuadé que je le retrouverais mort. — Le lendemain, pourtant, il était beaucoup plus calme, il se laissa approcher, caresser et soigner; ses blessures, qu'on lavait chaque jour avec de la créoline, se cicatrisèrent rapidement, et il devint bientôt aussi familier que la femelle. Pour les remettre promptement en bon état, je leur donnai du lait (dont ils étaient très friands), du pain, des carottes, du maïs, de l’avoine et de l'herbe. À ce régime, leur poil devint vite brillant, ils engraissèrent, ét bientôt il me fut possible de supprimer le lait, le pain ét les carottes; je ne leur donnai plus — à chacun — en plus de l'herbe du parc, qu'un demi-litre de maïs, mélangé à un demi- litre d'avoine. | Le mâle, qui, dès son arrivée, avait perdu deux petites dagues, fit immédiatement ses boïs et, au mois d'août, il avait ses bois complets avec ses andouillers. Il entra en rut au mois de juillet; je ne l’ai pas vu s'accou- pler, mais il montait la garde autour de sa ‘femelle, qui le fuyait moins. Au mois de septembre, la biche me parut avoir le ventre plus gros; actuellement (janvier 1900), je la crois pleine, et j'espère qu’elle mettra bas au printemps. 432 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Jusqu'au mois d'août, le Cerf avait été très doux, il aimait à se faire caresser et semblait ne vous pousser de ses cornes que pour jouer. Pourtant, dès cette époque, quand il voyait un étranger, il se contractait, frappait le sol de son pied, labourait la terre de ses cornes, puis retroussant ses lèvres et creusant ses larmiers, prenait la plus étrange des figures. — Il passait sa colère sur les arbustes du parc qu'il se mit à briser les uns après les autres. J’espérais que sa mauvaise humeur en resterait là, et on continuait à entrer auprès de lui sans défiance. Mais un jour,au mois d'octobre, le jardinier, qui réparait une porte de l'écurie, n’eut que le temps de se sauver: l'Axis avait foncé brusquement sur lui, et, d’un coup de tête, lui avait fait eux sérieuses blessures à la jambe. Quelques jours après, moi-même, je venais de le caresser, quand il se précipita sur moi et me fit de fortes contusions à la poitrine. Depuis, il devient de plus en plus méchant; mon jardinier m'écrit qu'il y a danger à entrer dans le parc et qu'il est obligé de donner la nourriture par une porte de derrière de l'écurie. Un ouvrier, qui faisait une réparation dans le pare, faillit, lui aussi, être sérieusement mis à mal, et il fut obligé d’aban- donner ses outils. On m'avait assuré que ce Cerf n'était point méchant : il faut, en somme, prendre avec lui les mêmes précautions qu'avec les autres Cervidés, et je crois que je vais être obligé, pour plus de sécurité, de lui faire scier les cornes. Non seulement, en effet, il s’est jeté sur nous, mais il a failli tuer sa femelle : un jour, en jouant, il poussa la porte de son écurie, et il se trouva ainsi enfermé pendant une nuit et une partie de la journée avec sa biche. Il en profita pour étre aimable à sa facon et laboura, de ses cornes effilées, les flancs, le cou et les jambes de sa probablement trop chaste com- pagne. Heureusement, on put les séparer à temps, et les bles- sures, quoique graves, se guérirent rapidement. Je viens de montrer le principal défaut de l’Axis : il est méchant; à certaines époques, il devient dangereux pour ses gardiens, et il peut, si son parc n’est pas suffisamment spa- cieux, aller jusqu’à tuer sa femelle. Mais il faut savoir pardonner, d'autant plus que je suis cer- tain qu'on pourrait, presque complètement, éviter les dangers 5» d [ae] ÉLEVAGES DE MARAS ET DE CERFS AXIS. Il que je viens de signaler, en livrant au mâle plusieurs femelles et en làchant la petite harde dans un espace de 3 ou 4 hec- tares. En dehors de ces excès, dus à sa nature trop ardente, om ne trouve que des qualités chez l’Axis. Il résiste parfaitement à nos hivers, et notre distingué col- lègue, le docteur Trouessart, nous à dit qu'au bout d’une génération, la gestation de la femelle se réglait et que les petits, naissant à une époque favorable, s’élevaient alors facilement. L’Axis est le plus gracieux des Cervidés; il est toujours en habit de parade, il garde, en toute saison, sa jolie robe mou- chetée de blanc. C'est l’idéal de la bête de parc; lorsqu'il est guéri de sa folie d'amour, il reconnait ses amis du plus loin qu’il les voit, et, bondissant, il vient, en se jouant, leur quémander une caresse ou une friandise. Toujours sur ses gardes avec un étranger, il donne, par la noblesse de sa pose, par la grâce de son allure, une impression de charme infini. Ce serait aussi l’idéal de la bête de chasse. Contrairement à ce que j'ai dit pour le Mara, l’Axis serait un gibier parfait. Je ne puis donc que conseiller à nos collègues de poursuivre son acclimatation et à nos chasseurs de l’introduire dans leurs grandes chasses. Je souhaite voir, un jour, nos veneurs, qui ne peuvent tous se permettre un déplacement dans la jungle, s’offrir le plaisir peu banal de courir l’Axis dans les forêts de la France, 134 LE POISSON COMBATTANT DE SIAM (BETTA PUGNAX) ET SA REPRODUCTION. EN AQUARIUM (1) Par N. SOLOTNITSKY, Conseiller d'État à Moscou, Lauréat de la Société nationale d Acclimatation de France. Le Poisson combattant, (Belta pugnax) appartient: à la famille des Pharyngiens labyrinthiformes — Labyrinthici — qui comprend aussi les Macropodes que tout le monde connait. IF habite les petites rivières et les ruisseaux de l'Annam, du Siam, et généralement ceux des Indes au delà du Gange; on le-trouve également et en grande abondance dans l'ile de Poulo-Penang (ou du Prince de Galles) où il peuple les ruis- seaux qui coulent au pied de la montagne de Penang. De petite taille (5 à 6 centimètres), son aspect rappelle un peu celui de l’'Epinoche (Gasterosteus aculealus). Le corpsrest de-forme allongée, légèrement déprimé sur les flanes, la ligne latérale absente ou interrompue; la nageoire dorsale courte, placée au milieu du dos, les nageoires pectorales longues se terminant par un grand filament; les nageoires ventrales très larges et en forme de voile, la queue est arrondie. La coloration est d'ordinaire peu brillante avec ses rayures transversales foncées sur un fond brun et ses nageoires d’un gris-bleu sale. Maïs pendant la période des amours ou quand ils sont excités par la colère, les mâles, belliqueux par tem- pérament, se parent de couleurs si vives qu’elles échappent à toute description. La nageoire dorsale prend une teinte d'un magnifique outremer, les nageoires pectorales et ventrales mélangent cette teinte à un rouge cramoisi des plus vifs et la queue divisée en rayons depuis sa base, devient d’un bleu plus sombre avec des tons framboise d’une grande intensité. 4. Cet article a paru dans le journal Natur und Haus, 6° année, fascicules 16 et 18. — La présente traduction faite de l'allemand par A. Delaval a été com- muniquée à la Société d'Acclimatation dans sa séance du 22 décembre 1899. LE POISSON COMBATTANT DE SIAM- 135 Sur le corps apparaissent des ondes colorées, tantôt noires, tantôt. vertes avec des reflets dorés. Les yeux, d’un bleu ver- dâtre, brillent comme des étincelles électriques. Maïs qui n’a vu ce curieux Poisson ne saurait se faire une idée de son éclatante splendeur. Quant à la femelle, sa coloration ne change pas excepté celle des nageoires qui devient plus vive pendant la période du frai. Ce Poisson doit son nom de Combaltant au caractère tout particulièrement irritable des mâles qui ne manquent jamais d'engager les combats les plus violents chaque fois qu'ils se rencontrent, quand même ce ne serait pas à l’époque du frai. Les habitants de l’Annam et du Siam ont profité de cet instinct exceptionnel de combattivité pour les dresser à la lutte, comme le font les Chinois avec les Sauterelles ou comme nos amateurs de Moscou, à leurs moments perdus, avec leurs Coqs. Ce genre de sport existe depuis un temps immémorial et constitue un des plus grands amusements du peuple. Les paris sont naturellement le point capital de cette attraction, tout comme dans nos combats de Cogqs et l'argent engagé sur l’un et l'autre des champions atteint parfois des sommes consi- dérables. Pour le véritable naturaliste, le dressage de ces Poissons pour le combat n'offre pas un intérêt bien vif. On remarque que tous les sujets ne possèdent pas au méme degré l’irritabilité et la. combattivité requises pour la lutte. Ainsi, par exemple, les Poissons péchés dans les rivières et ruisseaux où ils vivent ne conviennent pas pour ce genre de sport. On ne peut employer pour combattre, les premiers spécimens venus : il faut en former une race spéciale en choisissant d’abord, parmi les plus féroces, ceux qui recher- chent le plus le combat, puis par une sélection rigoureuse, on n’élève en captivité que les plus batailleurs : ce sont ceux- là qui font l’objet du dressage dont nous allons parler. Ce dressage, qui fait vivre nombre d'individus dans l'Inde, passe pour une occupation des plus nobles. Il consiste, d’après les correspondants du Field, le journal anglais bien connu à qui nous empruntons la plupart de ces détails, d'abord à pré- server les jeunes Poissons de toute espèce d’agitation inutile, ensuite à chercher à développer en eux l'envie de se battre, MT 136 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Le premier résultat s’obtient en ne laissant pas les Poissons ensemble dansle même aquarium, maïs en les isolant dans des bocaux particuliers : on évite ainsi les luttes inutiles qui les étiolent et les affaiblissent. On rapproche ensuite ces vases à parois transparentes, et dès que ces petits ani- maux s’aperçoivent, ils entrent en fureur et paraissent disposés à se mettre en pièces, mais les parois les en em- pêchent; le but de cette opération est d'augmenter leur fureur et leur envie de combattre. En répétant de temps en temps cet exercice, les amateurs portent leurs élèves au plus haut degré d'irritabilité et de rage, tout en ménageant leurs forces. Tel est le principal entrainement des Poissons combattants. Pour mener à bien une éducation, il faut donner aux animaux une excellente nourriture qui développe leurs forces, leur taille et leur énergie, tout en augmentant la vigueur des muscles de la queue et des nageoires qui leur sont néces- saires pour combattre. L'art de préparer la nourriture qui augmente ces facultés, ainsi que sa composition, restent le secret de chaque éleveur. Mais celle qui semble la mieux appropriée à ce résultat, con- siste en larves de Moustiques, de Mouches et d’Insectes qui s'obtiennent en abandonnant au dehors des tonneaux remplis d’eau de pluie. Ils l'acceptent très volontiers. Chez les indigènes, ces Poissons portent le nom de Plu-kat et aux yeux des profanes, ne semblent guère différer entre eux, c’est tout au plus si la queue et les nageoires paraissent plus bleues chez les uns ou plus rouges chez les autres. Mais les connaisseurs jugent au premier abord quels sont les plus vigoureux, les plus énergiques et les mieux doués : ils s’en rendent facilement compte au mouvement de la queue, à la manière de nager, etc. Le Poisson combattant est assez répandu dans l'Inde pour qu'il soit assez facile d'en trouver à un prix raisonnable, mais ceux qui proviennent d’une race renommée sont fort recher- chés et leurs propriétaires re s’en dessaisissent que quand ils y sont forcés par la nécessité et à des prix élevés. Après avoir fait connaître le dressage du Plu-kat, nous allons passer maintenant à la préparation et à la description du combat lui-même. En transportant leurs Poissons au lieu du combat, les ama- LE POISSON COMBATTANT DE SIAM. 137 teurs ne les traitent pas avec moins de soins que les sportsmen européens n'en prennent pour les Chevaux de course. Ce n’est pas dans les aquariums où ils vivent ordinairement que s'opère le transport, mais dans des vases spéciaux dont les parois sont garnies intérieurement d’une étoffe moelleuse, de papier, ou simplement de plantes aquatiques à larges feuilles. Souvent cette garniture est remplacée par un sac en étoffe souple placé dans le vase destiné au transport et dans lequel on met les Poissons. Le but de toutes ces précautions est de leur éviter une agitation inutile, et avant tout des blessures produites par le choc contre les parois du vase, ce qui leur ferait infailliblement prendre la Mousse, maladie qui est aussi dangereuse pour les Combattants que pour nos Poissons d'aquarium ordinaires. À l'arrivée, chaque Poisson est logé seul dans un vase à large ouverture, de forme carrée, parfaitement propre et transparent qu'on entoure de papier foncé ou d’étoffe. On les laisse pendant quatre jours dans le plus grand repos pour leur donner le temps de se remettre et de reprendre des forces. Dans ce même but, on nourrit les Poissons de la facon précédemment indiquée en y ajoutant certains ingrédients qui ne se trouvent qu'à Bankok et qui restent le secret des éleveurs. Enfin on met dans chaque récipient une plante aquatique à larges feuilles qui servira d’abri aux Poissons, mais surtout leur fournira de l'oxygène tout en aidant à la propagation des Infusoires qui fournissent aux Poissons une nourriture constante et fortifiante. Mais l'heure du combat approche, tous les sportsmen en- tourent les Poissons et se livrent à un examen minutieux de la taille des champions pour ne pas mettre en présence des adversaires de poids ou de dimensions inégales ; car il est connu que c’est du poids que dépend la force des coups portés. On met alors en présence les bocaux des deux antagonistes qu'on élève assez haut pour permettre au public de les voir. L’enveloppe des vases est retirée et les Poissons qui s’aper- coivent entrent tout à coup dans une violente colère ; ils agitent leurs nageoires, gonflent leurs branchies comme une collerette et cherchent à se surpasser l’un et l’autre en ma- gnificence, ils nagent en zig-zag, pleins de fureur, leurs yeux menacants lancent des étincelles, ils battent l’eau de leurs nageoires et frappent avec rage contre les parois du bocal, 138 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. leurs couleurs deviennent alors vraiment féeriques et dé- passent tout ce qu’on peut imaginer. Enfin, on réunit les adversaires dans le même récipient, aussitôt ils se mettent en garde, prenant la position de deux lutteurs qui vont en venir aux mains, puis, après avoir im- primé à leurs nageoires un mouvement rapide et fait vibrer tout leur corps de colère, ils se précipitent l’un sur l’autre. C’est le moment palpitant, chacun désigne celui qu'il croit avoir le plus de chance de remporter la victoire, et l'attention est. à son comble durant ces queiques minutes, quand tout à coup, l’un des Poissons se retournant vivement, se précipite sur la queue de son adversaire : c’est le signal du combat, et à partir de ce moment, ilse poursuit sans s'arrêter jusqu'à:ce que l’un des champions s'ayoue vaincu en prenant la fuite, pourchassé par le vainqueur. Mais ce dénouement n'arrive pas immédiatement {je ne parle naturellement pas de ces Poissons féroces dont le combat se termine dès le premier choc), car la lutte dure une et même souvent deux heures, Malgré la longueur et la férocité du spectacle, le combat est mené ayec une telle vigueur qu'il captive même ceux quime sont pas intéressés à son issue. Il faut voir avec quelle ardeur ces petits êtres cherchent à mordre leur adversaire et comme ils s’arrachent mutuellement la queue. C’est elle qu'ils cherchent surtout à préserver, car elle se déchire très facilement, mais ils essayent plus encore de se prendre la nageoire pectorale {ceile-ci en favorisant la rapidité de leur course les met hors d'atteinte des attaques de leur adversaire); ils continuent ainsi à se battre en se mordant avec la bouche et déploient autant de force, d'énergie et de ruse que des boxeurs de profession se poursuivant, s’at- trapant et ainsi de suite. Souvent, au bout d'une demi-heure d’un tel combat, les Poissons ont la queue et les nageoires en lambeaux et pen- dantes, mais ils n’en ont pas pour cela perdu leur énergie et ils continuent à lutter jusqu'à ce qu’ils soient presque dis- loqués. Alors, l’un des deux paraît fléchir, ses attaques et ses pa- rades sont plus molles et il finit par prendre la fuite, l’autre le poursuit sans pitié, c'est le signal de la victoire, les spec- tateurs sont debout, les uns applaudissent et poussent des LE POISSON COMBATTANT DE SIAM. 139 cris de joie, les autres siftlent et se disputent, chaque pro- priétaire retire son Poisson, le combat est fini. Après une pareille séance, les Poissons, pour la plupart, sont épuisés de fatigue, aussi leur donne-t-on un peu de nour- riture pour réparer leurs forces; ensuite on leur accorde sénéralement un repos complet de deux ou trois semaines afin de se remettre complètement de leurs blessures, après quoi, ils sont prêts à rentrer en lice. La possession d’un Poisson tel que le Combattant ne pouvait manquer d’'exciter la convoitise des amateurs européens de Poissons exotiques, mais jusqu’en 1894 tous les efforts pour en obtenir avaient été vains. Il ne s’en trouvait qu'à Paris chez M. Vaillant, professeur au Muséum ; la Ménagerie des Reptiles du Jardin des Plantes les avait eus en 1892, encore étaient-ils presque ignorés. Dans l'été de 1894, M. Jeunet, pisciculteur à Paris, en recut de Cochinchine quelques couples et en informa de suite notre vieil amateur de Poissons à Moscou, M. Mestcherski. Aussitôt plusieurs amateurs de Saint-Pétersbourg en désirerent et prièrent M. Seyssel de leur en rapporter de Paris. Ce dernier s'y intéressa et en conserva trois pour Jui. Le temps était très chaud quand M. Seyssel apporta les premiers Poissons combattants en Russie et le thermomètre ne descendit pas pendant la nuit au-dessous de 37% centi- grades. Aussi, les Poissons supportèrent-ils facilement le voyage et arrivèrent sans encombre et sans fatigue à Saint- Pétersbourg. Aussitôt de retour, M. Seyssel envoya à Moscou la paire de Poissons de M. Mestcherski, mais le voyage ne se fit pas sans accident, car l’un des deux mourut peu de temps après son arrivée à destination. Cependant M. Seyssel installait les siens dans un aquarium de 20 cent. de haut sur 25 de long, garni de plantes aquatiques, en les nourrissant de Vers de vase (Chironomus plumosus) dont ils se montraient fort avides. : Ils se trouvèrent si bien de ce régime, qu'au bout de quelques jours, ils commencèrent à pondre; l’eau avait à ce moment 21 degrés centigrades. Voici comment M. Seyssel décrit lui-même l’opération dans l'intéressant compte rendu qu'il en a donné. 140 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. « Le matin du troisième jour après mon arrivée avec les Combat- tants, je fus surpris en apercevant une rougeur inaccoutumée à la queue et aux nageoires de l’un des Poissons ; j'examinai l’intérieur du vase et remarquai une petite plaque d’écume sur laquelle un Poisson veillait soigneusement. Sachant que c'était la manière de frayer des Poissons à grandes nageoires, je plaçai immédiatement une petite lampe sous le vase et laissai la température s'élever à 25°. Le jour suivant, ce Poisson qui, comme je l’ai remarqué plus tard, était un mâle, devint plus brillant encore et commenca à faire la cour à l’un des deux autres tandis qu’il poursuivait impitoyablement le troisième. Ce que voyant, je retirai la victime, laissant le mâle avec la femelle qu'il s'était choisie. Le mâle n'était plus reconnaissable, ses nageoires agrandies semblaient avoir poussé, la nageoire postérieure ainsi que la queue étaient outremer avec des rayons rouge framboise et le corps tantôt vert, or ou noir, avait des reflets si vifs et si chatoyants, qu'on l’eût cru intérieurement éclairé par une lumière électrique dont les rayons sorlaient à travers les écailles et par les yeux. Après qu'il eut atteint tout son éclat, le mâle commenca à chasser impitoyablement la fe- melle, lui déchirant la queue et les nageoires jusqu’à ce qu’elle fût dans le plus piteux état. Il monte alors à la surface de l’eau, aspire l’air à pleine bouche puis l’expulse et remonte encore à la surface pour recommencer jusqu'à ce qu’il ait confectionné un nid en forme de croissant qui occupait plus du tiers de la surface de l’aquarium. Pendant toute la durée de ce travail, la femelle se tint tranquillement au fond, craignant à tout moment que le mâle ne fondiît sur elle, car il re cessait de la surveiller. Ainsi s'acheva tout le jour. » Le lendemain, vers cinq heures, c'était au mois de juillet, M. Seyssel vit de nouveau le mâle courtiser la femelle et la solliciter à venir sous le nid auquel il ne cessait de travailler. Enfin, vers six heures du matin, le nid était complètement terminé, les galanteries du mäle atteignirent leur apogée. Il lui lancait des regards enflammés, la poussait (mais non plus comme la première fois) pour l’engager à le suivre. « Combien il était beau en ce moment et combien brillantes » étaient ses couleurs, continue M. Seyssel, je ne saurais le » décrire; il faut voir cela soi-même. » Enfin la femelle céda aux instances du male, le suivit et resta une minute sous le nid, la tête en bas. A ce moment, elle était si décolorée qu’elle semblait morte; et avec cette pâleur livide et ses nageoires déchirées, on eût dit d'un squelette animé. Mais après être restée un instant ainsi ; elle reprit du mouvement et alla droit au fond : le mâle 0) LE POISSON COMBATTANT DE SIAM. 441 Ja suivit et se mit de nouveau à la déchirer; la ramenant sous le nid. Ce manège dura environ une demi-heure, jusqu'à ce que le mâle courbé pour ainsi dire en cercle et enserrant la femelle la contraignit à expulser ses œufs. Les œufs des Combattants sont très petits et ressemblent aux Graines de Pologne, dont ils ont l'apparence irrégulière et de couleur très blanche. Les œufs pondus montent bien vite à la surface et restent dans le nid, mais s’il y en a qui tombent au fond, le mâle va aussitôt ies prendre et les y reporter, il agit de même avec les œufs qui restent adhérents au ventre de la femelle. Celle-ci ne fait pas qu'une seule ponte : pour la premiere, elle reste en général sous le nid, mais ensuite et surtout en octobre, elle pond ses œufs au fond de l’aquarium de telle facon que le mâle est obligé de les ramasser et de les re- monter sous le nid. La ponte dure environ deux heures : tout d’abord, la femelle émet trois ou quatre œufs à la fois, ensuite il y en a dix-sept ou dix-huit, puis à la fin, elle n’en pond plus que trois ou quatre. De telle sorte qu'une femelle de cette espèce de Poissons ne pond pas plus de cent à cent cinquante œufs. La ponte se termine lorsque la femelle est complètement affaiblie et à partir de ce moment, le mâle ne la laisse plus approcher du nid, il prend seul le soin de garder les œufs et de les empêcher de s’éparpiller. L’alevin sort de l'œuf au bout de quatre jours, mais si petit, qu'il faut une loupe pour l’apercevoir. Tous n’éclosent pas en même temps, mais successivement, dans l’espace de trois jours; le mâle construit un nid spécial où il les place au fur et à mesure des naissances. Pour nourriture, M. Seyssel leur donnait des Infusoires qu'il obtenait avec des feuilles de salade, plus tard des Daphnies et des Cyclopes, mais en hiver, lorsque cette nour- riture manque à Saint-Pétershourg, il leur donna des larves de Chironomes qui ne furent mangées que par les plus gros Poissons, encore n’en prenaient-ils que des morceaux, quant aux plus petits, ils moururent par douzaine. Ces Poissons furent élevés dans l’aquarium où ils étaient nés, M. Seyssel isola seulement les plus gros, la température fut maintenue de 22° à 25° sans jamais descendre au-dessous de 20° au moyen de deux lampes à pétrole. Le moyen em- 142 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. ployé pour chauffer des aquariums avec des lampes est très intéressant. Les aquariums contenant les plus gros Poissons étaient placés sur l'appui d'une fenétre, entre eux se trouvaient les lampes à pétrole. Au-dessus, sur des rayons, les quatre aqua- riums contenant les alevins, qui, naturellement, recevaient plus de chaleur que les autres — ce que désirait M. Seyssel. Ce qui nuisait à la régularité de ce mode de chauffage, c'était le refroidissement produit par le voisinage de la fenêtre : il fallut recouvrir cette fenêtre avec de la cretonne verte. Ea quantité de lumière se trouvant fortement réduite, les plantes en souffrirent bien un peu, mais la température était devenue constante. Du reste, les Poissons combattants paraissent ne pas avoir besoin de végétation dans l’eau où ils vivent, car lorsqu'ils manquent d'oxygène, ils vont en prendre à la surface. De plus il n’est pas non plus nécessaire que l’eau soit renouvelée; M. Seyssel a remarqué que la mortalité était plus grande quand on abaïissait la température de l’eau en la changeant que lorsquelle ne l'était pas. D'autre part, six de ces Poissons que M. Seyssel avait donnés à M. A. Klimenkoff ne se portèrent pas plus mal pour avoir été mis dans un aquarium d’eau très claire et garni de plantes aquatiques, ils grandirent aussi vite et devinrent très beaux en cinq mois; au bout de dix mois, ils reproduisaient êt leur manière de pondre fut la même, sauf que le nid n'avait pas la forme d’un croissant, mais celle d'un chapeau. Grâce au chauffage artificiel, la ponte commença en mai par 31°. Naturellement, elle a lieu plus tard quand l’eau atteint 25°. La plupart du temps, on maintenait la température à 21 ou 22° comme chez M. Seyssel mais quand elle atteignait 25°, les nageoires des plus beaux types commencaient à prendre dés couleurs vives. Depuis ce temps les Poissons combattants se sont beaucoup multipliés chez les amateurs de Moscou, mais on ne remarque pas chez tous la même vivacité de coloris. La raison en est diflicile à donner, soit qu'il s'agisse de l'influence de la température ou de l’époque de la ponte. En plein soleil, les alevins acquièrent des couleurs plus brillantes. LE POISSON COMBATTANT DE SIAM. 143 ‘Nous ne pouvons omettre de citer les seize magnifiques Poissons de M. Glinka, qui furent envoyés en 1896 à l'Expo- sition d’'aquariums de Moscou et universellement admirés. Autour de l'aquarium, rempli de magnifiques plantes ét éclairé par des lampes électriques renfermant ces Combat- tants, se pressait une foule énorme : l’effet du reste était mer- veilleux, ces superbes Poissons richement colorés, avec leurs grandes nagéoires flottantes, ressemblaient à des Papillons. Tout ce qu’on peut souhaiter comme dégradation de couleurs S'y trouvait, d’un côté le plus bel outremer passant au bleu marin avec reflets métalliques bleu paon, de l’autre, des tons nuancés de cramoisi ou de pourpre. En un mot, la modification des teintes est illimitée chez ces Poissons, on peut les con- templér des heures entières et voir toujours du nouveau. Pas un Poisson ne saurait procurer autant de plaisir ni Captiver aussi longtemps l'intérêt que notre Poisson combattant. La rapidité des changements de couleur dans les nageoires mérite de fixer un instant notre attention : la métamorphose est si instantanée qu'il semble que ces organes se remplissent d’un liquide colorant, qui les fait passer des tons les plus pâles aux couleurs les plus vives, ou inversement. IL faut admettre que cet effet se produit sous l'influence d’une dila- tation ou d’une contraction chromatique en attendant qu'on en ait trouvé une autre explication. Souvent cela se produit sous l'empire de la frayeur, quand on frappe sur l'aquarium, quand on dérange le Poisson, ou à l'approche subite d’une lumière. De nature très sauvage, le Combattant fuit à la moindre alerte, parcourant son bassin en tous sens. Pour empêcher les accidents, il est prudent de couvrir l’a- quarium dune mousseline ou d'un filet. C’est ainsi que M. Seyssel perdit une de ses plus belles femelles qui avait sauté par un trou du papier qui servait de couverture à l’a- quarium. Une autre particularité de leur caractère est l'habitude qu'ils ont de s’enterrer dans le sable, où ils restent toute la journée en ne sortant que la tête pour voir ce qui se passe à la manière des Anguilles. Ils emploient leur queue pour se couvrir de sable, ou comme d’autres le prétendent, ils y enfoncent leur corps. A4k BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Pour terminer, je dois dire que si les Combattants ne ré- clament pas de soins particuliers, il leur faut une température constante de 21 à 22° centigrades. Sans compter que l’eau plus froide leur fait perdre leurs couleurs, on les voit d’abord pälir, des taches et des points noirs apparaissent sur la queue, envahissant le corps et principalement la tête et les flancs, puis ils périssent si le séjour dans l'eau froide se prolonge. La maladie apparait à une température de 1% et à 12, le Poisson meurt infailliblement. Pour guérir cette maladie, il faut isoler le Poisson qui en est affecté dans un vase spécial avec de l’eau légèrement salée, maintenir la température à 28° et y laisser le Poisson jusqu’à complète guérison. Jusqu'à présent, ces Poissons ne se sont fait remarquer à Moscou que par leurs jolies couleurs; aussi bien leur prix s’est- il maintenu de 13 à 17 francs la pièce. On avait essayé, à Saint-Pétersbourg, d'organiser des luttes de Combattants, j'ignore quel a été le résultat de cette tentative. ALLOCUTION PRONONCÉE LE l« FÉVRIER 1900 Par Maxime CORNU, Professeur de Culture au Muséum d'Histoire naturelle, A L'OUVERTURE DE LA CONFÉRENCE DE M. L. DUVAL VICE-PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ D'HORTICULTURE DE SEINE-ET-OISE SUR LES ORCHIDÉES. Mesdames, Messieurs, Les Orchidées sont des fleurs tout à fait à la mode et dont la vogue va croissant de jour en jour. Elles plaisent à cause de la beauté, la grâce, la variété de leurs formes, de leur couleur et de leur parfum : elles renouvellent pour ainsi dire la série des fleurs ordinaires. Mais elles possèdent des qua- lités auxquelles on ne songe pas toujours et qui font que la faveur dont elles jouissent est durable; cette faveur repose sur des qualités rares et précieuses. D'abord, elles n’ont pas de saison, c’est-à-dire qu'on trouve des fleurs d'Orchidées toute l’année. Vous savez com- bien on est heureux de rencontrer à tout moment et pour toutes les circonstances de la vie, les éléments d'un beau bouquet, d’un surtout élégant; pour décorer une boutonnière, un salon, une table servie. Mais la fleur des Orchidées a une propriété bien rare : mal- gré sa beauté et ses nuances délicates, c’est une fleur solide, qui se conserve longtemps. Dans les bouquets, avec adresse et habileté, on peut garder des fleurs facilement une ou deux semaines et dans les serres, ou même en appartement, certaines espèces peuvent de- meurer fraiches et resplendissantes, à condition d’être con- venablement soignées pendant plusieurs mois. Quand on présente, dans les Expositions, des tablettes chargées de plantes fleuries, aux couleurs les plus variées, aux formes les plus élégantes et les plus diverses, la grande | Bull. Soc. nat. Aocl. Fr. 1900, — 10, 146 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. majorité du public n'imagine pas le soin, l'habileté, la science qu'ont exigés chacune d'elles. Lesunes réclament la serre froide, d’autres la serre chaude: les méthodes de culture varient avec chaque genre, quelque- fois avec chaque espèce, et ne ressemblent guère à celles qu’on emploie pour les autres végétaux. Il a fallu successi- vement les deviner ou les inventer, et les perfectionner de jour en jour; vous en aurez la preuve aujourd'hui même. On aurait tort de croire qu'il suffit de reproduire les condi- tions naturelles dans lesquelles vit une plante (sol, chaleur, humidité et lumiere) pour réussir à la cultiver : c’est une grave erreur. D'abord, on ne les connait pas toujours exactement, on les ignore parfois totalement: et lors même qu’on les connaïtrait, il serait dangereux de les appliquer brutalement. Empruntons un exemple à une plante bien connue de vous, qui fleurit.et fructifie assez souvent dans nos serres, qui n'est pas. une Orchidée (et comme telle aisée à cultiver), c'est le café. Le Caféier réclame, aux. colonies, une: terre forte, compacte et plutôt argileuse ; les terres légères ne lui conviennent:pas. Or, si nous essayions de la cultiver ainsi dans les serres, elle ne tarderait pas à périr; nous employons une terre lé- gere et poreuse : la terre de bruyère ; c’est le contraire: de: ce que le Caféier exige dans la nature: Comment. peut-on trouver ce qui convient aux Orchidées? En cherchant sans cesse : c’est l'essence même de l’art de lFhorticulteur. Il varie les méthodes ; il en laisse une pour en prendre-une meilleure; ce:qu'il fait aujourd’hui est la somme d’une-masse énorme d'efforts et d'observations. Il étudie sa plante; il sait si elle va dépérir ou si elle est florissante; illa surveille à chaque heure (un arrosage intem- pestif peut.la tuer). IL agit en confiance, comme la mère qui comprend et devine ce qu'il faut à son enfant encore inca- vable de: parler, et, comme la mère, il soigne: et chérit sa plante. (On a vu des horticulteurs, même pauvres, refuser de vendre une espèce rare, afin de ne pas s’en séparer.) Mais quand il a résolw: là difficulté, libre d'inquiétude, il procède avec sûreté, et, ce: qui lui à coûté tant de peine ALLOCUTION DE M. MAXIME CORNU. 147 d'abord devient un jeu pour lui : la culture d'une nouvelle espèce est désormais devenue facile. Au milieu des diverses branches de l'Horticulture, celle qui comprend les Orchidées est souvent considérée comme l’une des plus élevées, j'oserai dire des plus nobles. En tout cas, c'est l’une de celles qui exigent le plus de science. Parmi tous ceux qui excellent dans cet art difficile, on peut citer hautement M. Duval qui s’y est placé parmi les pre- miers, non seulement à Versailles, la ville des fleurs, mais dans notre pays tout entier. Vous allez l'entendre ; il est l’un de ceux qui sur ce sujet difiicile ont le droit de parler avec le plus de compétence et le plus d'autorité. 18 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. SÉANCE GÉNÉRALE DU 23 FÉVRIER 1900. PRÉSIDENCE DE M. RAVERET-WATTEL, VICE-PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Président présente les félicitations de la Société à M. de Claybrooke qui vient d’être promu officier de l’Ins- truction publique. DÉCISION DU CONSEIL. Dans sa séance du 7 février, le Conseil a décidé d'offrir au Bantam-Club français deux médailles d'argent à décerner comme prix à l'exposition des volailles naines de toutes races que cette Société organise pour le mois de mars prochain. PROCLAMATION D'UN NOUVEAU MEMBRE. M. le Président proclame comme ayant été admis par le Conseil depuis la dernière séance : M. | PRÉSENTATEURS. ; ; J. Crepin. BARBEILLION (Georges), docteur en mé- D : : Baron J. de Guerne. decine, 51, rue Laffite, Paris. M. Loyer. DÉPOUILLEMENT DE LA CORRESPONDANCE. En l'absence de M. le Secrétaire des séances, M. le Secré- taire général procède au dépouillement de la correspondance. Généralités. — La Société zoologique de France adresse des invitations pour la conférence qui doit avoir lieu le 23 février dans l’amphithéâtre Richelieu, de la Sorbonne, à l’occasion de son assemblée générale annuelle. Cette confé- rence sera faite par M. Racovitza, naturaliste de l'expédition antarctique belge. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 149 Ornithologie, Aviculture. — Le R.P. David, Membre honoraire, demande quelle est la meilleure variété de Canards comestibles à acclimater dans l'Orne. — M. Boron-Dubard, de Montevideo, demande des rensei- snements sur le Martin triste ou petit Martin dont l’acclima- tation dans l'Uruguay lui parait devoir être intéressante pour la destruction des Insectes nuisibles à l’agriculture. — M. l'abbé Charruaud (Mb) envoie des renseignements sur la Colombe diamant, sa nourriture et la manière de re- connaitre les sexes chez cette espèce. — M. Thiébaux (Mb) annonce le prochain envoi d’un mémoire sur l'élevage aux environs de Paris du Rossignol du Japon, dont il continue à s'occuper. Botanique. — M. Trabut (Mb) appelle l'attention de la Société sur le Touï des Philippines, arbre de la famille des Euphorbiacées qu'il serait intéressant de répandre, particu- lièrement en Algérie. Entomologie. — M. Patin, consul général honoraire de Belgique (Mb), désirerait connaitre l'opinion de ses collègues les plus compétents, sur la question de la dégénérescence du Bombyx mori dans les climats intertropicaux. Renvoi à la Section d'Entomologie. Cheptels, distribution de graines, etc. — M. Maurice de Vilmorin (Mb) annonce que, sur la demande de la Société, il a fait parvenir à M. Heckel, à Marseille, un certain nombre de bulbilles d'Ignames de Farges. — M. le D' Clos (Mb), directeur du Jardin des Plantes de Toulouse, offre à la Société pour être distribuées entre ses Membres, une série de graines récoltées par ses soins dans cet établissement : Acacia relinodes, Gymnocladus cana-. densis, Quercus coccifera, Slerculia plalanifolia, Zizyphus sinensis. — M. le Directeur du Jardin botanique de Calcutta offre à la Société un certain nombre de graines de Livistona Jen- kinsii, très beau Palmier originaire de l’Assam et du Sikkim et qui peut se cultiver en serre froide sous le climat de Paris. — M. Huet (Mb) demande des renseignements sur la cul- 450 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. ture du Physalis Francheli dont il.a recu des graines dela Société. — M. Kotliaroff, de Kieff, remercie la Société de l'envoi des Crosnes, qu’elle a bien voulu lui faire et qui lui sont par- venus entrès bon état, emballés dans la poussière de charbon de bois. Il demande des renseignements détaillés sur la culture de cette plante qu'ilessaie de répandre en Russie et au sujet de laquelle il aura soin d'envoyer à la Société tous les renseignements pouvant l’intéresser. — La correspondance concernant les graines (demandes, envois et remerciements) donne lieu comme d'habitude à de nombreux échanges de lettres. COMMUNICATIONS ORALES. M. le Secrétaire général rend compte de la conférence qui a été faite dans la grande salle de la Société, le jeudi 1° fé- vrier, à huit heures et demie du soir, par M. L. Duval, vice- président de la Société d'Horticulture de Seïine-et-Oise. M. Maxime Cornu, professeur de Culture au Muséum, avait bien voulu accepter la présidence de cette séance, spéciale- ment organisée par la Section de Botanique. Le bureau de celle-ci (M. Weber, président, Morot, vice-président, de La- marche, secrétaire), avait pris place sur l’estrade. Après une courte allocution de M. Cornu (voir ci-dessus, page 145), M. Duval a successivement abordé les points suivants -de l'histoire naturelle et spécialement de la culture des Orchidées exotiques. Voici le sommaire de sa conférence : Généralités. — Orchidées indigènes el exotiques. — Histoire de la découverte des Orchidées : apparition des espèces exotiques dans les serres d'Europe. — Comment et en quel état elles y arrivent. — Le collectage. — Pays où se pratiquent les recherches ; difficultés à vaincre ; auxiliaires employés. — Établissement définitif des Or- chidées exotiques dans les cultures. — Multiplication, semis, créa- tion de variétés nouvelles. — Les amateurs d'Orchidées. — Prix des plantes. — Dimensions, formes, couleurs, parfums, diversité des fleurs. — Rôle des Orchidées dans la décoration des serres et des appartements. De nombreuses projections à la lumière oxhydrique ontété faites au cours de la séance qui s’est terminée:par la présen- PROCÈS :VERBAUX (DES SÉANCES (DE LA SOCIÉTÉ. #54 tation-d’un certain nombre de élichésien couleurs gracieuse- ment prêtés:pour la circonstance par la Maison Lumière ‘et fils, de Lyon. Après avoir remercié M. L.: Duval de sa très intéressante conférence, M. Cornu lui a remis en souvenir, aux applau- dissements de l'assemblée, une plaquette artistique en argent de Daniel Dupuis, ayant pour sujet L’Horliculiure. — M. de Guerne entretient ensuite la Sociélé des récents travaux du Comité de la Ramie qui poursuit les démarches nécessaires pour réunir, pendant l'Exposition universelle, un Congrès de spécialistes. M. le Président fait observer que le principal intérêt de ce Congrès consistera dans les expé- riences pratiques de dégommage des fibres de Ramie. Il ne pourra être fait d'expériences concluantes qu'avec une cer- taine quantité de Ramie et M. le Président demande si le Comité est assuré de trouver à Paris assez de matière pre- mière. M. de Guerne répond que le Comité s'est préoccupé de la ‘question qu'il a envisagée sous divers rapports. La Ramie pourrait être envoyée d'Algérie. Il serait possible de la cultiver spécialement pour la circonstance dans les environs de Paris. Enfin, le concours de machines aurait lieu, s’il était nécessaire, à Alger, à une époque favorable et sous la direc- tion d’un jury préalablement nommé par le Congrès réuni à Paris. — M. le Secrétaire général reprend l'examen de la situation financière de la Société dont l'exposé a été fait dans ses grandes lignes à la séance du 26 janvier; il donne les chiffres définitivement arrêtés par la Commission chargée de la véri- fication des comptes. — Au nom de M. Magne, qui s'excuse de ne pouvoir assister à la séance, lecture est donnée d'une importante notice sur l’'acclimatation et la culture des plantes alpines dans les jardins. L'examen tout particulier de ce mémoire est renvoyé à la Section de Botanique. M. le Président en fait d’ailleurs ressortir l'importance etexprime l'espoir de voir suivre, par un grand nombre d’a- mateurs, l'exemple de Magne, qui a réussi d’une facon tout à fait remarquable la culture trop négligée et cependant fort intéressante des plantes alpines. Il est à souhaiter qu'un ser- vice d'échange s’établisse entre ces amateurs de manière à 152 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. contribuer au développement des cultures dont il s’agit, cultures relativement faciles et qui n’exigent pas de bien grands espaces. Pour le Secrélaire des séances, JULES DE GUERNE, Secrétaire général, SÉANCE GÉNÉRALE DU 23 MARS 1900. PRÉSIDENCE DE M. RAVERET-WATTEL, VICE-PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. En l'absence du Secrétaire des séances, M. le Secrétaire » général procède au dépouillement de la correspondance. DÉPOUILLEMENT DE LA CORRESPONDANCE. Généralités. — La Sociélé a recu avis du décès de M. l'abbé Furet, Membre honoraire, mais elle manque de renseïigne- ments sur la date et les circonstances de ce décès, au sujet duquel des informations seront prises. — La direction de la Société royale de zoologie d'Anvers annonce qu'une vente publique d'animaux sera faite par ses soins, aux enchères, les 3 et 4 avril prochain. Le catalogue sommaire des espèces qui doivent être mises en vente com- prend .un grand nombre de Mammifères et d’Oiseaux et quelques Reptiles. Mammifères. — Par l'intermédiaire de M. Maurice Loyer (Mb), la Direction des jardins et promenades publiques de Lyon demande si elle pourrait se procurer, grâce aux Membres de la Société, par achat ou par échange, un certain nombre de Mammifères destinés au parc de la Tête-d'Or et notamment des Daims et un Zèbre. Ornithologie, Aviculture. — Un certain nombre de Membres de la Sociélé demandent à se procurer des Tinamous au prix de 30 francs le couple. Ces demandes étant arrivées tardivement, la provision d'Oiseaux se trouve être épuisée et il n’a pu leur être donné satisfaction. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 153 — M. Tissot envoie de Champforgueil des renseignements sur les élevages de Tinamous roux qu'il poursuit depuis quelque temps avec succès. Ses observations diffèrent à cer- tains égards de celles qui ont été faites antérieurement sur le même sujet; elles seront publiées 2n exlenso. — M. À. de Saint-Quentin (Mb) signale de Toulouse une Poule à éperons, très bonne pondeuse d’ailleurs, et qui ne présente pas d'autre caractère anormal que la présence de ces éperons. Il donne quelques détails sur les croisements qu'il considère comme utiles à faire de la race des Poules de Barbézieux avec la race locale toulousaine qui s’en rapproche par de nombreux caractères. On l’améliorerait sans aucun doute en répandant le plus possible dans la région des Bar- bézieux purs. Aquiculture. — M. Henri Petit signale plusieurs cas de croissance remarquable chez la Truite arc-en-ciel observés à Chälons-sur-Marne. M. Petit ajoute qu'il a pu louer aux en- virons de cette ville un étang très favorable aux expériences de pisciculture et dans lequel il fera volontiers les essais que la Sociélé voudra bien recommander à son attention. — M. H. Bourgeois (Mb) adresse une communication sur l'importance de la qualité de l’eau pour l'élevage des Pois- sons d’eau douce. — Renvoi à la Section d'Aquiculture. — M. Gibert (Mb) donne divers renseignements sur l’éta- blissement de pisciculture qu'il a fondé à Rochetaillée (Loire). Les Truites arc-en-ciel y sont nourries avec une pâtée dont la composition, indiquée par M. Gibert, sera publiée au Bulletin. Entomologie. — M. Emile Caillas, secrétaire du Comité d'organisation du 2° Congrès international apicole, envoie le programme de ce Congrès qui doit se réunir pendant l’'Expo- sition universelle, les 10, 11 et 12 septembre 1900. Le Congrès est divisé en sept sections. Le programme détaillé est ren- voyé à l'examen de la Section d'Entomologie. Botanique. — M. Legendre, répondant à M. le Secrétaire général, envoie divers renseignements sur l'enquête qu'il poursuit concernant le Gui, la manière dont se répand cette plante parasite et le préjudice qu’elle peut causer aux diffé- rents arbres sur lesquels elle se fixe. 154 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. — M.Davwin, chef des cultures au Jardin botanique de-Mar- seille, signale à la Société la Courge patate, excellent légume qu'il cultive avec succès et dont ses correspondants dans les colonies lui redemandent des graines après les avoir essayées une première fois. — M. Trabut, botaniste du Gouvernement à Alger (Mb), adresse une notice écrite en réponse à M. Rivière sur la sélection du Bananier du Hamma. Cette notice, discutée déjà dans Ja séance de la Section de Botanique du 20 mars, sera insérée au Badllelin (voir ci-dessus, p. 77). Cheptels, distribution de cocons et de graines, etc. — À la suite de lavis publié dans le Journal concernant la distribution d'œufs de Truites arc-en-ciel que prépare la Sociélé, un grand nombre de lettres sont arrivées au Secré- tariat. Le nécessaire a été fait pour assurer l'envoi des œufs dans les meilleures conditions de promptitude et de sécurité. — La Sociélé ayant mis en distribution des cocons de Vers à soie de l’Aïiante (Atlacus cynlhia), un certain nombre de demandes sont parvenues au Secrétariat. A citer, entre autres, celle de Me Coni (de Laperrière), qui se propose d'’é- lever ce séricigène aux environs de Buenos-Ayres. — M. Simon, horticulteur à Saint-Ouen, adresse des ren- seignements sur les Cactus inermes envoyés d'Alger à la Suciélé par M. Rivière et dont un certain nombre d'articles lui ont été confiés. — M. de Saint-Quentin adresse le compte rendu des expé- riences faites avec les graines que la Sociélé lui a envoyées en 1899 et demande à recevoir des Haricots et des Piments du Mexique. Ii a cultivé autrefois ces Haricots, dont les graines lui avaient été envoyées par la Sociélé. Il regrette d’en avoir perdu l'espèce, qui était excellente mais dont la culture devait être pratiquée en ayant soin de ne pas fumer la terre. — Les demandes de graines mises en distribution etles lettres de remerciements résultant des envois, donnent lieu, comme d'habitude, à une volumineuse correspondance. Vingt envois exactement ont été faits depuis le commencement de mars, dont plusieurs très considérables. Parmi les remercie- PROCÈS-VERBAUX “DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 155 ments, il convient -de signaler ceux du Directeur du Jardin colonial de Nogent-sur-Marne. — M. Roland-Gosselin offre à la Sociélé une nombreuse série de graines récoltées par ses soins à Villefranche-sur- Mer. (COMMUNICATIONS ORALES. M. le comte d'Esterno présente des photographies mon- trant l'importance de la foire aux Bœufs de la Saint-Ladre, à Autun. C’est parmi ces animaux, réunis en nombre consi- dérable, que se produisent parfois les paniques dont M. d'Es- terno a entretenu récemment la Section des Mammiferes. Il en résulte souvent des accidents graves et contre lesquels on ne saurait prendre trop de précautions. Malheureusement, la cause de ces paniques n’est pas suffisamment connue pour qu’on puisse l'empêcher de se produire. M. Cacheux demande si quelques mesures ont été prises pour permettre aux hommes de se mettre à l'abri en cas de panique. Maintenant qu'on se préoccupe tant des accidents du travail dans l’industrie, il y aurait lieu de songer également aux dangers très sérieux que courent quelquefois les ouvriers agricoles. M. d'Esterno répond que l'on se sauve comme l’on peut ; pour sa part, il a échappé une fois au danger en grim- pant à ia grille qui divise en deux la place du marché et que l’on voit précisément sur l’une des photographies. Les arbres de la place ont également permis à quelques personnes d’é- viter les accidents. — M. Debreuil annonce la naissance d'une Biche axis dans sa propriété de Melun. Il signale le fait non pas comme étant rare, mais simplement comme intéressant pour lui. — AÀ.propos de la lettre de M. de Saint-Quentin où il est question des Haricots du Mexique, M. Weber dit que cet excellent légume forme la base de l'alimentation nationale au Mexique. La remarque de notre collègue, en ce qui concerne l’absence de fumure, n’a rien de surprenant, car les Mexicains ont l'habitude de se contenter des produits naturels du sol. Il semblerait, d’après M. de Saint-Quentin, que les qualités de ce Haricot, fort recherché au Mexique, se conserveraienf en Europe, ou tout au moins dans le midi de la France. 156 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. — M.le D' Weber donne des renseignements sur les graines offertes à la Société par M. Roland-Gosselin. L'envoi de notre collègue est très important et l’on y relève, à côté de plantes bien connues, des nouveautés fort intéressantes, notamment un Bauhinia du Yunnan qui semble devoir être répandu comme une fort belle plante d'ornement. M. le Président insiste sur la valeur à la fois matérielle, scientifique et pratique du don fait par M. Roland-Gosselin, qui s'efforce de faire oublier à la Sociélé la perte si regret- table de Ch. Naudin, dont les envois de graines étaient si généralement appréciés. Par les soins du Secrétariat, une lettre de remerciements, signée du Président de la Société, sera adressée à M. Roland-Gosselin. — Lecture est donnée d’une communication de M. l'abbé Charruaud, sur le Pape de Nouméa (Ærylhura psitlacea). Ce travail renferme des documents précieux et d'un grand intérêt sur l'élevage de ce Passereau et sa multiplication en captivité dans le département de Tarn-et-Garonne. Il sera publié dans le Bulletin. Pour le Secrétaire des séances, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. ir SECTION (MAMMIFÈRES). SÉANCE DU 5 MARS 1900. PRÉSIDENCE DE M. DECROIX, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopte. M. Debreuil demande que les procès-verbaux soient publiés le plus rapidement possible, l'intérêt qu'ils présentent diminue beaucoup sans cela; M. Debreuil exprime le désir formel que ce vœu d'intérêt général soit formulé dans le présent procès-verbal. La Section à l'unanimité approuve cette motion. La question des Chèvres laitières étant à l’ordre du jour, M. le Se- crétaire général, au nom de M. Loyer, secrétaire-adjoint de la Section et qui ne peut assister à la séance, rend compte d’une visite récemment faite par celui-ci à la chèvrerie de M. Crepin, à Vaugirard. M. Loyer y a amené une Chèvre venue de Suisse, mais dont la race est douteuse, à ce point qu'on a pu émettre l'hypothèse que cet animal serait un PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 157 hybride de Chamois et de Chèvre. Il sera intéressant de voir si cette bête est féconde; ce qui est certain, c’est qu’elle a été saillie par un Bouc de la chèvrerie de M. Crepin. A ce propos M. de Bonand demande si les Chabins sont vérita- blement des hybrides des espèces ovine et caprine. M. Mailles répond que tous les animaux présentés jusqu'ici comme Chabins, ont été reconnus tout ce qu’il y a de plus Moutons; le Bulletin a publié plusieurs travaux sur ce sujet, et, finalement, les Chabins ont été rejoindre les Léporides. M. le comte d'Esterno parle des paniques qui se déclarent parfois sans cause apparente chez les animaux réunis en grand nombre dans les foires et marchés; à la foire de Saint-Lazare ([Saint-Ladre), à Autun, notamment, notre collègue a vu se produire des paniques causant de graves accidents. A cette foire d'Aulun, l’on peut voir, réunies et serrées, de 25 à 30,000 paires de Bœufs. Quelle est la cause de ces paniques ? M. d’Es- terno cro:t qu'elles sont produites par l'irrilation résultant des piqüres de Diptères qui pondent dans la peau des Bœufs. A cette époque de l’année 1° septembre), ces Diptères sont très abondants. Il est à re- marquer, à l'appui de cette opinion, qu'aux grandes foires de mars, l’on n’observe pas de paniques. M. le comte d’Orfeuille a constaté, dans la Vienne et la Charente,des paniques semblables, aux foires qui ont lieu en septembre. Enfin, M. de Guerne signale des faits analogues, dans le Finistère, vers la fin de l’été. Pour ce qui concerne les Chevaux, M. Decroix a été témoin de paniques nocturnes, semblant exclure toute intervention d'Insectes. L'une de ces paniques, entre autres, eut lieu vers minuit. La Section revient sur la queslion des Chèvres, de leur utilité, et aussi du danger qu’elles présentent au point de vue de la destruction des taillis. M. d’Esterno pense qu’on ne doit sacrifier ni les taillis, ni les Chèvres, et que l'élevage de ces animaux peut se faire très bien loin des régions boisées. M. Mailles estime que l’homme ravage beaucoup plus les laillis et les forêts que les Chèvres et autres destructeurs réunis. MM. de Bonand et d'Orfeuille parlent des fromages de Chèvres, dont quelques-uns sont justement estimés. M. le Secrétaire général lit une note concernant lies Mammifères domestiques de la Grèce et qui ont été exposés lors du Concours agricole organisé à Argos, en 1899 par la Société biotechnique hellénique. M. Debreuil donne lecture d’une lettre de M. Pays-Mellier, de la Pataudière, concernant les Cerfs axis. Le Secrétaire, C. MAILLES. 158 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION: 2e SECTION (ORNITHOLOGIE. — AVICULTURE,. SÉANCE DU 12 MARS 1900. PRÉSIDENCE DE M. DEBREUIL, MEMBRE DU CONSEIL. M. Oustalet, président, s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Debreuil demande que l’on ajoute au questionnaire sur les Tinamous, dont les termes ont été arrêtés dans la séance de février, un paragraphe concernant l'importation des Tinamous morts, à l’état frigorifié. Pourrait-on s’en procurer et de quelle manière ? — Adopté. M. le Secrétaire général fait remarquer que la question du Tinamou est certainement à l'ordre du jour; il continue à recevoir des lettres de personnes désirant acheler un cerlain nombre de ces Oiseaux et demandant des renseignements sur leur compte. La direction du Jardin zoologique d'Anvers annonce qu'une vente d'animaux doit avoir lieu aux enchères, par ses soins, les 8 et 4 avril. Le catalogue mentionue un grand nombre d’Oiseaux. M. le Secrétaire général rend compte de l’exposilion organisée par le Bantam Club français, qui se termine aujourd’hui même, et à laquelle ont pris part plusieurs Membres de la Société d'Acclimatation. On y remarquait des Poules sans queue, dites Sabot hollunduis et qui appar- tiennent à la race connue sous le nom plus ancien de Valékini; elles étaient présentées par M. Monseu. Celte exposition, sur laquelle M. Wuirion donne à son tour des détails fort intéressants, a été trés remarquable au point de vue des races naines et bien supérieure à tout ce qu'on voit dans les concours agricoles. Elle continue digne- ment la série des Expositions spéciales inaugurée l’année dernière par la Société d'Acclimatalion elle-même. Les lauréats du Bantam Club sont du reste en grande partie les mêmes que ceux de la Societe d'Ac- climatation; il convient de signaler entre autres M. A. Vlasto, de Marseille. La Société des Aviculteurs français prépare de son côté deux expositions qui auront lieu dans la salle dite du Pré aux Clercs, pendant le mois de mars. Toutes ces expositions sont fort instruclives, mais on manque de guides. Presque partout, les médailles décernées seulement font l’objet d'une indication sur les cases, mais les norns des races ne s’y trouvent pas indiqués. La Section pense qu'il est très désirable qu'un ouvrage sérieux soit enfin publié sur les races de Poules et sur les Palmipèdes domestiques. Lecture est donnée d'un mémoire de M. l'abbé Charruaud sur l'édu- LA » n - nd 4 & Fe Ÿ £ 4 PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 159 cation d'un petil Passereau exotique vulgairement appelé Pape de Noumea et'qui n’est autre que l’Erythrura psitlacex. M: Ahterton Curtis offre à la Société un volume intitulé : La mode meurtrière, traduction d’un ouvrage en langue anglaise. On comprend qu il s’agit de la destruction des Oiseaux. M. le Secrétaire général communique à la Section un article assez curieux de la Semaine religieuse de Paris sur les Oiseaux dont l'Eglise catholique permel de consommer la chair les jours maigres. Lecture est donnée du questionnaire sur les Nandous, leur acclima- tation et leur élevage; ce questionnaire, établi par les soins de M. le Secrétaire général, sera imprimé:et distribué par la Société à l’occasion du Congrès ornithologique international. M. Rathelot demande s'il est réellement possible de créer et fixer une race par la sélection. Le Secrétaire, Comte D'ORFEUILLE. 32 SECTION (AQUICULTURE). SÉANCE: DU 26 MARS: 1900. Présipence DE M: EbMOND PERRIER: (DE L'INSTITUT), PRÉSIDENT. Le-procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Secrétaire général fait connaître qu'il a reçu jusqu'ici quinze demandes de Membres delæ Société désirant participer à la prochaine distribution d'œufs de Truites arc-en-ciel ; cette distribution aura lieu dans les premiers jours du mois d'avril, c’est-à-dire très prochainement. Lecture est donnee d’une notice de M. Henry Bourgeois ayant pour titre: Zmportance: de: la qualité deseuux en piscicullure. M Henri Petit, de Châlons-sur-Marne, envoie une communiealion sur la-rapidité de: la croissance-de la Truite arc-en-ciel. M: Borodine;, directeur de la: Revue internationale: de pêche el de pisci- culture à Saint-Pétersbourg, envoie un certain nombre de numéros de cette publication et demande qu'on veuille: bien la faire connaitre à ceux des Membres.de la Société qu’elle: peut: spécialement intéresser. M. Thorndike-Nourse demande des renseignements sur les espèces de:Poissons-:dont la peau est employée pour la préparation du galuchat. M: le Secrétaire général donne: quelques: explications sur ce produit, surlesindustriesiqui l'emploient et surles différents Poissons, Squales, Rousseties; Raies; etc., dont!la: peau’est'employée: pour le-préparer. M: le Président entretient: l'Assemblée du grand aquarium établi par 160 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. MM. Guillaume frères à l’Exposition universelle et donne des détails circonstanciés sur cet établissement concu dans de vastes proportions. Il renfermera de nombreux spécimens de la faune marine et particu- lièrement des espèces comestibles les plus répandues sur les côtes de France. Pour les Secrétaires empéches, C. DE LAMARCHE. 4° SECTION (ENTOMOLOGIE):. SÉANCE DU 19 MARS 1900. PRÉSIDENCE DE M. CLÉMENT, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Président souhaite la bienvenue à M. Emile Caillas, secré- taire-trésorier de la commission d'organisation du prochain Congrès international apicole, qui assiste à la séance, et l'invite à prendre place au bureau. Il est procédé au dépouillement de la correspondance. M. Flavien Obscur, institnteur à Charenton, rend compte des édu- cations d'Aftacus cynthia qu'il a pu tenter l’année dernière, grâce à la Société qui lui avait remis des cocons de ce séricigène. Les résultats ne semblent pas avoir été heureux. Au lieu de laisser les papillons s’accoupler, M. Obscur s’est empressé en effet d'en préparer un certain nombre pour les mettre en collections. Il s’est obstiné d’autre part à nourrir avec des feuilles de Mûrier les Vers à soie de l’Aïlante. À ce propos, M. Clément dit qu'il a élevé cette espèce sur le Lilas, dont il est toujours facile de se procurer des feuilles. Cet élevage sera d'ail- leurs poursuivi par ses soins de facon à obtenir une série de généra- tions successives alimentées uniquement avec le Lilas. M. Kopperhorn dit qu'il a vu des Vers à soie de l’Ailante sur des Figuiers, qu'ils semblaient y réussir très bien; les cocons lui ont même paru plus gros que la moyenne habituelle, le papillon conserve toutefois la taille ordinaire. Lecture est donnée d’une note de M. André sur une éducation de Caligula japonica, séricigène d’une espèce de Saturnide originaire du Japon. Pour faire suite à une communication présentée dans la dernière séance, M. le Secrétaire général donne lecture d’une notice sur l'Api- culture à la Réunion. Cette notice, publiée par l'Office colonial, a été spécialement demandée à cette institution à la suite de la remise à la Société par M. Debreuil d'un échantillon de miel provenant de la PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 161 Réunion, d’où il a été importé par M. Arnal, sous le nom de Miel vert. Ce miel, réputé de qualité supérieure, est dégusié par les Membres de la Seclion qui s'accordent à le trouver excellent. Il présente cette particularité de rester toujours liquide. Le goût spécial et très pro- noncé qui le caractérise est dû, paraît-il, à ce que les Abeilles butinent la fleur d’un très grand arbre dit Arbre à tan et dont le nom scien- tifique est Weinmannia macrostachya. M. Debreuil demande quel est le meilleur procédé pour faire de l’hydromel. M. le Président répond que ces procédés ont été indiqués par MM. Dufour et de Layens. Il ajoute que si la fermentalion tarde à se produire, on peut remédier à cet inconvénient en se servant d’une certaine quanlité de raisin. M. Caillas donne quelques détails sur le Congrès international api- cole qui doit se réunir à Paris les 9, 10 et 11 septembre prochain. Le programme de ses travaux comprend l’Apiculture tout entière. Il est divisé en sept sections : la l'° est consacrée à l’apiculture proprement dite, la 2° à l'étude de l’anatomie et de la physiologie de l’Abeille, la 3° et la 45 à la technique et à l’enseignement apicole, la 5° aux ma- ladies ét aux parasites qui attaquent les Abeilles, la 6° comprend la jurisprudence et la législation concernant l’apiculiure et enfin la 7° est réservée à la statistique apicole. M. le Secrétaire général fait observer que la discussion d’un pro- gramme aussi étendu sera difficilement terminée en trois jours, quelle que soit l’activité que puissent apporter à leurs travaux les Membres du Congrès. Il est cerlain, d’ailleurs, que beaucoup d’entre eux ne voudront pas s’en tenir exclusivement aux lravaux d’une section, mais désireront suivre également les discussions d'ordre général. Il sera donc probablement nécessaire de prolonger la durée de ce Congrès. M. le Président insiste sur l'importance de cetle observation. Il espère que la Société d'Acclimatation voudra bien donner l’hospitalité aux api- culleurs si la nécessité s’en impose. Pour les Secrétaires empéches, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. 5e SECTION (BOTANIQUE). SÉANCE DU 20 MARS 1900. PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEBER, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Secrétaire général annonce à ce propos que pendant cette Bull, Soc. nat, Acc, Fr, 1900, + 11 162 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. séance même, remise d’un jour à cause du mardi gras et tenue le mercredi 28 février, M. Maurice de Vilmorin, notre collègue, a été élu Membre titulaire de la Société nationale d'Agriculture, dans la Section de Sylviculture. À l’unanimité, il est décidé que des félicitations seront adressées, au nom de la Section, à M. de Vilmorin. Il est procédé au dépouillement de la correspondance. Celle-ci comprend : Une lettre de M. Magne sur les Orchidées qu'il serait intéressant de rechercher à Madagascar. Une lettre de M. Simon, horticulteur à Saint-Ouen, concernant les fragments de tige de Cactus inerme provenant d'Algérie et qui lui ont été confiés par la Societe, pour être mis en observation dans ses cultures. 1ls ont bien repris et se sont développés. M. P. Chappellier fait remarquer à cette occasion qu'il n’y a sans doute pas lieu d’espérer que les graines de ces Cactus reproduiront des plantes inermes. M. le D' Weber, se basant sur des observations failes pendant son séjour au Mexique, déclare partager cet avis; il estime que la reproduction de sujets inermes ne peut être obtenue par semis, mais uniquement par le bouturage des fragments de la plante. La correspondance comprend en outre une lettre de M. le D: Cros, de Perpignan, faisant connaître les résultats qu’il a obtenus dans la culture des plantes provenant de graines distribuées par la Société. Il annonce en même temps uu prochain envoi de graines offertes par lui pour être réparties entre ses collègues. M. A. de Saint-Quentin envoie de Toulouse une certaine quantité de graines d’une Courge du Chili dite Pafate. Klle est comestible et constitue certainement un très bon légume, car toutes les personnes qui l'ont essayée en redemandent. Lecture est donnée d’une note de M. Trabut, botaniste du Gouver- nement à Alger, à propos de la sélection du Bananier du Hamma. Cette nole est en contradiction avec une notice sur le même sujet publiée dans le Bulletin en 1899, par M. Charles Rivière, directeur du Jardin d’Essai du Hamma. M. Debreuil demande où il pourrait se procurer des graines d’'Euca- lyptus urnigera. Il lui est répondu qu'il peut s’adresser à la Ferté-Alais (Seine-et-Oise), chez une personne qui fait une culture spéciale de ces arbres. M. le Président présente le fruit d'un Cereus grimpant (Cereus érian- gularis) envoyé par M. Roland-Gosselin, délégué de la Société à Ville- franche-sur-Mer. Cette espèce, originaire du Mexique, a élé importée en Algérie et naturalisée aux environs d'Oran par un officier, qui avait fait partie de l'expédition du Mexique. Elle s'est bien acclimatée dans notre colonie et y fructifie régulièrement. Le fruit est assez volu- mineux. Celui qui est présenté par M. le Président pèse 570 grammes, PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 163 sa saveur est agréable et il passe, au Mexique, pour être l’un des meilleurs fruits indigènes. M. le Président annonce qu'un très important envoi de graines a été adressé à la Société par M. Roland-Gosselin, et donne sur les prin- cipales espèces tous les renseignements propres à guider ceux des Membres de la Société qui désireront en essayer la culture. M. le Secrétaire général fait connaître que M. Degron, à Crespières (Seine-et-Oise), veut bien inviter les Membres de la Société à visiter ses cultures où l’on voit en particulier les Vignes qu’il a importées du Japon et dont la maturité normale permet d'obtenir dans la partie de la France où le raisin ordinaire ne mürit pas suffisamment pour pro- duire du vin, une récolte à peu près assurée et donnant un vin de bonne qualité. Ces Vignes ont été également cultivées dans l'Orne par M. Caplat, de Damigny, qui après en avoir recu des graines de M. Degron lui-même les a fait connaître sous le nom de Précoce Caplat. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. 6 SECTION (COLONISATION). SÉANCE DU 5 MARS 1900. PRÉSIDENCE DE M. FRANCOIS, VICE-PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Milhe-Peutingon, président de la Section, s'excuse de ne pouvoir assister à la réunion. Une discussion s'engage sur la question, spécialement mise à l'ordre du jour, des Chevaux et des Mulets à Madagascar et au Transvaal. M. le Secrétaire général résume ce qui a été dit déjà à ce sujet devant la Société et notamment à la Section des Mammifères. M. de Bonand s'élève contre le préjugé courant que les Chevaux ne peuvent vivre à Madagascar parce que certaines herbes les empoisonnent. M. du Pré de Saint-Maur partage l'avis de M. de Bonand. Les fourrages de Madagascar ne sont pas nuisibles aux Chevaux. La cause réelle des insuccès de l'élevage et de l'infécondité des reproducteurs consiste selon lui dans l'insuffisance de l'alimentation. L’Avoine et l’'Orge font absolument défaut et, d’une facon générale, la nourriture n'est pas assez substantielle, surtout pour des animaux dont on exige, particu- lièrement dans les opérations militaires, un travail soutenu et assez considérable. Comme preuve à l'appui de ses assertions, M. du Pré de Saint-Maur cite la gendarmerie de Diego-Suarez qui a pu maintenir 164 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. sa cavalerie en bon état, uniquement à cause de sa situation sur le littoral, laquelle lui a permis de profiter des grains arrivant par ce port. Les essais d'élevage demeurés infructueux ont élé tentés au contraire sur les hauts plateaux où la nourriture est insuffisante, si l’on veut se contenter des ressources locales, et trop coûteuse s'il est nécessaire d'y amener des éléments étrangers. M. le Président dit que l'on ne connaît pas encore le type de Cheval qui conviendra à Madagascar et qui du reste ne sera obtenu qu’à la longue et par sélection. 11 paraît donc prudent d'introduire actuel- lement des Chevaux habitués à un climat analogue à celui de l’ile. Il importe à cet égard d'étudier ce qui se passe au Transvaal où le fourrage doit avoir sensiblement la même composition qu’à Mada- gascar. M. de Guerne rappelle que le R. P. Camboué, entre autres correspondants de la Société, se préoccupe de la question du four- rage et qu’il a demandé récemment si l’on ne pourrait lui procurer des Cactus inermes afin de remédier à l'insuffisance des Graminées ordinaires. Lecture est donnée d’une note sur le caoutchouc A/meïidina de la colonie portugaise d’Angola. Ce caoutchouc (Potato-gum, des Anglais) serait extrait de l’Ewphorbia tirucalli. À ce propos M. Hua dit que c’est la première fois qu'une Euphorbiacée de ce genre est signalée comme pouvant être une source importante de caoutchouc dans l'Afrique occi- dentale. Il est du reste impossible de se prononcer sur la question d'après la simple note qu’on vient de lire. M. Fron donne quelques indications sur les procédés récemment préconisés pour extraire le caoutchouc des écorces. Les méthodes expérimentées dans les laboratoires ne paraissent pas toutefois être encore prêtes à entrer immédiatement dans la pratique industrielle. M. Hua dit que pour exploiter le caoutchouc d’une facon rationnelle, il faudrait cultiver méthodiquement les plantes qui le produisent et les mettre en coupes réglées sur des espaces suffisants de facon à obtenir au bout d'un certain temps une quantité assez considérable de cette substance. M. le Secrétaire général attire l'attention sur une série de rensei- gnements réunis par l’Office colonial sur les produits de l’Apiculture dans les diverses colonies françaises. Il est à souhaiter què ces documents soient complétés et la Section pourrait s'appliquer à le faire par l'intermédiaire de ses correspondants. M. le Président dit que plusieurs projets d’excursions particuliè= rement intéressantes pour la Section coloniale sont actuellement à l'étude. La visite du Jardin colonial de Nogent-sur-Marne sera certai- nement l’une des premières que l’on voudra réaliser. À ce propos, M. Fron, qui esl attaché à cet établissement, dit que M. Dybowski, son directeur, sera heureux d'en faire les honneurs à la Société d'Acclima- tation. Il pense toutefois qu'il convient d'attendre quelque temps Se CONGRÈS ORNITHOLOGIQUE INTERNATIONAI, 165 encore pour que la végétation soit plus développée et que les serres à multiplication se trouvent complètement garnies. On sait en effet que le Jardin colonial est de création toute récente. L'un des Secrétaires : H. BOCHER. LE TROISIÈME CONGRÉS ORNITHOLOGIQUE INTERNATIONAL (PARIS, 26-30 JuIN 1900) Participation de la Société d’Acclimalation à ses travaux Le troisième Congrès ornithologique international se réunira à Paris, au cours de l'Exposition universelle, du 26 au 30 juin 1900; sa durée sera donc de cinq jours, pendant lesquels se tiendront des séances générales et des séances de sections, réparties comme il est indiqué ci- après et qui auront lieu pour la plupart dans le Palais des Congrès, situé dans l'enceinte de l'Exposition, près du pont de l’Alma {rive droite), Le Congrès se partage en cinq sections : I'e Section. — Ornithologie systématique : classification; description de genres nouveaux et d'espèces nouvelles; nomenclature. — Anatomie, physiologie et pathologie des Oiseaux. Mues; changements de plu- mage; anomalies. Hybrides. — Paléontologie : classification; des- cription de genres nouveaux et d'espèces nouvelles; faunes anciennes; relation des espèces éteintes avec les espèces actuelles, IIe Section. — Distribution géographique des Oiseaux. — Faunes actuelles. — Espèces éteintes dans les temps historiques. Migrations. Déplacements accidentels. — Apparitions d'espèces rares dans cer- taines contrées. 111° Section. — Mœurs. — Régime. — Embryogénie. — Nidification. — Oologie. IVe Section. — Ornithologie économique : protection des espèces utiles à l’agriculture; destruction des espèces nuisibles. — Chasse. — Acclimatation. — Aviculture. V® Section. — Organisation et fonctionnement du Comité ornitho= logique international. Élection de nouveaux membres. (Cette section est réservée spécialement aux membres du Comité.) DATES, HEURES ET LIEUX DE RÉUNION. Mardi 26 juin, à 10 heures du matin. (Palais des Congres) : Séance générale. — Élection du bureau. Constitution des sections et élection de leurs bureaux respectifs. LES RTS EX a pe 166 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Mardi 26 juin, à 2 heures (Palais des Congrès) : Z' Section. — a. Ornithologie systématique : classification ; description de genres nouveaux et d’espèces nouvelles; nomenclature. — . Anatomie, physiologie ét pathologie des Oiseaux. Mues ; changements de plu- mage. Hybrides. — c. Paléontologie : classification, descriptions de genres nouveaux et d'espèces nouvelles; faunes anciennes, relations des espèces éteintes avec les espèces actuelles. Mardi 26 juin, à 4 heures 1/2 (Palais des Congrès) : ZII® Section. — a. Mœurs. Régime. — à. Embryogénie. Nidification. — c. Oologie. Mercredi 27 juin, à 9 heures 1/2 du matin (Palais des Congrès) : ITe Section. — a. Distribution géographique des Oiseaux. Faunes ac- tuelles. Espèces éteintes dans les temps historiques. — à. Migrations. — c. Déplacements accidentels. Apparitions d'espèces rares dans certaines contrées. Mercredi 27 juin, à 2 heures (Palais des Congrès) : Séance générale. — Communication d’un intérêt général ou portant sur des questions mises à l’ordre du jour dans le programme de la session. Mercredi 27 juin, à 4 heures 1,2 (Palais des Congrès) : V° Section. — Comité ornithologique international. Rapport du président en exer- cice sur le fonctionnement du Comité, de 1896 à 1900. Élection de nouveaux membres. Jeudi 28 juin, à 9 heures 1/2 du matin (Palais des Congrès) : — IVe Section. — Acclimatation. Aviculture. Jeudi 28 juin, à 2 heures : Visite aux sections de l'Exposition qui ren ferment des spécimens intéressants pour les ornithologistes, sous la conduite de membres spécialement délégués à cet effet. Vendredi 29 juin, à 10 heures du matin (Muséum d'Histoire natu- relle : Visite aux collections d'Ornithologie du Muséum. Vendredi 29 juin, à 2 heures (Muséum d'Histoire naturelle) : V® Section. — Ornithologie économique. Protection des Oiseaux, Samedi 30 juin, à 9 heures 1/2 du matin (Palais des Congrès) : Ve Section. — Élection du bureau du Comité ornithologique interna- tional. Fixation de la date et du lieu de réunion du quatrième Congrès. Samedi 30 juin, à 2 h. 1/2 (Palais du Congrès) : Séance de clôture. — Vote sur les vœux émis par les sections. Résolutions. Samedi 30 juin, à 7 heures 1/2 : Banquet. Dimanche 1°" juillet : Excursions facultatives. Ce programme, très complet et à la rédaction duquel ont du reste collaboré plusieurs Membres hautement qualifiés de la Société d’Accli- matation, a été longuement examiné par la Section d'Ornithologie; il a attiré d'ailleurs l'attention de nombreux sociétaires. On a pu voir, par les procès-verbaux de la séance générale du 26 janvier et des séances de la Section d’Ornithologie des 15 janvier, 13 février et 12 mars 1900, que la Société d’Acclimatation prendrait une part très active au Congrès CONGRÈS ORNITHOLOGIQUE INTERNATIONAL. 167 ornithologique international. Le Conseil a délégué pour l’y représenter : 1° Tout le Bureau de la deuxième Section : MM. Oustalet, Remy Saint-Loup, le comte d’Orfeuille et Uginet; 2° MM. le baron de Guerne, Secrétaire général et Debreuil, Membre du Conseil; 3° enfin, il a choisi parmi les Membres de la Société, plusieurs personnes spé- cialement qualifiées pour la circonstance, MM. J. de Claybrooke, Cretté de Palluel et Xavier Raspail. On trouvera ci-après les trois questionnaires élaborés par la Section d'Ornithologie et dont les premières réponses, groupées par les soins du Secrétaire général, seront présentées au Congrès par un ou plusieurs rapporteurs qui signaleront, comme il convient, l’origine des documents mis en œuvre. Les diverses enquêtes commencées à cette occasion seront d’ailleurs continuées et fourniront sans aucun doute à la Société des documents d'un réel intérêt qui seront publiés ultérieurement. En outre, dans sa séance du 9 avril 1900, la Section d’Ornithologie a émis le vœu de voir porter à l’ordre du jour de l’une des séances du Congrès la question des Oiseaux sauvages étrangers à la faune fran- caise, que ne peuvent viser les lois ou règlements sur la chasse et qui sont introduits d'une facon plus ou moins régulière aux Halles de Paris à l’état frigorifié. JULES DE GUERNE, Secrétaire général. Questionnaire I. QUESTIONNAIRE CONCERNANT .L'HISTOIRE NATURELLE DES TINAMOUS SPÉCIALEMENT DU TINAMOU ROUX (Rhynchotus rufescens) Sa domesficalion, son acclimatation et son élevage en Europe Rédigé par les soins de la Section d'Ornithologie-Aviculture de la Société na tionale d’'Acclimatation de France, à l’occasion de la réunion à Paris, en juin 4900, du Zroisième C'ongrès ornithologique international. 1. Donner les caractères généraux du groupe des Tinamous. 2. Indiquer les caractères anatomiques. 3. Indiquer la répartition géographique de ces Oiseaux. 4. Indiquer les différentes espèces du groupe des Tinamous avec les noms vulgaires correspondants. 5. Indiquer les caractères zoologiques de ces espèces. 6. Indiquer les observations qui ont été faites sur les Tinamous, à l’état de liberté, dans leur pays d’origine (nourriture, reproduction, etc.). 7. Indiquer leurs ennemis naturels, leurs parasites internes et ex- ternes. 168 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 8. Indiquer leurs moyens de défense. 9. Indiquer quels sont les procédés de chasse. 10. Faire l'histoire de l’acclimatation des Tinamous, en Europe et dans les autres parties du monde. 11. Faire une étude spéciale du Tinamou roux (Rhynchotus rufes- cens). 12. Décrire les mœurs des Tinamous en captivité. 13. Indiquer la résistance des Tinamous adultes aux diverses con- ditions de milieu (froid, chaleur, humidité, etc.). 14. Indiquer le régime animal, végétal ou mixte. 15. Indiquer les maladies organiques et parasitaires. 16. Existe-t-il des signes extérieurs permettant de distinguer les sexes ? 17. Quelle est l'époque de la pariade? 18. Quelle est l'époque de la ponte? 19. L'époque de la ponte s'est-elle modifiée par suite de l'acclima- tation ? 20. Ya-t-il plusieurs pontes par an? 21. Quel est le nombre des œufs, leur couleur, leur utilisation alimentaire? 22. Quel est leur poids? 23. Quelle est la quantité relative des œufs clairs et des œufs fécondés? 24. Quelle est la durée de l'incubation? 25. Quelle est la résistance des jeunes? 26. Quel est leur régime? 27. Quelle est la durée de la croissance? 28. A quelle époque les jeunes commencent-ils à changer de plu- mage ? 29. Quelles sont les habitudes des jeunes ? 30. Quels soins leur donnent les parents? 31. Ya-t-il des maladies spéciales ? 32. A quel âge sont-ils adultes et aptes à la reproduction ? 33. Y a-t-il eu des essais d’incubation artificielle ? 34. A-t-on tenté l'élevage par les Poules? 35. Quelles couveuses naturelles faut-il choisir? 36. Quelles qualités spéciales celles-ci doivent-elles présenter ? 37. Quel est le prix de revient de l’Oiseau adulte? 38. Peut-on considérer le Tinamou roux comme Oiseau de volière, de basse-cour, de parc ou de chasse? 39. Quelles sont ses qualités ou ses défauts à ces différents points de vue? 40. Quels sont ses moyens de défense ? 41. Quelle est la qualité de la chair du Tinamou, comparée à celle de divers Oiseaux, volailles ou gibiers ? : CONGRÈS ORNITHOLOGIQUE INTERNATIONAL. 169 42. A-t-on fait des essais de transport de Tinamous conservés, en vue de l'alimentation, dans des appareils frigorifiques ? 43. Peut-on se procurer des Tinamous ainsi conservés ? 44. Quelle est l’utilisation du Tinamou au point de vue culinaire ? 45. Quelle est l'utilité du Tinamou en dehors de l’alimentation (des- truction d’Insectes, de Reptiles, de petits Rongeurs)? 46. Quel est l'emploi et la valeur des plumes ? 471. À quel âge et à quelle époque de l’année convient-il de pra- tiquer l'opération de l’éjointage ? 48. Indiquer les ouvrages et mémoires relatifs aux Tinamous. Nora. — Tous les documents iconographiques, dessins, aquarelles, photo- graphies se rapportant au questionnaire et concernant non seulement les Oiseaux et leurs produits, maïs le milieu où ils vivent, à l'état libre ou en captivité, seront accueillis avec reconnaissance. Des spécimens, des prépara- ions, des échantillons de produits, œufs ou plumes, peuvent étre également adressés à la Société d’Acclimatation (Section d'Ornithologie-A viculture), Questionnaire II. QUESTIONNAIRE CONCERNANT L’HISTOIRE NATURELLE, LES MŒURS ET L'UTILISATION DES PRODUITS DES NANDOUS (Rhea) La domestication de ces Oiseaux, leur acclimatation el leur élevage particulièrement en Europe Récigé par les soins de la Section d'Ornithologie-Aviculture de la Société na- tionale d’'Acclimatation de France, à l’occasion de la réunion à Paris, en juin 1900, du Troisième Congrès ornithologique international. 1. Donner les caractères du genre Nandou ? 2. Indiquer ses caractères anatomiques ? 3. Indiquer sa répartition géographique ? 4. Indiquer les différentes espèces de Nandous ; avec le nom vul- gaire de chacune d'elles ? 9. Indiquer les caractères zoologiques de ces espèces ? 6. Indiquer les observations qui ont été faites sur les Nandous à l’état de liberté dans leur pays d'origine (Nourriture, reproduction, etc.). 7. Indiquer leurs ennemis naturels, leurs parasites, internes el externes ? 8. Indiquer leurs moyens de défense? 9. Indiquer quels sont les procédés de chasse ? 10. Les Nandous sont-ils domestiqués et élevés dans leur pays d’origine ? Détails à ce sujet. 11. Faire l’histoire de l’acclimatation des Nandous en Europe et dans les autres parties du monde? 170 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 12. Décrire les mœurs des Nandous en captivité, hors de leur pays. 13. Indiquer la résistance des Nandous adultes aux diverses con- ditions de milieu (froid, chaleur, humidité, etc.). 14. Indiquer le régime animal, végétal ou mixte. 15. Indiquer les maladies organiques et parasitaires. 16. Existe-t-il des signes extérieurs permettant de bien distinguer les sexes en dehors de l’époque de la reproduction ? 17. A quel âge ces signes commencent-ils à être visibles ? 18. Quelle est l’époque de la pariade? Modifications survenant au moment du rut. Cri du mâle. 19. Quelle est l’époque de la ponte? 20. Cette époque s’est-elle modifiée par suite de l’acclimatation ? 21. Y a-t-il plusieurs pontes par an? 22. Quel est le nombre des œufs, leur couleur, leur utilisation alimentaire ? 23. Quel est leur poids? 24. Quelle est la quantité relative des œufs clairs et des œufs fécondés ? 25. Comment est pratiquée l'incubation ? Quelle en est la durée? 26. Quelle est la résistance des jeunes ? 27. Quel est leur régime? 28. Quelle est la durée de la croissance ? 29. A quelle époque les jeunes commencent-ils à changer de plu- mage ? 30. Quelles sont les habitudes des jeunes? 31. Quels soins leur donnent les parents ? 32. Sont-ils atteints de maladies spéciales ? 33. À quel âge sont-ils adultes et aptes à la reproduction? 34. Y a-t-il eu des essais d’incubation artificielle ? 35. A-t-on tenté l’incubation par des Dindes ? 36. Quel est le prix de revient de l'Oiseau adulte? Citer des exemples. 37. Quelle est la qualité de la chair des Nandous comparée à celle de divers Oiseaux, volailles ou gibier ? 38. Quelle est son utilisation au point de vue culinaire ? 39. Quelle est l'utilité des Nandous en dehors de l'alimentation (Destruction d’Insectes et de petits Rongeurs)? 40. Nettoyage des prairies; est-il vrai que les Nandous mangent certaines plantes laissées par le bétail ? 41. Quel est l'emploi et la valeur des plumes ? 42. Indiquer les ouvrages et mémoires relatifs aux Nandous. NOTA. — Tous les documents iconographiques, dessins, aquarelles, pho- lographies se rapportant au questionnaire et concérnant non seulement les Oiseaux et leurs produits, maïs le milieu où ils vivent, à l'état Uibre 6u en CONGRÈS ORNITHOLOGIQUE INTERNATIONAL. 171 captivité, seront recueillis avec reconnaïssance. Des spécimens, des prépa- rations, des échantillons de produits, œufs ou plumes, peuvent étre égale- ment adressés à la Société d'Acclimatation (Section d'Ornithologie-A vi- culture). Questionnaire III. QUESTIONNAIRE CONCERNANT LES ŒUFS ET L'INCUBATION CHEZ LES OISEAUX DOMESTIQUES Rédigé sous les auspices de la Section d’'Ornithologie-Aviculture de la Société nationale d'Acclimatation de France, par les soins de Rémy Saint-Loup, Vice-Président de la Section, à l’occasion de la réunion à Paris, en juin 1900, du Troisième Congrès ornithologique international. 1. Quel est le poids moyen de l’œuf des différentes espèces d’Oi- seaux domestiques ou en voie de domestication? 2. Quel est le poids moyen de l'œuf des différentes races ou variétés d’une même espèce? 3. Quel est le poids des producteurs adultes des deux sexes dans chacune de ces espèces, races ou variétés ? 4. Dans quelles limites varient le poids de l’œuf et le poids de l’a- dulte dans une même espèce et dans une même race? 5. Quels sont les volumes des œufs et des producteurs? — (La me- thode la plus simple consiste à mesurer le volume d’eau déplacé par l'œuf ou l'animal immergé.) 6. Quel est le poids de chacune des parlies de l'œuf? Vitellus ou jaune. Blanc ou albumen. Coquille. (La coquille doit être pesée après lavage intérieur à l’eau tiède et dessiccation à une température voisine de 20° C. Indiquer cette température.) Ÿ. A-t-on observé que les variations du régime alimentaire dans une même espèce aient une influence : 1° Sur l'augmentation ou la dimi- nution du poids de l'œuf? 2° Sur les proportions en poids des trois substances, coquille, albumen, vitellus ? 8. Les coquilles des différentes espèces sont-elles perméables à l’eau ou aux vapeurs. Quelles sont les conditions d'humidité requises pour l’incubation artificielle ? 9. La sélection permet-elle de fixer des races pondant régulièrement de gros œufs? 10. Quel est le nombre des œufs pondus chaque année par les diffé- rentes espèces ou races d'Oiseaux domestiques ? 11. Quelle est l’époque de la ponte maxima dans l’année, suivant les espèces? 12. Quelle est la fréquence de la ponte ou, en d'autres termés, à quels intervalles de temps les œufs sont-ils pondus ? 172 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 13. Y a-t-il des substances dont l'ingestion active la ponte? Ces substances agissent-elles pour une augmentation du nombre total annuel des œufs ou simplement pour une plus grande fréquence de la ponte ? 14. Y a-t-il d'autres conditions générales qui puissent avoir une influence sur la fréquence, l’abondance et l'époque de la ponte? 15. Existe-t-il un moyen pratique d'obtenir la ponte maxima chez la Poule commune d'une race déterminée à une époque où normale- ment la ponte serait très faible? 16. Pour les Oiseaux domestiques communément observés, quel est l'âge du rendement maximum en œufs ? 17. Quels sont les âges correspondant en moyenne et aussi dans les cas exceptionnels à la première et la dernière ponte ? 18. Quelle est la durée de l'incubation dans les espèces domestiques ? 19. Y a-t-il des variations à cette durée suivant les races ? 20. Quelle est l’époque ou quelles sont dans l’année les époques normales d’incubation dans les espèces domestiques ? 21. Le nombre moyen des éclosions est-il le même pour une espèce quelle que soit l'époque de l'incubation ? 22. Par quel mécanisme le poussin brise-t-il ses enveloppes dans les différentes espèces ? 23. Combien de temps avant l'éclosion le jeune fait-il entendre de petits cris indiquant ainsi que l'air a pénétré dans ses poumons ? 24. Y a-t-il avantage à prolonger le temps de contact du thermo- mètre jusqu'à cinq ou six minutes? | 25. À quelle cause est due le bruit qui se produit avant l’éclosion et dont on parle en disant que le poussin « bêche sa coquille » ? 26. Quelle est la température des Oiseaux domestiques, chez le mâle et chez la femelle à l’état normal, chez la femelle pendant l'incubation? (Ces températures doivent être prises au contact de la peau, sous le ventre et sous l'aile, et aussi dans le cloaque. Il faut faire trois obser- vations à environ un quart d'heure d'intervalle, le thermomètre étant maintenu au moins une minute. Il y a avantage à se servir du thermo- mètre à maximum. Enfin l'échelle des thermomètres ayant servi à la mesure de la température doit être contrôlée au bain de sable avec un ou plusieurs thermomètres de précision.) 27. La température est-elle la même aux différents jours de l’incu- bation naturelle ? 28. Quelle est la température moyenne de l'œuf situé sous la femelle aux différents jours de l’incubation ? 29. Les Oiseaux apportent-ils à la surface de la coquille pendant l’incubation des substances étrangères, eau, poussière naturelle du plumage, matières grasses sécrétées par la peau? 30. Déterminer si possible l’état hygrométrique du milieu incubateur aux différents jours de l’incubalion. # ne |: AS CONGRÈS ORNITHOLOGIQUE INTERNATIONAL. 473 31. Quelle est l'influence du lavage préalable des œufs ? 32. Quel abaissement de température peuvent supporter les œufs sans perdre leurs propriélés germinatives ? 33. Pendant combien de temps les œufs conservés vers 15° gardent- ils leurs facultés germinatives ? 34. Quelle est la perte de poids subie par les œufs au bout de 1,2,3, 15 jours à l'air libre à une température et dans des conditions hygro= métriques déterminées ? 35. Quelle est la perte de poids pendant l'incubation naturelle ? 36. Quelle est le poids des Oiseaux des différentes espèces ou races immédiatement après la naissance ? 37. Quelle est la perte de poids subie par les jeunes Oiseaux dans les deux ou trois jours qui suivent l’éclosion ? 38. Quelle est la température de ces Oiseaux à la naissance ? REMARQUE IMPORTANTE. — Prière de noter la région où on a observé les faits que l’on indique en réponse. Nora. — Tous les documents iconographiques, dessins, aquarelles, photo- graphies se rapportant au questionnaire et concernant non seulement les Oiseaux et leurs produits, maïs le milieu où ils vivent, à l'élat libre ou en captivité, seront accueillis avec reconnaissance. Des spécimens, des prépara- tions, des échantillons de produits, œufs ow plumes, peuvent étre également adressés à la Société d’Acclimatation (Section d'Ornithologie-Aviculture). Les personnes qui voudront bien répondre à un certain nombre des questions formulées ci-dessus sont invitées à le faire le plus sim- plement possible et avec toute la clarté désirable. Il suffira de faire précéder les indications envoyées, du numéro des demandes, le chiffre romain servant d'autre part à désigner le questionnaire. Exemple : I, 17, #at (Environs de Paris). — II, 13, les Nandous adultes sont très résistants, ils souffrent davantage de la chaleur que du froid et de l'humidité, etc., etc. On est prié d'adresser les réponses au Secrétariat de la Société d'A c- chimatation, 41, rue de Lille, à Paris, dans le plus bref délai. Une ou plusieurs brochures renfermant les résultats des enquêtes, seront offertes à toutes les personnes apparlenant ou nou à la Société d'Acclimatation et qui auront bien voulu y collaborer. Pour faire partie du Congrès ornithologique, il suffit d'envoyer son adhésion, accompagnée de la somme de 20 francs, à M. J. de Clay- brooke, Secrétaire-trésorier, 5, rue de Sontay, à Paris. Les publications faites par le Congrès sont adressées gratuitement à tous ses Membres qui jouiront en outre d’autres avantages, entre autres l’entrée gratuite à l'Exposition universelle pendant toute la durée du Congrès. 474 EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. C2 DANGERS DE L'EMPLOI DE L'ARSÉNIATE DE SOUDE POUR LA DESTRUCTION DES ALTISES DE LA VIGNE. Monsieur le Secrétaire général, Le Journal de la Société d'Acclimatation a publié l’an dernier (sep- tembre 1899, page 81) un procéde de destruction radicale des Altises de la Vigne. Viticulleur moi-même, j'ai lu avec grand intérêt la notice de M. Debray, espérant enfin trouver le moyen de débarrasser ce cher petil arbuste des nombreux ennemis qui le vouent à la mort. Eh bien! je vous le déclare, j'ai été positivement épouvanté en voyant qu'il s'agit de l'emploi, en grand et à haute dose, d’un produit éminemment toxique, comme l’arséniate de soude. L'auteur de l’article ne doit pas ignorer que l’arséniate de soude est certainement un des sels les plus dangereux qui s’emploient en thérapeutique. Pour ma part, j'aurais bien hésité avant d’en conseiller l'emploi, malgré les précautions in- diquées dans la notice. Sans vouloir faire ici un cours de toxicologie, il est certain que l’ar- séniate de soude est encore plus dangereux que l'acide arsénieux, vulgairement appelé arsenic, et que tout le monde connaît aujourd’hui. L'arsenic est peu soluble, tandis que son dérivé, l’arséniate de soude l’est en toutes proportions. De plus, il est sans saveur ou à peu près. En médecine on ne le prescrit qu'avec une extrême prudence, et par milligrammes; enfin, il est toxique à la dose bien minime cependant de quelques centigrammes à peine. J'ajoute que c’est un produit avec lequel il est on ne peut plus facile de s’empoisonner, et aussi malheu- reusement, d'empoisonner les autres..... À ce titre, il peut devenir une arme terrible entre les mains de gens mal intentionnés. .... Je n’insiste pas, mais je trouve qu’il est souverainement regrettable de conseiller, imprudemment peut-être, l'emploi d'un produit aussi dangereux, et d’en favoriser l'usage sans discernement. Dans le même ordre d'idées, j'ai eu l’occasion, il y a deux ans, je m'en félicite, de dissuader un Professeur de l'Université, docteur ès sciences, qui voulait expérimenter en grand le cyanure de potassium, comme agent des- tructeur du Phylloxera. L'idée était bonne, mais je crois qu'elle a, fort heureusement, à mon avis, élé abandonnée. Faisons des recherches et des expériences de laboratoire, mais, de grâce, pas d’imprudence et ne jetons pas sans discernement dans le public, des produits terribles qui sont infiniment mieux à leur place dans l'armoire à poisons des phar- maciens. Du reste, l’auteur du procédé divulgué s'est-il bien rendu compte de la quantité prodigieuse de sel arsenical qu'il faudrait employer pour Mit EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 475 traiter convenablement un vignoble d’une certaine étendue, d’après la formule indiquée (soit 200 grammes par litre)? Pour les 10 hectares de Vignes qu'il me faut salir tous les dns à la bouillie cuprique, à raison de trois barriques ou 6%5 litres par hectare, pour chaque trai- tement, il me faudrait, dis-je, le poids respectable de 135 kilos d’arséniate de soude par hectare, soi maille trois cent cinquante kilos pour mes 10 hectares. Or, ne perdons pas de vue que ce sel est toxique à la dose de dix centigrammes. C’est à faire frémir, et je gage que tous nos manœuvres de campagne, dont les mains sont peu ou point lavées, en empor- teraient sur leurs doigts une dose suffisante pour aller... paître. Non, sérieusement, l’arséniate de soude, le cyanure de polassium, le sublimé corrosif et autres, sont d’un maniement trop dangereux pour en conseiller ainsi l'emploi, de gaîté de cœur, à lout venant, sans discernement. À l’œuvre donc, cherchons autre chose pour la des- truction des Altises, de la Cochylis, et autres bestioles qui font ac- tuellement notre désolation. Voilà mon avis. Veuillez agréer, elc. E. MAISONNEUVE, Pharmacien à Nantes, >< ACCLIMATATIONS VÉGÉTALES A MADAGASCAR. Fianarantsoa (Betsileo, Madagascar), le 8 septembre 1899. Monsieur le Secrétaire géneral, Notre groupe de la Mission protestante française s’est fait inscrire comme Membre de la Société d’'Acclimatation. Nous allons commencer le Jardin d’essai obligatoire pour Loutes les Ecoles normales qui veulent dispenser de la corvée leurs élèves-maîtres, et nous serions heureux de recevoir des graines dont nous puissions faire l’essai, surtout en ce qui concerne les essences d’arbres que l’on pourrait acclimater ici. Nous avons deux Lilas de France, mais qui poussent très lentement. En fait de légumes à propager, il semble que le Maïs comestible de- vrait réussir. Le Chou-rave paraît devoir s’acclimater, et les Malgaches l’apprécient, ainsi que ie Navet. En fait de fleurs, je n’ai vu encore que des Begonia semperflorens, qui fleurissent bien. Le Canna indica est indigène, ainsi que le Glaïeul, celui-ci d'une seule nuance. Quant aux Cannas, un certain nombre de plants venus de la Réunion ont été fort beaux et ont donné des grainés- Nous en avons envoyé à notre neveu, M. Buyssens, chef de culture du comte de Virchow, à Gand, et il nous écrit qu’ils ont fort bien germé. Le climat de Fianarantsoa est plus froid que celui de l’Emyrne, et la saison sèche est presque un mythe. Nous avons eu de la pluie ou du brouillard presque tous les jours jusqu’à présent. À ce moment-ci, fin 176 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION août et commencement septembre, les Jelia azedarach recommencent à pousser et les Verveines entrent en floraison. Les Rosiers réus- sissent fort bien dans le Betsileo. Je me tiens à la disposition de la Sociéfé pour toutes les observations de ce genre qui pourraient l’intéresser. Veuillez agréer, etc. Pour la Mission protestante francaise de Madagascar, ESCANDE. X< CULTURES DIVERSES A TOULOUSE. — COMPTE RENDU DE SEMIS. Toulouse, le 6 mars 1900. M. le Secrétaire général, Je vous remercie de l'empressement que vous avez mis à m'envoyer les Haricots du Mexique que je vous avais demandes. C'est bien, en effet, ceux que j'ai cultivés pendant quelques années et que je re- grettais d’avoir perdus. Ils présentent une parlicularilé remarquable ; quand on les cullive dans une terre très riche, ils gagnent en vigueur, en abondance et en volume, mais ils perdent beaucoup en délicatesse de goût. Il faut donc éviter de les fumer trop abondamment. Quant aux graines que j'ai reçues l’an dernier, un grand nombre n’ont pas germé. J'ai eu des Courgettes d'Égypte que j'ai laissé müûrir et dont je puis vous envoyer une certaine quantité. Sur six graines de Palmiers divers, il ne m'est venu que deux Phœnix canariensis. Les Li-tchi et les Ginko n’ont pas germé. Les Pois à couleurs variées (Gesses), sont bien venus; mais les graines ont presque toutes avorté par suite d’une horrible sécheresse qui a Lari les sources et les puits réputés inépuisables dans le pays; des Négondos de Chine ont bien levé; mais je n’ai pas pu constater en quoi ils diffèrent de ceux de l’Europe. J'ai recueilli quelques graines, malheureusement bien peu, d'une Courge originaire du Chili qui m'a été donnée par notre collègue de Marseille, le docteur Heckel, et que l’on désigne sous le nom de Courge patate. Elle est petite, en forme de toupie, avec des côtes assez saillantes dans la partie renflée. Elle a le goût de la Patate douce, et se mange à maturité, en tranches d'un centimètre d'épaisseur frites dans une pâte à beignets. Je vous en adresse quelques semences. Il y en a évidemment trop peu pour distribuer à tous ceux de nos col- lègues qui en désireraient; mais on pourrait les remettre à quelques- uns d'entre eux particulièrement soigneux et qui l’auront vite mul- tipliée. Il faut veiller toutefois à son isolement, car elle s’hybride et s’abâtardit avec une facilité inouïe. Veuillez agréer, etc. A. DE SAINT-QUENTIN. BULLETIN SCUE AATONALE DACCUAT (Revue des Sciences naturelles appliquées) 47: ANNÉE : AS ‘14 — # Eu JUIN 1900 SOMMAIRE avis RASPAIL. — Le Hanneton (YWelolontha vulgaris) au point de vue de sa ee _gression dans les années intermédiaires de ses cycles ................ LE CAE DRE 2 UT Her DEGRON. — Les Vignes japonaises recueillies sur place, rapportées et cultivées . a ‘en France, à Crespières (CCE AS OMR) NRA REC Ars SRE PRE NE ne 18724100 nu | Cranres PAIN. — Sur les avantages que le Jatropha Curras présents comme support pour la culture des Vanilliers. — Emploi de Jatrogha gossypiifolia var : ro poonneéslepre en Colombie ...........1.........0 LD AUTRE HN RUE tRS AUS , CSS Ge Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIEGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, RUE DE LILLE, #1 PARIS ET À LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. … franc en timbres - -poste. 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Je fus tres étonné, lorsqu'en 1892 je commençai mes observations sur les mœurs et la reproduction du Hanneton (Melolontha vulgaris), observations que j'ai complétées défi- nitivement en 1895 (2), de découvrir que l’histoire d’un tel Insecte était encore totalement inconnue. Et cependant, ce n’est pas d'hier que les naturalistes se sont occupés des ra- vages qu’il cause dans les cultures; on peut s’en convaincre en remontant à travers les âges jusqu'au ve siècle avant notre ère, où, antérieurement à Aristote, le poète grec Aristophane en avait déjà fait mention. Comment interpréter une telle ignorance ? Elle provient à mon avis de ce que les naturalistes ont cru qu’il n’y avait plus rien à connaître de la vie et des mœurs d’un Insecte qui offrait à l'observateur toutes les facilités de l'étudier en raison de sa taille et de la possibilité de se le procurer en abondance, même au sein des villes ; de sorte que, sans se préoccuper de faire eux-mêmes des recherches, pourtant bien peu compli- quées comme celles que je n’ai pas eu beaucoup de mérite à entreprendre et à poursuivre, ils se sont contentés de repro- duire ce que leurs devanciers avaient publié à son sujet. Et ce n’est pas pour le Hanneton seul que j'ai acquis la preuve qu'il en était ainsi, mais pour bien d’autres animaux sur lesquels, au point de vue biologique, des légendes souvent absurdes, qui persistent quand même, se sont transmises à travers les siècles. Je ne saurais en donner ! un plus curieux exemple que celui du Coucou. (1) Communication faite en séance générale le 27 avril 1900. (2) Observations complémentaires sur la ponte et les mœurs du Hanne:on. Mén. Soc. Zool. de France, tome 1X, p. 331, 1896. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1900. — 12 178 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Mais, à l'heure actuelle, j'avoue avoir encore plus lieu de m'étonner de retrouver toujours, soit dans les publications récentes, soit dans les lecons des professeurs d'agriculture, des assertions aussi erronées sur la reproduction du Hanneton que les suivantes : « La vie du Hanneton est très courte, de dix à douze jours; le mâle meurt après l’accouplement de même que la femelle aussitôt qu’elle a fait sa ponte. » Ah! nous sommes loin de la réalité et combien le danger serait moins menaçant pour l’avenir si les choses se passaient de cette facon ! Sans prétendre reproduire ici mes précédentes observa- tions, non bis repelila placent, du moins, est-il nécessaire, en raison du sujet que je vais traiter, de rappeler très som- mairement les points principaux de la biologie du Hanneton telle que je suis parvenu à l’établir. Prenons le Hanneton à l’état parfait, lorsque dans la se- conde quinzaine d'avril, généralement vers le 20, il sort de terre. Presqu'immédiatement, l'accouplement a lieu et le mâle, très ardent, le recommence jusqu'à neuf fois, au cours de son existence, même alors que la femelle a définitivement terminé ses fonctions reproductrices et qu’elle n’a plus aucun œuf à pondre. Cette existence, c’est-à-dire la vie aérienre du Hanneton, est pour les deux sexes de 45 à 50 jours, temps pendant lequel ont vécu les individus tenus et nourris en captivité, dans des bocaux depuis leur sortie de terre, et une femelle ainsi captive n’est morte qu'au bout de 62 jours. Normalement, la femelle fait trois pontes présentant entre elles un écart pouvant varier de huit à seize jours. La femelle qui a vécu 62 jours a pondu quatre fois, donnant un total de quatre-vingts œufs. Toutes les femelles bien constituées, que j'ai observées, ont fourni un nombre d'œufs approchant de ce chiffre, conservant une proportion dans la gradation des trois pontes semblable à l'exemple suivant : 40 + 28 + 11 —: 79 œufs. La femelle dont l'existence a été de 62 jours avait donné : 30 L 24 L 23 L 3 — 80 œufs. Pour pondre, la femelle s'enfonce en terre à une profon- D nt ee fa te GR br Slot 18) GES 7 De à SU ETS PS EU 2 . } LE HANNETON. 179 deur de 20 centimètres environ et dépose ses œufs en tas, mais sans les agglutiner ainsi qu'on l’avait cru jusqu'ici. L'œuf éclot au bout de 25 jours environ et la larve poursuit son développement et ses ravages jusqu'à la fin du mois de juillet de la seconde année où elle se change en nymphe. La vie larvaire du Hanneton est donc de deux ans et un à deux mois selon l’époque de l’éclosion des œufs. L'état nymphéal, par contre, n’est pour ainsi dire qu'un passage transitoire d’une très courte durée, un mois tout au plus, et dès la fin d'août ou les premiers jours de septembre, l’Insecte parfait, débarrassé de la dépeuille pelliculaire de la nymphe, reste dans la loge faconnée par la larve avant sa métamorphose, pour y attendre pendant huit mois l'époque où, après être sorti de terre, il va procéder à la multipli- cation de son espèce avec une progression d'autant plus redoutable que les animaux, dont le rôle était de la res- treindre, diminuent de jour en jour per le fait de l'homme lui-même. Donc, en principe, si le Hanneton s’est montré une année en nombre, il est certain que trois ans après il se montrera en quantité beaucoup plus considérable. C’est ce qu’on appelle l'année à Hannetons, dont la répétition triennale établit le cycle spécial à telle ou telle contrée. Or, il est d’actualité d’en faire le relevé pour les différentes régions où le Hanneton se montre communément; et comme l'apparition en masse du Hanneton ne se produit pas partout la même année, on parait . attacher un grand intérêt à dresser une liste des départements possédant la même production annuelle autrement dit, jouis- sant du même cycle. M. Forel, de Lausanne, a Su pour la Suisse trois régimes différents : Le régime uranien : Cycle de 1892, 1895, 1898, 1901, re- levé pour les vallées de la Reuss, du Rhin supérieur. Le régime bélors : Cycle de 1893, 1896, 1899, 1902, eo dans les cantons de Bale, du Valais. Le régime bernois : Cycle de 1894, 1897, 1900, 1903, con- cernant les cantons de Berne, Neuchâtel, Lausanne, Genève. Pour la France, on a appliqué tout simplement les trois régimes définis par M. Forel, de sorte qu’on a trouvé à classer un certain nombre de départements sous le régime bälois, quelques autres sous le régime bernois, enfin à mettre, sous D 7. RE ET AE LPO ET à 180 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. le régime uranien, un plus grand nombre de départements parmi lesquels se trouve celui de l'Oise que j'habite. Je ne reproduirai pas la liste des départements dont les ré- gimes sont ainsi déterminés, parce que je n'y trouve qu'un intérêt très secondaire ainsi que je m'en expliquerai dans un instant ; cependant, je signalerai en passant ce fait que cette répartition ne se produit pas par régions nettement circons- crites, mais d’une facon irrégulière intercalant un régime au centre de contrées où en règne un autre. Tel est le départe- ment de la Somme qui est bélois alors que les trois départe- ments qui l'entourent complètement, l'Oise, l’Aisne et le Pas- de-Calais sont wraniens. Eh bien, j'ai constaté un exemple semblable, mais dans des proportions pour ainsi dire minuscules. C'était en 1887; 1886 avait été l'année à Hannetons dans l'Oise. J'étais allé, au mois de mai, explorer les bois de Saint-Michel situés sur les con- fins des territoires de Saint-Leu d’Esserent, de Villers et de Cramoisy et où, entre parenthèse, malgré le moment le plus actif de la reproduction, je fus surpris de rencontrer fort peu d'Oiseaux ; il faisait cependant une journée superbe, toute en- soleillée qui aurait dù inciter la gent ailée à chanter ses amours ; or, je n’entendis de toute la matinée qu’un Merle grive (Turdus musicus) dont je trouvai du reste le nid établi dans un Genévrier, et un Pouillot véloce ( Phyllopneute rufa). Par exemple, ces bois très pittoresques et accidentés sont toujours habités par les Sangliers et je me suis de- mandé si cette désertion des Oiseaux, que je m'attendais à y trouver en grand nombre, n’aurait pas la même cause que celle qui amène depuis nombre d’années les Sangliers à venir s'y établir. Rien ne rend cette supposition invrai- semblable. Ayant quitté ces bois inhospitaliers vers midi et, comme je suivais un chemin coupant une plaine assez vaste faisant partie du territoire de Cramoisy, mon attention fut attirée par des Insectes volant autour des arbres d’un bouquet de bois formant ilot dans cette plaine et n'ayant guere plus d’une trentaine d’ares. Ma première impression ne m'avait pas trompé, c'étaient des Hannetons, il y en avait sur tous les arbres et les buissons; d’un jeune baliveau, j'en fis tomber une cinquantaine. Ainsi, sur ce très petit coin de territoire, je rencontrais inopinément le régi e bélois implanté au LE HANNETON. 451 centre d’un régime wranien, comme cela existe, dans les mêmes conditions, pour la Somme. Je supposai alors que cette anomalie provenait de ce que, sur ce point, par suite de circonstances exceptionnelles, le développement de l’'Insecte avait mis quatre ans à se faire, comme on le prétend pour certaines contrées de l'Allemagne; aujourd’hui, je ne le crois plus et je pense qu’il faut en cher- cher la raison ailleurs. En France, le Hanneton ne met partout que trois ans à passer par ses quatre états et, par suite, il faut admettre que trois ans auparavant, c’est-à-dire en 1884, il avait été incon- testablement aussi abondant dans ce petit bois, rendez-vous, en l’absence d’arbres à une assez grande distance, de toute la production fournie par les terres en culture qui l’entouraient. Maintenant, en 1886, régime uranien de l'Oise, ces Insectes y avaient-ils été également aussi nombreux que partout ailleurs, ce qui chargeait cette partie de territoire de deux années à Hannetons ? Il n’y a là rien d’impossible, et mon opinion s’ap- puie sur les raisons que je vais aborder, qui sont le fond principal de cette notice et qui vont me servir à démontrer que, dans les deux années intermédiaires de ses cycles, la progression du Hanneton augmente d’une facon des plus in- quiétantes. En fait, il y a des Hannetons tous les ans et il en a été ainsi depuis la création du règne animal. Pour comprendre com- ment, tous les trois ans, il se montre en nombre tellement considérable qu'il serait temps de s’en inquiéter sérieusement, il ne suffit pas de se préoccuper uniquement de dresser de simples constats pour savoir qu'ici c’est telle année à Hanne- tons tandis qu'ailleurs c’est telle autre, de rechercher si un département appartient au régime bélois, bernois, ou ura- nien, il faut porter ses investigations plus haut, chercher à définir le pourquoi. Et certes, les auteurs ne sauraient pré- tendre nous éclairer à ce sujet lorsque, s'appuyant sur les travaux des savants français, Emile Blanchard et Reiïset, des allemands Brehm et Ratzeburg, ils se contentent de dire: « Les Hannetons, qui se montrent en quantité prodigieuse en certaines années, sont rares en d’autres années, ce qui s'explique par la durée de leur développement qui est triennal. » Cela, en effet, n’explique rien et il est des raisons qui 182 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. paraissent autrement concluantes lorsqu'on s'appuie sur des chiffres pour les mettre en évidence. Mais, avant d'y recourir, il est nécessaire d'ajouter à la bio- logie du Hanneton résumée précédemment, ce fait que j'ai constaté, à savoir que le nombre des femelles approche de celui des mâles ainsi que le prouvent les données suivantes : Le 10 mai 1892, au cours d’un hannetonnage exécuté dans ma propriété, je fis compter à part 300 individus, pris à tout ve- nant, parmi lesquels il y avait 154 mâles et 146 femelles. Le 8 mai 1895, je reuouvelai la même opération avec 500 indi- vidus et je trouvai 259 mâles et 241 femelles. Comme on le voit, les proportions sont sensiblement les mêmes et on peut conclure sans trop s’écarter de la vérité qu'il y a autant de femelles que de mâles dans une année à Hannetons. En me basant sur des remarques qui m'ont permis de sup- poser quil faut au moins compter, dans le cours des trois années du développement complet du Hanneton, sur ure des- truction des 4/5° des œufs pondus, nous avons tous les élé- ments suffisants pour montrer, dans le tableau suivant, la progression effrayante, en quelques périodes triennales, de la reproduction de cet Insecte. Pour en faire la démonstration, je prendrai une femelle, qu'un Moineau, surpris par mon arrivée, abandonna au mo- ment où il venait de lui détacher le corselet et les élytres: elle allait faire sa première ponte, ainsi que l’indiquaient les 39 œufs qu’elle contenait et qui étaient à terme. C'était le 11 mai 1899, par conséquent la première année intermédiaire du cycle 1898-1901 formant le régime uranien dans l'Oise. Années intermédiaires Nombre Total des œufs Le 5 parvenu la 3e année Dont moitié du des produits acl'état de eycle uranien. femelles reproductrices. dans les trois pontes. d'insecte parfait. femelles. SUIS : l 89 16 8 MS rCeso 8 640 128 64 OOo : 64 5.120 1.024 512 TOUS .. 512 40.960 £.192 4.096 ROME Re rrer 4.096 327.680 65.536 32.768 JON PEER 32.768 2.621.440 » » Ces calculs feront comprendre quels chiffres fantastiques on atteindrait si on les poursuivait encore pour quelques autres périodes triennales. LE HANNETON. 183 Ainsi, le Hanneton femelle, détruit en 1899 par un Moineau au moment où il allait déposer en terre sa première ponte, aurait pu fournir à la quinzième année une descendance qui, en tenant compte très largement de toutes les causes de des- truction, se serait trouvée représentée par 52,768 femelles pouvant produire le chiffre colossal de 2,621,440 Vers blancs! Admettons que cette femelle eût été transportée en cette année 1899, sur un point où il n’y aurait pas eu de Hannetons, elle était en état d'y devenir le point de départ de l'établissement du régime balois en ilot au centre du régime uranien, comme j'en avais trouvé un exemple dans le bouquet de boïs de la plaine de Cramoisy. En l’absence de mâles, elle n'aurait pu faire que sa première ponte composée des 39 œufs que contenait son abdomen, mais au bout de la quinzième année et dans les conditions et proportions qui ont servi à établir le tableau ci-dessus, elle n’en aurait pas moins fourni une descendance de 16,384 femelles capables de répandre dans le sol 1,310,720 Vers blancs. Certes, en fixant approximativement aux 4/5 la destruc- tion qui peut s’opérer 2n{ra comme supra la terre par les nombreux animaux qui servent de pondérateurs à la fécon- dité du Hanneton, on est certainement fort au-dessous de la réalité; il doit exister d’autres causes plus actives, telles que maladies, influences atmosphériques, réducteurs heureux de cette dangereuse expansion; autrement, cet Insecte serait déjà arrivé à un nombre tel que non seulement il couvrirait le sol, mais que même sa larve ne trouverait plus à se mou- voir dans la terre; tel serait le cas du Hareng qui, avec sa vertigineuse fécondité, emplirait l’'immensité des mers s’il n’a- vait sans cesse actionnées à sa poursuite des légions d’ennemis naturels qui se nourrissent de sa chair. Si jusqu'ici, le rôle perturbateur que joue l’homme dans l’'admirable harmonie de la nature, a eu peu d'influence sur l'équilibre qui existe entre les animaux qui vivent dans la mer,par contre, pour ceux qui vivent sur la terre, il n’en est malheureusement pas de même; là, on peut dire qu'il s’est constitué le plus grand ennemi de ses propres intérêts en donnant libre carrière à l'expansion des Insectes par une destruction sans profit des Oiseaux insectivores, voire même de cette pauvre Chauve-Souris que stupidement le paysan tue comme une « sale bête » quand il la trouve accrochée dans 484 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. son grenier ou sa cave, alors qu'elle digère les Insectes dont elle a purgé l'air dans ses courses nocturnes. Après l'exemple de ce Moineau qui venait, d’un coup de bec en supprimant une femelle de Hanneton, d'annuler la fantastique descendance qu'elle était en état de fournir; com- bien nous paraissent aveugles ceux qui crient « sus au Moi- neau » à cause du prélèvement qu'il fait sur leurs récoltes. Il mange les cerises, c'est vrai, mais il sauve peut-être l’arbre qui les porte en détruisant une seule femelle. Donc, si sur des régions et sans qu’on puisse invoquer des conditions climatériques ou autres, il s’est établi des périodes triennales différentes où le Hanneton se montre en abondance au point de devenir un fléau pour les végétaux en général, il a fallu que les causes qui devaient maintenir la reproduction de cet Insecte dans les justes proportions qu'exige le rôle qu'il devait jouer dans l’ordre naturel des choses, y aient cessé leur action pondératrice. Les cycles wranien, bélois et bernois n'ont pas d'autre origine et quand on nous signale un pays qui appartient à l’un ou à l'autre de ces trois régimes, cela doit nous faire comprendre que dans une année corres- pondant à l’un ou à l’autre de ces cycles, l'élément destruc- teur de cet Insecte s’est trouvé sinon annulé totalement, du moins insuflisant à remplir sa mission. Par contre, il ne serait pas impossible qu’une année à Hannetons püt être annulée et que le régime auquel elle ap- partient disparüt, par la production soudaine d’une épidémie pouvant résulter de l'abondance même de l’Insecte. Mais il serait illogique d'attendre patiemment qu'un tel bienfait se produisit et, depuis vingt ans que j'habite l'Oise, je constate chez moi, tous les trois ans, une progression désespérante. Cependant, ce n’est pas faute de lutter; dans tout le cours de son développement, la larve y est recherchée et détruite partout où il est possible de l’atteindre et, dès l’apparition de l’'Insecte jusqu'à sa disparition, c’est-à-dire pendant deux mois, le hannetonnage y est pratiqué chaque jour et sans se décourager de retrouver tous les matins autant de Hannetons sur les arbres qu’on en avait retiré la veille, les environs en étant la source inépuisable. En 1898, j'ai détruit ainsi 191 kilogrammes de ce maudit Insecte, dont le poids est en moyenne de 1 gr. 08; un kilo re- présente donc 925 Hannetons; ce chiffre multiplié par 191 RS En MU Re tree ENT RS NE LE HANNETON. 185 donne 176,615 individus dont 88,337 femelles en état de pro- duire 7,066,960 Vers blancs ! Le mal est déjà considérable, mais, depuis quelques années, jen vois un plus grand encore se prononcer et s’avancer comme une marée montante. Pendant longtemps, on ne songeait au Hanneton que tous les trois ans, quand il sortait de terre en abondance pour se répandre sur les arbres. Dans les deux années intermédiaires, nul ne s’en préoccupait, parce qu’on ne le rencontrait presque jamais; il y en avait cependant, mais en nombre si restreint que les Oiseaux, les Chauve-Souris et même certains Mammi- fères suffisaient pour le maintenir dans les mêmes propor- tions insignifiantes. Mais peu à peu et à mesure qu’on si- gnalait la diminution de tous les animaux insectivores, je remarquai que le nombre en augmentait dans ces deux années intermédiaires. Jusque-là, sa présence ne m'était révélée que par quelques élytres tombées sous les arbres ou par quelques- uns de ces trous si caractéristiques, qui indiquent les sorties de l’Insecte, sur les chemins ou les terres durcies. Mais à partir de 1890 et 1891, l’année à Hannetons dans l'Oise ayant été 1889 et 1892 suivant le régime uranien, je commençai à rencontrer assez fréquemment quelques In- sectes sur les arbres et, frappé de ce changement, j'eus soin d'en prendre note. C’est ainsi que je trouve des indications qui résultent non pas, je dois le faire remarquer, de l’inspec- tion de tous les arbres de ma propriété, mais seulement d’un bouquet de jeunes Sycomores, de deux Marronniers et d’un Noyer placés isolément au milieu de prés et toujours couverts de Hannetons lors des productions triennales. En mai et juin 1893 je trouvai 9 Hannetons. a ls 7 = à 1806 ES 52 _ 2 19m 8 (1) = se JON 91 _ Ainsi pendant ce cycle de 1893, 1896, 1899, nous avons une progression de 9, 34, 91 Insectes qui ressort de l’ins- (1) Chiffre inférieur à ce qu’il aurait dû être, mes observations ayant été inter- rompues prématurément. 186 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. pection de quelques arbres seulement ; d'ores et déjà, il est permis de prévoir pour 1902 un chiffre autrement signi- ficatif. De plus, en 1899, les labours, en mettant à découvert les larves provenant des pontes de l’année à Hannetons 1898, ont fait trouver presque partout des Vers blancs parvenus à toute leur croissance, provenant des pontes faites pendant l’année intermédiaire 1897, et devant fournir, pour cette année 1900, un nombre respectable de Hannetons. Sirien ne vient mettre un frein à cette progression me- naçante, il faut donc s'attendre, dans un avenir prochain, à voir s'établir dans une même contrée les trois régimes wra- nien, bélois et bernois. Dès lors, quand il y aura autant de Hannetons tous les ans, il est facile de prévoir le sort qui attend non pas seulement nos cultures, mais le Règne végétal tout entier. 187 LES VIGNES JAPONAISES RECUEILLIES SUR PLACE, RAPPORTÉES ET CULTIVÉES EN FRANCE A CRESPIÈRES (SEINE - ET - OISE) par Henry DEGRON, Lauréat de la Société d’Acclimatation (i). A MONSIEUR LE MYRE DE VILERS Président de la Société nationale d'Acclimatation de France Ambassadeur honoraire Député de la Cochinchine. Hommage respectueux et dévoué d'un explorateur, Membre de la Société d’Acclimatation. HENRY DEGRON. C'est l’année dernière seulement, en 1899, à l’occasion d'une exposition organisée, aux Mureaux, par les membres de la Société d'Horticulture du canton de Meulan, que je me décidai. à faire connaître au public, d’une facon assez res- treinte les Vignes rapportées par moi du Japon il y a seize ans (2). | 1) Communication faite en séance générale le 25 mai 1900. (2) Voici le résultat du concours des Mureaux : SOCIÉTÉ D’'HORTICULTURE DU CANTON DE MEULAN. Les Vignes de M. Henry Degron. M. Degron, chevalier de la Légion d’honneur, viticulteur à Crespières (Seine- _et-Oise), membre de notre Société, ayant demandé une visite de ses produits, les membres de la Commission nommée à cet effet, se sont rendus chez lui, le dimanche 27 août dernier (1899), pour procéder à cette visite, et ont ensuite rédigé et signé le présent procès-verbal : M. Degron possède des Vignes de Syrie et du Japon, comme nous n’en avions jamais vues. Les grappes de Vigne de Syrie atteignent une longueur de 0®,65 et 0®,41 de circonférence. Vignes du Japon : Un seul cep, planté au nord, a une longueur de 322,80; hauteur du cep 2",80. La longueur du bourgeon de l’année est de 4 mètres d’un côté et de 3m,28 de l’autre; la circonférence du pied à 1 mètre du sol 188 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Aujourd'hui, encouragé par cette première exhibition et sur les conseils de viticulteurs compétents, je veux profiter de l'Exposition universelle pour les faire wniversellement connaitre, Car je crois fermement qu'elles en valent la peine et peuvent être utilisées par beaucoup de spécialistes et d’a- mateurs de plantes ornementales. Envoyé en mission au Japon en 1883, par le Ministère de l'Agriculture, pour y rechercher des Vignes sauvages pouvant résister au Phylloxéra, j'ai rapporté de ce pays un grand nombre de cépages qui, malheureusement et malgré mes ob- jurgations, ont été plantés à Montpellier, première étape du Phylloxéra en France à son importation des États-Unis. Certes, on avait raison de planter ces Vignes en terrain phylloxéré, puisque jé disais que, dans ma pensée, elles de- vaient résister à l’Insecte dévastateur ; mais alors qu'elles ve- naient du centre de l'ile de Yéso — île la plus septentrionale du Japon, — des bords d’un fleuve, d’un pays froid, humide et où la neige couvre le sol pendant sept mois de l’année, c'é- tait assurer leur perte (même sans Phylloxéra), que de les est de Üm 10; ses feuilles ont 0,25 sur 0m,25 ; il y a des grappes sur toute la longueur. Semis du mois de février dernier : hauteur 0,27; circonférence 0",02; feuil- lage 0,16 sur 0,16. Vignes françaises greffées sur cépages japonais : La moyenne de ces ceps est de cinq à six branches, dont la vigueur est au-dessus de l'ordinaire. La propriété Dégron est d’une contenance de plus de 2 hectares, le tout en jardin fruitier et potager. Le travail de la Commission n'a pas duré moins de deux bonnes heures. Elle a trouvé le jardin dans le meilleur état de propreté, quoique n'ayant qu’un seul jardinier; malgré la sécheresse de cette année (1899), tous les fruits sont d’une beauté exceptionnelle. La Commission est d’avis que parmi les Vignes japonaises de M. Degron, il s'en trouve certainement de variélés peu connues, ou encore incunnues, et qu'il serait intéressant de voir classer scientifiquement, Les vins faits avec les raisins provenant des Vignes de M. Degron sont rouges et blancs, excellents el très agréables au goût. La Commission, à l’unanimité, accorde à M. Henry Degron la grande mé- daille de vermeil donnée par M. Berteaux, député, et le met hors concours pour tout ce qu’il exposera à la future exposition du canton. La Commission accorde également au jardinier de M. Degron une mention honorable pour la bonne tenue de la pronriété. Les Membres de la Cominission, Signé : CRÉTÉ, jardinier chef à Bazemont ; RousseL, horticulteur, vice- président de la Société d’horticulture, rapporteur ; RoOUSSELET, jardinier chef aux Mureaux, président. LES VIGNES JAPONAISES EN SEINE-ET-OISE. 189 planter dans un terrain et sous un climat où la sécheresse règne du mois de mai au mois de septembre. Cependant, malgré le Phylloxéra et malgré un climat si contraire à celui qui leur aurait convenu, mes Vignes ont ré- sisté à Montpellier pendant bien des années ; seulement, elles ne fructifiaient pas! De là cette croyance répandue, à tort, dans certains milieux, que la Vigne japonaise ne pouvait fructifier en France et dans d’autres — prématurément, sans preuves suffisantes — que le Phylloxéra les faisait périr. Une autre cause de dépréciation a été qu’à mon retour en France, en 1884, je me suis laissé enjôler par un certain ama- teur normand, dont la spécialité consistait à se faire donner des graines ou des boutures de Vignes de {ous pays exoliques. Ayant eu connaissance de ma mission, il guetta mon retour, vint me trouver à Crespières et me demanda des graines. Comme je préconisais l'introduction de mes Vignes en Nor- mandie et dans le nord de la France, j'acquiesçai naturel- lement à sa demande. Plus tard même, à l’occasion d’un con- cours régional qui eut lieu à Alencon, je lui portai moi-même quelques pieds japonais bien enracinés. Il résulte de tout ce qui précède que je suis bien l’auteur véritable de l'introduction de cette Vigne en Normandie, et que le Normanden question n’a été que mon instrument ; s'il ne s'était pas offert de lui-même pour cultiver les plantes intro- duites par mes soins, il ne m’eût pas été difficile de trouver d'autres amateurs pour mes essais. Malheureusement la per- sonne dont il s’agit eut le tort de mettre cette Vigne en vente trop tôt et de lui donner le qualificatif de précoce. Ce qui est vrai des cépages japonais, c'est qu’ils débourrent (dans la région de Paris) quinze à vingt jours avant les cépages indi- gènes ; mais quant à la maturité des fruits, elle se produit à peu près à la même époque et plutôt après qu'avant celle des nôtres.Aiïinsi, je cueille toujours mes raisins japonais en même temps que le Chasselas & conserver pour la table et l'hiver, soit quinze à vingt jours après les vendanges ordinaires. Dans les nombreux plants de un à deux ans que j'ai rap- portés, ainsi que dans mes graines, il y avait de tout, c'est ce que le vénéré et regretté professeur Planchon a lui-même constaté, avec M. Foëx, l'éminent directeur (à cette époque) de l’école de Montpellier. Il y avait du bon et du mauvais, des Vilis de plusieurs sortes et des Arnpelopsis. Dans les 190 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. graines que j'ai données de côtés et d’autres et dans les semis que j'ai faits chez moi, à Crespières, c'était la même chose. Il fallait du temps, des sélections et des expériences avant de parler des produits et surtout d'en vendre; autrement on s’exposait à en répandre de mauvais et par suite, à faire tort aux bons. Un troisième déboire m'attendait encore. Le Ministère avait donné de mes graines à l'École d'Agriculture de Gri- gnon ; elles y réussissaient assez bien ; de mon côté, j'en avais remis à Versailles, au grand savant M. Hardy, qui m'honorait de ses conseils. Maïs il y a quelques années, le Phylloxéra fut introduit subrepticement dans les Vignes de Grignon, et aussitôt, par mesure de prudence, on fit tout détruire, à Versailles comme à Grignon, et je restai seul à continuer mes expériences. Aujourd'hui, après seize ans de patience et d'efforts, je crois pouvoir parler de la Vigne - japonaise. | Je possède plusieurs milliers de ceps japonais sur lesquels j'ai greffé des boutures françaises ; sur d’autres, j'ai greffé du Chasselas ; tout cela me donne d'excellents vins, rouges et blancs, que j'appelle vins franco-japonais. Dernièrement, un ami, très sérieux viticulteur: de l'Yonne, m'aftirmait que la Vigne japonaise était réfractaire au gref- fage ! J'ai des Vignes-mères japonaises que je conserve pré- cieusement pour la reproduction ; l'une d'elles me donne des grappes (que l’on ne peut arriver à compter), sur un dévelop- pement de 27 mètres de longueur ! Cela n’a pas empêché cependant d'aftirmer, sur la foi d’un député de l'Hérault, que la Vigne japonaise ne fructifiait pas en France ! Il y a trois aus, j'ai eu toute une treille de Chasselas de Fontainebleau, exposée au sud, gelée ; elle a dû être rabattue jusqu'aux racines. Des Vignes japonaises, au nord, n'ont pas souffert. La Vigne dont il s’agit se recommande aussi pour l’orne- mentation, ses feuilles étant bien plus larges que celles de nos Vignes françaises; de plus, au lieu d'êtres minces, ténues et glabres comme la plupart des feuilles françaises, elles sont épaisses, malléables et poreuses ; les Lapins en sont très friands. LES VIGNES JAPONAISES EN SEINE-ET-OISE. 194 xx Voici maintenant un petit résumé de mes voyages et quel- ques indications sur les pays où je trouvai mes Vignes; cet aperçu date de 1884. Parti de Marseille le 21 janvier 1883, je rentrai en France le 11 janvier 1884. Je rapportais environ quinze cents pieds de Vignes japonaises de provenances diverses, mais surtout de l'ile de Hokkaïdo (anciennement Véso). Tous ces plants, de un à trois ans, bien enracinés, ont été mis en terre, dans des serres, et sont arrivés en aussi bon état que possible ; ils . ont été livrés, à Montpellier, à M. Gustave Foëx, directeur . de l'École nationale d'Agriculture. Quant à mes excursions et à mes études au Japon, elles ont fait l'objet d’un rapport général que j'ai eu l'honneur d'adres- ser à M. le Ministre d'Agriculture. Dans cette note, je me bornerai donc à parler de l'ile de Hokkaïdo, qui est la partie la moins connue et en méme temps la plus curieuse du Japon. Après quelques excursions dans le sud et le centre de la grande île de Nippon, je partis pour le Hokkaïdo. Le climat de cette île, beaucoup plus froid que ne semblerait le com- porter sa situation géographique (entre 41e et 46° de latitude nord) avait tout d'abord attiré mon attention et j'étais con- vaincu que les Vignes, dont je connaissais l'existence en ce pays, pourraient s’acclimater en France. L'ile de Hokkaïdo (en japonais : route du Nord), désignée dans nos géographies sous les noms de Yéso et Yesso (pays de sauvages — probablement par allusion aux habitants pri- mitifs de l'île, les Aïnos), n’est, à proprement parler, et à part quelques villes et villages du littoral et quelques centres de création moderne, qu’une immense forêt vierge, s’éten- dant sur des montagnes, dont plusieurs sont volcaniques et arrosée d'une multitude de cours d’eau, généralement peu profonds, mais qui, aux dernières pluies et surtout à la fonte des neiges, deviennent des torrents ; on y rencontre aussi quelques rivières, assez importantes et un beau fleuve, l’Ishi- kari, qui, à quelques milles de son embou£hure, est aussi « large que la Seine à Paris. Ce fleuve est peut-être le plus D en VS A CE 8 AL AE LI in EU Av A td GI à dieu Leg 192 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. poissonneux du monde entier ; les Saumons surtout y foi- sonnent. Pendant bien longtemps et alors que la partie sud de l’île de Saghalien formait la limite de l'Empire du Japon au nord et isolait l'ile de Yéso des établissements russes, le gouvernement taïkounal se préoccupa fort peu de l'ile de Yéso et pourvu que les Daïmios ou princes, à peu près ab- solus dans l’île, vinssent tous les six mois, rendre hommage au Taïkoun et résider quelque temps auprès de lui à Yédo {aujourd'hui Tokio), on ne leur demandait guère davantage ; mais quand, après la chute du Taïkoun, en 1868, le Mikado, que nous désignons en Europe sous le nom d'Empereur spi- rituel, eut repris l'exercice de ses droits souverains ; quand les Russes, profitant de la faiblesse du nouveau Gouverne- ment, sorti victorieux, mais non indemne, d'une révolution sanglante, eurent réussi à faire entendre à ce Gouvernement qu'il y avait avantage pour lui à leur céder ses droits sur Saghalien, en échange des îles Kouriles, les Japonais com- prirent qu'il était temps de mettre l'île de Yéso à l’abri de toute nouvelle tentative de persuasion diplomatique ; ils jugèrent que le meilleur moyen d'arriver à ce résultat était de coloniser Yéso, alors fort peu peuplée, d'en exploiter les richesses naturelles et de rattacher, plus étroitement, cette ile à l'empire. A cet effet,un Gouverneur général de Yéso fut nommé ; un Ministère des Colonies fut constitué et pendant plusieurs années, le Gouvernement japonais n’épargna rien pour attirer les colons dans l’île. On créa des établissements agricoles, on exploita des mines de houille. Actuellement, un chemin de fer relie les mines de Poronaï, au petit port de Ottarou. On subventionna des compagnies maritimes et des sociétés de commerce, les pêcheries furent localisées et réglementées. Plus tard, le Gouvernement général de l'ile fut supprimé, mais l'ile fut alors divisée en cinq départements, ayant chacun un chef-lieu, un préfet et tous les rouages administratifs ordinaires. La ville de Sapporo fut fondée et plus loin celle de Shibettu sur l'Ishikari ; cette dernière n’est autre chose qu'un grand centre de déportation ; à mon dernier passage, il y avait près de quinze cents forçats condamnés à vie et tous transformés en büucherons et en cultivateurs. Dans d’autres centres, on a organisé des stations agricoles de soldats laboureurs. Enfin, LES VIGNES JAPONAISES EN SEINÉ-ET-OISE. 193 on mit et on met encore tout en œuvre, pour assimiler l'ile de Yéso aux autres îles de l'empire. Malheureusement, la colonisation se fait lentement : à part la grand'route de Hakodaté à Sapporo, par Mori et Mororan, jolis petits ports qui se font face sur la magnifique Baïe des _ volcans, il n’y à pas de chemins carrossables, les transports et les objets de consommation sont partout à des prix exor- bitants. Pendant sept et parfois huit mois de l’année, le sol est cou- vert de neige et pendant trois mois l’Ishikari est gelé, le froid atteint 15 et 18 degrés au-dessous de zéro. Aussi com- prend-on que, malgré tous les efforts du Gouvernement, les indigènes de la belle île de Nippon, dont le climat est si doux, si agréable et si sain, ne se décident que bien difficilement à aller tenter la fortune dans le Hokkaïdo. Sauf sur la grand’- route, on ne peut circuler qu'à Cheval. Les Chevaux sont petits, mais vigoureux, et ils ont le pied d’une süreté bien précieuse, dans ce pays dont le sol est souvent spongieux et glissant et où, tantôt il faut gravir des montagnes, tantôt descendre dans le lit des torrents, et presque toujours traver- ser les rivières à gué. Les Chiens ont le poil rude, très épais et de véritables têtes de Loups. Les Bœufs sont petits, trapus et servent à la culture ; leur viande est tres bonne et, main- tenant, les habitants aisés des villes en mangent très volon- tiers. Il y a aussi des Poules ; maïs je ne crois pas, qu’à part ceux que je viens de nommer, il existe dans l’île, d’autres _ animaux domestiques indigènes. Quant au gibier, il y abonde, le gibier d’eau surtout. J'ai vu des lacs couverts de Canards sauvages et j'ai parfois ren- contré des Bécasses, des Faisans et des Lièvres, qui, tran- quillement, me regardaient passer. Outre la houille, que l’on dit de tres bonne qualité, et des pêcheries très productives, la principale richesse du Hok- kaïdo est son immense forêt ; il y a là des bois de construc- tion de tous genres et de toute beauté; on y retrouve presque toutes les essences de l’Europe, sauf les Conifères, dont l'ile de Nippon possède cependant tant de variétés. La végétation est d’une puissance extraordinaire, le Muguet des bois atteint plus de deux pieds de hauteur, mais il n’exhale aucun parfum. En revanche, j'ai trouvé dans des dunes, au bord de la mer, des Églantiers à larges fleurs rouges très Bull. Soc. nat. Accl. Fr. - 14900. — 13 194 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. odoriférantes. J'ai rapporté des feuilles de Chêne de plus d’un pied de longueur. Mais ce qui, en fait de végétation, m'a le plus frappé, c'est l'existence de deux plantes grimpantes gigantesques, la Vigne et le Xokoud. Ces Lianes, dont les troncs ont parfois un pied de diamèlre, atteignent et recou- vrent en entier les sommets des plus hauts arbres, puis se rabattant nonchalamment vers le sol, les rameaux abandon- nés à eux-mêmes, elles flottent avec grâce, au gré du vent. Que l’on regarde ces Vignes gigantesques, à l'automne, alors que leurs feuilles ont revêtu toutes les couleurs d’un joli coucher de soleil, ou que l’on se trouve en présence des Kokouds à l’époque de la floraison (la fleur du Kokouà res- semble beaucoup à celle de l’'Hortensia sauvage), on a de- vant soi un tableau aussi original que ravissant. Le Kokouà donne, en outre, des fruits gros comme de petites noix, mais plus allongés ; leur goût, très agréable d’ailleurs, rappelle un peu celui de la Groseille à Maquereau. Quant à la Vigne, c’est en celle-là, la Vigne d’Ishikari, que j'ai placé mon espoir, pour la réussite de ma mission ; c’est en elle aussi que, tôt ou tard, le Japon trouvera une nou- velle source de richesses. Comme j'avais déjà habité le Japon pendant plus de vingt ‘ans, quand j'y revins en 1883 pour remplir ma mission viti- cole, que j'avais occupé dans ce pays des fonctions oflicielles, à la Légation de France et auprès du Gouvernement japo- nais lui-même ; enfin, comme j'étais un vieux Membre smili- tant de la Société nationale d’Acclimatation de France, je voulus faire d'une pierre deux coups : rendre encore des services au Gouvernement japonais, tout en accomplissant ma mission. J'obtins de M. le Général Saïgo, Ministre de l'Agriculture et du Commerce, des lettres de recommandation pour les chefs de bureaux de l'Agriculture des départements que je devais traverser et de M. le Général Yamada, Ministre de l'Intérieur, une lettre circulaire d'introduction pour tous les Préfets de l'Empire. En reconnaissance de ces bons procédés, je promis de communiquer au Gouvernement japonais toutes les remarques et observations que je ferais et que je croirais pouvoir lui être utiles. Je tins parole et pendant tout le temps que dura ma mission j'adressai de nombreuses notes, tantôt à M. le Général Saïgo, tantôt à M. Skinagawa, vice-ministre LES VIGNES JAPONAISES EN SEINE-ET-OISE. 195 de l’Agriculture et du Commerce. Plusieurs de mes rapports furent communiqués à M. Matsugata, Ministre des Finances. Enfin, dans la plupart des villles où je passais, je fis des conférences publiques pour enseigner la culture de la Vigne et indiquer les endroits propices à son extension. Quand ma mission fut terminée et que je fus prendre congé de lui, M. Sienkiéviez, Ministre de France à cette époque au Japon, me fit l'honneur de me remettre la lettre officielle suivante : LÉGATION DE FRANCE RÉPUBLIQUE FRANCAISE. AU JAPON À Monsieur Degron, chargé d'une mission viticole par le Ministère de l'Agriculture, au Japon. Tokio, le 22 novembre 1883. Monsieur, Le Ministre des Affaires étrangères du Mikado vient de m'informer que Sa Majesté a bien voulu vous décerner la croix de chevalier de son ordre impérial du Soleil Levant. La distinction honorifique dont vous êtes l'objet témoigne des ser- vices que vous avez su rendre, durant votre mission, aux viticulteurs japonais. Je vous félicite d’avoir si bien réussi dans ce pays. Vous trouverez d ailleurs, ci-annexés, les insignes de votre grade. Recevez, etc. Signé : SIENKIEVIEZ. Pour compléter les renséignements qui précèdent et pour que les viticulteurs et toutes les personnes — qui s’intéres- sent, non seulement à la régénération des vignobles français, mais encore aux belles plantes d'ornement — puissent avoir une idée exacte de la valeur de la Vigne du Japon, je ne sau- rais mieux faire que de reproduire in exlenso une étude très détaillée et très documentée, qu’un professeur de viticulture M. P. Mouillefert, dont les ouvrages sont devenus classiques, vient de faire paraître dans la Revue de Vilicullure, dirigée par M. P. Viala, l’éminent professeur de l’Institut national agronomique. LES VIGNES JAPONAISES DE M. DEGRON (Vifis Coignetie Pur.) Bien que cette espèce de Vigne soit connue depuis longtemps des botanistes, sa description est toujours restée incomplète, faute d’élé- 196 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. ments suffisants, surtout en ce qui concerne la fructification et le vin obtenu. Mais il ne saurait plus en être ainsi : les nombreux individus obtenus des semis faits par M. Degron à Crespières (Seine-et-Oise),en 1884, à la suite de sa mission au Japon en 1883, ont fructifié, et se présentent à nous aujourd’hui, après seize années de végétation. Grâce à l'extrême obligeance de M. Degron, qui m'a permis d'étudier ces Vignes chez lui, où se trouvent de beaux spécimens, je puis contribuer, dans une certaine mesure, à l’histoire de l'espèce principale de la col- lection, le Vifis Coigneiie. La plus ancienne mention qui ait élé faite du Vitis Coïgnetie est celle de Thunberg dans son Flora Japonica, paru en 1784, où elle est désignée sous le nom de Vrfis Labrusca. Regel en parle aussi dans son Conspectus des espèces de genre Vitis. Viennent ensuite Franchet et Sava- tier, dans leur grand ouvrage Enumeratio plantarui in Japonia sponte crescentium, 1875, tome I, p. 83, sous le nom également erroné de Vrfis Labrusca. Dans ce même ouvrage, cette Vigne est indiquée, d’après Thunberg, comme habitant les broussailles du Kiousou, près de Nangasaki, puis par le D' Savatier dans le Nippon moyen, aux environs de Yokosta {1861); dans l'ile Yeso, près de Hakodaté, par Maximowicz et Tschotski, en 1864. Maximowicz la retrouva également au Nippon, au pied du Fudzi-Yama er 1864, lors de son deuxième voyage. Mais la première introduction comme plante paraît être due à M. et Me Coignet, qui, voyageant en 1875, au Japon, pour le compte de la Chambre de commerce de Lyon, en envoyèrent des graines, dit M. Pulliat (1), à leur père, M. Jean Sisley, grand amateur d'horticul- ture, qui en donna une partie à M. Pulliat et à M. Ch. Naudin, direc- tear de la villa Thuret à Antibes. « Du semis que je fis, dit M. Pulliat (loc. cit.), j'obtins, dès l’année suivante, des Vignes d'une vigueur et d’une ampleur de feuilles vraiment extraordinaires. J’envoyai quelques- unes de ces Vignes, dont je donnais la description, deux ans plus tard, à mon ancien maître et ami Planchon, en le prévenant que j'avais donné à cette Vigne le nom de M®® Coignet. M. Planchon latinisa ma dédicace et fit connaître « la Vigne Madame Coignet » aux botanistes sous le nom de Vefis Coigneliæ. » De son côlé, M. Ch. Naudin qui avait également recu, nous l'avons dit, de M. Sisley, père de M" Coignet, des graines de la Vigne en question, obtint aussi des plants, et, ignorant que M. Pulliat possédait la même Vigne et l’avait déja dénommée, lui donna le nom, en raison du caractère de ses fouilles, de Vifis rugosa. Mais comme ce dernier nom faisait double emploi avec le Vifis rugosa de Waliich, du genre Ampelopsis, et pouvait par conséquent prêter à confusion, le nom de Vitis Coignetiæ proposé par Pulliat, dédié à MC Coignet qui mérilait (1) Revue horticole, 1890, p. 49. eh E OBS À EN, c LES VIGNES JAPONAISES EN SEINE-ET-OISE. 197 bien cet hommage pour les services rendus par elle à l’horticulture, fut définitivement adopté par les botanistes. Malheureusement les pieds de Vifis Coignetie qu'on a vus fleurir à Chiroubles chez M. Pulliat et à Antibes, étaient tous mâles (Planchon, Journ. la Vigne américaine, 1888, p. 188). Depuis, aucun des pieds issus de ce premier semis n'a été signalé comme ayant fructifié et il est même probable que tous ont successivement disparu du fait du Phylloxéra ou d’autres causes. De sorte qu’il n’a probablement dû rien rester de cette première introduction de M. et MC Coignet et quele Vifis Coïgnetie manquerait encore dans nos collections sans l'introduction très importante de plants-racinés, de boutures et de graines faite par M. Degron (1), à la suite de sa mission spéciale au Japon en 1883, dans laquelle il avait été chargé par M. le Ministre de l'Agriculture de rechercher dans ce pays les Vignes sauvages ou cullivées qui pourraient être utiles à la viticulture française dans sa lutte contre le Phylloxéra. M. H. Degron, ancien directeur des postes françaises à Yokohama, a profilé, pour remplir cette mission, des facilités que lui donnaient la connaissance de la langue japonaise et des relations qu'il avait faites dans le monde officiel japonais pendant son séjour dans le pays. Arrivé à Yokohama le 7 mars 1883, M. Degron, après avoir renoué des relations avec d’anciens amis français et japonais, avec les auto- rités du pays, notamment avec les Ministres de la Guerre, de l’Agri- culture et des Finances, explora successivement les environs de Kobé sur la côte est de la grande île Nippon; il visita le champ d'expérience &e In-Nansimoura choisi pour la culture des Vignes étrangères. Dans les environs de Kioto, à Djiourakou, M. Degron trouva un Vifis tini- fera à gros grains noir-rougeâtre ou blancs très sucrés, qu'il crut pro- venir du Portugal par une introduction faite au xvi° siècle. Remontant vers le Nord, il visita les environs de Nagaya, où il vit des cultures de Vignes américaines introduites à grands frais par le Gouvernement ; puis il arriva à Kofou, province de Koshiou, où il rencontra partout des Vignes sauvages à petits fruits (probablement le Vifis ficifolia ou Vitis Thunbergii) ; à Kofou, M. Degron rencontra aussi un autre Wiéis vinifera cultivé pour raisin de table et qui a été introduit à peu près vers cette époque en France sous le nom impropre de Yeddo, mais connu au Japon sous le nom de Koshiou ou de Raisin de Kofou (2). Cette excursion dans le sud de Yokohama et dans le centre de l'ile (1) Il va sans dire que je serais très heureux, en cas d’erreur, que l’on veuile bien me rectifier. — P. Mouillefert. (2) Vigne vigoureuse et remarquable par la présence sur ses rameaux de pe- tites aspérités qui sont comme des poils subespinescents. Le Yeddo a été cultivé pendant plusieurs années de suite par M. de Lunaret, qui l'avait reçu directe- ment du Japon sous le nom de Ko-Chu. Ses raisins gros, oblongs, violet clair, sont d’assez bon goût. 198 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Nippon n'ayant pas produit grand'chose au point de vue du but pour- suivi, M. Degron résolut de se rendre dans le Nord, dans l’île Yéso (aujourd'hui nommée Hokkaïdo), et débarquait le 7 juin à Hakodaté ; de là il se rendit dans la ville de Sapporo, chef-lieu du département (Ken) de ce nom, par 4395 latitude Nord; il remonta avec les plus grandes difficullés dans des pirogues d’indigènes appelés Aïnos, la vallée du fleuve isikari (ou Ishikari). Cette vallée, bordée de grandes forêts de Chênes et de Châtaigniers et d’autres grands arbres, contient aussi, en très grandes quantités, plusieurs espèces de Vignes sauvages, notamment le Vifis Coignetie, qui y atteint des dimensions énormes. Dans le delta que forme l’Osikouaï et l’Isikari, M. Degron remarqua des pieds de cette Vigne qui enserraient et recouvraient en entier des arbres de plus de 150 pieds de hauteur avec des troncs de 0,55 à 0,60 de grosseur à 2 mètres du sol. A cette époque (1'"° quinzaine de juin), toutes ces Vignes étaient en pleines fleurs. En redesceudant vers Sapporo, dans l'Est, sur le plateau d’Ioromoï, l'explorateur retrouva cette même Vigne, mais cependant moins développée que dans la haute vallée de l'Isikari. En résumé, dit M. Degron, cette Vigne est partout abondante dans l’île de Yéso, où elle n’est pas utilisée. Cependant, à Sapporo, dans un établissement du Gouvernement, M. Degron put déguster du vin fait avec le raisin de la Vigne en question; mais ce vin, très chargé en couleur et fait d'une manière par trop primitive, ne donnait pas l’idée de ce qu'il pourrait être. Au sud de l’île de Toma-Koumaï, le Vifis Coïgnetie fut aussi retrouvé dans les prairies, mais beaucoup moins développé que dans l’île Yéso. M. Degron remarqua aussi dans cette île la présence de plusieurs Vignes différant du Vifis Coignetie, ou tout au moins des variétés de celle-ci à feuilles quinquélobées toujours avec sinus profonds, moins tomenteuses en dessous, même un peu rougeâtre à l’état adulte (1). M. Degron retrouva encore son Vifis Isikari dans l'ile Sado (38° de latitude) ainsi que dans le Nord de Nippon, ce qui donne une aire géo- graphique très étendue à cette plante, aire s'étendant au moins entre le 389 et le 44° degré, où elle habite surtout les hautes vallées pour s'élever jusqu'au voisinage des neiges presque perpétuelles, tout en atteignant toutefois son plus grand développement dans l'île Yéso. Au commencement d'octobre de cette même année 1883, M. Degron retourna dans le Yéso pour prendre livraison des plants de Vigne qu'il avait préparés et fait préparer au printemps lors de son premier voyage, et emporta avec lui à Yokohama environ 900 jeunes pieds « bien sains, bien enracinés, ayant de un à trois ans, provenant du plateau d'Ho- romoï, de Sapporo et de différents autres lieux, ainsi qu'un grand {1} D’après ces caractères, cette Vigne pourrait être le Witis Pagnucci, peut- être même le V. amurensis. LES VIGNES JAPONAISES EN SEINE-ET-OISE. 199 nombre de boutures et beaucoup de graines. Le 24 novembre, M. De- gron s'embarquait avec sa cargaison comprenant quinze caisses à la Ward ou bâches portatives; il débarquait à Marseille le 11 janvier 1884 et accompagnait ses plantes à l'École nationale d'Agriculture de Monipellier, où elles devaient être cullivées et étudiées. Maintenant que sont devenues ces Vignes ? Il paraît que toutes celles qui avaient été plantées à Montpellier sont mortes de l’action phylloxérique, ce qui est fort possible, surtout étant donné que le Vitis Coignetie appartient au groupe des Labrusca dont la résistance au Phylloxéra est très faible. A cela, M. Degron objecte que sa Vigne est originaire de contrées froides et humides, que le climat de Mont- pellier seul aurait suffi pour la faire mourir. Quant aux graines, elles furent distribuées dans différents établis- sements, notamment au Muséum, à l’École d'Agriculture de Mont- pellier, à l'École de Grignon où, malheureusement, on les arracha, en 1889, avec toutes les autres formant une tres belle collection, à la suite d'une invasion phylloxérique. L'École d’Horticulture de Versailles recut aussi de ces Vignes. Plusieurs personnes recurent également la nouvelle Vigne, notamment un M. Caplat qui s’'empressa de lui donner son noMe Nous ne saurions dire ce que sont devenues toutes les Vignes issues de la mission de M. Degron. Quant à celles semées et élevées chez lui, nous pouvons en parler pour les avoir visitées plusieurs fois et les avoir étudiées sur place. Les unes ont été élevées de pied franc et se couvrent de fruits tous les ans, tandis que d’autres ont servi de porte- greffes à des Chasselas et à des Meuniers et donnent des vins curieux qui démontrent l'influence réelle que peut avoir le sujet sur le greffon. Un pied de cette Vigne entoure d’une immense guirlande la maison d'habitation de M. Degron et mesurait, l'année dernière (1899), environ 35 mètres de long et 16 centimètres de grosseur à la base. Cette Vigne, aux feuilles de 25 à 27 centimètres de limbe, porte tous les ans un nombre considérable de belles grappes. Un berceau formé de cette même Vigne est également chargé de raisins. Passons maintenant à la description de cette Vigne. Description. — Vifis Coignetiæ Pulliat in litter. — Planchon, in journal Vigne américaine, 1883, p. 186. — Vifis rugosa Naudin in litter. non Wallich. — Vifis Ishikari Degron, Rapport au Ministre de l'Agri- culture, dans Compte rendu du service du Phylloxéra, année 1883, Paris, 1884, et dans journal Vigne américaine, 1884, p. 280 et 302. — Plan- chon, Les Ampélidées, extrait du Prodromus, vol. quintum, p. 325. — V. Labrusca Thunb. F/. Jap., p. 103. — Franchet et Savatier, Enum. PI. Jap., p. 83. Grand arbrisseau sarmenteux pouvant atteindre daus son pays le sommet des plus grands arbres, sur 0",50 à 0,60 de grosseur, à tige 200 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. recouverte d’une écorce feuilletée lamelleuse se détachant par grandes loques et laissant à nu une écorce pourpre livide ou pourpre grisâtre. Sarments assez gros, 8 à 9 millimètres de diamètre, un peu aplatis, brun rouge à l’aoûtement, finement striés, pubescents, floconneux, subglabres à l’aoûtement ; mérithalles assez rapprochés, 8 à 10 centi- mètres ; nœuds faiblement renflés. Moelle assez abondante, jaune rou- geâtre, 3 à 4 millimètres de diamètre. Diaphragme mince (1 millimètre), concave; vrilles interrompues (parfois par séries de 2-4), très robustes, courtes, ordinairement bifurquées. Bois dur, assez compact, blanc gri- sâtre. Feuilles grandes, ovales, cordiformes, entières ou à peine tri- lobées au sommet, à pourtour irrégulièrement et peu profondément denté, avec sommet des dents brusquement terminé; sinus pétiolaire plus ou moins ouvert en U ; limbe un peu vrillé, chagriné, vert foncé en dessus, glabre à l’état adulte; couvert en dessous d’un tomentum abondant plus ou moins rouilleux, jamais gris tomenteux et un peu rugueux, ce limbe prenant une belle teinte lie-de-vin à l’automne ; longueur, 12 à 18 centimètres sur à peu près autant de large. Pétiole relativement grêle, cannelé, peu renflé à la base, pubescent, flocon- neux et se terminant dans le limbe par cinq principales nervures; longueur, 10 à 12 centimètres. Bourgeons cylindro-coniques, recouverts d’un épais tomentum ferrugineux. Débourrement très précoce, rouge carmin. Jeunes feuilles généralement trilobées couvertes d’un tomentum roussâtre. — Inflorescences dioïques ou tout au moins polygames- dioïques; floraison précoce. Thyrse sur pédoncule assez robuste, 4-6 centimètres de long, assez grêle et souvent pourvu d’une petite vrille plus ou moins développée. Grappes, 15 à 20 centimètres, cylin- driques, lâches, souvent avec 1 ou 2 ailerons à la base; grains nom- breux, 50 à 100, ronds, moyens ou sur-moyens, 16 à 18 millimètres de diamètre, noir foncé, mais très pruinés ; peau assez épaisse, bien résistante ; jus très foncé en couleur, à saveur de cassis très nelte, mais bien moins que dans le Labrusca d'Amérique; pulpe vert gri- sâtre, aussi beaucoup plus liquide que dans ce dernier. Pépins géné- ralement 2, mais souvent 3 et parfois 4, ces pépins assez gros, 9 à 6 millimètres de long sur 4 de large, courtement ponctuës à la base, légèrement échancrés au sommet. Chalaze peu développée, elliptique— allongée. Maturité à Crespières (Seine-et-Oise), année normale, vers le 15 octobre : ce qui correspond à la deuxième époque de Pulliat. Variétés. — Parmi les nombreux individus issus des semis faits par M. Degron, on distingue nettement deux variétés : la première que nous désignerons sous le nom de V. Coignetie typica, a les feuilles grandes, 20 à 27 centimètres de limbe, vertes en dessous, très peu ferrugineuses. Les pédoncules fructifères sont gros, robustes ; les grappes, longues d’en moyenne 15 à 20 centimètres, dont 5-6 de pédoncules, sont pourvues de un à deux ailerons. Les grains de raisin LES VIGNES JAPONAISES EN SEINE-ET - OISE. 201 sont gros, ronds, 16 à 18 millimètres de diamètre. Cette variété est vigoureuse. La deuxième variété, que l’on pourrait appeler V. Coignetie ferrugi- nosa, se caractérise par des feuilles plus petites, 15 à 18 centimètres, et beaucoup plus ferrugineuses en dessous. La plante est aussi plus grêle, les grappes de même longueur sont plus cylindriques, à peine ailées ; les baies plus petites, 10 à 12 millimètres de diamètre, et mü- rissent plus tôt, huit à dix jours environ. En somme, celte variélé est inférieure à la précédente. Comme on le voit, la maturité de ces raisins est donc bien plus tardive qu’on ne le croyait. Comme rendement, voici les chiffres que nous avons trouvés au mois d'octobre 1899, d’après les raisins récoltés chez M. Degron. Quatre grappes, pesant ensemble 620 grammes, se sont ainsi décom- posées : IRÉNOe 6 268 a ROC TRES SRE 2 . 32 grammes. GHENNS sono SE MR SEE . 588 — Les grains à leur tour se sont ainsi décomposés : TEL SOS 375 grammes, soit 60 °/, du poids. BÉDINS esse 60 — pellicules re. 153 — Comme on le voit, le rendement en jus n’est donc pas très éleve; par contre, le poids des pépins et des pellicules est, en revanche, pro- porlionnellement considérable. Quant au moût de ces raisins à 159, il pesait au mustimètre Salleron 1.090, ce qui correspond à une quantité de 210 grammes de sucre par litre et en vin fait à 11°9 d’alcoo!l, ce qui serait une belle composition si malheureusement l’acidité n’était con- sidérable; nous avons trouvé pour cet élément le chiffre très élevé de 1498. Le vin fait ressemble beaucoup par sa couleur à un extrait de cassis et il en a aussi un peu le goût; mais ce qui ressort aussi dans ce vin, c'est son acidité et une certaine âpreté, prenant un peu à la gorge. En somme, ce n’est pas un vin de consommation courante. En arrêtant la fermentation, on obtiendrait, en revanche, une liqueur relativement supérieure. Voici, d’ailleurs, la composition que nous lui avons trouvée : alcool, 6975 ; acidité, 11 ; extrait sec, la quantité énorme de 28. Ce vin pourrait être à la vérité employé, en raison de sa grande richesse en couleur, comme vin de coupage ; mais il y en a tant d’autres qui lui sont supérieurs que l’on ne saurait nullement baser une culture sur ce débouché. Quant à la résistance phylloxérique du Vifis Coïgnetiæ, tant par ce que l’on sait que par le groupe botanique auquel il appartient, il y a 202 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. peu d'espoir aussi de ce côté. Dans tous les cas, c'est dans les régions du Nord et du Centre qu'il faudrait l'essayer, comme porte-greffe, où, grâce à sa grande vigueur, il peut donner d’excellents résultats. Mais, suivant nous, le véritable emploi de cette Vigne c’est comme plante d'ornement; par sa grande vigueur et son beau feuillage, elle est d’un grand effet ornemental : aucune des Vignes connues ne peut l’'égaler sous ce rapport, pas même le Vifis Romaneti, cependant très beau. J'ai aussi trouvé parmi les semis de M. Degron le Vitis amurensis dont l'aire géographique se trouverait aussi comprendre la Mandchourie et le nord du Japon. M. Degron, auquel on devait déjà l'introduction de plusieurs autres plantes ou arbustes du Japon (1), s’est donc acquis un nouveau titre à la reconnaissance publique en introduisant le Viéis Coïgnetie dans nos cultures. P. MOUILLEFERT, Professeur de Viticulture, à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon. (1) Pendant que M. Degron était directeur des postes françaises à Yokohama, il n’a pas introduit moins de cinquante espèces de plantes différentes, parmi lesquelles dix au moins n’avaient jamais été décrites. Aussi la Société d’Accli- matation lui a-t-elle décerné dès 1870, une médaille de première classe. [Voir Bulletin de la Société d’Acclimatation). 1869, pag. 470 et 1870, page XC. 203 SUR LES AVANTAGES QUE LE JATROPHA CURCAS PRÉSENTÉ COMME SUPPORT POUR LA CULTURE DES VANILLIERS EMPLOI DU Jatropha gossypiifolia, VAR. staphysagrifolia CONTRE LA LÈPRE (l) par Charles PATIN, Consul honoraire de Belgique en Colombie. L'observation m'a démontré que le Vanillier, comme, du reste, toutes les plantes grimpantes, fleurit abondamment lorsqu'il peut émettre des rameaux de 0,50 à 1 mètre, re- tombants, suspendus en l’air. Il faut, en outre, que ces ra- meaux, une fois en fleur, se trouvent à la portée des fécon- dateurs pour faciliter l’importante opération de la fécondation artificielle. II faut aussi que le support des Vanilliers soit constitué par des espèces, dont l’épiderme ne se renouvelle pas chaque année et que, autant que possible, l'écorce soit bien vivace et non pas sèche. I1 est désirable que ce support produise des branches courtes, trapues, peu bifurquées et ayant peu de feuilles, qu'il s’accommode d’un demi-ombrage, car le Vanillier a besoin d'être ombragé, mais toutefois pas autant qu'on le croit généralement. Toutes ces conditions sont obtenues par l'emploi du Jatro- pha curcas. C’est un arbrisseau trapu, à branches fortes, peu ramifiées, permettant facilement la suppression des rameaux inutiles et n’émettant pas, comme d’autres, des gourmands qui détruisent l'équilibre. Cette plante croît assez vite, et un an après sa plantation, on peut commencer à faire celle des _ Vanilliers. On se servira de boutures de 0,50 qu’on aura eu soin de couper la veille, afin de laisser sécher les blessures. La coupe aura été pratiquée sur le mérithalle, à environ 0,01 au-dessous d’un œil. À la plantation, on fera un petit trou à (1) Communication faite en séance générale le 25 mai 1900. 204 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 0n,25 du pied du Jatropha pour y enterrer ce chicon de mé- rithalle, et on couchera la bouture jusqu’au pied de l’arbre, en la faisant reposer sur la terre; puis on la recouvrira de terreau et de feuilles. L’extrémité sera attachée à l'arbre: lorsque le premier œil se développera, il prendra lui-même sa direction en se fixant sur le tronc principal, et lorsque le rameau arrivera aux bifurcations de l’arbre, on le dirigera, autant que possible, vers la plus grosse branche, sur laquelle il s’'attachera par ses racines adventives, et on le laissera courir jusqu'à ce qu’il dépasse d'environ 0,75 l'extrémité de cette branche. À ce moment on fera le pincement en suppri- mant l'extrémité. Peu de temps après, un nouveau rameau se développera sur la courbe formée par la chute de cette pre- mière branche, on le pincera aussi lorsqu'il aura atteint 0®,60 ou 0,75, et les rameaux se multiplieront ainsi à l'infini, en répétant toujours le même pincement. Ces pincements répétés développeront probablement des rameaux au-dessous de la bifurcation des branches du Ja- tropha, et ces nouveaux rameaux devront être dirigés vers une branche encore libre du même arbre. On multipliera ainsi ses bifurcations jusqu'à ce que toutes les branches du Jatropha aient leur rameau de Vanillier. On pourra aussi, pour stimuler le développement de ces rameaux secondaires, faire une incision transversale sur le mérithalle au-dessus de l’œil qu'on voudra développer; cette incision pourra même être faite en croix, si la vigueur du Vanillier est très grande. Pour ceci, on introduira perpendiculairement au mérithalle une lame de canif traversant le milieu de la branche de Vanillier et lui donnant une longueur d'environ 2? centi- mètres. Si l’on doit faire l’entaille en croix, c’est-à-dire double, on répétera la même incision dans l’autre sens, afin que, sur ces 2? centimètres de long, le Vanillier soit par- tagé en quatre. Ces entailles se ressouderont et formeront un bourrelet, après toutefois avoir entravé la sève qui aura dé- veloppé la branche qu’on désire. En même temps cette en- trave aura fait développer à la partie de la branche qui lui est supérieure, de nouvelles racines, favorables au plus grand développement de cette partie. Si l’on dispose d’un grand nombre de boutures, on pourra en mettre trois ou quatre au pied de chaque plant du Jatropha curcas, afin de le garnir plus tôt de branches de Vanilliers. SUR LES AVANTAGES DU JZATROPHA CURCAS. 20 ©: Chaque branche de Vanillier retombant, comme il est indiqué, se mettra sûrement à fleurs dans l’année de sa for- mation; mais comme tous les yeux d’une même branche ne se mettent pas toujours à fleurs en même temps, il arrive que chacune de ces branches donne des fleurs pendant deux à trois récoltes. ; Lorsque tous les yeux d'une branche auront fructifié, on supprimera celle-ci, et l’on continuera ainsi cette sup- pression pour dégager la plante des rameaux inutiles. En suivant ce système, on peut être sûr de faire produire chaque année une grande quantité de gousses à chaque plante. Il arrive quelquefois après le pincement, surtout si le ra- . meau pincé est très fort, que l’œil de l’extrémité se développe en rameau. Dans ce cas, il faut pincer de nouveau; mais, pour éviter la repousse de la branche pincée, lorsque celle-ci est forte et pour l’obliger à développer un œil utile, c'est-à-dire celui situé à sa base, et destiné à fournir le remplaçant plus tard, on arrivera à ce résultat en meurtrissant la branche sur un des mérithalles de sa base. On pourrait aussi faire l’entaille en croix, indiquée plus haut, car il faut toujours éviter que la sève se perde dans des prolongements de branches de plus de 1 mètre et la faire plutôt servir à multiplier le nombre des branches retombantes que nous avons indiquées. Le Jatropha curcas, ne s'élevant qu'à 4 ou 5 mètres, il ar- rive ainsi que tous les rameaux de Vanilliers sont à la portée des fécondateurs, car les plus hautes branches, par le poids même de la multiplication des rameaux de Vanilliers, s’incli- nentnaturellement, ce qui facilite l'opération de la fécondation. L'instrument que j'ai employé pour cette fécondation con- sistait en une aiguille émoussée et emmanchée du côté du trou dans un morceau de bois gros come un crayon; à l’aide de cet appareil très simple, mes ouvriers fécondaient de huit à neuf cents fleurs par jour. Il est facile de se rendre compte journellement de la marche de la fécondation, car les fleurs de Vanilliers, n'étant ouvertes qu’un jour, le lendemain elles sont toutes fermées, mais celles qui ont été fécondées sont inclinées vers le sol, tandis que celles qui ne l’ont pas été, soit à cause de ieur trop grande abondance, soit à cause de la négligence des ouvriers, restent dressées. La plantation qui remplirait les meilleures conditions pour 206 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. une culture scientifique et raisonnée devrait être établie de la manière suivante. Les Jatropha curcas seraient plantés à 4 ou 5 mètres de distance et en quinconce. Tous les 12 ou 15 mètres, il y aurait dans les allées, et aussi plantés en quinconce, des Castuloa elastica, pour donner l'ombrage né- cessaire aux Venilliers. Cette espèce se prête admirablement à cet usage, car l'arbre s'élève perpendiculairement et ne donne des branches qu'à la partie supérieure, permettant ainsi la circulation de l’air nécessaire à la bonne culture des Vanilliers. De plus, son caoutchouc est d’un grand rende- ment pour le planteur. Il se prête fort bien aussi à la régula- risation de l’ombrage, car s'il devient trop touffu, on peut diminuer cet ombrage en le saignant et en faisant une plus forte extraction du latex. Une plantation établie sur ces bases produira certainement, après cinq ou six ans, une livre de bonne vanille par pied. Pour donner une idée de l'avantage de ce système, le seul que je préconise, je terminerai en racontant ce qui m'est arrivé aux serres de Laeken pres Bruxelles. Il y a deux ans, dans une visite aux serres royales, j’ai fait observer à M. van Obbergen., chef des cultures de Sa Majesté le Roi des Belges, que son Vanillier, sur lequel il y avait une douzaine de fruits en deux ou trois grappes, devrait produire beaucoup plus. Il m'a répondu que les Vanilliers fleurissaient difficilement en serre, et tout en remarquant que cela dépendait de la ma- nière de les traiter, je lui ai dit qu'il obtiendrait pour la récolte suivante cinquante gousses s’il voulait suivre les pré- ceptes que je lui indiquerais, ce qu’il à accueilli avec em- pressement. Après avoir fait incliner tous les rameaux, dans une posi- tion retombante, par leur extrémité, j'ai engagé M. van Obbergen à donner aux nouvelles pousses la même direction, ce qu'il a fait, et l’année suivante, il y eut plus de cinquante gousses, qui viennent de muürir cette saison. Par ce système, on pourrait cultiver sous verre le Vanillier avec profit, comme or le fait de la Vigne. Je voudrais enfin signaler à la Sociélé d'Acclimatation deux espèces de Vanilliers qui existent en Colombie, en dehors du Fanilla planifolia. L'un, ressemblant à ce dernier, LE. SUR LES AVANTAGES DU JATROPHA CURC'AS. 207 lui est cependant supérieur, car la gousse est plus pleine et plus régulière sans jamais présenter la forme de massue, ce qui est avantageux pour le commerce. L'autre est une espèce nouvelle à fruits anguleux, plus secs, défectuezx sous ce rapport, pour le caprice du commerce, mais bien supérieur, eu égard à la consommation, car son parfum est bien plus fin et plus prononcé que celui des espèces qu’on trouve sur notre marché. Cette seconde espèce devrait être propagée dans les colonies. % Puisque nous venons de traiter d'un Jatropha, j'appellerai l'attention sur le Jalropha gossypüfolia var. staphysagri- folia, qui a des propriétés médicales très importantes. Un article, paru dans le journal Le Nouveau Monde, à la date du 17 février 1900, fait connaitre que le Gouvernement améri- cain a envoyé aux iles Sandwich le docteur Carmichael. 11 dit : « On va expérimenter pour guérir la lèpre dans les Îles Sandwich un nouveau remèdé avec lequel on a déjà oblenu, dit-on, des résultats rèmarquables. Ce remède est le produit d'un arbrisseau vénézuélien dont la cuillure a élé introduile dans les îles, sous la direclion du D' Carmichael, de l'hépilal maritime des Elats-Unis, et qui a élé chargé par les autorilés de Washinglon d'expérimenter ce pro- duil. » La lecture de cet article m'a rappelé qu’en Colombie, des guérisons de la lèpre ont été signalées par un prêtre dans l'État de Santander, à l’aide des décoctions du Jatropha gossypiifolia var. staphysagrifolia, arbrisseau d'environ 1%,50 de hauteur, qui croit dans tous les climats chauds de la côte de Colombie. Il doit être le même que celui signalé comme provenant du Vénézuela.Je présente à la Sociélé d’Ac- climatation une couple de plantes et quelques graines qu’elle voudra bien distribuer à ceux de ses Membres que ie sujet in- téresse. J'ai aussi quelques livres de la plante sèche que je mettrais volontiers à la disposition de la Sociélé pour des applications thérapeutiques. J'ai eu connaissance de cette plante d'une manière tres particulière. Elle montre que les peuplades indiennes de l'Amérique du Sud, encore à demi-sauvages, conservent le ms 1 208 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. secret de la propriété de certains végétaux, que nous igno- _rons, et pour s'exprimer à leur égard, ils ont des idées très baroques, qui sont, vraies au fond, mais qui sont traduites d'une manière ridicule. Certaines propriétés de ces Jatropha » 1° m'ont été signalées comme suit : ? Nous avons une plante, m'a dit l’Indien, dont les feuilles arrachées en les tirant par le haut donnent une décoction qui sert de vomitif; mais si la feuille est arrachée en tirant de haut en bas, la décoction devient vomitive et purgative. Cette assertion ma laissé naturellement très incrédule; mais plus tard, ayant entendu répéter le fait par un fermier qui m'a assuré qu'il employait régulièrement ce remède dans les maladies de ses ouvriers, cela m'a fait penser que, dans l'une des décoctions, il pouvait y avoir quelque chose de plus que la feuille, c’est-à-dire l’inflorescence ou le fruit. Ayant découvert la plante, j'ai observé qu'en prenant une feuille, et lorsqu'on la tire par le haut, le pétiole se rompt à peu près à la base du limbe, tandis que, en l’arrachant, tirant par ie bas, la feuille se détache ordinairement avec la hampe qui porte souvent des fleurs et des fruits. Aïnsi s'expliquent l'énigme et l'affirmation de l'Indien. J'ai tenu à faire ce récit pour appeler l'attention des Membres de la Société d’Acctlimalation sur les ressources que nous pouvons encore tirer de ces pays, qui nous ont déjà donné tant de bonnes choses. Par ma longue expérience de plus d’un quart de siècle, passé en Colombie et dans l’Amé- rique centrale, j'ai acquis la conviction que la science, au point de vue de la médecine et de l’agriculture tropicale, doit encore espérer beaucoup de ces contrées. Le BULLETIN 1591.52 DE LA NATIONALE D'ACCEDNATA ï DE FRANCE . 4 (Revue des Sciences naturelles appliquées) 472 ANNÉE JUILLET 1900 SOMMAIRE Louis GUESDE. — Notes sur l’Agriculture à la Guadeloupe.....,......,.,,.....,... 200 Extraits des procès-verbaux des séances de la Société. 7 anal 1 0000 0 A en te de tas NOTA 1€ Section. — Mammifères ......,.... ARC 0 UOTE EN D EN AS QE ENS PR En ee 000 2e Section. — Ornithologie, Aviculture .................. CA Cm A En et Pic PA OS Con AN amculinre 0e 0 Re MBA UE doc MP 4 Section. — Entomologie.....................,.. Te AS Pal a V ea lala aa LE EI de Cap ei le T2 2 ÉPaiSéchon, — Botanique .-............... DH ENS CAES à A EAU ur 229 M SEcuon = Colonisation. ....:.....1,..4.1.. 40.0 nue OO GES Extraits de la correspondance. La signification du mot Plumage. — L/Autruche d’ Afrique dans la République Argentine. D Une Poule a éperons......24,4.4.40. 504.00... eue one state ele 208 Extraits et Analyses. es RIVIÈRE et H. LECQ. — Les Acridiens ÉNANTDENE Le etoile scies etes sde cle NU R Le PATIN. — Emploi de l’ Alcool pour l'éclairage au “Congo not cle rniaestse der CN DIES La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions ‘émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. ° NN CR mn Un numéro Z francs ; pour les membres de la Société 4 fr. 50 AU SIEGE £ A » he: DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D’ACCLIMATATION DE FRANCE | 41, RUE DE LILLE, 41 PARIS ET À LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. DESINFECTANT e *NTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, Ne Scientifiquement démontrée, l’immense avantage de n'être Toxique ni Corrosif. Hémostatique et Styptique puissant. Adopté par Les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Sevvice de Sante de l'Armée, la Préfecture de la Seine et La Dlupart des Services d'Aygiene ef de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. 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DE PREU K, Chateau de la Villette, Sauliain (Nord), ou 16, rue de l’'Échiquier, Paris. ‘2 209 NOTES SUR L'AGRICULTURE A LA GUADELOUPE CANNE A SUCRE — CAFÉ — CACAO — KOLA — BAMBOU — BANANE (1) par Louis GUESDE, Secrétaire de la Chambre d’Agriculture de la Pointre -à-Pitre, Commissaire général de la Guadeloupe à l'Exposition universelle de 1900, La demande que la Société d’Acclimatalion a bien voulu me faire de lui dire quelques mots sur les principales cultures de la Guadeloupe montre combien elle s'intéresse à notre vieilie colonie de la mer des Antilles; je lui en exprime toute ma gratitude, et je vais essayer de lui donner satisfaction. Ces cultures ne sont pas très nombreuses et elles different suivant les localités, étant exclusives les unes des autres, à cause de la constitution différente des sols dans lesquels on les exploite. Notre colonie Soon deux îles complètement distinctes, et comme configuration et comme nature de terrain; elles sont séparées l’une de l’autre par un bras de mer dirigé N.S. et appelé Rivière salée. L'ile située à l’ouest de ce canal porte le nom de Gua- deloupe proprement dite ou Basse-Terre; elle est entière- ment volcanique, elle a été formée d’une seule pièce, par quatre grands foyers dont quelques-uns donnent encore de nos jours des marques d'activité. Une chaîne de mon- tagnes la parcourt dans toute sa longueur et la partage en deux versants E. et O. Un nombre considérable de rivières et de torrents descendent de ces montagnes et vont se jeter à la mer, soit brusquement, soit en pentes douces. On rencontre partout, sur la côte occidentale, des gorges (4\ Communicition faite en séance générale le 25 mai 1900. Les gravures qui accompagnent cet article ont été exécutées d’après des photographies prises par M. Louis Guesde. Elles sont extraites de la plaquette publiée par lui à l’occasion de l'Exposition universelle. M. Pierrefort, éditeur, 12, rue Bo- naparte, à Paris, en a mis gracieusement les clichés à la disposition de la Socié:é d’'Acclimatation. uil. Soc. nat. Accl. Fr. 4900. — 14 240 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. profondes, bien abritées des vents et très riches en humus; la côte orientale présente de grandes plaines allant se perdre à la mer. L'ile située à l'E. de la Rivière salée est au contraire plate, calcaire, sur base volcanique n’ayant pas dépassé le niveau de la mer, elle est dépourvue de cours d’eau, sa couche arable est de peu d'épaisseur et elle est balayée par les vents ali- zés; elle porte le nom de Grande-Terre. Cette constitution différente des deux îles fait que les mêmes cultures ne leur conviennent pas à toutes deux; c’est ainsi que la Guadeloupe est le grand centre d'exploitation du Café, du Cacao, de la Vanille, tandis que la Grande-Terre est exclusivement couverte de Cannes à sucre. On voit cependant dans les grandes plaines du versant E. de la Guadeloupe proprement dite, d'importantes cultures de Canne. La Canne à sucre a fait pendant longtemps la fortune du pays, et actuellement encore elle constitue sa principale culture d'exportation, mais depuis qu’on la cultive dans le monde entier et aussi et surtout depuis que la Betterave, par suite de la sélection par la graine, est arrivée à un rende- ment de 12 0/0 en sucre cristallisable, la situation a bien changé. La crise de 1884 a porté le dernier coup à la colonie, et, aujourd’hui, malgré des prix sensiblement meil- leurs, nous nous débattons aux prises avec des complications financières dont on ne prévoit pas la fin. Nos colons font des efforts surhumains pour ne pas suc- comber, ils emploient les outillages industriels les plus per- fectionnés, ils mettent en pratique les méthodes culturales les plus recommandées; de son côté notre établissement financier leur prête largement son concours. Mais la situation ne change pas. On voudrait bien remplacer la Canne par autre chose ; mais comment faire là où ni le sol ni les situations acquises ne le permettent? Partout où les conditions de territoire et de climat le comportaient, on a poussé avec activité les cultures de Café, de Cacao, d’Épices; on a vu des sociétés se créer aux Vieux- Habitants, aux Trois-Rivières, ailleurs encore, pour l’exploi- tation de vastes caféières et cacaoyères ; l'honorable et très distingué président de la Chambre d'Agriculture de la Basse- Terre est allé au Venezuela étudier la culture du Cacao; il en ‘(epsano smo7 ‘4 ep eryderSoioud eun saide p) ednoçopeno ej e ‘eqnoiepy ne uoneqey ouf Une plantation de Cocotiers, à la Guadeloupe (d’après une photographie de M, Louis Guesde). ul NOTES SUR L'AGRICULTURE A LA GUADELOUPE. 213 a rapporté des méthodes qu'il a avantageusement fait mettre en pratique sur les exploitations; il a introduit chez nous le procédé de terrage du grain qui a donné detrès bons résultats. Et l’on ne peut nier que le Cacao terré se présente à l'œil plus favorablement que le Cacao simplement séché ! Mais le cyclone du 7 août 1899 est venu bouleverser toutes les cacaoyères de la colonie et a anéanti la récolte sur pied; il y a lieu cependant d'espérer que les résultats de l’année prochaine compenseront largement les pertes de cette année, car, après cette violente secousse, les arbres se sont mis à bourgeonner vigoureusement partout. La production de la colonie en Cacao séché a déjà atteint six et même sept cent mille kilos dans les bonnes années; si rien ne vient enrayer les efforts du moment, on ne tardera pas à doubler ce chiffre. Ces conditions de territoire ont donc fait que les cultures de Cacao et de Café se sont centralisées à la Guadeloupe proprement dite et on rencontre dans toutes les communes du Sud et de l'Ouest de cette partie de la colonie des plantations de tout premier ordre dont les résultats actuels sont tres satisfaisants et ceux de demain pleins de promesses. C'est le Coffea arabica qu'on cultive partout, il se présente sur le marché en Café B (Bonifieur) et en Café H (Habitant); ces deux appellations sont dues à la facon dont on débarrasse le grain de sa parche. Au goût, l’un ne le cède en rien à l’autre, l'œil seul est plus flatté par le Café B qui est plus lisse, plus propre, mieux dépouillé de son enveloppe que le Café H(1). | On cultive aussi le Moka et le Bourbon, mais seulement par dilettantisme. Ces deux Cafés végètent du reste très bien chez nous et produisent abondamment. J’ai, au pavillon de la Guadeloupe, de nombreux échantillons de Moka que ne renierait pas le pays d’origine. L'on a prétendu à tort que la Guadeloupe poussait avec activité la culture du Café Liberia; on en plante à côté de l’'arabica, mais seulement comme porte-greffe; une culture (1) Le Café habitant est passé dans des pilons à bras d'homme, Une force motrice plus puissante intervient pour le Café bonifieur, ainsi appelé parce qu'il est préparé dans des établissements industriels dits Boniferies. Le producteur y apporte son Café en parche qui doit lui être rendu bonifié dans une proportion de 33 pour 100, 214 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. d'exploitation du Libéria ne pourrait que nuire à la bonne réputation du fin vert Guadeloupe. M. Thierry, à la Martinique, a obtenu des résultats très concluants en greffant l’arabica sur le Liberia; celui-ci a donné à l’arabica, sans lui faire perdre aucune de ses qualités, une rusticité qui lui permet de végéter dans des terrains qui, jusqu'ici, lui étaient absolument défavorables. C’est une découverte qui fait grandement honneur à M. Thierry et qui aura un très grand retentissement dans nos pays. Jusqu'en 1825, la culture du Café se faisait à Marie-Galante et à la Grande-Terre dans les quartiers dits des « Grands fonds », mais, aujourd'hui que la Canne à sucre y a pris sa place, il semble douteux qu’on puisse encore réussir, car le déboisement auquel a donné lieu la culture de la Canne a changé les conditions climatériques d’un façon trop sensible pour qu’on puisse songer à obtenir les résultats d'autrefois. Notre Café est connu sur les grands marchés de la métro- pole sous le nom de Bonifieur fin vert Guadeloupe, mais chez ie détaillant il est présenté au consommateur sous le nom de Café Martinique. La colonie sœur fait des efforts dignes de succès pour re- constituer ses caféières d'antan, maïs elle n’est pas encore en mesure de nous primer sur les marchés ; cela n'empêche pas qu'elle bénéficie et bénéficiera encore longtemps de l’excel- lence de notre denrée, tellement il est difficile de déraciner un préjugé. En 1894-95, j'ai introduit avec succès à la Guadeloupe le Café d’Abyssinie ; nous en possédons actuellement des plan- tations importantes. Ce Café a produit à dix-huit mois et il a été remarqué que plus les arbres sont ensoleillés et plus vigoureux ils sont. Deux de mes amis ont fait à la Grande-Terre de petites plantations de Café d’Abyssinie, cent pieds environ chacun ; ils ont bien réussi, et je possède, au pavillon de la Guadeloupe, un échantillon de la dernière récolte ; il est vrai de dire que le peu d'importance de ces cultures a permis de leur donner tous les soins désirables tant comme façons que comme fumures. La culture du Café et celle du Cacao étant de longue haleine, il faut des capitaux assez importants pour les entreprendre sur une grande échelle, car il faut pouvoir attendre pendant _ si 2 & : y 54 a LT RN 4 NOTES SUR L’AGRICULTURE A LA GUADELOUPE. 215 plusieurs années les résultats cherchés ; il n’est donc pas permis à tout le monde de s'y adonner, et le petit colon ne peut opérer que sur des surfaces assez restreintes. Le Domaine possède dans les montagnes de la Guadeloupe proprement dite des milliers d'hectares propres à la culture du Café et du Cacao ; l'Administration locale serait toute dis- posée à accorder des concessions importantes et gratuites à ceux qui en feraient la demande, ce serait un débouché avan- tageux pour les capitaux métropolitains sans emploi. Sous le patronage du D: Heckel, j'ai introduit à la Guade- loupe la culture du Kolatier; j'avais obtenu bon nombre d'arbres feuctifiant régulièrement deux fois par an, ce qui me permettait de mettre chaque année en distribution plus de mille plants, mais le cyclone est venu renverser tous ces arbres producteurs ; il faudra attendre pour de nouvelles récoltes que les jeunes arbres n'ayant pas souffert de la vio- lence du vent commencent à rapporter ; cette culture est très intéressante au point où en est l’emploi de la Kola, et nous savons que les Anglais l’étendent dans toutes leurs possessions de la Mer des Antilles. Je renouvelle à la Société d'Acclimatation mes vifs re- merciements pour l'honneur qu’elle m’a fait en me décer- nant une médaille à l’occasion de ces cultures de Kolatier. Je suis très fier de cette distinction (1). J'ai également introduit à la Guadeloupe plusieurs variétés de Bambous de Chine et du Japon, entre autres le Bambou noir qui est si recherché en Europe pour la confection des cannes, des parapluies, des petits meubles de jardin, etc. Je crois que la Guadeloupe pourra un jour songer à exporter ce Bambou. Les Bananes que j’apercçois sur le bureau me portent à vous dire que la Guadeloupe serait en très bonne situation d'ex- porter des quantités énormes de régimes de Bananes si des navires fruitiers venaient à fréquenter régulièrement le port de la Pointe-à-Pitre. (1) La médaille dont il s’agit — grande médaille hors classe à l'effigie d'Isidore Geoffroy Saint-Hilaire — a été décernée à M. Louis Guesde dans la séance du 12 février 1897. — Note du Secrétariat. 246 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. On pourrait en effet exploiter facilement cet immense fer à cheval appelé le Pelit cul de sac au fond duquel est construite la Pointe-à-Pitre. Quelques essais d'exportation de Bananes, portant chaque fois sur une centaine de régimes au plus, ont été tentés ces temps derniers, mais les conditions défavorables d’aménage- ment sur les paquebots ont entrainé des mécomptes non sans cependant laisser la conviction, et même la preuve, qu'il y avait beaucoup à faire dans cette voie; aussi les Chambres d'Agriculture de la Pointe-à-Pitre et de la Basse-Terre ont- elles émis le vœu que dans le nouveau cahier des charges de la Compagnie générale transatlantique il füt stipulé que des cales réfrigérantes fussent installées à bord des paquebots. J'ignore où en est actuellement la question, mais il est à souhaiter que l'État fasse introduire cette clause dans le contrat. Les épices telles que Poivre, Muscade, Girofle, Cannelle, etc., etc., donnent à la Guadeloupe des résultats de tout pre- mier ordre; j'ai, au Pavillon de la Guadeloupe, des échan- tillons qui ne manqueront pas d'attirer l'attention du Jury. EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. À SÉANCE GÉNÉRALE DU 27 AVRIL 1900. PRÉSIDENCE DE M. Le D' WEBER, MEMBRE DU CONSEIL. En ouvrant la séance, M. le Président annonce la grande perte que la Sociélé vient de faire en la personne de M. Al- phonse Milne-Edwards, membre de l'Institut, directeur du Museum d'histoire naturelle, décédé à Paris, le 21 avril, à l'âge de soixante-quatre ans. Ce savant éminent faisait partie de la Sociélé d’Acclhima- tation depuis 1869; il en avait été lauréat en 1870, enfin le Conseil de la Société le comptait parmi ses Membres depuis le 21 mars 1873. Maintes fois, il fut question de porter Al- phonse Milne-Edwards à la présidence de la Sociélé. Trop absorbé ailleurs par des travaux et des fonctions qu'il tenait à remplir consciencieusement, il se déroba aux suffrages de ses collègues qui le trouvèrent cependant toujours disposé à leur prêter le concours le plus utile et le plus dévoué. Tout récemment encore, il manifestait son intérêt pour nos études, encourageant par sa présence une forme nouvelle de notre activité sociale. C’est ainsi qu'en janvier 1899, Milne- Edwards voulut bien présider la conférence faite au siège de la Société par le D' Trouessart sur les Mammifères à accli- mater ou à domestiquer en France et dans les colonies fran- _çaises. On a pu lire dans le Bulletin (1899, page 169), le texte de l’allocution prononcée dans cette circonstance par le di- recteur du Museum, et l’on a vu en quels termes excellents il constatait le bon accord et l’étroite solidarité qui existent entre la Société d’Acciimatation et le Jardin des Plantes. Le souvenir d’Alphonse Milne-Edwards vivra dans la mé- moire de tous ceux qui onteu la bonne fortune de l’approcher et auxquels il a été donné d'apprécier, dans l'intimité, non seulement les qualités du savant, mais encore la valeur mo- rale de l'homme. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. 218 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. DÉcisioNs Du CONSEIL. Le Conseil a délégué pour représenter la Sociélé au Congrès international de Sylviculture qui doit se réunir à Paris du 4 au 7 juin 1900, MM. le baron Jules de Guerne, Secrétaire général; L. Mersey, Conservateur des Eaux et Forêts, Membre du Conseil: Émile Cacheux et Maurice de Vilmorin. Le Conseil a délégué d'autre part, pour représenter la Sociélé au Congrès ornithologique international qui doit se réunir à Paris du 26 au 30 juin : 1° tout le Bureau de la deuxième Section : MM. Oustalet, Remy Saint-Loup, le comte d'Orfeuille et Uginet; 2° MM. le baron Jules de Guerne, Se- crétaire général et Debreuil, Membre du Conseil; 3 enfin, parmi les Membres de la Société, plusieurs personnes spé- cialement qualifiées pour la circonstance, MM. J. de Clay- brooke, Cretté de Palluel et Xavier Raspail. PROCLAMATION DE NOUVEAUX MEMBRES. M. le Président proclame l’admission des Membres nou- veaux admis par le Conseil depuis la dernière séance : MM. PRÉSENTATEURS. BOUCHEREAUXx (A.), directeur technique de | Baron J. de Guerne. l’Aquarium à l'Exposition, 5, rue de 4 Ed. Perrier. la Manutention, Paris. Thornddike-Nourse. Baron J. de Guerne. Milne-Edwards. Oustalet. Foa (Édouard), explo rteur, 5, avenue des Champs-Élysées, Paris. DÉPOUILLEMENT DE LA CORRESPONDANCE. Cheptels, distribution de cocons et de graines, etc. — En l'absence de M. le Secrétaire des séances, M. le Secré- taire général procède au dépouillement de la correspondance. Il fait observer que celle-ci, très volumineuse, concerne ex- clusivement les distributions gratuites d'œufs de Salmonides, de cocons de Vers à soie, de graines et de plantes vivantes. v_” PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 219 M. de Guerne, quis’est efforcé de donner depuis un certain temps une très grande activité à ce service, constate avec satisfaction que les Membres de la Société apprécient beau- coup les avantages pratiques qui en résultent pour eux. Il exprile l'espoir que des comptes rendus des essais très va- riés, Lie dans des régions différentes, soient adressés par la suite à la Société par ses correspondants. Plusieurs s’y sont formellement engagés et ont promis en outre des envois de graines. — M. le Secrétaire général rend compte de la distribution d'œufs de Truite arc-en-ciel qui vient d'être faite. Vingt- deux envois ont été effectués et sont arrivés dans de bonnes conditions. Un compte rendu détaillé de cette opération sera donné dans la prochaine séance de la Section d’Aquiculture. COMMUNICATIONS ORALES. M. Ch. Rivière fait une communication sur le Mouton Touareg et la Chèvre d’Angora en Algérie. Celle-ci a été in- troduite par la Société d’Acclimatation il y a environ qua- rante ans et l’on peut constater aujourd’hui les résultats heureux de cette opération. A l'appui de sa communication, M. Rivière présente un certain nombre de peaux des Mam- mifères dont il s’agit. On pourra en voir d’autres dans la section algérienne de l'Exposition universelle. Diverses ex- plications sont demandées à M. Rivière, par MM. de Bonand, Loyer et de Guerne. — M. de Loverdo fait une communication sur l’Aviculture et le commerce des volailles en Angleterre. La France fournit surtout à l'Angleterre, les Poulets de choix, les Oies, les Dindons et les œufs. Les Poulets ordinaires viennent de plus en plus de Russie et d'Italie. Les Poulets de grain, poussins de quarante jours, viennent en majeure partie de la Belgique où leur production se développe sans cesse. M. de Loverdo ayant fait remarquer que l’organisation com- merciale française au point de vue de la vente des œufs laissait à désirer, M. Scelle lui demande de vouloir bien préciser ses critiques. M. de Loverdo lui répond que le défaut tient surtout au manque de classement, tous les œufs étant mélangés, aussi bien en ce qui concerne la date de la ponte que le volume. 220 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. € Cela donne à ces œufs un caractère d'infériorité vis-à-vis de ceux de provenance belge ou danoise, qui sont toujours clas- sés et sur la coquille desquels se trouvent timbrés la date de la ponte et le nom des expéditeurs. On a ainsi créé des marques qui font prime. Du reste, si quelque erreur se pro- duit, il existe un bureau auquel on peut réclamer et par l'intermédiaire duquel les clients obtiennent satisfaction, l'origine de la marchandise étant connue. L'exportation des volailles mortes françaises en Angleterre est relativement faible. M. Scelle considère que la cause de cet état de choses tient à la centralisation des marchandises à Paris où les droits d'octroi doivent toujours être préalablement payés ; cette situation s’améliorerait sensiblement si la Ville consen- tait à transformer en entrepôt un pavillon des Halles. — M. Rivière fait une communication sur l’Agave coc- cinea qui croit et se multiplie très facilement en Algérie. Il présente l'extrémité d'une hampe florale portant à la fois des graines parvenues à maturité et un groupe de bulbilles. Les uns et les autres sont offerts par lui à la Société pour être mis en distribution. L’A gate coccinea est encore peu commun ; mais il mérite d’être étudié au point de vue des fibres tex- tiles fort résistantes que l’on trouve dans les feuilles et qui pourraient donner lieu à une culture industrielle. M. Weber dit.que la provenance de l’4. coccinea n’est pas exactement connue. L’espece a été indiquée comme originaire du Mexique, mais elle ne semble pas y avoir été trouvée par les botanistes. Les 4. americana et Salmiana, qui sont extrémement répandus au Mexique, ne donnent jamais de bourgeons vivipares. Seul l'A. rigida de ce pays donne des bulbilles. M. Weber demande sil 4. coccinea est bien rustique. M. Rivière répond que tel est bien le cas sur le littoral algé- rien, mais non sur les hauts plateaux ni sur les versants désertiques de l'Algérie. Un certain nombre de Membres demandent immédiate- ment à participer à la distribution des bulbilles d'A. coc- cine. — M. Rivière présente ensuite quelques observations sur les Bananiers du Hamma en réponse à la note de M. le D' Trabut. Diverses observations sont faites à ce sujet. M. le Président demande des explications sur certains points in- PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 221 diqués par M. Rivière et sur lesquels la discussion scientifique pourra rester très longtemps ouverte. Quant aux résultats pratiques obtenus au Jardin d Essai du Hamma dans la cul- ture du Banañier, ils sont incontestables, et l’on ne peut que féliciter M. Rivière de la persévérance qu'il a mise à mul- tiplier et à faire connaître un fruit dès maintenant fort ap- précié des consommateurs qui commencent à le payer un prix supérieur aux bananes ordinaires. PROCLAMATION DES RÉSULTATS DU VOTE. M. le Président proclame les résultats du vote pour le re- nouvellement du Bureau et d’un tiers du Conseil. Le scrutin a été dépouillé pendant la séance par une Commission com- posée de MM. de Lamarche, Langlassé, Mailles et Rathelot. Le nombre des votants étant de 163, voici le chiffre des voix obtenus par chacun des candidats : Présent M LemMyÿrerde Milers: "ter -rrter.. 163 voix. Ace PresiO en S ÆNIMMIE CBULEAU- ee ele 163 EdmondiPerrienseee cree. 163 Comte de Pontbriand........, 162 CrRaverel-NValtele serrer 163 Secrétaire général : M. le baron Jules de Guerne..... 163 Secrétaires : MM. Paul Marchal (Znéerieur).......... 163 Elo Ja (CHSA)oomcsococesoadoc 163 Re MÉrClNOSCZnCES) PE NRC RE 163 Comte R. de Dalmas (Éfranger)... 163 DHESOR CR N GMA TRE EE NE ER ec ete nee 10108 Archiviste-bibliothécaïre : M. Loyer............... 103 Membres du Conseil : MM. Ed. Blanc......... ES 163 ReBlancharde re eee re 163 Milne-Edwards........,... 163 OK iEroncocpoocateose 162 Plusieurs Membres ont obtenu également quelques voix pour diverses fonctions. En conséquence sont proclamés élus : Président : M. Le Myre de Vilers. Vice-Présidents : MM. E. Bureau; E. Perrier; comte de Pont- briand et Raveret-Wattel. Secrétaire général : M. le baron Jules de Guerne. 222 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Secrétaires : MM. Marchal (Zntérieur); H. Hua (Conseil); F. Mérel (Séances); le comte R. de Dalmas (Zéranger). Trésorier : M. G. Magne. Archivisle-bibliothecaire : M. M. Loyer. Membres du Conseil : MM. Édouard Blanc; Raphaël Blanchard ; Milne-Edwards ; L. Olivier. M. le Président fait observer que le nom de M. Milne-Ed- wards figure sur la liste qui vient d'être lue. Son élection comme Membre du Conseil dans les conditions présentes est un dernier hommage rendu à la mémoire du défunt que la Sociélé pouvait espérer compter longtemps encore parmi ses plus éminents collaborateurs. M. le Président présente ensuite des félicitations de la Sociélé à M. Georges Magne, élu trésorier, et à M. Maurice Lover, élu bibliothécaire. Leur concours sera fort apprécié de tous et l’on peut être certain qu'ils rempliront à la satisfaction générale les fonctions dont ils ont bien voulu accepter la charge. Pour le Secrélaire des séances empêché, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. {re SECTION (MAMMIFÈRES). SÉANCE DU 2 AVRIL 1900. PRÉSIDENCE DE M. DECRO!IX, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. M. Crepin fait une communication sur les races de Chèvres qu'il élève à Paris dans son établissement de Val-Girard. M. Crepin remettra au Secrétariat, pour le Bulletin, les documents relatifs à ses études. M. le D' Barbeillion dit que le lait de Chèvre semble, d’après les aualyses faites, devoir convenir entre tous à l’allaitement des enfants, à défaut du lait de femme. Plusieurs Membres font remarquer l'intérêt que présente la Chèvre maltaise qui, d’après un certain nombre d'observations recueillies par diverses personnes, ne ronge pas les écorces et les pousses des arbres. M. Decroix parle de la castration des Vaches; cette opération a pour résultat de prolonger la lactation pendant plusieurs années. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 9293 M. le comte d’Esterno présente des photographies de la Foire Saint- Lazare, à Autun, et, à ce propos, ajoute quelques renseignements à ceux qu'il a donnés précédemment, concernant les paniques de Bœufs (Voir ci-dessus, pages 155 et 157). M. le Président constate que cette séance a été extrêmement inté- ressante. Il remercie tout particulièrement M. Crepin et croit que la première Section, et la Sociélé d'Acclimatalion tout entière doivent souhaiter qu’il persévère dans ses essais. Ceux-ci peuvent avoir des résultats de la plus haute importance; l'emploi rationnel du lait de Chèvre permettrait, en effet, de combattre utilement d’une part : la trop grande mortalité des enfants en bas âge, d’autre part, la tuberculose, maladie à laquelle la Chèvre semble se montrer toujours réfractaire. Le Secrétaire, CH. MAILLES. 2 SECTION (ORNITHOLOGIE. — AVICULTURE). SÉANCE DU 9 AVRIL 1900. PRÉSIDENCE DE M. J. DE GUERNE, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL. M. Oustalet, président, s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. Le procès-verbal de la dernière réunion est lu et adopte. Il est procédé au dépouillement de la correspondance qui comprend, entre autres, parmi les pièces imprimées, une Monographie des Com- battants anglais par M. Vlasto, Membre de la Socitté ; cet ouvrage est illustré de belles reproductions photographiques. À signaler égale- ment un journal italien d’ornithologie, Avicula, et un numéro du journal mexicain, la Vafuraleza, contenant le début d'un travail sur l’ornithologie locale. Lecture est donnée de lettres de MM. Defrance, d'Anvers et de Saint-Quentin, de Toulouse, sollicitant des renseignements sur divers Oiseaux de basse-cour- À l’occasion d’une demande concernant la possibilité de l'élevage de l’Autruche d’Afrique dans la République Argentine, Mme Coni, actuellement à Paris, communique une notice extraite d’un journal du pays et de laquelle il résulte qu'a Monte Grande, province de Buc- nos-Ayres, un Allemand a élevé pendant six années environ deux cents Autruches; il vendait les œufs et les plumes, mais les jeunes ne donnaient lieu à aucun trafic. Lecture est donnée d’une leltre de M. Rogeron répondant à une observation publiée par M. de Saint-Quentin dans le Bullelin et con- 924 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. cernant le plumage du Canard sauvage. La discussion porte sur le sens qu’il convient d’attribuer au mot « plumage ». M. le Président communique une lettre de M. Wuirion, concernant des Oiseaux frigorifiés venant de Russie et dans laquelle se trouve si- gnalée l'interdiction aux Halles de Paris d’une espèce de Perdrix assez semblable à celles de France et pouvant donner lieu à des confusions propres à favoriser l’exercice du braconnage. M. Scelle, mandataire aux Halles de Paris, et qui assiste à la séance, donne à ce sujet quelques explications. Trois espèces de Gal- : linacés sont en effet récemment arrivées aux Halles; les Oiseaux ont été saisis, puis rendus à leurs propriétaires ; ils étaient en trop pelit nombre pour faire l'objet d’une vente. On les désigne respectivement sous les noms vulgaires de Bartavelle de Chine, Perdreau de Mand- chourie et Perdreau de Russie. Une demande d'autorisation pour leur importation régulière a été déposée au Ministère de l'Agriculture. La discussion s'engage à ce sujet. Il serait à désirer qu'un certain nombre de spécimens en bon état fussent communiqués aux personnes compétentes pour obtenir la determination scientifique exacte des Oi- seaux dont il s'agit. M. Scelle promet de faire le nécessaire pour réa- liser ce desideratum. La Section émet le vœu que la question du gibier à plumes importé de l'Étranger à l'état frigorifié, soit soumise au prochain Congrès ornithologique international. M. le Président rappelle que la Societé prendra une part très aclive à ce Congrès, à l'occasion duquel trois questionnaires ont déjà élé rédigés par les soins de la Section. Il ajoute que, dans le courant de juin, quelque temps avant l'ouverture du Congrès, la Section d’'Orni- thologie sera convoquée à une séance supplémentaire au cours de laquelle seront examinées toutes les réponses au questionnaire. Le Secrétaire, Comte D'ORFEUILLE. 3 SECTION (AQUICULTURE). SÉANCE DU 30 AVRIL 1900. PRÉSIDENCE DE M. DEBREUIL, MEMBRE DU CONSEIL. MM. Edmond Perrier, président, et Boigeol, secrétaire, s cxcusent de ne pouvoir assister à la séance. M. Maire, inspecteur des Eaux et Forêts, présente les excuses de M. Mersey. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 925 Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté sans obser- vations. M. de Guerne annonce la mort de M. Alp. Milne-Edwards, directeur du Muséum d'Histoire naturelle et résume à grands traits sa carrière scientifique. La Societé d’Acclimatation s'associe au deuil du monde savant ; elle perd en Milne-Edwards un de ses Membres les plus dévoués et les plus anciens. Il faisait en effet partie de la Société depuis 1869. Toujours il accueillait ses collègues avec bienveillance. M. Maire rappelle qu'il y a très peu de temps encore il était allé consulter Milne-Edwards au sujet de l’acclimatation en France de l'Écrevisse de Russie (Asfacus leptodactylus). Il est procédé au dépouillement de la correspondance. M. Thorndike-Nourse offre le catalogue illustré de l’'Aquarium de New-York. La Sociélé à recu également le Bulletin de la Commission de Pisci- culture des États-Unis, formant un beau volume de 400 à 500 pages contenant de remarquables gravures représentant les différentes phases de la pêche des Moules d’eau douce dont les coquilles sont uti- lisées et fournissent une nacre de belle qualité. La correspondance comprend uu grand nombre de lettres relatives à la distribution d'œufs de Truites Arc-en-ciel, récemment faite par la Société. Vingt-deux personnes ont recu des œufs et partout les envois sont arrivés en bon état. Soixante mille œufs ont été expédiés dans le courant d'avril et ré- partis dans seize départements : Côte-d'Or, Doubs, Girondé, Jura, Isère, Loir-et-Cher, Loire, Loire-Inférieure, Marne, Haute-Marne, Nièvre, Oise, Orne, Pas-de-Calais, Saône-et-Loire, Seine. Un certain nombre d'Établissements publics et plusieurs Sociétés ont également pris part à la distribution, notamment la Station aqui- cole de Boulogne-sur-Mer, l'École d'Agriculture de Beaune, la Société de Pisciculture de Loir-et-Cher, la Société de Pisciculture du Sud- Ouest. En outre, un envoi d'œufs a été fait à Constantinople, où ils seront sans doute élevés dans les jardins d'Yldiz-Kiosk, résidence de S. H. Sultan. Comme en 1899, les œufs distribués ont pu être obtenus en quan- tité suffisante d'un producteur francais. C’est la seconde fois seule- ment que le fait se produit. Il est intéressant de constater que, sous ce rapport, la France peut actuellement suffire, en grande partie du moins, à ses besoins. Ce résultat est dû à la persévérance d’un pisCi- culteur plusieurs fois lauréat de la Société d’Acclimatation, M. de Mar- cillac, directeur de l’Établissement de Bessemont, près Villers-Cotte- rets, et dont l'Exposition universelle contribuera sans doute beaucoup à accroitre la notoriété. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1900. — 19 DST A UE a GR Grp EL: MSCE Là, 296 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. M. de Guerne donne, sur la demande qui lui en est faite, les noms et les adresses des destinataires auxquels des envois ont été adressés. Répondant à une question posée par M. Maire, M. Debreuil dit que la Truite des lacs meurt quand la température de l’eau atteint 17° à 18°, tandis que la Truite Arc-en-ciel résiste très bien à une tempéra- ture plus élevée et qui peut atteindre 23 ou 24°. De plus, contrairement à la Truite ordinaire, la Truite Arc-en-ciel supporte tres bien le transport à l’état vivant. Mais il ne semble pas en être de même du Poisson mort; la chair de la Truite ordinaire se conserve beaucoup mieux que celle de la Truite Arc-en-ciel; celle-ci arrive sur le marché en mauvais état, tandis que la Truite indigène peut se garder plus longtemps. M. Philipon écrit de Nice que la personne chargée de la piscicul- ture dans sa propriété trouve que la pâtée dont la composition est indiquée par M. Raveret-Wattel (poudre de viande Liebig et sang} réussit très bien pour ses Poissons. M. de Guerne ajoute quelques indications à celles qui ont déjà été fournies par lui dans la dernière séance sur la préparation et l'emploi du galuchat, à propos de la demande de renseignements adressée à la Section par M. Thorndike-Nourse. Lecture est donnée d'une communication envoyée de Madagascar par M. Lucien Bertrand sur les Poissons et les Crustacés d'eau douce alimentaires de l’Imérina. Une conversation générale s'engage sur la pêche et ses produits à l'Exposition universelle. Des renseignements nouveaux sont donnés sur l’Aquarium Guillaume dirigé par M. Bouchereaux, Membre de la Société. En dehors du Palais des pêches, forêts et cueillettes où sont grou- pés les objets les plus intéressants concernant la pêche et l’aquicul- ture, divers pavillons doivent être visités avec soin, ceux de la Norvège et de la Finlande entre autres. Dans la Russie d’Asie, au Trocadéro, se trouvent exposées des collections du Turkestan et du Caucase, pré- sentant un grand intérêt. À signaler également l'Exposition du Prince de Monaco importante surtout au point de vue scientifique. | Le Secrétaire-adjoint, BRUYÈRE. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 227 4e SECTION (ENTOMOLOGIE). SÉANCE DU 23 AVRIL 1900. PRÉSIDENCE DE M. CLÉMENT, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Président annonce la mort de M. Alphonse Milne-Edwards, di- recteur du Museum d'Histoire naturelle, décédé le 21 avril et dont les obsèques auront lieu le 25. M. le Président n’a pas à retracer aujour- d’'hui la carrière du défunt qui a rendu à la science et au pays de très grands services. Il tient seulement à rendre hommage à son caractère et à l’inépuisable bienveillance dont il a toujours fait preuve envers les travailleurs. Les entomologistes n’en étaient pas exceptés et M. Milne-Edwards a constamment mis à leur disposition, tant äu Museum qu'à l'École de pharmacie où il était également profes- seur, tous les matériaux d'études dont il pouvait disposer. Il avait acquis une grande notoriété dans l’Entomologie scientiñque par ses études sur les Crustacés. Mais iles applications de la science ne lui étaient pas indifférentes et il a certainement contribué comme président de la Commission des Missions scientifiques, à faire intro- duire en France par les voyageurs naturalistes des Insectes utiles ou intéressants. Tout récemment encore, M. Milne-Edwards favorisait comme directeur du Museum, la création dans cet établissement d’une galerie d’Entomologie appliquée, organisée par les soins de M. le pro- fesseur Bouvier. 11 est procédé au dépouillement de la correspondance. M. Charles Patin, consul général honoraire de Belgique en Colombie et qui s'intéresse tout particulièrement au développement de la sérici- culture dans les colonies, désirerait savoir s’il existe quelque moyen d'empêcher la dégénérescence du Bombyx mori dans les climats tro- picaux. Il demande également des renseignements sur l'Affacus aurota. Sur le premier point, M. de Guerne dit qu’il a soumis la question de M. Patin à plusieurs personnes compétentes dont la réponse n'est pas encore parvenue. Sur le second, M. Clément rappelle que la Société s’est occupée à plusieurs reprises de l’Affacus aurola, mais qu'aucun résultat pratique ne semble avoir été obtenu jusqu'ici dans l'élevage de ce séricigène. M. Le Myre de Vilers, président de la Société, communique une leitre du D' Harmand, ministre plénipotentiaire de France à Tokio et qui signala à la Sociélé, comme méritant une récompense, deux séri- : J ù* 228 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. ciculteurs japonais qui lui ont prêté un très utile concours pour en- voyer en Algérie des œufs du Ver à soie du Chêne destinés à d’im- portantes expériences. M. Ch. Rivière, directeur du Jardin d'Essai du Hamma, fait observer que l’élévage du Ver à soie du Chêne semble devoir être difficile en Algerie à cause de la rareté du Chêne dans ie pays. M. Pilastre adresse une certaine quantité de cocons de Zoghyrus pini récoltés aux environs de Château-Landon (Seine-et-Marne) et au sujet desquels il a déjà consulté la Societe. M. Clément présente des branches de Poirier couvertes de Kermès qui lui ont élé envoyées de Montereau. La destruction de ces Insectes se fait au moyen de badiseonnages de lait de chaux phéniqué. M. Clément présente ensuile des haricots de diverses espèces attaqués par des Bruches et qui proviennent du département de l'Isère. S'il s’agit de consommer ces haricots, un moyen de triage tres facile peut être appliqué : il consiste à les immerger. Les grains les plus attaqués qui ne contiennent presque plus de matière nutritive, viennent flotter à la surface et peuvent être aisément éliminés. Quand aux haricols destinés aux semis, ils doivent être chauffés. Une température relativement élevée détruit les Insectes sans porter atteinte à la vitalilé des graines. M. Clément signale à ce sujet un article de M. Schribaux récemment paru dans la Revue horticole et aui a pour titre « Action de la chaleur sur les Insectes ». M. le Secrétaire général demande si quelque Membre de la Section peut fournir des reuseignements sur le Con-cuoc de l’Indo-Chine. C’est une forte chenille qui peut atteindre la grosseur du pouce d’ur homme et dont on retire la glande séricigène, laquelle fournit un crin ana- logue au crin de Florence; on fabrique notamment avec cette sorte de fil des cordes d'instruments de musique. M. le Président donne quelques renseignements complémentaires sur le Congrès d'Apiculture dont il a été question dans la dernière séance. Les communications semblent devoir y être assez nombreuses. Une discussion générale s'engage au sujet des excursions spécia- lement consacrées à l'Enlomologie, et qui pourront être faites à l'Exposition universelle. ME Coni signale comme intéressantes à ce point de vue les Expositions de l'Inde anglaise et du Pérou. M. Clément dit qu’un groupe lyonnais a organisé une magnanerie que l’on pourra voir fonctionner dans quelque temps. Du reste, les installations sont encore si peu avancées qu'il est difficile de se rendre compte de l’ensemble de l'Exposition au point de vue spécial qui intéresse la Section. M. le Secrétaire général propose de s’en rapporter à M. Clément qui fait partie du Comité d'organisation de la classe 42 (septième groupe). Cette classe comprend, d’après le libellé officiel même, les objets suivants : Collections systématiques d’Insectes utiles ct d'Insectes nuisibles : PROCÈS-VERBAUX DES SEANCES DE LA SOCIÉTÉ. 229 Abeilles, Vers à soie, Bombyx divers, Cochenilles. — Collections systé- matiques de végétaux parasitaires des plantes et des animaux. — Matériel de l’élévage et de la conservation des Abeilles et des Vers à soie; leurs produits, miels, cires, cocons. — Matériel et procédés de la destruction des Cryptogames et des Insectes nuisibles. Suivant les avis que voudra bien donner M. le Président, une cir- culaire sera envoyée en temps utile par les soins du secrétariat afin d'organiser, s’il y a lieu, une excursion entomologique à l'Exposition. Pour les Secrétaires empêches, JULES DE GUERNE, Secrétaire général. DS ECIDION (BOTANIQUE): SÉANCE DU 1‘ MAI 1900. PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEBER, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Président donne lecture d’une lettre qui lui a été adressée par M. Maurice de Vilmorin remerciant la Section des félicitations qu’elle lui a envoyées à l’occasion de son élection comme Membre de la Société nationale d'Agriculture; il invite les Membres de la Sociélé à venir visiter son domaine des Barres près Nogent-sur-Vernisson (Loiret), où se trouvent des collections de plantes vivantes et présentant un certain intérêt, spécialement une belle série d’arbrisseaux. M. Philippe de Vilmorin envoie un exemplaire des discours pro- noncés sur la tombe de son père, Henry de Vilmorin, récemment décédé. M. de la Chesnaye, à la Corniche (Marseille), donne quelques ren- seignements au sujet des Lianes du Gran Chaco dont les graines lui ont été envoyées par la Socrété et qui semblent devoir réussir à Marseille. M. Charles Mottaz annonce l'envoi de Genève d’un certain nombre de plants de Nepeta Meyeri et de graines de Xo/rœuteria paniculata ; les fleurs de ces deux plantes sont très recherchées des Abeilles. M. le Directeur du Jardin botanique de Calcutta annonce l'envoi des graines de 215 espèces de plantes de la région du Sikkim et du Katchin dont la plupart pourront être cultivées avec succès dans le midi de la France. M. W. Trealease, directeur du Jardin botanique de Saint-Louis (Missouri), annonce à la Société qu'il s’occupe en ce moment de l'étude 230 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. d’une espèce de Yucca, originaire du Mexique et qui n’a pas encore été décrit. 11 offre à la Sociéfé de lui faire parvenir des graines de cette plante. M. Harmand, ministre plénipotentiaire de France à Tokio, écrit à M. Le Myre de Vilers, président de la Société, pour lui offrir d'être.le correspondant bénévole de la Société d’Acclimatation dans le pays qu'il habite et l’assure de tout son concours. Il donne quelques renseigne- ments sur l’Aralia cordata, espèce assez commune au Japon où elle est désignée sous le nom d’'Oudo et dont les jeunes pousses sont comes- tibles comme les asperges. Il fait connaître qu'il a envoyé à M. Heckel, directeur du Jardin botanique de Marseilie, des graines de Badiane japonaise (Zlicium uliginosum) et d’une espèce d’'Igname dont les tubercules sont arrondis. M. le Secrétaire général entretient la Section des Vignes japonaises cultivées par M. Degron, à Crespières (Seine-et-Oise). Celui-ci invite les Membres de la Sociéfé à venir visiter ces cultures de Vignes japonaises qu’il a rapportées lui-même de l’Extrême-Orient et dont il s'occupe depuis plus de trente ans. Celte excursion peurrait avoir lieu dans la seconde quinzaine de juin, on profiterait de l'occasion pour visiter en même temps, à Versailles, quelques importants et intéres- sants établissements d’horticulture. M. Magne invite les Membres de la Seclion à venir visiter les cultures de plantes alpines dont il s'occupe tout spécialement dans sa propriété de Boulogne-sur-Seine. M. le Président remercie M. Magne de son offre gracieuse et il est décidé que l'excursion dont il s’agit aura lieu le 12 mai courant. On visitera également les serres de la ville de Paris qui sont peu éloignées de la propriété de M. Magne et où l’on pourra voir la floraison des Azalées. Au nom de Me Coni {de la Perrière), M. le Secrétaire géneral offre un ouvrage considérable ayant pour titre « Segundo censo de la Republica Argentina » et qui contient, entre autres documents, des détails très complets sur la flore de la République Argentine. M. Paul Chappellier présente quelques bulbes d’un Ail cultivé chez lui depuis longtemps. Celte variété est très fertile, les bulbes sont volumineuses et ont une saveur plus douce et moins âcre que celles de l’Ail ordinaire. M. Charles Rivière, directeur du Jardin d'essai du Hamma, entre- tient la Section des essais qu'il a tentés pour extraire du camphre des feuilles du Campbrier. D’après les expériences d’Aimé Girard, ces feuilles donnent à peine un rendement de un pour mille. Dans ces conditions, M. Rivière estime que l'opération ne saurait présenter aucun intérêt pratique. M. Rivière donne ensuite quelques détails sur l'Arbre à suif du Japon (Crofon sebiferum). Cet arbre atteint de très grandes proportions. Son bois renferme un suc très vénéneux qui persiste même lorsque le PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 231 bois est completement sec. M. Rivière cile à ce propos des accidents survenus à des ouvriers qui avaient employé le bois, depuis longtemps abattu, pour des travaux de menuiserie et qui ont été sérieusement malades. Les graines, de couleur blanchâtre, sont recouvertes d’une sorte d’enduit gras; on sépare cet enduit de la graiie en faisant bouillir celle-ci dans de l’eau; la partie grasse surnage et peut être facilement recueillie. M. Rivière estime que ce produit n’a pas une valeur pratique sérieuse et qu’on ne doit accepter qu'avec beaucoup de réserves les conseils donnés par certaines personnes qui recom- mandent de propager cet arbre dans les colonies. M. le Secrétaire général présente des graines provenant d’une des régions les plus arides de l’Australie. Ces graines n’ont pu être déter- minées jusqu'à présent. Lecture est donnée d’une note sur un tubercule comestible prove- nant d’une plante de la famille des Apocynées, Parsonsia Paddisoni de la Nouvelle-Galles du Sud. Ce mémoire sera inséré au Bulletin. M. Charles Rivière donne quelques renseignements sur une espèce de Bambou originaire de l'Himalaya et dont la culture peut être très avantageuse, le Bambusa violascens. Les turions de cette espèce sont violacés. Le chaume est très gros, mais cependant très léger et d'une grande solidité. Cette espèce mérite d'être propagée. Le PBambusa violascens présente cette particularité que son accroissement a lieu surtout pendant le jour et très peu pendant la nuit, tandis que, chez la plupart des autres Bambous et particulièrement, le B. #mitis, le phénomène contraire se produit. L’accroissement des pousses de ce dernier peut atteindre 57 centimètres en vingt-quatre heures. Il ne dépasse pas 30 centimètres, pendant la même période, chez le PB. diolascens. À propos d’un article de M.:Bourlier sur la culture des Acacias en Algérie pour la production du tan, M. Charles Rivière se demande s’il y a réellement utilité à faire des plantations d’Acacias et d'Eucalyptus pour cette production lorsqu'on n’exploite pas même dans ce but les arbres de ces espèces qui eroissent spontanément dans le pays. M. Rivière estime du reste que l’Eucalyptus est un arbre dont l’uti- lité lui paraît avoir été exagérée. Son bois est de qualité très médiocre. Les chemins de fer qui l’avaient employé pour différents travaux ont renoncé à l'utiliser. Il en a été de même de l'Administration des lignes télégraphiques qui s’en était servie pour les poteaux et a dû renoncer à l’employer à cet usage. Le bois manque de solidilé et se gondole très facilement. L’Eucalypius globulus est, suivant M. Rivière, celle de toutes les espèces du genre dont le bois est le plus défectueux. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. 232 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 6° SECTION (COLONISATION). SÉANCE DU 2 AVRIL 1900. PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEBER, MEMBRE DU CONSEIL. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Ministre des Colonies envoie des invitalions pour l'ouverture de l'Exposition des cafés des Colonies qui doit avoir lieu incessam- ment à l'Office colonial. Cette Exposition, bien qu’elle soit la pre- mière de ce genre, sera cependant assez complète. M. Fron dit que le Jardin colonial y a largement contribué pour la partie agricole et engage ses collègues à la visiter. Lecture est donnée d’une lettre de M. Godefroy-Lebeuf, regrettant de ne pouvoir assister à la séance et venir applaudir au récit des voyages de M. Eugène Poisson qui doit être fait par le père de celui- ci, assistant au Muséum d'Histoire naturelle. Les études poursuivies par M. Eugène Poisson au cours de ses explorations seront très profitables aux agriculteurs coloniaux, particulièrement à ceux qui s'occupent des plantes à caoutchouc. M. Poisson père fait alors le récit des voyages de son fils pour rechercher les plantes à caoutchouc de l'Amérique du Sud. Il présente à l’appui de sa communication une série d’ustensiles et d'échantillons qui permettent de se rendre un compte exact de la manière dont opèrent les indigènes pour récolter le caoutchouc ; les formes sous lesquelles ce produit arrive sur les marchés sont très variées. M. le Président remercie M. Poisson de son intéressante causerie et le prie de transmettre à son fils, dès son arrivée en Europe, les félicitations de la Société pour le zèle dont il a fait preuve dans l'étude de la question si importante des plantes à caoutchouc. L'un des Secrétaires, H. BOCKHER. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. SUR LA SIGNIFICATION VÉRITABLE DU MOT : PLUMAGE. Dans son rapport sur les travaux des Membres de la Société d’Accli- matation au Congrès des Sociétés savantes réuni à Toulouse en 1899, M. de Saint-Quentin apprécie mon mémoire sur le plumage du Canard sauvage d'une facon particulièrement aimable et bienveillante, me faisant remarquer seulement que le mot plumage dont je me sers dans le titre ne répond peut-être pas complètement à l’idée que je veux exprimer. Plumage équivaudrait, dans son acception propre, à colora- tion de la robe de l'Oïseau, et au lieu de particularités dans le plumage du Canard sauvage, j'aurais dû mettre « quelque chose comme : Singula- rités dans l’état des plumes du Canard selon qu’il vole ou qu'il repose, ou bien encore : Éfat physiologique du plumage du Canard sauvage dans le repos et dans le vol ».. Et comme exemple que plumage équivaut seule- ment à coloration de la robe, à disposition des teintes, M. de Saint- Quentin cite la fable de La Fontaine : Le Renard et le Corbeau : SLAIE . si votre ramage Se rapporte à votre plumage et celle de Florian où Junon dit au Paon: Je t'enlèverai ton plumage. Pour moi, il me semble, au contraire, que plumage se rapporte à l'en- semble du vêtement de l'Oiseau, c'est-à-dire à sa robe et à la colora- tion de cette robe, mais plus encore à la robe; et si j'avais voulu dé- signer les particularités des couleurs de la livrée du Canard sauvage, j'aurais craint de n'être pas compris en me bornant au mot plumage; j'aurais pu même négliger plumage comme inutile, en parlant seule- ment des couleurs de l’Oiseau. En effet, plumage équivalant à robe, à vêtement, la couleur n'est, comme la coupe plus ou moins élégante du vêtement, qu’une de ses qualités, mais non l’habit lui-même, et c’est bien ainsi qu'il faut inter- préter le langage de Junon. En disant au Paon qu’elle lui enlèverait son plumage, elle ne voulait pas dire qu'elle décolorerait ses plumes, mais bien qu’elle le dépouillerait de son superbe x/mage tout entier, de sa belle queue, de son opulent manteau, de ses aigreltes, etc..., car il y a des Paons blancs qui sont encore de fort beaux Oiseaux. De même du Corbeau; plumage est pris aussi pour l’ensemble de son cosiume un peu lourd, un peu suranné de forme, et non pour sa seule couleur; et la preuve, c’est que jamais le Renard n’eût fait ce compli- ment de mauvais goût au Merle par exemple, également noir, beau- 234 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. coup plus noir; je pourrais dire que le Corbeau, en le regardant de près, laisse voir sur sa robe de jolis reflets d'un bleu irisé, tandis que celle du Merle est d’un noir mat privé de reflets. Quant au fait en lui-même, je me permettrai de ne pas y croire; c'est une simple gas- connade du Renard qui s’est vanté d’un succès qu’il n’a jamais eu, et sans doute pour se venger de s'être trompé d’adresse vis-à-vis d’un Oiseau aussi fin, aussi défiant que le Corbeau. GABRIEL ROGERON. >< TENTATIVES D'ÉLEVAGE DE L'AUTRUCHE D'AFRIQUE DANS LA RÉPUBLIQUE ARGENTINE. Ayant lu dans le Bulletin de la Société d'Acclimatation qu'une per- sonne désire savoir si les Autruches d'Afrique se reproduisaient dans la République Argentine, je crois pouvoir lui répondre par le fait suivant: A Monie-Grande, province de Buenos-Ayres, à côté de notre pro- priété, un Allemand a élevé pendant six ans deux cents Autruches d'Afrique dont il vendait les œufs er les plumes. Jamais il n’a pu obtenir de poussins : les mâles ne couvaient pas, et avec les cou- veuses, il a obtenu une fois un poussin mal venu, boiteux, qui a vécu quinze jours. Il s'est ruiné à cet élevage. Peut-être, dans le Nord dela République, la chaleur étant plus forte, le résultat serait-il meilleur. G. Conr (DE LAPERRIÈRE). >< UNE POULE À ÉPERONS. J'ai eu l’occasion de faire une observation qui pourrait offrir quelque intérêt pour ceux de nos confrères qui s'occupent d’aviculture et d’or- nithologie. C’est ce qui m'engage à la publier ici. Je me mets à la disposition des Membres de la Société d’Acclimatation qui désireraient de plus amples renseignements sur le sujet. J'ai remarqué chez un paysan de la commune où je passe l’élé, une Poule blanche de la race ordinaire qui avait des éperons aussi longs et aussi acérés que ceux d’un Coq. Cette Poule n'était ni hors d'âge, ni atteinte d’hermaphrodisme partiel ou complet; car, sauf le détail con- cernant les éperons, elle ne différait en rien des autres Poules; et, au moment où je l'ai observée l’été dernier, elle conduisait, après avoir pondu et couvé, une quinzaine de poussins. A. DE SAINT-QUENTIN. 235 EXTRAITS ET ANALYSES. LES ACRIDIENS EN ALGÉRIE, MOYENS DE DÉFENSE À LEUR OPPOSER, Par C. Rivière et H. LEca. L'Afrique du Nord est envahie, par périodes plus ou moins régu- lières, par deux espèces d’Acridiens, le Criquet pélerin et le Stauronote marocain qui pendant plusieurs années successives, causent de grands dommages aux cultures et à la végélation spontanée. Pendant longtemps, on ne reconnaissait qu’une seule espèce de Sauterelles, les Criquets pelerins qui envahissent l'Algérie en l’a- bordant par sa frontière saharienne. Mais, à côté de cette espèce erra- igue, on en distingue une autre, celle-là autochtone, le Séauronote marocain qui, d'après M. Künckel dà’Ierculais, vit et se multiplie sur les Hauts-Plateaux et dont les hordes serrées débordent certaines années dans la région tellienne. Lorsque nos postes de l’extrême-sud annoncent, en novembre et décembre, la présence des Sauterclles dans les régions reculées du Sahara, lorsque les caravanes apportent la nouvelle que des vols se montrent dans le Touat et le Gourara, il faut s’attendre à une in- vasion de Criquets pèlerins. Pendant l'hiver, à moins que la température ne soit absolument clémente, c’est-à-dire jusqu'au mois de mars, ces vols ne franchissent pas le Grand Atlas, limite sud des Hauts-Plateaux : mais bientôt ils s'engagent dans les défilés, traversent les cols pour envahir progressivement les Hauts-Plateaux et atteindre enfin, en avril-mai, le littoral. Telle est, à grands traits, la marche de ces grands migrateurs : les Criquets pèlerins. Tout autres sont les agissements du Sfauronote marocain : c’est en juin et surtout en juillet et août que leurs vols errent sur les Hauts- Plateaux : ce n’est qu'accidentellement qu’ils remontent sur le versant méridional du Grand Allas, mais quelquefois, à des intervalles rela- tivement rares heureusement, ils font une irruption momentanée sur le littoral. Les Sfauronotes peuvent être considérés comme de peñiés migrateurs. Naguère, ainsi qu’il est dit plus haut, on n’admettait en Algérie qu'une seule espèce de Sauterelles, le Djerah-el-Arbi, le Criquet pè- lerin qui venait du Sahara, y faisait souche, mais ne tardait pas, dans les régions plus septentrionales, à dégénérer : au dire des indigènes, il perdait de sa taille et de sa fécondité. La grappe d'œufs déposée par chaque femelle contenait un plus petit nombre de germes, mais ces œufs pouvaient supporter les rigueurs de l'hiver. Ce Djerad-el-Arbi 236 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. dégénéré avait reçu le nom de Djerad-el- A dami, de ce fait que les œufs, à la différence de ceux du Djerad-el-Arbi, mettaient neuf mois à éclore. De toute facon, on admettait que les femelles du Djerad-el- Arbi et du Djerad-el-Adami n'effecluaient qu’une ponte et mouraient ensuite. Une étude plus approfondie de la question fit reconnaître la fausseté de ces théories par trop transformistes. On parvint à établir que le Djerad-el-Arbi ne dégénérait pas, ne perdait jamais sa fécon- dité et que ses œufs ne passaient jamais l'hiver avant d’éclore. On dut reconnaître en outre que le Djerad-el-Adami était une espèce diffé- rente : le Séauronote marocain, dont les pontes peuvent sans s’aïtérer supporter les rigueurs de l'hiver des Hauts-Plateaux et éclore au printemps. Les Criquels pèlerins, comme les Sfauronotes marocains, s’accouplent et effectuent, non pas une ponte, mais plusieurs. Les Djerad-el-Arbi ont normalement leurs pontes échelonnées du mois de mars au mois de juin du Sahara à la mer, déposant leurs œufs aussi bien dans le sable du désert, dans les lits des oueds et les terres légères des Hauts- Plateaux, que dans les lits des rivières, les terres labourées ou les dunes du littoral. Les Djerad-el-Adami affectionnent au contraire pour pondre les terrains secs et arides, les côtes rocheuses exposées géné- ralement au Levant et au Midi. Chaque femelle de Criquet pèlerin confiait au sol, disait-on, une grappe unique ne contenant jamais plus de 90 œufs. Elle peut en réalité, tous les douze, quinze ou dix-huit jours, lui confier une série de grappes contenant de 50 à 80 œufs, en moyenne 10, c'est-à-dire normalement pondre 500 à 900 œufs et même davantage. Chaque femelle de Stauronote, affirmait-on, déposait en terre une petite masse ovigère, contenant une trentaine d’œufs : elle en pond réellement toutes les semaines un cerlain nombre contenant chacune de 25 à 30 œufs : normalement elle produit 200 œufs. Ainsi s'explique l'extraordinaire pullulation de ces parasites des végétaux, Caractères des deux espèces. — Le Criquet pèlerin, Acridium peregri- nuin Olivier, ou Schistocerca peregrina Olivier, est un Orthoptère de grande taille, mesurant de 7 à 8 centimètres de longueur, les ailes repliées, et ayant 11 à 12 centimètres d'envergure, les ailes étendues ; le mâle est plus petit que la femelle. Parvenu à l'âge où il est suscep- tible de se reproduire, il se fait remarquer par sa belle teinte jaune qui constitue le fond de sa coloration; chez le mâle, cette teinte est d'un jaune citron très vif ; chez les femelles elle est moins vive et le des- sous du thorax ainsi que l’abdomen prennent une teinte grisâtre ar- doisée. Dans les deux sexes, les ailes supérieures sont parsemées de bandes et de taches noires disposées plus ou moins régulièrement : les ailes supérieures sont jaunes, d’une coloration plus intense à la base qu’au bord. Particularité à noter : le prothorax porte à sa région EXTRAITS ET ANALYSES. 237 sternale une pointe mousse caractéristique. Les mâles sont silencieux et ne peuvent produire aucune stridulation. La femelle a la faculté d’allonger son abdomen de 13 centimètres et de le transformer en un instrument rigide qui peut pénétrer dans le sol à la façon d’un plan- toir. La pénétration du sol est facilitée par le jeu des pièces solides qui terminent l’abdomen et qui maintiennent les parcelles de terre au moment de la ponte. Le trou foré, la femelle sécrète une matière qui asglutine les parcelles de terre le long de la paroi et pond en même temps qu'elle rétracte son abdomen : en fin de compte, elle dépose au fond du trou de ponte, qui a une profondeur de 6 à 8 centimètres, une grappe d'œufs disposés en épi irrégulier de 3 à 3 cent. 1/2 de lon- gueur ; elle achève de le remplir avec la matière agglutinante qui forme alors un bouchon blanc spumeux, d'une extrême légèreté. Les œufs, d'abord d’un beau jaune d'or, deviennent bientôt gris rosé : chaque épi en compte de 50 à 80 et même 85. Le Stauronote marocain, Séauronotus marocanus Thunberg, est un Orthoptère de taille moyenne mesurant 3 cent. 1/2 à 4 cent. de lon- sueur, les ailes repliées et ayant 6 à 7 cent. d'envergure, les ailes étendues. Il est d’une teinte générale bistre relevée de jaune, la tête et le thorax sont ornés de bandes noires qui se détachent sur le fond jaune et constituent des dessins réguliers cruciformes (croix de Saint- André) : particularité caractéristique, les tibias des pattes postérieures sont d’une teinte rose carminé. La femelle ne diffère du mâle que par sa taille plus ou moins grande. Les aïles supérieures, d’un ton généralement bistre, sont parsemées de taches brunes disposées plus ou moins régulièrement. Le prothorax n'a pas de pointe sternale. A l'encontre des Criquets pèlerins, les mâles sont fort bruyants et font entendre jour et nuit de vives stridulations. La femelle, usant du même procédé que la femelle du, Criquet pélerin pour creuser son trou de ponte, en consolide les parois en agglutinant les parcelles de terre à l’aide d’une matière offrant une certaine consistance ; elle dépose au fond de ce trou, qui ne mesure que 2? cent. 1/2 à 3 cent. de profon- deur, une grappe d'œufs disposés en couches obliques régulières ayant 1 cent. 1/2 à 2 cent. de longueur : elle achève de remplir le trou de ponte avec une petite quantité de matière spumeuse et l’obture avec un couvercle merveilleusement adapté constitué comme la paroi. En résumé, le Stauronote construit une coque ovigère résistante. Les œufs d’abord blancs deviennent ensuite gris jaunâtre : chaque coque en contient de 25 à 30, quelquefois jusqu'à 35. ‘Les jeunes Criquets pélerins et les jeunes Stauronotes sont bien dif férents à toutes les phases de leur existence. Les Criquets pèlerins en naissant sont blanc verdâtre, puis bruns, puis noirs avec des dessins roses, noirs avec des dessins roses et jaunes. Pendant leur accroissement, ils ont subi après la mue ini- tiale quatre autres mues, toujours en se pendant par les pattes posté- 238 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. rieures. Arrivés au terme de leur accroissement, ils subissent une cin- quième mue : ils sont alors d’une teinte genéralement rose nuancée par places de bleuâtre avec les ailes jaunâtres d’abord recroquevillées, puis étendues l'une contre l'autre. L’Insecte parfait est alors constitué, il est du plus beau rose, aux ailes supérieures hyalines tachetées de noir ; au bout de quelques jours, cette teinte rose se fonce et passe au carmin, peu à peu la teinte s’assombrit et passe au rouge brique : la coloration générale devient terre de Sienne et enfin le pigment jaune apparaît peu à peu pour se substituer aux autres. Le Stauronote marocain en naissant a une teinte généralement bistrée sur laquelle se détachent des taches plus foncées qui bru- nissent peu à peu : peu à peu des taches noires et jaunes s’accusent ; après les premières mues, il prend une teinte brique rougeñtre très chaude sur laquelle se détachent, vers la tête et le thorax, les macu- lations jaunes et noires cruciformes qu'on retrouve dans l’Insecte ailé. Pour arriver à l’état adulte, il subit également cinq mues en se pen- dant par les pattes postérieures. Les changements de coloration des pigments à chaque phase de san existence sont manifestes comme chez les Criquets pèlerins, mais moins tranchés. Nous avons vu que les Criquets pèlerins ne se montraient norma- lement sur le littoral qu'en avril-mai. En 1896, dans l’Oranie, ils appa- rurent cependant en hiver, indépendamment de l'invasion normale du printemps qui suivit; on les vit s’accoupler et pondre en janvier et février. L’incubation fut de durée variable : en raison de la saison hi- vernale, elle se prolongea jusqu'à soixante-dix jours. Au printemps et en été elle est plus courte et selon les saisons dure deux, trois et même six semaines. Ce n’esl que quarante-cinq jours après l’éclosion que les Criquets prennent leurs ailes. Dans les temps les plus rapprochés de nous, les invasions de Saute- relles en Algérie eurent lieu en 1813, 1814, 1815, 1844, 1815, 1846, 1854, 1865, 1866, 1874, 1877 et de 1888-1896 sur divers points de la colonie. Moyens naturels de destruction. — La nature intervient dans une cer- taine mesure pour arrêter la multiplication des Acridiens. Si certains Oiseaux comme les Alouettes et les Étourneaux jouent un rôle im- portant comme indicateurs des lieux de ponte et comme destructeurs des œufs, les derniers mêmes, comme destructeurs, dans certains cas, des Sauterelles ailées, leur intervention est inefficace lors des grandes invasions. Il existe en outre des Insectes parasites qui interviennent ég&lement fort heureusement pour diminuer le nombre des envahis- seurs ; mais il faut qu'ils aient le lemps de multiplier pour pouvoir faire œuvre ulile : ce n’est donc que quand la période d’invasion se prolonge, que l'on s’apercoit de leur intervention. De ces parasites, les uns s’attaquent aux œufs, les autres aux Acridiens adultes. Parmi les premiers, on compte des Diptères et des Coléoptères à larves oophages. [724 EXTRAITS ET ANALYSES. 239 Parmi les Diptères, il faut citer certains Bombylides du genre Anthraz (Anthrax fenestrata Fallen) certaines Muscides du genre 4n- thomya : Anthomya cana Macquart, dont les larves dévorent les œufs des Stauronotes marocains : ce sont encore des Muscides du genre Idia (Idia lunata Fabricius, ou /asciata Meigen) qui, capables de fouir le sol, vont déposer leurs œufs sur les œufs mêmes des Criquets pèle- rins : ces Insectes parasites ont rendu des services signalés lors des invasions de 1892 et 1893. Leurs larves, véritables asticots, ont fait disparaître les pontes de ces Acridiens sur des milliers d'hectares dans les terres fortes et non dans les sables. Parmi les Coléoptères dont les larves habitent les coques ovigères du Stauronote marocain et sont assez nombreuses pour rendre quelques. services, nous citerons dans le groupe des Clérides, le Zhrichodes am- nios Fabricius, et dans la famille des Cantharidides, le Mylabris Schreï- bersi Reiche. La grande famille des Muscides parmi les Diptères, four- nit encore son contingent de destructeurs à larves acridophages : ce sont les Sarcophaga qui déciment les Acridiens, notamment Sarcophaga elathrata Meigen, les Stauronotes marocains, et Sarcophaga (Agria) affinis Fallen, les Criquets pèlerins (1};. (A suivre.) (2) >< EMPLOI DE L'ALCOOL POUR L'ÉCLAIRAGE AU CONGO. — UTILISATION DU DÉCHET DES PLANTATIONS. Ayant souffert, durant près d’un quart de siecle, des inconvénients du manque d’un bon éclairage pendant les longues nuits des tro- piques, je me suis occupé de résoudre la question pour des pays où la difficulté des communications ne permet guère d'importer le pétrole dans des conditions favorables, comme c’est le cas pour le Congo. Le: seul système qui puisse fournir une bonne lumière est l'emploi de l'alcool par incandescence. J'en ai fait usage en Colombie, dans des lampes Verstraten perfectionnées, avec des manchons, importés, pressés en ballots, dans des boîtes soudées, et dont l’incinération se fait tres facilement sur place. La fabrication de l'alcool de cellulose est d’autant plus pratique (1) Consulter à ce sujet les publications de M. Künckel d’Herculais, notam- ment les Comptes rendus des Séances de l’Académie des Sciences, novembre 4899, avril, mai, juin 1894, ainsi que l’ouvrage intitulé : Zvasion des Acridiens, vulgo Sauterelles en Algérie, t. I, Alger, 1893, pl. 1, fig. 1 à 23 et pl. J, fig. 1 à 30. (2) Extrait du Manuel pratique de l'Agriculteur algérien par Ch. Rivière, Directeur du Jardin d'Essai du Hamma et H. Lecq, Inspecteur de l’Agricul- ture en Algérie, 4 vol. grand in-Se, de xv-11#4 pag. Paris 1900. — Challamel, éditeur. 240. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. dans les pays chauds que les matières premières convenables s’v trou- vent partout sans présenter de valeur primordiale. Cet alcool n’est pas potable, il ne présentera donc pas l'inconvénient qu'offrirait la distil- lation des alcools bon goût, lesquels peuvent servir à préparer des boissons. Eu outre, il y a, dans la plupart des cultures tropicales, des déchets complètement perdus pour le planteur; ces déchets peuvent, à très peu de frais, produire des alcools utilisables pour l'éclairage et éventuelle- ment pour alimenter les foyers ou cuisinières dans les villes des tro- piques où le prix du combustible est élevé. Les déchets des plantations d’Agaves, de Cannes à sucre, de Ramie, de Bananiers, de Cacaoyers, et surtout de Caféiers, fournissent des alcools appropriés à l'éclairage par incandescence. Le résidu du dépulpage du café donne de 9 à 10 °/ d’alcoo!l à 20 degrés Cartier (le jus de la Canne à sucre ordinaire re donne que 11 ©), d'alcool rectifiable) dans l’alambic primitif; par la redistillation dans le même appareil, on obtient 36 à 38°, concentration suffi- sante pour un bon éclairage. Avec des appareils distillatoires perfec- tionnés, Egrot par exemple, on obtient du premier jet la concentration voulue. C'est en parfaite connaissance de cause que je donne ces rensei- gnements; jai moi-même fabriqué l'alcool de pulpe de baies de Caféier et je l'ai employé à mon usage dans des lampes à incandes- cence. On s'occupe, du reste, de la mise en valeur de ce procédé d'éclairage dans différents départements de la Colombie. CHARLES PATIN, Consul honoraire de Belgique à Meddellin (Colombie). Le. NID ïl TT AT des Sciences naturelles appliquées), D die ANNÉE REA AOUÛUT 1900 SOMMAIRE esse sr sos ets rose eee se se se 0e 4 Ebirails et Analyses « se s par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. A £ à (E Un numéro 2 francs : pour les membres de la Société 1 fr. 50 , FL ; 4 Ù ; 4 “AU: SIÈGE DK LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Et RUE DE CTLIE, 21 PARIS dau ET À LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Ë { Le Bulletin paraît tous lee mois. DÉSINFECTANT À ANTISEPTIQUE / Le seul joignant à son Efficacité, Sos Scientifiquement démontrée, NYSE l'immense avantage de n'être »° Toxigquo ni Corrosif. Hémostatique et Sty:tique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et La Plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu ind spensable dans la pratique vétérinaire. Corrosif Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques ct Prospectus : À SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs-Bourgeois (ti-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Par/s. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour èv:.cr les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRESYL-JEYES. 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(Voir la note au bas de la page 243.) 233 L'ÉTABLISSEMENT DE PISCICULTURE DE BESSEMONT PRÈS VILIERS-COTTERETS (AISNE) ÉLEVAGE SPECIAL DE LA TRUITE ARC-EN-CIEL (1) par À. DE MARCILLAC. Les premiers essais de pisciculture faits à Bessemont re- montent à 1889 ; ils débutèrent par une expérience compara- tive tentée en vue de déterminer quelle variété de Salmonides était susceptible de donner les résultats les meilleurs et les plus rapides au point de vue d’une exploitation industrielle, Des œufs d'Ombles-Chevaliers, de Truites des Étangs, de Truites des Lacs, de Truites des Lacs d'Écosse, de Salvelinus fontinalis, de Saumons de Californie et de Truites Arc-en- Ciel, provenant de différents établissements piscicoles de France, d'Allemagne et d'Amérique, furent mis en incuba- tion, et, après éclosion, les alevins de chacune de ces espèces furent déversés dans des étangs entierement séparés les uns des autres et dont chacun ne contenait que des sujets d’une même variété. Le résultat de cette expérience pratique fut tout en faveur de la Truite Arc-en-Ciel (Satmo irideus), espèce originaire de la Californie, remarquable par sa rusticité, la rapidité de sa croissance et la facilité de son acclimatation dans les eaux françaises. En résumé, il est acquis aujourd’hui que la Truite Arc-en- Ciel est, de tous les Salmonides, celui qui se prête le mieux à un élevage intensif en eaux closes. L'incubation artificielle de ses œufs ne présente aucune dif- ficulté : dès la seconde année de son existence, la femelle (1) Communication faite en séance générale le 25 mai 1900. Note concernant la fiqure 1 ci-contre. — Vue générale des pavillons où se pratiquent la ponte, la fécondation artificielle, l’incubation et l’alevinage ; devant le pavillon situé en bas et le plus à droite se trouvent les bassins en ciment destinés à conserver les Poissons dont on recueille les œufs et la laitance. Au fond de la vallée, à droite, on aperçoit l’un des étangs où sont conservés des reproducteurs. Fig. 2. — Etablissement de pisciculture de Bessemont, PA ‘uorneqnout 8 syoredde sep ojjeS — ‘jucwuesseg ap oininorosid 2P JUOWOSSIQIA — ‘© ‘Pr 246 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. donne annuellement 1,000 à 1,500 œufs et peut être conservée comme reproductrice pendant quatre ou cinq ans. La lai- tance des mâles est abondante et parfaite de la deuxième à la quatrième année. : L’éclosion des œufs est normale et s'effectue à des tempé- ratures très variables et dans des eaux de différentes natures. Mise en stabulation dans des étangs fermés, la Truite Arc- en- Ciel, pourvue d’une nourriture abondante et simple, telle Fig. 4. — Établissement de pisciculture de Bessemont. Bacs d’alevinage. que la viande de Cheval, croit avec une grande rapidité et supporte pendant les chaleurs estivales des températures qui peuvent s'élever jusqu'à 23-24° centigrades. Arrivée à la taille adulte, c’est-à-dire âgée de vingt à trente mois, alors qu'elle pèse, en moyenne, 2 à 300 grammes, elle peut être trans- portée vivante, dans des bidons aménagés à cet effet, et sup- porte ainsi des voyages de plusieurs heures. À la suite de cette expérience si concluante, l'Établisse- ment de Pisciculture de Bessemont se consacra à l'élevage exclusif de la Truite Arc-en-Ciel, et le développement de cette exploitation suivit une marche ascendante très rapide. En 1889, vingt-deux Truites, provenant du Jardin d’Accli- matation, donnaient quelques milliers d'œufs dont les alevins furent déversés dans un étang à l’âge de quatre mois. ST — Kiabliss f e LE ment de pisciculture de Bessemont des étangs à reproduct D ES EE 2 ce pe DT tn / eurs, Fig. 6. — Etablissement de pisciculture de Bessemont, — L’étang d'élevage le plus élevé à Courville (Marne). "+ RES RE Es L'ÉTABLISSEMENT DE PISCICULTURE DE BESSEMONT. 251 En 1890, incubation de 40,000 œufs, importés d'Allemagne, et mise à l’eau de 3,000 Truitelles. Au printemps de 1893, toutes ces Truites étaient pêchées et la fécondation artificielle de leurs œufs amenaït l’éclosion de 183,000 œufs ; en 1894, le chiffre des éclosions était de 250,000 et, dès lors, ne fit que croître chaque année. Fig. 7. — Établissement de pisciculture de Bessemont. Un étang à reproducteurs, L'exploitation piscicole de Bessemont ie aujourd'hui, . composée des éléments suivants : Dans la propriété de Bessemont, près de Villers-Cotterets, sont situés des étangs destinés uniquement à l'entretien des reproducteurs (Fig. 5 et 1). Ces reproducteurs, âgés de deux à cinq ans, sont parqués dans cinq étangs différents, formés par des retenues d'eau établies sur le parcours de la petite rivière qui traverse la propriété dans toute sa longueur. Les bâtiments (Fig. 1 et 2) où se pratique l’alevinage sont alimentés par une source spéciale captée à flanc de coteau. Deux succursales pour l’alevinage ont été successivement créées : l’une à Fismes, l’autre à Fismette, près de Reims. 9252 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Généralement les établissements de pisciculture limitent à la production et à la vente des œufs embryonnés le champ de leurs opérations; l'Établissement de Bessemont a voulu faire davantage et poursuivre l'expérience jusqu'à sa der- nière limite : la production du Poisson comestible et son apport, à l’état vivant, jusqu'au consommateur. En 1894, trois grands étangs ont été aménagés à Courville, près Fismes (Marne) en vue de cette expérience et disposés de facon à assurer le cycle complet d’un élevage poussé, au besoin, jusqu’à la troisième année. Ces trois étangs se déversent l’un dans l’autre et un sys- tèeme spécial de vannes permet de faire passer successive- ment tous les alevins dans chacun d'eux. Ils comprennent en outre un bassin de pêche (Fig. 9). Leur superficie totale est d'environ 15 hectares; les photographies reproduites ci- contre donnent la disposition générale de ces étangs (Fig. 6, 8 et 9) qui sont alimentés par un cours d’eau débitant de 2 à 3,000 mètres cubes en vingt-quatre heures. En 1895, 18,000 alevins, âgés de cinq à six mois, furent déversés dans l'étang supérieur où ils reçurent chaque jour une abondante nourriture; ils restèrent dans cet étang jus- qu’en juillet 1896, époque à laquelle ils furent déversés dans le second étang. Dans les dernières semaines de 1896, les jeunes Poissons furent enfin descendus dans le troisième étang servant de bassin de pêche. Sur les 18,000 alevins mis à l’eau en 1895, les pêches suc- cessives permirent d’en retrouver 15,530, soit donc un dé- chet de 12,60 pour 100 seulement. On peut admettre, pour les Truites péchées à partir de leur seconde année, un poids #20yen de 200 à 250 grammes. La quantité de viande de Cheval donnée à ces Truites pen- dant toute la durée de leur séjour dans les étangs a été de 7400 Kkgr., soit une consommation d'environ 3 kilos de viande de Cheval pour produire 1 kilo de Truite. Ainsi organisé, et par le fait de trois laboratoires complè- tement séparés les uns des autres, l'Établissement piscicole de Bessemont est à l'abri de tout accident ou épidémie pouvant compromettre sa production annuelle; cette production est des maintenant d'une grande puissance et d’une grande élasticité; pour la campagne de 1900, érois mille repro- ducteurs ont permis de mettre en incubation plus de deux ‘(ousej{) ejjrammo”) e ou9od op Sueo TT — ‘Juowosseg op eininotwsid op JuaWessIAC) — 8 V2Y ' ; L: :! À : Fig. 9. — Établissement de pisciculture de, Bessemont — Étang de pêche à Courville (Marne). On aperçoit au fond, à gauche, un étang d'élevage et au premier plan, à droite, la pècherie. ue L'ÉTABLISSEMENT DE PISCICULTURE DE BESSEMONT. 259 millions d'œufs et ce chiffre sera facilement augmenté suivant les besoins. » Les expéditions de Truites vivantes sur le marché de Paris ont été : CMS RE Sur. de +19 kilos: LÈCES MAMIE 475 — TÉL NSP ARPEAn ARR à 534 — TRE ER DRE 551 — TERMS Re 635 — SORA EURE TOUR D QD SUSPENSE nt 1, ,2 965 :— La demande de Truites étant infiniment supérieure à la production actuelle des étangs dont il dispose, l'Établissement “de Bessemont a été amené à proposer à certains propriétaires de prendre à ses frais l’'empoissonnement, en Truites Arc-en- Ciel de leurs eaux, les produits à récolter devant étre par- tagés par moitié. Cette combinaison, déjà acceptée par quelques proprié- \taires, ayant donné les résultats les plus satisfaisants, l'Éta- blissement de Bessemont espère que d’autres propriétaires suivront l'exemple donné, et que la question de l’alimentation en Truite, du marché de Paris d’abord, puis de celui des ‘autres grandes villes, pourra être résolue au grand avantage des propriétaires qui trouveront dans cette exploitation de leurs eaux une source de revenus importants comme au - srand plaisir des consommateurs amateurs d’une nourriture aussi saine que délicate. Il est certain que le régime des eaux françaises se prête admirablement à une exploitation aquicole qui peut être productive de bénéfices insoupconnés de ceux qui, sans s’en douter, en ont tous les éléments entre. les mains. À ce point de vue, l'Établissement de pisciculture de Bes- semont, tant par les résultats acquis que par ceux qu'il est permis d’entrevoir dans l’avenir, offre un intérêt sérieux à ceux que préoccupe le développement de l’aquiculture qui, plus que toute autre industrie, a besoin de trouver en elle- même des éléments d'amélioration et de prospérité. SUR LE PARSONSIA PADDISONI APOCYNÉE NOUVELLE A GROS TUBERCULES COMESTIBLES (1) par R.-T. BAKER, Directeur du Musée technologique de Sydney. Mon attention a été attirée sur cette plante par M. A. Pad- dison, de New-Angledool, qui m'envoya, pour le déterminer, un volumineux tubercule analogue à l’Igname, pesant en- viron 10 livres. D’après lui, cette racine était mangée par les colons et les indigènes. Après avoir reçu des spécimens de feuilles, de fleurs et de fruits, je constatai que cette plante se rapportait au genre Parsonsia, et non au genre Lyonsia, comme me l’avait fait supposer tout d’abord un examen som- maire des fragments de feuilles et de fleurs qui m'avaient été envoyés en premier lieu. La plante atteint une hauteur moyenne de 10 à 15 pieds. Cette hauteur cependant est dificile à déterminer d’une facon précise, le développement de la tige dépendant beaucoup de Ja hauteur de l'arbre autour duquel elle s'élève en grimpant. Les troupeaux sont friands des feuilles : la plante pourrait donc être utilisée comme fourrage. La tige a environ un pouce de diamètre à un pied du sol; l'écorce est très subéreuse. Il n’a jamais, du moins à ma connaissance, été fait men- tion des tubercules.du Parsonsia. On s’est occupe de ceux du Marsdenia, mais on n’a jamais signalé ceux du Parson- sia où d'une autre Apocynée. Ces tubercules sont connus dans le pays sous le nom d’Zg- naines indigènes, dénomination tres exacte, car, surtout lorsqu'ils sont volumineux, ils ressemblent beaucoup par leur aspect extérieur à l’'Igname de la Nouvelle-Zélande, qui est le produit d’une espèce de la famille des Dioscorées. {1) Ce mémoire, extrait du fascicule III du vol. 25 des Proceedings of the Linne an Society of New South Wales, publié à Sydney le 9 décembre 1899, a été communiqué à la Section de Botanique dans la séance du 1tr mai 1900. SUR LE PARSONSIA PADDISONI. 251 Leur peau est de couleur terreuse, analogue à celle des pommes de terre ou des truffes indigènes. L'intérieur est formé d’une substance blanchâtre dont l'analyse chimique a été faite par M. H. G. Smith. | Les fibres de la racine se voient très distinctement sur une section transversale. Dans les tubercules de petites dimen- sions, elles sont disposées en cercles concentriques avec assez de régularité. Celle-ci devient beaucoup moindre et disparaît dans les tubercules plus volumineux. Comme ces productions servent de nourriture aussi bien aux colons qu'aux indigènes, il était nécessaire de déterminer exactement leur composition chimique. Les résultats de l’ana- lyse n’ont pas répondu à l'attente de ceux qui comptaient y trouver ure nouvelle espèce de sérieuse valeur alimentaire. Cependant, elle présente cet avantage de fournir aux habi- tants des régions arides un légume supportant facilement des sécheresses auxquelles aucun autre ne saurait résister. La culture arrivera sans doute, du reste, à améliorer la qualité des tubercules. A l’état cru, ils n’ont pas l'aspect glutineux que présentent les Ignames proprement dites, lorsqu'elles sont fraichement coupées. Leur goût est analogue à celui du Turneps, qu'ils soient crus ou soumis à la cuisson. La couleur ou la consis- tance des échantillons volumineux sont à peu près ceux de la Betterave. M. Paddison m'écrit au sujet de ces tubercules : « Comme vous paraissez vous intéresser à cette plante, peut-être quelques renseignements relatifs à son développement et à son ha- bitat vous seront-ils agréables. — Comme je vous l’ai déjà dit, elle est sarmenteuse : elle pousse ordinairement au pied des arbres peu élevés, autour duquel elle s’enroule. Neuf fois sur dix, ces arbres sont des « Wilga » (Geïjera parviflora Hindil.). Lorsque je recus votre lettre, M. Started et moi nous mîmes à la recherche de cette plante. Nous en découvrimes un pied à 400 yards environ des limites de la ville et nous nous mîmes à l'œuvre pour en recueillir les tubercules. Nous fimes tout autour un trou de 4 pieds de diamètre environ et nous arrivâmes facilement à prendre les tubercules, ou du moins tous ceux qui étaient apparents. Ils se développent dans le sol de la même facon que les pommes de terre, les plus gros près de la racine-mère et les plus petits à l'extrémité des radicules. Ils se trouvaient à 4 pouces du sol et le plus profondément enfoui était à 21 pouces. Nous récoltâmes Bull. Soc. nat, Aol. Fr. 1900. — 17. 258 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. tout ce que nous pûmes et, les ayant rapportées à la maison, nous leg pesâmes séparément ; il y avait en totalité 29 tubercules dont voici les poids respectifs : 12 livres 1/4, 10 1/2, 9, 7 3/4, , 6, 5 1/2 (2), 4 1/2, 4 1/4, 3 3/4, 21/2 (2), 2(5), 1 3/4, 1 1/2 (2), 1 1/4 (2), 1 (2), 1/2, 1/4 et 1/8 (2). Le poids total de ces 29 tubercules était de 101 livres 1/4. Les quatre dernières années ayant été extrêmement sèches, je ne doute pas que dans des conditions favorables le produit ne se soit élevé à 150 ou 200 livres. Ce produit de 101 livres 1/4 pour un seul pied pouvant paraître invraisemblable, j'avais opéré avec M. Read, auquel on peut de- mander la confirmation de ce que j'avance. M. Read est très connu du Directeur de l’Australian Museum, auquel il a souvent envoyé des Oiseaux, etc., à déterminer. Quatre autres personnes ont également assisté à la pesée des tubercules. J'avais, au début, beaucoup de peine à admettre que des tubercules aussi volumineux pussent se développer dans le sol, mais j'ai dû me rendre à l'évidence. Autre remarque curieuse : s’il arrive que l’extrémité des tubercules soit endommagée, le reste continue à se maintenir en parfait état ; la. partie attaquée se dessèche et meurt, mais celle qui est restée intacte ne souffre en aucune facon. Le second tubercule, à partir du collet de la racine, est le plus. volumineux, et son écorce est couverte de nodosités de plus en plus développées à mesure qu'il devient plus vieux. L’écorce des autres est nette et lisse. » L'analyse chimique démontre que ces tubercules n'ont pas une très grande valeur au point de vue alimentaire. Ils manquent, en effet, d'éléments azotés et carboniques. Les radicelles, rassemblées en une sorte de paquet, s'é- tendent parallèlement au côté extérieur des tubercules et sont de plus en plus espacées, au fur et à mesure que leur racine s'accroît, leur nombre explique la proportion consi- dérable de substance fibreuse constatée. Les matières miné— rales sont également très abondantes et contiennent beaucoup. de dérivés du chlore : on y trouve également de l’acide sulfu- rique, de l'acide phosphorique, de la chaux, de la magnésie: et des alcalis, et une grande proportion de potasse, comme. dans d’autres cendres analogues. Ils ne renferment qu’une petite quantité d’amidon. Quelques. granules seulement y sont révélés par l'iode; ces granules AR : « Û 1 € À sont sphériques et d'un volume très variable, de BDD À 380 1 de pouce ; la moyenne de leur volume est de = NU de pouce. Nous n'avons pu mesurer que les granules teintés en bleu. SARTHE + nr M NET SEE? se RiRaE SUR LE PARSONSIA PADDISONI. 259 La proportion rigoureuse des éléments constitutifs n’a pas été déterminée, leur valeur étant insignifiante. On a trouvé 0,77 pour 100 de substances azotées, considérées comme albu- minoïdes, mais il est probable que quelques-unes de ces sub- stances n’ont pas subi cette combinaison. Une seconde expérience a été faite sur une tranche pré- levée pour l'analyse à la partie centrale d’un tubercule, et les résultats ont été identiques. Ces résultats démontrent que les tubercules ne contiennent que 4 1/2 pour 100 de principes carbonés, ce qui est une proportion extrêmement faible. Voici les résultats de l’analyse : HERO SO MES EN ERe ERRr +... 90,774 pour 100. Substances azotées (0,123 0/0 d’azote).. 0,770 — Amidon et autres principes carbones.., 4,564 — Résidus organiques non incinérés ..... 1,900 — Matières minérales contenant 18 0/0 de CHIOTO RE Mere eleleleis etes en ee 15992 — 100,000 pour 100. On trouvera ci-après la description du Parsonsia Pad- disoni. PARSONSIA PADDISONT Nov. sp. Tige glabre, ligneuse, grimpante. Feuilles opposées à pétiole long de 6 à 8 lignes, obovales, elliptiques-lancéolées, brusquement acumi- néès, glabres sur les deux faces, dont la supérieure est vert foncé, nervation à peu près également marquée sur les deux faces ; le réseau étant peut-être plus distinct sur la face supérieure ; la face inférieure de couleur moins foncée ; les bords recourbés ; largeur 3 à 4 pouces. Cymes axillaires ne naissant que dans une seule des deux aisselles de chaque paire de feuilles. Pédoncules pubescents plus courts que les feuilles. Calice à segments égaux, lancéolés, subulés, pubescent, côtelé, de une à une ligne et demie, bordé d'une marge scarieuse transparente. Corolle à tube plus court que le calice, étranglé au point d'insertion des étamines, à divisions, glabres de deux lignes de long, imbriquées du côté droit. Filets des étamines pubescents, légèrement tordus au-dessous de l’anthère ; anthères entièrement exsertes acu- minées, dépourvues d’appendice dorsal, à lobes basilaires longs et re- courbés à l'extrémité. Fruits de 5 à 7? pouces de long, follicules minces, graines atténuées vers le hile en un bee court, surmonté d’une aigrette d’un pouce de long. 260 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Hab. New-Angledool Nouvelle-Galles du Sud (Paddison). Je n'ai pu me procurer des échantillons du P. lanceolata R. Br. pour les comparer avec la plante nouvelle. Les caractères distinctifs que j'indique sont tirés de la description qu’en fait Bentham (Brifk. flora, vol. IV, p. 318). Si ce n’était l'imbrication des pétales et la forme des feuilles, cette plante pourrait être considérée comme une variété du Zyonsia eucalyp- étfolia J.v.M., auquel elle ressemble par beaucoup de traits communs et particulièrement par son inflorescence et la forme des anthères. Elle diffère du P. Zanceolata R. Br. par ses cymes axillaires, la forme de ses feuilles et son calice, dont les lobes sont égaux. Il est probable que ces deux espèces ont été confondues en une seule dans la Flore de Bentham. RS DU D OA ANT ATOM Ts PE PA. fe EE DORE VE 261 SUR L'EXPLOITATION ET LA PRODUCTION DU CAOUTCHOUC DANS L’AMAZONIE ET L'AMÉRIQUE CENTKALE D'APRÈS EUGÈNE Poisson (1). par Jules POISSON, Assistant au Museum d'Histoire naturelle. C'est à l’instigation de votre distingué et sympathique Secré- taire général, M. le baron de Guerne, que je dois l'honneur de vous entretenir des résultats de deux voyages successifs entrepris par mon fils, chargé de mission du Gouvernement français pour étudier les exploitations d’arbres à caoutchouc, dans l’Amazonie et l'Amérique centrale, en 1898 et 1899. Il est inutile d’insister sur l'importance qu'ont prise de nos jours dans l’industrie et le commerce l'emploi et le négoce du caoutchouc. C’est dans le but de se documenter sur ces diffé- rents points que mon fils, Eugène Poisson, est allé au Brésil, non seulement pour assister à la récolte de la matière pre- mière qui tient une place si grande dans le commerce actuel, mais aussi pour essayer de distinguer les espèces d'arbres qui fournissent les sortes les plus estimées de caoutchouc. Bien que ces tentatives ne soient pas nouvelles, on acquiert des notions souvent complémentaires de choses déjà connues par des voyages réitérés, et il est nécessaire de voir par soi-même dans les pays d’origine les procédés de culture et d'exploitation pour en parler en connaissance de cause. Pendant plusieurs semaines, tant en 1898 qu’en 1899, notre jeune voyageur parcourut les forêts où les Zevea d'espèces diverses sont mises à contribution pour l'extraction du caout- chouc, vivant de l'ordinaire des « Seringueros », campant avec eux dans la forêt et se nourrissant de viande boucanée, de Poisson et de farine de Manioc. Les Hevea au tronc droit et lisse croissent en terrain bas et (4) Communication faite le 2 avril 1900, à la Section de Colonisation. De nombreux échantillons de caoutchouc et divers ustensiles employés pour la récolte ou la coagulation du latex, ont été présentés par M. J. Poisson au cours de sa causerie. 262 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. inondé en saison des pluies ; on en trouve un de-ci de-là, car ils ne viennent pas en société exclusive. Ces arbres sont sai- gnés au moyen d'une petite hachette nommée « Macheta » dont on enfonce la lame d’un coup sec à 2 ou 3 centimètres de profondeur, puis aussitôt on insinue dans l'écorce au-dessous de la blessure la pointe d’un petit godet nommé « Tigelinha », de la contenance d’un verre à boire, et le lait s'écoule dans ce récipient. Suivant l’âge et la force del’arbre, on fait un nombre déterminé d’entailles, toujours à la hauteur que peut atteindre l'opérateur, et celui-ci passe à un autre arbre à la recherche duquel il va ainsi jusqu’à ce qu’il ait conscience du temps qu'il doit employer pour que, en revenant sur lui-même, il ait pu vider dans un récipient, habituellement une calebasse, d’une capacité de 2 ou 3 litres, le contenu des tigelinhas avant la fin de la journée. Le lait des Zevea ne se coagulant pas de suite comme celui du Caoutchouquier de Ceara et des Landolphia de la Côte d'Afrique, on peut réunir le lait des récoltes du jour dans une sorte de baquet dont les Seringueros se servent, et qui fait partie du matériel de préparation du caoutchouc, dans la som- maire installation nommée « Carbet » qu’ils se ménagent en forêt. Quelques pieux enfoncés en terre, puis un toit fait de branchages et de feuilles de Palmiers, tel est l'immeuble dont ils disposent et qui leur sert d’abri pendant la nuit. L’outil- lage se complète par un fourneau très simple, ou «Fumeiro», en forme d’amphore de 0,70 à 0,80 cent. de haut, à la partie supérieure rétrécie par où s'échappe la fumée nécessaire à la coagulation du lait recueilli. Cet ustensile est alimenté par des brindilles de bois et aussi des fruits de Palmiers de la forêt, à parois ligneuses, dures et contenant à leur intérieur une ou plusieurs amandes grasses qui, en brülant, font une fumée épaisse. L'expérience fort ancienne a démontré aux populations de ces contrées qu'une telle fumée était tout à fait efficace pour la bonne conservation du caoutchouc préparé au Para. Enfin ie matériel comprend aussi un ou deux bâtons, dont l’une des extrémités est en forme de palette et sur la- quelle s’appliqueraient successivement les couches de latex pendant l'opération nommée « enfumage ». L’'enfumage consiste à tremper la palette dans le latex encore fluide contenu dans le baquet, puis à la retirer aussitôt et à l’ex- poser à la fumée. La coagulation se fait immédiatement et le SUR L’EXPLOITATION ET LA PRODUCTION DU CAOUTCHOUC. 263 caoutchouc, cela se comprend, devient noir; on trempe à nou- veau la palette dans le lait et ainsi de suite, jusqu’à ce que les couches successives forment une masse jugée suffisante; après quoi, pour dégager la palette, on pratique une entaille à l’ex- trémité de la pelotte de caoutchouc, au moyen d’un couteau dont la lame est préalablement mouillée. On pousse alors par le manche de la palette, celle-ci en dehors, par l’entaille, et ainsi dégagée, la pelote de caoutchouc est prête à être livrée au commerce. C'est sous cette forme, avec des tailles variables, suivant la localité, que les boules ou pelottes miplates de caoutchouc constituent la marque dite « du Para ». Certains fermiers, auxquels les exploitations sont concédées par l’État, signent leurs produits d’une estampille pour en garantir la qualité. Le procédé de l’enfumage a été, dans d’autres régions, rem- placé par la coagulation au moyen des acides ou des sels alcalins brassés dans le latex, mais cette pratique plus rapide a des inconvénients, qu'il serait trop long d’exposer ici et qui font jusqu'à présent préférer la méthode en usage au Para. L'étude chimique du latex des plantes à caoutchouc, inté- ressant toujours ceux qui s'appliquent à ces sortes de re- cherches, mon fils s'était efforcé de se procurer du lait de toutes les espèces rencontrées par lui, non sans peine du fait des Seringueros, qui n'aiment pas à livrer du latex non coa- gulé ; aussi la chaleur élevée des tropiques le fait fermenter promptement et alors il chasse les bouchons ou brise les vases qui le contiennent. C’est ce qui arrive aux inexpérimentés, aussi faut-il associer à ce latex un antiseptique approprié si on veut le conserver à l’état fluide, et sans cependant gêner les expériences futures auxquelles il est destiné. Pendant son séjour en Amazonie, Eugène Poisson a désiré savoir quelle était la statistique de l'exportation du caoutchouc par l'Administration des douanes du Para. Le fisc, qui frappe ce produit d’un droit assez fort, quand il ne lui échappe pas par la fraude, fait à cette province, la plus riche du Brésil de ce fait, un revenu considérable. Le relevé des quantités sorties des ports de l’Amazonie a donné pour une année, de juin 1896 à juin 1897, les chiffres suivants : 22,300,000 kilogrammes sur lesquels 9 millions pour l'État du Para et 13 millions pour le Haut-Amazone et les rivières af- 264 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. fluentes, représentant une valeur de 115 millions de francs. Mais il faut ajouter à cette somme le coût du transport en Europe ou aux Etats-Unis et la déshydratation du caoutchouc pendant le voyage, qui en diminue le poids, enfin les frais de transaction qui augmentent des deux cinquièmes le prix final rendu à l'usine. Cette quantité de production, qui ne fait qu'augmenter en Amazonie, et vraisemblablement ailleurs, est bien frappante quand on songe aux autres sortes de gomme élastique venant de la Colombie, des Républiques du Mexique, du Centre Amérique, abstraction faite des produits similaires de l’A- frique et des régions asiatiques; on a peine à croire qu’une aussi énorme quantité de caoutchouc puisse être employée actuellement. En voyant la consommation croissante, on s’explique aisé- ment les efforts qui sont faits de toutes parts pour introduire dans les colonies des cultures d’arbres pouvant produire cette précieuse denrée ; aussi l’un des principaux objectifs du jeune explorateur, dont j'expose ici les résultats de voyages, était de se procurer des graines de ces arbres pour satisfaire aux de- mandes qui ne cessent de se produire chaque année. On peut estimer à 1,500,000 le chiffre des graines d'Æevea envoyées par lui en 1898 et 1899. Dans ce nombre il y a bien des mé- comptes, car les graines d’Æevea, de même que celles de Cacaoyer, de Muscadier, de Poivrier, de Mangabeira, etc., doivent entrer en germination presqu’aussitôt tombées de l'arbre. Aussi faut-il les mettre en stratification pour les amener en Europe; c’est une besogne pénible, à laquelle il faut procéder soi-même, au risque d’être déçu, et malgré tous les soins d'emballage, il y en a au moins le quart, sinon la moitié de perdues pendant le transport. Nous n'insisterons pas sur les démarches à faire pour se procurer les graines recherchées également par des nations concurrentes et qui exigent de l’opérateur une grande activité et la connaissance de plusieurs langues. Ces difficultés vien- nent d’être accrues par l'interdiction tardive, mais formelle, de l'État du Para, de l'exportation des graines que l’on se dispute avec acharnement. On doit comprendre alors qu'un jeune plant d'arbre à caoutchouc revienne cher à son importateur si, après avoir été élevé en serre, en France, par exemple, il faille l'expédier SUR L’EXPLOITATION ET LA PRODUCTION DU CAOUTCHOUC. 265 et le faire arriver en bon état dans une colonie quelconque. Diverses causes obligent les rares horticulteurs qui se livrent à la vente pleine d’aléas de ces plantes utiles aux colonies : 1e à envoyer des voyageurs spéciaux et coûteux pour se procurer sur place graines et boutures; 2° avoir un matériel suffisant pour faire germer des centaines de milliers de graines, ou faire d'innombrables boutures; 3° mettre en pot chaque sujet et le préparer à faire un long voyage en serre vitrée; 4° se trouver dans un grand centre de population et partant d'affaires, à proximité de plusieurs ports, avec des . bateaux rayonnant dans tous les points du globe. Les ÆZevea, dont plusieurs espèces concourent, suivant la région parcourue de l’Amazone et de ses affluents (4. brasi- liensis, H. guianensis, H. discolor, H. Spruceana, H. pauci- fiora, H. lutea, etc., et aussi des Micrandra) ne sont pas les seules sources du caoutchouc au Brésil. Au Ceara où Eug. Poisson s’est transporté pour voir sur place les arbres qui donnent la gomme dite de Ceara et fournie par le Manihot Glaziowi, de même que pour le caoutchouc de Pernambouc produit sur une Apocynée (Hancornia speciosa), il a pu constater que le sol sablonneux et rocailleux qui plaît au Mañnihot, est totalement différent de celui qu'exige l’Æevea et qui doit être profond, substantiel et humide et pour le Ceara, au contraire, sec et friable. La croissance de ce dernier est rapide, mais il ue forme qu'un arbre de moyenne taille. On peut le saigner par con- -séquent après deux ou trois ans de croissance. Sa graine a. l'avantage de se conserver plusieurs mois sans altération et, conséquemment, peut s’expédier facilement, protégée qu’elle est par son tégument épais et qu’il est même utile d'entamer au niveau de la radicule pour hâter la germination. Le latex de ce Manihot, qui appartient, comme les Zevea, à la famille des Euphorbiacées, est abondant et il se coagule promptement; aussi lorsqu'on désire le préparer par l’en- fumage, faut-il s’y prendre de suite. Le plus souvent on recueille le latex qui s’est coagulé sur les entailles et on le livre au commerce ainsi, ou on le met en boule. Ce caoutchouc n’a pas la même valeur que celui du Para, mais au Ceara même il se vendait, en 1897, 4 fr. 50 le kil., ce qui est très rémunérateur, si l’on songe que, dans sa moyenne de production, un pied peut donner par an de 1,500 à 266 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 2,000 grammes de gomme. Maïs il règne sur cette espèce une sorte d’hésitation à cause des rapports contradictoires sur sa production. Au Ceara même, elle est satisfaisante et les Brésiliens, qui, dans d’autres provinces, font des cultures de cette espèce, prennent toujours des graines à Ceara et non sur des pieds venant de cultures; enfin ils ont soin de choisir un terrain maigre et relativement sec, conditions qui ne sont pas toujours observées par les colons qui se sont livrés à des essais à la Côte d'Afrique et dans nos possessions asiatiques. Le mérite de cette espèce étant de se contenter d’un sol médiocre et sec, là où d’autres cultures ne seraient pas pos- sibles, elle constitue donc un important facteur de produc- tion, quand les conditions climatériques ne s’y opposent pas, alors qu'on n’avait pas d'espoir de mettre tel sol en état de produire. ; L'espèce d’Apocynée sus-indiquée et fournissant le caout- chouc de Pernambouc a aussi attiré l’attention de mon fils. C'est une sorte qui peut aller de pair presqu’avec le Ceara quoique paraissant de moins bonne qualité, mais qui a encore sa valeur lorsqu'elle est préparée convenablement ; elle est monopolisée par nos voisins d’outre-Manche. Toutefois les Æancornia seront encore pour un temps des arbustes à caoutchouc d'attente n'ayant pas encore fait ses preuves dans nos colonies. La germination des graines est capricieuse et leur élevage dans nos serres est peu facile. Il importera, pour cette espèce et ses variétés, de choisir des régions où elles pourront s'adapter au climat et au sol avant de se lancer dans des essais en grand. Au cours d’un second voyage, complémentaire du premier, Eugène Poisson a étendu ses recherches non seulement au Brésil et aux Guyanes, mais aussi aux Antilles et au Costa Rica. Les espèces dominantes et productrices du caoutchouc en Amérique centrale appartiennent au genre Castilloa. Enfin il s’est occupé aussi des arbres à Balata et des variétés de Cacaoyers, de Caféiers et autres espèces économiques, ainsi que de leurs conditions de culture, mais les détails qui les concernent ne sauraient entrer dans cette communication sans dépasser les limites que nous nous étions imposé. EXTRAITS ET ANALYSES. LES ACRIDIENS EN ALGÉRIE, MOYENS DE DÉFENSE A LEUR OPPOSER, par C. Rivière et H. LEcQ (suite ef fin) (1). Les Acridiens comptent parmi les Champignons parasites un en- nemi non moins redoutable qui s’attaque aussi bien aux œufs qu'aux Insectes adultes. Ce Champignon, dont le mycélium pénètre les tissus, détermine sur les Criquets pèlerins une maladie mortelle (2) et se développant sur les œufs, entrave leur développement (3). Ce Cham- pignon, le Lachnidium acridiorum Giard, a été, lors des invasions de 1891 et surtout de 1892 et de 1893, un précieux auxiliaire. Séduit par des vues théoriques, on avait pensé reproduire dans le laboratoire ce bienfaisant Champignon, en recueillir les spores qui, disseminées à la volée sur les terrains de ponte ou sur les Criquets naissants, les eussent rapidement contaminés. Mais ces tentatives res- tèrent infructueuses. Il faut reconnaître en effet qu’il faudra encore de longues et patientes recherches pour arriver à connaître les conditions biologiques qui président à la reproduction du Lachnidium et assurent son développement naturel sur les Criquets pèlerins ou sur leurs œufs. Bien des points obscurs restent à élucider. Par exemple, sont-ce les Criquets pèlerins femelles qui en effectuant leurs pontes, contaminent les œufs, sont-ce les Criquets pélerins et les œufs eux-mêmes qui trouvent dans le sol les spores qui se développeront dans leurs tissus? Mais admeltons par hypothèse qu’on ait réussi à se procurer des spores du Cryptogane parasite et qu’on ait trouvé le moyen de les fixer sur le corps des jeunes Acridiens, il ne faudrait pas oublier qu'ils muent au sortir de l'œuf et cinq fois encore à des intervalles de huit jours en moyenne, avant de se métamorphoser en Insectes ailés et par là ils peuvent se débarrasser des spores répandues à la surface de leurs corps. A l’état naturel, hâtons-nous de le dire, il n’a été trouvé jusqu'ici aucun jeune Acridien contaminé. La mortalité ne sévissait que sur les Sauterelles adultes ayant satisfait déjà nombre de fois à la procréation. Moyens artificiels de destruction. — Ce qui précède suffit pour faire comprendre que si les Oiseaux insectivores et les Insectes oophages et acridiophages rendent à l’occasion d'immenses services, on ne peut compter sur eux que comme auxiliaires (4). Il faut que l'Homme inter- (1) Voir plus haut, page 235. (2) Künckel d'Herculais, Les Champignons parasites des Acridiens. Comptes rendus Acad. des Sciences, 22 juin 1891. (3) Id. Mofices sur ses bitres et travaux scientifiques, 1895, p. 189. (4) Les tentatives d’acclimatation faites plusieurs fois au Jardin d’Essai d’Alger LP TR 3 4 268 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACELIMATATION. vienne pour protéger ses cultures de la mandibule de ces ravageurs. On a pratiqué le ramassage à la main des coques ovigères de Criquets pèlerins et de Stauronotes marocains que l'on déterre à la pioche. Quand cela est possible, il est préférable de labourer superficiellement à 6 ou 8 centimètres de profondeur les lieux de ponte de manière à exposer au soleil les coques qui ne tardent pas à sécher. Ce travail peut se faire au moyen de scarificateurs, de la houe : une deuxième facon, si possible, est donnée en travers quelques jours après. Pour ce travail, on choisit un temps sec et une journée ensoleillée. Le labourage des pontes quand la terre s’émiette bien et leur expo- sition au soleil permettent de détruire la plus grande partie des coques ovigères; un certain nombre cependant échappe, mais l’éclosion qui suit est considérablement réduite et sans importance. Ce travail est à recommander dans les vignes envahies : c'est du reste l'époque des facons cullurales ordinaires. | Dans les régions non labourables, la destruction des jeunes Acri- diens dès leur naissance s'impose pour les empêcher de se répandre dans les cultures. Il est à recommander de relever les gisements d'œufs, surtout de ceux du Stauronote marocain, et de les porter sur des cartes-croquis qui permettront d'organiser méthodiquement la défense et de faire les préparatifs utiles pour l’époque de l’éclosion. Les jeunes Criquets peuvent être détruits par le feu, en les inciné- rant au moyen de plantes sèches de toute nature, d'Halfa, de brous- sailles, etc., que l’on brûle sur les lieux de ponte au moment de l'éclo- sion. Mais il ne faut pas oublier que les éclosions sont successives et qu’au bout de quelques jours, on peut voir sortir des centres mêmes des bûchers, des millions d'Insectes. Il faut donc renouveler l’incinération à plusieurs reprises : ajoutons que souvent le combustible manque. La destruction des jeunes Criquets par écrasement est d’une appli- cation plus générale. Avant d'être réchauffés par le soleil, ou au déclin du jour, souvent aussi quand le temps est sombre, les jeunes Criquets restent réunis en tas : on peut alors les détruire aisément au moyen de battes, de balais à tiges souples ou à l’aide de branches de Lau- riers-roses au moyen desquelles on bat le sol. En pays indigènes, on se sert de bandes de toile appelées Melhafas qui d'un côté sont tenues relevées et de l’autre sont posées à plat sur le sol. Au moyen de bran- chages, on pousse doucement les bandes de Criquets sur la toile et quand celle-ci est noire d’Insectes, on la replie comme un sac et on écrase par piétinement les Criquets emprisonnés. La toile est ensuite secouée et on recommence l'opération sur une autre bande de Criquets. Dans le jeune âge, surtout quelques jours après leur naissance, les Criquets sont susceptibles d'être arrêtés ou tout au moins gênés dans avec les Martins tristes de la Réunion ont démontré que ces Oiseaux ne pou- vaient pas résister au climat algérien. Sur le Martin triste, voir notamment : Bulletin de la Société d’Acclimatation, 1890, page 404. EXTRAITS LT ANALYSES. 269 leur marche par les moindres obstacles. Se déplaçant toujours par groupes serrés, pour se porter en avant, ils suivent de préférence les sentiers battus tracés par les passants ou les troupeaux, évitant les terrains hérissés de mottes ou seulement recouverts d’une végétation buissounante ou même herbacée, Dans les terres labourées, il suffit de tracer à la charrue un large sillon à fond bien net, d’aplanir le sol par le passage d’un rouleau ou par l'emploi d'une dame pour que les Insectes suivent de préférence la route qui leur est tracée. On draine ainsi le flot des Insectes envahisseurs et on les dirige à volonté. Ces observations n’ont pas échappé aux cultivateurs qui, lors de l’éclosion des Criquets, se hâtent de les faire sortir des cultures, des vignes particulièrement, en leur tracant des sentiers faciles que les jeunes Criquets s’'empressent de suivre. Au lieu de se borner à faire évacuer les cultures en jetant les bandes de Criquets dans les terrains voisins, on peut disposer sur les chemins tracés méthodiquement des fosses-pièges, où les Insectes, en suivant ces sentiers, viennent tomber et sont capturés (système Ortel). Ces pièges consistent simplement en fosses dont les bords sont garnis de zinc qui empêche la sortie des Insectes capturés. Lorsque les Criquets sont arrivés à un plus grand développement, ils sont moins gênés dans leur marche par les aspérités du sol au- dessus desquelles ils peuvent plus aisément sauter : ils recherchent moins le sol battu et net, et il est moins aisé de les diriger. Mais on peut alors les arrêter au moyen de barrages de faible hauteur. Le principe du barrage repose sur cette observation que les Criquets ne peuvent grimper le long d’une surface lisse : dans l’application, il s’agit d'opposer aux colonnes en marche des barrières à surface suffi- samment lisses pour qu’elles soient infranchissables et susceptibles d’être établies à bon marché. L'appareil dit cypriote consiste en une bande de toile grossière de 100 mètres de long, de 70 centimètres de hauteur dont la partie supé- rieure est garnie d’une bande de toile cirée de 10 centimètres de largeur. En avant de la colonne de Criquets en marche, on dresse la bande de toile que l’on maintient verticale au moyen de piquets, la bande de toile cirée tournée du côté des Criquets; on réunit bout à bout un nombre plus ou moins considérable de ces toiles, suivant la largeur de la colonne que l'on veut arrêter (1). Celle-ci, en cherchant à la contourner, vient nécessairement tomber dans les fossés-pièges creusés de distance en distance le long de la toile. Lorsque les Criquets ont rempli les fosses, celles-ci sont recouvertes d'une épaisse couche de terre. C’est cet appareil cypriote qui, avec quelques modifications de détail, a été adopté par l’Administration. | (1) Voir Algérie agricole, n° du 1e" mars 1888, et les instructions pratiques pour l’emploi des appareils servant à la destruction des Criquets. (Numéro du 1er mai 1888.) 270 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Pour la défense des cultures, les colons donnent la préférence aux barrages en zinc plus durables, d’un poids moindre que celui de l’ap- pareil cypriote, ne nécessitant aucune surveillance, une fois posé. Le zinc désigné sous le n° 4 du commerce, de 0 m. 20 de largeur, est suffisant ; on le fixe au moyen de piquets en fer spéciaux ou même en le clouant sur des piquets en bois refendu. Le zinc présente sur la toile cet avantage qu'après usage il peut être revendu pour la refonte à un prix variable suivant les cours, mais toujours très élevé, eu égard au prix d'achat du zinc neuf (1). ; La pose de l'appareil en zinc est simple. On doit recommander d’incliner les bandes de zinc légèrement devant le front des Criquets, afin de rendre impossible toute escalade. Il faut présenter aux Criquets un plan incliné contrairement à leur marche. Les piquets qui fixent les bandes de zinc se placent derrière. A défaut de bandes de zinc, on peut encore employer des planches légères telles que des voliges garnies sur le bord supérieur d’une mince bande de zinc. On a aussi préconisé pour la destruction des Criquets l'emploi des insecticides et particulièrement de l'huile lourde en émulsion dans l’eau. Ces insecticides peuvent, dans certains cas, rendre des services, mais leur emploi est toujours plus onéreux que la destruction par les moyens mécaniques ; dans certains cas, leur usage est même dangereux pour les végétaux, et dans les vignobles, l'emploi de certains insec- ticides mal appliqués a eu parfois une influence fâcheuse sur la qualité de la vendange. La défense des cultures contre les Insectes ailés est plus difficile. Notons cependant que ceux-ei sont moins destructifs que les Criquets, qui, pour arriver à leur complet développement, doivent absorber des quantités de matières végétales. Les Insectes ailés, bien que suscep- tibles de causer certains dommages aux cultures, ont surtout pour préoccupation de s’accoupler et de pondre. Pour empêcher les Sauterelles ailées de s'abattre, les maraîchers parcourent leurs cultures eu frappant sur des bidons à pétrole ou en agitant des banderoles de couleurs voyantes. Les feux allumés de manière que la fumée passe au-dessus des champs que l’on veut pro- téger empêchent quelquefois les Sauterelles de s’abattre, ou les font changer de direction (2). Pour donner une idée très approximative de l'importance de la lutte entreprise contre ces invasions de Sauterelles qui, de 1887 à 1893, se sont succédé en Algérie, on peut établir que cette défense seule a exigé une dépense de 25 millions de francs environ en argent, car dans ce chiffre ne sont pas comprises les réquisitions obligatoires, non salariées, qui mobilisaient des masses d'hommes représentant (1) Voir le Bulletin de la Société d'Agriculture d'Alger, n° 103, 34e année : Les appareils cypriotes et les appareñls en zinc. (2) Voir le Bulletin précité, Foyers et nuages artificiels. EXTRAITS ET ANALYSES. 971 des millions de journées, de nombreux animaux, du matériel, etc. A ces sacrifices exigés par cette lutte, il faut encore ajouter les dépenses et les efforts considérables faits sur le littoral par les parti- culiers, soit pour l'acquisition d’appareils et d’insecticides, soit pour le paiement de la main-d'œuvre employée pour sauvegarder certaines cultures et principalement les vignobles. On ne pourrait dire dans quelle mesure de tels sacrifices ont con- tribué à atténuer les pertes subies par l’agriculture dans ces périodes d’invasion; cependant les déprédations qui ont été la conséquence de la présence des Sauterelles ont été quand même considérables. Sans entrer dans de grands détails sur ce sujet, il convient de rap- peler que les Services compétents ont estimé les pertes causées à l’agriculture du fait des Sauterelles dans la province de Constantine, à 8,230,000 francs en 1887 et à 25 millions en 1888. .: En 1891, ces mêmes Services évaluaient les dégâts dans la province d'Alger à 2,350,000 francs. Dans certaines années, le ramassage des coques ovigères sur les Hauts-Plateaux constantinois forme des cubes fantastiques : 500.000 doubles décalitres, et les jeunes Criquets ramassés se chiffrent par quatre millions et demi de doubles décalitres, sans que cette énorme des- truction ait réduit bien sensiblement l’action des Insectes ravageurs. Le principe et la praticabilité d’une lutte efficace contre les Saute- relles ne paraissent pas avoir été déterminés jusqu'ici. Quelques esprits critiques ont même laissé entrevoir que les travaux de défense entrepris etles dépenses considérables qu’ils ont nécessitées ne l'ont souvent été que pour donner une vaine satisfaction à l’opinion publique, et que l'expérience si chèrement acquise pendant cette succession d’in- vasions plus ou moins intenses ne s’est pas traduite par la connais- sance d’un système de lutte et de résistance bien nettement formulé. Faut-il prendre l'offensive, c’est-à-dire aller détruire les Sauterelles sur les Hauts-Plateaux et dans le Sud afin de protéger le véritable Tell et le littoral particulièrement, ce qui exige des frais énormes, une grande mobilisation de travailleurs dont le ravitaillement est dispen- dieux, souvent impossible ; convient-il aussi de chercher à protéger ou à sauver des cultures qui n'en valent pas toujours la peine, pour n’arriver, en somme, qu’à atténuer bien faiblement les effets de l’in- vasion dans les territoires de colonisation ? Faut-il, au contraire, rester seulement sur la défensive en ne sauve- gardant que les cultures riches du Tell, vignobles et cultures arbores- centes principalement et en sacrifiant tout le reste ? On sait que dans le territoire de véritable colonisation, la lutte peut être possible et efficace tout en étant économiquement conduite. En résumé, s’il est impossible de protéger l’Afrique du Nord contre les invasions de Sauterelles dont le berceau et les centres de multi- plication nous sont encore inconnus, on peut aisément défendre des cultures de surface déterminée et même, avec une certaine entente 272 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. entre les intéressés, protéger les centres de colonisation. Ce n’est sou- vent qu’une question d'argent et surtout d'organisation de la défense. Bien des fausses manœuvres, des gaspillages de temps, d'argent et de main-d'œuvre seraient évités, si on apportait plus de méthode dans la tactique suivie. Mais cette organisation est encore à étudier, la stra- tégie à suivre est à établir et, il faut le reconnaître, à chaque invasion, ce sont toujours les mêmes tâtonnements, les mêmes incertitudes et la même inexpérience qui président aux travaux de défense. Cela tient en grande partie à ce que, les invasions de Sauterelles étant intermittentes et espacées, l'expérience est plus difficile à acquérir et qu'à chaque invasion ce sont des hommes nouveaux qui sont appelés à l’organi- sation et à la direction de la lutte. >< INSUFFISANCE. DE LA PRODUCTION DU BOIS D'ŒUVRE DANS LE MONDE. On commence à s'inquiéter de l'insuffisance du bois d'œuvre. M. Mélard, Inspecteur des Eaux et Forêts, a présenté à ce sujet au Congrès international de Sylviculture réuni à Paris en juin 1900, un mémoire très documenté et qui a vivement attiré l'attention. La consommation est supérieure à la production normale des forêts accessibles, ce qui amène la destruction des arbres. En France, on a dû, de 1894 à 1898, importer chaque année plus de 140 millions de bois d'œuvre au lieu des 42 millions d'autrefois. En présence de cette consommation croissante, on s’est demandé si on ne pourrait pas trouver hors de l'Europe de nouveaux approvision- nements. Mais il semble qu'en dépit des forêts vierges du nouveau continent et des grandes forêts équatoriales, le monde est, sous ce rapport, assez mal pourvu. Ces forêts sont, du reste, difficilement ac- cessibles, et les frais d'exploitation et de transport élèveraient dans de grandes proportions le prix des bois. Actuellement les pays pouvant fournir de grands excédents de production se réduisent à sept : cinq en Europe : l'Autriche, la Norvège, la Suède, la Finlande et la Russie et deux dans l'Amérique du Nord: les États-Unis et le Canada. Déduction faite des pays où cet excédent est très menacé, il ne reste plus que la Suède et la Finlande en Europe et le Canada en Amérique. Mais ces trois pays seraient incapables de satisfaire pendant longtemps aux demandes des pays importateurs. On marche vers une véritable disette de bois d'œuvre si l’on ne prend pas de promptes mesures pour mieux aménager les forêts et en arrêter la destruction. BULLETIN DE LA ARTE NATIONALE D'ACCENATAT / DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 47: ANNÉE SEPTEMBRE 1900 SOMMAIRE F\TAINGAUD. — Sur l'introduction, l’acclimatation et la multiplication du Poisson- Soleil des Etats-Unis (Eupomotis gibbosus) dans la rivière l'Isle, affluent de la Dor- 273 œne . ss... ".. esse. s ee. ee See esse. 0e ee +0 CHAPPELLIER. — Compte rendu de cultures d’Ignames de diverses fi 1 1899 dans l'Orléanais............. Er AA DRE CS MEN AE ER D PA EI ER AA Del CEE TE ALES PATIN. — Remarques au sujet de la se du ie du Ho ee) 28 Extraits des procès-verbaux des Séances de la Société : éance | Péeeile Ge DE ne TD SAR ARIANE SAN AREA AC ae Ste eur nette Mi oeN 286 fouliés de l’acclimatation des Axis ue de de bIbE SM Te CON I CIE Rice e DIM00S e croisement du Zébu avec les Vaches............... LE ANSE FER PNR A 101208 Extraits et Analyses : Eu FOA. — L’Éléphant d'Afrique ; ; son histoire naturelle et sa chasse. ..... HAS IR /00€ Lo des Bambous au Japon ....... DE PS EN PR AS CE re EM Re No02 SIN DR mena Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIEGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE #1, RUE DE LILLE, #1 È PARIS _ET A LA LIBRAIRIE Sn 12, RUE SAINTE- “ANNE Le Bulletin paraît tous 16 mois. ACTES en ET R AÇE VAS Vue vr Res Le ee pen à de Lan à Dites DÉSINFECTANT ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, uen avantage de n'être »’, Toxique ni Corrosif, Hémostatique et Styptique puissant. Adopté par Les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, da Préfecture de la Seine et la plupart des Services | d'Hygiène ef de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus : | SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs-Bourgeoïis (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour èv:.ir les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les HR les Fan Cachets et le Nom CRÉSYL-JEYES. Ni Corrosif LE VETO PEINTURE & LIQUIDE GNIFUGES. 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Thoré, conducteur des Ponts et Chaussées, à Mussidan, homme instruit et bienveillant, qui a bien voulu me seconder dans l'enquête à laquelle je me suis livré. L'Administration des Ponts et Chaussées a fait mettre par M. Thoré, en deux fois, vers 1895 et 1897, dix mille alevins d’'Eupomotis gibbosus (2) dans l'Isle. Ces alevins provenaient de l'établissement de pisciculture, dirigé par M. Geneste, au Barrage, près Bergerac, et placé sous la surveillance et le contrôle des Ponts et Chaussées. Ils mesuraient environ ? millimètres d'épaisseur sur 3 centi- mètres de longueur. Le marché de Mussidan est approvisionné d’'Eupomotis dans la même proportion au moins que des espèces les plus recherchées : Perches, Brêmes, Carpes, etc. Mais ce Poisson ne semble pas avoir encore figuré sur celui de Périgueux. Il y à quelques jours à peine, un marchand de Mussidan me disait qu'ayant porté des Eupomotis dans notre chef-lieu, les habitués du marché de cette ville avaient été fort inté- ressés à la vue de ce Poisson qu'ils ne connaïssaient pas. -La pêche de cette espèce ne semble donc pas jusqu'ici {1) Extrait d’une letire en date du 28 juin 1900 adressée à M. Léon Vail- lant, professeur d’Ichtyologie au Muséum et communiquée par lui à M, Jules de Guerne. -(2) La détermination précise en a été faite au Laboratoire d’Ichtyologie du Muséum, sur des exemplaires envoyés par M. Ed. Maingaud, Voir dans le Bulletin de la Société d'Acclimatation, 1899, page 51, la fgure de l’Eupomotis gibbosus. Bull. Soc. nat. Acc. Fr. 1900. — 18. 274 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. donner lieu à un commerce très étendu. Maïs il ne semble pas douteux que cela ne doive se réaliser par la suite, si lon considère la facon dont elle pullule dans la rivière d'Isle. On en pêche de toutes tailles, les plus petits mesurent 7 ou 8 centimètres et les plus grands de 13 à 15. L'abondance de l’Eupomotis est telle qu'il n’y a pas de gamin péchant avec un morceau de fil terminé par une épingle recourbée, qui n’en prenne une quantité en peu de temps, les jours « où ça mord ». Il n’est pas possible aussi d'examiner la pêche d'un amateur sans y trouver quelques individus de cette espèce. Cette année-ci (1900) notamment, il y a dans l'Isle une telle quantité de jeunes sujets que les pêcheurs voient constamment les Vers de leurs hamecons arrachés par des Eupomotis trop jeunes pour se prendre. Les spécimens de grande taille (13 à 15 cent.) semblent se tenir au milieu ou vers le milieu de la rivière, aussi les prend-on surtout avec des filets ou des verveux, tandis que les individus plus petits fréquentent de préférence les bords, c'est pourquoi les enfants munis de lignes très primitives ne prennent que des £upomotis de 6 ou 8 centimètres de long. L'Eupomotis gibbosus, d’une longueur de 5 centimètres, ne porte que la tache noire à l’épine operculaire, la tache rouge ne se montrant pas encore; à 6 centimètres, cette dernière apparaît ; à 8 ou 9 centimètres, elle est bien marquée, enfin quand l’animal atteint la taille de 15 centimètres (la plus grande que j'aie vue, quoique M. Thoré dise en avoir vu de 18 centimètres), les deux taches noire et rouge sont encore plus accusées, et au-dessus et au-dessous de la tache noire, on voit une màrge d’un beau blanc confinant à la tache rouge, au fur et à mesure que ces taches s'accentuent, l’épine oper- culaire, d’obtuse qu'elle était, devient plus ronde et plus dis- tincte de l’opercule. M. Thoré a mis les alevins d'Eupomotis dans l'Isle, tout près de Mussidan, dans la commune de Saint-Louis, c’est l'endroit qui lui a semblé le plus favorable pour cette opé- ration. | Actuellement ce Poisson est abondamment répandu dans toute la partie de cette rivière soumise à la surveillance de M. Thoré, soit de Neuvic au département de la Gironde, c’est- à-dire sur un parcours de 55 kilomètres. Comme l'on voit, l'empoissonnement de l'Isle par l’Eupo- LE POISSON SOLEIL DES ÉTATS-UNIS DANS L’ISLE.: 275 molis gibbosus semble jusqu'ici avoir complètement réussi, puisque l'espèce ne paraît pas avoir dégénéré et qu'elle s'y multiplie. Du reste elle est apte à la reproduction d'assez bonne heure; on trouve souvent en effet des spécimens de 8 ou 9 centimètres, qui ont l'abdomen chargé d'œufs. L'Isle est une rivière encaissée, en général assez profonde, à courant peu rapide, elle traverse, au moins à Mussidan, le Crétacé supérieur (le Donien ou Maëéstrichtien), aux environs de notre localité, les calcaires sont ferrugineux et un peu magnésiens. _ Dans la contrée, tout le monde fait grand cas de l’£Eupo- motis comme aliment. Ce Poisson est très épais, charnu, la chair en est ferme, très blanche, et surtout, qualité bien grande, elle est totalement dépourvue d’arêtes, aussi l'es- time-t-on presqu'autant que celle de la Perche, qui se prend rarement à Mussidan. Personnellement, je considère ce Poisson comme des meil- leurs de tous ceux qui vivent dans nos eaux et, si j'avais à dresser une échelle de la valeur gastronomique de nos espèces comestibles, je l’établirais comme suit : I. Perca fluvialilis. II. Eupomolis gibbosus. III. Cyprinus carpio. IV. Scardinius erythropthalmus. V. Gobio fluvialilis. VI. Squalius leuciscus. VII. Squalius cephalus. VIII. Abramis brama. IX. Chondrostoma nasus (1). Telles sont d’ailleurs les principales espèces qui se pêchent ici, les autres sont moins fréquentes. _ La faveur avec laquelle l'introduction de l’Eupomotis a été accueillie est très variable, les uns disent qu’il détruit beaucoup de Poissons naïissants, mais c’est tout au plus si les dégâts pourraient porter sur le frai parce que la bouche du Sun-fish n’est pas très grande. En général on peut dire que les avantages, unanimement reconnus à cette introduc- (1) CAondrostoma nasus est encombrant ici et très peu estimé. L'Administra- tion des Ponts et Chaussées a même songé à le détruire. 276 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. tion, dépassent de beaucoup les hypothétiques inconvénients qu'on y trouve. Ce qu'il y a de certain, c'est que M. Thoré a conservé dans un bocal deux £upormotis de 12 à 15 centi- mètres de longueur, en compagnie d’alevins et de petits Poissons ; aucun de ces derniers n’a été dévoré et pourtant pendant longtemps aucune nourriture n'avait été offerte aux Eupomotis. Ce Poisson se pêche du reste à l'hamecon amorcé au Ver ou à la Mouche. Ce qui a pu faire croire qu’il serait pisci- vore, c’est la voracité avec laquelle il se jette sur l’appât et lon dit ici de lui qu’ « il est le plus sot » des Poissons, parce qu'il mord facilement et qu’il avale si profondément l’ha- mecon, que, presque toujours, il est impossible de dégager celui-ci du pharynx de l’animal sans arracher une des ouïes ou même une portion de la tête. En résumé : l’Eupomotis gibbosius Lin. a été introduit dans l'Isle depuis cinq ans environ, il s’y est reproduit, semble s'y être acclimaté. Sa chair est excellente, c’est un Poisson dont on fait grand cas. Il atteint aujourd'hui 15 centimètres de longueur. Il est plus avantageux que nuisible, en supposant qu'il soit capable de nuire. En somme, c'est une espèce. à propager, elle est aussi ornementale qu'agréable au goût. M. Thoré, qui m'a fourni beaucoup des renseignements qui précèdent, m'a promis de les compléter en m'indiquant la provenance des sujets adultes qui ont fourni les alevins. IL me renseignera aussi sur l'élevage de ce Poisson et sur les tentatives d’acclimatation aui ont pu être faites dans les cours d’eau autres que l'Isle. Pour être complet et vous éclairer tout à fait sur cette intéressante espèce, je me ferai un plaisir de vous envoyer tous les renseignements que je pourrai par la suite recueillir sur ce sujet. COMPTE RENDU DE CULTURES D'IGNAMES DE DIVERSES ESPÈCES FAITES EN 1899 DANS L'ORLÉANAIS {1} par Paul CHAPPELLIER. Un mot d’abord sur l’Igname de Chine. La Société d'Acclimatalion, appréciant les qualités de cette espèce, mais désirant corriger le défaut qui empêche sa culture de se répandre, la trop grande longueur de son tuber- cule, a ouvert un concours pour l'introduction ou la création d’une variété à tubercule court et de facile arrachage. Depuis plus de dix ans, je n’ai cessé de m'occuper de cette question, et j'ai rendu compte, à plusieurs reprises, de mes essais à la Société. Les résultats que j'ai obtenus jusqu'à présent ne sont pas encore définitifs, mais cependant ne manquent pas d’ intérêt; je les mettrai tout à l'heure sous vos yeux. Notre collègue, M. Heckel, professeur à la Faculté des Sciences de Marseille, voyant que mes essais se prolongeaient indéfiniment sans succès, a imaginé un procédé plus simple et plus prompt pour arriver au résultat cherché. Il a envoyé à la Société, à deux reprises différentes, des tubercules obtenus au moyen de son procédé par son colla- borateur, M. le capitaine Dubiau, vice-président de la Société d'Horticulture des Bouches-du-Rhône. A la séance du 27 janvier 1899, j'ai rendu compte de l’exa- men que j'avais été chargé de faire des derniers tubercules reçus en novembre 1898. _ L'un de ces tubercules a été confié à notre collègue, M. De- breuil, et l’autre m'a été remis. Voici le tubercule que M. Debreuil a obtenu et la note dont il l’a accompagné : « Un tubercule d’'Igname de Chine, envoyé de Marseille par M. Heckel, m'a été confié par la Société d’Acclimalation. (1] Communication faite en séance générale le 8 décembre 1899. 278 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. » Planté en mai dans une terre franche défoncée à 80 cen- timètres, il a donné une tige d'environ 4 mètres sans bul- billes. » Arraché le 1° novembre 1899, il a fourni deux tubercules soudés par le haut (près de la tige). » Le premier, long d'environ 85 centimètres, pesait environ 750 grammes et mesurait 17 centimètres à sa plus grande circonférence. » Le second était composé d’une touffe de quatre petits d’une longueur d'environ 12 centimètres chacun; ces quatre petits tubercules se trouvaient au bout d’un tubercule d’en- viron 35 centimètres. Ce dernier avait été rongé par des Vers blancs et pesait, avec les quatre petits, à peu près 300 grammes. » Celui que j'ai cultivé mesure environ 84 centimètres de longueur. Ces résultats tendent à prouver, comme je l'avais fait pressentir dans ma communication du 27 janvier 1899 (1) que la forme ramassée des tubercules obtenus dans l'expérience de MM. Heckel et Dubiau était due à une cause accidentelle et passagère. Du reste, cette cause accidentelle se reproduit souvent dans les cultures ; en voici un exemple : ce tubercule, qui provient de mon jardin, n’a pas été difficile à arracher en raison de sa forme ramassée, et cependant il n’a, au point de vue de cette forme, aucun mérite, attendu que son contournement a été produit par l’interposition d’un corps étranger : c'était un pot à fleurs. Je le planterai cette année, mais je suis certain d’ores et déjà qu’il produira un tubercule ayant une longueur nor- male de 70 à 80 centimètres de longueur. Quoique les espérances de MM. Heckel et Dubiau ne se soient pas réalisées en 1898, nous pensons qu'ils ont con- tinué, en 1899, leurs très intéressants essais et qu'ils vou- dront bien nous tenir au courant des résultats qu'ils auront obtenus. J'arrive maintenant à deux Ignames que j'ai déjà présen- tées à la Société l'an dernier; elles m’'avaient été remises par notre collègue, M. Maurice de Vilmorin, qui les avait reçues (1) Voir Bulletin de la Société d’'Acclimatation, mai 1899, p. 158. an AA LÉ LE LA ad + RO ide are Né be SL Qu c Den a A tea re VAN Lie HE 3 Je Ré * COMPTE RENDU DE CULTURES D’IGNAMES. 279 de M. l'abbé Farges, missionnaire en Chine (au Se-Tchuen). Je vous avais dit que l’une d’elles avait beaucoup de rap- ports avec notre Igname de Chine; cependant j'avais cons- taté sur le tubercule une bifurcation et un brusque renflement qui, du reste, pouvaient être accidentels. La culture que j'en ai faite cette année a confirmé cette supposition. En effet, l’un des tubercules que j'ai obtenus mesure 90 centimètres de longueur. SA Cette Igname, nouvellement importée du Se-Tchuen, est donc tout simplement notre ancienne Igname de Chine. L'autre espèce, figurée également dans le Bulletin de mai 1899 (p. 162, sous les lettres H et I), présente, au contraire, un réel intérêt; c’est l’'Igname de Farges. Les tubercules que j'avais plantés au printemps dernier étaient jeunes et de faible dimension; ceux qu'ils ont produits cette année ont un volume satisfaisant, celui d’une pomme de terre moyenne, en voici plusieurs exemplaires. Il serait toutefois prématuré de dire dès aujourd’hui que l’'Igname de Farges donne entière satisfaction au desideratum de la Société d’Acclimatalion; mais ce qu'on peut affirmer, c'est que cette nouvelle espèce possède des qualités pré- cieuses. Culture très facile en pleine terre sous notre climat, forme tout à fait sphérique, évitant toute difficulté d’arrachage, multiplication très facile au moyen des nombreuses bulbilles; enfin, elle est véritablement comestible. Plusieurs des per- sonnes auxquelles je les ai fait déguster ont trouvé leur qua- lité au moins égale à celle de l’Igname de Chine. Il y a toutefois un point sur lequel je conserve des doutes : la plante sera-t-elle suffisamment productive? En effet, de même que l’Igname de Chine, chaque pied d’Igname de Farges ne donne, sauf dans des cas exception- néls, qu’un unique tubercule. Or, le volume du tubercule de la nouvelle espèce est bien faible, comparé à celui de l’an- cienne, et pourtant l'abondance des racines semble bte une plante assez vorace. Mais lors même que ce nouveau légume aurait le défaut d’être moins productif que l’ancien, j'estime que sa forme seule, et aussi, il faut bien le dire, sa nouveauté, devront lui assurer, au moins à ses débuts, une certaine vogue. Je le regarde donc comme très intéressant, et j'engage les 280 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. amateurs, de même que les maraïîchers et horticulteurs, à ne pas négliger sa culture (1). Cette nouvelle espèce avait, pour moi personnellement, un intérêt tout particulier. En voyant ce tubercule tout à fait sphérique, j'avais tout de suite pensé à un croisement. En effet, pour obtenir la variété demandée par la Société dAcctimatation, c'est sur l'hybridation que je compte, et depuis dix ans, je l’ai pratiquée des milliers de fois. Presque toutes mes tentatives sont demeurées stériles ou ont provoqué la naissance de produits ressemblant à l’un des parents. Plusieurs essais cependant ont réussi, un notamment, c’est celui qui consiste dans la fécondation entre l'Igname de Chine à tubercule très long et l’Igname de Decaisne à tubercule arrondi. Parmi leurs produits, plusieurs participent, à des degrés différents, aux qualités et aux défauts de leurs parents et ne manquent pas d'intérêt. J'ai donc pensé immédiatement à tenter une hybridation entre la nouvelle espèce et celles que nous possédons déjà. Outre l'espoir d'obtenir une postérité à tubercule court, ou au moins demi-long, il y avait, dans cette expérience, un détail qui piquait ma curiosité. L'Igname de Chine, celle de Decaisne et beaucoup d’autres espèces du même genre sont volubiles. La volubilité, chez l’Igname de Chine, a lieu de gauche à droite, ou, pour mieux préciser, dans le sens contraire à la marche des aiguilles d’une montre, et j'ai été bien surpris en voyant que cette volubilité avait lieu en sens opposé dans la nouvelle espèce, c’est-à-dire de droite à gauche. Cette différence m'avait suggéré une idée bizarre. Si cette hybridation donnait des résultats, quel serait le sens de la volubilité chez les nouveaux produits? Tourneraient-ils de droite à gauche comme chez la nouvelle espèce, ou de gauche à droite comme chez l’'Igname de Chine, ou bien, tiraillés en sens contraire par leur double atavisme et (1) Notre collègue, M. Maurice de Vilmorin, m’a chargé de prévenir la So— ciété d'Acclimatation qu'il mettait, à titre gracieux, à la disposition de ses Membres environ deux cents tubercules de cette nouvelle espèce. Les bulbilles que j'ai reçues de M. Maurice de Vilmorin ne m’ont donné que des sujets mâles ; je serais très désireux de posséder des individus femelles. COMPTE RENDU DE CULTURES D’IGNAMES. 281 ne pouvant se décider à s’incliner plutôt d’un côté que de l’autre, prendraient-ils le parti de suivre la perpendiculaire et de s'élever en droite ligne ? Ce problème assez curieux n’a pas été résolu; il ne s’est même pas posé, car l’hybridation a été inféconde, c’est à r'e- commencer l'an prochain. IMimerme reste Fresnes tee plus que quelques mots à ajouter pour présenter mes derniers ré- sultats. Voici d’abord une variété, avec un tubercule dou- ble (voir la figure, à droite), qui est vraimentcourteet paraît remplir les conditions du pro- gramme, mais elle est seulement de . cette année, et | sonobtentiontrop | récenteneperme ne pas den compter 2 | sur sa fixité; nous t- la reverrons dans Ignames de Chine à tubercules raccourcis, provenant un an. des cultures faites par M. Paul Chappellier en La seconde, bien 1899. (D'après une photographie.) que plus longue (voir la figure, à gauche), est plus intéressante; je l’ai déjà présentée à la Société il y a deux ans (Bulletin, février 1898, p. 59), lé tubercule était double; l’une des branches a été détruite par un accident; ainsi réduit de près de moitié, il pèse 500 grammes; s’il avait conservé ses deux branches, il atteindrait 900 grammes environ, ce qui, pour mon terrain peu fertile, représente un poids normal. Depuis trois ans que je la cultive, cette Igname ne s’est pas allongée et a conservé sa forme courte. 282 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Si elle se maintient encore l'an prochain, je ne serais pas éloigné d’avoir rempli le desideratum de la Société. En effet, un jardinier pourra facilement, d’un coup de bêche ou de fourche, enlever ce tubercule de terre sans avoir besoin de fouiller à 80 centimètres et plus de pro- fondeur. Je me fais cependant un devoir d'attendre encore au moins une année avant de me prononcer définitivement sur le mérite de cette variété et d'affirmer que j'ai enfin atteint le but vers lequel tendent mes efforts depuis plus de dix ans. | ; ais REMARQUES AU SUJET DE LA SÉLECTION DU BANANIER DU HAMMA (1) par Charles PATIN, Consul général honoraire de Belgique en Colombie, Botaniste-Explorateur. Mes collègues de la Société d'Acclimatalion me permet- tront de donner mon opinion sur les articles contradictoires, publiés dans nos Bulletins par MM. Charles Rivière, directeur du Jardin du Hamma, et le Dr Trabut, botaniste du Gouver- nement général à Alger. D'après la communication faite par M. Ch. Rivière, à la séance générale du 24 février 1901, je pense qu'il a dû se glisser une erreur dans les observations, et en lisant la réponse du D: Trabut, publiée ci-dessus, page 77, je me rallie complètement à sa manière de voir. Le Bananier auquel fait allusion M. Rivière, et qu'il croit obtenir par sélection, est sans doute l’un des Bananiers des climats froids cultivés aussi bien en Colombie qu’au Brésil. J'en signalerai huit espèces bien distinctes : 1° Le Musa paradisiaca qui produit la plus volumineuse de toutes les bananes. C’est l’espèce qui a besoin de la plus grande somme de chaleur; de taille assez élevée, donnant des régimes contenant peu de mains, quatre à cinq, de gros fruits, dont la longueur dépasse parfois 0,40. On les mange géné- ralement cuits, soit verts, soit après maturité. 2 Le Musa sapientum, de taille plus élevée, avec régimes très grands et formées de dix à onze mains, contenant en- semble près de cent fruits. On les mange généralement frais, comme fruits de table. Cette banane s'emploie aussi verte et cuite; verte on la réduit en farine, et c’est élle qui fait l’objet de la grosse exportation aux États-Unis, où des millions de régimes sont importés chaque année. C’est aussi l'espèce, avec celle qui suit, la plus propre à la confection (1) Communication faite en séance générale le 25 mai 1900. 284 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. des bananes-figues, dont j'offre un échantillon à la Société. Ceci est certainement le grand avenir pour la culture des bananes, car les bananes-figues constituent un aliment sain, nutritif et agréable, et sont d’une conservation presque indéfinie, puisque celles que vous avez sous les yeux ont été séchées en janvier-février 1897 et expédiées par moi- même à mon collègue, M. Léon Vallez, Consul général de Ni- caragua, à Bruxelles. La boîte en fer blanc qui les renfermait a été ouverte dès son arrivée, et depuis lors, on en retire de temps en temps quelques bananes, c’est-à-dire qu’on intro- duit ainsi de l'air dans le récipient ; cependant, comme il est facile de s’en rendre compte, elles sont parfaitement con- servées. 3° Le Musa sinensis ou Cavendishii, espèce naine, trapue et à régimes aussi grands que ceux de la précédente, touchant quelquefois le sol; elle aime les climats plus chauds que le M. sapientum et est employée aux mêmes usages. La 4e espèce est un Musa de grande taille, à fruits rouge foncé, dont la chair est assez dure. Elle se plaît en climats chauds et tempérés, comme du reste les deux espèces précé- dentes, mais est moins estimée que celles-ci. Une 5° espèce est le Musa (Pomme) à régimes de moyenne grandeur, fruits plus petits, mais de goût plus fin; mangé comme fruit de table. La 6° espèce, le Musa (Date) à fruit plus petit et plus sucré que ceux de l'espèce précédente : même usage. Ces deux espèces peuvent servir aussi à préparer des bananes-figues. f Le Musa, appelé en Colombie : Maritu; fruits à chair rose jaunâtre, dont beaucoup de mains avortent. La 8e espèce est le Musa dit : Guineo, son fruit se mange uniquement cuit, il est à chair blanche, et sert principalement à faire des purées. Il est très estimé comme légume. Plusieurs des mains avortent, aussi le fruit est court et un plus ar- rondi que chez les autres espèces. C'est presque certainement une de ces deux dernières espèces qui a été signalée par M. Ch. Rivière. Elles croissent principalement en climats froids, c’est-à-dire peuvent sup- porter un température bien voisine de 0°. Comme le Bananier que M. Rivière croit avoir obtenu par sélection a été pris dans la vieille plantation, il est extréme- ment probable qu'il vient d’une souche des Bananiers d’es- REMARQUES SUR LA SÉLECTION DU BANANIER DU HAMMA. 285 pèces diverses importés du Brésil, et dont la plupart ont été détruits par le froid; ceux qui ont pu résister à la gelée dans la profondeur du sol, ayant repoussé avec difficulté, n’ont donné que petit à petit la plante fructifère développée, dont parle M. Rivière. J’ai cultivé des milliers de Bananiers dans mes plantations en Colombie et je n'ai jamais observé de fait analogue à celui qui est signalé. Je ne crois pas qu’on puisse obtenir des variétés nouvelles par sélection avec des plantes qui ne donnent pas de graines, si ce n’est toutefois la fixation d’une anomalie, une panachure, par exemple, un fruit difforme, mais cela ne modifierait rien dans la couleur ni la saveur du fruit, et bien moins encore sa résistance aux diverses tem- pératures. 286 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. SÉANCE GÉNÉRALE DU 23 MAI 1900. PRÉSIDENCE DE M. RAVERET-WATTEL, VICE-PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. PROCLAMATION D'UN NOUVEAU MEMBRE. M. le Président proclame l’admission de : M. PRÉSENTATEURS. Baron J. de Guerne. Ed. Perrier. Thorndike-Nourse. D' Arturo BELLINI, propriétaire à Comac- chio (Italie). En l'absence de M. le Secrétaire des séances, M. le Secré- taire général procède au dépouillement de la correspondance. DÉPOUILLEMENT DE LA CORRESPONDANCE. Généralités. — Depuis la dernière séance, la Société a reçu avis du décès de MM. Bérard et Duchemin. MM. Maurice de Vilmorin et Cacheux acceptent la délé- gation qui leur a été donnée pour représenter la Société au Congrès de Sylviculture et remercient le Conseil de les avoir désignés à cet effet. Mammifères. — M. Germain, Membre honoraire de la Société, écrit de Périgueux pour signaler l'utilité du croise- ment du Zébu avec le Bœuf. Il rappelle à cette occasion qu'il a déjà traité cette question dans le Bulletin de la Société en 1886. Ornithologie, Aviculture. — M"° Coni (Mb) communique une notice sur l'élevage du Hocco et sa reproduction en captivité aux environs de Buenos-Ayres. Entomologie. — M. Bourgeois envoie une notice sur l’Apiculture en Tunisie et donne de nombreux chiffres, con- cernant le prix des installations et les bénéfices que peut produire dans ce pays l'élevage des Abeilles. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 287 Aquiculture. — M.le Ministre de l'Agriculture remercie la Société du rapport qu’elle lui a envoyé concernant la distri- bution d'œufs de Truites arc-en-ciel récemment faite par ses soins ef il la félicite des efforts constants qu’elle poursuit pour favoriser le développement de la pisciculture en France. — M. B. d’Albertis, de Gênes, demande des renseigne- ments sur les principaux établissements de pisciculture qu’il pourra visiter lors d’un prochain voyage en France. Botanique. — M. Charles Patin (Mb) adresse une note sur la combustibilité des Opuntia, tout au moins en Colombie. L'auteur ne partage pas l'opinion de M. Roland Gosselin au sujet du rôle utile que pourraient jouer ces Cactées pour arrêter les incendies. Colonisation. — M. Charles Patin écrit que la maladie des Bovidés, en Colombie, au sujet de laquelle la Société a été consultée, il y a un certain temps (voir ci-dessus, page 112), a été combattue par les procédés modernes et notamment par l'usage d’un sérum pour la vente duquel le Gouvernement local avait même accordé un monopole. Cheptels, distributions de cocons et de graines, etc. — M. Gallé-Defond, de Port-de-Piles (Vienne), offre à la Société un couple de Mouettes conservées depuis quelque : temps en captivité et qui sont très familières. — La correspondance comprend un certain nombre de lettres relatives à la distribution d'œufs de Truite arc-en-ciel dont il a été question dans la séance du 27 avril dernier. L’éclosion s’est produite partout très vite après l’arrivée des envois et le développement des embryons se poursuit d'une manière satisfaisante. — Une distribution de cocons d’Aftacus cynlhia ayant été faite pendant la deuxième quinzaine de mai, un grand nombre de lettres sont arrivées à la Société, accusant ré- ception et remerciant des envois auxquels l'abondance des cocons a d’ailleurs permis de faire participer divers établis- sements publics et quelques Membres de la Société entomo-. logique de France. — M. Mottaz, de Genève, annonce l’envoi de graines de Kotrœuteria paniculaia et d'un certain nombre de plants de LE fi a/ 2) AS 0 he." < A +47 16 RAC D 288 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Nepeta Meyeri, plantes mellifères, auxquelles il joint deux cents bulbilles d'Oxalis crenata. — Un grand nombre de Membres, notamment MM. Cros, Cornu, M. de Vilmorin, Zeller, remercient la Société pour les envois de graines qui leur ont été adressés. — M. Magne offre à la Société, pour les distribuer entre ses Membres : le une certaine quantité de graines d’'Eryn- gium alpinum, Ombellifère connue sous le nom vulgaire de Chardon bleu des Alpes et qui ont été récoltées par lui à la Vanoise. L'Eryngium alpinum est une plante très décora- tive; 2° quelques pieds de Puya Weberi, Broméliacée des hautes régions de l'Amérique du Sud et provenant de graines reçues par M. Weber, lesquelles ont été semées à Boulogne- sur-Seine ; 3° enfin, M. Magne met à la disposition de ses collègues diverses plantes alpines provenant de ses semis de printemps et se déclare prêt d'ailleurs à faire des envois ultérieurs aux personnes désireuses d'entreprendre la cul- ture trop peu répandue des plantes alpines. COMMUNICATIONS ORALES. . M. le Secrétaire général rend compte de l’excursion faite le 12 mai par les Membres de la Société à Boulogne-sur-Seine où l'on a visité les serres de la Ville de Paris et la propriété de M. Magne. Dans les serres et les jardins environnants ont été examinées non seulement les Azalées dont la floraison touchait à sa fin, mais encore bien d’autres plantes intéres- santes à divers égards. Chez M. Magne, on a pu voir une série de végétaux extrême- ment variés. Les pelouses sont garnies non seulement d'arbres et d’arbustes appartenant à des essences à feuillage coloré et très ornementales, mais encore de plantes alpines qui forment une bordure continue le long des allées. Toutes ces plantes sont étiquetées avec grand soin. La plus large part est d’ailleurs faite aux plantes alpines dans les cultures de M. Magne et des espaces spéciaux sont réservés pour leur multiplication. Dans la partie consacrée aux semis, on a beaucoup remarqué les Edelweis (Immortelle des neiges, Gnaphalium leonlopo- dium) que M. Magne a réussi le premier à cultiver et à faire PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 289 fleurir sous le climat de Paris. Un certain nombre de Papavé- racées, de Gentianes, des Aquilegia, diverses Composées, en pleine floraison, notamment des Arnica, ont vivement attiré l'attention et l'on s’est arrêté à considérer la plus belle des Orchidées indigènes, le Cypripedium calceolus, bien fleuri également. La comparaison de ces fleurs a pu d’ailleurs être faite im- médiatement avec des Orchidées exotiques dont une serre contient des spécimens nombreux appartenant à des espèces très diverses. Une grande serre tempérée renferme une série de plantes vertes choisies parmi les plus intéressantes et les plus nouvelles. L’on y voit de beaux Palmiers et de nom- breuses Fougères parmi lesquelles une espèce arborescente en très bel état. En dehors de l’horticulture, la curiosité de chacun a pu être largement satisfaite par la vue de nombreux souvenirs scientifiques et artistiques que M. Magne a rapportés de ses voyages, notamment en Égypte. Les collections sont disposées avec beaucoup de goût dans un pavillon en bois, de construc- tion très originale et des plus soignées, qui rappelle, lui aussi, la haute montagne, car c’est un modèle d'habitation confor- table emprunté aux cantons les plus élevés de la Suisse. La propriété de M. Magne est égayée par quelques animaux, Daims et Faisans, qui paraissent se plaire dans ce milieu où les soins ne leur font certainement pas défaut. Après la visite de la propriété, les hôtes de M. Magne se sont réunis dans la salle à manger où un lunch leur a été servi. M. Cornu, professeur de Culture au Muséum d'Histoire naturelle, a pris alors la parole pour remercier M. Magne de son bon accueil et le féliciter des résultats obtenus par lui dans la culture d’une foule de plantes intéressantes dont beaucoup s'offrent rarement à l'étude des botanistes et des horticulteurs. Les excursionnistes étaient au nombre d’une vingtaine, parmi lesquels MM. Weber, président de la Section de Bota- nique, P. Chappellier et Debreuil, membres du Conseil, J. de Guerne, secrétaire général, Loyer, bibliothécaire, Clément, président de la Section d'Entomologie, Rivière, directeur du Jardin d'essai du Hamma, à Alger, etc. — M. Patin, consul honoraire de Belgique en Colombie, fait Bull. Soc. nat. Acc. Fr. 1900. — 19 290 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. une communication sur les avantages que présente le Ja- tropha curcas comme support pour la culture des Vanilliers, (voir Bulletin ci-dessus, page 203). Les observations de M. Patin ont été faites en Colombie pendant son séjour pro= : longé dans ce pays. Il communique en outre quelques notes sur l'emploi du Jatropha gossypifolia, variété Slaphysagri- fotlia contre la lèpre. Deux plants de ce Jatropha ainsi que des graines sont offerts à la Société par M. Patin. — M. Louis Guesde, secrétaire de la Chambre d'Agriculture de la Pointe-à-Pitre et qui représente la Guadeloupe à l'Expo- sition universelle en qualité de Commissaire général, fait une communication sur les cultures dans cette Colonie. Il insiste particulièrement sur les essais d’acclimatation qu’il a tentés. M. le Président remercie M. Guesde de sa communication et rappelle qu’une médaille lui a été décernée par la Société en 1897 pour l'introduction, l’acclimatation et la culture du Kolatier à la Guadeloupe. : — M. Patin présente quelques observations sur la sélection du Bananier du Hamma. Contrairement à l'opinion de M. Ri- vière, il croit que le Bananier cultivé par celui-ci au Jardin d'essai et dont la culture est préconisée en Algérie appartient bien à l’une des espèces ou variétés connues de l'Amérique du Sud. En Colombie notamment, plusieurs d’entre elles ré- sistent bien au froid, ce qui permet d’ailleurs de les cultiver assez haut dans les montagnes, même sous les tropiques. — M. Ch. Rivière, après avoir répondu quelques mots à M. Patin au sujet du Bananier du Hamma, fait une communi- cation sur les refroidissements nocturnes dont l'intensité est très variable suivant qu’on les observe à la surface du sol ou à une certaine hauteur au-dessus de celle-ci. Une série de graphiques relevés au Jardin d’essai d'Alger et présentée par M. Rivière, montrent d’une manière très nette comment des variations de température, souvent insoupconnées, expliquent bien des insuccès en acclimatation végétale. — M. Clément présente une famille de jeunes Æalabe, Araignées fileuses de Madagascar, qui viennent de lui être adressées par le R. P. Camboué. L'envoi est arrivé en bon état ; M. Clément, après avoir donné lecture de la lettre de nos correspondant, ajoute quelques détails sur la manière PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 291 dont il nourrit les jeunes animaux, très voraces et qu'il faut alimenter copieusement, sous peine de les voir se manger entre eux. Les observations qui pourront être recueillies sur ces Halabe seront communiquées ultérieurement à la Société. — M. Eugène Simon (dont l'autorité est universellement reconnue pour tout ce qui concerne les Arachnides) cite divers faits concernant l'emploi des soies d’Araignées, leur finesse et leur solidité. Il faut reconnaître toutefois que de grandes difficultés pratiques sont encore à résoudre pour élever en nombre considérable ces animaux carnassiers. — L'ordre du jour étant très chargé, M. le Secrétaire gé- néral dépose simplement sur le bureau un mémoire accom- pagné de nombreuses photographies et où M. A. de Marcillac décrit en détail l'Établissement piscicole de Bessemont, près Villers-Cotterets (Aisne). Cet Établissement, consacré à l’éle- vage à peu près exclusif de la Truite arc-en-ciel, a pris depuis quelques années un grand développement et il a fallu lui ad- joindre diverses dépendances situées en particulier dans le département de la Marne. — M. de Guerne rappelle que M. de Marcillac a obtenu déjà de la Société a’ Acclimatalion, pour ses travaux de pisci- culture, deux hautes distinctions (Médaille hors classe à l'ef- figie d’Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, en 1895 ; Médaille d’or du Ministre de l'Agriculture, en 1898). Dans quelques jours, on pourra voir groupés au Palais des Pêches, à l'Exposition universelle, les principaux produits de l'Établissement de Bessemont, ainsi qu'un plan en relief de la contrée que M. de Marcillac a su aménager d’une manière si avantageuse pour la pisciculture. — M. le Président remercie toutes les personnes qui ont pris la parole dans cette séance, laquelle, grâce au talent des orateurs et à la variété des sujets traités, a été, sans con- tredit, l'une des plus intéressantes de la session. C'en est aussi la dernière. Mais un grand nombre de Membres de la Société se retrouveront certainement bientôt dans les Congrès très variés qui vont se succéder pendant l'Exposition univer- selle. Le Conseil veillera à ce que la Sociélé soit convena- blement représentée à tous ceux d’entre eux qui touchent à ses études. L'on peut donc espérer pour la fin de cette année et le début du siècle prochain, une reprise fort active des 292 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. travaux de la Sociélé d'Acclimatation. Les documents qui lui parviendront à la suite de l'Exposition universelle con- tribueront également pour leur part à augmenter l'intérêt des communications appelées à figurer à l’ordre du jour des séances en 1901. Pour le Secrétaire des séances : JULES DE GUËÉRNE, Secrétaire général. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. DIFFICULTÉ DE L’ACCLIMATATION DES AXIS IMPORTÉS (1). La Pataudière, par Champigny-sur-Veude (Indre-et-Loire), 3 mars 1900. Vous m'écrivez, cher Monsieur, que vos Axis ne reproduisent point, que le mâle est bien méchant. Or, ces Axis sont des importés. J'ai connu et je connais encore plusieurs amateurs qui possèdent des Axis importés, très familiers, très bien portants; ils n’ont jamais re- produit et les mâles ont toujours été fort méchants. Pour moi, depuis plus de vingt ans, j'ai des Axis en grand nombre (vous avez dû les remarquer à la Pataudière, car ils sont superbes), ces animaux reproduisent à merveille chaque année et plusieurs Cerfs vivent Zoujours avec les Biches, foujours lous ensemble, dans le même enclos, en toute saison. Et je w’ai jamais eu de mâle méchant. Au moment du rut des fe- melles, les mâles bataillent bien un peu, mais les plus faibles cèdent aux plus forts et aucun ne maltraite les Biches. Je crois donc que les Axis importés sont très longs à se bien accli- mater pour se décider à la reproduction... Je crois encore qu’il ne faut point avoir de mâle #rop familier, car, alors, en vieillissant, il de- vient mauvais. J'ai toujours, ici, des Cerfs de six, sept, huit ans, très beaux, aux bois énormes, doux, jamais furieux, moins éaquins même que les plus jeunes. Mais les gardiens du parc de la Pataudière ont l’ordre sévère (1) Extrait d’une lettre adressée à M. Ch. Debreuil. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 293 de ne jamais caresser, de ne jamais jouer avec les animaux et surtout de ne jamais les battre. C’est là le point essentiel; car vous pouvez être certain que fous les Cerfs, toutes les Antilopes adultes érop familiers sont ou devien- dront, forcément, méchants. En ne les rendant pas trop familiers, on peut éviter ce désagrément et ce danger. Feu M. Sharland a eu, maintes fois, des Axis importés, les mâles trop familiers, et toujours féroces, sans avoir jamais pu en obtenir la reproduction. M. Bizeray, de Saumur, possède encore un beau couple d’Axis im- portés, mâle érès familier, mais érès méchant et pas de reproduction ! Vous, vous avez, également, des Axis importés... le mâle est mé- chant, m'écrivez-vous, et vous n’obtenez pas la reproduction !... Tous les Axis que j'ai cédés ont toujours parfaitement et de suite donné reproduction. Cherchez ?... Trouvez ?... et donnez-moi la cause de ce fait re- marquable. Bien cordialement, PaAys-MELLIER. LE CROISEMENT DU ZÉBU AVEC LES VACHES. Périgueux, le 24 mai 1900. A Monsieur le Président de la Société nationale d'Acclimatation. Je vois dans le compte rendu de la séance du 8 janvier 1900 de la 1re Section (Mammifères), Bulletin ci-dessus, page 90, que M. De- breuil émet l’avis qu'il y aurait intérêt à essayer, en France même, le croisement du Zébu avec une ou plusieurs de nos races bovines. J’ai l'honneur de vous rappeler que cette indication se trouve lon- guement exposée dans un travail sur les animaux domestiques de la Cochinchine française, dont je suis l’auteur et qui a été inséré au Bulletin d’août 1886. A l’article Bœuf, les bons résultats du croisement du Zébu avec la race de Lourdes sont signalés. Vers 1867 ou 1868, M. Gourdon, professeur à l’École vétérinaire de Toulouse, a publié dans le Journal des Vétérinaires du Midi, un long exposé de ce croisement, dont il jugeait le produit remarquable. La Société d’Acclimatation pourrait facilement se procurer cet article. Dans un des derniers Bulletins, un colon d'Algérie a mentionné les bons résultats du croisement du Zébu avec la Vache algérienne, cela ne saurait m’étonner. Ÿ Quant au Zébu de Madagascar, je dois penser, d’après ceux que 294 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. j'ai vus à Pointe de Galles et à Aden, qu’il ne convient pas autant que celui de l’Annam pour des croisements avec des races françaises et algériennes. J'ai l'honneur de vous demander, M. le Président, que mon travail soit rappelé à la l'° Section par la communication de cette lettre. Les Zébus dont il est question avaient été donnés par moi à M. Fould, et c’est dans son domaine de Mourles, près Lourdes, dont moñ père était le vétérinaire, que le croisement a eu lieu. R. GERMAIN, Membre honoraire de la Société d'Acclimatation. EXTRAITS ET ANALYSES. L'ÉLÉPHANT D'AFRIQUE,| Son histoire naturelle et sa chasse (1), par Édousrd Fou. Je commence par le roi des animaux, le vrai, celui que désigne l'étude, l'expérience et le sens commun, en dépit du bon La Fontaine et même quelques naturalistes. Je veux parler de l'Éléphant (2). (1) La Société d’Acclimatution a publié depuis 1896 une nombreuse série de documents relatifs à l'Éléphant d’Afrique. L'accueil favorable qui a été fait à ces divers articles et l'intérêt même du sujet, justifie amplement l'insertion dans le Bulletin du présent mémoire. Celui-ci figure en appendice dans le beau livre récemment publié par M. Édouard Foa et intitulé : C'hasses aux grands fauves pendant la traversée du continent noir, du Zambèze au Congo français (1 vol. in-8, x11-352 pag., illustré de nombreuses gravures, avec une carte en couleurs.) La Société d'Acclimatation remercie l’auteur d’avoir bien voulu lui permettre de faire à son ouvrage un aussi large emprunt. Elle exprime également toute sa gratitude aux éditeurs MM. Plon, Nourrit et Cie qui ont eu l’obligeance de mettre à sa disposition les clichés ci-joints. — Le livre de M. Edouard Foa mérite d’être connu de tous les amis de la Nature et le présent extrait le recommandera sûrement davantage aux lecteurs sérieux qu’une analyse incomplète. (2) On trouvera dans Mes grandes chasses dans l'Afrique centrale, 1895, p. 202, 291, 293, 296, quelques mots sur les mœurs de cet animal. J’ai à rectifier deux assertions que l'expérience m'a fait juger inexactes. L’Éléphant ne s’affaisse pas toujours lorsqu'il est frappé au cœur : il rend du sang par la trompe et donne des signes de gros abattement; quelquefois, il reste sur place et ne s’abat qu’ensuite, mais il peut encore marcher pendant une centaine de mètres. D'autre part, sérieusement frappé aux poumons, il ne va guère à plus de 3 ou 400 mètres. EXTRAITS ET ANALYSES. 295 L'âge auquel peut arriver cet animal est très difñcile à fixer ; dans l'Inde, il ne vit pas au delà de cent vingt ans; mais dans ce pays la captivité abrège, croit-on, son existence. On peut donc présumer que cent cinquante ans constituent l'extrême vieillesse pour un Éléphant d'Afrique. Les traces extérieures de l’âge avancé sont malaisées aussi à bien définir chez lui; j'ai remarqué que les vieux Éléphants ont des creux tres profonds aux tempes, la mâchoire saillante, en un mot la tête osseuse, comme si la peau était tendue directement sur le crâne ; le reste du corps est aussi plus maigre, plus anguleux. Naturellement leur taille a atteint son maximum. J'ai noté sur mes carnets la taille de presque tous mes Éléphants. Le tableau comparatif qui termine cet ouvrage en donne une vingtaine à titre de renseignements. La moyenne que j'ai trouvée est à peu près de 3",19 (10 pieds 7) pour les mâles adultes portant des défenses de 20 kilos et au-dessus. Elle est de 2,93 (9 p. 8) pour les femelles. J'ai tué des femelles sans défenses et un mâle bien au-dessus de cette taille, mais c’est, je crois, exceptionnel, sauf dans quelques régions encore peu fréquentées où les Éléphants peuvent arriver en toute tranquillité au terme de leur croissance. Chez l'Éléphant de l'Inde, la circonférence du pied antérieur repré- sente, à peu près exactement, dit-on, la moitié de la hauteur du garrot. Cette base ne peut être adoptée pour celui d'Afrique : je n’ai jamais constaté pareille concordance ; Sir Samuel Baker non plus (1). Généralement ce tour du pied est inférieur à la moitié de la hauteur. Cela ferait supposer que l’Éléphant d'Afrique a le pied relativement plus petit que son congénère asiatique. La plante du pied de devant du mâle et celui de la femelle diffèrent sensiblement par la dimension, d’abord, et ensuite par la forme : légè- rement ovale pour le mâle, tout à fait ronde pour la femelle ; ce carac- tère permet au chasseur de distinguer sur le sol la trace d’un petit mâle de celle d’une grande femelle. Les deux sexes ont les pieds de derrière d’un ovale allongé. Le système pileux est plus développé aussi chez le mâle ; la lèvre, l’intérieur des oreilles, le bouquet qui termine la queue, sont plus touffus ; il y a aussi entre eux, comme chez tous les animaux, différence de grosseur du cou, du poitrail, des membres, etc. Vécût-on cinquante ans dans un pays à Éléphants, il est impossible de se rendre compte exactement de la facon dont ils se reproduisent, mais j'emprunte à M. Sanderson, qui est une autorité incontestée, ayant été chargé pendant treize ans par le Gouvernement anglais de capturer des Éléphants et de les dresser pour le travail, les renseigne- ments suivants, qui ne concernent à la vérité que ceux de l’Inde, (1) Mile Tributaries cf Abyssinia, petite édition, 1894, p. 199, 296 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. mais qui doivent pouvoir s'appliquer à peu près à leurs congénères de l'Afrique (1) : .« Les femelles, commencent à reproduire vers seize ans et à inter- » valle de deux ans et demi (2). Elles portent vingt-deux mois pour » un mâle, mais dix-huit mois leur suffisent pour donner naissance à ». une femelle. Il n’est pas rare de voir une mère ayant deux petits > d’âges différents ; dès sa naissance, le jeune mâle a de petites dé- » fenses qui pointent ; il mesure alors 0,90 de haut et pèse déjà » 200 livres. Il ne vit que de lait jusqu’à six mois. » J'ai souvent apercu des femelles avec leurs petits, et j'ai remarqué que ceux-ci suivent leur mère avec la plus grande facilité dans ses longues marches ; au moindre danger, ils se réfugient immédiatement entre ses jambes, généralement sous la poitrine. (On sait que l'Élé- phant a les mamelles en cet endroit.) Pour téter, ils jettent leur trompe de côté et se servent des lèvres, bien que les indigènes soient persuadés qu'ils tètent avec le nez, comme ils boivent. Buffon le croyait aussi. La mère est pleine de sollicitude pour sa progéniture : elle soutient son petit pendant la traversée d’une rivière. J’ai déjà conté que j'en avais été témoin. Pour monter une côte, elle l’aide éga- lement en le poussant par derrière avec sa trompe repliée. Les défenses des mâles pèsent en moyenne une quinzaine de kilos; leur grosseur et leur longueur diffèrent selon les pays. Ainsi j'ai re- marqué que les Éléphants du haut Zambèze portaient peu d'ivoire, ceux du Congo beaucoup ; les défenses des premiers sont courtes et grosses; celles des autres, longues et minces. Chez les femelles adultes, elles sont en général de la grosseur de l’avant-bras, longues d'un mètre environ et pesant en moyenne 4 kilos; celles des mâles vont depuis 15 kilos jusqu’à des chiffres extraordinaires. Je répète que la généralité est dans les 15% à 20 kilos, mais j'en ai tué dont les défenses pesaient 30, 38, 42 et même 52 kilos chacune. A l'Exposition d'Anvers figurait, parmi les produits du Congo, une défense de 91 kilos! Ces chiffres sont tout à fait exceptionnels. La longueur ordinaire des dents de 15 à 20 kilos est d'environ 1,50, mais, parmi les exceptions, j'en ai vu qui atteignaient presque le double. Je crois que le milieu dans lequel vivent les Éléphants, pays sec ou humide, plaine ou forêt, peut influer beaucoup sur la qualité et la quantité de l’ivoire, comme il influe sur la taille. A côté des Éléphants pourvus de défenses, qui sont la généralité, on rencontre certaines anomalies : les Éléphants sans défenses sont, pour moi, des phénomènes de la nature, résultant de quelque caprice (1) G.-P. Sanderson, Zhirteen years amongst the wild beast of India. (2) Il parle de l’état sauvage, car à l’état domestique elles ne reproduisent pas. On cite des femelles ayant reproduit en domesticité, mais il est prouvé qu’elles étaient grosses lors de leur capture. p) esse{N se np 1son0,] e ‘ossnoiq e] suep nyjeqe onbuyy,p 1urqdor “(804 ‘4 ‘IN ep etqdexSoroud oun saude Ç | RER AO RE AE ET AB RME LR SERRE EU He 298 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. de la dentition. Je n'ai jamais vu de mâle qui en fût dépourvu, et M. Selous n’en cite qu’un ; par contre, j'ai rencontré nombre de fe- melles qui n’en avaient point, surtout dans l'Afrique centrale méri- dionale. À partir de la région des lacs et au Congo, ces femelles sans défenses me semblent plus rares. Elles se distinguent des autres Élé- phants par une grande irascibilité et une taille supérieure. L’aigreur de leur caractère me paraît inexplicable, à moins que le manque de défenses ne constitue une souffrance, ce qui est difficile à admettre; quant à la grande taille, elle doit provenir de ce que les chasseurs indigènes redoutent ces animaux et les épargnent à cause de leur méchanceté et aussi de leur inutilité commerciale ; ils les laissent donc se développer à leur aise. Non seulement l’absence de défenses n’est pas héréditaire, mais tout au contraire, à en croire les indigènes expérimentés, les femelles sans défenses sont toujours les mères de gros mâles à ivoire. J’ai vu plusieurs exemples de cette particularité. Une défense cassée repousse-t-elle ? On le croit généralement, mais c'est une erreur. J'ai vu plusieurs Éléphants avec une seule défense, l’autre ayant dû être perdue, soit pendant un combat entre mâles, soit à la suite d’un coup de fusil maladroit. L'usage que font les Éléphants de cet accessoire est tout indiqué par le nom très juste qu’on lui a donné. Il constitue une arme redou- table avec laquelle les mâles se battent entre eux, marquent leur su- périorité ou inspirent la crainte dans la troupe. Les femelles l’uti- lisent dans le même but entre elles, et il n’est pas rare de trouver des Éléphants blessés ou marqués en plusieurs endroits par les dé- fenses de leurs congénères. Accessoirement, ils s’en servent en outre pour déterrer des racines, pour écorcer des arbres, etc., ou même pour se reposer : ils les ap- puient, à cet effet, contre une branche transversale ou tout autre support pendant qu'ils sommeillent. Pour mâcher leur nourriture, ils n’ont que de grosses molaires au nombre de quatre ou six à chaque mâchoire. J’ajouterai que la moitié à peu près de la longueur de la défense émerge seule de la bouche de l'Éléphant; un tiers est encastré dans une puissante alvéole osseuse située sous la base de la trompe ; un sixième est entouré par les gencives et les lèvres, le reste sort au de- hors. La défense est creuse à peu près jusqu’à sa moitié; le creux intérieur va en diminuant et affecte la forme d’un cornet. Quant à la trompe, quoique douée d’une force prodigieuse; c’est la partie la plus délicate que possède l'Éléphant. Chaque fois qu'il y a du danger et que l’animal se jette sur un ennemi, il la replie et la rentre avec soin, laissant ses défenses bien en avant. Les gravures sur lesquelles est représenté un Éléphant chargeant un chasseur et ayant la trompe levée font honneur à l'imagination du dessinateur, mais EXTRAITS ET ANALYSES . 299 dénotent son ignorance complète des mœurs du Pachyderme ; même quand il court, celui-ci replie sa trompe à moitié; afin de ne pas frôler les obstacles, il la ramène sous sa tête et tourne vers l’avant l'ouverture par laquelle il saisit les émanations qui lui servent à se diriger ; la trompe se trouve alors protégée en cas de heurt, par les défenses. Dans les endroits où l’animal ne marche qu'avec méfiance -et lentement, sa trompe, dont l’extrémité est repliée en dedans, pend jusqu'à terre et tâte le terrain en avant. La finesse de son odorat lui permet de sentir l'homme à 4 ou5 kilomètres, si le vent est favorable. Le plus souvent il déracine les arbres avec sa tête, en appuyant son front dessus, et non sa trompe; celle-ci lui sert pour les objets de moindre importance : c’est une main parfaite qui va chercher les fruits, qui les palpe, les choisit et les rapporte, qui prend délicate- ment une branche grosse comme un crayon, la pèle, garde l'écorce et jelte le bois, ou va ramasser dans les hautes herbes des fruits tombés que l'œil ne peut découvrir. À l’eau, l'Éléphant s’en sert comme d’une pompe aspirante. Il l’emplit jusqu’à moitié environ, la ferme, la replie et déverse dans sa bouche le liquide qui le désaltère, il la transforme aussi en appareil à douches pour s’asperger dans tous les sens, entre les jambes, sur la tête et sur les côtes ; ou bien, si l’eau manque, la trompe recueille de la terre ou du sable frais et en saupoudre le dos et les oreilles brûlées par le soleil; dans le cas de grande chaleur et de fatigue, lorsque la bête est exténuée, c’est dans son propre gosier quelle aspire l’eau qu’elle dégorge afin de s’arroser et pour se rafraîchir la tête et les épaules (1). Une lance ennemie s’est-elle enfoncée dans les chairs, la trompe la saisit et l’arrache pour la jeter au loin. Tout à la fois bras puissant, main sensible, nez délicat : tel est l'organe admirable dont la Nature a doté l'Éléphant. | La vue et l’ouïe sont, en revanche, des sens imparfaits chez lui : l'œil semble manquer de la qualité de discerner les objets qu’il aper- çoit ; il voit bien l'Homme, mais, sans l’aide de l’odorat, il ne le dis- tingue pas d’un animal quelconque (2). Bien souvent, lorsque le vent était en ma faveur, des Éléphants m'ont regardé fixement en remuant leurs immenses oreilles, maïs sans donner aucun signe d'inquiétude, tandis que je m'avançais sur eux. Leur trompe s’agitait en tous sens, cherchant à se renseigner, mais comme le vent n’apportait rien de fâcheux, ils ne bougeaient pas. Ceux qui ont déjà été blessés par un Homme se sauvent pourtant quelquefois, rien qu’en en voyant un à courte distance. (1) L’Éléphant possède la faculté d’emmagasiner environ 50 litres d’eau dans une poche spéciale, isolée de son estomac. Cet organe supplémentaire ressemble assez à celui dont est pourvu le Chameau dans le même but. (2) IL faut d’ailleurs remarquer que la plupart des animaux sauvages sont dars le même cas, EP EE LE CRE ur PT Qu LEUR, FINE PET PO QUES ESP TER PT RTC ESS EAN EE 300 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Quant à l’ouïe, elle n’est guère meilleure chez l'Éléphant que chez l'Homme. Je ne saurais la comparer à quelque chose de plus pauvre (1) : quel animal, en effet, même domestique, n’est pas mieux doué que nous au point de vue de l’ouïe et de l’odorat ? J'ignore com- ment étaient nos ancêtres, les chasseurs des cavernes, mais s'ils avaient les sens aussi imparfaits que nous, leur vie devait être le jouet des animaux contemporains. J'admettrais plutôt, que, conformément aux théories transformistes, la sécurité et le bien-être ont émoussé nos sens. | Je reviens aux Éléphants. J’ai achevé leur description physique. Un mot de leurs mœurs, maintenant. La grande quantité de nourriture qu’il leur faut les oblige à par- courir journellement de grandes étendues ; de là, leurs continuels voyages. Ils consomment beaucoup d'herbe, verte de préférence, ou, à son défaut, de la paille, des roseaux, des feuilles, des écorces d’arbustes épineux (ils en sont très friands et les sentent à distance). Ils aiment également les fruits nombreux que la brousse africaine leur offre à différentes époques. Parmi ces derniers j'ai cité les Matondos en dé- cembre, les Fowlas en mai. Ajoutons-y les M/oudzi en juin, les grappes de l’Hyphenæ en septembre, les Tchendjes, etc. Ils les avalent entiers, sans les mâcher. Ils affectionnent les jeunes pousses des Bam- bous qui croissent dans les lieux humides et en mangent également les racines (Tsoungoui) ; ils sont friands de Sorgho, de Maïs, de Cucur- bitacées, de tout ce qui compose les plantations indigènes, voire même de Tabac : aussi font-ils souvent dans ces cultures des ravages toujours nocturnes. Il faut à un Éléphant d'Afrique une moyenne de 400 à 450 kilogrammes de vivres par vingt-quatre heures. S'ils sont une vingtaine, on comprend fort bien qu'ils ne puissent faire nulle part de longs séjours. Comme c’est l’odorat seul qui les guide dans le choix de leurs aliments, comme en tout; ils prennent leur nourriture indifféremment, le jour ou la nuit : ayant senti à dis- tance le genre spécial de végétaux qu'ils désirent, ils marchent droit dessus, puis, de là, se dirigent sur un autre point; de même, ils flairent l'existence de l’eau à de grandes distances et ils y vont par le plus court. C’est pour cela qu’une piste d'Éléphants est une série de lignes droites jalonnées, sur tout leur parcours, par des arbustes épi- neux, des arbres fruitiers, des mares d’eau : en un mot, par tout ce qui est nécessaire à leur subsistance. Voilà pourquoi aussi ils marchent presque toujours contre le vent; ils ont ainsi la certitude qu'il n'y a en avant aucun danger à craindre, ils savent où se trouve l’eau (1) La voix humaine leur est particulièrement désagréable : il suffit quelque- fois d’un cri ou d’un appel, quand ils sont blessés, pour les mettre en fureur et les déterminer à charger. À EXTRAITS ET ANALYSES. 304 et ils sentent leurs mets préférés. Pour prendre leurs repas, les Élé- phants se déploient sur une ligne, comme des tirailleurs, et ils tracent des pistes parallèles, tout en marchant et en mangeant; de cette facon, chacun d’eux peut se nourrir à sa guise. En voyage, en « formation de marche », au contraire, ils se suivent à la file indienne et, pour passer le temps, ils arrachent de droite et de gauche, sans s'arrêter, quelques bouchées d’herbe ou d’arbustes. En tête sont généralement les femelles qui ont des petits, ou bien un mâle ; les autres seigneurs ferment la marche. A l’arrêt, les mâles sont très souvent au milieu, entourés de tous côtés par les femelles. Quand ils se déploient, au contraire, il n’y a pas de règle bien suivie : chacun pour soi, et c’est ce qui cause la mort de plus d'un Éléphant. : Quand ils arrivent au bord d’une mare ou d’un fleuve dans la journée ou pendant les nuits chaudes, ils commencent par boire lon- guement, puis ils entrent dans l’eau et s’arrosent dans tous les sens ; souvent alors ils poussent imprudemment des cris de joie, qui pré- viennent le chasseur de leur présence. Quand il y a de la boue, ils s’en couvrent le corps ; une fois qu'elle est sèche, ils se frottent aux arbres pour arracher ainsi les énormes Tiques et les parasites qui s’attachent à leur peau épaisse. Souvent aussi, ils avalent de la vase ou de la terre (1), sans doute pour se purger. Ils ont d’ailleurs, dans les intestins, une quantité considérable de Vers courts et gros, qui doivent les gêner (2). (A suivre.) (1) Surtout lorsqu'elle contient des principes salins, potasse, sel gemme, nitre, etc. (2) Les mêmes Vers se rencontrent dans l’estomac du Zèbre et dans la boîte cervicale du Bubale. Ce sont des larves que ces animaux doivent absorber avec l’eau. Tête osseuse d'Éléphant d'Afrique; on voit, en avant de l'orbite, la trace de deux balles. 302 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. LA CULTURE DES BAMBOUS AU JAPON. Analyse d’une communication faite par Sir Ernest Satow à la séance générale de l'Asiatic Society of Japan fenue à la Légation britannique de Tokio, le 21 juin 1899 (1). C'est seulement dans ces dernières années que les Bambous ont été cultivés en plein air dans la Grande-Bretagne. Pendant longtemps on avait cru que le climat de ce pays était trop froid pour ces plantes délicates. Aujourd’hui la mode est venue de cultiver les Bambous, et les horticulteurs, à la recherche d’espèces robustes, ont dirigé leurs investigations du côté des espèces originaires du Japon, le climat de cette contrée, bien que généralement plus chaud que celui de la Grande-Bretagne, présentant cependant en hiver des températures assez basses et les gelées y étant très fréquentes. Le résultat de ces recherches a été très satisfaisant. Par exemple, dans une localité du Midland, connue pour la rigueur de son climat, cinquante espèces ont donné des fleurs, bien qu’elles n’aient pas atteint les dimensions auxquelles elles parviennent habituellement. La plupart de ces espèces avaient été importées du Japon, et il n’est pas sans intérêt de constater que la presque totalité des Bambous importés en Europe vient de Tokio et de Yokohama. M. Satow, sans s'arrêter sur les usages si variés auxquels les Bam- bous peuvent être employés, se borne à donner quelques indications relatives à la culture de ces plantes et essaie de fixer la nomenclature des différentes espèces introduites jusqu’à ce jour dans les jardins et les parcs de la Grande-Bretagne. Ces renseignements sont pour la plupart extraits du Nikon Chiku-Fu ou Manuel des Bambous japonais publié en 1885 par feu Katayama Nawahito. Une traduction allemande de cet ouvrage a été faite il y a quelques années par M. Léon van den Polder, secrétaire de la Légation hollandaise au Japon, qui en a également fait une traduction fran- çaise, non encore imprimée. Il serait utile de traduire cet ouvrage en anglais, en suivant, autant que possible, le texte original, tout en laissant de côté des détails peu importants pour nous, tels que ceux qui concernent la préparation des Bambous pour la vente et l’analyse chimique des graines de ces plantes. L'auteur, ou pour mieux dire le compilateur, a probablement eu recours, pour cette partie de son ou- vrage, à un volume plus récent et plus étudié Keiyen Chiku-Fu, ouvrage anonyme. (1) Ce document a été adressé à la Soctété d'Acclimatation par le Ministère des Affaires étrangères, grâce à l’aimable intervention de M. le D Harmand, Ministre de France à Tokio. EXTRAITS ET ANALYSES. 303 M. Satow a été conduit à s'occuper de cette question par la lecture d'un ouvrage récent The Bambou Garden de M. A.-B. Freeman Mitford. Cet ouvrage contient la description d’un grand nombre d'espèces citées par Katayama et qui se sont acclimatées en Angleterre. On sait que la différence de sol, de climat et de culture peut produire de profondes modifications chez un grand nombre de plantes. Ainsi le Rosa rugosa, le Nerium oleander, le Berberis Thunbergi sont des exemples de modi- fications apportées par la culture; il en est de même pour les Bambous. L'on ne devra donc pas s'étonner que les jardiniers ne puissent parfois déterminer qu'avec beaucoup de difficulté les plantes qui leur sont envoyées du Japon. Celles-ci arrivent ordinairement en assez mauvais état et il faut attendre trois ou quatre ans avant qu’elles aient pris un développement suffisant pour que leur identification soit possible. Pendant ce temps, les importateurs leur ont donné un nom, ce qui cause une certaine confusion dans la nomenclature. Une autre cause , d'erreur est que très souvent, pendant le trajet, les étiquettes de- viennent illisibles, s’égarent ou se déplacent et sont parfois attribuées à des plantes autres que celles auxquelles elles se rapportent. En étudiant l'ouvrage de M. Mitford, on s'aperçoit qu'il existe une très grande confusion dans les dénominations des Bambous japonais et que la cause de cette confusion est surtout la multiplicité des synonymies attribuées à ces plantes. Le professeur Matzumura, de l'Université impériale de Tokio, a donné les noms de toutes les espèces connues dans le pays, en dis- tinguant autant que possible les espèces exotiques de celles qui sont spontanées au Japon ou qui y sont cultivées depuis si longtemps qu'elles peuvent être considérées comme complètement naturalisées. Les noms dounés par le professeur Matzumura diffèrent, dans certains cas, de ceux qui figurent sur la liste terminant l'ouvrage de M. Mitford. Lorsqu'il n’a affecté aucun nom latin à une espèce, on peut en con- clure que celle-ci n’est pas indigène et ne se trouve que dans les jardins. Après avoir constaté combien il est difficile de déterminer avec exactitude les différentes espèces de Bambous, dont un grand nombre ne fleurissent que très rarement, M. Satow discute la question de la classification de certaines formes, appelle l’attention sur les différences caractéristiques permanentes et sur les différences essentielles de cer- taines variétés et examine la question de l'identification des genres. Le professeur Matzumura cite dans sa liste vingt-deux espèces de Bambous connues au Japon dont sept seulement paraissent exotiques, Katayama au contraire, en compte cinquante et une, mais deux dou- zaines de celles-ci paraissent douteuses ou de fantaisie. Parmi les Bambous originaires du Japon, trois seulement atteignent une grande taille. Ce sont le Moso, le Madake et le Hachiku, qui peuvent tous trois être utilisés dans l'industrie. Le premier produit les bour- 304 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. geons de Bambou, employés comme légumes, le second sert pour con- fectionner des vases, des perches d’échafaudage, des poutres, etc. ; ilest le plus commun; le troisième, le moins répandu, s'emploie aux mêmes usages que le second. Le premier est appelé par les étrangers « Bambou à plume », à cause de son panache recourbé et tombant; son feuillage est jaune et ses tiges vert jaunâtre produisent un effet pittoresque. De toutes les grandes espèces, c'est certainement la plus décorative. Celui qui s’en rapproche le plus sous le rapport de l'élégance est une petite espèce le Tao-Min-Chiku dont les feuilles sont également pendantes. L'origine du mot Bambou est encore obscure. Le colonel Yule, dans son intéressant Glossaire des mots anglo-indiens, pense qu'il est d'origine portugaise et vient du mot canarien Banwu. Un écrivain portugais dit Wambu et la première fois qu'il apparaît dans un ouvrage anglais, le voyage de Hakluyt (1586), il est écrit Bambo ; c’est du temps de Purchas, en 1621, que date le nom actuellement usité. Lorsqu'on arrache un Bambou, on voit qu'il présente un grand nombre de tiges souterraines avec des nœuds analogues à ceux de la tige aérienne, mais plus rapprochés. Dans le Holei-Chiku, chaque nœud porte un bourgeon. Un certain nombre de ces bourgeons sortent de terre et forment des drugeons, qui rappellent la forme d’un télescope fermé et paraissant s'ouvrir de plus en plus, à mesure qu’on se rap= proche du haut de la tige. La tige une fois formée ne grossit plus et elle atteint, la première année, toute sa hauteur. Quelquefois cepen- dant, la feuille terminale ne se montre que la deuxième année. Les branches se développent comme la tige et portent des feuilles. Les tiges et les branches sont couvertes de nœuds qui, dans cerlains cas, ne se montrent que la seconde année. La portion de tige qui se trouve entre les nœuds porte le nom d’inter- nœud. Elle est entourée d’une gaîne terminée à son extrémité infé- rieure par un appendice foliacé. Cet appendice n’a pas de nervure médiane, mais les cinq ou six derniers au sommet de la tige prennent la forme de véritables feuilles. Celles-ci naissent sur les gaines im- briquées l’une sur l’autre et très étroitement réunies et rapprochées, au point qu’elles semblent partir du même point d'attache. Mais en les détachant avec soin, on voit très distinctement que chacune d'elles correspond à un nœud dont l'internœud ne s'est pas développé. Seule, la feuille terminale est dépourvue de gaîne et part directement du dernier nœud. Dans une espèce, le Bungo Zunso (Bambusa ensifolia) les branches sont très courtes et chacune d'elles ne porte qu’une seule feuille. Il arrive quelquefois que la tige ne consiste qu’en un seul in- ternœud accompagné d’une gaîne et d’une feuille. BULLETIN DE LA JOETE MATIONALE D'ACELINATAT 4 (Revue des Sciences naturelles appliquées) ————— 41: ANNÉE —— t OCTOBRE 1900 SOMMAIRE % 4 ï. DE LOVERDO. — Le concours des volailles de Londres et l’aviculture en Angleterre.. 305 GronGes MAGNE. — De l’acclimatalion et de la culture des plantes alpines dans les 18 Rent Baardins-........4,....... . 4.0.0 %e.:9:e Poleïeis alerts ele els eee slele à se 1; ee 311 Extraits de la correspondance : : Pauz CAMBOUE. — Sur les Araignées fileuses de Madagascar......... eee 42 Extraits et Analyses: sieleetalelele ehalel me lobe etai ee oo. 326 Il, pu BUYSSON. — Dégäts du Forfcula auricularia dans les ruches d’Abeilles. .. | 327 : MILNE-ED WARDS. — La Gutta-percha à la Grande Comorre.............. 101322 : AGEL. — L'industrie du Liège dans la province de Gerone. ............ eco 12400920 Don — La production du Bois.,.... eine hel el eietele sta eralate tete elle lala ee al atale ee ee EU DU D La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. ; à TT ZZEZRSNSN ER mms e Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 4 fr. 50 ja L = EE NS me, À pa Le AU SIÈGE * FER DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE : TS 41, RUE DE LILLE, 41 É ê PARIS ET À LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. 1 CGorrosif DÉSINFECTANT ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, #7" SCientifi tjuement dér vnirée, l'immense avantage de n'être »’, Toxique ni Corrosif. 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C’est un fait bien connu que la Grande-Bretagne s'adresse à l'étranger non seulement pour combler le déficit de sa pro- duction en pain, en viande, en légumes et en fruits, mais aussi en œufs et en volailles. Pour ce qui concerne les pro- duits de la basse-cour, les importations suivent d'une année à l’autre une progression tellement constante que l’on peut se demander si un pareil mouvement ascensionnel ne corres- pond pas à un recul de l'élevage national. En réalité, il n’en est rien et ce phénomène est le corollaire de l’augmentation des richesses et de la population, et par conséquent de la con- sommation de la Grande-Bretagne. Parmi les nations étrangères qui viennent combler ce dé- ficit, la France occupe un des premiers rangs qu’elle a cepen- dant quelque peine à maintenir. Les Anglais demandent sur- tout à nos basses-cours des Dindons, des Oies et des œufs. Quant aux Poulets, ils leur sont fournis par d’autres pays, et notamment par l'Italie et par la Russie. Ce dernier pays en fournit des contingents importants dans des conditions exces- sivement curieuses. Dans les steppes russes, la rareté de la population fait que chaque paysan dispose d'immenses étendues de terre en jachère. Là, les volailles, élevées à l’état demi-sauvage, trouvent suffisamment de nourriture pour ne pas demander un supplément d'aliments à leur propriétaire. Celui-ci, surtout dans les contrées où les communications font défaut, s’estime heureux de les livrer à raison de 30 à 40 centimes par tête. Ce sont ces Poulets que des négociants ingénieux ont songé à tirer des steppes russes en y envoyant des wagons d’une construction spéciale. Chacun de ces wagons constitue une (1) Communication faite en séance générale le 27 avril 1900. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1900. — 20 306 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. sorte d'épinette roulante, à plusieurs étages, où les Poulets continuent à être engraissés même pendant le trajet. En 1897 seulement la Russie a exporté à la capitale anglaise pour un peu plus de 11 millions de francs de ces Oiseaux. Les colonies anglaises y envoient aussi des Poulets frigorifiés. Les consommateurs au palais un peu raffiné, préfèrent à ces volailles à bon marché, les Poulets indigènes que l'Irlande fournit à des prix défiant toute concurrence étrangère. De fait, la Belgique, qui a tenté cette exportation, a dû y re- noncer. Néanmoins les Belges s’y sont créé une spécialité grâce à leur « petit poussin », qui est livré à la consomma- tion à l’âge de quarante jours et qui est payé à raison de 2 fr. 50 par tête. Une seule race flamande est, paraît-il, capable d’une telle précocité. C’est la fameuse race Braekel, une variété de la Campine, dont les coquelets commencent déjà à chanter trois semaines après leur éclosion ; à l’âge de six semaines, ils pos-. sedent des crêtes rouges et se montrent si galants auprès des Poules qu’on est obligé de les en séparer. Les éleveurs belges attribuent cette précocité peu commune et peut-être exagérée à l'habitude que l’on avait autrefois en Belgique d'organiser des concours de chant de Cogqs. La sélection ainsi opérée tourna tout à fait au profit de la précocité. Quant aux succu- lentes poulardes françaises du Mans et de la Bresse, elles ne sont servies que sur les tables somptueuses — à commencer par celle de la Reine — et surtout dans les maisons qui ont des chefs français. Nous sommes mieux partagés quant au commerce des Dindons et des Oies. La France est même presque le seul pays qui fournit des Oies à l'Angleterre. Rien que pendant les fêtes de Noël, le marché de Londres reçoit près de cent cinquante mille Oies du département de la Sarthe. : La France, pendant longtemps, eut à Londres un large débouché d'œufs qui tend malheureusement à se restreindre de plus en plus depuis que nos fermières — surtout celles de la Normandie — s’avisèrent de garder les œufs plusieurs jours après la ponte, dans l'espoir d'obtenir de meilleurs prix. Or, les œufs ne doivent pas être livrés à la consommation après dix ou quinze jours. Une quantité des nôtres arrivent à Londres bien plus âgés, à moitié vides et souvent gâtés. Cela discrédita les œufs français au profit des œufs danois, LE CONCOURS DE VOLAILLES DE LONDRES. 307 lesquels conquièrent tous les jours le terrain perdu par les nôtres. Il faut le dire bien haut et chercher à y remédier par une organisation commerciale mieux entendue. Toutefois, si l'Angleterre importe tous les ans plus d’un milliard et demi d'œufs, d’une valeur de 112 millions de francs environ, et plusieurs centaines de millions de têtes d’Oiseaux de basse-cour, c’est que ses exploitations rurales ne donnent pas, relativement à leur surface, une quantité de produits analogues à ceux des autres pays. Cela est dû d’abord à ce que le sol de l'Angleterre n’est pas très morcelé et que les grands agriculteurs de ce pays manifestent quelque dédain pour la basse-cour. Mais cette pénurie reconnaît également une autre cause, qui est un phénomène pour ainsi dire social : l'éducation de la femme anglaise. Dans toutes les campagnes, la basse-cour est un des principaux attributs de la femme ; en Angleterre il en est de même. Seulement, dans ce pays, peu de femmes veulent bien condescendre à soigner des Poulets et à élever des Lapins. En France, quand on va dans une ferme et qu’on a envie de parler à la fermière, on est toujours sûr de la trouver au milieu de ses Poules ou dans sa laïiterie. En Angleterre, j'ai sans doute joué de malheur, mais il ne m'est jamais arrivé de trouver une fermière dans sa basse-cour. Per contre, dans toutes les fermes que j'ai visitées, j'ai été recu par des femmes très élégantes, abimées dans la lecture de queli;jue Magazine, installées dans de très jolis petits salons Où il y avait un piano et des fleurs. Même dans les exploita- tions très modestes, les compagnes des petits cultivateurs ne montrent pas un amour irrésistible pour les Gallinacés. Ceci demande une explicatiow. Il faut dire qu'en Angleterre les femmes des classes pauvres ne considèrent pas la domesticité comme une carrière, ainsi que cela a lieu chez nous, et qu'elles n'y entrent que pour quelques années, en attendant qu'elles trouvent à se marier. Il en résulte qu’il y a dans ce pays infiniment plus de femmes que chez nous ayant été ser- vantes dans leur jeunesse, et que la plupart des femmes des cultivateurs ou des ouvriers agricoles n’ont été rendues à la campagne qu'après avoir servi pendant quatre ou cinq ans dans des maisons bourgeoises des villes. Or, il est certain que ce passage dans la domesticité constitue une très mauvaise école pour une femme, qu’elle y prend des habitudes de gas- 308 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. pillage et de confort et cherche à imiter beaucoup de ses maîtresses en faisant beaucoup travailler son mari, tout en se réservant pour elle-même le moins de besogne possible. Elle sacrifie, du reste, tout à l'apparence, et comme elle passe sa journée à nettoyer ses tabliers blancs, à repasser ses bonnets de tulle, à frotter et à astiquer ses meubles, elle ne trouve ni l'occasion d'économiser un sou, ni le loisir de s'occuper de ses volailles. Il est vrai que la dernière crise ‘agricole a été si cinglante pour la bourse des maris, que beaucoup de ces anciennes servantes ont été obligées de crotter leurs petits souliers dans la boue des poulaillers. Cela n'empêche que l'élevage des volailles soit très en honneur dans certaines régions de l'Angleterre; seulement, il me semble que les faits que je viens d'exposer arrêtent son extension. Parmi les régions productrices, le berceau de la fameuse race de Dorking, le comté de Surrey, ainsi que le comté limitrophe de Sussex, viennent incontestablement en pre- mière ligne pour l'élevage des Poulets. L'industrie de l'en- graissage y est très prospère, on y trouve des établissements qui élèvent jusqu’à cinquante mille Poulets par an. Dans quelques contrées aussi de l'Irlande, de grands efforts sont. déployés en faveur de cet élevage que l'adoption du poulailler sur roues a considérablement développé. Grâce à ces maisons portatives, les Oiseaux, au lieu d’être empilés dans un enclos, sont disséminés dans les champs qu'ils contribuent à fumer tout en en tirant beaucoup d’aliments. Il n’y a pas d’œil plus percant que celui de la Poule ; lorsque celle-ci, la tête baissée.. donne des coups de bec dans une prairie, c’est pour engloutir soit un petit Ver, soit une Araignée, soit une graine quel- conque. Et si ces matériaux manquent à la surface, les Poules. grattent le sol pour les trouver sous l'herbe morte et amé- liorent ainsi la prairie en se livrant à un véritable hersage. Jusqu'ici les éleveurs anglais s'étaient médiocrement préoc- cupés des caractères et des aptitudes des différentes variétés. On élevait pêle-mêle des volailles à toutes fins, et ce n’est que dans ces dernières années qu'on y observe une tendance: à spécialiser la production. Les amateurs d'Oiseaux de luxe ont aiguillé, pour ainsi dire, l'élevage dans cette voie en le relevant au point de vue moral. Il est certain, qu’en Angle- turre, comme dans les autres pays, ces amateurs n’envi- LE CONCOURS DE VOLAILLES DE LONDRES. 309 sagent pas la question sous un angle utilitaire et sacrifient même souvent à la fantaisie les qualités exigées par le marché ; mais il n’est pas moins vrai qu'ils contribuent au perfectionnement des animaux domestiques et même à la production nationale. Si l'on songe, en effet, que des milliers d'habitants des faubourgs des grandes villes anglaises et des milliers d'artisans, qui élèvent des volailles en vue des expo- sitions, produisent, d’après M. Brown, plus de cent millions d'œufs par an et plusieurs milliers de Poulets, on conviendra que ce contingent alimentaire n’est pas à dédaigner. D'autre part, malgré les erreurs commises par suite du développe- ment excessif des signes visant à l'effet, les variétés les plus utiles ont été produites en grande partie, chez nos voisins, par des éleveurs d’Oiseaux de luxe. Ceux-ci, en effet, en appli- quant soigneusement les procédés de sélection, sont arrivés à créer d'excellentes pondeuses et des volailles de table d’une dimension gigantesque. D'autres branches avicoles importantes consistent dans l'élevage des Canetons — dans la vallée d’Aylesbury — des Oies et des Dindons dans les comtés de Norfolk, de Suffolk et dans le Cambridgeshire. En Angleterre, les hôtes de la basse-cour n’ont acces dans les grands concours d'animaux que depuis 1885. Cependant, à partir de cette époque, toutes les expositions agricoles leur ont été ouvertes. De tous ces concours, celui de volailles mortes, fondé en 1891, par Sir Walter Gilhey, comme annexe de l'Exposition annuelle du Smithfeld-Club, intéresse les éleveurs français d’une facon toute spéciale. Ce concours, qui tient ses assises à l'Agricullural Hall de Londres, était tout d’abord destiné exclusivement aux producteurs britanniques ; mais dès les premières expositions, les organisateurs se sont apercu que les éleveurs anglais ne faisaient pas valoir suffisamment leurs produits et qu'ils les présentaient d’une facon très mé- diocre. Cela les détermina à rendre ce concours interna- tional, afin d'attirer les éleveurs étrangers, surtout les Fran- çais, et à profiter de leurs lecons. Nos compatriotes n'ont pas démenti la réputation de goût qui les avait précédés. Les premiers concours internationaux de 1896 et de 1897 furent de véritables triomphes pour la Section française. Le lendemain de la distribution des prix, M. Tegetmeier, le 310 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. vénéré savant, et le vieil ami de Darwin, membre du jury pour nos volailles, écrivait ceci : « Les classes françaises y étaient incontestablement le plus bel étalage de volailles. mortes que l’on eût jamais vu en Angleterre. » Malheureuse- ment, cette belle fusée d'enthousiasme n’a pas été de longue durée. Le nombre de nos exposants se réduisit en 1898, à une proportion si minime, que les Anglais ont été amenés, en 1899, à fusionner en une seule les cinq classes de la Sec- tion française. Du coup, les récompenses, en espèces, ont passé de 620 fr. à 80 fr. seulement. Nos éleveurs trouvèrent. dans ce fait un excellent prétexte pour ne point se déranger, et pendant le dernier Table Poullry show de Londres, la basse-cour française n'était pas représentée, tandis que, au contraire, la Belgique et la Russie y avaient envoyé un grand nombre de volailles. Personnellement, comme délégué de la Société nationale d’A viculture et du Ministre de l'Agriculture, nous avons eu toutes les peines du monde pour persuader au Comité de maintenir la Section française sur la liste, en l’as- surant que les demandes des exposants français seront . nombreuses à la fin de cette année. Nous espérons que nos éleveurs ne voudront pas démentir nos affirmations. 311 DE L’ACCLIMATATION ET DE LA CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS par Georges MAGNE (1). Tout le monde admire et connaît plus ou moins la flore alpestre. Les montagnards, dans les Alpes ou les Pyrénées, cueillent ces charmantes fleurs pour en orner le corsage des jeunes filles ou les chapeaux des jeunes garcons. Nos belles citadines suivent cet exemple des ruraux de haute altitude : L'Edelweiss (Graphalium leontopodium) n’a-t-il pas l’hon- neur d’être porté en bijou par les dames, qui, l’an dernier, lui avaient dédié même un culte plus particulier en en ornant leurs chapeaux et leurs manchons ? Le botaniste parcourt l'été nos montagnes toujours à la recherche de nouvelles espèces ou de nouvelles variétés pour enrichir son herbier. Enfin le simple touriste, qui ne se laisse pas encore tenter par les ascensions en funiculaire, s'arrête ému en parcourant nos montagnes à la vue de ces fleurs aux coloris incompa- rables, astres terrestres, comme a dit le poète, d'autant plus brillants qu’on se rapproche du ciel. Parmi les chercheurs de cette flore, il y a deux catégories : Le botaniste et le montagnard cueillent la fleur mais res- pectent la plante, ils l’admirent trop pour en anéantir la source. C’est la catégorie des conservateurs. Il faut y joindre l’amateur et le touriste éclairés qui, émus à la vue de ces merveilles, se laissent aller à leur charme poé- tique et ne songeraient jamais à y porter une main sacrilège. J'en donnerai un illustre exemple: L'année même où elle devait périr à Genève, sous le (1) Communication faite en séance générale le 23 février 1900. L'examen par- ticulier de ce mémoire a été renvoyé à la Section de Botanique où il a fait l’objet d’une importante discussion à la séance du 13 mars 1900. 312 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. poignard d’un assassin, l’Impératrice d'une grande puissance européenne, très amateur de fleurs, s'était fait conduire au jardin célèbre de la Linnœæa, créé pour la conservation des plantes alpines dans le Valais, à Bourg Saint-Pierre sur la route de Martigny au Grand Saint-Bernard. Elle y admira longuement toutes les merveilles qui y sont réunies et comme les administrateurs du jardin se propo- saient de lui cueillir un bouquet, elle s’y refusa, déclarant que cette collection de fleurs était le charme de tous les visiteurs et qu'il ne fallait pas l’amoindrir pour en détacher un bouquet bien vite fané. Il y a eu là l'expression d’un sentiment extrêmement dé- licat mais qui n’est pas malheureusement assez répandu. La seconde catégorie de chercheurs comprend les amateurs de ces plantes qui veulent essayer l’acclimatation dans leurs jardins et les industriels qui veulent faire trafic de ces plantes dans divers buts. | Les amateurs sont peu dangereux pour les plantes en ce sens qu'ils les récoltent en petites quantités et qu'après tout c'est pour essayer de les faire vivre ailleurs qu'ils les arrachent de leur sol natal. Essai le plus souvent infructueux d’ailleurs pour plusieurs raisons dont les deux principales sont l’arrachage de ces plantes pendant la floraison, en pleine sève, et leur transport dans un climat et à une altitude tout différents de ceux affec- tés à ces plantes par la nature. Les dévaliseurs par esprit de lucre sont bien plus dangereux, car ils détruisent systématiquement dans certaines contrées tous les sujets d’une même espèce. C'est ainsi, par exemple, qu'en Suisse le Cypripedrum calceolus qui se rencontrait souvent sur les flancs ombrés des montagnes a presque totalement disparu. Voilà le vrai danger qui menace dans son existence même la plante alpine. C'est dans ce but que des sociétés se sont formées, en Suisse, en Italie, en Autriche, pour la protection des plantes dans les montagnes. Ces sociétés poursuivent un double but : 1° Réunir dans un endroit déterminé, pour le plaisir des amateurs, la plus grande quantité d'espèces et de variétés de plantes de montagne et les y acclimater; CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS. 313 2° Fournir aux amateurs de ces plantes des graines des- tinées à propager presque à coup sûr ces mêmes plantes dans toutes les régions et en conséquence annuler, dans la mesure du possible, le commerce des plantes alpines arrachées jusqu’à destruction par des vandales. Ces jardins alpins sont préservés par des règlements contre l’indiscrétion de certains amateurs : On cite à la Linnœæa (1) le fait suivant : Le premier ministre d’une grande puissance européenne visitait ce jardin en compagnie de sa fille et d’un secrétaire. Ce dernier, en bon courtisan, crut bien faire en cueillant pour l’offrir à la jeune fille tout un parterre d’Eryngium alpinum (le fameux Chardon bleu des Alpes) dont il garnit tout le fond de la voiture du Ministre. On en parle encore à la Linnœæa. En dehors des jardins alpins créés par les Sociétés protec- trices des plantes de montagne, il existe dans la plupart des grandes capitales de l’Europe des sections de plantes alpines dans les jardins botaniques. Je citerai Londres, Berlin, Saint-Pétersbourg et Genève. A Saint-Pétersbourg, à cause du climat, le jardin botanique est obligé de conserver ses plantes alpines en serre; encore faut-il dire qu'un grand nombre d’espèces de ces plantes ne peuvent y vivre et spécialement les Fougères rustiques ainsi que les plantes de rocailles, comme les Sedurmn ou les Umbi- iicus. À Berlin, on entoure de toute espèce de précautions l’ap- proche de ces plantes par les visiteurs et on a bien raison, car des mains téméraires enlevaient ces plantes avec la même avidité que d’autres s’attachent à détacher, à titre de souvenir, des doigts de statues, dans les musées, ou dans les jardins publics. Mais ce ne sont pas seulement les Gouvernements qui subventionnent la culture de ces plantes dans les jardins botaniques. En Suisse, on trouve dans certaines contrées de petits jardins alpins ou même d'immenses parcs dus au travail des particuliers. (1) Jardin alpin de Bourg-Saint-Pierre (Valais), dont il est question ci-dessus, 314 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Qui ne connaît le magnifique parc des Eaux vives à Genève ? Et à Zermatt, le joli jardin alpin si bien entretenu par M. Alexandre Seiler, le grand civilisateur de cette vallée incomparable de Zermatt ? M. Seïler est obligé d'avoir des gardiens pour accompagner les visiteurs, car, en peu de temps, il ne conservait plus que le souvenir de ses plantes au lieu des plantes elles-mêmes. J'ai gardé pour la fin le Jardin d’acclimatation de M. Cor- revon à Plain-Palais, faubourg de Genève, où ce botaniste a réuni toutes les variétés de plantes de montagne du monde entier et en procure des exemplaires aux amateurs qui s’a- dressent à lui. Donc, il est parfaitement établi que les plantes de montagne peuvent être acclimatées et cultivées en dehors de leur situa- tion naturelle. États et particuliers y travaillent : À En Angleterre, le climat de brouillards paraît favorable à la culture de ces plantes. Dans les grands jardins anglais, il y a toujours une part faite à la plante alpine, et les pelouses irriguées de petits ruisseaux avec des rochers forment le cadre de la plan- tation. En France, on cite le jardin de M. Ginet à Grenoble. Aux environs de Paris, celui de M. de Vilmorin à Verrières- le-Buisson (Seine-et-Oise), celui de M. et M" Daïgremont et celui de M. Magne. Dans Paris même, le jardin de Me Bossot, avec sa belle collection de Fougères rustiques. Je connais des Parisiennes qui cultivent avec succès le Cyclamen europæum en caisse sur leurs balcons! Mais, en somme, il y a peu de personnes qui s’adonnent à la culture de ces plantes délicieuses, aux coloris si variés et aux formes si diverses. Il y a plusieurs causes à ce fait : D'abord, la plupart des touristes qui parcourent les mon- tagnes voyagent en été, à une époque où la flore a presque disparu; à partir de la fin du mois de juillet, les Rhodo- dendron n’ont plus que des fleurs décolorées et desséchées, les Gentianes sont défleuries ; seule, pour ainsi dire, la fleur CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS. 315 des neiges (Gnaphalium leonlopodium) est dans toute sa splendeur. Si les amis de la nature pouvaient voir au printemps les couleurs dont se parent les montagnes et respirer l’air em- baumé qui s’en exhale, les plantes alpines se trouveraient dans tous les jardins. Au mois d'avril 1899, allant étudier les jardins alpins de Suisse, j'ai trouvé, au-dessus de Genève, le mont Salève com- plètement couvert des Prunula farinosa aux couleurs roses et de ces Genliana verna d’un bleu indéfinissable, et, pous- sant plus loin mon excursion, j'ai vu toute la région du pays de Caux, au-dessus de Montreux, ne formant qu'un tapis de Narcissus poelicus dont l'air était tout imprégné... Il y a une autre cause qui limite le nombre des cultivateurs de la plante alpine : | C’est, dit-on, la difficulté de culture de ces Disnes dont on entend toujours parler avec exagération. Les jardiniers la redoutent, parce qu'ils ne la connaïssent pas; ils préfèrent nous suggérer l'amour des pelouses bien peignées, absolument vertes, et des mosaïques qu'ils com- posent en y employant tant de temps et de plantes. Plantes qu'il faut martyriser d’ailleurs, les coupant chaque semaine, les empêchant de fleurir, enchantés qu'ils sont quand aucun brin de feuille ne dépasse les autres. Heureux sommes-nous quand nous ne voyons pas les ama- teurs de ces parterres symétriques et tondus reproduire ou leurs noms, ou seulement leurs initiales ou leurs armes, ou se complaire dans la reproduction d'un Papillon ou d’une Libellule ou même de l’image de la République. Voyons ce qu'on peut répondre à ces objections sur la culture et l’acclimatation des plantes alpines. Et d'abord, nous autres amateurs de ces plantes, vérita- blement épris de leurs beautés, faisons de la propagande, montrons nos jardins, nos collections, afin que, sans voyager au printemps et au commencement de l'été dans les mon- tagnes, les amateurs de la belle nature puissent voir, sans se déranger et de tout près, ces végétaux qui ne peuvent laisser personne insensible. _ C’est la propagande par l'exemple. « Puis disons à ces appelés qu'ils pourront devenir des élus 316 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. en travaillant eux-mêmes, avec certitude de succès la plupart du temps, à l’acclimatation de ces plantes. Les amateurs ont essayé et: ont tàätonné à ce sujet, et dans l'état actuel on peut résumer ainsi les divers moyens cou- ramment employés : Il y a d’abord une première série de plantes alpines, série fort nombreuse, qui ne demande ni culture spéciale ni soins particuliers. Je veux parler des plantes alpines de faible altitude qui poussent dans les bois et pâturages aux flancs des montagnes. Celles-ci, comme les autres plantes vivaces (la plupart des plantes alpines sont vivaces d’ailleurs), se cultivent dans un bon sol et de préférence sur les pelouses. Réunies dans des parterres à d’autres plantes, les plantes alpines risqueraient d’être étouffées et confondues avec les autres. Ce sont des joyaux qu'il faut isoler sur un plateau pour qu'elles aient tout l'air désirable et qu'on puisse les admirer à son aise. Offrons-leur donc un plateau de verdure. Et ici je propose comme exemple aux amateurs le parc des Eaux vives à Genève dont les pelouses sont couvertes de toutes les plantes de basse culture. Que de noms à citer | D'abord les Aquilegia dont les variétés sont si nombreuses et parmi lesquelles nous citerons seulement l’alpina et le cærulea, si beaux avec leurs coloris d'azur. Puis toutes les variétés du Geranium, plante si ornementale aux coloris si variés, mais dont les variétés pratense, ibéricum et platy- petalum donnent toutes les gammes du bleu, couleur toujours si séduisante et si rare parmi les fleurs. Passons aux 4co- nitum, bleus ou jaunes, à la plupart des variétés de Primula et d'Aurieula,aux Delphinium, à la plupart des Campanula. Faut-il en énumérer d’autres ? Les Papaver alpinum et nudicaule, les Aster si nombreux, les Peonia,les Æelleborus, les Helianthemum, les Anémones pour la plupart, les Dian- thus, les Centaurea et les Trollius se cultivent de même. N'oublions pas les plantes bulbeuses, les Colchiques, les Tulipes, les Scilles, enfin les Orchidées rustiques, les Orchis, les Ophrys, etc., etc. CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS. 317 Les fleurs se succéderont sur vos pelouses d'avril à sep- tembre sans interruption et feront de vos gazons de véri- tables corbeilles de fleurs. Je m'arrête un instant à nos Orchidées rustiques si peu connues et qui, en diminutif, valent bien leurs grandes sœurs les Orchidées exotiques. J'entends encore à la campagne prononcer, en parlant d'elles, ce doux nom de « Pentecôtes » que les jeunes rurales leur donnent aux fêtes de ce nom. Parlez donc de « Pentecôtes » à une mondaine au milieu de fleurs ! Va pour la Rose, ou le Mimosa. Ajoutons enfin, pour ne rien oublier, toutes les Fougères rustiques, à la condition de les planter dans un terrain frais et tourbeux, dans des rochers autant que possible et au bord de l’eau pour certaines espèces. Alors nous n’aurons plus qu’une règle à suivre, c’est de disposer les plantes en question à l'ombre ou au soleil sui- vant leurs préférences naturelles et de nous initier pour la disposition des rochers et des petits cours d’eau à l’art de l'architecture paysagiste. Je reviens encore à cet égard au goût dont a fait preuve M. Allemand au parc des Eaux vives à Genève. Supposons donc la décision prise de créer un jardin alpin et tout le cadre prêt à recevoir les plantes alpines. Pour toutes celles que nous venons d’énumérer procurez- vous des graines et semez sur terrine composée de terreau de feuilles, terre franche et sable. Repiquez en terrine, plantez en godets, puis plantez ensuite en pleine terre dans le sol naturel de votre jardin. Et voilà la premiere partie d’un jardin alpin créée. Je le répète, ceci est à la portée de tous et nous devrions trouver cette culture dans tous nos jardins. N’arrachons pas ces plantes dans les montagnes; nous avons 95 pour 100 de chances qu'elles meurent et 5 chances pour 100 qu’elles vivent ainsi transportées dans nos jardins. Il est bien plus simple de les élever de semis. L’acclima- tation se fait ainsi d'elle-même et sans aucun risque. Je sais bien que parmi les amateurs se rencontrent quel- quefois des apôtres qui pour sauver leurs plantes arrachées dans les montagnes emportent avec elles dans leurs voyages 318 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. des malles spécialement construites avec compartiments tou- jours aérés, facilement arrosables, et permettant de HApUo ter les plantes dans leur sol naturel. Mais ce mode de procéder, qui n’est employé d’ailleurs que pour les plantes rares, de haute altitude, dont nous parlerons plus loin ne donne pas encore d'excellents résultats; bien au contraire, parce que la plante est arrachée le plus souvent en pleine sève. Semons donc, c’est le meilleur moyen de réussir pour les plantes ci-dessus énumérées. D'ailleurs, une fois la plante obtenue, il sera facile de la multiplier, par éclats, par exemple, pour les Geranium, les Aconits, les Pivoines, les Digitales, par boutures pour les Epilobium, les Clematis, les Dianthus, etc., etc. Enfin, pour les amateurs pressés, ils pourront s'adresser à d’autres amateurs ou à des professionnels qui mettront à leur disposition de jeunes sujets élevés en pots et tout prêts à être mis en place. Je parlerai plus loin d’une idée de créer entre tous les amateurs un petit bulletin destiné à la circulation des plantes alpines dans le monde. Mais l'amateur ne se contente pas des plantes faciles à cultiver. Il vise toujours plus haut et veut conserver auprès de lui ces plantes de hautes régions qu’il a vues croître dans la nature entre les rochers et sur les derniers gazons de la végétation alpine. Comment faire pour acclimater et cultiver dans son jardin des plantes alpines de haute altitude ?... Le semis pour ces plantes aussi donnera d'excellents ré- sultats. Si la patience manque, et si on veut avoir de suite certaines espèces de plantes, lentes à germer, comme les Gentiana ou les Arnica, par exemple, il faudra, comme nous le disions tout à l'heure, demander de jeunes plants à des spécialistes ayant eux-mêmes semé, repiqué et planté en godets ces plantes. ! En un mot, le spécialiste aura commencé la partie la plus difficile de l’œuvre, c'est-à-dire l’acclimatation, car il ne se sera pas contenté de semer, mais il aura fait venir de tous les coins du monde des plantes alpines en jeunes plants arrachés à une époque favorable, quand il n'y aura plus de sève, avec CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS. 319 la discrétion et les soins qu’elles comportent, et il aura ainsi couru, au lieu de l’amateur, les risques de non reprise. Donc revenons à notre conseil de semer nous-mêmes nos plantes. Pour les semis, le moment le plus favorable est le mois de mars. On sème en terrine bien drainée qu’on met sur couche légèrement chaude pour amener une germination plus ra- pide. Il y a aussi une méthode qui consiste à semer à l'automne et à laisser la neige couvrir l'hiver le semis. La germination serait, dit-on, plus puissante. Mais dans nos régions, où la neige est rare et toujours humide, à la différence de la neige qui tombe et séjourne sur les montagnes, le semis de printemps me paraît tout à fait favorable. Quant à l'emploi de la terre dans laquelle doit être déposée la graine, une distinction est à faire, suivant qu'il s’agit de plantes aimant la silice ou le granit, d’une part, ou préférant au contraire le calcaire. Le compost, qui devra être formé d’un tiers de terre franche, d’un tiers de terre de bruyère et d’un tiers de sable, devra comprendre du sable calcaire ou granitique, suivant qu’il s'agira de plantes de l’une ou de l’autre de ces deux catégories. Les Rhododendron nous donnent un exemple frappant de cette différence du sol. Le Rhododendron ferrugineum pousse dans un sol siliceux. Au contraire, son frère le Rhododendron hirsutum ne vit que dans un sol calcaire. Voici d’autres exemples : Parmi les plantes qui profitent en sol calcaire, nous citerons: d'Achillea atraia, l'Edelweis (Gnaphalium leontopodium) l'Androsace lactea, l'Androsace helvetica, l’'Anemone alpina, le Gentiana angustifolia, le Gentiana Clusii, l'Hul- Chinsia alpina, le Primula auricula, etc., etc. Parmi les plantes préférant la silice, nous indiquerons : l’'Achillea moschata, l'Androsace carnea, l'Androsace gla- cialis, l'Anemone sulfurea, le Gentiana alpina, le Genliana Kochiana, le Primula villosa. Voici votre plante semée, levée, repiquée en terrine et enfin plantée en godet. 320 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Deux modes de culture s'offrent alors à vous: La culture en pleine terre ; Et la culture en pots. Je vais tout de suite ouvrir une parenthèse qui s'applique aux deux modes de culture : Il y à un certain nombre de plantes alpines de hauts sommets qui se conservent mieux dans du Sphagnum, soit qu'on les cultive en pots, soit qu'on les plante définitivement sur des rochers. Car le rocher est indispensable pour faire valoir et con- server la plante alpine élevée en pleine terre. Nous revien- drons sur ce sujet, plus loin, quand nous traiterons de la culture des plantes alpines en pleine terre. Conservez en Sphagnum le Linnæa borealis, l'Arnica montana, le Bartsia alpina, le Parnassia palustris, les Saxifraga aizoides, biflora, le Saæifraga carpathica, le Soldanella alpina, le Linaria aipina, certains Cypripedium, la Pyrola rotundifolia, etc. J'ouvre encore une parenthèse pour dire qu'il y a certaine plante alpine qu'il faut rentrer l'hiver sous chässis froid pour éviter les grosses gelées, par exemple certains Primula notamment le verticillata, le Linnæa borealis, le Lippia repens elc,telc: Je reviens maintenant aux deux modes de cultures : D'abord la culture en pots : Il est indispensable d’avoir des pots bien drainés, de les enterrer, pour que le sol ne se dessèche pas et de rempoter chaque année, de préférence à l’automne, et avant la cessa- tion complète de la sève. Placer ces pots au soleil, à l'ombre ou à mi-ombre suivant les espèces et ne pas les placer dans des parterres de plantes non alpines qui étoufferaient nos plantes de montagne. Une difficulté qui n’est pas sérieuse, mais sur laquelle j'appelle l'attention des amateurs, c'est la conservation de ces plantes l'hiver. Il faut éviter l'humidité à tout prix : Placez les espèces les plus délicates sous châssis froids, bien aérés, tant qu'il ne fait pas trop mauvais temps. Il y a des espèces comme l'£Edelweiss qu'il faut laisser pour ainsi dire sèches et sans arrosage depuis e mois d'octobre jusqu’au mois de mars. CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS. 321 Pour les Cypripedium élevés en pots et non en Sphagnum, il faut les arracher après la cessation de la sève, les faire sécher dans un grenier, les rempoter en octobre et ne les arroser qu’au moment du retour du printemps. On place alors les pots dans un endroit bien ombré en les enterrant pour éviter la sécheresse. Cette culture en pots a ses avantages : D'abord elle permet de déplacer facilement et à toute époque les plantes ainsi élevées et de les faire figurer dans des expo- sitions. Ensuite elle facilite la décoration de rochers laissés nus pendant la mauvaise saison dans la crainte de perdre les plantes qu'on leur aurait confiées trop tôt que vous pouvez placer à votre convenance au retour du printemps. Ce mot de rocher est précisément ma transition pour passer à la culture de la plante alpine sur place et en pleine LERLES Toutes les fois qu'il est question de plantes alpines, il est question de rochers ; et dans les pays où la plante alpine est très en vogue, comme en Angleterre, tout l’art des architectes paysagistes, des Martinet et des André, est employé pour donner à cette flore un cadre digne d'elle. États et particuliers font de même, soit que dans un jardin botanique on crée une section de plantes alpines, soit qu’on veuille cultiver dans un jardin ordinaire un coin en alpinum, comme on dit. Dans la création de ces rochers le calcaire ou la silice jouent un rôle considérable. L'eau aussi a son importance, et même la nature de l’eau employée. Une eau calcaire peut détruire certaines plantes. Il faut savoir ménager, dans la création de ces rochers, toutes les expositions, en donnant la plus grande place au Levant et à l'Occident, car on a remarqué que ces deux expo- sitions convenaient le mieux aux plantes alpines. Autrefois, avant cette constatation, on se contentait d’'é- lever toutes les plantes alpines à mi-ombre, il y en avait ainsi pour tous les goûts. On a bien progressé à cet égard et on donne méthodique- ment à chaque plante l'exposition qui lui convient. Ces rochers doivent être pourvus de niches bien drainées ; de petits cailloux sont mélangés au sol à choisir suivant l’es- pèce à lui confier, afin de faciliter l'écoulement des eaux. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1909. — 21 322 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Ces généralités posées sur les rochers alpins, je reviens à la culture sur place des plantes alpines : Je fais d’abord une distinction entre les plantes saxatiles et les autres plantes alpines. Les plantes saxatiles ou de rocaille vivent dans la nature sur des rochers arides et n'ont pas besoin d'autant de frai- cheur que les autres plantes de montagne. Il faut élever ces plantes sur des rochers de 1",50 à 2" de haut, s'élargissant graduellement du sommet à la base, afin d'en bien ménager les niches destinées à recevoir les plantes, niches confectionnées de manière à ce que l’eau puisse y pénétrer. Dans cette catégorie de plantes saxatiles nous placerons les Saxifraga, les Sedum, les Sempervivum et les Ummbi- licus, enfin les Androsace. Parmi les Saxifrages il en est certains qui préfèrent une exposition ombrée. Les autres et la plupart des plantes saxatiles préfèrent le soleil. En bassinant chaque jour les plantes pendant la saison chaude, on les voit pousser à vue d’æil et l’on jouit pendant de longs mois d’une floraison délicieuse. Pour relever un peu ces rochers de plantes saxatiles un peu plates, ces plantes se trainant sur le sol, on peut placer sur la crête des rochers les diverses variétés des Rhododen- drons de montagne. Ces plantes de rocaille sont assez faciles à cultiver, se di- visent très bien pour la multiplication après la floraison et ont cet avantage particulier qu’elles n’exigent aucun abri pour la saison d'hiver. Il est peut-être plus sage néanmoins de les abriter simplement par un toit de chaume, qu'on peut facilement enlever. Nous arrivons enfin à la culture des plantes alpines de haute altitude, autres que les plantes saxatiles : La culture de ces plantes sur pilotis a été suggérée à des amateurs par des études de culture en baquets faits à Soisy sous Montmorency (Seine-et-Oise) par M. et Mme Daigremont. - Pour arriver à obtenir de belles floraisons d'Arnica mon- tana ou de Gentiana, par exemple, M. et Me Daigremont emploient des baquets, c’est-à-dire de petits tonneaux coupés en deux, dont le tiers est garni d'eau; au-dessus ils élèvent avec des fils de fer et de petits rochers, un jardin suspendu TS CURE PT ar DRE A LOS NT on DOS AT TGe AD T e 21 CULTURE DES PLANTES ALPINES DANS LES JARDINS: 323 et les plantes qui y sont placées se trouvent sous l’action du soleil constamment saturées d'humidité. Seulement, la mauvaise saison venue, les baquets sont ren- trés en serre froide. Cette ingénieuse culture a déterminé d’autres amateurs à cultiver sur place les plantes alpines de sommet autres que les plantes saxatiles, sur des rochers pourvus d’une eau sou- terraine. Voici comment on peut procéder : Avant de construire les rochers, on établit une vaste cu- vette en béton où l’on amène de l'eau de pluie canalisée pour la renouveler sans cesse. Une profondeur d’eau de 0,20 à 0,30 centimètres suffit. Sur cette cuvette, et au moyen de tiges de fer, on construit en quelque sorte sur pilotis des rochers pourvus de niches destinées à recevoir d’abord le sol propice à chaque plante, puis la plante elle-même. Ces niches doivent être drainées avec le plus grand soin, afin de faciliter l'écoulement des eaux en cas d'orage. Puis on dispose les plantes dans les niches en donnant à chacune l'exposition qui lui convient. Les Dianthus, les Edeliveis, les Gentiana, les Arnica au soleil ainsi que l’Zrilrichun nanum. Spécialement pour les &Genltiana et les Arnica,il faut garnir les niches de Sphagnum. On disposera à l’ombre les Ramonda, les Pyrola, un grand nombre de Primula. Ces plantes de haute altitude, surtout celles que vous avez obtenues de semis, ignorant ou oubliant leur altitude natu- relle, retrouvent dans une certaine mesure la fraicheur de leurs montagnes, grâce à l'emploi de cette eau qui circule sous les rochers. Le soleil, en pompant cette eau souterraine, imprègne les rochers pendant la plus grande chaleur d’une humidité qu'ils communiquent aux plantes. Les résültats de cette culture sont merveilleux. Les Gentianes et les Arnica cultivés par ce procédé, que : nous ne saurions trop recommander, donnent des fleurs su- perbes. Toutes les plantes ainsi cultivées ont une végétation admi- rable. Il y a une précaution indispensable à prendre, c'est de préserver les rochers et leurs plantes de l'humidité pendant 324 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. la mauvaise saison. À cet égaru il faut établir un toit vitré mobile à placer à la mi-octobre et qu'il faut laisser jusqu'au printemps. En outre, dans les hivers froids, il faut avoir soin de cal- ieutrer autant que possible le bas des rochers en les entou- ant par exemple avec des paillassons, pour éviter la gelée qui pourrait être préjudiciable à des végétaux, plantés en fait sur une couche peu épaisse de terre. Ce mode de procéder me donne d'excellents résultats à Boulogne-sur-Seine. Avant de terminer, je voudrais exprimer ici une idée qui me parait de nature à développer le goût de la culture des plantes alpines. Je ne veux pas prononcer le mot « Journal » qui est trop gros pour ce que je veux dire. Je voudrais que les amateurs de ces plantes créent entre eux une entente pour l’établis- sement d'un bulletin périodique où l’on trouverait la liste des plantes que chaque amateur serait disposé à échanger contre d'autres plantes. Ce travail pourrait être centralisé entre les mains d’un amateur choisi par ses collègues. Ce mode d'échange est très utile, c’est par lui qu’on peut obtenir des établissements publics tels que le Jardin de Kew, certaines plantes qu’ on ne peut pas se procurer à prix d'argent. Je termine en souhaitant de voir augmenter le nombre des amateurs de plantes alpines. Ces nouveaux amateurs trouveront toujours auprès de leurs anciens le plus grand désir de leur faciliter leurs tra- vaux de début. 325 EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. SUR LES ARAIGNÉES FILEUSES DE MADAGASCAR. ENVOI DE SPÉCIMENS VIVANTS. (1). Tananarive, 12 avril 1900. On semble faire une certaine attention aux essais de soie de l'Arai- gnée et, comme vous l'avez très justement remarqué et dit dans une des séances de la Sociélé, on semble ignorer ou ne pas se souvenir que la Société d Acclimatation s'est occupée depuis longtemps déjà de la question. Depuis lors, il est vrai, celle-ci a fait du chemin et, grâce aux travaux pratiques de l’École professionnelle du Gouvernement à Tananarive, on pourra voir à l'Exposition universelle les premiers tissus de la soie d'Halabe de Madagascar. D'ailleurs, déjà depuis quelque temps, la Chambre de commerce de Lyon et le Laboratoire d'études de la soie, s'étaient aussi occupés de cette soie et avaient exposé des spécimens (scientifiques) à l'Exposition de Lyon. Je vous adresse, en même temps que celte leltre, un tirage à part du rap- port fait par M. Dusuzeau, alors Directeur du Laboratoire d’études de la soie à la Chambre de commerce de Lyon. Mieux encore, per- mettez-moi de vous faire hommage (depuis longtemps vous avez bien voulu vous faire le patron de notre Halabe) d'une nichée de cette Arachre. Je vous l’adresse par poste (paquets échantillons) et, si je re me trompe, elle vous arrivera avec les jeunes Araignées bien vivantes. Il ne serait peut-être pas sans intérêt, dans ce cas, de placer à côté des spécimens de tissus ou broderies faits avec la soie d'Halube, la petite colonie vivante dans une grande cage de verre, par exemple, en la nourrissant de quelques moucherons, du sang frais liquide, de quelques gouttes d'eau. Jules Fallou avait, en 1889 (voir Bulletin, 20 septembre 1889), fait quelques essais d’acclimatation de l'Halabe. Les jeunes Araignées placées sur un rocher de son jardin, après quelques jours, cessèrent d’être visibles. J. Fallou se demanda si elles avaient servi de nour- riture aux Oiseaux ou aux Lézards. Les Fourmis les avaient-elles chassées, ou bien ces petites Araignées vont-elles passer l'hiver dans les cavités du rocher ? L’Entomologie appliquée ayant eu le malheur de perdre J. Fallou, je ne sais si le savant observateur a pu trouver réponse à son desideratum. Ne pourrait-on ajouter aux points d’in- terrogation ci-dessus posés par J. Fallou, celui-ci : « L’AÆalabe ne (4) Lettre adressée à M. Clément, président de la Section d’Entomologie. 396 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. fait-elle pas comme certaines de ses congénères et ne va-t-elle pas voyager au loin? » Un savant chercheur et observateur du &07 des Araignées, le R. P. Favier, m'écrivait tout récemment : « La grande Epeire, de Madagascar, ne connaît-elle pas ce moyen de chercher fortune loin de son berceau ? Le fait ne serait peut-être pas sans in- térêt pour la question de l'élevage en plein air de ces grandes fi- leuses. » Par même courrier de ce jour, j'envoie une coque de jeunes Halabes au P. Favier, pour qu’il puisse les étudier à ce point de vue. Veuillez agréer, etc. Paul CAMBOUÉ, S. J., Missionnaire à Tananarive. EXTRAITS ET ANALYSES. UN NOUVEL ENNEMI DES ABEILLES (Phyllotochus Macleayi FISCHER), par À. Grarp. On sait que l’Abeille ordinaire (Apis mellifera) introduite en Aus- tralie depuis 1262, y prospère admirablement, grâce à l’abondance des fleurs à nectar et aussi, sans doute, parce que bon nombre de ses en- nemis du vieux continent n'ont pas été transportés dans les terres australes. Cependant, M. Walter W. Froggatt, entomologiste du Gouverne- ment à Sidney (Nouvelle-Galles du Sud), vient de faire connaître un fait curieux qui pourrait, en se généralisant, causer de sérieux dom- mages à l'apiculture. Un petit Lamellicorne, très commun en Australie, le Phyllotochus Macleayi Fischer, long de 8 millimètres environ, qui, jusqu’à présent, vivait exclusivement dans les fleurs de divers ar- bustes, notamment des Angophora et des ZLeptospermum, s'est mis, depuis deux ans, à pénéirer dans les ruches, trouvant plus commode de dévorer le miel tout recueilli par les Abeilles. C’est au crépuscule que les Phyllotocus commettent leur pillage, et en trois nuits, M. Reed, apiculteur à Pumpong Cooma, a pu détruire 9 litres de ces larrons en placant parmi les ruches des vases d’eau miellée où ils allaient se noyer. On sait que, dans certaines régions de la France, Cefonia (Potosia) cardui Sch1. a aussi une tendance à pénétrer dans les ruches, mais sa grande taille le rend moins dangereux que le Phyllotocus. Nous avons déjà insisté sur les curieux changements de régime que vi OR EXTRAITS ET ANALYSES. 327 peuvent présenter certains Lamellicornes (Société entomologique de France, Bulletin, 1893, p. cocv). L'exemple nouveau cité par W. Frog- gaté mérilait d'être signalé ; publié dans un travail d'Entomologie ap- pliquée, il aurait pu passer inaperçu des biologistes (1). >< DéGars pu Forficula auricularia L. DANS LES RUCHES D’ABEILLES, par H. pu Buysson. Cette année, le 29 mars, j'eus l’idée d’examirer une ruche que j'a- vais établie l’an dernier et, en la soulevant, je vis le plateau de des- sous jonché de cadavres d’Abeilles, parmi lesquels ceux de dix-huit Forficula auricularia L. Une lutte devait avoir eu lieu et en examinant les rayons, je fis tomber encore sept ou huit Forficules vivants qui étaient assurément occupés à manger le miel et la cire. — Cet essaim maladif par suite du froid de l'hiver, d'un calfeutrage insuffisant et par suite surtout de l'épuisement des provisions, avait eu à souffrir de ces intrus. Je crois intéressant de signaler le fait, attendu que cette observation ne se trouve relatée dans aucun ouvrage d’apiculture et que pareille chose s’est produite aussi, cet hiver, dans une ruche, chez M. J. Martin, Préparateur d’Entomologie au Muséum de Paris (2). < LA GUTTA-PERCHA À LA GRANDE-COMORE, par A: Mirne-Enwanps. Dans des communications précédentes qui ont paru au Pulleiin du Muséum (3) les naturalistes ont été tenus au courant des essais d’in- troduction de l’Zsonandra quila à la Grande-Comore par notre corres- pondant, M. Humblot, et des résultats obtenus. Sur la demande de M. Jungfleisch, M. Humblot m’a envoyé des feuilles mortes ramassées au pied des arbres afin qu’elles soient ana- lysées; je les ai remises à mon savant collègue qui, après les avoir (1) Bulletin de la Société entomologique de France, n° 8, 4900, p. 183. (2) Jbid., p. 183. (3) Ces communications ayant été reproduites daus le Bulletin de la Société d'Acclimatation (1897, p. 478 et 14898, p. 308.), il a paru utile de donner éga- ment 2% extenso la présente notice extraite comme les précédentes du Bulletin du Muséum, et qui témoigne de l'intérêt que portait le regretté directeur de cet établissement au développement des cultures coloniales de la France. 328 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. étudiées, m'a écrit une lettre fort intéressante que je crois devoir re- produire intégralement : Paris, 25 janvier 1900. Monsieur et cher collègue, Les difficultés de la récolte des feuilles d’Zsozandra gutta, non pas, évidemment, sur les repousses des arbres abattus par l'exploitation malaise, mais sur les arbres des forêts, dont la hauteur est le plus souvent très grande, m'ont élé signalées, dès que j'ai fait connaître la richesse de ces feuilles en gutta-percha et la possibilité de les utiliser pour la production de celte substance très employée aujourd hui. J’ai été conduit par cette remarque à me préoccuper de savoir ce qu'est devenue la gutta-percha dans les feuilles tombées mortes sur le soi. Ayant pu me procurer, vers la fin de 1893, une petite quantité de feuilles d'Zsonandra guila, recueillies sur le sol au pied des arbres, mais déjà très fortement atteintes de pourriture, j'ai pu constater qu'elles contenaient en abondance de la gulta-percha. J'ai élé frappé de la proportion relativement faible du produit résinifié par oxy- dation. Ce fait confirmait une observation relatée lors de mes premiers essais sur la remarquable conservation de la gutta dans les feuilles sèches exposées à l’air pendant un temps considérable entre la récolte et le traitement. Il montrait une fois de plus que la nature des tissus et celle des principes solubles contenus à l'état sec dans ces tissus sont très favorables à la conservation de la gutla-percha enfermée dans les laticifères ; on sait, en effel, que cette gulta exposée directement à l'air s’oxyde rapidement. Toutefois, les mauvaises conditions dans lesquelles avaient pu être recueillies les feuilles tombées dont je viens de parler, le temps pro- longé pendant lequel elles paraissaient avoir séjourné sur le sol, me semblaient rendre désirable nne reprise de l'expérience dans des conditions meilleures, plus voisines de celles qui correspondaient à uue récolte régulière. C’est pourquoi, il y a quelques mois, après avoir constaté la richesse en gutta des feuilles récoltées sur les Zsonandra gutta que M. Humblot cultive à la Grande Comore, j'ai profité de votre bienveillant intermédiaire pour demander à M. Humblot de vouloir bien faire ramasser les feuilles qui tombent spontanément de ces arbres. M. Humblot a eu la complaisance de donner satisfaction à ma demande et vous m'avez remis récemment deux pelits sacs contenant ensemble 354 grammes de feuilles tombées et recueillies sur le sol. Voici les observations auxquelles ces feuilles ont donne lieu : J'ai pu retirer d'un lot de 100 grammes de ces feuilles 8 gr. 92 de gutia. Un autre lot semblable m'en a fourni 9 gr. 50. Les deux essais, assez concordants, si l'on tient compte des faibles quantités mises en a Re D Ge à Cr de" à d'nt-d EXTRAITS ET ANALYSES. 329 œuvre, conduisent à un rendement moyen de 9,25 pour 100. Ce ren- dement des feuilles mories est un peu plus élevé que celui obtenu par moi anterieurement avec des feuilles récoltées vivantes sur les mêmes arbres. Une telle auzmentation doit résulter, me semble-t-il, des résorptions de principes organiques el minéraux qui s’opérent dans la feuille mourante avant qu'elle se détache du végétal; elle in- dique, si l'on ne considère que la quantile, le traitement des feuilles mortes comme plus avantageux que celui des feuilles récollées vivantes. | Le produit.que j'ai obtenu des feuilles mortes est fort peu chargé de résine ; sa qualité ne me parait pas inférieure à celle de la gutta extraile des feuilles des mêmes arbres récollées vivantes; ramolli dans l’eau chaude, il se laisse faconner à la manière de la meilleure gutta et il donne par simple traction des membranes minces à éclat soyeux, etc. Les feuilles des jeunes arbres de M. Humblot ont donc donné une première réponse précise à la question posée : les résultats fournis par leur examen autorisent à penser que les feuilles d’Zscnandra quitta tombées morles sur le sol, constiluent une excellente matière première pour la fabrication de la gutta-percha. Il devient maintenant néces- saire de contrôler ces faits par des essais pratiques sur des quantités plus importantes afin d'étudier de plus près la valeur du produit. Je vais demander en Malaisie quelques kilogrammes de feuilles ré- coltées sur un même groupe de végétaux, de manière à rendre l’expé- rience décisive. On peut affirmer, des à présent, que le mode de récolte dont il s’agit, s’il n’est ni pénible ni coûteux, s’il échappe entièrement au reproche de nuire au développement du végétal, fournit en outre un produit de qualité excellente, de qualité meilleure que celle de la plus grande partie des produits que la Malaisie envoie aujourd’hui en Europe. È Je vous serais particulièrement reconnaissant de vouloir bien trans- mettre à M. Humblot mes sincères remerciements pour l'extrême obligeance avec laquelle il a bien voulu répondre à ma demande. 7< L'INDUSTRIE DU LIÈGE DANS LA PROVINCE DE GERONE (ESPAGNE). Extrait d'un rapport de L. AGEL, gérant du vice-consulat de France, à Barcelone. Barcelone. La province de Gerone est la région la plus importante de la Péninsule dans la production et la fabrication du liège. Les deux principaux centres industriels se trouvent, l’un dans le district de la 330 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. x Bisbal, tout le long du littoral à Llagostèra, la Bisbal, Calonge, Palamos, Palafrugell et Bagur; l’autre est situé dans le district de Figueras, sur le versant des Pyrénées espagnoles, à côté de la fron- tière ; les villes et bourgades à citer sont Massanet, de Cabrengo, Darnius, La Bajol, Agullana, La Junquera et Cantallops. Dans le premier groupe, il convient de mentionner en premier lieu Palamos, qui compte environ 2,500 habitants; de plus, la majeure partie de la population ouvrière occupée à l'industrie du liège habite les deux bourgs les plus voisins qui sont San-Juan de Palamos et San-Antonio de Calonge. Palamos possède deux fabriques actionnées par un moteur à vapeur; l’une d'elles ne produit que des trefinos champagne; quant à l’autre elle élabore des bouchons de toute espèce. A elles seules, ces deux manufactures, qui fonctionnent jour et nuit, occupent un millier d'ouvriers. Quatre cents femmes font manœæuvrer des machines à main et fournissent à trois cents ouvriers la matière nécessaire à la fabrication des carrés de liège. Les autres manufac- tures de cette ville emploient environ deux mille ouvriers de plus, dont la plupart ont leurs logements dans les deux communes subur- baines dénommées plus haut. Bien que la contrée de Palamos ne produise aucun article de consommation et que les conditions d'existence y soient chères, on remarque cependant que la classe ouvrière y jouit d’un bien-être relatif; cela provient du cours élevé des salaires gagnés par les ouvriers bouchonniers. La ville de Palafrugell ne produit pas la quatrième partie du liège brut qu’exigent les besoins de son industrie. Cette commune, peuplée de 6,000 âmes, possède quatre-vingt-cinq fabriques de bouchons et indépendamment de ces établissements, il faut ajouter que l’on tra- vaille le liège dans la plus grande partie des maisons particulières. On y compte deux mille ouvriers employés à l’industrie du liège et un nombre encore plus considérable de femmes et d'enfants. A côté de Palafrugell se trouve Bagur, où l’on compte sept fabriques. Bien que leur personnel paraisse à première vue fort nombreux, il n’en est pas moins bien insuffisant. En ce qui concerne le second groupe de villes et bourgades qui s’adonnent au travail du liège, il y a lieu de faire remarquer tout d’abord que cette industrie a été autrefois très florissante à La Jun- quera, à Agullana, à Massanet de Cambrenys, à Cantallops et dans plusieurs autres localités voisines; à l'heure actuelle, La Junquera a bien perdu de son ancienne importance; pour les autres centres ma- nufacturiers situés dans cette partie du district de Figueras, s'ils n'ont pas progressé beaucoup, du moins ils ont conservé à peu de chose près leur situalion économique antérieure. Les vicissitudes que La Junquera a traversées sur le terrain industriel sont dues jusqu’à un certain point au transport à Port-Bou, en 1878, du principal bureau des douanes de la province, aux ravages du Phylloxéra et à la sup- EXTRAITS ET ANALYSES. 331 pression de la douane de La Junquera, qui a été remplacée par celle du Perthus. Mais c’est surtout la dernière guerre civile qui a le plus contribué à précipiter la décadence de cette ville au point de vue industriel. Suivant les catégories, le prix de la main-d'œuvre varie entre 1 piéc. 50 c. et 5 piecettes par millier de bouchons. Un bon ouvrier travaillant à la fabrication des bouchons dits «trefinos », en produit de 8 à 10,000 par jour; ce qui représente un salaire hebdomadaire de 40 à 50 pié- cettes. Pour les femmes. le travail manuel se rémunère à raison de 1 piéc. 50 c. à 2 piéc. 50 par jour, tandis que le travail de la machine se paie 1 piéc. 75. Les ouvriers dont le salaire est établi à la journée gagnent d’ordi- naire 3 piécettes. Les diverses opérations auxquelles donne lieu la manipulation du liège sont très multiples et variées : cueillette, récolte et séchage du liège ; cuisson et râclage des pannes; division des pannes en tranches et des tranches en carrés, confection des bouchons, triage, polissage, lavage, desséchement, nouveaux triases successifs et emballage. Il est aussi une autre opération appelée : « procédé » qui consiste à vérifier la qualité des bouchons. Les frais d'élaboration du liège, ou, en d’autres termes, le coût de la main-d'œuvre, est relativemêent élevé si on le compare au prix de revient de la matière première; celui-ci absorbe seulement les 3/5 du prix total et laisse les autres 2/5 disponibles pour les fonds des salaires. Sans parler des autres articles que l’on confectionne avec le liège, les bouchons se répartissent en un grand nombre de variétés; on en comptait, il y a encore quelques années, jusqu’à cent cinquante; au- jourd’hui ce chiffre a beaucoup diminué. Parmi les principales on n’en cite que sept, qui sont d’un usage courant : 1) Trefinos pour champagne; 55 millimètres sur 35 millimètres; 2) Mi-longs pour Bordeaux, fins ; 55 millimètres sur 23/22 milli- mètres ; 3) Mi-longs pour autres espèces de vins et cognacs ; 50 millimètres sur 23/25 millimètres ; 4) Modèles de 45 millimètres sur 24/26 millimètres ; 5) Gazeuses de 40 millimètres sur 23/25 millimètres ; 6) Trefinos et modèles de dimensions inférieures de moitié aux espèces ci-dessus ; 7) Bouchons coniques ou terminés en pointe de 20 à 35 millimètres pour pharmacie et droguerie. Comme on le voit, les espèces de bouchons se classifient d’après leur longueur et leur diamètre depuis le bouchon de pharmacie jusqu’aux « bretas » qui sont encore plus gros que les trefinos. 332 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Les cours moyens de chacune des sept variétés de bouchons énu- mérées ci-dessus sont respectivement déterminés ainsi qu'il suit : l'e catégorie.... 100 piécettes le millier. 2e — TO 0 —- — dE — HP UEDS — — 4 — RE) — — Se — ESS ETG — — (LE — D tes UE — _— 7e — ATEN RE — En résumé l'industrie du liège d2 la province de Gerone est la seule branche de l’activité économique de la Péninsule qui soit florissante à tel point que non seulement elle ne redoute aucune concurrence étrangère sur le marché de la Péninsule, mais que de plus elle lutte avec avantage dans la conquête des débouchés extérieurs. C'est une des rares industries espagnoles qui n’ont pas exigé du (Gouvernement la majoration des tarifs et une protection douanière plus accentuée. Et cependant il s’agit d'un produit de très peu de valeur : on vend à raison seulement d’une piécette le mille une grande quantité de bou- chons à la confection desquels ont successivement collaboré une douzaine d'ouvriers différents depuis le cultivateur jusqu’à l’expor- tateur. Pour réaliser une valeur aussi élevée que celle de 37 millions de piécettes il faut que le bon marché excessif du liège ouvré soit compensé par des stocks considérables. En 1898, l'Espagne a exporté environ 2 milliards de bouchons, dont 1 milliard 200 millions sont sortis de la province de Gerone. J'ai cru intéressant de communiquer ces quelques détails touchant l'importance extraordinaire de l’industrie bouchonnière dans une région aussi voisine de notre frontière et dépendant de la circons- cription de ce Consulat général. CR AS REVUE DES CULTURES COLONIALES | HAN | Directeur : À. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit, Directeur du Service de l'Af _des Antilles à l'Union coloniale française Président de la Section coloniale à la $ tonale d'Acclimatation de France. | ï DAT Ë po réée sous les auspices de l’Union coloniule française, cette publication a pour but de faire mie “onnaïtre, en France, les diverses cultures et les productions coloniales; de vulgariser dans les col meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes franc etuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. “a À ae . COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MM. | MM: e prince D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe BARON JULES DE GUERNE, secrétaire général de la Société . colonial, président du Comité de l'Afrique française. tionale d’Acclimatation. $ g ME Le commandant BINGER, ancien gouverneur de Ja Côte- Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, direct d'Ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des de l'Institut colonial de Marseille. _. a Colonies. | $ LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, préside AUL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- la Société nationale d'Acclimatation.. À LE « culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du St-Espr BUREAU, professeur de botanique au Muséum. j MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséut - CHAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Revue, { …— tiques, secrétaire général de l'Union coloniale française. * nérale des Sciences pures el appliquées. Ra HARLES-ROUX ancien député, membre du Conseil supérieur PRILLIEUX, sénateur, inspecteur général de l'Enseignem - du commerce, vice-président du Groupe colonial. azricole, profesr de Botanique à l'Institut National agro ORNU, professeur de culture au Muséum. POISSON, assistant au Muséum. RE EHERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- RISLER, directeur de l'Institut national agronomique, , ole au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. RIVIÈRE, ancien président de la Société d'Agriculture d’Alge r MARCEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- directeur du Jardix d'essai du Hamima. PE Fe à versité de Paris. D' TREILLE, ancien inspecteur en chef du service de é YBOWSKI, dirceteur, professeur de cultures coloniales à “dés Colonies. FE CEE x 28 l’Institut national agronomique. VIALA, professeur de viticulture à l’Institut nationel agr “ H. FLAHAULT, professeur de botanique à l'Université de mique, directeur dela Revue de Viticulture. : 4 Montpellier. . é ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon e LOUIS GRANDEAU, directeur de la Sfalion agronomique de l'Ecole des sciences politiques. Li … l'Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. RANDIDIER, membre de l'Institut. _ La Revue des C'ullures coloniales paraît le 5 et le 20 de chaque mois. … Bureau : 4h. rue de la Chaussée d’Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 18 francs — recouvré à domicile, 18 fr. 50. — Colonies el Un _ Postale, 20 francs. — Pour les abonnements et annonces, s'adresser à M. Gaston Noblet, admi _ En vente au siège de la Société d'Acclimatation, A, rue de Lille, Paris | Les ouvrages suivants de M. RicnarD DE BOEVE 5 Graveur - Dessinateur el Colombophile - Aviculteur TRAITÉ PRATIQUE NOUVEL ue DU Li a PIGEON VOYAGEUR ACTUEL | ATLAS COLOMBOPHILE | CONTENANT CONTENANT : D ui | res esse mac applicables à l'Art Militaire et Maritime * de toutes les espèces de pigeons AINSI QU'UNE . Élude expérimen tale des Maladies des Pigeons VOYAGEURS, DE FERM E FAR avec les remèdes . et de fantaisie ‘ / ne pour les quérir promplement \ Prix : 3 fr. 75 FRANCO Prix : 2 fr. 75 FRANCO __ Savons vétérinaires à l'Eucalyptol, pour Chiens \ : ou autres Animaux ; Les Membres de la Société d’Acclimatalion qui désirent essayer ce savon très - efficace contre la vermine et les maladies cutanées sont informés qu'il peut leur _ cn être envoyé quelques pains à titre d'essai, à des prix extrêmement avantageux. _ — Pour plus amples renseignements, s'adresser au Secrétariat de la Société. SOCIÉTÉ NATION reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 ALE D’ACCLIMATATION DE Fondée le 10 Février 1854 41, Rue DE Lizze. — Paris BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1900-1901 Président. M. LE Myre pe Virers, député de la Cochinchine, membre honoraire de la Société (médaïlle d'or 1882), 3, rue Cambacéres, Paris. Edouard BunEaAu, professeur de botanique au Muséum d'histoire naturelle, quai de Béthune, 24, Paris. Edmond Perrier, membre de l'Instiiut (Académie des : Sciences), directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Vice-Présidents. 28, rue Gay-Lussac, Paris. FORE de Ponterian», député, boulevard Saint-Germain, 238, CARRE C. RAverET-WATTEL, directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier, près Fécamp, rue des Acacias, 20, Paris, Secrétaire générai: Baron JuLES DE GUERNE, rue de Tournon, 6, Paris. Henri Hua, licencié ès sciences naturelles, ,254, boulevard Saint-Germain, Paris,et château du Luat par Ecouen (Seine-et- | Oise) (Conseil). Paul Marcxaz, docteur en médecine et docteur ès sciences, - Secrétaires. directeur adjoint de la Station entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, Fontenay-aux-Roses (Seine) (/ntémeur). Comte Raymond de Damas, rue de Berri, 26, Paris (Etranger). Félix MÉREL, Statuaire, rue Chauveau, 29, Neuilly-sur-Seine : (Séances). | Trésorier : Georges MA@xe, notaire honoraire, 207, boulevard Saint-Germain, Paris, et 15, boulevard de Boulogne, à Boulogne-sur-Seine. Archiviste bibliothécaire: Maurice Loyer, avocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. Membres du Conseil. L. G. BINGer, ancien gouverneur de la Côte d'Ivoire, chargé des affaires d'Afrique au Ministère des Colonies, 15, rue de Prony, Paris. Edouard Branc, explorateur, 52. rue de Varenne, Paris. à Raphaël Brancæarp, membre de l’Académie de médecine, professeur à la Faculté de médecine, secrétaire général de la Société zoologique de France, 226, boulevard Saint-Germain, Paris... Charles DEBREUIL, avocat à la Cour d'appel, propriétaire, 25, rue de Châteaudun, Paris et à Melun (Seine-et-Marne). Paul ne LaBouLaye, ambassadeur de France, 129, avenue des Champs-Elysées, Paris. - L. Mensey, conservateur des Forêts, directeur du Service de la Pêche et de la Pis- ciculture au Ministère de l'Agriculture, 10, rue Garancière, Paris. Louis Ozivier, docteur ès sciences, directeur de la Revue générale des Sciences pures et appliquées, 22, rue du Général Foy, Paris. Ousrazer, Docteur ès sciences, assistant au Muséum d'histoire naturelle (Mammifères et Oiseaux), 121 Lis, rue Notre-Dame-des-Champs. Paris. A. Razer, membre de l'Académie de médecine, professeur d'Histoire natu- relle à l'Ecole vétérinaire d’Alfort (Seine). Dr WeBer, médecin inspecteur de l'armée, ancien directeur de l'Ecole de médecine militaire du Val-de-Grâce, 180, boulevard Saint-Germain, Paris. Président honoraîre : Albert GEOFFROY SAINT-HILAIRE, Vault de Lugny, par Avallon (Yonne). Ù Secrétaire général honoraire : Amédée BErTHOULE, avocat, docteur en droit, membre du Comité consultatif des Pêches maritimes, 18, rue du Cherche-Midi, Paris. Trésorier honoraîre: Georges Maruias, propriétaire, Bourg-la-Reine (Seine). Membres honoraires du Conseil: Pierre MéaniN, membre de l'Académie de médecine, directeur du journal l'Eteveur, avenue Aubert, 6, à Vincennes (Seine). j é De Edouard MÈne. médecin de la maison de santé de Saint-Jean-de-Dieu, rue Oudinot, 20, Paris. ; ; Dr Joseph Mrcuow, ancien Préfet, rue de Babylone, 33, Paris. Versailles. — Imprimeries CErr, 59, rue Duplessis. Le Secrétaire Général gérant, Fine FRANCE Juixs DE GUERNE. 2 E t D BULLETIN DE LA NE AUTOMNE D'ACATATON (Revues des Sciences naturelles appliquées) 47 ANNÉE NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1900 SOMMAIRE APE CHARRUAUD. — L'Eryéhrures psittacea,... +. iee care edae se ei 333 . Lucien BERTRAND. — Poissons et Crustacés d’eau douce alimentaires.............. 348 ENFANTIN. — Les cultures du Sénégal et l’organisation agricole de V Afrique occidentale Mfrancalse ste ce: À VC RO A AE A PRES NA 350 . | Extraits et Analyses : * L'Eléphant d'Afrique, par Edouard Foa (suite et fin).......... .............. PAT 7 Ce ; Note sur l'élevage en France du Colin de Virginie, par F. MÉREL............. .., TENTE La distribution des sexes dans les pontes des Pigeons, par L. Cuénor.... ....... D'AMAERLE 383 . Le Mimulus luteus dans le département du Pas-de-Calais, par J. Poisson et BEHAGUE.... 386 MPa bu des auteurs. ne, 4 LU ee eme 388 innahbtiquedes animaux. tr... niet A D NE ART On ere 391 de haohetiquedes végétaux... ll.) SU NE LS 392 | MIE babÉtquerdes articles: Lui ui a. near 393 EG mt dela Societé Al ER PLAN Re he 2 M eos 10e ls: 1395 ne de A TT nd nt APN AG La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions. émises par lés auteurs des articles insérés dans le Bulletin. NS NO ER Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 4 fr 50 LP ES AU SIEGE DK LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, RUE DE LILLE, 41 PARIS ET À LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. DÉSINFECTANT ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, scientifi iguement dér ontrée, Me avantage de n'être »', Toxique ni Corrosif. Hémostatique et Stvstique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l AYMEE, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène cl de Desinfection des Départements. 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À * | L : ayant obtenu la médaille d’or avec félicitations du Jury à l'Exposition de Bruxelles après expé- Prix : 80 fr. les cent kilos ; 1 fr. 25 le kilo. S’adresser pour prospectus et renseignements à M. G. DE PREUX* Château de la Villette, Saultain (Nord), ou 16, rue de l'Échiquier, Paris. 333 L'ERYTHRURA PSITTACEA (GMELIN) AMADINE OU DIAMANT PSITTACULAIRE; PAPE DE NOUMÉA DES OISELIERS SES MŒURS, SES HABITUDES ET SON ÉLEVAGE DANS LE MIDI DE LA FRANCE par l'Abbé A. CHARRUAUD, Curé de Bessens (Tarn-et-Garonne) (1). \ / / Amadine psittaculaire, Diamant psilttaculaire, Pape de Nouméa, trois noms qui désignent le même Oiseau. Sans nous prononcer sur la valeur respect've de chacun de ces noms qui auraient certainement fourni au spirituel auteur de l’Ornithologie passionnelle la matière d’une disser- tation pleine d'humour sur l’analogie, nous adopterons celui d'Amadine psittaculaire ; Erythrura psilltacea des ornitho- logistes. C’est en vérité une charmante créature : rouge éclatant sur la tête, aux joues, au cou, à la poitrine, sur le croupion et la queue, celle-ci plus sombre en dessous et agrémentée de deux plumes qui dépassent les autres d’un centimètre en- viron. Vert bronzé sur tout le reste du corps. Deux petits yeux ronds et noirs comme du jais, un bec conique pareil- lement noir et deux pattes fines et brunes complètent le per- sonnage dont la taille est à peu près celle du Tarin d'Europe. Et rien n’est joli comme cet Oiseau minuscule avec son manteau couleur d’'émeraude que fait ressortir plus énergi- quement encore le brillant plastron écarlate qui empourpre sa gorge et sa poitrine, et la calotte de même nuance dont sa tête est coiffée. Les signes caractéristiques des sexes sont si rares et si peu apparents dans le groupe des Psittaculaires que l'œil le plus exercé est exposé à s’y méprendre. On distingue la femelle, dit M. le marquis de Brisay, « à sa tête plus petite et à cette particularité que le rouge de la face s'étend moins (1) Communication faite en séance générale le 23 mars 1900, Bull. Soc. nat, Accl. Fr. 1900, — 22 334 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. loin sur l’occiput et plus bas sur la gorge (1). » Pour M. Mo- reau, cette même particularité serait, au contraire, l’apanage du mâle dont la bavette rouge « semble descendre un peu plus bas sur la gorge (2)». Selon nous c’est à l'allure seule qu'on peut les reconnaître à coup sûr : le mâle parait plus élancé, plus éveillé aussi et plus remuant que la femelle. Lorsque les époux sont perchés sur la même branche, ou vol- tigent paisiblement l’un près de l’autre, il est impossible de les confondre. Mais il n’en est plus de même dès qu'ils entrent en mouvement. C’est de la Nouvelle-Calédonie que nous vient ce pur chef- d'œuvre emplumé, et Marseille est le port d’arrivage où l'on a le plus de chance de le trouver. Importé en petit nombre, bien que très commun, paraît-il, dans sa patrie, le Diamant psittaculaire a été d’abord vendu plus de 100 francs le couple. Encore de nos jours tel marchand de Paris n’en demande pas moins de 80 francs la paire ou de 45 francs l’un. Heureuse- ment les amateurs se sont mis de la partie; et, grâce aux nombreux produits obtenus en ces dernières années par un élevage bien compris et disséminés aux quatre coins de la France, on peut aujourd’hui se procurer un couple de jeunes pour 35 ou 40 francs, et un couple d'adultes pour 45 ou 50 francs, selon la vigueur et la beauté des sujets. Vieillot est le seul naturaliste qui ait décrit, très succinc- tement d’ailleurs, le Diamant psittaculaire. Il lui donne le nom de Chardonneret acalanthe, appellation que le temps n'a pas ratifiée. M. Moreau, à qui nous empruntons ce renseignement, parle aussi des frères Layard comme ayant observé cette Ama- dine dans son pays d'origine. Au dire de ces voyageurs « elle construit son nid de fibres d’Aloës, et lui donne une forme sphérique assez volumineuse. Sur l’une des faces est mé- nagée la sortie. Enfin, l’intérieur est garni de quelques plumes de Perroquet. » Et M. Moreau d'ajouter mélanco- liquement : « On ne sait rien de plus de ses mœurs en li- berté (3). » Il est certain que, comme peinture de mœurs, c'est maigre. Puisque les frères Layard eurent la chance de découvrir un (1) Passereaux, p. 200. Auray 1894. (2) L'Amateur d'Oiseaux de volière, p. 194. (3) L’Amateur d’'Oiseaux de volière, p. 195. L'ÉRYTHRURA PSITTACEÀ, 335 nid de Psittaculaire il ne leur en eût pas coûté davantage, semble-t-il, d'y introduire le doigt afin de pouvoir nous ap- prendre ce qu'il renfermait, œufs ou petits, et leur nombre et leur couleur. L'ornithologie et l’aviculture n'auraient rien perdu non plus à savoir si le berceau se balançait gracieu- sement dans les airs aux tiges flexibles d’un grand arbre, ou s’il reposait à quelques pieds de terre sur les rameaux enche- vétrés d’un buisson touffu. Enfin, une description rapide du site, — plaine ou montagne, champ ensemencé ou forêt impé- nétrable, steppe aride ou rive fleurie, — tout en donnant au tableau sa vraie couleur locale, aurait heureusement achevé une relation dont le naturaliste dans ses livres et l'amateur dans ses volières tireraient le meilleur parti. Mais, sans nous attarder à déplorer plus longuement le laconisme des frères Layard, disons de suite qu’il n’est pas téméraire de penser que les mœurs et les habitudes du Dia- mant psittaculaire en liberté ne s’éloignent pas sensiblement des mœurs et des habitudes de ses congénères australiens, lesquelles ont été décrites par un ancien consul français de la charmante façon que voici : « J'ai vu, aux environs de Sydney, de nombreux nids de Diamants, et je les ai toujours trouvés sur des arbustes, au sein de la verdure. La première fois qu’il me fut donné de rencontrer les Diamants, j'étais en chasse, seul avec mon fusil et mon Chien, fort loin de ma résidence. Arrivé assez tard dans une clairière découverte, j'établis mon cam- pement auprès d’une haie naturelle de Mimosas, et j'y passai la nuit en plein air, ce qui n’a que du charme sous ce climat si calme et si tempéré. Le matin, à mon réveil, j'entendis sortir des massifs fleuris qui m'environnaient de doux gazouillements, et puis s’agiter dans le feuil- lage toute une foule de petits êtres ailés. Je m'approchai, et je re- connus les mêmes Diamants que j'avais admirés dans les Jardins zoologiques d'Europe, avant mon départ pour les Antipodes. Il y avait là une trentaine de gros nids en forme de tignasses her- bues, percées d’un trou au milieu, d’où sortaient et où rentraient Îles Diamants que ma présence ne semblait pas inquiéter. C’étaient leurs habitations et le berceau de leurs petits : je m’en assurai en plon- geant les doigts dans une ou deux de ces boules à orifice cylindrique, et en trouvant au fond quelques œufs lièdes reposant sur un lit de mousse et de plumes. Par la suite, je trouvai d’autres nids de diverses variétés de Dia- 336 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. mants, et tous étaient construits dans les mêmes conditions, et dans les Conifères et les Mimosas » (1). Ces renseignements, puisés aux sources mêmes de la Na- ture, méritaient, quelque insuffisants qu'ils soient, d’être placés sous les yeux du lecteur. Mais si nous savons peu de chose sur la manière de vivre du Diamant psittaculaire à l'état libre, en revanche ses mœurs et ses habitudes en captivité sont plus connues. Essayons de les retracer d’après nos observations personnelles. De tous les Diamants, le Psittaculaire est, sans contredit, le plus robuste, celui qui se fait le mieux aux rigueurs de notre climat. On connaît, par expérience, la délicatesse ex- trême de certaines espèces, du Gould et du mirabilis, par exemple, qui, ayant la beauté des roses, des roses ont aussi, hélas ! la fragilité. Au début de leur acclimatement, un léger refroidissement de l'air, une faible agitation de l’atmosphère, l'ombre d’un nuage, suffisent pour affecter ces frileuses créa- tures qui se pelotonnent sur leur perchoir ou se retirent, grelottantes, dans un coin. Et, même au milieu de l'été, il n’est pas rare qu’un vent violent ne se change pour elles en un souffle meurtrier. Aussi doit-on se garder de làcher ces Oiseaux en volière ouverte tant qu'ils n’ont pas subi l’épreuve décisive de la première mue. Avec le Psittaculaire, cette précaution est inutile. De mai à septembre, l’amateur peut se donner le plaisir de voir ses Diamants calédoniens s’ébattre au grand soleil et fleurir les arbrisseaux verts de l’espace grillagé le jour même de leur arrivée, pourvu toutefois qu'un refuge leur soit assuré pour s’y mettre à l’abri de la fraicheur des nuits. En toute autre saison, cette précipitation pourrait avoir des conséquences graves. Personne n'ignore, en effet, que les transitions brusques d’un climat à un autre sont nuisibles à tous les êtres organisés, et que les plantes elles-mêmes les supportent mal. C'est pourquoi, en automne et en hiver, le régime de la cage en chambr non chauffée est de rigueur jusqu'aux beaux (1) Cité par M. le marquis de Brisay, Passereaux. L'ERYTHRURA PSITTACEA. 337 jours pour les sujets d'importation récente. Cependant si la partie close de la volière était vitrée, exposée au Midi et im- pénétrable à la gelée, nous ne verrions aucun inconvénient à les y loger hic el nunc, et même à leur permettre une joyeuse en volée dans le jardinet les jours où l’air serait calme et le soleil radieux. Mais le printemps est venu, Psittaculaire est acclimaté ; ou, s'il ne l’est pas encore, parce que trop tard débarqué en pays de France, tenez pour certain qu’il s’acclimatera tout seul. sans que vous ayez besoin de vous en méler. Et quand l'hiver reviendra avec ses pluies torrentielles et ses vents glacés, le petit Passereau rouge et vert n’exigera pas d'autre traitement que celui de ses plus robustes compa- gnons de captivité. Nous connaissons nombre d'amateurs qui, aux premiers glas funèbres de la Toussaint, s'empressent de porter la déso- lation parmi leurs pensionnaires emplumés en les forcant à hiverner tristement entre les quatre murs d’une chambre mal éclairée, en des cages étroites. — « N'est-ce pas, m'écrivait dernièrement un correspondant de Bordeaux, que j'ai bien fait de rentrer mes Psittaculaires et que vous m’approuvez? » — « Non, Monsieur, lui avons-nous répondu, vous n’avez pas bien fait et je ne vous approuve pas. Depuis cinq ans que j'élève ce charmant Passereau, jamais il ne m'est arrivé d’in- fliger pareil supplice à un volatile avide, plus peut-être que tout autre, d'air et d'espace, et jamais aussi, croyez-le, ma confiance en sa rusticité n’a été déçue. » Et nous disions la vérité. Il convient cependant d'ajouter que nous avons trouvé le moyen de permettre à nos Diamants psittaculaires d’hi- verner en volière et d'y braver impunément les froids les plus rigoureux. Le voici dans toute sa simplicité. A l’une des parties inférieures de l'abri vitré, presque au ras du sol, est pratiqué une sorte de guichet mesurant 8 cen- timètres en carré et s’ouvrant et se fermant à volonté au moyen d'une planchette coulissante. Quand le temps est doux, la porte reste grande ouverte, afin de laisser pénétrer. un peu d'air pur dans la maisonnette. Au contraire, si le temps est rude, seul le guichet est mis à la disposition des Oiseaux sans que la température de l’intérieur en soit sensi- blement altérée. Mes élèves le savent bien. Ils se promènent dans le jardin aussi longtemps que cela leur fera plaisir. Mais 338 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION dès que le froid commence à les piquer, il faut voir alors. Psittaculaires détaler et enfiler leur petit trou avec une dextérité qui ferait envie au plus agile des clowns. Et c’est ainsi traités que mes Diamants calédoniens arrivent frais et dispos à la saison des zéphirs, des fleurs... et des amours. A un tempérament robuste, le Psittaculaire joint une grande vivacité de caractère. Au point de vue de la beauté, quelques-uns de ses congénères ont peut-être autant de titres que notre Diamant à l'admiration des amateurs. Mais pour l’activité, l’agilité et la gaieté, il n’a point de rival, on dirait que ce volatile a du vif-argent dans les veines tant il est alerte et remuant. Jamais il ne reste longtemps à la même place : tantôt sur le sol, où il sautille avec aisance; tantôt dans un buisson qu'il fouille en tout sens, se glissant subtile- ment à travers la feuillée à la manière des Souris; tantôt escaladant un arbuste et paraissant subitement à la cime de la plus haute branche comme une fleur fraichement épanouie, le Psittaculaire semble posséder le don d’ubiquité. À lui seul, il anime une volière. Rarement il se départit de sa bonne humeur. On le voit toujours gai, toujours fré- tillant. Par instants, il s'arrête sur un point et prend une attitude recueillie qui contraste comiquement avec son allure d’ordinaire si éveillée. Alors sa tête est comme en- goncée dans les épaules et sa queue penche nonchalamment entre les pattes. Mais quelque chose vient-il à frapper son attention, tête et queue se relèvent prestement et l’Oiseau, secouant sa torpeur momentanée, reprend ses ébats, épar- pillant dans l'air ses trilles perlés d’un son si pur et si argentin qu'on les croirait détaillés par une mandoline : trri, trri, trri, ti, li, trrrrril... C'est là toute sa“petite chanson. Après le coucher du soleil, tous ses compagnons sont depuis longtemps sur leurs perchoirs, que le Psittaculaire folâtre encore dans le jardinet. À ce moment, sa vivacité ressemble à de l'agitation. Ce ne sont plus de petits sauts de branche en branche, des voltigements de buisson en buisson, mais des volées à tire-d’aile d’un bout de la volière à l’autre. On dirait que l’'Oiseau des tropiques, se ressouvenant des splendeurs zodiacales de sa patrie, veut s’élancer à la suite de l’astre étincelant dont les derniers feux s’éteignent à L'ERYTHRURA PSITTACEA. 339 l'horizon. Alors seulement il se décide à rentrer dans la maisonnette, où il a coutume de dormir. Pour la même raison sans doute, au lever du jour, il est le premier à aller saluer l’aube naissante. S'ils sont deux, mâle et femelle, le couple va toujours de compagnie. Ils sortent de l’abri couvert et y reviennent en- semble. Quand l’un mange, l'autre ne tarde pas à limiter. Ils se baignent souvent et en toute saison, principalement le matin et à midi. Le mâle commence; puis c’est le tour de la femelle qui bientôt cède sa place pour la reprendre et la céder encore jusqu'à ce que les deux époux aient ter- miné leur toilette. Toutes ces qualités sont relevées chez le Diamant calé- donien par une grande douceur de caractère. Lorsque plu- sieurs couples habitent le même local, les mâles échangent bien, de loin en loin, quelques petits coups de bec; mais ces luttes innocentes sont toujours de courte durée et sans conséquences facheuses. Après la bataille, il n’y a ni vain- queur ni vaincu, en sorte que l'honneur des combattants reste sauf et leur plumage intact. Rien ne s'oppose donc à ce que plusieurs ménages vivent côte à côte dans la même volière. Il en est ainsi chez moi depuis plusieurs années, et jamais le besoin de modifier cette situation ne s'est fait sentir. À l'égard des autres Oiseaux, le Diamant psittaculaire montre les mêmes dispositions pacifiques et je ne l’ai guère vu se battre qu'avec le Bengali Cordon-Bleu, (Estrelda phæ- nicotix),en compagnie duquel il se trouve parfois dans les volières. Avant d'aller plus loin, un mot sur la nourriture. Elle n’est autre que celle de tous les granivores : Millet blanc et Alpiste toujours, Chènevis de temps en temps seulement. Avec cet ordinaire, le Diamant psittaculaire peut vivre ; mais, pour le conserver beau et vigoureux, il est nécessaire d’y ajouter des œufs de Fourmis le plus souvent possible et un ou deux Vers de farine par jour et par Oiseau. On supplée ce régime ani- malisé avec le pain d'œuf, le pain au lait, le maigre de viande très fraîche et finement hachée, et surtout avec la Provende 340 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. armoricaine intimement mélangée, sans addition d'aucune sorte, au jaune d'œuf dur (1). Enfin la verdure, le sable de rivière et les coques d’œufs écrasées dans la main ou les coquilles d'Huitres finement con- cassées doivent être distribués en abondance. Inutile d'ajouter que l’eau des baignoires sera toujours propre et limpide. Abordons maintenant la question capitale, celle qui, aux yeux de l'éleveur, prime toutes les autres : la question de la reproduction. Nous remplirions dix pages du Bulielin si nous voulions conter les doléances de tous les amateurs qui se sont essayés vainement à l'élevage du Passereau calédonien, élevage si peu compliqué pourtant et toujours couronné de succès... quand on sait s’y prendre. Pour réussir, trois choses sont à connaître et trois règles à observer. De l'ignorance des unes et de l’inobservance des autres viennent, selon nous, tous les déboires. Il faut savoir : 1° Que le Diamant psittaculaire a pris toutes ses couleurs, autrement dit est adulte, à l’âge de trois mois, de quatre mois au plus, comme le vulgaire Mandarin (2); 20 Que, du moment que la Nature l’a revêtu de son costume de noces, Psittaculaire pense agir sagement en cherchant à se marier ; ce qu'il fait, au reste, très consciencieusement — quelle que soit la saison — dès que l’occasion se présente (3) ; 3° Que le Psittaculaire est ardent à l'excès. Il suit de là : 1° Qu'on ne doit jamais donner à un mâle adulte une femelle (1) Voici les proportions : deux ou trois parties de Provende et une partie d'œuf. Pour la manière de préparer cette pâtée voir : Bulletin de la Société d'Acclimatation. Mars 1899, p. 97, note 2. (2) La transformation de ceux qui naissent à la fin de l'automne est plus lente à s'opérer. (3) La reproduction du Psittaculaire à l’âge de trois ou quatre mois est pour nous un fait acquis, l'ayant plus d’une fois constatée dans notre volière. D’autre part, un éleveur bien connu, M. Martineau. de Nantes, à qui nous avions cédé trois couples de jeunes nés en mai 1897, nous écrivait à la date du 5 septembre de la même année : « Un des jeunes couples que vous m'avez envoyés a fait une ponte de quatre œufs qui, malheureusement, se sont trouvés clairs ; mais cela me donne de l'espoir pour le printemps prochain, » MES ; Tr ee L'ERYTHRURA PSITTACEA. 341 qui ne l'est pas, parce que le mâle poursuivrait sa compagne avec tant d’acharnement que la pauvre bête succomberait tôt ou tard à la fatigue ou à la faim ; 90 Qu'il faut bien se garder de lâcher en volière un couple de Psittaculaires adultes à la fin de l’automne ou en hiver, si l’on ne veut s’exposer à l'avortement de toutes les couvées (1), une température diurne et constante de 15 à 20 degrés étant indispensable à ces Oiseaux pour mener à bien l’éclosion de leurs œufs (2). 3° Que la meilleure saison pour l’accouplement, c’est le printemps. Est-il besoin d'ajouter qu'on ne saurait trop, au préalable, s'assurer du sexe des sujets? Nos l’avons vu, rien ne res- semble plus à un couple de Psittaculaires qu'une paire de Psittaculaires. Aussi que d'amateurs attribuent leur insuccès (1) Il s’agit ici de Psittaculaires indigènes n’ayant pas encore reproduit, ou de Psittaculaires nouvellement importés. Quant à ceux qui auraient déjà adopté nos saisons, rien ne s'oppose évidemment à ce qu’ils soient réunis dans le même local, même en hiver, attendu que leur ponte n’aura jamais lieu qu’au printemps, (2) « Pourquoi, nous écrivait encore M. Martineau, déjà cité, le Diamant psittaculaire exigerait-il plus de chaleur que le Diamant mandarin et le Dia- mant à gouttelettes dont j'ai obtenu des produits pendant tout un hiver? » Sans rechercher si cet hiver ne fut pas d’une douceur exceptionnelle, nous pourrions retourner l'argument et dire : Pourquoi le Bec-Croisé, qui fait son nid, pond et élève ses petits au plus fort de l’hiver sur des arbres couverts de neige, exige-t-il moins de chaleur encore que le Mandarin et le Goutte- lettes?... La meilleure raison qu'on en puisse donner c’est que le Maître l’a voulu ainsi. Mais de ce que Dieu a permis que certains Oiseaux portassent toujours en eux le printemps avec'toutes ses joies, cela ne prouve pas qu’il ait accordé la même faveur à tout le monde emplumé. En ce qui concerne le Dia- mant de Nouméa, l’expérience prouve même le contraire. Au début de notre élevage nous laissions nos Psittaculaires pondre en toute saison. Eh bien, ja- mais nous n'avons obtenu de petits des pontes d'hiver, malgré la température artificielle de 10 à 12 degrés que nous maintenions nuit et jour au moyen de réchauds pleins de braise incandescente dans le compartiment clos. Et ce- pendant les femelles avaient été fécondées ; car, lorsqu'après une incubation trop prolongée nous enlevions les œufs afin que la mère ne se fatiguât pas inu- tilement, la coquille crevée laissait apparaître une masse sanguinolente qui ne permettait aucun doute à cet égard. Il y a mieux. Une fois nous laissâmes la couveuse exercer tranquillement ses fonctions maternelles jusqu’au vingl- deuxième jour, presque le double du temps requis pour la formation des petits. Les œufs furent enlevés et crevés avec précaution. Dans trois sur quatre la cha- leur avait produit l’état embryonnaire avec un commencement de putréfaction. Le quatrième nous réservait une surprise : le fœtus était formé, mais nageait encore dans le liquide amniotique ; et, chose qui nous parut bien extraordinaire, il était vivant !.. Explique qui pourra ce mystère! Pour nous, la conclusion fut celle-ci : En hiver, la chaleur naturelle de l'Amadine calédonienne ne suffit pas pour déterminer l’éclosion des œufs. 342 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. tantôt à la malchance, tantôt à la froideur ou à la stérilité de leurs Oiseaux, qui ont tout simplement tenté, sans le savoir, cette chose impossible : l’accouplement de deux mâles ou de deux femelles !... Nous connaissons les conditions essentielles d’une bonne réussite. Entrons dans les détails de l'élevage. Le printemps, avons-nous dit, est l'époque qui convient le mieux pour procéder à l'accouplement. Mais encore faut-il que le cœur des futurs époux aït eu le temps de se réchauffer à un mutuel contact. L’éleveur réunira donc le mâle et la femelle vers la fin de février, c’est-à-dire, des que le retour d’une chaleur douce et vivifiante réveille la Nature. Cependant si la température se montrait trop inclé- mente, ou que le compartiment vitré ne fût pas suffisam- ment protégé contre la froideur des nuits, il serait prudent : de retarder cette opération préliminaire. On a si vite fait connaissance dans le monde des Psittaculaires! A la pre- mière entrevue, les relations les plus cordiales s’établissent et, dès ce moment, on ne se quitte plus : repas et récréa- tions, bains et plaisirs, tout, même le sommeil, est pris en commun. Chaque jour les cœurs vont se rapprochant davantage. Le moment est donc venu de préparer la chambre nuptiale et de mettre à la disposition des fiancés les divers objets qui leur serviront à la meubler. Les Psittaculaires font leur nid au milieu de fortes touffes de verdure accrochées aux parois de l'abri couvert, mais plus fréquemment dans de petits pots de terre percés d'un trou rond sur le devant et suspendus par une anse à une hauteur de 2 mètres environ. On leur fournit pour le construire : du foin, de la mousse, des bandes de papier, du crin, du coton ou de la bourre et des plumes fines et duveteuses en abondance. Tout aussitôt mâle et femelle se mettent à l’œuvre, celui-là charriant les matériaux, celle-ci les disposant à l’intérieur du pot ou au centre de la verdure, selon l'emplacement choisi. Moins de huit jours après le nid est terminé. Alors commence un chassé-croisé des plus amusants. Le male, pris d’une ardeur subite, se jette sur la femelle qui, devinant ses intentions, l’évite et gagne d’un trait l'extrémité opposée du local, où dare-dare son amoureux la rejoint. Elle l’évite encore, s'enfuit à l’autre bout, rentre dans la mai- los L'ERYTHRURA PSITTACEA. 343 sonnette, en sort, se laisse approcher, s'échappe, saute sur le sol, se faufile dans l'épaisseur d’un buisson, reparait sur la plus haute tige, s’élance jusqu'au sommet du treillage, retombe sur un arbuste, prend position sur une branche horizontale et là, avec toutes les apparences d’une lassitude qui n’est peut-être qu'un excès de coquetterie, se laisse enfin féconder. Le lendemain le premier œuf est pondu. Et chaque jour, jusqu'à la fin de la ponte, le même manège recommence de plus belle. Les Psittaculaires font de trois à cinq œufs de couleur blanche. Rarement le nombre de cinq est dépassé. Une seule fois nous en avons obtenu six d’une femelle importée. Les époux couvent alternativement pendant le jour, si- multanément pendant la nuit. D'une susceptibilité extrême, au moindre bruit ils se précipitent hors du nid. L’éleveur usera donc de grands ménagements quand ses fonctions l’'appelleront dans la volière. Après treize jours d’incuba- tion, les petits naissent. Ils sont laids et noirs comme des ramoneurs. A partir de ce moment, une nourriture animalisée est de rigueur. On donnera aux parents des œufs de Fourmis et des Vers de farine le plus souvent possible. Avec l'emploi continu de la Provende armoricaine, l'usage des Insectes peut être limité à deux ou trois rations par jour. De mai à septembre, les tiges tendres des Rosiers sont habitées par d'innombrables colonies de Pucerons verts dont les Psittaculaires se montrent très friands. Pour recueillir ces bestioles on incline les tiges infestées sur un vase à large orifice qu'on tient d'une main; et de l’autre, à l’aide d’une brosse douce, on les fait tomber dans le récipient. Ces parasites ailés doivent étre servis de suite aux reproducteurs qui en gavent leurs petits. Mais c’est principalement avec la verdure que le père et la mère alimentent les nouveau-nés.Le Mouron blanc, connu de tout le monde, la Fléole des prés, la Fétuque ovine, et surtout le Poa et le Ray-Grass anglais qui croissent en abondance dans les luzernes et les prairies, sur le bord des chemins et même au pied des murs délabrés, seront distribués à profusion tant que durera l'élevage. Ces herbes aux semences menues sont d’une utilité telle que nous avons vu des nichées entières conduites à bien avec cette seule nourriture ajoutée à la . Provende armoricaine. PARUS RC ER AUX CAO CET Pr OR 7 23 344 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Il va sans dire que Mouron, Poa, Ray-Grass, etc., peuvent être remplacés par le Millet blanc en grappes laiteuses. Mais tous les éleveurs ne disposent pas d’un jardin suffisamment spacieux pour cultiver cette précieuse Graminée, tandis que les autres foisonnent dans les champs. La croissance des oisillons s'effectue lentement : au vingtième ou vingt-unième jour seulement, ils prennent leur essor. Leur plumage est alors d’un vert sombre éclairé par un peu de rouge sur la tête et au cou. La mandibule supé- rieure du bec est noire et l'inférieure blanchâtre. Une parti- cularité digne d’être signalée : à la naissance du bec, de chaque côté de la tête, brillent comme des perles deux petites excroissances charnues, rondes, bleues et de transparence vitreuse, Nous surprendrons sans doute beaucoup de nos lecteurs en disant qu'un autre Diamant possède aussi, dans son bas âge, cet ornement singulier : c’est l’Amaranthe masqué (Amadina larvata), volatile des plus jolis et trop peu connu. Après quelques jours de vie au grand air, lesdites perles perdent de leur éclat, diminuent graduellement de volume et disparaissent tout à fait. Si les Psittaculaires adultes n’offrent extérieurement aucun signe caractéristique de leur sexe, en revanche les jeunes mâles et les jeunes femelles se distinguent facilement aux plumes rouges, plus abondantes chez les premiers et plus clair-semées chez les dernières. Cette différence, très sen- sible pour quiconque a de bons yeux, nous a toujours servi d'indication dans le choix des sujets : sur plus de vingt couples cédés en cinq ans à divers amateurs, jamais il ne nous est arrivé de nous tromper de sexe. Mais il faut se hâter de marquer les mâles ou les femelles, car, à trois mois, nous l’avons déjà dit, les Psittaculaires se sont complètement dépouillés du costume de l’enfance pour revêtir la splendide livrée qui ne les abandonnera plus. Alors l'Oiseau, arrivé à son entier accroissement, est, en tous points, semblable aux parents. Alors aussi, le superfiu de la nourriture, n’ayant plus rien à produire dans l'individu, va s’employer désormais à la reproduction de l'espèce. La première nichée est toujours suivie d’une seconde, d’une troisième et très souvent d'une quatrième. Certaines femelles sont assez prolifiques pour en donner une cinquième. Enfin une de celles que nous possédons n’en fit pas moins de six L'ERYTHRURA PSITTACEA. 349 l’année de son importation. Voici d’ailleurs les états de service de cette précieuse bête en l’année mémorable 1895. Il est intéressant d'enregistrer de tels faits : 1er nid, 4 février : 3 œufs qui ne peuvent éclore faute de chaleur. 22 — 2 mars: 4 — 4 petits. = ARE LES AND) in 9 oO 0 59 — 9Qaoù: 3 — 3 — GE" 21sept. 2020 — Total.... 20 œufs, 17 petits. Et voici ce que je lis dans mon cahier de notes à la suite du tableau ci-dessus : « Dans ce même mois de septembre, un jeune mâle de la nichée de mai s’accouple avec une de ses jeunes sœurs de la nichée de juin, et, de cette union hâtive, naissent trois petits. » Finissons par un trait de mœurs. Le Diamant psittaculaire est monogame dans la plus large acception du mot: non seulement le mâle n’épouse qu'une seule femelle, mais cette femelle il la garde, à l'exclusion de toute autre, jusqu’à la fin de sa vie; et rien ne le déciderait à s'en séparer. De son côté, la femelle reste irrévocablement unie au mâle que le sort lui a donné. Voici pourtant l’histoire très véridique d’une infidélité con- jugale que nous allons raconter en la signalant à l'attention des amateurs de croisements originaux. C'était en 1897. Par une belle matinée de septembre une jeune Munie japonaise, d’une éclatante blancheur, devenait inopinément veuve au moment où elle allait enfin goûter les joies de la maternité. En ce temps-là vivait dans la même volière un non moins jeune Psittaculaire auquel la mort prématurée de sa chère - moitié faisait des loisirs. L’infortunée Munie poussait de si touchants soupirs que le - voisin, ému de compassion, résolut de la consoler. # A dou pe A Sa AE NA Mg Re A EE 346 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Comment s’y prit-il? Je l’ignore. Le fait est que moins de huit jours après Psittaculaire et Munie travaillaient à se bâtir un nid bien chaud et bien douillet dans un des pots de l'abri couvert. Quelle émotion pour moi! Jugez donc, un Oiseau pourpre et vert comme le printemps accouplé avec un Oiseau blanc comme la neige ! Quelles merveilleuses combinaisons, la Nature allait tirer du mélange de ces couleurs si bien faites pour s’harmoniser !... Le nid fut promptement achevé et notre veuve, tout à fait consolée, y déposa tendrement quatre œufs que je n’'eusse pas donnés pour leur pesant d'or. Mâle et femelle se parta- gèrent les soins de l’incubation, se relayant à heures fixes. Au bout de quinze jours, incapable de refréner plus long- temps ma curiosité, l’éclosion devant avoir eu lieu, je décro- chai le pot, et, avec une émotion facile à comprendre, j'y introduisis délicatement le doigt... Me voici au centre, où repose sûrement l'inestimable trésor. Je palpe: un, deux, trois... œufs! Quelle déception! Les Munies japonaises n'allaient pas au delë. de deux nichées par an, l’une en mai et l’autre en septembre. Je perdais tout espoir d'obtenir avant ! ngtemps une nouvele ponte. Aûieu donc mes Oiseaux “odiges ! Créés par l'imagination ils s'étaient envolés comme reve: Je remettais tristement le pot-à sa place, lorsque je me Hemandai tout à coup ce qu'était devenu le quatrième œuf. Vite le nid est ramené... A côté des œufs tièdes quelque chose de plus chaud et de doux comme un peloton de duvet se meut... Plus de doute, c'est un petit qui avait échappé à ma première investigation. Certes, le résultat n'était pas précisément merveilleux : un Oiseau sur quatre œufs Néanmoins il prouvait que le Psittaculaire est susceptible de s'accoupler avec le Moineau du Japon et que leur union est féconde. Mon métis eut un triste sort. Quand il fut suffisamment développé, je voulus savoir enfin de quelles couleurs la Nature avait peint son plumage. Je pris l’oisillon dans la main. Sa petite queue était toute blanche sur la tête et au cou apparaissaient quelques plumes d'un rouge indécis tirant sur le rose; le reste du corps avait une teinte verdâtre nuancée de gris assez difficile à définir. En 3 ï L’'ERYTHRURA PSITTACE 14. 347 somme rien de bien extraordinaire; mais le temps, qui est aussi un grand artiste, en y mettant sa touche propre, devait faire sans doute de mon Oiseau un être des plus curieux. Je le replaçai dans son nid, dont je fermai un moment l'entrée avec la main pour lui donner le temps de se remettre de sa frayeur ; puis je gagnai la sortie. À ce moment un léger bruit sec et mat se fit entendre derrière moi. Je me retournai. Ma merveille gisait sur le sol à l'angle d’une baignoire de zinc. Apeuré et trop confiant en des ailes encore mal assurées, le métis avait voulu prendre son essor; l’imprudent avait fait une chute mortelle. 348 POISSONS ET CRUSTACÉS D'EAU DOUCE ALIMENTAIRES DE L'IMÉRINA (MADAGASCAR) par Lucien BERTRAND, Géomètre principal du Service topographique à Tananarive (1). L'Imérina, partie centrale de Madagascar qui entoure Tananarive (altitude moyenne 1,400 m.), est une région très riche en cours d’eau, lacs, étangs et marais. La principale culture est le Riz, et tout le terrain utilisable a été irrigué d'une façon remarquable par les Hovas. Les Poissons alimentaires vivant dans la région sont peu nombreux. À ma connaissance, il ne s’en rencontre que trois espèces : 1° L’Anguille qui atteint des proportions remarquables ; 2° Un Cyprin, sorte de petite Carpe, dont il existe une va- riété absolument rouge comme le Poisson rouge bien connu de nos aquariums. Elle atteint au maximum 15 à 18 centi- mètres de longueur, est pleine d’arêtes et dotée d’un goût de vase prononcé. Tel qu'il est cependant, ce petit Poisson fait les délices des Malgaches et donne même lieu à un trafic assez important, soit à l’état frais, soit desséché. Comme il pullule aussi bien dans les marais que dans les rizières inondées, on le prend très facilement, à la ligne ou à l’aide de petites nasses en jonc ; | 3 Une sorte de petite Perche (le Marakely en hova), qui est beaucoup plus rare que le précédent. Le Marakely est un joli Poisson. Les plus grands que j'aie vus atteignaient 15 centimètres environ de longueur. Ce Poisson est revétu d’écailles brunes noirâtres et orné d’une quantité de petites taches vertes, roses ou dorées qui changent de couleur sui- vant que la lumière les frappe plus ou moins obliquement. Le Marakely est bon à manger quoiqu'ayant trop d’arêtes. Pour terminer, je citerai l'Écrevisse malgache qui existe en (4) Communication lue à la Section d’Aquiculture dans la séance du 30 avril 1900. POISSONS ET CRUSTACÉS D'EAU DOUCE ALIMENTAIRES. 349 quantité dans les torrents et ruisseaux du massif de l’Anka- ratra. Cette Écrevisse ressemble assez à celles qui se font de plus en plus rares en France et atteint des proportions inconnues à ses congénères européennes; j'en ai vu qui mesuraient de 0,25 à 0,30 de long; de véritables petits Homards! Du reste exquises. 3 Les nombreux étangs et marais qui entourent Tananarive pourraient peut-être nourrir d’autres espèces comestibles que celles citées ci-dessus. Voici quelques renseignements sur le régime de ces étangs qui permettront à Messieurs les Membres de la Section d'A- quiculture de se faire une idée de la région et de pouvoir désigner les espèces nouvelles à y introduire. L'eau de ces lacs est assez claire et ils doivent être ali- mentés par des sources cachées. — Presque toujours un cou- rant existe parce que ces étendues d'eau servent de réservoirs pour l'irrigation des rizières. — Jamais ils ne se dessèchent, et on y rencontre des profondeurs de 7 mètres en certains endroits. En saison sèche (de mai à fin octobre), le niveau baisse et les bords sont alors travaillés par les indigènes qui y éta- blissent leurs rizières de semis. Le Riz ainsi planté est ensuite repiqué dars les terrains ad hoc. Pendant la saison des pluies, les marais et rivières dé- bordent, envahissent les rizières dont la récolte est alors terminée. Presque tout le pays est couvert d'eau. Les mame- lons et les digues émergent seuls. La flore des marais est riche et variée. Les Papyrus, Joncs, Roseaux, servent aux indigènes, soit comme combustibles, soit pour la couverture des cases, ou encore pour la fabrica- tion des nattes. Les Nénuphars bleus ou Lotus sont recueillis pour l’engraissement des Bœufs. Il existe en outre une mul- titude d'Algues et d’autres plantes aquatiques submergées. Les larves et Insectes d’eau pullulent ainsi que les petites Grenouilles et pourraient fournir une pâture abondante aux Poissons carnassiers. Enfin, pour terminer, je dirai que les bords de ces lacs et marais ne sont pas ombragés; pas le moindre arbre, ni le plus petit buisson n’en ornent les rives. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1900. — 23, LES CULTURES DU SÉNÉGAL ET L'ORGANISATION AGRICOLE DE L'AFRIQUE OCCIDENTALE FRANÇAISE par ENFANTIN, Ingénieur Agronome, ; Chargé de Missions agricoles au Sénégal et en Egypte (1). I. Les Cultures du Sénégal. Mix. La culture la plus ancienne du Sénégal est, sans contredit, celle du Mil. Le grain de cette Graminée constitue la base de l'alimentation des autochtones de l’Afrique occidentale fran- caise, qui consomment généralement le Mil sous forme de farine grossièrement concassée et préparée en Xouss-Kouss, à raison de deux repas par jour, en moyenne. Pour le Cheval, le Mil en grain remplace l'Orge ou l’Avoine. Il sert aussi à l’alimentation des animaux de basse-cour. C'est la Graminée alimentaire générale de l’Afrique occidentale française. Le commerce en distingue deux sortes : le petit Mil et le gros Mil. Ce dernier est préféré pour les Chevaux, qui peuvent le mastiquer plus facilement que le petit Mil. Au point de vue botanique, le petit Mil est un Panicum. Le cultivateur devra distinguer plusieurs Panicum groupés sous le nom de variétés hâtives et de variétés tardives. Une variété barbue est moins attaquée que les autres par les Oiseaux granivores, connus sous le nom générique de Mange-Mil. Le petit Mil est préféré pour l'alimentation du Noir. Sa culture est pratiquée de la facon la plus rudimentaire. Préparation du terrain. — Pendant la saison sèche, le Noir met le feu à la brousse. A l’approche de la saison des (1) Communication faite à la Section de Colonisation le 11 décembre 1899. LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 351 pluies, il donne un léger binage avec l’hilaire, et confie la graine au sol. La récolte des épis est faite trois mois environ après le semis, pour les variétés hâtives. L’hilaire est une espèce de rateau à pousser, dont le fer est en forme de lance. C’est l'instrument aratoire le plus employé au Sénégal. Pendant la mission agricole que j'ai accomplie au Sénégal et en Égypte, j'ai pu démontrer la supériorité de la charrue moderne, en organisant des champs d'essais de dé- monstration. L'emploi du feu au Sénégal, au Soudan, en Guinée, etc., pour la culture du Mül, fait des indigènes de grands destruc- teurs de végétaux ligneux : 1° parce qu’il est plus facile, mais ruineux pour l'intérêt général, de défricher par le feu qu’à l'aide d'instruments aratoires ; 2 parce que le fétichisme fait considérer par les indigènes les grands végétaux ligneux comme des êtres à maléfices ou des nids à Serpents ; ils pré- ferent les surfaces nues aux surfaces boisées, malgré leurs gris-oris protecteurs contre ces animaux malfaisants ; 3° parce que c’est leur moyen de récolter le bois, méthode défec- tueuse, toujours à l’aide du feu. Dans beaucoup de villages, l'on ne rencontre pas d’arbres d'une certaine dimension, en dehors de l’Arbre à palabres. Rien n'échappe au défrichement par le feu. La stérilité absolue, mais d’abord relative, s'installera en maitresse, si l’on ne réagit contre cette manière de cultiver par une meil- leure exploitation des forêts et le reboisement. Sur les terres légères, siliceuses, il faut, de préférence, cultiver le petit Mil. Par sélection, il serait facile d'obtenir des variétés de Mil plus productives, plus nutritives, c’est-à-dire plus riches en matières utilisables et de meilleure conservation. Gros Mi. — Les terres du Fouta et de l'ile à Morphil sont celles qui produisent le plus de gros Mil. Ce sont des terres d’alluvions, fortes et compactes, où l’on cultive cette Graminée, qui est un Sorghum. Le gros Mil est semé sur les rives du fleuve au moment où les eaux se retirent. Ces ter- rains sont annuellement inondés par le fleuve Sénégal et présentent une certaine analogie avec les terres du Haut-Nil d'Égypte. La charrue appliquée à la culture des Mils (petits et gros) en a doublé la production. 352 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Dans ces conditions, il serait possible de transformer, sur place, le Mil en alcool, ou d'exporter les grains sur les marchés de la Métropole, où ils seraient très bien vendus au prix courant de l’amidon et du gluten qu’ils renferment. Le Mil récolté est rapidement piqué par diverses espèces de Charancons. Sa conservation dans les greniers indigènes, dans des paniers d’osier, est défectueuse. Il faudrait es- sayer de petites colonnes métalliques analogues à celles que l'on emploie dans les docks à grains de l'Amérique du Nord ou à la Compagnie générale des Omnibus de Paris, pour la conservation des Avoines et autres grains. Conservé en épis, le Mil est déjà moins rapidement attaqué qu'à l’état de grains nus. ARACHIDE. L'Arachis hypogea, de la famille des Légumineuses, est une plante cultivée pour sa graine, dont on extrait une huile comestible de première qualité. Les Noirs de l'Afrique occidentale française font une grande consommation du fruit, en nature ou préparé de diverses facons. C’est le Cacaouëll des boulevards parisiens. L’Arachide, introduite au Sénégal en 1841, s’y répandit très lentement et ce ne fut qu’en 1850 que l’on put en expé- dier une cargaison en France. Plus tard, l'invention de l'hilaire donna une nouvelle extension à cette culture. La mission que m'avait confiée M. le Ministre des Colonies avait pour principal objet la culture de l’Arachide et la re- cherche des améliorations à y apporter. L'extension de la culture de l’Arachide dans diverses parties du monde, notamment dans l'Inde et l'Égypte, en a fait baisser le prix dans d'énormes proportions et l’on doit s'attendre à voir ce mouvement de baisse s’accentuer en- core. ©’il atteignait certaines limites que l’on peut prévoir, il serait à craindre que les cultivateurs sénégalais ne soient obligés d'abandonner la culture de cette plante, comme cela est arrivé pour une partie des colonies :de la côte d'Afrique, et de céder devant la concurrence de populations plus habiles, plus denses et vivant à moins de frais encore (les Indous et les Fellahs d'Égypte). AE nt USO A SN CM TMEE ET : < LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 353 Dans les pays où ils vivent, la main-d'œuvre est à meilleur marché qu'au Sénégal. Il était donc urgent de faire des recherches pour apprendre aux populations sénégalaises à produire plus d’Arachides à moins de frais et d’abaisser ainsi le prix de revient. J'ai eu la bonne chance d'obtenir un excellent résultat; les champs de démonstration de mon système de culture d’Arachides ayant donné trois fois plus de récolte sans augmentation de frais généraux de culture, ainsi que l’a constaté M. le Gouverneur général (1). CAOUTCHOUCS. Mes séjours en Colombie et au Venezuela m'avaient déjà permis d'étudier des plantes à caoutchouc dans leur aire géographique naturelle. Il existe dans la zone intertropicale, aussi bien en Amé- rique qu'en Afrique, des végétaux à suc laiteux renfermant du caoutchouc ou de la gutta. Ces végétaux appartiennent généralement aux familles des Euphorbiacées (Æevea-Ma- nihot- Micrandra-Euphorbia), des Artocarpées - Ulmacées (Ficus-Castilloa-Cecropia-Arlocarpus), des Apocynées (Vahea-Landolphia- Urceola, etc.), des Asclépiadées, etc. J'ai laissé au Sénégal une collection complète des diverses plantes à caoutchouc connues, pour y être soumises à des essais culturaux. Trois groupes sont autochtones, ce sont : 1° Les Landolphia et Vahea ; 2° Les Ficus dont j'ai reconnu vingt-cinq espèces ; 3° Les Calotropis. Les derniers échantillons que j'ai reçus provenaient de la Mission Bourdarie. Il faudrait rechercher, par la méthode expérimentale que j'ai appliquée à l’Arachide, les variétés de caoutchouc les plus avantageuses pour être soumises à une culture ration- nelle, dans l'espoir d'en faire des plantations, soit comme entourage d’autres cultures, soit comme plantations d'aligne- ment, soit en forêts sous forme de taillis ou de futaies, soit en semis de reboisement dans les forêts existantes ou dans (1) Voir le Journal offciel de l’Afrique occidentale, déc. 1897. 35€ BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. les réserves à multiplication. Il y a très peu de probabilités de pouvoir en faire l’objet d'une monoculture à l'instar du café et du cacao. En l’espèce, le Ceara est déjà éliminé comme ne donnant pas un rendement suffisant. Dans quelques rares milieux, il pourrait y avoir possibilité d'arriver à une bonne exploitation de père de famille, des caoutchoucs naturels par l’aménagement des saignées qui permettrait de tirer tous les ans une certaine quantité de caoutchouc, tout en assurant la conservation et la reproduc- tion naturelle de ces plantes, dans l’espoir de nouvelles ré- coltes, tout en arrivant à une production annuelle suffisante pour être rémunératrice. C'était le but que je poursuivais pendant mon séjour au Sénégal. L'important eût été de pou- voir démontrer qu'il serait beaucoup plus lucratif d'exploiter les plantes à caoutchouc en les cultivant et en les multipliant qu'en les détruisant. C’est un travail d'intérêt général que devraient continuer les fonctionnaires agricoles de cette colonie. Il faudrait écalement rechercher le mode d'exploitation le plus convenable pour extraire périodiquement le suc des plantes autochtones sans les détruire. L'établissement de pépinières pour la multiplication des espèces reconnues les meilleures serait le premier effort à tenter. Sous le climat désertique, il faut employer la multiplication par semis en place au début de l'hivernage. Il faut aussi trouver des plantes à caoutchouc, autres que les Landolphia et les Ficas qui s’accommoderaient des deux conditions sui- vantes : climat désertique et multiplication rapide par semis. (I n'y a rien à faire en ce moment-ci au Sénégal au point de vue industriel.) Les pépinières seraient constituées par des pieds-mères sélectionnés pour en distribuer annuellement les semences aux cCultivateurs noirs, immédiatement après la récolte, la durée germinative de ces graines étant très courte. Pour les régions plus humides, en Casamance par exemple et dans le voisinage des cours d’eau de la Guinée et du Sou- dan, la multiplication par boutures et marcottes, ainsi que la fourniture des jeunes arbres produiront de bons résultats. Un choix très judicieux des espèces caoutchifères devra être fait selon que le terrain sera léger ou fort, sec où humide, etc., etc. de cd Wu LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 353 Actuellement, dans la majorité des cas, en ne considérant que l'intérêt général, il faudrait prendre des mesures législa- tives de protection pour éviter la destruction des bonnes espèces de plantes à caoutchouc indigènes par une exploita- tion à blanc. Puis d’autres mesures pour en assurer la multi- plication naturelle pour le reboisement et l'aménagement des forêts, tout en laissant un bénéfice suffisant à l'exploitant, si cela était possible. Dans cet ordre d'idées (exploitation rationnelle), c’est un caoutchouc d'Amérique, le Castilloa elastica, qui me paraît offrir le plus de chances de réussite par sa croissance rapide et son grand rendement en latex. Je l’ai trouvé dans de fort belles conditions à deux ou trois journées de marche de la rivière Lebrija, affluent du Magda- lena, en Colombie. Mais je n’ai point eu l’occasion d’en voir de beaux spécimens en dehors de l'Amérique du Sud, son habitat naturel. Culture et avenir. — Pour le capitaliste ou l'industriel, il y a telle situation où il y aurait avantage à combiner l’exploi- tation du caoutchouc avec une autre production agricole. Tel est le cas de Madagascar où, combiné avec l’exploitation du caoutchouc, l'élevage du bétail pourra payer les frais géné- raux et même donner des bénéfices. Il y aurait aussi lieu d'étudier sur place la combinaison de l’exploitation des plantes à caoutchouc avec d’autres cultures. Dans les régions à caoutchoucs naturels, la main-d'œuvre -est presque toujours difficile à trouver par les procédés ordi- naires de l'offre et de la demande. Souvent elle ne peut être obtenue qu'après entente avec les autorités locales ou les chefs indigènes. En Casamance, l’exploitation du caoutchouc pourrait heureusement s’allier au commerce général des produits européens consommés par l’indigène, etc., etc. La question technique des plantes à caoutchouc, réduite à sa plus simple expression, consiste à déterminer : 1° L’espece botanique ; 2° La richesse du latex ; À 3° La quantité de latex que l’on peut extraire (extraction culturale et extraction industrielle); 4 Les procédés de coagulation. Ces quatre questions sont relativement faciles à résoudre par un voyageur capable de prendre de bons échantillons. LENS TELE" 356 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Actuellement, nul ne peut se prononcer sur la valeur cul- turale. Il n'y a pas encore de caoutchoucs provenant de plantes cultivées, on n’en trouve que de naturels. C’est donc sur l'exploitation de plantes sauvages seules que peut être basée une bonne opération financière, surtout s’il devient possible d’en tirer suffisamment de latex sans détruire la plante et de ménager une extraction périodique de nouveaux produits. : Le caoutchouc est une matière première dont l’utilisation dans l’industrie tend à augmenter. Par cela même, le prix est appelé à se maintenir à un taux élevé. L'exploitation en est facile par simple incision des végétaux. Le transport à grandes distances peut s'effectuer avec profit, parce que, sous un petit volume, le caoutchouc présente une certaine valeur. Les plantes à caoutchouc ont donc un grand avenir. Mal- heureusement, l’on a déjà commis de grosses erreurs, notam- ment au Sénégal et en Casamance. Jusqu'ici, les Noirs n’exploitent que les Lianes, {ol en Ouolof (Landolphia) et les arbres, dob en Ouolof (Ficus), qu'ils trouvent dans la brousse ou la forêt. Ils détruisent ces végé- taux en extrayant trop de suc à la fois (saignée à blanc). R1z. Aux environs du lac de Mérinaghen, il pousse à l’état - naturel, et l’on y cultive en trop petite quantité un Riz se rapprochant de celui de Koringi (Indes). Il est très savoureux, à petits grains, et sert à faire des Xouss-Kouss d'honneur aux voyageurs de distinction. Quelques kilogrammes de ce Riz constituent un cadeau très apprécié par les mulâtres et par les chefs noirs. Dans le Oualo, cette culture pourrait être étendue, sim- plement en creusant quelques canaux. Au jardin de Richard-Toll, avec les eaux de la Tavouey, nous avons fait un essai de culture de gros Riz, en utilisant tout simplement la crue de cette rivière. Ce Riz est arrivé à bonne maturité. Mais au Sénégal, notamment à Richard-Toll, l’on a souvent semé en septembre ce qu'il aurait fallu semer en juin. C'est Er PTE PTS EE ie A. à F Lié dati sed - do) “te Ed ue NS DS Le à ES né LT RE ls jé N'OSE dé D LS Er LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 357 ce qui explique le peu de succès des cultures entreprises, par des commercants, des avocats, des militaires, des religieux ou des administrateurs qui prennent le titre de Directeur de jardins d'essais, Directeur de pépinières, etc. C'est ce qui est arrivé à perdre cette colonie de réputation, au lieu de la mettre en valeur par l’utilisation de ses richesses naturelles. Espérons que cet état de choses ne se renouvellera plus, en agriculture, avec les agents agricoles qui ont été appelés à la suite de ma mission, La culture du Riz pourrait être pratiquée dans beaucoup de marigots du Sénégal qu'elle assainirait tout en donnant un excellent produit. Le centre des cultures du Riz se trouve en Casamance. C'est une culture d'avenir dans cette province. Pour la développer et l'améliorer, il avait été question, au cours de la conférence agricole tenue à Saint-Louis, sous la présidence de M. Lebon, Ministre des Colonies, d'installer en Casamance, un village annamite ou chinois, destiné à initier les populations autoch- tones aux procédés perfectionnés de culture, tels qu'ils sont pratiqués en Indo-Chine. C'était une excellente idée que l’on n’a pas encore mise en pratique. Elle aurait aussi pour résultat de mettre en concurrence le travailleur jaune avec le culti- vateur noir de cette colonie, ce qui pourrait favorablement stimuler l’apathie de ce dernier. Ce résultat économique est à souhaiter. Ne serait-ce que pour cela, cet essai devrait être tenté. Le Sénégal manque d'une population assez laborieuse pour devenir essentiellement agricole et produire des récoltes en quantité exportable. Les indigènes se contentent de cultiver des plantes à produits de consommation directe (mil, arachide, niébé, beref, etc.), pour leur propre alimentation, restrei- gnant volontiers leurs besoins plutôt que d'augmenter leur travail, dans l'espoir d’un bénéfice. Leur organisation sociale favorise aussi cette manière d’être. L'idéal du Noir est de ne rien faire. C'est, peut-être, l’âge d’or de ces populations. Mais cet état des choses ne me semble pas convenir aux intérêts de la Mère-Patrie et aux progrès de l'humanité. 398 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. CAFÉ. Dans le haut du Rio-Nuñez il existe une variété de café (Coffea arabica) tres estimée. Elle est en train de disparaitre, l'indigène ayant la fâcheuse habitude d’abattre les grands arbustes pour en cueillir plus facilement les fruits. La culture du café demande de l’ombre, des irrigations et des soins continus. Les Noirs du Sénégal ne me paraissent pas encore aptes à se plier à ses exigences culturales. Dans ces conditions, il nous restait à étudier le café, sans espoir d'applications immédiates de cultures. Des plantations de café de Libéria (Coffea liberica) ont été faites sur divers points du territoire, notamment en Guinée et à Richard-Toll. J'ai vu deux pieds de Coffea arabica en fleurs et à fruits dans le jardin de la mission apostolique de Thiès; ils ne me rappelaient que de tres loin les plantations productives de l'Amérique du Sud. Le Sénégal ne pourra se prononcer que dans deux ou trois années sur l’avenir de cette culture et encore, à condition que les essais soient convenablement dirigés et assurés. Je crois que le café ainsi que le cacao n'y a pas d'avenir. PLANTES DIVERSES. Le tabac, le coton, l’indigo, etc., croissent à l'état naturel dans diverses régions du pays. Malgré l’insuccès de tentatives de cultures faites à diverses époques, nous espérons obtenir de meilleurs résultats, parce que la plupart de ces essais n’ont pas été faits d’une facon méthodique, ni par des personnes suffisamment compétentes en opérations culturales. CoToxs. La flore du Sénégal possède une vingtaine de variétés de Cotonniers (Gossypium) appartenant aux espèces punctalum et acerifolium. Tous ces cotons sont à soie courte. Les cotons à longue soie, quiont été introduits à différentes époques en Afrique occidentale française, ont disparu, toutes LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 359 les fois qu'ils ont été abandonnés à eux-mêmes et à leur reproduction naturelle. Les cotons à longue soie appartiennent à des espèces végétales qui demandent un sol riche et beaucoup plus d’eau qu'il n’en tombe au Sénégal. La culture de ces cotons ne devra être tentée qu'à l’aide de l'irrigation et des engrais, notamment pour le petit Cotonnier (Gossypiur herbaceum) que j'ai vu cultiver comme plante annuelle en Égypte et qui me parait avoir le plus de chances de réussir au Sénégal. De nouveaux semis de Cotonniers à longue soie ont été essayés en juin 1898, au jardin de Richard-Toll. Les semences provenaient du Museum d'Histoire naturelle de Paris. La levée en godets, en bambous, a été bonne. La mise en place a eu lieu en août, en terrain sec, mais la reprise a nécessité plusieurs arrosages. Le rendement a été bien supérieur en qualité et quantité au rendement des espèces indigènes cultivées comparativement. Il faudrait essayer au début de l’hivernage (saison des pluies), sans irrigation, une culture en plein champ, d’un hectare au moins, et comparativement aux espèces indigènes, en at- tendant le fonctionnement de la ferme arrosée. La blancheur et la finesse du coton des Serrères ont attiré mon attention. Des échantillons ont été adressés à une grande filature de France, et l'industriel nous a répondu que ce coton pourrait être filé à la machine et qu'il s'engagerait à l'acheter si On lui garantissait une fourniture annuelle suffisante pour lui permettre de transformer son outillage. Dans ces conditions, l’on pourrait essayer un envoi de coton serrere. Il suffirait de s'entendre avec les chefs indigènes pour en faire cultiver une superficie suffisante. D'où il faut conclure que la culture du coton des Serrères pourrait être avantageusement développée au Sénégal. Il suffirait de mettre à la disposition du chef noir une égreneuse à bras ou à manège et une petite presse pour l’em- ballage. Une maison de commerce ou, à son défaut, le Gou- vernement local devrait tenter cette opération. La culture est très facile, le coton des Serrères étant un arbuste vivace, il suffirait de nettoyer le terrain de la planta- tion par des binages en temps utile, récolter le fruit, l'égrener le plus rapidement possible pour conserver la blancheur de la soie et ne resemer, pour agrandir les plantations, que les 360 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. L graines des pieds les plus productifs et donnant la meilleure qualité. (Amélioration des plantes indigènes cultivables par la sélection.) TABAC. En Afrique occidentale française, le Tabac peut être consi- déré comme un produit d'échange, faisant l'office de monnaie, aux mêmes titres que le sel, la guinée, etc. L’indigène achète le Tabac en feuilles, qu'il fume générale- ment dans une petite pipe en terre rouge, armée d’un tuyau de roseau. Cette pipe est bourrée en réduisant les feuilles en petits morceaux (brisures). Le Noir fume aussi ces feuilles de Tabac en petits cigares qu’il fabrique ad hoc, à la facon du Français qui roule sa cigarette à la main. Les Maures fument le Tabac en brisures dans une espèce de fume-cigare en corne ou en os et généralement agrémenté d’un morceau de métal. Toutes les femmes noires et beaucoup de mulàätresses fument la pipe. Le Tabac en feuilles, vendu au Sénégal, est de provenance américaine ; il présente une forte quantité de déchets, appelés roussites. Ces déchets sont surtout constitués par des pétioles de feuilles. Tous ces Tabacs sont fortement additionnés de matières saccharines et comburantes qu'on a dù lui incorpo- rer par la fermentation. Le prix de détail du Tabac est, en moyenne, de 2 fr. 50 c. le kilogramme à Saint-Louis, la feuille entière, y compris le pétiole qui est infumabie. Compte argent. — Mercurialisé à 185 francs les 100 kilo- grammes, il supporte ad valorem un droit de 10 0/0 de douane =: 10208 4200 NU Re RS SI DIS Un droit de 7 0/0 sur les marchandises étran- DÈTES — 4e de US en ON ER NO Un impôt de consommation de 25 0/0 —. . . . 46 25 et 5 0/0 des droits d'octroi à Saint-Louis — . . . 9 25 Total des droits . . . . 8S6fr.95c. Vu les droits de 86 fr. 95 c. par 100 kilogrammes dont sont grevés les Tabacs étrangers en feuilles, et auxquels droits il faudrait ajouter le prix du transport et de la manutention du pays d'origine au point de consommation ; il y a lieu detenter LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 361 cette culture. Elle se trouvera, toutes choses égales d’ailleurs, jouir d’une avance de 86 fr. 95 par 100 kilogrammes de feuilles sur les cultures des Tabacs américains introduits dans la Colonie. Nous supposons, ce qui me parait tont naturel, que les Tabacs produits dans le pays ne seront soumis à aucun droit, tout au moins au début. En supposant encore que les Tabacs produits au Sénégal paient les mêmes droits que les Tabacs importés, ils auraient encore en leur faveur les frais de transport. D'autre part, la Métropole achète aussi des Tabacs étrangers et nous ne doutons pas, qu'à qualité égale, elle ne donne la préférence à une Colonie. Par conséquent, nous avons de vastes débouchés en perspective et cela constitue toujours une espérance sérieuse. Essais de culture. — Au Jardin de Thiès, j'ai vu en terrain siliceux une collection de diverses variétés de Tabacs. Ces plantes poussaient très bien à l’aide des arrosages. Mais aucune d'elles n'avait été traitée en vue d'en obtenir des feuilles bonnes à fumer. Si à cela nous ajoutons que j'ai trouvé dans l’intérieur le Nicotiana gigantea (Tabac géant) et que dans les jardins l’on rencontre des variétés de Tabacs d'ornement; l’onest en droit de conclure que le Tabac peut pousser au Sénégal et qu'il doit être l’objet d’un essai méthodique de culture pour en déter- miner la valeur économique. J'ai également trouvé des pieds de Nicotiana tabacum dans la brousse des environs de Dakar. Cela indique que l'espèce importée peut se conserver à l'état nature!. Nous avons vu qu'il n’en était pas de même pour les cotons à longue soie. M. Delpeuch, de Dakar, a cultivé du Tabac dont il a tiré un bon parti financier en le vendant en feuilles aux Noirs. Il ignorait la culture de cette plante. C’est un employé de com- merce. Il eût été désirable que l'Administration secondât ses efforts en lui déléguant un agent agricole à l’époque des prin- cipales opérations culturales. La culture du Tabac peut donc être considérée comme ayant été essayée à Thiès. Mais l’on s’est contenté de semer une collection sans soumettre les plantes aux diverses épreuves ordinaires pour en obtenir des feuilles bonnes à fumer (ab- sence de connaissances techniques). Cependant ce sont les feuilles et non la graine, surtout ici, qui peuvent être l’objet 362 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. d’un commerce et l’appät d’une juste rémunération des tra- vaux de l’homme. Ailleurs un expérimentateur subventionné ne se doutait pas qu’il est indispensable de repiquer le jeune plant de Tabac, de pincer la tige, effeuiller le bas de la plante, ébourgeonner, cueillir successivement les feuilles à leur maturité, les faire sécher lentement, les mettre en manoque, etc., etc. Si l’on avait soumis la plante aux différentes épreuves que je viens d'indiquer, quelle eût été la valeur du produit? C’est là le premier point à établir. Après, nous ferons nos prix de revient et si la différence nous constitue un bénéfice suffisant nous pourrons nous livrer à la culture du Tabac avec quelques chances de succes. INDIGO. L’Indigotier (indigofera tinctoria) est très répandu au Séné- gal et les Noirs savent en préparer un indigo de premiere qualité avec lequel ïls teignent leurs pagnes. Bien que la cul- ture de l’Indigotier soit très facile, plusieurs essais ont été infructueux. La question des eaux dans la préparation du produit joue ici un très grand rôle. La maison Rabaud a dû reprendre d'anciens essais de cul- ture et de préparation de l’indigo qu’elle est en état de con- duire à bien. PALMIERS ET PLANTES TEXTILES, ETC. Puis viennent comme importance économique les Palmiers et les plantes textiles autochtones. Enfin j'ai dressé au cours de ma mission une liste de 490 végétaux pouvant présenter quelque importance. II. Méthode employée pour l’organisation agricole de l’Afrique occidentale française. Méthode de travail. — J'ai rompu avec les vieilles tradi- tions des chargés de missions, qui se contentaient de faire des rapports. LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 363 Ne considérant que l’importance pratique des résultats à obtenir : la mise en valeur de nos colonies par l’agriculture et l'exploitation rationnelle de leurs richesses naturelles, j'ai mis la main à la pâte pour labourer, dresser des Bœufs à ce travail, semer, planter, tailler, greffer, et montrer ainsi ce que l’on pourrait faire en agriculture, dans un pays ignorant nos procédés modernes d’agronomie et pour instruire la po- pulation noire de visu et par l'exemple. Après avoir étudié les divers éléments de la production agricole de cette colonie; sol, faune, flore, régime des eaux, état actuel de la culture, main-d'œuvre, etc., j'ai été amené à conclure que chaque plante susceptible d’être cultivée au Sénégal et dans les dépendances devait étre soumise à une série d'essais, et j'ai appliqué la méthode expérimentale déter- minative des meilleurs procédés culturaux, à notre agricul- ture coloniale. Car il n’y a pas une agriculture coloniale générale, mais seulement des procédés de culture à établir dans chaque colo- nie, ou plus exactement dans chaque milieu agricole. Il nous faut sortir des brillantes mais ruineuses études générales dans lesquelles nous excellons, pour obtenir des résultats finan- ciers et nous laver du reproche {hélas, souvent mérité, sur- tout en matière de colonisation!) que la France, toujours en avance quand il s’agit de penser et d'inventer, est toujours en retard quand il faut agir. En l'espèce, ce retard doit être attri- bué à la mauvaise administration locale. L'on obtient, à l’aide de la méthode expérimentale, des champs d'essais et de recherches, que j'ai inaugurés au Séné- gal, la détermination pratique des meilleurs procédés de culture à employer dans un certain milieu. Par l'isolement et l'élimination des diverses conditions culturales dans les- quelles ces plantes peuvent être placées en l’état de nature, sans installation de laboratoires et jardins coloniaux, toujours trop coûteux au début, nous arrivons à établir les procédés manuels donnant le maximum de bénéfices nets. C’est ce qu'il faut démontrer aux indigènes d’une façon irrécusable, permanente, et en frappant leur imagination de primitifs. D'autre part, pour l'avenir de notre race, le jour où nous pourrons démontrer que telle culture rapporte tant à l’hec- tare, dans telle colonie, nous re manquerons ni de colons, ni de capitaux français. C’est le premier devoir à accomplir dans 354 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. l'œuvre de la colonisation au Sénégal. Le Blanc cultivera toujours, s’il peut obtenir un bénéfice suffisant. Le Noir de l'Afrique occidentale française ne travaillera que pour la sa- tisfaction de ses besoins réduits au minimum, par entraine- ment, par la force des choses {ce qui serait un peu trop lent) et par l'exemple. L'étude préliminaire de l'établissement de la production du sol exécutée par le technicien, il s'agira de prendre les mesures administratives nécessaires pour propager les systèmes cul- turaux reconnus les meilleurs. L'intérêt général sera servi en raison directe de la valeur du système de culture établi et de la surface exploitée. Essais de culture. — Mes premiers essais de démonstra- tion de culture ont porté sur l’Arachide : 1° Sur la culture à la charrue comparée à la culture faite à l'hilaire ; 20 Sur la culture en ligne comparée à la culture en foule; 3° Sur le semis en Arachides décortiquées comparé au semis en Arachides en coques. 4 Sur la culture de la variété d'Égypte (1) comparée aux cultures des variétés locales (Cayor, Galam, Rufisque, etc. je 5° Sur l’espacement à donner aux plantes; 6° Sur la profondeur d’enterrage des semences; 9° Sur l’époque du semis; 8° Sur la sélection des semences du pays 9° Sur la culture sans engrais, comparée à une culture sur un engrais vert. C'était le seul engrais dont nous pouvions disposer. Résultats obtenus. — Les frais généraux se sont élevés à 100 francs par hectare pour la culture à l’hilaire et à un peu moins pour la culture à la charrue. Le rendement maximum a été de 7.000 kilogrammes à l’hec- tare; il correspondait à la parcelle travaillée à la charrue, en lignes espacées de 40 centimètres, les plantes étant à 30 centimètres sur la ligne; cet essai avait recu un engrais vert; les semences décortiquées appartenaient à la variété d'Égypte, et avaient été enterrées à 8 ou 10 centimètres de profondeur. (1) Pendant mon séjour en Égypte j'avais expédié au Sénégal 1,000 kilo grammes des meilleures variétés d’Arachides cultivées dans la Basse-Egypte. LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 365 D'où nous concluons, d’après la pratique, qu'il faut em- ployer : 1° la charrue de préférence à l’hilaire ; 2° Semer en ligne plutôt qu’en foule; 3° Pratiquer le semis en Arachides décortiquées surtout pour les coques à deux ou trois amandes ; 4 Employer les semences sélectionnées ; 5° Enterrer les graines de 8 à 10 centimètres ; 6° Semer le plus tôt possible entre la première et la se- conde pluie de l'hivernage. Ce système d’expérimentation directe, dans les conditions locales, avec les seules ressources du pays, en grande cul- ture, sur plusieurs hectares, sortant ainsi des limites du jardin, à beaucoup frappé les Noirs qui se sont mis à l’adopter. Le Bour Diambour (chef indigène) sur le territoire duquel nous avons fait un essai à l’aide d’une charrue, a immédia- tement demandé à faire l'acquisition de quarante charrues. Rendement des Arachides.— Nos divers essais d’Arachides cultivées à la charrue nous ont donné des rendements de 3,080 kilogr. (produit minimum) à 7,000 kilogr. (produit maximum) à l’hectare, ce qui constitue un rendement moyen, en chiffres ronds, de 5,000 kilogr. à l’hectare a — 5,040). Les rendements que nous avons déterminés sur les cultures des indigènes appelées Longuans ont varié entre 700 et 2,100 kilogr. à l’hectare, ce qui nous donne un rendement moyen de 1,400 kilogr. à l'hectare (Rs — 1,400). Nous avons obtenu à l’aide de la charrue, surtout de l’en- grais et de meilleurs soins culturaux, un rendement triple DD 5,040 sur la culture ordinaire du pays e a 3,6) et nous con- cluons que la production de l’Arachide au Sénégal pourrait être améliorée sans augmenter les surfaces cultivées ni les frais généraux. | C’est un résultat qui mérite d’être appliqué avec toutes ses conséquences financières générales. Nous admettons comme axiome que plus un pays produit, plus il est riche. Si nous prenons les rendements obtenus en estimant l’Ara- chide, sur place, à 10 fr. les 100 kilogr. (nous n’estimons l’Arachide qu’à 10 fr. les 100 kilogr. pour laisser un bénéfice Bull. Soc. #at. Accl. Fr. 1900. — 21 Eh gr En on ec AS A li ont) ARR de AU ee EE GR sn EP Tr de A Rr4 ATP #. è # cé 4 à # 366 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. * à l'intermédiaire. À cette date l’Arachide en coque valait de 20 à 25 francs les 100 kilogr. sur les places du Havre et de Bordeaux), nous obtenons en argent un rendement de 700 francs à l'hectare, correspondant à une récolte de 7,000 kilogr. sur notre parcelle n° 1. La parcelle n° 2 nous a donné 385 francs. La parcelle n° 3 nous a donné 308 francs. La parcelle n° 4 nous a donné 210 francs. La parcelle n° 5 nous a donné 70 francs. Nos frais généraux s'étant élevés à 100 francs à l’hectare, cela nous constitue un gain de 600 francs à l’hectare pour. le n°1; de 285 fr. pour le n° 2; de 208 pour le n°3;"de 110 fr. pour le n° 4 et une perte de 30 fr. à l’hectare pour. le no 2. Les essais n° 1,2 et 3 correspondent à des parcelles de terres cultivées à la charrue et sont en bénéfices sérieux de: 208 à 600 fr. par hectare. Les n°4 et 5 sont des Longuans (culture des indigènes à l'hilaire). Le rendement maximum (n° 4) correspond à un bénéfice de 110 fr. à l’hectare. Mais pour le n° 5, corres- pondant au rendement minimum de la culture des indigènes, il y aurait une perte de 30 fr. par hectare, si le cultivateur était obligé de payer sa main-d'œuvre. C'était notre cas. L'indigène, exploitant lui-même ou par esclaves, a tout de même extrait du sol une valeur de 70 fr. qui est venue ac- croître d'autant notre richesse publique. C’est à ce titre qu’il doit être encouragé. La paille d'Arachide, élément très important pour la nour- riture des animaux domestiques, a suivi la même progression de rendement que les fruits, dans nos essais. Ces diverses conclusions techniques constituent le meilleur procédé cultural de l’Arachide au Sénégal, celui qui, jusqu'à ce jour, a donné les meilleurs résultats. Il peut encore être. perfectionné par le temps et de nouvelies recherches sur la machine à arracher les Arachides, l'introduction d’autres instruments aratoires, notamment la houe à Cheval, le se- moir, et aussi l'emploi des engrais. LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 367 AVENIR AGRICOLE DES COLONIES FRANCAISES DE L'AFRIQUE OCCIDENTALE. Il faudrait procéder ainsi pour chaque plante et chaque colonie, ce qui donnerait des résultats immédiats, tout en étant moins coûteux et plus rapide que l’organisation des jardins coloniaux, stations, laboratoires, etc., dont on peut se passer actuellement au Sénégal, lorsque l’on connait suf- fisamment l’agriculture tropicale et le métier de cultivateur. En somme, nous faisons de l’agriculture pour faire pro- duire au sol une récolte et en obtenir un bénéfice. Commencons donc par faire produire quelque chose au sol et par récolter, nous modifierons plus tard nos procédés, s’il y a lieu. Il ne faut pas trop nous attarder à vouloir trop bien faire, surtout sur le papier. Nous finirons par ne pas arriver du tout ou trop tard dans la course européenne de la mise en valeur des territoires africains par l’agriculture. Force motrice. — Le premier progrès réalisable qui, au Sé- négal, s’est offert à ma pensée, après l’étude du milieu, a été de substituer à l’hilaire (sorte de rateau) primitive, mise en mouvement par la main de l’homme, des instruments plus puissants et manœuvrés à l’aide de la force motrice des animaux. Le Sénégal possède deux races de Bœufs : 1° Le Bœuf à bosse ; 20 Le petit Bœuf du Cayor. Nous avons utilisé ce dernier. Quoiqu’un peu petit, il se dresse facilement au labourage. Il s'agissait aussi d'y dresser des Noirs, de leur faire comprendre les avantages de cette opération et de mettre à leur disposition un modèle de char- rue assez léger, pour leurs petits animaux, simple et peu coû- teux, pour être à la portée de toutes les bourses et pouvoir être construit et réparé dans le pays. J'ai impitoyablement écarté les modèles de charrue don- nant un mauvais travail. Une bonne charrue doit couper la terre verticalement à l'aide de son coutre, horizontalement à l’aide de son soc et retourner la bande de terre ainsi dé- coupée, sous l'angle que l’on désire, à l’aide du versoir. Le réglage en profondeur et en largeur doit être très facile. 368 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATiON. C’est pour cela qu'ont été écartées la charrue d'Égypte et la charrue des Arabes malgré la modicité de leur prix. Ce sont des charrues qui labourent mal. En pareille matière, il faut s'incliner devant les résultats. Dans nos essais de charrue au Sénégal, c'est la charrue coloniale Fondeur qui nous a donné les meilleurs résultats. Service agricole. — À la suite des essais de culture que j'ai installés pendant ma mission d'une durée de deux années, j'ai été chargé d'organiser le service de l’agriculture au Sénégal avec le titre d'Inspecteur. Sile Gouvernement local, aidé du personnel agricole que j'ai laissé là-bas, sait et peut généraliser ces premiers essais, ma mission aura rendu un service inappréciable à la Colonie. Le personnel agricole n’a qu’à continuer cette méthode, qui. a donné d'excellents résultats pratiques, et l’appliquer à d’autres produits que l’Arachide. Maïs il ne faut pas se dissimuler que l’on aura à lutter contre de grandes difficultés en raison du caractère des in- digènes, de leur apathie et de leur attachement aux vieux usages. FERMES-MODÈLES. J'estime que la meilleure manière de posséder serait de créer, dans deux ou trois milieux agricoles de la Colonie, de petites Fermes-modeles, et de dresser, pour les cultiver, des groupes de travailleurs indigènes, en famille, en y intéres- sant le chef noir du village. Ces travailleurs noirs pourraient en devenir propriétaires. N'ayant pas eu le temps de faire fonctionner ces fermes, j'ai dirigé la culture des champs d’essais dont le matériel et les semences étaient fournis par l'Administration sur le budget de chaque cercle où l’on devrait faire figurer une certaine somme sous la rubrique « Améliorations agricoles en pays de protectorat ». L'on développerait ainsi la production agricole d’un cercle (Direction des Affaires indigènes) avec l’argent provenant des habitants noirs de ce cercle par l'impôt actuel de capitation, et l'intérêt général y trouverait son profit. _ Pour commencer, deux fermes-modèles suffiraient : LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 369 1° Une ferme-modèle dans les sables à base de culture d’Arachides ; 2° Une ferme-modèle irrigable, à base de cultures à pro- duits riches. L'irrigation serait presque aussi facile à pra- tiquer qu’en Égypte. Champs de cullure. — Pour d’autres plantes que l’Ara- chide dans les champs dont j'ai dirigé la culture, nous avons obtenu des rendements supérieurs à ceux des champs des Noirs de la même région. En continuant ce système, qui est assez difficile à pratiquer, l’on arriverait à secouer l’apathie naturelle des indigènes pour tout ce qui n’est pas fantasia, tam-tam, cheval, femme, jeu ou toilette. Nous arriverions ainsi, après quelques années, à une organisation suffisante de la production agricole en Afrique occidentale française. L’arrachage des Arachides et la cueillette des graines exigent beaucoup de main-d'œuvre et des soins particüliers, soit pour éviter une trop grande perte de graines laissées en terre, soit pour obvier à l’échauffement qui se produit lorsque les coques sont placées en trop gros tas avant d’être suffisamment séchées, ce qui a pour effet notamment de détruire la pellicule jaune qui garnit l'intérieur de la coque et de diminuer ainsi la valeur marchande de l’Arachide en diminuant la finesse de la matière grasse. L'on peut estimer que la qualité de finesse de l’Arachide du Sénégal pour la fabrication de l’huile comestible ne craindra jamais la concurrence des Arachides de l'Inde ou de l'Égypte, mais pour cet usage seulement. Fourrage. — Les soins de cueillette doivent aussi porter sur la paille d'Arachide qui est un excellent fourrage, presque l'unique fourrage du Sénégal. Il se vend couramment de 5 à 10 francs les 100 kilogrammes selon la qualité et l’époque de l'année. Moyens de développer la culture de l’Arachide. — La culture de l’Arachide peut étre développée au Sénégal sans avoir à craindre une surproduction. Il faudrait même se hâter. D’autres producteurs pourraient nous ravir ce dé- bouché. L'on arrivera rapidement à développer cette culture en mettant entre les mains de chaque chef de village une charrue et une paire de Bœufs dressés. 370 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. L'importation en France de l’Arachide en coque du Sénégal s'élève à un chiffre rond de quelques millions de francs par an, savoir : 11,193,270 francs en 1894; 7,000,000 en 1895 et 8,437,963 francs en 1897, etc. La Métropole importe pour une somme supérieure d’Ara- chides provenant notamment de l'Égypte et des Indes. L'im- portation en France de graines d’Arachides décortiquées de l'Inde s’est élevée à 147 millions de kilogrammes en 1894 pour tomber à 7 millions en 1897. Par suite de la peste bubo- nique dans l’Inde, nous n'avons importé que 3,500,000 kilo- grammes pour les dix premiers mois de l’année 1898. Par conséquent, l’on peut, sans crainte de surproduction, développer la culture de l’Arachide au Sénégal et doubler, en peu de temps, sa production par l'application générale du mode de culture que nous avons découvert. Cela représen- terait une augmentation de la production agricole s’élevant à plusieurs millions de francs, ce qui mettrait déjà le Sénégal dans une bonne situation et permettrait à ses finances d’en- treprendre de nouveaux travaux d'utilité pu»lique. D'ailleurs l’on peut y cultiver d’autres plantes pour éviter les dangers de la monoculture. À Agriculture générale. — Le climat du Sénégal proprement dit, dans sa région désertique, caractérisé par une courte saison des pluies appelée hivernage et une longue saison sèche, constitue une situation tout spécialement favorable à la production des graines oléagineuses qui ont un si large débouché sur nos marchés d'Europe. Déjà le Sésame nous a donné de bons résultats. D'une facon générale il faut que la terre soit préparée pen- dant la saison sèche pour que le cultivateur puisse consacrer tout le temps de l'hivernage à l’ensemencement et aux divers soins culturaux de binage, etc. : Dans ces conditions de travail, toutes les plantes grani- fères (maïs, mils, niébés, etc.) qui y peuvent accomplir leurs phases de végétation en quatre ou cinq mois, ont été, avec succès, soumises à une culture rationnelle. A l’aide de la charrue, le rendement des Arachides pourra être augmenté. Cela représentera, pour le Sénégal seul, un accroissement de production annuelle d’une dizaine de mil- lions, car l’Arachide peut y être cultivée dans les sables les plus pauvres. Toutes les cultures annuelles (maïs, mil, sorgho, haricot, _ etc.) subiront une augmentation de rendement lorsqu'elles _ seront convenablement pratiquées à la charrue, car le sol n’est pas stérile comme on l’avait pensé. J’ai constaté des richesses naturelles suffisantes pour colo- niser rapidement l'Afrique occidentale française, en commen- cant son développement économique par son organisation agricole basée sur le travail de la terre par les populations autochtones. . Nous sommes donc en droit d'espérer, en présence des résultats acquis à la suite des expériences que j'ai poursui- vies, que l’Afrique occidentale française, colonie pauvre, sera bientôt une colonie riche, grâce à l’agriculture. LES CULTURES DU SÉNÉGAL. 274 372 EXTRAITS ET ANALYSES. L'ÉLÉPHANT D'AFRIQUE, Son histoire naturelle et sa chasse, par Édouard Foa (Suite et fin) (1). Les Éléphants émettent divers sons. J'ai déjà décrit celui qui indique la colère ; c'est an barrit aigu, comme une sirène à vapeur, et qui se répète comme une sonnerie de trompettes. L'Éléphant le pousse lorsqu'il est arrivé au paroxysme de la fureur ; il le produit, à ce que je crois, au moyen de la trompe (2). Par le gosier, l’animal pousse des grognements profonds et sauvages sous l’action de la souffrance, lorsqu'il est blessé, mais bas et semblables à ceux d’un énorme Porc, lorsqu'il semble vouloir communiquer avec ses compagnons, ou bien quand il médite une charge. Dans ce cas, il grogne d'abord doucement, puis violemment, et lance le « coup de trompette » au moment où il se jette sur l'ennemi (3). J’ai déjà parlé du grondement sourd et profond que les indigènes attribuent au ventre de l’animal et qu’on n'entend que de très près; ce bruit res- semble, à s'y méprendre, au ronflement d’une chaudière qui entre en pression. Comment est-il produil? Je l’ignore. IL est possible que ce soit avec la trompe. Les habitudes des Éléphants changent selon le degré de sécurilé que leur offre le pays où ils se trouvent. Dans les régions calmes, où: les chasseurs nelés troublent pas (et leur instinct les leur fait bientôt connaître), ils se reposent pendant les heures les plus chaudes de la journée, dans des taillis impénétrables au soleil, généralement appuyés contre un arbre ou simplement plantés sur leurs jambes, avec les défenses posées sur une branche. On les voit sommeiller ainsi la tête basse. Ils remuent de temps à autre leurs grandes oreilles, soit pour s’éventer, soit pour écouter ; leur trompe pend ou bien se pose sur une des défenses, l’ouverture tournée du côté du vent; les yeux clignotent ou se ferment. Toute la troupe est là dans des positions diverses, immobile. Vers quatre heures, elle se remet en marche, en quête de nourriture, jusqu’au commencement de la nuit; à ce mo- ment, nouvelle halte, généralement en un endroit où il y a des (1) Voyez plus haut, page 294. (2) IL pousse des cris analogues, la nuit, quand il prend son bain. C’est alors probablement un cri de joie. (3) Je suppose que les Eléphants doivent échanger entre eux, au moyen de grognements, leurs sentiments respectifs, mais je n'ai jamais pu m’approcher assez d’eux pour m'en rendre compte. EXTRAITS ET ANALYSES. 373 arbres, mais celte fois découvert. Les uns se couchent, les autres s’appuient contre une termitière, d’autres sommeillent debout. Dés la fraîcheur du matin, ils reprennent de nouveau leur route ou leur pâture, jusqu’à ce que le soleil leur fasse chercher un abri. Ils boivent pendan!i ieurs heures de promenade. Au contraire, dans les districts suspects, où ils se sentent en danger, les Éléphants boivent, mangent et dorment quand ils le peuvent, mais généralement ils suppriment le repos. de la nuit qu’ils remplacent par des marches forcées ; ils allongent celui du jour, de facon à se mettre en route à la nuit tombante après être restés cachés la plus grande partie de la journée. Pendant les repos mêmes, aucun animal ne se couche, un ou plusieurs d’entre eux étant continuel- lement sur le qui-vive, levant la trompe en l’air d’une facon inquiète, pour saisir toutes les émanations suspectes. À la moindre alerte, sur un signal inconnu, le troupeau entier disparaît, avec une légereté et dans un silence dont on ne croirait guère ces énormes animaux Ca- pables. On a vu, par l'exemple que j’ai donné de ce vieux mâle aidé par les femelles, que les Éléphants sont susceptibles de solidarité. On m'a souvent demandé si j'avais rencontré de ces cimetières cü les Éléphants sont censés se réunir pour mourir. Je n’en ai jamais vu aucun vestige, et ne crois pas à leur existence (1). Ce qui a donné naissance à cette idée, c’est que nulle part on ne trouve d’ossements d'Éléphants. La raison me semble en être (oute simple ; les os de l'Éléphant sont très spongieux et très tendres ; au lieu d’être creux et remplis de moelle, comme ceux des autres animaux, ils sont homo- gènes et poreux, composés d’une infinité de cellules creuses et longi- tudinales où la moelle coule sous forme de liquide : j'ai déjà dit qu’on pouvait briser les côtes sans l’aide d’une hache et simplement avec la main. Il est donc probable que le squelette tombe très vite en pous- sière et ne tarde pas à être dispersé aux quatre vents; trois ou quatre ans doivent suffire pour cela. Le crâne, qui est plus épais et plus dur, subsiste fort longtemps, quand les Hyènes l’épargnent, et j'en ai rencontré quelques-uns dans la brousse. Les os des autres animaux, au contraire, se conservent plus long- temps. J'ai parlé, à la page 317 de Mes grandes chasses, d'un camp, où j'avais vu, de ma tente, passer un Lion ; je suis repassé au même en- droit en 1896, c’est-à-dire quatre ans après, et j'y ai retrouvé les osse- ments d'animaux que j'avais lués là, entre autres le Lion, quelques Reedbucks, des Kobs, des Zèbres, etc. Ces quatre années d’intem- péries ne les avaient pas du tout altérés : à peine blanchis. En re- (1) Je suis presque certain qu’il n’en existe pas; les noirs cernaient autrefois des bandes entières de ces animaux et les exterminaient jusqu’au dernier ; peut- être a-t-on pris pour d'anciens cimetières les ossements laissés par les indigènes à la suite de ces hécatombes. 374 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. vanche, je n'ai jamais rien retrouvé dans des endroits où j'avais tué des Éléphants : pas un os, pas le moindre vestige de la lutte qui avail eu lieu; les arbres marqués ou à demi-renversés, les rochers, les détails de paysage qui avaient marqué dans notre souvenir, étaient les seuls témoins du drame; sur le sol, depuis, l’herbe s'était plu- sieurs fois renouvelée. ; Il faut donc croire que, exposés aux pluies et au soleil, à la rosée et aux feux de brousse, les os des Éléphants s'en vont rapidement en poussière, et ainsi s'explique que l’on n’en retrouve jamais. Les dé- fenses pourtant seraient de nature à résister ; mais, si quelque pas- sant les voit, il les emporte. D'ailleurs, l’ivoire mort, qui se voit sur les marchés, n'a pas d'autre provenance ; sa teinte mate, la réduction de son poids spécifique, sa couleur, indiquent qu'il a longtemps subi les intempéries. - Il reste encore beaucoup d‘Éléphants au Congo, dans la région du Nil, du Tchad, du Victoria-Nyanza; mais partout ils sont traqués, poursuivis, chassés et blessés surtout, ce qui est pire que la mort pour eux. Les chasseurs indigènes sont très maladroits avec une arme à feu ; ils tirent toujours à la tête, sans se douter que ce coup. d’une extrême difficulté, demande une étude préalable et une précision qui n'est pas à leur portée, comme je l’expliquerai tout à l'heure. Aussi manquent-ils souvent l'Éléphant ou le blessent-ils simplement sans autre résultat que de le faire saigner et le rendre furieux, ou bien ils lui cassent les défenses. Voilà pourquoi on trouve tant de celles-ci qui sont ébréchées, abïmées ou brisées. Dans la région du Zambèze, je n’ai jamais tué un Éléphant qui n’eût plusieurs balles indigènes dans le corps ou ne portât des traces de blessures anciennes ou récentes. Quelquefois ces plaies étaient pleines de pus et de vers, et devaient faire souffrir horriblement la victime infortunée de tant de mala- dresse. Il n’est pas étonnant que, dans ces conditions physiques, connaissant déjà l'effet d’une arme à feu et exaspéré par de vieilles blessures, l'Éléphant charge immédiatement son agresseur. On s'ex- plique aussi qu’il devienne de plus en plus rare dans le bassin du moyen Zambèze. Dans la région des lacs, où les armes à feu sont moins répandues, comme le Moero, le Baugonéolo, le Haut Louapoula, les indigènes chassent l'Éléphant à la saguie; ils en blessent aussi un grand nombre avant d'en tuer un, mais leurs ravages ne sont pas à com- parer à ceux que faisaient les armées de chasseurs du Zambèze. Je dis: faisaient, puisque les Éléphants ont déserlé ces régions depuis plu- sieurs années, et que les chasseurs ont dû chercher un autre métier. Dans le Congo, sur la lisière de la grande forêt, les indigènes cons- truisent des pièges à fosse où parfois un Éléphant vient tomber. Ou bien ils cernent un troupeau en construisant en grande hâte une ee Per D LITE ee CES NT C 2 D ere De D Er) Re PNR; A A ù LT ë T7 us EXTRAITS ET ANALYSES. 375 palissade à une certaine distance autour de lui. Les Négrilles ou Pyg- mées décochent au Pachyderme des flèches empoisonnées avec les- quelles il va mourir misérablement à de grandes distances pour servir de pâture aux seuls Vautours. Enfin, dans le Darfour, dans le Nord de l'Ouganda, quelques Arabes ou Éthiopiens, les « Agagers » chassent l'Éléphant à cheval et, après l'avoir forcé à la course, lui tranchent d’un coup de sabre le tendon du jarret ; vu l'extrême difficulté et le péril de ce genre de chasse, ils u'en détruisent que peu ainsi. En résumé, l'humanité tout entière est en guerre contre ce malheureux Éléphant, moi compris; mais je ne demande qu’à déposer les armes si l'on décide une trêve générale, trêve qu'il est grand temps de con- clure si on veut qu’il y ait encore des Éléphants d'Afrique ailleurs que dans les musées. Du train dont on va actuellement, et malgré leur reproduction, il n’en restera plus un seul dans cette partie du monde dans cent cinquante ans; l'espèce sera classée parmi celles qui ont disparu ; comme les Æhinoceros simus, les Lophiodom, les Anoplothe- rium, ce Pachyderme appartiendra désormais à la paléontologie. Mais il ne sera pas anéanti sans s'être défendu. On ne s’attaque pas impunément à un aussi gigantesque animal, et nombreuses sont ses victimes. J’ai eu connaissance, directement ou indirectement, de bien des accidents arrivés aux chasseurs indigènes de. 1891 à 1897 ; en fait d'Européens, j'ai trouvé dans le haut Zambèze la tombe d’un Anglais enterré par un mulâtre portugais au pied de l’arbre même où il avait été cloué par la bête ; on voyait encore sur le tronc, cinq ou six ans après, les marques profondes des défenses. Une croix de bois vermoulu, quelques mots en partie effacés rappelaient cette triste histoire. Dans l'Ouest du lac Nyassa, près de la Boua, un autre An- glais est saisi par un Éléphant qui lui casse des côtes, les deux bras et les deux jambes. Par bonheur pour lui, un établissement européen se trouve à proximité, à Kotakola ; on l’v transporte dans un état dé- sespéré. En 1896, M. W..., encore un Anglais, chassait au Lac Moero. Il est saisi par un Éléphant qui s’agenouille deux fois pour le percer de ses défenses et qui, manquant son but par un hasard pro- videntiel, ne réussit qu’à labourer la terre à côté de lui. Moi-même j'ai failli être enleve plusieurs fois et n'ai dû mon salut qu’à mon agi- lité ; enfin, l’un de mes hommes ne s’est tiré d’une aventure de ce genre que grâce à une chance exceptionnelle. Remarquez que cette petite statistique ne concerne qu'un coin de l'Afrique centrale; étendez-la au reste du continent, et vous aurez une idée assez exacte de la mortalité annuelle causée par les Éléphants, et du danger qu’il y a à affronter un aussi redoutable adversaire. J’ai dit plus haut que le coup à la tête était très difficile. Voici pourquoi : la cervelle occupe dans la masse de la tête d’un Éléphant une place minime ; protégée de tous côtés par des masses osseuses qui ont jusqu'à 0,25 d’épaisseur et dont quelques-unes, comme le 376 _ BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. frontal, sont d’une dureté exceptionnelle, elle ne peut être atteinte d’une façon certaine qu’en un point qui se trouve un peu au-dessus de la ligne joignant l'œil à l'entrée de l'oreille, c’est-à-dire sur une sur- face ayant tout juste dix centimètres carrés. Elant donnés la distance à laquelle doit se tenir le chasseur, l'ombre des taillis et des végétaux, ainsi que les mouvements de l’animal, on comprend que ce coup soit des plus incertains. De face, si l’Éléphant a la tête baissée et si sa trompe pend jusqu'à terre, on peut le tuer er tirant au dernier pli de la trompe, exactement entre les deux yeux, un peu au-dessus toutefois. La balle atteint alors le cerveau pourvu, bien entendu, qu'elle ait de la force de pénétration. Mais si l'Éléphant vous charge ou vous regarde, c’est-à-dire s’il a la tête levée, le front en oblique, inutile de tirer ; c’est du temps perdu, et l’on a risqué inutilement sa vie. Dans ce cas, si, ayant la tête levée, l'Éléphant tient sa trompe roulée comme pour charger, le chasseur peut, en se baissant, l’atteindre mortellement au cou, juste au ras de la mâchoire inférieure, au creux du ster- num. Mais on ne doit tenter ces chances que lorsqu'on est bien sûr de soi et que la nature du terrain empêche la fuite momentanée. Le dessin ci-joint donne exactement, sur un crâne d'Éléphant, l'endroit à at- teindre, mais c'est surtout le coup au cœur que je recommande aux chasseurs. La piste d’un troupeau d'Éléphants est tres difficile à reconnaître et à juger; quoiqu'il semble aisé, au contraire, de suivre d'aussi grands animaux, il faut beaucoup de pralique et de patience pour y arriver : la majorité des Européens chasseurs d'Éiéphants serait incapable de suivre une piste s'ils n’avaient des indigènes pour la leur montrer. À mon avis» EXTRAITS ET ANALYSES. . 377 il faut pouvoir se passer d'eux, et puis n'est-ce pas humiliant de ne pouvoir déchiffrer ces traces sur le sol, alors que d’autres les lisent couramment ? Pour en finir, je dirai comment on extrait les défenses d'un Éléphant mort. Il y a deux facons d'opérer, selon le temps dont on dispose. Est-on pressé, on dépouille de la chair les alvéoles osseuses qui portent les défenses et on les taille sur le côté avec une petite hache ; l’ouver- ture doit être faite doucement et avec grand soin, si on ne veut pas abimer l’ivoire. Quand on a du temps, on entoure la tête simplement ou la couvre de terre humide; au bout d’une semaine, les défenses, lui branlant déjà fortement dans leurs alvéoles, peuvent être arrachées avec facilité. Dans le haut Zambèze et le pays de Moasi, les indigènes appellent Koungourou un Éléphant mâle adulte, Katchendé le jeune mâle, VNioun- goua, les femelles sans défenses. Le nom générique de l’Éléphant est Nzôou ou Ndjovo. Dans le pays, l'Éléphant passe pour avoir deux ennemis : les Fourmis carnivores, qui lui montent dans la trompe pendant qu'il dort (!), et les Serpents qui le piquent au ventre (?). Je n'ai pas besoin de dire combien ces deux assertions sont fantaisistes. Je voudrais voir l’accueil que recevraient les premières Fourmis qui s’aventureraient dans la trompe d'un Éléphant, appendice qui est un vrai fusil à air comprime: un ouragan les jetterait bientôt dehors avec violence. Quant au Serpent, ses crochets ont déjà assez de peine à percer la peau humaine, où ils se cassent souvent, sans aller chercher à en- tamer du cuir d'Éléphant. Non: l'Éléphant n'a qu’un seul ennemi : c’est l'Homme. Quant aux animaux, il n’en craint aucun: avec une intelligence relativement su- périeure, il possède la force, la taille, le courage au besoin, et de plus un toucher qu'aucun d'eux, même le Singe, n’a aussi délicat. Il passe partout, il nage comme un Amphibie, et traverse indistinctement et indifféremment ravins et rivières, forêts et taillis ; tout se brise, tout cède pour lui faire place ; il monte et descend des pentes que l’on croirait inaccesibles pour lui, traverse en une nuit des pays entiers, comme un maître incontesté dans ses vastes domaines ; il est à la fois partout et nulle part; malgré sa masse, il se cache comme une Souris et disparait sans bruit comme un insaisissable Protée, laissant le chas- seur déconfit; enfin, si on veut épargner sa vie, il est prêt à redevenir, comme autrefois lorsqu'il se battait à ses côtés, l’allié, l’ami, le ser- viteur, le protecteur de l'Homme. Voilà le vrai roi des animaux. Va-t-on le comparer au Lion, animalinu- tile, rôdeur nocturne, au Lion qui est à la merci d’une bande de Loups? En parlant de la colonisation {1} je traite d’autre part de la domes- (1) La traversée de l'Afrique du Zambèze au C'ongo français, 1 vol. 378 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. tication de l’Éléphant appliquée au développement économique des colonies africaines. Mais je résumerai ici ce que je pense de cette domestication au point de vue des difficultés matérielles. Ah ! ils se trompent étrangement, ceux qui croient possible d'opérer la capture de l’Éléphant, en l'état actuel des choses, c’est-à-dire avec la guerre à outrance qu'on lui fait de tous côtés. Jamais sa doimestication ne sera possible tant que sa chasse ne sera pas interdite. Il faudra même plusieurs années pour qu'il retrouve sa con- fiance et ses habitudes. On pourra alors surveiller un troupeau, le suivre, le capturer, parce qu'il restera dans une région bien définie; il aura repris ses mœurs naturelles qui le portent à séjourner à demeure dans un grand pays où il trouve, selon les saisons, l'herbe, l’eau, les marécages, les arbres, les abris qu’il affectionne. Actuellement, au contraire, traqué de tous côtés, le troupeau qui est ici aujourd’hui sera demain à 50 kilomètres, après-demain ailleurs. Peut-être ne le reverra-t-on jamais, on en rencontrera d’autres qui apparaîtront et disparaîtront à leur tour par ce besoin de se mouvoir qu’engendrent l'inquiétude, l'insécurité, la détonation des armes à feu, l'odeur des Hommes qui rôdent aux alentours. Le besoin de nourri- ture a fait de l’Eléphant un animal nomade ; la crainte du danger le rend insaisissable. Bien qu’animés des meilleures intentions du monde, ïls sont dans l’erreur la plus complète, ceux qui projettent de s'emparer d’Eléphanis dans ces conditions ; en quelque circonstance particulière, ils pour- ront en prendre un; mais qu'est-ce qu’un Éléphant? C’est par cen- taines qu'il en faut ; si on veut créer des établissements comme ceux qui existent dans l'Inde, c’est par centaines qu’il en faut, si on veut essayer de remédier, d’une façon notable, au manque de moyens de transports : et combien d’années faudra-t-il avant que la colonisation africaine profite de cette tentative ? D'ici là, la chasse continuera, et, quand on aura créé les établissements, il n’y aura plus d'Eléphants à y mettre! On ne réussira, à mon avis, que si les nations européennes, d’ac- cord avec l'État du Congo, interdisent sévèrement la chasse à l’Élé- phant. Ce moyen est radical, et il nuira momentanément au com- merce; mais cent ans plus tôt, cent ans plus tard, on doit arriver à la fin de l’ivoire ; autant vaut aviser dès-maintenant à le remplacer. Une fois la chasse défendue, une fois l'exportation de l’ivoire absolument interdite d’une facon générale, on procèdera, dans chaque colonie, à la confiscation de celui qu’on trouvera entre les mains des indigènes. L'ivoire n'ayant plus de valeur ni pour l’indigène ni pour FEuro- péen, la chasse s’arrêtera d'elle-même; des peines rigoureuses pour- ront être édictées contre quiconque massacrerait des Élépüants par amusement ou pour se procurer de la viande. Une fois ces résultats acquis, on pourra aviser aux moyens de capturer des EXTRAITS ET ANALYSES. 319 Éléphants (1), et l’on trouvera, sans peine alors, avec ces garanties, les capitaux nécessaires à l’organisation de grandes compagnies de capture et d'élevage, qui revendront aux colons et aux Gouverne- ments des animaux dressés aux transports. En appliquant en Afrique les méthodes qui réussirent dans l’Inde, en y employant même les cornacs et les Éléphants de pays, on réus- sirait très probablement : j'en suis absolument persuadé. Quant à la possibilité de domestiquer l'Éléphant d'Afrique, peut-on la mettre en doute un instant ? L'histoire ne nous apprend-elle pas que, dans l’an- tiquité, Carthage capturait et faisait dresser des centaines d'Éléphants à la guerre et aux transports ! Ce qui a été fait autrefois en Afrique, ne peul-on le refaire aujourd’hui? Quelques années suffiront, sous la direction d’un personnel hindou, à former des cornacs experts sur le continent noir. Dans l’état actuel des choses, il faut y renoncer. Pas plus que les Mouches avec du vinaigre, on n'attrape les Éléphants à coups de fusil. >< CONSOMMATION DE LA VIANDE DE CHEVAL A PARIS. Le Bulletin du Ministère de l'Agricullure (novembre 1900, n° 4) a publié les renseignements ci-après, fournis par la Préfecture de police, sur la consommation de la viande de Cheval, Mulet et Ane, à Paris et dans le département de la Seine, pendant l'année 1899 : NOMBRE D'ANIMAUX RENDEMENT TR — A Présentés Livrés Moyen à Refusés. à la net Total. l'abattage. consommation. de l'animal. Espèce chevaline... 25,930 ‘: 920 23,958 220 5,270,760 — mulassière.. 36 2? 34 220 7,480 ASIE. - 235 36. 215 90 10,750 Totaux... 25,201 994 24,207 5,288,990 Le nombre des étaux dans le département de la Seine était de : 195 au 1°’ janvier 1899 ; 209 au 1°’ janvier 1900. Les prix de vente du kilogramme de viande, sans dislinction d’es- pèces, ont été en 1899 : Filet, 2 francs à 2 fr. 20; Faux-filet, 1 fr. 40 à 1 fr. 60; (1) Aux Indes, on est opposé à la capture des jeunes Eléphants dont l’entre- tien est très onéreux; on préfère capturer des animaux adultes. 380 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Tranche et côtes, 0 fr. 50 à 1 fr. 40 ; Basse viande de 0 fr. 20 à 0 fr. 50. On peut évaluer à un tiers seulement la quantité de viande vendue dans les étaux, le reste entrant dans la fabrication du saucisson. La viande des animaux abatlus était en général de deuxième et de troisième qualité, comme précédemment. Le poids total de la viande vendue en 1899 a été supérieur de 590,100 kilogrammes à celui de 1898. >< NOTE SUR L'ÉLEYVAGE EN FRANCE DU COLIN DE VIRGINIE (Ortyx Virginianus L.), par F. MÉREL. Le Colin de Virginie, appelé vulgairement Colin Hoooué, à cause de son cri clair et aigu, est certainement l'espèce dont Buffon a fait men- tion sous le nom de Colenicui et qui a été appelé par Brisson Perdrix de la Nouvelle-Angleterre, Perdrix d'Amérique et Cuaille de la Louisiane. A l’époque où je commencai l'élevage de cet intéressant gallinacé (1855), on ne trouvait guère que des Colins de Virginie importés et cette espèce était assez rare. Le premier couple que je possédai m'’ar- riva l'hiver. Je crus prudent de le placer dans une volière intérieure, précaution bien inutile du reste, comme l'expérience devait me l'ap- prendre par la suite, car ce Colin est un oiseau des plus rustiques et des plus résistants au froid.Je ne làchai donc mes nouveaux pension- naires dans la velière à air libre que je leur avais préparée qu’au printemps. Dans cette installation, adossée à un mur exposé au Midi, et mesurant 3 mètres de longueur sur 2? de largeur et 2 de hauteur et que j'avais divisée en deux parties, l’une couverte, l’autre garnie de grillages sur toutes ses faces, j'avais planté une quantité assez consi- dérable de pieds de Buis nain, très rapprochés les uns des autres, principalement dans le fond de l'abri couvert et de facon à laisser entre le mur et ma plantalion un petit espace faisant couloir. Dans le milieu de la partie à air libre et au centre d’un petit tertre gazonné, j'avais planté un petit Pin sapo dont les branches inférieures touchaient le sol. Mes Colins trouvèrent sans doute l'installation de leur goût, car, à peine lâchés, ils manifestèrent leur contentement par des cris et des ébats auxquels je n'étais pas habitué; puis, bientôt, après avoir pris connaissance des lieux, ils disparurent sous les touffes de Buis. C’est là qu'ils devaient passer une grande partie de leur existence et pré- luder en paix à la création de leur petite famille. Je me gardais bien de déranger mes Oiseaux par des entrées inop- EXTRAITS ET ANALYSES, 381 portunes dans la volière et prenais toutes les précautions nécessaires pour ne pas les effrayer au moment de la distribution de leur nour- riture qui consistait en menu grain alpiste, millet, chènevis, verdure. Bientôt je n’aperçus plus aux heures où d'habitude le couple faisait son apparilion dans la partie dénudée de leur demeure que le mâle, et encore ne faisait-il que la traverser pour bientôt aller se percher dans le petit sapin. La femelle devait couver, mais je n’osais m'en assurer dans la crainte de lui faire abandonner ses œufs. J’attendis donc que le temps nécessaire, qui est de vingt-trois jours pour cette espèce, fut écoulé, et le vingt-quatrième, j’entrai résolument dans la volière. La femelle, qui était sur ses œufs, glissa prestement derrière un arbuste et j'apercus dans une pelite excavation creusée au pied d’une touffe de Buis et garnie d'herbes sèches et de plumes onze œufs d’un blanc pur, très pointus, plus petits que l’œuf de Caille; tous élaient clairs, mes Oiseaux, d'importation récente, non encore acclimatés, n'avaient sans doute pas trouvé dans le régime de graines que je leur offrais une nourriture suffisamment substantielle. Je résolus d’aviser et je songeai aux Vers de terre ; ils ne voulurent pas y toucher; n'ayant pas d'œufs de Fourmis, j'essayai sans succès diverses préparations et finalement je fus assez heureux pour trouver une nourriture animalisée qu'ils daignèrent accepter. Plus d’un mois se passa sans que je pusse sur- prendre des velléités de reproduclion; mais un jour, qu'un perchoir étant tombé, je fus obligé d’entrer dans la volière, j'apercus dans une excavation semblable à la première deux œufs; la seconde ponte était commencée; nous étions au commencement de mai. Le 22, la Coline prit le nid et vingt-quatre jours après, j’eus la joie de la trouver le matin dans le milieu de la volière abritant un troupeau d'oisillons à peine gros comme des Frelons; il ÿy en avait dix-neuf; deux œufs seu- lement n'étaient pas fécondés. Le résultat était celte fois satisfaisant mais il fallait songer à élever celle petite famille. Ne pouvant me pro- curer d'œufs dé Fourmis frais, j'en achetai de desséchés et les mélangeai à la pâtée qui m'avait si bien réussi pour les parents. Les deux pre- miers jours, mes Colineaux, comme tous les jeunes Gallinacés, ne touchèrent pas à la nourrilure, mais le troisième jour, je surpris toute la famille attablée autour de la petite assielte que j'avais disposée au milieu de la volière, se gavant à qui mieux mieux, en compagnie de leurs parents qui, eux aussi, s’en payaient à bec que veux-tu. La pre- mière mue, qui arrive ordinairement sept à huit jours après la naissance; au moment où les gros tuyaux des plumes, des ailes et de la queue commencent à pousser, se passa sans que j'eusse à déplorer la mort d'aucun élève. Mes Oiseaux étaient, du reste, excessivement vigou- reux, mangeant bien, et les soins de leurs parents ne leur faisaient point défaut. Trois semaines après, tout le monde était au perchoir le soir et bientôt je pouvais distinguer les sexes : j'avais onze femelles et huit mâles. Bull. Soc. nat, Accl. Fr. 1900. — 25. 382 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Mes élèves passèrent l'hiver sans accident, supporlant sans paraître en souffrir, des froids de 8 à 10°, et il n’y en eut qu'un seul à manquer à l'appel au printemps. Je me trouvai donc en 1887 à la tête de huit couples de Virginiens superbes, bien acclimatés et je résolus d’en tenter l’éievage intensif. J'installai mes Oiseaux dans huit petites volières, de facon que les couples ne pussent se voir et j'attendis. La première ponte me donna cent dix-huit œufs que je plaçai dans un incubateur et me donnèrent quatre-vingt-dix jeunes que j’élevai au moyen d’une pelite éleveuse dont la chaleur se dégageait par le dessous. J'avais en effet observé que les éleveuses du commerce ne convenaient pas pour amener à bien ces minuscules oisillons et que, dans ces appareils, la chaleur étant bien trop forte à la hauteur de la tête et insuffisante pour les membres inférieurs, beaucoup de poussins mouraient par suite du refroidis- sement des pattes. Dans le pelit appareil que j'avais adopté, le réser- voir à eau chaude était bien, comme à l'ordinaire, placé au-dessus, mais la chalcur s'en dégageait au moyen de tubes en cuivre qui la conduisait jusqu’au fond, sur lequel reposaient les jeunes Oiseaux, de sorte que, tout en étant chauffés par côté, lorsqu'ils s’appuyaient sur ces tubes, ils l’étaient également par dessous et se trouvaient enve- loppés d’une chaleur douce et bienfaisante; j'élevai donc, grâce à la disposition spéciale de ma petile éleveuse, lous mes jeunes Coiins que je nourrissai de pâtée comme ceux de l’année précédente et les lâchai aussitôt qu'ils furent suffisamment emplumés dans une grande volière de cinq mètres de côté abondamment garnie d’arbustes, d'herbes et de feuillage. J'opérai de même pour la seconde pontie qui fut moins nombreuse et ne me donna que soixante jeunes. J'avais fait couver les œufs cette fois par de petites Poules pour supprimer l'élevage artificiel et les soins à donner aux nourrissons, mais, malgré la douceur et l’extrème peti- tesse de mes auxiliaires, mes Poules étaient encore trop grosses. Je dus leur enlever leurs enfants adoptifs pour éviter un écrasement gé- néral et fus obligé de confier mes orphelins à mon petit appareil, avec lequel j'élevai tous les survivants. J’obtins une deuxième ponte de huit œufs en moyenne, que je me gardai bien, celte fois, d'enlever pour ne pas pousser mes reproductrices à une fécondité excessive, dont le résultat est souvent la mort. Toutes mes Colines sauf une prirent le nid, et j'eus le plaisir, comme l’année précédente, mais cette fois sur une plus vaste échelle, de pouvoir observer les mœurs et les ha- bitudes de ces intéressants petits Gallinacés. J’obtins donc de mes huit couples, tous issus de mon premier mé- nage d’importés, près de deux cents jeunes. J'avais tenté cette expé- rience dans l'espoir de voir adopter le Colin, qui est un oëseau de chasse de premier ordre et un excellent manger comme gibier, dans les grandes chasses, Je ne trouvai personne de convenablement installé en France EXTRAITS ET ANALYSES. 383 qui voulüt bien consentir à tenter cet essai. Je le fis dans de mau- vaises couditious n'ayant pu trouver de terrain suffisamment vaste et assez bien gardé pour empêcher la destruction de mcs Oiseaux par les braconniers et maraudeurs qui pullulent dans tous les pays. Cependant, sur une centaine d'Oiseaux que je lâchai au mois de fé- vrier 1887 dans un pelit bois d'une vingtaine d'hectares, les quelques couples qui résisterent à la fusillade et aux embüûches de toutes sortes que les gens du pays multiplièrent à l’envi, j'eus la satisfaction, au mois de mai suivant, de trouver sur une grande exploitation voisine deux compagnies de Colineaux, dont je pus, à l'ouverture, avoir ma part. Les Oiseaux que j'avais lâchés et qui avaient échappé au massacre, avaient donc pu se reproduire, après avoir passé une partie de l'hiver sans soins, en pleine liberté. Je suis persuadé qu’en pays accidenté, garni de petits bois, en bordure de plaines fertiles et dans un territoire surveillé, on pourrait obtenir du Colin de Virginie des reproductions nombreuses, d'autant plus nombreuses que le Colin est une Perdriæ percheuse, que la femelle ne déposera jamais ses œufs que près d'un arbre, d'où le mâle pourra surveiller les environs, par conséquent presque toujours dans une haie ou un taillis, et, qu’en conséquence, outre sa précocité, on n'aurait pas à craindre la destruction des cou= vées en accomplissant les travaux de la campagne. (Ornis, tome X, 1889, 2103, pp. 191-195.) >< LA DISTRIBUTION DES SEXES DANS LES PONTES DES PIGEONS; par L. Cuénor. On sait qu’à chaque ponte les Pigeons domestiques et les Colom- bins exotiques donnent toujours deux œufs qui éclosent en même temps. Une tradition très ancienne, qui remonte au moins à Aristote, veut que ces deux œufs fournissent ordinairemeut l’un un mâle et l’autre une femelle; c'est l'opinion courante parmi les éleveurs de Pigeons ; et Darwin, Flourens, Reynaud, Fabre-Domergue, elc., l’ac- ceptent comme démontrée : « REYNAUD (1898, p. 104). L'expérience prouve que les Pigeons pondent, à chaque couvée, deux œufs donnant naissance l’un à un mâle, l’autre à une femelle. Je considère que la dérogation à cette règle empirique est tout à fait exceptionnelle. » « FABRE-DOMERGUE (1898, p. 203). Il se peut que les jeunes issus d'une même ponte aient été parfois et très exceptionnellement du même sexe, mais le contraire était la règle, et la personne chargée de 384 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. ces oiseaux (S/eplopelia risoria Sivains.) considérait la différence des sexes dans une même ponte comme normale. » Il est certain, d'autre part, que ce n'est pas une règle absolue, car on a signalé souvent des couvées qui comprenaient deux petits du même sexe et il s’est même trouvé un éleveur qui, prenant le contre- pied de l'opinion recue, prétend qu'il est assez rare que les deux jeunes soient du sexe différent. Harrison Weir, grand éleveur de Pigeons, cité par Darwin (1881, p. 272), rapporte qu'il a eu souvent deux femelles d’un même nid. Bailly-Marbre, cilé par Giard (1897), tout en admeltant que la couvée soit le plus généralement formée d’un mâle et d'une femelle, cite un couple de Mondains ordinaires qui, trois fois de suite, a donné deux mâles à chaque couvée. De Brisay, cité par Giard, admet que, pour les Colombes exotiques, il peut y avoir des couvées unisexuées ; il a eu un couple de Pigeons satin qui, pendant dix ans, sur une cinquantaine de petits, n’a donné que deux femelles, et des Colombes diamant qui, sur treize petits, ont donné une grande majorité de femelles. Remy- Saint-Loup a élevé un couple de Ramiers capturés dans un même nid. Tous deux étaient mâles. Gruyer (1) a disséqué dix-huit Pigeons produits par des hybrides de Séreptopelia risoria et de Columba alba. Sept paires comprenaient mâle et femelle, une paire renfermait deux mâles et une paire deux femelles. Thauzies, éleveur de Pigeons voya- geurs, cité par H. de Varigny (1898), pense qu’il est assez rare que les deux jeunes soient de sexe différent ; il mentionne en particulier sept pontes, dans lesquelles il trouve cinq fois deux mâles, une fois deux femelles, et une fois seulement un mâle et une femelle ; une paire de sujets ne lui a donné que des mâles pendant trois ans consécutifs. Mais, en somme, quelles que soient les contradictions des observa- teurs cités plus haut, les uns et les autres admeltent que le sexe des deux Pigeons d'une couvée n’est pas distribué au hasard, qu'il suit une certaine règle, phénomène äont on ne connaît pas d'autre exemple chez les vertébrés. Pour élucider la question, j'ai examiné soixante-cinq pontes de Pigeons voyageurs (Columba livia Briss.) élevés dans mon laboratoire, en m'assurant avec grand soin que les œufs pondus provenaient bien de la même mère; j'ai trouvé 17 fois deux mâles, 14 fois deux femelles et 34 fois les deux sexes. Or, le calcul des probabilités nous apprend que, si l’on jette 64 fois en l'air deux pièces de monnaie, il est pro- bable que l’on aura 16 fois deux faces, 16 fois deux piles et 32 fois une face et une pile, chiffres à peu près identiques à ceux que j'ai trouvés pour mes Pigeons: ; La comparaison avec les pièces de monnaie n’est pas tout à fait exacte; en effet, ces dernières ont autant de côté pile que de côté face, (1) Gruyer, Ovarian structure in an ob anormal Pigeon (Zoological Bulletin, tp 2114899); EXTRAITS ET ANALYSES. 385 tandis que les Pigeons présentent normalement un excês de naissances masculines; ainsi les 65 nontes de Pigeons renfermaient 68 mâles et 62 femelles ; en calculant sur ces bases, on trouve qu'il y a probabilité pour avoir 17,1 fois deux mâles, 14,7 fois deux femelles et 32,4 fois un mâle et une femelle. L'identité avec les chiffres expérimentaux est encore plus frappante. Il n’y a donc aucune loi de distribution des sexes dans les pontes de Pigeons, pas plus que dans les familles humaines ou les portées d'animaux domestiques, et il faut abandonner définitivement le pré- jugé de la bisexualité ordinaire des pontes. Une autre tradition attribue aux pontes bisexuées une particularité des plus curieuses : Aristote avait remarqué que c'était « le plus sou- vent le premier œuf pondu qui donne le mâle », et Flourens, en 1864, a confirmé le fait pour 11 pontes étudiées par lui; 11 fois de suite, le premier œuf donna un mâle et le second une femelle; jusqu'ici per- sonne, que je sache, n’a mis en doute l’assertion d’Aristote. A mon tour, j'ai étudié 20 pontes bisexuées dans les conditions suivantes : les deux œufs qui sont pondus à un ou deux jours d'intervalle étaient, dès leur apparition, marqués d’un numéro sur la coquille; pour re- connaîlre le sexe, je disséquais les jeunes un ou deux jours avant qu'ils éclosent; j'étais donc bien sûr de ne pas me tromper, ni sur le sexe, facile à reconnaître par disseclion, ni sur le numéro d'apparition de l’œuf. Or, sur les 30 pontes, le premier œuf dans 15 cas a donné un mâle et dans les 15 autres une femelle. Il y a donc autant de chances pour que la première naissance soit mâle que: pour qu’elle soil femelle, exactement comme dans les familles humaines qui ont deux enfants, fille et garcon ; et ce second préjugé du premier œuf mâle doit être abandonné comme celui de la bisexualité des pontes; le Pigeon ne présente absolument rien d’exceplionnel au poiut de vue du sexe, Comme il est extrêmement peu probable que Flourens soit tombé sur une malencontreuse serie de 11 pontes bisexuées et toutes à premier œuf mâle, il est à penser qu'il n’a pas fait l'expérience lui-même et qu'il a été trompé par un subalterne. Enfin, j'ai profité de mon matériel pour déterminer la proportion normale des sexes chez le Pigeon voyageur; j'ai disséqué en tout 136 Pigeons nouveau-nés, qui m'ont fourni 73 mâles et 63 femelles, soit une proportion de 115,85 mâles pour 100 femelles. Il y a donc dans les naissances une véritable hyperandrie, fait qui avait été également re- marqué par Darwin pour les Pigcons adultes. On sait, du reste, que l'hyperandrie est tres fréquente chez les Oiseaux sauvages ou domes- tiques (Faisans, Dindons, Canards, Passereaux, etc.); les Pigeons, malgré leur stricte monogamie, ne font pas exception à la règle. (C. r. de l’Académie des Sciences, N° 19, 5 Nov. 1900.) USM RS RU NU ERCRCTENSEPERE Fi CAMCX MAT NUS 386 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. LE Jimulus luleus DANS LE DÉPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS, par J. Porssox et BEHAGUE. L'apparition dans notre région d’une plante exotique s’accommodant au milieu, se répandant, et persistant comme une espèce spontanée est toujours un fait intéressant pour le bolanisie herborisant, qui parcourt une contrée dans le but d’en bien connaître la flore. On aime à en savoir l'histoire, à découvrir le mécanisme de son in- troduction, à constater sa marche progressive, et les Recueils de bota- nique ne manquent jamais de tenir leurs lecteurs au courant des loca- lités où l’étrangère a été de nouveau rencontrée. Parmi les plantes introduites presque volontairement, comme celles que l’on a signalées aux environs de Paris (1) à la suite de la guerre de 1870 amenées'par les fourrages des pays lointains bien peu se natu- ralisent et toutes celles qui se sont montrées à cette époque ont dis- paru successivement après quelques années de séjour. Il en est de même pour les espèces introduites dans les ports à la faveur des mar- chandises débarquées. Par contre, d’autres espèces s’implantent et ce ne sont pas toujours les plus décoratives ou les moins encombrantes, telles sont par exemple, le Matricaria discordea, l'Erigeron Canadense et l'Elodéa de la même patrie dont l’Europe se serait bien passée. L'espèce dont il est question dans cette note n’a pasles inconvénients des précédentes ou jusqu'à présent ne mérite pas les récriminations des populations auprès desquelles elle s’est développée et enfin c’est une plante cultivée en France depuis près d’un siècle pour la RENE de ses fleurs, il s'agit du Mimulus luteus L. Cette Scrophularinée est originaire de Californie. Elle a donné par les semis et les croisements, avec d’autres espèces du genre, des -variétés nombreuses et l'on s'explique qu'elle ait pu s'échapper dés jardins où on la cultive pour se répandre au dehors, observation qui a déjà été faite, comme nous le mentionnerons plus loin. C'est dans un petit village reculé du Pas-de-Calais, à Aix-en-Ergny, canton d'Hucqueliers, arrondissement de Montreuil-sur-Mer, que l’un de nous avait observé l’année dernière cette espèce croissant en -abondance. Nous l'avons vue encore en fleurs en cet endroit le 25 septembre de cette année. Elle se plaît dans les prés humides -et surtout le long de la petite rivière l’Aa, qui prend sa source à Bourthes à 5 kilomètres d’Aix-en- Ergny. Parmi les plantes à demi .submergées, le Cresson,le Sicnu angustifolium etc. on voyait (1) Gaudefroy et Mouillefarine, Flora obsidionalis (Bull. Soc, bot. de France, t, XVIII, 246 ; XIX, 266). EXTRAITS ET ANALYSES, 387 se dresser les tiges terminées par des inflorescences du Wimulus, qui portaient les dernières fleurs très apparentes de celte espèce ornementale. Nous n’avons pu savoir par les rares habitants de ce village s'ils avaient connaissance que cette plante fût sortie d’un jardin du voi- sinage. ; Le Mimulus luteus XL. avait déjà une localité d'introduction bien connue en Alsace et signalée vers 1850 par Fr. Kirschleger dans la Flore de cette province. Il dit à son sujet : « Naturalisée sur les bords de la Bruche et des ruisseaux qui en découlent depuis Framont jusqu’à Molsheim. » Puis aussi : « Vallée de Watterbourg depuis la maison du curé jusqu'à mi-chemin de Soulzbach»; ce qui donne à penser que c’est du jardin du curé que les graines si ténues du Mimulus se sont répandues à l'entour, et de proche en proche, l'espèce se sera largement étendue dans le pays. Enfin, cette plante s’est aussi naturalisée à une date moins ancienne dans la Côte-d'Or. La Société Dauphinoise d'échanges botaniques a distribué, sous le n° 5292 de ses collections, la plante qui nous occupe. Elle à été recueillie par le botaniste N. Garnier dans les environs de Saulieu. La localité du Pas-de-Calais que nous venons de citer n’est peut- être pas la seule de ce département mais d'après les renseignements que nous devons à l’obligeance de MM. Mouillefarine, Copineau et Gonse, qui connaissent bien la flore du nord de la France, on n'avait pas encore indiqué la présence de cette plante dans la région. En dehors du territoire français, sa dispersion n’est pas moins étendue. En Allemagne et en Autriche, ce Mimulus a élé signalé de nombreuses stations (1); on l’indique aussi en Angleterre. Cette faci- lité de dissémination et cette persistance à se maintenir en Europe prouvent une vitalité et une tendance à l’adaplation peu communes et qui méritent d'appeler l’attention. (Association française de Boulogne-sur-Mer pour l'avancement des Sciences, 28° Session, p. 489. Compte rendu.) (1) E. Fiek, Flora von Schlesien, 1881, p. 325. 388 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS MENTIONNÉS DANS CE VOLUME. AGEL (L.). L'Industrie du dans la province de (Espagne), 329. Baker (R.-T.). Sur le Parsonsia Paddisoni. Apocynée nouvelle à gros tubercules comestibles, 256. BarReTTo (L.-P.). Les Hancornia {plantes à Caoutchouc) et autres végélaux d'utilité et d'ornement de Saint-Paul (Brésil), 115. Bicuer (G.). Progrès du dressage d'un Éléphant d'Afrique au Fernan-Vaz, 57. Buysson (H. pu). Dégâts du Forf- cula auricularia dans les ruches d’Abeilles, 327. CawBoué (P.). Sur les Araignées fileuses de Madagascar. En- voi des spécimens vivants, 325. liège Gérone — Travaux de colonisation agricole à Madagascar, 55. CHaPpeLLiER (Paul). Compte rendu de culture d’Ignames de di- verses espèces faites en 1899 dans l’Orléanais, 277. CrarRuauD (l'abbé A.). L'Erythura psüttacea (Gmelin). Amadine ou Diamant psittaculaire ; Pape de Nouméa des Oiseliers, 333. CLémexr (A.-L.). Remarques sur des éducations d’Attacus Bau- hiniæ et Cynthia faites à Pa- rIS MD a) Coxi (de Laperrière). Tentatives d’é- levage de l’Autruche d'Afrique dans la République Argentine, 234, Cornu (Max.). Allocution prononcée le 1°* février 1900 à l'ouverture de la conférence de M. Duval sur les Orchidées, 145, CuénoT (L.). La distribution des sexes dans les pontes des Pi- geons, 383. Dezreuiz (Ch.). Élevage de Maras et de Cerfs Axis à Melun (Seine-et-Marne), 129. Decron (Henry). Les vignes japo- naises recueillies sur place, rapportées et cultivées en France, à Crespières (Seine- et-Oise), 187. ExFAnNTiN. Les cultures du Sénégal, 390. Escaxpe. Acclimatation végétale à Madagascar, 175. | Foa. L'Éléphant d'Afrique. — Son histoire naturelle et sa chasse, 2942372; GErMAIN. Croisement du Zébu avec les Vaches, 293. Giarp (A.). Un nouvel ennemi des Abeilles (PAyllotochus Mac- leayi Fischer), 326. GuespE (Louis). Notes sur l’agricul- ture à la Guadeloupe, 209. Iacner-Soupcer (P.). Le dressage de l'Éléphant, 26. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS. 389 Jore (Émile). La culture et le com- merce des Bananes à Costa- Rica, 125. Leczair (D') Araujia sericipfera en pleine terre dans l’ouest de Ja France, 114. Lovenpo (J. DE). Le concours des volailles de Londres et l'Avi- culture en Angleterre, 305. Macxe (Georges). De l’acclimatation et de la cullure des Plantes al- pines dans les jardins, 311. MainçeauD (Ed.). Sur l'introduction, l’acclimatation et la multipli- cation du Poisson soleil (£u- pomotis gibbosus) dans la ri- vière l'Isle, affluent de la Dordogne, 273. — Poissons et Crustacés d’eau douce alimentaires de l’Imerina, 348. Maisonneuve (E.). Dangers de l'emploi de l'arséniate de soude pour la destruction des Altises de la Vigne, 174. Marcuaz (D' Paul). Le Zophirus Pini, Hyménoptère nuisibleaux Pins : moyen de le détruire, 58. Manrcrrzac (A. DE). L'établissement de pisciculture de Bessemont près Villers-Cotterets (Aisne), 243. Mérez (K). Note sur l'élevage en France du Colin de Virginie, 380. Mizne-Enwanps (A.). Les Éléphants de la ménagerie du Muséum de Paris, 117. — La Gutta-percha à la Grande-Co- more, 321. Morez (H.\. Sur le Ginko biloba, 114. Parin (Ch.). Emploi de l'Alcool pour l'éclairage au Congo. — Utilisation du déchet des plan- tations, 239. — Remarques au sujet de la sélection du Bananier du Hamma, 283. — Sur les avantages que le Ja- tropha C'urcas présente comme support pour la culture des Vanilliers. — Emploi du Ja- tropha gossypüfolia, var. Sta- physagriüfolia contre la lèpre, 203. Pays-MeLrrier. Difficulté de l’accli- matation des Axis importés, 292: Poisson (J.) et BexaGur. Le Mimu- lus luteus dans le département du Pas-de-Calais, 386. Poisson (Jules). Sur l'exploitation et la production du - Caoutchouc dans l’Amazone et l’Amérique Centrale, d'après Eugène Pois- son, 261. Raspaiz (Xavier). Le Hanneton (We- lolontha vulgaris), au point de vue de sa progression. dans les années intermédiaires de ses cycles, 177. Rivière et Leca. Les Acridiens en Algérie. — Moyens de défense à leur opposer, 235-267. RoGEron (Gabriel). Sur la significa- tion véritable du mot + plu- mage »,233, Rozanp-GosseziN (Robert). Docu- ments nouveaux sur les qua- lités ignifuges des Opuntia. Expériences faites sous les aus- pices du ministère de la guerre, HQE SAINT-QuEnTIN (A. DE). Cultures diverses à Toulouse, 176. SAINT-QUENTIN. Une Poule à épe- rons, 234. SERRE (P.). Lettres de Californie, 118. | — Notes de zoologie pure et appli- quée recueillies en Californie, 65. SoconiTsky (U.). Le Poisson Com- battant de Siam (Betta pu- gnaz) et sa reproduction en aquarium, 134, 390 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. } TraBuT (D'). À propos de la sélec- tion du Bananier du Hamma (réponse à M. Charles Rivière), Te TrousssarT (D'). Les Mammifères à acclimater ou à domestiquer en France ou dans les colonies françaises, 33. Uainer (Paul). Meurtre d’un Nan- dou, 25. — Sur l’acclimatation et l'élevage du Nandou (Rhea americana) en Normandie, 1. Weser (D'). Le Figuier de Barbarie (Opuntia ficus indica) et ses variétés, D. FIN DE LA TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS. è -INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX MENTIONNÉS DANS CE VOLUME. Abeilles, 326-327. ÂAcridiens, 235, 267. Aloses, 122. Altises, 174. Antilopes, 50. Araignées fileuses, 325. Attacus Bauhinie, 53. Attacus Cynthia, 21-53. Autruche, 234. Axis, 2992. Bar, 122. Betta pugnaz, 134. Bœuf du Fouta-Djalon, 23. Caille de montagne, 121. Cerfs, 48. Cerfs Axis, 90, 131. Cheval (Consommation de la viande de) à Paris, 379. Colin de Virginie, 380. Crevettes, 72. Diamant psittaculaire, 333. Éléphants, 26, 117, 294, 372. Éléphant d'Afrique, 20, 44, 57. Erythura psittacea, 333. Eupomotis gibbosus, 273. Faisans, 70. Forficula auricularia, 327. Halabe, 290. Hanneton, 177. Hérisson, 17. Huîtres, 71. Ibis du Brésil, 70. Kangourou, 51. Lophirus pini, 18, 58. Maras, 49, 129. Nandou, 1, 169. Pape de Nouméa, 333. Phascolome, 51. Phoques, 17, 65, 119. Phyllotochus Macleayi, 326. Pigeons (ponte des), 383. Poisson Combattant de Siam, 134. Poisson Soleil, 273. Poissons et Crustacés d’eau douce ali- mentaires de l’Imérina, 348. Poule, 234. Saumons, 119, 123, 124. Tinamou, 23. Tinamou roux, 167. Truite arc-en-ciel, 243. Typhlomolge Rathbuni, 18, 70. Zèbres, 45. Zebu, 20, 60, 293. FIN DE L’INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX. 392 INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX MENTIONNÉS DANS CE VOLUME. Arachide, 352 Araujia sericifera, 114. Bambou, 215, 302. Bambusa spino:a, 25. Bananes, 125, 215. Bananier, 283. Bananier du Hamma, 77. Cacao, 213. Café, 213, 358. Canne à sucre, 210. Caoutchouc, 261, 352-356. Coton, 358-360. Cultures du Sénégal, 350. Edelweis, 288. Eryngium alpinum, 288. Eugenia cauliflora, 116. Figuier, 62. Figuier de Barbarie, 5. Ginko biloba, 114. Gnaphalium leontopodium, 288. Gutta-percha, 327, Hancornia, 115. Jgnames, 24, 277. Tatropha curcas, 203. Indigo, 362. Kolatier, 215, Lièse, 329. Mélastomacées du Brésil, 116. Mil, 350-352. Minrulus luteus, 386. Opuntia, 24, 73. Parsonsia Paddisoni, 250. Piysianthus albens, 19. Puya Weberi, 288. Ramie, 151. Riz, 356. Tabac, 360-362. Vignes hybrides sino-brésiliennes, 117 Vignes japonaises, 187. FIN DE L'INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX. | | 5. “ TABLE ALPHABÉTIQUE DES ARTICLES PUBLIÉS DANS CE VOLUME. * Abeilles (Dégâts du Forficula auricularia dans les ruches d’)....,,.. 327 nr (Unnouvellennemt des) nee en Lee ue 26 Acridiens (Les) en Algérie. Moyens de défense à leur opposer .. 235, 267 . Alcool (Emploi de l’) pour l'éclairage au Congo........,.....,.... 239 Allocution prononcée par M. Max. Cornu le 1°" février 1909 à l’ouver- ture de la Conférence de M. Duval sur les Orchidées.........., AS Altises (Dangers de l'emploi de l’Arséniate de soude pour la destruction dessine Mn ste Late : A Aa meRle states ee orale leve NT AU TA Araignées fileuses an Malade ne S0FQO os oovbonurco end booba +. 325 Atiacus Bauhinia et Cynthia [Remarques sur des éducations d') faites à PAM 000 000000 c Soon vb ado end eur ondes 03 Autruche d'Afrique enatres d'éler age de l’) dans la République TENTE 10 00 F6 LC OAROP OT MOOD DONC MNRA A" Axis Difficulté de lAcclimatation des) importés. .............,.... 11202 Bambous (Culture des)au Japon.....0.......:.,.4:." ten Rte 0 2 Bananes (La culture et le commerce des) à Costa-Rica...... ose ilP25 Bananier du Hamma (à propos de la sélection du)......... SA EE 77 — Mr (Remarques au sujet de la sélection du) ....... 283 Bessemont (L'Établissement de Pisciculture de}. Élevage spécial de la Hirtitelarc-ensciele een ee ee NS AE RS HE PEN DEEE s 243 Bœufs porteurs à Madagascar (Sur l'emploi des)............ ae 60 Bois d'œuvre (Insuffisance de la production du) dans le monde. .... 5& 272 balifomientLeltres de)... 44 ANNE. Done a On nie AE 118 Caoutchouc (Sur explain et la production 5 dans PA et l'Amérique centrale................... Ddocccecoscbor 201 Cerfs Axis (Élevage de) : à ie (Seine-et- Ven DA UE on ERA 129 Chexal (Consommation de la viande de) à Paris............... doc OT Colin de Virginie (Note sur l'élevage en France du)......... 500008 : SE Concours de volailles de Londres et l’Aviculture en Angleterre...... 305 Congrès ornithologique international (Le troisième).............. D (RE MnlinrediyersesaToulonse ERP ERP REC CLR ce. -ecrerer 176 — du Sénégal (Les) et l'organisation agricole de l'Afrique occi- dentale francaises ie este leretee Ne a pe elsle ele a ete ape PAU O0 À) Hiéphany d/Afriqueet salchasse.. 0.0... 500000 294, 312 — — (Progrès du dressage d’un) à Fernan-Vaz......., 57 — (Le dressage de l')...... NE MAN do id o0 26 — (Les) de la Ménagerie du Muséum de Paris.............. 117 Envois de graines (Remerciements pour)..,.,.,..,....,.....+, D8, 59, 60 39% BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. Erythura psittacea (L’) Amadine ou Diamant psiltaculaire ; Pape de Nouméa des oiseliers. Ses mœurs, ses habiludes et son élevage dans le Midide laFrancen.necenree .smeechttenite DCEEREE Kiguier (La Culture du) en Grece... Re CCC CCC ERER —. de Barbarielllie)let seswvarittés. en -LentcRet LLC PCPUEE GER RO ND UO DD RER eee MReALE, Fi FAC eE ele ER RR RO Co Guadeloupe (Notes sur RAC Late Aa) Re ee ne SN TNA HS Gutta-percha (La) à la Grande-Comore.............. RER Hancornia (Les), plantes à caoutchouc et autres végétaux d'ulilité ou d'ornement à Saint-Paul (Brésil)... 4.000 CRPRER PER eRr Hanneton (Le) Melolontha vulgaris, au point de vue de sa progression dans les années intermédiaires de ses cycles............. Bb 0 Ignames (Compte rendu de Cultures d’) dans l’Orléanais.....,..... Jatropha C'urcas. Sur les avantages qu’il présente comme support pour ltculture des Wanilliers eee rec-rccee crc ceRECEEPERE Liège (L'Industrie du) dans la province de Gérone (Espagne)........ Lophirus pini (Le) hyménoptère nuisible aux Pins : moyens de le dé- oO B 0m) 0 ue ne doc o bb onto ab 0 000.0 0 dé 00 Madagascar {Acclimatations végétales à)........ SN ae AE = (Travaux de colonisation agricole à)................. Mammifères (Les) à acclimater en France ou dans les Colonies fran- ŒIL oo bo aceabcosoc G'9 0 0 Hop 0 00 6 DPéooovdoooor 06000 0 Maras (Élevage de) à Melun (sine et- Mae) PPS de T2 OCR Mimulus luteus (Le) dans le département du Pas-de-Calais. .... Bodo 6 Nandous (Sur l’acclimatation et l'élevage des) ................... — 4 (Meurtre d'un): 5 sn R 0eme ec cr CPP EPEPE Opuntia (Documents nouveaux sur les qualités ignifuges des)........ Parsonsia Paddisoni (Sur le). Apocynée nouvelle à gros tubercules COMESUIDIE Et eee LE CET MC TCe DR ODAGODD06 060 0000 Pigeons (La distribution des sexes dans les pônles des): Me Re Plantes alpines (L’acclimalation et la cullure des) dans Éù res He Plumage (Sur la signification véritable du mot)..............+.... Poissons et Crustacés d’eau douce alimentaires de l’'Imerina.......... — Combattant de Siam (Betta pugnaæ) et sa reproduction en BRAPIU + . + ss es lelelare ele se sale ose IS — Soleil (Sur l'introduction, L’ eds et la Mer du)ïdans Ja rivière l'Isle..." .c.:te ceci CLR RRr Poules \àléperons 2: MRP MERE PERRIER ER ERL SC CREER ERErERnr Vignes Japonaises (Les) recueillies sur plece, rapportées el cultivées en France à Crespières (Seine-et-Oise)............. ee sonores Zébu (Croisement du) avec les vaches ....,....,............ ..... Zoologie (Notes de) pure et appliquée, recueillies en Californie. . -.... FIN DE LA TABLE ALPHABÉTIQUE DES ARTICLES. TABLE DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ “ SÉANCES GÉNÉRALES: Séance du 8 décembre 1899... 13 DOME — ... 80 O2 btanvien LOUONE-MNSS 93 février — .... 1 — Séance du 23 SÉANCES DES SECTIONS. 1T0 section. — Mammifères. Séance du 8 janvier 1900..... 89 — février — ..... 91 _ Dmars — ....,. 156 == 2 avril Ne. 1299 2€ section. — Ornithologie. À viculture. Séance du 15 janvier 1900 ,.. 93 = LE EME LS Con 0 — Dm Cr 5 = 9 avril 0 20) 3€ section. — Aguiculture. Séance du 29 janvier 1900... 96 — 26 février — ... 99 — 26 mars RATE RE EL) — 30 avril — ... 224 4° section. — Entomologie. Séance du 22 janvier 1900... 19 février mars 1900..,... 27 avril 25 mai 19 mars 23 avril D9 section. — Botanique. Séance du 16 janvier 1900 . … 69 section. — Colonisation. 28 février 20 mars 1 mai — Séance du 8 janvier 1900 .... (2x 19 février mars avril FIN DE LA TABLE DES SÉANCES. 395 1592 217 286 396 TABLE DES GRAVURES Bessemont (Établissement de pisciculture) .............. 04088 0 243, 244 — nn = _ Salle des appareils à incubation. 245 —= = —= Bacs d’alevinage . ........."1246 æ me = Étang à reproduction.... 248, 251 Courville Hlang dielevager Lee ee ECC LEE Dao: PE) = Étangide peche tee ere AA SL 000, Do Éléphantiabatiun ee. cceee ddbos bBOLCDo Goo: Oo de AA] — buvant une bouteille de vin......... 1." FRR0n don (He — présenté par Laurent Franconi........ oeil .... 28 — Selim monté par miss Stephanie ....... DdoS0os0o0o oo TO (Mlétesdiee ee ee lei AD ob A0 60.6 € eee LOI ONE, Habitation au Matouba (Guadeloupe)...,.......... MODecocoe 0 on Ml Igname de Chine....,...,. as Too dou ub 000 ie Do 6to 6 6 sale eee 2 Oil Plantation de Cocotiers à la Guadeloupe ..... Ba 6 So 0 OOboouochocoo ZI FIN DE LA TABLE DES GRAVURES. VERSAILLES, IMPRIMERIES CERF, 59, RUE DUPLESSIS. ince | D'ARENBERG.: député, vice-président du Groupe nial, président du Comité de l'Afrique française. commandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- ire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des lonies. OURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- e en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. (U, professeur de botanique au Muséum. JAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- nes, secrétaire général de l'Union coloniale française. S-ROUX. ancien député, membre du Conseil supérieur merce, vice-président du Groupe culonial. professeur de culture au Muséum. IN, membre de |’ Institut, professeur de chimie agri- u Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. =L DUBOIS, urofesseur de géographie coloniale à l'Uni- té de Paris. SKI, directeur, professeur de cultures coloniales à tut national agronomique. “AHAULT, professeur de botanique à l’ Université _de itpellier. »GRANDEAU, directeur de la Sfalion agronomique de , rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. DIDIER, membre de l'Institut. Graveur - Dessinateur TRAITÉ QUE CONTENANT 7 dernières perfections et les secrets de l’élevage colombophile s Pnhcables à l’Art Militaire et Maritime AINSI QU'UNE ude expérimentale des Maladies des Pigeons avec les remèdes pour les quérir promptement : 3 fr. 79 FRANCO Prix ée sous les auspices de l’Union coloniale française, aître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies. illeurs DEOGEUES de culture, dy provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes Fanede COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE evue des Cultures coloniales paraît le 5 et le 20 de chaque mois. eaux : 44, rue de la Chaussée d’Antin, Paris. nements : un an : France, 18 francs — recouvré à domicile, 18 fr. le, 20 francs. — Pour les abonnements et annonces, s'adresser à M. Gaston Noblet, admini En | vente au siège de F Société d'Acclimatation, M, ; Les ouvrages suivants de M. RicHARD pe Bo el Colombophile - Aviculteur IGEON VOYAGEUR ACTUEL | ATLAS COLOMBOPHILE Savons vétérinaires à l'Eucalyptol, ou autres Animaux . Les Membres de la Sociélé d’Acclimatation qui désirent essayer ce savon très Ge ficace contre la vermine et les maladies cutanées sont informés qu'il peut leur RU tre envoyé quelques pains à titre d'essai, à des prix extrêmement avantageux. Pour FuTe STE) ROSES S adre: esser au > ÉRRETN de la Société. cette publication a pour but de faire mieux MM. BARON JULES DE GUERNE, secrétaire général de la Société 28- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. M£r LEROY, supérieur général des Missionnaires du St-Esprit MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Revue 9 - nérale des Sciences pures et appliquées. P PRILLIEUX, sénateur, inspecteur général de l'Enseigneme azricole, profesr de Botanique à l'Institut Nalional agronome POISSON, assistant au Muséum, RISLER, directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien président de laSociété d'Agriculture d'Al directeur du Jardin d'essai du Hamma D' TREILLE, ancien inspecteur en chef du service de santé des Colonies, 5 VIALA, professeur de viticulture à l’Institut national agrono- mique, directeur de la Revue de Viticulture. a ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon Er ÿ l'Ecole des sciences politiques. Er 50. — Colonies el Uniot rue de Lille, Paris NOUVEL CONTENANT LES DESSINS EXACTS de toutes Les espèces Ge pIGeONS VOTAGEURS, DE FERME et de fantaisie : 2 fr. 75 FRANCO Prix pour Chiens SE _ Charles NAUDIN Membre de l’Institut (Académie des Sciences) qe Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL ÊL ACUILIT M ATEU . CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Te Adaptées aux divers climats de l'Europe et des Pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE Sociélé nationale d'Acclimatation de France LA : Un volume in-8° de près de 600 pages avec portrait TE TEE RSS TR INTRODUCTION : Considérations générales sur l’acclimatation des plantes ; race Aperçu général des genres de plantes auxquels sont em espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; : Le où Description sommaire des familles ou groupes naturels auxque _ rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Here : Noms vulgaires des plantes etsynonymes rapportés aux noms botaniq Enuméralion par ordre alphabétique des plantes, leurs usages culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les dix régions du globe ; cu Due: Noms des auteurs cités dans le cours de l’ouvrage avec les abrévi: | usitées. : prunté Prix : ‘7 FRANcS Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d’'Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. Versailles. — Imprimeries Cerr, 59, rue Duplessis. BULLETIN . DE LA © MAIONALE D'ACCLIMATATION Na 4 F4 De BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGGLIMATATION DE RER ANCE Fondée le 10° Février 1854 RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR DÉCRET DU 20 FÉVRIER 1855 ANNÉE 1901 QUARANTE-HUITIÈME ANNÉE PARIS Of Gin G10 2 DB. M0A CODICNTNE IE 4, RUE DE LILLE, 41 1901 1% He de DE FR UE BULLETIN DE LA É NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 4 à (Revue des Sciences ee appliquées) orrr TS Ne 4 JANVIER 1901 1 a re # SOMMAIRE ae .. Un numéro 2 francs; pour 1 membres de la Société 4 fr. 50 HS , à a \: ‘SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÈTÉ XATIONALE D ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue de Lille: — PARIS Le Bulletin paraît tous les mois. = REVUE DES CULTURES COLOMALES Directeur: À. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit; Directeur du Service del el des Antilles à FUnion coloniale française : Président de la Section colon Société nationale 'd’'Acclimatation de France. = Créée sous les auspices de l’Union coloniale fransuise, cette publication à pour but de. mieux connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales; de vulea -dans les colonies les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meille variétés des plantes françaises actuellement cultivées et lacclimatation de plantes nouvell La Revue des Cultures coloniales parait le 5 et le 20 de chaque mois. ORNE Le D D A (France. 48 francs. — Recouvré à domicile. 48 fr fe DR NES EUR AS { Colonies et Union Postale Pour les abonnements et annonces, s'adresser 44 d’Antin, Paris. » rue de la Chaussé En vente au siège de la Société d'Acclimatation, A, rue de Lille, —P Les ouvrages suivants de M. RicxarD DE BoEvE Graveur-Dessinateur et Colombophile-Aviculteur. TRAITÉ PRATIQUE NOUVEL DU PIGEON VOYAGEUR ACTUEL | ATLAS COLONBOPHILEL CONTENANT CONTENANT É les dernières perfections et les secrets de l'élevage colombophile LES DESSINS EXACTS applicable à l'Art Militaire et Maritime de toutes Les espèces de AINSI" QU'UNE te PIGEONS VOYAGEURS, DE FER Etude expérimentale des Maladies des. 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L'alimentation des nouveau-nés surtout devient chaque jour un problème de plus en plus difficile à résoudre quand les mères n'ont pas l'aptitude physique nécessaire pour nourrir elles-même, ni les moyens de supporter le tracas, les exigences et l'en- combrement onéreux d'une nourrice à domicile. Nous pour- rions ajouter que nombre de personnes hésitent non sans raison à exposer leur enfant à puiser sa subsistance à une source qui n'est malheureusement que trop souvent souillée de syphilis ou de tuberculose dont la constatation n’est pos- sible par le médecin que lorsque le mal est fait. Nous pensons également que l'innovation que nous propo- sons aurait une influence des plus salutaires sur l’état des malades et des vieillards affaiblis condamnés au régime risoureusement lacté. Ceux-ci ne trouvent dans Paris que du lait de Vache que leur estomac débile n'arrive pas, la plupart du temps, à pouvoir digérer et qu'ils prennent bientôt en aversion, en raison de l'empätement désagréable de la bouche que son absence de fluidité leur occasionne. Pour eux comme pour les tout jeunes enfants, l'usage de ce lait présente un autre inconvénient, celui de les exposer à introduire dans leur organisme, que la débilité rend parti- culièrement accessible au mal, un liquide souvent suspect de tuberculose, comme nous allons le démontrer plus loin, ou tout au moins rempli de germes pathogènes (2) et qu'on (1) Communication faite en séance générale du 45 janvier 1901. (2) Professeur Monti de Vienne — voir renvoi plus loin. Bull. Soc. na’. Accl. Ir. 1991. — 1 PA 4 1 YURE à. mie Aa Ëx Z 3 iù 2 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION ne peut éviter puisque, avec la Vache, la traite aseptique est à peu près impossible (1).- Sans doute le grave inconvénient que nous venons de signaler peut être en partie conjuré par la stérilisation, mais tous les médecins paraissent d'accord aujourd'hui (les communications faites au Congrès international de Médecine de 1900 en font foi), pour admettre que la cuisson apporte des modifications profondes dans les éléments chimiques du lait (2), auquel elle enlève sa propriété précieuse d'aliment complet, qui l’a toujours désigné tout spécialement et néces- sairement pour l'élevage du nouveau-né. On a suivi en cela les sages enseignements de la.Nature qui sert à celui-ci, par le sein de sa mère, le lait à l'état cru et vivant. Nos expé- riences personnelles pratiquéessur de jeunes animaux de l'es- pèce caprine, — qui sont pourtant bien rustiques, puisque, à l'âge de 15 jours, ils digerent du son, — ne nous laissent plus le moindre doute à ce sujet. Quant à la pasteurisation, chacun sait que les médecins ne l’acceptent que parce que, avec le lait de Vache, il n'y a (4) Sur 600.000 litres de lait de Vache que consomme par jour la population parisienne, on peut compter qu'il y a 575.000 litres de lait contaminé (Conférence à l’Institut Pasteur en Janvier 1901 par le D° Henri de Rothschild). (2) Le lait de Vache contient toutesles Bactéries du lait parfois même des microbes pathogènes comme celui de la diphtérie, de la tuber- culose, de la fièvre typhoïde, etc. Le lait de Vache ne doit pas être administré à l'état cru, il faut d’abord éloigner le danger des microbes. Nous faisons abstraction des moyens chimiques et mécaniques (force centrifuge, froid) ; les uns altèrent trop le lait, les autres sont insuf- fisants..…… L’échauffement du lait à 40° pendant dix minutes suffit pour tuer les mi- crobes pathogènes sans altérer le lait, mais les ferments de la caséine, le Bacillus subtilis, le Bacillus thyrothrix tennis, le bacillus mesentericus vulgatus, résistent à ces températures, et même après la cuisson à 100° il reste des spores de ces Bacilles qui peuvent encore se développer. Mais l’action des hautes températures altère le goût du lait et la com- position chimique de ses éléments : par l’altération de la lactose, le lait a un goût de caramel ; la lacto-albumine coagule, d’après Mammers- tein, déjà de 72 à 84; la caséine coagule, dans un pareil lait, en flocons gros et durs; la fine émulsion de globules lactés est détruite, les acides gras sont mis en liberté et donnent au lait un goût désagréable, même les sels sont transformés en une forme insoluble et sont préci- pités. De cette manière, on crée des conditions très défavorables à la digestion, et l’utilisation de la nourriture devient difficile. UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 3 pas mieux : c'est un pis-aller qui à pour mérite de détruire les germes pathogènes à l'état parfait sans apporter dans les éléments constitutifs du lait des modifications aussi pro- fondes que celles apportées par la stérilisation. Mais il est reconnu que ce procédé n’atteint en aucune façon les spores microbiennes (1); or celles-ci sont-elles donc sans danger? Du reste la pasteurisation ne pourra jamais donner au lait de Vache la digestibilité qu'il n'a pas. 1] n’en est pas de même de la maternisation du lait, seu- tement ce procédé rentre dans la catégorie des laits fabriqués dont on n'use généralement qu'avec d'infinies précautions et pour cause, la formule devrait toujours en être donnée par le médecin et être exécutée en pharmacie, car il s’agit là d'un véritable produit pharmaceutique. IL arrive plus souvent qu'on ne le suppose que, malgré toutes ces préparations, le lait de Vache ne convient pas à certains enfants même vigoureux. Nous pouvons en parler sciemment, car notre propre enfant qui à aujourd'hui près de 5 ans, n'a jamais pu tolérer une goutte de lait de Vache. Nous avons essayé ce lait sous toutes ses formes et nous avons pu nous convaincre quil n y à de la part de l'enfant ni dégoût, ni prévention pour ce liquide, mais uniquement un effet spécial de chimie stomacale. Le lait de Chèvre dans ce Cas se comporte souverainement et nous n'hésitons pas à reconnaitre que nous lui devons la vie de notre enfant. *% X *# Le public parisien, naturellement méfiant et, de par l'agi- tation que lui cause la multiplicité de ses besoins factices, peu disposé à creuser les questions qui ne lui sont pas fami- lières, n'a vu d'abord dans notre proposition d'utilisation de Re D’après les recherches de Klügge, les saprophytes ne sont pas complètement tués par la cuisson prolongée, mais ils sont seulement réduits au minimum, et il reste encore une quantité de spores qui plus tard se développent. $ DobbE Les enfants nourris au lait stérilisé deviennent anémiques et rachitiques. (Professeur Monti de Vienne, Congrès de Paris, Annales de médecine et chirurgie infantile, 1° décembre 1900, p. 905 et 906). (4) La pasteurisation n’a pas pour but de tuer les spores des ma- ladies, mais elles les anéantit pendant un certain temps (Conférence de M. le D'. H. de Rothschild à l’Institut Pasteur le 10 Janvier 1901). 4 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION la Chèvre qu'une pensée originale, curieuse, reposant sur une intention bonne, mais pratiquement peu réalisable. On s'est étonné, en effet, qu'une idée aussi simple ait pu échap- per à nos savants en quête depuis longtemps d'une solution à la crise lactée dont souffre Paris et à laquelle succombent annuellement des milliers de jeunes enfants et de malades, faute d'une nourriture appropriée (1). Nous-même, du reste, nous partageons Cet étonnement; nous avons cherché vai- nement à nous expliquer ce fait, car la Chèvre est un ani- mal d'usage courant; tout le monde sait qu'elle est la plus ancienne nourricière de l'humanité; les siècles ont consacré sa réputation et, encore aujourd hui, son lait domine presqu à l'exclusion de tout autre, dans l'alimentation du peuple espagnol. L'Algérie, la Tunisie, l'ile de Malte, la Grèce (2), etc., n'usent que de ce lait, et la Suisse elle-même n'en voudrait pas d'autre s'il ne fallait pas du gros bétail pour la bou- cherie et si le gros bétail en question ne fournissait le lait spécial nécessaire à la fabrication du fromage de Gruyère dans lequel il ne peut entrer une goutte de lait de chèvre sans préjudice pour la réussite de ce produit. Si à Paris, comme dans la pluplart des grandes villes de France, l’ancien usage de faire boire aux enfants et aux malades du lait de Chèvre a considérablement perdu dans la faveur du public, cela tient uniquement à la qualité du lait que nos chèvriers ambulants ont coutume de nous servir aujourd'hui. Les animaux qu'ils promèenent à travers les rues, proviennent généralement des contrées montagneuses du centre de la France où dominent les Chèvres du groupe des fromagères. Le lait de celles-ci est le plus souvent épais et fortement imprégné de l'odeur caprine qui répugne à tant de monde. C'est même à ce défaut qu'il faut attribuer également l'hésitation de certains médecins à conseiller le lait de Chevre qu'ils considerent bien à tort comme indigeste et excitant. ; Il en serait tout autrement si nos villes de France avaient (1) En six ans, 209.000 enfants sont morts en France de maladies. évitables (Communi-ation à l'Académie de médecine de MM. les D Balestre et Gilettu de Saint-Joseph, Janvier 1901). Sur 41.000 enfants qui meurent avant d’avoir atleint leur première année, pius de la moitié succombent à des maladies évitables. (Paul Strauss.) (2) En Grèce, il y a 419 chèvres par 100 habitants. ES $ 7 D: UTILISATION DE LA CHÈVRE À PARIS D à leur disposition les laitières de choix que sont les Chèvres suisses, maltaises, nubiennes et espagnoles. Partout où vivent ces races d'élite, le public abandonne le lait de Vache et accourt au passage des troupeaux de Chèvres pour recueillir lui-même le liquide chaud qui verse la force et la santé dans nos veines. Cet usage relativement récent en Suisse (1) se généralise de plus en plus dans ce pays et il est aujourd hui particulièrement pratiqué à Genève, Lau- sanne, Montreux, etc. Il est imité, d'ailleurs, d'une coutume qui existe dans le sud de l'Europe, où les médecins locaux attribuent à ce lait le merveilleux état de santé des jeunes enfants (2). Les Maltais placent si bien le lait de Chèvre au-dessus de tout autre qu'ils considerent le lait de Vache tout au plus comme bon à l'alimentation des indigents ou à l'engraisse- ment des animaux. Du reste une bonne Chèvre se paie à Malte jusqu'à 120 francs. II. — Erreurs et préjugés contre le lait de Chèvre. Pour les hommes de science, il est de règle de n'admetire comme bases à leurs discussions que des faits scientifique- ment établis. On ne doit donc pas s'étonner qu'un savant éminent ait pu négliger de tenir compte, pour l'appréciation du lait de Chèvre, de l'universelle et séculaire réputation de ce lait et s'appuyer pour le condamner sur de simples pré- omptions scientifiques faciles à détruire comme on va le voir. Ce savant affirme : 1° Que le lait de Chèvre contient trop de casèine, 40 gram- nes en moyenne par litre. Nous avons examiné le produit de nombreuses races de Chèvres et particulièrement celui des races de choix, comme les Alpines de France et de Suisse, les Pyrénéennes, les Maltaises, les Murciennes et autres variétés espagnoles, et nous n'avons jamais constaté, même dans les variétés peu recommandables du Poitou et du Centre de la France, la (4) N. Julmy, professeur à l'Ecole d'agriculture d'Econe (Suisse), Monographie de la Chèvre. _ (2) Docteur Lesage, Etude sur les affections intestinales de l'enfance. 6 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION caséine en quantité supérieure à celle que l'on trouve dans les laits de Vache de toutes provenances. La plupart des Alpines donnent même un lait si faible en albuminoïdes que par sa Composition chimique il se rapproche en tous points d'un bon lait de Feñine. Une seule Chèevre cependant, celle de Corse, peut justifier cette opinion, car la teneur de son lait en caséine est bien de 40 grammes, mais quiconque connait tant soit peu la Chèvre, sait fort bien qu'il faut bannir la Chèvre corse de toute chèvrerie sérieuse; c'est, en effet, un animal à peu près sauvage, une mauvaise laitiere, qui, apres la mise bas, donne à peine 1 litre 1/2 d'un lait épais, lourd et généralement imprégné d'une forte odeur caprine. C'est bien là l'exception que le savant dont jai parlé plus haut à pris pour la regle. La Chèvre corse est à la généralité des Chèvres de race ce qu'est, par rapport à la généralité des nourrices, cette extraordinaire nourrice bre- tonne citée dans les livres spéciaux et dont le lait contenait 44 grammes de caséine par litre au lieu de 15 à 25 grammes que l'on trouve habituellement dans le lait de Femme (1). De pareilles anomalies ne peuvent évidemment pas entrer en ligne de compte pour déterminer une moyenne. Le même auteur prétend : 2° Que le lait de Chèvre est indigeste puisque dans les deux seuls cas où il a êlè à même de l'éprouver, le résultat a été mauvais. N'avons-nous pas quelquefois des mécomptes avec le lait des nourrices mercenaires, et bien mieux, avec le lait de la propre mère de l'enfant elle-même. Du reste, à côté de ces deux cas si facheux, puisqu'ils ont entrainé la condamnation de la Chèvre, n’avons-nous pas des cas innombrables où le salut de l'enfant était absolument dû au lait de Chevre? En dehors du témoignage des autorités médicales de premier ordre, parmi lesquelles nous citerons M. le docteur Bois- sard (2), n'avons-nous pas à l'appui de notre opinion la tra- dition qui glorifie la Chèvre dans l'antiquité la plus reculée et la signale déjà dans la légende mythologique comme la nourriciere de l'humanité sous la figure symbolique d'Amal- thée allaitant Jupiter enfant. Les Anciens attribuaient si bien à ce lait des vertus particulières que Longus parlant. (1) D' Marfan, Alimentation des nouveau-nés. (2) Journal des praticiens. — 30 Mai 1900. — De l'alimentation des nouveau-nés par Le lait de Chèvre. UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS T dans sa célebre idylle de la beauté de forme et de la vigueur de Daphnis, nen recherche les causes que dans ce fait qu'une Chèvre l'avait nourri. Enfin notre contradicteur allègue : 3: Que le lait de Chèvre a èlé expérimenté dans un hôpi- tal de Paris, il y a 15 à 20 ans, mais qu'on à Au renoncer à ce mode d'allaitement reconnu défectueux à plusieurs points de vue. Ce qu'il aurait fallu ajouter, c'est que l'expérience, conduite comme elle l'a été, ne pouvait en aucuné façon réussir. Nous verrons plus loin en quels termes précis M. ie docteur Boissard nous parle de cette tentative. Réunir des Chèvres recrutées au hasard, sans se préoccuper de la race ni des propriétés spéciales à chaque race, sans tenir aucun compte non plus de l'influence qu'exerce la nourriture sur l'abondance, la qualité, le goût et mème la proportion rela- tive des éléments constitutifs du lait, c'était courir à un échec certain. Pour réussir, des essais de ce genre devaient être précédés de sérieuses recherches sur le terrain de la zootechnie caprine et être suivis, avec des données bien établies, sur le domaine de la physiologie infantile. Les expérimentateurs ne connaissaient pas la Chèvre, comment prétendaient-ils la juger et surtout lui rendre justice? Nous démontrons plus loin combien ils se sont trompés à ce sujet. Après avoir parlé des erreurs, passons aux préjugés. L'odeur hircine, souvent reprochée au lait de Chevre, n existe que dans les races dégénérées qui sont nombreuses en France ou dans celles qui se rapprochent de l'état sauvage. Cet inconvénient ne se présente jamais dans les races sélectionnées et s’atténue même dans les autres sous l'influence d'une nourriture appropriée. La saveur du lait des Chèvres d’Espagne, de Malte et de Suisse est aussi exquise que celle du meilleur lait de Vache avec une certaine finesse au goût en plus. Nous ne pouvons du reste mieux faite | que de repr since à ce sujet les appréciations formulées par M. Francisque Sarcey, de regrettée mémoire : Notre éminent critique, dans son « Grain de Bon Sens » du 30 mars 1899 (Figaro) déclare le lait des Chèvres suisses et espagnoles « exempt de toute odeur. Çà, dit-il, je puis en répondre, car je me suis mis pour me convaincre par une 8 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION expérience personnelle, à boire de ce lait depuis huit jours ». Dans « Chasse el Pêche », de Bruxelles, numéro du 15 mai 1899, nous trouvons sous la plume du distingué professeur M. Reul, de l'Ecole vétérinaire de Bruxelles, le témoignage suivant : « Le lait des Chèvres murciennes « est gras, légèrement sucré et dépourvu de toute odeur « hircine, nous en avons goûté chaud au sortir du pis, « pour mieux nous convaincre d'une particularité que « nous ne rapporterions pas ici si nous ne l'avions Cons- « tatée. » Enfin, dans le numéro du 30 juillet 1899 du même Journal, M. Pauwels, l'un des rédacteurs les plus estimés de cette feuille, s'exprime comme il suit : « Le lait de la Chèvre sou- « mis à ce régime aussi simple que peu coûteux est au lait « généralementobtenu, ce qu'un bon verre de vrai Bordeaux « est au pire des « petits bleus », c'est-à-dire que ces tasses « de lait m'ont procuré un plaisir au moins égal à celui que « ressent un amateur de bon vin à déguster un nouveau « produit dont il ne soupconnait même pas l'existence, à « mOi qui n'étais jamais parvenu précédemment à m'imposer « l'absorption de deux gorgées de ce liquide que je considé- « rails comme indigeste, lourd et d'un goût au moins désa- « gréable ». ; Dans sa communication à l'Académie de Médecine {séance du 10 juillet 1900) et au Congres international de Médecine (sur la valeur du lait de Chèvre dans l'alimentation des enfants, 3 août 1900), notre distingué collègue de la Societe d'Acclimalation, M. le docteur Barbellion, expose ce qui suit : « Enfin il est une considération sur laquelle nous « tenons à insister, c'est que contrairement à l'opinion « admise, le laitde Chèvre n'a pas d'odeur nide goût spécial. « Seules, certaines races présentent cet inconvénient. Le « beurre tiré du lait de Chèvre est d'une densité très faible, « il est constitué par des globules graisseux d'une finesse « extrème, ce qui explique sa grande digestibilité ». Nous ajouterons, en ce qui concerne le beurre, que celui- ci, quoique réputé d'un goût sui generis plutôt désagréable par de nombreux auteurs qui ne connaissaient pas la manière de le produire excellent, présente au goût, tout au moins en ce qui concerne le produit des races de Mureie et UTILISATION DE LA CHÈVRE À PARIS 9 * de Malte, plus de finesse et d'arôme que le meilleur beurre de Vache. Il a sur celui-ci l'avantage d'offrir à poids égal, un volume de 1j5° plus fort que celui du beurre de Vache et de profiter en cuisine du double de ce dernier. Ce sont là des constatations curieuses et intéressantes que nous avons faites nous-mêmes et que nos lecteurs peuvent faire à leur tour pour se convaincre; tout le secret consiste à n’employer au barattage que de la crème rigoureusement douce et fraiche; le seul écueil est que dans le lait de Chèvre la crème monte difficilement. Quant au préjugé si répandu que le lait de Chèvre énerve ou, pour parler plus français, surexcite les enfants, nous ne le mentionnons que pour en signaler l'absurdité et le préjudice qu'il cause en empêchant souvent la mère de famille de recourir à l'action salutaire du lait de Chèvre pour l'alimentation de son enfant. Lui prêter le moindre crédit, c'est d'une part confondre la vivacité et l'entrain, qui sont des signes de santé chez l'enfant, avec l'énervement, état maladif que la Chèvre ne saurait communiquer; et, d'autre part, admettre que les Algériens, les Maltais, les Grecs, les Napolitains et tous les montagnards qui font ex- clusivemnnt usage de lait de Chèvres, sont des races de né- vropathes, alors qu'en réalité la neurasthénie leur est en quelque sorte inconnue. Voulez-vous un enfant, dormant avec calme, ferme de corps, gai, solidement éenformé, per- çant ses dents tôt et facilément(1) enfin exemptde «gourme » (impetigo), nourrissez-le au lait de Chèvre cru et autant que possible à la chaleur de la traite. Nous défions à cet égard la contradiction, de si haut qu'elle puisse venir. D'ailleurs, la Chèvre n'a pas le système nerveux irritable, cest un animal patient et bien équilibré. La preuve en est dans la facon dont elle supporte le contact presque imme- diat de l'ampoule lumineuse employée dans la production du rayon X. Nous l'avons soumise à ce procédé scientifique afin de nous rendre compte si en cas d'affection de poitrine, il serait possible d'utiliser ce moyen pour explorer le pou- mon. L'expérience a donné des résultats favorables et la Chevre s'est montrée bien moins sensibles aux effets physio- logiques de l'électricité que bien des animaux considérés (4) Le lait de Chèvre par ses sels favorise l’évolution dentaire et le développement du système osseux. (D'° Boudard, La Chèvre-nourrice). 10 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION LS cénéralement comme infiniment moins impressionnables qu'elle. Un fait qui semble trouver sa place ici, en raison des erreurs auxquelles il a déjà et peut encore donner lieu, c'est la coloration spéciale des selles chez les enfants élevés au lait de Chêvre. Tout le monde a pu remarquer que les dérivés du lait de vache : le beurre, surtout celui de Normandie, le fromage de Brie, de Gruyère, etc., etc.,. ont généralement une teinte jaunàtre, c'est là ce que nous appelleront la couleur de fond d’un bon lait de Vache. Il en est de même du lait de femme, c'est pourquoi les enfants alimentés à ces deux laits:ont, à l’état de parfaite santé, les selles couleur bou- ton d'or. Il n'en est pas ainsi du lait de Chèvre : tous les produits de ce lait sont d'un blanc absolu, assez semblable à celui du saindoux ou du suif. Pour corriger cet aspect peu engageant, il est même d'usage de colorer le beurre de Chèvre avec du jus de carotte. Or la garde-robe des enfants élevés au lait de Chèvre, de ceux qui sont parfaitement bien portants, subit cette influence colorante : elle se rapproche de l'aspect de la farine de maïs (D' Boissard). Cette teinte effraie souvent les meres de famille qui croient voir en cela une menace de lienterie (suralimentation) bien que l'odeur fétide n'y soit pas. Ces faits ont été rigoureusement observés par nous sur de jeunes chevreaux dont les fèces prenaient la couleur blanc mastic, jaune bouton d'or ou brun foncé. selon que nous leur faisions absorber du lait de Chèvre, du lait de Vache ou du bouillon gras. Il n'est pas sans intérêt d'ajouter qu'avec le lait de Vache, la diarrhée ne manquait jamais de survenir dans les débuts du régime pour toutefois se calmer dans la suite quand l'animal commençait à s'habi- tuer à l'aliment, ce qui nous parait néanmoins assez carac- téristique surtout que nous expérimentions sur une espèce d'animaux assez rustique pour digérer du son à l'âge de quinze jours. Il faudrait donc admettre que l'enfant a l'esto- mac moins délicat que le chevreau, si lon voulait soutenir que le lait de Vache vaut mieux pour lui, ce qui nous parai- trait d’ailleurs inadmissible. La vérité, c'est qu'en apparence tous les laits peuvent plus ou moins, non pas convenir, mais servir à l'alimentation d'un enfant; cela dépend des condi- tions chimiques de son suc gastrique. On à vu un nourrisson POFRES UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 14 ne digérant pas le lait de sa mère, digérer du lait de Vache à la seule condition d'accompagner ce liquide d’une cuillerée d'huile de foie de Morue (1). Ce qui importe et ce que nous cherchons simplement à établir, c'est la nature du lait qui convient le mieux à l'être humain au point de vue de ses facultés digestives, de son hygiène et de son développement physique ; et tous les documents que nous avons recueillis sur la Chèvre nous font pencher en faveur de son lait. III. — La santé de la Chèvre à Paris. Plusieurs personnes semblent douter que la Chèvre habi- tuée à vivre dans les régions élevées où l'air atteint son maximum de pureté, puisse prospérer dans l'ambiance délé- tère de la grande ville, et elles ont pensé que la stabulation devait fatalement l'anémier et la prédisposer, comme la Vache, à prendre la tuberculose. La réponse est simple et facile. Ne voyons-nous pas des Chevres parfaitement saines et en portantes même dans les grandes villes? N'en existe-t-il pas plus de 10 000 en sta- bulation constante au Mont d'Or Lyonnais? Nous voulons bien admettre que ce sont là des bêtes acclimatées et qu'il ne pourrait peut-être pas en être de même d'animaux recueillis sur le sommet des Alpes et transportés directe- ment à Paris pour y vivre en hiver constamment enfermés. Cependant l'expérience en a été faite trois fois de suite, à des époques différentes de l'année, et l'acclimatation s'est faite parfaitement. 11 est certain que sur des troupeaux de 100 bêtes, il faut bien compter sur quelque déchet, mais les causes de mortalité nous ont toujours paru mani- festement étrangères au changement de climat. Quant à la résistance de la Chèvre au régime de Paris, elle ne fait pas de doute; nous possédons des animaux qui ont plus de deux ans d'étable et ne paraissent aucune- ment en souffrir, puisqu'ils sont absolument superbes tout en donnant du lait en abondance. Ceux nés à Paris attei- gnent, grâce aux bons soins dont ils sont entourés, un tel développement et une telle vigueur que nous n'hésiterons (1) D' Porack, de l’Académie de médecine. 12 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION pas à les faire figurer dans des concours. 11 est d’ailleurs illogique d'admettre que la Chèvre, le plus rustique des animaux, ne supporterait pas à Paris les conditions de vie que nous imposons sans difficulté à des êtres moins résis- tants, plus délicats, à nos Chevaux, nos Chiens, etc. On a également avancé que le mauvais air de Paris et le défaut d'exercice devaient condamner fatalement la Chèvre à prendre la tuberculose, comme le fait la Vache. Cette assertion est absolument dénuée de fondement. D'abord, l'air dans Paris n'est pas plus insalubre que celui d’autres agoelomérations et il est prouvé que la Chèvre y prospère à souhait. Pour ce qui est du mouvement, elle n'en est pas privée dans les conditions où nous l'installons, puisque nous ménageons auprès de sa demeure un parcours grillagé où elle peut s'ébattre à volonté; nous agrémentons même ce parcours de rochers qui lincitent à grimper, à user ses onglons et à faire des gambades si elle le désire. Le curé d'une de nos paroisses parisiennes qui souffrait depuis des années de dyspepsie, s'est guéri par l'usage du lait de Ch vre et entretient depuis dix ans, dans un petit enclos, une Chèvre.qui lui donne tout le lait nécessaire à sa consommation depuis Pâques jusqu'au carème suivant. 11 nest privé de lait que pendant les six semaines d'absti- nence, car la Chèvre tarit à ce moment là pour préparer sa nouvelle mise bas. Si l'on suppose que dans les conditions d'installation que nous indiquons, le régime de la Chèvre est encore trop res- treint pour l'époque où la bête est en gestation, rien n'em- pèche d'envoyer à la campagne aux environs de Paris les animaux taris arrivés aux derniers mois de leur grossesse. On à cru, pendant longtemps, en se basant sur des recherches expérimentales et sur des faits, que la Chèvre est absolument réfractaire à la tuberculose. Le profes- seur Nocard dans une communication à l'Académie de Médecine en 1890, s'exprime comme il suit : « On ne connait » pas de fait de tuberculose chez la Chèvre en dehors des » expériences de laboratoire et dans ce cas, il est très dif- » ficile de rendre tuberculeux les animaux de cette espèce ». Le sang de la Chèvre est bactéricide pour la tuberculose (Berlin et Picq). Des procédés expérimentaux nouveaux ont cependant UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 18 établi que tous les animaux supérieurs devaient être suscep- tibles, à des degrés divers, de contracter Ia terrible maladie, mais il reste acquis à la science que la Chèvre doit être classée parmi les plus rebelles. C'est ainsi que, dans une communication faite au « Journal d'Agriculture pratique » (2 août 1900), M. le docteur H. George cite deux cas de tuberculose caprine relatés par M. Rabieaux, chef des tra- vaux à l'Ecole vétérinaire de Lyon, et signalés par M. No- card à la Société centrale de Médecine vétérinaire. MM. Le- clerc et Deruelle, du service de l'Inspection des viandes à l'abattoir de Perrache (Lyon), ont observé la tuberculose chez la Chèvre une dizaine de fois. En 1899, sur 3000 Chèvres tuées à cet abattoir, cinq ont été saisies pour cause de tuberculose. N'est-ce pas là toutefois une constatation très rassurante en faveur de la Chèvre, qui ne. deviendrait tuberculeuse que dans la proportion de 1,6 (un, six dixièmes) par mille, alors que pour la Vache, dans certains pays, la proportion des sujets tuberculeux, atteindrait et même dépasserait 50 0/0 (1). « Par la découverte de la tuberculine de Koch, on a pu établir que, dans une proportion considérable, des Vaches saines en apparence portaient en elles le germe de la terrible maladie. Dans un certain nombre de mé- tairies on trouva des Vaches suspectes de tuberculose dans la proportion de 80 0/0: (Travaux du D' Rabinowitsch, à Berlin) (2). Nous soulignons bien 50 0/0 et même 80 0/0, c'est-à-dire 500 el 800 par 1000, pour la Vache contre 7,6 par inille pour la Chèvre. M. Bailly, médecin vétérinaire à Kairouan (Tunisie), et propriétaire d'un établissement d'élevage pour les bêtes de boucherie, nous faisait connaître naguère les désastres que cause la tuberculose dans les troupeaux d'espèce bovine de Tunisie. Les 7/10 des Vaches y deviennent tuberculeuses, tandis qu'aucun cas n’a été observé, à sa connaissance, dans les innombrables troupeaux de Chèvres qui alimentent exclusivement en lait les populations tuni- siennes et algériennes. « La tuberculose ne s'observe pas (4) À. Guerrapain. La Tuberculose bovine. L'Acclimatation, numéro du 20 mai 1900. (2) Wiener Tagblalt (Numéro du 23 septembre 1900). 44 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION chez la Chèvre » (Trasbot — Vaccine caprine en Algerie — Acadéinie de Médecine 1900). Cependant la tuberculose ne doit pas toujours être facile à constater, puisque les vété- rinaires eux-mêmes sy trompent souvent. Ainsi, il nous a été rapporté le cas où un vétérinaire très sérieux ayant dé- elaré tuberculeux un poumon de Chèvre, celui-ci examiné par M. le professeur Nocard, a été reconnu simplement atteint de pleurésie ulcéreuse. Malgré ces arguments en faveur du lait de Chèvre, cer- tains esprits prudents à l'excès, proposent soit la cuisson de. ce lait, quitte à en atténuer les vertus vivifiantes, soit la soumission des animaux Caprins à l'épreuve de la tuber- culine. Si cette pratique ne présente réellement aucun dan- ser pour la santé future des animaux en général (nous fai- sons cette réserve parce qu'elle a été faite devant nous par bon nombre de vétérinaires et de médecins) nous ne voyons pas pourquoi on y soustrairait un troupeau appelé à servir à l'alimentation lactée du public. Mais toutes ces précautions nous sembleraient bien mieux justifiées à l'égard des nourrices humaines qui sont autre- ment suspectes de maladies contagieuses que nos belles et bonnes Chèvres de Suisse, de Malte et de Murcie, si saines et si alertes. « Dans un établissement hygiéniquement installé avec des laitières bien choisies, bien nourries et éloignées des « agents habituels de contagion, les dangers de tuberculose « pour la chèvre nous paraissent absolument improbables, « dit M. Reul, professeur à l'Ecole vétérinaire de Bruxel- « les ». (Chasse et pêche, de Bruxelles). Il nest pas sans intérêt pour la cause de rappeler un autre passage de l'article précité de M. le docteur H. George : « La Chèvre passe généralement pour être réfractaire à la « tuberculose. Cette opinion est trop absolue. Cependant la « rareté de cette maladie chez cette espèce animale donne de « l'intérêt aux observations qui y sont relatives. Tel est le « Cas rapporté par M. Schlathoelter, Inspecteur d'abattoir à « Sieghourg, et contrôlé par M. Olt, de l'Institut anatomo- « pathologique de l'Ecole de Hanovre. L'autopsie révéla « deslésions tuberculeuses multiples dans tous les viscères de « la Chèvre expérimentée. Cette Chèvre n'avait jamais été « en contact avec des bêtes bovines; mais elle avait été Z UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 15 « élevée avec du lait de Vache et c’est par là sans doute « qu'elle a été infectée ». Avis aux meres parisiennes qui ne craignent pas de nourrir leurs enfants au lait de Vache. Sans doute beaucoup d’entre elles ont le soin de le faire cuire, de le stériliser en d'autres termes, mais de très, habiles médecins, pensant encore non sans raison, quil faut au jeune enfant qui ne peut vivre que de lait un aliment vivant et absolument com- plet, ordonneront le lait cru en recommandant toutefois de rechercher la pureté de la source; c'est là malheureuse- ment une précaution vaine à Paris. On s'applique depuis quelque temps à répandre dans le public la croyance, rassurante du reste, que le lait ne con- tient le microbe de la tuberculose que lorsque les glandes mammaires de la Vache sont atteintes de cette maladie. En surveillant attentivement le pis de l'animal, on arriverait donc ainsi à échapper au danger tant redouté. Laissons au D' Marfan le soin de répondre à ce sujet : « Bollinger, Nocard et Galtier avancent que le lait de « Vache n'est surement virulent que lorsque le pis est « atteint par la tuberculose ; Nocard affirme que la tubercu- « lose mammaire est rare, Degive et Van Hersten, Bang la « croient assez fréquente. D'autre part, Bang, Csokor, Ernst, « Hirschberger, Koubassof ont trouvé le lait virulent alors « même que les animaux dont il provenait ne présentaient « point de tuberculose mammaire. Il est vrai qu’on s'accorde « à reconnaitre que le diagnostic de la mammite tubercu- « leuse au début est tres difficile. Il importe aussi de noter « que d'après Gaffky, la souillure stercorale des trayons « d’une Vache tuberculeuse peut introduire des bacilles « dans le lait sans qu'il existe de la tuberculose mam- « maire. Quoiqu'il en soit, il reste avéré que le Lait d'une « Vache phtisique peut être virulent. » (Traité de l’Allai- « tement, page 68). D'autre part, puisque, d'apres le Professeur Dieulafoy (1), il est avéré que le pneumocoque, agent de la pneumonie, est transmissible à l'enfant par le lait, n'est-il pas à présumer que, dans le cas de la tuberculose en général et dans celui de la pneumonie tuberculeuse en particulier, le bacille de Koch (1) Traité de Pathologie interne. 16 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION doive se comporter de la même façon que son acolyte le pneumocoque ? IV. — L'alimentation de la Chèvre à Paris. M. Weber, membre de l'Académie de Médecine, dont la mort récente a causé à la science tant de regrets, nous fit un jour, au début de notre campagne en faveur de la Chèvre, cette remarque qu'il se pourrait que le bien-être de cet animal à Paris nécessitât, tout au moins au printemps, la distribution de fourrage vert, même de feuilles et de bour- weons, que les caprins recherchent habituellement avec prédilection. Il ne paraissait possible de satisfaire ce besoin qu'au prix de grands frais que nous hésitions à nous imposer. Néamoins, nous tentâmes l'essai et quelle n'a pas été notre surprise de voir notre troupeau diminuer en lait dès qu'on lui servit de la Luzerne verte et montrer un réel empressement à revenir à son régime sec, à la faveur du- quel nos animaux ont, depuis Comme auparavant, parfaite- ment prospéré. Il en a été de même des feuilles que nos Chèvres ont accueillies avidement pour commencer, mais en les voyant s en lasser dès le second repas, il a bien fallu admettre quil y avait eu là un simple caprice de leur part. Au résumé, les Caprins acceptent bien tous les fourrages dont se contente la Vache, mais donnent la préférence au regain sec et bon,de quelque nature qu'il soit (1). Comme la nourriture exerce une influence considérable sur le goût du lait chez la Chèvre, il nous a semblé que rien ne pouvait ètre supérieur à ce point de vue au regain de Luzerne, Sainfoin, Trefle sec, et enfin à du Son de bonne qualité. Le Mais u'ouve son emploi utile pendant la lactation en ce sens qu'il augmente dans le lait la richesse en phosphates ; aux Maltaises nous donnons de préférence des Fèves pour obtenir un produit abondant. | Pour accentuer l'influence de la nourriture sur le goût du lait chez l'animal en question nous mentionnons le fait inté- ressant que voici : le docteur Prompt, dont nous avons déjà eu occasion de parler à propos de l'intéressant élévage auquel il se livre en Sologne, eut un jour l'attention de (1) La Chèvre mange de 469 plantes. UTILISATION DE LA CHÈVRÉ A PARIS 17 nous envoyer un spécimen du beurre de Chèvre que pro- duisent ses animaux et qu'il utilise à l'exclusion absolue du beurre de Vache qui lui cause une véritable répulsion. Le beurre de Chèvre en question était si fortement aromatisé que nous le croyions arrosé d'essence de Menthe. Le docteur nous détrompa aussitôt en nous déclarant qu'il avait obtenu cet effet en alimentant simplement ses Chèvres pendant plusieurs jours exclusivement avec du Thym et de la Germandrée. V. — Lactation de la Chévre. Nous lisons dans le Compte-rendu officiel du Concours international des animaux reproducteurs (Journal officiel de la République française — 7 septembre 1900) que la puissance productive d'une bonne Vache de Fribourg atteint 2.900 litres par lactation et que celle de nos excellentes petites Vaches bretonnes de la taille de 1 mètre peut s’éle- ver à 2.000 litres. D'autre part, nos incomparables normandes et flamandes dont la hauteur au garrot varie de 130 à 1745 et dont la longueur du corps atteint 2 mètres peuvent pro- duire 4.000 litres de lait en 10 mois, durée de leur lactation. Que le lecteur veuille bien retenir ces chiffres et ce fait que la Chèvre consomme, selon qu'elle est de race suisse ou espagnole, 1/6° ou 1/8° du fourrage nécessaire à une Vache de bonne taille. Or nos Chèvres de Saanen, de Toggen- boure, de Gruyère, du Haut-Valais, etc..…., donnent, quand elles sont bonnes, de 900 à 1.000 litres de lait dans une lac- tation de 10 mois; même la charmante petite Chèvre rouge de Murcie produit facilement, d’après notre expérience, ses 600 litres par an. Il s'en suit que six bonnes Chèvres suisses consommant la même quantité de nourriture et valant ensemble le même prix qu'une Vache de bonne taille rap- porteront de 5.400 à 6.000 litres de lait pendant leur lacta- tion d'un an et que huit petites Chèvres de Murcie ne coùû- tant ensemble que le prix d'achat et l'entretien de cette même Vache donneront à leur propriétaire un produit annuel de environ 4.800 litres de lait. On ne saurait admettre que le public ait négligé jusqu'à ce jour l'exploitation d'un pareil produit. Nous en conve- Bull. Soc, nat. Accl. Fr, 1901, — 2 18 BULLETIN DE LA SOCIETÉ D’'ACCLIMATATION nons, la Chèvre bonne laitière n'est pas aussi commune que l'on voudrait bien le croire et elle a contre elle une très grande irrégularité qui réduit souvent son rendement au 1/3 de ce que l’on était en droit d'attendre. Elle est aussi prodi- sieusement sensible aux influences de la température qui affecte considérablement la lactation. Le froid humide, la neige lui sont très préjudiciables et le moindre coup ou heurt, même une forte émotion déterminent facilement l'avortement de l'animal. Il lui faut, pour produire, des soins attentifs, une nourriture rigoureusement propre et de bonne qualité, un pansage fréquent et la suppression de tous les parasites qui la recherchent beaucoup. C'est, en un mot, un animal qui ne saurait se contenter du régime sommaire imposé à la Vache. Il n'y a pas à son- ger à obtenir de la chèvre la production intensive que l'on peut obtenir de la Vache. La Chèvre ne mange en quelque sorte que du bout des dents, perd toujours du four- rage même avec le meilleur appétit: il est dans sa nature de choisir et, à moins d'y avoir été habituée depuis le plus jeune âge, comme les races suisses, par exemple, elle a horreur des aliments humides et pâteux qui développent si prodigieusement les fonctions mammaires chez la Vache. Il faut compter aussi avec les parturitions difficiles qui cer- taines années, éprouvent fortement le troupeau. Cependant, nous croyons que cet inconvénient grave pourrait être Con- sidérablement conjuré en fournissant à ces animaux en ges- tation, les moyens de se donner beaucoup d'exercice sans aller toutefois jusqu’à la fatigue. En soumettant les bonnes races de Chèvres au régime que nous indiquons, en faisant un choix judicieux d'animaux pour le service spécial de la reproduction, en laissant le bouc acquérir tout son dévelop- pement avant de l'employer à la monte et en reglant son emploi dans une juste mesure, en sélectionnant soigneu- sement les chevreaux et en donnant à ceux qui sont conser- vés du lait à la température de la traite, en abondance sur- tout, pendant les trois premiers mois de leur vie, il ne nous parait pas douteux que l'on obtienne des sujets aussi par- faits, aussi constants dans l'exercice de leur qualité que le sont nos vaches perfectionnées par les méthodes savantes d'amélioration aujourd'hui universellement en usage. La Chèvre en France en est en ce moment au degré d’abâtar- UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 19 dissement et de dégénérescence que l’on observe sur les bovidés de Grèce et des provinces balkaniques. Dans ces pays là la chèvre tient la faveur publique, non seulement comme laitière, mais même comme bête de boucherie. C'est une affaire d'habitude et nous sommes aussi répréhensibles en France d'avoir négligé la branche d'industrie caprine, que nos voisins du Sud-Est de l'Europe le sont de n'avoir pas donné à l'industrie bovine l'attention considérable qu’elle mérite. Pour appuyer encore notre prétention de provoquer par des procédés scientifiques de sélectionnement, de croi- sement et.d’hygiene, l'amélioration des espèces caprines, nous citerons quelques faits qui prouveront clairement combien la faculté productrice de lait est grande chez la Chevre. | Des Chevres taries depuis 6 mois et même un an, ont recommencé à donner, dans le premier cas, 3 litres de lait, dans le second, 1 litre 1/2 par jour, par le simple effet d’un massage pratiqué avec intelligence et persévérance pendant plusieurs jours sur les mamelles et dans la région pelvienne. Des Chèvres ayant avorté dans le dernier mois de leur œrossesse et atteintes d'agalactie absolue apres ce part anormal, ont manifesté une montée de lait quand est arrivé le moment où la mise-bas aurait dû avoir lieu et la quantité de lait obtenu a augmenté progressivement jusqu'à 4 litres par jour. La lactation n'en a pas moins duré plus d'un an sans interruption. Une jeune Chèvre primipare et élevée selon notre système, a mis bas à 11 mois, ayant pris le Bouc à 6 mois, tellement elle était développée à cet âge. La parturition fut laborieuse parce que les fœtus, à terme cependant, étaient morts et décomposés. La bète ne put se remettre qu'après 4 mois de maladie causée par les intoxications qui furent la consé- quence de la désinfection insuffisante des voies génitales. Enfin, malgré toutes ces tribulations et l'état d'épuisement considérable dans lequel se trouvait cette Chevre, elle se mit à donner du lait et aujourd'hui qu'elle est radicalement œuérie et en état d'embonpoint, elle donne, 8 mois après sa mise bas, 3 litres de lait par jour. Si l’on remarque qu'une primipare donne généralement la moitié du produit auquel elle peut atteindre après sa 3° portée, on peut compter que # 20 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION « Lisbeth » donnera certainement 6 litres de lait par jour à l'âge de 3 ans. Autre exemple. — Une Chèvre de Malte nous fut envoyée de Sousse (Tunisie) au mois de mars dernier. Elle était déjà en lactation avancée, car elle devait, suivant l'habitude des Chèvres de cette race, avoir mis bas en septembre pré- cédent. La traversée qu'elle fit. pour arriver à Marseille fut des plus pénibles, la mer était démontée et le trajet dura un temps double du temps ordinairement nécessaire. Ayant eu le mal de mer et n'ayant pu ni se nourrir ni s'abreuver pen- dant tout le voyage en raison de son abattement et de sa fatigue, elle arriva à Paris totalement tarie. Mais, deux jours après, le lait revint et se serait sans doute maintenu si une nouvelle grossesse n'était intervenue. Comme dernier exemple, nous citerons celui de notre très remarquable « Frenélé », Chèvre d'origine suisse, à poil ras et de taille moyenne, 75 centimètres à peine au garrot, qui a donné 8 litres de lait par jour le premier mois après sa mise-bas, qui eut lieu en octobre 1899. En août 1900, elle donnait encore 3 litres et il a fallu la tarir de force en sep- tembre pour lui permettre de se reposer avant sa nouvelle mise-bas attendue pour octobre. « Frenélé » aura sans doute donné beaucoup plus de 1000 litres pendant ses 10 mois de lactation. Elle ne parait nullement fatiguée; elle a le poil très brillant, l'œil fort bon et est en bon état d'engraissement. Ce qui augmente encore l'avantage de posséder de bonnes races laitières, c'est que celles-ci, douées généralement d'un très bon appétit, engraissent des qu'il leur arrive de cesser. de produire, cas qui ne se présente guère que lorsque la copulation n'a pas réussi ou que l'animal a tari sans espoir de voir revenir le lait, par suite de maladie. Elles atteignent dans ce cas le développement adipeux de nos plus beaux Moutons de boucherie et leur chair alors supporte avanta- seusement la comparaison avec celle de nos meilleures Brebis. En Suisse, en Espagne et même dans le Midi de la France, où la Chèvre est en faveur, sa chair est très prisée. Les Arabes, les Maltais et les Orientaux la préfèrent de beaucoup à celle du Mouton. Dans Paris même, on consomme plus de Chèvre qu'on ne le soupconnerait, sous l'étiquette de côtelettes et de gigots d'agneaux. Les personnes qui pré- tendent que cette viande manque de succulence n'ont jamais UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 21 mangé que des Chèvres sacrifiées à l’âge où elles ne peuvent plus produire. Une vieille Chèvre vaut une vieille Brebis, elle ne donnera jamais un morceau de choix en boucherie. L'excessive ardeur du Bouc, qui satisfait 100 Chèvres, est une indication du tempérament et de la puissance prolifique de l'espèce. Nous estimons que plus la Chèvre produit, mieux elle se porte. Il arrive, sans doute, un moment où elle a besoin de se reposer; elle refuse alors les avances du mâle, serait-il « Don Juan » lui-même, notre plus séduisant Bouc de Murcie. En Suisse et dans les Alpes, on assure les mises- bas pour l'époque printanière, afin d'offrir aux jeunes ani- maux de la verdure, qui favorise beaucoup leur développe- ment, surtout quand on a l'intention de les sevrer de bonne heure. C’est là une simple disposition économique, comme celle appliquée en Algérie, qui veut les parturitions principa- lement en automne, afin que l'excès des chaleurs ne vienne pas trop tôt tarir les laitières et parce que la verdure sous ce climat existe surtout aux environs de décembre et de janvier. Au demeurant, les Chèvres mettent bas en toute saison, aussi bien les Alpines que les autres; la preuve encore, prise en dehors de nos procédés personnels, c'est que les Chèvres du troupeau que nous venons d'acheter au Village suisse sont en majorité pleines et deux d’entre elles ont déja mis bas dans le courant de septembre. Ce fait répond aux craintes qui nous ont été formulées sur la ques- tion de savoir si l’on peut.avoir du lait de Chevre en hiver. Pour les personnes qui nous taxeraient d'exagération dans l'appréciation de la valeur productive de la Chèvre, nous ne pouvons mieux faire que de les prier de consulter, au Bul- letin de la Socièté d’'Acclimatalion de France (mars 1834, page 297), la communication faite à ce sujet par M. le géné- ral du Martray. Il signale à la Societé que la moyenne de Ja production annuelle d'une Chèvre du Haut-Valais est de 900 litres de lait. Un autre témoignage nous est donné par M. Borel, fonctionnaire du Crédit foncier de Neufchâtel, dans l'extrait de lettre ci-après : « On parle ici couramment de 4 à 5 litres de lait par jour « pour les bonnes laitières. Ma Chèvre de Saanen qui a mis @ bas en janvier donne de 3 à 4 litres seulement. Elle en « aurait donné davantage si nous avions pu réussir à la faire « tarir, mais la chose n’a pas été possible; il à fallu la traire € Ÿ e) BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION ( « jusqu'au dernier jour et c'est ce qui explique pourquoi elle « ne dépasse pas 4 litres. Ma seconde Saanen donne encore « un litre de lait. Elle n'a pas fait de cabris depuis 2 ans 1/2 « et elle les fera pour la seconde fois au commencement de « juin ». La race de Malte ne parait pas inférieure comme qualité à la Chèvre suisse, puisque nous tenons d'un vétérinaire de Sousse que la Maltaise donne en moyenne 3 litres de lait par jour et que les quantités extrêmes sont de 1 à 5 litres. Il y a ensuite l'attestation excessivement favorable donnée pour les Chèvres du Mont-d'Or par M. le vétérinaire Bennion dans son livre « La Chèvre ». Au moment de livrer la présente note à l'impression, nous recevons d'Angleterre un extrait du Ladies Field, numéro de septembre publié à Londres, qui signale à l'attention du public les beaux résultats obtenus de son troupeau de Chèvres Toggenbourg par M. Bryan Hooks, éleveur de Chèvres à Berfolds Church. D'après cette communication, M. Hooks a remporté plusieurs prix aux expositions caprines organisées par la Société anglaise constituée pour le déve- loppement de l'industrie chevrière dans les Iles britanniques. Cette industrie parait y être déjà florissante, en raison des résultats produits par le croisement anglo-nubien. Cepen- dant les récompenses décernées à M. Hooks indiqueraient que le sélectionnement des races suisses constituerait une méthode supérieure à toute autre pour l'amélioration de l'espèce caprine. Notre expérience, comme celle de M. Hooks, établit que la question d’acclimatation n'est pas si redoutable que le pensaient naguère les gens de Darmstadt, dont les importa- tions de Chèvres suisses en leur pays ont donné lieu à de nombreux mécomptes. Il est vrai qu'ils se sont ravisés l’année suivante et que les produits des Chèvres introduites dans le pays se sont admirablement comportés (Dettweiler à Darmstadt). VI. — Etudes sur les propriétés hygiéniques du lait de Chèvre. Recherches chimiques. Dans l'étude consciencieuse à laquelle nous nous sommes livré des œuvres des principaux auteurs français, suisses et UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 23 allemands qui ont traité de la Chèvre, nous avons remarqué des divergences étonnantes dans la détermination des élé- ments chimiques qui composent le lait de cet animal. Nous avons voulu nous rendre compte par nous-même des causes de ces différences et voici, au tableau ci-contre, les analyses que nous avons obtenues de dix échantillons de lait provenant de Chèvres sélectionnées. Il ressort de ces analyses que la composition du lait de Chèvre varie considérablement selon les races et que les laits provenant des variétés alpines présentent une grande similitude avec le lait de Femme (1). Les laits des Chèvres de Malte et de Murcie sont d'une grande richesse. Nous avons donc dans l'espèce caprine trois catégories distinctes : les beurrières (Pyrénées, Malte, Murcie), les fromagères (Corse, Poitou, Corrèze, etc.) et enfin celles qui nous intéressent le plus par leur aptitude spéciale à l'allaitement des enfants : les Alpines françaises, les Saanen, les Gruyère, les Toggen- bourg et en général toutes les races suisses VII. — Recherches cliniques. Pour vérifier la valeur de nos affirmations en ce qui con- cerne la digestibilité du lait de Chèvre, des expériences ont été faites avec plein succès dans plusieurs hôpitaux de Paris, et M. le D" Boissard, publiant dans le Journal des Praticiens, numéro du 20 mai 1900, les résultats qu'il à obtenus à l'hôpital Tenon, s'exprime comme il suit : « L'usage du lait de Chèvre pour l'alimentation des nou- « veau-nés est loin d'être une chose nouvelle; après l’allai- « tement maternel, c'est le mode d'alimentation artificielle « le plus ancien et le plus répandu, et l'on sait la place que « tenait autrefois l'élevage de la Chèvre, qui a été un des « premiers animaux domestiques. = (1) Lait de femme. Composition par litre.-Lait de chèvre. Densité 1032 1027 à 1033 Extrait sec 124 110 à 146,50 Beurre 42 24 à 45 Caséine 19 à 22 22,70 à 36,60 Lactose anhydre 50 à 52 41,50 à 55,60 Matières minérales 1,80 6 à 8,10 F. Baucher, directeur du Laboratoire de la Maison Pelliot et Hofman. — Chimie du lait — Tableau III — 1901. purour 404 £ 9p U01} V'I CC COST G°re 6 « “6 9 °6E GO Far CSL G°168 D u —C Ha C*OEOT apNou HLLIV'HL AINYASNUH SLA O9 | FATANHIG HL'IVN 'ITNIS NO « 29 9€ 0€ “9Y C8 ‘y « e S « 4 OYY «°GE0r AMAHN 9 oN a AA! «C°T 77 co FL ‘9% ‘pè “EG ‘9 “086 ‘007 ‘L&OT 91J9aN0w U01N)0D) HSSINS e SANTA 1er emIe °:'AID 99 eu9304d049e7 RUE EI “aUI9589 PS e URE qe] 9p a49ns Eros Mae “auunsg Een *‘‘enbiuefuo aijued M. Baucher et Dumonth 9-00 AI 0,9 195 70 0,90 BTS npisay ......: COCOON a M s par M. Weber.membre de l'Acad ifiée té faites par eTrI s ont 6 se anus, et v de Médecine. (1) Ces analy “himistes coï a Le UTILISATION DE LA CHÈVRE À PARIS 25 « C’est inimaginable combien notre époque, qui passe pour une époque d'indépendance et de libre examen, est sensible à l’'ostracisme prononcé par une voix autorisée. Il semble difficile aujourd'hui de ne pas accepter comme d'indiscutables vérités des formules tombées de la bouche de certains oracles; 11 y a comme une religion scientifique d'État. « En 1880, c'est-à-dire il y a 20 ans, Tarnier adoptant les formules de ses prédécesseurs, affirmait que le lait de Chèvre ne convenait pas aux nouveau-nés; employé pur ou coupé, il n’en a obtenu de bons résultats ni dans l'un ni dans l’autre cas; du coup l'emploi du lait de chèvre était rejeté de l'alimentation des nouveau-nés; pour notre part, nous pensons qu'il y a lieu de revenir sur ce jugement qui n’a pu être porté par un auteur de bonne foi et un observateur de la valeur de Tarnier, qu'en raison des conditions défectueuses de l'expérimentation. D'où pro- venait le lait de Chèvre employé? Quelles étaient les con- ditions dans lesquelles se faisait la traite des Chèvres? On conn it actuellement l'importance capitale de ces questions, dont la solution peut expliquer les succès qu'on est en droit d'attendre aujourd'hui de l'usage du lait de Chèvre pour l'alimentation des nouveau-nés. « Il est incontestable qu'il existe encore actuellement des préventions contre l'emploi du lait de Chèvre, mais nous pensons qu'elles disparaitront le jour où une étude cons- ciencieuse sur cette question sera présentée au Corps médical ». Plus loin nous lisons : « Le lait de Chèvre que nous avons employé était donné soit dans le service, c'est-à-dire à des tout nouveau-nés, soit à notre consultation externe des nourrissons, c'est-à- dire à des enfants âgés de quelques mois; chez les pre- miers comme chez les seconds, le lait donné non coupé était bien supporté; outre l'augmentation du poids, les garde-robes ne présenterent pas d'odeur. Deux fois nous avons donné du lait de Chèvre à des enfants syphilitiques que ne pouvaient alimenter leurs mères et nous pensons qu'en pareil cas l'usage du lait de Chèvre pourra rendre des services. Actuellement, nous pouvons affirmer que 26 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION « l'emploi du lait de Chèvre sera un adjuvant précieux pour « l'alimentation des nouveau-nés. » A l'hôpital Trousseau, le D' Lesage nous a déclaré textuel- lement : « À la pesée des nourrissons de mon service, j'ai obtenu avec l'allaitement au lait de Chévre des courbes iden- tiques à celles obtenues avec l'allaitement au sein. ». VIII. — Recherches expérimentales. De son côté, M. le D'Barbellion s’est livré à des recherches in vitro fort curieuses, desquelles se dégagent les constata- tions suivantes : 1° Le caiïllot du lait de Vache forme un bloc. compact, dense, adhérent, se divisant par l'agitation en grumeaux peu solubles ; 2° Le caillot du lait de Chèvre forme de très petits flocons légers, mous, tres friables et très solubles, comme ceux du lait de Femme et du lait d'Anesse; 9° Le caillot du lait de Femme et du lait de Chèvre après agitation se précipite très lentement et incomplétement, tandis que le caïillot du lait de Vache se précipite tres rapi- dement et complètement; 4° Soumis à l'action de la gastérine, le lait de Femme, le lait d’Anesse et le lait de Chèvre ont été digérés complète- ment en 20 heures, tandis que la digestion du lait de Vache était tres peu avancée après 60 heures; 9° La digestibilité du lait de Chevre est bien plus grande que celle du lait de Vache: 6° Le lait de Chèvres sélectionnées est celui qui se rap- proche le plus du lait de Femme par sa composition et par sa digestibilité. « Accessoirement, il nous est apparu, ajoute-t-il dans « le compte rendu de ses expériences, que d'une manière « générale, la digestibilité du lait cru est plus grande que « celle du lait bouilli ou stérilisé et ceci nous a montré que « l’on pourrait peut-être dans certains cas, toutes précau- « tions d'asepsie observées, se servir du lait de Chevre cru, « puisque cet animal est, Comme on le sait, un des plus « réfractaires à la tuberculose ». UTILISATION DE LA CHÈVRE A PARIS 27 + * *# Nous espérons que-le lecteur qui aura bien voulu nous suivre dans cette étude un peu longue peut-être, mais cepen- dant encore incomplète, de la Chèvre et de son lait, ne con- servera aucune prévention contre cet animal. Tout nous porte à penser que nous parviendrons, et ce sera la récom- pense de nos peines, à entrainer l'opinion en faveur d'une nouvelle industrie parisienne que nous croyons appelée à rendre des services considérables au point de vue écono- mique, hygiénique et même humanitaire. | Dans notre prochain article sur la Chèvre, nous nous pro- posons de traiter la question au point de vue spécial de la description des caracteres propres à chaque race et des résultats obtenus par le croisement des races suisses avec les races d'Espagne et de Malte. 28 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION L'HOVENIA A FRUIT DOUX HÆovenia dulcis (THUNBERG) par D. CLOS Correspondant de l’Institut, Directeur du Jardin des Plantes de Toulouse (1) J'ai déjà eu l'honneur d'expédier à la Société d’Acclima- tation, pour être réparties entre ses Membres, les jolies baies rouges et globuleuses d'un petit arbre de l'Ecole de Botanique de Toulouse, le Jujubier de Chine (Zizyphus sinensis Lamk.), proche parent du Jujubier commun (Zizy- phus vulgaris Lamk.). C'est encore d'un autre arbre de la famille des Rhamnées ou Nerpruns, comme les précédents, que je viens leur offrir, non pas tant les fruits, petits, globuleux, secs, uni- quement utiles pour la reproduction, que leurs supports ou pédoncules comestibles qui, à la fructification, s'étalent horizontalement, deviennent très amplifiés, charnus et bruns, le goût de leur chair se rapprochant de celui de cer- taines poires (2). L'arbre atteint de 5 à 7 metres de hauteur, et le tronc noirätre à écorce fendillée du pied de notre Ecole de Bota- nique a 0%55 de pourtour à sa base. Ses branches étalées portent de grandes feuilles alternes pétiolées avec de tres petites stipules, ovales, aiguës, tres finement dentées, molles au toucher, caduques, et forment une large tête. Le pied qui y figure depuis peu d'années s'est couvert pour la première fois de panicules de fleurs blanches, (3) d'une odeur agréable et constamment visitées par des myriades d'Abeilles. Les corolles accompagnées d'un petit calice, ont cinq pétales onguiculés, obovés et convolutés: elles entourent autant d'étamines et un pistil à 3 loges uniovulées, et 3 styles plongés dans un disque poilu. Les fruits, portés sur des pédi- celles grèles sont indéhiscents et les graines comprimées. (1) Communication faite en séance générale le 14 décembre 1900. (2) On sait que la pomme dite d'Acajou est le pédoncule énormément hypertrophié et devenu charnu comestible de l’Anacardier d'Occident, de la famille des Térébinthacées. (3) Un commencement de floraison, mais incomplète, avait eu lieu l'an passé. L'HOVENIA À FRUIT DOUX 29 L'Hovenia dulcis fut dénommé et décrit pour la première fois par un élève de Linné, Thunberg, qui, dans sa Flore du Japon publiée en 1784, le consacre à la mémoire de David Hoven, commissaire hollandais au Japon. Le Bon Jardinier le dit d'orangerie. Cependant il figurait en 1877 dans l'Arborelum segrezianuwin de Lavallée; à Tou- Jouse il a toujours supporté les hivers les plus rigoureux sans en souffrir et le Dictionnaire d'Horticullure de Nichol- son déclare aussi qu'il peut passer l'hiver à une exposition abritée et à l'aide d'une protection, ajoutant qu'ilse plaît en terre de bruyère et qu'on le me par boutures dans du sable et sous cloche. Cet arbre à un peu le port d’un Tilleul, et son faux fruit passe au Japon pour dissiper l'ivresse produite par une sorte de bière dite Saké, préparée avec du Riz fermenté. Par l'élégance de son port, ses belles panicules florales, ses propriétés mellifères et les singuliers renflements comes- tibles de ses pédoncules à fruits, l'Æovenia qui semble s'accommoder de notre climat, comme tant d’autres arbres du Japon, mérite de prendre place dans nos cultures; il est d’ailleurs signalé comme croissant aussi en Chine et dans l'Inde septentrionale. Enfin un dernier fait prouve sa rusti- cité : durant de longues années, confiné dans nos serres, il y restait chétif et à l'état d’arbuste, comme le fit, à sa venue le Paulownia au Museum; mis en pleine terre, il y a cinq ou six ans, il a fait merveille. 80 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION EXTRAITS ET ANALYSES OBSERVATIONS SUR LES MIGRATIONS DES PALMIPÈDES ET ÉCHASSIERS Au moment de la migration vers le Nord, les Palmipèdes et les Echassiers dé toutes sortes se réunissent, parait-il, sur le bord et dans les marécages du Yang-Tsé-Kiang, remontent la côte et gagnent la Corée par le travers du Golfe de Petchili, suivent les bords de la mer du Japon, et gagnent les régions amouriennes et le nord de la Sibérie, par la vallée de Souifoun et de l'Oussouri. Je fus en effet témoin d'un phénomène vraiment extraordinaire, auquel je n'avais jamais assisté dans ma vie d’explorateur. Dès la pointe du jour, des bandes d'Oiseaux, de Palmipèdes surtout, s’avancent vers le Nord avec des rapidités qui varient suivant les espèces, forment de véritables taches dans le ciel, et les vols se suc- cèdent si rapidement et si nombreux qu'on croit rêver. Si la nuit est claire, on entend des cris d'Oies, de Cygnes, de Canards et d'autres espèces qui glissent dans l’air à des hauteurs variables, rasant souvent le sol et suivant le cours de la rivière. Tous les habitants de la région se livrent à cette époque à de véri- tables hécatombes de gibier ; des escouades de soldats chasseurs y sont même envoyées..Il s'est formé des sortes d'associations de chas- seurs dans les villages, de façon à préparer le gibier ou à le conserver en glacières. C’est par charretées qu'on transporte le gibier, et j'ai vu plusieurs chasseurs qui n'ayant tué qu'une centaine d'Oies dans la journée (car les Canards et les autres espèces ne comptent pas) consi- déraient la chasse comme bien mauvaise. Il se produit à cette époque, presque simultanément, deux courants de migration; les oiseaux qui se rendent dans l'extrême nord passent les premiers; ceux qui restent dans la région viennent ensuite et on voit apparaitre successivement les Oies, les Cygnes, les Canards, puis les Echassiers de toutes sortes; enfin les Passereaux, formant comme l’arrière-garde de ce monde de volatiles du Nord (1). CHAFFANJON. LA CULTURE DU CAFÉ, DU COTON, Du CAOUTCHOUC ET DU THÉ A MADAGASCAR. On cultive le Café à Madagascar depuis nombre d'années. Il existe des caféières très belles, quoique abandonnées à elles-mêmes et fort mal soignées, dont l’âge varie de six à quarante ans. Il est bien clair que les régions où existent d'aussi vieilles plantations sont propices à la culture de cette plante précieuse. On en trouve trois espèces : l'Arabica, le plus répandu, le Bourbon et le Liberia. Cette dernière espèce, de qualité habituellement inférieure aux précédentes, est cultivée sur la côte Est avec un plein succès et sa qualité est, à Madagascar, supé- (1) CHarranJoN. — Lettre adressée de Vladivostok, le 4/10 novembre 1899, à M. le Ministre de l’Instruction publique. (Bulletin du Museum, n° 3, 1900). EXTRAITS ET ANALYSES 311: rieure à ce qu'elle est partout ailleurs. Ce produit, encore peu impor- tant, se consomme sur place. Mais cette culture se répand beaucoup et elle est appelée à un grand avenir. Le succès des diverses espèces de café paraît donc assuré à Mada- gascar, à la seule condition de choisir les terrains propices. Des plan- teurs ont eu cependant des mécomptes, notamment dans le Betsiléo, où un grand nombre de Cañféiers ont été gelés. Cet accident prouve qu'il y a une réelle imprudence à faire des essais de ce genre dans cer- taines parties trop froides du haut plateau. Le Gouvernement local fait faire en ce moment, dans les environs de Tananarive et en divers points, des plantations de coton à titre d'essai. Cette mesure est excellente; si cet arbuste, comme beaucoup le pré- tendent, réussissait en Imérina, ce serait un aliment nouveau, et non des moins importants, à la colonisation. On va également faire l'essai, dans différentes localités et à diverses altitudes, d’un arbre à caoutchouc, l’Hevea brasiliensis, dont les graines ont été envoyées de la Guyane. On a fait, du reste, plusieurs tentatives de ce genre. Des colons ont planté divers arbres à caoutchouc, notam- ment le Ceara. On prépare également des plantations de Thé dans les environs de Tananarive. Là, le succès paraît assuré, car le sol a la même compo- sition, à peu près, que celui qui produit à Ceylan d'excellents Thés. C'est une terre argilo-ferrugineuse, exempte de calcaire. On sait, en effet, que cette plante se trouve très mal de la présence du calcaire dans le sol. Quant à l'altitude et à la température, il m'y a pas à s'en inquiéter. 11 existe dans l'Himalaya, des plantations de Thé à des alti- tudes plus considérables que celle du plateau de l’Imérina, et dans des régions soumises à une température plus basse. D'ailleurs, on a remar- qué que si la quantité du Thé diminue, sa qualité augmente. Il existe déjà dans le Betsiléo, une plantation de Thé contenant 20000 pieds dont les produits ont un arome très fin. LES ABRICOTS DES ENVIRONS DE Damas (TURQUIE D'ASIE) (À); RÉCGOLTE ET PRÉPARATION; COMMERCE AUQUEL ILS DONNENT LIEU. Les abricots sont un des principaux produits de Damas. Les jardins arrosés sont littéralement couverts d’Abricotiers qui fournissent une récolte considérable dans les bonnes années et donnent lieu à de grandes transactions. La récolte commence en général dans les derniers jours de mai et la saison dure un mois et demi. On distingue six espèces d’abricots dont trois variétés désignées sous les noms de Sendiani, Hamoui, Vouzari sont consommées sur place. : Quand ces fruits sont bien mürs, le noyau s'ouvre naturellement lors- qu'on partage le fruit; l’'amande est douce. Depuis l'établissement du chemin de fer, une bonne partie prend la direction de Beyrouth et les prix sur place ont augmenté dans de grandes proportions. (G) Extrait d'un Rapport de M. Barré De Lancy, Drogman, Chancelier du Consulat de France sur le Commerce de la Province de Damas en 1899, publié par le Ministère du Commerce le 10 janvier 1901. a BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Au point de vue commercial, les trois autres qualités sont plus inté- ressantes, car elles servent à faire des confitures, des abricots secs et, de la pâte d'abricots. Ces qualités sont le Chami, le Baladi etle Xlabi. Le chami est confit par les confiseurs de Damas et est expédié dans toute la Syrie, à Smyrne, à Constantinople, en Egypte. Le baladi qui est à chair ferme et se rapproche le plus des abricots de France est séché au soleil jusqu'à ce qu’il soit entièrement sec. Ces abricots secs sont expédiés dans toute la Turquie et en Egypte où ils entrent dans la préparation de beaucoup de plats doux. La troisième qualité Ælabi est la plus ordinaire et la plus abondante c'est celle que produisent les arbres répandus partout dans les jardins ouverts, les champs, sur le bord des routes et qui sert à confectionner la pâte d’abricots qui est une spécialité de Damas et s’exporte dans toute la Turquie. La pâte d’abricots appelée en arabe Qamar eddine (la pleine lune de la religion), se fait en pressant les abricots dans un tamis. Le jus recueilli qui est très épais, est élalé sur des planches enduites d'huile et séché au soleil. Ces planches ont toutes la même dimension pour obtenir des pièces uniformes. Ce sont des négociants de la ville qui en général les louent aux villageois au moment de la récolte. La pièce est longue environ d'un mètre 50 sur 0“50 et pèse à peu près un rotol, soit 2 kilog. 564. La récolte des abricots en 1899 a été supérieure aux deux années précédentes, mais les prix se sont maintenus assez élevés : pour les qualités de consommation, par suite de l'exportation à Beyrouth, et pour les autres par suite de l’accaparement d’une énorme quantité par des Français venus pendant la saison pour prendre la pulpe des abri- cots. Pendant toute la récolte, ces industriels ont traité une moyenne de 9 à 10 tonnes d’abricots par jour, — le maximum a été 13 tonnes, — qu'ils conservaient dans des boîtes confectionnées en Krance et qu'un ferblantier venu avec eux soudait. La quantité d’abricots offerts dépassant leur provision de boîtes, ils tentèrent d'en faire fabriquer dans le pays, mais leur tentative ne fut pas très heureuse, beaucoup des récipients ne résistèrent pas. Malgré tout, leur campagne fut bril- lante. Le prix moyen du kantar, 100 rotols (256 kilog.) fut de 100 piastres, (20 fr. — 114 piastres). La quantité d’abricots séchés a été plus grande qu’en 1898, elle a atteint 600 kantars. Les prix ont varié de 850 à 1,500 piastres le kantar. Il a été expédié à destination de la Syrie, de la Turquie et de l'Egypte environ treize cents caisses de 90 à 100 kilog. chacune représentant une valeur de 110,000 fr. Malgré la quantité considérable d’abricot klabi achetés par nos com- patriotes, on a fait néanmoins en 1899, plus de päte d'abricots que l’année précédente. On evalue le nombre des pièces à plus d’un million. Les prix ont varié de 3 piastres 1/2 à 4 piastres 1/2. 1,327 tonnes ont été expédiées de Damas à Beyrouth à destination de l'Egypte, de la Turquie, de l'Allemagne. L'exportation pour l'Allemagne a été moindre que les autres années, elle se serait élevée à environ mille caisses de 100 kilog. chacune. On a naturellement récolté plus de noyaux que l’année dernière. Ces noyaux, cinq mille sacs de 100 kilog. chacun ont été expédiés pres- qu’en totalité à Marseille, Trieste et en Allemagne. Les prix ont varié de 4 piastres à 43/4 piastres, le kilog., ce qui donne le chiffre de 400 000 fr. En résumé, tout ce qui précède démontre l'importance du commerce des abricots à Damas et la place qu'occupe dans ce pays la culture de l’Abricotier. Librairie et Imprimerie horticoles, 84 bis, rue de Grenelle, Paris. BULLETIN nr, LA Re, GÉTÉ NATIONALE D'ACGLIMATATION DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) AAA 48° ANNÉE re FÉVRIER 1901 — Î SOMMAIRE OMTEND'ORFEUILLEL:—;LSa nocuité du Moineau...11......1..4.... 44e UE 33 CE CÉZARD. — Educations de Bombyciens séricigènes faites en 1900, à Velaite-en- ; Haye, près Nancy (Meurthe-et-Moselle).........:....umtumti. Lu 31 OLIS DUVAL .. — Contribution à l’histoire de la culture de la Vigne D ROrne ATEN 42 ce du 7 janvier 1901 (Ze SA RL OT RE SNS ET ES PAP En TEL APS NN 52 ce du 4 février 1901 — Un ele Le LME TEE RER 53 ce extraordinaire du 25 juin 1900 (ZIe Section. — Ornithologié)............,............... 54 ince du 14 janvier 1901 (ZI° Section. — A0 ALLO LO QUE) LR RSR ESS RIT IEEE Ste A re AE RACE A 55 ince du 11 février 1991 — SR RE RATE TE RER ASE LRU PRE ARR PH56 ce duP2tonviento0l (Ve Section. — Botanique)... 4... ME Spies Extraits el Analyses +. A AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue He Tille. — PARIS Le Bulletin paraît tous lés mois. ‘à REVUE DES CULTURES COLOMALES | _et des Antilles à l’Union coloniale française ; Président de la Section coloniale à la Société nationale d'Acclimatation dé France. : Re Créée sous les auspices de l’Union coloniale française, cette publication a pour but de faire Q A - 2 “ . Mieux connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales; de vulgariser introduction des meilleures * dans les colonies les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l’i variétés des plantes françaises actuellement cultivées et l’acclimatation de plantes nouvelles. La Revue des Cultures colcniales paraît le 5 et le 20 de chaque mois. 4 tu France. 48 francs. — Recouvré à domicile. 48 fr. 50 NNEMENTS : Un h \ : : à ABONNEMENTS : UN AN { Colonies et Union Postale 20 fr. Pour les abonnements et annonces, s'adresser 44, rue de Ja Chaussée d’Antin, Paris. | En vente au siège de la Société d’Acclimatation, 41, rue de Lille. — Paris: ! Les ouvrages suivants de M. 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LA NOCUITÉ DU MOINEAU (1). par le comte d’Orfeuille. Dans la séance du Conseil général de la Seine du 26 dé- cembre 1900 il a été présenté une proposition relative à la destruction des Moineaux francs. La discussion en a été assez intéressante et a démontré quels ravages ces oiseaux font dans la banlieue de Paris. Déjà, en 1846, d'Orbigny avait constaté cet état de chose et, dans son Dictionnaire d'Histoire Naturelle, il rappelait même que plusieurs pétitions avaient été adressées au Con- seil-général de la Seine. Qu'on veuille bien remarquer qu'il y a de cela cinquante-quatre ans! On a depuis fait beaucoup de politique, mais les Moineaux sont demeurés parfaitement tranquilles et tout à leur besogne. L'auteur de la proposition actuelle, M. Carmignac, avait eu la précaution de se munir de l'opinion d'un certain nombre de zoologistes favorables à sa thèse. C'est tout d'abord d'Orbieny qui accuse les moineaux de détruire la plupart du temps pour le plaisir de détruire. C’est Buffon qui, longtemps auparavant, après avoir rappelé avec mélancolie qu'un couple de Moineaux dévore vingt litres de blé par an et se nourrit du meilleur de notre grain, exprimait le désir qu'on trouvät quelque moyen de les dé- truire. C'est Bosc qui, dans son Cours d'Agriculture, éva- lue à deux millions d’hectolitres la consommation de grain que font les Moineaux en France. Pour être ennemi déclaré du Moineau, M. Carmignac ne se montre pas pour cela injuste et il a eu soin de ne pas ou- blier les défenseurs de ce Passereau, ou du moins ceux qui ont plaidé les circonstances atténuantes. Brehm, par (4) Communication faite à la Section d'Ornithologie, dans la séance du 14 janvier 1901. - Bull, Soc, nat. Accl. Fr. 1901. — 3 34 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION exemple, qui, tout en avouant ses méfaits, rappelle que Frédéric le Grand, après avoir proposé six pfennigs par tête de Moineau, fut obligé d'en racheter d'autres plus cher parce que les chenilles avaient remplacé les Moineaux. Pizetta, dans son Dictionnaire d'Histoire Naturelle, est obligé à son tour d'admettre qu'au printemps les Moineaux nourrissent leurs petits d'insectes, de chenilles et surtout de Hannetons dont ils font une grande consommation. On le voit, s'il a ses détracteurs, le Moineau a trouvé des naturalistes qui ont enregistré ses bienfaits. Cela n'empêche qu'en face de la statistique, il est bien difficile de défendre sa cause, au point de vue de lä destruction des céréales aux environs de Paris. Le passage suivant d'un travail de M. Paul Vincey est tout simplement effrayant : « À considérer l'estimation des ravages pour qui ne con- nait pas tres bien les conditions de la culture de banlieue, il y a lieu d'être tout surpris de lire, par exemple, que : « À Bry-sur-Märne, les moineaux détruisent parfois 25 de la récolte du blé; pour cette mème céréale, la perte, dans certains cas, est de 50 °/,, à Chevilly; à Bagneux ainsi qu'à Clamart, les dégâts avoisineraient en moyennent 33 de la récolte en grains et en fruits; Sceaux mentionne 25‘, de pertes en froment et en fruits; Epinay constate que les ravages sur le Blé peuvent atteindre 50 ‘/, du rendement normal ; Saint-Ouen indique 10; Bondy, 13; Noisy-le-Sec, 15; Romainville, 33 ‘/, de la récolte en Froment, saccagée par les pierrots. Quelques communes ont estimé en argent les ravages du Moineau; c'est ainsi qu'en année normale, on constate les pertes suivantes : à Bonneuil, 5000 fr.: à Chà- tenay, 9 700 francs; à Châtillon-sous-Bagneux, 5 500 francs; à Colombes, 37 666 francs ; à Courbevoie, 20 470 francs. « Tous comptes faits, en année ordinaire, le Moineau franc fait éprouver des pertes aux cultivateurs suburbains que l’on doit certainement estimer comme étant supérieures à 200 000 francs. A côté de ce chiffre combien sont légers dans la balance les services que cet Oiseau peut rendre en qualité d'insectivore. » Après cette lecture personne ne s'étonnera que la propo- sition de M. Carmignac ait été adoptée. Si maintenant on considère à un autre point de vue la LA NOCUITÉ DU MOINEAU e) question de la nocuité du Moineau, on arrivera à conclure qu'il est impossible de ne pas proscrire cet oiseau d'une facon absolue. Mon ami et confrère du Comité ornithologique interna- tional, le baron de Berlepsch n'hésite pas à se prononcer de la manière la plus formelle. Or est-il nécessaire de rappeler que ce savant zoologiste est en même temps un des plus erands protecteurs des oiseaux. C'est lui qui est l'inventeur des nichoirs artificiels au moyen desquels il a obtenu en Thuringe des résultats merveilleux, résultats qui ont été les mêmes partout où son système a été expérimenté. Or, dans son Manuel de Protection des Oiseaux, travail qui devrait être entre les mains de tous les agriculteurs de notre pays, le baron de Berlepsch ne se contente pas de considérer le Passer domesticus, au point de vue des ravages causés aux cultures, il conclut carrément en éta- blissant que, si on veut avoir des oiseaux pour se garantir du fléau des insectes, il faut de toute nécessité détruire les ennemis déclarés des oiseaux qui sont le Chat domestique, la Belette, la Martre, le Putois, la Pie, le Geai, l'Epervier, et surtout deux de nos Moineaux, le Moineau franc et le Moineau friquet (Passer domesticus et Passer montanus). Ecoutez plutôt le naturaliste allemand : « Aux Chats, s'ajoutent encore les Moineaux qui de- viennent même plus nuisibles aux endroits où nous suspen- dons des nichoirs. « Les Moineaux se rendent bien vite maîtres des nichoirs, et quand un autre oiseau les occupe déjà, ils l'en expulsent sans aucun égard. « Qu'il s'agisse d'espèces plus faibles, ils les forcent à coups de bec à déguerpir; à d’autres de plus forte taille, les Etourneaux par exemple, ils rendent le séjour du nichoir insupportable, les dérangent sans cesse et font un tapage infernal. Les espèces se reproduisant dans des trous et bien d’autres se voient plus ou moins dérangées ou chassées par leur vacarme continuel; je considere les Moineaux comme très préjudiciables partout où l’on veut attirer nos Oiseaux utiles. « En m'appuyant sur les observations que j'ai faites dans ma propriété, je voudrais établir le principe suivant : 36 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION « L'augmentation des divers Oiseaux se fait remarquer au fur et à mesure que le nombre des Moineaux va en diminuant. « Depuis une trentaine d'années, feu mon père et moi avons toujours fait une guerre d'extermination aux Moi- neaux. Dans une de nos stations d'essais, où chaque nichoir est occupé par l'espèce que nous désirions attirer, les Moi- neaux ont en général disparu depuis une dizaine d'années. Ailleurs où, depuis environ vingt-cinq ans,le nombre des Oiseaux et la variété de leurs espèces ont constamment subi une augmentation, les Moineaux ont constamment diminué depuis la même époque. » On pourrait peut être nous reprocher de prècher ainsi, avec M. de Berlepsch, la persécution des Moineaux, surtout si on se rappelle les paroles si sages prononcées au troi- sième Congres ornithologique international par le doyen des zoologistes européens, M. le baron de Sélys-Long- champs : « Prenez garde, disait-il, d'anéantir une race d'êtres; vous iriez à l'encontre des lois établies par le Créa- teur, lois que vous ne connaissez pas. » Mais cela n'est pas à craindre pour le Moineau domestique, car certainement la chasse qu'on pourra lui faire ne luttera jamais entière- mentcontre son extrème fécondité. Dans les pays de céréales on pourra bien lui déclarer une guerre sérieuse, mais en d’autres lieux on le laissera certainement en paix et la race n'éprouvera qu'une faible diminution. Sans être prophète, ni nous ni nos successeurs ne verront l'extermination de cet oiseau; aussi n'avons-nous aucun remords en pensant et en disant que l’homme a le droit de se défendre contre un ennemi. ÉDUCATIONS DE BOMBYCIENS SÉRICIGÈNES FAITES EN 1900 A VELAINE-EN-HAYE PRÈS NANCY (MEURTHE-ET-MOSELLE) par Léonce Cezard. ATTACUS ORIZABA WESTW. L'Attacus orizaba, magnifique séricigène du Mexique, offre une grande ressemblance avec l'A. awrola du Brésil, sous le double rapport de la chenille et du papillon. Les cocons, paraît-il, ont été trouvés sur le Frêne et l'Épine-vinette, mais la chenille s'accomode aussi fort bien du Lilas et du Troëne. Elle est d'humeur peu vagabonde et ne quitte presque jamais les branches. Le 12 juin 1900, je reçus 120 œufs qui venaient d'être pondus ; du 20 au 26, j'obtins en tout 96 éclosions. Je plaçai immédiatement les petites chenilles (d'un jaune vif, zébré noir) sur des branches de Frène et de Lilas; voyant qu'elles donnaient la préférence à ce dernier, je les élevai exclusi- vement avec des feuilles de Lilas, poussées sur de vieux bois. Pendant le premier àge, je perdis une trentaine de che- nilles, mais là se borna le déchet. La première mue eut lieu du 6 au 12 juillet, c'est-à-dire une quinzaine de jours après leur naissance. Les petites chenilles sont alors jaune verdâtre avec les tubercules noirs. À partir de ce moment, elles sont très vigoureuses et mangent avec appétit, on peut donc les considérer comme sauvées, réserve faite du chapitre des accidents. La deuxième mue eut lieu du 14 au 17 juillet, la chenille devient vert clair et chaque anneau porte quatre petits tubercules rouges. Du 20 au 23 juillet, troisième mue : le vert de la livrée devient plus bleu; tubercules rouge-orangé; ventre cou- vert de duvet blanc. 38 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Du 25 au 28 juillet, quatriéme mue : livrée verte; mandi- bules bordées de noir: ventre toujours couvert de duvet; les tubercules sont d'une nuance plus claire ; la ligne de sépa- ration du dos et du ventre est vieux rose. Du 31 juillet au 2 août, cinquième et derniere mue arrivée à tout son développement, la chenille est d’un beau vert tendre, sans épines; les incisions des anneaux et les bords du dernier segment offrent une coloration jaune Citron. Chaque anneau porte quatre petits tubercules orangés; la ligne de séparation du dos et du ventre revêt une couleur chair; la chenille mesure de 10 à 12 centime- tres de longueur. Le coconnage commence le 15 août et se termine le 3 septembre : la soie est d'une jolie teinte gris argenté, et les reflets métalliques en sont très curieux. Au point de vue pratique, cette chenille est très robuste et suffisamment polyphage, puisqu'elle vit également bien sur le Lilas, le Frène et le Troëne, réprésentants de la famille des Oléinées. La vitalité de cette espèce me semble remarquable : une chenille, surprise par des Fourmis, fut traînée sur l'espace d'u mètre. Aussitot délivrée, elle s’est installée sur une branche de Lilas et n'a pas paru beaucoup souffrir : deux ou trois jours après, elle accomplissait très bien sa dernière mue. Pour éviter le retour de pareils acci- dents, les parois du baquet d'éducation reçurent un badi- geonnage au carbonyle et les fourmis s'empresserent de déguerpir, sans que l'odeur du goudron parut Iincommoder les Orizaba. Au point de vue purement entomologique, je considère l'A. orizaba comme étroitement apparenté avec les autres séricigenes de l'Amérique centrale et méridionale : A. au- rola, Jacobæ, Lesperus, Lebauni, Spondiæ. Peut-être même ces différents Bombyciens ne constituent- ils qu'une seule et même espèce dont les représentants se différencient par le changement de latitude et de régime ? TELEA POLYPHEMUS. Avec une dizaine de cocons j'obtins 8 éclosions (4 mâles et 4 femelles) du 16 juin au 16 juillet, mais la différence des âges étaitsans doute trop sensible pour permettrela reproduction, ÉDUCATIONS DE BOMBYCIENS SÉRICIGÈNES 39 et il me fut impossible de surprendre un accouplement. Il aurait fallu réunir quatre à cinq douzaines de cocons dans une grande cage et l'exposer à l'air libre dans un bosquet ou dans un massif. ATTAGUS CYNTHIA. (Élevage sur le Lilas). Je ne dirai que quelques mots de cette espece fort répan- due et très polyphage, puisqu'elle réussit également bien sur l'Ailante, le Ricin, le Lilas et même le Figuier. D’après M. Clément, la chenille nourrie exclusivement de Lilas produit une soie rougeàtre moins grise que celle élevée sur l'Ailante. De mon coté, je poursuivais la même expé- : rience et les cocons se sont montrés d'une teinte havane plus ou moins chaude à la première génération; ils sont plus petits que ceux provenant de larves nourries sur l’Aïlante. PLATYSAMIA CEGROPIA. Ponte d'une femelle née le 29 juin et fécondée deux fois : 316 œufs du 30 juin au 11 juillet. Du 19 au 24 juillet j obtins presque autant d'éclosions qu'il y avait d'œufs. Des leur naissance je plaçai les petites chenilles sur des branches coupées de végétaux différents : je pus ainsi remarquer qu'elles refusaient de manger les feuilles de Lilas et d'Erable-Plane, mais qu'en revanche elles s'accomo- daient fort bien du Cerisier. Au premier âge, la petite chenille est d'un noir de jais; elle est tres vagabonde et il faut visiter souvent les envi- rons des bouteilles où des baquets dans lesquels trempent les branches. 24 juillet : un certain nombre de chenilles ont déjà mué : leur livrée reste d'un noir vif, mais elle présente deux rangées de taches dorsales d’un jaune foncé. Cette première mue à été du reste signalée par M. Clément (1). Toutefois j'ai pu assister à la mue d’une petite chenille qui,en quelques secondes à quitté sa première peau d'un noir dejäis et m'est apparue complètement vêtue de la livrée orange caracté- (1) Bulletin de la Société d’Acclimatation, février 1879. A0 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION ristique du troisième âge. Cette chenille a donc sauté la mue intermédiaire. Du reste la livrée des chenilles au troi- sième àge est loin d'être uniforme. En général, la larve est d'un beau jaune clair ou orange, mais chez certaines cette coloration tourne au brun verdàtre et même au bistre : il ne faut pas selon moi y voir un état morbide, car elles sont aussi vigoureuses les unes que les autres. 7 août : J'observe quelques chenilles qui viennent de muer. Leur livrée générale est encore jaune, mais les quatre premiers tubercules sont d'un rouge plus ou moins vif : au surplus elles ne tardent pas à se modifier de la facon suivante : l'ensemble du corps devient vert jaune et le dos bleu clair : les tubercules dorsaux, jaune orangé . Sauf les quatre premiers qui sont carmin ou vermillon; tubercules latéraux bleu pâle. J'ai en tout 275 élèves à cette époque et je remarque avec étonnement que, doués d’ailleurs d'un robuste appétit, ils préferent de beaucoup le Cerisier au Prunier sauvage : le ontraire avait été signalé par Clément (1). 16 août : au sortir de la quatrième mue, la chenille est vraiment ravissante. Dos : bleu turquoise. Tubercules laté- raux : bleu d’outremer. Flancs : vert pré. Tubercules dor- saux : jaune d'or bien accusé (à l'exception toujours des quatre premiers qui varient de l'orange clair au grenat et du marron pâle au corail. Je constate aussi la disparition de eTros points noirs situés entre les tubercules. Mais ces belles couleurs durent peu et je suis à même de noter plusieurs métamorphoses à ce sujet : ainsi, chez les unes, les flancs affectent une teinte vert mousse; chez les autres une coloration vert jaune foncé. J'en observe une certaine quantité dont la teintesombre ou livide m avait quelque peu inquiété, mais je me rassure en les voyant manger de bon appétit. 15 septembre : 225 chenilles ont achevé leur cinquième et dernière mue. Je constate un accroissement notable des quatre premiers tubercules dorsaux qui sont à présent orangé où vermillon; les deux suivants d’un jaune citron sont presque aussi volumineux; la couleur des stigmates est blanc bleuàtre; la couronne des pattes membraneuses (4) Bulletin de la Societé d’Acclimatation, février 1879. ÉDUCATIONS DE BOMBYCIENS SÉRICIGÈNES Al est bleu foncé; la face dorsale revêt une teinte blanchâtre. Vers cette époque, la diarrhée m'enleva une quinzaine de chenilles, mais, sauf ce léger accroc, l'éducation se pour- suivit avec succès et mes élèves parvinrent à la taille normale. Le coconnage commença dans les derniers jours de sep- tembre et se continua pendant tout le mois d'octobre. Quelques larves retardataires furent placées dans une piece chauffée où elles acheverent de se chrysalider et j’obtins en tout 237 cocons d'assez belle venue pour la plupart. CONTRIBUTION A L’HISTOIRE DE LA CULTURE DE LA VIGNE DANS L'ORNE par Louis Duval. Archiviste du département de l’Orne. A l'occasion de l'Exposition universelle, la Sociélé natio- nale d'Acclimalalion a été appelée à étudier les Vignes pouvant résister à un climat relativement rigoureux, comme celui de l'Orne. Les ceps magnifiques exposés par M. Victor Caplat, de Damigny, présentent un spécimen des plus remar- quables des résultats auxquels on a pu arriver dans la plaine d'Alençon, par le choix de plants doués d'une vigueur excep- tionnelle, et provenant de Vignes sauvages découvertes par les missionnaires français dans les forêts de la Chine et du Japon, à une altitude de mille à deux mille mètres. Ce vignoble cultivé en plein champ, avait au bout de trois ans l'aspect d'une vigne française de dix ans et plus, avec un feuillage luxuriant, mesurant plus de 0"45 de longueur. La précocité de la fructification est un fait non moins remar- quable. Elle commence à s'opérer dès le mois de mai, en avance de plusieurs semaines sur les Vignes françaises. La maturité est complète dès le 15 septembre. Grâce à cette précocité exceptionnelle, ces Vignes peuvent échapper aux terribles gelées du mois de mai, qui chez nous, si souvent tuent le raisin dans sa fleur. Les mêmes plants semblent jusqu'ici n'avoir rien à craindre des maladies qui ont décimé ou altéré une partie de nos vignobles, le mildew ou autres parasites. Ajoutons que la qualité des vins tirés de ces rai- sins, est remarquable, que leur coloration est très forte et que, mis en bouteilles, ils font sauter le bouchon. M. Victor Caplat a donc réalisé, avec un succès complet dans la plaine d'Alençon, un problème auquel tous les viti- culteurs s'intéressent à juste titre. Il est ainsi établi que le HISTOIRE DE LA CULTURE DE LA VIGNE DANS L'ORNE 43 climat et le sol d'Alençon, réputés réfractaires à la culture de la Vigne en plein champ et non en espalier, peut produire des plants que leur vigueur et leur rusticité exceptionnelles semblent désigner pour servir de porte-greffe, pour recons- tituer les vignobles épuisés ou atteints par le Phylloxera. Résultat merveilleux dû à l'initiative, à la persévérance, aux soins intelligents d’un compatriote qui par là, a droit à notre reconnaissance et aux félicitations des viticulteurs de tous les pays. Mais sans diminuer le mérite de M. Victor Caplat, il est utile de rechercher, si avant lui, dans la même région, d’autres viticulteurs n'ont pas fait des tentatives analogues; quel en a été le résultat et, s’il y a lieu, de rendre égale- ment hommage à leur initiative et à leurs travaux. Commençons d'abord par rappeler qu'il y a une vingtaine d'années, M. Louvel, instituteur à Larré, a réussi lui aussi pendant plusieurs années. à faire fructifier un beau plant de Vignes françaises donnant un vin qui fut trouvé riche en alcool et en tanin. Il parait même que mis en bouteille, ce vin avait acquis assez de qualité pour pouvoir rivaliser avec les vin de table ordinaires. Si nous poussons nos investigations au delà de notre siècle, nous n'aurons pas de peine à y trouver les preuves du succès avec lequel la Vigne fut jadis cultivée dans notre pays. Ce fait a été mis hors de doute par M. Léopold De- lisle dans ses Études sur l'Agriculture normande au moyen age. M. Delisle a établi en outre que cette culture commença à disparaitre précisément à partir de l’époque où l'on par- vint à produire, au moyen du jus des pommes une liqueur perfectionnée égale, sinon supérieure aux petits vins du pays qui jusqu'alors avaient été préférés aux cidres du même CRU Le chapitre du savant ouvrage de M. Delisle consacré aux Vignes est des plus curieux et des plus complets. Mais M. Delisle, tout en faisant connaitre les vignobles qu on ren- contrait dans les vallées de l'Eure, de l'Iton, de la Risle, de la Touque, de la Dive, de la Vie et de l'Orne, n'a mentionné qu'un petit nombre de ceux qui existaient dans l'ancien du- ché d'Alencon et dans le comté du Perche, dans la région qui correspond aujourd'hui au département actuel de l'Orne. Nous croyons utile d'essayer d'en faire le dénombrement et 44 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION nous demandons pardon d'avance de l'aridité des détails dans lesquels nous allons être forcés d'entrer. Le Perche et spécialement l'arrondissement actuel de Mortagne, parait être la partie du département de l'Orne où la vigne réussit le mieux. Peut-être y fut-elle apportée pour la premiere fois par les légionnaires romains qui reçurent d'assez nombreuses concessions de terres dans ce pays. Mais les moines de Marmoutiers sont généralement consi- dérés comme ayant sinon introduit, au moins développé et perfectionné cette culture sur les coteaux du Bellêmois au xl° siècle. Elle y existait, en tous cas, avant eux, car nous voyons vers 1050, Hugues de Rocé ou du Rochet {de Rocelo) donner aux églises de Saint Santin ou de Saint Léo- nard qu'il avait construites dans son château de Bellème, un arpent de vignes sis au hameau de Rocé, en la commune actuelle du Gué-de-la-Chaine. Béraud, son vassal, donna un arpent de vigne, moins un quartier. Beraud Minterne, arrière-vassal de ce dernier, donna un arpent entier. Un autre vassal, Ingelbaud de Courtiout donna un arpent de vigne du clos de Crépon (aujourd'hui Crapon, commune de Saint-Martin du Vieux-Bellème) réputé excellent (1). Parmi les donations faites à la sacristie de Saint Léonard de Bellème par Yves de Bellême et par Godehilde, sa femme, figurent, avec la terre joignant le vieux château de Bellème, donnée par Avesgaud, évêque du Mans (995-1035) du temps du roi Robert un plant de vigne joutant les murs du même château. Cette charte contient également la confirmation d'une donation au prieuré, d'un verger et de vignes, situées pres du bourg de Bellème. La réputation de ces vignobles ne s'arrêta pas avec le siècle de Guillaume-le-Conquérant. En 1901, par exemple, on trouve une charte par J. de Lonré, contenant donation d'une Vigne à Bellème (3). En 1269, Guillaume Achard, vend à Guillaume Chalopin, une portion de rente assise sur une Vigne de la vallée de Bellème. Les mentions de Vignes à Saint-Martin du Vieux- Bellème reviennent à chaque instant, en 1231, en 1296, en 1315, en ce Inventaire sommaire des Archives de l’Orne, tome IF, p. 65-66 (H Ibid. p. 49 (H 2150). ité par Léopold Delisle. Étude sur l'Agriculture normande p. 43%. SES HISTOIRE DE LA CULTURE DE LA VIGNE DANS L'ORNE 49 1391 et dans de nombreux baux à ferme. Le dernier de la série est celui qui fut consenti pour huit années, par les re- ligieux du prieuré, en 1743 et dans lequel figure une pièce de terre sise pres de Haute-Loge. L'importance de cette culture est attestée par les rede- vances fixées par les services et aussi par les proces qui en résultaient fréquemment. En 1300, par exemple, on trouve un accord entre Jean de Dancé et.le prieur du Vieux-Bel- lème, au sujet du pressurage des vins et des droits de pres- soir. En 1316, on voit le prévôt fieffé du prieuré réclamer avec force injures, une miche blanche, quatre bises et un boisseau de pois, chaque fois qu'il allait en vendange. Un procès-verbal de prise de possession par les religieuses, en 1406, d’un clos de Vigne, sis à Saint-Martin du Vieux-Bel- lême fait mention du service de onze vendangeurs. Un accord conclu en 1505 nous apprend que les habitants de la Perrie, pres Crapon, étaient obligés à offrir aux religieux, pour droit de coutume une pipe de vin de Vaunoise. On voit par un autre acte de 1515 que les religieux percevaient la dime des vignes de Saint-Martin et de Vaunoise (1). Ce dernier cru a joui d’une réputation, dont le souvenir n'est pas éteint. Au x1I° siecle, Rotrou IV, comte du Perche, donna à l'abbaye de la Trappe le clos de vigne quil possé- dait à Vaunoise. En 1210, eut lieu un procès au sujet de la Vigne-le-Comte et la Vigne-Garboud, propriétés de l'abbé de la Trappe. Le prieur du Vieux-Bellême réclamait la dime de ces deux clos, comme situés sur une paroisse dépendant de son prieuré. L'intervention de Robert IF, archevêque de Rouen, mit fin au proces. Par un accord conclu devant lui, à Bellème, il fut convenu que l'abbé payerait au prieur tous les ans, deux sommes de vin du cru sus-dit ou de toute autre vigne, pour droit de dime. Mais plus tard, le produit de ces vignobles, ayant sans doute diminué, la redevance fut réduite à une pipe de vin blanc ou à une somme de 4 livres, au choix de l'abbé, suivant transaction en date du 17 août 1524 (2). (1) Les citations ci-dessus sont extraites du compte-rendu par M. Gus- tave Le Vavasseur, de la publication de l’Inventaire sommaire des Ar- chives de l'Orne, publié dans le Bulletin de la Societé historique ue l'Orne, t. XV, page 377 et suivantes. (2) Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame de la Trappe, p. 312-313. 46 BULLETIN DÉ LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION On cite également une autre transaction entre le prieur du Vieux-Bellème etl’abbé de la Trappe, intervenue en 1238 au sujet des dimes d'une vigne, appartenant à l'abbé, sans indication précise du lieu où cette Vigne était située (1). Pour nous résumer, nous pourrons dire que l'excellence du cru de Vaunoise est attestée par ce fait qu'on y trouve à la fois, comme propriétaires, au xvu® siècle, l'abbé de la Trappe, les prieurs du- Vieux-Bellème, de Chartrage et du Val-Dieu et le curé de Colonard qui, en 1296, y avait aussi un petit clos de vigne, sans compter, parmi les laïques, le comte du Perche qui, Comme on l’a vu, en avait cédé la pos- session aux religieux de la Trappe. Le vin de Vaunoise était en effet, de préférence, réservé pour le Saint-Sacrifice. Témoin lé testament de Robert Du- rand, vicaire du Pin-la-Garenne, qui en 1516, lègue à son église une rente de 7 sols et demi pour le pain et le vin de Pâques et deux planches de vignes à Vaunoise, pour servir à la fourniture du vin de messe (2). Les vignes de Vaunoise ont subsisté jusqu'à la fin du règne de Louis XV. Voici ce qu'en dit Delestang, sous-préfet de l'arrondissement, dans sa Chorographie de la sous-pré- fecture de Mortagne publiée en Fan IX : « 1] existait en- core, il y a une trentaine d'années, des Vignes à Vaunoise et aux environs; elles ont totalement péri et n'ont pas été remplacées. » Les autres localités des environs de Bellème dans les- quelles existent des traces de la culture de la Vigne sont les suivantes : ORIGNI LE BUTIN. Vers la fin du x1° siècle où au commen- cement du xi°, Guillaume d'Illiers avait cédé à l'abbaye de la Trappe, la vigne qu'il possédait à Origni-le-Butin. Cette vigne où une autre, située dans la même paroisse, fut l'occa- sion, en 1255, d'un accord entre Payen de Sourches, seigneur de Clinchamp, au sujet du droit de justice qu'il prétendait y exercer, ainsi que Sur un hébergement pourvu d'un pres- soir, à l'usage de la dite vigne. Nous trouvons encore sur le même territoire la conces- (1) Cartulaire de l’abbaye de Notre-Duine de la Trappe, p. 311. (2) Gustave Levavasseur. JZbid, HISTOIRE DE LA CULTURE DE LA VIGNE DANS L'ORNE 47 sion faite en 1231 par Thibaud Renois, à la même abbaye, de trois sommes de vin à prendre au moment de la ven- dange sur la meilleure qualité du cru de la Troigne.En 1255, vente par le même d’une rente assise sur le produit de deux vignes, l’une sise au Val de Genest, l’autre précédemment acquise par le vendeur, de Guillaume le Bovier. Le 15 août 1260, Guillaume L'Ane vendit au même abbé, pour 20 sols tournois, une piece de terre et de vigne sise en la paroisse d'Origni-le-Butin, joutant un côté d’un autre quartier de vigne possédé par les religieux (1). Vente d'une planche de vigne en 1300 (2). Enfin reconnais- sance en 1625, par les moines de la Trappe, rendue au prieur du Vieux-Bellème, pour les vignes dépendant de leur métairie d'Origni-le-Butin (3). Il existe encore dans cette commune deux hameaux appelés /es Vignes et un autre la Vigne d'Origni. ORIGINI-LE-ROUX. En 1291, vente par Robert André à Ro- bert Roignon d'une rente de 100 sols tournois assise sur une vigne appelée le Clos de Loussaut au fief de Chancenai. En 1551, sentence de Jacques Courtin, lieutenant particulier du vicomte du Perche, qui condamne Louis Chalambert, curé d'Origni-le-Roux, à payer à François Radoueil, sieur de la Rouziere, une rente assise sur une pièce de vigne, sise en cette paroisse baïllée en fief à ses prédécesseurs par acte du 31 décembre 1381. L'existence de ces vignes est attestée par le nom de Vigne-Pelée, donné à un des hameaux de cette commune. GUÉ-DE-LA-CHAINE. Sur le territoire de cette commuue, récemment créée, mais sur les confins d'Origni-le-Butin, se trouve la Vigne-des-Ronces. CHAPELLE-SOUEF (LA). Nous ne connaissons d'autre trace de vignoble sur la Chapelle-Souef, que le nom de la Vigne que porte un de ses hameaux. CHEMILLY. Le nom de la Vigne des Roses, ou plutôt Vigne des Ronces est un indice semblable à celui que nous avons trouvé au Gué-de-la-Chaine. (1) Cartulaire de l’abbaye de Notre-Dame de la Trappe, p. 298. 304, 305, 308, 310. (2) Inventaire sommaire t. 11, p. 117 (H. 2553). (3) G. Le Vavasseur, Zbid,. 48 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION IGÉ possède la Vigne de Rougeuil et les Vignes. SAINT-FULGENT-DES-ORMES a aussi sa Vigne. Aux environs de Mortagne on trouve également quelques vestiges d'anciennes vignes : A MORTAGNE, /a Croix des Vignes. A CORBON-LE-VIEUX, /4 Vigne. A FEINGS, bail à ferme par les Chartreux du Val-Dieu en 1775, du lieu de la Vigne (1). : A REVEILLON, bail à ferme par les Chartreux du Val-Dieu en 1775 du lieu de la Vigne. A SAINT-LANGIS, baïl à ferme par les Chartreux du Val- Dieu, en 1775, du lieu de la Vigne. A SAINT-MARD-DE-RENO, {es Vignes. Dans le canton de Pervenchères, nous trouvons encore quatre communes où ont dû exister des plants de vignes : BARVILLE, {a Vigne. PERRIÈRE (LA), {es Vignes. PERVENCHÈRES. En 1257, Eudes Quarrel, seigneur de Vau- vineux, donne à l'abbaye de la Trappe, une rente de 10 sols tournois sur ses cens de Vauvineux (de Vallé Vinos&) (2). SURÉ. La Vigne des Haies et peut-être le Mont Friloux. En 1531, dans le lot d'Etiennette Bry, sœur de François Bry de la Clergerie, se trouve figurer la métairie de Bonnes, composée de terres, vignes et prés (3). Le canton du Theil,renferme trois communes où l’on peut trouver trace d'anciens vignobles. CETON, Les Vignes. Nom de deux hameaux différents. GEMAGES, le Clos des Vignes. SAINT-GERMAIN-DE-LA-COUDRE, /@4 Petite Vigne. Dans le canton de Remalard nous ne relevons plus que deux noms de lieux significatifs. COULONGES-LES-SABLONS, {a Vigne. (1) Imventaire, t. 11, p. 143 (H. 2745). (2) Cartulaire de la Trappe, p. 29. (3) Inventaire t. 11, p. 81 (H. 278). HISTOIRE DE LA CULTURE DE LA VIGNE DANS L'ORNE 49 DORCEAU, {a Vigne. Même constatation à Bazoches-suwr-Hoëne. LA MESNIÈRE, le Clos de la Vigne. SAINT-CGERMAIN-DE-MARTIGNY, {4 Vigne. Il n’est pas jusqu'a Tourouvre qui n'ait son hameau de La Vigne. 11 ne faut pas oublier que sur le territoire de cette commune se trouvait la villa romaine de Méziere. La Sarthe après avoir pris naissance au pied des forêts de Moulins et de Bonsmoulins, dans le Perche, arrose l’arron- dissement d'Alençon et y forme avec ses affluents des vallées peu profondes, mais fertiles, dont les bords médio- crement relevés ont pu jadis se couvrir de pampres verts. Nous avons signalé tout à l'heure ceux de Barville, près le Mesle-sur-Sarthe. Dans le canton de Courtomer, limitrophe de celui de Moulins-la-Marche, nous trouvons /4 Vigne au Plantis (1) et à Tellieres-le-Plessis, /es Vignes à Ferrières- la-Verrerrie, et es Vignettes, au Chalange et à Montche- vrel: Aux portes d'Alençon, nous trouvons à Neufchâtel-en- Saonnois, une vigne qui fut donnée à l’abbaye de Perseigne par Guillaume, comte de Ponthieu en 1145 (2). En 1224, Thomas, curé de Forges, donne à l'abbaye de Perseigne un journal de terre au Boullay (Boollay) pres de la vigne de Renault, son neveu (3). En 1225, Robert de Monceaux, chevalier, et Guillaume son fils, confirmerent à l’abbaye de la Trappe la possession sous réserve de leurs propres droits, d'une vigne, sise à Ancines, au hameau du Coudray (4). En 1262, Guillaume de Colombiers vendit à l’abbaye de Perseigne une rente de trois sous tournois sur un terrement qu'il possédait à Colombiers pour deux tonneaux de vin du prix de 50 sous (5). On ne doit pas être surpris de rencontrer sur le territoire (1) En 287, Roger de la Vigne vendit à l'abbaye de Perseigne une pièce de pré en la paroisse du Plantis (Gabriel Fleury, Cartulaire de l'Abbaye de Perseigne), p. 129. (2) Ibid, p. 3. (SD tire (4) Cartulaire de la Trappe, p. 335. (5) Cartulaire de Perseigne, p. 112. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 18, — 50 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION méme d'Alençon, la Fuye-des-Vignes, Sur l'ancien chemin d'Alencon à Courteilles, jadis connu sous le nom de chemin d'Echauftour. A Colombiers, commune limitrophe de Damigny, nous trouvons la terre des Vignes, où le vénérable historien d'Alencon, Odolant Desnos, aimait à chercher l'ombre et la fraicheur aux bords de la Briante. Sur les rives de la forêt d'Écouves, nous découvrons enfin les Vignes et le Fignage à Saint-Nicolas-des-Bois; et sur l’autre versant du même massif, à la Ferrière-Béchet, canton de Séés, le hameau des Tignes. Cette dernière localité appartient au bassin de l'Orne, pour lequel nous n'avons à mentionner que deux localités Batilly, canton d'Ecouché, où se trouve le hameau de /& Vigne,et Sevray, commune voisine, où nous remarquons la terre de Vigneral. Nous nous refusons à reconnaitre les traces de la culture de la Vigne, comme l'ont fait quelques-uns de nos compa- triotes, dans Sévigny,. jadis écrit Sepvigny, et dans ce fait que la famille Guyon des Diguères, depuis longtemps fixée dans cette paroisse porte en effet dans ses armes un cep de Vigne. Mais est-ce là une raison pour ne pas voir que Se- vigny, Savigny, dont la forme la plus ancienne est S'atiniac n'est évidemment pas un nom de formation française. Nous pensons qu'il est plus simple et plus juste d'admettre que cette localité à pu avoir pour principal propriétaire à l'époque gallo-romaine un colon du nom de Sabinus. A plus forte raison nous ne reconnaissons pas l'influence du « jus de la Vigne », dans l'origine des noms de Juvigny- sur-Orne et de Juvigny-sous-Andaines. | A l’autreextrémité de l'arrondissement d'Argentan,dansles valléesde l'Tton, de la Risle etdela Touque, de la Diveetdeson affluent, la Vie, la culture de la Vigne parait ancienne. M. Léo- pold Delisle en cite des exemples empruntés aux chartes des xi® et xIn° siècles. Une charte munie du sceau de Nicolas de Malvoue, nous apprend qu'au commencement du xui° siècle, Hugues de Guerquesalles donna à l'abbaye de Saint-André de Gouffern son vignoble de Guerquesalies. Le même, du consentement de Geoffroy, son fils donna à la même abbaye tout le champ de vignes qui s'étendait au-dessous du bois de Guerquesalles, jusqu'à la terre de Geslin le Forestier. HISTOIRE DE LA CULTURE DE LA VIGNE DANS L'ORNE 1 Il est à peine besoin de dire que dans tout l'arrondisse- ment de Domfront on ne relève pas un seul nom de lieu rappelant la culture de la Vigne. Or cette région composée de terrains siluriens, de grès et de schistes est réputée avec raison comme le plus froid et le plus humide du départe- ment de l'Orne, quoique en raison de son voisinage de l'Océan on puisse y cultiver en pleine terre des plantes telles que le Camélia qui ne résistent pas à une températnre rigou- reuse. 52 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 1: SECTION (MAMMIFÈRES) SÉANCE DU 7 JANVIER 1901 PRESIDENCE DE M. DECROIX, PRÉSIDENT. M. Debreuil s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. Il est procédé au renouvellement du Bureau. Sont élus : Président : M. DEcroix. Vice-Président : M. LE D' TROUESSART. Secrétaire : M. MAILLES. Secrétaire-adjoint : M. Loyer. M. Trouessart est en outre nommé délégué à la Commission des récompenses. Il est procédé au dépouillement de la correspondance. M. le Secrétaire général signale comme particulièrement intéressante le texte de la Convention internationale signée à Londres le 19 mai 1900 et par laquelle les puissances européennes ayant des intérêts dans l'Afrique équatoriale s'engagent à protéger un certain nombre de Mam- mifères; l'Eléphant d'Afrique figure naturellement en première ligne parmi ceux-ci. M. le Président fait observer que c’est là en quelque sorte la consé- cration des efforts faits par la Societé d’Acclimatation depuis un certain nombre d'années, pour la défense de cet animal, menacé dans son exis- tence par les trafiquants d'ivoire, et dont la domestication pourrait ètre si profitable aux colons. Une discussion générale s'engage à ce sujet, et M. Bourdarie cite différents exemples d'Éléphants d'Afrique domes - tiqués dans la colonie allemande du Cameroun, ainsi que des essais nouveaux tentés par les Belges au Congo. En ce qui concerne la con- vention de Londres, M. Bourdarie fait observer qu'en dehors des puis- sances européennes, plusieurs gouvernements africains et, entre autres, celui de l'Abyssinie, devraient être appelés à y adhérer. Les mesures prescrites sont évidemment excellentes, la difficulté consiste dans leur application. Après un échange de diverses observations, M. Bourdarie propose un vœu qui est adopté en principe par la Section, et dont les termes seront soumis au Conseil de la Société, lequel sera prié de vouloir bien le transmettre aux pouvoirs compétents. M. et M® Loicq de Lobel présentent à l'assemblée un magnifique Chien de l'Alaska, qu'ils ont ramené eux-mêmes de ce pays, lors de leur dernier voyage. Comme on peut en juger, cet animal est docile. Il ne paraît pas avoir souffert jusqu'ici de la température à laquelle il est soumis et qui est beaucoup plus élevée que la moyenne de celle de son pays d'origine. M. Loicq de Lobel donne de nombreux détails sur la race des Chiens de l'Alaska. Ces animaux rendent de grands PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 53 services pour l’attelage. [ls ont beaucoup de résistance et se contentent d'une nourriture à peine suffisante et de qualité médiocre. La meilleure qu'on puisse leur donner consiste en débris de Poissons et particuliè- rement de Saumons qui abondent dans les grands fleuves du pays et dont on fait des conserves. Le travail fourni par les Chiens attelés semble ne nuire en rien à leur bonne santé, et c’est une indication favo- rable pour les partisans de l'emploi rationnel du Chien de trait dans les pays civilisés. M. le Président remercie M. et M°° Loicq de Lobel de leur commu- nication et les félicite de l'énergie dont ils ont fait preuve au cours de deux voyages dans un pays aussi deshérité que l'Alaska. Il exprime le désir que de nouveaux détails soient donnés dans une séance géné- rale de la Société sur les conditions d'existence dans l'Alaska et sur les produits animaux et végétaux de la région. M. Trouessart fait remarquer que toutes les observations concernant les Mammifères à fourrures sont particulièrement dignes d'intérêt, M. le Secrétaire général fait connaître la statistique de la consomma- tion de la viande de Cheval à Paris, récemment publiée dans le Bulle- tin du Ministère de l'Agriculture. Cette consommation va toujours en augmentant. Il est utile de signaler à ce propos les observations récem- ment faites par le célèbre physiologiste allemand Pîlüger, concernant les accidents produits par l'usage prolongé de la viande de Cheval. Des Chiens nourris exclusivement avec cette viande soit crue, soit cuite, ont présenté des troubles digestifs qui ont disparu à la suite de l’adjonetion à la nourriture de la graisse qui entoure les reins du Mou- ton, du Bœuf ou du Porc. L’explication scientifique de ces faits n’a pas encore été donnée, mais il y a là une indication pratique, bonne à connaître pour les adeptes de l'hippophagie. M. le Président fait observer que des accidents analogues à ceux constatés sur des Chiens soumis à un régime tout à fait exclusif ne doivent pas nécessairement atteindre les personnes qui font habituellement usage de la viande de Cheval, mais dont l'ordinaire comprend en outre bien d’autres aliments; il estime que la conclusion d'expériences de laboratoire ne saurait troubler en rien la pratique de l’hippophagie qui continue et continuera certainement encore à se développer en rendant de grands services. Pour les Secrétaires empéchés : JULES DE GUERNE Secrétaire général. SÉANCE DU #4 FÉVRIER 1901 PRÉSIDENCE DE M. LE D’ TROUESSART, VICE-PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Uginet s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. M. le Secrétaire de la Section exprime ses regrets den‘avoir pu rem- plir ses fonctions à la séance de janvier. M. le Secrétaire général annonce que M. Boulanger, ingénieur civil Sy BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION a fait don, à la Société, d’un jeune Macaque d'espèce non encore déter- minée. Cet animal a été confié à M. Loyer, qui a bien voulu se charger du soin de l'élever. M. le Secrétaire général signale, dans le Bulletin de la Société de Géographie, un article concernant le Bœuif musqué, du professeur suédois Nathorst. L'auteur a pu observer un certain nombre de ces animaux à l’état sauvage pendant un voyage d'exploration au Groenland. Le travail dont il est donné lecture présente un grand intérèt notam- ment au point de vue des essais d'introduction de cette espèce dans les pays scandinaves et en Grande Bretagne. M. le D' Trouessart fournit quelques renseignements sur cet animal, son habitat actuel et sa distribution géographique à l’époque glaciaire. Celle-ci s'étendait beaucoup plus au Sud qu'aujourd'hui. Il est donc vraisemblable que le Bœuf musqué pourra prospérer, en Europe, dans la plupart des régions situées au Nord du 60° parallèle. Plusieurs membres ajoutent que cette introduction sera facilitée par le respect des lois que professent, en général, les Suédois et les Norwé- giens, et M. de Guerne cite le cas de l’Elan qui, en voie d'extinction, il y a moins de vingt ans, n’est plus rare aujourd'hui en Scandinavie, grâce à la réglementation de sa chasse, très observée, d'ailleurs, par la population. M. Trouessart donne aussi quelques renseignements sur divers ani- maux à fourrures, et sur les essais d'élevage qui sont pratiqués sur le Renard bleu. Notre collègue promet de compléter cet aperçu et de rédiger une note pour le Bulletin. En terminant la séance, la Section, à l'unanimité, émet le vœu que la Société d'Acclimatation se tienne en communication avec ceux qui essaient d'introduire. le Bœuf musqué, dans le Nord de l'Europe. Le Secrétaire, CH. MAILLES. 2e SECTION (ORNITHOLOGIE-AVICULTURE) SÉANCE EXTRAORDINAIRE tenue le 25 juin juin 1900 au Museum d'Histoire naturelle (Laboratoire d’ornithologie). PRÉSIDENCE DE M. OUSTALET, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière réunion est lu et adopté. Après avoir expliqué que la présente séance est, en quelque sorte, une réunion préparatoire pour le Congrès international d'ornithologie, M. Oustalet donne connaissance du programme de ce congrès, dont la troisième session s'ouvrira à Paris le 26 juin. Lecture est donnée des questionnaires qui ont été dressés sur l’histoire naturelle et l’acclimatation du Nandou et du Tinamou, ainsi PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 55 que d’un programme très développé rédigé par M. Remy Saint-Loup sur les œufs et l’incubation chez les Oiseaux domestiques. M. le Secrétaire général résume les réponses qui ont été envoyées aux trois questionnaires, M. Remy Saint-Loup se chargera de présenter le travail concernant les œuîs et l’incubation pour lequel M. le D'Keri a envoyé des documents importants, M. de Guerne résumera d'autre part les réponses aux questionnaires sur les Nandous et les Tinamous, MM. Emile Daireaux et Charles Debreuil ont, entre autres, fourni des réponses intéressantes. M. le D'° Raphaël Blanchard a adressé une notice détaillée sur les vers parasites des Nandous et des Tinamous. M. Scelle parle de l'introduction du gibier étranger et de sa vente aux Halles de Paris. Il serait peut-être utile de traiter également cette question devant le Congrès. Une discussion générale s'engage à ce propos et la section est d'avis que le sujet, malgré tout l'intérêt qu'il présente au point de vue international, ne saurait être traité utilement Sans avoir été mis à l’ordre du jour et sérieusement étudié depuis long- temps. La question ne sera donc pas soulevée au Congrès, mais il con- viendra d'en reprendre l'examen l'hiver prochain. On: peut dire dès à présent qu'il serait désirable que le Museum et la Société d’Acclimata- tion fussent avertis de la présence sur le marché des animaux rares afin de pouvoir les acheter et sauver ainsi des spécimens curieux trop souvent perdus. Le Secrétaire : Cte D'ORFEUILLE. SÉANCE DU 14 JANVIER 1901 PRÉSIDENCE DE M. Remy Sair-Loup, VicE-PRÉSIDENT: M. Oustalet, président, s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. Il est procédé au renouvellement du bureau pour l’année 1901. Sont élus : Président : M. Oustalet. Vice-Président : M. Remy Saint-Loup. Secrétaire : M. le Comte d'Orfeuille. Secrétaire-adjoint : M. Uginet. Délégué à la Commissicn des récompenses : M. Debreuil. Il est donné lecture d’une lettre de M. Lucet, répondant à un certain nombre de points du questionnaire dressé à l’occasion du Congrès d’ornithologie et spécialement en ce qui concerne les œufs et l’incuba- tion. M. Cézard adresse à la Section une note sur l'élevage du Tinamou roux en Lorraine, où il a résisté à un froid assez vif. M. Galichet lit un mémoire sur le même Oiseau. II y répond aux ques- tionnaire rédigé par les soins de la Section lors de la réunion à Paris du troisième Congrès ornithologique international. M. Remy Saint-Loup fait part à la Section d’une découverte faite par 56 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION lui tout récemment à la suite d'observations les plus minutieuses. L’ho- norable membre a acquis la preuve que l'embryon de l'Oiseau se com- porte pendant l'incubation comme les Reptiles, animaux à sang froid. Sa température n'est pas sa température propre, mais celle du milieu dans lequel il se trouve. Sur un embryon de trois jours, le nombre des pulsations est sensiblement le même entre 32° et 38°. On comprend toute l'importance de cette découverte, car elle démontre que la phy- siologie est d'accord avec l'anatomie pour établir la parenté existante entre les deux types de Sauropsidés : les Oiseaux et les Reptiles. M. le Secrétaire général donne lecture de la convention interna- tionale signée à Londres le 49 mai 1900 pour la protection d'un certain nombre d'animaux de l'Afrique équatoriale. En ce qui concerne les Oiseaux, ce document établit trois catégories : 1° les Oiseaux nuisibles et à détruire, ce sont les grands Rapaces. sauf ceux désignés au para- graphe suivant; 2° les Oiseaux à protéger. savoir : les Vautours. l'Oiseau secrétaire. les Hiboux, les Pique-Bœuñs ; 3° les Oiseaux qu'il ne faut tuer qu'en nombre restreint, et qui sont les Autruches,les Marabouts, les Aigrettes,les Outardes,les Francolins,les Pintades et autres Gallinacés. Le Secrétaire, COMTE D'ORFEUILLE. 2e SECTION (ORNITHOLOGIE-AVICULTURE) SÉANCE DU 11 FÉVRIER 1901 PRÉSIDENCE DE M. REMY Saini-Loup, VICE-PRÉSIDENT. M. Oustalet, président, s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. La Section émet le vœu quele travail de M. Galichet sur le Tinamou roux soit publié dans le Bulletin. M. le Président exprime le désir qu'on apporte aux séances des extraits de journaux contenant des faits intéressant l'Ornithologie. M. le Comte d'Orfeuille lit un travail sur la nocuité du Moineau. Il donne ensuite connaissance d'un article sur la même question publié par notre collègue M. de Lamarche, dans le Cosinos du 6 oc- tobre 1900. M. de Lamarche constate les ravages effrayants causés aux Etats-Unis par le Moineau, qu'on a eu l'imprudence d'introduire dans ce pays. Rien n'échappe à sa gourmandise, pas plus les fruits que les céréales, et de plus il est un ennemi dangereux pour les autres Oiseaux. M. Cretté de Palluel admet que le Moineau est un animal nuisible, mais en pratique sa destruction offre des difficultés et des dangers. Sous prétexte de tuer cet animal, on fera un vrai carnage des autres Passereaux. On ne peut se figurer combien d'Oiseaux se prennent dans les pièges ; M. Cretté de Palluel cite comme exemple la capture de soixante Rouge-gorges faite dans un parc, en une seule promenade. Nous devrions commencer par protéger notre gibier. M. Scelle pense qu'il faudrait empêcher la chasse des Alouettes qui permet de prendre toutes espèces d'Oiseaux. Dansle midi, on sert jus- PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ Sy qu'au mois d'avril sur les tables d'hôte une foule de Passereaux qui n'ont rien de commun avec l’Alouette. M. Langlassé signale la destruction de Perdrix opérée au moyen de batlues dans les huit jours de l'ouverture. Rien ne résiste à cette opé- ration, mais ce n'est que par la création d’ilots inviolables que l’on pourrait remédier à ce danger. Revenant sur la question du Moineau, MM. Wuirion et Scelle disent avoir vu cet Oiseau prendre d'assaut des nids d'Hirondelles. M. Remy Saint-Loup fait la communication qui suit : « Dans la séance du 1#janvier, j'ai parlé devant vous de mes récentes expériences d'où il résultait que le Poussin, dans la période qui pré- cède de quelques heures l’éclosion, se comporte non pas comme un vertébré à température constante, mais comme un vertébré à tempéra- ture variable. Mes recherches ont porté depuis sur ce point, savoir : A quel moment se trouve opéré le changement physiologique qui fait que ie poussin abandonne pour ainsi dire ce caractère sauropsidien pour prendre définitivement le caractère d'animal à sang chaud qu'il conser- vera pendant son existence ultérieure. Je n'ai pu encore résoudre cette question, mais il m'a semblé que je devais déjà en faire connaître l'énoncé pour éveiller l'attention d'autres chercheurs et faire naître les tentatives de solution de questions connexes. « Or, depuis ma première communication, une note présentée à l’Ins- titut par M. Ed. Perrier et qui est due à M. Quilhet, établit que les glo- bules du sang des Oiseaux ont des réactions chimiques différentes de celles des Mammifères. Si je rapproche des faits que je vous ai signalés l’idée que j'ai défendue depuis de longues années, et pour la première fois ici mème devant la Société d’Acclimatation, savoir que les espèces, et à plus forte raison les genres, différaient bien plus par\des carac- tères chimiques que par des caractères morphologiques, je considère les faits signalés par M. Perrier comme une confirmation non seulement de mes idées, mais encore de mes expériences relatives à la tempéra- ture de l’'Oiseau pendant et après l’incubation. Mais une idée plus nouvelle me paraît maintenant devoir être exa- minée et résolue par des recherches. Il y a dans le développement une succession d'états physiologiques, aussi bien que d'états morpholo- giques. Ces changements chimiques sont-ils la répétition ontogénétique de propriétés ancestrales des cellules ? Si les faits autorisent, comme je le pense, l'interprétation que je propose, nous comprendrions mieux certains phénomènes de l’hérédité. On verrait mieux le mécanisme de ce que l’on nomme l'hérédité des aptitudes. Je ne veux pas entrer davantage ici dans ces considérations théoriques, et si je les signale c'est qu'elles me paraissent pouvoir dans la suite être utiles pour les applications pratiques. Dans une prochaine séance, je me propose de vous apporter quelques observations sur les conditions de température pendant l'incubation et de discuter ce qui est le plus favorable au développement normal du poussin. » Passant à un autre ordre d'idées, M. Remy-Saint-Loup donne lecture de la note suivante : « Vous avez sans doute remarqué une communication récente faite D8 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION par M. Cuénot à l’Académie des Sciences (1) pour indiquer le résultat de ses observations sur le sexe des jeunes Pigeons. De ces observations il résulte d'une manière péremptoire que, contrairement à l'opinion qui avait cours dans le public il y à quelques années, les deux œufs d’une couvée de Pigeons ne donnent pas nécessairement naissance à un couple, c'est-à-dire à un mâle et une femelle. « Evidemment il faut louer M. Cuénot d'avoir fait de cette question l’objet d’une expérience rigoureuse, mais n'est-il pas juste de recon- naître aussi que la conclusion qu'il apporte devant l'Académie ne fait que confirmer d'autres recherches également rigoureuses et dont le résultat a été publié depuis le commencement de l’année 1898. Je me permets de rappeler que, dès cette époque, j'ai publié dans l’Zntermé- diaire des biologistes une réponse à la question posée relativement à la consanguinité chez les Colombins et dans cette réponse je m'’exprime ainsi : « Le point intéressant est de savoir si régulièrement les œufs d’une couvée produisent un mâle et une femelle; ÿ faut recon- naître que cette règle n’est pas absolue,» et un peu plus loin je fais allu- sion aux autopsies qu me permettent de produire cette affirmation. « Je crois donc établir nettement la priorité que j'ai, relativement à l'éclaircissement et à la solution de cette question scientifique. Je veux bien que deux preuves valent mieux qu'une ; aussi pouvons-nous consi- dérer qu'il est bien établi que les paires de jeunes Pigeons ne sont pas toujours des couples et que de cette manière la consanguinité n’est pas, chez les Colombins, aussi parfaite que les ancienséleveurs le sup- posaient. » Le Secrétaire, COMTE D'ORFEUILLE. SNS ECHO NB OHEAMNIONUNE) SÉANCE DU 22 JANVIER 14901 PRÉSIDENCE DE M. Moror, VIGE-PRÉSIDENT. Il est procédé au renouvellement du bureau pour l’année 1901. Sont élus : Président : MM. D' WEe8er. Vice-Président : Moror. Secrétaire : DE LAMARCHE. Secrétaire-adjoint : MAILLES. Déléqué aux récompenses : D° WEBER. M. le Secrétaire général dépose un exemplaire de l’ouvrage Les Fo- réts, offert à la Société par l'auteur, M. Boppe, ancien Inspecteur des Eaux et Forêts, ainsi qu'un volume ayant pour titre : La culture des Bambous au Japon. offert par le Ministère des Affaires étrangères de la part de l’auteur. M. Harmand qui avait déjà envoyé à la Société, l’an- née dernière, un résumé de son travail. (1) Le travail de M. Cuénot a été publié in extenso dans le Bulletin de la Sociélé, Déc. 1900, p. 383. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 59 Il est donné lecture d’une note de M. Hæckel sur le Dioscorea penta- phylla, cette note était accompagnée d’un certain nombre de bulbilles qui ont été envoyés à M. Bois pour être examinés par lui. M. Chappellier fait observer que le D. Fargesii n'est pas très inté- ressant au point de vue cultural. Sa culture n'offre aucune difficulté, il s'arrache facilement, mais sa production comme tubercules est assez restreinte. Il pense qu'avant de se prononcer sur la valeur du D. penta- phylla envoyé par M. Hæckel, il convient d'attendre le résultat des essais auquels cette plante nouvelle va être soumise par M. Bois. M. Debreuil présente à la section quelques échantillons de brosses et de balais qu'il s’est procuré à l'Exposition universelle. Ces instruments sont confectionnés au moyen d'herbes marines vivant dans les grandes profondeurs de l'Océan et qui sont rejetées par les tempêtes sur les côtes de l'Australie. Elles sont recueillies et coupées en fragments qui sont utilisés pour la fabrication des brosses. MM. Morot et de Guerne estiment que ces plantes doivent appartenir à la famille des Zostérées. M. Morot se charge d'étudier les échantillons qui sont remis par M. De- breuil et fera connaître à la prochaine séance le résultat de ses recherches. M. le Secrétaire général donne lecture d’une lettre par laquelle M. le général Gallieni, gouverneur de Madagascar, remercie de l'envoi très important de graines qui lui a été fait par la Société. Il annonce que ces graines seront distribuées par ses soins aux personnes qui lui - paraîtront le mieux en mesure d'en tirer bon parti. Le R. P. Camboué donne quelques renseignements sur les plants de Cactus inerme qui lui ont été remis par la Société; il les a fait planter dans le jardin d’une école régionale où ils ont bien réussi; il espère que l’année prochaine ces Cactus pourront fournir aux Bovidés un four- rage frais qui sera d’une grande utilité. Il est donné également lecture d’une lettre de M. Robert, qui a rem- placé M. Escande à la direction de la Mission protestante de Fïana- rantsoa et qui remercie de l'envoi de graines qui avait été adressé à ce dernier, — d'une seconde lettre de M. Léon Grandin au sujet de l'envoi de graines qui lui a été fait par la Société au moment de son départ pour le bas Ougoué, et enfin d’une troisième lettre de M. Castex, direc- teur du Jardin de Bab-Saadoun à Tunis, auquel il avait été également envoyé une série importante de graines, mises en distribution par la Société. M. le D: Lecler, de Rouillac (Charente) envoie la photographie d’un Chamærops excelsa, provenant de graines qui lui ont été envoyées par la Société, il y a 15 à 20 ans. M. Magne communique une lettre de M. Roland-Gosselin remerciant des pieds de Vignes de Syrie, originaires des cultures de M. Degron, qui lui ont été envoyés. M. Magne entretient la Section d’une intéressante Orchidée, l'Angrœæ- cum fragrans, de Maurice et de la Réunion qui pourrait être acclimatée dans nos colonies et cultivée comme succedanée de la Vanille. M. le Secrétaire général donne lecture d'une communication de M. Du- val, archiviste de l'Orne, sur la Vigne dans ce département. Il résulte des recherches de M. Duval que la Vigne était cultivée dans le Perche à l’époque de la conquête romaine. Quelques crus avaient même une 60 ‘ BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION certaine réputation, comme celui de Vaunoisey. M. Duval ajoute qu'un très grand nombre de noms de localités dans cette région, indiquent par leur composition, que la culture de la Vigne y était très développée. M. Canu fait connaître que la Société d'Agriculture de Boulogne-sur- mer se propose d'essayer l’acclimatation dans la région, de plants de Vignes pouvant y donner des résultats. Il demande à la Société de lui procurer des plants offrant quelques chances de réussite sous le climat boulonnais. M. le Secrétaire général fait connaître qu'il a reçu du Jardin botanique de Calcutta un nouvel envoi de graines qui vont être mises en distri- bution ainsi qu'une certaine quantité de graines d'espèces originaires du Turkestan, de la Guadeloupe, etc., provenant de l'Exposition uni- verselle. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. EXTRAITS ET ANALYSES. LA QUESTION DU MOINEAU (1) Par C. de Lamarche. La question de savoir si le moineau est un oiseau utile ou nuisible est depuis longtemps discutée et n'a pas encore été officiellement résolue. Les ornithologistes et les administrations s’en sont fréquem- ment occupés sans arriver à une solution définitive. Il y a quelques années, après une enquête faite dans les environs de Paris, il fut décidé que le moineau ne serait pas classé parmi les oiseaux nuisibles. Aujourd'hui, plusieurs Conseils généraux déclarent qu'il doit être traité en ennemi! C'est là, je crois, qu'est la vérité. Le moineau n'est autre chose qu'un parasite. C’est un oiseau brouil- lon, mal élevé, criard, tapageur, un vrai gavroche parisien qui ne fait que du mal et vous désarme par ses allures de bon enfant. Exclusive- ment occupé en apparence de ses affaires de ménage, querelles, prises de bec et tout ce qui s'ensuit, il amuse par ses petits scandales de gouttière. Narquois et insolent jusqu'à l'audace, mais conservant une incontestable originalité dans ses tours les plus pendables, il finit par vous rendre indulgent pour ses méfaits, et puis, véritable mouche du coche, il fait un tel tapage autour d’un malheureux hanneton qu'il a cueilli dans son vol qu'on arrive à se demander si, chez lui, le vernis du parasi- tisme ne dissimulerait pas un auxiliaire vraiment et sérieusement utile. Or, il est tout simplement nuisible, c'est un fléau pour nos champs et nos jardins, et il ne rend que des services absolument insignifiants. Ce qui a le plus contribué à faire au moineau une réputation d'oiseau utile, c'est cette légende généralement accréditée que les États-Unis ont (1) Cet article que nous empruntons au Journal Le Cosmos, est de notre collègue M. C. de Lamarche. Il nous a paru intéressant de le publier en mème temps que celui de M. d’Orfeuille. Tous deux, du reste, aboutissent à la méme conclusion : le Moineau estun oiseau déprédateur dont la disparition est à souhaiter. EXTRAITS ET ANALYSES 61 ete obligés d'en faire venir d'Europe un certain nombre pour les aceli- mater et détruire les insectes qui ravageaientleurs champs. Rien nest plus inexact, et voici la vérité sur l'introduction des moineaux en Amérique. Les premiers moineaux furent introduits dans ce pays à l’automne de 4850 par M. Nicolas Pike, directeur de l'Institut de Brooklyn: ils furent mis en liberté au printemps suivant, mais ils disparurent. En 4852, M. Pike en reçut 50 nouveaux qui furent làächés dans le parc des Marrows, à New-York. En 1854, le colonel William Rhodes en amena quelques-uns de Québec, et, en 1858, M. J. Peace Hazard en mit cin- quante en liberté à Peace Dal, Rhode Island. Enfin en 1866, 1867 et 1869, quelques-uns furent introduits simultanément à New-York, Newhaven, Galveston, Boston, Charlestown et Pailadelphie; l'envoi reçu dans cette dernière ville comprenait 100 sujets, c’est le plus gros chiffre d'importation qui ait été constaté. Le nouveau venu prospéra, et, gràce à sa prodigieuse fécondité, devint bientôt abondant. Il l'est devenu à ce point qu’en 1885, on commença à se préoccuper sérieusement des dégâts qu'il causait et des moyens d’en arrèter le développement. Aujourd’hui, sa tête est mise à prix, et l’on recherche les moyens d'en débarrasser le territoire. Ce serait du reste une erreur de croire que les Américains ont intro- duit le moineau aux États-Unis dans le but de protéger leurs récoltes. Les premiers sujets ont été importés à titre de simple curiosité et comme oiseaux d'agrément (?). Il ne faut pas perdre de vue que la plus grande partie de la population américaine est originaire d'Europe et que les souvenirs de la patrie restent toujours profondément gravés dans la mémoire. Les émlgrés voyaient avec plaisir cet oiseau familier et amu- sant qui leur rappelait le pays natal. Aussi fit-il longtemps prime à New-York, où il se vendait au prix d’un dollar (5 fr. 18). En 1886, le moineau avait déjà envahi 35 Etats et 5 territoires. Aujourd'hui, on le trouve à peu près partout dans la vaste république américaine. IL s’y est complètement acclimaté et prodigieusement mul- tiplié, grâce à sa fécondité. Il fait, en effet, 6 couvées par an, de 4 à 7 œufs chacune, et on a calculé que chaque couple donnant par an 24 petits seulement qui peuvent se reproduire dès la première année de leur naissance, un couple de moineaux, en dix ans, aura reproduit plus de 27%5 milliards de ses semblables. Cet accroissement phénoménal ne se réalise pas, heureusement, mais en réduisant le nombre de jeunes de chaque couple à 12 par an seulement, on aura, après une période de cinq ans, 33.654 moineaux, comme rejetons d’un seul couple, — ce qui est déjà un joli chifire. Les dégâts causés par les moineaux sont de plusieurs sortes : d'abord, ils s’attaquent avec acharnement aux boutons des arbres à fruits et de la vigne au moment où ils sont le plus tendres, sans doute parce que, à ce moment, la nourriture qu'ils préfèrent, les graines, sont rares. Le pècher est leur victime préférée : on a vu un moineau couper 19 boutons de pècher en moins de deux minutes. La partie qu'ils pré- ferent est l’embryon du fruit futur. Ils sont également très friands de fruits : raisins, cerises, fraises, framboises, etc., de petits pois, de jeunes laitues et de graines de tous les légumes. On attribue souvent 62 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION aux abeilles et aux guèpes les dégâts causés auxraisins par le moineau. Des expériences faites par le service entomologique ont prouvé que ces insectes étaient incapables de percer l'enveloppe des grains de raisins, la structure de leur bouche s'y opposant; elles n’attaquent ces grains que lorsqu'ils ont déjà été entamés par le bec de l'oiseau. Le moineau détruit également les pommes lorsqu'elles sont grosses et bien müres. Il les choisit grosses afin d’avoir plus de surface pour se tenir, et il sait parfaitement reconnaitre leur état de maturation. C’est le seul oiseau qui s'attaque aux tomates dont la saveur acide ne la fait pas reculer, et il cause de réels dommages aux maraichers qui se livrent à la culture de ce légume. Les pois tentent surtout les moineaux au moment où les feuilles cotylédonaires sortent de terre; plus tard, ils s’attaquent aux fleurs et enfin aux graines dont ils sont très friands. Comme ils sont essentiellement granivores, leurs ravages deviennent surtout sérieux sur les végétaux montés en graines. Toutes leur con- viennent, spécialement celles des navets, des choux, des laitues etsur- tout du cresson alénois. On sait qu'il estimpossible de voir réussir une pelouse de gazon si lon ne préserve. au moyen d'un réseau de fils tendus, les graines fraîchement semées. Mais c'est surtout sur les céréales et particulièrement sur le blé que s'exercent leurs ravages. Au moment où le blé commence à mürir, les champs sont envahis par les moineaux ; ils se liennent de préférence sur la lisière de ces champs qu'ils dépouillent sur une largeur de 5 à $S mètres. Dans l'Illinois, les rapports officiels évaluent la perte éprouvée de ce chef à 6 0/0 de la récolte. Cette proportion relativement considérable tient à ce que, non seulement les moineaux dévorent une grande quantité de grains, mais encore à ce qu'ils en font tomber bien davantage en saccageant les épis et en les égrenant. Non contents de ravager les récoltes, les moineaux exercent encore, dans un autre ordre d'idées, une désastreuse influence. Sur 767 réponses au questionnaire dressé par le département de l’agriculture des Etats-Unis au sujet des rapports du moineau avec les autres oiseaux, 739 l’accusent de détruire ou tout au moins d’éloigner les oiseaux insectivores. 70 espèces d'oiseaux utiles nichant dans le voi- sinage des habitations et rendant des services sérieux aux agriculteurs et aux jardiniers sont molestées par les moineaux, notamment les hirondelles, les martinets, les rouge-sorges, les roitelets et les mésanges. Le moineau, nichant presque en tout temps, s'empare des nids abandonnés l’année précédente par ces oiseaux, et lorsque ceux-ci arrivent au printemps pour retrouver leur ancien gîte, la place est occupée et ils ne peuvent en déloger l’'envahisseur. Celui-ci, du reste, ne se gène nullement pour expulser de leur nid les oiseaux déjà ins- allés, briser leurs œufs et s'établir à leur place. Dans beaucoup de localités, les oiseaux insectivores ainsi pourchassés par l’intrus ont quitté le pays et sont allés s'installer dans des localités plus éloignées où ils sont à l'abri des vexations constantes du moineau qui s’écarte rarement des environs des villes et des villages. L'importante question de savoir si le moineau a des habitudes insectivores est certainement une des plus intéressantes à examiner. Nous avons vu ies dégâts qu'il cause, mais s'il était prouvé qu'en ’ EXTRAITS ET ANALYSES 63 échange il détruit un grand nombre d'insectes nuisibles, il aurait droit à des circonstances atténuantes. Malheureusement il n’en est rien. Le moineau n'est pas un insectivore normal. Il nourrit, il est vrai, ses petits en grande partie d'insectes pendant qu'ils sont encore au nid, mais dès que ceux-ci sont en état de voler et de se nourrir eux-mêmes, ils prennent bien vite le régime granivore de leurs parents. En réalité, le moineau est omnivore, mais les graines constituent de beaucoup sa principale alimentation, ainsi que l'ont prouvé de très nombreux exa- mens de leurs estomacs. M. Gurney a constaté que les graines entrent pour 85 0/0 dans sa nourriture. et les insectes pour 6 0/0 seulement. Enfin le moineau cause un tort notable au feuillage des arbres qu'il souille et brûle de ses déjections. Cette nature de dommage affecte éga- lement les bâtiments etles statues qui décorent les jardins etles places publiques. Dans les basses-cours, le moineau est un véritable fléau. Il s’installe au milieu des poules et partage avec elles le grain qu'on leur distribue; il lui arrive mème de poursuivre et de chasser les jeunes poulets qui viennent prendre part au repas. On a calculé que dix moi- neaux mangent autant de grains qu'une poule, et commeils se trouvent partout en nombre considérable, on voit quelle énorme quantité de graines ces pillards dévorent sans profit. En échange de tous ces méfaits, le moineau ne nous rend aucun ser- vice. C’est donc uniquement un parasite et un ennemi. C'est comme tel qu'il faut le traiter et essayer de le détruire par tous les moyens possi- bles. Malheureusement, il est rusé et méfiant, et se laisse très difficile- ment prendre aux pièges qui lui sont tendus. L'ÉLEVAGE Du Hocco AUX ENVIRONS DE BUENOS-AYRES. M. Victorino Alday, éleveur de la province de Buenos-Ayres semble avoir résolu le problème de la reproduction du Æocco Alector à l’état domestique. Cet Oiseau plus grand que la Poule, dont la chair est blanche et fine comme celle du Kaïisan, habite les selves de l'Amérique méridionale. Son brillant plumage est d’un noir azuré dans sa partie supérieure et d'un blanc grisätre dans la partie inférieure de la poitrine et du ventre. Sa tèle est ornée d’une huppe de plumes jaunâtres, rigides et frisées seu- lement dans la partie supérieure. Les Hollandais ont essayé vainement d'obtenir la reproduction du Hocco, qui est restée stérile en captivité. Azara el Sausure disent qu'il est impossible d'obtenir des. petits en captivité. Malgré lx respectable opinion de ces savants, le lecteur qui sera curieux de voir le contraire n'aura qu'à faire un voyage à la propriété (estancia) de M. Alday. En novembre, la Poule Hocco pond deux œuis énormes — dispropor- tionnés avec la grosseur de son corps. Si on les lui retire, elle en pond deux autres, quinze jours après. Et ainsi de suite quatre ou cinq fois. Le poussin naît avec toutes ses plumes après trente-cinq jours d’incu- bation. Il est déjà apte à chercher tout seul sa nourritüre et montre 64 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION plus d’attachement à celui qui le soigne qu'à sa mère. Il vole au bout de trois à quatre jours. (El Diario, 23 mars 1900.) LE Con-Cuoc. — DÉVELOPPEMENT DE SON ÉLEYAGE EN INDO-CHINE. Le Con-Cuoc est une sorte de chenille qui se nourrit des feuilles de Cày-Sau, arbre très commun dans le cercle du Yan-thé. La culture de cette chenille ne se fait presque exclusivement que dans le canton de Lang-gioi; elle se reproduit comme le Ver à soie, d'année en année, au douzième mois de chaque année (janvier); les Annamites suspendent des Cocons aux branches du Cày-Sau, le Con-Cuoc sort des cocons vers le mois de février sous forme de papillon et pond sur les branches de cet arbre des œufs qui, au bout d'un mois environ. donnent naissance à des chenilles. Celles-ci, d’un tempérament bien moins délicat que le Ver à soie, avec lequel elles ont beaucoup de rapports. s'adaptent à la feuille qui les nourrit et sont adultes au bout d’un mois environ; elles atteignent alors à peu près la grosseur du pouce d'un homme; on place des épouvantails sur le Cày-Sau pour en éloigner les Oiseaux qui les mangent volontiers. On en retire un fil auquel on fait prendre la couleur de la paille de riz. Ce fil appelé Sol-cuoc est un crin solide qui’ressemble beaucoup au crin de Florence. Il abonde sur les marchés du Delta. Les industries locales l'emploient à de nombreux usages : couture des chapeaux de Congaï. fabrication de cordes pour archets de violon et d'instruments de musique, etc. La culture du Con-Cuoc est chose facile et peu coûteuse. On trouve- rait pour ce produit des débouchés en Europe, si on se donnait la peine de l'améliorer. Il y a peut-être dans les renseignements qui précèdent le point de départ d'une étude spéciale du Con-Cuoc au point de vue de son utilisation industrielle. (La Quinzaine coloniale, 10 mars 1900. p. 150). DISTRIBUTION DE GRAINES GRAINES DE PLANTES ALPINES A SEMER EN AVRIL QUE M. MAGNE TIENT A LA DISPOSITION DE SES COLLÉGUES®: Astrantia major. | Gentiana alpina. Auricula monachensis. Gentiana decumbens. Aster nanus. Geraniuin syloaticuin. Aster pyrenœus. Gnaphalium leontopodium Campanula alliariæfoli«. (Edelweiss). Campanula turbinata. Papaver alpinum. Carlina acanthifolia. Papaver nudicaule. Carlina acaulis. Primula auricula. Carlina vulgaris. Pœonia officinalis. Clematis integrifolia. Primula Sieboldi. Cousinia hystrix. Rudbeckia purpureu. Delphiniuwm nudicaule. Salvia ringens. Eryngium Oliverianum. D 7 : BULLETIN SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION AMG D DE sRANcGE 4 _ (Revue des Sciences naturelles appliquées) 48° ANNÉE PRIE MARS 1901 SOMMAIRE GEORGES MAGNE.— Action de la neige sur la germination des graines de plantes $ alpiues. 65 D NE RD LH Date sans noyat bn, ou in ni AN ten Areas ee 69 nr VERMOND. — L'avenir de la Guadeloupe, par la culture du caféier....::................ 74 # F us Extraits et Analyses : E. SAUVINET. — Note sur une Otarie née à la Ménagerie du Muséum.....1................ HD Ce Poissons nouveaux du Congo français............... IAE PRO OA ESS ES Te RM ALT der SO Bourquelques /Parastiesidu-Gatéier 4 10 RÉUNION ee) Mdr no net Pre 81 ei eee randos di dei Eee CA . POISSON. — Note sur ie caoutchouc de la Nouvelle-Calédonie....:....................... sû card alpin duballon d'Alsace. rer RS AT EN AN DER EE QT SON AE ; Extrait de lu Correspondance : : \ote sur les élevages de Mammifères, de la Villa du Jagueneau, pres Saumur. ...:....:.... JDE CHARLES PATIN. — Remarques au sujet de l'élevage des oies en:Colombie rer CT PAUL SERRE. — Notes de Zoologie recueilliés en Californie... œ é Sur quelques naissances intéressantes, d'animaux exotiques survenues ee le début de 1901 à la Pataudière, par Champigny-sur-Veude (Indre-et-Loire)................:....,...2... 9% HR PATIN. — Les Opunlia peuvent être détruits par le feu................ ORNE 95 Na Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises | par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. mr CCSN Un numéro 2 francs: pour les membres de la Société 1 fr. 50 SIT ——— AU SIEGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue de Lille — FARIS Le Bulletin paraît tous les mois. SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGGLIMATATION DE FRANC Fonpée LE 10 Février 1854 ie Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 BUT DE LA SOCIÉTÉ Le but de la Société est de concourir : 1° À l'introduction, à l'acclimatation et à la domestication des . espèces d'animaux utiles et d'ornement; 2° au perfectionnement et à. la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; % à l'introduction et à la propagation des végétaux utiles ou d'orné-. ment. ; Ce programme s'applique au territoire des possessions extérieures comme au sol mème de la France. L'attention des personnes compétentes doit être appelée tout spécialement sur l'intérêt qu'il ÿ à d’acclimater. ‘dans les colonies isothermes, des animaux et des plantes utiles choisis ! dans un milieu convenable. La Société contribue aux progrès de la zoologie et de la botanique appliquées en encourageant les études qui SY rapportent et dont elle vulgarise les résultats dans ses séances publiques ou particulières, dans. . ses publications périodiques où autres. Elle distribue des récompenses à honorifiques où pécuniaires, organise des expositions ou des conférences. ! Enfin, d'une manière toute spéciale, par les graines qu'elle donne, par les cheptels qu'elle confie à ses membres ou aux Sociétés dites agrégées où. affiliées, la Socièlé d'Acclimatation poursuit un but pratique d'utilité wénérale et qui la distingue entre toutes les associations analogues uni yuement préoccupées de science pure. ‘ Les récompenses et les encouragements de la Socrêté dAcElina lation peuvent être obtenus par les Francais et les étrangers, le membres de la Société ou les personnes qui n'en font point partie. Son invités à prendre part aux concours : les naturalistes-voyageurs, les. jardiniers, les gardes, les éleveurs de toute catégorie {aviculteurs, pisciculteurs, apiculteurs, sériciculteurs), et en oénéral, tous ceux qui servent, dans la pratique, avec ou sans salaire, le but poursuivi par Jaù * 4 Société. TETE 1 AOMON DELA NEIGE SUR EAN GRR \IINSBION DES GRAINES DE PLANTES ALPINES par Georges MAGNE |!). L'action de la neige sur la germination, quoique peu expliquée jusqu à ce jour, est indéniable. Les agriculteurs ont remarqué que, dans les champs, les graines de Céréales poussent avec plus de vigueur quand elles ont germé au moment où la neige recouvrait le sol. Cette action ne devait pas laisser indifférentes les graines des plantes alpines, souvent lentes et difficiles à germer; il est donc naturel que les botanistes aient cherché à l'utiliser dans leurs tentatives d’acclimatation de ces plantes. Dans son ouvrage intitulé Zes Plantes alpines el de r'o- caille (Doin éditeur, Paris 1895), M. H. Correvon, de Genève, s'exprime ainsi au sujet de l'influence de la neige sur Ja sermination : « Le moment le plus favorable au semis des oraines alpines est l'arrière automne. Il faut avoir soin de peu recouvrir les graines et de ne pas les enfoncer dans le sol. Les pots ou terrines où elles sont semées, devront être placés dans une couche froide, sèche et saine. Des que la neige commence à tomber, on découvre les châssis et lon fait en sorte qu'une forte couche en recouvre les semis. Si on peut le faire, il faut même amonceler la neige au-dessus d'eux, et, si possible, l'arroser avant les nuits froides, de manière à la transformer en glace. » J'ai voulu reproduire les termes employés par M. Correvon pour insister sur l'intervention de la glace qu'il juge néces- saire. Il à ensuite procédé par comparaison entre les graines de même espèce, les unes soumises à ce traitement, et les autres laissées sous châssis sans intervention de la neige, et il a remarqué une plus grande activité et une plus grande régularité dans la germination des premieres. (4) Communication faite à la Section de Botanique dans la séance du 5 mars 1901. s Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 5 66 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION Comme depuis quelques années nous n'avons plus à Paris d'hiver rigoureux, je n'ai jamais essayé, jusquen 1900, mes semis de plantes alpines qu'en terrines, sous châssis froid, au mois de mars. Nous ne pouvons plus, en effet, compter sur la neige, sous notre latitude, et si elle fait une ou deux fois par an son apparition, elle fond rapi- dement et se transforme bientôt en boue. Dans ces conditions, inutile de semer en décembre sans espérance dintervention de neige; le semis au printemps est tout indiqué. Mais cette année, dans la seconde semaine de janvier, nous avons eu presque subitement quatorze de- orés de froid, et une neige abondante qui a persisté durant toute une semaine. J'ai tenté alors d'imiter le procédé employé dans les pays froids, où la neige couvre la terre pendant l'hiver et j'ai soumis des terrines à semence à l’action directe de la neige, aussitôt qu'elle eût commencé à tomber, afin d'éviter que le contenu de mes terrines ne fut préalablement gelé. Mais j'avoue que je n'ai pas osé faire intervenir la glace, comme le fait M. Correvon. 11 me semble que la glace causerait la veiece des semences, tandis que la neige les protège contre cette mème gelée et que le phénomène électrique qui peut se produire sous l’action de la neige, doit être moins diffus, sinon annulé, par une plaque de glace ne laissant plus communiquer les semences avec l'air ambiant. Quand la neige à fondu, j'ai rentré mes terrines dans une serre légè- rement chauffée, et en quelques jours, j'ai obtenu une ger- mination tres dense, avec des graines de Primulacées alpines réputées comme longues et difficiles à germer. Voici d'abord les : Primnula siberica, P. obconica, P. [a- inosa, P. uralensis, P. pubescens, P. auricula, P-Parg®, P. frondosa, P. japonica, P. Sieboldi, puis l'Edelweiss (Gnaphaliuin leontopodium) enfin des graines d'Orchidées rustiques et l’Androsace Laggeri. L'expérience est done concluante. Il faut essayer, sous notre climat, de semer sous la neige les graines de plantes alpines, en surveillant le moment propice, sauf à se rejeter sur le semis du prin- temps, si la neige n’a pas voulu faire son apparition, et à trompé nos vœux. Il parait intéressant d'obtenir ces résultats aux environs de Paris, alors que des tentatives de ce genre ne me parais ACTION DE LA NEIGE SUR LA GERMINATION DES GRAINES 67 sent avoir été essayées que dans des pays froids et qui ont toujours des hivers rigoureux. Cette germination de Prinula obconica et awricula à été obtenue ainsi, 11 Y a dix ans, par un pasteur allemand M. Müller, en Wurtembere (1). Le fait est rapporté par M. Correvon dans son ouvrage : Les plantes alpines el de rocaille; mais M. Müller commence par placer quimze oraines pendant deux ou trois jours dans un bassin rempli de neige fondante, puis il les sème peu profondément dans des terrines, qu'il descend à la cave et les recouvre de neige fondante. Quand cette action de la neige s'est bien exercée, il rentre les terrines dans une pièce chauffée, et il maintient la couche de neige jusqu'à la germination. On voit que dans ce systeme, l'action de la neige inter- vient avant le semis, pour se continuer jusqu à la germi- nation. Cette méthode que je n'ai pas mise à l'épreuve a ses adeptes. On. sait les difficultés auxquelles on se heurte quand on veut faire germer des graines d'Orchidées rus- tiques, or, l'intervention de la neige à été essayée avec d'excellents résultats à Munich pour des semis d'Orchidées rustiques, mais ici, on seme sur la neige. L'auteur auquel nous empruntons ce procédé (2), conseille, après avoir dis- posé des caisses bien drainées et remplies de terre préparée à cet effet, de recouvrir le sol d'une couche de cinq centi- mètres de neige; puis, c'est sur cette neige que l'on répand les graines d'Orchidées. On transporte ensuite les caisses dans un endroit où la neige puisse fondre, puis on étend sur le sol du Sphagnuin haché et l’on place sur la caisse trans- portée sur couche chaude, une plaque de verre. Au bout de quelques semaines les Orchidées lèvent; il est bon d'ajouter que l'on peut obtenir le même résultat, avec plus de temps, en procédant à froid. Voici donc les-effets de la neige heureusement constatés pour la germination des plantes alpines, aussi bien dans les pays froids que dans les pays tempérés avec les différents modes de procéder, c'est-à-dire l'intervention après le semis ou enfin le semis dans la neige elle-même. (1) Müllers Gärtner Zeitung 1889, n° 9. (2) Unsere heimiséhen Orchideen. Munich 1892, 68 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Nous nous promettons d'étudier l'an prochain, à Boulogne- sur-Seine, le semis direct sur la neige et l’action de la neige sur les graines avant le semis. Il semble que, quelque soit le mode de procéder, il se produit avec l'intervention de la neige, un phénomene électrique plus où moins intense et un développement plus rapide de vitalité. Dès maintenant il s'agit de déterminer et de préciser dans l'avenir les divers résultats de ces expériences renou- velées et comparées, et d'interroger de plus près l'électri- cité qui est encore au début de ses applications. On pour- rait étudier aussi, par comparaison, l'action directe d'une pile électrique sur des graines, et celle de la neige sur ces mêmes graines, afin de poser ensuite des principes tirés des résultats de ces comparaisons. Notre collègue, M. de Lamarche, nous disait à la derniere séance de notre section de Botanique qu'il avait étudié éga- lement l'action directe d'une pile électrique sur les graines, et qu'il avait constaté l'heureux résultat de cette action sur des graines semées ensuite. Je m'attacherai aussi à cette étude; et du reste. n'inté- resse-t-elle pas également la grande culture? N'a-t-on pas déjà tenté, au moyen de plaques métalliques placées dans le sol et de mâts destinés à conduire l'électricité, de doubler les récoltes de Céréales, en France comme à l'étranger? Mais ceci dépasse les bornes de notre sujet: me renfer- mant dans l'étude des plantes alpines, je crois avoir démon- tré que la neige est un agent incomparable pour la germi- nation des graines de notre flore alpestre et que ceux qui tentent l'acclimatation de nos merveilleuses plantes des montagnes ne doivent pas refuser le précieux concours qu'elle vient leur offrir. LA DATTE SANS NOYAU CONSIDÉRATIONS PARTICULIÈRES SUR LA POLLINISATION ET LA FÉCONDATION. par Ch. RIVIÈRE directeur du Jardin d'essai du Hamma. En 1899, j'ai signalé à la Société d’acclimatation dans une communication orale et avec exemples à l'appui la curieuse fructification d'un Dattier, Phænix dactylifer«, observée depuis longtemps au Jardin d'Essai d'Alger. On sait que les variétés du Dattier sont nombreuses et que leurs caracteres les plus saillants résident principa- lement dans le fruit : les dattes sont petites, grosses, presque rondes ou allongées, à pulpe sèche, molle, char- nue, demi-douce, très sucrée, etc.; quelquefois le noyau est gros, allongé, mince, pointu, obtu, etc. La variété remarquée au Hamma a pour caractère parti- culier et stable, ainsi que je l'ai démontré par des coupes faites en séance, l'absence absolue de noyau, ce qui aug- mente considérablement le volume de la pulpe dans cette datte. On constate bien au centre de c2tte datte encore verte l'emplacement souvent à peine marqué qu'aurait occupé le noyau, indication quelquefois linéaire au moment de la maturité : dans cette cavité restreinte se trouve le péris- perme parcheminé et transparent à l'état de pellicule, mais ne contenant aucune trace, même embryonnaire du noyau. Cette variété est très fructifere et présente toujours de- puis qu'elle est observée ce même caractère d'atrophie de l'ovule, sans exception aucune. La datte paraît être de bonne qualité autant que l'on peut en juger par la maturité relative de ce fruit sur le littoral de l'Algérie, au bord même de la mer, station défa- vorable à la fructification du Dattier. 70 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION *k X * On ne saurait invoquer dans ce cas le manque de fécon- dation artificielle, vieille pratique des Arabes, car ce Dat- tier se trouve dans un groupement de Palmiers où les mäles abondent et où les femelles portent toutes réguliè- rement des dattes sans le secours de la pollinisation voulue. Cet exemple de datte sans noyau à pulpe très développée, démontre bien, ainsi que cela se remarque sur beaucoup de fruits, même pour la figue, que la fécondation naturelle ou artificielle, même la caprification, ne sont pas toujours indispensables pour le grossissement de l'ovaire. Mais il serait plus exact de dire que la pollinisation natu- relle ou artificielle, même non suivie de la fécondation des ovules, aurait quelque influence, soit par excitation, soit par irritation sur le développement charnu ou pulpeux d'un fruit même stérile. La fécondation n'est donc pas absolument indispensable au développement du péricarpe, cette partie la plus inté- ressante de certains fruits, aussi faut-il rappeler que, con- trairement aux indications des grands traités de botanique, les fruits sans graines ne sont pas de rares exceptions et que l’on doit citer parmi ceux de cette nature les plus gros et les plus succulents, les diverses esp ces de bananes et leurs nombreuses variétés, beaucoup de Plaqueinines cul- tivées depuis longtemps en Chine et au Japon, les oranges et les citrons sans pépins, le fruit conique du Monstera deliciosa ; les raisins de Corinlhe, etc. Dans ces cas la fécondation n'a aucun rôle sur le déve- loppement des fruits ni sur leur abondance puisque les espèces précitées se chargent annuellement d'une abon- dante fructüfication. * x x La pollinisation non suivie de fécondation est-elle abso- lument utile au développement de l'ovaire prenant les apparences d'un fruit formé à péricarpe charnu dans les Dattiers ou dans les Palmiers en général pour se borner à cette famille? Je ne saurais me prononcer sur ce point et j enregistre simplement quelques observations comme con- tribution à l'étude de cette question. LA DATTE SANS NOYAU il Dans les hybrides de Palmiers que j'ai #owlus et que je crois avoir obfenus, j'ai remarqué dans beaucoup de cas la stérilité des femelles, mais cependant le grossissement de l'ovaire dans un état voisin de la dimension normale, quoique vide, c'est-à-dire sans pulpe ni graine : tels sont Phœnix Rivieri ou Phœænix canariensis X par Ph. recli- nata; Corypha macrophylla où Latania borbonica X par Corypha australis, etc., et même remarque est faite sur des hybrides de Phœænix dactylifera X par Ph. pumila. Mais il y aurait des exemples de dattes à pulpe, acciden- tellement sans noyaux, quand il ne semble pas y avoir eu fécondation. Les années où l’on accomplirait artificielle- ment cet acte, les noyaux sont formés dans ces mêmes sujets stériles précédemment. Cependant, dans beaucoup de cas, quand il ne semble pas y avoir eu de pollinisation, la fleur femelle ne tarde pas à se détacher avec son ovaire peu après son épanouissement. Quelles sont l'influence et l’action du pollen des sujets mâles dans les nombreuses variétés du Phœænizx dactylifera? Quoique au milieu de variétés bien différentes dans une . oasis où les mâles n'ont guère d'identité, la remarquable variété Deglet-nour, fécondée par n'importe quel mâle, produit toujours les mêmes caractères de fructification si recherchée par ses qualités particulières et fixes, mais fixité apparente qui ne se perpétuerait pas sûrement par le semis. Dans ce cas, quelle que soit l'origine de la pollinisation, son action semble identique sur le développement et les qualités de la pulpe, mais il n'en est pas de même sur les caractères héréditaires du noyau s'il y a eu fécondation. * X # La pollinisation à une action immédiate sur l'organe femelle et sur toute la fleur car on la voit subitement se faner, se dessécher et tomber, tandis que les autres non pollinisées ont une durée prolongée. Et ces phénomènes s'expliquent quand on suit dans le stvle la marche et la vie particulière en quelque sorte para- sitaire du pollen depuis sa première évolution dans le stig- mate jusque vers le sac embryonnaire. re. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Cette excitation par la pollinisation crée un état physio- logique tout particulier de l'organe femelle qui peut trans-. former l'ovaire en un fruit pulpeux très développé, mais incomplet, puisque souvent on n'y retrouve que peu ou point la trace d'ovules, comme dans les fruits précités. * x On ne doit pas toujours la fructification complete à la pra- tique de la fécondation artificielle des Dattiers, pas plus que la maturité des figues à la caprification qui n'est qu'une opération très localisée dans le bassin méditerranéen. Les pratiques ne concordent souvent pas avec l'état de dévelop- pement complet des deux organes sexuels et elles sont fort variables dans leurs applications. Elles sont même inutiles dans un groupement de Dattiers femelles quand il y à un nombre suffisant de pieds mâles bien répartis surtout vers le vent dominant à l'époque de la floraison. Ce que j'ai vu de ces fécondations artificielles dans mes séjours dans les oasis où elles sont diversement pratiquées, ne m'a pas toujours édifié sur leur rôle utile, et souvent j'en ai conclu que la fécondation directe avait seule été efficace, sans cependant nier les résultats certains de la pollinisation voulue en temps opportun. * x * Dans notre datte sans noyau, le manque de fécondation, maloeré la pollinisation est donc une qualité due à la varia- tion de l'espèce : il faudrait donc se bien garder, si on le pouvait, de remédier à cette anomalie, qui parait avoir pour caractere absolu l'avortement des ovules. L'intérêt pratique des faits de cette nature réside juste- ment dans la perpétuation par la fixité de ces anomalies accidentelles ou voulues. Le noyau qui occupe souvent un quart du volume du fruit est pour ce dernier un désavantage en ce sens que la pulpe se trouve réduite de la dimension du noyau. D'autre part ce noyau, qui est un albumen corné, enlève inutilement à la plante, des éléments initiaux exigeant une réparation faite aux dépens de la vitalité du sujet et par conséquent des fructifications subséquentes. CO LA DATTE SANS NOYAU 18 L'absence de noyau dans notre datte est donc un avantage réel : et c'est d’ailleurs la grande recherche en horticulture fruitière de diminuer dans les fruits le volume des graines, sinon de les supprimer. | Pour citer des exemples plus spéciaux dans cet ordre d'idées dans des faits de culture exotique, je signalerai brie- vement des fécondations entreprises au Jardin d’Essai d'Alger entre des bananiers comestibles et des seminiferes pour atténuer chez ces derniers, de tempérament plus rus- tique et de plus grande aise d'extension, la formation de oraines dures et développer la pulpe. Une opération contraire, qui rendrait seminifères les Bananiers comestibles ne serait pas à encourager pratique- ment. * X * Le Dattier qui produit la datte sans noyau est un très beau sujet, à tête bien formée et ayant de nombreuses feuilles. Son stipe est élevé et d'un fort diamètre puisqu'il mesure 0%, 75et il a pour caractere l’adhérence permanente des bases des pétioles. Sa fructification, ainsi qu'il est dit plus haut, est régulièrement abondante sur de nombreux régimes bien formés. Mais comment propager cette variété qui serait certaine- ment très appréciée dans les oasis? Il y aurait là un pro- blème intéressant à résoudre deu l’ordre pratique et éco- nomique. Malheureusement on n’a jamais remarqué d’œilletons sur ce Dattier, ni à sa base, ni sur son stipe, œilletons si com- muns sur certaines variétés. Le développement de ces bour- geons en quelque sorte vivipares constituerait cependant le seul moyen de reproduction de ce beau sujet appelé à dispa- raitre forcément un jour ou l’autre, soit par le Less soit accidentellement. Y a-t-il des procédés à appliquer pour provoquer l’émis- sion de bourgeons basilaires ou latéraux dont on obtiendrait ensuite l’enracinement aprés séparation d'avec le pied- mère ? C’est ce qui reste à rechercher attentivement dans une voie difficile que la science et la pratique n’ont pas encore tracée. L'AVENIR DE LA GUADELOUPE PAR LA CULTURE DU CAFÉIER. par M. VERMOND ||}. Si nos nouvelles colonies de l'Afrique et de l’Indo-Chine sont en faveur, par contre nos vieilles colonies sont bien démodées. L'indifférence la plus complète règne sur nos établissements des Antilles et tout spécialement sur la Guade- loupe, qui na pas vu vingt immigrants français depuis quinze ans. C’est que la Guadeloupe s'est surtout adonnée à la culture de la Canne à sucre : toute la Grande Terre, dont les terrains plats ne se prêtent pas à d'autres cultures, le nord-est, l'est et le sud-est de la Guadeloupe proprement dite ne connais- sent guere d'autres plantations que celle de la Canne. Le créole blanc, dans les bonnes années d'autrefois et mème encore aujourd'hui, a toujours regardé avec un certain dé- dain les cultures du Caféier et du Cacaoyer qu'il appelle se- condaires tandis qu'ailleurs on les nomme /es cultures riches, et il lui semble plus noble, même maintenant que les années de disette ont succédé aux années grasses, de ne pas gagner d'argent dans les plantations que de s'adonner aux autres cultures. Le planteur de sucre étant doublé d'un in- dustriel, c'est le grand colon: les autres cultivateurs sont les petits. | Il y a cependant quelques grands propriétaires de cafée- ries aux environs immédiats de la ville de la Basse-Terre, dont l'intelligence et la fortune devraient servir d'exemple à tous. Mais, à part ces trop rares exceptions, toute la cul- ture caféière est faite par les petits colons noirs qui exploi- tent chacun quelques hectares de Caféiers, assez pour vivre, pas assez pour mettre de l'argent de côté. En général, la culture en grand du Caféier, les grandes plantations comme à Porto-Rico, au Centre Amérique et sur- tout au Brésil, sont complètement inconnues à la Guade- (1) Communication faite en séance générale à la date du 29 février 1901. L'AVENIR DE LA GUADELOUPE PAR LA CULTURE DU CAFÉIER 19 loupe; chacun travaille un jardin soigné, ratissé, propre comme un enclos de chef de gare, délicieux à voir et à par- courir; personne ne penserait à établir des plantations de cent, deux cents ou trois cents hectares sous peine de passer pour atteint de la folie des grandeurs. Et c'est cependant là qu'est l'avenir et le salut de la colo- nie; si des colons européens veulent y porter leur travail et des capitaux, et profiter de découvertes récentes pour trans- . former la culture routinièere actuelle du Caféier, La Guadeloupe n'est pas, en effet, un pays où la culture du café soit facile comme dans l'intérieur des continents. Bien que l'ouest de l'ile, depuis la commune de Deshayes au nord-ouest jusqu'à celle des Trois-Rivières au sud, soit à peu près à l'abri des vents, bien que les hauteurs dans cette région soient favorables à la culture caféière, il faut cepen- dant s'abriter contre le vent, il faut aussi fumer des terres qui ne possèdent pas la richesse des terres vierges du Gua- temala ou du Mexique. De là des frais considérables, mais compensés par la plus- value sur la qualité d’un café de premier ordre et par la dé- taxe de 78 francs par 100 kilogs dont jouissent nos cafés coloniaux en attendant la détaxe complete dont ils seront certainement un jour gratifiés. Ce qui arrête surtout le développement des plantations caféières, c'est une maladie du Caféier qui exige tant de soins délicats que personne ne peut songer à agrandir son exploitation; il faut se livrer à une lutte continuelle contre le dépérissement des plantes, leur prodiguer des soins incessants, et dans ces conditions force est bien à tous autres qu'aux quelques grands planteurs des environs de la Basse-Terre, de se borner à des cultures de dimensions infimes sans pouvoir songer à de vastes plantations qui seraient d'autant moins chères et d'autant plus rémunéra- irices qu'elles seraient plus grandes, puisque les frais géné- raux se répartiraient sur un grand nombre d'hectares au lieu de peser sur trois, quatre, cinq ou six hectares. Cette maladie n'est heureusement pas l'Æemileia vasta- trix qui a détruit les caféeries de Ceylan, de Bourbon, d'une partie des Indes néerlandaises; c'est une maladie moins grave, qui s'attaque aux racines et contre laquelle de grands soins peuvent apporter des adoucissements, 76 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Cependant, elle n'est pas tellement anodine que le décou- ragement n'ait parfois été pres de s'emparer des planteurs: quelques-uns ont écouté les conseils des savants qui, sans se préoccuper de la valeur marchande du produit, n'ont vu que la plante indemne de toutes ces maladies et ont prôné la cul- ture du Coffea liberiea et même proh pudor! celle du Coffea stenophylla en remplacement du Cofea arabica. Les marchands de café qui, se plaçant à un point de vue différent, voient avant tout la qualité et la valeur marchande . du produit, se sont récriés, ont montré aux quelques Guade- loupéens égarés qu'ils perdraient complètement la grande réputation de leur excellent café s'ils cultivaient le /berica ou le stenophylla, pire encore. On leur répondait : Mieux vaut le /iberica que pas de café du tout, ce qui, malgré les apparences, n'est pas un raisonnement juste. Car, sur 15.000.000 (quinze millions) de sacs que produit le monde entier, quel besoin aurait le consommateur d'acheter à n'im- porte quel prix les quelques milliers de sacs de Ziberica que que produirait la Guadeloupe. Heureusement pour l'avenir de nos colonies, un homme étudiait la maladie et cherchait le reméde. C'est M. Armand Thierry, alors directeur du jardin botanique de Saint-Pierre de la Martinique. Il sentait bien que le Ziberica, prôné d'abord par lui-même faute de mieux, était un pis-aller inacceptable. I1 chercha et détermina la maladie exacte qui étiolele Coffea arabicaaux Antilles; c'est une maladie vermi- culaire; le ver ou anguillule s'attaque aux racines, en détruit le chevelu et le plan dépérit par la base. De nombreuses expériences lui démontrèrent en même temps que le Caféier de Liberia était absolument réfractaire à cette maladie ver- miculaire. : La conclusion était simple : il fallait greffer l'arabica sur des racines de Caféier de Liberia. C'est ce qu'entreprit M. Armand Thierry : la greffe par approche sur parties ligneuses et avec des plantes âgées d'un an ne réussit pas; le greffon se décollait du sujet sous l'influence des vents ou des chocs, et le travail avait été fait en pure perte. Il tenta alors de greffer par approche en dessous des coty- lédons sur des plantes n'ayant guère qu'un mois de levée après la germination. Le résultat fut concluant : outre la L'AVENIR DE LA GUADELOUPE PAR LA CULTURE DU CAFÉIER 11 facilité plus grande du procédé de ce greffage sur parties herbacées que sur des parties ligneuses, la greffe a toutes les qualités désirables d'adhérence et de solidité. | Ce n’est pas le lieu ici d'entrer dans tous les détails d'une méthode que M. A. Thierry a développée dans le Bulletin agricole dela Martinique (mai-juillei 1899), dans une séance du syndicat agricole de la Martinique tenue le 4 septem- bre 1899, et devant les membres du Congres de l'Agriculture à l'Exposition de 1900. Il suffit de dire que c'est cette mé- thode qui semble devoir être le point de départ de la renais- sance commerciale des Antilles françaises. Grâce à elle, la Canne à sucre usée, finie malgré toutes les protections de la loi, peut disparaitre; le Caféier sauvera nos vieilles colonies. Quand les capitaux habitués à l'exploi- tation exclusive de la Canne à sucre abandonneront cette denrée pour fournir une plus grande activité aux plantations dites si bizarrement aujourd'hui secondaires du Caféier, ils deviendront alors largement rémunérateurs; surtout si l'on abandonne les vieilles méthodes de culture pour ne planter que des plants greffés suivant les expériences con- cluantes de A. Thierry, et si, au lieu des quelques misé- rables hectares que les soins minutieux actuels de conser- vation et de défense contre la maladie ne permettent pas d'étendre, on veut créer hardiment la grande plantation, comme à Java, dans le Centre Amérique et au Brésil. Évidemment il faudra encore du travail ; ilen faut toujours et partout en culture; il ne faudra pas planter au hasard, sans se préoccuper ni de la qualité ni de l'exposition du terrains comme on l'a vu faire à quelques européens trop audacieux daus leur inexpérience. Mais, ces précautions élémentaires prises, le succès est certain. Certes, on ne peut arracher les anciennes plantations qui ont de la valeur et continueront à produire gràce aux soims minutieux qu'on leur donne sans compter. Mais toutes les nouvelles cultures pourront se créer sur une plus vaste échelle, et produiront le café en abondance et à meilleur marché, grâce à l'étendue même des terrains qu'elles cou- vriront. Le gouvernement local aura peut-être enfin à concé- der les terres de l'intérieur de l'île qui n'ont jamais servi à rien, bien qu'elles soient les mieux abritées, les plus riches en /wunus,qu'elles aientles qualités de fertilité qui manquent 18 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION aux terrains des bords de la mer jusqu ici seuls habités, et seuls cultivés. Ce n'est pas là un rêve, gràce à la méthode de greffage Thierry, et si la mode revient à ces vieilles colonies des Antülles, il y a certes un avenir autrement beau pour les colons et les capitaux européens à la Guadeloupe que dans les sables du Sénégal, du Soudan, du Congo ou à Madagascar même. C'est dans ces pays nouveaux que se portent aujourd'hui toutes les énergies qui demandent à se dépenser; c'est à la Guadeloupe qu'elles devraient être dirigées. Un sang nou- veau ranimerait ces vieilles colonies où la politique et les animosités de races qui en découlent, absorbent toutes les forces vives et aboutissent à une décadence qu'une immigra- tion nombreuse arrêterait aisément, avec un peu d'appui du gouvernement local. EXTRAITS ET ANALYSES NOïE SUR UNE ÜTARIE DE CALIFORNIE N£E A LA MÉNAGERIE DU MusEuM par M. E. Sauvinet. Le 26 janvier 1897, la Ménagerie du Muséum eut le regret d'inscrire, sur son registre de sortie, la mort d'un mâle d'Otarie de Californie (Otaria californica). On dut priver la femelle d’un nouveau compagnon, le prix de celui-ci étant trop élevé pour les faibles ressources dont dispose la ménagerie, Le 2 décembre 1899, un établissement zoologique particulier, le « Pôle Nord », se vit dans la nécessité de mettre en vente ses pensionnaires, au nombre desquels se trouvaient sept Otaries ; le Muséum en acquit une qui aussitôt fut mise dans le bassin, près de l’'Amphithéàtre, et fit assez rapidement connaissance avec la veuve solitaire. La nouvelle venue donna longtemps quelques doutes sur la nature de son sexe, et cela à cause de ses cris ressemblant à s'y méprendre à ceux du mâle. En tous cas, ses allures plutôt vives ne faisaient penser en aucune façon à celles d'une femelle en état de gestation. Cependant, le 13 juin, c'est-à-dire 6 mois et 13 jours après son arrivée à la Ménagerie, la très bruyante Otarie emplit l'air de gémissements tellement spéciaux, que je ne tardais pas à aller me rendre compte de visu du motif de ces plaintes. À la clarté des étoiles (il était onze heures de la nuit), je pus constater la naissance d'un petit animal à poil ras, épais et très brun, de la grosseur d'un Chien de Terre- Neuve de 2 mois. La mère, avec une grande sollicitude, se mit aussitôt à la toilette du bébé qui dura jusqu’au jour. Enfin, après un bain qui ne parut pas très. apprécié de ce dernier, puisque c'est dans la mächoire maternelle qu'il fit, du haut de la plateforme, un plongeon sonore mais de courte durée, la mère revint avec son précieux fardeau sur le rocher où, avec mille soins attentifs, elle se mit à remplir ses devoirs de nourrice. Les cinq jours qui suivirent la naissance, il ne fut point permis au nouveau-né de se mettre à l’eau; ce n’est que le sixième que la mère, avec beaucoup de précautions, l’entraina doucement à l’eau, le soute- nant, le portant au besoin sur son dos. Ces promenades nautiques durèrent jusqu'au jour où le petit, se sentant assez fort pour se passer de l’aide de sa mère, et même de sa permission, put prendre, seul, ses ébats dans le bassin. L'arrivée de ce nourrisson sembla un moment sinon détruire, du moins gâter les bons rapports qui existaient entre les deux femelles adultes. La jeune mère ne permettait point à sa voisine d'approcher de son petit, les disputes étaient continuelles et finissaient quelquefois mème par des batailles; au moment des repas surtout, le spectacle était très amusant. La bonne entente semble à présent vouloir revenir 80 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION peut-être jusqu'au jour très proche où le jeune, qui jusqu'alors s'est contenté du lait maternel, voudra lui aussi prendre sa part des Poissons distribués à ses ainées. Aujourd'hui, 27 novembre, notre élève a plus de 6 mois; sa gros- seur est plus du tiers de celle de sa mère; sa tête qui, les premières semaines de sa naissance, était ronde, s'est sensiblement allongée. l'accroissement est à peu près le mème que chez les jeunes Chiens: sa démarche surtout s'est modifiée; il ne fait plus, comme aux pre- miers jours, de ces sauts qui lui donnaient les apparences d'un Crapaud et le rendaient si comique. Sa santé est excellente el nous sommes en droit d'espérer qu'il comptera longtemps parmi les hôtes de notre Ménagerie. Bull. du Museum d'Hist. Nat., 1900, n° 7. PoIssONS NOUVEAUX DU CONGO FRANÇAIS. Le D: Pellegrin poursuit, depuis plusieurs années déjà, une série de recherches des plus importantes sur l'ichthyologie du Congo français; ses nombreux travaux ont été l'objet de communications à la réunion des Naturalistes du Muséum; nous condensons ici les faits les plus saillants qui ressortent de ses intéressantes études. La faune ichthyologique africaine présente une grande homogénéité. En effet, à l'exception de la région méditerranéenne, qui a une physio- nomie particulière, on rencontre habituellement dans tous les grands fleuves africains, Nil, Niger, Sénégal, Zambèze, sinon toujours les mêmes espèces, du moins des espèces en général très rapprochées. Le Congo et l'Ogooué n'échappent pas à la loi commune. Les Pois- sons nombreux qui peuplent ces cours d'eau présentent de grandes affinités avec ceux maintenant bien connus du Sénégal et du Nil. Il en est cependant un certain nombre qui semblent propres à l'Ouest africain. M. Sauvage en a fait connaître quelques-uns d'après les premiers matériaux rapportés par M. de Brazza et ses collègues; depuis. M. Vaillant, M. Günther, Mlle Schilthuis ont décrit plusieurs types in- téressants de ces régions. Enfin, M. Boulenger vient tout récemment de publier un magnifique ouvrage, superbement illustré, sur la faune ichthyologique du Congo. Néanmoins, M. le D' Pellegrin a pu continuer très fructueusement les recherches de ses devanciers et enrichir la science d'une ample moisson de faits nouveaux. Jetons un rapide coup d'œil sur les prin- cipales familles qui habitent le Congo et l'Ogooué. Les Ganoïdes sont représentés dans ces deux fleuves par les Polyptères, à pinnules dorsales plus ou moins nombreuses, dont une espèce atteint jusqu'à 1 mètre de long. Les Mormyridés, Poissons africains aux formes des plus bizarres, sont extraordinairement nombreux. M. Pellegrin en à fait connaitre plusieurs espèces appartenant au genre Mormyrops : M. Vaillanti. EXTRAITS ET ANALYSES SL M. Furcidens., M. Boulengeri. Cette dernière est particulièrement re- marquable par son museau prolongé en un long tube légèrement re- courbé vers le bas, à son extrémité. Les Cyprinidés ne sont pas très abondants au Congo. Ils appar- tiennent principalement aux genres Labeo et Barilius. Les Characi- nidés, par contre, sont brillamment représentés. Cette famille, spé- ciale à l'Amérique du Sud et à l'Afrique, compte de nombreuses espèces dans la région qui nous occupe; M. Pellegrin a signalé deux .genres nouveaux : le Mesoborus crocodilus et l'Hemistichodus Vaillanti et plusieurs espèces Bryconethiops Boulengeri, Xenocharax crassus, Distichodus hypostomatus. Les Siluridés sont aussi des plus abondants ; M. Pellegrin a fait con- naître deux espèces : Gephyroglanis ogooensis, Peltura scaphyrhyn- chura. Ce dernier Poisson est particulièrement curieux en ce qu'il pré- sente un cuirassement latéral partiel qui le rapproche de certains genres de l’Amérique du Sud. Les Acanthoptérvgiens ne sont guère nombreux, sauf dans une seule famille, celle des Cichlidés. Le D° Pel- legrin en nomme un certain nombre : Paratilapia multidens, Parati- lapia nigrofasciata, Pelmatochromis lepidurus, Tilapia bilineata. Enfin la famille des Labyrinthidés dont le type est ce curieux petit Poisson grimpeur de l’Inde et de l'Asie orientale l'Anabas scandens, est représentée en Afrique par le genre Ctenopoma dont M. Pellegrin, a fait connaître trois espèces nouvelles Céenopoma ocellatum, C. acu- tirostre, C. denticulatum. Ajoutons pour finir que la plupart de ces Animaux sont comestibles et constituent une précieuse ressource ali- mentaire. Ces quelques indications suffiront à montrer qu'en dehors de leurs qualités purement scientifiques, les recherches de M. le D° Pellegrin ont encore une portée pratique qui mérite la plus grande attention. Bull. Soc. centr. d'Agriculture et de Pêche, Février 1901. SUR QUELQUES PARASITES DU CAFEIER 4 LA REUNION (1). Dans un petit travail publié en 1899 dans la Revue des Cultures colo- niales (n° 28, 5 mai), j'ai indiqué quels étaient, à la Réunion, les prin- cipaux parasites du Cañféier (2). Aujourd'hui, j'ai seulement pour but de compléter certaines des indicartons précédemment données. I. Je commencerai par le RÉDAODISrE dont la larve, en perforant les fruits, cause un préjudice énorme : il s’agit du Botyde du Caféier (1) Extrait de la Revue agricole, organe des cultivateurs de la Réunion, n° 1, anvier 1901. @) Les parasites signalés dans cette étude étaient : Thliptoceras octogut- talis, Cemiostoma coffeella, Gracilaria coffeifoliella, Lecanium coffeæ. L. nigrum, Dactylopius Adonidum, Cratopus punctum, des fourmis et des termites, parmi les insectes, et l « Hemileia vastarix », au nombre des para- sites cryptogamiques. Butl. Soc. nat. Accl: Fr, 1901. — 82 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION (Thlipoceras octoguttalis Feld.). Cet insecte a été rencontré non seule- ment aux îles Mascareignes, mais encore à Natal, à Ceylan. à Bornéo. dans l'Inde, aux Moluques et en Australie. La larve en question, arrivée au terme de sa croissance, mesure une longueur de 11 à 12 mil- limètres, et un diamètre de 2 millimètres environ. Sa couleur générale est claire. Sur le dos se trouve une double rangée de taches brunes, séparées par une ligne très nette de couleur claire. Les taches brunes forment comme de petits ilots entourés d'une teinte violette ou lie-de- vin qui finit en se dégradant. L'introduction de la larve à l’intérieur du. fruit a toujours lieu à la base de ce dernier, lorsque la baïe n’est pas encore müreet que les tissus en sont encore tendres. Le développement larvaire semble durer de six à huit semaines et chaque larve peut détruire une quarantaine de fruits pendant ce temps. Le papillon mesure 6 millimètres environ de longueur, de 11 à 12 millimètres d'envergure. Au repos, ses ailes demeurent ouvertes, les deux grandes cachant en partie les petites. Sur la marge de chaque aile supérieure, on remarque quatre taches transparentes, d’un blanc nacré, à reflets bleuàtres ou violacés, de forme irrégulière et nettement circonscrites par une fine bordure noire, La couleur générale est un gris argenté tirant sur le jaune fauve, à mesure surtout qu'elle gagne l'extrémité des ailes supérieures. Les dégâts causes par le Botyde du caféier sont quelquefois inquiétants. La perte qui en résulte peut représenter 50 0/0 de la récolte entière. De plus, ces dégâts ne s’arrètent malheureusement pas aux fruits. Après la récolte, lorsque les caféiers sont entièrement dépouillés de leurs fruits, les femelles du Botyde déposent leurs œufs sur les bourgeons terminaux des jeunes branches. Immédiatement après leur naissance. les jeunes larves pénètrent à l’intérieur de ces bourgeons et de là, dans le tissu médullaire occupant le centre des branches. Elles se creusent alors des galeries atteignant facilement de 12 à 20 centimètres de profondeur. Les extrémités des rameaux ainsi minés se dessèchent et meurent. Les fruits attaqués par les larves du Botyde du caïéier devraient ètre soigneusement cueillis, puis brülés ou écrasés. On devrait aussi couper les extrémités des rameaux dans lesquels ces larves ont creusé leurs galeries et les détruire par le feu. Malheureusement, les pro- priétaires qui agissent ainsi sont bien rares. L'emploi des pièges avec lampes n'a donné des résultats que très médiocres. Je ne connais pas quels sont les ennemis naturels du Botyde du caïéier, mais je compte entreprendre cette étude sous peu. Ils doivent ètre bien peu répandus à la Réunion, si on en juge par l’abondance toujours croissante du redoutable parasite (1). Et maintenant quel semble être le pays d'origine du Botyde du caféier? Il n’est pas très facile de répondre à cette question avec uno entière certitude. Je suis cependant porté à considérer l’insecte comme ayant été importé d'Afrique avec le caféier. Il est, en effet, digne de (1) En 1898, nous avons constaté que les Botydes du Caféier étaient attaqués par un parasite et avons trouvé un hyménoptére sortant de l'enveloppe qui aurait dû dunnér naissance au microlépidoptère. ACINE EXTRAITS ET ANALYSES 83 remarque que, dans tous les pays où le « Thliptoceras octoguttalis » a eté trouvé, on cultive le caféier. Je crois donc quil faut voir là autre chose qu'une simple coïncidence. On pourrait néanmoins se demander comment il se fait que les dégâts commis par le parasite n'aient été signalés qu'aux iles Mascareignes (la Réunion et Maurice), sans qu'il en ait été question dans lés régions où le Botyde à été rencontré. Faudrait-il alors admettre que dans ces régions l'insecte respecte le caféier pour s'attaquer à d’autres végétaux ? Cette explication ne parait guère plausible, et il me semble bien plus logique de penser que. dans toutes ces régions, le Botyde attaque le caféier, mais en causant probablement des ravages peu importants, par suite sans doute de la guerre acharnée que doivent lui faire certains hyménoptères parasites n'existant pas aux Mascareignes, ou du moins y étant très peu nom- breux ponr une cause quelconque (1. Les planteurs ont alors dû se borner à constater que les fruits du caféier étaient quelquefois attaqués par une larve, sans chercher à connaitre l’insecte qui en provenait. Cet insecte parfait, il est vrai, aurait été successivement capturé dans ces diverses régions — mais, comme une espèce banale — puis envoyé en Europe pour la détermination, sans que l'on sût qu'il correspondait à la larve nuisible. J'avais tout d’abord pensé — contrairement à ce que je viens d’'ex- poser ci-dessus — que le « Thliptoceras octoguttalis » était d'origine asiatique et avait été importé en Afrique et dans les iles africaines de l’océan Indien,avec des végétaux de l'’Asie ou de l'archipel indo-malais; peut-être avec des » Ixora » (genre appartenant à la famille des Rubiacées et très voisin du genre « Coffea »). Ce qui me portait à croire cela, c'était l'observation faite au jardin botanique de Saint-Denis (Réunion), où j'avais trouvé une larve du Botyde du caïféier dans des fruits d «Ixora grandiflora », espèce très décorative, originaire préci- sément de l'Inde et de Ceylan. Cette hypothèse — que ie n'exposai d'ailleurs dans aucun recueil — aurait pu avoir une sérieuse valeur si le genre « Ixora * avait été spécial à la flore asiatique. Mais il n’en est rien, car des recherches. faites avec soin, m'ont appris que certaines espèces de ce genre étaient particulières à l'Afrique méridionale et aux Mascareignes. J'ajouterai d’ailleurs que le Botyde du caléier semble bien rarement s'attaquer aux fruits des » [Kora ». tandis que des caféiers situés dans leur voisiriage immédiat ont une bonne moitié de leurs fruits perforés par le redoutable parasite. IT. Dans ma note publiée dans la Revue des Cultures coloniales, je signalais — à la Réunion — deux microlépidoptères dont les larves minaient les feuilles du caféier : l'Élachiste « Cemiostoma coffeella », (1) On connaït d’ailleurs des cas semblables pour d'autres parasites, pour l’Élachiste du catéier, par exemple. C’est ainsi que cet insecte, très nuisible à la Martinique, ne cause que des dégâts insignifiants dans une autre ile du groupe des Antilles, la Trinitad. D’après Edelestan Jardin : Le Caféier et le café, Paris, 1895, les caféiers de la Nouvelle-Calédonie ont souvent leurs fruits transpercés par une « larve » qui les fait sécher et tomber. Je ne serais pas surpris que la larve en question füt celle du Botyde, ce qui prouverait que ce m'est pas seulement aux Mascareignes que le parasite attaque le caféier. 84 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMA LATION et une ténéide encore plus petile que je supposais être la Gracilaire, « Gracilaria coffeifoliella ». M. l'abbé J. de Joannis, le savant lépidop- tériste, à bien voulu, sur ma demande, examiner l'espèce en question. M. de Joannis est d'accord avec M. Giard pour déclarer que ce micro- lépidoptère est bien le « Gracilaria ». HT. L'Élachiste — ainsi que la seconde larve mineuse des feuilles du caféier — a deux ennemis sérieux à la Réunion; ce sont deux minuscules Hyménoptères : un Chalcidien du genre « Eulophus » et un Braconide du genre « Apanteles ». (Voir pour plus de détails sur ces parasites la note de M. A. Giard sur l'existence du « Cemiostoma coffeella » Guér.-Men, à l'ile de la Réunion. Bull. Soc. Entomol. Fr. 11 mai 1898, p. 201-203). IV. J'ai constaté tout récemment que les jeunes feuilles et les bour- geons foliaires du caféier étaient souvent détruits par un bel Orthop- tère de la famille des Locustides dont le nom est « Phyloptera lau- rifolia ». V. Comme parasite cryptogamique du caféier, je n'avais cité que F » Hemileia vastatrix », qui est certainement le plus redoutable. J'ai reconnu depuis, sur des feuilles, la présence du « Glæosporium coffeanum », parasite dont la découverte est due à M. le D' Delacroix. De plus, sur le caféier Libéria, j'ai observé une algue parasite, le « Cephaleuros virescens », étudiée également par M. G. Delacroix, et vivant aussi sur le feuillage. A la Réunion, on ne s'occupe guère de combattre l« Hemileia », qui cause cependant de graves dommages. Je crois que MM. Isautier frères, de Saint-Pierre, sont à peu près les seuls propriétaires qui aient essayé de lutter contre le fléau au moyen de la bouillie bordelaise. Bien que cela ait nécessité une dépense assez élevée, ces propriétaires semblent satisfaits des résultats obtenus. EpMoNp BoRDAGE. Revue des Cultures coloniales, 5 avril 1901. LE LEBBEK. Le Lebbek d'Egypte (Albissia lebbek) est un arbre de grande taille aux branches s'étendant horizontalement et retombantes qui croit à l'état sauvage, dans les forêts des Indes ou il est connu sous le nom de Siris. Les feuilles sont composées et ressembient à celles des Ro- biniers. Les fleurs sont d'une couleur jaune-verdàtre réunies par 3-4. Le fruit est une gousse ligulée de couleur brun-jaunâtre, longue de 4 à S centimètres et large de 1 à 2. ; Le tronc de l'arbre adulte est recouvert d'une écorce lisse de couleur claire. Le bois est blanc et le cœur brun sillonné de raies longitudi- nales. Il est solide et se travaille facilement. Le Lebbek a été introduit en Egypte dans les premières années du dernier siècle; il s’est beaucoup répandu sous le règne de Mehemet-Ali, qui s'intéressait vivement à l'horticulture (1805-1848). Sous le règne du EXTRAITS ET ANALYSES 85 Khédive Ismael, M. Braillet, jardinier français, fit planter plusieurs centaines de milliers de ces arbres. On peut affirmer, en raison de la quantité considérable que l’on en voit actuellement au Caire et le long des routes que le Lebbek était, à cette époque l'arbre le plus générale- ment cultivé dans ce pays. Grâce à ces plantations, les routes qui avoisinent la ville, au lieu d'être exposées au soleil torride qui brüle le sable jaune, sont relativement fraiches. Ce sont de véritables avenues recouvertes d’un dôme de verdure qui ne laisse pas pénétrer les rayons du soleil. Une de ces avenues qui conduit aux Grandes Pyramides a une longueur de plus de six kilomètres. On dit qu'elle a été plantée, lors de l'inauguration du Canal de Suez, en l'honneur de l'Impératrice Eugénie. Je crois qu'il serait impossible de trouver dans le monde en- tier une pareille avenue, établie dans des conditions aussi défavorables, c'est-à-dire en plein sable du désert. Les seuls arbres qui réussissent dans ces régions sont les Dattiers et un Acacia qui donne une sorte de caoutchouc. È Le Lebbek est, sous beaucoup de rapports, un arbre très précieux pour border les routes des pays méridionaux. Sa croissance est très rapide, il donne un ombrage épais, réussit dans les terrains manquant d'humidité et se mulliplie par boutures avec la plus grande facilité. Ii supporte très bien la transplantation. Des sujets de grande taille peuvent être enlevés de terre et replacés ailleurs sans risquer de pé- rir. Les branches sont disposées assez irrégulièrement, de sorte que les plantations le long des routes ne présentent pas l'aspect monotone de celles qui sont formées de Peupliers de Lombardie, si répandus en Italie, au Chili et dans l’Utah ou de Cyprès, comme dans le nord de l'Italie. Pour établir les plantations de Lebbek le long des routes on n’em- ploie pas, comme pour la plupart des autres arbres de jeunes sujets qui doivent être protégés pendant assez longtemps au moyens de gar- nitures de bois ou de fer. Les arbres, provenant de graines, sont con- servés en pépinières pendant trois ou quatre ans. Le tronc a alors un diamètre de sept centimètres environ. Ils sont arrachés, recépés et mis en place. Ils sont devenus assez robustes pour n'avoir plus besoin d'aucune protection artificielle. Tous les deux ou trois ans, les branches sont coupées, en réservant quelques rejetons vigoureux pour renou- veler la tète. Malheureusement ces branches se détachent facilement du tronc et sont souvent brisées par les orages. M. Christian Stamm, un des plus expérimentés horticulteurs d'Egypte, conseille de planter les graines dans un terrain riche, à un mètre de distance, afin qu'il puissent se développer à l'aise pendant quatre an- nées. C'est à cet âge qu’on les met en place. On choisit pour cette opé- ration le moment où les nouvelles feuilles vont apparaître. La pre- mière année les branches poussent vigoureusement et produisent une couronne d'au moins deux mètres de diamètre. La seconde année, l'avenue est formée. Pendant la première année, il est bon de les arroser de temps en temps. L'arbre peut atteindre de très grandes dimensions. Il en existe en Egypte dont le tronc a une circonférence de trois mètres. Aux Indes, le Lebbek est employé comme fourrage. Mais en Amé Q 86 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION rique il ne présenterait que peu d'intérêt à ce point de vue; en Egypte il n'est pas utilisé de cette façon. L’écorce est employée par les fellahs pour en obtenir une teinture. et le bois pour divers travaux. Je n'ai pu avoir aucune donnée certaine sur la résistance de cet arbre au froid. Je pense qu'il peut supporter une légère gelée, mais il serait plus utile de procéder à quelques expériences à ce sujet. Le Lebbek réussira certainement dans le Sud de la Californie, l'Arizona, la Floride et la Louisiane, ainsi que dans les parties les plus tempé- rées des Etats-Unis. Davip FAIRCHILD». Explorateur agricole. NOTE SUR LE CAOUTCHOUC DE! LA NOUVELLE-CALÉDONIE par M. J. Poisson. L'importance que prend de jour en jour l'exploitation du caoutchouc et l'augmentation de cette matière sur le marché prouvent de la façon la plus évidente, qu'il ne faut pas négliger tout ce qui peut en assurer la production. Les offres peuvent à peine sulfire aux demandes et les applications du caoutchouc dans l'industrie n’ont pas encore dit leur dernier mot. On sait que des efforts sont faits par toutes les nations étrangères ayant, sous les tropiques, des domaines susceptibles de recevoir des cultures de plantes caoutchouquifères, et ce serait une négligence coupable de ne pas les suivre dans cette voie. Les colonies françaises occupent maintenant une étendue suffisante, et dans des régions très variées comme condition de sol et de temperature, pour qu'on ait le choix des cultures à entreprendre. Toutefois, à moins de se limiter à l'exploitation des espèces indigènes, les essais d'introduction de plantes nouvelles, pour un point déterminé, ne peuvent que rarement donner un résultat heureux & priori, c’est l'exception, et ce n’est qu'après plusieurs tentatives qu'on peut avoir de saines notions sur ce qui peut être acquis dans la région considérée. Ce raisonnement est surtout applicable pour les espèces à caoutchouc dont on a tenté l'introduction en ces dernières années et qui n'ont pas toujours satisfait aux espérances qu'on avait fondées sur elles. Mais peut-être s’est-on un peu hàâté de se décourager. Les espèces d'introduction faciles sont limitées comme nombre. Ce sont celles à tronc érigé et d’une exploitation commode. Les sortes à tige flexueuse et grimpante exigent toujours plus de temps pour acquérir un volume permettant d'être saignées méthodiquement, ce qu'on aura beaucoup de peine à obtenir des indigènes des contrées où croissent ces lianes. Il est à remarquer que jusqu'à présent, sauf pour le Ficus elastica de l'Inde et le F. Vogelii de l'Afrique occidentale qu'on n’a guère cherché à répandre jusqu'alors (en passant sous silence les Xickæia insuffi- EXTRAITS ET ANALYSES S1 samment connus comme producteurs de caoutchouc), c'est aux espèces americaines qu'on s'est adressé pour les introductions dans les cultures nouvelles. Les ÆHevea de l'Amazonie fournissent les excellents caoutchoucs du Para, si recherchés sur le marché: puis les Castilloa, donnant le caoutchouc du Mexique et du Centre Amérique et qui seront les Caoutchouquiers de l'avenir dans les plantations; enfin le Manihot Glaziovii produisant le caoutchouc dit de Ceara, parce que c’est sur- tout dans cette province du Brésil qu'il croit à l'etat spontané, sur un sol d'une pauvreté inaccessible à d’autres végétaux, Cette dernière espèce mérite qu'est discute sa valeur, et c’est le but principal qui a inspiré cette note, et les causes qui l’ont fait naître sont intéressantes à rappeler. Parmi les produits aussi variés que nombreux qui figuraient à l'Exposition de la Nouvelle-Calédonie, peut-être la mieux comprise et la plus complète des colonies françaises, se trouvait une vitrine conte- nant quelques échantillons de caoutchouc de cette Île océanienne. Sa forme spéciale en boule, du volume d'une orange et à reflet nacré, distingue cette sorte à première vue. Ce caoutchouc de bonne qualité est fourni par le Ficus proliæa Forst, espèce très répandue dans l’île et les archipels avoisinants. Un échantillon d'un caoutchouc d'autre sorte représenté par une rondelle d’un centimètre d'épaisseurattirait l'attention des spécialistes. Ce spécimen instructif était accompagné d'une note indiquant qu'il était issu d'un pied de Manihot Glaziovii, croissant dans le jardin du gouverneur, dont le sol schisteux parait convenir à l'arbre qui l'avait fourni (1). Sa qualité paraissait tout à fait satisfaisante, et il n’était pas douteux que c'était là une preuve que le Ceara pouvait donner une bonne gomme en Nouvelle-Calédonie, d'autant plus que l'arbre pro- ducteur était relativement âgé et son latex conséquemment plus riche en caoutchouc. Un entrelien que j'eus avec M. Feillet, un des gouverneurs de nos colonies dont l'intelligence et les efforts ont été si appréciés de tous, fut des plus fructueux pour son auditeur. M. Féillet pense que l'exploitation du Caoutchouc en Nouvelle-Calédonie peut devenir une source sérieuse de profit, et il ne cesse de l’encourager. Déjà la pro- duction venant du Ficus prolixa, qu'on nomme le Banian dans cette colonie, a augmenté depuis quelques années, et M. Feillet a distribué plusieurs milliers de graines du Manihot Glazioviifournis par la maison Godefroy-Lebæuf et venant de Ceara mème. Cette espèce est mainte- nant répandue un peu partout dans l’île. A-t-on négligé de saigner les jeunes arbres ou peut-être leur jeune âge n’a-t-il pas permis de se rendre compte des résullats qu'on peut en espérer? Cependant, comme le sol du jardin du gouverneur ne doit pas être sensiblement différent de celui du reste de la colonie, il est à supposer que la qualité de leur caoutchouc serait la même que celle de l’échantillon auquel il est fait allusion. . (D Deux individus de cette espèce sont dans le jardin du gouverneur; ils y étaient lors de son arrivée en fonction; ils ne doivent pas avoir moins d’une dizaine d'années. ot) BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Depuis que le Ceara a été lancé dans les entreprises de cultures de la plupart de nos colonies. les rapports sur son compte n'ont pas toujours été encourageants. Cependant, en certains points, on n’a pas eu à s’en plaindre. Il est aujourd'hui parfaitement prouvé que les sols pauvres sont ceux qui lui conviennent, puisqu'au Ceara c'est dans ces conditions qu'on le trouve en abondance. Il est très possible que les essais malheureux en quelques régions de la côte occidentale d'Afrique soient causés par l'inobservance de ces conditions. Un savant alle- mand, qui a vécu longtemps en Afrique et qui connaît aussi bien la côte occidentale que la côte orientale du continent noir, a dit à mon fils, qui s'occupe de cultures coloniales et qui a vu toutes ces espèces dans leur propre pays, qu'il avait remarqué que le Ceara ne réussis- sait pas toujours à la côte ouest, tandis qu'il se comportait très bien sur la côte est d'Afrique. Cette assertion mérite d'être notée. Il ressort de ce qui précède, qu'en matière de culture et d’exploita- tion coloniales, les renseignements utiles, habituellement épars. sont peu faciles à obteuir; mais on doit s'efforcer de les réunir pour apprendre à mieux diriger les entreprises auxquelles il serait bien exigeant de demander une réussite immédiate. C'est surtout aux colo- niaux observateurs et aux explorateurs sincères qu'il appartient de nous instruire en culture tropicale. L'observation directe sur les lieux mêmes est le criterium le plus sûr en pareille matière. soit qu'il s'agisse du Manihot Glaziovii, qui mérite d’être un peu réhabilité, ou de tout autre végétal pouvant enrichir nos colonies. Bull. du Museum d’Hist. Nat. 1900, n° S. LE JARDIN ALPIN DU BALLON D'ALSAGE Au mois d'octobre 189%, un membre du Groupe de Belfort du Club alpin français, faisait venir de Zermatt quelques pieds de Rhododen - dron ferrugineum pour essayer d'acclimater cette belle plante alpestre au Ballon d'Alsace. Au printemps de 1895, d'autres plantes des Alpes étaient demandées au Jardin alpin d’Acclimatation de Genève, dirigé par M. Correvon et réparties en différents endroits du sommet de la montagne. Quelques temps après, le Groupe de Belfort décidait, en principe, la création d'un jardin de plantes alpestres au Ballon d'Alsace et conti- nuait les premiers essais tentés en introduisant des plantes et semis. Ces derniers étaient confiés à M. Lorentz, horticulteur à Belfort, pour les faire lever et n'étaient transportés dans la montagne que lorsque la plantule était assez forte pour supporter le climat des hautes alti- tudes. Des premières plantations faites, un assez grand nombre dis- parut, sans qu'on soit fondé à croire que la cause doive en ètre attri- buée à ce que ces plantes ne peuvent s'acclimater dans les Vosges : le bétail pâturant sur les chaumes où elles se trouvaient dispersées, les botanistes en quête de plantes rares, la mauvaise exposition (l’essai EXTRAITS ET ANALYSES 89 ne portant que sur un exemplaire unique), réduisirent notablement le nombre des sujets soumis à l'épreuve de l’acclimatation. C'est alors que le Groupe de Belfort résolut de procéder plus ration- nellement et, à l'automne de 1897, un jardin était prêt à recevoir les plantes alpestres. Ce jardin, d’une superficie de 4 ares, fait aux frais du Club alpin français, est situé à 1150 mètres d'altitude, dans la propriété de M. Martzloff, propriétaire de l'Hôtel du Ballon d'Alsace qui nous a sracieusement offert ce terrain à la limite de la frontière franco-alsa- cienne. Le sol en est légèrement incliné vers l'O. Quelques arbres, placés dans l’enclos, donneront de l’ombrage aux plantes qui en ré- clament et des rochers abriteront les plantes saxatiles. L'enclos de 250 de hauteur, est formé au moyen de perches de sa- pin solidement fixées dans le sol et très rapprochées. Les botanistes nous objecteront peut-être que cet emplacement est mal choisi et que les escarpements Nord du Ballon, du côté de la vallée des Charbon- niers, non loin de la Jumenterie, eussent été bien préférables pour l'établissement d'une semblable station, car les quelques plantes alpestres indigènes au Ballon d'Alsace se rencontrent seulement dans ces parages, par suite de l'exposition. Mais différentes raisons empêchèrent d'établir la station d'essai en cet endroit. Plusieurs espèces introduites dans le jardin sont vosgiennes, mais n’ont pas leur habitat au Ballon d'Alsace (seulement au Hoheneck et environs). Les Rhododendron ferrugineum, importés en 1894 et 1898 sont très vigoureux et ont été abondamment pourvus defleurs en 1899 (une seule fleur en 1898 sur les pieds de 1894). Cette Ericacée se développe bien et paraît s'acclimater. Viola biflora (1895), ainsi que Gypsophyla repens Alchemilla alpina ont fleuri régulièrement depuis cette époque ; Hiera- cium aurantiacum, introduite en 1896 est très prospère; la floraison a eu lieu chaque année; Petasites niveus (1896) ; Potentilla minima (1895) ; Gentiana punctata (1896); G. bavarica (1896); &. verna (1896); Erinus alpinus (1896); Phytewma Scheuchzeri (1896); Campanula rhomboidalis (4896); Doronicum caucasicum (1896); Erigeron alpinum (1896); Loni- cera pyrenaica (1895); Senecio cordifolius (1896); S. adonidifolius (1896); Hypochæris uniflora (1896); Geum pyrenaicuwm (1895); Astrantia major (1895) très belle; Saxifraga umbrosa (1895); S. imbricata (1895); Dian- thus neglectus (1895); Papaver alpinum (1896) ont fleuri en 1899. À l'automne dernier, nous avons récolté des semences de Gentiana verna, Campanula rhomboidalis et Erigeron alpinum; elles ont été semées dans le jardin. Environ soixante dix espèces sont actuellement dans l'enclos; les plus anciennes (cinq pieds de Rhododendron ferrugineum) ont été im- portées au Ballon d'Alsace en 1894; les autres l'ont été successivement. En somme, la plupart des plantes sont très vigoureuses et se com- portent bien. Plus tard, quand certaines espèces auront fait un stage suffisamment long d'acclimatation, on les dispersera dans la montagne. Jusqu'à maintenant, il serait téméraire de formuler des conclusions à l'égard de l’acclimatation et surtout de la reproduction. Depuis leur introduction dans le jardin du Ballon d'Alsace, très peu de plantes ont 00 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION disparu et la plupart se développent très bien. Continueront-elles à prospérer et les graines, abandonnées à la terre, germeront-elles?1I est impossible, actuellement de répondre par l’affirmative à ces questions, la présence de ces plantes au Ballon d'Alsace étant de date trop récente. Le groupe de Belfort du Club alpin français continue cet essai d’accli- matation et, chaque année, de nouveaux sujets viennent garnir les plates-bandes du jardin. _ Certaines plantes vosgiennes, qui deviennent de plus en plus rares dans les Vosges et tendent à disparaître, pourraient également, prendre place dans ce jardin (1). D.-R. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE NOTE SUR DES ÉLEVAGES DE MAMMIFÈRES, À LA VILLA DU JAGUENEAU. PRÈS SAUMUR (2). La campagne de 4900, s1 mauvaise comme résultat en ce qui concerne l'élevage des Palmipèdes et des Gallinacés, m'a causé quelques satis- factions touchant les Mammifères. Ceux-ci se sont mieux comportés. Mes Maras ont eu onze petits, et cependant j'ai eu à déplorer la mort de trois jeunes. nés avant terme. Cet accident est dù à la frayeur que causa à deux femelles la présence de Chiens introduits, je ne sais comment, dans leur parc. Les Antilopes cercicapra m'ont donné cette année une jeune femelle; a famille se compose maintenant d'un mâle et de trois femelles, dont deux mettront bas ce printemps. Une femelle Cervule de Reeves est née au mois de juillet; mais der- nièrement sa mère est morte des suites de blessures graves causées par le mâle. J'ai, du reste, remarqué qu'après la cinquième année, les Cerfs de cette petite espèce devenaient très ombrageux; leur approche est même dangereuse pour ceux qui les soignent. Vers la fin de décembre. j'ai obtenu la naissance d'un nouvel Alpaca ainsi que celle d'un petit Bouc de la race naine de Madagascar (les parents ont 23 centimètres de hauteur au garrot). Malheureusement tous deux sont morts le second jour après leur naissance, sans avoir. pu prendre la mamelle. Ils étaient faibles et tremblants et le vent et la pluie les ont achevés. Il faut, pour que ces jeunes animaux puissent s’habituer à notre climat, que la mise bas ait lieu en été. J'ai depuis quelque temps, un couple de Cerfs Muntjacs dorés de Su- matra. Ces Cerfs sont un peu plus grands que les Cervules de Reeves, (1) Extrait du Bulletin de la Section des Hautes-Vosges du Club alpin Français n° 12, 1900, Communiqué par M. Armand Boigeol. @) Extrait d’une lettre adressée à M. Ch. Debreuil, à la date du 12 janvier 1901 EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE QU ils sont fort gracieux et point timides, car huit jours après leur arrivée ici, ils venaient déjà prendre le pain à la main, le long du grillage de leur parc. Je crois que la femelle est pleine, et vraisemblablement j’au- rais une portée au printemps. J'ai fait venir des iles d’Ouessant deux Brebis et un Bélier. Ces trois animaux et la caisse qui les contenait pesaient trente kilogs. Ce sont de vrais jouets, ils ont 28 centimètres de haut. La reproduction de ces petits Mammifères sera facile ef l’on pourra faire un rôti d'un mouton entier. B1izERAY. REMARQUES AU SUJET DE L'ÉLEVAGE DES BOvIDÉS EN COLOMBIE par Charies Patin Consul général de Belgique en Colombie. Dans la séance du 5 février dernier, la Société d’'Acclimatation, a été consultée sur une maladie de l'espèce bovine qui cause d’assez grandes pertes dans ces pays, où, disait-on, on ne connaît aucun remède à ce fléau. Je dois protester contre cette assertion, car si la maladie n’est pas connue et traitée scientifiquement au Rio Sinu, elle est depuis plus de douze ans évitée en partie et souvent guérie dans l’État d'Antioquia où, sur mes indications, on a introduit le virus anti-charbonneux. Même avant l'introduction de ce virus, j'ai obtenu la guérison de beaucoup de sujets, par l'administration de doses répétées d'acide salicylique, prises dans une décoction d'écorce de Guazuma ulmifolia, pour en atténuer l'effet irritant sur les muqueuses. Puisque je vous entretiens au sujet du bétail, je voudrais vous dire que M. Debreuil a bien raison de vouloir tenter le croisement du Zébu avec une ou plusieurs de nos races de Bœufs. Je puis lui assurer le succès au point de vue des Bovidés comme animaux de trait, pour la charrue. J'ai eu l’occasion de constater les avantages que présente le produit de ces croisements, car dans les Antilles anglaises cela se pra- tique régulièrement. Les jeunes Zébus reproducteurs de quelques mois d'âge, se vendent 40 livres sterling et les produits des croise- ments sont très recherchés pour le labourage des plantations de Bana- niers. Le Bœuf étant très lent de sa nature, le produit obtient une agi- lité qui le fait apprécier des planteurs. Un autre point sur lequel je désirerais attirer l’attention des colo- niaux qui s'occupent de l’élevage du bétail, c'est le grand avantage qu'il y a pour eux de convertir les vieilles Vaches, à leur dernier vèlage c'est-à-dire six mois ou un an avant de les mettre à l’engrais, en beu- vonnes, c’est-à-dire en opérant quelques jours après la mise bas, la castration qui se fait aujourd'hui très facilement et sans presque de risques en employant le système d’étranglement. 92 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION ( NOTES DE ZO00LOGIE RECGUEILLIES EN CALIFORNIE. par Paul Serre. I. — Un docteur de Ashland (Etat d'Orégon) élève des « Skunks » (Me- plitis mephitica) ce qui, paraît-il, est très facile : cet animal, trouvé sur la côte, est mignon, mais très peu agile, il possède un singulier moyen de défense. Lorsqu'il est attaqué, ou croit l'être. par un Indien, un Loup, un Renard, un Chat sauvage, etc. tous friands de sa chair, il tourne sa partie arrière vers l'ennemi et l’arrose jusqu'à 10 pieds de distance, et sans jamais manquer le but, avec une substance fétide de couleur jaune, et phosphorescente, contenue dans deux glandes grosses comme un pois. placées près de la queue, et reliées à des vaisseaux absor- bants qui s’enfoncent dans le corps. Ces glandes se remplissent pour une nouvelle aspersion, en quelques secondes. La puanteur de cette substance, très volatile, ne peut ètre décrite; elle suffoque, a une action sur les muqueuses, peut produire une sorte d’anesthésie et couper la respiration. La personne qui a été aspergée par un « Skunk » doit sacri- fier ses effets, et on doit s’écarter pendant longtemps des endroits où cet animal à projeté une goutte de son liquide. Le docteur précité, obtiendrait 1 doll. 50 (environ 7 frs S0) pour la peau de chacun de ses pensionnaires; 75 cents (3 frs 90) pour l'huile employée à tort ou à raison comme remède contre les affections des bronches et de la poitrine, et 50 cents pour sa chair succulente. Le « Skunk » préfère ne pas être dérangé, toutefois il a confiance dans son pouvoir de mettre tout être vivant en fuite, car il se promène dans les chemins fréquentés. Il se multiplie très rapidement et les grandes dames qui considèrent que parler d’un « Skunk » en société est de la der- nière impolitesse, revèêtent des manteaux dits de Castor ou de Martre zibeline, préparés avec des peaux de Skunks pris par les trappeurs de l'Est. Certains naturalistes assurent que cet animal est un ami du fermier; il détruirait un grand nombre de Souris et de Sauterelles. II. — Un animal très répandu dans le «Far West» américain, et notam- ment en Californie est le Coyote ou Chien sauvage qui a beaucoup d'analogie avec le Chacal d'Algérie et le Chien sauvage d'Australie. Le Coyote se croise avec le Chien domestique et souvent les chiens de chasse refusent d'attaque une femelle de Coyote. Cet animal ne sort de son repaire que la nuit. et il rûde autour des habitations et des camps. Son poil est de la couleur du roc, et il est très difficile de l’aper- cevoir à 30 pas quand il se lient immobile et embusqué. Ses aboie- ments ont quelque chose d’'humain, et quand ils se répercutent dans les montagnes, un seul Coyote peut mettre en émoi toute la popula- tion d’un village. É Le Coyote est lâche par nature, et ne s'attaque jamais à des animaux plus gros que lui, mais il est grand destructeur de Lapins, de volailles, de jeunes Agneaux, etc. Ce Chacal indigène était devenu si nuisible ici, que la Législature de Californie avait alloué une prime de 5 dollars par EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE 93 tète pour les détruire, mais ces primes s'étant élevées jusqu à un total égal à 1600000 francs ont été supprimées comme étant ruineuses pour l'Etat. IT. — L'Union des Ornithologistes américains est alarmée avec rai- son, de la rapidité avec laquelle on détruit les Oiseaux aux Etats-Unis. Dans 37 Etats, leur nombre a diminué de 46 p. 0/0 depuis 45 ans. Trois Etats seulement : (Californie, Orégon, et Caroline du Nord) maintiennent une balance, et on ne constate un accroissement de la gent ailée que dans quatre Etats : Kansas, Wyoming, Washington et Utah. Dans l’État de Kansas, il est défendu de vendre et d'expédier un grand nombre d'Oiseaux utiles, et il est regrettable qu'une telle loi ne soit pas appliquée par l'autorité fédérale. Le professeur Hornaday, du Jardin zoologique de New-York prévoit que dans vingt ans plusieurs espèces d'Oiseaux auront disparu aux Etats- Unis si on ne prend pas les mesures suivantes : 1° Défense de collectionner les œufs d'Oiseaux, excepté pour les AG vidus pourvus d’un permis spécial. _ 2° Défense de vendre du gibier à plumes en toutes saisons. 3’ Défense de tuer ou de capturer les Oiseaux, et les quadrupèdes autres que les animaux à fourrure, dans un but de commerce. 4° Défense de chasser au printemps et de porter un fusil sans permis. 5’ Défense pendant trois ans de tuer ou de capturer tout Oiseau à l'exception de certains Oiseaux de proie qui seraient désignés par le Bureau biologique. Une telle loi, d’après le professeur Hornaday, représenterait des millions de dollars pour les fermiers et les horticulteurs. IV. — On a fait sauter dernièrement, au moyen d’une charge de 10.000 livres de nitro-glycérine, un rocher qui obstruait l'entrée de la baie de San-Francisco. L'explosion a causé la mort d’une quantité considérable de Poissons. Parmi les spécimens qu’on à recueillis à la surface de l’eau, se trouvait un « Poisson rat » (Hydrolagus Colliaci) de la famille « Chimaera » qui existe sur la côte nord du Pacique. Ce Poisson me- surait 25 pouces du nez à l’extrémité de la queue. La peau brune, était tachetée de points blancs. Une arête creuse et barbelée, contenant un fluide vénéneux constitue le moyen de défense de ce Poisson rat, espèce qu’on prend rarement dans un filet, car il vit dans les trous de rocher et ne remonte jamais à la surface. V. — On trouve dans les eaux de la côte californienne trois espèces d'Espadons (swordfish) le Xiphius gladius, le Tetrapterus albidus, et l’Histiophorus et notamment dans les iles qui se trouvent sur le littoral du Comté de Los-Angeles. Ces Espadons se nourrissent de certaines espèces de Maquereaux. Ils se battent entre eux et attaquent les Céta- cés. On a trouvé dernièrement sur la plage de San-Diégo un Tétrapterus albidus de 6 pieds de long qui s'était échoué après avoir été poignardé par un de ses semblables. Quelquefois les Espadons attaquent les na- vires qu'ils prennent pour un monstrueux animal. Le voilier en bois Dreadnought a eu son armure de cuivre et sa coque traversés de part en part par une épée d’'Espadon. 94 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION SUR QUELQUES NAISSANCES SURVENUES DÉS LE DÉBUT DE 4901 A LA PATAUDIÈRE, PAR CHAMPIGNY-SUR-VEUDE (INDRE-ET-LOIRE) Cher Monsieur, Vous me demandez quelques notes sur mes élevages de la Pataudière ? Ce n'est guère la saison. Dans deux ou trois mois. à la bonne heure! A cette époque, j'aurai, je lespère, quelques naissances intéres- santes et rares et je me ferai un plaisir de vous les annoncer. Dès maintenant, cependant, deux Biches Axis (Axis maculala) ont mis bas; trois autres biches de même espèce vont avoir leurs petits dans quelques jours. Ces animaux, très rustiques, reproduisent à la Pataudière, fort régu- lièrement chaque année. Une Biche naine de Reeves (Cervulus Reevestii) vient de donner nais- sance à un jeune male, extrèmement robuste. Ces jolis petits ruminants, originaires du nord de la Chine, ne redoutent pas les froids les plus rigoureux et reproduisent en toutes saisons; la portée est d'un seul petit. Une Antilope Tchickara, à quatre cornes (Tetracerus Quadricornis), a mis bas, pour la seconde fois, il y à un mois, donnant le jour à deux petits, toujours mâle et femelle. Ces charmantes Antilopes sont assez rares. Comme elles sont origi- naires du Bengale, je les fais rentrer dans une écurie chaude pendant les grands froids. En plein hiver, j'ai eu le plaisir d'enregistrer la naissance d'un Cerf de Malacca. Les parents que j'avais reçus l'été dernier, étaient arrives en fort bon état à la Pataudière, et la biche était pleine. Ces Cerfs sont fort beaux et très robustes. Deux femelles Antilopes Cervicapra ont mis bas, lune un male el l'autre une femelle. Ces jolis animaux sont très décoratifs; ils feraient facilement l’ornement d'un parc, car leur rusticité est absolue, ils ne craignent pas le froid et reproduisent avec la plus grande facilité. Enfin des Chèvres de Chine. de Judée et du Sénégal, ont aussi leurs petits. À noter également la naissance d’un Phalanger Renard (Phalangista vulpina) que la mère porte maintenant sur son dos. Les Phalangers sont des Marsupiaux et les femelles, par conséquent, cachent leurs petits dans une poche abdominale renfermant les deux mamelles. Les jeunes achèvent leur développement dans la poche maternelle et ils ne quittent définitivement cet abri que lorsque leur taille ne leur permet plus d'y rentrer. Alors ils se tiennent sur le dos de leur mère qui les transporte partout ainsi. A la Pataudière, les femelles de cette espèce n’ont qu'un seul petit à la fois; ce sont des animaux originaires de l'Australie, faciles à conserver en captivité; à l'exception de la viande, ils mangent à peu près tous les aliments qu'on leur présente, et les portent à leur bouche avec leurs pattes de devant. J'ai vu il y a quelques jours une femelle Mara (Dolychotis pata- gjonica) suivie de deux petits; et une femelle Coati (Nasud musica) a sa EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE 95 nichée dans une boïte remplie de paille. Elle ne permet pas qu'on y regarde et je ne sais pas encore si sa progéniture est nombreuse. L’an dernier elle a élevé cinq petits. J'allais oublier la naissance de mes Casoars (Diromæus Novæ Hollan- diæ). Ils sont éclos hier et avant hier. Or, il y a peu de jours, un de mes amis m'écrivait qu'on lui avait assuré que les jeunes Casoars éclosaient ordinairement après quarante- deux jours d’incubation. Voici mes observations : depuis plusieurs années, ce sont des faits précis, contrôlés régulièrement à chaque éclosion et que je me suis empressé d'envoyer en réponse à mon ami. [L'an dernier, le mâle Casoar (car, chez ces oiseaux, c'est le mâle qui couve, toujours seul) s'est mis sur le nid le 12 février 1900. Il couvait dix œufs. Neuf petits sont éclos le9 et le 10 avril suivants; j'ai élevé avec la plus grande faci- lité ces neuf jeunes Oiseaux. Cette année, le Casoar (le même que l'an dernier) a couvé onze œufs, dès le 30 janvier 1901. La première éclosion est survenue le 31 mars dernier. la seconde le 1* avril au matin, et la troisième éclosion le 1° avril au soir. Deux petits étaient morts dans la coquille, cinq œufs étaient clairs, le dernier avait été brisé. Le froid excessif durant le mois de mars (six degrés au-dessous de zéro, la nuit) fut, sans doute, la cause de la mauvaise réussite de cette couvée. Mais vous voyez que l’incubation des œufs de Casoars est au moins de 57, 60 et 61 jours, et non pas de 42 jours seulement. Pendant la durée de cette longue incubation, le Casoar ne mange jamais, et ne quitte pas ses œufs. Il se lève quelquefois sur ses jarrets, et s'étire pour se délasser. La femelle ne couve jamais et ne s'occupe pas des jeunes oiseaux. Voici donc les premières notes concernant mes élevages de la Patau- dière. D’autres, si vous le voulez bien, suivront, qui vous donneront par le menu, l'ensemble de mes élevages durant la première moitié de l'année 1901. Pays MELLIFR. (Lettre adressée à M. Maurice Loyer, le 4 Avril 1901.) Les Opuntia PEUVENT ÊTRE DÉTRUITS PAR LE FEU. par Charles Patin. Consul général de Belgique en Colombie. La lecture de la lettre de M. Robert Roland-Gosselin, publiee dans le Bulletin de la Societé d’Acclimatation 1900, page 73, m'a beaucoup étonnée, car, jusqu'à présent, j'ai toujours fait détruire, par le feu, les Opuntia dans les propriétés en Colombie. C’est la manière la plus éco- nomique de délivrer les terrains en friches de cette mauvaise espèce. Je ne crois nullement aux avantages qu'offrent les Cactées de ce genre pour arrêter les incendies de broussailles, car un feu, quelque 96 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION léger quil soit. dont la flamme s'élève jusqu à la hauteur des Opuntia. détruit infailliblement toutes les raquettes léchées par la flamme; non pas qu'elle produise lenr combustion immédiate, mais, parce que la chaleur, altérant les tissus, surtout dans les parties jeynes, amène bientôt la décomposition de la plante dont la vitalité disparait complè- tement après quelques semaines. Les Opuntia restent certainement debout, mais ne tardent pas à se dessécher sous l’ardeur du soleil, et deviennent même alors une matière assez inflammable. La conclusion erronée de l'expérience relatée dans notre Bulletin, tient sans aucun doute à ce que cette expérience a été réalisée à l’aide d'un buisson et d’une haie d'Opuntia établis artificiellement ; on a pris des plantes chez lesquelles on a supprimé les parties jeunes, et qu'on a fixées en terre d’une manlère plus ou moins régulière, en les plaçant les unes contre les autres, de manière que celles du premier rang pré- servaient celles de la partie centrale entre lesquelles ne se trouvaient d’ailleurs pas de matières inflammables comme c'est le cas pour des haies vives d'Opuntia. Dans la nature, on observe en effet entre les Cactées, des plantes grimpantes qui se dessèchent en été, et commu- niquent le feu de proche en proche, Dans les propriétés de ma famille, en Colombie, il existe de très longues haies d'Opuntia, ayant plusieurs kilomètres; il faut parfois brûler une prairie pour détruire les buissons; on doit alors couper l'herbe et les broussailles tout le long de la haie sur une largeur de 1° 1/2 environ afin de préserver les Cactées ; les plantes coupées sont amoncelées du côté extérieur de cette sorte de sentier, pour les éloigner des Opuntia. Après quelques jours de ce travail, mais avant que la brousse restée sur pied soit desséchée par les chaleurs, on brüle tout ce qui à été enlevé en élargissant ainsi le chemin formé entre la haie d'Opuntia et la brousse. Je crois que la manière la plus prudente d'obtenir ce que l’on désire, c'est-à-dire d’arrèter dans un lieu déterminé l'incendie des brous- sailles, qui arrive périodiquement dans les colonies, est de suivre le système employé en Colombie, pour empêcher les haies d’'Opuntia d'ètre atteintes par le feu. On pourrait dans ce cas frayer le chemin précité sur une plus grande largeur. 5 ou 6 mètres. par exemple; les parties dénudées seraient alors suifisantes pour empêcher les flammes de se répandre de proche en proche et d'atteindre les ‘régions qu’on désire préserver. G: Les Lra de la Société d ao sont informés, qu'à dater réservée. de la publication du présent Bulletin une page spéciale, affectée AUS offres et demandes qu'ils voudront faire insérer, leur est gratuitement a Ce service, dont l'apparition coïncide avec celle du Bulletin de mars. _- sera renouvelé sur chacun des Bulletins qui suivront. j Nous engageons vivement ceux de nos Collègues qui seraient dési- reux de recourir à la publicité de notre Bulletin, à adresser leurs de- mandes ou leurs offres au Secrétaire général de la Societé d'A cclimalu= tion, 41, rue de Lille, qui s'empressera de les faire insérer dans le plus prochain Bulletin. OFFRES, DEMANDES ET ANNONCES GRATUITES Réservées aux Membres de la Société OFFRES Femelle Faisan à collier à plumage de HÉNELSÉ HAN ES RARE ERREUR E 1e Mäle Swinhoé-Mélanotte........... 15 fr Femelle Canard siffleur............ 10 fr M. LOYER, 72, rue de Rennes. Femelle Perruche Bouton d’or..... 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Boulogne | (Seine). | | | DEMANDES Femelle Faisan argenté 1899. Femelle Colonibe poignardée. M. de LAMARCHE, 4, rue de Lälle. Femelle Agouti. MT. LOYER, 72. rue de Rennes. DISTRIBUTION DE GRAINES Graines a par M. le D' EROS, de Perpignan. Acacic farnesiana. Cassia marylandica. Chamærops hkumilis. Cimifuga dahurica. Melia Azedarach. Mimosu dealbta. Nerium oleander. Physulis Franchetti. Physianthus albens. Pois de senteur vivace. Thermopsis carolian«. Vernoniaarkansana Xanthoceras sorbifolia. Graines offertes par M. MOREL, Villa Eucalypta, Beyrouth (Syrie). Aristolochia ringens. Asparagus Sprengeri. Gone bignonia. Euculyptus botryoides. dealbata. gomphocephalu. Guimnit. hemiphloia. Lehmann. longifolia. morginata. resiniferc. r'udis. stuartiand. viminalis. Gossypiun herbuceum. Sabal Ghiesbreghti. Sciadopitys verticillata. D'PID'DDISt®S + REVUE DES CULTURES COLONIALES Directeur: A. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit; Directeur du Service de l'Afrique et des Antilles à l’Union coloniale française ; Président de la Section coloniale à la . Société nationale d'Acclimatation de France. Créée sous les auspices de l’Union coloniale française, cette publication a pour but de faire mieux connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales, de vulgariser dans les colonies les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures - variétés des plantes françaises acluellement, cultivées ei l’'acclimatation de plantes nouvelles: La Revue des Cultures coloniales paraît le 5 et le 20 de chaque mois. “ For 1. ( France. 48 francs. — Recouvré à domicile. 48 fr. 50 ABONNEMENTS : UN AN { Colonies et Union Postale.:......:......:..-; 20 fr. * Pour les abonnements et annonces, s'adresser 44, rue de la Chaussée d’Antin, Paris. 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Lite ro RE EURE NE A DOM A A TEE 97e G: MAGNE, — Acclimatation et culture des Orchidées terrestres dans les jardins......... 105 Extraits des Procès-Verbaux des Séances de la Socièté 5 Séance du 19 mars 1901 (II° Section. — OrRIRO TIGRE) RER SAR RT ENTER NN ARE SES LASER RU 109 Séance du 5 Mars 1901 Ve Section. — BOTGRIQUE) SRE SN RATE ANNE NN Ste Aer 111 Extraits et Analyses : A, G. NATHORST. — Le Bœuf Mmusqué dans le Grænland oriental... ..... ARE UN AU D 112 - AL. CLÉMENT. — L’apiculture dans les colonies PARCS S AA AS EUR En ee 119 D HR I cmphredans l'ile de Hormoses..., 2... 0. à eme 0e 4 123 L'industrie des figues sèches en Californie CAE OT MO EE A et LP LU BIO à ET ET RAS 1261 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des o pinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. TU COS ———— Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 11760 | AU SIÈGE SOCTAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'’ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue de Lille. — PARIS Le Bulletin paraît tous les mois. SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGCLIMATATION DE FRANCE FonDÉE LE 10 Février 1854 Den. , Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 BUT DE LA SOCIÉTÉ Le but de la Société est de concourir : je À l'introduction, à l'acclimatation et à la domestication des espèces d'animaux utiles et d'ernement; 2° au perfectionnement et à _ Ja multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées ; 3% à l'introduction et à la propagation des végétaux utiles ou d'orne- ment. Ce programme s'applique au territoire des possessions extérieures comme au sol même de la France. L’attention des personnes compétentes doit être appelée tout spécialement sur l'intérêt qu'il y a d’acclimater dans les colonies isothermes, des animaux et des plantes utiles choisis dans un milieu convenable. ; | La Sociéts contribue aux progrès de la zoologie et de la botanique appliquées en encourageant les études qui s'y rapportent et dont elle vulgarise les résultats dans ses séances publiques ou particulières, dans ses publications périodiques ou autres. Elle distribue des récompenses ” honorifiques ou pécuniaires, organise des expositions ou des conférences. Enfin, d'une manière toute spéciale, par les graines qu'elle donne, par les cheptels qu'elle confie à ses membres ou aux Sociétés dites agrégées où affiliées, la Socièté d'Acctimatation poursuit un but pratique d'utilité générale et qui la distingue entre toutes les associations analogues uni quement préoccupées de science pure. à Les récompenses et les encouragements de la Socièté d'Acclima- tation peuvent être obtenus par les Français et les étrangers, les membres de la Société ou les personnes qui n'en font point partie. Sont invités à prendre part aux concours : les naturalistes-voyageurs, les jardiniers, les gardes, les éleveurs de toute catégorie (aviculteurs, pisciculteurs, apiculteurs, sériciculteurs), et en général, tous ceux qui à servent, dans la pratique, avec où sans salaire, le but poursuivi par la Société. COMPTE RENDU DE L'EXPOSITION D'ANIMAUX DE BASSE-COUR DE TOULOUSE Ex DÉCEMBRE 1900 (DE par M. A. de SAINT-QUENTIN La Société d'Agriculture de la Haute-Garonne dont les membres mettent un zèle aussi persévérant qu'intelligent à étudier à fond toutes les questions, à prendre toutes les initiatives qui peuvent favoriser le but qu'elle poursuit, a inauguré le 15 et le 16 décembre 1900, une première expo- sition de volailles mortes et vivantes, ainsi que d'appareils et de publications concernant la basse-cour. Notre collècue de la Société d'Acclimatation, le docteur Audiquier, commissaire général, Chargé d'organiser cette Exposition, a su obtenir un succès qui ne peut qu'encou- rager la Société d'Agriculture à renouveler périodique- ment les exhibitions de ce genre. L'empressement des éle- veurs à exposer leurs produits et celui du public à se pres- ser dans le local de l'Exposition, ne laissent aucun doute sur l'opportunité des concours d'animaux de basse-cour à Toulouse. La Haute-Garonne et les départements circon- voisins constituent, en effet, une région éminemment agri- Cole dont les volailles sont un des produits les plus appré- ciables et les plus rémunérateurs. La race d'Oie, dite de Toulouse, que l’on élève aussi dans presque tout le bassin de la Garonne, possède une réputation qui n’est plus à faire en France, et qui a pénétré jusqu'en Angleterre. A l'éval de l'Oie, le Canard hybride provenant du croisement de l'Anas moschata avec la race commune et désigné vulgai- rement sous le nom de #2w1ard, est encore une des volailles favorite des éleveurs du Midi. Le foie de ces animaux, comme celui des Oies, développé par des procédés spé- Ciaux, dont la tradition s'est maintenue dans nos cam- pagnes, constitue un des mets de luxe les plus recherchés, soit en nature, soit sous la forme de ces pâtés exquis que tout le monde connait. () Communication faite à la Séance générale du 31 Mai 1901. Bull, Soc. nat. Accl. Fr, 1901. — 7 98 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION - L'industrie des foies d'Oie hypertrophiés parait avoir été introduit, dans les Gaules, par les Romains qui engrais- saient leur Oies avec des figues. Jecur ficatum anseris albi. dit Martial : «le foie figuée (1) (c'est-à-dire engraissé par les figues), d’une Oie blanche ». Mais c'est aux languedociens qu'est due l'extension au Canard du régime que les Ro- mains avaient imaginé pour leurs Oies. Du temps de ces derniers, le Canard n'était pas encore arrivé au point de domestication où il est actuellement chez nous. Columelle recommande de couvrir les volières, ou basse-cours, d’un filet... . ne possit anas evolare; « afin, dit-il, que le Canard ne puisse prendre son vol, » De nos jours les Canards, à Toulouse comme à Rouen et à Pé- kin, préferent à la liberté, une servitude calme, où le vivre et le couvert ne font jamais défaut. De plus, le Canard musqué, originaire de l'Amérique méridionale et récem- ment domestiqué n'existait pas dans les basse-cours romaines. Apicius n'a donc jamais connu ces vigoureux mulardas qui après avoir fourni leurs foies aux gourmets, assurent encore, comme les Oies, avec leur chair salée et confite dans la graisse, d'abondantes et excellentes provi-. sions, aux ménages du Midi. Ajoutons que, si l'élevage des Palmipèdes tient le pre- mier rang parmi les industries agricoles de nos régions, celui des Gallinacés n'y est pas moins en faveur. Chaque année, au mois de décembre, des milliers de Dindes, en- graissées où non, apparaissent sur nos marchés et four- nissent non seulement le traditionnel rôti de Noël, mais encore ces succulentes conserves salées, dont la chair d'Oie faisait l'unique base, chez nos ancêtres. Dans les campagnes du Midi, on ne possède pas encore (1) Il est curieux, à ce sujet, de constater que, dans les langues néo- latines, le dérivé du mot ficatum s'est substitué au mot jecur et l’a fait entièrement disparaître. Le viscère dont il s’agit a pris en portu- gais le nom de figado, en espagnol celui de higado. Le mot français foie lui même, n’est qu'une forme contractée du mème vocable. EXPOSITION D'ANIMAUX DE BASSE-COUR DE TOULOUSE - 99 de race de Dindon bien fixée et présentant une aptitude exceptionnelle pour l'engraissement. Néanmoins, le soin que l'on met à cultiver ce Gallinacé aménera sans doute, à la longue, la formation d'une ou plusieurs variétés amélio- rées qui, par le seul fait de la faveur qu'elles obtiendront, seront le point de départ d'une sélection spontanée, comme cela s'est produit pour le Palmipède qui est devenu la superbe Oie de Toulouse. La race galline locale, dite « gasconne » est incontesta- blement une excellente espèce, quand elle est pure. Elle atteint sa perfection aux environs de Caussade. Si elle pa- rait actuellement un peu déchue, dans un assez grand nombre de localités, on doit l'attribuer à un concours fächeux de circonstances qui se sont succédées depuis un demi-siècle et dont les conséquences regrettables se font encore sentir. Je reviendrai plus loin sur le sujet. La Pintade, à qui le climat de la Haute-Garonne convient parfaitement, ayant graduellement émigré des volières du château à la basse-cour des fermes, commence elle aussi, à ètre fort en faveur chez le paysan. En lisant les considérations qui précèdent, on serait tenté de s'étonner que la Société d'agriculture de la Haute-Ga- ronne n'ait pas songé à organiser plus tôt, les concours qu'elle vient d'inaugurer. Rien n'est plus explicable, cepen- dant, pour celui qui a suivi avec attention les évenements qui se sont succédés depuis un demi-siècle et dont quelques- uns furent de véritables calamités pour l’agriculture. Je veux parler de l'apparition successive de l'Oïdium Tucheri et des autres fléaux qui s'abattirent après lui sur la Vigne. Jusqu'au milieu du xix° siècle chaque province de France élevait une variété spéciale de poules, fruit d'une sélection lente et d'autant fructueuse pour l'éleveur, qu'elle se pro- duisait sans idée préconçue, en dehors des théoriciens, par la force des choses et comme conséquence de cette harmo- nie que F. Bastiat nous montre comme inhérente à tout ce qui concerne l'homme vivant en société. Mais vers 1850, la fameuse poule de Cochinchine et, quelques temps apres, celle de Brahma-Pootra, furent importées en Europe, où elles furent l'objet d'un engouement général et malheureu- sement excessif. On doit reconnaitre néanmoins que l’atten- tion provoquée par l'introduction de ces grosses races 100 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION orientales était louable en principe. Malheureusement elle dépassa le but et eut des conséquences déplorables. Les éleveurs au lieu de diriger leurs efforts vers l'amélioration de nos belles especes indigènes, par un bon choix de repro- ducteurs et par des soins persévérants; au lieu surtout de procéder avec une grande prudence et beaucoup de réserve dans les croisements, se laissèrent séduire par les argu- ments de théoriciens sans expérience et de spéculateurs peu scrupuleux. Leurs tentatives n’aboutirent qu'à des mé- comptes. Le résultat le plus clair fut d'abâtardir les varié- tés locales et de détruire pour longtemps cette harmo- nieuse uniformité et çet ensemble de qualités qui les carac- térisaient. Pendant que cela se passait, les Sociétés d'agriculture, surtout celles du midi, préoccupées des terribles fléaux qui sévissaient sur la Vigne, donnaient tous leurs soins à l'étude des moyens propres à sauver les vignobles. Cette étude ayant porté ses fruits et le problème pouvant être actuelle- ment considéré comme résolu, bien qu'à grands frais, la Société d'agriculture de la Haute-Garonne, a senti la néces- sité de reporter son intérèt sur la reconstitution de la poule gasconne qu'il convient de ramener, là où elle a dégénéré, sinon à son ancien type exact, du moins à un ensemble de caracteres analogues aussi uniformes que possible, et cons- tituant une race de choix, apte à prospérer dans l'aire géo- oraphique où elle est destinée à vivre. D'autre part, la guerre de 1870 avait mis tout-à-coup en relief, le rôle important que peut jouer le Pigeon voyageur, dans les opérations militaires. Enfin, les expositions de volailles se multipliaient à Paris et dans les départements du nord, sous l'impulsion de la Societé d’'Acclimatalion. A peu près délivrée des graves soucis qui la préoccu- paient, la Société d'agriculture de la Haute-Garonne s'est donc trouvée tout naturellement entrainée à diriger actuel- lement son attention sur les encouragements à donner à l'élevage des animaux de basse-cour, élevage si approprié aux traditions et au goût des agriculteurs du Languedoc. Telle est l'explication du retard apparent qu'elle aurait mis à inaugurer ses expositions de volailles. Quoi quil en soit, celle du 15 et du 16 décembre 1900 a été un merveil- leux début, et l'on peut dire qu'elle a eu lieu juste au EXPOSITION D'ANIMAUX DE BASSE-COUR DE TOULOUSE 101 moment le plus favorable, si l'on en juge par l'impression qu'elle à produite sur le public, et par l’affluence des visi- teurs qui ont bravé, pour la voir, une température assez fraiche et un temps assez maussade. Le programme du con- cours comprenait les volailles de toute espèce, vivantes ou mortes, les Lapins, les appareils d’incubation artificielle, les nids, les instruments utiles aux faisanderies et aux basse-cours, enfin les livres et publications périodiques concernant l’aviculture. On avait même admis quelques cages qui, renfermaient des Cobayes, à poil court ou à poil long. Leur présence était justifiée, car, ces petits Mammi- fères, bien qu'élevés généralement en Europe, comme ani- maux d'agrément, sont utilisés, dans leur pays d’origine, pour les besoins de la cuisine. Leur chair est fort délicate comme celle de la plupart des Rongeurs, et leur extrême fécondité en rend l'exploitation très avantageuse, lorsqu'on les destine à l'alimentation. Il serait à désirer qu'on s’habi- tuàt chez nous à les employer dans ce but. Des cages etdes parquets spacieux et confortables avaient été mis, sansrétribution, à la disposition des exposants, dans la cour de l'établissement ditle Pré-Catelan. Dans la grande salle qui précède cette cour, étaient disposés les volailles mortes, les appareils, les ustensiles, les livres et les jour- naux d'aviculture. Parmi les volailles mortes figuraient quelques Oies grasses véritablement monstrueuses. Parmi les appareils, deux incubateurs ont attiré particulièrement mon attention. Le premier, exposé par M. le comte Bégouen présentait ceci de remarquable qu'un ingénieux système automatique, actionné par une pile électrique en réglait la température. Le second appareil possédant également un système très ingénieux de régulateur de chaleur, avait été construit dans un but spécialement économique et pratique. L'auteur, M. de Guillebert des Essarts, me fit observer que sa couveuse avait déjà donné naissance à des centaines de poussins ; il avait employé, pour la construire, une barrique coupée au deux tiers de sa hauteur et quelques morceaux de planche. Le tout n'avait exigé, autant que je me le rap- pelle, qu'une trentaine de francs de dépense. Dans la cour du local de l'exposition, se trouvaient les cages et les parquets des volailles vivantes. Deux splendides collections de Pigeons qui, du reste, ont été primées l'une 102 BULLEIIN DE LA SOCIÈTÉ D’'ACCLIMATATION et l’autre, avaient été exposées par les deux sociétés colom- bophiles de Toulouse: les Amis toulousains, et le Courrier de la Concorde. En face des Pigeons, les Gallinacés et les Palmipèdes oc- cupaient une longue file de cages et parquets. Là, comme parmi les volailles mortes, l'Oie de Toulouse était la reine du concours. Puisque j'ai cité de nouveau l'Oie de Toulouse, je crois devoir prévenir les amateurs contre un de ces pré- jugés qui prennent souvent naissance dans les délibérations des jurys et les prospectus d’aviculteurs. Là on décrète d'autorité, que telle ou telle race ne doit être considérée comme pure et admissible aux récompenses, qu'à condition d’avoir tel ou tel caractère. Ainsi, la plupart des faisandiers et beaucoup d'amateurs éliminent, comme entachées d'une tare, les Oies de Toulouse qui n’ont pas de fanon. C’est une erreur. À l'exposition qui nous occupe, comme dans les campagnes du Midi, on a pu voir des Oies de race parfaite- ment pure, ayant le même poids, la même allure, la même aptitude à engraisser, que ceiles qui ont un fanon, bien que dépourvues de cet appendice.Je reconnais toutefois que le fanon, comme l'abdomen traînant, ajoute beaucoup à la belle prestance de l'animal. Les Cops et les Poules étaient nombreux et en général, fort beaux. Malheureusement, l'inexpérience d'un grand nombre d’exposants se manitestait par la grande quantité de métis exposés. Ces animaux, remarquables, d’ailleurs comme volume et comme vigueur, ne portaient en général, aucune indication d'origine et figuraient, la plupart du temps, sous des noms de pure fantaisie. J'ai remarqué, toutefois, parmi les produits de race pure, quelques Pèles de combat fort remarquables et de belle apparence. Il n'y avait qu'un couple de Lang-Shan dont le Coq était un splen- dide sujet. Dans beaucoup de métis, le sang malais était aisé à deviner. Ce croisement n'est pas à encourager. Quelques individus ds race malaise, fort altérée d'ailleurs, avait été exposés sous les divers noms de :- coq indien, coq de Mada- gascar, etc... Aucun des exposants n'avait employé le nom de coq malais. Il est vrai que le type absolument pur de cette race n'était pas représenté. Les Faisans étaient en petit nombre. Le second jour, vers deux heures de l'après-midi, un : EXPOSITION D'ANIMAUX DE BASSE-COUR DE TOULOUSE 103 : magnifique lâcher de cinq cents Pigeons voyageurs, a eu heu dans la cour. Ces animaux étant, en grande partie, des environs de Toulouse, on à pu recevoir, une heure ou deux, après leur départ, avis de leur arrivée au colombier. Après ce lâcher, le public a été invité à se rendre dans la grande rotonde de l'établissement où devait avoir lieu la distribution des récompenses. M. de Capèle, président de la Société d'Agriculture, a donné la parole à M. le comte Bégouen, pour une conférence sur la race galline, ses variétés et son élevage pratique. Dans un style clair, familier et concis, le conférencier a traité son sujet à fond. Il a tracé d'excellentes règles et donné des conseils qui révèlaient l’homme expérimenté et pratique. Il a surtout insisté sur la nécessité de perfec- tionner la race locale, dite race gasconne, par la sélection. Il a signalé le danger des croisements pratiqués à la légère, ou par un engouement irréfléchi pour des races qui, fort bonnes dans leur pays d'origine, ne procurent pas toujours, dans d’autres régions, les résultats que l’on recherche. | Cette première exposition qui aura une influence incon- testable pour le développement des produits de la basse- cour, à été organisée et s'est terminée dans des conditions qui font le plus grand honneur à la Société d'agriculture de la Haute-Garonne, et, puisqu'elle m'a fait l'honneur de me désigner pour représenter dans son jury la Socièlé d’Accli- matation, j'ai le devoir de lui adresser en terminant, les félicitations les plus vives pour son début dans les exposi- tions de ce genre, et les encouragements les plus sincères et les plus mérités, à persévérer dans cette voie. Toulouse, 19 janvier 1901. ACCLIMATATION ET CULTURE DES ORCHIDÉES TERRESTRES DANS LES JARDINS (1) par G. MAGNE. La culture des Orchidées terrestres est encore peu connue. A la différence de leurs grandes sœurs, les Orchidées exo- tiques ou épiphytes, dont on obtient aujourd'hui de si beaux hybrides par la fécondation et le semis, les Orchidées ter- restres n'apparaissent dans les jardins que grâce à la trans- plantation de sujets pris à leur place naturelle dans les bois, les prés et les marécages. ; Je crois qu'un semeur d’Orchidées terrestres a contre lui de nombreux éléments d’insuccès que ne rencontre pas le semeur d’Orchidées exotiques. Quoique moins brillantes que ces dernières, les Orchidées terrestres ont cependant un très grand charme, non seule- ment pour les possesseurs de vastes jardins, mais même pour les humbles qui jouissent de ces plantes poussant pour tout le monde et aiment à en faire des bouquets au moment de la Pentecôte. (C'est sous le nom de « Pentecôte » que, dans beaucoup de pays, les jeunes filles désignent les plantes appartenant au genre Orchis). Le charme qu’elles exercent sur les botanistes, les ama- teurs et le simple passant, est dû au coloris, à la forme et à l’odeur de ces plantes singulières. Au point de vue du coloris citons rapidement dans le genre Orchis, VO. inaculata, aux taches violettes sur fond blanc ou rosé, l'O. incarnata d'un si beau rose, l'O. latifolia et l'O. moris de couleur pourpre et l'O. pallens d’un jaune pâle. Dans le genre Calypso, le C. borealis d’une belle couleur rose-lilas; dans le genre Cypripedium, le C. cal- ceolus en forme de sabot brun et jaune. La forme de ces plantes est encore plus séduisante par sa variété. Le Cypripediuin est connu sous le nom de « Sabot de Vénus » pour sa forme typique. Les Ophrys présentent l’image : l'O. apifera, d’une Abeille, l'O. arachites, d’un (1) Communication faite à la Section de Botanique dans la séance du 5 Mars 1901. ACCLIMATATION ET CULTURE DES ORCHIDÉES TERRESTRES 109 Bourdon, l'O. aranifera, d'une Araignée, l'O. muscifera, d’une Mouche. Notons l'odeur du Nigritella suavis (orchis-vanille) et du Gymnadenia odoratissima, ainsi que du Loroglossum hir- Cinuinm à odeur de Bouc et du Gymnadenia conopsea à odeur de Punaise. Mais, bonne ou mauvaise, cette odeur attire l’Insecte dont l’intervention est nécessaire pour la fécondation des Orchi- dées. La culture de ces intéressantes plantes est suivie en Europe et en Amérique par de nombreux amateurs parmi lesquels on peut citer en France, M. et M" d’Aigremont à Soisy-sous-Montmorency, M. Mantin à Plivet, et l’auteur de cette communication à Boulogne-sur-Seine ; parmi les pro- fessionnels, MM. Dugourd à Fontainebleau, Correvon à Genève, Herb à Naples et V. Haag à Erfurth. Au nombre des amateurs, j'allais oublier de citer le prince Ferdinand de Bulgarie. Les professionnels cultivent les Orchidées en pots comme en pleine terre afin de pouvoir livrer les plantes aux ama- teurs dans les meilleurs conditions pour en assurer la reprise. On a fait certaines objections à cette culture dans les jardins. On a prétendu qu'après un certain nombre d’années les fleurs s’anémient et perdent leurs couleurs ; je réponds que si l’on place les Orchidées dans un sol et à une exposi- tion analogues à ceux dans lesquelles elles se trouvent dans la nature on ne remarque aucune dégénérescence. On prétend également qu'un certain nombre de sujets meurent chaque année et qu’au bout d’un certain temps, la mortalité est telle qu'on est tenté de se décourager et d'abandonner cette culture. Ces accidents ne sont pas aussi nombreux qu’on veut bien le dire. Il suffit de prendre quelques précautions, pendant la période humide de l’automne, notamment pour les Cypri- pedium et les Ophrys qui doivent être conservés sous cou- verture pendant l’hiver. Quant aux espèces méridionales, notamment quelques Serapias, il est préférable de les cul- tiver pendant l’hiver. En procédant ainsi les pertes ne seront pas plus élevées que celles que l’on éprouve pour les autres plantes cultivées dans les jardins. 106 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION Voyons maintenant comment on doit procéder pour acclimater les Orchidées terrestres. Il faut établir une distinction parmices plantes, suivant le climat sous lequel elles croissent à l’état spontané. En nous plaçant sous un climat tempéré, comme celui des environs de Paris, c’est en pots seulement que doivent être cultivées les Orchidées originaires du Midi, les Seraptia, les Loro- glossum, les Cephalanthera, bien que ces plantes se trou- vent également dans l’Europe centrale et certains Ophrys méridionaux ; il en est de même des Nigritella, Orchidées alpines et du Calypso borealis dont la feuille unique est immédiatement dévorée par les Insectes, lorsque la plante est laissée en plein air. On maintient les bulbes bien au sec pendant la période de repos de la végétation et, à l'automne on les replante en pots que l’on laisse à l'air, sous châssis froid jusqu'au prin- temps, sans les arroser. Lorsque la belle saison est arrivée, on transporte les pots à la place qu'ils doivent définitive- ment occuper. Les Cypripediuim européens où américains cultivés en pleine terre, à l'ombre, en bordure ou dans les rochers ne doivent jamais être déplacés; ils recevront une couverture pendant la mauvaise saison. Au contraire, les Orchis, les Platanthera, les Listera et un certain nombre d'Ophrys peuvent ètre cachés sur les pelouses, en les plaçant dans les conditions de sol et d'expo- sition dans lesquellesils se trouvent dans la nature, au milieu des prés, des pâturages ou des bois. On ne doit jamais les déplacer et il faut éviter de leur donner des engrais. Pour cultiver en place dans les jardins les Orchidées sus- ceptibles de supporter ce mode de culture et d’après les distinctions établies ci-dessus, il y a deux modes de procéder : 1° La transplantation de plantes arrachées aux endroits où elles croissent spontanément; 2° Le semis. La transplantation est actuellement le mode le plus usité. On enlève la motte au début du printemps, quand la plante commence seulement à entrer en végétation; on replante immédiatement dans un sol et à une exposition analogues à ceux dans lesquels se trouvait la plante et la réussite de l'opération est à peu près assurée; pour les Ophrys quil ACCLIMATATION ET CULTURE DES ORCHIDÉES TERRESTRTS 107 serait difficile de distinguer au début de leur végétation, il est nécessaire de marquer après la floraison la place à laquelle ils se trouvent, afin de retrouver cette place au printemps. On doit n'avoir recours à l’arrachage des plantes qu'avec une certaine discrétion afin de ne pas provo- quer la disparition des espèces. Lorsque l'amateur ne peut procéder lui-même à la recherche de ces plantes, il peut se procurer des bulbes en les achetant aux profes- sionnels. Pour les plantes que l’on veut reproduire par semis, la cermination des graines est lente et difficiie. M. Correvon, de Genève, n'a jamais essayé ce procédé dans son jardin de Plainpalais; dans son album des Orchi- dées (Doin 1899) il cite le nom des diverses personnes qui, à sa connaissance, ont employé ce mode de reproduction : M. du Buisson, M. Noé, jardinier de l’Université de Chris- tiania et M. Alexandre Wurtemberger, de Munich. M. du Buisson coupe les tiges des fleurs, au moment où les feuilles se fanent; 1l place ces tiges dans des pots pour que les graines achèvent de mûrir, puis lorsque cette ma- turité est achevée, il enlève les tiges et les secoue, pour en faire tomber les graines, sur une pelouse, un massif, un pré marécageux suivant la naturé du terrain qui convient à la plante. Ce procédé est certainement très simple, mais combien de graines doivent se trouver perdues s’il survient un orage ou un simple coup de vent! M. Noé sème en terrine, après avoir placé dans celle-ci un compost composé de terre de bruyère, terreau de feuilles, et terre de bois de sapins; il plante dans ce compost trois ou quatre espèces de Mousses vivantes, il sème les graines sur cette Mousse et place le semis dans des caisses conte- nant de l’eau; j'ai, depuis cinq ans, expérimenté très sou- vent et toujours sans succès ce mode de procéder. M. Wur- temburger, de Munich, fait intervenir la neige comme élé- ment de germination dans le semis. Un compost à peu près semblable à celui de M. Noé est placé dans des caisses bien drainées; ce compost est recouvert de cinq centimètres de neice, et c'est sur cette neige que la graine est répandue. La caisse est transportée ensuite dans un endroit où la neige fond rapidement; on la recouvre de Mousse hachée 108 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION et elle est enfin placée sous un châssis chaud. J'ai essayé cette année un procédé qui se rapproche de ce dernier en laissant recouvrir de neige des terrines ense- mencées; j'ai semé et exposé à l'air mes terrines au mo- ment où la neige commençait à tomber. J'ai obtenu quelques résultats, mais je ne crois pas pouvoir me prononcer encore sur la valeur de ce mode de procédé que j'étudierai de nou- veau l’année prochaine. Comme M. du Buisson, M. Dugourd, de Fontainebleau, emploie la graine aussitôt qu'elle est mûre. Il n’a recours ni à l'emploi des terrines ni à l'intervention de la neige. Il enlève dans de la terre de bruyère bourbeuse des mottes qu'il retourne; il maintient ces mottes constamment hu- mides et à l'abri des rayons du soleil, il sème les graines sur ces mottes aussitôt qu'elles sont arrivées à maturité. Quelques mois après, les graines lèvent; les jeunes plantes sont alors rempotées dans des godets avant de choisir la place de celles qu'il veut élever en pleine terre. Ce procédé me parait excellent et je me propose de l’expé- rimenter cette année. M. Bois a vu au Muséum des Orchis balifolia issues de graines tombées d'une tige florale sur le sol où le sujet était cultivé. En résumé, dans l’état actuel de la question, on peut dire que la culture des Orchidées dans les jardins est actuelle- ment pratiquée par un petit nombre de personnes qui ordi- nairement se bornent à transplanter des sujets pris dans les lieux où ils croissaient spontanément. Quant à la ques- tion du semis des graines d'Orchidées elle n'a pas encore été complètement élucidée. Les différents systèmes expéri- mentés demandent à être encore étudiés; il faut espérer que malgré les difficultés qu'elles présentent, les études poursuivies nous permettront bientôt d'obtenir des semences d'Orchidées terrestres aussi facilement que celles d'Orchi- dées epiphytes, mais le résultat sera toujours moins impor- tant, parce que les plantes ainsi obtenues n'auront jamais une valeur comparable à celle des Orchidées exotiques hy- brides obtenues au moyen de semis. ra V4 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS 2e SECTION (ORNITHOLOGIE-AVICULTURE) SÉANCE DU 19 MARS 1901 PRÉSIDENCE DE M. Rémy Saint-Loup, VicE-PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Cretté de Palluel expose une série d'observations faites par lui sur l’alimentation des Oiseaux au point de vue de l’acclimatation et de la protection. M. de Palluel rappelle que pendant longtemps on connut bien peu ce qui se rapportait à cette question et que vers 1869 il pro- posa, au sein de la Société Nationale d’Acclimatation, la création d’un prix destiné à récompenser l'invention d'une pâte remplaçant les œufs de fourmis. Il faut en effet nécessairement aux oiseaux un régime ani- mal, car à une certaine époque de la vie, tous, même les granivores, se nourrissent d'Insectes. Les Pigeons eux-mêmes ne présentent pas d'exception, car, au moment de la naissance des petits, le jabot des parents se modifie, et il se forme des glandes secrétant un liquide qu ressemble beaucoup au lait des Mammifères; il est la première nourri- ture du petit et plus tard les graines triturées que les parents déposent dans son bec en sont imprégnées. L'étude du régime alimentaire des Oiseaux démontre qu'ils ont tous leur utilité et qu'il ne faut proscrire aucune espèce; les êtres forment une chaîne, et si on en détruit un chai- non on produit une perturbation dans l'économie de la création. Au mo- ment de la reproduction, le régime des Oiseaux est un régime animal. La Caille par exemple, cet Oiseau granivore, se nourrit au printemps exclusivement d'Insectes. M. Cretté de Palluel a trouvé dans le jabot des Cailles jusqu'à quarante de ces animaux, parmi lesquels des Tau- pins, le Carabe bossu, beaucoup de Charançons dont les larves sont nuisibles aux grains. Pour se convaincre de ce fait il faut tuer la Caille la nuit après son repas; pendant le jour on ne reconnaîtrait plus la na- ture des débris. La Caille consomme ensuite des graines fraîches et non utiles, faisant ainsi une provision de graisse pour son voyage. Un autre oiseau fort utile est le Scops. Ce petit Rapace nocturne arrive chaque année de toute la France et mème d'Allemagne aux envi- rons de Toulon, il y séjourne en grand nombre en attendant l'heure de la migration, mais, hélas! on en fait un vrai massacre. Ils sont alors fort gras et on les vend en grand nombre sur les marchés, où ils sont très recherchés des amateurs de cuisine provençale à cause du parfum de Pin pignon qu’exhale leur chair. Le public croit que l’Oiseau se nourrit de cette graine; c’est une profonde erreur, cette odeur leur est commu- niquée par les petits Rongeurs qu'ils dévorent et dont l'alimentation se 110 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION compose surtout de la graine du Pin pignon. Le Scops vient chez nous attiré par la chenille du Chou, les chenilles poilues dévastatrices des arbres fruitiers, le Carabe recu le Hanneton. La Huppe, qui malheureusement n’est jamais très ie a une spécialité comme nourriture : la Courtilière. Elle détruit aussi l'Agrotis segeturn. Le Coucou a été accusé par quelques-uns, d'être un animal nuisible C'est une pure calomnie. Les grosses chenilles velues apparaissent-elles dans une localité, le Coucou arrive et s'y établit. Tout le monde connait un fait de ce genre qui s'est produit dans une forèt de Poméranie. A Garches, en Seine-et-Oise, des Mouches à scie avaient envahi une plantation de Saules; pendant les trois ans que ces Insectes ont continué leurs déprédations, les Coucous sont revenus leur faire la guerre. Ils dévorent aussi le Grand Paon et tous les Smérinthes, que les oisillons ne peuvent manger. On a accusé le Coucou de se nourrir d'œufs, jamais M. de Palluel n'a trouvé dans leur estomac ni trace d'œufs, ni petits Oiseaux. Privés de nourriture, des Coucous placés avec de petits Oiseaux ne les ont pas attaqués. M. des Murs cite le fait de Coucous qui, détruisant des Mouches à scie qui avaient envahi des Groseillers ont été la cause de la mort de jeunes Merles, tombés de leur nid, mais pas un d'eux n'a été mangé. Quant aux Oiseaux frugivores, ils assurent la reproduction des Végé- taux. Les graines rejetées par eux éclosent toujours. Il n'y a pas en forèt de meilleur ensemencement que celui fait par les Oiseaux. Le gland n'irait pas de lui-mème là où il est porté par le Geai; les Loriots aug- mentent le nombre des Cerisiers et le Merle fait les Kraisiers sauvages. M. Remy Saint-Loup observe que, puisqu'il est démontré qu'à une certaine époque les Oiseaux ont une nourriture exclusivement animale, il yalieu de se demander si c'est le fait d’une adaptation de régime aux substances existantes, ou si l'instinct des Oiseaux est guidé par un motif d'utilité. M. Cretté de Palluel répond que le Moineau a toujours à sa disposition sa nourriture, et cela ne l'empêche pas de devenir insectivore au mo- ment de la reproduction, c’est-à-dire une fois par an. M. Remy Saint-Loup rappelle que des observations produites au cours des dernières séances démontrent qu'il n'y a chez les Oiseaux qu'une ponte par an, laquelle peut quelquelois être fractionnée. Que les œufs viennent par exemple à être détruits par accident, la femelle recom- mence à pondre; l'incubation avait été interrompue et voilà tout. Il arrive aussi, dit M. Cretté de Palluel, que des Ramiers ou des Merles couvent en hiver; cette dérogation aux habitudes correspond à une anomalie dans l’époque de la mue. Sur la demande d'un des membres, M. Cretté de Palluel ajoute qu'il a observé lui-même le suc ou lait des Pigeons. Il ajoute une observation fort curieuse faite par lui sur l'alimentation du Martinet. Cet animal nourrit ses petits avec de nombreux mouche- rons, mais comme il ne peut les leur apporter un à un, voici ce qui se passe : À cette époque il se produit chez cet Oiseau une dilatation de la peau de la mâchoire inférieure et une sécrétion abondante des glandes salivaires, ces modifications organiques ont été constatées il y a long- EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS 111 temps par un zoologiste anglais. Au moyen de cette production, le Mar- tinet peut former une agglomération de moucherons, grosse comme une bille, et il la donne à son petit. M. Cretté de Palluel a placé de ces billes sur une plaque de verre exposée au soleil, les moucherons étaient tous vivants, et, quand la liberté leur a été rendue, ils ont nettoyé leurs ailes et se sont envoles. Le Secrétaire, COMTE D'ORFEUILLE. 5e SECTION (BOTANIQUE) SÉANCE DU 5 MARS 1901 PRÉSIDENCE DE M. MAGNE Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. Il est donné lecture d’une lettre de M. le D' Weber, président de la Section, qui s'excuse, en raison de l'état de sa santé, de ne pouvoir assister à la séance. M. Roland-Gosselin demande quelques renseignements sur l’Angræ- cum fragans, Orchidée assez répandue à l'Ile de la Réunion. Il s'étonne que cette plante n'ait pas encore été introduite dans d’autres colonies et particulièrement à Madagascar. M. Roland-Gosselin pense que l’Augræ- cum fragrans pourrait être utilisé pour remplacer la Vanille et que les - feuilles pourraient, par infusion, fournir une boisson analogue à celle produite par le Thé. M. Magne fait connaître que l’Awgræcum n'a pas été introduite dans les cultures florales, parce que la fleur est assez insignifiante et que du reste, d’après les renseignements qu'il a recueillis auprès de personnes s'occupant spécialement de ces questions, l'accli- matation où la culture de cette Orchidée n'offre aucun intérêt sérieux. M. Magne informe la section qu'il met à la disposition de ses collègues, des graines d’un certain nombre de plantes alpines cultivées par lui et dont il donne la liste (1). À ce propos, M. Magne fait connaître qu'il est très difficile de multi- plier les plantes alpines par boutures, drageons, etc. Le procédé le plus pratique et offrant le plus de chances de succès est le semis des graines, mais ces semis doivent être faits dans certaines conditions spéciales ; le mois de mars est en général l’époque la plus favorable pour cette opération. Pour certaines plantes comme les Primulacées, qui se reproduisent difficilement par semis, quelques précautions particulières sont néces- saires. Il faut faire les semis avant les premières neiges. M. Magne a constaté que la présence de la neige recouvrant les terrines dans les- quelles sont semées les graines favorise et assure la germination de celles-ci. Il a constaté cette année que des graines de Primulacées, (1) Cette liste a été publiée dans le Bulletin de Mars 1901. 142 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION d'Edelweis, etc., semées dans une terre qui a été recouverte de neige pendant une dizaine de jours, avaient germé quinze jours environ après leur mise en terre. Le même fait s'est produit pour quelques Orchidées indigènes. M. Magne recommande de semer en janvier les graines dans des ter- rines qui sont laissées dehors. Lorsqu'elles ont été recouvertes d’une couche de neige et après que cette neige a disparu, les terrines sont rentrées en serre froide et la germination suit son cours. M. Magne a obtenu ainsi la reproduction d'espèces d'Orchidées indigènes ordinai- rement difficiles à faire lever et à mener à bien dans les cultures. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. EXTRAITS ET ANALYSES. LE BŒUF MUSQUÉE DANS LE GRŒNLAND ORIENTAL (1) par A. G. NATHORST Membre de l’Académie royale des sciences de Suède A l’époque glaciaire, alors que le Renne vivait dans les plaines de l'Europe jusqu'aux Pyrénées, le Bœuf musqué était également indigène de ces régions. Des débris fossiles de cet animal ont été trouvés dans le sud de l'Angleterre, dans l’Europe continentale, en Sibérie, dans l'Alaska, et, aux Etats-Unis. Pendant cette période, le Bœuf musqué -était une espèce circompolaire, et était contemporain du Mammouth et du Rhinocéros lanifère. Il ne s'ensuit pas cependant, que ces animaux vécussent ensemble, car il est possible qu'alors comme aujourd'hui, le Bœuf musqué se rencontra dans les toundras de l'époque. Ainsi, Nehring a démontré qu'à Thiede, près de Brunswick, après la fonte de la grande carapace glaciaire, il y eut, d'abord, une faune de toundra, composée du Renne, du Bœuf musqué, du Renard bleu, du Lemming, du Lagopède alpin, et, qu'à cette faune de toundra succéda une faune de steppes, composée dela (erboiïse, du Porc-épic des steppes. du Lagomys, du Cheval sauvage, de l’'Hémione, du Rhinocéros, du Mammouth, et, à certains endroits, de l’Antilope saïga. En d’autres termes, lorsque l'adoucissement du climat amena la transformation de la toundra en steppe, la faune changea également. Il est intéressant de suivre les différents sorts que ces animaux subirent postérieurement. Les Mammouths, les Rhinocéros lanifères et plusieurs autres espèces disparurent. La faune des steppes existe, au contraire, encore dans l’est, en Russie et en Asie, tandis que les ani- maux de la toundra ont émigré dans l’extrème nord. Le Bœuf musqué ne semble pas avoir été commun en Europe, et doit y avoir disparu de bonne heure. Si, au contraire, il avait survécu à l’époque glaciaire, il aurait dù, comme le Renne, suivre la glace, au fur et à mesure de son retrait vers les Alpes scandinaves. Or, on n'a découvert en Scan- (1) Bulletin de la Sociéte de Géographie 15 Janvier 1901. LE BŒUF MUSQUÉ DANS LE GRŒNLAND ORIENTAL 113 dinavie aucun reste de cet animal, et, il ne s’est point retiré non plus dans les toundras de Sibérie. Suivant toute vraisemblance, pour des causes qui nous sont inconnues, le Bœui musqué s’est éteint dans l'Ancien Monde dès l'époque glaciaire, tandis qu'il a continué à vivre dans l'Amérique du Nord. Lorsque les glaciers eurent disparu des régions septentrionales du Canada, le Bœuf musqué s’y établit. L'habitat de cet animal dans le nord de l'Amérique s'étend dans le nord-est. Il n'existe plus dans l'Alaska; aujourd’hui, son aire d'occu- pation, située au nord de la limite septentrionale des bois, est limitée par une ligne partant du Fort Churchill (baie d'Hudson) et rejoignant la côte de l'Océan Arctique, à l'est de l'embouchure du Mackenzie; vers le nord, elle s'étend à travers les iles Parry et la terre d’'Ellesmere jusqu'aux parties les plus septentrionales de la terre de Grinnel, puis, au-delà du Robeson Channel, jusqu'au 83° de Lat. — Dans le Gronland septentrional, Peary a rencontré des Bœufs musqués en abondance, même à l’Independence Bay (8137 de Lat. N.). La deuxième expédition arctique allemande, dirigée par Koldewey, (1869-1870) trouva des exemplaires de ce Mammifère dans le Gronland oriental, jusqu'au 17 de Lat. N. — Leur nombre augmentait, à mesure qu'on avançait vers le nord. Il est donc hors de tout doute que le Bœuf musqué existe encore plus au nord, le long de la côte orientale, jusqu’à l’Independence Bay où Peary l’a signalé. Vers le sud, les allemands trouvèrent le Bœuf musqué jusqu'à l'embouchure du fjord Krançois-Joseph (73°). L'expédition danoise de Ryder (1891-1892) l’'observa sur les bords du Scoresby Sound. De ce côté, il s'étertd donc au sud jusqu'au 78°. Au delà du Scoresby Soundie Bœu musqué n'a pas été signalé. Ce fjord est donc la limite méridionale de l'habitat de cet animal sur la côte orientale du Gronland. Les recherches du lieutenant Amdrup nous éclaireront, sans doute sur la cause de cet arrèt; peut-être quelque nappe de glace s'étendant très loin en mer ou simplement la pauvreté de la végétation a-t-elle empèché les Bœufs musqués de descendre au sud du Scoresby Sound où la végétation est si riche. En tout cas, c'est ici, et, non pas au cap Farwel, comme on l’a dit quelquefois, que se trouve la limite sud de l'aire occupée par ce Mammifère dans le Gronland. Sur la côte occidentale du Gronland, le Bœuf musqué n’a jamais existé au sud de la baie Melville; il est donc inconnu dans tout le Gronland danois. Les glaciers couvrant presque entièrement les bords de la baie Melville, ont probablement arrèté ces animaux dans leurs migrations vers le sud. De nos jours, on n'a pas observé de Bœuf musqué au sud du canal de Robeson (S1° de Lat.-N.); toutefois, on en a découvert des restes beaucoup plus loin, par 78° de Lat. N., sur les rives du détroit de Smith. Jadis, t-on. deux Bœufs auraient été tués par 7630’. Suivant toute vraisemblance, la tribu d'Eskimos établie au nord du cap York a exterminé ce troupeau. # La date de l'arrivée du Bœuf musqué sur la côte orientale du Gronland offre ur très grand intérêt. En 1869-1870, comme je l’ai déjà dit, l'expé- dition Koldewey observa cet animal entre le 73° et le 77° de Lat. N.. Bull. Soc. nat. Accl. Fr; 1902, — S 114 BULLETIN DE LA SOCIETE D'ACCLIMATATION en 1891-1892, Ryder en vit des exemplaires sur les bords du Scoresby Sound [70°-71‘). Par contre, en 1822, lorsque les Scoresby père et fils visitèrent ce fjord, ils n’y rencontrèrent aucun Bœuf musqué. Ce fait est d'autant plus remarquable que Scoresby le jeune visita le cap Stewart, dans le Hurry Inlet, et que, son père, à bord du Fame, pénétra très loin dans cette baie, jusqu'aux îles qui portent le nom de son navire. Des gens de l'équipage firent mème une longue marche à travers la terre de Jameson; ils y découvrirent des Lemmings, mais aucun Bœuf musqué. En 1899, au cap Stewart. nous vimes. comme Ryder quelques années auparavant, plusieurs de ces animaux; nous en tuâmes même dans cette localité, de même que plus loin dans la baie, sur la rive occidentale, où ils étaient assez nombreux. De ce seul fait il serait prématuré de conclure que le Bœuf musqué n'existait pas dans ces parages en 1822. Toutefois, il est remarquable qu'en 1823, Clavering ne vit, non plus, aucun de ces bovidés. Quelques degrés plus au nord, dans la région où les Allemands trouvèrent ces animaux en 1869-1870, Clavering fit une longue excursion en canot le long de la terre, depuis l'île Sabine jusqu’à celle qui porte son nom, passant devant l'ile Jordam Hill jusqu’au fond du Loch Fine, sans voir nulle part un Bœuf musqué. Aujourd'hui, dans toutes ces localités en rencontre ce Mam- mifère. En 1823, les Anglais ne trouvèrent pas, non plus, cet animal sur l'ile Sabine, pendant les deux semaines durant lesquelles Sabine y fit des observations ; on ne découvrit également aucun vestige de cet animal. Pendant notre expédition de 1899 dans ces mèmes régions, nous tuâmes un assez grand nombre de ces Mammifères et recueil- limes des crânes de ces animaux et des flocons de leur laine d'hiver. Puisque, ni Clavering, ni Sabine, ni les deux Scoresby n’ont observé la moindre trace de Bœuf musqué dans ces parages, on serait tenté de supposer qu’en 1822-1823 cet animal n'avait pas encore immigré dans le Gronland oriental au sud du 75° de Lat. N. ou qu'il y était encore très rare. Plusieurs autres faits militent en faveur de cette opinion. Le long de la côte orientale, du 70° au 75° de Lat. N., sont éparses des ruines d'habitations d'Eskimos. Ces indigènes ont disparu après 1822; Clave- ring vit, sur l'ile qui porte son nom, une famille de douze personnes; depuis, on n’a point rencontré d'êtres humains dans ces parages. Les anciennes habitations sont, comme d'ordinaire. entourées de kAjokken- moddings, dont les matériaux peuvent renseigner sur les espèces animales dont ces Eskimos se nourrissaient. Ces amas de débris de cuisine renferment des ossements de Phoque, de Narval, d'Ours, de Renard, de Lièvre, de Chien, d'Oiseaux, etc., mais aucun os de Bœuf musqué (1). Si, à l’époque où vivait cette tribu d'Eskimos, les Bœufs musqués avaient été aussi nombreux qu'aujourd'hui, ils auraient été indubitablement pour elle un gibier précieux, non seulement à cause de (1) Ryder suppose qu’une dizaine de crânes de Bœufs musqués qu'il a ren- contrés sur les bords du Nordbugt (baie septentrionale), dans le Scoresby Sound, proviennent d'animaux tués par les Eskimos, qui auraient emporté la chair et la peau et abandonné les crânes. Pour ma part, je pense plutôt que ces débris de squelettes dérivent d'exemplaires tués par un baleinier; en effet, près du cap Broer Ruys, où un de ces baleiniers avait tué un certain nombre de Bœufs musqués, en 1889, les corps avaient été emportés, tandis que les têtes avaient été laissées sur place. LE BŒUF MUSQUÉ DANS LE GRŒNLAND ORIENTAL 115 leur chair, mais aussi à cause de leur peau. L'absence complète, semble-t-il, de Bœuf musqué dans les Ajokkenmoddings autorise à croire que cet animal n'existait pas dans le pays à l'époque où il était habité. Sur toutes les figurines découvertes jusqu'ici dans les ruines eskimos, on ne trouve aucune représentation de ce mammifère, tandis que celles de Phoque, de Renne, d'Ours, de Renard, de Lagopède alpin, etc., sont très abondantes. Si un animal d’une forme aussi carac- téristique que le Bœuf musqué avait vécu dans la région, très certaine- ment on en trouverait des représentations dans les œuvres artistiques de cette tribu polaire disparue. Peut-être, des recherches ultérieures modifieront-elles l'opinion que je viens d'exprimer, car le Bœuf musqué parait avoir existé dans le Gronland à une époque encore plus reculée, antérieure à la présence des Eskimos. Nous trouvämes, en effet, près d'un groupe d'anciennes huttes dans le fond du fjord Krançois-Joseph, un crâne de Bœuf musqué qui, probablement, avait été porté à la hutte à titre de curiosité; le crâne était si vieux que la substance cornée avait complètement dis- paru ; il était couvert de lichens et tellement décomposé que les parties les plus solides. seules, restaient encore. Il datait évidemment d'une époque antérieure à la présence des Eskimos dans ces parages; pour s'en convaincre, on n'avait qu'à le comparer avec le crâne d’un Ours blanc et avec des ossements de Renne, de Phoque, de Chien, etc.,trouvés près de ces huttes, Un crâne semblable a été rencontré sur un autre point de la côte. Le Bœuf musqué aurait donc existé au Gronland oriental, à une époque très reculée, puis, ayant disparu pour reparaitre encore il y a soixante-dix à quatre-vingts ans. Siles kjokkenmoddings des Eskimos renfermaient des restes de cet animal, on pourrait sup- poser que cette espèce animale a été exterminée par ces indigènes, puisqu'après l'extinction des Eskimos, elle a, ensuite, reparu. Mais rien, aujourd’hui ne vient à l'appui de cette hypothèse (1). Ni Scoresby, ni Clavering, ni Sabine n'ayant signalé le Bœuf musqué däns le Gronland oriental, grande fut la surprise lors de la rencontre de cet animal par l'expédition allemande. Ce fut, dans l'ile Shannon, (i) Dans sa Fauna Gronlandica, Fabricius rapporte que, pendant 'son séjour dans le Gôrnland occidental, il reçut d’un Eskimo le crâne et d'autres parties d’un animal qu'il identifiait avec le Yak ou Bœuf grognant d’Asie (Bos grun- niens). Ces débris avaient été trouvés sur la glace flottante. Plus tard, il rec- tifia cette détermination et montra qu'il s'agissait d’un Bœuf musqué. Le glacon, suppose-t-il, qui portait ces ossements devait provenir de l’est (de l'Amérique, à travers la région polaire), tandis que le D'Pingel prétend qu'ils sont venus du nord-ouest, directement de l'archipel polaire américain. Mal- heureusement, on ne sait pas au juste sur quel point de la côte occidentale ces restes ont été trouvés; on suppose que cest près de Fredikshaab. Si ce fait est exact, selon toute vraisemblance, ces ossements viendraient du Gronland oriental; ce serait, alors, une preuve que le Bœuf musqué existait sur la côte est à la fin du siècle dernier. Le défaut de renseignements exacts sur la position de la côte où la trouvaille a été faite, empêche de tirer une conclusion certaine. Des Bœufs musqués arrivés sur la glace dans le Gronland oriental, et v ayant péri ont pu être poussés avec la banquise loin dans le sud, comme le montre le renseignement fourni par M. G. Holm, d’après lequel des Eskimos de Sermiligak sur la côte orientale (au nord du 63° degré) ont trouvé, il y a quelques années, sur la glace un corps de Bœuf musqué qu'ils ont mangé avec plaisir. 116 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’'ACCLIMATATION le 16 août 1869, que les explorateurs virent, à 600 pas devant eux. un animal « semblable au Gnou ». On se perdait en conjectures sur ce gibier, lorsque, enfin, on reconnut un Bœuf musqué. Ne soupçonnant pas la présence de ce Mammifère dans ces parages, l’'étonnement des naturalistes fut profond. En 1889, M. Knutsen, capitaine du baleinier l'Hekla, tua quelques Bœuis musqués aux environs de l'île Clavering et au nord de cette île. L'expédition de Ryder abattit trois mâles à Hold with Hope, en 1891, une femelle et deux petits, au cap Stewart, en 1892. Pendant l'été 1898, le capitaine norvégien Næso réussit à atterrir près de l’île de Clavering. Le succès de la chasse dans cette région et le prix élevé qu'il obtint pour les peaux de Bœuîs musqués l'engagea à retourner dans ces parages, l’année suivante, en compagnie de deux collègues. Si l’état de la glace continue à ètre aussi favorable qu'il l'a été ces deux dernières années, d'autres chasseurs viendront dans celte région; ce qui amènera, fatalement, une diminution très notable du nombre des Bœufs musqués. En outre, de temps en temps ces animaux sont chassés par les baleiniers écossais qui visitent cette côte, mais ces marins n’at- terrissent qu'exceptionnellement. L’équipage d'un de ces baleiniers, la Balaena, tua, en 1899, dix-huit Bœufs musqués. C'était le seul baleïinier écossais qui eùüt visité la côte orientale du Gronland, cette année-là. Quelques mots maintenant sur la place que ce Mammifère occupe dans le règne animal. Comme l'indique son nom latin (Ovibos, bœuf- mouton), ce genre à été longtemps considéré comme intermédiaire entre les genres ovins et les genres bovins. Par ses formes il ressemble davantage au Bœuîf, mais il en diffère « par l'absence du fanon et par son museau nu, par sa queue très courte, par ses ongles qui sont iné- gaux entre eux, et par l'existence de deux mamelles » (1) (Brehm). D'après Lydekker, qui, dans son grand ouvrage sur les espèces sau- vages de Bœuf, de Mouton et de Chèvre, a, en dernier lieu, traité cette question (2). le Bœuf musqué appartient à un type « plus ou moins isolé et spécialisé, présentant une certaine affinité avec le Mouton ». Jusqu'à présent on n'avait guère étudié que le squelette et les carac- tères extérieurs de l'animal. Nous avons conservé tous les organes internes de plusieurs exemplaires; ces pièces. à l'exception du cerveau. que le professeur Retzius étudie, ont été remises au docent E. Lonnberg, de l'Université d'Upsal. Cet anatomiste a publié le résultat des études auxquelles il s’est livré (3). Ces recherches lont conduit à formuler la conclusion suivante: « The Musk-Ox is entitled to form a subfamily of _its own, at least pro tempore, as well definied as the Caprinæ or the Bovinœæ. » Notte première rencontre avec le Bœuf musqué eut lieu, le 9 juillet 1899, à l'ile Sabine (environ 74°30' de Lat. N.), à quelques kilomètres du mouil- lage où l’expédition allemande avait hiverné en 1869-1870. Ce jour-là, nous tuämes un Bœuif musqué. (1) Selon M. Lonnberg (voir plus bas), le nombre des mamelles est de quatre. (2) R. Lydekker, Wild oxen, Sheep and goats at all lands, living and extinet, Londres, 1898, (3) E. Lonnberg, On the Soft Anatomy of the Musk-ox (Ovibos moschatus.)in Procedings 3001. Soc. London. Febr, 1900; On the Structure and Anatomy of the Musk-Ox, in Ibid. Juin 1900, LE BŒUF MUSQUÉ DANS LE GRŒNLAND ORIENTAL 117 - Le 12 juillet, dans la vallée de la reine Augusta (Konigin Augusta Thal), qui débouche dans la Flache bay, nous vimes deux troupeaux, dont l’un de sept têtes, l’autre de dix ou douze. A cette date, sept exem- plaires furent abattus. Cinq jours après, dans l’île Clavering, nouvelle chasse à une troupe de douze animaux. Trois furent tués, et, le 19 juillet, le même nombre dans la presqu'ile Hold with Hope. Dans le Scoresby Sound, trois degrés plus au sud, nous tuâmes cinq Bœufs. À une distance de cent mètres sous le vent de ces animaux, on sentait l'odeur de muse qu'ils répandent; la veille, le premier machi- niste et le lieutenant de notre bâtiment avaient été chargés par un troupeau. Le 25 août, sur les bords de la baie des Rennes (Renbugten), dans le fiord Krançois-Joseph, deux de ces bovidés furent tués, et cinq, dont trois veaux, lelendemain dans lefjord des Géologues (Geologfjorden), également un embranchement du fjord François-Joseph. Le 27, dans le fiord des Bœufs Musqués (Myskoxefjorden), nous ne vimes pas moins de soixante-sept de ces animaux. Ils se trouvaient là par groupes d’effectif très variable ; les uns ne comptaient que deux ou trois ani- maux, tandis que le plus nombreux était fort de dix-neuf individus. Les veaux étaient rares; dans ce troupeau de dix-neuf bêtes nous n’en vimes qu'un ct également un seul dans une troupe de douze têtes. Pen- dant tout notre voyage nous avons aperçu de deux cent trente à deux cent quarante Bœuîfs musqués ; dans ce nombre il n’y avait guère plus de rieuf veaux. La femelle ne met bas que tous les deux ans, mais ce fait ne peut expliquer une telle rareté des jeunes. Probablement les Loups détruisent les jeunes exemplaires. Le 29 août eut lieu notre dernière rencontre avec les Bœufs musqués. Ce jour-là, notre excellent docteur fut chargé par un solitaire, tandis qu'il était occupé à de paisibles recherches d'archéologie, et, s’il n'avait été armé dun pistolet de 8 millimètres, à magasin, du modèle de la cavalerie allemande, l'issue de la rencontre eût pu être funeste à notre compagnon. Jusque-là nous avions douté de la véracité des histoires rapportées sur les dangers de la chasse au Bœuf musqué; en tous cas, nous sup- posions que les faits avaient été exagérés. Un chasseur de Phoques norvégien avait pourtant raconté qu'un de ses hommes avait été très mal mené par un de ces animaux, et la relation de l'expédition alle- mande mentionne également qu'un de ses officiers avait été attaqué par un Bœuf musqué qui avait déchiré ses vètements et endommagé son fusil. Pendant l'été, nous trouvâmes toujours ces animaux très pai- sibles ; peut-être en automne, à l’époque du rut, leur hümeur change-t- elle et doit-on attribuer à ce fait l'attaque qu'eut à subir notre excellent docteur. Hearne (1795) rapporte que, pendant cette période, dans l’Amé- rique du Nord, les Bœufs musqués attaquent tout être qui s'approche d'eux; ils chargeraient mêmeles Corbeaux et les autres grands Oiseaux qui viendraient se poser dans leur voisinage. D'après le même auteur, les mâles attaquent leurs rivaux jusqu'à ce que mort s’en suive. À ce propos, je dois faire observer que deux des animaux que j'ai tués avaient une corne cassée, sans aucun doute à la suite d'un de ces combats relatés par Hearne. Les femelles mettent bas à la fin de mai où au commencement de juin et ne donnent le jour qu'à un seui petit. 118 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION Les estomacs des Bœuîs musqués sont remplis d'une quantité d'ali- ments absolument colossale. Ce sont principalement des feuilles et des branches de Salix arctica ou d'espèces analogues. Probablement quel- quefois, il absorbe également des feuilles de Bouleau nain, des Gra- minées, des Dryas, etc. Le Saule constitue la principale nourriture de cet animal; sur ce point tout le monde est d'accord. L'hiver, il mange des Graminées, et, sans doute, des plantes enfouies sous la neige, mais l’assertion de Payer, que la Mousse et le Lichen forment la base de son alimentation, est absolument fausse. Greely rapporte qu’en hiver à la terre de Grinnell, les Bœuis musqués grattent la neige, pour mettre à jour des touffes de Dryas, de Saxifrages et de Graminées ; cet explora- teur ne les à jamais vu manger des Lichens, ni mème fréquenter les localités où ces Végétaux abondent. La chair de ce Mammifère rappelle celle du Bœui. Si l’on enlève immédiatement les entrailles, elle n’a pas de goût particulier. Sans cette précaution, ou si une balle a traversé l'estomac ou les intestins et amené l’épanchement de leur contenu, tout naturellement la viande a une saveur particulière; mais, il en est de mème pour le Renne. À mon avis, la chair de ce bovidé n'a pas un goût musqué plus prononcé que celle du Renne dans les mêmes conditions. Bref, la viande du Bœui musqué est un aliment nourrissant et très sain. Au Canada, le Bœuî musqué est tué en grand nombre. En 1891, d’après Lydekker, la compagnie de la baie d'Hudson a mis en vente pas moins de 4,358 peaux de ce Mammifère. Dans le Gronland oriental, ces animaux sont protégés par la banquise qui, en général, défend l'accès de cette côte. Mais, si l’état des glaces devient plus favorable, gare l'arrivée des chasseurs norvégiens. Heureusement, au nord du %5° de Lat. N., s'étendent d'immenses espaces toujours bloqués parles glaces ; dans cette région, les derniers représentants de cette espèce curieuse trouveront un abri inviolable et s'y perpétueront. Peut-être, sera-t-il possible de tenter l’acclimatation du Bœuf musqué dans l'Europe boréale? Cet animal paraît supporter la chaleur et les moustiques beaucoup mieux que le Renne, et, d'autre part, il sait mieux se défendre contre les Loups que ce cervidé. Ta laine, très fine dont il est couvert pendant l'hiver et qui tombe en été, sa peau et sa chair sont des produits excel- lents et de valeur; par suite, s'il était domestiqué, le Bœuf musqué rendrait de très grands services. En 1894, les 1,358 peaux de ce Mam- mifère vendues par la Compagnie de la baie d'Hudson ont atteint des prix variant de 7 fr. 50 à 4150 francs. Des essais d'acclimatation sont, du reste, actuellement tentés. En 1899, un chasseur de Phoques norvégien ramena à Tromso deux jeunes Veaux musqués vivants. Ils ont été achetés par le Duc de Bedford et installés dans son parc zoologique en Angleterre. Si l’un d'eux est mort, l’autre est en bon état et se développe. Cette même année (1900), plusieurs autres exemplaires de Burt mus- qué ont été importés en Europe. En Suède, on songe même à tenter lacclimatation de ce Mammifère. L'expédition organisée par M. Kolthoff avait même pour objet principal la capture de Bœuîfs musqués. L’entre- prise a réussi; cette mission a rapporté deux veaux vivants, un mâle L'APICULTURE DANS LES COLONIES FRANCAISES 419 et une femelle, qui ont été placés dans une propriété du Norrland (1) appartenant à M. Broms, le Mécène de l'expédition. Le chasseur de Phoques norvégien, Næso, ayant rapporté à Tromso quatre jeunes exemplaires, deux de chaque sexe, je proposai à un amateur éclairé, M. C. E. Liljevalch, d'acheter ces animaux, afin de pro- céder à une expérience d'acclimatation qui, avec un tel nombre d'animaux, serait beaucoup plus concluante qu'avec les deux de Kolthoff. Ma pro- position fut acceptée; maintenant trois de ces animaux se trouvent à Medstugan, propriété de M. Liljevalch, située dans le Jamtland; le quatrième est mort à la suite d’un accident. En Suède, il y a donc actuellement cinq jeunes exemplaires de Bœuf musqué, deux mâles et trois femelles. L'expédition danoise de 4900 a, d'autre part, rapporté du Gronland oriental, un Veau musqué vivant — un mâle, — qui a été placé au Jardin Zoologique de Copenhague. M. Hagenbeck, de Hambourg, a acheté un jeune individu vivant, mâle, à un chasseur de Phoques norvégien, et le Jardin Zoologique d’Anvers cinq exemplaires. Quatre sont morts pen- dant le voyage; une femelle qui seule avait survécu, est morte également. Il existe donc actuellement en Europe plusieurs Bœufs musqués vivants, mais seuls, les animaux qui sont en Suède ont été placés dans un milieu anssi semblable que possible à celui dans lequel ils se trouvaient au Gronland. Les jeunes individus s’apprivoisent facilement, et on doit espérer que nous pourrons avoir dans le Bœuf musqué un animal domestique utile. J'ai, en effet, fait tisser la provision de laine de ce bovidé que j'avais rapportée du Gronland en 1899; elle a fourni un drap qui peut être employé. Cette laine est extraordinairement solide et élastique malgré sa finesse; d’après les spécialistes elle peut être comparée à celle de la Vigogne. Stockholm 3 janvier 1901. L’APIGULTURE DANS LES COLONIES FRANÇAISES (2). On a déjà souvent signalé les richesses mellifères inépuisables, que possèdent nos colonies et dont il serait facile de tirer parti par une exploitation raisonnée des Abeilles. L'apiculture existe déjà, mais à un état généralement rudimentaire dans ces régions privilégiées où l’on rencontre souvent à l'état sauvage plusieurs sortes d’Abeilles sociales, la plupart domesticables et dont les produits sont recueillis à l’aide de procédés plus ou moins primitifs par lies indigènes. La Feuille de renseignements de l'Office Colonial nous fournit à cet effet de très intéressantes indications desquelles on peut conclure (1; Suède septentrionale. () Extrait de l’ouvrage l’Apiculture moderne, de M. A. L. CLÉMENT, président de la section d’Entomologie (paru en 1898, Larousse éditeur). 120 BULLETIN DE LA SOCIETÉ D'ACCLIMATATION sans hésitation que, dans toutes nos colonies. l’apiculture pourrait ètre une ressource précieuse et que dans certaines d’entre elles, elle pourrait réellement devenir la base d’un commerce important ct rému- nérateur. En Alvérie, l’apiculture est pratiquée de temps immémorial. On y emploie généralement des ruches fixes cylindriques ou parallélipipé- diques. Elles sont souvent construites avec les tiges de la Férule. Depuis 1871, on y rencontre aussi des ruches à cadres. Une société agricole s'y est fondée dont les membres possèdent actuellement de très importants ruchers. Dans un excellent manuel (1) le D‘ Reisser indique pour les colons algériens le moyen de construire avec de vieilles caisses à pétrole des ruches à cadres qui ne reviennent qu'à 2 fr. 30 et il donne les conseils nécessaires pour leur exploitation. En Algérie, la visite générale se fait en octobre, alors qu'il se produit une nouvelle floraison. Le Romarin y fleurit en novembre, les Abeilles y trouvent du pollen. L'hiver étant court, la consommation hivernale est réduite à S ou 10 kilogrammes. C'est seulement dans les régions tempérées de cette colonie que l'apiculture peut être fructueuse. Dans les régions chaudes, les Abeiïlles ne sortent guère que le matin. la production du nectar cuve dans la journée et pendant la saison sèche elles meurent de faim. La Tunisie de même que l'Algérie se prète bien à l'apiculture. A l'Exposition universelle de 1900, nous avons pu examiner des miels, cire et hydromels exposés par M. Pilker de Kasar-Tyr. Les miels récoltés sur la Geranium rosat, le Romarin, le Thym, la Marjolaine conservaient le parfum des plantes qui les avaient produits, de mème que les miels d'Orangers exposés par M. Hue. Au Soudan, les ruches sont faites de paille fine, tressée; elles sont cylindriques, recouvertes d'un toit conique et percées de trous à la base pourla circulation des Abeilles. Leur intérieur est enduit de terre. On les suspend dans les arbres pour les mettre à l'abri des feux de brousse et les préserver des rongeurs. Les Abeilles, nullement domestiques sont petites et foncées, leurs essains sont très nombreuses dans certaines celairières. Le miel, mal récolté, est brun et liquide, il vaut de 0,50 à 1 franc le litre. : La cire, quand elle est épurée, est très belle. Elle vaut de 0,50 à 1 franc le kilogramme. Elle est ordinairement brune, quoique certaines régions en produisent de jaune et mème de blanche. Les frais de cour- tage ct de transport jusqu'en France s'élèvent à 0,70 par kilogramme. Suivant la Feuille de renseignements de l'Office colonial, l'Européen qui acquererait une concession dans la région Sud où les essaims abondent dans les forêts pourrait obtenir sans frais une grande quan- tité de cire qu'il augmenterait encore par l'installation de ruchers. Il trouverait en outre chez les indigènes l'écoulement de son miel. En Guinée, les Mouches à miel abondent. Longtemps négligées pour (1) Manuel d'Apiculture à l'usage du colon algérien, par le D: Neïsser, président de la Société des Apiculteurs algériens (Paris, Challamel). 4 L'APICULTURE DANS LES COLONIES FRANCAISES 121 le Caoutchouc, elles sont maintenant très recherchées. On les trouve à l’état sauvage dans les troncs d'arbres, d’où onles chasse par la fumée. Les rayons sont récoltés avec leurs Abeilles et introduits dans des marmites. On en égoutte le miel et le résidu est chauffé pour en extraire la cire qui vaut de 1 fr. 90 à 2 francs le kilogramme. Les indigènes en fabriquent de grosses bougies très employées dans la colonie. Ils les plantent sur de grossiers chandeliers en bois à .bords larges et creux où vient se figer la cire qui coule. Dans le Fouta-Djallon et aux environs, les ruches sont faites de Senle tressée; elles ont la forme de tambours, large de 0,50 qu'on accroche dans des arbres qui portent le nom de Néris. Pour les récolter, on fait périr l’essaim. Souvent le miel seul est recueilli et remplace le sucre dans les usages domestiques, 2 kil. 500 de miel valent un estagnon de pétrole de 16 litres, matière préférée, aujourd'hui, pour l'éclairage aux bougies de cire. Le Néris est un arbre qui croit dans toute la colonie surtout dans les endroits rocheux et arides. Il est toujours entouré d’Abeilles et son abondance permettrait de nourrir mille fois plus.de ruches. La cire vaut de 1 îÎr. 50 à 2 francs le kilogramme elle est répandue dans le commerce et coulée dans des moules en fer blanc (souvent dans des estagnons de pétrole vides) pour être envoyée en Europe, enveloppée dans de la toile à voiles. Le frèêt coùte 30 francs par tonne. Le miel est trop mal récolté pour être exporté. Au Dahomey, on rencontre des ruches naturelles et des ruches arti- ficielles. Les Abeilles sauvages y sont domesticables. Il y en a de deux sortes : l’une noire, non mellifère et une autre au contraire, très mellifère. Le miel vaut 0.60 et n’est pas exporté. A Mayotte, les indigènes se servent de caisses de bois et de ruches connues à la Réunion sous le nom de Bombardes. Il semble y avoir trois sortes d’'Abeilles, dont deux sont facilement domesticables. Pour la récolte, les indigènes emploient la fumée et s'’enduisent du jus de certaines plantes afin de se préserver des piqüres, le miel est tantôt jaune, tantôt rouge. A Madagascar, le miel est bon, mais impur; il vaut de 0,75 à 1 franc le litre, et la cire sauvage de 2 fr. 30 à 2fr. 50 et 3 francs suivant la qualité. Dans quelques districts, les Malgaches l’emploient pour la fabrication d'une boisson fermentée. L’Abeille de Madagascar est petite ot noire. Les indigènes cherchent les colonies, dans les forèts et les asphyxient pour recueillir la cire qu'ils compriment en boules et qu'ils expédient sous cet état en Europe. La ruche à cadres a été récemment introduite à Madagascar. À la Réunion on rencontre trois sortes d’Abeilles: Apis unicolor, Apis ligustica (italienne) et Apis mellifera et ses variétés; la première plus abondante, les autres ont été introduites. On y emploie les ruches Layens, Dadant, Gariel etc. Parmi les plantes melliferes, l’une des plus importantes est le tan grand arbre qui donne le miel le plus estimé connu sous le nom de « miel vert ». Citons aussi la Vanille qui communique au miel un parfum exquis. 122 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION La colonie manque, dit la'Feuille de renseignements de l'Office colonial, de débouchés pour l'écoulement du miel dont plus du tiers est perdu. Il vaut de 1 à 2 francs le litre et la cire de 2 à 3 francs le kilogramme. | En Indo-Chine, on trouve plusieurs Abeilles sauvages : une grande entre autres, très redoutée des indigènes et une petite qu'ils domesti- quent. L'ouvrière de cette dernière mesure 1 centimètre, la mère 12 à 13 millimètres. Son élevage est pratiqué surtout en Annam et au Tonkin où elle a été étudiée en 1887 par le D' Rialan. Le miel est extrait en pressant la cire dans les mains; il est brun. La récolte a lieu tous les deux mois, sauf en hiver et donne chaque fois deux ou trois bols de miel. La cire est épurée à l'eau chaude. En Cochinchine,les forêts sont divisées en lots affermés aux viliages pour la récolte des nids d’Abeilles vivant à l’état sauvage. Chaque nid donne de cinq à dix bols de miel et 500 à 700 grammes de cire tantôt blanche, tantôt jaune. Le miel (qui est toujours à l'état liquide) de première qualité, vaut 1 franc le litre. On l’emploie comme vermifuge, laxatif, dépuratif. Celui de qualité inférieure vaut en gros de 30 à 40 centimes ; il sert à la fabri- cation de certains mets indigénes et de gâteaux. La cire vaut 1 franc le kilogramme. Elle est ordinairement vendue aux Chinois. A la Martinique, nous trouvons deux espèces d’Abeilles dont l’une est sauvage et intraitable, tandis que l’autre est très maniable. Le miel se vend sur place 1 fr. 25 à 1 fr. 50 le litre. Une ruche en produit 30 litres et 1 kilo 250 de cire. M. le Marquis de Fougères, qui a longtemps habité cette colonie nous dit que c'est l'espèce demi-sauvage qui peuple les ruches de l’ile. Les essaims sont installés dans des caisses à pétrole et à vermouth et reçoivent peu ou pas de soins. La flore, largement pourvue de plantes mellifères pourvoit à leurs besoins. Un certain nombre d’apiculteurs fournissent à la consommation un miel excellent et en quantité suffisante. Ils l’exportent pour Cayenne dans des dames-jeanne de 10 litres. Il vendent la cire aux pharmaciens et aux particuliers. La récolte a lieu de novembre à avril. Une ruche de 65 centimètres sur 30 donne 30 litres de miel et 4 kilo 500 de cire. Dans le Nord de l'ile près de Saint-Pierre, on trouve comme un petit centre apicole. A la Guadeloupe, nous dit encore M. de Fougères, on trouve une petite Abeillesolitaire qui construit des petites capsules isolées, grosses comme un bouton de fleur d'Oranger, formées d'une cire brunâtre contenant un miel également brun d’un parfum exquis et une Abeille sociale dont le mielest excellent. Celle-ci vit à l’état sauvage ; mais on en fait aussi l’élevage dans des ruches fort simples, caisses à pétrole ou à vermouth qu'on retourne sur une dalle ou sur des planches. La caisse à pétrole étant en fer, s’oxyde, noircit le miel et lui com- munique souvent un mauvais goût. Par contre les caisses à vermouth sont souvent détruites par les Termites. LA PRODUCTION DU CAMPHRE DANS L'ILE DE FORMOSE 123 La Guyane française posséde plusieurs espèces d’Abeilles. Les unes appartenant au genre Mellipone n’ont pas d’aiguillon, les autres ressem- blent à notre Abeille ordinaire et sont facilement domesticables. Le miel sauvage vaut à la Guyane de 3 à 4 francs le litre et le miel cultivé de 5 à 6 francs. Il est soumis à une légère cuisson qui assure la conser- vation pendant deux ou trois ans. Les fleurs abondent à la Guyane. Une demoiselle Cablat s’y occupe de la culture des Abeilles. La Nouvelle-Calédonie passe pour produire peu de miel; pourtant il existe à Nouméa des ruchers importants, composés de ruches Dadant et Layens, peuplées en grande partie d’Abeilles italiennes. A l'intérieur les colons fabriquent leurs ruches au moyen de caisses d'emballage. Les Abeilles sauvages sont nombreuses, la flore variée est très mellifère. Le miel et la cire, en Nouvelle-Calédonie, sont de bonne qualité, l’apiculture pourrait y prendre une facile extension qui aiderait à la fécondation du Caféier, du Vanillier et de tous les arbres fruitiers. Les Abeilles y travaillent toute l’année et la production de la cire serait sans doute facile et rémunératrice. Le miel sauvage vaut de 0 fr. 75 à 1 franc le litre ou 0 fr. 50 le pot ou la section d’une livre anglaise. A Taïti, le miel a fréquemment le goût et l'odeur de la Térébenthine, qu'il prend, paraît-il aux fleurs du Manguier ; mais on y récolte aussi du miel d'Oranger qui est excellent. Les indigènes de l'archipel Tuamotou se servent du miel pour sucrer leurs aliments et leurs boissons ; il leur est vendu par boîtes de 3 10 kilogs. 700 à 800 kilogrammes de cire sont expédiés annuellement à Ham- bourg et environ 4.000 kilogrammes sont consommés dans la colonie. De tout ce qui précède, il ressort évidemment que l’apiculture pour - rait donner dans nos colonies d'excellents résultats. Il y aurait bien entendu pour chacune d'elles à tenir compte des différences de climat qui obligerait à traiter les Abeïlles d’une manière particulière. Il serait difficile de donner ici des indications bien précises sur le choix des races et sur les soins particuliers dont elles devraient être l’objet ; tout apiculteur quelque peu expérimenté saurait certainement se créer lui- même une méthode appropriée à la localité où il résiderait. Nous avons voulu seulement appeler l'attention sur une source de richesse abon- dante et trop délaissée qu'il serait, nous semble-t-il, facile de mettre en valeur. LA PRODUCTION DU CAMPHRE DANS L'ILE DE FKORMOSE (1) On s'est beaucoup occupé pendant ces quelques dernières années de la production du camphre, tant à cause des demandes toujours plus importantes dont est l’objet cette substance, très employée dans l’indus- trie qu'à cause du temps d'arrêt qu'a subi la production, conséquence immédiate de la Cession au Japon de l'ile de Kormose où se trouvent les plus importantes forèts de Camphriers. (1) Agricultural Journal of the Cape of good hope. 122402 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION Bien que la Chine et le Japon produisent le Camphrier, qui commence également à se développer dans la Floride, c'est en réalité de Formose que vient la presque totalité du camphre employé dans le monde en- tier. Depuis les temps les plus reculés.les habitants de cette île s'occupent de la distillation du camphre, mais au xvinr° siécle. le gou- vernement chinois s'empara du monopole de cette production en édic- tant des peines d'une extrème sévérité contre ceux qui contrevien- draient à ce monopole. En 1720, plus de deux cents personnes furent exécutées à Formose pour avoir contrevenu à ces lois barbares; mais la tyrannie excita une révolte des indigènes et on finit par déclarer libre l'exploitation du camphre, le gouvernement se réservant le droit d'acheter seul. et à un prix déterminé tout le camphre que l'ile pou- vait produire. Cet élat de choses dura jusqu'au jour où les traités ou- vrirent au commerce les ports de Formose. Les négociants européens refusèrent alors de reconnaître le monopole et achetèrent directement aux producteurs, Mais ces procédés irritèrent ies mandarins et il en résulta des conflits sérieux entre les Chinois et les Européens. Enfin le monopole fut complètement aboli en 1868. Depuis cette époque, l’in- dustrie du camphre devint de plus en plus florissante à Formose et diminua de jour en jour d'importance en Chine et au Japon. Cette liberté d'exploitation du camphre eut les plus funestes résul- tats. On exploita les forèts d'une manière si imprévoyante qu’en peu d'années elles furent dévastées. Il devint nécessaire, en présence de cette exploitation trop intensive d'avoir recours aux mesures restric- tives édictées jadis par le gouvernement chinois. L'ile fut divisée, pour l'exploitation du camphre en six districts, dont chacun était surveillé par un bureau central qui accordait les permissions d'exploitation et fixait le prix de vente du camphre dans chaque district. Le nombre des personnes autorisées à exploiter les Camphriers qui étaient aupe- ravant de 4000 fut réduit à 1,400. Le camphre brut acheté par le gou- vernement est envoyé à l’entrepôt central à Taipeck où il est pressé, réuni en une espèce de gâteau et préparé pour l'exportation. Cette préparation lui donne pour le commerce beaucoup plus de valeur qu'il n'en avait autrefois. Jusqu'ici on ne s’est pas préoccupé de modifier la méthode primitive de préparation qui pourrait cependant être sérieu- sement perfectionnée. On construit en argile et en pierre un four d'une hauteur de quatre pieds environ au-dessus du sol. On le remplit de bois sur lequel on place une grande chaudière de fer, dans laquelle se déverse constamment un filet d'eau provenant d'un autre récipient pourvu d'un robinet. La chaudière est surmontée d'un baril de forme cylindrique rempli de bois de Camphrier divisé en petits morceaux. Au sommet du cylindre est adapté un tube de bambou correspondant avec un récipient hermétiquement clos. Toutes les parties de l'appareil sont soigneusement lutées avec de l'argile. Lorsque le feu est allumé, l'eau contenue dans la chaudière se vaporise, passe par le tube de bambou et se rend dans le récipient entrainant avec elle le camphre que conte- naient les morceaux de Camphrier et qui s’est volatilisé sous l’action de la chaleur. Il se dépose alors du camphre à l’état solide et un pro- duit liquide, l'huile de camphre. Cette huile contient encore de 20 à 30 pour cent de camphre; autrefois on exportait ce produit dans l’état ou L'INDUSTRIE DES FIGUES SÈCHES EN CALIFORNIE 125 il avait été recueilli mais aujourd'hui on envoie cette huile au Japon où tout le camphre restant dans l'huile est extrait. La distillation du bois de Camphrier se fait principalement dans l'intérieur de l’île; mais elle est souvent interrompue, les indigènes, encore à peine civilisés, préférant se livrer au pillage des caravanes qui se rendent à la côte. La fréquence de ces deprédations explique l'élévation du prix du camphre qui a doublé depuis l'établissement du nouveau régime. En outre, le gouvernement japonais a restreint la production en interdisant l'exportalion du camphre, espérant en faire augmenter le prix et obtenir ainsi un revenu plus élevé. Il est douteux qu'il obtienne ce résultat, aujourd'hui que la fabrication du celluloïd qui employait autrefois une grande quantité de camphre lui a substi- tué la naphtaïine et ses dérivés. L'huile de camphre dont on se sert pour parfumer les savons communs sera certainement facilement rem- placée par d'autres huiles peu coûteuses si le prix de celle-ci continue à augmenter, En raison de l'élévation du prix du camphre à Kormose, M Schum- mel pense que la culture du Camphrier pourrait réussir dans l’Inde et à Ceylan. Les recherches faites par M. D. Hopper ont déjà démontré que cet arbre peut donner de bons produits dans l'Inde. Il à démontré que les feuilles de Camphrier cultivé à Ootacamund, produisaient à la distillation sous un courant de vapeur, une huile donnant de 10 à 415 pour cent de camphre et qu'un second échantillon de feuilles recueil- lies à Nadwdatam, sur les bords du Nilgiris, donne une huile encore plus riche, renfermant environ % pour cent de camphre. Le D° Watt pense également que le Camphrier prospérerait dans l'Inde. Les ren- seignements statistiques ci-après établis d'après les prix de vente fixés par le gouvernement japonais pour Formose, démontrent que l'établissement de plantations de Camphriers dans l'Inde serait certai- nement une opération très avantageuse. La consommation annuelle du camphre dans le monde entier est éva- luée à 10 400 000 livres. D’après le régime actuel 5 200 000 Hivres sont four- nies par l’île de Formose; un tiers de la différence pourra être exporté du Japon; il manquera encore environ 3 640 000 livres pour atteindre le chiffre de l'exportation de 1898. Suivant le journal Thoain Nichi Nichi Shimpo qui se publie à Kor- mose, le prix de revient de la production du camphre est de 26 yen (67 fr. 50) par picul (133 livres), les frais d'administration s'élèvent à 28 yen par picul etle prix de vente à Hong Kong est de 70 yen par picul. Le bénéfice au profit du Gouvernement est donc aujourd'hui de 37 fr. 50 environ par picul, mais on espère que les prix de vente s’élèe- veront et que la production totale du Camphre à Formose pourra donner annuellement un bénéfice de 3375 000 tr. L'INDUSTRIE DES FIGUES SÈCHES EN CALIFORNIE. L'’evènement horticole le plus important qui se soit produit en Cali- fornie pendant l’année 1899 est certainement le succès obtenu dans l'introduction et la propagation dans cette région du Blastophagus ou 126 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION œ Mouche du Figuier, qui a été apporté de Smyrne (Turquie d'Asie). Beaucoup de tentatives infructueuses avaient été faites dans ce but jusqu'à ce jour. Maintenant que le résultat désiré est obtenu, on peut être assuré que les derniers mois de l’année 1900 verront pour la pre- mière fois introduire sur le marché des figues de Smyrne originaire de la Californie. La figue de Smyrne est la seule réellement avantageuse au point de vue commercial. Il y a certainement beaucoup d’autres variétés qui ne sont pas sans valeur, mais celle-là est la plus populaire et la plus recherchée dans le monde entier. Elle à besoin pour mürir conve- nablemént d'être soumise à la caprification. D’autres espèces qui se rapprochent comme aspect et comme saveur de la figue de Smyrne. telles que par exemple, la figue blanche de l’Adriatique n’ont pas besoin. pour mürir leurs fruits, d'être artificiellement fécondées ; mais la figue de Smyrne, si elle n’a pas subi cette opération ne produira jamais que des fruits petits, noueux, qni se dessèchent sur l'arbre et tombent avant leur maturité. L'introduction en Californie de l'insecte qui provoque cette fécon- dation est due à M. Walter T. Swingle chargé de mission du Ministère de l'Agriculture qui se rendit à Smyrne en 1898 et envoya au Ministére une assez grande quantité d'insectes avec les fruits des Caprifiguiers dans lesquels ils étaient nés. Ces Insectes furent confiés à M. George C. Rœding, grand cultivateur de Figuiers à Fresno, (Californie) qui les propagea et qui possède aujourd’hui plusieurs milliers de Caprifiguiers sur lesquels vivent les Insectes. Il exploite environ 4.200 Figuiers de Smyrne et à aujourd'hui assez d'Insectes pour assurer la fructification de 1.200 de ces arbres. Mais M. Rœding n'est pas arrivé à ce résultat sans éprouver quelques mécomptes. il essaya d'abord de se procurer des Blastophagus en Amé- rique. Il envoya un homme dans l’Arizona et le Nouveau-Mexique où on lui avait dit que cet Insecte vivait et prospérait, avec mission de lui en rapporter quelques exemplaires. Mais cette tentative n'amena aucun résultat. La mème année M. Rœding fit venir de Smyrne une certaine quantité de figues fécondées par l'Insecte. Une partie de cet envoi arriva en bon état. Ces figues furent placées au milieu des bran- ches des Caprifiguier ; une partie des Insectes sortirent des fruits qui les renfermaient mais ils refusèrent de s'introduire dans les Caprifi- guiers indigènes. L'expérience n'avait donc donné aucun résultat. En 1896, M. Rædnig reçut de l'État de San Luis de Potosi (Mexique) des fruits de Caprifiguier. contenant un certain nombre d'Insectes préci- sément à l'époque où ceux-ci se multiplient. Il les installa également sur des Caprifiguiers, mais, cette fois encore, il n'obtint aucun résultat. Vers la même époque, M. Albert Kæbele, naturaliste, envoya à M. Rœding, de Morales (Mexique), une certaine quantité de Caprifi- guiers fleuris, en lui exprimant cependant la crainte que cet envoi ne pût lui être utile; il pensait en effet que chaque variété de Figuier à son Insecte spécial et que pour réussir, il serait probablement nécessaire d'importer en mème temps que les Mouches, les arbres sur lesquels elles vivaient. En 1894-95 M. Rœding reçut de Smyrne, envoyées par M. Denotovich, L’INDUSTRIE DES FIGUES SÈCHES EN CALIFORNIE 17 des fleurs de Caprifiguiers. Elles arrivèrent en hiver et à une saison trop tardive pour pouvoir être utilisées. Le résultat fut nul. En 1898, M. Swingle fit un envoi analogue, mais chaque figue était enveloppée séparément dans une feuille de papier d’'étain. L'envoi arriva dans la première quinzaine d'avril, il se composait de 30 figues. Elles furent placées dans les Caprifiguiers ; mais deux seulement produisirent des Mouches qui sortirent du 15 juin au 1” juillet et s'introduisirent aussitôt dans les fruits des Figuiers. L'expérience fut répétée et, en novembre, une quatrième génération de Mouches se montra, ayant fécondé plus de 400 Figuiers. Bientôt plus de 500 Caprifiguiers étaient garnis de Mouches et l’acclimatation de l'Insecte pouvait être considérée comme un fait accompli. Le Caprifiguier et le Figuier de Smyrne constituent deux espèces absolument différentes. Le premier croit à l’état sauvage daus les montagnes de Turquie et son fruit n’est pas comestible. Il joue à l'égard du Figuier le rôle du mâle envers la femelle. Les figues portent leurs fleurs à l’intérieur du fruit. Dans le Caprifiguier comme dans le Figuier, il existe des fleurs mâles et femelles. Les femelles se trouvent dans la partie inférieure du fruit, vers le pédoncule, elles sont bien plus nom- breuses que les fleurs mâles qui n’occupent qu'une zône étroite vers l'œil du fruit. Lorsqueles fleurs femelles sont arrivées à maturité, cel œil s'ouvre. C'est alors que les Mouches, qui éclosent précisément au moment où les fleurs femelles sont mûres, sortent des fruits des Capri- figuiers et emportent en traversant les fleurs mâles qui environnent l'ouverture du fruit, une partie du pollen de ces fleurs. Elles entrent alors dans une figue dont elles fécondent les fleurs au moyen de ce pollen, pondent leurs œufs et meurent. Les Caprifiguiers ont de petits fruits qui sont remplis de Mouches. Une seule figue en contient plus d’un million, c’est-à-dire beaucoup plus qu'il n’est nécessaire pour féconder tous les fruits d’un Figuier. Mais les cultivateurs ne laissent pas rentrer les Mouches dans les fruits du Caprifiguier-. Ils coupent ces fruits, en placent un à chaque extrémité d'un bâton qu'ils placent dans un Figuier de Smyrne. Les Mouches sortent de ces fruits et se mettent immédiatement à la recherche des figues, et elles s’y introduisent en y apportant du pollen des Capri- figuiers ; les fleurs femelles des Figuiers se trouvent ainsi fécondées. Le fruit se développe alors rapidement et donne la figue de Smyrne qui lorsqu'elle est convenablement desséchée possède une saveur supé- rieure à toutes les autres variétés. Elle doit ces qualités au mode de fécondation dont nous venons de parler car il est à remarquer que les autres espèces de figues sont bien moins savoureuses; leurs graines sont en général stériles et leur goût est plus fade. Le Blastophagus agit donc comme agent de fécondation en transportant sur les fleurs femelles le pollen des fleurs mâles et c'est en cela que son concours est précieux. Sans lui la culture de la figue de Smyrne serait absolu- ment impossible en Californie. En dehors des cultures de M. Ræding qui comprennent 80 Caprifi- wuiers et 4.200 Figuiers de Smyrne, cet arbre n'est cultivé en Californie que dans un petit nombre de localités, Les arbres qui composent les vergers de M. Ræding furent apportés de Smyrne en 1886 par M. W. 128 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION C. West, chef de culture de M. Rœding qui l'avait envoyé en Asie. spécialement dans ce but. M. West éprouva beaucoup de difficultés pour se les procurer, les cultivateurs sachant qu'il venait de Californie refusaient de lui en vendre, parcequ'ils redoutaient la concurrence que pourrait leur faire sur les marchés étrangers les cultures américaines, M. West dut avoir recours à un stratagème. Il fit faire les achats par une personne du pays, puis quand il eut réuni, non sans beaucoup de peine, le nombre de sujets nécessaires il les expédia sous le nom de racine de Réglisse. Le bateau qui les emportait était à peine sorti des eaux turques. que l « Oriental Advertiser », jeurnal publié à Constan- tinophe, dans son numéro du 18 décembre 1886, sigralait le fait, en déplorant que l’on ait laissé sortir du territoire turc ces arbustes, et ajoutant qu'il espérait bien que les Kiguiers de Smyrne ne pourraient pas réussir en Californie « Si cependant, ajoutait le journal, cette cul- lure réussissait, l'Amérique pourrait probablement fournir aux marchés européens des produits supérieurs à ceux venant de Smyrne. En outre, les procédés mécaniques en usage en Amérique, remplaceraient très avantageusement le procédé manuel pour l'empaquetage des fruits. Il y à lieu de se préoccuper très sérieusement de cette éventualité qui peut causer de graves préjudices à l'industrie de la production des figues dans l'Asie Mineure ». Ces prédictions pessimistes sont certainement exagérées. Quelle que soit l'extension que la culture de la figue puisse prendre aux États- Unies, elle ne ruinera pas l'industrie de Smyrne, mais il est néanmoins certain que nous pourrons bientôt envoyer sur les marchés une grande quantité de figues. Un certain nombre de Figuiers ont déjà été fécondés l'année dernière dans les cultures de M. Rœding et ont produit une grande quantité de superbes fruits dont la saveur n’est pas inférieure à celle des figues de Smyrne et dont la dessication s'est effectuée dans les meilleurs conditions. Antérieurement. M. Rœding avait obtenu une douzaine de fruits excellents en introduisant dans les figues, au moyen d'un cure-dent, le pollen des Caprifiguiers. Ces fruits étaient très beaux, très charnus et très savoureux et ce résultat démontrait la nécessité de la fécondation par l'intermédiaire des Insectes, nécessité jusqu'alors contestée en Californie ou les autres variétés de figues arrivent à maturilé sans avoir besoin de cette fécondation artificielle. Actuellement et avec les espèces cultivées dans le pays, la figue blanche et la figue brune, la Californie fait de ces fruits un commerce considérable qui ne pourra qu'augmenter quand la culture de la figue de Smyrne aura pris un sérieux développement. Les figues en sacs de Californie obtiendront, sur les marchés la préférence sur les figues en boîtes de Smyrne. L'industrie de la culture des figues. parait devoir ètre, avec celle des Oranges, une des plus importantes de la Californie. La figue est certainement le meilleur des fruits secs el sa consommation est consi- dérable. (The Australian Vigneron and Fruits-Growers Journal). BULLETIN DE LA DE PRANCE:: (Revue des Sciences naturelles appliquées) 48° ANNÉE ARR MAI 1901 SOMMAIRE D. G. SEURAT. — L’Huttre perlière H: MOREL. — Acclimatation d’arbres exotiques à la Villa Eucalypta Extraits de la Correspondance : BIZERAY. — Acclimatation des Macaguas ricaneurs “D CLOS. — Des Gymnoclades où Chicois par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. nm CCR Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE AL ver de Lule re PARES | Ch. RIVIÈRE. — Surle Dirina cerutoniæ, lichen parasite des Phanerogames en Algérie... SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACELIMATATION 129 147 156 158 158 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises Le Bulletin paraît tous les mois. fe. he Lea HA Hi à Fa # Æ PRIT LM OPEN Er 0 Es Gr Le Te OS UE SN RS = HO LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACELIMATATION DE FRANEE Fondée le 10 Février 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 41, RUE DE LiLLE — PARIS BUREAU ET CONSEIL D’ADMINISTRATION POUR 1901 Président. M. Edmond Perrier, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Méde- cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. / MM. Ed. Bureau, Professeur de Botaniqueau Museum d'Histoire Naturelle, Paris Baron Jules de GuEeRwe, 6, rue de Tournon, Paris. - Vice-Présidents. Comte de PontsrianD, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. C. Raverer-WarTrTeL, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier. 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire-général : M. Maurice Loyer, A vocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. MM. le D: P. SEBILLOTTE, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris (Intérieur). H. Hua, Directeur-adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Germain, Paris (Conseil). : Secrétaires. À L. SeurarT, Docteur ès Sciences, Zoologîste au Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). : | G. Frox, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin colonial, 19, rue de Sèvres, Paris (Etranger). Trésorier. M. Ch. DEeBREuIz, Avocat à la Cour d'Appel, %5, rue de Chateaudun, Paris. Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d’OrreviLee, à Versailles. Membres du Conseil MM. L. Bncer, Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, Directeur des affaires d'Afrique au Ministère des Colonies, 15, rue de Prony, Paris. : K Edouard BLaxc, Explorateur, 52, rue de Varenne, Paris. C2 D: Raphael BLancuarD, Membre de l'Académie de Médecine, professeur à la Faculté de Médecine, 226 boulevard Saint-Germain, Paris. à Comte Raymond de Darwas, 26, rue de Berri, Paris. 4 Le Myre DE Virers, Député de la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. “4 P. Marcxar, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de la Station entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. . ; L. Mexsey, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pèche et de la Pisci- culture au Ministère de l'Agriculture, 87, boulevard Saïut-Michel, Paris. Ë A. Mime-PournGon, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, 4%, rue de la Chaussée- d’Antin, Paris. E. Ousracer, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue Notre-Dame-des- Champs, Paris. OUE. A. Razer, Membre de l'Académie de Médecine, Professeur à l'Ecole vétérinaire d’Alfort (Seine). Dee TrouEssarr, Président de la Société Zoologique de France, 145, rue de la Pompe, aris. à Présidents honoraires : MM. Le Myre De Vixers, 3, rue Cambacérès, Paris. Albert GEorreoy-Sainr-HizarRe, à Vault de Lugny, par Avallon (Yonne). Secrétaires Généraux honoraires : MM. Amédée BEerraouLe, 4, avenue des Ternes, Paris. Baron Jules de Guerxe, 6, rue de Tournon, Paris. Membres honoraires du Conseil : MM. P. de LaBouLAYE, 129, avenue des Champs-Elysées, Paris: D: P. Mé&nix, 6, avenue Aubert, Vincennes. ‘ Dr Ed. Mxxe, 20, rue Oudinot, Paris. D: J. Mrcuow, 33, rue de Babylone, Paris. D: Weser, 180, boulevard Saint-Germain, Paris. LAURE PER DIPRE EXPOSÉ DES CONNAISSANCES ACTUELLES SUR L'HISTOIRE NATU- RELLE DE CE MOLLUSQUE, LES ESSAIS DE CULTURE DONT IL A ÉTÉ L'OBJET, ET L'HISTOIRE DE LA FORMATION DES PERLES (1). par L.-G. SEURAT Docteur ès Sciences, Zoologiste du Laboratoire colonial du Muséum Secrétaire de la Société La nacre et les perles constituent une source importante le richesse pour nos colonies d'Océanie; la production annuelle de la nacre dans les Etablissements français de l'Océanie, établie d'après la moyenne des huit dernières années, est de 560 tonnes, représentant une valeur de 1.200.000 francs; sur ces 560 tonnes, il n'y en a guère que 25 qui soient dirigées sur la France. La production annuelle de la perle peut être évaluée à un chiffre qui n’est pas infé- rieur à 100.000 francs. Ce chiffre peut être porté à 150.000 fr. lorsque le lagon de Kaukura est ouvert à la pêche (2). La nacre et les perles de Tahiti sont produites par un Mollusque Lamellibranche de la famille des Aviculidés, ja Meleagrina margaritifera Linné. Deux espèces de Méléagrines produisant de la nacre et des perles sont recherchées plus spécialement : la M. #24i-- gaïrilifer«æ, la plus grande, peut acquérir une dimension de 30 centimètres de diamètre et peser jusqu'à 9 et 10 kilo- grammes; cette espece fournit la belle nacre; on la ren- contre dans la mer des Indes, la partie méridionale de la mer Rouge, les Comores, à Zanzibar, dans la mer de Chine, les Philippines, les Iles de la Sonde (Bima), la mer des Moluques, la Nouvelle Guinée (3), dans nos possessions françaises de l'Océanie (archipels des Tuamotu et des Gam bier), sur les côtes de la Nouvelle-Calédonie, dans le golfe (1) Communication faite à la séance générale du 11 juin 4901. (2) Notice sur les Etablissements français de l'Océanie p. 91-93; Paris 1900. _ (3) Rosenberg, Perlenfischerei auf den Aru-fnseln, Nachr. Malar, Gesellsch. 1884 p. 189. Bull. Soc. nat. Accl, Fr. 1901. — 9 130 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION de Californie, sur le versant Pacifique des côtes d'Amé- rique. Dans la mer des Caraïbes (ile Margarita), l'huitre perlière est la Meleagrina Squamulosa Lam. (1). L'Huitre perlière de Ceylan et du Golfe Persique, la Me- leagrina fucata Gould, est beaucoup plus petite que l'espèce précédente et dépasse rarement dix centimètres de dia- metre. Les valves de la coquille sont minces et donnent peu de nacre: elles sont rejetées après avoir été examinées pour la recherche des perles. Un certain nombre d'autres Mollusques sont également recherchés pour la nacre ou les perles qu'ils sont suscep- tibles de produire. La Meleagrina tmbricata (Shark's Bay shell) est très abondante dans la baie des Requins (Australie Occidentale), où elle est pèchée pour la nacre et les perles. L'Avicula (Meleagrina) Martenst Dunker est l'Huitre perlière du Japon (2); elle est exploitée et cultivée dans la baie d'Ago (province de Shima, sur la côte Pacifique du Japon central); l'Avicula vivesi Rochebrune, recueillie par M. Léon Diguet dans le golfe de Californie, produit d'assez belles perles (Diguet). La Mulette perlière (Margarilana margarilifera Linné) est assez commune dans certaines régions montagneuses de l'Europe : dans les rivières de l’Ecosse, où la pèche des perles dura jusqu'à la fin du siecle dernier, surtout dans la rivière Tay; en Suède et en Norvège; en Laponie; dans beaucoup de rivières des régions montagneuses de l’Alle- magne; dans l’Elster, en Saxe, où la récolte des perles a été d’une certaine importance; dans quelques ruisseaux de la Silésie. de la Bavière, etc.; en France, elle était très recherchée autrefois dans la Vologne (Vosges) pour les perles qu'elle contient. Elle existe également au Canada et dans la partie septentrionale des Etats-Unis. Le Dipsas plicatus Leach, très abondant dans les lacs aux environs de Canton, est l’objet d'une industrie chinoise très prospère pour la production artificielle des perles et des camées en nacre. (1) Dall. American Naturalist vol. xvir, second part; 1883 p. 740. «+ (2) Kunz. Cultivation of the pearl. —Oyster (Avicula martensi) in Ja- pan. Bull. U. S. Fish Commission vol. xur, 1894, p. 457. L'HUÎTRE PERLIÈRE, au La « Vitre chinoise », Placuna placenta, qui vit dans les eaux saumâtres de la baie de Tamblegam, près de Trinco- malee, sur la côte N. E. de l'ile de Ceylan, donne de petites perles de couleur; les coquilles, plates, d’un grand dia- mètre et presque transparentes, sont utilisées comme vitres par les Chinois. Les Jambonneaux (Pinna Squamosa, P. nobilis L.), les Anodontes (Anodonta cygnea L.), l'Huitre comestible, la Moule comestible, certaines Trigonies (1rigonia pectinata des côtes d'Australie), les Haliotides, l'Æaliolis gigantea (nom japonais : « Awabi ») au Japon, l’Æaliolis rufescens sur la côte ouest du Mexique et dans le golfe de Californie, produisent également des perles ou de la nacre, à des” degrés divers. La Pêche des Perles. . PÊCHERIES DE L'ILE DE CEYLAN (1 et 2). — Les bancs perliers de l’ile de Ceylan sont situés dans le golfe de Mannar, au sud de l'ile de Mannar, à dix ou douze milles de la côte environ; les banes sont situés par groupes, au large d’Aripo (bancs de Paria-par, Paria-par Karai, Cheval-par, Kalluti- del-par et Modararagam-par), au large de Jaffnapatam au nord-ouest; pres de l'ile Cardieu; au large de Calpentyn, de Chilaw et de Negombho au sud-ouest; le fameux banc de Karaitivu est au large de la ville du même nom. Les prin- cipaux bancs perliers sont ceux d’Aripo. Les fonds les plus favorables paraissent être les fonds de Madrépores déta- chés; les bancs sont situés par 4 1/2 à 8 brasses; dans le « Grand Banc », situé à six lieues des côtes, par une profon- deur de 8 à 12 brasses, les Pintadines renfermant des perles sont rares. Les pècheries de Ceylan sont un monopole du gouverne- ment; la position exacte de chaque banc est marquée par des bouées et les pêches n’ont lieu qu’à des intervalles irréguliers; la pêche, pratiquée par des plongeurs indi- (1) James Steuart. An Account of the Pearl Fisheries Gi Ceylon. Cey- lon 1843; 2 cartes. (2) Weber. Pearls and pearls fisheries. Bull. U. S. Fish Commiss., vol. vi, 1886, p. 321. 152 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION genes, ne peut avoir lieu que pendant les temps les plus calmes de la mousson du nord-est, c'est-à-dire pendant les mois de février, mars et avril. La récolte des perles, en 1891, a été vendue 2.519.375 fr. (1). PÊCHERIE DE LA PROVINCE DE TINNEVELLY (Inde). — Les bancs d'Huitres perlières se trouvent au large de Tuticorin et de Trichendoor, à 5 ou 8 milles de la côte, et à une pro- fondeur de 5 1/2 à 8 1/2 brasses; ces bancs, qui reposent sur des fonds de masses rocheuses s'élevant, par place, au- dessus d'un fond sablonneux, sont exposés aux courants de l'Océan, qui, en apportant du sable dans les interstices des rochers ont détruit souvent les Huitres sur une étendue considérable. GOLFE PERSIQUE (2-3-4). — Les pêcheries de perles les plus importantes sont celles qui ont lieu sur plusieurs bancs peu éloignés de l’ile de Bahrein, sur le versant ouest du golfe Persique; toutefois, les Huitres perlières se ren- contrent tout le long de la côte d'Arabie; le fond est cons titué par du sable et des Coraux détachés, et la profondeur de l’eau est de 5 à 18 brasses. Beaucoup de ces coquilles sont amenées dans le petit port de Lingah et envoyées directement à Londres. La pêche dans la mer Rouge est surtout fructueuse dans le voisinage de Souakim, de Massaouah et autour des îles Farsan. Les Huitres perlières sont exploitées également dans le golfe de Tadjourah (Côte française des Somalis). M. Léon Diguet a publié des documents très précieux sur l'exploitation de l'Huitre perlière en Basse-Californie (5 et 6) où des essais d'ostréiculture perlière, couronnés de suc- (1) Manuel et Catalogue officiels de la section de Ceylan. Colombo 1900. (2) H. Whitelock. An Account of the Pearl Fishery in the Gulf of Persia (Appendice du travail de James Steuart). (3) Mc. Culloch. Commercial Dictionary : Manuscripts notes commu- nicaled by major D. Wilson, late Political Resident at Bushire. (Steuart's Appendix). (4) E. Schlagintweit. Perlenfischerei im persischen Golf. Nachr. Ma- lak. Gesellschaft. Frankfurt p.153; 1883: (5) Léon Diguet. Pêche de l'Huître perlière dans le Golfe de Califor- nie. Bulletin Soc. centr. d'Aquiculture de France (2) Tome var; n° 1-2; 1895 pp. 1-18. . (6) Exploitation de l'Huitre perlière dans le Golfe de Californie. Bul- letin Soc. d'Aquiculture n° 7; juillet 1899 pp. 1-15. L'HUÎTRE PERLIÈRE 159: cès ont été tentés. L'exploitation se fait surtout à l’aide du scaphandre. Les pêcheries du détroit de Torres au Queensland, celles de l’Australie occidentale sont également très prospères (1 et 2). Dans le détroit de Torres, la profondeur moyenna à laquelle les Huitres perlières sont pêchées est de 7 à 8 brasses. Autrefois, les Méléagrines étaient recueillies à une profondeur beaucoup plus faible. Beaucoup de Méléa- grines de grande dimension sont pêchées au large de la côte méridionale de la Nouvelle-Guinée, par vingt brasses de profondeur. Un acte du Parlement du Queensland inter- dit la pêche des Huitres perlières (Meteagrina margarili- fera) ayant un diametre inférieur à 7 pouces, ou moins de 6 pouces de surface nacrée. L’Huiître perlière est exploitée et cultivée en Nouvelle- Calédonie; la pêche a lieu à l’aide du scaphandre. LAGONS DE TAHITI. — Les lagons de Tahiti, dans lesquels se pratique la pêche des Méléagrines perlières sont situés dans l’archipel des Tuamotu (appelé autrefois archipel des Pomotu), et dans celui des Gambier. L'archipel des Tuamotu comprend 80 iles, dont un certain nombre seulement ne produisent pas de perles. Chacune de ces îles, généralement de forme circulaire ou ovoïde, est constituée par une couronne, ou ætoll, de récifs coralliens, renfermant un lac intérieur appelé lagon. Cette terre basse, à peine élevée d’un ou deux mètres au-dessus de l’eau, mesure généralement de 100 à 500 mètres de largeur, et atteint un développement tel que dans certaines îles le lagon a jusqu’à 60 et 70 kilometres de longueur. Les dépressions de l'atoll sur plusieurs points de son pourtour font communiquer le lagon avec la mer et permettent aux bateaux de pénétrer à Pintérieur de l’ile lorsque la passe est suffisamment large et profonde. Le Cocotier, introduit dans ces îles, s'y est développé admirablement et est pour l'archipel l'objet d'un commerce important de coprah (amande sèche du coco coupée en fragments). (4) W. Saville Kent. The Great Barrier Reef; London 1891 p. 216. (2) The Naturalist in Australia; London 1897; Chap. vi p.195 : Pearls and Pearl Oysters. 134. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION La production de la nacre atteint dans l'archipel un chiffre moyen de 430 tonnes, représentant une valeur de plus de un million de francs: le trafic des perles est estimé à plus de 50.000 francs par an; ces perles sont en général petites, mais d'un bel orient. L'archipel des Gambier, qui comprend dix ilots volca- niques tres rapprochés dont les principaux sont Mangareva, Taravai, Akamaru et Aukena, produit annuellenent130tonnes de nacre environ, représentant une valeur de 200.000 francs, et la valeur des perles exportées chaque année dépasse 50.000 francs. La nacre des lagons septentrionaux et orientaux des îles Tuamotu est à bordure noire, et la qualité en est tres appréciée et recherchée sur les marchés d'Europe et de San Francisco: La nacre des lagons méridionaux (île de Marutea), ainsi que celle des Gambier, dite Taku, est blanche, la bordure étant moins nuancée. Les perles, qui sont le produit d'une secrétion des tissus de la Pintadine, se trouvent dans toutes les parties du corps de l'animal : dans la glande génitale, autour du musele adducteur, dans le muscle lui-même (1), dans le manteau, dans les branchies. Les perles contenues dans le corps du Mollusque sont retenues seulement par la membrane enve- loppante, laquelle finit par se rompre, et les perles tombent alors dans les plis du manteau; Kelaart a remarqué, que dans la Méléagrine de Ceylan, les perles sont plus abon- dantes au mois d'Octobre qu'en Avril et Mai. et pense que les perles, une fois formées, sont souvent expulsées par l'animal; ces perles situées dans le corps de l'animal sont les perles fines. On trouve des perles qui sont logées dans l'épaisseur des valves, d'autres qui sont soudées aux valves par un point minuscule d'adhérence; ce sont les perles de nacre. La présence de corps étrangers entre le manteau et la coquille, détermine la formation de perles très irrégulières, {1) Audoin. — Observations pour servir à l’histoire de la forma- tion des perles. (L'auteur signale une perle contenue à l'intérieur du muscle transverse, chez un Solen). Mémoires du Mus. t, XVII, p. 174, Paris, 1828. L'HUÎTRE PERLIÈRE 135 appelées chicots, qui peuvent atteindre la grosseur d'un œuf de pigeon. On trouve de fort belles perles dans le lagon de l'ile de Kaukura, le lagon d'Arutua est également très riche; enfin il faut citer aux Gambier le banc de Tearia (1), sorte de haut-fond qui joint la pointe est du mont Duf (Ile Mangareva) à la pointe ouest de la petite ile d'Akena, sur une longueur de 3 kilometres environ et une largeur moyenne de 80 mètres, les profondeurs variant entre 5 et 8 mètres, quelquefois 2, 3 et 4 mètres (Grand). Le lagon de Taiaro, aux iles Tuamotu, ne produit que des perles dorées. PÉCHE. — Les indigènes emploient le miroir pour voir les huîtres au fond de la mer : c'est une boite en bois léger, dont la partie inférieure est fermée par un verre à vitre, mastiqué avec soin et parfaitement étanche; on peut observer distinctement jusqu'à 10 metres de profondeur; cet instrument est également employé, d'ailleurs, par les pêcheurs d'Eponges de la côte tunisienne. Les indigènes plongent à 25 et 30 brasses,; le premier soin du plongeur est de tenir les valves de la coquille iserrées l'une contre l'autre, de crainte que l'animal n'expulse la perle qu'il peut contenir; les indigènes ouvrent les Pintadines récoltées avec un large couteau, qui tranche le muscle adducteur; chaque coquille et son contenu sont ensuite examinés avec soin. La plonge a lieu, aux Tuamotu, toute l'année, plus spécialement de novembre à février: de juin à septembre, elle n'a lieu que l'après-midi, la température de l’eau étant trop fraiche dans la matinée. L'usage du scaphandre, adopté momentanément, a été interdit comme appauvrissant trop les lagons nacriers. Il est bon de faire remarquer, que dans d'autres régions fla pêche au scaphandre est pratiquée et donne d'excellents résultats. L'administration, en vue d'enrayer l'épuisement des lagons producteurs, à réglementé la pêche : chaque année, huit ou dix iles seulement sont ouvertes à la plonge, chaque ile reste fermée à la pèche pendant au moins trois ans, pour permettre aux jeunes Méléagrines de se développer et de (4) S. G. — La Culture des Huitres perlières à Tahiti, Quinzaine Coloniale ; Paris, 25 août 1897, p. 125. 130 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION grossir; cette interdiction s'appelle le sahuwi. Le rahui n'a d'ailleurs pas produit les heureux résultats qu'on en atten- dait. L'arrèté du 24 janvier 1885 restreint à 17 centimètres de partie intérieure nacrée, ou 200 grammes de poids par valve, les seules Huitres perlières pouvant être pêchées sans délit. Cet arrêté est d'une application difficile. APPAUVRISSEMENT DES LAGONS DE TUAMOTU. — Bouchon- Brandely (1), en 1884, constatait l’appauvrissement des lagons de Tuamotu et des Gambier. Déjà en 1883, M. de Bovis, dans son rapport sur la Colonie Tahitienne, réclamait la réglementation de la pêche dans l'archipel. Bouchon-Brandely fait observer que les Huitres mar- chandes, mesurant 17 à 20 centimetres de diamètre n'existent plus que dans les grands fonds, alors qu'autrefois on les rencontrait jusqu'aupres du rivage. Les causes de dépeuple- ment, seralent, suivant cet auteur, la capture des jeunes Huitres et l'absence de surveillance. Soubeyran et Delondre (2), en 1867, signalaient également l'appauvrissement des lagons océaniens. HISTOIRE NATURELLE DE LA MÉLÉAGRINE PERLIÈRE. — On connait peu de choses sur l'anatomie des Méléagrines. Kelaart a donné quelques détails relatifs à l'anatomie macroscopique de l'Huiître perlièere de Ceylon. Les branchies sont en forme de peigne semi-lunaire s'étendant transversalement d'un côté à l’autre, la concavité étant tournée vers l'avant; il y a un espace libre entre la face concave des branchies et le corps du Mollusque. Du côté gauche, quand l'Huiître est placée la charnière pres de l'observateur, on voit un court prolongement conique, tubulaire, à pointe aiguë, qui est le rectum; l'intestin est court : en quittant l'estomac, il tourne autour du muscle adducteur et se termine juste au côté opposé à celui où est - (4) Bouchon-Brandely. — Rapport sur sa mission à Tahiti. (Partie technique). Les pècheries des îles Tuamotu. Journal Officiel de la République Française; Paris, 1885 (23 juin, pp. 3186-3189, 25 juin pp. 3220-3221 ; 26 juin, pp. 3234-3236; 27 juin, pp. 3250-3252). Reproduit dans « Report U. S. Fish. Comm. XIII, App. pp. 353-377). (2) Soubeyran et Delondre. — De la nacre et des localités qui nous en approvisionnent. Bull. Soc. Zool. d’Acclimat., 1867, p. 578. L'HUÎTRE PERLIÈRE 137 placée la bouche. Au niveau de l'anus, il y a un espace libre entre les bords du manteau, laissant le libre passage des excréments. Les palpes labiaux sont longs, larges, tronqués antérieurement, arrondis sur les côtés, et à surface interne plissée. Pelseneer (1) à étudié l'anatomie de la Melteagrina fucata Gould (exemplaires provenant de Ceylan). Le ventricule du cœur n’a presque plus de rapports avec le rectum, et s'étend dorsoventralement, en dessous de ce dernier, qui est attaché à la paroi dorsale du péricarde. Les branchies sont constituées comme chez l'Avicula : chaque branchie est formée de deux lames plissées à feuillets réfléchis, chacune est soudée au manteau, sur toute la longueur, par le bord dorsal de son feuillet externe. Ménégaux (2) a examiné deux espèces de Méléagrines : la Meleagrina margaritifera L. et la M. albida Sow. Le cœur est logé dans la concavité du muscle; le ventricule n'est pas traversé par le rectum. Les branchies ont une structure identique à celle de l’Avicule. ALIMENTATION. — La nourriture de l'Huitre perlière est constituée par de petites Algues, des Diatomées, des Infu- soires et des Foraminifères. Pour happer sa nourriture, l'animal ouvre ses valves en les écartant de un centimètre eLpluse FONOTIONS DE LOCOMOTION. — La Méléagrine est fixée au support, dans son jeune âge et dans son âge moyen, par un faisceau de 30 à 40 fils qui constituent le byssus; les coquilles dont le diamètre est inférieur à 7 ou 8 pouces sont attachées au support, qui est formé principalement de fragments de Coraux et de coquilles, par un byssus résistant. Les coquilles de grande taille, de 9 où 10 pouces de diamètre, et de poids considérable, sont dépourvues de byssus, comme Fa cons- taté Saville Kent(3) dans tous les exemplaires qu'il à examinés en place, et restent simplement posées sur le fond, généralement par la valve gauche; la valve libre est d’ailleurs (4) Pelseneer. — Contributions à l'Etude des Lamellibranches, Archives de Biologie, t. XI, pp. 198-199 ; 1891. (2) Menégaux. — Recherches sur la circulation des Lamellibranches marins. Besançon, 1890, pp. 43-44. (3) Saville Kent. — The Great Barrier Reef. 138 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION recouverte de Madrépores et d'Eponges, qui empêchent, par leur poids, tout déplacement du Mollusque. Quand l'animal veut se fixer, il allonge son pied et après _avoir cherché pendant quelques minutes, avec l'extrémité de ce pied, une place convenable, il le rentre dans sa coquille; une forte fibre, ayant la forme du sillon longitudinal dont le pied est creusé, reste attachée par une de ses extrèmités à la base du pied, et par l’autre au roc. Ce petit manège est répété plusieurs fois, jusqu'à ce qu'il se soit formé un cable tres solide qui constitue le byssus. L'animal ne peut pas détacher son byssus du roc sur lequel il est attaché, mais il peut le couper au niveau de son corps et le laisser en arrière. Kelaart à montré que la Méléagrine peut se détacher volon- tairement et quitter l'endroit où elle est attachée pour aller se fixer ailleurs; ce déplacement à lieu presque exclusive- ment pendant la nuit, et se produit plusieurs fois à de courts intervalles chez des spécimens conservés en aquarium, de telle sorte que l'animal peut avoir changé de place jusqu'à douze fois dans un mois, en secrétant chaque fois un nou- veau byssus. D'après Kent, dans le cas où le byssus est endommagé, il est rejeté et un nouveau. byssus est secreté; cet auteur ajoute que «the animal was capable at will of separatinge itself from its original fulcrum, and of reattaching itself elsewhere »; ce dernier fait a été vérifié sur des spécimens conservés en captivité. Chaque fois que la Pintadine est cueillie par arrachement, elle meurt aussitôt; si, au contraire le byssus est conservé par le plongeur avec la coquille et n'est détaché du corps d'adhérence que par son extrémité extérieure, en la remet- tant à la mer, de nouvelles soies seront filées à côté des anciennes à l'effet de reconstituer une nouvelle attache au corps dur qui en sera le plus voisin. Par conséquent, la con- servation du byssus est une question essentielle de vie ou de mort des sujets que l’on veut déplacer. Mariot recom- mande également de ne pas endommager le byssus des jeunes Huiîtres qu'on veut transporter. La locomotion des jeunes Méléagrines est peu active et à ce sujet les habitudes de l’huitre perlière sont semblables à celle de la Moule commune et des Avicules. La Pintadine ne possède pas la faculté de locomotion rapide du Pecten et L'HUÎTRE PERLIÈRE 139 . de la Lime, qui peuvent se transporter à des distances con- sidérables en rapprochant et écartant les valves de leur coquille, bien que cette faculté leur ait été attribuée à tort par des indigènes et des propriétaires de bateaux pêcheurs. FONCTIONS DE REPRODUCTION. — Suivant Kelaart, Bou- chon-Brandely, etc., la Pintadine mère-perle est à sexes séparés ; il faut donc, pour que la reproduction s’accom- plisse, que dans un périmètre assez restreint il y ait des individus appartenant à l'un et à l'autre sexe. Dans les fonds ayant été dragués maintes et maintes fois, pendant plusieurs années consécutives, les sujets restants deviennent trop rares et trop isolés pour que les éléments générateurs puissent se rencontrer, à raison de la tranquillité relative des eaux des lagons, et c'est pour cette raison que le rahui n'a pas donné les heureux résultats qu'on en attendait. Kelaart (1 et 2), n'a pas vu plus de 3 à 4 indidus mâles pour 100 femelles, et il pense que cette proportion parait. être la proportion normale des deux sexes; il insiste sur la erande part que les Huitres mâles prennent à la formation des bancs, les œufs ayant absolument besoin de l'influence de la liqueur mâle, et montre l'importance de leur conser- vation. DIRFÉRENCES SEXUELLES. — Jusqu'à présent on n'a pas établi de différences satisfaisantes entre les coquilles des deux sexes. D’après les indigènes, les grandes coquilles aplaties, sont celles des mâles, celles qui sont épaisses, bombées, étant celles des femelles; mais cette distinction n’a pas été confirmée, et Kelaart a trouvé des œufs bien formés dans des Huiîtres grandes et aplaties. Cet auteur a observé chez la Meleagrina radiata la sortie des œufs, dans le voisinage de l'anus, sous forme d'un courant nuageux qui se continua pendant à peu près un quart d'heure; il n'a pas pu distin- œuer un oviducte régulier à l'endroit où s'échappaient les (4) Kelaart, E. F. Introductory Report on the natural History of the Pearl-Oyster of Ceylon (Meleagrina margaritifera Lam.) Madras Jour- nal of Literature and Science ; N. séries, vol. 3; 1858, pp. 39-104. Pro- ceed. Royal Phy. Soc. Edinburgh, vol. L, 1858; pp. 399-405. (2) Kelaart, E. F. and Karl Moebius. On the natural History of the Cingalese Pearl-Oyster and on the formation of pearls. Annals and Magaz. of nat. history 3 Ser. vol. I, 1858, pp. 81-100. 140 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION œufs. Ces œufs sont piriformes, mesurant 8 millièmes de millimètre de plus grande largeur, et 16 millièmes de milli- metre de longueur; le nombre d'œufs contenus dans les ovaires d'une Huitre perlière de cinq à six ans est estimé à douze millions au moins. Les spermatozoïdes sont contenus dans des organes semblables aux ovaires, et s'échappent sous forme d'un liquide laiteux. Kelaart insiste sur l'intérêt qu'il y a à procéder à des observations mensuelles des ovaires, afin de déterminer si l'Huitre perlière est seulement en frai à certaines périodes et si elle pond plusieurs fois dans l'espace d’une année. Grand (1) à fait connaitre l'époque du frai aux iles Gam- bier; dans cet archipel, situé par 23° de latitude sud, il y a deux saisons nettement tranchées, la saison chaude, de novembre à fin avril, et la saison froide, de mai à fin octobre; vers la fin de décembre les glandes sexuelles des Pintadines sont jaunes dans les unes, rouge-aurore dans les autres; c'est à cette époque qu'à lieu l'expulsion des pro- duits sexuels. Dans l’archipel des îles Tuamotu, situées par 15 à 18 degrés de latitude sud, la différence des saisons ne s’accuse que par une période pluvieuse, la température des lagons étant à peu près toujours la même. Les indigènes de ces îles pensent que les Méléagrines deviennent fécondes à chaque pleine lune: Bouchon Brandely fait remarquer que le frai. n'a pas lieu en même temps dans toutes les îles de l’ar- chipel, ni même dans les îles voisines les unes des autres : vers le milieu du mois de juillet 1834, les Huitres perlières de l'ile de Takarava étaient en plein frai, tandis que celles du lagon d’Aratika frayaient seulement cinq semaines plus tard. Comme on le voit, la nécessité d'observations men- suelles s'impose dans chacun des lagons de Tuamotu, afin de trancher la question de l'époque du frai dans ces iles d'une manière précise; les résultats pratiques de la con- naissance de cette question ne sont pas contestables. L'Huitre perlière serait en frai dès l’année qui suit sa naissance. (1) Grand, A. Méthode de culture de l'Huître perlière dans les lagons de Tahiti. Revue maritime et coloniale; Tome 125; (Bulletin des pêches maritimes); pp. 576-590. Paris, Mai 1895. L'HUÎTRE PERLIÈRE 141 FIXATION DU NAISSAIN. — Les éléments sexuels se rencon- trent au sein des eaux; on ne trouve jamais de naissain entre les valves de l'Huiître perlière. Le naïissain se fixe sur les différents supports qu'il ren- contre : sur la coquille des parents, sur les branches de Coraux morts, sur les pierres, etc. Bouchon-Brandely a fait la remarque, que dans les lagons de Tuamotu, jamais le naissain ne s'écarte du lieu où il est né; Grand dit au con- traire, que sous le vent du lagon on trouve des naïissains d'Huitres perlières adhérents aux pierres du rivage et à de très grandes distances des gisements de mères. D’après Mariot (1), les Coraux vivants, si favorables au développement de la coquille déja formée, non seulement laissent échaper le naissain, mais encore le détruisent; M. Diguet fait remarquer également que « dans les fonds perliers on ne rencontre jamais surles Madrépores vivants d'Huitres perlières fixées, mais lorsque ces derniers sont détachés en bloc et que leurs surfaces sont mortes on les rencontre souvent donnant asile à plusieurs Méléagrines ; ils présentent alors d'excellentes conditions pour que les Mollusques puissent y fixer leur byssus ». Grand ayant constaté que le naissain se fixait sur les chaines en fer retenant les tonneaux de balisage d'une passe d’un lagon, eut l’idée d’immerger des fascines en bois de « mikimiki », bois imputrescible, plus dense que l’eau, d'un arbrisseau qui pousse sur le rivage même des lagons; l'appareil collecteur comprenant un flotteur, une corde en brou de coco avec six fascines et une pierre de fond, était immergé au moment du frai: trois mois plus tard les fascines étaient suffisamment garnies de naissains variant de 2 à 4 centimetres de diamètre. Il est absolument nécessaire d’avoir des collecteurs pour recevoir le naissain: les Madrépores morts, détachés en blocs, les roches calcaires, les fascines, constituent d'excel- lents collecteurs. : Beaucoup de jeunes Méléagrines sont fixées sur la coquille des adultes ; aussitôt qu'elles atteignent une certaine taille et un certain poids, elles coupent leur bysssus, et vivent (1) Mariot. La reproduction des Huiîtres perlières aux iles Tuamotu. Bullet., Soc. d'Acclimatation (3) Tome I; 1874, pp. 341-342. 0 142 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION sur le fond, ou bien probablement sont entrainées par le courant à une grande distance. Cette propriété de se déta- cher elles-mêmes a été contrôlée par Kent (1) sur des spé- cimens conservés en captivité. La présence de beaucoup de byssus abandonnés à la surface des coquilles âgées appuie d’ailleurs l'opinion qui vient d'être émise. Il est superflu d’insister sur l'importance, au point de vue de la culture, de cette migration des jeunes Huîtres per- lières. La croissance et l'avenir des jeunes Pintadines dépendent des conditiens dans lesquelles elles sont placées; il y a lieu d'étudier à cet égard l'influence de la nature des fonds, celle de la profondeur, des courants, etc. INFLUENCE DE LA NATURE DES FONDS. — La nature des fonds a une grande importance. Le fond de sable calcaire est mortel pour les Huitres perlières: il y a quelques années, on dispersa une certaine quantité de petites Huitres en un point du lagon de l'ile d’Anaa, sur un fondoùuilny avait que du sable ; toutes périrent ensevelies sous les sédi- ments. D'après Mariot, un fond de pierres ou de gros gravier leur est bon, mais leur développement y est peu rapide; la préférence doit être donnée aux fonds formés de graviers conchylifères, dégagés de Coraux colorés, car les Pinta- dines en empruntent souvent la couleur. Les Coraux bran- chus, vivants, sont favorables au développement de la coquille; on peut créer ce fonds de Coraux : pour cela, on enlève des séries de bouquets de Coraux disséminés de ei de là et on les transporte, en ne les laissant pas hors de l’eau plus d'une heure: ces morceaux de Coraux reprennent sur le fond comme des bouture. On peut d’ailleurs utiliser un fond sablonneux en l'ensemençcant de pierres et de co- quilles ; M. Diguet cite un fait de ce genre dans son étude sur l'Huitre perlière du Golfe de Californie. INFLUENCE DES COURANTS. — La croissance des Huiîtres perlières est plus rapide dans les lagons qui ont une ou deux passes communiquant avec la mer que dans- les lagons fer- més (Mariot). Les courants, dans les lagons, sont déterminés par l'action (1) Saville Kent. The Great Barrier Reef. de de L'HUÎTRE PERLIÈRE 143 -des marées; d’après Grand, les Pintadines qui se trouvent fixées dans un endroit ou la vitesse du courant n'excède pas un nœud à l'heure, sont celles qui s’alimentent dans des conditions normales. Dans les courants de grande vitesse, tout comme dans une eau stagnante, les Pintadines sont maigres. INFLUENCE DE L'ALTITUDE DU FOND. — L'altitude du fond a une importance considérable pour le développement des nacres. Dans les fonds de moins de cinq mètres, très éclairés, à nappe d'eau très oxygénée, les Méléagrines sont recou- vertes de végétation, et contraintes dans leur développe- ment; elles vieillissent sans jamais atteindre au delà de douze centimètres de diametre ; ces nacres ont la coquille épaisse et perforée par les Entozoaires et leur valeur com- merciale est toujours un prix minimum; néanmoins, elles sont recherchées des plongeurs, en raison des perles qui S'y trouvent assez souvent; c’est ainsi que sur le banc de Tearae (archipel des Gambier), dont le fond est rapproché de la surface et très éclairé, le test de la nacre est très dense et la pousse extensive limitée; par contre, ce banc est un banc perlier par excellence. (Grand. DURÉE DE LA CROISSANCE. — On n'est pas encore complète- ment d'accord sur le temps nécessaire à la Méléagrine pour parvenir à l'état adulte. Grand estime qu'il faut cinq années pour que la nacre devienne marchande; Mariot, Saville Kent et M. Diguet pensent que trois années suffisent. Les Huitres perlières de Ceylan ne produiraient de bonnes perles qu'après la sixième année. Comme il est facile de s'en rendre compte, on connait encore relativement peu de chose sur l'histoire naturelle de l'Huitre perlière; un grand nombre de problèmes restent ‘encore à résoudre, dont la solution est d'une importance capitale pour la bonne réussite de l'élevage de ce Mollusque ; ces connaissances sont également indispensables si on veut réglementer la pêche d'une facon méthodique. ENNEMIS ET COMMENSAUX DE L'HUÎTRE PERLIÈRE. — Un cer- tain nombre d'animaux viennent chercher asile à l'intérieur des valves de la Méléagrine, et vivent à ses dépens. Les Pinnotheres sont de petits Crabes à carapace arrondie qui 144 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION se logent entre les lobes du manteau; ces animaux, très fré- quents, ont été signalés chez la Meleagrina margariltifera par Saville Kent (1), Bouchon-Brandely, etc.; O. Bürger cite le Pinnotheies villosus Guérin, commensal de la Meleagrina Mnargaritlifera à Ubay (2). L'Alpheus avarus Fabricius, est également un Crustacé commensal (Saville Kent, pl. XIV). Un Poisson, le Fierasfer dubius Putnam, « Glass eel », vit en commensal dans la chambre branchiale de la Méléa- grine et également dans la cavité générale des Holothuries (Saville Kent, pl. xu fig. 10). Il peut arriver que le commensal, au lieu de s'introduire entre les deux moitiés du manteau, pénètre entre le man- teau et la coquille, causant une irritation qui provoque la sécrétion de la nacre et le commensal se trouve englobé très rapidement, dans un kyste nacré, restant visible par trans- parence; Woodward (3) a signalé le cas d'un Pinnotheres ainsi englobé dans la couche de nacre d'une Méléagrine pro- venant de la côte septentrionale de l'Australie; Gunther (4), Putnam (5), Kunz (6), L. Diguet, etc., ont signalé le même fait à propos du Fierasfer dubius. M. Diguet a rapporté au Muséum des échantillons de Fiej-asfer ainsi emprisonnés dans une couche de nacre, provenant de l'exploitation de M. Vives en Basse-Californie. ENNEMIS DE LA PINTADINE. — Un certain nombre d'animaux S'attaquent à la coquille, qu'ils perforent, d’autres mangent la Pintadine. L'un des animaux les plus nuisibles a été appelé par les indigènes « Raie marteau » (tehareta); c'est une Raie longue de 1 m. 50 sur 1 mètre de largeur. Ce (1) W. Saville Kent. The Great Barrier Reef, Plate xi1, fig. 40; Fie- rasfer : Plate x1v, fig. 12-43. (2) Bürger, O. Ein Beitrag zur Kenntniss der Pinnotherinen. Zool. Yahrbücher, 8 Bd. 1895 p. 361 [Pinnotheres villosus Guérin]. (3) Wodward. Exhibition of, and remarks upon specimens of animals commensal or parasitic in the shell of Meleagrina margaritifera. Pro- ceed. Zool. Soc. London 1886, pp.176-177; et Nachr. Malak. Gesellsch. XVII, p: 487. (4) Günther. Exhibition of a small Fish of the genus Fierasfer im- bedded in a Pearl-Oyster. Proceed. Zoolog. Society. ASS6, pp. 318-320 ; with a cut; et Nachricht. Malak. Gesellsch. xvrrr, p. 187. (5) Putnam. Fierasfer dubius; Proceed. Boston Society xt. pp. 343- 346 ; 1872. (6) Kunz. Bull. U. S. Fish Commiss. vol. xx, plate 32; 1894. L'HUÎTRE PERLIÈRE 145 'Frygon possède deux mâchoires portant de nombreuses dents disposées en mosaïque, avec lesquelles elle broie les Pintadines, surtout les jeunes, et se nourrit de leurs parties charnues. Ce Poisson se trouve par bandes de huit à douze individus. Un autre Poisson, long, arm: d'une puissante mâchoire, appelé « Oiri » ou « Kotohe » à Tuamotu, broie également les Huitres et les dévore. Un Crabe attaque la jeune Huitre, la détache de son point d'adhérence à l’aide de ses pinces et la dévore ensuite. On a signalé, sur les bancs d’'Huitres perlières de Ceylan, de grandes Etoiles de mer de couleur blanche, tiquetées et frangées de cramoisi. D’autres animaux s’attaquent à la coquille; d’après l'opi- nion de beaucoup d'auteurs, l'expérience démontre que les Vers perforateurs du test de la nacre, tres abondants sur les haut-fonds, choisissent de vieux sujets, c'est-à-dire ceux qui ont cessé leur poussée extensive. Un Murex transperce le test de part en part, obligeant l'animal à un travail incessant de sécrétion pour boucher les nombreux trous pratiqués dans sa coquille. A Ceylan, un Gastropode, désigné sous le nom de « Chank » (Lurbinella rapa), perce au moyen de sa trompe de petits trous dans la coquille de la Meleagrina radiata, et mange le Mollusque (1). Les Lithodomes produisent dans la coquille des perfora- tions dont le diametre peut atteindre parfois un demi-centi- mètre, et arrivent à occasionner la mort de la Méléagrine; le Mollusque perforant se réserve dans les couches exté- rieures de la Pintadine, une ouverture par laquelle sont éta- blies les communications avec le dehors. L'ouverture des valves du perforant est généralement dirigée vers les couches extérieures de la Pintadine, le sommet de la coquille repo- sant sur les couches intérieures qu'il détruit successivement en progressant dans son travail. D'après Bouchon-Brandely, le « Ver aiguille » est le plus malfaisant à Tahiti; il creuse entre l'écorce extérieure de la (4) Soubeyran et Delondre. De la pècherie d’Huîtres perlières de Tinnevelly et de la culture artificielle des Huitres perlières dans la même localité, Bulletin Soc. imp. Zoolog. d’Acclimatation (2), Tome IV, pp. 398-115; Paris 1867. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 10 146 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ: D'ACCLIMATATION coquille et la partie nacrée une multitude de trous et de galeries qui la font ressembler à un morceau de bois rongé par les Xylophages. La nacre ainsi détériorée s'appelle nacre piquée ou vermoulue. Une Eponge siliceuse, appartenant au genre Cliona, déter- mine dans toute l'épaisseur de la coquille de fines perfora- tions régulières souvent tres rapprochées les unesdes autres. Gwyn Jeffreys recommande que les bancs soient dragués fréquemment, afin d'opérer la destruction de tous les Mol- lusques coquilliers et des Etoiles de mer qui pourraient nuire à l'Huitre perliere (1). (A suivie.) (1) De Folin. Des perforations de la Pintadine mère-perle (Meleagrina margaritifera Lamk). Actes Soc. Linéenne Bordeaux, T. xxv; (3) T. v, 1864, pp. 339-344. nee Di ACCLIMATATION D'ARBRES EXOTIQUES | AILA VILLA EUCALYPTA (BEYROUTH, SYRIE) par H. MOREL Depuis 1887 voulant choisir un endroit bien caressé par les rayons du soleil pour y passer mes hivers, j'ai jeté mon dévolu sur Beyrouth, à 900 lieues de la France. Ce n'est pas là une de ces idées communicatives qui menacent de faire-beaucoup de prosélytes; et cependant, consultez les touristes français qui ont fait le tour de la Méditerranee. la plupart manifesteront une prédilection marquée pour ce pays. Notre protection, en 1860, et depuis cette époque, l'action continue de nos religieux, et surtout de nos reli- œieuses, en ont fait une vraie petite France en dépit des efforts contraires des Turcs, des Américains, des Anglais, des Italiens, et surtout en dernier lieu des Allemands et des Russes. Beyrouth n’a à montrer aux voyageurs ni monu- ments, ni sites remarquables, ni lieux saints ou historiques ; et néanmoins le cœur français s’y trouve al home comme au Canada, et comme, dit-on, à Maurice. À vrai dire, rien n est beau comme le coucher du soleil incendiant le sommet neigeux du Saunin et toute la chaine du Ziban, du dernier reflet rougeätre de ses rayons; le fameux phénomène dé l'illumination des Alpes, si vanté, lui est inférieur. Beyrouth est situé par 33°5418"” de latitude : comme pays connus et fréquentés on peut-lui comparer Biskra à 34°51 97, Gahes à 33°52°58” et Madère 32°37”. C’est un pays chaud, mais non torride; la moyenne d'août, le mois le plus chaud, y est de 28° 1/2. Bien rarement les minima descendent au- dessous de + 5°. Cependant en 1880 et en 1896 j'y ai vu de la glace. En 1880 les Eucalyptus y ont gelé; et il y a quatre ans, j ai compté trente-quatre sortes de plantes mortes de froid. La terre y est extraordinairement compacte. Le sable de la mer, poussé par les vents alizés, a envahi et enseveli de nombreuses propriétés, menacant Beyrouth et formant de hautes dunes. Un bois de Pins a efficacement protégé la ville. Les Turcs, dans leur barbarie, n'ont su opposer au 148 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION fléau que des plantations de Cactus, obstacle dérisoire. Heureusement, depuis quelques années, les vents semblent avoir changé. La terre y est chargée surtout de fer; elle est complète- ment dépourvue de phosphate: la terre de bruyère y fait aussi défaut, même dans le Liban. Je viens vous raconter les efforts, par moi tentés, pour créer là une propriété à l'instar de nos propriétés françaises. La Société d'Horticulture m'a accordé une médaille d'or pour notre propriété de France, la villa des Cyclainens à Auteuil, pres Beauvais; j'ai tout lieu de penser que notre villa Eucalypla de Beyrouth n'est pas inférieure à sa sœur ainée. Commencons par les ARBRES. Un arbre magnifique se présente d'abord : l'Araucariæ excelsa. Planté dans l'axe de la façade de la maison, à sept metres, il Commande vraiment l'admiration. Ici, qu'on me permette de donner un conseil à nos colons : « Ne plantez jamais d’arbre à moins de six meétres de l'habitation, plus près, c'est y attirer l'humidité d'abord, puis les Insectes si nombreux et si nuisibles dans les pays chauds ». J'ai donc trainé à cette distance, malgré sa taille (alors environ de 5 à 6 mètres) cet arbre le plus décoratif qu'on puisse imaginer, il avait été maladroïitement placé dans un coin contre l'immeuble. Un autre arbre également somptueux est le Pinus pinea ou Pin parasol. J'avais déjà admiré ceux de Cannes et ceux du Vésuve, à Naples, mais ni à Cannes ni à Naples jenen ai vu d'aussi beau que celui-là. Il y en a toute une forêt à 3eyrouth avec mélange de Pins d'Alep, improprement appelés Pins de Jérusalem, car il n'y à pas un seul Pin à Jérusalem. Ce qui caractérise surtout ma propriété, c'est la collection d'Eucalyptus que j'y ai élevés; mais ceci fera, si vous le voulez bien, l’objet d’une communication spéciale. J'ai hâte maintenant de vous parler des Palmiers. Est-il une famille d'arbres plus admirable que celle-là ? Malheureusement un proverbe arabe dit que celui qui plante le Palmier n’en verra pas les fruits, ce qui est un peu exagéré. ACCLIMATATION D'ARBRES EXOTIQUES 149 Il en est un qui se recommande avant tout par la vigueur de sa végétation; certains le nomment Brahea, la plupart lui donnent le nom de Pritchardia, enfin Naudin critique ces deux noms et insiste pour qu'on l'appelle Washingtonia,nous avons le robusta et le filifera ou filamnentosa. On éprouve un vrai plaisir à constater la rapidité de croissance extra- ordinaire de cet arbre. “Pendant que nous parlons des Palmiers, énumérons la liste de ceux qui font ou feront la gloire de notre villa. En les plantant, nous avons plus pensé à nos petits neveux qu'à nous mêmes, et cependant certains nous récompensent déjà en déployant une vigueur peu commune. Notons les Areca Baueri, lutescens, sapida; des Brahea, Ræzli et Ræ:li glauca de toute beauté et surtout plusieurs Jubæa Spectabilis du Chili qui m'ont été donnés il y a dix ans par M. Max. Cornu et qui sont déjà pleins de promesses. Suivent les Chamærops humilis, excelsa, macrocarpa; les Cocos cainpestris, datil, flexuosa (du Brésil), Romanzof- fiana, Weddelliana (une des plus belles plantes d'apparte- : tement), l'£læis Guineensis, le Geonoima (semble à Bery- routh exiger la serre), les Æentia Balinoreana, Forste- riana, etc. Je ne puis m'empêcher de m'étendre sur nos quatre Latania Borbonica; achetés il y a une dizaine d'années, ils tenaient dans une petite boite de 15 centi- metres de côté, actuellement ils déploient leurs fastueuses frondes avec une impériale majesté. Toutefois il en est un qui roussit et semble péricliter. A l'encontre des autres, il est placé dans le coin le plus argileux, difficile à arroser et tout à fait exposé en plein soleil. Ces trois conditions réunies semblent lui nuire et lui présager un fatal destin. L'un d'eux ayant déjà trois fois fleuri, notre jardinier arabe a eu l'excellente idée de le féconder avec le pollen d’un autre Palmier, celui d'un simple ChamnÆærops huwmilis. L'expérience à confirmé ce que m'avaient déjà enseigné des connaisseurs : dans les multiplications de Palmier, le fruit qui germe suit invaria- blement le genre et la tournure de la mere. Cela nous a permis de distribuer déjà plus de 50 kilogrammes de graines wrbi et oïbi, j'en ai envoyé jusqu'au Brésil. Parmi les Pal- miers Phænix, nous possédons d’abord en certaine quantité le canariensis au tronc monstrueux, un des premiers 150 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION arbres que doit tenter de posséder un arboriculteur, puis le Phœnix daclylifera, seul commun à Beyrouth (c'est à peu près la limite des pays où les fruits de cet arbre murissent). Ensuite le /eonensis vel spinosa, le reclinata Si gracieux, le upicola, le Senegalensis. Enfin les Palmiers suivants : Sabal Ghiesbreghti, Fra- chycarpus excelsus, Thrinax elegans. ai oublié le Car- ludotviea palinata. Ces deux derniers, ainsi que le Geonom«, semblent tres délicats. J'ai construit une serre un peu haute pour tous les trois. Je me demande si je dois tenter aussi l'acclimatation du Borassus flabelliformis, ce géant indien de quarante pieds fournissant là-bas sucre, vin et toitures des paillotes, sans compter un fruit gros comme la tête d’un enfant. Les Cycadées et Pandanées font bonne figure auprès des Palmiers. Nous avons deux Cycas circinalis assez beaux et les Pandanus graininifolius, utilis et Veitchi. Si la prestance des Palmiers leur a valu le titre de princes des arbres, les Conifères en formant l'aristocratie et s'il est même un arbre que lon puisse qualifier de Maiesté c’est bien le Cedrus Libani. J'en avais trouvé un quand j’achetai ma villa Eucalypta, en 1887. Détail curieux : À cet arbre du Liban planté sur sol libanais pen- dait encore l'étiquette d’un horticulteur de Paris. Placé dans un fouillis d’autres arbres qui l’étouffaient, de cette majesté déchue, comme le lion de la Fontaine, on peut dire : Le Cèdre splendeur des forêts Fut enfin attaqué par ses propres sujets Devenus forts par sa faiblesse. Force fut de le laisser faire place ‘aux autres. Il est remarquable que cet arbre ne se voit pas à Beyrouth ; pro- bablement la pression atmosphérique habituelle lui est fatale; au Liban même, on ne le rencontre que sur les sommets les plus élevés, et si Jussieu ne l’avait emporté dans son chapeau, cette espèce menacerait de s'étendre. Aujourd'hui un Cèdre deodara Ss'engraisse de ses dé- pouilles. Les Abies ont en général du mal à réussir. Nous avons le ACCLIMATATION D’ARBRES EXOTIQUES 151 fortunei languissant, mais l'Abies pleurant ou 320rinda et le normanniana bien portants. Les Araucaria souffrent aussi, est-ce le soleil qui les brûle? Un manouvrier arabe m’a arraché un Araucaria tinbricala d'un metre, le prenant pour un arbre nuisible. Nous avons les Araucaria Bidivilli, excelsa, imbricata, sinensis, Cuninghami, glauca, }e Cedrus atlantica glauc«, les Ciyplomeria japonica, elegans, Lobbii, inonstrwosa, nana albo spica. Le Cupressuws, l'arbre par excellence de ces pays présente ici plusieurs grandes espèces inconnues, puis les Cupressus Cashimneriana glauca, glauca, hori- zontalis, juniperus, bermudianc. Outre le Pinus alepensis et le Pin-parasol déjà nommés, la Villa Eucalypta possede le canariensis fort curieux, le densifoliæ, lexcelsa, Ÿ Harniltoni, le laimbertiana; arrètons nous sur celui-ci, il le mérite : d’une forme des plus irrégu- lières, il produit le strobe le plus gros de tous les fruits des conifères. Nos deux sujets ont près de 5 mètres mais pas encore de cônes, puis le P. palula, ponderosa, tæda dit Pin à encens. Viennent ensuite le Pseudolarix Kæjnpferi; les Retlinospora plumosa, squarrosa; le Taxodiuim distychum où Cypres chauve de la Louisiane (souffrant du manque d'eau), le Thuya Lobbii zebrina;le Wellinglontia pendula (souffrant de trop de soleil). De toutes les plantes, de tous les arbres que nous avons introduits en Syrie, ce qui est le plus apprécié, c'est le Mimosa et surtout le Mimnosa deatbata. I n'y a plus là-bas de réception en carème. Le mardi gras une fleur de Camellia . par exemple, se vendra jusqu'à cinq francs, le lendemain elle n'aura plus de valeur. Le Mimosa dealbala qui fleurit en mars est donc des plus appréciés; c'est, du reste, non seulement le plus précoce mais aussi celui qui fournit les plus belles fleurs et le plus beau feuillage. Cette année, quand nos marins français sont venus, on peut dire que j'en ai couvert la flotte entière. Cette classe des Mimosées est des plus intéressantes et des plus nombreuses. Le diction- naïre de Paxton en énumère trois cent cinquante. J'en ai essayé une trentaine au moins et je communique iei mes impressions désintéressées. Le Mimosa dealbata, le plus intéressant de tous à coup sûr ne réussit pas en tout terrain. 1l a longtemps fait le 152 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION triomphe de Cannes et la jalousie de Nice et de Menton. Enfin on a eu l’idée de le greffer en ce pays sur le longifolia et maintenant il s'épanouit partout dans le midi. Cet arbre est si beau qu'on le pille partout à Cannes, au bout de quelques jours on n'en voit plus un entier; il ny a qu'un seul endroit où l’on puisse l’admirer dans toute sa beauté, c'est au cimetière; là seulement il est respecté seu reveren- tia moïrtis, Sew limore custodis. On peut dire qu'à cette époque, le cimetiere est l'endroit le plus gai de Cannes; c'est là que l'oiseau vient roucouler sa sérénade, séduit par la beauté du lieu ou plutôt jouissant de la même quiétude que la fleur et pour la même raison. J’ajouterai que l’Acacia commun, Robinier ou faux-Acacia est un des arbres à pro- pager plus que tout autre dans les pays sauvages ou à demi- sauvages; en Syrie on pille nos Pins; bois, fruits et branches sont également recherchés; les branches en particulier servent à l'élevage des Vers à soie. L'acacia au contraire est moins tentant; d'abord il se dé- fend par ses épines, de plus son bois est terriblement lourd et ne s'enleve pas si facilement, c'est le bois le plus dur à entailler et on ne peut le faire sans bruit et sans attirer l'attention. Enfin pour le maître, c’est le bois le plus utile à employer; de ses plus petites branches on fait d'excellents manches d'outils. Ses fleurs, qui font de délicieux beignets, ne sont pas des plus appréciées des indigènes. Pour en revenir à la question de précocité de la floraison, après le Mimosa dealbata ce sont l'oteæfolia et le cyano- phylla qui lui succèdent. Cette question est beaucoup plus importante qu'elle ne paraitrait à premiére vue. Quelque soit en effet, le pays qu'on habite, il y a la saison agréable, saison printanière que les frileux comme nous viennent chercher de bien loin. A mesure que croit la rapidité de la locomotion, on va de plus en plus loin chercher la chaleur. Ne parlez pas à un niçois de la plus belle fleur du monde, si elle fleurit au mois d'août. Beyrouth, toutefois, fait excep- tion à la loi commune. Si les Européens viennent en hiver et au printemps chercher la chaleur, en été les Egyptiens viennent chercher la fraicheur au Liban. Néanmoins l’arrivée de Pâques marque la fuite des étran- gers; à cette date l'Acacia cyclops, curieux par l'espèce d'œil qui se distingue dans sa graine, vient à son tour fleu- ACCLIMATATION D’ARBRES EXOTIQUES 153 rir, puis le dodoneifolia (Synonyme viscosa) sorte de Mi- mosa pleureur du plus admirable effet. Il n’est rien de plus décoratif que cet arbre à sa floraison, quand il est bien dégagé et placé bien en vue, seulement la viscosité qui exsude de toutes ses feuilles le rend sujet à une maladie que je réussis à enrayer en les abattant entie- rement après floraison, et en le frictionnant vigoureuse- ment avec du pétrole. Placé en face et faisant pendant à un Saule pleureur (arbre si magnifique dans le midi) cela pro- duit un effet pittoresque des plus délicieux. Il y a bien d’autres Mimosas également recommandables, tels le Zeiophylla ou saligna le sideroxylon, le {rinervis, le salicina, le doratoxylon, très beaux également, mais un peu moins florifères chez moi. Ce qui en fait l'attrait, c'est la diversité infinie de ces arbres à tous les points de vue, comme feuilles, fleurs, branches, tronc, écorce, tenue de l'arbre, etc. Cette diversité convient à merveille à Bey- routh, le pays du monde peut être où il y a le plus de diversité dans les races humaines : Turcs, Arabes, Ansarieh, Metualis, Druses, Maronites, Grecs-Levantins, Syriens, Chaldéens, Juifs, Arméniens, etc., etc., pour ne parler que des Asiatiques sans compter les Européens, Africains et Américains. Terminant l'énumération de nos Acacias-Mimosas au point de vue des fleurs à bouquet, je citerai l'albicans, argyro- phylla, brachybotrya, lophanta, lophanta Neuindani, macraderna, melanoxylon, moluccana albizzia, neo- Mmexicana, Mmyriobotrya, longissina, elegans, new, re- tinoides, floribunda. Comme fleur pour la parfumerie, l'Aca- cia farnesiana abonde, il est appelé Emmebaze par les Arabes qui en garnissent leur chevelure; l'odoralissima que j'ai aussi fait venir m'a paru d'abord la même espèce, mais bien qu'elle s'en rapproche beaucoup elle est plus flo- rifère et moins parfumée que le farnesiana. Le cullrifor- mis et l'ornithophora offrent aussi de fort jolies fleurs, mais par leurs épines elles offrent des inconvénients. Enfin au point de vue de la défense des terrains par les épines, ce qui n'est pas le moindre avantage de beaucoup des Légumi- neuses, nous avons l'eburnea, l'ovalifolia offrant d'énormes épines très curieuses mais irrégulières, l'Acacia où Gledilt- schia triacanthos propre à défendre les abords d'une pro- 154 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION priété. Il est toutefois un arbre, qui offre encore plus de garantie pour la défense et la clôture, il appartient non plus, aux Mimosées mais aux Cesalpinées, c'est-à-dire faisant encore partie des Légumineuses. Il n'est pas d'Argus ni de Cerbère, qui vaille ce gardien-la; le visiteur qui ne se courbe pas assez pour passer au-dessous, est immédiate- décoiffé et a bien dés peines à retirer son chapeau en bon état. ù Cet arbre c'est le Cæsalpinia dijinia; ses épines sont inévitables, par cette raison qu'il y en à dans tous les sens. Mentionnons encore parmi nos Mimosées l’Acacia Leb- beck répandu à profusion dans tout l'Orient et le Jwli- brissin, dont la fleur est fort belle et ne ressemble à au- cune autre. Le Minosa pudica n'a jamais pu grandir chez nous. Le baileyana vient seulement d'être semé, je ne puis l’apprécier. J'ai perdu larmala, le linifolia glauca, le œi- totica, le pycnanth«. Maintenant notons par ordre alphabétique les autres arbres représentés chez moi L'Æsculus rubra où Marronier rouge (languissant), le Carica Papaïa, Papayer, arbre des plus curieux ayant une apparenceexotique et tropicale bien qu'il endure assez bien le climat de Beyrouth dans les endroits bien ensoleillés. IT est dioïque, et les sujets mâles improductifs sont malheureuse- ment assez nombreux. Ses fruits font une confiture man- seable. Ses feuilles contiennent un sue, la papéine, analogue à la pepsine, on attendrit la viande en la plaçant entre deux feuilles de Papaïer. Enfin le Cassia pistäacæfolia, arbre où plutôt arbuste qui m'a été apporté du Transvaal et qui s'élève rapidement. Parmi les autres essences, notons encore le Casuarina equiselifolia de l'Inde, surnommé Filaos en Egypte et de là acclimaté quelque peu en Syrie; le Casuarina quadri- valvis apporté par moi de Nice, le Catalpa bignonia, le Cellis cordata (c'est notre Micocoulier de Provence), le Cet- tis orientalis; le Ceratonia siliqua, le Caroubier très répandu à Beyrouth (ses nombreux détritus, feuilles et écorces, produisent un excellent terreau); le Cercis sili- quastruin, Arbre de Judée trouvé également dans le pays: le Cereus grand cierge à douze angles atteignant cinq ACCLIMATATION D’ARBRES EXOTIQUES 155 mètres; les Ficus suivants : altisstina, barbata, carica, Cooperi, elastica, glumacea, tinperialis à feuilles prodi- sieuses; Parcelli si agréablement panaché; religiosa, le fameux Arbre des Banyans qui plonge en terre ses racines adventives, refaisant ainsi de nouveaux arbres; le s‘wbigt- nosa; puis le Grevillea robusta compatriote de l'Eucalyptus, pousssant presque aussi vite, couvrant sans cesse la terre de ses feuilles sans nombre; l'Ææwmnatoxylon campechia- run, tout petit, le Jacaranda mtnosæfolia, arbre qui s'est prodigieusement multiplié en Syrie, le Lüriodendion luli- piferuin, le Tulipier de Virginie qui vient admirablement, bien qu'attaqué par le ver blanc, l'ennemi de tous les arbres du Nord à feuilles caduques; les Magnolia gran- diflora, Harhvica, les Melia Azedarach, floribunda et si- nensis ; le Murier à gros fruit noir indigene; le Pewpliei de Damas, le Saule indigène; le Schinus inolle, l'arbre si peu exigeant de tous les pays chauds; le Sterculia platanifolia récemment importé, le Tecoma Sinithi et le Tecoina stans. Je crois avoir indiqué les arbres qui embellissent la villa Eucalypta, j'ai laissé, à dessein, de côté les Eucalyptus dont j'ai une collection presque complète ; je vous entre- tiendrai prochainement de mes efforts pour les acclimater, et des résultats que j'ai obtenus. SUR LE DIRINA CERATONIÆ LICHEN PARASITE DES PHANEROGAMES EN ALGÉRIE (1) Par Ch. RIVIÈRE Directeur du Jardin d'Essai du Hamma Délégué de la Société d’Acclimatation en Algérie Les Dirina sont des Lichens très communs dans les zones tempérées et chaudes; ils vivent et s'étendent sur toute végétation, sur les arbres principalement. Le Dirina ceratoniæ a été signalé en Algérie et décrit dans l’£xploration scientifique de 1844, comme vivant sur un grand nombre d'espèces indigènes, mais depuis il a envahi beaucoup de plantes exotiques, les arborescentes notamment. C’est un Lichen crustacé, grisätre ou blanchâtre, quel- quefois argenté, suivant les milieux et les saisons, s’étalant en plaques plus ou moins larges qui finissent par se joindre pour former de véritables revêtements sans solution de continuité. Aux environs d'Alger, l'extension de cette Parméliacée est commune sur les Dicotylédonées comme sur les Monoco- tylédonées de grande taille, qui en sont plus ou moins atteints. Mais dans un grand nombre de cas, ce revêtement est presque absolu, change completement l'aspect naturel de l'écorce et par cela même l’ensemble du végétal, au point que l’on aurait une tendance justifiée, sans examen appro- fondi, à reconnaitre à bien des écorces une couleur cendrée ou argentée. On a souvent écrit que l’écorce de nos énormes Ficus inacrophylla du Jardin d’Essai était de couleur cendrée, tandis qu'au contraire elle est brun clair: ce sont les pla- ques du Dirina, de surface quelquefois tres étendues, qui donnent à ces arbres cette teinte anormale. Même observation est à produire pour d’autres arbres, notamment pour le Caroubier dont le tronc n’est pas natu- (1) Communication faite à la Séance générale du 11 juin 1901. SUR LE DIRINA CERATONIÆ LE rellement de couleur grisàtre. Les écorces lisse des Oliviers sont également atteintes. Ce Lichen s'introduit aussi entre les aiguillons de cer- taines Bombacées et ternit la couleur verte de leur écorce. Sur les Di'acæna draco Vancienne végétation est recou- verte par ce Lichen qui se confond avec la teinte naturel- lement claire de l’écorce. Sur les vieux Bambous, Bambusa inacroculinis, s'étalent de larges plaques de ce Lichen qui ne s'attaque pas aux espèces à chaumes lisses et vernissés comme ceux du Bañbusa vulgaris. Le Dirina forme de larges taches argentées sur la base des pétioles persistants du Dattier, et sur le stipe lisse de l'Oreodoxa regia, le revêtement par ce Lichen est assez étendu et homogène pour simuler la couleur naturelle de l'écorce. Il se plait moins sur les écorces rugueuses et crevassées ; il va sans dire, que de développement assez lent, on ne le rencontre pas sur celles à exfoliation annuelle ainsi que sur certains grands Ficus à désquamation pelliculeuse, comme dans les Ficus Sycoimorus et r'acern0s«. Les jeunes plantes et les organes nouveaux ne sont pas atteints par ce Lichen qui ne se plait que sur la vieille végé- tation, quelle que soit sa vigueur. Jusqu’à ce jour il ne parait pas nuire aux végétaux sur lesquels il s’est établi quand ils sont en pleine terre, mais il devient nuisible sur ceux âgés et trop longtemps cultivés en pôt. Sa tendance ne semble pas toujours bien marquée à ne se développer que sur les faces Nord et Ouest : on le ren- contre, surtout sur le littoral, à des orientations différentes. Ce Lichen crustacé à une adhérence intime à l'écorce, mais par une friction énergique avec une brosse métallique, apres une période de pluie, on peut, sur les écorces dures et lisses comme celles des Orangers et congénères, faire disparaitre ce Lichen pour quelque temps; c'est une opé- ration applicable à certains cas seulement en horticulture. Un lavage au sulfate de fer (5 kilos pour 1 hectolitre d’eau) complete le brossage ou le ràclage. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE SUR L'ACCLIMATATION DES MAGAGUAS RIGANEURS Monsieur le Secrétaire général, M. le baron de Grandmaison, père de notre député de Saumur, ren- tré au mois de janvier d'un long voyage de chasses en Australie, a rapporté un couple de jeunes Oiseaux, qu'il m'a donné et qu'il serait très intéressant d'élever et de faire reproduire ici. Ce sont, je serais porté à le croire, d'après Brehm, des Macaguas ricaneurs. Cet Oiseau, destructeur de reptiles et en particulier de Vipères, dont il fait sa seule nourriture, est protégé dans son pays d’origine, car une amende de cinq livres sterling frappe quiconque en détruit, et il a fallu bien des démarches et une autorisation du gouvernement local, pour. permettre à M. de Grandmaison d'exporter ces Oiseaux, que lui-même avait déniché au mois d'octobre. Je les possède depuis la fin de janvier; je les nourris de viande de Cheval découpée en longues lanières affectant la forme des Reptiles, d'Insectes que nous pouvons trouver en cette saison, et enfin de Moi- neaux que mon faisandier se procure très facilement dans la propriété. Je serais très heureux de mener à bien cette tentative d’acclimata- tion. Je considère l'élevage du couple comme assuré aujourd’hui, mais c'est la reproduction qu'il faut maintenant obtenir. Ce serait rendre un grand service à notre contrée de l'Ouest, infestée de Vipères. Ces Oiseaux, n'étant jamais inquiétés par l'homme, sont d'une grande familiarité; ils s'approchent très volontiers des promeneurs, aussi j'espère bien les laisser en liberté, cet été, dans ma propriété. BIZERAY. Saumur, 28 avril 1901. DES GYMNOCLADES où CHIcOTS Monsieur le Secrétaire général, À la date de quelques mois, j'avais l'honneur de vous informer de la fructification au Jardin des Plantes de Toulouse de l'Hovenia dulcis, petit arbre japonais aux pédoncules renflés et édules (1). Je crois devoir vous signaler aujourd'hui celle du Chicot dioïque ou canadien (Gymmnocladus dioïca où canadensis), qui vient d’avoir lieu dans le même établissement. C’est un arbre dioïque, de la famille des Légumineuses, et généralement en France, les pieds màles dominent dans les plantations. Nos plus gros sont de ce sexe; mais un plus (1) Voir ce Recueil, n° de Janvier dernier, p. 28. EXTRAITS DE LA (CORRESPONDANCE 159 jeune individu, dont le tronc mesure 0°70 de pourtour et qui figure à son rang dans l'Ecole de botanique, s’est trouvé femelle, et nous don- nait récemment six fortes gousses aplaties, coriaces et ligneuses, un peu arquées, d'un brun rougeâtre, avec 4 ou 5 grosses graines lenti- culaires noires dans chacune. Cette rareté de fruits oblige à multiplier le Chicot par les nombreux rejets qu'émet l'arbre de ses racines; et ce mode asexué de propaga- tion explique l’invariabilité de son caractère de végétation, à l'inverse d’un grand nombre d’autres epèces d'arbres, comme lui depuis long- temps cultivés. Son introduction en Europe date en effet de 1756, et, en 1803, André Michaux le figurait dans sa Flore de l'Amérique septen- trionale (t. IL. p. 51). Il est, dans notre Sud-Ouest, d’une rusticité à toute épreuve et méri- terait d'y trouver place dans tous les parcs. Son tronc robuste, qui peut s'élever jusqu'à 20 mètres et acquérir 2 mètres ‘et plus (1) de pourtour, est droit à écorce brune crevassée, et terminé par une large cime. Ses feuilles très grandes et deux fois ailées lui forment un beau dôme de verdure, ses grappes de fleurs blanchâtres sont groupées en fortes panicules d'aspect un peu duveteux. Au point de vue esthétique, on lui reproche d'offrir en hiver une dénudation des branches qui sont alors courtes, en petit nombre et lui donnent l'apparence d’un arbre mort, ce qui lui a valu la dénomination de Chicot que traduit celle générique de Gymnocladus (rameaux nus). Mais la beauté de l’arbre à la belle saison rachète amplement ce défaut. On avait d’abord cru, a tort, que ses graines pourraient remplacer le café, d’où le nom d’Arbre à café qu'il reçut des premiers colons américains. Mais, au point de vue économique, il se recommande tout spéciale- ment par son bois dur, à gra fin, de couleur rosée, estimé pour l’ébé- nisterie. Dans le groupe des Légumineuses, ce Gymnoclade fait partie de la belle tribu des Césalpinées, plantes la plupart ligneuses, aux fleurs presque régulières, souvent unisexuées, et qui comprend, indépen- damment du Caroubier de larégion méditerranénne (Ceratonia siliqua), du Campèche (Hæmatoæylum Campechianum), du Copayer (Copaifera officinalis), des Casses (Cassia), Césalpiniées (Cæsalpinia) et Tamari- niers (Tamarindus), les Féviers ou Gleditschia aujourd’hui répandus dans les plantations et dont une espèce le Gleditschia monosperma, dénommée également G. caroliniana, est comme lui, d’origine amé- ricaine. Le nom de gros Févier appliqué parfois au Chicot témoigne des affinités réciproques des genres Gymnocladus et Gleditschia. On peut enfin se demander si, comme il à été fait pour le Ginkgo, il ne serait pas possible de transformer artificiellement par le moyen de la greffe, en vue d'obtenir de plus fréquentes fructifications un certain nombre de pieds dioïques en monoïques. (1) La mesure de la circonférence d’un pied de Gymnoclade de notre école de Botanique, a 1 mètre au-dessus du sol, a donné 2",20. C’est donc bien à tort que quelques auteurs ont qualifié l’espèce d’arbuste. 160 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION C'est à tort que quelques auteurs, et notamment Dupuis (Arbres d'ornement de pleine terre, p. M), appellent le Gymnocladus dioica Bonduc, dénomination française d'un autre genre de Légumineuses, le genre Guilandina, dans lequel l'avait rangé Linné sous le nom de Guilandina dioica, mais dont le sépara Lamarck en 1783 (Dict. bot. de l’Encyclop. I, 733) sous les noms de Chicot du Canada, Gymnociadus canadensis, tandis que le Bonduc ordinaire de Lamarck est le Gui- landina Bonduc de Linné. Baillon a justement fait remarquer que, d’après les lois de la nomen- clature botanique qui consacrent les droits de priorité, le mot spéci- fique dioica (du Guiland'naïdioica de Linné de 1753, species (Plantarum p. 381), doit remplacer canadensis, de 1803, auprès de Gymñocladus, l'espèce devant s'appeler désormais Gymnocladus dioica au lieu de G. canadensis. Le même botaniste français faisait connaître en 1875 une seconde espèce de Chicot, découverte en Chine, son Gymnocladus sinensis. Les fleurs lui en avaient été rapportées par le P. Heudes. C’est un arbre ornemental, comme son congénère, et dont le fruit est employé à Shang-Haï pour le savonnage. Le chicot chinois se distingue du cana- dien par ses gousses et ses fleurs plus petites, ainsi que par la couleur rose de ces dernières; on se demande pourquoi il n’est pas plus répandu (V. Journ. soc. centr. d'hortic. 2° série, t. IX. pp. 164-168). D: D. CLos. Directeur du Jardin des Plantes de la Ville de Toulouse. Toulouse 22 mai 1901. Librairie et Imprimerie Horticoles, 84 bis, rue de Grenelle, Paris. BULLETIN DE LA D ER ANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) AARAARI 48° ANNÉE Los sd JUIN 1901 SOMMAIRE . -161 Extrails des procés-verbaux des Séances générales Ë A Séance générale du 14 décembre 1900 Ta er Dr du 25 janvier 1901 ‘34 — du 22 février 1901 par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. TIC O D ——— Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Æ41, Rue de Lille. — PARIS Le Bulletin paraît tous les mois. ETS tit + Pa Se MER L le Te Ch De Em ee me d— “b - — ms N- N@ er lun. faune ee MN TL Re RÉ ER EPEN PE APRES DES D PR Le nn de = EP ER AT RNA TE S # 4 z RAP RERET pr REAUEs Here: EE RTS ER Te RrDANERE Mere a É AUS : RIRES RTS a Président. M. Edmond Perrier, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Méde- SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACELIMATATION DE FRANCE Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855. 41, RUE DE LiLze — Paris BUREAU ET CONSEIL D’ADMINISTRATION POUR 1901 cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Museum d'Histoire Naturelle, Paris. Baron Jules de GuERNE, 6, rue de Tournon, Paris. Vice-Présidents. Comte de PoNTBRIAND, Sénateur, boulevard Saint-Germain 238, Paris. C. RAvEeRET-WATTEL, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier. 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire-général : M. Maurice Loyer, Avocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. MM. le D' SeBiLotre, 41, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris (Intérieur). H. Hua, Directeur- -adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Germain, Paris (Conseil). Secrétaires. L. SevuraT, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). G. FroN, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin colonial, 19, rue de Sèv res, Paris (Etranger). : Tresorier. M. Ch. DeBreuz, Avocat à la Cour d'Appel, 25, rue de Chateaudun, Paris. Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d'ORFEuILLE, à Versailles. Membres du Conseil . MM. L. BmGer, Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, Directeur des affaires d'Afrique au Ministère des Colonies, 15, rue de Prony, Paris. Edouard BLANC, Explorateur, 52, rue de Varenne, Paris. D: Raphael BLaxcHarD, Membre de l'Académie de Médecine, professeur à la Faculté de Médecine, 226 boulevard Saint- Germain, Paris. À Comte Raymond de Darmas, 26, rue de Berri, Paris. : Le Myre pe Viers, Uéputé de la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. J P. Marcaaz, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de la Station entomulogique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. L. ME:sey, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pèche et de la Pisci- culture au Ministère de l'Agriculture, 87, boulevard Saiut-Michel, Paris. A. Mix -PourTiNGon, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, 4%, rue de la Chaussée- d'Antin, Paris. E. Ousrazer, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue Notre-Dame-des- Champs, Paris. A. RaizuEr, Membre de l’Académie de Médecine, Professeur à lEcole vétérinaire d’Alfort (Seine). Dore Trouessarr, Président de la Société Zoologique de France, 145, rue de la Pompe, aris. \ Presidenis honoraires : MM. Le Myre DE Viens, 3, rue Cambacérès, Paris. Albert Grorreoï-SAINT- HiLaIRE, à Vault de Lugny, par Avallon (Yonne). Secrétaires Géneruux honoraires : MM. Amédée BerrHouLe, 4, avenue des Ternes, Paris. Baron Jules de GUERNE, 6, rue-de Tournon, Paris. Membres honoraires du Conseil : MM. P. de LaBouLaye, 129, avenue des Champs-Elysées, Paris. D: P. MÉGNN, 6, avenue Aubert, Vincennes. : D: Ed. MEÉNE, 20, rue Oudinot, Paris. D: J. Mrcxow, 33! rue de Babylone, Paris. D: WEgger, 180, boulevard Saint- Germain, Paris. LE" fe aus IPHUITRE PERLIÈRE (S'uile.) EXPOSÉ DES CONNAISSANCES ACTUELLES SUR L'HISTOIRE NATU- RELLE DE CE MOLLUSQUE, LES ESSAIS DE CULTURE DONT IL A ÉTÉ L'OBJET, ET L'HISTOIRE DE LA FORMATION DES PERLES (1). par L.-G. SEURAT Docteur ès Sciences, Zoologiste du Laboratoire colonial du Muséum Secrétaire de la Société Essais d’Ostréiculture perlière. Les bancs perliers exploités le plus souvent d'une façon inconsidérée, n'ont pas tardé à donner des signes d'épuise- ment dans les diverses régions (Inde, Ceylan, Australie, Basse-Californie, Lagons de Tahiti); on à cherché à remé- dier à cet état de choses par des essais de culture artifi- cielle des Méléagrines perlières. Ces essais ont été tentés à Ceylan par Kelaart, dans l'Inde, en Australie par Saville Kent, en Basse-Californie et à Tahiti; beaucoup ont été cou- ronnés de succès, et l'ensemble de ces essais montre que la culture artificielle est possible; les lagons de Tuamotu, en particulier, constituent de véritables pêcheries closes dans lesquelles il serait facile de provoquer la multiplication des Huitres. | Kelaart, dans l’Zntroduclion à l'histoire naturelle de l'Huitre perlière de Ceylan, a avancé le premier l'opinion que les Huitres perlières pouvaient être enlevées du banc de rocher où elles se trouvaient originairement, et trans- portées dans un endroit qui leur fut plus favorable (2). Des essais de culture artificielle (3) de l’Huitre perliere ont été tentés par le capitaine Philipps, qui a établi un parc artificiel à Tuticorin (Inde); le capitaine Philipps a choisi un (4) Communication faite à la séance générale du 11 juin 4901. (2) Soubeyran et Delondre. De-la pêcherie d'Huiîtres perlières de Tin- nevelly et de la culture artificielle des Huïîtres perlières dans la même localité. Bull. Soc. d’Acclimatation (2) Tome 1v, pp. 398-415; 1867. ; (3) Kelaart. Künstliche Züchtung der Perlnuscheln an der Küste von Vorderindien. Aus d. Natur, 32 Bd. (N. F. 20 Bd.) ; 1865, pp. 350-352. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 11 162 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION banc situé entre Paundian Teevo (ile de la baie de Tuticorin) et la côte, à une profondeur de 3 à 7 pieds, entièrement à l'abri du ressac, des courants et de l’afflux de l’eau froide. Une portion de ce banc fut entourée de murs composés de blocs de Coraux renforcés par des rangées de pieux; le fond était garni de blocs de Coraux ou de fragments de roches. A l'époque de la production du frai, ce dernier était recueilli et porté sur le fond artificiel et les Huitres perlières y étaient laissées jusqu'à ce qu'elles soient assez grandes pour être transportées en pleine mer. La pêche des coquilles, abandonnée ensuite, fut reprise en 1876. PARCS ARTIFICIELS DE M. MARIOT, ÉTABLIS À L'ILE D'ARUTUA (ARCHIPEL DES TUAMOTU)(1 et 2). — M. Mariot, ancien résident des Tuamotu, s'est préoccupé, il y a une trentaine d'années, d'assurer le repeuplement des lagons par la création de parcs artificiels. Ces parcs, établis sur des banes de Coraux branchus vivants par des fonds de un metre de profondeur à marée basse et entourés, pour recueillir le naissain de murs en pierres sèches ne dépassant jamais le niveau de l'eau, sont situés dans les endroits où il n'existe qu'un léger courant, et jamais sur le sable calcaire où les Huitres ne peuvent vivre. On tapisse le fond de jeunes Huitres de la erosseur d'une pièce de cinq francs à peu près, que l'on trouve en abondance dans les endroits peu profonds; on doit enlever les coquilles sans arracher le byssus qui les attache; si l'on peut emporter le morceau de pierre, il faut le faire; sinon, il faut couper le byssus avec un couteau. On place ensuite la coquille le talon en bas, la bouche en l'air, le byssus du côté du courant; on les met ainsi côte à côte, sans les serrer, comme les livres d'une bibliothèque. Douze mois après, la coquille, qui était grande comme une soucoupe, sera grande comme une assiette ; à partir de ce moment, elle ne grandit plus guère, elle épaissit davantage ; trois ans doivent suffire pour avoir de bonnes nacres. C'est (1) Mariot. — La reproduction des Huïitres perlières aux îles Tuamotu, Bulletin Soc. d’Acclimatation (3) t. 1, 1874, pp. 341-342. (2) Delondre. — Nacroculture et Ostréiculture perlière aux îles Pomotu (Océanie). Bulletin Soc. d’'Acclimatation (3), t. TI, 1876, pp. 389-390. L'HUÎTRE PERLIÈRE 163 dans les nacres de cinq ans que se trouvent les plus belles perles, généralement dans la partie du manteau qui borde la bouche de l'Huitre ; plus ensuite elles avancent en àge, moins elles ont de valeur comme orient. Lorsque la coquille lâche son naissain et l’abandonne au courant, ce naissain est recueilli par les pierres sèches du mur dont il a été question plus haut, et sur lesquelles on pourra plus tard prendre les nouveaux sujets que l’on voudra parquer. Les essais de M. Mariot ne paraissent pas avoir été continués. M. Mariot insiste sur l'importance qu'il y a d'avoir des collecteurs pour recueillir le naissain. Bouchon-Brandely, envoyé en mission aux iles Tuamotu, pour étudier les moyens de repeuplement des lagons et de culture artificielle des Méléagrines séjourne à Tahiti du 24 juillet 1884 au 10 septembre de la même année; cet auteur préconisait l'élevage dans des caisses ostréophiles longues de 1 m. 20 à 1 m.50, larges de 70 à 80 centimetres, hautes de 25 à 30, reposant sur quatre piéds qui les isolent de 20 à 25 centimetres du sol, ces caisses contenant à l'inté- rieur une série de tablettes disposées dans le sens de la largeur, et légerement inclinées comme les lames fixes d'une persienne mise à plat, chaque lame étant pourvue à sa partie inférieure d'un tasseau portant des échancrures arrondies, destinées à recevoir chacune une Huitre. La Méléagrine, placée dans un sens presque vertical, avait les valves en l'air et son byssus en contact avec le bois ; méthodiquement rangées entre les planchettes de la caisse, les Huitres ne pouvaient se mêler entre elles ni être déplacées par l’action des courants. Le fond et le couvercle de l'appareil se composaient d'une claire voie en lattes; les parois étaient percées de trous, l'eau pénétrait ainsi libre- ment à l'intérieur et y circulait. L'appareil était lestée de pierres ou de saumons en fonte; on l'immergeait à l'aide d'un cordage. Toutes les Huitres enfermées dans ces boites se sont fixées au bois des planchettes, chacune dans son casier respectif: Bouchon-Brandely a récolté, à l’ile d’Aratika, du naïssain sur les caisses ostréophiles déposées à l'entrée du lagon et contenant des Huitres mères; il recommande de placer des collecteurs autour des caisses ostréophiles. 164 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION MISSION DE M. A. GRAND, OSTRÉICULTEUR (1). — M. Grand se rendit en Océanie pour mettre en pratique les théories de Bouchon-Brandely. Les premières expériences furent faites dans la rade de Papeete, sur un fond de gravier coral- lien, recouvert par une nappe d'eau de 70 centimètres. Les caisses ostréophiles furent faites en planches de Cocotier, bois résistant aux Tarets. Grand dépose dans ces boîtes 100 Nacres adultes, qui en quelques jours étaient fixées à l'appareil leur servant de nouvel habitat, et cela au moyen de nouvelles soies qu'elles avaient ajouté à leur ancien byssus. Aux abords, Grand dispose des ruchers collecteurs en briques, en rognures de fer, en fragments de coraux morts, le tout entouré d'un mur en pierres juxtaposées, de 1 mètre d'épaisseur, dont le sommet, à haute mer, dépas- sait de 30 centimètres le niveau de l’eau. Les nacres mères ainsi séquestrées conserverent leur vitalité. Il n’y eut aucun résultat au bout d'un an. Grand partit alors aux Gambier où il séjourna deux ans (14 janvier 1887 au 25 novembre 1888). Dans ces iles on trouve les bancs de Nacres par 4 mètres jusqu'à 12 et 15 metres de profondeur. Grand renonce aux caisses ostréophiles et fait usage d'un appareil collecteur comprenant six fascines en bois de « nikiniki». Vers la fin de décembre, il immerge dix-huit fascines sur le banc de Tearia, assez riche en Pintadines adultes; trois mois plus tard, ces fascines collectrices étaient suffisamment garnies de naissains variant de 1 à 2 centimètres de diametre. Grand relève ces fascines, les transporte sur un fond propice et après avoir sectionné les brindilles au moyen d'un sécateur, jette à la mer les parties sur lesquelles les naïissains étaient adhérents, en les répartissant dans la proportion de 5 naissains par mètre carré. Le fond d'élevage avait une profondeur de 7 mètres; peu de temps apres, une pousse extensive des valves s'était produite à chaque phase lunaire de leur àge, soit deux pousses par mois, ayant chacune 3 millimètres d'allongement. (4) A. Grand. — Méthode de Culture de l'Huitre perlière dans les lagons de Tahiti. Revue maritime et coloniale, t. 125, pp. 575-590; mai 1895. L'HUÎTRE PERLIÈRE 165 Pendant toutes ces opérations de relevage et d’étalage il faut apporter la plus grande attention pour éviter le décol- lement du byssus des jeunes sujets fixés aux brindilles, condition indispensable à la réussite, puisque la Pintadine _ne peut vivre sans cet appendice. L'immersion des collecteurs se fait aux Gambier pendant la saison chaude; dans l’Archipel des Tuamotu, au contraire, l'immersion de ces collecteurs, peut se faire, d’après Grand, pendant toutes les saisons. Il faut cinq années d’élevage pour que la Nacre soit mar- chande. La culture de la Pintadine sur les hauts-fonds produira des nacres de petite dimension, mais les chicots et les perles s'y trouveront assez souvent, tandis que la culture dans les grands fonds produira des valves nacrées de grande dimension, très recherchées du commerce, mais la perle y sera très rare. Grand à réussi à transporter les Pintadines d'un lagon dans un autre, ou à de grandes distances, en les mettant dans un endroit du bateau qui soit ombré quand il s’agit de les déplacer pour une durée de quelques heures seulement; lorsqu'on doit les déplacer à de grandes distances, 1l faut les placer dans des récipients contenant de l’eau de mer,renou- velée au moins deux fois par jour; en prenant ces dernières précautions, on peut conserver des Pintadines pendant plu- sieurs mois. Les expériences de Grand ne paraissaient pas avoir été continuées après son retour en France. EXPÉRIENCES ET ESSAIS DE CULTURE EN AUSTRALIE. — Saville Kent a étudié d'une facon tres approfondie un cer- tain nombre de points de l'histoire naturelle de la Méléa- grine, et a fait des essais de culture. Il a réussi à transporter les Huitres en les conservant dans un vase où l'eau est renouvelée; ces Huitres sont immergées dans la mer, dans des caisses, pendant la nuit. La meilleure méthode de transport est celle qui consiste à laisser les Huitres constamment immergées dans l'eau de mer; le transport peut s'effectuer dans des bateaux réser- voirs, semblables à ceux utilisés en Tasmanie pour le trans- port du poisson vivant; les Huitres sont mises, dans des 1C6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION casiers séparés, à travers lesquels l'eau peut facilement circuler. Kent(1), a placé des Méléagrines dans un marais de Palé- tuviers, ou dans des lagunes exposées seulement quelques heures lors des basses mers, à fond ferme de gravier et de” coquilles : les Huitres sont placées dans des caisses en bois fermées par des chassis en fil de fer. Au bout d'un an, les coquilles avaient non seulement grandi, mais avaient com- mencé à se multiplier : plusieurs jeunes étaient attachées aux coquilles des parents et à la surface des chassis de bois et de fil de fer. Saville Kent recommande la formation de viviers de réserve, les coquilles pouvant être transportées plus tard dans des lits de culture plus éloignés. Cet auteur préconise le repeuplement des récifs coral- liens à eaux peu profondes, où les Huitres perlières étaient pèchées autrefois, sous la direction du gouvernement aus- tralien, Comme on a déjà essayé au Queensland. Il faut choisir des baies et des récifs à l'abri; les côtes ouvertes et exposées, situées dans la région des cyclones, ne peuvent ètre utilisées avec succès; il à choisi la baie de Shark (Wes- tern Australia), située entre les parallèles 25° et 26° 1/2 de latitude Sud; les Méléagrines, furent placées dans des caisses sur des récifs à eau peu profonde, composés presque exclusivement par les expansions ou frondaisons de Madré- pores appartenant au genre Turbinaria; douze mois après la date à laquelle elles furent déposées, les caisses furent relevées et ouvertes : les Huitres avaient augmenté de taille et un certain nombre avait donné du naissain; ce der- nier s'était fixé sur les coquilles des parents. D'après Kent, la coquille, placée dans des conditions favorables, atteint la taille marchande de 8 ou 9 pouces dans une période n'excédant pas 3 ans. ESSAIS DE CULTURE EN BASSE-CALIFORNIE. — M. Léon Diguet, qui a étudié d'une facon très approfondie la biolo- gie de l'Huitre perlière de la Basse-Californie, signale les: essais de culture entrepris par M. Gaston Vives, dans une lagune de l'ile de San-José, située un peu au-Nord de la (1). Kent. W. Saville. — On the experimental cultivation of the mother of Pearl-Shell (Meleagrina margaritifera) in Queensland. Report Austral. Association, t Il, pp. 5#1-54S, 1$91. L'HUÎTRE PERLIÈRE 167 la baie de la Paz; cette lagune forme un lac salé offrant une superficie de plusieurs hectares; sa profondeur générale est d'un mètre; les bords de cette lagune, sur plus de la moitié de l'étendue, sont découpés par une série de petites baies dont les rivages se trouvent maintenus avec stabilité par des Palétuviers. L'eau est sans cesse renouvelée par des marées, comme cela a lieu uniquement dans certaines baies peu profondes du golfe de Californie; les fonds ont été garnis de coquilles ou de débris; des fascines et des blocs madréporiques ont été disposés en ligne. Les Méléa- orines parquées dans cette lagune ont donné du naissain qui s'est fixé sur les racines des Palétuviers, sur certains Madrépores, et sur les coquilles volumineuses. Léon Diguet a rapporté au Muséum une coquille de Chame (Chama frondosa), provenant des cultures de M. Vives, sur laquelle plusieurs Méléagrines se sont fixées. Les tentatives de M. Vives ont été couronnées de succès, et ont permis de fixer un certain nombre de points encore obscurs de la biologie de l'Huitre perlière, en particulier l'âge auquel la coquille de la Méléagrine atteint la taille marchande (3 ans). La culture de la Méléagrine est susceptible, comme on le voit, de donner des résultats pratiques importants; il serait à souhaiter qu'elle fût entreprise d'une manière rationnelle dans les lagons de Tahiti, apres avoir élucidé toutefois un certain nombre de faits relatifs à la biologie de la Méléa- orine, en particulier les époques du frai dans chacun des lagons. Origine et mode de formation de la perle La question de l’origine et du mode de formation de la perle à depuis longtemps préoccupé les naturalistes et mal- gré un grand nombre d'investigation, elle n'est pas encore résolue d’une facon satisfaisante. On a observé depuis longtemps que quand un Mollusque ou un autre animal perforant ou rongeur perce une des valves de la Méléagrine, celle-ci répare le dégât causé à sa coquille par la secrétion d'une couche nacrée. Linné (1) qui (4) Linné. Systema Naturæ ; 6° édit., p. 195. 168 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION connaissait ce fait, proposa de réunir un grand nombre de Mulettes (Margaritana margaritlifera 1.) des ruisseaux de la Suède, de percer la coquille d’un trou avec une tarière, pour leur occasionner une blessure et de les parquer en- suite pendant 5 ou 6 ans, en attendant que la perle soit formée. Le gouvernement suédois consentit à mettre ce procédé en pratique, en fit un monopole et tint longtemps la chose secrète. On réussit, en opérant ainsi, à produire des perles, mais elles étaient d’une beauté médiocre et la dépense l'emportant sur la recette, on renonça à pousser plus loin l’entreprise. Cette expérience fut répétée par Bouchon-Brandely sur des Méléagrinees des lagons de Tuamotu : « à l’aide d’une mèche ou d'un vilebrequin, nous avions perforé des Pinta- dines sur divers points de la coquille et avions introduit par ces trous, larges d'un centimètre à un centimètre et demi, de petites sphères de pierre ou de verre rodé, rete- nues par un fil de laiton formant queue. Un bouchon de liège ou de bois de bouras, traversé par le fil de laiton et ne dépassant pas la face interne des valves fermait herméti- quement l'ouverture. De cette façon, la boule de verre était le seul corps étranger faisant saillie à l'intérieur de la coquille; apres quatre semaines, une mince couche de nacre s'était formée au-dessus de la sphère, la recouvrant presque en totalité. Nous étions en présence d’un fort beau chicot en voie de développement. » En 1898, L. Boutan (1) fit des expériences analogues sur des Haliotides; il trépanne la coquille de l'Haliotide, et par l'orifice ainsi produit, de 6 à 7" de diamètre, il introduit une perle de nacre; il ferme ensuite le trou avec un ciment qui fait prise immédiatement sous l’eau; il a ainsi observé la formation de nouvelles couches de nacre à la surface de la perle introduite. Beaucoup de théories de la formation de la perle reposent sur ce fait, connu des Chinois depuis longtemps, que des perles imparfaites se forment quand on place des substances étrangères entre le manteau et la coquille de certains mol- lusques. (1) Boutan. Production artificiélle des perles chez les Haliotis. Compt. Rend. Acad. Sciences T. cxxvir p. 828-834; Paris 1898. L’HUÎTRE PERLIÈRE 169 Il existe une grande manufacture de ces perles artifi- cielles et de camées en nacre dans le voisinage de Canton, et à Hutchefu, près du fleuve Ning-po. Cet art a été signalé aux Européens en 1772, par un Suédois, Grill (1). Grill, après un séjour à Canton, raconte qu'ils placent un chapelet de 5 à 6 sphérules de nacre entre la coquille et le manteau d'un Bivalve d'un lac situé près de Canton; au bout d'un an, chacun des sphérules de nacre est recouvert d'une nouvelle assise nacrée et ressemble à une véritable perle. Gray (2), Woodwart (3), Hague (4), Th. von Siebold (5 et 6), P. Fis- cher (7), Kunz, indiquent également le procédé des Chinois . pour la production arüficielle des perles par un bivalve d'eau douce, le Dipsas plicatus Leach (Barbata plicata), par l'insertion de substances étrangères, granules ou ma- trices en métal, entre la face interne de la coquille et le manteau. La planche XIX du travail de von Siebold représente une valve droite de Dipsas plicatus avec quinze perles disposées sur trois rangées; dans la figure donnée par Hague, il y a vingt perles sur trois rangées. La planche XX du même travail représente une valve droite d'un autre Dipsas plicatus avec onze figures en relief d'une divinité chinoise (Bouddha). La planche 40 du travail de Kunz (8) représente les mêmes perles et figurines chez un Dipsas plicalus provenant également de Chine. (1) Grill. Bericht, wie die Chinesen ächte Perlen nachmachen. 4bkandl d. Konigl. Schwed Akad. d. Wissensch; 1772Bd. 34 p. 88. (2) Gray. On the structure of Pearls and on the Chinese Mode of produ- cing them of a larger size and regular form. (Barbata plicata), Annals of Philosophy New Series vol. ix, 1825 p. 27; vol. x p. 389. (3) Woodward. À Manual of the Mollusca. London 1851 p. 274 (4) Hague, Consul à Ningpo. On the natural and artificial production of Pearls in China. (Dipsas plicatus Leach). Journal of the Royal Asia- tic Society of Great Britain and Ireland vol. xvi. London 1856 p. 280. (5) Siebold, C. Th. von. Traduction du travail de Hague « On the na- tural and artificial production of pearls in China ». Zeitsch. f. Wass. -Zoolog. 8“ Band p. 439-444. Leipzig 1857. (6) Siebold, von. Ueber die Perlenbildungen Chinesischer Süsswas- ser-Muscheln, als Zusatz zu den Voie een enter Aufsatze. Zeit. Wiss. Zool, Bd. 8 p. 445-454; Taf. xix à xx. (7) Fischer, L. Production artificielle des perles. (Dipsas plicatus). Journal de Conchyliologie vol. xiii, Paris 1865 pp. 64-65. (8) Kunz, G. F. On Pearls, and the Utilization and Applications of the shells in which they are found in the ornamental Arts, as shown at the World’s Columbian Exposition. Bull, U. S. Fish Commis. vol. xir1- plate 40 (Dipsas plicatus). Washington 1894. 170 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Il existe dans les collections du Muséum de Paris, des valves d’Anodonta herculea Midd., provenant du Japon, avec des figurines semblables, introduites sous le manteau et recouvertes de nacre, et des chapelets de perles arti- ficielles. D'après Hague, (loc. cit. p. 444) et Figuier (1), les Chinois attribuent la découverte des procédés de fabrication de ces perles à un natif de Hutchefu, nommé Yé-Jin-Yank, qui vivait au x‘ siècle; sa mémoire est encore honorée, par ceux qui pratiquent son art, dans un temple élevé à Seaou- Shang, qui lui est spécialement dédié. Cette industrie ferait vivre 5.000 personnes aux environs de Hou-Tcheou-Fou. (Hague). On à proposé (2), à maintes reprises, de pratiquer cet art en Europe dans les régions où se trouvent des Mulettes per- lières: Pagenstecher (3) préconise l'introduction de petites perles de verre entre la coquille et le manteau de PUnio inargartiifer. Les hypothèses sur la formation des perles, reposant sur ces faits, sont nombreuses : beaucoup d'auteurs ont pensé en effet que le nucleus de la perle est formé par un corps étranger qui a pénétré entre la coquille et le manteau. Everard Home (4) pense que le noyau de la perle est formé par les œufs du Mollusque quise sont égarés entre la coquille et le manteau: il appuie son opinion par deux arguments : toutes les perles examinées par lui con- tiennent au centre un espace vide dans lequel un œuf aurait trés bien pu se trouver (5): il a trouvé des perles dans l'ovaire des Anodontes. Von Baer (Meckels Archiv 1830) s'élève contre cette maniere de voir. En 1858, Kelaart (6) considere les œufs comme la cause (1) Figuizr. Année Scieniique 7° année, p. 286 (1863). (2) Moquin-Tandon et Cloquet, Sur la production artificielle des perles, rapport fait à la Société d’'Acclimatation, 1858. Journal de Con- chyliologie, X, pp. 87-88. (3) Pagenstecher. Ueber Perlenbildung [Margaritana margaritifera]. Zeitsch. f. Wiss. Zoologie, &. IX, p., 496. Taf. XX, 1858, (4) Home, Everard. Philos-Transact, 1826. P. 3, p. 338. (5) Kelaart. E. F. Introductory Report on the natural history of the Pearl-Oyster of Ceylon (Meleagrina margaritifera Lam.). Madras Journ. Literature and Science: N. séries. vol. 3; 1858, pp. 39-104. (6) Xelaart. Filaria in Oysters (Ceylon). Proceedé Royal Phys. Soc. Edinburgh, vol. 2; 1863, p. 101-102. L'HUÎTRE PERLIÈRE AETEL principale de la formation des perles chez l'Huitre perliere de Ceylon. D'autres auteurs pensent que le nucleus de perle est formé par un grain de sable, ou un squelette de Diatomée. Mobius (1) fait remarquer que sur quarante quatre perles qu'il a examinées, aucune ne contenait de grains de sable; dans la majorité des cas, les nuclei étaient de nature orga- nique. D'après Kelaart et Môübius, les noyaux les plus fré- quents semblent être le corps ou les œufs de petits parasites internes : Filaires, Distomes, Bucephalus, ete. Gwyn Jeffreys (Report to the Secretary of the State of India) à fait des sections de quelques perles; en examinant ces sections au microscope, il a pu reconnaitre que le noyau était constitué par un animal, tout en admettant qu'il est très difficile de prouver les faits lorsqu il s'agit d'êtres aussi petits d'autant plus que, par suite de la section opérée, il a dû y avoir destruction ou perte de certaines des parties : sui- vant cet auteur les perles sont produites par la présence de petits Crustacés parasites qui s'attachent fortement à la paroi du manteau de l'Huitre perlière et y déterminent une irritation. L'Huitre perlière voulant s'en débarrasser les étouffe sous une couche de matière nacrée de même nature que celle qui garnit la paroi interne de la coquille ; la super- position graduelle d'une couche sur une autre, dans un ordre concentrique, détermine la formation de la perle. Suivant Gwyn Jeffreys,la présence des cils qui couvrent le manteau et la place des perles qui se trouvent invariablement entre le manteau et la coquille, rendent improbables l'opinion de Kelaart que le noyau est un grain de sable ou une particule servant à l'alimentation. En 1852, de Filippi (2) attribue la formation des perles à la présence de Distomes parasites : en examinant des spéci- mens d'Anrodonta cygnea des étangs du parc royal de Racconigi, pres de Turin, il fut frappé de la fréquence des perles, les unes soudées à la coquille, les autres contenues dans le manteau et cette fréquence des perles coïncidait (1) Môbius. Die echten Perlen, ein Beitrag zur Luxus-, Handels-, und Naturgeschichte derselben. Abhandlungen des naturimss. Vereins zu Hamburg, IV, Bd. 1857. (2) Filippi (de). Sul! Origine delle Perle. Estratto dal Cimento, Fas- cicolo IV, Torino, 1852. 172 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’'ACCLIMATATION avec celle d'un Trématode,le Distoma duplicatuin x. Baer; il reconnut que le noyau des perles est toujours formé par un Entozaire ordinairement de l'ordre des Trématodes; de Filippi ajoutait que la fréquence des perles est vraisembla- biement en raison directe de la fréquence des parasites dans le manteau des Mollusques margaritifères. En 1854 (1), il trouve des perles d’'Anodonta cygnea ren- fermant comme noyau un jeune individu de ZLimnochares anodontae (Acarien) encore parfaitement reconnaissable ; l’auteur ajoute « qu'il serait peut être intéressant d'étudier les parasites des Mollusques margaritifères, même dans un but industriel, car on pourrait trouver le moyen d'augmenter la diffusion de ces parasites et de les transporter d'un endroit à l'autre. On pourrait faire très facilement des recherches de ce genre en Saxe, où la récolte des perles est toujours de quelque importance et constitue un droit de gouvernement. » Küchenmeister (2 et 3) en 1856 a observé que les perles étaient surtout abondantes dans les Mollusques vivant dans les parties tranquilles de la rivière saxonne l'Elster, où les Acariens aquatiques (Liynnochares anodontae) se rencon- traient le plus abondamment. Il en conclut que la principale impulsion de la formation des perles est donnée par ces ACariens, au moins dans cette rivière, et recommande de placer les Muleltes dans des endroits où abondent les femelles de ZLisinochares. La même année, de Filippi (4 et5) fait observer, à propos du Zinnochares anodontae, qu'il n'a rencontré cet Acarien (1) Filippi, de. Troisième Mémoire pour servir à l'histoire génétique des Trématodes. Mém. Acad. Sciences Turin, série Il, tome XV, p.29 et Ann. Sciences Natur. (4), tome Il, p. 281. Paris 1854. (2) Küchenmeister, D' Fr. Uebersetzung der Arbeit de Filippis : « Sull origine delle Perle », nebst auf eigene Untersuchungen gegrün- deten Anmerkungen. Archivo. f. Anat., Physiol. von y Müller. Jahrg. 1856, p. 251-268. (3) Küchenineister. Ueber eine der haufigsten Ursachen der Elster- perlen und das Verfahren, welches zur künstlichen Vermehrung der Perlen dem hoh. K. Sachs. Minist. des KFinanzen vorgeschlageu wurde. Müller’s Archiv., 1856, p. 269. (4) Filippi (de). Encore un mot sur la formation des perles. Archi. f. Anat, Physiol, von D' J. Müller. Jahrg, 1856, pp. 490-493. (5) Villa, A. Sull origine delle Perle e sulla possibilita di produrle artificialmente. Il Politecnico, fase. XLVIII. Milano in-$°, 19 pag. 1860. Traduction de T. Coutet. Paris 1863. L'HUÎTRE PERLIÈRE 173 que très rarement dans l'intérieur des perles, bien qu'il soit excessivement commun dans les Moules et les Anodontes du Piémont, et qu'on le trouve partout, même dans les localités où les perles sont excessivement rares; le ZLännochares n'est pas la cause la plus ordinaire de la formation des perles : quelques rares individus s'égarent accidentellement entre la surface externe du manteau et la lame interne de la coquille, et dans ce cas seulement, ils sont en position d'être incrustés par la secrétion du manteau et de servir de noyau à une perle. Les larves de Trématodes, par contre, sont de véritables parasites internes et se frayent une route dans tous les organes du Mollusque; elles s'enkystent et se trouvent dans des conditions favorables pour former des noyaux de perles. Pagenstecher (1) n'a trouvé aucun Hydrachne dans les Mulettes perlières d'un ruisseau affluent de gauche du Neckar, qui après un trajet de quelques lieues se jette à Neckarsteinach (pres de Heidelberg); cet auteur attribue la formation des perles à l'introduction de corps étrangers entre la coquille et le manteau. Von Hessling (2 et 3) a examiné un grand nombre de spé- cimens d'Unio margarilifer et n'a trouvé aucune trace de parasites ni d'œufs. La production de la perle serait due à Ia pénétration de corps étrangers dans le système vasculaire, ou à des granules de la même substance que l'épiderme de la coquille, qui pénetrent dans les vaisseaux et aussi dans le parenchyme des tissus et de l'organe de Bojanus. La pureté des eaux influe sur la qualité des perles. Dans un autre travail (4), le même auteur, à propos de la Méléagrine per- lière, rapporte l'opinion des pêcheurs d'Orient que les belles perles ne se trouvent jamais dans les coquilles bien déve- loppées et lisses, mais dans les coquilles rabougries; les mollusques qui renferment des perles sentent mauvais et sont malades. (4) Pagensterher. Ueber Perlenbildung (Margaritana margaritifera) Zeitsch f. Wiss Zoologie, t. IX, p. 497. Taf. 20; 1858. (2) Hessling, D' von. Ueber die Perlbildung bei Unio margaritifer. Zeitsch. f. Wass. Zoologie. Bd. 9, p. 543-546. Leipzig, 1858. (3) Hessling, Th. von.1. Die Perlmuscheln u.ihre Perlen.Leipzig; 1859. (4) Hessling, 2. Die Verbreïlung der Seeperlenmuschel u. der Perlfis- cherei. Zeitschrift f. d. gesammt. Naturw. Berlin. 1859, p.17. 47% BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION Kelaart (1) pense également que les Huitres qui donnent des perles ont été gènées dans leur développement: « most of the oysters in which 1 have found pearls had external marks of having been retarded in their lateral growth and displaced in early life from their fixed position on a bank. 1 am inclined to believe that oysters which have abundance of food and are not disturbed, remain fixed for the last two or three years of their growth to one spot. These are less likely to have a large proportion of pearl-bearing indivi- duals about them. » D'apres Weber (2) la formation des perles est probable- ment causée par une maladie du Mollusque; cette opinion est appuyée par cette circonstance qu'on trouve rarementdes perles quand les coquilles sont grandes, à face interne lisse, propres et sans aucun trou, c'est à dire quand le Mollusque a pu se développer normalement; la formation des perles est au contraire tres fréquente quand les coquilles sont irrégu- lières; souvent une centaine de perles se trouvent dans ces dernieres coquilles, mais fréquemment à peine une d'entre elles possede une valeur conimerciale. Grand, qui a étudié aux iles Gambier les conditions natu- relles dans lesquelles les perles se produisent le plus fré- quemment, a fait des observations qui appuient l'opinion de Weber. Il a observé plus spécialement le banc de Tearae, sorte de haut-fond qui joint la pointe Est du Mont Duf (île Mangareva) à la pointe ouest de la petite ile d’Akena, sur une longueur de 3 kilometres environ et une largeur moyenne de 80 metres: les profondeurs varient entre 5 et 8 mètres, quelquefois 2, 3 et 4 mètres. Le fond est très éclairé par les rayons solaires. Ce rempart naturel sous-marin est le seul point de Mangareva où la Pintadine ne se développe pas; les nacres de ce banc de Taerae ne peuvent acquérir la dimen- sion de celle des grands fonds; elles vieillissent sans dépas- ser une taille de douze centimetres de diametre; le test est très dense et souvent perforé par les animaux destructeurs ; (4) Kelaart. E. F.and Karl Mobius...On the Natural History of the Cingalese Pearl Oyster and on the production of pearls. Annals and Magaz, of nai. History, 3 ser. vol. I, 1858; pp. 81-100. : (2) Weber. Om Perler og Pate tatoo Norsk Fisker itidende. Bergen. 18S6, DD R0 263. Traduction : Pearls and pearl tisheries, dans Bulletin U. S. Fish Conm. vol. v1, 1886, p. 321-328. © L'HUÎTRE PERLIÈRE 175 par contre ce banc de Tearae est un banc perlier par excel- lence. Grand ajoute que dans les grands fonds, ceux de 12 à 15 mètres, assombris par leur éloignement de la surface, les Pintadines sont propres et poussent vigoureusement, mais les perles y sont rares. Cet auteur parait attribuer une cer- taine importance à l'introduction d'un grain de sable ou autre corps étranger, le déplacement du fond de sable coral- loïde étant constamment sollicité par les marées. Il recom- mande la culture de la Méléagrine sur les haut-fonds si on veut obtenir des perles et des chicots en abondance. Saville Kent (1) attribue la formation de la perle à une maladie du Mollusque. «There are, at the same time, grounds upon which the shell produces pearls in phenomenal abun- dance, such shell, however, being invariabily of inferior quality. Pearls, in fact, as is tolerably well known, repre- sents a diseaded product of the mollusc. It might, imdead, be suggested that they partake somewhat of the nature of chalk-stones in the human subject. » / M. L. Diguet (2) a fait faire tout récemment un grand pas à la question de l'origine des perles. L'auteur distingue tout d'abord deux catégories de perles, les perles dites de nacre et les perles fines, ou à orient. La perle de nacre prend nais- sance à la surface du manteau, sous l'influence d’une cause d'excitation anornale : corps étranger introduit sous la coquille par exemple. La perle fine se produit dans n im- porte quelle région des organes, à l'exception de la surface du manteau; elle se forme à l’intérieur du tissu et se trouve contenue, pendant toute la période de sa formation, dans une poche fermée, qui va en s'usant à mesure que la perle se développe. L'évolution de la perle comprend trois stades : dans le premier stade, on observe une sorte d’ampoule, remplie d'un liquide ou d’une sérosité, plus ou moins trans- lucide due tres vraisemblablement à l'action d'un parasite, qui en s'introduisant dans les tissus, est venu déterminer une forte irritation. Dans le second stade, la substance liquide qui forme le contenu de l’ampoule subit peu à peu une condensation; elle sépaissit en prenant l'apparence (4) Saville Kent. The Naturalist in Australia. (2) Diguet. Exploitation de l'Huitre perlière dans le golfe de Californie. Bull. Soc. Aquic. Juillet 1899, p. 1-18. 176 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION d'une gelée, puis se transforme en conchyoline. Puis la masse se divise en une série de couches concentriques plus ou moins régulières, laissant entre chaque zône, des inters- tices qu'un dépôt calcaire cristallisé viendra combler pen- dant l'opération de la calcification. La calcification qui représente la troisieme et dernière étape de la perle dans son évolution, s'accomplit progressi- vement. Pendant toute son évolution, la perle reste conte-. nue dans l’ampoule qui lui a servi en quelque sorte de ma- trice; cette jenveloppe, pendant la calcification, s’use et se détruit, de sorte que, au moindre effort du Mollusque, elle se rompt et la perle se trouve alors facilement expulsée. Les observations de M. Diguet montrent que la formation des perles est analogue à celle des calcosphérites. En résumé, nous voyons que l'excitation de la face externe du manteau par l'introduction de corps étrangers entre la coquille et le manteau : grains de sable, granules de nacres, animaux parasites, donnera naissance à des perles de nacre; la perforation de la coquille par les animaux destructeurs donnera également naissance à des perles de nacre, ou à des chicots. La production des perles fines, est due au contraire à une sécrétion produite à l’intérieur des tissus, sous l'influence d'une excitation qui n’est pas encore nettement définie, mais parait due à la présence de parasites, dont la nature reste encore à fixer. En tout cas l'étude attentive des conditions dans lesquelles les Méléagrines sont susceptibles de donner plus fréquemment des perles ne peut manquer de fournir un enseionement fructueux au point de vue pratique. PR RE Tr LOU ait «0 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES GÉNÉRALES SÉANCE GÉNÉRALE DU 14 DÉCEMBRE 1900 PRÉSIDENCE DE M. DEBREUIL, MEMBRE DU CONSEIL ; Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. M. le Président donne lecture d’une lettre de M. Raveret- Wattel, Vice-Président, qui, appelé à Rouen pour les tra- vaux de la Commission de Pisciculture, s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. M. le Président proclame le nom des membres admis par le Conseil dans les différentes séances depuis la der- nière réunion générale de la Société. celles, 82, Paris et château © Baron J. de Guerne. MM. ARgBEL (D: Luc), rue de Cour- C'° R. de Dalmas. de Vadancourt (Aisne). | A PiC Hors BErGE (René), ingénieur civil, Conseiller GénéraldelaSeine- Inférieure, 12, rue Pierre- Charron, Paris. Baron J. de Guerne. Mersey. Raveret-Wattel. aron J. de Guerne. e Myre de Vilers. Boucxé (Robert), propriétaire, : Luling. Ba C. Mareuil-sur Ay (Marne). aron J. de Guerne. de Lamarche. Le Myre de Vilers. Grand Moulin de Vaux à Cer- nay-la-Ville (Seine-et-Oise)et 16, rue de la Paix (Paris). _ CasreLLo y Carreras (Salvador), Diputation 373, Barcelone (Espagne). CEzarD (Léonce-François-Nico- las), propriétaire, château de Velaine-en-Haye (Meurthe- et-Moselle). S. de Claybrooke, Baron J, de Guerne. Oustalet. | ( CarLiEr et Scxocx, Pisciculteurs, | A. L. Clément. / Ch. Debreuil. | Baron J. de Guerne. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 12 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION MM. Cosre (Georges), notaire, 17, rue du Palais à Montpellier. CRIVELLI SERBELLONI, Président de la Societé lombarde de : pisciculture (Milan). Darreaux (Emile),15,rue Vernet, Paris. Dinrer (Kurt), directeur de la station sylvicole Brakwater près Windhoek (Afrique alle- mande occidentale). DuLianier, attaché au Ministère des Affairesétrangeres,1,rue - de l'Abbé-de-l'Épée, Paris, FLeuTiaux (Edmond), 6, rue Suzanne, Nogent-sur-Marne (Seine). LELOUTRE, chef d’escadron d'artillerie, sous-directeur de l’Artillerie à Tananarive (Ma- dagascar). LianiÈère, maître de Conférence à l'École vétérinaire d’Alfort, Chargé de mission scienti- fique dans la République Argentine. ÉCOLE NATIONALE D HORTICULTURE de Versailles. LABORATOIRE DE ZOOLOGIE AGRI- COLE, Faculté des Sciences, : Marseille. Rd CT A. L. Clément. Ch. Debreuil. Baron J. de Guerne. Baron J. de Guerne. Mersey. Edm. Perrier. : Baron J. de Guerne. La Myre de Vilers. Oustalet. Baron J. de Guerne. Proschowsky. Dr Weber. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. L. Mersey. A. L. Clément. François. Baron J. de Guerne. Baron J: de Guerne. Le Myre de Vilers: Magne. Baron J. de Guerne. Leblanc. Railliet. Max. Cornu. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers- D: R. Blanchard. Baron J. de Guerne. Le Myre cle Vilers: M. le Président adresse des félicitations à M. Bourdarie qui assiste à la séance, au sujet de l’heureuse issue du nouveau voyage récemment accompli par lui au Congo. M. Debreuil ajoute qu'il aurait à féliciter un grand PROCÈS VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 179 nombre de membres de la Société pour les distinctions d'ordre divers qu'ils ont obtenues pendant les vacances et notamment à l’occasion de l'Exposition universelle. Regret- tant de ne pouvoir les citer tous, il tient cependant à signa- ler parmi les nouveaux Chevaliers de la Légion d'honneur MM. de Claybrooke et Nantin et parmi les Officiers du Mé- rite agricole MM. A.-L. Clément et de Marcillac. M. de Guerne fait observer qu’un très grand trouble a été apporté au service intérieur de la Société par les travaux de démolition et de reconstruction du mur mitoyen qui limite dans sa plus grande longueur l’immeuble qu’elle occupe. L'activité de la Société s’est exercée au dehors et notamment dans une série de Congrès internationaux réunis pendant l'Exposition universelle. Un grand nombre de nos collègues y ont pris une part active, plusieurs d’entre eux avaient été spécialement délégués pour représenter la Société. Les Congres internationaux de Sylviculture, d’Ornitho- logie, d'Agriculture, d’Apiculture, de Botanique, d’Aqui- culture et de Pêche ont eu lieu jusqu’à la fin d'octobre. La Société à pris une part importante au Congrès d’Ornitho- logie qui était présidé par M. Oustalet et à l’occasion du- quel trois questionnaires avaient été préparés par la Société. Une séance avec projections fut organisée le 30 juin dans la grande salle de la Société. Cette séance suivie d’une col- lation, à laquelle assistaient un grand nombre de savants étrangers avec leur famille, a obtenu un vif succès. La Société à pris part, en outre, au Congrès annuel de l'Association française pour l’avancement des Sciences, qui se réunissait cette année à Paris. Enfin, M. le Secrétaire général croit devoir mentionner deux excursions qu’il à faites en compagnie de M. Debreuil, l’une aux environs de Reims et de Nancy, l’autre à Cres- pières (Seine-et-Oise), où M. Degron cultive avec une grande persévérance et un réel succès des Vignes rappor- tées par lui du Japon. En l’absence de M. le Secrétaire des ce M. Loyer, bibliothécaire, procède au dépouillement de la correspon- dance. 180 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION : Généralités. — M. Fricotte, instituteur à Heudicourt (Pas-de-Calais), demande le programme des sujets mis au concours par la Société pour 1901. Il est répondu à M. ns cotte. M. Paul Serre envoie une nole sur la Zoologie et la Bota- nique en Californie. Cette note donne des renseignements sur le Skunk (Mephitis mephitica) et sur son élevage, sur le Coyotte ou Chien sauvage, et sur un certain nombre de plantes spontanées en Californie. Mammifères. — M. Luigi Tarentini, chirurgien à: Corato (Italie), demande des renseignements sur la Chèvre de Nubie dont il désire acheter des spécimens de race pure. M. Charles Mottaz, de Genève, demande à la Société de lui donner l’adresse de Mammalogistes, qui voudraient bien échanger avec lui des spécimens d'animaux de leur région, afin de lui faciliter la recherche de pièces de com- paraison pour la faune suisse qu’il étucie. ‘M. Paul Meslay, de Sourdeval-la-barre (Manche) demande des renseignements sur les différents articles publiés dans le Bulletin sur le Cobaye. - Entomologie. — M. Lecler, de Rouillac (Charente), envoie deux cocons trouvés par lui dans un champ de pommes de terre. M. Marchal a déterminé ces COCOns qui appartiennent à l’espèce Bombyx trifolii. M. Cezard de Velaine-en-Haye (Meurthe-et-Moselle), envoie à la Société, le. compte-rendu de l’éducation de Bombyciens sericigènes qu’il poursuit. M. Jaboulay fournit des renseignements analogues sur un élevage d'essai qu'il à pratiqué à Izieux (Loire). M. Paul Marchal, Directeur de la Station entomologique de Paris, prie la Société de vouloir bien lui faire connaître les personnes qui pourraient contribuer à lui fournir les éléments d'une collection d'objets relatifs à la zoologie appliquée et spécialement d’Insectes utiles ou nuisibles, actuellement en voie de création à l’Institut agronomique. Botanique, Culture. — M. le D'Clos, directeur du Jardin des Plantes de Toulouse, envoie une notice sur l’Hovenia duicis, bel arbre, atteignant une hauteur de 5 à ut PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 181 7 mètres et qui réussit très bien en plein air à Toulouse. Un certain nombre de graines sont mises par M. Clos à la disposition de la Société. 7 : M. Heckel, directeur du Jardin botanique de Marseille adresse une notice sur une nouvelle variété de Dioscorea pentaphylla à tubercules ovoïdes et ramassés au bas de la tige qu'il a obtenue dans ses cultures. Un échantillon de la plante en question est joint à cet envoi. M. le Dr Lecler, de Rouillac (Charente) transmet la us graphie d'un Chamærops excelsa qu’il cultive en plein air et qui a atteint de très grandes dimensions, il offre à la Société des graines de ce Palmier. | Cheptel Distribution de graines.—Le Directeur du Jardin Botanique de Calcutta a envoyé à la Société le 5 juillet et le 29 août, 60 paquets de graines différentes qui ont été mises en distribution. Ho à Un grand nombre de graines ont été remises à des membres de la Société et particulièrement au R. P. Bichet et au Directeur du jardin de Thiès (Sénégal), à M. Larguier à Lausanne, à M. Castet, directeur de l’établissement horticole de Bab-Saadoun (Tunis) et à M. Grandin qui les emporte au Gabon où il va PRIE une très importante exploitation agricole. ) Le R. P. Camboué et M. Escande, chef de la mission protestante française de Fianarantsoa (Madagascar) accusent réception des graines qu'ils ont reçues de la Société. Ornithologie-Aviculture. — Mme Florence Amberst envoie à la Société la liste des Oiseaux qu'elle expose au Concours de Vincennes et demande qu’un agent de la Société veuille bien leur donner quelques soins. M. Lydeker,du British Museum Natural History à Londres demande à la Société de vouloir bien, lorsqu'elle en aura Poccasion lui faire parvenir les squelettes ou peaux des animaux morts dont elle pourrait disposer et qui seraient destinés à faire partie d’une collection en voie de formation dans l'Etablissement auquel il est attache. M. le comte Begoüen, aux Espas, (Ariège) soumet quelques observations au sujet des Combattants denudés 182 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATVTION de Madagascar. Il pense que cette race de Poule à été obtenue au moyen d’un croisement de Cou-nu de Transyl- vanie avec le Combattant malais. M. Audiguier, Commissaire général du Concours d’Oi- seaux de basse-cour qui aura lieu à Toulouse les 15 et 16 décembre 1900, remercie la Société des trois médailles qu’elle à accordées pour ce concours à la Société d’Agri- eulture de la Haute-Garonne. M. Oustalet, professeur au Museum, adresse quelques renseignements demandés par M. Hervineau sur des oiseaux semblant appartenir au genre Coccyzus. Aquiculture. — M. le comte d’Orfeuille demande des renseignements sur des Poissons mis en vente par une maison de commerce sous le nom de « Tanches vertes de Russie ». Ceux-ci lui ont été fournis. M. Maurice Faure donne quelques détails sur les résul- tats qu'il à obtenus à Paris dans l'élevage de Truites arc- en-ciel, provenant d'œufs offerts par la Société. M. Louis de Vriès, à Gand(Belgique)envoie les documents relatifs à l'Exposition internationale de pêche de Salzbourg (Autriche). M. Bertrand, adresse de Tananarive un intéressant extrait du Journal officiel de Madagascar sur le Gourami. M. Ledoux, secrétaire de la Société de Pisciculture de Loir-et-Cher, fait connaître les résultats très satisfaisants qu’il a obtenus avec les œufs de Truite arc-en-ciel qui lui ont été envoyés par la Société, les pertes n’ont pas dépassé 10 p. 100. Le général Galliéni remercie également des graines qui lui ont été remises au moment de son départ et qu’il doit distribuer aux colons de Madagascar. M. Ancel-Seitz, représentant des Comptoirs de la Côte occidentale d'Afrique envoie un échantillon de café grillé ‘du Congo. M. Rogeron, à l’Arceau près Angers, fait connaître qu’il possède une Bernache des îles Sandwich femelle et qu’il désirerait vivement trouver un mâle pour lPaccoupler et en obtenir des produits.Le Museum a un mâle de cette espèce, aujourd'hui bien rare en Europe. Mais ce mâle est trop àgé pour qu’on puisse en espérer les résultats désirés par PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÈTÉ 183 M. Rogeron, auquel il paraît bien difficile de donner satis- faction. M. le D° Wiet, de Reims, promet à la Société de faire tous ses efforts pour lui procurer des Cynomis ou Chiens-rats de la Louisiane, mais la capture de ces animaux est tres difficile. M de la Roche-Corbon remercie des graines d’Æryn- güuwimn alpiniuin qui lui ont été envoyées par M. Magne. Communications orales. — M. Bourdarie signale les essais actuellement poursuivis avec succès au Congo par le lieutenant Laplume de l’armée belge pour la domes- tication et le dressage de jeunes Éléphants d'Afrique. M. de Guerne rappelle à ce propos qu’une convention à été récemment signée à Londres par les représentants des puissances européennes ayant des intérêts dans l'Afrique tropicale. Une série d'articles concernant l'Éléphant y sont insérés. Il y a lieu d'espérer que la destruction de ces ani- maux sera arrêtée dans une certaine mesure. Au nom de M. et de M" Loicq de Lobel qui viennent d'accomplir un nouveau voyage au Klondyke, M. le Secrétaire général présente des navets et des pommes de terre rapportés de ce pays où ils sont extrêmement recher- chés et se maintiennent toujours à un prix très élevé, les matières alimentaires fraîches d’origine végétale y sont très rares. M. Loicq de Lobel a rapporté d’ailleurs de son voyage plusieurs animaux vivants, entre autres un fort beau chien et divers passereaux dont il entretiendra ulié rieurement la Société. M. Crepin fait une communication sur l'élevage de la Chèvre à Paris et l’utilisation de bon lait pour l’alimen- tation des jeunes enfants (voir Bulletin). Une discussion générale s’engage a ce sujet. MM. le D' Trouessart, Rocher, Debreuil, Decroix, donnent divers détails sur l’usage du lait et de la viande de Chèvre. M. le Président remercie M. Crepin de sa communication et insiste sur l’intérèt que: présente la question et qui ressort de la discussion appro- fondie qui vient de avoir lieu. Pour le Secrétaire des Séances, Le Secrétaire général, JULES DE GUERNE. 184 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION SÉANCE GÉNÉRALE DU 25 JANVIER 1901 PRÉSIDENCE DE M. G. MAGNE, TRÉSORIER Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopte Proclamation de nouveaux membres : M''"° Rapp (Suzanne), à Mai- ( Baron J. de Guerne. dières, par Pont-à-Mousson / Le Myre de Vilers. (Meurthe-et-Moselle). ( M. Loyer. M. BAILLET (Albert), Ingé- ( Baron J. de Guerne. nieur des Arts et Manufac- ? C. de Lamarche. tures, à Chimay (Belgique). Le Myre de Vilers. En l'absence de M. le Secrétaire des séances, M. Loyer, archiviste-bibliothécaire, procède au dépouillement de la correspondance. Ornithologie.— Il est donné lecture d'une lettre de M° Loicq de Lobel, relative à des Oiseaux qu'elle a rapportés de l'Alaska. M. Loyer qui a placé ces Oiseaux dans ses vo- lières donne sur eux quelques détails que M. le Secrétaire général complète au moyen des renseignements qui lui ont été fournis par M. le comte de Dalmas. Communication est donnée d'un prospectus de M. Gallé- Defon, naturaliste à Port-de-Piles (Vienne), contenant une notice sur l'utilité des Oiseaux d'eau. Entomologie. — M. Fleutiaux envoie à la Société des spécimens de Pucerons et animaux microscopiques prove- nant du Jardin colonial. M. Léonce Cézard, de Velaine-en-Haye, près Nancy, envoie une notice sur les Bombyciens séricigènes qu'il élève dans sa propriété et notamment.sur les Alfacus cynthia, nourris avec des feuilles de Lilas. Cette nourriture communique aux cocons une coloration particulière. M. Clément qui pratique le même élevage dans des conditions identiques donnera une note à ce sujet. M. L. Cezard fournit en outre des renseignements sur son élevage de Plalysainia cecropia. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 185 Le bureau du Congrès international des Bibliothécaires annonce la fondation de plusieurs prix pour l'étude des Insectes ou Vers qui s'attaquent aux livres et aux reliures. Botanique.— M. Heckel, directeur du Jardin botanique de Marseille, envoie une communication sur le Solanum Commersoni. Cette Solanée, observée au Jardin dirigé par M. Heckel a produit sous l'influence de la culture, des tuber- cules de plus en plus volumineux. Ceux-ci qui, il y a quatre ans, étaient à peine de la grosseur d'une noisette, atteignent aujourd'hui le volume d’une Pomme de terre moyenne. La culture à également amélioré la qualité du tubercule qui a perdu aujourd'hui l'amertume très prononcée qu'il présentait au début. Cette espèce est rustique et très résistante aux parasites végétaux; elle vient très bien dans les terrains humides. Comme son produit en tubercules est considérable, elle pourra dans certains terrains, et notamment aux 'colo- nies, devenir une ressource précieuse pour l'alimentation du bétail. M. Heckel a joint à son envoi quelques tubercules pour être distribués aux membres de la Société. M. Chappellier désirerait savoir si l'amélioration obtenue par M. Heckel est le résultat de semis ou de la plantation de tubercules. M. Heckel ne donne dans sa lettre aucun rensei- gnement à ce sujet. M. Duval, archiviste du département de l'Orne, envoie une notice très documentée sur la culture de la Vigne en Nor- mandie dans le passé. Ce travail est surtout établi au point de vue historique. Distribution de graines: — La Société met en dis- tribution un certain nombre de graines, entre autres : des oraines d'Hovenia dulcis, du Japon, offertes par M. Clos. Cet arbre réussit sous le climat de Toulouse et son pédoncule est comestible; des graines de Phœænix rupicola, originaires de Calcutta; de Physalis Francheti, offertes par M. Magne; de Légumineuses, Cucurbitacées, etc,, provenant. de l'exposi- tion de Turkestan et enfin des graines de nombreuses va- riétés du Courges et de divers autres légumes provenant des cultures de M. Debreuil et offertes par lui à la Société. Offres d'ouvrages. — M. Raveret-Wattel, vice-pré- _sident, offre à la Société l'ouvrage qu'il vient de publier sur les Poissons d'eau douce de la France. 186 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION » Parmi les ouvrages récemment parvenus à la Societe, M. le Secrétaire général signale le livre de M. Henri Jumelle, ayant pour titre : Traile des plantes alimentaires, Cullures coloniales, offert par les éditeurs Baillière et fils et une notice de M. Pietrement, intitulée : de l’histoire du Cheval dans l'antiquité, offerte par l'auteur. Communications orales. — M. le Secrétaire gé- néral annonce le décès de M. Chatin, de l'Académie des sciences et de M. L. Cerf, imprimeur, membres de la Société. Il fait connaitre que M. H. Coupin, membre de la Société, vient d'obtenir de l’Académie des Sciences, pour ses travaux de physiologie végétale, le prix Parkin de 3.400 francs. Il présente à la Société une tige de Bambou de très grande taille, envoyée par M. Ch. Riviere, d'Alger. M. Ch. Debreuil communique quelques renseignements qui lui sont donnés par M. Bizeray, sur les élevages de Mammi- feres et d'Oiseaux poursuivis par lui dans sa Dos du Jagueneau, prés Saumur. M. Decroix présente quelques observations sur l'opportu- nité de l'élevage du Cheval à Madagascar. Pour le Secrétaire des Séances, Le Secrétaire général, J. DE GUERNE. SÉANCE GÉNÉRALE DU 22 FÉVRIER 1901. PRÉSIDENCE DE M. RAVERET-WATTEL, VICE-PRÉSIDENT Il est donné lecture du procès-verbal de la dernière séance qui est adopté. M. Loyer, archiviste-bibliothécaire, procède au dépouille- ment de la correspondance. Généralités. — Depuis la dernière séance, la Société a recu avis du décès de M. Delamare-Debouteville. | M. Ch. Riviere, directeur du Jardin d'essai du Hamma, à Alger, annonce le prochain envoi du texte de la communi- cation qu'il a faite dans une précédente séance sur le refroi- PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 187 dissement nocturne en Algérie et son influence sur l’accli- matation des végétaux dans ce pays. Mammifères. — M. Robert Pauwels, de Bruxelles, demande des renseignements sur les Mulets et les Anes. M. Emmanuel Boulet, président du Club français du Chien de berger, annonce que le concours annuel, organisé par ses soins, aura lieu à Chàäteauroux, le samedi 1° juin 1901. De nombreuses récompenses seront décernées à cette OCCasion, M. Rogeron, de l’Arceau, près Angers, envoie une notice sur une Poule d'eau que n’effraie pas le bruit produit par ses domestiques en battant l’eau avec des saules pour faire rentrer le soir ses Palmipèdes dans leurs volières. Entomologie. — M. A. L. Clément annonce que la réouverture du cours d'Entomologie agricole qu'il professe au Luxembourg à eu lieu le mardi 29 janvier. Comme l’année dernière, des excursions et des visites concernant l'Entomo- logie appliquée seront faites pendant la période de ce cours. Botanique-Culture. — La Société d'Agriculture de l'Indre fait connaître qu'elle organise à Chateauroux une exposition horticole, à l'occasion du centenaire de sa fonda- tion. Cette exposition restera ouverte du 30 mai au 2? juin 1901. M. Archinard, ingénieur des Chantiers de la Loire, à Saint- Denis, demande des renseignements sur l'£ucalyplus urni- gera. M. Cannonne, de Salbris (Loir-et-Cher), envoie un tra- vail présenté par lui au Congres international de Sylvicul- ture, réuni à Paris en juin 1900, et dans lequel il relate le résultat des expériences poursuivies par lui depuis près de vingt ans, sur l'acclimatatation des arbres forestiers exo- tiques en Sologne. ; Cheptels — Distribution de graines.— M. Bou- langer, ingénieur civil, offre à la Société un Singe macaque, parfaitement apprivoisé et dont l'espèce n'a pu être encore déterminée. Cet animal a été confié à M. Loyer. La Societé a reçu de la Direction du Jardin botanique de Calcutta un certain nombre de paquets de graines origi- naires de la région du Katchin et du Sikkim. , 18S PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ Comimunications orales. — Présentation d'ou- Yrages : M. Ch. Halais, résident de France en retraite, offre à la Societé | « Almanach des Colonies françaises pour Dee ». qu il vient de publier. Parmi les autres ouvrages récemment parvenus à la So- -cièté, M. le Secrétaire général signale le très important volume de l'expédition scientifique du ‘‘Travailleur” et du ‘{Talisian consacré aux Crustacés décapodes. Ce volume accompagné de nombreuses planches noires et coloriées est dû à la collaboration de M. Bouvier, professeur au Muséum et de feu Alp. Milne-Edwards qui fut, comme l’on sait, l’ins- tigateur et le chef des mémorables expéditions du « Tra- vailleur » et du « Talisman ». M. de Guerne signale en outre dans les transactions de la Société zoologique de Londres, une monographie des Casoars, due à l'Hon. Walter Rostchild, membre de la Societe d’'Acceli- mnatation, qui s'est occupé depuis plusieurs années de réu- nir, dans son parc de Tring toutes les espèces du genre Casoar. Ces oiseaux sont représentés dans de très belles planches coloriées exécutées d'apres nature. Au nom de M. Edouard Blanc, M. de Guerne ee le répertoire des noms scientifiques et vulgaires des Poissons d'eau douce de la Russie d'Europe. Pour: le Secrétaire des Séances, Le Secrétaire général : J. DE GUERNE. SA 46 . EXTRAITS ET ANALYSES PRINCIPAUX FRUITS ALIMENTAIRES DES TROPIQUES UTILISÉS PAR L'HOMME : Les Animaux n'ont pas été seuls à apprécier les fruits des plantes tropicales; depuis un temps immémorial l’homme a su- tirer sa nourri- ture de la forèt vierge qui l’entourait. Il paraît avoir conservé le souve- nir de ces bienfaits, car dans beaucoup de religions, les plantes ont pris une grande place dans la vénération des fidèles. Chez les Indiens, le culte des arbres (Topé) est très développé, les plantes comme le Figuier des pagodes, qui se multiplient et s'accroissent indéfiniment sont tenus pour de véritables temples, on les regarde comme des sanctuaires aussi respectés que ceux élévés par la main de l’homme; l'écorce des arbres sacrés purifie le pêcheur qui se blottit dans ses crevasses afin d'y naître une seconde fois. A leur ombre nul ne saurait mentir sans crime (4). Nous verrons d'ailleurs à la fin de ce livre quel rôle capital ont joué les arbres dans la région primitive de l'humanité qui est lié intimement au souvenir gardé par l’homme d'un séjour dans un lieu de délices où les fruits les plus variés étaient à sa disposition. Parmi les espèces qui peuvent justifier la légende de l’âge d’or, on peut citer notamment l’Arbre à pain (4rtocarpus incisa) dont deux à trois pieds suffisent dans ces pays bienheureux à nourrir un homme pendant toute l’année. On comprend que de pareïls arbres tiennent une place considérable parmi les aliments des peuples océaniens; à Taïti notamment, la première espèce constitue la base de la nourriture du peuple. On le mange bouilli, grillé ou cuit sous la cendre et il remplace complètement le pain que les peuples du Nord obtiennent avec tant d'efforts (2). C'est le receptacle floral qui dans ces plantes sert à l’ali- mentation. Cette portion de la tige hypertrophiée renferme des petites gavités où se trouvent les fruits qui constituent autant de pépins. De tout temps, l'Océanien a dû rechercher parmi les inflorescences de ces arbres, celles où la matière nutritive abonde le plus, où les pépins et les graines étaient par contre peu développés. C’est probablement par suite de ce choix, de cette sélection artificielle, qu'ont été créées ces va- riétés sans graines que l’on signale non seulement pour le Jacquier, mais pour les Ananas, les Musa, les Jambosa. Il est très intéressant de constater que l'on a obtenu par cette méthode des variétés très nom- breuses ayant une certaine stabilité. On ne peut pas invoquer ici, pour (1) Ces idées sont encore vivantes dans l’Inde contemporaine ainsi que le prouve l’histoire de cette grève de marchands qui fut provoquée par une plan- tation, dans les rues, d'arbres sacrés ; à l’ombre de ces arbres, tout commerce eût été impossible. Les Indiens semeérent aussi le Jambosier (Ewgenia) le Sal, (Shorea robusta) le Tulaisi dont le bois sert à faire des rosaires de Vichnou. (2) On comprend, dit Baillon, « les légendes superstitieuses qui se rattachent à l’origine céleste de ce précieux végétal ». 190 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION expliquer la formation de ces races, l'intervention de croisements qui seraient, selon certains auteurs, l'unique cause de la variété des êtres, il faut donc évidemment avoir recours, dans ce cas, à l'intervention des agents extérieurs qui constituent la cause primordiale de l'évolution des formes vivantes. L’Arbre à pain nous a fourni un type de fruit contenant des matières alimentaires se rattachant aux matières amylacées. À côté de cette catégorie de fruits, nous pouvons en citer d'autres qui fournissent soit des matières grasses, soit des matières sucrées. L'Avocatier (Persea gratissima) est le type de ceux qu'on peut quali- fier d’oléagineux; on peut en effet étaler la pulpe de ces gousses sur du pain, exactement comme s’il s'agissait de beurre; la substance de ces fruits est d’ailleurs fréquemment désignée sous le nom de beurre végétal. Les types les plus communs de fruits tropicaux sont ceux qui four- nissent des matières sucrées. Il serait long d’en citer la liste; mention- nons seulement quelques-uns d’entre eux que l'on récolte principale- ment à Java. L’Ananas est une plante que l'on cultive très communément. Les Javanais le plantent en guise de haie autour de leur Kambong et les fruits succulents que donne cette espèce sont si nombreux, qu'on les vend sur les marchés pour un prix presque dérisoire. Les Pamplemousses (Citrus decumana) ressemblent beaucoup à d'énormes Oranges, grosses comme une tête et pesant de 5 à 10 livres; on les voit très communément apparaître sur les tables. Mais parmi les fruits les plus exquis et qui ont un goût aussi délicat que le raisin le plus estimé, on peut citer ceux des Sapindacés comme le Nephelium inutabile et le N. lappaceum. Leur enveloppe est cou- verte de piquants, rappelant un peu ceux que tout le monde a observés sur les fruits des Marronniers (qui offrent d’ailleurs des affinités avec ces plantes), si l'on vient à presser le pericarpe, on en fait sortir une graine couverte d'une arille blanche que l'on peut manger sans s'en rassasier même lorsqu'on a les fruits les plus délicats à sa disposition. Les Mangostans (Garcina Mangostan Clusiacées) donnent des fruc- tifications de la grosseur d'une petite poire que l’on divise par une section circulaire de facon à enlever un couvercle et à mettre a nu 4 à 6 graines charnues blanches comme des boules de neige, dont la chair douce fond sur la langue et rappelle le goût de la pêche ou du raisin. La liste de ces fruits est presque inépuisable : Manguier, Mangifera indica (Anacardiacée) Jambosa (Myrtacée) Achras Sapota (Sapotacée). Anon«& squamosa (Anonacée), etc. Aliments tous singuliers pour la bouche d'un Européen qui ne possède. pas un langage, suffisamment, riche en expressions pour en caractériser le goût souvent complexe et étrange. Parmi ces fruits qui font, à la première impression, fuir toute personne non prévenue nous pouvons notamment signaler ceux du Durio Zibethinus (Bombacée), qui dégagent quand ils sont amoncelés, une odeur épouvantable; cependant tous ceux qui ont eu assez de courage pour vaincre la répugnance que provoquent des parfums aussi désagréables et qui ont brisé l'enveloppe de ces fruits trouvent que la pulpe a une saveur qui rappelle celle de la crème ou de l'amande. PRINCIPAUX FRUITS ALIMENTAIRES DES TROPIQUES 191 La noix du Cocotier qui est également un aliment important des régions tropicales, contient dans sa cavité un lait de coco que l’on peut extraire en perforant le fruit. Cette graine renferme un albumen dont la consistance est un peu fibreuse, mais dont l’arrière-goût d'amande n’est pas désagréable. Les Javanais pilent cette substance ou s’en servent pour relever un peu le riz qui est leur aliment fondamental (1). Les richesses végétales que rencontrent ainsi les indigènes partout à leur portée leur permettent donc de vivre presque sans travail dans cet heureux pays. La culture du riz est cependant depuis un temps immémorial tres . répandue dans toutes les contrées qui présentent des régions suscep- tibles d’être inondées ; c’est ainsi qu'à Java les rizières occupent depuis des siècles, de radies étendues de terrain. Comme la fumure est inutile puisque l’eau des fleuves et des rivières sert à fertiliser le sol, ei comme la terre est molle, le labourage et la culture se font sans grands efforts. Le sillon étant ouvert préalablement par la petite charrue chinoise, l'indigène sème le grain à la volée. Il est suivi par un Buffle trainant une planche qui unit le sol et qui met en suspension la vase qui recouvre ensuite le grain, souvent on laisse la plante en place. Quelquefois on la repique; ce sont des femmes et des enfants qui font ce travail. Quatre ou cinq mois après les semailles, la récolte est prête et le terrain, préparé de Fa même façon, pourra recevoir un. nouvel ensemencement. Cette culture commode, n'exigeant pas de grands travaux suffisait à l'indigène, avec les produits qu'il pouvait récolter spontanément avant l’arrivée des Hollandais. Ces derniers ont pensé qu'ils pourraient sti- muler l’indolence des douces populations javanaises qui se trouvaient sous leur domination sans changer leurs mœurs, ni le système de gou- vernement auquel elles étaient habituées. Le sol appartenant à l'Etat au temps des Sultans, ils utilisèrent le système des corvées pour im- poser la culture d’un certain nombre de plantes importantes, comme la Canne à sucre, le Caïéier, etc. Ce système gouvernemental a été complété par une politique habile qui avait surtout pour principe que, pour bien commander aux indigènes, il fallait savoir leur langue et connaître leurs mœurs; aussi le Gouvernement hollandais a-t-il imposé : à tous ses fonctionnaires la connaissance non seulement du Malais mais même des dialectes de l’île. Gràce à un ensemble de sages me- sures, un petit nombre d'Européens a pu gouverner une immense po- pulation; quoique la Hollande n'ait pas donné la liberté aux Javanais qui se trouvaient courbés sous ses lois, elle leur a du moins procuré le moyen, en les y contraignant il est vrai, de tirer de leur pays les trésors qu'il renfermait. Ce qui semble excuser cette méthode un peu tyrannique c'est que, grâce à elle, la population s'est accrue dans des (1) Les ‘autres applications de ces plantes sont extrêmement nombreuses. D'ailleurs l'utilité des Palmiers est majeure pour les habitants des régions chaudes : bois de charpente, nattes, paniers, chapeaux, vin de palme, eau- de-vie, arak, huile, savon, bougies, textiles, balais, brosses, sagou, etc., s’extraient de ces plantes. D'après les Indiens, les usages du Cocotier égalent en nombre les jours de l’année et un poète tamouk en _énnmère 100 pour le Rondier | Borassus je mis). 192 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION proportions tout à fait extraordinaires depuis le commencement du siècle. On comptait alors à Java trois millions d'habitants. Dès que le régime de la culture forcée a été imposé, on a vu ce chiffre s'élever, doubler en peu d'années et, à l'heure actuelle, il y à vingt-cinq millions d'habitants dans cette île. L’exubérante végétation tropicale se charge de nourrir cette fourmilière, car il n’y a pas de pays au monde, où la population soit aussi dense, et. fait très remarquable, il n'y a pas de mendiants sur cette terre féconde, tandis qu'on en rencontre assez communément à Ceylan. N'oublions pas d'ajouter que pendant de longues années, la métropole s’est enrichie des produits de cette colo- nie merveilleuse. Nous avons insisté un peu sur ces questions parce qu'il nous semble qu'elles sont intimement liées à l’étude de la flore puissante qui s'épa- nouit sous l'Equateur. La forêt tropicale contribue d’ailleurs à la richesse de ces pays fécondés par les pluies et les rayons solaires, puisque c’est à son ombre que peut se faire la culture du Caféier, du Cacaoyer et de tant d'autres plantes utiles qu'elle contient en nombre presque indéfini. On ne saurait donc la détruire impunément. Tant qu'elle existe, elle oppose un obstacle, pour ainsi dire invincible à l'invasion d'espèces étran- gères et l’on a remarqué qu'à Java où beaucoup d'espèces étrangères {américaines notamment) se sont naturalisées, elles ne pénètrent jamais dans l'intérieur de la forêt vierge. Il est cependant des pays comme le Brésil où cette destruction est fréquemment entreprise pour l'exploitation; pour l’achever, on a l'habi- tude de livrer aux flammes toutes les parties sèches qui subsistent. Quand une zone de forèt a été ainsi atteinte par le feu, il lui faut vingt- cinq ans pour se reconstituer. Les espèces annuelles se montrent d’abord, mais elles sont bientôt détruites par l'invasion des arbrisseaux, des arbres et des lianes. Il ne semble pas d’ailleurs que la forêt puisse se reconstituer indéfiniment et après la troisième destruction, selon M. Warming, elle ne se réformerait plus. Ces dévastations systématiques ne se sont produites que grâce à l'intervention de l'homme et surtout de l’homme civilisé. Partout ail- leurs, la forèt vierge s’est maintenue depuis un temps indéfiniment re- culé. Il ne semble pas y avoir eu, (au moins si la géologie actuelle nous permet de résoudre cette question) de cataclysme dans ces régions équatoriales, de sorte que M. Wallace a pu dire que cette flore n’est pour ainsi dire, que la continuation d'une végétation ininterrompue «depuis les premiers âges de la terre. J. CosrANTIN. — La nature tropicale (p. 67-72). oo Librairie et Imprimerie Horticoles, S4 bis, rue de Grenelle, Paris. 4 no BULLETIN DE LA \ SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACELIMATATION DE EFERANCE à (Revue des Sciences naturelles appliquées) ï 48° ANNÉE - JUILLET 1901 SOMMAIRE æ. HECKEL. — Sur une nouvelle variété du Dioscorea pentaphylla ......................... 193 PP RINMPR EM Epocore la banane duHamma..-...4.:e.MMei id M... nero 198 Extraits des procès-verbaux des Séances générales À ne le da 20 mars 490922... ....4............ 4... 0. 207 Ê = Gin il one MOD SR SRE A ES 6 a bo do one c 213 k Extraits des procés-verbaux des Séances des Sections - n° |Srcrion. — Ornithologie.........................................................cr.. 216 “v: SEcTion. — Botanique :.......... RD PA L'EAU LA A PEAR EE 216 "Ni Srorion. — Colonisation................................................................... 217 M L : Extraits et analyses 1e  . Général N. DE DEPP. — Note sur l'élevage des « Chanchitos » ........................... 219 Concours pour l'étude des Insectes ennemis des livres................................... 222 “La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises de par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. — cr 92=— Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE SOCIAL : DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE, # 4i, Rue de Lille. — PARIS Le Bulletin paraît tous les mois. Fondée le 10 Février 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 41, RUE DE LiILLE — Paris BUREAU ET CONSEIL D’ADMINISTRATION POUR 1901 Président. M. Edmond Perrier, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Méde- > ER cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. Baron Jules le Guerwe, 6, rue de Tournon, Paris. MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Museum d'Histoire Naturelle, Paris. Vice-Présidents. | Comte de PoxrrmianD, Sénateur, boulevard Saint-Germain 238, Paris. CG. RAvERET-WATTEL, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier. - 20, rue des Aca. as, Paris. Secrétaire-général : M. Maurice Loyer, Avoc.c à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. MM. le D: Sesnorre, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris Ce ieur). H. Hua, Directeur- -adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Germain, Paris (Conseil). Secrétaires. L. Seurar, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial du. Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). G. Frox, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin coloniak, 19, rue de Sèvres, Paris (Etranger). 3 Tresorier. M. Ch. Desreuiz, Avocat à la Cour d'Appel, 25, rue de Chateaudun; Paris. Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d’'Orreurcee, à Versailles. Membres du Conseil MM. L. Ben. Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, Directeur,des affaires d'Afrique au Ministère des Colonies, 15. rue de Pronw, Paris. + Edouard BLawo, Exploraleur, 52, rue de Varenne, Paris. ke D: Raphael BLANCHARD, Membre de l'Académie de Médecine, professeur. à la Faculté de É Médecine, 226 boulevard Saint Gérmain, Paris. J Comte Raymond de DaLuas, 26, rue de Berri, Paris: Le Mvyre pe Virers, Député de la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. “4 P. MarcaL, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de la Station entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay- -aux-Roses. ? L. ME sev, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pèche et\de la Pise culture au Ministère de l'Agriculture, S7, boulevard Saiut- Michel, Paris. À. Mia -PourNGox, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, 4%, rue de la Chaussée- d'Antin, Paris. # E. OUSTALET, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue Notre-Dame-des-" Champs, Paris. “4 A. Razer, Membre de l’Académie de Médecine, Professeur à lPEcole vétérinaire. d'Alfort (Seine). 3 D: E. Trouessarr, Président de la Société Zoologique de France, 145, rue de la Pompe,;« Paris. = Presidents honoraires : MM. Albert Grorreoy-Sant-Hinamme, à Vault de Lugny, par A He (Yonne). Le Myre DE VILERS, 3, rue Cambacérès, Paris. Secrétaires Généraux honoraires : MM. Amédée BERTHOULE, 4, avenue des Ternes, Paris. Baron Jules de GUERNE, 6, rue de Tournon, Paris. Membres honoraires du Conseil : MM. P. de LaBouLaye, 129, avenue des Champs- Elysées, Pari Dr P. MéanIN, 6, avenue Aubert, Vincennes. D: Ed. MEÉNE, 20, rue Oudinot, Paris. D: J. Micnow, 33, rue de Baby lone, Paris. Dr WEBER, 180, boulevard Saint- Germain, Paris. Shi CS ae MON MES QE Ce SUR UNE NOUVELLE VARIËTÉ DU DIOSCOREA PENTAPHYLLA L. A TUBERCULES OVOÏDES RAMASSÉS AU BAS DE LA TIGE par M. Edouard HECKEL Au cours de mes recherches, au ‘Jardin botanique de Marseille (champs d'expériences), en vue de'raccoureir le tubercule de l’Igname de Chine, j'ai &û porter, dans un esprit de comparaison, mon attention sur diverses autres espèces capables de donner naturelllineut le résultat cherché sur le Dioscorea Batatas L. mais non encore atteint. L’une d’entre ces espèces mises à l’essai m'a fourni quelques observations présentant un certain intérêt tant théorique que pratique, et je viens les soumettre au jugement de _ mes collèges de la Société d’acclimatation de France, que . la même question préoccupe. Peut-être ont-ils été témoins des mêmes faits dont l'interprétation me parait offrir quelques difficultés, qui se résoudront sans doute plus aisément par l’apport de nouvelles observations. Je serais _ heureux que ma communication en provoquât la mise au jour et qu’elle put faire naître une discussion au sein de cette savante assemblée. Il en résultera certainement grand profit, pour moi tout au moins qui suis un peu isolé dans mes recherches. Parmi les espèces que j'ai mises en culture se trouve le Dioscorea*Fargesii Franchet. J'ai obtenu une vingtaine de beaux pieds de cette plante grâce au zèle éclairé de M. Davin, chef de culture du Jardin botanique que je dirige. Ces plantes proviennent d’un lot de tubercules que. je reçus gracieusement de M. Maurice de Vilmorin. Mais de ces semis de tubercules naquirent deux pieds qui tranchent _ absolument parmi les Fargesii : ils se rapprochent à cer- tains égards du Dioscorea pentaphylla L. et s’en éloignent par d’autres caractères. Ces plantes sont très vigoureuses commes les D. Fargesii, mais ni les unes ni les autres n’ont fleuri. Elles ont donné toutes d’abondants bulbilles à l’aisselle des feuilles, mais c’est tout. La feuille dans les deux cas est à 3-5 folioles, plus souvent trois au sommet Bull. Soc. nat. Accl. Fr, 1901. — 13 194 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION et cinq à la base, mais la variété du pentaphylla à bien, comme le type linnéen, ses folioles plus épaisses, plus coriaces, moins membraneuses et d’un vert plus sombre que celles de lIgname de Farges: ses poils foliaires sont plus petits, plus appliqués sur les bords de la foliole, comme c'est indiqué par D. pentaphylla, mais cependant elle s'éloigne de cette espèce par la forme des bulbilles et ; par celle des tubercules. Franchet dit (D)ebVE Bois (2) confirme que, dans, l'Igname de Farges, les bul- billes aériens sont rugueux au lieu d’être lisses et lui- sants, comme c’est le cas dans ligname a cinq fo- lioles; or, c’est précisément l'inverse que j'ai constam- ment observé dans ma plan- tation. Dans cette dernière forme, le bulbille est non seu- lement rugueux mais d’as- pect subéreux; d’autre part il est ellipsoïde, à grand axe transversal, tandis que dans l’Igname de Farges, il est uni- Re lormément ellipsoïde aussi, Variété. mais à grand axe vertical, lépiderme très lisse, mais velu dans le jeune âge, n'étant interrompu seulemerf que par quelques lenticelles. Mais ce qui m'a causé une bien plus grande sururise, c’est de voir que les tubercules souterrains ne concordent pas du tout avec la manière d’être accusée par tous les auteurs qui se sont occupés de cette espèce D. pentaphyllæ. Les tubercules de l’Igname de Farges que j'ai récoltés sont turbinés coniques, à pointe dirigée vers la tige, leur chair est blanche jaunâtre comme l’épiderme, et toute leur sur- face extérieure est recouverte d’un abondant chevelu de (1) Un nouveau Dioscorea alimentaire de la Chine occidentale, in Rev. hortie, 6° année p. 540. (2) Le Dioscorea Fargesii, nouvelle igname alimentaire, in Bull. de la Soc. bot. de France t. xLvIr; séance 9 fév. 1900. DIOSCOREA PENTAPHYLLA 195 racines. Dans la même terre, au contraire, et végétant côte à côte, les tubercules de ce que j'appelle une variété de D. pentaphylla, sont lisses, et, contrairement à ce qu’indi- quent les auteurs pour l’espèce type, ils sont ovoïdes, au nombre de 3 à 6 (fig. 1), de grosseur dissemblable et ras- semblés autour du collet de la tige en une masse compacte et serrée. Quelques tubercules sont soudés les uns aux autres, le plus grand nombre sont libres; leur épiderme est granuleux, chagriné et de couleur rouge. En enlevant avec l’ongle cet épiderme peu adhérent, on met à nu un pa- renchyme dense, charnu, également de couleur rouge à la périphérie et blanc au centre. À la coupe examinée au microscope, les grains d’amidon se montrent fort petits, en petit nombre et de forme différente de ceux de l’Igname de Farges. Ces tubercules soumis à l’ébullition se sont montrés faciles à cuire, se pelant aisément et de saveur très agréable sans dureté à la périphérie mais filandreux au centre : ils semblent supérieurs à ceux de l’Igname de Farges. Ils rappellent l’Igname de Chine à part la consis- tance filandreuse du centre. Je me propose de reproduire par ces tubercules la plante l’'an prochain pour voir ce qu'ils deviendront dans l'avenir sous l'influence de la culture et s’ils maintiendront leur forme actuelle. Ce serait une bonne acquisition culturale si le tubercule, pouvait être développé et amélioré. Il semble que ce résultat doive être facilement acquis, dans le Midi de la France au moins. Suis-je en face d’une variété D, pentaphylla où bien d’un hybride de pentaphylla et ue Fargesii? C’est la question qui se pose et je ne possède pas les Moyens de la résoudre n'ayant pas eu Pheureuse chance de voir fleurir ni l’une ni l’autre de ces deux plantes chez moi. I tout cas, ce que j'appelle une variété de D. pentaphylla, se présente, en l’état de ce que j'ai fait connaître, avec des caractères végétatifs empruntés à l’une et à l’autre de ces deux espèces. Les feuilles sont incontestablement du D. pentaphylla, mais les bulbilles rappellent ceux que les auteurs cités attribuent à D. Far- gasti. Il est vrai que je n'ai pas retrouvé dans cette der- _nière espèce les bulbilles qu'on lui attribue. D'un autre côté les tubereules se rapprochaient {bien plus de ceux de lIgname de Farges que de ceux de l’Igname à cinq folioles. . Franchet dit en effet (/oc. cit. p. 551) que d’après une 196 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION figure de Thwaites citée par Hooker (F4. Ind. VI, 290) les tubercules oblongs de D. pentaphylla peuvent atteindre 5 à 6 pieds anglais (de 1",50 à 1",80). Nous sommes ici loin de compte et comme forme et comme dimension, mais nous sommes moins loin de D. pentaphylla, il faut le reconnaitre. Je me propose, comme je viens de le dire, de continuer mes expériences sur cette dernière forme mais j'ai cru devoir avant tout en signaler l’existence, et cela d'autant plus que M. Bois, a qui j'ai soumis mes observations à bien voulu me répondre à la date du 13 octobre que M. de Vilmorin lui a envoyé des échantillons de deux espèces de Dioscorea en fleur qui lui avaient été remises par le P. Farges comme appartenant à une seule espèce et qu’il y a trouvé le vrai D. Fargesiti, cultivé par lui à Crosres, plus le D. pentaphylla. « I est probable, ajoute M. Bois, que cette dernière espèce s’est trouvée associée au D. Far- gesii, dans les plantes que M. de Vilmorin vous a adressée. » Comme on peut en juger par tout ce que je viens de dire, ce n’est en tout cas pas-l'espece/Wype queen reçue, mais bien une variété ou un produit de croisements. J'envoie à l’examen de la Société les tubercules de la variété de D. pentaphylla et une plante de D. Fargesti pourvue des bulbilles qui s’éloignent absolument de ceux qui sont décrits par les auteurs. ENCORE LA BANANE DU HAMMA DISSERTATION SUR L’ACCLIMATATION (1) par A. RIVIÈRE Directeur du Jardin d'essai du Hamma [L’obtention de la Banane du Hamma, variété savoureuse et fructi- fère sur une plante à grande végétation, est un fait d'acclimatation très intéressant et qui n’a donné lieu, jusqu’à ce jour, qu'à deux observa- tions, j'allais dire contestations, dont il faut tenir compte dans l'intérêt de la science de l’acclimatation seulement. L D’abord on se trouve en présence d’un fait indéniable contre lequel échouent toutes les hypothèses et les arguties, c’est la place de plus en plus grande prise dans nos bananeries de l’Afrique du nord pour cette excellente variété de banane successivement améliorée dans les cultures du Jardin d'Essai. Nous ne sommes plus en présence d’une petite tentative de jardin botanique, mais bien en pleine pratique con- sacrée par des années d’expérience. I! serait donc inutile de revenir sur un fait accompli, apprécié ef sanctionné, siles choses d’acclimatation complexes, souvent inexpliquées, n'avaient pas besoin d’être étayées de bonnes observations et disser- tations, de nature à nous indiquer tout au moins les modifications forcées subies par les organismes, suivant les milieux qui leur sont imposés : cela ne s’apprend pas encore dans les livres, mais bien par des expérimentations sur le vif, constantes et de longue durée. Il ne faut donc pas éviter de répondre aux quelques critiques qui me sont faites, car elles contiennent souvent en elles-mêmes une réponse qui ne demande qu'à se dégager et, dans le cas présent, elles servent beaucoup trop la thèse que je soutiens pour les regretter. Puisque par hasard, j'assiste à une séance de la Société d’acclima- tation, que jy entends la lecture d’une note de M. Patin et les explica- tions qu’il y ajoute, j'y répondrai de vive voix, ainsi qu'à M. Trabut, heureusement appuyé par quelques échantillons ‘qui souvent valent mieux que des affirmations.] LE Dans le Bulletin de juin 1898, p. 194 et 196, notre honorable collègue, M. Trabut posait comme un principe absolu, admis et indiscutable, que dans le cas signalé, il ne pouvait y avoir eu sélection : /a plante ne grainant : pas et n'ayant pas été obtenue de semis. Mais en présence des observations que j'ai présentées, de- vant notre Société, relatant par de nombreux exemples que lavariation gemmairesélectionnée etfixéesontdes faits bien acquis, M. Trabut consent cependant à ne pas soutenir sa thèse et abandonne facilement, il faut le reconnaître, son (1) Communication orale faite à la séance générale du 25 mai 4900. 198 . BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION opinion cependant si nettement et si brièvement formulée que la variation ne peut avoir d'autre origine que l'acte sexuel. 1e > De cette généralité, il passe au cas particulier : il n’admet pas, dans l’histoire du Bananier du Hamma, l'in- fluence de la sélection, mais seulement les effets de la cul- ture et de l’acclimatation. Je lui avais facilité l’une de ces solutions en discutant (page 214) quel élait dans ce cas la part afférente à l’in- fluence climatérique et à celle de la sélection? M. Trabut ne voit là que l’acclimatation, mais dans un sens absolument réduit, et c’est l'esprit qui domine dans toute sa note pour tous actes de transportation et de natu- ralisation confondues avec lacclimatation. Mais, acclimater une plante n’est pas le fait brutal de la transporter simplement dans un autre milieu et de l'y aban- donner au hasard du temps et des accidents. L’acclimatation vraie, dont les faits indiscutables sont encore si peu précisés, est la résultante de pratiques com- plexes et raisonnées parmi lesquelles dans un grand. nombre de cas, la multiplication est une des principales méthodes culturales, peut-être plus puissante et efficace que la voie du semis avec ses longueurs, ses incertitudes et ses retours en arrière. L'acclimatation n’est pas l’acte simple de transporter une plante dans un milieu analogue un peu différent de la localisation d’origine; cela est de la transportation. Mais l’art de modifier une plante, de l’adopter à un nouveau mi- lieu consiste tout d’abord à y faire vivre cette plante dans une première période en ne l’exposant pas jeune, tendre et sans résistance a de mauvaises conditions meétéoriques : tel est l’exemple cité par M. Trabut à l’Arba et sur lequel je m’expliquerai plus loin. : Suivant le savant professeur d'Amsterdam, M. Hugo de Vries, l’acclimatation est une question de variabilité indi- viduelle et de sélection : la variabilité a pour cause l’héré- dité et le milieu ambiant, et elle dépend beaucoup de la nutrition. On remarquera que je n’ai jamais cessé de faire inter- venir tous ces éléments d'interprétation, sans préciser cependant le rôle prédominant de chacune, dans mon expé- rience avec le Bananier du Hamma, qui a duré une dou- zaine d'années : c’est dire en passant que cette plante, de LA BANANE DU HAMMA 199 végétation herbacée, de développement si rapide, ne s’est pas pliée facilement et sans résistance aux exigences du milieu et aux efforts de l’acclimateur. Si l’on avait été, comme pour d’autres Bananiers, en pré- sence d’une espèce qui, d'emblée, dans une région autre, continue sa végétation sans trouble apparent, cette trans- portation n'aurait pas été une acclünatation dans le sens vrai du mot, et comme on doit l’entendre, c’est-à-dire une adaptation au climat s’accomplissant par des phases suc- cessives et bien marquées, sous l’impulsion d’une méthode absolument définie dans une note de 1889, p. 262 et que je résume encore ainsi : « Un Bananier reçu du Brésil, quoique bien soigné pen- dant cinq ans, doué d’une grande végétation a pour carac- tère le manque de fructification; le stipe mourut sans dépasser la période florifere. « En 1891, la neige et des froids inconnus jusqu'alors détruisent en grande partie les bananeries et il ne reste que quelques pieds seulement de cette plante, ainsi sélec- tionnés, au point de vue de la résistance, par une cause naturelle puisqu'il n’en restaitqueles pieds les plus vivaces. « Pendant 6 ans après cet événement, les dits Bana- niers, — comme autrefois — ont toujours pour caractère de simples floraisons, puis anfin des régimes avortés et des fruits atrophiés. On obtient cependant une certaine amélioration se traduisant quelquefois par des fruits for- més, irrégulierement répartis et par des maturitèés impar- faites et peu homogènes sur un même régime. » Ce que je considère ici comme une véritable sélection c’est d’avoir constamment multiplié la plante avec les rejetons des pieds de fructification améliorée. La logique ne commandait pas d'agir autrement et c’est ainsi qu'on arriva à obtenir des régimes à peu près normaux, mais encore avec ce caractère curieux et original de #14ins atrophiées en plus ou moins grand nombre. M. Trabut me reproche d’avoir fait dans mon premier rapport de 1897 des réserves que je n'ai pas maintenues par la suite. En effet, quoique en présence d’un excellent résultat, la prudence me dictait de ne pas engager l'avenir et de ne pas me prononcer à priori, mais l'amélioration s'étant accentuée et le fait étant acquis, j'ai affirmé deux ans plus tard, ce qui deux ans avant n’était qu'une pro- babilité. 200 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION Voilà donc une plante herbacée d’évolution rapide qui met plus de douze ans à se modifier pour fournir des régimes de développement normal, à fruits bien formés et surtout succulents. Mais, M. Trabut ne discute pas sur le vif : il n’émet que des séries d’hypothèses et donne aux termes des signifi- cations diverses. Pour lui, il n’y a dans cet exemple, qu’une modification due à la culture, comme si la sélection, la nutrition et la généralité des soins n'étaient les prin- cipaux facteurs de l’acclimatation. Je prétends donc toujours que la rigoureuse élimination des stipes portant des régimes à mains atrophiées, c’est- à-dire ayant une tendance à ce retour en arrière, est une véritable sélection trop logique pour être discutée plus longtemps, que lAcclimatation est le fait de l’homme, et qu’elle est nulle sans la méthode culturale qui a pour base la fixation des organismes choisis, sélectionnés, parmi ceux qui ont subi sous le climat la modification recher- chée, apparente ou intime. La vigueur et la fertilité de ce Bananier ne sont pas si caractéristiques, avance M. Trabut et j'y réponds par des exemples que je vais décrire à l’aide des remarquables échantillons que chacun peut étudier de visu. A. Voici un stipe du Bananier du Hamma qui mesure 97 cent. de diamètre et que les connaisseurs de végétation équatoriales qualifient de pen ordinaire. B. En outre voici son régime composé de 150 fruits de maturité hivernale, pleins, parfumés et à chair succulente. Je joins à ces exemples, une correspondance que je prie le bureau d'examiner et qui démontre les constatations et les avis favorables des gens les plus autorisés en ces ma- tières, sans oublier l'appréciation de notre honorable Pré- sident, M. Le Myre de Vilers, grand connaisseur en ces sortes de productions exotiques. M. Laferrière, gouverneur général de l'Algérie a bien voulu accepter un régime de 174 fruits et M. de Lanessan en a reçu un de 178 fruits. On récolte au Hamma des régimes pesant 14 kilos. Mais il y à un autre critérium : la qualité de cette Banane est telle qu’elle est payée le double du prix des fruits ordi- naires; On comprendra alors pourquoi la Banane du Hamma est substituée aux autres variétés du Musa sa- pientun et prend une place dans la culture pratique. LA BANANE DU HAMMA .… 201 4 Dire que le Bananier du Hamma a une aire d’exten- sion moins grande que celle des autres Bananiers en Algérie est une allégation non fondée. L'expérience démontre en effet le contraire et l’on peut déjà établir que cette variété sort aisément de l’étroite limite de la culture de ces plantes, aussi l’exemple cité par M. Trabut, s’il est unique, n’est pas concluant, ainsi que je vais le démontrer. Ce Bananier aurait mal supporté le climat de l’Arba, localité froide où il aurait été planté. Mais comme le fait remarquer M. de Bonnand, ni l’Arba ni Blida, régions sou- vent neigeuses, ne conviennent guère aux Bananiers, qui affectionnent la région exclusivement littorale. On a pris deux petits éclats de souche — c’est moi qui en ai été le donateur — avaient-ils des racines, étaient-ils originaires de pieds déjà sélectionnés, comment ont-ils été plantés, soignés, soustraits aux gelées du printemps? Aucun renseignement sur ce point. Pourquoi choisir comme démonstration et pour la géné- raliser, un point de la zône excentrique du Bananier au lieu de citer des résultats favorables dûs à de bonnes mé- thodes de pratique d’Acclimatation ? Peu loin de la localité où il aurait si mal réussi avecses deux petits pieds, M. Trabut aurait pu voir chez M. Bour- lier, ancien député, agronome fort distingué, les Bana- niers du Hamma donnant de beaux régimes à très bons fruits. Je dois ajouter que les plants que j'ai donnes à M. Bourlier provenaient déjà de souches très fructifères. Placés au Sud, à 34 m. d'altitude, abrités des vents du Nord et de l'Ouest, bien arrosés et fumés, ces Bananiers donnent dans leur région des fruits estimés. Je me permettrai de faire observer que toute l’argumen- tation de M. Trabut s’écroule devant le fait topique qu’il croit devoir produire et qu’il formule ainsi : « On a récolte en plein été (sur les deux pieds de l’Arba) des bananes atrophiées, ils ne provenaient donc pas de pieds sélec- tionnés. » C’est résumer toute la série de mes expériences qu’il affirme par une tentative d’infirmation et ce retour en arrière ou à l’origine, est certainement la confirmation la plus entière de mes travaux sur ce Bananier. Mais faudrait-il donc recommencer dans un autre milieu cetté tentative d’acclimatation? Permettez-moi, mon cher 202 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION Collègue, de ne pas répondre à votre question. Vous dites qu'entre vos mains le Bananier continue à donner des régimes à fruits avortés tandis que ceux qui se récoltent au Hamma ont de 150 à 180 fruits. J’étais dans cette situa- tion, quand j'ai débuté avec cette plante qui, comme vous le voyez, a fortement hésité à se plier à nos convenances. Je vous trouve aujourd'hui dans une situation contraire et j'ai beaucoup de peine pour l'étude seulement à retrouver les mains avortées si caracteristiques que, grâce à vous, nous pourrons conserver comme type original démon- trant que ce Bananier n’est pas venu du Brésil, tout formé et à point. A la page 77, M. Trabut signale un fait qui est la base de son argumentation : le Bananier du Hamma aurait été introduit en fraude en Algérie, alors que la législation phylloxérique empêchait encore il y a peu de temps, l’en- trée des végétaux vivants de n'importe quelle provenance. L'Algérie s’est bien ressentie, au point de vue acclima- tation, de cette mesure injustifiée que l’Académie des Sciences n’a jamais voulu ratifier. Quand j'ai fait connaître en 1897 les heureux résultats obtenus avec la Banane du Hamma que le publie a si bien accueillie comme succès d’acclimatation dotant l’alimen- tation d’un bon fruit, M. Trabut dénoncça l'introduction suivant lui frauduleuse de ce Bananier vivant illégalement en Algérie depuis une douzaine d'années. Il était dans son droit : les Bananiers devaient être arra- chés; la loi est formelle et son application rigoureuse. La justice, quelquefois boiteuse, dit-on, fut cette fois sourde. Comme dans notre Bulletin, la fraude fut signa- lée au gouvernement : celui-ci sourit; il était l’auteur de cette introduction, qu'il avait cru devoir faire lui-même en m'en confiant la suite heureuse et les documents offi- ciels que je remets entre les mains du bureau témoignent sa satisfaction en cette circonstance, d'autant plus vive que ce succès ne lui coûtait rien. Détruire les Bananiers du Hamma après douze ans de séjour, était pour M. Trabut une mesure de prudence et cette opinion, était quelque peu entachée d'erreurs géo- graphiques et entomologiques. En effet, voici largu- mentation : en introduisant ce Bananier du Jardin bota- nique de Rio, on pouvait importer le Phylloxera qui déjà ravageait l'Est et l'Ouest de l’Algérie; on s’exposait aussi - LA BANANE DU HAMMA 203 aux atteintes de l’Aspidiotus perniciosus….. du Chili, peut- être même de l’Aspidiotus Ficus — de la Floride, dénommé spécifiquement depuis peu en Algérie, mais où ilest connu depuis quarante ans environ. Au point de vue entomologique on peut considérer que les Insectes affectionnent peu les Musacées qui contiennent un suc corrosif et par conséquent antiparasitaire. Même dans les Bananeries les plus étiolées, les moins aérées, on ne connait parmi elles aucune trace de ces Insectes trop nombreux qui envahissent les plantes environnantes même celles qui sont sous leurs ombrages. Ce suc corrosif qui découle abondamment de la coupe des feuilles et des régimes est dangereux pour les ouvriers chargés de ces services : ils doivent protéger leur figure etleurs mains et être revêtus de blouses de grosse toile préservant leurs vêtements de taches indélébiles et même de brûlures. On ne voit donc pas bien la vie prolongée d’Insectes redoutables sur ces deux ou trois petits stipes de Musa- cées enveloppés dans une toile grossière et arrivant de Rio à Alger après deux mois de voyage. Quant à la dénomination du Bananier du Hama, contre laquelle M. Trabut s'élève, je répondrai que j'ai ainsi précisé cette plante en souvenir de la région où les Bananiers ont été cultivés pour la première fois en Algé- rie et dans la localité même où se trouve le Jardin d'Essai du Hamma qui a rendu tant de services au pays et à l'Hor- ticulture en général (marques d’assentiments). Je ne voudrais pas prolonger cette réponse, qui n’a pour but que de démontrer que l’on ne doit pas entendre par acelimatation une action unique, mais bien l’ensemble de conditions et de méthodes, sélection, multiplication, agame ou sexuée,fécondation, hybridation, applications culturales, ete., devant adapter l’organisme à un nouveau milieu. La discussion peut donc rester longtemps ouverte sur les causes prédominantes qui ont agi sur la transforma- tion heureuse d’un Bananier, mais ce qu’il y à de certain, c’est que le résultat est acquis et fixe. k Avant de répondre à la note lue par M. Patin, je tiens à décrire à l’aide des échantillons ici présents les caractères 204 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION de la Banane du Hamma que je ne trouve nullement indiqués parmi les fruits auxquels il la rapporte. La Banane du Hamma appartient aux Figues-Bananes, mais au lieu d’être {ronquée à sa partie supérieure, elle se termine en s’amincissant, en forme de mucron : c’est une sorte de prolongement, de prépuce allongé, une sorte de phymosis. Ce caractère rare dans les variétés comestibles se trouve ordinairementdans lesespèces sémenifères, Musa textulis, troglodytarum, Japonica, etc. La banane est cylindrique, bien pleine, a rarement des angles qui disparaissent sur les régimes de bonne végé- tation : ces angles sont surtout saillants dans les mains atrophiées. M. Patin reconnaitrait notre plante dans le Guineo, Bana- nier des montagnes de la Colombie et du Brésil, mais la description qu’il en donne n’a aucune concordance avec notre Bananier : la chair n’est pas absolument blanche, mais à tendance vers le jaune; il ne signale ni son parfum ni son goût acidulé pourtant si caractéristiques, et il classe ce fruit parmi les petites figues-bananes, contraire- ment à ce que nous observons. La taille gigantesque de la plante n’attire nullement son attention. Le fruit mûr n’est pas bon dit-il — nous nous récrions tous — on ne le mange que comme légume, cuit à l’état vert. J’insiste en disant que le fruit est savoureux, parfumé, qu'au lieu d’être fade et päteux comme les autres bananes il est acidulé et frais. M. Patin nous répond que ces qualités là ne sont pas appréciées : des goûts il ne faut pas dis- cuter. Un de nos collègues qui a habité la Colombie partage cette manière de voir, mais à la dégustation il change d'avis et affirme que cette banane ne lui rappelle en rien celle de la Colombie. Cependant M. Patin ne voudrait plus se prononcer affir- mativement; il enverra des échantillons à une personne habitant Bruxelles pour avoir un avis. Avouons que tout cela est bien peu précis et nullement scientifique : les hypothèses disparaissent devant les faits. Revenons à la technique de l’acclimatation. M. Patin a compris que j'avais émis la prétention de créer une variété par multiplicalion agame, fait impossible puisqu'il ne pouvait y avoir variation et sélection que par graines : LA BANANE DU HAMMA 205 c’est une opinion que je ne partage pas et j'en ai donné les motifs, mais je n’en fais pas l'application au cas présent. J'ai dit que par le choix persévérant de pieds de plus en plus fructifères, ce qui est une sélection, j'avais par la culture à outrance mis en fructification régulière et nor- male une plante rebelle pendant de nombreuses années à la formation de son régime. Quant à la lente modification subie par ce végétal sur notre climat qui pourra la préciser ? M. Patin ne voit là qu’une plante qui aurait souffert du . froid et qui se serait rétablie lentement : il oublie qu'avant le froid signalé, la plante n’avait jamais fructifié et que 10 ans après, quoique de végétation vigoureuse, certains pieds avaient encore des régimes atrophiés, tandis que d’autres ne présentaient plus ce caractère. Notre honorable collègue n’a jamais vu de faits analogues depuis qu'il cultive les Bananiers. Pourrait-on lui de- mander s’il a fait de la culture ou de lacclimatation et en d'autres termes s’il a introduit des Bananiers originaires d’autres pays dans des milieux différents et à la dernière limite de la vie de ces plantes? D’autres part pour régénérer des bananeries de cette nature s’adresserait-il de préférence à des souches fructi- fères ou non? ou dans le cas présent prendrait-il des éléments de multiplication sur les souches ayant tendance à l'avortement des régimes ? Pour M. Patin la variation agame ne consiste que dans les caractères apparents, panachure et difformité, mais elle ne peut atteindre la couleur et la saveur des fruits, encore moins la résistance du sujet. Ma note (1) relate des observations précises et non des hypothèses : elle tend à établir que la variation gemmaire et sa fixation ont déjà de nombreuses démonstrations qui ne s'appliquent pas seulement à des apparences exté- rieures,mais bien à des fonctions intimes, physiologiques et biologiques. | Pour prendre comme exemple le Bananier, ne pourrait- on pas rechercher si les nombreuses formes de cette plante si répandue et qui ne graine pas, ne seraient pas une résultante de la modification séculaire du végétal sous l'influence du milieu où elle est propagée par multi- plication agame ? (1) Bull. Soc. Nat.-Accl., 1899, p. 262. 206 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION La sélection ne s’applique qu’à la graine pense M. Patin, comme M. Trabut d’ailleurs, alors on peut encore leur demander si pour composer un vignoble, ils ne prendront que des sarments non fructifères, mais s'ils ne choisiront pas au contraire ceux qui se signalent pas une abondante mise à fruit. On va plus loin, on recherche si sur un même sarment, les yeux, suivant leur emplacement, n’auraient pas une individualité particulière. Qu'est-ce donc qu’un stipe de Bananier? Un long bour- geon, une ramification d’une souche rhizomateuse cen- trale. Les modifications physiologiques subies par les végé- taux en changeant de milieu peuvent donc être perpétuées tout aussi bien, et peut-être mieux suivant les cas, par la multiplication agame que par l’action sexuée. EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES GÉNÉRALES SEANCE GÉNÉRALE DU 29 MARS 1901 PÉSIDENCE DE M. LE MYRE DE VILERS, PRÉSIDENT Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Secrétaire général procéde au dépouillement de la correspondance. Entomologie. — MM. les professeurs G. Gianelli et E. Perroncito, de l'Ecole supérieure de Médecine vétérinaire de Turin, prient la Societé d'Acclinatation d'envoyer au Musée de Parasitologie, près l'École supérieure de Médecine vétérinaire, des œufs ou des cocons de Bombyciens sérici- genes sauvages de la Chine et des autres régions où vivent ces Insectes, tels que l'Attacus pernyi, cynthia, yamamai, melitta, splendidus, etc., pour en tenter l'élevage à la ferme- école Pasteur. M. Jules Cloquet rend compte des résultats de ses tenta- tions d'élevage d'Halabés, Araignées fileuses de Madagascar, qui lui furent confiées à la suite d'un envoi adressé à la S'o- cièté d Acclimatation par le R. P. Camboué. Cette tentative d'élevage, infructueuse d'ailleurs, fut faite en Algérie, dans le jardin du Cercle militaire d'Orléansville. Les jeunes Epeires disparurent très rapidement, sans qu'il fut possible d'en retrouver la trace. Cette disparition doit- elle être attribuée aux Oiseaux, Lézards, Batraciens qui peuplaient également le jardin du Cercle militaire, ou à une migration, comme celle que signalait le R. P. Camboué au mois d'avril 1900? Tel est le problème que M. Cloquet espère résoudre lorsque les circonstances le permettront. M. le professeur Marchal fait ensuite la communication suivante : M. Howard, Directeur de la Station d'Entomologie du département de l'Agriculture des Etats-Unis, cherche actuel- lement à introduire aux Etats-Unis le Calosome sycophante pour l'utiliser dans la lutte contre le Ziparis dispar (Gipsy- Moth) et la Chenille de l'Ærastria scilula pour l'opposer au Lecaniwm oleæ, qui est une des Cochenilles les plus nui- sibles de la Californie. L'utilisation de parasites ou de préda- 208 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION teurs européens lui semble particulièrement indiquée pour lutter contre ces Insectes nuisibles d'origine européenne, dont la naturalisation en Amérique est relativement récente, et dont la multiplication insuffisamment contrebalancée par les parasites est encore plus désastreuse que dans notre pays. M. Alwood, envoyé en mission en France par le gouver- nement des Etats-Unis, a prié M. Marchal de s'occuper de cette question, à laquelle la Division d'Entomologie attache la plus grande importance. M. Marchal sera donc reconnaissant à ses collègues de la Section d'Enltomologie, qui pourraient se procurer des Calosoma sycophanta (à Yétat de larves ou d'adultes), ou des Ærastria scitula (à l'état de chenilles jeunes ou d'œufs), de bien vouloir se mettre en relations avec lui (Station entomologique de Paris, 16, rue Claude-Bernard), de façon à ce que l'envoi de ces animaux en Amérique soit fait dans les meilleures conditions possibles. Tous les frais qui pourraient être nécessités par les re- cherches seront remboursés par la Division d'Entomologie. Botanique. — M. Chappelier présente à l'Assemblée le résultat de ses cultures d'Ignames de Chine. Les tubercules qu'il a obtenus sont courts, de forme oblongue, d'un diamètre de 25 centimètres et pèsent environ 75 grammes. M. Chappelier prétend donc être arrivé au but qu'il pour- suit depuis quatre années : réduction de la longueur des tubercules, et par suite, transformation d'un légume dont la forme et la croissance démesurées se prêtaient mal à la cul- ture. Du reste, M. Chappellier se propose de rédiger un mé- moire à ce sujet, dans lequel il exposera plus en détail les résultats pratiques de ses études. Communications orales. — M. le Président donne ensuite la parole à M. Ch. Rivière, directeur du Jardin d'Essai du Hamma, qui fait de vive voix la communication suivante, accompagnée de nombreux échantillons de Bam- bous qui offrent à l'Assemblée le plus vif intérêt. Voici le résumé des principaux points traités par l'auteur : Ces remarquables spécimens, dit M. Rivière, proviennent de la contribution apportée au grand concours agricole de Paris par le Jardin d'Essai dans la section du comice agricole PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 209 d'Alger, qui à obtenu pour cette très belle exhibition une orande médaille d’or. 1° Un beau Bambou, à chaume jaune d'or, panaché de lignes vertes, Bambusa vulgaris villata; c'est une magni- fique variété qui atteint quelquefois 10 centimètres de dia- mètre. Malheureusement sa couleur et sa panachure ne se conservent pas longtemps; aussi les exemplaires à l'état frais, ici présents, constituent-ils une curiosité assez rare. On trouve ce Bambou en Chine, dans l'Asie orientale et sur beaucoup de points des archipels indien et malaisien. Connu autrefois sous le nom de Bambusa variegala, nous avons cru devoir en faire une simple variété du Bambusa vulgaris dont il à, sauf la couleur et les panachures, tous les autres caractères. Il faut, en outre, ne pas confondre cette plante avec des espèces à panachures à peu près similaires, cependant moins belles et à couleur moins accusée. Le type Bambusa vulgaris, anciennement B. distorta, Thouarsii, madagascariensis, est très répandu. La variété panachée en question est fixe et se multiplie facilement, mais elle est sans résistance en dehors des pays tempérés-chauds. 2 Voici un autre Bambou de 8 centimètres de diamètre, et qui atteint entre 6 et 8 mètres de hauteur : il se signale par sa solidité, mais surtout par la légèreté de son chaume, qui le rendent propre à des usages économiques : c'est le Bam- busa violascens (Phyllostachys). Cette espèce m'avait été confiée, il y a quelques 25 ans, par la Societé d'Accltimatalion, mais ce n’est que depuis une dizaine d'années seulement que l’on peut se prononcer sur sa valeur utilitaire. Sa résistance en terrain sec et à des froids relatifs est grande, mais dans ces cas, la végétation est insuffisante et ce n’est réellement qu'en terre fraiche et dans des régions tempérées que ce Bambou donne les résul- tats que je montre ici. C'est parmi les Bambous à rhizomes très traçants, une excellente espèce à développement rapide, ainsi que l'en- seigne un graphique des croissances diurnes et nocturnes, d'où résulte l'indication d’élongation de 18 centimètres par 24 heures au moment de la pousse vernale. Les jeunes bourgeons ou turions sortant de terre sont violacés, d'où son terme spécifique : quelquefois des méri- . thalles ont une ligne jaunâtre, unique et assez fugace. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901, — 14 210 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION Comme dimensions, ce Bambou pourrait être classé immé- diatement après le B. 2nilis, le (plus gros de nos Phyllosta- chys; peut-être le dépasse-t-il dans certains cas, fait que nous ignorohs jusqu à ce jour dans les cultures. 3° Puisque nous parlons des Bambous, il convient de dé- crire les belles inflorescences du Bañibusa macroculmis, que je présente à la Société en appelant son attention sur les caractères qui les différencient, suivant qu'elles pro- viennent d'un chaume ou d’une souche rhizomateuse. La floraison des grandes espèces est assez rare, même dans les pays d'origine. Dans l'Asie, on dit qu’un homme qui a vu fleurir les Bambous deux fois doit être bien vieux. Il résulte pour nous, de l'observation de ces inflorescences, des faits nouveaux que je vais décrire ici très brièvement, me réservant de les développer dans une note spéciale. La floraison du Bambusa macroculmis s'est présentée sous trois aspects différents : A. Sous forme de petites hampes, sans feuilles, se dévelop- pant nombreuses, directement sur la souche rhizomateuse, et portant des fleurs agglomérées en petites masses sphé- riques (clinopodes). B. Sous forme de longs chaumes, d'aspect particulier, crèles, tortueux, feuillus, et dont les ramifications se gar- nissent rapidement de petits épillets. C. Enfin la floraison se produit sur les ramifications de vieux et grands chaumes de 15 à 20 centimètres de hauteur, qui ont perdu toutes leurs feuilles et qui se dessèchent entièrement : c'est la fin de la vie du chaume, mais sa mort ne se traduit pas toujours par la floraison. Mais cette der- nière entraine-t-elle la disparition de la souche entière? Il est encore difficile de se prononcer sur les conséquences, pour la vie de la plante, de la floraison et de la fructifica- tion et il ne conviendrait pas de généraliser quelques obser- vations contradictoires suivant les espèces. La question est pleine d'intérêt et nous la suivrons avec la plus grande attention au Jardin d'Essai sur de nombreux cas qui se pro- duisent actuellement. On a signalé que de grandes espèces disparaissaient entiè- rement après la fructification, phénomène concordant sou- vent avec des périodes de sécheresse assez prononcée pour occasionner la famine dans la région. Souvent ces fructifi- cations de Bambous, dont la graine ressemble à celle du Blé, ont sauvé de la famine des districts indiens. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ DAME La floraison des Bambous aurait préoccupé depuis long- temps les agronomes chinois, et ces derniers, pour arrêter cette floraison de proche en proche remarquée dans certains cas, conseillent d'isoler de suite les pieds florife es, à l’aide d'une tranchée, de ceux qui ne le sont pas encore. On em- ploie en Europe, pour arrêter la marche du pourridié, une mesure analogue. Nous avons déjà au Jardin d'Essai, à Alger, des exemples de cette floraison de proche en proche, suivie de mortalité complète, mais avec des exceptions qui deman- deraient quelques explications que je réserve. _ Devant ces signes de floraison, il ne serait donc pas impos- sible de prévoir la disparition, un jour ou l’autre, de cette magnifique allée de Bambous du Jardin d'Essai, véritable tunnel de verdure. 4° Pour ne pas sortir des Graminées, la présentation de cette Canne à sucre intéresse tout particulièrement la So- cièté d'Acclimatation, car c'est elle qui m'a envoyé cette plante, à l'état de petite herbe, il y a une trentaine d'années. Les quelques renseignements qui accompagnaient cet envoi, apprenaient que cette espèce dite Petite Canne à sucre verte de l'Inde, offrait une grande résistance aux maladies qui, à cette époque, préoccupaient vivement les planteurs de Cannes. De nombreuses multiplications en furent faites au Jardin d’Essai, on y récolta des milliers de Cannes semblables à celles en question, qui ont environ 2 metres de hauteur et parfois plus, maismalerénos efforts, personne nes’y intéressa. Sous le climat marin de l'Algérie, sur le littoral notam- ment, on doit reconnaitre à cette plante une grande végéta- tion. Evidemment, rien à en retirer au point de vue sucrier, mais elle a une réelle valeur fourragere. Ses touffes, tres cespiteuses, produisent une abondante alimentation her- bacée en juillet, tres recherchée par le bétail. On n’a pas besoin d'attendre pour cet usage la formation des chaumes, bien au contraire, il convient de procéder à des coupes successives quand les feuilles ont atteint 1 m. 50 de hauteur et qu'elles sont encore à l'état tendre et succulent. Avec de l'irrigation on peut faire trois ou quatre coupes par an, représentant des milliers de kilogrammes de matière verte, au moins égale comme valeur alimentaire à celle du Mais, du Sorgho et des grandes Graminées exotiques, Coïx et . Téosinté, pour ne citer que les grandes formes intertropicales. Au point de vue économique, on se demande même pour- 212 BULLETIN DE LA SOCIÈTE D’ACCLIMATATION quoi on cultiverait dans les régions tempérées-chaudes des Graminées annuelles au lieu des vivaces, ces dernières s'im- plantant dans le sol pendant plusieurs années, n’exigeant par la suite que &es frais de culture restreints, tout en don- nant des produits plus abondants et moins chers que ceux de cultures annuelles. A cause de ses qualités fourragères, de sa facilité de mul- tiplication par bouturage des chaumes ou par éclat de souche, de sa grande végétation et de son énorme produc- tion de feuilles, la Petite canne à Sucre verte de l'Inde à donc un grand intérêt pour l'agriculture coloniale, aussi en ai-je remis un certain nombre de plants destinés à être multiplièés au Jardin colonial de Vincennes. 6° La fructification du Philodendron pertlusuin, où mieux du Monstera deliciosa se présente rarement aussi abondante que sur’ l'échantillon qui est sous les yeux des membres de la Société : en effet ce groupement comprend une vingtaine de fruits, sortes de cônes allongés, qui se sont développés aux environs de la section d'un bourgeon terminal très vigoureux : il y à peut-être là une indication. Cette curieuse Aroïdée, remarquable par ses larges feuilles decoupées et percées comme à l'emporte-pièce, mürit facilement ses fruits au Jardin d'Essai d'Alger : ils sont délicats, très parfumés, mais il convient de ne les manger qu'à parfaite maturité, car avant ils contiennent des Raphides, petits cristaux aigus, fort désagréables et non sans danger pour les muqueuses buccales. M. Riviere termine en disant que la présentation des échantillons de cette nature constitue une véritable leçon de choses et que c'est pour lui un système d'accompagner ses communications d'exemples à l'appui. M. le Président remercie vivement M. Rivière au nom de l'Assemblée, de son intéressant exposé et l'assure que la Socièté d'Acclimatatlion attache un grand prix aux disser- tations de ce genre qui allient la démonstration pratique à la théorie. Cheptels. — Distribution de graines. — Ia Société met en distribution un certain nombre de graines offertes par M. le D' Cros, de Perpignan, et par M. Morel, de Beyrouth (Syrie). Pour le Secrétaire des Séances, L'Archivisle-Bibliothécatre, Maurice LOYER. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 213 SÉANCE GÉNÉRALE DU 31 MAI 1901 PRÉSIDENCE DE M. RAVERET-WWATTEL, VICE-PRÉSIDENT Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Président fait part à l'assemblée du décès de M. l'abbé David et du D' Bretschneider et exprime les regrets unanimes que cette perte cause à la Société dont ils étaient les zélés correspondants. M. le Secrétaire Général procède ‘au dépouillement de la correspondance. Généralités. — M. Bizeray fait connaître le résultat de ses élevages de Mammifères et d’Oiseaux pendant la première partie de lPannée 1901, ainsi que de sa tentative d’acclimatation dans les environs de Saumur d’un couple de Macaguas ricaneurs, qui lui ont été rapportés d’Aus- tralie en janvier 1901, par le baron de Grandmaison. Ornithologie. — Lecture est donnée du compte- rendu de l'Exposition d'animaux de basse-cour de Tou- louse, en 1900, mémoire présenté à la Société d'Acclima- tation par son délégué auprès du jury de cette Exposition, M. de Saint-Quentin. Après avoir indiqué que la crise viticole subie par le Midi avait arrêté dans son élan l’initiative des éleveurs et des amateurs d’Oiseaux de basse-cour, M. de Saint-Quentin fait une courte description de l'Exposition de Toulouse, examine en détail les différentes races d'Oiseaux de basse- cour présentées ‘au jury, et insiste plus particulièrement sur les spécimens remarquables de lespèce d’Oie, dite Oie de Toulouse, qui y était largement représentée. IL termine en exprimant l'espoir que cette première Exposi- tion aura une grande influence sur le développement des produits de la basse-cour dans le sud-ouest de la France. Aquiculture. — M. Delaval fait hommage à la Société d’un album de photographies, représentant de fort beaux spècimens de Poissons Télescopes et à « Queue en voiles », de la Chine et du Japon qu’il a su acclimater à Saint-Max près Nancy et dont il a obtenu par la sélection, 214 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION en poursuivant cet intéressant élevage entrepris depuis dix ans, de fort remarquables reproductions. Le plaisir qui s'y attache, dit notre collégue dans une note accom- pagnant l'album, s’accroit chaque année par l'imprévu et la variété des résultats, et l’on ne peut mieux le comparer qu'à celui du semeur qui jouit de la floraison lui révélant quelques variétés nouvelles de ses fleurs favorites. Chez les Poissons Télescopes, vraies fleurs animées, l'influence des croisements judicieux entre les nombreuses variétés, les lois de l’atavisme, l'influence de l'alimentation, du climat, réservent à l'amateur les plus grandes surprises. Comme les fleurs, ils donnent à nos yeux le spectacle des formes les plus diverses, des modifications les plus extraordinaires du type pri- mitif, des couleurs les plus éclatantes comme les plus tendres ; mais, plus que les fleurs, ils nous apportent le mouvement qui varie sans cesse les combinaisons de ce merveilleux tableau que présente un aquarium. L’aquarium est un cadre dont les décors et le fond sont faits de plantes aquatiques aux formes curieuses, inconnues à nos yeux, aux couleurs vives ou chaudes dans cette gamme infinie des verts ; au milieu d'elles s’agitent de petits joyaux aux formes de chimères ou de dragons, faits du métal le plus brillant ou de l'émail le plus richement coloré, se drapant dans des flots de gaze diaphane qui emprunte aux rayons de soleil les colorations les plus tendres de l’écharpe d’Iris, pour atténuer ce que cet assemblage de couleurs trop vives pourrait avoir de heurté. Cette étonnante déformation de l'œil en deux énormes boules placées de chaque côté de la tête, assorties à la teinte générale ou tranchant sur elle comme des turquoises ou des lapis et terminées par une len- tille leur a valu le nom de Télescopes. Il serait impossible de décrire tous les accidents de coloration et de formes qui naissent du conflit de ces monstruosités assorties suivant le caprice de l'homme; ces feuilles d'album, grâce à l’impeccable exac- titude de la photographie en montreront la réalité et la variété. Botanique. M. le Dr Clos, directeur du Jardin botanique de la ville de Toulouse adresse une note sur les Gymnocladcs ou Chicots, qui sera publiée dans le Bulletin. À la fin dela séance, M. le Président proclame le résultat des élections pour le renouvellement du Bureau et des membres du Conseil démissionnaires ou arrivés au terme de leur mandat : NOMBRE DE VOTANTS : 121 Sont élus : Président MR MENMME Ed dm Perrier 421 PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCEG DE LA SOCIÉTÉ Vice-Présidents . . . . Secrétaire Général. . Intérieur. — Conseil. — Séances. — Étranger.— Secrétaires RESORT NN EUN, Archiviste-bibliothécaire ë Membres du Conseil . . Membres du Conseil . . DURE UR 0 0 120 J. de Guerne. . . 110 Ce de Pontbriant. 120 Raveret-Wattel . 121 HOME AMENER 0421 Sébnlotte met 21 À LE RE La NA EN Be Li LP Seurat . Al FLORENT 121 Ch. Debreuil . . 120 Cie d'Orfeuille. . 121 BIENNE EN 121 Ct° de Dalmas. . 120 LeMyre de Vilers 120 DALEDENCe MEME DAMARCh al? MerSeN Aa 121 Milhe-Poutingon 121 Dnsalec que gran dt DARrouessSar tee Me 1 Pour le Secrétaire des Séances : L'Archiviste-Bibliothécatre : MAURICE LOYER. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS Ile SECTION (ORNITHOLOGIE) SÉANCE DU 25 MAI 1901 La séance est ouverte à 5 heures, sous la présidence de M. Remy St-Loup. Lecture et approbation du procès-verbal de la dernière séance. Après différents échanges de vues relatives à la température aux diverses périodes de l'incubation artificielle, entre MM. Remy-St-Loup, D:' Sebillotte et M. Loyer. Il a été rendu compte des travaux du Comité du Standard avicole de France. M. Remy-St-Loup a ensuite prié ses collègues de recevoir sa démis- sion de Vice-Président de la section, ses occupations ne lui permettant plus de suivre les séances avec l’assiduité nécessaire. Les membres présents regrettent cette détermination, mais ne peuvent faire révenir M. Remy-St-Loup, sur sa démission. La séance est levée à 5 1/2. Le Secrétaire-adjoint. Pauz UGINET. Ve SECTION. — BOTANIQUE SÉANGE DU 23 Avriz 4901 Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le comte Gabrio Casati envoie de Milan un certain nombre de bulbilles d'Ignames de Farges pour être distribués aux membres de la Société. Il demande en même temps des bulbilles d’Igname de Decaisne qui lui seront envoyés en lui faisant observer que cette espèce est peu cultivée et ne présente pas de sérieux avantages. M. Nouvel envoie des pieds de Bocconia obrordata, plante ornemen- tale et M. le D' Cros de Perpignan, un certain nombre de graines pro- venant de ses cultures qui seront annoncées dans le Bulletin, ainsi qu'un lot de graines provenant de Beyrouth et offertes par M. Morel. M. P. Chappellier offre à la Société, des pieds de Mirabilis Jalapa et longiflora, plantes remarquables par leur vigueur. Le D' Weber présente à la Société des échantillons de la fibre végé- tale mexicaine connue en Europe sous le nom de crin de Tampico. Cette fibre textile, courte et forte, dont il se fait au Mexique un com- merce considérable, est désignée par les indigènes ainsi que par les documents statistiques des douanes sous le nom d’Zxtle. Son principal point d'exportation est le port de Tampico, dans le golfe du Mexique, où elle arrive des régions de l'intérieur (Tamaulipas, San Luis PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS 217 de Potosi, Nuevo Leon, etc.). En Europe elle est employée à de nom- breux usages, en remplacement du crin de cheval, principalement à la matelasserie et à la confection de la brosserie commune. Cette fibre si utile, et exploitée sur une si large échelle, est fournie par plusieurs espèces de petite taille du genre Agave, qui sont très répandues dans les vastes espaces plus ou moins désertiques du Nord-Est du Mexique où elles sont désignées sous le nom commun de Lechuguillas. Il faut se garder de confondre ces espèces, relativement naines, avec les Agaves de grande taille, qui habitent les Terres chaudes du Mexique, principalement le Yucatan, et qui fournissent la célèbre fibre textile connue sous le nom de Henequen, chanvre du Yucatan ou chauvre de Sisal. Au point de vue botanique, les Agaves qui produisent le Tampico et celles qui fournissent le Henequen forment deux groupes absolument distincts. Les premières c’est-à-dire les ZLechuguillat, ont une taille moyenne atteignant à peine 0"50, et appartiennent au sous-genre Littaea, caractérisé par son inflorescence en épi, tandis que les secondes acquièrent généralement une taille gigantesque, et appar- tiennent au sous-genre Euw-Agave, caractérisé par une hampe florale ramifiée en panicule. Les Agaves qui produisent le Tampico forment dans le sous-genre Littaca une section spéciale désignée sous le nom d’Agaves marginées, en raison de la disposition spéciale de leurs dents ou épines latérales, qui sont insérées sur un liseré corné, avec lequel elles peuvent se déta- cher tout d'une pièce, tandis que dans toutes les autres Agaves les épines latérales sont implantées dans la substance charnue de la feuille elle-même. Ce caractère particulier, fourni par la marge cornée des feuilles, est très facile à constater et empêche toute confusion des Lechuguillas avec les autres Agaves textiles. Les principales espèces d'Agaves marginées, signalées comme pro” duisant la fibre Tampico, sont les suivantes : Agave heteracantha, Po- selgeri, univittata, lophantha, multilineata, Tunkii, cœrulescens, etc. Mais leurs différences spécifiques sont peu appréciables. M. le D' Weber montre des échantillons de feuilles fraiches de ces diverses espèces, et expose leurs caractères diflérentiels. Toutes ces espèces habitent principalement les Hauts-Plateaux du nord-est du Mexique, dans les régions tempérées ou même froides, et seraient, par conséquent, susceptibles d'être acclimatées en Algérie; tandis que les Agaves qui fournissent le Æenequen (Ag. rigida, Ag. sisalina, etc.), habitent les zônes torrides du littoral mexicain et ne peuvent être cultivées en Floride au nord du 27° parallèle. M. le D° Weber appelle en outre l'attention de la Société sur les pro- priétés saponifères des Lechuguillas, dont le rhizôme constitue le savon commun au Mexique, où il se vend sur les marchés sous le nom d'Amole, et renferme une forte proportion de saponine.! M. Magne fait une communication sur la culture des Orchidées ter- restres et particulièrement des Orchidées indigènes. Après avoir énu- méré les espèces qui se rencontrent le plus fréquemment en Krance à 218 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION l'état spontané, M. Magne indique les meilleures méthodes de propa- gation et de culture de ces belles plantes que l’on considère habituel- lement comme ne pouvant être cultivées dans les jardins. Il indique deux manières d'opérer : 1° la transplantation de plantes arrachées pen- dant le repos de la végétation, aux endroits où elles croissent naturel- lement, en ayant soin de les placer dans des conditions d'habitat analogues à celles dans lesquelles elles se trouvaient à l'état spontané: 2° le semis qui doit être fait avec des précautions particulières, la germination des graines étant lente et difficile. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. VIe SECTION (GOLONISATION) SÉANCE DU 4% FÉVRIER 1901 PRÉSIDENCE DE M. MILHE-POUTINGON, PRÉSIDENT M. Milhe-Poutingon prie M. Cornu de vouloir bien prendre la place du président, en l’absence de M. Le Myre de Villers, président de la Société, qui se trouve retenu à la Chambre, et l’on procède au renou- vellement du bureau Sont élus : Président : M. Milhe-Poutingon, Vice-Président : M. Francois. Secrétaires : MM. Bocher et Fron. En outre M. Milhe-Poutingon est nommé délégué de la section à la Commission des Récompenses. M. le Secrétaire procède au dépouillement de la correspondance qui comprend particulièrement une lettre de M. le Général Gallieni remer- ciant la Société des graines qu'elle a bien voulu mettre à sa disposition. Il est offert à la Société par l'éditeur M. Baillére, le premier volume de « Les cultures coloniales » consacré aux plantes alimentaires par M. Henri Jumelle. M. le Secrétaire général remercie la Société du Concours qui a été prèté par les membres de la Section, et particulièrement par MM. Cor- san et Rivière, lors des réunions de la Commission internationale de la Ramie. La parole est ensuite donnée à M. Noirot. administrateur au Fouta- Djalon qui fait part à la Société des magnifiques résultats obtenus grâce à son zèle et à son administration bienveillante envers la population laborieuse de la région. Après avoir montré les difficultés des transports de Conakry à Timbo, capitale du Fouta-Djalon, M. Noirot énumère les nombreux légumes et fruits qu'il est heureux de pouvoir maintenant offrir à sa table quand L'ÉLEVAGE DES ( CHANCHITOS » 219 il recoit des Européens. Les Indigènes se sont mis au travail du sol avec la charrue, et des concours sont organisés entre eux pour con- duire la charrue et pour faucher les récoltes. Une école d’orphelins permet de former les enfants à la culture et est en très bonne voie de développement; ces derniers au nombre d’une quarantaine environ, garçons et filles, sont chargés des travaux du jardin. ._ À Timbo de même que dans les villages voisins, des plantations diverses sont entreprises, particulièrement des plantations de lianes à caoutchouc qui paraissent donner de très bons résultats. En terminant son intéressante communication, M. Noirot présente une série de projections du plus haut intérêt. M. le Président remercie vivement M. Noïirot de la communication qu’il vient de faire. Il fait ressortir les résultats obtenus tant au point de vue du développement de la culture dans la région qu'au point de vue économique. Il ajoute d’ailleurs que M. Noirot, avant d'aller en FoutaDijalon, avait déià dirigé au Sénégal des travaux pacifiques, particulièrement au point de vue de la construction de routes et de ponts édifiés seule- ment en utilisant la main indigène. Après diverses observations concernant les questions d'élevage et de nourriture du bétail au Fouta-Djalon la séance est levée. l’un des Secrétaires. G. FRON. EXTRAITS ET ANALYSES. NoTE SUR L'ÉLEVAGE DES « CHANGHITOS » (1) par S. E. le général N. de DEPP (Traduction d'A. Delaval) A cette question, posée à la Société « Triton » : « Quelles sont les « expériences faites par des amateurs sur le Chanchito (2) (Heros face- « tus), comme Poisson d’aquarium » je prends la liberté de répondre par ces quelques notes : Au mois de mai, j'ai reçu par les soins obligeants de notre vénéré président, M. Paul Nitsche et grace à l’amical et aimable concours de M. Schœæîfer, consul à Kiew, dix petits Chanchitos, dont la longueur ne dépassait pas quatre à cinq centimètres; sans espoir de réussir l’année même l'expérience de l'élevage que je tentais, j'installai ces Poissons avec dix autres provenant de croisements entre des Poissons rouges et des Carpes sans écailles, longs de sept à huit centimètres, dans un bassin en bois de forme circulaire, placé dans mon jardin. 11 mesurait (1) Extrait du Journal Natur und Has. Berlin. (2) « Chanchito » signifie en espagnol, « petit cochon ». 220 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION deux mètres de diamètre et la hauteur de l'eau atteignait soixante-cinq centimètres. Comme nourriture, je leur distribuai des Daphnies, d'après la méthode que j'ai précédemment décrite. Tous ces Poissons se portèrent si bien et se développèrent si rapi- dement, que je ne me souciai plus d'eux. Quels ne furent pas mon étonnement et ma joie, quand, rentrant chez moi au mois d'août, je découvris une bande de petits Chanchitos, na- geant sous la surveillance d'un couple de parents ! Les alevins ressemblaient à de petits tétards, courts de forme et mu- nis d'une grosse tête. Aucun Poisson ne pouvait s'approcher de la petite troupe; celui qui J'osait recevait des parents de rudes morsures, qui le mettaient rapi- dement en fuite. Si j'approchai mon visage trop près de la surface de l’eau, les parents se précipitaient pour engager un combat avec lui, à tel point qu'il me fallait esquiver les coups. C’est là une chose étonnante de la part des Chanchilos, si timides, qu'ils se cachent à l'approche de l'homme, quand ils n’ont pas de petits. C'était chose admirable à voir que la sollicitude dont les vieux pa- rents entouraient leurs petits et la manière dont ils les défendaient des attaques de leurs ennemis. ! En dehors du temps qu'ils consacrent à élever leur famille, les Chan- chitos vivent d'ordinaire en societé et se tiennent le plus souvent en- semble. Chaque alevin imite le mouvement des autres et dans le même sens. Si on les dérange, ils se dérobent tous à la fois et avec la rapi- dité de l'éclair. Les Chanchitos sont des animaux très vifs; quand on les change de bassin, il faut les recouvrir d’un filet jusqu'à ce qu'ils se soient accou- tumés à leur nouvelle demeure, sans quoi, ils sauteraient dehors. L'expérience m'avait démontré que beaucoup de Poissons, sans par- ler des Macropodes, qui prennent soin de leurs petits, commencent eux-mêmes à les poursuivre et à les dévorer, dès qu'ils sont prêts à recommencer à pondre. Pour ne pas m'exposer à perdre ce premier élevage, je repris avec un filet mes alevins. chose facile, étant donnée leur habitude de se tenir en groupe compact, et les plaçai dans un réservoir de même pro- portion. Bien que moins gloutons que les Cyprins dorés et Poissons analogues, les jeunes Chanchitos, faisaient la chasse aux petits Crustacés et grandirent de trois centimètres pour l’automne, tandis qu'à cette époque, les parents avaient atteint une taille de dix à douze centi- mètres. La première ponte dépassa le chiffre de six ou sept cents œüaîs. J'ai retiré du premier réservoir mes gracieux Cyprins marbrés et sans écailles, pour permettre aux Chanchitos de recommencer à pondre, sans être dérangés : ce qui arrivera sûrement au mois de septembre. La ponte ne se fait pas en société, comme chez les Carpes, mais par couple; ils préparent un petit creux dans le sable ou dans la vase, au fond du réservoir, et le nettoient soigneusement avant d'Y déposer L'ÉLEVAGE DES ( CHANCHITOS » oil leurs œufs. N'ayant point assisté à l'opération du frai, je n'ai pu la dé- crire ni déterminer le temps nécessaire à l’éclosion. Dès que les œufs ont été déposés, ils restent sous la surveillance ininterrompue d'un des parents et souvent des deux, stationnant au- dessus du nid découvert. Sans bouger de sa place, le Poisson agite ses nageoires pectorales, pour entretenir l’eau dans un perpétuel mouvement. Une fois sortis de l’œuf, les petits restent dans le nid jusqu’à la ré- Chanchito (Héros facetus), sorbtion de la membrane vitelline et la faim seule les pousse dehors d’une façon qui est alors définitive. Ils frayent quand l’eau atteint une température d'environ quinze de- grés Réaumur. Plus carnivores qu'herbivores, ils mangeaient cepen- dant du biscuit trempé, tant qu'ils ne furent pas séparés des Cyprins. Mais quand, à l’automme, la nourriture animale eut diminué, ils re- eurent des vers de terre découpés et de temps à autre, du bœuf cru finement haché. - La mortalité chez ces Poissons, est moins grande que chez les « Té- lescopes » et les « Queue en voile ». _ Je n'ai constaté aucune déviation du type normal, ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau. À cause de la modicité de leur prix, les Chanchitos conviennent parfaitement pour peupler l'aquarium d'appartement. 4 28 avril 1901. 222 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION CoNcOURS POUR L'ÉTUDE DES INSECTES. ENNEMIS DES LIVRES. Au cours du Congrès international des Bibliothécaires, tenu à Paris les 20, 21, 22 et 23 août 1900, Mile Marie Pellechet (1), bibliothécaire honoraire à la Bibliothéque nationale et membre du Congrès, a institué deux prix, l’un de 1.000 francs, l’autre de 500 francs, destinés à récom- penser les deux meilleurs mémoires relatifs aux Insectes qui détruisent les livres. Ces prix seront décernés sous le nom de Prix Marie Pelle- chet. Au cours du même Congrès, un second donateur, qui désire garder l'incognito, a fondé un prix unique de 1.000 francs à décerner à l'étude la plus sérieuse présentée sur le même sujet, mais dans laquelle l’auteur se sera plus spécialement occupé des Insectes qui s’attaquent aux reliures des volumes. Ce prix est denommé Prix du Congrès des Bibliothécaires. La Commission d'organisation du Congrès des bibliothécaires, auto- risée par les fondateurs, a arrêté, ainsi qu'il suit, les conditions du concours. Art. 1%. Prix MARIE PELLEGHET. — Un premier prix de 4.000 francs et un second prix de 500 francs seront décernés en 1902 aux deux meilleurs mémoires présentés sur ce sujet : Étudier d'une facon scientifique les Insectes ou vers qui s'attaquent aux livres; en déterminer les genres et les espèces; en décrire les modes de propagation, les mœurs, les ravages; mentionner les parasites qui vivent à leurs dépens; définir les matières dont ils se nourrissent, celles qui les attirent, celles qui les font fuir ou les font périr; indiquer les meilleurs moyens à em- ployer pour les détruire et les chasser quand ils ont envahi une biblio- thèque, pour prévenir de leur invasion les bibliothèques encore indemnes. Art. II. Prix DU CONGRES DES BIBLIOTHÉGAIRES. — Un prix unique de 4.000 francs sera décerné, à la même époque et dans les mêmes condi- tions, à un autre mémoire sur le même sujet, mais avec cette différence, toutefois, que le mémoire qui pourra être récompensé par ce prix sera consacré à l'étude des insectes ou vers qui s’attaquent plus particuliè- rement à la reliure des livres. Art. IT. — Le jury, chargé d'examiner les mémoires et de décerner les prix, est formé du bureau de la Commission du Congrès des biblio- thécaires, auquel sont adjoints les membres de la Commission et des zoologistes. — Les membres du jury sont : MM. D. Blanchet, conser- vateur adjoint à la Bibliothèque nationale, secrétaire du Congrès; E.-T. Bouvier, professeur d’entomologie au Muséum d'histoire natu- relles J. Couraye du Parc, bibliothécaire à la Bibliothèque nationale, trésorier du Congrès; Léopold Delisle, membre de l'Institut, adminis- trateur général de la Bibliothèque nationale, président du Congrès; (}) Mlle Marie Pellechet, fondatrice de ces prix est décédée le 11 décembre 1900. L'ÉTUDE DES INSECTES ENNEMIS DES LIVRES 223 J. Deniker, bibliothécaire du Muséum d'histoire naturelle, vice-prési dent du Congrès; P. Dorveaux, bibliothécaire de l'École supérieure de pharmacie de Paris; A. Dureau, bibliothécaire de l’Académie de méde- cine; Alfred Giard, membre de l’Institut, ancien président de la Société entomologique de Krance; Jules Künckel d'Herculais, assistant au Muséum d'histoire naturelle (chaire d’entomologie); Paul Marais, con- servateur adjoint à la Bibliothèque Mazarine, secrétaire du Congrès; Paul Marchal, professeur de zoologie à l'Institut national agronomique, Membre du Conseil de la Société d’Acclimatation; Henry Martin, con- servateur adjoint à la Bibliothèque de l’Arsenal, secrétaire général du Congrès; Charles Mortet, conservateur à la bibliothèque Sainte-Gene- viève, secrétaire du Congrés; Edmond Perrier, membre de l’Institut, directeur du Muséum d'histoire naturelle, Président de la Société d’Accli- matation; Émile Picot, membre de l'Institut, vice-président du Congrès. — Le jury conserve, en outre, le droit de faire appel, s'il y a lieu, à tels spécialistes dont le concours lui semblerait utile. Art. IV. — Les mémoires pourront être rédigés, non seulement en français ou en latin, mais aussi en allemand, en anglais, en espagnol et en italien. Art. V. — Les auteurs ne doivent pas se faire connaître avant la décision du jury; mais chaque manuscrit devra porter une épigraphe ou devise qui sera répétée sur un pli cacheté joint à l'ouvrage et con- tenant le nom de l'auteur. Art. VI. — Les mémoires devront être adressés, avant le 31 mai 1902, au secrétaire général du Congrès des bibliothécaires. Art. VII. — Si les mémoires présentés à la date du 31 mai 1902 ne semblent pas au jury d'un mérite suffisant pour obtenir les récom- penses offertes, le concours sera prorogé jusqu'au 31 mai 1903. Si à cette date encore aucun mémoire digne d’être récompensé n'avait été présenté, le concours sera prorogé une seconde fois jusqu'au 31 mai 1904; mais les prix qui n'auraiant pu être décernés après ces deux prorogations seraient définitivement retirés. Art. VIII. — Les auteurs devront inscrire, en tète de leurs mémoires. les mots Prix Marie Pellechet, ou Prix du Congrès des Bibliothécaires, suivant qu'ils auront en vue l’un ou l’autre de ces concours. Art. IX. — Il est bien entendu que le désir des donateurs n’est pas de faire attribuer une récompense aux personnes qui enverraient sim- plement des formules et recettes ou qui signaleraient des moyens empiriques généraux pour détruire les insectes ou les éloigner des livres. Art. X. — Les manuscrits envoyés ne seront pas rendus (1). (1) Les mémoires, ainsi que les demandes de renseignements, doivent être adressés à M. Henry Martin, secrétaire général du Congrès des Bibliothécaires, à la bibliothèque de l’Arsenal, rue de Sully, 1, à Paris. Librairie et Imprimerie Horticoles, 84 bis, rue de Grenelle, Paris. TUE A IPNES DE FRANCE : à (Revue des Sciences naturelles appliquées) SARAA TS 48° ANNÉE PAPA AOUME TOO SOMMAIRE 3 A \UG. | CHEVALIER. — L'avenir de la Culture du Cotonnier an Soudan français Extraits et analyses Accimatation des Perroquets et des Perruches en Angleterre:...:.,.. TS MAR LE VE TE 5 ED. HECKEL. — Sur quelques cultures tropicales tentées en pleine terre au Jardin ColonaederNarSerIles MM RE Re Me PNR NT es AO OA PA A TT Ris ‘élevage du Mouton dans la Colonie du Cap... PI A Re TA Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 L'AU. SIÈGE, SOCIAL, a . DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE. 41, Rue de Lille — FARIS Le Bulletin paraît tous les mois. x? : L 3 (AIS 2 ue * La, Me NE 2 É # SÈ ne A Ô HAVE SA = * DURS > É LAET Fondee Le 10 Fevrier: 1854 Reconnue d'utilité publique par déc” et en date duxe6 one 1855 4Â, RUE DE Lite nee BUREAU ET CONSEIL D’ADMINISTRATION POUR 1901 , Président. M. Edmond Perrier, membre d>l'Académie des Sciences et de l'Académie ‘de Méi cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. : MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Museum d'Histoire Naturelle, Po de Baron Jules de GuERxe, 6, rue de Tournon, Paris. Vice-Présidents- Comte de PoNTBRIAND, Sénateur, boulevard ‘Saint-Germain, 238, Paris. C. RAvERET-WATTEL, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier. 20, rue des Acacias, Paris. Secrélaire-général : M. Maurice Loyer, Avocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. D : MM. le D’ SEBILLOTTE, A1, rue Croix-des-Petits-Champs, ‘Paris (Intérieur). H.-Hua, Directeur- -adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint Germain, Paris (Conseil). Secréluires. / L.: SEeuraT, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial ï ; ‘Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). G. Fron, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin on 19; rue de Sèvres, Paris (Etr anger) Tresorier. M. Gh. DEesreuiz, Avocat à la Cour d'Appel, 25, rue de Chateaudun, Paris. Archiviste-Bibliothécuire. M. le Comte d'OrreuiLce, à Versailles. Membres du Conseil MM. L. BinGer, Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, Directeur des atfaires d'Afrique ai Ministère des Colonies, 15,rue de Prony, Paris. ; Edouard BLANC; Exploraleur, 52, rue de Varenne, Paris. TEE D: Raphael BLancHArD, Membre de l'Académie de Médecine, professeur : à la Faculté À - Médecine, 226 boulevard Saint- Germain, Paris. . Comte Raymond de Darmas, 26, rue de Berri, Paris. Er Myre pe Virers, Député de la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. - # P. Marceaz, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de a Station entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. À LE. Meesey, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pèche et de. la Pisci ; culture au Ministère de l'Agriculture, 87, boulevard Saiut- Michel, Paris. À. Mire:-PouriNGon, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, 4%, rue de la Chaussées d’'Antin, Paris. | E. OUSTALET, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue ‘Notre-Dame- des- Champs, Paris. A. Ranuwr, Membre de l'Académie de Médecine, Professeur à l'Ecole vétérinai d’Alfort (Seine). Poe TROUESSART, Président de la Société Zoologique de France, 15, rue de la Pompe £ : aris. “LE MYRE DE Voies 3,1 rue Nr Paris. 5 Secrétaires Céncrne honoraires : MM. Amédée Berraoure, 4, avenue des Ternes, Paris. be Baron Jules de GUERNE, 6, rue de Tournon, Paris. f Membres honoraires du Conseil : MM. P. de LaBouLaye, 129, avenue des Champs-Elysées, Paris | - D: P. Méenn, 6, avenue Aubert, Vincennes. Dr Ed. MéxE, 20, rue Oudinot, Paris. D: J. Micnon, 33. rue de Babylone, Paris. D: Weser, 180, boulevard Saint- Germain, Paris. L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER ‘: AU SOUDAN FRANÇAIS par Aug. CHEVALIER L’achèvement prochain du chemin de fer du Sénégal au Niger moyen et la construction de celui de la Guinée au Sou- dan méridional vont ouvrir à la colonisation un vaste em- pire depuis longtemps pacifié, exploré dans tous les sens, mais dont l'avenir apparaît encore comme très incertain à beaucoup d’esprits des moins pessimistes en affaires colo- niales. L'on possède, en effet, bien peu de documents précis sur les ressources de cette contrée et bien des légendes se sont. accréditées sur sa valeur présente. Au Gire de quelques voyageurs enthousiastes, le Soudan serait un pays d’une fertilité merveilleuse, produisanten abondance lesrichesses les plus variées, richesses la plupart inexploitées, et n’at- tendant que la venue des colons pour alimenter un com- merce illimitée. Pour les autres, au contraire, ce pays est un vaste désert brülé par le soleil, dépourvu des ressources les plus élémentaires, habité par des nègres paresseux, plongés dans la barbarie la plus profonde; bref la colonisation n’au- rait rien à y faire. C’est cette opinion que résumait lord Sa- lisbury, quand il nous faisait des concessions si larges du côté du Sahara: «Puisque le vieux Coq gaulois aime gratter le sable, laissons-lui le Soudan ». Ce sont ces deux jugements extrêmes que nous entendons constamment formuler par la plupart des officiers qui reviennent de cette contrée, suivant qu’ils l’ont vue sous une bonne ou une mauvaise one SOINS nous croyons la vérité toute différente. D'abord, l’indigène vaut certainement mieux que la mau- vaise réputation qu'on lui a faite. Son indolence vient sur- tout du manque de besoins; en travaillant quelques mois chaque année, il récolte suffisamment pour vivre et entre- tenir sa famille ainsi, souvent, qu’une quantité innombrable de désœuvrés indigènes qui vivent aux dépens du paysan noir. Il n’est pas douteux que les besoins de ces peuples primitifs se développeront a notre contacl, déjà dans les Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 15 Me AL Ge EL ; 226 BULLETIN DE LA SOCIËTÉ D’ACCLIMATATION centres importants où nous sommes installés depuis quel- ques années seulement, une activité très grande est née comme par enchantement. : D'un autre côte, ces pays longtemps décimés par la traite des esclaves et les guerres intestines sont en train de se repeupler. Certaines tribus fournissent d’habiles artisans, comme les Wolofs, d'excellents cultivateurs comme les Bambaras, des pasteurs de premier ordre comme les Foulbés. «Au Bornou, dit Nachtigal, Pagriculture occupe l'habitant une grande partie de l’année ». Le Soudan n’a fourni jusqu'à présent à l’exportation qu'un peu d'or et quelques produits de cueillette (caout- chouc, gomme, cire d’Abeilles), ou de chasse (ivoire, plumes de parure). Mais cette exploitation ne saurait être indéfinie : il faut déjà aller à plus de 2.000 kilomètres de la côte du Sé- négal pour trouver des Lianes à caoutchouc inexploitées et l'on ne rencontre plus quelques rares troupeaux d'Éléphants que sur les confins de la forêt de la Côte d'Ivoire ou dans le Baoule. C'est donc le développement de l’agriculture qui créera des sources durables de richesse et qui procurera à Pindi- gene, plus encore en Afrique que partout ailleurs, les moyens d'améliorer sa situation matérielle et morale. «Cest là, s on l'expression de M. Henri Lecomte (1), l'unique for- mu' de colonisation; elle en est aussi la conception la plus haute, car elle fournit l’occasion d'élever l’homme par le travail. Sans être constitué uniquement par ces terres légères, auxquelles lord Salisbury faisait allusion, le Soudan fran- çais comprend cependant de vastes espaces qui demeure- ront toujours incultes. On peut même dire, sans exagéra- tion, que les 2/3 de la surface du sol, sont constitués par des terres dont il n’y a rien à faire : au nord par des dunes arides recevant chaque année une quantité d’eau minime, au sud par d'immenses plateaux de poudingues ferrugi- neux d’une aridité complète. (1) H. Leconte. Le Coton, p. 482. : L'AVENIR DE LA GULTURE DU COTONNIER DO - C'est doncuniquement dans les vallées et dans les plaines alluviales que devront se localiser les entreprises agricoles, et il ne faut pas encore se faire d'illusions sur le nombre et le rendement des cultures actuellement possibles. Ni le Cacaoyer, ni le Caféier, ni la Vanille, ni les épices ne pour- ront être cultivés, le climat étant trop sec et la végétation arboreseente trop claire. Le bétail (Moutons, Bœufs, Chèvres) et les plantes vi- vrières indigènes, (Manioc, Sorgho, Bananier, Ignames) sont presque les seules ressources qui existent déjà dans le pays et dont la production pourrait se développer rapi- dement, mais il est probable que d’ici longtemps encore, ils ne pourront devenir l’objet d’une exportation importante en dehors de l'Afrique. L’Arachide, le Ricin,les Sésames réussissent parfaitement, mais ce sont des denrées de faible valeur, qui supporleront difficilement les frais d’exporta- tion. Quant à la culture des plantes à caoutchouc et à gutta, nous n’en sommes encore qu’à la période des tàätonnements, et il serait extrêmement imprudent de lier l’avenir d’une colonie à une ressource aussi aléatoire. De même que le Kolatier est la seule plante dont le ren- dement paraisse actuellement devoir être rémunérateur pour l’européen qui saura la cultiver dans la zône gui- néenne (haute Côte d'Ivoire et régions boisées de la Guinée française), de même le Cotonnier est la seule culture :di- gène actuelle, dont le développement soit susceptible à.sli- menter un courant commercial important du Soudan pro- prement dit (du 10° au 16° degré lat. N.) vers l'Europe. Il Le Cotonnier est un arbrisseau de la famille des Malva- cées qui produit la matière textile dont l'emploi est le plus général dans le monde à l’époque actuelle. Dans les pays subtempérés, il constitue souvent une herbe annuelle et délicate, mais dans les régions tropicales il peut devenir un petitarbuste vivaceettres vigoureux.Seslargesfleurs, tantôt entièrement jaunes, tantôt tachéees de pourpre au fond de la corolle, ressemblent beaucoup à celles de certains Hibiscus. Aux fleurs succèdent bientôt les fruits, constitués par 4 ou 5 valves qui, à maturité, s'ouvrent longitudina- lement et dont l’ensemble constitue la capsule du Cotonnier. 228 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION Chaque valve donne insertion à 5 ou 10 graines se déta- chant à maturité et entourées de nombreux poils soveux, qui ne sont autre chose que le précieux textile, tantôt forte- ment adhérent à la graine, tantôt s’en détachant avec la plus grande facilité. Lorsque les capsules sont mûres, les valves s’écartent et étalent à l’air leurs flocons neigeux dans lesquels sont ren- fermés les grains. La cueillette du coton consiste à détacher à la main ces flocons, avant que les pluies les aient endommagés. On sé- pare ensuite par des machines spéciales, dites égreneuses, les soies des grains. Ces derniers serviront à en extraire une huile comestible dont la consommation se répand de plus en plus. Les Cotonniers semblent originaires les uns de l’Amé- rique tropicale, les autres des Indes Occidentales. Ils ont été apportés en Afrique à une époque très reculée. Déjà, du temps de Léon l’Africain, leur culture au Soudan était très étendue, et l’habileté des tisserands de ces contrées indique que nous nous trouvons en présence d’une industrie fort ancienne. Lors de notre passage à Ségou, les tisserands de cette petite ville de 6.000 habitants, ne fabriquaient pas moins de 100 modèles divers de bandes tissées en entre- croisant des fils blancs, bleus (teints à l’indigo d’/2digo- fera ou de Lonchocarpus cyanescens), ou jaunes (teinture d'Anggeinus leiocarpus), ou rouge (teints au Cola). La re- nommée dont jouissent ces tissus du Niger jusque dans l'Afrique centrale est une autre preuve de lancienneté de la culture du Cotonnier dans cette contrée. Cependant les procédés de culture n’ont fait aucun progrès depuis le pas- sage des premiers voyageurs tels que Mungo Park et René Caillé. Il convient de dire que jusqu’à ces dernières années, de très faibles efforts ont été faits par les européens pour l'améliorer, bien que l'occupation du Sénégal remonte à plus de trois siècles. III Les premières tentatives de culture rationelle du Goton- nier au Sénégal et les premiers renseignements scienti- fiques sur cette plante sont fort anciens, et si jusqu’à ce jour aucun résultat économique appréciable n’a été obtenu, 4", dcr MS die 32% ÿ L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER 229 cela tient à la légèreté et à l’incompétence avec laquelle ont été dirigés ces essais bien plutôt qu'à des causes sur- humaines comme le prétendait le gouverneur Brou. Dans la relation du voyage qu'il fit au Sénégal, eu 1749, sous les auspices de la Compagnie des Indes, l’illustre botaniste Adanson rapporte qu'à Podor « l’indigo et le coton étalaient la plus belle verdure et à Sor, près Saint- Louis, il y avait des longans (champs) de coton, d’indigo, de tabac ». (1). En 1763, Adanson proposa au duc de Choiseul, alors ministre de la marine d’aller étudier de nouveau ces plantes au Sénégal et de tenter leur acclimatation à la Guyane, mais diverses circonstances s’opposerent à l’exé- cution de ce voyage (2). La France, rentrée en possession du Sénégal en 1817, se préoceupa de faire de ce pays une colonie agricole. Dès 1822, le baron Roger institue des primes pour en- courager la culture et l'exportation du coton. En même temps deux naturalistes expérimentés sont envoyés sur les lieux pour étudier la question. L’un d'eux, Richard, jar- dinier de l'Empereur, déjà initié aux cultures des pays ehauds par un séjour en Italie, entreprend les premières plantations sur un terrain des bords du Bas-Sénégal, devenu plus tard Richardtoll (champ de Richard) et qui constitue probablement le plus ancien jardin d’essai des colonies françaises. À la même époque l’autre, Perrottet, parcourt la colonie dans tous les sens pour recueillir de précieux documents sur les plantes utiles. En 1832, il décrit dans sa « Flore de la Sénégambie », le Cotonnier du Séné- gal, et fait remarquer que « son coton est d’une grande finesse et d’une blancheur éclatante » (3). De 1820 à 1829, l'exportation annuelle fut d’environ 10 tonnes. La culture encouragée par le gouverneur Jubelin allait probablement s'étendre quand son successeur Brou, supprima brusquement en 1829 toutes les subventions. Aussi, dès 1830, l’abandon de la culture devint général. En 1863, au moment de la guerre de Sécession, après que l'Algérie eût gaspillé follement plus de 3 millions en encouragements pour cette culture, le général Faidherbe, (4) Apanson. Relation abrégée d'un voyage au Sénégal, 1757. (2) H. DE Frorpevaux. Les mémoires inédits d'Adanson sur l'ile de Gorée. (Bull. géogr. hist. et descript., 189, n° 1). (3) Guizzemin et PErrorrer. Tentamen Floræ Senegambicæ. 230 RULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCITMATATION alors gouverneur du Sénégal, encouragea de nouveau la production du coton et chargea le jardinier Lécard, d’en- treprendre à Richardtoll des expériences pour déterminer les espèces convenant le mieux au pays. Le Cotonnier indigène, cultivé en terrains convenablement irrigués, lui donna les meilleurs résultats (jusqu’à 1000 kilogs de coton non égréné à l’hectare). L’exportation annuelle atteignit 50 tonnes pendant plusieurs annees, mais quand les con- séquences de la guerre ne se firent plus sentir, le coton du Sénégal ne put soutenir la lutte avec celui de l'Amérique du Nord, l’abandon de la culture fut général. En 1897, le général de Trentinian, lieutenant-scouverneur du Soudan français, fitreprendre au Soudan, sur une vaste échelle, les études se rapportant à cette question. M. Blot, chargé de la direction du Jardin d'essai a Kati,et Mademba, fama de Sansanding, obtinrent des résultats encourageants en ensemençant divers Cotonniers exotiques, envoyés par PUÜnion Coloniale ou acquis directement par le Gouver- nement local. C’est sur ces entrefaites que fut organisée la mission économique du Soudan par le général de Trentinian, mis- sion dans laquelle nous n’étions pas moins de quatre spé- cialistes, chargés de recherches se rapportant à la culture et à l'exploitation du coton au Soudan.M.Jacquey ingénieur- agronome, installé sur pläce au jardin de Kati ensemencça diverses espèces d'Egypte et des Etats-Unis et surveilla leur culture. M. E. Fossat, courtier en cotons très expéri- menté, délégue par la chambre de commerce du Hävre, fut chargé de la partie commerciale et parvint à recueillir dans la vallée du Niger Moyen, 70 tonnes de coton trié, non égréné, dont une faible partie seulement püt être expédiée en France. . La Société Cotonnière de Saint-Etienne-du-Vauvray a filé 2.500 kilogs du coton recueilli par M. Fossat et par- venu égrénée au Havre en octobre 1899; dans son rapport elle a signalé le textile du Soudan comme lui ayant produit la meilleure impression et elle demandait de nouveaux envois pour sa consommation. M. Baïillaud examina spécialement les procédés de fila- ture indigène et reconnut la possibilité d'installer un petit tissage dans la région de Djenné. Il rapporta en outre une collection très complète des tissus fabriqués dans le pays : cette collection a été exposée en 1899 à l'Office Colomial. L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER 231 Dans cette mission, j’eus à m'occuper moi-même de l’étude des questions biologiques se rapportant aux Co- tonniers, telles que la détermination botanique des espèces, leur distribution géographique, la sélection des races, etc. À la suite de toutes ces recherches, stimulées par le général de Trentinian, il est aujourd'hui bien acquis que la vallée du Niger Moyen convient admirablement à la culture du coton en grand. Son climat, son degré d'irrigation, le beau développe- ment de l’espèce indigène la plus répandue le prouvent surabondamment. IV La détermination botanique des diverses espèces des Cotonniers ou Gossypium, de même que celle de la plupart des plantes cultivées est des plus difficiles. La culture à produit de nombreuses variations héréditaires, qui mas- quent les véritabies affinités. De plus, l'hybridite est souvent intervenue pour créer des séries d’intermédiaires entre des espèces primitivement tres éloignées. Cependant les belles monographies de Parlatore (1) et de Todaro (2) et les nombreux matériaux conservés dans les herbiers du Muséum nous ont permis de rapporter à des formes connues, les nombreux échantillons recueillis au cours de l’exploration botanique de l'Afrique occi- dentale. Quatre espèces de Gossypiuin se rencontrent actuelle- ment dans les cultures du Sénégal et du Soudan français ; aucune n’est spontanée. Le G. herbaceum L. originaire, dit-on, de l'Inde est pro- bablement l'espèce la plus anciennement connue des indigènes qui l’appellent Cotonnier femelle: N'dar Guiné (wolof) Coroni mousso (bambara). | Au Soudan c'est un arbuste vigoureux, dont les buissons atteignent jusqu'à 2° et 3° de haut. Il y est toujours vivace et arborescent et donne à l'hivernage une floraison abondante. Malheureusement les (1) Parrartore. Le specie dei Cotoni. Korcnce, 1866. (2) Toparo. Relazione della coltura dei cotoni in Ttalia sequita da. una monografia del genere Gossypium, texte gr. in-8, pl. in-folio, Rome et Palerme, 1877-1878. 232 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION soies sont très courtes et fortement adhérentes, aussi malgré sa végé- tation luxuriante cette espèce présente actuellement peu d'intérêt. Elle est d’ailleurs très peu cultivée et a presque complètement disparu de la boucle du Niger. Nous en avons rencontré quelques touffes dans les cultures du Sénégal et dans la région comprise entre Denné et Sansan- ding sur les bords du Niger. 2° Le G. barbadense L. (var. Sea-Istand — G. marilimum Tod.; var. Jumnel où Mako = G. marilinum var. Jumeliz- num Tod., ete.), originaire des Antilles est d'introduction toute recente au Soudan, puisque les premières graines ont été distribuées en 1896 et 1897, par les soins des comman- dants de cercles qui les ont réparties entre les chefs des principaux villages. Aussi les indigènes l’appellent-ils Co- tonnier des Blancs, Coroni Toubab (bambara). Cette espèce à longues soies, qui donne de si beaux resultats dans la Louisiane et l'Egypte, a généralement mal réussi dans TAfrique occidentale. Peut-être parviendra-t-on à l’acclimater au Sénégal, dans les plaines du Baol et du Cayor avoisinant la mer et où les rosées sont abondantes. Elle semble aussi pouvoir se déve- lopper dans lesud du Soudan, où les pluies durent6ou7mois. Dans tout le nord au contraire, et particulièrement dans le Niger moyen, les sujets de cette espèce demeurent chétits et ne donnent que quelques fleurs. En somme, le climat manifestement trop sec, arrête le developpement de cette espèce ordinairement annuelle et à évolution trop rapide. En outre, à Sansanding, la plupart des plants ont été détruits par des invasions de chenilles. Aussi les indigènes, auxquels le général de Trentinian avait fait distribuer des graines de diverses variétés d'Egypte, ont renoncé très vite à leur culture. 3° On trouve quelquefois au Sénégal, près de la côte, un Cotonnier très robuste, a feuilles profondément découpées, à pétales jaune pâle présentant une tache rouge clair sur Fonglet. Cette plante est sans aucun doute le G.religiosum 1. C'est une espèce intermédiaire entre le G. barbadense T.. et le G. hir- sut I. qui paraît être un hybride fixé, c’est-à-dire reproduisant, hybride provenant du croisement ancien de ces deux espèces : il se rapproche en effet beaucoup du « Cotonnier hybride du Niger » sur lequel nous reviendrons plus loin. Le G. religiosum L. a des soies adhérentes, au moins à l’une des L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER 233 extrémités de la graine. C’est une espèce très rare au Sénégal, qui manque encore complètement au Soudan et qu'il serait peut-être inté- ressant de chercher à sélectionner. Notre court séjour au Sénégal ne nous a pas permis de l’étudier complètement. 4 Le Cotonnier, de beaucoup le plus répandu dans toute l’étendue du Sénégal et du Soudan est le G.punctatimn Perr. (exclus. descript. et var. acerifolia). Cest une race afri- caine très vigoureuse du @.hirsutuin L., tantôt assez velue, tantôt presque Complètement glabre. Elle se rencontre presque dans châque village; nulle part nous ne l'avons vue spontanée, mais sa rusticité est telle qu'on l’observe fréquemment natularisée en pleine brousse, soit sur l’em- placemeïñt des anciens villages détruits, soit dans les cul- tures abandonnées. Elle a été cultivée au Sénégal à une époque très reculée, car elle est la seule espèce de Gossy- pium qui figure (Herbier du Muséum) dans les plantes récoltées au Sénégal en 1750 par Adanson. Comme on la dit originaire de l'Amérique, elle aurait probablement été transportée à la côte par les premiers navires portugais qui firent le trajet de l’ancien au nouveau monde et inver- sement, en même temps que le Manioc, PArachide, ete. Au Soudan elle a complètement remplacé le G. herbaceuwm L. probablement plus anciennement cultivé et introduit de Plnde par l'Egypte ou par l’Abyssinie. Les buissons qui sont grèles et chétifs (hauts seulement de 2 à 3 dé- cim.) dans les terrains arides et secs, atteignent une hauteur de 2 mètres dans les sols riches et arrosés. La hauteur moyenne est de 1 mètre environ. Leurs branches deviennent alors fortes et très ramifiées. Le rameau central du buisson, ainsi que les latéraux les plus robustes portent des feuilles trilobées, cordiformes à la base, à lobes allongés-pointus, très divariqués. Les feuilles des rameaux latéraux sont tantôt trilobées, avec des lobes courts et arrondis, tantôt elles sont entières, cordées à la base. Ces feuilles sont glanduleuses, couvertes sur leurs deux faces de pelites pustules rouges, car elles sont tantôt plus ou moins velues, tantôt presque glabres sur les deux faces. En vieillissant, elles prennent une coloration rouge lie de vin sur les bords et cette teinte s'étend bientôt à toute la surface. Les inflorescences sont de petites cymes de 1 à 3 fleurs situées à l'aisselle des feuilles supérieures. Le calicule est constitué par 3 bractées vertes où parfois vert-blanchâtres, cordées, flabelliformes, présentant de 7 à 13 laciniures profondes. La corolle, assez petite, comprend 5 pé- tales subdeltoïdes, ordinairement d'un jaune-soufre très clair; ils ne tardent pas à prendre une teinte rouge pâle vineux, particulièrement en dehors, soit suivant des stries, soit uniformément sur toute la surface. A la fin, toute la corolle devient rougeûtre, et ses pétales desséchés persistent quelque temps sur la capsule. 934 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Les graines sont de la taille d’un petit pois, elles sont verdâtres avant maturité, plus tard elles deviennent gri- sätres. Elles portent des soies très adhérentes, blanches ou accidentellement rousses, ainsi qu'un court duvet épais, cendrée, persistant. Les plus beaux pieds produisent annuellement de 30 à 50 capsules qui mürissent en novembre et décembre, c’est- à-dire en pleine saison sèche; quelques autres capsules se développent plus tardivement. Dans les terrains les plus favorables des environs de San, de Djenné, de Sumbpi, les soies sont longues de 25 à 28m et atteignent une assez grande régularité. Cela tient évidem- ment au climat plus favorable et surtout aux procédés de culture plus perfectionnés. v Dans presque toute l’étendue du Soudan, depuis la côte du Sénégal jusqu’à l’Abyssinie, l'agriculture est parvenue à un état relativement avancé, et le voyageur n’est pas peu surpris de voir des peuples si ignorants à tant d’égards, pratiquer des assolements très remarquables, ou cultiver des races innombrables de plantes agricoles, races qu'ils conservent dans toute leur pureté. La culture du Cotonnier, en particulier, est l’objet des soins les plus attentifs, dans la vallée du moyen Niger, de Ségou à Goundam. A Djenné, on l’ensemence pendant l'hivernage (au com- mencement, au milieu ou à la fin), c'est-à-dire de juin à novembre. On sème ordinairement de 10 à 20 graines dans des trous espaces de 0" 70 à 1"50 les uns des autres, en les faisant alterner ordinairement avec des plants de mil (4ndr0po- gon Sorghuin) dont les hautes tiges abritent les jeunes plants contre le soleil trop ardent. Quand les premières feuilles sont épanouies, on élimine les pieds les plus chétifs, en en conservant seulement deux ou trois à chaque place. Après l’enlévement du mil, les Cotonniers sont buttes et soigneusement sarclés. En quelques endroits on les arrose pendant la saison sèche. Certains cultivateurs foulbés dé- posent aussi à chaque pied un peu d'engrais provenant des immondices entasses près de chaque village. L'AVENIR DE LA CULTURE. DU COTONNIER 235 : Les Cotonniers semes de bonne heure peuvent produire quelques fleurs dès la première année, mais ce n’est que la deuxième et surtout la troisième année, qu'ils acquièrent un grand développement et se couvrent de nombreuses capsules. Au commencement du deuxième hivernage on écime ordinairement les tiges, et au troisième on les récèepe sou- vent à la base. Cependant les indigènes conservent ordi- nairement quelques touffes, sans jamais les tailler; leurs rameaux fleurissent toute l’année ce qui permet d'obtenir du coton en toute saison, mais dans ce cas les fleurs sont moins nombreuses, les capsules plus petites et les soies plus courtes. Ilne semble pas y avoir intérêt à conserver un champ de coton plus de quatre ou cinq ans. On fait ordinairement suivre sa culture d’Arachides (Arachis hypogea), de Doli- ques de Chine (Figna Cutjung) Sosos ou Nicbes des indigènes, de Pois souterrain (Woandzeia subterranet), Légumineuses dont les racines ont la propriété d'enrichir le sol en nitrates. (C’est seulement plus tard qu’on peut planter des Céréales (Mil, Riz de montagne). VI Tel qu'il est actuellement, le Cotonnier du Soudan pré- sente de réelles qualités que lon pourra développer par une sélection suivie, et des procédés de culture plus par- faits, tels que l’emploi des engrais, et l'irrigation des plantations en saison seche. Ses avantages les plus appréciables sont les suivants : 1° Il est admirablement adapté au climat du pays et malgré les sept ou huit mois de sécheresse qu’il à à sup- porter et la petite quantité d’eau qu'il reçoit (de 0,80 à 0%,40 par an), peut-être davantage le long du Niger-Moyen, il se maintient vigoureux dans toutes les vallées et les plaines irriguées à l’hivernage ; 2 Ses touiffes robustes sont en plein rapport pendant deux ou trois ans; 3° Ses soies atteignent dans les lieux les plus favorables (par exemple sur les alluvions avoisinant le lac de Sumpi) 236 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION de 25 à 28mn, C’est donc une «moyenne soie » de dimension commerciale courante; : ° Elles sont suffisamment résistantes, ni trop grosses, ni trop fines; »° Elles sont d’une grande blancheur. Rarement certains pieds donnent des soies rousses, recherchées par les indi- gènes pour faire des fils, employés sans teinture, pour border où pour marquer les pagnes. La Socielé de Saint- Elienne-du-Vauvrey, pense qu'on pourrait surtout le sub- stituer aux cotons de l’Inde. Ses deux principaux défauts sont: 1° Le manque d’uniformité dans la longueur et la uen des soies ; 2° L’adhérence très forte des poils au tégument de la graine, qui rend l’égrenage laborieux, et entraîne la rupture de quelques soies pendant cette opération. La première défectuosité disparaitra par la culture soignée, en même temps que les qualités énumérées s’ac- croitront. Quant à la non-adheérence des soies, cette qualité étant spécifique, il semble dans l’état actuel Ge la science, qu’on ne pourra obtenir qu'en croisant le Gossypium punctatum du Soudan à soies adhérentes, avec une race de G. barba- dense à soies non-adhérentes, le but de l’hybridation dans ce cas, étant non de mélanger en parties égales les qualités des deux parents, mais de transporter sur l’un au moins des descendants toutes les qualités du G.punctatum moins une, le caractère de la non-adhérence de soies au tégument séminal étant emprunté au G@. barbadense. De tels croisements se sont déjà produits naturellement dans les jardins d’essai du Soudan où lon cultivait côte à côte le Cotonnier indigène et le Cotonnier d'Amérique (Sea Island). Nous avons observé plusieurs de ces formes hybrides dans le champ d'expériences de Sansanding créé par notre ami Mademba, Noir toucouleur placé par le général Archi- nard à la tête des États de Sansanding. La plupart de ces hybrides étaient déjà de deuxième génération. La forme la plus fréquente que nous appellerons « Cotonnier hybride du Niger » présente un mélange, pres- Te RE en L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER : DAT que à parties égales des qualités des deux parents. Les touffes du Cotonnier hybride du Niger sont demi-arbores- centes et offrent presques la vigueur du @. punctatuin. Elles ont résisté à la séchesse et à l'invasion de chenilles qui détruisirent presque complètement le @. bar badense du champ d’expériences en 1899. Les feuilles plus profondément découpées que celles de l'espèce indi- gène en présentent la plupart des caractères, les pétales larges sont d’un jaune plus ou moins clair avec l'onglet teinté de rouge, rarement de pourpre-foncé. L'un seulement des individus observés avait des soies longues et fines qui n’adhéraient pas au tégument, tous les autres au contraire, présentaient dans leurs fleurs et leurs capsules la plupart des caractères du @. punctatum, notamment l’adhérence des soies et ne s’en distinguaient que par des feuilles plus découpées et une tache rouge sur l'onglet des pétales. En résumé, si l’on adopte la ne nendene de M. Hugo de Vries pour les hybrides (1), le nouveau Cotonnier du Niger est un polyhybride diphylle et si l’on envisage seulement le mode d'union des poils au tégument séminal, la non-adhérence des soies constituera le caractère récessif, c'est-à-dire celui qui apparaïtra le moins souvent sur les des- cendants de l'hybride. D'après la loi de disjonction des qualités spé- cifiques des hybrides énoncée par M. Hugo de Vries., on peut prévoir qu'à la deuxième génération sur cent descendants du premier hybride, il y en aura vingt-cinq seulement qui auront conservé ce caractére du G. barbadense d'avoir des soies non adhérentes. Le but à poursuivre pour l’amélioration du coton du Soudan, sera done de rechercher parmi les vingt-cinq sur cent pieds les seuls descendants de l’hybride, qui aient des soies nor-adhérentes, ceux qui auront conservé le plus de qualités du Cotonnier indigène. Il faudra apporter des soins particuliers, dans leur sélection pour empêcher le retour des soies adhérentes; on devra chercher aussi à obtenir un nombre maximum de capsules murissant en même temps, afin de faciliter les operations de cueillette. Todaro a cultivé autrefois sous le nom de Gossypium hirsutuin var. Hardyanuwim où « Géorgie longue soie » un Cotonnier qui paraissait remplir toutes ces conditions et était la plante adaptée à l'Amérique du Nord dont nous (1) Huco pe VRies, Revue g2nérale de Botanique, 1900. 238 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION cherchons à obtenir l’analogue pour l'Afrique occidentale: Il n’est pas douteux qu’on n’y parvienne par ae années d'expériences et de sélections. NIUE Des efforts qui seront faits dans cette voie dépend l'avenir de nos colonies du Sénégal et du Soudan, ainsi que la prospérité de l’industrie cotonnière en France. Il ne faut pas se dissimuler en effet que, tel qu'il est actuellement le coton du Soudan ne peut faire lobjet d'aucun commerce, avec l'Europe, même quand il existera un chemin de fer pour l’apporter à la côte, car, il ne faut pas l’oublier ce coton est très peu coté sur nos marchés (1) et son rendement est faible dans les cultures indigènes actuelles. Si les pieds sont espaces de 1:m. 50, un hectare com- prendra 4356 plants, pouvant donner dans les meilleures conditions actuelles de 20 à 30 capsules par buisson, au ma- ximum, lesquelles pourront fournir, à raison de 1 kg. de textile pour 500 capsules, de 157 à 260 kgs de coton égréné à lhectare. Nous sommes loin des rendements de l'Egypte qui atteignent, paraît-il, jusqu'à 1000 livres de coton filé à l'hectare (2). Il est à remarquer aussi que les capsules des variétés améliorées qui donnent en Amérique,au Turkestan, jusqu'à 33 p.100 de soies par rapport au poids total de leurs graines, ne donnent actuellement au Soudan que 25 p. 100 de soie à légrenage. De grands efforts restent donc à réaliser pour faire de l'Afrique occidentale française un pays d'exportation pour le coton. Nous avons noté plus haut qu’il était possible d'accomplir cette œuvre. La France a des intérêts matériels trop consi- dérables en jeu pour se désintéresser de cette question. Dans les conclusions de son beau livre sur «le Coton », (1) La plus belle soie triée du Soudan fut cotée au Havre 40 francs les 50 kilogrammes en, 1899, et elle vaudrait à l'heure actuelle de 50 à 59 francs les 100 kilogrammes. (2) D'autre part, il ne faut pas perdre de vue que le transport d’une tonne de coton égréné du Niger au Havre, coûtera mème avec un che- min de fer 110 à 120 francs par tonne. L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER 239 M. Henri Leconte a mis en évidence ce fait indiscutable : C’est que l’industrie européenne des cotonnades se trouve de plus en plus menacée par les fabriques qui se créent aux Etats-Unis, au Japon, dans les Indes anglaises, et si nous voulons lutter contre cette extension de l’industrie étran- gere, c'est dans les colonies françaises que nous devons chercher un débouché pour nos produits nationaux. Ce dé- bouché est lié entiérement au développement de l’agricul- ture et à la prospérité économique de ces mêmes pays; en _effet, pour pouvoir vendre les produits de nos manufactures, il faut encore que l’indigene ait avec quoi les payer. Cette richesse qui lui est,ainsi qu’à nous nécessaire, il la trouvera uniquement dans l’agriculture, car « les richesses natu- relles d’un pays s’épuisent singulièrement vite si la culture wintervient pour les renouveler (4) ». En ce qui concerne toute l'étendue du Soudan, nous pen- sons que c’est précisément la culture du coton, jointe à l’éle- vage du bétail qui doit assurer la prospérité agricole de ces nouvelles Indes Noires. NII Les régions où la culture du Cotonnier pourra acquérir un grand développement sont, particulièrement au Sénégal : le Baol et le Cayor maritime, à proximité des points d’eau; enfin, au Soudan, cette partie du Niger que M. Guy a si heureusement nommée la Mésopotamie nigérienne et qui, par son régime d’inondations, sa fertilité et son climat est en tout point comparable au Nil inférieur (2). Dans cette derniere contrée, il serait possible de cultiver dès maintenant 250.000 hectares en Cotonniers sans aucun travail hydraulique spécial. Si l’on compte seulement un rendement de 200 francs à l’hectare, chiffre très inférieur à la réalité, ce serait une richesse annuelle de cinquante mil- lions de francs que l’on pourrait lui faire produire en tres peu de temps. En constituant tout le long du cours moyen du fleuve des bassins où l’eau s’accumulerait en hivernage pour être en- (1) H. Lecomte, I. c. p. 482, (2) A. CHevarier. Sur l'existence probable d’une mer récente dans la région de Tombouctou, C. R. Acad. Sc. 1901. 240 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION suite, après élévation, distribuée aux plantations, cette étendue pourrait être facilement triplée. Nous ne nous arréterons pas à la conception d’un endi- guement général des branches du fleuve, qui, au dire de M. Duponchel (1), permettrait de mettre en culture par l'irrigation méthodique des terrains ainsi découverts, trois millions d'hectares. Un tel endiguement serait un travail d’Hercule que l’on reconnaitra irréalisable, si l’on songe à l'immense nappe du Niger moyen et à l'inextricable lacis de ses canaux de dérivation qu'il faudrait emmurer ou barrer. Ce serait pour- suivre une chimère que d’en tenter l'exécution même par- tielle. Nous n'avons plus les moyens d'action, qu'’avaient au Nil les Pharaons, et nos indigènes ont autre chose à faire que d'accomplir une œuvre gigantesque dont l’utilité pour les générations futures serait même problématique. On pourra tout au plus, ainsi que l’ont fait dejà les indi- gènes en beaucoup d’endroits, préserver de l’inondation certaines petites cuvettes, par des lévées de terre cultivées, entre lesquelles on réglerait la distribution de l’eau. Les terrains incultes de la vallée sont aussi très vastes et conviendront à la culture du textile le jour où on pourra les irriguer en elevant l’eau de quelques mètres. Mais avant d'entreprendre de semblabies travaux qui demandent d'importants capitaux et une main d'œuvre très insuffisante à l'heure actuelle, il convient d'amener lindi- gene à exploiter déjà le champ tout préparé qu’il possede, champ suffisamment vaste pour suffire à son activité encore pendant de nombreuses années. Il existe en effet déjà dans la vallée du Niger, plus de 300.000 hectares de terrains cultivés et recevant assez d’eau pour convenir à la culture du coton amélioré. Ces terrains, le paysan bambara ou djennonké, dont nous avons signalé (2) les aptitudes agricoles, est capable de les mettre en valeur si le gouvernement français lui vient en aide. * (1) Dupoxcnez L'exploitation agricole et coloniale du Soudan nige- rien in Revue coloniale, 1900, n° 46, 47, 18, 19. (2) A. CHEVALIER. Les cultures indigènes dans l'Afrique occidentale française in Rev. Cul. Col. 1900. - 1e t L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER (AS) NS = IX Ce n’est pas après une étude, même de quinze mois, poursuivie dans les régions les plus variées du Sénégal et du Soudan, qu’il est possible de tracer un programme défi- nitif sur les procédés qui seront à employer. Il n’est pas douteux cependant, que ce programme devra s'appuyer sur des données scientifiques sérieuses en ce qui concernera l’espèce à cultiver; d’un autre côté, les encouragements administratifs et pécuniaires devront être réglés d’après les usages indigènes actuellement existants. Par exemple, les principaux chefs de case, propriétaires de terres cultivables, étendues, et jouissant d’un réel prestige dans chaque village, sont tout naturellement indiqués pour être les premiers à entreprendre cette culture. 1° Donc, au point de vue scientifique, il semble néces- saire de créer une race de coton bien adaptée au pays, suf- fisamment productrice et de qualité supérieure. On pourra, par exemple, partir du Cotonnier hybride que nous avons signalé. Il faudra ensuite sélectionner cette race, dans un jardin d'essai installé sur les lieux, non pas par des expériences soumises au hasard comme par le passé, mais par des méthodes scientifiques rigoureuses. Les expériences de M. Hugo de Vries montrent comment il faut procéder et ce que lon peut obtenir par Papplication de ces méthodes grâce auxquelles les savants botanistes de Java ont renové la culture des Quinquinas et de la Canne à sucre et par lesquelles ils sont en train de préparer la victoire dans la lutte engagée entre l’indigo naturel et Pin- digo artificiel. C’est à la France d'entreprendre une œuvre semblable pour l'amélioration de son coton d'Afrique. Cette race constituée, on devra la multiplier dans des champs d'expériences, de manière à bien la fixer et à obtenir un grand nombre de graines qui seront distribuées simul- tanément à tous les cultivateurs indigènes du Niger, après destruction des anciens pieds déjà existants. Il faudra, en effet, obtenir, au moins au début, une qua- lité uniforme de coton dans la colonie, si on veut lui assurer un placement commercial facile. è La sélection devrait être continuée dans les champs d'essai dirigés par les européens, sous le contrôle d’un Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 4901. — 16 242 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION établissement scientifique chargé de rechercher des races nouvelles meilleures et de prévenir leur dégénérescence. Cest grâce à la création d’un Institut scientifique spécial, confié à des savants de grande notoriété, MM. Wilkins et Ochanine, que la Russie est parvenue, en un petit nombre d'années, à faire du Turkestan, l’un des pays cotonniers les plus riches du monde et capable d'alimenter déjà le tiers de la consommation de l'empire russe. 2° Au point de vue économique, il serait nécessaire au début que l'Etat encourageàt la culture du coton, adminis- trativement et pécuniairement. En quoi consisteront ces encouragements? C’est une ques-. tion embarrassante, dont la solution n’est pas pour le mo- ment de notre compétence. Peut-être l'Etat pourrait-il accorder des primes aux culti- vateurs, ou se charger lui-même de la vente en leur accor-. dant, d’une manière ou d’une autre, une somme supérieure à la valeur vénale du produit, somme qui leur serait réelle- ment versée et ne consisterait pas en un simple dégréve- ment d'impôt. Il faudra, dans tous les cas, chercher à éviter les fraudes qui se produisirent dans les tentatives précé- dentes. Il y aurait peut-être lieu d'essayer le système qui fut proposé en 1869 par M. Léon Blondel, pour étendre la pro- duction du coton en Algérie (1). D'après son projet, des primes devaient ètre accordées pendant 42 anné?s aux producteurs, et cette indemnité devait aller en décroissant jusqu'à l'expiration du délai au bout duquel le débouché semblait assuré. Cette allocation devait être proportionnelle aux quantités et aux qualités produites; très élevée au début, elle aurait été en décrois- sant, d'abord lentement, puis elle aurait diminué brusquement dans les dernières années. En même temps, l'Etat aurait accordé des primes à l'exportation et se serait chargé lui-même, pour le compte du planteur, du placement des quantités non exportées. Dans tous les cas, il sera indispensable de laisser au cul- tivateur indigène la plus grande indépendance au point de vue de la liberté du travail et de remplacer au plus vite le (1) L. BLoxpez. Rapport sur la culture du Cotonnier en Algérie, Paris, 1859 (Bibl. Mus.; CC. 36 c.). Ibid. Rapport au Conseil supérieur de l'Algérie sur les encourage- ments à donner à la culture du Cotonnier en Algérie, Paris, 1860 (Bibl. Mus. CC. 36 c.). L'AVENIR DE LA CULTURE DU COTONNIER (AS) 43 portage sur la tête des nègres, si néfaste actuellement à la production agricole, par des moyens de transport moins primitils. Nous pensons que le régime des grandes concessions et même du metayage sera toujours inapplicable au Soudan. Dans ces régions où l’indigene a si peu d'efforts à fournir afin de faire produire au sol lé peu qui lui est nécessaire pour vivre, il ne consentira la plupart du temps à subir les exigences du colon que s’il y est forcé. Pour obtenir une main d'œuvre abondante, il faudrait donc avoir recours à un esclavage plus ou moins déguisé : ce procédé répugne à notre civilisation, et de plus, il est contraire à nos intérêts généraux dans ces pays. Au Soudan en effet, comme autre- fois à la Martinique, il n'est pas douteux que le Noir, culti- vateur profondément attaché à la terre, fournira un travail d'autant plus productif, qu’il aura la jouissance plus com- plète de ses récoltes. La richesse ainsi acquise sera em- ployée à améliorer son bien-être, par l'achat dans les comptoirs des produits de notre industrie : nous profiterons done nous-mêmes de son travail. Ce m'est pas à dire que le colon n’ait rien à faire en Afrique, il y est au contraire nécessaire; mais, comme le faisait remarquer dernièrement, pour l’ndo-Chine, M. le capitaine Fernand Bernard «son rôle ne peut consister à disputer à l’indigèene le maigre produit de son champ. Il peut être industriel ou planteur : il doit dans les deux cas apporter ce qui manque à ce pays : des capitaux et des pro- cédés scientifiques (1) ». Si en agriculture, il consacre son activité à diriger des plantations riches, telles que celles du Colatier (dans le Sud), où il faut apporter plus de connais- sances spéciales que de bras, son capital sera autrement rémunéré que dans une plantation pauvre comme celle du Riz ou du Cotonnier, dans laquelle l’indigène seul qui peut se passer d'intermédiaires coûteux, trouvera un bénéfice suffisant. De même, qu’il a suffi au Sénégal de quelques années de tranquilité et d’encouragements pour devenir et rester la courcenrdeArachides lat plus riche du 2lobe (en 4900; 130.000 tonnes ont été exportées d’une valeur de plus de 30 millions de francs); de même il suffira au Soudan de quelques années d'efforts persévérants pour devenir la (4) CAPITAINE F. BERNARD. L'Indo-Chine, Charpentier, 1901, 244 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION plus riche mine de coton de l’ancien monde, capable d’ap- provisionner la plus grande partie du marché français. En accomplissant ce programme nous aurons véritable- ment réalisé une œuvre colonisatrice et française, car nous aurons amélioré le bien-être matériel d’une race, nous lui aurons ainsi fourni les moyens d'élever son niveau moral et intellectuel, nous lui aurons, en un mot, ouvert notre civilisation. EXTRAITS ET ANALYSES ACCLIMATATION DES PERROQUETS ET DES PERRUCHES EN ANGLETERRE M. Charles Buxton, membre du Parlement, a lu la notice suivante à l'une des dernières séances de la Société britannique pour le progrès des sciences. Elle intéressera les amis des sciences naturelles. Nous l'extrayons du North-British Agriculturist. Je vais vous dire quelques mots des tentatives qui ont été faites de laisser les perroquets en liberté. Quoiqu’elles aient eu pour nous beau- coup d'intérêt, je crains que ce que je vais raconter ne soit guère digne de l’attention d'une Société pour le progrès des sciences; je ne puis pas même dire en conscience que nos efforts pour acclimater ces oiseaux et enrichir ainsi la faune de l'Angleterre aient été couronnés d'un plein succès. « Il est vrai que les perroquets ont pondu, que cinq fois les petits sont venus à bien, et que. sans « ces maudits fusils », ces oiseaux réussi- raient fort bien, car il semble qu'ils soient exempts de maladies et de la mort naturelle. Mais, par malheur, ils participent aux faiblesses de la nature humaine, et, par dessus tout, en ce qu'ils ne savent pas rester où ils sont bien; en effet, de temps en temps, ils sont pris d'un désir de voir le monde, et alors ils s’envolent à douze ou quinze milles, et peut-être plus loin, et ils sont tués par des chasseurs ou par des gars chargés d’écarter des champs les corbeaux, et qu’étonnent leur appari- tion si brillante dans les arbres. C'est un couple de cacatoës qui a donné aux autres l'exemple de fonder une famille, il a essayé sans succès de faire un nid dans une cheminée. Avant d'être terminé, le nid tomba avec les cacatoès. C'était en été, on ne trouva les oiseaux que vingt-quatre heures après, dans la suie, et noirs comme des ramoneurs. Ils ne se découragèrent point; ils con- struisirent un autre nid dans une des niches établies à cet effet près du toit. Mais ce fut en vain que la femelle couva avec persévérance ses deux œufs jusqu'en septembre; les œufs étaient clairs. Ensuite un couple de perroquets verts, le mâle venant de l’Amazone et la femelle de l'Honduras, firent leur nid dans une des niches et eurent un petit. Mais quand celui-ci commença à avoir des plumes, les parents jugèrent à propos de le tuer. L'année suivante, le même couple eut deux petits, et c'était vraiment un beau spectacle que de voir voler cette famille, toujours réunie et paraissant beaucoup s'aimer. Par malheur, la mère et son fils aîné furent tués a coups de fusil. Plus tard, un cacatoès, de l'espèce blanche vulgaire, et une femelle couleur de rose et de la grande espèce, se creusèrent un nid dans une branche pourrie d’acacia, ils pondirent deux œufs et eurent deux petits. Ces métis sont fort beaux, : sans ressembler au père ou à la mère; ils sont blancs, sauf une fort ; 246 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION belle crète, d’un rouge orange. Les parents furent si satisfaits du succès de leur expérience, que l'an dernier ils la répétèrent, et qu'ils eurent trois nouveaux petits. La famille se composait douc alors de sept membres. Malheureusement, l'un d'eux reçut l'hiver un coup de fusil, et revint au logis gravement blessé. Les autres ne voulurent plus le recevoir, et il vécut alors isolé dans un buisson. Un jour, je le fis aller au jardin, et pendant que j'avais le dos tourné, des cacatoès, — ce n'était pas de ses parents, — lui tombèrent dessus et le tuèrent. Ces oiseaux, ainsi que beaucoup de bètes sauvages, ont avec l’homme un trait de ressemblance : c’est un dégoût pour les estropiés. Un autre de ces perroquets fut également blessé. Je l'emportai dans le Surrey, où, malgré son aile et sa patte cassées, un vieux cacatoës le prit en amitié et le traita comme son fils. Nous espérons cette année que le mème couple nicherait encore; mais par malheur deux perroquets verts les devancèrent dans la prise de possession de la branche creusée, et eurent les deux petits que vous venez de voir, et qui ont un si mauvais caractère. L'instinct maternel s’est développé d’une manière bien absurde dans un autre couple de perroquets gris. Cette année, une cl'atte a fait ses petits dans une des piches. Deux perroquets gris, qui n'ont pas eu l’esprit de pondre des œufs et de fonder une famille, se sont mis dans la tète que ces petits chats sont leurs enfants. Ils ont déclaré la guerre à la vieille chatte, et dès qu’elle quitte la niche, l'un d'eux vient s'y mettre avec les petits chats, dont il ne s'éloignent guère, mème quand la mère est là. Lorsque les cacatoès dont j'ai parlé avaient leur nid dans l’acacia, c'était chose plaisante que l’intérèt extravagant que les autres cacatoès prenaient à leurs affaires. Toute la journée, ils perchaient sur les branches au-dessus du nid, et quand la mère prenait son vol, elle était suivie par une troupe qui poussait d'horribles cris en son honneur. Cette espèce d'oiseau est d'une grande originalité, et n'a rien de vul- gaire, de terre à terre. Ils sont d’une curiosité sans limites, eb cer- tainement ils observent l'homme et ses actes avec le plus vif intérêt, mélangé de surprise, et peut-être aussi d'un soupçon de mépris. De plus, l'individualité est très marquée chez eux. Il ne s’en rencontre pas deux qui aient le mème caractère. Je pense que les grands cacatoès blancs à large crète blanche sont les plus: intelligents. J'en avais un que je voulais tenir attaché sur son bâton. Un serrurier de premier ordre de Londres à en beau essayer toutes ses inventions, le cacatoès l'a battu à plate couture. Sans rien casser, il parvenait à ouvrir l’an- neau ou l'appareil quelconque destiné à le retenir, quoique. dans un ou deux cas, une étude sérieuse parüt nécessaire pour comprendre le mécanisme. L’acclimatation des perroquets a été expérimentée sur une assez grande échelle, Nous avons eu des perroquets d'Afrique, de l’'Amazone et de la Caroline, des perruches Rosella, de grandes perruches du Ben- gale, quatre espèces de cacatoës et deux espèces d'oiseaux magnifiques, au Corps écarlate, aux longues ailes et à la queue d'un beau vert mé- tallique. On voit moins bien ces derniers que les autres, car ils vont toujours s’enterrer sous le plus épais feuillage, et n’ont rien de la sen- sibilité et de l’activité d'esprit des cacaloès et des perroquets. Il faut dire toutefois que pendant la plus grande partie du jour, ces oiseaux, quelle que soit leur espèce, ne restent pas du tout en vue. Plusieurs ACCLIMATATION DES PERROQUETS ET DES PERRUCHES 247 vivent dans les bois, loin de la maison, et ceux-même qui ont pris do- micile dans les arbres du jardin ne sont pas faciles à découvrir. On croirait qu'au moins le cacatoès blanc doit être visible partout; mais l'instinct de tous les animaux est d'échapper aux regards de l’homme, et quandils sont cachés par le feuillage, il est rare que des yeux non exercés les aperçoivent. Le matin et le soir, ils viennent manger du chènevis, du pain et du lait dans des corbeilles posées sur un trépied, et alors, je vous l’assure, ils forment de très beaux groupes. Nous avons fait récemment de grandes pertes, car beaucoup ont pris leur vol, et se sont fait tuer; mais je vais vous lire des notes que j'ai prises il y à deux ans, en observant une scène que je voyais tous les jours se répéter devant la fenêtre de ma bibliothèque. Le déjeuner des perroquets ayant été déposé sur la corbeille, un couple de cacatoès blancs, qui, perchés au dessus, avaient observé avec anxiété l’opération, fondent dessus et se mettent à l’œuvre aus- sitôt. Une perruche du Bengale aux longues ailes vertes vient effleurer le dessus de la corbeille, et pendant quelques minutes voltige perpen- diculairement, la tête et la queue tournées en dedans et les ailes éten- dues. Deux ou trois cacatoës arrivent et se posent sur le trépied, mais sans oser prendre place au bord de la corbeille où leurs redoutables compagnons fonctionnent de leur mieux. Mais voilà qu'un des grands cacatoës blancs à crète orange s’abat lourdement, et met en fuite tous les autres. Cependant ceux-ci se rassemblent tout autour, et l’un d'eux, d'un vert et d’un rouge éclatant, fend l'air et se pose au plus haut du trépied, ses couleurs foncées faisant contraste avec le blanc pur du cacatoès placé au dessous de lui: le groupe est complété par um chou- cas de Cornouailles, qui n’est point le plus mal vêtu, avec son plumage d’un noir: bleu brillant, son bec et ses pattes jaunes. Il finit toujours par engager avec ses rivaux un rude combat où son long bec lui donne l'avantage. Je vous assure, mesdames et messieurs, qu'un pareil spectacle, que j'ai vu plus de cent fois, est vraiment beau, surtout dans une belle ma- tinée d'hiver, où la neige couvrant le sol fait ressortir les couleurs de ces oiseaux. Ils ne paraissent pas souffrir du froid. Les perroquets gris ont pris possession d'une maison qu'on leur avait préparée comme abri, mais aucun d’une autre espèce n’a voulu y entrer; ils vivent toute l'année dans les bois. L'autre hiver, quand le thermomètre marquaiït 4 degrés Fahrenheit au dessous de zéro, si un des cacatoës a disparu sans laisser de traces, tout le reste avait l'air aussi animé, aussi vivant que possible. En fait, tant que les oiseaux sont bien nourris: et bien portants, je ne crois pas que le froid leur soit fatal. Leurs migrations ont pour cause le manque de nourriture et non le froid. Même là déli- cate petite mésange à longue queue et le roitelet plus délicat encore, ainsi que d’autres oiseaux très faibles en apparence, restent tout l'hiver chez nous sans paraitre souffrir. Le fait est que les oiseaux ont un si excellent manteau, une telle masse de duvet sous leurs plumes, et de plus, si je ne me trompe, une telle dose calorique, bien supérieure à celle des autres animaux, que : Je froid les tue rarement. Je né dis pas pour cela qu'il leur plaise, mais ilest curieux que ces perroquets d'Afrique, ces perruches du Bengale, ces lory des Philippines ne paraissént point souffrir de notre froid et dé-nos neiges. Je ferai remarquer que, d’après le jardinier. les perro- 248 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATYTION. quets gris sentent l'orage, ct se réfugient souvent d'avance dans leur maison de verre. Rien de plus frappant que le contraste entre le plumage du perroquet qui nous arrive, et son aspect lorsqu'il a quelques semaines volé en liberté. Il acquiert alors un lustre et un état métalliques. La varieté dans l'alimentation leur est aussi nécessaire. que l’abondance, et ils ont de plus besoin d'exercice. Quelques-uns, qui ne peuvent voler ou qui préfèrent paresser à domi- cile, ont un air malheureux, sont tristes et irritables. tandis que le jacquot industrieux, qui vole et va chercher sa vie, est joyeux, content et bon enfant. Ils ont une idée très nette de la propriété. Un vieux perroquet, qui perche toujours sur le Lierre d’un ancien mur, se fâche lorsque quelque autre vient y prendre place, tout autant que le ferait mon cuisinier si quelqu'un de vous venait s'installer dans sa cuisine. En général, ils ont le plus grand respect pour la propriété d'autrui. Nous prenons ordinairement nos perroquets à M. Jamrach, un juif dont la boutique est près de Wapping, et qui achète toute espèce dani- maux aux navires qui entrent dans les docks. Son magasin est singu- lier, et mérite d’être vu. Un jour, j'y trouvai un crocodile de 42 pieds, et une autre fois, un bébé de crocodile d'environ 18 pouces, que j'achetai et conservai vivant quelque temps. On y voit des ours, des lions, des singes et d’autres animaux; toutes les chambres de lhabitation . sont réservées aux oiseaux qui, pour la plupart, sont des perroquets. On entend là des cris terribles. De temps à autre, il arrive une avalanche de petites per- ruches vertes d'Australie; une fois, M. Jamrach en a eu 3,000 dans les chambres à coucher. Les perroquets qui parlent se vendent très cher; aussi nous n’en achetons pas. D'ailleurs, ils oublient bientôt dans les bois ce qu’ils ont appris, mais quelquefois en apprenant à imiter d'autres sons. Dans ma maison de Surrey, les choucas nichent dans des paniers, placés pour eux sur les toits. Un perroquet gris a appris à imiter leur voix, tandis qu'un des cacatoès reproduit à s’y méprendre le gloussement des poules. Un grand perroquet de l’Amazone, qui est à Northreps-Hall depuis vingt ans, parlait dans la perfection. Ce fut lui qui nous inspira l’idée de laisser les perroquets en liberté, car, s'étant échappé, il était resté près de trois mois dans les chênes et les hêtres, et il ne revint qu'à l'hiver, mais avec un si magnifique plumage, que l’idée nous vint d'essayer sur d’autres perroquets les effets de la liberté. Après son retour, .il nous amusa beaucoup, lorsque, tout en montant et en descen- dant sur l'encadrement de la fenêtre de la salle à manger, il répetait les phrases suppliantes que lui avaient adressées les, servantes pour l'engager à revenir, imitant exactement les paroles et la voix de cha- cune : une fois, il fit grand'peur à une pauvre femme, en s’abattant tout à coup sur le haut de sa tête, tandis qu’elle marchait sur la route. Deux ou trois fois des étrangers, en approchant de la maison, ont été stupéfaits d'entendre sur leurs têtes sortir des arbres les voix de per-. sonnes invisibles. Un des jeunes cacatoès nés sur l’acacia disparut le printemps dernier. Il est revenu un de ces jours dans un état misérable, et à demi-mort de faim. Mais bientôt il a repris bonne mine. Je voudrais savoir ce qui lui est arrivé, et comment il a retrouvé la maison. Un des. grands SUR QUELQUES CULTURES TROPICALES 249 cacatoès déserta pendant quelques mois, s'associa à une bande de grolles, et finit cependant par revenir. Il arriva une fois qu'une compa- gnie de nos perroquets s’en alla dans une terre nommée Brooke, qui est bien à une distance de 25 milles. Onze d’entre eux furent tués par le garde chasse, qui crut avoir fait un coup de maïtre. Plus tard, cinq cacatoès ont péri de la même manière. On remarquera l’amitié singulière qui s'établit entre oiseaux de dif- férentes espèces. Un perroquet vert et une perruches sont devenus in- séparables. Sur une compagnie de onze: perroquets verts, dix ayant été tués, le survivant s'est attaché à des cacatoés; et, depuis deux ans, il vole toujours avec eux de compagnie. Dans le rude hiver de 1860, une femelle de perroquet de Caroline, eut les pattes gelées, et les perdit. Elle était dans un état déplorable, lorsqu'un magnifique perroquet de l'Amazone en eut pitié, et se dévoua à elle en vrai chevalier, la défen- dant contre les attaques des autres, qui l’auraient tuée, nettoyant son plumage, et presque toujours restant à ses côtés. C'était un contraste risible que celui de la vieille estropiée et du jeune et beau chevalier, qui avait pour elle une si folle passion. Au bout de quelques années les cacatoès dirigèrent contre elle une attaque combinée, qui, après bien des cris perçants, et tous les bruits de la bataille, se termina par le meurtre du pauvre vieil oiseau. Ces oiseaux aiment beaucoup le jardinier en second qui leur donne leur nourriture, et rarement il est à son ouvrage sans qu'un ou deux cacatoès soient perchés sur sa tète ou ses épaules. Ils disposent de leur temps d'une manière très sensée. Dès l’aube, on entend leur voix dans un bois éloigné, où la plupart d’entre eux passent la nuit. Ils viennent ensuite attendre leur déjeuner, et ils font la sieste dans le milieu du jour. Après cela, ils cherchent leur nourri- ture, et ils viennent au souper. Mais, avant d'aller se coucher, ils se livrent, comme les grolles, à un exercice agréable. Souvent les perroquets volent en cercle, à une grande hauteur, avec des cris de joie, tandis que les cacatoès volent d'arbre en arbre, la crète dressée, et criant sur le ton le plus haut de leur doux organe, surtout lorsqu'ils voient du monde dans le jardin. Je dois avouer que quelques-uns de ces oiseaux, sinon tous, sont nuisibles aux fruits surtout. Mais nous trouvons cet inconvénient plus que compensé par l'animation qu'ils donnent au jardin et la beauté merveilleuse de leurs couleurs. SUR QUELQUES CULTURES TROPICALES TENTÉES EN PLEINE TERRE AU JARDIN CoLONTAL DE MARSEILLE (1) Par le Professeur D' Edouard HECKEL Directeur de l’Institut colonial, et du Jardin botanique, Président de la Société d’Horticulture et de Botanique des Bouches-du-Rhône. En prévision des besoins de l’enseignement colonial créé à Marseille, sur ma demande, par la générosité éclairée de la Chambre de Commerce (1) Communication faite à la Société dacelimatation- à la séance du 20 décembre 1900 et adressé en même temps à la Revue des Cultures coloniales qui l’a pe dans son n° du 20 mars 1901. 250 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION avec l’appoint matériel des ressources du Musée colonial que j'ai fondé dans cette ville en 1893, j'avais cru devoir, dès 1889 (1), à titre de direc- teur du Jardin Botanique de la ville au parc Borély, consacrer une certaine surface de terrain disponible dans ce parc, à l’organisation d’un jardin colonial en plein air. Situé dans un espace très clos et très sur- chauffé l'été, mais arrosable, bien ensoleillé l'hiver, pourvu de bâches pour les jeunes semis, ce jardin correspond parfaitement, dans la limite de l’action permise par ie climat méditerranéen, au but à atteindre. Depuis plusieurs années, cet établissement modeste, mais bien à sa place sur les bords de la Méditerranée, marche vers une progression croissante, et j'ai pu. grâce au dévouement éclairé de M. Davin, chef de culture au Jardin des Plantes. qui s’est familiarisé depuis longtemps avec les questions de botanique coloniale, obtenir quelques résultats démonstratifs de la bonne situation du terrain choisi. Ils me paraissent présenter assez d'intérêt pour être publiés. Comme je l'ai dit, la création de ce jardin a surtout pour but prin- cipal de donner satisfaction au désir que j'ai pu suggérer à la Chambre de Commerce de Marseille, d'adjoindre aux six cours coloniaux déjà créés. une conférence pratique de culture coloniale, et, par suite, de pouvoir montrer sur place, aux élèves de la nouvelle section colo- niale inaugurée à l’École supérieure de commerce en 1900, un certain nombre de plantes économiques et de grande culture (2), Il est inutile d'insister sur l'importance pratique que présente, au point de vue didactique un pareil enseignement. Confié à M. Davin, il ne pouvait ètre placé entre les mains d'un praticien plus compétent. Voici quelques résultats culturaux obtenus, en 1900, dans ce jardin colonial. 1° On sait que les graines oléagineuses d’Arachide constituent, pour le commerce marseillais aussi bien que pour l’industrie de cette ville, une matière première de la plus haute importance qu'elle reçoit d'Asie et d'Afrique. Cette plante économique d'origine américaine (comme toutes les espèces du même genre Arachis auquel elle appartient) donne deux variétés connues, l'une africaine et l’autre asiatique. J'ai fait semer une longue plate-bande de la, variété africaine provenant de Rufisque (Sénégambie), qui est la sorte commerciale d'Afrique la plus estimée. Ces graines m'étaient parvenues en coque et à l'état encore frais, huit jours de mer seulement séparant Marseille du Sénégal. Toutes les graines ont levé et m'ont donné environ 80 pieds d’Arachis (1) C’est de ce jardin colonial et surtout des serres qui y sont attenantes que sont sortis un grand nombre de végétaux utiles et inconnus jusque-là, dont j'ai pu doter nos colonies françaises tropicales. Je citerai notamment le Kola, dont plus de 600 pieds furent expédiés à la Réunion, en Cochinchine, à Tahiti, aux Antilles et à la Guyans; le Polygala butyracea Heckel,ou Maloukang, graine oléagineuse supérieure du Foutah-Djalon, actuellement cultivée en Indo-Chine et à Java: l'Araucaria Bidwilli d'Australie qui donne une gomme résine utili- sable et une graine comestible comparable à la châtaigne : le Kinkélibah (Com- brétum Raimbautltii Heckel) précieux remède contre la bilieuse hématurique ; la courge-patale ; le Lamy et le Méné, à graines grasses du plus haut intérêt industriel pour Marseille, ete., ete. (2) La section coloniale créée en octobre 1900 à l'Ecole Supérieure de Com- merce, comprend 15 élèves recrutés par voie de concours. L’ensemble de l'enseignement colonial est donné actuellement au'Palais de, la Bourse, par six professeurs pris dans l'Université, plus un chargé de Conférences pratiques. M. Davin. : SUR QUELQUES : CULTURES : TROPICALES 251 hypogaea L. qui ont fleuri et fructifié abondamment, bien que la terre compacte et argileuse dans laquelle les graines avaient été semées en fin mai 1900, ne permit guère d'espérer ce résultat. La pénétration des fruits dans la terre s’est faite normalement et sans difficultés. Ce fait de la floraison et de la fructification des Arachides à Marseille n'a rien de bien surprenant, car il a ét£ constaté dans d’autres points du midi de la France, mais il démontre ane fois de plus la vérité de cette proposition que j'ai plusieurs fois émise, à savoir que : toutes les espèces annuelles tropicales capables de parcourir l’ensemble de leur cycle végétatif pendant les quatre mois de chaleurs de notre climat méditerranéen (juin, juillet, août et septembre), peuvent y être cultivées non pas en vue d'une production économique, mais avec la certitude d'obtenir des fruits. On dit, dans les classiques, que l’Arachide ne peut ni fleurir ni fructifier au délà du 30° de lat. Nord et du 25" de lat. Sud. Or, Marseille est par 42° de. lat. Nord. Il ne faudrait pas en inférer que la culture de l’Arachide y serait productive comme l’est la Vione ou l'Olivier, mais il n’en est pas moins vrai que la formule classique émise sous cette forme rigide est inexacte. Du reste, des expériences de culture déjà assez anciennes l'ont bien prouvé, et on parait avoir recherché par ces essais quelle est la limite exacte de floraison et de fructification de cette plante en France et même en Europe. Ce mouve- ment de curiosité semble être parti d'Espagne au commencement du siècle. En effet, d'après le professeur Bleekrode (Katjang-Olie Arachiden Aardnoten, Rotterdam, 4860), rapportant des observations de Cavanilles (Ann. d’hist. nat. d’Espagne, 1801), cette culture avait réussi à Valence (1). En l’an X, le préfet des Landes, Méchin, fit publier les résultats favorables d'une culture entreprise avec des graines d'Arachide envoyées d'Espagne par Lucien Bonaparte, ambassadeur de France dans la péninsule ibérique (2), A la suite de cette publication, des cultures furent tentées avec le mème succès dans les départements des Pyrénées, de Vaucluse et du Gard {3). Maïs antérieurement, en 1723, des essais isolés et cependant favorables avaient été faits par Nissole au Jardin Botanique de Mont- pellier (4) avec des graines provenant de Curaçao. Sonnini relate des expériences faites au commencement du x1x° siècle avec succès en Dauphiné; on tenta aussi le même essai mais sans résultat aux envi- rons de Paris. À la même époque on fit, mais avec succès cette fois, des plantations à Naples, en Piémont, à Trévise et dans d’autres parties des Etats d'Italie : ces résultats favorables furent publiés dans le Giornale encyclopedico di Napoli 1806. Enfin, M. Bois, assistant au Muséum, a repris les expériences de la culture de l'Arachide dans les Landes et dit dans son excellent livre intitulé modestement « Le Potager d’un curieux » (Paris, Librairie Agricole 1899, page 35) : « Nous « avons cultivé l’Arachide dans le département des Landes où nous (1) En Espagne, d’après Ulloa, la culture de l’Arachide a donné 200 et 300 pour 1. Ce résultat semble exagéré. (2) Recueil de mémoires, instructions, observalions, expériences et essais de l'Ara- * chide imprimé à Mont-de-Marsan — an X. (3) On a prétendu que ces cultures avaient donné, après 4 à 5 mois de semis, de 1,500 à 2,00 kil. de graines d'où on peut extraire de 40 à 43 0/0 d’huile, ce qui fait une moyenne de 720 kil. (4) Mémoires de l'Académie des Sciences, 1723, pl. 19. 952 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION A « savions que des essais avaient été faits sous le premier empire. « Nous avons ensemencé une planche formée de sable fin noirci par « les détritus de Bruyère et de Fougère. La végétation s'y est faite « régulièrement mais sans grand développement. Nous avons eu « cependant le plaisir de faire une petite récolte. » Cette affirmation réduit à de plus justes proportions les évaluations attribuées aux récoltes du Gard, du Vaucluse et des Pyrénées. Quant à nous qui avons opéré dans des conditions de terrain moins favorables que M. Bois, voici les résultats que nous avons obtenus : Les plants ont atteint une moyenne de 0°40 de hauteur. Chaque pied a donné en moyenne trois gousses müres contenant chacune deux graines, rarement une seule. Ces gousses pesaient de 2 à 3 grammes. Le poids moyen de chaque plante, radicelles non comprises, était de 15 grammes. Les graines ne sont jamais parvenues à maturité et à développement complet. Mais le but recherché, c'est-à-dire montrer la plante dans toutes ses phases végétatives était atteint. A 2° Le Jute (Corchorus capsularis L..) est une plante textile en honneur dont les produits sont très employés dans l'industrie française. Cette plante à été obtenue en une petite plate-bande dense; elle a fleuri et fructifié. Les tiges qu'elle a données ont atteint 1"45 de haut et un poids compris entre 100 gr. maximum et 51 gr. mirimum. On sait que cette plante indienne annuelle, qui est exploitée comme textile avec sa congénère Corchorus olitorius L., exige pour sa culture économique environ 26° de moyenne annuelle. Par les résultats que nous avons obtenus, il est démontré qu'elle peut parcourir ses diverses phases végétatives pendant la durée de nos mois chauds méditerranéens. Elle avait été semée sur place en mai, et était en pleine fructification en septembre : toutefois ses capsules demeurées très petites n’ont pas donné de graines müres. Les tiges que nous avons récoltées ont été soumises au rouissage pendant le mois de novembre et ont donné après 15 jours de station dans l’eau chargée de matières organiques des résultats fort médiocres; la fibre était àpre et tenace parce qu'on avait laissé trop lignifier les écorces. La récolte s'était faite trop tar- divement. Le succès cultural de cette plante textile, dans notre région méditerranéenne par 42° de lat. nord, n’a rien de bien surprenant si on tient compte de ce fait qu'elle est cultivée industriellement au Japon, qui est compris entre 32 et 45° de lat. nord. Il est vrai que cette culture se fait surtout dans la partie sud du Japon, ce qui me conduit à admettre qu'elle réussirait bien, selon toute probabilité, déjà dans nos possessions d'Algérie. Mais cependant il ne faut pas oublier que le Jute aime les terrains frais argilo-sablonneux avec des dépôts marneux d'alluvion; sa culture productive réclame un climat chaud et humide où les pluies cependant ne soient pas trop abondantes et ou il y ait des alternatives de soleil et de pluie, conditions qu'il ne sera pas trop facile de rencontrer en Algérie. Il est plus que probable du reste que cet essai à du tenter le zèle bien connu jdu savant Directeur du Jardin du Hamma à Alger, qui nous renseignera sur les résultats obtenus. Les À SUR QUELQUES CULTURES TROPICALES 253 3° L’Ousounifing où pomme de terre du Soudan (1) est fournie par une Labiée que M. Max. Cornu a nommée Plectranthus Coppini et qui a fleuri pour la première fois en Europe en plein air dans le Jardin botanique colonial de Marseille. J'ai obtenu, en effet, tout à la lois la floraison sous bâche dans des plantes en pot, et en plein air sur des pieds venus en pleine terre. Les semis avaient été faits par des tuber- cules provenant du Mossi (Wagadougou-Soudan) soit de l’Indo-Chine par le Jardin Botanique de Saïgon, qui avait cultivé la plante après réception du muséum (M. Cornu) de tubercules africains. J'ai pu grâce à cette floraison, en belles inflorescences de fleurs bleu pâle, m'assurer que cette plante appartient au genre Coleus et non au genre Plec- tranthus, et que ce n’est pas le Coleus edulis Vatke, d'Abyssinie (2).11 est probable que c’est une espèce nouvelle que j'appellerai volontiers Coleus Coppini, pour perpétuer. comme a voulu le faire M. Max. Cornu, le souvenir du premier importateur des tubercules en Europe. Voici ce qui me porte a croire quil s’agit d’une plante abyssine. Les indigènes du Soudan, d'après M. Chevalier, prétendent, en effet, que c'est une plante provenant de l'Est. Le fama (roi) de Madamba affirme que la plante a été apportée autrefois sur les bords du Niger par un noir musulman du nom de Birama et ce serait-la l’origine du nom de Fabirama (mot à mot Fa, le père; Birama) qu'en donne à cette plante dans la région de Ségou; quant au nom d'Ousounifing qu'on attribue à la même plante dans les autres régions du Soudan et notamment au Mossi, il signifie littéralement petite patate noire (owsou, patate; m2, petite; fing, noire) (3). Ce végétal n’a donc pas de nom indigène dans cette région soudanienne, et c'est là une indication qui corrobore l'hypothèse de son introduc- tion de l’Est, admise par les indigènes du Soudan. Un autre fait con- duirait à la mème conclusion, c'est celui de la floraison de cette plante en pleine terre à Marseille. En novembre 1900, ces plantes, qui ne sont du reste pas annuelles, ne paraissaient pas souffrir outre mesure de nos nuits froides de l'automne, tout au plus si les feuilles ont un peu changé de couleur, passant du vert clair au brun rougeûtre (1). (1) Le R. P. Sébire, dans ses Plantes utiles du Sénégal (p. 213) datant de 1899, ne fait que citer au Soudan l'existence de cette plante et dans les termes sui- vant : « Derrière Richard-Toll, on trouve une sorte de Coléus sauvage dans les « endroits inondés, et au Soudan un Colèus tubéreux comestible. » (2) Le Coleus tuberosus Rich. ou C. edulis Vatke a les fleurs jaunes etles feuilles sessiles, oblungues, et lancéolées aigues (voir Tent. flor. Abyss. A. Richard, p. 185), tandis que celles de l’'Ousounifing sont longuement péliolées, ovales acuininées (fig. 14). (3) La culture de l'Ousounifing paraît être très étendue dans le Soudan. La Revue des cultures col. du 20 février 1901, p. 107, dit à propos d’un concours agri- cole à Conakry (Guinée française) en 1899 : « A cette liste, on doit ajouter un «apport de Coleus tuberosus provenant du cercle de Kar kan, où cette plante « est cultivée par les indigènes et dont la culture devrait ctre vulgarisée dans « toute la colonie «. Il y a évidemment erreur dans la dénomination spécifique de la plante, mais le fait de sa diffusion culturale réalisée ou désirée n'en est pas moins important, car il démontre l’excellence du produit (tubercule) qui, dans les contrées chaudes, est appelé à remplacer celui du Solanum tuberosum L. La pomme de terre ordinaire ne réussit pas bien dans les régions tro- picales. (1) Si cette plante était originaire des plaines du Soudan, il est probable qu’elle ne fleurirait pas en pleine terre sous notre climat et que les premiers froids la feraient périr irrémédiablement. 11 semble donc admissible, confor- mément à l'opinion des indigènes soudanais, que cette plante doit provenir des haut plateaux d’'Abyssinie. 254 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION Sous bâches, les plantes ont fleuri en fin octobre (elles avaient levé en 1899). Les plantes en pleine terre ont fleuri en novembre, mais leurs fleurs sont restées très petites et la plupart non épanouies.les inflores- cences étaient rabougries. Dans les régions tropicales de l'Afrique, les racines sont pourvues de tubercules, et ceux-ci rappellent ceux de la pomme de terre comme saveur et odeur, maïs ils sont de petit volume et noirs extérieurement. Jouant un grand rôle daus l'alimentation des indigènés et des Européens au Soudan, ils y tiennent lieu de notre pomme de terre. Nos plantes n’ont donné que de très petits tubercules, soit sous bâche soit en plein air; mais le résultat n'a pas lieu de sur- prendre si on tient compte de ce fait que les Ousounifing se sont développés surtout en tiges et en feuilles. On cultive, en ce moment au Jardin colonial de Vincennes, un Coleus comestible venant de Madagascar et étiqueté C. tuberosus Rich., nom qui est un synonyme de C. edulis de Vatke. Cette plante a été aussi exposée en 1900, dans la serre du Jardin colonial de Vincennes, au Palais de l'Administration des Colonies, sous le même nom. Elle m'a paru très rapprochée de notre Ousounifing. bien que je n'aie pu l'exa- miner que très rapidement et sans les données {des organes floraux. C'est peut-être une espèce nouvelle, mais, à coup sùr, cette plante présentée comme provenant de Madagascar, n'est pas le Coleus tube- rosus Richard, originaire d'Abyssinie. Il se peut que ce soit le Plec- tranthus ternatus Sims, appelé vulgairement « Pomme de terre de Madagascar » ou Oumine,ou Matambala, qui est originaire des Comores et de Madagascar d'où elle a été introduite à Maurice et sur la côte occidentale de lAfrique du Sud (Transwaal, etc.), enfin au Congo français. L'Ousounifing a été l’objet d'une courte étude de MM. les docteurs Le Dantec et Boyé (Annales d'Hygiène et de Médecine colo- niale, T. III, 1900, n° 2. p. 286), d'où Il résulte que ce tubercule ren- ferme 15 0/0 d'amidon et 83 0/0 d’eau; sa teneur en azote et autres prin- cipes n'est pas indiquée; les grains d’amidon rappelleraient, par leur forme, ceux du Manioc (Jatropha Manihot T.). Ce travail est à com- pléler, et je me réserve de le faire, si possible, dans une monographie spéciale. 4° Benincasa cerifera Savi. Cette plante originaire de l'Inde chaude, réussit admirablement en pleine air depuis plusieurs années que M. Davin la cultive au Jardin colonial. Les fruits que nous en avons obtenus sont toujours très développés et très sains : la plante est cul- tivée en espaliers. Ces fruits sont plutôt ovoïdes que cylindriques, ce qui me porte à croire que les plants producteurs appartiennent à la variété à laquelle Ch. Naudin a attribué une origine chinoise : ce qui me confime dans cette manière de voir, c'est que la sécrétion de la cire y est peu abondante, eu égärd aux dimensions et au poids des fruits, ainsi qu'on jugera par le tableau suivant indiquant les quantités pon- dérales de cire obtenues sur 6 fruits mûrs et développés provenant de la récolte de 1900 (novembre), Or, c’est là encore une des caractéristiques de cette variété chinoise d’après Ch. Naudin. SUR QUELQUES CULTURES TROPICALES 255 Petit diamètre Quantité de cire Poids Grand diamètre moyen obtenue N°4, 3240 gr. 037 0 31 0 gr.52 \ La quantité de cire NE 229000 0 35 0 20 Al 10 sécrétée, toujours NS ME 219580 » » 0 22 È très faible, n’est NÉS 52500 » » (Q 80 pas en relation NP AS DE 0 0:55 0 20 AONOS constante avec le N° 6 3.440 » 0 56 0127 il 10 volume du fruit. Ces fruits ont été trouvés agréables par ceux qui les ont consommés en potage, mais à la condition d'étre cueillis avant leur maturité complète : plus tard la chair devient compacte et s'adapte difficilement aux apprèts culinaires. C’est sans doute avec cette réserve qu'il faut accueillir les éloges qui n'ont pas été ménagés au produit de cette cucurbitacée indienne encore très peu répandue dans nos cultures méridionales où elle paraît, du reste, se complaire comme dans son pays d'origine. Cependant nous devons dire que nous n'avons jamais obtenu de fruit aussi développé que celui qui, de provenance algé- rienne, à paru d’après Ch. Naudin (cité par Bois, Potager d’un curieux, p. 5) à l'Exposition Universelle de 1855, à Paris, et qui mesurait 02,60 de long sur 0”, 20 à 0*.,25 d'épaisseur. Malgré ce succès cultural, je ne sache pas, du reste que le fruit du Benincasa se soit introduit couramment dans lalimentation publique en Algérie. Nos fruits se conservent admirablement pendant tout l'hiver. En ce moment, fin février, nons avons encore toute notre récolte de novembre de 1990 par- faitement saine. C'est là une supériorité indéniable sur un grand nonibre de fruits de cucurbitacées employés dans l'alimentation pu- blique. J'arrête là cet exposé, mais je me propose de revenir ultérieurement sur le même sujet qui est devenu tout à fait de circonstance. L'Association scientifique pour l’Avancement des Sciences, dont le congrès annuel doit se tenir à Ajaccio en septembre 1901, a introduit dans le cadre des sujets à traiter devant la 14° Section (Agronomie), la question des cul- tures coloniales susceptibles d’être introduites en Corse. Les résultats que je viens de faire connaitre et ceux que je pourrai fournir devant le Congrès d'Ajaccio, pourront donner tout au moins des indications expérimentales sur le choix de ces cultures : ce sera également une base sérieuse de discussion. On cultive déjà en Corse avec succès le Cédratier (Citrus medica Risso), le Caroubier (Ceratvnia Siliqua L.), on pourrait y introduire avec quelques chances heureuses celles du Jute, comme textile, du Physalis peruvianæT,. pour en faire des con- diments; le Ziatris odoratissima Willd. ou plante par excellence à Coumarine, la Chayotte (Sechium edule SW.) dont on utilise le fruit comme comestible et la paille pour la confection de chapeau de femme et menus objets de fantaisie sous le nom de paille de chouchoute ou de chouchow à la Réunion et dans l'Inde; enfin le Psophocarpus tetrago- nolobus DC. de la Réunion, qui donne un bon légume. Je ne parle pas de la Ramie, dont le rendement n’est rémunérateur pour l’agriculture que dans les régions tropicales, mais peut-être le Thé réussirait-il sur certains points humides et chauds de la côte Est de l'ile. Il y a là tout un programme de recherches à réaliser. 256 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION L'ELEVAGE pu MouToN DANS LA COLONIE pu Cap Mouton à grosse queue, dit Mouton du Cap. — L'élevage de cet ani- mal se fait concurremment dans cette contrée avec celui de race méri- nos. Il est toutefois de moindre importance au Natal et au Sud-Est transvaalien. Mais, tandis que le deuxième, avant d’être livré à la bou- cherie, a donné plusieurs rendements sous forme de laïne d'agneau d'abord, et tout au moins de deux tontes d'adulte,le premier ne saurait en donner qu'un seul : celui de viande de boucherie. Cependant, le colon du Cap s’est {plutôt appliqué ces derniers temps à augmenter la production du Mouton à grosse queue qui, au premier abord, semblerait moins rémunératrice que le mérinos. La raison en est due principale- ment à la baisse des laines et ensuite parce que, à poids égal, le Mou- ton à grosse queue peut êlre livré à la boucherie dès l’âge de neuf mois, tandis que le mérinos ne peut guère l'être avant dix-huit mois ou deux ans; quant aux prix ils sont les mêmes, malgré la différence d'âge. De plus, la brebis à grosse queue est beaucoup plus précoce et prend (et c'est là une règle générale) le bélier à l’âge de six mois, tandis que la brebis mérinos ne le prend qu'à l’âge de dix-huit mois. Enfin, à poids égal, le Mouton à grosse queue est plus avantageux, parce que la queue (13 kilogr. 600). obtient un prix plus élevé que la chair elle- même. Cette queue ne produit pas de suif, mais une graisse fort esti- mée des habitants du Cap et qui est, paraït-il, supérieure au saindoux lorsqu'elle est préparée avec soin. En moyenne, un Mouton à‘grosse queue, lorsqu'il est vidé et dépouillé, pèse 4 livres anglaises (20 kilogr. 450), mais il n'est pas rare, s’il a reçu une bonne alimentation, de trouver un animal atteignant le poids de 34 kilogr. Le prix de ce Mouton n'est pas très élevé en tant qu'animal repro- ducteur. On peut se procurer un bon bélier dans les prix de 50 à 75 fr., une brebis d'un an de 35 îÎr., et un agneau de six mois de 27 fr. 50. Mouton à grosse queue dit de Perse. — Un peu plus petit que celui du Cap, ce Mouton est non seulement aussi précoce, mais encore plus facile à élever et à engraisser. La quantité de saindoux accumulée dans la queue dépasse encore celle du Mouton du Cap; de plus, celte agglo- mération de matière adipeuse, au lieu de rester pendante, s’accumule au-dessus du bas du dos ne gènant pas ainsi les mouvements. Cette espèce, qui est tout aussi susceptible que l’autre d'ètre élevée en troupeau, pourrait très bien, vu sa facilité d’assimilalion de nourri- ture, s’acclimater à Madagascar, où l'élevage aurait grande chance de donner des résultats satisfaisants. Le prix de cette espèce est plus elevé que celui du Mouton du Cap. Cependant des jeunes béliers de race pure peuvent s’obtenir au prix de 75 à 100 fr. et les brebis de 35 à 40 fr. (Bulletin agricole de l'Algérie et de la Tunisie). Librairie et Imprimerie Horticoles, $S4 bis, rue de Grenelle, Paris. BULLETIN DE LA DEEE ANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 48° ANNÉE 2202 LE SEPTEMBRE 1901 SOMMAIRE CG. SEURAT. — L’Éponge 8 CC OO BD OO MORE LED CPS Re RAT TT EL D UE TA ME AU 251 RABUT. PE Pananier du Hamas LU, RARE AMAR ET ARE rene a 283 à Extraits et analyses DE D OMR — Les Moutons d’Algérie et de QURISIEE FR Re ee 284 à Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. fi; —CECNSD—— Ée. Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 4 AU SIÈGE SOCIAL 4 DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue de Lille. — PARIS Le Bulletin paraît tous les mois. SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Fondee le 10 Fevrier 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 41, RUE DE LILLE — PaRis BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1907 Président. M. Edmond Perrier, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Médel cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Muséum d'Histoire Naturelle, Pariss Baron Jules de GUERNE 6, rue de Tournon, Paris. Vice-Présidents. Comte de PoNTBRIAND Sénateur, boulevard Saint-Germain 238, Paris. GC. RAVERET-WATTEL, Directeur de la Station aquicole du Mid-dé-Verdier] 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire-général : M. Maurice Loyer, Avocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. MM. le D: Sesizorte, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris (Intérieur). É. H. Hu, Directeur-adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint Germain, Paris (Conseil). Secrétaires. L. SEURAT, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). G. Fron, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin colonial 19, rue de Sèv res, Paris (Etranger). Trésorier. M. Ch. Desreuiz, Avocat à la Cour d'Appel, 25, rue de Chateaudun, Paris. _ Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d'Orrevrzee, à Versailles. Membres du Conseil . MM. L. BINGEr, Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, DAC des affaires d'Afrique à au Ministère des C! “nies, 15, rue ge Prony, Paris. Edouard BLANC, L:- :oraleur, 52, rue de Varenne, Paris. D: Raphael BLancaarr, Membre de l'Académie de Médecine, professeur à la Faculté . Médecine, 226 boulevard Saint-Germain, Paris. Comte Raymond de Dazmas, 26, rue de Berri, Paris. Le Myre De Virers, Député de la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. P. MARCHAL, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de la Station entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. L. Mersey, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pêche et de la Pisci- culture au Ministère de l'Agriculture, 87, boulevard Saiut- Michel, Paris. A. Micur-PouTINGoN, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, 4h, rue de la Chaussées d’Antin, Paris. E. OusTALET, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue Notre-Dame- 1e Champs, Paris. A. RAILLIET, Membre de l’Académie de Médecine, Professeur à l'Ecole vétérinaiil d’Alfort (Seine). Rob TrousssArTr, Président de la Société Zoologique de France. 145, rue de la Pompe} aris. à 4 Presidents honoraires : MM. Albert Grorreoy-SaiNT-HiLAIRE, à Vault de Lugny, par Avallon (Yonne) Le MYRE DE VILERS, 3, rue Cambacérès, Paris. 6 Secrétaires Généraux honoraires : MM. Amédée BERTHOULE, 4, avenue des Ternes, Paris. 2 # Baron Jules de GUERNE, 6, rue de Tournon, Paris. Membres honoraires du Conseil : MM. P. de LaBouLAye, 129, avenue des Champs-Elysées, Perl Dr P. MÉanin, 6, avenue Aubert, Vincennes. 1 Dr Ed. MÉxE, 20, rue Oudinot, Paris. SE . D: J. Micnon, Hs rue de Babylone, Paris. {5 Dr Weger,. 180, boulevard Saint-Germain. Paris. D: L'ÉPONGE HISTOIRE NATURELLE; PÉCHE; ACCLIMATATION; SPONGICULTURE par L.-G. SEURAT Docteur ès sciences, Zoologisle du Laboratoire Colonial du Muséum Secrétaire de la Société La pèche des Éponges, qui s'effectue tous les ans en Tunisie, dans le Golfe de Gabès, donne lieu à un mouvement annuel d’affaires, dans le port de Sfax, d'environ trois millions de francs. Il nous à paru intéressant de recueillir quelques données sur la biologie de l'animal qui donne ce produit, sur la pêche, et les essais de culture dont il a été l’objet. On distingue dans le commerce deux sortes principales d'Éponges : les unes, petites, compactes, sont connues sous le nom d'Éponges fines ou Éponges de toilette; les autres, plus grosses, sont parcourues par un système de lacunes urosses comme le doigt, s’'anastomosant dans tous les sens, ce sont les Éponges communes. L'Eponge de toilette est donnée par le squels{te corné de différentes variétés de l'Zuspongia officinal."et par celui de l'Zuspongia ziimocca Schm.; l'Éponge commune, qui fait l'objet du commerce d'Eponges de la Tunisie est le squelette d'une Éponge appartenant à une espèce et à un genre diffé- rents, l'Aippospongia equina var. elastica Lend. L'Éponge de toilette est connue depuis la plus haute anti- quité : les héros d’'Homère en faisaient déjà usage. Aristote connaissait l'Éponge fine et l'Éponge commune. L'Éponge est fixée au rocher, au fond de la mer, par une lame basale mince, cornée; à l’état vivant, elle est entourée d'une enveloppe de consistance gélatineuse, de couleur foncée; quand’l'Éponge est mise hors de l'eau cette subs- tance ne tarde pas à entrer en décomposition en dégageant une odeur nauséabonde. C'est cette enveloppe qui donne a l'Éponge vivante sa couleur foncée : dans le golfe de Gabès, les Hippospongia ne manquent jamais d'attirer l'attention grâce au peu de profondeur et à la transparence des eaux, Bull. Soc, nat. Accl. Fr, 1901. — 17 258 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION par leurs masses sombres et leurs larges oscules béants (1). L'Euspongia officinalis var. adriatica est d'un gris-violet brun sur la face dorsale qui regarde la surface de la mer, cette couleur passant à un gris jaune-clair sur les côtés; l'Éponge n'est d’ailleurs colorée que sur une épaisseur de sa substance de un demi à un millimètre; l'intérieur est jaune clair. Squelette. — Le squelette des Éponges usuelles est cons- titué par un échafaudage plus ou moins serré de fibres d’une substance cornée, dont la composition et les propriétés sont voisines de celles de la soie; cette substance qui se dissout dans les acides bouillants, a reçu le nom de Spongine; elle. a pour formule, d'après Krukenberg, C" H*° Az° O"; elle résiste à l'action d'une solution ammoniacale de sous-oxyde de nickel qui dissout la soie. Si on chauffe en vase clos dans l’eau, jusqu’à 200 degrés, elle devient visqueuse. Le squelette des Eponges fines {Zuspongia officinalis)est formé de deux sortes de fibres : des fibres principales, non ramifiées, partant de la plaque cornée par laquelle l’'Eponge est fixée au support et se dirigeant radialement et longitu- dinalement; ces fibres ascendantes se terminent à la surface dans de petites protubérances coniques de la peau, qui dans l’Æ. officinalis var. adrialica ont un milli- metre de hauteur et un millimetre de diametre à leur base; ces fibres contiennent de petits grains de sable et d’autres corps étrangers enchassés dans la spongine; dans les va- riétés les plus recherchées, les plus fines de l'Éponge offici- nale, ces fibres principales n’ont pas un diamètre supérieur à six centièmes de millimètre; dans les variétés qui donnent les Éponges plus dures, elles ont de six centièmes à un dixième de millimètre. Entre ces fibres squelettiques ascen- dantes s'étend un réseau de fibres connectives beaucoup plus fines, s'anastomosant sans cesse, dont l'épaisseur varie de cinq à neuf millièmes de millimètre, les mailles du ré- seau qu'elles forment n'excédant pas quatre centièmes de millimètre de largeur; ces fibres sont formées par de la spongine pure, et ne contiennent aucun corps étranger. Dans l'Euspongia officinalis, les plus grosses fibres connec- tives ne sont jamais plus de deux fois plus épaisses que les plus fines. (4) Topsexr E. Éponges du Golfe de Gabès; Mn. Soc: Zoot. oi ance T,Vir, p. 37; 1894, - | È | | ; L'ÉPONGE 250 La surface de l’Éponge vivante, présente un certain nombre d’orifices visibles à l'œil nu, de plusieurs millimètres de dia- mètre, appelés oseules : le diamètre du champ de l’oscule, entouré d'une couronne de protubérances où se terminent des fibres ascendantes, est d'environ deux à trois millimetres dans l’Æ. officinalis var. adriatica et dans la var. exigua; dans l’Éponge officinale, les oscules peuvent atteindre cinq millimètres de diametre. Ces orifices, ou oscules, mènent dans de larges canaux qui pénetrent, en se ramifiant, à l'in- térieur de l'Éponge; leurs ramifications terminales, très fines, ne sont pas visibles à l'œil nu. La surface concave de la peau située entre les protubé- rances coniques est percée de très nombreux et très petits pores, que l’on ne peut apercevoir qu'à la loupe, cette sur- face apparaissant alors sous l'aspect d’un crible; ces pores sont entourés d’une membrane annulaire contractile, qui en : se con#actant en rétrécit l'ouverture et peut même les fer- mer complètement; ces orifices conduisent dans des canaux situés sous la peau, desquels partent de nombreux canali- cules de un millimètre de diametre environ, qui se divisent bientôt en branches très fines, lesquelles vont s'ouvrir finale- ment dans des chambres creusesarrondies, qui dans l'Éponge officinale ont trois à quatre millièmes de millimètre de dia- metre; environ quatre branches terminales s'ouvrent dans une même chambre; un autre canal part de ces chambres, et n'est autre chose que l’une des ramifications terminales des gros tubes qui, partant des oscules penetrent à l'inté- rieur du Corps. Les canaux qui traversent la masse de l'Éponge sont revé- tus intérieurement d'une assise de cellules aplaties qui portent chacune un cil. Le revêtement interne des chambres dontnous avons parlé plus haut est formé d'une soixantaine de cellules très hautes, dont les extrémités libres, tournées vers l’intérieur, portent chacune un court tube membraneux cylindrique, qui forme une collerette entourant un fort cil inséré au milieu de l'extrémité libre de la cellule; ces cel- lules sont dites cellules à collerette ou choanocytes. Les cils des cellules à collerette, ainsi que ceux des cel- lules formant le revètement interne des canaux efférents sont continuellement en mouvement et ce battement des cils à pour effet de déterminer un courant d’eau qui traverse continuellement l'Éponge quand elle est en bonne santé, l’eau entrant par les pores de petit diamètre ou pores inha-. 260 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION lants situés à la suface et sortant par les oscules; l'existence de cette circulation d’eau à travers le système des canaux qui traversent la masse du corps en tous sens à été signalée des 1825 par Grant; il suffit, pour la constater, de placer une Éponge vivante dans un aquarium contenant de l’eau tenant en supension des granules colorés, par exemple des gra- nules de carmin : le carmin pénètre rapidement à l'intérieur du corps de l'animal et au bout de quelques heures (Éponges marines) le corps entier est rempli de la matière colorante; on retrouve les granules de carmin dans les chambres ciliées. L'absorption des aliments a lieu à l'intérieur du corps, et . non par la surface : l’eau qui traverse le système des ca- naux de lEponge contient des substances dissoutes et d’autres en suspension; les corps les plus gros, tenus en suspension, ne peuvent pas pénétrer à l'intérieur de l'Éponge, à cause de la petitesse des pores inhalants. Ce- pendant quelques-uns, parmi lesquels des grains de sable, pénètrent en provoquant une blessure de la peau : ce sont ces grains de sable que l'Éponge utilise dans la formation des fibres principales du squelette. Les matériaux qui entrent dans les chambres ciliées sont absorbés par les cellules à collerette :-celles-ci absorbent tous les corps qui viennent à leur portée, gardent ceux qui sont utiles pour l'Éponge et rejettent les autres; elles sont chargées de l'élaboration dé ces aliments et des fonctions d'excrétion. Les pores inhalants ne laissent pas passer indistinctement tous les corps: ils se ferment rapidement quand l’eau contient en dissolution ou à l’état de suspension des substances nuisibles : il suffit par exemple d'ajouter de la strychnine à l’eau dans laquelle se trouve une Éponge pour arrêter le courant d'eau et voir les pores imhalants se fermer. Le lait est une des rares substances parmi celles dont dispose le physiologiste qui ne provoque aucun mou- vement de contraction de ces pores. Les espaces compris entre les canaux et leurs ramifica- tions sont occupés par une masse sans structure, de consis- tance muqueuse, dans laquelle sont incluses de nombreuses cellules, les éléments génitaux et le squelette; cette sub- stance qui s'écoule quand on sectionne l'animal est désignée sous le nom de « lait d'Éponge » par les pêcheurs grecs (1). (4) EcxxeLzz. Der Badeschwamm. Triest 1873. MRPPONCEN LE | 261 On trouve dans cette masse des cellules migratrices ami- boïdes, qui prennent la nourriture élaborée par les cellules à collerette et sont chargées de son transport (1 et 2). Les fibres du squelette sont secrétées par des cellules situées à leur surface, et désignées sous le nom de spon- goblastes; la secrétion de ces cellules se dépose en assises concentriques autour des fibres, et se durcit bientôt : elle est constituée par de la spongine; quand les fibres ont ainsi atteint leur grosseur définitive, les spongoblastes meurent et disparaissent; les fibres ascendantes ou princi- pales accroissent leur diametre de la même façon; en outre un capuchon de spongoblastes recouvre leur extrémité ter- minale et dépose sur leur pointe sans cesse de nouvelles assises de spongine : l'accroissement en longueur de ces fibres est assuré de cette facon. La spongine secrétée par les spongoblastes agglutine d’ailleurs les corps étrangers, grains de sable en particulier, qui pénetrent de l'extérieur à travers la peau de l'Eponge. Eponges communes Les Éponges dites communes sont fournies par le sque- lette de diverses espèces du genre Hippospongia,.-en parti- culier par LA. equina var. elastica (Méditerranée) et par l’Æ. canaliculata var. gossypina (Bahamas, Floride). . Elles sont généralement aplaties, souvent leur forme est celle d’une miche de pain, et peuvent atteindre une très grande taille : «une Éponge usuelle appartenant à la collec- tion du Muséum d'Histoire Naturelle rapportée de Syrie par M. Albert Gaudry, est une coupe circulaire de près d'un metre de diamètre » (3). Certains spécimens des iles Baha- mas, en forme de gâteau, mesurent un métre de diametre, Les oscules sont très grands; les pores inhalants également plus grands que dans l'Eponge de toilette, conduisent dans de vastes cavités vestibulaires situées sous la peau, de cinq à dix millimètres de diamètre, et anastomosées entre elles : l'existence de fibres squelettiques ascendantes principales, . (4) Lexvoenrerr. Experimentelle Untersuchungen über die Physiolo- gie der Spongien. Zeitsch. f. Wiss. Zool. Bd. 48; 1889 p. 406-700. (2) LexpexreL. Die Lebenserscheinungen des Badeschwammes..Z00- log. Garten xxx: Jahrg. n° 4 April 1890 p: 97-104... PT rre (3) EnmoxD Perrier. Traité de Zoologie, p..540: Paris 18934 : ee 262 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION parcourant toute la masse de l'Éponge perpendiculairement à sa surface, est ainsi devenue impossible. La couleur du squelette est la même que dans les Éponges fines : le tissu est beaucoup plus lâche, et facilement déchi- rable. Les fibres connectives forment un réseau à mailles de un à quatre dixièmes de millimètre de largeur. IL ÉPONGE OFFICINALE : DISTRIBUTION GEO- GRAPHIQUE DE QUELQUES - UNES DE SES VARIETES. — Il existe plusieurs variétés de-l'Éponge officinale; Lendenfeld (1) en admet onze, dont un certain nombre nous intéressent plus spécialement. 1. Euspongia officinalis var. mollisstina : cette Éponge est désignée dans le commerce sous le nom d'Éponge fine du Levant; on la trouve dans la mer Egée, la partie orien- tale de l'Adriatique, et dans la Méditerranée orientale. Elle est en forme de coupe ou de champignon, et les oscules sont limités à la face supérieure et groupés au centre de l'excavation de cette face supérieure; à ces oscules abou- tissent des canaux vecteurs arrondis de trois à quatre mil- limetres de diamètre; les Canaux partant des pores inha- lants sont beaucoup plus étroits, mesurant un millimètre de diametre. Les fibres du squelette sont molles, toutes de même épaisseur, et tres élastiques; les fibres ascendantes n'ont pas un diametre supérieur à neuf centiemes de millimètre. 2. Le Officinalis var. adriatica, est l'Éponge fine de l'Adriatique; on la rencontre dans la partie orientale de la Méditerranée, dans l'Adriatique, sur la côte africaine de la Méditerranée, et à la Havane (Antilles). Le tissu est moins fin et moins élastique que dans la variété précédente; les oscules ne sont plus cantonnés uniquement sur la face dorsale de l'éponge : ils sont le plus souvent distribués assez irrégulierement. 3. E. officinalis var. nilens Schm. : cette variété habite l'Adriatique et les côtes d'Algérie et de Tunisie; M. Che- vreux l’a rencontrée dans le golfe de Gabès par des fonds de 19, 20, 22 et 38 metres (2). (4) LENDENFELD. A. Monograph of the horny Sponges; London 1891; 936 p. 50 PL. (2) Topsenr. Éponges du Golfe de Gabès. Mém. Soc. Zool. France Tome vit p. 43 et 44; 1894. | M. L'ÉPONGE 263 : 4. H. officinalis var. exigua se trouve dans l'Adriatique, et dans le golfe de Gabès par des fonds de sables et de Zos- tères de 21 à 22 mètres (1), et à l'ile Maurice (2); sa valeur marchande est très faible. 5. LE. officinalis var. lamella Schulze, a la forme d’une lame aplatie pouvant atteindre un demi-mètre carré de sur- face et épaisse de un centimètre seulement; elle vit dans les eaux profondes sur les côtes de Dalmatie, autour de l'ile de Lesina, et dans le détroit de Torres. II. EUSPONGIA ZIMOCCA Schm. L’Euspongia zimocca est connue dans le commerce sous le nom d’« Eponge dure » ; en Dalmatie on la désigne sous le nom d'Éponge zimocca. Le squelette est de couleur brun-jaune foncé; il-est plus dur et plus ferme que celui de l'Éponge fine de toilette : les fibres connectives sont en effet plus fermes, plus dures et plus épaisses que celles de l'Éponge officinale; elles ont un diametre moyen de trente à quarante-cinq millièmes de millimètre; les fibres principales ont un diamètre de quatre centièemes de millimètre, et sont presque entièrement dé- pourvues de grains de sable. La forme extérieure est également différente : on trouve rarement des formes massives, mais le plus souvent l'Éponge zimocca affecte une forme de clé à manche large et court ou d'entonnoir, mince sur les bords, plus épais en son milieu. Cette espèce habite l'Adriatique, la mer de l'Ar- chipel grec et les côtes de Barbarie. III. ÉPONGE COMMUNE. L'Eponge commune de la Médi- terranée est le squelette de l’'Æippospongia equina var. elastica Lend.; cette espèce est très abondante dans le golfe de Gabes, où elle fait l'objet d'une pêche très importante; ces Éponges du golfe de Gabès sont exportées de Sfax et connues sous le non: d'Éponges de Marseille. Celles dites « Gerby » ou « Zerbi », provenant de l'ile de Djerba, ont des fibres un peu plus grossières et une couleur plus sombre. L'Hippospongia equina var. elaslica existe dans toute la Méditerranée : à la Calle, dans le Golfe de Naples, au large (4) TOoPSENT. Éponges du Golfe de Gabès. Mém. Soc. Zool. France Tome vit p. 43 et 44; 1894. (2) LENDENFELD. Monograph of the horny Sponges. 264 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION dés côtes de Sicile (1), dans l'Adriatique, sur les côtes ocei- dentales et méridionales de l’Asie-Mineure, à Chypre, sur les côtes de Syrie et sur les côtes d'Afrique; elle est d’ail- leurs pèchée dans ces différentes localités. La même espèce a été signalée sur les côtes atlantiques de l'Amérique, en Tasmanie, à la Nouvelle-Zélande et à l'ile des Pins (2). EÉponges de la Mer Rouge.— Les Eponges sont très abon- dantes dans la Mer Rouge; Keller (3) a décrit sous le nom d'Euspongia officinalis var. arabica une Eponge de toilette, de forme massive, un peu élargie à la base, qui s'élève en forme de colonne épaisse tronquée à sa partie supérieure. L'Eponge de la mer Rouge est moins élastique que celle de la Méditerranée, ce qui tient au grand nombre de grains de sable enrobés dans les fibres principales. On trouve cette espèce au milieu des récifs coralliens à une profondeur assez grande; à Souakim, à Massaouah, à Djebel Zeit et dans le Golfe de Tadjoura (4). Eponges américaines. Les Eponges sont très abondantes sur les côtes de l’'Amé- rique, en particulier sur les côtes de la Floride, aux îles Bahamas, dans la mer des Antilles et dans la mer des Ca- raïbes. Ces Éponges américaines n'ont d’ailleurs pas la grande valeur marchande de celles de la Méditerranée. Eponges de la Floride (5 et 6). — Les bancs spongifères de la Floride sont groupés en trois bandes séparées et allon- gées, situées le long de la côte méridionale et de la côte occidentale de cette presqu'ile. Le premier de ces banes, appelé Banc des récifs de la Flo- ride comprend à peu près tous les récifs de la Floride; il a (1) Hesse. Die Schwammfischerei bei der Insel Lampedusa (in 1897). Zool. Garten xxx1x p. 323. (2) LENDENFELD. Monograph of the horny Sponges. (3) KeLLER, Conrad. Die Spongienfauna des rothen Meeres. Zeitsch. für Wiss. Zoologie Bd. 48; p. 342-343 ; 1889. (4) Topsenr. Éponges du Golfe de Tadjouras Bull. Soc. Zool. de France T:xvur p. 1821893. Fan (5) STEARXS, Silas. Fishing Grounds of North . The Florida Sponges Grounds, in Fisheries and Fisheries Industr. of ire United States; VF ashinhton 1887; Sect. 111; p. 58; Chart-N° 17. LS (6) Brice J. Report U. S. Comm. Fish. and Fisheries je 1896; Washington, 1898 p. 263-278; Sponge-grounds p: 266: :: 2 NDÉPONGCE. nu : 265 une étendue linéaire d'environ 120 milles, commence près de Biscayne Key au Nord-Est, et finit au Sud dans le Canal du Nord-Ouest, juste à l'Ouest de Key West. La moitié Nord- Est de ce banc est très étroite, mesurant cinq milles de lar- weur moyenne; cette largeur est limitée au bord externe des récifs; à partir de Matacumbe Keys, les bancs couvrent toute la largeur des récifs: les Éponges vivent à de faibles profon- deurs, parmi les ilots, et le long des récifs. La baie de Bis- cayne est dans sa plus grande partie un excellent endroit pour les Éponges. Le second banc d'Eponges est situé le long de la côte occidentale de la Floride, à une distance de 4 à 8 milles de celle-ci; ce banc appelé banc d’Anclote s'élend sur une lon- œueur de 60 milles environ, du voisinage de Johns Pass, juste au dessus de Clearwater Harbor, jusqu à Cedar Keys, la largeur étant de 7 à 8 milles, et la profondeur de 3 à 6 brasses; le meilleur de ces bancs est celui du Récif Saint- Martin, situé au large de Homosassa et de Crystal River, entre les latitudes 28° 40° et 28° 50°. Au Sud-Ouest du Récif Saint-Martin se trouve le banc connu sous le nom de « New Ground », où d'excellentes Éponges sont recueillies par 42 à 45 siais de profondeur (Brice). Le troisième de ces bancs est celui de Rock Island, qui s'étend le long de la côte Nord-Ouest de la Floride depuis Cedar Keys jusqu'à la baie d’Apalachee et se termine juste à l'embouchure de la riviere St-Marks, sur une distance de 90 milles, et une largeur de 15 milles; cette bande spongi- fère est située à environ cinq milles de la côte, par trois à cinq brasses de profondeur. Les meilleurs fonds sont, au large de Piney-Point, entre les latitudes 29° 40° et 29° 50° juste au dessus de la baie de Deadman, à l'embouchure de la rivière Steinhatchee. La superficie totale des bancs spongifères de Ia Floride est évaluée à environ 3.000 milles carrés (Stearns, H. M: Smith (1). Brice énumère cinq espèces d’ Hponges vivant sur. ces bancs : celle dite « Sheepswool Sponge » est la plus esti- mée; c'est l’Jippospongia canaliculala var. gossypina; les autres espèces sont l'Æuspongia officinalis var. rolunda (Spongia agar icina) désignée sous le nom de « Yellow Sponge »; l’Hippospongia equina var. flabelhim (Spongia 4)-Suirx, Hugh M.: Report :U. S. Porn Hs and Fisheries for 1808 ; Washington 1899 DCR CR D PE NN A ee ARTE En UT 266 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION graminea) où « Grass Sponge »; l'A. equina var. meandri- niforimis ou « Velvet Sponge » et l’Euspongia officinalis var. lubulifera où « Glove Sponge ». La « Sheepswool Sponge » se rencontre par dix à quinze mètres sur des fonds généralement rocheux, rarement sur des fonds de vase ou de sable; le fond rocheux est presque toujours d’origine madréporique. La meilleure qualité est pêchée sur les bancs d’Anclote et de Rock Island. Les Éponges de la Floride sont de forme plus régulière que celles des iles Bahamas, et par suite leur valeur mar- chande est plus grande (1) : cette différence de qualité serait due à des différences dans la nature des fonds des bancs de ces deux régions. Éponges des Bahamas (2). Les bancs spongifères les plus étendus sont situés à l'Est, à l'Ouest et au Sud de l'ile de New-Providence:; quoiqu'ils soient situés assez loin de la côte et à une profondeur de six, douze et dix-huit metres, on peut apercevoir les Eponges à travers les eaux transpa- rentes sur le fond clair sablonneux. L'Eponge « Sheepswool » la plus grande et la plus fine se rencontre à l'extrémité Sud-Ouest de l'ile d'Andros, et sur les bancs d'Exuma; la « Velvet sponge » se trouve à l'Ouest de l'ile Bahama et à William's Cay. Le principal centre pourle commerce des Éponges des îles Bahamas est à Nassau (chef-lieu de l'archipel des Bahamas). Les Eponges sont situées sur des récifs très exposés à l’action des vagues, souvent à trente milles du rivage et dans des endroits où le courant est assez fort, atteignant quelquefois trois ou quatre nœuds à l'heure; ces courants ont d'ailleurs pour effet d'assurer le rencuvellement de l'eau et d'apporter aux Eponges les matières dont elles se nourrissent. Avant 1840, l'existence de ces bancs des Bahamas était inconnue; toutes les Eponges du commerce venaient de la Méditerrannée. En 1840, un commercant appar- tenant à une grande maison de commerce d'Eponges de la Méditerranée, de Paris, fit naufrage sur l’une des îles Baha- mas, lors d’un voyage de la Jamaïque en Europe. Il remar- (1) ALLEN, E. J. Rept. on the Sponge-Fishery of Florida and the arti- ficial Culture of Sponges. Journ. Marine Biol. Assoc. London (2) vol.1v, p. 188-194. (2) L. Simmons. The Commercial Products of tre Sea; Chap. 111, p. 174 : The Sponge Fishery of the Bahamas. L'ÉPONGE 267 qua qu’un grand nombre d'Éponges étaient employées par les habitants et apprit qu’elles étaient. pêchées dans les eaux entourant l’ile. À son retour à Paris, il établit le pre- mier commerce d'exportation des Éponges des Bahamas. Les habitants se mirent à les rechercher plus activement, et actuellement plusieurs milliers d’entre eux sont employés à cette pêche (1). Antilles. — Les gens pauvres des Antilles font usage du squelette de l’Æippospongia canaliculala Lend. var. g0ssy- pina D. etM.; cette Eponge, généralement massive, parsème le fond de la baie de la Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), où elle : est excessivement abondante (2 et 3). L'Hippospongia Var. elastica à été signalée à la Havane et sur le banc de Campêche (2 et3). Fonctions de reproduction. Les Éponges dont le squelette est utilisé pour les usages domestiques sont à sexes séparés. Les exemplaires contenant des spermatozoïdes sont exces- sivement rares : malgré d’actives recherches, Schulze (4) n à pu recueillir qu'un unique exemplaire avec les spermato- zoïdes groupés par masses de forme ovale. Celles-ci étaient d'ailleurs irrégulièrement disséminées. Cet exemplaire n’est pas arrivé absolument à l’état frais entre les mains de Schulze, en sorte que celui-ci a dû se borner à constater la présence de spermatozoïdes chez une Eponge qui était dépourvue d'œufs, et à constater par cela même la séparation des sexes. Les œufs sont groupés, dans l'Eponge officinale, par dix à trente dans le voisinage des canaux efférents de diamètre assez erand, et englobés dans un stroma de tissu conjoncüf; ces œufs, entourés d'une capsule endothéliale, ont une forme ovale et un diamètre de vingt-cinq centièmes de millimètre, quand ils ont atteint leur maturité (5). (1) LyperKker. The Royal Natural History, Vol. vi, p. 548; 189%. (2) Topsenr. Quelques Spongiaires du Banc de Campèche et de la Pointe-à-Piître; Mém. Soc. Zool. France Tome 11, p. 46; p. 48 et p. 50. (3) Topsexr. Spongiaires du Banc de Campèche et de la Guadeloupe. - Mém. Soc. Zool. France. Tome vit p. 34, p. 35 et p. 36. (4) F. E. Scxurze. Untersuchungen über den Bau u. die Entwicklung der Spongien. 7° Mitth. Die Familie der Spongidae. Zeitsch. f. W iss, Zool. Bd. xxx11; 1879 p. 593-660; PI. 34 à 38, p. 642. (5) id. p.64. 268 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION Epoque de la maturité des œufs. F. E. Schulze (1) a cherché à connaitre l'époque de l’an- née à laquelle les œufs de l'£Euspongia officinalis var. adria- lica arrivent à maturité; dans ce but, il a fait prélever, à Lesina, pendant plusieurs mois (d'avril à juin), et régulière- ment toutes les semaines, par Buecich, homme très expéri- menté dont nous aurons à signaler plus loin les travaux de spongiculture, des exemplaires d'Æuspongia, recueillis vi- vants et fixés à l'alcool absolu; l'examen de ces Eponges, ainsi que celui d'autres échantillons recueillis pendant d'autres mois de l'année (juillet excepté) lui a permis de reconnaitre que /4 malurilé sexuelle de l'Eponge de toilette ne dépend pas de l'époque de l'année. Il faut remarquer d’ailleurs, qu'on trouve toujours, à côté des Eponges arrivées à maturité un plus grand nombre qui ne le sont pas : à Lesina, on trouve chez l'Euspongia offici- nalis Var. adrialica, environ un spécimen sur quatre qui soit arrivé à maturité; cette proportion reste sensiblement la même dans les différentes saisons de l’année. Larve. — La fécondation de l'œuf et les premières phases de son développement ont lieu à l'intérieur du corps de. l'Éponge mère. La jeune Eponge quitte le corps de celle-ci, à l'état de larve à peu près oviforme, mesurant environ quarante cen- tièmes de millimètre de longueur et trente cinq de largeur; à l'une de ses extrémités, elle présente une surface légere- ment invaginée, ou aire basale, limitée par un bourrelet annulaire. Schulze (2) pense que la larve est mise en liberté peu de temps après quelle a acquis un revêtement de cils qui lui permettent de nager et d'atteindre un endroit favorable où elle pourra se fixer et continuer son développement, ou peut- être avant. On comprend toute l'importance qui s'attache à la déter- mination d'une façon précise, et pour chaque localité, de l'époque à laquelle a lieu la sortie des larves, si on veut Té- olementer la pêche d'une façon rationnelle. C'est ainsi qu en Tunisie, dans le Golfe de a la pêche I nie SCHULZE. Zeitseh. für Wiss. Zoolotte Bd. XXXII P. ne AY (2) id. p. 644. î : (ei L'ÉPONGE : 269 des Éponges est prohibée du premier Mars au premier Juin, époque à laquelle on suppose que se fait la reproduction. …_Malsré de nombreuses et patientes recherches, FE. E. Schulze n'a pas réussi à observer cette sortie des larves nageant librement dans l'eau après avoir quitté le corps de leur mere : « Solche frei schwimmenden Larven habe ich aber bisher nicht bekommen, sondern meine Embryonen nur aus in Alkohol absolutus erharteten Schwämmen he- raussgenommen » (1). Cet auteur a essayé de faire vivre des Éponges dans de petits aquariums afin d'observer l'expul- sion des larves, leur fixation et leurs métamorphoses; ces essais ont échoué à cause de l'extrème délicatesse et de la faible vitalité de ces animaux en aquarium. Les Eponges, en effet, peuvent être laissées plusieurs heures hors de Feau sans cesser de vivre, mais elles meurent au bout de quel- ques minutes si on les met dans un vase rempli d'eau de mer qui n'est pas renouvelée continuellement (2). O. Schmidt (3) a observé qu'a Naples la reproduction de l'Éponge commune (Æippospongia equina), à lieu par des larves errantes, qui résultent du développement des œufs, en Mars et Avril, et peut être aussi plus tard. Dans le voisi- nage des canaux aquifères se forment de nombreux amas d'embryons : une Eponge de taille moyenne donne un nombre incalculable de larves, en sorte que si on la pêche avant qu'elle ait expulsé celles-ci, le dommage produit est considérable. D’après les observations de Berthoule et Bouchon-Bran- dely, l'Éponge s'attacherait de préférence aux corps cal- caires, aux rochers ou débris de coraux, très rarement au bois. Les larves seraient mises en liberté, en Tunisie, au printemps : après avoir nagé un certain temps, elles iraient se fixer, pour ne plus s'en détacher, sur un corps solide sub- mervé. (1) F. E. Sonuzze. Zeitsch. für Wiss. Zoologie. Bd. xxx1r, p. 647. (2) La conservation de l'Éponge dans des aquariums d'étude n’est probablement pas une difficulté insurmontable, mais nécessite des recherches précises, en particulier sur le mode d'alimentation. Les recherches de MM. Fabre-Domergue et Biétrix ont montré ce que la patience et la sagacité permettent d'espérer dans celte voie. Les essais d’acclimatation de l’'Éponge de Syrie sur les côtes fran- çaises de la Méditerranée ont d’ailleurs montré que l’on peut garder vivante cette Eponge dans des caisses en bois remplies d’eau de mer, constamment renouvelée, pendant près d’un mois, malgré les péripéties d'une traversée pénible. (3) Scamiptr, O. Die Niedere Tiere, in Brehns Thier leben Bd. X P: 639; 1893. 270 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION Croissance de l'Éponge. — La croissance de l'Éponge pa- rait être très longue; d'après Buccich, il faudrait environ sept ans à une jeune Eponge de la Méditerranée pour acquérir Sa taille marchande. Les auteurs américains disent au contraire que la crois- sance de l'Eponge est très rapide sur les côtes de la Flo- ride : deux années seraient suffisantes. Cette croissance varie avec la température : elle est plus lente en hiver qu'en été. Dans certains fonds, les Eponges croissent plus rapidement que dans d’autres (1). L'Éponge ne peut vivre, que si l'eau où elle se trouve est bien aérée, ce qui nécessite un certain courant (trois à quatre nœuds); ce courant à d'ailleurs comme autre résul- tat d'amener à la portée de l'animal les matières dont il se nourrit : sels dissous dans l’eau et corps très petits tenus en suspension. Les courants violents activent la croissance des Éponges, mais la forme de celle-ci devient alors irrégulière et le squelette est dur. Bidder (2) fait remarquer que les Éponges atteignent une plus grande taille quand elles sont suspendues à quelque distance du fond de la mer, en particulier quand elles sont attachées à un corps flottant, que quand elles croissent en étant fixées par une base inférieure. Les Eponges les plus fines vivent dans les baies à l’ a à des profondeurs de cinq à vingt-cinq brasses, sur iles fonds de rochers et de sable. Les fonds vaseux ne sont pas favorables à leur développement. Pêche des Éponges dans la Méditerranée Les pècheries d'Éponges les plus importantes sont celles de la Méditerranée; on pêche l'Éponge commune sur les côtes de Tunisie, dans le golfe de Gabes, sur les côtes de la Tripolitaine, de Sicile, de Syrie, de Jaffa à Alexandrette, dans l'Archipel ottoman sur les côtes de l'ile de Candie, de l'ile de Rhodes, etc.; dans la mer Egée; la mer Adriatique. Archipel ottoman. — La pèche des Eponges dans l'Archi- pel ottoman est effectuée par les habitants de certaines iles de cet archipel dont les principales sont : Calymnos, Symi, (1) Arapran. Rept. U. S. Comm. Fish and Fisheries 1896 p. 276. Was- hington 1898. (2) Bipper, G. J. Mar. Assoc. (2) 1v p. 195-202. L'ÉPONGE 271 Psara, Castel Rosso, Leros, Stampalia, Telos, Cassos, Rhodes et Kharki. Les barques appelées « scafi », jaugent en moyenne six tonnes, et sont montées généralement par sept hommes, quelquefois par huit; sur ce nombre il y a quatre plongeurs qui se partagent le produit de la pêche, les autres sont des rameurs qui reçoivent un salaire fixe pour la saison de pêche. Ces barques, qui ont une voilure énorme, vont vite et tiennent tres bien la mer. Elles vont exploiter les bancs de l'ile de Chypre, ceux des côtes de l'ile de Candie, ces derniers étant exploités plus spécialement par les pêcheurs de Kharki; ces barques vont également pêcher sur les côtes rocailleuses de la Syrie, où se trouvent les qualités les plus fines, jusqu'à Alexandrette, sur les côtes sablonneuses de la Caramanie, où les qualités sont plus inférieures, et sur les côtes d'Afrique, depuis Alexandrie jusqu'à la Grande Syrte; deux bancs sont plus particulièrement exploités sur la côte d'Afrique : ce sont ceux de Benghazi et de Man- drouka. La pêche a lieu le plus généralement par la plonge à nu; le pêcheur plonge la tête première et active sa descente à l’aide d’une grosse pierre, attachée à une longue corde dont l'extrémité est amarrée au bateau; les Eponges sont déta- chées du rocher auquel elles adhèrent à l'aide d’un couteau à forte lame, et mises dans un filet; le filet rempli d'Éponges, la pierre à plonger et le plongeur sont ramenés à la surface par les hommes restés dans le bateau. Les Éponges de belle qualité se trouvent à une profon- deur moyenne de trente brasses; celles de qualité infé- rieure se trouvent à des profondeurs moindres. Ces der- nières sont pêchées par les Grecs de la Morée, et parmi eux les Hydriotes, à l'aide d’un trident à! lames tranchantes recourbées et garni d'une poche ou filet. Cette manière de pêcher a l'inconvénient de les déchirer plus ou moins, aussi se vendent-elles 30 pour 100 de moins que les Éponges dites | plongées. Le scaphandre a été introduit dans ces iles de l’Archipel ottoman : cet engin a rencontré, au début, une grande hos- tilité de la part des pêcheurs indigènes. L'usage de cet appareil à permis d'augmenter de beaucoup le produit de la pêche, de le doubler tout au moins. La pêche sur les côtes de Syrie fournit principalement des Éponges fines, qui sont de taille moyenne, et sont re- 212 BULLETIN DE LA SOCIËTÉ D’ACCLIMATATION cherchées en France; celle qui a lieu sur la côte d'Afrique donne des Eponges communes. Pêche des Éponges en Tunisie. La pêche des Éponges en Tunisie donne lieu à un impor- tant commerce d'exportation, dont le centre est à Sfax. Cette pêche a lieu dans le golfe de Gabès, dans le voisi- nage de l'ile de Djerba et des iles Kerkennah; la saison com- mence en octobre et finit en fin janvier; durant les autres mois de l’année, les lieux où se trouvent les Éponges sont couverts de masses compactes d’Algues; les tempêtes de novembre et de décembre ont pour effet d'enlever celles-ci, en sorte qu'il est alors possible d'explorer les fonds spongi- fères (let 2). La pêche est presque entièrement entre les mains des Etrangers : Grecs, Maltais, Italiens, qui l'heure venue, en- vahissent littéralement le Golfe de Gabès, au nombre d’en- viron cinq mille, montés les uns sur leurs scolèves (ou sako- lèves), forts et élégants bateaux de pêche construits pour tenir la mer, les autres sur de lourdes tartanes ou d'énormes « Skounafs » de quatre-vingts tonneaux venant des Cy- clades (3 et 4). Les scolèves pèchent à l’aide de la gangava, qui est une sorte de chalut semblable à celui des pêcheurs de nos côtes; la gangava est constituée par un filet en corde, à targes mailles, formant une poche profonde de deux à trois metres, qui vient senverguer sur un cadre long de six à douze mètres, dont l'un des grands côtés, celui qui rase le sol, est formé d'une solide barre de fer, tandis que l'autre est une pièce de bois qui maintient l'appareil vertical lorsqu'il est en action (5, 6 et 7). Un fort càble relie la gangava au bateau qui la remorque. Cet engin enlève tout sur son passage et (4) Simmoxps. The Commercial Products of the Sea; p. 190. (2) Sponge Fishery at Tunis. Rep. of british Consul at Tunis. Nature XXXVIIL. (3) Les Pêches maritimes en Algérie et en Tunisie. Revue scientifique 1890 ; Tome 46, p. 560. (4 ) FAUROT. La Pèche des Éponges dans le Golfe de Gabès. Revue scientifiq. Tome 45; 1890; p. 428-431. (5) La Tunisie; Tome 1: p. 407; Tunis 1896. (6) Deiss. J. A. L'industrie des pêches en Tunisie. Bull. Soc. Centr'. - d'Aquiculture et de Pêche, Tome vir1; 1896; ne 10, p. 252. (1) GODEFROY J. L'industrie et le commerce des Éponges. Revue Ge nér. des Sciences; Paris, 30 octobre 1898; p. 776. Cu. L'ÉPONGE rt 273 arrache les Éponges petites et grosses; les petites Éponges passent à travers les mailles du filet et vont mourir au fond de la mer, étant arrachées de leur support. La pêche à ja gangava est prohibée du premier Avril au premier Juin. Les Maltais et les Siciliens pêchent à l'aide du trident ou foëène, instrument muni de trois ou cinq dents, fixé au bout de longs et forts bâtons; la foëne permet de pêcher par des fonds de dix à douze mètres au plus. Pour cette pêche, il est nécessaire de voir l'Éponge au fond de l'eau : les pécheurs se servent, à cet effet, du #24r0tr, qui est un cylindre creux en fer battu, de la forme et de la capacité d’un seau ordi- naire, dont l’une des extrémités est fermée par une vitre; cet instrument remplace avantageusement l'huile que les pêcheurs jetaient autrefois à la surface de l'eau pour atté- nuer les rides qui en diminuent la transparence; il suffit de l’'enfoncer de quelques centimètres pour voir tres distincte- ment le fond, jusqu’à des profondeurs de huit à dix metres. Les pêcheurs utilisent de petites barques arabes, montées au plus par trois hommes, qu'ils louent pour toute la durée de la saison; l'un se tient aux avirons, l’autre en avant dans une échancrure du faux-pont, percée à cet effet, appelée trou d'homme; ce dernier explore le fond de la mer à l’aide du miroir, se tenant ainsi immobile pendant des heures en- tières : aussitôt qu'il aperçoit la masse sombre d'une Éponge, il lance avec force le trident dont il est armé et d'un seul coup la détache et l’enlève. Les déchirures que cause l'usage du trident aux Éponges n'ont pas une grande influence sur la valeur marchande de l'Éponge tunisienne, dont le tissu est assez grossier; il en. serait autrement pour les belles Éponges fines du Levant. On a introduit, il y a quelques années, des scaphandres; la pêche pratiquée avec ces instruments est beaucoup plus productive, mais nécessite une mise de fonds considérable qui jusqu ici en a restreint l'emploi. Dans certains endroits, où ni la gangava ni la bone Tree peuvent pénétrer, en particulier dans certains parages de l'ile de Djerba, où les Éponges, cachées sous les roches, sont inaccessibles au trident ou à la drague, les indigènes plon- gent pour les atteindre jusqu'à vingt-cinq metres. Peu de temps après leur récolte, les Eponges sont prépa- _ rées : les pêcheurs après les avoir laissées quelque temps en tas, les lavent dans l’eau de mer et les piétinent fortement sur un plancher à claire voie jusqu'à ce qu'elles aient perdu Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 19041. — 274 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION toute trace de leur enveloppe extérieure de couleur foncée. Après les avoir ainsi lavées, on les accroche en chapelets aux vergues et on les laisse sécher. Les Grecs sont renom- més pour le soin avec lequel ils font cette première opéra- tion de lavage; les Éponges qu'ils préparent ont de ce fait une plus-value sensible sur celles des indigènes. Essai d’acclimatation des Éponges de Syrie dans les eaux françaises de la Méditerranée. En 1862, Lamiral fut chargé par la Société d'Acclimatation d’aller en Syrie pour s'assurer des moyens et de la possibi- lité d'obtenir la reproduction et la culture des Éponges du Levant sur les côtes méditerranéennes de la France (1). Le 3 Juin ue Lamiral (2) embarque sur le paquebot des Messageries, à Tripoli de Syrie, six caisses contenant cent cinquante Eponges sur leurs bases de roche; ces caisses étaient en planches de sapin très épaisses, cerclées de fer, calfatées et brayées à l’intérieur, de 80 centimètres cubes de volume chacune; l’intérieur, carbonisé et gratté, conte- nait l’eau de mer; de forts taquets placés de manière à faci- liter les arrimages permettaient de relier deux caisses super- posées dans le but de remplir constamment la caisse supé- rieure formant réservoir d’eau, afin de la faire couler, par une ouverture pratiquée au fond, sur l'eau de la caisse infé- rieure contenant les Eponges vivantes; le bas côté de ce bac était muni d'un robinet qui régularisait un courant continu et laissait échapper l'eau viciée par les Eponges. L'eau des caisses supérieure était rafraichie par l'addition de glace, de facon à maintenir la température de celle des bacs entre 21 et 23 degrés. Le 10 Juin, l'auteur constate que « l'eau des bacs s'écoule en laissant sur le pont une matière grasse et blanche qui doit ètre la substance des larves. Un parenchyme blanchâtre tapisse les parois » (des bacs) (3). Les Eponges arrivèrent presque toutes vivantes à Mar- (1) Lamirar. Acclimatation des Éponges dans les eaux de France et d'Algérie. Bull. Soc. impér. z0olog. d’Acclimatation, Tome vint, p. 327- 334: 1861. (2) L. SouBeyranx. Rapport sur le Mémoire de M. Lamiral. Même recueil; Tome vit, p. 433-437; 1861. (3) id. Second Rapport sur un Essai d’acclimatation des Éponges de Syrie dans les Eaux françaises de la Méditerranée. JEU Soc. Accli- mat. Tome x, p. 8-15; 1863. He L'ÉPONGE 275 seille, puis à Toulon. Le 21 Juin un certain nombre d’entre elles (1) furent immergées dans une auge de pierre cons- truite à cet effet, et vingt-trois reposant sur leurs bases de roche furent placées aux alentours, pres du fort de l'Aiguil- lette, sur un fond de gravier, par 5 m. 50 de profondeur, les autres furent mises près de Bandol, sur un fond de roches et gravier, par dix mètres de profondeur, dans les environs de l'ile de Pomegue, sur un fond de gravier et de cailloux, à vingt-cinq mètres de profondeur, et enfin près de l'ile de Port-Cros (une des îles d'Hyères), dans un endroit abrité de tous les vents, sur un fond de gravier et de roches, à vinet-deux mètres de profondeur. Cent vingt-trois indi- vidus étaient en place le 2 Juillet, et tous en bonne santé, Le 26 août suivant, ils continuaient à prospérer. Vers la fin de l'année, Lamiral, allant inspecter les Éponges qu'il avait rapportées de Syrie, constata que toutes étaient mortes ou avaient disparu (2). L'essai d'acclimatation qui avait été tenté par lui avait par conséquent échoué, mais il avait prouvé la possibilité du transport des Éponges à une distance assez grande de leur habitat. Acclimatation aux Bahamas de l'Éponge fine de la Méditerranée. Bidder (3) pense qu'il est possible, en observant certaines précautions, de transporter des Éponges fines de la Méditer- ranée orientale jusqu'aux Bahamas. Cet auteur ne croit pas que ces Eponges fines de la Méditerranée orientale soient des races, variétés ou espèces spéciales, qui conservent dans tous les cas leurs qualités particulières; d’après lui, ces Éponges appartiendraient à la même espèce que celles de valeur moins grande que l’on rencontre aux Bahamas, et ne devraient les qualités qui en font la valeur qu'à certaines conditions favorables de milieu, qu'elles rencontrent dans la Méditerranée. Il craint, qu'une fois transportées aux Baha- mas, elles ne perdent, sous l'influence des conditions vitales . (4) Lawiraz, M. Rapport sur un Essai d’acelimatation des Éponges de Syrie dans les eaux françaises de la Méditerranée. Bull. Soc. impér. zoolog. d'Acclimatation, T. 1x, p. 641-653; 1862. (2) Id. Second Rapport sur un Essai d'acclimatation des liponges de Syrie dans les eaux françaises de la Méditerranée. Bull. Soc. Acecli- mat. Tome x, p. 8-15; 1863. ‘ (3) Bipper, G. Notes on Projects for the Improvement of Sponge- Fisheries. Journal Marine Biolog. Assoc. vol. 4, 1896, p. 195-202. 76 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION différentes, les qualités qui leur donnent leur valeur mar- chande et ne deviennent semblables aux Éponges indigènes de cesiles- R. v. Lendenfel (1) ne partage pas cette manière de voir et croit que, malgré la grande plasticité individuelle des Eponges, le changement des conditions extérieures ne doit pas avoir en général une action si importante. D'un autre côté, il est vraisemblable que les Éponges de la Méditer- ranée acclimatées aux Bahamas s’y trouveraient en concur- rence vitale avec les espèces indigènes mieux adaptées, moins fines et qu'elles ne tarderaient pas à succomber, en sorte que leur acclimatation pourrait bien ne pas réussir. Cela n'exclut pas, toutefois, la possibilité de Ja culture artificielle de l'Éponge de la Méditerranée aux Bahamas. Spongiculture. On à cherché depuis longtemps à élever les Éponges et à les multiplier; on a fait des essais en Europe et en Amé- rique. Essais de Spongiculture faits dans la Méditerranée. — O. Schmidt (2 et 3) a montré le premier que si on découpe une Eponge (il a pris l'Æuspongia officinalis var. adriatica) parfaitement fraiche en fragments de dimensions conve- nables, et que si on place ces fragments aussitôt apres les avoir coupés dans la mer, en prenant certaines précau- tions, ces morceaux croissent et donnent chacun une nouvelle Eponge de forme semblable à celle qui a été morcelée. Le Gouvernement autrichien, et de gros industriels de Trieste eurent l'idée, à la suite de ces expériences, d'établir un parc d'Éponges dans la baie de Socolizza, située à la pointe Nord-Est de l'ile de Lesina; les essais durerent de 1863 à 1872; en, mai 1867, cette station fut placée sous la direction de Buccich. Cette entreprise fut abandonnée en (1) R. v. LENDENFELD, Zoolog. Centralblatt 111, p. 690; 1896. (2) O0. Scamipr, Die Spongien des adriatischen NIÉCReES Leipzig 1862; p. 22 (3) O0. Sexmipr, Erstes Supplement zu den Spongien des adriatiséhen Meeres Leipzig, AS64 ; p. 24. és (Se > eus L'ÉPONGE : 974 novembre 1872, à cause de l'attitude hostile des populations indigènes (1, 2, 3 et 4). Les résultats obtenus, toutefois, sont suffisants pour montrer qu'un tel essai peut être fait avec succès ; la cul- ture artificielle des Éponges est favorisée par leur grande vitalité. La meilleure saison pour commencer les expériences est l'hiver : en hiver, la croissance est plus lente, mais l'Éponge peut rester plusieurs heures hors de l’eau, à l’ombre, en con- servant sa vitalité; en été, la croissance est plus rapide, mais l'animal périt rapidement si on le laisse quelque temps hors de l’eau. Les échantillons devant servir aux expériences sont recueillis avec le plus grand soin possible, avec leur base d'attache, par des mains expérimentées, et transportés dans _ des boîtes percées de trous, de telle façon qu'ils ne soient ni endommagés, ni serrés les uns contre les autres. On les découpe en fragments d'environ vingt centimètres cubes de volume (un pouce cube) à l’aide d’un couteau très tran- chant. Buccich qui exécutait les expériences de Schmidt, a remarqué qu'on peut durant les temps parfaitement calmes, déposer ces fragments sur des roches détachées situées au fond de la mer, et qu'ils y adhèrent : c’est là un point intéressant de la biologie de l'Éponge. Les endroits choisis pour la culture sont des baies à l'abri des forts courants et des grosses vagues, mais où l’eau n’est pas complètement calme : il faut un courant modéré; le fond doit être formé par des roches et on doit principalement éviter la vase, qui est la principale cause d'échec de la spongiculture. Il faut que le fond soit couvert d’Algues : la couleur fraiche de celle-ci est un indice que la localité a été bien choisie. On doit éviter avant tout le voisinage des sources et des embouchures de rivières. Buccich avait imaginé un appareil pour placer les (4) O. Scamior, Brehm’s Thierleben; Bd. x. Niedere Tiere; p. 638, 4893. (2) MARENZELLER, E. v., Die Aufzucht des Badesschwammes aus Theilstücken, Verhandl. d. K. K. Zool. botan. Ges. Wien, 1818, 28 Bd. p. 687-694. Id. Propagation of Sponge by Cuttings. American Naturalist Xx11, p- 200-203 ; 1883. : | (3) Seamipr, 0. Sponge Fisheries. Method of arüficial Propagation at Gratz. Nature Tome xxxvir; p. 595; 1888. (4). Brice, J. Report U. S. Comm. Fish. and Fisheries for 18%; p.. 272-275. Washington 1898. Re. 278 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION fragments d'Eponge : cet appareil était formé de deux plan- ches rectangulaires (63 centimètres de longueur sur 40 de largeur), l'une formant le fond, l’autre le couvercle, tenues parallèllement l’une à l’autre, à une distance de 42 cen- timètres par deux petits étais situés à environ onze centimètres l'un de l’autre. Dans chacune des planches sont pratiqués vingt-quatre trous éloignés chacun de son voisin d'environ douze centimètres. Les fragments d'Éponges sont enfilés dans des baguettes en bambou, longues de 42 centi- mètres, dont l’écorce siliceuse résiste aux attaques des tarets; on met trois de cés fragments sur une même ba- guette; immédiatement au-dessous de chacun d'eux, un trou est percé dans la baguette, par lequel on introduit un petit morceau de bois qui sert à maintenir en place le fragment d'Éponge. Les baguettes ainsi garnies sont fixées dans les trous des deux planches, perpendiculairement à celles-ci. L'appareil est immergé et maintenu au fond de l'eau à l’aide de pierres placées à l'intérieur et servant de lest. Buccich a constaté que dans le cas où les fragments d'Éponge ont été découpés avec soin et préparés rapide- ment les parties endommagées se régénèrent rapidement, reprennent leur vitalité, puis s’accroissent. Leur croissance est très lente: il faut sept ans pour obtenir une Eponge d'une taille commerciale. Buccich et O. Schmidt sont pérsuadés que Ja spongi- culture ainsi expérimentée est susceptible de donner, à peu de frais, des résultats pratiques excellents. Schmidt conseille en outre, pour la conservation des bancs spongifères, de ne pas pêcher les individus de petite taille, et de ne pêcher dans une même localité qu'à des intervalles d'au moins trois ans. Spongicullure en Floride. — La spongiculture, telle que l'avaient établie O. Schmidt et Buccich à l’ile de Lesina, a été entreprise également sur les côtes de la Floride, où elle a rencontré d’ailleurs la même hostilité de la part. des pêcheurs. Rathbun (1) a décrit, en 1883, le premier essai de spon- giculture suivi de succès fait en Amérique. . (4) RarTaBux, R. Sponge Culture in Florida. Ste . p. 213; 1883. Cambridge Mass. R. v. Lendenteld. Zoolog. Centralbl. 1; ; p. 892-893, L'ÉPONGE 279 J. Fogarty (1), Allen (2), R. M. Munroe (3) ont nie publié les résultats de leurs expériences. La plupart des essais de spongiculture faits en bla l'ont été avec l'Éponge connue sousle nom de « Sheepswool Sponge », qui d'après Lendenfeld est vraisemblablement l'Hippospongia canaliculata var gossypina; les uns ont été faits à Key West (Rathbun, J. Fogarty), les autres dans la baie de Biscayne (Ralph M. Munroe); d’après Munroe, cette derniére localité offre des avantages très nombreux pour ces expériences de spongiculture : on a dans cette baie non seulement des fonds de nature différente, et des pro- fondeurs variées, mais aussi, en divers endroits des salures différentes des eaux, en sorte qu’on peut mener les expé- riences dans des conditions très variées. Le procédé adopté est le même qu’à l'ile de Lesina: les Éponges sont découpées en environ vingt-cinq fragments de vingt centimètres cubes de volume chacun; ceux-ci sont fixés sur des baguettes, et placés dans la mer. Les essais ont été suivis pendant six mois: ces différents auteurs ont constaté que pendant les quatre premiers mois les fragments d'Éponges réparent les tissus endommagés, et qu'ensuite seulement 1ls accroissent leur volume : cet accroissement est très rapide, car deux mois plus tard le volume était quatre à six fois plus grand que le volume primitif; l’ac- croissement de l’'Éponge de la Floride est comme on le voit plus rapide que celui de l’Éponge de l'Adriatique tel que avait observé Buccich; d'après Munroe on pourrait obtenir une Éponge de taille marchande en une année et demie ou deux années au plus. Un second fait constaté dans les expériences exécutées sur les côtes de la Floride est la variation de la croissance avec le courant: dans les endroits où le courant est faible ou n'existe pas, la croissance est très lente; cette croissance est au contraire tres rapide dans les endroits où un courant ‘existe. Quand la croissance est très rapide, le squelette est (1) Focanry, Fishery Industries of the U. S. Sect. v vol. 2 p. 832; Analysé par Brice, dans Rept. U. S. Comm. Fish. and Fisheries for “4896; ie 1898, p. 271. (2) "ALLEN, : J., Report on the Sponge-Fishery of l'lorida and the. _ artificiel of Sponge. Journ. Mar. Biol. Assoc., vol. 4, London, 41896, p. 188-194; Analysé dans Zoolog. Centralbl. xx p. 688-600. (3) Azcex, E. J., Supplement to report on the Spongetishery of Florida, and the artificial culture of Sponges (Letter by Ralph Munroe). J. Mar. Biol. Ass. (N. S.) vol. #4, p. 892-893 London 1896; ARE pau 280 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION plus grossier et la forme de l'Éponge devient irrégulière. Munroe pense que cette Culture artificielle est susceptible de donner des résultats pratiques; il est bon toutefois de faire remarquer qu'il a abandonné ses essais. Marenzeller, Bidder, (1), R. von Lendenfeld (2) et (3), ne pensent pas que l'élevage des fragments d'Éponges, préconisé par les auteurs précédents, puisse donner un revenu plus considérable que celui qui résulterait de l’éle- vage de jeune Éponges que lon laisserait croître sans les couper en morceaux; Lendenfeld, en particulier, est persuadé qu'une jeune Éponge de toilette intacte, placée dans des conditions favorables, croîtra plus rapidement que les fragments observés par Buccich. Ce même auteur pense que l’on ne peut espérer beaucoup, quant à présent, de la spongiculture telle qu’elle a été faite par Buccich et les Américains; 1l pense que l’on obtiendrait des résultats plus appréciables en exploitant les bancs d'Éponges d’une maniere plus rationnelle et en laissant se développer les spécimens de petite taille, qui ont d’ailleurs une valeur commerciale tres faible, jusqu'à ce qu'ils aient atteint leur taille marchande. Réglementation de la pêche des Éponges. J. Arapian (4), négociant en Éponges à Key West, Townsend (5) et H. M. Smith (6) tont remarquer que le nombre des Éponges diminue dans les bancs de la Floride, et attribuent cette décroissance à la récolte continue faite par les pêcheurs, de spécimens de petite taille. Smith fait observer qu'il existe cependant une loi, datant d’une quinzaine d'années, qui prohibe la récolte des Éponges dont le diamètre au sommet est inférieur à quatre pouces, et que cette loi est toujours restée lettre morte; il propose (1) Binper. Notes on Projects for the Improvement of Sponge-Fis- heries. Journ. Marine Biol. Assoc. London (2) vol. 4 p. 195-202. (2) LENDENFELD, R. v., Zoolog. Centralbl. 117 p. 690. (3) LENDENFELD. R. v. Monogreph QE the horny Sponges ; London 4889 (4) ARAPIAN. On . Florida Sponges. Réjoÿt US". Comm. Fish and Fisheries for 1896; p. 276-278. Washington 1898. (5) TOoWNSEND, C à, “Fisheries of the Gulf States; The Sponge Fishery. Rept. U. S. Comm. Fish. and Fisheries for 1899; P- 426. NWeSRng 1900. (6) SHrri, Hugh M. Report o on the Inquiry respecting food- fishes and the fishing grounds: U. S. Comm. Of Hs and: Fisher ies Aie 1898 ER): Pe CXXIX-OXXXs L'ÉPONGE 281 de l'appliquer avec rigueur, et de suspendre la pêche sur un banc donné pendant une ou deux années. Araplan propose également une réglementation spéciale de la pêche, divisant les bancs d'Éponges en sections de cent milles carrés de superficie environ, et ne permettant la pêche dans chacun de ces espaces, qu'à des intervalles de temps déterminés : de cette facon, les Éponges qui se trouveralent dans les sections où on ne pêche pas auraient le temps de s'accroître et atteindraient une taille qui leur donnerait une plus grande valeur marchande. Cet auteur propose en outre d'interdire l'usage du scaphandre dans l'exploitation des bancs d'Éponges : d'après Arapian le sca- phandrier, en marchant sur le fond de la mer avec ses lourds souliers, détruirait un grand nombre de celles-ci. Il résulte des opinions émises par différents auteurs très compétents, et que nous venons de résumer brièvement, que la spongiculture telle que l’a préconisée Buccich, et telle qu'elle a été essayée en Floride ne peut être considérée actuellement que comme une expérience qui n'est pas encore entrée dans le domaine de la pratique. Une législation récente, édictée en 1897 par l'État de la Floride, prohibe l'emploi de la drague et celui du sca- phandre le long des côtes, depuis Pensacola jusqu’au Cap Floride, sur les fonds où existent des bancs d'Éponges ; l'emploi de ces appareils entraîne une amende et la confis- cation de ces appareils et même du bateau (1). La récolte des Éponges de petite taille, dont le diamètre est inférieur à dix centimètres est également prohibée; cette prohibition existait d’ailleurs depuis 1883, mais était restée lettre morte. Enfin la législation de 1897 protège et encourage la cul- türe artificielle et la propagation des Éponges dans les eaux de la Floride, en accordant aux personnes qui se livrent à ces essais un certain nombre d'avantages : il est permis aux propriétaires des terrains en bordure des eaux de l'État de : la Floride de se livrer à ces essais dans les eaux situées en face de leurs terres, jusqu'à une profondeur n’excédant pas une brasse à marée basse, et ils ont le droit exclusif de pêcher et de cultiver les Éponges dans ces limites, sans que toutefois ce droit puisse s'étendre au delà de 300 yards (274 mètres environ) de la ligne des côtes; ces mêmes (4) Suiv. Hugh M. Sponge Legislation in Florida. Bullet. of the U. S. Fish Commission, vol, xvix, 1897, p. 231-232; Washington 1898: 282 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION riverains sont d'ailleurs autorisés à délimiter les espaces qui leur sont réservés à l'aide de pieux, à la condition toutefois de ne pas gèner la navigation. Il est permis aux personnes se livrant à des essais de spongiculture de recueillir des Éponges de toutes tailles, pourvu que ces Éponges soient destinées seulement à être transplantées. Toute personne qui n’est pas Citoyen américain et qui veut se livrer à ces essais de spongiculture, doit payer une licence de 5 dollars. 11 serait à souhaiter, pour la conservation des bancs d'Éponges de la Tunisie, qu’une réglementation identique à celle qui à été préconisée en Floride intervienne. Nous avons vu précédemment que la pêche à la gangave, pra- tiquée sur les côtes tunisiennes, arrache indistinctement tout sur son passage et qu'ainsi un grand nombre de jeunes Éponges de petite taille, sont annuellement détruites sans profit pour persoune La réglementation de la pêche des Éponges en Tunisie nécessite en outre la connaissance approfondie de la biologie. de l'Éponge commune; l'un des problèmes les plus intéres- sants à résoudre est celui de la détermination de l’époque à laquelle les larves ciliées de cette espèce sont mises en liberté; l'examen des produits génitaux d’Éponges recueil- lies d'une facon méthodique, de semaine en semaine par exemple, pourra préparer la solution de ce problème. En second lieu il est indispensable de connaître, pour les dif- férents bancs, la durée de la croissance, c'est-à-dire le temps que met la jeune Eponge pour Dior la taille marchande. Ce sont la deux questions fondamentales à la solution desquelles est indissolublement liée celle de la prospérité des industries qui, dans notre Protectorat de Tunis, tirent leur revenu des pr oauits de la PEU des Éponges. LE BANANIER DU HAMMA par M. TRABUT (1) Je ne veux pas prolonger indéfiniment la discussion sur le prétendu Bananier du Hamma obtenu en neuf années (1887- 1896) par sélection des rejetons, je dois cependant protester au sujet des actes blàmables et des écrits peu scientifiques que m'attribue M. Ch. Rivière dans sa dernière communi- cation du 25 mai. Les arguments apportés par M. Ch. Rivière dans ses deux communications suffisent largement pour démontrer l'in- vraisemblance des aptitudes à varier attribuées à ce Bana- nier du Brésil qui, non seulement a été amélioré en quelques années, mais se livre brusquement à des r'e{ours en arrière quand je le cultive. Je ne croirais à la production de la variété nouvelle que si le Bananier du Hama renvoyé au Jardin botanique de Rio de Janeiro, présente dans cette localité un seul caractère un peu différent de ceux de la souche d’où il est sorti en 1887. L'expérience est facile à faire : elle en vaut la peine, car obtenir en neuf ans une variété nouvelle d'un Bananier sans graine n'est pas une chose banale en horticulture. Contrairement à ce qu'écrit M. Ch. Rivière je n’ai jamais demandé l’arrachage du Bananier du Hamma par application de la Loi phylloxérique. Je n’ai jamais ni dit, ni écrit que cette musacée pouvait nous apporter l Aspidiotus Ficus où l'A. perniciosus ou le Phylloxera. J'ai signalé seulement le danger d'introduire des végétaux enracinés de l'Amérique du Sud pouvant nous apporter le Margarodes viliwm, Cochenille très répandue sur les racines de nombreuses plantes très différentes et qui trouverait ici, comme dans les vignobles du Chili, un milieu favorable. (4) Réponse à l’article de M. Ch. Rivière paru dans le Bulletin de la Société d’Acclimatation, juillet 41901. EXTRAITS ET ANALYSES Les MourToxs D’ALGÉRIE ET DE TUNISIE Par P. BECHAMBRE L'Afrique du Nord est le pays du mouton; dans la zone fertile du Tell et dans la région des steppes du sud paissent des troupeaux nom- breux; cela est la seule richesse des populations nomades du sud algérien. On tisse la laine, on boit le lait, on mange la chair; la vente de quelques moutons permet de se procurer les autres choses nécessaires. La vaste région des steppes du sud, aussi grande que la France, comprend les Hauts-Plateaux et le Sahara. Les Hauts-Plateaux, malgré leur température excessive, possèdent le climat le plus sain de toute l'Algérie; les grands troupeaux qui y vivent se déplacent sur des parcours déterminés, chacun de ces parcours comprenant des pâturages d'été et des pâturages d'hiver. Dès les premiers beaux jours commence la transhumance, la marche vers les pâturages d'été. Tous les trois ou quatre jours l'Arabe conduit ses moutons s’abreuver à un r’dir éloigné de quelques lieues; il se rencontre avec d’autres troupeaux, des bandes de chameaux viennent aussi boire à la petite mare. Celle-ci ne renferme bientôt plus qu'une eau croupie, piélinée, salie par les excréments et devenue ainsi le véhicule de nombreuses maladies contagieuses et parasitaires. Elle ne tarde pas d’ailleurs à se dessécher et il faut chercher un autre abreuvoir; ce sont parfois de longues pérégrinations sous une chaleur accablante, suivant un parcours désolé par les passages antérieurs. Toutes ces vicissitudes sont prévues et leurs risques sont ceux de chaque année; mais quand survient une longue sécheresse, la situation devient vraiment terrible; dans certaines années calamiteuses on a compté jusqu'à trois ou quatre millions de morts sur une population de dix mi!lions d'ovins. Les pertes, au cours des hivers rigoureux, sont également considé- rables; pour en donner une idée, il suffit de rappeler que le cerele de Tiaret a perdu l'hiver de 1888-89, 207,000 tètes sur un effectif de 430,000, soit environ 50 0/0. On compte, en année normale, un million de ETES A quoi est due cette proportion élevée ? À la pénurie des pâturages, au manque d’eau, aux rigueurs de l’hiver- nage, à de nombreuses maladies dont les germes existent dans les eaux. L'exploitation des troupeaux dans le sud algérien est entièrement entre les mains des indigènes; 1/30° seulement est exploité par les Euro- péens; c’est dire avec quels errements il faut lutter, quelles routines il faut combattre, quelle apathie il faut vaincre; cela fait comprendre aussi comment ont avorté les tentatives les mieux conduites, dès qu'elles se sont heurtées au fatalisme et à l’insouciance des Arabes. CARACTÈRES. — La race barbarine appartient au groupe des moutons à orbites saillantes, dont on trouve des représentants en Hongrie, en Russie méridionale, en Turquie, au Caucase, dans l’Asie Mineure, elc., couvrant une immense superficie, de l'Europe centrale et méridionale à l'Asie et au nord de l’Afrlque. La taille est de 0"60 à 0"70, le poids moyen est de 40-45 kilos. La LES MOUTONS D’ALGÉRIE ET DE TUNISIE 285 tète est forte, pourvue de cornes chez les mâles; ces cornes sont quel- quefois au nombre de quatre; les oreilles sont longues et semi- tombantes; la poitrine est haute et étroite, la croupe inclinée, les membres forts. La tête et les membres sont brunâtres, fauve foncé ou fauve clair, soit de couleur uniforme, soit parsemés de taches noiràtres, de bandes foncées qui donnent aux individus ainsi marqués une physionomie sauvage. La toison peut être aussi brunâtre ou roussâtre, mais le plus souvent la coloration est limitée aux extrémités. La laine est longue, dure, roide, en méches pointues, dans lesquelles le suint est assez abondant; ou bien en mèches courtes, très spiralées, quoique les brins restent durs et grossiers. Le jarre ou poil est rare dans les toisons des sujets améliorés ; il est, par contre, très abondant chez les individus incultes où il arrive même à prendre la place de la laine. Des variations se présentent dans les dimensions de la queue. Les moutons à grosse queue du Caucase, de la Perse, du Turkestan, faisant partie du groupe que nous étudions, il n’est pas étonnant de rencontrer dans l'Afrique du Nord (Egypte, Tunisie, Algérie) des moutons qui soient porteurs d’un volumineux appendice caudal. La masse de graisse qui surcharge le train postérieur est due à des dépôts qui se forment à la pointe des fesses et à la base de la queue; cela devient une réserve de matériaux nutritifs qui se constitue pen- dant les périodes d'alimentation abondante et qui diminue pendant les disettes. Les moutons tunisiens que nous examinions au mois d’avrii avaient la queue très volumineuses; dans trois mois, nous disait-on, ils vous paraîtraient moins extraordinaires. La queue grillée est un morceau très estimé des indigènes. Elle leur fournit aussi la graisse dont ils ont besoin pour leur usages culinaires, la religion musulmane leur interdisant la consommation de la graisse de porc. M. Marès a fait remarquer que, pour cette raison, on rencontre la race ovine à grosse queue partout où sont des peuples de religion musulmane. On ne peut cependant généraliser cette idée intéressante, en disant que la race ne se rencontre que chez les Musulmans puisque les Russes du Sud et du Caucase qui possèdent des moutons à grosse queue, sont orthodoxes, et que les Kirghiz, de religion mahométane, ont de nombreux troupeaux à queue fine. Les moutons tunisiens sont tous à grosse queue, cet appendice arri- vant à peser de 4 à 40 kilos. Dans la provinee de Constantine, sur les confins de la Tunisie, sont des troupeaux demême caractère. On appclle à demi queue les moutons qui ont seulement la base de la queue large de 10 à 15 centimètres; les moutons à queue fine forment le reste de la population, et l'on y reconnaît, dans les provinces algériennes, un certain nombre de sous- races dont la description détaillée serait sans intérèt; la meilleure est celle dite de Chellala sur les confins des provinces d'Alger et d'Orau. Les moutons de Chellala, ont les cornes fines ou absentes, la tête et les membres marqués de roux; leur toison pèse de 3 à 4 kilos, ils donnent à la boucherie 20 à 22 kilos de viande nette. AMÉLIORATION. — La question de l'amélioration du troupeau algérien a une importance zootechnique et économique considérable ; aussi s’en est-on. préoccupé dès le début de la colonisation. Les travaux des 286 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION vétérinaires militaires Bernis et Durand ont depuis longtemps préparé les recherches de la période actuelle, recherches qui aboutissent à la nécessité de deux catégories de mesures, des mesures d'ordre général, et des mesures d'ordre zootechnique. A. Mesures générales. — L’Amélioration des cultures déjà conseillée à propos de l'espèce bovine, permettra de constituer des réserves alimentaires. Ces réserves préserveront les troupeaux de la faim pendant les sécheresses ou les hivers; si elles sont suffisantes elles rendront possible l'amélioration par l'introduction d'éléments étrangers. L'irrigation et la création de points d'eau, par l’aménagement des sources, des mares, le forage de puits artésiens, seront une ressource tellement précieuse, que sans ces travaux les mesures proposées resteront inefficaces. L'autorisation pour les troupeaux de fréquenter en hiver certaines régions boisées; la construction de hangars, de bergeries ouvertes, sont des indications complémentaires qui seront certainement d’une grande utilité. B. Méthodes zootechniques. — La sélection et le croisement sont à discuter ici. La sélection, le choix convenable des béliers et des brebis est la seule méthode qui puisse être mise en pratique sur les troupeaux des indigènes, en admettant qu’on puisse triompher de leur insouciance et de leur imprévoyance. Klle ne nécessite pas de frais d'acquisition d'animaux d'élite ; elle met à l'abri des risques de l’acclimatement. Elle conviendra donc aux petits colons qui disposent de peu de capitaux. Cette sélection sera basée sur l'amélioration des formes et l’élimi- nation des moutons à grosse queue dans les troupeaux destinés à l'exportation. Si, en effet, les moutons à grosse queue sont fort appréciés des indigénes, ils subissent à Marseille et à Paris une dépré- ciation sensible, comparativement aux moutons à queue fine. Ce sont. donc ces derniers qu'il convient de répandre en castrant les mâles défectueux et en prenant des reproducteurs dans la tribu de Chellala, la mieux conformée et la plus appréciée pour la boucherie. Les toisons seront améliorées par le mème procédé, le Chellala ayant une laine moins grossière que celle de ses congénères. Si tout le monde est d'accord sur les points qui précèdent, il n’en est pas de même de l’amélioration par le croisement. Les uns pensent que le croisement ferait disparaître la rusticité, la résistance au climat et à la fatigue de la transhumance. D'autres affirment que seul le croisement peut augmenter le poids des gigots et des côtelettes du mouton algérien, et que les races mérinos sont les meilieures parce qu'en même temps elles rendent la toison plus lourde et plus fine. Tous sont d'accord pour écarter les grandes races anglaises qui sont trop exigeantes, bien qu'on ait pu les introduire avec succès dans l'Amérique du Sud. On peut préciser les conditions dans lesquelles le croisement rendra des services, en répondant aux premiers qu'on le mettra en pratique seulement sur les troupeaux soumis à des déplacements limités et suffisamment bien nourris; -aux seconds que: tous les mérinos ne sont pas également susceptibles d'être introduits en Algérie et qu'un choix s'impose parmi les sous-races. Le mérinos de Rambouillet, dont: LES MOUTONS D’ALGÉRIR ET DE TUNISIE 287 l’acclimatation a été tentée par Bernis dès 1855, et reprise. depuis, ne: peut pas prospérer, et donne des métis qui ne résistent guère mieux que lui. Le mérinos de la Crau, de petite taille, à grosses cornes, de laine moins fine que le Rambouillet, est rustique, accoutumé au climat méridional, à la sécheresse, à la transhumance, qualités qui le désignent à l'attention des améliorateurs. Son importation et son mélange avec la race indigène donneront les résuliats les moins aléatoires. Voici d’ailleurs le résumé de ce que nous pensons devoir être utilement entrepris pour l'amélioration du troupeau algérien et tunisien. La population ovine étant en grande partie possédée par les Arabes, les résultats les plus sûrs seront obtenus par la transformation de la race indigène. Régulariser le régime et profiter de la mise en état des animaux au printemps, pour les vendre à la boucherie. Améliorer par sélection en castrant les mauvais béliers et en ne laissant dans chaque troupeau que quatre mâles sur cent brebis. Elever pour l'importation en France de barbarins à queue fine. Chez les colons, on suivra ces préceptes ou on em accélèrera l’action par le croisement avec le mérinos du midi; on fera de l'élevage, on préparera des moutons pour la boucherie ou des agneaux gras, si on est dans le voisinage d’un centre populeux. La production de l'agneau de boucherie est très en honneur dans le midi de la France où elle motive l'introduction de brebis barbarines fécondes et bonnes laitières ; elle a donc chance de pouvoir être menée à bien ici, si les mères sont bien choisies et convenablement alimentées. Après avoir vendu les agneaux, on assure l’engraissement des brebis dans les mois qui suivent pour les vendre à leur tour et réaliser un continuel renouvelloment du troupeau. Cela se pratique avec succès dans la banlieue de Tunis et peut se généraliser autour des centres importants de consommation. Reste une difficulté spéciale, due à la présence en Algérie d’une maladie contagieuse, laclavelée.La clavelée sévissant à l’état endémique sur les moutons algériens détermine chez ces derniers une accoutu- mance relative qui atténue les pertes. Mais il arrive fréquemment que des moutons algériens amenés en France introduisent la clavelée dans les troupeaux de nos départements du Midi; la maladie bénigne sur l'algérien, est très grave sur le français, aussi l'élevage méridional est-il fort réservé vis-à-vis de l'introduction des moutons barbarins. Cela nuit beaucoup à l'élevage africain ; car, s’il paraît avantageux de voir ces moutons terminer en France leur préparation pour la boucherie, encore faut-il que cet avantage ne soit pas supprimé par les pertes dues à la clavelée. Dans un remarquable rapport, le professeur Nocard a montré que la clavelisation préventive des troupeaux exportés d'Algérie est la seule mesure qui puisse garantir efficacement la métropole contre limpor- tation de la clavelée. « Cette mesure, pratiquement réalisable, augmen- tera la valeur marchande des moutons algériens et contribuera à la progression de la richesse publique en Algérie. » Comme sanction de ces conclusions, fut prise à la date du 27 juin 1900, une décision ministérielle rendant la clavelisation obliga- toire pour les moutons algériens importés en France à partir dn 288 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 1* mai 1901. Par mesure de transition, les moutons destinés à l’abattoir pourront, jusqu'en 1902, être exonérés de cette pratique qui demeure obligatoire pour ceux qui doivent séjourner quelqne temps sur les pâturages français; par un décret récent (30 avril 1901) ces mesures s'appliquent également aux moutons tunisiens. Il était impossible de passer sous silence ces réglementations de po- lice sanitaire, parce qu’elles sont appelées à permettre à l'élevage ovin d'entrer dans une phase nouvelle, et voici comment nous comprenons cette heureuse conséquence. Quand la race barbarine aura été suffisamment améliorée pour qu'il n'arrive plus que des moutons bien formés et à queue fine; quand les producteurs algériens auront compris qu'ils gagneront à faire de l’éle- vage plus qu'à faire de l’engraissement; quand enfin, par l'inoeulation obligatoire, la clavelée aura cessé d'être un péril permanent, les moutons algériens viéndront dans le Midi pour y être mis en état et trouveront sur place, ainsi qu'à Paris, un débouché constant. Les populations ovines assez hétérogènes des Basses et des Hautes-Alpes, de la Drôme, du Gard, de l'Hérault, des Bouches-du-Rhône, s’effaceront pour faire place au mouton barbarin. Les importations augmenteront rapidement, pour le plus grand bien d'une contrée que l’on a nommée justement le pays du mouton. STATISTIQUE. — À quel chiffre pourra s'élever l'effectif dn troupeau algérien ? Quand on suit les variations de la population ovine pendant une longue période, on constate des écarts assez étendus en raison des pertes subies de temps à autres par le fait de sécheresses prolongées; on constate un maximum de 10,850,000 tètes en 1887 et un minimum de 5,500,000 en 1882. Actuellement on compte environ 9 millions de têtes dont 400,000 possédées par les Européens. Or ce chiffre ne diffère pas de celui relevé en 1867. Quelle augmentation peut-on attendre de l'application des mesures proposées. La seule réduction dela moitié des pertes, conséquence d’une hygiène meilleure et,de la prophylaxie des maladies contagieuses et parasitaires, permettrait d'exporter annuellement un supplément de 500,000 tètes qui trouveront en France un écoulement certain. Il sera sage, d'autre part, de ne compter que sur une augmentation de 2 ou 3 millions de êtes correspondant à un accroissement de capital renouvelé tous les trois ou quatre ans. Les importations n’ont pas cessé de suivre une marche ascendante, de quelques milliers en 1855, de 45,000 en 1860, de 750,000 en 1879, elles atteignent aujourd'hui 1,150,000 têtes. Les arrivages ont lieu surtout de mai à septembre. Dans les semaines qui suivent, la Provence envoie à Paris, sous le nom d'africain de réserve, des moutons qui ont été mis en état sur les pâturages du Midi. La Tunisie possède environ un million de moutons composé presque exclusivement de barbarins à grosse queue. (L'Agriculture nouvelle, 15 mai 1901.) ER Em Librairie et Imprimerie Horticoles, 84 bis, Rue de Grenelle. — Paris Fu, L BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACELINARATION DÉ FRANCE 4 (Revue des Sciences naturelles appliquées) #8* ANNÉE OCTOBRE 1901 —_—__— ne SOMMAIRE D 289 GALICHET. — Réponse au Questionnaire concernant Vhistoire naturelle des Tinamous 290 » MOREL. — L'Eucalyptus Extrait de la Correspondance + PROSCHOWSKY. — L'utilisation des Blattes pour l à: 4 mi - BR F4 a alimentation des Poissons... 320 ociété ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises De par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. TTC CNO D ——— Un numéro 2 francs: pour les membres de la Société 1 fr. 50 CE CT 4 AU SIÈGE SOCIAL 5 DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE #4 #1, Rue de Lille. — PARIS Le Bulletin paraît tous les mois. SOCUÉTÉ HATIONALE D'ACELIMATATION DE FRAME Fondée le 10 Février 1854 nn Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 é FU : DÉbRee RATS : D 44 Rob DE loire PARIS 02e & BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1901 Président. M. Edmond Perrier, membre de l’Académie des Sciences et de l'Académie de Méde cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. ; MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Muséum d'Histoire Naturelle, Paris Baron Jules de GUERNE, 6, rue dé Tournon, Paris. S Comte de PonrsriAnp, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris: \ C. Raverer-WarreL, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdie 20, rue des Acacias, Paris. ; É > Vice-Présidents. | Secrétaire-général: M. Maurice Loyer, Avocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. MM. le Dr Sezmorre, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris (Intérieur). à H. HuA, Directeur-adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Sainte A Germain, Paris (Conseil). PQ Secrétaires. L. Srurar, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial d Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). i G. Frox, Docteur ès Sciences, , Chef des Travaux au Jardin colonial 19, rue de Sèvres, Paris (Etranÿer) ï +54 Trésorier. M. Ch. Desreuz, Avocat à la Cour d'Appel, 25, rue de Chateaudun, Paris. _* Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d'ORFEUILLE, à Versailles. Membres du Conseil MM. L. Bnwézr, Ancien Gouverneur de la ‘Côte d'Ivoire, Directeur des affaires d'Afrique Ministère des Colonies, 15,rue de Prony, Paris. 5 Edouard BLanc, Explorateur, 52, rue de Varenne, Paris. ; D: Raphael Brancaar», Membre de l’Académie de Médecine, professeur à la Faculté : Médecine, 226 boulevard Saint-Germain, Paris. : TER HOT Comte Raymond de Dazwas, 26, rue de Berri, Paris. Le Myre de Viers, Député de la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. Dr Leprincr, 24, rue Singer, Paris. \ P. MarcHAz, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de la Sta entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. à L. Msrsev, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pêche et de la Pise culture au Ministère de l'Agriculture, S7, boulevard Saint-Michel, Paris. & A. Muer-Poumnéeon, Directeur de la Revue des Culiures Coloniales, 44, rue de la Ghaus d’Antin, Paris. j | ÆE. Ousrazer, Professe Champs, Paris. . ; : ST A. Rarmuer, Membre de l’Académie de Médecine, Professeur à PEcole vétérina de la Pom ur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue Notre-Dame-de: 4 _ d’'Alfort (Seine). $ Dr E. Trourssarr, Président de la Société Zoologique de France. 14, rue Paris. Albert Grorrrox-Samr-Hizarre, à Vault de Lugny, par Avallon (Yon Presidents honoraires : MM. au l Le Myre ne Viens, 3, rue Cambacérès, Paris. Secrétaires Généraux honoraires : MM. Amédée BrrrHouLe, 4 avenue des Ternes, Paris. Baron Jules de Guerwe, 6, rue de Tournon, Paris: À * Mermibres honoraires du Conseil : MM. P. de LABOULAYE, 129, avenue des Champs-Elysées, P: Dr P. Méenn, 6, avenue Aubert, Vincennes. D: Ed. Méwe, 20, rue Oudinot, Paris. ë D: J. Mrcnow, 33. rue de Babylone, Paris. Dr Weser. 180, boulevard Saint-Germain, Paris: SÉANCES GÉNÉRALES ET DE Les travaux de la Socielé devant reprendre leur cours normal à partir du 1” novembre, le Conseil a décidé que le tableau des Séances serait publié trimestriellement dans SECTIONS le Bulletin et tiendrait lieu de convocation. En conséquence, MM. les Membres de la Socielé sont informés que les Séances générales et de Sections auront lieu, pour les mois de novembre et de décembre, aux jours et heures indiqués dans le tableau ci-dessous : 19041 NOVEMBRE | DÉCEMBRE SÉANCES GÉNÉRALES Le Vendredi à 5 heures. 29 on 1" SECTION. — Mammifères. Le Lundi à » heures. 4 2 2° SECTION. — Ornithologie-Avicullure Hesdta Stheurest nou: DE 9 3° SECTION. — Aquicullure. Le Lundi à 5 heures. TSI ATO 4° SECTION. — Æntomologie. Le Lundi ADO IRE SR E M ATNS 25 23 9° SECTION. — Bolanique. Le Vendredi à, D'ITCTROR REA Ne 22 20 6° SECTION. — Colonisation. Le Ven- dredi à 5 heures. 15 13 Bull, Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 19 LES TINAMOUS RÉPONSE AU QUESTIONNAIRE concernant l’histoire naturelle des ‘‘ Tinamous ’” SPÉCIALEMENT DU ‘* TINAMOU ROUX ‘’ (RHYNCHOTUS RUFENCENS) RÉDIGÉ PAR LES SOINS DE LA SECTION D'ORNITHOLOGIE-AVICULTURE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D’'ACCLIMATATION DE FRANCE par P. GALICHET 1. — Donner les caractères génèraux du groupe des Tindinous. Les Tinamous sont caractérisés par un corps cylindrique, poitrine et dos larges, reins courts, queue tout à fait rudi- mentaire, allant même jusquà l'absence presque totale chez certaines espèces, le Tinamou roux en particulier; cou long et grêle, tète forte et ronde, bec plat, long et effilé, légèrement recourbé à sa pointe; langue plate et triangulaire. Les yeux sont ronds et bien ouverts, la pau- pière est ombragée de longs cils. Les pattes, fortes et nerveuses sont lisses, pourvues de quatre doigts longs et bien détachés dont le pouce, placé un peu haut et tres rudimentaire; chez une espèce particulièrement, le « Tina- mou à aigrette » où « Perdrix pintade » de la Guyane, ila mème complètement disparu; ces Tinamous n'ont que trois doigts. Les Tinamous ne perchent pas. Leur intelligence est médiocre; elle est en général au même niveau que celle des Gallinacés. 2. — Indiquer les caractères analomiques. Les caractères anatomiques des Tinamous sont un peu différents de ceux des Gallinacés, et, sur beaucoup de points, se rapprochent de ceux des Brévipennes. Les vertèbres du cou sont en plus grand nombre que chez les Gallinacés, par contre, les vertèbres coccydiennes sont LES TINAMOUS 291 très rudimentaires, la colonne vertébrale est plus courte dans son ensemble, le sternum moins allongé, est aussi moins proéminent. Les viscères sont analogues à ceux des Gallinacés, sauf cependant pour l'intestin : le tube digestif à un développe- ment plus long, et le cæcum est beaucoup plus allongé et de la grosseur d'un fort crayon. Cette différence de constitution est un indice précieux pour l'alimentation à donner aux Tinamous; elle indique chez ces oiseaux le régime végétal proprement dit, celui qui consiste en racines tubercules, plantes vertes, etc. Les organes sexuels des Tinamous sont exactement sem- blables à ceux des Palmipèdes. 3. — Indiquer la répartilion géographique de ces oiseaux. Ils font partie de la faune autochtone du continent Sud- Américain. lis sont répandus dans toute l’Amérique du Sud, des bords de la mer des Antilles jusqu'au Rio Negro de la Plata. Quelques chasseurs prétendent même en avoir vu et tué dans la Patagonie. Ils sont surtout communs dans la partie sud du Brésil, au Paraguay, dans la République de l'Uruguay, dans la Conféderation argentine et même au Chili. IIs paraissent cependant affectionner particulièrement les bords du Parana et du Paraguay, le Grand Chaco et les Pampas de ia République argentine. 4, — Indiquer les différentes espèces du groupe des Tina- mous avec les noms vulgaires correspondants. On connaît six espèces de Tinamous : 1° Le Tinamou cendré (Cryplura cinerea), commun à la Guyane Française où 1l prend le nom de Perdrix cendrée. Il mesure environ 30 centimetres de longueur. | 2° Le «Tinamou macao », où « Tinamou roux » (Rhyn- chotus rufescens), originaire du Brésil, le plus intéressant de tous. Il est très recherché comme aliment, à cause de la finesse et de l'abondance de sa chair; son nom vulgaire est € Martinetla ». Le Tinamou roux est à peu près de la taille et du poids de notre Faisan commun, mais il est plus ramassé, plus gros, plus charnu, il fait entendre un sifflement particulier à la fois très doux et tres sonore. La femelle est très prolifique, les œufs sont d'un violet. 292 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION très foncé et d'un aspect d'autant plus singulier que la coquille en est polie et ne présente aucun défaut. 3° Le « Tinamou magona », de la taille et de l'aspect du précédent, un peu plus gros et plus charnu; il est doué d'un sifflement au son grave et fort. La femelle pond de douze à seize œufs d'un bleu verdàtre. 4 Le « Tinamou rayé » (Cryplura sylvicola), de la taille d’une perdrix, ne sort pas des forêts où il vit solitaire. La femelle pond de quatre à six œufs d'un violet lustré. 9° Le « Tinamou tataupa », où « Tinamou de cheminée » nom qui lui a-été donné par les habitants du Paraguay, parce qu'il se rapproche volontiers des habitations. Le cri du Tataupa est plus fort et plus sonore que celui des autres espèces; il commence par la syllabe « pi » répétée violemment et précipitamment pendant plusieurs secondes et suivie, après un silence, d'un retentissant « Chororo ». Ses œufs sont d'un bleu foncé brillant. 6° Le « Tinamou à aigrette » ou « Tinamou varié » (Endio- imnys Elegans), que les colons de la Guyane nomment « Perdrix pintade » alors qu'aux Antülles et au Venezuela on l'apppelle plus communément « Poule à joli ». Son plu- mage est moucheté et rappelle celui de notre Pintade, sa queue est rudimentaire, à peu près comme celle du Ràle, et portée de la même facon. Chez ce Tinamou, le pouce fait complètement défaut; il n'a que trois doigts. La tête est surmontée d'une aigrette longue et fine, semblable à celle des Colombes lophotes: l'oiseau l'éleve ou l'abaisse à volonté, suivant les sentiments dont il est agité. Le Tina- mou à aigrette est un peu plus petit que le Tinamou roux. 5. — Indiquer les caractères zoologiques de ces espèces Zoologiquement, les Tinamous forment à la suite des Gallinacés un genre à part, celui des Cupridés, et servent de transition entre les Gallinacés et les Brévipennes. Ils diffèrent des Gallinacés par leurs mœurs plus douces et plus patriarcales. Beaucoup moins belliqueux que ces derniers, les mâles ne jouent pas dans l'espèce le rôle pré- pondérant des coqs. Bien au contraire, les Tinamous vivent en colonies plus où moins nombreuses, chez lesquelles la polygamie et aussi la polyandrie (bien que mitigée dans certaines espèces) parait être la régle fondamentale. LES TINAMOUS 293 x IL 6. — Indiquer les observations qui ont ete [ailes sur les ‘ Tinamous ”, à l’état de liberté, dans leur pays d'ort- gine (nourrilure, reproduction, etc.). Les observations faites sur les Tinamous à l’état libre sont encore peu nombreuses. On sait seulement que plusieurs espèces habitent exclusivement les grandes forêts du Brésil, du Venezuela et des Guyanes, tandis que d'autres, au con- traire, préferent les immensités herbeuses des Pampas et les bords du Paraguay et du Parana. (Parmi ces derniers, le Rhynchotus rufescens). Les Tinamous vivent par troupes plus ou moins nom- breuses, 50, 100 et même 150 individus; ce sont plutôt des bandes que des colonies proprement dites, car chaque indi- vidu est indépendant et n'obéit à aucun mot d'ordre, ainsi que cela se pratique dans les colonies de Hérons et autres. oiseaux plus ou moins migrateurs. Du reste, les Tinamous sont très sédentaires, ils s'éloignent peu des cantons qu'ils ont adoptés et où ils trouvent la nourriture qui leur plait. Les mâles seuls sifflent et font entendre ce chant parti- culier à l'espèce, qui varie d'intonation, de syllabe et de vigueur suivant la variété à laquelle ils appartiennent. Le chant cesse complètement pendant la mue. L'accouplement a lieu dès le début du printemps, qui, pour l'hémisphère sud, correspond à notre mois d'août; la ponte commence dès le milieu de septembre et se prolonge pour certaines variétés jusqu'à fin janvier. Le Tinamou n'apporte aucun art dans la construction de son nid, qui est fait très grossièrement à l'abri d'une haute touffe d'herbes ou des branches basses d’un arbrisseau, et qui consiste en une simple dépression du ‘sol que l'oiseau excave à grands coups de pattes en arrière, tout en tour- nant sur lui-même. C’est le mâle qui construit le nid, après toutefois qu'il a su fixer l'attention d'une femelle par son chant et ses pro- - menades répétées circulairement les ailes étendues, un peu comme le fait le Nandou d'Amérique. L'accouplement n'est pas brutal et rapide comme celui des Gallinacés et des Phasianidés. Le mâle s'installe sur le dos de sa poule qu'il piétine fortement en la recouvrant de ses ailes, il prend son temps, et procède de la même manière 294 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATA TION que le Dindon; la fécondation terminée, il la pousse douce- ment vers le nid qu'il a construit, et lui indique que c’est là qu'elle doit déposer les fruits de leur union. Dès que le nombre d'œufs pondus atteint le chiffre de six, quelquefois sept, mais rarement plus, le mâle se met incon- tment à les couver. La femelle au contraire, après quelques jours consacrés à un vagabondage bien gagné, retourne se confondre avec la bande que le conple avait momentanément quittée; elle y attend qu'un second amoureux vienne la charmer, et lui indiquer le chemin d’un nouveau nid. Une deuxième édition d'œufs violets vont bientôt récompenser le nouvel époux de ses attentions et de ses soins. - L'incubation dure dix-neuf jours, le mâle conduit et élève les jeunes avec une sollicitude touchante, il les promène dans les hautes herbes, et les conduit à la manière des Gal- linacés, attrapant des insectes dans l'herbe, sous les feuilles, faisant même de légers sauts pour les cueillir aux branches et les présenter ensuite à ses petits. Les jeunes grandissent rapidement; à l'âge de dix jours, ils sont complètement emplumés; à l’âge de trois semaines, ils commencent à s'éloigner de leur père, allant chacun de son côté. Bientôt le mâle les quitte tout à fait et se met à la recherche d'une autre femelle avec laquelle il reconmmencera de nouvelles amours. De fin septembre à fin janvier, les Tinamous mâles ou femelles peuvent ainsi s’'accoupler, pondre et élever leurs jeunes, environ trois fois; c'est ce qui a fait dire à certains auteurs que les Tinamous faisaient deux et même trois pontes par an. C’est. une erreur : en réalité, il n y a qu'une seule ponte, coupée par des intervalles plus où moins longs, suivant le gré de la femelle et la rapidite avec laquelle elle trouve le mâle qui doit remplacer celui momentanément absorbé par les soins de l’incubation. La ponte n'est pas interrompue, comme chez les Gallinacés, par l'élevage et la conduite des jeunes, elle est si l'on peut dire, continue par intermittences. Les Tinamous sont omnivores, ils mangent de tout ce qui, à un titre quelconque, peut être ingéré : insectes, grains, herbes, racines tendres, fruits, tubercules, etc., etc. Ils fouillent de leur long bec, les touffes d'herbes, les terres humides et marécageuses des bords des grands fleuves amé- ricains, l'humus des forèts, pour en extraire les mille LU LES TINAMOUS 295 insectes divers, petits crustacés, mollusques, les racines tendres des plantes bulbeuses, etc., qui forment à l'état libre la base de leur alimentation. æ 1. — Indiquer leurs ennemis nalurels, leurs parasites internes et externes. Les Tinamous ont pour ennemis naturels toutes les bêtes de proie et les rapaces qui peuplent les solitudes améri- caines, mais, comme tous les animaux sauvages, ils sont habiles à s'en défendre. Les grosses fourmis rouges leur font aussi une guerre acharnée, surtout lorsqu'ils couvent et pendant l'élevage de leurs jeunes; mais leurs plus cruels ennemis paraissent être les orands troupeaux de bœufs et d'animaux sauvages qui parcourent les plaines à fond de train et écrasent sans pitié les malheureux oiseaux dont le premier soin est de se raser pour ne plus bouger, dès qu'ils entendent le sourd tremble- ment qui en précède l'approche. Les parasites internes, ténia et ascarides que l'on trouve chez les Gallinacés, peuvent également se rencontrer chez les Tinamous. Ils sont aussi comme tous les oiseaux sujets à la vermine cutanée. 8. — Indiquer leurs moyens de défense. Le Tinamou est très bon coureur, et il se sert volontiers de ses pattes pour se mettre hors d'atteinte de ses ennemis. Son vol n'en est pas moins très soutenu, et peut être com- paré en tous points à celui du Faisan. Lorsqu'il est surpris par un danger ou un ennemi qui surgit brusquement, et qu'il n'a pas eu le temps d'éviter, son premier soin est de se giîter, en s'écrasant le plus possible sur le sol, le cou allongé, de facon à se confondre avec le sol même ou les herbes environnantes. La couleur de son plumage se prête du reste fort bien à cette tactique. Il ne s'enlève que lorsque l'ennemi est sur lui, prêt à le saisir, si toutefois il a réussi à le découvrir, ce dont l'oiseau a fort bien conscience. Son vol, élevé de 15 à 20 mètres, est long et soutenu; l'oiseau franchit facilement des distances de 250 à 300 mètres. En touchant le sol, il ne piète pas à l'instar du Faisan et de la Perdrix; il se gîte à nouveau en s'écrasant encore plus que la première fois s'il est possible, et alors pour le découvrir, il faut littéralement marcher dessus. 296 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 9. — Indiquer quels sont les procédes de chasse. Le Tinamou se chasse de toutes façons. Au fusil et au chien d'arrêt, il offre un passe-temps des plus agréables, et fournit aux chasseurs adroits l'occasion de coups magnifiques; c'est ainsi qu'on le chasse aux Antilles, au Venezuela et dans les Guyanes. Dans les immenses plaines du Brésil, il est surtout chassé par les indigènes. Cette chasse se fait à cheval; les Gauchos décrivent de grands cercles, et cernent ainsi une vaste étendue de prairie, où ils supposent qu'une bande de Tina- mous à élu domicile. Puis, obéissant à un signal, tous les cavaliers se dirigent vers le centre du cercle, en le rétré- cissant de plus en plus; effrayés, ahuris par le bruit des chevaux, les cris des hommes, les malheureux oiseaux, après quelques vols incohérents, ne savent plus de quel côté se diriger; ils sont bientôt fatigués, à bout de forces, et deviennent alors faciles à tuer ou à prendre au filet. Dans la République Argentine, les grands propriétaires- cultivateurs, fabricants de sucre, etc., se réunissent à cer- taines époques de l’année, et font des battues monstres de Tinamous. A Tucuman, on en tue ainsi quelques milliers tous les ans; la disposition du terrain se prête du reste mer- veilleusement à cette amusante distraction. Les chasseurs sont postés sur des collines bordant de chaque côté un vallon de quatre à cinq cents mètres de largeur. Les rabat- teurs font lever les Tinamous qui vont, traversant d'un seul vol le vallon, d'une colline à l’autre. Les chasseurs les re- coivent à coups de fusils, et se les renvoient comme ils fe raient d'un volant lancé par la raquette. Dans les Cordillères, dans le sud de la République argen- üine, on le chasse de préférence au chien d'arrêt, ou, comme je l'ai dit plus haut, au filet. III 10. — Faire l'histoire de l'acclimatation des Tinamouws, en Europe et dans les autres parties du monde. Divers essais ont été tentés, dans le but d’'acclimater le Tinamou en France, le Tinamou roux en particulier. Les premiers Tinamous furent adressés à M. de Rothschild, vers 1868 par le comte Amelot de Chaïllou, consul général du Paraguay. LES TINAMOUS 297 Une seule paire survécut aux fatigues du voyage et fut remise à Mairet, faisandier du château de Ferrières, qui les conserva en volière. En 1869, ce couple produisit sept jeunes. En 1877, la des- cendance des premiers importés s'élevait seulement à cin- quante sujets, et la dégénérescence, résultat inévitable de la consanguinité, fut telle que ces oiseaux moururent les uns apres les autres. M. de Capanema qui a essayé de se livrer à la reproduction du Tinamou, a échoué en 1877. Chez M. Mercier, où ils étaient en volière avec des pas- sereaux, ils se montrèrent voraces au point de manger des oiseaux des îles. Jacques Le Merrer, faisandier de Mme Coeffier, à Ver- sailles, essaya en 1878 l’elevage du Tinamou roux avec un mâle et deux femelles. I! obtint à la ponte vingt et un œufs. Les sept premiers furent couvés par une poule nègre, ils ne produisirent qu'un poussin, un œuf contenait un mort en coquille, les autres étaient clairs. Sur neuf œufs placés dans une couveuse artificielle, deux arrivèrent à éclosion, sept furent reconnus non fécondés. Avec les cinq derniers œufs dont trois étaient clairs, il n'eut qu'un oiseau. Soit quatre jeunes sur vingt et un œufs. Jacques Le Merrer remarqua que la femelle pondait à deux jours d'intervalle. Il continua eux ans à surveiller la reproduction de ses Tinamous puis il i'abandonna, remettant les œufs à la cui- sinière du château qui les utilisait à la confection des omelettes. (Je ferai remarquer ici que toutes ces tentatives d'élevage ont été faites en volière, et que pas une n'a été tentée en grand parquet et à l'état libre ou presque libre). Un amateur étranger qui me prie de ne point citer son nom, m'affirme qu'ayant lâché des Tinamous, au nombre de huit, dans un enclos de 3,000 mètres carrés, il en eut au bout de deux ans, plus de soixante, qui tous, il est vrai, disparurent successivement; mais il impute leur disparition aux chats du voisinage et au goût très prononcé de ses domestiques pour ce rôti. Enfin M. F.-E. Blaauw parait avoir réussi l'élevage des Tinamous en leur donnant un espace relativement étendu, de l’eau, des ombrages et une nourriture appropriée. Ses observations complètes ont été consignées dans une com- 298 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION munication qu'il a faite en séance générale à la Société Nationale d'Acclimatation de France, le 11 décembre 1896. Je rends ici pleinement hommage au mode de procéder employé par M. F.-E. Blaauw, j'ai en bien des points reconnu la justesse de ses observations, et souvent profité de ses enseignements dans les essais que j'ai faits, sur une plus vaste échelle, à ma faisanderie de Mériel. Depuis décembre 1895, j'ai tenté à Mériel l’acclimatation du Tinamou, et spécialement du Tinamou roux, ainsi que son importation dans les chasses européennes. J'ai relaté dans une brochure éditée en septembre 1897, la marche presque quotidienne de cette tentative, et les résultats obtenus y ont été consignés d'une façon rigoureu- sement exacte. Aujourd'hui je puis dire que, malgré les déboires inhérents aux débuts de l’acclimatation de toute nouvelle espèce, ces résultats sont concluants, et permettent d'affirmer que le Tinamou, tout au moins le « Tinamou roux » s'acclimatera sur le sol de la vieille Europe, comme l'a fait jadis le Faïsan. Indépendamment du Tinamou roux, j'ai eu à Mériel des Tinamous de plusieurs espèces, notamment le Tinamou à agrette (Endromuys Elegans) et le Tinamou rayé (Cryplura sylvicola). Je n'ai pas été heureux avec les premiers qui ne sont arrivés dans un état de décrépitude presque complet, et avec tous les symptômes de l'’anémie la plus avancée. Malgré les soins les plus attentifs et les plus constants, il ne m'a pas été possible d'en conserver un seul; sur vingt-six sujets que j'ai tenus vivants dans mes parquets, aucun n'a pu faire sa mue, et ils ont tous succombé les uns après les autres. Le sujet qui a résisté le plus longtemps a vécu exactement à Mériel six mois et onze jours. Son poids était lorsqu'il est mort de 370 grammes, alors que l'oiseau robuste et en pleine santé doit peser environ 1 kilogramme. Jai été un peu plus heureux, quoique n'ayant pas obtenu de résultat, avec le Tinamou rayé. Quatre sujets seulement sur dix-sept qui m'avaient été expédiés, me sont arrivés à Mériel, l'un est mort d'accident trois mois après son arrivée ; c'était précisément une femelle, les trois autres qui se sont parfaitement acclimatés, qui ont mué, et que j'ai conservés plus d'un an étaient tous des mâles. Rien d'extraordinaire donc à ce que je n’aie pas obtenu de reproduction dans les deux cas que je viens de relater, A NT Et LES TINAMOUS 299 mais le passage de ces oiseaux dans ma faisanderie m'a permis de faire les remarques suivantes : Chez eux, comme chez le Tinamou roux, aucune distinc- tion de plumage entre les sexes, mêmes attitudes, mêmes allures, mêmes aigrettes pour les Endromys elegans. La bonne harmonie n'a jamais cessé de régner chez mes sujets. Les observations faites ei-dessus, concernant la polygamie et la polyandrie des Tinamous, peuvent donc s'appliquer, sinon à toutes les variétés, tout au moins et à coup sûr, à trois d’entre elles : Le Tinamou roux (Rhynchotus rufescens), le Tinamou rayé (Cryplura sylvicola), le Tina- mou à aigrette (Ændromys Elegans). En 1898, j'ai expédiée un peu partout, en France, en Alle- magne, en Belgique, en Danemark, en Hollande, en Russie, en Serbie, en Suede, des Tinamous roux à l'état adulte. En 1899, j'ai expédié dans ces mêmes pays, de jeunes Tinamous de la même espèce, dont l'âge variait EnEe SIX semaines et deux mois. En 1900 et 1901, j'ai expédié des œufs dans presque tous les coins de l’Europe. Au point de vue commercial, la vente de cet oiseau ou de ses produits a toujours été croissante, ce qui tendrait à prouver que son acclimatation et son élevage ont donné des résultats sérieux. Au surplus, les nombreuses lettres que j'ai reçues, les demandes de renseignements qui me sont continuellement adressées, démontrent que la majorité des éleveurs et des chasseurs s’est fortement intéressée à cet oiseau, et je sais de source certaine que les premiers d’entre eux, vendus en 1898 et 1899 se sont reproduits dans les chasses à l'état libre, et sans autre protection que celle qu’on accorde véné- ralement aux Faisans. IPF 11. — Faire une etude spéciale du « Tinamou TOUxX » (Rhynchotus rufescens). De tous les Tinamous, celui dont l’acclimatation a donné, jusqu'à présent, les meilleurs résultats, qui s'est montré le plus rustique, le plus fécond, est incontestablement le «Ti- 300 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION namou roux », (Rhynchotus rufescens). C'est aussi celui dont la taille est la plus forte après le Tinamou magona; c'est celui dont la chair est la plus fine, la plus délicate et la plus savoureuse. Le corps de ce Tinamou est rond et cylindrique, le poi- trail large et fortement développé, avec les pectoraux très charnus. Le cou long et grèle, est terminé par une tête ronde et forte surmontée d'une sorte de huppe érectile que l'oiseau redresse ou baisse à volonté, et suivant les sentiments dont il est agité. Le bec droit, légerement recourbé à la pointe, long de 6 centimètres environ, est formé par deux mandibules de même force; il est fait pour fouiller et non pour broyer comme celui des Gallinacés. La langue est plate et trian- culaire. L'œil est grand, bien rond, la pupille noire, l'iris jaune paille affaibli: la paupière presque nue, avec le bord infé- rieur jaune tres pâle, est ombragée de long cils. Le tour des yeux est complètement emplumé. Les pattes hautes et nues jusqu'au-dessus de la jointure de la jambe, laquelle est forte et musculeuse, indiquent un oiseau coureur. Les tarses de couleur gris ardoise foncé, mais un peu plus clair par devant, sont forts et longs de 10 à 12 centimètres. Les doigts au nombre de quatre, sont longs et bien détachés. Le pouce placé un peu haut est très petit et tout à fait rudimentaire ; on dirait un organe atro- phié dont l'oiseau ne se sert plus. Les talons sont noirs. Dans son ensemble, l'oiseau mesure environ 40 centi- mètres de longueur: il est de la grosseur et de la taille d'une belle poule faisane, mais plus court, plus ramassé, peut être moins fin et moins élégant, quoique d'un aspect particulier qui ne manque pas d'une certaine originalité. Son poids varie de 0 kilogr. 900 à 1 kilogr. 200. On peut enfin donner du Tinamou roux le signalement général suivant : Son port le classe immédiatement dans la catégorie des oiseaux « Gibier »: tête de la Bécasse, cou fin et allongé de la Pintade avec le mème genre d'attache au dos, ce dernier Fig. 4. — Le Tinamou roux (ZÆhynchotus rufescens). 302 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION très bombé, fuyant, également comme la Pintade, se ter- mine dans une courbe tres régulière et très prononcée par une queue rudimentaire s'infléchissant brusquement vers le sol comme notre Perdrix commune. Le Tinamou' à du Faisan la démarche lente et calme. Lors- qu'il se sent ou se croit en sécurité, il semble plutôt glisser sur l'herbe que marcher ; mais vienne le moindre bruit, la moindre crainte, il allonge son grand cou, relève la tête, explore du regard les environs, écoute quelques très courts instants et disparait rapidement et sans bruit en se glissant dans les herbes. Le surprendre est bien difficile, méfiance plutôt que sau- vavèrie, SOI, mais le résultat est le méme ul ERtivRee défendre des embüches qui l'entourent. Sa livrée est telle qu'a un pas il devient invisible : avec les branches mortes, les feuilles éparses, il ne fait qu'un, et si le regard ne rencontrait son grand œil rond, il passerait inaperçu. |: Son départ est brusque, mais son vol est uniforme, large et silencieux, aucun bruit d'ailes, aucun claquement. I] file droit, semble planer, les ailes largement étendues et les battements très espaces, laissant derrière lui comme une longue trainée fauve, produite par la couleur vive des orandes rémiges de chaque aile. L'allure et le plumage sont identiques chez les deux sexes: Ci-dessous une description aussi complete que possible du plumage : AILE. — Les dix premières rémiges (n° 1) (rémiges pri- maires) sont de couleur fauve clair avec le tuyau noir; à la onzième rémige (n° 2) des stries noires commencent à paraitre, mais seulement du côté externe de la plume; à la douzième rémige (n°3) ces stries occupent les deux côtés des barbes de la plume, à son extrémité seulement; de la treizième à la vingt-deuxième (rémiges secondaires) les stries augmentent en ombre et en intensité pour arriver à la vinget-deuxieme (n° 4) à garnir la plume en totalité. Toutes les autres rémiges (rémiges scapulaires) sont sem- blables comme nuance et dessin, et ne varient que dans leurs dimensions. (4 LES TINAMOUS 303 Enfin, toutes les couvertures ou tectrices sont uniformes et semblables à celles du dos. Dos (n° 5). — Tres nombreuses et serrées, les plumes du dos présentent une série de stries jaunes et noires, de forme ovale irrégulière, qui occupent du tiers à la moitié environ de la longueur totale. Ces plumes se recouvrent jusqu'à la première strie jaune ce qui fait paraitre l'oiseau comme paré d’une suite de cercles concentriques noirs et roux. QUEUE (n° 6). — Les plumes sont semblables à celles du dos ; absence totale de rectrices, seules, les couvertures du 304 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION croupion sont assez développées et retombantes: absence également de faucilles. En résumé, queue très rudimentaire et qui est plutôt un simple prolongement du croupion. Toutes les plumes très nombreuses et très serrées forment en fort pinceau. VENTRE et POITRINE (n° 7). — Les plumes sont très four- nies et très serrées, d'un blanc lavé de roux, d'une teinte cénérale jaunâtre tirant sur le gris; elles sont toutes tra- versées par une strie jaune très clair. CUISSES (n° 8). — Les plumes sont également très serrées, mais reprennent le dispositif général de celles du dos et des rémiges scapulaires, et comme les premières, se recouvrent jusqu'à la premiere strie. GORGE et JOUES (n° 9). — Très petites, presqu'unies, les stries quoique existantes sont à peine visibles et toutes tres serrées; teinte uniforme beige clair. HUPPE (n° 10). — De dix à douze millimètres de longueur, plantées sur tout le bonnet, de la naissance du front à la nuque, étroites et lancéolées, noires au centre et bordées d'un liséré roux s'élargissant à la pointe, ces plumes sont érectiles; au repos, elles n'offrent rien de visible, mais quand l'oiseau, sous l'empire d'un sentiment quelconque, les redresse, elles forment comme une petite crête, qui, par suite de la disposition du dessus présente une série de crans. Toutes les plumes en général, sauf les rémiges primaires et celles du ventre, sont terminées à leur extrémité par une strie pâle formant comme un liséré de 2 à 3 millimètres. Enfin toutes les couvertures, les plumes du dos, du ventre et des cuisses sont garnies d'une couche de plumules très épaisses. Le vol, quand l'oiseau ouvre bien ses ailes, est gris près du corps et roux sous les quinze premières rémiges. Le mäle seul chante. Il fait entendre un sifflement pro- longe, tres sonore et qui s'entend de fort loin. Ce chant peut se traduire par les quatre syllabes : CTiû..…. tü.di.dû » données au diapason normal suivant les notes la, si, si, sol, la premiere note tiù (la) donnée fortement par LES TINAMOUS 205 l'oiseau en jetant la tête en arriere; les deux suivantes plus courtes et plus espacées, la dernière plus courte encore, mais liée à la troisieme, produit un son filé d’une grande pureté. L'ensemble de ce chant est bien rythmé et d'un mouvement presque andante. L'oiseau commence à chanter des que sa mue est comple- tement terminée, fin janvier et février pour notre hémi- sphère. C’est au début de la ponte que le chant est dans toute son activité. Il est alors comme fiévreux et se fait entendre dès l'aube, pour ne cesser qu'an crépuscule. Le chant cesse avec la ponte et aussitôt que la mue commence. (A suivre.) Bull. Soc, nat. Accl. Fr, 1901. — 20 PÉRUIC MEN PRES par H. MOREL Tout a été dit sur l'Eucalyptus, on l’a partout tour à tour exalté et décrié avec trop de fougue. Faut-il répéter ici les renseignements qui se trouvent un peu partout? Je me décide à le faire, car, il faut bien l'avouer, malgré nos Expo- sitions si brillantes et si instructives, le Français voyage si peu et se tient si peu au courant des découvertes exté- rieures qu'il faut revenir sans cesse à la charge pour dissi- per son ignorance de ce qui se passe au loin. M. Planchon à justement dit de l’acclimatation de cet arbre que c’est « l’inportation la plus utile de notre siècle en fait d'arbres exotiques. » Les Australiens le nomment le diamant des forêts, l'arbre de vie : tree of life. Découvert par La Billardière au siècle dernier... non, disons avant dernier, puisque nous ouvrons maintenant le XX!', cet arbre a été baptisé par l'Héritier : bien caché, qui convient en effet admirablement aux graines de toutes ses variétés, surtout à celles du Calophylla. Plus tard, vers 1830, une importation de plusieurs espèces eut lieu en Italie, mais toutes périrent par la gelée sauf un seul : le polyanthema. Enfin, en 1852, eurent lieu de nouveaux essais, faits par M. Ferd. Müller, de 1854 à 1860. M. Ramel s'entendit avec lui pour importer des semences largement répandues dans tous nos établissements. M. Thuret au cap d'Antibes, Alphonse Karr à St-Raphaël arrivèrent à le faire connaitre et à le multiplier. M. Cordier en a réuni près d'Alger une collection qui passe pour la plus complète. A l'époque où je la visitais, il y a vingt ans, il en avait une centaine de variétés. Je suis parvenu, non sans peine, à atteindre à peu pres ce chiffre dans ma villa Eucalypta, de Beyrouth, en Syrie. Sa situation au pied du Liban me faisait penser qu'il devait y avoir à peu de profondeur une nappe d'eau favorable au développement des racines de ces arbres et sous ce rap- port je ne me suis pas trompé. On reste stupéfait et presque incrédule quand je raconte que ces arbres, dont plusieurs atteionent environ 18 mètres, proviennent d'une graine plus #2 L'EUCALYPTUS 307 fine qu'un grain de poivre, jetée en terre il y a treize ans et demi. J'ai vu moi-même, en Algérie, des Eucalyptus qui avaient été plantés jadis dans un marais infect et meurtrier. Or j'ai constaté que non seulement ce marais avait été complète- ment desséché par ces arbres, mais encore qu'on avait été obligé de faire venir de l'eau de loin pour les entretenir. Voici donc deux faits bien constatés que ne peuvent nier les détracteurs de l'Eucalyptus. 1° Croissance d'une rapidité inconcevable. 2° Desséchement prompt des eaux stagnantes. Ces deux qualités ne suffisent-elles pas pour inspirer la vénération et le culte de ces bienfaiteurs de l'humanité ? En Italie un célebre professeur d'arboriculture, sans nier les qualités de l’'Eucalyptus, avait prétendu que le sol italien ne lui serait pas propice. Cette affirmation erronée partant d'une bouche autorisée a fait un tort immense à ce pays. Depuis ce temps, combien la malaria a-t-elle causé de morts, de maladies et de pertes matérielles qu'une plantation hâtive eût évitées ou au moins diminuées! Une réaction s'opéra enfin en faveur de l'Eucalyptus, œràce à la hardiesse et à l'initiative des Trappistes français établis à St-Paul-trois-Fontaines en 1868, aux portes de Rome. Douze de ces R. P. périrent à la täche dès le commence- ment. Toute une partie de la banlieue de Rome était pro- oressivement abandonnée. La magnifique basilique de St- Paul-hors-les-Murs se dressait isolée au milieu d’un pays désert; un tel monument montre cependant qu'il a dû y avoir une population dense en cet endroit. L'Aria cattiva venait poursuivre ses victimes jadis aux portes de Rome et jusque dans Rome même. Aussitôt après la moisson commençait un véritable exode de ce pays! Spec- tacle sinistre ! De longues files de charrettes, chargées de gens et de bêtes partaient pour des pays plus sains, Albano, Frascati, Rocca di Papa, etc., on ne revenait qu'à l'automne... Les trappistes eux-mêmes ne purent s'y fixer d’abord que pendant le jour etne l'habitèrent définitivement qu'en 1874. A l'égard de ces trappistes dont j'admire certes le cou- rage et l’abnégation je me permettrai deux critiques. 1° A l’époque où je les ai visités, ils n'avaient pas planté d'Euca- lyptus dans les bas-fonds. Le moine qui nous conduisait nous donna comme raison que c'était la partie qui leur rap- portait le plus en céréales. Ceci m'a paru une spéculation | 308 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION malheureuse. La santé des habitants et la leur n'était-elle pas plus intéressante que le produit de ces cloaques. Un proverbe dit, il est vrai, que dans les Marennes on fait fortune en un an, mais un autre proverbe dit aussi qu'on y crève (si crepa) en six mois. 2° Ma seconde critique s'adresse au peu de variétés par eux cultivées. Comment dans cette forêt d'Eucalyptus n'ont-ils pas eu l'idée d'établir un arboretum où ils auraient pu faire des études sérieuses et comparer nombre d'espèces? Ils n’en avaient en tout qu'une dizaine de variétés. Je passe maintenant sans transition à la description des Eucalyptus par moi cultivés. Pour la commodité des lecteurs et pour mieux m'y retrou- ver moi-même je les décrirai par ordre alphabétique. Toutefois comme la question de rusticité est, pour nous Français, la question la plus importante, je commencerai par énumérer les espèces qui passent pour les plus résistantes au froid et suivant l’ordre même de leur rusticité : Urnigera, Mnazeldana; ensuite : coccifera, viminalis, amygdalina, goimphocephala, rostrala, imicrotheca, po- lyantheima, Mulleri, rubescens. Ceci dit, procédons maintenant. Acervula. C'est par lui que j'ai commencé mes semis et plantations. L'’ayant mis trop près des armygdalina il souffre de ce voisinage. Il semble pousser droit, sa feuille lancéolée est élégante. Ajnplifolia. Justifie son nom, croit tres vite, ses feuilles ont de 0%15 à 0%20 de long, 0"02 1/2 de large, délicat au Moins en commençant. Anygdalina (Labil). Cette variété a toutes mes préfé- rences. Mais hâtons-nous de le dire, ces Eucalyptus viennent de Vilmorin, et Naudin en m'en parlant, a émis des doutes sur la véritable identification de cette variété. Il m'a remis lui-même plusieurs graines provenant d'Australie même et de plusieurs sources, sans du reste m'affirmer leur légiti- mité. Or, chose curieuse, les différentes graines venant de Jui et celles de Vilmorin me paraissent reproduire toutes le ième arbre. J'ai deux sujets magnifiques à l'angle de ma maison, supportant bravement le poids de la tempête et résistant à la furie du sirocco qu'on appelle ici «(Khamsin ». Ils n'ont pas fléchi, leur tige reste superbement droite, lisse et blanche. Le vent projette leurs graines qui lèvent de tous L’EUCALYPIUS 309 côtés. Cette force de résistance au vent est une qualité qui, à Beyrouth, prime presque toutes les autres. Ce n’est pas tout, c'est l'espèce qui contient le plus d'essence, 5 fois plus que le globutus, elle en fournit 3 kilogr. 390 gr. p. 100 kil. de feuilles. Vient ensuite l'£uc. Olessa dit Morell comme producteur d'essence, puis le g/obulus. Amygdalina regnans. Singularité qui m'inquiète : ceux que j'ai, proviennent des graines de Vilmorin; les arbres qu'elles ont produit ne ressemblenten rien à l'amygdalina ; leurs feuilles sont d’une forme toute différente ; au lieu d’être allongées et légerement mucronées, elles sont larges et se rapprochent de celles de l’amplifolia. C'est cet arbre qui, comme son nom l'indique, serait le Roi de la Création, car il atteint jusqu'à 152 m. Andreana, introduit par Ed. André. S’annonce très bien mais je l'ai depuis peu, il n'a pas encore pris son caractère. Botryoides (Smith). Sur ce sujet là, il y a beaucoup à dire. M. Henry de Vilmorin venant visiter ma propriété de Beyrouth n'a pas voulu reconnaître mes botryoides qui pourtant sortent de chez lui. Il à trouvé qu'ils ressemblaient au viminalis. Malgré toute la déférence que j'avais pour ses avis, je suis bien persuadé qu'il s’est trompé. J'ajouterai même que les caractères de cet arbre sont tellement tranchés au'il ny a guère d'erreur possible et que la désignation qu'en donne Naudin répond entièrement à la configuration de mes arbres. Leur facies diffère absolument de tous les autres. Leur forme est franchement pyramidale. Leur feuil- Jage est de tous le plus abondant, je dirai même le seul véritablement ombreux. Les feuilles du botryoides sont vernissées à l’égal de celles des Magnolias. Enfin, comme le dit Naudin, c’est par excellence l'arbre d’avenue. Son bois à teinte brunâtre est fort solide. Néanmoins un d'entre eux fut brisé cet hiver à un mètre de terre ce qui me donne des doutes sur la résis- tance absolue de cet arbre. Une autre singulière particula- rité le distingue : son écorce devient toute spongieuse par les hivers humides. Les personnes qui n'aiment pas l’Eucalyptus en général et qui critiquent son feuillage grêle aiment le botryoides, Du plus loin qu’on l’aperçoit tous, même les Turcs peu sen- sibles aux impressions de la beauté végétale, tombent en extase devant cette pyramide de fleurs qui se touchent 310 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION comme celle de l'Antheis. Qu'on se figure par la pensée un immense cône de fleurs blanches de 16 metres de haut. Je ne comprends pas que cet arbre ne soit pas plus célèbre. Naudin en fait pourtant une description flatteuse, mais encore inférieure à son mérite. Son fruit est aussi caractéristique, il affecte la forme d’un fourneau de pipe renfermant d'ordi- naire quatre graines, quelquefois trois. Calophylla (Rob. Br.). C’est le plus beau des Eucalyptus, impossible de ne pas ladmirer. J'ai un sujet magnifique qui a émerveillé M. de Vilmorin. Pourquoi faut-il qu'il soit si difficile de le faire reproduire. J'en ai semé peut-être trois mille graines et malgré des soins particuliers je n'ai pu sauver qu’une quinzaine d'élèves et encore sont-ils tou- jours vivants? Il n'y a pas d'arbre présentant la forme d’une pyramide plus parfaite. Naudin le dit assez rustique. Il semble craindre surtout l'humidité. Outre sa forme exquise et la beauté de ses feuilles vernissées, la beauté de sa floraison le rend un arbre sans pareil au monde. Capitellata. Forme tout jeune une tête arrondie ce qui l'expose à être souvent brisé par les vents de Beyrouth. L'ennemi, pour nos Eucalyptus, situés à 3 kilometres de la mer, est non pas la gelée, comme en Provence, mais le vent. Cinerea (Mull). J'en ai un déjà vieux, mais qui est resté affaibli par ses voisins, il est néanmoins remarquable par son feuillage cendré, pruineux. Citriodora.T s'agit encore ici d’une espèce qui ases fana- tiques. Même chez les sujets à peine levés, le feuillage nais- sant exhale un parfum citroné intense. Dans toutes ses par- ties cet arbre revêt un caractère particulier. C’est avec l'amygaalina et le rostrata le plus haut de nos Euc., c'est aussi le plus droit avec l’amygdalina, mais son écorce est encore bien plus lisse, elle à de plus une teinte d'un rose virginal. Il perd de bonne heure ses premières branches, et l'écorchure du point d'attache se cicatrise complètement, aussi avec cette grande flèche unie et comme vernissée, l'idée d'un mât de Cocagne nous vient-elle de suite en le regardant. Un Pacha Turc me fit demander de ses feuilles avec instance, je mis son envoyé en présence de mes cétrto- dora dont la branche la plus basse était à dix mètres : «Je veux bien vous en donner, lui ai-je dit, mais donnez-vous la peine de les cueillir ». L'envoyé n'insista pas. L'EUCALYPTUS 311 Coccifera (Hook). Rustique en tout point, prospère par- tout, aussi en ai-je distribué dans toute la région, Cordata (Labil). Encore jeune, peu élevé, passe pour rus- tique, croit rapidement. Cornuta (Labill). Opercule en forme de longue corne, bois solide plus dense que l’eau, un de ceux qui résistent le mieux aux Tropiques. Corymbosa. Bois de couleur rouge, bon chauffage, écorce utilisée pour la fabrication du carton, gomme peu soluble, appelé bois-de-sang, blood-wood. Corynocalyx (Mull). Aime la séc DER comme les deux précédents. Crebra(Mull. Celui de tous qui est le plus facile à cultiver, bois dense plus lourd que l’eau 1,19. Dealbala. Je suis étonné qu'on n'en parle pas davantage dans les traités. Ses branches extrêmement divariquées s'éténdent très loin. Il se distingue par là de tous les autres. J'en ai distribué des quantités. Excellent pour ombrager au loin. Très facile à multiplier. En raison de son envergure extrème, il casse facilement, bien que son bois soit tres bon; il lui arrive aussi d'être déraciné tant est grande la prise qu'il offre au vent. Decipiens (Endlich). Arbuste très joli, tres ornemental. Ses feuilles oblongues et glauques lui donnent un aspect particulier. Doratoxylon (Mull). Bois à lance, spear-wood. Ses repousses droites servent à cet usage. Bois à la fois dur et élastique. Ficifolia. Chaque année je l’essaye; je laisse, en quittant Beyrouth, de jeunes sujets magnifiques à feuilles vernissées qui promettent beaucoup et ne les retrouve plus. Je crois que dans sa jeunesse, il exige un arrosage bien entendu, que mes Arabes ne savent pas lui donner. Ses fleurs pourpres en font aussi, dit-on, un arbre ornemental au dernier point. Flooded-Guin. Aurait la précieuse faculté d'être celui qui résisterait le mieux à l'humidité. Eœld-Bay. Semble aimer l'humidité. Branches inclinées. Gigantea. Ne pousse pas si vite que son nom semble Vindiquer. Bon bois de chauffage. 212 BULLETIN DE LA SOCIÈTE D’ACCLIMATATION Globutus (Labill). Au point de vue des différentes qualités que peuvent réunir les Eucalypt., si le globulus n'est pas le premier, il est le second partout: rapidité extraordinaire de croissance, hauteur, essence, rusticité relative, densité du bois et, suivant bien des auteurs, solidité, dureté et résis- tance à la pourriture, tanin. Enfin un avantage qu'on ne signale pas et qui est néanmoins important : il se rabat faci- lement, c'est-à-dire qu'à quelque distance de terre qu’on le recepe, il repousse toujours avec une fougue nouvelle, ce qui n'arrive guere pour les autres. Souvent je perds ces arbres, soit que les vents les brisent, soit que poussant trop hâtivement, je me vois, par prudence, forcé de les rabattre. À Maison-Carrée, on a systématiquement rabattu tous les globulus pour leur donner plus de force et de résis- tance. Je crois que c'est une sage pratique. Sur 100 Euc. en tous pays, on voit généralement 99 go- bulus, on ne connait généralement que celui-là. Les formules médicales sont toujours basées sur l'emploi du g/obulus Vaut-il mieux que d’autres? Je comprends néanmoins que la médecine ait besoin d'une espèce bien connue et facile à se procurer pour se baser sur elle. Je distribue souvent aux fiévreux du voisinage, des liqueurs que nous faisons avec les esinifera et le citriodora, concurremment avec le glo- bulus. Apres plusieurs expériences, je ne puis accepter ce que disent bien des auteurs, Naudin en tête, sur l'énputrescibi- lilé du globulus. Ayant employé bien des branches ou laissé en plein air des troncs de globulus, j'ai été étonné de les voir ne pas mieux résister. Je conserve notamment comme curiosité un tronc de 80 centimètres de haut, sur lequel j'avais placé un cadran solaire; ce tronc qni devait jadis peser de 30 à 40 kilogs, en pèse à peine 4 aujourd'hui, ce n'est plus qu'un enroulement de feuilles entre lesquelles s'est produit un interstice. Il est vrai qu'il était exposé au soleil et à la pluie, mais cette dégénérescence s’est produite en moins de dix ans. Le bois du globulus pousse tout en spirale. Naudin y voit un avantage quand on l’'emploie pour le pavage, ses fibres spiralées opposeraient, par suite de leur disposition, plus de résistance à la pression verticale. Pour ce dernier emploi cela peut être un avantage, mais pour tout autre c'est un grand inconvénient; le bois est moins facile à travailler, et tordu comme il est, on n'en peut tirer des planches, ses irrégularités et ses zigzags en empêchent l'emploi pour quoi que ce soit. Il est d’une certaine rusticité L’EUCALYPTUS D Le au froid, moindre toutefois que celle de l'Oranger, et de plus il est très cassant. Globutus nova species. Je n'ai point constaté de différence si ce n'est qu'il pousse moins bien. Gomphocephala. Caractère particulier : les opercules recouvrent les boutons de ses fleurs. Branches nombreuses, feuillage plus abondant, croit vite, rustique, bois dur, bon, dense. Belle forme. Hauteur moyenne. Gunnit. (Hook). Rustique, croit vite, peu difficile, moyen. Heiiphloia. Porte une effroyable quantité de graines, ce qui oblige ses branches à pleurer; hauteur moyenne, bon bois. Jugalis blue gum. Petit, se reconnait de suite à la couleur glauque de toutes ses feuilles, aussi bien les dernières que les premières. Lehmanni(Benth). Naudin en fait en arbrisseau de trois à quatre mètres, le mien a bien au moins dix mètres, c'est donc un arbre véritable. Rien de plus curieux que ses graines qui le différencient de tous autres au point qu'on a voulu en faire un genre séparé. Ses flenrs soudées ensemble font une sorte de bouquet, elles ont pour opercule chacune une sorte de corne on bonnet phrygien que les enfants et aussi les grandes personnes éprouvent un grand plaisir à retirer. Aussitôt on voit les étamines s'épanouir, puis trop faibles, retomber; ce spectacle est des plus curieux. Ces graines au lieu de tomber à terre comme les autres restent à l'arbre plusieurs années, pour mieux dire indéfiniment, car je n’en ai pas trouvé une seule à terre, bien que mon arbre fleurisse depuis quatre ans. Leucoxylon (Mull). Assez élevé. Il semble étrange de voir cet arbre, dont le nom signifie bois blanc, montrer la couleur brune la plus foncée qu'il y ait parmi les Eucalyptus. Ceux qui l'ont ainsi baptisé se sont référés à la couleur, non du tronc, mais des rameaux qui sont blancs en effet. Très bon bois employé au pavage, rustique, pousse vite. Longifolia (Link). Ressemble au Zewcoæylon, grand arbre, bon bois résistant à l'humidité, brave la sécheresse, brûle bien. Macrandra ou Macrantha. J'en ai six sujets qui pro- mettent, mais n'ont pas encore fleuri. 314 BULLETIN DE LA SOCIËTÉ D’ACCLIMATATION Macroryncha (Mu). Moyen. Son écorce, enlevée par plaques, sert à couvrir les cabanes, voisin du capilellal«. Maculala et Marginata. Ces deux arbres, tous deux élevés, fournissent les meilleur bois de tous les Eucalyptus, le premier moucheté, le second veiné ressemblent à l’'Aca- jou. Le second surtout, le Maïrginala, connu sous le nom de Zarrah garnissait plusieurs pièces à l'Exposition, au rez-de- chaussée, entre le Canada et le café indien. Ce bois résiste également à l'humidité, aux Tarets et aux Termites. Sert surtout au pavage des voies, on l'a employé, à Paris, rue Lafayette. Megacarpa (Mull). Bon bois estemploye pour pilotis, petit relativement. Melliodora(Allan Cunn). Arbre de hauteur moyenne attire les abeilles, bois de charronnage. Microphylla. Pousse partout avec une véritable fougue, promet beaucoup. Bon bois de charpente et de chauffage, grand. : Mulleri (Naudin). Du nom de Muller qui a rendu tant de service à l'arboriculture et en a mal été récompensé dans Son pays. On peut consulter à la bibliothèque de la Société d’Horticulture son magnifique ouvrage : Zucalyptographia. Cette variété croit avec une rapidité prodigieuse; encore jeune chez moi, encore peu connue, mais promet beaucoup; se rapproche du Gunnii et du Vininalis, c'est une des espèces les plus robustes. Obliqua (L'Hérit). Voisin de l'Zæmasloma. Grand. Bois léger, néanmoins bon pour charpente et menuiserie, pourrit facilement. Occidentalis. Très rustique, supporte la sécheresse; un des plus répandus après le g/obulus. Pañniculala. Plus difficile, on en fait des poteaux et treil- lages. 2 Piperila. Grand, bois estimé, feuillage également, pour son odeur prononcée. Polyanthema (Schau). Se distingue de suite de tous les autres; ses feuilles rondes lui donnent plutôt l'aspect d'un peuplier que d'un Eue., il en a aussi la couleur grisâtre. L'EUCALYPTUS 315 Très rustique, bois tres lourd. Quelques-uns veulent faire du polyantheima une espèce à part. Redunca (Schauer). Assez grand, fleurit précocement; lui aussi blanchit en vieillissant après la chute de lécorce, bois dur, bon pour charronnage. Resinifera (Smith). Ils forment parmi les Euc. un groupe spécial. M. de Vilmorin, les visitant chez moi, émettait l’avis qu'il faudrait les réunir tous sous le nom de sostrata à cause de la forme absolument caractéristique de la graine en forme de rostre. Primitivement il les avait portés dans ses catalogues sous ces trois noms : Res. Teuterfield — Res. vera — Res. Gros red gun et, en dernier lieu, 1l annonce ce dernier sous le nom de Rostrata. Je possède les quatre à plusieurs échantillons, et je ne puis m'empêcher de certifier que si les graines se ressemblent, chacun a son allure particulière; le gr. red gum pousse avec une véritable furie, aucun autre arbre ne lui ressemble ni n’en approche sous ce rapport. Chaque coup de vent remplit mon jardin de ses débris bois et feuilles, mais pour réparer ses avaries il va encore plus vite que ne fait le vent pour l’'endommager, ce duel intermittent semble rappeler Her- cule abattant les têtes de l’hydre de Lerne qui repoussent sans cesse, ici c’est l'arbre qui semble le plus fort et c'est le vent qui s’épuise à vouloir l’entamer. Il va toujours progres- sant sernmpei allius, Seimper lalius. Ses graines sont Innom- brables et en font absolument un arbre pleureur, ce qui n'arrive pas pour le obusla. Enfin les auteurs proclament l'excellence du bois du s‘obusta, au contraire les branches du gros red gum cassent à tout instant. Aux personnes qui veulent se créer un rideau d'arbres les séparant prompte- ment de leurs voisins, je donne sans hésiter le gros red œum, ses branches retombant sous le poids des fruits en font un écran naturel. Aux colons embarrassés pour le choix, je dirai : « Prenez avant tout celui-là, il n'y a rien dans la nature qui lui soit comparable quant à la rapidité de la végétation, c'est absolument phénoménal. Les autres resinefera le suivent, il est vrai, mais il les devance tous. Rostrata X resinifera. Espèce nouvelle livrée par Vil- morin depuis trois ans. 316 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION - Risdoni (Hook). J'en ai beaucoup perdus. Naudin émet des doutes sur son identification : « Mème dans leur pays d'origine, dit-il, à propos du r'isdoni, les espèces d’Euc. sont facilement et fréquemment confondues les unes avec les autres. Robusta (Smith). J'en tiens la graine de l'abbé Raboisson ; arbre qui promet beaucoup; ses feuilles d’un vert luisant admirable, semblent dénoter une vigueur peu commune. Je voyais dernièérement une statistique des arbres plantés à Madagascar et on le citait avec le #2elia azedarach, comme ayant fort bien réussi à Madagascar. Son bois imprégné d'oleorésine le met à l'abri des Insectes. Rudis (Endlich). Le moins difficile à faire venir, mais le plus difficile à déterminer, d'autant mieux que feuilles et fruits changent beaucoup sur le même arbre suivant l’âge, c'est un vrai Protée. Saligna. Vient facilement, tronc droit, grand, bon bois employé pour la construction des navires. Santalifolia. Espèce nouvelle qui vient tres vigoureuse- ment. Siderophloia. Très grand, très bon bois durable et bon pour chauffage. _ Sieberiana. Semble se rapprocher du précédent. Sur- nommé iron-bark tree, écorce de fer, probablement estimée pour le tannage. Stuartiana (Mull). Se rapproche du Gunnii, feuille plus large, fort employé pour le chauffage. Tereticornis (Smith). Naudin dit cette espèce la plus va- riable de toutes, comme le s'udis. J'en ai deux jeunes. A ce propos Naudin dit : « Le croisement entre espèces est possible, cependant peu probable si la fécondation s'effectue dans les fleurs avant la chute de l'opercule, ce qu'on ignore encore. » Croît rapidement. Trabuti. Hybride du botryoides et du rostrata, croit très vite. J’ai été forcé d'en rabattre plusieurs, à cause de la croissance inconsidérée des branches si l’on considere la faiblesse du tronc. A L'EUCALYPTUS ! : 317 Urnigera (Hook). J'ai été pressé de questions de toutes parts à son sujet. On s'y intéresse parce ce qu'il est indiqué comme le plus rustique de tous, mais je me lasse de dire qu’il ne mérite pas tant d'intérêt. La petitesse de sa feuille, sa gracilité générale lui enlèvent toute valeur au point de vue hygiénique. Je me suis obstiné à le semer très souvent, j'ai toujours très mal réussi. Un sujet mieux venu que les autres a poussé de 3 mètres en dix ans et vient de mourir sans que je sache pourquoi. Peut-être venant des montagnes de Tasmanie, île beaucoup - plus froide que l'Australie, est-il par là même peu porté à sup- “porter la chaleur de Beyrouth. Naudin le dit très biforme ce -qui m'étonne, je n'ai jamais vu sa feuille varier. Vininalis (Labill). J'en connais deux variétés : le V.7an- naguin résistant tres bien à la sécheresse, le V. sivaimpaum ou ferlilis poussant comme son nom le dit dans les maré- cages; ils sont d’ailleurs très différents. Le premier est de moyenne grandeur, le second est un des plus grands. S'il y à -une espèce à essayer en pays où il gêle, ce serait plutôt le Viminalis et l'Amygdalina, mais qu'on s'attende à des dé- boires! À Cannes, Nice et Menton, j'ai vu bien des Eucalyp- ‘tus abîmés par le froid. Lors de l’épouvantable hiver 1880, époque où j'ai trouvé de la glace à Minieh dans la haute Egypte, j'ai vu partout, sur mon passage, {tous ceux qui COM- mençaient à semer de l'Euc. découragés, ces arbres avaient ‘welé en Grèce, en Syrie et même en Egypte. A la suite des Eucalyptus, citons encore un arbrisseau bien intéressant l'Jakea Eucalyploides qui ressemble à un ‘Eucalyptus. Enfin à la villa Eucalypta de nombreux essais ont été tentés sur les variétés suivantes : Acmenoides, alpin«, “angulosa, anomala, bicolor, colossea, Coriacca, COSI0- phylla, eugenioides, eximia, exserta, glauca, gorphocor- nutla, incrassata, macradenia, macrocarpa, 11eliSSiodor «x, niCr0COryS, inicrolheca, obstusifolia, pilularis, plancho- niana, platypus, preissiana,punclala, quadrialata, radiata, ravereliana, rudis X rostrata, uncineta,vilellina.'Tous ces Eucalyptus sont encore trop jeunes pour que je puisse donner ici les résultats de leur acclimatation à Beyrouth. Beaucoup résisteront à l'épreuve qu'ils subissent, d'autres malheureu- 318 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION sement sont déja morts ou végèetent tristement. Lorsque le moment me semblera venu, j'entretiendrai notre Societé d'Acclinatation de mes efforts et du succes qui, je l'espère, les aura couronnés. Je ne puis terminer sans rendre hommage à Naudin et à Ferd. Muller, dont les noms sont intimement liés à l'histoire de l'Eucalyptus. Saluit appelle la villa Thuret, jadis dirigée par Naudin, « le quartier général des Eucalyptus ». Les Français qui voyagent pourront les étudier dans les endroits suivants : avant tout à la villa Thuret. Je conserve religieusement le papier sur lequel j'écrivais mes questions à M. Naudin. (Il était devenu tellement sourd qu'on ne pou- vait communiquer avec lui que par écrit). Il y a une station après Nice : Beaulieu, je crois, ou peut-être Eza, où l’on s'est plu à les collectionner. La villa de la Mortola, entre Menton et Bordighera, en possède quelques variétés. A Alger, visiter la Maison Carrée, le jardin du Hamma, enfin le jardim Ricasoli, à Florence et Saint-Paul-trois-Fontaines à Rome. Il me semble curieux de résumer ici les nombreux emplois qu'on a faits des diverses parties de l'Eucalyptus : Boës : constructions navales, pavage des rues, balast des voies ferrées, poteaux, treillages, charpente, tonnellerie, charron- nage, papeterie, cartonnage, chauffage, charbon, ouate, fla- nelle pour plastrons, ceintures, gilets, calecons, chemises, genouilleres, bas. L'écorce sert au tannage. La gomme est bue par les indi- genes d'Australie. Feuilles et essence : en parfumerie et pharmacie pour sirops, pilules, cachets, fumigations, lavements, injections, injections sous-cutanées, bonbons, pastilles, tisanes, ciga- rettes, huiles, vinaigres, sels, savons, poudres et pâtes den- üfrices, insecticides, antiphylloxériques, remèdes contre la maladie des Vers à soie, contre la loque des ruches, le mil- dew, contre les fièvres de toutes sortes, les rhumes, enroue- ments, affections des bronches, de la gorge et des poumons, asthmes, névralgies, oppressions, choléra, catarrhes vési- caux, influenza, coqueluche, chorée, urémie, rhumatisme chronique, goutte, congestions du cerveau, du poumon, les Moustiques et, ce qui est un comble, pour faire maigrir. Enfin, après vous avoir garantis de toutes ces maladies, apres avoir guéri toutes celles que vous avez pu contracter, L’EUCALYPTUS 319 pour les impénitents qui se sont laissés mourir en méconnais- sant ses bienfaits, l'essence d'Eucalyptus peut encore servir à les embaumer après leur mort. En Syrie, on est'venu me proposer une affaire, il s'agis- sait d'apposer mon cachet de #{7//a Eucalypta sur des drogues à l'Euc. : Eucalyptor, Eucalypsinthe, Eucalypteuse ou Euca- lyptüne; moyennant quelques attestations de médecin, bien persuasives, la drogue se répandait dans tout l'Orient. Evidemment, le puffisme devait s'emparer de cette décou- verte. Cela n'empêche pas l'effet réel et certain du voisinage de ces arbres. Pres de ma villa, le poste de soldats libanais souffrait tellement des fièvres, qu'on était forcé de changer les sol- dats très souvent; maintenant on ne les change plus. Un docteur, de mes amis, m'affirme avoir guéri une phti- sique, par des injections sous-cutanées d'extrait d'Euc.; cette malade en avait été tellement imprégnée qu'à plusieurs mètres on sentait l'Eucalyptus en l’'approchant. L'influence de l'Eucalyptus peut avoir été exagérée par ceux qui y ont trouvé matière à spéculation, mais elle est certaine et indéniable. 320 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION EXTRAIT DE LA CORRESPONDANCE L'UTILISATION DES BLATTES POUR L'ALIMENTATION DES POISSONS Grotte Ste-Hélène, pres Nice, le 1S septembre 1901. Monsieur le Secrétaire général. Je viens de lire l’intéressant article de M. Paul Chappellier sur les Blattes domestiques dont notre collègue recommande avec raison l'utilisation pour la nourriture des Oiseaux insectivores. Permettez-moi d'ajouter quelques mots à cette communication pour recommander également l'emploi de ces Insectes pour la nourriture des Poissons. Les Blattes sont ici un véritable fléau. On en voit très peu le jour, mais, pendant la nuit, dès qu'on arrive avec une lampe dans la cuisine ou les pièces adjacentes, on en voit des centaines courir dans toutes les directions. J'ai fait boucher avec du ciment toutes les moindres fissures des murs et je me demande d'où ces Insectes peuvent venir en si grand nombre. Je ne vois chez moi que les cheminées qui puissent leur servir de retraites pendant le jour; mais lorsqu'on nettoie ces cheminées, il est bien rare qu’on en trouve quelques-unes. Dans le jardin qui entoure ma maison, on n’en rencontre jamais même dans les endroits où sont entassés les débris végétaux. Mais j'en reviens à l’utilisation des Blattes. J'ai pu quelquefois réussir à en prendre d'assez grandes quantités. Je les place vivantes dans un récipient quelconque. Bien qu'elles soient si nombreuses qu’elles forment au fond du récipient une couche de 15 à 20 centimètres d’épais- seur, pas une seule ne meure ef, après cinq ou six jours, quand je les prends pour en nourrir mes Poissons, elles se portent aussi bien et sont aussi agiles que le premier jour. Ce sont surtout les Barbeaux, ies Blageons et les Chevesnes qui sont friands de ces Insectes. Les Tanches semblent moins les appré- cier. Quant aux Cyprins rouges, ils les dédaignent complètement. Les trois premières espèces que je m'étais procurées avec beaucoup de peine et en petit nombre, sont toutes mortes cet été; elles ont été attaquées par le Saprolegnia feraæ ou d’autres maladies, car quelques- unes ne présentaient aucune trace de mousse. Mes Tanches et mes Cyprins rouges, bien qu'ils aient présenté des signes évidents de maladie et de faiblesse ont cependant résisté. Ayant pu constater combien les Blattes étaient appréciées par cer- tains Poissons, je me demande si elles ne pourraient pas être utilisées et fournir un appoint sérieux pour la nourriture des Poissons élevés industriellement comme les Salmonides par exemple. La question vaut la peine d’être étudiée. Je n'ai pas pu déterminer pendant combien de temps les Blattes peuvent être conservées vivantes, mais, d’après ce que j'ai constaté, elles doivent pouvoir se garder pendant un temps assez long, et l'on pourrait sans doute les expédier facilement des localités où elles sont malheureusement trop abondantes pour alimenter les Poissons élevés dans les établissements industriels de pisciculture. Veuillez agréer, etc. À. R. ProscHowsrx . ie BULLETIN 591-52 DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGCLIMATATION DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) PPPPPTE 48: ANNÉE COTE NOVEMBRE. 1901 SOMMAIRE A MM. les Membres à vie........ D RENE A AE PILE SAR ESS ER 321 CHIPS LOL 0e a OS On IRAN ALES ne ERA OS 322 P.GALICHET.— Réponse au Questionnaire aan l’histoire naturelle des Tinamous (swile) 324 ANGELO GHIDINI. — Le Ver à soie de l’Ailante dans le Tessin....................1...,...... 390 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. ee CLONE Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 : É AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue de Lille. — FARIS Le Bulletin paraît tous les mois. SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGCLIMATATION DE FRANCE Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855. ÆÂ, RUE DE LiLLE — Paris BUREAU ET CONSEIL D’ADMINISTRATION POUR 1901 President. M. Edmond Perrier, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Méde- cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Muséum d'Histoire Naturelle, Paris. Baron Jules de GuERxE, 6, rue de Tournon, Paris. Vice-Présidents. Comte de PonrBriAND, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. C. Raveret-Warrez, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier . 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire-général : M. Maurice Loyer, Avocat à la Cour d'Appel, 72, rue de Rennes, Paris. MM. le D' SEeirrorre, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris (Intérieur). H. Hu, Directeur-adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Germain, Paris (Conseil). Secrélaires. L. SruraT, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). à G. Fron, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin colonial, 19, rue de Sèvres, Paris (Etranger). Trésorier. M. Ch. Desreuiz, Avocat à la Cour d’Appel, 25, rue de Chateaudun, Paris. Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d’OrFeuILce, à Versailles. Membres du Conseil MM. L. BinGer, Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, Directeur des affaires d'Afrique au Ministère des Colonies, 15, rue de Prony, Paris. Edouard BLanc, Explorateur, 52, rue de Varenne, Paris. Ë | D: Raphael BLancHAr», Membre de l’Académie de Médecine, professeur à la Faculté de Médecine, 226 boulevard Saint-Germain, Paris. ë Comte Raymond de DaLmas, 26, rue de Berri, Paris. - Le Myre De Virers, Député äe la Cochinchine, 3, rue Cambacérès, Paris. Dr LEPRINCE, 62, rue de la Tour, Paris. P. Marcxar, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur adjoint de la Station entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. L. Measey, Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pêche et de la Pisci- culture au Ministère de l’Agriculture, 87, boulevard Saint-Michel, Paris. A. Minne-PouriNGon, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, 4%, rue de la Chaussée- « d’Antin, Paris. É E. Oustarer, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 124 bis, rue Notre-Dame-des mu Champs, Paris. Ë nr 3 A. Razer, Membre de l’Académie de Médecine, Professeur. à l’Ecole vétérinaire À d’Alfort (Seine). Dr E. TrouessArrT, Président de la Société Zoologique de France. 145, rue de la Pompe. Paris. SU : Presidents honoraires : MM. Albert GeorrRoy-Sanr-HizaiRe, à Vault de Lugny, par Avallon (Yonne). 4 : Le Myre DE Virers, 3, rue Cambacérès, Paris. Ë = nu Secrétaires Généraux honoraires : MM. Amédée BERTHOULE, 4, avenue des Ternes, Paris: ne. Baron Jules de Guerxe, 6,-rue de Tournon, Paris. à Membres honoraîres du Conseil : MM. P. de LaABouLaye, 129, avenue des Ghamps-Elysées, Paris. Dr P. Méeniw, 6, avenue Aubert, Vincennes. Dr Ed. MÉNE, 20, rue Oudinot, Paris. D: J. Micxow, 33, rue de Babylone, Paris. Dr Weger. 180, boulevard Saint-Germain. Paris. A MM. LES MEMBRES A VIE À la suîle de nombreuses réclamations provenant toutes de ce que MM. les Membres à vie faisant depuis longlemps partie de la Societe n'ont pas notifié au Secrétariat leurs changements d'adresse, le Conseil a décidé que MM. les Membres à vie seraient priès, par la voie du Bulletin, de [aire parvenir au Secrétariat de la Sociètlé, 41, rue de Lille, avant le 1* janvier 1902. En conséquence, le service du Bulletin ne sera fait, à partir du 1* janvier 1902, qu'aux Membres à vie qui auront bien voulu se conformer à celte décision. L'envoi au Secrétariat d’une simple carte suffira pour indiquer l'adresse actuelle. - Bull. Soc, nat. Accl. Fr, À 1901. — 21 CHEPTELS Les membres de la Socièlé d'Acclinaltation ont encore présente à la mémoire l'époque déjà lointaine où l’on distri- buait en cheptels des lots d'animaux, Mammifères et Oiseaux. Les comptes-rendus de ces cheptels parurent dans nos Bulletins, d’abord fréquents, puis moins nombreux; enfin le moment vint où le dernier cheptelier avisa la Société de la perte du dernier animal confié en cheptel. Pendant de longues années, il n'en fut plus question et les cheptels semblaient définitivement abandonnés, quand, cette année, la pensée vint à quelques amateurs de reprendre cet usage disparu et de créer un service de cheptels qui, bien administré, deviendrait un lien nouveau entre nos membres, un sujet d'observations intéressantes et une source de bénéfices pour la Société par le croit des animaux confiés aux chepteliers. Les premiers éléments de ces nc pourront être constitués par les échanges effectués avec le Muséum d'Histoire Naturelle, grâce au bienveillant Concours de MM. Edm. Perrier (de l'Institut), directeur de cet établis- sement et de M. Oustalet, professeur et à l’aide des dons de plusieurs de nos collègues, MM. Bizeray, Debreuil, Loyer, Magne, Pays-Mellier, etc. Une première liste de Mammifères et d'Oiseaux destinés à ètre confiés en cheptel parait aujourd'hui. Elle ne contient encore qu'un petit nombre d'offres, car les démarches ont été faites tardivement, alors que les élèves de l’année avaient été déjà distribués ou échangés par leurs proprié- taires; mais il y à lieu de penser, si cette initiative produit de bon résultats, comme on est en droit de l’espérer, que la liste qui sera établie l'année prochaine après la campagne d'élevage viendra compléter celle qui est publiée ci-après. MM. les Membres de la Sociélé qui désireront tenter l'élevage des animaux offerts aujourd’hui sont priés d'adresser leur demande au Secrétariat général qui les soumetira à l'examen de la Commission instituée à cet effet. Nous ferons connaitre dans le Bulletin du mois de Janvier 1902 les conditions dans lesquelles ces cheptels pourront ètre accordés. _:4é se EE CHEPTELS 220 1° Mammifères 1 couple Cerfs cochons. 1 — Cerfs Sikas. 1 — Daims mouchetés, offert par M. Magne. 1 — Gazelles à bézoard. 1 — Mouflions à manchettes. 1 mâle et une femelle Chèvres naines du S 1 couple Moutons du Dahomey. 1 mâle — offert par M. Loyer. 1 couple Agouti de la Guyane, offert par M. Pays-Mellier. nn = 2° Oiseaux couple Canards pilets, offert par M. Debreuil. 1 LL — — siffleurs — — — L — . Canards mignons. Mr Oiesbarrées. Cie dEcypte. PA Haisans dorés, offert. par M: Bizeray. Le — offert par M. Loyer. 1 — Faisans Lady Ambherst dorés, 3/4 sang, offert par M. Bizeray. — Faisans argentés, offert par M. Bizeray. — Tinamous roux, offert par M. Debreuil. coq et 1 poule Hambourg — — = Padoue chamois, offert par M. Loyer. = Pile de Combat, offert par M. Debreuil. = Cochinchine fauves, offert par M. Loyer. couple Colombes zébrées. — Perruches du Bengale, offert par M. Loyer. He b EE EE LES TINAMOUS (suile.) RÉPONSE AU QUESTIONNAIRE concernant l'histoire naturelle des ‘‘ Tinamous SPÉCIALEMENT DU ‘: TINAMOU ROUX (RHYNCHOTUS RUFENCENS) XÉDIGÉ PAR LES SOINS DE LA SECTION D'ORNITHOLOGIE-AVICULTURE DE LA SOCIÈTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE par P. GALICHET V 12. — Décrire les mœurs des Tinamous en captivité. Lorsqu'on prend un Tinamou à la main, il fait entendre pendant tout le temps qu'on le tient une sorte de miaule- ment plaintif, assez semblable à celui d’un jeune chat; ïl ferme les yeux, laisse pendre la tête, fait le mort, si l’on peut s'exprimer ainsi, puis se redressant brusquement donne un vigoureux coup de bec et se laisse retomber, les yeux fermés, la tête pendante. Les efforts des jambes, des pattes et des ailes sont très nerveux. Tous les Tinamous que j'ai eus se sont toujours montrés tres doux et très pacifiques en captivité. Je n'ai. jamais constaté parmi eux, une seule de ces batailles que se livrent les coqs au moment des amours. Chez les Gallinacés, c'est par la force et la vigueur déployées en toutes occasions que le coq constitue son harem. Il charme et captive d'autant plus de poules qu'il est plus fort, plus vigoureux et plus beau; il joue son rôle de sultan en entier, il féconde sans se mêler en rien aux soins de l'incubation et de l'élevage qui sont entièrement laissés aux femelles. Cette prépondérance du coq explique chez les Gallinacés, la différence de livrée et de tenue des deux sexes, le brillant coloris, le plumage multicolore, et la fière attitude du coq faite pour séduire et charmer. Rien de semblable n'existe chez le Tinamou. Les mâles ne jouent pas dans l'espèce le rôle prépondérant des coqs: Lot . | LES TINAMOUS 329 ce ne sont pas des sultans belliqueux, jaloux et fiers qui ne peuvent supporter la présence d’un rival et n’acceptent de leurs femelles qu'une admiration sans bornes et la sou mission la plus humble. Dans la procréation, les rôles sont presque renversés, t ut au moins équivalents : si la femelle pond, le mâle féconde, couve et élève. Comme suite, aucune différence de plumage entre les deux sexes dont la livrée est identiquement sem- blable, et aucune prédominance marquée au mâle. Aussi, la bonne harmonie et l'entente la plus parfaite ne cesse de régner au sein des colonies de Tinamous. Les batailles san- glantes et parfois mortelles que se livrent les coqs pour la possession des poules y sont totalement inconnues. La seule velléité belliqueuse que j'ai remarquée très sou- vent et dans laquelle, du reste, ils ne mettent aucun achar- nement, est la suivante : lorsqu'un Tinamou est au bac ou à l’abreuvoir, en train de manger ou de boire et qu'un autre survient, le premier occupantle chasse et le poursuit, ne lui permettant pas de boire et de manger en même temps que lui. Le résultat est presque toujours celui-ci : lepremier occupant perd sa place, laquelle est prise par un troisième larron. En général chaque Tinamou vient au bac à tour de rôle; ‘je n'ai jamais vu ces oiseaux manger côte à côte ainsi que le font les faisans. Chez les jeunes, cette disposition à Sisoler pour manger, se manifeste de très bonne heure. Les Tinamous s'entendent très bien avec les autres oiseaux adultes, de gibier ou de basse-cour. Il ne faudrait pas cepen- dant permettre à de tout jeunes faisandeaux où poussins l’accès de leurs parquets, ils seraient vite tués et avalés. Ils s’habituent très rapidement à la captivité, à la pré- sence de l'homme et aux soins qu'ils en reçoivent. Néan- moins, la captivité, même étroite, n'a pas pour effet d'en faire des oiseaux de basse-cour à l'instar des poules. Is conservent toujours l'instinct sauvage, ils se méfient et se. rasent chaque fois qu'on les approche. 13. — Jndiquer la résistance des Tinaimous adulles aux diverses conditions de milieu (froid, chaleur, hurnii- dité, elc.). Le climat de l'Amérique du Sud a la plus grande analogie avec le climat européen. Dans la République argentine, séjour de prédilection du Tinamou roux, les plantations ont, à peu de choses près, les mêmes que celles de l'Europe 326: BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION centrale: 6n y cultive le blé, le sarrazin, le maïs et toutes” les plantes maraichères. Les prairies artificielles ou natu- relles y sont les mèmes que chez nous; la tepérature à aussi beaucoup d'analogie avec la nôtre. L’acclimatation du Tinamou, n'étaient l’interversion des saisons et la longueur du voyage, n'offrirait donc en France aucune difficulté. Le Tinamou adulte résiste aux plus grands froids comme aux plus grandes chaleurs de nos climats. Cette année (1901) les mois de juin et juillet ont été particulièrement chauds et secs, le pluviomeétre est resté à Mériel 49 jours consécutifs sans enregistrer une seule goutte d'eau tombée, et le ther- momeètre à indiqué comme température maxima 64 Eau Nord. Si l'on ajoute à cela qne le sol de ma faisanderie est un sable sec, aride et brülant, on conviendra que le Tinamou résiste admirablement à la chaleur et à la sécheresse. Quant au froid, je n'ai pas depuis 1897 enregistré une température inférieure à — 16°. Aucun de mes Tinamous adultes ne s'est jamais trouvé incommodé ni par de telles chaleurs, ni par de tels froids. La chaleur ne parait pas être aussi indifferente aux jeunes qu'aux adultes et semble développer chez eux certaine affection dont j'aurai occasion de parler plus loin en traitant la question 31. 45. — wuelle est l'utilité du Tinainou en dehors de l'ali- inentation (destruction d'insectes, de reptiles, de' petits 'ONGOUTS )? Les Tinamous sont tres grands chasseurs d'Insectes et de toutes sortes de vers et de vermisseaux qu'ils déterrent fort adroitement; ils se font un régal de Mulots, de Souris, de Musaraignes, et mème de jeunes Rats. Ils sont, dit-on, ama- teurs de Couleuvres et mème de Vipères, mais je n'ai jamais ete à même de vérifier le fait. J'ai trouvé à maintes reprises dans l'estomac des oiseaux morts dont je faisais l'autopsie, des débris d'animaux non encore digérés. J'y ai également trouvé les objets les plus hétéroclites, tels que clous, mor- ceaux de verre ou de métal, bouts d'entraves en nickel, etc... J'ai trouvé même, certain jour, une agrafe de corset donf l'ingestion intempestive avait du reste causé la mort du sujet. ‘On peut dire du Tinamou, que si tout ne fait pas ventre pour lui, tout lui est bon, et son estomac est souvent un véritable bazar: il a cela de commun avec les brévipennes, les Autruches et les Nandous. Ex * L LES TINAMOUS 327 14. — Jndiquer le régime animal, véegélal ow mixte. Du reste, la nourriture normale de l'oiseau adulte est celle que j'ai indiquée plus haut. C'est le régime végétal proprement dit, celui qui consiste en racines, tubercules, plantes vertes et bulbeuses, et aussi au point de vue animal en petits crustacés, mollusques, etc... Le Tinamou se nourrit aussi et suivant les saisons de grains secs, blé, mais, sar- rasin, riz, avoine, orge, etc. Il ne dédaigne pas non plus les proies vivantes, et rien n'est plus amusant comme de Jâcher une Souris dans un parquet de jeunes Tinamous; ce sont des courses folles, des sauts, des gambades insensées après le malheureux animal qui n'en peut mais et dont quelques yisgoureux coups de bec ont bien vite raison. À Mériel où le sol est sec et sablonneux, où les Mollusques et petits Crustacés font complètement défaut, où souvent lorsque l’année est seche (comme c'est le cas pour cette année 1901) les plantes ou herbes vertes et tendres sont rares, pour ne pas dire totalement absentes, mes pension- naires reçoivent une nourriture aussi variée que possible, riche en principes azotés et en phosphate. Je pousse mème la sollicitude jusqu à donner à mes adultes du cœur de Bœuf cru finement haché, du glycéro-phosphate de chaux, de l'huile de foie de Morue, etc. Tout cela mélangé avec le grain sec forme, alterné avec des pâtées de riz cuit et avec de la pomme de terre crue coupée en petits cubes, un tout suffisamment nourrissant et réconfortant, au moyen duquel j'espère leur faire oublier les terrains frais et humides des bords des grands fleuves américains où poussent à l'envi les plantes dont ils sont friands, et où pullulent les Mollusques et les Insectes dont ils font leur nourriture journaliere. 15. — Zndiquer les maladies organiques et parasilaires. J'ai dit plus haut que le régime végétal proprement dit convenait particulièrement au Tinamou, cela me semble confirmé par les observations que j'ai pû faire à Mériel sur des cadavres de jeunes, morts à moitié de leur grosseur, à un âge où les maladies qui leur sont spéciales ne paraissent plus à craindre. Ces oiseaux présentaient à l'’autopsie une dégénérescence marquée de tout l'appareil digestif: les intestins très bal- lonnés, distendus, étaient remplis d'air et de matières jau- 328 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION nâtres tres liquides, le cæcum. dans lequel le bol alimen- taire doit être épais, ferme et réparti en chapelets, était très distendu, également rempli d'air et de mêmes matières, mais en plus grande abondance. La vésicule biliaire au lieu d’être d'un jaune vert foncé, était d'un jaune pâle et presque inco- lore; elle était souvent complètement épanchée et toujours tres petite; le foie était pâle et décoloré. Par contre, l'estomac et le gésier n’offraient rien d'anormal. J'aurai l'occasion de revenir plus tard sur cette maladie particulière, en traitant la question 31, spéciale aux jeunes. Les Tinamous sont sujets aux mêmes affections et peuvent contracter les mêmes maladies que les Gallinacés. Toutefois ils sont plus résistants que ces derniers au catarrhe oculo- nasal, à la dyphtérie et à la tuberculose. Jusqu'à ce jour je n'ai jamais constaté de cas de tuberculose chez mes pen- sionnaires; les organes les plus sensibles aux maladies sont ceux de la digestion, le foie particulièrement et les intestins. Au début de l'acclimatation du Tinamou à Mériel, parmi les premiers importés dont la mue particulièrement difficile était encore contrariée par l'interversion des saisons, plu- sieurs succombèerent aux suites d'une maladie cutanée, lichenoïde ayant une grande analogie avec la pellagre, dégageant une odeur infecte et arrêtant completement les fonctions de la peau. Cette maladie occasionnée sans doute par la mauvaise nourriture et notamment le maïs avarié qu'ils avaient reçu pendant la traversée, avait son siège principalement sous les ailes; des applications répétées de teinture d'iode l'ont fait disparaître tout à fait, et je ne l'ai plus observée depuis. 16. — Existe-t-il des signes extérieurs permettant de distinguer les deux sexes? Ainsi que je lai dit plus haut, le plumage chez les deux sexes est identiquement semblable, et si ce n’est le siffle- ment du mâle, rien extérieurement ne permet de distinguer les mâles des femelles. Cependant à l'encontre de ce qui existe chez les Galli- nacés, chez lesquels le sexe n’est pas apparent et consiste pour le coq en deux papilles érectiles, placées de chaque côté de l'anus, le mâle Tinamou, lui, possède une verge tire-bouchonnée de même nature que celles des Palmipèdes, Oies, Canards, etc. Lorsque l'on veut se rendre compte du sexe auquel appar- LES TINAMOUS 329 tient un Tinamou, un aide tient l'oiseau sur le dos, les pattes ramenées en avant. L'opérateur place la main gauche sous les reins, et avec le premier doigt de la main droite exerce une légère pression en arrière de l'anus, entre la fourchette, en même temps qu'avec les pouces, il écarte légèrement les bords de l'anus. Si c'est un mâle la verge saillit presque aussitôt. Cette opération pour être conduite avec certitude demande une certaine expérience et un doigté qui ne s'acquiert que par la pratique. Il importe en effet, d'une part, de ne pas appuyer trop fortement, et, d'autre part, il arrive fréquem- ment que l'oiseau se refuse à l'examen et contracte les muscles dans un mouvement de retrait. 17. — Quelle est l’époque de la pariade? En France, sous nos climats, la pariade commence avec le printemps, fin mars ou première quinzaine d'avril, et est plus ou moins précoce suivant que la saison est elle- même plus ou moins avancée. 18. — Quelle est l’époque de la ponte? La ponte suit l'accouplement de très près et commence (toujours pour notre pays) du 20 au 25 avril. — Dans le pays d'origine, ces deux époques correspondent au mois d'août et de septembre. 19. — L'époque de la ponte s’est-elle modifiée par suile de l’acclimatation? En somme la ponte n'est modifiée qu'en fait et non en réalité, puisque pour les deux pays elle commence à la même époque, c'est-à-dire au début du printemps. 20. — Y a-t-il plusieurs pontes par an? Une fois commencée, la ponte se suit assez régulièrement; elle atteint son maximum d'intensité du 20 mai au 20 juin, puis décroit ensuite avec intermittences, pour cesser com- plètement vers le 10 août. En réalité il n'y a qu'une seule ponte par an, du 15 nl au 15 août, limites extrêmes. Cette période est coupée par des moments de repos plus ou moins prolongés suivant la saison et suivant la fantaisie de la femelle qui recherche plus ou moins activement le mâle. neue éleveurs ou a ont Cru pouvoir Con- 330 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION clure de ces interruptions que la femelle Tinamou faisait deux et même trois pontes par an. C'est une erreur, et en fait, lorsqu'elle a pondu de 8 à 10 œufs, 15 au maximum, le . mâle qui l'a fécondée prend le nid et la poule restée seule, après quelques jours de repos qu'elle emploie à vagabonder de côté et d'autre, court à de nouvelles amours, et “continne la ponte interrompue. LS L'inspection anatomique, du reste, ne révele qu'une seule orappe ovarienne, très développée et composée d'un grand: nombre d’ovules. 21. — Quelle est le noïmbre des œufs, leur couleur, leur. utilisation alimentaire? — 22. — Quel est leur poids? Depuis trois ans, je mets chaque année en travail de 100 à 150 poules Tinamous. Ce nombre se compose en majeure partie de poules nées à la faisanderie, et pour le reste de poules directement importées qui me servent particuliè-- rement à renouveler le sang de mes sujets. La moyenne énérale de la ponte pendant ces trois ans a été pour chaque année de 16 œufs par poule. Mais il faut distinguer : Beaucoup, parmi les poules importées, ont donné seule- ment au cours de Ia seconde année d'importation 2, 3, 9, 6 ou 7 œufs par poule, d'autres, en moins grand nombre 12, 14 ou 15 œufs par tête. Enfin, j'ai eu également un petit nombre de poules importées (exactement 5 poules) qui n'ont donné 18, 20, 25, 26 et même 27 œufs. Les mêmes variations se produisent parmi les jeunes poules nées à la faisandérie, mais elles sont toutefois beau- coup moins accentuées. Le minimum de leur ponte a été de: 14 œufs par tête avec deux poules, et le maximum de 44 œufs avec trois poules. Pour les autres, leur ponte à varié entre ces deux termes. Beaucoup de jeune poules m'ont donné 19, 21 et 23 œufs par tête; d’autres, mais en moins grand nombre 25, 28 et 3 œufs, pour sauter à 44 œufs avec les trois poules citées plus haut. On peut, je crois, de ce qui précède, tirer les conclusions: suivantes : A.— En ce qui concerne les poules directement importées : ° Celles qui n'ont donné qu'un très petit nombre d'œufs: devaient être des oiseaux déjà vieux, presque épuisés et dont: l'ovaire ne contenait plus qu'un nombre très minime d'ovules. LES TINAMOUS Pl 2° Celles qui mont donné une ponte plus abondante, étaient des oiseaux plus jeunes, plus robustes et en meil- leure santé. 3° Pour toutes, la mue devait être terminée lorsque je les: ai reçues, en septembre ou octobre. Elles n'ont pu en pro- fiter pour franchir l’interversion des saisons qui existe entre les deux hémisphères du globe. Les fonctions organiques ont suivi leur cours normal, et la mue, contrariée par les rioueurs de l'hiver, n'est revenue qu'en mai et juin, quand ja nature plus clémente a permis à l'oiseau de se dépouiller : comme suite, ralentissement de la ponte, allant presque e quelquefois même jusqu'à l'arrêt. L'année suivante, ces mêmes poules s'étant mises d'accord avec les saisons, leur ponte est redevenue normale. Je ne puis guere m'expliquer autrement cette extrème variation de ponte, observée chez les importés. B. — En ce qui concerne les poules nées à ma faisanderie : 1° Certaines d'entre elles, bien que d'accord avec. la marche des saisons, n'étaient pas pour cela entièrement acciimatées au sens étroit du mot. C'est ce qui me semble découler des minima d'œufs pondus. 20 Les maxima eux, au contraire, prouvent en faveur de l’éclectisme organique du Tinamou,etde son accommodement plus ou moins rapide aux différents milieux dans lesquels 11 est transplanté. 3° Enfin, les maxima tendraient aussi à prouver que les qualités prolifiques du Tinamou ont tendance à se modifier en sexaltant, sous l'influence de soins et d’une nourriture appropriés que l'oiseau est sûr de trouver constamment, à point nommé et juste au moment où il en à besoin. Du reste, l’exaltation de la ponte du Faisan n'a pas été obtenue par d’autres moyens. Nous voyons en effet la poule faisane qui, à l'état absolument sauvage, pond de 8 à 10 œufs, faire, dans nos chasses vardées où on pratique l’'agrénage, et où on lui donne abri et protection, des nids composés de 15 à 20 œufs. Nous voyons même dans certaines faisanderies où lon pousse à la ponte intensive et où lon donne non seulement la protection et l'abri, mais aussi une nourriture abondante et souvent échauffante à dessein, la ponte s'élever jusqu’à 30 et même 50 œufs. | Il est vrai que ce théorème de physique : « on perd en force ce que l'on gagne en vitesse », pourrait avoir là, mieux que partout ailleurs, son corollaire : « on perd en qualité ce 332 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION que l'on gagne en quantité ». La grande quantité d'œufs clairs que nous voyons journellement, provenant d'animaux domestiques ou seulement recevant les soins de l’homme, ne doit pas avoir d'autre cause. + # % L'œuf du Tinamou est bizarre, son volume peu en rapport avec celui de loiseau, sa couleur et son aspect sont sin- guliers. La premiere fois que je vis un œuf de Tinamou, j'eus l'impression que je me trouvais en présence d'un œuf de porcelaine parfaitement moulé. C'est aussi l'impression que dut ressentir mon garde-chef à la vue du premier œuf qu'il découvrit dans ses parquets; mais pour lui, l'aventure faillit tourner au tragique. Depuis deux ans qu'il soignait ses Tinamous, avec un soin et un zèle infatigables, il attendait toujours le premier œuf avec une impatience d'autant plus grande que les nouveaux oiseaux étaient à la faisanderie, et chez mes amis le sujet de toutes les conversations, et qu'à lui seul le soin en était confié. Son amour-propre et aussi la confiance que je lui avais témoignée en le chargeant de la difficile mission de Vacclimatation lui faisaient une obligation de réussir. Le premier œuf de Tinamou fut pondu à Mériel le 30 mai 1897, bien après que la ponte des Faisans eût été commencée. J'étais absent. A mon retour, et au rapport journalier du soir, mon garde-chef se présenta. Il avait la figure des mauvais jours, et avant que j'aie pu l'interroger, il jetait brusquement, sur les papiers qui couvraient ma table, un œuf de couleur violette, poli, verni, astiqué, invraisemblable, comme je n’en avais jamais vu, et sans toutefois se départir de sa politesse accoutumée, me donnait sa démission. Je pris l'œuf, le retournai, l'examinai, et regardai mon homme sans comprendre. Il éclata. Ses camarades et subor- donnés lui avaient, disait-il, joué ce mauvais tour pour lui faire sentir que ses soins avaient été mauvais, et qu'en trois ans de temps, il avait été incapable de faire pondre ses oiseaux. Il ne pouvait, dans ces conditions, lui, chef, ayant la haute main sur le personnel, rester plus longtemps à mon service. Je congédiai tout le monde, non sans avoir reçu les pro- iestations et les dénégations formelles de chacun, et, resté LES TINAMOUS 333 seul avec le garde-chef et le régisseur, je me mis à examiner l’objet qui m'avait été présenté d'une si singulière façon. Je restai un moment indécis : l'œuf est si beau, sa couleur si violette, son vernis si parfait, qu'on le croirait, n'était son poids, en verre soufflé. L'examen, avec une forte loupe ne me révele aucun défaut dans la coquille, et je ne puis me convaincre qu'il est bel et bien réel, qu'en le frappant légè- rement avec la pointe d’un poinçon et en le mirant avec une forte lampe électrique. Je fis enfin partager ma conviction à mes deux interlocu- teurs, et l’emportement et la mauvaise humeur de tout à l'heure, se changea en une joie qui fut bientôt partagée par tous les gardes, et que je m'empressai de confirmer comme il convient en pareil cas. Voici la description exacte de l'œuf de Tinamou : Il est de forme très réguliere, il a les fortes dimensions d'un bel œuf de poule de Houdan ou de Faverolle. Ses dimensions sont : suivant le grand diamètre, 52 millimètres et suivant le petit, 32 millimètres. Son poids est de 65 grammes environ. Sa couleur est lilas ou mieux couleur aubergine assez clair. La coquille est lisse, sans pores appa- rents, seulement, de place en place, de tres légers petits. points de la grosseur d'une pointe d’aiguille et très espacés; elle est, de plus, recouverte d’une couche d’un superbe vernis tres brillant et sans le moindre défaut, qui lui donne toutes les apparences d'un magnifique œuf de porcelaine. Au point de vue culinaire, comme finesse de goût et digestibilité, les œufs de Tinamous peuvent, avec avantage, supporter la comparaison avec les meilleurs œufs de poules. Ils ont, comme tous les œufs de gibier sauvage, un goût particulier, « sui generis », ils sont pius compacts, on sent, à leur absorption qu'ils doivent être plus nutritifs que les œufs d'oiseaux de basse-cour. 23. — Quelle est la quantité relative des œufs clairs et des œufs fécondés? A ma faisanderie. depuis trois ans, la fécondation a tou- jours été excellente, elle a varié de 83 à 95 0/0 d'œufs fécondés. Chose essentielle à noter, la fécondation a tou- jours été aussi bonne à la fin qu'au début de la ponte. Cela tient, je crois, au changement de mâle; je pratique moi- même ce changement de coqs avec mes Faisans, et je men suis toujours bien trouvé ; 334 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 24. — Quelle est la durée de l'incubation? L'incubation dure 19 jours. L'éclosion a lieu régulière- ment entre le dix-neuvième et le vingtième jour. 93. — Y a-t-il eu des essais d’incubation artificielle? Tous les ans, à Mériel, je fais couver artificiellement des œufs de Tinamous. La réussite est bonne. Le pour cent de mortalités en coquilles est moins élevé que celui de Poule de ferme ou de Faisans. Ces œufs sont plus sensibles que ceux de Poules ou de Faisans à une température de x 42° centig. Tous les ans, j'ai pu constater non sans un certain plaisir que la mortalité en coquilles des jeunes Tinamous, qu'ils soient couvés naturellement ou artificiellement, est insigni- fiante. Toutefois, cette année 1901 a été particulièrement sèche pendant la période d’incubation, et cette mortalité a été plus forte que les années précédentes. 34, — A-t-on tenté l'élevage par les poules? En général, je pratique l'incubation mixte; je fais, sauf, bien entendu, quand le manque de poules couveuses me force à faire autrement, commencer l’incubation par des poules nègre-soie. Lorsque lembryon est bien formé, c'est- à-dire vers le quatorzième jour, je transporte mes œufs au couvoir artificiel, où se poursuit l'incubation et où se fait l'éclosion. 39. — Quelles couveuses naturelles faut-il choisir? Tous mes jeunes Tinamous, sauf ceux que je laisse élever par leurs pères naturels, le sont par des poules nègre-soie du Japon, et je n'ai jamais constaté d'insuccès du fait de la poule éleveuse. Il est vrai que je n'ai jamais fait élever de jeunes Tinamous, par des poules autres que des nègre-soie bien que la chose soit parfaitement faisable, et que je Paie vu maintes fois pratiquer ailleurs que chez moi. 36. — Quelles qualités spéciales celles-ci doîvent-elles présenter? Je conseille néanmoins, de s'assurer que les poules aux- quelles on confie des œufs de Tinamous, réunissent les qualités suivantes : être très douces et peu nerveuses, ne pas s’effrayer quand on approche du nid, se laisser prendre sur les œufs sans s’agiter; il faut aussi qu'elles soient LES. TINAMOUS > 399 légères, et il Convient d'éliminer toute poule trop lourde qui se laisse choir brutalement et d’une seule fois sur ses œufs, car aucun œuf n'est aussi sensible aux félures que l'œuf de Tinamou, la moindre cassure, le plus petit trou arrête net le développement de l'embryon. - Il est bon, avant de les confier à une couveuse. de prendre la précaution suivante : Teindre en violet ou plutôt ae aubergine huit ou dix beaux œufs de poules ordinaires (une décoction de bois l'Inde dans laquelle on les fera cuire durs fera parfaitement l'affaire), placer ensuite la poule couveuse choisie, bien s'assurer que la différence de couleur avec les œufs ordi- naires n'a pas occasionné le refus de s'accouver et ne Jui confier les véritables œufs que lorsqu'on a la certitude que ceux d'essai ont été bien acceptés. % Na 25. — Quelle est la résistance des jeunes? Les jeunes Tinamous venant d'éclore sont très rustiques, ils le sont assurément plus que les faisandeaux, ils sont aussi plus forts et mieux membrés. Ils sont de la grosseur de beaux poussins Faverolle, mais plus allongés, plus vifs, plus actifs et plus résistants aux intempéries. Ils se soucient assez peu de leurs parents et ne se réfugient sous leurs ailes qu’à la dernière extrémité. Ils craignent peu le froid -et la pluie. . Voici deux exemples de la résistance et de la rusticité des jeunes : En juin 1899, le garde charge de l'éclosion, en transpor- tant une couvée de jeunes Tinamous du couvoir au parquet d'élevage destiné à la recevoir, perdit deux jeunes pendant le trajet. Toutes les recherches furent inutiles; la poule meneuse même, lächée sur le parcours, eut beau caqueter, rappeler, rien n'y fit, et les deux oisillons nés de la veille furent enregistrés comme manquants. Un violent orage sur- venu la nuit suivante vint à point confirmer leur oraison funebre. : Quel ne fut pas mon étonnement, en voyant huit jours après, une femme de service me rapporter triomphalement un oiseau quelle jugeait extraordinaire, et qu'elle avait trouvé dans une pièce d'avoine située en dehors de la Faïi- 3306 BULLETIN DE LA SOCIÉÈTE D’ACCLIMATATION sanderie, à environ 300 mètres de l’endroit où l'accident avait eu lieu. C'était un de mes deux vagabonds, frais, dru et joli à plaisir. assurément plus vigoureux que ceux de ses petits camarades élevés par la poule. Dix-sept jours après cette évasion, je me promenais dans une partie de la Faisanderie située à plus d’un demi-kilo- metre des parquets d'élevage, en compagnie d'un visiteur M. Robert G.…. J'avais avec moi une excellente chienne tres sage et très sûre, et je ne fus pas médiocrement surpris de la voir mar- quer un splendide arrèt dans un endroit où tout gibier avait été retire depuis plus d’un mois. C'était le second de mes Tinamous que nous rattrapâmes avec beaucoup de diffi- cultés, et qui, à peine plus gros qu'une belle caille, nous faisait des vols de 100 à 150 metres. Ce second fuyard était de beaucoup plus fort que les jeunes provenant de la même couvée; il pesait 65 grammes de plus que la moyenne vénérale. 26. — Quel est leur régime? Mes jeunes Tinamous sont soumis au même régime que mes jeunes Faisandeaux. Ils recoivent, dès le deuxième jour, une pâtée composée d'œufs durs et de verdure hachée puis, successivement, larves de fourmis, viande crue hachée tres fin, riz cuit, verdures de toutes sortes. A dix jours, ils commencent à manger le grain sec, millet, blé et sarrasin qu'ils aiment beaucoup. Vers l'âge l’âge de deux mois, les jeunes Tinamous subissent une crise de formation qui se traduit pour quelques-uns par une paresse accentuée de l'appareil diges- tif. Ils sont alors excessivement sensibles aux suites d'une alimentation aigre ou simplement fermentée, cette crise est encore rendue plus difficile avec la canicule et l'appa- rition des grandes chaleurs. Pour ces raisons, il faut, dès que les Tinamoudeaux atteignent un mois où un mois et demi, qu'ils sont comple- tement emplumés, et ont perdu tout duvet, supprimer les pâtées qui aigrissent trop vite, continuer les larves de fourmis, la verdure, mais en petite quantité, la viande crue très fraiche, hachée finement et séchée avec de la chape- lure ou avec de la farine de biscuit. On peut distribuer à profusion des Insectes vivants, du blé, du sarrasin, du moha de Hongrie, du millet, du maïs concassé, des pommes LES TINAMOUS MN de terre crues coupées en petits morceaux cubiques. Ils aiment beaucoup la pomme de terre ainsi préparée, et il est intéressant de leur en donner plutôt que de la verdure qui, en trop grande quantité, pourrait provoquer la diarrhée. De cette facon, on franchit sans trop de mal et sans trop «de pertes le passage délicat de la croissance. Les Tinamoudeaux sont très voraces, ils courent avec une rapidité surprenante apres tous les Insectes, les Mulots, les Souris et même les jeunes Rats qui se hasardent dans leurs parquets. 27. — Quelle est la durée de lewr croissance? La croissance est très rapide, trop même, car je crois que cette rapidité est une des causes principales de la crise dont je viens de parler. 28. — A quelle époque les jeunes commencent-ils à change; de plumage? A Sa naissance, le jeune ‘Tinamou est un bizarre oiseau, ayant beaucoup d'analogie avec de tout jeunes autruchons: il est entièrement recouvert d'un duvet soyeux, tres épais, brun foncé sur le corps, et brun clair au-dessous, dont chaque brin est terminé par un long poil rigide, qui donne à l'oisillon l'aspect d'un Hérisson en miniature. La tête est également de couleur claire et partagée longitudinaiement par sept raies noires : celle du milieu occupant exactement la ligne médiane, est de beaucoup plus large que les autres qui prennent naissance autour de l’til, la première au-des- sus, la deuxième derrière et la troisième au-dessous, ce qui fait paraitre l'œil comme encadré. Ces sept lignes se perdent dans le duvet qui recouvre la nuque et se confondent avec lui. L'œil est rond, largement ouvert et curieux. Le bec est long, grêle, de couleur claire. Les pattes toutes mignonnes, bien découpées, sont roses. Cette première livrée persiste les huit premiers jours, puis les plumes commencent à apparaitre, exactement sem- blables à celles des parents, mais d’un ton plus clair. Peu à peu, au fur et à mesure que l'oiseau grandit, les plumes deviennent plus nombreuses, plus fortes, plus touffues; à quatre semaines, il est complètement emplumé, mais la couleur ne varie pas. L'oiseau arrive ainsi à l'état adulte sans aucune transition brusque, les jeunes n'étant que le Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901. — 22 338 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION diminutif de leurs parents, et pour le reste, toutes propor- tions gardées, exactement semblables à eux. Des la quatrième semaine, ils peuvent se passer complèe- tement des soins de l’éleveuse, à laquelle depuis longtemps déjà ils ont cessé d’avoir recours, si ce n'est pendant les nuits trop fraiches ou les orages trop violents. 29. — Quelles sont les habiludes des jeunes? Les jeunes Tinamoudeaux sont vifs, alertes, ils piochent Le Tinamou et sa couvée. constamment du bec le sol de leurs parquets pour en faire sortir les vers et les vermisseaux dont ils sont très friands. Il est curieux de voir lorsqu'il a plu, avec quelle activité ils fouillent la moindre motte de gazon, à la recherche d'Escargots, de Limaces, etc., que la pluie pousse hors de leurs retraites. Ils sont très indépendants et se soucient médiocrement des appels de la poule mère; il n'est pas rare de les voir rester une journée entière sans éprouver le besoin de se réfugier sous ses ailes. Quand ils font la sieste, c'est toujours isolément qu'ils se couchent sur le sable etjamais côte à côte comme le font les Faisandeaux et les Perdreaux. nd Li = Late id CPE Lac L Été 2h LE ; i LES TINAMOUS 339 Au bac ou à l'abreuvoir, ils se comportent exactement comme les adultes et n’admettent pas qu'un de leurs frères puisse manger ou boire en même temps. 30. — Quels soins leur donnent les parents? Tous les ans, je laisse un certain nombre de coqs couver et élever eux-mêmes leurs jeunes en toute liberté. Le mâle conduit ses petits avec beaucoup de dévouement et de solli- citude pendant les huit ou dix premiers jours. Lorsqu'un danger menace la couvée, il fait entendre un petit cri d'alarme et se rase en s’applatissant le plus qu’il peut sur le sol, derrière une touffe d'herbe, À ce signal, les jeunes, au lieu de chercher un abri sous son aile, se dis- persent dans toutes les directions, se dissimulant à qui mieux mieux et toujours isolément derriere le moindre accident de terrain, ils ne rallient leur père que longtemps apres que tout danger a disparu. Vers le 10° ou 15° jour, la sollicitude paternelle se ralentit pour cesser tout à fait vers la quatrième semaine. A ce moment les coqs cessent complètement de s'occuper de leurs petits, et ceux-ci sont du reste aptes à se suffire à eux-mêmes. A7. — À quel äge el à quelle époque de l’année contient-ti de pratiquer l'opération de l'éjointage? On peut éjointer le Tinamou à tout âge, mais l'âge le plus propice pour pratiquer cette opération est lorsque l’oiseau a atteint quatre semaines, c'est-à-dire lorsque les plumes ont complètement remplacé le duvet. L'éjointage ordinaire, c'est-à-dire l'ablation de la main, en avant du pouce qui doit rester intact, suivie d’une cautérisation au perchlorure de fer, n'est jamais cause d'accident lorsqu'il est fait avec soin. 31. — Y a-l-il des maladies spéciales? Les Tinamoudeaux sont sujets vers l’âge de deux mois, à l'époque de la canicule, et par suite de cette crise de for- mation que j'ai déjà signalée, à une maladie contagieuse, spéciale à l'espèce, à laquelle les autres oiseaux de chasse sont complètement réfractaires. C'est une entérite microbienne à marche très rapide et très virulente, surtout chez les issus d’importés directs. Elle est caractérisée par des lésions intestinales affectant la forme et les dimensions de forts grains de millet, semés tout le long du gros intestin, et par l’intoxication du foie. 340 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’'ACCLIMATATION Cette entérite est produite par un bacille inconnu jusqu'à présent en France. Jai soumis à MM. les professeurs de l'Ecole vétérinaire d'Alfort des cadavres de Tinamous morts de cétte affection. IlS sont arrivés à obtenir des cultures de ce nouveau microbe et ont bien voulu s'offrir à fabriquer un sérum destiné à immuniser les oiseaux. Mais la fabrication exigeait au moins deux années, et aurait donné lieu à des dépenses relativement considérables. De plus les oiseaux inoculés n'auraient été immunisés que pour une période de douze jours seulement, après laquelle une nouvelle inoculation aurait été nécessaire. Dans ces -conditions j'ai dû y renoncer. Ce bacille ne devient virulent que lorsque le température atteint X 28° ou 30° centig.; au-dessous, les germes restent inertes. Les mesures prophylactiques sont les suivantes : A l’apparition des grandes chaleurs, diviser les jeunes en petites bandes de manière à limiter la contagion à son minimum et les installer sur un soi neuf. Comme nourriture, supprimer les pâtées susceptibles de fermenter ou d'aigrir rapidement à l'air libre; si, à cause du jeune àge des élèves, on est encore obligé de donner la pâtée, n'en distribuer que tres peu à la fois, de facon à ce que tout soit consommé immédiatement. Aussitôt le repas terminé, enlever tous les ustensiles ayant püû servir, les laver soigneusement avec de l'eau acidulée à 5 pour 100. Comme boisson ne donner que de l'eau acidulée à 2 pour 1000. Des qu’un oiseau tombe malade, fait la boule, le cou rentré dans les épaules, et s'avance comme automatiquement les plumes hérissées, les symptômes marchent vite : il ne tarde pas à tomber sur le dos, et à agiter désespérément les pattes. C’est l'affaire de cinq minutes pour que le sujet tout à l'heure bien portant et frétillant passe de vie à trépas. Il est inutile d'attendre que l'oiseau soit mort, le mieux est de l'enlever immédiatement, de l'achever et de brüler son cadavre. La marche est comme on le voit foudroyante, et la maladie d'autant plus terrible et difficile à éviter qu'aucun signe précurseur ne vient donner l'éveil. Au fur et à mesure que les oiseaux sont depuis plus long- tenips acclimatés, la maladie devient de moins en moins virulente. Le maximum d'intensité a été pour l'année 1898, . c'est-à-dire à l'époque où la majeure partie de mes jeunes LES TINAMOUS 341 provenait soit de parents directement importés, soit de parents issus eux-mêmes d'importés. En 1899, tout en exerçant ses ravages, elle a été beaucoup moins funeste, ses attaques ont été moins fréquentes, et ses effets moins froudroyants. En 1900 où cependant le thermomètre a atteint des hau- teurs auxquelles nous ne sommes point accoutumés, je n’ai constaté, sur plus de 900 élèves, qu'une trentaine de cas, dont une vingtaine seulement suivis de mort. Les effets ont été beaucoup moins prompts qu'en 1898, et j'ai pu voir des oiseaux atteints, résister pendant deux et même trois jours, alors que précédemment, et chez les jeunes issus directe- ment d'importés, il ne s'écoulait guère plus de cinq minutes entre l'attaque et la mort. Cette année (1901), je n'ai eu qu'un seul cas suivi de mort. Prois autres oiseaux ont été atteints, mais d'une facon très bénigne. On peut donc espérer, et il est fortement à souhaiter que cette maladie assurément particulière à l'espèce puisqu'elle ne s'est jamais propagée chez les autres pensionnaires de ma faisanderie, S'éteindra au fur et à mesure que l'acclima- tation du Tinamou sera plus complete, et que d'exotique il sera devenu indigène. 96) 32, — À quel age sont-ils adultes el aptes à la reproduction? Les jeunes Tinamous sont adultes dans l'année de leur naissance et atteignent leur complet développement vers l'âge de quatre mois. Ils sont aptes à la reproduction au printemps suivant, c'est-à-dire à dix mois environ. Les jeunes poules sont sensiblement plus prolifiques que celles de deux et trois ans, et leur ponte est bien plus abon- dante. Les jeunes coqs sont aussi supérieurs aux vieux. Cette année les cogs qui ont couvé et élevé leurs petits étaient en majeure partie nés en 1900. 37. — Quel est le prix de revient de l'oiseau adulte? L'acclimatation du Tinamou est encore chose trop récente pour qu'il soit possible d'établir dès maintenant un prix de revient exact du sujet parvenu à l'état adulte; il faut attendre que son élevage soit plus répandu et que le prix des reproducteurs soit moins élevé. On peut cependant poser en principe que ce prix sera de beaucoup inférieur à celui du Faisan, la fécondité et la 342 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION grande rusticité du Tinamou en sont des gages certains. Ce serait assurément, en dehors de l'agrément de la chasse, un immense avantage au point de vue de l'alimentation, étant données la finesse et la délicatesse de sa chair. VII 38. — Peut-on considérer le Tinainow roux comme oiseau de volière, de basse-cowr, de parc ou de chasse? L'élevage du Tinamou roux ne prospère bien qu'à la con- dition que l'oiseau soit placé dans un espace assez grand, et qu'il jouisse au moins d'une demi-liberté. On peut néanmoins le tenir en volière, mais il importe alors que cette volière soit spacieuse et garnie d'arbustes, qu'elle présente des recoins et des cachettes dans lesquelles l'oiseau puisse se dissimuler. J'ai vu des Tinamous s'habituer à des espaces plus restreints encore; toutefois je doute qu'en volière sa reproduction soit aussi bonne qu'en liberté, ou même en demi-liberté. Les qualités qu'une domestication continuelle et intensive a fait naître et grandir chez les poules et autres oiseaux de basse-cour, n'ont pas encore eu le temps de se développer chez le Tinamou:; je doute même qu'elles se développent jamais, et j'estime que, pour l'instant du moins, il doit être réservé Comme « oiseau de basse-cour ». Jusqu'à présent, il s'est surtout montré oiseau de chasse par excellence. Ses antécédents parlent en faveur de cette Opinion, Car jamais avant son introduction en Europe, il ne s'était reproduit et développé autrement qu'à l'état sauvage et jamais, si ce n'est chez nous, il n'a été maintenu en capti- vité. Il ne faudrait done pas, ainsi que l'a pourtant fait récemment, un éleveur éminent et des plus justement réputés, conclure de la facilité avec laquelle il la subit qu'il se reproduira volontiers dans une basse-cour et que ses qualités s'y maintiendront. Les tentatives de reproduction en espaces restreints n’ont jamais donné de brillants résultats et ont plutôt abouti à des échecs. Au contraire, et sans parler de la liberté com- plète qui, à mon avis, lui est nécessaire pour développer toutes ses qualités, les essais faits dans de grands parquets boisés avec de l’eau ou mieux des pièces d’eau, des ombrages, des endroits touffus où il peut se cacher et abriter ses LES TINAMOUS Be amours, ont toujours d'autant mieux réussi que les espaces donnés étaient plus vastes et les oiseaux en colonies plus nombreuses. Vouloir peupler nos basses-cours avec un oiseau sauvage depuis sa création, est à mon sens une utopie semblable celle qui, ces années dernières à hanté l'esprit de certain éleveurs et de certains chasseurs qui ont voulu faire un gibier du « Dindon », animal de basse-cour par excellence. Le Tinamou en captivité, s'habitue à l'homme, cela est parfaitement vrai, mais il s’y habitue comme le font les fauves du Jardin des Plantes et des Ménageries, parce qu'il ne peut faire autrement. De là à conclure qu'il s'y plaira et qu'il s'y reproduira, il y a tout un monde. 39. — Quelles sont ses qualilés ou ses défauts & ces differents points de vue? Comme oiseau de volière, le Tinamou est insignifiant et offre peu de qualités. La simplicité de sa livrée est loin d'en faire un ornement; de plus, s'il vit en bonne intimité avec les oiseaux de grosseur égale à la sienne, il n’en est pas de même avec les plus petits, et si la volière dans laquelle on voudrait le renfermer contenait des petits oiseaux, on cour- rait le risque de les voir, à un moment donné, servir d'aliment à sa voracité. Il ne déploie aucune grâce, et n’attire en quoi que ce soil l'attention; autant mettre une poule Faverolle ou une poule de Bresse en voliere. Le Tinamou est un modeste qui passe inaperçu. Il n'en est pas de même comme oiseaux de chasse: sa rusticité, sa fécondité, la précocité des jeunes et la facilité de leur élevage, la finesse de sa chair, sa chasse des plus attrayantes, en font un gibier de premier ordre; si l'on joint à cela qu'il est sédentaire, qu'il se cantonne volontiers à la seule condition qu'il ait à sa disposition de l'eau et des broussailles, on conviendra que le Tinamou est le.gibier à plumes rêvé, et qu'il réunit toutes les qualités qui consti- tuent l'oiseau de chasse par excellence. 40. — Quels sont ses moyens de défense? Il possède plusieurs moyens de défense qu'il utilise tous, et avec avantage suivant le cas. La sévérité de son plumage lui permet de se dissimuler très aisément au point de se confondre avec le sol. Ses LEA BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’'ACCLIMATATION CO e pattes lui donnent une agilité capable de défier à la course le plus habile des chiens courants. Son vol soutenu et pro- longé le met sur un pied d'égalité parfaite avec les meilleurs Faisans; il tient parfaitement l’arrèt et s'il piète souvent avant de prendre l'essor, il offre sous bois au chasseur, le mème agrément que la Caille lui procure en plaine. Il est peut-être un peu tôt encore pour se prononcer d'une façon définitive sur la manière dontle Tinamou se compor- tera dans l'avenir vis-à-vis des chasseurs. A mon avis, ses moyens actuels de défense changeront, et mon opinion est basée sur les raisons suivantes : Dans son pays d'origine, il n'est pas chassé ou fort peu. Que sont, en effet, les quelques centaines de chasseurs qui le poursuivent (et comment?) comparés aux centaines de mille d'hectares dont se compose l'Amérique du Sud? Il ne connait que deux ennemis : les grands troupeaux de Bœufs sauvages qui l'écrasent en parcourant les plaines à fond de train, ou bien les grosses Fourmis rouges qui le dévorent. Quant à l'homme, quant au chasseur, c’est pour lui un accident isolé, qui n'apporte aucune modification à sa maniere d'être. En sera-t-1l de même en France, où pas un pouce de terre n'est foulé, labouré ou retourné par le cultivateur, où pas une cépée, pas un buisson, pas une touffe n'est battue, fouillée, flairée par le chasseur, son rabatteur ou son chien, ou chaque abri cache un fusil, chaque corne de bois un ennemi? Evidemment non. Les mœurs du Tinamou, encore confiantes et peu sau- vages, se modifieront comme ses moyens de défense, au fur et à mesure que se seront modifiés les moyens d'attaque dont il sera l'objet. Voyez la Perdrix. Combien la chasse s’en est-elle modifiée depuis vingt ans? Il nest pas un chasseur, à la barbe à peine erisonnante, qui ne se rappelle avec bonheur, les jours heureux où ce gibier si délicat, si estimé, si amusant, lui partait dans les bottes, à l'arrêt patriarcal de son braque ou de son épagneul chassant tranquillement sous le canon. Aujourd'hui, les battues, les choke-bored, les pointers anglais, avec leur course endiablée, ont changé tout cela. Les moyens d'attaque sont différents, les moyens de défense sont tout autres. La Perdrix, aujourd’hui, surtout dans les chasses où on fait beaucoup d'élevage, vit en bandes nombreuses et non hs FT # #8 LES TINAMOUS 34 plus en compagnies. Elle pose des sentinelles avancées tout comme le Canard sauvage et, qu'elle soit dans un bon cou- vert de betteraves, dans un trefle ou dans un taillis, elle part à 200 metres du chasseur au chien d'arrêt. En battue, elle force à présent les rabatteurs avec autant de désinvol- ture que le bouquin le plus avisé. Que dire du Faisan, cet amateur par excellence des taillis et des fourrés? Ne voit-on pas maintenant, en Sologne, le pays de prédilection cependant, les propriétaires de chasse obligés de faire des battues en plaine avant de chasser au bois. N'est-ce pas là, aussi, une modification profonde, essentielle même, de la nature de ce gibier? Non moins avisé que les autres, le Faisan s'est dit que les surprises étaient moins à redouter en plaine que sous bois : on voit de plus loin. On ne peut donc encore, à mon avis, préjuger des moyens de défense dont usera le Tinamou, c'est affaire d’acclimata- tion, de chimat et milieu. Mais ce qu'il est possible d’affir- mer avec assurance c'est que, de quelque facon qu'il Sy prenne, il se défendra vigoureusement; ses antécédents permettent d'avancer cette opinion avec toute certitude. 41. — Quelle est la qualile de la chair du Tinainow, con- parée à celle de divers oiseaux, volailles ow gibiers? La chair du Tinamou roux est blanche, tendre, juteuse et excessivement fine et délicate, ses pectoraux sont {res charnus et fournissent des blancs aussi beaux et aussi épais que ceux des plus beaux poulets. Son fumet délicieux le place, comme qualité comestible, au mème rang que le Per- dreau et la Bécasse:; il a la finesse du premier et la saveur de la seconde. | 42. — A-t-on fail des essais de b'ansportlde Tinarnous cOon- serves, en vue de l'alimentation, dans des appareils fri- gorifiques?. — 43. — Peut-on Se procurer des Tinainous ainsi conservés? Malgré ses précieuses qualités culinaires, je ne crois pas, ou tout au moins je n'ai pas connaissance qu'il ait été fait 346 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION des essais de transport de Tinamous conservés dans des appareils frigorifiques. La cause en est peut-être dans les frais considérables que nécessiterait une semblable entre- prise. Il faudrait, en effet, que les appareils fussent trans- portés sur les terrains mèmes de chasse ou de reprise du œibier; or, ces terrains sont toujours à des distances très éloignées des points de centre et d'embarquement. D'autre part, tout le monde sait que les viandes gelées perdent la majeure partie de leurs qualités. À l'heure actuelle, il se produit sur le marché de Londres un impor- tant mouvement de recul sur le trafic des viandes congelées importées d'Australie et d'Amérique, et la boucherie a une tendance marquée à revenir de plus en plus à l'élevage indigène. L'importation de Tinamous conservés en vue de l’alimen- tation, dans des appareïls frigorifiques, ne me semble pas avoir chance de succes. Toujours est-il que, dans les grandes villes d'Amérique, il constitue un mets fort recherché et très estimé, qu'on en fait une consommation considérable, et qu'on y fait aussi une grande différence, tout à son avantage, avec la Perdrix ordinaire. 41. — Quel est l'utilisation du Tinainouw aw point de vue culinaire ? L'utilisation du Tinamou au point de vue culinaire est de premier ordre, et ses applications sont multiples. C’est là, véritablement où sa supériorité s'affirme d’une incontestable façon. Si, en chasse, il ne prétend pas au delà du Faisan et de la Perdrix, il n'en saurait être de même de la cuisine; il les surpasse avec une maestria remarquable. Ses blancs, comme ceux des jeunes poulets, peuvent, avec plus de profit encore, être utilisés pour les malades et les convalescents. Ils sont plus savoureux, plus nutritifs et plus digestibles. | Quelle que soit la facon dont on l'accommode, qu'il soit en salmis ou en chartreuse, à la broche ou en pâté, il est exquis. Cependant, comme tous les privilégiés et tous ceux qui règnent sans conteste, il manifeste des préférences : rôti, il demande deux ou trois jours pour permettre le dévelop- pement de son délicat fumet; aux choux, il est comme le Lièvre, il préfère atttendre. LES TINAMOUS 347 Ceux qui m'ont fait l'honneur de lire cette étude et qui ont eu la patience de la poursuivre jusqu'au bout, sont, sans aucun doute, chasseurs et par suite gourmets. Ils me sauront oré, je l'espère, d'en clore l’aridité par un procédé culi- naire que je leur recommande particulièrement : la « TIM- BALE de Tinamou MÉRIEL ». C'est une entrée exquise, sans laquelle un repas de chasseurs qui se respectent, ne saurait ètre convenablement ordonné. En voici la recette, dont je livre la confection, facile du reste, à la méditation et au savoir-faire de leurs cordons bleus : Faites une timbale dans un moule d'entrée uni, que vous aurez légèrement beurré et décoré avec de la pâte d'office abaissée très mince; foncez avec feuilletage à gâteau de roi à sept tours; Vous aurez préalablement fait pocher du macaroni dans du grand bouillon, égouttez et assaisonnez sel et poivre; Garnissez-en votre moule, faites cuire au four et démoulez; Faites une ouverture sur le dessus, retirez le macaroni et laissez un bord de trois centimetres. Préparez ensuite des blancs de Tinamous, des émincés de foies gras et des rondelles de truffes cuites au vin de Madère; passez au beurre vos morceaux de Tinamous et de foies oras, faites un jus mélangé d'espagnole réduite au fumet de Tinamou avec un peu.de tomates; Faites cuire dans ce jus des petits champignons, et rangez en les alternant par lits vos blancs et vos éminces séparés par les rondelles de truffes et les champignons. Versez votre jus bien réduit; Rangez sur le bord, des champignons tournés d'égale grosseur, alternés de truffes et de queues d'écrevisses; Servez. 46. — Quel est l'emploi el la valeur des plumes? En dehors de la chasse au point de vue agréable, de la cuisine au point de vue alimentaire et de la destruction d'insectes, reptiles et petits rongeurs, je ne vois rien qui, dans le Tinamou, puisse offrir encore quelque utilité. Ses plumes, d’un coloris uniforme et sombre, ne peuvent être d'aucune valeur. Son duvet, quoique très fourni, n'est pas assez abondant pour trouver son emploi commercial. On prétend que jadis les Gauchos se servaient de ses 348 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION rémiges pour empenner leurs flèches. Maïs il est probable qu'à l'heure présente la civilisation à apporté dans leur pays les mèmes bienfaits dont elle a doté les autres parties du monde, et depuis longtemps, à leurs armes surannées, ont dû succéder les revolvers et les fusils à répétition. Je n'ai jamais connu d'autre emploi des plumes du Tinamou. X 48. — Jndiquer les ouvrages el ineémoires relatifs AUX TiNAINOUs. Jai dit plus haut que le Tinamou était un modeste. Le silence fait jusqu'à présent autour de Iui semble vouloir justifier cette opinion. Les ouvrages et mémoires qui y sont relatifs, sont à ma connaissance, peu nombreux et, pour la plupart. insi- gnifiants. BREHM (Merveilles de la Natuïe. — Les Oiseaux) en parle au chapitre des Crypturidés: il consacre spécialement au Rhynchotus rufescens une brève notice, mais ses obser- vations mont paru tres superficielles et renferment des erreurs importantes. M. F, E. BLaauw a fait le 11 décembre 1896, en assemblée générale, à la Sociélé nationale d'Acclinatation de France, une intéressante mais trop courte communication. Ses observations sont justes, et c'est assurément ce que j'ai lu de meilleur et de plus vrai concernant le Tinamou. Enfin, jai édité moi-même, en 1897, un opuscule dans lequel j'ai relaté presque jour par jour de décembre 1895 à août 1897, les différentes phases de mes essais à ma faisan- derie de Mériel. % 55 ü L'étude qui précède est non seulement le résultat de mes observations personnelles, mais aussi celui des renseigne- ments que j'ai pu recueillir de droite et de gauche. Je croirais manquer à toute bienséance, en ne remerciant pas d'une façon générale, les personnes qui ont bien voulu me communiquer ce qu'ils savaient du Tinamou. J'adresse ici, tout particulièrement, mes remerciements à MM. : LE MYRE DE VILERS, qui, le premier, ma indiqué les LES TINAMOUS 349 mérites culinaires du Tinamou, mérites que j'ai moi-même appréciés par la suite. Baron DE CASTEX, qui à chassé le Tinamou au chien d'arrêt et au chien courant, dans les Antilles et le Venezuela. HiLLERET, grand industriel français, propriétaire d'une inportante fabrique de sucre à Tucuman (République argen- tine), qui le chasse au chien d'arrêt et en battue. SUBERVIELLE, qui l'a rencontré et chassé au Chili et dans les Cordill res des Andes. KERLERO DU RoOSBO, qui l'a poursuivi à cheval avec les Gauchos et chassé au chien d'arrèt dans le Puelches et aux environs de Buenos-Ayres et de la Plata. LÉO DUCHANOY, qui l'a rencontré en Patagonie et mème dans la Terre de Feu. Je dois enfin remercier ceux qui m'ont aidé dans la tàche que j'avais entreprise et qu'il m'est permis de considérer aujourd'hui, Comme à peu pres terminée. M. M. Er. BELLECROIX, si affable et si bienveillant, et dont la perte a causé un si grand vide dans le monde cynégé- tique, qui a bien voulu me donner le concours de sa haute personnalité et courir le risque d'accepter le parrainage du Pinamou en le présentant le premier au public; Louis LEROY, le délicat écrivain, CALLET, HENRI COUPIN, MALHER, MAX DE NANSOUTY, DE PARVILLE, le regretté marquis DE CHERVILLE et tant dautres, dont les noms me sont inconnus ou n'échappent, qui, par leur plume ou par leur crayon, m'ont apporté un précieux appui et ont contribué à faire connaitre et à propager en France, le nouvel arrivant. Evalement, celui qui modestement et non moins utilement, a été le premier artisan de son acclimatation sur le sol français : M. Isidore ANDpRÉ, garde-chef à ma faisanderie, qui à reçu chez moi les premiers Tinamous importés, qui, par des soins incessants et une sollicitude jamais lassée à triomphe des premières difficultés et aplani les suivantes, qui à mis les premiers œufs en incubation, soigné et élevé les pre- miers jeunes, continuellement à l'affut de ce qui pouvait leur être bon ou utile. Désolé, lorsqu'un accident ou un décès venait éclaircir les rangs de ses élèves, heureux et rayonnant lorsqu'il les voyait pousser et grandir, toujours prêt, toujours présent, jamais las, il a bien mérité des chas- seurs, des éleveurs et de tous ceux qui s'intéressent aux choses de l'Acclimatation. LE VER A SOIE DE L’AILANTE DANS LE TESSIN par M. ANGELO GHIDINI En 1856, arriverent en Europe les premiers œufs du papillon de l'Aïlante (Atlacus Cynthia), magnifique bomby- cien dont les cocons produisent en Chine et dans l'Hin- doustan une quantité d'excellente soie. C’est une espèce rustique et dont la reproduction est facile. Ceux qui se proposaient d’acchmater cette nouvelle espèce, espéraient trouver en elle un concurrent sérieux au ver à soie commun, qui, affaibli par la pebrine, ne sera plus bientôt qu'un sujet d'études pour les bactériologistes. En France, la Socièlé d’'Acclinalalion a fait de grands efforts pour répandre la culture du Ver à soie de l’Aïlante ; des écoles spéciales furent fondées et l'illustre Guerin- Meneville entreprit en sa faveur une habile campagne. Cette faveur (principalement en 1870) ne fit pas défaut au nouveau Ver à soie qui n'exigeait que très peu de soins et n'avait besoin que des jeunes feuilles de l'Aïlante au milieu des- quelles il filait ses cocons. Le cocon de cette espèce, comme celui de notre Paon (Salurnia) présente une ouverture à l'une de ses extrémités lorsqu'on se borne à le recueillir après la sortie du papillon. Il est alors extrèmement léger, il en faut environ 2.400 pour un kilo. La chenille de l’Aïlante s'est parfaitement acclimatée en Europe et viten pleine liberté dans tous les pays où l'Aïlante est commun. En France, on la rencontre dans la plupart des départe- ments; elle est commune dans beaucoup de localités de l'Italie, de l'Autriche, de l'Espagne, dans les Balkans, etc.; dans le canton du Tessin où il différe quelque peu de sa forme typique, ce Bombycien s'est naturalisé avec la plus orande facilité et il a sa place dans toutes les collections de Lépidoptères indigènes. Les premiers spécimens de l'Attacus Cynthia furent observés à Lugano sur les fanaux du bord du lac en 1889; ils devinrent par la suite de plus en plus commun, si bien qu'en 1894-1895, ils volaient par à LE VER A SOIE DE L’AILANTE DANS LE TESSIN DA centaines autour des lampes à arc de lastation de Chiasso (1). Aujourd'hui cet élégant Bombycien est devenu fort com- un, gràce aux nombreuses plantations d'Aïlante (Atantus glandulosa) répandues dans notre région. Les œufs pondus en juillet donnent naissance, après douze à quinze jours, à la chenille qui atteint apres cinq mues successives, une longueur de 9 à 10 centimètres et la erosseur du petit doigt. A l'état adulte, elle est d’un beau vert d'émeraude, avec la tête, les pattes et le dernier seoment de couleur jaune d'or. Elle porte sur ses anneaux des tubercules en forme d’aiguillons, dont l'extrémité est blanche et elle est recouverte d'une sécrétion séreuse qui constitue une sorte de farine blanche destinée à protéger la chenille de la pluie et de la rosée et sur laquelle l'eau ne peut séjourner. L'Attacus Cynthia üsse à la fin d'août un cocon de couleur crisätre, enroulé dans une feuille, qui est suspendu par un cordon de Soie aux branches de l'Aïlante. Le papillon qui, en Chine, se reproduit deux fois chaque année, n’éclot chez nous qu'au mois de juillet suivant. De la taille du grand Paon (12 à 15 centimètres d'envergure), le Cynthia est le plus beau papillon nocturne de nos régions. Les ailes, en forme de faux, au fond vert sombre velouté, sont entre- coupées de bandes blanchâtres nuancées de rose et bordées de noir; au milieu de l'aile se trouve une tache en forme de demi-lune d'un blanc opalin entouré d'un cercle jaune. Le haut des ailes supérieures est rosé avec un œil noir. L'abdomen, de la couleur des ailes, est couvert de touffes élégantes et régulières de poils blancs. La variété du Tessin diffère du type primitif par la teinte vénérale tirant sur le jaune, et sur laquelle se détachent mieux les bandes roses. Dans ces derniers temps, à la suite de la diffusion de l'Ailante etde son papillon, on chercha de nouveau à utiliser les cocons de l'Attacus Cynthia; mais les résultats obtenus ne furent pas de nature à encourager de nouvelles tenta- tives, si bien qu'en France il n'existe actuellement aucune filature de cocons de ce Bombycien, et la maison Ritter, de Goritz, qui s'en était encore récemment occupée, s’est (1) L'Attacus Cynthia fut observé à Tesserete en 18%5, à Gubbiano en 1890, à Locarno en 4897, à Mendrisio et à Chiasso en 1894-1895, et à Come en 159%. 352 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION vue rapidement obligée d'abandonner ses essais, les pro- cédés industriels actuellement en usage en Europe ne per- mettant pas de dévider d'une maniere réguliere les cocons de l'Allacus Cynthia. Si cependant, comme le prétendent certains spécialistes, on trouve dans un avenir prochain des procédés pouvant permettre mdustriellement de filer ces cocons, peut-être les culüvateurs du Tessin pourront-ils trouver dans cette nouvelle ou plutôt dans cette future industrie une source inespérée de richesse. BULLETIN DE ZA 7. NATIONALE D'ACELIMATAION DE ERANCE Dr (Revue des Sciences naturelles appliquées) CCS 48° ANNÉE CO DÉCEMBRE 1901 SOMMAIRE Allocution de M. Perrier, Président, à la séance générale de 1901............................. 393 RAVIER (Vabbé). — L’Araignée de Madagascar (Næphila madugascariensis) élevée en France. 356 Extraits ‘des Procès-verbaux des Séances générales. LÉUNRS SmeraLe Cie SE AO RAS SRE CRE SE OPERA EE NE RS AR 370 Extraits des Procès-verbaux des Séances des Sections. ISéance du 4 novembre 1901 (Jr Section. — Mammifères). .............................e...... 373 ISéance du 41 novembre 1901 (11° Section. — Ornithologie) ....................eei.ece. 374 Béance dus novembre 1901 {(TTTe Section. — Aquiculture)......!........1. 4e. 315 Brauce du? novembre 1901 (Ve Section. —"Botanique):,...1.2:..:2284 0 desss tente rene eee eee 376 Beance dutls)novembre 1901 (VI Section. = Colonisation)... ........,:.....1.244M IR 377 able DRAP Te TAUTIEUTE SAS ne En RS nr PNR 4719 ndex AE Eee SAT AT Te CU NE TR Re M re 480 Index Hp lareinne CES MTS AE ORNE Re ne 480 à CRD AIME TETE IUESEATEIC Les 7 Re nn Re PR ARE Neal 481 ñ MORE SE nCeS Tera SOCIE LE Darren de à noue à cadence eo n te ie SU DNA 482 LÈÛE CES CAN EE RE er OR ES AR PR EE 482 A en ee teen tan e VA à Au SUD etat 0 de PS PR M RE ES RC Et DE be Li EN Er eee te 2 482 Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. — ces S55 ——— Un numéro 2 francs; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE SOCIAL . DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 41, Rue de Lille. — FARIS Le Bulletin paraît tous les mois SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGELIMATATION DE PRANCE Fondée le 10 Février 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 4, RUE DE LiLLE — PARIS Re er BUREAU ET CONSEIL D’ADMINISTRATION POUR 1901 President. M. Edmond Perrier, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Méde cine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. Ed. Bureau, Professeur de Botanique au Muséum d'Histoire Naturelle, Paris. Baron Jules de Guerne, 6, rue de Tournon, Paris. 4 Vice-Présidents. Comte de PoNTBRIAND Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. à G. RAvVERET-WATTEL, Directeur de la Station aquicole du Nid-de-Verdier | 5 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire-général : M. Maurice Loyer, Avocat à la Cour d'Appel, , rue de Rennes, Paris. MM. le D' Sesizrorre, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris (Intérieur). H. Hua, Directeur-adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint Germain, Paris (Conseil). à Secrétaires. L.-SEurar, Docteur ès Sciences, Zoologiste au Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire Naturelle, Paris (Séances). À G. Fron, Docteur ès Sciences, Chef des Travaux au Jardin colonial 19, rue de Sèv res, Paris (Etranger). . Trésorier. M. Ch. DEBREUIL, Avocat à la Cour d'Appel, 25, rue de Châteaudun, Paris. Archiviste-Bibliothécaire. M. le Comte d'ORrrEuILLE, à Versailles. Membres du Conseil » MM. L. BinGer, Ancien Gouverneur de la Côte d'Ivoire, Directeur des affaires . d'Afrique Ministère des Colonies, 15, rue de Pronv, Paris. Edouard BLAxc, Explorateur, 52, rue de Varenne, Paris. D: Raphael BLANCHARD, Membre de l’Académie de Médecine, professeur à la Faculté d Médecine, 226 boulevard Saint- Germain, Paris. Comte Raymond de Darwas, 26, rue de Berri, Paris. Le Myre px Vizers, Député de la Cochinchine, 3, rué Cambacérès, Paris. Dr Leprinces, 62, rue de la Tour, Paris. ; P. MARCHAL, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Directeur Heu de la Stati. . _ entomologique de Paris, 126, rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses. L. Mesey, “Conservateur des Eaux et Forêts, Chef du service de la Pêche et de la Pis. culture au Ministère de l'Acriculture, 87, boulevard Saint-Michel, Paris. A. MiLHE-PouTINGON, Directeur de la Revue des Cultures Coloniales, "44, rue de la Chauss d’Antin, Paris. E. OUSTALET, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 121 bis, rue Notre-Dame-d Champs, Paris. A. RAILLIET, Membre de l’Académie de Médecine, Professeur à l'Ecole vétérin d’Alfort (Seine). e D: E. Trousssar®T, Président. de la Société Zoologique de France. 145, rue de la Pom Paris. Présidents honoraires : MM. Albert GEOFFROY- SAINT- Hirarre, à Vault de Lugny, par Avallon (Yonn Ê Le Myre DE VILERS, 3, rue Cambacérès, Paris. Secrétaires Généraux honoraires : MM. Amédée BERTHOULE, 4, avenue des Ternes, Paris. Baron Jules de GUERNE, 6, rue de Tournon, Paris . Membres honoraires du Conseil : MM. P. de LABOULAYE, 129, avenue des Champs- Elysées, ! Pa D: P. Mécni, 6, avenue Aubert, Vincennes. Dr Ed. Mëne, 20, rue Oudinot, Paris. D: J. Micro, rue de Babylone, ‘Paris. D: Wager, 180, boulevard Saint-Germain, Paris. ALLOCUTION de M. Edmond PERRIER (de l’Institut) Président de la Societé d’'Acclimatation ANDA SHANCE. CÉNÉRALE DE 41901 Messieurs, Au moment où la Socièlé d'Acclimaltalion reprend ses travaux avec l'intention de leur donner une orientation nouvelle vous ne vous étonnerez pas que votre Président essaye de préciser, moins encore pour vous mêmes, que pour les lecteurs de notre Bulletin le rôle que se propose de prendre notre association. Lorsqu'elle fut constituée par Isidore Geoffroy Saint- Hilaire, notre Société se trouvait en présence de vastes aspirations; mais nul ne pouvait savoir dans quelle mesure étaient réalisables les vues de ses enthousiastes fondateurs. Il ne s'agissait de rien moins que d'asservir sur la terre entière les formes vivantes utilisables par l'homme et de reconstituer en France une sorte de paradis terrestre où tout ce que la terre produit de beau et d’utile, plantes ou animaux, aurait été artistement rassemblé. L'exemple du Chat domestique, du Coq et, à une époque plus récente, du Paon, du Dindon, de la Pintade transportés chez nous de l'Inde, de l'Amérique ou de l'Afrique, celui de tant de plantes exotiques répandues par notre Muséum d'Histoire naturelle sur toute la France etsurses Colonies était particulièrement encourageant. Ne pouvait-on faire de même pour d’autres espèces utiles que l'Homme laisse perdre ou détruit, et dont la conservation. ménagerait à la terre toutes les joies que Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1901, —. 23 PAT At 354 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION donne la variété? C'était le vaste programme du début. Nos prédécesseurs se sont appliqués à le remplir; ils ont eu — il suffit pour s’en convaincre de parcourir notre Bulletin — d'éclatants succes: ils ont appris en même temps quelles étaient les conditions du succes; peu à peu, les problèmes se sont précisés; les conditions elles-mêmes dans lesquelles ils pouvaient être abordés se sont modifiées et de cela, il est nécessaire que notre Société prenne nettement cons- cience. Notre Société ne saurait avoir aujourd'hui, Comme il y a cinquante ans, un objet unique : l'introduction, la domesti- cation et la propagation en France, des espèces d'animaux et de plantes utiles ou ornementales. De ce côté, notre tache, bien que, encore inachevée, se précise, et nous pouvons nous féliciter, en jetant un regard en arriere, d'avoir fait beaucoup dans cette voie. Mais le champ de cette œuvre primitive dont nos devan- ciers n'entrevoyaient pas les limites, n’est plus assez vaste ni assez net. L'expérience acquise nous à montré quil y avait autre chose à faire, qu'une autre méthode s'imposait à nos {travaux en même temps que prenait COTps une concep- tion plus large du rôle que nous avons à remplir et qui, par ces résultats plus féconds et plus brillants, servira mieux encore les intérêts de notre Société. Trop à l'étroit dans les limites qui ont été primitivement données à son initiative, la Société d'Acclimatation doit étendre aujourd'hui son domaine hors de la métropole, ravonner sur toutes nos colonies. Nous devons faire rentrer dans le cercle de nos travaux, l'étude des productions natu- relles de nos possessions lointaines et nous constituer, en quelque sorte, les surveillants de l'exploitation des richesses zoologiques et botaniques qu'elles possèdent. Pour atteindre ce but, la Société d’Acclimatation doit, avant tout, se préoccuper d'établir avec nos colonies des relations étroites. Cela pourra se faire aisément par l'entremise du Muséum d'Histoire naturelle et l'appui de notre grand établissement scientifique ne saurait lui manquer. Le Muséum entretient, en effet, des relations suivies avec toutes nos colonies, toutes ont des rapports fréquents avec lui et il n’est pas un chargé de mission scientifique, un fonc- tionnaire colonial s'intéressant aux choses de la nature, qui ne vienne sy documenter, en puisant dans ses collections ALLOCUTION DE M. PERRIER 395 les renseignements qu'il désire obtenir avant d'entreprendre son voyage. La création récente du Laboratoire colonial du Muséum nous montre bien les caractères de l'évolution scientifique qui s y manifeste, c'est à nous de suivre également l'impul- sion donnée, et de nous laisser entrainer par le courant qui nous emporte vers ce que recèle encore de choses inconnues notre empire d'outre-mer. Il nous sera donc aisé de rappeler à ces voyageurs, à ces administrateurs, aux colons que tentent l'étude de la zoolo- sie et de la botanique, le but poursuivi par notre Société; les résultats que nous avons déjà obtenus en matière d'ac- chimatation coloniale, pourront les engager à devenir nos correspondants et les inciter à créer sur place, dans les orands centres d'expansion coloniale, aux chefs-lieux de nos possessions lointaines, des Sociétés similaires, fillales de notre Société, se rattachant à nous par de multiples liens, et S'occupant comme nous d'acclimatation, de domestication et d'élevage. Ces correspondants et ces sociétés seraient alors tout désignés pour recevoir les animaux et les plantes que nous pourrons leur adresser et en assurer la répartition. En échange, ils nous enverraient des spécimens intéres- sants de la faune et de la flore des régions qu'ils occupent et nous fourniraient de nouveaux sujets d'observations ef d'études. Vous voyez toute l'importance de l'œuvre dont je trace en quelques mots les grandes lignes. Les liens qui retiennent notre Société dans un cercle de plus en plus étroit à mesure que s'affirme la réussite des essais d’acclimatation tentés en France, seraient ainsi brisés; une source de travaux plus féconds et plus vastes serait offerte à votre initiative; la Société d'Acclimatation rayonnerait alors sur l'ensemble de nos possessions d'outre-mer, son champ d'action serait illimité, son importance croitrait chaque jour et son exis- tence en recevrait une vigueur nouvelle. Notre bulletin, dont la valeur et la portée scientifiques devront être encore augmentées, sera pour nous un aide puissant dans la campagne d'expansion que nous entrepren- drons. Répandu au loin, devenu le répertoire de tous les renseignements zoologiques ou botaniques où pourront puiser tous ceux qui sont allés chercher au loin des richesses que notre ancien Monde ne produit pas, recueil à 396 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION d'observations envoyées par nos correspondants coloniaux, il sera le lien entre la Société de la Métropole et ses suc- cursales dans les autres parties du monde. C’est à ce travail, dont l'importance ne saurait être niée, que je viens aujourd'hui vous convier : assurer d’une part le perfectionnement de l’œuvre déjà commencée par l'intro- duction et l'assimilation dans notre pays des richesses natu- relles de nos colonies, susceptibles d’assimilation, et d'autre part, le développement de cette idée naissante qui sera l'enrichissement de nos possessions lointaines, l’accroisse- ment de leur bien-être et leur prospérité par l’acclima- tation. Mais il manquait à la Sociélé d'Acclinatation un instru- ment de première importance pour elle. Longtemps, elle s'était appuyée sur le Jardin d’Acclimatation qui offrait à ses membres quelques avantages, recevait en dépôt les animaux et les plantes qu'elle lui donnait et se prêtait à la constitution de cheptels entre les mains de ceux de nos associés qui lui en exprimaient le désir. Le Jardin d'Accli- matation s'est séparé de la Société; il nous a semblé que le Jardin des Plantes uniquement préoccupé d'intérêts scien- tifiques pouvait, dans quelque mesure reprendre vis à vis de la Société d'Acclimatation qui est un peu sa fille, le rôle qu'avait eu longtemps le Jardin d'Acclimatation et lui rendre ainsi l'appui qui lui manquait. Depuis long- temps, le service de la culture distribue des graines et des arbrisseaux; les membres de la Société d'Acclima- tation qui en feront la demande pourront être compris dans cette distribution; d'autre part, la ménagerie du Muséum reçoit l'offre d'un assez grand nombre d’ani- maux qu'elle ne peut pas toujours accepter, faute de place et, parmi ses hôtes, il en est dont elle peut disposer, en s'entourant des garanties qu'exigent le reglement. Les uns et les autres peuvent fournir la base de cheptels auxquels participent, en raison du but que poursuit la Société, les membres de la Société d'Acclinaltation. Nous devons remercier M. Oustalet, professeur aù Muséum et dans le service duquel se trouve la ménagerie, de la bonne grâce qu'il à mise à régler cette question de cheptels. Ce sont là des points importants. Je n'ai pas besoin de dire que toutes les facilités pour la visite et l'étude seront données au Muséum aux membres de la Société d'Acclima- lation. ALLOCUTION DE M. PERRIER DO Par cette collaboration plus étroite, la Société et le Muséum se rendront de mutuels services. La Société peut fournir le noyau d'une Socielé des amis du Muséum dont l'action peut être aussi féconde que celle de la Société des amis de l'Universile de Paris. D'autre part, le Muséum, en usant pour les progrès de la Sociélé de ses nombreuses relations à l'Etranger lui donnera d'importants moyens d'action. Mais il ne faut pas oublier, Messieurs, que notre action se mesure aux ressources dont nous disposons et dont les cotisations de nos membres forment la plus grosse part. Je ne saurai donc trop vous inviter à nous amener des adhérents et à provoquer autour de vous des donations qui pourraient nous permettre d'exercer au loin une action efficace. L'ARAIGNÉE DE MADAGASCAR (NEPHILA MADAGASCARIENSIS) ÉLEVÉE EN FRANCE Par M. l’Abbé FAVIER L'étude des voyages aériens accomplis par certaines araignées m'a permis de constater que les jeunes Epeires diadème, qui parmi un grand nombre d'autres espèces, jouissent de facultés aéronautiques assez développées, empruntent la route de l'air pour sé disperser et s'en aller au loin chercher un terrain favorable à leurs chasses (1). Il était intéressant de vérifier si les « Halabé » de Mada- gascar qui appartiennent à la même grande famille que notre Epeire ont aussi l'instinct de se confier au vent pour leurs voyages. Le fait pourrait ne pas être sans consé- quences pour l'éducation de ces grandes productrices de soie, et par suite pour l'essai d'industrie coloniale dont le R. P. Camboué a été l'initiateur à Madagascar. Je me suis adressé à ce vaillant missionnaire pour lui demander de résoudre cette question intéressante. Il m'a courtoisement répondu par l'envoi d'un nid de jeunes Halabés. Voici brièe- vement l’histoire de leur éducation en même temps que les observations faites à leur sujet. Elles sont arrivées à Lyon, le 16 mai 1900. A l'ouverture du petit panier de jonc qui renfermait le cocon de la mère Araionée, quatre cents jeunes bien vivantes s'agiterent pour sortir, déja fort habiles dans l'art de filer. Toutes étaient au même point de développement. Dans le cocon j'ai trouvé les enveloppes vides des œufs éclos, quelques œufs dessé- chés et les traces de la seconde mue que nombre d’Araignées accomplissent avant de sortir du cocon maternel. Je pus bientôt me rendre compte que ces petites Halabés emploient pour se livrer au moindre courant d'air et s'envoler le mème procédé que nos Epeires diadème. Un long fil, (1) Cf. Une note de l’auteur sur les voyages aériens des araignées, dans le Bulletin de la Société Entomotogique de France (séance du 24 juillet 1901). L’ARAIGNÉE DE MADAGASCAR 359 étiré par le vent, sort de leurs filières et leur sert d’aérostat et de parachute. Elles sont déjà aéronautes avant d'avoir tissé leurs réseaux, par conséquent avant d'avoir pris aucune nourriture. Divers expédients furent employés pour les nourrir dans ce premier âge, aucun n'a donné des résultats pleinement satisfaisants. Elles ont vécu d'abord de sang caillé; la diffi- culté était de le leur présenter, elles sucent volontiers les parcelles qu'elles rencontrent, mais elles ne vont pas facile- ment à la recherche de la nourriture, c'est à peine si elles se dérangent pour aller boire les gouttes fines déposées par condensation de vapeur sur les parois du local qui les ren- ferme, et cependant, quand elles y ont goûté, elles s’en désaltèrent avidement. Elles se noient dans les liquides, à moins qu'ils ne soient en couche mince sur une lame de verre ou qu'ils ne mouillent un linge. Du sang de poulet caillé, renfermé dans un sachet, à paru aider beaucoup à leur développement. Ces petites bêtes habitent toujours leurs fils en groupes compacts dans cette première période de leur existence à la manière des Epeires diademe; elles filent avec empressement dès qu'on les dérange et vont attacher leurs câbles aux points les plus élevés qu'elles peuvent atteindre dans leur cage de verre. Au cours de cette première période, elles deviennent capables de tisser leur toile, je le constate pour une vaga- bonde échappée de prison. Le 27 mai, une petite Araignée a mué; vers les premiers jours de juin, les mues se produisent en grand nombre. A cette époque, je place une partie des Araignées, dans un verre de lampe fermé aux deux extrémités par du coton, les autres, 150 environ, dans une cuvette de faïence, sur un support formé par un cercle de fil de fer, soutenu par trois pieds, à 4 ou 5 centimetres du fond de la cuvette, et je les abandonne ainsi à découvert. Le cercle de fil de fer est bientôt garni de fils qui forment un réseau serré, sur lequel il est facile de déposer de petits morceaux de viande crue, des entrailles de mouches, de jeunes larves, des pucerons; les résultats ne sont pas heureux, bien que j'aie trouvé plusieurs fois quatre ou cinq Araignées occupées à manger le même débris de viande ou le même petit ver; la dessic- cation de leurs provisions se fait trop rapidement. J'essaye aussi de pulvériser des liquides qui s'arrêtent sur les fils sous forme de fines gouttelettes, mais la forme globulaire 360 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION de ces gouttes empêche les Araignées d'en profiter, leurs pattes y adhèrent et elles se dégagent avec peine sans en avoir rien sucé. Pour éviter la fuite des Araignées ainsi logées dans une cuvette, il faut avoir soin que les parois du récipient soient bien lisses et bien nettes, afin que ces adroites fileuses n'y puissent pas grimper. Il suffit, en effet, qu'une seule Arai- ence réussisse dans son ascension, pour que son fil livre passage à toute la bande. Il est indispensable aussi d'éviter tout courant d'air, car le moindre souffle détermine ces aéronautes à développer un aérostat et le « làchez-tout » ne se fait pas attendre. C'est ainsi qu'un jour je trouvai à la fenêtre de ma chambre d'études cinq ou six fugitives; leurs fils avaient été arrêtés au passage par les càbles de soutien laissés par une grosse Epeire et sans façon, elles y avaient attaché leurs petites toiles. Sans vouloir décourager de nouvelles tentatives, je dois dire que malgré plusieurs avantages, ce procédé d'élevage en vase découvert me semble peu pratique, il est encore moins avantageux de placer les Araignées sur un flotteur, ou en plein air, sur un ilot, quelque grand qu'il soit, car elles se noient ou elles s'envolent; on les voit faire quelques pas rapides, redresser leur abdomen et s'enlever accrochées à un fil qui a été développé en quelques secondes. Le spec- tacle mérite qu'on fasse l'expérience; le courant d'air pro- duit dans une chambre par une fenêtre ouverte est parfaitement suffisant; on est surpris de les voir ainsi prendre tout à coup leur essor avant même qu'on ait soup- conné leurs intentions. Ce fait explique les insuccès des élevages tentés en plein air (1). Ce n’est pas la voie de terre que les jeunes Halabés prendront pour s’en aller, si le ter- rain de chasse ou le climat ne leur convient pas, elles ne prendront pas la peine de cheminer sur des fils tendus de branche en branche ou d'arbre en arbre comme le font d’autres araignées, c'est toujours la route de l'air qu'elles choisiront au premier jour qui leur semblera favorable. Peut-être un réseau de fils de fer ou simplement de longs fils tendus au-dessus du champ d'expériences suffiraient-ils à arrêter la plupart des fugitives. Ces fils en effet, mème espacés de 50 centimètres seraient presque toujours un (1) Cf. Revue des sciences naturelles appliquées (Bull. Soc. nat. Accl, Fr.), n° du 20 septembre 1889. L'ARAIGNÉE DE MADAGASCAR 361 obstacle au développement des longs aérostats qui emportent les araignées et ces dernières ne trouveraient la route libre qu'apres s'être établies pour leurs manœuvres, sur ces obstacles mêmes. La préparation du terrain serait aussi une condition de succès pour des essais semblables, car les évaporations du sol jouent un grand rôle dans cette sorte d’aviation que réalisent les Araignées. Il est bon de faire remarquer que les sujets bien nourris songent moins que d’autres à s'envo- ler, ils y sont d’ailleurs moins aptes et finalement, après quelques mues, toutes les Araignées de cette espèce deviennent incapables de s’enlever. Conduire leur éducation jusqu'à cette période serait résoudre plus qu'à moitié le problème, car les tentatives que nous allons décrire démontrent combien il est difficile d'empêcher les Halabés de se dévorer entre elles, quand elles sont réunies en grand nombre dans un espace restreint. Les mœurs de l’Araignée adulte nous fourniront cependant plus loin quelques nou- velles indications. La colonie qui était restée dans un tube prospéra davan- tage quoiqu'elle fût plus négligée. Cela tint, je crois, à deux causes : une plus grande chaleur, une moins grande évapo- ration et peut-être aussi une moins grande dépense de fil. Cette observation me détermina à soumettre toutes mes Araignées au même régime. Placées dans des tubes verti- caux, elles les remplissent de fils attachés irrégulièerement aux parois. L'espace est trop restreint pour qu'elles puissent former leurs réseaux. De petites larves de mouches et sur- tout de jeunes Araignées appartenant à différentes espèces, prises au sortir de l'œuf et par conséquent encore incapables de courir sur les fils et d'en produire elles-mêmes devinrent alors la nourriture ordinaire de ces Halabes. Presque toutes les bestioles destinées à leur pâture étaient arrêtées par leurs fils avant d'arriver au fond des tubes; les Araignées pouvaient les prendre à loisir, et malheur à l'insecte remuant qui s'agitait pour se dégager! c'était le premier Saisi. On voit qu'il y à avantage à ne pas employer des bocaux trop grands : la nourriture est plus facile à pré- Senter. De temps en temps, il est bon de faire couler quelques gouttes d'eau sur les parois à l'intérieur des tubes, on peut aussi en couvrir l’orifice avec un linge imbibé d’eau. Les mues se produisent presque sans interruption, malheureusement il arrivait qu'une pauvre engourdie 362 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D’ACCLIMATATION occupée à retirer ses pattes de leur ancienne cuticule se trouvait saisie et dévorée par ses voisines. Aux premiers jours du mois d'août, plusieurs mâles étaient munis des renflements caractéristiques de leurs pattes mâchoires; ils avaient à ce moment accompli trois mues depuis leur arri- vée en France, et comptaient parmi les plus grosses et les plus vigoureuses de mes Araignées. Vers la fin du mois, oràace à des conditions de température plus favorables, leur appétitse développa, je n’eus pas assez de vivres convenables à leur présenter, les plus fortes dévorerent un grand nombre des plus faibles. Ce régime leur fut très profitable. Plusieurs mâles étaient adultes au commencement de septembre; la dernière mue avait modifié la couleur et même la forme de leur abdomen. A ce moment, les femelles survivantes avaient à peine dépassé les dimensions de ces mâles, c'est-à-dire 1 centimètre et demi. On sait que la femelle de Nephila Mmadagascariensis peut mesurer jusqu à 15 centimètres de longueur. Celle que j'ai élevée jusqu’à l'état adulte n’attei- onit que 10 centimetres; la photographie en a été prise en vraie grandeur. La proportion ou plutôt la disproportion entre cette taille et celle des mâles que j'ai pu élever est à peu pres celle que l’on observe au pays d'origine. La femelle est normalement cinq ou six fois plus grande que le mâle, si l’on considère la longueur totale; en volume, le mâle est environ huit cents fois plus petit qu’elle. J'insiste sur cette anomalie déjà maintes fois signalée, car elle me parait corrélative d'une autre anomalie que j'ai pu toucher du doigt. Mon Halabé en effet eut un nombre de mues presque triple de celui des mâles. Je me contente’de signaler ce fait qui demandera une étude spéciale. A partir de septembre chaque Araignée fut mise seule dans un tube ou dans un bocal tout juste assez grand pour lui permettre de tendre son réseau. Toute proie désormais devra être prise dans la toile pour être mangée; il faudra donc qu'elle soit de taille proportionnée à celle de l'Araignée. Des cocons de Microgaster, parasites des chenilles de la Piéride du chou, me fournirent des provisions faciles à con- server. La plupart des larves ayant été parasitées à leur tour, j'eus affaire à trois ou quatre espèces différentes d'Ichmeumonides, les éclosions s'échelonnerent, c'était un o L’ARAIGNÉE DE MADAGASCAR 363 avantage fort appréciable, mais ces Microgasler ne sont pas un mets de choix. Souvent les Araignées dédaignaient cette proie qu'elles semblaient trouver trop coriace après l'avoir eoûtée. Dans les derniers jours de novembre, plusieurs mâles adultes périssent, un seul resté très petit après avoir accompli son avant-dernière mue en octobre, fut adulte seu- lement en décembre et mourut en janvier. Ce fait semble indiquer que l'insuffisance de la nourriture retarde l'époque de la mue. Pendant cette même période, les deux seules femelles qui me restent et que je cherche à nourrir avec des Ichmeumonides et quelques rares Diptères espacent leurs mues de plus d’un mois. Enfin, en janvier, apres avoir mué, l’une le 21 et l’autre le 24, elles sont désormais assez orosses pour manger des mouches et des Araignées ténébri- coles de différentes espèces. Malgré cela, une des deux femelles périt en février; elle avait alors 3 centimètres de longueur. L'autre désormais accomplira régulièrement une mue tous les 28 ou 29 jours; elle prospère, bien qu'elle ait jadis perdu une patte de la première paire dans une bataille avec un de ses frères, elle mange les mouches domestiques que le soleil d'hiver fait apparaître de temps en temps, heu- reuse quand les beaux jours coïncident avec la période de son grand appétit et les jours froids et nuageux avec celle du jeûne complet qu'elle commence à observer huit jours avant ses mues et qu'elle continue trois ou quatre jours apres. Une fois, la disette de vivres menaçait de prolonger ce jeûne d'une manière exagérée, elle s'accommoda de quel- ques petits coléoptères (Ceulorhynchus assimilis). Dans l'intervalle qui sépare un jeûne de l'autre, lappêtit suit une marche rapidement ascendante et plus lentement décrois- sante; il y a une période de « brife » comme pour les vers à soie. Cinq ou six jours après une mue accomplie au 15 mars, mon Araignée dévorait en une seule journée sept grosses Mouches et deux Araignées, c’est-à-dire un poids de nourri- ture à peu près égal à son propre poids. Son embompoint annonçait pour la prochaine mue un développement notable. De fait, au 12 avril, cette femelle mesurait 7 centimetres et demi de longeur, pattes allongées; le 13, elle atteignait bien près de 10 centimètres. Son abdomen était réduit à rien, tandis que ses pattes s'étaient allongées démesurément pen- dant la nuit. Dès la veille, l’ancienne cuticule du céphalo- thorax paraissait soulevée sur tout son pourtour à la partie 304 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION supérieure, comme un couvercle devenu trop petit. L'Halabé était adulte. La toile qu'elle fit alors dans une cage vitrée, mesurant à peine 30 centimètres de hauteur, permit d'apprécier la belle coloration de son fil. Je remarquai que les fils à globule, d'un jaune très pâle lorsque la toile est récente, prenaient une teinte beaucoup plus éclatante au bout de 24 heures. Influence de l'air, de la lumière, de la dessiccation, je ne saurais encore préciser la cause de ce changement. La cou- leur des fils secs qui forment le cadre et les rayons de la toile est constante, les glandes qui les produisent extraites de l'animal apparaissent remplies d'un liquide jaune, d'abord visqueux, mais qui prend très rapidement, au contact de l'air, la consistance de l'albumine coagulée. Au 17 avril, l'Araignée fut mise dans une chambre exposée au levant, sur un perchoir formé de deux baguettes diver- centes, attachées au dossier d'une chaise: le lendemain elle avait tendu dans l’espace compris entre les deux baguettes, une assez grande toile, en prenant pour fil de soutien supé- rieur un fil que j'avais eu soin de lui faire placer la veille, en la transportant d'une baguette à l'autre. Par ce procédé, j'ai toujours obtenu qu'elle fit sa toile à l'endroit précis que j'avais prévu. Après avoir placé l'Halabé près de l'extrémité supérieure de l'une des baguettes, on la voit assujettir son fil, puis chercher à gagner le sommet; avant qu'elle y arrive on approche un petit bâton que l’on place, en le tenant à la main, dans le prolongement de la grande baguette. L'Halabé ue tarde pas à passer de la baguette sur le petit bâton, que l’on éloigne aussitôt doucement, tandis que l'Araignée ailonge son fil qu'elle ne cesse jamais de produire, quelles que soient les allées et venues qu'elle ait à faire. Il suffit alors de Ja faire passer du petit bâton sur le point où l’on veut faire aboutir son fil, on y réussit facilement par une manœuvre inverse de la première. L’Araionée attache ce fil en faisant au besoin le tour de la baguette pour le fixer plus Sûrement, puis, très patiemment, elle attend j'heure du travail. C'est vers deux ou trois heures du matin qu'elle commence son ouvrage, en prenant infailliblement ce premier fil pour base de sa construction. A Madagascar, elle a, parait-il, les mêmes habitudes sédentaires, les mêmes allures; maladroite quand elle marche sur le sol ou grimpe sur des branches, lente et majestueuse quand elle chemine sur ses fils, elle ne devient L’ARAIGNÉE DE MADAGASCAR 3069 agile et prompte que pour fondre sur la proie qui fait vibrer sa toile. Placées sur un vaste terrain planté d’arbustes ou garni de tiges de roseaux et de perches, les Halabés une fois parve- nues à la taille qui les rend incapables de s'envoler, reste- raient probablement fort paisibles sur leurs grandes toiles. L'école professionnelle de Tananarive a créé un pare aux Araignées (1) sur un espace assez restreint et dans lequel, semble-t-il, les communications d'un support à l’autre ont été rendues par trop faciles; c'est un grave inconvénient qui entraine des pertes nombreuses. Nous avons vu que les jeunes sont plus vagabondes, mais dans un local fermé ne pourrait-on pas obtenir qu'elles fissent leurs toiles dans les mêmes conditions que les grosses Araionées, sur de petits perchoirs isolés, appropriés à leur taille. Si rapprochés en effet que soient ces perchoirs, les Araignées ne pourraient passer de l’un à l’autre que grâce à un courant d'air favorable à l'établissement d'un pont de soie; en supprimant les moindres courants d'air on éviterait des conflits funestes, car c’est toujours une rencontre qui provoque le cannibalisme chez les Halabés; jamais elles ne songeraient à s'attaquer, si elles ne se trouvaient en pré- sence sur le même ouvrage. D'autre part, une précaution bien simple empêche les Araignées de venir attacher au sol les fils inférieurs. de leurs toiles. Il suffit de couvrir les rayonnages supportant les perchoirs, de poussière, de cendre, de sable fin ou de sciure de bois très fine, pour obtenir un complet isolement. Pareille installation, si on la réalise dans les conditions que je viens d'indiquer, rendra nécessaire l'élevage de petits insectes très prolifiques et faciles à nourrir, elle exigera d’ailleurs quelques manœuvres délicates, mais pour une période de temps assez restreinte. Si l'on réussit à opérer pratiquement sur un grand nombre de jeunes, on pourra porter les élèves sur le champ d’expé- riences, des que le danger de les voir fuir par voie aérienne aura disparu. C'est en plein air seulement que l'on peut songer à nourrir les Halabés devenues grosses et capables d'un rendement industriel. La place que demande leurs orands réseaux et l'abondance de nourriture qu'elles récla- ment, ne permettront jamais d'en conserver un grand (1) Cf. La soie d'araignee de Madagasear, par M. J. Maroïx, dans le 10° volume publié par le Laboratoire d’études de la soie de Lyon. Rapport de 1899-1900. 366 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION nombre en salles closes. Enfin on rendrait probablement l'exploitation plus régulière et plus pratique en échelonnant les éclosions. ; Les problèmes à résoudre sont nombreux encore, comme on le voit. Celui de la nourriture pourrait être simplifié par le moyen de fanaux ou de petites lampes électriques allu- mées le soir au milieu des champs de culture. Ce serait cer- tainement le moyen d'attirer un grand nombre d'insectes et de procurer un supplément de provisions à ces intéressantes bètes. Dans les endroits où les Criquets abondent, on pourrait encore essayer de diriger vers les pièges de l'Araignée ces insectes malfaisants. Il ressort de ces réflexions que je donne avec les réserves les plus expresses, que l'élevage sera toujours difficile sous un climat tempéré. Voici dans quelles conditions de tempé- rature mon Halabé a vécu en France : elle a passé l'hiver dans une salle dont la température a varié entre 15 et 18’; à l'automne et au printemps, elle a supporté pendant la nuit, Sans paraitre en souffrir, 7 ou 8° cent. Les grandes chaleurs que nous avons eues à Lyon au mois de mai, cette année, semblaient augmenter sa vigueur et son appétit. Dans son appartement fermé, ensoleillé et chaud comme une serre elle était vive et alérte comme elle eût pul'être.en son pays d'origine. Elle enveloppait prestement de fils blancs soyeux et tres fins les grosses lLibellules que lon jetait dans sa toile, et les emportait pour les dévorer au sommet de ses ouvrages. Au mois de mai deux hbellules lui suffisaient à peine pour une journée. Les papillons, les ouèpes étaient pour elle petite proie. Je n'ai presque rien dit encore de la soie de dame Halabé; celle que j'ai examinée me parut ne le céder en rien pour la tenacité, à celle qui a été recueillie à Mada- vascar, mais je dois avouer que j'ai négligé toutes les opé- rations qui auraient pu éclairer la question du rendement industriel d'une bête ainsi élevée. À deux ou trois reprises cependant, je lui ai emprunté 5 ou 6 mètres de son beau fil jaune d’or, mais sans aucun appareil dévideur et même sans déranger l'Araisnée de sa toile ou de son perchoir. Je n’au- rais pas voulu compromettre uue série d'observations d'ordre Se Mon De sa toile. eb ‘’Halabé L 368 BULLETIN DE LA SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION plus spécialement scientifique, qui me semblaient plus opportunes dans ces premiers essais. Voilà mon excuse. La toile de Nephila madagascariensis, comme celle des Araignées appartenant au même groupe, rappelle les réseaux des Araignées de nos jardins, mais tandis que nos Epéires occupent le centre de leurs toiles rondes, les Halabes se placent au sommet d'une sorte de panneau en forme d'éven- tail renversé, dominant ainsi les nombreux rayons qui partent de ce centre d'observation. L'Araionée n'a donc jamais à monter pour fondre sur sa proie. Elle descend promptement, mais il faut voir avec quelle gravité elle regagne son poste quand elle est chargée de son butin. Au 3 mai, elle pese juste 3 grammes, elle a conscience de son poids, aussi elle renforce le cordage supérieur par de nom- breux fils qui viennent aboutir pres du centre de ses opéra- tions. C'est là qu'elle se suspend par les deux pattes de la dernière. paire, posant les autres pattes sur les rayons de sa toile, mais toujours prête à les lever pour tourner et retourner la pauvre mouche qu'elle vient d'envelopper, ou pour se défendre quand on l’agace où qu'on lui présente une nourri- ture dont elle ne veut pas; elle agite à la fois ses six pattes antérieures pour repousser l'agresseur, on dirait un enfant capricieux qui trépigne d'impatience; c'est toujours à cette même place que l'Araignée dévore sa proie et qu’elle met en réserve, en les espacant suffisamment pour n'être pas gênée, les mouches qui se prennent dans sa toile avant qu'elle ait achevé de dévorer sa premiere proie. Elle revient d'ailleurs toujours au morceau entamé après avoir mis en sûreté les provisions survenues entre temps. La toile des Halabés comme celle des Epeires diadème est inscrite dans un triangle; les rayons qui la composent sont plus courts à mesure qu'ils se rapprochent davantage de la position horizontale, ceux qui descendent verticalement sont les plus longs, plusieurs de ces rayons se dédoublent, si bien que l'on en peut compter jusqu à 60 à la périphérie tandis qu'au centre leur nombre est toujours bien moindre. L'Araionée y dispose le fil de trame, non pas en tournant autour du centre comme fait notre grande Epeire, mais en revenant sur ses pas quand elle arrive aux cordages d'enca- drement, ou si l’on veut, elle oscille, plaçant un fil en allant, un autre en revenant jusqu à ce que les plus longs de ses rayons soient garnis de leur trame visqueuse. Les Nephila ne détruisent pas les spires du fil de fondation, ce fil sec . L'ARAIGNÉE DE MADAGASCAR 369 est beaucoup moins visible que les autres, de sorte que 7 ou 8 des fils visqueux également espacés l’un de l’autre appa- raissent comme un ruban séparé du ruban voisin par un intervalle (1). Cet aspect n'est fort sensible que dans les toiles faites de premier jet; car voici une curieuse particu- larité du travail du Nephila imadagascariensis; c'est par moitié que l'Halabe détruit et refait sa toile chaque nuit. Les deux moitiés, celle qui a été conservée et la nouvelle, se raccordent suivant un diametre vertical. A mesure que l'appétit de l'Araignée diminue, l’amplitude des ouvrages décroit, il arrive que le raccord au lieu d'être une Simple ligne devient un secteur. Il y a alors dans une même toile, une moitié récente séparée de la moitié tissée la veille par un secteur étroit datant de l'avant-veille. Si l'araignée devient moins avide et plus paresseuse, elle pourra laisser entre les ouvrages d’un jour et ceux de la veille un secteur de plus en plus grand, si bien que certaines parties de la toile pourront dater de quatre ou cinq jours; parfois aussi elle laisse, à l'un des angles supérieurs, un recoin de toile qu'elle néglige de détruire, jugeant les parties neuves de son panneau suffisantes pour ses besoins. Il suffit en effet de faire jeûner l'Halabé pour obtenir d'elle une toile plus lar- œement développée. Quand elle n’a plus faim elle ne travaille plus et reste paisiblement sur sa toile sans se soucier des mouches qui viennent s'y faire prendre. Voilà une bête fort intelligente, sans doute; mais dans la réfection de ces moitiés de toile est-elle guidée par un dis- cernement qui lui permette de refaire précisément la partie la plus endommagée? Mes expériences ont semblé prouver le contraire. A dessein, j'ai troué et déchiré la toile, c'est toujours la même loi d'alternance qui a guidé l’Araignée. Elle refait le côté droit de sa toile, parce que la veille elle a refait le côté gauche, son intelligence ne va pas plus loin. Notons encore que l’Araignée ne détruit pas le triangle qui à servi à échafauder son premier ouvrage, mais qu'elle se borne à tendre des fils qui réduisent à l'intérieur les dimensions du cadre de soutien. Enfin, le plan de la toile n'est pas exactement vertical, l'araignée, toujours placée du côté qui incline vers le sol, peut laisser tomber les débris de ses repas sans qu'ils soient arrêtés par aucun fil. (1) Cf. Eug. Simon : Histoire naturelle des Araignées, © édition, LL, D. 159. Bull. Soc. nat. Acel. Fx : 1901. — 24 370 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION I nous reste une question à examiner : cette Araignée peut-elle se reproduire sous un climat qui n est pas le sien. Ce premier essai d'élevage permet de l'espérer : Le 26 mai, notre Halabé alourdie par son embonpoint, cesse de man- ser, elle boit encore avec avidité les gouttes d'eau qu'on lui présente sur une lame de couteau. Le 28, elle n'est plus sur sa toile, elle à laissé sur une des branches de son per- choir des flocons de soie brillante et d'un blanc argenté, un long fil jaune descend jusqu’au sol, c'est la premiere fois qu'elle s’'aventure ainsi; laissant toujours derrière elle un fil qui trahit son escapade, elle monte derrière un meuble et file un beau cocon jaune; malheureusement, les œufs qui ne sont pas fécondés tombent sur le sol. Toute une journée, elle reste immobile sur ce cocon vide, elle est étrange- ment amaigrie, elle boit quelques gouttes d’eau; la nuit suivante elle tend de longs fils sans trouver dans la salle un endroit propice pour édifier sa toile. Elle mange avidement quelques mouches que je lui présente au bout d'une épingle. Enfin le 30 mai, replacée sur son perchoir, elle y fait la toile la plus grande et la plus régulière que j'aie obtenue; celle dont la photographie est ici reproduite. était moins belle et mesurait seulement 45 centimètres de largeur et 65 centimetres dé hauteur, elle fut faite d’un seul jet dans la nuit du G au 7 juin, le 6 au soir, j'avais entièrement détruit le réseau, en respectant seulement le cadre. Le 8 juin, mon Araignée dut me suivre dans les montagnes -de l'Ardèche, elle refit encore sa toile, mais la fraicheur de la température diminua son appétit, elle put encore filer un second cocon le 21 juin. Les fils de ce nouveau cocon sont blanc d'argent; comme la première fois, les œufs stériles sont tombés sur le sol. A partir de ce moment, l'Araignée ne fait plus que languir, elle tisse encore un réseau, minuscule malgré les longs cordages qui le soutiennent, elle reste plusieurs jours sans travailler; une ou deux fois, elle refait la moitié de sa toile en la développant un peu, elle semble avoir peine à se sou- tenir sur ses fils. Le 3 juillet, je la trouve morte sur le sol Le climat trop froid des Cévennes l’a fait périr. Cette mort prématurée est une nouvelle indication : les essais d'élevage industriel ne pourront réussir que dans un climat chaud. Une certaine acclimation sera possible cepen- dant si l'on réussit à nourrir les jeunes dans des salles fermées et chauffées pendant l'hiver. En les faisant éclore à 5 L'ARAIGNÉE DE MADAGASCAR Sul une époque convenable, on pourrait avoir au printemps des élèves toutes prêtes à être semées sur les terrains d'exploi- tation, elles seraient en plein rendement au moment de l'été. Après avoir exposé les conditions du problème, ou si l'on veut, les difficultés de la solution, qu'il me soit permis d'ajouter que la quantité de fil produit par une Araignée pourra être augmentée par l'éducation et surtout, dans une mesure très grande peut-être, par un dévidage moins fati- sant pour les organes de l'Araignée, et beaucoup plus fréquent, sans que pour cela on voie diminuer la longueur du fil obtenu à chaque opération (1). J'aurais voulu encourager les recherches par des données plus précises; semblables expériences demandent à être reprises sans idées préconçues ; quoi qu'il en soit d'ailleurs des résultats problématiques de l'acclimatation des Halabés, il est problable que dans nos colonies africaines, on pourra mettre à profit les renseisnements que donneront des essais plus complets, car il est bon de remarquer que ce n'est pas seulement à Madagascar que l’on rencontre cette grande araignée ; elle est commune sur les rives du Zambeze. (4) Parmi plusieurs autres griefs motivés, on a formulé contre la soie d'Halabé celui d’un calibrage très irrégulier; or, si je ne me trompe, le calibrage du fil d'Araignée dépend de la vitesse du dévidage, beau- coup plus que des filières de l'animal. (Cf. le rapport du Laboratoire d’études de la soie de Lyon, dans le volume cité plus haut.) AVIS L'ouverture du Cours public et gratuit d'Entomologie agricole, professé au jardin du Luxembourg, par M. A:-L. CLÉMENT, aura lieu le 28 Janvier, à 9 heures du matin. Ce cours aura lieu les Mardis, Jeudis et Samedis, à la même heure. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES GÉNÉRALES SÉANCE GÉNÉRALE DU 11 JUIN 1901. PRÉSIDENCE DE M. Edmond PERRIER, Piésident PUIS DE M. le baron J. de GUERNE, Vice-Pjésident. La séance est ouverte à 5 heures. M. Edmond Perrier remercie la Société de l’avoir appelé à la présidence. La Socièlé d'Acclimatalion, en alliance étroite avec le Muséum, va prendre une voie nouvelle et s'orienter vers l'extension agricole de nos colonies et lexploi- tation des animaux et des plantes qu'elles renferment. Une Commission à d'ailleurs été nommée par le Conseil pour étudier cette question de l'orientation nouvelle de la Société. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. L'assemblée donne à M. Magne, ancien Trésorier de la Société, et suivant son désir, quitus pour sa gestion durant l'année 1900 et le commencement de 1901. M. le baron de Guerne et M. le Secrétaire Général rendent hommage à la mémoire de M. Decroix et de M. Maxime Cornu, Professeur au Muséum, décédés récemment, ainsi qu'à celle de M. Mathias, qui a été longtemps Trésorier de la Societe. M. le Président proclame le nom d'un membre admis par le Conseil depuis la derniere réunion générale de la Société. M. Bois, assistant au Muséum, présenté par MM. Edmond Perriér, Weber, Magne. M. le Secrétaire Général procède au dépouillement de la correspondance. - M. H. Morel adresse à la Société une Note sur l’acclimata- tion d'arbres exotiques à la villa Eucalypta (Beyrouth, Syrie). M. Ch. Rivière envoie une communication relative au Dirina Ceraloniæ, lichen parasite des phanérogames en Algérie. éd Lx" <- PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ TE M. J. de Guerne donne lecture des conditions du Concours sur les Insectes nuisibles aux livres. M. le Président rend hommage à M. le Myre de Vilers, qui a été nommé Président honoraire, et à M. de Guerne, nommé Secrétaire Général honoraire. Ce dernier remercie vivement la Société et l’assure de tout son concours. M. le Président cède le fauteuil de la présidence à M. de Guerne, vice-Président. M. Raveret-Watiel, à propos de la communication de M. Morel sur l'£Ewcalyplus, rappelle qu'en Italie des planta- tions tres importantes d'Evcalyplus globulus ont été faites en vue d'assaimir les pays à Malaria; ces plantations s'éten- dent jusque dans les environs de Naples et même sur les flancs du Vésuve ; une plantation très importante existe à la Trappe de Saimt-Paul-Trois-Fontaines, pres de Rome, et comprend 250.000 arbres, la plupart de grande taille (une vingtaine le mètres); ces arbres, grace à leurs propriétés absorbantes, ont drainé le sol et amélioré la situation sani- taire d'une région basse, tres humide, où une colonie péni- - tentiaire, établie auparavant par le Gouvernement, n'avait pu subsister ; c'est le seul point de l'Europe où onsait utilisé l'Eucalyptus dans de telles proportions. M. le Président remercie M. Raveret-Watel de sa commu- nication et attire l'attention sur les propriétés assainissantes des ÆEuwcalyptus; 11 signale en outre les expériences de M. Grassi, qui garnit les entrées des habitations avec de la toile métallique afin d’empècher l'entrée des Moustiques et est arrivé ainsi à supprimer la Malaria. M. le D°' Weber fait remarquer que la culture de l'£wca- lyplus a au moins le mérite d'empêcher le développement et la propagation des Moustiques, et signale les plantations de cet arbre faites en Algérie. M. Loyer insiste sur les plantations d'£vcalyplus situées dans la région arrosée par le Tibre et fait remarquer que ce sont les seuls arbres qui y atteignent une grande dimension. M. du Pré de Saint-Maur pose la question de savoir si l'£w- calyptus globulus pousse tordu; il pense que la torsion de l'arbre est en rapport avec la nature du terrain. Communications orales. — \: Seurat donne lec- ture d’un Mémoire sur l'Huitre perlière, contenant l'exposé des connaissances actuelles sur l'histoire naturelle de ce Mollusque, les essais de culture dont il a été l’objet, et l'histoire de la formation des perles. 4 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION M. le Président remercie M. Seurat de sa communication, et fait remarquer que la nacre est une matière premiere qui fournit du frêt à des bateaux entiers : notre collègue, M. Ch. Janet, qui a une usine de tabletterie à Beauvais, consomme beaucoup de nacre qu'il est obligé d'aller chercher à Londres. M. le Président insiste également sur l'intérêt que présentent les perles des Mollusques d'eau douce, abon- dantes en Saxe, en Bavière et en Russie où l’on en trouve de grandes quantités dans les trésors de certaines églises ; dans ces régions on se préoccupe également de la produc- tion artficielle des perles. M. Milhe-Poutingon insiste sur l'exploitation abusive de la pèche en Océanie; il espère que des mesures administra- tives seront prises dans un avenir prochain et attire l’atten- tion sur les bancs perliers de l'Indo-Chine. À propos de Ia formation des perles, M. Milhe-Poutingon signale ce fait que dans certaines perles de nacre on trouve quelquefois une perle fine d'un bel orient. M. Aug. Chevalier. donne lecture d'un Mémoire sur l'avenir de la culture du Cotonnier au Soudan français. Au cours de:cette conférence très documentée, M. Chevalier présente des échantillons d'étoffes tissées par les indigènes avec le coton du pays, et colorées à l'indigo, ainsi que des échantillons botaniques de cotonnier. M. le Président remercie M. Chevalier de sa communica- tion et propose d'en faire le sujet, ainsi que celle de M. Seurat, d'une conférence avec projections qu pourrait avoir lieu l'hiver prochain. M.- Milhe-Poutingon donne lecture d'un rapport della Société cotonnière de Saint-Étienne de Vouvray, qui a reçu 25.000 kilogranmes de coton du Soudan et fait remarquer que le plan de M. Chevalier pour la culture du Cotonnier est bien conçu: le système des primes, qui a donné lieu à des fraudes, doit être rejeté; la prime devrait être donnée à l'exportation. Le système de la contrainte parles chefs, qui n'est pas humiliante pour les indigènes, a été l’origine de la culture de l’'Arachide au Sénégal et a donné d’excellents résultats, 125.000 tonnes d'Arachides ont été exportées l’année derniere de cette région. La séance est levée à 7 heures. Le Seciélaire des Séances, G. SEURAT. OT TONY | DUT PET EN PET ET SAR ET | ; l | | EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS Je SECTION. — MAMMIFÈRES SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1901 PRÉSIDENCE DE M. LE D' TRoUESSART, VICE-PRÉSIDENT M. le Président prononce l'éloge de M. Decroix, président de la Section, décédé depuis la dernière séance. Il exprime les regrets unanimes que cette perte cause à notre Société dont il était l’un des doyens. Il rappelle les services rendus par le défunt, son assiduité aux séances de la section qu'il présidait depuis plus de trente ans avec beaucoup de tact et d'autorité, la campagne courageuse et couronnée de succès qu'il entreprit en faveur de l’hippophagie dont il fut le vulgarisateur, et sa lutte ardente et opiniâtre contre l’alcoolisme et l'abus du tabac. M. le Secrétaire général fait part à la Section des négociations pen- dantes entre la Société et le Muséum d'Histoire naturelle à l'effet d'obtenir, par voie d'échange, un certain nombre de Mammifères pre- venant du croît des troupeaux vivant à la ménagerie du Jardin des Plantes, et qui sont sur le point d'aboutir. Ces animaux seraient répartis par les soins de la Sociélé entre ses membres sous forme de cheptels. A cet effet, M. le Président de la Société d’'Acclimatation exprime le désir que la section établisse un tableau des Mammifères propres à être domestiqués en France et dont la Société pourrait faire l'acquisi- tion pour en vulgariser l'élevage. M. le D' Trouessart fait remarquer que cette étude a déjà fait de sa part, l'objet d’une communication en séance générale, à la date du 42 janvier 1899 mais que, néanmoins, sur le désir exprimé par M. Perrier, ii complètera, si faire se peut, cette étude ;à la prochaire séance de la Section. M. Loyer donne lecture d'une lettre du D' Duchemin, rapportant les résultats d’une autopsie pratiquée par lui sur une femelle de Singe macaque de l'Inde, dans le courant du mois d'octobre. Ce Singe qui vivait au grand air durant huit mois de l’année et dans une écurie durant les quatre mois d'hiver, est mort d’une congestion, suite d’une absorption trop considérable d'aliments. Tous les organes de cet animal étaient sains, cependant les poumons présentaient à leur extrémité supérieure des traces de tuberculose en voie de cicatrisation. Le D' Duchemin estime que la vie au grand air et la suralimentation mieux surveillée, eussent suffi pour guérir cet animal et le préserver contre tout retour de la tuberculose. M. le Président fait remarquer à ce sujet, qu'on lui a signalé, qu'à Java on avait observé dans les poumons de certains Singes, la pré- 376 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION sence d'Acariens logés dans les cavités des poumons de ces Quadru- manes; et qui laissaient croire à la présence de la tuberculose pulmonaire. | Ce fait, non encore scientifiquement établi, mériterait de faire l'objet d'observations lorsque l'on procédera à de nouvelles autopsies. Après quelques observations présentées par MM. de Bonnand, - de Guerne. d'Orfeuille et Wuirion, la séance est levée à 7 heures. Pour le Secrétaire einpêché, Le Secrétaire général, NaAuUrIcE LOYER. 2° SECTION — ORNITHOLOCGIE SÉANCE DU 41 NOVEMBRE 1901 PRÉSIDENCE DE M. OUSTALET, PRÉSIDENT La séance est ouverte à 5 heures sous ia présidence de M. Oustalet. M. Loyer, Secrétaire général, donne communication de deux mémoires envoyés par M. Rogeron, l’un sur la Bernache des îles Sandwich, l’autre sur le Cygne de Bewick. Il est donné lecture d'une lettre de M. Bizeray, offrant en cheptel un lot de Faisans. ë A. le Secrétaire général donne la liste des Oiseaux qui pourront être donnés au mème titre aux membres de la Société. NM. Pilastre adresse à la Section un rapport sur son cheptel de Tinamous. M. Debreuil fait part d'un fait dont ia possibilité avait été niée jusqu'ici. Trois œufs de Nandou avant été placés sous une Dinde, il est né un petit. Cette année, sur dix œufs confiés au Nandou mâle, neuf se sont trouvés clairs; ce mâle a, de nouveau, voulu couver en septembre. Il serait intéressant de rechercher pour quelles causes en certaines années, par exemple en 1901, les œufs ne donnent guère naissance qu'à des mâles. M. Loyer communique ensuite à la Section certaines observations touchant diverses espèces de Perruches. Chez lui les Perruches du Bengale ont perdu quatre œufs. Quant à la Perruche callopsite, elle réussit encore mieux que l’ondulée, car il a eu d’un seul couple, en plusieurs années, dix-huit jeunes. On a essayé de donner à quelques- unes d’entre elles la liberté, pensant qu’elles resteraient autour de leur volière, mais elles ne sont pas revenues. Il en est autrement si l’un des sexes reste dans la cage, dans ce cas, l’autre oiseau vient retrouver son compagnon. Une fois un mäle s'était introduit dans un compartiment où se trouvait un couple, et cet étranger a partagé avec l’autre mâle le soin de l’incubation. La femelle s'est par suite abstenue de couver, un œuf n’a pas réussi, les trois autres ont éclos et n'ont produit que des mâles. Le Secrétaire, Comte D'ORFEUILLE. RAR D MR te MU n D ES LEA TA PORN PNY A Ram QD ee MCE ETON “ PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS DUT SOS CLONE N'ONICUOREMRUrELE SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1901 PRÉSIDENCE DE M. RAVERET-\VATTEL, PRESIDENT M. le Président communique à la section une notice de M. Delaval, sur un Poisson Télescope à trois queues. Ce travail, accompagné de photographies, sera lu en séance générale et inséré au Bulletin, M. Debreuil a eu dernièrement des Carpes atteintes de la «mousse », Ne sachant comment les traiter, il a nettoyé les places malades et les a frottées avec du citron; ces poissons se sont presque tous rétablis. M. Loyer, qui s’est trouvé dans le même cas, a lavé les parties malades à l’eau boriquée et le procédé lui a réussi. M. Loyer a remarqué que la plupart de ses Carpes malades étaient chevauchées par des Grenouilles dont il était difficile de les détacher; quelques Grenouilles avaient mème enfoncé leurs pattes dans les yeux des Carpes. C'était le moment du frai des Grenouilles. M. Raveret-\Wattel ne croit pas qu'il y ait de rapport entre le fait constaté par M. Loyer et la mousse des Carpes. Pour que la mousse se développe, il faut que les Poissons se trouvent dans de mauvaises conditions hygiéniques, et, qu’en outre, ils aient été blessés. M. Boigeol est du même avis; cependant, il signale ce fait, que l'on donne à cette mousse dans le département de l'Orne, le nom de « frai de crapauds ». Cela semble prouver que l’on voit souvent des Gre- nouilles s'attacher aux Carpes, au moment du frai. Dans tous les cas de mousse que M. Boigeol a fait étudier dans divers laboratoires, on a toujours eu affaire au genre Saprolegnia. M. Raveret-Wattel rappelle l'emploi du permanganate de potasse et de l’eau salée. M. Boigeol qui emploie le permanganate d'une facon suivie pour les Salmonides, dit n’avoir jamais constaté que ce produit soit nuisible. Des alevins de Truites arc-en-ciel, peuvent facilement séjourner environ dix minutes dans de l’eau devenue absolument violette sous l'influence du permanganate. Toutefois, pas plus avec le permanganate qu'avec l’eau salée, M. Boigeol n’a constaté d'effet utile sur la mousse des Carpes qui réapparaissait inévitablement si le Poisson restait dans le mème milieu. Le seul procédé pratique pour lutter efficacement contre cette mousse, lui semble être de placer les poissons malades dans des étangs ou des réservoirs contenant des plantes aquatiques contre lesquelles ils puissent se frotter pour se débarrasser des parasites, et de les nourrir abondamment, car il ne faut pas oublier que la mousse est surtout une maladie de misère. M. Loyer a pèché à la ligne des Poissons, et les a mis dans de l’eau de source; tous ont été atteints de mousse, qui commençait à se déve- lopper autour des blessures faites par l'hamecon, M. Raveret-Wattel attire l'attention de la section sur l'introduction en France du Catfish {Asmiwrus nebulosus), et se demande s’il n’y a pas là un danger pour nos eaux. Les recherches qu'il a faites à ce sujet ne sont pas concluantes : Un premier travail de M. Maës, directcur de la pisciculture en Belgique, fait à la suite d'expériences, donne des conclusions rassu- rantes. tandis qu'un autre travail émanant également de pisciculteurs 318 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION belges, arrive à des conclusions diamétralement opposées, et signale comme désastreuse l'introduction du Catfish dans les étangs ou cours d'eau. M. Mersey fait remarquer qu'il s'agit peut-être de deux espèces de Poisson-chat; mais M. Raveret-Wattel répond qu'il n'existe qu'une seule variété de ce poisson en Belgique. M. Raveret-\Wattel a voulu savoir à ce propos quelle était l'opinion des Américains, et il a trouvé que de l’autre côté de l'Océan, on consi- dère plutôt le Poisson-chat comme nuisible. En résumé, les résultats n'étant pas concluants, la Section décide de continuer ses recherches et invite tous ses membres à collaborer à cette enquête. M. Raveret-Wattel a voulu faire des essais sur une prétendue nou- velle variété de Salmonides, le Stilhead dont on lui faisait l'éloge, mais il a découvert que ce Poisson n'est autre qu'une variété de Truite arc- en-ciel qui a été à la mer et s’est modifiée. Le Secrétaire, BolGEoL. SENS E CARTON MERE OMPENSRONURE SÉANCE DU 22 NOVEMBRE 1901 PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEBER, PRÉSIDENT Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Chappellier demande à rectifier et à compléter de la façon suivante ie procès-verbal de la Séance générale du 29 mars 1901, inséré eu Bulletin de juillet dernier, page 208 : « M. Chappellier présente ses deux meilleures variétés d’'Igname de Chine, produit du travail auquel il se livre depuis douze ans pour l'amélioration de celte plante; ces tubercules sont courts; ils mesurent de 25 à 35 centimètres. La longueur moyenne des tubercules de l’Igname de Chine est d'environ 80 centimètres et atteint parfois un mètre. La diminution de la longueur des tubercules obtenue par M. Chappellier permettra de les récolter très facilement, et supprimera la difficulté d’arrachage des tubercules de l'Igname de Chine, qui constitue aujour- d'hui le seul défaut de cette plante. M. Chappellier estime que cette variété répondra au desideratum formulé par la Société. » M. le Président engage M. Chappellier à présenter à la Commission des récompenses les tubercules qu'il a obtenus et les produits qu'ils auront donné en deuxième génération. M. Chappellier n'ayant pas l'intention de prendre part au concours ouvert à ce sujet par la Société demande que la question ne soit pas portée devant la Commission des récompenses. MM. Magne et Debreuil font l'éloge d'une variété de Belle-de-Nuit obtenue par M. Chappellier qui leur en avait remis des plants, Cet hybride provenant du croisement des Mirabilis jalapu et longiflora est très vigoureux et très florifère; les plantes sont jolies et très odorantes. La culture de cette plante est celle du Dahlia ; mais, comme elle cons- titue un véritable hybride, ses graines ne donnent que des produits dégénérés. M. Chappellier met à la disposition de ses collègues de jeunes tubercules de cette variété. ” 1 % À PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS 319 M. Ch. Mottaz, de Genève, offre des graines de Colenteria pani- culata, plante très mellifère et qui peut être cultivée avec avantage par les apiculteurs; il demande quelques-unes des graines offertes par M. Magne. Ces graines lui ont été envoyées. NI. Jacquey, directeur de l'Agriculture de l’Annam et du Tonkin, envoie des graines d’une espèce de Poinsetia, originaire de Singapoure, et d'une espèce de Clitoria à fleurs très doubles et d’une belle couleur bleue. Il demande des graines de Fuchsias et d'Œiüllets nains. M. J. Tètu, d'Avignon, demande des graines de Soja. NM. Roland-Gosselin, de Villefranche-sur-mer, envoie des graines d'une espèce d'Aristolochia, originaire de Colombie, qui lui ont été transmises par M. Palin, consul-général. Cette plante a fleuri dans ses cultures et il a reconnu qu'elle n'était autre que l'A. elegans, cultivée dans le Midi et qui se développe bien dans les endroits chauds et abrités. M. Rolland-Gosselin envoie également des graines d’un Begonia à racines tuberculeuses et dont les feuilles sont analogues à celles du B. rex. Cette plante qui parait intéressante provient de graines qui lui ont été envoyées il y a quelques années par la Société. M. Trelease, directeur du Jardin botanique de Saint-Louis (Missouri), envoie des graines d'Opuntias comestibles ou Tuna, du Mexique. M. le Président se charge de la culture de ces graines et rendra compte à la Société des résuitats qu'il aura obtenus. M. Magne fait connaitre qu'il organise en ce moment, dans sa pro- priété de Boulogne-sur-Seine, une culture en parterre et en plein air d'Opuntias originaires des hauls plateaux de l'Amérique du Nord, et qu'il espère que celte culture donnera de bons résultats. M. Magne présente un Cereus triangularis dont la fleur, qui ne s'ouvre que la nuit, est blanche et très volumineuse, son diamètre atteint 35 cen- timètres. Cette plante, originaire du Mexique et des Antilles, s’est répandue au Brésil, son fruit est comestible. M. le Président a présenté l’année dernière, à l’une des séances de la Section, un de ces fruits qui pesait 570 grammes. M. Debreuil présente des épis de différentes variélés de Maïs pro- venant de l'Asie Centrale et qui mürissent parfaitement sous le climat de Paris. Il présente également une fleur de Clianthus Dampieri, pro- venant de Genève. Le C. Dainpieri appartient à la famille des Légu- mineuses, c'est une plante herbacée vivace en serre. Les fleurs sont de couleur rouge écarlate intense, avec un œil noir brillant à la base de létendard. Elles sont disposées par 4-6 au sommet d'un pédoncule axillaire dressé. M. Loyer présente des tubercules d'une variété de pomme de terre désignée dans le commerce sous le nom de pomme de terre-asperge. Ces tubercules sont digités. La plante, cultivée par M. Loyer à Bièvre, donne un grand rendement. Les tubercules sont comestibles et ont une saveur analogue à celle de la pomme de terre commune. M. le Président présente la photographie d'un Agave du Mexique et donne d'intéressants détails sur les diverses espèces d'Agavées cultivées soit pour produire de l’eau-de-vie ou une sorte de vin, soit pour leurs fibres employées comme textiles ou comme crin végétal. L'espèce présentée par M. le Président est entièrement nouvelle, M. Weber se propose de l'étudier et de la déterminer. Le Secrétaire, C. DE LAMARCHE. 9 380 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 6° SECTION — COLONISATION SÉANCE DU 45 NOVEMBRE 1902 PRÉSIDENCE DE M. LE D' WEeBer La dernière séance ayant été fusionnée avec une réunion générale n'a pas donné lieu à un procès-verbal spécial. Il est donné lecture d’une lettre de M. Milhe-Poutingon, président de la Section, qui s'excuse de ne pouvoir assister à la réunion. La correspondance comprend en outre une lettre de M. Robert, directeur de l’Ecole supérieure protestante de garçons à Fianarantsoa, Madagascar. M. Robert remercie la Société de graines qui lui ont été adressées et rend compte des résultats obtenus jusqu'à présent : les graines de légumineuses, particulièrement celles de Pois chiche ont parfaitement réussi ainsi que les semis de choux, oignons, navets, etc. Les graines obtenues peuvent permettre d'augmenter les semis cette année. Il en a été de même pour des avoines dont la puissance de végétation a été considérable, les tiges atteignant jusqu'à 1 m. 70 de hauteur. Malheureusement, diverses Chenilles ont fait de grands ravages et ont détruit en bien des endroits les récoltes de blé. orge, haricots. M. Robert demande si la Société peut lui procurer des graines de divers arbres fruitiers pouvant végéter dans un terrain sec et argileux. Au sujet de cette lettre, M. le D' Weber fait remarquer combien il serait intéressant de développer le service d'envoi de graines en demandant seulement à ceux qui en bénéficieraient de tenir la Société au courant des essais entrepris, comme le fait M. Robert. Ces envois donneraient lieu à une correspondance du plus grand intérèt pour la Société. Diverses observations sont ensuite échangées entre MM. Hua, Loyer, Fron, sur la région de Fianarantsoa et le pays Betsileo. On sait que ce pays situé sur le plateau au sud de Tananarive est une région des plus salubres de l'ile, prenant, particulièrement depuis la création de l'école industrielle de Fiaranantsoa, un très grand développement économique. Le commerce y est très actif, et se trouve principalement entre les mains de Français établis dans la région. Malheureusement, comme dans l'Imérina, la nature du terrain limite beaucoup les régions susceptibles de colonisation. Il serait à souhaiter que M. Robert puisse fournir à ce sujet des indications précises sur les points où il a entre- pris ses expériences. Les terres du Betsileo sont souvent argileuses, durcissant par la dessiccation, peu perméables à l’eau. Ce sont des terres ocreuses, dépourvues de calcaire, pauvres en potasse et en acide phosphorique. L'établissement des exploitations agricoles doit être localisé dans les vailées et les bas-fonds où se trouvent accumulées de grandes réserves de fertilité et où l'eau est en quantité suffisante. Dans ces régions, et là seulement, on peut espérer des résultats excellents d'une culture bien conduite, après avoir tenté des essais variés dans le genre de ceux qui sont signalés par M. Robert. Le Secrétaire, G. FRON. INDEX ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS MENTIONNÉS DANS CE VOLUME BARRE DE Laney. Les Abricots des environs de Damas, 31. Bizeray. Note sur des élevages de Mammifères à la villa du Ja- gneneau, près Saumur, 90. — Sur l'acclimatation des Maca- guas ricaneurs, 158. C£zarp (Léonce). Education de Bombyciensséricigènes faites en 1900, à Velaine-en-Haye, 37. CHAFFANJON. Observations sur les migrations des Palmipèdes et Echassiers, 30. CHevaLier (Aug.). L'avenir de la Culture du Cotonnier au Sou- dan français, 225. CLÉÈMENT (A.-L.) L’Apiculture dans les Colonies françaises, 119. Czos (D: D.). Des Gymnoclades ou chicots, 158. CLos (D.). L'Hovenia à fruit doux, 28. CosraAnTIN. (J.). Principaux fruits alimentaires des ‘Tropiques utilisés par l’homme, 189. CRréPIN (J.). L'utilisation de la Chèvre à Paris. 1. DEcHAMBrEe (P.). Les Moutons d'Algérie et de Tunisie, 284. Dep? (Général N. de). Note sur l'élevage des Canchitos, 219. Düvaz (Louis). Contribution à l'Histoire de la Vigne dans l'Orne, 42. Farrcxizp (David). Le Lebbek, 84. Favier (l'abbé). L'Araignée de Madagascar élevée en France, 300. GALIGHET (P.). Les Tinamous; réponse au questionnaire concernant l'histoire natu- relle du Tinamou, 290-324, GHipint (Angelo). Le ver à soie de l’Aïlante dans le Tessin, 390. HEcrEz (E.). Sur une nouvelle variété de Dioscorea penta- phylla, 193. — Sur quelques cultures tropi- cales tentées en pleine terre au jardin colonial de Mar- seille, 249, LAMARGHE (C. de). La question du Moineau, 60. MAGnE (Georges). Action de la neige sur la germination des graines des plantes alpines, 66. MAGNE (G.). Acclimatation et cul- ture des Orchidées terrestres dans les jardins, 105. MorEz (H.). Acclimatation d'arbres exotiques à la villa Eucalypta, 147. MorEL (H.). L'Eucalyptus, 306. NarHorsrT (A.-G.). Le Bœuf mus- qué dans le Grœnland orien- tal, 112: ORFEuILLE (CC) La nocuité du Moineau, 33. Pan (Ch.). Remarques au sujet de l'élevage des Bovidés en Colombie, 91. Porssox (J.). Note sur le caoutchouc de la Nouvelle-Calédonie, 86. Proscxowsky (A.-R.). L'utilisation des Blattes pour l'alimentation des Poissons, 320. Rivière (Ch.). La Datte sans no- yau, 69. — Sur le Dirina ceratonia Lichen parasite des phanérogames en Algérie, 156. — Encore la Banane du Hamma, 198. 382 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION SAINT-QUENTIN (A. de). Compte- rendu de l'Exposition des animaux de basse-cour de Toulouse en Décembre 1900, OTE ; SAUvINET (E.). Note sur une Otarie née à la Ménagerie du Mu- séum, 79. Parix (Ch.). Les Opuntias peuvent être détruits par le feu, 95. INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX SERRE (Paul). Notes de Zoologie RE recueillies en Californie, 92. SEuraAT (L.-G.). L'Huitre perlière, 129-161. # — L'Eponge. 257. TrABUT (D'} Le Bananier du Hamma, 283. VERMOND (M. L'avenir de la Guadeloupe par la culture du Caïéier, 74, MENTIONNÉS DANS CE VOLUME Abeilles, 119. Araignées de Madagascaar, 356. Bœuîf musqué, 112. Blattes, 320. Bombyciens, 37. Chèvre, 1. Canchitos, 219. Con-Cuoc, 64. Echassiers. 30. Halabé, 356. Heros facetus, 219. Hocco, 63. Huiître perlière, 129, 161. Insectes ennemis des livres, 222. Macaguas ricaneurs, 158. Moineau, 33, 60. Mouton, 256, 284. Otarie, 79. Palmipèdes, 30. = Perroquets, 245. Perruches, 245. Poissons. 80, 320. Tinamous., 290-324. Ver à soie. 350. Zebus, 95. INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX MENTIONNÉS DANS CE VOLUME Abricots, 31. Banane du Hamma, 198, 283. Caîfé, 30. Caïféier, 74, 81. Camphre, 123. Caoutchouc, 30, 86. Chicots, 158. Coton, 30. Cotonnier, 225. - Datte, 69. Dioscorea pentaphylla, 193. Dirina Ceratonia, 156. Eucalyptus, 306. Figues, 125. Gymnoclades, 158. Hovenia, 28. : Lebbek, 8%. Opuntia, 95. Plantes alpines, 65. Thé, 30. Vigne, 42. INDEX ALPHABÉTIQUE DES ARTICLES PUBLIÉS DANS CE VOLUME. ANbmacoisires)des environs dé Damas. 25. OM TN Acclimation d'arbres exotiques à la villa Eucalypta . . . . . .. Action de là neige sur la germination des graines des plantes TES 25 ce 5 00e To SN EN Re Er Atioeution de M. Edmond Perrier, président, à la Séance générale Ge ISBN RE EEE A HE Apiculture (L’) dans les Colonies françaises . . . . . . . . . . . Araïignée de Madagascar élevée en France. . . . . . . . . . .. Avenir (L') de la Guadeloupe par la culture du Caféier. Banane Fe Honn an (le) RE Re de. er, NRA A ERE amener dl HT) RE RSI RE Ce Blattes (L'utilisation des) pour l'alimentation des Poissons. S Bovidés (Remarques au sujet de l'élevage des) en Colombie. . . Bœuf musqué (Le) dans le Grœnland oriental . . . . . . . . . . Bombyciens (Educations de) séricigènes faites en 4900, à TRIER EME CO RO SRE CEE Camphre (La production du) dans l’île de Formose. . . . . . . : Canchiios (Notersurlélévaserdes) se Ne | Caoutchouc de la Nouvelle-Calédonie (Notes sur le) . . - . . . . Chentelg SAN RETENUE CEE NOIR RER EE tree Clevretttitsationdeta)a Paris te tee Ur nu Concours pour l'étude des insectes ennemis des livres. . . . . . Con-Cuoc (Développement de son élevage en Indo-Chine) . . . . Cotonnier (l'Avenir du) au Soudan français A Se ra ME etat Culture (La) du Café, du Coton, du Caoutchouc et du Thé à Mada- DECO SENS RO Men Un ED M ONE 0e RENE duiures (Sur quelques) tropicales tentées en pleine terre au JésdincolomaldeMarSeile ere ER ot DATES An SEN Oyaus (lé a) RAS ET NS EEE Pere RARe Dioscorea pentaphylla (| (Sur une nouvelle variété de) . . . Dirina Ceratonia (Sur le) Lichen parasite des phanérogames ‘en ER CP M Le ee 020, ie Echassiers (Observations sur les émigrations des). . . . . . . : Elevages (Notes sur des) de mammifères à la villa du Jaguencan DTÉS SD PR RE Eee A Ne ENS Re SERRE Eucalyptus (L AN SR PR RE Re ARE ne CR SUR RE nt A) Exposition d'animaux de basse-cour de Toulouse, en décembre TD Comptemenduidel) se Set RE Eee EE tr Higues sèches (l'Industrie des) en Californie. . . . . . . . . . . Fruits alimentaires des Tropiques ulilisés par l'homme . . . . . Gymnoclades TDESITOUE CIC OISE INR RE Hocco (L'élevage du) aux environs de Buenos-Ayres . . . . . . Hovenia (1’) à aborde NN ee ÉRIROSDERMeTE (AE M EME Pr NÉ N N enete 129 bedntalpine(ee) du ballon d'MSACeN "TOME NU EEE ÉTÉ RPO R be ed 2ou-2 ee ee TOO Macaguas ricaneurs (sur l’acclimatation des). . . . . . . . . . . Moe aan OCULELAU) EN AE RE nt CON Line Île Gestion) EEE M SA Moutonss(Bes) d'Alpérie et de Tunisien." "NN. ME Mouton (L'élevage du) dans la colonie du Cap . . . . . . . . . . Notes de Zoologie recueillies en Californie. . . . . . . . - . . . Opuntias (Les) peuvent être détruits par le feu. . . . . . . . . . Orchidées terrestres (Acclimation et culture des) dans les jardins Otarie (Note sur une) née à la Ménagerie du Muséum . . . . . . Palmipèdes (Observations sur les émigrations des). . . . . . . . Parasites (Sur quelques) du Caféier au Congo français. . . . . . Perroquets (Acclimation des) et des Perruches en Angleterre . Poissons nouveaux du Congo français. . . . . . . . . .: . . . . Tinamous (Réponse au questionnaire concernant l’histoire natu- MÉNOAeS N en Udre ce 290 Ver à soie (Le) de l’Ailante dans le Tessin. . . . . . . . . . . . Vigne (Contribution à l’histoire de la) dans l'Orne . . . . . . . . 4 { æ ELITON CE TABLE DES SÉANCES DE LA SOCIÉIÉ SÉANCES GÉNÉRALES Séance du 14 décembre 1900. 177 | Séance du 29 mars 2, 2 — 25 janvier 1901. 184 —— 31 mai — 21 — 22 février — 186 — AT juin — 310 SÉANCES DES SECTIONS 1° Section. — Mammifères. 3° Section. — Aquiculture. Séance du 7 janvier 1901..... 52. Séance. du 18 nov. 419012 315 — : du 4 février — ..... 53 se : no sue 373 5° Sechon. — Botanique. " : Se Holars Séance du 22 Janvier 1901. . 58 2° Section. — Ornithologie. a) Nbr à RL Séance du 25 janvier 1900... 5% — du 23 Avril — .. 216 — du 14 janvier 1901... ,55 — du 22 Nov. — . . 316 du 11 février — "#50 » cs PE Dm 2 NC 6° Section. — Colonisation. — du 25 niai — ... 216 | Séance du #4 Février 1901. . 218 — du 11 nov. — ... 314 — du 15 Nov. — .. 311 TABLE DES GRAVURES CaMCMITO AU RER MR ARR Cr PA ee Chèvres-delalCollection de M JACrépine ee EEE dl Halabé,ét:sa tone its eme AN RSR Re ner ES 0) ‘Finamouvroux (RAYNChOIUS MUJESCENS) VO D Tinamous (Plumestdé) sm EE PS PS 15 ERRATA Page 228, ligne 42, les soies des graines au lieu des grains. — 228, — 16, Indes Orientales au lieu de Indes Occidentales. — 228, — 26, Anogeissus leiocarpus au lieu de Anggeinus. — 229, — S, lougan au lieu de longan. — 232, — 5, Djenné au lieu de Denné. — 232, — 38, se reproduisant au lieu de reproduisant. — 233, — 35, elles sont tantôt au lieu de car elles sont tantôt. — 235, — 17, Vigna Catjang au lieu de Vigna Cutjung. — 238, — . 2, qu'on yparvienne au lieu de qu'on n’y parvienne. OFFRES, DEMANDES ET ANNONCES GRATUITES Réservées aux Membres de la Société OFFRES _3 Singes noirs es Indes. 2 Accipiter nisus jeune. ne 1 Oriolus galbula — 2 Monticola saxatilis. ; M. C. MOTTAZ, Palais Eynard, Genève. 2 Daims mouchetés de deux ans. 25 Faisandeaux des bois. _ 42 Faïsans dorés, mâles et femelles, en pleine couleur. _ M. MAGNE, 5, boulevard de Boulogne: TON Boulogne (Seine). Orchidées, huit fortes plantes bien établies, | vigoureuses, fleurissant, petit prix. _ Comte DE SAINT-INNOCEN‘®, Sommant, A par Lucenay-l'Evêque (Saône-et-Loire). À CÉDER CET HIVER : Plusieurs couples de Maras : couple. Une femelle Lama, 2 ans ayant reproduit, : pied de devant un peu défectueux; 1 ; mâle Lama de 10 mois, sans défaut, ES ETAPE RES .. 500 fr. Mäles Cervules de Reeves: 420 fr. l’un. 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