ÿ ! | } (4 " de h na (Au) « — he < ba di 7, Fr = 7 Pre FORTHERPEOPTE FOR EDVCATION FOR SCIENCE LIBRARY OF THE AMERICAN MUSEUM OF NATURAL HISTORY SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDE FONDÉE EN 1871 IE — ANNÉE 1880. Pen ciel et JA s2 Journal + HS A F: Œ: “ : L ÉBPÉBET IN DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE à Li LA : te l jte (a, " AE % ; CAE d. ei: S LA } . LUE BRIE ET UN DE LA PDOIÈDÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE FONDÉE EN 1871 TOME VIL — ANNÉE 1880. HAVRE Imprimerie du Journal LE HAVRE (F. SANTALLIER, Imprimeur) 35, RUE FONTENELLE 1882 | ET" R nn 2 NE LD sat M 21: ‘ut A : x BUELETIN DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE RÉSUMÉ DES SÉANCES SÉANCE DU 13 JANVIER 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. MM. Ernst, adjoint au maire du Havre, et Maurice Lémeray, présentés à la dernière séance, sont admis comme membres actifs résidants. Trois nouvelles présentations ont lieu : celles de MM. Etienne, pharmacien à Gournay-en-Bray, Pierret et Tesson, il sera statué sur leur admission à la prochaine séance. Le rapport sur la situation financière de la Société est Iù par le trésorier et adopté. Le Président fait un rapide exposé des travaux accomplis pen- dant l’année précédente. Il parle de l'Exposition de 1877 et du livre qui devra en perpétuer le souvenir ; il énumère les travaux déjà faits pour l'exécution de ce livre, ceux qui sont encore en préparation et les collaborations illustres que nous avons pu obtenir, notamment celles de MM. de Saporta et Cotteau. Ilest ensuite procédé aux élections pour le renouvellement du Bureau, qui est ainsi composé : Président, MM. G. LENNIER ; Vice-Président, G. LIONKET ; Secrétaire, À. LÉCUREUR ; Trésorier, G. DrouaUx ; Archiviste, W. PARTRIDGE. 4 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Les ouvrages suivants reçus depuis la dernière séance, sont remis aux Rapporteurs : 1° Comple-rendu de l’Association Française pour l'avancement des Sciences, Congrès du Havre 1877; 2° ‘Bulletin de la « Societa Toscana di Scienze naturali » de Pise ; 3° Bullelin du Comité des Travaux Historiques et des Sociétés savantes ; 4° Bulletin de la Société libre d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles Lettres de l'Eure. Tome III. s° Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres. La correspondance donne de nombreuses lettres, particulière- ment de MM. Fromentel, Eug. Marchand, de Saporta, Morière, Gaudry et Cotteau relatives à notre ouvrage sur l’Exposition. Mme Vve Rolland-Banès, remercie la Société de la lettre de condoléance qui lui a été adressée par le Secrétaire. M. Lionnet analyse une partie de l'important Résumé sur la Géologie normande qu’il a entrepris pour le livre de l'Exposition. M. G. Drouaux analyse le Bulletin de la Société d'Études des Sciences naturelles de Béziers (1877). M. Lionnet propose de faire imprimer une petite publication mensuelle destinée à donner connaissance de nos travaux aux membres qui ne peuvent pas suivre nos réunions. Après des observations en divers sens, la question est mise à l'étude et “viendra à l’ordre du jour de la prochaine séance. M. le Président dit qu’il serait d’avis de faire relier en un volume toutes les pièces manuscrites que la Société a reçues pendant l’Exposition, ainsi que tous les catalogues de nos exposants. Cette idée est vivement approuvée. À propos de l’accident mortel survenu le 10 janvier, dans une carrière d'argile plastique tertiaire à Mélamare, M. Denize donne des explications sur le oisement de ces argiles ; elles forment des poches lenticulaires dans les cuvettes de la craie ; pour les atteindre, il faut creuser des puits de 14 mètres de profondeur en moyenne dans des sables tertiaires. Ce sont les parois sableuses du puits qui se sont écroulées, et qui ont enseveli le malheureux carrier. RÉSUMÉ DES SÉANCES s SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1879 Présidence de M. G. LIONNET, Vice-Président. MM. Etienne, Pierret et Tesson, présentés à la dernière séance sont admis. La correspondance contient notamment des lettres de Messieurs Eug. Marchand et Cotteau, relatives au livre sur l'Exposition. M. Lionnet annonce que l’envoi de végétaux fossiles fait à M. de Saporta sera bientôt complété par les échantillons précieux de la collection Duplessy. Les ouvrages suivants ont été reçus depuis la dernière séance : 1° Bulletin de la Société de Géographie, novembre 1878 ; 2° Feuille des Jeunes Naturalistes, n° 100 ; 3° Le Congrès international des Sciences anthropologiques en 1876; 4° Actes du Muséum d'Histoire naturelle de Rouen, Tome IV. M. le Président met en discussion le projet de publication mensuelle d’un bulletin analytique de nos séances. Après discussion, il est décidé qu’un résumé succinct des séances sera imprimé sur l’un des côtés de lalettre de convocation adressée à chacun des membres, de facon à ce que l’on ait en même temps sous les yeux le résumé de la séance précédente et l’ordre du jour de la séance prochaine. M. Lionnet continue la lecture de son Résumé sur la Géologie normande. M. Gazé analyse le Bulletin de la Société des Sciences naturelles de Rouen, il en extrait quelques passages intéressants. M. C. Brylinski analyse une note du Quarterly Journal sur les terrasses geysériennes de Roto-Mahana (Nouvelle-Zélande), ainsi qu’un article intéressant de la feuille des Jeunes Naluralistes sur le Trias de Draguignan. M. Lionnet continuant son étude sur les substances minérales servant à l’industrie, introduites par la voie du Havre, traite des grès tertiaires de Bolbec, et des grès siluriens de May et de Feuguerolles. Sur la proposition de M. Lécureur, la Société vote une somme de fr. 25 pour souscription à la caisse des écoles. 6 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE SÉANCE DU 3 MARS 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Les ouvrages suivants reçus depuis la dernière séance sont distribués : 1° Bulletin de la Société libre d'Émulation du Commerce et de l’In- dustrie de la Seine-Inférieure (1877/78) et Catalogue du Musée Indus- triel, de la mème Société; 2° Bulletin de la Société de Géographie décembre 1878 ; 3° Annales de la Société Géologique du Nord, Tome V, 1877/78 ; 4° Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, n°137; s° Feuille des Jeunes Naturalistes. n° 101. MM. Lionnetet Lennier présentent comme membres actifs MM. Martin, professeur au Lycée du Havre, et Chateau, ingé- nieur à Aubervilliers. M. le président communique à la Société la circulaire ministé- rielle, relative à la réunion des délégués des Sociétés savantes, qui aura lieu à la Sorbonne du 16 au 19 avril prochain. M. Denize présente une série de fossiles de la craie blanche recueillis aux environs de Cany. M. Beaugrand a remarqué dans le Bulletin de la Société de Géographie de novembre 1878, un intéressant travail de M. J. Crevaux sur la géologie de la Guyane française, dont il donne un résumé succinct. M. C. Brylinski résume l’article de M. Tournier sur le Beau- j olais à l’époque glaciaire, paru dans la Feuille des Jeunes Natura- listes de février 1879 Les Actes du Muséum de Rouen contiennent un intéressant travail sur les ossements miocènes de Pikermi, dû à notre collègue M. le docteur Pennetier ; M. Lémeray en donne une rapide analyse. M. Lionnet continue la lecture de son travail sur les substances minérales employées par l’industrie ; il traite aujourd’hui des granits normands d'Alençon et de Vire, et des granits de la Manche et des îles Chausey, qui viennent surtout au Havre. M. Savalle donne lecture d’une note sur l’état actuel de la falaise à Bléville (1); les éboulements y sont imminents ; notre (1) Note insérée, voir plus loin. RÉSUMÉ DES SÉANCES 7 collègue promet de nous tenir au courant des modifications qui pourront se produire. Le glissement des basses falaises a mis au jour de beaux blocs de gaize et de gault ; par contrele kimmeridge est toujours couvert par le galet. Le Bulletin de 1877 est distribué, et le Conseil d'administration va s’occuper de la publication de celui de 1878. SHANCEMDUN7 AVEIL 18/9 Présidence de M. G. LENNIER, Président. MM. Martin et Chateau, présentés à la dernière séance sont admis. MM. Gazé et Savalle présentent comme membre actif M. Théodore Courché. La Société a reçu depuis la dernière réunion : 1° Sept brochures que M. de Lapparent a bien voulu lui envoyer en l’autorisant à y puiser tout ce qui pourra lui être utile pour le livre de l'Exposition; 2° Bulletin de la Société de Géographie, février 1879. M. Lionnet lit une note sur un article de M. Lenthéric, publié dans la Revue des Deux Mondes sous le titre: Une Ville disparue, Tau- roentium. Cette ancienne ville gréco-romaine, vraisemblablement détruite au XT° siècle, n’alaissé au bord du golfe des Lèques, près la Ciotat, que de rares vestiges ensevelis dans les alluvions qui ont comblé son port et une partie du golfe. Tout porte à croire même que des mouvements d’affaissement se sont aussi produits sur ce point. M. Prudhonime analyse le Bulletin de la Société Géologique du Nord, Tome V.{1) M. Savalle fait une nouvelle communication (2) sur l’état de la falaise, communication doublement intéressante au moment où recommencent nos excursions annuelles et qui a pu être mise à profit déjà dans la course de la veille. (1) Voir tome V. (2) Voir plus loin. 8 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE À ce propos M. le Président dit que la destruction de nos falaises, causée en grande partie par une exploitation industrielle véritablement excessive, est chose très grave. Il n’y a pas d’ébou- lements sérieux sous les phares, par cette raison que l’exploitation des marnes et argiles kimméridiennes y est sévèrement interdite; mais au-delà la basse falaise a disparu, la mer bat en côte et des éboulementé immenses sont imminents. On remarque fort avant dans la plaine des crevasses nombreuses, et avant un an un espace énorme aura disparu. Jusqu'ici les premiers intéressés, c’est-à-dire les propriétaires riverains n’ont fait entendre que des protestations isolées ; cependant la situation est fort grave. M. le Président résume ensuite la course de la veille à la Hève, dans laquelle on a recueilli d'assez beaux échantillons, notamment une magnifique Ostrea aquila. M. G. Drouaux présente une intéressante série de fossiles kim- méridiens provenant du département du Doubs. SÉANCE DU 5 MAI 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. M. Courché présenté à la dernière séance est admis. M. le Président annonce que l'Association française pour l’avan- cement des Sciences nous a envoyé la collection complète de ses publications, réalisant ainsi la promesse qui nous en avait été gracieusement faite lors de la session 1877. M. Lionnet annonce qu’il a terminé l'analyse bibliographique du Bulletin de la Société Géologique de France, relativement à la géologie normande. M. Lécureur exprime le désir que cetravail soit joint aux notes nombreuses déjà recueillies, afin de pouvoir achever la publication de notre Bibliographie Normande dont le premier fascicule a été fort apprécié. M. le Président résume les deux excursions faites depuis la dernière séance : celle de Cauville où les derniers éboulements ont découvert l’aptien et les sables ferrugineux, et où il importe- rait de prendre des coupes qui permettraient d'établir la limite exacte de ces deux étages et d’éclaircir des points encore très L À ; RÉSUMÉ DES SÉANCES 9 discutés, et celle de Lion et Luc-sur-Mer où nous avons pu étudier, à l’ouest de Lion, un petit dépôt remanié contenant des fossiles calloviens, et entre Lion et Luc, les magnifiques coupes du bathonien. Pour compléter l’étude du terrain jurassique une dernière course est décidée à Trouville et Villers. M.C Brylinsky indique dans le Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, n° 137, plusieurs travaux intéressants, notamment de M. J. F. Campbell sur les Périodes glaciaires et du professeur P. M. Duncan sur la faune coralline des Upper Green Sands de Haldon (Devonshire). SÉANCEMDUMOMIUINt1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Les ouvrages suivants reçus depuis. la dernière séance sont distribués aux Rapporteurs : 1° Bulletin de la Société d'Études des Sciences naturelles de Béziers, 3° année; 2° Bulletin de la Société de Géographie, mars 1879. MM. M. Brylinski et G. Lionnet présentent comme membre actif correspondant, M. Gustave Dollfus, 45 rue de Chabrol, Paris. Sur la proposition de M. G. Lionnet, la Société décide que, par dérogation aux Statuts, il sera voté immédiatement sur cette présentation. | M. Gustave Dollfus est admis à l'unanimité. M. Lionnet dépose ensuite un travail de M. G. Dollfus, notre nouveau collègue, sur PExtension des Terrains tertiaires, dans le bassin anglo-parisien; cet important travail sera inséré dans notre ouvrage sur Exposition (1). M. C. Brylinski donne lecture d’une note analysant un travail du D'J. W. Dawson,sur l'Eozoon Canadense, dans le Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres \2). (1) Voir Bulletin, tome VI. (2) Voir Bulletin, tome V. 10 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE M. Beaugrand lit une note sur une série de silex taillés trouvés aux environs d’Yvetotet du Havre (1). Il présente à l’appui une assez nombreuse collection dont quelques pièces sont remarquables, notamment une pointe de flèche triangulaire à bords finement retaillés. M. Lionnet résume une excursion faite à Tancarville et Lille- bonne, dans laquelle les explorateurs ont pu suivre le tracé de la faille de Villequier aux environs de Lillebonne (2). On a constaté notamment que le tracé de cette faille, indiqué par M. Lennier sur la grande carte géologique qui lui a valu une médaille d'argent à l'Exposition de 1878, est partout rigoureusement exact. Dans une course ultérieure, l’examen de cette faille sera continué aux environs de Bolbec. M. Drouaux donne lecture d’une note sur un dépôt sableux (3) qu'il a reconnu aux environs de Manneville-sur-Risle et qu'il croit pouvoir rapporter à l’époque tertiaire. Complétant ses communications antérieures, M. Savalle lit une note sur les éboulements survenus cet hiver dans nos falaises (4). M. Lionnet analyse une note publiée dans le Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, par M. W. Usher sur le trias de Normandie {s). Un membre signale la mort prématurée de notre collègue M. Michel Gautier. L'assemblée exprime à cette occasion ses sympathiques regrets. SÉANCE DU: 7 JUILLET 4679 Présidence de M. G. LENNIER, Président. La Société a reçu depuis la dernière séance les Archives de la Commission scientifique du Mexique. M. Bucaille annonce qu’il termine son travail sur les Echino- dermes de la craie dont la première partie a déjà paru dans notre (1) Voir Bulletin, tome VI. (2) Voir plus loin : Mémoires. (3) Voir plus loin. (4) Voir plus loin. (s) Voir le tome VI. RÉSUMÉ DES SÉANCES II Bulletin et qu’il se propose d’y joindre un certain nombre de planches. M. le Président dit que MM. Adam et Bucaille ont déjà réuni de nombreux documents sur les failles des environs de Rouen, notamment sur celle de Pavilly, et ajoute qu'il serait désirable que ces documents fussent publiés. M. Beaugrand a remarqué dans le Bulletin de mars, de la Société de Géographie, une communication sur l’état des sondages qu’on exécute en ce moment au seuil de Gabès. Ces sondages n’ont traversé jusqu’à présent que des couches sableuses. M. Bucaille fait observer que ces résultats sont en contradiction avec les prévisions de M. Pomel, qui, dans une communication faite au Congrès du Havre, avait admis l’existence d’un seuil rocheux. M. Bucaille communique à la Société, le résultat de ses obser- vations surle niveau dit à Belemnites plenus que les géologues du Nord considèrent comme appartenant au Cénomanien supérieur. À son avis, ce niveau, qu'il a pu étudier aux environs de Rouen et dans le département de l'Eure, doit au contraire être rangé dans le Turonien inférieur ; il y a rencontré, avec le Belemnites Plenus, des fossiles Turoniens : Znoceramus labiatus, Rynchonella Cuvieri, Cidaris hirudo, Discoidea minimus. Il se propose, du reste, d'étudier attentivement ce niveau. M. Lemeray résume l’ouvrage déjà ancien de M. Jonglez de Ligne : Le Port maritime de la Seine, auquel les travaux actuels de la baie de Seine et les études du canal de Tancarville donnent un nouvel intérêt. L'auteur de cet ouvrage, après avoir fait à grands traits l’histoire des différents ports de l'embouchure de la Seine successivement ensablés : Juliobona, Harfleur, PEure, le Quief de Caux, enfin le Havre qui, menacé du même sort, y a jusqu'à présent résisté, étudie l’effet des courants dans la baie, leur influence sur les apports sableux, enfin les effets de l’endiguement de la Seine. Ce mémoire se termine par l’exposé d’un projet d’endiguement de la rade du Havre. M. le Président fait remarquer que, dans cet ouvrage, il est dit que les bancs de la Seine ont été produits par les alluvions du fleuve ou des courants. C’est là une erreur, car les bancs de l’Eclat, d'Amfar, du Rattier et de Trouville, sont composés de couches Kimméridiennes ou Coralliennes formant le sommet d’ondulations dans les plis desquelles coule la Seine, couches non seulement préexistantes à l’époque actuelle, mais encore antérieures au dépôt de la craie qui repose sur elles en stratification discordante, 2 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE M. Savalle se propose de résumer dans un rapport d'ensemble les travaux faits jusqu’à présent sur la baie de Seine, tant au point de vue hydrographique qu’au point de vue géologique. M. le Président ajoute qu’il serait intéressant de rechercher quel était l’état ancien du rivage avant la fondation du Havre. L'opinion commune qui place l’ancien village du Quief de Caux sur l'emplacement actuel du banc de l’Eclat ne lui paraît guère admis- sible, ce banc étant sépare de la côte par un chenal profond de 7 mètres à basse mer et qui n’a pu, vu son fond d'argile et de calcaire dur, être creusé par les courants depuis une époque relativement si peu éloignée. M. Bidard présente une série de silex taillés recueillis sur le plateau de Frileuse dans les exploitations de M. Dubosc. Une discussion s'engage au sujet de ces silex, auxquels M. Bucaille ne reconnaît pas une taille intentionnelle. M. le Président fait remarquer que, jusqu’à présent, on n’a trouvé sur les plateaux de notre région que des silex polis. Les silex simplement taillés n’étant guère rencontrés que dans les vallées. La question reste pendante et plusieurs membres se proposent d'examiner ce gisement. SÉANCE DU 14 AOUTSTS Présidence de M. G. LENNIER, Président. MM. Bucaille et Drouaux présentent comme membre actif correspondant M. l’abbé Deshayes, curé de Manneville-sur-Risle. M. le Président donne connaissance de la correspondance contenant deux lettres importantes ; d’abord une lettre de M. le Ministre de l’Instruction publique nous annonçant que la subvention ministérielle de fr. 200, qui nous était allouée jusqu’à présent, a été portée à fr. 300. Notre Bulletin n° IV renfermant l'important mémoire de MM. Lionnet et Brylinski sur les phos- phates fossiles n’est pas étranger à cette décision. Le Secrétaire est invité à écrire à M. le Ministre pour lui témoigner toute la reconnaissance de la Société. RÉSUMÉ DES SÉANCES 13 La seconde lettre émane de M. le Maire du Havre, qui remercie la Société du don fait à la bibliothèque municipale du dernier volume de notre Bulletin. M. Bourdet donne lecture d’un mémoire sur les armes et outils en silex exposés en 1877 (1). Ce travail sera inséré dans notre ouvrage sur l'Exposition. M. Lionnet dépose également, pour le livre sur l'Exposition : 1° Un mémoire sur les roches granitiques et d’épanchement en Normandie ; 2° Deux mémoires sur les terrains jurassiques et crétacés ; 3° Un travail original de M. G. Dollfus sur les mers tertiaires, avec carte; 4° Un travail original de M. Cotteau sur les Echinides de de Normandie. Le même membre donne connaissance d’une lettre de M. le marquis de Saporta, relative au travail qu’il veut bien préparer pour nous sur les végétaux fossiles exposés. M. Savalle présente à la Société une vertèbre de Téléosaure recueillie par lui dans les Poudingues Aptiens à Octeville. M. Lémeray dépose d’intéressantes coupes des sondages effec- tués dans la baie de Seine. M. Savalle fait connaître le sommaire du travail qu’il vient d'entreprendre de concert avec M. Prudhomme sur l'estuaire de de la Seine. M. Prudhomme donne lecture d’un rapport sur les Archives de la Commission scientifique du Mexique (2). SÉANCE DU 8 SEPTEMBRE 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. M. l'abbé Deshayes, présenté à la dernière séance, est admis comme membre correspondant. M. le Président donne connaissance à la Société des résolu- tions prises en conseil d'administration relativement à l'impression de notre ouvrage sur l'Exposition. (1) Voir Bulletin, tome VI. (2) Voir plus loin. 14 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE La question des excursions d’automne étant à l’ordre du jour, il est décidé, après discussion, qu’il sera fait, le dimanche 14 sep- tembre, une excursion à Trouville. ce qui permettra d’étudier tout spécialement l’étage Corallien sur lequel notre collègue M. Durand a préparé une monographie destinée au livre de l'Exposition. M. Beaugrand donne lecture d’une note analysant le mémoire récemment publié de M. Frémy sur la formation de la houille. Le même membre, se basant sur la présence de matières orga- niques révélée par l'analyse chimique, qu’il a faite de concert avec M. Bidard, des silex noirs de la craie Cénomanienne, se demande sil’on ne pourrait pas trouver dans ce fait une explication de l’origine de ces silex et de leur disposition en bancs horizontaux. Une discussion s’engage sur ce sujet, et M. Lionnet fait remar- quer que la théorie de formation des silex, généralement acceptée, est loin de permettre la supposition d’une origine végétale. Il se réserve, d’ailleurs, de traiter cette question plus au long à la prochaine séance. M. Prudhomme donne lecture d’une note analysant le Bulletin de la Société d'Études des Sciences naturelles de Béxiers, 3° vol.; il signale particulièrement une étude de M. Rouzaud sur un dépôt lacustre miocène des environs de Narbonne, et un travail de M. Sabatier Dezarnaux sur les dépôts quaternaires des envi- rons de Béziers.— Ces dépôts d’argiles rouges sans fossiles sont souvent recouverts par des amas de cailloux, que l’auteur de cette étude suppose avoir été formés par de violents courants; ilsne présentent pas de traces de frottement et ne sauraient provenir de moraines glaciaires. SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Depuis la dernière séance le secrétariat a reçu les ouvrages suivants : 1° Mémoires de l Académie nationale des Sciences, Arts et Belles Lettres de Caen, année 1879 ; 2° Quarterly Journal of the Geological Society London, n° 139 ; 3° Bulletin de la Société d'Études scientifiques de Lyon, Tome II, n% get 2, et Tome IV, n°1; RÉSUMÉ DES SÉANCES HS 4° Feuille des Jeunes Naturalistes, septembre et octobre ; s° Les brochures suivantes de M. Hébert : Nouvelles recherches sur les Terrains Tertiaires du Vicentin ; Observations sur les Terrains quaternaires du Var ; Craie supérieure des Pyrénées ; Fossiles de la craie du Nord de l'Europe ; 6° Notespour servir à l'anthropologie préhistorique de la Normandie, par M. Hamy ; 7° l’Union, 1 vol., par le docteur Muller. MM. Lennier et Lécureur présentent comme membre actif correspondant M. P. Nicole, directeur de l'Exposition de 1879 à Paris. M. Lionnet dépose le manuscrit définitif de son Résumé des Terrains primaires normands, destiné au livre sur l'Exposition. Sur la proposition de M. le Président, MM. Daubrée, Hébert, de Lapparent, de Saporta, E. Deslonchamps, Cotteau et Letellier, qui ont apporté à la Société un concours si apprécié pour la publication de notre ouvrage sur l'Exposition de 1877, sont nommés membres honoraires. M. Bidard présente au nom de M. Dubosc trois magnifiques silex taillés trouvés sur le plateau de Frileuse : 1° Une hachette à grands éclats du type d’Olendon, parfaitement intacte ; 3° une autre hachette qui a dû être brisée et qui a maintenant la forme d’un coin ; 3° un percuteur de toute beauté, usé sur toutes ses faces par un long'usage. En constatant que la surface de ces hachettes est parfaitement blanche bien que l’intérieur du silex soit resté noir, ainsi que le montrent quelques éclats de date récente, M. Bidard pense que la surface n’a pris la teinte blanche actuelle qu’à la suite d’une altération lente au contact de Pair. M. Lionnet pense que la coloration noire est plutôt due à l’oxyde de fer. Une intéressante discussion s’engage à ce sujet entre les deux membres. M. Bidard signale encore la découverte à Frileuse d’une poche de Kaolin analogue à celle de St-Yrieix, au moins comme compo- sition, mais rouge au lieu d’être blanc; il se trouve presque à l’état de silicate d’alumine pur. À cette occasion M. Partridge rappelle qu’il a déjà signalé, dans les cuvettes et les puits de la craie, la présence d’une mince cou- che d'argile plastique, qui pourrait être rapprochée du dépôt dont il est parlé. 16 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE SEANCE DU 10 NOVEMBRE 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président. M. P. Nicole, présenté à la dernière stance, est admis. Les ouvrages suivants, nouvellement reçus, sont distribués aux Rapporteurs : j 1° Bulletin de la Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen, 22 SemMMT870 EPL SeMLrO 7098 2° Bulletin de la Société de Géographie, août et septembre 1879; 3° The Canadian journal of the Canadian Institute. Vol. 1°, 1" partie, nouvelle série. M. Beaugrand fait un rapport verbal sur le Tome IV 1878, du Bulletin de la Société d'Études scientifiques de Lyon ; il a remarqué une note intéressante sur le terrain houiller de St-Etienne, par M. J. Fond. Le même membre lit un rapport sur le Bulletin de Juillet de la Société de Géographie. Ce Bulletin contient un important travail sur les chotts algé- riens, notamment sur le chott el Djerid, par le capitaine Roudaire. Après avoir décrit longuement ce chott, le capitaine Roudaire s'appuyant sur différentes données, admet qu’il a été autrefois en communication avec la Méditerranée, et que cette communication a été interrompue par un de ces soulèvements si fréquents sur la côte d'Afrique. M. Lécureur constate que l’opinion du capitaine Roudaire sur la communication ancienne des chotts avec la mer est en complète contradiction avec celle qu'avait émise M. Pomel, au Congrés du Havre en 1877. M. Pomel, en effet, avait soutenu que le Sahara n’est point, ainsi qu’on l'avait cru, un fond de mer desséché, et avait cherché à démontrer l'impossibilité de créer une mer intérieure, le niveau des chotts étant suivant lui plus élevée que celui de la Méditerranée. M. Beaugrand donne lecture d’un rapport sur une note de M. Hamy pour servir à l’ Anthropologie préhistorique de la Norman- die. — Dans cette note, M. Hamy décrit quatre crânes trouvés, deux au petit Quevilly, un à Fécamp et l’autre à Vaucelles. Le premier de ces crânes est du type dolichocéphale néolithique ; les trois autres appartiennent au type de Cro-magnon. RÉSUMÉ DES SÉANCES Vip M. Lionnet, reprenant la discussion commencée dans la séance du 11 septembre, repousse absolument lopinion émise par M. Beaugrand sur l’origine des silex de la craie Cénomanienne. Sans nier la présence dans ces silex de matières organiques, il s'élève contre l'expression trop exclusive qui attribue la colora- tion noire à la présence du charbon. Nos collègues MM. Bidard et Martin ont fait l’analyse de ces silex, et y ont en effet, trouve des traces de matières organiques. M. Martin dit qu'il y a aussi reconnu la présence du fer et donne à ce sujet le résultat de ses recherches. Ce que M. Lionnet tient à constater, c’est que la présence du carbone dans ces silex peut très bien s’expliquer sans avoir recours à une théorie qui lui donnerait pour point de départ l'existence de dépôts Tourbeux. Résumant rapidement les travaux de MM. Ebelmen, Marcel de Serres, Delanoue, Brongniart, Fournet, Gaudry et P. Hébert, qui se sont occupés de la question si inte- ressante de la formation des silex, il fait ressortir que c’est tou- jours dans des couches calcaires que se rencontrent les silex. C’est ce fait remarquable que M. P. Hébert a pris pour point de départ dans sa Théorie chimique de la Formation des Silex et des Meulières. On sait que l’acide carbonique précipite la silice qui entre dans la composition des silicates alcalins. On sait aussi que c’est à l’état de silicates alcalins et de carbonates que les eaux contiennent les produits de la dissolution des Roches. Les eléments calcaires sont maintenus en dissolution sous l'influence de l’acide carbonique en excès. Lorsque, par une cause quel- conque, il y a rupture d'équilibre, le carbonate de chaux se préci- pite sous forme de calcaire, et l’acide carbonique mis en liberté précipite la silice des silicates alcalins. Cette silice, mise ainsi en liberté, se condense et se forme bientôt, soit en bancs, soit en silex isolés. Lorsqu'il n’y a pas de condensation suffisante les particules siliceuses se précipitent en même temps que le calcaire et constituent les calcaires siliceux. Postérieurement aux dépôts siliceux ainsi formés, les eaux d'infiltration ont pu accroître les dépôts déjà constitués, et trans- former en silice les éléments primitifs des organismes enfermés dans la masse calcaire: En résumé l'analyse chimique, corroborée par l'observation géologique, semble indiquer la contemporanéité des couches cal- caires et des lits de silex ou des silex isolés, disposés suivant une direction sensiblement horizontale. 18 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE M. Lennier soumet les moulages des silex taillés présentés à la dernière séance, par M. Bidard. Ces moulages, destinés au Musée, ont été exécutés et peints par notre collègue, M. Noury, avec une rigoureuse exactitude. SÉANCE DU 14% DÉCEMBRE 1879 Présidence de M. G. LENNIER, Président, MM. Lennier et Lécureur présentent comme membre actif rési- dant, M. Pellot père, petit neveu du savant naturaliste havrais Lesueur. M. Le Président donne lecture d’une lettre de M. le Maire du Havre relative à la subvention attribuée à la Société parle Conseil municipal. Le Conseil d'administration a répondu à cette lettre en fournissant les documents demandés. Connaissance est aussi donnée d’une lettre de M. de Lapparent accompagnant les bois qu’il nous a gracieusement envoyés pour le livre de l'Exposition. Les publications suivantes, reçues depuis la dernière séance, sont réparties entre les Rapporteurs : 1° Bulletin de la Société libre d'Émulation du Commerce et de l'Industrie de la Seine-Inférieure, année 1878/79 ; 2° Société des Sciences et Arts agricoles et horticoles du Havre, 15° Bulletin; 3° Feuille des Jeunes Naturalistes, novembre 79. M. le Président, revenant sur la communication de M. Bidard faite à la séance d’octobre, s’étonne de la présence d’une poche de Kaolin dans les argiles de la briqueterie de Frileuse, et il ne comprend pas que le Kaolin, qui provient ordinairement de la décomposition des granits, se rencontre ainsi en plein quater- naire, dans une région où ne se trouve aucune roche granitique. MM. Lionnet et Bucaille sont du même avis ; cependant vu les connaissances spéciales de M. Bidard, on ne saurait admettre une complète erreur de sa part. Notre collègue sera prié de don- ner à la Société des explications complémentaires sur cette découverte. M. Prudhomme donne lecture d’une note sur un affeute- ment fossilifère de craie blanche récemment observé par lui et RÉSUMÈ DES SÉANCES 19 M. Savalle, à Sandouville (r). Ce serait le lamibeau de craie blan- che ie plus rapproché du Havre. Afin de prendre date, M. Bucaille signale un fait nouveau pour la géologie des environs de Rouen : D'une découverte récente, il résulte que la faille doit être reportée bien au-delà des points où on l'avait signalée jusqu'ici. En effet, dans la rue du Vieux Château, à St-Sever, à 100 m. de la mare du parc, dans la pro- prièté de M. Savalle, on a commencé à creuser un puits dans lequel, au-dessous de 4 m. de quaternaire, notre collègue a reconnu 2 m. de Portlandien avec ammonites biplex et trigonia Pellati. Les travaux ont été arrêtés sur un banc de calcaire pétri de coquilles. La faille de Rouen fait donc à cet endroit un cro- chet que les précédentes observations n'avaient pas permis de reconnaître. À 10 m. de ce point se trouve un puits creusé dans le Sénonien inférieur. A propos de l’intéressante communication de M. Bucaille, M. Lennier dit qu’on devrait trouver, sur la rive gauche de la Seine, une bande de sables Néocomiens, puisqu'on voitces mêmes sables sur la rive droite, et qu’on trouve à Saint-Sever du Portlan- dien et du Kimmeridge. M. Bucaille dit qu’il devrait en être ainsi, mais, qu'à sa connaissance, on n’a pastrouvé de sables Néoco- miens sur la rive gauche. M. Lennier signale encore ce fait qu'à Rouen on trouve du Portlandien, tandis qu’à Villequier, où existent maintenant de très beaux découverts, on n’en voit absolument aucune trace et queles sables crétacés reposent directement sur le Kimmeridge. SÉANCE DU 12 JANVIER 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. M. Pellot présenté à la dernière séance est admis. Il est procédé aux élections annuelles pour le renouvellement du Bureau. — Sont nommés : Président, MM. G. LENNIER ; Vice-Président, G. LIoNNET ; Secrétaire, À. LÉCUREUR ; Trésorier, G. Drouaux ; Archiviste, F. PRUDHOMME. (1) Voir plus loin. 20 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Le trésorier donne connaissance de l’état financier de la Société. L'Assemblée consultée approuve les comptes qui lui sont pré- sentés. M. Beaugrand dans son rapport sur le Bulletin de la Société de Géographie (octobre 1879), signale un article de M. J. Girard relatif aux causes d’affaissement des Pays-Bas et de leur envahissement par la mer. L’auteur ne croit pas à l’affaissement, et il attribue les causes d’envahissement de la mer aux bancs qui se forment parallèlement à la côte. M. Savalle cite à ce propos l’opinion d’Elie de Beaumont, qui, lui, croit à l’affaissement. Une discussion intéressante s’engage à ce sujet entre Messieurs Prudhomme, Savalle et Lennier. (Ce dernier rappelle que M. Durocher à traité avec développement cette question. M. le Président rappelle en termes émus la mort de notre regrette collègue Louis Roquencourt. Sur sa proposition il est décidé qu’une lettre de regrets sera adressée à sa veuve. M. Lionnet donne lecture d’une lettre de notre collègue M. Partridge qui a quitté le Havre, et qui, en raison de son éloi- gnement, regrette de ne plus pouvoir nous donner un concours aussi assidu que précédemment. SÉANCE DU 2 FÉVRIER 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. M. le Président donne connaissance d’une lettre de M. le Ministre de linstruction publique, relative à la réunion des Sociétés savantes qui aura lieu à la Sorbonne du 31 mars au 4 avril prochain. IL invite les membres de la Société qui vou- draient y prendre part à se faire inscrire. Lecture est également donnée d’une lettre de remerciements de madame veuve Roquencourt. M. Lennier annonce qu’il a reçu une lettre de M. le marquis de Saporta lui demandant des renseignements sur le gisement des végétaux fossiles de la Hève exposés en 1877, renseignements dont il a besoin pour achever le mémoire qu’il prépare pour notre livre sur l'Exposition (r). (1) Voir tome VI. RÉSUMÉ DES SÉANCES 21 M. Lionnet donne quelques détails sur l’état d'avancement de l’impression de cet ouvrage. M. Lennier rend compte d’une excursion qu’il a faite la veille à la Hève, en compagnie de MM. Lécureur et Noury. Un temps superbe a favorisé cette course, et il n’a fallu rien moins que le beau temps pour la rendre possible, car depuis la Hève jusqu’à Bléville il faut franchir presque constamment des éboulements récents fort difficiles, quelquefois même assez dangereux ; de nouveaux éboulements menacent encore sur différents points. Ils sont hâtés comme toujours par l'exploitation du pied de la falaise, qui est en somme en fort triste état. Une observation intéressante à marqué cette course : la débâcle de la Seine a arraché des rives de ce fleuve, une quantité énorme d'arbres, d’osiers, de pieux, d’herbes et de détritus detoute sorte, qui forment maintenant au pied des falaises un cordon littoral de plusieurs kilomètres de longueur, un ourlet végétal continu, déjà en partie enfoui dans le galet. Il y a à, dit M. Lennier, un véritable enseignement. Si, en effet, cette partie de notre littoral devait devenir un terrain solidifié, sa composition étrange pourrait être un problème insoluble pour les Géologues de lavenir. On y trouverait, en effet, des galets de la plage provenant de divers étages, des animaux marins, Liftorina Littorea, Mytilus edulis, etc., des Helix terrestres, des coquilles d’eau douce, entre autres la Nerilina fluviatilis. Combien de terrains anciens dont l'étude nous paraît si difficile n’ont pas eu d’autre origine puisque les mêmes causes ont toujours produit les mêmes effets ! SÉANCE DU 8 MARS 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Sur l'invitation du Président, MM. Lionnet et Lécureur donnent des détails sur l’état d’avancement du livre sur l’'Expo- sition. Les ouvrages reçus depuis la séance de février sont distribués aux Rapporteurs : 1° Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, n° 141; 22 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE 2o Le Pays de Bray, par M. de Lapparent, qui a autorisé la Société à faire usage de cet ouvrage pour les résumés à publier dans notre livre sur l'Exposition, et nous a également commu- niqué plusieurs bois de la carte géologique de France. L'assemblée décide, que des remerciements officiels seront adressés à M. de Lapparent, ainsi qu’à M. Hébert, pour la constante bienveillance dont ils ont fait preuve envers la Société. M. Savalle analyse verbalement le Bulletin de la Société des Sciences naturelles de Rouen, pour 1878/1879, ily a remarqué un mémoire sur la constitution géologique du département de la Seine-Inférieure, ainsi qu’une liste des fossiles de la côte Sainte- Catherine, par M. Boutillier, et une note de M. de Vesly, sur des objets préhistoriques et des fragments fossiles provenant des bal- lastières d’Amécourt (Eure), rive droite de l’Epte, et de Sergy, rive droite de l'Oise. Le même membre lit une note intéressante relative à l’affaisse- ment du sol des Pays-Bas (r). M. Lionnet donne ensuite lecture de l’éloge de Belgrand, pro- noncé par M. Bertrand dans la séance de l’Académiedes Sciences du 2 mars. SÉANCE DU 12 AVRIL 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. La Socièté a reçu depuis la dernière séance les ouvrages sui- vants qui sont distribués : 1° Bulletin de la Société Géologique du Nord, tome VI; 2° Bulletin de la Société de Géographie, janvier 1880 ; 3° Feuille des Jeunes Naturalistes. MM. Lionnet et Lécureur donnent des explications sur l’im- pression du livre sur PExposition. M. Lionnet ajoute qu’au grand regret du Comité de publication, il n’a pas été fait de résumé sur les terrains quaternaires ; l’état de la science géolo- gique, en ce qui concerne les terrains de cette époque, est si (1) Voir plus loin. RÉSUMÉ DES SÉANCES 23 peu avancé encore, les documents sont tellement confus et con- tradictoires, qu’il eut été imprudent,dangereux peut-être, en tout cas prématuré, de chercher à mettre d’accord dans une vue d’en- semble des éléments jusqu’à présent si disparates. M. Prudhomme analyse un travail de MM. Hébert et Munier Chalmas sur le tertiaire du Vicentin. Les savants auteurs de ce travail reconnaissent trois divisions dans ce terrain : des calcaires reposant sur la craie en très légère discordance et caractérisés par Numunulites Bolcensis ; des couches à Alveolines renfermant des fossiles du calcaire grossier de Paris, — c’est à la partie supérieure de cette division que se trouvent les couches à Poissons et à Végétaux de Monte-Bolca — ; enfin un système supérieur compose, à la base, des calcaires à Echinides et Nummulites surmontés de couches à fossiles d’eau saumätres alternant avec des lignites. Ces lignites correspondent aux couches tertiaires Les plus inférieures de Hongrie. M. Lionnet donne connaissance de notes préliminaires sur un travail important qu’il compte entreprendre sur la Zoolosie etla Géologie du cap de la Hève en établissant les rapports etles diffé- rences qui existent entre les animaux vivants et les animaux disparus. M. Biochet présente une note intéressante sur une pierre trouée, découverte par lui à Aïzier et dont il n’hésite pas à faire la partie essentielle d’un monument funéraire de l’époque mépalithique (1). M. Lécureur donne lecture d’une lettre très aimable de M. de Lapparent en réponse à celle que le Secrétaire lui avait écrite en conformité du vote émis dans la séance du 8 mars. SÉANCE DU 7 JUIN 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Le Président présente à l’Assemblée M. l'abbé Deshays, curé de Manneville-sur-Risle, qui assiste pour la première fois à nos séances. (1) Voir Bulletin, tome V. 24 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Il est donné connaissance des lettres reçues ; la plus importante émane de M. de Saporta et est relative à la publication de son mémoire. Les ouvrages suivants ont été reçus depuis la dernière séance : 1° Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, n° 140; 2° List of the members of the Geological Society; 3° Huit brochures de la U.S. Geological and Geographical Survey, Washington. Savoir : 1° Sketch of the origine and Progress of the Survey, par M. FE. W. Hayden; 2° The So-called two Oceans Pass, par le même ; 3° Catalogue of the publications of the Survey, par le même ; 4° Preliminary Report of the field Work, of the Survey, pour 1877; s° Le même, pour 1878; 6° The Relations of the Horizons of Extinct Vertebrata of Europe and North America, par M. E. D. Cope ; 7° Fossil Foresis of the volcanic tertiary formations of the Yellow sione national park, par W. H. Holmes ; 8° Jura trias section of Southeastern Idaho and Western Wyoming, par À. C. Peale ; 4° Annuaire des Musées Cantonaux, pour 1880. M. l'abbé Deshays présente à la Société une magnifique col- lection d’armes et d’outils en silex taillés ou polis, trouvés sur le territoire de sa paroisse et dans quelques autres communes de l’arrondissement de Pont-Audemer. M. l'abbé Deshays explique que toutes les pièces qui sont main- tenant en sa possession, et dont il n’a apporté que le plus petit nombre, ont été recueillies dans le limon jaune des plateaux (terre franche cultivée), et presque toujours à la surface. Les champs les plus fertiles occupent une ligne presque droite, qui s’étend suivant une direction à peuprès N.etS. de la chapelle de Bonne- bosc (territoire de Manneville) à l’église de Fourmetot. Dans cette contrée on trouve à la fois des silex taillés et des silex polis, des percuteurs, des éclats, deslissoirs et des grattoirs, des haches et des têtes de flèches. M. l’abbé Deshays a dès-à-présent en sa posses- sion 21 hachettes polies en silex ou en diorite. Il a chez lui en quantités considérables, des éclats parfaitement caractérisés, les uns montrant un commencement de retaille, les autres restés RÉSUMÉ DES SÉANCES 25 bruts, mais tous portant uniformément le bulbe de percussion qui ne permet de garder aucun doute sur leur origine et qui est en quelque sorte la marque ou la signature des ouvriers primitifs. La découverte simultanée des objets de l’âge de la pierre taillée et de ceux de la pierre polie dans les mêmes lieux et dans les mêmes conditions, porte M. l’abbé Deshays à voir dans la région qu’il explore avec tant de succès, non pas une station proprement dite,mais une contrée habitée pendant une très longue période par les peuplades primitives de la Gaule, qui ont laissé la trace de leur existence sur un même point par des instruments d’abord très grossiers, puis de plus en plus perfectionnés. Suivant toute vraisemblance, il n’y avait pas là une fabrique d’armes comme il en existait sur certains points; il y avait une tribu, ou plutôt un groupe de tribus qui fabriquaient leurs armes et leurs instru- ments, et qui les faisaient de mieux en mieux à mesure que s’établissait une civilisation relative. M. l'abbé Deshays a remarqué encore qu’on trouve en très grand nombre des armes et des outils en silex au voisinage des établissements Romains, assez communs dans la région, par exemple près du chemin Perrey (via Perrea), qui va de Pont- Audemer au Vieux-Port, et près d’un cimetière Gallo-Romain, signalé depuis longtemps dans le voisinäge immédiat de l’église de Manneville, mais qui n’a encore été que très incomplètement exploré. Il en conclut, ce qui d’ailleurs est conforme à la logique, en même temps qu’en rapport avec la tradition, que les conquérants ont dû s’établir dans les localités déjà occupées par la population aborigène , laquelle sans doute s'était fixée de temps immémo- rial dans les stations des tribus primitives, de sorte que probable- ment il n’y a pas eu d'interruption très importante dans la colo- nisation de cette contrée, depuis le jour où l’homme sauvage et nu en a pris possession. La découverte assez rare, il est vrai, d'objets de l’âge du bronze, tendrait encore à corroborer cette opinion. M. le Président remercie M. l’abbé Deshays de cette intéres- sante communication qui a occupé une grande partie de la séance et Le prie de vouloir bien préparer sur ce sujet une note qui sera insérée dans le Bulletin de la Société (1). (1) Voir plus loin. 26 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE SÉANCE DU 9 AOUT 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. La correspondance comprend : 1° Une lettre de M.le Ministre de l’Instruction publique, annonçant qu’une subvention de fr. 400 est attribuée à la Société. Il est ensuite donné lecture de la réponse du Secrétaire à M. le Ministre ; 2° Une lettre de la Société Académique Hispano Portuqaise de Toulouse, qui demande a échanger avec nous ses publications. Cette demande est acceptée et le Secrétaire est chargé de répondre en ce sens ; 3° Une lettre de M. A. Bell, Secrétaire-Adjoint au département de l’intérieur, à Washington, annonçant l’envoi, sur la demande de l’auteur M. le docteur F. V. Haydens, des 10° et 11° rapports annuels du U.S. Geological and Geographical Survey of the territories. M. le Président donne ensuite lecture d’une lettre adressée à la municipalité pour demander la continuation de la subvention que la ville du Havre accorde à la Socicté. Il est procédé ensuite à la distribution des publications reçues depuis la dernière séance, ce sont: 1° Bulletin de la Société Académique Hispano Portugaise de Tou- louse ; 2° Mémoires de la Société Académique des Sciences Arts et Belles Leitres du département de l'Aube, 3° série. Tome XVI ; 3° Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen. — Recueil des Coléoptères anormaux, par M. S. Mocquerys ; 4° Bulletin de la Société de Géographie, mars et avril ; s° Feuille des Jeunes Naturalistes ; 6° Bulletin de la Société d'Etudes Scientifiques d'Angers ; 7° Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, n° 142; 8 Description de deux nouveaux genres de Crinoides du Dévonien de la Mayenne (Extrait du Bulletin de la Société Géologique de France), par M. Œhlert ; | 9° La Position systématique des Brachiopodes, par M. Œhlert (Journal de Conchyliologie, avril 1880) ; 10° Sur les Fossiles Dévoniens de la Mayenne, par le même. 11° Rapport d'ensemble sur les Travaux de la Société Géologique de France, par M. de Lapparent. RÉSUMÉ DES SÉANCES 277 M. Beaugrand signale la découverte qu’il a faite d’un fruit de cycadée fossile entre Villers et Dives dans la partie supérieure des argiles oxfordiennes. Ce fruit est maintenant entre les mains de M. le marquis de Saporta. Aussitôt qu’il sera revenu, M. Beau- grand en fera l’objet d’une note pour la Société. Le même membre donne lecture d’une note sur une roche erratique trouvée dans les sables aptiens de la Hève, et dont il fait hommage à la collection de la Société (1). Il est rappelé à ce propos que ce n’est pas la première fois que des roches erratiques sont trouvées dans les sables de la Hève, M. Lennier possède plusieurs blocs de granit trouvés au même endroit, et M. Alleaume, maire de Ste-Adresse, possède une roche de grande dimension de même nature et de mème provenance. M. Beaugrand lit encore un extrait qui lui a été demandé pour le livre de l'Exposition, du rapport présenté à l’Institut, le 29 mes- sidor an XI, par Biot, sur la météorite de Laigle (2). M. Durand a lu un extrait de la Nature sur les Moulins des gla- ciers, excavations profondes et presque cylindriques qui se creu- sent fréquemment dans les glaces, sous certaines influences. Il se demande s’il n’y a pas là une certaine analogie avec la formation des puits de la craie. M. Beaugrand analyse une note de M. Cosson, publiée dans le Bulletin de la Société de Géographie (janvier 1880), relative au projet de création d’une mer intérieure en Algérie. Tout'en rendant hommage au commandant Roudaire, M. Cosson a toujours ëté et est encore un des adversaires de ce projet. M. Beaugrand signale ensuite dans le même recueil le projet de création d’une mer intérieure en Californie et dans le Colorado. M. Lionnet recommande à ses collègues l’étude des terrains quaternaires dont tout le monde s'occupe en ce moment. M. le Vice-Président annonce la mort d’un savant modeste autant que distingué, M. Besnou, d’Avranches, qui a rendu de grands services à la Société à l’occasion de l'Exposition de 1877. Non content de nous offrir les échantillons nombreux et intéres- sants qu’il avait exposés. M. Besnou nous a envoyé, sur les tangues, un travail important qui est inséré dans le livre de l'Exposition (3). (1) Voir plus loin. (2) Voir Bulletin, tome VI. (3) Voir Bulletin, tome VI, 28 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE SÉANCE DU 12 SEPTEMBRE 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président, MM. Lionnet et Prudhomme présentent comme membre actif résidant M. Duret, il sera statué sur cette présentation à la pro- chaine séance. Les ouvrages suivants ont été reçus par la Société: 1° Bulletin de la Société de Géographie, novembre 1879 ; 2° Feuille des Jeunes Naturalistes. M. Beaugrand, empêché d’assister à la séance, annonce par lettre la mort d’un de nos collègues M. Paul Petit. Le Secrétaire est chargé d’écrire au nom de la Société à la famille de notre regretté collègue. M. Lionnet rend compte de l’excursion que la Société a faite sous la direction de MM. Denize, Vacossin et Lennier, à Bolbec et à Lillebonne. Il signale les affleurements de la faille reconnus à Bolbec, et les découverts du tertiaire dans les tranchées du che- min de fer en construction. Il décrit aussi l’excursion archéolo- gique faite à Lillebonne, dans le but d’examiner les ruines romaines découvertes par notre collègue M. Denize, dans le manoir d’Alincourt. Il est décidé qu’une autre excursion sera faite le 20 septembre, à Fécamp, afin d’étudier l'extrémité N. O. de la faille. M. Prudhomme donne lecture d’un rapport sur le tome VI des Annales de la Socièté Géologique du Nord. Parmi les nombreux travaux que contient ce recueil, M. Prudhomme signale particulièrement ceux relatifs aux argiles à silex et aux limons quaternaires. M. Ch. Barrois, dans une étude sur le tertiaire des Ardennes, constate qu’il existe des argiles à silex inférieures au tertiaire (Vervins), et d’autres supérieures aux sables landéniens (argiles à silex et à meulières des Ardennes). Discutant ensuite les diverses théories émises sur leur origine, et particulièrement par M. de Lapparent, qui admet l’origine éruptive des argiles rouges de ce terrain, M. Barrois croit que, si cette dernière théorie peut s’appliquer aux argiles à silex supé- rieures, elle ne saurait expliquer l’origine de l’argile de Vervins. Il se rallie à l'explication proposée par M. Gosselet dans un travail inséré dans le même bulletin. Suivant M. Gosselet la surface de la craie à silex a dû, avant le dépôt des terrains tertiaires, former un sol continental qui a été RÉSUMÉ DES SÉANCES 29 corrodé par les agents atmosphériques ; il s’y est produit des cavités et des parties saillantes ; les silex déchaussés se sont accumulés principalement dans les cavités ; puis est venu le dépôt des sables et leur émersion. C’est alors, qu’à commencé la forma- tion de l'argile à silex. Les eaux pluviales chargées d’acide carbo- nique ont pénétré jusqu’à la craie à travers-le sable etles silex, se dirigeant vers les parties concaves où les silex plus abondants for- maient un drainage naturel; elles ont agrandi et agrandissent peut-être encore les poches de la craie. Des notes de MM. Ladrière, Gosselet, Ortlieb, Challoneix, Rutot et Van-den-Broek, donnent des coupes nombreuses des limons quaternaires qui recouvrent les plateaux du nord de la France. SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. M. Duret présenté à la dernière séance est admis. Le Secrétaire donne lecture d’une lettre de notre collègue M. Martin, maintenant professeur au Lycée d'Alger. Notre col- lègue regrette que le peu de temps qu’il a passé parmi nous ne lui ait pas permis de prendre une part plus active à nos séances ; il continuera d’appartenir à la Société à titre de Correspondant. M. Martin fait en même temps hommage à la Bibliothèque de plusieurs volumes. Les ouvrages suivants ont été reçus depuis la dernière séance : 1° Bulletin de la Société de Géographie, juillet 1880 ; 2° Quarterly Journal de la Société Géologique de Londres, n° 143. M. le Président présente à l’Assemblée le premier exemplaire du compte-rendu de l'Exposition Géologique et Paléontologique de 1877. Après avoir dit ce que ce livre, auquel des circonstances particulières l’ont empêché de donner la part de collaboration qu'il eût voulu, a coûté d’efforts aux auteurs d’abord, et ensuite à ceux de nos collègues qui ont bien voulu se charger du travail matériel, il félicite et remercie en particulier MM. Lionnet et 4 Lécureur, qui se sont spécialement dévoués à cette œuvre 30 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE . considérable. M. le Président expose ensuite les mérites de ce livre, ainsi que ses côtés faibles. « C’est dit-il, en terminant, « une œuvre incomplète sans doute, mais elle résume plus « complètement que tout ce qui a été fait jusqu'ici, l’état de « la science géologique à notre époque, pour ce qui concerne la « Normandie. Ce livre est surtout un instrument de travail ; c’est « un point de départ solide, et à ce titre, j'ai confiance qu'il « restera. » L’exemplaire présenté est ensuite examiné avec intérêt par les Sociétaires présents. C’est un volume de plus de 900 pages, orné de gravures superbes, cartes, planches, etc. L'Assemblée est unanime à se féliciter de voir cette œuvre importante menée à bonne fin. M. Beaugrand signale dans le Rapport d'ensemble sur les travaux de la Sociéte Géologique de France, par M. de Lapparent, Le passage suivant, à l’adresse de la Société Géologique de Normandie : «.....A ce point de vue, comme à beaucoup d’autres, nous « nous féliciterons d’avoir vu naître depuis peu des Sociètés « Géologiques Régionales comme celles de Normandie et du « Nord, dont les travaux sont déjà justement estimés. Par ces « institutions et par la part qu’ils peuvent prendre au fonction- « nement des stations agroromiques, nos confrères de province « sont à même de réaliser dans toute son étendue le vœu que « nos fondateurs avaient formé, de faire concourir la Géologie au « développement de la prospérité nationale. » M. Lennier demande à M. Denize quelques renseignements sur les fouilles archéologiques qu’il a entreprises à Lillebonne. M. Denize à trouvé les vestiges superposés de deux monuments bien distincts. Le premier, dans lequel le tuf avait été largement employé et dont certaines parties étaient encore intactes, n’a pas cependant livré le secret de sa destination ni celui de son âge. Le second, plus récent, incontestablement Romain, était exclusivement à usage de bains. On trouve des hypocaustes pour chaque série de salles. Toutes les murailles intérieures étaient couvertes de marbres. La tour semi-circulaire que la Société a reconnue dans sa dernière excursion, était polygonale à l’inté- rieur, et on y a trouvé une quarantaine de variétés de marbres. M. Savalle rend compte de ses dernières excursions à la Hève et aux environs du Havre. Il a trouvé une tête d’Ichtyosaure dont il présente certaines parties. À Sandouville et au Haut-du-Vent, RÉSUMÉ DES SÉANCES 31 dans la craie blanche, il n’a rien trouvé; à Octeville et à Cau- ville, la falaise est mal dégagée, cependant notre collègue y a trouvé, dans les argiles Kimméridiennes, une vertèbre de Plésio- saure. Il y a quelques découverts des mêmes argiles à 150 mètres du Béquet à la Hève. Partout les valleuses sont bonnes en ce moment. M. Lennier dit qu’il est allé passer deux*jours à Viliers lors des fêtes de la Toussaint; il n’y a rien trouvé : les argiles oxfor- diennes étaient recouvertes par le sable. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1880 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Les ouvrages suivants, reçus depuis la dernière séance, sont distribués : 1° Bulletin de la Société de Géographie, Juin et Août; 2° Bulletin de la Société d'Études des Sciences naturelles de Rouen, deuxième semestre 1880; 3° Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de Lyon, an- née 1879; 4° Feuille des Jeunes Natwralistes ; 5° Bulletin de la Société d'Histoire naturelle de Reims, deuxième et troisième année, avec atlas. M. Lionnet donne lecture du compte-rendu de l’excursion faite par la Société le 26 Septembre à Fécamp, pour l’examen de la faille. M. Savalle annonce qu'il est allé récemment à la Hève afin de se rendre compte si les sables à fondeurs qu’on exploite au sommet sont au-dessus ou au-dessous des argiles à silex. Géné- ralement ils leur sont supérieures, mais quelquefois aussi on les trouve à la partie inférieure de ces argiles. Ces sables contiennent quelques fossiles, principalement des polypiers provenant de la craie Sénonienne ou Turonienne. M. Savalle croit que ces sables très calcareux proviennent de la décomposition chimique des étages sous-jacents. M. Lennier dit qu’il ne faut pas oublier que toutle système qu’on 32 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE est convenu d’appeler argiles à silex, présente des traces de boule- versements énormes, et que ces argiles, dans beaucoup de cas, sont composées en grande partie de débris du tertiaire remanié. M. Savalle présente à l’Assemblée un os sternal de tortue, provenant des argiles supérieures du Kimmeridge, de Cauville. Le même membre dépose sur le bureau, une collection de silex taillés bien caractérisés par leur patine ainsi que par le bulbe de percussion, et provenant de la plaine de Frileuse, à ce que prétend du moins l’ouvrier de qui les tient notre collègue: ils auraient été trouvés à 30 centimètres de profondeur. Trois de ces échantillons sont en silex noir à surfaces blanchies, semblables aux spécimens de même provenance que la Société a eue pré- cedemment sous les yeux. Ils paraissent bien être du pays. Mais les autres échantillons, d’un blond roux plus accentué, ne parais- sent pas appartenir aux silex de la région, ce qui fait douter à M. Lennier, que l’ouvrier de qui les tient M. Savalle, les ait, comme il le dit, trouvés à Frileuse. RAPPORNMSURNEIES "ARCHIVES DE LA COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE (TomEs 1, 2 et 3), par F. PRUDHOMME. En 1864, lorsque les troupes françaises occupaient le Mexique, une Commission, sous la présidence de M. Duruy, alors Ministre de l’Instruction Publique, fut chargée de réunirles documents scien- tifiques concernant ce pays et d’en faire faire l’exploration. Cette Commission, divisée en quatre Comités : des Sciences Naturelles et Médicales, des Sciences Physiques et Chimiques, d'Histoire Linguistique, Archéologie et d'Économie politique, nomma des voyageurs pour explorer le pays. À ce titre, M. Guillemin-Tarayre fut chargé d’étudier les gisements métallifères, et MM. Dollfus (1), de Montserrat, et Pavie, des études géologiques. Des officiers du corps expéditionnaire, des savants mexicains et américains firent aussi parvenir de nombreux documents. Les travaux de la Commission ont été consignés dans deux recueils : Les Annales, renfermant les travaux d'ensemble résultant des explorations, et les Archives, contenant avec les procès-verbaux des Séances, le résumé ou l'indication des travaux insérés aux Annales ainsi que d’autres travaux plus spéciaux et qui ne ren- traient pas dans le plan général. C’est ce dernier ouvrage que je suis chargé d’analyser. J'ai pris comme base de ce travail un rapport d'ensemble de M. Guillemin sur les gisements métalli- fères en y rattachant les travaux spéciaux au fur-à-mesure de la description du pays. Isthme de Panama. — M. Guillemin commença son exploration par la Nouvelle-Californie, et se rendit à San-Francisco par lIsthme de Panama. Il relève, en passant, l'erreur que repro- (1) Nous devons ici rendre hommage à notre concitoyen Aug. Dollfus, prématurément enlevé à la science et à ses amis. Les fatigues de cette expé- dition altérèrent sa santé : il revint en France épuisé et mourut victime de son dévouement à la science. (La Soctélé). 34 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Al duisent encore la plupart de nos atlas en traçänt à travers ‘’Isthme et jusqu’au milieu des plateaux mexicains, une arète montagneuse formant le prolongement de la Cordillière des Andes. La branche occidentale de cette Cordillière, qui longe l'Océan Pacifique, s’abaisse dans le Nord de la Colombie pour s’interrompre brusquement au ravin de Raspadura. Sur ce point, d’après M. de Humboldt, en 1788 un canal permettait aux barques du pays de passer du Rio Atrato dans le Rio San-Juan de Noanama, et par conséquent, de communiquer d’une mer à l’autre. À partir de ce point jusqu’à l’Isthme, on ne voit que de faibles arêtes dont les points culminants ne vont pas au-delà de 80 m. L’Isthme lui-même ne présente que des collines que le chemin de fer traverse à la cote de 79 m. Amérique Centrale. — L'Amérique Centrale, quoique monta- gneuse et volcanique, forme un système complètement indé- pendant. Loin de former la continuation de la Cordillière, cette partie centrale de l’Amérique n’est qu’une masse hétérogène où se rencontrent tous les terrains, depuis les Roches cristallines et les Porphyres métalliféres du Guatemala, les Calcaires carboni- fères et le nouveau Grès rouge de Panama et de Veragua jusqu’aux formations récentes de l’Isthme vers la mer des Antilles, qui reposent sur des lits du Trias à peine émergés. Les volcans du Guatemala, de San-Salvador et de Costa-Rica, disposés en une bande orientée N.-N.-0., ont réuni ces diverses formations. Il est probable qu’aux époques anciennes l’Isthme n'existait pas et que les massifs dont il se compose actuellement formaient une chaîne d’iles semblables aux Antilles. Mexique. — Le système montagneux du Mexique est formé par deux chaînes côtières parallèles : la Sierra Madre du golfe à VE., la Sierra Madre du Pacifique à lO., ces deux chaînes formant les rebords d’un vaste plateau limité au Sud par une ligne de volcans barrant l’Isthme de Tehuantepec et orientée E.-O. La Sierra du Pacifique, dans sa partie N. est accompagnée d’une chaîne parallèle, la Sierra Nevada, dont les prolongements forment la presqu’ile de Californie. Les plateaux mexicains entre les deux chaînes sont sil- lonnés de chaînons isolés, assez rapprochés dans la partie Sud, mais plus rares dans le Nord, et affectant trois directions différentes : COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE 35 N.-S., E.-O. et N.-O.-S.-E. Cette dernière orientation est la plus fréquente ; elle est parallèle à celle des chaînes cotières. Les pla- teaux, très élevés au Sud, aux environs de Mexico où ils atteignent l'altitude de 2,275 m., s’abaissent vers le Nord pour se confondre avec les plaines américaines. Cette disposition en chaînonsisolés, caractère distinctif des soulèvements nord-américains, rend les communications faciles, et l’on voit des attelages de bœufs lour- dement chargés traverser sans difculté tout le Mexique, depuis Mexico jusqu’au Texas et même jusqu’au grand Lac Salé. Versant occidental. — Les Etats de Californie et de Nevada, qui politiquement, appartiennent aux Etats-Unis, font partie géologi- quement des terres mexicaines. Traversés par la Sierra Nevada, dont la Californie occupe le Versant occidental, ces deux Etats présentent de nombreux gisements métallifères. Le Nevada, situé sur le plateau, forme un bassin distinct et renferme des dépôts de sel gemme appartenant au Trias, qui constitue le sous-sol. Les roches cristallines qui l’entourent contiennent de nombreux filons d'argent, principalement à l’état de sulfure. On y rencontre aussi quelques gisements d’or. La Californie présente sur le versant de la Sierra et dans les bassins du Sacramento et du San-Joaquim, des alluvions auri- fères qui datent de différentes époques : quelques-unes sont antérieures à la formation des trachytes, d’autres contemporaines, et même postérieures à celle des laves et des basaltes. Plusieurs de ces alluvions, enrichies par des érosions modernes, ont donne de riches récoltes. La Sierra renferme des minerais de cuivre et d'argent, et une petite chaîne cotière, les Coast Ranges, des gise- ments de Cinabre, ces derniers situés au milieu de roches créta- cées auxquelles les serpentines et les trapps ont fait subir un métamorphisme marqué. On rencontre aussi des lignites dans la chaine cotière ; les uns, de l’époque crétacée, comparables à de la houille légère, d’autres tertiaires (miocènes), sont restés imparfaits. Les trois Etats de Sonora, Sinaloa et Jalisco, forment du N. au S. le versant occidental des plateaux mexicains. Ils renferment tous trois de nombreux gisements métallifères. Celui de Sonora, de même que la presqu’ile de Californie qui lui fait face, offre de de nombreuses traces de l’action volcanique. La presqu’ile, dont les gisements sont à peine exploités, est formée d’une série de chaînes granitiques soulevant des schistes et des micaschistes qui 3 36 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE renferment des filons aurifères. Les roches volcaniques y sont nombreuses et variées ; des tufs stratifiés se remarquentsur certains points des côtes ; on rencontre aussi des sources magnésiennes et séléniteuses. Dans la Sonora, une grande partie du versant de la Sierra Madre est composée d’un calcaire gris qui appartient probable- ment à l’époque carbonifère. Cette formation, qui paraît avoir une grande puissance, se remarque sur près de 2,000 kilom. de lon- gueur sur les deux versants de la Sierra Madre du Pacifique ; on y rencontre de l’Anthracite. Sur ce terrain reposent des Calcaires, des Schistes et des Marnes probablement crétacés (avec ceratites, trigonies, cidaris, mais pas d’ammonites). La Craie paraît faire défaut dans cette région. Les soulèvements ont été déterminés par la Syénite et le Granit qui sont très développés dans la chaine, et mélangés de roches volcaniques. Ces roches cristallines sont pénétrées de nombreux filons métallifères qui se croisent en tous sens ; quelques filons ont été réduits à l’état natif par des actions postérieures. Ces mêmes actions ont introduit dans des filons d'argent, des sulfures de métaux communs. L'Etat de Sinaloa, qui faisait autrefois partie de la Sonora, n’a pu être exploré, à cause de l’hostilité des habitants. Celui de Jalisco est recouvert sur presque tout son territoire par de puissants dépôts volcaniques, Tufs et Conglomérats, Porphyres, Basaltes et Obsidiennes, qui recouvrent la formation sédimentaire. Celle-ci, visible seulement par lambeaux et mise à nu dans les profonds ravins, ou Barrancas qui se rencontrent si souvent sur les deux versants, est formée de Schistes et de Cal- caires gris. Les gisements métallifères sont moins nombreux que dans la Sonora, et se trouvent généralement dans les Porphyres. Ce sont des Minerais sulfurés ou des Pyrites arsenicales. Les Barrancas, dont il vient d’être question, qui sont très nom- breuses sur les deux versants des plateaux, sont de profondes fissures causées par les soulèvements et dans lesquelles les fleuves se sont creusé depuis un lit. Les parois verticales de ces fissures atteignent parfois 1,000 m. de hauteur. -Plateaux. — Les Etats qui occupent la partie Nord des Plateaux : Chihuahua et Durango, renferment peu de gisements métallifères. Cependant, dans ce dernier Etat, on en trouve quelques-uns, tant dans les Porphyres que dans des roches méta- morphiques de chaux carbonatée. COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE gl Dans le Zacatecas, des Schistes argileux métamorphosés et passant au Porphyre sous l'influence des Diorites, renferment de nombreux filons. | Autour de San-Luis Potosi, les couches salines triasiques du sous-sol ont donné naissance à des lagunes où le sel est exploité pour les besoins de l’amalgamation. Les riches mines des environs se trouvent dans des Porphyres cristallins qui ont soulevé les calcaires. Sur plusieurs points les filons pénètrent dans ceux-ci ; sur d’autres points ils se sont glissés entre les calcaires triasiques et des grès sous-jacents. Une partie de ces filons a été ancien- nement exploitée par les Chichimèques; des traces deces anciennes exploitations ont été reconnues. Plus au Sud, à Guanajato, le terrain est composé, comme à Zacatecas, de Zchistes que le contact des Diorites et des Syénites d’une Sierra soulevée sur une étendue de 30 lieues, a métamorphosés en Porphyres verdâtres terreux. De même aussi qu’à Zacatecas, un conglomérat de Grès feldspathique, uni au Por- -phyre terreux recouvre le terrain métallifère. Cet étage quelque- fois d’une puissance de $o m. a été pris, par erreur, par M. de Humboldt, pour le- représentant du Vieux Grés rouge. C’est au contraire le plus nouveau de tous les terrains du Mexique, dont il recouvre presque tous les plateaux. C’est au Sud de Guanajato que s’étend en ellipse, complète- ment entouré de montagnes porphyriques, le bassin impropre- ment appelé Vallée de Mexico. Ce bassin, rapidement décrit par M. Guillemin, fait l’objet d’un travail étendu de MM. Dollfus, de Montserrat et Pavie, inseré dans les Annales et dont un rapport de M. Sainte-Claire Deville, retrace les principaux traits. Les montagnes qui entourent ce bassin sont composées de Porphyres métamorphiques variés, souvent cristallisés, avec cristaux de feldspath. Les roches qui leur ont donné naissance, sont, d’après M. Guillemin, autant qu’en en peut conclure de leur position, des Marnes crétacées. : Ce système est accompagne de roches volcaniques, et le bassin renferme un certain nombre de petits volcans qui ont rejeté des laves et des scories; on y rencontre aussi des sources thermales. Les eaux de ce bassin se réunissent dans trois lacs étages, au pied desquels Mexico est bâti. Le sol est composé de tufs lacus- tres, évidemment déposés lorsque la Vallée tout entière ne for- mait qu’un seul lac. MM. Dollfus et de Montserrat ont aussi décrit en détail deux 38 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE : petits districts miniers des environs : l’un celui de Suliepec où, parmi des chaînes porphyriques, se trouve une sierra grani- tique (le Granit est fort rare sur les plateaux mexicains). Des Schistes appuyés sur ces Granits sont recouverts sur plusieurs points par des Calcaires. Les minerais, galènes ou sulfures, sont généralement dans les Schistes,et cessent au contact des Porphyres, Les vallées et les plateaux sont recouverts d’un lit quelquefois très épais de conglomérats de cailloux roulés ou de tufs blanchîtres, renfermant des débris de planorbes et de lymnées. L’autre district de Zomalahuacan, près de Perote, sur le versant oriental du pla- teau est situé à la naissance d’une profonde barranca, dont les parois d’une hauteur verticale de 1,000 m. sont écartées de 100 m. ; le fond est occupé par un torrent. Les deux falaises, d’une composition identique, présentent au sommet des Porphyres, d’abord nettement stratifiés, puisprismatiques, quelquefois traver- sés par des bancs verticaux de Calcaires cristallins. Ces Porphyres reposent sur des Calcaires probablement jurassiques, qui forment le fond de la Barranca. Les filons, soit dans le Porphyre, soit das le Calcaire, sont des galènes argentifères et des sulfures de cuivre. On 2 recueilli dans le torrent de beaux échantillons de Malachite, mais on en ignore le gisement. Versant oriental. —— Le versant oriental du plateau, le long de la Sierra Madre du Golfe, moins riche en gisements métallifères n’a pas été exploré par M. Guillemin, mais les coupes prises par MM. Dollfus et de Montserrat, de la route de Vera-Cruz à Mexico, et de plusieurs routes transversales, ainsi qu’une étude très com- plète sur la Géologie des environs de Perote, et de Jalapa, des mêmes voyageurs, ce dernier travail seulement indiqué dans les Archives, donnent des renseignements sur la partie Sud de ce versant. Après les dunes qui bordent la côte de Vera-Cruz, paraissent des sables et près fins, probablement Tertiaires ; ces dépôts cou- vrent la plus grande partie des terres chaudes. Au-delà, à Chi- quihite et à Cordova, se montrent des Calcaires blancs crétacés, puis à Orizaba, des Calcaires gris bleuâtres jurassiques. L’absence de fossiles dans ces-dépôts ne permet pas de leur assigner une date certaine. Au-deli d’Orizaba, au défilé de Cumbres, la route gravit le rebord du plateau, et traverse d’abord des Calcaires noirs et des Grès grisâtres, qui rappellent le Calcaire carbonifère d’Eu- rope ; on y rencontre des fragments d’arbres fossiles ; puis vien- COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE 39 nent des grauwackes probablement siluriennes (1). Des Tufs et des Conglomérats trachytiques recouvrent ces roches, en divers endroits. Au-delà des Cumbres, le plateau de Puebla jusqu'aux montagnes Porphyriques de Mexico, est recouvert d’un tuf blanc diluvien ; ce plateau est bordé au Nord par une chaîne de collines calcaires, que M. Guillemin considère comme crétacées. Les coupes transversales relevées par MM. Dollfus et de Mont- serrat, permettent de retrouver ces terrains dans les falaises des barrancas traversées, mais les puissants dépôts volcaniques, si nombreux au Mexique, les recouvrent presque partout, n’en laissant voir que des lambeaux ; ce qui rend très difhcile l’étude géologique du pays. Un Mémoire de M. J. Marcou, sur la Géologie des frontières entre le Mexique et les Etats-Unis, décrit tout le bassin du Rio- del-Norte, dans le Texas et le Mexique. Le littoral est une plaine basse et marécageuse, renfermant des débris de coquilles vivantes. Au-delà de Matamoros, en s’élevant dansle pays, on voitle diluvium quaternaire, renfermant de nombreux ossements des genres Mas- todon, Elephas, Equus, et recouvrant le plus souvent le Tertiaire. Les plateaux sont formés d’un Calcaire gris blanchâtre avec fos- siles crétacés. Cette formation s’étend depuis le Texas jusqu'aux Etats Mexicains de Nuevo-Leon et Chihuahua. Sur les rives du Rio-del-Norte se voient des filons de Trapp, traversant les assises. Vers le confluent du Rio-Pecos, on a reconnu des indices du juras- sique, qui probablement existe sur l’autre rive du Rio-del-Norte. La Sierra de Guadalupe, qui s'étend entre le Rio-Pecos et El Paso, est formée de roches granitiques sur lesquelles reposent des Cal- gaires gris bleuâtres avec spirifers, qui sont probablement carboni- fères, puis d’autres Calcaires magnésiens, des Gypses, Marnes rouges et irisées, dolomies et grès bigarrés du Trias. A l'Ouest d’el Paso, un vaste plateau traversé par de nombreuses Sierras est composé de nouveau grès rouge. Les parties centrales de ces Sierras, sont des granits, des Syénites et des Porphyres. Gisements métallifères. — Les terrains métallifères sont répandus sur les 4/5° du pays, et comprennent un vaste parallélogramme de 2,000 kilomètres de long sur 600 de large, traversé par la Sierra du Pacifique. L'autre versant des plateaux paraît moins bien partagé sous ce rapport. (1) M. Guillemin rapporte tous ces calcaires à la formation crétacée. , 40 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Les filons sont répartis dans tous les terrains, aussi bien dans les terrains sédimentaires que dans les roches cristallines. Ils sont souvent enclavés dans les porphyres métamorphiques qui forment au Mexique, par leur extrème variété, toute une classe de roches. Outre les filons argentifères, on rencontre aussi des gisements de Cinabre, d’abondantes mines de cuivre, du fer exploité par la méthode Catalane. Les procédés d’exploitation des minerais argentiféres sont encore peu avancés. Les galènes sont grillées ; les sulfures, qui sont les plus répandus, sont réduits par deux procélés d’amalga- mation, à froid et à chaud. Dans le premier procédé, le minerai, d’abord concassé en présence de l’eau et réduit en une boue fine que l’on fait sécher jusqu’à ce qu’elle acquière la consistance du mortier, est additionné de 2 à 4 o/o de sel ordinaire que l’on incorpore au moyen d’un pietinement effectué autrefois par des Indiens et maintenant par des mules. On y incorpore de même façon le Magistral ; c’est un mélange de pyrite de feret de cuivre grillé, et qui renferme dans cet état 8 à 10 oo de sulfate de cui- vre. Il est ajouté à la masse dans la proportion de 1 à 2 o/o. On laisse agir avant de verser le mercure qui s'empare des molécules d'argent abandonnées à l’état naissant par les réactions qui s’opè- rent ; on lave alors le mélange dans une cuve traversée par un courant d’eau qui enlève les matières terreuses. L’amalgame recueilli est lavé, filtré et distillé, et l'argent qu’on en retire est ensuite fondu. Ce procédé est très commode pour les minerais déjà décom- posés ; mais certains minerais doivent être préalablement grillés. Dans le procédé d’amalgamation à chaud, le minerai, concassé comme dans l’autre méthode,est enrichi par le lavage, puis chauffé dans une cuveavec addition de sel et de mercure; après 24 heures, on ajoute du mercure pour précipiter l’amalgame, puis on lave et on distille. Ce dernier procédé est surtout employé dans les mines de San-Luis Potosi. Cette façon de traiter les minerais laisse subir une perte de 25 à 30 o/o sur leur teneur réelle. On a essayé,mais sans succès,de la remplacer par la méthode Saxonne, mais celle-ci, trop dispendieuse, n’a pas donné de bons résultats. Les procédés actuellement usités ont cet avantage qu’ils ne néces- sitent pas de surveillance. Certains minerais riches de basse Californie sont expédiés tels quels en Europe, et sont traités en Saxe dans l’usine Freyberg. COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE AI Outre les gisements métalliques, le Mexique renferme encore des dépôts d’Asphaltes, de Lignite, d’Anthracite et de Charbon. Le soufre est exploité dans le cratère du Popocatepetl. Le marbre est rare, mais les Calcaires sont nombreux dans les deux Sierras. Des Gypses Saccharoïdes se trouvent dans le voisinage des chaînes,et en relation avec les sources thermales. On trouve des dépôts de Kaolin très anciennement exploités. Les porphyres et les basaltes sont très répandus. Sources thermales. — Des sources thermales se rencontrent sur plusieurs points; celles des environs de Puebla, examinées par MM. Dollfus, de Montserrat et Pavie, forment une ceinture autour de la ville, et sont dûes, sans doute, à l’action volcanique du Popocatepetl et des centres d’éruption qui s’y rattachent. Quoique rapprochées, elles présentent entre elles des différences assez notables de température et de composition, différences dues probablement aux terrains traversés ou à la profondeur diffé- rente des points d’émergence. On peut croire qu’elles pro- viennent d'un seul et vaste bassin souterrain ; elles contiennent toutes beaucoup d’acide carbonique, peu de soufre, quelques traces d'hydrogène sulfuré libre et beaucoup de bicarbonate de soude en dissolution. Les unes, très limpides, contiennent nota- blement plus de soufre et d’acide carbonique ; les autres, présen- tant une coloration bleue, dûe au soufre, ont dû traverser des couches souterraines où l'hydrogène sulfuré a été soumis à une décomposition partielle. Le soufre libre, entrainé par l’eau, se dé- pose au bord des sources. Elles sont employées dans le traite- ment des maladies de peau. Un puits artésien a été foré à Mexico. La coupe en est donnée par M. le capitaine du génie Soyer. Le puits traverse les couches lacustres de la Vallée pour atteindre aux profondeurs de 84 et 89 mètres, deux nappes aquifères. Volcans. — Le bord méridional du plateau mexicain est, comme il est dit plus haut, indiqué par une ligne de Volcans: ceux de Tuxtla, d’Orizaba, le Popocatepetl, le Nevado de Toluca, le Jorullo, le plus récent de tous, le Tancitaro et le Colima. MM. Dollfus et de Montserrat ont visité trois de ces Volcans : le Popocatepetl, le Nevado de Toluca, le Colima, et en donnent une description détaillée. Situé à 20 lieues S.-E. de Mexico, le Popocatepetl se trouve à 42 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE l'intersection de deux chaînes montagneuses. C’est un pic de por- phyre s’élevant jusqu’à 3,130 m. au-dessus de la plaine et à 5,410 m. au-dessus du niveau de la mer. Ses pentes inférieures sont formées d’un conglomérat ponceux auquel succède un trachyte très dur et cristallin, puis le porphyre se montre à nu ; près du sommet, il est recouvert par des couches d’un sable noir violacé, très pulvérulent, provenant des déjections du volcan. Le cratère circulaire, d’un diamètre de 8 à 900 m. est dominé par deux pointes dont l’une est plus élevée que l’autre de 150 m. Il présente trois zones ; la première, d’une déclivité de 65° aboutit à un mur vertical de 70 m. de hauteur, au bas duquel se trouve un deuxième plan incliné de 25° à 30° ; la profondeur totale est de 250 m. Un treuil de bois avec bigue surplombant permet de descendre au pied du mur vertical. Cet appareil sert aux Indiens pour l’extrac- tion du soufre qu'ils retirent du cratère. Les explorateurs n’ont pu,à cause du mauvais temps,descendre dansle cratère inférieur. Ils y ont remarqué des fumerolles disposées suivant le diamètre. On dit qu’au fond du cratère se trouve une excavation remplie d’une eau acide et chlorurée. La roche constitutive du cratère est un trachyte compacte riche en cristaux de feldspath striés, surmonté de couches de basalte. La pente supérieure est cou- verte de scories violacées, très poreuses, avec oxyde de fer, paraissant provenir de Porphyres calcinés. Le Nevado de Toluca, volcan éteint à $ lieues à l'O. de cette ville, en ferme la vallée par ses contreforts. Ses premières pentes sont recouvertes d’un sable noir volcanique, analogue à celui du Popocatepetl. Une profonde Barranca permet d’y reconnaître des couches alternées de Ponces et de Sables. Le cône proprement dit est entouré de petites éminences, il a une altitude de 4,578 m. et est d’un accès facile. Le cratère forme une ellipse irrégulière dont le grand diamètre a 1,431 m. et le petit 595. La profondeur varie de 300 à 25 mètres seulement, à cause de l’inégale hauteur des parois. Au centre du cratère est un massif trachytique long de 150 m. et haut de 175 m. Un petit lac profond de 10 m. occupe le quart du cratère ; son eau limpide et froide, est sans saveur minérale ; elle ne provient pas du volcan, c’est de Peau de pluie ou provenant de la fonte des neiges. Le cône est d’un porphyre trachytique très compacte et très dur. Le volcan doit, tout proba- blement, son origine à une éruption porphyro-trachytique accom- pagnée d’un dégagement considérable de gaz et de vapeurs ; il a COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE 43 aussi rejeté beaucoup de cendres et de ponces qu’on retrouve sur ses flancs, mais l’action ignée n’a pas dû être très violente, car on ne voit pas traces de scories. Si l’on compare le Nevado aux volcans à lacs de l’Eïfel, il faudrait supposer très ancienne l’action éruptive, car on ne retrouve sur les bords du lac du Nevado aucune trace de l’action des gaz. Auprès de Jalapa, au Cerro de Macuiltepec, ancien volcan, il existe aussi trois cratères devenus des lacs. Le volcan de Colima, à ro lieues de Colima, département de Jalisco, non loin du Pacifique est d’un accès très difficile, à cause de nombreuses barrancas très profondes qui en coupent la base ; il faut d’abord escalader le pic de Nieve ; on voit alors le volcan, au milieu d’un cirque de rochers. C’est un cône régulier, isolé, entièrement composé de scories rougeûtres et de cendres. Sa base peut avoir un diamètre de 1,800 m. Ses pentes abruptes en rendent l'ascension pénible ; les débris qui le composent ont appartenu à des roches porphyriques (de rares échantillons ren- ferment des cristaux d’un bleu indigo, qui paraissent être d'oxyde de fer.) Un peu au-dessous du sommet, une légère dépression entourée d’un petit rempart de roches porphyriques, présente tous les caractères d’un évent éteint depuis peu ; la roche est. fissurée et porte Îles traces d’une action gazeuse récente. Le cratère, à l'altitude de 3,886 m., est aussi régulier que le cône ; c’est une cuvette profonde de 125 à 250 m. suivant la hauteur des bords; il a environ $oo m. de diamètre, et $o m. au fond; les flancs sont couverts de scories et de roches porphyriques noi- râtres, un peu vitrifiées. Les fumerolles sont nombreuses ; la température des gaz qui en sortent est de 76° à 80°; ils sont en majeure partie composés de vapeur d’eau et d’acide carbonique, avec une très faible odeur d’acide sulfureux. Le mouvement qui a donné naissance à ce cône, a relevé brusquement les masses porphyriques qui forment tout le système montagneux de Ja région, et a agrandi les nombreuses barrancas qui entourent le volcan. Placé sur le dernier rebord du plateau mexicain, il s’est élevé en en brisant brusquement les contreforts ; il n’a pas donné de coulées de laves, mais autour de lui, de petits cônes en ont donné d'énormes. Le Pic de Nieve, qu’on considérait comme un volcan jumeau, n'est qu’un pic rocheux très élevé, d’un porphyre cristallin ana- logue à celui du Nevado de Toluca. Cette série de volcans est disposée sur une même ligne, de 44 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Est à l'Ouest, et indique une grande fissure dont la régularité est un des traits les plus remarquables de la géologie du Mexique. Les Volcans de l'Amérique centrale qui font l’objet d’un travail des mêmes savants, seulement indiqué dans les Archives, sont aussi soulevés sur une ligne dont le prolongement coupe celle-ci sous un angle de 45°. La presqu’ile de Yucatan, laissée en dehors de l'exploration de M. Guillemin, n’a pas non plus été vue par MM. Dollfus et de Montserrat, mais l'abbé Brasseur de Bourbourg, qui l’a explorée sous le rapport archéologique, dit quelques mots de sa compo- sition géologique. Elle forme un triangle dont les côtés s’étendent du Nord au Sud pour rejoindre les montagnes du Peten. C’est une vaste formation calcaire, mouvementée de quelques collines dans le Sud. Il y a peu d’eau à la surface ; celle-ci s’est accu- mulée dans des cavernes souterraines, où les habitants vont puiser. Les anciens habitants du Yucatan avaient remédié’ à cet inconvé- nient en construisant de nombreuses citernes, et leurs travaux hydrauliques sont de tous points remarquables. Explorations archéologiques. — M. l'abbé Brasseur de Bourbourg, M. Guillemin-Tarayre et le général Doutrelaine ont inséré des mémoires sur l’histoire et l'archéologie mexicaines, ainsi que la description de plusieurs ruines. M. Guillemin a fouillé les restes de sept anciennes cités du nou- veau Mexique, marquant les étapes des invasions des Toltèques ax VITE siècle et des Chichimèques au XIII. Il fait ressortir les rapports que certaines habitations présentent avec les habitations asiatiques ; il décrit les ustensiles trouvés dans les tombeaux, des flèches en silex et des haches en pierre dure. On a trouvé, dans un de ces tombeaux, un bloc de fer météorique de 50 centim. de diamètre, enveloppé de bandelettes, comme les cadavres inhumés dans la même localité. Peut-être les Indiens célé- brèrent-ils sa chute comme la mort d’un dieu inconnu auquel ils donnèrent la sépulture. Une idée superstitieuse a dû s’attacher à ces blocs de fer météorique si nombreux dans PEtat de Chihuahua ; peut-être cette idée a-t-elle retardé usage du fer dans ces contrées. L'Obsidienne, si employée par les anciens Mexicains pour la fabrication de leurs armes et d’un grand nombre d’ornements, COMMISSION SCIENTIFIQUE DU MEXIQUE 45 paraît avoir été exclusivement extraite des mines du Cerro de Na- rajas, dans une chaîne trachytique, à la limite Nord du Bassin de Mexico. L’obsidienne s’y trouve à une petite profondeur,sous une croûte de tufs trachytiques ; la masse forme une grande ampoule fissurée dans tous les sens, de sorte que les blocs ne sont jamais bien considérables. Les anciens mineurs paraissent avoir rejeté les morceaux voisins de la surface, dont les propriètés vitreuses avaient été altérées par les agents atmosphériques. Cette exploitation a dû être très longue : commencée dès l’époque préhistorique, elle durait encore à l’époque de la con- quête. , Sur plusieurs points du Mexique on a trouvé, soit dans des cavernes, soit dans des alluvions, des armes en silex, en jade, en lydienne et en diorite, associées avec des ossements d’animaux éteints. Un certain nombre de ces armes sont figurées dans le mé- moire de M. Guillemin. Quoique l’obsidienne ait probablement été employée à la même époque, cette pierre a surtout servi dans des temps plus rapprochés et a même été plus tard exclusivement employée. Il ne paraît pas qu’on ait trouvé au Mexique des restes de l’homme préhistorique. OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES AUX ANTILLES Par MM, Dorrrus, DE MonTsERRAT et PAVIE Les Petites-Antilles, ou Iles-du-Vent, forment une bande longue et étroite, de 600 kilom. de long sur 180 kilom. de large. Elles sont aussi bien déterminées géologiquement que géographi- quement, et s'étendent jusqu’à Trinidad qui n’est qu’un lambeau détaché de la terre ferme. — Les Iles ont toutes l'orientation de la chaine, elles ont une forme elliptique dont le grand axe suit la la direction générale, et est dessiné par une chaine montagneuse qui forme arète, lançant quelquefois des chainons rayonnants. On y remarque deux catégories de roches. L’arète montagneuse est formée de roches éruptives, trachytes, dolérites et porphyres, laves trachytiques ou doléritiques. Vers le rivage existe une cein- ture s’élevant jusqu’à l'altitude de 250 m. d’un conglomérat argi- leux de cailloux roulés. De nombreux volcans, dont plusieurs sont encore en activité, se trouvent toujours dans la chaîne prin- cipale qui suit l’axe général de l’ensemble. Cette disposition peut s’expliquer de la manière suivante : une 46 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE vaste fente ouverte dans la direction de l’archipel a donné naissance à une série de volcans, dont les déjections, précipitées dans la mer, ont formé autour de chaque îlot, une ceinture sous marine. Ces îlots émergés sont devenus les îles actuelles. Sur certains points, à cette formation toute volcanique, sont venus s’ajouter des récifs madréporiques. À la Guadeloupe entre autres, tandis que la Basse- terre rentre dans le type général, la Grande-terre est constituée par une roche calcaire de formation madréporique, formation qui, du reste, se continue sur certains points du rivage. L'Ile de Trinidad a, au contraire, tous les caractères d’une for- mation sédimentaire, — elle est traversée par trois chaînes monta- gneuses : celle du Nord, a soulevé des terrains anciens, schistes talqueux, calcaires compacts ou cristallins rappelant le silurien de Gembloux, maisque l’absence de fossiles ne permetpas de classer. L’arète centrale est formée de grès blancs durs, avec couches sableuses, que les géologues Anglais supposent néocomiens ; ils ont de grands rapports avec les Lower Green Sands. La troisième arète est formée de grès et de sables argileux ter- tiaires bitumineux: entre ces trois arètes sont des bassins argileux. C’est au pied de cette troisième chaîne qu’est situé le lac de Brai, à 2 kilom. de la plage et à sr m. d’altitude. Le bitume se montre aussi sous l’eau de la mer jusqu’à la Côte ferme. A l'extrémité Sud de l’Ile, se trouvent des salses o1 Volcans de boue, l’un d’eux rejette une boue chlorurée, ce qui laisserait sup- poser qu’il est en communication avec la mer; faut-il admettre que ce phénomène est dû à l’action chimique des eaux de la mer sur les couches de lignites, ou n’y voir qu’une manifestation de l’action volcanique ? c’est ce que les auteurs n’osent pas décider. L'AFFAISSEMENT DU SOL DES PAYS-BAS Analyse, par E. SAVALLE. MESSIEURS, À propos du compte rendu verbal fait par notre collègue M. Beaugrand, de la note de M. Jules Girard, insérée au Bulletin de la Société de Géographie (Octobre 1879), et intitulée L’Affais- sement du sol des Pays-Bas, j'ai crû devoir faire remarquer que auteur était en contradiction avec l'opinion professée par Elie de Beaumont dans ses Leçons de Géologie Pratique au Collège de France (années 1843-1844). Sur l'invitation de M. le Président, j'ai pris connaissance de la note de M. Girard et jai relu l’ouvrage d’Elie de Beaumont. C’est le résultat de cette étude comparative, que je vais vous soumettre en quelques mots. Suivant M. Girard, l’envahissement par la mer du Territoire des Pays-Bas doit être attribué à la rupture de l’isthme qui reliait jadis la Grande-Bretagne au continent européen. « À un mo- « ment inconnu, l’isthme se rompit sous les efforts des marées « qui venaient battre des deux côtes. Il en résulta une pertur- « bation dans le niveau de la mer; les eaux de la Manche « refoulèrent celles de la mer du Nord; du conflit dans le mode « de propagation des deux ondes il se produisit un gonflement « de la nappe d’eau et par suite des courants qui ravagent les côtes « du continent et des Iles Britanniques, (p. 380.)» Comment expliquer alors, ce fait géologique étant antérieur à la période historique, les passages suivants du même auteur : « D’après les « Commentaires de César, 1! y a deux mille aus le sol des Pays- « Bas était couvert de bois et de maraïs ; il n’y a plus de forêts, et « maintenant l’on navigue sur cette partie du territoire que les « Romains appelaient la forêt sans pitié. — Les envahisse- « ments successifs qui déterminèrent la transformation de Zuy- « derzée en mer intérieure commencèrent vers les premières années « du XIII< siècle. — Ces quelques exemples indiquent bien 48 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE que le niveau de la mer est supérieur dans certains endroits à celui du sol, mais ils ne sont pas une preuve d’affaissement, car on ne peut considérer le niveau de la mer comme invariable aux abords d’un cstuaire tourmenté par les marées et de côtes boule- versées par des tempêtes qui produisent des bancs mobiles. » — Ce que César et le panégyriste Eumène nous rapportent de l’état des marées en Flandre, étant peu différent de l’état actuel, semble indiquer que l’affaissement a été nul depuis dix-neuf siècles. » Et enfin « Dans l'estuaire de la Tamise on a retrouvé des « « « « « digues attribuées aux Romains et l’on a constaté que depuis le XIV® siècle le flux avait avancé d’une heure à Londres; ce qui fait élever le niveau de l’eau de 0"30 ; ce fait peut être attribué autant au déplacement des bancs de sable qu'aux travaux d’endiguement. Sur la côte des Pays-Bas, le Casteilum Britannicum du temps de Drusus, à l’ancienne bouche du Rhin, à Katwyk, s'était conservé intact dans son emplacement depuis le VIE siècle jusqu'au X° siècle; mais il fut plus tard submergé comme toutes les villes environnantes. » Si « aux témoi- gnages partiellement favorables de laffaissement lent, ‘on peut opposer d’autres preuves contradictoires indiquant la fixité du sol depuis les âges historiques » pourquoi ajouter plus bas: l’expérience a démontré qu'après les endiguements le niveau des polders, c’est-à-dire des terres entourées de digues, parais- sait baisser encore. » Après ces extraits, je me bornerai à citer le jugement porté par le grand géologue normand sur cette question de l’affaisse- ment lent du sol de la Hollande, voici ces pages où tous ces faits sont résumés d’une façon si lumineuse, si magistrale : « Je vous « « « « « « « « « « ai fait connaître (1) les faits qui portent à croire en effet que lé cordon littoral à un peu reculé vers l’intérieur des terres. Le plus remarquable est l’existence des ruines romaines appe- lées het Huis te Britten, en avant de la plage actuelle, près de Katwyk. Mais la découverte de ces restes antiques, en montrant que la plage a reculé, fournit aussi des indices sur la cause de ce phénomène et de plusieurs autres qui s’y rattachent ; car il paraît que le sol sur lequel ces bâtiments ont été établis, est aujourd’hui plus bas relativement au niveau de la mer que lors- qu’ils ont été construits. (1) Pages 315 et suivantes. « L’AFFAISSEMENT DU SOL DES PAYS-BAS 49 « La position de ces restes antiques à une certaine profondeur au-dessous de la surface de la mer, pourrait également résulter de l’élévation du niveau de la mer ou de l’abaissement du sol. Cet abaissement pourrait lui-même ne s’être fait sentir que sur une très petite étendue. Dans une contrée formée comme celle-ci par les alluvions de la mer et des rivières, la mollesse du terrain pourrait sufhre à elle seule pour permettre aux parties qui avaient un poids considérable à supporter, de s’enfoncer plus ou moins profondément dans le cours d’un grand nombre de siècles. Les restes de constructions romaines qu’on a aperçus, ne sont peut-être que les fondations les plus profondes de l'édifice, qui peuvent avoir été posées à une profondeur presque aussi grande que celle à laquelle on les a vues, et qui, restées isolées par suite de l'entrainement du sol qui les entou- rait, se seraient seulement enfoncées d’une petite quantité par l’effet même de cetisolement. La profondeur de la mer est elle-même peu considérable en cet endroit (1). « Il est cependant difficile d’expliquer toutes les circonstances du phénomène sans admettre que l’ensemble de la côte s’est légèrement abaisse par rapport au niveau de la mer ; et la ques- tion est de savoir comment se produit ce phénomène, de savoir si ce sol, formé de matières tourbeuses, d’argile, de sable, a été simplement comprimé par le poids des dunes, qui augmente sans cesse depuis que les dunes s’accumulent sur ces côtes, ou si c’est le sol entier de la Hollande qui s’abaisse par rapport au niveau de la mer. Au premier abord une pareille conclusion paraît très hardie ; mais vous verrez plus tard que d’autres observations montrent que le niveau de la terre et le niveau de la mer sont sujets à varier l’un par rapport à l’autre ; qu’il y a des parties de la surface du globe où le sol s’élève réellement par rapport à la mer, et d’autres où il s'enfonce. « On conçoit qu’il ne peut être question ici que d’un enfon- cement d’une extrême lenteur. Tous les cours d’eau quitombent dans la mer du Nord, depuis le Pas-de-Calais jusqu’à l’Elbe, sont, près de leurs embouchures, bordés de digues qui rendraient tout enfoncement un peu rapide sensible à un grand nombre d’yeux fortement intéressés à l’apercevoir. « Mais, s’il est certain qu’il n’y a eu aucunenfoncement géné- ral rapide, il est également évident qu’en admettant un enfon- (1) Von Hoff, ouvrage cité, tome 1er page 348. SO SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE cement progressif d’une extrème lenteur, on expliquerait d’une manière aussi simple que naturelle non seulement la présence de constructions romaines sous la mer, en avant du cordonlitto- ral, mais encore les autres phénomènes qui nous ont occupés. Alors, en effet, on concevrait facilement que le sol s'étant enfoncé par degrés insensibles, la mer de Harlem se soit conti- nuellement étendue ; fait certain et dont l’agrandissement Yétangs formés d’abord par lexploitation de la tourbe ne fournit qu’une explication précaire. La formation plus ancienne du lac “Flevo ”? a peut être été un premier fait du même genre. On concevrait de même que les marées à l’extérieur dominant de plus en plus les terrains bas protégés par le cordon littoral, il ait fini par survenir des irruptions de la mer, telles que celles qui ont formé le Zuyderzée, les lagunes du Dollart et de la Jahde, et quelques-uns des bras de mer de la Zéelande. La submersion du Biezbosch ne prouverait pas alors que les digues qui le protégeaient aient été construites dans l’origine contrai- rement aux règles de la prudence. S’il y a eu un enfoncement graduel du sol, cela a suffi pour que les digues aient fini par être débordées et coupées. L'existence des dépôts tourbeux qui forment un des traits caractéristiques du sol de la Hollande, s'explique aussi très naturellement dans la même supposition. Lorsque le Zuyderzée n’existait pas encore, lorsque la mer n'avait pas encore fait irruption dans le lac ‘‘Flevo”, qui n’était, comme aujourd’hui la mer de Harlem, qu’un grand amas d’eau douce, les bords de ce lac remplissaient les condi- tions qui, comme nous le verrons plus tard, sont les plus favo- rables à la production de la tourbe. Il paraît qu'il en a été de mème, très anciennement sans doute, des environs de Rotter- dam, et, ce qui est plus surprenant encore, du territoire de la Zéelande. Comme la tourbe n’est pas une production marine et ne se produit pas sous le régime des incursions périodiques de la mer, l'existence de la tourbe dans une grande partie des Pays-Bas suppose l’ancienne existence d’un régime dans lequel le cordon littoral les protégait plus efficacement que de nos jours. Les dépôts tourbeux si répandus dans la Hollande et la Zélande, et recouverts par le limon des rivières, montrent clairement que les marées n’y ont pas toujours eu leurs entrées aussi libres qu’aujourd’hui. Leur pénétration a été le prélude éloigné de ces grandes invasions de la mer qui ont produit le Zuyderzée, le Dollart, la Jahde, etc. L’ensemble de ces phéno- « L'AFFAISSEMENT DU SOL DES PAYS-BAS SI mènes semble indiquer clairement que cette portion de la sur- face du globe s’enfonce par degrés très lents. « Voilà ce que nous présentent les Pays-Bas: ils doivent leur existence, comme terre habitable, à l'appareil littoral que la mer a élevé sur ses bords, comme sa propre limite, sur une lon- gueur de 506 kilomètres. » Ces principes si clairement exposés par Elie de Beaumont, ne sont pas applicables seulement à l’ori- gine de la Hollande ; la formation du territoire, du sol havrais étant la conséquence des mêmes lois, j’ai crû devoir vous donner en entier ce remarquable passage des Leçons de Géologie pra- tique. Je reprends ma citation. « La Hollande, en particulier, « ainsi que Deluc l'avait parfaitement observé, est garantie du côté de la ser par des dunes que les flots et les vents ont for- mées en soulevant le sable, et enfermée par des digues, tant du côté du Zuyderzée au Nord-Ouest, que du côté de la Meuse et de son golfe au Sud-Ouest. Une partie du sol de cette enceinte est aujourd’hui de 15 pieds ($ mètres) plus bas que les plus basses marées. (1) Il a fallu aux Bataves un art mer- veilleux pour s’en faire une patrie ; mais cet art lui-même aurait été impuissant s’il avait cherché à s’exercer ailleurs que sur un sol circonscrit par la mer, par les dunes, qui lui doivent leur existence. » — Enfin notre auteur termine le résumé de ses observations sur l’origine du territoire des Pays-Bas par ces lignes très nettes et très concluantes. « On parle ordinairement de ç « AR « la Hollande comme d’une contrée formée absolument par les atterrissements ; mais ce n’est là qu’une partie de la vérité. La Hollande existe à la faveur des dunes, et même sous la protec- tion de cet abri les atterrissements n’avaient produit qu’un terrain bas, qni aurait été naturellement une vaste tourbière, et plus tard une espèce de grande lagune envahie par toutes les grandes marées. C’est sur ce terrain que l’industrie humaine s’est exercée On en a conquis une partie sur la mer. Les changements les plus mémorables qu’il asubis viennent des incursions de la mer, qui ont détruit ce que les atterrissements, et ce que les hommes avaient modifié. Ce phénomène qui tend à indiquer un affaissement du sol, estici bien plus surprenant que ceux produits par les atterrissements des rivières, » — surtout dans les estuaires — « où le phénomène de l’enfoncement graduel du (1) Deluc, Journal de Physique, tome XLI, page 235 (1792). 52 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE « sol ne vient pas compliquer ceux qui résultent de l’action de la « mer et des rivières. » Les réflexions d'ensemble et de détail que le sujet dont nous vous entretenons en ce moment, Messieurs, peut nous suggérer sur l’origine du sol havrais, des tourbières de la Harelle, du Marais-Vernier, et notamment dela tourbiére de Criquebœuf depuis longtemps déjà sujette aux érosions de la mer, trou- veront plus naturellement qu'ici place dans le travail que nous avons entrepris sur l’embouchure de la Seine. HAvRE, le 8 Mars 1880. NOTE SUR L'ÉTAT DE LA FALAISE DU HAVRE A BLÉVILLE Pendant l'hiver de 1878-1879 Par E. SAVALLE. MESSIEURS, À ceux de nos collègues qui fréquentent la Hève et se livrent à la recherche des fossiles, l’été surtout, j’ai pensé qu’il serait peut- ètre agréable d’avoir quelques renseignements sur l’état actuel de la Falaise du Havre à Bléville, c’est-à-dire : 1° sur la marche des basses falaises pendant l’hiver écoulé, qui aura été si rude et si long; 2° sur le bon ou mauvais état des valeuses ; 3° sur les éboulements des couches de la craie Cénomanienne ou du gault; 4° sur les blocs qui, entraînés au bord de la mer sont lavés par la vague et offrent un attrait particulier aux chercheurs de fossiles ; s° enfin sur les couches inférieures ou Kimméridgiennes que les coups de vent mettent parfois à découvert. Sous le Havre et, en partie, à Sainte-Adresse, partout où exis- tent les épis, les sables et les galets recouvrent le Kimmeridge, qui est là, d'ordinaire, si riche en fossiles avec test. Depuis quelques années déjà d’ailleurs, rien n’est modifié à cet égard. A la pointe ÉTAT DES FALAISES 53 du Becquet, seulement, le banc coquillier se montre parfois, trop rarement, sur une très faible étendue. Sous Notre-Dame-des- Flots, la carrière Alleaume ouverte dans les sables Néocomiens, est aujourd’hui presque totalement remblayée. À partir du Becquet jusqu'aux Signaux d’Octeville, les basses falaises se sont partout affaissées et s’affaissent sans cesse : elles ont glissé de plusieurs mètres le long de la muraille, de dix à vingt mètres même à quelques endroits. Aussi leur aspect est-il à ce point changé qu’il n’est plus possible de suivre les sentiers, fréquentés à mer haute: tous sont coupés, interrompus. L'accès des valeuses est devenu très difhcile. Des quatre qui avaient eu jusqu’à ce jour notre préférence, la valeuse Dubosc, la valeuse Duplessy, la Guilleuse et la valeuse des Signaux d’Octe- ville, aucune n’offre de sécurité ; toutes sont compromises plus ou moins, et menacées par l’affaissement, le glissement continu des basses falaises, en même temps que les argiles d'en haut les obstruent dans leur partie supérieure; et, jusqu’à ce que ces argiles soient déblayées, jusqu’à ce que le temps se soit remis au beau, au sec, je ne conseille à aucun de vous de s’y aventurer. Au bord de la mer, les vagues ont lavé et mis à jour de beaux blocs de gaultet de gaize, amenés là par le glissement des basses falaises. Sous ce rapport, trois endroits sont surtout à visiter : 1° au fond d’Ignauval ; 2° au bas et en aval de la valeuse Duplessy; - 3° à quelques pas en amont de la Guilleuse. Il sera bon aussi de surveiller sur ce dernier point, de même qu’au Becquet, certains blocs de sables ferrugineux fossilifères. Les blocs Cénomaniens, éboulés anciennement ou récemment et lavés par la mer, méritent moins l'attention et tous d’ailleurs sont moins importants que les blocs de gaize et de gault que je viens de signaler. Je crois en effet, qu’ils fourniront peu de fossiles aux excursionnistes de l’été prochain. Entre les deux fonds d'Ignauval, il est vrai, la falaise menace toujours en haut (niveau à scaphites) ; je ne mentionnerais pourtant pas ce point s’il n’était le plus dangereux : il vaut mieux passer rapidement devant, les yeux en haut, que de s’y arrêter. Si les hivers précédents, l'étage Kimmeridgien a abondamment garni nos sacs, cette année il est demeuré caché sous les sables et les galets qu'ont retenus les vents d’aval si persistants, et demeuré si bien caché que pas un ptérocère n’est trouvable actuellement du Havre à Octeville ; cela est grave, n'est-ce pas ! Le temps des cidaris n’est plus! s4 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Et puis les ouvriers qui extraient l’argile à mer basse n’ont fait, non plus, cet hiver, aucune trouvaille, de si mince importance qu’elle fût. Nous n'avons plus d’espoir que dans les grandes marées de Mars et d'Avril et dans les coups de vent du N.-O. ; sinon, l’année sera peu féconde. Si cette note vous offre quelque intérêt, je pourrai compléter les renseignements qu’elle contient, aussitôt que l’hiver aura ter- miné son œuvre. Je pense qu’il serait bon que tous les ans fût dressé, d’après les articles publiés par la presse locale et d’après les excursions des membres de la Société, un Etat, un Résumé des modifications subies par nos stations géologiques du Havre à Etretat, de Honfleur à Villers, d'Orcher à Tancarville, de sorte que plus tard, après une certaine série d'années de constatations, il fût facile de suivre ces changements, de les comparer, d’en étu- dier les causes, d’en dégager les conséquences et les enseigne- ments possibles. NOTES SUR LES ÉBOULEMENTS ET LES VALEUSES Pendant l'hiver 1878-1879 Dans la dernière séance, j'ai esquissé l’état des valeuses et l'aspect de la Falaise depuis lé Havre jusqu’à la limite de Bléville, c’est-à-dire jusqu'aux signaux d’Octeville. Pendant le mois de Mars dernier j’ai continué mes excursions, à partir de ce point jusqu’à Cauville. Jai à vous signaler aujourd’hui, Messieurs, d’abord un glisse- ment considérable de la basse falaise sous le four à chaux Léver, à Bléville, glissement qui a eu lieu dans le courant de la dernière semaine de février. Le gault nous fournira à coup sûr de nom- breuses trouvailles cet été à cet endroit. La valeuse Duplessy et celle des signaux n’ont pas subi de nouvelles détériorations ; réparées, elles offrent dés-à-present, quelque sécurité. Sous Octeville, en aval du hameau du Tôt, la valeuse dite des ÉBOULEMENTS ET VALEUSES 55” pêcheurs a été endommagée par suite du tassement des terrains éboulés pendant les deux années précédentes. — Au Croquet, un éboulement assez considérable a poussé vers la mer de nom- breux blocs de Poudingues de l’étage Aptien et de craie Cénoma- nienne. J'y ai déjà recueilli plusieurs bons fossiles parmi les Pou- dingues lavés par la mer. Il va sans dire que l’éboulement a emporté avec lui la valeuse par laquelle nous sommes descendus l’année dernière et qui aboutissait à la Moulière. Mais un peu au sud a déjà été faite récemment une valeuse qui promet d’être plus tard une des plus belles, des plus sûres, de la Falaise. Telle qu’elle est, c’est la seule où l’on puisse se hasarder en ce moment sur le terri- toire d'Octeville, où il n’y a pas longtemps encore on en comp- tait cinq très fréquentées et très solides. Cette nouvelle valeuse aboutit en haut à cent mètres environ au nord du four à chaux Couillard. À partir du Croquet, les argiles supérieures du Kimméridge, si riches en ammonites, en aptychus, en dents et os de sauriens, sont actuellement recouvertes par le galet ou les sables éboulés. Jusqu’à la rue d'Equeville, peu de fossiles à glaner au bord dela mer. Le banc du large, si fossilifère, est aussi complètement ensablé. Passé la pointe d’Octexille et la grande cailloutière ouverte dans le diluvium, c’est-à-dire entre le Cramolet et Cauville, je puis vous signaler trois bonnes valeuses. La valeuse de la source de Cauville, dont l'accès était si facile, est coupée depuis le com- mencement de Décembre et ne sera, m'a-t-on dit, remise en état qu'aux beaux jours. Avis aux géologues qui s’attarderaient en bas. Sous Equeville, jai relevé cet hiver une coupe de PAptien et jai recueilli dans les sables Néocomiens plusieurs fossiles d’espèces identiques à celles que j'ai trouvées à Sainte-Adresse et à Bléville dans cet étage. Il y a, à cetendroit, une carrière à surveiller. D’Equeville à Cauville, les basses falaises ont peu changé d'aspect, l'hiver a causé beaucoup moins de dommages qu’à la Hève et sous Bléville et Octeville ; elles ont à peine bougé, sauf à la cascade même de Cauville, où l’abondance des sources à entrainé les couches du gault et de la gaize, couches qui sont, vous le savez, si fossilifères. Une nouvelle source, tombant des couches moyennes de l’Étage cénomanien, fait, sur le versant méridionale du vallon, pendant à la magnifique cascade du versant Nord. Cette double inondation permanente explique la démolition, pendant les derniers mois, de la valeuse et les riches éboulis de cette station. 56 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Sur la côte du Calvados, de Trouville à Houlgate, l’ensable- ment est général. Plusieurs nouvelles carrières sont ouvertes dans le corallien sur le mont Canisy. Sous Villers, le sable, poussé très haut par la mer, et les argiles éboulées rendent les recherches à peu près impossibles. Il faudrait un changement de vent pour balayer le sable qui recouvre le banc du large. A l’endroit classique, sous Beuzeval, où l’on trouvait en abondance les ammonites, les bélemnites, etc., le sable, toujours le sable, cache le banc à peu près totalement. Pendant les deux mois écoulés, Avril et Mai, la continuation des gros temps a favorisé la destruction de nos Falaises, et deux éboulements, dont le dernier surtout a été d’une importance exceptionnelle, extraordinaire, ont eu lieu, l’un au fond d’Ignau- val, au Nord du manège Duboscq, et l’autre à Cauville, à deux cents mètres environ au Sud de la Source. L’éboulement du fond d’Ignauval (9 Avril), depuis longtemps prévu a poussé vers la mer d'énormes blocs de gaize et de craie cénomanienne. Le second de ces éboulements, à Cauville, a chassé devant lui les basses falaises qui ont glissé vers le large en opérant un effet très remarquable de soulèvement de galets. Il a été étudié lors de l'avant dernière excursion de la Société et les Journaux du Havre ont inséré un compte rendu détaillé de cette excursion en même temps que du nouvel aspect que présente à présent la falaise à cette station. « Sur une étendue d’environ 200 mètres en lon- « gueur, le cordon littoral formé de galets et les roches couvertes « d'animaux marins, qui se trouvent au niveau moyen du balan- « cement des marées, ont été poussés, relevés jusqu’à environ « sept mètres au dessus des plus hautes mers connues. On voit à « cette altitude d'énormes rochers auxquels sont encore attachées « des balanes, des patelles, des littorines, etc., et des plantes « marines qui ont déjà été desséchées par le soleil. » Rien de nouveau ne s’est produit cet hiver dans les falaises d'Orcher. Lors de l’excursion de la Société à Cauville, deux valeuses, dont une très bonne surtout, ainsi qu’un éboulement des couches supérieures de la falaise, ont été reconnus sur le territoire d’Heu- queville. En ce moment-ci deux points sont menaçants: l’un à Sainte- ÉBOULEMENTS ET VALEUSES 57 Adresse sous les Signaux mêmes de la Hève que l’on est en train de reporter un peu plus en arrière, et l’autre à Bléville, au four Bocquet. Tel est, Messieurs, le résumé des ravages causés par l’hiver dernier dans nos falaises. Les blocs éboulés appartiennent généralement aux zônes supérieures, et l'abondance de ces blocs, en même temps que celle des sables et des galets, rend presque vaine, pour longtemps, la recherche des fossiles dans l’étage Kimméridgien. La fréquence de ces éboulements doit être attribuée à la nature des roches qui constituent notre falaise, à la durée si prolongée de l’hiver, et aussi, dans certains cas, à l’enlèvement des argiles, du calcaire hydraulique et du sable. L'importance de ces dernières causes ne saurait être exagérée pourtant puisqu’à Cauville et à Octeville où ont eu lieu les deux éboulements les plus considé- rables de la saison, cette extraction n’a pas lieu. Aux géologues qui ont été empêchés cet hiver de fréquenter la falaise pour quelque cause que se soit, et qui comptent bien profi- ter des beaux jours de cet été, je rappellerai que lorsqu'ils seront à la recherche d’une valeuse pour descendre à la mer, presque toujours au point où une valeuse fréquentée, c’est-à-dire sûre, débouche dans la plaine, existe une hutte en gazon édifiée là par les douaniers pour faciliter leur surveillance, et que lorsque ces mêmes géologues, à la fin de leur excursion, cher- cheront en bas l’aboutissant d’une valeuse, aboutissant assez difficile d’ailleurs à trouver à cause de la nature mouvante des éboulis et des lavages de la mer, ils trouveront géné- ralement ce terminus, là où des barques sont hissées à sec, les meilleures valeuses étant celles dites valeuses des pêcheurs ou valeuses des barques. HAvReE, le 9 Juin 1879. NOTE SUR UN AFFLEUREMENT DE CRAIE SÉNONIENNE A SANDOUVILLE Par E. SAvVALLE et F. PRUDHOMME. Le but de cette note est de signaler à l’attention des géologues un des endroits les plus rapprochés du Havre où il soit facile d'observer en place la craie blanche à un niveau fossilifère. Dans une excursion faite à Sandouville le 7 novembre dernier, nous avons examiné sur le flanc d’un vallon descendant au marais, une grotte ou excavation naturelle, formée par un bloc de craie blanche, qui a glissé du sommet. L’affleurement de craie déjà reconnu et examiné par l’un de nous dans une excursion précédente, nous a offert un niveau remarquable par les nom- breux fragments de cidaris que nous avons recueillis. La grotte est située à environ 20 mètres en contre-bas du sommet du plateau de Sandouville sur le flanc occidental d’un petit vallon descendant au marais en pente rapide. L’endroit, dénommé le Haut-du-Vent, est à peu près à mi-chemin entre le fond de Sandouville et celui de Mortemer. L’altitude du plateau est d’environ 100 mètres. Le bloc de craie blanche, ayant glissé de sa position normale se trouve incliné dans une direction dia- métralement opposée au plan général d’inclinaison. L’excavation a une ouverture d'environ 8 mètres sur une hauteur de 2 mètres à2 m. 50. L’inclinaison du bloc abaïsse rapidement cette hauteur, et la profondeur atteint 8 à 10 mètres. À une cinquantaine de mètres plus à l’Est, existe une autre grotte dont des éboulis successifs ont obstrué l’entrée. Un peu en avant des deux grottes se trouve une terrasse recouverte aussi ’éboulis provenant du bloc de craie. | L'emplacement qu’occupent ces grottes, à la naissance d’un vallon qui descend à la mer, et sur ce plateau de Sandouville où fut bien certainement une station préhistorique, nous laisse penser qu’elles ont pu être habitées. La roche est composée de lits de craie et de silex rosés très BLOC ERRATIQUE S9 peu fossilifères. Une couche intercalée, épaisse d’environ 30 cen- timètres est littéralement pétrie de débris de Bryozoaires, de spongiaires et d’échinodermes. C’est au-dessus de cette couche que nous avons recueilli de nombreux fragments de cidaris ainsi que des radioles. Voici du reste la liste des fossiles recueillis, liste assez nom- breuse relativement à l’espace restreint livré à nos recherches : Articulations de Crustacés ; Ostrea sp. ? Valve supérieure; Rhynchonella octoplicata ; Rhynchonella sp. ? Terebratula sp.? Cidaris clavigera, fragments de test et radioles ; Cidaris sp? Pseudodiadema sp. ? Tiges de pentacrinites, bryozoaïres et spongiaires. Havre, le 30 Mars 1870. NOTE SUR UN BLOC ERRATIQUE RECUEILLI DANS LES SABLES APTIENS, A OCTEVILLE Par CH. BEAUGRAND. Déjà, à plusieurs reprises, on a signalé dans les sables aptiens de la Hève, la présence de blocs erratiques plus ou moins, gros. Il nous a été donne, dans une excursion faite dernièrement à Octeville, de recueillir un nouvel échantillon de ces blocs, que nous avons cru devoir vous présenter ici. C’est, non pas un granit, ni un grès de May, comme il en a déjà été recueilli, mais un grauwacke très dur, très compacte et micacé ; il faisait partie d’un bloc de Poudingue ferrugineux qui se trouvait dans un talus d’éboulement, à environ 14 mètres au- dessus du niveau de la mer. Ce grauwacke, dont quelques parties ont été détachées, mesurait enviren 0",30° de longueur sur 0,15 de large et 60 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE 0",6 1/2 dans sa plus grande épaisseur. Il paraît avoir été peu roulé et ne présente pas de surfaces de polissage, ce qui ferait supposer. qu’il n’a pas eu à subir un trajet bien long, et qu’il provient probablement des massifs de la basse Normandie; sa forme est assez irrégulière. Telle est, en résumé, Messieurs, la description que je crois pouvoir faire de l’échantillon que je vous soumets ; si la Société pense qu’il puisse offrir un réel intérêt scientifique, je serai heureux de lui en faire hommage et d’en enrichir sa collection. HAvVRE, le 5 Juillet 1880. NOTE SUR UN DÉPOT TERTIAIRE RECONNU A MANNEVILLE-S/RISLE, PRÈS PONT-AUDEMER (EURE) Par G. DRoOUAUXx. Dans une de mes excursions, j’ai reconnu sur la commune de Manneville-sur-Risle un dépôt d’argiles et de sables que je rattache à l’époque tertiaire et que je vais essayer de décrire, et ce, d’autant plus que, je le crois, ils n’ont pas encore été signalés. La carrière dans laquelle j’ai reconnu ce dépôt, est située au sommet de la colline, sur son versant, à quelques mètres d’un chemin de raccourci, qui passe à environ 200 mètres de l’église, dans la direction S.-S.-O. Cette carrière a été ouverte depuis peu, pour l'extraction du sable qui est employé dans la cons- truction ; elle est creusée dans les argiles rouges à silex, dans lesquelles se trouvent enclavés deux dépôts d’argiles que je rattache au tertiaire, et deux dépôts sableux, qui, quoique fort rapprochés l’un de lautre, présentent cependant quelques caractères différents. Au haut de la carrière se trouve environ un mètre de terre végétale, formant le sommet de la colline; puis au-dessous les argiles rouges à silex, contenant fort peu de silex dans certaines parties et au contraire beaucoup dans d’autres; on y remarque ‘un banc régulier de silex d’environ 20 centimètres d’épaisseur if EL — > LT En ——S z LIST AL LT À A « AS LA 74 0% ES 4 A PRE CP T7 tit) — DÉPOT TERTIAIRE 61 qui sillonne entre les deux dépôts d’argiles tertiaires ; un autre amas de ces silex est situé à peu près entre les deux lentilles de sable ; à certains niveaux ces argiles rouges présentent des parties sableuses. Les deux dépôts d’argiles tertiaires 1 et 2 présentent le même aspect : ce sont des argiles brunes, d’une pâte excessivement fine et très douce au toucher; ces argiles sont très pures et ne con- tiennent aucun débris de silex, ni aucun débris organique appa- rent. Elles perdent une partie de leur couleur et passent au rose lorsqu'elles sont exposées à l’air pendant un certain temps, pour devenir tout-à-fait blanches à la cuisson. Cette dernière propriété indiquerait qu’elles ne doivent pasileur couleur brune à l’oxyde de fer, mais plutôt à la présence de débris organiques qui dispa- raissent à la chaleur. SLOup Ê X97IÇ Miveau d'exploitation de la carrière Ces argiles, qui me paraissent appartenir au tertiaire inférieur, semblent provenir du même niveau que les argiles plastiques signalées à l'Est de la Risle, par M. Ant. Passy, dans sa Descrip- tion Géologique du Département de l'Eure ; seulement l’auteur signale ces argiles plastiques comme étant accompagnées de mi- nerai de fer, et je n’ai trouvé aucune trace de fer dans celles de Manneville, et la propriété qu’elles ont de devenir parfaitement 62 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE blanches à la cuisson, semble écarter toute idée de la présen e de ce minéral. La puissance du dépôt n° 1 est d'environ 1",50 dans sa plus grande épaisseur, sur 3 mètres de longueur. Le dépôt n° 2 est un peu plus épais et plus régulier, en ce sens qu’il ne finit pas en pointe comme le dépôt n° 1. La couleur des argiles du banc n° 2 est légèrement plus foncée que celle de l’autre assise, mais cela tient sans doute à ce que leurs assises étant inférieures, elles contiennent plus d'humidité. Les deux dépôts de sables que j’ai rencontrés dans cette car- rière sont également intercalés dans les argiles rouges à silex. L’un de ces dépôts, n° 3, présente un sable fin, blanc-oris, mélangé de quelques parties rouges, et contient en grande quantité des petits silex translucides, en partie arrondis et parais- sant avoir été roulés ; la grosseur de ces silex est assez variable, il y en a qui atteignent presque la grosseur d’un noyau de cerise, mais en général ils sont gros comme des grains de gros sable. L'autre dépôt, n° 4, offre un sable plus fin que le précédent et de même couleur, mais beaucoup plus mélangé de parties blan- ches. Il contient également de nombreux silex arrondis, mais beaucoup plus petits que dans le dépôt précédent, et ils sont si petits qu’on les sent à peine en pulvérisant le sable entre ses doigts. Ces sables me paraissent appartenir aux grès de l'argile plas- tique et doivent correspondre, comme niveau, aux grès tertiaires de Bolbec. M. Ant. Passy a signalé sur plusieurs points du département la présence de sables accompagnant l'argile plastique, et ceux que j'ai rencontrés à Manneville-sur-Risle me paraissent être les mêmes que ceux dont parle ce savant géologue. Havre, Mai 1870. NOTE SUR LA SIGNIFICATION DE L'ÉTAGE & DES BANCS-LIMITES Par J. SkRoDzxI. Dans le but de faciliter l’étude de la Géologie, les premiers maîtres ont séparé la masse accessible de l'écorce terrestre en grandes divisions, auxquelles ils ont imposé le nom d'étage. Les étages se différencient, disent-ils, par des faunes succes- sives, d'autant plus dissemblables que les étages sont plus éloi- gnés les uns des autres. L’habitude que l’on a, d’étudier successivement les diverses couches du globe, fait que l’on est arrivé à considérer comme de véritables divisions de la nature ce qui n’est en réalité qu’une méthode destinée à venir en aide à la faiblesse de l’esprit humain. Notre entendement s’affole, en effet, devant des sujets trop vastes, et les veut examiner d’abord en détail, avant de les concevoir dans leur entier. Les limites des étages étant arbitraires, il en résulte que, si tous les géologues sont d'accord sur leur succession — et encore diffèrent-ils entre eux sur leur terminologie — il n’en est pas de même, lorsqu'il s’agit de déterminer où commence et où finit un étage. L’étage a été subdivisé par la suite en divers niveaux ou zones auxquels on 1 donné le nom du fossile, dont, autant que possible, l’existence y a été exclusivement constatée. Mais, comme de nombreux fossiles se rencontrent sur une étendue verticale assez considérable, ces subdivisions ne font que compliquer la difficulté, et nous voyons souvent un géologue appeler dernières assises d’un terrain ce qu’un de ses collègues considère au contraire, comme formant les premières assises de l'étage suivant. Lorsqu'il y a manquement d’un ou de plusieurs niveaux, une ligne de démarcation se trouve le plus souvent tracée sous forme 64 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE de banc-limite. On peut affirmer, à la vue de ces traces de dis- cordance, que commence un nouvel ordre de choses. Il ne faut donc pas s’étonner, si le désir de découvrir une limite certaine aux étages, a fait souvent trouver à des savants, mème émérites, des lignes d’usure et de discordance entre étages se succédant normalement. Et ce fait ne se présente que s’il a existé une période de retrait des eaux entre les deux dépôts. Supposons, en effet, qu’il y ait eu dans un coin du globe — ce qui est impossible — un bassin dont les nombreuses convulsions de la croûte terrestre eussent respecté, sinon la forme, du moins la position. Evidemment, à son centre, les dépôts chimiques se seraient opérés, jusqu’à précipitation complète de l’excès des sels dont les eaux avaient été primitivement saturées. Les dépôts mécaniques, qui avaient lieu conjointement aux premiers, auraient continué à se déposer avec des facies minéralogiques différents, et ce com- plexe de couches, parsemé des débris des êtres existants à l’époque de leurs formations, se présenterait, des plus anciennes aux plus récentes, sans lignes de démarcation. La faune, dont les derniers spécimens diffèreraient sans doute énormément des premiers, aurait passé elle-même par des transformations insensibles, dues aux efforts des êtres, pour s’adapter aux nouveaux #0dus vivendi. Cet état de choses existe peut-être depuis la période crétacée,dans l'Océan atlantique, dans les profondeurs duquel se forment jour- nellement des sédiments crayeux, composés principalement de diatomées et de foraminiféres. Un exemple en petit de ce mode de formation nous est offert par la falaise de Sainte-Honorine-des-Pertes (Calvados).Les assises du Bajocien supérieur (oolithe blanche) présentent, dans leur masse, à différents niveaux, des traces de vers de l’ordre des an- nélides dorsibranches. Ces vers, vivant comme ceux de nos jours dans la partie superficielle des sédiments, indiquent seuls les ni- veaux des différentes couches, sans qu’il soit possible de décou- vrir aucune ligne de démarcation entre elles (1). L’étage, qui lui succède (Fuller’s earth.), commence par un banc de calcaire dur, jaunûtre, contenant un assez grand nombre de fossiles du Bajocien. Sa base se lie intimement avec l’oolithe blanche, à laquelle il passe, par des dégradations imperceptibles. (1) Le même fait se voit encore dans la carrière du lias inférieur à Cartigny-l'Epinay (Calvados). L'ÉTAGE ET LES BANCS-LIMITES 65 Avec la meilleure volonté, il nous a été impossible de trouver une ligne de démarcation entre les deux étages. Seule la présence de l'Ostrea acuminala, fossile caractéristique, permet de ranger ce banc dans l'étage du Fuller s. Au-dessus, commencent des assises d’un bleu-noir, formées de bancs de calcaire et de marne. On pourrait plutôt tracer la ligne de démarcation entre ces bancs et le calcaire jaunâtre, dont le sommet est durci, et pénétré de pyri- tes de fer; mais alors les partisans de l’étage seraient forcés d’ad- mettre la présence de l’Ostrea acuminata, dans la dernière couche du Bajocien. S'il a existé une période de retrait des eaux entre les deux dépôts du Bajocien et du Fuller’s, elle a dû être fort courte, car certaines parties de l’oolithe blanche sont colorées sur une assez grande étendue, en profondeur, par la teinte noirâtre du Fuller’s (1), ainsi que les fossiles caractéristiques qu’elles contiennent. En tout cas, on peut nier le retrait des eaux. Il est encore impossible de trouver des traces de banc-limite, lorsque, dans une période d’extension, les eaux sont venues recouvrir un terrain peu consistant. Ainsi le Fuller’s n'offre, à son sommet, qu’un calcaire marneux, se délitant au contact de l’eau. A Villiers-sur-Port, en ce point curieux, par le mélange de la Rhynchonella varians (fossile qui ne se rencontre ordinairement que dans le niveau supérieur du Ful- ler’s), avec des fossiles du Bajocien, et, où il atteint une certaine consistance, il est encore peu dur. Il est donc facile à comprendre, qu’aux endroits où il a été recouvert par les sédiments de la mer du Bathonien inférieur, les couches supérieures du Fuller’s aient été enlevées, et que les eaux aient raviné ces terrains peu consistants, ne laissant voir, pour toute trace de démarcation, qu’un changement minéralogique dans la nature des sédiments. Pour qu’il y ait eu formation d’un banc-limite, il est donc né- cessaire, qu'après une période de retrait, les eaux, soient reve- nues couvrir à nouveau des sédiments suffisamment consolidés. Une petite carrière ouverte dans l’infra-lias, à Carquebut, près Chef-du-Pont (Manche), nous a fourni un bel exemple de banc- limite. (1) Il est probable que dans certains lieux, la marne de Port représente aussi une partie de l’oolithe inférieure, car elle paraît empiéter sur les bancs qui la supportent. DE CAUMONT : Essai sur la Topographie du Calvados. 66 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Ce niveau se raccorde sans doute avec le fameux banc de fer d'Osmanville ; mais, au lieu de présenter une surface corrodée également, comme dans ce dernier endroit, il montre, par places, une surface peu égale, comme si les sédiments eussent offert aux flots liasiques une surface inégalement consolidée à leur superficie. À Carquebut, la dernière assise de linfra-lias, qui laisse voir de nombreuses traces d’huitres et de vers, est surmontée par des cal- caires peu consistants, appartenant au lias inférieur, et contenant une grande quantité de moules intérieures de Mactromya liasiana. Dans le Calvados, ce sont des marnes à Gryphœa arcuata. Il ne faudrait pas penser que les bancs-limites ne peuvent se rencontrer que dans les conditions qui viennent d’être indiquées. Les bancs-limites, en effet, se voient encore intercalés au milieu de ce que lon est convenu de nommer étage. Ainsi les carrières entourant Valognes (Manche), nous montrent un banc-limite, placé au centre de la formation infra-liasique. Il ne diffère du banc de fer d’'Osmanville, que par la dimension plus petite des perforations, dues aux vers. Ce n’est pas à dire qu’on doive supprimer l'étage en géologie ; mais il faut le concevoir, nous le répétons, non comme division tracée par la nature, mais bien comme une division arbitraire, imposée par les savants, dans le but de faciliter Pétude de la science. Donc pour nous : ’étage est une unité de convention. La présence d’un banc-limite indique le manquement d’un ou de plusieurs niveaux, déposés, pendant la période de retrait des eaux. Sa formation est subordonnée à l’état de consistance des sédi- ments, que les eaux sont venues recouvrir. Il est inutile d’ajouter que deux bancs-limites, bien que situés immédiatement au-dessus d’un même niveau, peuvent n’être pas synchrones, s'ils se trouvent dans des contrées éloignées les unes des autres: les formations n'ayant qu’un même âge relatif, et le même degré de développement ayant pu être atteinten des temps différents. Bayeux, Décembre 1881. MÉMOIRE POUR SERVIR A L'ÉTUDE D'UN PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN DESTINÉ A RELIER LES DEUX RIVES DE LA SEINE A SON EMBOUCHURE Par G. LENNIER : ÉTUDES COMPARATIVES Les travaux projetés et en cours d’exécution au Havre, pour donner satisfaction aux besoins croissants de notre grand port maritime, sont de la part de MM. les Ingénieurs des Ponts-et- Chaussées l’objet d’études sérieuses, savantes et approfondies. Les bassins se multiplient, des projets grandioses sont à létude pour créer une nouvelle entrée, augmenter la hauteur de l’eau dans les passes et permettrel’accès du port aux plus grands navires. De ce côté, tout marche à souhait; mais s’il est facile à la marchandise d'arriver au Havre par mer, il ne lui est guère facile d’en sortir par terre, en prenant la seule voie ferrée qui, jusqu’à ce jour, a desservi notre ville. En maintes circonstances, les réclamations des intéressés se sont produites sur l'insuffisance des moyens de transport vers lin- térieur du pays, vers les centres de fabrication, vers les milieux de consommation. Dernièrement encore, lors du voyage de M. Gambetta, les rapports et communications faites par M. le Maire du Havre et par M. le Président de la Chambre de com- merce, ont prouvé une fois de plus que la situation qui nous est faite est intolérable et qu’elle ne saurait se prolonger sans amener de nombreux inconvénients, dont le plus grave serait de détourner le commerce de notre port vers le Nord, au grand détriment de la richesse nationale. Le Havre n’a qu’une seule ligne de chemin de fer : la ligne de Ouest, et les mesures adoptées par cette Compagnie semblent 5 68 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE bien plutôt prises en vue de conserver un bon monopole que de favoriser le développement commercial de notre cité. La théorie est simple ; elle consiste à construire des amorces nouvelles sur Ja ligne principale, déjà encombrée par la circulation, pour desser- vir des villes comme Montivilliers, Bolbec, Lillebonne, Duclair, Caudebec, par des trains qui quelquefois arrivent moins vite que les voitures publiques. Mais, qu'importe à la grande Compagnie ! Elle a pris possession de la situation. En créant le tronçon de Montivilliers, elle croit avoir empêché pour toujours la ligne du Nord de venir au Havre. En créant les embranchements de Duclair, Caudebec et autres, elle a empèché la création d’une ligne concurrentielle de Rouen au Havre, par la Seine. Son but est atteint ; elle reste maîtresse de notre territoire, puisque d’une part elle nous empêche, par des travaux isolés, de donner suite à tout projet d'ensemble, et que de l’autre, ayant pris possession au Nord, par la vallée de Montivil- liers, et à l'Est sur les rives de la Seine, elle empêchera longtemps encore les lignes d'Orléans et du Nord d’arriver jusqu’au Havre. Notre but ici n’est pas de récriminer, de discuter des faits accomplis, que, bon gré mal gré, il nous faut accepter ; nous voulons chercher si, à la situation qui nous est faite, il n’est pas un remède. Nous sommes comme des assiégés, nous voulons sortir de la place et puisque, à l'Ouest, nous sommes bloqués par la mer, au Nord et à l’Est, par la ligne de l'Ouest, examinons comment nous pourrions établir des communications par le Sud, en franchissant la Seine à son embouchure, afin de nous mettre en communication rapide et économique avec le centre, le Sud et l'Ouest de la France. Dans l’état actuel, il faut, pour pénétrer dans l’Ouest et dans le Sud, passer par Rouen, ce qui allonge considérablement le parcours. Pour raccourcir ce parcours, il faut franchir la Seine à son embouchure, Le plus près possible du Havre ! Quel est le moyen de franchir le fleuve ? C’est ce que nous nous proposons d'étudier maintenant, c’est Le sujet principal de ce mémoire. PONT OÙ TUNNEL ? Pour étudier les faits, la méthode la plus simple est, croyons- nous, de les comparer entre eux. Aussi pensons-nous devoir, avant de parler du passage de la Seine, rappeler les études, les PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 69 travaux qui ont été faits pour franchir le détroit de Calais et mettre en communication directe la France et l’Angleterre, et les travaux en cours d’exécution ou déjà terminés en Europe. Le plus ancien projet de communication directe entre la France et l’Angleterre remonte, croyons-nous, à 1802. À cette époque, un ingénieur français, M. Mathieu, imagina d’établir une communication entre les deux pays, par une galerie creusée sous la Manche, ce long souterrain aurait été éclairé par des lanternes et le service aurait été fait par des diligences. En 1838, un autre ingénieur français, M. Thomé de Gamond entreprit, sur le même sujet, une série d’études auxquelles il a consacré trente-cinq ans de sa vie et toute sa fortune. Ces études ont été publiées en 1869, dans un ouvrage qui a pour titre : Mémoire sur les Plans du projet nouveau d’un Tunnel sous-marin entre l'Angleterre et la France, produits à l'Exposition universelle de- 1867, et sur les différents systèmes projetés pour la jonction des deux territoires, depuis l’origine de ces études en 1833 : Tunnel immergé, Pont sur le détroit, Bac flottant, Isthme de Douvres, Tunnel sous- marin (Planches gravées en couleur, offrant la réduction des planches exposées). 1° Le Tunnel immergé consistait en un tube de tôle qui devait se poser au fond de l’eau, non par immersion verticale, mais par allongement sur le sol même du fleuve ou de la mer. Ce système avait été proposé par un ingénieur, M. Dun, pour un passage de la Neva ; 2° Pont sur le Détroit (1836). Un tunnel : pourquoi ne pas pré- férer un pont ? Telle était la question que les ingénieurs, surtout les anciens, adressaient à Thomé de Gamond. Pendant les années 1835-1836, Thomé de Gamond étudia les diverses conditions de la construction d’un pont sur le détroit, de Calais, à Ness-Corner-Point, plus courte de quatre kilomètres que celle de Douvres à Calais. Cinq projets différents : ponts en granit, ponts en métal et ponts mixtes à squelettes en métal, furent suc- cessivement étudiés, élaborés et ensuite abandonnés après mûrs examens. Il est inutile d’entrer ici dans les considérations qui firent abandonner le projet du pont : il suffira de dire : r°qu’un grand nombre de piles noyées, nécessaires à l’établissement de l'ouvrage, avaient plus de 60 mètres de hauteur, dans la traversée du plus grand brassiage du chenal, et devaient coûter au-delà de 70 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE 30 millions de francs, l’une ; 2° Le projet de bac flottant nécessi- tait la création de deux jetées d’enrochement de 8 kilomètres l’une enracinées à chaque plage, se prolongeant l’une vers l’autre dans la mer et laissant libre, entre leurs deux musoirs, un inter- valle de 18 kilomètres. La dépense prévue pour ce système mixte, enrochement et bac, s'élevait à 230 millions de francs, chiffre beaucoup plus modéré que celui du projet précédent ; 3° Îsthme de Douvres. — En 1839, la pensée de l'ingénieur que nous suivons dans ses laborieuses et savantes études, s'arrêta sur le procédé radical de réunir le territoire anglais au Continent au moyen d’un isthme continu d’enrochement, élevé à travers le détroit, avec la réserve de trois larges passes de navigation. Ce projet rencontra de nombreuses objections. Parmi les principales, nous citerons : la crainte que cet ouvrage ne vint modifier l’heure du plein des marées dans quelques ports de la mer du Nord; la résistance des marins, répugnant de s’assujettir aux manœuvres nécessaires pour franchir les passes étroites et dangereuses de l’ouvrage projeté ; enfin le chiffre de la dépense prévue au projet, s’élevant à 840 millions de francs. La question du tunnel sous-marin fut reprise en 1851, lors de l'Exposition de Londres. Plusieurs campagnes d’études furent entreprises d’années en années, jusqu’en 1855 ; on commença étude géologique des terrains qui forment les rives et le fond, les couches immergées du détroit. L'auteur que nous suivons dans cette étude et dont nous admi- rons les persévérants efforts, Thomé de Gamond, s’aperçut qu’il finissait par où il aurait dû commencer, afin d’éviter d’innombra- bles tâtonnements : par l'étude géologique du sol. Nous profiterons des enseignements que nous donne le mémoire de Thomé de Gamond, et après avoir rapidement examiné les grands travaux en cours d'exécution qui pourront être comparés au tunnel sous la Seine, nous rentrerons, pour y rester, dans le cercle des études qui nous sont familières ; nous examinerons la composition géologique du sol qui forme le fond et les rivages de la baie de Seine, à l’embouchure de ce fleuve, laissant aux ingénieurs compétents le soin de choisir le niveau géologique le plus convenable, et aux économistes, aux négociants havrais, l’étude des moyens financiers à employer pour trouver le capital nécessaire à la réalisation du projet. PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN TI LE TUNNEL DE LA MANCHE Le tunnel se composerait de trois parties distinctes : une partie centrale, ayant 26 kilomètres de longueur, et deux rampes d’acces ayant une pentecomprise entre 12 "/" et 13 DM iparimnetre. La partie centrale serait légèrement arquée et se décomposerait en deux parties égales, inclinées chacune à o "" 378 par mètre, de manière à diriger leurs eaux vers l’origine des rampes d’accès, d’où partirait, de chaque côté, une galerie à section réduite ayant environ 4 kil. $ de longueur, et faisant suite respectivement à chacune des sections de la partie centrale du tunnel ; ces galeries amèneraient les eaux de Ja partie centrale et celle des rampes d'accès au fond de puits creusés sur les deux côtés de l'Angleterre et de la France, et munis de machines d’épuisement. M. Potier, ingénieur des mines, a donné au Congrès de l’Asso- ciation Française pour l'avancement des Sciences, session tenue au Havre en 1877, un compte-rendu des opérations géologiques faites dans le détroit de Calais, pour préparer le percement du tunnel sous-marin. Dans les études faites au fond du détroit, on a recueilli un grand nombre d'échantillons du fond, à l’aide d’un tube en acier de o " o2 de diamètre intérieur surmonté d’un plomb pesant so kilogrammes. Cette sonde a été descendue 7,671 fois et lon a obtenu plus de 3,000 échantillons du fond ayant une valeur géologique. L’examen des échantillons recueillis, l’étude pétrographique des roches et de leurs allures souterraines, donnent des raisons en faveur de l’établissement du tunnel sous marin dans les couches crétacées. Les assises supérieures, qui sont sans consistance et se fendil- lent à l’air ne nécessitaient pas d’études spéciales ; la multitude des fentes qui les traversent offrent à l’eau un passage très facile qui les rend dangereuses. C’était principalement la craie marneuse à Inoceramus labiatus, le Turonien de d’Orbigny, et la craie de Rouen ou cénomanienne du même auteur, qui devaient être exa- minées, et autant que possible dans le voisinage du tunnel, afin qu’on ne pût arguer de la variabilité des caractères minéralogiques dans une même assise. L'étude du régime des eaux a prouvé qu’il fallait établir un tunnel dans la craie cénomanienne et de préférence dans le tiers inférieur, dont le débit est absolument négligeable. 2 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE En résumé, M, Potier conclut ainsi : « On ne doit donc tenter le percement du tunnel sous-marin qu’à la condition de se main- tenir dans la partie inférieure de la craie de Rouen on cénoma- nienne, et par conséquent, de suivre à peu près les ondulations de la surface de séparation de cette craie et du gault sous-jacent. » L'étude de la carte géologique du détroit, dressée par MM. de Lapparent et Potier, montre, que, dans le tracé du tunnel, on épousera très bien la forme de la surface de couches, sans employer des courbes d’un rayon inférieur à 1,200 ", et encore une courbe de ce rayon ne sera-t-elle nécessaire que près de la côte française. LE TUNNEL DE CAMMERSEN TUNNEL DE LA SEVERN M. Lécureur a récemment publié dans Le Journal Ze Havre deux articles très remarqués sur le tunnel de la Mersey et le tunnel de la Seine (Voir Le Havre du 16 Septembre et du 30 Octobre 1880). Nous empruntons à notre collègue de la Société géologique, la traduction d’un article de l’I/lustrated London News, qu’il a reproduit et qui donne les plus intéressants détails sur le tunnel de la Mersey. « La Mersey, entre Liverpool et Birkenhead, forme un superbe port de rivière, de trois quarts de mille de large ( 1,300 mètres environs), offrant un accès facile aux plus grands steamers des lignes Cunard et des autres Compagnies Transatlantiques. Sur ces rives, s'étendent une série de docks qui surpassent de beaucoup les établissements analogues établis dans tous les ports du monde. Ceux de Birkenhead ont coûté environ 6 millions sterlings. Ceux de Liverpool qui s’étendent sur une longueur de près de 7 milles, ont coûté plus du double. » Les docks de Liverpool et ceux de Birkenhead sont adminis- trés par une puissante association portant le nom de « Mersey Harbour and Docks Board ». La population de Liverpool et de ses faubourgs est de près de 700,000 âmes. On conçoit dés lors combien il importe ‘d'assurer entre les deux rives du fleuve de commodes moyens de transport pour les passagers et les mar- chandises. » Les autorités locales avaient fait ce qu’elles pouvaient en éta- blissant des embarcadères à Prince’s-Dock, et à Saint-George’s- PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 73 Dock, du côté de Liverpool età Woodside, du côté de Birkenhead. Elles avaient en outre, établi entre ces points, un service de grands et commodes ferry boais à vapeur, affectés les uns aux voyageurs, les autres aux voitures de toute espèce. » Les départs avaient lieu à quelques minutes les uns des autres; mais si bien disposés et si bien conduits que fussent ces bateaux, ils n’en étaient pas moins sujets à des retards et à des int2rrup- tions de service, particulièrement en hiver et dans les gros temps. Autre inconvénient sérieux : le transport des marchandises par chalands entraînait de grandes pertes de temps, des lourdes dépenses et des risques sérieux. » À plusieurs reprises, des projets avaient été proposés pour l'établissement d’un pont ou d’un tunnel entre les deux rives. Le projet du pont fut écarté, et, en 1868, la Marsy Railway Company fut autorisée, par acte du Parlement, à établir le tunnel. » Au commencement de 1880, on commença à creuser des puits de grand diamètre à Woodside (Birkenhead) et à Saint- George’s-Dock (Liverpool). Ces puits foncés jusqu’à une couche solide de grès, à 180 pieds de profondeur, sont destinés à draîner le tunnel qui passera sous le lit de la rivière sur une étendue de 1,300 yards (1,188 mètres). » Des pompes puissantes, des machines et des chaudières per- fectionnées ont été installées sur ces puits et peuvent extraire s à 6,000 par minute (20 à 25,000 litres) de chaque côté de la rivière. » Au fonds des puits, des galeries d’essai ont été creusées pour reconnaître la nature de la roche. On a reconnu qu’elle était partout composée de grès solide, offrant assez de résistance pour permettre de creuser le tunnel. » Les galeries d’essai sont poussées avec activité de chaque côté de la rivière. » L’extrème profondeur de l’eau dansla rivière, à marée haute, est de 90 pieds anglais et de 70 pieds à marée basse. L’épaisseur moyenne de la roche, entre le plafond du tunnel et le lit de la rivière, sera de 30 pieds. Nulle part, cette couche n’aura moins de 25 pieds. » La coupe du tunnel sera ovale. Il aura 21 pieds de haut sur 26 pieds de large, dimensions qui sont suffisantes pour l’établis- sement de deux voies de chemin de fer. La galerie sera complète- ment maçonnée, de manière à être rendue étanche. » La longueur totale du chemin de fer, partant de Church- 74 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Street (Liverpool) et aboutissant à Tranmere (Birkenhead) sera de 2 milles et demi (4,022 mètres) dont 2 milles (3,218 mètres) sous tunnel. » Pour la traction, on emploiera des locomotives sans fumée. » Suivant les devis, la construction ne dépassera pas £ 866,000 (environ 21 millions et demi). On espère que les travaux seront achevés au mois d’août 1883. « Grâce à cet important travail, les habitants de Birkenhead pourront se rendre à Liverpool en $ minutes. » TUNNEL DE LA SEVERN Après sept années de travaux considérables, le grand tunnel percé sous le fleuve Severn, en Angleterre, vient d’être achevé. Les communications sous-fluviales sont maintenant établies entre les deux rives, celle de Ouest de l’Angleterre et celle du pays de Galles. Le tunnel de la Severn, que traversera une voie ferrée, abré- gera beaucoup le trajet entre Bristol et Newport, en même temps qu’il facilitera les relations entre Bath, Exeter, les villes des comtés de Somerset, de Devon, de Cornouailles et tout le Sud de la principauté de Galles. Pour le tunnel de la Mersey, les travaux sont en cours d’exé- cution ; pour le tunnel de la Manche, on pratique une galerie d'essai , à petite section d’une rive à l’autre. Si maintenant, — a-t-on dit pour le tunnel de Calais — nous supposons le tunnel exécuté, son exploitation ne rencontrera- t-elle aucun obstacle ? Il y aura évidemment quelques difficultés particulières, que ne présentent pas les chemins de fer ordinaires. : Mais l’expérience des grands tunnels déjà construits, dans les Alpes et à Londres, permet d’affirmer qu’elles seront levées assez aisément. Par exemple, certaines personnes se sont préoccupées de la ventilation. Les travaux des houillères ont prouvé qu’on pouvait maintenant ventiler à toutes les profondeurs et sur toutes les lon- gueurs possibles. Mais cela ne sera même pas nécessaire. Les trains qui circuleront dans le tunnel, à intervalles très rapprochés, produiront eux-mèmes la ventilation ; ils agiront comme d’im- menses pistons parcourant de gigantesques corps de pompe, refoulant l’air devant eux et l’aspirant derrière. Quant à la crainte La ue PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 75 de voir se produire des éboulements, par suite du poids énorme de la mer, cette crainte est dépourvue de tout fondement. Il suffit, pour s’en convaincre, de se rappeler le tunnel de Mont-Thabor, dont la voûte supporte, non plus 40 mètres de craie et de 50 mètres d’eau, mais 800 mètres de roches schisteuses et porphy- roïdes. Il y aurait bien d’autres faits à citer. Voici un exemple tout à fait topique, emprunté à un ingénieur anglais du siècle dernier, Pryce, dans son traité sur l’exploitation desmines, où on lit à propos d’une mine de la Cornouaille : « La mine de Huel-Cock, dans la paroisse de Saint-Just, s'étend sous la mer à près de 150 mètres de distance, et dans quelques endroits, il n’y a pas plus de $ mètres d’épaisseur de roches entre le fond de l’eau et les galeries, de sorte que lesmineurs entendent parfaitement le bruit des vagues, venant du large de l'Océan, se briser sur le rivage; ils entendent venir le roulement des galets au fond de la mer, pareïl à celui du tonnerre, ce qui frappe d’étonnement et de terreur ceux qui l’entendent pour la première fois. Des filons plus riches que les autres ont été exploités à 120 seulementau-dessous du fond, etil est arrivé que par des temps d’orage, le bruit occasionné par les flots et les galets était tellement épouvantable, que les ouvriers ont plusieurs fois aban- donné leurs travaux, plus effrayés du fracas de la tempête que de voir. la mer tomber sur eux et les engloutir. Sous une aussi faible épaisseur, ils eurent quelquefois à arrêter des infiltrations d’eau salée ; ils y parvinrent en calfeutrant les fissures avec des étoupes et du ciment, comme les flancs d’un navire. Par l'étude qui précède, sur les travaux exécutés ou en cours d'exécution, nous croyons avoir suffisamment prouvé qu’au point de vue de l'exécution matérielle le percement d’un tunnel à l’em- bouchure de la Seine, pour mettre en communication les deux rives du fleuve, serait une œuvre possible théoriquement ; une œuvre importante, mais d'une importance beaucoup moindre que le passage du détroit de Calais, et présentant au point de vue géo- logique, des avantages qui, dans des conditions déterminées, permettent d’assurer le succès de l’opération. TOPOGRAPHIE DE LA BAIE DE SEINE La baie de la Seine forme une large échancrure qui s’ouvre sur le prolongement de la ligne des falaises du Pays de Caux, entre le Cap de la Hève et la pointe de Dives, et s'enfonce vers 76 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE l'Est, jusqu’à une ligne tirée de Quillebeuf à la vallée de Lille- bonne. Au Nord et au Sud de cette baie, s’élèvent de hautes falaises, dont le sommet est partout crayeux et recouvert par des dépôts d’argiles rouges à silex. De larges et profondes vallées s’ouvrent dans le plateau, qui généralement est élevé de 100 à 11$ mètres, et descendent jusqu’au niveau de la mer. Au Nord, c’est d’abord la vallée de Montivilliers, puis une série de petits vallons profonds et rapides, Orcher, Oudalle, Sandouville. Tancarville, Tous ces accidents de terrain résultent de dénudations, de creusement lent par les eaux. Sur la même rive Nord, nous trouvons plus à l'Est, la vallée de Bolbec-Lillebonne, qui a une tout autre origine, comme nous le verrons plus tard dans l'étude géologique. De la Hève à Tancarville, presque partout, le plateau se termine par une falaise à pic, quelquefois, comme à Orcher, par un talus d’ébou- lement. La rive Sud, qui s'étend de Dives à Quillebeuf, est beaucoup plus accidentée. Les plateaux s'élèvent à peu près aux mêmes alti- tudes de 100 à 115 mètres en moyenne. Ces plateaux sont limités à l'Ouest par la vallée de la Dives, et en suivant leurs bords, près de la mer, on remarque qu’ils sont profondément ravinés et coupés entre la Dives et la Touques. Cette vallée de la Touques s’ouvre très largement à la mer, entre Villers-sur-Mer et Trouville, et, au milieu de ce large espace, s’élève un ilot compltèement isolé, haut de plus de 100 mètres : le mont Canisi, que la mer devait contourner, avant que les sables apportés par les courants et les vents n’eussent formé la digue qui a favorisé le dépôt des ter- _rains sur les marais de Blonville et de Tourgeville. Entre Trouville et Honfleur, les falaises qui font face au Havre sont fortement découpées par l’érosion, et présentent une série de petits vallons, dont le plus important, celui de Criquebeuf à Pennedepie, donne une quantité d’eau assez considérable. A la vallée d’Honfleur succèdent, vers l'Est, celle de St Sauveur, de Fiquefleur, de Jobble et de Grestain. Entre Berville et la pointe de la Roque, s’ouvre la vallée de Pont-Audemer, qui verse dans la Seine les eaux de la Risle. A l'Est de laRoque jusqu’à Quillebeuf, sur une superficie de 6,000 hectares, s'étend le vaste cirque du marais Vernier. Dans les grandes marées d’équinoxe, s’il vente bon frais de la partie Ouest ou Nord-Ouest, tous les marais sont couverts et la mer occupe entièrement, pendant quelques instants, l’espace compris PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN A7 entre les falaises qui limitent la baie. Dans les marées ordinaires, au contraire, le fleuve reste dans son lit et l’on peut voir tous les atterrissements, tous les dépôts d’alluvions qui se sont formés dans la baie et qui sont devenues de magnifiques prairies, depuis Har- fleur jusqu’à Tancarville, sur la rive droite, et de Honfleur à Ber- ville sur la rive gauche. A la basse mer, vue du haut de la côte de Grâce, de Fatouville, du Château d’Orcher ou de la pointe du Hoc, la baie ne présente que des bancs de sable, entre lesquels on voit de nombreuses flaques d’eau, où il est bien difficile de reconnaître le lit du fleuve. ÉTUDE GÉOLOGIQUE Les assises qui constituent les falaises se continuent au-dessous du niveau des eaux, et toute la masse présente une inclinaison, un plongement régulier d'environ 3 ou 4 milimètres par mètre, vers le N.-E., c’est grâce à cette pente, qui forme un relèvement versle S.-O., que nous pouvons suivre, sur la côte du Calvados et de l'Eure, entre Dives et Quillebeuf, dans les falaises, les couches qui pourront être traversées par le tunnel et choisir d'avance celles qui paraîtront, après un examen approfondi, présenter les meil- leures garanties pour l'exécution des travaux, dans des conditions de solidité à toute épreuve et d'économie, qui rendront possible la réalisation du projet. À Dives, la base et la partie moyenne de la falaise sont formées, jusqu'à Villers-sur-Mer, par des argiles dures dans lesquelles on voit alterner quelques bancs calcaires. Ces couches, quelquefois désignées sous le nom d’argiles de Dives, par les géologues nor- mands, appartiennent à la partie moyenne du terrain jurassique, à l'étage Oxfordien de d’'Orbigny; elles ont entre Dives et Villers- sur-Mer, une épaisseur de 100 mètres environ. Au-dessus de ces couches, dont la partie supérieure vient plonger au-dessous du niveau des hautes mers, à l’Est de Trouville, on voit des assises calcaires qui appartiennent à l’étage Corallien de d’Orbigny, et qui ont une épaisseur de 30 à 35 mètres. Elles sont recouvertes par les argiles de Honfleur, dont les premières assises se voient à Trouville, au-dessus du Corallien. Ces argiles de Honfleur sont plus connues sous le nom d’argiles kimméri- diennes ; elles s'étendent le long du littoral, jusqu’à Honfleur. A l’Estde Honfleur, les falaises sont formées parles assises de la Craie, dont le plongement au Nord-Est est aussi assez régulier jusqu’à 78 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Quillebeuf. En suivant les assises entre ces deux points, on verrait plonger successivement au-dessous du niveau de la mer : les sables inférieurs de la Craie, les assises aquifères de la Gaïze, les craies glauconieuses du Cénomanien, la Craie marneuse, épaisse seulement de quelques mètres (Turonien). En arrivant à Quille- beuf, le long du marais, à St-Aubin, on trouve les craies dures de la base de l’étage Sénonien. L’étude de la rive Nord de l’embouchure de la Seine indique qu’il existe une étroite liaison dans 1 formation géologique des deux rives. Nous y retrouvons, en effet, exactement la même suc- cession dans l’ordre de superposition des couches. Le Havre pré- sente la même coupe de falaises que Vassouy, Harfleur que Fiquefleur, Le Hode que Berville, Quillebeuf que Radicatel. Le plongement est régulier et aucune faille ne paraît exister à l’em- bouchure de la Seine, dans la direction Est-Ouest. Dans la direction Nord-Sud, entre le Havre et Honfleur, les assises argileuses présentent des ondulations que nous avons depuis longtemps décrites et figurées dans un diagramme que nous reproduisons. Ce diagramme montre que les couches d’ar- giles compactes qui se voient au cap dela Hève et à Honfleur se continuent régulièrement d’une rive à l’autre. La preuve maté- rielle de cette continuité des couches argileuses compactes, est dans les sondages du Havre, du banc de l’Eclat, du banc d’Amfard, du banc du Rattier et de Honfleur. D’après nos observations personnelles, d’après les sondages de M. Frissard, les trois bancs de lembouchure sont assis sur une même couche d'argile compacte, imperméable à l’eau, identique à celle du Havre et de Honfleur, dans laquelle des sondages profonds ont été faits. A l'Est de Honfleur, dans la traversée de l’estuaire, on ren- contrerait les sables de la partie inférieure de la Craie, puis plus loin les assises alternantes d’argiles et de calcaires durs qui for- ment un niveau imperméable à l’eau et alimentent les sources d’Orcher, sur la rive Nord, et celles de la rivière St-Sauveur, sur la rive Sud. En nous dirigeant toujours à l’Est, pour conti- nuer notre exploration du sol sous le lit de la Seine , nous ne trouverons plus, au-dessous de l’alluvion moderne, que des roches crayeuses : la Craie glauconieuse, sableuse ou compacte, une mince bande de Craie marneuse, du Nais de Tancarville au fond du marais Vernier. Enfin la Craie blanche à l'Ouest de la vallée de Lillebonne. A l’entrée de cette vallée, nous rencontrons la faille de Fécamp à Lillebonne qui, par un brusque crochet, PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 79 retourne.sur Villequier. Il faudrait éviter d’amener les travaux dans ces parages, où on peut observer de profondes dénivellations de couches qui, par exemple, relèvent la craie glauconeuse à plus de 100 mètres d'altitude près de Triquerville, ramènent derrière le village de Villequier les argiles kimméridiennes à 40 mètres au- dessus du niveau de la Seine et montrent, entre le fanal et le village de Vieux-Port, dans le lit même du fleuve, un banc très étendu de calcaire Cénomanien rempli d’Holaster subglobosus. Les mouvements du sol qui ont amené le relèvement des cou- ches, ont en même temps disloqué toute la masse dela Craie qui s’est ainsi remplie de fissures, deux grandes fentes appartenant à deux directions principales. Ces fentes, souvent très larges, pourraient être un sérieux obstacle à [a création d’un tunnel sous- marin. Cependant, il y aurait lieu, avant de se prononcer sur cette question, d'examiner l’état des couches profondes qui, n'ayant pas subi l'influence des agents atmosphériques, ont peut- être conservé toute leur eau de composition, et sont restées beau- coup plus compactes et moins perméables que celles qui sont, depuis de longs temps géologiques, exposées à l’air. NIVEAUX D'EAU Dans un tunnel sous-marin, s’il convient de rechercher des couches solides, compactes, non fissurées, il faut soigneusement se garantir des eaux qui peuvent venir aussi bien d’en bas que d’en haut. Elles sont fournies par les sources, par les nappes d’eau souter- raines, qu'il faut autant que possible éviter. La plus élevée de ces nappes se trouve dans le Turonien; elle fournit toutes les eaux des sources de Radicatel. Les eaux du Cénomanien que nous voyons alimenter toutes les sources de la côte du Havre s'arrêtent dans les sables olauconieux de la base de cet étage, et sourdent au-dessus des argiles du Gault. Ce sont les eaux de ce niveau qui forment les fontaines d’Orcher, de la côte de Grâce, à Honfleur, et qui alimentent les deux petites rivières la Morelle et la rivière St-Sauveur. Partout où les assises de la Craie glauconieuse inférieure sont coupées par les vallées ou par les falaises, sur la rive Nord et sur la rive Sud de la Seine, on retrouve de petites sources qui appartiennent à ce niveau, le plus constant de notre région. Au-dessous du Gault, on ne trouve plus, à embouchure de la Seine, de niveau 80 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE d’eau constant. Les eaux qui, en effet, s’échappent du calcaire corallien dans un certain nombre d’endroits, celles qui coulent sur le Kimmeridge entre Trouville et Villerville,aussi bien que celles de POxfordien, ne forment pas de niveaux réguliers étendus ; elles proviennent presque toutes de pénétrations voisines et ne donnent jamais lieu, dans la région qui nous occupe, à des nappes impor- tantes, d’un débit constant et peu variable. SONDAGES Pour contrôler les faits observés dans les falaises et dans les carrières sur les bords de la Seine, à son embouchure, acquérir la certitude que les couches ne subissent aucun dérangement dans les zônes profondes, déterminer l'importance par l’étude des échantillons, des variations de composition ou d'état, il faut, et c’est là la première chose à faire, percer un certain nombre de puits sur les deux rives et consulter tous les sondages qui ont été faits jusqu’à présent dans la région, par MM. les ingénieurs des Ponts-et-Chaussées. Les forages qui ont été faits et portés à notre connaissance, peuvent déjà donner d’utiles renseignements. En 1830, sur la place Louis-Philippe, près de l'endroit où se trouve le magasin aux décors un sondage fut entrepris, pour la recherche de l’eau. On y traversa d’abord 18"30 de dépôts modernes, au-dessous desquels on rencontra les argiles kimméri- diennes, à 11 mètres au-dessous du niveau de la mer. Ces argiles, compactes, imperméables à l’eau, forment des strates d’épaisseur variable, séparées par des lits de calcaire marneux. La sonde descendit jusqu’à la profondeur de 208 mètres, sans rencontrer d'eau et sans sortir de l'argile. Un autre sondage fait à la Hève, sous les signaux, jusqu’à 47 mètres de profondeur, n’a rencontré que des argiles compactes avec lits calcaires. Sur la plage du Havre, l'administration des Ponts-et-Chaussées a fuit exécuter, entre le Cap la Hève et la jetée du Nord, un certain nombre de sondages qui ont pour la plupart, maloré leur faible profondeur, rencontré les argiles du Kimmeridge. Des sondages, ont, croyons-nous, été faits il y a quelques années, sur les bancs d’Amfard, du Ratier et de l’Eclat. Ces son- dages se trouveraient certainement aux bureaux des Ponts-et- Chaussées où MM. les ingénieurs pourraient en donner commu- PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 81 nication : pour ne citer, dans ce travail, que les faits que cette admi- nistration a livrés à la publicité, nous dirons que, d’après les son- dages dirigés il y a trente ans par M. l'ingénieur Frissard, et poussés à 5,90 au-dessous du galet, le Ratier est assis sur une base d'argile brune, très compacte ; le mème ingénieur dit aussi que le banc d'Amfard est assis « sur une basse d’argile brune très compacte. » Ce banc découvre de 1 mètre à 1"30 dans les grandes marées. Dans notre mémoire couronné par la Société Havraise d'Etudes Diverses, et ensuite par l'Académie de Rouen, sur la géologie de l'embouchure de la Seine, publié chez MM. Costey frères, nous disions : « Sur la rive droite de la Seine, le Kimmeridge composé d’argiles compactes avec lits calcaires occupe la base des falaises du cap de la Hève ; il forme le fond de la rade du Havre et le banc de J’Eclat, situé au large du cap de la Hève. » À la pointe de la Hève, au Béquet, les couches argileuses- marneuses, avec alternances de lits calcaires, occupent la base de la falaise et y forment un petit escarpement qui s'élève à 6 mètres au-dessus des hautes mers ; plus au Nord, ces couches plongent vers le Nord-Est. L’inclinaison des couches, dans cette direction, se continue sur une très grande étendue, interrompue seulement par des ondula- tions et des failles, dont la plus rapprochée de l'embouchure de la Seine est celle de Fécamp à Bolbec avec retour sur Villequier. La preuve de la régularité, de la continuité d’une masse argileuse à la base de la craie, sur une grande étendue, est faite depuis longtemps et contrôlée par des sondages. En effet, dans le puits creusé à Meulers, entre Dieppe et Neufchâtel, à environ 90 kilomètres dans le Nord-Est du Havre, après avoir traversé 110 mètres de craie blanche marneuse et glauconieuse, 60 mètres de marnes bleues du Gault, et 40 mètres de grès calcarifères compactes qui représentent les sables ferrugineux à Ostrea Aquila du Havre et de Honfleur, la sonde à rencontré, à 210 mètres au- dessous du sol, c’est-à-dire à 160 mètres au-dessous du niveau de la mer, et par conséquent à 175 mètres plus bas qu’au Havre, les argiles kimméridiennes, caractérisées par l’'Ostrea virgula. À Rouen, les mêmes argiles kimméridiennes, ont été rencon- trées dans le puits de la rue Martinville, à 67 mètres de la surface du sol et à 12 ou 14 mètres seulement dans le puits de la Mon naie, M. Bucaille, a retrouvé, l’année dernière, à Saint-Sever, les assises jurassiques supérieures formant un affleurement à quelques mètres seulement de la surface du sol. 82 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE L'inclinaison des couches au Nord-Est n’est pas régulière ; elle est au contraire interrompue : 1° par les failles dont nous avons déjà parlé; 2° par de grandes ondulations qui forment des courbes allongées. Le cap de la Hèveet le banc de l’Eclat sont au sommet d’une de ces courbes, Amfard et le Ratier en indiquent deux autres, d’après leur élévation et les sondages dont nous avons parlé plus haut. Pour la fondation des écluses de chasse qui viennent d’être construites à Honfleur, plusieurs sondages ont été exécutés ; tous ont rencontré l'argile kimméridienne compacte. Nous avons pu étudier les échantillons recueillis et conservés au magasin des Ponts-et-Chaussées, et nous avons constaté que lesol, au-dessous de la ville, est formé par des assises argileuses très compactes, comme au Havre, et présentant aussi une grande puissance, car elles ont été traversées sur une épaisseur de 70 mètres. La continuation du dépôt d’argile compacte qui forme le sol sous-marin de la baie entrela Hève, le Havre, Honfleur, Crique- beuf, est donc constatée par l’étude des falaises, par les sondages d'Honfleur, du Havre, du Rattier et d’Amfard. Par suite du plongement des couches dans une direction géné- rale Nord-Est, et bien qu’il n’ait été fait aucun sondage à notre connaissance, dans le fond de la baie de Seine, à l'Est de Honfleur, et jusqu’à Quillebeuf, on peut dire quelles assises, quelles roches seraient rencontrées par la sonde. On trouverait d’abord, au-des- sus des argiles, une large bande de sables appartenant au terrain crétacé inférieur et qui s'étend au-dessous des dépôts modernes, dans l’espace compris entre Honfleur et Fiquefleur, sur la rive Sud. Un peu plus à l’Est plongent les assises argilo-calcaires, peu épaisses, du Gault ; puis ensuite jusqu’à Quillebeuf, au Sud, et jusqu’à Radicatel au Nord, on voit se succéder les assises crayeuses qui se présentent de l'Ouest à l'Est dans leur ordre chronologique. La craie glauconieuse, la craie marneuse, très peu épaisse, et enfin la craie blanche à Quillebeuf et à Radicatel. LONGUEUR DU PARCOURS DANS LES DIFFÉRENTES ASSISES De la petite Eure, au Havre, au phare de PHôpital, à Honfleur, la traversée sous-marine en tunnel serait de 7,000 mètres. Sur cette ligne, en descendant à une profondeur suffisante, à déter- miner par une série de sondages, on ne quitterait pas les argiles PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 83 compactes de l’étage kimméridien, les travaux ne présenteraient pas de sérieuses difficultés d’exécution et l’étanchéité du tunnel serait parfaite, ces argiles ne laissant pas passer l’eau, ainsi que nous l’avons dit en parlant des sondages exécutés sur les deux rives, au Havre et à Honfleur. Du Hode à Berville, la distance en tunnel serait de 5,500 mètres. Les roches qui seraient rencontrées sur ce point appar- tiennent à la partie moyenne du Cénomanien ou craie glau- conieuse. Ce sont les couches qui se voient le long de la Seine, en suivant le chemin 81, entre Oudalle et Orcher. Elles sont formées par la craie blanche ou jaunâtre, glauconieuse dans la partie inférieure et contenant de nombreux lits de silex en bancs continus aux parties moyenne et supérieure. Cette craie, dans les falaises, est traversée par un très grand nombre de fentes, les unes appartiennent par leur orientation aux systèmes qui ont disloqué, souvent, en les relevant, toutes les assises crayeuses de notre région ; les autres, qui s’observent surtout près des vallées, résul- tent de la poussée au vide. Nous avons dit déjà qu’il ne fallait pas préjuger d’une manière absolue de la composition et de l’état des roches exposées à l'air et soumises, depuis de longs siècles, à l’action des agents atmos- phériques, pour déterminer létat des couches analogues du même âge, mais qui ont toujours été soustraites, par leur enfouissement dans les zônes profondes du sol, à l’action de ces mêmes agents. Pour déterminer avec exactitude l’état de ces couches, il faut des sondages ; mais ce que nous croyons pouvoir en dire déjà, c’est qu’elles sont traversées par un grand nombre de fentes, et que, très probablement, dans les zônes situées au-dessous du niveau de la mer, la plupart des fentes sont remplies d’eau d’infiltration, ce qui pourrait créer de sérieuses difficultés et entrainer à de très grandes dépenses d’épuisement. De Tancarville à la Roque, on traverse des assises crayeuses un peu plus récentes, appartenant à la partie supérieure de la craie cénomanienne et de la craie turonienne qui, dans cette région, a peu d’épaisseur. Les inconvénients que nous avons signalés pour la traversée du Hode à Berville, se retrouvent ici avec une inten- sité plus grande, peut-être, par suite du voisinage de la faille et des dislocations qui en ont été la conséquence aux environs de Lillebonne et qui vont se répercuter à une certaine distance. De Tancarville à Quillebeuf, la distance est de 4,500 mètres. On traverserait en entrant à Tancarville pour passer, comme nous 6 84 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE l’avons prévu par toutes les autres traversées entre30 et 35 mètres au-dessous du niveau des hautes mers, on trouverait les assises crayeuses supérieures du Cénomanien, pour ressortir à Quille- beuf dans la base de la craie blanche, ou craie sénonienne. Dans ce tracé, aux inconvénients signalés précédemment, il faudrait ajouter l'abondance de l'eau, car il est bien probable que le tunnel couperait les couches aquifères qui fournissent l’eau des abondantes sources de Radicatel, et ainsi formerait un appel de ces sources dans les zônes profondes, dans les travaux, au grand détriment de l’entreprise. Plus à PEst, le passage de la Seine en tunnel pourrait encore être étudié, entre Norville et Vatteville-la-Rue. Au lieu dit le Trait-du-Val, la éôte, sur la rive droite a 63 mètres d’altitude ; elle est formée de craie blanche. À Vatteville-la-Rue, la côte est aussi formée de craie blanche et assez élevée. Entre ces deux points, la distance ne serait que de 2,000 à 2,500 mètres à tra- verser en tunnel. Bien que ce point soit celui où les deux falaises qui bordent le lit du fleuve soient le plus rapprochées, il y aurait lieu, avant de le choisir, de bien étudier le terrain, car le voisi- nage de la faille et le relèvement de Villequier pourraient réserver de bien grandes surprises à ceux qui tenteraient le tunnel sans avoir, par des études approfondies et de nombreux sondages, étudié le terrain. En résumé, considéré seulement au point de vue de la réussite du travail, sans tenir compte de la longueur du parcours et des prix de revient dont nous n’avons pas à nous occuper ici, il nous paraît évident en ce moment, que le lieu qu’il faudrait choisir pour l'établissement du tunnel est la ligne du Havre à Honfleur. Cependant, hâtons-nous de le dire, cette ligne est la plus longue et ne semble, au point de vue de la composition du sol, plus convenable que, peut-être, parce qu’elle est mieux connue, parce qu’elle a été bien explorée par de nombreux sondages. Pour se faire une opinion rationnelie, pour juger cette délicate question du choix de l’endroit le plus convenable à l'établissement du tunnel sous la Seine, il faut connaître de visu les allures sou- terraines et la composition minéralogique des assises du sol dans les zônes profondes, dans les zônes qui n’ont pas été modifiées par les agents atmosphériques. Cette connaissance ne peut être acquise que par des sondages pratiqués sur les deux rives et sur les bancs à l'embouchure. Si, contre toute attente, il était reconnu, après études faites, PROJET DE TUNNEL SOUS-MARIN 85 que les difficultés à vaincre ne sont pas en proportion des béné- fices à réaliser pour l’établissement du tuunel dans la partie Est de la baie, il resterait toujours la possibilité de passer du Havre à Honfleur, dans l’argile kimméridienne, etc’est ce que nous avons cherché à démontrer par cette première étude, que, bientôt nous espérons pouvoir compléter. ÉTUDES PRÉLIMINAIRES Si après examen, les hommes compétents trouvent qu’il y a lieu — et nous l’espérons — de prendre en considération les faits exposés dans ce mémoire, il faudra nommer une commission pour déterminer les études à faire, en dresser le programme qui sera soumis aux autorités compétentes et au comité chargé de les exécuter. Cette commission pourrait être composée, pour la partie technique, d’ingénieurs des mines, d'ingénieurs des Ponts- et-Chaussées, d'ingénieurs hydrographes; pour la partie écono- mique et administrative, de membres des Chambres de commerce, de députés, de conseillers généraux, conseillers d'arrondissement, maires, coaseillers municipaux. Ainsi formée, la Commission pourrait se livrer à une enquête sérieuse, étudier les voies et moyens et arriver à une solution qui donnerait satisafction aux besoins commerciaux de notre cité, en lui créant une nouvelle voie d’accès dans l’intérieur du pays. GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES A MANNEVILLE-SUR-RISLE ET AUX ENVIRONS DE PONT-AUDEMER Par l’Abbé DEsHAYEs, curé de Manneville Membre de plusieurs Sociétés savantes. Il n’est pas un seul de nos départements où l’on n’ait rencon- tré des silex travaillés par la main de l’homme. Si le département de l'Eure a jusqu’à présent fourni un moindre contingent aux collections et à la science, ce n’est pas parcequ’il est plus pauvre mais parcequ'il a été moins exploré. L'exposition géologique du Havre, en 1877, où se sont rencontrées, à quelques exceptions près, les plus intéressantes découvertes de la Normandie, nous a appris que notre province n’a rien à céder, en fait d’antiquités préhistoriques, aux.autres contrées plus connues de la France et de l’étranger. L'ouvrage de M. le Vicomte de Pulligny, publié par la Société Libre de l'Eure et qui a pour titre : « L’Art préhistorique dans l'Ouest » nous a révelé les richesses de la partie de notre départe- ment connue sous le nom de Vexin normand. La contrée opposée, que j'habite, offre à l’archéologue des traces aussi nombreuses et aussi intéressantes de l’occupation de notre pays aux époques les plus reculées. Il me suffira pour en fournir la preuve de faire connaître le nombre et la variété des instruments de silex recueillis dans le court espace de deux années sur le territoire d’une seule commune de larrondissement de Pont-Audemer : Manneville- sur-Risle. En m’attachant tout particulièrement à énumérer et décrire les découvertes de cette localité, je n’ai point la pensée de la faire passer pour plus riche que les communes voisines ; j’ai trouvé dans toutes les plaines qui l’entourent et particulièrement sur les deux plateaux qui dominent à droite et à gauche la vallée de Risle ; on m’a apporté des silex de toutes les localités environnantes, dans l’arrondissement de Pont-Audemer. Si je m’applique tout spécialement à la description des trouvailles de GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES 87 Manneville, c’est parce que je connais mieux les gisements de son territoire, parceque j'ai plus attentivement étudié et exploré son sol, c’est aussi parce que jai pensé que la nomenclature des décou- vertes faites sur le territoire d’une seule commune, dans un temps déterminé, donnerait une plus juste idée de ce qu’il serait possible de rencontrer dans les autres plaines de notre région, si des recherches aussi actives y étaient entreprises. Il n’est pas étonnant que Manneville ait été occupé par les premiers peuples qui sont venus s’établir dans nos contrées ; sa position élevée au dessus de la vallée de la Risle, ses vallons boi- sés, ses champs sur les plateaux propres à fournir d’abondants pâturages et plus tard une facile culture, ont dû être un grand attrait pour ces hommes qui, déjà, se montraient si intelligents quand il s’agissait de choisir un lieu de long séjour. Il a, en effet, été le centre d’une population nombreuse, qui s’y est très ancien- nement établie et qui y a séjourné longtemps. La multitude comme le genre des objets préhistoriques recueillis sur son territoire en donnent la preuve certaine. On ne rencontre pas seulement à Manneville la pierre de fronde et la hache du guerrier vagabond, la tête d’épieu, la pointe de flèche du chasseur errant, mais un nombre considérable d’outils qui ne se peuvent trouver que dans un lieu de résidence fixe et qui attestent un centre industriel. Les grattoirs employés pour travailler les peaux et pour obtenir du feu, recouvrent les champs de culture sous les formes les plus variées ; les ciseaux taillés et polis, pour travailler le bois, les forets pour le creuser, les tranchets, les couteaux ou lames de silex pour dépecer les ani- maux tués à la chasse, se rencontrent partout sur le sol, mêlés et confondus. On y trouve également les grossiers outils qui ont servi à fabriquer les instruments plus finis : percuteurs, outils éclateurs, polissoirs, de même que la matière première avec laquelle ils ont été fabriqués : noyaux, éclats, déchets en quantité innombrable et attestant, par la nature de leur roche, qu’ils ont été extraits par l’ouvrier du lieu même où il avait établi ses ateliers. Je lai déjà dit, les découvertes préhistoriques de Manneville ne datent guère que de deux années. On avait bien rencontré, sur son territoire, des traces de l'occupation romaine et du séjour des Francs : presque aucune trouvaille des âges de la pierre n’y avait été signalée. Je ne connais comme découverts, avant cette époque, qu’un grain de collier Gaulois, deux petites haches en diorite, 88 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE une hache ovalaire en silex rose et une autre en silex blanc à côtés aplatis, longue de 12 centim; (collection de M. D. Fou- quer, à Manneville.) Un jeune cultivateur de ma paroisse, M. Léon Bisson, qui bien d’autres fois depuis a eu la main heureuse, rencontre un jour par hasard, dans un champ nouvellement retourné par sa charrue, une hachette en silex blanc, longue de 16 centim., d’une conser- vation parfaite. Il veut bien me l’offrir et quelques jours après il me remet encore un polissoir en grès, ramassé au même endroit. Ces deux découvertes me donnent idée de chercher moi-même ; je me mets à battre les champs de Manneville et j'ai bientôt la certitude qu’ils abondent en silex travaillés, qu’il n’y a pour ainsi dire qu’à se baisser pour en recueillir. On est tout étonné d’abord de me voir ainsi parcourir la plaine, explorer sillon par sillon, les terres nouvellement travaillées et lavées par l’eau de pluie. Mais je porte sur moi un exemplaire ou un dessin des outils le mieux caractérisés et le plus fréquem- ment rencontrés ; l’étonnement diminue : chacun se met à chercher de son côté ; les cultivateurs particulièrement, en travail- lant leurs terres, et il en est bien peu parmi eux qui, un jour ou l’autre ne m’aient apporté quelques bons silex. J'ai appris aux enfants des écoles à connaître les outils et les armes de pierre. Il en est aussi un bon nombre parmi eux qui m'ont remis de belles pièces. Je dois ici une mention spéciale à M. Vaudran, instituteur à Manneville et à Mr° Vaudran. Leurs fréquentes excursions dans les champs qui avoisinent l’école com- munale ont eu souvent un heureux succès. Ils ont trouvé un cer- tain nombre d’outils bien finis, entr’autres une magnifique tête de flèche recueillie par M"° Vaudran, plusieurs hachettes, plu- sieurs ciseaux et tranchets, objets qu’ils m’ont toujours offerts avec le plus entier désintéressement. Ainsi aidé par bon nombre d’habitants de Manneville, j’ai pu réunir en fort peu de temps une quantité considérable d’outils de pierre; mais la richesse du sol, la facilité de trouver, donne bientôt à d’autres personnes la pensée de chercher des silex. D’autres collections se forment à côté de la mienne. Je ne suis plus seul à battre les champs : tantôt cherchant côte à côte, tantôt nous pressant pour devancer d’autres chercheurs dans un champ fraîchement retourné, tantôt rebattant avec soin les endroits où ils sont passés, nous nous faisons part de nos mutuelles décou- vertes, nous nous désignons les uns aux autres les endroits où GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES 89 nous avons été le plus heureux; une bonne trouvaille faite par l’un de nous redouble le courage de tous et on se met à chercher avec une nouvelle ardeur. Grâce à cette émulation, à cette activité de recherches nous possédons à Manneville un ensemble de décou- vertes vraiment imposant. On en jugera par la nomenclature qui termine ce travail. Un seul chercheur n’aurait jamais pu, même en beaucoup plus de temps, trouver la quantité et la variété d'instruments de pierre tombés dans nos mains. Parmi nos collectionneurs de Manneville, je citerai M. Delphin Carrey, géomètre, dont la collection se compose de près de 500 pièces bien authentiques ; les enfants de M. H. Hoiïnaut qui pos- sèdent un certain nombre d’outils intéressants, entr’autres trois pointes de flèches recueillies dans l’espace de quelques mois par Mie Adrienne Hoinaut; M! Elise Thouroude, femme aussi mo- deste qu’intelligente et instruite. Un jour, elle a occasion de voir mes silex : de suite elle se procure plusieurs ouvrages traitant de préhistoire, elle les lit attentivement et elle se met à chercher elle- même en compagnie d’une personne dévouce. En moins de temps encore que moi, elle réunit un bon nombre d’outils de choix, elle a la bonne fortune de recueillir à elle seule 8 têtes de flèches. (Je ferai remarquer que sur 23 pointes de flèches trouvées à Manneville, 16 ont été récoltées par des dames). Je pensais au début de mes recherches ne point pouvoir faire remonter l'occupation de Manneville au delà de l’époque néolithique ; les armes et outils le plus fréquemment rencontrés appartiennent à la pierre polie. Un examen plus attentif de cer- tains silex, de leur forme, de leur patine, de leur gisemeut, m'a bientôt donné la certitude que notre région était déjà habitée dès les temps quaternaires, L'homme, témoin des phénomènes si éton- nants qui ont marque la fin des temps géologiques, a vécu dans nos contrées. Ses armes et ses outils grossièrement travaillés sont là pour attester son passage; ils se rencontrent sur nos pla- teaux, quelquefois à la surface, lorsque le diluvium affleure, plus souvent à une certaine profondeur dans le sol où, jusqu’à présent, le hasard seul les a fait découvrir. Ces outils sont peut-être aussi abondants à Manneville que ceux de la pierre polie ; s’ils figurent en plus petit nombre dans nos collections, c’est que, ordinaire- ment, il faut fouiller la terre pour trouver leur gisement. Nous pouvons exhiber, comme appartenant à cette époque reculée, cinq têtes d’épieu, forme ovalaire du type Chelleen. L'une d’elles, malheureusement brisée par lamoitié, porte des deux 90 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE côtés et vers la pointe des retailles fines et régulières. Sa patine brillante, d’un brun foncé, lui donne d’une manière irrécusable le cachet du silex paléolithique. Elle a, d’ailleurs, été rencontrée à plus d’un mètre de profondeur dans le sol (Collection M. Carrey). Outre ces pièces de choix, nous avons recueilli à divers endroits, sur les points les plus rapprochés de la vallée de la Risle, une demi douzaine de haches éclatées, un certain nombre d’éclats et de lames de silex, plusieurs pointes moustériennes, retaillées d’un seul côté, quelques percuteurs, environ $o racloirs. Nous possédons quelques haches éclatées et taillées que j’hésite à ranger parmi les silex quaternaires. Leur forme néolithique, l’absence de patine, le fait de les avoir constamment rencontrés à la surface m’empêchent de leur attribuer une plus haute antiquité; ces celts, contrairement à l’opinion de quelques auteurs, ne sont point pourtant des ébauches, des outils dégrossis et disposés pour le polissage. Tels qu'ils sont, ce sont des outils achevés, leur tranchant est façonné avec tant de soin qu’il serait inutile de les aiguiser davantage; outre cela, la plupart portent des traces évi- dentes de service et d’usure ; pour moi, ce sont des outils moins soignés auxquels l’ouvrier a attaché une moindre importance, pro- bablement à cause de leur destination. Les silex néolithiques de Manneville, suivant leur genre, ressem- blent aux armes et aux outils des autres stations de la même époque ; il y a cette différence , et encore elle n’atteint pas la forme, c’est que quelques outils finement travaillés ailleurs seront ici grossièrement exécutés, tandis que d’autres mal façonnés en d’autres lieux seront chez nous généralement mieux faits, plus réguliers, plus finis. Si nous n’avions quelques bonnes découvertes assez récentes, les percuteurs trouvés par nous pourraient être mis au nombre de ces instruments défavorisés pour l’exécution : ils sont abon- dants, ils portent des marques irrécusables d’authenticité, mais à quelques exceptions près, ils ne sont pas beaux; ils n’offrent pas cette forme globuleuse régulière que j’ai rencontrée dans d’autres stations. En général, ils sont oblongs, souvent ils ne portent de trace de service que sur deux de leurs faces. Leur taille varie depuis 3 centimètres de diamètre jusque 8 à 9 centimètres. Nous considérons comme pierres de jet quelques silex ayant la forme de percuteurs, taillés à facettes, mais beaucoup plus petits. Les noyaux de silex ont quelquefois une forme quadrangulaire, plus souvent ils ressemblent à un cône polygonal. Nous en possédons GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES 91 à trois vraiment intéressants : ils po tent sur leurs côtés de petites facettes régulières larges d’un demi centimètre, résultant de l’enlè- vement de fines lames de silex adroitement détachées. On n’a pas rencontré, à Manneville, de polissoirs à rainure; cela ne dit pas qu’ils n’ont jamais été employés ici. Ces pierres d’une certaine dimension ont pu être brisées ou employées dans les maçonneries. En revanche, nous avons ramassé une douzaine de petites pierres en grés ayant une forme oblongue, comme les percuteurs, et por- tant sur une de leurs faces une usure en creux qui atteste qu’ils ont servi à polir. Deux autres pierres plates en grés, trouvées au début de nos recherches et ayant environ 20 centimètres de long sur douze de large, sont usées profondément et d’uue manière concave : elles ont dû être employées comme polissoirs dormants. Au reste, je ne connais pas de roche plus favorable que le grès pour polir le silex. M. D. Fouquer qui a eu la chance de rencontrer le premier des haches polies à Manneville s’est amusé, pour se rendre compte de la difficulté du travail à imiter ses trouvailles ; il a tenté divers moyens et employé plusieurs roches plus dures que le silex : jamais il n’a mieux réussi que lorsqu'il s’est servi d’un polissoir en grés arrosé d’eau et légérement semé d’une fine pous- sière de sable. Il faittrès facilement une hache de marbre; avec plus de temps, il en obtient une très belle en silex, sans la patine, toutefois ; le résultat serait plus rapide s’il choisissait ses cailloux à polir parmi ceux qui sont tout fraîchement extraits des carrières. Nous devons ranger au nombre des outils ayant servi à fabriquer d’autres instruments de pierres, certains silex décrits par M. de Mortillet dans son musée préhistorique et auxquels il donne le nom de relouchoirs (outils éelateurs, de John Evans). Ces outils devaient être particulièrement employés pour la retaille des lames de silex et la fabrication de têtes de flèche ; nous en avons recueilli une soixantaine, ainsi qu’un plus grand nombre de silex qui leur ressemblent plus ou moins par la forme et dont la desti- nation nous est inconnue, Ici comme ailleurs, ce sont les grattoirs qui se trouvent en plus grand nombre, ce sont les outils les plus simples ; l’ouvrier, lorsqu'il en avait besoin, pouvait en rien de temps s’en fabriquer un à l’endroit même où il se trouvait. Outre cela, le grattoir servait à une foule d’usages : pour préparer les peaux, racler et raboter le bois, et c’est un des outils dont l'emploi a duré le plus longtemps, comme pierre à feu. Nous rencontrons à Manneville toutes les formes désignées par John Evans : grattoir fer à cheval, bec de canard, coquille d’huître, cerf 92 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE volant ; grattoir creux, rond, droit, de côté, grattoir à tige, grattoir foret. Les plus communs sont : le grattoir fer à cheval et le bec de canard; les plus rares, le grattoir rond et le grattoir droit. J'ai ramassé un certain nombre de grattoirs ayant la forme d’une lançette et retaillés régulièrement des deux côtés. D’autres grattoirs recueillis non seulement par moi, méritent une mention spéciale. Ils ont la forme du fer à cheval, mais au milieu de l’extrémité taillée en biseau s’avance une pointe qui leur donne la forme du champ d’un blason. Les forets ou perçoirs sont également nombreux à Manneville et affectent diverses formes. Nous en trouvons de toutés les lon- gueurs et de toutes les grosseurs, quelquefois le même silex en porte deux : l’un à pointe très fine pour commencer le forage, l’autre plus gros pour continuer et agrandir le trou déjà fait. Certains de ces forets ont une pointe très ténue et très acérée ; ils ont pu servir à graver sur la pierre ou sur livoire ces antiques dessins que l’on rencontre parfois dans les cavernes de la pierre polie ou bien encore au tatouage, puisque nous savons par l’histoire qu’il était en usage chez les anciens peuples de la Gaule. Les éclats et les lames de silex ne sont pas rares dans notre station, mais nous n'avons pas souvent trouvé de belles pièces. Je citerai 4 petites lames d’un demi centimètre de large sur 4 cent. de long, et trois autres lames habilement détachées du nucléus ; l’une d’elles a 14 cent. de long. Nous sommes bien pauvres pour les scies, nous n’en comptons que trois, encore sont-elles peu intéressantes. Nous avons également peu de fêtes de javelot et elles ne sont pas non plus remarquables. En revanche, il y a peu de stations aussi riches que la nôtre pour les féles de fléche : nous en possédons 23, non- seulement bien certaines, mais toutes très belles. Parlant il y a peu de temps à un savant compétent, de notre succès de ce côté, j'ai eu bien difhcile à lui persuader que toutes nos pointes avaient été recueillies en deux années et sur le seul territoire de Manneville. Il me disait que ces flèches devaient être rares à cause de la difficulté de leur fabrication, que pour cela elles devaient être conservées soigneusement comme amulettes ou comme objets de luxe, et que ce n’était point de semblables pointes qu’on lançait à pure perte dans les combats ou à la chasse. Je conviens que de simples silex aigus ont pu être employés comme têtes de flèche, avec peu ou point de travail, et rendre le même service; j'en pos- sède un certain nombre qui me semblent avoir rempli cet usage ; je sais aussi que les pointes de flêche plus finement travaillées GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES 93 ont èté longtemps considérées comme amulettes et comme telles, portées religieusement par leurs supertitieux possesseurs ; mais qu’il faille conclure de là que c’était leur destination première, je ne le crois pas. La flèche ramassée à Manneville était l’arme ordi- naire de l’homme chasseur et guerrier ; elle était finement et régulièrement façonnée parcequ'il mettait sa gloire à avoir de belles armes, parcequ'’il avait, pour les faire si parfaites, beaucoup de temps libre, la même patience que les sauvages de nos jours mettent à fabriquer leurs outils et leurs armes, une adresse pour travailler le silex acquise par une longue expérience et lui permet- tant de jeter au rebut, sans aucun regret, toutes les pièces manquées. Aussi, nous en sommes convaincus, sans compter celles qui sont profondément enfoncées dans le sol ou qui ont été brisées, anéanties dans une foule de circonstances, beaucoup de flèches sont encore à recueillir dans les champs de Manneville ; le zèle et l’acti- vité de nos chercheurs nous assurent de nouvelles découvertes. La forme la plus ordinaire des flèches de la localité est celle que John Evans signale également comme plus fréquemment rencon- trée en France : tige ou soie centrale avec deux barbes régulières. Les numéros $ et 6 de la planche I, toutes les flèches représentées sur la planche IT, appartiennent à ce type. Les numéros 3 et 4, planche I, représentent deux belles têtes de flèche en silex blond, translucide, régulièrement taillées ; elles n’ont jamais eu de tige centrale. Nous avons ramassé deux pointes de flèche, numéros 1 et 2, planche I, qui ont une forme triangulaire; elles n’ont pas de soie, ne sont point barbelées, mais elles portent de fines retailles des deux côtés et sur tous leurs bords. Sept autres, recueillies tout récemment, mais trop tard malheu- reusement pour qu'il ait été possible d’en donner le dessin, nous offrent, avec un travail aussi soigné, des variétés de forme bien intéressantes. Outre bon nombre de silex taillés en forme de hache : silex hachettiformes, nous avons rencontré une centaine de #ranchets biseautés d’une forme précise et bien arrêtée. Les ciseaux taillés et polis, sauf la dimension et une forme un peu plus allongée, ressemblent à nos hachettes ; quel- ques-uns ne sont polis qu’au tranchant, d’autres, le sont entière- ment. Deux beaux ciseaux taillés en silex noir sénonien font partie de ma collection ; ils sont tout-à-fait semblables et ont été obtenus par le même procédé. Un éclat a été adroitement détaché d’un noyau de silex, on l’a taillé du côté de la croûte pour amener à la grosseur voulue, on a ensuite aiguisé le bout opposé 94 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE au conchoïde de percussion, le polissage du tranchant a terminé le travail. Nos haches polies affectant presque toutes les formes connues, nous ne pouvons pas dire, ce qui a lieu dans bien d’autres stations, que nous possédons un type spécial plus géné- ralement adopté; nous avons des haches à forme ovale, à côtés aigus et à côtés aplatis, nous trouvons des celts épais, des celts minces, des celts à tranchant droit, à tranchant arrondi et à tranchant oblique. Comme les ciseaux quelques-uns ne sont polis qu’au tranchant, d’autres émoussés par l’usage ont été retaillés à grands éclats, beaucoup semblent brisés intentionnellement ; plusieurs fragments ont été travaillés à nouveau et transformés en grattoirs ou en outils éclateurs. Les haches en roche étrangère sont en jade, en diorite et en serpentine ; elles sont beaucoup moins nombreuses et de plus petite dimension, elles devaient être emmanchées dans des cornes de cerf; l’une d’entre elles porte sur ses deux côtés un commencement de perforation. Ces outils, certainement importés, sont peut-être les modèles qui ont appris à nos indigènes à polir leurs silex. Un mortier, un grain de col- lier gaulois et un petit vase en silex complètent la série des objets préhistoriques recueillis à Manneville. La pierre qui forme le vase est une géode ronde aplatie ; l’ouvrier a deviné qu’elle était creuse, il a percé une petite ouverture sur une des faces plates, il l’a ensuite régulièrement agrandie avec un outil éclateur, ainsi il obtenait un récipient capable de contenir des couleurs pour se tatouer ou des poisons pour ses flèches. (Pline nous apprend que les Celts trempaient leursflèches dans le suc de plantes vénéneuses). Outre les quelques haches exotiques mentionnées plus haut, les instruments de pierre recueillis par nous sont en silex de la loca- lité. La majeure païtie est en silex noir de la craie turonienne, les plus beaux sont en silex noir de la craie senonienne, beaucoup et particulièrement les haches polies sont en silex blanc de l’argile à silex. Manneville-sur-Risle s’étend sur une surface de 932 hectares; c’est un espace suffisant pour contenir une grande cité ; ses limites qui sont d’un côté la rivière de la Risle, d’autre part, la voie romaine de Noviomagus à Juliobona et d'anciens chemins également battus par les conquérants des Gaules, mais probablement tracés avant leur passage, nous indiquent que depuis des temps bien reculés son étendue de territoire est la même. Au moyen-âge, quelques manoirs fièrement assis sur ses hauteurs se coudoyaient par leurs dépendances seigneuriales. Plusieurs siècles auparavant GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES 95 les Francs avaient couvert de leurs demeures la plus grande partie de ses terres ; le cimetière Mérovingien qui occupe vers l’Est tout le versant de la colline donne idée de ce que devait être la cité des vivants quand la nécropole est si peuplée. Les Romains avaient précédé les Francs à Manneviile (Magna Villa), rempli de leurs villas, d'ateliers industriels, les parties habitables de la vallée et des plateaux ; des substructions romaines d’une certaine impor- tance et dont on peut, à certaines époques de l’année, suivre les directions diverses, ont été rencontrées à différents endroits ; on reconnaît au laitier de fer (1) gisant à la surface du sol Pemplace- ment de deux forges de la même époque; les derniers vestiges de deux fours à poterie viennent de disparaître sous la pioche des terrassiers. J'ai rencontré, il y a quelques mois, au pied d’un vallon où l’on a fait plusieurs excavations pour établir un tir, un ancien four à chaux rempli de débris de cuisine des Romains : ossements, moules, coquillages, fragments de poterie noire et de poterie rouge, dite de Samos. Manneville, résidence d’une population puissante et nombreuse aux premiers temps de notre histoire, a bien perdu aujourd’hui de son antique splendeur ; ila perdu jusqu’au souvenir de sa gloire d'autrefois ; il ne sait presque rien de son passé, et sans les nombreux débris qui jonchent le sol et que retourne la charrue: tuiles à rebords, fragments de poterie, meules, pierres de petit appareil en calcaire travertin, petits cubes de verre et de pierre provenant de mosaïques, sans les lourds cercueils de pierre que le paysan rencontre parfois et qu’il brise avec sa pioche lorsqu'il ne les réserve pas à un usage immonde (2), cette modeste commune ne penserait pas avoir eu un jour une plus grande importance, elle ne trouverait dans son histoire aucun document qui lui permette de faire remonter son origine au-delà de 7 ou 8 siècles. Les 230 feux qui la composent sont distribuës en nombreux hameaux ; à les voir semés de loin en loin sur les diverses parties de son antique enceinte, on dirait quelques arbres d’une grande forêt restés debout après un violent incen- die ou d’impétueux ouragans ; l'herbe pousse sur ses chemins soli- (1) Le minerai de fer est assez abondant dans quelques terrains de Man- neville ; il peut se faire qu’il ait été exploité autrefois. (2) Je n’ai pu, jusqu’à ce jour, en préserver que trois de la destruction. Ces cercueïls sont pour la plupart en craie marneuse et ont été extraits de carrières de la localité ; d'autres, en plus petit nombre et composés de deux ou trois morceaux, sont en calcaire travertin et peuvent venir de Carbec-Gres- tain ou de St-Maclou. 96 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE taires ; des bois, de vastes champs occupent l’espace laissé vide. Or, c’est dans ces champs et au milieu même des ruines accumulées de tous Les âges que nous retrouvons les vestiges d’une population plus ancienne encore et qui a séjourné longtemps sur son territoire ; c’est même, nous l’avons constaté maintes et maintes fois, vers les endroits où la tuile antique pave les champs et où les chemins romains étalent leur profondes et solides chaussées, que nous avons fait nos plus belles trouvailles. Le cimetière Mérovingien où dorment en rangs pressés, tournés vers l'Orient, les Francs de Manneville, nous a également offert des armes et des outils de silex : des éclats, des grattoirs, un percuteur, une pointe de flèche, trois haches polies. Faut-il en conclure que les Romains arrivant dans nos contrées ont eu à combattre une population ignorant encore l’usage des métaux, et qu'après l’avoir vaincue ils se sont assis sur les lieux mème occupés par elle, ou bien que l'usage de la pierre a persévéré de leur temps, chez nous, et a sur- vécu à leur passage ? Non, et ce serait méconnaître ce que nous apprend l’histoire. Nous savons par elle que les Gaulois, nos pères, se servaient de fer au temps de la conquête et que, bien longtemps avant de connaître le fer, ils avaient abandonné la pierre pour fondre le bronze (1) et l’employer aux divers usages de la vie. Ils pouvaient encore en certaines circonstances se servir d’instruments de silex : pour la préparation des peaux, pour écra- ser le grain ; je dis la même chose de leurs vainqueurs et de ceux qui sont venus après eux ; ils portaient les uns et les autres des pierres comme amulettes, même d’anciens outils de pierre; ils se servaient de silex dans leurs cérémonies funèbres : bon nombre d’éclats rencontrés autour des sépultures Mérovingiennes me semblent y avoir été déposés par les Francs eux-mêmes ; la pointe de flèche en pierre a été longtemps en usage dans les temps historiques, mais l’âge du fer avait succédé aux âges de bronze et de la pierre, la tradition m'avait pas mème conservé le souvenir de ces temps lointains. Comment donc expliquer la présence de silex travaillés particulièrement aux endroits où se rencontrent des vestiges de l’occupation romaine ? J'en donnerai la raison en répétant ce que j'ai dit au début de ce travail : les plus anciens peuples qui ont pénétré (1) Des haches de bronze ont été recueillies tout autour du territoire de Manneville ; une m'a été désignée comme ramassée près le cimetière Méro- vingien ; je possède une petite pointe de flèche, également de bronze, trouvée dans nos plaines. GISEMENTS DE SILEX PRÉHISTORIQUES 97 dans notre contrée se sont montrés très intelligents pour le choix des lieux qu’ils ont occupé, leur longue descendance est demeurée attachée au même sol et y a suivi le progrès de la civilisation, les différentes étapes de l’industrie humaine. Elle y a séjourné jusqu’à ce qu’elle ait été dépossédée par les envahisseurs qui se sont assis aux endroits même de sa résidence et ont campé dans ses propres retranchements. Ce fait n’est point particulier à Manneville, d’autres que moi l’ont observé ailleurs, et j’ai eu l’occasion de le remarquer moi-même dans toutes les localités environnantes. Je le prouverai en parlant de découvertes préhistoriques en dehors de Manneville. De mème que nous rencontrons des débris romains sur toutes les parties du territoire de Manneville, au milieu, à ses extrémités, de même aussi nous trouvons partout des silex travaillés. J'avais remarqué au commencement de mes recherches quelques champs qui me semblaient plus riches; après, j’ai dû noter seulement les terres où je ne trouvais pas, maintenant je ne puis plus faire de distinction ; on a trouvé partout. Le percuteur, le polissoir, l'outil éclateur sont des outils d'atelier et de résidence, nous les avons ramassés à tous les coins et dans toutes les direc- tions. Plus nous nous éloignons des bords de la vallée, plus cepen- dant les outils deviennent rares, mais souvent ils sont plus finis. Il n’y a presque rien sur les pentes inclinées des vallons, comme aux endroits où l'argile à silex apparaît à découvert : les meilleurs terrains sont le diluvium et le limon jaune ou terre franche. Si nous trouvons les silex disséminés à peu près partout, on ne peut en induire que nos plaines ont été autrefois complètement couvertes par les habitations des Celts ; ces peuples, tout ensemble pasteurs, chasseurs et guerriers, devaient souvent changer leurs lieux de campement et errer d’une contrée à l’autre, selon l'abondance des pâturages et les besoins, comme la conservation de leur propre existence, c’est pour cela que nous trouvons en tous endroits trace de leur passage. Les champs ont été trop souvent fouillés et retournés par la culture pour qu’il nous ait été donné d’y ren- contrer, comme en d’autres stations gauloises, l’emplacement d'anciens foyers. Après avoir parcouru ces quelques pages, on pourrait prendre Manneville pour une station exceptionnelle et toute privilégiée ; j'ai pourtant la preuve qu’un grand nombre de communes de larrondissement de Pont-Audemer offriraient aux recherches, d’aussi heureux succès. Grâce au zèle tout-à-fait désintéressé de M. Guincètre, instituteur à Corneville, qui m’a recueilli des 98 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE silex et m'en a fait ramasser par ses élèves, grâce à la bien- veillance de plusieuts autres instituteurs voisins, je possède une bonne série d’outils de pierre provenant de diverses localités de nos environs. Or, chose digne de remarque, c’est toujours aux endroits où les Romains ont laissé trace de leur passage que les découvertes ont été le plus fructueuses. Corneville possède deux anciens retranchements : la Citadelle et le camp d'Harcourt ; plu- sieurs haches polies, un ciseau taillé et poli au tranchant ont été ramassés dans leur enceinte même, par pur hasard et sans recher- ches spéciales. Des grattoirs, des tranchets, des percuteurs, recou- vrent le sol aux alentours, exactement comme à Manneville. A Conde-sur-Risle, M. linstituteur m’a remis une belle hachette en silex jaune à côtés aplatis, longue de 27 centimètres. On l'avait trouvée à un jet de pierre d’un ancien camp assis sur cette com- mune.M.Homo, pharmacien à Pont-Audemer, a ramassé quelques bons silex à peu près au même endroit ; Campigny et la Roque ont donné les mèmes résultats et dans les mêmes circonstances. Nous savons déjà que M. Beaugrand, membre de la Société Géologique de Normandie, a trouvé une belle tête de flèche dans les champs de labour de cette dernière localité. Montfort-sur-Risle nous a offert plusieurs Celts polis et une magnifique hache hermi- nette représentée de grandeur naturelle, planche III. Cette belle pièce, par sa taille ondée, la nature du silex, la teinte pâle de sa patine, ressemble tout-à-fait aux silex taillés du Danemark. Placée à côté d’un de ces beaux outils, sa forme seule peut la faire recon- naître. Pour nous, cette herminette, malgré qu’elle soit en silex, est un outil importé comme les haches en jade et en diorite. St-Christophe, Appeville, Fourmetot, Bourneville, Triqueville, Cormeilles, Pont-Audemer lui-même, ont apporté leur con- tingent. Pour mieux dire, je ne connais presque point dans l’arron- dissement de localité qui ne puisse se glorifier, à une époque plus ou moins récente, de quelques trouvailles préhistoriques. Puissent les découvertes de notre contrée encourager les amis de la science à entreprendre eux-mêmes ou à faire faire de sem- blables recherches sur les lieux qu’ils habitent. On serait plus que surpris si, un jour ou l’autre, d’intéressants débris ne venaient les dédommager de leur peine et fournir de nouveaux etutiles maté- riaux à l’histoire de nos premiers ancêtres, ces hommes dont nous ne connaissons encore la vie, les usages et les mœurs que par de pauvres outils de pierre, mais qui ne sont peut-être pas aussi éloignés des temps historiques que nous pouvons le penser. 92 NOMENCLATURE DES OUTILS DE PIERRE RECUEILLIS A MAYNEVILLE-SUR-RISLE DANS L'ESPACE DE DEUX ANNÉES (Surface approximative des champs explorés : 489 hectares). A LE ja |ié|io|2*|$8i LE LE 0 = É SN ET RE OO | PE RER ÉPOQUE PALÉOLITHIQUE sain pginaieielate s s ea 0 01e 0 » » » » DOS TOM S 2 6 » asus, 10 15 S » RACIOITS A een eme 8 10 6 » BETCOIES emma sat een are I » » » DÉTESdÉPIEU eee. ones 2 I » » LES RATE ME » 3 » » rt ile st lee 6 12 15 I MOOD RONN 2 » 3 » sos eine oo 0e ee 90 20 0e 7 S 6 » PONSSOITS ENNPTES AR ee » 5 > » Outils éclateurs, retouchoirs... 15 12 6 » Outils indéterminés ........... 40 30 18 » Grattoirs.2 21.2 -.05 déco bDoc 200 | 240 | 67 60 ÉONETS T2 ere ueleiee 35 so 20 » ÉD 00 80 25 12 » ne oisin sions case ue sn) se eme ne 2 Î » » » PHÉTES ASNJAVElOR,. 2. ner uee 8 6 s 4 » Pomtes derfiéche 7-0... 6 8 6 3 » de ddcple 18 12 12 6 f Sad00n DO De GOT oTdoo 42 25 30 5 » LÉO CC 00600 6 6 S 3 » CSEAURIPOS RES Pere Le 7 2 2 I » ÉTACHESENNSITEXS 2 eee 40 10 II 6 S Haches, roches étrangères. ...., S ) » I » Grainidercollier.. 1.1.1 I » » » » MONTE es ldsle sde anses ct o » » » GE DO ADD 10 » 1 » » » 1082 | 496 | 481 | 194 67 Récapitulation pour chaque genre Eu OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ‘& ZOOLOGIQUES FAITES DANS LA BAIE DE SEINE SUR LES RIVAGES ET LES FALAISES QUI LIMITENT CETTE BAIE Par G, LENNIER I'ESTUAIRE DE PANSEINE En prolongeant la ligne des falaises qui bordent la mer entre le cap d’Antifer et le cap de la Hève, on rencontre sur la rive gauche de lembouchure de la Seine, la vallée de la Dives, qui vient se terminer à la pointe de Beuzeval. Cette ligne indique avec assez d’exactitude les limites de lestuaire vers l’ouest, c’est-à-dire la limite des dépôts sableux qui forment les bancs de l’embouchure de la Seine. Quand les marins l’ont franchie en venantde l’ouest, dit Baude, ils se croient en rivière. En amont vers l’est, l’estuaire commence à Quillebeuf ; il peut être limité vers ce point par une ligne tirée de la pointe de Quillebeuf à la pointe de Tan- carville. C’est donc dans l’espace compris entre la Hève, Beuzeval, Quillebeuf et Tancarville que se produisent les phénomènes naturels de la formation des terrains d’alluvion et l'accumulation des bancs de sables. C’est dans cette partie, et principalement à l’est d’une ligne tirée du Hoc à Honfleur, que les bancs de sables, sous l'influence des courants et des vents, se déplacent et modifient le chenal qui conduit les eaux du fleuve à la mer. Lorsque la marée monte, l’eau de la mer se précipite dans la large baie ouverte entre le cap de la Hève et la pointe de Dives ; elle rencontre le courant d’eau saumâtre qui s’était formé à la marée baissante et qui descendait du fleuve. Il y à alors, entre ces deux courants contraires, un moment de lutte qui se traduit par une déviation et un renversement du Courant qui vient d’amont, de la Seine. Les eaux qui viennent de la mer dans la baie de Seine forment plusieurs branches de courant : la plus puissante celle du milieu, vient heurter la côte à Antifer, où elle se divise en deux pour former le courant qui longe la côte d’Antifer à la baie de Seine, OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES IOI et d’Antifer jusqu’au détroit de Calais. A Barfleur, une autre branche se détache vers le Sud et suit, pour entrer dans la baie, les côtes de la Basse-Normandie. La violence des courants est très variable dans la baie de Seine; elle dépend de la force des marées, des crues de la Seine, de la position des bancs de sables et aussi de la direction des vents. La salure des eaux est aussi sujette à de grandes variations qui se font sentir jusqu’au Havre, à la marée baissante, et qui sont produites par la plus ou moins grande abondance des eaux douces versées dans la baie par le fleuve. De nombreux dépôts se forment dans la baie de Seine et presque tous les matériaux : galets, argiles, sables, qui composent ces dépôts, sont empruntés aux rivages maritimes de la Seine-Infe- rieure et du Calvados ; lapport fluvial n’entre, croyons nous, que pour une part infiniment minime dans la formation des allu- vionset, quant aux bancs de sables, ils viennent bien évidemment de la mer, j’entends des plages maritimes. On peut considérer qu’il y a dans la baie Seine plusieurs sortes de dépôts : 1° Un cordon littoral de galets formé sur place, ou charrié le long des rivages par l’action combinée des courants et de la percussion des vagues ; 2° une masse de sables, très coquilliers sur les côtes du Calvados, que le vent soulève et entraîne dans les terres où se forment des dunes, comme à Deauville ; ou bien que les courants transportent, amoncellent en bancs qui sans cesse modifient les passes, les chenaux don- nant accès dans le fleuve. Enfin, d’autres dépôts sont formés de sédiments fins, d’ar- giles empruntés aux falaises de Dives, de Villers-sur-Mer, de Villerville et de la base du cap de la Hève. Le limon du fleuve, plus ou moins abondant suivant les conditions atmosphériques du bassin de la Haute-Seine, vient se confondre avec les sédi- ments fins provenant des falaises maritimes. En temps ordinaire, la Seine charrie peu entre Rouen et Quillebeuf. Cependant, lors des grandes crues ou à la suite des débâcles de glaces, elle apporte un petit contingent aux dépôts, aux attérissements de embouchure. Le sol sous-marin, dans toute la partie ouest de l'estuaire, est forme d’argiles dufes, alternant avec des bancs calcaires, que nous retrouvons sur le littoral, de Dives à Trouville. Au nord, au pied du cap de la Hève, on rencontre aussi des argïles; elles s'étendent, en plongeant vers le nord-est, sous la ville du Havre. 162 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Les lits calcaires forment les bancs durs (calcaire coquillier et bancs de plomb) que l’on peut observer au cap de la Hève, sur la plage, au niveau moyen et inférieur des marées. Les argiles et les calcaires marneux du cap de la Hève appar- tiennent à la partie supérieure du terrain jurassique, connue des géologues sous le nom d’argiles du Kimméridge. Les assises cor- respondantes se voient sur la rive sud dc l’estuaire, entre Villerville et Honfleur. À Villerville, elles s’élèvent au-dessus du niveau de la mer et l’on voit apparaître, en face de ce village, une assise de calcaires jaunâtres, alternant avec des marnes de même couleur. Cette assise se relève vers Trouville, où elle acquiert une assez grande épaisseur. Sur le banc du Rattier, nous avons reconnu les affleurements de ces mêmes couches calcaires, bien qu’au Havre nous n’en ayons rencontré aucune trace dans les sondages. Il est probable que les couches calcaires que l’on rencontre entre Villerville et Trouville ne s'étendent pas à une grande dis- tance de la côte, vers le Nord. Ou bien si elles continuent, leur composition minéralogique chanze ; elles deviennent argileuses. Au-dessus de ces argiles, on voit, à Honfleur et au cap de la Hève, une assise sableuse qui, géologiquement, appartient aux couches inférieures du terrain crétacé. Ces sables forment une large bande quitraverse d’une rive à l’autre et qui occupe, au- dessous des bancs de formation moderne, l’espace compris entre Harfleur et Orcher, sur la rive nord, entre Honfteur et Fique- fleur sur la rive sud. A l’est de la ligne tirée de Fiquefleur à Orcher, tous les fonds de l’estuaire sont formés par des roches calcaires appartenant à la craie glauconieuse, à la craie marneuse ou à la craie blanche, dont les massifs stratifiés se voient partout dans les falaises des rives nord et sud. Les assises argileuses anciennes qui se trouvent sous le Havre et sur lesquelles repose l’alluvion, ont été pénétrées par un sondage exécuté en 1834, sur la place Louis-Philippe ; elles alternent avec des lits de calcaires marneux qui furent tra- versés jusqu’à 108" de profondeur. Il est probable que, dans ce sondage, les assises Kimméridiennes ont été entièrement traver- sées et que la sonde a ensuite pénétré dans l’argile Oxfordienne. Les aroiles avec alternance de bancs calcaires que nous avons signalées à la base du cap de la Hève, forment des ondulations en traversant la baie pour aller reparaître dans les falaises de Crique- beuf et de Villerville. Deux de ces ondulations ont pour sommet le banc d’Amfard et le banc du Rattier, ainsi que nous avons pu OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 103 nous en assurer par des sondages. En effet, au-dessous des galets et des sables qui recouvrent ces bancs, on trouve, à une faible profondeur, l'argile kimméridienne. Les bancs du Rattier et d’Amfard tiennent donc à la constitution géologique ancienne de la baie de Seine, et, comme le banc de l’Eclat qui se trouve à l’ouest du cap de la Hève, ils existaient avant que les dépôts d’al- luvion eussent commencé à remplir la baie. Les phénomènes géologiques qui ont formé la baie de Seine peuvent être divisés en deux ordres. Dans le premier, nous ran- geons le creusement de la baie par les eaux de la mer qui allait jusqu’à Quillebeuf et pénétrait dans le Marais Vernier. Dans le second, le remplissage, le comblement qui se continue encore de nos jours, sous nos yeux, par la destruction des falaises dela Seine-Inférieure et de celles du Calvados. PROVENANCE DES MATÉRIAUX Les éboulements de la falaise brisent les rochers en fragments plus ou moins considérables et projettent ces fragments dans la zone du balancement des marées. La mer s'empare des parties les moins grosses, elle les déplace par le choc des vagues, les remonte et les descend sur la plage et les fait ainsi cheminer, par un mouvement de zig-zag, vers l'embouchure de la Seine. Dans ce mouvement, les roches perdent rapidement leurs angles, deviennent des galeis et toutes les parties détachées par le choc, par l’usure, forment le sable. Les débris provenant de la destruction des côtes, de la destruc- tion des falaises, du cap d’Antifer au cap de la Hève, ont fourni tous les galets qui s’étendent depuis Ste-Adresse jusqu’au Hoc et ceux qui, dans le Perrey, quartier du Havre voisin de la mer, forment le sol. Vers l’embouchure de la Seine, plus à l’est, on retrouve, de l’autre côte de la rivière la Lézarde, un cordon littoral de galets; mais ces galets sont formés sur place, de mème que ceux de la rive gauche au-dessus de Honfleur, des débris de la falaise, roulés par les vagues de la mer qui frappaient le pied des côtes avant la formation des grèves, des marais, des terrains d’alluvion. Ces derniers galets, dis-je, ne sont pas transportés de loin, ils ne viennent pas, comme ceux qui s'étendent sur la plage du Havre jusqu'au Hoc, de la zone littorale comprise entre le cap d’Antifer 104 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE et le cap de la Hève ; ils proviennent des falaises situées immédia-- tement au-dessus de la rive. Nous savons comment se forment les sables, par le choc, le frottement des galets. Sur les plages de la Hève au Hoc, au- dessous de la zone des galets, on rencontre généralement une seconde zone assez étroite, formée de graviers et de sables gros- siers; puis une. troisième, beaucoup plus étendue et qui, sur beaucoup de points, s’étend au fond de la mer au-dessous des plus basses mers connues: cette troisième zone est formée par du sable. Aïnsi, sous l'influence de la percussion des vagues, les rivages de la mer, dans l’espace que nous décrivons, du Hoc à la Hève, présentent trois zones. Au sommet, les galets; dans la zone moyenne, les oraviers, et à la base, les sables. Ces sables sont peu coquilliers, c’est-à-dire qu’en dehors des débris de coquilles de Moules (Mytilus edulis), on n’y rencontre presque aucuns fragments de testacés. Sur le rivage sud de l’embouchure de la Seine, entre Dives et la Risle, le littoral présente un aspect très particulier. Les plages du Calvados et le fond de la mer sont éminemment sableux. Les sables proviennent de la destruction des côtes à l’ouest de l'Orne et des silex de la craie verte qui forme le sommet des falaises, entre Dives et Honfleur; ils sont très coquilliers, c’est-à-dire qu’ils contiennent une grande quantité de coquilles bivalves bri- sées (Cardium, Mactra), etc. Pendant de longs siècles, ces sables ont comblé les anses du littoral ; ils ont formé d'immenses dépôts à l’embouchure de l'Orne, à Cabourg, à Dives, autour du mont Canisy, entre Villers-sur-Mer et Trouville ; mais aujourd’hui que toutes ces baies sont comblées, que toutes ces anses sont remplies, les sables viennent se. déposer au point de rencontre des courants de la Seine et de ceux qui viennent de la mer ; ils forment, en se con- fondant avec ceux qui proviennent de la rive droite, les écueils changeants que les pilotes nomment les bancs de la Basse-Seine. Entre Dives et Villers, nous l'avons dit plus haut, la base des falaises sur $o mètres d'épaisseur en moyenne, estformée d’argile. La partie supérieure est composée de calcaires crayeux, avec lits de silex semblables à ceux de la rive droite, à l'embouchure de la Seine, au cap de la Hève. Battues par les vents du nord et du nord-ouest si fréquents dans notre région, les falaises, de Villers à Beuzeval, embouchure de la Dives, sont détruites avec une OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 105 effrayante rapidité. Le sommet de ces falaises, formé de craie avec lits de silex, se transforme rapidement en galet qui chemine difficilement vers l’est, arrêté par les sables dans lesquels il dispa- raît. Les argiles de la base sont délayées par l’eau ; elles forment des sédiments fins que le courant de flot transporte et qui vont ainsi, en se mélangeant aux marnes produites par le lavage des roches crayeuses et aux sables fins, se déposer dans les parties où l’eau reste quelques instants stagnante. C’est ainsi que se forment les alluvions ; c’est ainsi qu’elles s'élèvent au-dessus des marées moyennes. Le sol sur lequel le Havre est bâti est aussi un sol d’alluvions, mais nous le croyons plus ancien que les mêmes terrains qui s'étendent en amont sur la même rive. La découverte d’une embarcation, sorte de pirogue creusée dans un tronc d'arbre, dans les argiles d’alluvien du Havre, à l’emplacement du bassin du Commerce, semble devoir faire remonter les dépôts de ces couches à une époque préhistorique. L’alluvion du Havre s’est formée à l’abri d’une digue de galets provenant des falaises de la Hève. Elle est composée de lits marins alternant avec des couches d’origine terrestre. À l'abri de la digue de galets, il existait un vaste marais où, en temps ordi- naire, les eaux douces venant des niveaux aquifères du coteau de Graville, entretenaient la végétation puissante qui a formé les bancs de tourbe. Mais, de temps à autre, la digue était rompue ou submergée, les eaux de la mer reprenaient pour quelque temps possession de leur ancien domaine, et y déposaient des vases qui sont devenues des argiles. Nous venons d'indiquer la provenance des sédiments qui forment les attérissements du littoral et les bancs de la baie de Seine. Il convient pensons-nous, de rapporter ici deux observations que nous avons faites sur les éboulements de la côte de la Hève, d’où proviennent une grande partie des matériaux : Sables, Silex, Argile, Marnes et Calcaires, qui forment les cor- dons littoraux et les bancs de sable de la baie de Seine. Le vendredi 14 juin 1861, au moment où les ouvriers venaient de quitter leurs travaux sur la plage, toute la partie connue sous le nom de Basses Falaises glissa lentement vers la mer, refoulant devant elle le sable et le galet, qui se trouvèrent soulevés en quelques endroits de 4 à s mètres au-dessus du niveau de la mer. Quelques gros blocs de rochers couverts de mollusques (Purpura lapillus, Littorina littorea et Mytilus edulis) furent en même temps soulevés au-dessus du niveau des eaux. 106 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE En glissant ainsi, la partie base avait isolé la falaise, qui sur- plombair considérablement. De nouveaux éboulements étaient inévitables ; dès le lendemain, de grandes fissures qui avaient été remarquées sur le haut de la falaise, s’élargirent et plus de 40,000 mètres cubes de roches roulèrent bientôt comme une avalanche jusqu'aux bords de la mer. Les blocs restés suspendus aux escarpements de la falaise, continuèrent à tomber pendant deux jours. Le troisième, nous pûmes explorer cette masse de débris; elle couvrait une surlace de 30,000 mètres, et la quantité des roches éboulées et de celles qui avaient été refoulées par l’éboulement ne pouvait être évaluée à moins de 50,000 mètres cubes. Un phénomène très curieux fut observé par toutes les personnes qui assistaient au premier glissement de la falaise. De toutes les fissures qui se produisaient dans le terrain en travail, s’échappaient des lueurs phosphorescentes qui furent comparées à la clarté quise produit à la mer, lorsque des myriades de Norti- luques viennent illuminer les flots. La présence des lueurs dont je viens de parler, peut s’expliquer par le dégagement de chaleur que devait produire le frottement de masses aussi considérables les unes contre les autres. Cette chaleur pouvait être augmentée encore par l’inflammation des pyrites blanches en décomposition, qui se trouvaient en très grande quantité dans le terrain éboulé. Le second éboulement dont nous parlerons ici, a eu lieu dans la falaise de Sainte-Adresse, au mois de juillet 1866. Le 30 juin, les basses falaises, en mouvement depuis près de deux mois, commencèrent à descendre vers la mer, en glissant sur les argiles kimméridiennes. Le même jour, des fentes se pro- duisirent sur le plateau, au-dessus du terrain en mouvement. Le lendemain, 1° juillet, les fentes s'étaient beaucoup élargies et, à dix heures du matin, une partie considérable de la falaise s’ébou- lait avec un bruit sourd et en produisant un nuage de poussière crayeuse. En tombant sur le talus d’éboulement, cette masse de roches en accéléra la marche, et toutes les basses falaises, sur une étendue d’environ $oo mètres, depuis la partie nord-ouest des parcs jusque sous les signaux, furent ébranlés par le choc et sui- virent le mouvement en avant vers la mer ; mais elles s’arrêtèrent bientôt, et les effets de l’éboulement proprement dit furent cir- conscrits sur le point où il s’était produit. En cet endroit, le talus d’éboulement avait à peu près 200 mètres de largeur et il se ter- minait, au bord de la mer, par un escarpement formé d’argiles OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 107 et de calcaires kimméridiens, haut de cinq mètres taillé à pic. Ces calcaires et ces argiles restèrent complétement étrangers au mouvement. À mesure que le talus d’éboulement avançait, les parties placées en avant étaient précipitées du haut du petit escar- pement kimméridien à la mer ; elles y formèrent bientôt un amas considérable, sous lequel disparut entièrement le Kimmeridge. Le 2 juillet, l’amas de blocs de toutes dimensions formé par l’'éboulement sur le galet, pouvait être estimé à 4,000 mètres cubes ; il formait une espèce de petit cap avançant d’une qua- rantaine de mètres dans la mer. La surface totale du terrain entraîné par le mouvement pendant l’éboulement, était d’environ 8 hectares. On peut évaluer à plus d’un million de mètres cubes la quantité de roches calcaires, de sables et de terre qui avaient été remués. De ce qui précède, on voit que les dépôts qui se forment à l'embouchure de la Seine ont une origine presque exclusivement marine — que les galets, les sables, les argiles qui, avec les mar- nes, forment les vases, proviennent des rivages de la mer, des falaises qui bordent la Manche, depuis Antifer jusqu’à la Hève et des côtes du Calvados. On sent aussi que la baie de Seine a été d’abord creusée par la mer, et qu’elle recevait les eaux du fleuve dontles méandres forment des circuits très caractéristiques jusqu’à la ligne de Quilllebeuf-Tancarville. A un second ordre de faits, nous rattachons le comblement de la baie, qui continue encore chaque jour, sous nos yeux. Ce phénomène de comblement par l’apport de sédiments marins, de sédiments provenant des falaises maritimes, a commencé à Villequier ; il s’est étendu dans la baie qui s’ouvre entre Petitville et Tancarville. Au même moment, une autre baie, ouverte de Quillebeuf à la Roque, était fermée par les sables et les argiles venus de la mer et qui donnèrent naissance à une sorte de digue naturelle en arrière de laquelle, dans les eaux douces, se développèrent des végétaux dont les généra- tions successives, enfouies sur place, nous ont laissé les tourbes du marais Vernier. Après le comblement des baies, l'apport marin continuant à s'étendre à gagné successivement le Hoc et l'embouchure de la Lézarde, sur la rive droite, et comblé l’anse de Ficquefleur, sur la rive gauche. Ce comblement de la baie semble redoubler d'intensité depuis que les dunes de Deauville et de Cabourg, sur la rive sud ont été plantées et herbées, depuis qu’elles ont été arrêtées dans leur 108 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE développement par des constructions ; elles se reforment au large, àune certaine distance de la plage ancienne et laissent entre celle-ci et la plage en formation une série de mares ou d’étangs dans lesquels l’eau de mer séjourne, bien qu’elle n’y puisse pénétrer que pendant les grandes marées en franchissant la digue de sable. À Dauville, on a élevé une petite construction sur ce banc qui dans quelques années formera la nouvelle plage. ZOOLOGIE LA FAUNE DE L’ESTUAIRE DE LA SEINE CONSIDÉRÉE DANS SON ENSEMBLE La faune de l’embouchure de la Seine présente à l'étude un grand intérêt. Dans l’espace que nous avons précédemment circonscrit, si nous étudions ce qui s’est autrefois passé, nous verrons que les zones que nous devons considérer aujourd’hui comme faisant partie de l'estuaire ont toujours été absolument maritimes. En effet, le maquereau et le hareng ont été pêchés jusque devant le port de Honfleur, à une époque qui n’est pas très éloignée de nous ; les marsouins, Delphinus Delphis — Delphinus phocæna, viennent en bandes à la suite des petits poissons qui pénètrent dans le fleuve jusqu’en amont de Quillebeut. De grands cétacés baleines, Dauphins Globiceps, ont autrefois pénétré assez avant dans la baie de Seine et même dans le fleuve, jusqu’à Villequier. Nous allons, par un rapide examen, passer en revue dans un ordre zoologique les espèces animales qui vivent dans la baie formée par la mer à l'embouchure de la Seine. Les mammifères marins, les baleines, les dauphins, ont souvent pénétré dans le fleuve après avoir franchi la zone des eaux sau- mâtres de l'embouchure et ont remonté la Seine jusqu’à une assez grande distance de la mer. Des dauphins, delphinus delphis ont été pèchés à Rouen. Une baleine est venue à une époque restée inconnue, échouer à Ville- quier, et ses ossements ont été recueillis sur les rives; la tête a été repèchée dans le fleuve, en cet endroit, et figure aujourd’hui OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 109 au Muséum de la ville du Havre ; des vertèbres et des côtes du ‘même animal ont été recueillies sur les bords de la Seine, jusqu’à Jumièges. Une autre baleine qui figure aujourd’hui empaillée et disséquée au muséum de Paris, a été capturée sous la falaise de Saint- Vigor, en 1847. L'endroit où ce cétacé qui mesure plus de 16 mètres de longueur, est venu échouer à cette époque, au pied de la falaise, est aujourd’hui éloigné du fleuve de près de deux kilomètres. Les oiseaux, suivant nous, ne peuvent donner aucune indica- tion précise sur les limites de la mer. Les oiseaux qui fréquentent l'estuaire appartiennent pour la plupartaux palmipèdes, mouettes, hirondelles de mer, canards, et aux échassiers : hérons, avocettes, chevaliers, etc., etc. Les poissons sont très nombreux dans la baie de Seine, et c’est sur les bancs de sable qui se trouvent à l'embouchure que les pleuronectes, soles, carrelets, limandes se réunissent à certaines époques pour frayer ; aussi, la quantité de jeunes poissons plats est-elle considérable dans la baie, au printemps. On pêche accidentellement en Seine, au-dessus de Quillebeuf, des esturgeons (Acipenser) des saumons (Salmo). Ces poissons viennent de la mer. Il en est de même des aloses (C/upea alosa). L’éperlan (Salmo eperlanus) se pèche en très grande quantité à Berville. Les anguilles se trouvent partout, aussi bien à la mer que dans le fleuve. Les soles, les carrelets, ne montent que très rarement au-dessus de Berville, tandis que les flondres vivent par- faitement dans les eaux saumâtres et remontent jusqu’à Rouen. Les poissons, selon nous, ne peuvent guère servir à déterminer les limites de l'embouchure d’un fleuve et sa séparation d’avec la mer. Ce sont des animaux voyageurs qui changent très facilement de place, et qui n’ont simplement qu’à se laisser entraîner par les courants pour se déplacer en restant dans le milieu qui leur con- vient. C’est ainsi qu'un certain nombre d’espèces montent avec le courant d’eau salée et redescendent avec le même courant. Elles changent ainsi de place sans changer de milieu. Le hareng a été plusieurs fois signalé à l’embouchure de la Seine et les courants en ont entraîné des bancs jusqu’à Quillebeuf. Depuis longtemps déjà, cette espèce se tient plus au nord ; elle dépasse rarement le cap d’Antifer. Le maquereau suit quelquefois la plage, chassé par les mar- souins, Delphinus phocæna, et on le prend à la senne comme cela 110 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE est encore arrivé cette année, au commencement du mois d’août, sur le littoral, jusqu’à la jetée du Havre. Plusieurs espèces de gades, les merlans, les merlus se pêchent en été sur les bancs de Seine, entre le Havre et Villers-sur-Mer, rarement plus en amont. Les mollusques nous donnent des renseignements plus précis sur la nature des eaux dans la baie de Seine. Certains Céphalo- podes, les Sepia officinalis, les Octopus vulgaris, les Loligo vulgaris sont des animaux de haute mer, qui ne viennent dans la baie de Seine qu’en été. On prend alors ces espèces, et nous les avons prises nous-mêmes, en trainant le chalutavec notre bateau l’H5/ma, jusque pour le travers du Hoc et de Honfleur. D’autres espèces de céphalopodes pénètrent plus loin dans la baie jusqu’à Quillebeuf, avant l’endiguement, maintenant, jus- qu’à Berville. Ce sont : les Sépioles, Loligo sepiola, et les Calmars subul, Loligo subulatum. Les Gastéropodes, sur la côte sud jusqu’à Honfleur et sur la côte nord jusqu’au Hoc, sont représentés par les espèces suivantes, bien évidemment marines : Turbo littorea, T. rudis, T. retusus, T. néritoides, Patella vulgata, Chiton marginatus, Doris argus, Tritonia Homberoii, Mytilus édulis, Cardium edule, Venus virginea. Ces espèces ne dépassent guère Honfleur etle Hoc. Plus à lest, jusqu’à Berville et jusqu’à Tancarville, on trouve dans le sable des bancs de la baie, et dans les alluvions littorales des marais, la Paludina muriatica, espèce caractéristique des eaux saumûtres, qui a été signalée dans les eaux peu salées de la Baltique, où les canards s’en nourrissent. Surles marais, on trouve aussi, près de la mer, des coquilles terrestres parmi lesquelles nous avons reconnu des espèces que nous désignerons plus loin. Parmi les mollusques bivalves de la baie de Seine, nous pou- vons citer les moules, Mytilus edulis qui forment la magnifique moulière du banc du Ratier et la moulière de l'Eure qui s’étend jusqu’au Hoc, les moulières de Villerville sur les Roquets, bancs de calcaire de l’étage Corallien qui s'étendent au large de ce village. Il y à quelques années une moulière s’était formée à Berville sur la digue sud; elle a aujourd’hui complètement disparu. Le Car- dium edule (la coque), espèce assez commune sur les bancs de sable où elle vit, est représentée dans tous les dépôts d’alluvions, bancs de sable, sable du littoral, alluvions du Havre, par sa coquille qui forme en certains endroits de petits amas ou des lignes comme on en pouvait voir dans toutes les fouilles faites au OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES TII Havre pour le creusemenr des bassins, et comme on en trouvera certainement en creusant le canal de Tancarville. La Donax anatina, très commune à Trouville, se trouve encore, mais plus rarement jusqu’à Honfleur. La Lucina lenuis est très commune dans tous les sables de la baie, aussi bien dans les argiles sableuses qui forment le sol des marais que dans les sables des bancs qui obstruent le chenal jus- qu’à Berville. Les Vénerupis perforans sont des mollusques qui perforent les pierres ; on les rencontre en abondance au cap de la Hève, et même dans les pierres de la base des jetées. Les coquilles de cette espèce se trouvent quelquefois dans les alluvions, mais nous ne pensons pas qu’elles se rencontrent plus loin que le Havre, vers l’intérieur de la baie de Seine. Les Pétricola striala et les Saxicava rugosa se trouvent communément sur les deux rives de la baie, à Trouville, à la Hève, plus rarement sur les points littoraux situés plus en amont. Cependant nous avons quelquefois rencontré ces coquilles à Honfleur et jusqu’au Hoc.. Les Mactres, Mactra stultorum, très abondantes à Trouville, deviennent plus rare à mesure qu’on approche de Honfleur ; ces coquilles se rencontrent cependant dans le sol des alluvions, jus- qu’à Berville. La Lutraria compbressa vit dans les sables de la baie jusqu’à Ber- ville et jusqu’à Tancarville. Elle forme des amas considérables à la limite des blancs bancs et des prairies d’alluvion. On la retrouve partout enfouie dans le sol des alluvions anciennes des’ marais. Nous lavons. recueillie au marais Vernier, dans les alluvions entre Petitville et Tancarville, dans l’anse de Lillebonne, dans le sol des marais de Tancarville au Havre ; elle sera partout rencon- trée par les travaux de creusement du canal. Par son abondance, cette espèce qui bien incontestablement est marine, peut servir à prouver d’une manière irrécusable la formation par les eaux de la mer de toutes les alluvions de la baie de Seine. Les coquilles de Solen vagina, Solen ensis, qui se trouvent dans les sables de la baie, proviennent d’animaux qui vivent sur les bas niveaux des plages de Trouville et de toute la côte du Calva- dos. Je n’en ai pas cependant trouvé de vivants sur les bancs de sable du chenal, entre Honfleur et Berville, en face Ficquefleur. Les Pholades, Pholas dactylus, vivent enfoncées dans les argiles dures du littoral, et aussi au-dessous du balancement des marées. On en rencontre au Havre et sur la plage de l'Eure, où elles res- T2 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE tent toujours petites. À Honfleur on en trouve aussi quelques- unes. Plus avant dans la baie, nous n’en avons jamais rencontré de vivantes, bien que les coquilles blanches de ce mollusque soient assez communes dans les sables des bancs. Les tarets (Teredo navalis) sont connus par les dommages con- sidérables qu’ils causent en attaquant et perforant tous les bois immergés dans l’eau de mer. Au Havre, les tarets sont malheu- reusement très nombreux ; on en trouve sur la plage jusqu’au Hoc, où ils deviennent très rares. À Honfleur comme au Havre, les tarets sont nombreux et les bois retirés des travaux du port et et déposés aux Chantiers de l'Administration des Ponts-et-Chaus- sées portent de nombreuses marques de perforations. Dans les chantiers du Havre, MM. les ingénieurs n'ont permis d’étudier des bois provenant des anciennes digues de PEure ; ces bois sont perforés par les tarets. En amont du Hoc, les tarets n’existent plus ; nous en avons vainement cherché à lembouchure de la Lézarde et sur la rive gauche, à Berville. Les mollusques Bryozoaires se rencontrent vivants sur les plages et au fond des eaux de la partie ouest de la baie. La Flustra pilosa vit attachée sur les varechs ; la Flustra bombicina est aussi très commune ; cette espèce forme des touffes d’expansions obtuses dichotomes. Transportée par les eaux, la flustra bombicina se trouve sur les points où les courants littoraux forment des dépôts, mélangée à des varech vesiculosus, à des herbes des marais, à des œufs de buccin, ‘Buccinurñ undatum. Nous avons trouvé de ces dépôts jusqu’au dessous de Quillebeuf et de Port- Jérôme. On rencontre à l'embouchure de la Seine un certain nombre d’annélides. L’Arénicole des pêcheurs, très commune dans les sables de la plage du Havre, se retrouve sur la plage de l'Eure ; jamais on ne la rencontre au-delà du Hoc, vers l'Est. Les Aphrodites, très communes en dehors des bancs de Seine, sont rares dans la baie, et jamais nous n’avons rencontré cette espèce à l’est du Hoc,à Honfleur.Les annélides tubicoles (Serpula), déjà rares à l’est de la ligne quiréunit le cap de la Hève à Dives, ne se rencontrent jamais à l’est de la ligne tirée de Honfleur au Hoc. Les Cirrhipédes sont représentées sur la plage du Havre par le genre Balane. Ces animaux couvrent de leurs coquilles les murs des jetées du Havre et tous les rochers, au niveau du balance- ment des marées, Au sud-est du port, on voit encore des balanes OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 113 jusqu’au Hoc, mais sur ce point, elles deviennent très rares. A l’est du Hoc, il n’y en a plus. Les insectes ne peuvent nous donner aucun renseignement. Les Crustacés au contraire, dont les espèces sont assez nom- breuses, ont fourni de précieuses observations. Le Portumus marmoreus se pèche jusque vis-à-vis du Hoc et de Honfleur ; il est très-commun au large de la Hève et dans toute ja baie entre le Havre et Dives. Le Portumus puber (vuloo étrille) se pêche dans la baie et, chassé par les pieuvres, Octopus vulgaris, il remonte jusqu'à Honfleur et au Hoc. Le crabe commun, crabe enragé (Carcinus mænas) remonte beaucoup plus haut ; on le trouve très communément à Berville et même au-delà ; sa dépouille, sa carapace calcaire, se rencontre jusqu’à Tancarville, dans les criques des marais ou dans les cordons littoraux formés de débris de toutes sortes laissés par le flot des grandes eaux. Le Palemon serratus (bouquet) se trouve accidentellement dans la baie ; on le pêche en même temps que la crevette (Gammarus marinus), mais il est beaucoup plus rare. La Crevette (gammarus marinus) est très commune dans la baie; elle se reproduit dans les eaux saumâtres et on trouve à Berville des sujets de toutes tailles. Cette espèce, au passage du flot, est souvent rejetée sur les marais, où on la trouve ensuite à sec. Les creveites sauteuses (Talitrus saltatrix) habitent les rivages de la baie; elles se cachent dans les débris de plantes marines reje- tées par la mer etsautent avec une telle agilité qu’on leur a donné sur le littoral, le nom de puces marines. Nous n’avons pas rencontré de Talitrus à Orcher, Oudalle, Sandouville, mais nous avons cepen- dant observé cette espèce à Tancarville, dans des débris rejetés par la mer. À Berville, on rencontre très fréquemment des Talitrus. La Caprella acuminifera est très commune dans la rade du Havre ; on ne la trouve que rarement à l’est du Hoc. Sur la rive gauche, nous ne l’avons observée qu’à Honfleur et sur les rivages de la mer, à l’ouest de ce point. L'Oniscus oceanicus est très commun dans les épis de la plage du Havre, principalement sur l’épi à Pin. On le trouve aussi au sud du port, dans les fentes des murs ; il était très commun autrefois dans les bois de la vieille digue de l'Eure, il se cachait entre les fentes des madriers ou entre les joints des pièces de construction des épis et des digues. Au sud de la baie, nous avons reconnu la même espèce dans les fentes des roches corralliennes de Trou- ville et dans les fentes des murs battus par la mer à Honfleur. 114 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Les Cirrhipèdes ont, au point de vue, qui nous occupe, une grande importance. Les espèces qui vivent dans nos mers ne peuvent pas se déplacer; elles se fixent en naïssant, s’attachent au sol marin et ne peuvent se détacher sans mourir. Les Balanes, qui appartiennent à cette classe, vivent en quantités innombrables sur les rochers du cap de la Hève, sur les roches de la côte du Calvados et sur les murs de nos quais. Les balanes sont des animaux absolument marins. L’espèce de notre littoral maritime a reçu de Lamark le nom de Balanus balanoïdes. On trouve toujours cette espèce réunie par groupes conside- rables et si serrés les uns contre les autres, que leur forme en devient souvent irrégulière. Les balanes, nous lavons dit plus haut, sont très nombreuses au Havre et sur la plage du Calvados jusqu’à Honfleur où elles disparaissent. À Quillebeuf, nous les avons vainement cherchées et nous n’en avons trouvé que dans les chantiers des Ponts-et- Chaussées, sur un mât de navire apporté de la haute mer; c’est dire qu’elles n’existent pas sur ce point. On rencontre dans la baïe de Seine plusieurs espèces d’échino- dermes : Dans les fonds durs, jusqu’à Honfleur, entre Amfard et le Rattier, l’Echinus lividus, qui est aussi commun sur les plages, au-dessous du balancement des marées moyennes. L’Echinocyamus pusillus, sur les fonds sableux de l entrée de la baie, entre Dives et le Havre. Cette espèce, de petite taille, se rencontre surtout dans l’estomac des soles, Platessa solea, qui en font leur nourriture. Le Spatangus purpureus, la plus grosse espèce de la baie, est très rare ; on la pèche entre Dives et la Hève. Quelquefois l’enve- loppe testacée de cet animal vient sur les sables à la basse mer, au Havre, où elle est réjetée après la mort de l'animal Au nord- ouest de la baie, entre le cap d’Antifer et la Hève, à cinq lieues au large, on en peut pêcher de grandes quantités. L’Ampbhidettus cordatus (Agassiz) est très commun dans les Que qui découvrent sur la plage, dans les marées moyennes, sous les chantiers Normand, au Havre, et sur la plage de l'Eure, jusqu'aux Abattoirs. Sur la côte sud, on le trouve aussi très abondamment, à Cabourg, à Houlgate et à Trouville. Sur ces dernières plages, au niveau supérieur des marées, dans le cordon littoral formé de coquilles brisées, il est aussi très commun. Les Asteries (Asterias rubens) vivent sur tous les points de la baie, et on les désigne sous le nom d’étoiles de mer. On les ren- OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES IIS contre bien vivantes jusqu’à Honfleur et jusqu’au Hoc. Sur le littoral, sur les bancs de sable du chenal, on les trouve plus avant dans la baie ; nous les avons vus jusqu’en face de Berville. Sur les plages, à Berville, à Tancarville, et même plus à l’est, en amont, on peut aussi recueillir accidentellement PAsferies rubens, mais elle n’est plus là dans son milieu d’habitat ; elle a été violemment transportée par les courants. Sur les marais de Lillebonne, et même plus en amont de la Seine, de l’autre côté de ES on peut trouver des astéries apportées par le flot. Les autres espèces d’astéries qui habitent la baie de la Seine se tiennent dans les zones profondes et sont moins exposées à être transportées par le courant ; nous ne les avons pas rencontrées à l’est du Hoc. Les méduses, principalement la grande espèce connue sous le nom de Rhizostoma cœrulescens, sont excessivement abondantes aux mois de juin, juillet et août. Entraînées par le courant marin, elles remontent très haut en Seine, où elles meurent bientôt dans l’eau saumâtre. Lorsqu’elles sont prises par le flot, elles viennent souvent échouer sur les marais, à Orcher, à Tancarville et à St- Sauveur. La phosphorescence des eaux, dans la baie de Seine, est produite par un animal microscopique voisin des méduses, le Nociiluca. Lorsque la mer est phosphorescente au Havre, on suit sans dimi- nution apparente la phosphorescence jusqu’à Honfleur, si la mer est haute. Plus au sud, les eaux sont moins phosphorescentes, et jamais à Quillebeuf nous n’avons pu observer ce curieux phéno- mène, bien qu’on nous ait afhirmé qu’il s’y produit quelquefois, mais avec une intensité beaucoup moindre qu’à Honfleur et surtout au Havre. RÉSUMÉ DES OBSERVATIONS FAITES DANS LA BAIE Au Hoc, le cordon littoral de galets qui se prolonge en avant dû phare pour former la pointe du Hoc, est compost de galets roulés qui viennent de la Hève. En dedans de la digue naturelle, du cordon littoral de galets, on remarque les dépôts d’argiles sableuses de la plaine de PEure. Ces dépôts sont analogues à ceux qui se forment sur les terrains d’alluvion, des deux côtés de la baie, où on trouve les mêmes espèces enfouies : Lutraria compressa, Paludina murialica et aussi Cardium cdule. À l'embouchure de la Lézarde, sur la rive gauche, le sol des D] 116 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE marais est formé des mêmes éléments minéralogiques, de vases avec sables. La proportion de sable est très variable suivant les endroits. Les marais de la rive droite, jusqu’à Tancarville, pré- sentent partout le même aspect; le sol a la même composition, il est formé par lapport marin et contient un grand nombre de coquilles, Lutraria compressa, Paludina muriatica. A Tancarville, dans les grandes marées, on voit souvent surles marais, après le passage du flot, des crevettes en très grand nom- bre (Grangon vulgaris). En arrière des marais, au pied des falaises, presque partout entre Orcher et Tancarville, on voit un cordon littoral de galets. Ces galets sont moins arrondis que ceux de la plage du Havre; ils n’ont pas été autant roulés, ils proviennent du lavage sur place des cailloux de la côte. La composition des alluvions est la même sur les deux côtés de la baie, et le cordon littoral de galets formés sur place se retrouve entre Fiquefleur et Berville. À Berville même, le cordon littoral de galets prend une importance considérable : il présente l’aspect d’une digue naturelle qui s'étend du village de Berville jusqu’à environ 1,500 mètres à l’est. Cette digue de galets s'élève au plus haut niveau des lames de marées d’équinoxe poussées par des vents de nord-ouest. En lar- geur, elle s’étend sur un espace de 30 à $0 mètres. A la basse mer on voit qu’elle repose sur un terrain d’alluvion semblable au sol des marais et formé de couches successives, parfaitement strati- fiées, d'argile et de sable. Ces assises complétement dénudées, lavées par l’eau de la mer, montrent mieux que partout ailleurs et sur une épaisseur de 4 à $ mètres la superposition des couches et leur mode de formation. Les lits formés par un temps calme sont dus à l’action des courants ; ils sont composés de sédiments fins. Ceux qui ont été apportés par les vagues dans les gros temps sont beaucoup plus sableux. À Honfleur, en 1880, dans les chantiers de l'Administration des Ponts-et-Chaussées, j'ai visité des bois de chène provenant des anciennes darses du bassin de l’ouest. Ces bois étaient rem- plis de trous de taret, Téredo navalis et de trous de Limnoria. Les murs de quai dans le même port, sont couverts de Varech, Fucus vésiculosus, et on y rencontre aussides balanes, Balanus. Les tarets les limmoria et les balanes sont des animaux absolument marins. Ils ne peuvent vivre dans l’eau saumâtre. Le Fucus vésiculosus est aussi une plante marine, qui meurt rapidement dans l’eau sau- mâtre. OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES TTE7 Sur la plage, à l’ouest du port de Honfleur on trouve le galet de mer roulé jusqu’au phare de l'Hôpital ; en dedans du phare, on rencontre l’alluvion, argile sableuse. Nous avons déjà parlé du cordon littoral des galets formés sur place, qui se voit tout le long de la côte jusqu’à Berville, lorsqu’il n’est pas recouvert par l’alluvion des marais. C’est à Berville maintenant que se trouvent les animaux qui, autrefois, il y a une quarantaine d’annces, se pèchaient à Quille- beuf : les Flondres, Pleuronectes flusus, les éperlans, Salmo eperlanus. Les éperlans se plaisent dans les eaux saumâtres; ils se nour- rissent de jeunes crevettes qu’ils trouvent en grande abondance à Berville. Les carrelets (Platessa vulgaris) se pèchent aussi à Berville. Le dimanche 21 août, nous avons exploré les marais sur la rive gauche de la Lézarde. L’alluvion présente toujours le même caractère. Dans les prairies, le long des digues, au plus haut niveau atteint par la dernière grande mer, nous avons reconnu un cordon littoral formé principalement d’herbes des marais, de petits morceaux de bois, de Varech, Fucus vesiculosus, d'œufs de Buccins (Buccinum undalum), et de carapaces de Crabes, Carcinus mœænas, mélangés à des coquilles d’eau douce, et même à des espèces terrestres. Ces amas nous ont fourni les espèces suivantes : Lymnæa pa- lustris. Valvata piscinalis (Muller) Valvata sp. ? Auricula bidentata. Bithinia tentaculata. Bulimus lubricus. Hélix nitida, Hélix carthu- siana, Hélix neglecta. Paludinx muriatica. Tellina tenuis. Cardium edule. Lutraria compressa. Au large des marais d’Orcher, on voit des blancs bancs sur les- quels pousse la salicornia et où vivent en grande quantité des coquilles marines, ZTellina solidula, Lutraria compressa, espèces franchement marines ; on rencontre aussi la Paludina muriatica. Cette petite espèce, longue de deux millimètres, à l’état adulte, forme des amas importants dans les criques, près des blancs bancs, au commencement des prairies. 118 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Analyse des Echantillons du sol d’Alluvion de la baie de Seine N° I No Suis Arles Cr O TL DADIE EC bete 95 05 ES ARLES 6 20 Carbonate de Chaux...... 2 LS VE NE AR D PIE PES Matières os 5 8e Carbonate de Chaux... 0 75 BPM ENS Matières organiques ...... 4 25 N252 Arele: 5100026 ; 1 36 N°12 SADIE RE sec 98 10 : Carbonate de Chaux... 1 10 Arpile: te OM 6 62 Matières organiques. De LOTS Sable . soso. {1 45 Ko Carbonate de Chaux....., 6 11 RTS) Matières organiques ...... O 49 ATpIles ee crereie om 3 86 : SAbIE Eee Ftoc ce AOLAO NF F7 Carbonate de Chaux ..... 2N2S Matières organiques. ..... I 05 sens dorer Etre br 6 10 x Sable ..:2.144 SÉCREÈRE 1 50 N° 4 Carbonate de Chaux... ..… L do Nid nenomioncucda $ 90 Matières organiques...... o 85 SAPDIE AR recense 92 15 Carbonate de Chaux..... 3 90 N° r2#7 Matières organiques . ..... 0 65 NC pu Ateilet. es eee Gene 4 40 SADIE MA CS re mnt TN OSEAO An rte etre Shot s 40 Carbofate delChaus PRE 0 SADIE LCL cree 93 20 Matières organiques ...... 0 55 Carbonate de Chaux...... 4 15 Matières organiques...... oO 70 N° X A o Nes Argile TE PE 15 10 AT EC rer OS? Saple Lt re teutRe 82 60 Sable 2 LEE Een 90 04 Carbonate de Chaux ..... 3 50 Carbonate de Chaux... ... 6 15 Matières organiques..... 2 10 Matières organiques ...... 1 10 N° 8 N° X B ATAUC RCE LEE EE ; 6 80 Arpilé. +5 Are tee 18 20 Sable ere EE 92 95 Sable. ue serert Re 0O bo 79 60 CarbonatetdelChAux EE ro Carbonate de Chaux...... 3 90 Matières organiques. ..... 0 90 Matières organiques ...... 287 No Pris à la pointe du Hoc à 100 mètres du cordon littoral des hautes mers. No Pris sur le blanc banc de Sandouville. No Pris dans l’herbé près de la berge. No Pris à la profondeur de 60 centimètres. No Pris au-dessus des racines des herbes. No Pris vis-à-vis le val de Mortemer, à 200 mètres du chemin 8:, à 6o centimètres de profondeur. No Pris sur le marais en face le Nais de Tancarville à 6o centimètres de profondeur No Pris au même endroit à la surface du sol. No 12 Prissur la rive gauche, à Fiquefleur, à 300 mètres au large de la li- miteatteinte parles hautes mers, à 69 centimètres de profondeur. No 12 Pris au même point que le n° 12 à la surface du sol. Pris à la surface de l'alluvion ancienne des marais, au plus haut niveau atteint par les grandes marées. OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 19 L'analyse des sédiments indique parfaitement l’origine, la pro- venance des matériaux qui forment les alluvions. L'élément dominant, le sable siliceux, provient de l’usure, de la truituration des bancs de silex de la craie, qui forme presque entièrement les falaises entre le Havre et Antifer, et que nous retrouvons sur la rive gauche, formant de Berville à Honfleur toutes les collines littorales. De Honfleur à Dives, la falaise est aussi formée de craie avec nombreux bancs de silex, mais à la partie supérieure seulement. L’argile entre pour une assez faible proportion dans la forma- tion des alluvions, mais il ne faut point s’en étonner, car, en dehors de la falaise de Dives à Villers, il n’existe pas de dépôts d'argile importants, susceptibles de donner un aliment aux allu- vions. Dans le lit de la baie, nous l'avons dit, le fond sur une vaste étendue est composé d’argile ; mais il faut se rappeler que les fonds sont couverts de sables, de graviers et d’une végétation sous-marine qui empèche la déeradation des assises qui forment le sol sous-marin, et le transport des argiles sur le littoral. Ce qui frappe dans les analyses des sédiments de la baie, c’est la faible proportion de carbonate de chaux. Il est probable que les sédiments résultant de la décomposition des roches crayeuses sont transportés au large. On pourrait les retrouver dans les dépôts qui se forment à l’entrée de la baie, entre Antifer et l’em- bouchure de l'Orne, au large des bancs sableux de la baie de Seine. Quant aux matières organiques, il ne faut pas en tenir compte, au point de vue spécial qui nous occupe. La proportion de ces matières varie suivant que les échantillons sont pris à une distance plus ou moins grande du sol superficiel. Dans les alluvions du Havre, il existe plusieurs bancs de tourbe; nous en connaissons aussi sur la rive gauche qui ont une très grande étendue, dans la mer et sur la plage, à Criquebeuf. Si on analysait le sol sur ces échantillons prélevés sur ces points, la matière organique dominerait comme elle domine dans la partie supérieure du sol des prairies d’alluvion, couvertes d'herbes. Ce sont là, hâtons-nous de le dire, des accidents locaux qui n’ont aucune importance et qui ne sauraient être pris en sé- rieuse considération dans lPanalyse des terrains d’alluvion, alors surtout qu’il s’agit de déterminer leur provenance. Pour résumer ce qui peut être dit sur l'analyse des échantillons 120 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE prélevés sur les terrains d’alluvion des deux rives de la Seine, nous pensons que presque tous les éléments constitutifs de ces alluvions viennent des falaises maritimes du Calvados et de la Seine-Inférieure. D'autre part, pour nous, au point de vue de la faune, la baie de Seine, avant l’endiguement, était maritime jusqu’à Quillebeuf ; par suite des modifications apportées à la libre circulation des eaux, par l’endiguement, la limite à laquelle il faudrait s’arrêter, au point de vue de l’histoire naturelle, de la faune, serait mainte- nant l’extrémité des digues actuelles à Berville. Là, en effet, la faune change, les mollusques marins, Mytitus edulis, Lutraria compressa, Cardium edule, cessent d’exister, bien que ce soient les espèces qui remontent le plus haut dans la baie. Ilserait bon, si on acceptait cette ligne de séparation, de consi- dérer qu’elle indiquerait la limite extrême à laquelle peuvent vivre les animaux marins qui se déplacent peu et ceux qui vivent et meurent sur la place qui les a vus naître. Ce mémoire est complété : 1° par une collection des princi- pales espèces de mollusques qui vivent dans la baie et qui se ren- contrent subfossiles dans les terrains d’alluvion ; Cette collection est déposée au Muséum ; on y remarque — 2° les crustacés les plus communs dans la baie, le Cancer mœnus, le Crangon vulgaris ; 3° Des bois perforés par les Turets et provenant des ports du Havre et de Honfleur ; 4° Des bois perforés par les Limnoria ; 5° Une série de plantes recucillies sur les marais; 6° Une séries d’échantillons des terrains d’alluvion qui ont été analysés à notre laboratoire du Muséum par M. Clerc, pharma- cien de 1"° classe, et par moi ; 7° Trois vues des falaises d’où proviennent les sédiments et les galets qui forment les alluvions de la baie de la Seine, le cordon littoral de galets et les bancs de sable. Ces falaises ont été repré- sentées telles qu’on les voit de la mer, par M. A. Noury.Au-des- sous de chaque dessin, nous avons figuré la coupe géologique qui serait visible si on pouvait mettre la roche à nu. Ces coupes et ces dessins peuvent donner une idée précise de la provenance des sédiments qui forment les alluvions et les bancs de sable. Pour la détermination des plantes, nous avons réclamé le concours de M. E. Debray, qui, depuis plus de vingt ans, étudie OBSERVATIONS GÉOLOGIQUES ET ZOOLOGIQUES 121 la flore de la baie de Seine et qui possède une remarquable col- lection des espèces qui croissent sur les marais d’alluvion. Ensemble nous avons recueilli les espèces suivantes : Salicornia herbacea. Végète sur les blancs bancs, précède toute autre végétation. Les racines sont fortement attachées dans la vase ou dans le sable vaseux. Sur les blancs bancs, cette plante est à chaque marée baignée par l’eau de mer. Dès que le terrain est un peu asséché, elle disparait pour faire place à Aster maritime (Aster tripolium. Linné). La Suæda Maritima (Brébisson). Se trouve le long des rigoles, dans l'Eure, et sur les marais des deux côtés de la baie, près de la mer. Triclochin maritimum. Se trouve sur tous les marais de la baie mais principalement sur les alluvions déjà anciennes, entre Har- fleur et Tancarville. Dans la plaine de l'Eure, dans les terrains argilo-sableux et dessichés, on retrouve cette espèce étiolée. Cochlearia anglica. Cette plante est assez commune, aux mois d'avril et de mai, dans les terrains d’alluvion de date ancienne, sous Orcher, Tancarville. Elle a disparu des bords des criques de l'Eure. Aster tripolium, Brébisson. Végète sur les terrains d’alluvion récente. Cette plante est très vigoureuse près des rivages, dans les terrains vaseux fréquemment baignés par le flot. Elle s’étiole au fur et à mesure que le terrain se dessèche. Sur le bord des falaises, près de la route, on ne la rencontre plus. Cette espèce existe dans les criques de l'Eure. Lehiconum rubrum. Se rencontre sur toutes les alluvions an- ciennes. Cette plante est commune dansles sables et sur les bords des chemins du littoral. Plantago maritima. Est très commune sur lestetrains d’alluvion des deux côtés de la baie de Seine. On le trouve aussi au Hoc et dans les sables du littoral. Scirpus marilimus. Serencontre dans la vase sableuse de tous les marais et dans les criques de l'Eure. En dehors de la famille des Chenopadées, qui est si largement représentée dans les sables maritimes de la baie de Seine, et tout 122 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE le long du chemin caillouteux aboutissant aux Neiges, il faut encore citer les espèces suivantes : Cakile maritima, dans les sables ; Eryngium maritimum, dans les sables ; Tamarix anglica, dans les haies ; Apium graveolens ; Salsola kali. Les observations que nous résumerons ici, sur ja baie de la Seine, sont le résultat d’une longue série d’études que nous avons eu, en octobre 1881, l’occasion de contrôler en accompagnant ia Commission du Conseil d'Etat institué par décision du 22 juillet 1881, dans sa visite sur les rives nord et sud de la baie de Seine. Dans le rapport que M. le vice-amiral Bourgois a présenté au Conseil d'Etat sur cette visite, on trouve des renseignements du plus haut intérêt sur l’hydrographie de Ia baie de Seine et sur l’hydrologie, au chapitre Observations de la Lionne sur la salure des eaux. COMPTE DES RECETTES ET DÉPENSES DE L'ANNÉE 1879 RECETTES En Caisse au rer Janvier 1879 ........... LÉ Sao toto oi E: JB9MS Subvention du Ministre de l’Instruction publique ............ 400 — » duiConserlhgeneral/pouEMe76.-tereene ARCS 800 — » » DEN Chiot eos eoouuce 5 300 — » du Conseil municipal pour publication du volume SMIRESDONHONMGÉOIOSIQUE See ---hrerere-ce-re 1.000 — Subvention du Conseil municipal pour 1879.......... ..... 400 — MO RANONSMENEMISSCES eee eee Lee: 1.007 — ENS GACETS DÉPENSES Souscription à la Caisse des Ecoles........... TU NDe RCE FE: 25 — Cotisation à l'Association française pour l'avancement des SGICHCÉSIPOUR 18 7 Os e ces e sel me es DnUvondospo ot 20 — Cotisation à l'Association française pour l'avancement des SCIENCES NDOUMTO 70e le meme rie comen ee eee ea ste 20 — Prusde Renvoi d'Echantillonsiexposés: 2", 41....5.42.:... 69 95 HE ONU BUIIEN ETS 77 ET M EE encre 1.404 50 Premnéres Dépenses pour le Bulletin 1678..." 100 — RRAISTAENVOIS ARR ie et abat ennemie Mes ou so 30 Érais d'encaissement des Cotisations... rc. 29) 20 NHpreSSIons A tHranchisSements Met Rene entrer 174 45 F. 1.893 40 é Solde eniGaisse aus DECeMEEE 0e... DES AIS F. 4.646 15 Le Trésorier, G. DROUAUX. COMPTE DES RECETTES ET DÉPENSES DE L'ANNEE 1880 RECETTES ÉnlGaisse au NJANVIeMOBO EE EC CCE PET F. 2.752 75 Subvention du Ministre de l’Instruction publique .......,... 400 — » du Conseil municipal. Se PéCERrRPPERRE 400 — Cotisations ENCAISSÉES ne Ce CRC EP CT CE 988 — F. 4.540 75 DÉPENSES Souscripuon amdalCaissendestEcOleS Pere ter Per ee É: 25 — Dépenses à valoir sur le Bulletin de 1878. .............. 412 60 » » de 1879 (Exposition)... .... 3.281 35 Fraisid/EncaissementdesiCotisations- "FPE CENT EC 31 90 Affrahchissements {Impressions ete Pere ere er ose 125 — F. 3.875 85 Solderen Caisse mnBi@DEcembrer ere 664 90 F. 4.540 75 Le Trésorier, + G. DROUAUX.. SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES rss torse. Cambrai. ...... lÉTRPE 00e de ce . CCC sus ...... CCE CPC Angleterre... ... Australie... .... FRANCE Société d'Etudes scientifiques. Société d'Etudes des Sciences naturelles. Association Normande. Académie nationale des Sciences, Arts et Belles-Lettres, Société Linnéenne de Normandie. Société d'Emulation. Société libre d’Agriculture, Sciences, Arts et Belles- Lettres de l'Eure. Cercle Pratique d'Horticulture et de Botanique. Société des Sciences et Arts agricoles et Horticoles, Société Havraise d'Etudes diverses. Société Géologique du Nord, Société d’Horticulture et de Botanique du centre de la Normandie. Société d'Etudes Scientifiques de Lyon. Association française pour l’Avancement des Sciences. Feuille des Jeunes Naturalistes. Institut des Provinces. Société de Secours des Amis des Sciences. Société de Géographie. Société d'Histoire naturelle. Société libre d'Emulation du Commerce et de 1 Industrie de la Seine-Inférieure. Société des Amis des Sciences naturelles. Muséum d'Histoire naturelle. Société d'Agriculture, d'Archéologie et d'Histoire natu- relle du département de la Manche. Société Académique Hispano-Portugaise. Société Académique d'Agriculture des Sciences, Arts et Belles-Lettres de l’Aube. ALGÉRIE Académie d'Hippone. ETRANGER Geological Society, London. School of Mines, Ballaraat. Canadian Institute, Toronto. Smithsonian Institution, Washington. U.S. Geological and Geographical Survey, Washington. Societa Toscana delle Scienze naturali, Pise. LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ Composition du Bureau pour les Années 1879 et 1880 ANNÉE 1879 MM. G. LENNIER, Président ; G. LIONNET, Vice-Président ; A. LÉCUREUR, Secrétaire ; G. DROUAUX, Trésorier ; W. PARTRIDGE, Archiviste. ANNÉE 1880 MM. G. LENNIER, Président ; G. LIONNET, Vice-Président ; A. LÉCUREUR, Secrélaire ; G. DROUAUX, Trésorier ; F. PRUDHOMME, Archiviste. MM. ALLEN BALI. BARBIER. E. BASSET. Ch. BEAUGRAND. E. BÉNARD. L. BIDARD. C. BRYLINSKI. CHENEL. CONSTANTIN. Alb. COURANT. Th. COURCHEÉ. Méd. DESCHAMPS. G. DROUAUX. J. DUPASQUIER. L. DUPLESSY. A. DURAND. DURET. ERNST. FOLLAIN. GAZÉ. L. GÉRY. GIBERT. Léon HALLAURE. Membres résidants : HAREL. H. JARDIN. KABLÉ. LEBRIS. LECADRE Oncle. A. LÉCUREUR. LEFRANÇOIS. Maurice LEMERAY. G. LENNIER. LESIDANER. G. LIONNET. Ern. LOUER. Jacques LOUER. F. MAILLE. E. MARANDE. Max MARANDE. MARICAL. Ph. MONOD. Raoul NICOLE. A. NOURY. PARSY. W. PARTRIDGE. PELOT père. MEMBRES CORRESPONDANTS 12 MM. C. PERRET. MM. J. RŒDERER fils. PIERRET. E. SAVALLE. PORNIN aîné. SCHLAGDENHAUFFEN. POULAIN. Ern. SIEGFRIED. F. PRUDHOMME, J. SIEGFRIED. PRUNIER. SOCLET jeune. Franck PUAUX. TESSON. Ch. QUIN. TORQUET. Aug. RISPAL. Léon TÜBEUE. André ROBERT. Membres correspondants : MU Te ADI trot Sainte-Austreberthe. B'ADINPAR ER Rs dec @es Barentin. PATPPEULE M cet Caudebec-en-Caux. CRBIOCHENN EE Re Caudebec-en-Caux. BTP ETES NE AR à ectehe Bellème. NABRMEINSITRRERERRET Paris. BRIE PME NE Bellème. CHANBE AUS NE Aubervilliers. DISAIS ARS ET Lillebcnne. HADESHAVESE RNA Er Manneville-sur-Risle. GCDOLLEUS RUE Paris. MÉDUBOIS te Fécamp. ÉAMENNE Reese Gournay-en-Bray. CALLAND MMM SE Granville. GOESLE:.»...; Au Caen. PACAIEPENMIS RER NRC Bolbec. CEMARCHANDE Petit-Quevilly. BADIONNETR SAN ser Mobile (Etats-Unis). Emm. de MALSABRIER... Rouen. MARIN PRE RUE Alger. MARUITES EN es Yvetot. MASSE ER Rennes. IAeMORGANEC EEE Paris. PAINICOLE Te .--00 Paris. PENNEIERS APE 2 Rouen. VANGOSSIN EEE 0. re Bolbec. D'ARAMBAUSEN Tu Eu. 4 A. de VILLE-D'AVRAY... Honfleur. Membres honoraires : MM. G. COTTEAU. MM. Alb. de LAPPARENT. A. DAUBRÉE. A. LETELLIER, E. DESLONGCHAMPS. MORIÈRE. HÉBERT. De SAPORTA. THEN sue) st F æ. on UT AT Fes ‘ 17 | TABLE DES MATIÈRES Résumé des Séances (Année 1879 » » (Année 1880..... Lobonregeoo ec Ce LIU Rapport sur les Archives de la Commission Scientifique du Mexique, Dee Bornes sc eouobonsencoonasdon ab neo C OUT L’affaissement du sol des Pays-Bas, analyse par E. Savalle... ..... 4 Note sur j'état de la Falaise du Havre à Bléville, pendant J'hiver JENMOTÉONPAME RS AVAIlE E Re e eoee SAROHE DE S2 Note sur les Eboulements et les Valeuses Poe l'hiver de 1878-79, AMIE NSavallE rer. don ob botoes dodo e 000 ob ES Note sur un affleurement de craie sénonienne à Sandouville, par EASavalleret Fr Prudhonime........ se om ele ets Me SO Note sur un bloc erratique recueilli Fe le ‘Sables Aptiens dOcteville PpAmCh Betuprand, "7". SN CO AD CU EE 59 Note sur un dépôt tertiaire reconnu à Manneville-sur-Risle (Eure), PANGADIOUAUXE. TE HAERP band ne code sb O0 Note sur la signification de l” Euge et des bancs-limites, par Je SR CLS? 000088 SPORE ER RCE 5 core Mémoire pour servir à l'étude d'u un Der de Tunnel sous-marin, destiné à relier les deux rives de la Seine à son embouchure, par Ge IEDdier. 0e. do vote re ne nee SAR 67 Gisements de silex préhistoriques à Manneville-sur-Risle et aux environs de Pont-Audemer, par l’Abbé Deshayes. ............ NE Observations Géologiques et Zoologiques faites dans 1 Pa de Seine et sur les rivages et les falaises qui limitent cette baie, par GC LENOIR ASC AD ON bre eate eme 100 Compte des Recettes et Dépenses de l’année he into DD CAD OC DES MP) » » » » 1880... DoDOT an Ent Ererdes SociérésiCONTESpOndantes. . 01... 20.2 ue le netole 22e 70 125 Liste des Membres de la Société. ......... ohvire a re eu 20 Silex préhistoriques de Manneville. PIE Formant th. {mp Pecquet r des Moyers d7. Silex préhistoriques de Manneville. PALAIS L'ormant lt. 72 Pecquetr des Noyers, S7. Silex préhistoriques de Manneville. PIE JOUL. Lormant Lil {mp Lecqu etz ces Woyers, S7. Li “ 7 L » - » D « 5 r# LI J » “ Ex + A - 4. . ’ CP CS Tr Li cd. cs (FRA À ‘ #} L " # RU à e En N F° Fe ji ) A ee | : = » 1# 1 SN EC k Mia sé à Céé 1 Il kr À | COUPE THEORIQUE Lea| MALAISME QUI ER ORDENT LE EMBODUCAUERR DE LA SEINE | LA HVE ORCHER LE HODE 777774 derveux jule el Calcitre aie Verte dre Jorctnye da Ar rHeble fer: LUS Arÿt el Cal Craie ve Crate blanche Plaoe Li Zhilses LOST £ | _ Craie marreuse 2 Es (se =) | Crélgcé tre férteux Cart Cromantert Argite 2 Sex Lunor des plaltatix (Em Tertiaire guaernaive (se) Wénonien lurmuer (=) Aonmneriage | E COUPE LES COUR TÉBORIQUE DES PFALAISES QUI BORDENT L EMBOUCHLIRE DH LA SEINE ENTEE HONFLELER ET RAR USER IETe HONFLEUR COTE D'INGOUVILLE BERVILLE LA BOQUE | VIEUX PORT ENTER, LE TANCARVILLE | | CAM NT AMEN EN) ET MILLE QUIEF LILLEBONNE VILLEQUIER TERRAIN S montrant Lx position géotogique des Gtegiles du Kituneridqe lente bis ele line enfce & HAVRE & HONNLEUR . LE HOC Gall mes Laroquanss à uru01 fur d0 mélres EVA bats: cou pese 40 métaus. HONFLEUR / Ed — Abies ae Di SUEDE PEN DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE CHERE REN DE LA OCIÈDE GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE FONDÉE EN 1871 TOME VIII — ANNÉE 1881 CE A HAVRE Imprimerie du Journal LE HAVRE (F. SANTALLIER, Imprimeur) 35, RUE FONTENELLE, 35 1883 ÉÉRE PTIN DE LA SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE RÉSUMÉ DES SÉANCES SÉANCE DU 10 JANVIER 1881 Présidence de M. G. LENNIER, Président Le Président communique les lettres de MM. Guillebert, Pierret et Scheurer, donnant leur démission. Les ouvrages suivants ont été reçus depuis la dernière séance : 1° Société de Géographie, bulletin d’octobre 1880 ; 2° Bulletin de la Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen, 1° semestre 1880 ; 3° Bulletin de la Société d'Etudes scientifiques d’ Angers ; 4° Bulletix de la Société libre d'Emulation de Rouen, 1879/1880 : s° Feuille des Jeunes Naturalistes ; 6° Bulletin du Cercle pratique d’Horticulture du Havre. 7° Recherches sur la Craie supérieure des Pyrénées, par M. Hébert. Il est procédé aux élections pour le renouvellement du Bureau. Sont élus : MM. G. LENNIER, Président ; G. LioNNeET, Vice-Président ; A. LÉCUREUR, Secrétaire ; G. Drouaux, Trésorier ; F. PRUDHOMME, Archiviste. Le Bulletin VI: est ensuite distribué aux Membres présents. 6 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Le Secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Bizet, de Bellème ; notre collègue annonce l'envoi prochain d’un profil géologique du chemin de fer de Mamers à Mortagne /1). Il annonce aussi qu'il prépare un travail sur la Géologie du Perche Ornais, comprenant la presque totalité de l'arrondissement de Mortagne. Notre collègue donne des détails sur l'importance de ce dernier travail, qu’il espère mener rapidement à bonne fin. M. Prudhomme donne lecture du compte-rendu d’une excur- sion faite par quelques Membres de la Société, à la briqueterie E. Dubosc, à Frileuse, dans le but de rechercher le niveau exact où ont été trouvés les silex taillés, présentés par M. Savalle, dans la séance du 6 décembre. Le but de l’excursion n’a pas été atteint, en ce sens qu’on n’a pu reconnaître le gisement cherché, ni retrouver de silex analo- gues à ceux présentés ; mais On a examiné avec intérêt une belle série d'instruments du type de Saint-Acheul, que M. Dubosc avait gracieusement mis à la disposition des visiteurs. Diverses observations sont échangées à la suite de cette lecture. Sur la proposition de M. Parsy, il est décidé qu’une lettre sera adressée à M. E. Dubosc pour le remercier de l’amabilité avec laquelle il a autorisé la visite de son établissement. SÉANCE DU 14 FÉVRIER 1881 Présidence de M. LIONNET, Vice-Président M. G. Drouaux, Trésorier, fait connaître l’état financier de la Société et résume le compte de recettes et dépenses de l’année écoulée. Sa communication est écoutée avec intérêt. M. Beaugrand fait un rapport verbal sur le Bulletin de la Société d'Etudes scientifiques d'Angers. M. Lionnet annonce que le Bulletin de l'Exposition est en distribution. M. Savalle fait un rapport verbal sur le Bulletin de la Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen. (1) Voir plus loin, Mémoires. RÉSUMÉ DES SÉANCES 7 M. Beaugrand présente à la Société une série de magnifiques hachettes, en silex taillé, du type Acheulcen, faisant partie de la collection de M. E. Dubosc et oblisgeamment prètée par lui. Ces instruments, en silex noir, revêtus d’une patine blanche, ont tous été trouvés sur le plateau de Frileuse. SÉANCE DU 14 MARS. 1887 Présidence de M. G. LENNIER, Président. Le Président annonce une présentation. Le Secrétaire donne lecture de la correspondance. Elle comprend surtout des accusés de réception du dernier Bulletin (Livre sur l’Exposition), avec des remerciements et des félicitations de MM. Daubrée, Cotteau, de Lapparent, Chancourtois, Alph. Milne Edwards, Barrois, Président de la Société Géologique du Nord ; Letellier, Directeur du Musée d'Alençon ; Eug. Noël, Bibliothécaire de la Ville de Rouen; Velain, attaché au ministère de l’Instruction Publique; Richet, Directeur de la Revue Scienti- fique ; Quenault, à Montmartin-sur-mer, etc. La lettre de M. Daubrée est accompagnée des ouvrages suivants: 1° Recherches Expérimentales sur les cassures qui traversent l'écorce terrestre ; 2° Expériences tendant à imiter les formes diverses de ploiements, contournements et ruptures que présente "écorce terrestre ; 3° Conformité des systèmes de cassures obtenues avec les systèmes des joints qui coupent les falaises de la Normandie ; 4° Alignements réguliers des joints on diaclases, dans les couches terrestres des environs de Fontainebleau ; s° Expériences relatives à la chaleur qui a pu se développer par les actions mécaniques dans l’intérieur des roches ; 6° Sur les réseaux de cassures ou diaclases, qui coupent la série des terrains stralifiés ; Le Secrétariat à reçu en outre : 1° Mémoires sur les envahissements de la mer, par M. Quenault; 2° Bulletin de la Société de Géographie. 8 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE M. Savalle présente des notes intéressantes prises par lui à l'Exposition de 1877, sur les fossiles exposés, les localités d’où ils provenaient et les noms des exposants. Le même Membre dépose sur le bureau une remarquable série d’Aptychus qu’il a trouvés dans les argiles supérieures du Kimme- ridge, à Octeville. M. Lennier donne quelques explications sur les allures du Kimmeridge et en particulier sur la zone des argiles à ammonites nacrées. Le Secrétaire donne connaissance d’un très élogieux compte- rendu du Livre de l'Exposition, publié dans le Journal Le Temps. M. Lionnet, daris un résumé rapide, analyse l’ouvrage de notre collèoue, M. G. Dollfus, Principes de Géologie Transformiste, sur lequel il attire l'attention de la Société. C’est, dit-il, une œuvre remarquable qui ouvre à la Géologie un champ nouveau et encore inexploré. M. Dollfus passe en revue les différentes doctrines relatives à l’histoire de la Géologie ; il examine ensuite l’évolution géologique, le métamorphisme, et montre combien la classification des terrains, leurs séparations, sont choses délicates et parfois dou- teuses. Dans la troisième partie, l’auteur aborde le problème de l'espèce, aux deux points de vue paléontologique et zoologique. Il cherche à montrer l'avenir de la zoologie dans l’application de la doctrine de l’Evolution. Les Géologues feront bien de lire cet ouvrage avec attention : c’est une œuvre d’érudition remarquable, où la vérité est poursuivie, au travers d’une somme énorme de travaux et d'analyses, avec une ardeur et une sincérité qu’on ne saurait trop admirer. SÉANCE DUT AVRIErSS: Présidence de M. G. LENNIER M. Skrodski, de Bayeux, présenté à la dernière séance, est admis. Les ouvrages suivants ont été reçus depuis la dernière séance : 1° Bulletin de la Société Géologique du Nord, 1879-1880; 2° Annuaire des Musées Cantonaux, 1881 ; 3° Revue des Travaux Scientifiques, publication du ministère de l’Instruction publique, Janvier et Février ; RÉSUMÉ DES SÉANCES 9 4° Flore fossile du Lias, par M. E. Morière; Crinoides Jurassiques, par le même. M. le Président rappelle que la réunion annuelle des Sociétés Savantes à la Sorbonne aura lieu les 20, 21 et 22 Avril. La Société y sera représentée par MM. Lennier, Lionnet et Lécureur. Le Secrétaire donne lecture d’une lettre de M. G. Biochet, qui s'excuse de ne pouvoir assister à la séance et qui rend compte d’une excursion qu'il a faite dans les tranchées du chemin de fer de Caudebec à Duclair, à Béchères, près Yainville. Ces tranchées sont ouvertes dans la craie blanche à silex en tables, dont quelques bancs plus durs ont reçu, des ouvriers, le nom de Bancs jaunes, et de M. Ant. Passy, la dénomination de Craie subcristalline. Peu de fossiles, Micraster corlestudinarium, Inoceramus Lamarckii, Térébratules, Spondyles, etc.Lacraie, à plusieurs mètres au-dessous de la surface, est fendillée et, comme on dit dans le pays, #ichée. Quanu cesse cet état d’effritement, on reconnaît sans peine les fentes typiques avec l'orientation ordinaire Nord-Est et Nord- Ouest, faisant ensemble des angles de 90°. La partie de ces tranchées, tirant vers le Nord, offre de nombreux épis de craie, qu’entourent des sables jaunâtres, des silex roulés et non roulés et l'argile rouge. Dans toute cette partie, les épis de craie etles poches de silex et de sables qui les entourent sont revêtus d’un couvert de même nature que les poches, lesquelles sont quelque- fois très larges, ailleurs étroites, souvent cylindriques et finissant en pointe vers le bas. Souvent le couvert indique, au-dessus des poches, un abaisse- ment de lignes qui montre que certains tassements se sont produits, depuis le dépôt, au droit des poches et provoqués par elles. Au Sud des mêmes tranchées et à la même altitude, la craie n’a plus ni couvert, ni poches, ni puits. Notre collègue note la coïn- cidence comme un nouvel argument à l'appui de la thécrie des causes actuelles et de la continuation du creusement des poches. Il promet de s'informer si les travaux du chemin de fer de Barentin à Duclair offrent l’occasion d’autres études, et, en cas d’aflirmative, il croit que la Société pourrait faire une fructueuse excursion dans ces parages en suivant, de Barentin à Vainville, le vieux lit de la rivière, alors que, sur l'emplacement de Duclair, il était de 15 à 20 mètres plus élevé qui ne l’est aujourd’hui. M. Beaugrand donne connaissance d’une note sur les éboule- 10 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE ments de Bréauté et de Goderville {1}, éboulements qu’il convient d'attribuer, suivant lui, à l’éffondrement d’anciennes marnières. M. Beaugrand rend compte, ensuite, d’une visite qu’il a faite à la collection de silex taillés de notre jeune et regretté collèoue, M. Petit, collection remarquable, qui compte environ trois cents exemplaires de têtes de flèches, de gouges, de grattoirs, etc. Tous ces objets proviennent de la station préhistorique de Sainte-Marie- des-Champs. M. Beaugrand signale aussi une autre station à Ecalles-Allix. À propos de cette communication, M. Lécureur signale, d’après un autre passage de la lettre de M. Biochet, déjà citée, la décou- verte, à Bourneville (Eure), d’un frésor composé de trente à quarante hachettes, lesquelles auraient été vendues à un brocan- teur de Rouen. M. Prudhomme lit une note sur les sables calcareux fins qui accompagnent le limon des plateaux. M. Partridge annonce que la mine de houille de Zittry (Calvados), la seule qui fût encore en activité dans la région normande, vient d’être définitivement fermée ; le matériel va être vendu prochai- nement. Le même Membre vient de faire une excursion à la carrière de Sully. On y a pratiqué des excavations plus profondes que précédemment et l’on a atteint l’étage Toarcien. M. Savalle analyse les Recherches sur les oiseaux fossiles des terrains tertiaires inférieurs des environs de Reims, par le docteur Lemoine ; il lit quelques passages de cet important travail. A cette occasion, M. Lennier signale cette coïncidence : qu’on trouve, dans le Tertiaire, des oiseaux et des tortues, munis de dents les uns et les autres. Du reste, les tortues Tertiaires sont, de tous les reptiles connus, ceux qui se rapprochent le plus des oiseaux. SÉANCE. DU, 13 JUIN: Présidence de M. G. LIONNET, Vice-Président Le Secrétariat a reçu, depuis la dernière séance, les ouvrages suivants : 1° Annual Report of the U. S. Geological and Geographical Society, années 1878 et 1879; (1) Voir plus loin, Mémoires. RÉSUMÉ DES SÉANCES II 2° Revue des Travaux Scientifiques. M. Lécureur annonce que, profitant d’un dimanche de mai, ü a, en compagnie de MM. Lennier, Bucaille et Biochet, visité les tranchées du chemin de fer de Barentin à Duclair, ouvertes à différents niveaux de la craie blanche et déjà sommairement décrites par ce dernier. L’exploration a confirmé de point en point les descriptions de notre collègue, quant aux terrains traversés par le chemin de fer. Il y a eu, par contre, divergence d’opinion rela - tivement à la dépression qui se trouve en arrière de la presqu'ile de Jumièges, dépression dans laquelle M. 'Biochet voit le lit primitif de la rivière de Barentin, alors que M. Lennier pense que cette rivière a dû toujours se jeter dans la Seine, en amont de 1 presqu'’ile. M. Savalle donne lecture d’une note intéressante sur les sables néocomiens (1), dans lesquels il a découvert des empreintes d’une algue nouvelle, souvent associée au Tenidium Pinnatisectum décrit par M. le marquis de Saporta, dans notre Bulletin VI [livre de l'Exposition). Parmi ses dernières trouvailles dans ces sables, il signale de bons exemplaires de Cardium en fer hydraté et de jolis échantillons d’une petite pholade en fer pyriteux, extraits d’un fragment de bois fossile. Le même Membre donne connaissance d’une note sur le gisement d’Aptychus, découvert dans les argiles à Ammonites d'Octeville (2) et dont il a déjà parlé dans la Séance du 14 Mars dernier. Le but de ce travail est de bien préciser le niveau de ce gisement, dans lequel notre collègue n’a pas rencontré moins de deux cents exemplaires d’Aptychus parfaitement con- ser vés. M. Savalle présente, enfin, une série de fossiles des argiles supérieures du Kimmeridge. Chargé d'analyser une série de brochures que M. Daubrée à offertes à la Socièté et dans lesquelles l’éminent savant rend compte des recherches qu’il a entreprises pour arriver à reproduire expérimentalement les phénomènes de fracture et de plissement qui affectent les couches terrestres, M. Prudhomme rend compte de celles de ces brochures qui ont trait à la première partie de ces expériences. (1) Voir plus loin, Mémoires. (2) Voir plus loin, Mémoires. 12 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE SÉANCE DU 8 AOÛT 188 Présidence de M. G. LIONNET, Vice-Président M. L. Bureau, professeur à l'Ecole de Médecine à Nantes, est admis. Les ouvrages suivants ont été reçus depuis la dernière Séance: 1° Feuille des Jeunes Naturalistes ; 2° Bulletin de la Société d'Etude des Sciences Naturelles de Rouen, 1880, 2° semestre ; 3° Mémoires de la Société Académique du département de l Aube ; 4° Bulletin de la Société de Géographie ; s° Bulletin de la Société d'Etude des Sciences Naturelles de Béziers ; 6° Bulletin de l’Académie d’Hippone ; 7° Bulletin du Cercle pratique d'Horticulture du Havre; 8° Etudes sur les Fossiles des sables éocènes de la Loire-Inférieure, par M. Ed. Dufour. 9° Quarterly Journal of the Geological Society, n° 146; 10° Annual Report of the Board of Regents of the Smithsonian Institution, 1879 ; 11° U. S. Geological and Geographical Survey, 1876-77; M. Savalle fait un Rapport verbal sur deux brochures de M. Morière: Considérations générales sur la Flore fossile et spécia- lement sur celle du Lias, découverte du genre Lomatopteris dans le grès Liasique, et Crinoïdes du terrain Jurassique du Calvados. Cette dernière brochure contient la description détaillée, avec planches, de plusieurs espèces des genres Apiocrinus, Eugeniacrinus, et Cotyloderma, reconnues par M. Morière en Normandie. M. Ch. Beaugrand, au nom de M. C. Brylinski, notre collègue, qui a dû quitter le Havre, donne lecture d’un rapport sur l’ouvrage de M. Quenault : Sur les envahissements de la mer. Quelques observations sont échangées au sujet de certaines opinions émises dans ce travail. M. Savalle rend compte d’une excursion qu’il a faite dernière- ment à Trouville. RÉSUMÉ DES SÉANCES 13 SÉANCE DU 14 NOVEMBRE 1881 Présidence de M. G. LENNIER, Président MM. Fortin, Maurice Nicolle, G. Jaugey et Alph. Bouju, de Rouen, sont admis. La correspondance comprend : Une lettre de M. le Préfet, annonçant l'octroi, par le Conseil Général, d’une subvention de 3oofr. ; De M. Bucaille, qui annonce le prochain envoi de son travail sur les Oursins de la Craie (1); De M. l’abbé Deshayes, qui envoie les dessins pour sa notice sur les armes et instruments en silex de la station de Manneville- sur-Risle ; Et de M. C. Brylinski, qui, devant dorénavant habiter Paris, fait ses adieux à ses collègues et prie la Société de le comprendre au nombre de ses membres correspondants. Il est fait droit à cette demande et le Secrétaire est chargé de répondre à notre collègue. Les ouvrages suivants ont été reçus au Secrétariat, depuis la dernière Séance : 1° Revue des Travaux Scientifiques ; 2° Bulletin de la Société Scientifique d’ Angers, 1880 ; 3° Bulletin de la Société des Amis des Sciences Naturelles de Rouen. M. Beaugrand analyse verbalement le Bulletin de la Société de Géographie, qui contient : un itinéraire à Tombouctou, une notice sur les recherches de l'expédition de sir John Franklin, et le récit d’une exploration aux sources du Niger. M. Savalle a remarqué, dans le Bulletin de la Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen, une notice sur les ossements de Mammouth, trouvés à Elbeuf, par M. Noury, et qui figuraient à l'Exposition du Havre en 1877. M. Prudhomme donne lecture d’un intéressant mémoire sur le limon des plateaux (2). M. Savalle présente quelques fossiles remarquables, notamment une Pinna Deshaysii, une autre pinna non déterminée et une belle série d’Aptychus. (1) Voir plus loin, Mémoires. (2) Voir plus loin, Mémoires. 14 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE M. Beaugrand donne connaissance d’un fait qui serait de la plus haute importance, au point de vue des études préhistoriques, si les observations qu’il a faites venaient a être confirmées : entre Veules et le cap d’Ailly, notre collègue a découvert, à 2 ou 3 mètres au-dessus du galet, sur le rivage de la mer, un banc de 20 à 30 centimètres d'épaisseur, entièrement ‘composé de débris de coquilles marines, moules, littorines, etc. IL s’est demandé s’il ne s'agissait pas là d’un dépôt de débris de cuisine, analogue aux Kjoekkenmoeddings de la côte du Danemark. Cette supposition paraîtrait d'autant plus vraisemblable que, très visiblement, ce banc a été remanié et que M. Beaugrand y a trouvé une assez grande quantité de débris Romains : des tuiles à rebords, des poteries Samiennes et un petit crochet de bronze qui pourrait être un hameçon, à moins qu'il ne soit un morceau de fibule. La Société engage vivement M. Beaugrand a continuer ses recherches sur ce point. SÉANCE DU 19 DÉCEMBRE 1881 Présidence de M. G. LENNIER, Président Le Secrétariat a reçu les ouvrages suivants : 1° Feuille des Jeunes Naturalistes ; 2° Revue des Travaux Scientifiques ; 3° Quaterly Journal of the Geological Socrety, London, n° 148 ; List of the Geological Society. M. Beaugrand donne lecture du mémoire de notre collègue M. l'abbé Deshayes, sur les Gisements de silex préhistoriques, par lui explorés à Manneville-sur-Risle (r). M. Biochet aurait désiré que les altitudes des Gisements de silex décrits dans ce mémoire eussent été indiqués par M. l'abbé Deshayes. Plusieurs membres lui font remarquer que tous ces silex ont eté recueillis sur le plateau dominant la vallée de la Risle et dont l’altitude est sensiblement uniforme. (1) Voir Tome VII. RÉSUMÉ DES SÉANCES 15 M. G. Lionnet, au nom de M. Skrodsky, donne lecture d’une note de notre nouveau collègue sur Les Bancs limites et leur rôle dans la Géologie (x) M. Savalle fait un rapport verbal sur le Bulletin de la Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen. M. Beaugrand fait aussi un rapport verbal sur le Bulletin de la Société d'Etudes Scientifiques d’ Angers. M. Savalle présente un membre antérieur de Plésiosaure qu'il a trouvé à Octeville, dans les argiles kimméridiennes. (1) Voir Tome VII. ÉTUDE SUR DES ÉCHINIDES FOSSILES DU DÉPARTEMENT DE LA SEINE-INFÉRIEURE Par E. BUCAILLE. DISCOIDEA CONCAVA, BucaiLe, 1882. DIAMÈTRE HAUTEUR Dimensions en millimètres... 39 22 1/2 Autresiexemplaes pere: 29 17 19 II Test assez régulièrement circulaire ou très légèrement sub- pentagonal, rétréci à la base, arrondi au pourtour; dessus peu élevé, sub-conique ; face inférieure inclinée du pourtour vers le centre, où elle est profondément concave ; l’on y observe que les bords externes des interambulacres sont marqués de faibles dépres- sions plus ou moins apparentes et dépourvues de tubercules. Aires ambulacraires très étroites, un peu renflées aux appro- ches du Péristome, sillonnées et légèrement déprimées au centre et depuis le sommet jusqu’à l’ambitus. Zones porifères parfaitement droites, à fleur de test. Pores petits, arrondis, séparés par un granule, disposés par paires obliques, peu écartées l’une de l’autre, et qui ne se multiplient pas sensiblement dans la région inframarginale. Tubercules perforés, crénelés, scrobiculés, petits, peu nombreux, formant d’abord deux rangées longitudi- nales en contact immédiat avec les lignes de pores et s’élevant jusqu’au sommet. Il existe, en outre, deux ou quatre autres ran- gées irrégulières et onduleuses, qui disparaissent graduellement avant le sommet et dont les tubercules, multipliés et plus gros vers le bord, sont au contraire très écartés et petits sur la face supérieure. Granules intertuberculaires irréguliers, fins, peu serrés. Quatre plaques ambulacraires correspondent à une plaque inter- ambulacraire. Aires interambulacraires marquées en dessus, d’une petite rainure centrale. Tubercules médiocrement développés à la face supérieure et également multipliés sur le bord; deux séries un ÉCHINIDES FOSSILES 17 peu plus apparentes et plus régulières que les autres, vont du Péristome jusqu’à l'appareil apicial ; les autres rangées sont irré- gulières et elles ne se montrent guère au-dessus dé PAmbitus, Leur nombre varie entre six et huit. En dessous, ces tubercules sont beaucoup mieux développés, plus largement scrobiculés ; ils occupent, en droite ligne, le centre des plaques, et, dans l’en- semble, ils tendent à former des séries concentriques. Le milieu des deux aires, aux environs du Péristome, est dépourvu de tubercules. Granules intertuberculaires, à la face supérieure prin- cipalement, plus gros, plus irréguliers, moins nombreux et plus écartés que dans les ambulacres; en dessous, ils forment des cercles bien distincts autour des tubercules. Appareil apicial.— Sub-pentagonal, très petit, à peine enfoncé, d’un aspect mamelonné, pourvu de granules un peu grossiers et trop confus sur nos échantillons pour être plus amplement décrits. Péristome.— Très petit, excessivement enfoncé, sub-décagonal, entaillé médiocrement. Son diamètre correspond à o,15 de celui de l'individu. Périprocte.— A fleur de test, allongé, ovale, acuminé aux deux extrémités, situé un peu plus près du bord que du Péristome. Jeune Age. — L’unique jeune individu que je connaisse ne diffère des grands échantillons que par sa forme polygonale plus accentuée. Moule. — Un seul moule, faisant partie de ma collection, et d'assez mauvaise conservation, me semble appartenir au Disroidea concava ; il porte, à la face inférieure, dix sillons, d’abord très étroits sur le bo qu'ils entaillent assez profondément, et qui se poursuivent jusqu'au Péristôme en s’évasant notablement. Les ambulacres sont un peu renflés ; ils sont marqués, sur le bord seulement, d’une rainure centrale très accentuée. L’empreinte du Péristôme est plus grande et moins enfoncée que dans les exem- plaires pourvus de leur test. Observations . — Le type qui vient d’être décrit ne saurait être assimilé au Discoidea cylindrica ; les différences sont trop sensibles pour qu'il y ait lieu de les énumtrer. L’affinité avec l2 Discoidea rolula ne me paraît pas non plus probable, Du Discoidea conica, il s’éloigne, sans aucun doute, non seulement par sa taille, constam- ment plus considérable, mais encore par les détails du moule. Le Discoïdea concava, dont j'ai sous les yeux huit individus de taille différente, me paraît bien distinct de ses congénères, par sa forme abaissée et sub-conique en dessus, par la concavité cons- 2 18 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE tante de la face inférieure, par l’entoncement considérable et la petitesse du Péristôme, et par la position, le développement et la forme acuminée du Périprocte. Etage Cénomanien supérieur. Localités : Rouen, (R), Fécamp, Cap de la Hève. Collections : Muséum de Rouen, Muséum du Havre, Le Mar- chand, Bucaille (8 Exemplaires). Explication des Figures : Pl 2. Discoidea concava de ma collection et de grandeur naturelle ; fig. 9, profil de la face supérieure ; fig. 10, le même, vu en dessus; fig. 11, face inférieure ; fig. 12, partie du test grossi. Dans les figures 9 et 10, les tubercules interambulacraires sont représentés plus nombreux et plus gros que sur l’échantillon type et que sur tous les exemplaires que je connais. ECHINOCONUS CASTANEA, BRONGNIART, 1822. ECHINOCONUS SUBROTUNDUS, Acass, 1840. Dans une publication récente (Bull. Soc. Sc. Nat. de l'Yonne, 2° série, t. IV p. 135) M. Cotteau établit, qu’à l’aide d’un certain nombre d'échantillons recueillis dans une même carrière, il a reconnu que l’Echinoconus subrotundus ne constitue pas une espèce distincte, mais simplement une variété de l’Echinoconus castanea. A ce sujet, je crois devoir faire connaitre dès à présent que cette remarque ne me semble pas s'appliquer aux individus récoltés, non-seulement à Rouen, où ils sont abondants, mais dans tout le département de la Seine-Inférieure. Les deux formes qui sont représentées, dans ma collection, par de belles séries, subissent évidemment un certain nombre de modifications plus ou moins saillantes et constantes et, cependant, l’étude de ces matériaux ne permet pas d'observer un seul individu établissant le passage d’une forme à l’autre. Il me semble, au contraire, en ressortir que chacune d’elles possède des caractères spécifiques constants, tels que : une disposition différente des Zones porifères, un Appareil apicial dissemblable et des détails caractéristiques propres à chacun des jeunes individus, de l’un et de l’autre type. Je reviendrai sur ce sujet intéressant, dans une autre étude où je m'occuperai également de l’Echinoconus gibbus, cet autre parent très proche de l’Echinoconus subrotundus. ÉCHINIDES FOSSILES 19 ECHINOCONUS CIRCULARIS, BUuCaAILLE, 1882. LONGEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres... 35 34 26 Autre exemplaire . ......... 27 26 20 NANTERRE Eee eees 35 35 25 Test de moyenne taille, sub-pentagonal au pourtour, un peu plus large en avant qu’en arrière. Face supérieure assez basse, conique et à bords droits, arrondie au sommet ; face inférieure plate ; bords sub-anguleux. Aires ambulacraires étroites, superficielles ; quatre plaques ambulacraires, dont deux étroiteset deux plus larges, correspondent à une plaque interambulacraire. Zones porifères vaguement sub- onduleuses, très étroites, à peine déprimées. Pores égaux, très petits, un peu allongés, séparés par un fin granule, disposés par paires obliques et simples en-dessus ; à la face inférieure et à peu de distance du bord, les paires de pores se groupent tout-à-coup par triples paires très obliques. Tubercules irréguliers, très fins, peu nombreux et très écartés en-dessus ; plus gros, nombreux et presque serrés à l’ambitus et surtout à la face inférieu:e, où ils sont aussi beaucoup plus enfoncés dans leurs scrobicules. Les plus petits tubercules forment une première rangée allant du sommet au péristôme et en contact immédiat avec les zones pori- fères; voisine de cette série, il en existe une seconde ayant la mème longueur, mais composée de tubercules plus développés et alternant avec ceux de la série marginale ; d’autres tubercules de mème nature que les précédents et plus ou moins serrés, existent encore au centre des séries longitudinales, mais ils ne se montrent distinctement qu’à la face inférieure et à l’ambitus, et ils dispa- raissent à peu près entièrement en dessus. En dessous et au pourtour, tous les tubercules sont disposés de telle façon qu’ils ‘ forment des petites séries obliques et bien constantes. Granules intertuberculaires extrèmement fins et lâches en dessus ; plus visibles, plus nombreux sans être serrés, et irréguliers au pourtour et à la face inférieure. Aires interambulacraires larges, et dont le centre, au sommet seulement, est marqué d’une très vague saillie. Tubercules identi- ques et de même nature que dans les ambulacres. Ces tubercules sont peu nombreux et très irrégulièrement épars en dessus; à la face inférieure, ils sont au contraire serrés, nombreux, mal distri- 20 SOCIËTÉ GÉGLOGIQUE DE NORMANDIE buëssurla plupart des exemplaires; sur certains individus,cependant, ces tubercules affectent une disposition en courtes séries, irrégu- lièrement droites sur chaque plaque et concentriques dans l’ensemble. Granules comme dans les aires ambulacraires. Appareil apicial. — Petit, compact, un peu granuleux. Plaques génitales anguleuses et inégales, perforées au centre. Plaques ocellaires aussi inégales, les antérieures petites, les posté- rieures beaucoup plus développées. Corps madréporiforme, grand, irrégulièrement développé sur certains individus, et placé en avant plutôt que central. Sommet presque central. Péristôme.— Bien ouvert, circulaire, à peine enfoncé, occupant le centre de la face inférieure. Périprocte. — Grand, un peu oviforme, dilaté à sa partie supé- ricure, n’échancrant pas, ou alors extrèmement peu, le bord. Area triangulaire, ayant les bords saillants et le centre évidé, mais seulement au contact du périprocte. Jeune âge.— Les plus jeunes individus de l’Echinoconus circularis que je connaisse, n’offrent aucune particularité digne de remarque. Observations.— Dans une note manuscrite, M. Cotteau a rap- porté (à titre de variété) à l’Echinoconus conicus, les deux échantil- lons que j'ai fait figurer; je ne crois pas pouvoir me ranger à cette opinion, par ce motif que, parmi les milliers d'exemplaires de l’Echinoconus conicus que j'ai examinés un à un et que j’airecueil- lis dans la même localité que l’Echinoconus circularis, je n’ai jamais observé un seul individu pouvant établir un passage d’une forme à l’autre. Je sais bien que l’Echinoconus conicus, dont je possède une série remarquable, est une espèce des plus variables et qu'il est presque impossible de la limiter; cependant, je le répète, elle ne m’a jamais présenté une forme intermédiaire qui me permette de la rallier à l'Echinoconus circularis. Cette dernière espèce rappelle, par son aspect extérieur, une forme figurée par d'Orbigny, dans la Paléontologie française, pl. 1003 et décrite, tome VI, page 539, sous le nom de Echinoconus Raulini. I] ne me paraît pas douteux que cette espèce diffère de la nôtre; je ne peux cependant pas établir les différences, puisque je ne connais cette der- nière que par l’ouvrage que je viens de citer. L’Echinoconus circu- laris se reconnaîtra facilement à son aspect assez régulièrement circulaire, au profil conique et peu élevé de la face supérieure, dont le sommet se termine par une pointe arrondie, et par ÉCHINIDES FOSSILES 21 la position du Périprocte visible seulement d’en bas et situé exactement près du bord, qu’il n’entame pas. Etage Sénonien moyen. (Craie à Micr. rostratus et Marsupites). Localités : Elbeuf, Les Vieux. Collections : Adam, La Sorbonne, Bucaille (10 exemplaires). Explication des figur:s : PI. 1, Echinoconus circularis de gran- deur naturelle, et de ma collection. Fig. 16, profil de la face supé- rieure ; fig. 17, le même vu en dessus; fig. 18, face inférieure du même; fig. 19, partie du test grossi; fig. 20, profil de la face supérieure d’un autre exemplaire; fig. 21, face inférieure du même. HOLASTER ALTUS, Acassiz, 1839. Echin. Suisses, 1er Mémoire, p. 20, pl. 3, fig. 9-10. — Holaster sub-globosus, var. élevée, Desor, 1858, Syn. Ech. foss., p. 338.— Holaster sub-globosus, d'Orb., 1860, Pal. Fr., terr. Crét., t. VI, p. 98.— Holaster sub-globosus, Lennier, 1870 (pars), Et. Géol. et Pal., p. 214. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres . 40 38 28 Autres échantillons ........ 43 39 31 » DA ME Tondau 34 32 26 » DA meet 20 18 14 1/2 Test de taille moyenne, un peu sub-cordiforme, allongé; l'avant est largement échancré, arrondi, un peu gibbeux ; l’arrière est notablement rétréci, brusquement tronqué et obliquement rentrant ; base rétrècie, pourtour arrondi et un peu renflé. Face supérieure déprimée, peu élevée, très faiblement convexe ; un peu plus déclive en avant qu’en arrière, vaguement carënée au centre de l’interambulacre impair. Dessous convexe; le plas- tron est marqué au centre par quelques protubérances disposées en zig-zag. Le point le plus élevé est en avant de lappareiïl apicial et à la naissance du sillon. Sillon antérieur aigu au sommet, s’élar- gissant beaucoup et régulièrement jusqu’à lambitus; superficiel à la naissance, et ensuite plus évidé sans devenir très profond; distinctement limité dans toute sa longueur par deux faibles sail- lies toujours très nettes et très distinctes. Notre fig. 4, ne donne qu’une reproduction fautive de ce sillon, dont les bords devraient être à peu près parallèles, depuis le 1/3 supérieur jusqu’à la base, au lieu de s’évaser comme la figure l'indique. Aires ambulacraïres paires étroites, inégales, très divergentes. 22 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Zones porifères à fleur de test, d’une largeur inégale, les anté- rieures quelquefois un peu arquées au sommet et toujours plus longues que les postérieures; ces dernières sont toujours droites. Pores allongés et même parfois sub-virgulaires, obliqués en sens inverse, et disposés par paires rapprochées au sommet, mais qui s’espacent beaucoup vers l’ambitus où alors, les pores sont ronds, petits, réunis presque l’un à l’autre et disposés très obliquement. Ambulacre impair logé dans le sillon et formé de pores petits, ronds, séparés par un grossier granule tuberculiforme, disposés par paires très obliques. Zone interporifère finement gra- nuleuse et dépoufvue de tubercules. Tubercules.— Assez réguliers, disséminés et écartés sur tout le test ; petits en dessus, plus développés en dessous et particulière- ment sur le plastron où ils sont aussi plus nombreux, sans être compactes. Le long et à l’intérieur des bordures du sillon, il existe des tubercules très développés, irréguliers entre eux, et affectant une disposition en séries confuses. Granules intertuber- culaires réguliers, fins, peu serrés. e Appareil apicial.— Assez large, très allongé, granuleux, super- ficiel. Pores génitaux écartés et peu ouverts. Sommet apicial excentrique en avant. Péristome.— Petit, ovale transversalement, situé assez près du bord antérieur, non enfoncé, à peine évidé en avant. Périprocte. — Ovale, acuminé faiblement aux extrémités; situé vers les 2/3 de la hauteur totale, à l’origine d’une Area évi- dée et qui est presque toujours limitée par des petites protu- bérances contournant parfois le Périprocte. Jeune âge.— Tous les jeunes individus ont la forme et les caractères des adultes, le sillon antérieur y est caractéristique. Le sommet paraît un peu plus excentrique en avant et le Périprocte est comparativement plus élevé. Observations.— Cette forme intéressante n’ayant jamais été décrite complètement, que je sache, et la figure d’Agassiz étant défectueuse, il m’a semblé utile de la faire connaître et figurer à nouveau. Après avoir créé l'espèce, Agassiz la réunit dans le catalogue raisonné et à titre de variété, à l’Holaster sub-globosus ; cela provient sans doute du marque de matériaux, car il me paraît évident que les deux formes ont des caractères propres, ne permettant pas de les confondre l’une avec l’autre. L’Holaster altus se distingue, même à la plus petite taille, de l'Holaster sub-globosus, par son développement toujours moindre, ÉCHINIDES FOSSILES 23 sa forme toujours un peu allongée, son dessus abaïssé et à peine arqué, la troncature large et élevée de l'arrière, par son sillon comparativement plus large, très accusé et régulièrement limité par deux faibles carènes à peu près parallèles depuis le 1/3 supé- rieur jusqu’à la base ; il s’en éloigne encore, par la position diffé- rente du sommet, par le développement moindre des Zones porifères et leur inégale largeur, par la position plus élevée du Périprocte, et enfin, par les gros tubercules, logés le long des bordures du sillon antérieur. Etage Cénomanien supérieur et moyen. Localités : Rouen (C C), Limézy, Fécamp (C), Villequier, Ernemont-la-Villette, les Falaises Cénomaniennes du litto- ral (C), etc. Collections : Le Marchand, Lennier, Etienne, Biochet, Nourry fils, Bucaille, Muséum de Rouen, Muséum du Havre, Collection de la Sorbonne. Explication des figures : PI. s, Holaster altus de grandeur natu- relle et de ma collection ; fig. 1, profil longitudinal ; fig. 2, face supérieure ; fig. 3, face inférieure; fig. 4, profil du côté buccal ; fig. 5, profil du côté anal; fig. 6, aire ambulacraire grossie ; fig. 7, appareil apicial et partie de l’ambulacre impair grossis ; fig. 8, Péristome et parties des avenues ambulacraires grossies. CARDIASTER SEQUANICUS, BucaiLre, 1882. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres.. so 49 33 Autre exemplaire... 45 45 31 Test largement cordiforme et d’assez grande taille, aussi large que long; très profondément échancré à l’avant; troncature posterieure de largeur moyenne et presque verticale. Face supé- rieure élevée, très rapidement déclive en avant; carène posté- rieure en forme de toit, un peu arquée et en pente oblique jus- qu’au Périprocte. Le point culminant est en avant de l’appareil apicial et à la naissance des bourrelets qui limitent le sillon. La plus grande largeur existe aux deux tiers antérieurs. Face infé- rieure bombée et marquée de petites protubérances en zig-zag sur le plastron; profondément évidée en avant du Péristome. Bords arrondis sans être renflés. Ambulacres pairs à fleur de test et très divergents; les anté- 24 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE rieurs sont seuls arqués à la naissance; ils sont aussi plus longs et plus ouverts que les postérieurs. Pores allongés, sub-larmi- formes, plus développés dans les séries externes que dans les internes, disposés par paires plus ou moins distantes lune de l’autre. Les zones porifères externes ont une largeur à peu près double des zones internes. Ambulacre impair formé de pores ronds, très petits, séparés par un grossier granule et disposés par paires obliques et espacées lune de l’autre dès le sommet ; il est logé dans un sillon d’abord presque nul, mais qui, à peu de distance du haut, se creuse rapidement et va en s’approfondissant jusqu’au bord, qu'il échancre profondément; ce sillon est limité par deux bourrelets particulièrement saillants au sommet. Zone interporifère large, très finement granuleuse et pourvue de quelques rares tubercules dans la région de l’ambitus; ces derniers sont moins développés que ceux qui existent le long des bords internes du sillon. Tubercules de petite taille, irréguliers, clair semés en dessus ; beaucoup plus serrès et mieux développés au pourtour ; plus gros encore, mais toujours écartés, à la face inférieure où ils ne sont réellement nombreux que sur le plastron. Sur la face supérieure, il existe une petite quantité de tubercules plus volumineux que les précédents, mais ceux-ci n’occupent que les bords du sillon antérieur et la ligne de faite de l’interambulacre impair; quel- quefois aussi, autour de l’appareil apicial, on observe encore quelques-uns de ces gros tubercules. Granules intertuberculaires à peu près indistincts sur tous les échantillons que je connais ; ils paraissent fins et très serrés. Appareil apicial.— Plus long que large, à fleur de test, granu- leux et portant quelques rares tubercules relativement gros. Pores génitaux sub-circulaires et bien ouverts. Sommet ambulacraire un peu excentrique en avant. Périsiome.— Petit, éloigné du bord, enfoncé, semi-lunaire. Périprocte.— Acuminé, situé aux 4/7 de la hauteur totale, à l’extrémité d’une Area triangulaire, étroite et un peu évidée. Fasciole.— Indistinct. Jeune âge et Moules.— Inconnus. Observations.— Le Cardiaster sequanicus se distingue nettement du Cardiaster bicarinatus. C’est du Cardiaster ananchytis que notre espèce est la plus voisine; elle en diffère cependant par la position beaucoup plus antérieure du point culminant, par la brusque déclivité de l'avant, par la courbure allongée de la carène inter- ÉCHINIDES FOSSILES 25 ambulacraire, par son sillon presque nul au sommet, mais ensuite de plus en plus creusé et anguleux jusqu’au bord, qu’il entame profondément; par le développement moins prononcé et le nombre plus restreint des tubercules qui bordent le sillon anté- rieur, qui entourent et occupent l'appareil apicial et qui longent le sommet de la carène postérieure; et, enfin, par la position sensiblement plus élevée du Périprocte. Etage Cénomanien supérieur. Localités : Rouen, St-Didier-des-Bois (Eure). Collections : Le Marchand, Muséum du Havre, Bucaille (8 exemplaires). Explication des figures : Pl. 3, Cardiaster sequanicus de gran- deur naturelle et de ma collection; fig. 1, face supérieure; fig. 2, face inférieure ; fig. 3, profil du côté buccal; fig. 4, profil du côté anal. Malgré tout le talent de notre dessinateur, il me faut dire que la reproduction du Cardiaster sequanicus est très défectueuse; dans les figures 1 et 2, l'arrière est trop arrondi et la plus grande largeur trop centrale; sur les figures : et 3, le sillon est trop évasé au-dessus de lPambitus ; il n’est pas assez nettement limité et le méplat qui existe au sommet de ce sillon n’est pas distinct; sur toutes les figures, les tubercules sont beaucouptrop nombreux et les gros tubercules signalés le long de la carène postérieure et sur les bords du sillon, ne sont pas représentés. EPIASTER SULCATUS, BucaiLe, 1882. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres..,,, 43 42 29 Autres individus...... Ts SO 49 33 » D CC eee 33 32 24 » M ee Mel ee à 28 28 19 Test atteignant une assez grande taille, cordiforme, un peu polygonal au pourtour, aussi large que leng ; peu profondément échancré à l’avant, largement tronqué et un peu en saillie À l'arrière ; bords arrondis et assez épais. Dessus très élevé en arrière, sub-caréné et un peu arrondi dans l'interambulacre impair, ensuite régulièrement incliné jusqu’au bord antérieur où il ne reste guère d’épaisseur. Dessous quelquefois très plat, le plus souvent un peu convexe et bombé sur le plastron ; le Péri- 26 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE stôme est un peu évidé en avant et latéralement; au centre de l'extrémité postérieure du plastron et tout-à-fait sur le bord de la troncature, il existe une protubérance bien accentuée. La plus grande hauteur est très excentrique en arrière du sommet et le plus grand diamètre presque central. Ambulacres pairs bien creusés, les antérieurs une fois plus longs que les postérieurs; ces derniers sont peu divergents, moins profonds et moins larges. Pores difficiles à observer, ils paraissent ronds dans les rangées internes et allongés dans les externes. Zones porifères larges, un peu fermées à leur extréminé ; elles sont logées sur les parois des dépressions ambulacraires. Ambulacre impair situé dans un sillon large et profond dès le début et sur la face supérieure, mais qui s’atténue beaucoup sur le bord qu’il échancre cependant assez largement ; ce sillon ne se continue pas en dessous. Les parois de ce sillon sont presque verticales en dessus et elles ne s’arrondissent qu’à la base, où elles s’élargissent aussi un peu. Pores indistincts. Les aires interambulacraires antérieures sont plates en dessus ; elles sont très étroites et renflées à leur sommet, où elles forment comme des carènes qui aboutissent à l’appareil apicial. Tubercules.— Petits, peu nombreux, écartès en dessus; plus abondants, mieux développés et presque égaux au pourtour et à la face inférieure, où ils sont en outre plus serrés; sur le plas- tron, ils sont un peu moins gros. Appareil apicial.— Très petit, sub-circulaire, enfoncé, granu- leux. Sommet ambulacraire à peu près central. Péristome.— Peu éloigné du bord, semi-lunaire, transversal, petit, à peine labié. Périprocte.— Situé aux 3/4 supérieurs de la hauteur, ovale allongé, parfois un peu acuminé aux extrémités, légèrement oblique ; Area très étroite, plate et non évidée, très allongée et, portant au centre, un léger sillon en zig-zag. Jeune âge.— Le seul jeune individu que je connaisse ne s’éloigne des adultes que par la troncatüure postérieure, qui est comparati- vement beaucoup plus large chez lui; tous les autres caractères sont les mêmes. Observations.— Cet épiaster ne me semble pas pouvoir être confondu avec aucun de ses congénères, et il se reconnaîtra tou- jours à sa forme largement évasée, à son dessus fortement incliné de larrière jusqu’au bord antérieur, à ses ambulacres pairs larges ÉCHINIDES FOSSILES 27 et profonds, à son sillon antérieur large, profondément concave et d’un développement tout particulier, qui rappelle un peu celui du genre Schizaster. Je dois dire que c’est leur physionomie externe qui m'a engagé à ranger cette espèce et la suivante dans le genre Epiaster, duquel elles semblent un peu différer, par leur test très large et sub-circulaire, par le développement, la profondeur et surtout la forme du sillon antérieur ; par la disposition des zones porifères, et aussi par le développement et la profondeur plus grande des ambulacres. Etage Cénomanien inférieur (Gaïze). Localités : Bléville, Cauville, Rouen, Octeville. Collections : Muséum du Havre, Le Marchand, Constantin, Bucaille (6 échantillons). Explication des figures : PL. 3, Epiaster sulcatus de grandeur naturelle et de ma collection; fig. 7, profil longitudinal; fig. 8, face supérieure; fig. 9, face inférieure; fig. 10, profil du côte buccal ; fig. 11, profil du côté anal. EPIASTER FRANCII, Bucaicre, 1882. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres. 74 72 ? Test atteignant une très grande taille, largement cordiforme, très polygonal et un peu ondulé au pourtour, peu profondément échancré à l’avant, étroitement tronqué en arrière. Dessus incliné de l’arrière à l’avant, sub-caréné et arqué dans l’interambulacre impair. Bords élevés, pourtour très convexe. Face inférieure encroûtée. Le point culminant est un peu excentrique en arrière, et la plus grande largeur est environ aux 3/5 antérieurs. Ambulacres pairs très larges, profondément concaves; les antérieurs plus divergents et de 2/3 plus longs que les postérieurs. Zones porifères sub-pétaloïdes, longues, larges, logées sur les parois latérales des excavations ambulacraires ; elles sont un peu fermées à leur extrémité dans les ambulacres postérieurs ; elles sont, au contraire, plus ouvertes, plus longues et plus larges dans les ambulacres antérieurs. Pores oblongs dans les séries internes ; obliques, virgulaires et très allongés dans les séries externes; écartés l'un de l’autre dans chaque paire. Les paires sont nom- breuses et serrées, Zones interporifères très larges. 28 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Ambulacre impair composé de pores rapprochés, ronds et petits à l’intérieur, un peu allongés dans les séries externes, unis par un indice de sillon et séparés par un renflement de peu d’im- portance : les paires de pores sont plus éloignées l’une de l’autre que dans les zones ambulacraires paires ; elles sont disposées en lignes presque droites et presque parallèles dans leur plus grande longueur. Ces séries de pores sont placées à la base des parois du sillon. Zone interporifère très large, très finement granuleuse et pourvue de quelques tubercules. Sillon antérieur très large, à peu près plat dans le fond et dont les parois sont un peu arrondies et inclinées ; il est profond dès le sommet et sur la face supérieure, très atténué sur le bord au-delà duquel il est nul. Ce sillon est limité par deux faibles carèncs s’évasant beaucoup dès leur nais- sance, se rapprochant ensuite, après avoir décrit une courbe régu- lière, puis s’écartant à nouveau jusqu’au pourtour, sur lequel elles sont considérablement évasées ; mais à cet endroit, elles devien- nent nulles. Les aires interambulacraires paires sont marquées d’un fort et large méplat en dessus et jusqu’au pourtour; elles sont en outre très étroites et comme carènées à leur sommet, où elles inclinent fortement vers l'appareil apicial. Tubercules de la face supérieure fins, inégaux et peu sail- lants ; ils sont nombreux et même serrés le long des dépressions ambulacraires ; plus développés sur les bords du sillon antérieur ; beaucoup plus écartés et aussi mieux développés au centre du méplat interambulacraire. Granulation très fine, régulière et dense. Appareil apicial.— Enfoncé, particulièrement petit et mal conservé sur l’échantillon que j'ai sous les yeux. Sommet ambulacraire un peu en avant. Périsiome, Périprocte et face inférieure indistincts sur notre échantillon. Observations. — La profondeur et la largeur des zones ambula- craires paires, la forme du sillon antérieur, la disposition des zones porifères, et l’ensemble tout particulier de cette espèce, suflisent pour la distinguer de tous les types que j’ai vus figurés. Ce n’est qu'avec l’Epiaster sulcatus qu’il semble exister un peu d’analogie dans la physionomie générale, mais les détails d'orga- nisation me paraissent absolument différents, d’après le seul exemplaire que je connaisse de l’Epiaster Francii. Etage Cénomanien supérieur. Localité : Rouen. ÉCHINIDES FOSSILES 29 Collection : Bucaille. Explication des Figures : PI. 3 ; fig. S, Epiaster Franc de grandeur naturelle et de ma collection. MICRASTER NORMANNIE, E. Bucaille, 1882. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres..... SI 46 27/2 AUITESNEXEMPIATES ee ee S4 52 34 1/2 » » RARES 44 41 24 1/2 » DR A es 33 30 18 Test sub-cordiforme, oblong, très déprimé, sub-polygonal au pourtour ; dilaté et médiocrement échancré à l’avant ; très rétréci en arrière; troncature postérieure large et obliquement rentrante. Face supérieure très surbaissée et à peu près plane ; cependant, la carène assez vague de linterambulacre impair présente un indice de renflement tout proche du sommet et à Pendroit où existe le point le plus élevé. Dessous subconvexe, assez profon- dément creusé à l’avant du Péristome. Plastron médiocrement renflé. Ambulacres pairs très inégaux, relativement larges, forte- ment concaves ; les postérieurs très courts et peu divergents ; les antérieurs plus longs de deux cinquièmes environ. Zones pori- fères fortement courbées au sommet et ensuite.presque droites, étroites. Pores petits, à peu près ronds dans les séries internes, allongés dans les rangées externes. Plaques porifères assez longues, relativement étroites, bordées par une série de granules peu distincts et formant un léger bourrelet entre chaque paire de pores. Zones interporifères un peu plus larges que l’une des zones porifères et remplies par des granules très fins, très serrés et difficiles à distinguer. Ambulacre impair formé de pores petits, ronds, séparés par un fort granule, disposés par paires obliques et relativement éloignées l’une de l’autre. Zone interporifère très large, finement granuleuse et dépourvue de tubercules sur tous les échantillons que je connais. Les plaques porifères ont une largeur double de celles des ambulacres pairs. L’ambulacre impair occupe un sillon assez fortement creusé dès sa naissance, mais qui de suite est moins profond jusqu’à l’ambitus, pour ensuite s’approfondir à nouveau jusqu’au bord inférieur. La largeur assez faible de ce 30 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE sillon est à peu près égale de haut en bas et il est limité par deux faibles carènes, qui vont en s’élargissant jusqu’à la base, où elles sont particulièrement vagues. Tubercules.— Très fins, à peu près uniformes, nombreux, et très irrégulièrement distribués en dessus; plus développés et beaucoup plus abondants à l’ambitus ; gros et largement scrobi- culés en dessous, compactes sur le plastron. Granules intertuber- culaires particulièrement fins et homogènes. Les avenues ambu- lacraires, sur la face inférieure, ontun aspecttrès finement rugueux, et c’est difcilement que l’on peut y observer la forme des granules, qui est presque analogue (malgré qu’ils soient plus serrés), à ceux existant entre les tubercules; parmi ces granules, recouvrant les avenues ambulacraires, il existe parfois quelques rares tubercules isolés, petits et scrobiculés. Appareil apicial.— Enfoncé, sub-circulaire, petit, compacte et granuleux ; la plaque madréporiforme est petite et presque cen- trale ; elle forme une gibbosité saillante sur plusieurs des échan- tillons que je connais. Pores génitaux bien ouverts et au centre des plaques. Sommet ambulacraire excentrique en avant. Péristome.— Eloigné du bord, enfoncé, sub-circulaire, pourvu d’une lèvre petite et peu saïllante. | Périprocte.— Bien ouvert, ovale, un peu transversal, situé très haut par rapport à l'épaisseur du test. Area assez large, relative- ment haute, un peu évidée au centre, limitée par de faibles nodo- sités plus ou moins apparentes. Fasciole sous-anal très étroit. Jeune âge.— Les plus petits individus se rapportant à cette forme, ont un aspect général qui les fait reconnaître assez facile- ment; cependant, ils sont moins acuminés en arrière, et les ambulacres pairs sont proportionnellement plus courts, moins iarges et plus à fleur de test que chez les grands exemplaires. Moules inconnus. Observations.— Par sa physionomie générale et son habitat, ce Micraster semble former le passage entre les Micraster breviporus et cor-testudinarium ; cependant, ses caractères propres l’éloignent certainement du premier sans permettre aucune assimilation avec le second; il sera toujours facile à distinguer par son test allongé et aplati en dessus, par la forme concave et les détails de ses Ambulacres, par son sillon antérieur étroit et irrégulièrement creusé du sommet à la base, et enfin par la troncature très ren- . ÉCHINIDES FOSSILES 31 trante de l’extrémité postérieure. Je possède plusieurs échantil- lons d’une taille un peu supérieure à celui qui est figuré ; ils en diffèrent en ce qu’ils ont le dessus un peu plus élevé au sommet ambulacraire, et constquemment un peu arqué; les autres détails restent les mêmes. Eïage Sénonien inférieur (dans les assises en contact avec le Turonien supérieur). Localités : Dieppe (falaise du Pollet), Senneville-sur-Fécamp, Le Héron, Mont-de-l'If (dans une marnière)}, Roncherolles-le- Vivier. Collections : La Sorbonne, Le Marchand, Bucaille (nombreux exemplaires). Explication des figures : PL. 6, Micraster Normanniæ de grandeur naturelle et de ma collection; fig. 1, profil longitudinal; fig. 2, face supérieure; fig. 3, face inférieure; fig. 4, profil du côté buccal ; fig. 5, profil du côté anal; fig. 6, plaques ambulacraires paires grossies ; fig. 7, plaques de l’ambulacre impair grossies. MICRASTER INTERMEDIUS, Bucaizre, 1882. Micraster cor-anguinum, Hébert, 1872, Bull. Soc. Géol. de Fr. vol, 29, p. 457.— Idem, 1875, vol. 3 de la 30 série du même Bull., p. $19. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres.. $o (To) 36 Autres exemplaires..." 53 S4 1/2 39 , D 43 43 32 1/2 È Ù ss. 35 35 25 > OUVRE 23 22 16 1/2 Nanctéstrapue 70, ere. 48 53 35 DIN ADAISSÉE cite ce ce 52 52 33 1/2 A AlOnPE Peer eee 48 AANT/2 31 1/2 Test épais, renflé, très largement cordiforme ; aussi large que long. Avant médiocrement échancré et très dilaté ; arrière tronqué largement et verticalement; pourtour arrondi. Face supérieure gib- beuse, très haute et fortement convexe; carénée et régulièrement déclive dans l’interambulacre impair, très brusquement déclive et quelquefois presque abrupte en avant. Le point culminant est toujours au sommet ambulacraire. Dessous sub-convexe, étroite- ment évidé à l’avant du péristome. Plastron large et fortement renflé. 32 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Ambulacres pairs droits, relativement très larges, peu creusés ou même presque à fleur de test ; les postérieurs de 1/4 moins longs que les antérieurs. Zones porifères, larges, droites, un peu courbées et seulement au sommet. Pores petits, à peu près ronds dans lesrangées internes, un peu allongés dans les rangéesexternes, unis par un sillon très étroit et un peu arqué. Plaques pori- fères très nombreuses, très longues, très étroites, un peu arquées, portant sur le bord une rangée de granules petits et plus ou moins distincts. Zone interporifere sillonnée au centre, finement granuleuse, un peu plus large que l’une des zones porifères. Ambulacre impair droit, logé dans un sillon très peu pro- fond, étroit et d’une largeur à peu près égale sur toute la lon- geur. Pores internes ronds, les externes un peu allongés, séparés, le plus souvent, par un fort granule dans les 7 ou 8 paires les plus élevées, ensuite conjugués par un sillon étroit et disposés par paires transversales que sépare une ligne de granules ; du tiers supérieur de la longueur, les paires deviennent plus espacées jusqu’à la base et les pores, presque en contact l’un de l’autre, sont de nouveau séparés par un grossier granule. Zone interpo- rifère relativement très large, couverte d’une granulation d’abord assez grossière dans le haut et ensuite fine et dense; çà et là quelques très petits tubercules mieux développés et plus nombreux à Ja base. Les plaques porifères de l’ambulacre impair ont environ 1/3 de largeur en plus que les plaques des ambulacres pairs. Tubercules très abondants, petits et médiocrement scrobiculés en-dessous ; plus développés à lambitus et plus particulièrement encore en dessous, nombreux et serrés sur le plastron. Granules intertuberculaires fins, réguliers et très compactes sur la face supérieure, un peu plus grossiers et plus irréguliers sur la face inférieure. Avenues ambulacraires en dessous, pourvues de gra- nules très irréguliers de forme et de dimension, la plupart très grossiers, toujours fort inégalement répartis. Appareil apicial.— Faiblement enfoncé, bien développé, com- pacte, granuleux. Pores génitaux en général grands et occupant le centre des plaques. Plaque madréporiforme à peu près centrale et assez grande. Sommet ambulacraire le plus ordinairement central, quelque- fois, cependant, un peu excentrique en avant. Péristome.— Assez proche du bord, petit, sub-circulaire, peu enfoncé, muni d’une lèvre à peine saillante. ÉCHINIDES FOSSILES 33 Périprocte.— Assez haut situé, ovale, grand, un peu transver- sal. Area anale large, élevée, plane et non évidée, distinctement circonscrite et bordée par quelques nodosités plus ou moins vagues. Fasciole sous-anal toujours étroit. Jeune âge.— Forme un peu allongée, largement tronquée à l’arrière, aplatie en dessus et dont le point culminant est en arrière du sommet ambulacraire ; ambulacres pairs larges, pres- qu’à fleur de test; zones porifères externes très arrondies au sommet et particulièrement dans les ambulacres postérieurs. Péristome relativement éloigné du bord, très petit, recouvert par une lèvre plus ou moins saillante et aiguë. Ce n’est guère qu’à la taille de 40 /, que la forme gibbeuse du dessus s’accentue nettement. Moules inconnus. Variations.— Elles portent toutes sur la forme extérieure et jamais sur aucun des caractères ambulacraires ou 2utres. Je pos- sède des individus un peu plus allongés, moins dilatés en avant et moins élevés que le type que j'ai figuré; d’autres, dont les ambulacres sont plus creusés, moins longs et les plaques pori- fères un peu plus larges. Je possède aussi deux ou trois exem- plaires trapus et ayant une largeur supérieure à la longueur; enfin, j'ai pu observer, sur quelques trèsrares échantillons, que les pores ambulacraires des séries externes étaient remarquablement allongés. Observations : La forme externe du Micraster intermedius le rapproche d’une manière vague des Micraster cor-anguinum (Agass), et Micraster brevis (Desor). Avec le premier, il n’y a certes pas lieu de le confondre, et je pourrais presque en dire autant du second, dont il s'éloigne par sa forme constamment arrondie en-dessus et la position différente du sommet, par ses Ambulacres moins creusés, plus larges et plus longs; par la dispo- sition des zones porifères et interporifères et par la présence constante d’un Fasciole sous-anal étroit, qui manque le plus souvent chez le Micraster brevis. Etage Sénonien moyen (couches à silex rubanés). Localités : Elbeuf et ses environs (C. C.), Saint-Pierre-des- Cerceuils (C.), Orival, Saint-Adrien, Betteville, Falaises de Saint- Valery-en-Caux et de Fécamp à Yport. Collections : Le Marchand, Adam, Noury, Muséum de Rouen, Collection de la Sorbonne, Bucaille. 34 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Explication des Figures : PL. 7, Micraster inter médius de grandeur naturelle et de ma collection ; fig. 1, profil longitudinal ; fig. 2, face supérieure ; fig. 3, face inférieure ; fig. 4, profil du côté buccal ; fig. 5, profil du côté anal ; fie. 7, plaques ambulacraires paires grossies; fig. 8, plaques de l’ambulacre impair grossies. La fig. 6 n’est pas absolument correcte, les plaques semblent trop larges pour la longueur et l’espace interporifère est un peu trop étroit. MICRASTER ROSTRATUS, E. Bucaille, 1882. LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR Dimensions en millimètres... 64 61 38 Autres exemplaires. .... EE ST s1 36 1/2 , DT AU LRU 36 32 25 » nt Grue 28 26 19 Test cordiforme, de très grande taille, plus long que large, sub- pentagonal au pourtour ; profondément échancré à l’avant ; l’extrémité postérieure largement tronquée et obliquement ren- trante. Face supérieure élevée et arquée, assez brusquement déclive dans la région antérieure ; carène arquée et proëéminente dans l’aire interambulacraire impaire et qui se prolonge au delà de la troncature postérieure, pour se terminer en un rostre très saïllant. Le point culminant est un peu en arrière du sommet ambulacraire. Face inférieure presque plate, étroitement évidée en avant du Péristome ; plastron très large et très peu renflé. Ambulacres pairs bien développés, longs et larges, profondé- ment creusés en forme de toit renversé, parfaitement droits; les an- térieurs plus allongés de un tiers environ que les postérieurs. Zones porifères à peine un peu courbées au sommet, ensuite larges et droites. Pores nombreux, petits et à peu près ronds dans les rangées internes, allongés et larmiformes dans les rangées externes. Plaques porifères nombreuses, très longues, très étroites, portant une rangée de fins granules, en général bien distincts. Zones interporifères profondes au centre, assez finement granu- leuses, et plus larges que l’une des zones porifères. Ambulacre impair logé dans un sillon étroit et peu profond à la partie supérieure, beaucoup plus creusé et plus évasé au pourtour. Pores ronds dans les rangées internes, allongés et acu- minés dans les séries externes, disposés par paires nombreuses et ÉCHINIDES FOSSILES 35 horizontales dans la région du sommet ; ce n’est qu’après le tiers supérieur de la distance comprise entre le haut et la base, que les paires s’espacent beaucoup, deviennent très obliques et que les pores, alors très petits et entièrement rapprochés l’un de l’autre, sont séparés par un granule. L'espace interporifère est très large et couvert d’une granulation très fine, homogène et qui offre, surtout vers l’ambitus, quelques tubercules peu développés et plus ou moins nombreux, selon les individus. Tubercules très abondants, très petits, à peine scrobiculés et assez uniformément distribués en dessus; beaucoup plus gros, entourés d’un large scrobicule et plus irrégulièrement distribués en dessous, où ils ne sont réellement compacts que sur le plas- tron. Granules intertuberculaires très fins et très denses. Les avenues ambulacraires portent, sur la face inférieure, des gra- nules parfaitement distincts, apparents, très inégaux, d’une con- formation irrégulière et à peu près isolés les uns des autres. Appareil apicial. — Faiblement enfoncé, petit, compacte, granuleux. Pores génitaux largement perforés. Plaque madrépori- forme peu développée. Sommet ambulacraire un peu excentrique en avant. Péristome. — Peu éloigné du bord, petit, sub-circulaire, faible- ment enfoncé, pourvu d’une lèvre peu saillante. Périprocte. — Ovale et grand, situé au sommet d’une Area élevée, à peine évidée et circonscrite par quelques nodosités peu sensibles. Le Périprocte n’est visible que d’en bas, par suite de la position oblique qu’il occupe sous le rostre, particulièrement saillant, de l'aire interambulacraire impaire. Fasciole sous-anal étroit. Jeune âge.— Les deux plus jeunes échantillons que je connaisse ont une longueur de 36 "j,; ils sont déjà caractérisés par le rostre prononcé, qui recouvre entièrement le Périprocte; l’un de ces échantillons a une forme assez exactement semblable à celle des plus grands individus, l’autre est moins dilaté en avant. Chez lun et l’autre, les ambulacres sont moyennement creusés, les plaques porifères allongées, le Péristome est relativement plus rapproché du bord et la face inférieure est fortement bombée sur le plastron. Moules. — Les moules sont extrêmement rares dans nos collections ; ceux que je connais, ont bien tous la physionomie particulière au Micraster rostratus ; les seules différences à signaler portent sur la profondeur, moindre, des ambulacres; sur la posi- 36 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE tion du Péristome, plus voisin du bord, et sur la saillie, moins accentuée, du rostre postérieur. Observations. — Le Micraster rostratus habite avec le Micraster cor-anguinum, mais dans des assises supérieures, où cette dernière forme est déjà rare. C’est, à première vue, du Micraster glyphus, que cette forme nouvelle semble le plus se rapprocher ; elle s’en écarte cependant beaucoup par son aspect plus pentagonal au pourtour, la forme plus abrupte de l’avant, ses ambulacres plus droits, plus longs et plus profondément creusés ; la disposition toute différente des zones porifères, la différence d'emplacement du Péristome et enfin, par la saillie rostrée et particulièrement apparente, qui domine et recouvre le Périprocte. Etage Sénonien moyen (assises les plus élevées avec Marsupites, Ananchytes carinata). Localité (Test) : Elbeuf et ses environs. — (Moules), Malaunay. Collections : Noury, Adam, Bucaille (12 exemplaires). Explication des Figures : P1. 8, Micraster rostratus de grandeur naturelle et de ma collection ; fig. 1, profil longitudinal ; fig. 2, face supérieure ; fig. 3, face inférieure ; fig. 4, profil réduit du côté anal ; fig. s, plaques ambulacraires grossies ; fig. 6, plaques de l’ambulacre impair grossies; fig. 7, Péristome et son contour grossis. Sur les figures 1 et 2, les Ambulacres pairs ne paraissent pas assez profondément creusés ; sur la figure $, les plaques devraient être un peu plus allongées par rapport à la largeur, et la fig. 4 ne donne qu’une idée très imparfaite du rostre et de la position du Périprocte, qui est beaucoup trop apparent et trop grand sur le dessin. HÉMIASTER DIFFICILIS, Bucaice, 1882. LONGUEUR LARGEUB HAUTEUR Dimensions en millimètres... 33 31 26 Test cordiforme, sub-polygonal au pourtour, à peine échancré à l’avant, assez largement tronqué et verticalement en arrière; bord élevé, renflé, très arrondi. Face supérieure arrondie et régu- lièrement déclive en avant; arquée en arrière, carénée dans l’in- terambulacre impair. Face inférieure sub-convexe, bombée sur le plastron, peu sensiblement évidée en avant du Péristome. Le point le plus élevé est en arrière du sommet ambulacraire, et la plus grande largeur presque centrale. ÉCHINIDES FOSSILES 37 Ambulacres pairs.— Très inégaux, droits, médiocrement creu- sés ; les antérieurs un peu plus larges et environ deux fois plus longs que les postérieurs; sillon antérieur relativement large et assez profond en dessus, mais très atténué sur le bord, qu’il n’en- tame pour ainsi dire pas. Zones porifères indistinctes. Tubercules visibles seulement à la base et en dessous, où ils sont bien développés et peu nombreux ; sur le plastron, ces tuber- cules sont moins gros et plus serrés. Appareil apicial. — Très confus, enfoncé, petit, circulaire, granuleux. Sommet ambulacraire excentrique en arrière. Péristome.— Eloigné du bord, bien ouvert, non enfoncé. Périprocte. — Très élevé, petit, ovale, acuminé au sommet. Area non évidée, longue et assez large. Fasciole inconnu. Radioles de la face inférieure très grèles, très allongés, côtelés longitudinalement sur la tige et pourvus d’un bouton relativement très développé. Observations. — Cette espèce, dont je ne connais que deux individus en bon état, ne me paraît pas susceptible d’être confon- due avec l’Hémiaster bufo, parce qu’elle a un aspect plus allongé et plus pentagonal au pourtour, une forme comparativement plus haute et plus arrondie sur les bords qui sont, en outre, plus élevés ; elles s’en éloigne encore par la courbure régulière et allongée de la carène interambulacraire impaire, par l'aspect beaucoup plus grèle de ses ambulacres et par l'élévation moindre du Périprocte, comparativement à la hauteur. Etage Cénomanien inférieur (Gaïze). Localités : Bléville, Cauville. Collections : Lennier, Bucaille. Explication des Figures : PI. 4, Hémiaster difficilis, grandeur naturelle et de ma collection ; fig. 1, profil longitudinal ; fig. 2, face supérieure ; fig. 3, face inférieure ; fig. 4, profil buccal ; fig. s, profil anal ; fig. 6, Radiole du mème échantillon, grandeur naturelle et grossi. 38 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE En 1873, j'ai publié, dans le 1° volume du Bulletin de la Société Géologique de Normandie, le catalogue descriptif des Echinides réguliers du département de la Seine-Inférieure, qui devait être accompagné de planches dont la gravure a été retardée par diverses causes. Les planches qui auraient du être annexées à mon précédent travail sont les 1'° et 2"° de celles quiaccompagnent celui-ci. J’en donne ici la légende succincte, en renvoyant, pour chaque espèce, au 1° volume du Bulletin, où l’on trouvera la description détaillée. CIDARIS UNIFORMIS, Sorignet. Bull. de la Société Géol. de Normandie, vol. rer, p. 82.— Tir. à part, p. 26. Explication des figures : PI. 1, Cidaris uniformis, de lEtage Cénomanien et de ma collection; fig. 8-9, plaques interambu- lacraires grossies; fig. 10, fragment d’une zone porifère, grandeur naturelle et grossie; fig. 11, Radiole granulaire, grandeur natu- relle et grossi. CIDARIS HÉVA, BucaizLe, 1872. Bull. Soc. Géol. de Norm., vol. 1, p. 85.— Tir. à part, p. 29. Explication des figures : PI]. 1, Cidaris Héva, de l’Etage Céno- manien et de ma collection; fig. s, Radiole de grandeur naturelle; fig. 6, partie du même grossie; fig. 7, facette articulaire grossie. Sur la fig. 6, la granulation est figurée trop nombreuse et trop compacte. CIDARIS SP. Bull. Soc. Géol. de Norm., vol. 1, p. 118.— Tir. à part, p. 62. Explication des figures : PI. 2, fig. 1, Radioles de grandeur naturelle ; fig. 2, Radiole grossi ; — ma collection.— Etage Séno- nien moyen (assises à Micrasier intermedius). Ces Radioles, d’une forme et d’une ornementation constante, doivent-ils être réunis au Cidaris clavigera ? De même qu’en 1872, je ne le pense pas; je propose de les spécifier sous le nom de Cidaris fallax. CIDARIS PENNETIERI, BucalILce, 1872. Bull. Soc. Géol. de Norm., vol 1, p. 122. — Tir. à part, p. 66. Explication des figures : PI. 1, fig. 1, Radioles de grandeur naturelle ; fig. 2, Radiole grossi ; fig. 3, partie de la tige, collerette ÉCHINIDES FOSSILES 39 et bouton grossis ; fig. 4, autre Radiole de grandeur naturelle ; fig. 42, facette articulaire grossie, — ma collection. — Etage Sénonien moyen (assises à Micraster intermedius). CIDARIS SUB-PYRIFORMIS, BucaiLe, 1872. Bull. Soc. Géol. de Norm., vol. 1, p. 126. — Tir. à part, p. 7o. Explication des figures : PI. 1, fig. 12, Radiole de grandeur naturelle; fig. 13, partie du même grossie.— Etage Sénonien ; — de ma collection. MAGNOSIA SEQUANA, BucaiLce, 1872. Bull. Soc. Géol. de Norm., vol. 1, p. 189.— Tir. à part, p. 133. Explication des figures : Pl. 2, Magnosia Sequana de lEtage Cénomanien et de ma collection; fig. 3, profil de grandeur natu- relle; fig. 4, face supérieure; fig. 5, face inférieure; fig. 6, aire ambulacraire grossie ; fig. 7, aire interambulacraire grossie ; fig. 8, Appareil apicial grossi.— Dans la fig. 7, les tubercules sont repré- sentés trop nombreux et avec une régularité qui n'existe pas sur notre échantillon. J'ai quelques doutes sur la valeur spécifique de ce type ; il se pourrait même qu'il appartint à un autre genre, et il faut attendre À de nouvelles récoltes pour être exactement fixé à ce sujet. N'OTTCE PROFIL GÉOLOGIQUE DU CHEMIN DE FER DE MAMERS A MORTAGNE Par PAUL BIZET, Conducteur des Ponts-et-Chaussees à Bellème, Membre de la Societe Geologique de Normandie. EXPOSÉ L'important réseau de chemin de fer construit par lEtat sur le sol normand livre aux géologues un vaste champ d’investigations et facilite leurs recherches, au double point de vue stratigraphique et paléontologique. Les tranchées ouvertes pour l'exécution des travaux permettent, en effet, de recueillir de précieux renseignements sur l’ordre de superposition des couches des terrains, en même temps qu’elles fournissent les moyens de rechercher et de classer rigoureusement les fossiles que renferment les divers étages géologiques. Il importe donc de profiter de ces circonstances favorables pour se livrer à des études locales très détaillées, afin de réunir un en- semble d'observations que les savants consulteront avec intérêt. La science n’a pas encore dit son dernier mot, en ce qui touche la distribution des corps organisés fossiles que renferment les di- verses assises de la terre. Quelques auteurs, trop exclusifs dans leur opinion, les ont cantonnés dans des zones très restreintes ; d’autres, au contraire, ont admis des migrations auxquelles ils ont peut-être donné trop d’extension. De part et d’autre, il y a vraisemblablement des exagérations, queles nombreuses coupures faites dans le sol par l’établissement des voies ferrées permettront de reconnaître et de rectifier. Les auxiliaires ne sauraient manquer pour conduire à ce résultat, car la géologie est une science pleine d’attraits, qui procure à ses adeptes de vives satisfactions, en ouvrant à leur esprit les plus larges horizons. Nous espérons donc que, dans chaque contrée, bon nombre d’observateurs consciencieux et de jeunes gens PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE AT instruits se montreront désireux de contribuer à la réalisation de ce vaste plan d’études, dont l’importance ne saurait échapper à personne. Ces observations multiples, bien coordonnées, auraient pour conséquence, non seulement d’élargir le cercle de nos connaissances en stratigraphie et de conduire à une classifica- tion rigoureuse des espèces fossiles les plus caractéristiques des diverses assises, mais encore de faire ressortir, d’une façon nette et précise, les variations nombreuses qui se sont opérées dans les faunes successives des terrains, variations qui s’accusent parfois d’une manière très sensible, même pour des localités peu éloignées les unes des autres. On pourra ainsi rechercher les causes de ces modifications de forme et voir si elles sont le résultat de déve- loppements organiques, ou si on doit les attribuer à des circons- tances chronologiques ou à des influences topographiques. Au point de vue pétrologique, bien des faits restent aussi à expliquer. Peut-être trouverons nous dans ces études des données importantes, qui nous conduiront aux solutions depuis si longtemps cherchées. Maïs, pour qu’il y ait unité d’action entre les observateurs, il est indispensable que tous leurs travaux soient centralisés par une commission unique qui, en les coordonnant, saurait en dégager les traits principaux et faire ressortir les conséquences qui en découlent. En agissant séparément, on risquerait de commettre de graves erreurs et de présenter, comme des faits généraux, des accidents entièrement locaux, dûs à des circonstances particulières. En ce qui concerne les constatations faites sur les divers points de notre belle province, les mémoires pourraient être adressés à la Société Géologique de Normandie qui, nous en avons la ferme conviction, accepterait avec empressement cette intéressante mission. Dans cette espérance, nous venons lui apporter notre tribut, en lui soumettant le profil géologique du chemin de fer de Mamers à Mortagne, et en lui donnant l’assurance que, dès que les exigences de nos fonctions nous en laisseront le loisir, nous complèterons ce travail en produisant les coupes des lignes de Mortagne à Laigle et de Mortagne à Mézidon. Ce profil géologique présente un intérêt particulier, en ce qu’il montre les rapports de superposition de la plupart des terrains représentés dans l'arrondissement de Mortagne. IL a aussi l’avan- tage de donner des types locaux qui pourront être consultés avec fruit par les personnes que leur situation empèche de se déplacer pour aller étudier au loin les coupes classiques des divers étages. 42 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Les types percherons que nous donnons ont été déterminés avec le plus grand soin et comparés aux terrains de la Normandie et de la Sarthe, étudiés par nos géologues les plus renommés (MM. A. d'Orbigny, Hébert, Desnoyers, Eugène Deslongchamps, Albert Guillier, Triger et autres). | Les localités que nous avons visitées et qui nous ont servi de terme de comparaison, pour la détermination de nos types locaux, sont les suivantes : Vieux-Pont,— Evrecy,— Subles,— Tilly (Calvados), — Précigné, — Poillé (Sarthe). Les Hachettes, près de Port-en-Bessin, — Sully et St- Vigord, près de Bayeux,— Les Moutiers, près d'Har- court, — Environs de Falaise (Calvados) ;— Noyen, — Avoise,— Château-de-Pêcheseul,— Tennie, — Conlie (Sarthe). Furzer’s | Arromanches,— Port-en-Bessin (types argileux),— Envi- EARTH {| rons de Caen et de Falaise (types calcaires). Oolithe miliaire, — Port-en-Bessin, — Environs de Caen Lras : OOLITHEINFÉ- RIEURE (Calvados) ; — Environs d’Argentan et de Séez (Orne) ; — Noyen, — Tranchée de la Jonnelière, près Conlie, — Avoise (Sarthe); — Bradford-Clay et Forest- Marble, — Ranville, — Falaises de Langrune, — Lion-sur-Mer (Calvados) ; — Environs d'Argentan (Orne) ; — Conlie,— Carrières du Château-de-Pêche- seul, — Noyen (Sarthe). Chemiré-le-Gaudin,— Noyen,— Pècheseul,— Marolles- les-Brault,— Montbizot (Sarthe) ; — Almenèches, — Environs de Séez (Orne). Falaises de Dives à Trouville (Calvados), — Marolles,— Beaumont, — Courgains (Sarthe); — Ste-Scolasse (Orne). Trouville, — Lisieux, — Carrière de Glos, près Lisieux (Calvados), — Ecommoy, — Conneré,— St-Cosmes (Sarthe) ; Igé, — Bellème, — Mortagne (Orne). Falaises de Trouville à Villerville,-- Honfleur (Calvados) ,-- Eéneins La Ferté-Bernard, — Ecommoy, — Soulitré (Sarthe) ; — Bellême, — Mortagne (Orne). GRANDE OoLITHE u CALLOVIEN TERRAIN JURASSIQUE OXFORDIEN CoraALz-RAG | | \ Falaises entre Villerville et Trouville (Calvados), — { Honfleur, — Côte d’Ingouville, près du Havre. { Villerville, — Cap de la Hève, — Rouen (Côte Ste- GaAULT CÉNOMANIEN : k : Catherine), — Environs du Mans, { Falaises entre le Cap de la Hève et Etretat, — Yport, — ; Fécamp, — (Conneré (Sarthe) ; — Margon, — La Loupe, — Senonches (Eure-et-Loir). Etretat, — Yport, — Fécamp, — Dieppe (Seine-Infé- ; rieure), — Lambeau, à l’Est de Nogent-le-Rotrou (four à chaux de la Plante). TURONIEN TERRAIN CRÉTACÉ SENONIEN PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 43 C’est donc après avoir examiné, avec la plus scrupuleuse attention, l’allure des couches de ces divers terrains, porté notre attention sur l’ordre de superposition et les caractères pétrolo- giques de leurs nombreuses assises; c’est, enfin, après avoir classé et comparé entre-elles les espèces fossiles que nous y avons rencontrées, que nous avons pu séparer les époques de formation ou établir le synchronisme des terrains que nous allons avoir à examiner dans le parcours de Mamers à Mortagne. Mais, afin d’embrasser une plus grande série de couches, nous remonterons le chemin de fer de la Hutte et nous prendrons, comme point de départ de nos études, la gare de St-Remy-du- Plain, située à 10 kilomètres à l'Ouest de Mamers. TERRAIN BAJOCIEN Près de cette gare, on peut observer, dans les talus de la ligne, l’Oolithe inférieure à l’état sableux, qui est un de ses facies dans plusieurs localités du département de la Sarthe. Un peu au Nord du bourg de St-Remy-du-Plain, au carrefour de Chaumiton, des carrières sont ouvertes dans les assises inférieures de cet étage ; on y trouve des bancs d’une certaine épaisseur, qui sont exploités comme pierre de construction. La roche a, dans cet endroit, une texture un peu sableuse et elle se transforme, de place en place, en un grès calcaréo-siliceux, d’une assez grande dureté. Parfois aussi, elle se présente sous l'aspect d’un calcaire grisâtre, contenant une multitude de lamelles spathiques, dues à des sections de crinoïdes. On y rencontre un assez grand nombre de fossiles, dont voici les espèces les plus caractéristiques : Ammonites Murchisonæ (Sow.); Nautilus lineatus (Sow.); Phola- domya obtusa, Pholadomya fidicula (Sow.) ; Ceromya Bajociana (d’Orb.); Mytilus Sowerbyanus (d'Orb.); Ostrea Bruckmanni (Sow.); Terebratula perovalis (Sow.) ; Rhynchonella Wrightii (Sow.). La plupart de ces fossiles ne se trouvent qu’à l’état de moules intérieurs et dans un médiocre état de conservation. — L’Oolithe ferrugineuse, qui forme une zone si remarquable aux environs de Bayeux, n’existe pas dans notre région, où elle est remplacée par l'Oolithe à contexture sableuse. On peut vérifier ce fait à la côte de Chaumiton et dans le flanc du côteau de St-Remy, où on 44 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE voit les couches oolithiques reposer directement sur les argiles à Belemnites et à Ammonites serpentinus du Lias supérieur. Quand l’Oolithe inférieure à une certaine puissance, comme dans les carrières de Villaines-la-Carelle, on peut y établir deux divisions : l’une, qui est la plus inférieure, est caractérisée par la Terebratula perovalis et semble correspondre à l'horizon de la Mälière du Calvados ; la partie supérieure, qui représente l’'Oolithe blanche des géologues normands, est caractérisée par l’Ammonites Parkinson. À cause du peu d’épaisseur des assises, il est difficile de pouvoir faire cette distinction sur la ligne du chemin de fer. TERRAIN BATHONIEN OOLITHE MILIAIRE Au-delà de la station de Villaines-Vézot, au kilomètre 19, on remarque, dans les talus, des bancs minces d’un calcaire marneux. blanchâtre, ou d’un calcaire compacte sublithographique, légère- ment bleuâtre et à cassure conchoïde. Ces calcaires, que l’on trouve autour de Mamers, dans la rue du Cimetière et sur le chemin qui conduit de la route d'Alençon à Marcoué, forment, dans notre région, la base de la grande Oolithe (1). Ils sont surmontés directement ‘par lOolithe miliaire, ainsi qu’on peut le voir dans une petite carrière ouverte à la ferme de PArche. Leur contact avec l’Oolithe inférieure est visible près du pont biais établi sous le chemin de fer (kil. 22.3). Les fossiles sont assez nombreux, mais presque toujours fort empâtés. Nous n’avons pu y trouver que quelques bons exemplaires de Pholadomies, de l’espèce Pholado- mya Vezelayi, des Lucina bellona, et des térébratules voisines de la Terebratula subcanaliculatu. Ces calcaires, dans lesquels on ren- contre parfois de belles dendrites (Arche), n’ont guère qu'une épaisseur de 8 mètres. L’Oolithe miliaire peut s’observer un peu avant le kil. 21, sous (1) M. Triger a rapporté ces calcaires au Fuller’s Earth. Nous avons beau- coup étudié cet horizon géologique à Port-en-Bessin, à Caen, et dans les environs de Falaise; nous ne croyons pas que l’on puisse admettre cette assimilation, que ne viennent appuyer ni la composition minéralogique de la roche, ni ses caractères paléontologiques. Ces calcaires sont certainement un peu plus élevés dans la série, et ils correspondent vraisemblablement au niveau de l'Oolithe miliaire. PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 45 le pont du Bray, et dans la tranchée de Bel-Air (kil. 22.6). Elle est constituée par plusieurs bancs très fissiles, d’un calcaire légè- rement jaunâtre à contexture un peu sableuse. Dans sa partie supérieure, la roche est même désagrégée et incohérente. Les carrières voisines de la ligne ferrée, où on peut encore étudier l’'Oolithe miliaire, sont celles de Marcoué et de la rue de Marolette, que les travaux de MM. Hébert et Desnoyers ont rendues classiques. Là, elle est formée de plusieurs bancs, de 80 centimètres à 2 mètres d'épaisseur, d’un calcaire un peu jau- nâtre à oolithes fines, de grosseur assez uniforme. Cependant, on remarque, dans la masse, de petits amas lenticulaires de calcaire compacte ou granulaire, à oolithes blanches ou blondes. On y voit aussi de nombreuses veines formées par un agrégat de bryozoaires et de coquilles brisées, énergiquement cimentées. L’épaisseur totale de cette assise ne dépasse guère une dizaine de mètres, à Mamers; mais à Villaines-la-Carelle, où elle fait l’objet d’une exploitation importante, elle atteint près de quinze mètres de puissance. L’oolithe miliaire se fait ici remarquer par l’extrème pauvreté de sa faune. Nous n’y avons recueilli que quelques Zerebraiula maxillata et des dents de Sauriens. M. Jules Desnoyers, bibliothécaire au Muséum d'Histoire Naturelle, à Paris, y a découvert, à la partie supérieure, des empreintes de plantes terrestres appartenant à la famille des fougères. Soumises à l’examen de M. Brongniart, cet illustre savant y a reconnu deux espèces, auxquelles il a donné les noms de Pecoplteris Desnoyersi et Pecobteris Reglei. Outre les fougères, on a trouvé, dans loolithe miliaire de Mamers, quelques portions de feuilles et de tiges de cycadées, qui n’ont laissé dans la roche que leur empreinte en creux, mais dont la forme est très particulière. Ce sont les Ofoxamites lagotis (Brong) ; O. hastaius (Brong) ; ©. Bucklandii (Braun) ; O. Bechii (Braun). Ces empreintes sont aujourd’hui extrêmement rares. La partie supérieure de la grande oolithe, le Bradford-clay et le Forest-marble, est aussi représentée parmi les terrains traversés par la ligne de la Hutte à Mamers. BRADFORD-CLAY On peut observer ces deux assises dans la tranchée de l’Abdon- nière (kil. 20) et aux abords du pont supérieur du Bray. Sur ces 46 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE deux points, le Bradford-clay se présente sous la forme d’un calcaire marneux et de lits d'argile renfermant des fossiles très caractéristiques : Terebratula digona ; T. bicanaliculata ; T. coarctata ; T. cardium et Rhynchonella concinna. Dans la tranchée du pont du Bray, on voit clairement le Bradford-Clay reposer sur l'Oolithe miliaire, dont la partie supérieure est corrodée et cou- verte de grandes huîtres plates et de serpules. En s’avançant vers Mamers, on retrouve encore cet horizon, mais ses caractères pétrologiques se modifient profondément. Ce sont alors des calcaires grenus, en plaquettes de 2 à $ centimètres d’épaisseur et très fissiles. Les fossiles y sont fort rares. Dans les carrières de Marcoué et de Marolette, on remarque également le Bradford-Clay, sous son facies graveleux, sur une épaisseur de 1 mètre $0 à2 mètres, avec ses principaux fossiles : Terebratula digona ; T. bicanaliculata ; Rhynch. concinna. C’est à la base de ce sous-étage que l’on a trouvé, dans la carrière de la rue de Marolette, ces fameuses fougères terrestres qui indiquent que les couches de la grande oolithe ont été émergées, dans nos parages, à une certaine époque géologique et annoncent un arrêt dans la sédimentation. FOREST-MARBLE Nous croyons devoir rapporter au Forest marble des Anglais, deux bancs peu épais d’un calcaire grisâtre, quelquefois un peu ferru- gineux, renfermant une grande quantité de coquilles transformées en carbonate de chaux spathique, que l’on peut observer au-dessus du Bradford-Clay, sur les points où nous l’avons signalé. Cette assise est surtout très apparente dans la tranchée du pont du Bray, où elle se détache, sous forme de corniche, au-dessus des couches marneuses à Terebratula digona et Terebratula cardium. La partie supérieure, sur laquelle reposent les premiers dépôts calloviens, est couverte d’huîtres plates, de serpules et de cristallisations de sulfate de chaux, qui y forment une croûte de 1 à 2 centimètres ’épaisseur. Si nous avions pu retrouver les traces d’une surface corrodée à la partie supérieure du Bradford-Clay, il nous eût été facile de différencier avec assurance ces deux assises ; mais, à cause de sa nature marneuse sur ce point, ce terrain n’a pu garder de traces des dénudations qu’il a subies. Nous nous basons donc, pour ranger cette assise rudimentaire dans le Forest-Marble, d’abord sur sa position stratigraphique et ensuite sur les caractères pétrolo- PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 41 giques qu’elle présente et qui ont tant d’analogie avec les couches rapportées à cet horizon par nos géologues les plus célèbres, au four à chaux de la Jonnelière, au château de Pêcheseul et à Noyen, dans le département de la Sarthe. Il est vrai que si l’on compare ses caractères paléontologiques avec ceux que présentent les terrains que nous supposons analogues dans la Sarthe, nous ne pourrons en tirer aucune déduction venant appuyer notre hypo- thèse, car, ici, nous ne retrouvons plusles fossiles si nombreux et d’une si belle conservation de la Jonnelière ou de Pêcheseul. On constate surtout, chez nous, l’absence de ce zoophyte fort abon- dant et très caractéristique là bas : le Montivaultia Sarthacensis. 1] est vrai que les bancs dont il s’agit renferment quelquefois une grande quantité de coquilles; mais, comme elles sont toutes passées à l’état de carbonate de chaux spathique, elles se brisent sous le choc du marteau et il devient difficile de pouvoir les déterminer. Il y a donc là une question que nous serions heureux de voir élucider par des géologues expérimentés. CORNBRASH Quant à la partie supérieure de la grande oolithe, le Cornbrash, si bien caractérisé dans le Boulonnais par la Terebratula lagenalis, nous ne croyons pas, à l'encontre de quelques auteurs, qu’il soit représenté dans notre région. À l’époque où se déposaient ces couches, sur quelques points de la France et de l’Angleterre, le sol percheron était émergé et les mers, qui tenaient en suspension leurs éléments constitutifs, étaient repoussées vers le Nord. TERRAIN CALLOVIEN. Avant d’arriver à la gare de Mamers, on pénètre dans une tran- chée de 15 mètres de profondeur ouverte dans les assises Callo- viennes, qui se continuent dans la gare même, puis sur la ligne de Mamers à Mortagne, sur une longueur de près de 4 kilomètres. C’est une des plus belles coupes et une des plus intéressantes stations paléontologiques que nous connaissions. On peut y étudier les couches les plus inférieures du terrain Callovien, puis- qu’on retrouve les bancs du Forest-Marble à 1 mètre $o en contrebas du passage à niveau de la route du Mans. Des fouilles, nécessitées par la construction d’une maison, nous ontpermis de constater ce 48 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE fait, que l’on peut d’ailleurs toujours reconnaître dans une carrière ouverte en flanc de côteau, dans des terrains situés derrière la gare, où le contact des deux formations est apparent. D’après nos observations, nous pensons qu’il convient d’établir trois divisions dans le terrain Callovien des environs de Mamers, savoir : 1° Les argiles bleues à la base, avec alternance de bancs de o mètre 20 à o mètre 30 d’un calcaire marneux, bleu dans les parties inférieures, mais passant asséz promptement au gris bleuâtre de moins en moins foncé à mesure que l’on s’élève. C’est là le niveau des Ammonites macrocephalus (Schlot), bullatus (d’Orb.) et Herveyi (Sow.); des Echinobrissus clunicularis etorbicularis et de térébratules très voisines de la Terebratula digona. On y trouve aussi de nombreux exemplaires de la Phol. decussata et du Collyrites elliptica, mais ces espèces sont beaucoup moins caractéristiques de la base du Callovien que les précédentes. 2° Les calcaires noduleux, d’une couleur jaunâtre et quelque- fois rouillée à la surface, alternant avec des couches minces d'argile ou des bancs de calcaires d’un gris jaunâtre, plus ou moins désagrégés. C’est dans cett: zone moyenne, que l’on peut observer, depuis la tranchée de Mamers jusqu’au kil. 3 de la ligne de Mortagne, et que lon trouve en abondance les fossiles suivants : MoLLUSQUES CÉPHALOPODES. Ostrea amata (d'Orb.). — alimena (d'Orb.). Nautilus hexagonus (Sow.). Ammonites Backeriæ (Sow.). MoLLusQuEs BRACHIOPODES. — modiolaris (Ewy..). — tumidus (Ziet.). Terebratula umbonella (Lamk.). — subcanaliculata (Appel.). — reticulata (Smitt.). Rhynchonella Fischeri (Rouill.). Pholadomya decussata (Agass.). FT Royeriana (d'Orb.). — carinata (Goldf.). LE spathica (Lamk.). — crassa (Agass.). Ceromya concentrica (d’Orb.). — Sarthacensis (d'Orb.). Collyrites elliptica (Desmoulins). Astarte Achilles (d'Orb.). — dorsalis (d'Orb.). Isocardia tener (Sow.). Mtilus gibbosus (d’Orb.). — solenoides (d'Orb.). Pecten fibrosus (Sow.). Plicatula peregrina (d'Orb.). Ostrea Marshii (Sow.). — amor (d'Orb). Serpula quadrangularis (Lamk.). MOLLUSQUES LAMELLIBRANCHES. ECHINODERMES. — analis (Desmoul.). Pygurus depressus (Agass.). Acrosalenia spinosa (Agass.). ANNÉLIDES. PROFIL DE MAMERS À MORTAGNE 49 3° Les calcaires grisâtres pénétrés d’oolithes ferrugineuses de la grosseur d’un grain de millet. Cette assise, qui a une certaine analogie d’aspect avec l’Oolithe ferrugineuse de Bayeux, forme la partie supérieure du Callovien. Elle à une épaisseur maximum de 3 à 4 mètres et elle représente exactement, chez nous, le Kelloway-Rock des Anglais. On peut létudier au lieu dit le Champ-Rouge, au pied du signal avancé de la halte de Saint- Remy-des-Monts, ainsi que dans les talus d’une excavation faite, non loin de là, pour l’emprunt des terres nécessaires à la construc- tion de la ligne ferrée. C’est une station paléontologique d’une si grande richesse qu’elle peut être comparée aux localités bien connues de Montbizot et de Beaumont-sur-Sarthe. Voici les principales espèces que nous y avons recueillies : MoLLUSQUES CÉPHALOPODES. Pinna rugoso-radiata (d'Orb.), rare. Nautilus Julii (Baug.), très rare. — hexagonus (Sow.), assez commun. Ammonites Backeriæ (Sow.), abon- dante. — anceps (Brin.), comm. — coronatus (type et varié- tés), comm. — Jason (Zeit.) (type et variétés), comm. — Hunula (Zeit.), abon- dante. — pustulatus (Haan.), très rare. MOLLUSQUES LAMELLIBRANCHES. Trigonia major ? très rare. Pholadomya decussata (Agass.), abon- dante. — carinata (Goldf.), assez comm. — inornala (Sow.), assez comm. — trapezicosta (d'Orb.), as- sez rare. — clytia (d'Orb.), rare. Ceromya concentrica (d'Orb.), assez comm. — Sarthacensis (d'Orb.), rare. Isocardia tener (Sow.), assez comm. Mytilus gibbosus (d'Orb.), trèscomm. Lima proboscidea (Sow.), rare. Pecten fibrosus (Sow.), très comm. Plicatula peregrina (d'Orb.), comm. Ostrea alimena (d'Orb.), comm. Ostrea amor (d'Orb.),assezcomm. Avicula inæquivalvis (Sow.), assez comm. MOLLUSQUESs BRACHIOPODES. Terebratula subcanaliculata (Oppel ), assez rare. — dorsoplicata ( Suess. ), comm. — Trigeri (Deslong.), assez comm. — pala(deBuch.), comm. — biappendiculata (Desl.), très comm. — umbonella (Lamk.), très comm. Rhynchonella Fischeri (Rouill.),abon- dante. — spathica (Lamk.), assez comm. — Oppeli (Deslong.), assez comm. — Royeriana (d’Orb.), as- sez comm. ECHINODERMES. Pygurus depressus (Agass.), rare. — orbiculatus (Agass.), rare, 4 No) SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUÉ DE NORMANDIE Echinobrissus Goldfussi (Desor), as- Holectypus depressus (Desor.),comm. sez rare. — striatus (d’Orb.), assez Collyrites elliptica (Desmoulins), rare. abondant. Stomechinus calloviensis (Cott.), rare. — dorsalis (d'Orb.), assez Pedina Gervillei (Agass.), rare. comm. Pseudodiadema inæquale(Agass.), rare Les différentes assises du terrain Callovien reposent, les unes sur les autres, en stratification concordante. Dans la tranchée de de Mamers, elles sont sensiblement horizontales, mais au-delà, dans la direction de Bellème, elles plongent sous un angle de un à deux degrés vers le S.-E., puis elles finissent par disparaître sous des dépôts d’alluvions anciennes que l’on exploite comme ballast, près de la halte de Saint-Rémy-des-Monts. Nous ferons également remarquer ici que l’on peut établir très nettement, à Mamers, la discordance de stratification qui existe entre la grande Oolithe et le Callovien. On voit, en effet, les couches de la première de ces formations s’infléchir vers le S.-E, avec une inclinaison assez prononcée, tandis que le pendage des diverses assises Calloviennes qui la recouvrent est presque d’un millimètre par mètre vers le N.-O., c’est-à-dire dans une direc- tion opposée. Le profil géologique joint à cette note montre, en outre, que l’ensemble des couches de lOolithe inférieure et de la .grande Oolithe, dont l'allure est la même, est affecté d’ondulations, plus ou moins amples, à partir de Saint-Rémy-du-Plain, qui se trouye placé dans la direction d’un axe de soulèvement de ce système de roches. Ces remarques faites, continuons nos études. TERRAIN OXFORDIEN. En quittant la halte de Saint-Rémy-des-Monts, on marche quel- que temps sur les dépôts d’alluvions anciennes que nous avons signalés et sur lesquels nous reviendrons en temps utile. Ce n’est qu'après avoir franchi la petite rivière des Ormes que l’on entre dans la tranchée de Montmarlo, où l’on peut observer un dépôt d’argile bleuâtre, dépendant du terrain Oxfordien, dans laquelle on trouve peu de fossiles, mais quelques cristallisations de sulfate de chaux, sous forme de crètes ou de roses. En poursuivant notre route, nous remarquerons encore l’Oxfor- PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE st dien au villige de la Monnerie, puis dans les talus, à l’entrée de la gare de Vannoise. Là, ce sont des alternances d’un calcaire gris-bleuâtre marneux, avec des lits d’un sable jaunâtre fin et des couches d'argile. Comme fossiles, on y recueille Ammonites cordatus (varièté com- primée) et des belemnites (Belem. hastaius). En pénétrant dans le parc du Château des Chaises, on retrouve des couches d’argiles bleues d’environ 30 mètres de puissance, qui sont actuellement masquées par des perrés en maçonnerie. Ces argiles sont fort pures, sèches et à cassure concoïde; elles ont une très grande analogie d’aspect avec celles qui constituent la falaise classique des Vaches-Noires, entre Dives et Villers-sur-Mer, mais elles sont infiniment moins fossilifères. Au sommet du coteau, pres du pont des Cerisiers, on voit, dans les talus, des calcaires argileux bleuâtres ou noirâtres, qui forment une véritable lumachelle ; mais les fossiles qu’ils contiennent sont bien plus nombreux en indivi- dus qu’en espèces. Les Pernes (Perna mytiloïdes) (Lamk.), y sont surtout extrèmement abondantes, mais on y trouve aussi : Gervi- lia aviculoïdes (Sow.) ; Trigonia monilifera (Agass.) ; Rhynchonella Thurmanni (Noltz); Pholadomya decemcostata (Rœmer); Ostrea gregaria (Sow.) ; Terebratula insignis (Sch.); Pecten subfibrosus (d’Orb.), et diverses articulations d’encrines. L’Ostrea dilatata, si commune aux Vaches-Noires, est ici fort rare. CALCAREOUS-GRIT. Au-dessus de ces calcaires argileux commencent à apparaître .les couches sableuses du Calcareous-grit; puis, un peu plus loin, au village de la Bigotière, les calcaires noduleux et caverneux que noùs rangeons dans le mème horizon géologique. Ces calcaires compactes, un peu siliceux, sont exploités comme moellons et utilisés avec avantage dans les constructions. Leur surface irrégu- lière et remplie de cavités, facilite leur liaison avec les mortiers, ce qui contribue beaucoup à la solidité des maçonneries. Ils renferment divers fossiles, notamment des Ammonites voisines de l’Ammoniles plicatilis (Sow.), des Pentacrines, des Peignes (Pecten subfibrosus), VEchinobrissus scutalus, des moules intérieurs et de nombreuses empreintes de Trigonia Bronnii, et de deux autres grandes espèces du groupe des Clavellées, particu- lières à cette zone. s2 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE A quelques centaines de mètres de la Bigotière, à la maison- nette n° 24, on retrouve encore les couches sableuses du Calca- reous-prit, un peu relevées sous l'influence d’un mouvement du sol. Dans ces sables, de couleur brune, un peu ferrugineux, on remarque de nombreuses concrétions d’un grès calcareo-siliceux, affectant parfois des formes bizarres, qui sont très recherchées par les personnes atteintes de la manie des collections hétéroclites. Dans la pente qui précède la halte d’Igé, on voit, à la base des talus, l’argile bleue de l’Oxfordien; puis, près de la halte, les calcaires marneux du même étage. Ces calcaires forment, avec l'argile bleue, le sous-sol des prés qui bordent la rivière de Même, jusqu’à la ferme de Vieux-Bellème. Ils disparaissent, en ce point, sous les sables du Calcareous-grit, qui affleurent de nouveau, et qui sont surmontés à leur tour par les assises calcaires du Coral- rag (maisonnette n° 28). Une faille qui, vraisemblablement, passe près du moulin d’Aul- naye, a brisé et redressé l’ensemble des couches des divers terrains qui plongent, par suite, vers le N., sous un angle d’en- viron trois degrés. Ces terrains laissent voir leur tranche, de sorte que les calcaires Oxfordiens, à Perna mytiloïdes, apparaissent une dernière fois aux hameaux de Vaudron et d’Aulnaye. On retrouve ensuite les sables du Calcareous-grit, avec cordons de grés concrétionné, dans la tranchée suivante; puis, enfin, les assises Coralliennes, qui se continuent alors sans interruption jusqu’a la gare de Bellème. CORAL-RAG. Sauf les accidents purement locaux, on peut dire que le Coral- rag de nos contrées a une composition à peu près identique sur tous les points où il affleure. On peut y établir trois divisions, savoir : A la base, les calcaires oolitiques plus ou moins marneux, à Trigonia Bronnii (Agass.), et Astarte nysa (d’Orb.) (kil. 18 et maisonnette n° 30). A la partie moyenne, les calcaires graveleux à grosses oolithes et à pisolithes (kil. 19.4). Enfin, le calcaire à Dicérates et Nérinées (kil. 19.7) termine le système du Coral-rag, quia une puissance de 25 à 30 mètres dans jes environs de Bellème. PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 53 Les fossiles sont abondants comme individus, maïs le nombre des espèces est restreint. À la partie inférieure, en contact avec le Calcareous-grit, on rencontre diverses espèces de Trigonies : T. Bronnii (Agass.); T. aculeata (d'Orb.); T. clavellata (Sow.) ; une grande Astarte, l’Astarte nysa (d’Orb.). Toutes ces coquilles ont perdu leur test, ce qui rend leur détermination spécifique dificile. Dans les calcaires à grosses oolithes, on trouve diverses espèces de Nérinées, d’Astartes et de Térébratules également peu détermi- nables, à cause de leur mauvais état de conservation ou de leur empâtement dans la roche encaissante. Mais, dans la section supérieure abondent les Dicérates (Diceras minor), les Nérinées et une espèce particulière de mollusque (Car- dium septiferum) (Buvig.), que les ouvriers nomment Pied de biche. Les fossiles suivants sont aussi assez communs : Pholadomya pau- cicosta (Rœmer); Cardium Buvigneri, et divers moules intérieurs d’Astartes et de Peignes. Parmi les oursins : Pygaster umbrella (Agass.); Echinobrissus scutatus (d'Orb.) ; Hemicidaris crenularis (Agass.); Hemicidaris stramonium (Agass.); Holectypus corallinus (d’Orb.). Toutefois, les fossiles de l’ordre des Echinodermes sont rares. KIMMERIDGE-CLAY. Dans les talus de la voie d’accès de la gare de Bellème, on constate que les assises Coralliennes à Dicérates et Nérinées sont recouvertes, sur une épaisseur de $ mètres, par des bancs de calcaire compacte ou marneux, entremêlés de lits d’argile et de sable jaunâtre très fin. C’est cet ensemble de couches qui constitue, dans notre région, le terrain Kimméridgien ou Ximmeridge-clay des Anglais. Cette roche appartient bien à un nouvel ordre de faits, car on remarque, sur plusieurs points, que la surface supé- rieure de la dernière assise Corallienne est usée par les eaux et percée de nombreux trous de lithophages, ce qui équivaut à une discordance de stratification entre ces deux terrains, dont on peut observer le contact dans le talus. C’est surtout lorsque le Coral- rag acquiert une certaine dureté, comme à la carrière du Bois. Fézédin, que l’on peut facilement vérifier ce fait, très important à reconnaitre, puisqu'il annonce un temps d’arrêt bien manifeste dans le dépôt des deux systèmes. La composition du terrain Kimméridgien est presque identique- ment la même aux environs de Bellème. C’est toujours une S4 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE alternance de bancs calcaires et de couches d’argile ou de sable fin, quelquefois un peu micace ; mais, lorsque les parties sableuses ont été pénétrées par un suc calcaire ou siliceux, elles se sont transformées en un grès assez résistant, qui forme dans la masse des amas lenticulaires d’une faible étendue. Voici une coupe prise à la gare de Bellème. Elle montre les relations qui existent entre les deux étages successifs et la compo- sition normale du terrain Kimméridgien dans cette localité : 1° Au pied du talus, calcaires faiblement agrégis à Dicé- rates "et NÉTINÉES NRA SNA TOM ERERERNR 2° Calcaire sub-compacte, avec moules nombreux de Nérinées et de Cardium septiferum . . . . . . . . o"30 (La surface de ce banc est dénudée et criblée de trous de lithophages). 3° Calcaire compacte à Ostrea deltoidea. . . . . . o"L2 4° Calcaire marneux blanchâtre à Ostrea deltoïidea, Mtilus jurensisset Natica Iuroim forms MON NRNEED s° Calcaire blanchâtre sub-compacte à Nautilus siege CLINAUCES MEN Ë LES ONAERRNTE 0730 6° Calcaire marneux Dai à PS Pin et Ostreassohitaridi r. MOMIE ON OC EE 7° Calcaire fragmentaire avec ae jaunâtre = PRENOETE 8° Marne-un peutsableuse #78 SR 9° Calcaire compacte gris-bleuâtre à ne fine et à cassure ont, avec Mytilus subpectinatus et AStaTIe MMA NIET NN RENE TENRERSREES ro°Sable‘jaunâtre très finsisans fossiles M MEN 00 11° Marne grisâtre avec Myiilus jurensis. . . . : . . . . o"20 12° Calcaire marneux grisâtre avec nombreux deb de co- quilles d’huîtres, surtout à la partie supérieure du banc (Ostrea Bruntrutana) et autres indéterminables 0"60 13° Calcaire compacte gris-bleuâtre, à cassure conchoïde, avec Mytilus subpectinatus et Astarte minima. : . . 0"30 14° Petit lit de coquilles d’huitres indéterminables. . . . 0"03 16° Sable jaunâtre fin, unfpeutarpileux EME ER RO EE 16 1Calcaire grisâtresemi=compacte MC NIMES 17° Sable argileux jaunûtre, fin, à noyaux Sata . SMATONSS 18° Marne‘blanchâtre. + MEN EME 19° Calcaire désagrégé \péuvtossilifère 14-00 MOMONTS 20° Terre végétale. 10820 NE ME RENE PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 55 Dans cette coupe, les numéros 1 et 2 correspondent au Coral- rag. Les autres numéros se rapportent au Kimméridgien. — Les marnes à Ptérocères, que l’on trouve dans les falaises de Trouville et du Havre, ne sont pas représentées ici. Malgré l’affirmation d’un géologue très renommé, nous ne croyons même pas à l'existence de la zone à Ostrea virgula, à Bellème. Nous n’y avons jamais rencontré ce fossile, si reconnaissable pourtant à sa forme générale et aux stries longitudinales fines qui ornent sa coquille. On est donc en droit de conclure que nous ne possédons, chez nous, que les premiers dépôts de l’étage Kimméridgien, et que notre région s’est trouvée émergée dès le commencement de cette époque géologique. Nous devons encore relever une inexactitude. Dans ses études géologiques sur le département de l'Orne, M. Blavier, ingénieur en chef des mines, présente, page 66, une coupe prise à la sortie de la ville de Mortagne, qui donne au terrain dont nous nous occupons une puissance de 68 mètres. Il y a là assurément une erreur manifeste car, nulle part dans nos parages, cet étage n’atteint une semblable épaisseur. La plus belle coupe que l’on puisse en obtenir se voit près de Mortagne, sur la route de Paris, en montant la côte de la Grippe; mais en cet endroit, les assises Kimméridgiennes n’atteignent guère que 30 mètres. Vis-à-vis de la gare de Bellême et dans le fossé gauche de la voie d’accès qui conduit à cette ville, on remarqué, à l’extrémité d’un mur de clôture, un banc de 0"30 à 050 d’épaisseur de grès ou de calcaires ferrugineux, en fragments, dont la surface et Les angles ont été polis et usés par les eaux. Ce petit banc, qui repose direc- tement sur les calcaires marneux du Kimméridgien, est recouvert par la Glauconie à Ostrea vesiculosa. On le retrouve, très bien caractérisé, au moulin du Blanchard {commune de Nocé), près de Villiers et de Fings, dans l’arrondissement de Mortagne. Ces grès ou calcaires, dont l'aspect indique de la façon la plus évidente qu’ils ont été roulés par les eaux, proviennent-ils des dépôts du terrain Portlandien, auquel ils auraient été arrachés à la fin de l’époque Jurassique, ou bien leur origine serait-elle Crétacée ? D’après les monographies que nous avons lues, ils ne semblent pas encore avoir été reconnus en Normandie. Comme on ne trouve, dans nos contrées, aucun indice annonçant la présence du Portlandien, ni des premiers dépôts Crétacés qui renferment des parties ferrugineuses, la question est difficile à résoudre. 56 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Elle est rendue plus ardue encore par l’absence, dans ces grès, de tout débris organique. Nous nous bornons donc, quant à présent, à les signaler à l’attention des géologues ; ils trouveront assurément, dans leur examen, l’occasion d’exercer leur sagacité. Ici s'arrête, dans les environs de Bellème, la série des dépôts Jurassiques. Le sol du Perche, s’élevant de plus en plus sous l’action des forces centrales, se trouvait entièrement au-dessus des eaux, avant la fin de époque Kimméridgienne. Il resta ainsi émergé pendant toute la durée de l’époque Portlandienne et des trois premiers étages de la période Crétacée (Néocomien, Aptien et Gault). Ce n’est qu’au commencement de l’époque Cénomanienne qu’un nouvel affaissement du sol se produisit et occasionna le retour de la mer, qui regagna tout l’espace qu’elle avait perdu dans nos régions occidentales et dépassa même ses anciennes limites. Déjà, vers la fin de l’époque précédente (Gault), elle s’était avancée jusqu'aux environs de Ceton, situé sur le bord oriental de notre département, ainsi que l’indiquent quelques fossiles trouvés dans cette localité. Il existe donc une lacune de quatre étages dans la coupe que nous présentons. TERRAIN CÉNOMANIEN Le premier dépôt Crétacé qui se soit formé chez nous est la Glauconie, si reconnaissable à sa couleur d’un vert foncé, que l’on peut observer en face de la gare de Bellème, au-dessus de la petite assise ferrugineuse dont nous venons de parler. On la retrouve également dans la tranchée de Périgny et près de la maisonnette n° 35. Son épaisseur varie de 1 mètre à 3 mètres, aux environs de Bellème; elle est très peu fossilifère. On n’y trouve guère que l’Ostrea vesiculosa, qui semble être le seul fossile de cet horizon. Presque toujours assez rare, cette petite huître est quelquefois extrèmement abondante, comme au pied de la butte de Montgaudry, par exemple. Cette couche est surtout remarquable en ce qu’elle renferme sur quelques points, notamment dans la commune de Ceton, des nodules de phosphate de chaux. Malheureusement, ce précieux engrais minéral y est peu abondant et son exploitation serait coûteuse. Au-dessus de la Glauconie. viennent les marnes et les sables PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE S7 glauconieux plus ou moins argileux (Tranchée de Plaisance), puis une alternance de sables glauconieux et de bancs d’une sorte de craie verdâtre ou jaunâtre, contenant toujours de nombreux grains verts. C’est la Craie Glauconieuse et le niveau de l’Ammonites Mantelli et du Turrilites tuberculatus. On peut voir un type de ce terrain dans la tranchée de Plaisance (kil. 21.8) et près du 2° passage à niveau de la route de Mortagne ([maisonnette n° 38). Dans cette dernière tranchée, les couches de marnes glauconieuses sont séparées par des bancs d’un calcaire siliceux d’une assez grande dureté. Ainsi que nous le ferons voir dans les études géologiques que nous préparons sur le Perche-Ornais, ce dernier facies de la Craie Glauconieuse est surtout bien développé à la Mariette, à St-Jean-la-Forêt et à Appenay, où les carrières four- nissent des pierres de taille de grandes dimensions et d’un très bon grain. Les fossiles qu’on y rencontre le plus communément sont les suivants : MOoLLUSQUES CÉPHALOPODES. Mytilus Ligeriensis (d’Orb.), assez comm. Peclen asper (Lamk.), comm. Janira quinquecostata (d’Orb.), Nautilus elesans (Sow.), comm. Ammonites falcatus (Mantell.), assez rare. : ; comm _— Mantelli (Sow. très ; ne ÉQUE Ostrea haliotidea (d’Orb.), comm. — Couloni (d'Orb.), assez D AIS (LRNNL CEE # COM... 4 ECHINODERMES. Turrilites tuberculatus (Bosc.), assez comm. Epiaster distinctus(d'Orb.),comm. — crassissimus (d'Orb.), assez MOLLUSQUES GASTÉROPODES. comm. Pleurotomaria Maiïlleana (d’Orb.), Hemiaster bufo (Desor.), assez assez comm. comm. MOLLUSQUES LAMELLIBRANCHES. AMORPHOZOAIRES. Cardium hillanum(Sow.),comm. Guetlardia stellata (Michelin), rare. — Moultonianum (d'Orb.), Syphonia costata (d’Orb.), assez comm. rare. Un peu avant de pénétrer dans la grande tranchée qui est ouverte dans la forêt de Bellème, on voit la Craie glauconieuse buter directement contre les sables Cénomaniens supérieurs, sans que l’on aperçoive une seule assise de la Craie de Rouen qui, lorsque la série n’est pas interrompue, sépare ces deux horizons. Cela provient du dérangement apporté, dans l’allure des couches, par une faille qu’indique notre profil. La Craie de Rouen ne se 58 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE trouve qu’au-delà de la forêt, à la ferme de la Chaise ; mais, à partir de cet endroit, elle se continue sans interruption jusqu’à la gare de Mortagne. Ce n’est que dans les fortes dépressions du sol qu’apparaît la Craie glauconieuse (halte de Saint-Denis et la Cave). Dans toutes les tranchées, on peut remarquer que les diverses assises dont se compose la Craie de Rouen, se poursuivent d’une façon très régulière, et, sauf quelques légères ondulations, sont presque horizontales. Elle est formée de bancs assez épais d’une craie presque blanche, assez tendre, maïs qui jouit de la propriété de durcir à l'air, au point de pouvoir être employée, dans les constructions, comme pierre d’appareil. Lorsqu'elle a entièrement perdu son eau de carrière, elle résiste suffisamment à l’action de la gelée et conserve bien ses arêtes et les ornements d’architecture qu’elle reçoit. Malheureusement, elle renferme des noyaux d’un silex grisâtre, fondus dans sa pâte, qui la font rejeter pour les monuments de quelque importance. La craie de Rouen est assez fossilifère dans cette région. Voici les espèces les plus communes qu’on y rencontre : MoLLUSQUES CÉPHALOPODES. Corbis rotundata (d’Orb.), assez : ; comm. Nautilus triangularis (Montfort), È . : : Lima clypeiformis (d'Orb.), assez assez rare. Æ : ; mm. Ammmoniles varians (Sow.), assez se à HT PERLE Janira quinquecostata (d'Orb.), assez comm. — Rofomagensis (Lamk.), assez comm. — falcatus (Mant.), assez Ostrea carinata (Lamk.), comm. — columba (Desh.), comm. | comm. MoLLusquEes BRACHIOPODES. Turrilites costatus (Lamk.). assez comm. Terebratula biplicata (Defr.), rare. Rhynchonella alata(Lamk.), comm. MOLLUSQUES GASTÉROPODES. Avellana Cassis (d'Orb.), commun. TE Sirombus inornatus (d'Orb.), très Discoidea subuculus (Klein),assezrare. rare. Holaster carinatus (Agass), assez rare. MOLLUSQUES LAMELLIBRANCHES. Hemiaster bufo ( Desor. ), assez Trigonia spinosa (Park.), très rare. comm. Mais la partie supérieure, formée d’une alternance de craie et de couches de marne grisâtre, plus ou moins glauconieuse, est surtout remarquable en ce qu’elle renferme de nombreux fossiles dans un état de conservation tel, que certaines espèces ont conservé PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE S9 la nacre de leurs coquilles. C’est la zone à Scaphites æqualis et à Baculites baculoides, de la côte Sainte-Catherine, près Rouen. Comme stations paléontologiques intéressantes de ce niveau, nous indiquerons une petite carrière, située sur le côté gauche de la ligne, près de la ferme du Champ-Roussel {kil. 27.5); le sommet de la tranchée de la Mare-Giboust (kil. 28.5), et la gare de Mor- tagne. Nous y avons recueilli les fossiles suivants : MoLLUSQUES CÉPHALOPODES. Ammoniles varians(Sow.), comm, — Rotomagensis (Lamk.), comm. — falcatus (Mantel.), assez comm. Scaphites œqualis (Park. ), assez comm. — obliquus (Sow.), assez rare. Baculites baculoïdes (d’Orb.), comm. Hamites simplex (d'Orb.), assez rare. Turrilites costatus (Lamk.), comm. MOLLUSQUES GASTÉROPODES. Avellana Cassis (d’Orb.), comm. Ostrea carinata(Lamk.),assez comm. — colomba (Desh.), comm. — conica (d’Orb.), comm. MOoLLUSQUES BRACHIOPODES. Terebratula biplicata (Defr.), assez rare. _ lima (Defr.), rare. — lacrymosa (d'Orb.), rare. Rhynchonella alata (Lamk.), comm. ECHINODERMES. Catopygus carinatus (Agass.), comm. Cottaldia Benettiæe (Cott.), assez rare. Discoidea subuculus (Klein), assez comm. Pseudodiadema variolare (Cotteau), assez rare. Trigonia spinosa (d’Orb.), très rare. — tenue (Desor.), rare. Arca carinata (Sow.), assez comm. Glyphocyphus radiatus (Desor), assez Janira quinquecostata (d'Orb.), assez rare. comm. Fusus Pre. MOLLUSQUES LAMELLIBRANCHES SABLES CÉNOMANIENS. La marne grise à Scaphites æqualis et à Turrilites costatus, qui termine la Craie de Rouen, dans la contrée traversée par le che- min de fer de Mamers à Mortagne, est recouverte immédiatement par les sables ocreux qui constituent la plupart des collines per- cheronnes. On constate leur présence dans la forêt de Bellême et non loin de la gare de Mortagne, au hameau de Chartrage. Ces sables ont donné lieu à de nombreuses controverses, entre divers géologues, et particulièrement entre MM. Elie de Beau- mont, Jules Desnoyers, Laugel, Triger et Hébert. Malgré tout ce qui a été écrit à leur sujet, il existe encore, chez la plupart des auteurs, beaucoup d'incertitude sur leur âge relatif. 60 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Quelle que soit la haute valeur des champions qui ont pris part à cette lutte scientifique, la question, vivement agitée depuis plus de trente ans, est encore loin d’être entièrement résolue. Nous pensons donc qu’il ne sera pas inutile d’entrer, ici, dans quelques détails sur ces terrains que nous avons scrupuleusement étudiés. Nous paraïîtrons bien téméraire, sans doute, de venir, ici, contester des opinions émises par des savants justement renom- més; mais nous ne devons pas nous laisser détourner de notre but par de semblables inquiétudes. La géologie est basée sur l’obser- vation et chacun doit apporter son tribut, si modeste qu’il puisse paraître. Chacun doit dire ce qu’il a vu et constaté, dans les régions qu’il a particulièrement observées. C’est le seul moyen de faire progresser cette science, en procurant aux hommes illustres qui la dirigent les éléments nécessaires pour étayer leurs savantes théories. Or, il résulte de nos propres observations, et surtout des communications de notre éminent collègue et ami, M. Albert Guillier, du Mans, que tous les sables du Maine ne doivent pas être confondus, comme quelques auteurs l’ont fait, avec les sables des collines du Perche. Les premiers sont, sans conteste, beau- coup plus anciens que les seconds. On remarque, en effet, qu’au- delà de la Ferté-Bernard, en se dirigeant vers le Mans, les sables contiennent exactement les mêmes fossiles que ceux que lon trouve dans la « Craie de Rouen » de toute la partie Sud- Est de l’arrondissement de Mortagne, c’est-à-dire des can- tons de Bellème, de Remalard, de Nocé et du Theïil. Ces caractères paléontologiques conduisent donc à établir que la Craie de Rouen, proprement dite, et certains sables et grès des environs du Mans ont un même âge géologique. Seulement, il y a eu des modifica- tions dans la nature des sédiments. Dans l’Orne, les éléments constitutifs du tuffeau et des marnes étaient calcaires et argileux, tandis que, dans cette partie du département de la Sarthe, tout s’est déposé à l’état de sable. Néanmoins, malgré ces différences minéralogiques, le synchronisme de la Craie de Rouen et des sables inférieurs et moyens du Maïne nous paraît parfaitement établi au point de vue paléontologique. D’un autre côté, les caractères stratigraphiques viennent aussi corroborer cette opinion, car il ressort d'observations précises que, dans les communes de Théli- gny et de Lamnay (Sarthe), des sables du Maine se trouvent inter- calés entre la craie à Scaphites et la craie à Ammonites Mantelli. Voici ce que l’on constate dans les communes précitées : PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 61 Au-dessous de la couche végétale, on trouve plusieurs assises de Craie de Rouen à Scaphites æqualis, Scaphites obliquus, Turrilites costatus, Ammonîtes varians, Ammonites Rotomagensis, Baculites baculoïdes, etc., reposant sur un dépôt de sables et grès du Maine de plus de 40 mètres de puissance à Anorthopygus orbicularis, Codiopsis doma, Lima Reichembachii, Lima Galienniana, Ammonites Cunningtoni, Rhynchonella Lamarckiana et Terebratella Menardi. Cette puissante couche de sable repose à son tour sur la craie glauconieuse à Ammonites Mantelli, Ammonites falcatus, Ammonites Beaumontianus, Turrilites tuberculatus, Cardium hillanum et Cardium Moutonianum. Enfin, tout cet ensemble est supporté par la glauconie à Ostrea vesiculosa qui renferme, aux environs de Ceton, Ammonites inflatus et auritus, c’est-à-dire des espèces de l’horizon du Cénomanien le plus inférieur, connu sous le nom de Guixe. Ce sont là des faits palpables, indéniables, que les géologues pourront toujours recon- naître. Cependant M. Hébert, membre de l’Institut, paraît les contester, car dans l’Introduction du cours de géologie qu’il professe à la Sorbonne, il produit une coupe idéale présentant la succession des assises crétacées dans laquelle les grès du Maine sont placés au-dessus de la craie à Scaphites. Nous regrettons de nous trouver en désaccord avec le savant professeur, mais assurément, dans cette circonstance, ses théories ne concordent pas avec les faits et nous offrons à nos collègues de la Société Géologique de Normandie de les conduire sur les lieux, où ils pourront eux-mêmes vérifier l’exactitude de nos affirmations. On peut d’ailleurs consulter à ce sujet les beaux et nombreux travaux de M. Guillier sur le département de la Sarthe, particuliè- rement ses profils géologiques des routes nationales et départe- mentales. Au-dessus de la craie à Scaphites, on trouve, dans le Perche, des sables siliceux jaunâtres, souvent ocreux, qui renferment des fossiles assez nombreux et dans un bon état de conservation. On y trouve l’Ammonites navicularis, l'Ostrea carinata, la Rhynchonella compressa et surtout de nombreuses coquilles d’Ostrea colomba et conica. Ce sont là les sables Cénomaniens supérieurs, que l’on peut observer au champ-de-foire de Longny, près de Montceaux, et au moulin de Bluteau, dans la commune de Boissy-Mangis. À Longny, surtout, il est facile de déterminer leur véritable position, car ils sont recouverts par une couche de marne légèrement glauconieuse, 62 SOCIËÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE d'environ 1 mètre d'épaisseur, à Terebratella Carentonensis, qui les sépare de la craie marneuse à Znoceramus labiatus. Ces sables sont donc bien à leur niveau normal, dans cette localité, et il ne saurait y avoir de doute sur la place qu’il convient de leur assigner dans la série géologique Mais, il n’en est pas ainsi des sables de la plupart des collines du Perche, qui ne sont pas recouverts ou ne le sont que par l’argile à silex, qui forme une sorte de calotte au- dessus des monticules que ces sables constituent. (Butte de Chartrage, près Mortagne; Montiers-au-Perche; Bizou; Butte de Croisilles et du Tertre blanc, près Nogent-le-Rotrou, etc.) Dans ce cas, ils correspondent vraisemblablement à une époque de remaniement du dépôt primitif, qui a été raviné sur une certaine épaisseur et dont les débris ont été entraînés et amoncelés au loin. La rareté et le mauvais état des fossiles que l’on rencontre dans ces sables, état si différent de celui dans lequel on les trouve dans les parties qui sont évidemment en place, conduisent natu- rellement à cette conclusion. Sur quelques points, cependant, on constate que la base des dépôts sableux renferme des coquilles parfaitement conservées, tandis qu’au contraire les parties élevées n’en contiennent que des débris. (Montceaux ; tranchée du chemin de fer du Mans à Paris, près de Brétoncelles). Ne devrait-on pas admettre, dans ce cas, que la base des sables serait en place, et partant Cénomanienne, mais que la partie supérieure, qui ne contient pas de fossiles, aurait été seule remaniée ? Mais ici se place une question d’une solution difficile. A quelle époque convient-il de rapporter ce remaniement des sables Céno- Al maniens supérieurs ; est-ce à l’époque Tertiaire ou bien même à l’époque Quaternaire ? L’une et l’autre de ces hypothèses ont été soutenues avec de sérieux arguments. Dans un mémoire publié dans le Bulletin de la Société Géolo- gique de France, en 1861, M. J. Desnoyers, se basant sur diverses considérations et surtout sur leur association constante avec les argiles à silex, auxquelles ils sont toujours subordonnés, les attribue à l’époque Tertiaire. Nos observations, à cet égard, ne sont pas encore assez complètes pour que nous nous permettions d'exprimer une opinion. Nous dirons cependant, tout en faisant nos réserves, que nous nous sentons disposé à partager l’avis de M. Desnoyers, quant à la place qu’il leur assigne. PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 63 Quoiqu'il en soit, nous croyons avoir suffisamment montré : 1° que les sables inférieurs et moyens des environs du Mans, compris par M. Hébert dans la désignation de sables et grès du Maine, ne sont, à proprement parler, qu’une modification latérale de la Craie de Rouen ; 2° que les sables à Ammonites navicularis et Rhynchonella compressa, qui se trouvent immédiatement placés au-dessus de la Craie à Scaphites et qui sont recouverts par la Craie marneuse, à {noceramus labiatus, sont les véritables sables connus sous le nom de sables Cénomaniens supérieurs, ou sables du Perche ; 3° que, cependant, certains sables, qui entrent dans la constitution des collines percheronnes, sont dus à une action énergique de remaniements; mais que, faute de données plausibles sur leur âge et leur origine, la plupart des géologues les assimilent aux sables Cénomaniens supérieurs, quoiqu’ils soient évidemment d’une époque plus récente. Pour bien préciser nos idées sur la stratigraphie de l'étage Cénomanien dans nos régions, nous les condenserons dans le diagramme ci-contre, en plaçant, en regard, la coupe théorique de M. Hébert. ÉOLOGIQUE DE NORMANDIE G 1 SOCIETE 64 O a: on srhntr nee à : Rate om a RER = LESC SANTE EE = = 4 2: > spaÿ \ 20 \ :SaQ8S TE RE : LT £ SANTE EE ten D KV (Es) OR ED CU RRN 77 sE ee NS ç SE V4 8 Ë paeuxsg-21104 e'T 8 À F un Cu ( À LOL) CSTEL EN) unod 7000 AP 27404 : ANNE H ‘wo {unod 72000 2P 20844 : anon$uorg 2nO1Q70 PT AI ,S non 77 sue ne odnoq uT op 194 adno) cr 26Dd 2g8I 2OUURD (107704 7° LOL SBUPNY) = UNE JU pd erydpubrne 2PUMSDY) AUUOGUO D] P 2svefoud 2160200919 9p SAMN07 1272 5 S2)E ou Sa Puruaar 2781505 7#J20290n) tepyr Pruurs 2 722 S81LIIn à ñ TZ e P og P org. = 2? HeoS So F ë LET 29 er Fe = EC?) | “Poe = “P29 ne HT) snurwI99our sn)e1QET DE a je Pit < ll sueY 27 noajoy-opru380oÿ LHAAAE à M HVA SUUIN ne 2J1ABH np 2[89pPtT (002) MALE GET" J Fo edno') V 9 ÉHY nonoy- auaŸoÿ oc 2PU09 uoPaeyy 21819 VILA? 30 = SA P/JUT ur à 8 918 2171 Tan 21089 79 aqpane) LIT “UAON 3P 7029 VOS TNT PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 65 1. Glauconie à Osfrea vesiculosa. 5. Craie À Ostrea biauriculata et 2. Craie glauconieuse à Ammoniles Ostrea flabella. Mantelli et Turrilites tubercu- 6. Craie à Terebratella Carentonensis latus. et Dentalium deforme. 3. Craie, Sables et Grès à Ammo- 7. Craie marneuse à Jnoceramus nites Rolomagensis et Scaphi!es labiatus et Rhyn.Cuvieri (Turo- æqualis. nicn). 4. Sables Cénomaniens supérieurs à 8. Arpile à silex de la Craie. Ammoniles navicularis et Rhyn- chonella compressa. La coupe Planche III, qui comporte beaucoup de détails, éclair- cira ce que les explications précédentes pourraient laisser d’obscur sur la position des sables Cénomaniens inférieurs. Pour revenir à notre profil géologique du chemin de fer de Mamers à Mortagne, dont cette digression nous a momentané- ment éloigné, nous dirons que nous considérons le mamelon sableux, sur lequel s’élève la belle forêt de Bellème, ainsi que les petits monticules du Pin-la-Garenne et de Chartrage, comme étant formés par les sables Cénomaniens supérieurs remaniés. ARGILE A SILEX. Ces sables sont presque toujours surmontés par une couche, plus ou moins épaisse, d’argile à silex, qui s’étend sur eux comme un manteau, ainsi qu'on peut le voir dans la tranchée ouverte au faîte de la forêt. Cette argile est jaunâtre et renferme de nom- breux silex tuberculeux, qui proviennent de la Craie supérieure du même niveau que celle de Chartres {craie à Ananchytes ovata), dont les éléments calcaires ont été dissous par une puissante action chimique, au commencement de l’époque Tertiaire. On rencontre assez fréquemment, dans l’intérieur des nodules, les fossiles caractéristiques de l’étage Sénonien, généralement silicifiés, tels que le Micrasler cor-anguinum (Agass.) ; l’Ananchytes gibba (Lamk.) ; le Cardiaster ananchytis (d’Orb.) ; l'Echinoconus conicus (Breynius) ; VE. Subrotundus (d’Orb.). Comme pour les sables, on peut établir deux divisions dans cet étage : Une partie, qui comprend l'argile à silex en place, avec de gros silex noduleux ou fragmentaires non roulés, et une autre partie qui correspond à l'argile à silex remaniée, reconnaissable à ses nodules brisés et roulés, ainsi qu’aux nombreuses veines, ou poches de sable, dont elle est pénétrée. Ces deux assises constituent un ) 66 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE ensemble dont les parties s’enchevêtrent et sont tellement liées, qu'il est souvent difficile de les séparer. On pouvait les observer dans la tranchée de la forêt et dans une autre petite coupure, située au kil. 25.5 ; malheureusement, des perrés en maçonnerie, que l’on a construits pour maintenir les talus, les masquent presque entièrement aujourd’hui. ALLUVIONS ANCIENNES. Il ne nous reste plus à examiner, maintenant, que des terrains d’une origine beaucoup plus moderne que ceux dont nous nous sommes occupé jusqu’à présent. Nous voulons parler des dépôts d’alluvions anciennes, situés près des haltes de Saint-Rémy-des- Monts et d’Origny-le-Roux, que l’on exploite en ce moment comme ballast, pour l’entretien de la ligne ferrée. Ces dépôts ont été formés, à l’époque Quaternaire, par les grands courants qui ont sillonné la région et lui ont donné son relief actuel. En les exami- nant attentivement, on reconnait que les pierrailles qui les constituent ont les arêtes émoussées et la surface lisse, par suite des frottements qu’ils ont subis, de même que les galets qui se forment, de nos jours, sur les bords de nos fleuves et de nos rivières à cours impétueux. Ces pierres et pierrailles proviennent du ravinement des roches de l’Oolithe inférieure et de la grande Oolithe des environs de Contilly et de Suré, d’où ils ont été charriés par les eaux. Les petites veines de glauconies que l’on remarque dans les alluvions voisines de la halte d’Origny-le-Roux ont été entraîinées par la ravine de la base des côteaux crayeux de la Perrière. Si ces dépôts ne présentent pas un grand intérêt géologique, celui de Saint-Rémy est toutefois remarquable par les vestiges de monnaies et poteries de l’époque gallo-romaine qu’il renferme. ALLUVIONS MODERNES. Généralement, les alluvions anciennes sont recouvertes par le limon des plateaux, connu sous le nom de Loess, ou bien, près des cours d’eau, par une couche, de deux ou trois mètres d’épaisseur, d’alluvions modernes, formées par les apports successifs des eaux dans ’étendue de leur zone de débordement. Ce sont elles qui cons- tituent le sous-sol de la plupart de nos prairies. PROFIL DE MAMERS A MORTAGNE 67 RÉSUMÉ. Il ressort de la présente Notice, que la ligne de la Hutte (de la station de Saint-Rémy-du-Plain à Mamers), et le chemin de fer de Mamers à Mortagne, traversent neuf étages géologiques, se subdivisant en diverses assises très nettement caractérisées par les fossiles qu’elles renferment et par leurs relations stratigraphiques, savoir : SOUS-ÉTAGES LIEUX ÉTAGES ET D'ÉMERGENCE — ASSISES PRINCIPALES HE === Ligne dela Hutteà Mamers : f 10 Calcaire sableux à Zere-|De Saint-Rémy-du-Plain BAJOCIEN | bratula perovalis ; à Villaines-Vézot. ou OoLtTHE { 20 Calcaire compacte, so-| Au pied du remblai, sur INFÉRIEURE nore, à Ammonites Par-| le ruisseau du Rutin. | kinsoni ; | 10 Calcaire compacte ou|Près de Ia gare de Vil- marneux à Pholadomya| laïnes-Vézot— au pied Veselayi ; du remblai, sur le ruis- seau du Rutin — dans les talus du chemin de en 4 l’Arche. à Pi ONU) 26 Oolithe miliaire de Ma-|Dans La tranchée du pont n ne GRANDE mers ; de Bray et dans celle < Nr de Bel-Air. = 3° Bradford-clay à Terebra-|Dans la tranchée du pont É: tula digona et Rhyncho-| de Bray (kil. 20). & nella concinna; eA 49 Forest-marble. Dans la tranchée du pont eA ; El de Bray (kil. 20). 5 10 Callovien inférieur à Am-|Tranchée de Mamers. monites macrocephalus et| : | Echinobrissus clunicu-|L'8%€ de Mamers à Mor- laris ; lagne : SOS 20 Callovien moyen à 4m-|De la gare de Mamers au monites modiolaris ; kil. 2-5. 30 Callovien supérieur (zone|Du kil. 2-$ à la ferme | ferrugineuse). de Champ-Rouge. 19 Argile de Dives et Cal-|Du kil. 8 au kil. 14 et du caires marneux à 4m-| kil. 15 au kil. 18. monites cordatus et Perna OXFORDIEN myliloides ; 20 Sables et Grès roussâtres|Du kil, 14 au kil. 15 et et Calcaires caverneux| du kil. 18 au kil, 19-5. du Calcareous-grit. 68 TERRAIN JURASSIQUE TERRAIN CRÉTACE TERRAIN TERTIAIRE SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE gonia Bronnii; | 10 Calcaires marneux à Tri-|Kil. 18-o et 18-0. 20 Calcaire pisolithique; |Kil. 19-4. Ro 30 Calcaire compacte ou dé-|Vis-à-vis de la maison- | sagrégé à Dicérates et| nette n0 32. Nérinées. , 10 Argile et Calcaires argi-| Du kil. 19-6 au kil. 20-7. leux à Ostrea delloidea ; | 20 Calcaires compactes ou dito dito. marneux à Pholadomya Prolei et Mytilus Ju- ensis ; PAMÉEDCIEN 30 Banc mince de Calcaires| Chemin d’accès de la gare oudeGrèsferrugineux,| de Bellème, en remon- en fragments roulés. tant vers la ville (au pied d’un mur de clô- ture et au sommet du talus droit). | to Sables verts et Glauconie|Vis-à-vis de la gare de | à Ostrea vesiculosa ; Bellème — du kil. 20-7 au kil. 20-09. ; 20 Craie glauconieuse à 4m-|Du kil. 20-9 au kil. 22-7 moniles Mantelli et Tur-| et du kil. 33 au kil.3s. rililes tuberculatus ; Craie blanche|Du kil. 26 au kil. 33, et compacte à| du kil. 35 au kil. 38. Amm. Ro- c lomagensis. CÉNOMANIEN ( Ÿ ASE Craie Sa Kil. 27-5 ; kil. 28-5 ; gare Rouen. ; F à Scaphites| de Mortagne. æqualis et Turrilites costatus ; | 40 Sables Cénomaniens su-|? ? ? . .. périeurs en place ; | 5° Sables Cénomaniens su-|Sables de la forêt de Bel- | périeurs remaniés. lème; Sables du Pin- | la-Garenne; Sables de | Chartrage. 19 Argile à silex en place,|Partie de la tranchée de avec fossiles et de la] la forêt de Bellême, Craie supérieure; recouverte de perrés en maçonnerie, EOCÈNE 20 Argile à silex remaniée, [Partie au-dessus des per- avec nodules brisés et| rés; petite tranchée du roulés. kil. 25-5; quelques traces au-dessus des sables de la forêt. PROFIL DE MAMERS À MORTAGNE 69 10 Alluvions anciennes; Ballastière de St-Rémy- des-Monts ; talus près de la halte d’Origny- le-Roux. 20 Loœss. Au-dessus des alluvions anciennes, notamment \ à Saint-Rémy. TERRAINS DE TRANSPORT TERRAIN Sous-sol des prairies de Chèreperrine, de la Alluvions modernes. Chaise et de Saint- Denis, TERRAINS SUPERFICIELS | ACTUELLE QUATERNAIRE ÉPOQUE Nous avons rempli le cadre que nous nous étions tracé ; nous avons cherché, dans ce travail, à donner des renseignements précis et détaillés sur les nombreux terrains traversés par le chemin de fer de Mamers à Mortagne, lesquels sont très répandus dans l'arrondissement de Mortagne ; nous lavons fait de manière à bien faire saisir leurs subdivisions, l’ordre de superposition de leurs diverses assises et enfin les caractères paléontologiques qui les distinguent. Plus tard, nous donnerons la description et les figures des principaux fossiles que nous avons indiqués. Le profil géologique du chemin de fer de Mamers à Mortagne est accompagné de coupes transversales intéressantes. La première part de la Perrière et est dirigée sur Courgains, en passant par Mamers. Elle montre d’une manière fort claire les dénudations profondes qui se sont produites dans notre région, aux dépens de l’étage Oxfordien et de l’étage Cénomanien, lors du cataclysme quaternaire. La seconde coupe, qui passe par Bellème, met en évidence les modifications apportées dans l'allure des couches du Coral-rag, du Kimméridgien et des autres terrains, par suite des nombreuses failles qui existent aux environs de cette localité. Mais, comme notre coupe suit la direction de la route nationale de Mamers à Nogent-le-Rotrou, elle nindique pas tout l’ensemble des couches Crétacées qui forment un petit îlot au centre même de la ville. Pour bien suivre la série de ces couches, il faut partir du village du Val et remonter le côteau jusque sur la place du Château, transversalement à la route nationale. On voit alors la Glauconie occuper le fond de la petite valiée, où coule un mince filet d’eau; puis on trouve successivement la Craie glauconieuse, au carrefour du chemin de Carnavé, puis la Craie de Rouen, sous l'antique chapelle de Saint-Sentin, et enfin les sables Cénomaniens supéricurs, 70 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE à la hauteur des promenades publiques, dans la cour de l'Hôtel des Trois-Marchands. Le sommet du petit mamelon que couronne la place du Château est formé en partie par l’Argile à silex en place, ainsi qu’on peut le voir dans le sentier qui, partant de la statue de Collin-Maillard, aboutit aux halles de Bellème. Ces vestiges du terrain Cénomanien et de l’Argile à silex, entiè- rement isolés du reste des terrains similaires avoisinants, sont donc une preuve manifeste des dénudations profondes qui ont eu lieu dans cette contrée, et auxquelles on doit, vraisemblablement, la formation de la vallée de la Même. Nous nous sommes surtout efforcé, dans cette Notice, d’aplanir aux débutants dans la science les difficultés que nous avons éprouvées au commencement de nos études, en leur procurant des types locaux, bien définis, qu’ils pourront consulter avec certitude. Nous avons, en outre, discuté un peu longuement la stratigra- phie de l'étage Cénomanien, que nous savons incomplètement représenté dans toute la partie septentrionale de notre belle et vaste province. Aussi, espérons-nous que les considérations particu- lières dans lesquelles nous sommes entré à ce sujet, ne sauraient manquer d’attirer l’attention des savants. On trouvera plus loin, Planche III, trois autres coupes, que nous tenons de l’obligeance de M. Albert Guillier. Elles mon- trent les relations des sables Cénomaniens avec la craie à Ostrea biauriculata et les rapports de celle-ci avec la craie à Terebratella Carentonensis, qui termine la série des assises Cénomaniennes. En comparant ces coupes avec notre profil de La Loupe au Mans, on remarquera que le banc d’huîtres qui a formé la craie à Ostrea biauriculata, dans la Sarthe, ne s’est guère étendu au delà de Conneré et qu’on n’en trouve plus de traces lorsqu'on s’avance vers le Nord (La Ferté-Bernard, — Nogent-le-Rotrou, — Bréton- celles, — La Loupe). Les sables Cénomaniens supérieurs en place sont alors immé- diatement recouverts par la petite couche de craie Glauconieuse à Terebratella Carentonensis qui les sépare de la craie Turonienne à Inocerarnus labiatus (Margon, — La Loupe). ETUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER Par G. LENNIER Le pittoresque village de Villequier, situe sur la rive droite de la Seine, en aval de Caudebec, présente au géologue une station des plus intéressantes à visiter. Il y trouvera, dans un espace de moins de trois kilomètres, le terrain Jurassique supé- rieur, le Kimmeridge, puis, au-dessus, la série complète du ter- rain Crétacé. Les couches modernes peuvent aussi être étudiées, sur le même point; on trouve de la tourbe au bord de la Seine, des alluvions argilo-sableuses et des tufs calcaires en voie de formation. Le géologue pourra encore étudier, à Villequier, l’une des grandes failles qui sillonnent les plateaux crayeux de la Norman- die et, enfin, jouir du spectacle grandiose de la barre ou mascaret qui s’y fait sentir, aux marées d’équinoxe, avec une grande intensité. Une seule rue longue et étroite aligne deux rangées de mai- sons resserrées entre le fleuve et la falaise. La rue est parallèle à la Seine et décrit la mème courbe qu’elle. Au-dessus de la rue, entre la falaise et les maisons, sur un grand talus d’éboulement, s'étendent les vergers et les cerisaies. Ce talus d’éboulement cachait, il y a quelques années, toute la partie inférieure des assises du terrain. Nos études sur Villequier remontent à 1866. À cette époque, en compagnie de notre honorable collègue et ami M. Biochet, nous découvrimes, à plus de quarante mètres au-dessus de la Seine, les argiles Kimmeridiennes surmontées de sables ferrugi- neux appartenant à la Craie inférieure, de couches argileuses et calcaires appartenant à la Gaize, de Craie verte, de Craie marneuse et de Craie blanche. Villequier présente donc, sur un même point, dans un ordre parfait de superposition, la longue série de couches qui se sont 72 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE formées depuis l’époque Kimméridienne jusqu’à la Craie blanche, y compris ces deux importantes assises. Les deux extrémités du village de Villequier sont limitées, en- cadrées par deux affaissements de la falaise crayeuse, l’un au nord-est, que la Seine et la route ont successivement attaqué ; il mesure 80 mètres de longueur sur 30 mètres de hauteur au bord de la route. Son arête vive et saïllante lui a valu le nom populaire de Dos-d’Ane. L'autre affaissement, au sud-ouest du village, s’étend depuis le ravin du Dallot jusqu’à celui du phare, qu’il dépasse un peu ; il est appuyé contre la falaise qu’il masque et se trouve entièrement compris dans les chantiers de la Société des argiles de Villequier. En amont et en aval de ces deux massifs éboulés, commencent les falaises de la Craie blanche, en sorte qu’à quelques pas de distance la Craie blanche et le Kimmeridge se trouvent en contact latéral, sur une même ligne horizontale. La Craie blanche, à Villequier, incline légèrement vers l’est dans la carrière d’aval. Les carrières d’amont, relevées d’une quinzaine . de mètres sur les précédentes, ont la même inclinaison; dans les deux cas, les pentes sont sensiblement moins accusées dans la Craie blanche, lèvre plongeante de la faille, que dans les autres assises que nous aurons à étudier et que la lèvre soulevée de la faille a mis au jour. ” Le diagramme général (pl. 1, fig, 1) établit ce fait ; il laisse apercevoir, entre les deux massifs de la Craie blanche, conservant presque leur niveau, les assises fortement redressées de la lèvre soulevée de la faille. Les lignes de pente, prolongées en chaque sens, montent vers Triquerville à l'Ouest et plongent vers Sainte- Gertrude à l'Est. Ce fait du plongement général des couches de la lèvre soulevée, pourrait être mis en évidence par un dia- gramme général partant de Notre-Dame-de-Gravenchon et se dirigeant sur le Mont-de-lIf. Les couches de la lèvre soulevée, que nous voyons derrière le village de Villequier, se prolongent, de chaque côté, au-delà des limites que nous avons précédemment indiquées, mais elles sont masquées par la falaise de Craie blanche. Les deux massifs du Dallot et du Dos-d’Ane proviennent de l’éboulement de la lèvre soulevée. Ce sont des accidents locaux, bien postérieurs à la formation de la faille, produits par l’érosion du flot. Si des cir- constances favorables n'avaient permis de suivre les couches relevées, de déterminer leur allure sur une grande étendue, on ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 73 aurait certainement été tenté d'accorder aux assises relevées du Dallot et du Dos-d’Ane une importance beaucoup trop grande. I. — KIMMERIDGE Depuis longtemps déjà nous avons signalé la présence des argiles Kimmeridiennes à Villequier. C’est sur nos indications géologiques qu’une grande Sociétés’est formée pour l'exploitation de ces argiles. Si nous n'avons pas publié plus tôt ce travail, c’est que nous espérions toujours pouvoir le compléter par de nou- velles observations, par l'étude de fossiles et de la disposition des couches. Les argiles, à Villequier, s’élèvent à 40 mètres au-dessus du niveau de la Seine et elles ont été traversées par des sondages jusqu'à environ trente mètres au-dessous de ce niveau. La partie supérieure de ces couches représente, nous l'avons dit plus haut, le groupe Virgulien, c’est-à-dire la partie supérieure de l'étage Kimmeridien, l’équivalent des assises que nous avons décrites au Nord du cap de la Hève, depuis Bléville jusqu’au Nord d’Octeville. Les échantillons de la partie inférieure, ceux qui ont été ramenés par les sondages, ou rencontrés dans les fouilles faites pour placer la machine de l’usine, nous paraissent, par leur composition géologique, par l’abondance des calcaires marneux qui coupent les argiles, pouvoir être considérés comme appartenant à l’assise moyenne, au Piérocérien. Nous devons dire, cependant, que cette opinion ne s'appuie que sur des données stratigraphiques et minéralogiques; les gastéropodes, si caracté- ristiques de cette zone, faisant presque entièrement défaut à Villequier, La partie supérieure du Kimmeridge, en contact, comme au cap dela Hève, avec les sables ferrugineux de la base de la Craie, présente, nous l’avons dit plus haut, les plus grands rapports avec les couches observées à Octeville et en sont bien évidemment la continuation. Au sommet, le Kimmeridge commence par des marnes argi- leuses, bleues ou grises, alternant avec des bancs d’argile et de calcaire marneux de couleur plus pâle. Comme à Octeville, on rencontre, dans ces couches supérieures, l’Ostrea virgula très abondante, et aussi, mais plus rarement, la variété bilobée, 74 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Au sommet des argiles, nous avons relevé la coupe suivante, de haut en bas : Argile bleue sans coquilles, en contact à la partie supérieure avecles sables erétacés PACE Calcaire marneux RC ENT PNR NE Argile bleue, sans coquilles "the RMENERR Calcaire marneux 27001 OO PE Argile sans coquillést?t Sue RICO Calcaire marneux. 242: Argile avec Odreavirpula CROP Lit mince de Gervillia kimmeridiensis en fer sulfuré, avec plaquettes.de fer. Sulfuré NE NN EME NE Aroilefavec Ofrea vtr oula PCM EE O 40 Calcaire marneux?: 2 MP 0 30 Arpile avec quelques Wrreules NP RENE PRIOR 5 Argile passant à la marne et au calcaire marneux, avec Osirea 'otreula PE TAIENES CTP PRE APATTERES Argile avec petit lit d’'Ostrea virgula au tiers inférieur. . . Calcaire marneux (banc irrégulier) . . . . . . . . . Arpile + 5200 NN PER PE Calcaire marneux. 2 Ne Argile: . VU PAIE RSR Calcaire marneux en bancs irréguliers. . . . . . . . Ateile sans Coquilles 9 4 eee RS DMOUO" O0. O1: OH O [e) LEA 9538 La partie moyenne de la coupe du Kimmeridge de Villequier est plus difficile à étudier en détail; elle est recouverte par des éboulements de sables et de roches crayeuses. Cependant, nous avons pu constater qu’elle est formée, sur une épaisseur de 20 mètres, d’alternances de bancs calcaires, séparés par des couches argileuses d’épaisseur variable, et contenant peu de coquilles fossiles. A la partie inférieure, comme au cap de la Hève, les bancs calcaires sont plus épais et, dans la fouille faite pour placer la machine de l’usine, nous avons relevé la coupe suivante de haut en bas : Arpile grise... (1041007 AN SEE Banc de calcaire marmeux . Re ARTE CCR RO RES Aroile.. m4... ae ee D NRC À reporter! "0 -MNISRO ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 75 REPOS EME ENS A0S Bancdehealcaire mamentee ne 7, LICENSE. Le 0130 Areles avec srandes Ammonites.…. … .).M-/e/mfipatene e Je Binede calcaire mameus ee 20. 201. Jen Unr à 10120 Argiles et marnes bleues avec grandes Ammonites . . . . I — 6"35 Comme on le voit par les coupes que nous venons de donner, par l'abondance des Ostrea virgula à la partie supérieure, il ne saurait exister aucun doute sur la zone à laquelle peut être rappor- tée l’argile de Villequier ; elle représente bien évidemment les argiles virguliennes du Nord du cap de la Hève ; elle est la conti- nuation de ces couches, ramenées au jour par la dislocation de la faille et par le relèvement de la lèvre Nord. Nous n'avons pu, par l’examen des échantillons provenant des sondages, arriver à reconnaître avec certitude le Kimmeridge moyen, le Pérocérien, les marnes à Piérocéres, si bien caractérisées au cap de la Hève et à Villerville ; nous pensons, cependant, que toutes les assises exploi- tées à Villequier, appartiennent au Kimmeridge supérieur, et que couches inférieures rencontrées par les sondages représentent le Ptérocérien. Les argiles et les calcaires marneux de Villequier se sont dé- posés dans une mer profonde, dont les rivages se trouvaient à la Hève et à Villerville. Les espèces suivantes ont été recueillies par MM. Biochet, Brulé et Pornet, qui en ont fait hommage au Musée de la ville de Caudebec : Vertèbres d’Ichthyosaure, côtes de Plésiosaure et de Polypti- chodon. Ammonites longispinus (Sow.). De grands exemplaires de cette belle espèce ont été recueillis en creusant la fouille né- cessaire à l’établissement de la machine à vapeur. A Octeville, dans les argiles kimmeridiennes supérieures, nous avons aussi recueilli cette espèce. Trigonia clavellata (Leymerie). Assez commune, presque toujours en mauvais état. Nucula sp. ? Petite espèce indéterminable, trouvée dans l'argile, presque toujours sans test. Astarte sp. ? Petite espèce dans l'argile. Astarte scalaria (Rœmer). Thracia depressa (d’Orb..) 76 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Venus sp. ? Unicardium excentricum (d’Orb.) Pinna granulata (Sowerby). Gervilia kimmeridgensis (d'Orb.). Cette espèce forme un petit lit que nous avons signalé dans la coupe ; nous la retrou- vons dans les parties inférieures, avec les grandes 4m- monites longispinus. Mytilus sp.? Ostrea virgula (d’'Orb.) ? Ostrea Bruntrutana (Thurman). Ostrea multiformis (Koch). Terebratula Leymerii (Cotteau). Orbiculoidea. Cette petite espèce a été trouvée dans la partie moyenne du Kimmeridge connu à Villequier. II. — SABLES INFÉRIEURS DU TERRAIN CRÉTACÉ Nous avons désigné les sables blancs quartzeux, micacés, avec lits de fer limoneux, qui occupent la base du terrain crétacé au cap de la Hève, sous le nom de sables Néocomiens. Ils avaient été désignés par C.-A. Lesueur, dans ses vues et coupes du cap de la Hève, sous le nom de sables Wealdiens. La désignation de Néo- comiens donnée par nous à ces assises sableuses, dans un travail publié en 1867 sur la géologie de l’embouchure de la Seine, à soulevé quelques critiques; cependant, dans son remarquable travail sur le Pays de Bray, M. de Lapparent a admis cette opinion (1). Dans la falaise de Villequier, comme à Octeville, les argiles kimmeridiennes sont surmontées d’une assise sableuse, qui forme la base du terrain Crétacé. Ces sables quartzeux, micacés, sont blancs ou jaunâtres, quelquefois colorés en jaune ou en brun, par les eaux ferrugineuses. Ils présentent, comme au cap de la Hève, de petits lits d’argile fine, de couleur bleue, qui blanchit à lair. Dans la partie supérieure, le fer est plus abondant, la colo- ration brune plus accentuée, et on remarque même des amas de nodules et de véritables géodes de fer oxydé hydrate. Comme au cap de la Hève, l'épaisseur des sables ferrugineux, à Villequier, est de 20 à 30 mètres, au maximum. Ils sont principa- (1) Voir Bulletin de la Société géologique de Normandie, 1880, p. 336 ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 77 lement visibles dans l’établissement de la Société, qui les utilise pour son mélange, et dans les propriètés de MM. Busquet et Poultier. Les fossiles ne se trouvent guère que dans les parties dures, dans les rognons ferrugineux ; ils sont à l’état de moules et pres- que toujours indéterminables. Nous y avons reconnu des Turrilelles, des Turbos, des Nucules, des Trigonies, des Thétis. Les végétaux fossiles ont laissé de nombreuses traces dans les sables ; on y rencontre des bois à l’état de lignites, des veines noirâtres charbonneuses, et même une feuille appartenant a une espèce qui a pu être déterminée, figurée et décrite dans le Bulletin de la Société Géologique de Normandie, par M. le marquis de Saporta, correspondant de l’Institut, qui lui a donné le nom de Cylindriles latifrons. “ Les traces d’une autre espèce végétale se trouvent aussi à Villequier : le Teænidium pinnatisectum, décrit et figuré par le même auteur. L’unique exemplaire du Cylindrites latifrons à été recueilli à Villequier, par M. le docteur Bréchot. III. — GRÈS ET POUDINGUES FERRUGINEUX (ÊTAGE APTIEN). Fig. 1, 2, 3. Au-dessus des sables ferrugineux, nous avons reconnu, dans la propriété Poultier et même dans les terrains de la Société, les grès et poudingues de l’étage Aptien. Comme au Havre, cette couche, peu épaisse (trois à quatre mètres au maximum), est formée de galets, de graviers roulés, agglutinés plus ou moins fortement avec du sable et, acciden- tellement, de grès très durs. Les fossiles sont rares à ce niveau, mal conservés et presque toujours indéterminables. Le musée de Caudebec possède deux fragments d’ammonites provenant des grès et poudingues ferrugi- neux de Villequier. Ce sont les seuls fossiles que nous connaissions de ce niveau, recueillis dans cette localité. La grande ressemblance qui existe entre ces couches, à Villequier, et celles du Havre et de Honfleur, les rapports de stratification avec les couches plus récentes et plus anciennes, la composition minéralogique identique, nous ont paru des raisons suffisantes 78 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE pour déterminer la position et l’âge des grès et poudingues de Villequier, pour les assimiler aux assises du Havre et de Hon- fleur, dans lesquelles nous avons recueilli l’Ostrea aquila. IV.— GAULT OÙ GALZE (Erace ALBIEN, d’Orb.) Fig. 1, 2, 3. Dans la propriété de la Société, on voit, à 70 mètres d’altitude environ, une série de cinq à six bancs de calcaire gris, siliceux, séparés par des couches argileuses peu épaisses. L'ensemble de ces couches, que nous rapportons à la Gaixe, ne présente pas, croyons-nous, une épaisseur de plus de cinq à six mètres. Leur étude est très difficile, car elles sont presque partout recouvertes par un talus d’éboulement. C’est au niveau de ces bancs argileux que s'arrête l’eau des sources abondantes qui alimentent l’usine de Villequier et le magnifique parc du château possédé autrefois par Me Musard. Les espèces fossiles recueillies sont peu nombreuses. On cite : Ammonites inflatus; Nautilus sp.?; Turritella sp.?; Delphinula; Natica; Cardium; Arca; Ostrea ; Cidaris; plus des bois fossiles. Accidentellement, dans la même couche, on trouve le fer sulfuré, pyriteux, et des coquilles dont le test a été remplacé par l’agate ou silex calcédonieux. V. — ÉTAGE CÉNOMANIEN (CRAIE VERTE, CRAIE GLAUCONIEUSE) Fig. I, 2, 3. Si les étages inférieurs de la Craie sont difficiles à étudier à Villequier, la Craie moyenne, au contraire, présente des coupes magnifiques. Dans l’une des carrières de la Société (ancienne proprièté Noël) et au Dallot, dans la partie éboulée qui rend les assises plus facilement abordables, nous avons pu suivre l’ordre de stratification (Fig. 1.) et établir la coupe suivante, qui passe de l’étage Turonien à l’étage Kimmeridien; nous rapportons dans cette coupe la première assise au Turonien. 1. Craie blanche, noduleuse, avec débris nombreux d’Inoceramus problematicus, épaisseur variable, en moyenne sn ds dé LOI TM ORUTC IPN 2. Craie semblable avec nombreux rognonsà surfacejaune o 15 xD— À TeDOr(Er, L, VUE NOIRS ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 79 RéPOR Re rs 3. Craie grise, dure, compacte, sans silex, avec quelques HOUSSE VER LL MEET LE: 1:10 .30 Halieide tosnonsivertsperotess.1 . © Et. lots s. Craie grise, un peu verdâtre, noduleuse à la partie SHPÉNCUTENN D NIET Dee lle SF O0 60 6. Calcaire gris, avec rares silex en rognons . . . . . . I 60 7. Petit lit d'argile ou calcaire argileux peu compacte . . 8. Craie blanche, légèrement glauconieuse, avec trois ou quatre bandes de silex, dont les deux supérieures sont .plus constantes; les silex sont à surface cherteuse I 10 9. Petit lit de marne argileuse, gris-verdâtre . . . . . . o 04 10. Craie blanchâtre, un peu glauconieuse, très fendillée. o 40 11. Lit de gros silex noirs, passant à un grès gris siliceux o 20 12. Craie blanche compacte, avec quelques cherts épais . 1 40 13. Craie verdâtre, glauconieuse, avec Holaster subolobosus 4 — 14. Craie plus ou moins glauconieuse, avec nodules bruns, couche de céphalopodes : Ammonites varians, Man- RSC quais, etc. etc tee EE NI" 15. Grèset calcaire gréseux, avec Znoceramus striatus . . . 4 — 16. Craie sableuse, avec lits de silex noduleux, Pecten asper, Caratomus rostratus, Catopygus carinatus, Hemiaster bnjoElolastensab-clobosus ONE ROME 6: — 17. Craie plus ou moins glauconieuse, avec lits de silex, FHÉR DOM ADSSINEEES Le Len 0. MNT LES — 18. Glauconie sableuse avec traces blanchâtres de polypiers 2 — HR GA UIOUN PALERME ER EE D — ZOO AIDES er TUAINEUx NE DRM AR Eure — DPI MNONUTe le oc RE PRE EN M 26. Hors 8794 Si nous comparons cette coupe avec celle de St-Jouin, nous verrons que, sur ces deux points, sur la Manche et sur la Seine, à une distance de 38 kilomètres, le passage du Cénomanien au Turonien se fait d’une manière identique ; même composition des assises, mêmes niveaux fossilifères. L’épaisseur totale du Cénomanien reconnue à Villequier, est de 40 à 45 mètres ; c’est moins qu’au cap de la Hève, moins qu’à Orcher, où cet étage présente un développement de 60 mètres d'épaisseur. 80 SOCIËTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Les fossiles sont très nombreux, à Villequier, dans la craie Céno- manienne ; nous croyons utile de citer les espèces recueillies par M. Biochet et par moi, et qui figurent dans les collections du Musée cantonal de Caudebec et dans les collections du Museum de la Ville du Havre. Liste des fossiles cénomaniens recueillis à Villequier : CÉPHALOPODES. — Belemnites ultimus, d'Orb.; Ancyloceras armatus, d'Orb.; Hamiltes simplex, d’'Orb.; Turrilites tuberculatus, Bosc.; Turrilites costaius, Lamarck; Turrilites Scheuchzerianus, Bosc.; Nautilus triangularis, Montfort; Nautilus subradiatus, d'Orb.; Nautilus Largilliertianus, d'Orb.; Nautilus elegans, Sow. ; Ammonites varians, Sowerby ; Ammonites Largilliertianus, d’Orb. ; Ammonites falcatus, Mantell, Ammonites Mantelh, Sow.; Ammonites Rotomagensis, Lam.; Ammonites Woloari; Scaphites obliquus, Sow.; Scaphites æqualis, Sow.; Baculites baculoïdes, d'Orb. GASTÉROPODES. — Turritella; Avellana cassis, d'Orb.; Turbo umbilicatus, d'Orb.; Pleurotomaria perspectiva, d’Orb.; Pleuroto- maria turbinoïdes, d'Orb.; Pleurotomaria Brongniartiana, d'Orb. ; Rostellaria sp.? Pterocera sp. ? ACÉPHALES.— Venus faba, Sowerby; Venus Rotomagensis, d’Orb.; Trigonia spinosa, Parkinson; Trigonia scabra, Lamarck; Cardium Mailleanum, d'Orb.; Arca Passyana, d'Orb.; Arca Mailleana, d'Orb.; Pinna Deshaysii, Morière; Lima clypeiformis, d'Orb. ; Inoceramus striatus, Mantell; Pecten asper, Lam.; Pecten Cenoma- nensis, d'Orb.; Pecten elongatus, Lam.; Pecten orbicularis, Sow.; Janira quinquecostata, d’'Orb.; Janira æquicostuta, d’'Orb.; Janira cometa, d'Orb.; Spondylus striatus, Goldf.; Chama cornucopiæ, d'Orb.; Ostrea carinata, Lam.; Ostrea lateralis, Nilson; Ostrea Lesueurii, d'Orb. ; Ostrea conica, Sow.; Ostrea Ricordeana, d'Orb. Bracxiopopes.— Rhynchonella compressa, Defrance; Rhynchonella Cuvieri, d'Orb.; Terebratula biplicata, Defrance; Terebratula lima, Defrance. EcnixoperMEs. — Holaster suborbicularis, Agassiz; Holaster trecensis, Leym.; Holaster carinatus, d'Orb.; Holaster subglobosus, Agassiz; Holaster Cenomanensis, d'Orb.; Hemiasier bufo, Desor ; Catopygus carinatus, Agassiz; Caratomus rostratus, Agassiz; Discoi- dea cylindrica, Agassiz ; Düiscoidea subuculus, Leske ; Salenia personata, Agassiz; Salenia sculigera, Gray; Pseudodiadema pseudo- ornatuwm, Cotteau ; Pseudodiadema ornatum, Desor; Pseudodiadema variolare, Cotteau; Pseudodiadema Michelini, Desor; Glyphocyphus ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 81 radiatus, Desor; Echinoconus gibbus, Cotteau; Echinoconus Roto- magensis, d'Orb.; Cidaris vesiculosa, Goldf.; Cottaldia Beneitiæ, Cotteau; Micraster acutus, d'Orb. Nous avons encore recueilli, dans la craie Cénomanienne de Villequier, des écailles de poissons, des dents de raie et des dents de squales ; des Serpules et des Scalpellum. Les Bryozoaires, les Polypiers et les Spongiaires y sont aussi assez communs. On y rencontre presque toutes les espèces signalées au Havre et à Fécamp. VI. — CRAIE MARNEUSE (Erace TuroONIEN, d’Orb. 1 EE La Craie marneuse n’offre à Villequier même, au bord du fleuve, que ses assises inférieures, qui sont bien visibles dans les parties affaissées de la falaise, de la lèvre soulevée de la faille, au Dos- d’Ane et au Dallot (voyez fig. 1). On trouve la Craie marneuse en place, au-dessus de la Craie cénomanienne au sommet de la falaise, au-dessous du château de Villequier. L’inclinaison générale des couches vers l’Est, tandis que le plateau conserve à peu près son horizontalité, fait augmenter l’épaisseur de la Craie marneuse dans cette direction ; elle peut avoir 2$ mètres d’épaisseur au-dessus du Dos-d’Ane et seulement 10 à 15 mètres près du château. Nous avons vu, dans la coupe de la carrière Noël, la Craie marneuse se superposer à la Craie glauconieuse. Au-dessus des bancs que nous avons déjà signalés, nous avons encore pu recon- naître plusieurs mètres de craie blanchâtre, compacte, avec nombreux Jnoceramus labiatus, et plus haut encore, quelques lits de silex cherteux du même étage. Les fossiles de la Craie marneuse, si on en excepte l’espèce caractéristique, l’Inoceramus iabiatus, sont rares à Villequier. Nous citerons les espèces suivantes : Ammonites Lewesiensis, d'Orb.; Spondylus spinosus, Osirea sp. ? Rhynchonella Cuvieri, Anomya truncata, Geinitz ; Cardiaster Cotteanus, d'Orb. 82 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE VIT. — CRAIE BLANCHE (Erace SÉNONIEN, d’Orb.), Fig. 1, 2, 3 Les carrières d’aval, exploitées pour l’endiguement de la Seine, présentent un front de taille de 40 à 55 mètres d’élévation ; elles fournissent les matériaux des digues et des perrés en blocs tendres et durs, gelifs et non gélifs, et à l’industrie, la pierre à chaux qui, quelquefois, est employée au Havre et même expédiée pour l'Angleterre. La difficulté de l’accès de ces carrières nous a empêché d’en faire la coupe détaillée ; nous ne publions donc ici qu’une coupe générale, nous réservant, lorsque nous publierons les notes que nous préparons, avec le concours de MM. Biochet et Vacossin, sur Caudebec, sur Lillebonne et Bolbec, de donner une coupe très détaillée des assises de la craie Sénonienne. Coupe des carrières d’aval de Villequier, de haut en bas : 1. Craie blanche, tendre, à bandes rapprochées de silex pétits\et/Cariés, éNNITON, el NII IC RER RRRREE 2. Craie blanche plus compacte, avec quelques gros silex de couleur bleuâtre, rubanés, à nodules de silex gréseux, gris opaque, nombreux bryozoaires. . . . 9 — Trois bancs de cette couche n° 2, d’une épaisseur plus grande que toutes les autres, se détachent sur la masse blanche de la falaise, en une ligne plus blanche que l’on peut apercevoir de Caudebec, à une dis- tance de plus de 4 kilomètres. 3. Craie blanche, tendre, à bandes rapprochées de petits silex pleins et cornus = C0 NRC ERP 4. Alternance de bancs tendres et de bancs durs ; ces derniers forment des corniches de couleur rouilleuse, qui ont valu à cette couche la dénomination locale de Dancs jaunes 1. is CRE NE EEREE s. Craie blanche, tendre, à lits de ee peu apparents, épars, petits, pleins, avec quelques lits de silex réculiers, continus, appelés Bisets ou Larmier de biset ; dans la partie inférieure de cette couche, se rencontre souvent un lit très dur, jaunâtre, offrant souvent des vacuoles, des cavités nombreuses. Les ouvriers désignent ce calcaire caverneux sous le nom de banc Re M hn ue D À reporter LM MONA ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 83 REPORT MENACE Jen E 6. Banc de silex en table continue, très constant (Biset on darmierde.biset des \ouvriers}l. 4 2.5... O0 7. Craie blanche tendre (banc blanc ou Brouat des CONTE) LPO SATA ORNE SE PRES NET SH Groslien(ouveros Lais tendre... mnt M 2. 0 30 9. Vrai gros lien des ouvriers, calcaire compacte, dur, inattaquable 2slaseléenT AE à : PTIT :0170 lo Étane banc, (craie blanche tendre. pee, Sun 11. Calcaire dur, de bonne qualité pour les constructions, rempli de vacuoles (Etanfiche des ouvriers) . . . . 1 80 12. Nodules jaunes et verts (Rognons de coq des ouvriers) o 20 53"65 La surface de la Craie blanche est accidentée par de nom- breuses érosions et par un grand nombre de puits naturels. A différents niveaux, dans la masse crayeuse, on remarque des couloirs sinueux ; à la surface des bancs durs, ces couloirs sont plus ou moins remplis de sable fin et les parois présentent des traces évidentes de lavage et même d’érosion. Ce sont d’anciens canaux souterrains, dans lesquels l’eau a long temps couru et dont la configuration actuelle des vallées voisines et la taille des falaises par l’action des temps, a amené l’assèchement. Entre Tancarville et Lillebonne, un peu au-dessus du niveau du chemin 81, on voit de nombreuses cavités, semblables à celle dont nous venons de parler : les unes sont vides, les autres rem- plies de sable fin, d’autres enfin, comme à Radicatel, servent encore à l’écoulement et on en voit sortir de nombreuses sources d’eau vive. La Craie blanche présente, à Villequier, les espèces suivantes, qui ont été recueillies par MM. Biochet, Bucaille et par moi : VERTÉBRÉS. — Ecailles et dents de poissons. Morzusques. — Jnoceramus Lamarckii ; I. Cuvieri ; Lima; Spondylus spinosus ; Ostrea semi plana ; Crania Parisiensis. BRACHIOPODES. — ZTerebratula carnea ; T. semi çlobosa ; Khynchonella limbata ; Rhynchonella sp ? ; R. plicatilis ; R. Cuvieri ; plusieurs espèces de Bryoxoaires. ECHINODERMES. — Cidaris sceptrifera, Mantell ; C. sub vesiculosa, d'Orb.; Cidaris perlata, Sorignet; Cidaris perornata, Forbes; Cidaris clavigera, Koenigh ; Cyphosoma radiatum, Sorignet ; Mi- 84 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE craster cor anguinum ; Micraster cor testudinarium ; Micraster bre- viporus ; Holaster planus ; Ananchites gibba. VIII. — TERRAINS RÉCENTS (RocHEs ACCIDENTELLES) Après avoir décrit les roches qui forment les coteaux de Ville- quier et qui donnent à ce charmant endroit un aspect si pittores- que, il nous reste à étudier les dépôts formés dans le lit du fleuve et à signaler quelques découvertes récentes de roches et d’osse- ments de mammifères. Les faits dont nous parlerons d’abord sont relatifs à la décou- verte, au-dessous du Dos-d’Ane, au bord de la Seine, d’une série de roches anciennes, dont nous croyons devoir donner la descrip- tion d’après les renseignements qui ont été fournis par M. Zeïller, ingénieur des mines, secrétaire du Conseil des mines, auquel ces échantillons ont été communiqués par notre collègue, M. Biochet. Voici la liste des roches recueillies : 1° Calcaire très dur, noir ; 2° Euphotide, roche composée de feldspath labrador, de dial- lage (silicate de chaux, de magnésie et de fer) et de chaux car- bonatée ; ce dernier minéral forme des veines roses et blanches ; 3° Grès avec quartz et feldspath ; c’est la roche qu’on désigne sous le nom d’arkose, et qui se trouve ordinairement à la sépa- ration des terrains cristallisés et des terrains sédimentaires ; 4° Psammite, grès schisteux micacé ; s° Grès ferrugineux, ressemblant à ceux qu’on trouve à la base des grès de Fontainebleau ; 6° Lave basaltique avec péridot et fer titané ; 7° Granit. D'où viennent ces roches ? Telle est la question que nous nous sommes posé. On a rencontré plusieurs fois des roches anciennes dans les terrains quaternaires de la Seine, aux environs de Rouen et d’'Oissel. M. Bucaille nous a montré des fragments de roches granitiques, mélangées aux nummulites et aux blocs roulés de calcaires, pétris de fossiles tertiaires. En aval de Rouen et jusqu’en face Caudebec, sur la rive gauche de la Seine, de Vat- teville à la Maïlleraie, on trouve aussi, dans le Quaternaire, mais plus rarement, des roches et des sables granitiques. Les roches anciennes, trouvées à Villequier et que nous venons de dé- ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 85 crire pourraient donc ainsi provenir de transports, C’est à cette opinion que nous nous étions arrêté tout d’abord; mais l'étude des roches recueillies, leur détermination, a complétement mo- difié cette opinion, et nous pensons aujourd’hui que ces roches proviennent du lest d’un navire et qu’elles auront été jetées dans le fleuve près du bord. Il se fait ainsi, par le lestage des navires, des transports de roches considérables. Le même lest est plusieurs fois repris pour des voyages différents ; dans les mises à terre successives, il est transporté à des dépôts où il se trouve, en partie, mélangé avec du lest d’autres provenances. Dans les dépôts de lest du Havre, on pourrait faire des séries de roches provenant de toutes les parties du monde et repré- sentant un nombre considérable d’espèces minérales, dont la provenance est presque toujours incertaine. Nous nous sommes un peu étendu sur les roches anciennes trouvées à Villequier, parceque nous avons pensé que des dé- couvertes analogues pourraient être faites le long des bords de la Seine et donner lieu à des erreurs de détermination de prove- nance. IX.— DÉPOTS FORMÉS DANS LE LIT DU FLEUVE On a recueilli aussi, près du Dos-d’Ane, en même temps que des fragments roulés de tourbe, un certain nombre d’ossements de couleur brune, paraissant provenir de tourbières ; ces os, une fois secs, sont très légers, ils ont perdu presque toute leur gélatine. Parmi ces ossements, où les os longs dominent, nous avons re- connu les genres cheval, bœuf, cerf. Ils sont rejetés sur la plage dans la courbe de la Seine, près du Dos-d’Ane, par les eaux du fleuve. Nous pensons que ces ossements sont dégagés de la tourbe qui les contenait par les dragages du banc des Meules et qu’en- suite ils sont rejetés sur la plage du Dos-d’Ane par le courant descendant. Cette hypothèse est justifiée par les découvertes faites par M. Descamps, conducteur des Ponts et Chaussées, d’une série remarquable d’ossements dans les tourbes draguées au banc des Meules. Ces ossements sont analogues à ceux que nous avons recueillis au Dos-d’Ane ; ils font aujourd’hui partie de la collection du Musée de Caudebec. Ce qui pourrait justifier notre hypothèse relativement à la provenance des 86 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE ossements dont nous venons de parler, c’est que nous ne connaissons, auprès de Villequier, aucun banc de tourbe autre que celui des Meules, situé en amont, dans le fond de Goville. OSSEMENTS DE BALEINE TROUVÉS DANS LA SEINE En 1869, M. Desmarais ramena du fond de la Seine, un peu en aval de Villequier, un arrière-crâne de baleine qui depuis très longtemps séjournait sous les eaux du fleuve; il était entière- ment couvert de Dreissena polymorpha. Cette portion osseuse mesure deux mètres soixante de largeur, dimension prise d’un os temporal à l’autre. Elle figure aujourd’hui au Muséum du Havre. OUVRAGES A CONSULTER. I.— Manuscrit de M. Lesage, archéologue et naturaliste à Caudebec, décédé à Caudebec en l’année 1851, à l’âge de 89 ans. Pendant sa longue carrière, il a colligé tout ce qui intéressait les antiquités et l’histoire naturelle des environs de sa résidence. Dans un de ses manuscrits, offert par lui à la ville de Caudebec, on trouve 19 planches de fossiles céno- maniens de Villequier. Le même manuscrit contient quete observations très exactes sur le sol des environs. II.— Sur la Craie glauconieuse du Nord-Ouest du bassin de Paris, par M. Hébert. Extrait des Comptes Rendus de l’Académie des Sciences, 7 mars 1864. IlI.— Etudes géologiques et paléontologiques sur l'embouchure de la Seine et les falaises de la Haute-Normandie, par G. Lennier, in-49, avec coupes et planches (1867). IV.— Bulletin de la Société Géologique de Normandie. NOTE EXPLICATIVE DU DIAGRAMME ET DU PLAN D’ENSEMBLE DES FALAISES DE VILLEQUIER A CAUDEBEC. Fig. 1.— La coupe de falaise, ici figurée, suit la ligne indiquée sur le plan général, par un pointillé. On voit. à gauche, les carrières Léveillard ouvertes dans la Craie blanche; puis, auprès du phare, un petit vallon étroit dans lequel passe la faille. À droite de ce vallon, en regardant la falaise, on voit les couches relevées : le Kimmeridge ; les sables ferrugineux; le Gault ou ÉTUDE GÉOLOGIQUE SUR VILLEQUIER 87 Gaïze ; la Craie cénomanienne, surmontée par la Craie marneuse et recouverte par des dépôts quaternaires limoneux. Près du phare, une partie de la falaise, lèvre soulevée, a glissé sur le Kimmeridge et présente aujourd'hui un massif considérable dont les couches sont fortement redressées. A l'extrémité Est du point où le relèvement de la lèvre Nord de la faille cesse d’être visible, on remarque un second massif, tombé aussi de la lèvre relevée. Ce massif est désigné sous le nom de Dos-d’Ane. A l'Est du Dos-d’Ane, recommence la falaise de Craie blanche (Etage Sénonien). Fig. 2.— Cette coupe théorique montre la position relative des couches sur les deux lèvres de la faille, qui doivent être en contact, comme nous les figurons à 150 ou 200 mètres en arrière du front de taille des carrières. Fig. 3.— Montre la coupe de la falaise de la lèvre soulevée, prise sous le chalet Malfilatre. Fig. 4.— Plan général du terrain de Caudebec à Villequier ; un pointillé indique la ligne de passage du diagramme. NOTE SÛR... LE. CIMONADES PPATEAUR AUX ENVIRONS DU HAVRE Par F. PRUDHOMME. # Les pages qui suivent sont le résumé de quelques observations faites dans les exploitations de briqueteries des environs immédiats du Havre. Le peu d’importance de ce travail et l’étendue res- treinte que j'ai donnée à mes recherches me défendaient peut- être d’y joindre un essai de comparaison, qui ne saurait se faire avec fruit qu'entre des couches bien étudiées. J'ai cru cependant pouvoir essayer de comparer le limon de nos plateaux aux dépôts analogues du Nord de la France et de la Belgique, si bien étudiés par les géologues du Nord. Je ne me dissimule pas tout ce que cet essai a de prématuré, mais je considère mon travail seulement comme un jalon posé dans ’étude du terrain quaternaire du Pays de Caux, étude un peu négligée jusque-là, heureux si ces quelques notes peuvent servir à un plus digne pour entreprendre d’une façon sérieuse cette étude si intéressante. Le limon des plateaux qui recouvre uniformément tout le Nord de la France, s’étend aussi en couches épaisses sur les plateaux du Pays de Caux. Cependant, aux environs du Havre, il diminue rapidement d'épaisseur. En effet, sur la ligne des falaises du Havre à Saint- Jouin, ligne qui correspond à la crète de partage des eaux, les puissantes masses d’argile à silex qui surmontent la Craie ne sont recouvertes que par un lit peu épais d’un limon grossier, LE LIMON DES PLATEAUX 89 différant sensiblement du limon argileux homogène qui forme la masse ordinaire du limon des plateaux (1). Dans des cavités de l’argile à silex, et quelquefois même en poches dans celle-ci, on rencontre des dépôts toujours peu étendus de sables fins (sables à fondeurs), blancs ou panachés de jaune et de rouge. Cette disposition en poches peut s’observer à Bléville, valeuse Duplessy (alt. 10$ m.), où un dépôt de sable fin, blanc, se trouve à 4 mètres environ au-dessous du sol et s'étend dans l’argile à silex à une profondeur de 3 mètres. À Octeville, sur la falaise, près du corps de garde (alt. r0$ m.) on peut reconnaître dans une tranchée : PROD ui bnO20 Éimon jaune fancé/(aroilette).. 21. 0107180 Ligne irrégulière marquée par de petits cailloux de grès siliceux anguleux, à an- gles arrondis, de couleur brun foncé . o 05 Arpgile rouge grossière renfermant quelques- unside cesrcuiliaue.t SDL ANT jusqu’au fond de la tranchée. Cette couche doit avoir quelques mètres de plus en profondeur et reposer sur largile à silex, qui paraît dans la falaise à 8 mètres en contrebas. Je reviendrai plus loin sur cette ligne de cailloux anguleux légèrement roulés, qui se retrouve constamment dans le limon. À 200 mètres de ce point, toujours sur la falaise et vers Blé- ville, deux puits creusés pour exploitation des sables à fondeurs n’ont donne la coupe suivante : Éimon ons Arlette) EN EE RÉ Pimon rouge avec petits silex MU 2 40 Sable blanc ou panaché de rouge, avec petits blocs de craie à silex blonds. . . . . . 2 — au moins (1) I n’est pas inutile de rappeler que la partie supérieure de l'argile à silex présente des traces de profonds remaniements. Fortement ravinée, elle ren- ferme des graviers, des nodules de craie, des silex brisés et des débris de roches tertiaires. Il serait peut-être plus exact d’appliquer une appellation différente à cette partie supérieure, pour la joindre aux dépôts quaternaires dont elle ouvre la série ; cependant, comme il est impossible de séparer les couches inférieures en place de la partie supérieure remaniée, je me ser- virai dans cette note du terme argile à silex pour désigner cette partie supé- rieure sur laquelle s’étend le limon des plateaux, 90 SOCIÉÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Auprès des signaux d’Octeville, on peut voir, dans la falaise, 3 à 4 mètres de limon surmonter largile à silex. Aux signaux même existent des veines de sables fins. Entre la falaise et la route départementale du Havre à Fécamp, le limon, quoique plus développé, est encore peu épais. Divers puits creusés pour l’exploitation des silex le traversent sur quel- ques mètres seulement. Dans le bourg même de Bléville, une fouille ouverte près de l'Eglise, dans une proprièté privée, m’a donné la coupe suivante : Limon jaune (aroilette), : 2 Petit lit de cailloux bruns anguleux. Limon jaune fonce. A AS Sables fins blancs, avec petits blocs de ot CEE PR MP A et ©, Sur le territoire de Sainte-Adresse, à l’endroit où le chemin de grande communication n° 79 quitte le plateau de Bléville pour descendre à flanc de coteau dans la vallée de Sainte-Adresse, une carrière ouverte au bord du plateau (alt. 95") présente cette coupe : rpesssees"e Die S ire Nese RER SE Pl Joe Cl dehors 2 0 2 0 CNE ES d. Argile grossière, avec petits silex brisés ou éclatés et quelques gros silex 2 mètres, épaisseur variable. c. Limon jaune argileux. b. Sable fin, avec veines d’argile plastique et blocs de craie. a. Argile à silex (remaniée). On peut suivre la couche d dans le talus de la route, où elle atteint l'épaisseur de $ mètres. Elle renferme de nombreux petits éclats de silex, avec quelques gros silex anguleux, disposés irré- gulièrement dans la masse; les petits cailloux bruns de grès siliceux se rencontrent aussi dans cette couche, mais ne forment »* pas lit continu. LE LIMON DES PLATEAUX 91 La surface de la couche c, affouillée, est surmontée d’un lit continu de ces petits cailloux. La surface supérieure des sables D est aussi marquée par la présence de ces fragments. Je reviendrai sur la disposition remarquable de cette coupe et sur les conclusions qu’on peut en tirer. Auprès du fort de Sainte-Adresse (alt. 92"), l'argile à silex, dans laquelle sont creusés les fossés du fort, n’est couverte que d’une couche peu épaisse de limon grossier, avec petits silex brisés. Le vrai limon ne s’y trouve pas; les sables fins blancs ou panachés se montrent près de la surface, en quelques endroits. De l’autre côté de la route départementale, le limon acquiert une puissance considérable, et est exploité en grand pour la fabri- cation des briques. A la briqueterie Raverat, située à la Mare-aux-Clercs (alt. 92"), une carrière ouverte sur une longueur de plus de 200 mètres présente une magnifique coupe de 10 mètres de hauteur; on peut y relever de haut en bas : IDEREMNESSIES 7 € 7 nie EME DA Nos o d3 Limon remanié grossier, avec racines et débris demvénéEuRt. ALIEN NTS d Limon jaune foncé (argilette) . . . . . . 3 — Petit lit de cailloux anguleux légèrement LOUER AN ETES. 2e Une TE +05 OS d' Limon jaune, avec traces charbonneuses ITMTÉPUIerES eHODIQUES MT 2 50 Deuxième lit de cailloux roulés . . . . . o o$ c Limon compacte rouge brun{terre à briques) 3 50 b Sable fin avec veines d’argile plastique I — et plus. ARANPIIEMANSIeX 7 Sur divers points de la coupe, l'argile à silex remonte de façon à interrompre les couches b et c. Les sables b, blancs sur quelques points, sont sur d’autres points jaunûtres et assez siliceux. Le limon c est la vraie terre à briques ; très argileuse, elle ren- renferme à sa partie inférieure des nodules de craie, dont la surface à demi décomposée s’effrite sous la main. La couche d, entre les deux lignes de cailloux, est traversée par 92 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE des veines noirâtres, d’apparence charbonneuse et paraissant provenir de la décomposition de tiges de végétaux. La couche d? est beaucoup plus légère que la couche sous-ja- cente ; c’est l’argilette des ouvriers : trop sableuse et trop peu consistante au moulage, elle donne à la cuisson des produits inférieurs. La couche d3 est évidemment la partie supérieure de d°, trans- formée au contact des racines des végétaux et quelquefois entamée par la charrue. Les deux lignes de cailloux indiquées dans la coupe, et que j’ai déjà signalées plus haut, sont formées de petits fragments angu- leux, à angles émoussés, d’un grès siliceux de couleur brune, quelquefois avec veines verdâtres ou d’un blanc laiteux. Ils varient de 1/2 à 2 centimètres cubes de grosseur, et sont disposés en lignes régulières et horizontales. L’épaisseur de chaque couche est de 2 à $ centimètres au plus. Les cailloux sont nombreux et semblent semés d’une façon régulière. On rencontre quelquefois, dans les pointes d’argile à silex qui remon- tent dans le limon, de gros blocs de ces grès siliceux d’une dimen- sion de 10 à 20 centimètres sur $ à 15 centimètres. Ces blocs sont souvent décolorés sur leurs surfaces. La décoloration atteint jusqu’à 1 centimètre environ, formant une patine blanche ou jaunâtre. Ils sont fendillés dans leur masse, de telle façon qu’un choc assez léger en détache de petits fragments absolument sem- blables à ceux qui se retrouvent étendus en couche dans le limon. A la briqueterie Thirel, voisine de l’exploitation Raverat, on peut observer, sur une hauteur de 8 mètres : Terre véoétale: 2e CAR UE Limon’jaune ‘oris (arpilette) END Ligne de cailloux. LimOn rouge. 0 PM Er NET EEE Sable fin, blanc où panaché Re À partir de la profondeur de 6 mètres, le sable blanc veiné de rouge commence à paraître ; à 8 mètres, ce sable forme couche continue et renferme de nombreux fragments de craie, dont la surface décomposée s’effiite à la main. Dans le talus du chemin qui descend de la Mare-aux-Clercs dans le vallon du bois de Bléville, on peut suivre les deux lignes de cailloux, mais on les voit bientôt se rapprocher pour se rejoindre au point où l'argile à silex, qui supporte le limon, affleure LE LIMON DES PLATEAUX 93 dans la pente du vallon. On les voit ensuite se reformer dans le limon qui recouvre les pentes inférieures. Les briqueteries de la Mare-aux-Clercs sont ouvertes sur la partie du plateau qui borde le petit vallon du bois de Bléville. Cette disposition est à noter, car c’est surtout à la naissance des vallons et sur leur bord méridional, que le limon acquiert sa plus grande épaisseur. Le plateau ondulé, qui s’étend entre Fontaine et Montivilliers, est aussi recouvert par le limon, mais l'absence d’exploitations empêche de l’observer. À Montivilliers même, diverses briqueteries viennent de s’éta- blir sur la terrasse qui forme le flanc Ouest de la vallée (alt. 45" L'observation des couches qu’elles mettront à découvert sera, Je lespère, féconde en résultats; mais le peu de renseignements que jai pu recueillir encore, ne me permet pas d'aborder, dans cette note, l'étude des dépôts de pentes. J'espère, cependant, pouvoir le faire prochainement. Au-delà de Montivilliers, les exploitations sont rares et peu importantes ; cependant, à Gonneville, De du bourg, le long du chemin tendant à la Poterie {alt. 125"), j'ai pu relever, dans une briqueterie, la coupe suivante : AO ane ER PA IPIC ANT Cr ondes 3e" Lit de cailloux bruns, assez gros, peu nom- breux, mais formant ligne régulière. Limon jaune foncé, passant au gris. . . . 3 — Ici les cailloux, plus gros, sont moins nombreux et il paraît n’y avoir qu'un niveau. Cependant l'exploitation n’a pas été poussée assez profondément pour qu'il soit certain qu’une deuxième ligne n’existe pas. Sur la route de Saint-Martin-du-Bec à Gonneville, auprès du hameau d’Ecultot (alt. 105"), les talus de la route, hauts de 2m. 50 à 3 m., sont formés par le limon et l’on peut y suivre, pendant quelque temps, une ligne de cailloux à peu près au ni- veau de la route. J'ai laissé à dessein en dehors de cette description le plateau étroit qui s’allonge au Nord du Havre, depuis Ingouville ni Harfleur, et qui est limité par la vallée de Role et le pli de terrain qui part des Acacias pour aboutir à Sanvic, la Côte en un mot. Dans sa partie occidentale, depuis Sanvic jusqu’au fort de Tourneville, il n’existe, sur l'argile à silex, qu’un limon grossier 92 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE des veines noirâtres, d’apparence charbonneuse et paraissant provenir de la décomposition de tiges de végétaux. La couche d? est beaucoup plus légère que la couche sous-ja- cente ; c’est l’argilette des ouvriers : trop sableuse et trop peu consistante au moulage, elle donne à la cuisson des produits inférieurs. La couche d3 est évidemment la partie supérieure de d°, trans- formée au contact des racines des végétaux et quelquefois entamée par la charrue. Les deux lignes de cailloux indiquées dans la coupe, et que j'ai déjà signalées plus haut, sont formées de petits fragments angu- leux, à angles émoussés, d’un grès siliceux de couleur brune, quelquefois avec veines verdâtres ou d’un blanc laiteux. Ils varient de 1/2 à 2 centimètres cubes de grosseur, et sont disposés en lignes régulières et horizontales. L’épaisseur de chaque couche est de 2 à $ centimètres au plus. Les cailloux sont nombreux et semblent semés d’une façon régulière. On rencontre quelquefois, dans les pointes d’argile à silex qui remon- tent dans le limon, de gros blocs de ces grès siliceux d’une dimen- sion de 10 à 20 centimètres sur $ à 15 centimètres. Ces blocs sont souvent décolorés sur leurs surfaces. La décoloration atteint jusqu’à 1 centimètre environ, formant une patine blanche ou jaunûtre. Ils sont fendillés dans leur masse, de telle façon qu’un choc assez léger en détache de petits fragments absolument sem- blables à ceux qui se retrouvent étendus en couche dans le limon. À la briqueterie Thirel, voisine de l’exploitation Raverat, on peut observer, sur une hauteur de 8 mètres : Terre végétale’ A CPR ER ETS Limon jaune ons (arsilette) MERE 0 Ligne de cailloux. Limon\rouge. 120 CR NE EE Sable fin (blanciou PAnAChÉE À partir de la profondeur de 6 mètres, le sable blanc veiné de rouge commence à paraître; à 8 mètres, ce sable forme couche continue et renferme de nombreux fragments de craie, dont la surtace décomposée s’effiite à la main. Dans le talus du chemin qui descend de la Mare-aux-Clercs dans le vallon du bois de Bléville, on peut suivre les deux lignes de cailloux, mais on les voit bientôt se rapprocher pour se rejoindre au point où l'argile à silex, qui supporte le limon, affleure LE LIMON DES PLATEAUX 93 dans la pente du vallon. On les voit ensuite se reformer dans le limon qui recouvre les pentes inférieures. Les briqueteries de la Mare-aux-Clercs sont ouvertes sur la partie du plateau qui borde le petit vallon du bois de Bleville. Cette disposition est à noter, car c’est surtout à la naissance des vallons et sur leur bord méridional, que le limon acquiert sa plus grande épaisseur. Le plateau ondulé, qui s’étend entre Fontaine et Montivilliers, est aussi recouvert par le limon, mais l’absence d’exploitations empêche de l’observer. À Montivilliers même, diverses briqueteries viennent de s’éta- blir sur la terrasse qui forme le flanc Ouest de la vallée (alt. 45" L'observation des couches qu’elles mettront à découvert sera, Je l’espère, féconde en résultats; mais le peu de renseignements que j'ai pu recueillir encore, ne me permet pas d'aborder, dans cette note, l'étude des dépôts de pentes. J'espère, cependant, pouvoir le faire prochainement. Au-delà de Montivilliers, les exploitations sont rares et peu importantes ; cependant, à Gonneville, près du bourg, le long du chemin tendant à la Poterie (alt. 125"), j’ai pu relever, dans une briqueterie, la coupe suivante : Limon jaune . . . . MENT RE IPS ANIME Lit de cailloux te assez gros, peu nom- breux, mais formant ligne réoulière. Limon jaune foncé, passant au gris. . . . 3 — Ici les caïlloux, plus gros, sont moins nombreux et il paraît n’y avoir qu'un niveau. Cependant l’exploitation n’a pas été poussée assez profondément pour qu'il soit certain qu’une deuxième ligne n'existe pas. Sur la route de Saint-Martin-du-Bec à Gonneville, auprès du hameau d’Ecultot (alt. 105"), les talus de la route, hauts de 2 m. $0 à 3 m., sont formés par le limon et l’on peut y suivre, pendant quelque temps, une ligne de cailloux à peu près au ni- veau de la route. Jai laissé à dessein en dehors de cette description le plateau étroit qui s’allonge au Nord du Havre, depuis Ingouville LU, Harfleur, et qui est limité par la vallée de Rouelles et le pli de terrain qui part des Acacias pour aboutir à Sanvic, la Côte en un mot. Dans sa partie occidentale, depuis Sanvic jusqu’au fort de Tourneville, il n’existe, sur asie à silex, qu’un limon grossier 94 SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE caillouteux, absolument semblable à celui qui termine la coupe du chemin 79. (Dans la dépression qui limite la côte au Nord, au contraire, le limon, ou du moins l’argilette, existe en couche assez épaisse.) Dans les talus du fossé du fort de Tourneville, on peut voir le limon avec ses deux lignes de cailloux, et dans les fossés mêmes, sur quelques points, les sables fins. Dans toute la partie couverte par le bois de Muontgeon (alt. 85"), l'argile à silex affleure (1), surmontée seulement de quelques centimètres de limon grossier, rempli de petits cailloux éclatés, parmi le-quels on rencontre les cailloux bruns déjà cités, mais alors disposés confusément et sans stratification. Puis brusquement, dans la plaine de Frileuse, le limon acquiert une puissance considérable, ce qui en a permis l’exploitation en grand. Plusieurs briqueteries sont en effet établies sur ce point. La plus importante, celle de M. E. Dubosc, offre des coupes remarquables (alt. 97). La principale exploitation, ouverte perpendiculairement à la direction de la Côte, c’est-à-dire Nord et Sud, offre la coupe suivante : Terre vépenle 20e su 5 SUD Limondaune Argent) ee CCC .. 3 — lit decalouctbrans "#07 RP : 0 25 ‘Limon jaune avec veines noires charbon- HEUSÉSC. MARINE CROP IALUS MESO Deuxième lit de cailloux. . ... sAIE KO2S Limon Rouge... t£5 #1, COR MOMIE Sable blancs er AE jusqu’au fond. Tout à côté de cette tranchée, où le limon offre une épaisseur totale de 18 mètres, une autre, ouverte de l’Est à l'Ouest, donne une succession de : Terre vécétale 27e M CES PRE Limonsrossienavecsiles PORC Sable compact, ocreux, passant au sable blanc avec noyaux d’argile plastique . 4 — Sable blanc fin, compacte jusqu’au niveau d'exploitation RENE CR ER (1) Sauf toutefois les pentes qui descendent vers les Acacias ou vers ‘ Rouelles, où le limon se montre épais. LE LIMON DES PLATEAUX 95 Trois autres tranchées, ouvertes dans un rayon de 300 mètres, offrent d’aussi grandes différences. Une d’entre elles, exploitée à 6 mètres de profondeur, est coupée au milieu par une pointe d’argile à silex, qui remonte presque | jusqu’au sol. D’un côté (au Sud), le limon vient buter sur l'argile et montre ses deux lignes de cailloux, quise rapprochent au voisinage de celle-ci et arrivent à se confondre en y pénétrant; de l’autre, un mélange confus de sables, blancs et veinés, et des veines irrégulières d’argile plastique, le tout renfermant des nodules de craie dont la surface est décomposée. La coupe ci- dessous représente cette disposition. pd sn Es SANS un. LÉDDPOPPOZ ER PTS = T> A f Q e 9 \ e 2 extrème confusion qui existe à cet endroit est d’autant plus remarquable que, partout ailleurs, l'allure des couches, sauf toute. fois les brusques ressauts de l'argile à silex, est assez régulière. Comme le limon de Picardie et du Nord de la France, le limon du Pays de Caux ne renferme pas de fossiles ; de rares ossements de Mammouth et des bois de Cerf ont été trouvés dans l'argile à silex (remaniée) de la côte d’Ingouville ; mais la couche d’où ces dé- bris proviennent se rattache, par sa position, aux dépôts de pente. Des silex taillés de type Acheuléen, ont été souvent trouvés depuis quelques années dans la briqueterie de M. E. Dubosc, à Frileuse, et M. Bidard, notre collègue, en a soumis à la Société, dans la Séance du 7 Juillet 1879, deux superbes spécimens. M. Beaugrand, dans la Séance de 14 Février dernier, a aussi présenté à l’examen de la Société, une belle série d’outils du même type faisant partie de la remarquable collection réunie par M. Dubosc. Des silex, aussi acheuléens, et quelques autres taillés sur une 96 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE face seulement et pouvant se rapporter au type du Moustier, ont été trouvés dans le courant de cette année, aux briqueteries Raverat et Duplessy; quelques uns ont été présentés à la Société par M. Savalle. L’intérèt que présentent ces découvertes est d’autant plus grand, que c’est sur le gisement des silex moustériens que M. N. de Mercey se base pour établir, dans le Quaternaire, une coupe séparant le limon des dépôts du quaternaire ancien (1). Malheu- reusement, le gisement exact des silex de ces deux types, n’a pu jusqu’à présent être observé avec un degré suffisant de précision; ils paraissent tous se trouver dans le limon rouge (terre à Brique), au-dessous des deux lignes de cailloux. Quelques ouvriers assu- rent même en avoir trouvé à la base du limon, sur les sables. Attendons que quelques observations précises nous permettent de fixer ce point intéressant et d'établir avec exactitude l’âge du limon de nos plateaux. IL. fai essayé, dans la première partie de ce travail, de décrire les dépôts quaternaires des plateaux environnant le Havre. Pouvons-nous assimiler ces dépôts à ceux de la Picardie, du Nord de la France et de la Belgique, sur lesquels de nombreux et importants travaux ont déjà été entrepris ? En Belgique, selon MM. Rutot et Van den Broeck (2), le Qua- ternaire comprend : 1° Le Diluvium ancien, constitué par des amas de cailloux, rou- lés ou non, et par des sables et argiles empruntés au sol sous-jacent. Formé avant le creusement et l’approfondissement des vallées, ce dépôt renferme assez communément des ossements de mammouth et de rhinocéros, et des coquilles terrestres et fluviatiles ; 2° Le Limon Hesbayen, masse de limon d’apparence homogène quand elle a été seustraite aux influences atmosphériques, sableuse en bas, argileuse en haut. La partie supérieure, décalcifiée par dissolution du calcaire, esttrès propre à la fabrication dela brique : c’est la terre à briques. La partie inférieure, non altérée, finement (1) N. de Mercey, quelques mots sur le Quaternaire ancien. (Bul. de la Soc. Güéol. de France, 3e série, Tome VIII, p. 330). (2) Les Eléments du terrain Quaternaire en Belgique. (Ann. de la Soc. Géol. du Nord, Tome VIII, 1880-81, p. 83.) LE LIMON DES PLATEAUX 97 sableuse, ne peut être employée à cet industrie : c’est l’Ergeron. La base de l’ensemble est toujours indiquée par un ravinement réel avec cailloux roulés; 3° Des dépôts d’origine marine (Sables et Aroiles de la Campine) composés de sables plus ou moins argileux, stratifiés vers le bas, et de sables meubles non stratifiés, vers le haut. La base de cet ensemble est aussi indiquée par une ligne de ravinement; 4° Des dépôts locaux de vallées de natures diverses. Dans le Nord de la France, M. Ladrière (r) reconnait : 1° Reposant sur largile à silex, un Diluvium à silex brisés, ren- fermant des nodules de craie. Sur les sables Landéniens, ce diluvium est formé d’un sable roux grossier, avec nombreux galets de silex, quelques blocs de grès tertiaires et des nodules de craie. Ce dépôt, d’allures tourmentées, a été formé sous une action violente, mais de courte durée, qui a remanié les couches sous-jacentes sans les entamer bien profondément ; 2° Un limon gris bleuâtre, très argileux à la base, plus sableux au-dessus ; c’est aussi une couche diluvienne ; 3° Une couche noire, argilo-tourbeuse, indiquant arrêt dans la sédimentation ; 4° Une série de limons, se succédant sans interruption ni traces de ravinement, et ne différant que par un léger changement dans la nature minéralogique du dépôt, les limons inférieurs étant plus sableux et le dernier constituant la terre à briques ou limon des plateaux. Cet ensemble constitue le Quaternaire ancien. Les dépôts posté- rieurs sont des alluvions et des limons de lavage déposés dans les vallées. Pour M. N. de Mercey (2) le Quaternaire ancien comprend : 1° Une succession de limons stratifiés et de graviers étagés par ordre d'ancienneté, depuis les plateaux jusqu’au fond des vallées, de l’âge de l’Elephas meridionalis à la fin de l’âge de l’Elephas primigenius ; ces dépôts, résultant de l’abaissement successif du plan d’eau dans les vallées, au fur et à mesure de leur creusement, les dépôts de plateau étant les plus anciens et constituant l’alluvion (1) Le terrain Quaternaire du Nord (Ann. Soc. Géol. du Nord, Tome VII, 1879-80, p. 15.) (2) Bulletin de la Soc. Géol. de France, 3e Série, Tome Vill, 1880, p. 330. 7 98 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE de rive du premier creusement, de sorte qu’un dépôt de graviers se trouve surmonté d’un dépôt d’alluvion siratifiée, créé à l’époque immédiatement postérieure à celle du dépôt du gravier; 2° Un limon son stratifié, avec caïlloux éclatés à la base, recou- vrant indistinctement tous les dépôts, mème les précédents, du remaniement desquels il provient en partie, et correspondant à la lacune existant entre l’industrie de la pierre taillée et celle de la pierre polie. On doit donc trouver sur les plateaux un limon stratifié, le plus ancien de la série, d’origine fluviatile, surmonté d’un limon non stratifié formé par remaniement. Quant à l’origine de ce dernier dépôt, M. de Mercey la croit glaciaire ; c’est un dépôt boueux. Il écarte l’intervention des eaux de la mer ou d’une vaste inondation, ce limon s’étant formé sur place à toutes les altitudes et sous toutes les inclinaisons et n’ayant déterminé que des remaniements loca- lisés. Pour M. d’Acy, (1) lelimon des plateaux ne forme qu’un seul dépôt stratifié, créé par le grand cataclysme diluvien qui a déterminé la configuration actuelle du pays, et dont Belgrand a démontré l'existence. Il est postérieur au creusement des vallées. Nous avons ainsi en présence deux opinions diamétralement opposées : pour les uns, le limon des plateaux est unique, déposé en une seule fois ; la différence qui existe entre sa base et son sommet provient de la décalcaration des couches supérieures par l’infiltration des eaux atmosphériques. Pour les autres, il y a plusieurs limons, et tandis que les inférieurs, stratifiés, sont d’ori- gine fluviatile ou d'inondation, le supérieur (terre à briques) non stratifié, a une origine toute différente. En outre, tandis que M. d’Acy voit dans le limon et dans le Diluvium qui en forme la base le produit ultime d’une violente inondation, M. de Mercey considère la partie inférieure du limon (stratifiée) comme une alluvion de rive, déposée par les plus anciens cours d’eau quaternaires commençant seulement leur travail de creusement. Ceci établi, comparons les dépôts de nos plateaux avec les couches énumérées ci-dessus. (1) E. d’Acy, le Limon des Plateaux du Nord de la France, 1878, p. 71. LE LIMON DES PLATEAUX 99 Nous avons d’abord la partie supérieure de l'argile à silex, remaniée, qui me paraît correspondre avec le Diluvium ancien, de M. Van den Broeck, et le Diluvium à silex brisés, de M. La- drière. Elle présente aussi des caractères de remaniement violent. L’argile est souvent mélangée de graviers, les silex sont souvent brisés ; on y trouve des nodules de craie et des fragments de grès siliceux, probablement tertiaires. Les dépôts, toujours localisés, de sables (sables fins à fon- deurs), souvent accompagnés d’argile plastique, ne me paraissent correspondre à aucune des couches du quaternaire du Nord. Par leur position en lambeaux et en poches dans l’argile à silex, par les modifications qu’ils éprouvent suivant qu’ils sont à une certaine profondeur ou rapprochés de la surface, par Pallure toujours tour- mentée de l'argile plastique qui les accompagne, enfin, par la présence presque constante des nodules de craie, je les considère comme les débris des sables et argiles tertiaires qui se retrouvent en place à Bolbec et à Mélamare ; débris remaniés, mais qui ont été protégés contre une destruction complète, par leur position dans des cavités de l'argile à silex. Au-dessus de ces couches, nous n’avons plus que le limon, argileux au-dessous des lignes de cailloux, plus sableux au-dessus; ce limon n’est pas stratifié ; il recouvre l'argile à silex remaniée, très profondément ravinée; le passage de l’une à l’autre est brusque ; les silex de Pargile et des nodules de craie se rencontrent, mais assez rares, à la base du limon ; mais bientôt il n’en contient plus et reste pur jusqu'aux deux lignes constantes de petits cailloux décrites plus haut. Il nous manque ici le limon calcareux (Ergeron) ainsi que les différents limons stratifiés du Nord ; nous n’avons même pas le limon sableux calcarifère jaune chamois, infertile, impropre à la fabrication des briques, que décrit M. d’Acy{r), à moins qu’on ne considère comme représentant ce limon, les couches locales de sables jaunes qui accompagnent quelquefois les sables à fondeurs et qui existent aux briqueteries Raverat {alt. 92") et Dubosc (alt. 97"). Du reste ces dépôts, toujours localisés, se présentent plutôt sous l'apparence de poches dans le Diluvium, que comme couches régulières. Quant au limon, est-il, comme le veut M. d’Acy, le produit ultime de la grande inondation dont Belgrand a analysé les effets ? (x) Loc. cit. p. 31. 100 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Il n’est pas stratifié ; il devrait commencer à La base par un dépôt grossier sableux, composé des sédiments les plus lourds, déposés les premiers, tandis qu’au contraire, il est homogène dans toute sa masse. Faut-il y reconnaître, avec M. de Mercey, le résultat d’inonda- tions boueuses glaciaires ? Cette manière de voir explique la non stratification du dépôt et son extension à diverses altitudes. Il resterait à expliquer la présence des deux lits de cailloux et la modification de composition des couches intercalée et supé- rieure à ces lits (Limon jaune et Argilette), qui sont plus sableuses que le limon rouge (terre à Brique). Faut-il admettre que le limon s’est dépose À trois reprises, séparées par deux périodes de calme, pendant lesquelles les cailloux se seraient répandus sur le sol? Leur grand nombre et la façon régulière dont ils sont disposés me paraissent difficiles à concilier avec cette supposition. Y aurait-il eu, depuis le dépôt du limon rouge, des remaniements opérés par des eaux d’inondations? En ce cas, les couches supérieures auraient conservé des traces de stratification. Cependant, pas plus que le limon rouge, le limon jaune n’est stratifié ; en outre, les lignes noirâtres, charbonneuses, qui y existent entre les deux lits de cailloux, n'auraient pu persister après un remaniement. Cependant, l'allure bouleversée des sables du plateau de Frileuse (alt. 97%), de même que la coupe de Sainte-Adresse (alt. 95"), que j'ai donnée plus haut, où les sables à fondeurs et le limon rouge n'existent plus que dans les poches du diluvium et sont surmontés d’un limon grossier et caillouteux évidemment formé à leurs dépens, donneraient à penser qu’il y a eu au moins un remaniement, dont les effets assez violents ne pourraient être expliqués que par l'intervention d’un courant. En résumé, les couches quaternaires de nos plateaux se com- posent d’un diluvium formé par le remaniement sur place de l'argile à silex tertiaire, qu’on peut difficilement séparer de celle-ci, mais qui n'en est pas moins reconnaissable par la présence de graviers, de nodules de craie, de silex brisés et de débris de roches tertiaires. Ce diluvium, profondément raviné, renferme en poches ou supporte dans ses cavités des dépôts toujours peu étendus de sables fins blancs ou jaunes, souvent accompagnés d’argile plastique rouge ou panachée et renfermant presque toujours des nodules de craie tendre, s’effritant sous ja main. La présence dans LE LIMON DES PLATEAUX IOI ces sables de l'argile plastique, dont des dépôts assez étendus existent à Bolbec et à Mélamare, au milieu de sables tertiaires analogues à ceux-ci, nous indique que nous avons là les débris des mêmes couches, mais remaniés et la plupart du temps dans un grand état de confusion. Au-dessus et couvrant le tout, un lit d'épaisseur très variable de limon argileux rouge, renfermant à sa base quelques silex et nodules de craie : c’est la terre à Brique. Celle-ci est surmontée de deux couches probablement formées à ses dépens par remaniement de limon jaune plus sableux, dont la partie supérieure a reçu des ouvriers le nom d’argilette. Ces deux couches sans silex sont séparées l’une de l’autre et du limon rouge par deux lits de petits cailloux anguleux, de grès siliceux bruns. Dans la partie Ouest, sur le bord des falaises, le Diluvium n’est souvent recouvert que par un limon rouge grossier, renfermant épars de nombreux silex éclatés et les cailloux bruns qui, ailleurs, sont déposés en lits distincts. Ce dépôt paraît n’être qu’un facies local des couches du limon jaune. NOTE SUR LES ÉBOULEMENTS DE BRÉAUTÉ ET DE GODERVILLE Par CH. BEAUGRAND. L’attention de la Société a été attirée sur plusieurs éboulements qui ont eu lieu dans des circonstances singulières ; à Bréauté, une grande crevasse s’était formée tout à coup dansle sol, engloutissant plusieurs masures ; quelques semaines plus tard, à peu de distance de là, à Goderville, un autre éboulement, moins considérable il est vrai, avait eu lieu pendant la nuit, au milieu d’un jardin et près d’une maison d’habitation. La cause de ces phénomènes m'ayant paru intéressante à rechercher, j’ai fait, le dimanche 20 mars, accompagné de notre collègue et ami M. Lemeray, une excursion à Bréauté et à Goderville ; en voici le résumé. Nous nous sommes rendus d’abord chez M. Levaillant, notaire à Goderville, dans la propriété duquel un éboulement s'était produit et qui s’était mis gracieusement à notre disposition. L’éboulement a formé, près de la maison d’habitation, un trou a peu près circulaire, qui avait à ce moment environ 7 mètres de diamètre, 1/3 de profondeur. Je dis à ce moment, car tout autour de la cavité de nombreuses crevasses s’étaient formées, qui, s’éboulant à leur tour, augmentent sans cesse la largeur du trou et en diminuent la profondeur. Fait curieux, au milieu de l’éboulement se trouve un arbre, qui s'élevait primitivement à 4 mètres environ au-dessus du sol, et dont les plus hautes branches émergent à peine du fond de la cavité ; l’arbre s’est trouvé enseveli perpendiculairement. La cause certaine de l’éboulement de Goderville est due à une marnière, creusée il y a quelques années, et qui avait été comblée depuis. Les eaux pluviales, s’infiltrant dans le sol, ont rempli les galeries et la roche s’est peu à peu désagrégée. Je dois ajouter qu’une sorte de conduit en bois, destiné a deverser le trop plein des eaux, et dont les restes sont encore visibles de chaque côté de la crevasse, a peut-être laissé s’écouler ÉBOULEMENTS DE BRÉAUTÉ ET DE GODERVILLE 103 dans l’ancienne marnière une partie des eaux qu’il devait conduire plus loin, et par suite, n'a pas été étranger à cet affaissement. D’après un journal de la localité, un éboulement s’est produit a peu près en même temps et dans les mêmes conditions à Oudalle; là aussi un arbre a été englouti; depuis, on a parlé d’un nouvel éboulement, en tout semblable aux deux autres (6 mètres de diamètre et 4 mètres de profondeur), aux environs de Goderville. De là nous nous sommes dirigés sur Bréauté, où a eu lieu cet hiver un éboulement beaucoup plus considérable. En effet, deux masures ont été englouties et une troisième, qui se trouvait sur le bord de la crevasse a été détruite de fond en comble. L’éboulement s’est produit au lieu dit le Givout, à quelques mètres de la grande mare des Marettes ; là encore, c’est un trou à peu près circulaire d'environ 17 mètres de diamètre sur 6 de profondeur; des maisons englouties, on ne voit pas de traces; de plus, le trou ayant été rempli d’eau pendant fort longtemps, la terre végétale qui le tapisse intérieurement empêche de se rendre compte de la nature du sous-sol. Je ne pense pas qu’on doive attribuer l’éboulement de Bréauté à la faille de Bolbec et de Fécamp. Cette faille doit passer un peu plus à l'Est, et d’ailleurs un effondrement comme celui de Bréauté ne se serait pas produit sans former un certain nombre de cre- vasses latérales, très visibles, et par lesquelles les eaux de la mare des Marettes, distante de quelques mètres seulement, se seraient déversées au moins en grande partie. C’est plutôt à l’exploitation probablement fort ancienne de marnières, qu'il faut, je crois, rattacher la cause de cet éboulement, qui ne parait différer en rien des deux autres ; du reste, encore aujourd'hui, une carrière, que nous n'avons pas eu le temps d'examiner, se trouve à peu de distance de là. Tels sont, Messieurs, ces éboulements dont on a tant parlé depuis quelque temps; la quantité d’eau énorme, tombée cet hiver, paraît avoir été la cause déterminante de ces accidents, qui eussent pu avoir des suites graves, mais qui, heureusement, n’ont été que désagréables (surtout pour les propriétaires). Quoiqu'il en soit, rien dans tout cela n’est de nature à nous faire craindre pour nous, ni même pour nos arrière-neveux, une catastrophe géologique prochaine. “# NOTE SUR LES SABLES NÉOCOMIENS Par E. SAVALLE. MESSIEURS, J'ai dû, pour continuer mes recherches dans les sables néoco- miens, depuis que la carrière de Saïinte-Adresse a été comblée, explorer les éboulements, à Octeville, à Bléville, sous les phares de la Hève. Les espèces fossiles que j'ai pu recueillir ont toutes été recon- nues déjà : je signalerai, parmi mes dernières trouvailles, de bons exemplaires de Cardium, en fer hydraté, et de jolis échantillons d’une petite pholade en fer pyriteux, extraits d’un fragment de bois, tous fossiles provenant des sables ferrugineux. A ce même niveau de l'étage Néocomien, j'avais souvent remarqué, dans la nombreuse série des lits minces, très rapprochés les uns des autres, qui séparent les couches, une multitude de petites géodes sableuses, plates, ovales, de différentes grandeurs, d’aspect brunâtre, parfois creuses et contenant une argile bleuûtre, parfois compactes et à cassure rouge fonce. Tout récemment, à Octeville, j'ai extrait, avec la plus grande précaution, dans l’éboulement de la moulière, quelques plaques ferrugineuses, minces, fragiles, sur lesquelles j'avais aperçu des empreintes de Tænidium Pinnatisectum et quelques-unes de ces lentilles sableuses. J’ai l'honneur, Messieurs, de vous soumettre un fragment de ces plaques, exposé d’abord à l'air et nettoyé ensuite délicatement à la brosse sèche et vous voyez que ces lentilles, généralement isolées dans les sables, se trouvent sur ce fragment groupées de manière à permettre de les attribuer à une algue, qu’il sera possible de déterminer. NL GISEMENT D'APTYCHUS 105 Cette algue, ordinairement associée dans les couches supérieures de l’étage Néocomien au Tænidium Pinnatisectum, je ne l'ai pas jusqu’à présent rencontrée aux niveaux inférieurs, c’est-à-dire dans les sables compactes, verdâtres ou blancs, de la base de l’étage; on peut se la procurer dans le banc interrompu, ou dans les couches subordonnées les plus voisines de ce banc. NOTE SUR UN GISEMENT D’APTYCHUS, DANS LES ARGILES KIMMERIDGIENNES A AMMONITES D’OCTEVILLE Par Emize SAVALLE MESSIEURS, J'ai eu lPhonneur de vous soumettre, à la séance du 14 mars dernier, plusieurs beaux échantillons d’Aptychus doubles trouvés dans les argiles supérieures de l’étage Kimmeridgien, à Octeville. Je reviens sur les explications que j'ai fournies verbalement à cette séance, afin de bien préciser le niveau exact du gisement de ces Aptychus, où je n’ai pas recueilli moins de deux cents exem- plaires parfaitement conservés de ce fossile, jusqu’à présent si rare dans nos collections. La valeuse de la rue d’'Equeville, à l’extrémité septentrionale de la commune d’Octeville, aboutit à la station des barques des pé- cheurs. C’est à cet endroit même que jai reconnu, dans les argiles, la présence d’Aptychus en abondance, en parfait état de conser- vation, à un niveau déterminé, constant, sur une étendue de deux kilomètres. À la base des sables et des galets balancés par les marées, au niveau du rocher même où sont établis les parquets des pècheurs, 106 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE on remarque un banc calcaire, gris, marneux, qui, à moins d’un kilomètre au Nord, plonge au-dessous de la mer. Ce banc est surmonté de couches argileuses qui atteignent sept à huit mètres de hauteur. Aux deux tiers de la coupe de ces argiles, on voit deux petits bancs absolument pétris d’ostrea vireula, de dix centi- mètres chacun, séparés par une mince couche argileuse. À un mètre environ au-dessus de ces deux petits bancs, qui donnent un bon point de repère, toujours facile à retrouver, on découvre un gisement très fossilifère, de 30 centimètres d’épaisseur, à la partie supérieure duquel reposent de très grandes ammonites (Orthoceras Achilles), dont la plupart n’ont pas moins de 40 cen- timètres de diamètre, spécimens très aplatis, très minces, fragiles, d'aspect jaune. Littéralement, les Ammonites se touchent, et cela sans interruption sur une étendue de trois kilomètres environ. C’est parmi ces Ammonites que, naturellement, j'ai recueilli les plus grands Aptychus que vous avez sous les yeux. Ces Ammo- nites, de grande taille, reposent sur une couche d’autres Ammo- nites, de moindres dimensions (Cymodoce, etc.), dont les Aptychus sont par conséquent moins grands, et enfin, immédiatement au-dessous de cette seconde couche et en contact avec elle, il y a un troisième lit de petites Ammonites, semées au milieu d’une multitude d’Astartes, de petites espèces d’autres Bivalves et de Gastéropodes, avec nombreux Aptychus qui n’ont guère plus de un à deux centimètres. La fragilité du test de tous ces fossiles, et, ily a là une faunule des plus intéressantes, rend malheureusement leur récolte et leur conservation très difficile; seuls, toujours, les Aptychus sont en excellent état. En amont des barques, presqu’à la limite de Cauville et d’Oc- teville, le niveau à Aptychus sur lequel j'appelle attention des collectionneurs de fossiles, se trouve sous le galet, presque à la base du balancement des mers; quand les argiles découvrent, la cueillette y est très aisée et très féconde. En aval des barques, le gisement va, en remontant, jusqu’au-dessus du galet poussé par les grandes marées ; aussi, les argiles n’y étant pas usées par la vague, mais s’offrant au chercheur sous une coupe verticale, il est plus pénible, parce qu’on a à piocher à même la falaise, de se procurer intact et en certaine quantité cet intéressant fossile. Tels sont, Messieurs, les renseignements précis que je puis donner à ceux d’entre vous qui voudront s’assurer de la richesse fossilifère, si exceptionnelle, si extraordinaire du niveau à Aptychus. Certes, dans toute la série des couches des argiles kimmerid- GISEMENT D’APTYCHUS 107 giennes d’Octeville, pourra-t-on trouver, çà et là, au hasard, disséminés dans la masse, quelques Aptychus plus ou moins con- servés ; mais nulle part, ailleurs qu’au niveau que j’indique, on n’en trouvera en aussi grande abondance, d’une manière aussi sûre, et en aussi bel état de conservation. J'ai remis tous mes échantillons entre les mains de M. Lennier, qui a désiré les étudier de près, persuadé que leur grand nombre, leur variété, leur parfait état lui permettront d’attribuer à chacune des espèces déjà connues d’Ammonites des argiles supérieures du kimmeridge, l’Aptychus qui lui convient, et, par conséquent d’éclaircir, de fixer un point de la paléontologie qui est resté jusqu’à présent un peu voilé. LES ÉBOULEMENTS AU CAP DE LA HÈVE Par G. LENNIER (Extrait du journal Le Havre des 24 février et 1er mars 1881) Un nouvel éboulement vient de se produire au cap de la Hève ; on l’a annoncé dans les journaux et tout serait dit si cette question, qui touche, pour les compromettre, à de si grands intérêts, n’était pas aussi une question scientifique. L’éboulement des falaises cauchoises, depuis Antifer jusqu’au Havre, a été étudié dans un ouvrage que j'ai publié en 1862 et dans lequel j’ai résumé les études de tous les auteurs, depuis Dubocage, qui écrivait en 1753, jusqu’à Lesueur, qui publia, en 1843, la magnifique lithographie connue sous le nom que lui avait donné l’auteur : « Vues et Coupes du cap de la Hève. » Pour rendre plus saisissantes les descriptions déjà publiées, les observations déjà faites, et en donner une idée exacte, je décrivis alors deux éboulements auxquels j'avais assisté. Le premier de ces éboulements se produisit le 14 juin 1860. Au moment où les ouvriers qui, à Bléville, travaillent si activement à la destruction de la falaise, venaient de quitter leurs travaux à la plage, toute la partie connue sous le nom de Basse-Falaise glissa lentement vers la mer. Quelques blocs de rochers, couverts de mollusques : Purpura lapillus, Littorina littorea et Mytilus edulis, qui formaient la plage au-dessous du niveau des galets, furent refoulés et élevés au- dessus du niveau des hautes mers. Les rochers et les terrains mis en mouvement pendant l’ébou- lement de Bléviile, en 1860, couvraient une surface de plus de ÉBOULEMENTS AU CAP DE LA HÈVE 109 30,000 mètres carrés et la masse qui avait participé au mouve- ment ne pouvait être évaluée à moins de 500,000 mètres cubes. Un phénomène très curieux fut observé par toutes les per- sonnes qui, le soir, assistaient au premier glissement de la falaise. De toutes les fissures qui se produisaient dans le terrain en travail, s’échappaient des lueurs phosphorescentes, qui furent com- parées à la clarté qui se produit dans le sillage des navires ou dans les brisants du littoral, lorsque les médusaires microsco- piques, décrits par le docteur Suriray, les Noctiluques, viennent illuminer les flots. Le second éboulement important auquel j'ai assisté, et que j'ai décrit, eut lieu à la Hève en 1866. Le 30 juin, les Basses- Falaises, en mouvement depuis près de deux mois, commen- cèrent à descendre vers la mer, en glissant sur les assises argi- leuses du Kimmeridge. Le mème jour, des fentes se produisirent sur le plateau, au-dessus des terrains en mouvement. Le lendemain 1° juillet, ces fentes s’étaient beaucoup élargies et, à 10 heures du matin, une partie considérable de la falaise s’éboulait avec un bruit sourd et en produisant un nuage de poussière crayeuse. En tombant sur les talus d’éboulement préexistants, cette masse en accéléra la marche et toutes les Basses-Falaises, sur une étendue de plus de $00 mètres, depuis le N.-O. des Parcs jusque sous les Signaux, furent ébranlées et suivirent le mouvement en avant, glissant sur les argiles kimmeridiennes vers la mer. La surface d’éboulement des terrains mis en mouvement en 1866 était d'environ 8 hectares, et la masse des roches calcaires, des sables et des terres qui participèrent au mouvement fut alors estimée à #x million de mètres cubes. Sur la plage, en face de l’éboulement, le cordon littoral avait été refoulé et formait un petit promontoire avançant d’une qua- rantaine de mètres dans la mer. L’éboulement qui vient de se produire dans la nuit de ven- dredi à samedi (nuit du 18 au 19 février 1881) et dont le mouve- ment continue encore au moment où nous écrivons (24 février), a une importance plus grande que tous ceux que nous avons observés jusqu’à présent. Vu du sommet de la falaise, au poste du sémaphore, il peut être mesuré pour la partie tombée du plateau : c’est une brèche de 200 mètres de long sur une largeur moyenne de 12à 15 110 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE mètres, soit plus de 2,000 mètres superficiels de terre de rapport, supprimés, perdus pour tous et pour toujours. L'ancien emplacement des mâts de signaux, déplacés il ya quelques annéees, a disparu, et des fentes nombreuses, avec affaissement du sol, se voient encore aujourd’hui sur le plateau, à plusieurs mètres de la partie éboulée: c’est la moisson de la mer qui se prépare pour l'avenir. Du plateau des phares, près du sémaphore, on domine trop l’éboulement pour en bien saisir, pour en bien apprécier l’impor- tance. Pour bien juger, il faut voir de près, après avoir contemplé de haut. Pendant deux jours, nous avons parcouru en tous sens ce dédale. En marchant sur des roches énormes qui tremblaient sur leur base, en franchissant les fentes qui s’ouvraient sous nos pas, nous avons, avec plusieurs de nos collègues de la Société Géolo- gique de Normandie, tout étudié attentivement, et voici ce que nous avons constaté. Nous avons dit qu'au sommet de la falaise, les terrains du plateau se sont éboulés sur une longueur de 200 mètres et sur une largeur telle, que le fossé du Fort des phares n’est plus qu’à 15 mètres de la falaise. Sur la plage, le phénomène a pris un déve- loppement bien plus considérable. Il s’étale en éventail sur une longueur de près de $oo mètres, depuis le Barvallet jusque sous le phare du sud. Toute la basse falaise a glissé sur les argiles kimmeridiennes qui forment la base du cap, et une masse énorme de Craie, avec bancs de silex, de Craie glauconieuse, d’argile noirâtre du Gault, de sables ferrugineux, micacés, formant un total de plus de 2,000,000 de mètres cubes, s’est avancée à plus de 100 mètres en mer, en avant du cordon littoral. L'ancienne plage de galets a été refoulée ; elle forme aujour- d’hui un énorme bourrelet de cinq à six mètres de hauteur, à la limite des basses-mers de morte-eau. Là se trouvent accumulés, soulevés par une puissance incalculable, toutes les roches, tous les galets, tous les sables qui formaient l’ancienne plage. La pente de cette plage était douce, régulière, avant l’éboule- ment ; elle est abrupte, rapide, presque à pic aujourd’hui. Les animaux qui vivent sur les roches baignées par la mer, à des ni- veaux différents pour chaque espèce, ont été bouleversés avec les rochers sur lesquels ils étaient attachés. Là, c’est une grosse roche couverte de moules, dont les noires coquilles, serrées les ÉBOULEMENTS AU CAP DE LA HÈVE III unes contre les autres, forment un tapis de velours noir, qui est renversée. À côté, une grosse roche calcaire, perforée par les Saxicaves et les Pholades, couverte d’éponges qui ne vivent qu’au niveau inférieur du balancement des marées de vive eau, se trouve remontée, soulevée à un niveau que les marées moyennes ne peuvent plus atteindre à la pleine mer. Sur un de ces rochers relevés, couvert d’éponges, de laminaires que la mer ne peut plus atteindre maintenant, nous avons trouvé des pourpres, Purpura lapillus, occupés à pondre. IT En 1753, M. Dubocage, notre compatriote, savant aussi érudit que bon observateur, publiait une étude remarquable sur la géo- logie du littoral du cap de la Hève. Après lui, en 1786, l'abbé Dicquemare, dans le Journal de physique, étudiait les roches et les fossiles de la même localité. En 1822, la coupe de nos falaises fut publiée par un savant anglais, Sir H.-T. de l1 Bèche. M. Antoine Passy vint ensuite apporter de nouveaux renseignements, de pré- cieuses observations sur le même sujet. Lesueur, un Havrais, dans un tableau aussi remarquable au point de vue artistique que précis au point de vue scientifique, dessina, en 1842, les Vues et Coupes du cap de la Héve. Nos falaises ont encore été visitées par un grand nombre de savants, et les notes géologiques, les descrip- tions d’espèces publiées dans les recueils des Sociétés savantes françaises et étrangères, ont fait de la Hève un point classique pour l’étude de la géologie. La marche des galets a été étudiée par Lamblardie, par Lesueur ; la destruction des falaises depuis Antifer jusqu’au Havre, par les mêmes auteurs et par nous. De nombreux rap- ports, sur le même sujet, ont été adressés à l'Administration supérieure par MM. les ingénieurs. La question est donc aujourd’hui bien connue, bien étudiée et sion ne fait rien pour défendre la plage de l'Ouest et la base du cap de la Hève, c’est qu’on ne veut rien faire ; c’est que les propriétaires, dont les terrains sont chaque jour attaqués, détruits par la mer, ne tiennent pas à leur fortune ; c’est que l’Adminis- tration attend que la mer fasse tomber les phares pour les recons- truire à quelques mètres plus loin, comme on l’a déjà fait pour le 112 SOCIÈTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE Sémaphore; c’est que les batteries, construites il y a quelques années, qui sont à peine terminées, peuvent être supprimées et remplacées par d’autres, comme si elles n’avaient rien coûté. Voilà ce qu’on pourrait croire, et cependant rien de tout cela n’est vrai. Les propriétaires tiennent à leur fortune, les ingénieurs sont sans cesse préoccupés de l'entretien, de l’amélioration de notre port, et le ministre de la guerre tient aux forts et aux batteries qu’il vient de faire armer. Alors, pourquoi abañdonne-t-on à la mer toute la plage au Nord du port, lorsque la sollicitude, l’activité, la science si grande des ingénieurs se déploie pour défendre par de magni- fiques digues les plages qui sont au Sud? C’est pour nous un mystère qui relève de la haute Administra- tion et que nous ne chercherons pas à pénétrer. Il serait pourtant bien facile de porter remède à ce mal qui va toujours grandissant. Mais il ne faudrait pas tout demander à l'Administration ; il faudrait l’aider au moins par la formation d’un syndicat pour la défense de la plage, dans lequel tous les intéressés seraient représentés et où chacun fournirait une part contributive en rapport avec les intérêts engagés ou déjà com- promis. Les ponts et chaussées ont à défendre les phares, le magni- fique viaduc des Brindes, déjà tout disloqué par des fissures, et plusieurs routes qui doucement, lentement, descendent vers la mer. L'administration de la guerre a à défendre ses forts, ses batte- ries que la mer a déjà attaqués et sérieusement endommagés dans plusieurs grandes marées, poussées par des vents du large. La ville a à défendre son boulevard et l'extrémité Ouest des rues qui vont à la mer. À ces intérêts déjà si importants viennent se joindre tous les intérêts des particuliers, propriétaires ou occu- pants des terrains qui bordent le littoral. Que ces derniers se réunissent, s'entendent et ensemble sollicitent le concours de l'Administration pour entreprendre un travail d'ensemble, qui seul peut enrayer le mal. En ce moment, immédiatement sous les phares, une masse énorme de rochers qui a glissé, il y a une vingtaine d'années, de l'épaisseur des sables ferrugineux, (une trentaine de mètres), se trouve dégagée de tous les blocs qui l’entouraient; elle est ap- puyée à la falaise et, seule, elle empèche un éboulement considé- rable qui se produira sous les phares, à la suite de l’éboulement ÉBOULEMENTS AU CAP DE LA HÈVE 113 actuel, aussitôt que ce contrefort naturel aura disparu. Pour conserver cette roche, ce contrefort dont la mer chaque jour mine le pied, il faudrait en avant un épi solidement construit et consolidé par un enrochement dont les matériaux se trouvent à pied d'œuvre. L’éboulement actuel, en refoulant la plage, a créé, sous les signaux, une plage nouvelle presque unie, qui avance d’une cen- taine de mètres en mer. Il faudrait conserver ce terrain, naturel- lement gagné, par une série d’épis en arrière desquels la basse falaise éboulée prendrait une pente nouvelle, douce, jusqu’au cordon du littoral et garantirait cette partie pour toujours contre les envahissements de la mer et les éboulements de la falaise. Entre les signaux et Sainte-Adresse, tant que les parcs crés par la reine Christine tiendront, il n’y a rien à craindre que quel- que tassements qui assureront la solidité du terrain. Plus à l'Est, la batterie de Sainte-Adresse, bien défendue à la mer par des épis nombreux et bien entretenus, protège contre l’éboulement tous les terrains placés en arrière. Au-delà du pavillon de la reine Christine, immédiatement sous les Brindes, la plage est complétement à nu ; les argiles kim- meridiennes et les bancs de calcaires marneux forment le sol; tout le galet a disparu avec les épis qui le maintenaient, et, immédiatement, tout le terrain des Brindes s’est remis en marche. Une fente d’une étendue considérable s’est produite ; elle tra- verse la route nouvelle qu’elle a coupée par une véritable marche que les cantonniers aplanissent chaque matin. On suit cette fisssure sur le viaduc qu’elle disloque, dont elle disjoint les pierres et les briques. En prolongeant la ligne vers l'Ouest, on retrouve cette même fente à jo mètres plus loin dans le mur de clôture du jardin de l’ancien pavillon de la reine Christine, le long de la rue des Brindes. Là encore il faut des épis au bord de la mer, sous peine de voir compromis, dans un avenir prochain, les grands travaux terminés il y a deux ans à peine. Enfin, pour résumer ces'observations, pour conclure, nous di- rons qu’il y a quelque chose à faire, ou tout au moins quelque chose à tenter; que les administrations intéressées ne pourraient faire autrement que de venir en aide aux particuliers, si ces der- niers s’organisent, se rassemblent pour étudier en commun la défense de la plage et poursuivre la prompte réalisation du projet du boulevard Maritime, qui aurait pour premier effet de garantir la Ville contre les envahissements de la mer. COMPTE DES RECETTES ET DÉPENSES DE L'ANNÉE 1881 RECETTES In (CAES AUCUN meteo one oo Done D oc Aube COSAHONS EEE ET EEE Ce ECC OC Core Souscriptions au Bulletin de l'Exposition et vente du Bulletin... Subvention du Conseil général pour 1880................. DUPVÉNHONMUNCIPAlE POURIOBT: seems. rss DÉPENSES Souscription à la Caisse des Écoles, ...................... Scie dl ets ee Er Re Eco Solde du Blender yo sn rer ee three ue Hraissdiennoi'du Bulleun.. em Ma rentes. Le Trésorier, EX 664 90 1.182 — 762 — 300 — 400 — F. 3.308 90 1e 25 — se 182 90 1.902 45 sé 174 95 27 90 He 8 60 EE "5218680 987 10 EME 08100 G. DROUAUX. SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES FRANCE ANNEES Dee Société d'Études scientifiques. AFS cor one Société d'Études des Sciences naturelles. CORSA ER Association Normande. aude Académie nationale des Sciences, Arts et Belles-Lettres. DE D OO Société Linnéenne de Normandie. Cambrai. ..... . Société d'Émulation. TÉLÉ ME 00 000 à Société libre d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres de l'Eure. Le Havre, 000 Cercle Pratique d'Horticulture et de Botanique. BUT SEE Societé des Sciences et Arts agricoles et horticoles. ND RCE Société Havraise d'Études diverses. Lille........... Société Géologique du Nord. SEE Eee Société d'Horticulture et de Botanique du Centre de la Normandie. IBasooonvett Société d'Études Scientifiques de Lyon. PAT cote Association française pour l'avancement des Sciences. » .......... Feuille des Jeunes Naturalistes. AO TE Institut des Provinces. DRE .... Société de Secours des Amis des Sciences. TA Société de Géographie. REUNS ee eee Société d'Histoire naturelle. Rouen ..,...... Société libre d'Emulation du Commerce et de l’Industrie de la Seine-Inférieure, D Re à Société des Amis des Sciences naturelles. DNS EE ne Muséum d'Histoire naturelle. SET ieanere Société d'Agriculture, d'Archéologie et d'Histoire natu- relle du département de la Manche. Toulouse ....... Société Académique Hispano-Portugaise. Troyes........, Société Académique d’Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres de l’Aube. ALGÉRIE RHEO6 den porc Académie d'Hippone. ÉTRANGER Angleterre ...... Geological Society, Londres. Australie.... .. School of Mines, Ballaraat. (Chris eue de Canadian Institute, Toronto. Etats-Unis ..... Smithsonian Institution, Washington. U.S. Geological and Geographical Survey, Washington. NA ra Societa Toscana delle Scienze naturali, Pise. LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ Bureau pour l’Année 1881 MM. G. LENNIER, Président ; G. LIONNET, Vice-Président ; A. LÉCUREUR, Secrétaire ; G. DROUAUX, Trésorier ; F. PRUDHOMME, Archiviste. Membres honoraires : MM. G. COTTEAU. MM. Alb. de LAPPARENT. A. DAUBRÉE. A. LETELLIER. E. DESLONGCHAMPS. MORIÈRE. HÉBERT. De SAPORTA. Membres résidants : MM. ALLEN BALL. MM. G. LENNIER. BARBIER. G. LIONNET. E. BASSET. Ern. LOUER. Ch. BEAUGRAND. Jacques LOUER. E. BÉNARD. F. MALLET. L. BIDARD. E. MARANDE. CHENEL. Max MARANDE. CONSTANTIN. MARICAL. Alb. COURANT. Ph. MONOD. Th. COURCHÉ. Raoul NICOLE. Méd. DESCHAMPS. A. NOURY. G. DROUAUX. PARSY. J. DUPASQUIER. W. PARTRIDGE. L. DUPLESSY Fils. PELOT Père. A. DURAND. C. PERRET. DURET. PORNIN Aïné. ERNST. POULAIN. F. FOLLAIN. F. PRUDHOMME. GAZÉ. Ch. QUIN. L. GÉRY. Aug. RISPAL. GIBERT. André ROBERT. Léon HALLAURE. J. RŒDERER Fils. HAREL. E. SAVALLE. H. JARDIN. SCHLAGDENHAUFFEN. KABLÉ. J. SIEGFRIED. LEBRIS. Alfred SOCLET. LECADRE Oncle, TESSON. A. LÉCUREUR. TORQUETI. A. LEFRANÇOIS Maurice LEMERAY,. Léon TUBEUF. Membres correspondants : MMPqulien ADAMAFIS EE SEE PRET creer Sainte-Austreberthe. BADIN ES as eo em DO DE EE ED Barentin. BAILLEUL 22e OR Caudebec-en-Caux BEAURAIN SE, ui M nos et ue OL OU ee EUR Rouen. Gi:BIOCHET Xe Caudebec-en-Caux BIZET :4 45e ER RC EU PCR Bellême Alph.. BOUTU SR RE ee nee DE Rouen. BRULÉ : cs RS RU Re RE Verneuil. GC: BRYLINSK VERT en OR Paris M BRYLINSK Am retira ane Le EEE Paris BUÜGAILEE SSL Ce NN eee NC AM ETENRREE Rouen. LL. BUREAU ES re ee LÉ OL EE TE RARE Nantes DENIZE: 288 dé RE EN CARNET TERRE Lillebonne HADESHAYES EN ER e Manneville-sur-Risle G;: DOLLFUS; 6 PAR SEEN RE RTE Paris. AIf: DUBOIS 2e ruse rctRer tee CPE TEE Fécamp. ETIENNE. 27 ce RME ITEM PN ere Gournay-en-Bray FORTIN Li: MARNE Ne AA IE ANT ED Rouen. GALLAND is Len MCE re en Granville GOESLE:- AM se ER RE NP PRE RER ER Caen. GUÉZENNEC 4:23 00e MON RE RES Indret Georpes TAUGEVÉ RE ER RE ER ER EE CRETE Rouen. LACAILLE ENS 42e 0 ON ET OT IT TERRES Bolbec. LEMARCHAND RER NE Re Petit-Quevilly. LESIDANER 4, RER RE UN CPR EEE Paris. Emm. de MALSABRIERS 2.2 rec dece ct tree Rouen MARTIN urine semesseeetsentemeeee ten el Alger. MARUITTEN Ma der rororee ÉTT EREPPERERS Yvetot. MASSIEU 2 RME MP Da te PEL RURe ERA Rennes. J- de MORGANE ETES CE een Tee CEE Paris. Maurice NICOLLE MES AE ES 2e ere Re RER Rouen. Paul NICOLE RSR EEE Re EN TR PRE EE Paris. PENNETIER ; 25e tt ne RS RE Re Rouen. Franck PUAUXS HER AR NA TR MEET ERPES Paris. SKRODSKMPA LE Le Ou Rte Cie CCE DE CET Bayeux. VACOSSIN ELLE. ere NIET ER REE Bolbec. VARAMBAUX nee eee ect cet Eu À :-de VILLE=D'AVRAVE ete co ccer er men at Honfleur NÉCROLOGIE La Société a eu la douleur de perdre deux de ses membres au cours de l’année 1881 : M. Anthime BIOCHET, du Havre, et M. CHATEAU, d’Aubervilliers. Il est de son devoir d'exprimer les regrets qu’elle éprouve de cette double perte. TABLE DES MATIÈRES Pages RÉSUMEITES SEANCES essais eee te clelniele eee nel ie eco nine nuls S Etude sur des Echinides fossiles du Département de la Seine-Inférieure, PAIE ABUCAIERSE E are e-men eee Roncreeete 16 Notice à l'appui du Profil géologique du Chemin de fer de Mamers à Mortagne par Paul Bi Re eme eee eee es 5 Z© Etude géologique sur Villequier, par G. Lennier.................... 71 Note sur le Limon des Plateaux aux environs du Havre, par ÉRRAdHOMME Are Pumeenerismechienereeenceecte 88 Note sur les Eboulements de Bréauté et de Goderville, par Ch. Beaugrand 102 NotelsunilesiSables/Néocomiens part E-Savalle "2227. 20e 104 Note sur un Gisement d’Aptychus, dans les Argiles kimmeridgiennes à Anmontes Oct NpDAMERSAVAlE PERRET EEE 105 Les Eboulements au Cap de la Hève, par G. Lennier............... 108 Compte des Recettes et Dépenses de l’Année 188r1.................. IIS Ltée SOCICTESICONTESPONdANEES 0. Mecs Mae ere 116 listerdes Membres della SOCIEtÉ sn 2.124 due nsenesseeceee see 117 Havre, — Imprimerie du Journal LE HAVRE, 35, Rue Fontenelle. SR DS DAS 2 573 > Las + AS CRAN NS Peu), Le ES 7 FE umbert Zth /mp. Pecq 1er. Paris à 9 RE ve ee À » /) ÿ EU D 25: 0%: 2955595595 0N) umbert Lt mp Pecquet 27. Paris £ 7 y Æumbert lith umbert Li}, : Lrp. P ecquetir. Paris /umbert hth Zap Becquet 17: Paris. S Cr#1 D Pecquet P 7 1m um bert 11h. PIE Zumbert Lt. Ka + + D 35 RO J 325 JS Re QK cqueti ) He /rn7 / 4 | a || de Chemin de fer de la Hutte à Mamers res | x s Profil géologique du Chemin de fer de Mamers à Mortaëne. nn —— Sul de VillainesVezot Échellé de 0000028 pour les longueurs . Echelle de 0#0005 pour les hauteurs Gare de Mamers SU!de Vaunoise SU" de SURémy- des-Monts SU" d'Oriêni le Roux nn | LE il Lip ae | ï | 1] sn EME (ue | qu pu \ \\ Ai En IL LEE PEUT Gare de Belléme SU du Pin-la-Garenne PLA rATESS F a Éd 7 AOL ES Sun d'Ige nr En) \> ROSES TRS s Ê 2 DRE FES où SA NN Er LAS ARCN « y SL = CR > U D L'ELErT =. 6 “ai : —_ - a ; Er em ds Dee ee mena ee eee ME SE LA ? RS .. « ; : n PR PT QE | Ce da. | 1 ofi éolo$ique transversal de la Perrière à Couréains. | [ EE Alluvions modernes Mont Renault PE Kimméridge cluy mi ji re EN | — LL. LL, FE scie Lu ; i qui mn AU | 3 f DR, | À ? ù RS Oxbrd-cy e nt st All a \ “ | : CR & 7 ; L _ "+ ‘fé : 4 ES Cullovien supérieur {ône fav NN D Chernin de fer Æivière du Rutin Courënins Callovien inférieur — Bradford-cluy et HO Oolithe milinive | SA Oolithe mfT° à Am ÆQ Oolithe MP à Terebr porovnlis macble D kinsont Lias supérieur = Partie emprunte aux profils ééologiques des routes de la Sarthe, par MA. Guillier Bellême Sérigni | ge >i i Q … 1 N es Profil Géologique transversal suivant la @R\ route Nationale de Mamers à Nogent -le-Rotot < A la Bulardiére le Gué de In Chai D ses 6 Gué de In Chaine SU Martin Rivière de Mémi Tuienie des Vaux-chaperons , LED SUD LTÉE TE DR le Pérou (Chenili) | OS —_— | ae = 1? Ï HRobelia dns L Wübrrer 2 ol. de Normandie T VIIL. 1881. LE MANS Carrières de la Butte ——— Argéle à silex (krrain cocene) tu > Ca marneuse à Inoceramus labialus thhynchonelle Coriert a T'uronien L) —. ë Marne glaucomeuse à Zerebrakella carentonensis et Dental déforme ex =, Congloméral à Gopyqus oblusus ebMucleolites parallelis = Îlanne à Osbrea béauriculelz Ostrez columba et Qitrea flabella, A: Banc de grès dur blanchètre ; Sable argueux avec bancs minces de re Lu )L 21PT able grossier avec Ostrea Ungulata + Tables argéeux avec plagurlleo d arte et Benc de gré farugeneux TE ê & Grès elsable grossier avec Oatrez CTI77, N Dable argéleux avec pells Ls d argile et Perc de grès x Jable grossier à d ahious crclinees avec nombreuses Oklrez Logulate Qstreu colrmba Jerebrabells ê Ur grossuer verdäbre avec nombreuses Oitrea Lrgulata. Mererct Rhgnchonella sr Jable verdaätre ou rougealre avec parles dures asient at gred avec hynchonelle corrpresse.. à Jable vedätre ou rougeätre avec Hemnixster simils, Goiaoter Gueranger s Jable argieux werdälre ou brur avec ll2es de greë Rrmant banc & La partie supérieure Argéle compacte dable argileux verdètre orbrun avec Ar. ranrularis Qotrex columêa, faphiles œqualis, Le Grès calcaire à Brgoyoains A Rolhomagensg el nodules de phoyphak de chaux. > Gr gromur gleuconceux à feaphiles ægualis Tirrdles coslalus Paculies baculoides, rorrbreudes À Zérbralella Menarde, ralule bols Cspraæurs à crate de ouer) 53 A RECE T dolls Srès cnomaruers supers ré cenomouers difereurs RTE ce np lt duêles dl grès à grarns deguarés avec Frigo ua creruulxla, Grigorta rule, Origoru culcalarta = Grain Guerarger Berdodiadene Rrissgé (avec des radioles er plxce) d Lyes # calres de Lentacrinus cnormarensts . 2 a ? Jables avec Sralficalion énclnee et blocs de grès ferrugineux & nombreuses ersprecnles vegéliles Sables d | US Li + RS F a . | Profil bee) du Ch de Fer de Mamers à Mortagne YVRE L'EVÈQUE Grande carriere (1875) 54 &T re faur à grains de quarte, Lumachelle & Arca et Opis Ligeriensis TMarne verdäütre ou roi fe Marne ave florescrtes Hana gyne d'Osbrex béni: (PVES ST Jor PL cures de Le, 7 = 9 PA #74 à ET te PS Cale JT PME FES +2) Cai a Ostrea columéa (2 bancs) laure Kauabre discontinus à Haudilus Ériangutaris Ds TE DE phase EZ La 5 EPST 22 a Oitrea béauriculztr ed ? fnatre. æ æ et Jinita phascolx = peudirqu guarlg Lurnèa et breusa 7] fr no Er EU time t Plabals, lait buargtares pus cerdes, Am. nawieudarid et Quiex brxsriculate, rures d'dfferneres S ÈSE Jasles cl grès ferrugineux a séralifirahion drclrue Sables Ceromarers Us = Albrnance de sable argileux avec feuillets d argile cd de bancs de gres Re. CP: ouprerteurs Argile noire et blanche æ Sables Rule à pchls cuilloux de sai rnembreuses baces de fossiles hr get dm ps a SA SE S 5 Sables ileux, feuillets d'argile le blocs discontiruss de grès compressa de la Butte du Mans (/ coupe, K eV: 0 SEE re d oxide de fer. 7 FR CAFE Sables et grès à étratifisation iuclnés. RL DUNEAU Tranchees du chemin vicinal de Duneatt a G“Coiré. # Zerar de banaporé ét argile à dihæ Élanche, marneuse, de chargeant à la base de grade de : glauconte à Æhynchonelx Cuveeré glauconteuse devenant nodnleuse àlx base avec Lérebratellx Qrentonensdis, bhealarratz J Èl Oitrex laheralis, © baylei, © columèa, Zerebralula phascodna, Hemiaster nucleus, Leyrneri P'ITLÉ Ghie À plain af LS Cart, Wu / parallolus et Ostra courbe. ÿ Ca Gaie Fours à chaux et Carrieres Phare Maison blanche Maison Lahure de M Léveillard | — —— LOFT Fe de Caudebec frairies des (apucins 4 Jhaïries de Parioal / = . | // | . revautt He f 1 X > < = S na K " COS fres N ce N Ve 4 Maga: rée Hutèi 4 NX 0 Libeaux te Brily Je d êè s ” LA Ê “a N LC” INT Ta PE AN GENERAL / DAS Nr (nrdin, (1 Phil XQ —_— à / S pr OT A Nord à #0 Echelle du Plan 35000 VA soit 07 001 par 0 métres ve chez L A\Vubror À de / Abbé de Epée, * Hg. 2 Craie SEINE Dos d'äne St Maison Roullean L pour les Longueurs (0:000) soit o!oo1 pour 10 mètres Echelles du Diagramme { "Æ e PE pour les Hauteurs ( 5.000) soit o!o01 pour 5 mètres PANDER AD AIBRS0UIER Coupe théorique des Carrières de M° Léveillard Faille *, Afluvions de la Seine, reposant sur 1a Craie blanche Chapelle de Barival Dépôts superficiels _ Turonien Cénomanien Gault Sables Rrrugineux © fmmeridée 2000 5560 . Echelle de oo par mètre pour les hauteurs COUPE EN TRAVERS au chalet Malflatre Fig.3 Dépôts superficiels Tertiaire SI à : NS Craie verte flauconieuse vo zone des Pecten asper Himmeridée Znp Monrocq. Paris 0 + En REY A à "9/2 3 Fr: l'P 2 | " TS +. te 4 y * PUBLICATIONS DE LA g SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE NORMANDIE énosesetasanena dns — Pour les Membres Pour le Public Bulletin TS) 7 ru 3 Fr. SPE DL A TO TANT hr tentite ere 12 7, D PAR DEN À L Pat € 1e ir PET ARE PE x 2-45 $ » » ERLENE 1877 sovssess DCE EEEECEEEEEE $S » » D TON IR ER RE te 3 » » » T. VI. 1879 (Exposition Géolo- gique et Paléontologique de - 1879. Résumé sur la Géologie nogiahdé serge 1287) ÉS 9 not. VID AB80 ne eo Me CU 27. ts Fe MAL #88. aa PER ARR Le 8 » Bibliographie Géologique de la Normandie, ; Fascicule Dem ST RE vase SD Sd à + | ; à UE . DT: 7 04 e * à rÿ « Ve . 3 g, EAN ES ÿ 1 € An FEU : } QU A le ANR AN, IUT 4 D SAT IR À VENTE la É | HUB } 11 du V ! AC HA du Son, M nf 100209699