BULLETIN du MUSÉUM NATIONAL d’HISTOIRE NATURELLE N° 11 1111111 ! 1111111111111111111111 ! 1111 PUBLICATION BIMESTRIELLE JUILLET-AOUT 1971 zoologie II BULLETIN du MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE 57, rue Cuvier, 75-Paris, 5 e Directeur : P r M. Vachon. Comité directeur : P rs Y. Le Grand, C. Lévi, J. Dorst. Rédacteur général : M me D. Grmek-Guinot. Secrétaire de rédaction : M me P. Dupérier. Le Bulletin du Muséum national d’Histoire naturelle, revue bimestrielle, paraît depuis 1895 et publie des travaux originaux relatifs aux diverses branches de la Science. Les tomes 1 à 34 (1895-1928), constituant la l re série, et les tomes 35 à 42 (1929-1970), constituant la 2 e série, étaient formés de fascicules regroupant des articles divers. A partir de 1971, le Bulletin 3 e série est divisé en six sections (Zoologie — Botanique — Sciences de la Terre — Sciences de l’Homme — Sciences physico-chimiques — Écologie générale) et les articles paraissent, en principe, par fascicules séparés. S’adresser : — pour les échanges, à la Bibliothèque centrale du Muséum national d’His- toire naturelle, 38, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, 75-Paris, 5 e (C.C.P., Paris 9062-62) ; — pour les abonnements et les achats au numéro, à la Librairie du Muséum 36, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, 75-Paris, 5 e (C.C.P., Paris 17591-12 — Crédit Lyonnais, agence Y-425) ; — pour tout ce qui concerne la rédaction, au Secrétariat du Bulletin, 61, rue de Bufîon, 75-Paris, 5 e . En 1971, deux sections sont représentées : Zoologie (prix de l’abonnement : France, 96 F ; Étranger, 110 F). Sciences de la Terre (prix de l’abonnement : France, 24 F ; Étranger, 27 F). En 1972, paraîtront également les sections suivantes : Botanique, Sciences de l’Homme, Sciences physico-chimiques. BULLETIN DU MUSÉUM NATIONAL D'HISTOIRE NATURELLE 3 e série, n° 11, juillet-août 1971, Zoologie 11 Contribution à l’étude du développement postembryonnaire des Araignées Quatrième note Tegenaria saeva Bl., Coelotes terrestris (Wid.) et Coelotes atropos (Wlk.) (Agelenidae) par Max Vaciion et Michel Hubert * 1 Abstract. — The hatching and the other following stasis are described : prelarva 1, prelarva 2, larva and protonymph which appear during the postembryonic development of the spiders belong- ing to the family Agelenidae. La présente note expose les remarques faites sur quelques espèces de la famille des Agelenidae. En 1930 (3), P. Bonnet révèle le nombre des stades postembryonnaires et certaines modifications survenant avec les mues grâce à l’élevage de Tegenaria parietina (Fourc.) et Tegenaria agrestis (Wlk.) ; puis, c’est l’important travail de A. Holm qui, en 1940, précise les premiers stades de développement postembryonnaire d’Agelena labyrin- thica (L.), de Tegenaria atrica C. L. Koch, de Tegenaria clerhami (Scop.), et de Tegenaria parietina (Fourc.). En 1958, R. Legendre donne, dans les colonnes de VAnnée biologique (26), un résumé de sa thèse soutenue en 1957, et signalée par nous cette même année (9) ; la publication de cette thèse en 1959 (27), non intégrale, ne contenait pas ce qui a trait au développement postembryonnaire proprement dit. Nous profitons donc de cette note pour rappeler les conclusions importantes de R. Legendre qui a élevé, en particulier, Tegenaria atrica * Laboratoire de Zoologie (Arthropodes), Muséum national d’Histoire naturelle, 61, rue de Bufjon, 75- Paris, 5 e . 1. Nous avons (M. Vachon) successivement publié : « Généralités et nomenclature des stades», Bull- Soc. zool. France, 82 (5-6) : 337-354, 1957 ; « Le développement postembryonnaire des Orthognathes », Bull. Soc. zool. France, 83 (5-6) : 429-461, 1958 ; et celui de Pholcus phalangioides (Fussl.), Bull. Soc. zool. France, 90 (5-6) : 607-620, 1965. Notre état de santé ne nous permet pas de continuer, seul, nos observa¬ tions et nos élevages sur toutes les espèces d’Araignées dont nous avons donné la liste (1957 : 338, 339). Aussi avons-nous décidé de confier cette lourde tâche à notre collaborateur Michel Hubert avec lequel nous signons conjointement cette note et qui prend ainsi, le relai. Le titre général des notes, le numérotage des figures aussi bien que celui des travaux cités font suite à ceux utilisés dans les trois notes précitées de 1957, 1958, 1965. 11 1 614 MAX VACHON ET MICHEL HUBERT C. L. Koch, Tegenaria saeva Bl., Tegenaria derhami (Scop.) et Agelena labyrinthica (Cl.), et utilisons pour cela une des planches originales, non publiée, de sa thèse C Les premiers stades d ’ Agelena labyrinthica (Cl.) ont fait l’objet d’un travail de F. Meier en 1967 (28) et nous-même (M. V.) avons rappelé certains traits du développement posteni- bryormaire dans nos remarques sur la régénération des pattes chez Coelotes terrestris (Wid.) (32). D’autres notes relatives à la reproduction, à la fécondité ou à l’écologie de quelques espèces d’Agelenidae ont été publiées ; nous les citons bien qu’elles n’apportent aucun document morphologique sur les larves ou les nymphes ; il s’agit des travaux d’E. Tretzel en 1961 (30), d’ I. Mikulska et L. Jacunski en 1968 (29). Enfin, dans sa note de 1965 (24), R. Darchen expose les résultats obtenus par élevage chez Agelena consociata Denis. Malheureusement, cet auteur ne précise ni le nombre de stades qu’il a observés de l’œuf à l’adulte, ni ce qu’il entend par larves, l’interattraction entre celles-ci et les adultes étant étudiée. Nous supposons que le terme de larves s’applique aux stades que nous nommons nymphaires. Éclosion chez Tegenaria saeva En 1940 (5) (p. 128), A. Holm signale que l’éclosion, c’est-à-dire le rejet définitif du chorion, est accompagnée, chez Tegenaria atrica, du rejet de deux exuvies. Nous avons constaté le même phénomène chez T. saeça et, selon la nomenclature définie par nous en 1957 (19), nous admettons que le premier stade entièrement libre est la larve précédée de deux prélarves qui muent à l’intérieur même du chorion ou, tout au moins, avant son rejet définitif. Chez Tegenaria saeaa (fig. 74), le chorion saute grâce au jeu des dents d’éclosion de, bien visibles et pointues, situées à la base des pédipalpes. Peu avant la rupture, le cho¬ rion est fortement dilaté, tendu, si bien qu’un simple attouchement de l’aiguille suffit pour qu’il se rompe. Une fois fendu, le chorion est ramené vers la partie postérieure du corps, laissant à découvert la région antérieure ; quelques instants après, la première cuticule, celle de la première prélarve pL x , saute à son tour et, le long des pattes, s’arrête à la hau¬ teur de la dent d’éclosion. Nous ne savons comment se produit cette première mue. 11 semble, cependant, qu’elle soit favorisée par la présence de quatre paires de tubercules dorsaux coniques tu, disposés le long des flancs du céphalothorax de la deuxième prélarve pL 2 , tubercules (tu, fig. 74) dont A. Holm ne signale pas l’existence chez les espèces étudiées par lui. Au bout de quelques jours, sans que bougent sensiblement ni le chorion, ni la première exuvie, la cuticule de la seconde prélarve se rompt et vient rejoindre les autres enveloppes (chorion et première exuvie) ; l’ensemble est alors repoussé vers l’extrémité postérieure du corps pour être finalement rejeté (fig. 75). Cette seconde mue termine donc l’éclosion pro¬ prement dite, phénomène qui, en fait, comporte le rejet de trois enveloppes : chorion, l re et 2 e exuvies prélarvaires, ce que A. Holm avait découvert en 1940 (5), que R. Legendre signale dans sa thèse de 1957 chez Tegenaria derhami (voir pl. I, fig. 1-4) et que F. Meier précise bien, dans le tableau de son travail de 1967 (28) (p. 44), chez Agelena labyrinthica. 1. Ce qui nous permet d’exprimer notre gratitude à notre collègue et ami le Professeur R. Legendre. DÉVELOPPEMENT POSTEMBRYONNAIRE DES ARAIGNÉES 615 Il est ainsi certain, et nous l’avons vérifié chez Coelotes terrestris, qu’à l’éclosion, c’est seulement la larve L qui se libère définitivement de toutes ses enveloppes : chorion plus deux cuticules prélarvaires. La formule d’éclosion précisant les différents rejets cuticulaires, selon la nomencla¬ ture que nous avons (M.V.) mise au point en 1958 (23) (p. 430), est donc : (pLi, pL 2 ) L Description de la première prélarve de Tegenaria saeva Nous l’avons examinée après l’avoir dégagée du chorion par dissection et avant rup¬ ture de sa cuticule (fig. 76). La dent d’éclosion, à la base des pédipalpes, est nettement visible. Les appendices sont collés les uns aux autres le long du corps ; les chélicères sont Fig. 74-75. — Tegenaria saeva Bl. 74 : naissance de la deuxième prélarve, pL 2 , succédant à celle de la première prélarve, pL t , après rupture du chorion, Cho , par action des dents d’éclosion. La cuticule de la première prélarve se rompt, vrai¬ semblablement, par action des tubercules, tu, céphalothoraciques et dorsaux. — 75 : naissance de la larve L. Cette naissance, éclosion véritable, entraîne le rejet définitif des trois enveloppes : chorion (Cho), cuticules prélarvaires 1 et 2. distalement arrondies. La segmentation des pattes est peu distincte à ce stade. Tout au plus y retrouve-t-on trois éléments. Distalement, on peut déjà remarquer la présence des deux tendons (fig. 77). Les filières sont à peine indiquées à ce stade et ce sont déjà celles du stade suivant que l’on aperçoit par transparence. La partie postérieure de l’abdomen est dorsalement plissée et l’on y retrouve au moins six sillons bien différenciés. Il n’y a aucune production ectodermique spéciale et les yeux sont totalement absents. 616 MAX VACHON ET MICHEL HUBERT Description de la deuxième prélarve de Tegenaria saeva Elle est partiellement visible sur la figure 74 et ce sont surtout les tubercules dorsaux qui permettent de la caractériser ; ces derniers sont de petites saillies coniques que l’on ne peut apercevoir qu’en disposant favorablement l’animal car elles ne sont pas faites de chi¬ tine renforcée ou assombrie et sont de la même teinte que la cuticule. La deuxième pré- larve, d’aspect fœtal, ressemble beaucoup à la première. Les pattes ambulatoires sont tou¬ jours distalement arrondies et possèdent leurs deux tendons (fig. 79). L’article terminant les chélicères est relativement différencié et conique (fig. 78). 11 n’y a ni soies, ni organes sensitifs. Fig. 76-79. — Tegenaria saeva Bl., prélarves 1 et 2. 76 : prélarve 1, détachée du chorion par dissection et avant rupture de sa cuticule ; de : dent d’éclosion. — 77 : extrémité distale de la patte 1 d’une prélarve 1. — 78 : extrémité distale de la chélicère d’une pré¬ larve 1 à l’intérieur de laquelle on aperçoit la chélicère, rétractée, de la prélarve 2. — 79 : extrémité distale de la patte 2 de la prélarve 2 à l’intérieur de laquelle se trouve, rétractée, la patte 2 de la larve. t : tendons de l’apotèle, qui, plus tard, commanderont les mouvement des griffes (voir fig. 87 et 88). Description de la larve de Tegenaria saeva C’est la première stase libre et mobile, nommée 1 er « postembryonalstadium » par A. Holm (5) (p. 128) qui la considère comme incomplète. Durant quelques heures, la jeune Araignée conserve, collé à ses filières et rattaché à son dos par une petite languette de l’exuvie larvaire, l’ensemble des cuticules pL x , pL 2 soudées au chorion. Cette masse plissée (pL 1; fig. 74), au contact des autres larves qui remuent est bientôt rejetée, toutes les larves grégaires vivant ensemble dans le cocon maternel. Bien que libérée de toutes ses enveloppes, la larve est peu active et réagit à peine aux excitations extérieures ; ses mouvements sont lents et consistent surtout en des extensions plus ou moins prononcées DÉVELOPPEMENT POSTEMBRYONNAIRE DES ARAIGNÉES 617 des pattes. La chitine du corps et des appendices est blanchâtre ; elle est garnie de petits spicu¬ lés qui la caractérisent facilement et qui furent déjà observés par A. Holm en 1940 (5) (p. 129. fig. 26a) chez Agelena labyrinthica (à comparer avec la figure 80, chez Tegenaria saeva). Des soies très courtes existent dès à présent (fig. 81, 82, 83). 11 n’en existe qu’une seule sur les chélicères (fig. 80). 80 gi i i 81 Fig. 80-82. — Tegenaria saeva Bl., larve. 80 : chélicère avec son crochet impair, ci, non encore traversé par un canal venimeux (voir fig. 86) ; te, tr, tendons extenseur et rétracteur. — 81 : extrémité de la patte-mâchoire munie de son apotèle, ap, porteur d’une seule griffe impaire, gi. — 82 : patte 3 ; ap, apotèle et ses tendons te et tr ; gp, griffe paire avec ébauche d’une 3 e griffe portée par l’apotèle. Fig. 83. — Coelotes terrestris (Wid.), larve. Patte 3, où l’apotèle porte, en plus de la paire de griffes, gp, une griffe impaire, gi, bien distincte ; te et tr, tendons extenseur et rétracteur. Le céphalothorax ne porte pas d’yeux mais on distingue déjà ceux de la protonymphe. Le pédicule reliant céphalothorax et abdomen est mince, bien distinct ; ce dernier est glo¬ buleux, les filières existent mais ne sont pas fonctionnelles. La chélicère (fig. 80) possède un article distal différencié en forme de griffe ; deux ten- 618 MAX VACHON ET MICHEL HUBERT dons le meuvent mais il n’y a pas de canal venimeux. Les chélicères 11 e sont donc pas fonc¬ tionnelles, elles non plus. Par contre, les pattes possèdent leur segmentation définitive. Les pédipalpes n’ont qu’une seule griffe (fig. 81) alors que les pattes ambulatoires portent une griffe paire (fig. 82, 83). Mais toutes ces griffes, paires ou impaires, sont simples et ne portent aucune dent ; elles s’articulent avec une plaque impaire, l’apotèle ap (fig. 81, 82) sur laquelle s’attachent deux tendons bien formés. Cet apotèle possède un petit tubercule pointu, une 3 e griffe, nettement plus développée chez Coelotes terrestris (fig. 83) que chez Tegenaria saeva (fig. 82) et dont A. Holm avait souligné la présence chez Agelena labyrinthica (5) (p. 129, fig. 26d), griffe qu’il nommait d’ailleurs troisième griffe (3kl). Les divers articles des pattes portent des soies mais il n’y a encore aucune trichobothrie. Les maxilles ne portent pas de serrula. Ce sont les raisons pour lesquelles A. Holm qualifie « d’incomplet » ce premier stade libre postembryonnaire. Description de la première nymphe de Tegenaria saeva Au bout de 5 à 6 jours, la larve mue et se transforme en protonymphe, extrêmement active. C’est ce stade qu’A. Holm nomme 2 e « postembryonalstadium » complet. Cette petite Araignée commence à filer car ses filières sont bien constituées et ont au moins quatre tubili. Les filières médianes (fig. 84) sont simples mais possèdent de longs fusules ; les filières postérieures à tubuli courts (fig. 85) sont faites de deux articles. Le corps et les appendices, dont les spiculés ont disparu, sont recouverts de nombreuses soies, de formes diverses, les unes courtes, les autres longues ; certaines sont simples alors que d’autres sont pennées (fig. 86). Les pattes portent des trichobothries, dont une sur le basitarse des pattes 1, 2, 3 et 4, une sur le tibia des pédipalpes et des pattes 1 et 2, alors qu’il y en a deux sur le tibia des pattes 3 et 4 (fig. 90 et 91). Le tarse des pattes ambulatoires (fig. 89, 90 et 91) ainsi que le basitarse des pédipalpes (fig. 89) sont privés de trichobothries mais portent un organe tarsal bien net. La formule trichobotbriale de la protonymphe, selon la définition que l’un de nous (M.V.) en a donnée en 1958 (23) (p. 431), s’établit comme suit : Formule thichobothriale protonymphaire chez Tegenaria saeva tarse basitarse tibia Pd. (0) - (1) pl-2. (0) (1) (1) P3-4. (0) (1) (2) Cette formule est celle que nous avons également établie après étude des protonymphes chez Tegenaria saeva, chez Coelotes terrestris et, après consultation des descriptions données par A. Holm (5) (p. 129), chez Tegenaria atrica et Coelotes atropos. Nous ne saurions admettre cependant qu’il en soit ainsi chez toutes les Agelenidae car A. Holm, dans le même travail Fig. 84-88. — Tegenaria saeva Bl., protonymphe. 84 : filière médiane. — 85 : filière postérieure. — 86 : extrémité de la chélicère gauche dont le crochet pos¬ sède une articulation accessoire, aa, et est traversé par le canal de la glande venimeuse, cv. — 87 : griffe impaire, gi, portée par l’apotèle de la patte-mâchoire de droite D et de gauche G. — 88 : ensemble des griffes paires, gp, et impaire, gi, terminant la patte 3. Fig. 89-91. — Coelotes terrestris (Wid.), protonymphe. 89 : patte-mâchoire. — 90 : patte 2. — 91 : patte 4. 620 MAX VACHON ET MICHEL HUBERT (p. 130), précise que chez Agelena labyrinlhica, il y aurait deux trichobothries à tous les tibias des pattes ambulatoires, ce qui donnerait la formule suivante : Formule trichobothriale protonymphaire chez Agelena labyrinlhica tarse basitarse tibia H. (0) - (i) pl-2. (0) (1) (2) P3-4. (0) (1) (2) Les chélicères (fig. 86) ont un crochet distal bien formé et fonctionnel, traversé par un canal venimeux. L’article de base de la chélicère est orné, sur sa face ventrale, de quatre dents dont l’antérieure est atténuée. Les maxilles ont une serrula bien distincte faite de 19-20 denticules. Les organes lyriformes existent, notamment le groupe distal du basi¬ tarse. Les pédipalpes ont une griffe impaire ornée de quatre ou cinq petites dents (fig. 87). Les pattes ambulatoires ont des griffes paires munies de onze dents accessoires chez Tege- naria saeva (fig. 88), nombre que P. Bonnet signale aussi à la patte IV de Tegenaria parie- tina (3) (p. 246), alors qu’il y en a 14 ou 15 chez Tegenaria agrestis et seulement 6 ou 7 chez Coelotes terrestris. L’apotèle ap porte une griffe impaire gi. recourbée à angle droit (fig. 88) et ornée de deux dents accessoires, comme cela existe aussi chez Tegenaria parietina, alors qu’il y a trois dents chez Tegenaria agrestis selon P. Bonnet (3) (p. 245 et 246). Toute la région distale de la patte, apotèle et griffes compris, forme un article pouvant se rétracter par le jeu d’une articulation accessoire ( aa, fig. 88), ce que nous avons déjà signalé en 1965 chez Pholcus phalangioides (23) (p. 611, fig. 68). Cette première nymphe a donc tous les moyens de se nourrir et de capturer des proies. Elle reste en compagnie de ses frères et sœurs dans le cocon maternel mais, progressive¬ ment, quitte celui-ci et devient libre : la phase grégaire fait petit à petit place à la dernière phase du développement, la phase solitaire, dite d’autotrophie ou de liberté, conduisant de la première nymphe au stade adulte, phase qui correspond à ce que nous avons appelé en 1957 (19) (p. 345) période nympho-imaginale. Rappelons que, dans cette phase, C. Juber- tiiie (25) admet que la dernière nymphe et le stade adulte correspondent à une étape dite de sexualité. Il apparaît que, selon les conditions d’élevage ou selon les espèces, le 1 er stade nym- phaire peut ou non appartenir totalement ou partiellement à la phase grégaire. C’est ce que laisse à penser l’étude des phases écologiques du développement postembryonnaire, étude effectuée par F. Meier en 1967 (28) (p. 41) ; ce dernier admet dans son tableau (rela¬ tif à l’espèce Agelena labyrinthica) trois stades fœtaux (ceux que nous nommons prélarve I, prélarve II et larve) et le 1 er stade nymphaire. DÉVELOPPEMENT POSTEMBRYONNAIRE DES ARAIGNÉES 621 Nombre de stades nymphaires chez les Agelenidae Nos élevages ne nous permettent pas de préciser avec exactitude le nombre de stades nymphaires précédant le stade adulte. Nous estimons cependant que ce nombre peut varier, mais rester au voisinage de 8 chez Tegenaria saeva. P. Bonnet (3) (p. 156, 246), étudiant les variations du nombre de dents des griffes au cours du développement, parle de 10 âges (10 stades) nymphaires chez Tegenaria parietina $, de 7 chez Tegenaria agres- tis Chez Coelotes terrestris, E. Tretzel (30) (p. 721) compte 5, 6 ou 7 nymphes selon les sexes ou les conditions de développement (Normalentwicklung ou Frühentwicklung). Dans nos élevages de cette même espèce, au cours de nos expériences sur la régénération des pattes (32) (p. 418), nous avons constaté la présence de 6, 7 ou 8 nymphes. Il apparaît donc que, chez les Agelenidae, le nombre des stades nymphaires varie et cela pour des raisons qu’il importera d’élucider. Conclusions 1° En réunissant nos observations personnelles et celles de différents auteurs, nous pouvons affirmer que, chez les Agelenidae, l’éclosion, c’est-à-dire le rejet définitif du cho- rion, s’accompagne de celui de l’exuvie de la première prélarve et de l’exuvie de la seconde prélarve. La formule d’éclosion est donc : (pki, pL 2 ) L Cette formule correspond à celle que A. Holm a trouvée chez les espèces suédoises et qui est la suivante : (A B) C étant admis que ce qu’il appelle stade A correspond à la première prélarve, le stade B à la seconde prélarve, le stade C ou 1 er « postembryonalstadium » (incomplet) étant la larve. 2° La première nymphe succède à la larve ; c’est le premier stade (appelé par A. Holm 1 er ou 2 e « Postembryonalstadium » complet) où l’animal pourvu de ses organes sensitifs et venimeux devient capable de s’alimenter seul, de capturer des proies, après avoir épuisé le stock interne de vitellus maternel encore présent dans l’intestin larvaire aveugle. 3° Le nombre de stades nymphaires peut varier de 6 à 10 selon les espèces et, dans une même espèce, selon le sexe ou les conditions écologiques. 4° La première nymphe est le premier stade à posséder des trichobothries et la formule tnchobothriale qui se modifiera ensuite est chez Tegenaria saeva, T. atrica, Coelotes terres- tris et C. atropos : tarse basitarse tibia pd. (0) - (1) pl-2. (0) (1) (1) p2-4. (0) (1) (2) 622 MAX VACHON ET MICHEL HUBERT alors que chez Agelena labyrinthica cette formule est : tarse basitarse tibia P d . . (0) — (i) pl-2. . (0) (1) (2) p3-4. . (0) (1) (2) L’étude d’autres espèces d’Agelenidae pourra, seule, nous indiquer si le nombre de tricho- bothries varie ou non selon les genres, dès le stade protonymphaire. 5° Il y a, chez les Agelenidae, deux prélarves alors que nous en avons signalé une seule chez les Labidognathes (Pholcidae) (31), les Orthognathes Liphistiomorphes, les Ortho- gnathes Mygalomorphes (Dipluridae et Atypidae) et il n’en existe aucune chez les Ortho¬ gnathes Mygalomorphes (Theraphosidae) (23). Les conclusions relatives à ces différences seront exposées après l’étude de nombreuses autres familles de Labidognathes. 6° Chez les Agelenidae, la larve donne directement naissance à une première nymphe bien caractérisée, ce qui n’est pas le cas chez les Pholcidae (31) où le stade provenant de la larve est une nymphe incomplète qui mérite le nom de prénymphe. (à suivre ) PLANCHE I. — Développement postembryonnaire de Tegenaria derhami (Scop.). Photos R. Legendre, 1957 (thèse non publiée). Fig. 1. — Fin du premier stade prélarvaire : à travers le chorion, non rompu, on aperçoit la première prélarve dont les pédipalpes portent les dents d’éclosion (visibles surtout sur le spécimen en haut, à droite). Voir fig. 74, dans le texte. Fig. 2. — Éclosion et mue de la première prélarve ; ces deux phénomènes sont concomitants et abou¬ tissent à la naissance de la seconde prélarve. Fig. 3. — Seconde prélarve, d’aspect fœtal mais recouverte partiellement par le chorion et la cuticule de la première prélarve (voir fig. 75, dans le texte). Fig. 4. — Naissance de la larve portant encore à l’extrémité de son abdomen l’ensemble plissé formé par le chorion et les deux exuvies prélarvaires (voir fig. 75, dans le texte). Fig. 5. — Naissance de la première nymphe dont les pattes sortent de l’exuvie larvaire. Fig. 6. — Deux premières nymphes, immédiatement après la mue qui leur a donné naissance ; les yeux médians antérieurs sont particulièrement visibles, étant plus fortement pigmentés que les autres. «r- 624 MAX VACHON ET MICHEL HUBERT TRAVAUX CITÉS Ces travaux, classés par ordre alphabétique, continuent la liste de ceux que nous avons numé¬ rotés de 1 à 14 dans notre première note de 1957 (19), de 15 à 20 dans celle de 1958 (23) et de 21 à 23 dans celle de 1965 (31). 24. Darchen, R., 1965. — Éthologie d’une Araignée sociale : Agelena consiociata Denis. Biol. Gabonica, 1 (2) : 117-146, 8 fig. 25. Juberthie, C., 1955. — Sur la croissance postembryonnaire des Aranéides. Bull. Soc. Hist. nat. Toulouse, 90 : 83-102. 26. Legendre, R., 1958. —- Contribution à l’étude du système nerveux des Aranéides. Année biol., 34 (5-6) : 193-223, 11 fig. (Thèse, résumé). 27. Legendre, R., 1959. — Contribution à l’étude du système nerveux des Aranéides. An. Sci. nat. Zool., 12 e sér. : 349-473, 51 fig., 4 pl. (Thèse). 28. Meier, F., 1967. — Reitrâge zur Kenntnis der postembryonalen Entwicklung der Spinnen (Araneida Labidognatha). Unter besonderer Rerücksichtigung der Histogenèse des Zen- tralnervensystems. Rev. Suisse Zool., 74 (1) : 1-127, 42 fig. 29. Mikulska, I., et L. Jacunski, 1968. —- Fecundity and reproduction activity of the spider Tegenaria atrica C. L. Koch. Zool. Poloniae, 18 (1) : 97-106. 30. Tretzel, E., 1961. — Biologie, Okologie und Rrutpflege von Coelotes terrestris (Wider) (Ara- neae, Agelenidae). Z. Morph. Okol. Tiere, 49 : 658-745, 42 fig. 31. Vaciion, M., 1965. — Contribution à l’étude du développement postembryonnaire des Arai¬ gnées, troisième note : Pholcus phalangioid.es (Fussl.) (Pholcidae). Bull. Soc. zool. France, 90 (5-6) : 607-620, 10 fig. 32. Vachon, M., 1967. —- Nouvelles remarques sur la régénération des pattes chez l’Araignée : Coelotes terrestris Wid. (Agelenidae). Bull. Soc. zool. France, 92 (2) : 417-428, 29 fig. Manuscrit déposé le 1 er avril 1971. Bull. Mus. Hist. nat., Paris, 3 e sér., n° 11, juillet-août 1971, Zoologie 11 : 613-624. Achevé d’imprimer le 30 juin 1972. IMPRIMERIE NATIONALE 1 564 002 5 Recommandations aux auteurs Les articles à publier doivent être adressés directement au Secrétariat du Bulletin du Muséum national d’IIistoire naturelle, 61, rue de Buffon, 75-Paris, 5 e (adresse provisoire). Ils seront accompagnés d’un résumé en une ou plusieurs langues. L’adresse du Laboratoire dans lequel le travail a été effectué figurera sur la première page, en note infrapaginale. Le texte doit être dactylographié à double interligne, avec une marge suffisante, recto seulement. Pas de mots en majuscules, pas de soulignages (à l’exception des noms de genres et d’espèces soulignés d’un trait). Il convient de numéroter les tableaux et de leur donner un titre ; les tableaux compliqués devront être préparés de façon à pouvoir être clichés comme une figure. Les références bibliographiques apparaîtront selon les modèles suivants : Bauchot, M.-L., J. Daget, J.-C. Hureau et Th. Monod, 1970. — Le problème des « auteurs secondaires » en taxionomie. Bull. Mus. Hist. nat., Paris, 2 e sér., 42 (2) : 301-304. Tinbergen, N., 1952. — The study of instinct. Oxford, Clarendon Press, 228 p. Les dessins et cartes doivent être faits sur bristol blanc ou calque, à l’encre de chine. Envoyer les originaux. Les photo graphies seront le plus nettes possible, sur papier brillant, et normalement contrastées. L’emplacement des figures sera indiqué dans la marge et les légendes seront regroupées à la fin du texte, sur un feuillet séparé. Un auteur ne pourra publier plus de 100 pages imprimées par an dans le Bulletin, en une ou plusieurs fois. Une seule épreuve sera envoyée à l’auteur qui devra la retourner dans les quatre jours au Secrétariat, avec son manuscrit. Les « corrections d’auteurs » (modifications ou addi¬ tions de texte) trop nombreuses, et non justifiées par une information de dernière heure, pourront être facturées aux auteurs. Ceux-ci recevront gratuitement 50 exemplaires imprimés de leur travail. Ils pourront obtenir à leur frais des fascicules supplémentaires en s’adressant à la Bibliothèque cen¬ trale du Muséum : 38, rue Geofîroy-Saint-Hilaire, 75-Paris, 5 e .