BULLETIN du MUSÉUM NATIONAL d’HISTOIRE NATURELLE iiiimiiiiiiiiiiiiiiimiiiiiiiiii PUBLICATION BIMESTRIELLE N° 251 SEPTEMBRE-OCTOBRE 1974 zoologie 173 BULLETIN du MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE 57, rue Cuvier, 75005 Paris Directeur : Pr M. Vachon. Comité directeur : Prs Y. Le Grand, C. Lévi, J. Dorst. Rédacteur général : Dr M.-L. Bauchot. Secrétaire de rédaction : M me P. Dupérier. Conseiller pour l’illustration : Dr N. Halle. Le Bulletin du Muséum national d’Histoire naturelle, revue bimestrielle, paraît depuis 1895 et publie des travaux originaux relatifs aux diverses branches de la Science. Les tomes 1 à 34 (1895-1928), constituant la l re série, et les tomes 35 à 42 (1929-1970), constituant la 2 e série, étaient formés de fascicules regroupant des articles divers. A partir de 1971, le Bulletin 3 e série est divisé en six sections (Zoologie — Botanique — Sciences de la Terre — Sciences de l’Homme — Sciences physico-chimiques — Écologie générale) et les articles paraissent, en principe, par fascicules séparés. S’adresser : — pour les échanges, à la Bibliothèque centrale du Muséum national d’His- toire naturelle, 38, rue Geofïroy-Saint-Hilaire, 75005 Paris (C.C.P., Paris 9062-62) ; — pour les abonnements et les achats au numéro, à la Librairie du Muséum 36, rue Geofïroy-Saint-Hilaire, 75005 Paris (C.C.P., Paris 17591-12 — Crédit Lyonnais, agence Y-425) ; — pour tout ce qui concerne la rédaction, au Secrétariat du Bulletin, 57, rue Cuvier, 75005 Paris. Abonnements pour l’année 1974 Abonnement général : France, 440 F ; Étranger, 484 F. Zoologie : France, 340 F ; Étranger, 374 F. Sciences de la Terre : France, 90 F ; Étranger, 99 F. Botanique : France, 70 F ; Étranger, 77 F. Écologie générale : France, 60 F ; Étranger, 66 F. Sciences physico-chimiques : France, 20 F ; Étranger, 22 F. International Standard Serial Number (ISSN) : 0027-4070. BULLETIN DU MUSÉUM NATIONAL D'HISTOIRE NATURELLE 3 e série, n° 251, septembre-octobre 1974, Zoologie 173 * SOMMAIRE F. Monniot. -— Ascidies littorales et bathyales récoltées au cours de la campagne Biaçores : Aplousobranches. 1287 C. Monniot. -— Ascidies littorales et bathyales récoltées au cours de la campagne Biaçores : Phlébobranches et Stolidobranches. 1327 C. Monniot et F. Monniot. — Ascidies abyssales de Méditerranée récoltées par le « Jean Charcot » (campagnes Polymède). 1353 251, 1 Ascidies littorales et bathyales récoltées au cours de la campagne Biaçores : Aplousobranches par Françoise Monniot * Résumé. — Vingt-trois espèces d’Ascidies Aplousobranches ont été récoltées en plongée ou en dragage. Huit sont nouvelles pour la Science parmi lesquelles sept sont bathyales. Le bord du plateau continental marque une limite au-delà de laquelle le renouvellement de la faune est net : trois espèces seulement sont communes dont deux ont une très large répartition. Les récoltes de Biaçores ont l’intérêt d’apporter des formes d’organisation qui étaient jusqu’à présent inconnues dans l’Atlantique : le genre IliUerella, Polyclinidae, et les genres Sycozoa et Protoholozoa, Polyci- toridae. Abstract. — 23 species of Aplousobranchiata Ascidians hâve been collected by scuba-diving or dredging. 7 are bathyal ones among 8 new species. Beyond the edge of the continental shelf, the fauna renewal is clear : 3 species only are common to both habitats and 2 of them hâve a large distribution. The Biaçores collection has the interest to bring unknown types of organisation for the Atlantic : the genus Ritterella, Polyclinidae, and the généra Sycozoa and Protoholozoa , Polycitoridae. Les récoltes effectuées au cours de la campagne Biaçores ont eu lieu autour des îles de tout l’archipel des Açores, depuis une profondeur nulle jusqu’à la plaine abysssle. Seules les Ascidies Aplousobranches littorales et bathyales sont étudiées dans cet article, les formes abyssales ayant fait l’objet d’un travail précédent (Monniot C. et F. Monniot, 1973). En ce qui concerne les formes littorales, l’état des colonies n’était pas très satisfaisant : la campagne a eu lieu en octobre et novembre 1971, donc à une saison où les Ascidies com¬ posées sont en phase de repos. Beaucoup de colonies étaient réduites à l’état de stolons, d’autres n’avaient plus de gonades fonctionnelles ou de larves. La faune littorale des Açores n’est pas très riche en espèces et beaucoup ont une très large répartition. Cette pauvreté est certainement liée à l’agitation forte des eaux autour des îles. 11 n’a pas été possible de déterminer une orientation préférentielle des côtes abri¬ tant des Ascidies. Toutes les formes sont tolérantes aux variations de la lumière ou de la turbidité. Un facteur limitant peut être constitué par la présence presque constante autour de la frange rocheuse des îles d’une ceinture très mobile et très pauvre de cailloutis de pierre ponce et de coquilles mortes. L’extension des espèces pourrait être limitée par cette sorte de sédiment où les colonies ne peuvent se fixer ni s’étendre. * Muséum national d’Histoire naturelle, Biologie des Invertébrés marins et Malacologie, 57, rue Cuvier, 75005 Paris. 1288 FRANÇOISE MONNIOT Famille des Polyclinidae Aplidium bermudae (Van Name, 1902) (Fig. 1, A-B) Amaroucium bermudae Van Name, 1902. Stations : PI — P4 — P5 — P8 — P29 - P41. Les colonies ont le même aspect que celles des Bermudes mais une taille plus réduite. La tunique commune est transparente, résistante, à reflets bleuâtres, tandis que les zoïdes bien visibles sont plus ou moins teintés de rouge, mais se distinguent immédiatement par les 4 points rouge vif situés à la base du siphon buccal. Les zoïdes ont une musculature forte qui couvre tout le thorax puis s’étend sur l'abdo¬ men. Le siphon buccal a 6 lobes carénés, les lobes ventraux un peu plus longs que les dor¬ saux (fig. 1, A). Le siphon cloacal situé assez bas (c’est-à-dire au niveau du 2 e rang de stig¬ mates en général) est étiré en tube. Il porte du côté dorsal une languette simple, longue, souvent foliacée et 5 denticules régulièrement espacés (fig. 1, A). La branchie compte en général 13 rangs de stigmates et à peu près 20 stigmates par demi-rang. Le tube digestif est surtout remarquable par l’allongement de l'estomac, trois fois plus long que large. Sa paroi est marquée de 4 angles nets (fig. 1, B). Le postestomac est très peu marqué et l’intestin moyen sans subdivision. Les cæca du rectum sont très bien individualisés. Les gonades sont situées dans le postabdomen, très long, à une distance assez grande de la boucle intestinale. L’ovaire est situé au-dessus des testicules plus ou moins régulière¬ ment disposés en 2 rangs. Les têtards sont incubés dans la cavité cloacale. Ils portent 3 ventouses et de chaque côté de nombreuses petites papilles épidermiques. L’espèce se caractérise assez bien par l’aspect de la colonie, les points rouges des zoïdes, la forme du siphon cloacal, la musculature thoracique abondante et la position basse de l’ovaire. L’estomac cylindrique très allongé est aussi caractéristique. La présence aux Açores d’une espèce des Bermudes, également connue aux Antilles, n’a rien de surprenant. L’espèce est toujours signalée dans une zone très littorale. Aplidium sp. A Stations : 32 — 167 — 216. Les colonies en coussinets de 20 mm maximum de diamètre sont légèrement incrustées de sable et en voie de dégénérescence. Elles sont en trop mauvais état pour être correcte¬ ment décrites. Les zoïdes ne permettent pas non plus une étude complète. Je ne peux rap¬ porter ces spécimens à aucune espèce, mais il ne m’est pas possible non plus de créer une espèce nouvelle avec aussi peu d’éléments de diagnose. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1289 Fig. 1 . — A et B, Aplidium bennudae : A, siphons ; B, abdomen. ('.. D et E, Sidnyum appendiculatum : C, larve; D, abdomen face droite; E, abdomen face gauche. Il est fort possible que l’on ait ici une espèce bathyale, mais peut-être ne représente- t-elle qu'une forme profonde d’une espèce connue d’Afrique ou d’Amérique. Les zoïdes sont variables et les trois colonies récoltées ne pei mettent pas de déterminer le type morpholo¬ gique le plus fréquent. Les zoïdes sont de petite taille (3 mm environ, parfois 5 mm). Le siphon buccal possède 1290 FRANÇOISE MONNIOT 6 lobes nets ou une bordure circulaire lisse non dentée. Le siphon cloacalest situé nettement plus bas que le siphon huccal ; il est ourlé et surmonté d’une languette longue, simple ou trifide. Certains zoïdes n’ont pas de languette du tout. Il y a régulièrement 9 rangs de stigmates. L’endostyle est large, chargé de granules pigmentaires jaunes, translucides, qui le rendent très épais. Le raphé est constitué de 8 courtes languettes très décalées à gauche. La musculature thoracique est forte et les zoïdes très contractés. Il ne m’est pas possible de donner ici le nombre de stigmates par demi-rang. Le tube digestif forme une boucle assez courte. L’estomac cylindrique se place au milieu de l’abdomen. Il porte 5 à 8 plis peu nets. 11 semble y avoir un postestomac, mais cet élargissement de l’intestin peut être simplement dû à la contraction. L’ovaire est situé un peu au-dessous de la courbure intestinale. Les testicules sont peu nombreux, proches les uns des autres sous l’ovaire. J’en ai compté au plus une dizaine, généralement 5 ou 6. Le postabdomen est assez court, mais les testicules n’atteignent pas son extrémité postérieure. Le spermiducte s’ouvre avec l’anus aux deux tiers inférieurs de la cavité cloacale. Les têtards sont incubés dans la cavité cloacale. Ils ont 2 ou 3 granules sensoriels pig¬ mentés. Les 3 ventouses de fixation sont espacées au-dessus d’un croissant de très petites papilles ectodermiques. Cette espèce est originale par le nombre de plis de l’estomac et le nombre de rangs de stigmates. La seule espèce possédant ces caractères est A. sarasinorum (Fiedler, 1889). Mais la languette cloacale est cependant différente de celle que figure Millar en 1962, et les testicules ne sont pas ici disposés en grappe mais alignés. Il semble de plus très dilli- cile de placer l’espèce des Açores parmi des animaux provenant de Ceylan ou d’Afrique du Sud. Il est raisonnable de conclure pour l’instant à une convergence et d’attendre de nou¬ velles récoltes pour créer une espèce. Aplidium sp. B Stations : 21 —- 143. Les colonies sont très incrustées de sable, impossibles à distinguer de Sidnyum appen- diculatum sans dissection. Les zoïdes très minces ne semblent pas disposés régulièrement ni orientés dans la colonie. Le siphon buccal a 6 lobes arrondis. Le siphon cloacal est surmonté d’une languette simple, longue. La branchie comprend au moins 13 à 14 rangs de stigmates, parfois jusqu’à 16. Elle est haute mais très étroite. L’abdomen est lui aussi allongé. L’estomac cylindrique et long se situe environ au milieu de l’abdomen. Il est plus ou moins marqué de 4 plis. L’état des zoïdes ne permet pas de voir de détails sur l’intestin. L’ovaire est situé au milieu du postabdomen. Il ne contient qu’un gros ovocyte. Les lobules testiculaires occupent la moitié postérieure du postabdomen. Ils sont peu nombreux dans les zoïdes observés (4 à 10) en un seul rang. Le spermiducte droit n’a pas de caractères particuliers. Les têtards sont incubés dans la cavité cloacale. Il n’y en a généralement qu’un, qui ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1291 comprime la branchie sur presque toute sa hauteur. Le têtard a un ocelle et un otolithe, 3 ventouses séparées par 3 papilles épidermiques. Les caractères de cette espèce n’ont rien d’original ; il n’est donc pas possible pour l’ins¬ tant, avec ces seules récoltes, de nommer l’espèce. Sidnyum appendiculatum (Michaelsen, 1923) (Fig. 1, C-D-E) Synoicum appendiculatum Michaelsen, 1923, f. typica et f. basaltes. Stations : PI - P2 — P3 — P4 — P5 — P7 — P8 — P9 — Pli — P12 — P19 — P27 P29 — P32 — P33 — P38 — P41 ; 2 — 11 — 12 — 13 — 18 — 19 — 20 — 21 — 22 — 60 l 'il — 166. Cette espèce est très commune aux Açores. Elle se présente à proximité de toutes les îles, de 5 à 220 m de profondeur selon nos récoltes. Les colonies se présentent sous forme de groupes de petits lobules cylindriques entièrement incrustés de sable, coalescents à leur base seulement. Il semble que chaque digitation corresponde à un seul système de zoïdes. La tunique est très transparente, fibreuse, molle, mais rendue très résistante par la très grande abondance de sable qu’elle contient. Les caractères des zoïdes correspondent très bien aux descriptions des deux formes typica et basaltes de Michaelsen qui se rencontrent ensemble et ne représentent, à mon avis, que des stades différents d’évolution des zoïdes. Dans le cas le plus général, le siphon huccal a 8 lohes et le siphon cloacal est surmonté d’une languette trilobée. Des exceptions, peu fréquentes, peuvent montrer des systèmes de zoïdes où le siphon buccal a 6 ou un nombre quelconque de denticulations et parfois une languette cloacale simple à extrémité arrondie. On compte 16 tentacules coronaux de deux ordres régulièrement alternés. La paroi thoracique porte une musculature forte, mais le nombre de faisceaux muscu¬ laires est très variable : jusqu’à 18. A la base de l’endostyle, on constate la présence cons¬ tante d’une expansion foliacée triangulaire, quel que soit le stade de croissance des zoïdes. Cette excroissance ne comporte pas de musculature visible et son développement n’a pas de lien avec l’incubation des larves. La branchie, comme l’indique Michaelsen, a 10 à 12 rangs de stigmates réguliers, rectangulaires et, généralement, on compte 13 ou 14 stigmates par demi-rang. Les perfora¬ tions s’interrompent au niveau du raphé. Les languettes du raphé sont courtes et seules les postérieures sont décalées sur la gauche. L’œsophage est large et plat et se rétrécit brusquement un peu avant son entrée dans l’estomac. L’estomac (fîg. 1, D-E) présente toujours 6 cannelures plus ou moins saillantes. Il est cylindrique mais sa face supérieure est parfois un peu oblique. Il correspond à la des¬ cription qu’en donne Michaelsen. Un anneau saillant marque l’intestin tout de suite après l’estomac (fîg. 1, D-E) ; le rectum débute par 2 cæca nets mais peu importants. L’anus débouche au 3 e rang de stigmates, comptés à partir de la base de la branchie, chez les zoïdes étendus. L’ovaire est situé assez loin de la boucle digestive et précède une trentaine de vésicules testiculaires plus ou moins régulièrement alignées. 1292 FRANÇOISE MONNIOT Les larves, incubées dans la cavité cloacale n’ont pas de caractères particuliers sinon une accumulation de petites papilles de chaque côté des 3 ventouses apicales (fig. 1, C). Michaelsen plaçait cette espèce dans le genre Synoicum, très certainement à cause du siphon cloacal qui peut s’allonger en tube. En réalité, la place de cette espèce ne peut être que parmi les Sidnyum puisque le siphon buccal possède 8 lobes et que l’estomac est plissé. Il est vrai que la différence entre les genres Sidnyum et Aplidium est faible et seu¬ lement due au nombre différent de lobes buccaux. Cependant, malgré sa variabilité, le nombre des lobes buccaux est un caractère facile à voir et permet d’isoler rapidement quelques espèces. Il me semble utile de conserver le genre Sidnyum pour l’instant, même s’il est artificiel. Sidnyum appendiculatum, décrit des Açores, n’est connu que dans cet archipel. En raison de sa très grande abondance il est possible de dire qu’il en est endémique. Aplidiopsis atlanticus n. sp. (Fig- 2) Stations : P5 — P9 - P32 P41 ; 30 — 142 — 167 -- 181 — 208. L’espèce a été récoltée de 5 à 620 m de profondeur. Les colonies sont petites, cylindriques, de 8 mm de hauteur sur 5 mm de diamètre en moyenne. Elles ne peuvent être distinguées à première vue ni de Polyclinum aurantium, ni de Sidnyum appendiculatum. La tunique est plus ou moins densément incrustée de sable ; quand on peut la voir elle est bleuâtre. Les zoïdes ne sont pas visibles par transparence. Dans le cas général, chaque colonie n’est constituée que d’un seul système de zoïdes dont le cloaque commun est central. Pour chacune des deux colonies de la station 30, entre 250 m et 300 m de profondeur, trois systèmes de zoïdes étaient présents, chacun avec un orifice cloacal commun central et saillant, bordé d’une lame tunicale cylindrique mince. Les zoïdes ressemblent beaucoup par leur disposition dans la tunique commune à des zoïdes de Polyclinum. Le thoiax a une longueur égale ou un peu supérieure à celle de l’abdo¬ men. Le siphon buccal porte 6 lobes pointus. Le siphon cloacal, situé très haut (fig. 2, A), est allongé en tube. Ce tube cloacal a parfois un très grand diamètre ; selon les zoïdes, sa partie supérieure peut être développée en une languette plus ou moins longue. Si la languette est large et bien développée, son bord libre porte une ou 3 dents. Le bord inférieur du siphon cloacal est assez souvent découpé en 3 lobes, peu nets. 32 tentacules coronaux de trois ordres sont régulièrement alternés sur un cercle. La branchie comprend de 11 à 14 rangs de stigmates ovales, très régulièrement dis¬ posés. On en compte de 16 à 18 par demi-rangée. Les sinus transverses ne portent pas de papilles ; les lames qui surmontent ces sinus ont un bord droit, elles sont peu élevées. Le raphé est composé de languettes égales à une fois et demie la hauteur d’un rang de stig¬ mates. Il est peu décalé sur la gauche. L’abdomen est situé dans le prolongement du thorax (fig. 2, A-B). L’œsophage est large. L’estomac lisse est élargi et hémisphérique dans sa partie cardiaque, puis un peu rétréci et enfin brusquement tronqué dans sa partie pylorique (fig. 2, A). L'intestin est 1294 FRANÇOISE MONNIOT divisé en un postestomac élargi, puis, après un rétrécissement, il se renfle à nouveau en un intestin moyen, large, qui occupe la base de la boucle digestive. Le rectum ne débute qu’après un nouveau rétrécissement ; il a un diamètre variable selon son contenu, mais pas de diffé¬ renciations particulières. La boucle intestinale dans son ensemble est à peine tordue. Le postabdomen s’insère du côté gauche, au-dessus de l'intestin moyen, dans la boucle intestinale (fig. 2, A-B). Sa longueur est variable selon les zoïdes et selon l’état de maturité des gonades. Elle peut atteindre le double de la longueur thorax -f- abdomen. Son extré¬ mité distale contient le cœur. Les gonades mâle et femelle sont situées dans la moitié posté¬ rieure du postabdomen, élargi à ce niveau. Le nombre de lobules testiculaires, disposés en amas, peut être très grand (fig. 2, A). Le spermiducte est rectiligne dans le postabdomen ; en arrivant dans l’abdomen il se retrousse brusquement (fig. 2, B), contourne l’intestin moyen pour ensuite suivre le rectum sur la face droite du corps. L’oviducte qui contient des ovocytes ne suit pas ce tiajet, mais reste sur la face gauche du corps, parallèlement au rectum. Les canaux génitaux débouchent juste au-dessous de l’anus qui se situe lui-même au niveau de la 3 e rangée de stigmates comptés à partir de l’œsophage. Les larves présentes dans quelques colonies étaient toutes trop jeunes pour permettre une étude précise de leur structure. Peut-être sont-elles libérées très tôt. Dans l’ensemble, la musculature des zoïdes est faible : 8 à 10 faisceaux longitudinaux sur le thorax et une musculature abdominale peu développée. Remarques Le genre Aplidiopsis reste très mal connu. Il est souvent difficile à distinguer du genre Polyclinum. Il ne s’en distingue que par l’absence de papilles sur les sinus transverses de la branchie. Il ne diffère du genre Synoicum que par son postabdomen pédiculé. A l’origine ce genre fut créé par Lahille en 1890, mais avec une diagnose très diffé¬ rente de celle qui lui est attribuée maintenant. Pour Lahille, les Aplidiopsis ont un esto¬ mac lisse, une boucle intestinale non tordue et un postabdomen non pédiculé. Le type du genre était Aplidium vitreum Lahille, 1887, qui a retrouvé actuellement sa place primitive parmi les Aplidium. En 1924, Hartmeyer modifie la diagnose du genre Aplidiopsis en le rapprochant du genre Polyclinum mais en précisant que les sinus transverses ne portent pas de papilles. C’est cette diagnose •— estomac lisse, postabdomen pédiculé et absence de papilles sur les sinus transverses — qui est actuellement adoptée par tous les ascidio- logues depuis Van Name, 1945. En fait, le genre Aplidiopsis est intermédiaire entre le genre Synoicum et le genre Polyclinum. La torsion de la boucle intestinale est très irrégulière parmi les diverses espèces d’ Aplidiopsis et généralement mal décrite. Elle dépend énormément de l’état de contrac¬ tion des animaux et du stade de développement des zoïdes. Puisqu’il n’est pas constant, ce caractère ne peut être indu dans une diagnose de genre. Parmi les Aplidiopsis qui, à mon sens, peuvent être reconnus de façon valable, je cite¬ rai : A. amoyense Tokioka, 1967 ; A. discoveryi Millar, 1960 ; A. pannosum (Ritter, 1899) et A. pyriformis (Herdman, 1886). Kott, en 1969, place Synoicum georgianum. (Sluiter, 1932) parmi les Aplidiopsis, mais je crois que sa vraie place reste parmi les Synoicum : les zoïdes de cette espèce ont ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1295 une forte musculature qui se prolonge sur le postabdomen. Celui-ci est donc déformé et déplacé par la contraction ; la boucle digestive fait saillie hors de l’abdomen, ce qui donne l’impression d’un postabdomen pédiculé, surtout chez les individus immatures. Ce phénomène est également fréquent chez les espèces du genre Aplidium. Polyclinum incertum Herdman, 1886, bien que très insuffisamment décrit est certaine¬ ment un Synoicum bien que Kott le place, sans en donner les raisons, dans le genre Apli- diopsis. Aplidiopsis knipowitschi Redikorzev, 1927, devrait d’après sa description être placé parmi les Synoicum. Macroclinum macroglossum Hartmeyer, 1919, est également placé par Kott, 1963, parmi les Aplidiopsis. La description de cette espèce ne mentionne absolument pas la pré¬ sence ou l’absence de papilles sur les sinus transverses et il pourrait aussi bien s’agir d’un Polyclinum. Aplidiopsis tokaraensis Tokioka, 1954, me paraîtrait mieux placé dans le genre Sid- nyum. Cette espèce, en effet, possède huit lobes buccaux, une forte musculature qui s’étend jusqu’au postabdomen et ne permet pas de préciser comment il s’insère sur l'abdomen. De plus, les gonades sont inconnues. Aplidiopsis atlcinticus n. sp. est la première espèce du genre reconnue dans l’océan Atlantique. Elle est présente aux Açores jusqu’à 600 m de profondeur environ, selon nos récoltes. Elle doit être en réalité plus commune, le nombre de nos stations où elle ligure est peu élevé, mais ces stations sont très dispersées. Cet animal doit facilement échapper aux récoltes par la très petite dimension des colonies et sa tunique incrustée de sable. Peut- être est-ce une espèce endémique, ou bien importée aux Açores depuis assez longtemps. Polyclinum aurantium Milne-Edwards, 1841 Stations : P5 — P41. Ile de Sao Miguel. Deux colonies très petites (5 mm), ensablées. Les zoïdes de ces colonies ne diffèrent en rien de ceux des côtes d’Europe. Le thorax est bien développé, avec une branchie de 13 rangs de stigmates. La languette cloacale est, selon les individus, terminée en pointe ou à bord denté. L’anus s’ouvre au niveau du 7 e rang de stigmates. Les 8 faisceaux musculaires thoraciques sont visibles seulement sur la partie supérieure du thorax. Le postabdomen est porté par un court pédoncule. Les zoïdes sont en bon état et permettent de distinguer aisément le petit tubercule situé juste au-dessous du siphon cloacal et les papilles des sinus transverses de la branchie qui sont petites, régulières et très nombreuses. La présence de Polyclinum aurantium dans deux stations seulement indique une impor¬ tation accidentelle. Cette espèce ne fait pas partie de la faune habituelle des Açores. Elle a certainement été apportée par un bateau des côtes européennes proches où elle est très abondante. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1297 Ritterella glareosa n. sp. (Fig- 3) Station : 30. Cette espèce n’est représentée que par une colonie à peu près sphérique, gélatineuse, de 12 mm de diamètre. La tunique, parfaitement transparente, est incrustée de sable. Les zoïdes sont disposés sans ordre et s’ouvrent isolément à l’extérieur. Tous les zoïdes sont très contractés et il n’est pas possible de donner les proportions respectives du thorax, de l’abdomen et du postabdomen. Les deux siphons sont larges et bordés de 6 denticulations (fig. 3, A-B). Le manteau est faiblement musclé sur le thorax. On compte à ce niveau 6 ou 7 fais¬ ceaux musculaires de chaque côté du corps. Ces muscles se réunissent en un ruban qui se prolonge jusqu’à l’extrémité du postabdomen (fig. 3, C). Les tentacules coronaux, au nombre d’une douzaine, sont disposés sur un seul rang, en deux ordres alternés sur le bord d’un vélum. Le sillon péricoronal forme un V peu accentué sur la ligne dorsale. L’une des deux lames qui le constituent forme une membrane élevée. Le tubercule vibratile en bouton est situé à gauche de l’échancrure du sillon péricoronal. La branchie ne comprend que de 5 à 7 rangs de stigmates dans la seule colonie récoltée. 11 y a de très nombreux stigmates par rang. Il n’existe pas de sinus parastigmatiques. Le raphé se compose de languettes courtes et larges, nettement insérées du côté gauche de la branchie. Le tube digestif est très difficile à décrire étant donné son état de contraction. L’esto¬ mac semble situé au milieu de l’abdomen, il est cylindrique, marqué de 5 plis longitudi¬ naux peu profonds. Le rectum à sa base débute par 2 cæca nets (fig. 3, A). L’anus bilobé débouche à un très haut niveau dans le thorax, en face du deuxième rang de stigmates. Le postabdomen est très raccourci par la contraction des muscles longitudinaux, mais de toutes façons il ne doit pas être très long. Il comprend, pour certains zoïdes, un ovaire situé sous la boucle intestinale (fig. 3, A-B) et pour d’autres, une grappe de vésicules testiculaires (fig. 3, C). Le spermiducte longe le rectum. Dans le thorax, il s’élargit beaucoup (fig. 3, C) et forme une véritable ampoule un peu au-dessous de l’anus, près du siphon cloaeal. Les têtards sont incubés dans la cavité cloacale qu’ils distendent. J’en ai compté jus¬ qu’à cinq à la fois. Ils ont un otolithe mais pas d’ocelle. Les 3 ventouses de fixation sont présentes, elles sont entourées de bouquets de papilles (fig. 3, D). Ritterella glareosa n. sp. est la première espèce du genre signalée en dehors de l’océan Pacifique. Elle n’a été récoltée qu’une fois à 300 m de profondeur environ, ce qui ne donne pas d’indications sur ses affinités possibles : ou bien il s’agit d’une espèce batbyale, endé¬ mique, difficile à récolter à cause de sa transparence et de la petite taille des colonies, ou bien il s’agit ici encore d’un transport par bateau, mais cette hypothèse est moins probable que la précédente. En effet, la station où a été récoltée cette nouvelle espèce se situe sur le « banc des Açores » à 25 m au sud-ouest de Faial. Cette localisation, loin d’un port, sur 1298 FRANÇOISE MONNIOT un « sea-mount » isolé par des zones plus profondes, fait plutôt penser à une espèce endé¬ mique. Ritterella glareosa n. sp. se distingue de R. aequalisiphonis (Ritter et Forsyth, 1917), de R. asymetrica Millar, 1966, de R. pedunculata Tokioka, 1953, de R. pulchra (Ritter, 1901), de R. rubra Abbott et Trason, 1968, et de R. vestita Millar, 1960, par son petit nombre de rangs de stigmates. Elle diffère de R. dispar Ivott, 1957, par le nombre de plis stomacaux et la musculature. R. herdmania Kott, 1957, n’a que peu de stigmates par rang et la colonie a une forme différente. Enfin, R. sigillinoides (Rrewin, 1958) a un estomac à 12 plis longitu¬ dinaux, de nombreux muscles thoraciques et 4 papilles épidermiques situés entre les ven¬ touses chez le têtard. Ritterella glareosa représente donc une espèce nouvelle. Le genre Ritterella Harant, 1931, ne se différencie du genre Pseudodistoma que par le nombre de rangs de stigmates, plus de trois chez le premier et trois chez le deuxième. Ce découpage est certainement très artificiel, mais il est pratique, c’est pourquoi je m’y rallie. La comparaison des caractères anatomiques des différentes espèces de Ritterella peut être résumée dans le tableau ci-dessous. Clé tabulaire des espèces du genre Ritterella 1 — Nombre de rangs de stigmates A : 4à7;B:8àl4;C: plus de 20. 2 — Nombre de stigmates par demi-rang D : moins de 20 ; E : plus de 20. 3 — Sinus parastigmatiques présents : + ; absents O. 4 — Nombre de plis à l’estomac ou estomac aréolé (A). 5 — Muscles thoraciques latéraux R : rares, moins de 10 ; n : nombreux. 6 — Position de l’anus par rapport à la branchie : B : bas ; H : haut ; M : au milieu de la branchie. 7 — Nombre de vésicules épidermiques de la larve : 4 .... n. 1 2 3 4 5 6 7 Nom d’espèce A E O 5 R H n glareosa A E O 11 H 4 sigillinoides A D O 6 R Colonie en forme de cuiller herdmania A D O 20 R 11 dispar C E O 8-10 n B vestita B E O 6-8 R H pulchra B E O 10 R B Colonie en forme de cuiller asymmetrica B E + 20 n B pedunculata B D O 6-7 R H aequalisiphonis B D O A R M 4 rubra Famille des Polycitoridae Clavelina lepadiformis (O. F. Müller, 1776) Station : P42 — Sao Miguel, face interne de la jetée du port de Ponta Delgada, 1-10 m. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1299 Cette espèce n’a été trouvée que dans le port sur les parois verticales et sur les tubes de Spirographis. Connue sur toutes les côtes européennes de Trondjhem à l’Adriatique, cette espèce est bien caractérisée par ses bandes pigmentaires visibles à l’état vivant. Elle a été comparée à des exemplaires provenant de Bergen (la localité-type de cette espèce est « Fjords Norvégiens ») sans trouver de différences significatives. Les exemplaires étaient adultes, incubateurs, et possédaient de nombreux bourgeons en voie de développement. C’est la première fois que cette espèce est signalée aux Açores. Elle semble exclusive¬ ment localisée au port de Ponta Delgada. Elle a probablement été importée d’Europe. Les conditions écologiques qui régnent aux Açores ne permettent probablement pas à cette espèce de s’étendre dans l’archipel car elle réclame des eaux peu agitées. Clavelina oblonga llerdman, 1880 Stations : P8 — P10 — Pli — P12 — P20. Ile de Faial, de 3 à 10 m. Cette espèce est commune autour de l’île de Faial et n’a pas été trouvée ailleurs dans l'archipel. Elle vit sur les surfaces verticales ou surplombantes à partir de 3 m. A l’état frais elle n’est pas pigmentée et par conséquent se distingue très facilement de C. lepadiformis. Les exemplaires des Açores, plutôt petits (1,5 à 2 cm), n’étaient pas adultes mais en phase de bourgeonnement. Le type de l’espèce est des Bermudes ; elle vit sur les côtes atlantiques de l’Amérique du Nord, de la Floride au Brésil (Millar, 1958 ; Almeida Bodrigues, 1962), aux îles du Cap Vert (Hartmeyer, 1912) et à Dakar (Monniot F., 1969). Les Açores représentent le point le plus septentrional de la répartition de cette espèce. Elle aussi est probablement d’importation récente. Elle supporte mieux que C. lepadiformis des conditions de turbu¬ lence. Clavelina sp. Stations : P7 — P38 — P41. Cette petite espèce n’est malheureusement pas adulte, il ne nous est pas possible d’en donner une description complète. Mais en aucun cas il ne peut s’agir d’un jeune de l’une des deux autres espèces trouvées aux Açores. Les zoïdes de 0,5 à 0,8 cm de long sont disposés en touffes de 1 à 3 zoïdes réunis tout à fait à la base dans une tunique commune. La tunique est transparente et nue autour du thorax et densément couverte de sable le long de l’œsophage et de l’estomac. A l’état vivant la coloration est blanchâtre et il n’existe pas de lignes pigmentaires. Autour du tube digestif la partie interne de la tunique est remplie de granulations brunes. Le thorax est très dilaté, presque sphérique, il mesure 1,2 mm de long et 1 mm de large ; le pédoncule œsophagorectal est très allongé : 2 à 2,5 mm pour une largeur maximale de 0,15 mm. La région stomacale mesure environ 1 mm de long sur 0,7 mm de large. Les tentacules, 16 environ, sont disposés sur plusieuis rangs, les plus grands étant les plus internes. La branchie comporte 6 rangs complets de stigmates ; un 7 e , le plus anté- 1300 FRANÇOISE MONNIOT rieur, n’est présent que dorsalement. Les sinus transverses sont élevés et portent six longues papilles pointues qui forment le raphé. 11 y a une vingtaine de stigmates par demi-rangée. Bien que n’étant pas adultes, les zoïdes ont une branchie dont la croissance est sinon ter¬ minée du moins très ralentie. Par contre, les branchies des deux grandes espèces présentes aux Açores ont une croissance très active. L’estomac a une forme cubique. Il est caché par une accumulation de granulations blanc opaque. Les gonades n’étaient pas développées. La présence de ces granules semble indiquer qu’à cette période l’espèce est en état de repos physiologique, le cycle sexuel étant probablement terminé. Remarques La systématique du genre Clavelina et des genres proches tel que Pycnoclavella est confuse. L’espèce des Açores n’est pas C. nana Lahille, 1890, des côtes de la Manche et de Méditerranée. Elle se rapproche beaucoup de P. aurilucens Garstang, 1891, de Plymouth, et de P. minuta Millar, 1953, de la Côte de l’Or (Ghana). La structure de la colonie est très semblable à celle décrite en détail par Trason, 1963, de P. stanleyi Berrill et Abbott, 1949, des côtes de Californie. Cystodytes dellechiajei (Délia Yalle, 1877) Stations : P5 — P7 — P10 — Pli — P12 — P21 — P27 — P28 — P29 — P32 — P33 — P34 — P35 — P38 ; 49 — 62. Cette espèce est commune à faible profondeur dans toutes les îles des Açores. Elle se présente sous forme de coussinets peu étendus ne comprenant parfois que quelques zoïdes. Deux stations étendent la répartition des Cystodytes dellechiajei en profondeur : un dragage entre 215 et 225 m de profondeur (st. 49) et l’autre entre 735 et 800 m de profondeur (st. 62). Les animaux à ces profondeurs sont exactement semblables à ceux récoltés en plongée. La structure des spiculés et leur densité sont les mêmes. L’espèce serait non seulement cosmopolite, mais également eurybathe. Cystodytes planus n. sp. (Fig. 4) Station : 181. 450 à 620 m près de Sao Miguel. La seule colonie récoltée s’étendait sur une pierre. Elle mesurait 8 cm de long sur 3 cm de large. L’épaisseur de la colonie est inférieure à 1 mm entre les zoïdes et égale à 2 mm au niveau des capsules. L’aspect de ce Cystodytes est tout à fait particulier : les zoïdes ne sont pas perpendiculaires au substrat mais couchés. Il n’a pas été possible de localiser les orifices des siphons à la surface de la colonie. La tunique est entièrement transparente, glaireuse. Les zoïdes sont très espacés (d’au moins 5 mm). Ils sont entourés d’une capsule de spiculés incomplète. Ces spiculés sont ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1301 discoïdes, plats, très peu calcifiés. Leur diamètre moyen est de 400 à 500 p mais il peut atteindre 700 p. Il en existe 2 ou 3 couches au plus, imbriquées pour former des capsules autour des zoïdes. Cependant, à la différence des autres espèces de Cystodytes, la capsule qui couvre une partie du thorax et l’abdomen n’existe que sur la partie supérieure de la colonie. Elle s’interrompt sur la partie du zoïde qui est au contact du substrat. Les zoïdes ne sont séparés de la roche que par un film très mince de tunique. Fig. 4. — Cystodytes planus n. sp. : A, zoïde entier ; B, tube digestif ; C, gonade mâle. Les zoïdes sont tous très contractés et beaucoup sont très abîmés. Il est donc difficile d’évaluer leur taille (fig. 4, A). Les deux siphons tubulaires sont courts, bordés de 6 lobes obtus. Les tentacules coronaux, implantés sur un seul cercle, sont peu nombreux : une douzaine de deux ordres, et peut-être de très petits entre eux. 251, 2 1302 FRANÇOISE MONNIOT La paroi du manteau sur le thorax n’est pas très épaisse ; elle porte 9 à 10 faisceaux musculaires longitudinaux de chaque côté. La branchie comprend 4 rangs de stigmates et environ 25 stigmates par demi-rangée (fîg. 4, A). Les stigmates sont étroits, allongés. La partie postérieure de la branchie reste imperforée (fig. 4, A) ce qui est très fréquent d’ailleurs chez les Polycitoridae. L’endostyle droit, large mais peu épais, se prolonge assez loin sous les rangs de stigmates. Le raphé est composé de 3 papilles courtes à peine décalées à gauche. L’abdomen est replié sous le thorax. Il est beaucoup plus petit que lui ; même chez les individus où le thorax est très contracté, il ne mesure que le tiers de la longueur totale du corps. L’œsophage est long. L’estomac sphérique est parfois marqué d’une ornementa¬ tion en « côtes de melon » (fig. 4, B), mais chez les individus contractés il apparaît presque toujours lisse. L’intestin moyen porte un renflement constant tout de suite après la pre¬ mière courbure intestinale. Le rectum se replie contre l’estomac pour former une boucle digestive très fermée ; il est large, sans différenciations particulières. L’anus s’ouvre au niveau du 2 e ou 3 e rang de stigmates. Les gonades sont peu volumineuses dans la colonie observée. La gonade mâle est cons¬ tituée d’une rosette de 3 ou 4 lobes testiculaires plus ou moins allongés (fig. 4, C), mais il n’y en a parfois que 2. Le spermiducte suit le rectum. L’ovaire est visible chez quelques zoïdes sous forme d’un gros ovocyte. Je n’ai pas vu, pour cette colonie, de testicules pré¬ sents en même temps que l’ovaire dans un même zoïde. Les larves sont incubées dans une dilatation de la cavité cloacale, mais sans déforma¬ tion importante de la paroi thoracique. Les larves peu développées ne permettent pas une étude de détail. Elles mesurent 700 p, de diamètre, sans compter la queue qui est longue et fait une fois et demie le tour du corps. Il existe 3 ventouses disposées en triangle. Il n’y a pas d’ocelle mais seulement un otolithe. Cette espèce de Cystodytes se distingue de toutes les autres par l’allure de la colonie et la position des zoïdes. Elle en diffère également par son très petit nombre de lobules testiculaires : 1 à 4, les autres espèces en possèdent au moins 8. L’absence d’ocelle chez la larve semble indiquer qu’il ne s’agit pas d’une espèce littorale récoltée accidentellement en profondeur. Cystodytes planus n. sp. est très certainement une espèce bathyale. Les différences ana¬ tomiques qu’elle présente avec C. dellechiajei ne permettent pas de dire qu’il s’agit d’une forme de profondeur de cette dernière espèce, puisque C. dellechiajei a été trouvé aux Açores à une profondeur plus grande, sans modifications anatomiques. Eudistoma angolanum Michaelsen, 1915 Polycitor ( Eudistoma) angolanus Michaelsen, 1915. Stations : L1 — P3 — P4 — P5 — P10 — Pli — P12 — P21 — P26 — P27 — P32 — P38. Il est curieux de remarquer que cette espèce a été récoltée à peu près partout aux Açores, mais exclusivement en plongée, alors que de nombreux dragages peu profonds ont été effectués. L’espèce doit être limitée à une zone très littorale. Les colonies sont dures, incrustées de sable de façon très dense surtout à leur base. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1303 Généralement, elles sont disposées en coussinets, mais parfois des lobes capités à incrus¬ tation plus faible se détachent de la colonie. La coloration à l’état vivant va du gris-bleu au bleu, jusqu’au pourpre. Elle disparaît immédiatement dans les fixateurs. L’anatomie des zoïdes correspond bien aux descriptions de Millar en 1953 et 1957. Les colonies des Açores ont des zoïdes assez petits, ne dépassant pas 5 mm de long. Le tho¬ rax est court, les deux siphons 6-lobés. On compte une vingtaine de stigmates par demi- rangée. Œsophage et rectum sont longs ; l’estomac est arrondi, très postérieur ; l’intestin est divisé en deux portions renflées nettes. Le rectum est très long. L’anus s’ouvre au niveau du 2 e rang de stigmates. La glande pylorique, peu visible étant donné l’état de contraction des zoïdes, s’étend sur le rectum en face et un peu au-dessus du niveau de l’estomac. Elle est constituée de quelques tubules parallèles au rectum. La gonade mâle est localisée dans le fond de la boucle intestinale. Il y a une vingtaine de lobules répartis en 2 groupes à gauche et à droite du tube digestif ; les canaux qui en sortent restent individualisés sur une petite distance et se rejoignent sous l’estomac en un spermiducte large. Les canaux spermatiques traversent donc la boucle intestinale. L’ovaire n’offre aucun caractère particulier, il est situé à gauche de la boucle digestive et ne comprend généralement qu’un gros ovocyte. Les zoïdes sont alternativement mâles et femelles. Les larves sont incubées dans la cavité cloacale qui peut en contenir jusqu’à 3 dans les colonies des Açores. Ces larves possèdent un ocelle et un otolithe. Chez certaines larves on observe les papilles latérales figurées par Millar en 1953, mais situées plus près des ventouses. Chez d’autres larves, les papilles épidermiques se situent normalement entre les 3 ampoules de fixation. L’espèce est commune aux Açores, ce qui ne représente pas une extension considérable de l’aire de répartition de l’espèce qui va déjà de l’Afrique du Sud au Sénégal. Les zoïdes sont tout à fait comparables à ceux que j’avais observés en provenance du Sénégal. Distaplia corolla n. sp. (Fig. 5) Stations : P8 — P10 — Pli — P12 - P13. Ile de Faial de 1 à 10 m. Les colonies ont une forme tout à fait caractéristique. Elles se présentent en lobules cylindriques isolés ou coalescents. Chaque lobe est constitué d’une rosette de 8 à 20 zoïdes, disposés en couronne autour d’un cloaque commun central à ouverture circulaire. Les colonies ont une couleur vive, jaune vif ou orange, qui dépend de l’âge des zoïdes. L’épais¬ seur des colonies est voisine de 1 cm. Cette espèce, très facilement reconnaissable en plongée par sa forme et sa couleur, n’est présente aux Açores qu’à l’île de Faial. Il s’agit certainement d’une espèce impor¬ tée, très littorale. Les zoïdes (fig. 5, A-B) ont une taille qui varie beaucoup selon leur âge ; ils atteignent 2,5 mm de hauteur totale. Le siphon buccal a un bord circulaire non lobé. Le siphon cloa- cal peut revêtir deux formes : chez les zoïdes âgés, il est largement ouvert, surmonté d’une languette longue dont l’extrémité libre est tridentée (fig. 5, A). Chez les zoïdes de la géné- 1304 FRANÇOISE MONNIOT Dislaplia corolla n. sp. : A, zoïde à thorax âgé ; B, zoïde à thorax jeune ; C, larve, ration suivante, le siphon cloacal est petit, circulaire, en simple trou (fig. 5, B). Le manteau est fin et porte sur le thorax une abondante musculature oblique (fig. 5, B). Il y a 4 rangs de stigmates, qui comprennent chacun 20 stigmates en moyenne de chaque côté, recoupés d’un sinus parastigmatique. Le raphé est constitué de 3 languettes courtes, de longueur inférieure au tiers de la longueur d’un stigmate. La cavité cloacale est réduite. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1305 Le tube digestif forme une boucle non tordue. L’œsophage est long et large. L’estomac, fusiforme, a une paroi lisse, il s’amincit pro¬ gressivement vers l’arrière pour passer à l’intestin moyen sans transition nette, sauf dans quelques cas lorsque l’abdomen est contracté (fig. 5, A, B). De même, le rectum n’est pas vraiment séparé de l’intestin, il est rectiligne. L’anus bilobé débouche au niveau du 3 e sinus branchial transverse. Les gonades sont situées dans la boucle intestinale, à sa droite. Le testicule est formé d’une rosette de lobes pétaloïdes au centre de laquelle prend naissance le spermiducte commun. Le canal mâle suit ensuite le rectum jusqu’à l’anus. L’ovaire ne comprend qu’un ovocyte dans tous les zoïdes examinés ; il est situé à droite du testicule, en grossissant il devient postérieur et se développe dans un diverticule du manteau appendu au centre du testicule. Les embryons sont incubés individuellement dans des poches incubatrices situées à côté des zoïdes. Il n’y avait pas de liaison entre ces poches incubatrices et des zoïdes parents. Il semble que les zoïdes dégénèrent avant le développement total de l’embryon. Le têtard possède 3 grosses ventouses disposées en triangle, qui portent chacune à leur base un diverticule épidermique bilobé puis trilobé (fig. 5, C). Le têtard a une branchie déjà percée de 4 rangs de stigmates. Il a un ocelle et un otolithe. Le tube digestif est formé. La larve est gemmipare. Il n’y a qu’un bourgeon à ce stade, très peu évolué. Il faut signaler chez cette espèce de Distaplia, comme chez les autres espèces du genre, une grosse ampoule pylorique située entre le testicule et le cœur et un canal pyloricjue très net qui relie cette ampoule à l’estomac. Distaplia corolla n. sp. se rapproche beaucoup de D. bermudensis Van Name, 1902, mais se distingue facilement des autres espèces de Distaplia par les caractères suivants : colonies formées de lobes accolés dont les zoïdes sont disposés en rosette, estomac lisse, cavité incubatrice ne contenant qu’un embryon, et languette cloacale absente, ou triden- tée. Les similitudes avec D. bermudensis sont, en revanche, importantes. Les différences sont peu marquées mais nombreuses. Chez l’espèce des Bermudes, les colonies sont moins régulièrement disposées en rosette de zoïdes, plus étendues, vraiment encroûtantes. Elles ne sont ni jaunes ni orange, mais vont du rose au pourpre jusqu’au marron avec souvent des grains pigmentaires blancs. La languette cloacale de D. corolla est tridentée quand elle existe, elle est simple chez D. bermudensis. L’estomac de cette dernière espèce est plus brusquement rétréci du côté pylorique. Les testicules sont disposés en une rosette plane en forme de marguerite chez D. corolla et en amas irrégulier chez D. bermudensis. Enfin, chez notre nouvelle espèce les larves sont incubées dans des poches incubatrices individuelles ; elles sont au moins deux fois plus grosses que chez D. bermudensis. Leurs papilles adhésives sont élargies à leur base en 2 ou 3 lobes, ce qui n’est pas le cas chez les larves que j’ai récoltées aux Bermudes. L’ensemble des différences citées ci-dessus m’amène donc à créer une espèce nouvelle. Il est cependant fort possible que D. corolla provienne de la fixation de certains caractères génétiques d’une forme de D. bermudensis importée aux Açores et qui aurait réussi à s’y maintenir, dans un port, dans une zone peu agitées. D. corolla est très commune à Faial entre 1 et 10 m de profondeur, mais elle n’a été trouvée au cours d’aucune autre plongée dans les différentes îles des Açores. 1306 FRANÇOISE MONNIOT Station : 32, 230 m. Sycozoa melopepona n. (Fig. 6) sp. La seule colonie de la collection est très abîmée. Elle mesure 5 cm de haut et 2,5 cm de diamètre environ. Les zoïdes sont disposés tout le long de la colonie. L’ouverture cloa- cale commune est située à une extrémité de la colonie. L’autre extrémité est déchirée, il n’est donc pas possible de savoir si elle était pédonculée, Cependant, des débris sédimentaires divers sont fixés sur la tunique de ce côté, ce qui pourrait faire penser à une colonie sessile. Le centre de la colonie est plein. Les zoïdes mesurent en moyenne 3 mm. Les dimensions de l’abdomen ne dépassent pas un quart de la longueur totale du corps pour les individus en extension (fig. 6, A). Le siphon buccal est irrégulièrement lobé, divisé en 6 languettes elles-mêmes plus ou moins recoupées. Ce siphon est très court. Le siphon cloacal est largement ouvert et laisse la plus grande partie de la branchie à découvert (fig. 6, A). Il se prolonge au niveau du 1 er rang de stigmates par une languette large, plus ou moins longue selon les zoïdes. Le bord distal de la languette est droit ou en pointe, mais non lobé. Les tentacules sont très courts, en un rang situé tout à fait à la base du siphon buccal. J’en ai compté une douzaine au plus. La branchie possède 4 rangs de stigmates séparés par des sinus transverses en lames élevées. Les stigmates sont étroits et hauts. On en compte en moyenne une vingtaine par rangée totale. Le nombre de stigmates est toujours plus élevé à droite (de 11 -j- 9 à 13 -f- 7). Ils sont plus nombreux dans les l re et 2 e rangées que dans les rangées moyennes. Le raphé est nettement décalé à gauche, les 3 languettes sont triangulaires, un peu moins longues que les stigmates (fig. 6, A). La branchie comprend à sa base une large zone imperforée sous laquelle se replie l’en- dostyle (fig. 6, A). Le manteau est très fin au niveau du thorax. Il est très fragile. On y distingue seule¬ ment 3 ou 4 fibres musculaires longitudinales très minces et 2 fibres transversales au-des¬ sus des intervalles entre les 1 er et 2 e rangs de stigmates et les 2 e et 3 e rangs. Il est possible que des muscles supplémentaires existent, mais l’état de la colonie ne permet pas de les mettre en évidence. Le pédoncule œsophago-rectal est très étroit mais peu allongé. L’abdomen de tous les individus examinés ne contenait jamais de gonades, bien que la colonie soit très riche en larves. L’œsophage est large. L’estomac est sphérique, très petit. Il apparaît généralement lisse. Cependant il est divisé en côtes, comme un melon, mais les côtes sont basses et souvent effacées (fig. 6, B-C). L’intestin moyen s’amincit pro¬ gressivement jusqu’au rectum. Le rectum est long, sans forme particulière, mais il est toujours élargi à son départ et nettement séparé de l’intestin par une constriction (fig. 6, B-C). L’anus bilabié débouche à la base du 3 e rang de stigmates (fig. 6, A). Les larves, très grosses (fig. 6, D), sont incubées individuellement dans des sacs ovigères. Le lien entre la poche incubatrice et le zoïde doit être rompu très tôt : pour tous les indivi- ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1307 Fig. 6. — Sycozoa melopepona n. sp. : A, zoïde entier; B et C, détails du tube digestif ; D, larve. dus observés il n’a pas été possible de le mettre en évidence. Les larves n’ont pas d’ocelle mais seulement un otolithe. Les 4 rangées de stigmates sont individualisées très tôt (fig. 6, D). Les 3 ventouses sont disposées aux sommets d’un triangle. Il n’y a aucune différenciation de papilles épidermiques. Il n’y a pas de trace de bourgeonnement, même chez les têtards possédant déjà une branchie perforée. Cette espèce est la première du genre récoltée dans l’Atlantique Nord. Elle se diffé¬ rencie des formes déjà décrites surtout par la forme de l’estomac légèrement côtelé, sa mus¬ culature thoracique particulièrement faible et peut-être par la forme sessile de la colonie. Elle appartient à une faune bathyale, ce qui explique qu’elle n’ait été trouvée qu’une fois jusqu’à présent. Protoholozoa pigra n. sp. (Fig- 7) Station : 180, de 1 070 à 1 235 m. Les colonies se présentaient sous forme de lambeaux, assez faiblement fixés à la roche. La tunique transparente est molle et enrobe largement les zoïdes, vivement colorés de ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1309 rouge, jaune ou blanc, ces couleurs disparaissant à la fixation. Sur le vivant, seuls les zoïdes sont visibles tellement la tunique est transparente. Dans le formol la tunique s’opacifie. Les zoïdes, dans la colonie, sont tous alignés sur une droite et ils ont tous la même orientation. Ils sont couchés sur le support rocheux, à égale distance les uns des autres, sur leur face ventrale. Les deux siphons sont donc ouverts à la surface de la colonie. L’épais¬ seur de la colonie varie de 3 à 4 mm, la largeur totale est de 1 cm tandis que la longueur atteint 8 cm (mais la colonie était déchirée). Chaque zoïde semblait libre dans une logette de la tunique, retenu seulement par des prolongements vasculaires ramifiés, au moins aussi longs que les zoïdes. Il n’y a évidemment pas de cloaque commun. Le siphon buccal est ondulé sans que l’on puisse vraiment distinguer de lobes. Il est large et le sphincter musculaire est peu développé. Le siphon cloacal a un diamètre variable selon les zoïdes, parfois égal à la hauteur totale du thorax. Son bord libre est festonné. Le sphincter qui le ferme est également assez faible (fig. 7 A). L’endostyle est doublé sur toute sa longueur pai un fort faisceau musculaire qui s’ame¬ nuise vers l’œsophage. Les parois du thorax portent des fibres obliques irrégulières qui se raccordent au faisceau musculaire ventral. Quelques fibres musculaires longitudinales courtes se situent sous le siphon cloacal, sur la face dorsale (fig. 7, A-D). Le manteau a une paroi épaisse, peu transparente. Les tentacules coronaux sont digitiformes, de longueur semblable. J’en ai compté de 5 à 9 selon les zoïdes (fig. 7, B-C-D). Le sillon péricoronal est situé très près des tenta¬ cules. Il est bordé d’une lame tissulaire haute. Le tubercule vibratile s’ouvre par une fente transversale ou oblique au sommet d’un gros bouton. Il n’y a pas d’échancrure du sillon péricoronal à ce niveau. Le sillon péricoronal n’est pas relié au raphé (fig. 7, D). La branchie est très variable d’un zoïde à l’autre (fig. 7, B-C-D). Elle possède toujours 3 sinus transverses épais, libres dans la cavité thoracique sauf à leurs extrémités ventrales où ils sont reliés au manteau, près de l’endostyle. Ces sinus transverses sont reliés sur la ligne dorsale par une bande tissulaire qui porte les 3 papilles du raphé. Cette bande dorsale est reliée au manteau sous le tubercule vibratile et à l’entrée de l’œsophage. Les languettes du raphé sont ciliées ainsi que le bord interne des lames constituées par les sinus transverses. La ciliature des sinus transverses semble s’interrompre avant la jonction avec l’endostyle. Des ponts tissulaires relient les sinus transverses entre eux, d’autres s’insèrent sur le manteau à partir du 1 er et du 3 e sinus tranverse. Ces trabécules, eux, ne sont pas ciliés. Donc, il y a entre le manteau sous le sillon péricoronal et le 1 er sinus transverse un trabé¬ cule de chaque côté, entre le 1 er et le 2 e sinus transverse 1 (rarement 2) trabécule de chaque côté ; entre le 2 e et le 3 e sinus transverse, 1 (rarement 2) trabécule de chaque côté ; entre le 3 e sinus transverse et le manteau à la base du thorax, 1 trabécule de chaque côté. En général, ces « ponts » sont dans le prolongement l’un de l’autre, mais ce n’est pas toujours le cas (fig. 7, B-C-D). L’abdomen (fig. 7, A-E) a une longueur à peu près égale à celle du thorax. Il contient la boucle intestinale et les gonades. La boucle intestinale est largement ouverte, sans tor¬ sion chez les animaux en extension. L’œsophage est simple et droit, assez étroit. L’estomac est volumineux en forme d’olive ; le cardia n’est pas exactement opposé au pylore. La sur- 1310 FRANÇOISE MONNIOT face externe de l’estomac est lisse, la face interne est finement plissée. Ces côtes longitudi¬ nales apparaissent surtout par transparence après coloration. La paroi de l’intestin est mince. Peu après l’estomac, l’intestin porte une constriction, puis s’élargit à nouveau, se retrousse et passe sans transition au rectum (fig. 7, E). L’anus a 2 lèvres et s’ouvre tout à fait à la base de la branchie. Sur la face gauche de l’abdomen, au milieu de la boucle intestinale, naissent 1 ou 2 processus vasculaires (fig. 7, E). Les gonades sont situées dans la boucle intestinale à droite. Le testicule a une forme de mûre (fig. 7, A-E). 11 est constitué d’une soixantaine de lobules testiculaires arrondis. L’ovaire est situé sur le testicule, le long du spermiducte qui est droit et longe le rectum. Les ovocytes n’étaient que très peu développés dans la colonie observée. Le rectum et une grande partie de l’intestin sont entourés de vésicules de la glande pyloriqut. Les canaux pyloriques qui traversent la boucle intestinale sont eux-mêmes élargis en ampoules successives. Ils se réunissent en un très court canal commun qui débouche dans l’estomac au-dessus du pylore. Cette nouvelle espèce de Protoholozoa diffère par de nombreux points de celle de Kott, 1969. L’allure de la colonie est très éloignée de celle de P. pedunculata puisque celle des Açores est plate, encroûtante, à zoïdes distants les uns des autres, et celle de Kott pédon- culée. Les zoïdes de P. pigra ont 3 sinus transverses, ceux de P. pedunculata 2 seulement. Les testicules sont beaucoup plus nombreux chez P. pigra. Malheureusement, la colonie des Açores ne contenait pas de larves. P. pigra est la deuxième espèce connue du genre et si la morphologie des deux ani¬ maux n’est pas très éloignée, leur localisation géographique n’a aucun rapport. P. pedun¬ culata vit dans le sud-est de l’océan Pacifique, dans la région antarctique, à grande pro¬ fondeur entre 3 000 et 5 000 m. P. pigra n. sp. n’est pour l’instant connue que d’une station près des Açores à un peu plus de 1 000 m de profondeur. Notre connaissance des substrats rocheux profonds est beaucoup trop faible encore pour que l’on puisse en tirer une conclu¬ sion. Famille des OrDEMNiDAE Didemnum lahillei Hartmeyer, 1909 (Fig. 11, A) Synonymie : voir Laf argue 1973. Stations : L1 — Pli — P32 — P42. Les colonies sont encroûtantes, minces, translucides, à surface lisse. Leur couleur est beige rosé ; elle est due aux zoïdes visibles par transparence. Les spiculés sont très inégale¬ ment répartis dans les colonies, par taches et entre les zoïdes (fig. 11). Les zoïdes sont tels que les a décrits Lafargue en 1968. Pour les exemplaires des Açores, il faut cependant remarquer un appendice fixateur assez court qui s’insère bas sur le pédon¬ cule œsophago-rectal. Les organes thoraciques latéraux sont très petits, situés au niveau du 3 e rang de stigmates, environ à égale distance du siphon cloacal à petite ouverture et de l’endostyle. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1311 Les larves non gemmipares ont un ocelle et un otolithe ; elles possèdent 3 ventouses séparées par 4 papilles longues. Les colonies des Açores ne diffèrent en rien des colonies récoltées en Méditerranée ou sur la côte atlantique d’Europe. La présence de D. lahillei dans la zone tout à fait littorale des Açores est normale. Didemnum aff. maculosum (Milne-Edwards, 1841) (Fig. 8 et 11, B) Synonymie : voir Lafargue, 1973. Stations : P2 — P4 — P5 — P7 — P15 ; 21 — 41 — 63 — 79 — 105 — 106 - 145 — 156 — 180 — 181 — 207 — 216 — 257. Des Didemnum existent dans d’autres stations avec le même aspect, mais ils n’ont pas été inclus ici parce qu’ils n’ont pas de gonades, ou pas de larves. Leur détermination n’est donc pas possible. L’espèce récoltée en abondance aux Açores, de 0 à 1 650 m, se rapproche beaucoup de D. maculosum, mais il est difficile de la rapporter avec certitude à cette espèce. Les colonies sont toujours d’un blanc pur, à surface lisse, plus ou moins étendues, fixées sur la roche ou sur des éponges dures. L’épaisseur des colonies ne dépasse pas 2 à 3 mm, mais varie énormément. La consistance est soit très dure et cassante quand les colonies ont des systèmes cloacaux peu étendus, soit plus molle quand la tunique est composée de deux couches minces reliées par des travées où sont logés les zoïdes. L’aspect ressemble alors à ce que l’on trouve chez les Lissoclinum. La tunique est toujours densément remplie de spiculés. Ces spiculés (fig. 11, B) ont des formes d’étoiles, à nombre de rayons variable et de tailles très inégales au sein d’une même colonie. Les zoïdes sont exactement les mêmes dans les stations profondes que dans les stations littorales. Le siphon buccal a 6 lobes aigus. Le siphon cloacal est toujours très petit, arrondi, parfois presque fermé jusqu’à former un très court tube. Le manteau est musclé et épais sur le thorax. La branchie porte, elle aussi, des fibres musculaires et plus particulièrement un faisceau musculaire longitudinal de chaque côté du corps (fig. 8, A). Les organes thora¬ ciques latéraux sont la plupart du temps invisibles. Ils sont très petits, situés entre le 3 e et le 4 e rang de stigmates, arrondis ou en cupules, verticaux ou obliques, parfois même hori¬ zontaux (fig. 8, A). L’appendice fixateur est court, inséré à la base de la branchie et non sur le pédoncule œsophago-rectal. Le tube digestif présente une double courbure (fig. 8, B et C). La glande pylorique peu visible se compose de très petites vésicules entourant l’intestin moyen. Deux canaux pvloriques enserrent le rectum de chaque côté et se réunissent en un canal commun qui traverse l'abdomen et débouche au tiers inférieur de l’estomac (fig. 8 A et C). Les gonades (fig. 8 A et C) sont situées à gauche du tube digestif. Le testicule unique est couvert de 8 tours de spire du spermiducte. Quand le zoïde est âgé, les deux derniers tours s’élargissent ainsi que la portion ascendante du spermiducte. 1312 FRANÇOISE MONNIOT Fig. 8. — Didemnum afî. maculosum : A, zoïde entier ; B et C, deux aspects de la boucle intestinale, D, larve. L’ovaire se place un peu au-dessus du testicule du côté stomacal. Le testicule dégé¬ nère avant la croissance de l’ovocyte. Les larves (fîg. 8, D) ont 2 ventouses de fixation seulement et 6 papilles épidermiques ; ces papilles peuvent parfois se dédoubler. Dans les stations profondes, l’otolithe seul est présent alors que l’ocelle figure à côté de lui dans les colonies littorales. Il est possible que toutes les formes classées ici sous le nom de D. aff. maculosum appar¬ tiennent à deux ou trois espèces ; mais je n’ai pu trouver aucune différence valable dans l'anatomie des zoïdes d’une colonie à l’autre. D. maculosum étant variable, capable de s’adapter à des conditions diverses de tempé¬ rature, d’agitation ou de profondeur, je crois que les colonies des Açores doivent apparte¬ nir à cette espèce. Si ce n’était pas le cas, les espèces seraient vraiment très voisines. La présence de D. maculosum aux Açores n’étend pas Faire de répartition de l’espèce qui est très vaste. 1314 FRANÇOISE MONNIOT Polysyncraton asterix n. sp. (Fig. 9 et 11, C et D) Station : 38. 2 colonies. Les colonies sont minces, 1 mm à 1 mm 1/2, l'une fixée sur un morceau de roche vol¬ canique friable, l’autre sur une éponge. La surface des colonies est rugueuse. Les siphons buccaux sont marqués par de petits points blancs (accumulations de spiculés), régulièrement répartis. Quelques siphons cloa- caux sont visibles. Ils sont bordés de 6 ou 7 lobes densément incrustés de spiculés. La tunique se divise en 3 couches : la couche supérieure très résistante comprend de nombreux spiculés, mais ils ne sont pas extrêmement denses. La couche moyenne qui contient les zoïdes est surtout constituée de travées où sont logés les thorax et les abdomens, entre lesquelles circule l’eau. Les lacunes cloacales sont grandes et disposées comme chez les Lissoclinum ou les Diplosoma. La couche basale ne contient pas de zoïdes en général ; elle enserre parfois la base des abdomens, c’est-à-dire la partie qui contient les gonades. Les couches moyenne et dorsale de la tunique ne portent que très peu de spiculés. Les spiculés sont assez gros, très réguliers, à nombreuses pointes bifides (fig. 11, D). Dans les colonies iécoltées aux Açores, les zoïdes montraient tous un bourgeonnement actif et une grande activité des gonades. Peu de zoïdes avaient des thorax bien développés, presque tous étaient représentés par des bourgeons (fig. 9, B). La description des thorax est donc limitée à quelques zoïdes. Le siphon buccal est circulaire sans que l’on puisse voir de divisions en lobes. Il existe généralement 16 tentacules coronaux en deux ordres. Le thorax est grand, deux fois plus grand que l'abdomen environ (fig. 9 A). La Fran¬ chie est presque entièrement nue, sauf dans la région de l’endostyle. En effet, l’orifice cloa- cal très grand va du 1 er rang de stigmates à la base du 4 e rang. Les organes thoraciques latéraux (fig. 9, A) sont très glands, sphériques, situés entre le 1 er et le 2 e rang des stigmates, à mi-distance entre l’endostyle et la ligne dorsale. Ils sont saillants et contiennent de nombreux spiculés. En moyenne leur taille est égale à la hauteur d’un rang de stigmates. Le raphé est constitué de 3 languettes médio-dorsales minces, de longueur égale à celle d’un stigmate. Il est difficile de déterminer si les zoïdes ont une vraie languette cloacale (fig. 9, A). En effet, le fiord supérieur de l’ouverture cloacale est épaissi, et ourlé chez certains zoïdes, un peu plus saillant chez d’autres. Il est possible que la languette cloacale soit plus grande chez d’autres spécimens, mais elle est presque inexistante ici. Les bourgeons thoraciques n’ont pas de languette. Il n’y a pas d’appendice fixateur, ni chez les bourgeons, ni sur les thorax bien développés (fig. 9, A-B). Le pédoncule œsophago-rectal n’est pas très long, mais extrêmement mince. Le tube digestif est très simple. L’œsophage est élargi et possède un éperon ventral assez net chez les zoïdes en bourgeonnement. Il ne m’est pas possible de dire s’il s’agit d’un début de bourgeonnement, ou d’une forme particulière de l’œsophage (fig. 9, B). L’estomac est gros, sphérique, avec une gouttière externe bien marquée (fig. 9, C). L’intestin moyen n’a pas de différenciations particulières ; il est court. Le rectum, large, ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1315 est presque rectiligne. La boucle intestinale est plane et largement ouverte. Il n’y a pas de torsion secondaire, comme c’est fréquemment le cas chez les Didemnidae. L’anus bilabié débouche à la base du 4 e rang de stigmates. La glande pylorique n’est pas visible, mais le canal pylorique traverse la boucle intes¬ tinale au niveau de la partie médiane de l’estomac (fig. 9, E). Les gonades ne sont pas situées dans la boucle intestinale, mais au-dessous de celle-ci, à droite (fig. 9, B-D-E). Les testicules sont très variables. Leur taille peut différer énormé¬ ment. On en compte de 1 à 4, mais le nombre le plus fréquent est 3. Chaque lobe est piri- forme. Le spermiducte commun débute au pôle le plus postérieur de l’animal. Il fait ensuite 2 tours 1/2 seulement dans tous les zoïdes observés. Le dernier tour de spire est très élargi. Le speimiducte suit ensuite le rectum et s’ouvre sous l’anus (fig. 9, B-D-E). Dans les zoïdes observés je n’ai vu qu’un ovocyte (fig. 9, C). L’œuf peut devenir très gros et atteindre le diamètre total de l’abdomen. Il n’y avait pas de larves dans les colonies observées. Cette espèce se rapproche surtout de Polysyncraton canetense Brément, 1913, par ses organes thoraciques latéraux, ses gonades à droite, la structure de la colonie. Elle en diffère par la réduction de la languette cloacale, le nombre très faible de testicules et le nombre de tours du spermiducte : 2 au lieu de 4 ou 5. La différence la plus visible est la position des gonades sous la boucle intestinale chez Polysyncraton asterix n. sp., qui n'est pas due à un développement accentué des testicules ou des œufs puisque, même chez les individus où les testicules sont encore très petits, ils sont déjà situés dans une poche du manteau sous l’intestin. Ces différences ne sont peut-être dues qu’à une localisation géographique différente, ou à la profondeur assez grande à laquelle vivent ces animaux (350-400 m). Pour l’instant il me paraît préférable de créer provisoirement une espèce plutôt qu’une variété pour sim¬ plifier une nomenclature déjà très complexe. Diplosoma listerianum (Milne-Edwards, 1841) Leptoclinum listericmum Milne-Edwards, 1841. Stations : PI — P4 — P5 — P7 — PB — Pli — P12 — P27 — P42. Ce Diplosoma se rencontre partout à faible profondeur aux Açores. Les colonies sont tantôt très claires, presque blanches, tantôt colorées de brun grâce au pigment contenu dans le manteau des zoïdes. La consistance de la tunique est également très variable, soit très molle et peu abondante, soit plus résistante et plus épaisse, les zoïdes sont alors moins visibles par transparence. Il n’est pas nécessaire de revenir ici sur la description des zoïdes qui n’ont aucun carac¬ tère distinctif aux Açores. Les récoltes effectuées à Biaçores montrent que l’espèce n’a été récoltée qu’en plongée, elle reste donc très littorale. Sa présence y est normale puisqu’elle a une très vaste réparti¬ tion géographique (Méditerranée et tout l’Est Atlantique.) 11 est fort possible que D. mac- donaldi Herdman, 1886, soit synonyme de D. listerianum. J’ai récolté aux Bermudes de très nombreux exemplaires de Diplosoma qui ne m’ont paru différer des formes européennes 1316 FRANÇOISE MONNIOT que par l’extension plus grande des colonies et le développement accru des pigments bruns. Je n’ai pu relever aucune différence anatomique. Une étude histologique ou génétique pour¬ rait seule régler ce problème. Si les espèces sont confondues, la répartition de Z), listerianum serait étendue à toutes les côtes de l’Atlantique et du Pacifique, tempérées et tropicales. Lissoclinum fragile (Van Name, 1902) Diplosomoides fragile Van Name, 1902. Lissoclinum weigelei Lafargue, 1968. Lissoclinum weigelei Medioni, 1970 ; Lafargue, 1973. Stations : P5 — P7 — P13 — P27 — P29 — P32 — P41 — P42. Cette espèce est très commune à faible profondeur, mais elle n’a pas été récoltée en dragage. Elle avait déjà été signalée à Punta Delgada par Lafargue, 1973. L’espèce, qui a été plusieurs fois décrite et figurée, ne sera pas réétudiée ici. J’ai comparé les échantillons des Açores à des récoltes que j’ai effectuées en Méditer¬ ranée, sur la côte atlantique française et aux Bermudes (station-type de l’espèce). Je n’ai trouvé aucune différence. L’espèce L. weigelei tombe donc en synonymie. L. fragile a donc maintenant une répartition étendue, en tous cas à tout l’Atlantique et probablement bien au-delà puisqu’il est signalé au Japon, en Malaisie et dans les îles du Pacifique (Eldredge, 1967). Lissoclinum perforatum (Giard, 1872) t Leptoclinum perforatum Giard, 1872. Lissoclinum argyllense Millar, 1950. Lissoclinum argyllense Lafargue, 1968. Lissoclinum perforatum Lafargue, 1973. Stations : PI — P5 — P7 — P10 — P12 — P27 — P29 — P32 — P34 — P41 — P42. Cette espèce est limitée à une zone très littorale puisqu’elle n’a été récoltée qu’en plongée. Elle a une couleur jaune ocre ou orangé pâle à l’état vivant. L. perforatum a déjà été signalé aux Açores par Lafargue, 1973. Sa présence n’est pas surprenante puisqu’il se trouve également en Méditerranée et sur la côte Atlantique d’Europe. Lissoclinum rubrum n. sp. (Fig. 10 et 11, E. F) Stations : 180 — 181. Les colonies sont encroûtantes, molles, mais adhèrent peu au support. La coloration est rouge vif. La colonie est constituée de deux couches minces superposées entre lesquelles se disposent des trabécules qui contiennent les zoïdes. Les zoïdes sont entourés d’une couche très mince de tunique. Les spiculés sont rares, dispersés à la surface de la colonie et autour ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1317 Fig. 10. — Lissoclinum rubrurn n. sp. : A, zoîde entier; B, thorax ouvert par la face ventrale ; C, boucle intestinale ; D, larve. des zoïdes. Par contre, toute la colonie est envahie de très nombreuses cellules à pigment rouge. Les zoïdes sont grands, et les thorax mesurent deux fois et demie la longueur de l’abdo¬ men. Le thorax est presque complètement dépourvu de manteau ; celui-ci ne couvre qu’une étroite bande ventrale au-dessus de l’endostyle. Les canaux cloacaux sont très spacieux. Le siphon buccal a 6 lobes à peine marqués. Les tentacules coronaux sortent par le siphon buccal et leur longueur les rend visibles à l’extérieur. Ils sont nombreux puisque certains zoïdes en comptent 16 longs et de petits entre eux. La languette cloacale est arron¬ die, très petite et très proche du ganglion nerveux et du siphon buccal (fig. 10,A). Le manteau ne porte pas de muscles apparents, il est difficile parfois de distinguer les organes thoraciques latéraux aliformes, de petite taille, situés contre l’endostyle entre le 2 e et le 3 e rang de stigmates (fig. 10, A). 251, 3 1318 FRANÇOISE MONNIOT Il y a 4 rangs de stigmates et 10 à 12 stigmates par demi-rang (fig. 10, B). Les languettes du raphé sont étroites et ne dépassent pas la hauteur d’un rang de stigmates. Elles sont peu décalées à gauche. Le dernier rang de stigmates est moins développé que les précédents. Il n’existe pas d’appendice fixateur. Le pédoncule œsophago-rectal est très court. L’ensemble de l’abdomen paraît très petit comparé au thorax. L’œsophage court, étroit, débouche dans l’estomac sphérique, à paroi lisse. L’intestin n’est pas subdivisé en plusieurs parties et passe sans transition au rectum. La boucle intestinale n’est pas tordue. L’anus débouche dans la cavité cloacale commune, au-dessus de la limite du man¬ teau à mi-hauteur du 4 e rang de stigmates. Les gonades sont situées à droite du tube digestif (fig. 10, A-C). Le testicule est consti¬ tué d’une seule ampoule sphérique d’où part un spermiducte fin et droit qui longe le rectum. L’ovaire est situé un peu au-dessus du testicule, à sa gauche. Les ovocytes mûrs descen¬ dent dans un diverticule du manteau sous la boucle intestinale où ils restent appendus. Le bourgeonnement a lieu sur l’abdomen : les deux bourgeons thoracique et abdominal prennent naissance au niveau de l’estomac. La larve (fig. 10, D) a une forme arrondie. En plus des 3 ventouses de fixation, elle porte 8 papilles épidermiques digitiformes de chaque côté. Elle n’a pas d’ocelle mais un petit otolithe. Les spiculés ont une forme étoilée régulière, mais le nombre de rayons est très variable ainsi que la taille des spiculés. Certains présentent des aspects de dissolution (fig. 11, F). Cette espèce a été récoltée entre 540 m et 1 235 m de profondeur. Elle est certainement bathyale (sa larve n’a pas d’ocelle). Elle ne se distingue pas particulièrement des Lissoclinum littoraux. 11 faut cependant remarquer l’ouverture cloacale très grande et la faible densité des spiculés. La coloration rouge est fréquente en profondeur. Les espèces littorales Les espèces littorales ont toutes été récoltées en plongée. Il faut souligner ici encore l’intérêt du scaphandre autonome pour la récolte d’animaux qui n’aurait pas été possible sans ce moyen. C’est le cas, par exemple, de Aplidiopsis atlanticus n. sp., Distaplia corolla n. sp., Aplidium bermudae, Didemnum lahillei, Lissoclinum fragile, Lissoclinum perfora- tum. Ces espèces ne supportent pas l’émersion et ne peuvent être récoltées à marée basse. Par contre, elles ne descendent pas en profondeur et la drague ne peut les atteindre. Parmi les espèces littorales, beaucoup sont connues sur les côtes d’Europe : ce sont les Didemnidae en général, Clavelina lepadiformis, Cystodytes dellechiajei, Polyclinum auran- tium. Ces espèces ont une répartition étendue, elles sont également présentes en Méditer¬ ranée et sur les côtes d’Afrique. D’autres espèces viennent de l’Ouest Atlantique : Apli¬ dium bermudae, Clavelina oblonga sont piésentes aux Bermudes. Leur transport est tout à fait possible, les latitudes des deux groupes d’îles étant peu éloignées. 11 y a peu d’espèces vraiment endémiques. Sidnyum appendiculatum semble pourtant en être un réel exemple, puisque les colonies sont extrêmement abondantes sur tous les supports rocheux des Açores, mais n’ont jamais été signalées en dehors de cette région. Fig. 11. — Spiculés de Didemnidae. A : Didemnum lahillei, X 2 300 ; B : Didemnum maculosum, x 450 ; C : Polysyncraton asterix , x 800 ; D : P. asterix , X 1 600 ; E : Lissoclinum rubrum, X 4 350 ; F : Lis- soclinum rubrum, X 4 000, spiculé en cours de dissolution. Ces photographies ont été exécutées au laboratoire d’Ecologie du Muséum National d’Histoire Naturelle. 1320 FRANÇOISE MONNIOT Pourtant l’espèce est assez eurybathe. Les espèces nouvelles ne sont pas forcément endé¬ miques. Distaplia corolla est très localisée au port de Horta et représente plutôt une impor¬ tation même si elle est ancienne. Les espèces bathyales L’abondance des espèces nouvelles de la collection peut surprendre ; mais il faut remar¬ quer que, parmi elles, beaucoup appartiennent à la faune bathyale. D’une part, les prélè¬ vements effectués jusqu’à présent sur la pente du talus continental étaient rares, peut-être encore plus rares que pour la faune abyssale. D’autre part, les Ascidies Aplousobranches de cette zone sont peu visibles et de petite taille. Si elles n’ont pas échappé au tri, elles sont la plupart du temps abîmées parce qu’elles sont détachées de leur support rocheux avant la fixation. Elles sont alors dans un tel état que leur étude n’est plus possible. Les espèces bathyales n’ont pas seulement l’intérêt d’être nouvelles, elles montrent que des genres qui n’avaient pas de représentants connus jusqu’à présent dans l’Atlantique tempéré y sont tout de même représentés. Ce sont en général des animaux qui vivent dans les eaux froides, condition qu’ils retrouvent en vivant en profondeur. C’est le cas dans cette collection pour les genres Ritterella, Sycozoa et Protoholozoa. Conclusion 11 n’est pas possible de dire que les Açores représentent un point géographique impor¬ tant pour la répartition des Ascidies Aplousobranches. La plupart des espèces déjà décrites viennent des côtes d’Europe, d’Afrique ou de la côte Est des États-Unis (en moins grand nombre). Ces espèces avaient déjà une large répartition. Une seule espèce est endémique. Quant aux espèces bathyales, la plupart sont nouvelles et il serait plus intéressant de con¬ naître leur répartition par rapport à la dorsale médio-Atlantique que par rapport aux îles des Açores. Pour l’instant il n’est pas possible de dire si cette faune s’est différenciée sur place en profondeur à partir d’espèces abyssales ou littorales, ou bien si leur transport dans la région est accidentel. S’il s’agit d’un transport, il n’a sûrement pas eu lieu depuis la zone bathyale du sud du golfe de Gascogne : les nombreuses campagnes de la « Thalassa » dans cette région auraient permis de trouver cette faune. Il faudrait donc supposer une importation plus lointaine. Tableau T. — Liste des plongées. Iles : ^ Espèces Stations : | f ^ Santa Maria 1 L! PI P2 P3 P4 Terceira P8 P) PIO Aplidium bermudae . + 4" + Sidnyum appendiculatum. . + + + + + + + Aplidiopsis atlanticus . + Polyclinum aurantium . Clavelina lepadijormis . Clavelina oblonga . + + Clavelina sp. + Cystodyles dellechiajei . + + Eudistoma angolanum . + + + + Distaplia corolla . + + Didemnum lahillei . + Didemnum afï. maculosum. . + + + Diplosoma listerianum . + + + + Lissoclinum fragile . + Lissoclinum perforatum. . . . + + + V bfi ë Faial 1-3 Sao Miguel PII PI2 PI3 P19 P20 w P15 P5 P27 P28 P29 P32 P33 P34 P35 P38 P41 P42 + + + + + -f. + + + + + + + + + + + + + + + + + + + -f- + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + Flores P21 P22 + + + 1322 FRANÇOISE MONNIOT Tableau IL — Liste Espèces Stations : i Profondeurs : j Flores 105 106 1650 105 Ile du Centre Terceira, S. jorge, Graciosa, Faial, Pico U 12 13 18 19 20 21 22 30 32 38 41 76- 220 190- 52- 57- 87- 131- 115- 250- 230 350- 450- 105 221 73 71 145 175 140 300 400 475 Aplidium sp. A. H" Aplidium sp. B . + Sidnyum appendiculatum . + + + + + + + + Aplidiopsis atlanticus . + Ititterella glareosa . 4- Cystodytes dellechiajei . Cystodytes planus . Sycozoa melopepona . + Protoholozoa pigra . Didemnum afï. maculosum . + + + + Polysyncraton asterix . + Lissoclinurn rubrum . ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1323 des stations de dragage. Banc Joao ! Iles de l’Est ^ Banc de Castro (Sao Miguel, Santa Maria, Formigas) j La Chapelle 49 60 62 63 79 2 142 143 145 156 166 167 180 181 207 208 216 257 220- 66- 736- 170- 360- 60- 103 61- 140 350 130 130 1069- 450- 69- 155- 80- 335- 70 700 200 380 70 69 1235 620 130 290 90 355 + + + + + + + + + + + + + + + + + + + j + + + 1324 FRANÇOISE MONNIOT RÉFÉRENCES BIRLIOGRAPHIQUES Abbott, D. P., et W. B. Trason, 1968. — Ritterella rubra and Distaplia smithi : two new colonial ascidians from the west coast of North America. Bull. S. Calif. Acad. Sci., 3 : 143-154. Almeida-Rodrigues, S. de, 1962. — Algunas Ascidias do litoral sud do Brasil. Bolm.Fac. Filos. Cienc. Unit’. S Paulo, 261, zool. 24 : 193-214. Berrill, N. J., et D. P. 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Les Ascidies littorales des Açores tirent leur origine des faunes littorales d’Europe, d’Afrique et de Méditerranée. Il n’y a pas d’endémisme pour ces espèces. Abstract. — Nineteen species of Phlebobranchiata and Stolidobranchiata bave been recor- ded during this Cruise. Eleven are littoral ones, three are bathyal around The Azorean islands and seven live near the “ banc de La Chapelle ”. Two species, Ascidia molguloides and Alloeo¬ carpa loculosa, are new for Science. Littoral Azorean Ascidians corne from the littoral African and mediterranean fauna. There is noue endemic species. Au cours de la campagne Biaçores du « Jean Charcot » (29 septembre-20 novembre 1971), de nombreux prélèvements biologiques ont été effectués à la côte en plongée et au large jusqu’à des profondeurs de 4 700 m. Les Ascidies de la plaine abyssale autour des Açores et entre l’archipel et Brest, ainsi que celles des stations bathyales à caractère sédimentaire, ont été décrites dans un travail précédent (C. Monniot et F. Monniot, 1973). Les Phlébobranches et les Stolidobranches sont peu nombreuses aux Açores. Onze espèces vivent à la côte, trois dans la zone bathyale. En outre, sept espèces ont été trouvées dans les dragages effectués au large de Brest dans la zone du banc de La Chapelle. Stations a Ascidies Récoltes en plongée Quarante-quatre plongées ont été effectuées au cours de cette campagne, mais les Asci¬ dies simples n’ont pas été récoltées dans toutes les stations. Onze espèces ont été trouvées (tabl. I). Muséum national d'Histoire naturelle, Biologie des Invertébrés marins et Malacologie, 75005 Paris * Tableau I. — Liste des plongées où des Ascidies ont été récoltées. Espèces Ile de L1 PI Santa Maria P2 P3 P4 Ile de Ter- ceira P7 P3 P9 Ile de P10 PII Faial PI2 P13 P19 P20 P5 P29 Ile de P30 P32 Sao P33 Miguel P37 P38 P4I P42 Perophora viridis . + + + + + + + + + + + Ecteinascidia herdmani . + + + + + + + Ascidia muricata . + + + + + + + + + + + + + Botrylles. + + + Alloeocarpa loculosa . + liistomus hupferi . + + + + + + + Polycarpa scuba . + + + + + + + + Polycarpa tenera . + Pyura tessellata . + Molgula complanata azorensis. + + + + + + + + + + + Molgula plana . + + Tableau II. — Liste des stations où des Ascidies ont été trouvées. Espèces Profondeurs 1 en mm Banc Joao de Castro St. 1 St.2 ' 40- 60- 1 50 70 Groupe d’Iles du Centre 11 12 18 19 20 32 41 59 60 61 76- 220 52- 57- 87- 230 450- 560- 66- 77 105 73 71 145 475 580 70 Flores 117 135 520 760- 860 Groupe d’Iles de l’Est 142 143 180 181 216 103 61- 1069- 450- 80- 69 1235 620 90 Banc de La Chapelle 257 258 335- 347- 355 370 Tylobranchion nordgaar- di . + + + + + + + Ecteinascidia herdmani. + Ascidia rnolguloides. . . . + + + + Ascidia tritonis . + + Distomus hupjeri . + Polycarpa scuba . + + 4“ 4“ + + Polycarpa tenera . + Polycarpa pusilla . + Polycarpa pomaria . 4* Styela atlantica . + Bolteniopsis prenanti.. . + + Pyura tessellata . + + Microcosmus hernius. . . + Molgula complanata azo- rensis . 1 + 1 + + i + 1330 CLAUDE MONNIOT Récoltes à partir du navire (tabl. II) Elles ont été beaucoup plus nombreuses et effectuées dans une gamme de profondeurs considérables : d’une cinquantaine de mètre à 1 200 m. Quatorze espèces d’Ascidies ont été identifiées dans les stations à caractère littoral ou bathyal. Les stations à caractère littoral (St. 1 — 2 — 11 — 18 — 19 — 20 — 143 et 216) pos¬ sèdent une faune identique à celle de l’infralittoral rocheux. Cinq espèces y sont présentes, ce qui correspond à un appauvrissement de la faune. Les stations à caractère bathyal (St. 32 — 41 — 59 — 117 — 135 — 142 — 180 — 181) ne possèdent que 3 espèces dont une seule semble spéciale aux Açores. La station 216 (18-90 m devant les Formigas) a un mélange de faunes bathyale et littorale. Les stations 257-258 dans la zone bathyale du banc de La Chapelle sont beaucoup plus riches (7 espèces dont 4 n’ont pas été trouvées dans la région des Açores). Microcosinus hernius (St. 12) est une espèce à caractère abyssal. Pour les Phlébobranches et les Stolidobranches, la faune des Açores de 0 à 1 000 m comprend donc 14 espèces : 11 littorales et 3 bathyales. ÉTUDE DES ESPÈCES Ordre des PHLEBOBRANCHIATA Famille des Cionidae Tylobranchion nordgaardi (Hartmeyer, 1922) Rhopalaea nordgaardi Hartmeyer, 1922 : Tylobranchion nordgaardi. Monniot C., 1969 : 158, fig. 1 et pl. 1. Stations : 32 — 117 — 135 —• 142 — 180 — 257 et 258. T. nordgaardi est une espèce de la pente du plateau continental, connue depuis les fjords norvégiens jusqu’au cap Finistère. Seule la forme solitaire a été trouvée aux Açores. Famille des Perophoridae Perophora viridis Verrill, 1871 Perophora viridis Van Name, 1945 : 165, T. fig. 82 D — 83. Monniot C., 1972 : 939. Stations : P2 — P3 — P4 —■ P5 — P7 — P10 — Pli — P12 — P41 et P42. Cette espèce n’a été trouvée en abondance qu’à Sào Miguel. Dans les autres îles, quelques zoïdes isolés vivent sur d’autres Ascidies. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1331 Perophora çiridis est une espèce de la côte américaine caractérisée par des sinus longi¬ tudinaux complets, ou, au moins, des papilles en forme de T. L’espèce européenne P. lis- teri ne possède que des papilles plates. P. airidis semble avoir envahi tout l’archipel. Ecteinascidia herdmani (Lahille, 1870) Perophoropsis herdmani Lahille, 1890 : 294. Ecteinascidia herdmani Médioni, 1968 : 159, pl. 10. Stations : P4 — P5 — PB — P19 — P32 — P41 — P42 — 216. Cette espèce n’a été trouvée en abondance que sur la falaise de Moro de Capelas (P 41). Dans ce biotope, elle couvre des surfaces énormes. Il n’existe aucune différence morpholo¬ gique entre les exemplaires méditerranéens et ceux des Açores, si ce n’est qu’à Sâo Miguel l’espèce peut être couverte de sable. Une très petite colonie (4 zoïdes) a été trouvée aux Formigas (St. 216). Les zoïdes imma¬ tures sont beaucoup plus petits (1,5 mm au lieu de 5 à 6 mm) mais les caractères de l’espèce sont bien visibles, et le nombre de rangs de stigmates (14) est identique à celui des grands exemplaires. Remarques E. herdmani de Méditerranée est très proche de E. conklini minuta Berrill, 1932, de la côte atlantique des Etats-Unis et des Bermudes. Le seul caractère qui permette de séparer les deux espèces est la forme du tube digestif. Chez E. herdmani l’œsophage débouche dans l’estomac à la face postérieure de celui-ci, à courte distance du départ de l’intestin, alors que chez E. conklini minuta œsophage et intestin débouchent aux deux pôles opposés de l’estomac (Monniot, C., 1972, fig. 2). Il est curieux de constater qu'aux Bermudes et sur la côte américaine Perophora viri- dis et E. conklini minuta vivent ensemble ; qu’en Méditerranée P. listeri et E. herdmani se trouvent dans le même milieu ; alors qu’aux Açores on trouve ensemble le Perophora américain P. viridis et VEcteinascidia européenne E. herdmani. Famille des Ascidiidae Ascidia muricata Heller, 1874 (Fig. 1) Ascidia muricata Heller, 1884 : Ascidia fistulosa non Monniot C. et F. Monniot, 1967, Monniot C., 1971 : 1201. Stations : L1 — Pl — P2 — P3 — P4 — P5 — P7 — PU — P30 — P37 — P38 — P41. La taille des exemplaires va de 1 à 6 cm. La tunique est en général nue, mais quelques épibiotes peuvent s’y fixer. 11 y a toujours quelques papilles sur la tunique, le corps peut en être couvert et il en reste au moins sur l’un des siphons. Plus les individus sont grands, ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1333 plus ils sont allongés. L’espèce est toujours fixée par la totalité de sa face gauche. A l’état vivant l’espèce est peu colorée, quelquefois une légère teinte jaunâtre est visible. La masse viscérale est colorée en brun. Le siphon buccal est postérieur ; sa position va, selon la taille, de la moitié de la face gauche aux 5/6 e postérieurs. La tunique est d’épaisseur variable, de 1 à 3 mm. Elle est très fine sur la face gauche. La musculature est forte mais limitée à la face droite du corps. Les tentacules, de 40 à 60, implantés sur un bourrelet musculeux, sont longs et fins, de 3 à 4 ordres non régulièrement distribués. Ils ne sont pas disposés sur un cercle par¬ fait, les plus grands sont implantés plus postérieurement mais ils se raccordent au bourre¬ let par un sillon bordé de deux lames glandulaires (fig. 1, D). Une structure semblable a déjà été décrite par Millar (1960 : 80) sous le nom de « tentacular ribs » à propos de A. chal- lengeri. Ici la structure est beaucoup moins apparente. Le sillon péricoronal est éloigné du cercle des tentacules. Le tubercule vibratile est très variable, le plus souvent très petit. Dans certains exemplaires, il semble manquer totalement ; après coloration on peut observer de nombreuses ouvertures simples reliées au canal de la glande neurale par une série de canaux anastomosés. Je n’ai pas trouvé d’orifices dans la cavité péribranchiale. La glande neurale est éloignée du tubercule vibra¬ tile. Elle est plus proche du siphon cloacal que du siphon buccal. Le quart antérieur du raphé est formé de deux lames ; il devient ensuite simple, élevé, mais sa marge est enroulée. Il disparaît au niveau de l’entrée de l’œsophage puis est remplacé par quelques papilles irrégulières. Dans sa partie médiane, les contreforts se prolongent au-delà de la marge par de longues papilles. Sur la face droite, au niveau de l’entrée de l’œsophage et postérieure¬ ment, les sinus transverses se transforment en papilles triangulaires. La branchie est fine et régulière ; le gaufrage est peu prononcé. Elle peut s’étendre un peu en dessous de la boucle intestinale. Pour des exemplaires de 5 à 6 cm, on compte 40 à 50 sinus à droite et 35 à 45 à gauche. Les papilles principales sont longues et digitiformes. Il existe des papilles intermédiaires ; elles sont généralement très petites et peuvent man¬ quer. En général, les mailles contiennent 4 à 7 stigmates allongés. Il n’y a pas de sinus parastigmatique. Le tube digestif (fig. 1, A, B et C) est concentré à la partie postérieure du corps ; l’esto¬ mac est globuleux ; l’intestin isodiamétrique forme une double boucle très fermée ; l’anus s’ouvre horizontalement ou est légèrement dirigé vers l’arrière ; il est lisse ou à deux lèvres ou vaguement lobé. Les gonades (fig. 1, B et C) étaient peu développées dans tous les exemplaires. La par¬ tie femelle est concentrée à l’intérieur de la boucle intestinale primaire sur la face interne. Elle n’apparaît pas sur la face externe. La partie mâle est surtout externe et s’étend sur la plus grande partie du tube digestif. Les canaux génitaux s’ouvrent au niveau de l’anus par une très grande papille. L’intérieur de la boucle intestinale primaire est souvent rempli par une vaste lacune sanguine qui communique avec le vaisseau tunical. Ce dernier peut être long de plusieurs centimètres. Remarque Cette espèce est la seule Ascidia littorale des Açores ; elle y est très abondante et se 251, 4 1334 CLAUDE MONNIOT trouve dans tous les milieux, sauf les zones portuaires polluées. Sa forme externe est très variable. Les exemplaires des Açores correspondent parfaitement à la description d ’A. muri¬ cata lleller, 1884, de Méditerranée. Cette espèce n’est pratiquement jamais citée, malgré une relative abondance. Elle est généralement confondue avec A. conchilega bien qu’elle s’en distingue par l’absence de papilles sur la face droite du raphé. A. muricata est aussi très proche de l’espèce américaine A. interrupta Heller, 1878. A. interrupta se distingue d’A. muricata par son raphé qui possède, en plus des dents correspondant aux contreforts, des denticules intermédiaires. Elle en diffère également par l'absence constante de papilles intermédiaires dans la branchie et par sa gonade femelle qui apparaît constamment dans la boucle intestinale secondaire. En outre, à droite au niveau de l’entrée de l’œsophage, A. intermedia possède une lame basse qui raccorde les sinus transverses les uns aux autres. Ascidia tritonis Herdman, 1883 Ascidia tritonis Herdman, 1883. Ascidia tritonis Monniot C., 1969 : 166, fig. 3, A-C, pl. 1. Stations : 41 et 257. Les exemplaires de la station 257 (banc de La Chapelle) sont typiques de l’espèce. Ils atteignent jusqu’à 12 cm. L’exemplaire de la station 41 possède des canaux génitaux accompagnant le rectum. Ce caractère est un de ceux qui servent à distinguer A. tritonis d’M. celtica Monniot C., 1970, du hanc de La Chapelle. L’exemplaire des Açores est malheureusement unique. Comme tous les autres caractères sont identiques à ceux d’M. tritonis, je l’incluerai dans cette espèce. Ascidia molguloides n. sp. (Fig. 2) Stations : 59 — 60 — 61 et 216 — 181 avec doute. Cinq exemplaires de cette espèce ont été trouvés à des profondeurs variant de 66 à 580 m. A. molguloides est libre sur le fond ou très faiblement attachée à des coquilles (St. 216). C’est une espèce de très petite taille (1,5 X 0,8 X 0,8 cm) entièrement vêtue de sable, même au niveau de la surface de fixation. Elle n’adhère d’ailleurs aux coquilles que par quelques rhizoïdes. Les siphons sont invisibles et l’apparence est celle d’une Molgule. La tunique est extrêmement mince. La musculature (fig. 2, A) est très faible. Au siphon buccal on ne trouve que quelques fibres qui n’atteignent pas le niveau du sillon péricoronal. Sur la face dorsale, en avant et en arrière du siphon cloacal, se trouvent de puissants muscles transverses. Il n’y a aucune musculature sur les faces du corps. Une musculature semblable a déjà été signalée chez une autre Phlébohranche libre, Psammascidia teissieri. Les tentacules fins et longs, au nombre de 25 environ, fixés sur un bourrelet net, sont ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1335 Fig. 2. — Ascidia molguloides n. sp. : A, animal entier dépouillé de sa tunique ; B, face interne du tube digestif et gonades. régulièrement disposés en trois ordres. Le sillon péricoronal net est éloigné du cercle des tentacules et forme dorsalement une profonde indentation. Le tubercule vibratile, très petit, en forme de simple fente, est situé tout au fond de l’indentation. Le ganglion nerveux est situé à environ 1 mm du tubercule vibratile. Le raphé est assez élevé et très enroulé sur lui-même. Il est double jusqu’au niveau du ganglion nerveux. Il diminue un peu de hauteur avant l’entrée de l’œsophage. Les sinus transverses se prolongent sur le raphé en formant des contreforts très nets. Ceux-ci sont formés d’un axe cylindrique relié au raphé par une lame mince. La marge du raphé semble lisse, peut-être un peu agrandie au niveau des contreforts. Sa fragilité est telle qu’il n’a pas été possible de le dérouler sans le déchirer. La branchie est très fine et très régulière. Elle ne présente pas de gaufrage et s’étend un peu en dessous de la boucle intestinale. On compte 27 à 30 sinus longitudinaux fins et réguliers à gauche et 29 à 33 à droite. Les mailles sont longitudinales et contiennent 1 à 2 grands stigmates. Il n’existe ni papille intermédiaire ni sinus parastigmatique. Les sinus ne se raccordent pas au raphé. Le long du raphé, à droite, on trouve une zone plate qui contient 3 à 4 stigmates. Le tube digestif (fîg. 2, A et B) forme une boucle ouverte. L’œsophage courbé débouche dans un estomac élargi à paroi marquée de plis souvent peu visibles. L’intestin débute par 1336 CLAUDE MONNIOT deux constrictions, puis devient assez irrégulier (la dilatation figurée est due à une grosse pelote fécale). L’anus lisse débouche vers l’arrière, un peu au-dessus du siphon cloacal. Tous les exemplaires étaient en phase femelle. L’ovaire (fig. 2, B) est gros et occupe tout le fond de la boucle intestinale. Il est formé de tubes courts à aspect boursouflé. L’oviducte part de la région postérieure de la gonade et rejoint le rectum. Il était bourré d’œufs. On peut observer une trace de gonade mâle inactive sur l’intestin près de l’estomac (fig. 1, B). Les vésicules sont très petites et dispersées dans la boucle intestinale. L’exemplaire de la station 181 est en très mauvais état et en grande partie dépouillé de sa tunique. La boucle intestinale a une forme identique, l’échantillon n’a pas trace de gonades. Tableau III. — Comparaison des Ascidia à boucle intestinale ouverte. Espèces 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Localisation A. rnolguloides n. sp. 3 1 1 1 0 1 3 2 1 2 Açores A. aperta Sluiter, 1904 2 1 1 1 2 2 2 ï Malaisie A. aperta Van Name, 1918 A. aperta ToIcioka 1953 à 2 1-2 0 0 0-1 1 2 3 1 Philippines 1967 2 1 2 0 1 1-2 2 1-2 1-3 1 Japon A. ahodori Tokioka, 1953 2 1 2 2 3 2 1 2 Japon A. archaia (Sluiter, 1890) 2 2 0 3 3 2 1-2 Java A. clementea Ritter, 1907 A. corelloides (Van Name, 2 1 2 1 2 2 2 2 Californie (1 200 m) 19241 1 2 1-2 1 1 2 2 2 2 1 Caracas, Haiti A. hi/alina Oka, 1915 1 1 0 0-1 1 2 1 1 Indes A. minuta Tokioka, 1950 .1 . rhabdophora Sluiter, 2 1-2 2 0 0 2 1-2 2 1 1 Iles Palao 1904 2-3 1 2 0 1 2 1 i 1 Japon, Malaisie, Australie Remarques Les Ascidia à boucle intestinale ouverte sont très rares. Afin de faciliter la comparai¬ son entre ces espèces, nous résumons leurs principaux caractères dans un tableau 1 (tabl. III) : 1. - Position du siphon cloacal : situé dans le premier tiers du corps (1) ; dans la première moi¬ tié (2) : au-delà du milieu (3). 2 . - Position du ganglion nerveux : proche du tubercule vibratile (1) ou éloigné (2). 3 . Marge du raphé : lisse (1) ; découpée (2). 4 . - Extension de la branchie au-delà du tube digestif (1) ou absence d’extension (0). 5 . - Présence de papilles branchiales intermédiaires (1) ou absence (0). 1. A. aclara, espèce australienne à boucle intestinale ouverte, possède un pli net sur la branchie. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1337 6 . — Boucle intestinale secondaire : nulle (0) ; faible ( 1 ) ; marquée (2) ; se refermant sur elle- même (3). 7 . — Anus situé postérieurement par rapport au sommet de la boucle intestinale primaire (1) ; anus au même niveau (2) ; anus antérieur (3). 8. — Position de l’anus par rapport au siphon cloacal : anus postérieur (1) ; anus au même niveau (2). 9 . — Forme de l’anus : lisse (1) ; à deux lèvres (2) ; lobé (3). 10. — Direction du rectum : dirigé vers l’avant (1) ; horizontal (2) ; vers l’arrière (3). Toutes ces espèces sont très proches les unes des autres et généralement de petite taille. A. molguloides ne correspond parfaitement à aucune d’entre elles. Elle est en tout cas très différente d’A. corelloides, la seule connue de l’Atlantique. Ordre des STOLIDOBRANCHIATA Famille des Styelidae Botrvlles Stations : P7 — P12 et P42. Les Botrvlles semblent très rares aux Açores. Je n’ai trouvé que trois colonies d’aspect chétif, ne comprenant que quelques zoïdes en phase mâle. Sans phase femelle il est impos¬ sible de déterminer le genre : Botryllus ou Botrylloides ? Les exemplaires des Açores ne correspondent parfaitement à aucune des cinq espèces de Botrylles de l’Atlantique : Botryllus schlosseri, B. planum , Botrylloides leachi, B. nigrum et B. magnicoecum. Les zoïdes des Açores possèdent une ouverture cloacale arrondie, petite, située aux deux tiers du corps et surmontée d’une très courte languette, 8 rangs de stigmates, un estomac cylindrique à 7 plis longitudinaux un peu élargis vers l'avant (sans compter la thyphlosole qui porte un cæcum peu développé). Le trop petit nombre de colonies et leur petite taille ne permet pas de faire une des¬ cription correcte de la population. Alloeocarpa loculosa n. sp. (Fig- 3) Station P7. Une seule colonie de cette espèce a été trouvée sur la falaise verticale située à l’ouest du Monte Brazil, mêlée à des Distomus hupferi. Les zoïdes très séparés les uns des autres sont réunis par des stolons très fins. Ils sont dressés fixés par la face postérieure et une grande partie de la face gauche. La taille atteint 5 à 6 mm. La coloration est rosâtre et la tunique nue est très fine. Sortis de leur tunique, les zoïdes sont assez opaques et l'on devine par transparence la disposition des oiganes. Gonades et larves apparaissent postérieures au tube digestif. La musculature faible est diffuse. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1339 Les tentacules au nombre de huit subégaux sont insérés sous un fort vélum buccal qui semble pouvoir obstruer complètement le siphon. Le sillon péricoronal est rectiligne. Le tubercule vibratile foi me un bouton peu saillant. Le raphé lisse, assez élevé, augmente un peu de hauteur sur son trajet. La branchie est beaucoup plus courte que le corps et ne dépasse pas le tube digestif. L’endostyle se raccorde au manteau par une lame fine très élevée qui contourne le tube digestif. Cette lame isole de la cavité cloacale gauche toute la partie postérieure du corps qui contient les gonades femelles et les larves. On compte 5 ou 6 sinus longitudinaux à gauche et 7 à droite. Il y a 8 rangs de 25 à 35 stigmates allongés et régulièrement recoupés dans la partie moyenne par un fin sinus parastigmatique. Les sinus longitudinaux sont régulièrement espacés. Le tube digestif (fig. 3) est concentré et forme une boucle fermée. L’œsophage court et droit s’ouvre dans un estomac globuleux dont la paroi est piofondément marquée de 12 à 14 plis. Le cæcum est court, difficile à voir et caché sous l’intestin. L’intestin très large s’ouvre par un anus lisse. Les gonades sont très caractéristiques. Les gonades mâles, 2 dans nos exemplaires, se trouvent dans la cavité cloacale gauche. Dans certains cas l’une d’elles peut être en partie masquée par le tube digestif. Elles s’ouvrent par de longs spermiductes. Les gonades femelles (fig. 3), au nombre de 5 ou 6, sont formées de quelques ovules de taille très variable et s’ouvrent par un oviducte court et très large. Les gonades femelles se trouvent derrière la lame qui relie l’endostyle au manteau et s’ouvrent dans la cavité cloacale droite. Elles se disposent en un arc à la partie postérieure du corps. La plus ventrale est d’ailleurs insé¬ rée non sur le manteau mais sur la cloison entre les deux cavités cloacales (fig. 3). Les têtards sont incubés sous le tube digestif dans la cavité cloacale droite. Des endo¬ carpes grands et peu nombreux se disposent sur les deux faces du manteau au niveau de la branchie. Remarques Le genre AUoeocarpa est surtout connu dans la zone tempérée antiboréale et n’a jamais été signalé dans l’Atlantique Nord. Il se divise en deux groupes d’espèces bien différentes : les AUoeocarpa de la région magellanienne qui possèdent une gonade mâle allongée avec plusieurs spermiductes, et les espèces d’Afrique du Sud et de Nouvelle Zélande dont les gonades sont du type d’A. loculosa. A. loculosa se rapproche d’A. capensis Hartmeyer, 1912, d’Afrique du Sud. La des¬ cription originale est fondée sur des exemplaires non parfaitement adultes. Millar, 1962, redécrit cette espèce et signale que les gonades des deux sexes se trouvent ensemble sur la face gauche du manteau. Il précise même : « It is a little difficult to détermine the exact position of the ovaries relative to the middle line of the body, but careful examination shows them to lie to the left of the membrane which unités the endostyle to the ventral body wall », ce qui exclut l’identité d’A. capensis et d’A. loculosa. Il faut enfin signaler la description d’A. aequatorialis Millar, 1953, de la Côte de l’Or (Ghana) fondée sur des exemplaires immatures qui possèdent 20 à 25 tentacides et 8 plis à l’estomac. 1340 CLAUDE MONNIOT Distomus hupferi (Michaelsen, 1904) (Fig. 4, A) Alloeocarpa hupferi. Michaelsen, 1904. Distomus hupferi Monniot C., 1969 : 631, fig. 4 d. Stations : P2 P5 — P7 — P29 — P33 — P38 — P41 — 18. Cette espèce est rare et difficile à voir. Elle se confond avec l’espèce précédente et il n’est possible de l’identifier qu’après dissection. Quelques différences sont à signaler par rapport aux descriptions précédentes. Aux Açores, le nombre de tentacules est réduit, 8 ou 16, le vélum buccal étendu. La branchie bien développée présente trois plis bas, mais nets. G.R.0415131E. 15 sinus D.R.1524131E. 17 sinus Les testicules, situés à gauche, peuvent être un peu plus nombreux que dans le type de l’espèce : de 4 à 8 (fig. 4). La face droite du corps des exemplaires des Açores était très développée et beaucoup plus grande que la face gauche. Ceci peut être dû au fait que ces exemplaires vivaient dans des microcavités du substrat alors qu’on les trouve plus fréquemment, sur la côte d’Afrique, sur des tiges dressées. L’espèce n’est, à l’heure actuelle, connue que de Dakar et de la côte du Maroc. Elle a été signalée en Méditerranée. Elle n’est pas connue des côtes du Portugal. Polycarpa scuba Monniot C., 1971 (Fig. 4, R) Polycarpa rustica non (Ascidia rustica Linné, 1767) Lacaze-Duthiers et Delage, 1892 : 217, pl. 16. Polycarpa rustica Berrili , 1950 : 193, fig. 61 a-c, h, 64. Polycarpa scuba Monniot C., 1971 : 1201, fig. 1, Â. Stations : Pl — P2 — P3 — P4 - P5 — P7 — P33 — P41 — 1 — 2 — 18 — 19 — 142 et 216. La présence d’un très grand nombre d’exemplaires de cette espèce permet de mieux juger de sa position systématique. La taille est toujours réduite, de 0,5 à 1,3 cm. La tunique dure et coriace est couverte de débris divers et de sable. Une légère coloration rosée apparaît entre les grains. Ce n’est guère qu’au toucher que l’on peut distinguer cette espèce Le manteau est épais, opaque, jaunâtre, marqué de taches rouges au niveau des siphons. Le nombre des tentacules est très variable et va de 12 à 50 ; ils sont toujours d’au moins 3 ordres et souvent trapus. Ils s’insèrent sur un bourrelet net. Le sillon péricoronal est droit, le tubercule vibratile simple. Le raphé est lisse et élevé, sa hauteur croît légère¬ ment, il est souvent enroulé. Fig. 4. — Distomus hupferi (Michaelsen, 1904) : A, zoïde ouvert, branchie enlevée. Polycarpa seuba Monniot C., 1971 : B, exemplaire ouvert, branchie enlevée. Polycarpa tenera Lacaze-Duthiers et Delage, 1893 : C et D, deux exemplaires. Polycarpa pusilla Herdman, 1884 : E, exemplaire de la « Thalassa » ; F, exemplaire de Biaçores 1342 CLAUDE MONNIOT La branchie est épaisse et montre 4 plis bien marqués. Pour un grand individu de 1,3 cm, on compte : G.R.1 11 282 9272 E. D . R . 1 9 2 8 2 11 2 9 1 E. Il existe quelques sinus parastigmatiques dans la partie ventrale de la branchie. L’anus est formé de deux lèvres nettement lobées. Les gonades sont beaucoup plus nombreuses dans les exemplaires de la campagne Biaçores et couvient la totalité du man¬ teau, y compris dans la boucle intestinale. Il faut noter la présence d’œufs embryonnés dans la quasi-totalité des grands exem¬ plaires de cette collection. Remarques Les caractères utilisés en 1971 pour distinguer P. scuba des Polycarpa pomaria s. lato se révèlent non valables. Nous avons donc comparé ces exemplaires aux Polycarpa fixés des côtes de la Manche : P. pomaria, P. violacea et P. rustica au sens de Lacaze-Duthiers et Delage, 1892. P. pomaria s. stricto se distingue tout de suite par la structure des gonades souvent plus ou moins soudées les unes aux autres. Elles possèdent 2 à 3 lobes testiculaires émet¬ tant chacun un spermiducte qui s’ouvre soit individuellement, soit après s’être soudé sur une très courte distance. P. çiolacea et P. scuba ont des polycarpes de même type avec 3 à 7 acini testiculaires et des spermiductes qui se jettent dans un canal commun à trajet irrégulier ; mais chez P. violacea la papille mâle est indépendante de la papille femelle, alors que toutes deux sont liées chez les exemplaires des Açores. De plus, P. violacea a une tunique mince possédant une fente dans laquelle les siphons se dissimulent. Par contre les exemplaires des Açores sont très proches, sinon identiques à un petit Polycarpa couvert de sédiment de 1 à 1,5 cm que l’on trouve dans le circalittoral de Ros- cofï et que Y. Gruet a trouvé dans les récifs d’Hermelles de la baie de Bourganeuf. Cette espèce, à tunique dure, sans fente, est incubatrice. Un seul caractère sépare les échantillons de Roscoff et des Açores : l’estomac des premiers paraît un peu plus rayé. Sous quel nom cette espèce est-elle connue à Roscoff ? Le seul auteur à signaler un Polycarpa incubateur fixé est Berrill, 1950 : Polycarpa rustica (Linné, 1767). Cet auteur publie une traduction de la description de Lacaze-Duthiers et Delage, 1892, en y ajou¬ tant simplement l’indication de l’incubation. Tous les caractères cités par Lacaze-Duthiers et Delage correspondent à notre espèce, à l’exception de la tunique, lisse d’après ces auteurs. Or le nom de P. rustica n’est pas valable car YAscidia rustica de Linné est considérée par tous les auteurs comme étant la Styela rustica. Aucun autre nom spécifique n’apparaît dans la synonymie de cette espèce ; nous conserverons donc le nom de P. scuba. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1343 Polycarpa tenera Lacaze-Duthiers et Delage, 1893 (Fig. 4, C et D) Cette espèce est abondante dans tout l’archipel et intimement mêlée au P. scuba. Ce n’est guère qu’en ouvrant systématiquement toutes les Ascidies que l’on peut l’identi¬ fier. La taille peut atteindre 1,5 cm. La tunique épaisse mais peu résistante est couverte de sable et d’épibiotes de toute nature. Les siphons sont très peu colorés. Le manteau très fin, pigmenté en blanc ou en jaune crayeux, est extrêmement fragile et se déchire facile¬ ment. La musculature est très faible. Les tentaculesj6ont peu nombreux, bien écartés les uns des autres. On en compte en général 16 d’au moins trois ordres assez îégulièrement disposés. Le tubercule vibratile est petit, en bouton. Le ganglion nerveux est allongé. Le sillon péricoronal est droit. Le raphé droit, peu élevé, augmente un peu de hauteur au cours de son trajet. La branchie est très fine et régulière. On compte pour un individu de 1,5 cm : G. R. 08493 10 363 E. D. R. 1 7373 8364 E. Les sinus longitudinaux sont réguliers. Les mailles comportent en moyenne 5 à 6 sinus allongés entre les plis et 2 à 3 sur les plis. Les sinus parastigmatiques sont abondants mais peuvent manquer. Le tube digestif (fig. 4, C et D) forme une boucle ouverte sur le tiers postérieur de la face gauche. L’œsophage très court débouche dans un estomac en olive, marqué de 15 à 20 crêtes internes souvent irrégulières. Il n’y a pas de cæcum. L’estomac passe progres¬ sivement à un intestin qui se teiinine par un anus rétréci à marge un peu lobée. Les gonades (fig. 4, C et D) sont très ventrales. Elles se disposent en 2 rangées irrégu¬ lières de chaque côté de l’endostyle. Elles sont en forme de polycarpes globuleux, très peu allongés, de taille variable selon leur état de développement. Elle sont toujours un peu plus nombreuses à droite qu’à gauche. Elles sont liées à la fois au manteau et à la branchie, mais de façon lâche. 11 n’y a pas d’endocarpes. Les tentacules cloacaux, longs et fins, se disposent en un rang à la base du siphon cloacal. Remarques Plusieurs espèces de Polycarpa fragiles et dépourvues d’endocarpes ont été décrites des côtes d’Europe. Toutes ont été rassemblées par la plupart des auteurs sous le nom de P. gracilis. Au moins trois espèces sont incluses dans ce nom. P. gracilis Heller, 1877, sensu stricto (Monniot C. et F. Monniot, 1970) est une grande espèces nue ou couverte de sable, à tunique épaisse et peu solide, qui possède un tube diges¬ tif formant une boucle nette et des gonades allongées (2 à 4 fois plus longues que larges), peu nombreuses, disposées en un seul rang. P. gracilis vit en Méditerranée. 1344 CLAUDE MONNIOT P. discoidea Ileller, 1877, sensu Monniot C. et F. Monniot, 1970, est une espèce nue, coriace, qui possède un tube digestif globuleux, pas de boucle intestinale secondaire et de très nombreux polycarpes ronds disposés sans ordre. Elle n’est connue que de l’Adriatique. P. tenera Lacaze-Duthiers et Delage, 1893, des cotes de la Manche, est une petite espèce couverte de sédiment à polycarpes ronds disposés en un ou deux rangs. Nos exemplaires des Açores correspondent exactement à ceux de Roscofï. Polycarpa pusilla Herdman, 1884 (Fig. 4, E et F) Stations : 258. « « Thalassa » W 416. Tous les exemplaires trouvés vivent libres sur les fonds sédimentaires. Ils se présentent sous la forme de boules ou de disques de 10 à 18 mm de diamètre et de 5 à 7 mm d’épais¬ seur. Sur la partie supérieure, on distingue nettement les 2 siphons disposés sur de petites éminences grises et nues, de 2 mm de diamètre et distantes de 3 à 5 mm. Le corps est entièrement recouvert de rhizoïdes. Ces rhizoïdes se ramifient très vite à environ 1 mm de la tunique. Les ramifications sont très longues, jusqu’à 1 cm, rarement redivisées. Elles agglomèrent des particules très fines, principalement des débris de Fora- minifères. Les rhizoïdes sont plus courts et plus rares sur la face ventrale. L’épaisseur du feutrage de rhizoïdes est considérable et peut atteindre sur les faces latérales 5 mm d’épais¬ seur. La tunique est très mince et presque transparente. Le manteau ne semble adhérer à la tunique que par les siphons Les tentacules, au nombre d’une trentaine, sont longs et filiformes ; ils sont irréguliè¬ rement disposés. Le tubercule vibratile est très saillant en C ouvert vers le haut et la gauche. Le raphé lisse, épais, augmente de hauteur au voisinage de l’entrée de l’œsophage. La branchie, d’aspect épais, est formée de quatre plis bas constitués de sinus longi¬ tudinaux épais et très serrés. On compte : G . R . 0 15 2 8 2 15 1 11 1 E. D . R . 0 16 2 7 1 15 1 81 E. La branchie de tous les exemplaires était très contractée. Les stigmates semblent allon¬ gés, 6 à 10 par maille entre les plis, souvent recoupés par un sinus parastigmatique. Le tube digestif (fig. 4, E et F) est d’aspect variable selon son état de remplissage. L’entrée de l’œsophage est très postérieure. L’œsophage court débouche dans un estomac ovale à paroi mince pourvu de nombreux plis irréguliers. Il n’y a pas de cæcum pylorique. L’intestin, aussi à paroi mince, se termine par un anus lobé. La taille des lobes est très variable. Les gonades (fig. 4, E et F) sont peu nombreuses : 13 à 17 à droite, une douzaine à gauche, de forme et de structure irrégulières. En principe l’ovaire est interne et repose sur des lobes testiculaires externes. Mais souvent les acinis se répandent sur presque toute la face interne de l’ovaire. Ainsi certains polycarpes paraissent-ils exclusivement mâles. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1345 Par contre dans d’autres cas la partie mâle est presque inexistante. Les spermiductes forment un réseau irrégulier et la papille mâle est généralement indépendante de l’ovi- ducte. Les endocarpes sont nombreux et d’une taille voisine de celle des polycarpes. (Ils sont peu nombreux dans la boucle intestinale.) Le vélum cloacal est très étroit, épais et peu élevé. Il est doublé vers l’extérieur par un très puissant muscle (fig. 4, E) qui décrit une courbe irrégulière et qui s’interrompt postérieurement. Nous n’avons pas vu de tentacules cloacaux. Remarques Quatre espèces de Polycarpa vivent libres sur les fonds sédimentaires du plateau conti¬ nental d’Europe : P. mamillaris, P. violacea, P. libéra et P. kornogi. Notre individu ne correspond exactement à aucune d’entre elles. Son aspect externe et son adaptation pous¬ sée à la vie sur les fonds mous l’éloignent encore plus des espèces précédentes qui préfèrent des fonds coquillers (P. mamillaris et P. violacea) ou des fonds sableux propres (P. libéra et P. kornogi). Herdman, 1884, a décrit P. pusilla trouvé par 200 m au large de Valentia (Irlande) et par 900 m au large de Gibraltar, qui se rapproche de nos exemplaires. En particulier, Herdman déclare : « The polycarps are fairly numerous. Some art male, others female, and others hermaphrodite ». Malheureusement, le tube digestif et le siphon cloacal ne sont pas décrits. C’est donc avec quelques réserves que nous incluerons nos exemplaires dans l’espèce de Herdman. Polycarpa pomaria (Savigny, 1816) Cynthia pomaria Savigny, 1816. Polycarpa pomaria s. lato Monniot C., 1969 : 176, fig. 8. Station : 257. Styela atlantica (Van Name, 1912) Tethyum atlanticum Van Name, 1912. Styela atlantica Monniot C., 1969 : 172, fig. 6. Station : 257. Famille des Pyuridae Bolteniopsis prenanti Harant, 1927 Stations : 257 et 258. Cette espèce a déjà plusieurs fois été signalée dans cette zone. 1346 CLAUDE MONNIOT Pyura tessellata (Forbes, 1848) Cynthia tessellata Forbes, 1848. Pyura tessellata Mon mot C., 1965 : 93, fig. 23, G et fig. 29. Stations : P7 — 11 et 257. Cette espèce, dont l’aire de répartition va du Froy Fjord en Norvège à Dakar et s’étend à toute la Méditerranée, est la seule Pyuridae littorale trouvée aux Açores. Elle y est d’ail¬ leurs rare. Microcosmus hernius (Monniot C. et F. Monniot, 1973) (Fig. 5, A) Pyurella hernia Monniot C. et F. Monniot, 1973 : Stations : 12. 1 exemplaire. L’exemplaire de la station 12 appartient sans aucun doute à la même espèce que les exemplaires de profondeur. Tous les caractères sont exactement semblables, à l’exception de la présence ici d’une gonade gauche croisant la branche descendante du tube digestif (fig. 5, A). Dans une note précédente, en créant le genre Pyurella, irous signalions que ce genre pourrait être remis en cause si la gonade gauche était en position de Microcosmus. Malgré sa très petite taille, cette espèce appartient au genre Microcosmus, mais elle représente au sein de ce genre une direction évolutive très spécialisée. Famille des Molgulidae Molgula complanata azorensis Monniot C., 1971 (Fig. 5, B, C et D) Stations : P2 — 1>3 — P4 — P5 — P7 — P9 — Pli — P12 — P32 — P38 — P41 — 1 — 18 — 20 et 216. Cette espèce est extrêmement abondante dans tout l’archipel. Sa structure est très constante, en particulier en ce qui concerne les gonades, ce qui confirme la description originale. J’incluerai dans cette espèce 2 Molgules de beaucoup plus grande taille trouvées près des Formigas (fig. 5, B, D). La taille de ces exemplaires dépasse le centimètre ; ils sont couverts de sable et ne sont que faiblement fixés au rocher. La tunique est mince, transparente mais coriace. Les siphons sont pourvus de lobes digitiformes. La coloration sur l’animal vivant est verte. Le manteau semble formé de deux parties bien distinctes (fig. 5, B, C). La partie dor¬ sale, puissamment muscularisée, forme une sorte de capuchon opaque. La partie ventrale est, elle aussi, un peu épaisse mais la musculature y est très faible et diffuse. 1348 CLAUDE MONNIOT Les tentacules, 16 de deux ordres, sont bipennes. Le vélum buccal est très développé. Le sillon péricoronal est éloigné du cercle de tentacules. Il est un peu ondulé et forme un V très profond sur la face dorsale. Le tubercule vibratile, gros, très saillant, est situé à mi-dis¬ tance entre les deux siphons. De ce fait, le raphé est très court ; il est élevé et sa marge est prolongée par des lobes digitiformes. La branchie est épaisse, formée de 7 plis de chaque côté. On compte : G. H. 050509090907030 E. D. R. 050709 0 909 0 705 0 E. En certains points on peut observer une tendance à la néoformation de sinus incomplets entre les plis. Mais la branchie est très irrégulière et possède plusieurs zones imperforées. Le tube digestif (fig. 5, D) forme une boucle fermée. L’œsophage très court débouche dans un estomac peu différencié, surmonté d’une vaste glande hépatique. L’intestin, un peu irrégulier se replie sur lui-même et se termine par un anus à quatre lèvres. Les gonades (fig. 5, D), une de chaque côté, sont en partie incluses dans le manteau. Seule la partie mâle était en activité, mais l’un des exemplaires était incubateur. Remarques La taille des populations de M. complanata peut être très variable selon les habitats. En 1969, j’ai discuté la variabilité de l’espèce sur les côtes de Bretagne et j’indique des diffé¬ rences de tailles considérables pour des exemplaires adultes : 13 à 18 mm à Morgat, 3 à 5 mm dans l’Aber de Roscoff, 5 à 9 mm à Cleder. Ces différences de tailles s’accompagnent souvent de modifications de la structure des gonades. Aux Açores, où cette structure semble fixe, les différences principales porteraient sur la branchie et la musculature. Il serait nécessaire de disposer de très nombreux spécimens des Formigas pour envi¬ sager la création d’une séparation taxonomique, d’autant plus que la forme habituelle de l’archipel n’a pas été trouvée dans cette station. Molgula plana Monniot C., 1971 (Fig. 6) Molgula plana Monniot C., 1971 : 1203, fig. 1, R, C et D. Stations : P5 et P42. Cette espèce est toujours très rare aux Açores ; seuls 3 exemplaires ont été récoltés. Certaines remarques doivent être ajoutées à la description précédente. L’espèce n’est pas forcément aplatie sur le substrat mais peut avoir une forme normale. La disposition des organes est ainsi modifiée et la gonade droite n’est plus aplatie sur le rein. Les deux lames du sillon péricoronal sont moins différentes. La branchie est fine, les infundibula sont assez élevés. Il y a (fig. 6, C) 2 infundibula entre 2 sinus transverses et entre les plis, les parties distales des 2 stigmates fondamentaux restent indivis. ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES Fig. 6. — Molgula plana Monniot G., 1971 : A, face gauche ; B, face droite ; C, détail de la branchie ; D, détail de la gonade. 1350 CLAUDE MONINIOT Remarques Cette espèce ne semble vivre que sur l’île de Sâo Miguel et préfère nettement les zones portuaires : quai de Punta Delgada ou cale de Capelas. D’autres espèces préfèrent égale¬ ment des milieux portuaires ou des zones d’accostage et ne sont pas répandues dans tout l’archipel. C’est le cas des Botrylles, de YAlloeocarpa loculosa et des Clavelina : C. lepadi- formis à Punta Delgada et C. oblonga à Horta. Il est possible que M. plana soit aussi une espèce importée par un navire. Les petites Molgules fixées qui se confondent si facilement avec le sédiment ne sont guère bien connues qu’en Europe. Je n’ai aucune idée de la zone hypothétique d’origine de M. plana. Origines et affinités des Ascidies simples des Açores Bien que 5 espèces (ou sous-espèces) nouvelles aient été décrites des Açores, seules 1 espèce et 1 sous-espèce semblent endémiques de l’archipel. Toutes les autres tirent leur origine d’une autre zone géographique. La zone bathyale des Açores représente pour les Ascidies une zone d’appauvrissement considérable de la zone correspondante du golfe de Gascogne. Ceci est peut-être dû à l’exis¬ tence de la couche d’eau méditerranéenne plus chaude et plus salée que celle de l’Atlantique qui baigne la pente du plateau continental aux Açores. Un phénomène très net d’appau¬ vrissement de la faune ascidiologique a été observé à des profondeurs équivalentes le long de la côte ouest de l’Espagne et du Portugal, là où des eaux méditerranéennes sont présentes. La zone littorale des Açores est très pauvre en Phlébobranches et en Stolidobranches (11 espèces) et un certain nombre de genres communs sur la côte européenne y sont totale¬ ment absents. Citons Ciona, Styela, Microcosinus, Halocynthia. Ascidia et Pyura ne sont leprésentés que par 1 espèce, Polycarpa , et Molgula que par 2. Compte tenu de la température des eaux et de la quantité et de la variété des subs¬ trats disponibles, une faune beaucoup plus riche devrait vivre aux Açoies. Le problème de l’insularité des Açores est posé pour les Ascidies simples d’une manière évidente. La distance des Açores au continent et l’existence d’une plaine abyssale entre l’archipel et l’Europe exclut toute possibilité de transport direct de larves par les courants. Quatre espèces proviennent de la côte occidentale d’Europe (fig. 7) : Polycarpa scuba, P. tenera, P. tessellata et M. complanata. Deux espèces tirent leur origine de la Méditerra¬ née : Ascidia muricata et Ecteinascidia herdmani. Deux ont émigré de la côte d’Afrique : Distomus hupferi et Alloeocarpa loculosa. Une enfin est d’origine américaine : Perophora viridis. Aucune de ces espèces, au sein de leur faune d’origine, n’est une espèce dominante et, à l’exception de Molgula complanata et de Perophora viridis, aucune n’est très abondante. Certaines d’entre elles n’ont même pas réussi à conquérir tout l’archipel et restent liées à une île ou un gioupe d’îles. Les Ascidies simples littorales des Açores ont probablement toutes été importées soit d’une manière fortuite, soit sur des coques de navires, et ceci probablement à une époque très récente. Toutes en effet peuvent vivre sur les côtes d’Europe ou d’Afrique à des pro- ASCIDIES LITTORALES ET BATHYALES 1351 Fig. 7. — Origine des Phlébobranches et Stolidobranches des Açores. fondeurs très faibles et aucune ne craint vraiment la lumière. Les espèces plus sciaphiles telles que les grandes Pyuridae ou les Ascidiidae peuvent vivre à faible profondeur mais sous les pierres ; elles ne supportent pas un éclairement direct. Les quelques espèces pré¬ sentes aux Açores en abondance vivent dans tous les milieux disponibles alors qu’elles ont dans leur zone d’origine des écologies plus strictes. Le hasard semble avoir pioché dans le stock d’Ascidies littorales peu sciaphiles de l’Atlantique Nord quelques espèces pour les implanter aux Açores. Il est possible qu’avant l’arrivée de l’homme il n’y ait rien eu. 251,6 1352 CLAUDE MONNIOT RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Berril, N. J., 1950. — Tlie Tunicata. With an account of the British species. Ray Soc. Pubis 354 p. Hartmeyeh, R., 1922. — Die Ascidienfauna des Trondhjemfjords. Norske Selslc. Skrill., 6 : 1-48. Heller, C., 1874. — Untersuehungen über die Tunicaten des Adriatischen Meeres. I. Denkschr. Akad. Wiss., Wien, 34 : 1-20. — 1878. — Beitrage zur nahren kenntnis der Tunicaten. Sber. Akad. Wiss. Wien, Malh- natur. Klasse, 77 (1) : 83-111. Herdman, W. A., 1883. —- Report oïl the Tunicata collected during the Cruise of HMS « Triton » in the summer of 1882. Trans. 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Hist. nat., Paris, 2 e sér., 42 (6) : 1189-1199. — 1973. — Ascidies abyssales récoltées au cours de la campagne océanographique Biaçores par le « Jean Charcot ». Idem, 3 e sér., n° 121, Zoologie 93 : 389-475. Van Name, W. G., 1945. — North and South American Ascidians. Bull. Am. Mus. nat. Hist.. 84 : 1-476. Manuscrit déposé le 18 décembre 1973. Bull. Mus. natn. Hist. nat., Paris, 3 e sér., n° 251, sept.-oct. 1974, Zoologie 173 : 1327-1352. Achevé d’imprimer le 30 avril 1975. Ascidies abyssales de Méditerranée récoltées par le « Jean Charcot » (campagnes Polymède) 1 par Claude Monniot et Françoise Monniot * Résumé. — Des Ascidies abyssales existent en Méditerranée. Elles y sont moins abondantes et moins variées que dans les océans. Trois espèces sont décrites dont deux nouvelles pour la Science : Polycarpa caudata et Molgula tethys. Abstract. — Abyssal Ascidians do exist in the Mediterranean sea but less abondant and diversified than in the océans. Three species are described here, two of them are new for Science : Polycarpa caudata and Molgula tethys. Au cours des campagnes Polymède I et Polymède II du « Jean Charcot », 34 dragages ont été effectués à l’aide de la drague épibenthique Hessler et Sanders. La campagne Poly¬ mède I s’est déroulée en Méditerranée occidentale. La seconde a travaillé en mer d’Albo- ran, dans les bassins Thyrrénien et Ionien, et dans la mer Egée. Les Ascidies n’étaient pré¬ sentes que dans le bassin occidental et la mer Égée. Liste des stations où des Ascidies ont été trouvées Polymède I DS. 05 : 37°50'7 N — 05°22'0 E, 2 090 m : 3 Polycarpa caudata n. sp. DS. 10 : 40°59'3 N — 04°28'5 E, 2 665 m : 16 Polycarpa caudata n. sp. DS. 12 : 42°15'0 N — 04°28'5 E, 2 090 m : 2 Polycarpa caudata n. sp., 5 Molgula tethys n. sp. Polymède II DS. 08 : 40°18'3 N — 25°42'2 E, 866 m : 1 Polycarpa caudata n. sp. DS. 09 : 40°13'3 N — 25° 11'4 E, 1 308 m : 1 Ascidiella sp. DS. 11 : 39°25'4 N — 23°31'3 E, 1 213 m : 2 Ascidies indéterminables. Bien que les profondeurs soient peu importantes, ces Ascidies abyssales sont comparables par leur taille et leurs adaptations aux spécimens des bassins ouverts. 1. Résultats scientifiques des campagnes du N.O. « Jean Charcot » en Méditerranée, mai-juin-juillet 1970 et mars-avril-mai 1972, publication n° 10. * Laboratoire de Biologie des Invertébrés marins et Malacologie, Muséum tiational d’Histoire naturelle, 57, rue Cuvier, 75005 Paris. 1354 CLAUDE MONNIOT ET FRANÇOISE MONNIOT Ordre des PHELOBRANCHIATA Famille des Ascidiidae Ascidiella sp. (Fig. 1, A) Polymède II : 1)S. 09 : 1 exemplaire immature. Le seul exemplaire se présente sous la forme d’une boule transparente de 6 mm de diamètre. Les siphons contractés ne sont pas saillants. La tunique mince porte à la base quelques rhizoïdes. Le manteau est transparent et la musculature très peu développée. Le siphon buccal porte 8 lobes, le siphon cloacal, situé vers le milieu du corps, 6 lobes. Les tentacules, une trentaine, sont larges, arqués et implantés sur une crête basse. Ils sont d’au moins 4 ordres répartis sans grande régularité. Le sillon péricoronal, formé de deux lames égales, est rectiligne et forme un V peu profond au niveau du tubercule vibratile. Celui-ci en forme de bouton arrondi a une ouverture simple en coupe. Le ganglion nerveux est situé tout contre le tubercule vibratile. Le raphé lisse est élevé. L’entrée de l’œsophage est située à la partie tout à fait postérieure de la branchie. La branchie est plate ; on compte 22 sinus longitudinaux à gauche et 25 à droite. Les sinus longitudinaux sont fins, souvent interrompus. Ils ne sont pas surmontés de papilles. Les mailles sont deux à trois fois plus longues que larges et comptent en moyenne 2 à 3 stig¬ mates. Il n’y a de sinus parastigmatiques qu’en cas de division de la rangée de stigmates. De nombreuses figures de multiplication de stigmates s’observent. L’aspect de la branchie est juvénile. Le tube digestif (fig. 1, A) est bourré de sédiment. L’estomac est un peu élargi mais n’apparaît pas individualisé. L’intestin forme une boucle fermée, le rectum se termine par un anus bilabié. La majeure partie du tube digestif est située dans la portion la plus postérieure du corps. Les gonades ne sont pas développées. On peut seulement observer quelques ovocytes dans la lumière de la boucle intestinale. Les vésicules d’accumulation sont très petites et dilliciles à distinguer. Remarques Les Ascidiidae sont pratiquement inconnues dans la zone abyssale et le genre Asci¬ diella est strictement cantonné au plateau continental. Les Ascidiella sont abondantes en Méditerranée, et il ne nous est pas possible de décider si cet exemplaire appartient à une espèce littorale ou non. Il faut toutefois remarquer la position très postérieure du tube digestif situé en partie sous la branchie, disposition qui n’est jamais réalisée chez les exem¬ plaires littoraux. Peut-être n’est-ce qu’une simple adaptation à la vie sur un substrat meuble, ou bien un caractère juvénile. 1356 CLAUDE MONNIOT ET FRANÇOISE MONNIOT Ordre des STOLIOLOBRANCHIATA Famille des Styelidae Polycarpa caudata n. sp. (Fig. 1, B) Polymède I : DS. 05 : 3 spécimens ; DS. 10 : 16 spécimens ; DS. 12 : 2 spécimens. Polymède II : DS. 08 : 1 spécimen jeune. C’est une des plus petites Styelidae. Le corps est entièrement couvert de Foraminitères. 11 mesure de 1 à 2 mm de diamètre y compris le revêtement plus ou moins épais de la tunique. Des particules de vase se lixent entre les tests de Foraminifères. La forme du corps est arron¬ die ou triangulaire ; les deux siphons saillants occupant deux des angles. Le troisième est marqué par un rhizoïde unique ramifié en bouquet, ou par un paquet de petits rhizoïdes fins. Le manteau est très fin et la musculature faible. Les tentacules, une vingtaine environ d’au moins trois ordres, sont serrés. Leur taille peut varier énormément d’un individu à l'autre. Le sillon péricoronal est assez éloigné du cercle de tentacules ; il forme un V peu accentué et disparaît au-dessus du ganglion nerveux. Le tubercule vibratile saillant a une ouverture en forme de croissant ou de S. Le ganglion nerveux est gros et situé juste sous le tubercule vibratile à mi-distance entre les deux siphons. Le raphé lisse est élevé. Le nombre de sinus est très variable selon l’âge des individus. Chez les exemplaires immatures la branchie compte 4 sinus de chaque côté mais des papilles sont présentes le long des sinus 1 et 3. Les exemplaires adultes possèdent 2 plis de chaque côté. D. R. 0 4 1 3 1 E. G. R. 0 3 1 2 1 E. En général, chez les adultes, on observe 7 rangées transverses de stigmates, la plus postérieure étant formée de stigmates ovales dont le grand axe est un peu transverse. Chez les jeunes, des protostigmates sont présents surtout à gauche. Nous n’avons pas observé de sinus parastigmatiques. Le tube digestif plutôt petit (fig. 1, B) décrit une boucle fermée ; sur le dessin, l’œso¬ phage a été écarté pour pouvoir figurer le cæcum. L’œsophage est très court, l'estomac globuleux possède sept plis très saillants, le cæcum est long en forme de crochet, l'intes¬ tin très court se termine par un anus à bord retroussé et lobé. 11 y a 2 gonades de chaque côté chez les exemplaires adidtes que nous avons observés. Ces gonades sont peu développées. Elles se composent de quelques œufs et d’au moins une vésicule spermatique. Les canaux, difficilement observables, sont dirigés vers le siphon cloacal. Les endocarpes sont gros et encadrent les gonades. Sauf dans un cas, nous avons observé deux endocarpes symétriques très proches du siphon cloacal (fig. 1, B). Le siphon cloacal est fermé par un grand vélum. A sa base, sur ses faces droite et gauche, sont implantés quelques tentacules cloacaux longs et fins. ASCIDIES ABYSSALES DE MÉDITERRANÉE 1357 Remarques Quatre Polycarpa sont connus dans la zone abyssale atlantique : P. albatrossi (Van Name, 1912) possède une branchie pourvue de 4 plis, un très petit cæcum, plus de deux polycarpes sur la face droite et un vélum cloacal lobé. P. pseudoalbatrossi Monniot C. et F. Monniot, 1968, possède une branchie à 2 plis séparés par un sinus, mais pour une taille équivalente le nombre de sinus par pli est inférieur, dix plis sur l’estomac, un grand cæcum pylorique, une ou rarement 2 gonades de chaque côté, flanquées d’un seul endocarpe. Polycarpa sp. Monniot C. et F. Monniot, 1974, très proche de P. pseudoalbatrossi , possède un estomac à 11-13 plis, un anus lisse ou peu lobé, une gonade de chaque côté flanquée de 2 endocarpes. Polycarpa delta Monniot C. et F. Monniot, 1968, dont la branchie a 4 plis, des sinus parastigmatiques. L’estomac a 6 à 8 plis et un cæcum long en virgule II y a un seul poly- carpe de chaque côté. Toutes ces espèces atteignent une taille au moins double de celle de P. caudala n. sp. Famille des Molgulidae Molgula tethys n. sp. (Fig. 2) Polymède : St. 40 DS. 12 : 5 exemplaires. C’est une très petite espèce. La taille des cinq exemplaires s’échelonne de 1 à 1,5 mm. Le corps est un peu allongé, les siphons à lobes digités étant aux deux extrémités du grand axe du corps, donc très éloignés. La face dorsale est plate, la face ventrale bien bombée. La musculature est fine mais bien développée. Elle est constituée de fibres radiaires : 18 au siphon buccal, 14 au siphon cloacal. Elle est complétée par un champ intersiphonal de muscles transverses et deux champs latéraux allant du siphon huccal aux deux tiers postérieurs du corps. Les tentacules (fig. 2, B) sont insérés sur une crête basse. On en compte 6 à 8 grands portant des ramifications de premier ordre et, entre eux, quelques petites digitations simples. Le sillon péricoronal est un peu ondulé, il forme un V assez profond. Le tubercule vibratile, situé dans le V, est petit, à ouverture simple vers la droite. Le ganglion nerveux assez volu¬ mineux est situé sous le tubercule vibratile. Le raplié élevé est lisse. Son trajet est très court. La branchie est très délicate. Il y a sept plis de chaque côté. G. R. 010203030302010 E. D. R. 010203030303010 E. Le pli n° 1 est très court et peu marqué. II peut être incomplet mais il est toujours au moins indiqué par une série de papilles. Les plis 3 à 6 sont composés de deux sinus complets et d’une série de papilles représentant l’ébauche du troisième sinus. La branchie 1358 CLAUDE MONNIOT ET FRANÇOISE MONNIOT présente un gradient de développement antéro-postérieur. Dans la partie antérieure, les stigmates sont groupés deux à deux pour former des ébauches d’infundibula. Ces ébauches sont de moins en moins nettes dans les parties moyenne et postérieure et il reste tout à fait à la base un ou deux protostigmates indivis. Le tube digestif (fig. 2) forme une boucle très fermée dont le tracé exact varie en fonc¬ tion de la contraction du corps. L’œsophage est court, l’estomac est peu net et est recouvert de boursouflures hépatiques. L’intestin est irrégulier et se termine par un anus à quatre lobes peu marqués. Les gonades sont paires, la gauche au-dessus de l’anse intestinale en position typique du genre Molgula. Chaque gonade est formée d’un ovaire central ne comprenant que quelques ovules et s’ouvrant par un oviducte assez long dont la papille est lobée (fig. 2). La direction de l’oviducte est variable. La partie mâle s’étale sur l’ovaire et déborde très largement sur ASCIDIES ABYSSALES DE MÉDITERRANÉE 1359 le manteau. Le spermiducte commun est long ; il prend naissance au milieu de l’ovaire et débouche dans la cavité cloacale indépendamment de l’oviducte. Le rein allongé est situé entre la gonade droite et l’estomac. Il contient un gros gra¬ nule. Remarque La persistance d’un gradient de développement antéro-postérieur de la branchie chez une Molgulidae adulte n’avait pas encore été signalée. Bien que la Méditerranée soit une des mers les plus draguées du monde, une seule Asci¬ die avait été signalée à une profondeur supérieure à 1 000 m : Agnesiopsis translucida, (Carpine, 1970). Les campagnes Polymède démontrent l’existence d’une faune ascidio- logique en profondeur. Cette faune est très pauvre par rapport à celle connue des mers ouvertes : 4 espèces en Méditerranée et 34 dans le bassin nord-est de l’Atlantique. La densité des individus est, elle aussi, très faible. Enfin de nombreuses dragues n’ont pas récolté d’Ascidies en Médi¬ terranée, ce qui n’est presque jamais le cas dans l’Atlantique. Il n’est pas possible d’incri¬ miner les techniques de récolte : bateau, engins, responsables des opérations de récolte et de tri sont les mêmes. A l’exception d’M. translucida, espèce abyssale et bathyale pouvant remonter à 500 m de profondeur environ, commune à l’Atlantique et à la Méditerranée, les espèces méditer¬ ranéennes profondes semblent endémiques. Elles semblent même se situer dans une autre direction évolutive que les Ascidies abyssales océaniques. Ni les familles, ni les genres typiques de la faune abyssale ne sont présents dans cette collection alors que les trois espèces décrites ici appartiennent à de grands genres à diversité considérable dans la zone littorale. Ascidiella sp. appartient à la famille des Ascidiidae dont seule une espèce est connue à 2 000 m. Les Molgulidae sont abondantes dans l’abyssal océanique mais sont sous forme d’une lignée très régressée : Minipera, Protomolgula ou de la lignée Molguloides. Les vraies Molgula sont rares dans l’abyssal ; seules deux espèces sont connues : M. rnillari dans l’Antarctique et M. dextrocarpa espèce bathyale dont un individu a été trouvé en zone abyssale. Ceci permet de penser que l’origine des Ascidies profondes en Méditerranée n’est pas la même que celle des Ascidies abyssales océaniques. La Méditerranée au moins dans sa partie profonde semble n’avoir jamais été en contact avec les abysses océaniques. Il est donc probable que les Ascidies abyssales de Méditerranée tirent leur origine de la faune néritique locale. Beaucoup d’auteurs, à la suite de Sanders et coll. considèrent que la faune abyssale tire son origine d’espèces bathyales ou même néritiques contraintes à venir s’installer sur la pente du plateau continental au cours des grandes régressions. Ces espèces rendues bathyales par les transgressions profiteraient du milieu homogène très stable offeit par la zone abyssale pour la coloniser. L’existence d’Ascidies profondes dans la Méditerranée pourrait relever de ce phénomène. 1360 CLAUDE MONNIOT ET FRANÇOISE MONNIOT RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Toutes les références concernant les Ascidies abyssales se trouvent dans Monniot et Monniot, 1974. Carpine, C., 1970. — Une expérience de chalutage profond (recherche de la « Caravelle » engloutie au large de Nice). Bull. Inst, océanogr. Monaco, 69 (1408) : 1-16. Monniot, C., et F. Monniot, 1974. — Ascidies abyssales de l’Atlantique récoltées par le « Jean Charcot » (Campagnes Noratlante, Walda, Polygas A). Bull. Mus. nain. Hist. nat., Paris, 3 e sér., n° 226, Zoologie 154 : 721-786. Manuscrit déposé le 18 décembre 1973. Bull. Mus. nain. Hist. nat., Paris, 3 e sér., n° 251, sept.-oct. 1974, Zoologie 173 : 1353-1360. Achevé d’imprimer le 30 avril 1975. IMPRIMERIE NATIONALE 4 564 004 5 Recommandations aux auteurs Les articles à publier doivent être adressés directement au Secrétariat du Bulletin du Muséum national d’Histoire naturelle, 57, rue Cuvier, 75005 Paris. Ils seront accompa¬ gnés d’un résumé en une ou plusieurs langues. L’adresse du Laboratoire dans lequel le travail a été effectué figurera sur la première page, en note infrapaginale. Le texte doit être dactylographié à double interligne, avec une marge suffisante, recto seulement. Pas de mots en majuscules, pas de soulignages (à l’exception des noms de genres et d’espèces soulignés d’un trait). Il convient de numéroter les tableaux et de leur donner un titre ; les tableaux compliqués devront être préparés de façon à pouvoir être clichés comme une figure. Les références bibliographiques apparaîtront selon les modèles suivants : Bauchot, M.-L., J. Daget, J.-C. Hureau et Th. Monod, 1970. — Le problème des « auteurs secondaires » en taxionomie. Bull. Mus. Hist. nat., Paris, 2 e sér., 42 (2) : 301-304. Tinbergen, N., 1952. — The study of instinct. Oxford, Clarendon Press, 228 p. Les dessins et cartes doivent être faits sur bristol blanc ou calque, à l’encre de chine. Envoyer les originaux. Les photographies seront le plus nettes possible, sur papier brillant, et normalement contrastées. L’emplacement des figures sera indiqué dans la marge et les légendes seront regroupées à la fin du texte, sur un feuillet séparé. Un auteur ne pourra publier plus de 100 pages imprimées par an dans le Bulletin, en une ou plusieurs fois. Une seule épreuve sera envoyée à l’auteur qui devra la retourner dans les quatre jours au Secrétariat, avec son manuscrit. Les « corrections d’auteurs » (modifications ou addi¬ tions de texte) trop nombreuses, et non justifiées par une information de dernière heure, pourront être facturées aux auteurs. Ceux-ci recevront gratuitement 50 exemplaires imprimés de leur travail. 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