YU AY t'a 4 ie w} BULLETINS , f Len | | RAT % SCIENCES, “ Le 1 Ç Jen # L iA LI L4 Reyen v MAR de TE è ‘ - neo 24 ; re PORTE dore A LE TUE N . 2 ES Î £ ee Co ï Me rt HO AIN ES a et A GE ONE Me Ta ge Cr AL DES DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. BRUXELLES. M. HAYEZ , IMPRIMEUR DE L "ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. ms 1860. ÿ LR “1 #s 4 | A à } CN 4 ul © DUPLICATE EXCHANGE BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1860. — No 1. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 7 janvier 1860. M. MELSsENS, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d'Omalius d'Halloy, Sauveur, Can- traine, Kickx, Stas, De Koninck, Van Beneden, De Vaux, de Selys-Longchamps, Nyst, Gluge, Schaar, Liagre, Bras- seur, Poelman , d'Udekem, Dewalque, membres ; Lamarle, associé ; Montigny, Candèze, correspondants. 2" SÉRIE, TOME IX. 1 (2) CORRESPONDANCE. ee Il est donné communication d'un arrêté royal du 28 dé- cembre dernier qui approuve l'élection , faite par la classe, . de MM. Dewalque et Jules d'Udekem, en qualité de mem- bres titulaires. MM. Dewalque et J. d'Udekem expriment leurs remerci- ments pour la distinction qui leur est accordée. MM. W. Haidinger, de Vienne, et Lamont, directeur de l'observatoire royal de Munich, remercient également la classe pour leur nomination d'associés. — M. Haïdinger exprime le désir d'obtenir un fragment de l’aérolithe tombé à Saint-Denis-Westrem, le 7 juin 1855, et qui se trouve actuellément dans les collections de luni- versité de Gand. « En échange, dit-il, nous serions prêts à mettre à la disposition de la bienveillante direction du musée des fragments d'autres aérolithes ou fers météo- riques dont nous possédons des exemplaires bien intéres- sanis. » Sir Charles Lyell, récemment nommé associé, fait hom- mage de deux de ses publications : l’une sur les laves du mont Etna, et l’autre sur l’origine submarine du pic de Ténériffe. — Remerciments. — M. Henry Storks Eaton écrit d'Angleterre pour ob- tenir des renseignements sur l’état des instruments mé- téorologiques à Bruxelles, pendant les tempêtes de la fin d'octobre et du commencement de novembre derniers, : afin de les comparer à ceux obtenus dans les iles Britan- RD T ‘ FEREE? (8) niques. M, le secrétaire perpétuel fait connaître qu'il a pris soin de répondre à la demande de ce savant. — M, D. Leclercq communique, pour la ville de Liége, et M. Lanszweert, pour la ville d'Ostende, les résultats dés observations météorologiques faites en 1859. — MM. AIf. Wesmael et Émilien de Wael font parvenir leurs observations sur l’état de là végétation faites, à Vil- vorde et à Eeckeren, pendant la même année. — M. Florimond fait connaître qu’il a observé à Lou- vain, le 1° janvier, vers 4 heures 10 minutes du soir, une aurore boréale qui s’est prolongée jusqu’à 4 heures 25 mi- nues. — M. Quetelet fait hommage de l’Annuaire de l'Observa- toire royal de Bruxelles, pour 1860 , ainsi que de la notice par M. Ed. Mailly, qui y est insérée : Résumé de l'histoire de l'astronomie aux États-Unis d'Amérique. —Remerciments. — M. W. Zytphen, de Copenhague, fait parvenir une notice avec plan d'un bateau sous-marin. (Commissaire : M. Liagre.) PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1860. L PREMIÈRE QUESTION. Ramener la théorie de la torsion des corps élastiques à des termes aussi simples et aussi élémentaires qu'on l'a fait pour la théorie de la flexion. (4) DEUXIÈME QUESTION. On demande d'exposer la théorie probable des étoiles filantes et d'indiquer les hauteurs où elles se forment, apparaissent et s'éleignent, en appuyant celte théorie sur les faits observés. TROISIÈME QUESTION. Faire le relevé des espèces qui servent de nourriture aux animaux inseclivores el celui des parasiles qui se trouvent dans les unes et les autres. QUATRIÈME QUESTION. Faire un exposé historique de la théorie du lonus muscu- laire , et rechercher, pour les phénomènes expliqués autrefois à l'aide de cette théorie, une interprétation conforme aux faits établis par la physiologie expérimentale. CINQUIÈME QUESTION. Déterminer, par des recherches à la fois anatomiques et chimiques, la cause des changements de couleur que subit la chair des bolets en général et de plusieurs russules, quand on la brise ou qu'on la comprime. La classe adopte, dès à présent, pour le concours de 1861 , les deux questions suivantes : PREMIÈRE QUESTION. Établir, par des observations détaillées, le mode de déve- (9) loppement, soit du Petromyzon marinus, soit du Petromyzon fluviatilis, soit de l’Amphionus lanceolatus ou d’un poisson plagiostome. DEUXIÈME QUESTION. _ Les belles recherches de Bunsen sur les coefficients d'absorp- tion des gaz simples et composés par les liquides, ont été faites sous des pressions peu considérables ; l'Académie désire qu'on institue une série d'expériences pour déterminer l'in- fluence que pourraient exercer de fortes pressions sur ces coefficients d'absorption et sur l'exactitude de la loi que Bun- sen a déduite de ses recherches. Le prix de chacune de ces questions sera une médaille d’or de la valeur de six cents francs. Les mémoires devront être écrits lisiblement en latin, français ou flamand , et ils seront adressés, francs de port, à M. Ad. Quetelet, secré- taire perpétuel, avant le 20 septembre 1860 pour le pre- mier concours, et avant le 20 septembre 1861 pour le second. L'Académie exige la plus grande exactitude dans Îles citations; à cet effet, les auteurs auront soin d'indiquer les éditions et les pages des ouvrages cités. On n’admettra que des planches manuscrites. Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage, mais seulement une devise, qu’ils répéteront sur un billet cacheté, renfermant leur nom et leur adresse. Les mé- moires remis après le terme prescrit, ou ceux dont les auteurs se feront connaître de quelque manière que ce soit, seront exclus du concours. L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que, dès que les mémoires ont été soumis à son jugement, ils (6) sont déposés dans ses archives, comme étant devenus sa propriété. Toutefois, les auteurs peuvent en faire prendre des copies à leurs frais, en s'adressant, à cet effet au secré- taire perpétuel. ÉLECTIONS. A La classe procède à l'élection de son directeur pour l'année 1861; M. Liagre est désigné par la majorité des suffrages. M. Van Beneden, directeur pour 1860, propose de voter des remerciments à M. Melsens, directeur sortant. Des applaudissements accueillent cette proposition. es = = RAPPORTS. ———— La classe, après avoir entendu la lecture des rapports présentés par MM, Schaar, Lamarle et Timmermans, vote l'impression de la note de M. Gilbert, Sur quelques pro- priélés des lignes tracées sur une sur/ace quelconque. D’après l’avis de ses commissaires, MM. Plateau, Ad. Que- telet et Liagre, la classe a voté également l'impression de la notice Sur la’ vitesse du bruit du tonnerre, par M. Mon- tigny, correspondant de l’Académie. »“ TS Sn | Lee Recherches sur la genèse et les métamorphoses de la Peziza SCLEROTIORUM; par M. Eugène Coemans. Bapport de M. Martens. « La notice de M. Coemans, sur la Peziza sclerotiorum Lib., est consacrée à l'étude d’un de ces cas de polymor- phisme, qui sont si fréquents dans la classe des champi- gnons, et dont la découverte doit, en compliquant les organismes, et en simplifiant les classifications par la suppression d’un grand nombre de genres et d’espèces, opérer une révolution complète dans l'étude de la myco- logie. | La Pezize qui fait l’objet des recherches de l’auteur fut découverte sur plusieurs Sclerotium, par M" Libert, notre compatriote, qui la prit pour une espèce complète, développée parasitiquement sur ces productions fongoides. Il résulte, au contraire, des investigations de M. Coemans qu’elle n’est que la dernière phase du développement d’une espèce qui passe successivement par Îles formes néma- toïde et sclérotienne avant de revêtir la forme d'un cham- pignon de l’ordre des discomycètes. La Peziza sclerotio- rum n’est, du reste, pas la seule thécasporée qui naisse sur des sclérotes, Outre la découverte importante qu'a faite M. Tulasne du Cordyceps purpurea qu'engendre l’ergot du seigle, nous devons en mentionner quelques-unes qui se rattachent plus particulièrement au sujet en question. C’est ainsi que M. Durieu de Maisonneuve a vu se développer une Pezize sur le Sclerotium sulcatum qui croît à l’intérieur des tiges de Carex, et, tout récemment, M. Currey a vu, de cs : (8) son côté, le Sclerotium roseum des tiges de jonc en pro- duire une autre. Les observations de M. Coemans viennent donc com- pléter celles des botanistes précédents. Son travail est d'autant plus intéressant que l’auteur y suit la Peziza scle- rotiorum à travers toutes les phases de son évolution et l’étudie dans ses moindres détails. Sa notice est une mono- graphie complète de cette curieuse espèce : elle est de nalure à jeter un nouveau jour sur une des parties les plus obscures de la mycologie. J'ai l'honneur de proposer à la classe des sciences de la faire insérer, avec la planche qui l'accompagne, dans les Bulletins de l'Académie. » Happort de M. Kickæ. « Les Sclerotium furent envisagés jusqu’en 1843 comme des cryptogames autonomes. A cette époque, M. Leveillé émit l'opinion qu'ils n'étaient qu'une sorte de mycélium secondaire, succédant toujours au mycélium filamenteux primitif, Quoique appuyée sur des considérations justes et sur des recherches nombreuses, cette manière de voir ne fut cependant pas généralement admise : c’est qu'en effet, il lui manquait ce que nous appellerons le contrôle phy- siologique. I fallait avant tout chercher à saisir, au moyen d'observations directes, la filiation de ces divers orga- nismes, successivement créés pour produire à la fin une espèce d’une organisation supérieure. M. Tulasne étudia à ce point de vue, en 1855, le Sclero- lium clavus, si commun sur les graminées. Il confirma (9) les prévisions de M. Leveillé, en démontrant que cette espèce n’est que la souche du Cordyceps purpurea, et en faisant connaitre toutes les phases par lesquelles passe lhypoxylée, à partir de la dissémination de ses spores. Mais les Sclerotium sont nombreux. Il était donc inté- ressant de vérifier si d’autres se conduisent de la même manière. M. Coemans a voulu résoudre cette question en suivant le développement des Sclerotium varium, com- pactum , ete., dont la station est complétement différente, puisqu'ils habitent les carottes, les navets et plusieurs autres racines alimentaires. Ses essais ont été couronnés d'un plein succès. Il a vu naître de ces Sclerotium une pezize décrite par M" Libert, sous le nom de Peziza sclero- tiorum, dans la croyance, où elle était, qu’elle avait sous les yeux un fait de parasitisme. La pezize de M" Libert est donc exactement au S. va- rium ce qu'est le Cordyceps purpurea au sclerotium clavus. De part et d'autre, le Sclerotium est une forme passagère d'une espèce de champignon appelée à atteindre une organisation plus élevée. La spore de la pezize produit un prothalle filamenteux qui donne naissance à un mycé- lium sclérotique, lequel à son tour se développe sous forme d’une pezize destinée à continuer le même cycle. Il y à là, comme le fait remarquer avec raison M. Coemans, une existence à trois termes « présentant à peu près Îles » mêmes métamorphoses que celles des insectes : l’état » primitif ou nématoïde représente en effet assez bien la » larve des insectes; l’état sclérotique, état de vie latente, » rappelle leur second âge, leur vie à l'état de nymphe : » et l’état pezizoïde celui d'insecte parfait. » .. Pour remonter à l'origine du selérote, l’auteur a semé les spores de la pezize : il a vu se former le prothalle ( 10 ) ou mycélium byssoïde, puis celui-ci produire le mycélium sclérotique. En un mot, il a suivi pas à pas la nature dans sa marche constamment ascensionnelle. On sait que, dans ses recherches, M. Tulasne a constaté l'existence de stylospores chez la forme mycéloïde, spha- célienne, du Sclerotium clavus. M. Coemans les a aussi retrouvés chez le Sclerotium varium. Il y a observé, en outre, d’autres corps reproducteurs qu'il hésite, peut-être à tort, à regarder comme des spermogonies, puisqu'ils paraissent en avoir tous les caractères. Cette découverte aurait d'autant plus d'intérêt, que M. Tulasne, après avoir cru aussi, de son côté, à l'existence de ces organes, a reconnu son erreur. Nous craindrions d'être trop long en analysant dans ses détails la notice que la classe nous a chargé d'examiner. Ce qui précède suffit pour apprécier l'importance des recherches de M. Coemans, à qui nous devons d'autant plus savoir gré de les avoir entreprises, qu'il n’a rien été publié sur le même sujet, eroyons-nous, depuis le mé- moire de M. Tulasne. On a bien découvert, comme l’in- dique notre honorable corapporteur, une pezize sur le Sclerotium sulcatum et une autre sur le Sclerotium roseum ; mais cela n’a jeté aucun jour sur la question qu'il s'agis- sait d'élucider. On ne manque pas, en effet, d'exemples analogues , ni dans le genre Peziza, ni dans les Clavaires, les Typhules, les Pistillaria, les Agaricus, etc. Est-ce à dire que la matière traitée par l’auteur de la notice soit épuisée? Nous ne le pensons pas. Il reste en- core des questions spéciales à étudier. Comment se fait-1}, par exemple, que telle espèce qui possède habituellement un mycélium sclérotique, se développe exceptionnelle- ment sans passer par cêt élat intermédiaire? L'absence . L (11) de ee mycélium serait-elle alors compensée par un dévelop- pement inusité de pycnides ou de spermogonies? Nous faisons des vœux pour que M. Coemans entreprenne une nouvelle série d'observations dans le but de résoudre en- core cette autre partie du problème. Me ralliant aux conclusions de M. Martens, premier commissaire, j'ai l'honneur de proposer à la classe de décider que la notice de M. Coemans sera publiée, avec la planche qui l'accompagne, dans les Bulletins de l'Aca- démie. » Conformément aux conclusions de ces rapports, l’Aca- _ démie ordonne l'impression de la notice de M. Eugène Coemans. . COMMUNICATIONS ET LECTURES. Occultation des pléiades , le 8 décembre 1859 ; notice de M. Ad. Quetelet, directeur de l'Observatoire royal. D’après les désirs de M. Bache, associé de l’Académie et directeur des travaux géodésiques des États-Unis, l’ob- servatoire royal de Bruxelles a continué l'observation de l'occultation des pléiades. Le ciel était assez favorable le 8 décembre dernier; mais le 4 de ce mois, l'observation devint tout à fait impossible, à cause de la quantité des nuages. Les observations ont été faites, comme précédem- ment, par mon fils et par moi; on en trouvera ci-après les résultats exprimés en temps sidéral, M, Ernest Quetelet | (12) observait à l’équatorial de Troughton; je me servais d’ une lunette libre de moindre dimension. Ê Occultation des pléiades, le 8 décembre 1859, NUMÉROS des IMMERSION. ÉTOILES. 21h 32m 152 42 19,5 » 21,6 (°) » 54 0,4 5 58,9 34,5 ÉMERSION, 29h 40m 2954 » 22 3 56,1 21 50 11,4 Observateurs. Ern. Quetelet, Ad. Quetelet. Ern. Quetelet. » Ad. Quetelet. Ern. Quetelet. Ad. Quetelet, 34,1 Ern. Quetelet. 5,6 Ad. Quetelet. 5,7 ; Ern. Quetelet, (") Douteuse. Note sur l'écoulement des eaux qui circulent à la surface de la terre; par M. Lamarle, associé de l’Académie. 1. L'objet que je me propose dans la présente note est d’élucider certains points relatifs aux eflets de la rota- tion de la terre sur l'écoulement des eaux qui cireulent à sa surface. Une question soulevée par M. Babinet, au sein de l'In- stitut, a donné lieu tout récemment à une discussion qui s’est continuée pendant plusieurs séances et où MM. Ber- (15) trand, Delaunay et Combes sont particulièrement inter- venus. M. Babinet avait dit que, par suite de la rotation de la terre sur son axe, les cours d’eau de notre hémisphère tendent constamment à ronger leur rive droite, tandis que ceux de l’autre hémisphère tendent à ronger leur rive gauche. Il avait ajouté que cette tendance est propor- tionnelle au sinus de la latitude et indépendante de la direction suivie par les différents filets fluides. MM.'Bertrand, Delaunay et Combes sont tous trois tombés d'accord sur l'existence réelle de la tendance signalée par M. Babinet. Toutefois 1ls n’admettent point que la rotation de la terre ait exercé où exerce une in- fluence appréciable sur les directions actuelles des cours d'eau. M. Combes ajoute que, si cette influence est sen- sible quelque part, ce ne pourrait être que dans les par- ties voisines des embouchures, et encore lui semble-t-1 qu'elle est impuissante à produire autre chose que des effets très-faibles et peu étendus. 2. L’explication du phénomène sur lequel M. Babinet a appelé l’attention de ses savants confrères, peut s'établir de diverses façons plus ou moins simples, plus ou moins complètes. M. Delaunay déduit cette explication de la considéra- tion d’une force fictive, introduite par Coriolis dans la théorie des mouvements relatifs et désignée sous le nom de force centrifuge composée. M. Combes ne méconnaît point l’importance et l'uti- lité du théorème de Coriolis sur le mouvement relatif d’un système de points matériels. Il préfère toutefois recou- rir ici à des considérations purement géométriques et ne faire usage que des principes élémentaires de la méca- (1) niqué rationnelle, Îl procède, en conséquencé, par une simple décomposition de la rotation de la terre, comme l'ont fait antérieurement MM. Poinsot et Liouville, lors- qu'il s'agissait d'expliquer la rotation apparente du plan d’oscillation du péndule dans la belle expérience de M. Foucault. | M. Bertrand ne pense pas qu'il soit utilé d'introduire dans la discussion du problème la force centrifuge com- posée de Coriolis. Ces forces fictives conduisent sans doute à un résultat exact, mais précisément parce qu’elles sont fictives, elles ne paraissent pas de nature à faire bien comprendre le mécanisme du phénomène, en donnant l'analyse des causes réelles qui le produisent et de Ja manière dont elles sont mises en jeu. Je partage entièrement celte opinion de M. Bertrand. Jl me semble d’ailleurs que le procédé suivi par M. Com- bes n'est pas assez direct pour montrer clairement ce qui se passe en réalité, et établir entre les différents cas qui se présentent les distinctions qu'ils comportent, J’ajou- terai que ce procédé laisse subsister quelques doutes , soit parce que les rotations composantes dont on fait abstrac- tion ont pour axes des droites incessamment mobiles; soit parce que l’objection formulée par l’auteur contre la théorie de M. Babinet parait trop absolue, notamment dans le cas d’un cours d’eau qui se meut, avec une vitesse constante, le long d’un parallèle. « Notre confrère, dit M. Combes, n’introduit dans ses » raisonnements et ses calculs que la force centrifuge » due à la vitesse effective dont un point matériel est » animé suivant la circonférence d'un parallèle terrestre. D» » Un calcul correct ne peut ainsi lui donner que la com- posante horizontale de la force qui pousserait les points (15) » de ce parallèle vers le pôle ou vers l'équateur, si la » vitesse angulaire de rotation de la terre venait tout à » coup à diminuer ou à augmenter de la vitesse relalive a » qu'il prête au point matériel divisée par le rayon du » parallèle IérReSLre, c’est-à-dire en employant ses no- » —. Or, ce n'est là qu'une vue incom- tations de = » plète du sujet en discussion où le seul point délicat » est laissé de côté. Si dans la note imprimée au compte » rendu, notre confrère arrive à un résultat exact, c’est » par suite d’une erreur de calcul que M. Liouville a du » reste signalée à l’audition de là note. » Il semblerait, d'après ce texte, que, dans le cas d’an cours d’éau qui circule uniformément le long d’un paral- lèle, on n’est pas en droit de considérer directement et d’une manière absolue le mouvement effectif de chacun des filets fluides. Selon moi, dans ce cas, le plus simple de tous, il convient précisément d'opérer d'une manière directe, ce qui n'offre aucune difficulté, et montre mieux que tout autre procédé le mécanisme du phénomène. 3. Soil p un point matériel dont la masse est m el qui se meut, par hypothèse, suivant un parallèle, avec une vitesse relative u supposée constante, Nommons : r le rayon du parallèle où se trouve le point p; À l'angle que fait avec la verticale passant par le point p la perpendicalaire abaissée de ce point sur l’axé terrestre; « là vitesse de rotation de la terre autour de son axe; R la partie de la verticale ui cu entre le point p et l'axe de rotation. Il est visible que le point p tourne autour de l’axe de la terre avec une vitesse angulaire w + = et qu’il est animé d'une vitesse totale effective représentée par ro + u. La conséquence ést que la réaction produite par ce mouve- 2, (16) ment se réduit exclusivement à l’action centrifuge dirigée suivant le rayon vecteur r et ayant pour expression u | u2 m \o + —] (ro + u) = mr? + Qmuo + m —. r ” Cela posé, mro* est la force centrifuge qui subsisterait seule si le point p n'avait point de vitesse relative. De même aussi me est la force centrifuge qui subsisterait seule si la terre ne tournait pas sur son axe et que le point p n'eût d'autre vitesse que sa vitesse relative u. On voit donc qu'aux deux réactions qui résultent de l’un et l’autre des mouvements composants, considérés chacun comme subsistant seul, s'ajoute, par le fait de la combinaison de ces mêmes mouvements, une réaction additionnelle, Dmou. La composante horizontale de cette réaction est évidem- . ment Amou sin }, ainsi que l'ont trouvé MM. Delaunay et Combes. Veut-on comparer les deux états qui correspondent respectivement, l’un au cas où le point p n’a pas de vitesse relative, l’autre à celui où le point p a une vitesse rela- tive u supposée constante? Il faut, en se plaçant à ce point de vue, considérer l'augmentation totale que subit la force centrifuge dans le passage du premier état au second. Cette augmentation est égale à mu? mu? — + mou = r R cos à + Amau. (17) Il s'ensuit qu'elle à pour composante horizontale ë mu? CPU, : Oinou sin À +- si tang à et pour composante verticale, dirigée en sens contraire du poids du point matériel p, mu? ER . mon cos À Désignant par v la vitesse communiquée par la rotation de la terre aux différents points du parallèle considéré, on à 0 —= Fo — Ro cos 2. De là résulte, en substituant dans l'expression (1) de la composante horizontale la valeur de « fournie par cette dernière relation, L : nu? Dinuv u (3) . mou sin } + {ang À — tang À | 1 +- =] : R t 2v On à de même pour la composante verticale mu? 9muv u | (4). . . mou cos À + — | ee . : R 2% En général, la quantité — est une fraction qui reste très-pelite pour tout parallèle situé en dehors du voisi- nage des pôles. Il s'ensuit qu'on peut presque toujours la négliger, et poser, en conséquence, les déductions sui- vantes. 2" SÉRIE, TOME IX. 2 (48) Selon que la vitesse w est dirigée dans le sens de la vitesse v ou en sens contraire, la composante horizontale, due à l'intervention de la vitesse u , est dirigée vers l'équa- teur ou vers le pôle; ce qui revient à dire que, dans notre hémisphère, elle se porte toujours vers la droite du cou- rant, et, dans l’autre, toujours vers la gauche. = 4. Considérons, en second lieu, le cas d’un cours d’eau qui se meut avec une vitesse uniforme le long d’un mé- ridien. Concevons qu’on ait pratiqué le long de ce méridien un canal à fond horizontal et à paroïs verticales. Imagi- nons, en outre, que le point p se meuve dans ce canal avec une vitesse relative u supposée constante. À chaque instant le point p est animé de deux vitesses rectangulaires entre elles, l’une w constante et dirigée suivant la tangente au méridien, l’autre v variable et dirigée suivant la tan- gente au parallèle. La composante v est la vitesse com- muniquée par la rotation de la terre au point du parallèle contre lequel le point p s'appuie à l'instant que l'on con- sidère. Lorsque le point p se meut dans notre hémisphère de l'équateur vers le pôle, il tend, en vertu de fa vitesse acquise, à se déplacer vers la droite, perpendiculaire- ment au méridien, et plus rapidement que ne le font les points des divers parallèles qu'il touche successivement. De là résulte un obstacle apporté à la marche du point p par la paroi verticale située à droite de la vilesse u, el, conséquemment, une action exercée par le point p contre cetle même paroi. Lorsque le point p se meut du pôle boréal vers l'équateur, il tend, en vertu de la vitesse acquise, à se déplacer vers la droite, perpendiculairement au méridien, et moins rapidement que ne le font les points des divers parallèles qu'il touche successivement. De là (19) résulte une action exercée sur la marche du point p par la paroi verticale, située à droite de la vitesse w, et, con- séquemment , une réaction égale et contraire exercée par le point p contre celte même paroi. S'il s'agissait de l’hé- misphère austral, la gauche se substituerait à la droite : rien d'ailleurs ne serait changé. Telle est ici lanalyse très-simple du phénomène. S'agit-il ensuite d'évaluer la pression que supporte la paroi verticale, on peut y parvenir, soit en opérant, comme l'a fait M. Combes, d’après la considération des infiniment petits, sôit en suivant la marche tracée par M. Delaunay en faisant intervenir la force centrifuge composée intro- duite par Coriolis dans la théorie des mouvements rela- tifs, soit en s’en tenant au procédé direct et rigoureux du calcul différentiel. Voici d'abord ce que donne la considération des infini- ment pelits. La vitesse du point p, dirigée pérpendiculairéement au méridien , étant rw, l’espace qu'il décrirait en vertu de celle vitesse, pendant le temps dt, est rœdt. L'accroisse- ment de ce même espace, après le temps dt, est exprimé par la différentielle dr. dt. Il suit de là que la force capable de produire cet accroissement, c’est-à-dire que l’action ou la réaction exercée par le point p sur la paroi verticale contre laquelle il s'appuie à pour expression dr Dm — dt ? à _ dr At D J 7e el remplaçant = par sa valeur w sin 2. d : 2muv (5) . . . Smet sin à — tang 2. ( 20 ) Cette expression est précisément celle qui représente ici la force centrifuge composée. On peut donc l'écrire direc- tement, lorsqu'on fait usage du théorème de Coriolis invoqué par M. Delaunay. 5. Voyons maintenant comment s'applique le procédé direct et rigoureux du calcul différentiel. Observons d’abord qu’étant donnée la position du point p sur le méridien qu'il décrit, nous pouvons substituer à ce méridien le cercle osculateur qui le touche en p. Cela posé, prenons pour axe des x l’axe terrestre, et pour plan des zy le plan décrit par le centre du cercle osculateur substitué au méridien, à partir du point p. Conservons les notations précédentes, et nommons : t l'instant que l’on considère; 6 l'angle que le méridien mené par le point p fait, à l'instant €, avec le plan des zx. p Le rayon de courbure du cercle osculateur substitué au méridien à partir du point p. b la distance du centre de ce cercle à l’axe de rotation. De là résulte d'abord : r = R cos à — 0 +1p cos: On voit d’ailleurs, sans la moindre difficulté, que les coordonnées du point p, à l'instant {, sont respecti- vement : T—=psM), VTC STE Différentions deux fois de suite, en observant que les . dA uw dç , quantités d, p, DE D y = 0 sont censées constantes, et faisons é—0 dans les résultats de la dernière différentia- tion, ce qui revient à prendre pour plan des zx le méri- ns actes tint dti à nt 0 (2) dien qui passe par le point p, à l'instant t. On trouve ainsi | d?x d) \2 uw? (6) —— — , sin ) ea — — — sin ). ) de? ï dt p d?i dre dà (7) = —9 —_., —_ — — Do,p —. sin } — — dou sin à. di? CM 1: 6 dt (8) d?z | = dr HSE , — = — FF |— ns eee NO = 1 COS 2e dt? dt dt? p De là résultent évidemment les réactions suivantes : 4° Suivant le rayon du parallèle mené par le point p, la réaction mra, c’est-à-dire la force centrifuge due à la rotalion de la terre, prise isolément; 2 Suivant la verticale, la réaction m _ c'est-à-dire la force centrifuge due au mouvement relatif du point p sur le méridien, ce mouvement étant pris comme s’il subsis- tail seul; 5° Suivant la normale au méridien, la réaction 2moœu sin À, c'est-à-dire celle que nous avons déjà trouvée ci-dessus et qu'on désigne, d'après Coriolis, sous le nom de force centrifuge composée. Ces résultats concordent avec la théorie de Coriolis sur les mouvements relatifs. Ils ont l'avantage de mettre en évidence toutes les réactions qui se produisent, et de fournir ainsi, conformément à cette théorie, les divers éléments dont on a besoin pour résoudre le problème d'une manière complète. Conceluons que, dans le cas d’un point matériel qui se meut uniformément le long d’un méridien, les réactions qui s'ajoutent au poids apparent sont au nombre de deux, l’une horizontale et perpendiculaire au plan du méridien, (22) l’autre verticale et agissant en sens inverse de la pesanteur apparente. La première a pour expression : 2muv (9) - - . . Omou sin à — tang à. R La deuxième est DR CAE 0 6, Considérons en troisième lieu le cas d’un cours d’eau qui se meut uniformément suivant une ligne géodé- sique (). En substituant au cours d’eau un point matériel, nous pourrons opérer comme nous venons de le faire. Les modi- fications à introduire consisteront en ce que les vitesses e dAÀ d£ 4 angulaires =, + Cesseront d'être constantes. On aura d’ailleurs, comme équations de condition, HAN (RL 4 cire 2 a) + 720? = u? = çons*. b ds — = +0, dé (12) . æ/ étant la partie de la vitesse angulaire e qui Corres- pond au mouvement relatif du point p. (*) On observera que, dans le cas général d’une ligne quelconque autre qu'un paralléle ou un méridien, il y a nécessairement combinaison des effets particuliers et distincts qui correspondent respectivement à chacun des deux cas traités précédemment, (3) Il vient alors, au lieu des équations (6), (7), (8), Là: ; ONCE en — psin À (ee) + p COS À _ La relation r—R cos 2 = 6 + p cos à donne dr À CPR TE IMPLTES AB: 5: | | M jé (S} ds) ie héadiihet CR if a À On a de même en différentiant les équations (11) et (12) ds AE il e dr d?) dr Hi. . PT == — = — — 0 —: dt dt? ro dt di? dt De là résulte, par voie de simple substitution, ag. Le sÿ ; a; . — —=— sin 1 | — COS À — di? . ds de? ? dy d} e da d?ài Dont — 6 (Quote) — sin = = — a?) (2 “ ) dt r dt de” d°?z di \2 d?;, 20). — — ro +)? — » cos ;. (2) — 9 Sin }. —. si Pts) 5 dt ee dt? (24) Supposons que le mouvement relatif du point p subsiste seul. Pour appliquer à ce cas les formules (18), (19) et (20), il suffit d’y poser © — 0. Ce qui reste alors ce sont les réactions qui correspondent à celte hypothèse pour l'unité de masse. Prises toutes ensemble, ces réactions se composent en une réaction unique, celle qui provient de la force centrifuge dans le mouvement du point p, sur la ligne géodésique qu'il décrit. Il s'ensuit que cette réac- tion est dirigée, suivant la verticale, en sens contraire de la pesanteur apparente et qu'elle a pour expression u? Mu PR A en Ê o! étant, pour le point p, le rayon de courbure de la ligne décrite dañs le mouvement relatif de ce point. Par hypothèse, la ligne dont il s’agit est une ligne géo- désique. Elle a donc en p même courbure que la section normale de même direction. De là résulte, ainsi qu'on le voit aisément, On peut donc écrire C d\2 2,2 122). 4°. mn (à) + |. p R Ayant soustrait des seconds membres des équations (18), (19) et (20) les termes qui ne s’évanouissent pas dans l'hypothèse o — 0, et dont l'ensemble nous a donné la réaction centrifuge m : ,il ne nous reste plus que les réactions suivantes, l’une parallèle à l'axe des y et repré- | (25 ) sentée par dl, LR (25) . e ° e e L 2m Tes sin À | dt l’autre parallèle à l’axe des x et exprimée par GEL. . . mr + 2moor Retranchons, pour la laisser à part, la réaction mr, qui n’est autre chose que la réaction centrifuge due à la rotation de la terre prise isolément. Opérons ensuite sur la réaction 2morw/ et décomposons-la en deux autres, l’une dirigée suivant la verticale et ayant pour mesure DA. , 2marw’ COS 2, l’autre dirigée suivant la tangente au méridien et exprimée par en 2maore Sin 2. Il est visible que la résultante des réactions (25) et (26) est dirigée dans le plan horizontal, perpendiculaire- ment à la vitesse u, et qu'elle agit de manière à porter le point p vers la droite ou la gauche du courant, selon qu'il s’agit de notre hémisphère ou de l’autre. On voit de même que cette résultante a pour expression j d). \? Dm sin À V/# e + 1222 — Omaœu sin ). (A Concluons que, dans le cas traité ci-dessus, les réactions qui s'ajoutent au poids apparent du point p se réduisent à deux, l’une horizontale et dirigée normalement à la vi- (26) tesse u, sur la droite ou la gauche, selon qu'il s’agit de notre hémisphère ou de l'hémisphère austral, l'autre ver- ticale et agissant en sens contraire de la pesanteur appa- rente. La première a pour valeur CT) SPORE RAR RCT RER La deuxième est représentée par la somme algébrique ; d) > 7? 4) a). 0e QUE m2 | , L'AbS | + 2mrouf cos 1, dt R la vitesse angulaire «/ devant être affectée du signe + ou du signe —, selon qu’elle est de même sens que la vi- tesse w/ ou de sens contraire. 7. Au lieu de procéder, comme nous venons de le faire, on peut s’appuyer directement sur le théorème de Coriolis. En vertu de ce théorème, on connaît d'avance les réac- tions qui se développent dans le mouvement du point p. Ces réactions sont au nombre de trois. La première est due à la rotation de la terre, prise à part et isolément : c'est la force centrifuge mro*. En se composant avec l'attraction que la terre exerce sur le point p, elle produit la pesanteur apparente et détermine la direction du plan horizontal. La deuxième est celle qui résulterait du mouvement relatif du point p, si ce mouvement subsistait seul. Elle se réduit ici à une force centrifuge dirigée suivant la verticale el ayant pour mesure l'expression (22), savoir mu? [ d) | 12? er mm el) + —— |: “+ dt i | La troisième est ce qu'on nomme, d’après Coriolis, la JA A0 ENS ENONS | 244 Au : Pi (27) force centrifuge composée. Elle est exprimée en grandeur par le produit 9mo.u sin &, « étant l’angle que la direction de la vitesse w fait avec l'axe terrestre. Cette réaction est perpendiculaire au plan mené par la vitesse 4 parallèlement à l’axe de rotation. Elle agit en sens contraire du sens dans lequel la droite qui repré- sente la vitesse w serait entraînée si l’axe de la rotation w passait par le point p. Imaginons deux plans menés par le point p, l’un, P, per- pendiculaire à l’axe des x, l’autre, Q, perpendiculaire à la vitesse w. Soit D l'intersection de ces deux plans. La force centrifuge composée est dirigée suivant la droite D. Les cosinus des angles que la vitesse uw fait avec les axes coordonnés sont respectivement À dx 4 dy 1 dz COS (U,X)—= — — , COS(u,y) — Cos(u,z) = — —. (ex) u dt ? (u,y) u dt ? (u,3) u dt De là résulte, en désignant par 7 l'angle que la droite D_ fait avec l’axe des z et par > celui qu’elle fait avec la ver- ticale menée par le point p. COS y — COS À COS y. On a, d’ailleurs, 1 dz 4 dy = — € + — — sin y —= 0, s dl ë dt ds vu que la droite D est perpendiculaire à la vitesse u. Le plan Q, contenant à la fois la droite D, la verticale (28 ) menée par le point p et l'horizontale qui part de ce même point suivant la direction perpendiculaire à la vitesse u, il s'ensuit que la force contrifuge composée se décompose en deux forces, l’une dirigée suivant la verticale et ayant pour mesure 2mau sin æ&. COS #, l’autre horizontale, perpendiculaire à la vitesse u, et ayant pour expression Qinœou sin &. sin y. Cela posé il est visible qu’en restreignant au mouvement relatif du point p les équations générales Z—pSin), Y—TrTSNc, Z—rcCosSC TERRE Il suffit de différentier une fois ces équations et de poser _6—0 dans les résultats pour obtenir immédiatement les valeurs suivantes dx d) je UE 6 ; — — p —. COS), — Tr — ro, dt dt dt dt dz dr d) TN pe SIN dt at dt On a d’abord (16e) 1 dx COS. (UT) = COS a = — — | u dt” et, par conséquent, V'dy? + dz? sin x — . uut Il vient ensuite On déduit de là, en premier lieu, dy COS Y = ———— ; . Vdp + de? en second lieu dy. sin?) + dz? sin 4 = V1 — cos? à cos? > — T7 djrdé Dès lors il ne reste plus à faire que de simples substi- tutions. On trouve ainsi L di 2mou Sin & COS 4 —= 2Mo à cos À — Amrow COS à. On a de même dA\2 a ; dtV P? (5) ro Eu udt sin à A A Er || V’dy? + dz? V'dy? + dz? et, conséquemment, 2mou sin & sin y — 2mou sin à. De la résultent évidemment les résultats définitifs for- mulés ci-dessus comme conclusions du numéro qui pré- cède. 8. Considérons, en dernier lieu, le cas général d’un point matériel qui se meut, avec une vitesse constante u, le long d’une ligne quelconque s, tracée à la surface de la terre. Sans rien changer à ce qui précède, désignons par © ( 50 ) l'angle que le plan de la section normale, menée par lé point p suivant la direction de la vitesse uw, fait avec le plan osculateur de la ligne s. La seule modification con- siste en ce que la force centrifuge due au mouvement re- latif du point p est dirigée suivant le rayon de courbure de la ligne s et qu’elle a pour expression mu? 2 p'' étant ce rayon de courbure. On sait qu’on à généralement Il vient donc pour la réaction dont il s’agit nu? mu? im d: \? rc"? ER === NEC EUR == P — + 0 p p cos © COS © dt R Cette réaction, dirigée suivant le rayon de courbure de la ligne s, se décompose en deux autres, l'une dirigée sui- vant la verticale et représentée, comme ci-dessus, par d) \? 1202 2 9 e e , . mn | | n pue a —— s (29) p = l'autre horizontale, perpendiculaire à la vitesse w et ayant pour mesure LE i \ 2 72627 Done. ml 4 Fe + fins On observera que cette dernière réaction agit du dedans au dehors de la courbe suivant laquelle le cercle oscula- (51) teur de la ligne s se projette horizontalement. On voit d’ailleurs qu’elle peut acquérir une énergie prépondérante. Concluons que, dans le cas général d'un point matériel, décrivant , avec une vitesse constante «, une ligne quel- conque tracée à la surface de la terre, les réactions qui s'ajoutent au poids apparent de ce point sont au nombre de deux, l’une horizontale, dirigée normalement à la vi- tesse u et, toutes choses égales d'ailleurs, agissant sur la droite avec plus d'énergie que sur la gauche, Fautre verti- cale et agissant en sens contraire de la pesanteur appa- rente. La première a pour expression (51) 9 . Fe | (æk _h ae Les mou Sin m ee) le ng © AU A hs La deuxième est représentée par (32) Amrox COS ) +] (2 + ic SEE et) À — ; F\ar R | 9. Passons du cas d’un simple point matériel à celui d’un cours d'eau dont tous les filets auraient une même vitesse constante w et couperaient à angle droit la section verti- cale perpendiculaire à l’axe du courant. L'effet des réac- ions qui s'ajoutent à la pesanteur apparenteest de modifier celle pesanteur en grandeur ainsi qu'en direction. Il en résulte que la ligne qui limite la surface du cours d’eau dans la section transversale, s'incline à lhorizon d'un angle à détermine par la relation générale : d;\2 re 21. Lou Sin ?} Le pi) + —. {ang 9 rein ie — g — 2rue COS À — p É (3) Il en résulte en même temps qu'à la pesanteur appa- rente, représentée par mg pour la masse m, se substitue la force P, exprimée comme il suit : d) \? r 20? 24) . . P—m —— Jr COS À — (2) he |: (54) E ) À — p di = Les formules (55) et (54) se simplifient dans les cas par- ticuliers traités ci-dessus; elles s'appliquent au cas d'un parallèle, en posant d) Ge = U, (4) — 0, 9 = 0. Lorsqu'on fait abstraction du défaut de sphéricité de la terre, les quantités ? et R deviennent toutes deux égales au rayon terrestre, et l'on a en général pour une ligne quelconque s Jœu sin à + . tang + (55). * . . . tangi— RAD g — 2rau COS À — % ” uw (56) . . . P—m (0 — Iyrow’ COS À 2 R Ces dernières formules sont, dans tous les cas, très-ap- prochées. On peut d’ailleurs y négliger, par rapport à g, les °._? L « . 2 quantités relativement très-petites 2row/ cos À et £: II vient alors très-simplement Le + 1 ; u° (97) «1. "Mangit = —+ (au sin À £ — lang +), ’ R | (35 ) et l'on peut s’en tenir à cette dernière formule, qui donne, pour le cas d’un parallèle, | 2 (OO tang : FA (au sin À + .. tang 1), et pour le cas d’une ligne quelconque géodésique du Sin À (39) ° . 7] , . fang n = ————————— € g 10. Empruntons à M. Combes l'application particu- lière qu'il a prise pour exemple, en partant de la for- mule (59). La valeur moyenne de 45° étant attribuée à , on trouve | ouV/2 6,2%8uV/2 0 0DODIO4S à q 56400. 9,809 tang à — Il en résulte que, pour un fleuve large de 4 kilomètres et qui coulerait dans notre hémisphère avec une vitesse uniforme de 5 mètres par seconde, le relèvement de l’eau du côté de la rive droite serait de 42 centimètres. Un pareil effet, s’il subsiste seul, ne paraît pas de nature à exercer aucune influence sur le cours du fleuve, lorsque les deux rives, supposées de niveau, conservent chacune une cer- _taine élévation au-dessus du périmètre mouillé. En est-il de même, en cas de crue, lorsque les eaux s'élèvent, et notamment lorsqu'elles débordent. Nous ne le pensons pas. Si le courant peut surmonter la rive droite, tout en res- tant au-dessous de la. rive gauche, il semble qu'il doit exercer sur la rive par laquelle il déborde une action plus marquée que sur l’autre rive. 2€ SÉRIE, TOME IX. J (54) Imaginons que cette action ait pour résultat une érosion dont la concavité soit tournée vers la rive gauche. Conce- vons, en outre, qu'un petit cercle de la sphère terrestre remplace la ligne géodésique, considérée d’abord et qui permettait l'emploi de la formule (39). Il faut, en ce cas, recourir à la formule (58), et poser 4 (: u? |. tang à — — | ou sin © -+ — tan s g R S ? Soit ! le rayon du peut cercle pris pour axe du cours d'eau, On a exactement VR 2 a lang e — L et approximalivement, pour toute valeur de ! supposée petite par rapport a R, Re {ang © — ie De la résulte 1 9 LD RONTONNEE NE Re (200 sin À + . . 9 On voit aisément, par cette dernière formule, que, pour : des valeurs de u et de !, les unes au moins égales à l'unité, les autres égales ou Dent à 12 kilomètres, le terme ñ acquiert une importance relative prépondérante. Cette importance est telle qu'avec les données précédentes et pour une valeur de 142 kilomètres attribuée à {, le terme ji dépasse le triple du premier terme. Ce ne serait donc a A et de. es in 5 2. ee (35) plus de 12 centimètres seulement, mais de 48 centimètres au moins que les eaux tendraient à se relever du côté de la rive droite. L'hypothèse d'un courant dont tous les filets auraient même vitesse ne peut se réaliser dans l’ordre naturel où l’adhérence, que ces filets contractent entre eux et avec la paroi mouillée, retarde inégalement leur marche. II suit de là que le relèvement des eaux vers la rive droite est moindre qu'on l'a supposé tout à l'heure, et qu’un autre effet remplace en partie la dénivellation. Cet effet consiste en ce que les filets animés de la plus grande vitesse se rapprochent de la rive droite plus que de la rive gauche. Il semble assez naturel d'admettre, comme conséquence applicable aux cours d’eau de notre hémisphère, une ten- dance à ronger leurs rives plus prononcée vers la droite que vers la gauche. Suivant la remarque de M. Combes, ce n’est sans doute qu'à proximité de l'embouchure des fleuves que cette tendance peut, à l’aide du temps, produire des déviations sensibles. Peut-être aussi doit-elle avoir pour effet général d'étendre sur la droite plus que sur la gauche le développement des sinuosités naturelles. M. Desfontaine a observé sur le Rhin, fleuve à fond de sable et de gravier, sujet à des crues subites d’une grande violence, que les rives où la courbure des coudes avait un rayon de 2 kilo- mètres et demi n'étaient plus sensiblement affouillées. En admettant une vilesse moyenne de 53 mètres par seconde et une courbure uniforme au rayon de 2,500 mètres , on trouve pour valeurs correspondantes des termes L et œuV'2 gè Fr u? o) 9 = — 0,000367, mv2 — 0,00005144. y (56 ) | Il suit de là qu’en assimilant entre eux les effets de la courbure des coudes et ceux de la force centrifuge com- posée, les premiers devraient l'emporter de beaucoup sur les seconds. Or, s’il est permis de généraliser l'observation de M. Desfontaines, l'effet d'une courbure au rayon de 2,500 mètres cessant d'être sensible, on peut conclure que la rotation de la terre est presque partout sans influence appréciable sur la direction des cours d’eau considérés dans les conditions actuelles de leur régime ordinaire. Note sur la vitesse du bruit du tonnerre ; par M. Monugny, correspondant de l’Académie. On admet que la distance d’un observateur au point le plus rapproché du sillon lumineux tracé par la foudre dans l'air, est égale à autant de fois 540 mètres qu'il s'écoule de secondes entre l’apparition de léclair et la première impression du bruit du tonnerre pour l’obser- vateur. Tel est le mode d'évaluation de la distance d'un orage. Mais, en présence des faits suivants, je me suis demandé si ce mode est bien fondé, et si la vitesse du bruit du tonnerre n’est pas de beaucoup supérieure à la vitesse du son ordinaire, qui, comme on le sait, est de 340 mètres par seconde, à la température de 46°. Dans la nuit du 28 au 29 septembre dernier , vers deux heures et demie, un violent orage éclata aux environs de Namur, pendant lequel la foudre incendia une ferme au village de Flawinne. Je me trouvais alors à Rhisnes, dans une habitation qui est éloignée de 5200 mètres de cette (37) ferme (1). Éveillé dès le commencement de l'orage, je vis tout à coup la vive lueur d’un éclair, et presque aus- sitôt un violent coup de tonnerre éclata avec fracas en produisant ce bruit sec particulier qui annonce la chute de la foudre aux environs. L’intervalle de temps écoulé entre l'éclair et l'éclat de la foudre ne dépassa certaine- ment pas deux secondes. Quelques minutes après, jJ'aper- çus à l’horizon les premières lueurs de l'incendie que la foudre venait d'allumer à Flawinne. Si l’on calcule le temps qui, théoriquement, aurait dû s’écouler entre l'apparition de l'éclair et l’audition du coup de tonnerre, en divisant par 540 mètres la distance de 5200 mètres de l'habitation de Rhisnes à la ferme incen- diée, considérée comme ayant été le foyer sonore, on obtient le chiffre 15,3, qui exprime le nombre de secondes que j'aurais dû compter entre l'éclair et le tonnerre. Or, J'ai la certitude que cet intervalle n’a pas dépassé deux secondes, Dans le but d'expliquer une différence aussi marquée entre l'observation et le résultat du calcul, on invoquera d’abord l'accélération que la vitesse du vent peut produire sur la propagation du son, quand leurs directions coïnci- dent. A la vérité, un vent du SO. assez intense s'étant élevé pendant l'orage , il aurait pu affecter la vitesse d’un . son dans la direction de Flawinne vers Rhisnes, ce der- nier village étant au nord du premier. Mais 1l est impos- sible d'attribuer à l’action du vent une accélération de la vitesse du son qui puisse expliquer la différence, si mar- (1) Les distances rectilignes, dont il sera question, ont été mesurées à l’aide de la carte détaillée de la Belgique, publiée par MM. Vandermaelen. ( 38 ) quée, entre le court intervalle de temps observé et les quinze secondes déduites du calcul. Veut-on supposer que la foudre émanant d’un nuage élevé de 680 mètres au-dessus de l'habitation de Rhisnes, ait été frapper la ferme de Flawinne en traçant un sillon lumineux très-incliné à l'horizon? Alors l'audition de l'éclat du tonnerre aurait pu succéder à l’éclair après deux secondes, comme je l'ai observé, parce que la plus courte distance du sillon fulminant au lieu d’audition eût été égale au double des 340 mètres que le son parcourrait en une seconde. Mais, si telle était la cause de la différence signalée, le bruit du craquement de la foudre aurait dû persister pendant 13 secondes environ, tout en perdant progressivement de sa violence. Je n’ai rien observé de semblable : la foudre produisit un bruit sec très-fort, mais de courte durée. Il fut suivi de roulements de ton- nerre assez prolongés. Voici, d'ailleurs, une circonstance qui enlève toute pos- sibilité à la supposition émise. Le lendemain de l'aeci- dent, j'en parlai à M. Raucoux, curé de Temploux, village situé à l’ouest de Flawinne. Il avait vu l'éclair et entendu le craquement de la foudre. Je lui demandai quel avait été, d’après son appréciation, l'intervalle écoulé entre les deux phénomènes; 1] me dit que cet intervalle ne lui avait point paru excéder deux secondes. Or, le . presbytère de Temploux se trouvant à 5050 mètres de la ferme incendiée, le son aurait dû employer 14,7 secondes à parcourir cette distance avec la vitesse ordinaire de 340 mètres. Cette nouvelle différence entre le résultat calculé et l'appréciation d’une autre personne détruit entièrement la supposition faite plus haut, parce que la distance du presbytère de Temploux à l'habitation de Rhisnes étant | d { ua 44 ef | 22100 ” (39) de 4050 mètres, l'intervalle de temps écoulé, pour M. Rau- coux, entre l'éclair et le coup de foudre aurait dû dépas- ser de beaucoup les deux secondes qu'il a évaluées au maximum, si l'éclair eût jailli d’un nuage situé à 680 mètres au-dessus de Rhisnes, et si le bruit se fût pro- pagé avec la vitesse ordinaire de 5340 mètres. Il est important de signaler un troisième fait. M. Rau- coux avait jugé, me dit-il, d’après le temps appréciable écoulé entre l'éclair et le coup de foudre, que le point frappé, pendant la nuit du 29 septembre, devait être assez éloigné de son habitation, parce que, la veille, vers cinq heures du matin, pendant un autre orage, la foudre atteignit un arbre de la grand'route, au delà du château de Boquet, et, d'après sa remarque, la détonation suivit immédiatement l'éclair. La distance du château de Boquet au presbytère de Temploux étant de 1500 mètres, si le bruit du coup de foudre avait franchi cet intervalle avec la vitesse de 340 mètres, l’audition du bruit à Temploux, aurait dû survenir après au moins # 5 secondes, tandis que l'intervalle de temps entre l'éclair et ce phénomène a été presque inappréciable. Je citerai un quatrième fait, celui qui le premier a sérieusement attiré mon attention sur la question traitée. Pendant l'été de 1859, la foudre frappa deux habitations du faubourg de Borgerhout, près d'Anvers, à deux orages différents. La seconde fois, elle commit beaucoup de dégâts dans une petite maison de la rue Digue de Pierres. Je vis l'éclair, puis j'entendis le violent coup de tonnerre après un intervalle de temps tellement court, que je crus à un coup de foudre sur un point assez rapproché, tel que la tour de la cathédrale. Cependant, la distance de mon habitation au point qui venait d’être frappé de la foudre . ( 40 ) à Borgerhout étant de 1800 mètres, avec la vitesse assi- gnée au son, le bruit aurait dû succéder à l'éclair après 5,3 secondes de temps seulement. Il faudrait conclure des faits précédents que le bruit de la foudre, au moins quand elle frappe un objet terrestre, se propage avec une vitesse beaucoup plus grande que 540 mètres. Je ferai remarquer que les différences entre les résultats de l’observation et du calcul sont trop considé- rables pour que l’on puisse les attribuer à des erreurs d’ap- préciation de ma part. D'ailleurs, lors de l'orage qui alluma l'incendie à Flawinne, l'intervalle de temps maæxi- mum auquel j'ai limité l'instant écoulé entre l'éclair et l'audition du coup de foudre, coïncide avec l’apprécia- tion personnelle de M. Raucoux, qui se trouvait à peu près à la même distance que moi du lieu atteint par la foudre. Le fait signalé a peut-être déjà frappé passagèrement des observateurs; en recueillant leurs souvenirs, ils pour- ront se rappeler avec quelle surprise ils ont connu le lieu que la foudre venait d'atteindre pendant un orage, sa distance ayant surpassé de beaucoup celle qu'ils pré- sumaient d'après le court intervalle de temps écoulé entre l'éclair et le fracas de la foudre. Quoi qu'il en soit, je n’ai trouvé ni dans la remarquable Notice sur le tonnerre d’Arago (1), ni dans plusieurs ouvrages de météorologie, aucun fait d’après lequel il faille attribuer au bruit du tonnerre une vitesse de propagation supérieure à 540 mères. Ce manque de documents ne doit pas trop nous sur- prendre : c’est accidentellement que les circonstances de (1) OEuvres complètes d' Arago, Notices scientifiques , 1. I. ( 41 ). nature à éveiller l'attention et à la fixer surle fait en question peuvent se trouver suffisamment précisées, comme elles le furent pendant l'orage du 29 septembre dernier. Il aurait fallu d’ailleurs que les observateurs prévenus se fussent pour ainsi dire tenus aux aguels pendant des orages, afin de noter le temps écoulé entre chaque éclair et le bruit du tonnerre, et qu’en outre, parmi tous les coups, l’un d’eux pût être infailliblement attribué à la chute de la foudre sur un objet terrestre situé à une distance bien déter- minée. Je désire vivement que des observations soient entreprises afin de bien préciser le fait signalé. Je ferai ici une remarque qui n'est pas sans impor- tance. Pendant les orages, le bruit du tonnerre succède souvent très-rapidement à l'éclair ; J'invoquerai à ce sujet, le témoignage d’'Arago : « En consultant mes propres sou- » venirs, dit-il, je suis certain de rester dans les limites » dela vérité; je me flatte même de ne m’exposer à la déné- gation d'aucun observateur exercé, si je dis que souvent » l'intervalle entre l'éclair et le bruit n’est pas d’une demi- » seconde (1). » D'après celte appréciation que personne ne contestera , il faut nécessairement admettre que si la vi- tesse du bruit du tonnerre est de 340 mètres seulement, au plus fort des orages, au moment où moins d’une demi- seconde s'écoule entre les éclairs et les fracas de la foudre, sans chute à la surface du sol, les nuages orageux sont éle- vés à moins de 170 mètres au-dessus de nos têtes. Or, la généralité des observations les mieux établies prouve que dans nos contrées, et surtout dans les pays de montagnes, où ces sommités présentent des espèces de repères dont la hauteur a pu être fixée par des nivellements, l'élévation LA (1) Votices , p. 85. (4) des nuages orageux la plus ordinaire dépasse plusieurs centaines de mètres et quelquefois plus de deux à trois mille mêtres. Faut-il admettre qu’au plus fort des orages, lorsque les éclats de la foudre succèdent si rapidement aux éclairs, les nuages orageux s’abaissent toujours à moins de 170 mètres au-dessus du sol? Cette conséquence de l’appré- clalion d’Arago et de la vitesse du bruit du tonnerre limitée à 540 mètres, est difficilement admissible, me paraît-il, pour la généralité des cas, quoique M. Haïdinger ait cité deux exemples très-remarquables où des nuages fulminants ont été vus très-près du sol (1). S'il faut attacher à cette remarque l'importance que je suis porté à lui attribuer, on doit en conclure que la vitesse du bruit du tonnerre surpasse 340 mètres, non-seulement lorsque la foudre frappe des objets terrestres, comme dans les cas cités, mais aussi quand elle s'élance entre les nuages. L’excès de vitesse si marqué du bruit du tonnerre sur celui du canon, qui, d’après l'expérience, parcourt 340 mètres par seconde, ne serait pas la seule particularité qui distinguät le premier bruit du second. Des éclats de foudre, dont le brait formidable, entendu à proximité, a élé quelquefois comparé à la détonation de cent pièces de canon éclatant à la fois (2), ne se propagent pas à de plus grandes distances que 4 à 6 lieues de poste, tandis que le bruit du canon s'entend quelquefois à plus de 20 et même 50 lieues de distance (5). Je ne puis passer sous silence le désaccord qui surgit (1) Motices d’Arago, p. 20 à 28. (2) Id., WET (3) Jd., p- 253. Ait it (45) entre les faits cités, d’après lesquels la vitesse du bruit du tonnerre excéderait de beaucoup celle du bruit du canon, et la théorie ordinairement admise, qui indique que les sons, forts ou faibles, doivent se propager également vite dans l'air. Il est vrai de dire que cette non-influence théo- rique de l'intensité du son est établie pour un état vibra- toire de Pair qui est excité par de pelites condensations, telles que celles qui se produisent dans le mouvement on- dulatoire provoqué par un son musical. Mais les exeila- tions vibratoires de lair sont tout autres lors des détona- tions de la foudre : le passage du fluide électrique dans l'air détermine, aux points qu’il traverse, des effets de dila- tation et de condensation extrêmement violents. Déjà l'élin- celle électrique de nos machines dilate fortement l'air, en franchissant la courte distance des deux petites boules qui sont placées dans le cylindre de l'instrument connu, en phy- sique, sous le nom de thermomètre de Kinnersley. D'après quelques expériences que j'ai faites récemment, par un temps assez sec, à l’aide d’une machine électrique dont le plateau a 0,58 de diamètre, la décharge d’une bouteille de Leyde, après quinze tours du plateau, produisit une dilatation subite égale à = du volume d’air que l’étincelle traversa dans le cylindre fermé de l’instrument cité. Après trente tours, cette dilatation s’est élevée à + (1). 121 (1) Dans ces premières expériences, le niveau entre le cylindre et le petit tube latéral du thermomètre de Kinnersley, ne s’est point rétabli aussitôt après la décharge : le liquide est d’abord retombé au tiers environ de la plus grande hauteur à laquelle il s'était élevé dans le petit tube; puis il re- descendit progressivement jusqu’à son point de départ, après un temps très- court, mais appréciable. Ce fait démontre d’une manière irréfutable, et contrairement à ce qui a été déjà prétendu, que le volume d’air traversé par l'étincelle électrique éprouve une élévation de température sensible, (44) L'effet d’une simple décharge électrique, lui-même si faible comparativement aux effets que développe la foudre dans l'air, surpasse de beaucoup en grandeur les conden- sations que l'air subit au voisinage d'un corps sonore. Ainsi, il résulte des fluctuations qu’un baromètre a accu- sées auprès d’une forte cloche en vibration, que les ac- croissements de la force élastique de l’air, dus aux ondes sonores produites par les percussions mêmes du battant, n’ont point dépassé + de la force élastique de l'air am- biant (1). Si l’on ajoute à ces considérations que la foudre, en sillonnant l'air, non-seulement développe de la chaleur, mais qu'elle donne lieu à des phénomènes chimiques, tels que la combinaison partielle de l'oxygène avec l'azote de l'air pour former de petites quantités d’acide azotique, on concevra que le bruit du tonnerre difière essentiellement, sous le rapport de sa génération dans l'air, des ondes sonores produites par un corps vibrant, ondes que la théorie mathématique ordinaire considère particulièrement dans les lois de la propagation du son. Voici, d'autre part, un fait qui tend à prouver que, contrairement aux conséquences théoriques, appliquées à la propagation de toute espèce de bruits ou de sons, les bruits très-forts se propagent plus vite dans l’air que des sons faibles. Lors d’une expédition au pôle nord du capi- taine sir J. Franklin, pendant que l’on faisait des expé- riences où il était nécessaire de tirer le canon sur un mot de commandement donné par un officier, des personnes (1) Voir une notice concernant l’Znfluence du son des cloches sur le baromètre, publiée dans les Bulletins de l’Académie , 2e série, t. VI, n° 2, (45 ) stationnées à la distance de quelques milles, avaient constamment entendu le commandement de feu après le bruit du canon. Ce fait tendant à prouver que le bruit du canon se propage plus vite que la voix humaine, avait été rapporté dans le temps par sir James Ross; il la de nouveau confirmé dans une des séances de l'Association britannique, en 1858. Sir J. Ross faisait partie de l’ex- pédition dont il s’agit, et il est précisément l'officier qui commandait le feu dans l’occasion en question (1). Le fait précédent a été rappelé dans la séance de l’As- sociation à l’occasion d’une observation très-importante, faite par un de ses membres, au sujet de la théorie ma- thématique du son, et dont il convient de parler ici. M. Earnshaw aurait fait voir que les conséquences de la théorie ordinairement admise ne sont point rigoureuses, parce que, dans le but de surmonter une difficulté d’inté- gralion, On à recours à une Supposition ou moyen approxi- matif qui est incompatible avec les propriétés de l'air. Par- tant de là, M. Earnshaw aurait réussi à traiter le problème sans supposition approximative. [Il est arrivé, paraîtrait-i}, à une solution qui l’a mis en possession de la clef de di- verses propriétés du son. Entre autres particularités, celte solution explique le décroissement rapide des sons vio- lents, et elle montre que, si la vitesse de propagation dans l’air est la même pour les sons dont la génération ne diffère pas beaucoup en intensité, il n’en est plus ainsi quand les sons se distinguent essentiellement sous le rapport de la force. Ainsi, d’après cette nouvelle théorie, (1) On peut consulter, à l'égard du fait cité et des remarques de M. Earns- baw, le n° 1507 du journal l’Jnstitut, p. 23, et le t. XIII du journal Cosmos , p. 565, d’après lesquels les résumés en question ont été faits. (46) | un son violent, par exemple, le bruit d’une arme à feu doit se propager plus rapidement qu'un son doux, tel que celui d'un instrument ou de la voix humaine. Les faits concernant la vitesse de propagation du bruit du tonnerre qui ont élé cités dans cette notice, consti- tuent-ils un nouvel argument en faveur de la théorie de M. Earnshaw? On serait porté à l’admettre, me paraît-1l. Note sur quelques propriétés des lignes tracées sur une sur- face quelconque ; par M. Ph. Gilbert, professeur à l’uni- versité de Louvain. Le but de cette note est de faire connaître quelques pro- priétés générales des lignes tracées sur une surface quel- conque d’après certaines conditions. Ces propriétés se tirent facilement de la formule qui, dans le calcul des _ variations, Conduit à l'équation différentielle des lignes de plus courte distance ou lignes géodésiques sur une surface donnée. M. Bertrand, dans ses leçons au collége de France, en 1855, s’est servi de cette formule pour établir certains théorèmes donnés par Gauss, dans ses Recherches sur les surfaces courbes; mais nous ne pensons pas que depuis d’autres géomètres aient fait usage des mêmes considéra- tions pour en tirer de nouvelles propriétés. Se Si l'on représente par s la longueur d'une courbe quel- conque tracée sur une surface donnée, entre deux points RP (47) (dis Yi, Zu) et (£, », C), on a: C Ë — JV a + dy* + dz?, %1 et sa variation 0s, lorsque les extrémités se déplacent en même temps que la forme de la courbe change sur la sur- face, est donnée, en posant : dx dy dz — 23 dy? +d2° e— ER Pr ds V'dx?+dy?+d2?, p FO ds? par la formule suivante : ds = p'dË + q'dy + TOC — (p,0X, + qy, + T,2z,) — OR S\ dp.dx + dq.dy + dr.0z). T1 On sait que (p’, q’, r') sont les valeurs de p, q, r, cor- respondantes à l'extrémité (£, y, 6) de la ligne tracée, et (Pa; da, Ta) les valeurs correspondantes à (x, y4, Zi). On sait aussi que p, q, r sont respectivement les cosipus des angles que fait la tangente à la courbe donnée en un point quelconque (x, y, z) avec les axes Ox, Oy, Oz. L'équation de la surface étant : Bér,u.4)==0, les variations dx , dy, dz satisfont à l'équation : et si l’on cherche à déterminer la courbe de telle manière quelle soit la plus courte que l’on puisse mener entre ses (48 ) extrémités sur la surface, on doit poser ds—0, ce qui con- duit, comme on sait, aux équations :* Up} dq.: : de (2) . e e ° . . TT — SL , dF dF dE dx dy dz qui montrent que le plan osculateur de la courbe cherchée est constamment normal à la surface. L’équation (1), d'où se tirent ainsi les équations des lignes géodésiques d’une surface donnée, peut aussi servir à établir diverses propriétés de ces lignes, et cela d’une manière assez simple. Concevons en effet que la courbe variable dont la longueur est représentée par s, ne cesse pas d’être une ligne géodésique. Comme ellesatisfera en chacun de ses points aux équations (2), la partie de ds, qui est exprimée par une intégrale dans l'équation (1), sera nulle d'elle-même, et disparaîtra, de sorte que la variation de . la longueur d’une ligne géodésique sera donnée simple- ment par la formule : (5). . 25 —p'Ë + q dy + re — (pit + QYi + r1924). Les extrémités (£, #, €), (x, y, z) seront soumises à certaines conditions. Appelons d6, ds, les ares infiniment petits qu'elles doivent décrire sur la surface, ©, o, les angles sous lesquels ces arcs sont coupés par la ligne géo- désique variable que l’on considère. On a évidemment : … . dŒ , Fe 6 COS ce =D — + + A 1 06 7 dc ds ” CN dy 02, cos nn = Pi + 4: x +. loire (49) d'où nous concluons de suite : 0 . OS — 06 COBS — ds, COS)o.. Cette expression est celle dont nous allons faire usage; on en déduit sans peine les propriétés des lignes géodé- siques données par Gauss, dans son mémoire sur la théorie des surfaces ('). SI Considérons une courbe PMQ (fig. 1) tracée sur une surface, et définie par une relation entre les longueurs s el s’ des lignes géodésiques, menées d’un point quel- conque de cette courbe normalement à deux courbes don- nées AB, CD sur cette surface. On aura donc pour équation de la courbe PMQ : F (s, s’) —= 0. Désignons par o, o/ les angles sous lesquels les lignes géodésiques coordonnées MM,, MM, coupent respective- ment la courbe PMQ. Les variations ds, ds’, calculées par la formule (4), en observant que chaque ligne géodé- sique reste toujours normale à l’une des courbes AB, CD, sont : S — do COS p, 0s” — do COS &”, et comme on a d’ailleurs : (*) Gauss, Disquisitiones generales circa superficies curvas; Comm. de Gôttingue, t. VI. 2e SÉRIE, TOME IX. 4 PT TT OR ST NS NES ( 50 ) On obtient l'équation : (DEA RATE ue cos i ds ds’ | D Examinons quelques : L cas particuliers du pro- RUE blème général quenous Po venons de résoudre. é ne / “ DT Supposons, par exem- * LA pat de ple, que la ligne PMQ Ne ! jouisse de cette pro- LS. ER priété, que la somme (Fig. 1.) des distances géodési- ques MM, , MM, soit constante. On aura donc : s + 5 — const., et l'équation (5) deviendra : COS ? + COS w = 0, ce qui montre que les angles o et +’ sont supplémentaires Dur l’un de l’autre (fig. 2). De D UN M là cette propriété : Si ce La s' l’on trace sur une surface D 5 quelconque une courbe À à, AUR telle que la somme des ER ME cd distances géodésiques de B chacun de ses points à (Fig. 2.) deux courbes tracées sur celte surface soit constante, sa tangente sera également in- clinée sur les deux lignes géodésiques qui mesurent les dis- tances du point de contact à ces deux courbes. L'ellipse est un cas très-particulier, celui où la surface est un plan et où les deux courbes directrices se réduisent à deux points. Rs ct ns ‘es & HI. Supposons que la surface donnée se réduise à un plan : les lignes géodésiques deviennent des lignes droites, et l’on peut facilement réaliser les conditions ci-dessus au | 10 moyen d’un tracé continu. iQ Re Traçons deux courbes à Hs CAE AR volonté, EF, GE : suppo- \ Le en sons un fil fixé par ses ex- ë j É j trémités en deux points pris sur ces deux courbes, et en- | roulé sur ces courbes dont T il se détache tangentielle- | ment, suivant les tangentes H TM, TM, au moyen d’une è (Fig 3.) pointe à tracer qui tient ce fil constamment tendu, de telle manière qu’en s'enrou- lant sur EF, par exemple, il se déroule sur GH. Il est clair qu'un point M, du fil décrira une développante de la courbe EF; un autre point, tel que M,, décrira une développante de la courbe GH : cela résulte de la con- struction même, et les portions rectilignes MT,, MT, , du fil, seront constamment normales à ces développantes respectivement. Il est donc évident que la courbe tracée par la pointe sera telle que la somme des distances MM,, MM, , de chacun de ses points à deux courbes données, sera constante, ce qui rentre dans les conditions du théorème précédent. D’où il suit : que la courbe décrite par la pointe dans les conditions que nous venons d’indi- quer, a sa langente en chaque point également inclinée sur les deux portions du fil qui aboutissent à ce point. (92). Le théorème à lieu, quelles que soient les deux courbes données : il subsiste donc si l’on prend deux portions d'une même courbe. Prenons, par exemple, une courbe fermée (fig. 4), entou- rons-la d'un fil sans fin, tendu par une pointe à tracer, de manière qu’une portion du fil T, UT soit appliquée sur la courbe, et l’autre forme deux droites T,M, TM qui se rac- cordent au point décrivant M. Il est clair que la proposition (Fig. 4.) précédente subsiste. Si la courbe donnée est une ellipse, on sait que les tan- gentes MT,, MT,, menées d’un point extérieur M, sont également inclinées sur les rayons MF’, MF, menés res- pectivement du point M aux deux foyers. Rapprochons cette propriété de celle que nous venons de démontrer : il devient évident que la courbe décrite par la pointe M coupe à chaque instant, sous des angles égaux, les deux rayons vecteurs MF, MF’, et n'est autre, par conséquent, qu'une ellipse qui a F et F’ pour foyers. Done : Si l’on enroule un fil fermé, de longueur quelconque, autour d'une ellipse, et que l’on lienne ensuite ce fil tou- jours tendu au moyen d'une pointe à tracer, en sorte qu'il s'enroule dans un sens et se déroule dans l’autre, la pointe décrit une ellipse homofocale à l’ellipse proposée. Et comme le périmètre total du fil est constant, ainsi que celui de l’ellipse donnée, leur différence est aussi con- stante, el l'on a ainsi immédiatement celte belle propriété connue des ellipses homofocales : (55) La somme des longueurs MT,, MT, des tangentes me- nées d'un point quelconque d’une ellipse à une ellipse homo- focale et intérieure , diminuée de l'arc compris sur celle-ci entre les points de contact, est constante. Ç IV. Pour étendre ces considérations aux lignes tracées sur une surface non plane, concevons d’abord que l’on mène sur cette surface une courbe AB (fig. 5), et qu'un fil MN primitivement ap- pliqué sur cette courbe en soit détaché successivement, restant toujours tangent à la courbe et tendu sur la surface : un de ses points N décrira une certaine courbe CD. D'ailleurs le fil MN (Fig. 5.) traçant constamment uve ligne géodésique sur la surface, la variation de la longueur MN sera donnée par la formule (4) : JS — do COS ÿ —— JS, COS :, , et comme ds — dc, que cos o —= 1, il est clair que cos o, = 0, d'où o, — 90"; donc l'angle o, est droit, c’est-à- dire que la ligne formée par le fil est constamment nor- male à la courbe CD qui décrit le point N sur la surface donnée. De là cette propriété analogue à celle des déve- loppées des courbes planes, et qui la contient: (Fig. 5). Etant donnée une courbe CD sur une surface, Si par les points de cette courbe on lui méne normalement (54) des lignes géodésiques, le lieu géométrique des intersections successives de celles-ci sera une certaine courbe AB sur la surface. La différence des longueurs de deux lignes géodési- ques tangentes à AB et terminée à CD, est égale à l'arc de la courbe AB compris entre leurs points de contact. Cela établi, on pent déduire de cette propriété, par une marche identique à celle du paragraphe précédent, le moyen de tracer d'un mouvement continu une courbe telle que la somme des distances géodésiques de chaque point à deux courbes données sur la surface, soit constante, et on obtient cet énoncé (fig. 6) : : Deux courbes AB, CD, étant A données sur une surface, on fixe Te les extrémités d'un fil sur les nan courbes, et on le plie suivant AN À à | chacune des deux courbes, de \ \ manière qu'il s'en détache sui- \m \w” vant deux lignes géodésiques \ M'M, M''/M, tangentes à AB, CD, au moyen d'une pointe qui tient p le fil constamment tendu sur la (Fig. 6.) surface : la pointe décrira une courbe coupant constamment sous des angles égaux les deux lignes géodésiques M'M,-M'/M formés par le fil. On peut, comme plus haut, remplacer les deux courbes par une seule courbe fermée, autour de laquelle s’appli- querait en partie un fil fermé, de longueur quelconque , et il en résulterait toujours la même propriété dans la courbe tracée par la pointe. Il resterait à reconnaître dans quels cas la belle pro- priété des ellipses homofocales pent être généralisée, en D 16e AC w PTE. : LT J - 1 ( 99 ) \ remplaçant les lignes droites par des lignes géodésiques de la surface que l’on considère. Il est clair, par exemple, qu'elle subsiste pour une surface développable quelcon- que, parce que le développement de la surface sur un plan ne change pas la longueur des arcs, et que les lignes géodésiques deviennent alors des lignes droites, ce qui ramène au théorème connu. Le même théorème est encore vrai pour les ellipses sphériques, et enfin M. Chasles l’a aussi démontré pour les lignes de courbure de lellipsoide, qui sont suscepti- bles d'une description semblable à celle de lellipse, en prenant pour foyers les ombilics de la surface. Ç V. La formule (4) s'applique aussi facilement à une courbe tracée sur une surface quelconque d’après la condition que La différence des distances géodésiques de chacun de ses points à deux courbes données sur la surface, soit con- stante. Raisonnant comme dans le $ 2, on trouvera : COS © — CS %S —0, » —Y, donc la courbe engendrée suivant cette loi coupe en deux parties ‘nes l'angle des lignes géodésiques menées de chacun de ses points normalement aux courbes données (fig. 7.) Sans entrer dans les dé- tails, comme plus haut, ob- ser vons qu'il sera facile, dans le cas où la surface donnée est un plan, de réa- liser fe mouvement d’une hs (4 be A à 27 a » æ: +2" n 1 CRT LAVE ON RP a NE A d Ù 2 Y ' AE Eu) 1 A | ( 26 ) pointe traçante dans les conditions ci-dessus, en géné- ralisant la description de l’hyperbole par un mouvement continu (). On peut donc, d’une manière très-simple, trouver dans le plan une infinité de systèmes de courbes qui se coupent orthogonalement et même les décrire par un mouvement continu. En effet : Traçons dans le plan deux courbes à volonté, enrou- lons un fil sur ces deux cour- bes, et traçons, comme au $ IT, une courbe au moyen d’une pointe qui tienne le fil toujours tendu : en donnant successivement à ce fil diver- ses longueurs, nous obtien- drons un premier système de courbes. Faisons ensuite mou- voir la pointe de manière à retrancher constamment des quantités égales sur les deux parties du fil qui sont tan- gentes aux deux courbes données, nous aurons un second système de courbes. Or, il résulte évidemment des pro- priétés démontrées que ces deux systèmes se couperont partout orthogonalement. C’est une généralisation de la propriété des ellipses et des hyperboles homofocales. On pourrait étendre ces consi- dérations à des courbes tracées sur une surface quelconque. (Fig. 8.) —————— —————— ———— mm (*) Ainsi, l’on pourra fixer deux fils par une de leurs extrémités, chacun en un point pris respectivement sur les deux courbes; on enroulera chaque fil sur la courbe correspondante, et on tiendra ces deux fils constamment tendus au moyen d’un anneau glissant sur ces deux fils, en sorte que, dans son mouvement, il retranchera constamment des quantités égales sur ces deux fils, ce qui suffit pour réaliser les conditions proposées. nn de fe Ét S VL. On pourrait encore faire bien d’autres applications de l'équation (4). Bornons-nous à certains cas particuliers très-simples. Considérons une courbe telle que le rapport des dis- tances géodésiques de chacun de ses points, à deux courbes données sur la même surface, soit constant. On aura ici : 4 S ’ ——k, ou s —ks — 0, cos ; —k cos ; = 0, ÈS $ Les angles © et +’ auront donc leurs cosinus dans un rapport constant. | Lorsque la surface est un plan, que l’une des courbes se réduit à une ligne droite et l’autre à un point, la courbe est une section conique dont # est le rapport e de l’excentricité au demi-grand axe. Ainsi, dans toute section conique, les cosinus des angles que fait la tangente avec les droites menées du point de contact à un foyer et à la direc- trice correspondante, sont dans un rapport constant, égal à e. D'où l’on déduit cette propriété curieuse relativement à la réfraction. Les rayons lumineux qui arrivent, parallèlement au grand axe, sur une ellipse dont l'indice de réfraction est égale à _ vont converger à l’un des foyers. Les rayons lumineux qui arrivent, parallèlement à l’axe réel, sur une branche d'hyperbole dont l'indice de réfrac- tion est égal à , divergent, après la réfraction, comme s'ils venaient du foyer de l'autre branche. TU PER Ent DEEE NA PORN) PRET ENTRE FA") fr Tv \ PUERTO" OPET TPE "RSS * as } ) 4 1 à tu ) WI NT 4 (58 ) Supposons maintenant que le produit des distances géo- désiques de chaque point de la courbe à deux courbes tra- cées sur la surface, soil constant : On a LEE N S' COS © + S COS p — 6 IE Le rapport des cosinus des angles o et o! est donc égal au rapport des distances s et s!, pris en signe contraire. Daos le cas particulier où la surface proposée se réduit à un plan, l'équation (x) donne la construction suivante : Lorsqu'une courbe est telle que le produit des normales abaissées de chacun de ses points sur deux courbes données est constant, si l’on prolonge ces deux normales chacune d'une longueur égale à l'autre, la diagonale du parallélo- gramme, construit sur ces deux prolongements, sera la normale à la courbe cherchée. Cette construction s'applique immédiatement à la lem- niscate , où les deux courbes données se réduisent à deux points, et à l'hyperbole, où chaque courbe se réduit à une ligne droite. S VIT. L’équation (4) peut aussi être utile dans la théorie des surfaces. Supposons qu'une surface soit définie par une équation entre les normales s, s’, s//, menées d'un point quelconque (£, #, 6) de cette surface à trois surfaces fixes données. En sorte que PSS A. 0 sera l’équation de la surface cherchée exprimée au moyen DONS SM TEE. ,Ÿ ( 59 ) des coordonnées s, s’, s’/. Si l’on désigne, en outre, par do l’arc infiniment petit pris à partir du point (£, », €) dans une direction quelconque sur la surface, et par +, #’,æ/’, les angles respectifs de cette direction, qui est une tan- gente à la surface, avec les prolongements des normales s,5!,s/!, on aura, en vertu de la formule (4) : a! DS — do cos, ds —06.coss", dS”— d5 COS ;", et comme, d’ailleurs, dF dF du — 26 + — ds + — 0 — 0, d ds” d il vient : dF . dF dF à) RE lcos DE — cos cos 2 — 0. ds ds ds Cette équation donne cette proposition remarquable que, Si l’on prolonge les normales 5, s!,s!! au dela du point E, y, 6), de urs égales respectivement à À, ©, © (E, », 6), de longueurs égales respectiveme pra TES la somme algébrique des projections de ces longueurs sur une tangente quelconque à la surface au point (Ë, y, C), est égale à zéro. Mais, d’un autre côté, on sait () que, Si l’on pro- jette trois arétes contiguës d’un parallélipipède sur une droite perpendiculaire à la diagonale qui aboutit au point de.concours de ces trois arêtes, la somme algébrique de ces (*) Cette propriété du parallélipipéde se démontre très-simplement en partant des théorèmes connus sur la composition des forces. ( 60 ) trois projections sera égale à zéro; d'où il suit que le lieu des tangentes à la surface au point (E, #, £), c’est-à-dire le plan tangent, est perpendiculaire à la diagonale du pa- rallélipipède construit sur les prolongements we: me, Tr De là cette construction : Une surface élant définie par les distances s, s', s!' de chaque point à trois surfaces données, au moyen d’une équation F (s, s/, s'/) — 0, on prolongera les normales s, s’,S/!, de quantités respectivement proportionnelles à dF dF dF ; AE a 9% 7e 6 l’on construira un parallélipipède sur ces trois prolongements : la diagonale de ce parallélipipède est la normale à la surface proposée au point considéré. Supposons, par exemple, que la somme des distances s, s!,s!! soit constante, on aura s + $ +s'’— cons., = ee ds Donc on prolongera les coordonnées s, s/, s!/ d'une méme longueur arbitraire, et le parallélipipède construit sur ces trois prolongements aura pour diagonale la normale à la surface cherchée. Cette construction s'applique sans peine au cas où les trois surfaces fixes se réduisent à trois points ; la surface engendrée correspond dans l’espace à l'ellipse dans le plan. Soit encore une surface telle que le produit des distances de chacun de ses points à trois points fixes est constante. On a ici | AE dF dF ss 1910 == $S —— == "$SS ds AS ‘ Pr D mL à PRE NN TE ou bien dE #5, dE k5 dl k5 — pie a A ns PE ds S ds S ds” S On portera donc sur le prolongement des rayons s,s/, s!’ des longueurs respectivement proportionnelles à Je : _ el on construira la diagonale comme ci-dessus, qui sera la normale à la surface ss!s/! — K. M. Van Beneden, en déposant deux mémoires nou- veaux, présente les observations suivantes : « J’ai l'honneur de communiquer à la classe deux mé- moires sur la faune littorale de la Belgique; l’un traite des Cétacés, l’autre des Turbellariés. » Le premier mémoire comprend le résultat de quelques observations faites sur le Delphinus globiceps qui à été trouvé mort en mer, il y a un mois, par des pêcheurs de Heyst, puis quelques remarques sur deux individus de La- genorhynque albirostre, et un squelette de Lagenorhynque d'Eschricht. Dans un chapitre à part, je fais l'énumération des espèces de cétacés vivants, observés jusqu'à présent dans nos parages ou vus dans la mer du Nord, et qui peu- vent venir échouer sur notre littoral. » Pour prévenir autant que possible la confusion des espèces, Jai indiqué les musées où les divers squelettes sont déposés. » Ce mémoire est accompagné de deux planches, repré- sentant le Lagenorhynque albirostre et quelques détails anatomiques. (62) » Le second mémoire à pour titre : les Turbellariés. H est divisé en deux parties : la première comprend la des- cription des espèces que j'ai eu l'occasion d'observer sur nos côtes, avec des remarques sur leur structure anato- mique et leur développement; dans la seconde partie, je résume ce que les recherches sur les différentes espèces m'ont appris. Le principe que les phénomènes de dige- nèse et de métamorphose sont d'autant plus complets et plus étendus que les œufs sont moins grands et plus nom- breux, y est pleinement confirmé. » L'évolution embryonnaire est bien plus variée qu'on ne le supposait, il y a quelques années. » Ce travail est accompagné de sept planches. » Ces mémoires sont renvoyés à l'examen de MM. de Selys-Longchamps et Jules d'Udekem. = Recherches sur la genèse et les métamorphoses de la Pezrza SCLEROTIORUM Lib.; par M. Eugène Coemans. Vix ullibi plura observanda restant, quam in historia Sclerotiaceorum. (Friss, S. V. S.) On avait longtemps cru, avec le célèbre mycologue d'Upsal (1), que toute production fongine présentant une forme caractéristique constante el se reproduisant sous cette forme élait une espèce véritable, un champignon imite (1) Fries, Sum F'eg. Scand., p. 485. d'u ATOS (65 ) autonome. Mais aujourd'hui de nombreuses observations, et surtout les belles recherches de M. Tulasne, de l’Insti- tut , Ont prouvé qu'une même espèce possède souvent deux et même trois modes de reproduction; que ce qui avait été considéré dans bien des cas comme un être parfait et complet, n’était cependant parfois qu’un simple organe, un appareil de reproduction; enfin qu'une même espèce pouvait, selon les différents âges de sa vie, ou sous l'influence de certaines circonstances, se présenter sous les aspects les plus divers. C'était ouvrir un champ nouveau à la mycologie et soulever bien des questions jusqu'alors à peine entrevues. Parmi celles-ci, deux surtout sont de première impor- tance: celle de l'autonomie des espèces et celle du nombre et de la valeur physiologique des appareils reproducteurs d'une même espèce. L'avenir de la mycologie dépend en grande partie de la solution de ces deux problèmes; mais leur élucidation est en même temps entourée de tant de difficultés et de tant de mystères, qu'il faudra certaine- ment encore bien des années de pénibles recherches avant de pouvoir leur donner une solution convenable et pleinement satisfaisante. Dans cet état de choses, toute expérience, tout fait nouveau tendant à éclaircir l’une ou l’autre de ces ques- tions est, je crois, un renseignement précieux à recueil- lir : ce sont, pour ainsi dire, des éléments de synthèse qui pourront servir plus tard à établir les bases d’un nou- veau système de classification , certainement bien différent de celui que nous possédons aujourd'hui. C'est ce qui m'engage à publier ici les recherches que J'ai faites, ce printemps, sur la genèse et les métamor- phoses de la Peziza sclerotiorum Lib., et à présenter à (64) l'appréciation savante de l’Académie le résultat de ces études, persuadé que, dans les travaux de ce genre, rien n’est plus facile que de s’égarer et de se méprendre, tant sur la nature que sur l'interprétation de faits d’une obser- vation diflicile et souvent extrêmement délicate. Au mois de mars de cette année, je découvris, dans les caves de l’hôpital civil à Gand, un grand nombre de Sclé- rotes, appartenant pour la plupart au Sclerotium varium , qui s'étaient développés sur diverses racines conservées en las. [ls croissaient de préférence sur les carottes et sur les navets; on en trouvait aussi, mais en moindre nombre, sur des racines de betteraves et de chicorée. Comme ils étaient abondants et qu'ils se présentaient dans diverses phases de développement, l’idée me vint d'observer leur végétation, et de répéter sur eux les expé- riences faites en 1855, avec tant de succès, par M. Tulasne, sur un de leurs congénères, le Sclerotium clavus D. C. J'emportai donc un certain nombre de ces racines, qui, disposées convenablement, continuèrent à nourrir leurs sombres parasites; et c’est sur elles que je pus observer la végétation, le développement et les métamorphoses du champignon polymorphe dont j'essaye aujourd’hui de faire l’histoire. En zoologie, les métamorphoses sont loin d’être rares : les batracides, les insectes, les cirrhipèdes, les vers, les échinodermes, les polypes, nous en offrent de curieux exemples. Mais en botanique, ces cas de métamorphose, non d'organes mais d'espèce, sont beaucoup moins fré- quents, ou peut-être moins connus, faute, sans doute, d'observations assez suivies et consciencieuses. Quoi qu'il en soit, l’histoire du développement de la Peziza sclero- tiorum est certainement, pour la physiologie végétale, un PT Ut a (65 ) nouveau cas de dimorphisme et de métamorphose, dans l’acception même la plus rigoureuse du terme. _ Ainsi, au jeune âge, notre plante vit en parasite sur les racines de diverses plantes bisannuelles, riches en sucs nourriciers ; mais ce parasitisme est loin d’être inoffensif, comme nous l’observons souvent pour le règne animal : ici, C'est une ennemie qui tue et détruira rapidement Ja racine qui lui avait accordé l'hospitalité. Un germe s’est introduit sous l’épiderme de la racine; bientôt il émet de longs filaments nématoïdes qui enve- loppent et attaquent les cellules d’alentour. En quelques jours, il se forme tout un système de filaments absorbants qui, s'étendant au loin, épuisent et détruisent le paren- chyme de la racine attaquée. En même temps, le parasite se produit à l’extérieur, montre d'innombrables filaments aériens de formes diverses, qui tous, en peu de jours, se chargent de spores acrogènes. Prévoyance dé la nature! la forme adulte de la plante vient-elle à avorter ou ne peut- elle pas se produire, la reproduction du végétal est néan- moins assurée, dès son enfance pour ainsi dire, dès sa première forme. Mais au bout de quelques semaines, la racine est entiè- rement épuisée, le tissu cellulaire à disparu; il ne reste plus qu'un épiderme décomposé et les filaments isolés du üussu vasculaire ; notre parasite, le mycelium primitif de la Pezize, va périr et mourir sur le corps même de sa victime. Mais non; en un grand nombre de points ces filaments nématoides, isolés au jeune âge, se resserrent, s'unissent, se condensent pour former une masse arrondie ou irré- gulière; un épiderme noirâtre, se formant aux dépens des extrémités de tous ces filaments, vient entourer cette formation nouvelle et lui donner une existence indé- 2e SÉRIE, TOME IX. pi (66) pendantes c'est ce que nous nommons un sclerotium. Sous cette forme nouvelle, notre jeune plante passera le reste de l'hiver, abritée contre le froid et les accidents qui pourraient la détruire; elle attend ainsi le retour de la belle saison pour prendre son dernier développement et revêtir sa forme spécifique adulte. Le printemps venu, quelques cellules épidermiques du sclerotium se gonflent, s'allongent, se multiplient et s'unissent en un stipe arrondi ou colonnette brunâtre, qui s'épanouit bientôt à sa partie supérieure, pour former une cupule d’un beau jaune de cannelle. La surface supé- rieure du sclerotium se couvre souvent entièrement de productions pareilles. La plante alors est facilement re- connaissable : c’est la Peziza sclerotiorum Lib.; c'est sa dernière métamorphose, la forme parfaite et adulte de l'être, ayant sa reproduction à elle, reproduction théca- spore, et qui met fin à l'existence polymorphe de la plante. Voilà bien trois phases distinctes d’une même vie, une existence à trois termes, et présentant à peu près les mêmes métamorphoses que subissent les insectes. L'état primilif ou nématoïde représente, en effet, assez bien la larve des insectes; l’état sclérotien, état de vie latente, rappelle leur second âge, leur vie à l'état de nymphe; et l'état pezizoïde , celui d’insecte parfait, ayant, comme celui-ci, toute la supériorité d'organisation, de forme et de couleur qui caractérise en zoologie les formes adultes. D'après ce que nous venons d’esquisser, nous partagé- rons la vie de notre plante en trois périodes : nous nom- merons la première période némaloïde ou sphacélienne; la seconde période sclérotienne, et la troisième période pezi- zeenne. L'exposé des caractères de chacune de ces périodes et PMP + | NJUr ( 67) des modifications que subit la plante en parcourant cha- cune de ces phases , sera, 1] me semble, l’histoire la plus naturelle et la plus facile de la vie de ce champignon. PÉRIODE NÉMATOIDE OU SPHACÉLIENNE. Dans tous les cas de formation de sclerotium à l’exté- rieur des racines, j'ai toujours observé que cette produc- tion, quelle que soit sa forme, commence par une espèce de sphacélie. Cette sphacélie n’est cependant pas ici, comme on le croirait peut-être, toute semblable, strictement ana- logue à celle qui précède la formation du Sclerotium cla- vus. La sphacélie que décrit M. Tulasne (1) était formée de touffes de très-petites basides naissant à angles droits sur des hypha rameux et cloisonnés, reposant eux-mêmes sur un stroma celluloso-gélatineux. J'entends ici par spha- célie, dans un sens plus large, une formation celluloso- filamenteuse, extrêmement polymorphe, vivant essentiel- lement en parasite, se reproduisant par génération acrogène et susceptible de former, dans certaines condi- tions, des espèces de tubercules qu’on nomme sclerolium, et qui mettent fin à cette première végétation. La sphacélie du Sclerotium clavus présentait générale- ment une structure assez uniforme : des basides égales, des stylospores de même forme et de même grandeur. Notre sphacélie, malheureusement, se laisse moins faci- lement caractériser : d’une polymorphie presque insaisis- sable, forme, arrangement anatomique, consistance, tout varie souvent d'un individu à l'autre, et l’on rencontre en (1) Tulasne, L.R , Mémoire sur l'ergot des glumacées. Anx. pes Sc. xaT., t. XX. 1855. | ( 68 ) même temps des filaments sporophores, des stylospores et des spores les plus dissemblables. Me bornant donc à décrire ce que j'ai observé dans la généralité des cas, je crois pouvoir néanmoins faire con- naître suffisamment ce premier âge de la plante, sa forme sphacélienne, en décrivant : | 1° Ses caractères extérieurs ; 2 Sa structure anatomique générale ; 3° Ses différents corpuscules reproducteurs; 4 Les parasites qui l'atlaquent ou vivent en commen- saux avec elle. Cette dernière partie, quoique paraissant peut-être ne se rattacher que faiblement à notre sujet, est cependant de toute nécessité pour pouvoir reconnaître les organes de reproduction et les spores de tout genre qui se trou- vent souvent confondus, et pourraient donner lieu à de graves méprises, I. — Caractères exterieurs. La Peziza sclerotiorum au jeune âge, à l’état de myce- lium, peut se présenter, d’après mes observations, sous deux formes : A. sous forme de sphacélie, ou B., plus rarement, sous forme de filaments nématoïdes secs, ou, ce qui revient au même, sous forme de byssoidée sèche. A. Forme sphacélienne. — La sphacélie se montre à tra- vers l’épiderme de la racine attaquée (navet, carotte, chi- corée ou betterave), tantôt comme un petit mamelon hu- mide, d'un blanc opalin et de consistance trémelloïde; tantôt sous forme de lobes allongés et irréguliers, de même couleur et de même consistance, imitant assez bien les circonvolutions du cerveau des mammifères supérieurs ; (69) quelquefois enfin, sous forme de simple pellicule humide et blanchâtre. Sous ces trois formes, la sphacélie peut être fructifère, je veux dire, peut se modifier en sclerotium. Il yarélation, jusqu’à un certain point, entre la forme primitive de la sphacélie et celle du sclerotium qui doit la suivre : ainsi, la 4" forme produit ordinairement des sclerotium irrégulièrement arrondis ou pisiformes, le Sclerotium varium Pers.; la 2% forme donne souvent naissance à des sclerotium plus aplatis, rugueux, de for- mes diverses, qui se rapportent généralement au Sclero- tium compactum D. C.; la 5°° forme ne fournit guère que des sclerotium petits et maladifs, creux à l’intérieur, et peu différents du Sclerotium bullatum D. C., ou même parfois ne donne qu’une simple pellicule noirâtre, épi- derme de sclerotium avorté. B. Forme byssoïdéenne. — Sous certaines influences que je n’ai pu bien apprécier, le mycélium de notre pe- zize ne prend pas la forme et la consistance humide de la sphacélie, mais se développe plus appauvri, sous forme de filaments irréguliers, simples ou rameux, qui forment de petits groupes isolés; ou bien se couchent, rampent, s'entortillent et s'étendent assez au loin sur l’épiderme de la racine, faisant l'effet de taches floconneuses et blanchà- tres. Cette dernière forme n’est pas toujours fructifère, tandis que la première produit toujours des stylospores ou des spores; l’une et l’autre, cependant, donnent naissance à des sclerotium, et se composent à peu près des mêmes éléments anatgmiques. Souvent la présence de la sphacélie est caractérisée par une espèce d’aire ou de tache humide et foncée, non sans quelque analogie avec celle qui entoure les Septoria et les Phyllosticta. Examinée au microscope, on reconnaît que (70) cette tache n’est pas uniquement due à l’action épuisante des radicelles de la sphacélie, mais plus encore à une alté- ration morbide des cellules du parenchyme de la racine, et à une modification chimique de leur contenu, fort sem- blable à ce que M. Schacht appelle reinefaule chez les pommes de terre (1). De nombreux infusoires, diverses espèces d’Acarus, et deux ou trois espèces de larves assez grandes, contribuaient aussi largement à troubler et à altérer ces tissus, et empêchaient souvent même les spha- célies de produire des sclerotium. ES — Siruciure analomiqgue. Quant à la structure anatomique de cette première for- mation, je ferai remarquer d’abord, que deux sortes de cellules, de nature fort différente, s'y rencontrent comme éléments simples constitutifs : 1° Des cellules incolores, à parois minces, de forme plus ou moins allongée, qui, placées bout à bout, ou anastomosées entre elles, forment les radicelles, les hypha et les basides ou les filaments sporophores de la plante; 2 des cellules verdätres, rondes ou arrondies, opaques, solides ou à parois très-épaisses, isolées entre les filaments de la sphacélie, ou adhérentes entre elles au moyen d’un mucilage grumuleux, qui re- présente sans doute la matière intercellulaire des algues et des lichens. Par leur couleur, leur nature azotée et leur position dans l’arrangement anatomique de la plante, ces cellules me semblent assez analogues aux gonidies de lichens. . (1) Janssen u. Schacht. Uber Kartoffelkrankheïit. Mit. d. Naturforsch. Gesell, zu Hamburg, 1846. CH) On ne peut sé faire une meilleure idée de l’arrangement de ces parties constitulives qu'en comparant notre para- site à une plante plus élevée dans Ja série végétale. Le cen- tré de végélation de la sphacélie, que je comparerai ainsi à un rhizome traçant, se trouve sous l’épiderme de la ra- cine hospitalière; il se compose de cellules incolores de forte dimension, simples, plus rarement rameuses, qui, placées bout à bout, forment de gros filaments, ordinaire- ment un peu étranglés aux articulations ; ou bien se réu- nissent irrégulièrement pour imiter un réseau lacuneux. Ces cellules sont ordinairement remplies d’un proto- plasma granuleux, incolore ou jaunâtre d’après la colora- tion de la racine qui les alimente : ainsi incolore, quand on les prend sur les racines de navet ou de chicorée, jaunâtre, quand on les extrait des carottes. De ce centre de végétation partent un système descendant ou radicellaire , et un système ascendant ou aérien. Le sys- tème descendant sert évidemment à la nutrition de la plante, et le système ascendant doit pourvoir à sa repro- duction. Le système descendant se compose de radicelles cylindriques, plus ou moins fréquemment septées, se ra- mifiant en d’autres plus grêlés, qui se divisent à leur tour en filets plus déliés encore. Les radicelles de forte dimen- sion sont souvent remplies de protoplasma, les radicelles terminales, au contraire, ne contiennent qu’un liquide limpide et clair. Ces derniers filaments ont leurs extré- milés arrondies et ne diffèrent guère des radicelles des Puccinia. Ces radicelles pénètrent fort avant dans les racines attaquées; on les trouve souvent à une profondeur de 2 à 5 centimètres. Elles entourent et désagrégent les cel- lules du parenchyme, souvent même les pénètrent, et s’em- (72) parent évidemment des substances nutritives qu’elles con- tiennent. J'ai remarqué également que les filaments radicellaires portaient parfois latéralement, placées en angle droit, de petites cellules saillantes, à parois épaisses, aplaties du côté de la radicelle et arrondies du côté demeuré libre. Ces cellules imitent assez bien ces boucles en métal qui. garnissent les courroies des malles de voyage; c’est pour- quoi le professeur Hoffman (1), qui les a trouvées chez d’autres champignons, les nomme Schnallenzellen. Elles étaient en tout semblables à celles que M. Schacht figure dans son grand ouvrage sur la cellule végétale (2). Le système ascendant de cette formation est plus difi- cile à bien caractériser, parce que les types de plusieurs genres s’y rencontrent et s’y trouvent souvent littéralement mêlés. Au fond, cependant, il se compose d’hypha, qui ne sont que la continuation des filaments du rhizome central, et qui, suivant une direction horizontale ou verticale, se ramifient irrégulièrement, se modifient en basides ou en pseudo-basides, pour produire enfin des stylospores ou des spores. Entre ces hypha, et surtout à leur base, se trouvent éparpillées ou réunies en amas plus ou moins considérables, ces cellules arrondies et verdâtres dont nous avons parlé un peu plus haut. Disons d’abord un mot de la structure microscopique de ces filaments, pour nous occuper ensuite de leur mode d'arrangement. Structure microscopique. — Ces filaments, considérés isolément, sont blancs, creux, inégalement septés, formés (1) Bot. Zeit., 1856, p. 156. (2) Hermann Schacht, Die Pflansenxzelle, taf. VI, fig. 15. (75) de cellules irrégulières et tortueuses, ou de cellules tubi- formes, à parois parallèles. Leur paroi cellulaire mesure à peu près 2 millimètres. Leur diamètre varie considérable- ment; on en trouve qui n'ont guère que 4 millimètres d'épaisseur , et d’autres dont le diamètre doit être évalué à 10-15 millimètres. Le contenu des cellules diffère égale- ment d’une plante à l’autre et souvent de filament à fila- ment : ainsi c’est tantôt un liquide hyalin et limpide, tantôt un liquide granuleux , semblable à celui du système radi- cellaire, qui les remplit; souvent le liquide est remplacé par des espèces de noyaux ou de cellules vacuoliformes qui, placées sur un ou sur deux rangs, remplissent l’intérieur du filament. Une cellule, ou articulation de filament, con- tient souvent trois ou quatre de ces cellules vésiculeuses, . parfois davantage, et même jusqu’à quinze et vingt. J'ai remarqué qu'en règle générale, plus un filament s'éloigne du centre de la plante, plus il est rarement septé; aussi les filaments terminaux n’offrent-ils souvent presque pas de cloisons. Ces filaments se composent de cellulose insensible aux acides et à l’action de l’iode, même aiguisé d'acide sulfurique. Ils résistent à l'oxyde de cuivre ammo- niacal (paracellulose de M. Fremy. Institut, 1859, n°1319); mais la matière granuleuse intracellulaire se dissout rapi- dement dans ce réactif. Arrangement. — Ces filaments plongés dans un gelin abondant, qui donne aux sphacélies cet aspect humide et trémelloïde, ou , développés en touffes sèches , affectent, le plus souvent, dans leur groupement une des formes suivantes : 4° Sur les hypha horizontaux du rhizome central, en- tremêlés de cellules verdâtres, s'élèvent de courts fila- ments, composés de deux ou trois cellules, dont la der- (1) nière donne naissance à une baside beaucoup plus grêle, longue de 0,02 à 0,05 mm., qui porte une stylospore cy- lindrique d'assez forte dimension : c’est la forme la plus régulière et qui se rapproche le plus des sphacélies du Sclerotium clavus. 2% Les kypha du rhizome se modifient en filaments ra- meux , irrégulièrement entortillés, formant les lobés de la sphacélie ou des coussinets laineux ; leurs extrémités Ler- minales et latérales produisent une infinité de spores acrogènes ou de stylospores généralement de moindre dimension que celles de la forme ne 1 et de figure ovoide ou ovalairé. Parmi ces filaments, il s’en trouve d’autres qui rappel- lent parfaitement le port des Fusisporium; ils portent de grandes spores fusiformes ou cylindriques, ordinairement bi-triseptées, droites ou courbées et se rapprochant beau- coup des stylospores de la forme précédente. En étudiant ces formations, on croirait volontiers à deux plantes vivant ensemble et mêlant léurs filaments et leurs spores ; je n'ai cependant jamais pu parvenir à sépa- rer les deux plantes , et j'ai trouvé toutes les transitions entre les petites spores ovalaires et les grandes spores cylindriques ou fusiformes. Il n’est pas rare, dans cette forme, de voir toute la partie supérieure de la sphacélie, sous l'influence d’une grande humidité, se désarticuler en spores de formes très-diverses, et imiter partiellement le genre Cylindrium, Bonorden. Aux filaments irréguliers de la forme précédente vient se mêler une troisième espèce de filaments : des filaments toruliformes, imitant parfaitement le genre Hormiscium Kze. Ils se désarticulent facilement én spores rondes ou arrondies, mais de diamètre fort variable. (75 ) 4° Enfin les filaments que nous venons de décrire se développent parfois stériles, formant des coussinets blancs et laineux ou des flocons moins denses et plus étendus. On remarque souvent, dans ces formations, des filaments à cellules noueuses et qui indiquent leur tendance natu- relle à se transformer en sclerotium. | Cette hétérogénéité de formes et de spores chez une même espèce, quoique toujours embarrassante pour lob- servateur , n'est cependant pas sans exemples en crypto- gamie. Ainsi l’Oidium violaceum Hart., et le Fusisporium solani Mart., appartiennent au même mycelium (1). Le professeur Caspary a égalemenñt vu le Fusisporium melanochlorum et le Fusisporium concors produire en même temps les spores arrondies du genre Hormiscium et les spores fusiformes propres à leur genre (2). Maintenant, me suis-je trompé, prenant pour des modi- fications d'un même mycelium des plantes réellement dis- tinctes, et confondant notre plante avec d’autres parasites secondaires ? Je l'ai longtemps craint, et je suis loin encore d’avoir sur ce point mes pleins apaisements; mais plus de cinquante examens microscopiques m'ont toujours et par- tout donné les mêmes résultats, et présenté la même con- fusion. Au reste, il n'y aurait rien d'étonnant que, dans un tel dédale de formes, le fil d'Ariane ne me fût échappé quelque part. | (1) Hermann Schacht, Lehrbuch der Anatom.u. Phys. der Gewäsche, 9te Theil, p.191. (2) Robert Caspary, Monatsberichte der Kôn. Akad. d. Wissensch. su Berlin, mai 1855. (76 ) HILL — Corpuscules reproducteurs. I. Quand on examine au microscope ces masses de spores ou de stylospores qui forment, à la surface des sphacélies, une couche souvent assez épaisse, ou qui en- combrent les filaments de formations plus sèches, on reconnaît, malgré la grande variabilité de ces corps re- producteurs , trois types assez constants auxquels peuvent se rapporter toutes les formes intermédiaires. C'est ainssi qu’on rencontre assez généralement en même temps, a. de petites spores ovalaires (microspores); b. de grandes spores cylindriques ou fusiformes (macrospo- res), et c, des spores arrondies. 4° Les spores de petite dimension, que je pourrais nommer microspores, quoique généralement ovalaires, varient néanmoins assez de forme et de grandeur. On en trouve de pyriformes, d'ellipsoides et d’ellipsoïdes-fusi- formes. Elles mesurent généralement 0,006, 8 ou 10 mm. de longueur sur 0,004 à 5 mm. d'épaisseur. Rarement septées, elles montrent plus souvent 1,2 ou 5 gouttelettes opaques, qui leur donnent parfois une apparence eloi- sonnée. Ces spores sont portées par des filaments sporo- phores, ou proviennent de la désarticulation des filaments mêmes. 2° Les grandes spores, les stylospores fusiformés ou cy- lindriques, que l’on pourrait nommer macrospores , sont droites ou arquées, à extrémités aiguës ou arrondies. Elles mesurent généralement 0,010, 20 ou 50 mm. de longueur sur 0,004 à 5 mm. d'épaisseur, et offrent 4, 2, 5 cloisons transversales, ou bien une série de gouttelettes ou nu- cléoles opaques variant en nombre de 5 à 10, (71) 5° Enfin les spores arrondies mesurent communément 0,004, 5 ou 6 mm. de diamètre. Elles contiennent éga- lement, sauf les toutes jeunes, une ou deux goutteleltes opaques, placées, tantôt au milieu de la spore, tantôt sur l’un de ses bords. Elles proviennent de la désarticulation des filaments toruliformes, ou même naissent du fond de la sphacélie, comme des conidies. Ces spores, ainsi que celles que nous avons décrites en premier lieu, portent souvent, à l’une de leurs extrémités, une petite cellule claire, ronde ou ovale, et qui leur a servi de baside. . Toutes ces spores ou stylospores, dont nous venons de parler, germent facilement au bout de 2 ou de 5 jours. Elles se gonflent et s’aliongent d’abord, puis émettent un filament mycélin à l’un de leurs bouts ou à leurs deux extrémités à la fois. Ces filaments s’allongent souvent con- sidérablement sans se diviser; dans d’autres cas, ils se ramifient abondamment et de bonne heure. Au bout de 7 à 8 jours, 1ls commencent déjà à montrer ces cloisons ou ces nucléoles opaques qui caractérisent les filaments de la sphacélie adulte. | II. De véritables spermaties n'ont pas encore élé dé- couvertes dans les formations sphacéliennes. M. Tulasne avait considéré un moment les stylospores de la sphacélie du Sclerotium clavus comme pouvant être des sperma- es; mais 1l a été, plus tard, le premier à reconnaître son erreur (1). Espérant découvrir peut-être ces corpuscules chez notre sphacélie, j'observais soigneusement toutes les formations qui se montraient dans le rayon de végétation des spha- célies, quand j'aperçus poindre, conjointement sur des (1) Mémoire sur l’ergot des Glumacées, pag. 8, not. 2. (78) navets et des betteraves, autour des sphacélies, un grand nombre de mamelons transparents, d’un beau rose incar- nat et d’un diamètre d'environ un demi-millimètre. = Ils s'élevèrent bientôt en longs filets arrondis; également roses, et contournés en spirale, pour s’affaiser ensuite et tomber en déliquescence. Ces productions se rapprochaient Met pour les caractères extérieurs, des Naemaspora, Libertella et Cyti- spora, mais en différaient totalement par leur structure anatomique. Examinés au microscope, ils me montrèrent l’organisa- tion des véritables spermogonies, c’est-à-dire un périthèce propre, arrondi, formé de fines cellules verdâtres, et tapissé à l'intérieur de cellules saillantes, donnant nais- sance à une quantité prodigieuse de spermaties. Celles-ci étaient cylindriques, incolores, droites, à extrémités obluses et toutes parfaitement semblables; elles mesu- raient 0,005 à 4 mm. de longueur, sur un peu plus de 0,001 mm. d'épaisseur. Ces spermogonies, percées supérieurement d'un pore plus ou moins large, se maintenaient au milieu des cellules polyédriques de l'épiderme, au moyen d'une multitude de radicelles vraiment capillaires. Malgré cette organisation peu équivoque, et leur position autour ou à proximité des sphacélies, je ne me crois pas suffisamment autorisé à considérer ces mamelons comme les spermogonies de celte première période. LV, — Parasiltes. Durant cette première période, des parasites assez nom- breux se montrèrent en compagnie de notre plante, ou vivant sur elle en parasites secondaires; car, dans bien à —. ne | (79) des cas, il est souvent très-difficile ou presque impossible de déterminer s’il y a véritable parasitisme ou seulement cohabitation. Le Mucor rufus Pers. et l'Ascophora mucedo Tode, qui naissent si facilement sur toutes les substances en putré- faction, se montrèrent les premiers sur mes sphacélies. Le Fusarium roseum Link, et le Trichothecium domes- ticum Corda, les suivirent bientôt, élevant partout leurs coussinets roses au milieu des masses blanches et opalines des sphacélies. Quelques semaines plus tard, les Penicillium apparais- saient en grand nombre : c'élaient les P. crustaceum (L.), candidum Link et bicolor Fr.; les deux premiers affectaient le plus souvent leur forme corémienne. Ua joli parasite, l’Haplotrichum roseum Corda, exerca aussi de grands ravages parmi les Aypha de cette première période : véritable cuscute pour le port et pour les mœurs, il détruisait souvent en peu de jours toutes les mucédinées qu’il rencontrait sur son passage. Je remarquai également sur les sphacélies le Fusidium clandestinum et sa variété microsporum Corda, l’Acrosta- lagmus cinnabarinus Corda, et l'Oïdium virescens Fr. Il me reste encore à parler d’une forme vigoureuse et robuste du Polyactis vulgaris Link (1), qui se montra souvent autour des sphacélies et attira spécialement mon attention pour deux raisons que je ne puis passer sous silence : 1° Les sclerotium en voie de formation sont toujours couverts d'un fin duvet laineux, qui n’est autre chose qu’une (1) Nees, Syst. der Pilze, tab. IV, f. 57 ; Corda, Icon. Fung., t. I, tab. V, f, 250. | (80) toison d'hypha encore non soudés; mais il n’est pas rare de voir ces hypha prendre un développement extraordinaire et s'élever même au-dessus du sclerolium à une hauteur d’un centimètre. Examinant au microscope ces hypha, j'ai été souvent frappé de leur tendance à se transformer en filaments de Polyactis, et il m'est arrivé d’en trouver qui, inférieure- ment encore hypha de sphacélie, montraient à leur partie supérieure les fines cloisons et le protoplasma grisâtre des filaments de Polyactis. Jamais cependant je ne les ai vus fructifier. Cette seule observation ne suffit certes pas pour en inférer que les filaments de sphacélie peuvent, sous certaines influences, se modifier en Polyactis; je ferai néanmoins remarquer qu'un mycelium de champignon, devenant fructifère sous forme de Polyactis, ne serait pas un phénomène sans antécédents dans la science. C’est ainsi que le Rév. Berkeley a vu le mycelium de sa Sphaeria Des- mazieri, fructifier sous cette forme (1). 2 J'ai trouvé des racines de navets et de chicorée sur lesquelles le Polyactis seul s'était développé, et qui se trouvaient néanmoins remplies, à l’intérieur, de beaux Sclerotium varium. La décomposition de ces racines était déjà trop avancée, quand je découvris ces tubercules, et je ne pus plus retrouver que les gros filaments générateurs, qui suivaient ordinairement les faisceaux vasculaires de ces racines. Comme les radicelles des Polyactis et des spha- célies se ressemblent beaucoup, je n’ai pu décider à laquelle de ces plantes appartenaient les filaments selé- rolifères. Il se peut que la sphacélie, étouffée par les (1) Gardn. chron., 1851, p. 805. © vw: né et ati (81) Polyactis, se soit développée sous forme de FRANS et ait néanmoins produit des sclerotium. PÉRIODE SCLÉROTIENNE. Dans la première partie de ce travail, nous avons étudié la vie de la Peziza sclerotiorum à l’état de mycelium diffus ; nous avons vu ce mycelium naître, se développer et fruc- üfier comme la plupart des mucédinées parasites; mais chez celles-ci, le moment de la fructification est ordinaire- ment une époque fatale qui met fin à leur existence; ici il n’en est pas de même : une partie du mycelium, celle qui avait servi à la fructification, périt seule, tandis que l’autre, plus vivace, se modifie, au contraire, en sclerolium , pour reprendre, après quelques mois de repos, une nou- velle activité vitale. La partie radicellaire de ce mycelium a done un double rôle à remplir : elle doit d'abord former et nourrir la sphacélie, puis, quand celle-e1 a fructifié et va périr, elle doit former un certain nombre de tubercules radicellaires ou de sclerotium, destinés à produire la forme adulte de la plante; quand le sclerotium est formé, son rôle physiolo- gique étant rempli, elle périt à son tour. Pour procéder avec le plus d'ordre possible, nous exa- minerons successivement les trois questions suivantes : a. L'origine et la formation du sclerotium ; b. Sa morpho- logie et son anatomie; c. Sa valeur physiologique. 4° Formation du sclerotium. — C'est le rhizome cen- tral de la sphacélie qui donne naissance aux sclerotium. Ceux-ci peuvent se former tant sous une sphacélie fruc- üfère qu'autour d'elle, comme formation secondaire et plus indépendante, et c’est ce dernier mode de forma- Qme SÉRIE, TOME IX. 6 (82) tion qui donne d'ordinaire les sclerotium les plus robustes. Je veux dire que la partie inférieure d’une sphacélie se: modifie bien souvent en masse sclérotienne, comme cela a lieu chez la sphacélie du Sclerotium clavus, mais que plus souvent encore c'est la partie intramatricale de la spha- célie, ses stolons cachés dans Ja racine hospitalière, qui donnent directement naissance à des sclerotium, sans que ceux-ci aient toujours été surmontés d’une formation fruc- tifère. C’est ce dernier mode de formation que nous allons principalement décrire. Disons d’abord, comme le prouve l'examen microsco- pique, que les tissus avoisinant la sphacélie sont tout remplis et traversés de forts et robustes stolons, qui ne sont que des prolongements des hypha du rhizome cen- tral. Ce sont ces stolons qui percent l'épiderme de Ja racine attaquée, le plus souvent autour des sphacélies, et viennent se Montrer, à l'extérieur, sous forme de petits mamelons ou coussinets humides et transparents. Ces mamelons ou coussinets sont formés de courts filaments, à articulations très-rapprochées et naissant, serrés les uns contre les autres, de la réunion de deux ou trois ou d’un nombre plus considérable de ces stolons. Au bout d'une couple de jours, ces mamelons ont considérablement grandi; leur forme trahit déjà leur destination et indique de jeunes sclerotium. L'aspect s'est également modifié dans l'intervalle; leur surface a perdu cette apparence humide et s’est couverte d’une courte laine blanche, due à l'épanouissement des filaments terminaux. À mesure que ces jeunes sclerotium gagnent en dimen- sion, la toison qui les couvre s'allonge également; ce dé- veloppement cependant n'est pas toujours régulier, et l'on voit des sclerotium de même âge, couverts les uns d'une ( 85 ) laine courte et épaisse, les autres de filaments plus longs et plus légers, s’élevant souvent même à un centimètre au-dessus de la surface du sclerotium. Nous avons déjà fait remarquer la grande analogie de certains de ces filaments avec ceux du Polyactis vulgaris (forma robusta). Il faut en règle générale quatre ou cinq.jours à un sclerotium pour atteindre ainsi sa croissance parfaite. Le sclerotium alors entre dans une nouvelle SNA que nous pourrions nommer lacrymante el qui est Ca- ractérisée par une exsudation abondante dont toute la surface libre du champignon est le siége. Cette période de courte durée s'achève en deux ou trois jours et fait la tran- sition de l'état laineux à l’état de sclerotium proprement dit. De tous les aspects sous lesquels peut se présenter ce pa- rasite, celui-ci est, sans contredit, le plus beau et le plus gracieux, et Je n’ai pu sans plaisir les contempler portant aipsi, sur un turban de belle laine blanche, un diadème de perles tremblotantes aussi pures que le cristal. Le premier jour, l’exsudation est peu abondante, le second elle l’est davantage, et le 5”° ou 4° jour, les goultelettes s'unissent pour découler autour du sclero- tium. C'en est fait alors de sa belle laine blanche, elle se flétrit à la surface du sclerotium , qui s'est coloré dans l’entre-temps en noir, et disparaît insensiblement, C’est cet état qui avait été pris par Fries comme caractérisant une espèce nouvelle dont il avait fait son Sclerotium tectum. Une pareille exsudation se remarque encore chez d’au- tres champignons. M. Tulasne la signale chez la spha- célie du Sclerotium clavus (1), et je l’ai observée, cet été, > (1) Tulasne, Z. c., p. 17. (84) sur de jeunes individus de Polyporus squammosus, de Tele- phora purpurea et de Xylaria cornuta. Elle a pour but, je crois, de ‘décharger la plante de la partie aqueuse des sucs abondants que lui fournit à cette époque son système radicellaire, et dont les parties plus substantielles sont converties en couches d’épaississement intracellulaire. En effet, des incisions pratiquées de manière à isoler le scle- rotium de la majeure partie de ses fibres radicales, font cesser entièrement cette exsudation. Examinant la liqueur exsudée, elle m’a paru limpide, sans goût et sans odeur et ne laissant aucune trace sur le papier. Elle était ordinairement chargée de spores de différentes grandeurs. Il paraît qu’à une certaine époque de la vie de notre mycelium, il suffit de mettre ses filaments à nu ou de les blesser pour leur faire produire des sclerotium; c’est ainsi que, sur différentes racines recélant de nombreuses radi- celles de sphacélie, j'ai pu produire à volonté des sclero- tium de diverses formes, en pratiquant des incisions ou des décortications partielles. J'ai déjà fait observer plus haut que ce n'est pas seule- ment à la surface des racines que peuvent se produire des sclerotium; on en rencontre également à l'intérieur de certaines racines. Ces sclerotium entogènes ne diffèrent guère de ceux qui se sont formés librement; ils sont géné- ralement arrondis, présentent souvent une cavité inté- rieure, et peuvent se transformer en Pezize, comme les autres. Il m'est arrivé de trouver à l'intérieur de navets qui s'étaient excavés par la décomposition de leur paren- chyme, des sclerotium suspendus à des faisceaux de fibres vasculaires, qui avaient présenté plus de résistance aux ravages des sphacélies. (85) Si l’on examine maintenant au microscope de jeunes sclerotium en voie de formation, il n’est pas possible de méconnaître leur origine et de ne pas voir que ce sont les filaments du mycelium qui se modifient, se resserrent et se soudent, pour former ces masses noires ou brunâtres qu’on considérait autrefois comme des productions autonomes. Les filaments destinés à former le sclerotium se distin- guent cependant des filaments ordinaires de la période sphacélienne par les caractères suivants : a. par la fré- quence et le rapprochemeni de leurs cloisons; b. par la propriété qu’a chaque articulation de se gonfler et de de- venir, pour ainsi dire, noueuse; c. par la propriété qu'ont ces mêmes articulations d'épaissir intérieurement leurs parois par la formation de nouvelles couches d'épaississe- ment, et de se souder entre elles au moyen d’une espèce de matière intercellulaire grumeleuse. Chaque cellule de sclerotium représente ainsi originairement une articula- tion de filament. La figure 42 de notre planche représente un fragment de jeunes sclerotium où la transition de l’état filamenteux à l’état cellulaire compacte se remarque très- bien. | F Le sclerotium formé, 1l se passe un phénomène assez curieux, mais dont je n'ai pu bien saisir la cause : les cel- lules de la périphérie se colorent en noir pour former un épiderme général, et puis se détachent, se désarticulent, d'une part, des filaments laineux qu’elles portaient supé- rieurement, et de l’autre, des filaments radicellaires qui nourrissaient jusqu'alors la plante. Ces cellules possèdent probablement une propriété isolante semblable à celle qui caractérise les cellules subéreuses des phanérogames supérieures. 2° Forme et structure anatomique du sclerotium. — Les ( 86) sclerotium que produit la sphacélie de la Peziza sclero- tiorum sont loin d'affecter une forme constante et ré- gulière et de présenter un type qui puisse servir à les caractériser; ainsi on en trouve de globuleux, de lobés, d'aplatis, de convexes, de cylindriques, et d'autres de formes les plus irrégulières et les plus bizarres. Au milieu de cette irrégularilé, on reconnaît cepen- dant certaines formes dominantes se présentant plus sou- vent que les autres, et rappelant des formes qui ont reçu des auteurs anciens des dénominations spécifiques. C'est ainsi que le Sclerotium varium Pers., et sa variété elongalum Chev., se montraient fréquemment sur les carottes; le Scl. compactum D.C., et le Scl. tectum Fr., sur les navets et les chicorées : le Scl. bullatum D.C., sur les navets et les betteraves. Certains sclerotium étaient à peu près lisses, d’autres fortement rugueux; quelques- uns montraient une surface plissée; il S'en trouvait qui, tout couverts de petils mamelons, rappelaient fort bien le Scl. Sphaeriaeformis Lib. Les proportions de grandeur ne varient souvent pas moins que la forme et l'aspect des sclerotium, et l'on en trouve qui mesurent depuis 2 milli- mètres jusqu’à 5 et 4 centimètres de longueur. Il arrive assez souvent aux sphacélies de ne point former de véritables sclerotium; ce cas est surtout fré- quent chez les sphacélies fructifères trop humides. On trouve alors, quand la sphacélie à disparu, une espèce de pellicule, souvent très-étendue, noirâtre à sa surface su- périeure et intérieurement blanche, mais dans laquelle on reconnaît cependant facilement les éléments anatomiques du sclerotium. La pellicule noirâtre, dans d'autres cas, est remplacée par un amas informe de cellules scléro- tiennes, présentant un aspect spongieux ou irrégulière- LR (87) ment rangées en chapelet. Toutes cesdormations sont évi- demment des sclerotium avortés, et sont incapables de ds duire des Pezizes. Une coupe transversale de sclerotium (fig. 11) montre la Structure anatomique bien connue de la généralité de ces productions. Sous un épiderme noirâtre, formé de trois ou quatre rangs de cellules, se trouvent des cellules blanches ordinairement un peu plus grandes, de formes diverses, à parois épaisses, laissant apercevoir, quand les coupes sont très-fines, des couches d’épaississement fortement serrées et soudées entre elles. Ces cellules sont grandes ou petites, arrondies ou prismatiques (fig. 11), allongécs ou même canaliformes, d’après la nature des filaments qui les ont produites et le degré de pression qu’elles ont subi. Les cellules de jeunes sclerotium ont les parois plus minces et contiennent souvent encore un protoplasma granuleux non utilisé : celle des sclerotium adultes sont souvent presque pleines, et ne montrent, sous le micros- cope, leur cavité intérieure que comme un point noir. Les cellules épidermiques ne diffèrent guère des cellules inté- rieures que par leur coloration foncée. -Corda dit avoir examiné plus de 1000 sclerotium, sans leur avoir jamais reconnu de spores : cela se conçoit aisé- ment : c'est comme si l’on cherchait des graines sur un tubercule de pomme de terre. Fries (1), De Candolle, Che- vallier et d'autres auteurs, qui ont remarqué autour de coupes de sclerotium des corpuscules sporuliformes, ont vu les spores de la période sphacélienne que les sclerotium portent souvent en grand nombre, ou bien des granula- (1) Fries, Sum V’eg. Scand., p. 477, et S. M., 1. IL, p. 247. (88 ) tions protoplasmatiques, qui sont très-abondantes dans pi ca préparations. ° Valeur physiologique du sclerotium. — Si l'on tient pe maintenant de la naissance du sclerotium, et de la transformation que nous lui verrons subir bientôt, il n'est plus possible de le considérer comme une espèce végélale. L'espèce est quelque chose d’absolu, capable de se nourrir et de se reproduire. Le sclerotium, comme tel, n'est qu’un être relatif, privé d'organes de nutrition et de reproduction. L'opinion de M. Bonorden (1), qui regarde les sclero- tium comme des dégénérescences d’espèces , n’est pas non plus admissible; l’évolution postérieure de cette forma- tion et sa métamorphose en champignon d’un ordre supé- rieur contredisent cetle manière de voir. Reste la théorie de M. Léveillé (2), qui ne voit dans les sclerotium que des mycelium condensés et destinés à une évolution ultérieure, et cette opinion trouve ici une pleine confirmation. De même qu’en phanérogamie, on trouve des racines fibreuses et des racines tuberculeuses : ainsi on rencontre, en my- cologie, des mycelium nématoides et des mycelium tuber- culeux ou sclérotiens. Le sclerotium remplit iei parfaite- ment le rôle d’une racine bisannuelle. Chez les plantes bisannuelles, nous voyons l'activité de la première année tendre principalement à accumuler des matériaux, diffé- rentes substances nutritives, destinés à l'entretien de la pousse de l’année suivante; pareillement, chez notre plante, l’activité de la première période végélalive, de la période (1) H.F. Bonorden, Fandbuch der algemeine Mykologie, p. 281, 1851. (2) Léveillé, Mémoire sur le genre ScuerorTiux. (Ann. sc, nat, t, XX, 1843.) + Le? re ", : ( 89 ) sphacélienne, sert en grande partie à former ces sclero- tium, dans lesquels les Pezizes, représentant la seconde période de végétation, devront trouver leurs éléments de développement et de nutrition. La nature et la destination des sclerolium ne sont done plus, dans ce cas donné, des énigmes : ce ne sont que des mycelium luberculeux, mais qui offrent ceci de remar- quable , c'est que l’activité vitale de la plante, après s'être concentrée quelque temps dans ces espèces de nymphes végétales, ne se réveille et ne reparaîl que pour affecter des formes aussi nouvelles et commencer une existence aussi neuve que celles de l’insecte qui sort de sa chrysalide. PÉRIODE PEZIZÉENNE. Ayant récolté plus de 200 sclerotium, de forme et de grandeur différentes, et que j'avais vus se former sous mes yeux, il ne me restait plus qu'à les placer dans des conditions favorables à leur germination, pour leur faire produire la forme adulte et parfaite. A cet effet, je suspendis une partie de mes sclerotium dans des flacons à large col, à moitié remplis d’eau et à un centimètre au-dessus de la surface du liquide, croyant qu'une atmosphère humide suffirait pour les faire germer; mais ce procédé, qui avait réussi à M. Tulasne, ne me donna aucun résultat ; et, depuis près de sept mois que je les observe, je ue les ai vus donner aucun signe de vie. Je semai une autre partie de sclerotium dans des ter- rines remplies de terreau, ne les couvrant que très-légère- ment et ayant soin de séparer les sclerotium de navet, de carotte et de chicorée, pour les reconnaître, au cas qu'ils vinssent à donner des champignons différents. Je ne parle | (90 ) pas des sclerotiuni de betteraves, qui, mal formés, ne pro- duisirent jamais rien. Je fis une première expérience le 16 mars. Je semai deux terrines, séparées en compartiments par des lames de verre, employant pour chacune d’elles des terreaux de provenance diverse; et je plaçai l’une dans une de mes chambres de travail qui, n'étant pas chanffée, offrait la température assez douce du printemps de cette année. Je déposai l’autre dans une serre à boutures, assez éloignée de mon habitation et où régnait habituellement une tempé- rature de 15 à 20 degrés centigradés. Ces terrines étaient couvertes d'un carreau de vitre, pour y maintenir une humidité plus uniforme. Pendant deux mois, mes sclerotium demeurèrent en- gourdis ; mais vers la mi-mai, je vis apparaître, sur les scle- rotium cultivés en chambre d’abord, puis, quelques jours plus tard, sur ceux que je conservais en serre, des espèces de clavaires brunâtres (fig. 4) que je pris pour de jeunes Ty- phula. Ces espèces de clavaires se développaïent assez rapi- dement, mais périssaient au bout de huit jours, sans pro- duire, à mon grand regret, d'organes de fructification. Je fus plus heureux à la fin de mai et pendant le mois de juin, et je vis tous les sclerotium produire abondamment de belles Pezizes, couleur de cannelle, que je reconnus de suite pour être la Peziza sclerotiorum Libert. Le retard des sclerotium semés en serre chaude sur ceux cultivés à une température beaucoup plus froide, est un fait que nous signalons en passant et qui semble prouver qu'il en est de certains champignons comme de plusieurs phanérogames (1), qui (1) La chaleur de nos serres est sans effet sur le blé, l’avoine, la bette- rave, elc. + (91) paraissent peu sensibles à une addition de chaleur artifi- cielle, et chez lesquelles la saison ou l’époque de l’année a beaucoup plus d'influence sur la végétation qu’une aug- mentalion ou une diminution de calorique. Dans l'intervalle, j'avais fait une seconde expérience, et le 1% mai j'avais semé en plein air trois nouvelles terrines. La 1'° contenait des sclerotium de navet ; la 2% des sclero- tium de carotte et la 5*° des sclerotium de chicorée. Je les laissai placées à l'ombre, ne les couvrant que d'une vitre blanchie. Dans les premiers jours de juin, tous ces sclero- tium produisaient indistinctement les mêmes Pezizes, qui se succédèrent par intervalle jusqu'à la fin du mois d'août. Je fis enfin une troisième expérience, le 4% juillet, mais elle manqua complétement, parce que mes sclerotium, trop humides et privés d'air, entrèrent en fermentalion dès les premiers jours. Les expériences précédentes suffisent ce- pendant pour constater ici avec certitude que plus de deux cents sclerotium, provenant de différentes plantes, quoique produits par la même espèce de mycelium , semés à diverses époques, dans des conditions différentes et dans des localités éloignées, ont toujours donné la même plante, la Peziza sclerotiorum Lib. J'ai remarqué que pendant leur germina- tion, les sclerolium ne se gonflent pas considérablement, seulement leur tissu se ramollit et devient flasque, et si on les laisse sécher après qu’ils ont produit leurs Pezizes, ils se ratatinent et n’offrent plus que la moitié du volume primitif : ce qui prouve qu'une partie de leur substance a été employée à nourrir les Pezizes. J'observai également que c'était bien toujours la surface supérieure des sclerolium qui portail les Pezizes, mais que * si on les tournait, leur surface inférieure, devenue alors supérieure , en produisait tout aussi bien. (92) Un point qui me parut très-important, fut de m’assurer de la manière dont les Pezizes se rattachent aux sclero- lium, el de constater les rapports qui existent entre ces deux formations. Je vis ainsi que les Pezizes commençaient à paraître sous forme de petits tubercules, souvent un peu plus pâles que l’épiderme du sclerotium. Ces tubercules, géné- ralement très-nombreux, ne prenaient, dans certains cas, pas de développement ultérieur, dans d’autres s’allon- geaient et se transformaient en Pezizes. Examinés au mi- croscope, je reconnus que ces tubercules n'étaient qu’un bourgeonnement, une multiplication des cellules épider- miques du sclerotium même. Une coupe perpendiculaire au travers du sclerotium et du stipe d'une Pezize adulte, me montra également qu'il y avait identité de cellules et union non interrompue entre l’épiderme du sclerotium et celui de la Pezize. Ici donc la métamorphose est certaine, et on ne peut soupçonner une espèce de parasitisme, comme chez l’Agaricus tuberosus et l’Agaricus stercorarius, où les sclerolium producteurs se couvrent d'un mycelium blane qui se transforme ensuite en stipe. | La Peziza sclerotiorum, espèce formée par M" Libert{1}, malgré son pédicelle quelquefois tuberculeux, qui lui donne alors un caractère tout exceptionnel, se rapproche néanmoins beaucoup de la Peziza Candolleana Lév. (2), et plus encore de la Peziza subulipes Bull. (5), dont elle ne diffère que par son mycelium sclérotien et sa couleur de cannelle. (1) Plantae crypt. Arduennae, n° 596. ‘ (2) Mémoire sur legenre Sclerotium. (ANx. Sc. Nar.,t. XX, p.253.1843.) (5) Herbier de France, 1. 1X, tab. 500, fig, 2. (93) ‘Elle varie beaucoup de forme et de grandeur, et l'on serait tenté d’y voir des espèces différentes, si de nom- breuses transilions ne venaient unir ces formes diverses. Elle se présente ainsi : a. Clavariforme (fig. 1). Cette forme n’est qu'un état de développement arrêté. db. Infundibuliforme (fig. 2). L'humidité et le manque de lumière produisent cette forme. c. Subturbinée (fig. 5). Courtement pédicellée ou pres- que sessile. d. Enfin hypocratériforme, longuement pédicellée, à pé- dicelle tantôt droit et robuste (fig. 4), tantôt grêle et flexueux (fig. 5). Les échantillons de M'"° Libert reprodui- sent cette dernière forme. | Sa cupule d’abord globuleuse, puis légèrement concave, s'aplatit ensuite et finit par se recourber après l'émission des spores. Elle varie en diamètre d’un millimètre à un centimètre; sa chair est céracée et transparente, et brunit en séchant. L’hymenium concolore, à l’état frais, appa- rait alors pruineux, ce qui est dû aux spores qui le cou- vrent. Les thèques (fig. 9) sont nombreuses, linéaires, longues de 0,015 à 17 mm., implantées sur un hypothecium brun foncé , et contiennent 8 spores (fig. 10) ovales, incolores ou très-légèrement jaunâtres, simples, mesurant 0,003 mm. de longueur sur 0,002 mm. d'épaisseur, et renferment souvent une ou deux gouttelettes claires. Les paraphyses sont rares, de même longueur que les thèques, mais beaucoup" plus grêles, et ne sont peut-être que des thèques avortées. Cette Pezize se développe en huit ou dix jours et en vit vingt ou trente; elle émet, comme le font beaucoup de ONE LE 1 ETAT hors, à (94) Pezizes, ses spores SOUS forme de petit nuage coloré. L’hy- menium ne se vide pas en une fois, et j'ai vu certaines Pezizes lancer ainsi leurs spores quinze jours de suite, quand je levais, le matin, le verre qui les couvrait. Les spermaties sont déjà connues chez plusieurs Pezizes ; mais chez celle-ci, je n'ai rien pu découvrir, même au tout jeune âge, qui pût être considéré comme un organe de ce genre. fi La structure anatomique de notre plante est assez re- marquable. Un tissu cortical, naissant du sclerotium même, entoure très-régulièrement la plante entière. Ce tissu (fig. 6) est formé de cellules colorées, ovales, régu- lièrement superposées , faisant quelquefois saillie sous forme de poils cloisonnés, et forme, en modifiant un peu ses cellules, la partie extérieure de la cupule. Le centre du pédicelle est occupé par un faisceau de cellules grêles (Gg. 7), incolores, très-allongées, fortement serrées et adhérentes entre elles, qui se prolonge ainsi jusqu'à la cupule. À ce point, son tissu se modifie, devient plus lâche, agrandit ses cellules et s’'épanouit pour former l’hy- pothecium. Quand la cupule prend une grande extension, les cel- lules du faisceau central, trop peu nombreuses pour rem- plir son intérieur, se séparent alors pour former une charpente, souvent très-ingénieusement disposée, et se réunissent ensuite de nouveau pour soutenir l'Aypothe- cium. Nous avons vu, dans la première partie de ce travail, qu'un assez grand nombre de parasites se montrèrent sur les formations sphacéliennes de notre plante : quelques para- sites envahirent également les sclerotium pendant leur ger- mination; ce furent : le Chaetostroma stipitatum Corda , (9%) le Botrytis cinerea Pers., et le Trichothecium domesticum Corda. Leur présence rendait généralement les sclerolium stériles. SV Nous terminons ce travail par quelques remarques ou considérations générales, qui ne seront peut-être pas sans intérêt pour la mycologie générale. Ainsi : 1° La genèse des Sclerotium varium, compaclum, tec- tum, etc, est, par analogie, une preuve de plus que le Scle- rotium clavus D. C., est bien une production sui generis, un vrai mycelium et non une déformation de l’ovule, de l'ovaire ou d’un organe quelconque de graminée. 2° Il est très-probable que, de même que les sphacélies des Claviceps purpurea, microcephala, nigricans, et de la Peziza sclerotiorum, un grand nombre de gymnomycètles ne sont pas des espèces autonomes, mais simplement des mycelium fructifères de champignons supérieurs qui, ren- contrant rarement les conditions requises à leur dévelop- pement parfait,. sont dotés, pour cette raison, d’un sys- tème de fructification supplémentaire. 9° [l est presque moralement certain que ces nombreux selerotium, qui formaient autrefois la plus grande partie de la famille des selérotiacées, sont précédés et produits par une forme sphacélienne. Ainsi, j'ai observé, cet automne, le Sclerotium pubescens Pers. : il était formé par une véri- table sphacélie grisâtre, produisant de nombreuses sty- lospores arrondies, ovales ou ovales allongées. Les Scle- rolium semen et stercoreum sont formés par un mycelium blanc, quoique je n’aie pas eu l’occasion de vérifier s’il était fructifère. C’est une sphacélie d’un jaune grisâtre qui donne naissance au Sclerotium pyrinum Fr. Elle fruc- lifie et porte des spores ovalaires à extrémités souvent tronquées. Il est certain que le Sepedonium mycophilum Su et, CDI MALE ET D (96 ) forme dans les bolets de véritables sclerotium brunâtres , souvent creux en dedans et présentant la même texture que le Sclerolium boletophilum Corda (1). Ces Sepedonium vivaient presque toujours en compagnie du Monosporium agaricinum Bonorden. 4 Ayant vu un même mycelium produire des sclero- tium de structure anatomique très-différente, c’est-à-dire à cellules grandes ou petites, arrondies ou très-allongées, minces ou à nombreuses couches d’épaississement, et donner néanmoins naissance à la même Pezize, on doit en inférer que la nature des cellules du sclerotium sont d'une valeur déterminative très-minime. 5 S'il est vrai, comme nous l’avons vu, qu'un même mycelium peut produire des sclerotium de forme et d'as- pect très-divers, il est au moins assez probable que des mycelium spécifiquement différents peuvent former des sclerotium semblables. Ceci serait important pour le cas où des sclerotium de même forme viendraient à produire des champignons différents. 6° Enfin, je crois qu'il ne faudrait plus que quelques expériences heureuses et conduites avec soin, pour pou- voir formuler une théorie générale de métamorphose chez les champignons sclérotiphorés. Il faudrait surtout, dans ces expériences, rechercher les causes qui peuvent influer sur la nature du mycelium et qui font qu'une même espèce se présente tantôt munie d’un sclerotium, tantôt privée de ce mycelium. L'époque de l’année où se développe le myce- lium et le genre de spore qui lui a donné naissance, y contribuent probablement pour une large part. (1) Zcon. Fung, t. II, tcon. 54, f. 10. EN. À CALTTCA re CSevereyns Là. de Len. Rey. TT 7 TA (97) Nous devons la planche qui accompagne ce mémoire à l'amitié et au talent de M. Gustave Boddaert, de Gand. Nous regrettons beaucoup de ne pouvoir y placer les figures explicatives de la période sphacélienne, parce que ces dessins, pris sans intention de publication, ne pré- sentent pas ‘cette stricte exactitude que nous leur dési- rerlons. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fig. 2,5, 4, 5. Formes diverses de la Peziza sclerotiorum Libert. : gran- deur naturelle. — 6. Tissu épidermique (grossi 500 fois). — 7. Faisceau central (500 fois). — 8. Coupe horizontale d’une cupule, — a. Hymenium, hypothecium. c. — Tissu de la cupule (500 fois). — 9. Thèque et paraphyse isolées (500 fois). — 10. Spores (500 fois). — 11. Coupe transversale d’un sclerotium (400 fois). — a. Épiderme. — b. Tissu interne. — 12et 12 bis. Fragments de sclerotium en voie de formation, et où se remarque la transition de l’état filamenteux à l’état celluleux 2" SÉRIE, TOME IX. 7 (98) CLASSE DES LETTRES. Séance du 9 janvier 1860. M. le baron DE GERLACHE, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. de Ram, Roulez, Gachard, Borgnet, David, De Decker, Snellaert, Carton, Haus, Bormans, Leclercq, Baguet, Arendt, Ducpetiaux, Chalon , membres ; Nolet de Brauwere Van Steeland, associé; Defacqz, corres- pondant. MM. Sauveur, membre de la classe des sciences, Éd. Fétis . et Jehotte, de la classe des beaux-arts, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. Une lettre du Ministre de l’intérieur fait connaitre que M. Gachard, directeur de la classe des lettres pour 1860, a été nommé par Sa Majesté, président de l’Académie pour la même année. Par une seconde lettre, M, le Ministre transmet un ii: L'ES É " A ” Ce (99 ) arrêté royal qui nomme membres du jury chargé de dé- cerner le prix de littérature flamande, pour la deuxième période quinquennale, MM. De Decker, Snelläert, Bor- mans, Carton, C. Vervier, Ph. Blommaert et Ch. Stal- Jlaert. — M. le Secrétaire perpétuel dépose un manuscrit por- tant pour épigraphe : La numismatique est l'un des flam- beaux de l'histoire. Cet ouvrage est destiné au concours de 1860, sur la question : Quelles sont les localités des dix- sept provinces des Pays-Bas et du pays de Liége où l’on a frappé monnaie depuis l'invasion des Francs jusqu'à l'éman- cipation des grands feudataires ? — M. de Ram présente l'Annuaire de l’université de Louvain pour 1860, en même temps que le compte rendu des fêtes qui ont eu lieu à l'occasion du 25” anniversaire de cette université. M. Chalon offre un opuscule sur les jetons du comté de Saintpol. — Remerciments. RAPPORTS. M. Dupont-Marin avait communiqué à la classe un mé- moire sur la question suivante : Quelles sont les causes des suicides qui deviennent de plus en plus fréquents de nos jours, et quels seraient les moyens de les prévenir? MM. Éd. Duc- petiaux et De Decker, qui avaient été nommés commis- saires dans la séance précédente, font connaître que le mémoire présenté n’est pas susceptible d’un examen dé- ÉLECTIONS. M. Leccerco, membre de Ja commission administra- tive pour l’année 1839, est maintenu dans ses fonctions pour l’année courante, et veillera, avec M. le directeur, aux intérêts de Ja classe des lettres. | 3" M. DE Ram est nommé directeur de la même classe pour l’année 1861. M. GacraRn, en prenant possession du fauteuil pour l'année 1860, remercie, au nom de l'Académie, M. le baron de Gerlache, directeur sortant. x 2 Ed. LE nat LE fa. \ ‘ +10 A è RE : le À > à < CP St A Sn CR es 9 RE A cn # TE. — AH A ENERS (101 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 12 janvier 1860. M. F. Fénis, président de l’Académie. M. An. Querecer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, G. Geefs, Navez, Roelandt, Van Hasselt, Erin Corr, Snel, Fraikin, Baron, Ed. Fétis, De Busscher, membres; Calamatta, associé; Balat, correspondant. CORRESPONDANCE. = L'Académie royale des beaux-arts d'Anvers fait parvenir le programme de son grand concours de peinture, qui com- mencera le 8 mai prochain et dont le prix consiste en une pension de 2,500 francs payée pendant quatre ans. Pour être admis à ce concours, il faut être artiste belge ou na-. turalisé et avoir moins de 50 ans. (102) RAPPORTS. a — Composition musicale intitulée : PETITE CANTATE DE NoëL; par M. Benoit. Mapnort de »£7, fr. Félise — « J'ai lu avec beaucoup d'intérêt la cantate fournie par M. Benoit, lauréat du grand concours de composition de 1857, parce que ce morceau, bien que renfermé dans des limites peu étendues, a un caractère d'originalité et de sen- timent individuel qui devient plus rare chaque jour, et que le mérite de l’art d'écrire, ainsi que la connaissance des effets de sonorité, y sont en harmonie avec le sujet. Ce sujet, pris par l’auteur dans le Nouveau Testament, est in- diqué par ces paroles de l'Écriture sainte : Des bergers gar- daient leurs troupeaux, lorsque tout à coup ils entendirent dans les airs des chants célestes ; une voix mystérieuse leur dit de se rendre à Bethléem pour adorer le Dieu fait homme qui venait d'y naître. Le début du morceau est un dialogue d'instruments champêtres, tels que le hautbois, la flûte et le chalumeau; ces instruments forment un concert pastoral qu'interrompt tout à coup un chœur céleste de voix qui chantent Gloria in excelsis Deo, accompagnées par les harpes saintes et l'orgue. Ce chœur, d’un caractère solennel, offre des op- positions d’un bel effet entre les voix de soprano et de con- tralto, et celles de ténor et de basse, Ces voix forment ( 105 ) deux chœurs à quatre parties chacune, ils se répondent etse réunissent tour à tour; puis la voix mystérieuse chante les paroles : Adeste fideles lœti triumphantes; venit in Bethléem. Le chant de la voix de ténor sur ces paroles est noble et plein d'onction, Là seulement entrent les instruments à archet avec une douceur infinie, pour accompagner le chant, sans nuances et sans accents, afin qu'il n’y ait rien qui puisse rappeler les passions humaines dans ce moment solennel de l’aurore de la rédemption. De temps en temps, une note de deux instruments à vent, à l’octave, fait enten- dre un son mystérieux sur cet accompagnement : puis le chœur céleste reprend avec les harpes et l'orgue. La voie mystérieuse reprend ensuite le chant Adeste fideles, etc., mais cette fois avec un accompagnementrhyth- mique de deux flûtes et de deux bassons d’un effet aussi heureux qu'original, sur lequel les instruments à archet font entendre un léger murmure qui indique le mouve- ment de la marche vers Bethléem. Le charme de cette in- strumentation montre l'intention du compositeur d’ac- croître la force de persuasion de la voix céleste. Vers la fin du chant, la sonorité va crescendo et amène une der- nière reprise du chœur des anges , où toutes les splendeurs des voix et toutes les richesses de l’instrumentation éela- tent sur les paroles : Gloria in excelsis Deo. Insensiblement cette sonorité s'éteint; les voix s’éloignent, et l’on n'entend plus que les sons des instruments champêtres, qui finis- sent par se perdre dans le lointain. M. Benoit, dans cette heureuse conception, semble avoir eu pour but la restauration du drame hiératique qui se jouait, dans le moyen âge, à certaines oecasions solen- nelles; mais il en fait disparaitre ce qui s’y trouvait parfois d'inconvenant et de théâtral. Une note placée sur sa parti- | ( 104) tion nous apprend que sa cantate fait partie du Salut de Noël, qu'il a composé et qui renferme quatre morceaux. Il serait intéressant de connaître les autres parties de son ouvrage, et je pense que M. le Ministre de l’intérieur pourrait inviter ce jeune artiste à les soumettre à l'examen de la section permanente du jury des grands concours de composition musicale. Je n’ai que des éloges à donner à ce que je connais de son œuvre. » Rapport de M. Snel. « Le début de cette cantate est un dialogue d’instru- ments, tels que les hautbois, les flûtes, les clarinettes, les bassons et les cors. Cette introduction, d’un style pastoral, s'enchaîne sans interruption avec un chœur céleste de voix qui chantent Gloria in excelsis Deo. Quoique peu déve- loppé, ce fragment de la cantate est bien traité, et les voix de soprano et de contrallo, ainsi que celles de ténor et de basse, sont parfaitement combinées avec l’accompagne- ment d'orgue, de violoncelles et de harpes, dont les accords et les arpéges qu'ils jettent au travers du chœur, doivent produire des effets splendides. Ce chœur est suivi d’un chant de la voix de ténor sur les paroles : Adeste fideles. On remarque dans cette mé- lodie, pleine de simplicité, un style religieux bien appro- prié à la situation et un accompagnement dont la partie de basse fait reconnaître le compositeur aux idées distin- guées. La fin de cette prière amène une dernière reprise du morceau d'ensemble : Gloria in excelsis Deo; accom- ( 105 ) pagné celte fois par un orchestre complet, ce chœur ter- mine dignement la partition de M. Benoit. » Ç Rapport de M, Daussoigne-Méhul. « M. Benoit, en écrivant une cantate sur le sujet sui- vant : Des bergers, conduits par une voix céleste, se rendent à Bethléem pour adorer le fils de Dieu au berceau, vient de produire une composition remarquable à plus d’un titre, quoique peu développée. L'analyse de ce morceau, présenté par notre illustre confrère, M. François Fétis, me dispense d'offrir à la classe de longs détails sur sa con- ‘texture. Je me bornerai donc à dire que cette œuvre, bien disposée pour les voix et l’instrumentation, affecte un caractère de douceur religieuse plein de charmes. Sauf de légères irrégularités qu'il serait facile de faire dispa- raître, elle est écrite avec une grande pureté. M. Benoit n'est plus un élève, mais un jeune maître de beaucoup d'avenir. » La classe a favorablement accueilli l'avis de ses com- missaires et à ordonné l'impression de leurs rapports dans son Bulletin. (106) COMMUNICATIONS ET LECTURES. M. Fr. Fétis rappelle que la classe a eu la douleur de perdre récemment l’un de ses associés les plus distingués, M. Louis Spohr, maître de chapelle à Cassel. Il annonce en même temps que son intention est de consacrer une : nolice à cet artiste célèbre, dans l'Annuaire. Cette annonce est favorablement accueillie. — MM. Braemt et Éd. Fétis font connaître que le comité directeur de la Caisse centrale des artistes belges s’est réuni avant la séance, et qu’il à arrêté les comptes de l’année précédente. L'avoir de l'association s'élève à la somme de 66,545 fr. 57 c., dont 6,121 fr. ont été reçus en 1859. ÉLECTIONS. M. Braeur est maintenu, pour l’année 1860, dans les fonctions de membre de la commission administrative de l'Académie, M. Suys est nommé directeur pour l'année 1864. M. Baron, directeur pour l’année actuelle, exprime les remerciments de ses confrères à M. Fétis, directeur de la classe et président de l'Académie pendant l’année précé- dente. (107) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Rapport sur les travaux de l’Académie royale de médecine de Belgique, pour les années 1857-1859; par le docteur D. Sauveur, secrétaire et membre titulaire de la Compagnie. Bruxelles, 1859; 4 broch. in-8°. Histoire du règne de Charles-Quint en Belgique; par Alexan- dre Henne. Tome IX. Bruxelles, 4859; 4 vol. in-8°. La révolution des Pays-Bas au X VI"* siècle, par John Lothrop Motley, traduit de l'anglais par Gustave Jotirand et Albert La- croix, Tome IIT, 2° partie. Bruxelles, 1860; in-8°. La province de Brabant sous l'empire romain ; aperçu histori- que, archéologique et physique par L. Galesloot. Bruxelles, 1859; in-8°. La Belgique ancienne et moderne : Géographie et histoire des communes belges ; par Jules Tarlier et Alphonse Wauters (province de Brabant, canton de Genappe). Bruxelles, 1859; grand in-8°. La statue d'Ambiorix à Tongres; par François Driesen. Ton- gres, 4859; 1 broch. in-8°, Notice sur un dépôt de monnaies romaines du IV” siècle, décou- vert près de Bitbourg ( Beda vicus), cercle de Bitbourg, régence de Trèves, par M. le docteur À. Namur. Bruxelles, 1859; in-8°. Méthode infinitésimale en géométrie; par J.-N. Noël. Liége, 4859 ; 1 broch. in-&°. Notice sur Josse de Harchies, médecin théologien montois au XVI" siècle ; par G. Broeckx. Anvers, 1860; in-8°. Analyse de l'ouvrage de M. Diegerick, intitulé : M. Jehan Yperman, le père de la chirurgie flamande (1297-1329); par le même. Anvers, 4860; in-8°. Journal des beaux-arts. Deuxième année, n° 1 et 2. Anvers, 1859; 2 feuilles in-4°. | DS ul) me 0 SU EU cn A (108 ) Revue trimestrielle, 25% volume. Bruxelles, 1860; 4 vol. in-12. L'abeille, revue pédagogique. V®® année, 10% à 49% Iivr. Bruxelles, 14859 ; 3 broch. in-8°. & Revue populaire des sciences; rédigée par J.-B.-E. Husson. JIme année, 4859, n° 10 à 12. Bruxelles, 4859; 3 broch. in-8°. Annales de la Société d'Émulation pour l'étude de l'histoire et des antiquités de la Flandre. Tome XI, 2": série, n°‘ à. et 2. Bruges, 1857-1858; in-8°. Messager des sciences historiques, ou archives des arts et de la bibliographie en Belgique. Année 1859, 4m livr. Gand, 4 broch. in-8°. Revue de l'administration et du droit administratif de la Bel- gique. VI" année, 8m à 19e livr. Liége, 14859; 4 cahier grand in-8°. Annales de la Société de médecine pratique de la province d'Anvers, établie à Willebrock. XIH®° année, 9% et 10e livr. Malines, 1859 ; in-12. ‘ Annales de la Société archéologique de Namur. Tome VI, 9ne Jivr. Namur, 14859; grand in-8°. Annales de la Société médico-chirurgicale de Bruges. XX®® an- née, juillet à octobre. Bruges, 1859; 2 broch. in-8°. Le Scalpel. XIF"° année, n° 9 à 18. Liége, 10 feuilles in-4°. Koninklyke Akademie van wetenschappen te Amsterdam : — Verhandelingen, afd. Letterkunde, deel 1; Verhandelingen, deel VII; — Verslagen en mededeelingen , afd. Natuurkunde, deel VIII, IX; afd. Letterkunde, deel IV ; — Jaarboek voor 1858. Amsterdam, 1858-1859; 2 vol. in-4° et 8 cahiers in-8°. Hippocratis et aliorum medicorum veterum reliquiae; edidit Franciscus Zacharias Ermerius. Vol. primum, Trajecti ad Rhe- num, 4859; 4 vol. in-4°. Collection des orchidées les plus remarquables de l'archipel indien et du Japon; par Ch.-L. de Blume. Vol. 4. Amsterdam, 1858; in-fol, ( 109 ) Annales de la Société historique et archéologique de Maestricht. Tome IL, £"° fascicule. Maestricht, 1858 ; in-8°. Les .contemporains portugais, espagnols et brésiliens ; par A.-A. Teixeira de Vasconcellos. Tome premier. Paris, 4859; À vol. grand in-8°. L'aveugle de Fossi; par madame Jaubert. Paris, 1860 ; in-8°. L'architecture du moyen àge jugée par les écrivains des deux derniers siècles ; par M. l'abbé J. Corblet. Paris, 1860; in-8°. Les grands artistes contemporains : Hyacinthe-Louis- Victor- Jean-Baptiste-Aubry Lecomte, dessinateur lithographe, 1797- 1858; par Auguste Galimard. Paris, 1860; in-8°. Traitements «de la métro-péritonite pucrpérale (maladie des fenumes en. couche); par le docteur Télèphe P. Desmartis. Bor- deaux, 1859; in-8°. Études sur les épidémies de croup, d'angine couenneuse et fièvre typhoïde et de dyssenterie, qui ont sévi dans le départe- ment de la Dordogne en 1859; par le même. Bordeaux, 1859; in-8°. Le Tasse à Sorente, poèmes; par Jules Canonge. Quatrième édition. Paris, 1859; 1 vol. in-12. Revue et magasin de zoologie pure et appliquée; par M. F.-E. Guérin-Meneville, 1859, n° 40 à 42. Paris, 1859; 3 broch. in-8°. L'Investigateur , journal de l'Institut historique. XX V® année, 9299" Jivr. Paris, 4859; in-&°, Journal de la Société de la morale chrétienne. Tome IX, n° 6. Paris, 4859; 4 broch. in-8°. Mémoires de la Société dunkerquoise pour l'encouragement des sciences , des lettres et des arts, 1858-1859, VI®e vol. Dunkerque ‘ 1839; 1 vol. in-S°. Collection de thèses inaugurales et de règlements; publiés par l'université de Fribourg, en Brisgau en 1859. Fribourg; 5 broch. in-8°. Archiv der Mathematik und Physik, herausgegeben von J.-A. Grunert, XXXIII Theil, 4-4 Heft. Greifsweld, 1859 ; in-8. ( 110 ) Heidelberger Jahrbucher der Literatur, unter mitwirkung der vier Facultäten, LH Jahrg., 10-12 Heft, October-December. Hei- delberg , 1859; 3 broch. in-8°. Neues Jahrbuch für Pharmacie und verwandte Fächer. XWte' Band, Heft 5-6. Heidelberg, 1859 , 2 broch. in-8°. Die antike Landwirthschaft und das von Thhunen'sche Geseiz , aus den alten Schrifistellern dargelegt ; von D' Heinrich Wiske- mann. Leipzig, 4859; in-4°. Collection de 55 thèses inuugurales, publiées par l’université de Marbourg. 1859; 35 broch. in-4° et in-8°. Untersuchungen über die Richtung und Starke des Erdmagne- tismus an verschiedenen Puncien des südwestlichen Europa, im allerhochsten Auftrage seiner Majestät dés Konigs Maximilian II von Bayern, ausgeführt von D' J. Lamont. Münich ; 1858 ; 1 vol. in-4°, | Magnetische Untersuchungen in Nord- Deutschland, Belgien , Holland, Danemark; von D" J. Lamont. Munich, 4859; 1 vol. in-4°. = Gelehrte Anzeigen ; herausgegeben von mitgliedern dgr k:bayer. Akademie der Wissenschaften, 48°: Band. Munich. 4859: 1 vol. in-4°, Erinnerungen an Johann Georg von Lori; ein rede von D' Georg Thomas von Rudhart. Munich, 1859; 4 broch. in-4°. Monatliche und jährliche Resultäte der an der K. Sternwarte bei München von 1825 bis 1856 angestelllen meteorologischen Beobachtungen; von D" J. Lamont. II Supplementband. Munich, 1859; 1 vol. in-S&. Süzungsberichte der küniglbühmischen Gesellschaft der Wissen- schaften in Prag. Jahrg. 1859, Januar-Juni. Prague, 1859; im-8°. Ueber die Fische und ihr Leben in den Waldbächen des cen- tralstockes des Bühmerwaldes; von Johann Nep. Woldrich. Pra- gue, 1858 ; in-8°. Abhandlungen der küniglichen bühmischen Gesellschaft der wis- senschafien. N“* Folge, 10" Band. Prague, 1859; in-8°. | Sir MATE #i } M pre LATE Würtiembergische naturwissenschaftliche Jahreshefte. XV'* Jahrg., 3'* Heft; XVI'e Jahrg., 1'7 Heft. Stuttgart, 1859; 2 broch. ‘in-8°. Kongliga Svenska velenskaps-akademiens Handlingar ; ny f6]jd, 2 Bandet, 1 Häftet, 1857. Stockholm; 4 vol. in-4°. Ofversigt of kongl. vetenskaps-akademiens Fôrhandlingar. 15 Argangen, 4858. Stockholm, 1859 ; 4 vol. in-8°. Berätlelse om framstegen à inseklernas, myriapodernas och arachnidernas naturalhistoria für 1855 och 1856, till kongl. Vetenskaps-Akademien, Afgifven af C.-H. Boheman. Stockholm, 1859; 1 vol. in-8°. Ber ättelse om Framstegen à Fysik under àr 1853, afgifven ull kongl. Vetenskaps-Akademien, af E. Edlund. Stockholm, 1859 ; 1 vol. in-8°. Kongliga svenska Fregatten Eugenies, Resa omkring Jorden under befäl af C.-A. Virgin aren 1851-1853. Zoologi, HI. Stock- holm, 1859; 1 cahier in-4°. 8 Bulletin de l'université impériale de Kasan. Année 1859. Kasan, 4859; 4 cahiers in-8° (en langue russe). Corrispondenza scientifica in Roma. Vol. VI, n°° 14-19. Rome, 4859-1860; 6 feuilles in-4°. Dell agro acerrano e della sua condizione sanitaria; richerche fisiche statistiche topographiche storiche di Gaetano Caporale. Napoli, 1859; in-8°. The annals and magazine of natural history, including , z00- logy, botany and geology. Third series, vol. IV, n°5 19 à 24. Londres, 1859; 6 cahiers in-8°. Observaciones astronomicas hechas en el observatorio nacional de Santiago de Chile in los años de 1853, 1854 1 1855; por el D" Carlos-Guill. Moesta. Tomo I. Santiago de Chile, 1859; 4 vol. in-4°. mi out hot: R:#torl 0 sEeS L fe GE a Ce MT APTRS Lt As eh d'Ar El nike rs COURS CUIR + VE = Lot à NE EEÈNEINEE ti BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1860. — No 2. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 4 février 1860. M. Van BENEDEN, directeur. M. An. QuereLet, secrétaire perpétuel, Sont présents : MM. Sauveur, Wesmael, Martens, Stas, De Koninck, De Vaux, Du Bus, Nyst, Gluge, Neren- burger, Melsens, Liagre, Duprez, Poelman, d'Udekem, Dewalque, membres; Lamarle, associé; Ernest Quetelet, Montigny, correspondants. 9m SÉRIE, TOME IX. R (114) CORRESPONDANCE. Le Gouvernement transmet un arrêté royal portant que : « La somme de cinq mille francs, affectée au prix quinquennal des sciences physiques et mathématiques pour la période de 1854 à 1858, sera appliquée à un ou plusieurs concours extraordinaires, dont le sujet sera déterminé par le Ministre de l’intérieur, après avoir en- tendu l’Académie royale, classe des sciences. » Une commission spéciale est nommée par la classe, atin d'indiquer les matières scientifiques les plus propres à fournir les sujets des concours extraordinaires proposés. — La Société impériale des naturalistes de Moscou , la Société royale des sciences de Bohême à Prague, la Société de physique de Francfort, etc., remercient l’Académie pour l’envoi de ses publications. | — Il est fait hommage d’une notice nécrologique sur Gérard Vrolik, associé de la classe, décédé le 10 novem- bre 4859, par M. J. Vander Hoeven, membre de l’Aca- démie d'Amsterdam. M. le docteur C. Poelman, membre de la classe, dé- pose une nolice imprimée sur une lumeur cornée déve- loppée sur la tête d’une femme: — Remerciments. — La classe ordonne l'impression des documents sui- vants qui lui sont transmis sur la météorologie et sur les phénomènes périodiques des plantes et des animaux pen- dant l’année précédente, savoir : 1° Observations météorologiques faites en 4859, à Sta- velot, par M. Dewalque, membre de l'Académie; à Namur, par M. A.-J, Maas, professeur de physique au collége de (115) la Paix ; à Venise, par M. Buchinger, jardinier en chef du Jardin botanique; à Herve, par M. Parent; 2 Observations sur les plantes et les animaux faites à Bruxelles, par M. Quetelet, à l'Observatoire, et dans les environs de Bruxelles, par MM. Vincent père et fils; à Melle, près de Gand, par M. Bernardin; à Stavelot, par M. Dewalque; à Ostende, par M. Ed. Landzweert, phar- macien. | — M. W. Haïidinger, associé de l’Académie, transmet quelques détails sur un météore observé dans la partie sud-ouest de la Bohême, le 28 novembre dernier, à peu près vers 11 heures et demie. Il se pourrait même, écrit l’auteur, qu'on trouvât quelque aérolithe; mais il a été impossible jusqu'ici de faire les recherches nécessaires, la neige étant survenue trop lôt et ayant couvert la place où peut-être la chute a eu lieu. » Après avoir communiqué cette lettre, M. le secrétaire perpétuel en dépose deux autres qu’il a reçues de M. Flo- rimond , professeur à Louvain; elles concernent un bolide des plus brillants qui s'est montré à Louvain, le 20 jan- vier dernier, vers 4 heures et demie du matin. « Tout à coup, dit l’auteur, la chambre où je me trouvais s’éclaira graduellement d’une lumière jaune franchement pronon- cée et tellement vive qu'on put lire, très-distinctement, l’heure à une petite horloge, à trois ou quatre mètres de distance. À cette lumière jaune succéda une lumière rouge. Ce changement de couleur n’a pas été équivoque; il se caractérisait fort bien par les reflels successifs des murs blancs de la chambre. » Le phénomène a duré 4 à 6 secondes. Dans une seconde lettre, M. Florimond ajoute qu'un veilleur de nuit « a vu un éclair, duquel est sorti une ( 116 ) boule de feu d'environ la grosseur du poing et d’un éclat _éblouissant. Cette boule est tombée jusqu’à terre d’abord avec un mouvement lent qui est devenu ensuite très-ra- pide. » Le veilleur n’a pas entendu de détonation. « Cette boule de feu aurait fait sa première apparition non loin du zénith et se dirigeait vers la Vierge. ». M. Van Beneden remet une troisième lettre de l’auteur qui annonce que le phénomène aurait été observé également à Mulhouse et à Colmar. Quelques membres disent avoir été informés également de l'existence de ce phénomène lumineux, mais sans avoir pu l’observer eux-mêmes (1). a M. Lamont, directeur de l’observatoire de Munich et associé de l'Académie de Belgique, transmet les renseigne- . ments suivants Sur la période annuelle de l'intensité hori- zontale du magnétisme terrestre : « Dans la théorie du magnétisme, c’est une e question de grande importance de savoir si la position opposée du s0- leil, en hiver et en été, exerce une influence sur la valeur moyenne des constantes magnétiques, ou si l’eflet du soleil consiste seulement à produire des oscillations diurnes qui, comme les ondes d’une masse fluide, troublent pour le moment la surface extérieure sans en changer le niveau moyen. Quant à la déclinaison, les observateurs sont d’ac- cord que s'il existe une période annuelle, elle doit être (1) Les journaux français mentionnent que, dans la nuit du 19 au 20 janvier 1860, vers 5 h.”/,, un grand nombre de personnes furent réveillées, à Plom- bières, par le bruit d’une explosion accompagnée d’une vive lueur due à un aérolithe. La même détonation a été entendue à Mulhouse et était également précédée d'une lueur, blanche d’abord, rouge ensuite, qui a duré environ deux secondes. A LE très-petite : à l'égard de l'intensité, les résultats qu’on a obtenus présentent des différences remarquables. II y a des séries d'observations qui donnent deux maxima et deux minima annuels, d’autres ne donnent qu'un seul maximum et un seul minimum ; les périodes diffèrent aussi par rap- port à la grandeur, et on y rencontre des irrégularités qui semblent indiquer que les causes accidentelles ou les imperfections des instruments ont une grande influence. Pour contribuer en quelque mesure à la décision d’une question si importante, J'ai calculé de nouveau, en employant une méthode uniforme, les résultats des observations horaires de Munich, commencées en 14840 et continuées, depuis la fin de 1841, avec des instruments perfectionnés, et j'ai obtenu, en réunissant dix-sept an- nées d'observations pour la période annuelle, les nombres suivants : Janvier . . . . . — 0,00059 Juillet . . . . . +- 0,00019 Février . . . . . — 0,00055 Août. . . . . . — 0,00005 Mars . . . . . . — (0,00029 Septembre. . . .- 0,00043 VER. ©: : -+‘0,00011 Octobre. . . . . + 0,00047 Mu 0.1. . ,— 0,00002 Novembre. . . . 0,00000 Juin . . . . . . + 0,00006 Décembre. . . . — 0,00023 Ces nombres sont beaucoup trop petits et offrent trap d’irrégularités pour qu’on puisse en conclure avec quelque certitude l'existence d’une période annuelle. Je crois de- voir attribuer les différences entre les mois aux pertur- bations magnétiques qui, comme on sait, sont plus ou moius nombreuses, suivant l’époque de l’année, et ten- dent toujours à produire une déviation en même sens. » L’intensité horizontale augmente maintenant en Eu- rope, sans qu'on y puisse reconnaître une loi régulière et uniforme. À Munich, le changement moyen annuel est de 0,0027 (en mesure absolue). Dans la table suivante, .qui (: 118) contient les résultats obtenus pour l'intensité moyenne de chaque année, j'ai employé ce changement annuel pour réduire les nombres à 1842. Les nombres ainsi réduits seraient égaux si l'intensité augmentait en progression arithmétique. En les retranchant de la valeur moyenne 1,9293, on obtient les nombres de la dernière colonne, qui représentent l’irrégularité du mouvement séculaire : INTENSITÉ - | IRRÉGULARITÉ Re. RS n du observée. réduite à 1842. mouvement séculaire. FÉES EUR ARE 1,9282 1,9282 +- 0,001! RES) 077 CRUE! AAA 1,9343 1,9318 — 0,0025 A AO A 1,9562 | 1,9308 —— 0,0015 LPS Ve Ra tete 1,9383 | 1,9302 — 0,0009 ASUG Es 08 DV EH 1,9417 1,9310 — 0,0017 LAON MAMA AAAE 67 dre 1,938 1,9303 — 0,0010 PAR NN LUS 0 UE ME PUS 1,9453 1,9291 + 0,0002 MÉLOAO MISE. je La ae 1,9268 1,9279 + 0,0014 RS AT PMIATANEUR 1,9499 1,9283 + 0,0010 | DE he Re LE Se ie 1,9544 1,9301 — 0,0008 RAD D UE LRU Ut 1,9519 1,9249 + 0,0044 | Li IEUNRES 1,9578 1,9281 — 0,0012 LPABDSL LU ee CURE 1,9615 1,9291 + 0,0002 TS PES 0 A 1,9639 1,9288 + 0,0005 | ADD LT ee ANSE 1,9680 1,9502 — 0,0009 RS RS ER 1,9706 1,93501 — 0,0008 » Ces nombres, comme ceux qui ont été obtenus par d’au- tres observateurs, démontrent l’irrégularité du changement séculaire de l'intensité. Ce qui me paraît très-important, c'est qu'on n’y remarque aucune trace de la période décen- nale. 11 paraît donc que la période décennale est indépen- dante de la cause qui produit le changement séculaire. » En considérant les résultats que je viens d'exposer, je crois devoir conclure que le mouvement diurne de l'aiguille et le changement périodique de la grandeur de ce mouve- ment ont leur source exclusivement dans le soleil, et ne font que produire des oscillations transitoires sans affecter l'état moyen. Une onde électrique telle que je lai supposée Rae CM JAN 4 li, ABS) (119 ) dans ma lettre du 4 août 1859, servirait à expliquer ce mouvement : en tout cas, les conditions que j'ai signalées pourront être utiles, quand il s’agit de représenter par une hypothèse mathématique les mouvements du magné- tisme terrestre. » — M. Jérôme Martynowski, professeur agrégé à l’uni- versité de Liége, présente un mémoire manuscrit sur la congruence a “= = (—1}, mod. — u. Cette note est renvoyée à l'examen d’un commissaire, M. Schaar. RAPPORTS. a MM. de Selys-Longchamps et Jules d'Udekem font des rapports favorables sur deux mémoires présentés dans la séance précédente, par M. Van Beneden, directeur de la classe, concernant la faune littorale de la Belgique et trai- tant l’un des cétacés, l’autre des turbellariés. Ces deux mémoires seront insérés dans les publications de la Compagnie. …. — M. Liagre fait connaître le résultat de son examen sur un mémoire de M. Zytphen, concernant l'Emploi de la daguerréotypie pour le dessin des cartes et diverses autres inventions. « Le travail soumis à la classe, dit-il, peut être considéré comme ayant été livré à la publicité; par suite, il me paraît devoir être rangé dans la catégorie des ou- vrages sur lesquels il n’est pas fait de rapport. » Ces con- clusions sont adoptées. a Lossrmerremner< ( 120 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. —— Observations de la lune et des étoiles de méme culmination faites en 1859. Notice de M. Ernest Quetelet. J'ai l'honneur de présenter à la classe les observations de la lune et des étoiles de culmination lunaire qui ont été faites à l'Observatoire pendant le courant de l’année 1859. Ces observations font suite aux trois séries qui ont déjà été publiées dans les Bulletins. Elles sont au nombre de quarante-trois, et elles portent à 289 le nombre des passages lunaires observés. Ainsi que dans les séries pré- cédentes, ce ne sont que des positions relatives calculées surtout en vue de la détermination des longitudes ter- restres. Observations des passages de la lune et des étoiles de même culmination, faites en 1859. (Les initiales B. et EQ. désignent les observateurs MM. Bouvy et Ern. Quetelet.) 1859. 15 janvier . Arietis . & ©! Arielis . . Taux: : NO © Tauri. . | PACA 7 5 9 50 j 9! 19 DATES. OBJET. 1859. 13 février . . . | 5 Geminorum. x Aurigæ... Ch 55 Geminorum. tv Geminorum. 14 mars . ...| v Geminorum. x Geminorum. 40 Cancri .. d Cancri . .. Leonis . Leonis . .. Cancri . .. 45 p (@ Marnilt. :24 . wi Canéri L. - à € 83 Cancri . . À Leonis . .. Leonis . .. Leonis . .. Leonis . . Leonis .. ES 19 | Le] Leonis . .. Leonis :... . MAS jet Virginis. . 28 Virginis. & OBSERVÉE. Gh 2»53:60 6 6 6 19 Liu 7 17 AR 95 25,77 45,98 11,07 0,51 16,03 58,08 35,78 7,00 49,45 14,44 95,54 32,17 34,94 49,04 45,21 8,60 49,50 28,33 46,71 17,91 8,88 9 46,05 8,86 46,10 29,56 54,26 49,94 Nombre DE FILS. XX ON OX O1 EX EX NO OX OX OÙ NT EX OÙ OX OX ON OX OT OX nm EX EX OÙ OX EX OX OBSERVA- TEUR. EQ. EQ. EQ. EQ. EQ. EQ. ; Li A it °C A TE 44 1° +). 1 af. ' ÉTOTTRR (12) ; Nombre |OBSERVA- DATES. OBJET. % OBSERVÉE. DE FILS. TEUR. 1 15 mai... f Virginis. . . | 12h29m5%:555 1 B. | | 98 Virginis. . . | 12 34 42,99 | 5 CHTAMEN 12 51 41,86 | 5 58 Virginis. . . | 13 10 6,8 5 æ Virginis. . . | 15 17 48,84 5 Séjuin À: 2 0 COMAELASNN TE 11 46 10,46 5 EQ. y Virginis. . . | 12 12 45,79 5 CREER æ Virginis. .. | 15 17 48,74 | 5 EQ. CREER 15 26 19,06 | 5 85 Virginis. . . | 15 58 2,64 5 89 Virginis. . . | 15 42 15,70 5 RAD A. 85 Virginis. . . | 13 58 2,59 5 EQ. CAREAU QU) 14 18 10,87 | 5 LEUBibræ, +. "15 «414485 5 DA Lu Un œ Scorpii... | 16 20 49,68 5 EQ. : r Scorpii... | 16 27 10,39 | 5 | CAE 17 515,85 | 5 0 Ophiuchi.. | 17 13 25,07 5 d Ophiuchi.. | 17 18 25,12 5 DD. 0 Ophiuchi.. | 17 15 25,00 5 EQ. | & Ophiuchi.. | 17 18 25,15 | 5 COTE 18 4 42,357 5 1 Sagittarii. . | 18 19 20,02 5 ? Sagittarii.. | 18 36 54,71 5 LEE NP) 1 Sagittarit. . | 18 19 19,96 5 EQ. g Sagittarii. . | 18 56 54,69 5 CNE Se 19 0 15,98 | 5 k? Sagittarii. . | 19 28 11,52 5 [ Sagittari. . | 19 358 11,62 5 2 a L'an 4e Fate CRE RE L (123 ) DATES. | OBJET. | % OBSERVÉE. “ Th on | au | 6 juillet. . .. | y . Virginis. . . | 192 12043554 3 EQ. | COUNTER | 12 19 43,69 | 5 Le É: ro 2 M | 14 2 022 | 5 EQ. 1 Libræ. ... | 14 45 7,94 | 5 D (3 TC 14 55 19,82 | 5 EQ. 59 Libræ. ... | 15 28 51,84 | 5 9 Libræ....| 1532 0,59 | 5 FERRSE 59 Libræ... . | 15 28 51,79 | 5 | EQ. 42 Libræ. ...| 1532 0,54 | 5 Ci A | 15 50 16,58 | 5 | S Scorpii...! 16 12 41,18 5 æ Scorpii. .. 16 20 49,85 5 Mc - .Üæ Scorpi... | 16 20 49,69 | 5 B. LGNNE ER pe 16 46 45,12 | 5 | 6 Ophiuchi..| 1715 25,14] 5 | d Ophiuchi..| 17 18 25,39 5 12, — | 8 Ophiuchi..| 17 15 95,17 | 5 EQ. | d Ophiuchi..| 17 18 25,56 | 5% GT 17 45 56,01 | 5 2 Sagittarii.. | 18 12 92,40 | 5 -A Sagittarii. . | 18 19 20,55 5 15 — d Sagittarir. . | 18 12 92,44 4 EQ. A Sagittarii. . | 18 19 20, 5 LS 18 39 2 5 Tr Sagittarii.. | 18 58 12,45 5 | z Sagittariü. . | 19 1 26,76 5 (124) RCE Nombre |OBSERVA- DATES. OBJET. Œ OSERVÉE. | 2 TS 1859 | 16 juillet... | 21 Capricorni . | 20h52m59:56 | 5 EQ. | 8 Capricorni . | 20 58 4,98 5 (CHMEUT RME 21 14 41,00 5 | y Capricorni . | 21 32 20,37 5 : 3 Capricorni . | 21 39 19,09 | 5 | 6 août .. 20 Libræ* . . .| 14 55 52,39 : EQ. | CARAMEL 15 52 23,02 | 5 | 5 Scorpi...| 16 12 40,89 | 5 | Scorpii . . . | 16 20 49,59 5 | 7 — œ Scorpii . . . | 16 20 49,50 5 EQ. CHAPEAU 16 28 47,27 4 8 Ophiuchi.. | 17 13 25,01 5 d Ophiuchi .. | 17 18 25,26 5 11 — (Que PER 20 7 58,75 5 EQ. p Capricorni . | 20 20 53,08 5 r® Capricorni . | 20 31 27,26 5 15 — r Capricorni . | 21 14 27,79 p EQ. À| y Capricorni . | 21 52 20,72 4 Ç QU NPA CAL 21 45 50,58 5 0, Aquat sv | 199 20 07 5 o Aquarii...| 22 25 14,95 5 bsepiembre. | OMHS EEE 18 2 51,41 is EQ. | ? Sagittarii. . |. 18 56 54,96 5 s Sagittarii. . | 18 46 55,47 5 8 me pe Capricorni . | 20 20 55,15 5 B. (bee. 20 40 43,80 | 5 8 Capricorni.. | 20 58 5,27 5 He. te Capricorni . | 21 14 27,77 4 é d s 4 1859. 12 septembre. . 3 octobre. .. . . . . - . . . 6 B. A. C. 149 .. A: (@ P .} OBJET. Piscium. . . Piscium. . Sagittarii . Sagittaril. . Sagittarii. . Sagittarii. . Sagittarit. . Sagittarii . . Sagittarii . Sagittarli. . Sagiltarii . Sagittarii . . Capricorni . Capricorni . Aquarii. . Aquarii. .. Aquarii. . Piscium. . . Piscium. . L'ER R ES Piscium. , Piscium. .. & OBSERVÉE. 25h 19m/46:29 23 0 18 18 18 18 18 18 18 19 19 19 19 19 19 wW NN 9 D NO NN O1 Qi 19 = à © © © 44 32,87 29,90 1,60 19,59 15,39 ; 54,95 11,92 34,93 11,89 18,98 15,86 95,49 15,91 25,55 24,40 59,38 5,04 9 27,54 58 18 24 15,14 41,58 5,32 46,40 40,96 26,59 3,08 45,96 0,89 Nombre DE FILS. EX St OX ON ET OT IET OT OT At RS OT OT OT QT EX OÙ Où Où EX OÙ OX EX EX EX OU EX OBSERVA-— TEUR. EQ. EQ. EQ. EQ. DATES. 41859. 5 novembre. . à décemlre. . ra L OBJET. Aquarii. . Capricorni . Aquarii. . . Aquarii. QUE 40 SIA d 45 B Piscium .. Piscium .. Arietis . . . B. A. C. 607. . € d CU MERE DR Arletis . . . Arieiis . Arietis . .. Arietis . .. Re EVUE 1 Aquarii. .. Piscium. . . Piscium. . . Piscium. . . Arietis . . Arietis . Arret. LI x OBSERVÉE. 21» 158514 21 ON OI CNO En Re LOŒMON O1 O1 © ho C1 CN C1 O1 C1 19 NO HO 19 ©Q1 C1 19 C1 [#2 14 98 6 27,10 8,36 59,94 27,18 6,90 24,76 30,04 56,10 51,20 16,56 39,25 55,15 39,25 53,05 26,98 1 1,65 26,88 4,82 46,00 12,80 58,94 8,28 53,86 51,19 39,40 55,26 Sombre DE FILS. x ot EX, OCR CN OT OT OT ETC NAT (= PE DCE ES x x x EX OX EE EX Où Ex oBsERva= || TEUR. EQ. EQ. EQ. EQ. EQ. RQ — = - EU RSS ET. ù DA , Fr MY nt | Nombre |OBSERVA- % OBSERVÉE. DE FILS. TEUR. 1859. 8 décembre. . | d Arietis ... 5h 5"39540 5 EQ. CLARiens 2fe, 5 6 55,50 5 Cris Feu AR 3272 5 BuR Æayri., 0. 4 17 58,00 5 | Tauri. .. 4 53 52,79 5) PR Nul: Fauri, 2 . 4 17 57,99 CAO A 06 ed Eauri: : 4 55 52,60 5 (RP APR MERE 4 52 54,16 5 B Tauri 5 17 28,67 5 %X Aurigæ... 5 23 59,23 5 2 Solution géométrique d’une série de problèmes relatifs à l’art . des constructions; par M. Lamarle, associé de l’Aca- démie. RÉSISTANCE ÎIDES MATÉRIAUX : POUSSÉE ET BUTÉE DES TERRES. I. Le présent travail a pour objet une série d’applica- tions relatives à l’art du constructeur et reposant toutes sur la solution préalable d’un seul et même théorème fon- damental. Ce théorème, étant traité par la méthode qui nous est propre, n'implique aucune notion transcendante, el il s'établit directement par voie géométrique. Les ques- (138 ) tions qu'il sert à résoudre empruntent à ce mode parti- culier de solution une clarté remarquable et de grandes facilités pour les différents cas d'application. Plusieurs de ces questions se rapportent à la résistance des matériaux à contexture grenue, tels que la pierre ou la fonte. Les résultats auxquels nous parvenons sont en partie nouveaux. Nous les croyons curieux et très-propres à faire ressortir la concordance qui subsiste entre la théorie et la pratique, là même où certains faits expérimentaux avaient fait penser à l’un de nos plus habiles ingénieurs (') qu'il existait un complet désaccord entre ces faits et les déductions théoriques. Les autres questions ont principalement pour objet la ré- sistance des terres dans des conditions diverses, la poussée et la butée des massifs de forme quelconque polygonale. On connaît les travaux publiés sur la poussée des terres, par MM. Prony, Français, Nawier, Persy et Audoy. On sait comment M. Poncelet a substitué aux méthodes de calcul qu'on employait avant lui, et qu'il était difficile de géné- raliser sans une grande complication, une méthode géo- métrique beaucoup plus simple; on sait aussi comment cette dernière méthode s’est étendue d'elle-même à la butée des terres. Nous empruntons à M. Poncelet une des trans- formations dont il s’est servi. Notre méthode est d’ailleurs tout à fait originale et plus générale encore que celle de M. Poncelet. Comparativement aux autres, elle a l’avan- tage précieux de présenter toujours une extrême facilité et de s'appliquer sans modification notable aux cas les plus simples et aux cas les plus complexes. Veut-on tenir (*) M. Vicat. (Voir les #nnales des Ponts et Chaussées de France, année 1833, 2° semestre.) (Re compte à la fois, ou séparément, du frottement, de la cohésion , et de l’action simultanée de plusieurs forces qui concourraient ensemble à équilibrer la poussée ou la butée des terres? La solution reste toujours la même, purement géométrique et tout élémentaire. THÉORÈME. Il. Soient D, À deux droites fixes. Un point m glisse sur la droite D et entraine avec lui deux droites mobiles, ma, mn. Les droites ma, mn sont respectivement assujetties , la première à passer par un point fixe a, la seconde à faire avec la première un angle constant amn. Cela posé, n étant le point où la droite mn coupe la droite À, on a le théorème suivant : Ilexiste sur la droite À une position limite que le point n peut aiteindre et qu'il ne peut pas dépasser. Cette limite correspond à la position du point m pour laquelle les angles man, nmD sont égaux. DÉMONSTRATION. Désignons par à le point d’intersection des droites D, À, 2€ SÉRIE, TOME IX. 9 ( 150 ) KT et par m/ la position du point m pour laquelle l'angle am'i est égal à l'angle constant amn. On voit aisément ce qui se passe dans l’intervalle im. Tandis que le point m va de ï en m’, le point n part dei, s'éloigne et revient en 1, après un certain écart maximum. Cet écart maximum correspond à la position du point m pour laquelle la vilesse du point n sur la droite À change de sens et s'annule. Soit o le centre instantané de rotation des droites ma, «mn pour une position quelconque du point m sur le seg- ment im/. Le point o est à l’intersection des deux droites mo, ao respectivement perpendiculaires, lune en m à la droite D, l’autre en a à la droite am. Du centre o abaissons sur mn une perpendiculaire et prolongeons-la jusqu’à sa rencontre en o’ avec la perpen- diculaire élevée en n sur la droite À. La rotation w, qui s'établit autour du centre o par suite du mouvement du point m sur la droite D, peut être transportée autour du centre o/. Il suffit pour cela quon la compose avec une translation déterminée en direction, sens et grandeur, par la vitesse actuelle du point 0’. Il suit de là que, dans le mouvement du point m sur la droite D, la droite mn peut être considérée à chaque in- stant comme animée de deux mouvements simultanés, lun de translation qui la fait glisser sur elle-même, avec la vitesse actuelle du point o’, l’autre de rotation qui la fait tourner autour du point o/ avec la vitesse angulaire ©. La translation qui fait glisser la droite mn sur elle- même, ne modifie en rien ni la position ni la vitesse du point n sur la droite A. Il s'ensuit que cette vitesse L A | LR ( 131 ) résulte exclusivement de la rotation w transportée autour du centre o’ (). On peut, en conséquence, poser, dès à présent, la déduction suivante : Pour que la vitesse du point n sur la droite À change de sens et s'annule , il faut que le point o! coïncide avec le point n, c’est-à-dire que la perpendiculaire, abaissée du point o sur la droile mn, tombe précisément en n. Supposons cette condition remplie. Le quadrilatère (Fig. 2.) mnao (fig. 2) est inscriptible dans la circonférence de cercle ayant mo pour diamétre, et, comme les angles man, nmD ont pour mesure commune la moilié de l’arc mn, il s'ensuit qu'ils sont égaux. De là résulte le théorème énoncé ci-dessus, théorème également applicable au cas où les droites D, A se coupent et à celui où elles sont parallèles. PR tt D" en (”) Les vitesses simultanées qui animent, l’une le point m sur la droite D, l’autre le point n sur la droite A , sont respectivement proportionnelles, la première à om, la seconde à o’n. ARR Re dlie fer PA NÉ", ei Ag Gad à nd + by AU (132) COROLLAIRES. IT, Soient m//' et n’ les points où la circonférence mnao est rencontrée pour la deuxième fois par la droite am/ et par la droite A. Soit d’ailleurs s le point où la droite an! va couper la droite D. L'égalité des angles amn, am'm implique celle des arcs mn,mm'",et, par conséquent, aussi celle des angles man, mam/. On voit, en outre, que les angles amn, an'n sont néces- sairement égaux. Cela posé, les droites am/, an’ étant toutes deux déter- minées à priori par la condition qu’elles remplissent de couper, sous un même angle donné amn, l’une la droite D, l’autre la droite À, il est visible qu'indépendamment de la solution directe énoncée ci-dessus, on a en outre, pour déterminer la position du point m, qui correspond à l’éga- lité des angles man, nmD, les corollaires suivants : 4° La position limite du point n sur la droite À, corres- pond à la position du point m, pour laquelle la droite am divise en deux parties égales l'angle nam'’. 2 La position limite du point n sur la droite À corres- pond à la position du point m, pour laquelle le carré de la distance sm est égal au produit des deux longueurs sa, sn’. N. B. On observera que si la droite an’ était parallèle à la droite D, le point m à déterminer serait à la rencontre de la droite D avec la perpendiculaire élevée sur le milieu du segment an’. (133) cé APPLICATIONS. Première question. IV. Soit amn un angle constant, tournant autour de son sommet m ; À une droite fixe ; an le segment intercepté sur cette droite par les côtés de l'angle amn. On demande de déterminer la position de l'angle mobile amn pour laquelle le segment an est le plus petit possible. Par le point m, menons une droite D parallèle à la droite À À. [Imaginons que le # f point m glisse sur la droite D, et qu’il en- traine avec lui les deux droites ma, mn respectivement assujetties, la première à passer par le point fixe a, la seconde à faire avec la première un angle constant amn. Îl est visible que, sans rien changer à la longueur du segment an pour une même direction quelconque de la droite am, on peut substituer à la rotation de l’angle amn autour du sommet m supposé fixe, le glissement de cemême sommet sur la droite D dans les conditions définies ci- dessus. Cela posé, menons la droite am’ de manière à ce qu’elle coupe la droite D sous un angle am'm précisément égal à l’angle donné amn. Conformément au corollaire 4 du n° IT, la position du point m pour laquelle le segment an est le plus petit pos- sible, est à la rencontre de la droite D avec la bissectrice de l’angle nam/. A 2727 D (Fig. 5.) (134) :: Soit am ceite bissectrice. L'égalité des deux angles am'm, amn combinée avec celle des angles mam’, x implique celle des angles man, mna. Concluons que le triangle anm est isocèle et que, en conséquence, on peut énoncer, comme il suit, la solution du problème à résoudre. Le segment an est le plus petit possible, lorsque la bissec- trice de l'angle amn est perpendiculaire à la droite D. Cette solution peut aisément s'établir d’une manière di- recte. Nous avons préféré la déduire du théorème exposé au n° IT, ce qui montre une première application de ce théo- rème et permet d'y ramener toutes les questions suivantes. Deuxième question. Section de rupture et résistance d'un solide prismatique encastré horizontalement et sollicité par un poids. Y. Soit GLBEFK la section longitudinale, supposée par- ( 135 ) tout la même, d’un prisme droit, encastré verticalement en GK et sollicité en e par un poids P. La section de plus facile rupture étant plane, perpen- diculaire au plan de la figure, et partant du point B, il s’agit d’en déterminer la direction BA. La direction cherchée est évidemment celle pour la- quelle, sans sortir des limites de l’élasticité, l'extension produite en B, perpendiculairement au plan de rupture, est un maximum. Soit x cette extension pour l'unité de longueur, E le coefficient d'élasticité, m le milieu de la droite BA. La réaction développée en B et rapportée à l’unité de surface a pour mesure le produit E.. Les réactions développées de m en B et de m en À sont d’ailleurs, ainsi qu’on le sait, respectivement proportionnelles aux distances comprises entre les points que l’on considère et l’axe d'équilibre pro- jeté en m. Partant de là, et procédant par voie purement géomé- trique, on déduit aisément l'équation suivante (”) : 2 P +... P—:Ee06 (*) La résultante des forces développées B de m en B, perpendiculairement au plan BA , est représentée en grandeur par l’aire du triangle mBB, rectangle en B, et dont m le côté BB’est pris égal à Ex pour l'unité 7m de longueur. De là résulte, en désignant par R cette résultante, Eubl R — “ , 2 et, comme elle agit au centre de gravité de ce même triangle, elle a pour + (136) où { représente la longueur Bm, b l'épaisseur du prisme, a et x les distances des points e et m au plan de la section transversale LB1. L’équation (1) montre que le maximum de la quantité u correspond au minimum de l'expression fractionnaire [2 a+ x = Le point e étant pris sur l’axe mD, tirons la droite Be et menons la droite Bn de manière à ce que l’angle mBn soit précisément égal à l'angle Bem. La similitude des triangles mBn, mBe donne immédiatement Il suit de là, conformément au principe établi n° IV, que le minimum du segment mn, et par suite le maximum de la quantité u, correspond à la direction de la droite BA pour laquelle la verticale BI divise en deux parties égales l'angle mBn, pris égal à l'angle Bem. moment par rapport à l'axe projeté en m Eubl? ———— 3 Le moment des forces développées de m en A étant le même, le moment total des réactions à considérer est évidemment 2 = Eubl, 2 ce qui donne l'équation d'équilibre 2 P(a+æx) — ” Eubl?. ( 137 ) De là résultent en premier lieu les conclusions sui- vantes : 1° La ligne de plus facile rupture est la perpendiculaire abaissée du point B sur la bissectrice de l'angle Bem l‘). 2° À mesure que le point e s'éloigne de la verticale BX, la ligne de plus facile rupture se rapproche indéfiniment de celte méme verticale. 5° Lorsque le point e se rapproche de la verticale BI, la ligne de plus facile rupture s'en écarte sans pouvoir dépasser l’inclinaison de 45°. 4° À la limite, lorsque le poids P agit suivant la verticale BI, la ligne de plus facile rupture fait un angle de 45° avec l'horizontale. | Ces résultats que nous croyons nouveaux, offrent une vérification remarquable des faits expérimentaux constatés par M. Vicat et publiés par lui dans les Annales des Ponts et Chaussées. (Année 1835, 2°° semestre, pages 201 et sui- vantes.) | VI. Supposons que le poids P agisse suivant la verti- cale BI et qu'il ait l'intensité nécessaire pour que l’exten- sion y soit la plus grande extension compatible avec la conservation de l’élasticité. On a, dans ce cas, D— 10: et, désignant par k la hauteur BI, (*) La ligne de plus facile rupture se détermine en prenant em — eB et tirant Bm. Il serait curieux de vérifier par l’expérience cette déduction théo- rique. .: L'équation (1) donne, en conséquence, (2) ant ARE de Ur de P — Ex. b.h. Qt! D Si l’on admet avec M. Navier que la force transverse permanente soit les quatre cinquièmes de la force tirante permanente; si l’on désigne en même temps par P’ la plus grande valeur admissible pour P, dans l'hypothèse où la rupture s'effectuerait suivant la section BI, on doit poser 4 OPEN P—< Exbh. La comparaison des équations (2) et (5) montre que, dans le cas où le poids agit suivant la verticale BI, la rupture est plus facile suivant le plan BA que suivant le plan BI. Cette déduction est entièrement conforme aux faits constatés par M. Vicat et consistant en ce que ce n’est point, en général, par insuffisance de la force trans- verse que la rupture s’accomplit. Observons en terminant que si la section d'encastrement était reportée en BE, à la ligne de plus facile rupture, re- présentée par BA, se substituerait la ligne brisée d'égale résistance Bml. Cette dernière déduction rend compte des arrachements courbes observés par M. Vicat. Elle fait voir en outre que, s’il s’agit de rivets à section carrée, la partie de ces rivets, située au delà des points où l'encastrement commence, doit avoir pour longueur minimum la moitié de leur épais- seur. La limite de l'effort qu'ils peuvent supporter d’une. manière permanente se trouve d’ailleurs déterminée par l'équation (2). % ( 139 ) Il est facile d'étendre ces déductions au cas de rivets à section quelconque et des tourillons. Toutefois, on ne perdra pas de vue qu’elles supposent une matière homo- gène, ou du moins, également résistante dans ious Îles sens. Troisième question. Section de rupture et résistance d'un solide prismatique chargé d'un poids. VIL. Soit un solide homogène, affectant la forme d'un parallélipipède rectangle et reposant par sa base sur un plan fixe horizontal. La face supérieure du massif étant sollicitée par un _poids P, on suppose que l’action de ce poids tend à rompre le parallélipipède suivant une section plane R, normale à la face ABCD (fig. 5) et dirigée suivant am. | Cela posé, il s'agit de déterminer la position de la droite am pour laquelle la rupture est la plus facile, c’est- à-dire la position de la droile am pour laquelle le poids capable de produire la rupture est le moindre possible. Observons qu’à l'instant précis où le poids P atteint l'intensité nécessaire pour produire la rupture, il y a équi- libre entre ce poids et les réactions développées le long de la section R. Observons, en outre, que ces réactions se ré- duisent à deux, l’une T parallèle à am, l’autre N normale à la première. R La réaction T doit en général être considérée comme dépendant à la fois de la cohésion et du frottement. En tant qu'elle dépend de la cohésion, on peut la désigner par T'et la représenter par am. En tant qu’elle dépend du frottement, on peut la composer avec la réaction normale (140 ) N, ce qui donne pour résultante une réaction N’, inclinée sur N d’un angle précisément égal à l'angle du frotte- ment. Dans tout ce qui suit, nous conserverons ces notations, et nous désignerons , d’ailleurs, Par o l’angle du frottement; Par f la tangente de l’angle © ou, ce qui revient au même, le coefficient du frottement; Par 7 la cohésion pour l’unité de surface; ParIlle poids de l’unité de volume de la matière du massif, poids dont nous faisons d’abord abstraction dans ce premier problème. La droite am étant prise pour ligne de rupture, si l'on représente par am la cohésion T’, et que, par le point m, on tire la droite mn sous l’angle amn ++ o, il est visible que le segment an, intercepté sur la verticale AB par l’angle amn, représente l'intensité que doit avoir le poids P pour produire la rupture suivant la droite am. Concluons que la direction de plus facile rupture est celle pour laquelle le segment an estle plus pe- n tit possible, le point m glissant sur la ver- ticale DC et entraînant avec lui les deux B € droites ma, mn, respectivement assujet- à ties, la première à passer par le point fixe a, la seconde à faire avec la première un angle constant amn — A + fr On voit par ce qui précède comment la question à résoudre se ramène au théo- , rème fondamental exposé au n° I. Soit aa! l'horizontale passant par le A D point a. Tirons la droite am/ sous l'angle (Fig. 8) a'am! —o. La ligne cherchée de plus facile (141) rupture est la droite am qui divise en deux parties égales l'angle nam’. (Corollaire 4 , n° IF.) On a par construction : mad =. mma , , , = > +e mam —=Mmap—=5|- — 5 A et Menons par le point m, 1° la droite mn sous l’angle T . ‘am + 9, 2 l'horizontale mp. On a DT. T = FT T—— pa — T — jan =: | | = + am. Il suit de là que le triangle amn est isocèle, que le point p est le milieu du segment an, et qu’en désignant par P le plus petit poids capable de déterminer la rupture, on doit écrire P ma’ EN me Soient a la largeur aa’ et b la longueur du massif me- surée perpendiculairement à la figure 5. On a M CE et par suite i P — 27.b.ma. On à d’ailleurs ons a tgi É | a (V1 s : ] —— + + 4510 = — * \9 te +9 BE +? alt V1 + f2). Il vient donc M ON ae Vif), ( 142 ) et si l’on désigne par « l’angle que fait avec l'horizontale la direction de plus facile rupture (2) “aa tnga—tg1 (T4) + v 1+ f?. On observera que s’il s’agit d'une matière grenue et très- cohérente, telle que certaines pierres, la cohésion doit être considérée comme intervenant seule jusqu’à la rup- ture. En ce cas donc, il faut poser f —0, ce qui donne tang & — 1 et montre que le plan de rupture est dirigé suivant lineli- naison de 45°. Ce résultat est confirmé par l'expérience. La formule (1) se réduit, pour f— 0, à OS Pr EE SR ETES 2H Si l’on voulait appliquer cette formule, il ne faudrait pas perdre de vue que la cohésion représentée par y n'est pas la cohésion primitive de la pierre soumise à l'expéri- mentation, mais bien la cohésion qui subsiste à l'instant de la disjonction, après l’altération plus ou moins com- plète qui prépare et précède la rupture. Faute de pren- dre garde à cette circonstance, on serait conduit à attri- buer à la formule (5) un sens qu'elle ne comporte point, et à créer artificiellement entre la théorie et l'expérience un désaccord qui n'existe pas en réalité. Ajoutons comme dernière observation que les formules (4) et (2) sont particulièrement applicables aux massifs composés de terres cohérentes ou de matières analogues. (445) Quatrième question. Section de rupture et résistance d’un solide prismatique pesant et chargé d’un poids. VIT. Reprenons la question précédente en tenant compte du poids du prisme qui tend à se détacher et qui se trouve au- dessus de la ligne de rupture. Désignons par h la distance 17 aB et prolongeons l'horizontale . aa’ d'une longueur a'a'! déter- minée par l'équation de condi- tion on a'a y.aa.b 2 2h H.aa.h.b nh’ ce qui donne 2 A D aa’ = Este ° IT (Fig. 6.) Il en résulte qu’en représentant par 2h. le poids IT a.b.h du prisme aBCa/, la cohésion développée suivant la sec- tion aa’ est représentée par a/a//. Il en résulte en même temps que, pour une ligne quelconque de rupture aem, coupant en e la droite DC et aboutissant en m à la verti- cale menée par le point a//, le poids du prisme qui tend à se détacher et la cohésion suivant ae sont représentés res- pectivement, l’un par 2h —a/e, l’autre par em. Soit n le point de rencontre de la verticale DC avec la ER se RU M SEP ne ( 144) droite menée par le point m sous l’angle amn = + 9. Il est visible qu'en désignant par P l'intensité du poids capable de produire la rupture suivant ae, la quantité P +Ila.b.h est représentée par 2a/n. Or Ila.b.h est une quantité constante. Donc la moindre valeur de P corres- pond à la position du point m pour laquelle la distance a!n est la moindre possible. Ici, comme tout à l'heure, nous voici ramenés au théo- rème fondamental exposé au n° IT. = Tirons la droite an’ sous l’angle n'aa/— et prolon- geons-la jusqu’à sa rencontre en s avec la verticale a//m. L’angle an/e est égal à . + o. Il s'ensuit, conformément au corollaire 2 du n° III que l’on à pour déterminer la position du point m, qui fixe la ligne de plus facile rup- ture am, la relation suivante : (ÉCART TR sm” — sa. sn”. Soit « l’angle que la ligne am de plus facile rupture fait avec l'horizontale aa!/', on a d’abord tang « — 44 1, aa aa aa On a d’ailleurs ! a'a’’ aa , ART aa. aa’ n S —_— , as — , sm — 7 VS « cos £ cos ? cos 2? Il vient donc en substituant L aa tang a = f + — RL cos aa ( 445 ) et eu égard aux valeurs de cos v et de a'a’/. CAM. | j) JA ONNeRr GEAR Ia + 2y D'un autre côté, mp étant la perpendiculaire abaissée du point m» sur la verticale CD, l'angle nmp est égal à F7 3 — (x —o), et l'on a an— ma” + np — aa” tang « + ua”. Cot (x — 0). De là résulte 9y À + tang 2x (5). - . an—atange + — + ——— ©. Il tang à — f Pour passer de la valeur a’n à celle de la quantité P + Ila.b.h, le facteur à introduire est, comme on l’a vu plus haut, ii Il vient donc enfin 11a2b (4) . + P + rrabh — À tang « + yab À + 1g 2x tang «a — f Les équations (2) et (4) résolvent complétement la ques- tion proposée. L’équation (4) montre, ainsi qu'on le voit d’ailleurs à priori, que la ligne de plus facile rupture doit partir du point A. On observera qu'il y a lieu d'apporter ici les mêmes res- trictions qu'au numéro précédent. Les ayant déjà men- tionnées, nous croyons superflu de les reproduire. 2% SÉRIE, TOME IX. 10 FE RAIN PE) RAR LOL OC TEE dus CAE EU ar ii ce GI tr de sé (146) Cinquième question. Équilibre d’un massif coupé latéralement. m IX. Soit aeb le profil d’un z massif limité à sa surface su- périeure par un plan beetcoupé latéralement suivant un talus (Fig. 7). planea. Il s’agit de déterminer la plus grande longueur qu'on peut donner au talus ea sans ee 7 y ait disjonction. On suppose que la rupture tend à se faire suivant un plan mené par l’arête inférieure du talus ea. Soit ac une droite quelconque prise pour ligne de rup- ture. Les forces à considérer sont au nombre de trois : 4° Le poids P du prisme aec; 2 La cohésion T’ dirigée suivant ac; 3° La réaction N’ dont la direction fait avec celle de la droite ac un angle égal à ? + ©. Considérons le système de ces trois forces et faisons-le tourner de manière à donner à la force P la direction eb. Cette rotation étant effectuée, si nous représentons par cd la réaction T’ et par dn la direction de la réaction N?, il est visible que la longueur nc représente le poids P’, pour lequel il y a précisément équilibre entre l’action de ce poids et les réactions développées suivant la section de rupture ac. Cela posé, pour qu'il y ait équilibre, il faut que le poids P qui agit en réalité soit inférieur ou tout au plus égal à P’. Le poids P est proportionnel à la base ec du triangle eac. (147) Supposons qu’on ait pris cette base pour le représenter et qu’on ait déterminé en conséquence la longueur cd. Le prin- cipe énoncé tout à l'heure implique la déduction suivante : La plus grande longueur que l’on puisse donner au talus ea, sans qu'il y ait disjonction, correspond à la position du point à pour laquelle le point n tombe en e, pour une direc- tion particulière de la droite ac, et reste à gauche du point e, pour toute autre direction. Observons ici que, pour une direction quelconque déter- minée de la droite ac, la direction de chacune des forces P, T’, N’ demeure invariable, indépendamment de toute inclinaison de la ligne eb. Il s'ensuit que pour un même angle quelconque eac, le triangle cdn reste semblable à lui- même, et qu'un rapport constant s'établit entre les côtés cd, cn. Mais, d’un autre côté, si l’inclinaison de la droite eb varie seule, le poids P et la réaction T’, tous deux pro- portionnels à la longueur ac, changent dans un même rapport. Il suit de là que, pour un même angle quelconque eac, le rapport des longueurs cn, ce demeure invariable pour toutes les inclinaisons possibles de la droite eb. Concluons que La direction eb peut étre choisie arbitrai- rement. Quelle que soit cette direction, elle n'admet jamais qu'une seule et méme détermination pour la longueur maxi- mum du talus ea. Ce résultat curieux n’était pas connu, croyons-nous. Il offre un moyen très-simple de résoudre la question pro- posée (*). (") Le procédé général, suivi dans ce travail, ne cesse pas d’être applica- ble ici comme ailleurs. L’artifice auquel on a recours a uniquement pour objet une simplification. | (148) X. Par le point e menons deux droites, l’une et diri- gée suivant le talus naturel, c’est-à-dire faisant un angleo L avec l'horizontale, l’autre eb perpendiculaire à la pre- mière et, par conséquent, faisant avec la verticale un angle égal à o. | AT Si nous prenons la droite eb pour li- mite supérieure du profil et que nous reproduisions (/ig- 8) la construction in- diquée (fig. T), il est aisé de voir qu’en prolongeant la droite nd jusqu’à sa ren- contre en.m avec la droite ac, on forme untriangle dmc rectangle en m et dont l'angle dem est égal à ©. On a par construction, cd T’ y. aC CE 0, mue [9] pA h étant la perpendiculaire ap abaissée du point a sur la droite eb. De là résulte Par le point m menons une parallèle à eb et désignons par o et q les points où cette parallèle rencontre les droites et,apon a eo D... ===, le triangle cdm donne d’ailleurs (5) ME AR EU omis on"00s pi ( 449 ) La combinaison des égalités (1), (2), (3) fournit immé- diatement l’équation finale 2 ER . . Éd eee. Ii L’équation (4) montre que le point m est assujetti à rester sur la droite fixe omg, et que la question proposée se résout par application du théorème fondamental ex- posé au n° I. Voici d’ailleurs la solution : o Prendre sur la droite et, pa- # rallèle au talus naturel, la lon- gueur eo égale à 7 COS D; Par le point o élever sur et la g” perpendiculaire om; Mener par le point e la droite emq' dirigée suivant la bissectrice de l'angle o0ea; Par le point m, où les droites emq/ et om se coupent, élever sur emq/' la perpendiculaire ma; Le point a situé à la rencontre des droites ma, ea est le point cherché : am est la ligne de rupture, ae la plus grande longueur que comporte le talus latéral, pour toute direction de la surface supérieure du massif. œ (Fig. 9.) On vérifie cette solution en observant que l’angle ema est droit et que les angles ome, eam sont égaux comme complément d’un même angle oem — mea. Par le point a tirons la droite ag’ parallèle à eo. L’an- æ (150 ) gle eg'a, égal par construction à l’angle oem, est égal à l'angle mea. Il s'ensuit que le triangle eg'a est isocèle et qu'on a généralement Eee Er UE er are Par le point g' menons la droite o’q! parallèle à om et, par conséquent, perpendiculaire à eo. Le point m étant le milieu de la base eg’ du triangle - isocèle eag/, on a 00/=— eo et, par suite, eo = 2 cos Il . Il suit de là que la droite o’q' est fixe. Concluons, en vertu de l'égalité (5), que le lieu des points à, correspondant aux diverses directions que peut prendre le talus latéral ea, est une parabole ayant son foyer en e, son sommet en 0, la droite eo’ pour axe principal et la droite o’/q! pour directrice. Concluons, en outre, que la ligne de rupture am est la droite qui touche cette méme parabole au point a. Déjà, depuis plusieurs années, nous étions parvenu à ce résullat curieux. Le calcul qui nous y avait conduit était moins simple et moins satisfaisant que la solution précédente. Il avait dissimulé à nos yeux la généralité de cette solution qui paraissait restreinte au cas d’une surface supérieure horizontale. Il n’avait pas non plus mis en évi- dence la direction remarquable affectée par la ligne de plus facile rupture. On observera qu’en pratique, on doit exclure des direc- tions assignables à la droite eb, qui limite supérieurement le profil aeb, celles de ces directions qui feraient avec l'horizontale, et au-dessus, un angle supérieur à ®. ( 151 ) On observera également que la solution précédente cesse d’être applicable, lorsque la ligne am est inclinée sur la gauche de la verticale élevée par le point a. AN. B. Ilest aisé de voir comment la solution qui pré- cède s'étend d'elle-même au cas d’une charge uniformé- ment répartie à la surface supérieure du massif considéré. En désignant par p la charge répartie sur l'unité de sur- face, il suffit, pour en tenir compte, de remplacer 11 par IT + #, h étant la perpendiculaire abaissée du point a sur la base du prisme qui tend à se détacher. Un nouveau genre de Crustacé lernéen; par M. P.-J. Van Beneden , membre de l’Académie. Déjà à diverses reprises, nous avons eu l’honneur d’en- tretenir l’Académie de quelques nouveaux genres de crus- tacés de la grande famille des lernéens, qui hantent nos parages et prennent des poissons marins ou fluviatiles pour habitacles, sinon pour victimes. La classe des crustacés est, sous ce rapport, une classe bien remarquable : quelques décapodes brachyures de- mandent l'hospitalité à des moules, des huîtres ou des jambonneaux, et, sous le nom de Pinnothéres, vivent en bonne intelligence sous un toit commun, en prêtant à ces mollusques aveugles, disaient les anciens, le bénéfice de leurs yeux nombreux et pédiculés. D'autres décapodes, les Pagures ou Bernard-l'Hermite, sans demander l’hospitalité à un vivant, s’établissent dans la coquille abandonnée d’un Buccin ou d'un Turbo mort, l M. à: (132) et s'installent dans cette demeure d'emprunt comme le vrai et légitime propriétaire. Plusieurs isopodes, dédaignant la vie monotone d’un crustacé se trainant avec peine sur ses sept paires de pattes, choisissent un poisson bon nageur, se crampon- nent solidement à sa peau, et, sans lui demander autre chose qu’un simple gîte, traversent d'un trait, grâce à leur véhicule vivant, l'Atlantique ou la mer du Nord, et voyagent avec toute célérité et sans fatigue du pôle à l’équa- teur. Les cirrhipèdes, qui sont bien de véritables crustacés, surtout les balanes, s’établissent indifféremment sur des pierres, des pieux, des moules ou des crabes, tandis que les anatifs en général s’établissent plutôt sur la quille des navires, et recouvrent, d’une vaste forêt de corps pédi- culés, toute la partie submergée de la carcasse : nous en avons vu de quatre à cinq pieds de longueur. On trouve aussi des cirrhipèdes sur des squales, des dauphins, des baleines, ainsi que sur la carapace des chélonées, et le plus souvent ces singuliers voyageurs servent de pavillon au navire vivant qui les à transportés. Enfin, les crustacés siphonostomes ne demandent pas seulement le passage à leur hôte débonnaire; ils en font une victime qu'ils assassineront au besoin pour s’abreuver de son sang, mais que, par une cruauté raffinée, 1ls laisse- ront vivre dans leur propre intérêt. Ces derniers crustacés sont communément désignés sous le nom de lernéens, et hantent surtout la cavité branchiale des poissons. C'est d'un nouveau genre de ce groupe que j'ai l’hon- neur d'entretenir aujourd'hui la classe ; mais, au lieu de vivre sur un poisson et de se colloquer à l’aide de fortes pinces et crochets, il se blottit dans le premier comparti- ( 155 ) ment d’un funicier composé, le remplit à lui seul, guette au passage ce qui lui convient, et passe sa vie à prendre sa nourriture solide et gazeuse avant de se transformer en étui sexuel. | Si ce lernéen n'a plus besoin de ses organes pour amarrer le corps, s’il vit dans un obscur compartiment où nulle agression ne peut l’atteindre, si son rôle ne consiste plus qu'à pondre sans danger les œufs qui doivent perpétuer l'espèce, on ne sera pas surpris que ce nouvel animal s'éloigne si notablement de ses congénères, qu'on n’est pas sans quelque embarras pour découvrir ses véritables affinités. : Ces lignes étaient écrites lorsque nous avons reçu le numéro des Archives de Troschel, contenant l’intéressant travail de M. R. Leuckart, ayant pour titre Carcinologis- ches (1). Nous y lisons que notre savant ami a trouvé, en 1853, à Nice, dans la cavité branchiale et le cloaque des Phallusia mamillaris, entre autres parasites, un lernéen extrêmement curieux, connu déjà de Costa, au moins le genre, et que M. Leuckart désigne sous le nom de Notopterophorus Veranyi. Krohn avait observé le même Jlernéen à Naples, dans différentes espèces de Phallusia, mais sans en avoir parlé dans ses écrits. Ce Notoptero- phorus est voisin de celui que nous avons trouvé dans l’Aplidium ; mais il se fait particulièrement remarquer par les prolongements des ailes qu'il porte sur chaque anneau thoracique, et qui lui ont valu son nom de No- topterophore. Quand la drague des pêcheurs racle, à quelque dis- (1) 1859, p. 252. (154) tance de nos côtes, le fond rocailleux de la mer, le filet se remplit généralement de grandes huîtres, de spatangues pourpres et d'énormes alcyons, au milieu desquels on trouve des corps arrondis d’un jaune verdàtre, ridés à la surface, de la grosseur d'une pomme de reinette, et dont la ressemblance avec des figues desséchées est assez frap- pante : ce sont des tuniciers composés que les naturalistes désignent sous le nom générique d’Aplidium, et dont il existe deux espèces non loin de nos côtes, l’Aplidium ficus et l’Aplidium ficoïides Van Ben. … C’est souvent une tige de tubulaire qui sert de siége aux fondateurs de la colonie, et c’est autour d’elle que se dé- veloppent successivement les diverses générations qui con- stituent le mollusque composé. Depuis longtemps nous connaissions ce fruit de mer; mais ce n’est que depuis quelques mois que nous avons appris à connaître l'hôte qu’il héberge, et dont les carac- tères méritent une attention particulière. C'est une circonstance toute fortuite qui nous l’a fait découvrir. En faisant dernièrement, avec un scalpel très -tran- chant, une coupe mince et transparente du fruit, c'est-à- dire de la colonie, et en portant cetle lame mince sur le porte-objet du microscope, il nous tomba sous les yeux un petit sac rempli d'œufs d’un beau rouge amarante que nous supposions provenir de l’Aplidium lui-même. Nous mimes ces œufs à. nu à l’aide d’une aiguille, et, comptant trouver un têtard de tunicier, quelle ne fût pas notre sur- prise de trouver une larve de crustacé au lieu d’un jeune mollusque. Comme on le pense bien, des suppositions de tout genre se croisèrent dans notre esprit. Était-ce un exemple | à vd RNCS 2 L” : ñ , St . p (155 ) de transition véritable d’une classe à une autre classe? était-ce un mollusque affectant d’abord les allures d’un crustacé ? Nous fimes bientôt une seconde coupe, puis une troisième et une quatrième, et tout s’expliqua. Ce n'était point du merveilleux qui se déroula, mais du nou- veau : aux sacs à œufs amarantes, nous voyons appendu un corps allongé que nous retirons tout entier de la loge qui le renferme, et en l’isolant, la nature lernéenne saute aux yeux. Nous avions donc affaire à un crustacé para- site logé dans la cavité respiratoire de l’Aplidium, et dont nous trouvions au moins une vingtaine de femelles dans une seule colonie. Depuis plus de vingt ans, nous possédions un dessin de ce crustacé en portefeuille; il était marqué : Trouvé sur un Aplidium ; mais comme les tubes ovifères manquaient, sa nature véritable, crustacé ou acaride, nous était restée in- connue. Ce problème est résolu aujourd’hui. Ce lernéen est nouveau pour la science; à cause de la cavité qu’il habite et de la couleur de ses œufs, nous le désignons sous le nom de : ENTEROCOLA FULGENS, Van Ben. La femelle a le corps un peu allongé, comme certains acarides, très-régulier et à peu près du même diamètre dans toute sa longueur; la tête est distincte et porte une tâche de pigment rouge au milieu du front; les appendices de la bouche sont couchés pendant le repos, de manière qu’on n’en voit aucune trace, à moins de placer l'animal sur le dos; le thorax compte quatre segments semblables, tous les quatre portant une paire d’appendices bifurqués très-courts; l'abdomen est peu développé sans segments et (156) se termine postérieurement par deux lobules fort courts sans dents ni soies; les tubes ovifères ont la largeur du : corps et sont couverts à leur base d’un appendice pro- , After: i Le mâle nous est inconnu. Il habite la cavité branchiale des Apiidium. La tête est parfaitement distincte du thorax; sa forme est triangulaire et légèrement bombée en dessus; vers le bord antérieur, sur la ligne médiane , on voit un reste de pigment oculaire rouge, mais ni sur le côté, ni en avant, on n’aperçoit aucun organe particulier, soit pour amar- rer le parasite, soit pour donner l'éveil en cas de danger. On dirait qu'il ne lui reste plus aucun rapport avec le monde extérieur, qu'il est condamné pour toujours à limmobilité du patron qu'il habite, enfin qu'il n’a plus d'autre rôle à jouer dans l’économie de la nature, que de veiller à la propagation de l’espèce. La tête porte cependant quelques appendices, mais ils sont réduits à un tel degré de simplicité, ils sont si pri- milifs dans leur composition, que, pour les reconnaître, il est indispensable d’en avoir fait une étude ailleurs. Sur le côté du segment frontal, on voit, en ayant soin de redresser les pièces qui sont couchées les unes sur les autres, s'élever un appendice foliacé, large à la base, pointu au sommet, mince et souple comme une mem- brane, composé de deux articles à peine distincts, et n'ayant à sa surface ni filaments, ni soies, ni épines : ce sont les antennes. Elles semblent pouvoir se loger dans une excavalion latérale du segment frontal. La seconde paire d’appendices est insérée à la base des antennes et ne semble former avec elles qu'un seul et ( 197 ) même organe. Nous trouvons en effet la plus complète ressemblance. entre ces appendices réunis et les quatre pattes thoraciques. Cette seconde paire n’est formée que d’un seul article assez volumineux et qui porte à son ex- trémilé libre deux ou trois courts feuillets membraneux : c’est la première paire de pieds-mâchoires, si nous ne nous trompons. Il existe une seconde paire de pieds-mâchoires, situés un peu au-dessous et en dedans des précédents, mais que leur état rudimentaire permet à peine de distinguer. Il n’est pas facile de bien connaître ces pièces qui en- tourent la bouche, à cause de la petitesse de ces crustacés et plus encore du peu de transparence de la carapace. La troisième paire de pièces, qui correspond évidem- ment à celle que nous avons décrite ailleurs comme la troisième paire de pieds-mâchoires, est la plus forte de toutes, et les deux appendices, en se rapprochant, peuvent faire la pince : ils sont formés de deux articles dont le ba- silaire est fortement gonflé, pendant que l’article terminal est bidenté au bout. Ces pieds-mâchoires portent en avant un palpe rudimentaire. Nous ne voyons nulle part des organes d'adhésion aussi peu faits pour amarrer le parasite, et c’est tout au plus si, au besoin, la dernière paire, généralement si bien condi- tionnée dans les lernéens, pourrait rendre quelque service à l’Entérocole. La région du corps qui porte les organes appendicu- laires et que l’on désigne avec raison sous le nom de thorax, forme presque tout le corps du parasite. Quatre segments parfaitement semblables constituent cette ré- g1on, et, sur le côté de chacun d’eux, on voit une paire de pattes d'une conformation plus simple encore que les ( 158 ) appendices de la tête. Par le thorax et le peu de dévelop- pement de leurs dépendances, les Entérocoles, sans les tubes ovifères toutefois, ne sont pas sans ressemblance avec les tardigrades. Les quatre paires de pattes sont exactement semblables et par le nombre d'articles et par leur volume; elles sont courtes, formées de deux pièces, comme les nageoires bira- mées, une pièce extérieure terminée par un onglet, sem- blable aux antennes, et une autre pièce interne arrondie, un: peu allongée et terminée par deux onglets membraneux. Chaque paire d’appendices thoraciques est exactement conforme aux deux premiers appendices céphaliques, et les antennes interprétées de celte manière, ne seraient que la dépendance de la première paire de pieds-mâchoires. Outre les appendices du thorax, on voit, à la hauteur de : la base de l'abdomen, de chaque côté, un feuillet membra- neux recouvrir la base des tubes ovifères et protéger les œufs au moment de leur entrée dans le sac. Cet appendice se retrouve dans plusieurs lernéens, mais c’est le seul genre dans lequel nous le voyons jouer aussi évidemment son rôle d’organe protecteur. ; Chaque tube ovifère est presque aussi gros que le corps de l’animal et porte trois ou quatre œufs dans la largeur et une dizaine dans la longueur. Les œufs sont irrégulièrement entassés et sont remar- quables moins par leur volume que par leur belle couleur amarante. Cette couleur, comme on le pense bien, est celle du vitellus; aussi la voit-on dans tout l'intérieur des ovaires qui ont envahi la cavité thoracique. Sans les œufs extérieurs, on pourrait croire que la femelle est un jeune animal qui n’a pas encore digéré sa masse vitelline. C'est un des motifs pour lesquels nous avions eu toujours (159 ) du doute sur la nâture de l’animal dont nous conservions depuis si longtemps un dessin colorié. Affinités. — La diversité de formes est souvent si grande dans ces crustacés lernéens, leur physionomie est parfois si singulièrement grotesque , qu'il n'est pas rare de voir les affinités naturelles des genres se dérober au coup d'œil le plus sagace et le mieux exercé. Le genre dont nous cher- chons iei à connaître le rang est du nombre de ceux qui nous ont offert le plus de difficulté. C’est une forme, en apparence, frappée dans le cours de son évolution, et ce- pendant les œufs dont la femelle charge son robuste ah- domen démontrent que cela n’est pas. Aussi dansle tableau général des lernéens, où 1l faudra tout classer d’après les termes plus ou moins éloignés de la larve et de l’em- bryon, les Entérocoles ne peuvent-ils s'éloigner beaucoup des genres qui doivent correspondre aux premiers âges embryonnaires. » Si nous considérons, d'après ce que nous avons appris à connaître des lernéens de nos côtes, ce qui reste encore à découvrir, nous ne nous sentons pas le courage de former un cadre général, et nous nous bornerons à signaler les fortes aflinités que présente ce nouveau genre avec les Eudactylina des branchies des Squatine ange et des Spinax acanthias. | : Ces genres ont tous les deux le corps d’une forme très- régulière, assez semblable à un isopode ou même à un acaride, montrant un segment céphalique de forme trian- gulaire, armé en avant d’une paire d'antennes et de trois paires de pieds-mâchaires autour de la bouche; tous les deux ont un thorax composé de quatre segments sembla- bles, portant des appendices ass£z mous, à peine articu- lés, bifides et diversement terminés au bout; un abdomen RE QT + 4 NOR ET ORTON PRE sh F L AL 4 V QUE SSP EES : LS al | , QE 4) TE À à f : ” ‘ ° TS SCO ( 160 ) | court, ayant sur le côté de courts tubes ovifères, et le segment caudal terminé par un double appendice uniar- ticulé, non sétifère. Comme nous avons cru devoir placer les Eudactilina dans la tribu des dichélestions, qui ont pour type l'espèce de l’esturgeon, nous y mettrons également les Entérocoles, en attendant que l’ensemble des affinités puisse être mieux , apprécié. S EXPLICATION DES FIGURES. ENTEROCOLA FULGENS. Fig. 1. L'animal complet, grossi une dizaine de fois, vu du côté du dos, tel qu'il sort de la cavité branchiale de l’/plidium. Les deux sacs à œufs ont pris un pli d’après la cavité dans laquelle ils sont logés. On voit encore un œil rudimentaire sur le front; mais , en général, les appendices, sauf ceux qui recouvrent les sacs à œufs, ne sont guère visibles de ce côté du corps. — 2. Un animal complet, vu de profil au même grossissement , montrant les quatres paires de pattes. Les sacs à œufs manquent. — 3. La partie antérieure de la tête et le premier segment thoracique plus fortement grossis, vus en dessous, montrant les différents appen- dices qui entourent la bouche et la première paire de pattes tho- raciques. — 4, La partie postérieure du corps, vue du même côté et au même grossissement, montrant les deux derniers segments thoraciques avec leurs appendices, la portion abdominale, le sac à œufs d’un côté, et les corps protecteurs des sacs des deux côtés. — 5. La moitié d’un individu, vu du côté du dos, comprimé entre deux lames de verre et montrant surtout les quatres paires de pattes au complet. — 6. Un embryon contenu encore dans l'œuf. — 7. Un embryon isolé, mais dont l’éclosion est provoquée par la com- pression. < Zn. AL seré page 160 ve page 160 ns APE Ten ASS " Zall de Led y ANS À GA ex ii » ( 161 ) Recherches sur le groupe urique; par MM. A. Schlieper et À. Baeyer. L. ACIDE PSEUDURIQUE. Malgré le grand nombre de dérivés connus de l'acide urique, nous ne sommes pas encore suffisamment éclairés sur sa nature, et tous les efforts pour sa production artifi- cielle ont échoué jusqu’à présent. Déjà Liebig et Woeh- ler (4), dans leur travail classique sur le groupe urique, ont communiqué les tentatives faites par eux pour résou- dre ce problème. Ils traitaient l’uramile par les vapeurs de l'acide eyanique sans obtenir un résultat. L’uramile (l’amide de l'acide dialurique), en se combinant avec l'acide cyanique, doit donner un corps qui présente Ja même proportion des éléments que l'acide urique, plus deux équivalents d’eau : , Uramile. Acide urique. CH.A,0, + CA:HO, = C4 %0s = CioH47,06 + H302- Nous avons réussi à effectuer cette réaction en traitant l’uramile par le cyanate de potasse; mais le corps obtenu n'est pas l'acide urique : c’est un acide nouveau que nous appellerons acide pseudurique : Pseudurate de potasse. C;H,47,0, + C,AzKO, — C, H,KAz,03. En chauffant l’uramile avec une solution concentrée de cyanale de potasse jusqu’à l’ébullition , on le transforme (1) Annalen der Pharmacie, etc., de Liebig et Wochler, t. XXIV; p. 284. 2me SÉRIE, TOME IX. 11 RAT CUT CP PL OT RAT ER PP RON TOO UT MER ie OR 4 nl in: ü LES Me à n Rss à (162) | | en pseudurate de potasse, qui forme un dépôt cristallin. On reconnaît la fin de l’opération à ce que le liquide ne rougit plus à l’air. Si cela a lieu, il faut ajouter encore du cyanate. Au lieu de l’uramile, on peut se servir aussi de la murexide. Ce corps chauffé avec le cyanate de potasse perd peu à peu sa couleur et donne des paillettes bril- lantes, qui ne sont que le pseudurate de potasse. Celte réaction n’est pas surprenante, puisque les alcalis conver- tissent la murexide en uramile. Acide pseudurique.. . . . C;,,H,Az,0,. Pour obtenir l’acide pseudurique, on dissout dans l’eau bouillante le pseudurate de potasse brut lavé, et on fait eris- talliser ; le produit séparé est dissout ensuite dans une les-. sive de potasse caustique et l'acide est précipité par l'acide chlorhydrique. Préparé de cette manière, l'acide pseudu- rique se présente sous la forme d’une poudre blanche eris- talline, composée de petits prismes. Les eristaux sont plus grands précipités à chaud qu’à froid. L’acide pseudurique chauffé à 160° ne perd pas de son poids : il ne contient pas d'eau de cristallisation. A l'analyse, il a donné les nombres sulvanis : I. 0,5041 gr. ont donné par la combustion 0,5596 CO, et 0,0987 HO. IT. 0,5555 gr. ont donné 0,6510 CO, et 0,1798 HO. HI. 0,1964 gr. ont fourni 0,4085 gr. de platine. IV. 0,5255 gr. ont donné par titration 0,0974 Az. CALCUL. I II. III. IV. HAE U UE 3,6 9,0 — A%, == 600 — — 29,5 50,1 0, = — — — — L’acide pseudurique est sans saveur et sans odeur, fort peu soluble dans l’eau froide ou chaude. I se dissout facile- ( 165 ) ment sans décomposition dans les alcalis eaustiques, et chasse les acides carbonique et acétique de leurs sels. L’hy- drogène sulfuré et l'acide sulfureux ne l’altèrent pas; l'acide nitrique le convertit facilement en alloxane. En suspen- sion dans l’eau chaude, le peroxyde de plomb le décompose avec énergie, en dégageant de l'acide carbonique et en se transformant en oxalate et en pseudurate de plomb, mais il ne se forme pas de l'allantoine ; à la fin de la réaction, les eaux mères ne renferment que de l’urée et une combi- naison plombique, qui paraît être l’oxalurate. Le perman- ganate de potasse le décompose aisément à froid. Les pseudurates s’obliennent facilement en traitant les hydrates, les carbonates ou les acétates par l'acide, ou par - double décomposition. Is se forment aussi directement par le traitement de l’uramile avec les cyanates correspondants. Le pseudurate d’'ammoniaque se prépare, par exemple, très- bien en chauffant luramile avec une solution de sulfate d’'ammoniaque et de cyanate de potasse, Les pseudurates sont tous solubles dans l’eau, mais pas en grande quan- tité : le sel de soude est le plus soluble. D'une solution saturée à chaud , ils se déposent en cristaux par le refroi- dissement; calcinés ils fondent en formant des cyanures. Pseudurate d'ammoniaque. . . . C;,,H, (42H,] A,0, + 2 aq. Lorsqu'on sature par l'acide une solution d’ammoniaque étendue et portée à l’ébullition, on obtient, par le refroi- dissement le pseudurate d'ammoniaque, sous la forme de petites paillettes ou aiguilles très-volumineuses. 11 n’est pas plus soluble dans lammoniaque concentrée qu’étendue, el ne se combine pas avec une plus grande quantité d’am- moniaque. Ce sel contient deux équivalents d’eau de cristallisation, qu'il perd au-dessus de 100°; chauffé au- (164) dessus de 150°, il se colore en rouge en dégageant de l'ammoniaque. Il est préférable de le préparer à l’aide de l'ammoniaque caustique que par l’acétate d’'ammoniaque, parce qu'on l'obtient plus blanc par le premier procédé. A l'analyse, ce composé a fourni les nombres suivants : ce 2,5380 gr. desséchés dans le vide ont perdu à 150° 0,2106 HO. Il. 0.9717 gr. ont perdu à 150° 0,0782 O. III. 0,9256 gr. ont perdu à la même température 0,0766 HO. Calcul pour 2 éq. HO. I. IT: HIT. 8,5 8,9 8,1 8,3 IV. 0,2592 gr. séchés dans le vide ont donné 1,2988 gr. de chloro- platinate d’ammoniaque. V. 0,4577 gr. séchés à 150° ont fourni 0,4752 CO, et 0,1926 HO. VI. 0,1522 gr. desséchés ont donné par titration 0,0459 Az. VII. 0,2578 gr. desséchés ont donné 0,0901 Az. CALCUL. LV: CALCUL. V. VI. VIT. Co — — Co 29,6 29,6 — — Hn — — H, 4.5 4,9 —— AZ 31,6 51,4 « Az, 54,5 — 54,6 54,9 OUEN E DS 4 SPC SCENE Les sels d’éthylamine et d’aniline ressemblent au sel d'ammoniaque. Pseudurate de soude. . . . .. C,H;NaAz,O, + 4 aq. En saturant une solution bouillante d’acétate de soude avec l'acide pseudurique, on obtient le sel de soude par le refroidissement sous la forme de choux-fleurs com- posés de petits prismes. Ce sel est assez soluble dans l'eau, surtout à chaud, et cristallise avec quatre équivalents d'eau de cristallisation, qu'il perd à 440°. Comme ce pseudurate est très-soluble dans une lessive de soude caus- tique, on pouvait supposer qu'il se formait un sel avec la double quantité de sodium. L'alcool sépare de cette solu- tion une couche huileuse qui se prend bientôt en une ( 165 ) masse blanche et amorphe; mais ce sel possède la même composition et renferme la même quantité d’eau que le sel cristallisé, En effet si on dissout la masse blanche dans l’eau chaude, on obtient le même corps que celui qui se prépare avec l’acétate de soude. On peut profiter de cette préparation pour purifier un produit impur. Îl suffit de précipiter un sel brun une ou deux fois par de l’alcool et de le faire cristalliser pour le rendre parfaitement blanc. Voici les résultats de l'analyse : I. 0,9411 gr. du sel précipité par l'alcool ont perdu à 140° 0,2950 HO. IL. 0,2132 gr. du même corps, séchés dans le vide ont fourni 0,0630 gr. de sulfate de soude. HI. 0,2196 gr. du même sel ont donné 0,0653 gr. de sulfate de soude. IV. 0,5058 gr. ont donné 1,0901 gr. de chloroplatinate d’ammoniaque. V. 2,0576 gr. du sel précipité cristallisé de l’eau ont perdu 0,5021 gr. HO. VI. 0,2564 gr. du même sel, séché à 1409, ont donné par la titration 0,0700 gr. Az. | VIT. 0,2501 gr. du même sel ont donné 0,0849 gr. de sulfate de soude. Le pseudurate de soude + 4 éq. d’eau de cristallisation renferme 15,0 p. c. d’eau. CALCUL. I. ve 15,0 16,1 14,5 caccuz. II. HIT. IV. CALCUL, VE: VIL. Co pret TE F rt Go EE El Mn H, — — — — He — — — Nan on: 96. 96 — Na 11,5 — 11,0 Az, 23,0 — — 12230 AZ, 27,0 27,5 — O2 ET R A ai 0: F7 Te Ya Pseudurate de potasse. . . .. CoHKAZ%,0, + 2 aq. Le sel de potasse se dépose d’une solution bouillante de l’acide dans l’acétate de potasse sous la forme de petites paillettes brillantes très-volumineuses. C'est le même corps que l’on obtient directement par une cristallisation Nat er 2 2 AU EC de: PEN APEMTS ne re = D. | (166) da produit de l'action du eyanate de potasse sur l'aramile, Il est moins soluble dans l’eau que le sel de soude, et renferme deux équivalents d’eau de cristallisation , qu'il ne perd qu’au-dessus de 440°. Chauffé au-dessus de 180°, il rougit fortement et se décompose. Dans une lessive de potasse caustique, 1l se dissout en grande quantité; l'acide ucétique où carbonique l'en précipitent. Mais il se dépose même d’une solution fortement alcaline, ét ne paraît non plus pouvoir fournir un sel avec deux équivalents de po- tasse. Le pseudurate de potasse a donné à l'analyse les résultats suivants : LE 2,0850 gr. ont perdu à 170° 0,1602 gr. HO. TL 0,8026 gr. ont perdu à 170° 0,0617 gr. HO. IL, 0,2219 gr. du produit brut une fois cristallisé ont donné 0.0770 gr. sulfate de potasse. IV. 0,2636 gr. du sel déposé d’une solution dans la potasse caustique ont fourni 0,0926 gr. sulfate de potasse. Le pseudurate de potasse à deux équivalents d’eau doit renfermer 7,4 p. c. d’eau. | CALCUL. L II. 7,4 7,1 7,5 JIL. IV Co Fin 43 A H, — — — AZ, — — K 15,0 13,5 15,0 0» Le ES =" Pseudurate de chaux. Le sel de chaux s'obtient en beaux prismes, lorsqu'on ajoute du chlorure de calcium à une solution bouillante d'un des sels précédents. Pseudurate de baryte. . . . .. CoH,BaAr,O, + 5aq. Le pseudurate de baryle s'obtient, par le refroidissement d'une solution d’acétate de baryle saturée à chaud avec l'acide, sous la forme d’aiguilles très-fines et longues, réunies en sphères comme la bile eristallisée. I renferme cinq équivalents d’eau de cristallisation. S'il se dépose très- lentement, les aiguilles sont moins délicates. Le même sel sobtient par double décomposition sous la forme d’un précipité cristallin , composé de petits prismes. Il n’existe pas un sel renfermant plus de baryte; en effet on obtient le même composé en ajoutant une solution ammoniacale de chlorure de barium à un pseudurate. Le sel de baryte est moins soluble que les sels des alcalis. À l’analyse, il a donné les nombres suivants : I. 4,2558 gr. du sel préparé à l’aide de l’acétate de baryte, ont perdu à 160° 0,6349 HO. IL. 0,5850 gr. du sel desséché ont donné 0,5061, CO, et 0,1240 HO. IL. 0,2672 gr. du même sel ont donné 0,1022 carbonate de baryte. IV. 0,2934 gr. du même sel ont donné 1,0070 de chloroplatinate d'am- moniaque. V. 0,4521 gr. desséchés dans le vide ont donné 0,1774 sulfate de baryte. VI. 0,2265 gr. préparés par une solution ammonicale de chlorure de barium et desséchés dans le vide, ont donné 0,0884 gr. de baryte. VIT. 0,8149 gr. de ce sel ont perdu 0,2724 gr. HO. VIT. 0,2652 gr. du même sel, desséchés à 150”, ont donné 0,1218 gr. de sulfate de baryte. Cinq équivalents d’eau de cristallisation représentent une perte de 45,0 p. c. CALCUL. ile Vil. 15,0 14,9 15,0 CALCUL. V. VI. CALCUL, CO IT, III. IV. VIIL Ho — — — H, 2,0 2,3 — — — Ba 93,0 221 25,90 Ba 927,0 — 26,6 — — AZ — — — Az, 22,0 —— — 21,5 — . ( 168 ) ‘Le pseudurate de cuivre s'obtient en aiguilles très-pe- tites d’une couleur verdâtre, lorsqu'on mélange une solu- tion saturée à chaud d’un pseudurate alcalin avec du sul- fate de cuivre. Les sels mercureux et mercuriques , obtenus par double décomposition, forment des aiguilles ou pail- lettes brillantes. | Le pseudurate de plomb se prépare en saturant une solution bouillante d’acétate de plomb avec l'acide pseu- durique. Par le refroidissement, ce sel se sépare en petits cristaux, formant des croûtes fortement attachées au verre. Il renferme deux équivalents d’eau de cristallisation. Lorsqu'on ajoute une solution d’un pseudurate à l’acétate de plomb basique restant en excès, le précipité formé au premier moment se dissout de nouveau dans ce réactif. L’ammoniaque en précipite une poudre blanche et amor- phe, qui est composée en grande partie d’hydrate de plomb. Le nitrate d'argent donne, avec les pseudurates, au premier moment, un précipité blanc qui brunit bientôt, de sorte qu’il était impossible d'examiner le sel argentique. En résumant les faits exposés ci-dessus, on voit que l'acide pseudurique ne forme qu'une espèce de sel, et qu'il est, dans ce sens, monobasique. Il n'offre pas de res- semblance avec l'acide urique; en effet 1l ne fournit pas de l’allantoïne lorsque, suspendu dans l’eau, on le traite par le peroxyde de plomb. Comme nous ne connaissons pas encore suffisamment Ja nature de lacide dialurique, il est impossible de donner une formule rationnelle de l'acide pseudurique qui dérive de l’amide de lacide dialurique. ae 4 "LIEU x \ (169 ) CLASSE DES LETTRES. ———— Séance du 6 février 1860. M. GacnarD, président de l’Académie et directeur de la classe. M. An. QueTeLer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron de Gerlache, Grandga- gnage, de Ram, Borgnet, le baron de Saint-Genois, De Decker, Snellaert, Carton, Haus, Bormans, Leclercq, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Chalon, membres; Nolet de Brauwere Van Steeland, associé; Thonissen, Th. Juste, correspondants. MM. Wesmael, Sauveur et Alvin, membres de deux au- tres classes, assistent à la séance. pp CORRESPONDANCE. M. le chevalier Texeira de Vasconcellos fait hommage de la première partie de son ouvrage sur le Portugal et la maison de Bragance. M. de Ram, membre de l’Académie et recteur de l’uni- CPE. SR VUE AURTEALLTT or CR 0: et î La 2 2 : L ( 470 ) | PC versiié de Louvain, présente un exemplaire d’un discours qu'il a prononcé après le service funèbre de M. Éd. Jos. Delforirie, président du collége de Marie-Thérèse à Lou- vain. — Remerciments. — M. J.-J. De Smet, membre de l'Académie, fait par- venir un travail manuscrit sur la première croisade, spé- cialement étudiée au point de vue belge. (Commissaires : MM. de Saint-Genois, Carton et de Ram.) — M. De Pouhon fait connaître qu’il serait disposé à donner, pour faciliter la copie des pièces concernant Charlemagne, qui se trouvent aux archives du Vatican, à Rome, une somme de mille francs, et qu’il ajouterait deux mille francs si les recherches amenaient la connaissance du lieu ou du pays de naissance de cet empereur. Il a éerit dans ce sens à M. Kervyn de Lettenhove, qui se rend dans les États pontificaux. « Il regrette, dit-il, tout en l’hono- rant, le sentiment qui engage les membres à s’exclure du concours ouvert sur celte question importante. » ———_————— CONCOURS DE 1859. La classe a reçu les ouvrages suivants sur les questions qu'elle avait mises au concours : PREMIÈRE QUESTION. Quelles sont les localités des dix-sept provinces des Pays- Bas et du pays de Liége où l'on a frappé monnaie, depuis (171) l'invasion des Francs jusqu'à l'émancipation des grands feu- dataires ? Décrire ces diverses monnaïes, et, au besoin, en discuter l'attribution. Il est arrivé deux mémoires portant les devises, n° 1 : Cherchez et vous trouverez; n° 2: La numismatique est l’un des flambeaux de l'histoire. Les commissaires sont : MM. le baron de Witte, Chalon et le baron de Saint-Genois. DEUXIÈME QUESTION. Quelles sont les applications utiles el pratiques du prin- cipe de l'association pour l'amélioration du sort des classes ouvrières et indigentes ? Deux mémoires ont été envoyés avec les devises, n° 1 : Avant de compter sur les autres, il faut pouvoir compter sur soi; n° 2 : Omne tulit punctum qui miscuit utile dulci. Les commissaires sont : MM. Ducpetiaux, De Decker et le baron de Gerlache. QUATRIÈME QUESTION. L’éloge de Cats , au point de vue de l'influence exercée par cet écrivain sur la littérature flamande. Les deux mémoires qui ont été reçus portent les devi- ses : 4° Vader"Cats ; 2 Vives et vivent istis tua carmina sœæclis. Les commissaires sont : MM. Snellaert, David et Nolet de Brauwere Van Steeland. CINQUIÈME QUESTION. Quelle a été l'influence littéraire, morale et politique des (172) sociétés et des chambres de rhétorique dans les dix-sept pro- vinces des Pays-Bas et le pays de Liége. Il est parvenu un mémoire sous la devise : Geduld is cene schoone zaak. Les commissaires sont : MM. Snellaert, le baron de Saint-Genois et David. Il n'a pas été reçu de réponse à la troisième et à la sixième question du programme. Sur la question relative à l’origine belge des Carlovin- giens, 1l à été reçu un seul mémoire portant la devise : Jaloux de suivre la trace des anciens, etc. (Commis- saires : MM. Borgnet, Arendt et Polain.) ÉLECTIONS. MM. Leclercq, De Decker et le baron de Saint-Genois sont nommés membres de la commission qui, avec MM. Gachard, de Ram et Ad. Quetelet, membres du bureau de la classe, sont chargés des présentations pour les pro- chaines élections aux places vacantes dans le sein de la classe des lettres. (175) RAPPORTS. es Projet d’un concours pour l’histoire de la ville d'Ypres, soumis à l'examen de l’Académie. Afin de satisfaire au désir exprimé par la ville d’Ypres et communiqué à l’Académie par M. le Ministre de l’inté- rieur, la classe des lettres avait chargé trois de ses mem- bres, MM. Carton, le baron J. de Saint-Genois et de Smet, d'examiner le projet de concours conçu par le conseil communal d’Ypres, et ayant pour objet l'élaboration d'une histoire de cette ville. Ce programme était formulé dans les termes suivants : « Faire la biographie des princes et princesses dont les statues sont placées dans les fausses croisées des fa- çades méridionales et nord de la Halle, au nombre de trente et une. » L'ouvrage sera écrit au point de vue de l’histoire d'Ypres et formera pour ainsi dire l’histoire de cette ville sous le gouvernement de ces princes; aussi l’auteur, tout en tenant compte des détails biographiques et des faits gé- néraux, S'attachera-t-1l spécialement à décrire les événe- ments de toute nature dont la ville d’Ypres fut le théâtre ou auxquels elle prit une part directe ou indirecte. » 1 ne perdra pas de vue les points suivants, savoir : » Histoire civile. — Institutions civiles, — politiques, — administratives, — priviléges octroyés ou modifiés, — taxes, — finances, — topographie et agrandissements suc- cessifs de la ville. (174) » Histoire des corporations. — Création, organisation, — statuts, — priviléges, — influence de ces corporations sur les institutions et les événements. » Histoire industrielle et commerciale. — Naissance des industries, — leur développement rapide, — leur déca- dence, — causes, — priviléges, — trailés, — voies de communication, — population à diverses époques. » Histoire militaire. — Organisation militaire de la bourgeoisie, — gildes, — combats auxquels les Yprois prirent part sous leurs comtes, — siéges, — troubles, — émeutes, — massacres. » Histoire religieuse. — Fondation des abbayes et cou- vents, — construction des églises, — priviléges du clergé séculier et régulier, — institutions de charité. » Monuments et édifices publics. —- Dates de leur con- truction, — leur destination, etc. » L'auteur donnera quelques détails sur les hommes remarquables nés ou ayant passé une partie de leur vie à Ypres. » L'ouvrage formera trente el un chapitres; chaque cha- pitre contiendra la biographie d’un prince et d’une prin- cesse, ainsi que l’histoire des événements , etc., ete., qui se sont passés sous leur règne, décrits dans l’ordre d’idées et avec les détails indiqués plus haut. » Enfin, l'ouvrage sera précédé d’une introduction in+ diquant à grands traits l’époque de la construction de la Halle, les restaurations qu’elle a subies, même en dernier lieu, sa destination à diverses époques. Une descripüon de ce monument et des quarante-huit statues qui la déco- rent. » k LA ‘4 US LA SUN 5 X 2 Fa ie (133) Happort de M. Carton. « L’active et intelligente administration communale d’Ypres a pris l'initiative de plusieurs mesures qui mérite- raient d’être imitées par nos autres villes de Flandre. Elle à compris que ses concitoyens, en la choisissant, ne lui confiaient pas seulement leurs intérêts présents, le développement de leur industrie, de leur commerce, la prospérité de la ville et sa part dans le bien-être du pays, mais qu’ils lui remettaient en même temps le dépôt sacré de son passé, l'honorable mission de conserver le souve- nir de son histoire, du rôle important qu’Ypres à joué dans les siècles passés, de son renom et de sa gloire. Ses magistrals ont accepté cette charge et la remplissent dignement. La belle église de Saint-Martin, autrefois la cathédrale d'Ypres, lorsque cette ville était la capitale de la West- Flandre et le siége d’un évêque, est restaurée en grande partie, et s'élève à présent comme jadis, belle, fière et majestueuse au milieu de la ville, protestation publique de sa foi et de son espérance en Dieu. La Halle, qui rivalise avantageusement avec tout ce que le moyen âge nous a légué de beaux monuments civils, est rétablie dans son style primitif et de plus ornéedes statues de nos comtes et comtesses. L'idée de compléter ce monument en plaçant dans cha- cune de ses fenêtres murées une statue de nos princes, fait honneur à la ville : c’est une expression de la recon- naissance que l’on conserve d'eux, un excellent moyen de rappeler les actes qu'ils ont posés en faveur de la cité, les UT Pl ( 176 ) événements qui se sont passés sous leur règne, le souve- nir des monuments dont ils ont doté Ypres et des institu- tions qui y ont été fondées sous leur gouvernement. L'administration avait autre chose encore à faire. La ville possède un riche dépôt d’archives. Ce que le respectable M. Lambin en avait fait connaître au public excita vivement l'attention du pays et des pays avec lesquels la Flandre avait eu des rapports. Tous espé- raient y trouver des éclaireissements sur des points ob- scurs de leur histoire, tous avaient des documents à lui demander. La ville, la première, était intéressée à ce que le dépouillement de ce trésor se fit par un homme com- pétent : ses annales, sa chronique, les noms de ses grands hommes, de ses bienfaiteurs et leurs œuvres étaient là ensevelis sous une poudre séculaire. M. Alphonse Vanden- peereboom, actuellement bourgmestre de la ville, eut le bonheur de trouver dans M. Diegerickx, l’homme savant et laborieux, linfatigable investigateur qu'il lui fallait pour répondre à l'attente et aux vœux. L’inventaire d’un nombre considérable de pièces, en plusieurs volumes, a paru; des documents nombreux ont été publiés par lui dans les revues et les mémoires de dif- férentes sociétés savantes du pays et de l'étranger. Aussi l'administration de la ville a-t-elle pensé que le temps était arrivé de coordonner tout ce que les recherches fai- tes ont révélé, et de mettre au concours la rédaction d’une histoire de la ville et de ses institutions. L'administration de la ville d’Ypres consulte l’Académie sur la position de la question et la prie de vouloir bien accepter la mission de juger les mémoires des concur- rents. Vous nous avez chargé de vous faire un rapport sur ces demandes. LÉ lus Va Var er) durs La question de concours est vaste, mais en discutant les différentes matières qu'elle signale comme entrant essentiellement dans sa solution, je suis arrivé à la con- clusion que le programme ne sort pas des limites conve- nables. Il m'a paru cependant, Messieurs, qu’il y a lieu d’expli- quer plus nettement les intentions de l'administration communale, sur lesquelles les concurrents pourraient peut-être se méprendre à la simple lecture du pro- gramme. Dans la lettre de M. le Ministre de l’intérieur, il est dit que l’on demande une histoire des comtes et comtesses de Flandre, au point de vue de l'histoire d'Ypres. Dans le programme du concours, on expose la question dans ces termes : Faire la biographie des princes et prin- cesses dont les statues sont placées dans les fausses croi- sées des façades au nord et au midi de la Halle. I semble- rait résulter de cette formule que ce que l’on demande est avant tout une histoire ou biographie des comtes et des comtesses ; Or, c'est là une erreur; la biographie et la vie des comtes sont très-connues; elles ont été bien décrites par plusieurs de nos savants. Les concurrents me paraissent donc devoir remarquer que cette partie de leur travail est de beaucoup la moins importante. Tout en tenant compte des détails biographiques sur les comtes et des faits géné- raux de leur gouvernement, ils doivènt s'attacher spécia- lement à décrire les événements de toute nature dont la ville fut le théâtre, à constater la part directe ou indirecte que les Yprois prirent dans les actes politiques du pays et l'influence des comtes sur les intérêts de leur ville, Le programme fixe le nombre des chapitres à trente et us, et stipule que chaque chapitre contiendra la biogra- 2° SÉRIE, TOME IX. , 12 (178 ) phie d'un prince et d’une princesse. J'ose conseiller fe laisser la division du mémoire à la sagacité de l’auteur. La marche de l’histoire, surtout dans ces fortes communes de la Flandre, au moyen âge, dépend moins de l'indi- vidualité du prince que de la vigoureuse iniliative du peuple appuyé sur ses droits et ses priviléges. | Si l’auteur était forcé d'interrompre à chaque succession d'un comte, le développement des idées et des faits d’une époque, l'histoire manquerait souvent d'unité et de clarté. L'histoire de la ville doit être décrite jusqu’au règne de Philippe II exclusivement. Tels sont les termes du pro- gramme. Je ne comprends pas la raison de l'exclusion de ce règne; je crois qu'il est essentiel, au contraire, de le faire figurer dans l’histoire qui va devenir l’objet d'un concours. Au moyen âge, la ville atteignait un haut degré de pros- périté; ses plus beaux monuments, ses plus importantes institutions datent de cette époque. À ces jours de splen- deur , de richesse, de bonheur, succédèrent le dépérisse- ment , la déchéance du commerce et de l’industrie; mais Charles-Quint les releva et ramena une ère de prospérité relative qui se serait probablement développée sous sa puissante impulsion, si les guerres de religion n'étaient vénues entraver les vues du grand Empereur, surtout sous le règne de son fils Philippe IT. La position actuelle de la ville, l’abaissement de son importance, le délabrement de ses monuments, la dispa- rilion d’un grand nombre de ses institutions; la destruc- tion d’une quantité considérable d'œuvres d'art, tout eela date de ces affreuses gucrres et s'explique par elles. Aux faits qui se passèrent sous ce règne finit la pre- mière et la plus importante partie de l'histoire d'Ypres ; ( 179 ) ils expliquent les causes de sa déchéance et rendent compte de son état actuel. L'histoire de la ville jusqu'au règne de Philippe I in- clus forme donc un tout inséparable; exclure ce règne ce serait finir cette histoire en l'air. Je crois donc devoir vous proposer de dire que, en acceptant le jugement du concours, vous Invitez les auteurs du programme de changer le mot: jusqu'au règne de Philippe IT exclusive- ment en inclusivement. » | Eapport de BE. le baron J. de Suini-Genois. « Je me rallie entièrement aux conclusions raisonnées prises par M. le chanoine Carton, et j'insiste particulière- ment avec lui sur la nécessité de laisser aux concurrents le soin de diviser leur Mémoire comme ils l’entendront; mais je n'admets pas la variante qui consisterait à faire entrer le règne de Philippe IT dans le programme du con- cours, en substituant le mot inclusivement à exclusive- ment. » Happosrt de M. Pe Smet. « Je suis parfaitement d'accord avee mes deux savants confrères pour proposer à la classe d'accepter le jugement du concours que veut ouvrir l'administration communale _ d'Ypres; mais je pense avec eux qu’il faudrait la prier de modifier son programme. Un ouvrage composé dé trente et un chapitres, dont chacun contiendrait la biographie d'un prince et d’une princesse, dans leurs rapports avec ( 180 ) la ville d'Ypres, manquerait absolument, me paraît-il, d'unité et de proportions. Sous tel comte, en effet, on ne trouve rien ou presque rien qui mérite d’être cité au point de vue de l’ancien chef-lieu de la West-Flandre, tandis que sous Lel autre il s’est passé bien des événements d’un haut intérêt pour son histoire. Il faut done nécessaire- ment laisser aux concurrents là liberté de diviser leur travail de la manière qui leur paraîtra la plus convenable. Je crois, comme M. le chanoine Carton, que leur ouvrage serait réellement incomplet, s'il ne comprenait pas le règne de Philippe Il, au moins jusqu’à la restauration de son pouvoir dans les Flandres. Mais la statue de ce prince ne figure point parmi celles qui décorent la Halle d'Ypres el, par conséquent, en se lenant aux termes du pro- gramme, son règne doit être exclu comme son elligie. » Sans statuer sur la divergence qui se remarque dans les conclusions de trois rapports précédents, la classe des leutres décide qu’ils seront transmis à M. le Ministre de l'intérieur. Notice sur un Psautier manuscrit du IX" siècle; par M. Namur, de Luxembourg. Bappost de FE. Bormans. « M. Namur, professeur bibliothécaire à l'athénée de Luxembourg, a communiqué à la classe une notice his- torico-bibliographique sur un psautlier écrit en lettres d'or, provenant de l’ancienne abbaye de Saint-Hubert, mais appartenant aujourd'hui à M. le procureur d'État Neumann. Il a joint à sa notice des fac-simile, des des- ( 181 ) Sins et des photographies représentant l’écrilure et les ornements tant extérieurs qu'intérieurs du livre. Ces appendices , M. Namur demande qu'on les lui ren- voie, comme étant la propriété de la société archéolo- gique du Luxembourg, qui a bien voulu les lui confier. La notice même se compose de deux parties : l’une - descriptive, l’autre historique. La partie descriptive, dans laquelle M. Namur examine le contenu du livre, ne vaut pas la description qu’en a donnée Dom Martène, dans le Second voyage liltéraire, pp. 156 et suivantes; elle n’est ni aussi complète, ni même exacte. Ainsi dans le huitième vers sur David, au lieu de Organa, M. Namur a lu Arcana, que le sens et le mètre repoussent également. Il ne donne de plus que quelques détails sur l'écriture et la forme des lettres initiales; en- core les observations qui les accompagnent ne sont-elles que ce que l’on trouve dans tous les traités de diploma- tique et de paléographie. La description de la reliure et du parchemin, quoique passablement longue, ne fournit pas non plus les éléments nécessaires pour résoudre les questions qui ont été soulevées depuis longtemps par rap- port à ce manuscrit. La partie historique n’a d'autre mérite que de nous apprendre à quel titre M. Neumann est aujourd hui le possesseur de ce précieux monument. Obligé de me servir de la main d'autrui pour mettre mes observations sur le papier, je préfère m'arrêter ici, en m'engageant à compléter ce rapport oralement. En attendant, j'ai l'honneur de proposer à la classe comme conclusion, d'adresser des remerciments à M. Na- mur pour sa communicalion, en lui renvoyant les acces- soires qu'il redemande. » HBanpport de MX, A, Eosgnet. « Je partage, sur le mérite du travail présenté à la classe, la manière de voir de mon savant confrère, M. Bor- mans, et Jadopte, en conséquence, les conclusions de son rapport. » Happort de M. le baron Jules de Saint-Genois. « Le travail de M. Namur, le zélé bibliothécaire de l’athénée de Luxembourg, a été rédigé avec tout le soin que comporte la description d’un manuserit aussi important, sous le rapport paléographique et de l'antiquité, que le Psautier de Saint-Hubert. On y reconnait une main habile, familiarisée depuis longtemps avec ces sortes d'études. Tout le monde ne connait pas la notice de ce précieux manuscril, faite il y a environ cent vingt-cinq ans par Dom Martène, dans son Second voyage littéraire. Nous ne saurions donc considérer comme des rediles les détails consignés dans ce mémoire, où M. Namur s'est peut-être abandonné à trop de prolixité, en voulant tout dire, mais qui, dans tous les cas, offre des particularités très-com- plètes et très-curieuses sur ce précieux manuscrit et sur les vicissitudes que son sort a subies avant de se trouver dans la possession de M. Neumann. Nos Bulletins et nos Mémoires renferment beaucoup de notices du même genre qui ne présentent pas l’intérêt de celle de M. Namur. Toutefois, si vous ordonnez l'impression de ce travail, rien n’empêcherait de supprimer les passages latins, déjà repro- 51" 1148 UMPAMIORERTESS ” : fi 1 4 TC AE P ( 185 ) duits par Martène, pp. 156-145, et auxquels M. Namur pourrait se contenter de renvoyer. Quant aux fac-simile d'écrilure qui accompagnent cette dissertation, nous re- connaissons volontiers qu'on en trouve de la même es- pèce dans les Éléments de paléographie de Léon de Wailly et dans la magnifique Paléographie universelle de Syl- vestre. D'autre part, la figure de l’empereur Lothaire, dont le dessin colorié a été joint au mémoire, diffère essentielle- ment, sous le rapport iconographique, de la figure du même empereur publiée par Charles Louandre, dans les Arts somptuaires au moyen ge; planches : 1. F, n°11 (4), d'après un livre des Évangiles, conservé à la Bibliothèque impériale à Paris, fonds Latin, n° 256. — Costume ct attributs, tout y est différent. Nous regrettons donc de ne pouvoir nous rallier aux conclusions quelque peu rigoureuses de nos honorables confrères, MM. Bormans et Borgnet. Nous eroyons, au contraire, que cette notice figurerait honorablement dans nos Mémoires, sans qu'il soit toutefois nécessaire d’y Joindre le fac-simile et les planches photographiques que M. Namur a cru pouvoir y annexer, en guise d'Ilustra- tions, et qui, nous l’avouons , occasionneraient des frais considérables à la classe. Nous opinons, par conséquent, pour que ce travail soit imprimé par l’Académie, avec la reproduction, à l’aide de la chromolithographie, de la figure de l’empereur Lo- thaire ; bien que celle-ci ait déjà paru, mais notablement embellie et modernisée, dans le Voyage de Martène. Quant (1) Paris, 1858, in-4. ( 184 ) aux inexactitudes signalées par M. Bormans, nous nous plaisons à croire que l’auteur tiendra à honneur de les faire disparaître de sa notice. » Après une longue discussion à ce sujet, il est décidé que le mémoire ne sera pas imprimé, et qu'on remerciera l’auteur pour la communication intéressante qu'il a bien voulu faire à l'Académie. * COMMUNICATIONS ET LECTURES. _—__— M. Th. Juste communique la note suivante : » Par une lettre que la classe a bien voulu accueillir dans le Bulletin de la séance du 1% août 1859, j'ai pris l'engage- ment de retracer la carrière politique des comtes d'Egmont et de Hornes. Deux raisons m'obligent à retarder l’aecom- plissement de cette tâche : premièrement, je n'ai jamais eu l'intention d'intervenir avec une dissertation purement polémique; secondement, au lieu de me borner à une simple notice, comme c'était d'abord mon projet, je me propose de faire un travail plus considérable, à l’aide des nombreux matériaux que j'ai pu réunir. Je poursuis aeti- vement cet ouvrage. » M Ne ou un | MM ( 185 ) La querre et la philosophie de l'histoire; par M. Thonissen, correspondant de l’Académie. I. Dans les nombreux et remarquables travaux sur la phi- losophie de l'histoire, publiés dans la première moitié du XIX°"* siècle, l’origine, la nature, le rôle, le but, les ré- sultats, en un mot, la mission de la guerre occupe invaria- blement une large place. Les causes de cette préoccupation constante des histo- riens et des philosophes ne sont pas difficiles à saisir. En- visagée des hauteurs où doit se placer l’homme qui s'im- pose la rude tâche d'étudier et de juger le mouvement progressif d’une longue série de siècles , la guerre est à la fois l’un des faits les plus grandioses et l’un des phénomè- nes les plus étranges de nos annales. L'homme aime la paix, et il a besoin de la paix. La guerre est en opposition avec les instincts les plus élevés de son âme, avec les affections les plus pures de son cœur, avec les enseignements les plus manifestes de sa raison. La guerre renverse les villes, dévaste les récoltes, épuise les richesses, anéantit en un jour le travail de tout un siècle. La guerre réclame des torrents de sang, décime les peuples et jette le deuil dans d'innombrables familles. Quelle est l'époque où l'homme ne se soit pas écrié: La paix est un bienfait, la guerre esi un fléau ? Et cependant, jusqu’à la fin du dernier siècle , la paix qu'on aime a été l'exception , la guerre qu’on abhorre à été la règle dans la vie de l'humanité! A toutes les époques, (186) sous toutes les latitudes, au sein des civilisations les plus diverses, nous trouvons les peuples sur les champs de ba- taille. Le long des fleuves, au fond des vallées, sur les rivages des mers, dans les gorges des montagnes, au mi- lieu des solitudes du désert, partout où l’homme a ren- contré l’homme, la terre est pour ainsi dire imbibée de sang (1). Comment expliquer la permanence et l’intensité de ces luttes fratricides ? Pourquoi la grande voix du christia- nisme, assez puissante pour faire tomber les chaînes des esclaves, n’a-t-elle pas réussi à mettre un terme à cette effroyable effusion de sang chrétien? Pourquoi la civilisa- tion occidentale, après avoir renversé tous les monuments de la barbarie paienne et de la barbarie féodale, n’a-t-elle pas établi le règne de l’ordre, du droit et de la jusuce : dans les relations internationales? Pourquoi n’a-t-elle pas fait pour les peuples ce qu'elle à fait pour les individus, les cités et les provinces? Pourquoi les guerres nationales sont-elles restées en honneur après la proseription des guerres privées? On vante les bienfaits et les charmes de la paix; on aime les joies douces et pures de la concorde; on exalte l'influence féconde des travaux immenses qui s’'accomplis- sent partout où la guerre cesse d'exercer ses ravages. Mais, aux yeux de l’immense majorité du peuple le plus civilisé, qu'est-ce que la gloire paisible du philosophe, du . (1) Dans un de ses premiers ouvrages, le comte de Mäistre s'est donné la peine de compter les années de guerre et les années de paix, depuis le déclin de le république romaine. C’est avec une pénible surprise qu’on y voit la permanence de la guerre et les rares apparitions de la paix. (V. Considéra- tions sur la France, p. 55 à 40; éd. belge, Goemacre, 1852.) ( 187,) savant, du littérateur et de l'artiste, à côté de la gloire retenlissante du général qui fait avancer les drapeaux de ses régiments sur des monceaux de cadavres? On accorde une estime silencieuse au penseur dont les longues et pé- nibles veilles agrandissent les idées , étendent le domaine et augmentent les forces de l’humanité. On élève des arcs de triomphe au soldat heureux qui réussit à faire couler à flots le sang le plus généreux des nations étrangères! Les poëtes maudissent le carnage et les dévastations que la guerre entraîne à sa suite; ils poussent des eris d'indignation quand ils voient l’homme convertir en arme meurtrière le fer que la nature lui a donné pour en faire l'instrument le plus précieux de son industrie. Et cepen- dant, qui pourrait compter les cordes de la Iyre usées sous les doigts des bardes chantant la guerre et les conquêtes? Quelle série de volumes ne pourrait-on pas publier à l'aide des strophes composées, dans toutes les langues anciennes et modernes, à la gloire des destructeurs des villes, des dominateurs des peuples, des fléaux de Dieu qui furent l'épouvante de leur siècle? Que d’épopées guerrières depuis l'Iiade d'Homère jusqu’à la Tanisiade de Pyrker! Mais où sont les épopées du travail et de la science ? En présence de cet amour contradictoire de l’ordre et du carnage, du travail et de la destruction, de la paix et de la guerre, un philosophe catholique se permit une hy- pothèse ingénieuse, que ses contemporains ont persiflée parce qu'ils n’en comprenaient pas la portée réelle. [l sup- pose qu'une intelligence supérieure, étrangère à notre globe, y vienne avec la permission de Dieu pour s’entre- tenir avec l’un de nous sur l’ordre qui règne dans les so- ciétés humaines. Parmi les choses curieuses qu’on lui ra- conte, on lui dit que la corruption et les vices répandus (188 ) sur la planète exigent que, dans certaines circonstances, l’homme meure par la main de l’homme; on ajoute quece droit de tuer sans crime n’est confié qu’à deux représen- tants de la puissance publique, le soldat et le bourreau. « L'un, ajoute-t-on, donne la mort aux coupables, con- » vaincus et condamnés; et ses exécutions sont heureu- » sement si rares, qu'un seul de ces ministres de mort » suffit dans une province. Quant aux soldats, iln'yena » jamais assez; car ils doivent tuer sans mesure, et tou- » Jours d’honnêtes gens. De ces deux tueurs de profession, » le soldat et l'exécuteur, l’un est fort honoré, et l'a tou- » Jours été parmi toutes les nations... ; l’autre, au con- » lraire, est tout aussi généralement déclaré infâme. » Devinez, je vous prie, sur qui tombe l’anathème? » L'habitant des astres, ignorant le charme magique attaché à la gloire militaire, donne la préférence au bourreau (1). Nous ne partageons pas l'avis de cette intelligence sidé- rale. Nous estimons le soldat; nous prouverons que l'es- time lui est due, et qu’il y aurait une injustice révoltante à le placer sur la même ligne que le bourreau. Mais nous n’en avons pas moins le droit de nous demander pourquoi l’Europe, après avoir extirpé la guerre entre les individus, n’éprouve aucune répugnance à ériger la force brutale en arbitre suprême el permanent des contestations qui sur- gissent entre les peuples. Est-ce une conséquence inévita- ble des infirmités de la nature humaine? Sommes-nous ici en présence d'une inexorable nécessité contre laquelle toutes les lumières de la raison seront à jamais impuis- santes? (1) Soirées de Saint-Petersbourg, p. 9; éd. Goemaere, 1855. PTT 1e 4 0 QUE ‘A. LE (189 ) IT. Aujourd'hui, comme à l'origine des lemps historiques, il est permis de dire avec le comte de Maistre : « Expliquez » pourquoi ce qu'il y a de plus honorable dans le monde, > au jugement de tout le genre humain sans exception, » est le droit de verser innocemment le sang innocent({).» Faut-il en conclure que, dans le cours de trente à qua- rante siècles, les idées des peuples sur la nature et les conséquences de la guerre soient restées invariablement les mêmes ? à En aucune manière. Les modifications radicales que ces idées ont subies, dans l'opinion des masses aussi bien que dans les théories des savants, doivent occuper une place considérable dans la philosophie de l’histoire. Citons quelques exemples. Voici un Grec qui s’écrie, au milieu des splendeurs ar- tistiques et littéraires du siècle de Périclès : « Il y a entre » tous les États une guerre toujours subsistante.. Ce » qu'on appelle ordinairement la paix n'est tel que de » nom, et dans le fait, sans qu’il y ait aucune déclaration » de guerre, chaque État est naturellement toujours armé » contre tous ceux qui l’environnent. » Quel est aujourd'hui le publieiste occupant une position élevée dans le monde littéraire; quel est le gouvernement ou le tribun qui oserait prétendre que le désordre, le car- nage, la dévastation, l'emploi de la force brutale, en un mot, la guerre sous tous ses aspects, forme la condition normale, l’état naturel des peuples dans leurs rapports (4) Soirées de Saint-Petersbourg, p. 14. ( 190 ) avec les nations voisines? Et cependant le Grec dont nous avons transcrit les paroles est l’un des génies les plus grands, les plus lumineux et les plus purs de l'antiquité : c'est Platon (1)! Voici un autre Grec qui esquisse le portrait d’un géné- ral digne de commander les armées d’un peuple libre. « Un bon général, dit-il, doit être rusé, voleur et rapace. Plus il fait de mal à la nation ennemie, plus il mérite de louanges. Il se conforme aux exigences de la justice en réduisant les populations vaincues à la dégradation de l'esclavage. » É Qu'on formule en ces termes le rôle et les devoirs des "généraux d'une armée moderne; qu'on place le vol et la rapine au nombre de leurs qualités supérieures; qu'on leur impose la mission de détruire pour toujours le bon- heur des femmes, des enfants, de toute la partie désar- mée de la nation ennemie. Ils briseront leurs épées pour ne pas se charger de ce rôle infàme! Et cependant, encore une fois, l’homme qui professait ces désolantes maximes était grand entre tous , et son nom, consacré par les hom- mages des siècles, rayonnera toujours dans les annales de l'esprit humain. C’était Socrate (2)! Et quel langage tenait-on au soldat vainqueur, le len- demain de la victoire? Lui recommandait-on le respect de la faiblesse, le maintien de l’ordre, l'amour de la disci- pline, le mépris du pillage? De telles idées n'étaient pas DS VE T (1) Lois, LI, p. 5; trad. de M. Cousin. (2) Les propositions que j'attribue à Socrate découlent directement des La suivants des as reset de Xénophon (V. IL. IL, c. 2, 2 etc. 6, 8 145 LU, ec. 1, S65E IV, c. 2, N 15; pp. 128) 200 el 522. Édit. Fe Utrecht, 1797). PVR Ÿ Ê . ‘in A { CIS l'apanage des siècles les plus brillants de l'antiquité! Loin d'imposer un frein aux convoitises brutales du soldat, on excilait sa Cupidilé, son orgueil, sa luxure, toutes ses passions et tous ses vices; on lui disait : « Nous possédons » un pays vaste et fertile; nous serons nourris par ceux » qui le cultivent ; nous avons des maisons, et, dans ces » maisons, tous les meubles qu'il faut. Que nul de nous » donc ne considère ces biens comme n'étant pas à lui; » car C'est une maxime élernelle chez tous les hommes » que, quand on prend une ville, tout ce qui se trouve » dans la ville, corps et biens, appartient aux vainqueurs. » Loin donc que vous détruisiez injustement les biens que » VOUS avez, Ce Sera une concession de votre philanthropie » d’en laisser quelque chose aux vaincus. » C'est mot pour mot le discours que l'esprit droit, ferme et pratique de Xénophon place sur les lèvres d’un roi dont il voulait faire le type idéal du conquérant et du prince (1)! Vingt-trois siècles se sont écoulés depuis le jour où l’au- teur de la Cyropédie traçait les lignes que nous venons de transcrire., Du haut de ses chaires, élevées par milliers, le christianisme a prêché le dogme de l’origine commune et de la fraternité des hommes. La religion et la philoso- phie ont adouci les mœurs, rectifié les idées, répandu les lumières. Une longue et coûteuse expérience nous a prouvé que, dans leurs joies et dans leurs douleurs, dans leurs profits et dans leurs pertes, les nations sont toujours plus ou moins solidaires. Et cependant, qui pourrait énumérer les craautés, les débauches et les crimes qui souilleraient le drapeau moderne, si le chef d'un grand empire, au (1) Cyropedie, 1. VIT, c. 5; trad. de M. Talbot, t. IT, p. 585. (19) moment d'entrer dans la capitale du peuple vaincu, adres- sait aux soldats, aigris par les privations et exaltés par la victoire, les paroles que Xénophon met dans la bouche de son prince idéal ? | Aussi les déplorables conséquences des guerres an- ciennes ne sont-elles que trop connues. Les villes réduites en cendres; les autels renversés; les soldats, c’est-à-dire l'élite du peuple, vendus à l’encan ; des populations en- lières arrachées à leurs foyers, privées de leurs richesses, abreuvées de tous les outrages et parquées, comme un vil bétail, dans les provinces éloignées du vainqueur; les fon- taines comblées et les arbres abattus, pour que les vents et les sables du désert ne rencontrent plus de résistance : tels étaient souvent le prix et le résultat de la victoire, les honneurs et l'éclat du triomphe (1) ! Ces horreurs devaient nécessairement devenir plus rares et plus odieuses après la prédication de la doctrine de paix, de fraternité, de concorde et d'amour qui forme l'essence de la morale évangélique; mais, — il importe de ne pas l'oublier, — même depuis l'admission incontestée du chris- tianisme en Europe, les idées des rois et des peuples sur les droits de la guerre ont successivement subi des modi- fications profondes. Citons encore un exemple, et, pour en rendre la signi- fication plus saisissante, renfermons-nous cette fois dans les limites étroites de la Belgique. (1) Le vainqueur n’exerçait pas toujours ses prétendus droits dans toute leur rigueur, Les Romains, entre autres, firent souvent preuve de modé- ration; mais ces exceptions ne portaient aucune atteinte à la règle. En droit, le vainqueur, ainsi que le dit Xénophon, disposait à son gré des corps et des biens des vaincus. (195) Un prince puissant a mis le siége devant une ville de 120,000 âmes. La plupart des défenseurs de la cité sont morts au pied des remparts, et les survivants ont pris la fuite pour se soustraire à l'atteinte de l'ennemi victorieux. Celui-ci franchit la brèche dans l'appareil de la force et du triomphe. Les prêtres, les moines, les femmes, les vieillards, .les enfants se pressent dans les rues et im- plorent à genoux la clémence du vainqueur; mais, l’œil enflammé par la haine, les traits contractés par la colère, le prince traverse celte foule suppliante sans daigner la regarder, et se dirige lentement vers la place de l'hôtel de ville. Arrivé devant l'édifice où, la veille encore, sié- geaient les magistrats qui avaient bravé ses ordres, il s'ar- rête, tire son épée et pousse un cri de triomphe. C'était le signal du massacre d'un peuple désarmé ! Quarante mille bourreaux, dignes soldats d'un tel maître, se dispersent dans toutes les directions. Le meurtre, le viol, le pillage, tous les crimes s’accomplissent impunément à la lumière du soleil. Un immense cri de détresse s'élève des maisons, des monastères, des églises, de tous les lieux où les fa- milles des vaincus ont vainement cherché un asile. Des ruisseaux de sang inondent les rues, et bientôt trente mille cadavres attestent l’éclatante vengeance du vainqueur. Mais celte vengeance n’est pas satisfaite encore! On réunit les survivants par dizaines, par vingtaines. On lie les en- fants aux mères, les époux aux épouses, les vieillards aux derniers représentants de leur race, et, du haut des ponts, on précipite ces fardeaux vivants dans le fleuve. Est-ce assez d'horreurs, assez de crimes? Non. La cité rebelle reste debout, et elle doit partager le sort de ses habitants. On dépouille les sanctuaires, on enlève les cloches des temples, on arrache le plomb des édifices, on brise Îles 2" SÉRIE, TOME IX. 1 G (195) marbres des tombeaux pour s'emparer des métaux dont ils sout ornés; puis, quand il n’y a plus de richesses à prendre, quand de longues files de chariots ont emporté jusqu'aux poutres des Loits, quatre mille soldats reçoi- vent des torches et deviennent les exécuteurs d'une der- nière vengeance. Le tigre couronné se retire alors; il se place sur une colline pour jouir de la vue des flammes qui s'élèvent, comme une montagne de feu, du sein de cette immense fournaise ! Quel est ce prince? Charles le Téméraire, Où se sont accomplies ces horreurs? A Liége. À quelle époque? A la fin du XV”* siècle de l’ère chrétienne! « Qu'on ne parle » pas de pardon, disait le Bourguignon. Maître, par le » droit de la guerre, de la vie et des biens de cette race » de rebelles, je puis les châtier à plaisir (4). » N’est-il pas évident que le prince qui, à la suite de toutes les révolutions du XIX"° siècle, oserait commettre ces alrocités et proclamer ces doctrines sauvages, serait mis immédiatement au ban de toutes les nations civilisées ? La guerre existe encore et la victoire distribue toujours. des lauriers enviés. Mais la guerre n’est plus ce qu’elle était dans la civilisation gréco-romaine, pas même ce qu'elle était au XV” siècle. Les idées chrétiennes ont adouci ses horreurs, circonscrit ses droits et limité ses ravages. Montesquieu à parfaitement résumé les tendances du droit des gens de l’Europe moderne, quand 1l a dit : « Les diverses nations doivent se faire dans la paix le » plus de bien, et, dans la guerre, le moins de mal qu'il (1) On trouve les détails de cet épisode de nos annales dans PÆZistoire de Liège du baron de Gerlache. OEuv. comp., t. IV, pp. 284 et suiv. (198 ) » est possible, sans nuire à leurs véritables intérêts (1). » HE. Mais le progrès a-t-il dit son dernier mot? Les conflits internationaux seront-ils éternellement réglés par le droit de la guerre, tel qu'il se trouve aujourd'hui admis et dé- terminé dans les usages diplomatiques de l'Europe? = Des philosophes, des savants, des jurisconsultes, un roi même, ont cru que l'extinction de la guerre et le maintien d'une paix perpétuelle entre les peuples civilisés n'avaient rien -d’impossible. IIS se sont efforcés de prouver que le progrès des lumières aura la puissance d'amener l'établis- sement d’une « cité des nations, » d’une « république chrétienne universelle (2). » Nous nous contenterons de jeter un rapide coup d'œil sur les systèmes imaginés par trois hommes de nature et de position très-diverses : l’abbé de Saint-Pierre en France, (1) Esprit. des Lois, 1. I, ch.IIL — On comprendra que j'ai dû me borner à l'indication de quelques traits saillants. Pour discuter ce sujet d'une manière approfondie, il faudrait passer en revue toute l’histoire du droit des gens. (2) Le roi auquel je viens de faire allusion est Henri IV. Sully, dans ses Mémoires (Économies royales), lui attribue le projet de partager l’Europe entre un certain nombre de puissances n’ayant rien à envier les unes aux autres du côté de l'égalité, ni rien à craindre du côté de l'équilibre. Un con- seil général, représentant tous les États de l'Europe, eût été chargé de se prononcer sur les querelles internationales, les intérêts fédéraux , etc. Sully _ ajoute que ce projet fut accueilli avec empressement par la reine Elisabeth, par Jacques [° et par plusieurs autres souverains de l'Europe. (Mémoires de Sully, t. VI, pp. 97 à 154. Ledoux, Paris, 1827). On sait que la véracité du récit de Sully, dans la matière qui nous occupe, a été sérieusement révoquée en doute. ( 196 } Jérémie Bentham en Angleterre, Emmanuel Kant en Al- . lemagne. | Le projet de paix perpétuelle de l’abbé de Saint-Pierre, publié en 1714, consiste dans les cinq articles suivants : | = ani = ere — El AE ES PEL ET a CRC VE VC LES ER OS — ne Te « 1. Il y aura désormais entre les souverains qui auront signé les articles suivants une alliance perpétuelle. Ils sont convenus de prendre pour point fondamental la possession actuelle et l’exécution des derniers traités, et se sont réciproquement promis, à la garantie les uns des autres, que chaque souverain qui aura signé ce traité fondamental sera toujours conservé, lui et sa famille, dans tout le territoire qu'il possède actuellement... Et afin de rendre la grande alliance plus solide en la ren- dant plus nombreuse, les grands alliés sont convenus que tous les souverains chrétiens seront invités d’y en- trer par la signature de ce traité fondamental. » 11, Chaque allié contribuera, à proportion des reve- nus actuels et des charges de l'État, à la sûreté et aux dépenses communes de la grande alliance. Cette contri- bution sera réglée chaque mois, par les plénipotentiai- res des grands alliés, dans le lieu de leur assemblée per- pétuelle, à la pluralité des voix pour la provision, et aux Lrois quarts des voix pour la décision définitive. » ut. Les grands alliés, pour terminer entre eux leurs différends présents et à venir, ont renoncé et renoncent pour jamais, pour eux et pour leurs successeurs, à la voie des armes, et sont convenus de prendre toujours dorénavant la voie de conciliation par la médiation du reste des grands alliés, dans le lieu de l'assemblée géné- rale. Et, en cas que cetle médiation n’ait pas de succés, ils sont convenus de s’en rapporter au jugement qui sera rendu par les plénipotentiaires des autres allés, ( 194) » perpétuellement assemblés, et à la pluralité des voix » pour la décision définitive, cinq ans après le jugement provisoire. » iv. Si quelqu'un d'entre les grands alliés refuse d'exécuter les jugements et les règlements de la grande alliance, négocie des traités contraires, fait des pré- paratifs de guerre, la grande alliance armera et agira contre lui offensivement, jusqu’à ce qu'il ait exécuté lesdits jugements ou règlements, ou donné süreté de réparer les torts causés par ses hostilités et de rembour- ser les frais de Ja guerre, suivant l'estimation qui en sera faite par les commissaires de la grande alliance. » v. Les alliés sont convenus que les plénipotentiaires, à la pluralité des voix pour la décision définitive, régle- ront dans leur assemblée perpétuelle tous les articles qui seront jugés nécessaires et importants pour procurer à la grande alliance plus de solidité, plus de sûreté, et tous les autres avantages possibles; mais l’on ne pourra ja- mais rien changer à ces cinq articles fondamentaux que du consentement unanime de tous les alliés (1). » On sait qu’un immense éclat de rire accueillit la publi- cation de ces idées généreuses, dictées cependant par Y KR” 19 5 CONS REA Ge Gr DE ON (1) Le Projet de paix perpétuelle fut publié en 5 vol. in-19, dont le pre- mier parut en 1714 et le dernier en 1716. L’auteur en fit un abrégé en 1728 sous ce titre : Æbrégé du projet de paix perpétuelle, inventé par le roi Henri le Grand; approuvé par la reine Élisabeth, par le roi Jacques son successeur et par divers autres potentats; approprié à l’état présent des affaires générales de l’Europe; démontré infiniment avantageux pour tous les hommes nés et à naître en général, et en particulier pour tous les souverains et pour les maisons souveraines. Cet abrégé, auquel nous renvoyons dans les notes, forme le premier votume et les quatre-vingt premières pages du deuxième volume des ouvrages politiques de l'abbé de Saint-Pierre, publiés à Amsterdam, chez D. Beman, en 1735, ( 198 ) l'amour le plus pur et le plus désintéressé de l'humanité. Dédains des hommes d'État, ricanements des hommes de guerre, moqueries des courtisans, épigrammes des poëtes, toutes les déceptions arrivèrent à la fois, et, de l’aveu des amis mêmes de l’auteur, le Projet de paix perpétuelle fut placé à quelques degrés au-dessous de l’Utopie de Morus. L'auteur, il est vrai, procédant avec une inconcevable paivelé, s'était singulièrement trompé sur le caractère pratique de son œuvre de prédilection. Il avait dédié un abrégé de son livre à Louis XV, en pressant vivement ce prince de ne pas laisser échapper « l'honneur d’exécuter » ce magnifique projet. » Il s'était flatté d'obtenir l’assen- timent immédiat de tous les monarques de l’Europe, en proposant d'ajouter au traité d'alliance un article supplé- mentaire , portant « que les souverains pourraient dis- » poser pour leur dépense particulière et domestique de » la moitié du revenu que leur produirait le retranche- » ment de la dépense militaire (1). » Il avait poussé les précaulions au point de promettre à tous les ministres de la guerre une pension considérable, pour eux et leurs en- fants , afin de les dédommager de la perte de leur em- ploi (2). Il avait commis l'étrange inconséquence de vou- loir inaugurer l'ère de la paix perpétuelle par une guerre acharnée, faite à tous ceux, peuples ou rois, qui refuse- raient d'entrer dans la grande alliance (5). Enfin, par sa prétention de vouloir garantir les princes en même temps contre les attaques du dehors et contre les révolutions du dedans, il avait plus que doublé les difficultés déjà si con- a ( 199 ) sidérables de sa tâche (1). Mais les cris et les rires d'une génération frivole , qui ne soupçonnait pas même la gran- deur du problème, n'en étaieut pas moins aussi injustes que déplacés. Au milieu de ses illusions et de ses erreurs, l'abbé de Saint-Pierre avait émis une foule d'idées saines el fécondes qui lui vaudront, dans un avenir peu éloigné, l'approbation et la reconnaissance de la postérité. La pen- sée d'établir un rapport harmonique et constant entre la vie séparée des peuples et la vie collective de l'humanité ; l'institution d'un tribunal européen, entretenu à frais communs, siégeant en permanence et pourvu d'une force fédérale assez puissante pour faire respecter ses décisions; le projet de prévenir l’envahissement du bien d'autrui, en mettant l’envahisseur, quel qu'il soit, en présence de tous les autres États réunis; la prétention hautement manifes- tée de rendre le commerce entre toutes les nations chré- tiennes parfaitement sûr, libre et inaltérable (2); le noble et généreux conseil de préférer aux agrandissements de territoire, obtenus par la violence et la ruse, ces autres agrandissements qu'on peut conquérir « à l'intérieur, » par l'amélioration des lois, la diffusion des lumières et le développement pacifique des ressources du pays (3) : tout cela, entremêlé de la peinture vive et saisissante des maux de la guerre et des bienfaits de la paix, ne méritait pas les dédains d'une société insouciante qui marchait gaiement vers l’abime. Soixante et dix-huit ans plus tard, en 1795, au milieu des guerres et des troubles qui suivirent la révolution fran- (1) TE, pp. 21, 51,60, 84,86 et suiv. PN'ET; p.61. (5) T. I, pp. 122, 152 et suiv. ( 200 ) çaise, l'abbé de Saint-Pierre et ses œuvres étaient com- plétement oubliés, lorsque la thèse de la paix perpétuelle atlira l'attention du génie lucide et vigoureux du philo- sophe de Kænigsberg (1). | De même que le philanthrope français, Kant, invoquant les leçons de l’histoire, commence par rappeler que les traités de paix n'ont été que des trêves; d’où il conclut, comme son prédécesseur , que les rapports des peuples ci- vilisés doivent être établis sur des bases nouvelles, si l’on veut mettre un terme aux calamités qui, depuis les âges primitifs jusqu’à la fin du XVIEL"* siècle, ont constamment affligé notre race. Lui aussi envisage la paix perpétuelle comme possible; mais, loin de partager l’optimisme de l'abbé de Saint-Pierre, il la voit à une incommensurable distance , que les progrès constants de l'humanité pourront seuls abréger (2). On remarque une différence non moins sensible dans les arguments qu’il invoque à l'appui de son système. L'abbé de Saint-Pierre se fonde principalement sur les avantages qu'une paix non interrompue procureralt aux souverains et aux peuples. Kant, sans méconnaître la va- leur de ces profits nationaux, s'appuie exclusivement sur les exigences de la nature, du droit et de la raison. Il voit dans la guerre un défaut de civilisation , une source d’avi- lissement pour l'humanité. Les individus ayant renoncé à la liberté anarchique des sauvages, 1] veut que les peu- ples forment de même une alliance pacifique (/œdus paci- (1) L’opuscule de Kant, intitulé Zum ewigen Frieden, Ein philosophi- scher Entwurf, forme les pp. 229 à 291 du t. VII des Œuv. compl. (édit. Rosenkranz et Schubert, Leipzig, 1858). (2) P. 291 ên fin. (204) ficum) et organisent, en se soumettant à des lois communes, l'État des États, la cité des nations (civitas gentium). Il prouve que la guerre, expression de la force brutale, ne saurait être admise comme voie de droit; et, puisque l'humanité s’avance lentement mais visiblement vers le règne du droit, 1l espère que l'avenir verra se former une grande confédération d'Étaté libres, dont tous les membres se garantiront réciproquement contre le retour des barbaries du passé (1). Le projet de Kant se compose de six articles prélimi- naires et de trois articles définitifs. On commencera par faire entrer les premiers dans le droit des gens de l’Europe; puis on adoptera les seconds comme autant de bases de la paix perpétuelle. Les articles préliminaires sont : « 1. On ne regardera pas comme valide le traité de » paix, où les parties se réserveraient tacitement la ma- >» tière d'une guerre nouvelle. » 1. Aucun État indépendant, grand ou petit, ne » pourra passer sous la domination d’un autre État, ni » par succession, ni par échange, ni par achat, n1 par » donation. . » an. Les armées régulières et permanentes (miles per- » petuus) doivent être entièrement supprimées avec le » temps. » 1V. On ne contractera aucune dette nationale en vue » de se procurer des ressources pour défendre les intérêts » de l’État au dehors. » v. Aucun État n’interviendra de force dans la con- » stitution ou le gouvernement d’un autre État. (1) PP. 247 et suiv. (202 ) » vi. Aucun Élat en guerre avec un autre ne se per » mettra des hostilités qui auraient pour conséquence » de rendre impossible la confiance réciproque à l'heure » où l’on Songéra à la paix : telles que l’emploi d'assassins » on d'empoisonneurs, la violation d’une capitulation, » l’encouragement à la trahison dans l'État envahi (1). » Les articles définitifs sont rédigés de la manière suivante : « 1. La constitution de chaque État doit être représen- > talive (2). _» ar. Ïl faut que le droit des gens (Vôlkerrecht) soit » fondé sur une fédération d’États libres. » qi. Le droit cosmopolitique { Weltbürgerrecht) se » bornera aux conditions d’une hospilalité universelle (3). » Rien n'était moins pacifique que la situation de l’Eu- rope, au moment où Kant se livrait à ces spéculations philosophiques sur la possibilité d'une paix perpétuelle. Les guerres de la République avaient fait couler des tor- rents de sang; mille symptômes annonçaient le voisinage de la crise universelle d’où devaient sortir, quelques an- (1) Pp. 252 et suiv. | (2) Kant se sert du mot républicaine (republicanisch); mais cette épi- thète ne rend que très-imparfaitement sa pensée. Il considère comme répu= blicaine toute constitution dans laquelle le pouvoir législatif est séparé du pouvoir exécutif. Il dit, en termes formels, qu'on ne doit pas confondre la constitution républicaine avec la constitution démocratique (pp. 245 et 244). Je crois avoir exactement traduit sa pensée en me servant de l'expres- sion constitution représentative. Quant aux motifs pour lesquels Kant donne la préférence à ce régime, ils sont on ne peut plus simples. Il est, dit-il, de l'essence de ce gouvernement que la guerre ne puisse se faire sans l’assentiment des citoyens; ceux-ci doivent donc s’attirer volontairement toutes les calamités de la guerre, etc. (P. 245.) É (5) Kant entend ici par droit d’hospitalité celui de ne pas être traité en ennemi dans le pays où l’on arrive. (P. 255.) N l'A /E F, ( 203 ) nées plus tard, à la suite du bouleversement de tous les rapports internationaux, les guerres plus sanglantes en- core de l'Empire. Et cependant, vers la même époque, l'idée de la paix perpétuelle avait préoccupé un homme que personne n’accusera de sacrifier à l’imagination; un Jurisconsulte profond, qui cherchait avant tout le côté positif et pratique des choses; un philosophe qui voyait dans le profit personnel la source de nos opinions et le mobile de tous nos actes; en un mot, Jérémie Bentham. Après avoir recherché les causes des guerres et les moyens de les prévenir, le restaurateur de l’école utili- taire fait aboutir son système à l'institution d’une diète générale, laquelle, sauf quelques changements sans im- portance, n'est autre chose que le tribunal fédéral ima- giné par l'abbé de Saint-Pierre. La diète représenterait tous les États civilisés, et chacun d’eux y enverrait deux députés. Elle aurait pour mission de vider les conflits qui surgiraient entre les peuples confédérés, en prenant pour base de’ses décisions un code international perfectionné, consacrant dans son texte tous les usages que les progrès de la civilisation ont fait admettre dans la diplomatie euro- péenne. La sentence rendue recevrait la publicité la plus étendue et la plus solennelle; et si, malgré cet appel à la conscience publique, le prince ou le peuple condamné refusait de se soumettre, des contingents fournis par les autres États seraient chargés d'amener, par l'emploi de la force, l'exécution du jugement prononcé par l’aréopage européen (1). (1) Works of Jeremy Bentham, now first collected under the super- intendence of his executor John Bowring, t. VIT, pp. 558 et suiv. (Lon- don; 1859.) ( 204 ) | Tel était l'état du problème à la fin du XVIHE" siècle. IV. Ainsi qu'on devait s’y attendre, l’abbé de Saint-Pierre, Kant et Bentham ont trouvé de nombreux contradicteurs parmi les philosophes, les historiens et les jurisconsultes du siècle actuel. Les uns repoussent la paix perpétuelle comme incompatible avec les dogmes et les traditions du christianisme; les autres, laissant de côté la question reli- gieuse, se prévalent des malheurs interminables du passé, des luttes meurtrières du présent, des orages menaçants qui s’amassent à l’horizon de l'avenir, pour déclarer l’exur- pation de la guerre à jamais impossible. Les publicistes qui repoussent la paix perpétuelle au nom des idées chrétiennes trouvent leur personnification la plus brillante et la plus énergique dans lillustre auteur des Soirées de Saint-Pétersbourg. « L'homme étant donné avec sa raison, ses sentiments » el ses affections, ü n'y a pas moyen, dit le comte de Mais- » tre, d'expliquer comment la querre est possible humaine- » ment. Pourquoi toutes les nations sont-elles demeurées respectivement dans l’état de nature, sans avoir fait jamais un seul essai, une seule tentative pour en sor- ur? Comment la raisonnante Europe n’a-t-elle jamais rien tenté en ce genre? Pourquoi les nations n'ont- elles pas eu autant d'esprit ou autant de bonheur que les individus; et comment ne sont-elles jamais convenues d’une société générale pour terminer les querelles des nations, comme elles sont convenues d’une souveraineté nationale pour terminer celles des particuliers? » II ajoute ; « Toutes les raisons imaginables, pour établir que = SPA RE “RES RS CES - = ( 205 ) cette société (des nations) est impossible, militeront de même contre la société des individus. L’argument qu’on Urerait de l’impraticable universalité qu'il faudrait don- ner à la grande souveraineté, n'aurait point de force; car il est faux qu’elle dût embrasser l’univers. Les na- tions sont suffisamment classées et divisées par les fleuves, par les mers, par les montagnes, par les reli- gions, et par les langues surtout qui ont plus ou moins d’affinité. Et quand un certain nombre de nations con- viendraient seules de passer à l’état de civilisation, ce serait déjà un grand pas de fait en faveur de l’huma- nité (4)! >» Pourquoi donc les peuples ne se sont-ils pas constam- ment préoccupés de l'extinction définitive de la guerre, puisque cette œuvre, malgré ses proportions colossales, n'offre rien d’impossible en soi? Le comte de Maistre ré- pond : « Les fonctions du soldat tiennent à une grande loi » » > » du monde spirituel... La guerre résulte d’une loi occulte et terrible qui a besoin du sang humain. Partout, dans le vaste domaine de la nature, il règne une violence manifeste, une sorte de rage prescrite qui arme tous Îles êtres în mutua funera. Une force, à la fois cachée et palpable, se montre continuellement occupée à mettre à découvert le principe de la vie par des moyens vio- lents. Mais cette loi s’arrêtera-t-elle à l'homme? Non ——— (1) Soirées de Saint-Pétersbourg, septième entretien, t. IT, pp. 7, 14, 16 (édit. belze de 1853). Le comte de Maistre ne se conforme pas rigoureu- sement à la vérité historique, quand il dit que l’Europe n’a jamais rien tenté en ce genre. lle a tenté, mais elle n’a pas réussi. Pour ne pas sortir des temps modernes, n'est-ce rien que la conféderation germanique ? Ce qui est vrai, c’est que les essais n’ont été que partiels et insuffisants. “. ” ( 206 ) » sans doute. Cependant quel être exterminera celui qui » les exterminera tous? Lui. C’est l’homme qui est chargé » d'égorger l'homme. Mais comment pourra-t-il accomplir » Ja loi, lui qui est un être moral et miséricordieux ; lui » qui est né pour aimer; lui qui pleure sur les autres » comme sur lui-même? C’est la guerre qui accomplira » le décret. N’entendez-vous pas la terré qui crie et de- » mande du sang? Le sang des animaux ne lui suffit pas, » ni même celui des coupables versé par le glaive des » lois... La terre entière, continuellement imbibée de » sang, n'est qu'un autel immense où tout ce qui vit doit » être immolé sans fin, sans mesure, sans relâche, jJus- » qu'à la consommation des siècles, jusqu’à l'extinction » du mal, jusqu'à la mort de la mort? La guerre est » divine en elle-même, puisqu'elle est une des grandes lois » du monde. La guerre est divine par ses conséquences » d'un ordre surnaturel tant générales que particulières... » La guerre est divine dans la gloire mystérieuse qui l'en- » vironne, et dans l'attrait non moins inexplicable qui » nous y porte... Dieu aime à s'appeler le Dieu des armées, » le Dieu de la guerre (1). » Il nous sera facile de prouver que rien n'est moins chré- tien que cette théorie soi-disant chrétienne de la guerre; mais il importe de rappeler d’abord les arguments des publicistes qui, mieux avisés, placent le débat sur le ter- rain des faits, des intérêts et des passions qu’on rencontre inévitablement dans la vie des peuples. Évidemment le problème n’est pas même discutable aux yeux des hommes d'État qui nient le progrès général et (1) Soirées de Saint-Pétersbourg, t. I, pp. 16, 22, 25et 54. Lilo RSS pe (207 ) continu de l'humanité. Ils disent que le XVI" siècle, qui vit paraître le projet philanthropique de l’abbé de Saint- Pierre, subit quarante-huit années de guerres acharnées. Ils ajoutent que les spéculations pacifiques de Kant et de Bentham furent suivies de vingt-cinq années de révolu- lions et de batailles, depuis le Nil jusqu'à la Baltique, depuis Lisbonne jusqu’à Moscou. [ls croient avoir tout dit quand ils ont cité les immenses déceptions qu'éprouvèrent les membres de tous ces Congrés de la paix, annonçant le terme du règne de la force au début de la crise européenne de 1848. Pour eux, nous le répétons, la discussion n'est pas possible; car, niant la grande loi historique du pro- grès, 1lS voient dans le passé le type invariable et éternel de l'avenir. Mais il est une autre classe d'hommes qui, tout en ad- mettant le perfectionnement graduel de l'humanité, n’en croient pas moins à l’éternelle durée de la guerre et ran- gent, eux aussi, au nombre des rêves des gens de bien, tous les moyens imaginés pour restreindre ses ravages. Ils n'admettent ni la possibilité ni l'efficacité de l’établis- sement d'un tribunal souverain des peuples. Ils soutien- nent que les intérêts et les passions opposés de ses mem- bres amèneraient des débats, des luttes, des tirailléments et des coalitions au sein même de cet aréopage européen, et par suite sa dissolution et le recours à la force, c’est-à- dire la situation actuelle et la guerre, Ils ne nient pas en- Uérement la valeur des espérances que Kant a fondées sur la généralisation des gouvernements représentatifs; mais ils répondent que les peuples ont leurs ambitions, leurs haines , leurs colères et leurs caprices, aussi bien que les rois, alors surtout que les luttes inévitables des partis ont pour résultat de faire envisager, de points de vue tout | (208 ) à fait opposés, l'honneur, les intérêts et la sécurité de la nation. Ils ont aperçu l'influence sans cesse croissante de la morale et de la raison dans les rapports internatio- naux; mais ils persistent à dire que, quels que soient lés progrès qu’on réalise dans cette sphère, la force physique sera toujours l'arbitre suprême des querelles qui surgis- sent entre les peuples voisins. « Ce ne seront jamais, » disent-ils, les idées qui gouverneront le monde, car » l'homme n’est pas une intelligence pure; ce seront » toujours, plus ou moins, les besoins, les penchants » et les passions; les passions sont immortelles, parce » qu’elles renaissent avec les générations qui les éprou- » vent et les objets qui les inspirent et les nourrissent. » Confondant ici leurs objections avec celles des parusans arriérés de l’immobilité sociale, ils font remarquer que la logique inexorable des faits a toujours triomphé des lamentations des philosophes et des tendances naturelle- ment miséricordieuses du cœur humain; puis, pour com- pléter leur tâche, 1ls s'étendent avec complaisance sur les avantages moraux que la guerre procure aux peuples, en compensation des malheurs dont elle les accable dans le domaine des intérêts matériels. Frédéric Ancillon, qui a brillamment développé le système, termine sa disserta- tion par les paroles suivantes, qui ne seraient pas dépla- cées dans une apologie des batailles : « La paix amène » l’opulence, l’opulence multiplie les plaisirs des sens, » et l’habitude de ces plaisirs produit la mollesse et » l’égoisme. Acquérir et jouir devient la devise de tout » le monde; les âmes s’énervent et les caractères se dé- » gradent., La guerre et les malheurs qu’elle entraîne » à sa suite développent des vertus mâles et fortes : » sans elle le courage, la patience, la fermeté, le dé- 5 Qi POS D f 0] L di de Ÿ (Le . æ ( 209 ) vouement, le mépris de la mort disparaîtraient de dessus la terre. Les classes mêmes qui ne prennent aucune part aux combats apprennent à s'imposer des privations et à faire des sacrifices. Ces sacrifices sont forcés , sans doute; mais, en les faisant, l’âme acquiert de la vigueur, apprend à vouloir, et vient à en faire de volontaires ; l'existence et les biens devenant précaires, on sait mépriser ce qu'on peut perdre d’un moment à l'autre. Chez un peuple civilisé jusqu’à la corruption, il faut quelquefois que l'État entier périclite pour que l'esprit public se réveille, et c’est le cas de dire ce que Thémistocle disait aux Athéniens : Nous périssions, si nous n’eussions péri (1). » NE 5 N. à Y HO Ÿ VV Y % V b où L Qu’y a-t-il de vrai dans ces systèmes contradictoires? Quels sont les faits et les idées qu'il faut admettre pour ne pas aboutir à la négation de la loi du progrès histo- rique ? Quelles sont les doctrines et les espérances qu'il faut rejeter pour ne pas se placer sous la bannière des utopistes modernes? Écartons d’abord la théorie prétendûment chrétienne du comte de Maistre. * Quand on réduit le système à sa dernière expression, on s'aperçoit que le célèbre philosophe piémontais se fonde sur trois arguments principaux : le texte de l’Écriture sainte, le dogme de l’expiation par le sang, la gloire mystérieuse qui entoure la profession des armes. (1) Voy. Tableau des révolutions du système politique de l’Europe. Discours préliminaire, t. 1, pp. 15 et 24, édit, belge de 1859. 2" SÉRIE, TOME IX, 14 ( 210 ) On s'étonne vraiment de voir invoquer ici le texte de l'Écriture. S'il est une vérité à l’abri de toute controverse, c'est que la Bible, depuis son premier jusqu’à son dernier chapitre, manifeste partout l'horreur de l’effusion du sang humain. Lorsque la famille du patriarche, à la suite de la catastrophe universelle du déluge, reçut la mission de repeupler la terre délivrée de ses peuples sacriléges, Dieu lui dit : « Vous ne répandrez pas le sang de l’homme; car » J'ai fait l’homme à mon image. Je redemanderai jusqu'à » la dernière goutte le sang de l’homme versé par la » main de son frère (1). » Lorsque Moïse, au milieu de la manifestation solennelle de toutes les puissances de la nature, reçut le Décalogue au sommet du Sinaï, il y lut ce commandement suprême : Vous ne tuerez point (2)! Quand Isaïe, ravi par l'esprit prophétique, aperçut dans le lointain des siècles la régénération universelle qui de- vait sortir de l’humble grotte de Bethléem, il s’écria : » Un Enfant nous est né, un Fils nous a été donné: et » l’Empire a été posé sur ses épaules; et on l'appellera » l’'Admirable, le Dieu fort et puissant, le Prince de la » Paix (5). » Il n'est pas nécessaire d’ajouter que les mêmes préceptes et les mêmes aspirations s se révèlent à tontes les pages de l'Évangile. On objectera peut-être que la Bible donne conti- nuellement à Jéhovah le titre sublime de Dieu des ar- mées. Nous répondrons que le fait n’est rien moins que certain. Des hommes profondément versés dans l'étude des langues orientales prétendent que les mots (1) Gen., IX, 5 et G. (2) Exod., XX, 15. (5) Isaïas, IX, 5. 4 . © DR ORRRRS Te l 1 mn " * { 21€) Tseba, Tsebaoth, qui reviennent si souvent dans le texte des Psaumes et des Prophètes , désignent, non les armées de la terre, mais les phalanges qui se meuvent dans l'es- pace, les tourbillons célestes, l’armée des astres : image grandiose et admirablement choisie pour donner au peuple la notion la plus élevée de la puissance, de la gloire et de l’incomparable grandeur de l'Étre des êtres {1). Mais quand même ces mots devraient recevoir l'interprétation que leur donne le comte de Maistre, il ne serait pas permis d'en conclure que Dieu fasse de la guerre, des batailles, de l’effusion incessante du sang hümain, la condition du pardon accordé à l'humanité coupable. Ils prouveraient uniquement que les sociétés humaines, dans tout l'appa- reil de leurs forces et de leurs colères, ne sont que de faibles instruments que le Tout-Puissant fait mouvoir au gré des décrets de son éternelle et universelle providence. Déclarer la guerre indispensable, parce que Dieu est le maître souverain de la guerre, comme il est le maitre souverain de toutes les forces répandues dans l'univers, c'est commettre un étrange oubli de toutes les règles d'une interprétation rationnelle. Sans doute la guerre, de même que les maladies et toutes les misères qui nous environnent, est la conséquence de la déchéance origi- nelle de l'humanité, et à ce point de vue les souffrances de la guerre sont une expiation. Sans doute encore, Dieu peut se servir et s'est servi de la guerre pour châtier les peuples et les ramener dans les voies où il veut les faire marcher. Mais la guerre n’a rien de plus divin que les épidémies, les inondations, les incendies, la famine et (1) Telle est notamment l'opinion de l’éminent orientaliste de Louvain, M. Beelen. (212) tous les autres fléaux qui ont tant de fois désolé le monde. Quel moraliste oserait affirmer que l’homme qui cherche et trouve un remède contre la peste ou la lèpre est allé se heurter contre une loi générale du monde spirituel? Que répondrait-on au philosophe qui dirait : « N’entendez- » vous pas la terre qui crie et demande la peste et la » lèpre? » Et cependant, à part l'éclat de l’image, le comte de Maistre ne dit rien de plus quand il écrit : « N'entendez-vous pas la terre qui crie et demande du » sang? » L’illustre auteur des Soirées de Saint-Pétersbourg n’est pas plus heureux dans les considérations qu'il déduit du dogme éminemment chrétien de l’expiation. Un savant et célèbre jurisconsulte lui a répondu avec autant d’éloquence que de raison : « Sans doute, le salut par le sang, ou l’ex- piation du péché au prix d'un sacrifice sanglant, est le fondement de la foi chrétienne; mais ce n’est ni le sang des animaux, ni le sang des hommes qui doit couler; ce ne sont pas des victimes mortelles qui doivent être immolées : c’est une victime sans tache. C’est un mé- diateur divin qui opère, par son généreux sacrifice, la réhabilitation du genre humain déchu. Selon la révéla- tion, une personne divine pouvait seule égaler la répa- ration à l’offense, et offrir à la miséricorde de Dieu une satisfaction capable de tempérer la rigueur suprême de ses jugements (4). » Telle est en effet l'économie divine de la révélation. Partout le philosophe chrétien rencontre les preuves et les conséquences de la dé- NU VS VV VW EE. WE ww — ———————————————_— ——— (1) Paroles du comte Portalis. Voy. Séances et Travaux de | Académie des sciences morales ct politiques. (Compte rendu par Ch. Vergé, 5° série, tu XVIII, p. 17.) " ( 213 ) chéance de Phumanité; mais partout aussi il trouve une promesse de miséricorde et une garantie de réhabilitation dans le dévouement sublime du Rédempteur. Nulle part Dieu n’a dit à l’homme : « Tu verseras éternellement le » sang de tes frères! » La guerre est légitime quand elle est indispensable à la défense des droits des peuples, tout comme l’emploi de la force est légitime quand celle-ci devient l’unique moyen de sauvegarder les droits de lin- dividu; mais, en dehors de cette situation exceptionnelle, la guerre est un crime de lèse-humanité, une violation flagrante des lois fondamentales du christianisme. Aussi n’y a-t-il rien de divin ni de mystérieux dans la gloire qui environne la profession des armes. La guerre étant admise comme l'arbitre suprême et permanent des destinées de l'Europe, le soldat doit nécessairement oc- cuper la première place dans la hiérarchie sociale. I se sépare de la foule, il se soumet à une discipline sévère, il méprise la mort, il place sa poitrine entre les canons des envahisseurs et la frontière menacée de la patrie. Plaisirs, richesses, honneurs, joies et intérêts de la fa- mille, tout ce que les hommes aiment et désirent est sacrifié par le soldat au premier appel de ses chefs. Ce n’est qu'à ce prix qu'il procure à ses concitoyens la sécu- rité, l'honneur, l'indépendance et l'intégrité du terri- toire! Enumérez et placez, d'un côté les vertus héroïques que réclame la vie militaire, de l’autre les services im- menses rendus par les armées qui donnent la victoire au drapeau national, et vous ne serez plus surpris de l'éclat qui entoure les vainqueurs. Vous êtes dans le vrai en disant que les préjugés populaires ont exagéré la gloire du soldat aux dépens de toutes les autres professions qui requièrent le dévouement et le sacrifice; mais vous blessez les sus- (214). ceptibilités légitimes de la conscience humaine, vous mé: connaissez les exigences de la justice et de la raison, quand vous placez sur la même ligne le guerrier et le bour- reau. L’un et l’autre sont les exécuteurs dé la volonté na- tionale; mais le bourreau tue sans gloire, parce qu’il tue sans péril (1). Nous croyons avoir suffisamment prouvé que les dogmes chrétiens sont ici hors de cause. Il est temps de placer le débat sur le terrain des faits. La science, la diffusion des lumières, le travail et l’in- fluence souveraine des idées chrétiennes ont extirpé d'innombrables misères qui pesaient lourdement sur la majorité du genre hümain. Le même phénomène se produira-t-il à l’égard du mal quarante fois séculaire de la guerre? C'est là le seul problème à résoudre. Réduit à ces termes, 1] n’en est pas qui soit plus digne d'occuper les méditations des hommes d’État, des économistes et des philosophes. | A notre avis, les divers systèmes qué nous avons passés en revue ont tous le défaut d'être trop absolus. Il n'est pas possible d'arriver à des combinaisons politiques assez puis- santes pour garantir l'existence d'une paix perpétuelle ; mais, par contre, il n’est pas permis d'aflirmer que la guerre sera, comme par le passé, la règle et non pas l’ex- ception dans les relations internationales. Il ne suffit pas, en effet, de hausser les épaules, de crier à l'utopie, de prononcer solennellement le mot im- mo (1) Nous avons passé sous silence l'argument que le comte de Maïstre a puisé dans l’effusion incessante du sang des animaux. Ce phénomène de la nature n’a rien de commun avec la guerre. Assurément, si les animaux se mangent les uns les autres, ce n’est pas à titre de peine, LES : s 0 D ( 215 ) possible, Les hommes d'État de la Grèce ancienne pre- naient celte attitude et tenaient ce langage, quand les ulopistes de leur temps protestaient contre ce crime universel, cette iniquité des iniquités, qu'on nommait : l'esclavage. Malgré la rectitude de ses idées et la force de son génie, Aristote disait : « L'esclave n'est, par sa nature, » qu'un instrument plus parfait et susceptible de manier » d’autres instruments... Si un Outil pouvait pressentir » l’ordre de l'artiste et l’exécuter, si la navette courait » d'elle-même sur la trame, si le plectrum tirait sponta- » nément des sons de la cithare, l’art n’aurait pas besoin » d'ouvriers, ni les maîtres d'esclaves (1). » Aristote croyait avoir à jamais réduit au silence les adversaires les plus déterminés de l'esclavage. Mais le temps et le progrès se sont chargés de lui répondre! L'outil reçoit aujourd’hui l'ordre de l’ouvrier; des forces naturelles asservies par la science obéissent à l'impulsion de l'artiste; la navette court sur la trame sans que l’homme ait besoin de lui prêter la vigueur de ses muscles, et l'esclavage a disparu de l’Europe chrétienne! Tout n’est pas dit quand on répond en ricanant comme Voltaire: « La paix est une chimère » qui ne subsistera pas plus entre les princes qu'entre les » rhinocéros et les éléphants, entre les loups et les chiens: » Îles animaux carnassiers se déchirent toujours à la pre- » mière occasion (2). » Il ne suffit pas davantage d'invoquer sans cesse l’expé- rience du passé. Le passé ne ressemble pas au présent, et l’avenir sera plus dissemblable encore. Sans mériter en + (1) Politique , 1. EL, c. II. (2) De la paix perpétuelle, OŒov. cowrz., t. XXIX, p. 55, édit. de la Soc, Typ. (1784). ( 216 ) aucune manière le titre d’utopiste, on peut affirmer har- diment qu'il est possible de faire aujourd'hui bien des choses qu’il n’était pas possible de faire à d’autres époques. : Qu'on se souvienne des siècles où l'unité de l’espèce hu- main n'était connue que dans un coin de l'Asie, où les peuples étaient naturellement en guerre et toujours armés les uns contre les autres, où le droit de la guerre rendait le vainqueur propriétaire et maître des corps et des biens des vaincus, où le massacre d’une population désarmée était envisagé comme la conséquence naturelle d’une ba- taille malheureuse. Qu'on se rappelle que, malgré ces mœurs barbares et ces innombrables obstacles, le progrès a continuellement manifesté sa puissance dans la sphère des idées guerrières; et qu'on nous dise ensuite pourquoi le progrès devrait brusquement s'arrêter au seuil du XIX"° siècle ! En vertu de cette loi mystérieuse qui fait sortir le bien du mal et la régénération de la souffrance, la guerre a plus d’une fois rendu des services immenses à l'humanité. Elle a rapproché les peuples, détrôné la barbarie et disséminé les idées fécondes; elle a facilité la prédication du chris- tianisme en réunissant les peuples dans l’unité maJestueuse de la domination romaine; et l'on conçoit sans peine que, depuis saint Augustin jusqu'a Bossuet, depuis Lessing | jusqu'à M. Michelet, des intelligences vigoureuses, tout en se plaçant à des points de vue très-différents, se soient préoccupées de la mission de la guerre dans le dévelop- pement de la civilisation générale. Mais où sont les ser- vices que, sous ce rapport, elle puisse rendre aujourd'hui aux peuples civilisés de l'Europe? Les idées, les doctrines, les inventions, tous les produits de l'esprit humain, toutes les merveilles de la science se répandent avec la rapidité Re su A Ve enEs w, | 2, CUS) de l'éclair, au point que nous voyons souvent plusieurs nations se disputer la priorité de la même découverte! Mais :l est une réflexion bien plus importante encore et sur laquelle on ne saurait trop appeler l'attention de tous ceux qui s'occupent des destinées futures de l’huma- nité, La guerre trouvera dans le développement du travail el l'extension du commerce des obstacles de plus en plus con- sidérables. L'industrie, marchant à pas de géant, étend chaque jour son domaine, ses richesses et son influence. Les capitaux qu’elle féconde se comptent par milliards ; les bras qu'elle emploie, les familles qu’elle nourrit se comptent par centaines de mille. C’est un pouvoir nou- veau avec lequel les princes et les ministres auront désor- mais à compter ; et ce pouvoir, qui vit et se développe à l’aide du crédit, autre puissance que l'antiquité n’a point connue, est l'ennemi naturel de la guerre. Ce n’est pas tout! Grâce à la solidarité que les progrès de la civilisa- tion ont établie entre les intérêts de tous les peuples, la guerre ne peut plus éclater sur un point de l’Europe, sans que l'Europe entière souffre et se plaigne. A l’époque où les communications étaient rares et difficiles, où le com- merce extérieur était dénué d'importance, où chaque peu- ple vivait de sa vie et de son travail propres, les luttes armées dépassaient rarement les proportions d’une que- relle locale. Il n’en est plus de même au XIX"° siècle. Quand deux nations tirent aujourd’hui l’épéeet descendent sur les champs de bataille, toutes les autres s'alarment et doivent inévitablement s'imposer de pénibles sacrifices. Qu'on y ajoute la grande et belle idée de l'équilibre néces- saire des puissances, admise en principe par toutes les chancelleries modernes, et l’on sera convaincu que la proposition que nous venons d'émettre ne dépasse en au- (248) | cune manière les limites d'une espérance raisonnable (1), Aïnsi, d’un côté, la guerre a perdu les seuls avantages qu'elle pût offrir avant la diffusion des idées chrétiennes; de l’autre, elle rencontre et rencontrera des obstacles cha- que jour plus formidables dans les intérêts les plus im- portants des peuples modernes. Et c’est alors qu’on ne craint pas d'affirmer que la guerre sera, dans les siècles de l’avenir, ce qu’elle a été dans les siècles du passé! Aux yeux de tout homme qui sait réfléchir, un grand travail se manifeste dans le monde. Ce travail amènera des complications, des tiraillements et probablement des guerres; mais le résultat final n'en sera pas moins un grand progrès dans la vie de l'humanité, Partout se mon- tre une tendance visible vers l'alliance, vers le rapproche- ment, vers l'harmonie des intérêts et des institutions des peuples civilisés. Les distances disparaissent, les commu- nications deviennent chaque jour plus faciles, les préju- gés nationaux s’affaiblissent, la grande et puissante com- munauté du travail s'étend sans cesse et dans toutes les directions. Si ce mouvement se propage et se développe, — et tout semble prouver qu'il acquerra chaque jour une force nouvelle, — il est évident que nous approchons du temps où les peuples, à défaut de leurs chefs, songeront sérieu- sement à se prémunir contre le fléau de la guerre. Aux époques où la grande voix de l'opinion publique domine toutes les autres, les besoins universellement sentis ne peuvent longtemps tarder à recevoir leur satisfaction. (1) On peut consultér à ce sujet les faits et les preuves réunies par M. de Molinari, dans l'introduction placée à la tête de son intéressant ouvrage : L'abbé de Saint-Pierre et ses OEuvres (Paris, 1857). pui be gt AE Te ( 219 ) Est-ce à dire que la paix sera perpétuelle, ainsi que l'es: pérait l'abbé de Saint-Pierre? Non; et, sous ce rapport, les nombreux adversaires qu'il a rencontrés ont eu raison de le placer parmi les utopistes. Quelles que soient les com- binaisons qu’on adopte, les luttes politiques au dedans et les coalitions au dehors pourront toujours déranger les plans le plus ingénieusement combinés. On se contentera de prendre contre la guerre des pré- cautions qu’on n’a pas prises dans les siècles passés. Mais en quoi consisteront ces précautions? Quelle sera la forme de cette assurance d’une nouvelle espèce ? Les leçons du passé, les besoins du présent et les ten- dances visibles de l’avenir fournissent la réponse. On n’arrivera pas à l'unité monstrueuse et impossible rêvée par les despotes sous lé nom de monarchie univer- selle, L'existence des peuples, avec leur vie propre et leur activité particulière, est évidemment réclamée par les vœux de la nature, les décrets de la Providence et les be- - soins les plus essentiels de l'humanité. On n’arrivera pas non plus à une confédération univer- selle. Les différences de race, de langue, de civilisation, d'intérêts et de besoins la rendront toujours impraticable. On devra maintenir la variété dans l'unité, les différen- ces partielles dans l'harmonie générale, et dès lors il ne reste qu'un seul système susceptible d’être traduit en fait. C'est la fédération de groupes plus ou moins nombreux de peuples placés dans des conditions plus ou moins identi- ques. | Quand cette Sainte- Alliance, plus vaste, plus forte et surtout plus démocratique que la première, sera conclue aux applaudissements du monde; quand l’Europe, éclairée par ses longues souffrances, entrera dans cette ère nou- ( 220 ) velle, la gloire des armes cessera de primer toutes les au- tres, et l’historien-philosophe ne trouvera plus, dans les sentiments et les vœux des peuples, ces contradictions in- cessantes qui déroutaient le génie puissant du comte de Maistre. La guerre, sans doute, sera toujours possible; mais, à la différence de ce qui s’est passé jusqu’à nos jours, la paix sera la régle et la guerre une rare exception dans la vie des nations civilisées, On dira que l'heure est mal choisie pour manifester ces espérances. Mais que sont les perturbations passagères dans la vie générale de l'humanité? Les orages politiques ne dérangent pas plus les lois de l’histoire que les orages de l’atmosphère ne dérangent les lois de la nature. Que de temps, que d'efforts, que de peines n’a-t-1l pas fallu pour arriver à l'établissement de tribunaux investis du droit de punir et chargés de régler les conflits qui surgissent entre les individus! Pourquoi donc l'intelligence et le cœur se troubleraient-ils à l'aspect des obstacles que rencontre l'établissement d’une justice internationale ? C'est surtout aux époques d’agitation et de décourage- ment qu'il importe de s’écrier avec le poëte : Inter spem curamque, timores inter et iras, Grata superveniel, quae non sperabilur, hora! : AM OUN RER 1/11, RSEREE LE as : (24 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. me Séance du 2 février 1860. M. BaroN, directeur. M. An. QueTeLeT, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, Fr. Fétis, Navez, Roelandt, Suys, Van Hasselt, Jos. Geefs, Érin Corr, Snel, Fraikin, Ed. Fétis, De Busscher, membres; Calamatta, associé; Demanet, correspondant. MM. Chalon et Nolet de Brauwere Van Steeland, de la classe des lettres, assistent à la séance. == CORRESPONDANCE. Au sujet de l’illustre compositeur Gossec, sur l’origine et le nom duquel il s'était élevé des doutes, M. Eug. Bo- chart éerit : « Pour jeter quelque jour sur cette contro- verse , au moins quant à l’endroit et à l’époque de sa nais- sance, j'ai consullé des papiers que je possède, et j'ai acquis la certitude que François-Joseph Gossé est né à Vergnies (province de Hainaut), le 47 janvier 1754; que, le même jour, il a été tenu sur les fonts baptismaux par François Gossé et Anne Gossé; qu'il était fils d’un simple ouvrier; qu'il y avait encore dans la même commune, en 1829, des habitants du même nom, et qu’un de ceux-ci avait très-bien connu le compositeur dont le nom a été changé à Paris, pour en faire Gossec. » M. Bochart ajoute que les études musicales de Gossec s'étaient faites à Anvers, où, pendant huit ans, il avait été enfant de chœur à la cathédrale; finalement qu'il vint à Paris en 1751. CONCOURS DE 1861. La classe adopte, dès à présent, pour le concours qui sera fermé le 1° juin 1861, la question suivante, qui lui est proposée par M. Roelandt : Faire l'historique des systèmes successifs de couverture des édifices chez les différents peuples. En déduire l'appro- priation des formes et des matériaux aux divers pays et aux divers climats. | CAISSE CENTRALE DES ARTISTES BELGES. M: Ed. Fétis, secrétaire du comité de la caisse, commu- nique les principales décisions prises dans la réunion qui a précédé la séance de la classe des beaux-arts; il donne ( 2923 ) ensuite lecture du rapport annuel, sur les revenus de l’as- sociation pendant l’année 1859. Ce rapport sera inséré dans l'Annuaire de l’Académie pour 1860. COMMUNICATIONS ET LECTURES, Les Artistes belges à l'étranger : GÉRARD EDELINCK; par M. Ed. Fétis, membre de l’Académie. La date de la naissance de Gérard Edelinck a été sou- vent indiquée d'une manière inexacte par les biographes. Ce serait 14627 suivant les uns, 1641 selon d’autres. Il en est qui, mieux renseignés, ont donné le millésime de 1640. C'est, en effet, à la fin de cette année que le célèbre artiste est né à Anvers, ainsi que le constate l'inscription de son acte de baptême dans les registres de l'église Saint- Jacques, à la date du 20 octobre. Gérard était fils de Ber- nard Edelinck et d'Anne de Winter. A l’âge de douze ans, (1652) il entra, comme élève, dans l'atelier du graveur Gaspard Huberti ou Huybrechts. Après un apprentissage de onze années (1665), il était reçu maitre dans la corpo- ralion de Saint-Luc, Ces renseignements ont été recueillis par M. L. De Burbure dans les actes originaux; ils doivent inspirer toute confiance. Il y a donc lieu de considérer comme mal fondée l’opinion, précédemment accréditée, que Gérard Edelinck fut destiné par sa famille à la profes- sion d'avocat, et qu’il eut à lutter contre la volonté pa- ternelle, pour obtenir l'autorisation de suivre le penchant ( 224 ) qui l’entrainait vers la carrière des arts. Si l’on avait voulu faire de lui un jurisconsulte, ou ne l’aurait pas mis, dès l’âge de douze ans , en apprentissage chez un graveur. Un point plus difficile à éclaircir se présente. Il existe à l'école des beaux-arts de Paris des mémoires manuscrits sur la vie et les ouvrages des membres de l’ancienne Aca- démie de peinture et de sculpture. Ces mémoires, qui ont été publiés pour la première fois il y a quelques années (1854), ont été rédigés par des écrivains contemporains des artistes dont ils renferment les notices biographiques, d’après des renseignements fournis par les familles de ces derniers. L'auteur du mémoire sur Edelinck, qui déclare se conformer aux notes dont il a reçu la communication, et qui donne très-exactement, d’ailleurs, la date de la nais- sance du graveur anversois, dit que Gérard Edelinck fut d'abord placé par son père sous la direction d’un peintre, et que l’assiduité avec laquelle 1l copiait les plus belles estampes de l’école flamande ayant fait connaître sa véri- table vocation , il fut confié aux soins de Corneille Galle, le jeune. S'il faut en croire l’auteur du mémoire, Gérard fit des progrès si rapides, en mettant à profit ce qui l'avait frappé dans les estampes de Visscher, Bolswert et autres, que Galle sentit son impuissance à conduire Jjus- qu’à son développement complet un talent de tant d'avenir. Un jour donc, le maître, croyant remplir un devoir de probité, prit la résolution d’abréger un apprentissage dé- sormais inutile, et de reconduire chez son père le dis- ciple dont le seul défaut était une aptitude trop prononcée. Bernard Edelinck, en voyant Galle lui ramener son fils, crut que celui-ci avait donné quelque grave sujet de plainte. L'artiste se hâta de le rassurer, en lui expliquant que Gérard avait autant de zèle que de talent : « Je n'ai 4 RER de ( 225 } plus rien à lui montrer, ajouta-t-il; il grave à présent mieux que moi. Si je le gardais encore, je lui ferais perdre son temps. Je vous le rends donc. » Ces détails circonstanciés ont-ils été inventés par l’au- teur du mémoire auquel nous les empruntons? On a peine à le croire. Il y a tout lieu de supposer qu'Edelinck étudia sous la direction d’un peintre, en même temps qu'il ap- prenait le maniement du burin de Gaspard Huybrechts, chez lequel il est incontestable qu'il fit son apprentissage. Il s'est montré trop grand dessinateur, pour qu'on puisse admettre qu'il n'ait eu des leçons que de ce graveur dont les estampes accusent une absence complète du sentiment et de la science de la forme. Un motif semblable nous porte à penser que Gérard quitta l’atelier d'Huybrechts pour entrer dans celui de Galle, le jeune. Ce dernier n'était pas, 1l s’en faut de beaucoup, un graveur de pre- mier ordre; mais l’enseignement qu'il avait reçu de son père n’avail pas été tout à fait stérile, ainsi qu’on en peut juger par les portraits qui forment la meilleure partie de son œuvre, et notamment par celui d'Octavius Piccolo- mini. Îl n'y aurait rien de surprenant à ce que Gérard Edelinck eût étudié sous sa direction la pratique du burin, qu'il connaissait bien, tandis qu'Huybrechts, obseur fabri- cant d'images de dévotion, n’était capable que de porter atteinte à ses heureuses facultés naturelles, en lui faisant contracter de mauvaises habitudes dont il lui aurait été difficile de se débarrasser par la suite, et dont ses premiers travaux ne présentent pas de trace. Il n'existe heureuse- ment aucune analogie entre la gravure d'Edelinck et celle de Gaspard Huybrechts; l'impossibilité de son séjour près de ce maître inhabile, pendant une période de onze années, est démontrée par le caractère même de son talent. On QMe SÉRIE, TOME IX. 15 ( 226 ) est, au contraire, fondé à rattacher ce talent aux priñ- cipés dont Galle le is à fait ad ee ses ou- faitfés formés par Rubens. Nous ne récusons pas le témoignage fourni par les registres de la corporation de saint Luc; mais nous 6sons affirmer qu'il est incomplet. Gérard Edelinck entra d’abord chez Gaspard Huybrechts, puis il passa sous la direction de Corneïlle Galle. La com- paraison des estampes de notre artiste avec celles des deux graveurs que lui donnent pour maîtrés des versions différentes, mais facilement conciliables , ést, pour former notre opinion, uné preuvé qui n’a pas besoin de la con- firmation des documents officiels. Lacombe a dit dans son dictionnaire des beaux-arts que la réputation qu'Edelinck s'était acquise par ses ou- vrages l'avait fait désirér en France, et que « Louis XIV, cet auguste protecteur du mérite, attira par des bienfaits le célèbre artiste. » Cette énonciation d’un fait qui n’est pas conforme à la vérité, à induit en erreur plusieurs bio- graphes sur les circonstances qui ont motivé l’expatria- tion de Gérard Edelinck. Notre Anversois n'était pas cé- lèbre lorsqu'il vint eù France; Louis XIV ne l’a pas attiré par ses bienfaits. C’est un lieu commun qui se rencontre dans les notices de tous céux dé nos Flamands qui sont allés à Paris, vers la fin du XVII" siècle, chercher Ja fortune que les hommes de talent ne manquaient pas d'y trouver. Par suite des événements politiques, la vie s'était retirée dé nos provinces, tandis qu'un grand mouvement se faisait en France, dans la sphère dés arts, sousun règne qui à bien justifié la prétention d'être grand en toutes choses. | Edelinck quitta donc Anvers, pour sé rendre dans la ( 227 ) ville qui offrait le plus de ressources à son talent et le plus d'aliments à son activité. Mariette nous apprend, dans ses annotations de l’Abecedario, que Jean Edelinck, frère de Gérard et graveur comme lui, l’avait précédé à Paris. Il eite, à ce propos, un fait qu’il affirme tenir d’un certain M. Chaufourier, gendre d'Edelinck. Le jour de son arrivée à Paris, notre Anversois alla voir son frère, et, tout en l’entretenant de ses projets, de ses espérances, lui demanda de quels travaux il était lui-même occupé. Jean lui fit voir un portrait du médecin hollandais Re- nier de Graef qu'il venait d'entreprendre d’après un des- sin d'H. Watelé. Gérard dit à son frère d’aller préparer le souper, car le voyage l’avait mis en appétit, et que pendant ce temps-là 1l travaillerait à sa planche. Jean Edelinck avait un vrai ménage d'artiste. Ne pouvant se permettre le luxe d’un domestique, il se servait lui-même. Il alla aux provisions et se mit en devoir de préparer un repas d’une recherche inusitée chez lui, pour fêter l’arrivée de son frère. Pendant son absence, Gérard grava entièrement la tête du médecin hollandais. Dans un autre endroit, Ma- riette rapporte la même particularité avec quelques va- viantes : « M. Edelinck le fils et M. Wleughels, dit-il, con- viennent que M. Edelinck, arrivant à Paris, trouva son frère occupé à graver des têles dans une planche, et que, ayant sçu qu'il en avait un écu de chacune, il en grava deux dans le jour même de son arrivée, pendant que son frère était occupé à donner ordre à sa réception, et l’un et l’autre m'assurent que ce fait leur a été raconté souvent par M. Edelinck même. » C'était une rémunération bien médiocre qu’un écu pour la gravure d’une tête, fût-elle de la plus petite dimension. | Quoi qu’il en soit , l’anecdote que nous venons de trans- ( 228 ) crire et dont le fond est le même dans les deux versions, n’est pas seulement curieuse par les détails intimes qu'elle donne sur l'artiste dont nous nous oceupons, elle est im- portante en ce qu’elle prouve qu’à son arrivée à Paris, Edelinck étant un graveur singulièrement habile, et en ce qu'elle répond à certaine allégation de l’auteur du Mémoire académique : « Edelinck, dit naïvement cet écrivain, travailla sous François Poilly et grava plusieurs tableaux d'histoire et plusieurs portraits auxquels cetexcellent artiste ne dédaigna pas de mettre son nom. » Cette condescen- dance du graveur français s'explique parfaitement, et elle Jui fait moins d'honneur que ne parait le croire l'écrivain dont nous avons cité les paroles. Poilly avait reconnu que le jeune Flamand maniait supérieurement le burin. H pouvait donc signer ses œuvres en toute sécurité d’amour- propre, et sans faire preuve, en cela, d’une grande géné- rosité. Du reste, nous verrons tout à l’heure qu'il sut rendre justice au mérite de celui que nous appellerons non pas son élève, mais son aide, et qu'il facilita son début dans la carrière où il devait s’illustrer. Si Edelinck était entré dans l'atelier de François Pouilly, ce n’était point assurément pour recevoir des leçons dont il n'avait pas besoin, c'était afin de gagner quelque argent pour vivre, en attendant qu'il se fût créé des relations personnelles et qu’il eût obtenu des commandes directes. Poilly fit mieux que de daigner mettre son nom au bas des planches exécutées par Edelinck. Il abrégea la durée d'une situation subalterne où il répugnait à sa conscience de laisser végéter l'artiste anversois. Un jour que celui-ci avait terminé une estampe complétement réussie, son patron lui dit de la signer et le nom de Gérard Edelinek fut révélé au monde connaisseur. « Ce trait de générosité, ( 229 ) dit l’auteur du Mémoire, est d'autant plus digne d’être publié, que la jalousie à fait marcher trop d'artistes dans un chemin tout opposé. » Pour le graveur comme pour le peintre, le seul moyen d'arriver à la fortune était d'obtenir les bonnes grâces de Le Brun, dont l’avis faisait loi en matière de commandes et d’encouragements. Edelinck se proposa de solliciter celte puissante protection. Il s'était lié d'amitié avec Phi- lippe de Champagne, son compatriote. Ce maitre lui confia un saint Jérôme, qu'il venait de terminer, pour en faire la gravure. Edelinck exécuta sa planche avec soin et en porta une épreuve à Le Brun. Le premier coup d'œil suflit au peintre des Batailles d'Alexandre pour lui faire discer- ner le mérite de l’estampe qui lui était présentée par notre Anversois, et pour lui faire entrevoir l'avenir réservé à celui-ci. Un intérêt personnel influa, il est permis de le supposer, sur la résolution que prit Le Brun de se faire le protecteur d'Edelinck dont le burin promettait à ses compositions un interprète habile. Le Brun mit sous les yeux de Louis XIV l'estampe du saint Jérôme et en obtint la promesse que l’auteur de ce bel ouvrage ne serait pas oublié dans la distribution des faveurs royales. Edelinck, ayant eu connaissance de cette démarche et de son issue favorable, adressa au roi une demande qui prouve que le sentiment artiste parlait plus haut, chez lui, que l'ambition; c'était d'obtenir une place à l’Académie de Rome, avec la pension dont jouissaient temporairement les titulaires. Son désir était d’aller étu- dier les beaux modèles de l’art antique et de la renaissance italienne, puis de revenir à Paris avec un talent qui eüt été, suivant lui, plus à la hauteur de la tâche qui pourrait lui être confiée. Sa requête fut accueillie; mais Colbert, ( 230 ) d'après l’avis de Le Brun, représenta au roi qu'il n’y avait alors à Rome aucun graveur d'un certain mérite et qu'il était à craindre qu'on n'offrîit à Edelinck d'assez grands avantages pour le décider à se fixer dans cette ville. L'ordre déjà donné pour expédier au jeune artiste le brevet de sa pension fut revoqué. En même temps qu'il en était informé, Edelinck recevait de Colbert l'invitation de gra- ver la sainte Famille de Raphaël, faisant partie du cabinet du roi. Ce n’est point, comme on l’a dit généralement, sur la proposition de Le Brun et pour le compte de la cour qu'il fut chargé de ce travail. On lit ce qui suit dans les annotations de Mariette : « Gérard Edelinck ne grava pas cette planche pour le roi, mais pour M. Colbert et pour servir à une thèse soutenue par un de ses enfants; depuis , M. Colbert la donna au roi, et l’on effaça les noms qui étaient au bas de la planche. » Le ministre de Louis XIV avait voulu, sans doute, dédommager Ede- linck, par cette commande importante, du désappointe- ment qu’il lui avait causé en mettant obstacle à son départ pour Rome. Louis XIV aÿant, plus tard, exprimé son ad- miration pour la superbe estampe de la sainte Famille , Colbert erut devoir faire hommage à son souverain de la planche, qui entra, par la suite, dans la calchographie royale. Il existe de cette gravure deux épreuves précieuses, avant toute lettre et avant4des armes de Colbert. L’une est à Vienne; l’autre est au nombre des richesses iconogra- phiques de la Bibliothèque impériale de Paris, qui la achetée, en 1834, pour la somme de 2,500 francs, à la vente du duc de Buckingham. Edelinck, en gravant la sainte Famille de Raphaël, avait produit une œuvre d’un mérite supérieur. « Cette estampe, dit l’auteur du Mé- moire, porta son nom dans toute l'Europe et lui fit de be PS LACET CAPE (251) prime abord une très-grande réputation, et on peut affir- mer sans exagération que le burin n’avait même rien ac- compli d'aussi parfait en France. » Le talent seul d'Edelinek lui avait mérité la faveur de Louis XIV. Cependant, s’il fallait en croire plusieurs de ses biographes, une circonstance particulière et toute per- sonnelle au monarque aurait été l’origine de cette faveur. Le Brun avait peint sainte Madeleine renonçant aux va- nilés du monde. C'était, disait-on, M" de la Vallière qui lui avait commandé ce tableau, destiné à l’église du cou- vent des carmélites où elle avait pris le voile. On croyait généralement qu'une allégorie transparente confondait, dans un même personnage, la pécheresse convertie par Jésus et la belle pénitente qui venait de changer son titre de duchesse contre le nom de Louise de la Miséricorde. Edelinck fit, d’après ce tableau, une superbe estampe; une épreuve en fut mise sous les yeux de Louis XIV qui, charmé de voir une aussi parfaite reproduction d’une peinture qu’il affectionnait, voulut que le grayeur anver- sois lui fût présenté. Il y a un fond de vérité dans celle histoire: mais, Sur ce fond, on À brodé des incidents imaginaires. D'abord, ce n’est pas à la demande de M" de la Vallière que Le Brun peignit sa Madeleine repentante. Ce tableau lui fut commandé par M. le Camus, bienfaiteur du couvent des carmélites, en même temps qu’un aulre représentant la Madeleine aux pieds de Jésus-Christ chez le Pharisien. En . second lieu, des mémoires particuliers de la famille de Brienne ont fait connaître que Louis XIV s'était formelle- ment opposé, dans une autre occasion, à ce que M'° de la Vallière fût représentée en Madeleine. Quant au fond de vérité dont nous parlions tout à l'heure, le voici : l’estampe ( 232 ) d'Edelinck fut admirée du roi, qui souhaita en connaître l'auteur. L'artiste flamand fut conduit à l’audience royale par celui qui était à la fois son obligé et son protecteur. D’après les détails qui ont été conservés sur cette audience, Edelinck y conserva une simplicité digne, dont s’étonnè- rent les courtisans. Louis XIV le complimenta sur le talent dont il faisait preuve dans ses travaux, et promit de lui octroyer la faveur qu'il croirait devoir demander, ne voulant pas qu'un homme de son mérite reslät sans récompense. Si ce qu'on rapporte est vrai, Edelinck, qui n’avait pas songé d'avance au parti qu'il pourrait tirer de la bienveillance du prince, fut pris au dépourvu; ne sachant quelle demande faire, il dit naïvement que son seul désir était de devenir marguillier de sa paroisse. Les assistants avaient grande envie de rire de cette naïveté; mais, dans ce qui leur semblait une sottise, Louis XIV vit l'indice d’une droiture de caractère peu commune, surtout à la cour, et réprima par son sérieux les velléités mo- queuses. Îl dit à l'artiste que ce qu’il désirait lui serait accordé, et-qu’il donnerait, en outre, des ordres pour qu'on fit quelque chose de plus pour lui. Edelinck reçut le brevet d’une pension, le titre de gra- veur du cabinet du roi et un logement aux Gobelins, le tout, bien entendu, sans préjudice des fonctions de mar- guillier. A dater de ce moment, il entreprend des travaux considérables qu’il poursuit sans relâche et auxquels la mort seule mettra fin. Tous les peintres ambitionnent de l'avoir pour interprète; plusieurs obtiendront la faveur de voir leurs œuvres popularisées par son burin ; mais c'est à Le Brun qu'il prêtera, avant tous, sa précieuse collabora- tion. C’est ici le lieu de citer les principaux tableaux de ce peintre gravés par notre artiste. PDT Tan 2 4 0 NY soie tt 74 (235 ) Parmi les sujets religieux, la composition du Christ aux anges se présente en première ligne. Le Brun aimait à rap- peler dans quelles circonstances ce tableau avait été exé- cuté. La reine mère, Anne d'Autriche, étant un soir absorbée dans de pieuses méditations, se représenta le Christ attaché sur la croix et entouré d’anges qui venaient l’adorer. Le lendemain, elle fit appeler Le Brun et lui demanda s'il serait possible de faire de cette scène mys- tique le sujet d’ane composition pittoresque. On se doute de la réponse. Quelques jours après, l'artiste venait sou- mettre à sa royale cliente l'esquisse du tableau connu sous le nom du Christ aux anges. Anne d'Autriche en fut si satisfaite, qu’elle fit don à Le Brun de son portrait en- touré de diamants, et attaché à une chaîne d’or qu'elle voulut lui passer elle-même au cou. Le Christ aux anges fut placé à Versailles dans l’oratoire de la reine. L’estampe qu'en a faite Edelinck est capitale et d’une grande beauté. Elle à valu au graveur anversois l'honneur d’une seconde audience de Louis XIV. On voit ce qui suit dans la vie de Le Brun, lue par Guillet de Saint-Georges à l’Académie : « Le 4 février 1686, M. Le Brun présenta au roi M. Ede- linck, qui a gravé le Crucifix des anges. Cette estampe a été dédiée au roi par ledit M. Edelinck. Le Brun avait d’abord désiré que la dédicace eût lieu sous son nom, mais il accéda au désir exprimé par le graveur. [ls avaient dû faire l'entreprise de la publication en commun et il avait été stipulé que Le Brun payerait 2,000 livres à Edelinck pour sa part. Le marché fut rompu. » Cette stipulation de 2,000 livres pour la part de Le Brun dans l’entreprise, nous fait connaître qu Edelinck estimait au double la valeur de sa planche. Pour un pareil travail, un graveur demande- rait aujourd’hui 60,000 francs, Il est vrai qu'il mettrait ( 234 ) sept ou huit ans à l’exécuter. Edelinck allait plus vite en besogne. Le Brun n’était pas seulement le peintre de la cour, il était aussi celui de la bourgeoisie, et même de la classe ouvrière. Au bas de l’estampe qu'Edelinck a gravée d'après sa sainte Famille connue sous le nom du Benedicite, on lit l'inscription suivante : LE TABLEAU DE CETTE ESTAMPE PEINT PAR MONSIEUR LE BRUN, PEINTRE DU ROY, ET GRAYÉ PAR LE CHEVALIER ÉDELINCK, APPARTIENT A MESSIEURS LES COMPAGNONS CHARPENTIERS DE LA CONFRÉRIE DE SAINT-JOSEPH, ERIGÉE EN L'ÉGLISE DE SAINT-PAUL À Paris. Avec la Madeleine dont il a été question plus haut, nous n'avons plus à mentionner que deux tableaux religieux de Le Brun gravés par notre artiste, savoir : Saint Louis devant la vraie croix et devant la couronne d’épines, composition dont l'original se trouvait à Choisi-le-Roi, dans la chapelle du château de Pelletier, ministre d'État ; Saint Charles Borromée implorant Dieu au pied d'un crucifix pour obtenir la cessation de la peste qui désolait Milan. C’est à l’auteur du tableau lui-même que le graveur dédie son estampe : lllustrissimo viro Carol Le Brun equiti . , . . . . ofjerebat G. Edelinck. Dans la série des compositions historiques de Le Brun, illustrées par le burin d'Edelinck, la Famille de Darius aux pieds d'Alexandre doit être citée en premier lieu, C'est un des chefs-d'œuvre de notre artiste qui a soin, pour consacrer le souvenir d'un fait dont le peintre se olorilie, de placer au bas de son estampe l'inscription que voici : Gravé par le S' Edelinck d'après le tableau qu'en a fait M. Le Brun, premier peintre du roy, et que Sa Ma“ prenait plaisir de luy voir peindre à Fontainebleau en l'an- née 1661. Cette particularité est, en effet, consignée dans le mémoire de Guillet de S.-Georges sur Le Brun : « Le ( 255 ) roi étant à Fontainebleau, dit-il, commanda à M. Le Brun de travailler sur quelque sujet tiré de l’histoire d'Alexandre, et Sa Majesté voulut bien se faire un plaisir de donner quelques moments de ses heures de relâche pour le voirpeindre. Ainsi, elle le fit loger dans le château et proche de son appartement, et le venait voir dans des moments inopinés, lorsqu'il tenoit le pinceau à la main, et daignoit même s’entretenir avec lui sur les grandes ac- tions de ce héros. » On sait que Mignard, jaloux de la gloire et du erédit de Le Brun, entreprit de traiter aussi le sujet de la fa- mille de Darius implorant la clémence d'Alexandre, avec l’espoir de faire une œuvre supérieure à celle de son rival. Il eut également l'ambition de voir sa composition gravée par Edelinck. Cette double espérance fut déçue. Son ta- bleau fut jugé très-inférieur à celui de Le Brun, comme il l’est en effet, et Edelinck mourut sans avoir achevé sa planche, qui fut terminée par Drevet. Les grandes thèses gravées par Edelinck, d’après Le Brun, sufliraient pour placer l'artiste anversois au pre- mier rang des maîtres qui, dans tous les temps, ont manié le burin. La thèse du Triomphe de la religion ou de l'Ex- tirpalion du calvinisme, celle dite De la Paix, dont le sommet est occupé par l’image de Louis XIV à cheval, celle où le monarque, vêtu à la romaine, est couronné par limmortalité, sont des œuvres aussi remarquables par la vigueur que par la délicatesse du travail, par un mé- . Jange de ces deux qualités, qui souvent s’excluent, et qui concourent ici à former un harmonieux ensemble. Si la reconnaissance avait fait un devoir à Edelinck de mettre son talent à la disposition de Le Brun, dont les bons oflices lui avaient été d’une incontestable utilité, ( 236 ) l'amitié qui l'unissait à Philippe de Champagne, son com- patriote, le porta naturellement à se faire l'interprète des œuvres de ce maître. Pour graver le Moïse, il associa son burin à celui de Nanteuil, ou, ce qui est plus juste, il termina la planche qu'avait commencée ce graveur célèbre et qui lui était échue par succession, ainsi qu'on le verra plus tard. Il fit seul les planches de Jésus et de la Sama- rilaine, de la Vierge de douleur, du Roi Salomon et de Saint Jérôme. Reportant sur le neveu l'affection qu'il avait vouée à l’oncle, il grava, d’après J.-B. de Champagne, dont les productions n'étaient guère faites pour l’inspirer, Un Ange planant dans le ciel, saint Ambroise, saint Atha- nase, saint Basile le Grand et saint Grégoire de Nazianze. L’Annonciation, d’après le Poussin, est une des belles planches de l’œuvre d’Edelinck. Parmi les artistes de l’école moderne dont il reproduisit les compositions, on remarque : Jacques Stella, D. Hallé, H. Sourley, H.Watelé, Van Plattenberg (connu en France sous le nom de Platte- Montagne), Coypel et Le Pautre. Plusieurs maitres an- ciens eurent également en lui un traducteur fidèle de leur pensée, de leur style, des effets de leurs œuvres; car on est frappé, en examinant la nombreuse série de ses es- tampes , de la variété qu'il a mise dans son travail, avec l'intention, heureusement réalisée, d'appliquer à chaque peintre un mode particulier et caractéristique d’interpré- tation. C’est ainsi que le Déluge, d'après Alexandre Véro- nèse, morceau d’une singulière vigueur, diffère essentiel- lement de la Sainte Famille de Raphaël , où tout est suave et moelleux; c’est ainsi que le Combat des quatre cavaliers, d'après Léonard de Vinci, présente, à son tour, un tout autre aspect. En vain dira-l-on, pour expliquer les difié- rences dont nous parlions, que les planches où elles se tar AU NE Gr re s (281 ) présentent appartiennent à des époques diverses de la car- rière de l'artiste qui se serait modifié lui-même, soit in- volontairement , soit par système. Elles sont, nous en avons la conviction, le résultat de sa volonté, d’un parti bien pris de conformer le style de la gravure à celui du tableau, de rendre non-seulement l’idée du peintre, mais encore la forme dont il l’a enveloppée; non-seulement la composition , mais encore le coloris. On en aura la preuve en comparant entre eux ceux de ses portraits qui datent de la même époque, et dont l’exécution varie selon qu'il a eu à rendre des peintures de Le Brun, de Philippe de Champagne, de Rigaud, de Mignard, de Tortebat, de Largilière, de Vouet, de De Troy, etc. L'auteur du Mé- moire définit très-bien ce côté particulier de son talent, lorsqu'il dit : « Je crois ne pouvoir trop louer la manière d'Edelinck; plus on apporte d'attention à l'examen de ses ouvrages et plus on trouve qu’elle lui est personnelle. Ce n’est point Vischer, ce n’est point Bolswert, ce n’est point Pontius; ce n’est ni Poilly, ni Nanteuil, ni Masson, ni aucun des autres graveurs de ce temps-là : c'est Edelinck. Les élèves, que j'ai principalement en vue, ne sauraient trop s'appliquer à se faire, comme lui, une manière à eux, à faire en sorte que tous les peintres ne deviennent pas un même homme sous la main du graveur. Qu'ils travail- lent, s'il est possible, dans le secret, jusqu’à ce qu’ils aient toutes les manières sans en avoir aucune, jusqu’à ce qu’on trouve dans leurs ouvrages non-seulement l’école, mais encore chaque peintre de cette école. » _ Nous avons dit que Gérard Edelinck avait obtenu un logement aux Gobelins. Un ordre du roi lui fit conférer le titre de professeur perpétuel de la petite Académie qu'on avait annexée à cet établissement pour l'instruction des ( 238 ) tapissiers. « Là, dit l’auteur du Mémoire, il fut souvent visité par des princes et par des ambassadeurs étrangers, et, ce qui contribua plus à sa gloire, par Philippe, duc d'Orléans, qui depuis a gouverné ce grand empire. Ce prince, si éclairé pour les arts, après avoir examiné les tableaux et les statues, dit qu'il avait réservé le plus digne d'attention pour le dernier. C'était Edelinck, le burin à la main, ce burin si obéissant à la volonté de l'artiste, que presque jamais ni repoussoir, ni gratloir ne mar- chaient sur ses traces, et que très-rarement il rentrait dans ses tailles. » D'après ce que nous apprend l’auteur du Mémoire, le duc d'Orléans passait volontiers de longs instants à voir travailler Edelinck et à s’entretenir avec lui. Il ajoute que si les discours de l'artiste plaisaient au prince, ce n’était point par la beauré du langage, car il n'avait jamais pu apprendre à bien parler français; mais, vif et spirituel, 11 s'était fait un jargon flamand-francisé original et pittoresque qui n’était pas sans charme. Quelque talent qu'Edelinck ait déployé dans les estam- pes que nous avons mentionnées précédemment, 1l s'est peut-être élevé encore plus haut dans ses portraits. C'est là qu'on admire surtout la magie de son burin; c’est là qu'il se montre un puissant coloriste, si l'on peut em- ployer cette expression en parlant de l'artiste qui n'a eu pour seuls moyens d’effet que les oppositions du blane et du noir, de l’ombre et de la lumière. L'auteur du Mémoire a dit d'Edelinck : « Il se fraya une route nouvelle. Avant lui nos graveurs ne connaissaient que les tailles carrées, et leur travail était, pour ainsi dire, monotone ; il était uni- forme. Et pourquoi s’asservir à l’usage et ne pas préférer ce qui entre mieux dans l'intention du peintre? H intro- duisit la (sic) losange; par la variété de ses tailles et de ( 239 ) leurs différents assemblages, il se forma un goût de travail très-varié, si bien choisi et si heureusement appliqué aux différents choses qu’il avait à traiter, qu’il fait distinguer jusqu’à la matière de chaque objet. Il acquit l’art de ren- dre les différentes sortes d’étoffes, le bois, les métaux, le linge; de rendre les chairs avec cette vérité molle propre au burin flamand et de faire sentir dans l'estampe les cou- leurs du tableau’ Il parvint à allier le feu de Vischer à la suavité de Bolswert; pour m'exprimer par une comparai- son, à fondre en un seul homme Corneille et Racine. » Cet art de donner aux objets, par la disposition des tailles, l'apparence de la matière dont ils sont formés, cet art de faire sentir dans l'estampe les couleurs du tableau, ce n'est pas Edelinek qui l’a inventé. I le tenait de Rubens par transmission; c’est Rubens qui eut, parmi tant d'autres gloires, celle de trouver le principe en vertu duquel le burin , jusqu'alors asservi à de certaines procédés de con- vention , allait pouvoir lutter, en quelque sorte, avec le pinceau , pour le rerdu de la nature. Edelinck importa en France le style auquel ce principe, qui faisait de la gravure un art nouveau, avait donné naissance. Ces paro- les, prononcées par un membre de l’Académie de pein- ture de Paris, en faisant l'éloge de l’artiste anversois, sont significatives. « Avant lui, nos graveurs ne connaissaient que les tailles carrées et leur travail était monotone, uni- forme. » Cette assertion est parfaitement exacte. Cepen- dant, quelques iconographes ont prétendu rattacher Ede- linck à l’école française, se fondant non-seulement sur ce qu'il a passé en France la plus grande partie de sa car- rière d'artiste, mais encore, et c’est leur principal motif, sur ce qu'il a travaillé dans latelier de François Poilly. Le premier argument m’aurait de valeur que si Edelinck ( 240 ) s'élait modifié au contact des graveurs parisiens, s'il avait abandonné les traditions flamandes pour adopter leurs procédés ; or, c'est lui qui, au contraire, les a contraints de changer de manière, de corriger, d’après son exemple, la froide monotonie de leurs tailles. Loin qu'il ait rien appris de François Poilly, on surprend une trace de son influence dans les travaux de cet artiste postérieurs au séjour qu'Edelinck fit dans son atelier“ Il se trouve que c'est l'élève qui a donné des leçons au maître. Voici en quels termes Mariette, juge excellent en ce qui concerne l’art de la gravure, apprécie le talent de notre artiste, lorsqu'il parle de l’estampe de La famille de Darius aux pieds d'Alexandre : « Rien n’y est négligé, chaque objet y est traité de la manière et dans le goût qui leur convient, et il y règne une suavité de tons soutenue par une couleur brillante que l’on ne rencontre point ailleurs. C'est que Gérard Edelinck travaillait avec tant d’aisance, que ce qu'il gravait, il le faisait presque toujours au pre- mier coup, sans être obligé d'y revenir comme la plupart des autres graveurs. C'était un don de la nature, et ceux qui l’ont vu travailler étaient surpris de la facilité avec laquelle 1l promenait son burin sur le cuivre; de là le grand nombre de pièces que l’on voit de lui, dont il n'y en à aucune qui ne soit très-terminée et qui Loutes cepen- dant sont gravées au burin, manière qui est d’ailleurs si peu expéditive. » Peut-être aurions-nous pu nous dispen- ser de rapporter ce qui a été dit du talent d'Edelinek, car le mérite des œuvres de ce maître parle trop haut, pour qu'il soit nécessaire d'appeler des autorités à l’appui de l'éloge qu'on en fait; mais la crainte de paraître nous lais- ser influencer par un sentiment patriotique, lorsque nous louons un de nos arlistes, nous engage souvent à laisser PR TES. + KT: ( 241 ) parler à notre place les critiques étrangers, dont le témoi- gnage n’est pas suspect. Revenons aux portraits du graveur anversois. Ceux qu’il a faits de Louis XIV, sont au nombre de treize, soit séparé- ment, soit dans des compositions de thèses ou de ütres de livres. IL nous a montré le grand roi en armure de che- valier; en empereur romain et assis dans un char traîné par des lions que conduit la victoire; assis sur un nuage et couronné par l’immortalité; entouré d’une couronne de palmes au sommet de laquelle brille lesoleil; sous la forme d’une statue équestre et regardant les grands hommes de la France qui défilent à ses pieds, etc. Louis XIV éprouvait une satisfaction particulière à voir sa majestueuse image reproduite par le burin d’Edelinck. Il n’en fallait pas davantage pour mettre notre artiste à la mode, n’eût-1l eu d’ailleurs qu'un talent médiocre. Ce fut à qui obtiendrait d'avoir son portrait gravé par cet homme privilégié qui, au preslige du plus grand mérite, joignait celui de Ja faveur royale. Bien des gens mirent à profit cette occasion de passer à la postérité. Souvent aussi Edelinck fit spontané- ment les portraits de personnages illustres dans les lettres, dans les sciences et dans les arts, dont il se plaisait à po- pulariser les traits. Enfin, les éditeurs de certains recueils iconographiques sollicitèrent de lui des planches qui de- vaient faire le succès de leurs publications. Edelinck à gravé quelques portraits d’après d'anciens maîtres. Tels sont les portraits des grands ducs de Toscane, François de Médicis et Anne d'Autriche, d’après les pein- tures de Rubens; tels sont encore les sept portraits d’ar- tistes connus des amateurs sous le nom des grandes barbes : Abraham Teniers, Albert Durer, Jean Cousin, Gilles Sadeler, Abraham Bloemaert, Pierre Van Bouc ct 2" SÉRIE, TOME IX. 16 ( 242 ) du Titien, auxquels s'ajoute, pour cause de grande barbe, celui de Nathanael Dilgerus, ministre de Dantzig. Cette série est très-recherchée; on la trouve rarement complète. Parmi les hauts et puissants personnages dont les portraits ont été gravés par Edelinck; nous citerons : le duc de Berry, le duc de Bourgogne, le duc du Maine, Isabelle de Bragance, infante de Portugal; le prince de Galles (le prétendant), dont notre artiste a reproduit trois fois les traits à des âges différents; Philippe V d'Espagne, deux fois, comme duc d'Anjou d’abord, charmant portrait, puis comme roi; Pierre IT, de Portugal; la reine de Suède, Ulrique-Éléonore; le duc d'Orléans, douteux suivant Ro- bert Dumesni}; Henri Casimir, comte de Nassau; les papes Clément IX (douteux) et Innocent XIL. Ce dernier n’est pas habituellement compris dans l'œuvre d'Edelinck, qui ne voulait pas lui-même s’en reconnaître l’auteur. Voici ce que raconte Mariette ( Abecedario) à ce propos : « M. Chau- fournier m'a dit qu’à l'élection du pape Innocent XI, M. Edelinck trouva cette petite planche qui trainoit chez luy; il y donna quatre coups et la donnoit à vendre à ses enfants. Il ne veut pas que cette pièce soit dans son œuvre. — M. Edelinck le fils m’a dit que son père, ayant appris sur les dix heures du matin la nouvelle de l'élection du pape Innocent XIT, remonta après le déjeuner dans sa chambre, et qu'il se mit sur-le-champ à graver en quatre coups le portrait qui fut achevé à midi, et je tiens cela pour vray. » Edelinek, comme tant d’autres, profite de la circonstance; mais il faut remarquer qu’il abandonne à ses enfants le produit de cette petite planche, qu'il se garde bien de signer et qu'il ne veut pas qu'on place dans son œuvre. Sa réputation n’en souffre donc aucune atteinte. Le portrait de la duchesse de la Vallière est douteux, ( 243 ) suivant certains iconographes; celui de la marquise de Montespan est authentique. Edelinck a gravé Colbert, il devait bien cela à son protecteur. L’effigie du puissant mi- nistre s’encadre dans la composition dessinée par Le Brun pour décorer la thèse de philosophie que soutenait, en Sor- bonne, M. Claude-Nicolas Morel, en juillet 1682. Louvois, surintendant des maisons royales, arts et manufactures, avait droit à occuper aussi le burin d’'Edelinck. Toutefois, ce n’est pas à raison de ces pacifiques fonctions qu'il est représenté par notre artiste, car nous voyons son portrait soutenu par les figures de Mars et de Bellone. Louvois était-il plus fier d’avoir fait brûler le Palatinat, que d’avoir décidé le roi à entreprendre les grandes constructions de Versailles, de Trianon et de Marly? Parmi les guerriers illustres, on remarque Bussi-Rabutin, les maréchaux de Luxembourg, deNoailles et de Villeroy; dans le haut clergé, les cardinaux d’Ossat et du Perron. | La série des portraits de littérateurs, de savants et d'artistes est d’un intérêt supérieur à celui qu’offrent les autres parties de l’œuvre du maître. Il semble qu'Edelinck ait réservé les plus puissantes ressources de son art pour ces princes du royaume de l'intelligence. Mentionnons, en tête de cette précieuse série, les portraits d'Antoine Ar- nauld et de Pascal, au sujet desquels M. Robert Dumesnil donne la note suivante dans Le peintre-graveur français : « La table de cet ouvrage (Les hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, de Charles Perrault) prouve que les portraits d'Antoine Arnauld et de Pascal devaient en faire partie; leurs noms ont disparu sous de petites bandes imprimées aux noms de Du Cange et de Thomassin, soigneusement collées. La raison de celte substitution doit être cherchée dans la querelle des jésuites contre Îes jan- 7 ES, - UE LE) a a" da 1 4 L til r (24) 4 sénistes, qui était dans toute sa violence à l’époque de cette publication. » M. Robert Dumesnil aurait dû ajouter qu'il existe des exemplaires des Hommes illustres de Charles Perrault où la substitution dont il parle n’a pas été faite. La Bibliothèque royale de Bruxelles possède un de ces exemplaires. Edelinck a gravé deux portraits d'Antoine Arnauld, d’après des peintures de Philippe de Champagne, le premier du vivant du personnage, le second après sa mort. Celui-ci nous montre l'illustre théologien-philosophe assis dans une grotte au delà de laquelle apparaît, au fond du paysage, une vue de Bruxelles, ville où Antoine Ar- nauld est mort. Arnauld d'Andilly figure également dans la galerie iconographique de notre artiste. Dans un ear- touche ménagé au bas de l'encadrement, on voit une repré- sentation de l’abbaye de Port-Royal. Nous voudrions qu'il nous fût permis de nous arrêter devant chacun de ces por- traits, dont il est peu qui ne soient des chefs d'œuvres; mais nous dépasserions les limites que nous sommes obligé d’assigner à ces notices. Citons rapidement, dans la caté- gorie des savants et des littérateurs : Descartes, Furetière, Moreri, Huygens, d'Hozier, Racine, La Fontaine, Qui- nault, Saint-Evremond, Santeuil, Nicolas Rigault, garde de la bibliothèque du roi. Ouvrons la liste des artistes par cet admirable portrait de Philippe de Champagne, celui de tous ses ouvrages auquel Edelinck donnait la préférence, et qu’il disait être le triomphe de son burin, suivant ce que rapportent des biographes contemporains. Le portrait de Le Brun, d’après Largilière, est accompagné de cette devise ambitieuse : Cunctis sublimior et de cette dédicace : offerebat humillimus servus Gerardus Edelinck. Nous aimons mieux linseription du portrait de Rigaud; elle est moins humble et plus sin- AL AG ECS s nl 7" TE D FR Pr. ( 245 ) cère : Edelinck Eques Romanus et Regius Sculptor in œs incidit amicum simul et amicitiam œternitati consecraturus. Mignard devait faire pendant à Le Brun comme Louvois à Colbert. Le burin d'Edelinck ne pouvait manquer de rap- procher ces rivaux illustres, dans des genres différents. Citons encore Desjardins (Van den Bogaert), Mansart, Nanteuil, Perrault, Claude Mellan, Israel Silvestre, Jean Warin, Chauveau et Blanchard. Les musiciens ne furent pas oubliés par notre artiste. Il fit le portrait de Lully presque par devoir, car le compositeur affectionné de Louis XIV avait une place marquée tout naturellement parmi les grands hommes du siècle, dont son burin retra- çait l'histoire figurée. Quant à celui du célèbre théorbiste Jean Mouton, il le fit par reconnaissance. L'auteur du Mé- moire auquel nous avons emprunté plusieurs particula- _ rités intimes relatives à Edelinck, dit qu'il grava ce portrait de Mouton pour s'acquitter envers cet excellent musicien, qui avait donné des leçons à sa fille sans vouloir recevoir d'argent. | Un des plus beaux portraits d'Edelinck est incontesta- blement celui de Frédéric Léonard, imprimeur du roi. Il y à dans nos biographies, au nom de ce personnage, une lacune qui devra être remplie. Frédéric Léonard était de Bruxelles, ainsi que le témoigne l'inscription du portrait : Fredericus Leonard Bruxellensis, regis, serenissimi Del- phini, et cleri gallicani archi-typographicus, aetatis LXV, anno M. DC. LXXXIX. Imprimeur du roi et du clergé, il publia le plus grand nombre des volumes de la collection des auteurs latins, ad usum Delphini, entreprise par ordre de Louis XIV. II demeurait rue Saint-Jacques, et avait pour enseigne à l’escu de Venise. Piganiol de la Force nous fait connaître dans la Description de Paris, à l'occasion de ( 246 ) l'imprimeur bruxellois, une particularité assez piquante, Au chapitre consacré à l’église de Saint-Benoît, nous lisons ce qui suit : « Contre un des piliers de la nef, on remarque un pelit monument de marbre de très-bon goût, qui a élé imaginé par Gilles Marie Oppenord el a été exécuté, d’après son dessin , par feu Vancleve, un des plus habiles sculp- teurs de nos jours. On y lit : MARIA ANNA DES ESSARTZ Fredericus Leonard Amissam conjugem moerens Hoc amoris et grati animi Monumentum posuit. On se sent presque ému par ce témoignage de douleur conjugal; l'émotion cesse lorsqu'on lit, immédiatement après l'inscription où s’épanche les regrets d’un époux af- fligé, cette phrase ajoutée par l'écrivain qui la transerit : a Ce Frédéric Léonard était le plus riche libraire de Paris, et sa femme une des plus aimables et des plus malheu- reuses de son temps. » Dans l’un des chapitres où 1l dé- crit les environs de Paris, Piganiol de la Force parle d'une fort belle maison située à Ruel, laquelle appar- tenait à l’intendant du comte d’Argenson, ancien mi- _nistre-de la guerre, et « avait élé construite, dit-il, par les célèbres Léonard père et fils, imprimeurs du roi. » Une inscription gravée sur une table de marbre, que les premiers propriétaires avaient fait placer dans le vesti- bule de leur luxeuse habitation, constatait qu'ils l'avaient fait élever avec le produit de leur travail comme impri- meurs du rot et du dauphin. Si nous entrons dans ces délails étrangers au sujet que nous traitons ici, C’est que (241) nous reprenons volontiers nos Belges partout où nous les trouvons, et qu'il y a une place à donner dans la biogra- phie nationale à l'industriel artiste qui fut imprimeur de Louis XIV, et dont les presses mirent au jour la plupart des célèbres éditions ad usum Delphini. Le portrait d’un autre Belge, d'un autre Bruxellois, gravé par Edelinck, nous a fort occupé. C’est en quelque sorte une énigme dont il ne nous a pas été possible de trouver le mot, en dépit de recherches persévérantes. Disons, d’abord, que le portrait est de toute beauté, Aucun ouvrage plus parfait n’est sorti des mains d'Edelinck. On lit dans la bordure qui entoure le personnage : Joannes- Carolus Parent Bruxellensis eques romanus. Qui est ce Jean-Charles Parent, de Bruxelles? Aucune biographie ne nous le fait connaître, Dans la mention qu'ils font de son portrait gravé par Edelinck, d’après Tortebat, Hubert et Martini (Manuel des curieux), le qualifient d’imprimeur du roi. Le Catalogue général des portraits de la collection d'Orléans désigne ce même Parent comme un peintre flamand. Il y a erreur de part et d'autre, et nous conser- vons le regret de ne pouvoir faire plus ample connaissance avec le compatriote dont le burin d'Edelinck a illustré la figure, remarquable, d’ailleurs, par la noblesse du ca- ractère aussi bien que par la vivacité de l’expression, Le portrait de M. de Montarsis est encore une des pièces de choix de l’œuvre iconographique d'Edelinck. Quels sont les titres du personnage pour figurer parmi les célèbres modèles qui viennent tour à tour poser de- vant Edelinck ? Ces titres étaient des plus respectables aux yeux de Coypel, le peintre du portrait, et aux yeux du graveur anversois. M. de Montarsis, joaillier du roi, était amateur des beaux-arts; il avait formé une des belles collec- ( 248 ) tions de tableaux et de dessins qu’il y eût à Paris de son temps. L'inscription de lestampe est ainsi conçue : Petri de Montarsis de bonis artibus optime merili effigies, quam a se depictam, Antonius Coypel , in amicitiae et grati animi monumentum a Gerardo Edelinck aere incidi curavit. Le goût des beaax arts, s'il n’était inné, pourrait devenir quelquefois une heureuse spéculation d'amour-propre. Qui connaîtrait M. de Montarsis, tout joaillier du roi qu’il fût, si la belle estampe d’Edelinck n’eût perpétué le souvenir de son nom avec celui du noble emploi qu’il faisait de sa fortune ? Comme pour prouver que les célébrités de tous les genres devaient être représentées dans sa galerie, Ede- linck fit le portrait d'Évariste Ghérardi, le spirituel Arle- quin de la comédie italienne, et celui de Raimond Poisson, l'excellent Crispin. Une inscription qualifie le premier de Regiae italorum comediae princeps. Cette pièce est attribuée par certains iconographes à l’un de ses frères, ainsi que nous le dirons tout à l'heure. Sous l'image du second, on lit ces vers : Le peintre et le graveur nous ont dans ce portrait Du célèbre Crispin donné la ressemblance. Il vit, il va parler ; mais est-il aucun trait Qui pust de ses talents nous peindre l'excellence ? Cet mots : il vit, il va parler, peuvent s'appliquer à tous les portraits gravés par Edelinck. Ce ne sont pas, en eflet, des images inerles; la vie les anime; le feu jaillit de leur regard; elles respirent; il semble qu’au premier moment elles vont se détacher du fond où, par un prestige dont son burin avait le secret, l'artiste a fait circuler l'air. La délicatesse du modelé des têtes, la morbidesse des chairs, ( 249 ) | le moelleux des étoffes, la perfection de tous les détails des accessoires , font des beaux portraits d'Edelinck, de ceux de Philippe de Champagne, de Desjardins (Vanden Bogaert), de Léonard, de Parent, de Santeuil et de Blampi- gnon, curé de Saint-Merri, par exemple, les chefs-d'œuvre, non-seulemént du maître, mais de l’art de la gravure. Outre les tableaux et les portraits dont nous avons donné l'indication sommaire, et dont on trouve la descrip- tion détaillée dans le Peintre graveur-français de M. Ro- bert Dumesnil, Edelinck à gravé plusieurs frontispices de livres, parmi lesquels on peut mentionner particulière- ment ceux du recueil des poésies latines de Ferdinand, prince-évêque de Munster et de Paderborn, des poésies du P, Jean Commire, dela Dioptrique oculaire du P. Ché- rubin d'Orléans. De ces trois ouvages , les deux premiers renferment également des vignettes charmantes de l'ar- tiste anversois. Edelinck fit aussi quatre planches pour l'édition de Vitruve donnée par Perrault. Lorsqu'il con- sentait à graver, pour cet ouvrage, les modèles des ma- chines dont se servaient les anciens pour élever des: far- deaux ou transporter des pierres, l’auteur de la Famille de Darius, du Christ aux anges et de la Madeleine donnait un exemple de modestie, d'abnégation, que les célèbres graveurs de notre temps, seraient, sans doute, peu dis- posés à imiter. | Edelinck, au milieu de ses importants travaux, trouvait encore le temps de graver les reproductions d'environ quatre-vingts médailles pour l'ouvrage intitulé : Médailles sur les principaux événements du règne de Louis le Grand. Il est à remarquer que ces mêmes médailles avaient été modelées par un compatriote d’'Edelinck, par Jean Warin, et que Louis XIV dut ainsi recourir aux talents de deux ( 250 ) artistes belges pour illustrer les événements de son règne. On voit dans la calchographie du Louvre dix planches de statues gravées par Edelinck. Voici une note de Ma- riette qui se rapporte à cette série de pièces : « Statues de Versailles sur des piédestaux, gravées par Edelinck. — Ces statues sont présentement fort rares; il doit yen avoir, pour être complètes, quatorze. Ce sont les derniers ou- vrages du sieur G. Edelinck. Il s’en trouva à sa mort douze de gravées entièrement, et deux dont il n'a jamais élé Liré une seule épreuve, et qui même n'esloient pas encore achevées de graver, Je scay cela de M. Chaufourier qui est son gendre. Ces planches sont rares présentement; mais dans la suite elles ne le seront'pas, selon toutes appa- rences. On les mettra au jour; elles sont chez M. Cote, premier architecte du roi. » La prédiction de Mariette ne s’est pas réalisée; les planches d'Edelinck qui devaient cesser, suivant lui, d’être rares, sônt introuvables, celles du moins dont les cuivres étaient déposés chez M. De Cotte, et dont il ne paraît pas qu'on ait tiré des épreuves. Edelinck fut élu,en 1677, membre de l’Académie royale de peinture et de sculpture. Dans la séance même où il prêta serment en cette qualité, la compagnie le nomma à la place de conseiller devenue vacante par la mort de Chauveau. « Son mérite seul, dit l’auteur du Mémoire plusieurs fois cité, et le cas que l’Académie faisoit de sa probilé, lui procurèrent cette distinction si marquée, Il ne paroit pas qu'il ait fait aucun morceau de réception ; mais, vraiment reconnaissant, il donna en différents temps à l'Académie des épreuves de la thèse de l’extirpation de l'hérésie et de celle de la paix, 150 épreuves du portrait de Le Brun, le Crucifix des anges et le portrait de Phi- lippe de Champagne. » ( 251 ) On a vu plus haut que Colbert avait pris Edelinck sous sa particulière et puissante protection. Cet homme d’État ne se borna pas à procurer au graveur flamand les avan- tages qui résultèrent pour celui-ci de la faveur royale. Il voulut, suivant ce que nous apprend le Mémoire acadé- mique, se charger de son établissement , et négocia lui- même son mariage avec M! Regnesson dont le père était graveur et riche, Cette union éfablit un lien de parenté entre trois artistes du même genre, car Nanteuil était le beau-frère de Nicolas Regnesson et par conséquent l'oncle de la femme d'Edelinck. Le célèbre portraitiste étant mort sans enfants, ce fut sa nièce qui devint son héritière; Gérard Edelinck aurait dû être riche, tant des biens qui Jui venaient de sa femme que du produit considérable qu'il retirait de la vente de ses estampes. Cependant, il paraît qu'il ne laissa lui-même qu'un héritage médiocre, car l’auteur du Mémoire croit devoir défendre ses contem- porains du reproche d’avoir mal récompensé ses talents. Edelinck n’était pas un dissipateur ; le nombre des plan- ches dont se compose son œuvre prouve qu’il n'avait pas le temps d’avoir ce défaut, si nous pouvons nous exprimer ainsi. Si ses dépenses étaient considérables, c’est qu'il traitait avec magnificence ses amis et les hommes distin- gués qui recherchaient sa société. Le logement qu'il avait aux Gobelins et dont il s'était plû à faire une sorte de pelit musée, était le rendez-vous des artistes de tout genre, peintres, sculpteurs, architectes, graveurs. Les visites qu’il recevait n'étaient pas toujours désintéressées. Ceux-là venaient solliciter la reproduction de leurs œuvres par son burin; ceux-ci lui demandaient des conseils dont les plus habiles pouvaient faire utilement leur profit. Gé- rard Andran, lui-même, mécontent de l’eau-forte de sa ( 252 ) planche du Triomphe d'Alexandre, vint un jour lui sou- mettre son travail, en lui confiant l'embarras où il se trouvait et en le priant de l'aider de son sie - ce que notre artiste fit loyalement. Le nombre total des pièces gravées, en tout ou en par- tie, par Gérard Edelinck s'élève à 539, d’après le catalogue qu'en a donné M. Robert Dumesnil. Quand on examine cet ensemble imposant, quand on voit quelle perfection d'exécution a déployée l'artiste dans une foule d’estampes capitales, et lorsqu'on songe au temps que les graveurs de notre époque emploient à l'achèvement d’une seule planche, on se demande par qüel miracle ces maîtres du XVIE®e siècle, dont nous admirons les impérissables ou- vrages, arrivaient à réaliser de tels prodiges de fécondité. Edelinck forma peu d'élèves. On ne cite guère, outre ses frères et son fils, qu'un certain Trouvain, qui a gravé la Majorité de Louis XIII de la galerie du Luxembourg. II n’a donc pu être beaucoup aidé; on sait seulement que son frère Gaspard-François et Pitau ont travaillé aux fonds d’un certain nombre de ses planches. Les différences qu’on remarque dans ses estampes, qui ne sont pas toutes d'une égale beauté, il faut bien le reconnaitre, provien- nent de ce qu'il ne donna pas le même soin aux planches dont la commande lui était faite par des éditeurs de re- cueils iconographiques, qu’à celles dont il entreprenait l'exécution de lui-même et pour ainsi dire d'inspiration. L'auteur du Mémoire dit qu’on distingue dans son œuvre : « Ce qu'il a fait, pressé par sa grande dépense, de ce qu'il a fait poussé par l’amour de son talent. » Il ajoute : « Les ouvrages produits par ce dernier motif l'emportent beau- _coup sur les autres, et j'ose dire que le besoin fut toujours et sera toujours un foible Apollon, » A part sa forme my- ( 255 ) thologique qui sent le XVIII" siècle, cette remarque sera d’une application juste dans tous les temps. Le biographe-académicien qui avait reçu, comme nous l'avons dit, de la famille et des amis d'Edelinck des indica- tions exactes sur des particularités intimes de la vie du cé- lèbre artiste, dit que : « Sa probité, Le crédit qu'il avait à la Cour et l’estime que ses compatriotes avaient pour lui, le firent élire administrateur perpétuel de la chapelle des flamands, dans l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, et qu'il en soutint la charge avec l'honneur et la générosité qu'il faisait éclater en tout. » Edelinck a signé ses estampes de sept manières diffé- rentes que voici : Edelinck, G. Edelinck, Gérard Ede- linck, G. Edelinck eques romanus, Edelinck chevalier romain et le chevalier Edelinck. Le titre de chevalier romain lui avait été conféré sans qu'il eût fait aucune démarche pour lobtenir, ainsi que l’affirme l’auteur plu- sieurs fois cité. Gérard Edelinck mourut le 5 avril 1707 et fut inhumé à Saint-Hippolyte, paroisse des Gobelins. La vente de son mobilier attira un grand nombre d'artistes et surtout de graveurs, qui venaient pour acheter ses burins dont leurs enchères firent monter le prix bien au-dessus de leur valeur réelle, « Était-ce vénération, était-ce imagination frappée ? demande un biographe. On leur attribua dans le temps (aux graveurs) de croire que les burins d'Edelinck étaient autrement faits et beaucoup meilleurs que ceux des autres, et que de là venait sa supériorité. » Jean Edelinck, frère ainé de Gérard, né à Anvers en 1658, fut, ainsi que ce dernier, élève de Gaspard Huy- brechts ou Huberti. Nous avons dit qu’il précéda son frère à Paris, où celui-ci le trouva installé. Son talent ne s’éleva (254). , point au-dessus d’une honnête médiocrité. Mariette dit s'être assuré qu'il mourut en 1680. M. Génard, qui a publié récemment une généalogie de Ja famille des Edelinck, dans la Revue d'Histoire et d’Ar- chéologie, ajoute la note suivante à la mention qu’il fait de la naissance de Bernard Edelinck, baptisé à Notre-Dame d'Anvers en 1647 : Nous ignorons si c’est à ce frère de Gérard Edelinck que s'applique ce passage de Mariette : « Gérard et Jean Edelinck avoient un troisième frère, à qui ils avoient appris la graveure, mais comme il y faisoit peu de progrès et qu'il lui survint d’autres occupations, il l'abandonna de bonne heure. » Si M. Génard avait eu con- naissance du mémoire dont nous avons éilé plusieurs pas- sages dans le courant de cette notice, ses doutes au sujet du second frère de Gérard Edelinck, qui eultiva l’art de la gravure , eussent été éclaircis. Ce n’était pas Bernard, mais Gaspard-François, né en 1652, suivant l’indication donnée par le savant sous-bibliothécaire d'Anvers. L'auteur du Mémoire exprime le doute que Gérard Edelinck ait jamais composé, à moins qu’on ne regarde comme une COMmpOSsI- tion un petit portrait de Philippe V qu'il a gravé, groupé avec quelques figures allégoriques, et sous lequel il a mis Edelinck fecit sans nom de peintre. Jean était doué d'une certaine facilité d'invention, ainsi qu'il l’a prouvé dans des frontispices de livres et dans des vignettes bien capa- bles de le faire regretter, ajoute notre auteur. Quant à Gaspard-François, il avait fait, à ce qu’il paraît, de bonnes humanités au collége des jésuites d'Anvers, avant d'entrer dans la carrière des arts. 11 étudia ensuite sérieusement le dessin et se distingua parmi les jeunes artistes anver- sois qui, suivant un usage établi dès longtemps, s’amu- saient, l'hiver, à modeler des statues de neige sur la place PRATT: Lartpe LP LES « (255 ) de l'Hôtel de Ville. Il avait commencé la péinture, quand Gérard le fit venir à Paris et lui enseigna le maniement du burin. Gaspard-François répondit, par des progrès ra- pides, au soin que son frère prit de le former. Sans égaler jamais Gérard, il acquit assez de talent pour qu'on ait attribué à ce dernier les portraits du chanoine Feuillet et du comédien Poisson, dont il est l’auteur, si le Mémoire dit vrai. On assure que si Gaspard-François signait sim- plement ses estampes G. Edelinck, c'élait par modestie. Cette modestie aurait pu devenir préjudiciable à la répu- tation de son frère, en lui faisant attribuer des œuvres au-dessous de son mérite. La conformité des initiales du prénom a été cause, en effet, que des pièces de Gaspard- François ont été rangées dans l’œuvre de Gérard par des iconographes qui n’y ont pas regardé d'assez près. Quand le plus jeune des deux frères eut terminé le Déluge, d’après Alexandre Véronèse, que l’aîné retoucha et qui est signé : Edelincks sculpserunt, Gérard voulut que Gaspard-Fran- çois se présentàt à l’Académie; mais celui-e1, toujours par modestie, refusa de faire les démarches nécessaires pour obtenir un honneur dont il ne se croyait pas digne. « Étre assis entre les deux Gérard, dit l'écrivain qui nous fournit ces détails, entre son frère et Audran, parut à son peu d'ambition une place trop brillante, trop élevée pour son mérite, qu'il regarda toujours comme médiocre en se com- parant à ce frère dont il eût fait au moins un demi-dieu. » Gérard Edelinck eut plusieurs enfants : à l'exception d'une fille et d’un fils, ils lui furent enlevés dès leurs plus jeunes années. La fille épousa Jean Chaufourier, dessi- pateur-paysagiste de peu de talent. Le fils, appelé Nicolas, montra des dispositions pour la gravure; mais, d’après ce quenousfait connaître Mariette dans une note de l’Abece- | (256), dario, une extrême indolence l’empêcha de profiter des leçons que son père avait entrepris de lui donner. Gérard crut que le meilleur moyen de combattre ce défaut était de faire voyager le jeune artiste. Il l’envoya d’abord à Munich auprès de C. G. Amling, graveur de mérite qui avait tra- vaillé à Paris, où l'électeur l'envoya pour se perfectionner, et qu'Edelinck eut pour compagnon d’études dans l’atelier de François Poilly. Amling s’efforça de vaincre l’apathie de son élève et lui fit exécuter quelques planches. Son aptitude naturelle continua de se manifester, en même temps que sa paresse. De Munich, Nicolas Edelinck se rendit à Venise, où il se lia avec le peintre anversois Phi- lippe Wleughels; son séjour dans cette ville fut assez long, mais 1] n’y grava que deux planches. Le goût du travai ne lui vint pas davantage à Rome où il alla ensuite. Quand il revint à Paris, son père avait cessé de vivre. Le bien que celui-ci lui avait-laissé, quoique n'étant pas considé- ble, lui permit de se livrer à son penchant pour l’oisiveté. Il ne prit plus guère le burin que pour graver d’après Tor- tebat le portrait de Gérard Edelinck. Il devait au moins cet hommage à la mémoire de son père. Nicolas Edelinck mourut en 1768 des suites d’une chute.'Il était âgé de 87 ans. | Antoine Coyzevox avait modelé en terre cuite un buste de Gérard Edelinek, lequel passa entre les mains d’Audran, qui succéda à notre artiste dans son logement des Gobe- lins. Le portrait de Gérard, peint par Tortebat et gravé une première fois par Nicolas Edelinck, le fut une seconde par P. Dupin, pour l’Europe illustre de Dreux du Radier, el l’a été dernièrement encore pour la collection des Ga- leries de Versailles. PROC ER var: vw OUVRAGES PRÉSENTES. Discours prononcé à la salle des promotions, le 26 janvier 1860, par P.-F.-X. de Ram, recteur de l'université catholique de Louvain, après le service funèbre célébré en l'église primaire de Saint-Pierre, pour le repos de l'âme de M. Édouard-Joseph Deifortrie. Louvain, 1860 ; in-12. Note sur une tumeur cornée développée sur la têle d'une femme de vingt-huit ans; par le docteur C. Poelman. Gand, 1860; 1 br. in-8°. De la situation et de l'avenir des caisses des veuves et orphe- lins:, instituées par la loi du 21 juillet 1844; par M. Aug. Vis- schers. Bruxelles, 1859; 1 vol. in-4°. : L'économie polilique ramenée aux principes du christianisme ; par le docteur Th. Olivier. Paris- Tournai, 1860; 1 vol. petit in-8°. Le lard et ses auxiliaires dans l'alimentation des habitants des campagnes; par le docteur de Wachter. Anvers, 1859; 1 br. in-8°. Notice sur le frère Abraham de l'abbaye d'Orval et les tableaux qui lui sont attribués ; par le docteur À. Namur. Anvers, 1860; 1 broch. in-8°. Essai de tablettes liègeoises ; par Alb. d'Otreppe de Bouvette. 30"® livraison. Liége, 1860 ; 1 broch. in-12. Association scientifique universelle; projet de Victor Helt- man. Bruxelles, 1860; 1 broch. in-8°. Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique. Tome XVI, 4e Jivr, Anvers, 1859; 1 br. in-8°. Journal des beaux-arts. Deuxième année, n° 5 et 4. Bruxel- les, 1860; 2 feuilles in-4°. | Revue de la numismatique belge. 3"° série, tome IV, 4°° livr. Bruxelles, 4860 ; 1 broch. in-8°. 2me SÉRIE, TOME IX. 12 (238 ) __ Annales de la Société pour la conservation des monuments historiques et des œuvres d'art de la province de Luxembourg. Années 1854-1855 et 1855-1836, 3%° cahier. Arlon, 4856; 1 br. in-8°. Bulletin de la Société scientifique et littéraire du Limbourg. Tome IV, 2° fase. Tongres, 1860; in-8°. : Levensberigt van Gerardus Vrolik; door J. Vander Hoeven. Amsterdam, 14859; 4 broch. in-8°. Handelingen der jaarlijksche algemeene vergadering van de Maatschappij der nederlundsche letterkunde te Leiden, gehouden, den 46° junij 4859, in het gebouw der maatschappij tot Nut van ’t algemeen te Leiden. Leide, 1859; 4 vol. in-8°. Natuurkundige vereeniging in nederlandsche Indië : — Ver- handelingen, deel I-IV ; — Tijdschrift, deel I, HI, IV, V, XH, afl. 4-6, deel XIII, XIV, XV, XVI, XVII. Batavia, 1852-1857; 4 vol. in-8° et 27 broch. in-8°. Bulletin de la Société géologique de France. Deuxième série, tome XV, feuilles 52, 53 et titre; tome XVI, feuilles 60-64 ; tome XVIL, feuilles 4-6. Paris, 1860; 3 broch. in-8°. L'Investigateur, journal de l'Institut historique. FA FETES, 300-301 livr. Paris, 4859; 4 broch. in-8°. De la femme dans l'état social; de son travail et de sa rému- nération; par M. Boucher de Perthes. Abbeville, 1860; in-8°. Archéogéologie; par Boucher de Perthes. Abbeville, 1859; in-8°. Réunion mensuelle du 13 janvier 1860 et installation du bu- reau de la Société dunkerquoise pour l'encouragement des sciences, des lettres et des arts. Dunkerque, 1859; 1 vol. in-S°. Réponse à M. Fétis et réfutation de son mémoire sur celle question : Les Grecs et les Romains ont-ils connu l'harmonie si- multanée des sons ? en ont-ils fait usage dans leur musique? par M. A.-J.-H. Vincent. Lille, 4859; 14 broch. in-8°. Mémoires de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève. Tome XV, 1"° partie. Genève, 1839; { vol. in-8°. Observations astronomiques faites à l'observatoire de Genève, ( 239 ) dans les années 1853 et 1854; par E. Plantamour. XIH et X1V° séries. Genève, 1859; 4 cahier in-4°. Résumé météorologique de l'année 1858 pour Genève et le Grand Saint Bernard; par E. Plantamour. Genève, 1859; 1 br:. in-8°. Koniglichen preuss. Akademie der Wissenschaften zu Berlin : — Abhandlungen, 1854, 2 suppl. Band , — 1858; — Monats- bericht, 1859. Berlin, 4859; 2 vol. in-4° et 11 cahiers in-8. Die Fortschritte der Physik im Jahre 1857; dargestellt von ‘den physikalischen Gesellschaft zu Berlin. XII Jahrg., 2° Abu. Berlin, 1839; 1 vol. in-8°. Chemische Untersuchung der Hermannsborner Stahl- und Saurquellen; von D' Wilh. Von der Mark. Dortmund, 1860 : 4 broch. in-4°. Senckenbergischen naturforschenden Gesellschaft : — Abhand- lungen , H'® Bandes, 1° Lieferung. Francfort S/M, 1859; 1 ca- hier in-4°. Universität zu Kiel : :— Schrifien aus dem Jahre 1858, Band V. Kiel, 4859; 4 vol. in-4°. Compte rendu annuel adressé à S. Exc. M. de Brock, ministre des finances ; par le directeur de l'Observatoire physique central, A.-T. Kupffer. Année 1855. Saint-Pétersbourg, 1856; in-4°. Rendiconti delle adunanze dell’ Accademiu economico-agraria dei Georgofili di Firenze. Triennio II, anno 5, disp. 6*-7*. Florence, 1859; 2 broch, in-8°. Aili dell imp. reg. Istituto Veneto di science, lellere ed art. Tomo V', seria Lerza, disp. 2-3°. Venise, 1859-1860 ; 2 broch. in-$°. Observations météorologiques fuites à l'observatoire de l'Evo'e polytechnique à Lisbonne. Octobre à décembre 1859; in-plano. Linnean Society of London : — Transactions, vol XXI, p. 5- 4; — Proceedings, Botany, n° 7-15, supplément, n° 1-2; — Zoology, n° 7-15 — List, 1858, 1859; — address of Fh. Bell, esq., ete., the president, read at the ann. meeting of the Linn. ( 260 ) Society, on monday, 24 mai 4858, — mai 24, 1859. ni 1858-1859; 2 cahiers in-4° et 24 broch. in-8&. Architectura numismatica , or architectural medals of chdisie antiquity, illustrated and explained by comparaison with the monuments and descriptions of ancient authors, and copious text. One hundred lithographs and woodcuts; by T.-L. Donald- son. Londres, 1859; 1 vol. in-8°. Popular tables arranged in a new form, giving information at sight for ascertaining according to the carlisle table of mor- tality the value of lifehold, leasehold , and church property, ve- newal fines, etc.; by Charles Ab. Willich. Fourth edition. Lon- dres, 14859; 1 vol. in-8°. Royal irish Academy : — Transactions, vol. XXII; — Pro- ceedings, vol. VIE, parts 4-8. Dublin 1858-1859; 1 vol. in-4° et 7 broch. in-8°. Memoirs of the geological survey in India. Vol. I, part 1. Calcutta, 1859; 1 vol. gr. in-8°. Journal of the geological Sociely of Dublin. Vol. I, part 3-4; vol. IE, part 4-4; vol. IV, part 1-2; vol. V, part 1-3; vol. VI, part 4-2; vol. VII, part 1, 4 et 5; vol. VIE, part 1-2. Dublin, 4838- - 4859; 18 broch. in-8°. On the iron ores of carnarvonshire ; — Experimental resear- ches on the granites of Ireland ; — On some rocks and minerals from central India, including two new Species hislopite and hun- terite; — On the felspar and mica of the granite of Canton; — On the black mica of the granite of Leinster and Donegal ; and its probable identity with Lepidomelane ; by Samuel Haughton. Dublin, 1854, 1858 et 1859; 5 broch. in-&. The american Journal of science and arts, second series. Vol. XXIX, n° 85. New-Haven, 1860; in-8°. BÜLLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1860. — No 5., CLASSE DES SCIENCES. ——_———_—— Séance du 5 mars 1860. M. Van BENEDEN, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpéluel. Sont présents : MM. d'Omalius, Sauveur, Timmermans, Wesmael, Martens, Cantraine, Kickx, Stas, De Koninck, À. De Vaux, de Selys-Longchamps, Gluge, Nerenburger, Melsens, Liagre , Duprez, Brasseur, Poelman, d'Udekem, Dewalque, membres; Schwann, Lamarle, associés ; Ernest Quetelet, Montigny, correspondants. M. Éd. Fétis, membre de la classe des beaux-arts, assiste à la séance. 2me SÉRIE, TOME IX. 18 Les 2 per À A ut: h F RSR F * PAPE NE Le DE ON Le ( 262 ) CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur répond à la demande qui lui a été faite, que les académiciens ne sont point exclus des concours extraordinaires qui seront ouverts par le Gouvernement, en conformité de l'arrêté royal du 10 dé- cembre dernier, relatif à l'emploi des 5,000 francs non décernés par le jury du prix quinquennal des sciences physiques et mathématiques. — La Société linnéenne de Londres remercie pour le dernier envoi des publications de la compagnie. — M. Ch. Willich écrit à l'Académie en lui faisant hom- mage de ses tables populaires sur différents sujets scien- tifiques. — Remerciments. = RAPPORTS. M. Kickx fait connaître que la commission pour la Bio- graphie nationale s'est réunie avant la séance; que les membres se sont mis d'accord sur la forme qu'il convient de donner à la publication projetée; et que le plan, pro- visoirement adopté, sera soumis au jugement de l’Acadé- mie entière, dans sa prochaine séance générale du mois de mai, avant de le soumettre au Gouvernement. La réunion se composait des représentants des trois ( 265 }) classes, MM. Gachard, président de l’Académie, Kickx, Wesmael, Van Hasselt, Ad. Quetelet et le baron Jules de Saint-Genois, qui avait bien voulu se charger de la rédac- tion du projet et du règlement des travaux. — La commission académique, composée de MM. Ne- renburger, Martens, Stas, Liagre et De Koninck, propose deux questions pour les concours extraordinaires à ouvrir par le Gouvernement dans le domaine des sciences phy- siques et mathématiques. Quelques membres font remar- quer que les deux questions appartiennent aux sciences physiques et que les mathématiques ne figurent pas au programme. [1 est répondu que le programme n’est pas définitif et que la classe peut le modilier. Différentes ques- tions nouvelles sont proposées; le secrétaire aura soin de les réunir et de les faire imprimer avant la prochaine séance, pour permettre à la classe de fixer son choix, EE == COMMUNICATIONS. ee Orage du 19 février 1860, note de M. Ad. Quetelet, directeur de l'Observatoire. Le dimanche soir, 19 février, a éclaté, sur la Belgique, le plus terrible orage dont les annales de la science fassent mention pour ce pays. Îl a suivi à peu près la route ordi- naire que parcourent la plupart des fléaux semblables qui ont affligé nos contrées. Vers sept heures, il éclatait sur Rolleghem et Courtrai; une heure après, ses ravages s’exerçaient sur Gand, Bruxelles et les environs d'Anvers ; ( 264 ) se détournant ensuite vers Liége, où il éclatait à neuf heures, semant la dévastation sur son passage, il pénétra sur le territoire prussien , et, vers dix heures, il incendiait l'église de Melhem près de Cologne. Pendant ce trajet, l'orage se dédoublait: vers neuf heures du soir, il frappait plusieurs tours dans les environs de Charleroi, et.se dirigeait également sur Liége, en longeant la Sambre et la Meuse. Jamais l'orage n’a atteint, dans notre pays, autant de points à la fois; il est tombé sur plus de vingt clochers qu'il a plus ou moins endommagés; ce sont les églises de Saint-Martin à Courtrai, de Rolleghem, de Moorslede, de Nazareth, de Berchem près d’Audenarde, d'Oordegem, de Saint-Rombaut et de Notre-Dame à Malines, de Saints-Jean et Nicolas à Schaerbeek, de Saint-Gommaire à Lierre, de Puers, d’Aertselaer, de Wesemael , de Rillaer, d’Aerschot, de Hoegaerde, de Lobbes, de Walcourt, de Marchienne- au-Pont, de Saint-Paul à Liége, de Melhem et de Heins- berg dans la Prusse rhénane. De ces vingt-deux églises, la cathédrale de Liége est pour ainsi dire la seule qui wait souffert aucun dommage; et c’est au paratonnerre qui la surmonte qu'elle a dû cet avantage. On peut comparer à cet orage celui qui éclata avec tant ‘ de violence sur une partie de la France dans la nuit du 4% au 45 avril 1718. M. Duprez, membre de l’Académie, fait observer que la foudre tomba alors sur vingt-quatre clochers. Voici le renseignement D a bien voulu me communiquer : « L'ancienne Académie des sciences de Paris a enregis- tré dans ses volumes (1) les détails relatifs à un orage re- (1) Année 1719, partie historique, page 21. | ( 265 ) marquable qui éelata sur une partie de la France dans la nuit du 44 au 45 avril 1718. Du rapport transmis à ce sujet par Deslandes, il résulte que, pendant cette seule nuit, la foudre tomba sur vingt-quatre clochers, dans l’es- pace compris, le long de la côte de la Bretagne, entre Lan- derneau et Saint-Pol-de-Léon , et occasionna la mort ou de graves blessures aux personnes qui, d’après la funeste habi- tude de cette époque, sonnaient les cloches dans l'espoir d'écarter le météore. » L’orage qui, durant la soirée du 19 février dernier, a sévi presque simultanément dans un grand nombre de localités de notre pays, a produit des désastres dont il est bon, je crois, de conserver également le souvenir. La fou- drea frappé vingt-deux tours ou clochers, indépendamment de deux maison et d’un moulin. Voici, d’après les rensei- gnements puisés dans les journaux, les divers lieux où . ces accidents sont arrivés. Bruxelles. — Un orage épouvantable a éclaté dimanche soir. Rien ne saurait donner une idée de la violence de cette tempête de neige, de bourrasques, de rafales, d’éclairs et de LLC qui, phénomène atmosphérique des plus rares à cette époque de l’année, s'est abattue cette nuit sur la capitale. La foudre est tombée dans la cour d’une maison contiguë à l’église Saints-Jean et Nicolas, faubourg de Schaerbeek, et a failli faire deux victimes. La fabrique de chicorée de M. Navez Van Themsche, chaussée de Jette, à Koekelberg, a eu beaucoup à souffrir de l'orage. La cheminée principale servant de foyer à la machine à vapeur a été détruite. Vers le milieu de la nuit la tourmente s’est apaisée, et ( 266 ) la neige, qui à continué de tomber, couvrait hier matin le sol à une épaisseur de plusieurs centimètres. Courtrai. — Hier dimanche, vers sept heures du soir, le plus horrible temps, pluie batlante, tempête continuelle, a régné sur notre ville. Un violent orage, accompagné de gros grêlons, a éclaté, et tout à coup un craquement for- midable, précédé d’un rapide et brillant éclair, se fit en- tendre. Les habitants effrayés du quartier avoisinant l’église Saint-Martin, virent que l’une des quatre tourelles de cette église, frappée par la foudre, était en feu. Aussitôt tout le monde fut sur pied, et on put éteindre l'incendie. Rolleghem, arrondissement de Courtrai. — Un journal signale que le clocher de cette commune a été foudroyé, mais il ne donne aucun détail. Moorslede, arrondissement de Roulers.— Vers six heures, on entendait dans l’air un bruit sourd, avant-coureur des orages. Bientôt les nuages s’'amoncellent, le vent le plus violent s'élève : il tombe à la fois et de la neige et de la pluie, pendant que les coups de tonnerre redoublent à chaque instant, C'était un spectacle vraiment émouvant, aussi avons-nous bien des désastres à déplorer. L’ouragan a renversé quelques petits bâtiments, enlevé la toiture à bon nombre de maisons, déraciné des centaines d'arbres et maltraité même quelques habitants. De plus, la foudre est tombée sur la tour de léglise. Vers sept heures, on entendit un coup de tonnerre si aigu et si perçant que personne ne put douter de sa chute. En effet, aussitôt après, le sommet de la tour était en feu, et sans secours instantané, c'en eût été fait de la flèchetet peut-être de l'église tout entière. On est parvenu à maîtriser le feu en moins de deux heures, ( 267 ) Beerst, arrondissement de Dixmude.— La foudre a frappé l'aile d’un moulin. L'heure n’est pas indiquée. Gand. — Dimanche au soir, vers huit heures, un orage a éclaté sur cette ville et a occasionné un grand malheur à Nazareth. Nazareth-lez-Deynze. — Dimanche soir, vers sept heures un quart, à la suite d’un violent coup de tonnerre, l'on s'aperçut que l'extrémité de la flèche de l’église, près de la croix, était en feu. A la hauteur où l'incendie avait éclaté et à cause de la violence du vent qui soufflait à cette heure, on ne pouvait espérer de l'éteindre; aussi les flammes se propagèrent- elles avec rapidité, et peu de minutes après, la tour entière était en feu. La violence du vent rendit les secours à peu près inu- tiles. Vers onze heures, la tour s'’abima avec la croix, les cloches et la charpente : ce fut un fracas épouvantable. Bientôt la sacristie et la partie Est de l’église ne présentè- rent plus qu'un immense brasier. A minuit, tout espoir de se rendre maître des flammes avait disparu. Le clergé et les habitants de Nazareth uni- rent alors leurs efforts pour sauver le mobilier; mais toutes les tentatives faites dans ce but furent infructueuses; l’ar- deur du feu empêchait que personne ne s’en approchât. Aujourd'hui les quatre. murs de l'église restent seuls debout : tout le reste de l'édifice ne forme qu’un monceau de ruines fumantes. Berchem-lez-Audenarde. — Hier, à huit heures du soir, le tonnerre est tombé sur la flèche du clocher de l’église : en un instant la partie supérieure était en feu, et aurait été infailhiblement détruite par l'élément destructeur sans l'audace de trois habitants, qui ont eu assez de sang-froid ( 268 ) | pour monter, au péril de leur vie, par l’intérieur du clo- cher, jusqu’au lieu de l'incendie, et ont pu, après une demi- heure d'efforts inouiïs, éteindre le feu en détachant les pièces de bois enflammées. Oordegem, arrondissement d’'Alost. — En trois quarts d'heure, le feu allumé par la foudre au clocher de l’église a été éteint. Anvers. — lier soir, nous avons eu un temps assez sin- gulier. Les éclairs sillonnaient les nues, et le tonnerre se faisait entendre pendant que la neige tombait à gros flocons et que le vent soufflait avec violence. Le mauvais temps a duré une grande partie de la nuit. Ce matin encore la neige a continué de tomber presque sans interruption. Aertselaer, arrondissement d'Anvers. — La foudre est tombée sur le clocher de l’église; le dommage n'est pas considérable. fé Malines. — Hier, vers huit heures du soir, par suite d’un fort orage, la foudre est tomhée sur la tour de Notre-Dame, au delà de la Dyle. Heureusement on s’en aperçut à temps, et, à dix heures, on croyait le feu éteint, quand une heure après, le tocsin sonna de nouveau; des secours arrivèrent, et trente minutes plus tard tout danger avait disparu. Un journal cite également le clocher de Saint-Rombaut comme ayant été frappé par la foudre, mais sans ajouter aucun détail. Puers, arrondissement de Malines. — La foudre est tom- bée hier soir sur l’église. Les habitants sont parvenus à se rendre maîtres du feu, mais il paraît que les dégâts sont assez considérables. Lierre. — La foudre est tombée sur la tour de l’église Saint-Gommaire. Le feu s'est communiqué à deux poutres presque au sommet de la tour. Grâce à de sages précau- ( 269 ) tions prises par plusieurs habitants accourus aussitôt sur le théâtre du sinistre, on a pu se rendre maître du feu. Louvain. — Dimanche soir, vers huit heures et demie, un fort orage a éclaté sur la ville et les environs. Wesemael, arrondissement de Louvain. — La foudre est tombée sur l'église et y a mis le feu; la tempête qui régnait a propagé l'incendie. La neige qui tombait en ce moment, mêlée aux rafales de pluie et de grêle, rendait les secours difficiles; toutefois les boiseries de la tour ont été seules incendiées. Rillaer, arrondissement de Louvain. — ELa foudre est tombée sur les tours d'église des villages voisins : Wese- mael et Rillaer. Ces tours sont complétement détruites. Les dommages sont considérables. Aerschot. — L’orage de dimanche soir, qui a causé tant de sinistres, n’a pas épargné notre ville. Vers huit heures, la foudre est tombée sur la flèche de notre antique cathédrale, et le feu s’est déclaré aussitôt au sommet de la tour. En moins d’une heure, le sommet était un immense brasier, lançant des gerbes de feu qui venaient retomber en pluie d'étincelles sur toute la ville. Ce n’est que grâce à une épaisse couche de neige que les maisons ont été épargnées. Aux premiers sons du tocsin, toute notre population était sur pied; on est parvenu à monter une pompe près du foyer de l'incendie, et grâce à ce puissant secours, on a pu circonserire Le feu au sommet de l'édifice, lequel est entièrement consumé sur une largeur de trente-cinq pieds environ. L'église a peu souffert. Hoegaerde, près de Tirlemont. — Dimanche, 19 de ce mois, lors de l'orage épouvantable mêlé d'éclairs et de ( 270 ) tonnerre, que différentes parties du royaume ont essuyé, la foudre est tombée, vers huit heures et demie du soir, sur le clocher de l'église d'Hoegaerde, laquelle est une des plus belles églises des communes rurales de la pro- vince, et y a mis le feu en trois endroits différents. Grâce à l’activité, au dévouement et au courage des habitants, qui se sont empressés de venir au secours, en moins d'une demi-heure le feu à été éteint. Les dégâts sont de peu d'importance. | Charleroi. — Hier soir, vers neuf heures, un orage a passé sur notre contrée ; aux éclairs et aux coups de ton- nerre à succédé bientôt une grêle épaisse, puis de la neige abondante qui a tombé une partie de la nuit. Le vent s’est remis ensuite au nord. Ce matin il avait gelé assez fort, et la neige a recommencé à tomber avec une extrême abon- dance. Il y en a au moins un pied d'épaisseur sur nos cam- pagnes et dans nos rues. L'orage, qui a éclaté hier soir, a frappé trois églises de nos environs, celles de Lobbes, de Walcourt et de Mar- chienne-au-Pont. Toutes trois ont été alteintes entre neuf et dix heures. Marchienne-au-Pont, arrondissement de Charleroi. — La foudre a atteint le cadran extérieur de l'horloge, brisé les aiguilles, puis, pénétrant à l’intérieur, elle est sortie par le portail sans occasionner d’autres dégâts. Lobbes, arrondissement de Thuin. — La foudre est tom- bée sur la croix qui surmontait le clocher, et l'a renversée; en même temps, elle a communiqué le feu à.la pointe du clocher. Grâce à de prompts et intelligents secours, l’incendie fut bientôt comprimé. À minuit tout danger avait disparu. L'extrémité du elocher à seule été endommagée. ( 27H ) , Walcourt, arrondissement de Philippeville. — Les effets de la foudre ont été moins graves que dans les localités précédentes; elle a seulement effleuré le clocher de l’église en brisant une voie d’ardoises. Namur, — Une violente bourrasque, accompagnée d'éclairs, de coups de tonnerre et de neige, a sévi hier, dimanche, vers neuf heures du soir, sur notre ville. Pen- dant la tourmente, qui n’a duré que quelques instants, le . vent soufflait avec une fureur extrême. Le temps était hier au dégel; mais, dans la nuit, le vent a sauté de l’ouest au nord, et il a gelé de nouveau. Liége. — Hier soir, vers. neuf heures, le vent se leva avec une impétuosité étonnante et fondit sur notre ville en manière de trombe, soulevant des flots de neige qui se mélaient à une grêle épaisse dont la nuit fut pour ainsi dire obscurcie. En quelques minutes, la tourmente attei- gnit son plus haut degré. C'était une vraie tempête. Un éclair, d’un éclat éblouissant, auquel succéda immédiate- ment un très-fort coup de tonnerre, illumina le ciel dans son immensilé. Cet éclair fut suivi, à peu de distance, de deux autres coups de foudre également violents. Puis tout cessa : vent, pluie, neige, tonnerre; la bourrasque avait tout emporté avec elle, se dirigeant vers l'est avec une rapidité sans égale. Si passagère qu'ait été cetie tempête, la grêle et la neige n’en étaient pas moins chassées avec tant d'impé- tuosité vers la terre qu’en un instant le sol en fut cou- vert. La neige a encore tombé en abondance pendant une partie de la nuit, Dans les campagnes environnantes, la couche de neige a, ce matin, près d’un pied d'épaisseur. On rapporte que pendant l'orage, au moment où a (EM ) brillé le premier éclair, les environs de la cathédrale ont paru tout en feu. La maison du sonneur, adossée à la tour, a été remplie d’une fumée sulfureuse qui a obligé d’en ou- vrir les fenêtres. On présume que la foudre est tombée sur le paratonnerre de la cathédrale, mais on n’a pas trouvé de trace de ce passage. Ces détails, donnés par les journaux, ont été affirmés par M. de Selys-Longchamps, qui se trouvait, en ce moment à Liége. Waremme.— Les mêmes phénomènes s’y sont produits, vers huit heures et demie, d’après M. Ghaye. Ils présen- taient le caractère d'une trombe étroite de cent vingt-cinq mètres environ. Spa. — Dimanche, vers neuf heures et demie du soir, un tourbillon de neige s’est abattu sur notre ville avec une violence extraordinaire. Uu coup de tonnerre s'est fait entendre sans produire d'accidents; mais, en peu d’in- stants, il y avait plus d'un demi-pied de neige dans les rues. Les routes de Stavelot et de Malmédy sont radicalement encombrées, et les voitures n’y circulent que sur traîneau, comme en pleine Russie. Melhem , près de Cologne. — Pendant l'orage qui à éclaté dimanche, 19, à dix heures du soir, la foudre est tombée sur l’église et l’a incendiée entièrement. Toutes les mai- sons de l'endroit ont été épargnées. Suivant une communication faite à la Gazette de Co- logne par le docteur Garthe, à l’occasion de l'orage de di- manche dernier, les orages sont si rares dans les mois de décembre, janvier et février que des observations recueil- lies à Berlin, depuis 1701 jusqu’à 1787, établissent qu'il n’y en à eu dans cet espace de près d’un siècle que six en décembre, cinq en janvier et huit en février, (273 ) Voyons maintenant les indications des principaux in- struments météorologiques pendant cette effroyable tem- pête, qui semble plus spécialement avoir sévi dans notre royaume. Variations météorologiques recueillies à l’observatoire royal de Bruxelles. DATES. . mm. k 19 févr. midi. | 750,31 a OS0O. 0,25 Temps gris, incertain | k 1bs. 49,0 5,9 0S0. 0,25 pendant la jeune du 49; || Ds pos cs peser | LA 15 2 346,65 4,8 OSO. 0,50 tombant, et l’après-midi 4 45,4 4,6 OS0. 0,50 quelques gouttes d’eau, ÿ 45,8 5,4 OS0O. 0,70 entre 3 et 4heures.— Vers 6 43,1 5,1 OSO. 1,20 (®)[ 8 h. du soir a éclaté subi- 7 41,9 1,6 O0S0. 1,90 (6) tement un orage; chute 40.5 (2 pee lle “ de grêle assez abondante, 8 117 Û 3,4 (5) ONO.(4)| 0,65 suivie de neige et accom- ms pagnée de forts éclairs 9 Sur 0,6 0. J 0,55 bleuâtres avec tonnerre. Lx HS pi CE Er Après 9 h., le ciel s’est g TR ‘£) > , , éclairei par intervalles. — 20 févr. minuit.| 41,2 0,8 ONO. 0,25 Le lendemain, 20, neige 1h m. 41,4 0,9 ONO. | 0,20 abondante pendant la ma- 2 2475 0,1 0. 0,20 tinée; à midi, on a re- 5 41,2 — 0,8 O0. 0,25 cucilli 6"",50 d’eau. 4 41,1 =LE ONO. 0,25 5 41,0 —1,9 0. 0,15 6 40,9 — 2,6 OSO. 0,05 7 40,8 — 2,9 OS0O. 0,05 8 40,6 — 2,0 OS0O. 0,20 9 40,56 |—1,5 OS0O. 0,20 10 40,6 0,1 ONO. 0,25 11 . 41,1 0,7 ON©. 0,20 midi. 41,18 4,2 ONO. 0,20 PRESSION barométriq. | TEMPÉRAT. absolue réduite à ZÉéTO, centigrade de l’air. Direction. VENT INFÉRIEUR. CR. RE Intensité, Notes. (1) La direction marquée est ceile qu’avait le vent à l'heure de l’annotation, tandis que l'intensité, exprimée en kilogrammes , représente l’action, sur une plaque carrée d’un pied anglais de côté, du plus fort coup de vent arrivé pendant l’heure qui a suivi. (2) Entre 7 h. 55 m. et 8 h. 5 m. , la colonne s’est élevée hrusquement de 740mm,3 à 741mm,7. (5) A 8 h. 50 m., la température était descendue à + 09,5. (4) Vers 7 h. 50 m., le vent a sauté de 1°0$0 à l’'ONO. (5) Vers 6 h. 50 m, des coups de vent croissant d’intensité se succèdent par inlerrup- Lion depuis 6 h. 3 m. (6) Vers 7 h. 15m.; ensuite les coups diminuent peu à peu d’intensité et cessent complé- tement vers 8 heures. ( 274 ) | On voit qu'au moment du passage de l'orage, le bato- mètre élait très-bas : il a subi en ce moment une secousse assez forte. Le thermomètre et le vent ont éprouvé égale- ment des oscillations très-sensibles. La chute de la neige et de la grêle emportées par la violence des vents, ne per- mettait pas aux bâtiments de présenter des conducteurs naturels depuis leur sommet jusqu’à la base, et c’est pro- bablement à cette circonstance que sont dus la plupart des désastres physiques que nous signalons. Stavelot. — Voici les renseignements qu'a bien voulu me communiquer M. le professeur Dewalque : « L’orage que je n’ai remarqué à Slavelot que par pr éclairs, a été très-fort à Beaumont. TEMPÉRATÜRE, ÉTAT DU CIEL, VENTS ; QUANTITÉ D'EAU ;, observés à Stavelot, le 49 février 1560. | INSTRUMENTS | 6h 9h EN 9h 6h observés, matin. matin. soir. matin. (Baromètre à 0°, |756m,40| 753,62 731,21 729,50 Her 121m,77 Psychrometre, . | 056-050 | 155-056 158-152 198-1521157-190 |-257-5, Thermometre. . | 0,6 1,4 2,0 1,9 1,8 -2,8 maximum 5,5 minimum 0,6 Sérénité . . . . 0 0 0 0 2 Vents (supér.).. [NNE-1 | 0-4 0-5 OS0-5| » ‘| NO-2 Vitesse. Quantité d’eau. » » le 19, 1mm,65 neige. » » » le 20, 4,53, dont les 5/7 de acige. Les premiers éclairs observés à Stavelot, l'ont été vers six heures et demie et les derniers vers huit heures du soir; mais on a observé sans soin. Il neigeait abondamment. Je n’ai pas entendu le tonnerre. (275 } À Beaumont, village à une lieue à l’est de Stavelot, sur le versant méridional de la vallée de l’'Amblève, l'orage a éclaté à onze heures et demie du soir, et a duré plus d’une heure , avec violentes rafales de neige. — M. Duprez a bien voulu me remettre les renseigne- ments suivants qu’on lira sans doute avec intérêt (1). « Le recensement ci-dessus montre que toutes les pro- vinces de notre pays, à l'exception du Limbourg et du Luxembourg, ont payé leur tribu à l'orage du 19 février ; il montre aussi que des vingt-deux explosions de la foudre qui ont eu lieu, quatorze ont déterminé des incendies plus ou moins considérables qui causèrent, entre autres, la destruction complète de deux églises. Parmi les édifices atteints, un seul était pourvu de paratonnerre, et, comme on devait s'y attendre, la foudre s’est écoulée sans produire le moindre dégât : c’est là un nouvel exemple de l'effica- cité des paratonnerres propres, comme {ant d’autres, à faire ouvrir les yeux à ceux qui, dans notre pays, reculent en- core devant l'emploi de ce moyen préservatif. » Je rappellerai , à cette occasion, que, dans ma Sta- tistique des coups de foudre qui ont frappé des paratonnerres ou des édifices et des navires armés de ces appareils (2), j'ai mentionné cent soixante-huit cas de paratonnerres fou- droyés , parmi lesquels il ne s’en trouve que vingt-sept, c'est-à-dire environ un sixième, où les paratonnerres, par suite de graves imperfections constatées dans leur (1) Nous avons recu encore depuis une notice obligeante de M. Bernardin de Melle, près de Gand, mais qui cite les mêmes localités que nous avons dé- signées. (2) Mém. de l'Acad., tome XXXI. ( 276 }) | construction, n’ont point complétement préservé les édi- fices ou les navires qui les portaient. Ce résultat est des plus coneluants en faveur de l'efficacité des paratonnerres, et il est, sans aucun doute, la meilleure réponse qu’on puisse faire aux objections mises en avant contre l'emploi des appareils dont il s’agit. » Les effets produits par l’orage du 19 ae viennent encore à l'appui de l'opinion qui admet que les orages des saisons froides sont plus dangereux que ceux des mois chauds. On sait qu'Arago parlageait cette opinion, et qu'il chercha à la soumettre à l'épreuve de l’observation, du moins pour les orages qui se manifestent en mer. En clas- sant par mois tous les coups foudroyants à dates certaines, signalés par les navigateurs et dont 1l avait tenu note, le savant physicien français trouva que, malgré un nombre d'orages considérablement moindre en hiver qu’en été, les coups de foudre frappant des navires étaient cependant beaucoup plus nombreux dans la première saison que dans la seconde. » Ce n’est pas seulement en Belgique que l’orage du 19 février a fait des ravages, il à aussi sévi dans la Prusse rhénane, entre autres lieux à Melhem, où l’église a été réduite en cendres, et à Heinsberg, où le fluide électrique a mis le feu à la tour de l’église de Saint-Gangolphe. En Hollande, le tonnerre s’est fait également entendre; mais on ne dit point qu'il y ait commis des dégâts. (277) Communication relative aux moyens de prémunir les édifices contre les ravages de la foudre; par M. Ad. De Vaux, membre de l’Académie. Le dimanche 19 février 1860, des nuages de neige, fortement chargés d'électricité et poussés par un vent des plus violents, ont présenté ce phénomène remarquable de- frapper de la foudre un grand nombre de tours et de clo- chers situés en Belgique, et à peu de distance de nos fron- tières, dans les pays voisins. Ce fait concorde parfaitement avee les explications dé- veloppées par notre savant confrère M. Ad. Quetelet, dans une des dernières séances de l’Académie, à savoir que l'utilité des paratonnerres est surtout incontestable quand la foudre éclate avant la pluie, avant que les surfaces soient mouillées et offrent au fluide un moyen de s’écouler jusqu’au sol par l'extérieur des monuments. Ici, en effet, le vent n’apportait qu'une neige sèche et fine, et encore n'est-elle tombée qu'après le contact des nuages avec les sommets des édifices, c’est-à-dire après que les premières décharges du fluide avaient eu lieu. À ce point de vue, je crois opportun de parler d’une disposition administrative récente qui ne peut manquer de recevoir votre approbation. Un arrêté royal du 21 juil- let 1858 prescrit, pour les magasins à poudre, l’emploi « d’un toit en tôle galvanisée, muni d'appendices métal- » liques servant de conducteurs et plongeant profondé- » ment dans le sol en s’éloignant du pied des murs. » Des chéneaux métalliques feront partie de la toiture; » ils ne pourront être fixés aux murs. » Revenant à l’orage du 19 février, je me demande ce qui 2€ SÉRIE, TOME IX. 19 ( 948 ) serait advenu si, en l'absence d’une couverture protectrice de ce genre et, à défaut de bons paratonnerres, les édifices foudroyés avaient été pourvus, depuis le sol jusqu’au faîte, d’un ou plusieurs conducteurs métalliques d’une grosseur suffisante. Il me paraît vraisemblable que le fluide se serait porté de préférence par cette voie vers la terre et que les monuments eussent eu beaucoup moins à souffrir. C’est un point généralement admis, à la suite de nom- breux exemples, que les choses se passent comme si la foudre était attirée par les parties métalliques qui entrent dans nos constructions : on la voit souvent suivre et fondre les cordons des sonnettes, serpenter d’une ancre à l’autre sur la face de nos murs; on sait le rôle que joue dans le paratonnerre la barre conductrice du fluide; on sait enfin ce qui arrive quand celte barre présente des solutions de continuité ou qu’elle ne communique pas assez intimement avec le sous-sol. Qu'il me soit permis, à ce sujet, de vous entretenir d’un fait assez remarquable observé à l’univer- sité de Liége et dont je n’ai pas souvenir qu’il vous ail été rendu compte. Il y a deux ou trois ans, pendant un fort orage, un élève de l’École des mines était au tableau pour un examen de chimie. Il avait derrière lui, à la distance de 50 à 40 centimètres, les conduits en fonte servant au chauffage des salles par la vapeur; ces tuyaux aboutissaient, d’une part, à une chaudière placée au rez-de-chaussée et, de l’autre, à un tuyau de décharge ouvert à la naissance du toit. La foudre éclate, et en même temps une étincelle bien nourrie, partant des tuyaux, vient frapper le jeune homme dans les reins et lui fait éprouver une sensation étrange et quelque peu douloureuse. L’explication est trop simple pour que je m'y arrête , et je me contenterai de la résumer en affirmant que rien ne se serait manifesté au dehors des tuyaux, si ceux-ci, au lieu de s'arrêter à une ( 279 ) chaudière supportée par une maçonnerie plus ou moins isolante, s'étaient prolongés sans interruption jusqu’à une certaine profondeur dans le sol. Toutes ces observations concourent à établir la garantie que pourrait offrir, pour nos constructions, la présence de lignes non interrompues de substances conductrices de l’élec- _ tricilé depuis le faite jusqu'au-dessous des fondations. Si cette opinion est partagée par la classe, 11 paraîtra peut-être utile de la signaler à l'attention du Gouver- nement, en décidant l'insertion de la présente note au Bulletin. La classe a également écouté avec intérêt quelques détails particuliers qui lui ont été donnés par MM. de Selys-Longchamps, d'Omalius, Dewalque, etc. M. Ami Boué, membre de l’Académie impériale des sciences de Vienne, adresse au Secrétaire perpétuel une lettre renfermant le programme d’une nouvelle publica- tion qu'il fait connaître dans les termes suivants : « Je vous avais promis, il y a deux ans, de faire imprimer le catalogue méthodique de 30,075 sociétés et de 10,348 Journaux périodiques, non compris 6,000 journaux poli- tiques, 4,065 journaux d’amusement et 5,051 écrits de sociétés savantes, 44,959 instituts, universités, musées et écoles supérieures publiant 514 écrits divers. » Je suis forcé d’ajourner à un moment plus calme l'élaboration de ce catalogue, et, d'autre part, je désirerais cependant publier au moins un tableau numérique et sy- noplique des résultats. Je vous envoie, comme prospectus, le commencement de ce tableau général, tout en vous fai- sant remarquer que, dans mon travail définitif, je placerai, dans des colonnes séparées, les différentes publications : bulletins, mémoires et comptes rendus annuels des socié- tés savantes. ( 280 ) DÉSIGNATION des SCIENCES ET DES MATIÈRES. Sciences. Arts . Economie | domestique. | Sociaux et} érudition de toute espece. || toute espèce. Sciences et érudition 1 lettres, | tion soignée. graphie. Sciences , — = Sciences de | Sciences, arts et belles- ainsi qu'éduca-{ Grandes sociétés. Réuntonsiomades Mnuel, Congres | Mathématiques. Sans siége central fixe A siége central fixe. De société à résidence fixe . De délégués de sociétés . Pour des royaumes — des régions . — des provinces i pour une race . nationaux. - — un pays . L L tenus une fois. internationaux e fois ou repetes . cosmopolites périodiques. Académies de toute espèce, y compris les écoles académiques avec les anciennes. Académies de premier ordre. Demi-academies. Petites académies . Petites sociétés . | Sciences physiques , chimiques et naturelles avec la géo- arts et belles-lettres. avec les sections d’académies . Mathématique et physique . — avec les sections d'académies, : | Académies et Sociétés savantes. INSTIE Nombre TOTAL. ACTUEL. 179-181 467-179 48- 50 ds 48-50 516 28 57 182 60-66 61-66 » 158-176 245 55-56 à .» 81 Le 264 288-294 201-205 ” —500 1000-1081 48-52 41-45 75-56 _ 52-54 4 | 149) 419 102 5 370; à 288-295) à 100-105) 224 87 “4 » » | » » 10-12 6 51 45 11-14 5-15 26 | 4 4 (281 ) | » A ce tableau devraient se joindre, comme corollaires, d’autres tableaux faisant la répartition des races, des | cultes, de la chronologie et des lieux où se trouvent les sociétés ou les publications... » 'IONS. PUBLICATIONS. s UNIVERSITÉS, tres dent des. Poe Journaux périodiques. | écoles MUSÉES. Nombre Nombre SUPÉRIEURES . 15-16 (Instituts). » Re = Er 83 81 20 20 6-8 1 12-20 44-116 41-13 56 48 \ 68 239 48 156) à 133) 192 15)9041 411 2 © TOTAL. ACTUEL. TOTAL. | ACTUEL. a —————— me 215-218 46-49 741--149 114-121 50 12-13 Environ 30 collections. 161 | 10-21 Environ 56 collections. . (280) (281) santremarquer que, dans mon travail définitif, je placerai, » Ace tableau devraient se joindre, comme corollaires, dans des colonnes séparées, les différentes publications : d'autres tableaux faisant la répartition des races, des bulletins, mémoires et comptes rendus annuels des socié- cultes, de la chronologie et des lieux où se trouvent les tés savantes. sociétés ou les publications... » PUBLICATIONS. _— TR — 2 —— : INSTITU ? TIONS: DESIGNATION endus, ires, vomplie etins, mémoires el au- tres écrits des sociétés sn vantes: Journaux périodiques: des UNIVERSITÉS, écoles MUSÉES. Nombre Nombre | RE, SCIENCES ET DES MATIÈRES. SUPÉNIEURES ACTUEL. TOTAL. ACTUEL. | Sans siège central fixe . . . . . | 179-481 167-179 j » s3 81 A siége central fixe. + + . . . . 48- 50/ 512 48-50 De société à résidence fixe . . . . 28 ; Sciences . LL Ê £ _ 28 BEL he 516 500 Arts . È { De délégués de sociétés . BT 57 à ; : 20 20 ë Pour des royaumes » 189 | 514 £ onde É — des régions . » 60-66 | domestique: 2\. — des proyinces » 61-66 | : pour une race . nationaux. . . — unpays . 158-176 55-56 au ja 82 Sociaux sf érudition de 2 Lo cs ER £ E toute espèce.) © 19 De or : ; 1 ï internationaux | t2us une fois. © ou répétés . cosmopolites 19 C2 rs périodiques, , . 5-6 288-294 201-205 | 117-150 —500 1000-1081 48-52 41-45 ù Ü 44-116 A1- 75-56 52-54 » 1 Sciences de/ Académies de toutelespèce, y compris les toute espece.| écoles académiques avec les anciennes. Sciences Académies de premier ordre. et érudition.} Demi-académies. . Sciences, arts etbelles-| Petites académies . 2 129) 419 102 jus » : ss) lettres , ainsi qu'éduca-{ Grandes sociétés. 4 310) à 288-205) à ÿl ù 133) 192 IOnpIEneR, Petites sociétés . . À 100-105) 924 87 FE | " ) a Éteneee physiques, chimiquesetnaturelles avec la géo- » » | ù » à 215-218 46-49 1e, se ; arts et belles-lettres, : » » 5 < » 747-149 nie Mathématiques, » 3 2 1 50 42-15 Abe Environ 50 collections: _ avecles/sections d'académies… Mathématique et physique … q 10-2 … 15-16 s 9 2 161 10221 linstituis), Environ 56 collecuons; — avec les sections d'icademies, Ï DÉSIGNATION Mu. | Académies ét Soci des SCIENCES ET DES MATIÈRES. -TOTAL. ASfronomie: a M0 EL LD ES RS RAR TEE F : Ophque ie c'e ARE nur RTINPRNtS ETE TRS » MNETOEChpIE ns, MAT DEEP Re Are ES 5 FE 5 Photographie #7: LEA. Qi pe it RESTE ENT Frs RL Électricité et magnétisme 4 ML, ENLUE, UER 3 r5 : 2-5 Magnétisme terrestre et météorologie. . . . . . . Météorologie DAULIQUE US enter At MEN VIP EONEN EEE » ». Abrienne sex d'hcu0R, | DETENTE » » À Météorologie / sur des montagnes. . . , . . . . "RS Ar LOS au même temps horaire . . . . . . » DURE 0 aux solstices et équinoxes . . . . , » » Phénomenes périodiques de la vie organique . . . . » » Oronométirie. © dt red ieN ea MELON IRENNENNE » » 4 | AnEMoOmEtrIe 4e 2001016 ET D AT RE RTE » 4 Hydrométrie, COMMISSIONS! LL AE LC RER » » î ; Seismométrie, commissions. EN 3 LV » »21 Physique ét chimie STE DPI MR TAUE TT, 17-25 | — — avec les sections d'académies. . . 25 | IC TENNIS NES) US ARE RAR EE 4 DORMI EEE 0 I te NME. 5 UE LS LRARS 15-15 — avec les sections d’académies . . . . . . 61-66 — avec les sociétés de pharmacie. . . . . . 93-98 Pharma MIE OR EMULE LUI MON 40 LIONS. UNIVERSITÉS, écoles SUPÉRIEURFS. h 6-7 établissements. 196-232 'observatoires. 173-178 observ. actuels. » » ) L.4 k 9 sans les écoles. L |. E. 2 | 2 6 » Plus de 100. 29-31 ta stations princip, _ 1300-1350 stations second. | » LUE | » » » À » |# » 5-6 [D 1e ; » | | » l » | Plus de 140 | aborat. princip. À PR L MUSÉES. Annuaires, comptes rendus, bulletins, mémoires et au- tres écrits des sociélés sa- vantes. TOTAL. 13 Au moins 29 Beaucoup. 19 © Nombre PR : Q1 ACTUEL. PUBLICATIONS. Journaux périodiques. TOTAL. 9 8 4 rapports, environ 44-45 collections d’obser- 4 rapports, au moins 80 collections d'observations. || 45 » » Plus de 1600 3-4 67-68 | -1620 collections d’observations, Nombre ACTUEL. 1 9 Dont 2 rapports. | l vations. 11-12 » Plus de 32 rapports. » Plus de 50. Plus de 19. Plus de 15. Plus de 42. Plus de 43. Plus de 170-200. Plus de 32. Pour mémoire. Fi » 45 rapports. 62 collections. 23 répertoires. 26-27 7 18 rapports. » 40 collections. 25 répertoires. 32-39 "( 282) (285) INSTITU | rrons. DÉSIGNATION Annuaires, comptes rendus, bulletins, mémoire Académies ét SOGiétés savantes ; érioui des FA CROSS | uuvensinés, trésétritstdes sotiétés Su Journaux périodiques. vantes. à N ; , y SCIENCES ED DES MATIÈRES. Se écoles Nombre Nombre 7 — — A | Kurénieunrs. TOTAL. ACTUEL, TOTAL. ACTUEL. TOTAL. ACTUEL. Astronomie - ï 6-7 dablissenents: 196-232 | observaloires: " 7 75-178 | % 19 10 Wbsery actuels.) Optique . . ne « » » 56 n » » 11 9 Microscopie. . . « 3 É 3 5 5 2 À 5 9 1 1 Photographie … ENS 4 Dos 5 y 0 » 2 9 9 9 2 Re 2e Dont 2 rapports. Électricité et magnéèlisme + : : . : ; 5 î 6 :, 6 { g 1 Ce a 4 rapports, environ 44-45 collections d'obser= 2-5 1 » j 2 1 yations: Magnétisme terrestre et météorologie, + : : : - - Plus de100: » 15 13 4 rapports, au moins SOcollections d'observations. Météorologie : … D ta Te Ô ee 51-52 26-27 29-51 ù Au moins 29 2) 45 11-12 nat ï Beaucoup. » » » stations princip, Plus de 52 rapports: 1300-1330 » » x l ÿ à lations second. Plus de 1600-1620 collections d'observations: HAUDQUÉS CEE Er Re oc Ù n | ù » à ï Plus de 60: AENIENT EEE EU ee » ù » » » » plus de 19: Météorologie { sur des montagnes. . . , . : . . " à F “ » » ù plus de 15. au même temps horaire . . . : . . » » ù n » » Plus de 42. aux solstices el équinoxes + : » » » » » » Plus de 45 Phénomènes périodiques de la vie organique : . - . Plus de 170-200. Plus de 52° Ozonométrie. . . . . TNT À DAS TES AMEMOME LEE EN M Un ee re ee re à UE, Pour mémoires Hydrométrie, commissions. . . . . - . . . . Seismométrie, commissions. . . . . … . . . . Physique etichimie "2.1"... — Es avec Pentionc 0 TES D? avec les sections d'académies. … 25 45 rapports. 62 collections: 25 répertoires. » À 2 » 3-4 Elus de40 5 3 2 14 96-27 Orate principe ATCOUD EEE Re e CMTe r T h MO LD : MISE TAN TE SEEN TER EIRE 15-15 61-66 95-98 — avec les sections d'académies , : . . . . rapports. — avec les sociétés de pharmacie. . . . . . ï l 40 collections, 9ÿ répertoires: 5 22 10 67-68 32-55 MHALMACIE Ne EE el eee de 40 SCIENCES NATURELLES. Géologiques. Paléontologiques. Géographiques. Voyages. Statistiques. Médicales. Chirurgicales. Vétérinaires. Agricoles. Horticulturales , etc. Sylviculture. Industrie cérisicole. Apiculture , etc. Militaires. Nautiques RP civils ngénieurs L des mines. Architectes. Technologiques de toute espèces. Beaux-Arts. SCIENCES D’ÉRUDITION. Historiques. Archéologiques. Héraldiques. Numismatiques. Philologiques. Langues orientales. Pédagogie. Stenographie , etc. Éducation. (Établissements d’éduca- tion supérieurs de toute espèce). Sociétés de lecture et bi- bliothèques principales. Bibliothèques populaires. ÉCONOMIE POLITIQUE ET SOCIALE. Juifs Émigrations. Esclaves. Protection des sauvages. Tempérance. Charité. Mendiants. Nutrition. Bütiments pour les pau- vres. Prisons. Condamnés. Finances. Caisses d'épargne. . Assurances. Commerce. Librairie. Religions diverses. Missions. Société de traites. — de bons livres (Tract societies.) Morale. Franc-maçons. Philosophie. Bibliographie avec huit grandes sous-divisions, d’après le but. Journaux d’amusements. Gazettes politiques. — M. Quetelet communique, d’après une lettre de M. Henri Storks Eaton, une note sur les oscillations ra- pides du baromètre qui ont été observées, pendant la der- nière partie de 1859, en Angleterre et jusqu’en Belgique. — M, Melsens fait une communication verbale sur le perfectionnement d’un manomètre métallique, et M. Van Beneden sur un effet d’hypnotisme observé chez un ho- mard. ( 285 ) CLASSE DES LETTRES. Séance du 5 mars 1800. M. Gacarp, président de l’Académie et directeur de la classe. | | M. An. QUETELET, secrélaire perpétuel. Sont présents : MM. de Ram, de Saint-Genois, De Dec- ker, Snellaert, Haus, Bormans, Leclereq, Polain, Ba- guet, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres; Nolet de Brauwere Van Steeland, as- socié; Defacqz, Thonissen, correspondants. MM. Sauveur, Alvin, Ed. Fétis, membres des deux au- tres classes, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. M. le président du Sénat remercie l’Académie pour l’en- voi de son dernier bulletin. — Ïl est remis un mémoire sur le lieu de naissance de Charlemagne. Ce sujet n'étant pas inserit au concours LÉ TRE TT NL IUT FENTE DE hé ES NS € “e arh 16 en ( 286 ) annuel de la classe, ce travail est déposé dans les archi- ves de la Compagnie. — M. J. Jehotte, correspondant de la classe des beaux- arts, fait connaître qu'il a exécuté le buste de feu M. De- wez, ancien secrétaire perpétuel de l’Académie. Il de- mande que ce corps veuille honorer la mémoire du savant qui, depuis la réorganisation de l’Académie, en 1816, jusqu’en 1835, n’a cessé de lui rendre les services les plus importants. Tous les membres présents rendent hommage à leur ancien confrère, et expriment le désir que le local de l’Académie soit orné du portrait de cet écrivain de mérite, qui à tant contribué aux progrès des études his- toriques. Une demande sera adressée à M. le Ministre de l'intérieur, pour obtenir que le Gouvernement fasse Pac- quisition du buste de M. Dewez. — M. Chalon fait hommage d’une brochure sur le Der- nier duc de Bouillon ; M. Quetelet présente également un exemplaire du travail qu’il vient de publier sous le titre: De la statistique considérée sous le rapport du physique, du moral et de l'intelligence de l’homme. — Remerciments. COMMISSIONS. La commission pour la Biographie nationale des Belges présente, par l'intermédiaire de son président , un aperçu du travail général que l’Académie aurait à faire pour ré- pondre aux désirs du Gouvernement. Ce rapport sera présenté à la réunion générale des trois classes, qui aura lieu au mois de mai prochain. La commission était ( 287 ) composée de MM. Gachard, président de l'Académie, Kickx, Wesmael, Van Hasselt, Quetelet et le baron J. de Saint-Genois, qui avait bien voulu se charger de la rédac- tion du rapport. — La commission nommée par l’Académie pour la pré- sentation de candidats aux places vacanies d’associés et de correspondants de la classe, dépose sa liste de présenta- tion. La commission se composait des trois membres du bureau , MM. Gachard, président; de Ram, vice-directeur; Quetelet, secrétaire perpétuel, et des trois membres ad- joints, MM. Leclercq, De Decker et le baron J. de Saint- Genois. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Renaissance de la ville de Gand, après la retraite des pirates du Nord. Notice par J.-J. De Smet, membre de l’Aca- démie, Déjà, sous Le règne de Charles le Chauve, la ville de Gand avait une certaine importance, puisque, à cette époque, il y fut frappé des monnaies avec la légende Gandavum (1), et cette importance ne fit que grandir quand l'Empereur accorda à Baudouin Bras de Fer, avec la main de sa fille, le titre et les honneurs de comte de Flandre. Baudouin se fit un devoir d’embellir et de fortifier les places les mieux (1) Leblanc, Monnaies des rois de France, p. 151. ( 288 ) situées de sa principauté (1); mais son attention fut bientôt appelée ailleurs, et ce fut le cas de dire : | Pendent opera interrupta minaeque Murorum ingentes (2). Les flottes des pirates normands menaçaient le pays, et le comte aimait mieux en défendre l’entrée à ces bar- bares que leur permettre de le ravager, en les attendant derrière les murailles de ses villes. Cette résolution était digne d’un esprit généreux et d’une âme fortement trem- pée : elle devait réussir. Aussi longtemps que vécut Bau- douin , les corsaires du Nord insultèrent rarement, ou avec perte, le littoral flamand, trouvant moins de résis- tance à leurs rapines en Frise et dans la Grande-Bretagne. Malheureusement le comte, à qui ses talents militaires et sa bravoure assurent une place glorieuse parmi nos meilleurs princes (5), fut enlevé à son peuple vers 880, ne laissant que deux fils, dont l’ainé, qui lui succéda sous le nom de Baudouin le Chauve, ne manquait pas de génie et de valeur, mais avait à peine atteint sa dix-huitième année et ne possédait d’ailleurs ni le caractère généreux ni la loyauté de-son père. Une expédition redoutable de Nor- mands, qui semblaient avoir guetté son avénement, aborda en Flandre et vint prendre ses quartiers d’hiver à Gand, en 880. Toutes les fortifications qu’on avait construites depuis vingt ans pour leur résister, et tous les monastères situés le long de l’Escaut et de la Lys furent pillés et ren- (1) Baudouyn fit édifier aulcuns chasteaux et forteresses. D'Oudegh., t. I, p. 150. (2) Aeneïd., lib. IV. (5) Acta S. S. ord. Si Ben., saec. HI, p. 511. ( 289 ) versés de fond en comble; les villes de Tournai, Saint-Omer, de Térouanne livrées aux flammes. Le tombeau de saint Liévin, à Hauthem, fut seul épargné. La situation de Gand, au confluent de deux rivières et près d’autres courants d’eau, avait engagé les pirates à faire de cette ville leur place d'armes et leur résidence la plus ordinaire (1). Ils s’y réfugièrent plus d’une fois, et en particulier après un échec que Baudouin le Chauve leur fit essuyer dans la forêt de Mormal , et, après leur défaite beaucoup plus san- glante, à Saulcourt en Vimeu. Leur séjour dans nos contrées se prolongea pendant plus de douze ans, marqués par les dévastations et les cruautés les plus affreuses : ils quittèrent le pays, quand ils l’eurent transformé en désert. La ville de Gand surtout, dont les deux abbayes ne présentaient plus que des amas de ruines noircies par le feu, avait perdu sa population presque entière. Le comte, qui avait d’abord eu soin de fortifier Bruges, où il s'était retiré, avec les débris d’Aldenburg (2), ne songea que plus tard à relever la ville de Saint-Bavon. Est-ce à lui ou à son père qu'on doit la fondation de la forteresse célèbre appelée depuis Petra Comitis ou s'Gravensteen ? Nos annalistes ne s'accordent pas sur ce point historique. Tandis que d'Oudegherst l’attribue à Baudouin Bras de Fer, plusieurs autres écrivains en font honneur à son fils. Comme le traité de Verdun, signé vers 845, avait placé Gand à l’extrêmelimite entre le royaume de France et l’Em- pire, et que dès lors les Normands menaçaient nos pays, la première opinion peut très-bien se justifier; mais après (1) Contra Nortmannos in Ganto residentes, AnvaL. Berr., ad an. 880. (2) Aujourd’hui Oudenburg. (290 ) tous les ravages exercés par ces barbares, la construction du château se motive aussi justement. Nous sommes porté à croire que le comte Baudouin I* a fondé la forteresse, mais qu'elle fut rasée par les Normands, et que son sue- cesseur fut obligé de la reconstruire entièrement. Ainsi se concilieraient les deux opinions. Ce château, qui porta d’abord le nom de Castrum novum (1), sans doute en op- position avec le Castrum où saint Amand établit l’abbaye de Saint-Bavon, étendit plus tard ses fortifications depuis l'endroit où les eaux de la Lieve se mêlent à celles de la Lys jusqu'au pont de la Lieve (2), et de là par les deux rues du Château (5) jusqu’à la porte fortifiée qu'on appe- lait la Porte Grise ou Grauwer-Poort, abattue en 1540 par ordre de Charles-Quint. Elles communiquatent près de là au fossé d'Othon. et se trouvaient limitées par le fossé aux Sept Ponts ou fossé des Corroyeurs. Quant au château pro- prement dit, 1l existe encore , et l’entrée, renouvelée par Philippe d'Alsace, est un vénérable monument de notre ancienne architecture militaire. Baudouin le Chauve bâtit aussi, sur la rive gauche de la Lys, l'église de Sainte-Pharaïlde, érigée plus tard en collégiale, pour servir de chapelle aulique (4). Il y con- voqua une assemblée générale des seigneurs et des abbés deFlandre, afin d’aviser aux mesures qu’on pouvait prendre pour mettre ordre aux affaires du comté. L'évêque de Tour- nai, Rembert, y réunit, la même année, un synode, afin de (1) Plus tard Castrum vetus. (2) Ou Pont aux Pommes. (3) Lange en Korte-Steenstraet, ce qu'on a bien mal traduit par rues des Pierres. (4) Meyer, ad an. 912. ( 291 ) pourvoir, autant que possible, à la restauration des églises et aux besoins spirituels des paroisses (1). Les remèdes qu’on employa eurent cependant peu de succés , puisque le chef des Normands, Rollon, à qui Charles le Simple avait offert la Flandre, lui préféra le pays inculte et hé- rissé de bois qu’on appela depuis Normandie. Les moines de Saint-Pierre avaient réparé leur monastère; mais ceux de Saint-Bavon n’avaient pas même donné un successeur à leur abbé Hélyas, mort en 895; ils restèrent dispersés dans les couvents du Laonnais, et parurent oublier, pendant plus de quarante ans, qu'ils possédaient, à Gand, une ab- baye et des biens considérables. Aussi leur couvent ne présentait-il plus que quelques pans de murs couveris d'épines et de ronces, comme le pays environnant res- semblait à un véritable désert. Le savant historien de l'abbaye pense que rien ne motivait plus, depuis 895, l’exil volontaire de ces religieux (2). Nous sommes porté à croire qu'ils craignaient de nouvelles invasions de pirates, et ce qui prouve que cette crainte n'était pas tout à fait sans fondement, c’est qu’en 918, ces derniers dévastèrent encore les côtes de Flandre, et ne les quittèrent qu'après avoir essuyé une défaite sanglante à Fauquenberge, où les * deux fils de Baudouin le Chauve avaient fait preuve de pru- dence et de valeur. Ce comte mourut la même année. Il avait pris une trop grande part aux divisions qui agitaient la France et à la spoliation des monastères, assez commune alors, pour faire au comté tout le bien qu'il aurait pu pendant une administration paisible de plus de vingt ans. Il fut ense- EE SE —— (1) J. Goethals, Jaerb. van Cortryck , 1°'e deel,.p. 107. (2) Van Lokeren, Æisiotre de l’abbaye de Saint-Bavon, p. 25. ( 292.) veli à l’abbaye de Saint-Pierre, et sa veuve Elstrude, nièce du roi Alfred le Grand, et ses fils Arnould et Adolphe donnèrent au couvent, pour le repos de son âme, Île domaine considérable de Liefesham, dans le Kentshire, avec toutes ses dépendances et tous ses revenus (1). Le nouveau comte, que les chroniqueurs appellent Ar- nould le Grand ou le Vieux, joignait à une mâle beauté (2) une grande énergie de caractère et des qualités gouverne- mentales peu communes. Il avait, il est vrai, hérité de son père une ambition qui ne reculait devant aucun moyen , quelque criminel qu’il fût, pour atteindre son but, et l’histoire doit lui reprocher des actions aussi perfides que cruelles. I! n’en à pas moins beaucoup de droits à la reconnaissance de la ville de Gand, dont il fut en réalité le second fondateur (3). A peine arrivé au pouvoir, il jeta les fondements d’une nouvelle ville sur le vaste terrain qui est situé entre les deux bras de l’Escaut et le détour que fait la Lys au delà de ces deux bras, terrain qui se nommait alors Hereheim. Les anciens habitants, que la terreur des pirates du Nord avait éloignés de leurs foyers, et une multitude de gens de la campagne, vinrent se fixer dans une localité protégée par deux rivières et par une puissante citadelle. Le comte avait pris des mesures pour raviver l’industrie et le commerce des cuirs; il avait même introduit des industries nouvelles, et en particulier celle des toiles de lin, qui prit plus tard des développements oo (1) Annal. S'i Petri, p. 85. (2) Une chronique le nomme Den groeten ende schoenen ende siauten Arnodt. Voy. aussi Annal. Meyeri, ad an. 964. (5) On s’en est seulement souvenu de nos jours, en donnant son nom à une rue nouvelle de la 5"° section. (293% si considérables. Il créa des foires et des marchés dans la ville qu'il venait d'établir, lui donna des lois, et prit toutes les mesures qu’il crut utiles pour assurer son avenir. Un écrivain du XI"° siècle nous apprend que, de son temps, les étrangers y élaient attirés en grand nombre, au commencement d'octobre, les uns par dévo- tion, les autres dans un but de commerce , et la plupart par l'attrait de curiosité qu’offrent toujours les foires (1). La position heureuse de la ville, dont les rivières ren- daient si facile le transport des marchandises; des règle- ments qui garantissaient aux marchands tout à la fois la liberté et la sécurité nécessaires ; enfin, l’exemption de certains droits d'octroi, quinze jours avant et quinze Jours après la Saint-Bavon, devaient attirer dans la nouvelle cité une grande affluence d'étrangers. Après avoir fait exploiter longtemps à son profit les abbayes de Flandre, comme l'avait fait son père, le comte Arnould se repentit de cette usurpation, et, à la prière de saint Gérard, abbé de Brogne (2), et de Transmarus, évé- que de Tournai, il s’obligea à restituer aux religieux la plupart de leurs domaines. Et, en effet, par un diplôme, daté du monastère de Blandin, l’an 959, et souscrit par Arnould, l’évêque Transmarus, Baudouin, fils du comte, et plusieurs membres de son conseil (5), le prince rend à l’abbaye de Saint-Pierre le cens qu'on perçoit des maisons situées dans la nouvelle ville, les dimes qu’y doivent payer les habitants et les péages qu'on reçoit des passagers. Il leur restitue ensuite, avec les Prés fleuris qui touchent au (1) Acta S. S. Belgii, t. II, p. 565. (2) Au pays de Namur. (5) A. Kluit, Cod. dipl, 1.1, p. 18. 2e SÉRIE, TOME IX. | 20 (294 ) port de Gand (1), le vignoble qu’il a replanté à côté du monastère, le terrain qui y est attenant jusqu’au port, el toutes les autres terres contiguës au couvent, où les reli- gieux pourront, à leur convenance, construire des ateliers ou planter des jardins potagers. Deux ans plus tard, l’évêque Transmarus rétablit, as l'abbaye de Saint-Pierre, la règle de Saint-Benoît , laissant aux chanoines qui y demeuraient le choix de prendre l’habit monastique ou de retourner dans le monde: beau- coup d’entre eux prirent ce dernier parti. Sept moines de Saint-Bavon qui vivaient encore disper- sés à l'étranger, y avaient appris cependant les disposi- tions religieuses du comte Arnould , et s'étaient enfin dé- cidés à revenir au couvent qu'ils avaient trop longtemps abandonné. Le prince leur fit l’accueil le plus bienveillant, et comme les ruines de l’abbaye ne leur offraient pas le moindre abri, quoiqu'il eût déjà commencé, avec le con- cours des fidèles, à relever les lieux conventuels et l’ora- toire, il leur accorda un asile au cloître de Sainte-Pha- raïilde, qui put à peine les héberger avec leurs saintes reliques. I leur fallut néanmoins y prolonger leur séjour pendant trois ans, qu'on mit à reconstruire le monastère. Enfin, le 1° octobre 940, ils en reprirent possession; mais avant d'y rentrer processionnellement avec saint Gérard à leur tête, ils se virent obligés à exposer sous les yeux de tout le monde les reliques de saint Bavon, d'en ouvrir la châsse et de montrer aux assistants que le sceau qu'on y avait apposé avant l'émigration vers Laon était entièrement intact (2). Cette vue excita une vive allégresse (1) Nommés depuis Prairies des moines. (2) Acta 8.5. Belgii, t. IT, p. 617. 41 S APM 4 NS ( 295 ) parmi le peuple, à qui l’on avait fait accroire que les reli- ques du saint patron avaient été enlevées, Ainsi se trouvèrent restaurées les deux abbayes fondées par saint Amand, et, grâce aux travaux de saint Gérard, les religieux , ramenés à la régularité et à la ferveur primi- tives, promettaient à l’agriculture et aux arts utiles, comme à la religion et aux connaissances humaines, de nouveaux progrès. Cependant il n'était pas suffisamment pourvu par ces monastères, placés l’un et l’autre à une extrémité de la ville, aux besoins spirituels des habitants déjà nombreux de la nouvelle ville. Le comte et l’évêque n'avaient pu man- quer d’apercevoir qu'un centre aussi considérable de popu- lation exigeait la construction d’une église. On y mit la main en même temps qu'on travaillait à la restauration de l’abbaye de Saint-Bavon, et bientôt on vit s'élever, sur un tertre voisin de la rive gauche de l’Escaut, un modeste ora- toire que Transmarus, évêque de Noyon et de Tournai, consacra, le 45 avril 944 , sous l’invocation de saint Jean- Baptiste, de saint Vaast et de saint Bavon. Dans une charte qu'on nous a conservée, il le nomme une « basili- que convenable pour le commun des fidèles (1) : » c’est le berceau de la magnifique église de Saint-Jean, devenue cathédrale, au XVI" siècle, sous le vocable de Saint- Bavon. Ces institutions eurent bientôt les résultats que le comte et l’évêque en avaient espérés. La barbarie qui avait en- vahi la contrée avec les Normands disparut peu à peu. Des hommes pieux el austères rappelèrent le peuple au repen- (1) Basilicam vulgo congruentem. | ( 296 ) ür, rouvrirent les écoles, et, au lieu de l’indiscipline et de l’ignorance, fruits d’une longue anarchie, rétablirent parmi les religieux les lois de l’obéissance, des mœurs, du travail et de l'étude. Si l’on en croit d'Oudegherst (1), les espérances qu’on en avail conçues furent aussitôt compromises. L'empereur Othon I“, ayant eu des démêlés avec le comte Arnould, prit d'assaut le château de Gand, le fortifia et y mit une garnison nombreuse. Diericex place cet événement vers 921 ; mais cette date est tout à fait impossible, puisque Othon [° ou le Grand, n’avait à cette époque que neuf ans et ne suc- céda à son père, Henri l'Oiseleur, et seulement comme roi de Germanie, qu'en 956. Aussi, Meyer ne parle de cet événement que sous l'an 949, et son opinion est encore peu probable, car en ce temps-là Othon faisait la guerre aux Danois. « Nous-ne pouvons croire, dit M. Van Loke- ren (2), qu'à cette époque, le Château-Neuf fût au pouvoir de l’empereur Othon; » et nous partageons entièrement cet avis. Chose étonnante! le chevalier Dieriex et le chanoine de Bast admettent tous deux le fait et croient avec d’Oude- gherst que le comte Arnould fit de grandes et diverses poursuites pour ravoir ledict chasteau. Mais que voiant qu'il n'y pouvoit parvenir , et que ledict Empereur n'y vou- loit entendre, il ordonna que l'on fit audit port aulcuns petits chasteaux et maisons défensables. Mais où le comte avait-il fait construire ces fortins et ces maisons suscepti- bles de défense? Diericx les place au Marché aux Herbes (5) (1) Tome }, p. 151. (2) Hist. de Vabbaye de Saint-Bavon, p. 26. (5) Topographie de Gand, p. 52. (297 ) et assure que lui-même en à encore vu les fondements, en 4807; ce qui n’a rien d’invraisemblable (1). M. de Bast ne pense pas de même toutelois. Il veut trouver ces mai- sons defensables au marché du Vendredi, à la rue Basse et dans la ruelle qui conduit de cette rue à la Haute-Porte (2), c'est-a-dire à près de quatre cents mètres de la place Sainte-Pharailde, où s'élevait le château impérial. On ne : peut pas exiger sans doute qu'un chanoine, bien qu'il s’oc- cupe d'histoire et d’antiquités, connaisse les traités de l’at- taque et de la défense des places de Vauban; mais l’hypo- thèse de M. de Bast est par trop bizarre, et nous sommes surpris que son caustique adversaire ne l'en ait pas raillé davantage. Les faits qui ont amené cette discussion paraissent in- contestables, car tous les chroniqueurs en font mention; mais on doit les reculer jusqu'au commencement du X["° siècle. On ne peut nier cependant l'existence d’un château fondé ou pris par l’empereur Othon [° à Gand, vers 946, car nos meilleurs historiens en font foi, et leur témoignage est confirmé par plusieurs actes d’une authenticité incon- testable. Mais comme l'avait déjà remarqué le judicieux Sueyro (5), ce château était tout autre que le ’sGravensleen; car Thielrode dit, en termes formels, qu’il était construit sur le territoire de Saint-Bavon, in libera S. Bavonis pos- sessione, et non pour dépouiller l’abbaye, mais pour la défendre, non ad spoliationem ecclesiae sed ad defensio- (1) La grande boucherie ne fut bâtie en cet endroit qu’à la fie du XIVe siècle. (2) Recueil d’ant. rom., p. 21, note 1. (5) Anal. de Fland , 1. I, p. 49, ( 298 ) nem (1). Diericx en aurait parlé tout autrement, s'il avait eu connaissance de cette chronique. Othon ne mit pas dans sa forteresse des châtelains proprement dits, maïs des comtes, qui reçurent en fief de l'Empire les pays de Waes et d’Alost avec les Quatre-Métiers. Ces dispositions étaient si peu hostiles à Arnould qu’il s'empressa de don- ner sa fille Lietgarde en mariage à Wieman de Saxe, le premier de ces comtes et la tige de la maison de Gand ou d’Alost (2). L'histoire nous présente peu d'événements particuliers à notre ville pendant les dernières années de l’administra- tion du comte Arnould, assez malheureuses sous d’autres rapports. On peut inférer toutefois de quelques actes con- nus que la paix continuait à régner dans cette partie de la Flandre. Ainsi le comte fit transporter à l’abbaye de Saint-Bavon les reliques de plusieurs autres monastères qu’on avait enfouies pour les soustraire aux profanations des Normands; il mit à la tête du même couvent un disci- ple éprouvé de saint Gérard et obtint ensuite (en 958) du roi Lothaire l’approbation du rétablissement de la com- munauté et la confirmation de ses statuts et de ses pro- priétés, avec le privilége d'élire les abbés après la mort de l'abbé Womare (5). Dans une assemblée de grands et d'évêques, tenue à Gand, en 958, le comte Arnould, qui gouvernait la Flan- dre depuis quarante ans et sentait ses forces Ss’affaiblir, (1) Chron. S. Bavon., cap. VIII. (2) Duchesne, Aist, gén. des maisons de Gand et de Guines, pp. 55 et suivantes. (5) Les Ann. S. Bavon. se trompent quand ils nous donnent un nommé Hugo comme abbé de Saint-Bavon jusqu'en 965. ( 299 ) abdiqua le pouvoir en faveur de son fils, Baudouin le Jeune (1). Ce nouveau prince encouragea surtout le com- merce des Flamands : il établit des marchés dans plusieurs villes qui n’en avaient pas encore et introduisit des tisse- rands et des foulons dans la ville de Gand, dès lors très- peuplée (2). Comme l'argent était rare dans le pays, il autorisa le commerce par échange : on donnait une oie pour deux poules, deux oies pour un cochon de lait ou un agneau déjà fort, trois agneaux pour un mouton et trois jeunes veaux pour un bœuf. L'administration de Baudouin, qui promettait d’être si prospère, fut malheureusement de courte durée. Le prince, dont on admirait la valeur, l’amour pour son peuple et la loyauté, mourut après trois ans de règne, de la rougeole, selon quelques auteurs, et de la variole, selon d’autres. Il laissait de sa femme, Mathilde de Saxe, un fils en bas âge, nommé Arnould. Le vieux comte, obligé de reprendre une autorité qu'il avait résignée, convoqua une nouvelle assem- blée à Gand (5), et fit reconnaître son petit-fils comme marquis et comte de Flandre; mais il retint encore de ses débiles mains, jusqu’en 964, époque de sa mort, les rênes du gouvernement. Pendant la minorité d'Arnould IT, le roi Lothaire s’em- para des pays d'Arras et de Térouanne, mais il en rendit plus tard une partie, composée des comtés de Boulogne, de Saint-Pol et de Guines. Le même roi se montra plus gracieux envers l’abbaye (1) En opposition avec nos chroniques, l'Art de vérifier les dates dit qu'il se l’associa. (2) Buzelini Ænn. Gallo-Flandr., pag. 165. (5) D'Oudegherst transforme ces assemblées en états de Flandre. ( 500 ) de Saint-Bavon. Par une charte, datée du 5 mai 967, ce souverain défend aux archevêques et évêques, non de s’im- miscer dans les affaires de l’abbaye, comme traduit M. Van Lokeren, mais de l’envahir et de la mettre au ban. Elle y est maintenue dans toutes les propriétés qu’elle possède au delà de la Lys au port de Gand; de l’église d’Hec- cringhem, avec toutes ses dépendances et dix manses; le fief de Marca avec ses dépendances, c’est-à-dire une manse à Maglina et le village de Gundinglehem, Evergehem et son église; Dotnest (1) avec sa forêt, qui peut nourrir mille porcs; le manoir seigneurial de Fronstalla, dont relèvent les domaines précédents; l’église de Vindreholt avec une manse; le village de Ledringehem (2) avec ses terres, prairies et bois; les hameaux de Sclota, Sclotrahiga, Thesledung ; Thornesela, Spergedung et Metmedung avec une église. Ce document d’une haute importance pour la topographie des environs de Gand (5), bien que plusieurs des endroits qu’il désigne ne se retrouvent plus aujour- d'hui, prouve que le nom de Hereheim avait déjà cédé la place à celui de Gand, comme aussi qu'un grand nombre d'églises et de fermes s'étaient déjà relevées de leurs ruines. « À en croire les chroniqueurs, dit M. Van Lokeren (4), les Normands n'avaient laissé derrière eux que ruines et déserts, et à peine trente années s’élaient-elles écoulées depuis leurs dernières invasions, que l’abbaye réclame et (1) Peut-être Duttegem, dépendance d’Afsné. (2) Laethem. (5) Il est imprimé dans le Cartulaire de Saint-Bavon, pp. 6 et suiv., et nous en avons dit quelques mots dans la deuxième étude sur les Origines de Gand. (4) ist, de l'abbaye de Saint-Bavon, pag. 54. v Bec (5 SAN RES È F m ( 501 }) qu'on lui restitue une foule de métairies et d’églises.» Le savant auteur conclut de là que les chroniqueurs ont beau- coup exagéré les ravages des Normands. Il ne se serait pas hâté de conclure ainsi, pensons-nous, s’il avait remarqué que ce n’était pas depuis trente années, mais depuis plus de soixante et dix, que les pirates du Nord n’avaient plus reparu dans les pagi de Courtrai et de Gand, et que leurs dernières incursions n'avaient pu ravager que la Morinie. Sans doute, on ne regardera pas comme très-prodigieux qu’en soixante et douze ans on ait relevé quelques églises et un nombre de mélairies qui n’avaient rien de magnifique. Arnould le Jeune épousa Rosale, fille de Bérenger, roi de Lombardie. C'était là un mariage brillant, mais qui p'élait pas toutefois plus illustre que celui des premiers comtes de Flandre : il donna lieu néanmoins à une tradi- tion populaire qui devint avec le temps un petit roman historique. Le X°"° siècle étant stérile en mémoires sur notre pays, au point que l’exact de Meyere ne craint pas d'affirmer que nous ne connaissons pas la dixième partie des événements qui ont eu lieu en Flandre à cette épo- que (4), on comprend que l'imagination d'écrivains peu consciencieux pouvait s'y jouer tout à son aise. À les en croire, le roi lombard avait appelé les seigneurs et les princes d'Italie, de Flandre et d'Angleterre dans la ville de Pavie, pour prendre part à un tournoi, dont le vainqueur obtiendrait la main de sa fille, une des princesses les plus accomplies de son temps. Sorti victorieux de la passe d'armes, plus encore par son adresse que par sa valeur, le comte Arnould devint gendre du roi et fut obligé de rester assez longtemps à sa cour. Mais son triomphe avait excité (1) nn, Fland., pag. 19 verso, ( 302 } la jalousie des rois de France et d'Angleterre, déjà irrités parce que les Flamands avaient capturé dans la Manche plusieurs de leurs vaisseaux. À yant attiré dans leur alliance le roi d'Écosse, ces princes envahirent la Flandre, que gouvernait alors Thierri de Beveren dans l'absence du comte, et mirent le siége devant Gand avec toutes leurs forces réunies. Le siége durait, sans aucun progrès, depuis sept ans et menaçait d’égaler en longueur celui de Froie, et on ne pouvait se promettre la même issue, car les assié- geants ne comptaient aucun Ulysse dans leurs rangs, quand les hauts alliés se décidèrent à la retraite. Mais, comme le roi d'Angleterre avait juré d'entrer à cheval dans la wille par une brèche et de semer du grain sur la grande place, les Gantois daignèrent lui permettre d’abattre un pan de muraille entre la porte de Thorhout et du Sable, et d’en- irer par là, monté comme un saint Georges, afin qu'il pût se donner l'air d'accomplir son serment. Le bon Marc Van Vaernewyck ne peut croire à ce siége de sept ans, mais il paraît disposé à admettre le récit, et ajoute même que la retraite des trois souverains donna lieu à de grandes réjouissances, auxquelles son annotaleur rapporte l'établissement de la foire de mi- carême (1). Sanderus, à son tour, raconte que Thierri de Beveren soutint vaillamment le siége que les trois rois avaient mis devant Gand, et qu’il rendit tous leurs efforts inutiles; mais il ajoute ce correctif : Quibus tamen ea res, quamque solidis auctoribus nitatur, hactenus mihi incom- pertum (2). Philippe de l'Espinoy, tout en modifiant un (1) Æist. van Belgis, Ile deel, bl. 180, enz. (2) Flandr. illustr., tom. Ier, pag. 28. Il y revient, pag. 388, sans aucun correctif, L'IM ASIA RSS ; ARE . ; Mi (505 ) peu l’histoire, est plus affirmatif, On lit en effet dans son principal ouvrage : « Durant l'absence dudit comte audit » voyage, ledit seigneur de Beveren défendit vaillamment » la ville de Gand, et soustint le siége de trois roys, à » sçavoir de France, d'Angleterre et Escosse, lesquels » avoyent assiégé ladicte ville à tout leur effort par plu- » sieurs temps, mais furent contraincts à lever ledit » siége, et eux retirer à grande honte et nul proufit, » comme nous tesmoignent les vieux tiltres qu'on en » trouve par escript (1). » Plusieurs manuscrits parlent encore de ce siége, mais lui assignent une autre époque (2), M. Van den Bogaerde y croit aussi (5). Un bel esprit du XVI®° ou de la fin du XV" siècle, assez judicieux pour garder l’anonyme et ne pas publier son œuvre, broda sur ce sujet un petit roman historique qui n'aurait pas déparé la Bibliothèque Bleue. On l’im- prima néanmoins à Gand, avec quelques additions, vers le milieu du XVIF®* siècle (4), et un rhétoricien drama- turge s’avisa même d’en faire une tragédie , qui jouit à son tour des honneurs de l’impression. Le prétendu siége n’en est pas moins une fable puérile qui n’a d'autre fondement que le nom mal interprété d’une rue (5), mais qui eut quelque vogue, parce que le roman qu'elle avait produit caressait la vanité de quelques familles (1) Recherches des antiq. , etc. Douai, 1651, pag. 72. (2) L’annotateur de Vaernewyck cite de plus un Belleforest, qu’il a lui- même créé cardinal, mais le texte qu’il donne ne dit rien du siége. (5) Het dist. van S'-Niklaes, 1I[° deel, bl. 15. (4) Les bibliophiles flamands l'ont réimprimé en 1845, comme curiosité littéraire. (5) Engelandgat.; ce qui ne signifie pas brèche , mais rue ou porte d’ An- gleterre. ( 304 ) ; puissantes, en faisant remonter leur illustration jusqu'au X"* siècle. Sueyro l’a réfutée avec plus de gravité et d'éru- dition qu’il n’était nécessaire (1). Un autre fait longtemps controversé, mais qui ne res- semble en rien à ce roman, se rattache encore au règne d’Arnouid le Jeune : c’est le creusement du fossé ou canal d’Othon. Le chanoine De Bast en nie l'existence, et le che- valier Dieriex soutient avec sa verve ordinaire que ce fossé n'était autre chose que le canal nommé encore Othogracht, qui commence à l’écluse appelée Paddegat , près du con- fluent des deux rivières, et s'étend jusqu'à la Lys. Une tra- dition constante, les chroniques de Thielrode (2) et de Saint-Bavon, que confirme la keure des Quatre-Métiers, ne permettent pas de s'en tenir à l'opinion de De Bast; et celle de Diericx n’est pas moins en contradiction avec ces chroniques, qui font, à la vérité, passer le canal devant le pont de Saint-Jacques, à Gand, mais qui le font débou- cher, non dans la Lys, mais, à l'embouchure du Hont, dans la mer du Nord. D'ailleurs, nos annalistes auraïent- ils cru nécessaire de faire mention d’un fossé aussi peu considérable que l’Othogracht actuel? Nous sommes porté à croire que le canal a été creusé en effet pour servir de démarcation entre l'Austrasie et la Neustrie, par suite du traité conclu à Reims, en 980, entre l’empereur Othon le Roux et le roi Lothaire, et por- tant la cession de la haute Lorraine à l'Empire. Mais com- ment constater le parcours de ce canal? M. Van Lokeren d'abord (5) et ensuite MM. Warnkoenig et Gheldolf, qui (1) Ann. de Fland., tom. Ir, pag. 58. (2) Pag. 10. (5) Chron. de Thielrode, Notes hist, p. 105%, ( 505 ) ont porié un nouveau jour dans la question ({), pensent que l’Ottogracht actuel en faisait réellement partie, mais qu'après avoir rejoint la Lys, à l'endroit dit Krommen-Wal, il était remplacé sur l’autre bord par le fossé navigable, appelé aujourd’hui fossé de bateaux ou Schipgracht, et se prolongeait au nord de Gand, dans la direction de Rooden- huize vers Cluisen et Ertvelde, sous le nom de ruisseau des Châtelains (Burggraven-Stroom), séparant les métiers de Bouchaute et d’Assenede de la partie de la châtellenie de Gand qui relevait autrefois de la couronne de France. Quand on se dirige encore plus au nord, ajoutent-ils, en suivant la limite du métier de Bouchaute, on la trouve formée par un fossé nouveau qui du Burggraven-Stroom s'étend jusqu’au territoire de Caprycke. On ne peut le suivre plus loin à cause des ensablements et des inonda- : tions successifs qui en ont, dans beaucoup d’endroits, fait disparaître les traces. À près avoir longé encore la frontière du métier de Bouchaute, le canal Othonien devait se jeter dans la mer entre Botersande ou Wevelswale, à l’extré- mité NO. de ce métier et Gatternesse, qui appartenait au Franc-de-Bruges. Cette solution d’un problème historique ardu et long- temps douteux nous semble rationnelle et appuyée de preuves solides. Le nouveau canal séparait de la Neustrie une lisière de pays qu'on appela du nom de l’empereur Ottingen ; 1l protégeait en même temps les limites de l’Austrasie, l’abbaye de Saint-Bavon et le Château-Neuf. Peut-être devint-il bientôt inutile sous ce dernier rapport; car Baldéric et Sigebert de Gembloux nous apprennent tous deux que Baudouin le Barbu était en possession de (1) Zist. de la Fland., t. IE, pp. 17 et suiv. ( 306 ) ce château, et on ne lit nulle part que ce comte ou sa mère, pendant sa minorité, ait songé à s'en emparer. D'où résulte que le fort se trouvait déjà entre les mains d’Arnould le Jeune. Aussi, le savant Duchesne croit que ce prince s'en rendit maître pendant que le châtelain Thierri [* et son fils Arnould faisaient la guerre en Hol- lande (1). C'était là un nouveau gage de sécurité pour l’industrie et le commerce de Gand, et la population dut considéra- blement s’en augmenter. La tradition constante de l'église de Saint-Nicolas, mieux que les assertions de Van Vaer- newyck et de Sanderus, prouve que son existence date de la fin du X°° siècle. On n'aurait pu songer à bâtir une seconde église si près de celle de Saint-Jean et après un demi-siècle seulement, si la multitude croissante des ha- bilants n'en avait pas fait une loi. Les bibliothèques de Rome (notes et extraits ); par M. Ker- vyn de Lettenhove, membre de l'Académie. Près de deux mille ans se sont écoulés depuis que Rome, la plus belle, selon Virgile, des choses qu'il y ait au monde {rerum pulcherrima Roma), tient dans ses mains le sceptre des lettres et des arts. Fille de Saturne ou de Ja- cob, cité impériale d’Auguste ou cité pontificale de Léon X, elle réunit dans son sein toutes les gloires et veille avec le même soin à ce qu'elles se transmettent de génération (1) ist. gén. des maisons de Gand , etc., p. 59. re ce POS ( 507 ) en génération. Les Césars avaient placé le tabularium au Capitole : les papes ont ouvert à leur bibliothèque et à leurs archives le palais du Vatican. Cependant quand on s'arrête aux bords du Tibre, ce n'est plus dans la poussière des archives et des bibliothèques que l’on se sent conduit à chercher la vie du passé. Il n’est pas une pierre muette et abandonnée qui n'ait ses enseignements bien supérieurs à ceux des livres, et le hasard même semble multiplier entre toutes ces ruines également désolées, de grandes et mystérieuses associa- tions de souvenirs. La carte de Rome n'est plus tracée sur le marbre du Capitole, mais l’histoire de Rome se lit encore tout entière dans les débris mutilés qui en- tourent le temple de Jupiter, devenu l’Ara cæli. Là était l'autel de la Victoire, là était le temple de la Concorde. Si l’autel de la Victoire couronnait le Capitole, c'était le tem- ple de la Concorde qui en marquait la base : utile leçon que Rome ne comprit pas plus sous la république que sous l'empire. Là se trouvaient les rostres antiques où le tribun, qui s’adressail aux passions populaires, avait à sa droite la statue de la Fortune, à sa gauche les Gémonies. Là se voyait la statue de Pompée au pied de laquelle tomba César. De ce côté s'étendait la voie Appienne qui s’ouvrait par le tombeau du premier des Scipion , BONORUM oPTIMUS, pour se terminer non loin de Literne, tombeau d’un autre Scipion, qui y fit graver ces mots trop célèbres : Ingrata patria , ne ossa quidem. Plus près, la voie Sacréecommence vis-à-vis de la fontaine de Servilius, et atteint son point culminant à l’arc de Titus, pour descendre et s’éteindre avec les annales mêmes de l'empire, au monument de Con- stantin. Autres temps, autres destinées. C’est dans la pri- son de Séjan que saint Pierre répand l'onde purificatrice ( 908 }) du baptême : c’est dans le cirque de Néron que sa sépul- Lure indiquera la place où s’élèvera plus tard la sublime basilique de Michel-Ange. | Deux points extrêmes dominent la Rome antique et la Rome chrétienne : au nord, les jardins où Salluste se re- posait dans la mollesse, après avoir rudement flagellé ces mœurs dont il était le complice; du côté opposé, sur les hauteurs du Janicule, la cellule de Saint-Onuphre, où Tor- quato Tasso, après avoir chanté la Jérusalem terrestre, saluait dans l’ardeur de ses hymnes et de ses prières, une autre Jérusalem. Quel abime entre ces deux noms, entre ces deux collines! | _ Au milieu de tous ces grands souvenirs qui placent à Rome le centre de la conquête du monde, d’abord par les armes, ensuite par la foi, il était bien difficile de songer à d’autres annales que celles qui ont élé écrites au Capitole avant de se continuer dans les catacombes; il était bien difficile de songer à une autre histoire, et quelle histoire ? Celle de ces pays éloignés où Virgile plaçait, sur des rivages sans cesse menacés par les fureurs de l’océan, la limite des peuples visités par la conquête, et où longtemps après lui les écrivains romains ne découvraient du Rhin à l'Es- caut, sous un ciel toujours sombre, que d'éternels brouil- lards. Et néanmoins, c’est de cette contrée longtemps méprisée que sont venus et Charlemagne, qui triomphe sous le portique de Saint-Pierre vis-à-vis de Constantin, et Baudouin de Flandre, qui recueillit le sceptre même de Constantin, et ce pieux Godefroi, qui reçut quelque chose de mieux qu'une couronne, quand un grand poëte le choisit pour héros de son épopée. C'est de là aussi que sont accourus ces glorieux disciples de l’art moderne, qui, mélant leurs chefs-d'œuvre à ceux de l'Italie, ont asservi ( 509 ) le marbre à leur ciseau sous la coupole de Saint-Pierre (1), ou placé l'ange d’airain armé de l'épée au sommet du mau- solée d’Adrien (2). Il y a à Rome un cloître qui fut jadis un temple de Mi- nerve, et où l’on ne rencontre que des religieux portant la robe blanche de saint Thomas d'Aquin. Là se présenté- rent à moi pour la première fois d’autres souvenirs, que je croyais étrangers aux traditions classiques ou religieuses de Rome. On me montra une bible magnifique, et j'y re- connus le lion de Flandre et de Brabant devenu, à la fin du X[V"* siècle, le noble insigne des ducs de Bourgo- gne. On voulut bien aussi my faire voir un précieux exemplaire d’une histoire universelle, et à la dernière page, quelques lignes, écrites en flamand, étaient signées de Jossine de Briarde et de Françoise de Vormizeele. De la Minerve, je me dirigeai vers les archives de la basi- lique de Saint-Pierre, et là, sur le premier feuillet d’un manuscrit des Satires de Perse, je lus une note dans la- quelle un ancien conservateur de la bibliothèque du Vati- can, qui à rédigé le catalogue des manuscrits de Saint- Pierre, et qui, dans cette même basilique, a dû à la reconnaissance publique un monument digne de sa science, a pris plaisir à omeltre son nom pour ne rappe- ler que sa patrie : Emmanuel de Belgio, Antverpiensis (5). —_ (1) On sait que la statue de saint André par François Duquesnoÿ est la plus belle des statues”"colossales placées dans les niches des piliers de la cou- pole de Saint-Pierre. (2) La statue qui a donné son nom au château Saint-Ange est de Pierre Verschaffelt. (5) Cette note porte la date du 8 mai 1688. On conserve aux Archives de Saint-Pierre le catalogue de tous les ouvrages imprimés ou manuscrits, dus à la plume féconde d’Emmanuel Van Schelstrate. La bibliothèque de la basilique de Saint-Pierre, quoique peu considé- 27° SÉRIE, TOME IX, 24 ( 510 ) Ces souvenirs m'avaient touché; cet exemple m’encoura- gea , et bien que, ni dans la disposition de mon esprit ni dans l'état de ma santé, rien ne me rendit propre à un travail sérieux, bien que je ne fusse aucunement préparé à des recherches de ce genre, je me décidai, sans trop regarder en arrière, à offrir aussi mon tribut patriotique, quelque faible qu’il dût être, à la science et à l'étude con- sciencieuse du passé. J'oubliai que je ne disposais que de quelques heures, ou, tout au plus, de quelques fragments de Journées déjà bien remplies, et je formai le vœu d’être introduit aux archives pontificales, et de consulter les pré- cieuses collections du Vatican, sans négliger compléte- ment les trente mille manuscrits mentionnés dans les catalogues des bibliothèques Angelica, Vallicellana, Ca- sanatense, Chigi, Barberini et Corsini. | Aux archives, la perte constatée depuis longtemps des documents originaux du VIII” et du IX" siècle (1) rendait fort difficiles les recherches que, selon le vœu de la classe, rable, renferme de précieux MSS. des philippiques de Cicéron, de saint Augustin, de saint Hilaire, de Dante et de Vincent de Beauvais. On y ad- mire un missel orné des plus élégantes miniatures de Giotto. Le MS. de Dante offre, m’a-t-on assuré, des variantes qui mériteraient un sérieux examen. J’en reproduirai une seule, que j'ai recueillie parce qu’elle se rapporte aux vers consacrés à Siger de Courtray : Quest’ ordine ritorna ‘L luo rigquardo C'illume d'uno spirto chei pensieri Gravi a morir li parve venir tardo : Essa la luce eterna di Siggieri Che leggendo nel vico degli Strami Silogizzo invidiosi vert. (1) Voyez à ce sujet les savantes recherches de M. Pertz, /talianische Reise, pp. 24-52. (oil ) Jeusse été heureux de consacrer aux origines carolin- giennes. J'avais inutilement interrogé, dans plusieurs bi- bliothèques, des textes vénérables, écrits, selon quelques érudits, de la main même des Alcuin et des Agobard (1); J'avais pu m'assurer que le manuscrit si précieux de Hugues de Fleury, conservé à Bruxelles, était conforme à celui de saint Benoît-sur-Loire, déposé au Vatican (2). Il ne me restait qu'à remettre le sort et l’espoir de ces investigations entre les mains savantes du directeur des archives pontificales. Si un jour quelque texte nouveau, heureusement retrouvé, vient suppléer au silence d'Egin- hard, e’est au R. P. Theiner que nous devrons la solution d’une question encore si obscure. | Cependant le désir de profiter de l'autorisation qui «m'avait été accordée, m'engagea à porter mes investiga- Uons sur un autre point, et le R. P. Theiner voulut bien me communiquer des documents relatifs au siècle de Bo- niface VIIT et de Philippe le Bel, époque mémorable, qui n’a jamais été assez profondément étudiée. La classe me (1) La Bibliothèque de Francfort (n° 67) possede aussi un précieux frag- ment sur Charlemagne. Il à été publié par Grafft, 4lt-hochdeutscher Sprachschats, III, p. 855. Le disciple de Raban Maur, qui Pa écrit, y nomme Eginhard : Unus qui sapientior caeteris dicebatur, nomine Ein- Rart. (2) Le MS. de Ja J’aticane, reg. 545 (XIT siècle), est adressé, comme celui de Bruxelles, à Yves de Chartres, et les premières pages offrent exactement le même texte. Malheureusement, il est incomplet, et s'arrête avant les lignes si précieuses qui nous ont conservé la seule trace historique de [a réaction mérovingienne, après la mort de Charles le Martel. La Vaticane possède (reg. 745) un autre MS. de Hugues de Fleury, bien moins ancien que le n° 545. Les sources relatives à l’histoire du VIlme et du IX": siècle abondent à Rome, ( 312) permeltra de rappeler que j'ai publié en 1853, dans ses Mémoires, plusieurs pièces importantes qui ont trait au démêlé du pape et du roi de France, et tout récemment un manuscrit de Mayence m'a révélé une face nouvelle de cette lutte, face caractéristique, quoique grotesque et po- pulaire, car on y fait remonter l’histoire de la caricature politique en France, à 1505, en nous apprenant qu’à la mort de Boniface VII, le roi Philippe fit promener dans les rues de Paris l’image du pape armé d'une fourche, pour combattre l'aigle germanique et le coq gaulois, mais soudainement abattu et dévoré par les vers (1). A Rome, je recherchai avec un vif intérêt les écrits de Jacques de Viterbe, le docteur spéculatif, qui fut l’apologiste de la papauté contre Gilles Colonna, l’apologiste du pouvoir royal (2). Je copiai quelques pages éloquentes du livre de (1) MS. de la Bibliothèque de Mayence, n° 417. (2) Il est intéressant de rechercher dans le livre de Regimine principum , ouvrage d’ailleurs rempli de maximes pieuses et sages, certaines règles poli- tiques, perfidement interprétées plus tard par Philippe le Bel, qui eut Gilles Colonna pour précepteur et à qui ce livre fut dédié. On y trouve tour à tour le germe de sa haine contre la noblesse ( Quod politiam salvare videtur est cavere seditiones nobilium) ; de son système stratégique qui tendait à sub- stituer au courage la force matérielle même la plus vile (sciamus quales homines sunt eligendi ad bellum.. Utiles sunt macellarii quia non hor- rent sanguinis effusionem cum assueti sint ad occisionem animalium) ; de son penchant pour les hommes de plume, poëtes ou scribes, qui explique la continuation du Roman de la Rose par Jean de Meun , et les diplômes de chevaliers ês-lois (rhetorica necessaria est filiis regum, quia horum est conversari inter gentes et dominari populo qui non potest percipere nisi rationes grossas et fiçgurales); de son empressement à chercher dans les cas graves un appui dans l'élément populaire (Decet reges observare bonas consueludines. populus diligit magnanimos, exponentes se pro bonis communibus); de sa théorie presque moderne du gouvernement des classes moyennes (optimum regnum et oplimus populus quando est èn mullis à. AT 4e (1 AS ". "1 F4 re ‘À Pre w ' à (515 ) Regimine christiano, où Jacques de Viterbe déclare qu’il prend la plume pour rétablir la vérité, dans un temps où elle est profondément troublée (1) : « S'il n’y a plus qu’un » pelit nombre de bons rois, s'écrie-t-1l, c’est que leur puis- » sance est trop grande, et c’est surtout leur cupidité, » qui les porte à la tyrannie. On oublie le dicton de nos » pères : Tu seras roi tant que tu feras le bien ; sinon , non. » Rex eris si recle facias. Sinon facias recte, rex non » eris (2). » Jacques de Viterbe désignait plus ouverte- ment encore le roi faux monnayeur, quand alléguant je ne sais quel passage des étymologies d'Isidore, il ajoutait : _» Siun mauvais denier n’est pas un denier, il faut dire » aussi qu'un mauvais roi n'est pas un roi (3). » D'autres recherches entreprises sur des bases plus lar- ges, dans le but de découvrir des documents inédits rela- uifs à notre histoire politique et littéraire, trouvèrent de toutes parts un bienveillant appui. Son Éminence le car- personis mediis constitutus) ; et par-dessus tout, de son avarice (diversi modi sunt lucrandi pecuniam et aliqui horum modorum sunt regibus congruentes), et de l’inflexible rigueur de sa volonté (expedit populo cum magna reverentia obedire regibus ne reges provocentur ad iracundiam), principalement contre ceux qui sont les plus faibles (consideranda est poten- tia adversarium, ad meliores pacem debemus habere, nisi occurat oppor- tunitas temporis in quo ex eis congrue possimus vindictas assumere). (1) Casanatense, B. VIII, 17. La Bibliothèque Ængelica possède une précieuse copie (faite à Padoue, en 1408, par frère Jean de Austria ) du cours de théologie professé à l’université de Paris, par Jacques de Viterbe. Il y cite fréquemment nos anciens docteurs , notamment Henri de Gand et Gilles de Lessines. (2) Plures ad tyrannidem deficiunt et maxime propter cupiditatem , vitium quae radix est omnium malorum, secundum apostolum. (5) Pravus rex non vero potest dici rex, sicut falsus denarius non est denarius, Vide Zsidorum, 1. IX, Etym. | (514 ) dinal Antonelli m'avait accordé immédiatement l'autori- sation dont j'avais besoin. Monseigneur de San-Marsano, archevêque d'Ephèse et préfet de la Vaticane, qui a rempli il y a peu d'années près de notre Gouvernement les hautes fonctions de nonce apostolique, voulut bien (je ne saurais assez lui en témoigner toute ma gratitude) se rappeler les liens qui l'avaient uni à la Belgique. Au même titre, mon- seigneur Angelini, dont le nom n’est pas étranger à lanon- ciature actuelle de Bruxelles, et qui professe lui-même pour les lettres le goût le plus éclairé (4), me facilita l’accès de plusieurs autres dépôts, et je trouvai un accueil non moins obligeant chez l’un des associés de la classe, déjà célèbre par d’admirables travaux d'archéologie chré- tienne : j'ai nommé M. le chevalier de Rossi. Grâce à un concours si précieux et si utile, mes notes se multiplriè- rent, et bien que j'aie cru plus tard devoir supprimer la plupart de celles qui se rapportaient au XVI" siècle, parce qu’elles reproduisaient les données recueillies avec le plus grand soin en 1857 par notre confrère M. Borgnet, (1) Monseigneur Angelini a eu la bonté de me montrer, dans sa nom- breuse collection d’autographes, des livres portant des annotations margi- nales du plus grand prix. Il en est qui sont écrites de la main de Galilée ou de celle du Tasse. D’autres, tracées sur les feuillets des #aximes de ma- dame de Sablé par la reine Christine de Suède, sont des plus intéressantes. L'auteur des Maximes avait fait l'éloge de la science; il avait soutenu que les princes n’entendaient la vérité qu’au berceau; il avait dit que la comédie a ses dangers, parce qu’elle porte trop à l’amour. Sur ces questions si différentes, Christine est d’un avis tout opposé. Elle ne croit pas à la science, puisque le plus haut degré où elle puisse nous élever est de recon- naîlre que nous ne savons rien. Les princes sont déjà craints au berceau, et par suite leur enfance même est déjà livrée aux flatteurs. Quant à la comédie, elle nie l'influence qu'on lui attribue, en ajoutant qu’elle parle ainsi par expérience, ( 315 ) il en est d’autres que je renvoie à un appendice, qui ne sera peut-être point sans quelque utilité. La classe me permettra de ne m'arrêter ici que sur deux manuserits qui m'ont paru, entre tous ceux que J'ai vus, plus dignes de fixer son attention. Les auteurs de ces deux textes appartiennent l'un et l’autre au Hainaut, la plus chevaleresque et la plus litté- raire de nos anciennes provinces. Le premier chanta la chevalerie, mais n’écrivit que des vers; le second, à la fois chroniqueur et poëte, célébra également les faits d'armes, les prouesses et les aventures. Le premier est resté presque inconnu, le second est l’'Hérodote du moyen âge. Dans la. forme, c’est la même langue, gracieuse et naïve; pour la pensée, ce sont les mêmes traditions, les mêmes ins- pirations , le même culte de la gloire et de l'honneur. Le poëte (à notre avis, il mérite d’être placé parmi les trouvères les plus élégants du XIV” siècle) était attaché à Guillaume de Hainaut, « ce seigneur prud’homme el » loyal, craint et redouté de ses ennemis, aimé de ses » amis, pourvu de grant sens et de parfait honneur (1). » Il se nomme lui-même Jchans de Condet qui estoit De son maisnage et qui viestoit Des robes de ses esquyers. Li gentieus quens des Hainnuiers Lui a dou sien donné maint don. Jean de Condé désigne quelque part ses vers sous ce titre : Li recors d'armes et d'amours. Il prodigue aux che- (1) Froissart, Chron. 1, 1,12 ( 316 ) valiers, à qui s'adresse ce double enseignement, des con- seils qu'ils ne doivent pas oublier. Tantôt il s’écrie : Haus hons doit à honneur entendre ! Tantôt il répète : Noble ordène est de cevalerie : Si doit iestre sans tricerie. Mais déjà la corruption et l’avarice se répandent, et le poëte les accable de ses sévères invectives : Trop est li siècles pervertis.…. Ne sai c'onneurs est devenue Et pouvrement est maintenue Par ciauls qui par droit le deuissent Maintenir s’en leur cuer euissent L’estat d’onneur. Poursuivant avec une noble hardiesse, il s'adresse en ces Lermes au prince à qui il offre ses vers : Tu ies de gens d’onneur estrais, Bien te dois warder de tous fais Si c’onneur à honte ne ranges. Ce poëte du Hainaut, qui n’est pas historien, fait tou- tefois le plus magnifique éloge de l'histoire, quand il dit aux grands que cette gardienne fidèle de la vérité marche sans cesse à côlé d'eux pour leur présenter deux miroirs, l'un qui perpétuera leur gloire, l’autre qui éternisera leur honte. Une fois seulement, il s'occupe des faits contem- porains, et c’est pour payer à la mémoire du comte Guil- ( 517 ) laume de Hainaut un juste tribut de douleur et de grati- tude : Morir est usaiges communs ; Pour chou doivent pluiseur sans faindre Le boin conte Willaume plaindre Qui tenoit Haynnau et Hollande. Nul prince plus preu, ne plus noble N’avoit jusqu’en Constantinople. Fieus fu au boin conte Jehan Qui mainte paine et maint ahan Eut pour se pays à deffendre. Il fu plains de grant gentillèce, De valour et de grant prouèce, De largèce et de grant frankise. On ne poroit en nulle guise Plus large donnéour trouver. C'est li pères de ménestrès : Cil doivent bien iestre espierdu Quant il ont leur père pierdu. En armes fu preus et isniaus, Et débonnaires comme aigniaus, Et selonc sa nobilité Fa plains de grant humilité, As povres boins aumosniers. e- L2 LL L2 2 L L1 ° . Se doit-on bien prier pour l’âme. Pais, après avoir loué les vertus de sa veuve, Jeanne de Valois, le poëte ajoute : IIT filles saiges et senées Eurent noblement assenées. ( 318 ) L'ainsnée estoit empereys Femme à l’empereur Loeys : L'autre ot le conte de Viler Vaillant conte et biau baceler; La tierce, n’estoet trop long quierre, Elle est roinne d’'Engleterre (1). La reine d'Angleterre est madame Philippe de Hainaut, généreuse protectrice des lettres comme son père, et ces vers, consacrés à la noble compagne d'Édouard [IL, nous conduisent naturellement à nommer l’auteur du second manuscrit, qui n’est autre que le bon chroniqueur « qu’elle iit et créa. » Froissart, qui s'accointait si volontiers des hommes de son temps, est aussi un ami pour quiconque se laisse entraîner aujourd’hui à vivre avec lui, c’est-à- dire, à chevaucher avec lui de ville en ville, de récit en récit; 1} semble qu'on l'interroge d’abord à grand’peine, mais bientôt il s'offre à vous pour vous semonner et vous délilter lors même que vous ne songez plus à lui. C’est, j'ai hâte de le reconnaître, messire Jean Froissart qui, lui-même, est venu me mettre sous la main, à Bruxelles, son premier et son dernier poëme, et qui plus tard, à Cambray, m'a révélé ses touchants adieux aux vanités de la terre. C’est encore Froissart qui, dans la splendide bibliothèque de Sixte-Quint, et alors que je ne pensais guère qu'à Charlemagne, a placé sur ma table, à mon (1) Sur Jean de Condé, voyez la notice de M. Dinaux, dans les Ærchives du nord de la France, 1857, p. 575. M. Sandras (Étude sur Chaucer) ve- marque que, parmi les trouvères du XIVe siècle, une place exceptionnelle doit être réservée à Jean de Condé, « âme courageuse qui a la haine du vice » et qui le poursuit au grand jour. » Le manuscrit que j'ai découvert à la Minerve offre plus de vingt poëmes ou fabliaux de Jean de Condé, restés inconnus jusqu’à ce jour. FE ET sn FA ts Û : j — | sa i : } ; US ( 319 ) grand étonnement , un texte tout nouveau de ses chro- niques, un texte si précieux, que je suis heureux d’être le premier à le signaler à l’attention des érudits. Froissart avait annoncé qu'il remplirait jusqu'à son der- nier jour sa lâche de chroniqueur, revoyant, modifiant, corrigeant sans cesse d'après ses informations et ses en- quêtes, l'immense recollection de faits historiques qu’il avait réunie. On était assez disposé à penser que, dans les dernières années de sa vie, le découragement s'était em- paré de lui, et que sa retraite à Chimay avait été aussi silencieuse qu'obscure. On avait calomnié Froissart, car la Vaticane nous offre un manuscrit où le chroniqueur, près de descendre dans la tombe, proteste de nouveau de son zèle pour la cause sacrée de la vérité, et complète son œuvre par des chapitres inédits et des souvenirs person- nels , qui répandent une vive lumière sur les événements du XIV®® siècle. La dédicace au comte de Blois ne s'y re- trouve plus, car le comte de Blois est mort, et avec lui s’est tristement éteinte l’une des plus illustres maisons du moyen âge. [Il ne faut pas en chercher une autre adressée soit au roi de France, soit au roi d'Angleterre; car si le roi de France est le faible Charles VI, le roi d'Angleterre est aussi le faible Richard IT, peut-être même est-ce déjà l’usur- pateur Henri IV. À Chimay, l'isolement du chroniqueur est complet : rien ne le rattache plus au siècle des Clisson et des Chandos, mais il a déjà devant lui la postérité. Voici le prologue du manuserit de la Vaticane (1) : « Alin que les grans merveilles et li biau fait d'armes » liquel sont avenu par les guerres de France et d'Engle- (1) Reg, 869, FPoyez l’appendice. ( 520 ) terre et des roiaulmes voisins soient notablement regis- » tré, et ou temps présent et à venir veu et congneu, je » » Jehans Froissars, trésoriers et chanonnes de Chimay, me voel ensonnier de metre en prose et ordonner se- lonch la vraie information que je ay eu des vaillans hommes, chevaliers et esquiers , qui les dites armes ont aidiet à accroistre, et aussi par auquns rois d'armes » nommés héraus et lors marescaus qui, par droit, sont et doient.estre juste inquisiteur et raporteur de tels beson- gnes; et devés savoir que je ai ce livre cronisiet et his- toriet, ditté et ordonné apriès et sus la relation faite des desus dit, à mon loial pooir, sans faire fait ne porter partie, ne colourer non plus l’un que l’autre, et seront dedans ce livre li bien fait ramenteu de ceulx qui l'ont desservi de quel païs et nation il soient, car esplois » d'armes sont si chèrement comparet et achatet, ce scè- h vent cil qui i travellent, que nullement on n'en doit mentir. » | Le chroniqueur ajoute que jamais il n’y eut plus de merveilles de bravoure que de son temps, mais qu'avant d'aborder ses récits il veut « un peu exemplier les bons. » Il continue en ces termes : « Tout homme qui demande à estre preus doit regarder à la vie des anciens... Le nom de preu renlumine les coers parecheus et resplendist dansles salles ei dans les palais, on l’enseigne au doi, on recorde son bienfait, on li donne glore en ce monde. Proesce ne voet point séjourner en l’ostel, mais errer et travillier et querre partout ès pais prouchains et lointains les armes et les aventures. » Froissart fait observer que les bacheliers se plaignent de ne pas être assez riches pour chercher au loin les aven- ( 321 ) | tures, mais la plupart des héros de son livre ne l’étaient pas davantage, et jamais ils ne songèrent à se plaindre de leur pauvreté. Il n’en est pas de même au moment où Froissart dicte ce dernier texte de ses chroniques: « or se » débrise li mondes. » Puis viennent quelques lignes où Froissart, parlant de son imagination de chroniqueur, nous apprend pour la première fois, qu'il avait étudié avec soin l’histoire des temps anciens. Il ne se contente pas de dire que l’on trouve dans le monde, à la suite des héros qui s'illustrent, la voix du peuple qui raconte confusément leurs ex- ploits, et le récit des clercs plus exact et plus fidèle « qui » registre lors œvres et baceleries par quoi elles soient » mises et couchiés en mémoire perpétuelle : » il se plaît aussi à rechercher l’histoire de la gloire des armes depuis les premiers temps du monde. « Or ai eu plusieurs fois grant imagination sur l'estat de proëce, et penset et imaginet comment et où elle a tenu ses termes et venu d’un roiaulme en aultre, et aussi en ma jonèche j'en ay moult oy parler auquns vaillans hommes, li quel s'en esmervilloient ensi que Je, et pour venir à la vérité et apaisier m’imagination, je ai leu » tant ens ès livres anciens que je quide savoir auqune » cose, et selonch mon avis, je en ferai aucune détermi- » nation. » La gloire des armes compte sept époques principales. Après avoir régné en Chaldée avec Ninus et Sémiramis, en Judée avec Josué, David et les Machabées, en Perse et en Médie, avec Cyrus, Assuerus et Xercès, elle a donné à la Grèce Hercule, Thésée, Jason, Achille et d’autres preux chevaliers. De Rome elle à passé en France, sous le grand empereur Charlemagne. Y % VS VW ÿ (083 « Apriès a resgné proèce un temps en Engleterre pour » le fait dou roi Edouwart et de la bonne roine Philippe » de Hainnau sa femme, et par lors enfans et par les vail- » lans hommes de celi roiaulme. Or, ne scai pas si elle » voelt encores aler plus avant ou retourner, mès elle est » de si noble et poissant condition, que là où elle trueve » les hommes qui l’aiment et la servent, elle s’encline et » se lient et demoure avecques euls, ear proèce n'a cure » des couwars et des preçeurs, mais les fuit et esquève et » elle à droit. Homs qui voelt venir à vaillanee par proèce » considère comment on asciet à table dou roi, de duch » et de conte le preu, et on met arrière le couwars pre- » çeus, ja soit-il de plus haut linage ; et pour que cette » histoire cronisié est toute remplie de fais d'armes, je » ai un petit tenu le degré de proèce, à la fin que » tout baceler qui aiment les armes s’1 puissent exem- » plier. > Dans cette rédaction des chroniques, Froissart remonte à la bataille de Courtray, pour expliquer Paffaiblissement de la noblesse française, puis passant en Angleterre, il trace un précieux tableau de la situation de ce pays, où les gentils-hommes sont pleins de loyauté et d'honneur, mais « où li communs peuples est de fele, périlleuse et » desloiale condition (14). » Comme Comines le remar- quera quelques années plus tard, l'Angleterre est le pays où les lois sont le plus respectées, où la levée des impôts est la plus régulière et la plus équitable, et pour citer les (1) Je copie au hasard d’autres phrases relatives aux Anglais, afin de montrer que Froissart ne fut pas coupable de trop de partialité en leur faveur : « Nuls qui sages est n’i doit avoir trop grant fiance. Li Engles « ne pevent amer les Escos, ne ne fissent onques, ne ja ne feront. » h Vi 7 ( 525 ) termes mêmes dont se sert ici Froissart : « Engleterre est » Ja terre dou monde la mieulx gardée. » J'ai voulu rechercher, dans ce manuscrit, les chapitres où il est question de Jacques d’Artevelde. Là aussi, si le texte nouveau se rapproche quelquefois du texte ancien, le plus souvent il s’en éloigne pour entrer plus avant dans la narration des faits. Quand Artevelde paraît pour la première fois, le chro- niqueur s'exprime ainsi : En ce temps avoit, à Gand, un » bourgois qui se nommoit Jaquemon Dartevelle, hauster » homme, sage et soutil durement, et fist tant par sa pois- » sance que toute la ville de Gand fu encline à lui et à ses » volentés. » Quand 1l prend la parole sur la place publi- que de Valenciennes, dans la patrie même de Froissart, nous lisons encore : « Dartevelle parla si proprement à la plaisance dou peuple qui là estoit assemblés pour oir ce qu'il voloit dire, que quant il conclut son sermon, une vois généraus et murmuracions se eslevèrent en disant : Dartevelle a bien parlé et par grande expérience, et est dignes de gouverner et excerser le pais de Flandres. » Mais ce qui mérite bien plus lattention , c'est le récit que nous allons rencontrer des derniers moments du cé- lèbre capitaine des communes flamandes. Une conférence avaiL été tenue à l'Écluse, et il y avait été résolu qu’on ferait un nouvel effort près du comte de Flandre pour l’en- gager à rendre hommage à Édouard HI. Artevelde avait ajouté que s'il persistait dans son refus, le roi de France et d'Angleterre pourrait, en le déclarant déchu de ses droits pour défaut d'hommage à son seigneur suzerain, investir son propre fils du comté de Flandre; mais tous les dé- putés des communes qui accompagnaientArtevelde, avaient remontré qu'une assemblée générale des représentants du ES ON Cu 0 ( 38€ pays avait seule le droit de prendre une résolution aussi importante. Ceci se passait au moment où le duc de Bra- bant traitait du mariage de sa fille avec Louis de Male; il s’alarma pour le prince qui devait plus tard être son gendre, et soudoya secrètement les tisserands de draps, dont le doyen était Thomas Denis (1). Quatre cents tisserands se réunirent devant l’hôtel de Jacques d’Artevelde en l’appe- lant par leurs insultes et leurs clameurs. En vain Arte- velde parut-il à sa fenêtre et les supplia-t-il de revenir dans trois jours : ils ne se laissèrent point toucher par ses discours : « Nous ne voulons point tant attendre, s’écriè- » rent-ils tout d’une voix, mais viens hors de ton hostel » compter à nous. » Artevelde, comprenant que sa mort élait jurée, quitta la fenêtre pour gagner son écurie et fuir à cheval, mais Thomas Denis réussit à l’atteindre et le frappa le premier d'un coup de hache. Thomas Denis était an ingrat : « Se li avoit Jaques Dartevelle, dit Froissart, fait plusseurs biens et l’avoit mis en l’office dou doyenné des telliers et si estoit son compère, et fu là ochis Jaques Dartevelle mescamment, qui tant avoit eu d’estal, d'amour et de prospérité en Flandre. Ensi vont les for- tunes de ce monde, ne nuls ne se peut, ne doit confier, se sages est, trop grandement ens ès prospérités de ce monde. » Édouard lui-même crut que, la Flandre lui restant fidèle, il ne devait pas rechercher trop sévèrement les auteurs du complot. Il fit bon accueil aux députés des communes qui s'excusèrent près de lui « et demora li pais » en pais, Dartevelle fu oubliés, li roi d'Engleterre unt » à amour les Flamans et ne leur osta nulles des grâces » faites. » Se © vw UÙ” ÿ: œ VV (1) Et voelt-on bien dire que le duc de Brabant fu cause. ( 929 ) Si je ne me trompe, ce sont surtout les emprunts faits © à la chronique de Jean le Bel qui se sont effacés dans le manuscrit de la Vaticane. Aussi n’y trouve-t-on plus cette phrase si souvent citée, où Froissart déclare qu’il a rédigé la première partie de ses chroniques d’après la relation de Jean le Bel. Peut-être ceci explique-t-il pourquoi j'ai cher- ché inutilement dans le manuscrit de la Vaticane l'épisode des amours d'Édouard II pour la comtesse de Salisbury qui, sauf la magie du style qui appartient en entier à Froissart, remonte évidemment à la narration de Jean le Bel. Notre bon chroniqueur, alors âgé d'environ soixante ans, se serait-il reproché d’avoir dépeint trop vivement cette passion que, malgré les calomnies de Jean le Bel, il avait renfermée du moins dans les étroites limites de l’honneur et du devoir? Mais, lors même que cet épisode n'aurait pas été conservé (et je n’ose l’affirmer, tant a été rapide mon examen du manuserit de la Vaticane), que de détails nouveaux abondent ailleurs! combien les aperçus naifs et piquants du chroniqueur sur les hommes et les choses de son temps occupent 1e1 plus de place, surtout en ce qui se rapporte à la glorieuse monarchie d'Édouard HI! Combien Froissart n'est-il pas heureux de rappeler que « li roi Edouwars d'Engleterre et la roine Philippe sa » femme en lors temps furent moult larges en dons et » courtois et plentureus dou leur, et sceurent moult bien » acquérir l’amour,et la grâce de toutes gens. » Tantôt c'est un chapitre consacré à des joutes et à des fêtes, où l’on vit accourir les plus braves chevaliers de toute la chrétienté, surtout ceux du Hainaut (1); tantôt c’est une (1) Froiïssart cite entre autres chevaliers du Hainaut les sires d'Enghien, d'Havré, de Gommiynies et de Ghistelles. Le sire de Gbhistelles, bien qu’issu 27° SÉRIE, TOME IX. 29 ( 326 ) rapide dissertation sur la construction du château de Windsor, promptement achevée sous la direction d’un elere nommé Guillaume, qui chaque samedi payait tous les ou- _ vriers et qui devint, grâce à sa probité et à sa vigilance, l'an des plus puissants seigneurs d'Angleterre. Ailleurs ce sont des passages encore mille fois plus précieux pour nous; car c'est Froissart lui-même qui s’est mis en scène, et qui confirme par son témoignage précis ce que J'ai dit ailleurs des enquêtes où il s’accointa des plus hauts sei- gneurs d'Angleterre. Ainsi dans les lignes suivantes nous le voyons chevaucher avec les Spencer sur les bords de la Tamise ou de la Savern : | « Je Froissars, actères de ces chroniques, le di pour tant que en ma jonèce je fus moult bien et tous dis amés de l’ainnet frère Espensier, que on nommet Edouwart ensi que son père, et ot en mariage la fille à messire Bertremieu de Bruhes (Barthélemi de Burghersh), un moult vaillant chevalier, et fu cils Sires Espensiers de son temps et dou mien le plus joli chevaliers et le plus courtois, li plus honnourables et amoureus et bace- leureus assés, qui fu en toute Engleterre, et le plus larges de donner le sien là où il véoit que il estoit bien employet, et qui mieuls sceut vivre, et dou plus biel » eslat et bien ordonné; et oy direen mon temps les plus » hautes et nobles dames dou pais que nulle feste n’estoit » parfaite se li sires Espensiers n’i estoit, et pluisseurs fois » avint que quant je cevauchoiïe sus le païs avecques lui (car les terres et revenues des barons d’'Engleterre sont » par places et moult esparses), il m’appeloit et me disoit : SG VU à VE vw: + Y GS d'une maïson de chevaliers de Flandre, était compris dans la noblesse du Hainaut, parce qu’il habitait la terre de Raismes, prés de Valenciennes. (527) »» Froissart, voés-vous celle grande ville et ce haut clo- »» cher? — Je respondoie: Monseigneur, oil. Pourquoi »» le dictes-vous? — Je le dis pour ce, elle deust estre »» mienne, mais il 1 ot une male route en ce pais, qui »» tout nous tolli » et ensi par pluisseurs fois m'en mons- » tra, et il s'en voet en Engleterre plus de XL, et appel- » loit la roine Isabiel mère au roi Edouwart la male roine, » et ausi faisoient si frères (1). » Le jour n’est pas éloigné (il est permis de l’espérer) où le plus admirable monument historique du moyen âge trouvera un éditeur consciencieux et érudit, qui le repro- duira d’après les meilleurs textes et avec toutes les va- riantes de ses rédactions successives. Le manuscrit de la Vaticane eccupera, sans doute, dans ce travail, la place qui lui est due si légitimement. Les citations que je lui ai empruntées en ont assez fait connaître toute l’impor- tance, mais 1l convient aussi de rechercher d’où est venu ce texte, écrit à la fin du XIV”* siècle, qui longtemps après passa de la bibliothèque de Paul Petau dans celle de la reine Christine de Suède, Quelques lignes suffiront pour éclaircir cette question, et peut-être ajouteront-elles à ce texte une autorité de plus en plus grande. Il faut remar- quer , d’une part, qu'une main presque contemporaine a tracé sur l’un des feuillets cette signature incomplète : J. de, d'autre part, que le nom des sires de Moreuil est souligné toutes les fois que Froissart mentionne ces braves (1) Le manuscrit de la Vaticane est, si je ne me trompe, le seul qui ren- ferme à sa véritable place l’histoire des années 1350 à 1356, qu’après de longues recherches, M. Buchon retrouva dans une copie du manuscrit Sou- bise , aujourd’hui perdu, et qui existe aussi-comme supplément à la fin d’un manuscrit du British Museum. ( 528 ) | chevaliers du Vermandois. N'y a-t-il pas lieu de croire que ce manuscrit a appartenu à Jean de Moreuil, capitaine de Compiègne, qui succomba à Azincourt, comme son aïeul avait péri à Crécy? Ce nom ne permettrait-il pas de re- monter à l’origine même de notre texte? Le sire de Moreuil avait recueilli l'héritage de la veuve du comte Louis de Blois, fille de Jean de Beaumont, et si nous admettons que ce fut pour elle que Froissart composa cette rédaction de ses chroniques, nous comprendrons aisément com- ment, avant 1415, elle se trouvait entre les mains de Jean de Moreuil. Notre texte serait donc le dernier monument de la fidélité de Froissart à ces nobles maisons de Beau- mont et de Blois, qui lui avaient confié le soin de perpé- tuer leur gloire. | Je devais retrouver quelques jours plus tard, dans la collection de l’Arsenal, à Paris, le Froissart de la biblio- thèque de Bourgogne, vanté par Godefroy et vainement cherché par M, Buchon. Enlevé de Bruxelles il y a plus d'un siècle, il a passé depuis par plusieurs mains, et nous ne saurions assez déplorer le soin que l’on a pris d’en dissi- muler lillustre origine, en arrachant les premiers feuillets qui portaient la signature de Charles-Quint (1). (1) La lettre de Godefroy à Dacier, qui lui transmettait la description du Froissart de la Bibliothèque de Bourgogne, quatre volumes in-folio reliés en ancienne basane blanche, m'avait aisément permis d’y reconnaitre les quatre grants volumes couverts de cuir blanc du Froissart décrit dans l'inventaire du 15 novembre 1487, qui a été publié par M. Barrois (n° 1895, 1700, 1651 et 1894). L'identité du manuscrit de l’Arsenal n° 144 (Histoire de France) est incontestable, et il suffit de remarquer 1° qu'il offre à l’éncipit du second feuillet et à l’explicit de chaque volume, les mots indiqués dans Pinventaire de 1487, y compris la faute +: Constantin pour Cotentin ; 2 que les quatre volumes contiennent le nombre de feuillets mentionnés par Gode- PT RC «€. F l * DT —- x ‘ ; } _ ( 529 ) Si des textes mêmes de Froissart, nous descendons aux documents qui, dans une bonne édition, doivent servir de pièces justificatives, nous ajouterons qu'un vol récent a fait disparaître à Mayence les célèbres prophéties de Jean de la Roche-Taillade, mais qu’elles sont conservées à la bibliothèque de Bâle (1). J'ai remarqué, dans les dépôts de Rome, plusieurs autres manuscrits dignes d’un sérieux examen. J'aurais pu citer, parmi les narrations historiques, une chronique achevée en 1520, où les grands événements qui avaient la Flan- dre pour théâtre sont fidèlement retracés, et une chro- nique de Baudouin d'Avesnes avec des variantes; j'aurais pu invoquer aussi, comme l’un des titres qui appelleront l’indulgence sur mon travail, la découverte d’une lettre dont la date révèle assez tout le prix, car elle fut écrite à Damiette, par Jean de Beaumont, chambellan de saint Louis, le 26 juin 1249. Je craindrais toutefois de donner trop de développements à cette notice, et je me bornerai à mentionner ici un manuscrit de la Vaticane, qui, par froy et qu'on y remarque également , au commencement du second volume, une miniature représentant le supplice de Guillaume de Pommyères. Ce manuscrit, avant d'entrer à l’Arsenal, avait fait partie de la bibliothèque du marquis de Paulmy. (1) Le MS. enlevé à la Bibliothèque de Mayence y portait le n° 247. 11 est décril ainsi au catalogue : Fratris Johannis de Rupe-Scissa, ord. min. libellus excerptus de prophetali libello, Vade mecum, de futuris eventibus.. Les prophéties de Jean de la Roche-Taillade, conservées à Bâle, ont été écrites à Avignon, dans une prison qu'on appelait la prison du Soudan. Elles sont adressées à un frère mineur, médecin, nommé Niger. Je ne retrouve plus les extraits que j’en avais pris, et je le regrette d’autant plus qu’ils offraient un grand intérêt, surtout en les rapprochant de ce qu'ont écrit sur Jean de la Roche-Taillade, Froissart et le continuateur de Guil- laume de Nangis. ( 330 ses généreuses nspirations, touche de fort près aux récits du chroniqueur de Valenciennes. Par un hasard étrange, l'un des derniers livres qu’ait écrits Christine de Pisan, repose à côté de la dernière relation historique qu'a dictée Froissart, et si cette rédaction de Froissart a échappé aux patientes investigations des érudits, le livre de Christine de Pisan est également resté inconnu, même à ses biographes les plus zélés. Il porte pour titre : Des- cription et deffinition de prodommie selon l'opinion de mon- seigneur d'Orléans (1), et nous n’oublierons pas que ce duc d'Orléans, qui traçait à Christine de Pisan les véritables règles de la prodommie, fut ce prince-poëte, captif pendant vingt-cinq ans, qui Sut tour à Lour combattre en chevalier el chanter en trouvère. Peut-être ai-je déjà occupé trop longtemps la classe de ces recherches, péniblement entreprises et presque aus- sitôt interrompues. Elles eussent exigé plus de temps, plus de soin, plus d'attention, mais je ne regrette point de les avoir tentées. L’ouvrier du Trastevère, qui poursuit les fouilles du Forum, recueille avec respect le moindre débris du passé, et lors même qu'il abandonne sa tâche dès le premier jour, il ne la juge pas complètement stérile s’il a exhumé quelque marbre tout empreint encore de la gloire et du génie d’un autre âge. (1) V’aticane, reg. 1258. APPENDICE (1). Vaticane, reg. 712. — Lamentatio de morte Karoli comitis Flandriae. | Incipit : Proh! dolor, ducem Flandriae Et defensorem Ecclesiae. Explicit : Hoc sunt digni supplicio Quibus placet perditio. Voy. Bolland., Acta SS. Martii. Casanatense, X, V, 51. — Lettre de Baudouin, comte de Flandre, au pape Innocent IT, en faveur d'Othon de Saxe, qui venait d'être élu empereur (1198). Casanatense. — Lettre de Jean de Beaumont, chambellan de saint Louis, à son ami Geoffroi de la Chapelle, panetier de France (à Damiette, le 26 juin 1249). Il lui annonce que le roi, la reine, le comte et la comtesse d'Anjou et le comte d'Artois se portent fort bien. Il jouit lui-même, ainsi que ses fils Gui et Guil- laume, d’une bonne santé. Le roi s'est embarqué le jour de l’Ascension : les flots étant soulevés par des tempêtes, il est resté treize jours en mer. La flotte comprenait au moins 120 gros vaisseaux et 1,800 navires d’un ordre inférieur (M mora et DCCC vasa). On arriva à Damiette le vendredi après la Trinité. Le lendemain matin, le roi, « auditis horis et divino servicio, » fit préparer, pour le débarquement, les galées et les petits navires (vasa minora). Le roi se montrait étranger à tout sentiment de (1) Un grand nombre de notes faisant double emploi avec celles de M. Bor- gnet ont été supprimées: je joins à celles que j'ai conservées quelques extraits pris à Naples et à Gênes. ( crainte, et les chevaliers luttèrent de courage pour assaillir les Sarrasins (Absque timoris strepitu, laeto animo... usque ad ma- millas mittebant se in aqua, tenentes in manibus lanceas et balistas). Les croisés ne perdirent presque aucun des leurs, et le lendemain, les lueurs de l’incendie allumé par les Sarrasins an- noncèrent qu'ils avaient abandonné Damiette. L'armée des croisés compte plus de 1,900 chevaliers du royaume de France (de regno Franciae). Ceux de Syrie et de Chypre, ceux du Temple, de l'Hôpital et des autres ordres religieux d'outre-mer sont au nombre de 700. Il y en a beaucoup d’autres dans l’armée, de sorte que l'on peut porter à plus de 5,000 le nombre de ceux qui se trouvent sous la bannière de la croix. Cette lettre est, je crois, signalée pour la première fois. On sait combien sont rares les documents originaux relatifs aux croisades. Je ne retrouve pas le n° du manuscrit où elle est trans- crite sur le feuillet de garde : c'est, si je ne me trompe, une histoire des Lombards, portée fol. 88 verso du catalogue. Barberini. — Chronicon breve comitum Flandriae. Fragment inséré dans une chronique italienne du XIV” siècle. Vaticane, reg. 395. — Chronique qui paraît offrir le plus grand intérêt pour l'histoire de la Flandre. Elle s'arrête en 132 et se termine par quelques lignes où l'on rapporte que Louis de Nevers, étant sorti de sa prison, vint à Paris, où, saisi d'un cha- grin-mortel (mortali ægriludine) dont sa captivité était la cause, il ne tarda pas à rendre le dernier soupir. L'on ajoute que ses obsèques furent célébrées le lendemain de la fête de sainte Marie- Madeleine. Cf. la cont. de Guill. de Nangis. Barberini. — Congiura del popolo minuto di Fiandra. 4324. Fragment en italien peu intéressant. Vaticane, 198. — Cathalogus et chronicon principum Flan- driae. Incipit: Anno Domini 621, temporibus Eraclii. Explicit : Fluctibus octobris valles maduere leonis, Imbres octobris luxerunt corde coloni. dsl ess Se SRI CE . man 22e Z trie Item in flammingo: Schonendycke dranc dryf win coel Doe Vlander hadde menighen poel. Cette chronique a été publiée par M. le chanoine Desmet; mais le texte du manuscrit de la Vaticane paraît plus correct. Cf. Chro- niques de Flandre, i. 1, p. 257. Vaticane, reg. 925. — Chronique de Flandre, dite de Denis Sauvage. Ce manuscrit de la fin du XIVe siècle s'arrête au siége de Calais. Il faut remarquer qu'il commence par rapporter la fonda- tion de l’abbaye des Dunes : « L'an 1138 fu fondé l’abbie des Dunes. » Vaticane, reg. 869. — Chroniques de Froissart, portant la signature : Pa. Petavius. Premier volume incomplet qui se termine à la mort de Philippe de Valois. | Vaticane, reg. 726. — Chroniques de Froissart avec une con- tiauation jusqu'à la mort de Charles VI. Ce manuscrit, écrit à la fin du XV" siècle, m'a paru peu important; je remarque toutefois qu'il commence à la mort de Philippe de Valois, c'est-à-dire au point où s'arrête le précieux manuscrit 869. Ces deux manuscrits avaient été indiqués en 1777, par Du Theil à Dacier, sans faire toutefois l'objet d’un examen sérieux. Vaticane, reg. 811. — Chronique relative aux affaires de France et de Bourgogne sous Charles VIT (autographe ?). Elle paraît offrir quelques rapports avec la chronique publiée par Godefroy, sous le nom de Berry. (fist. de Charles VII, p. 969.) Vaticane, reg. 899. — Chronique de la même époque, prin- cipalement consacrée à Jeanne d'Arc. Semblable au n° 10297 de la Bibliothèque impériale de Paris ? C'est la rédaction primitive d’où a été tirée la chronique de la Pucelle, Cf. M. Quicherat, procès de Jeanne d'Arc, IV, p.204. (354) Bibliothèque Bourbon, à Naples. — Histoire des guerres du XVre siècle, écrite en 1459. Je n'ai pu voir ce manuscrit. Vaticane, 3881. — Instructions d'Érard de la Marck, évêque de Liége, à son chancelier, qui se rend en France et à Rome, la première corrigée de sa main, la seconde entièrement auto- graphe (1515 ou 1516). Dans la première, l'évêque de Liége charge son conseiller de voir Madame (Louise de Savoie, mère de François I } et de lui exposer ses différends avec les Liégeois. Il proteste de son dé- vouement au roi de France : « À cause que ceulx de par decà, » quant ils ont veu que ils ne m'ont peult tirer à leur cordele, » et que pour rien ne vouloie habandonner le service du roy, » ils m'ont requis de neutralité, laquelle je ne veux jamais ac- » cepter, après moy avoir voulu faire déclarer, moy et mon » pays, pour leur alié. » Il émet le vœu d’être promu au cardi- nalat, et après avoir dit qu'il espère être soutenu par Madame et par le roi, il ajoute: « Soit que je sois cardinal ou non, si » veux demourer à eux servir, toutefois si j'estoie cardinal, » j'en pouroye mieulx servir pour des raisons que mon chance- » lier scest. » Dans la seconde instruction, qui se rapporte à l'envoi de son chancelier à Rome, l'évêque de Liége lui recommande de voir le cardinal Soderini, qui a été autrefois ambassadeur de Florence, près de Louis XIL, et dont le neveu (il était évêque de Saintes) est son ami, le cardinal Vigerius, qu'il a connu du temps du pape Jules IF, le cardinal San-Severino, qui est chargé des af- faires du roi de France, les cardinaux Accolti, Farnèse, Grassi, d'Aragon, etc. Il s’adressera plus particulièrement au cardinal d'Unce et au cardinal de Médicis. Il compte moins sur l'appui du cardinal Pucci, auquel il a toutefois rendu service à la cour de Saint-Germain, sous le roi Louis XIT, quand il sollicitait l'évêché de Vannes. Le chancelier exposera au pape qu'on a déjà enlevé le temporel à l'évêque de Liége et qu'on veut aussi lui enlever le spirituel. CA Den pacs - _ DE à, ( 395 ) Vaticane, 3881. — Concordia inter episcopum et praelatos Leodienses, necenon studium Lovaniense. 2 novembre 1498. Vaticane, reg. 894. — Discours sur les prétentions des An- glais et lettre au dauphin de Viennois, par Jean de Montreuil, prévôt de Lille. Vaticane, reg. 332. — Lettres de Jean de Montreuil, secré- taire du roi de France et prévôt de Lille, à Nicolas de Clémengis. Vaticane, Ottob. 1212. — Épitaphe rimée de Philippe le Bon, duc de Bourgogne. Vaticane, 15325. — Complainte de Louis de liés. comte de Saint-Pol. Incipit : Mirés-vous cy , perturbateurs de paix. Ce manuscrit, écrit par Jean Panice, marchand au palais à Paris, a appartenu à Jean de Gouy. Cf. Lénglet Dufresnoy, Pr. de Commines, HI, p. 458, et Keller, Romvart, p. 146. Vaticane, 1323. — Relation de la bataille de Nancy. Texte publié par Lenglet Dufresnoy, Pr. de Commines, NT, p. 493. Vaticane, 1325. — Vers latins sur la mort de Charles le Hardi, duc de Bourgogne. Vaticane, 889. — Jean d'Auffay, Mémoire sur la question qui est entre le duc d'Autriche et madame la duchesse sa femme, et le roy de France. Vallicellana. — Négociations entre le roi de France et le duc d'Autriche (1478). Bibliothèque Bourbon, à Naples, I. G. 22. — Traité de la guerre sur terre et sur mer, par Philippe de Clèves (texte fran- çais et traduction italienne). Vaticane, 756. — Relation de Vincent Quirini sur les Pays- Bas, 1504. Barberini. — De Belgio, Relatio Vincentii Quirini. Vaticane, 756. — Ricordi del imperatore Carlo per suo figliolo fatti in Augusta l'anno 1548 (traduction italienne). ( 556 ) c Papiers d'État de Granvelle, t. UK, p. 267. Vaticane, reg. 826. — Comm. de bello germanico sub Carolo V (par Marius). L'auteur déclare s'être informé avec soin de tous les événe- ments auxquels il n'a pas assisté lui-même. Chigi, R. 1,5. — Relazioni diverse di Carlo V et del re Filipo e de’ suoi stati. Corsini, 1402. — Diverses relations vénitiennes. . Vallicellana. — Theatrum crudelitatum heret. in Belgio. Bibliothèque de la ville, à Gênes. — Ant. Perez. Discorso sopra le disenzioni del 1575. Ibid. — Antoine Perez. Lettera al duca di Lermo del modo che dee tenere chi vivendo presso qualche M desidera con- servare la sua buona fortuna. Corsini, 443. — Discorso sopra l'andata del principe Matthias in Fiandra (lettre écrite à Rome, le 3 novembre 1577). Barberini. — Articoli proposti al duca di Terra Nova dagli stati di Fiandra (1% juin 1579). Vallicellana. — De urbe Cameracensi relatio historica, 4596, Vallicellana. — Memoria belli Belgici, 4597. Vallicellana. — Discursus fr. Mariae Vaiïlardi de cessione pro- vinciarum belgicarum, 1598. Vallicellana. — Exposé des motifs qui engagèrent Philippe HI à céder les Pays-Bas à sa fille (ut Hispania facilius pacem ha- beret, nec assiduis ob easdem provincias vexaretur bellis). Barberini. — Compendii di trattamenti istorici e geografici sopra li stati delle Flandrie. Barberini.— Lettere discorsive sopra le emergenze di Fiandra. Barberini. — Risposta al manifesto che fa facillissima li im- presa di Fiandra. Vallicellana, N. 22. — Memoriae de moribus provinciarum Belgii eum notitiis historicis bellorum, dominantibus Austriacis. Corsini, 459, 694. — François Campanella. Discorso cirea il modo come i Paesi Bassi volgaremente ditti di Fiandra si pos- ( 997 ) sano redurre sotto l'obedienza del re di Spagna e nel quale si diseor sopra la natura di Fiamminghi e di Spagnardi. Bibliothèque de la ville, à Gênes. — Instruzione lasciata dal conte d'Ognate ambasciatore cattolico al suo successore (le duc de l’Infantado) come si dovea governare nella corte di Roma. Corsini,491.— Nunzi apostolici. Instruzioni diverse. (Instruc- tions adressées à monseigneur l’archevêque de Patras, nonce aux _ Pays-Bas (Rome, 1 mai 1621). Casanatense. — Bentivoglio. Relazione del trattato della tre- gua di Fiandra (Anvers, 9 avril 4609). — Relazione delle pro- vincie unite di Fiandre. — Relazione della Fiandra inviata a Roma (6 avril 1613). — Relazione del movimento d'arme in Fiandra (1614). | Corsini, 305. — Relazioni del cardinal Guido Bentivoglio, fatti nella nunziatura di Fiandra. Le manuserit porte la note suivante : Questi relazioni sono diverse in molte cose dalle stampate. Bibliothèque de la ville à Gënes. — Bentivoglio. Lettere. Ibid. — Bentivoglio. Cifre delle letterre, 1617-1621. Chigi, À, IL. 49. — Lettere a mons. Nunzio di Colonia circa le missioni di Paesi Bassi, 1639-1648. Chigi, À, IL 36. — Lettere a mgr. Vezcovo di Nardo (plu- sieurs sont relatives à la paix de Munster), 1629-1651. Casanatense, X, VI. 23. — Lettre sans date ni signature (apocryphe ?), par laquelle l’université de Louvain, en renvoyant au cardinal de Richelieu quelques écoliers instruits par ses soins (un poco piu-dotti che non erano quando vennero a Lovanio), saisit cette occasion pour signaler là perversi costumi de scolari francesi. Casanatense, X, V. 24. — Lettre écrite par un marchand de Liége, le 10 août 1651. Il annonce que Zongo Oncledei a été arrêté à Clermont, porteur d’un chiffre et de papiers très-impor- tants. À l’aide du chiffre, les papiers ont été lus par l'ordre de D. Étienne de Gamarra. Ceci démontre assez che à Francesi non ( 558 ) La FAR : Sono ancora al fine delli travagli che dato loro il cardinale Ma- zarino. À cette lettre se trouvent jointes les instructions du car- dinal Mazarin sur certaines propositions à adresser aux principaux seigneurs de France, afin de préparer son retour aux affaires. Corsini, 1356. — Negociati al congresso di Cambrai (rela- tion du marquis Neri Corsini). | Corsini, 1571-1574. — Dépêches du marquis Neri Corsini. Corsini, 1192. — Accorso di M. Tempi in nunzio di Paesi Bassi, 4736. POÉSIE. Vaticane, Urbin, 515. — Fragment d'une ancienne chanson de geste relative aux guerres de Bérenger et de Baldzon (Bauces- li-Court) en Italie (XIII"E siècle). J'en citerai deux passages : Folio 20 : Dist Berengers : or, entendez, barons ; “Droit à Bologne, no estore ferons. Par tous les pors de Flandres en irons; Des bons vasaus les mellors eslirons Et à Bologne trestous les enmerons. Plus loin , folio 53 : Signors, fait-il, or oïés mon avis, Je ai noveles estore et oï Bauces li tors qui fu fix Baudoin, Celui de Flandres qui gist à Saint-Sevrin, Et Berenger fix Ysore le gris, Et bien C" chevalier de pris Viennent aider vo dame en cest païs. Ce fragment comprend environ 2,300 vers. | Casanatense. — Poésies de Jean de Condé (manuscrit du XIVe siècle). Ce manuscrit, malheureusement incomplet, ren- ferme les compositions suivantes : ( 539 ) Li dis des trois estas dou monde. Incipit : Cils fait grant sens qui voelt avoir L'amour de Dieu; c’est noble avoir. Les trois eslas sont : Chevalerie et prestrage Et puis ordre de mariage. Li confiesse et li pèlerinaige Renart. Incipit= Jadis estoit Renart empais À Maupertuis en son palais. Explicit : Si ont faite leur retournée Et Bernart et Belin; Ains puis ne furent pèlerin. CF. le Roman du Renard , édition Méon, If, p. 127. Li dis des VIII blasons. Incipit : Or si comme aventure mainne Ciaus qu’elle tient en son demainne. Explicit: Li Rois des rois qui sans fin siècle. Li dis dou lyon. Incipit : Hons d’armes d'honneur convoiteus Ne doit mie iestre si honteus Explicit : Qui chi en droit dou lion finne. Li dis dou roi et des hiermies. Incipit: Ki bien set dire et recorder Eæxplicit : Boins exemple prendre y poront. Li dis des trois mestiers d'armes. Incipit : Noble ordène est de cevalerie; Si doit iestre sans tricerie. Explicit : Jehans de Condé qui chi finne Son dit, le tiesmoingne et afinne. Le AR NE 30) " TR Œ Li dis A bdbe chière. Incipit : Salemons dist en ses proverbes. Explicit : S'en a de tous homs los et pris. Li dis donneur, quongié et honte. Insipit: Grans fuissons de biaus mos de sise. Eæplicit: À tant ma prière de fin. C'est dou fighier. ÆIncipit : Quant boins ouvriers devient wiseus. Explicit : Ce devons pryer de cuer fn. Li dis dou miroir. Incipit : Trop est li siècles pervertis. Explicit : Et en tiel manière et en tiel fourme * Que cils exemples t’en afourme Que Jehans de Condé t'a dit Qui chi en droit finne sen dit. Li recors d'armes et d'amours. Incipit : Or sont-il II mestiers ensanle. On lit vers la fin : Che dist bien Jean de Condé. Eæplicit : Et cou que j'ai dit retenra. Li dis de l'aigle. Incipit : Haus hons doit à honneur entendre. Explicit : Chi finne de l’aigle li dis. Li dig dou sengler. Fncipit : Hardis cuers au besoin se prive. Explicit : Chi finne li dis dou sengler. RO Cou) Li dis des II saiges. Incipit : Au fait des gens et des usaiges. Eæplicit : Et des trois saiges me tairai. Des braies le priestre. ÆIncipit : Recorder ai oy maint conte. Explicit : À tant me tais que plus ne sai. Li dis dou plicon. Incipit : Gens sont qui ont plus kier risées. Explicit : Et pour cou finnerai men conte. Li dis des rikièces c'on ne puet avoir. $ Incipit : Fols est qui voet tendre à avoir. Explicit : Et pour tant m'en tais ci en droit. Li dis dou sens emprunté. Incipit : Jehans de Condet certifie. Explicit : Et à tant voel men dit finner. Li dis dou frain. Incipit : Li coers des gens sont si hatant. Explicit : Çou qu’en ai dit à ceste fie. Li dis pourquoi II cozes on vit au monde. Incipit : Qui a le cuer nice et rubieste. Explicit : Si qu’à lui soyens ravoyet. Li dis don chien. Incipit : Par exemple de créatures. Explicit : Cil qui l’oront dire et reprendre. Li dis de seurté et de confort. Incipit : Tels est vaincus qui vaint apriès. Explicit : Et chi en droit finne men dit. 2% SÉRIE, TOME IX. Li dis de l'aliette. Incipit : C’est sierviches biaus et courtois, Explicit : Jehans de Condet qui chi finne Ses sierventois le nous affinne. Li dis dou chevalier à le mance. Incipit : Saiges est qui sa langue atempre. | On lit vers la fin : Dieus qui pooirs ne poet finner Laist Jean de Condet finner. Li dis dou varlet ki ama le femme au bourgois. Incipit : Ki pourcace à autrui grevance. ' Explicit : Et à tant mon conte de fin. Li dis de le Pasque. Incipit : Parler voel à tous crestiens. Li caslois dou jovène gentil homme. Incipil : Hons de gens de vaillance estrais. On lit vers la fin : Jehans de Condet qui reprent Celui qui ot et nens n’aprent. Li dis de boin non. Incipit : Chieus qui set loquence amoyer. Explicit : Qui du bien faire as boins recort. Li dis de le pelote. Incipit : Boine amour el vierLus si finne. Explicit : Et bien et honneur maintenir. Li dis de le mortel vie. Incipil : Povre cose est de mortel vie. Explicit : À tant prent cils dis finnement. (545) Li dis de le nonnete. Incipit : On ne doit mie trop reprendre. Li dis dou mariage de hardement et de larghèce. Incipit : Nobles hons qui à honneur tens. Li dis dou bon conte Willaume. Incipit : Morir est usaiges communs. Cette pièce de vers est consacrée à l'éloge du comte Guillaume, qui mourut le 7 juin 1337, « fort travaillé de gouttes. » Del amant hardi et del amant cremeteux. Je citerai les premiers vers comme modèle de style descriptif : En le douce saison jolie, Que toute créature est lie, Par droit de nature et joieuse, Et que naist la flour en la prée, K’entent oysiel main et viesprée, Et mainnent vie glorieuse, N'est si petite créature Qui ne soit joians par nature. Li dis dou lévrier. Incipit : Ki sens a de biaus mos trouver. Li dis dou magnificat. Incipit : Par orgueil et par fol cuidier. Li dis des estas dou monde. {ncipit : Par défaute d’entendement. Le nom de Jean de Condé n’est pas indiqué dans le catalogue. Ses poésies se trouvent à la suite du Roman de la Rose de Guil- laume de Lorris et de Jean de Meun. Valicane. — Michaut Taillevent, le psaultier des vilains. (344 ) BIBLIOGRAPHIE; AUTEURS BELGES. Casanatense, B. IV, 3. — Guibert de Tournay. Sermons. La bibliothèque de Marseille possède, sans indication de nom d'auteur, un précieux manuscrit de ces sermons. Il offre en marge quelques vers français relatifs aux croisades, qui parais- sent écrits sous le règne de saint Louis. Casanatense. — Petrus de Flandria. Histoire de la première guerre punique, écrite à Nègrepont, en 1464. Le même ouvrage se trouve aussi, si je ne me trompe, à la bibliothèque Bourbon, à Naples, XII, aa. 20. Petrus de Flandria ne serait-il pas l’auteur de l’Epistola lugubris de oppugnata in- sula Nigropontia Turcis, edita a Roderico, episcopo Palentino (Bibl. de Mayence, n° 42)? Bibliothèque Bourbon, à Naples. — Gérard de Bruxelles, Commentaires sur Euclide. Casanatense. — Copia di lettera del marchese de Mondesar a favore del Papeproquio (sic). Un manuscrit du marquis de Montexar, sur l'ordre du Mont- Carmel, est conservé dans la même bibliothèque. Vallicellana. — Bollandus. Epist. autogr. ad Odericum Ray- naldum (2 juin 1651). Casanatense. — Lupus Christianus, Belga, ord. erem. S. Aug. Plusieurs manuscrits sur diverses contrées de l'Asie, notamment sur la Palestine et la Chine. Angelica, R. 5, 10. — Documents relatifs à Christianus Lupus. Casanatense. — Joannes Poelman , Belga, theologus Casana- tensis, Traité de la grâce. Chigi, F. IV, 98 et À, Il, 52-34. — Vander Veken (S. J.) 41° Ephemerides sanctorum ; 2° Epistolae ad pp. Alexandrum VIF: 3° Patrocinia, 1660-1664. ( 345 ) HISTOIRE RELIGIEUSE. Casanatense. — Abbas Ursi Campi, ord. Cist. Propositions adressées au pape Martin V, de acceleratione concilii (1425). Casanatense. — Baius ( Michaël). Epist. ad Antonium Sabbi- nium, ord. min. Flandriae. Vallicellana. — De ïis quae facta sunt jussu apostolicae sedis per episcopos Belgii in causis M. Baïi et C. Jansenii. _ Angelica, N. 66. — Epistolae PP. Aug. Belgii quibus se justi- ficant a calumnia ipsis imposita de doctrina Jansenii. Corsini, 283. — De l’état de la religion dans les Pays-Bas (in Fiandra) ; rapport présenté par la congrégation de la Propa- gande à Innocent XI. | Bien que les protestants tiennent encore quelques conventi- cules, le clergé s'efforce de les ramener par la persuasion et la douceur. Éloge du clergé belge. Corsini, 283. — Lettre adressée au pape Clément XI et rela- tive aux religieux récollets de l’ordre de Saint-François, en Flandre. | J'mdiquerai de plus, d’après l’Iter Romanum du docteur Dudik: Vaticane, reg. S38. — Chronicon Andreæ Marchianensis. Vaticane, reg. 696. — Chronicon Lamberti Ardensis. Vaticane, reg. 711. — Chronicon Giraldi de Antwerpia (XIII®e siècle). Vaticane, reg. 760. — Gesta episcop. Cameracensium. Vallicellana, B. 19. — Traités entre l'Empereur et le due de Bourgogne (novembre 1475). Vallicellana, B. 19. — Négociations entre Louis XI et Maxi- milien d'Autriche (à Boulogne, 1429, lisez 1478). Vaticane, reg. 910-914. — Opera Stradæ. Vallicellana, M. 8. — Epistola Gasparis Furstenbergi scripta ab urbe Bruga, novembre 1596. —_— 2 ES ——— Séance du 1°” mars 1860. M. BaroN, directeur. M. An. QuErELET, secrétaire perpéluel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, De Keyser, G. Geefs, Navez, Roelandt, Suys, J. Geefs, Erin Corr, Snel, Ed. Fétis, De Busscher, Portaels, membres. CORRESPONDANCE. — M. le Ministre de l’intérieur annonce l’envoi du buste de M. André Dumont, exécuté par M. Simonis, et de- mande que ce buste figure à l’exposition des beaux-arts de cette année. Le même Ministre annonce qu’un subside de cing cents francs a été accordé par le Gouvernement au comité admi- nistratif de la Caisse centrale des artistes. COMMISSIONS. Dans une troisième lettre, M. le Ministre de l’intérieur ( 347 ) fait connaître qu'il est sollicité fréquemment d’allouer des subsides pour la restauration d'anciennes peintures qui ont subi des dégradations par suite de l’action des temps ou de circonstances défavorables. « L'administration n’autorise jamais par son concours, dit-il, ce genre de travaux que lorsque lavis motivé d'hommes compétents lui semble en démontrer la com- plète opportunité. Toutelois, même avec cel usage prudent _ du moyen, la restauration des tableaux, lorsqu'il s’agit d'ouvrages de valeur, constitue en principe une mesure si grave que l'application n’en saurait être entourée de trop de précaution, dans l’intérêt de l’art et pour la responsa- bilité du Gouvernement et des administrations publiques qui possèdent des collections d'œuvres anciennes. » Cette question ne me semble pas indigne de fixer l’at- tention de la classe des beaux-arts et de faire l’objet d’un examen spécial de sa part. » La restauration d'anciens tableaux doit-elle être en- couragée, recommandée ou même seulement autorisée ? À quels caractères reconnait-on que la restauration d’un tableau est devenue indispensable? Dans quelles limites y a-t-1l lieu toujours de la circonserire ? A quels systèmes de restauration convient-il de donner la préférence ? » Tel est le programme général que je crois pouvoir livrer à l’appréciation de l’Académie, qui le complétera dans son rapport, si elle juge que la matière offre d’autres questions à examiner. » Cette lettre est renvoyée à l’avis de MM. Navez, Portaels, De Keyser, Leys et De Busscher. — Sur la demande de quelques-uns de ses membres, la classe des lettres avait eu à s'occuper de la question qui se ( 548 ) rattache à la propriété des manuscrits destinés au con- cours. La classe avait cru devoir renvoyer cette question à l'examen de l'assemblée générale de l’Académie, avec le rapport d'une commission composée de deux membres pris dans chaque classe et du secrétaire perpétuel. Les mem- bres nommés sont MM. Alvin et Ed. Fétis, pour la classe des beaux-arts; De Koninck et Stas, pour la classe des sciences; Leclercq et Arendt, pour la classe des lettres. COMMUNICATIONS ET LECTURES. M. Braemt, trésorier de la Caisse centrale des artistes belges présente un aperçu succinct de l’état prospère de celte caisse depuis son origine. Le nombre de ses mem- bre est assez restreint, et cependant son avoir, depuis qua- torze ans qu’elle existe, s'élève à plus de 60,000 franes. M. Alvin rappelle que, depuis longtemps, une commis- sion a éténommée pour la révision du règlement de la Caisse centrale, eu il demande que le bureau s'occupe de cette opération. M. Ed. Fétis, secrétaire du comité et directeur de la Caisse, répond qu’il ne tardera pas à convoquer les membres désignés. ( 349 ) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Compte rendu des séances de la Commission royale d'histoire, ou Recueil de ses bulletins. 5"° série, tome Le", 4° à 3€ bulletins. Bruxelles, 1860; 2 cahiers in-4. Rapport triennal sur la situation de l'instruction primaire en Belgique, présenté aux chambres législatives, le 14 mai 1859, par M. Ch. Rogier, ministre de l’intérieur. Cinquième période triennale, 1853-1857. Bruxelles, 1860; 1 vol. an-4°. Bulletin du conseil supérieur d'agriculture du royaume de Belgique. Tome XII (situation de l’agriculture, année 1858). Bruxelles, 1860 ; 4 vol. in-4. Compte rendu des travaux du conseil de salubrité publique de la province de Liëége, pendant l'année 1859, présenté à la séance du 44 février 1860 ; par M. A. Spring. Liége, 1860 ; 1 br. in-8°. Rapport du conseil de salubrité publique de la ville de Liége, sur l'échauffement du sol des jardins du quartier de Saint-Jacques, à Liège. Liége 4860; 1 broch. in-8°. Histoire du règne de Charles-Quint en Belgique; par Alexan- dre Henne. Tome X. Bruxelles, 1860; in-8°. Notice sur une monnaie carlovingienne , trouvée au lieu dit Alikirch, à Rahling, canton de Rohrbach, département de la Moselle ; par le docteur A. Namur. Bruxelles, 1860; 1 br. in-8°. Revue de l'instruction publique en Belgique. VII® année, nouvelle série, tome HI, janvier à mars, n®% 1 à 3. Bruges, 1860; 3 broch. in-8°. Revue populaire des sciences; rédigée par J.-B.-E. Husson. {me année, n° 4 à 5. Bruxelles, 14860; 3 broch. in-8°. Rapport sur la situation de la Société archéologique de Namur, en 1859. Namur, 1860; 1 br. in-8°. 2€ SÉRIE, TOME IX. 24 ( 350 ) Journal de médecine, de chirurgie et de pharmacologie. XVII année, XXX®° vol., janvier à mars. Bruxelles, 1860; 3 broch. in-8°. | Archives belges de médecine militaire. XIL® année, t. XX, 1% à 3° cahier. Bruxelles, 1860; 2 broch. in-&°. Annales de médecine vétérinaire. IX"° année, 1% à 3° cahier. Bruxelles, 1859; 3 broch. in-8°. Annales d'oculistique. XXII" année, 4'° à 3e livr. Bruxelles, 1860; 3 broch. in-8°. La Presse médicale belge, XIH®° année, n° 1 à 13. Bruxelles, 1860; 13 feuilles in-4°. Journal de pharmacie, publié par la Société de pharmacie d'Anvers. XVI" année, janvier à mars. Anvers, 1860; 3 broch. in-8°. Annales médicales de la Flandre occidentale. Tome VI, n° 17 à 29. Roulers-Thourout, 1859; 5 broch. in-8°. Journal d'horticulture pratique de la Belgique. IV®° année, janvier à mars. Bruxelles, 1860; 3 broch. in-8°. L'Illustration horticole. VWH®E vol., 17° à 3% livr. Gand, 1860; 3 broch. in-8°, Publications de la Société pour la recherche et la conservation des monuments historiques dans le grand-duché de Luxembourg. Année 1858, XIV. Luxembourg, 1859; in-4°. Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, par MM. les secrétaires perpétuels. Tome L,, n°° 4 à 13. Paris, 1860 ; 13 cahiers in-4°. Revue de l'instruction publique en France. XIX"° année, n% 31 à 52. Paris, 1859; 22 doubles feuilles in-4°. Revue et magasin de zoologie pure et appliquée. 1860, n'S 1 à 5 Paris; 35 broch. in-8°. Revue de l'art chrétien, recueil mensuel d'archéologie reli- gieuse, dirigé par M. l'abbé J. Corblet. IV": année, n° 1 à 53. «Paris, 1860; 3 broch. in-&. | Discours d'ouverture prononcé à l'assemblée générale du 16 dé- 201 ) | cembre 1859 de la Société de géographie; par M. Elie de Beau- mont. Paris, 1860; 1 broch. in-S$°. Nouvelle biographie générale, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours ; publiée par MM. Firmin Didot frère, sous la direction de M. le docteur Hoefer. Tome XXXI. Paris, 1860 ; 1 vol. in-8°. Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie. Année 1859, n° 4. Amiens, 1859; 1 broch. in-8. | Programme de la 27% session du congrès scientifique de France, qui aura lieu à Cherbourg, le 2 septembre 1860. Cher- bourg , 1860; 1 broch. in-4°. Académie des sciences et lettres de Montpellier : — Mémoires de la section des sciences, tome IV, 1"° et 2e fasc.; — Mémoires de La section de médecine, tome IIF, 1° et 2e fase. ; — Mémoires de la section des lettres, tome HE, 1% fasc.; — Mémoire histori- que et biographique sur l'ancienne Société royale des sciences de Montpellier, par Junius Castelmau, précédé de la vie de l'auteur et suivi d'une notice historique sur la Société des sciences et belles- lettres de la même ville; par Eugène Thomas. Montpellier, 1858- 1859; 6 cahiers in-4°. Verhandlungen der naturhistorischen Vereines der preusschen Rheinlande und Westphalens; herausgegeben von prof. D”. C. O. Weber. XVIe Jahrg. 15t5-4t$ Heftes. Bonn , 1859; 2 ca- hiers in-8°. Sechs und dreissigster Jahres-Bericht der schlGischen (Gesell- chaft für vaterländische Kultur ; enthält : Arbeiten und Verän- derungen der Gesellschaft im Jahre 1858. Breslau, 1 vol. in-4°. | Neues lausiztisches Magazin ; ein Auftrage der oberlausitzi- schen Gesellschaft der Wissenschaften, herausgegeben von Gustav Kôhler. XXXVIST Band. Gôrlitz, 1859; 4 broch. in-8°. Mitthelungen aus Justus Perihes geographischer Anstalt. Er- gänzungsheft; 1860, I-HT. Gotha, 1860; 4 cahiers in-4°. The terrestrial air-breathing mollusks of the United-States, ( 352 ) ee; the “adjacent territories of North-America. Vol. IN; by W. G. Binney. Boston, 1859; 1 vol. in-8. American Academy af arts and sciences : — Memoirs, new series, vol. VE, part 2; — Proceedings, vol. IV, feuilles 12-31. Cambridge, 1859; 1 cahier in-4° et 4 cahier in-8°. Proceedings of the American association for the advancement of science. XI meeting. Cambridge, 1859 ; 1 vol. in-8°. Zuwôlfier Jahresbericht des Ohio Staats-Ackerbaurathes, mit einem Autzug der Verhkandlungen der County Ackerbau Gesells., an die General-versammlung von Ohio, für das Jahr 1857. Co- lumbus, 1858; 1 vol. in-8&. Annals of the lyceum of natural history of New-York. Vol. VIL. n% 1-3. New-York, 1859; in-8°. The first and second annual report of the geological survey of Missouri; by G.C. Swallow. Jeffersoncity, 1855; 1 vol. in-8°. Report on the geological survey of the state of Iowa; embra- ang the results of investigations made during portions of the years 1855, 1856 et 1857; by James Hall, J. D. Whitney. Vol 1, part 1-2. Jowa, 1858 ; 2 vol. in-8°. First report of à geological reconnoissance of the Northern … countries of Arkansas, made during the years 1857 and 1858, by David Dale Owen. Little Rock, 1838; 1 vol. in-&. Academy of natural sciences of Philadelphia : — Journal, new series, vol. IV, part 2; — Proceedings, 1859, feuilles 1-19. Philadelphie, 4859 ; 1 cahier in-4° et 1 cahier in-8°. American philosophical Society held at Philadelphia. — Tran- sactions, new series, vol. XII, part 2; — Proceedings, vol. VI, n® 59 à 61. Philadelphie, 1859; 1 cahier in-4° et 3 broch. in-S°. BULLETIN L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1860. — No 4. CLASSE DES SCIENCES. de du 31 mars 1860. M. Van BENEDEN, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d'Omalius d'Halloy, Sauveur, Wes- mael, Martens, Cantraine, Stas, De Koninck, A. De Vaux, de Selys-Longehamps, le vicomte B. Du Bus, Nyst, Gluge, Nerenburger, Melsens , Liagre, Duprez, Poelman, d'Udekem, Dewalque, membres; Lacordaire, Lamarle, associés ; Ernest Quetelet, Ch. Montigny, correspondants. M. Nicolas de Khanikoff, membre de l'Académie impé- riale des sciences de Saint-Pétersbourg, assiste à la séance. 9me SÉRIE, TOME IX. 25 ( 354 ) CORRESPONDANCE. — M. le Ministre de l’intérieur transmetdifférents ou- vrages destinés à la bibliothèque de l’Académie. M. Maury, directeur de l'observatoire de Washington, fait parvenir, par l'intermédiaire de M. Ad. Quetelet, les résultats de la discussion de 6,455 observations baromé- triques indépendantes et séparées , recueillies sur mer, à partir du 40° degré de latitude australe jusqu'au 55°. Ces observations sont divisées en trois groupes pour une même longitude, dans la vue de reconnaître l'influence du cap Horn sur l’abaissement du baromètre. On voit que cet abaissement est assez sensible, en se rapprochant de la latitude du cap. Hauteur moyenne du baromètre ENTRE LES MÉRIDIENS DE Entre les TR NA: 20° O. et 440° E. | 140° E. et 80° O. | du cap Horn. ES je MOYENNE NOMBRE . NOYBRE ë NOMBRE “ NOMBRE BAROMET BAROMET BAROMET. d’obser. ‘| d’obser. ‘| d’obser. d’obser. |? "0%ÈT- P 400 S. et 430S. | 1115 29,86 | 1703 et 45 738 29,73 el 48 9 29,68 et 50 et 53 et 55 ( 355 ) — M. Maury adresse en même temps ses remerciments pour sa nomination d’associé, et témoigne ses regrets de ce qu’une négligence dans la transmission du diplôme ait relardé jusqu’à présent sa réponse. Des remerciments sont adressés aussi par M. Struve, directeur de l'observatoire de Pulkowa, pour sa nomina- tion d’associé. — M. Encke, secrétaire perpétuel de l’Académie royale de Berlin, fait connaître qu'il à remis au comité chargé de la fondation de Humboldt, la souscription que l’Aca- démie royale de Bruxelles destine au monument consacré à la mémoire de son ancien associé. — M. le major Henry James, chargée de la triangula- tion de l'Angleterre, transmet des renseignements sur ses travaux géodésiques, et fait parvenir en même temps quelques beaux exemplaires photo-zincographiques, pris sur un ancien munuscrit qui se trouve dans le dépôt de la guerre. — L'Association britannique pour l’avancement des sciences annonce que sa 58" réunion aura lieu cette année, à Oxford, le mercredi 27 juin, sous la présidence de lord Wrottesley. | — M. Antonio Aguilar, directeur de l’observatoire de Madrid, fait connaître les facilités qui seront accordées aux astronomes désireux d'observer, en Espagne, l’éclipse solaire du mois de juillet prochain. — M. le docteur B. Schnepp, en donnant connaissance des premières réunions de l’Institut égyptien, annonce le prochain envoi des publications de cette société savante. ( 356 ) L'Académie des sciences et lettres de Montpellier, la Société des sciences de Gôrlitz, et l’Institut de Venise re- mercient l’Académie pour l’envoi de ses travaux. M. H. Namias, secrétaire de cette dernière société sa- vante, annonce en même temps l'envoi de son ouvrage sur les principes électro-physiologiques, qui a été couronné par l’Institut de Milan. — Remerciments. — L'Académie reçoit les résultats des observations qui ont été faites, le 21 mars dernier, sur l’état de la végéta- tion : 4° à Waremme par MM. de Selys-Longchamps et Ghaye; 2° à Jemeppe-sur-Meuse, par M. Alf. de Borre; 3° à Melle près de Gand, par M. Bernardin; 4° à Bruxelles; par M. Ad. Quetelet; 5° dans les environs de Munster, par M. le docteur Heis. | M. le professeur Rigouts-Verbert fait, de son côté, parve- nir les résultats de ses observations sur la feuillaison, la floraison, la fructification et la chute des feuilles, observés à Anvers, pendant l’année 1859. .— M. Alexandre Vander Looy, ancien marin et actuel- lement représentant des verreries de la Louvière, trans- met quelques renseignements sur des découvertes géogra- phiques, non encore indiquées sur les cartes oflicielles récemment publiées, et qui ont été faites en sa présence pendant l’année 1851, à bord du trois-mâts-barque hollan- dais Timor, commandé par le capitaine Koning. « 4° Le 9 mai 1851, nous pûmes constater que l'ile Wake, qui se trouvait placée sur nos cartes par 19°4/ lati- tude septentrionale et 166°46' longitude orientale (obser- vatoire de Greenwich} avait disparu. Quoique nous ayons marché franc-ouest sur la parallèle de la latitude de Pile Wake, à partir de 167°24/ de longitude orientale (obser- ( 357 ) valoire de Greenwich) jusqu’à 165°37/ de longitude orien- tale (même observatoire), et que de cette manière, nous ayons coupé diamétralement l’endroit où cette île aurait dû se trouver, cette dernière pourtant ne s’est point offerte à nos regards. » 2 Le 2 septembre 1851, à six heures du soir, entre 12°9' de lautude nord, 12059" longitude est (observa- toire de Greenwich) et 10°52/ latitude nord, 121°44' lon- gilude est (même observatoire), nous aperçûmes sur un fond de trois brasses et demie, des bancs de corail, qui ne figurent pas sur les cartes marines. » 5° Le 11 septembre 1851, à huit heures et quart du matin, entre 6°!’ lautude nord, 122°27/ longitude est (observatoire de Greenwich) et 5°17/ latitude nord, 121°50/ longitude est (même observatoire), nous vimes dans la direction E. ‘/: N., à un mille de distance, un petit rocher, qui était inconnu sur nos cartes. » — M. J.-J. d'Omalius d'Halloy, membre de la classe, présente une notice biographique de sa composition sur Alexandre Brongniart. — Remerciments. — Il est fait hommage d'une médaille en bronze, des- tinée à conserver le souvenir de M. Pierre Simons, ingé- nieur de l’État et ancien correspondant de l’Académie. Cette médaille, gravée par M. Veyrat, a été dessinée par M. Eug. Delbarre, chef de bureau au Ministère des travaux publics. — Remerciments. — La classe reçoit différents ouvrages manuscrits, SAVOIr : 1° Sur un nouveau système enregistreur des observa- tions de tous les instruments météorologiques, par M. Ch. ( 358 ) Noël, de Paris. (Commissaires : MM. Duprez et Ad. Que- telet.) | 2 Sur les ossements fossiles découverts à Lierre, le 28 février 1860, par M. François Scohy, médecin de ba- taillon dans l’armée belge. (Commissaires : MM. Nyst, De Koninck et Van Beneden.) 5° Note sur l'orage du 19 janvier 1860, sur la généra- tion de l'électricité des orages en général, et sur la fré- quence des coups de foudre pendant les orages d'hiver, par M. Florimond. (Commissaires : MM. Duprez et Ad. Que- tele.) CONCOURS. — Par sa lettre du 26 janvier 1860, M. le Ministre de l'in- térieur avait transmis une expédition d’un arrêté royal, disposant que le prix quinquennal des sciences physiques et mathématiques non décerné pour la période de 1854 à 1858 , serait appliqué à des concours extraordinaires. En réponse à cette demande, la classe des sciences a soumis au Gouvernement deux questions de sciences ma- thématiques et deux de sciences naturelles, pour faire l’ob- Jet du concours dont il s’agit. sn En (359 ) COMMUNICATIONS.ET LECTURES. Suite des observations sur la lumière zodiacale faites, à Munster, du 20 décembre 1839 au 23 février 1860, par M. le docteur Heis, de Münster. Communication de M. Ad. Quetelet (1). Décembre 20,1859, 7h. Bord supérieur : 500°+- 1°, 310°—2%, 320 — 3%, Janvier Février 330 — 50, Sommet : 341° — 110. Bord inférieur : 350°—15°, 3200—18, 310°—920”. 12,1860, 7h. Bord supérieur: 300°+11°, 310°-+10°, 330°+10", 18, 11, LA 54004100, 350°+ 10°, 0049, 100+9o. Sommet : 19° + 70. Bord inférieur: 10° — 2, Qo— 70, 300°— 11°. Le bord supérieur passe par &, y Pégase; le som- met se trouve vers 7 Poissons (x — 22°, À — 10). Le bord inférieur n’est pas curviligne comme autrefois, on remarque une anomalie vers la région de £ Baleine. h, Bord supérieur : 545°+-10°, 55594120, 59-714. 15 + 7°, 95° + 180, 35° + 19. Sommet : 47° + 190, Bord inférieur : 55° + 90, 25° + 59, 950 + 0, 50 — 2, 3350 — 8. Bord supérieur : 545°+ 10°, 5°+150, 950-+ 20, 5504 220, 450 + 290,5. Sommet : 50° + 25°. Bord inferieur : 4594 15°, 350+ 70, 950 — 70, 8h, Bord supérieur: 545°+ 240, 355°-+ 959, 5+926°, 1594260, 2504260, 35042505, 45°+950, Sommet : 51° + 20°. Bord inférieur : 45°+ 15°, 35504170, 250+0", 15° — 10°. } 45 (1) Voir Bull. de l’ Acad. royale de Belgique, 2° série, t. VIT, p. 575. ( 360 ) Février 25, 1860, 7° 5®. Bord supérieur : 540°+50°, 0°+ 30°, 20°+ 29», 400 + 28, 50° + 26e. Sommet : 60° + 240. Bord inférieur : 50°-+ 17°, 400-4110, 30°+ 5°, 200 — 3e, ee M. Heis communique aussi l'extrait d’une lettre de M. Neumayer, directeur de l'observatoire magnétique et météorologique de Melbourne (Australie). M. Neumayer, dans ces derniers temps, a observé plusieurs perturbations magnétiques (4) : D 1859. Octobre 18, de 8* 45% à 10h 45" (8h 50" aurore australe). » » 21, soir 1 (aurore australe). » » 22, matin » Novembre 7, de 10h à 15h 50" petites perturbations. ” » 11, matin petites perturbations. » » 15, soir ù » ” » 15, 9h50, » » ” à 25, soir, » n » Décembre 6, 22», » ” D NE 8, soir, grandes perturbations. » » 11, de 2h à 5h, grandes perturbations. à » 15, de 7» 19® à 20h, grandes perturbations (aurore australe). » » 16, de 9h à 10h 50%, perturbations. 1860. Janvier 4, 15h 53", pelites perturbations. LA » » 4 9 » » » » » 11, de 12h à 16h 25", grandes perturbations. Position de l'observatoire : latitude — 37°48/,6. longitude 9h 59w 53° cst de Greenwich, (1) A Bruxelles, M. Ernest Quetelet a observe une forte perturbation, les 47 et 48 octobre 1859 , au soir; le 21 octobre et le 13 décembre, petites perturbations. Enfin, le 28 et le 29 mars de cette année (1860), on a observé une forte pertur - bation des éléments magnétiques. Elle a été également constatée à Paris et à Lis- bonne; et le 29 , au soir, une brillante aurore boréale a été aperçue à Stockholm. ——— (361) Solution géométrique d'une série de problèmes relatifs à l'art des constructions ; par M. Lamarle, associé de l’Aca- démie. (Suite et fin.) ("). RÉSISTANCE DES MATÉRIAUX. — POUSSÉE ET BUTÉE DES TERRES. Sixième question. Équilibre d'un massif sollicité latéralement. XI. Soit ABCD le profil d’un massif compris entre deux plans verticaux parallèles, et sollicité en E par une force horizontale Q. On demande la plus grande valeur admissible pour Q, dans l'état d'équilibre, et en suppo- sant que la rupture tende à se produire par glissement, sui- vant un plan quelconque ae perpendiculaireau profil ABCD (fig. 10). Menons par le point. a l’ho- rizontale aa'a!’ et, procédant comme au n° VIIT, prenons (Fig. 10.) On sait qu'en représentant par 2h/ le poids (”) [a,b,h/ (*) Voir Bulletins, 2": série, tome IX , page 127. (*) h’ est la hauteur aB, a, la largeur aa’, b, la longueur du massif me- surée perpendiculairement au profil ABCD. (362) du prisme aBCa/, la cohésion développée suivant la sec- tion aa/ est représentée par a/a!/. On sait également que, pour une ligne quelconque de rupture aem coupant en e la droite DC et aboutissant en m à la verticale menée par le point a//, le poids du prisme qui tend à se détacher et la cohésion suivant ae sont représentés respectivement , l’un par 2h/—a'e, l’autre par em. Prenons a/b égal à 2h’; par le point b menons l’horizon- tale bn et par le point m la droite mn, sous l’angle amn T => + 9. Le poids du prisme qui tend à se détacher étant repré- senté par be, de même que la cohésion l’est par em, on voit aisément que le segment bn représente l’intensité que doit avoir la force Q pour équilibrer la résistance du massif à la rupture par glissement suivant ae. Imaginons que la droite ae s'abaisse ou s'élève parallèle- ment à elle-même. Lorsque le point a descend, le point b remonte d’une égale quantité. De [à résulte un double accroissement de la longueur be et, par suite, une dimi- nution correspondante du segment bn, ou, au contraire, une augmentation de ce même segment, selon que la ligne mn s'incline à gauche ou à droite de la verticale a/!m, c’est-à-dire selon que l’angle maa'’ est plus grand ou plus pelit que o. Dans le premier cas, la rupture est plus facile à parur du point À, et l’on a en général bn < a'a”. Dans le second cas, la rupture est plus facile à partir du point E, et l’on a généralement bn > a'a”. ( 363 ) Les déductions qui précèdent supposent que le point m resteau-dessous de l'horizontale bn. S'il en était autrement, la réaction N’, représentée par mn, changerait de sens, et, dès lors, ce ne serait plus par glissement que la rup- ture du massif tendrait à se produire. XII. Tirons la diagonale AE. Deux cas sont possi- bles, selon que l’angleEAD est plus grand ou plus pe- tit que ©. Soit d’abord (Fig. 11.) Ÿ vi ÿ LE EAD > o. Prolongeons les droi- tes AD, DC et prenons sur leurs prolongements DD'——, Db—92DC—921. Par le point b menons | DD | re une horizontale et par le \ point D’ une verticale. En Soit b’ le point où ces Fe droites se coupent : Re- $ présentons-nous la droite D. B. Le lecteur est prié de reporter le point S de Ab/ (fig. 11). celte figure sur le prolongement des droites mD’, n'A : , et à leur rencontre, La droite Ab! peut S à- L baisser au-dessous de la droite AE et faire avec l’hori- zontale un angle inférieur à ©. Lorsqu'il en est ainsi, la droite Ab' peut être considérée comme ligne de plus facile ( 364 ) or rupture (); la force Q est représentée par DD’, et l'on a En général, la droite Ab’ fait avec l'horizontale un angle supérieur à ©, et, dès lors, voici quelle est la solu- LION : Par le point À, on mène une droite inclinée sur bn de l'angle 7 + 9, ou, ce qui revient au même, inclinée sur AB de l’angle ©. Soit SAn/ cette droite qui coupe en S la droite D'm et en n’ la droite bn. On détermine le point m en prenant Sm — SA. Sn’. On üre la droite Aem et l’on achève la construction par le tracé de la droite mn, l'angle Amn étant pris égal à 2 +9 Cela posé, la ligne de plus facile rupture est la droite Ae, ou la diagonale AE, selon que la droite Ae reste au- dessous ou qu'au contraire, elle s'élève au-dessus de cette diagonale. Le reste s’achève aisément, la valeur cherchée pour Q étant représentée par bn et l'équilibre n'étant possible qu’autant que le point n tombe à droite du point b. Supposons maintenant que l’on ait MAD 2e. ——————_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_——— ——— ———_—_—_————————— (*) La rupture par glissement n’est possible que suivant des droites plus inclinées que la droite Ab’, (Voir au besoin la remarque faite à la fin du n° XL) ( 365 ) Prolongeons les droites AD, AB (fig. 12) et, sur leurs prolongements, prenons les points D’ et b, de manière que l’on ait | 2 AD=—, Fo—2FB. () Par le point b menons une moe 107%, horiontalelelipar le point D’ une verticale. Soit b' le point Be 1 où ces droites se coupent. Le % el: cs point m, où la diagonale AE DATE » F1 vient rencontrer la verticale f me de D'b', peut se trouver au-des- sous ou au-dessus du point b’. Dans le premier cas, la ligne de plus facile rupture est AË, et, si, par le point m, on mène la droite mn, sous l’angle Amn == + o (n étant le point de rencontre des droites mn, bb’), la valeur cherchée pour Q est représentée par le segment bn (”). Dans le se- cond eas, la ligne de plus facile rupture est le prolonge- ment de la droite menée du point b’ au point E; la force Q est représentée par AD’, et l’on a, comme ci-dessus, (Fig. 12.) Q — y.a L'Age Nous laissons au lecteur le soin de traduire, au moyen (*) Le point F est sur l'horizontale menée par le point E. (**) Les portions de droite Am, bA représentent respectivement, l’une la cohésion suivant AE, l’autre le poids du prisme AECB. II s’ensuit que les lon- gueurs mn , bn représentent en même temps, l’une la réaction N’, l’autre la valeur cherchée pour Q. ( 566 ) du calcul algébrique ceux des résultats précédents que nous n’avons fait qu'énoncer. On observera que la direction de la force Q peut être quelconque, sans que la solution qui vient d’être exposée cesse d’être applicable. On observera, en outre, que pour s'assurer de l’équilibre du massif, il faut considérer suc- cessivement tous les modes de rupture qu'il comporte, la rupture par glissement pouvant être moins facile que par rotation , comme au n° V, ou autrement. Septième question. Poussée des terres contre une paroi plane. XHI. Étant donnée une paroi plane ae, pressée par un massif de terre et maintenue par une force Q, dont on connaît la direction, on demande la valeur que doit avoir Ja force Q pour équilibrer l’action de la poussée. Soit ael le profil du massif à considérer. Opérons d’abord comme l’ont fait MM. Prony, Français, Navier, etc., c’est-à-dire en supposant la force Q perpen- diculaire à la paroi ae, et la droite el horizontale. Soit ac la ligne de rupture. Si le massif est cohérent, les forces à considérer sont au nombre de quatre : 1° La force Q, nor- male à la paroi ae; 2° Le poids P du prisme eac ; 5° La réaction T/due à la cohésion et dirigée suivant ac ; ( 567 ) 4 La réaction N’, dont la direction fait avec ac l'angle nl | Faisons tourner d'un angle droit, le système de ces quatre forces et représentons par ec le poids P, qui est évidemment proportionnel à ce segment. Après cette rotation, la force T’ est dirigée suivant une perpendiculaire à ca; la force Q suivant ea; la force N' suivant une droite faisant avec ac un angle égal à o. Représentons par cd la force T’ et menons par le point d la droite dm sous l'angle dmc —v. Le prolongement de cetle droite venant couper en n la droite ea, il est aisé de voir que le segment en représente la grandeur que doit avoir la force Q pour équilibrer la ne du prisme eac. On a, par construction, LA h étant la hauteur du triangle eac, 7 la cohésion pour l'unité de surface, IT le poids de l’unité de volume de la matière du massif. De là résulte 2y I ac (1). : ES Mr ei ee . Th Le triangle cdm, rectangle en c, donne, BUNR Oren RU | ..ém — Par le point m menons la droite ms parallèle à ce et du point a abaissons sur les droites ce, ms la perpendiculaire commune apq. Soit z la distance comprise entre les droites A. L 4. ( 368 ) el, ms,ona (3) SD he (4 En multipliant membre à membre les équations (1), (2), (3), on trouve immédiatement, NS huis be RS TT Il suit de là que la distance pq est indépendante de la direction ac, et, conséquemment, que, pour toute ligne de rupture partant du point a, le point m reste sur une même horizontale ms. Cela posé, si nous observons que la poussée maximum correspond à la plus grande longueur du segment en, nous pouvons conclure immédiatement que la solution cherchée est fournie par le théorème fondamental exposé n° EE. Par le point a menons la droite am! dirigée suivant le talus naturel et coupant, en conséquence, la droite mg sous l'angle am/m — ©. En vertu du corollaire 1 du n° ITE, la ligne de plus faéile rupture est dirigée suivant la bissectrice de l’angle nam'; elle divise donc en deux parties égales l’angle que la paroi fait avec le talus naturel. Supposons la ligne ac dirigée suivant la bissectrice de l’angle nam' et prolongeons la droite ae jusqu’à sa ren- ‘contre en s avec la droite ms. Les angles smn, sam étant égaux, les triangles snm, sma sont semblables et donnent 2 Sn sa ( 369 ) Le prisme eac est dit prisme de plus grande poussée. Désignons par t le rapport de la base ec de ce prisme à sa hauteur k, et par € l'angle que la paroi ae fait avec la ver- ticale. Il vient h + 3 z sm—t(h+2), sa —- Se | COS € cos € On déduit de là ; 2 (6). . en—sn — se —t" (h + z) cos s — : COS & Soit A’ la valeur de À pour laquelle on a en — 0. Cette valeur est déterminée par l'équation de condition 1 — & cos ’e D2y 1 —$6 cos ’e (; t” cos ‘€ Htgo {cos ’e (*) En désignant par + le complément de l'angle +, on trouve aisément THE 2 = EE 2 et, par suite, p 2Y sin T cos £ = — IL TREE SIN < ——— nr AS. On parvient à ce même résultat d’une maniere plus D / directe et plus simple en opérant comme il suit : à Soit ea (fig. 15%) la longueur pour laquelle le (a point n tombe en e. Par construction, les angles T+E \ eam , HER sont égaux entre eux et à—— ; ona d’ailleurs ema — ?. De là résulte UD E cos T \ z= em sin » N=aecos E, ae=em >- RS 2 N'ITAIRE sin 2 (Fig. 13bis.) Il vient donc : 9m SÉRIE , TOME IX. 26 (O0 ) | | Vo. et l’on peut écrire, en conséquence, HAE AMAR TE - at .. .en—=t (h — h'). cos €. : | De là résulte ve AL AE uth ; Us 710 7 pt en FAO (h — h') cos €. On voit ainsi comment se déterminent, dans le cas par- ticulier traité ci-dessus, d’une part, la hauteur h/ sur la- quelle le massif se maintient de lui-même en équilibre; d'autre part, la poussée maximum exercée sur la paroi ae pour une hauteur quelconque À supérieure à h’. XIV. Reprenons la question précédente en opérant comme M. Poncelet, c’est-à-dire en tenant compte du frottement qui se développe le long de la paroï ae, eten supposant la droite el inclinée d’une manière quelconque. 4 (Fig. 14.) Pour plus de géhéralité, nous admettrons, en outre, que le massif peut être cohérent. ae cos € 9 sin T Cos € k = z — ——— —= ——— ——— em THE : . THE SNS JE sin ? —e et ce résultat s'accorde avec la solution générale exposée n° X , pour l'équi- libre d'un massif coupé latéralement. Car) Désignons par + l'angle que la droite el fait avec l’ho- rizontale, et par ©’ l'angle du frottement relatif au glis- sement des terres sur la paroi ae. Les forces à considérer sont les mêmes que tout à l'heure. La seule différence consiste en ce qu’au lieu d’être perpendiculaire à la droite ae, la force Q fait avec cette droite un angle égal à ? + o/. Procédons comme au n° XIII, en faisant tourner le SyS- tème des quatre forces Q, P, T’, N’, non plus d’un angle droit seulement, mais de l'angle + + «. Après cette ro- tation, les quatre forces à considérer sont représentées respectivement : P par ec; T! par cd, l'angle dem étant égal à Ÿ + 2; N' par dn, l’angle dmc étant égal à © — «; Q par en, l'angle aen étant égal à o! + 0. Les équations (1) et (3) du n° XITT restant les mêmes, l’équation (2) change et devient ra . T L : sn (+) cd. cos D sn (o —c) sin(>—«) ce qui donne pour la distance 3 comprise entre la droite el et la parallèle à cette droite menée par le point m. (1). MR NS Il suit de là que, pour toute ligne de rupture partant de a, le point m reste sur une même droite ms, parallèle à el, et qu’en conséquence, la solution cherchée est four- nie par le théorème fondamental exposé n° Il. 5) Par le point a menons une droite an’ qui coupe la droite en sous l'angle an'e — ç — à. (x Soit s le point où la droite an’ vient rencontrer la droite ms. Conformément au corollaire 2 du n° HE, il faut prendre (SEEN ES SRE sm” — sa. sn’ et dès lors tout est résolu. Supposons le point m déterminé par l’équation (2). A la direction acm correspond la plus grande longueur du segment en, et, par conséquent, aussi la plus grande poussée du massif $ur la paroi ae. Soit Q cette poussée maximum ; elle a pour mesure enr. ARC LMRNDERT ONE XV. Cherchons l'expression numérique de la longueur (Fig. 15.) en, et pour faciliter les applications ultérieures, Ni gi d'une manière générale. Étant donnés le triangle ais et la droite in’ (fig. 15), les ES a 7 1} x ’ ns (-373 ) points m el n sont déterminés, le premier par la distance sm prise égale à V”sa, sn'; le second, par la rencontre des droites in’ et mn, la droite mn étant assujettie à faire avec la droite ma l'angle nma — in'a. Cela posé, il s'agit de trouver l'expression du seg- ment n. Désignons par 6, #, «, les angles sin/, n'ia, an'i. On a d’abord sie (C+ y) ASIE UN UE SR (one Ai) . 2 sn — St. = RES 14. A é sin (« +- #) SIN © _ Sin (w — 6) ? , isa s De là résulte (2). . _… SM — V’sa. sn —= si TEE sin &.Sin (© + #) el, par Suile, (3). im—si—sm—ia sin (® + #) [: cp | A las sin (o — 6) sin &. Sin (o + #) On sait, et d’ailleurs on voit aisément que le quadrila- tère mnan/ est inscriptible dans une circonférence de cercle, tangente en m à la droite ts. Il s'ensuit qu’on peut écrire im NON + tin ——, el comme on à A nt . Sin (w + #) (D). . . . . . in = ia ———, # Sin .o on déduit aisément des égalités (5), (4), (5), la relation ( 374 ) cherchée V'sin o sin (o -+ y) — V/sin €.sin (€ + #) ñ () sin (o — 6) : (6). in — ia | Du point à abaissons sur sa la perpendiculaire ig et représentons-la par g. Soit d’ailleurs p — ag la perpendi- culaire abaissée du point a sur la droite is. Les triangles iag , iaq donnent LA sin (© + #) — ia ia De là résulte, en substituant dans l'équation (6), __[Vaqsme--Vp sine Considérons un point e situé sur in’ et déterminé comme au n° XIV. La distance de ce point à la droite is étant re- présentée par 3, on a d’abord (eh lmenal Gus Ms te ae (*) Une transformation, facile à vérifier, permet d'écrire l'équation (b) sous la forme suivante : in —ua be RE | V'sin © sin (© + #) + V'sin Esin (6 + #) sin (6 + © + #) Î Dans le cas du parallélisme des droites is, an’, on déduit de là . CRT A , ta sin” (26 +- #) CE ST RT -ER PU UT AE À à 4 sin 6 sin (6 + #) D Ce dernier résultat s'établit, d'ailleurs, directement sans la moindre dif- ficulté. bé ce. CT (375) h étant la perpendiculaire ap abaissée du point a sur la droite ep menée par le point e parallèlement à is. , Du point e abaissons deux perpendiculaires, l’une ea sur ig, l’autre et sur is. La comparaison des triangles 0e, ile donne sin © sin © BE Li io — €, 357 3 — — : sin 6 sin © Désignons par e l’angle que la droite ea fait avec la ver- ticale : « étant l'angle que la droite is fait avec l’horizon- tale, ou, ce qui revient au même, l’angle que la droite apq fait avec la verticale, 1l s'ensuit que l'angle eap est égal à € — «. D'un autre côté, l'angle des droites ag, ig est le même que celui des droites as, is, c'est-à-dire — 6. On voit donc que l’angle des droites ea , ig, a pour expression la différence © — 6 — (:— x). On déduit de là les deux relations 07 = ea COS (o + x —6—:), ap — h — eu cos ( € — 6) - et, par suite, COS ( — C + x — 6) D NT ju ” COS (£ — x) ; Les équations (9) et (10), ajoutées membre à membre, * donnent A D are) SRE 2. cos (£ — 3) XVI. Veut-on appliquer les résultats qui précèdent à la détermination numérique des grandeurs introduites dans la“solution du n°, XIV? On doit remplacer w par o — x, 6 RES IR ANT VA. PAUIRE Re 6 pare — (€ + p'), x par = TE 4 ( 376 \ à , de Le Li 4 Les quantités p et q prennent alors les valeur: vantes : ; 2y cos.o ue , (1) | I sin (o — &) Ÿ ; EE (Bar Cole sin (y + ?’) ù TE cos (e + +) | cos (£ — &) | On a ensuite NE COS (o + 9 + € — 0) et en même temps z £ 2y cos. © \ D ee a a Siné Cos(s + vw) IT sin (9 — «).cos (£ + v’) De là résulte en général : à Va sin (e — &) — Vp cos (£ + v’) à “k (6) PE ESS EEE D J cos (g + pH E — à) | 2y cos ? I sin(p—eos(e +9). Dans le cas ordinaire des applications, la cohésion y étant supposée nulle , il vient plus simplement un h Ë sin(g —æ)sin(?+ —Vcos EHESS A). 0 = RS cos(e — à) cos (pp +E— 0) ’ 1 On a d’ailleurs Ge | Sin (« + #) } sin (& + #) PDU eh = : sin & sin &, Sin (6 + #) er (371) et, remplaçant les angles w,6, », par leurs valeurs respec- . T \ lives @ — &, = — (e + p'), p'+a sim (? ++) ! ER" = sin (+ — &) COS (£ — à) On déduit de là == sin ($ + $ em —en.en =? SEE #0 — X ; | COS (P+ P+E— 0) et désignant par £ le rapport de la base em à la hauteur h. G) _Vsin( — x) sin (p+ #) — Vcos(e El @œ) cos (£ + ?‘) sin (?+ +") NT cos (£ — a) cos (p+p +E— 0) sin(p—x)" Le rapport de la base du prisme de plus grande poussée à sa hauteur étant ainsi déterminé, on peut écrire em Sin w.SIn (6 + 4) D. — 7" sin (© + #) ou, ce qui revient au même, (6) La AR sin (o — à) cos (£ — a) RM DT sin (9 + 9) De là résulte à Ith? sin (9 — x) cos (£ — 4) pe Qu M, Si (ee om (ea) 2 sin (o + 9) XVIT. Considérons, en dernier lieu , le'‘cas d’un massif (378) dont le profil est limité supérieurement par une ligne ’ 4 ‘ LA 4 ’ ’ + LA ‘ ‘ 74 , emmmmm…s— NS AN RE VAN ATK à de \ \ “ \ \ \ \ \ \ \ Æ Ss & (Fig. 16.) brisée ecdfl. Pour ramener ce cas aux précédents, il suffit d’un simple artifice que nous empruntons à M. Poncelet. Supposons que la ligne de plus facile rupture vienne aboutir quelque part en m sur le segment f{. Nous pro- longeons la droite !f, d’abord jusqu’en g, où elle vient couper la paroi ea, ensuite jusqu’en e/, de manière à former un triangle e’af équivalent en poids au polygone aecd/a. Cela fait, il est visible que, pour toute ligne de rupture comprise entre les droites af, al, le profil ae/! peut être substitué au profil primitif, sans qu'il en résulte aucune modification dans les conditions d'équilibre. Or, dans le profil aæe/!, la ligne supérieure e’! est droite ; on est donc ramené à l’un des cas traités précédemment, et la question peut être considérée comme résolue pour toute ligne de rupture aboutissant quelque part en m sur le segment f. La solution qui vient d’être indiquée peut donner pour ligne de plus facile rupture une droite située à gauche de la droite af. Il s'ensuit alors que, relativement au segment fl, la droite af est la ligne de plus facile rupture, etily a lieu d'examiner si cette droite remplit la même condition par rapport au segment df. Cette nouvelle recherche se fait comme la première, en opérant sur le segment df de + sd L ( 3179 ) la même manière qu’on l’a fait d’abord sur le segment f{. Dans l'hypothèse où la ligne de plus facile rupture tombe quelque part en m sur le segment /{, et où la co- hésion du massif est considérée comme nulle, si l’on dé- signe par p le pied de la perpendiculaire h, abaissée du point a sur la droite e/!, et qu’on applique la formule (7) du n° XV, il vieni d’abord M en — Vg sin « —Vp sin 6 sin (o — 6) On à ensuite COS (D — Si — € + PE PS an ee COS (£ — à) Cela posé, si l’on désigne par a°* le produit constant h. e'g, et qu'on remplace les angles ©, 6 par leurs valeurs (: + o/), on peut écrire sin (o + <’ a° ; (3) 7 D MAIER + € — à), à) \ RARE SSE Le —Vhe cos (£ + SNESSN h en —= de e 8 CS la Le due 2) n he n' (5) .Q en L'action Q exercée sur la paroi ea, pour le prisme de plus grande poussée, se trouve ainsi déterminée numéri- quement. XVIII. Les solutions exposées dans les numéros qui précèdent s'étendent d’elles-mêmes au cas d’une charge ( 580 ) supérieure uniformément répartie. Elles s'étendent égale- . ment au cas d'une paroi résistante composée de plusieurs plans distincts. Pour tenir compte d'une charge supérieure uniformé- ment répartie et représentée par pour l'unité de surface, 2 . N 2 , il suffit de substituer à IT la somme II + - Cela résulte de ce que le facteur à introduire dans l'expression linéaire un de OUE : NA des forces considérées devient — + y au lieu de —- En ce qui concerne le cas d’une paroi composée de plusieurs plans distincts, montrons par un exemple com- ment peut se faire celte extension nouvelle. Soit eac une paroi plane composée de deux parties ea, ac, admettant chacune un coefficient particulier de frot- tement. Soient Q1, Q2 les forces nécessaires pour ‘maintenir, l’une le segment ea, l’autre le segment ac contre la poussée du massif. On connaît d'avance la direction de ces forces, et 1! s'agit d’en déterminer la grandeur. Considérons d’abord la force Q,. On opère sur le seg- ment ea, comme s’il subsistait seul, et rien n’est changé dans l'application des procédés décrits ei-dessus. Considérons ensuite la force Q2. On opère sur la paroi totale eac. La force Q1 étant connue en grandeur, ainsi qu’en direction, on la porte sur une droite menée à parur du point pris pour origine de la force P. Cela fait, tout s'achève d’après le procédé général, la seule modification consistant à prendre pour origine de la force Qe, non plus l’origine de la forte P, mais bien l'extrémité du segment sur lequel on à porté déjà la force Qu. XIX. Supposons connue la poussée que supporte une paroi plane pressée par un massif, et cherchons le point ( 581 ) d'application de cette poussée en nous bornant aux cas les plus simples. Reportons-nous d’abord au n° XVI. La valeur de Q, dans l'hypothèse d’une cohésion nulle, est donnée par l'équation Ih? sin(o— a) cos (s — x) RD 0. Q — - q) Q 9 sin (o + ©) à Soit a’ un point mobile, à par- ù 222 PRE ue 5 : . is LR TES pa tir du point e, sur la paroi ea. / Pour appliquer la formulle (1) au segment ea/, il suflit d'y con- sidérer À comme une quantité ne variable, qui représente, pour chaque position du point a’, la perpendiculaire abaissée de ce (Fig. 17.) point sur la droite em. Cela posé, voici les conséquences : 4° Le triangle eam étant pris pour représenter la poussée exercée sur la paroi totale ea, le triangle sem- blable ea/m' représente celle qui correspond au seg- ment ea'. 2 Une relation facile à saisir s'établit entre le point d'application de la poussée, Q sur la paroi ea et le centre de gravité du triangle eam. Cette relation consiste en ce que ces deux points sont sur une même droite parallèle au Côté ma. 5° Le point d'application de la poussée À est situé, sur ae, à une distance du point a égale au tiers de la lon- gueur ea. | | XX. Reportons-nous maintenant au n° XII. La valeur donnée pour Q par léquation (9) peut s'écrire comme il ? ( 582 ) ù Ru O — 1° cos €. JT à Eu] ss suit : Construisons le triangle eam, de manière que la base em y soit égale à la hauteur k. Pre- p nons ed — bc ——, et par les points b, c menons les droites: big, cod respectivement paral- lèles, la première à ea, la se- conde à #4. Les triangles aïg, boc étant égaux, on voit aisé- ment que la pression exercée par le He n’agit sur la paroi ea qu’à partir du point d et que, pour toute position du point a prise au delà de 4, elle est proportionnelle à l'aire du trapèze coim. De là résulte, ainsi qu'on l’a vu tout à l’heure, la conclusion suivante : Le point d'application de la poussée sur la paroi ea cor- respond au centre de gravité du trapèze coim, ce point el ce centre se trouvant tous deux sur une méme droite parallèle à la base im : Menons par le point c la droite cc’ parallèle à oi. Le trapèze coim est ainsi décomposé en un parallélogramme coic! et un triangle cc/m, ayant respectivement pour mesure , le premier fe anee le second TT. Soit x la distance au point a du point d'application de la force Q sur de, on a évidemment a 9 2 4 NON k' Rh-h _æ(h-hJh URL ad (h-hYŸad æ.{(h -h) 51% = dt ES ( 3583 ) On déduit de là ad: 9h + 4h L—=— ———— h 6 = SN 4 et remplaçant ad par sa valeur ae ——, ae(h—h") (Ch +h) (k-—Rh) (Eh + h') 6 h° mA 6h cose Dans le cas d’une charge uniformément répartie sur la face supérieure du massif et égale à x pour l'unité de sur- face, on doit remplacer IT par II + 1 et k' par h'’, en posant Il en résulte On Re 7h0 £ NI CUS _ S'agit-il ensuite du point d'application de la poussée Q sur la paroi ea? On procède, comme tout à l'heure, sauf les modifications suivantes. Les longueurs eb, bc sont prises égales à Le. Les droites de, am sont prolongées jusqu’à la droite fn menée paral- lèlement à em à la distance de L’aire du parallélogramme cfnm ayant pour mesure le produit (R—h17) + , il S'ensuit qu'il ne reste plus qu’à substituer le trapèze foin au tra- pèze coim pour rendre la solution qui précède littérale- ment applicable. La quantité h!/ peut être nulle ou négative. Lorsqu'elle est nulle, le point c se confond avec le point e; lors- | ( 384 ) qu'elle est négative, le point c tombe à gauche du point e. On observera que la pression du massif sur la paroi ae commence à partir du point d ou à partir du point e, selon que la quantité h!' est positive ou négative. Lorsqu'on ne prend pas garde à ces conditions diverses, on ne parvient . point aux résultats qu’on devrait obtenir, et l’on s'expose à voir des anomalies là où, en réalité, il n’en existe point (‘). Huitième question. Butée des terres contre une paroi plane. XXI. Soit ae une paroi plane pressée contre un massif de terre et exerçant sur ce massif un effort Q dont on connaît la direction. On demande la valeur maximum que la force Q peut atteindre sans rompre le massif, la rupture tendant à se produire par glissement et pouvant avoir lieu suivant un plan quelconque mené par l’arête inférieure de la paroi ae. Tel est le problème de la butée des terres, exposé pour la première fois par M. Poncelet. On voit aisément que ce problème peut et doit se résoudre comme celui de la poussée, rien n'étant changé, si ce n’est les directions rela- tives d’une ou plusieurs des forces désignées ci-dessus par les lettres Q, T’, N’. Dans le cas du n° XIIT, s’il s’agit de la butée au lieu de la poussée, la réaction T’ change de sens et l’angle o de signe. Il en résulte qu’à la figure 15 se substitue la figure 19, les droites cd, md se trouvant placées au-dessous de (*) Voir M. Prony (Poussée des terres) et M. Navier (Résumé des leçons données à l’École des ponts et chaussées). ( 582 ) cm précisément comme elles l’étaient au-dessus ("). La so- m' o 2 A: va à \ “ (Fig. 19.) lution cherchée s'obtient en menant la droite am’ de ma- nière que l'angle am/m soit égal à ©. La ligne de plus facile rupture est la droite am dirigée suivant la bissec- trice de l’angle nam/. Le prisme correspondant au triangle eac est dit prisme de moindre butée. La plus grande valeur que la force Q puisse atteindre sans déterminer la rupture du massif est exprimée par la relation ITA = —— * en. Q 2 Le prisme de moindre butée se substituant au prisme de plus grande poussée, le rapport désigné pour celui-ci par { prend une autre valeur. Soit f, cette valeur, on trouve très-simplement GE FE (*) Les angles dem , emd sont l’un droit, l’autre égal à +. 2®e SÉRIE, TOME IX. 27 _ On à de même, en désignant par À, la valeur de k qui correspond à celle que nous avons représentée d’abord par h/ : dy sin + cos € pe « Ti € cos? — 2 De là résulte 2? de si (A + R,) cos e. XXII. Considérons en- core le cas traité n° XIV et supposons qu'il s'agisse de la butée au lieu de la pous- sée du massif. Les angles ®, o! changeant de signe et la force T’ de sens, la figure 20 se substitue à la figure 14. Dans la nouvelle figure, la droite en est au-dessous de la droite ea, la droite md au-dessous de la droite mc. L’angle aen est égal à ®o! — «; l'angle cmd à @ + a; l'angle med à = — x. Il en résulte que la distance z du point #» à la droite ecl a pour expression (Fig. 20.) 7 mn # Il sin(p+ «) Soit n'as une droite menée par le point a, de manière à couper la droite en sous l’angle an'e — @ + «. s étant le A R | ( 387 ) _ point de rencontre de cette droite avec la droite ms menée par le point m parallèlement à el, supposons le point m déterminé, par rapport au point s, par l'équation de con- dition 2 sM —=Ssa.sn'. Cela posé, le prisme de moindre butée correspond au triangle ace et le reste s'achève comme au n° XIV. On voit suffisamment par ce qui précède comment les solutions, obtenues d’abord pour les différents cas de la poussée d'un massif contre une paroi plane, s'étendent d'elles-mêmes au cas de la butée. RÉSUMÉ GÉNÉRAL. XXII. Les questions traitées dans cette note compren- nent les objets suivants : Section de rupture et résistance d'un solide prismatique encastré horizontalement et sollicité par un poids. Section de rupture et résistance d'un solide prismatique chargé d’un poids. Section de rupture et résistance d'un solide prismatique pesant et chargé d’un poids. Equilibre d'un massif coupé latéralement. Équilibre d'un massif sollicité latéralement. Poussée des terres contre une paroi plane. Dutée des terres contre une paroi plane. Ces diverses questions se résolvent toutes par l’applica- tion d’un seul et même théorème de géométrie élémentaire. Le lecteur observera que si l’on s’en tient à la solution géométrique, tout se réduit à des résultats d’une extrême (388) simplicité et n’exigeant que le tracé d’un très-petit nombre de lignes. Parmi ces résultats, il en est plusieurs que nous croyons nouveaux et qui nous paraissent Curieux, Soit en eux-mêmes, soit par l’accord qu'ils présentent avec les faits expérimentaux. La complication inhérente aux pro- blèmes résolus n'apparaît que dans la traduction numé- rique des relations qui s’établissent entre les lignes sur lesquelles on opère et celles qui représentent les solutions cherchées. — M. De Koninck fait une communication verbale rela- tive à différents fossiles dont il est fait mention dans le travail de M. Scohy; il en présente plusieurs exemplaires, ainsi que quelques autres qui ne sont pas mentionnés dans le travail soumis à la classé. M. de Selys-Longchamps fait, de son côté, différentes observations sur la découverte des fossiles trouvés à Saint- Nicolas. D TE ed CR CR ee ERP Fa" , rer: AT, à re ni - \ et dr DPr : ( 389 ) CLASSE DES LETTRES. Séance du 2 avril 1860. M. GacHarD, président de l’Académie et directeur de la classe. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron de Gerlache, Grandga- gnage, de Ram, Borgnet, le baron J. de Saint-Genois, : P. Devaux, De Decker, Snellaert, Haus, Bormans, Le- clercq, Polain, Baguet, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres ; Nolet de Brauwere Van Steeland, associé. MM. Sauveur et Alvin, membres des deux autres classes, assistent à la séance. a CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur fait parvenir une lettre de M. le gouverneur de la province d'Anvers contenant une liste des hommes célèbres de cette province dont le souvenir mérite d'être consacré par des inscriptions pu- bliques. Cette lettre est renvoyée à la commission des ( 390 ) trois classes chargée de rédiger un plan de Biographie nationale. — M. Wilbert, président de la Société d’émulation de Cambrai, avait fait des démarches pour obtenir la com- munication d’un mémoire de dom Bévy, ayant pour objet les huits grands chemins militaires romains qui condui- salent de Bavay aux huit principales villes de la seconde Belgique. Le secrétaire perpétuel s’est empressé de répon- dre, en communiquant quelques-uns des renseignements demandés; il fera faire des recherches pour voir s'il ne serait pas possible de compléter ces documents, par les manuscrits de dom Bévy, que renferment encore les ar- chives de l’Académie. Le Congrès archéologique de France annonce que sa 27° session aura lieu à Dunkerque, du 16 au 25 août prochain. Le programme comprend un grand nombre de questions qui intéressent l’histoire de la Belgique. — M.J. Nolet de Brauwere Van Steeland, associé de la classe, dépose un fragment d’un poëéme hollandais de sa composition, intitulé : Het Verhael des monniks. — Re- merciments. RAPPORTS. M. le président fait connaître verbalement les décisions prises dans la commission mixte des trois classes, chargée d'examiner les questions relatives à la propriété concernant | 1 ot di (391) les mémoires publiés dans les recueils de l’Académie. Le rapport relatif à ces questions sera imprimé et distribué aux membres avant la séance générale du mois de mai. — Il est donné lecture des rapports de MM. le baron J. de Saint-Genois, Carton et de Ram, sur un mémoire manuscrit de leur collègue, M. De Smet, relatif à Robert de Jérusalem, comte de Flandre. Conformément à la de- mande des trois commissaires, ce travail sera imprimé dans le recueil des mémoires. — MM. Ducpetiaux, De Decker et le baron de Gerlache donnent successivement lecture de leurs rapports concer- nant les mémoires envoyés au concours sur la question relative au droit d'association. Le jugement sera prononcé dans la prochaine séance. M. Ducpetiaux donne ensuite lecture du discours sur le même sujet qu'il compte lire à la séance publique de la classe. — Il est également donné une première lecture des rap- ports de MM. le baron J. de Witte, Chalon et le baron J. de Saint-Genois, sur les deux mémoires envoyés en réponse à la question du programme de concours de 1860 : Quelles sont les localités des dix-sept provinces des Pays- Bas et du pays de Liëége où l’on a frappé monnaie depuis l'invasion des Francs jusqu'à l'émancipation des grands _feudataires ? Les décisions relatives à ces mémoires seront prises dans la séance du 9 mar. À (392 ) ÉLECTIONS. La classe arrête définitivement la liste des candidats pour les places de correspondants regnicoles et d’associés étrangers à élire lors de la prochaine séance du mois de mai. D Cm —— | ( 395 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 5 avril 1860. M. Baron, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, De Keyser, Fr. Féuis, G. Geefs, Leys, Madou, Navez, Roelandt, Suys, Van Has- selt, Jos. Geefs, Érin Corr, Snel, De Braekeleer, Fraikin, Éd. Fétis, De Busscher, Portaels, membres ; Daussoigne- Méhul , associé. M. Nolet de Brauwere Van Steeland, associé de la classe des lettres, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur annonce que, désirant satisfaire au vœu exprimé par l’Académie, il a chargé M. Louis Jehotte d'exécuter le buste en marbre de Dewez, ancien secrétaire perpétuel de la Compagnie. M. le Ministre demande l’avis de la classe sur une lettre du sieur Van Poucke, professeur de musique à Ostende, ( 394 ). qui soumet à la Chambre des Représentants diverses con- sidérations tendantes à l’adoption d’un diapason musical uniforme. Cette lettre avait été renvoyée au Ministère par décision de la Chambre; elle sera soumise à l'examen de la section de musique de l’Académie, qui fera son rap- port dans une prochaine séance. \ — La députation permanente du conseil provincial du Hainaut fait parvenir un exemplaire de la médaille frappée, en vertu d'une résolution de cette assemblée; pour per- pétuer le souvenir de la naissance de S. A. R. le comte de. Hainaut. M. Fr. Fétis fait hommage du premier volume de la Bio- graphie des musiciens, deuxième édition, qu'il vient de faire paraître. M. Galimard, peintre à Paris, fait don d’un exemplaire de la reproduction photographiée de son tableau la Vic- toire. — Remerciments. — M. Chrétien Holst, secrétaire de l’université royale de Christiania, fait parvenir différents ouvrages de ce corps savant, et fixe particulièrement l'attention de la classe sur un grand travail contenant la description de la cathédrale de Drontheim. « Le Gouvernement, dit-il, a l'intention de restaurer ce monument, et il est à désirer que des ob- servations faites à l'étranger renferment des remarques archéologiques propres à faciliter cette restauration d'une mauière irréprochable. » La classe désigne MM. Roelandt, Suys et Balat comme commissaires pour faire l'examen de cet ouvrage. JE A ST SES ‘RAPPORTS. MM. Fétis, Daussoigne-Méhul et Snel, formant la sec- tion permanente du jury de composition musicale, avaient été chargés, sur la demande de M. le Ministre de l’intérieur, d'examiner s'il n’y avait pas lieu de donner à M. Radoux, lauréat du grand concours de 1859, d’autres instructions que celles que mentionne le règlement. Voici le rapport présenté, au nom de la section, par M. Fr. Féus : « La section permanente du jury de composition mu- sicale est d'avis que, dans la situation politique actuelle de l'Italie, M. Radoux serait exposé à ne pas jouir, dans ce pays, du calme nécessaire pour ses études et ses tra- vaux. » D'autre part, l'Allemagne est en ce moment divisée par des opinions si divergentes, en ce qui concerne l’art musical , que le lauréat pourrait être livré à l'incertitude sur la direction à donner à son talent. » Le jury pense donc que l'Angleterre, Londres parti- cuülièrement, dans la saison des oratorios et des concerts, et Paris, où le goût est toujours le plus pur et où les occasions d'entendre de bonne musique bien exécutée se présentent fréquemment, sont les lieux les plus favorables à la continuation des études de M. Radoux. » La section permanente du jury croit devoir faire ob- server que le séjour de Londres, pendant trois ou quatre mois, exigerait une dépense mensuelle supérieure à la ( 396 ) pension accordée aux lauréats pour leur séjour en pays étrangers ; elle croit donc qu'un supplément d’indemnité serait nécessaire pour ce cas. » — L'Académie, dans sa séance précédente, avait nom- mé une commission chargée d'examiner la question sou- levée par M. le Ministre de l’intérieur et relative aux demandes de subsides qui lui sont fréquemment adressées pour la restauration d'anciennes peintures. La commis- sion s’est réunie une première fois et fait connaître qu’elle présentera prochainement son rapport. — La classe s'occupe ensuite de différents sujets qui doivent être discutés dans la prochaine assemblée géné- rale. | OUVRAGES PRÉSENTÉS. Notice biographique sur Alexandre Brongniart; par J.-J. d'Omalius d'Halloy. Paris, 1860; 1 broch. in-8°. De la statistique considérée sous le rapport du physique, du moral et de l'intelligence de l'homme ; par Ad.Quetelet. Bruxelles, 1860; in-4°. Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique ; par Fr. Fétis. Deuxième édition, tome I° (Aaron- Bohrer). Paris, 1860; 1 vol. gr. in-8°. Het verhael des monniks (fragment); door D' J. Nolet de Brauwere Van Steeland. Utrecht; 4 broch. gr. in-8°. ( 397 ) De l'emploi du procédé Bessemer pour la fabrication de l'acier ; par M. A. Delvaux de Fenffe. Liége, 1859 ; 1 brocb. in-&°. Notice sur les Fasrkunsr de M. Haurez, suivie de quelques considérations sur l'emploi des Man ENGINEs en Angleterre; par le même. Liége, 1859; 1 broch. in-8&. Influence de l'enseignement sur la prospérité industrielle et com- merciale ; par Eugène Gauthy. Bruxelles, 1860; 1 broch. in-&°. Notice sur La tribu des marantées, suivie de la nomenclature des espèces cultivées dans les jardins; par le D' Fr. Koernicke, de Pétersbourg, traduit de l'allemand, par AIf. de Borre. Gand, 4860 ; 1 broch. in-&. Charles Morren, sa vie et ses œuvres; par Édouard Morren. Seconde édition. Gand, 4860; 1 broch. in-8°. Fragments de voyages en Hollande, première et deuxième parties; par Alb. d'Otreppe de Bouvette. Liége, 1860; 2 broch. in-12. Archéologie liégeoise. Vestiges des âges, empreintes des siècles ou étude de l'histoire au moyen des fragments d'aris anciens et des débris des vieux monuments; par Alb. d'Oireppe de Bou- vette. Liége, 1860; 1 broch. in-8°. L'Abeille, revue pédagogique, publiée par Th. Braun. VI"° année, 1'° à 5° livr. Bruxelles, 1860; 3 broch. in-&°. Journal des beaux-arts. W"° année, n% 6 et 7. Anvers, 1860, 2 feuilles in-4°. | De vlaemsche school, VI Jahrg., feuilles 4 à 7. Anvers, 1860; 7 feuilles in-4°. Bulletin de la Sociélé historique et littéraire de Tournai. Tome VI. Tournai, 1860; 1 vol. in-8°. Journal historique et littéraire. Tome XXVI, liv. 10 à 12. Liége, 1859; 3 broch. in-8°. Annuaire de la Société libre d'émulation de Liége pour l'année 1860. Liége, 1860; 1 vol. pet. in-8°. Bulletin de la Société liégeoise de littérature wallonne. IF°'° année, Liége, 1860; 1 vol. in-8°. ( 398 ) Monographie des brachiopodes fossiles du terrain crétacé supérieur du duché de Limbourg; par 3. Bosquet. 1'° partie. Haarlem, 1859; 1 cahier in-4°. L'Investigateur, journal de l'institut historique. XXVII®< année, 302%-305%: livr. Paris, 1860; in-8°. Observations sur les phénomènes qui se sont passés à la sépa- ration des périodes géologiques; par M. Hébert. Paris, 1859; 4 broch. in-&. Note sur la limite inférieure du lies et sur la composition du trias dans les départements du Gard et de l'Hérault; par le même. Paris, 1859; 1 broch. in-8°. Rapports faits à la section des sciences du comité des Sociétés savantes, sur le tome XI du Bulletin de la Société archéologique de Soissons ; par le même. Paris, 1859 ; 4 broch. in-8°. Rapport fait à la section des sciences du comité des Sociétés savantes sur les mémoires de géologie publiés dans le tome VII des annales de la Société impériale d'agriculture de Lyon; par M. Hébert. Paris, 1859; 1 broch. in-8°. Rapport fuit à la section des sciences du comité des Sociétés savantes sur les mémoires de géologie contenus dans le deuxième volume des Mémoires de la Société d'émulation de Doubs; par M. Hébert. Paris, 1858; 1 broch. in-8°. Hippocrate, de la vision ; par J. Sichel. Paris. 4860 ; 1 broch. in-8°. De la chasse des hyménoptères; par le même. Paris, 1859; 4 broch. in-12. Bulletin de la Société industrielle d'Angers et du département de Maine-et-Loire. XXX"° année. Angers, 1859; 1 vol. in-8°. Mémoires de l'Académie d'Arras. Tome XXX"*. Arras, 1858 ; 1 vol. in-8&°. Mémoires dela Société d'émulation de Cambrai. Tomes XXHII- XXVI, 1'° part. Cambrai, 4850-1859; 4 vol. in-8°. Bulletin de la Sociéte linnéenne de Normandie, IVe volume. Caen, 1859; 1 vol. in-8°. ( 399 ) Nouvelles observations et recherches historiques sur la ma- ladie de la pomme de terre et sur celle de la vigne; par Victor Chatel. C2en, 1860; 1 broch. in-8°. Culture des pommes de terre, n° 16; par le même. Caen, 4860 ; 1 broch. in-8:. Mémoires de l'Académie impériale des sciences, arts et belles- lettres de Dijon. Deuxième série, tome VIT. Dijon, 1859, 1 vol. in-8°. | Programme du congrès archéologique de France qui sera ou- vert à Dunkerque le 16 août 1860. Dunkerque, 1860; 1 broch. in-4°. Essai sur l'hydrologie (extrait de la Géologie pratique de la Louisiane); par R. Thomassy. Montpellier, 1859; in-4°. Cartographie de la Louisiane (extrait du même ouvrage); par le même. Montpellier, 1859; in-4°. Novus codex diplomaticus Brandenburgensis ; von D" Adolph Friedrich Riedel. XVII, XVIII Bandes. Berlin; 2 vol. in-4°. Catalog der hinterlassenen Bibliothek des am 28 April 1858 in Berlin vustorbenen geh. medicinal- Rathes, Professors der Anatomie und Physiologie D’ Johannes Müller. Bonn , 1858 ; 4 vol. in-8°. Jahres- Bericht des physikalischen Vereins zu Frankfurt am Mainz für das Rechnungsjahr 1858-1859. Francfort SIM. 1859; 1 vol. in-8°. Von der Bedeutung der Sanskritstudien für die griechische Philologie; von Wilhelm Christ. Munich, 1860 ; 1 broch. in-4°. Rede zur feier ihres eenhundert und ersten Stiftungstages , ge- halten ; von Justus Freïherrn Liebig. Munich, 1860; 1 br. in-8. Magnetische und meteorologischen Beobachtungen zu Prag. Zwangister Jahrgang. Prague, 1860; in-4°. Archiv für die Naturkunde Liv-, Ehst-und Kurlands; he- rausgegeben von der Dorpater Naturforscher- Gesellschaft. Erste Serie, 15-217 Band. Dorpat, 1859; 2 vol. in-8°. Notizie storiche intorno l'invenzione e l’uso della bussola ( 400 ) presso tulti à popoli antichi e moderni ; raccolte da Montano Magliozzi. Naples, 4859; 4 vol. in-8°. Sui principi elettrofisiologici che devono indirizzare gli usi medici della elettricila; studii di Giacinto Namias. Venise, 4859; 4 vol. in-8°. | Betoenkning og Indstilling, fra den ved k. resolution of 1°'° September 1858 nedsatte Commission angaande Almueskole- voesenet. Christiania, 1859 ; in-4°. Foreningen til Norske fortidsmindesmerkers Bevaring ; Aars- beretning for 1858, Afgiven i Generalforsamling den Juli 4859. Christiania, 14859; 1 broch. in-8°. Statistike Tabeller for kongeriget Norge, udgivne efter Forans- taltning af Departementet for det Indre. Attende Raekke. Chris- tiania, 4858 ; 1 vol. obl. in-4. Fortegnelse over Modeller af Landhuskoldnings- Redskaber fra Ladegaardsoens horedgaard ved Christiania. Christiania, 4859, 1 broch. in-8°. Personalier Oploeste ved Haus Majestaet kong Oscar den 4°, begravelse i Ridderholmskirchen den 8" August 1859. Christiania, 1859, 1 broch. in-8°. Om aedrueligheds - Tilstanden i Norge; ved Eïilert Sundt. Christiania, 4859 ; 1 vol. in-4°. Om Saedeligheds- Tilstanden à di af Eïlert Sundt. Chris- tiania, 1857; À vol. in-8°. Forisat Beretning om F anhefollsts ved Eïlert Sundt. Chris- tiania, 4859; 1 vol. in-8°. Om Sistermaal à Norge; af Eïlert Sundt. Christiania , 1855; À vol. in-8°. Om Dodeligheden i Norge; af Eïlert Sundt. Christiania, 1855; 4 vol. in-8°. Al- Mufassal, opus de re grammatica arabicum, auctore Abul- Käsim Mahmüd bin ‘Omar Zamahs'ario; ad fidem codi- cum manu scriptorum edidit J.-P. Broch. Christiania, 4859; 4 vol. in-8°. ( 401 ) Karlamagnus Saga ok happa Haus ; udgivet af C.-K. Unger. 1. Christiania, 1859; 1 vol. in-8. Diplomatarium norvegicum ; Samlede og Udgivne af Chr. C.-A. Lange og Carl R. Unger. V®® Samling. Christiania, 4858; 4 vol. in-8°. | Nyt Magazin for Naturvidenskaberne ; Udgives af den phy- siographiske Forening i Christiania ved M. Sars og Th. Kjerulf. Xe Binds, 4% Hefte, XI! Binds, 1° Hefte. Christiania, 1859: 2 cahiers in-8°. Den norske Kirkes historie under Katholicismen; af R.Keyser. Christiania, 1856 ; 2 vol. in-8°. Uber die geometrische Repräsentation der Gleichungen Zwi- schen zwei veränderlichen, reellen oder Komplexen Grôssen ; von C.-A. Bjerknes. Christiania, 1889: 4 broch. in-4°. Forhandlingar i Videnskabs - Selskabet à Christiania aar 1858. Christiania, 1859; 4 vol. in-8°. Norske Huldre- Eventyr og Folkesagn; fortalte af P. Chr. Asbjorusen. IL. Christiania , 1859 ; 1 vol. in-12. Tale og Cantate ved det norske Universitets mindefest for kong Oscar den 22" September 1859. Christiania, 1859; 1 broch. in-3°. Berelning om Bodsfoengsslets Virksomhed i aaret 1858. © Christiania, 1859 ; 1 broch. in-8&. Norges Budget 1859 : — n° 4, civil Administrationen; — n° 2, Armeen; — n° 5, ophlysningsvoesenets; — TFoldiariffer. Christiania, 1859 ; 4 vol. in-4°. Throndhjems Domkirke, udgivet efter Foranstaltning af den norske Regjering; Text af Prof. P.-A. Munch, tegninger af arch. H.-E. Schirmer. Christiania, 14839: 1 vol. in-fol. Geological sketch of the estuary and fresh water deposit for- ming the bad lands of Judith river, with some remarks upon the surrounding formation; by F. V. Hayden. — Exiinct vertebrata from the Judith river and great lignite formation of Nebraska ; by Joseph Leidy. Philadelphie, 1859; 1 cahier in-4°.. Qme SÉRIE, TOME IX. 28 NE d à 402 “à The transaction of the Academy of science of S. n° 3. S.-Louis, 1859 ; 1 cahier in-8. THEATRE (Geological report of the country along the line of the sie western branch of the Pacific railroad state, of Missouri, DE G. C. Swallow. S.-Louis, 1859; 1 broch. in-8. 44 F4 ÿ *h Annual report of the board of regents of the Smithsonian in à stitution for the year 1858. Washington, 1859; 1 vol. in-8&. Report of the superintendant of the U. S. Coast Survey for 1857. Washington, 1858; 1 vol. in-4°. _ Exploration and surveys for a railroad route from the Mis- sissipi river 10 the Pacific ocean. Vol. X. Washington, 1859; À { vol. in-4°. BÜLLETIN _ DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1860. — N° 5. a < — CLASSE DES SCIENCES. Séance du 11 mai 1860. M. Van BENEDEN, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d'Omalius, Sauveur, Wesmael, . Martens, Cantraine, Stas, De Koninck, A. De Vaux, de Selys- Longehamps , le vicomte B. du Bus, Nyst, Neren- burger, Gluge, Melsens, Schaar, Liagre, Duprez, Bras- _seur , Poelman, Dewalque, d'Udekem, membres; Spring, Schwann, Lacordaire, Lamarle, associés; Maus, Donny, Gioesener, correspondants. 2€ SÉRIE, TOME IX. 29 (404) CORRESPONDANCE. — M. le Ministre de l’intérieur demande quelques nou- veaux renseignements sur la répartition du prix de 5,000 francs, destinés à différents concours dans le domaine des : sciences physiques et mathématiques et en remplacement du prix quinquennal non décerné. — MM. de Selys-Longchamps, Dewalque, Ad. Que- telet, Émile Rodigas, Husson, Bernardin. et Maas com- muniquent les observations qu'ils ont faites récemment _ pour l'étude des phénomènes périodiques des plantes et des animaux. Les observations météorologiques faites en Angleterre, à Madrid, à Lisbonne et à Rome sont également commur- niquées à l’Académie. — M. A.-J. Maas, professeur au collége de la Paix, à Namur, transmet quelques nouvelles observations concer- nant l’état de l’atmosphère le 19 février 4860, pendant l'orage qui a frappé 26 églises dans le royaume. « Le vent le plus violent, dit-il, s’est fait sentir à Bruxelles, à 7 heures du soir; il ne s’est produit à Namur qu'une heure plus tard. C’est donc dans des circonstances atmosphéri- ques pareilles que les deux élévations ont eu lieu; c’est-à- dire quand la violence des vents s’est calmée.. Le tonnerre n’a éclaté qu'un peu avant 9 heures du soir; et, un peu après, le ciel était très-resplendissant. Cette lueur ne peut être attribuée à la lune, qui était couchée depuis long- ( 405 ) temps, ni à l’éclat des réverbères de la ville. Je crois pou- voir l’appliquer à l’état électrique des flocons de neige; il n’y à eu ici aucun dégât. » a — = RAPPORTS. Sur une découverte d’ossements fossiles ; notice de M. le docteur Scohy. Mapport de M. Nyst. « M. Scohy, docteur en sciences naturelles et médecin de bataillon de l’armée belge, actuellement en garnison à Lierre, a présenté à la classe une notice fort intéressante sur les ossements fossiles découverts en cette ville, le 28 février dernier, notice que nous avons été chargé d’exami- ner conjointement avec nos honorables confrères, MM. De Koninck et Van Beneden. | Ce travail, qui est accompagné de six planches, représen- tant presque tous les objets les mieux conservés, est divisé en deux sections : dans la première, l’auteur décrit les dents et dans la seconde, les divers ossements recueillis. D'après M. Scohy, quatre grosses dents constitueraient les deux premières et les deux dernières mâchelières de l'Elephas mammouteus, Cuv., ou l’Elephas primigenius, Blum. L'une des plus petites mâchelières a été représentée pl. I, fig. 4. Un fragment en cône tronqué, mesurant 45 centimètres, semble devoir être une défense ayant appartenu à un élé- ( 406 ) phant femelle, tandis que d’autres débris appartiendraient à une défense d’éléphant mâle de la plus grande dimen- sion. Ces objets, étant trop brisés, n’ont pu être figurés. La planche IT, fig. 4 et 2, représente dans ses différentes faces, une dent, sixième molaire inférieure gauche, supé- rieurement conservée, appartenant au genre rhinocéros, que l’auteur rapporte au R. megarhinus. Une dent figurée pl. LIT, fig. 1-4, est une quatrième molaire de {a mâchoire gauche du cheval, et enfin les deux dernières (figurées pl. IV, fig. 4 et 2) sont une dent canine et une molaire que l’auteur pense devoir rapporter au genre Canis (chien), et qui ont, en outre, beaucoup d’analogie avec les genres Pterodon et Lyenodon. Elles ont, d’après M. Scohy, une grande affinité avec le Canis familiaris. | Parmi les ossements qui font l’objet de la seconde sec- tion, l’auteur décrit un os iliaque d’une pesanteur extra- ordinaire qu'il dit être un tiers plus grand que celui de l'éléphant moderne. Une tête de fémur, une première pha- lange d’un doigt (figurée pl. F, fig. 2, réduite à ‘/), un radius (pl. I, fig. 5, à la même réduction). Dix fragments de côtes, dont l’une sembie avoir appartenu à la pre- mière, et enfin un grand nombre de débris du crâne et les articulations temporo-maxillaires, etc. D'après M. Scohy, tous ces débris auraient appartenu au même squelette qu'il rapporte, sans hésiter, à un mam- mouth de la plus grande puissance, et qui n'aurait pas acquis l'extrême limite de son développement. Deux humérus droits provenant de deux individus adultes et un humérus gauche d’un individu jeune, se rap- portent également au genre Elephas. La planche [, fig. #, représente l’un de ces humérus réduit à /6. ER, : : 1 si | # | ( 407 ) Trois extrémités: d’os sont considérées par l’auteur comme des humérus de rhinocéros différents. (Voir pl. V, fig. 4 et 5, réduits à ‘/s). Un os d'environ 25 centimètres et de la grosseur d’un humérus humain, semble être le radius et le cubitus sou- dés ensemble du Cervus primigenius. (Voir pl. VI, fig. 1.) La planche V, fig. 1 et 2, montre : 1° l'extrémité infé- rieure d’un humérus du même animal que ci-dessus; 2 une vertèbre cervicale répondant à la quatrième du même animal ; 5° un fragment de bois de cerf d’un demi- mètre et fracturé au sommet, figuré pl. VI, fig. 2. Enfin, d’après l'étude qu’a faite M. Scohy de ces diffé- rents objets, il pense qu'ils appartiennent à huit individus différents, représentant cinq espèces, qui sont les sui- vantes : 4° Elephas primigenius ; 2° Rhinoceros megarhinus ; 3° Equus fossilis ; 4° Canis familiaris (l'espèce est douteuse) et 5° Cervus primigenius. | À la suite de son travail descriptif et de la détermina- tion de ces objets, M. Scohy s'occupe de la question géo- logique, c'est-à-dire celle de la nature du terrain dans lequel ils ont été trouvés enfouis. Il pense, d’après l’en- semble des caractères, qu'il a pour base le terrain diestien, lequel serait remanié ou plutôt altéré par le mélange des terrains plus récents. Si, d’un autre côté, nous consultons les travaux impor- tants de Cuvier, nous trouvons que l’on connaît depuis longtemps les éléphants fossiles de Belgique, et que le sa- vant Van Gorp a combattu, dès le XV["° siècle, les préju- gés qui faisaient attribuer à des géants des os et des dents d’éléphants trouvés anciennement aux environs d'Anvers, tout aussi bien qu’asjourd’hui on les qualifie encore, à | ( 408 ) Lierre, d'os de monstres marins. Il-dit, en outre, que Van Gorp parle aussi des os de deux éléphants déterrés près de Vilvorde. Jean Lauerentzen rapporte l’histoire d'un squelette déterré à Bruges en 1643. | De Burtin, dans sa Dissertation sur les révolutions de la surface du globe, couronnée à Harlem en 1787, annonce qu’il possède une dent d’éléphant découverte en Brabant, et ajoute qu’une très-grande tête fossile appartenant au même genre à été retirée d’une rivière, à 2 lieues de Louvain. De Limbourg (1) parle aussi d’os d'éléphants fossiles trouvés dans les Flandres. Cuvier cite des fragments de défenses recueillies dans les couches supérieures et meu- bles de Saint-Pierre, près de Maestricht. D’après les recherches de Morren (2), les environs d'Os- tende , les communes de Tamise, de Melsbroeck et de Niel ont offert aussi de nombreuses et curieuses trouvailles en ossements d’éléphants. Notre savant et modeste confrère et ami Crahay, que la mort a enlevé trop tôt aux sciences , annonce, en 1856, à l’Académie (3), qu’en creusant le canal de Zuitwillems- vaart, on a trouvé, en traversant le Caberg, dans le hameau de Smeermaas, une quantité immense de débris d'élé- phants et de rhinocéros. L'on y a constaté depuis des dé- bris de Cervus, d’'Elephas primigenius, de l’'Equus adama- ticus et des dents molaires du Bos primigenius. En 1840, notre savant confrère M. d'Omalius d’Hal- (1) Mémoires de l’ Acadèmie, vol. I, p. 410. (2) Bulletins de l’Académie royale des sciences et belles-lettres, 1. I, p. 152. 1835; in-8v. (5) Zbid., t. I, p. 45. 1856; in-8&e. » ‘uen AMENER DU UN a #n À ( 409 ) loy (1), présente à l’Académie un rapport sur une lettre adressée à cette compagnie par M. Biver, médecin, qui annonce qu'aux environs d'Ettelbruck, dans la vallée de PAlzette (Luxembourg), il a recueilli, enfoncées d'environ 2 mètres, dans un dépôt de débris et à 45 décimètres au- sn dessus du niveau de la rivière, deux défenses qui étaient à 12 centimètres l’une de l’autre, ce qui faisait supposer qu'elles avaient appartenu au même animal. Dans la notice de M. Biver, qui a été insérée ensuite dans le même volume des Bulletins, p. 452, l'auteur annonce en outre que, dans les bois de la commune de Nedderkern, à 11 lieues SSO. d'Ettelbruck, il a encore été fait une découverte semblable. Morren (2) cite encore de Melsbroeck une vertèbre d’un autre pachyderme du genre hippopotame, gisant dans l’ar- gile supérieure. Il ne sera pas sans intérêt de mentionner ici l'opinion de Cuvier au sujet de l’Elephas primigenius. Ses osse- ments, dit-il, se trouvent en grand nombre dans beau- coup de pays, mais 1ls sont ordinairement mieux con- servés dans le nord que dans le midi de l'Europe; ils ressemblent plus à l'espèce de l'Inde qu'à celle de l’Afri- que; se trouvent pour l'ordinaire dans les couches meu- bles superficielles de la terre et le plus souvent dans les terrains d’alluvion qui remplissent (comme dans notre pays) le fond des vallées, ou bien bordent le lit des rivières (comme à Lierre). [ls n’y sont jamais seuls, ajoute le grand naturaliste, mais mêlés avec les os d’autres qua- D 0 (1) Bulletins de l’ 4cadémie royale des sciences et belles-lettres de Bruxelles, t. VIT, part. 1'e, p. 64. 1840 ; in-8. (2) Revue systématique des nouvelles découvertes d’ossements fossiles . faites dans le Brabant. Gand, 1828; 1 pl.; in-8e, ( 410 ) drupèdes de genres connus, comme ceux de rhinocéros, de bœufs, d'antilopes, et souvent même avec des débris d’ani- maux marins. Îl est permis d’en conclure que le cataclysme qui a enfoui les objets qui font le sujet de ce rapport doit avoir été l’un des plus récents. En effet, les débris dont nous venons d'entretenir la classe n’ont pu être transportés violemment dans cet endroit, puisqu'ils ne sont pas roulés. Nous rappelons ici avec plaisir que notre confrère et ami feu Galeotti (1), en parlant des restes de l’Elephas pri- migenius trouvés à Melsbroeck, avait déjà, avec sa saga- cité habituelle, su distinguer la formation infra-marine dans laquelle on rencontre, à Anvers et à Saint-Nicolas, les vertèbres de cétacés, du dépôt argileux alluvien an- cien qui lui est supérieur et qui renferme les ossements æt dents qui nous occupent. En terminant mon rapport, je constate avec plaisir que m’étant rendu avec mon confrère, M. DeKoninek, à Lierre, pour voir ces ossements fossiles, nous avons trouvé chez M. le bourgmestre Bergmann, ainsi que chez M. Scohy, tout l’'empressement désirable pour nous fournir les ren- seignements dont nous avions besoin. Je propose donc à la classe : 1° de voter l'impression de l'intéressante notice de M. Scohy, dont le zèle et les connaissances sont dignes d’éloges, et 2 de remercier MM. les bourgmestre et éche- vins de Lierre, qui n’ont rien négligé pour faire tourner cette découverte au profit de la science. » (1) Mémoire sur la constitution géologique du Brabant méridional, p. 18 (1837). (Mémoires couronnés de l’Académie royale de Bruxelles, t. XII.) (411) Rapport de M. De Koninck, e « Au mois de février dernier, un assez grand nombre d’ossements fossiles furent découverts à Lierre et déposés, par les soins des autorités de cette commune, dans un local dépendant de l'hôtel de ville. s M. le docteur Scohy, médecin de garnison à Lierre, s’oc- cupa immédiatement du classement et de l'étude de ces ossements et mit beaucoup de zèle à réunir tous les débris qui avaient été dispersés ou enfouis avant qu’on eût re- connu l'importance de la découverte qui venait d'être faite. C'est aux démarches actives de ce jeune savant que l’on doit la conservation de plusieurs des pièces qu'il a décrites et figurées dans sa notice. Je suis d'accord avec lui pour admettre que la majeure partie des ossements découverts appartiennent au Mam- mouth, c'est-à-dire à cette espèce d’éléphant fossile que Blumenbach a désignée sous le nom d'Elephas primige- nius, quoiqu’elle soit loin d’être celle qui a paru la pre- mière à la surface de notre globe et dont les débris se rencontrent dans les terrains d’alluvion de la plupart des contrées de l'Europe. Je diffère d'opinion avec lui sur quelques-unes des au- tres déterminations qu'il a faites. Je doute fort que la dent de Rhinocéros qu'il a décrite comme provenant du Rhinoceros megarhinus, de Christol, appartienne réellement à cette espèce. Elle m'a paru être au moins aussi rapprochée des dents que M. Owen à figu- rées, sous le nom de Rhinoceros Schleiermacheri, Kaup, parmi celles qui ont été découvertes dans le crag d’eau douce de Sutton et que M. Herman Von Meyer prétend (M2) être identiques avec celles du Rhinoceros incisivus, Cuvier. La dent de cheval que M. Scohy dit provenir de l’'Equus fossilis n'appartient pas à cette espèce, mais bien réelle- ment à l’Equus plicidens de M. Owen; elle est facile à dis- tinguer par la ramification arborescente d’une partie de son émail, ramification que n'offrent pas les dents du che- val ordinaire ni du cheval fossile. Quant à l'espèce de chien dont M. Scohy a figuré un fragment de mâchoire inférieure, mais à laquelle il n’ap- plique positivement aucun nom spécifique, je la crois nou- velle, et je propose de la désigner sous celui de Canis Liranus, afin de rappeler le lieu de sa découverte. Ayant été chargé par M. le Ministre de l'intérieur de recueillir tous les ossements qui ont fourni le sujet du mémoire de M. Scohy et de les déposer au musée d’his- toire naturelle de l’État, je n’entrerai pas plus avant dans l'examen de ce travail, parce que je compte moi-même publier le résultat de mes recherches, après que j'aurai terminé les nouvelles fouilles qui seront bientôt entre- prises à Lierre, et pour lesquelles M. le Ministre a eu l’obligeance de mettre à ma disposition une somme de 300 francs. Je ne terminerai cependant pas mon rapport sans faire observer que, parmi les ossements déjà extraits, j'ai re- connu une côte d’une grande espèce de cétacé, dont. M. Scohy ne fait pas mention, ce qui élève à six le nombre des mammifères trouvés. Je me rallie néanmoins aux conclusions de mon savant confrère M. Nvst, pour demander avec lui l'impression du mémoire de M. Scohy; mais à la condition que les figures soient dessinées avec une exactitude plus rigoureuse que celle fournie par les figures actuelles. (13) Je demande, en outre, que des remerciments soient votés : 1° À M. le Ministre de l’intérieur pour la sollicitude et l'empressement avec lesquels il a pris toutes les mesures nécessaires pour conserver les fossiles recueillis et en com- pléter les débris ; 2 A MM. les bourgmestre et échevins de la ville de Lierre ; 5° À M. Lumen, conducteur au corps des ponts et chaussées, chargé de la direction des travaux du canal de dérivation de la Nèthe, sur le trajet duquel les ossements ont été découverts. Ce fonctionnaire a puissamment con- tribué à la conservation d’une grande partie de ces fos- siles ; 4 Enfin, à M. Scohy pour la part pe a prise dans toutes ces opérations. » Bapport de M. Van Beneden. « Je me rallie avec empressement à l'avis favorable que nos savants confrères viennent d'exprimer sur le mémoire du docteur Scohy. Je dois cependant faire remarquer que, à Mon avis, 1l serait plus prudent de ne pas se prononcer sur le genre auquel se rapporte le fragment de maxillaire de carnassier, rien n'indiquant jusqu à présent qu'il pro- vienne d'une espèce du genre Canis, et ensuite, Je ne saurais partager l'avis de notre honorable confrère M. De Koninck au sujet de la détermination de la dent de rhi- nocéros. Cette dent, nous semble-t-il , se rapporte bien au Rhinoceros megarhinus de Christol. Tous ces ossements de mammifères terrestres, exhibés (44) à la dernière séance de la classe, ont-ils été enfouis en- semble, à la même place, avec la côte que M. De Koninck considère comme une côte d’une grande espèce de cé- tacé? Notre savant confrère de Selys-Longchamps, qui s’est rendu le premier sur les lieux, exprime du doute à ce sujet, et nous voyons, du reste, à chaque fouille que l’on fait le long de la Nèthe, ou à chaque rupture de digue, combien ces ossements fossiles sont communs dans le lit de cette rivière. Le musée de Bruxelles possède depuis longtemps plusieurs ossements de rhinocéros trouvés à Duffel, lors des travaux de terrassement du chemin de fer de Malines à Anvers. D'ailleurs, le mélange de fossiles appartenant à des époques géologiques différentes n’est pas un phénomène si exceptionnel, el nous en voyons un exemple remarquable à Ostende, que je demande la permission de rappeler. Il n'est pas très-rare de trouver sur la plage de notre littoral des débris de Rhinoceros tichorinus et des osse- ments, même des défenses entières, d’Elephas primigenius, mêlés à des coquilles vivantes et des coquilles fossiles, parfaitement reconnaissables pour des coquilles du sable d’Aeltre. Tous ces fossiles proviennent du fond de la mer, et l’on sait que, surtout à quelque distance de la côte Est de l’Angleterre, des ossements se rencontrent en si grande abondance que les pêcheurs trouvent très-souvent dans leurs filets qui ont gratté le fond de la mer, avec les pois- sons vivants, des os, des défenses et des molaires de mam- mouth de Sibérie. Je conserve à Louvain des débris de ces deux grandes espèces de pachydermes et, entre autres, un humérus, trouvé dans un filet, qui est encore tout cou- vert de coquillages vivants qui y ont élu leur domicile. Je sais que M. Scohy n’a pas ajouté toutes les planches one DEP TER TIANTET ue Fu LÉ VAUR “e FA: ( 415 ) qui accompagnent son mémoire, avec l'intention de les faire reproduire, et j'ai l’honneur de proposer de faire figurer seulement la dent de rhinocéros et le fragment de maxillaire de carnassier. » Le mémoire de M. Scohy et les trois rapports auxquels il a donné lieu seront imprimés dans le Bulletin de la séance. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Projet de conférence internationale, pour étendre, sur le globe entier, le système des observations météorologiques adopté pour la mer, dans la Conférence de 1853. Lettre de M. Maury, directeur de l'observatoire de Washing- ton, à M. Ad. Quetelet. On sait que le gouvernement des États-Unis avait fait, en 1853, un appel aux différentes nations maritimes du globe, en vue d’unir leurs efforts et d'établir un système uniforme d'observations météorologiques pour simplifier la navigation. M. Maury fut le promoteur de ce vaste sys- tème, et Bruxelles le lieu choisi pour point de réunion de la Conférence. Les principales nations répondirent à l’ap- pel; les États-Unis d'Amérique, la France, l’Angleterre, la Russie, la Suède, la Norwége, le Portugal, le Dane- mark, les Pays-Bas, la Belgique envoyèrent des repré- sentants. On sait quel fut le succès de cette première conférence et les services immenses qui en sont résultés pour la ( 416 ) navigation : les trajets furent généralement abrégés, quel- ques-uns même du quart ou du tiers du parcours d'au- trefois. M. Maury fait actuellement un nouvel appel aux diffé- rentes nations; il demande que chacune d’elles envoie des délégués pour établir, de commun accord, un système uni- versel de recherches météorologiques sur mer et sur terre, et pour généraliser les beaux résultats obtenus déjà par quelques-unes d’entre elles. Voici la lettre écrite par lui à cette occasion : « Vous avez été le président de la Conférence de Bru- xelles; c’est vous qui avez contribué à l'harmonie de ses réunions el à la bonne issue de ses délibérations. L'époque est venue où, d’après les prévisions des membres, il serait désirable de se réunir de nouveau pour essayer d'étendre nos recherches au delà des mers. » La Conférence recommandait un programme dans lequel étaient spécifiés tous les genres d'observations qu’exige la bonne conduite des vaisseaux. Ce plan a été encouragé par toutes les nations commerçantes et géné- ralement adopté par les marins les plus intelligents navi- guant sous les divers pavillons; la mer est maintenant couverte d'observatoires flottants qui tous agissent de con- cert et qui observent, avec un intérêt philosophique, les phénomènes des vents, des ondes et du temps. » Ce système a si bien réussi, il a été si abondant en résultals pratiques et si riche en promesses pour l'avenir, que J'ai pris la liberté, comme un hommage du respect et de l’estime que mes collègues m'ont inspirés pendant la Conférence, de vous transmettre, comme à son président, la communication ci-jointe : faites-en tel usage que vous ( 417) Jugerez convenable. Ce n’est pas, vous le verrez, un rap- port sur les progrès accomplis, car cela exigerait la col- laboration de chacun de nos collègues et associés à nos travaux; ce n’est point un exposé des résultats obtenus depuis notre réunion, en 1853, n1 un aperçu de la durée des voyages à travers les mers, qui ont été tant abrégés et dont les dangers ont tant diminué; ce n’est point un compte rendu de ce que chacun de nos corps sociaux a si admirablement opéré, c'est le simple récit de quelques faits, de quelques-unes des circonstances qui ont passé de nos travaux collectifs dans l'expérience, et qui montreront que ce mode de recherches ne doit pas être resserré plus. longtemps dans les limites des mers. » L'avantage d’evoir à terre des météorologistes, pour coopérer avec les navigateurs dont la conférence récla- mait l'appui, est maintenant rendu si évident, que tout progrès ultérieur de la science météorologique demande absolument que ce système s’étende à la terre. La note suivante a pour but de démontrer brièvement un ou deux des grands problèmes sur lesquels nous avons appelé l’at- tention des marins, de ces problèmes qui se rapportent à l'atmosphère entière et qui ne peuvent être résolus qu’à l’aide d'observations correspondantes faites sur les conti- nents. » _« La Conférence maritime de Bruxelles de 1855 a re- commandé que le programme de recherches physiques proposées sur mer, s’étendit de manière à comprendre aussi les observations sur terre. Depuis cette époque, les mers ont été traversées par des milliers d’observateurs qui, agissant expérimentalement et de concert, ont prouvé la sagesse de cette recommandation. Je rappellerai quelques (418 ) faits, quelques conséquences acquises pendant le cours de ces recherches et qui tendent à prouver que cette exten- sion est absolument nécessaire pour la discussion ulté- rieure de problèmes, dont la solution est d’une grande importance pour le commerce, la navigation et en général pour tous les intérêts des peuples. » En partant de ce principe que, pour ce qui regarde le mouvement général de l'atmosphère, nous avons sur mer la règle et sur terre les exceptions, j'ai entrepris, avec l'assistance de mes collègues, de déterminer ce mouvement général par les observations faites sur mer. » Notre globe a été séparé par zones ou ceintures de 5 degrés de largeur s'étendant, de l’un et de l’autre côté de l’équateur, jusqu’au parallèle de 60 degrés. Au delà de ces limites, les observations sont peu nombreuses et en nombre insuffisant pour en déduire des résultats utiles. En comptant de l'équateur jusqu’au 5"° degré, depuis le parallèle de 5 degrés jusqu’à celui de 10 degrés, et ainsi de suite, il semble que nous avons assez d'observations pour 12 des 18 zones que l’on compte de chacun des côtés de l’équateur. » Dans ces limites, les cartes de pilote nous donnent 4,252,904 observations sur la direction du vent en mer; chaque observation embrasse une période de 8 heures et fournit la direction dominante du vent pendant cet inter- valle. Nous déduisons de ces données le tableau suivant, qui montre la direction et la durée moyenne annuelle du vent pour chacune des zones de 5 degrés qui s’y trouvent indiquées. Ce tableau est construit d’après 1,159,5535 ob- servations seulement du grand total de 1,232,904 que nous avons mentionné plus haut. 299 °S 06 “AI 9P tOMaUNb eus ‘A EN NP dornaenpb ,.} ‘S9LUL9 SANOf ‘9 , h ‘0 6 LLY 80} YG LY °) 07 88 17} CL LA ‘+ sanof | LY9'£Y ‘N°0 l'OS 'S |'S OS | H'N | YL8'LI °N 68 ‘O | ‘O 27 ‘S ! ‘S 87 ‘A | ‘A 07 ‘'N [009808 9{ 8 © )9 Sc} CG} 8 a ‘D Y1 6 SGH SL Ye ° + sanof | RS o8s#r | °N 1% ‘O l'O 98 *S | °S 19 ‘a L''a ge N À ozs‘ir | *N 8e ‘O0 | ‘O 87 *S | ‘S 87 ‘4 | ‘EH 87 ‘N [of To0$ 20} )8 LA OFF ec gg ‘7 6} LOT CGI 99 LG * * sanof || &£ 168 °N 67 ‘O | 'O SS TS | S 77 ‘A | ASE N 19%°6 *No% ‘O | ‘O L7 'S | ‘S 9% ‘A | ‘A 77 ‘N [006% 087 9 || ‘D 8 OST SG} 0€ os ‘D 91 YOr SIT 89 &9 ° * sanof || 699‘29 °N £7 ‘O | ‘O0 'S l'S IS "A |‘ HYS 'N AT °N 17 ‘O | ‘O 7 'S | ‘S L? “A | “A 7 ‘NN |087 6007 °Q | ‘) 6 CG} Yo 2 ga ‘9 Sr 06 Tr 89 cs * * sanof ICS LOY | °N 6% ‘O | ‘O #7 S | "S 8% ‘a | ‘AH 6S ‘N | £es ir N #7 Oo | 0% S | 'S 08 ‘A | ‘A G7 ‘N |007 F 0QC 0 | 7 68 907 86 89 ‘) ST 79 96 66 6 °° sanof || Y2G 94 N #r "O0 | ‘O 77 'S |°S 87 ‘A | ‘HA 77 'N | 719‘c9 °N #7 °O l'O LS 'S | 'S SF "A | ‘A LY 'N |oQC e 00€ 9Q +7) OI sy L9 1%1 66 *7) LI SG 79 66 Ye * * sinof 7 g£9‘99 °N 08 ‘O |-‘O 88 ‘S | *S 7% “a | ‘HA VS ‘N | LLL‘89 °N 87 ‘O | ‘O 1% 'S |'S LS ‘A | ‘HIS °N |00€ P 0GG 0 e ‘9 0 66 82 631 66 ‘D SE 6€ cG 18 LOG + + sanof || es c6£‘99 °N 38 ‘O | "O 92 *S |'S 77 ‘HE | ‘HS 'N LG‘ YY °N GS ‘O | ‘O0 GS |-'S GS ‘A | ‘HA VS ‘N |0S8 E 006 0( ee 8 A GG YVG YL T) Er 68 to 69 YNG * + sanof #09-97 | :N 68 ‘O | “O #2 "S | *S 8£ ‘Æ | “A 09 *N | scor'ce °N# ‘O l'O 7 'S | ‘S SG ‘A | “HI LS ‘N [008 v0S 90 |] ed ‘9 6 81 CG rasta 79 ‘D #h £& dd LES | sgc ** sanof || L18‘Cr :N 08 ‘O | ‘Oo 8 'S | ‘S 07 “x | ‘H 68 ‘N | 6cc‘25 °N 6% ‘O | ‘O 7 'S | 'S LG ‘A | ‘H LS ‘N loSF Vo0t ol . ‘n 07 LG ge CG cy *7) #6 6} OL Cry 6£F + + sanog || — | 879°8ç °N Gr ‘O | ‘0 2 'S | 'S 82 ‘H | ‘HIS 'N 1#8°9c NS ‘O l'OS 'S | 'S LY ‘A | ‘A LS 'N 001 POS 2) M | , "9 6} ce Ly ddd 08 » ‘D 8 GI 69 661 L9 *: smof | = CY6‘GL °No8v'O | ‘O082'S | *Socr ‘A | ‘HoSL'N | 65810 °N 088 ‘O | ‘O0LG'S | *SoLy ‘H | ‘HoSS'N lo E 00 2 - » " ; [ea | | D -NrS “xoraenb 9 *xonmaenb oug | “tonaenb oug | ‘dorqaenb Cas *391400b où | “T0H40Nb me | “Len D ou “aoraenb 0} AaNOZ E QE 41 E a a = 5 wi ‘ans *‘ŒNON è (ec). ‘sa09 sp anod opp {unof ua oouradro stansonb sowgu sa7 anod juan np o79nuuv quuoñouw 994mp 19 ‘aouuonb anbnyo 4n0d quan np ouuañow uoroourp ‘ouoz 2nbDy9 SUDP SUOLDALISQO D 10307 SAQUON] SAWIVI LA SENTA — V AVAIAVL ( 420 ) .» d’ai exclu les observations faites dans l'océan Indien .du nord, dans la mer de Chine et dans les Indes occiden- tales, parce que les vents, comme c’est le cas pour les moussons, présentent dans ces mers des exceptions bien connues aux mouvements généraux de l'atmosphère. » Les observations faites dans ces trois régions des mers s'élèvent au chiffre restant de 73,551; c’est depot elles qu on à construit le tableau suivant : TABLEAU B. — Vents et calmes dans l’océan Indien du nord, la mer de Chine et les Indes occidentales. | | NOMBR 4er quartier. | 2e quartier. | 3e quartier. | 4° quartier. NÉRREE FRERES De 0° à 50 N. | N. 550 E. | . 51° S. | S. 400 O. | O. 41° N. 13,203 Jours . .. 94 72 126 107 16 C.* De 5°a100N. | N. 44 E. . 45 S, S. 46 O. | O0. 58 N. 13,515 Jours . . . 118": 48 137 52 10 C. De100à150N. | N. 51 E. . 36 S. S. 47 O. | O. 43 N. 13,360 JOUTS a", 174 67 82 33 9 C. De150a200N. | N. 50 E. SD: . 39 O. | O0. 54 N°. 15,783 Jours ... | 167 80 33 9 C. De200à25°N.| N. 47 E. . 40 S. L , . 60 N. 9,856 Jours . .. 158 79 41 13 C. De250a300N.| N. 44 E. . 45 S. è j . HN. 9,635 JOHrS 0e 158 75 59 11 C. * C. Jours calmes. » La direction du vent sur mer pendant la période d’une observation (8 heures), est donnée par estimation, tantôt avec et tantôt sans égard à la déviation de la girouette, qui résulte de la combinaison des deux forces, la marche du vaisseau et la vitesse du vent. Jamais la direction du _ ti Se EE à id x ( 421 ) vent n’est donnée sur la carte des pilotes pour des cours différant entre eux de moins d’un intervalle de la rose ges vents, ou 22 50’, mais ces sources d'erreurs sont élimi- nées en quelque sorte par le nombre des observations in- dividuelles et par leur groupement par quartiers. La fig. 1 est construite d’après le tableau À, en ce qui concerne la prédominance du vent. Les flèches à l'intérieur du cercle, par leur position , indiquent la direction, et par leur lon- gueur, la moyenne annuelle de la durée, en mois, des vents dans chacune des douze zones boréales et australes. Les vents prédominants, dans chacune de ces zones, sont représentés par des flèches entièrement empennées; ceux qui s'en rapprochent le plus, par des flèches empennées d'un seul côté, et les moins fréquents par des flèches à moilié barbelées. Dans certaines zones, vers les calmes du Cancer et du Capricorne, les vents nord-ouest et sud-ouest sont également prédominants; dans ce cas, ils sont repré- sentés l’un et l’autre par des flèches entièrement empen- nées. Les vents dont la durée moyenne annuelle ne s'élève pas à un mois ne sont pas indiqués. » Le profil de l'atmosphère, représenté par le pointil- lage, est construit d’après plus de 100,000 observations barométriques. Plus de 90,000 ont été faites en mer et le reste dans les observatoires avoisinant la mer, tels que Hobart-Town, Greenwich et Saint-Pétersbourg. Je dois a mon collègue, le lieutenant Andrau (1), de la marine hollandaise, 83,334 observations faites en mer. Elles (1) Maandelijksche zeilaanwijzingen van Java naar het Kanaal.— Als uwitkhomsien van wetenschap en ervaring aangaande winden en zeestroomingen in sommige gedeelten van den Oceaan, uilgegeven door het khoninklijk nederlandsch meteorologische Instituut. Utrecht, L. E. Bosch en Zoon; 1859. ( 422 ) s'étendent depuis le 50" degré de latitude N. jusqu’au 36"° de latitude S., et sont réduites à 0 degré de température. » L’abaissement du baromètre au cap Horn a beaucoup préoccupé les météorologistes, et embarrassé les naviga- teurs. Et comme mes amis, les navigateurs hollandais, ont produit une très-grande masse d'observations pour les lati- tudes les plus septentrionales, j'ai résolu immédiatement d'examiner leurs livres de loch (ou journal de navigation) pour les observations recueillies dans la région polaire au delà du 40° degré de latitude méridionale, et d'étendre ainsi la série vers le Sud aussi loin que vont ordinairement les vaisseaux, en comprenant toute la circonférence du globe. » Afin de reconnaître si l’abaissement barométrique des régions australes se borne à certaines longitudes seulement, la calotte terrestre au sud du 40° degré austral a été di- visée en trois segments et a présenté les résultats suivants : TagreAu C. — Moyenne des observations barométriques. Près Du 200 O0. à | Du1400E. à ENTRE LE CAP HORN. 1400 E. 800 O. | us © | —— | total NOMBRE ;. MOYENKE MOYENNE MOYENNE |! d’obser- les parallèles NOMBRE NOMBRE : en en en » ç 8 » s pouces. |d’obser®.| Louces. | d'obser*.| bonces. vations. De 400 et 43° 43 et 45 45 et 48 48 et 50 50 et 55 53 et 55 377 55et au delà 1. | 1,055 1 Ou à la latitude moyenne de 56°,8. (423 ) » Ces observations ne sont pas corrigées pour la tempé- rature, parce que les données manquent entièrement. Cette correction abaisserait encore, au sud du 40° degré austral, la hauteur moyenne du baromètre. Ce tableau prouve que la dépression atmosphérique ne se borne pas au voisinage du cap Horn, mais que ce même phénomène se produit tout autour de la terre sous un parallèle déterminé. » En prenant la moyenne de ces observations, celles du docteur Kane, dans l'océan Arctique, et celles des vaisseaux hollandais, et en faisant usage de la méthode graphique, la courbe barométrique du pôle nord au pôle sud se projette sur le canevas, comme elle est représentée dans la fig. 2. TagLeau D. — Vents avec composante nord ou sud. Hémisphère nord. Hémisphère sud. TT NOMBRE NOMBRE ë EXCES NOMBRE | de jours du NOMBRE | de jours du INTER- À! A LLES. A OS a... ER. 0. di. d’observ. d’observ. | nord. | sud, | nord.| sud. nord. | sud. | nord. | sud. 67,829 9 12,945 36,841 | 158 |: 3 | 54,648 27,339 45,817 33,103 | 46,604 44,527 66,395 68,777 16 66,635 62,514 76,254 41,233 ÿ [107,251 53,252 | 25 | 63,669 29,461 25 | 29,152 41,570 e 14,286 17,874 | 14: 13,617 » Dans le tableau précédent D, pour condenser les ( 424 ) données, les vents des quatre quartiers ont été groupés en vents du nord ou vents du sud : il montre la durée moyenne en jours pour chaque zone. » La figure 3 repro- duit ce tableau par la méthode graphique. , Puisque sur mer nous devons nous attendre à trouver la règle et sur terre l’exception en ce qui concerne la dyna- mique de l'air, nous pouvons nous attendre aussi à ce que les lois générales de la circulation atmosphérique soient plus clairement exprimées dans l’hémisphère austral que dans l’hémisphère boréal. Tournons, par conséquent, un moment notre attention exclusivement vers l’hémisphère sud. Fr » Nous observons que là les vents polaires et équato- riaux se balancent mutuellement entre les parallèles de 55° et de 40° S. Voyez le tableau D et la fig. 3. Supposons que ces vents soufilent avec la même force et font mou- voir de mêmes volumes d'air, dans un temps donné, nous oblenons une barrière atmosphérique, une ceinture qui eutoure la terre et que ne peuvent franchir les vents de surface (1); car si un vent polaire traverse de temps à autre cette barrière, un vent équatorial le repousse 1mmédiate- ment. Cette ceinture coïncide avec la zone calme du Ca- pricorne. En nous éloignant d’elle et en nous rapprochant du pôle, les vents polaires deviennent de plus en plus do- minants; lorsque nous nous rapprochons au contraire de l'équateur , les vents dominants de cette zone deviennent de plus en plus fréquents. Cela est si remarquable que, pendant que nous nous éloignons de celte ceinture moyenne, nous voyons les vents équatoriaux d’un côté et oo —— (1) Vents de surface par opposition aux courants supérieurs. D ( 425 ) les vents polaires de l'autre (fig. 3) s’accroiître de proche en proche et presque à pas égaux. » Maintenant, que l’on peut admettre comme une loi météorologique que le vent de surface souffle toujours du lieu où &e trouve une accumulation d’air vers celui où l'air est plus rare, en d’autres termes, d’une pression baromé- trique élevée vers une pression barométrique. moindre, nous observons que les vents nous indiquent une dépres- sion atmosphérique dans les régions antarctiques, une dé- pression plus grande qu’à l'équateur ; ce qui doit être, sinon cette barrière des vents ou ceinture calme du Capri- corne, au lieu de se trouver plus près de l'équateur, serait à la moyenne distance entre la moindre pression baromé- trique de l'équateur d’une part et la même pression au pôle de l’autre. Mais, au lieu de cela, le courant, pour rem- placer la raréfaction polaire, s’étend à 50 degrés autour du pôle, tandis que le courant pour remplacer la raréfac- tion équatoriale, ne s'étend pas à plus de 35 degrés. Tel est le langage par lequel les vents révèlent une faible hau- teur barométrique au pôle austral. Ce résultat est rendu sensible par les figures 1 et 2. » L’abaissement du baromètre vers le pôle antarctique est établi d’une manière décisive. Sir James Clark Ross l’a observé à 60, 66 et 74 degrés sud. Si nous projetons la courbe entre les points R au pôle sud (fig. 2), elle don- nera une hauteur moyenne du baromètre inférieure envi- ron d'un pouce à la pression vers le nord. Les détermina- tions de sir James Ross ont été faites sur un seul vaisseau et ne comprennent qu'un petit nombre de jours. Celles qui ont servi à prolonger la courbe jusqu’au pôle, ont été faites sur plusieurs vaisseaux et sont elles-mêmes les movennes de quelques milliers d'observations. Soit que ( 426 ) nous donnions plus de poids à l’inconnue résultant de ces dernières déterminations, soit que nous les combinions avec celles de Ross, il est évident qu’il y a une grande raréfaction d'air au-dessus du continent antarcfique, assez grande pour abaisser la moyenne du baromètre considé- rablement au-dessous de 29 pouces. » Comment nous expliquer ce phénomène, à moins de nous appuyer sur la théorie de la chaleur latente de la vapeur fournie par les mers environnantes du Sud au delà du tropique; cette vapeur précipitée au lieu où les vents ré- guliers du pôle cessent de souffler laisse libre le calorique; celui-ci échauffe l'air, lui donne l'expansion et l’amène à souffler en arrière comme un courant supérieur, et à lais- ser ainsi après lui une pression barométrique peu élevée. Si nous adoptons cette théorie, ne devons-nous pas la pour- suivre et admettre que, contrairement à l'opinion reçue, les climats circompolaires antarctiques, au lieu d’être plus rigoureux que ceux des régions arcliques, sont comparati- vement plus tempérés ? » Les tableaux et figures montrent que la position des zones calmes des tropiques est déterminée par le degré de raréfaction au-dessus des régions calmes polaires, comparées au degré de raréfaction de la zone calme de l'équateur. Les calmes tropicaux sont pour ainsi dire la résultante de la raréfaction aux pôles et à l'équateur. Sup- posons qu’en vertu d’une cause quelconque, la pression barométrique de la zone calme à l’équateur, au lieu d’être de 29r,95, soit réduite à 27,95, tandis que celle des calmes polaires reste constante; il est évident que la région des courants équaloriaux serait considérablement élargie, et conséquemment que les lignes moyennes entre les calmes des pôles et de l'équateur seraient reculées vers les pôles. ( 427 ) En d’autres termes, les zones calmes des tropiques se rap- procheraient des pôles. » Le tableau D nous indique que les vents de la zone équatoriale augmentent en durée à mesure qu'ils appro- chent de l’équateur, et d’autres résultats (1) montrent qu'ils croissent aussi en vitesse; ainsi, dans les zones de 40 à 35 degrés, de 55 à 50 degrés, de 30 à 25 degrés, de 25 à 20 degrés, de 20 à 15 degrés, de 15 à 10 degrés, de 10 à > degrés sud, les vents équatoriaux sont en excès sur les vents de la région polaire respectivement dans l’ordre de leurs zones de 0, 54, 61, 99, 175, 195 et 211 jours. Il est, par conséquent, démontré qu’en approchant de l'équateur, les vents alizés sont renforcés par des masses que fournissent les courants supérieurs. Il paraît, de plus, d’après les déterminations baromé- triques du lieutenant Andrau, que Ja pression moyenne de l’air est de 0,06 de pouce plus grande entre l’équateur et 25 degrés sud qu’éntre l'équateur et 25 degrés nord. Mes propres observations (2) montrent une différence de 0,05 de pouce, également du côté des alizés du sud-est; mais comme cette détermination ne résulte que de 1981 mesures et celle d’'Andrau de 22,917, la différence de 0,06 _ de pouce semble avoir une plus grande valeur. Une difié- rence barométrique de 0,06 de pouce équivaut, en nombre rond , à une pression de 4,5 livres par pied carré. C’est ce surcroît de pression qui rend les vents alizés du sud-est plus forts que les alizés du nord-est. Ces deux vents passent d'une plus grande à une moindre pression , et la différence de 4,5 livres par pied carré suffit pour rendre compte de la (1) Vautical monograph n° 1. (2) Sixth Ed. Maury’s Sailing direction , 1854, p. 692. (498 ) position de la zone calme équatoriale, aussi bien que de la vitesse plus grande des vents alisés du sud-est. Cette zone calme étant la résultante dynamique de ces deux vents, ceux-ci la maintiennent dans sa position au nord de l’équateur. La chaleur latente, rendue libre par la con- densation de la pluie qui en résulte, détermine de même la position de l'équateur thermal. L’amiral Chabannes, commandant de la flotte française sur la côte du Brésil, a promis obligeamment de déterminer la différence de vitesse des deux systèmes de vents alizés par des mesures positives. D’après la rapidité moyenne des vaisseaux pen- dant qu'ils naviguent sous l’un ou l’autre vent, j'estime que la vitesse moyenne du vent sud-est est de 25 à 30 milles par heure, et celle du nord-est de 15 à 18 seulement (1). » En étendant un peu la méthode de représenter par des ordonnées et des abscisses la différence de pression barométrique pour des latitudes différentes et en se servant des nombreuses observations du lieutenant Andrau entre 30 degrés nord et l’équateur, nous obtenons, pour les vents alizés du nord-est, une courbe T (fig. 4), que j’ai eru pouvoir nommer la déclivité barométrique des vents; cette déclivité est d’un centième de pouce de pression barométrique pour un degré de latitude. » Quant à la mousson nord-est de l’océan Indien, c'est simplement le passage des vents alizés nord-est de cette mer, allant rejoindre, comme dans les autres mers, les vents alizés sud-est dans la zone calme de l'équateur. L’in- fluence des agents météorologiques exerçant leur action, durant le printemps et l'été, dans l’intérieur de l'Asie, y produit, sans doute, une raréfaction plus grande que dans (1) Physical geography of the sea. ( 429 ) la zone de calme équatorial. Ceci admis, les vents alizés sud-est arrivant en été dans la région de plus basse pres- sion équatoriale, y ressentent l'influence d’une dépression barométrique plus grande encore vers le nord; et ainsi, au lieu de s'arrêter, pour former un calme équatorial, ces vents passent outre (1), s’'inclinent au nord et deviennent, par suite de la déclivité M (fig. 4), la mousson sud-ouest de l'océan Indien. » Ainsi l’exigerait du moins la loi météorologique, qui veut que les vents aillent du lieu de plus forte pression vers le lieu où elle est moindre. Afin de déterminer la déclivité barométrique de la mousson sud-ouest, j'ai pris la hauteur moyenne du baromètre qui a été bien déter- minée à Madras, Bombay et Calcutta, aux latitudes diffé- rentes de 15° 4, 18° 54! et 22° 34! nord, par le docteur Buist et le colonel Sykes (2), pendant la mousson sud- ouest, et par ce moyen, j'ai obtenu la courbe M (fig. 4) qui montre la déclivité barométrique de la mousson sud- ouest; elle est d'environ 0,05 de pouce par trois degrés de latitude, et elle indique, ce que l'observation prouve, que la mousson sud-ouest est plus forte que la mousson nord-est. » Nous avons obtenu de cette manière les indices d’une pression barométrique moindre dans le nord de l'Inde ou dans son voisinage pendant la mousson sud-ouest. » D’après ces déductions barométriques, les vents po- laires du sud extratropical seraient beaucoup plus forts, leur déclivité barométrique étant d'environ 0,04 de pouce (1) Carte de la mousson de l’océan Indien. Observatoire de Washing- ton, 1860. (2) Philosophical Transactions, 1850, 2"e partie. ( 450 ) par degré de latitude (fig. 2), que les vents polaires du nord extratropical, dont la déclivité ne dépasse pas 0,01 de pouce par degré de latitude. L'expérience des marins et la vitesse moyenne des vaisseaux confirment pleinement le résultat des observations. » On constate donc en mer dans les plus grandes pro- portions, la suprématie de la même loi physique qu'on observe partout ailleurs dans les plus petites proportions. L’air qui alimente la flamme d’un foyer, quand il afflue du point où il est le plus dense vers le point où 1l est le plus rarélié, ne fait qu’obéir à la même loi que celle qui déter- mine les moussons. » [l existe, par conséquent, une relation physique entre la hauteur du baromètre, en avançant d'un parallèle à l’autre, et les vents quand ils soufflent au travers de ces mêmes parallèles; cette relation, dans certaines latitudes sur mer, est clairement exprimée par les vents alizés comme par les moussons. Nous n'avons plus à conjecturer si la même relation entre les différences de pression et le vent existent sur terre comme sur mer, Car le professeur Buys- Ballot, d'Utrecht, m'informe qu'il a découvert la relation numérique entre le vent et la différence simultanée de la pression barométrique dans certaines localités de la Hollande. Elle est si exacte et si invariable que, pendant les deux dernières années, elle lui a permis d'annoncer d'avance, dans toutes les circonstances, la force et la di- rection du coup de vent qui s’approchait (1). (1) « La relation numérique qui existe entre la différence des hauteurs » simultanées et la force du vent s’est confirmée pendant les deux dernières » années, et la direction est (a été) prédite sans exception. » (Lettre de M. le professeur Balloi, 14 février 1860.) ( 451 ) » Ce qu'il à fait pour la Hollande peut être fait pour d’autres contrées. Les ouragans marchent lentement rela- tivement aux messages télégraphiques, et plus la région pour laquelle ces relations barométriques peuvent être établies serait grande, plus avantageuse serait leur décou- verte; car elles permettraient au savant de donner ses aver- tissements d'autant plus longtemps à l’avance. . » Les télégraphes électriques, étant mis ainsi en con- nexion avec nos recherches sur les vents en mer, devien- draient des instruments météorologiques d’une grande importance, d’un pouvoir immense et d’une valeur incal- culable. Par des conventions spéciales et avec la coopéra- tion des nations qui ont adopté le programme de la Confé- rence maritime de Bruxelles, il est maintenant au pouvoir de la science, âidée par les télégraphes, d'établir partout, le long des côtes et loin à l’intérieur des continents, des sentinelles qui nous avertiraient d'avance de l’arrivée des grands ouragans. On sait qu’on est parvenu à annoncer, au moyen du télégraphe, la tempête qui a éclaté sur la mer Noire en 1854. L'orage d'octobre dernier, qui fit périr, dans la Manche, le Royal Charter et occasionna tant de désastres le long des côtes de France et d'Angleterre, montre ce qu'aurait pu faire un avertissement télégra- phique de son approche. » Les vagues de la mer avertissent souvent le pêcheur et » le cabotier de l'approche des tempêtes. « Près des côtes » (de l'Inde), les tempêtes sont annoncées environ 12 » heures avant de se manifester (1). » Si les vagues peuvent (1) Capitain Becher, royal navy. — Sailing directions for the Atlantic and Indian Oceans, p. 54. sil ( 432 ) faire cela pour la mer, que ne feraient pas, à la fois pour la terre et pour la mer, le fil et l’étincelle électriques? Il est done inutile d’insister davantage sur une proposition qui est d’une importance aussi évidente pour les intérêts indus- triels et commerciaux de tous les peuples qui ont adopté les télégraphes. Il en a été dit assez pour prouver que ceux qui étudient les vents en mer, pour le perfectionnement de la navigation, doivent demander également des obser- vations sur terre. » Dans le cours de mes recherches ici, j'ai signalé étant en mer, par leur action sur l’eau, plusieurs des causes qui influencent les vents sur terre, et réciproquement par leur action sur terre, celles qui empêchaient la navigation à la mer. Maintenant quand nos observateurs arrivent au port leur tâche est finie : il n’existe aucune coopération sur le continent, ettoute investigation ultérieure est abandonnée. Les nations qui ont établi des bureaux et chargé spé- cialement des officiers de coopérer à ce système de recherches sont la France, la Hollande, l'Angleterre, l'Es- pagne, le Portugal, la Russie, la Suède et la Norwége. Celles qui ont coopéré à l’aide de leur marine comme ob- servateurs et collaborateurs, sont les États italiens, la Belgique, l'Autriche, la république de Brême, la Prusse, le Danemark, le Chili et le Brésil. Je suis persuadé que dans toutes ces contrées mes col- lègues concourront avec moi, tant dans l'intérêt de la science que de l’industrie, à agrandir le cercle de nos ob- servations, à étendre les recherches sur terre et à rendre ainsi ce système universel. ME AS Cu olatres. a : F, 52 AUCOU " et il DE IL ë 7 # A aliiés du WE) 75 2 Verts D < ET Le PRO Les Rs RE SUE FE eg É 7, er Te PE FE RENE EN ARR . À AS ï S _ AS Er : “és ré À Es vf: = ; ; , . j f L ES Ë ; ee … e ë # . Ÿ , É “ à "Aa : | «+ à & 7 . ; - PE = \ En f > + s 2 ; 5 æ < à n É : : L î Y 4 j 5e ; e 2e 7 : É re EX - ë He : * » L'Hyi-e r e & : » LA 2 « +- . | Ro Ve ie s - é = b - £ £ ÿ C ; + L LA »- La x : k ° x ; | RARES er «dd = L à à :. ” < _—… _ + em. DES _ mn = ", à. - #, à ons F , et ù PT. 217 PAOY ep arms annee ee de Fe En + —} EU PAOI PAT BAND AUDIT .. -Figure IT: Barometre. RADNINIDNNTNT ADN e- LE. DD S'USÉERTEASSESRERL'E SW El Le — —— —| 11 — Es ELA EEE LE ES Beer SESSENeNsAFURSeRnBuU LE RE & 4 N K LS ENEFTES LCR AT Parometre.. Paralleles de Latitude. Sa7 407 NB= Vers du Nord dans l'hémasphere Boréal. D ZE — — CB = Carre. = er — NA - Verés du Vord _ = Austral. SA=— - Sud — nr — CAE Creer a —— — (433) PHÉNOMÈNES MÉTÉOROLOGIQUES. Aurore boréale. — M. Quetelet fait connaître que, le 9 avril dernier, entre 9 et 10 heures du soir, son fils a observé une belle aurore boréale qui s’étendait, comme d'ordinaire, du nord-nord-ouest vers le zénith : les jets lumineux étaient assez intenses et se projetaient dans le ciel à intervalles rapprochés. On a appris depuis que le même phénomène a été vu dans différents pays. À 9 heures, le nord était blanchâtre; plus tard, les jets lumineux passaient du blanc au rose-rouge; le fond était couvert et sombre; vers 11 heures, le ciel s’est entière- ment couvert, et 1l est tombé de la pluie. Déjà, vers 3 heures de l’après-midi, il s'était manifesté une perturbation assez marquée dans les instruments magnétiques : les valeurs en seront données dans les An- nales de l'Observatoire de Bruxelles. Magnétisme terrestre. — Les éléments magnétiques ab- solus ont été déterminés par M. Ernest Quetelet à la fin de mars et au commencement d'avril. Les observations ont été faites, comme d'ordinaire, dans le jardin de l’Observa- toire, et, à l'exception de la petite variation annuelle, elles n’ont rien présenté de particulier. Elles seront consignées avec les autres observations magnétiques que M. Ernest Quetelet a déjà recueillies à Paris, à Marseille et à Naples, ainsi qu'avec celles qu’il se propose de recueillir en Grèce. Halo lunaire. — Le G avril dernier, vers 10 h. ‘ du soir, par un ciel serein mais légèrement opalin, la lune, à son 15° jour, se montrait entourée d’un halo double. Ce phénomène, bien qu’assez fréquent, présentait quelques circonstances qui méritent d’être notées. (434 ) Le cerele vertical intérieur, ou halo ordinaire, était très- distinct dans sa moitié supérieure, c’est-à-dire jusqu’à son intersection avec le cercle horizontal ou parasélénique passant par la lune. Aux deux points d’intersection se dessinaient assez nettement deux parasélènes avec prolon- gements brillants et irisés en forme de queue, dont la di- rection extérieure coincidait avec celle du cercle hori- zontal. [1 n’y avait pas de trace d'arc tangent au sommet du halo ordinaire. | | Le grand cercle vertical extérieur, ou halo extraordi- naire, ne montrait également que sa moilié supérieure, et son intensité lumineuse était beaucoup moindre que celle du cercle intérieur; les extrémités du demi-cercle, surtout celle à l’ouest, n’atteignaient même pas les prolongements brillants des parasélènes. Au sommet se dessinait très- distinctement l'arc tangent circumzénithal externe, pré- sentant les teintes brillantes du spectre. La lune elle-même offrait, au centre des je halos, une apparence assez rare (1) : elle se montrait au milieu d'une croix lumineuse d’un blanc jaunâtre; une bande perpendiculaire à l'horizon, formait, avec une portion du cercle horizontal, les quatre branches de la croix en forme de pinceaux ou flammes. Nous rappellerons, à ce propos, une autre obsetéa ai ; dans la soirée du 3 mars dernier, il était tombé une pluie abondante de 7 à 8 !}2 heures environ; vers 9 heures, un halo ordinaire se dessinait dans le léger voile de vapeur (1) Kæmtz dit : « … Il est plus rare de voir une bande au-dessous du soleil ou de la lune, plus rarement encore un arc horizontal passe par le soleil, de manière que cet astre se trouve au milieu d’une croix. » Page 455 du Cours complet de météorologie, traduit par Ch. Martins. Paris, 1845. ( 455 ) qui couvrait les régions supérieures de l'atmosphère, tandis qu'une belle couronne lunaire se formait simulta- nément dans les vapeurs légères qui flottaient dans les ré- gions inférieures. Cette observation confirme une assertion de Kæmtz (1) : bien que certains auteurs assurent avoir vu en même temps des halos et des couronnes, cette coexistence, d'après ses propres observations, est bien rare, et les deux phénomènes sont distincts : la disposition des nuages n’est pas la même dans les deux cas, les couronnes se montrent au milieu des cumulus, les halos dans les cirrus. COMMUNICATIONS. M. le Ministre de l’intérieur ayant témoigné le désir d'obtenir une notice propre à constater l’eflicacité des paratonnerres et à dissiper les préjugés populaires qui subsistent encore à ce sujet, M. Duprez a bien voulu se charger de rédiger la notice nécessaire et l’a déposée sur le bureau. M. le secrétaire perpétuel est chargé de trans- mettre ce document à M. le Ministre de l'intérieur. — M. J.-S. Stas dépose une note qui constate le ré- sultat de certaines expériences chimiques, et se réserve de faire connaître plus tard les découvertes importantes qu’il a faites. Cette note est contre-signée par le directeur et par le secrétaire perpétuel de la classe. (1) Page 431 de l'ouvrage cité. Qme SÉRIE, TOME IX. oi (436) Sur des ossements fossiles découverts à Lierre, le 28 février 1860; par M. François Scohy, médecin de bataillon dans l’armée belge, docteur en sciences. Le 28 février 1860, vers G heures du soir, des ouvriers travaillant au creusement du canal de dérivation de la Nèthe, à Lierre, trouvèrent, entre la porte d'Anvers et celle de Malines, à 150 mètres de cette dernière, un wvé- ritable nid d’ossements. L’inattendu de la découverte et l'obscurité qui commençait à se faire dans les travaux firent que, d’abord, on enleva et jeta plusieurs pièces avec les terres du déblai. Mais bientôt on mit à nu de nouvelles pièces que les ouvriers eux-mêmes reconnurent pour des os, malgré leurs dimensions extraordinaires. A dater de ce moment, l'attention des plus indifférents fut éveillée : on remua les terres avec plus de prudence, et on en extraya successivement tout ce que nous avons vu. Parmi ces pièces, les unes ont une très-grande valeur paléontologique, ce sont celles qui suffisent pour déter- miner le genre et même l'espèce des animaux auxquels elles ont appartenu : telles sont, par exemple, les dents; les autres n’ont qu'une importance moins grande, parce qu’elles ne font, pour ainsi dire, que compléter et confir- mer les indications fournies par les premières : tels sont les fragments d’os des membres, du bassin, du crâne, ete. C’est dans cet ordre que nous les étudierons. SECTION le. — Des dents. 1° Quatre dents noires, extrêmement volumineuses et ( 457 ) pesantes, appellent d'abord l'attention. Elles sont à peu près exactement semblables deux à deux. | Les deux plus petites d'entre elles ont la couronne très- aplatie, elliptique, allongée. Le corps de la dent semble se composer de lames verticales, dont les soudures sont indiquées, d’ailleurs, par de légers sillons sur les grandes faces latérales. Cliacune de ces lames est formée d’une galette de cément revêtue d'une lamelle d’émail à stries longitudinales. La surface triturante figure de la sorte une plaque de cément parcourue en travers par des filets d'émail en petit relief, qui s’anastomosent deux à deux près des bords alvéolaires. Ces filets, vus de près, offrent de petits festons correspondant aux stries longitudinales de la lamelle d'émail que ces filets terminent. Dans la moitié antérieure de cette surface triturante, le filet d'émail est continu; il se replie sur lui-même en anses allongées de chaque côté de la ligne médiane. Près de l’un des petits bords se trouvent huit petites faces de cément entourées d'émail très-usé, et disposées à peu près comme les pa- pilles de la base de la langue chez l'homme. L’usure de toute cette partie de la couronne annonce qu’elle a servi beaucoup à la trituration. Ces deux dents ont chacune quinze à vingt racines évidentes, conoïdes, de longueur inégale. Les deux autres dents, plus grossières , sont formées de lames verticales très-distinctes, ayant presque la forme et l'épaisseur de grosses semelles. Elles n’ont pas de racines. Leur surface trilurante est disposée de telle façon que la moitié antérieure seule pouvait utilement servir à broyer les aliments, la moitié postérieure reposant sur un plan oblique et déprimé. Les filets d'émail y figurent encore dans leurs contours des ovales transverses à bords sensi- (438 ) blement parallèles. Quelques-uns de ces ovales sont légè- rement dilatés vers leur centre. On peut comparer toutes ces dents à des prismes rec- tangulaires obliques, à arêtes obtuses, ayant environ 415 à 17 centimètres de haut, 8 à 10 de large et 16 à 18 de long. Les deux molaires à racines paraissent formées cha- cune par la soudure d’une quinzaine de plaques verticales; elles pèsent chacune deux kilogrammes. Les molaires sans racines ont, l’une 21, l'autre 24 de ces plaques, appli- quées les unes sur les autres comme des ressorts de voi- ture, et pèsent chacune environ 5 kilogrammes. Ce sont donc les deux premières et les deux dernières mâchelières de l’Elephas mammouteus (Cuvier) ou Elephas primigenius (Blum... | % Un cône tronqué, extrêmement dur et plein, long de 45 centimètres, arrondi et courbé en arc. Les deux extrémités sont brisées et mesurent, l’une 6, l’autre 4 1}2 centimètres de diamètre. Du côté de la grosse extré- mité se trouve un creux médullaire en entonnoir, de 4 centimètres de profondeur, et sur les parois duquel on voit manifestement que la pièce tout entière est formée de feuillets concentriques. Une portion de la surface de cassure montre, près du petit bout, les arcades celluleuses caractéristiques de l’ivoire. Prolongé jusqu’à sa terminaison en pointe, ce cône aurait environ un mètre de longueur, ce dont il est, au reste, facile de s'assurer, en reconstruisant géométrique- ment la figure d’après les génératrices que nous en avons données. C'est évidemment une défense d’éléphant. 3° Un grand nombre de débris d’une pièce cylindro- conique, dure et fragile, très-altérée par son séjour dans ( 439 ) la terre. Il en reste trois morceaux ayant en moyenne 45 centimètres de longueur, 6 à 8 de largeur, 1 à 2 d’épais- seur. Ils sont constitués par des feuillets qui se coiffent intimement les uns les autres. Ce cône était arqué et d’un très-grand rayon de courbure. Le cercle de sa base était légèrement aplati; complété par le calcul, il devait avoir environ 25 centimètres de diamètre. L'épaisseur et le nombre de feuillets augmentent à mesure qu’on se rap- proche du sommet. Des fragments, ajustés ensemble, font voir que le creux médullaire, très-large à la base, se ré- trécit insensiblement et disparaît à 5 décimètres plus loin. Une partie indique que la surface externe de cette pièce était lisse, polie, et marquée de fines stries longitudinales; une autre semble établir que son extrémité terminale était en {orme d'olive très-allongée. Entière, cette pièce n'avait pas moins de 2 mètres et demi de longueur, si l’on en juge par la proportion graduelle dans laquelle elle se rétrécil. C’est une défense d'éléphant de la plus grande dimen- sion, et il est probable qu'elle a appartenu à un individu mâle, celle que nous avons décrite précédemment ayant plutôt l'aspect de la défense d’une femelle. Æ Une dent volumineuse dont la couronne aplatie re- présente deux colonnes de cément adossées et entourées chacune d’une lame épaisse d'émail. L’une de ces lames dessine un ovale très-aplati et recourbé en tiers de cercle; l’autre un ovale très-aplali et recourbé en deux tiers de cercle. (fig. 1.) Toutes deux sont en relief saillant au- dessus du reste de la couronne. La concavité extérieure de ces deux ovales courbes est tournée vers le même bord de la surface triturante, et limite deux fossettes ou vallons creusés dans l’épaisseur de la couronne. Le vallon borné ( 440 ) par la lame la plus contournée est moins large que l’autre à son ouverture et sensiblement moins profond. Dans son ensemble, le contour des lignes d’émail figure assez exac- tement un chiffre 5. | Les faces latérales de la couronne sont remarquables par leur couleur noire très-foncée et leur aspect chagriné. Cette coloration noire tranche assez vivement sur celle des racines, qui est terreuse. Un bourrelet coronal mince, mais évident, ajoute encore à la netteté de cette démarca- tion. | Examinés de très-près ou à la loupe, les filets d’émail de la surface de trituration présentent un nombre infini de raies fines, transverses, parallèles, très-régulières, at- teignant seulement la moitié de l'épaisseur des filets, dont elles côtoient les bords centraux. Les racines, au nombre de quatre, sont soudées deux à deux, irrégulièrement conoïdes, à sommet tronqué et rugueux, peu divergentes, et parcourues par un canal dentaire très-étroit (fig. 2). Cette pièce, dans son ensemble, est d’une admirable conservation et pèse 120 grammes; elle se rapporte au genre rhinocéros. Quant à l'espèce, nous l'attribuons au R. megarhinus, dont elle serait la sixième molaire infé- rieure gauche. 5° Une dent, plus petite de moitié que la précédente, constituant une sorte de prisme à base carrée légèrement courbé sur sa longueur. La couronne indique deux peuts croissants de cément placés bout à bout, eutourés d’un mince ruban festonné d'émail. Dans chacun de ces crois- sants est creusé un trou rond d’un centimètre de pro- fondeur. L'un de ces trous a le diamètre d'une graine de colza, l’autre le diamètre d’une graine de chanvre. Un ( 441 ) deuxième ruban d’émail, moins festonné, fait le tour de presque toute la dent, dont il enveloppe ainsi les petits croissants et le reste du cément. Ce dernier ruban forme, près d’un bord, du côté de la convexité des croissants, ce qu'on pourrait nommer une presqu'ile de cément en- tourée d’émail. L’usure plus grande du cément rend tou- tes ces lignes d’émail très-saillantes sur la surface de tri- turation. Les faces latérales de la dent n’offrent rien de particu- lier; seulement l’une d’entre elles, celle qui correspond à la concavité des croissants, est parcourue du baut en bas par une gouttière médiane profonde, limitée de chaque côlé par une demi-colonne qui se perd sur la racine cor- respondante. Les racines comprennent quatre tubercules rugueux, grossièrement cylindriformes, presque pleins et assez dis- tincts les uns des autres. La détermination de cette pièce est, au reste, très-facile : c’est une dent de cheval, et très-probablement la quatrième molaire de la mâchoire supérieure gauche. 6° La dernière pièce de cette catégorie, et sans con- tredit la plus importante, est un fragment d'os portant deux dents encore implantées dans leurs alvéoles. Ces dents sont évidemment une canine et une molaire. La canine est fusiforme, arquée. Sa couronne est co- noïde, courbée, convexe en avant, à pointe arrondie. La face de cette couronne, qui regarde au dedans de la bouche, est légèrement aplatie, c'est-à-dire triangulaire, et limitée sur les côtés par deux côtes sensibles qui naissent près de la pointe et se terminent assez brusquement au niveau du collet. Un bourrelet appréciable à la vue et au toucher termine Inférieurement la couronne. La racine est unique, ( 442 ) renflée au milieu, à sommet tronqué; elle es creusée très- largement à l’intérieur. Sa direction prolonge l'arc que décrit la couronne dont elle est cependant très-nettement séparée par la coloration noire et le bourrelet de celle-ci. La dent molaire est plus courte; sa couronne est co- noïde, aplatie de dehors en dedans, surtout en dedans. La face interne de cette couronne est un peu concave de haut en bas; sa face externe, c’est-à-dire celle qui regarde hors de la bouche, est convexe. Une côte sensible règne sur le bord antérieur de la couronne, une autre sur le bord postérieur. Ces côtes naissent près de la pointe, qui est mousse; à partir de là, elles se renforcent, deviennent très-apparentes au bas de la couronne, où elles semblent se bifurquer, surtout l’antérieure, pour grossir ou pour constituer le bourrelet qui limite et entoure la base de la couronne. Ce bourrelet est, en effet, plus manifeste en avant et en arrière qu’en dehors et en dedans, où il semble se relever et s’effacer , offrant ainsi une légère échancrure qui correspond à l'intervalle qui sépare les racines. Les ra- cines sont au nombre de deux, cylindroïdes, très-creuses; l’antérieure est droite, la postérieure légèrement courbe ; toutes deux semblent sortir de dessous le bourrelet coronal pour fixer la dent dans son alvéole. Ces deux dents sont deux véritables perles de la plus parfaite intégrité et de la plus merveilleuse conservation. Leurs couronnes sont brillantes, un peu chagrinées et d'un noir de jais qui contrasie vivement avec la couleur terne brunâtre des racines. Le fragment d’os auquel elles sont adhérentes porte en outre deux traces d’alvéoles d'incisives au- devant de la canine et deux traces d’alvéoles de molaires, l’une devant, l’autre derrière la molaire restée en place. La racine de ( 445 ) ces incisives était aussi grosse que l’une des racines de la molaire. Il résulte de cette disposition des alvéoles que toutes ces dents, incisives, canines et molaires, étaient implantées si près les unes des autres, que non-seulement il n’y a aucune trace de barre, mais qu'il y a même à peine des traces de cloison osseuse entre la canine et la première molaire, comme entre celle-ci et celle qui la suit (fig. 1.) La première molaire suivait immédiatement la canine; elle avait deux racines qui touchaient en avant celle de la canine et en arrière celles de la deuxième molaire; el ce n'étaient pas des molaires rudimentaires, puisque celle qui est conservée à déjà presque le volume de la ca- nine elle-même. Le râtelier d'aucun carnassier vivant, ni celui du tigre, ni celui de l'ours, ni celui des différentes espèces du genre Canis, n'offre l’image d'un rapproche- ment aussi étroit de toutes ces dents, ni d’un développe- ment aussi considérable des premières molaires. La tête de l’animal qui portait ce râtelier atteignait les dimensions de celle du tigre, qu'il devait aussi égaler en férocité ou plutôt en carnivorité, à moins que les molaires du fond de sa bouche ne fussent plus aplaties et moins tranchantes, ce qui est, d'ailleurs, une pure supposition. Tout en reconnaissant, dans cette pièce que nous venons d'analyser, beaucoup d’analogie avec les genres Pterodon et Hyenodon, nous l’attribuons au genre Canis. Quant à l'espèce, nous n’en avons vu aucune, ni décrite, ni figurée, qui lui corresponde exactement. Nous admettrions peu vo- lontiers qu’elle appartint au Canis familiaris fossilis, avec lequel elle à plutôt une grande affinité qu'une complète similitude. Au-devant de la canine, le fragment d’os porte, outre les deux traces d’alvéoles incisives, une surface ovalaire, (444) rugueuse, destinée à former avec l'os similaire du côté opposé, la symphyse du menton. Cette surface rugueuse empièle sur la table interne de l'os. Le fragment d'os est donc l'extrémité antérieure brisée du maxillaire inférieur gauche; car le bord de cet os, opposé au bord alvéolaire, est un bord lisse et continu. Les dents sont, par consé- quent, la canine et la deuxième molaire inférieure gau- ches d’une espèce à dénommer du genre Canis. : SECTION Il. — Des ossements. Indépendamment des dents, on a encore exhumé un grand nombre d'ossements, fracturés et brisés pour la plu- part en différents morceaux. Nous les avons rangés en plusieurs catégories, suivant les animaux auxquels ils ont appartenu, et nous avons pu, sans trop de difficultés, re- connaître, au milieu des débris, les pièces suivantes : À. — 1° Un os iliaque droit, d’une pesanteur et d'une dimension si extraordinaires, qu'un homme seul peut à peine le transporter. La symphyse pubienne mesure en- viron un demi-mèêtre de hauteur. Les distances de l’épine iliaque antérieure et supérieure à l’ischion et à la sym- physe sacro-iliaque, sont d’un mètre. La cavité cotyloide a 20 centimètres de diamètre. La crête iliaque est détachée en fragments spongieux, el, à son niveau, l'os atteignait l’épaisseur énorme de 20 centimètres et plus. Malgré l’irrégularité anatomique de sa forme, cette pièce est complète, et n'offre des traces d’altération que dans la symphyse du pubis. Il règne dans ses proportions, dans la disposition relative de toutes ses parties, tant de res- semblance avec celles de l'os iliaque humain, qu'il n'y à pas une seule saillie, pas une seule anfractuosité de celui- ( 445 ) ci qui ne se retrouve, dans l’autre, à la même place et avec les mêmes caractères. Cet os iliaque est d’un tiers plus grand en tous sens qu’un os iliaque d’éléphant moderne. 2% Une demi-boule osseuse, s’adaptant si exactement à la cavité cotyloïdienne du précédent, qu'on y reconnait, sans plus d'examen, une tête de fémur, détachée du corps de l'os par fracture, ou peut-être aussi par consolidation encore imparfaite des adhérences épiphysaires ; 3°. Une rotule ovoide avec sa face articulaire en dos d'âne; 4 Une première phalange d’un doigt, deux fois plus longue que large (15 centimètres sur 8, et 25 à 28 de circonférence). Son corps est cylindro-prismatique, à trois faces arrondies. Les fossettes d'insertion des ligaments latéraux sont rugueuses et profondes; les surfaces artieu- laires sont l’une plano-convexe, l’autre plano-concave. Cette pièce et la précédente offrent, au volume près, beau- coup de ressemblance avec leurs analogues chez l’homme; 5° Un os long (65 centimètres sur 8 de diamètre moyen), dont une extrémité surtout offre un renflement considé- rable en forme de massue ou de palette. Toutes les arêtes el les faces de repère de cet os sont effacées, érodées par le séjour dans la terre. Néanmoins, sa forme, sa longueur, ses renflements, la légère courbe qu'il affecte sur sa lon- gueur, caractérisent un radius; l'extrémité en palette appartient à la tête inférieure ou carpienne de l'os. 6° Dix fragments de côtes, reconnaissables à la gout- tière des vaisseaux et nerfs intercostaux. Ils ont en moyenne 6 à 7 centimètres de diamètre, 40 à 50 de lon- gueur. Leur rayon de courbure est de plus d’un mètre. Ces fragments sont plus arrondis vers leur extrémité ver- (446) tébrale, plus aplatis et moins rugueux vers leur extrémité sterno-abdominale; mais aucun ne présente assez d’éten- due ni assez de caractères pour permettre de lui restituer son rang probable. L’un d'eux cependant paraît être la première côte. | 7° Le crâne et la face sont représentés par un grand nombre de débris, si mutilés et pour la plupart dans un tel état de dégradation, que ce n’est qu’au prix des plus laborieux lâätonnements que nous sommes parvenu à nous y orienter. Deux masses informes, dont l’une n’a pas moins de 16 à 20 décimètres cubes de volume, se distinguent chacune par un condyle occipital à leur partie postéro-inférieure. Ces condyles sont très-convexes et figurent deux ellip- soides allongés d'avant en arrière ou plutôt de haut en bas, dans la station naturelle de l'animal. Leurs petits axes mesurent 12, leurs grands axes, ou axes verticaux, sensiblement parallèles , 18 à 20 centimètres de longueur. Leur rapprochement symétrique rétablit le trou occipital, ouverture oblongue dans le sens transverse, ayant 24 centimètres de diamètre horizontal, sur 10 à 45 de dia- mètre vertical, dimensions qui sont presque doubles de celles des éléphants. Au-devant des condyles occipitaux, on voit, de chaque côté, sur les deux mêmes fragments, un énorme condyle convexe, transverse, derrière lequel se trouve une excavation profonde : ce sont les articula- tions temporo-maxillaires. Il s’en faut beaucoup que les os du crâne soient frac- turés el séparés dans le sens de leurs sutures. De là vient qu'une même pièce porte souvent des parties appartenant à plusieurs os voisins. Celles que nous venons de men- tionner se rapportent à l’occipilal et au temporal. Leur (447) coaptation avec les autres est si grossière et présente tant de lacunes, qu'il est impossible de reconstituer les ré- gions dont elles font partie. Un fragment montre le trou auditif, et, au-dessous, la base de l’apophyse zygomatique. Une face large, unie, convexe d’un côté et spongieuse de l’autre, est un reste de la table externe d’un pariétal. Mais les caractères les plus frappants de la plupart de ces ossements sont leur épaisseur et leur structure excep- tionnelles. Cette épaisseur dépasse presque toujours 10 centimètres; elle en atteint plus de 50 à la partie supé- rieure et postérieure du crâne. L’énorme espace compris entre la table externe et la table interne est occupé par une innombrable quantité de cellules, de sinus alvéolaires à minces parois. La table interne est peu anfractueuse du côté cérébral. D’après ce qui en reste, d’après la prise en considération de cette monstrueuse épaisseur des os, on peut estimer que l'animal, dans une tête, de moitié plus volumineuse que celle d’un éléphant, portait un encéphale arrondi, à peu près aussi long et aussi haut que large, et qui, cependant, atteignait à peine les dimensions d’une tête d'homme adulte. | Parmi les débris qui représentent la face, on trouve deux portions symétriques des maxillaires supérieurs. Elles por- tent chacune une apophyse montante, et une tubérosité rugueuse qui est destinée à l'insertion de l'os jugal, et qui constitue l’extrémité antérieure de l’arcade zygoma- tique. Un fragment volumineux d’os intermaxillaire figure une espèce de gouttière , longue de plus d’un demi-mèêtre, de 2 centimètres d'épaisseur et courbée en arc dans le sens de sa longueur. La concavité de la gouttière est tournée du côté de la convexité de cette courbe en lon- ( 448 ) gueur. Sa courbure et le diamètre intérieur du cylindre creux auquel elle appartient s'adaptent d’ailleurs parfai- tement à la courbure et au diamètre extérieur que nous avons attribués aux grandes défenses décrites précédem- ment. Îl est donc probable, pour ne pas dire plus, qu’elle leur à servi d’étui ou d’alvéole. Sa fice externe ou cuta- née est lisse; sa face interne est chagrinée, et çà et là on y voit des empreintes nervoso- vasculaires, comme on AL voit, chez l’homme, sur la face des os que tapisse une muqueuse. L’'orifice antérieur de cet étui alvéolaire est sensiblement évasé; un léger bourrelet osseux règne à son pourtour, et son axe intérieur est oblique en bas et en dehors, d’où il résulte que les défenses se diri- geaient en bas, se recourbaient en haut et divergeaient en dehors. | Les seules pièces de la tête qui méritent encore quelque mention, sont deux petits fragments de la symphyse men- tonnière, dont l’adossement reconstitue, en partie, la gouttière horizontale antéro-postérieure qui termine et surmonte en avant la mâchoire inférieure. Un simple coup d'œil jeté sur tous ces ossements que nous venons d’énumérer, suffit pour convaincre qu'ils ont tous appartenu au même squelette; nous les rapportons, sans hésiter un seul instant, à la charpente osseuse d’un mammouth de la plus grande puissance ; et, malgré la taille gigantesque que ces restes lui assignent, on peut établir qu'il n'avait pas encore acquis l'extrême limite de son dé- veloppement. | 8 Mais trois pièces importantes se rattachent évidem- ment à ce groupe colossal : ce sont deux humérus ayant chacun un demi-mèêtre de long, et plus d’un demi-mèêtre de circonférence moyenne. Ces deux portions d'os sont ( 449 ) identiques; elles proviennent chacune d’un humérus droit, donc, de deux animaux différents. La troisième pièce est un humérus gauche, mais d’un individu manifestement plus jeune et plus petit. Il est digne de remarque que ces trois humérus ont été fracturés presque aux mêmes en- droits, et que, dans tous les trois, par conséquent, ce sont exactement les mêmes parties qui manquent, à sa- voir la tête et les tubérosités humérales supérieures, les fossettes et l'articulation huméro-cubitale. L’empreinte deltoïdienne est une longue côte rugueuse, et la fosse coronoïde est plutôt une face un peu concave en avant qu'une fosse proprement dite. Il résulte de là que nous avons des restes de trois mam- mouths différents : deux grands et un plus petit. Cette conclusion concorde avec celle à laquelle conduit le seul ‘examen des défenses et des dents. L’un des deux grands provient d’un individu mâle et l’autre d’une femelle qui, sans doute, aura été fidèlement suivie par son petit, dans la mort comme dans la vie. B. — Après avoir fait l'examen de toutes ces pièces, l’at- tention et la curiosité sont naturellement entraînées vers trois extrémités d’os longs que nous n'avons pas encore indiquées. Elles sont presque semblables; deux sont de même taille, une droite et une gauche; la troisième provient évidemment d’un sujet plus petit; les trois os longs aux- quels elles ont appartenu ont été rompus précisément à la même place, c’est-à-dire vers leur tiers inférieur, et dans toutes les trois, une même moitié du condyle articulaire qu’elles portent a été fracturée. Le diamètre de ces pièces n’est pas inférieur à celui d’un fémur ou d’un humérus d’éléphant moderne; et ce- (450 ) pendant elles n’appartiennent à aucun des mammouths dont il vient d’être question. Elles indiquent une articu- lation à deux condyles, séparés par une coulisse et ter- minant un os fortement tordu sur son axe : or, ces carac- tères excluent le fémur et l'humérus d’éléphant, qui se distinguent facilement par la simplicité exceptionnelle de leur forme. L’excavation qui surmonte la convexité arti- culaire, en avant comme en arrière, indique un humérus, ou plutôt trois humérus. En nous fondant sur le volume et la configuration de l’articulation, sur la torsion et la fracture ovalaire du corps de l'os, sur les circonstances mêmes et sur le mode de cette rupture, nous les attri- buons à deux rhinocéros différents. Il suffit, en effet, de jeter un simple coup d'œil sur un humérus de rhinocéros, pour saisir toutes ces analogies et pour se convaincre qu’il y a, dans cet os, deux lignes de moindre résistance sui- vant lesquelles il se fracturera toujours invariablement , à savoir, la base du condyle radial et le rétrécissement brusque que subit le corps de l’os à son tiers inférieur, au- dessous de cette énorme crête qui représente l'insertion deltoïdienne. C. — 4° Un os long d'environ 25 centimètres, de la grosseur d’un humérus humain, à corps convexe arrondi en avant, excavé en gouttière longitudinale en arrière, porte, à l’une de ses extrémités, plusieurs facettes obliques, avec une apophyse styloïde très-saillante, et à l’autre extrémité, une sorte de cupule et de demi-poulie artieu- laire : c’est évidemment le radius soudé au cubitus d’un renne ou d’un cerf. Une crête, qui parcourt presque toute la longueur de l’un des bords de la gouttière postérieure indique le cubitus. Cette crête a été fracturée à l'endroit précis où elle se détache de l’os pour constituer l’olécrâne ; | ( 491 ) en sorte qu'il ne reste aucune trace de cette apophyse. La face convexe présente au bas des coulisses tendineuses. Nous rangeons à côté de cette pièce, d’ailleurs bien conservée : : 2% Une extrémité inférieure d'humérus avec le condyle radial et la trochlée cubitale séparés par une coulisse, et que la comparaison force d'assigner au même animal que -l'os précédent ; 5° Une vertèbre cervicale, très-exactement semblable à la quatrième vertèbre cervicale chez les cerfs; 4° Enfin un fragment de bois de cerf d’un demi-mètre de long, fracturé au sommet et de la grosseur moyenne d’un fémur humain. Une ramification basilaire naît im- médiatement au-dessus du bourrelet d'insertion; deux autres se détachent de l'arbre sur son trajet. Toutes trois sont fracturées; néanmoins, on peut constater qu’elles étaient arrondies. Cela suffit, au reste, pour caractériser le cerf fossile. Le volume des os annonce un animal aussi grand que les plus forts rennes actuellement vivants. Cependant son bois était comparativement très-peulit. [Il n’en pouvait être autrement, en raison de la longueur du cou, qui était, à en juger d’après sa vertèbre, deux fois plus longue que chez ces animaux. En résumé, on a exhumé à Lierre des dépouilles fossiles de huit individus différents, représentant cinq espèces, qui sont : hi 4° L’Elephas primigenius (mammouth, Elephas mam- mouleus) ; % Le rhinocéros megarhinus ; 5° Le cheval fossile (Equus fossilis) ; 4 Une espèce du genre Canis; 278 SÉRIE, TOME IX. 52 ( 452 ) 5° Le cerf fossile (Cervus primigenius, ou Elephas fossilis). Malheureusement, les fouilles ont été interrompues dès le lendemain par l'urgence d’autres travaux de terrasse- ment. Cependant des ouvriers affirment avoir senti sous la bêche, et même avoir vu d’autres ossements que la conduite des eaux dans la tranchée ne leur donna pas le temps de retirer. La certitude est donc bien acquise qu'il y a là un gisement d'os fossiles presque à découvert que l'on pourrait exploiter avec la plus grande facilité, en mettant le fossé à sec et en endiguant 20 ou 30 mètres seulement de son lit. Au reste, la disposition des écluses permet de faire écouler les eaux à volonté, circonstance qui, jointe au peu de cohésion du terrain à enlever, sim- plifierait, au point de réduire, pour ainsi dire, à rien, le travail de cette exhumation. Mais il y a lieu d'espérer que ce travail sera exécuté sous les auspices du Gouvernement lui-même. Ces considérations nous amènent naturellement à nous occuper un instant de la question géologique, non moins importante que la question paléontologique soulevée par cette découverte : Quelle est la nature du terrain dans lequel elle était enfouie ? D’après le témoignage de plusieurs entrepreneurs, des officiers du corps des ponts et chaussées et de différentes personnes qui ont creusé des puits dans le voisinage, cette couche de terrain est d’une telle puissance, qu’on la re- trouve encore, avec tous ses caractères, à la profondeur de 15 et même de 25 mètres. Elle commence immédiate- ment au-dessous de la terre végétale, qui a à peine un demi-pied d'épaisseur, de sorte qu'elle en constitue à la fois la base chimique et le sous-sol. Elle est formée d’un sable glauconifère grossier, mêlé, dans la proportion d'au (453) liers ou d’un quart, de ces granules foncés qui donnent à l’ensemble une teinte bleu-verdâtre, quand le terrain est fraichement remué. On y trouve, de plus, de petits frag- ments de quartz, tantôt vitreux et tantôt opaques, à angles et à faces plus ou moins arrondis, de la grosseur moyenne d’une graine de chanvre et plus. Après un certain temps de séjour à l'air, la coloration glauque de ce terrain se modifie sensiblement et vire au jaune d’ocre, par la peroxydation dn sel de protoxyde de fer qu'il renferme. Telle est même, en certains endroits, la teinte primitive dont se rapproche la couchesur place; mais c'est évidemment le même terrain, puisque ces couches plus jaunâtres ne diffèrent en rien des couches bleues devenues jaunâtres au contact de l'air ou de l’eau aérée. L'exploration attentive de plus de 1000 mètres cubes de ce sable fraichement déblayé ne nous y a fait découvrir nt coquillages , ni cailloux roulés. On peut conclure et établir positivement, d’après la prise en considération de cet ensemble de caractères, que ce terrain a pour base le terrain distien de Dumont, mais remanié, altéré dans la pureté de ses éléments constitutifs par la superposition, ou plutôt le mélange de terrains plus récents. Les ossements ont été trouvés tous à la même place, comme si les animaux dont ils pro- viennent avaient été ensevelis ensemble dans la même fosse. On était à 10 et 11 mètres au-dessous du niveau du sol, et à 2 mètres, 2 mètres et 50 centimètres au-dessus du niveau moyen de la mer. Diverses circonstances cependant tendent à enlever une partie de son importance à la mesure exacte de cette pro- fondeur : le canal de dérivation que l’on construit aujour- d’hui n’est en réalité que l’approfondissement du fossé de | ( 454 ) l'enceinte moderne de la ville, enceinte qui date de 1406, et le long de ce fossé, il a existé, de mémoire d'homme, des travaux de fortification qui ont été démantelés dans le cours du siècle dernier. Dans cet endroit, comme dans presque toute l'étendue de la vallée où serpente la Grande-Nèthe, il y avait des tourbières qui ont été exploitées dans le cours du XVIF”° et du XVIII" siècle. On en exploitait même encore à peu de distance du gisement des os, quand fut promul- guée la législation de Marie-Thérèse sur cette exploi- tation, et plus d’une famille, dans la localité, a conservé le souvenir des procès interminables auxquels ces nou- veaux règlements purent à peine mettre fin. On aurait même découvert, à ce qu'il paraît, dans ces tourbières, une grande quantité d'arbres à peu près entiers et offrant cette particularité remarquable, qu'ils étaient couchés dans le même sens, comme s'ils avaient tous été renversés par un même ouragan ou par un même Lorrent, et se diri- geant du NO. au SE. de la province d'Anvers. Quoi qu’il en soit, nulle commune peut-être ne justifie mieux la comparaison qu'on à faite de cette province avec un ossuaire, un immense cimetière du vieux monde. Le musée du château de Léau, que Joseph IT fit transférer à Vienne et dont les ducs de Bourgogne avaient rassemblé les premiers matériaux, élait littéralement rempli, à ce qu’on assure, de fossiles recueillis aux environs de Lierre. Vers l’an 1790, un chanoine nommé Vissers, qui vécut longtemps dans cette ville, se réfugia à Vienne, emportant avec lui, au dire d'un magistrat qui l’a connu, cinq char- retées d’ossements collectionnés dans la banlieue, et qui sont allés, comme les précédents, enrichir le musée im- périal d'Autriche. Un fait, très-simple en apparence, Ft : sypie “ir r pe at 5e dppeus L# VE" Dé 3 à 4 "RS ER chi Fes hi Re re HaiHuY£ ë Fa J di 22 f : { « LM LÉ : La A ' à Fe 2 Se J4 ” Ê » P] A L ? PL s £ d 2 0 à 4 3 1 ÿ 4 & ATEI 1 ’ + l “ É " ‘ Er r Le é x LE HER 1 Ball de Lead y : Lori [NX 2esene page 454, lle l'AHcad. /oy. ' x \ ; n ! \ ‘» , ï 3 LE 1-2. Rhinoceros megarhinus.324 (anis (C. familiaris fassilis 2) grand natur | ë | ‘“h sèg ES ( 455 ) prouve d’ailleurs combien de semblables découvertes ont dû être fréquentes dans le voisinage, c’est que les villageois eux-mêmes ont un nom pour les qualifier. D’après eux, ce sont des os de monstres marins. Cette dénomination eu- rieuse ne semble-t-elle pas, à elle seule, résumer toute une chronique ou une légende ? EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fig. 1. Surface de trituration de la dent de rhinocéros montrant le liséré de raies sur les lames d’émail. 9, Vue de la même dent sous ses faces latérales. 3. Même pièce vue par la face interne. — Surface ovalaire rugueuse pour la symphyse du menton. 4 Fragment d'os maxillaire inférieur gauche portant deux dents, vu par sa face externe. — Deux alvéoles incisives au-devant de la canine ; deux alvéoles molaires, l’une devant, l’autre derrière la be restée en place. (Grandeur naturelle.) RG CLASSE DES LETTRES. Séance du 9 mai 1860. M. Gacar», président de l’Académie, M. Ad. Querecer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Grandgagnage, de Ram, Roulez, Borgnet, le baron de Saint-Genois, David, Paul Devaux, De Decker, Snellaert, Haus, Bormans ; Leclercq, Polain, Baguet , le baron de Witte, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres; Nolet de Brau- were van Steeland, associé. ———_— © CORRESPONDANCE. a — M, le Ministre de l’intérieur fait connaitre que le prix quinquennal de littérature flamande, pour la période de 1855 à 1859, a été accordé aux ouvrages intitulés : Jakob Van Artevelde et Nazomer, par feu Prudens Van Duyse. Aux termes de l'arrêté royal du 8 de ce mois, la somme de 5,000 francs, montant de ce prix, sera liquidée au profit de la dame veuve Van Duyse et de ses enfants. ( 457 ) — Un arrêté royal du 4% décembre 1845 porte que l’Académie royale sera chargée des travaux suivants : Une biographie nationale; la collection des grands écri- vains du pays avec traductions, notices, etc.; la publica- tion des anciens monuments de la littérature flamande. M. le Ministre, en rappelant ces dispositions, ajoute : « Jusqu'à présent la compagnie s’est occupée seulement de la première et de la troisième partie de cet important programme. La publication des anciens monuments de la littérature flamande a été commencée et se poursuit d’une manière satisfaisante. Des mesures ont été prises pour préparer celle de la biographie nationale, et 1l est à es- pérer que celte œuvre intéressante ne tardera pas à être sérieusement entreprise. Mais rien n’a été fait jusqu'ici pour remettre au jour d'une manière digne de l’Académie et du pays, les grands écrivains nationaux ayant écrit dans d'autres langues qu’en flamand. Cependant la Belgique possède sous ce rapport des monuments littéraires d’une incontestable valeur, et elle s’est laissé devancer déjà par l'étranger pour plusieurs publications dont elle aurait dû peut-être prendre l'initiative. Je citerai notamment les his- toriens du XV”* siècle. Je vous prie, M. le secrétaire per- pétuel, d'appeler sur cet objet l'attention spéciale de la compagnie. Elle trouvera le Gouvernement très-disposé à la seconder pour toutes les mesures se rattachant à l’ac- complissement de cette partie de sa mission. » Les questions que cette lettre soulève seront examinées dans la prochaine séance. — Par une autre letire, M. le Ministre de l’intérieur fait observer que l'Académie possède, dans la salle de ses séan- ces publiques, les bustes des membres les plus distingués ( 458 ) qui ont été associés à ses travaux, et dont Ja suite formera, en quelque sorte, l'histoire même de la compagnie. « A celle gloire, ajoute ce haut fonctionnaire, manque l’image d'une princesse illustre dont le nom se rattache à la fon- dation de l’Académie. J'ai décidé, par application de lar- ticle 2 de l'arrêté royal du 1° décembre 1845, que le portrait en pied de l’impératrice Marie-Thérèse serait exé- cuté aux frais de l'État, pour être placé dans la salle des séances publiques de la savante assemblée. Je suis certain que cette disposition rencontrera l’assentiment de l’Aca- démie, à laquelle, je vous prie, M. le secrétaire perpé- tuel, de vouloir bien en donner communication. » Des remerciments seront adressés à M, le Ministre pour ce témoignage de haute bienveillance. — Le Gouvernement communique le programme du concours arrêlé par la ville d’Ypres , relativement à l’his- toire de cette ville sous les comtes de Flandre : depuis Bau- douin, Bras de fer, jusqu'à Philippe IL exclusivement (1). Le premier prix se composera d’une somme de 1,500 francs et d’une médaille d'or; le second prix, d'une somme de 800 francs et d’une médaille d'argent. Les ouvrages doi- vent être écrits lisiblement en français ou en flamand, et seront adressés à l'administration communale de la ville d'Ypres avant le 1° mars 1862. Les ouvrages présentés au concours contiendront, outre les pièces justificatives, la matière d’un volume ordinaire in-8°; 1ls seront jugés par l’Académie royale de Belgique (classe des lettres). Tous les manuserits resteront déposés dans les archives (1) Voyez le Bulletin de l’Académie royale, t. IX, n° 2, 1860. ( 459 }) ousà la bibliothèque publique de la ville d’Ypres. Les au- teurs pourront, à leurs frais, les faire copier, traduire et imprimer. S'ils n’usent pas de cette faculté avant le 1* juillet 1863, la ville se réserve le droit de faire imprimer leurs ouvra- ges; mais, dans ce eas, le quart des exemplaires sera remis aux auteurs. On exige la plus grande exactitude dans l'indication des sources et des citations. À cet effet, les auteurs au- ront soin d'indiquer les pages et les éditions des livres cités. | Les concurrents ne mettront point leur nom à leurs ouvrages, mais seulement une devise, qu'ils répéteront sur un billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse. Ceux qui se feront connaître de quelque manière que ce soit, ainsi que ceux dont les manuscrits auront été re- mis après le terme prescrit, seront exclus du concours. — M. le secrétaire perpétuel annonce que le congrès international de statistique, qui s'est successivement réuni à Bruxelles, à Paris et à Vienne, se réunira le 16 juillet prochain, à Londres. On y arrêtera le programme général pour l’observation des phénomènes périodiques dont le projet de rédaction a été confié aux soins de deux savants qui s'occupent depuis plus de vingt ans, en Allemagne et en Belgique, de l'observation de ces phénomènes. — M. Quetelet fait hommage d’un mémoire de statis- tique contenant une table générale de mortalité pour la Belgique et deux tables spéciales de mortalité pour les hommes et pour les femmes, dressées d’après le recense- ment de 1856. ( 460 ) — M. le baron de Witte présente les derniers numéros de la Revue numismatique et un opuscule de sa composi- lion. — Remerciments. CONCOURS DE 1860. La classe des lettres avait mis au concours sept ques- tions sur différents sujets et une huitième concernant l’origine belge des Carlovingiens. PREMIÈRE QUESTION. Quelles sont les localités des dix-sept provinces des Pays- Bas et du pays de Liége où l'on a frappé monnaie, depuis l'invasion des Francs jusqu'à l'émancipation des grands feudataires ? Décrire ces diverses monnaies et, au besoin, en discuter l'attribution. apport de M. de Wilte. « La question offre un grand intérêt : elle touche aux origines de notre histoire. Bien comprise, bien traitée, elle aurait dû produire un travail des plus instructiis. Le premier des deux mémoires qui ont été présentés au concours porte pour devise : Cherchez el vous trouverez. L'auteur s’est borné à donner une description sommaire des monnaies mérovingiennes et carlovingiennes qu'on à attribuées avec plus ou moins de fondement à des localités des Pays-Bas et du pays de Liége; de plus, sortant des limites tracées par le programme, il a compris dans son :. NES 14e A Lx ( 461 ) catalogue les monnaies de quelques villes du royaume d'Austrasie, et y a fait entrer des monnaies féodales qui v’auraient pas dû y figurer. C’est ainsi qu'il cherche à jus- tifier sa seconde devise : Quod abundat non viciat, axiome vrai, quand il s’agit d’une véritable abondance de docu- ments, mais qui n’a pas de sens, quand on veut introduire dans un travail des éléments étrangers. Ce premier mé- moire n'offre qu'une sèche nomenclature des villes et bourgs, sans critique aucune, sans la moindre observa- tion historique. L'auteur semble ne pas avoir compris l’im- portance de la question, lutilité qu'elle présente pour jeter du jour sur la géographie ancienne de notre pays. Il accepte les attributions les plus hasardées et ne les dis- cute pas. Ce mémoire annonce une grande inexpérience. La seule chose qu’on puisse louer dans ce travail, c’est l’idée qu’a eue l’auteur de reproduire par le dessin les mon- naies qu'il décrit; l’idée est heureuse, et il faut convenir que les dessins sont bien faits et exécutés avec soin. Le second mémoire porte pour devise : La numismali- que est l’un des flambeaux de l'histoire. L’auteur à mieux compris la portée de la question. Il à senti que ce n’était pas une simple nomenclature que l’Académie demandait. Jl est entré dans quelques détails sur l’origine et l’histoire des localités auxquelles on à atiribué des ateliers moné- taires. Malheureusement, 1l accepte sans eritique presque toutes les attributions, sans discuter leur valeur, sans tenir compte de certaines observations. Glanant un peu partout, 1l ne fait aucune distinction entre les sources auxquelles il emprunte ses matériaux. En général, il ne remonte pas aux sources originelles et se contente de rap- porter l’opinion de ses devanciers, sans la soumettre à un nouvel examen, sans faire connaître ses propres impres- ( 462 ) sions, méthode facile et qui dispense de recherches sé- rieuses. Ce second mémoire laisse aussi à désirer sous le rapport du style et de la rédaction. Il existe un ouvrage qui aurait pu servir de guide aux concurrents, et on est étonné, vu que lun et l’autre le cilent assez souvent, qu'ils n’aient pas songé à le prendre pour modèle. C’est la Notice des monnaies françaises compo- sant la collection de M.J. Rousseau , accompagnée d'indica- tions historiques et géographiques par Adrien de Longpérier, Paris, 1848, 1 volume in-8° avec planches et nombreuses vigneltes sur bois. Ils auraient pu puiser, dans cet ouvrage, des notions exactes, des appréciations Justes, mais pré- sentées avec circonspection, des hypothèses ingénieuses, mais sages et réservées et basées toujours sur des compa- raisons de fabrique et de style. La numismatique, si utile à l’histoire, est une science sérieuse, et ce n'est pas aux inspirations d’un moment, mais à une étude sévère, à des recherches longues et laborieuses qu’il est permis de de- mander le succès. Aux observations qui précèdent, j’ajouterai encore les remarques suivantes sur ce second travail. L'auteur prétend que l'existence des ateliers monétaires dans les Pays-Bas ne remonte qu’à l'époque mérovingienne. Nous savons par des preuves irrécusables que nos ancé- tres gaulois ont frappé monnaie : je ne rappelle 1ei que les monnaies gauloises anépigraphes trouvées dans nombre de localités de la Belgique. Plus tard, les Belges ont. eu des monpaies portant des légendes aussi bien que les autres peuples de la Gaule. On ne sait rien relativement à l'établissement des ate- liers monétaires dans les Pays-Bas sous les Mérovingiens, Pia 0 € RAA ( 465 ) mais celte obseurité existe également par rapport à la France. Dire qu’au VI" et au VII"* siècle, la Gaule était plus riche, plus commerçante et plus peuplée qu'au temps des Romains, est une erreur. On ne saurait attribuer l’éta- blissement de nombreux ateliers monétaires de l'époque mérovingienne au développement des relations commer- ciales, au défrichement des landes et des forêts ou à la fondation de nouvelles villes. Tout ce qu’on peut dire, c’est que, sous les rois francs, le système de garantie change; le nom du prince paraît rarement sur la monnaie : c’est le nom de l’officier monétaire qui le remplace, et c’est sous sa responsabilité qu’elle entre dans. la cireulation. Pour savoir si une monnaie à pu être frappée dans telle ou telle localité, il est nécessaire de s'assurer avant tout que cette localité existait à l’époque où la monnaie a été frappée et que cette localité portait dans ce temps-là le nom qu'on croit reconnaître sur la monnaie. L'auteur attribue à Bavai, d’après M. Combrousse, une monnaie qui, selon M. de Longpérier (1) porte LAVACA et que ce savant donne à Liége, sans dissimuler les diffi- cultés qui s’opposent à cette attribution. La non-existence de Liége à l’époque mérovingienne n’est pas prouvée. Il est question de Leodium , vers la fin du VI" siècle, du temps où vivait Monulphe, vingt et unième évêque de Tongres. Rien n’est moins certain que l'attribution d’une mon- naie quelconque à Beaumont de Hainaut. Le nom de Bellus Mons se trouve partout ; il y a nom- bre de villes et de villages qui portent ce nom et il devient dès lors presque impossible de fixer la monnaie de cha- 4 cune des localités désignées sons ce nom, à moins que (1) Wotice de la collection Rousseau, p. 224. ON EN GT RENNES FAI FFT ac} ,* ù" PAT TE Cr ET AN À ns! 1e, sN Fa à nr { ++ VMC E Û LE L'an RUE |: , À , i LUS à mn re A7 des indices particuliers n’en déterminent l'attribution. Pourquoi l’auteur émet-il des doutes sur l'existence des monnaies frappées à Bergues-Saint-Winox au X1"° siècle, quand il décrit lui-même des pièces qui portent BEREAS ou BERGÀ S. WINOC? Il ajoute : cette abbaye paraît avoir possédé le droit de frapper monnaie! L'auteur donne une monnaie à Bineche. Cette pièce de Charlemagne est de Bingen. M. Chalon ({) n'avait cité Binche que d’une manière dubitative. Le tiers de sol d'or mérovingien, portant le nom du monétaire Nectarius, attribué à Gembloux par l’auteur, est rangé à Jumillac dans le Limousin par M. Max. De- loche (2). En parlant de Gand, l’auteur cite D. Bouquet, d’après Dewez, tandis qu’il était facile de remonter aux sources. À l’article Mons, l’auteur décrit une monnaie mérovin- gienne supposée; il dit lui-même que c'est une pièce fausse ; il ne fallait donc pas la décrire, ni même en faire mention. Il semble aussi confondre Castri Locus, Mons, avec Castrum Lucii, Chalus en Limousin. La pièce carlovingienne qui porte C. L. S. est de Co- logne, Colonia Sancta (3). La monnaie de Pepin, NOVINO MO, attribuée à Nimé- gue, a été expliquée par M. de Longpérier (4), par Novinus monetarius. On connaît plusieurs noms de monétaires car- lovingiens. Je me.borne à ces courtes observations. Je laisse de (1) Revue de la numismatique belge , 2° série, t. IE, p. 158. (2) Revue numismatique française, 1859, p. 177. (5) Note communiquée par M. Renier Chalon. (4) Revue numismatique française, 1858, p. 550. _ ( 465 ) côté une foule d’autres questions qu'il serait intéressant de discuter, par exemple, ce qui se rapporte aux monnaies frappées dans des localités désignées sous les noms de Wick ou Wyck, les pièces attribuées à Maestricht, Tra- jectum ad Mosam, et à Utrecht, Trajectum ad Rhenum. Mais ce que j'ai dit suflit, je crois, pour faire voir que s’il y a des points qui offrent de grandes difficultés, 1l y en a d’autres dont la solution est facile; souvent on se déter- mine pour des attributions, selon le besoin de la cause que l’on s'efforce de défendre. Pour conclure, je dirai qu'aucun des deux mémoires présentés au concours ne me semble mériter le prix. L'auteur du second mémoire peut avec du travail et en remontant surtout aux sources améliorer son mémoire et le rendre sinon aussi complet qu’on aurait pu le désirer, du moins intéressant et instrucuf. Je voudrais encourager l’auteur et, dans ce but, je propose à l’Académie de lui accorder une mention honorable. » Happort de M. Chalon. « Je me range tout à fait à l'avis de mon honorable con- frère, M. le baron de Witte. Je pense, comme lui, que les deux mémoires qui nous ont élé présentés ne répondent pas à ce que l'Académie était en droit d'attendre, et ne peuvent mériter le prix proposé par elle. Cependant, je reconnais au second mémoire une supé- riorilé relative qu'il serait peut-être juste de constater, en accordant à l’auteur une mention honorable, » ( 466 ) Rapport de PI. le baron de Sauint-Genois. « Mon incompétence en matière de numismatique et d'histoire monétaire m'engage à vous prier de ne consi- dérer que comme un simple appoint lavis que je dois émettre, après mes deux collègues, MM. le baron de Witte et Chalon, sur le mérite des mémoires envoyés en réponse à la première question du concours annuel. En leur aban- donnant le soin d'apprécier le côté essentiel de la ques- tion, je regrette comme eux que les auteurs de ces deux mémoires aient négligé de faire précéder leurs nomencela- tures numismaliques de vues générales sur les premiers temps de notre histoire. La position de la question dé- montre suffisamment que la description des monnaies de- vait avoir surtout pour but de déterminer l'importance des localités où elles furent frappées, ainsi que l’époque à laquelle remontent leur origine. L'examen de ces points intéressants eût d’ailleurs fait disparaître la sécheresse qui caractérise ordinairement ces sortes de dissertations. Je me rallie done entièrement à l’avis des deux premiers commissaires, el, laissant de côté le mémoire qui porte pour devise : Cherchez et vous trouverez, je vous propose d'accorder une mention honorable à l’auteur du mémoire portant la devise : La numismatique est un des flambeaux de l'histoire. » “ Conformément à l'avis de ses trois commissaires, la classe décide qu'une mention honorable sera accordée au second mémoire, et elle exprime le regret de ne pouvoir lui accorder la médaille du concours. L LR N (467) DEUXIÈME QUESTION. Quelles sont les applications utiles et pratiques du prin- cipe de l'association pour l'amélioration du sort des classes ouvrière et indigente ? Rapport de M. Ducpeliaux. « Deux concurrents ont répondu à l'appel de l'Académie. Le premier, dans une simple note, fait ressortir les avan- tages assurés aux ouvriers, dans quelques établissements industriels, par la construction et la location d'habitations saines et commodes à prix réduit, par la création d'un service médical gratuit, d’une société de prévoyance pour les cas de maladie et d'infirmités, de magasins d'approvi- sionnement pour la vente en détail d'objets de première nécessité, etc. Il se borne à recommander cet exemple et à faire des vœux pour sa propagation. Le second, dans un mémoire plus étendu, propose la fondation d’une dou- ble association, l’une qui assurerait aux ouvriers des se- cours pour les cas de chômage et de maladie, l’autre qui se chargerait du patronage et de l'assistance des indigents. Il entre dans quelques détails sur l’organisation de ces deux sociétés; mais bien que ces détails soient exposés sous forme réglementaire, ils ne permettent pas néanmoins de bien saisir le système de l’auteur, de distinguer la part qu'il fait à l'initiative et à l’action soit de l’État, soit des patrons, soit des ouvriers, et donnent lieu à des objections nombreuses que nous croyons pouvoir nous dispenser de passer en revue. En résumé, tout en rendant hommage à la pensée géné- reuse et philanthropique qui à inspiré les concurrents, 27 SÉRIE, TOME IX. 29 ( 468 ) nous sommes d'avis qu'ils n’ont pas fourni de réponse sa- usfaisante à la question posée pour l’Académie. Cette ques- tion nous paraît assez importante pour qu’elle soit main- tenue au prochain concours. C’est en vue de ce maintien que nous croyons utile de soumettre à l'Académie quelques considérations et quelques données qui développent le pro- gramme et contribueront peut-être à guider les concur- rents (1). » Happost de M. De Becker. « Aucun travail, digne de l'attention de l’Académie, n'a été présenté en réponse à la question relative aux ap- plications utiles du principe de l'association pour l’amé- lioration du sort des classes ouvrières. | Il y avait là cependant matière à une étude pleine d’in- térêt par les questions sociales à traiter, pleine d'utilité par les conséquences pratiques à en déduire. Le résultat négatif du concours paraît donc devoir être attribué à l'exposé incomplet des vues et des intentions de l’auteur de la question mise au concours. Les savants développements que cet honorable auteur vient de donner à sa proposition auront pour résultat de mieux poser le problème et d'en faciliter la solution. Dans la prévision de ce résultat désirable, j'émets éga- qq a — (1) La partie du rapport de l'honorable membre à laquelle il fait allusion a fait l'objet du discours qu'il a prononcé à la séance publique de la classe des lettres du 11 de ce mois. ( 469 ) lement le vœu que la question soit conservée au pro- gramme du concours. » Happort de M. le baron de Gerlache. « J'estime, comme mes honorables confrères, qu'aucun des mémoires soumis à l’Académie ne répond suffisam- ment à la question proposée, « relativement aux applica- » tions utiles du principe de l'association, pour l’amélio- » ration du sort des classes ouvrière et indigente; » et que cette importante question doit être maintenue au con- cours. L’excellent rapport de M. Ducpetiaux jette un grand jour sur cette matière, et aidera puissamment les concur- rents, s'il s'en trouve qui soient à la hauteur du sujet. » Conformément à l’avis de ses commissaires, la classe a jugé qu'il n’y avait pas lieu à décerner le prix. QUATRIÈME QUESTION. Prix D'ÉLOQUENCE FLAMANDE. — L'éloge de Cats, au point de vue de l'influence exercée par cet écrivain sur la littérature flamande. Happort de M. Snellaert, « Dans la littérature des Pays-Bas, l’individualité la plus populaire est sans contredit le poëte Cats : ce n’est pas sans raison. Dans aucun pays, peut-être, jamais auteur ( 470 ) n'a Mieux réussi à satisfaire aux besoins moraux de toute une nation. Ce succès est si complet que les œuvres de Cats ont acquis, depuis plus de deux siècles qu’elles ont paru, le surnom de Bible des ménages, et que le nom de l’auteur lui-même n’est dans la bouche des Flamands et des Hollandais qu'accompagné de l’épithète de père : Vader Cats. Enfant ou vieillard, amant ou époux, riche ou pauvre, heureux ou opprimé, l’homme, dans les situa- tions les plus opposées, trouve dans les œuvres de notre poëte consolation et conseil. Au milieu d’une littérature riche en tous genres et malgré la transformation insensible de la langue, la marche progressive de l'esprit humain et les variations des idées , les œuvres de Cats ne cessent de nous charmer, de nous instruire, Cet épais in-folio repo- sant sur la table du bourgeois, dans le comptoir du mar- chand, sur les rayons du savant et du riche, est transmis de père en fils, précieux par les souvenirs qui s'y ratta- chent : c’est l'emblème du grand-père assis au coin du feu et racontant les histoires de son jeune âge ou distribuant les maximes recueillies, par l'expérience, sur le chemin si varié de la vie. Informez-vous en Flandre, ou en Hollande, de Jacob Cats, le plus humble villageois vous racontera les traits principaux de sa vie d'étudiant, d'agronome, d'homme d'État, de poëte; même la légende renchérira sur l’histoire. Comme poëte, nous possédons nombre de littérateurs infiniment supérieurs à Cats pour la concep- Lion hardie, l’expression et le style; mais l'enfant de Brau- wershaven a su faire vibrer la fibre flamande dans ce qu’elle a de primordial, le sens moral. La classe des lettres a choisi cette figure si éminemment populaire pour sujet de son premier concours de prose fla- mande. Deux mémoires lui ont été présentés. Le premier LPS, D'EES (471) porte pour devise le vers latin du poëte zélandais Hoffer, adressé à Cats : Vives et vivent istis lua carmina saeclis; l’autre a pour épigraphe les mots : Vader Cats. Le premier de ces mémoires est une œuvre non dépour- vue de mérite; elle est bien conduite et dépeint agréable- ment le poëte et ses qualités. Le style en est simple et assez correct; les très-rares fautes contre le génie de la langue qui s’y trouvent doivent en effet être moins impu- tées à l'ignorance des formes propres à notre idiome qu’à un vice plus général parmi nos jeunes littérateurs et qui consisle à accepter, presque sans examen, les néologismes que les journalistes se permettent de forger dans leur hâte de traduire ce qu'ils ont sous les yeux. | Après un exposé des mérites de Cats, l’auteur aborde la question de l'influence exercée par notre poëte sur la littérature néerlandaise. Ici l’auteur perd tout à fait le ter- rain : il aurait dû suivre le littérateur éminent dans son génie et ses formes particulières, il aurait pu écrire des pages intéressantes en exposant les luttes que les admira- teurs de Cats: ont eues à soutenir en Flandre contre les _ défenseurs d’une poésie plus mâle; il se contente, au con- traire, de citer soixante et dix poëtes hollandais et fla- mands, à commencer par Daniel Heinsius jusqu’à Bellamy, poëtes qui la plupart, dit-il, se rapprochent, dans leurs écrits, d’une manière frappante, de notre moraliste : Waer- van meesE allen, in hunne hier aengewezene werken, de vatbaerste, de treffendste toenadering tot onzen zedemeester aenbieden. Cette liste n’a même pas le mérite d’être le ré- sul{at d’une étude spéciale : l’auteur s’est contenté de con- sulter quelques ouvrages traitant d'histoire littéraire, ce qui l’a égaré et conduit à des malentendus ou à des appré- ciattons inexactes, ( 472 ) L'auteur du second mémoire divise son travail en trois paragraphes. Le premier est une sorte d'essai sur la ma- nière de concevoir l'amour chez les anciens et chez les modernes, et sur les efforts faits dans les Pays-Bas pour y appliquer la poésie didactique; le deuxième traite spé- cialement de Cats, surtout à ce point de vue; le troisième est une liste raisonnée des auteurs qui ont imité Cats, soit comme moralistes, soit dans ce qu’il a de caractéris- tique dans son style. L'auteur à eu surtout en vue les œuvres de Cats qui traitent de l’amour, notamment le Trouw-Ring (lAnneau nuptial) et het Houwelyck (le Mariage). À vrai dire, ce sont là les œuvres capitales du pote, celles qui ont peut-être passé le plus par les mains du publie : il a été longtemps d'usage de donner l’Anneau nuplial en cadeau de noces à une nouvelle mariée. L'auteur ne néglige cependant pas absolument les autres œuvres du poëte; mais le tableau qu'il en donne est d’une étendue très-restreinte, Il y règne parfois certaine confusion, qu’on serait tenté d'attribuer à un défaut de l’auteur, et qui résulte de ce qu'il ne distingue pas assez l’amour de la galanterie, c’est. ce que Coornhert avait fait en séparant, l'un de l’autre, liefde et minne. L'auteur n'est pas toujours exempt d’assertions hasar- dées. Après avoir fait ressortir que Cats plus que tout autre a su se défaire de ce fatras mythologique qui, jusque dans ces derniers temps, entravait chez la plupart des nations européennes le libre élan de la poésie, il dit que Cats penchait plutôt vers le mysticisme. Il est vrai qu'il ajoute : « pour autant que celui-ci (le mysticisme) soit du » domaine de la Bible, » C’est là une phrase qui sera jugée comme prise en l'air par ceux qui ont lu Cats, et qui doit 44 safe Si IT LURSSSSSSE Cie er, ; (415) induire en erreur ceux qui ne connaissent notre poêle que de nom. Les tableaux de Cats sont une description franche et pure: le corps et l'âme y ont également leur place; on n’y aperçoit ni pruderie, ni malice; pas d'équivoque, mais un laisser-aller d’honnête homme poli. Les convives du père Cats ne sont ni des enfants, ni des bigots, ni des blasés. | Il range Zevecote parmi les imitateurs de Cats. Or, déjà en 1616, ce poête érotique quittait le cloître, où l'avait conduit son amour, qui nous charme encore dans maint joli morceau de poésie. Ses tragédies, datant d’une époque postérieure, ne respirent en rien la manière de Cats, ni pour la pensée ni pour l'expression. De même Heinsius ne peut-il être rangé parmi ceux qui doivent de la reconnais- sance à Cats. Ses poésies, qui avaient déjà paru séparément, reçurent, en 1615, privilége des états généraux, et furent publiées en 1618, l’année que Cats donna son premier recueil, les Emblèmes. Ce que l’auteur dit des deux poëtes précités : dat Heinsius en Zevecote meer dan eene kunstver- plichting hadden aen den dichter, est donc invraisemblable. Il n'est pas moins hasardé de prétendre que l’éminent orateur Borger ait subi, dans sa première jeunesse, l’in- fluence de Cats par la lecture de la Bible des ménages que lui fit sa mère. Mais combien de littérateurs n’y a-t-il pas qui, dans leur enfance, ont lu ou entendu lire ou réciter des milliers de vers du poëte? Ce qui est arrivé au jeune Borger n'est pas, à beaucoup près, un fait exceptionnel. L'auteur embrasse une opinion trop exclusive sur la part minime que les classes supérieures de la société au- raient prise, dans les deux derniers siècles, au mouvement littéraire. [Il dit, page 18 : Niet te min hebben zich de eige- lijk geheeten geleerden in Vlaenderen DENKELUK mel ansen ( 474 ) Schrijver vroeger niet bijzonder bezig gehouden, al kan hun zijn grieksch en latiÿn wel eens uitgelokt hebben tot eenige kennismaking met den volksdichter. C’est là une assertion sans appui. Les études se faisant en latin, les philologues de ce temps-là ne cherchaient l’objet de travaux pas plus dans Cats que dans Vondel, quoique, vers le milieu du siècle dernier, la lutte devint assez étendue, assez piquante chez nous entre les partisans de ces deux génies si dissem- blables. Ou bien, l’auteur veut-il dire que, parmi les poëtes de ce temps, on ne rencontre pas d'hommes savants? Cela serait aussi injuste que cette autre assertion, où il pré- tend que, de nos poëtes flamands, Lambrechts seul et par exceplion, appartenait à la haute société. Je ne rappellerai pas les savants ecclésiastiques, les avocats et les méde- cins qui ont manié avec succès la lyre flamande; je lui citerai cependant Thierri Van Liesvelt, seigneur d'Opdorp, Éverard Wassenbergh, Ignace d'Hanins, messires Ymme- loot, De Coninck et Van den Brandt, les jurisconsultes De Wree, Van der Borcht, Deck-her, De Condé, etc., tous appartenant, par leur naissance et leur position, à la classe élevée de la fraction des Pays-Bas qui fut ramenée sous le sceptre de l'Espagne, tous Flamands ou Belges; c'est le nom que l’auteur préfère donner à nos ancêtres, quoique ce dernier terme soit tout à fait inexact comme expression historique. Le terme générique de Belge s’appliquait in- distinctement aux habitants des dix-sept provinces, et nous ferons remarquer que le mot fut encore employé dans ce sens par Feith et Bilderdyk. Le mémoire est écrit dans un style correct; il est même ce qu'on nomme châtié. Mais l’auteur a le défaut de vou- loir à tout moment décliner ses substantifs à la manière (les auteurs du moven âge : cela enlève au style sa vivacité, “ AMEL FER HN ( 475 ) Nous avons le plus grand respect pour les formes si riches et si cadencées de la prose flamande antérieure à l'époque de la réforme, et nous sommes de ceux qui croient que, pour la beauté et l'harmonie du style, il convient de ré- server une part à ces formes antiques dans notre prose moderne. Mais c’est se perdre, c’est rendre un bien maigre service à la cause qu’on défend, que d’abuser inconsidéré- ment de ressources qui, employées avec sagacité, relèvent avec d'autant plus d'éclat et de solennité la richesse et la force de la langue. Vous qui êtes si prodigue, dans vos écrits, de formes dont les anciens ne vous ont pas encore dévoilé tous les secrets, emploieriez-vous un tel langage pour entraîner votre auditoire, si un jour vous vous trou- viez en face d’un public nombreux, soit à la tribune, soit dans une assemblée délibérante? Non certes; car vous dé- sireriez trop le triomphe de la cause dont vous auriez pris la défense, pour la compromettre ou pour vous exposer à une sévère accusation de pédantisme. . Malgré ces observations, qui ne touchent qu’à des points isolés ou secondaires et qui ne sont, pour la plupart, que le résultat d’un sentiment personnel, je suis d’avis que le mémoire portant pour épigraphe les mots Vader Cats mé- rite la médaille d’or et les honneurs de l'impression. » Rapport de M. Dartid. a Je me rallie sans réserve au jugement porté sur ces deux mémoires par mon honorable confrère, M. le docteur Snellaert, ainsi qu'aux conclusions de son rapport. » Rapport de M. Nolet de Brauiere van Steeland, « J’adopte volontiers les conclusions du rapport de mon savant confrère, M. le docteur Snellaert, sans toutefois me rallier au jugement qu'il porte sur le mémoire n° 1, qui se distingue par la grande érudition du fond autant que par la correction et l'élégance de la forme. C’est à cette belle œuvre, bien digne de figurer au nombre des savantes publications de l’Académie, que je propose de décerner la médaille d’or. Je m’estime heureux de ne point partager tous les scrupules de mon savant confrère : c'est précisé- ment ce qui me permet de faire miennes ses conclusions et d'aboutir comme lui, mais par une voie plus directe et à coup sûr moins hérissée d'encombres littéraires, au but que lui-même s'était proposé. » Conformément aux conclusions des rapports des trois commissaires, la médaille d'or a été décernée au premier mémoire dont l’auteur est M. Prudens Van Duyse, cor- respondant de l'Académie, récemment décédé. CINQUIÈME QUESTION. Quelle a été l'influence littéraire, morale et politique des sociélés et des chambres de rhétorique dans les dix-sept pro- vinces des Pays-Bas et le pays de Liége ? apport de M. Sneïlaert. « C'est la troisième fois que le même mémoire vous est présenté en réponse à la question ci-dessus. 25 CAR ( 477) L'année précédente, la classe a décerné la médaille d'argent à ce travail, fruit de longues recherches. L’'au- teur, mettant à profit les observations consignées dans les différents rapports, a eu le courage de revoir son œuvre, de la remanier en partie. Il s'ensuit que ce travail, de lourd et indigeste qu'il était, est devenu digne d’auirer l’attention du monde savant. On peut différer d'opinion avec l’auteur sur certaines appréciations et lui reprocher parfois d’avoir trop précipité son jugement; on peut re- gretter qu'il ait oublié de fournir les preuves des faits nou- veaux qu'il allègue; on peut lui reprocher la réapparition de légères contradictions, de quelques redites, même de certaines inexactitudes, le nouveau mémoire pris dans son ensemble, n’en reste pas moins une œuvre utile. Il est vrai qu'il laisse à désirer sous le rapport de la correction : des noms propres, des dates sont estropiés; parfois un néologisme insoutenable, tel que welkdanig (p. 140), vous arrête; plus souvent c’est un mot impropre qui donne à la phrase un sens que l’auteur n’a pu vouloir lui donner, C’est ainsi que nous trouvons onbekend pour overbekend (p. 90), slotvagel pour slotregel (p. 129), vermaerd pour vermaend (p. 149), et bien d’autres encore. Dans la plupart des cas, l’erreur est pertinemment due au copiste, faute de pouvoir déchiffrer l'original; cela est si vrai qu'en un certain en- droit, le pauvre scribe se permet de remplacer le mot ou les mots indéchiffrables par un signe d'interrogation. Je propose de couronner l’auteur du mémoire et de pu- blier l'ouvrage dans nos annales, » (478) Rapport de M, le baron de Saint-Genois. « C’est pour la troisième fois que vous m'avez fait l’hon- _neur de me nommer commissaire pour examiner le ré- sultat du concours relatif aux chambres de rhétorique. Cette importante question, inscrite cinq fois de suite au programme des concours de la classe, a reçu, en 1858, une première solution qui n’a pas été jugée satisfaisante. Remise au concours l’année suivante, elle a été traitée de nouveau par l’auteur du premier mémoire et, cette fois, d'une manière assez remarquable pour que deux commis: saires sur trois proposassent de lui décerner la médaille d’or. Toutefois, après une longue discussion, la classe n’adopla point ces conclusions, mais décida, avee le troi- sième commissaire, qu'on accorderait à l’auteur la mé- daille d'argent, et que la question serait reportée au pro- gramme de l’année 1860. Conformément à cette résolution, la question a re- paru au programme, et son maintien nous à valu cette fois un mémoire concis, rédigé avec soin, méthode et ensemble. Les nombreux défauts d'exécution, les lon- gueurs interminables, la défectueuse distribution des ma- tériaux, l'absence de résumés clairs et substantiels que j'avais eu à signaler dans les mémoires des deux années précédentes, ont disparu du travail que nous avons sous les yeux. Ce qui, dans le résultat des deux autres concours, n'avait été que des notices, intéressantes sans doute, mais dépourvues de cohésion et d’homogénéité, hérissées de notes parasites, de citations et de hors-d'œuvre de tout genre, est devenu une véritable dissertation, dont la lec- (419 3” ture cesse de fatiguer et dont les proportions démesurées se sont reserrées dans de justes limites. Certaines appréciations que nous avions signalées comme étranges ou très-contestables, y sont aussi présentées d’une tout autre manière; nous en cilerons un exemple. Dans notre rapport de 1858 , nous avions été surpris, à bon droit, de ce que l’auteur du premier mémoire se fût refusé à reconnaître que les rhétoriciens avaient contri- bué, au XVI" siècle, à la diffusion des doctrines de la ré- forme dans les Pays-Bas. L'auteur du mémoire actuel prend le contre-pied de celui des mémoires précédents. Enthousiaste de la révo- lution religieuse du XVI""° siècle, il se complait à exalter, avec trop d’insistance peut-être, le concours actif que les rhétoriciens prêtèrent aux réformateurs de cette époque. Nous avouerons même qu’il fait preuve d’une grande par- tialité, lorsqu'il nous montre ces sociétés littéraires aux prises avec l’orthodoxie de l’Église. Il s'ensuit que son tra- vail est devenu, çà et là, en même temps, un panégyrique de la réforme, comme instrument obligé de l’indépen- dance des Pays-Bas au XVI"* siècle, et un acte d’accusa- on contre Rome, qu'il présente comme complice aveugle du despotisme espagnol dans nos provinces. Dans certaines parties du mémoire, le plaidoyer trop vif, trop ardent, a remplacé le calme de la dissertation ; mais, ces réserves faites, nous nous empressons de recon- paitre que le travail qui nous est présenté est resté dans les limites de la question posée par l’Académie : Quelle a élé l'influence littéraire, morale et politique des chambres de rhétorique ? Son plan, bien conçu et bien disposé, a été fidèlement exécuté. La forme littéraire annonce de lélévation dans " ( 480 ) la pensée; elle est empreinte de la gravité qui convient à un sujet de ce genre, quoique, çà et là, le style soit peut- être un peu roide, un peu contourné; mais, en somme, nous inclinons volontiers pour que la médaille d’or soit décernée à l’auteur et pour que sa dissertation soit insérée dans la collection de nos mémoires in-quarto. Happort de BI. David. « Mes honorables collègues l'ont déjà dit, €’est pour la troisième fois que ce même mémoire, en répouse à la cinquième question du programme, est soumis à notre appréciation. Comme eux, je reconnais que ce travail, ; complétement remanié par l’auteur, est devenu plus précis et plus mé- thodique. Au fond cependant, c’est toujours, comme dans les deux premiers mémoires, l'histoire des Sociétés de rhétorique et des divers genres de littérature auxquels ces sociétés se livrèrent, plutôt qu’une véritable dissertation sur leur triple influence, demandée par la classe. Seule- ment, dans la nouvelle rédaction du mémoire, cette partie de la question est moins négligée que dans les précédentes. L'auteur y consacre à peu près le tiers de son travail; et quoique cette partie soit faiblement traitée, quoique je ne puisse ni entrer dans toutes les vues de l’auteur, ni ad- mettre tous ses principes, ni reconnaître la justesse de tous ses raisonnements, je me range néanmoins à l'avis de mes confrères, et je pense avec eux que la classe peut Jui décerner la médaille d'or. Quant à l'honneur de l'impression, j'hésite à le lui ac- 70 4 1 SES ta ” " ( 481 ) corder. D'abord, comme l’a fait remarquer M. le docteur Snellaert, la copie que nous avons eue sous les yeux est très-défectueuse, non-seulement pour l'orthographe des noms propres, mais aussi pour une foule de mots que les copistes (car on distingue deux mains) n'ont pas su lire et qu'ils ont ou complétement défigurés, ou remplacés par d’autres ne présentant aucun sens. Il sera donc très-diffi- cile de corriger et de rectifier le texte, à moins qu’on ne puisse recourir au manuscrit de l’auteur même. Mais il y a autre chose. L'ouvrage tel qu'il est et tel qu’il faudrait le reproduire, laisse beaucoup à désirer sous le rapport littéraire. Les néologismes inadmissibles, les termes impropres ou détournés de leur vraie significa- tion, les fausses métaphores s'y rencontrent en grand nombre. Ensuite l’auteur est de ceux qui croient mar- cher dans la bonne voie en essayant de faire revivre cer- taines formes grammaticales observées par nos écrivains du XIIL”° et du XIV”: siècle, mais généralement négligées de nos jours : ils ne se doutent pas que c’est aller à l’en- contre du développement historique de la langue et du progrès de l'esprit humain. La langue flamande, comme toutes les langues modernes, a parcouru trois périodes. Dans la première, celle de son enfance, elle est pauvre, rude, inflexible; dans la seconde, elle prend des formes grammalicales, elle exprime les rapports par des dési- nences, les idées complexes par des compositions : c’est Ja langue de nos auteurs du moyen âge, belle, naïve, énergique, mais dénuée de qualités littéraires. Par con- tre, dans sa troisième période, qui est celle d’aujour- d'hui, la langue, en se dépouillant en partie de ses anciennes formes, est devenue plus souple, plus claire, plus coulante, mieux appropriée à la précision du raison- ( 482 ) nement, au rhythme de la poésie, aux élans de l’élo- quence. Ce que l'écrivain moderne doit rechercher, ce ne sont pas les déclinaisons du XIII" siècle, mais la pureté, l'harmonie, la variété, en un mot, les qualités du style sans lesquelles toute œuvre littéraire, dans l’état actuel de la civilisation, est fatalement vouée à l'oubli. Je regrette de devoir ajouter qu'à mon avis, ces qualités manquent généralement au mémoire que nous avons examiné. » La classe a décerné la médaille d’or à Fanteur, M. Pru- dent Van Duyse. CONCOURS EXTRAORDINAIRE. au Exposer l'origine belge des Carlovingiens. Discuter les faits de leur histoire qui se rattachent à la Belgique. Happort de M. Borgnet. « Le concours ouvert sous votre patronage, il y a quatre ans, après avoir produit un premier travail, vient d'en produire un second. Malheureusement, — et je le dis à re- gret,— le dernier me paraît plus faible encore que celui qui l’a précédé, et il a tout particulièrement méconnu le caractère et la portée de la question. Les termes de cette question, surtout avec l'explication qu'on y a jointe, ne doivent cependant laisser aucune incertitude. Qu'y de- mande-t-on , en effet ? Deux choses : la démonstration de ( 485 ) l'origine belge des Carlovingiens, l'exposé des faits de leur histoire qui se rapportent à notre pays. Pour traiter convenablement un tel sujet, il faudrait, me semble-t-il, prendre à son début la lutte de l’Austrasie et de la Neustrie, en dire les causes et en retracer les principales phases. En procurant à l’Austrasie l’occasion de conquérir d’abord son indépendance, puis d'imposer à son tour sa prépondérance à la Neustrie qui, jusque-là, avait dominé par les Mérovingiens, cette lutte amena l'élévation de la famille carlovingienne en l'appelant à per- sonnifier la nationalité même du pays qui lui donna nais- sance. Après avoir rapporté ce qu’on sait du père de Pepin de Landen, on peut, aborder directement la narration re- lative à ses descendants, et la continuer sans embarras jusqu’au traité de Verdun. Mais une fois arrivé à ce grand épisode, quel ordre convient-il de suivre? Sans doute, les règnes des succes- seurs de Louis le Débonnaire ne présentent plus pour nous le même intérêt que ceux des héros fondateurs de la dy- nastie. L'empire franc s’est partagé, et la Lotharingie, qui s’est formée de la partie essentielle de l'ancienne Aus- trasie, doit particulièrement attirer l'attention. Néanmoins, il convient de suivre encore les Carlovingiens dans les autres pays, d'autant plus que la Lotharingie, après deux vaines tentatives pour obtenir une dynastie propre, se trouva ensuite disputée entre l'Allemagne et la France, tantôt partagée entre elles, tantôt adjointe à l’une ou à l’autre. En Allemagne, d’ailleurs, de même qu’en France, il existe certains rêgnes intéressants à étudier pour nous : ici, par exemple, ceux de Charles le Simple et He son petit-fils Lothaire, là celui d’Arnuif. Où faut-il s'arrêter? La fin me paraît encore bien nei- 2% SÉRIE, TOME IX. 24 ( 484) tement indiquée. [Il ne peut être question de scruter l’his- toire de toutes les familles souveraines qui, par les femmes, se rat{achent à Charlemagne. L’expression Carlovingien est assez claire, et, dans le langage historique, ne s’'ap- plique qu'aux descendants mâles de notre illustre com- patriote. Ainsi, Louis, dit le Fainéant, en France, Louis l'Enfant, en Allemagne, seront le terme naturel du travail. Mais une branche a continué à gouverner la Lotharingie, même après la disparition de cette famille dans les deux États voisins, el si nous connaissons peu de chose de l’ad- ministration du duc Charles, comme de celle de son fils Othon, il est toutefois intéressant de constater que la dy- nastie est venue s’éteindre dans le pays qui lui a servi de berceau. Tel est, à mon avis, le cadre à remplir, en y faisant entrer, Je le répète, non tous les événements de l’histoire des Carlovingiens, mais uniquement ceux qui concernent plus ou moins directement notre pays. Je vais dire main- tenant la manière dont l'auteur du mémoire, sur lequel vous êtes appelés à vous prononcer, a compris sa tâche. Pour cette partie de mon rapport, je me suis trouvé assez gmbarrassé. J'avais sous les yeux le travail le plus volumineux peut-être qui jamais ait élé envoyé à l’Acadé- mie. Eût-il été bon, que j'y aurais certainement trouvé matière à mainte controverse; mais comme Je suis fort éloigné de le trouver tel, sous le double rapport du style et des idées, j'y ai recueilli une ample moisson de remar- ques critiques. Les énumérer et mettre sous vos yeux les rectifications qu'elles m'ont suggérées, c’eût été allonger infiniment un rapport qui ne sera déjà que trop étendu. J'ai cru que je devais être fort sobre d'observations détail- lées, et qu'il fallait avant tout donner une connaissance ( 48 ) exacte du mémoire, sauf à résumer ensuite les motifs qui ont déterminé mes conclusions. Le titre déjà prouve que l’auteur n’a guère tenu compte des intentions du fondateur du concours. Dans une lettre aux membres du jury, il donne à ce sujet des explications que j'avoue ne pas avoir bien saisies. Je suis encore à me demander pourquoi, réformant la rédaction de l’Académie, il a intitulé son œuvre : Histoire philosophique, politique, civile, religieuse et généalogique des origines belges de la famille des Carlovingiens, avec discussion des points con- testés relatifs aux événements survenus en Belgique. Voila un titre qui ne brille ni par la correction ni par la préci- sion , et qui promet plus qu’il ne tiendra. L'introduction renferme trois chapitres consacrés à ex- poser successivement les éléments gaulois, germains, chré- tiens et barbares de la civilisation carlovingienne. Toute cette partie du travail porte sur les premiers temps de la domination franque en Gaule, c’est-à-dire sur une époque où 1l n’est pas encore question de famille carlovingienne. Dès lors cela serait plus applicable aux Mérovingiens, qui sont venus les premiers. Je voudrais bien savoir aussi s'il y a, dans ce que l’auteur appelle civilisation carlovingienne, des éléments germains qui ne soient pas barbares, et des éléments barbares qui ne soient pas germains. En tout cas, c'est un abus de consacrer soixante et quinze pages à des préliminaires, quand on devrait se contenter d’es- quisser à grands traits l'établissement des Francs en Gaule. La première partie est intitulée : les Carlovingiens, issus de Clodion, détrônés et proscrits par les Mérovingiens, re- paraissent à la cour, pour s'y élever à la dignité de maires du palais ; et faire une première tentative infructueuse pour récupérer leur couronne. Cette partie comprend six chapi- ( 186 ) tres, dont le premier porte ce titre : Les Carolinges sous les Mérowinges. Je n’attache pas une grande importance à ces nouvelles dénominations; si toutefois, aux yeux de l’auteur, elles valent mieux que les anciennes, pourquoi ne pas en user constamment? Quand on se permet des _ néologismes, en fait de noms propres, il faut être consé- quent avec soi-même, et ne pas reculer devant une recti- fication complète. Mais je dois m’arrêter quelques instants à ce chapitre, qui contient un exposé des idées de l’auteur sur l’origine des Carlovingiens et la cause qui l’a entrainé dans des développements inutiles. Je l'ai dit plus haut, il n’y a pas à se méprendre sur le sens ni sur la portée du mot Carlovingiens. Prenez quelque historien que ce soit, jamais il n’est question de l'appliquer à d’autres personnages qu'aux membres de celte famille qui, partie de Pepin de Landen, a produit Charlemagne et sa descendance directe. Pour l’auteur, 1l n'en est pas ainsi, et les Carlovingiens sont tout autre chose. Je tâcherai de résumer son système en peu de mots. Selon lui, Clodion aurait eu trois fils qui, dépouillés par Mérovée, auraient été forcés de quitter le pays. De l’un d'eux, Réginald, serait issu saint Arnould, le père d’An- gésise, mari de Begge. Quant au père de Begge, Pepin de Landen, on sait qu’il descend de Carloman , lequel pour- rait bien aussi, dit l’auteur, appartenir à la famille des Clodioniens : c'est le terme dont il se sert pour indiquer saint Arnould et ses ancêtres. Je n’entends pas contester l'intérêt d’une diseussion sur l'origine de saint Arnould, l’aieul paternel de Pepin de Herstal; mais Je ne saisis pas, je l'avoue, l'importance qu'on y attache dans la question posée par l’Académie. Qu'Angésise soit un Romain ou un Germain, cela n'em- ( 487 ) pêche pas son fils, carlovingien par sa mère, d’être né sur notre sol, d'y avoir passé sa vie, d’être belge en un mot, comme son aïeul et ses premiers descendants. . Pour ce qui est des Clodioniens, je me contenterai de faire remarquer que leur existence est fondée uniquement sur la légende, qu’il n’en est pas question dans des docu- ments historiques sérieux , et qu'il u’y a pas plus de raison d'admettre la tradition qui les. concerne, que toutes les autres traditions recueillies sur nos origines au moyen âge. Libre à l’auteur de priser haut l'autorité de Jacques de Guyse , et de se fâcher très-fort contre les ignorants qui ne l'ont pas apprécié; je lui conseille toujours, s’il veut devenir un historien sérieux, de ne pas admettre légère- ment les allégations de nos chroniqueurs, sur les faits dont ils n'auront pas été les témoins immédiats. Institutions mérovingiennes, tel est le titre du chapitre IF. Je ne vois pas trop la différence essentielle que l’on peut constater entre les institutions mérovingiennes et les in- stitutions carlovingiennes, et je me fais encore cette ques- lion, après avoir lu les pages que l’auteur y a consacrées. Les Francs sont restés tels sous l'autorité des Carlovin- giens comme sous celle des Mérovingiens, et s’il a existé quelque différence entre les Austrasiens, compatriotes des premiers, et les Neustriens, compatriotes des seconds, elle n’a pas réagi sur les institutions au point de les différen- cier dans leur essence. En tout cas, le bon sens et l’ordre chronologique réclamaient la priorité pour les Mérovin- giens, et 1] me semble que l’auteur aurait dû examiner leurs institutions, avant de parler des éléments de ce qu'il appelle la civilisation carlovingienne. Dans le chapitre If, Les Carlovingiens deviennent maires du palais, on voit cet avénement prendre le caractère ( 488 ) d'une restauration, et cela à l’aide d’une généalogie évi- demment fabriquée pour earesser l’orgueil de nos dynas- ties provineiales. Viennent ensuite le chapitre IV, Le chris- tianisme en Austrasie, le chapitre V : Les descendants mâles de Garloman , et le chapitre VI : Les monastères sous Pepin de Landen et ses enfants. | Après s'être tenu jusqu'ici presque constamment dans les préliminaires, l’auteur aborde le terrain réellement historique, en commençant la deuxième partie. Elle est intitulée : Les Carlovingiens acclamés ducs souverains de Belgique (basse Austrasie) et maires du palais du reste des Gaules. Cette partie renferme cinq chapitres consacrés : le premier, à Anségise, Pepin de Herstal et son cousin Martin; le deuxième à Pepin de Herstal seul, et devenu chef de tous les Francs après la bataille de Testry; le troi- sième à Charles Martel ; le quatrième à quelques apôtres, dont la mission évangélique fut appuyée par les Carlovin- giens; le cinquième aux événements qui précédèrent la retraite de Carloman, frère de Pepin le Bref. J'aurais sur tout cela beaucoup d'observations de détail à présenter, si je ne croyais devoir me restreindre autant que possible. Je ferai seulement remarquer que, dans l'énumération des causes qui expliquent l'élévation des Carlovingiens, l’auteur ne fait pas suffisamment ressortir la principale, la lutte entre l’Austrasie et la Neustrie. Il semble tenir pour plus efficace l’action du clergé qui leur fut en effet favorable, mais dont la sympathie n'aurait à coup sûr pas suñi pour leur transmettre l'héritage des Mé- rovingiens. Je suppose aussi que les expressions pouvoir absolu, employées pour désigner l'autorité qui leur fut con- férée, est une erreur de plume, et que l’auteur a vonlu dire pouvoir supréme. Ce serait la première fois, je pense, ( 489 ) qu'il viendrait à l’idée d’un historien de transformer en despote le chef d'un des États quelconques fondés par les Germains. Quant à la science étymologique de l’auteur, elle n’est guère solide, à en juger par l'explication du mot Herstal et par l’origine assignée aux dénominations Mar- tinrive et Raborive, deux localités situées au pied des ruines pittoresques appelées ordinairement château d'Am- blève ou château des quatre fils Aymon. A la fin de la deuxième partie, l’auteur a traité, mais d'une manière bien insuffisante, la question du lieu de naissance de Charlemagne. [1 cherche à expliquer le silence d'Éginhard à ce sujet, en le rattachant à la légende de sa mère Berthe, qui aurait été supplantée dans la couche de Pepin par la fille de sa nourrice. Je n’ai pas compris l’ex- plication, et j'ai moins compris encore un système qui tend à donner une valeur historique à une légende qu’on raconte comme telle; c’est cependant ainsi que procède l’auteur, en l’employant à expliquer le silence du biographe de Charlemagne. La troisième partie, les Carlovingiens de rois deviennent empereurs el d'empereurs redeviennent rois, S'étend de l’avé- nement de Pepin le Bref au trône au partage de l'empire franc entre les fils de Louis le Débonnaire. Le chapitre [°° est consacré à Pepin le Bref, les trois suivants à Charle- magne , le cinquième à Louis le Débonnaire et à ses en- fants. Il y a à, même dans le chapitre IV, vestiges du règne de Charlemagne en Belgique , bien peu de données qui in- téressent réellement notre pays. L'ancienne Belgique, de royaume d’Austrasie devenue royaume de Lorraine, en perdant plus d'un tiers de son territoire primitif, s'organise en grands fiefs dont s'empare la branche cadette de la famille des Carlovingiens. Tel est le ( 490 ) titre, passablement long et détaillé, de la quatrième par- tie. Elle comprend quatre chapitres, dont le premier, l'arène féodale en Belgique, est resté à l’état d’ébauche. Les trois autres chapitres sont consacrés à Lothaire IF, à Charles le Chauve, à Louis le Germanique, à Louis le Bègue, à Louis de Saxe, à Charles le Gros, à Arnalf, à Zwentibold, à Louis l'Enfant et à Charles le Simple. Le mémoire contient une cinquième et dernière partie intitulée : L'ancienne Belgique, d'abord réduite en royaume d'Austrasie, puis en royaume de Lorraine, devient duché de Lorraine, pour étre de nouveau morcelée et ne plus for- mer que le duché de basse Lorraine, avec des membres de la famille Carlovingienne pour ducs souverains. Cette par- tie se compose de dix chapitres consacrés à l’histoire des dues de Lotharingie jusqu’à Godefroid de Bouillon inclu- sivement. De ces dix chapitres, les deux derniers sont restés à l’état d’ébauche, comme le premier de la qua- trième partie. Même pour ceux qui sont donnés comme définitivement rédigés, on peut, au style et à l'écriture, constater la précipitation avec laquelle 1ls ont été com- posés. L'auteur s'excuse de n’avoir pu mettre la dernière main à son travail, en alléguant une maladie causée, dit-il, par l'excès de fatigue. Avec son système des Clodio- niens, il n’a pas cru devoir s'arrêter à la descendance de _ Begge et d’Angésise. J'ai déjà dit que la dénomination Carlovingiens me paraissait suffisamment claire, et ne comprenait que les personnages auxquels tous les his- toriens sont convenus de l’appliquer. Dès lors cette pré- tendue lacune, qui affecte tant l’auteur, n’a aucune im- porlance à mes yeux, puisque je considère cette cinquième partie comme étant tout à fait en dehors de la question; je ne vois d'exception à faire que pour deux des.individus ( 491 ) qui y sont mentionnés : Charles de France et son fils Othon. Il ne me reste plus qu'à conclure, ou plutôt à motiver des conclusions que j'ai fait connaître au commencement. . Le mémoire ne mérite pas le prix. Quoique deux ou trois chapitres attestent un talent d'écrire assez remarquable, ils ne peuvent racheter la faiblesse générale de l’œuvre. L'auteur n’a pas travaillé d’après les sources; il ne paraît même pas les connaître. Quand il les cite, c'est d’après un historien moderne, Bertholet, par exemple. Il ne pro- duit done qu'un travail de seconde main, et n’a pas même su choisir ses guides avec discernement. Vos rapporteurs ont eu plus d'une occasion de sourire à la lecture de cer- tains noms cités comme d’imposantes autorités. Le style est entaché de boursouflures et de néologismes; cependant il ne manque pas d'élégance n1 d'entrain. Pour dire toute ma pensée, cela me paraît être l'œuvre d’un jeune homme à qui l’expérience fait défaut, mais qui, malheureusement, possède une haute opinion de lui-même. La présomption ne sied à personne, et Thucydide ou Tacite seraient à peine excusables de parler de leurs œuvres, dans les termes que l'auteur du mémoire emploie à célébrer la sienne. Quoi qu'il arrive , dit-il quelque part, son travail sera publié. Ces paroles font tout l'effet d’une menace dont je ne crains guère la réalisation, car J'ai assez de confiance dans le bon sens du publie instruit, pour être certain de voir ratifier le: jugement que Je porte aujour- d'hui. Je propose à la classe de ne pas décerner le prix; je lui propose aussi, en présence de ce double échec, de rayer la question de son programme. » = (492 ) Rapport de M. Arendt. « L'examen attentif du mémoire présenté en réponse à la question sur l’origine belge des Carlovingiens, m'a con- duit à des conclusions semblables à celles que notre sa- vant et honorable confrère, M, Borgnet, vient de soumettre à la classe. Comme lui, je ne puis proposer d'accorder un prix au travail dont il s’agit. L'auteur, à qui je recon- nais volontiers une grande ardeur d'étude, des lectures étendues, un certain talent d'écrire, s’est complétement trompé sur la portée de la question, en confondant l’ori- gine belge de la famille des Carlovingiens avec les origines belges en général, Il en est résulté qu'une partie considé- rable de son volumineux travail se trouve tout à fait en dehors du sujet spécial et limité du concours, ou n’a avec celui-ci que des rapports vagues et éloignés. Je m'explique d'autant moins cette erreur, que les observations dont la classe avait accompagné son programme de 1859, ainsi que celles présentées par les rapporteurs du concours de l'année dernière, ne pouvaient laisser de doute sur le sens dans lequel la question doit être comprise, ni sur l'étendue qu'il convient de lui donner. Dans la partie de son mémoire qui rentre le plus dans le sujet propre du concours, l’auteur, à mon avis, pèche surtout par un manque presque Lotal de critique, quant à la valeur des sources où il a puisé ses récits, et par une Çonnaissance fort incomplète des travaux de l’érudition moderne sur la plupart des points qu’il avait à traiter. Je doute qu'il ait fait une étude approfondie des écrivains et des autres documents de diverse nature, qui seuls peuvent fournir les éléments d’une histoire de l’époque carlovingienne, ( 495 ) telle que l'exige l’état actuel des sciences historiques. S'il les a connus tous, ce que je n’oserais affirmer, il ne s’est guère préoccupé de rechercher le degré de confiance qu'ils méritent. À ses yeux, il n’y a, pour ainsi dire, qu'une seule source que l’historien moderne doive suivre, c’est la chronique de Jacques de Guyse, dont il exalte le mérite outre mesure, dans lequel il voit le père des sciences historiques en Belgique et dont il suit les récits avec une confiance que je ne crois pas qualifier trop sévèrement en l'appelant aveugle. « C’est surtout dans Bt Of Go en NN CO SN es CR, ie D OO 7 M 4 L "2 PIN, fie l’œuvre de ce bon Jacques, dit-il, que nous irons cher- cher nos origines carlovingiennes. Nous savons qu'on lui a reproché avec amertume son défaut de critique, sa facilité à se faire l’écho de toutes les traditions ; mais, à nos yeux, là se trouve un de ses principaux mériles. Selon nous, en effet, toutes les légendes, toutes les tra- ditions, les mythes et les symboles, reposent toujours sur des faits, mais transfigurés par l'imagination po- pulaire. La science consiste à retrouver le héros sous l’auréole symbolique, la vérité sous les voiles brodés de fables. Loin de nous le superbe dédain de lineptie et l'ignorance! Nous ne savons pas rire quand on nous dit que les Trévirs viennent de Trever, fils de Sémiramis, que Tullus Hostilius fonda la ville de Toul, que les Nerviens descendent des Romains, et les anciens Volgs des Volsques du Latium. La docte Germanie n’a-t-elle pas constaté que les races germaniques proviennent des races saces et asgardiennes , de même que les peuples de l’Assyrie; que les races galliques, teuloniques et pélasgi- ques sont trois rameaux d'une même souche. Sachez done interpréter le mythe avant de le conspuer : les traditions ne mentent jamais! » ( 494 ) Je ne sais si dans la docte Germanie, l’auteur trouvera beaucoup de savants, surtout parmi ceux qui s'occupent sérieusement d’études historiques, disposés à souscrire à son système par trop absolu sur la valeur des mythes en histoire, et qui, comme lui, voudraient s’écrier : que les tra- ditions ne mentent jamais. Mais ce que je sais avec une très- grande certitude , c'est qu’au nombre des travaux publiés récemment dans cette même docte Germanie et qui ont été : fort applaudis par les hommes les plus compétents, figure un travail critique sur la chronique du même Jacques de Guyse démontrant de la manière la plus irréfragable que la partie de cette chronique où il est traité des ori- gines belges n’est pas même tirée de la tradition, mais d’un genre de productions, fort répandues à cette époque du moyen âge, qui ressemble plus au roman qu’à toute autre chose (1). | Il est regrettable que l'auteur, avant de s'engager dans un système qui doit enlever toute valeur aux résul- tats auxquels il dit être parvenu après de grands efforts et un travail opiniâtre, ne se soit pas entouré des ren- seignements que fournissent, à l’égard des sujets sur les- quels portaient ses recherches, les travaux, sous tous les rapports si remarquables, sur les événements et les insti- tutions de l’époque carlovingienne , que nous devons à M. Pertz et aux nombreux savants qui marchent sur les traces de ce grand érudit. Il est ainsi arrivé à l’auteur de traiter d’une manière insuffisante et souvent ouvertement défectueuse, des questions qui même, à son point de vue (1) V. Jacobide Guisia Annales Hannonie , Untersucht van D' Wil- mans, dans Pertz, 4rchiv., ete., t. IX, p. 292-382. 5. "ti | ( 495 ) et pour le système qu’il adopte, offraient une importance majeure. | L'auteur parle quelque part de son âme impression- nable de poëte et de penseur. J'aime beaucoup les bons poëtes, et je respecte infiniment les vrais penseurs ; mais l’auteur me permettra de lui dire que, pour résoudre la question qui lui était posée, il faut avant tout être histo- rien, c’est-à-dire un homme qui, dans la recherche de la vérité, sache se garder autant des entraînements de l’ima- ginalion que d'opinions absolues et systématiques qui sont en dehors des faits et quelquefois même en contra- diction avec eux. Cette absence presque totale de critique et le manque d'une connaissance complète des matériaux sur lesquels il fallait travailler, me mettent, à mon grand regret, dans l'impossibilité de proposer à la classe un prix ou un accessit en faveur de l’auteur du mémoire, et je ne puis qu’adhérer simplement à la première partie, si bien mo- tivée, des conclusions de M. Borgnet. Quant à la seconde partie de ces conclusions, qui est relative à la radiation de la question du concours, je me réserve de développer de vive voix à la classe les raisons qui m’empêchent de m'y rallier, » Happorti de M. Polain. « Je partage entièrement la manière de voir de mes deux honorables confrères, MM. Borgnet et Arendt, sur le mémoire de concours que la classe a envoyé à notre examen, et suis également d’avis qu'il n’y à pas lieu ( 496 ) d'accorder le prix ni de remettre la question en pro- gramme. » Conformément aux conclusions des trois rapports qui précèdent, la classe a décidé qu'il n’y a pas lieu de dé- cerner le prix. ÉLECTIONS. La classe à procédé à l'élection de quatre correspon- dants, pour compléter le nombre de dix qu'elle peut s'ad- Joindre, aux termes de son règlement. Les choix, faits au scrutin secret, Se sont successivement portés sur MM. le colonel Guillaume, directeur au Ministère de la guerre, F. Nève, professeur à l’université de Louvain, Alph. Wau- ters, archiviste de la ville de Bruxelles et P. Blommaert, littérateur à Gand. Il a ensuite été procédé à l'élection de quatre associés, et les suffrages se sont portés sur MM. G. Grote à Londres, Lelewel]l à Bruxelles, Ph. Le Bas à Paris, et le R. P. Theiner à Rome. La classe s’est aussi occupée de former la liste double de candidats parmi lesquels le Ministère de l'intérieur choisira les cinq membres chargés de juger le concours ouvert en l'honneur de Van Maerlant, institué par le Gou- vernement. M. le Secrétaire perpétuel est chargé de transmettre au Ministère de l’intérieur les dix noms proposés par la classe. — On s'est occupé ensuite de régler les dispositions à prendre pour la séance publique du surlendemain. A —— ER 1Af À # . : { (497) Séance publique du 11 mai 1860, à 1 heure. M. Gacnar», directeur de la classe et président de l’Aca- démie. M. »E Ran, vice-directeur. M. An. QuereLer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Borgnet, le baron J. de Saint- Genois, Paul Devaux, De Decker, Snellart, Haus, Bor- mans, M.-N.-L. Leclercq, Polain, de Witte, Ch. Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, mem- bres ; Nolet de Brauwere van Steeland, associé; Th. Juste, Guillaume, correspondants. -Assistaient à la séance : Classe des sciences. — MM. Van Béneden, directeur ; Liagre, vice-directeur; d'Omalius d'Halloy, Sauveur, Wes- mael, Martens, Cantraine, Stas, De Koninck, De Vaux, Edm. de Selys-Longchamps, le vicomte B. du Bus, Nyst, Gluge , Nerenburger, Melsens, Schaar, Duprez, Brasseur, Poelman , membres ; Th. Schwann, A. Spring, Th. Lacor- daire, Lamarle, associés. Classe des beaux-arts : — MM. Baron, directeur, Alvin, Fr. Fétis, Navez, Van Hasselt, Snel, Ed. Fétis, De Bus- scher, membres ; Daussoigne-Méhul , associé. (498 ) M. le Directeur ouvre la séance par la lecture du tra- vail suivant, sur la captivité de François [° et le traité de Madrid: | MESSIEURS, Une voix que vous écoutez toujours avec sympathie, et que vous regrettez de ne pas entendre plus souvent, procla- mait , l’année dernière, à cette même place d’où j'ai l'hon- neur de vous adresser la parole, les maximes que doit prendre pour règles celui qui veut écrire l’histoire (1). Les considérations présentées par mon illustre devancier étaient d'autant plus propres à porter la conviction dans vos esprits, que, grâce à un heureux et rare privilége, le préceple chez lui s'appuie de l'exemple. Messieurs, c'est surtout en méditant sur ces considé- rations, fruits d'un jugement si sûr et d'une critique si éclairée, que je sens toute mon insuffisance. Aussi, pour me rassurer quelque peu, ai-je besoin de me rappeler l'in- dulgence avec laquelle vous avez toujours accueilli les modestes essais, résultats de mes recherches sur notre histoire nationale. Cette indulgence, j'ose la réclamer encore. Je me propose de vous entrelenir aujourd'hui, mes- sieurs, d’un événement qui occupe une place considérable dans l’histoire de notre grand empereur Charles-Quint : (1) Discours de M. le baron de Gerlache, prononcé à la séance du 6 mai 1859. (Bulletins de l’Académie, 2: série, t, VII, p. 201.) NC be “Ch, AE ; à uv] 4 4 4e RES ALLUME: es ( 499 ) j'ai entrepris de vous retracer la captivité de François [* et les négociations qui ÿ mirent un terme. Ce n’est pas que les récits nous manquent sur cel épisode dramatique de la longue rivalité des deux souverains; mais que d’inexac- titudes , de lacunes, de faits controuvés ou travestis dans les uns! que de partialité dans les autres! N’a-t-on pas avancé, par exemple, que Charles de Lannoy usa d'artifice pour déterminer le roi de France à se laisser conduire en Espagne? N’a-t-on pas reproché à Charles-Quint de s'être éloigné tout exprès de Madrid, pour ne pas s’y rencontrer avec le prince que le sort des armes avait fait tomber en son pouvoir? Ne l’a-t-on pas accusé, non-seulement d’avoir manqué des égards dus au malheur et au rang de son pri- sonnier, mais encore de lavoir soumis à toute sorte de mauvais traitements? N’a-t-on pas été jusqu'à prétendre qu'il voulut faire arrêter la duchesse d'Alençon, qui avait traversé les Pyrénées pour venir consoler son royal frère, el moyenner un accommodement entre les maisons d'Au- triche et de Valois? Ne s’est-on pas, en un mot, appliqué à peindre des couleurs les plus défavorables les senti- ments et les actions de l’empereur, pour faire mieux res- sortir la noblesse d’âme et la générosité du roi de France? Mon but, messieurs, dans cette étude, est de restituer ses droits à la vérité. Depuis une quinzaine d'années, de nombreux et précieux documents, exhumés des archives belges et françaises, ont jeté de vives lumières sur le sujet que Je vais traiter devant vous (1); Je les ai examinés et (1) Nous devons placer en premiere ligne l'important recueil publié par M. Aimé Champollion-Figeac, dans la Collection des documents sur l’histoire de France, et intitulé Captivité du roi François 1*, 1847, Lxxvin et 658 pp. Viennent ensuite le tome Ir de la Correspondenz des Kaisers Karl F, 2% SÉRIE , TOME IX. 39 ( 500 ) comparés avec une scrupuleuse attention; je les ai mis en regard des relations contemporaines, des relations espa- gnoles surtout, dont les auteurs ont été naturellement les mieux informés; J'ai eu aussi cette bonne fortune, dont parlait votre éloquent directeur de l’année dernière (1), de pouvoir puiser à des sources qui n’ont pas été jusqu'ici à la portée des historiens. Je m'efforcerai d’être un narra- teur fidèle, et je n'aurai pas moins à cœur d’être un juge impartial. ta Charles-Quint avait été atteint, à Valladolid, sur la fin de l'été de 1524, d’une fièvre opiniâtre; ses médecins, n’en pouvant triompher, lui avaient donné le conseil d’al- ler respirer lair vif et pur de Madrid. T1 était venu en cette ville au mois de novembre (2). Il s'y trouvait encore, et il commençait à reprendre des forces, à se livrer à ses plaisirs favoris de l'équitation et de la chasse (3), lorsque, de M. Lanz, 1844, in-8°, et le tome II des Wégociations diplomatiques entre la France et l’ Autriche, du savant associé de notre Académie, M. Le Glay. Ce dernier volume, qui a été mis en lumière en 1845, fait aussi partie de la Collection des documents sur l’histoire de France. On trouve encore quelques pièces relatives à la captivité de François Ie dans le premier volume des Papiers d’État du cardinal de Granvelle, in-4, 1841, et dans les Lettres de Marguerite d’ Angoulême, publiées, la même année, par M. Gé- nin, in-8°. (1) Bulletins, 2e série, t. VII, p. 205. (2) Description des voyages de Charles-Quint, par le sieur de Herbays, manuscrit de la bibliothèque de Madrid. — Quintana, Æistoria de las gran- dezas de Madrid, 1629, in-fol., p. 529. (3) Voyez sa lettre du 9 février 1525 au duc de Sessa, son ambassadeur à Rome, dans la Correspondance de Charles - Quint et d’ Adrien WE, page 213. ( 01 ) le 10 mars 1595 , il reçut les dépêches de son vice-roi de Naples, Charles de Lannoy, qui lui annonçaient la grande victoire remportée par son armée d'Italie et la prise du roi de France. Quelle que fût sa confiance dans l’habileté de ses généraux ét la valeur de ses troupes, Charles était loin de s'attendre à un succès aussi éclatant; son esprit, au contraire, était rempli de troubles et d’inquiétudes. Et, à la vérité, sa situation en Italie, depuis l’entrée de Fran- çois [* dans le Milanais, était des plus critiques. Entrai- nés par la supériorité qui semblait acquise aux armes de la France, les princes et les États italiens se pronon- çalent successivement contre l’empereur; ses alliés mêmes l’abandonnaient l’un après l’autre. Le pape avait déjà traité avec François [°'; les Vénitiens s’apprêtaient à sui- vre son exemple; le duc de Ferrare n’en avait pas eu besoin pour fournir des secours de tout genre aux Fran- çais ; seul, Francesco Sforza restait fidèle à la cause du prince qui lui faisait espérer, pour prix de ses services, l’investiture du duché de Milan. Et ce qui aggravait encore celte situation, c'était que les chefs de l’armée impériale manquaient d'argent. Afin de se procurer quelques res- sources, ils s'élaient imposé des sacrifices personnels; Lannoy et le connétable de Bourbon avaient engagé tout ce qu'ils possédaient; mais ces ressources avaient été bien- tôt épuisées. Il était dû trois mois de solde à l'infanterie espagnole, et un mois aux lansquenets allemands. Tel était le dénûment qui régnait au camp de l’empereur, qu'il avait fallu renoncer à y avoir des pionniers, faute des moyens de les entretenir. Les dernières dépêches de Lan- noy étaient extrêmement inquiélantes. François I” décla- rait hautement qu'il ne se contenterait pas, celte fois, du Milanais, mais qu'il voulait avoir aussi le royaume de ( 502) Naples. Il ne restait aux généraux de Charles-Quint d’au- tre alternative, que de livrer bataille au roi de France, au risque de la perdre, et cette perte pouvait entraîner celle de toute l'Italie, ou de souscrire aux conditions de paix ou de trêve qu'on voudrait leur dicter. Déjà l'empe- reur avait autorisé le vice-roi à remettre, entre les mains du pape, qui les aurait tenues en séquestre jusqu’à la con- clusion d’un arrangement, les places de la Lombardie occupées par ses troupes (1). On se figure aisément l’impression que, dans de telles conjonctures, Charles-Quint dut éprouver, à la nouvelle de la victoire de Pavie. Rien n’en parut toutefois — la chose nous est attestée par un témoin oculaire et qui ne saurait être suspect, l'ambassadeur vénitien Gasparo Contarini — rien n'en parut ni sur son visage ni dans ses paroles (2). Charles, c'est le même diplomate qui nous (1) Lettres de Charles de Lannoy à l’empereur, des 19 octobre, 5, 13, 19, 95 novembre, 9, 6 et 21 décembre 1524; à la duchesse douairière de Savoie, Marguerite d'Autriche, des 1°", 5 et 21 février 1525; lettres de Charles-Quint à Lannoy, des 15 dééEdihe 1524, 11 janvier et 5 février 1525; lettre du pape Clément VII à Chatles Ouônés du 14 janvier 1525, dans les manuscrits historiques du comte de Wynants. Le comte de Wynants, directeur général des archives des Pays-Bas sous les règnes de Marie-Thérèse, Joseph II, Léopold II et François Il, avait extrait la plupart des correspondances de Charles-Quint qui se trouvaient alors dans le dépôt confié à sa garde, et sont aujourd’hui aux archives im- périales, à Vienne. Ses manuscrits, que M. le chevalier Gustave de Liem, son petit-fils par alliance, a bien voulu mettre à la disposition de la commis- sion royale d'histoire, nous ont été, comme on peut le voir, d'un grand secours. (2) «.. Veramente, in questa cosi grande vittoria avuta contro il re chri- stianissimo, usù tanta modestia che fu un miracolo; non si vide un segno d’insolenza, né in parole, né in movimento alcuno. » (Relation de Gasparo Contarini, faite au sénat de Venise le 16 novembre 1525, dans nos Honu- EE . i ; à auè ( 205 ) lapprend, était un prince, « extrêmement modeste; la » prospérité ne l’enorgueillissait pas plus qu'il ne se lais- » sait abattre par la mauvaise fortune (1). » Il passa inconlinent dans son oratoire, s'y agenouilla, et durant une heure resta en prière, rendant des actions de grâces à Dieu. Bientôt l’heureuse nouvelle s'étant répandue dans Madrid, le palais se remplit des grands, des officiers de la couronne, des envoyés des puissances étrangères, qui venaient le féliciter. Charles reçut leurs compliments avec le même calme, la même gravité, la même retenue qu'il avait montrés dans le premier moment; il leur dit qu'ils remerciassent Dieu, car lui seul était l'arbitre des vic- toires, comme il l'était du châtiment des hommes (2). Le lendemain, il se rendit, avec toute sa cour, à l’ermitage de Santa Maria de Atocha, patronne de Madrid, situé à quelque distance de la ville; il y entendit la messe et un sermon prêché par fray Juan de Hempudia, de l’ordre des dominicains (3). Il ne voulut pas permettre que, dans sa ments de la diplomatie venitienne , p. 69.) — Voy. aussi Sandoval, Ais- toria de Carlos F,t. I, liv. XIII, À 2, p. 485. Charles de Poupet, seigneur de la Chaulx, conseiller, chambellan et som- melier de corps de Charles-Quint, écrivit à l’archiduchesse Marguerite que Jamais prince recevant une si grande et si heureuse nouvelle n’avait témoigné moins de fierté et de gloire, et rendu à Dieu autant d’actions de grâces, que ne l’avait fait l’empereur. C’est ce qui résulte d’une lettre de l’archiduchesse à Charles de Lannoy, du 21 avril 1525. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) (1) « Cesare è di natura molto modesta; non si eleva molto nelle cose pros- pere, nè si deprime nelle avverse. «(Les Monuments de lu diplomatie véni- tienne, 1. c.) (2) « Diziendo que diessén à Dios las gracias por todo lo que hazia, en cuya disposicion solo estava la vitoria y castigo de los mortales. » (Sandoval, IL. c.) (3) Relacion de lo sucedido en la prision de Francisco T, por el capitan ( 04 ) résidence ni en aucun autre endroit de ses domaines, des réjouissances publiques eussent lieu. Il écrivit aux grands, aux villes, aux prélats, pour les informer du succès des armes espagnoles. Sa lettre était, comme ses discours, pleine de modération; il y attribuait la victoire qu'il avait obtenue à la justice de sa cause (1). | C'était par le commandeur don Rodrigue de Peñalosa que Lannoy avait donné avis à l’empereur de la défaite de l’armée française. Peñalosa avait passé par Lyon. Il appor- tait à Charles-Quint, avec les dépêches du vice-roi de Naples et des autres chefs des troupes impériales, une lettre de Louise de Savoie, duchesse d'Angoulême, que François [” avait déclarée régente du royaume, à son dé- part pour l'expédition d'Italie. Louise de Savoie écrivait à Charles-Quint : « Monsieur mon bon fils, » comme au temps où les relations les plus étroites existaient entre les deux cours, où la fille du roi de France devait s'unir avec le roi de Castille; elle louait Dieu de ce que, dans le mal- heur arrivé à son fils, il était tombé aux mains « du » prince de ce monde qu'elle aimait le mieux; » elle ex- primait l'espoir que la « grandeur » de l’empereur ne lui ferait point oublier la « prochaineté de sang et lignage » qu'il y avait entre lui et le roi; elle le suppliait de penser au grand bien qui pourrait résulter, pour toute la chré- tienté, de l'amitié des deux monarques d'Espagne et de France; enfin elle lui demandait de faire traiter son pri- sonnier comme « l'honnêteté » de l’un et de l’autre le requérail, et de permettre qu’elle eût souvent des nou- Gonzalo Fernandez de Oviedo, manuscrit de la Bibliothèque nationale, à Madrid. Voy. lAppendice. (1) Sandoval, L c. ( 205 ) velles de son fils (1). François [* avait prié Peñalosa de dire à l'empereur qu’il avait espoir en sa vertu (2). Quelle détermination Charles-Quint allait-il prendre ? Poursuivrait-il sa victoire? Profitant de la consternation et de l'abattement où la France était plongée par la perte de la plus florissante armée qu'elle eût eue depuis long- temps , par la captivité de son roi, par la mort ou la prise de ses meilleurs généraux, ferait-il rentrer son armée d'Italie en Provence, et envahir en même temps le Lan- guedoe par les gens de guerre qu'il avait dans le Roussil- lon, tandis que ses troupes des Pays-Bas pénétreraient en Picardie? Chercherait-il, au contraire, à conclure une paix avantageuse ? Plusieurs de ses ministres inclinaient pour le premier parti (3); et c'était aussi l'opinion de l’archiduc Ferdinand , qui était venu jusqu’à Inspruck, afin de secon- der les mouvements de l’armée impériale : Ferdinand pen- sait, et 1l représenta à son frère, qu'il fallait marcher en avant, afin qu'il ne lui arrivàt pas ce qui était arrivé à Annibal, après la bataille de Cannes (4). Mais Charles- Quint était d’un caractère pacifique; depuis l’origine de ses querelles avec François [, il n'avait cessé de désirer qu'un arrangement fondé sur le respect du droit et de la Justice vint y mettre fin. Le langage qu'il tenait, à cette époque même, aux ambassadeurs de Venise découvre bien les sentiments qui régnaient dans son cœur : « Sachez — (1) Papiers d'État du cardinal de Granvelle , 1, 259. (2) Lettre de Lannoy à Charles-Quint, du 25 février, dans Lanz, I, 152. (5) Lettre de Charles-Quint à l’archiduc Ferdinand, du 25 mars 1525. (Manuscrits historiques du comte de Wynants) (4) Lettre de Ferdinand à Charles-Quint, du 14 mars 1525, dans Lanz, I, 155. — Instruction donnée, le 12 avril, par Ferdinand à son envoyé vers l'empereur. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) ( 506 ) » leur disait-il — que, si je le voulais, rien ne me serait » plus facile que de troubler la chrétienté; mais la seule » gloire à laquelle j'aspire est qu'on dise que, de mon » temps, l’Europe a joui de la tranquillité et de la paix, » laquelle je désire tellement affermir qu'elle subsiste » après moi, el que nos armes se tournent contre les » infidèles (1). » Il faut reconnaître aussi que des raisons d'un ordre supérieur lui conseillaient de traiter avec le roi de France. Il lui importait de pouvoir passer sûrement en ftalie, afin de s’y faire couronner ; il n’ignorait pas que sa présence devenait de jour en Jour plus nécessaire en Allemagne, où son autorité souffrait de graves atteintes, et que les progrès de la secte de Luther remplissaient d’agi- latiouns et de désordres; il savait aussi que les chefs de son armée ne s'entendaient pas entre eux : il aurait donc fallu qu'il allât en prendre lui-même le commaudemeut, evil n’avail personne qu'il pât laisser, en son absence, à la tête du gouvernement de l'Espagne. Ajoutons que, de ses alliés, celui sur lequel il aurait dû compter le plus, le roi d’An- gleterre, commençait à lui donner des motifs légitimes de défiance (2). Il se décida donc pour la paix. Il chargea Adrien de Croy, seigneur du Rœulx, l'un des principaux personnages (1) « Sappiate, ambasciadori, che quando io volessi il disturbo della eri- stianità , la cosa sarebbe in mia mano; ma io non cerco altro che questa glo- ria, che si dica a” miei tempi sia stala la pace e la tranquillità nella cristianità, la qual desidero che sia talmente ferma che anche perseveri dopo di me, e le armi nostre si voltino contra gl’infideli. » (Lettre des ambassadeurs Contarini, Priuli et Navagero au sénat de Venise, du 28 juillet 1595, citée par M. Cico- gna, Della vita e delle opere di Andrea Navagero, etc., p. 178.) (2) Lettre de Charles-Quint à Lannoy, du 15 juin 1525, dans les manu- scrits historiques du comte de Wynants. RS à + à _. nt. 20e ( 007 ) de sa cour, d'aller visiter de sa part le roi de France. Il manda à Lannoy et au connétable de Bourbon de suspen- dre toutes hostilités, « lui semblant honnête — c'étaient » ses propres expressions — de ne pas les continuer pen- » dant que le roi était entre ses mains; » 11 donna Îles mêmes ordres aux Pays-Bas et sur les. frontières d'Espagne. Il recommanda à Lannoy de faire bonne garde de son pri- sonnier, mais aussi d'avoir pour lui les plus grands égards, de le défrayer de sa dépense journalière, de permettre qu'il fût servi par ceux de ses officiers qui lui étaient le plus agréables ; il linvita particulièrement à prendre garde qu'on ne l’empoisonnât, car — lui disait-1l — leur hon- eur et leur réputation à tous deux y étaient intéressés (1). Il déclara qu'il voulait user de pitié, de magnanimité et de clémence envers le roi, et traiter avec lui comme s’il était libre (2). Enfin il énonça, dans une instruction com- mune à Croy, à Lannoy et à Bourbon, les conditions aux- quelles il était prêt à rendre la liberté au monarque fran- çais (3). Croy, en passant par Lyon, les communiquerait à la régente, à laquelle il remettrait en même temps la ré- ponse de l’empereur. Cette réponse était toute courtoise. Charles-Quint y exprimait sa joie d’avoir appris que le roi était en bonne santé; il assurait la régente qu'il le ferait traiter comme il voudrait être traité lui-même; il lui an- (1) Lettre de l’empereur à Charles de Lannoy et au duc de Bourbon, du 27 mars 1525, dans les manuscrits historiques du comte de Wynants. Voir aussi sa lettre du 26 mars à son ambassadeur en Angleterre, le sieur de Praet, dans Lanz, I, 157. (2) Lettre de l’empereur à Lannoy du 27 mars, déjà citée. — Autre lettre au duc de Sessa, son ambassadeur à Rome, du .. mars 1525, dans la Corres- pondance de Charles-Quint et d’ Adrien VIT, p. 215. (5) Elles sont dans la Captivité de François I°, p.149. ( 508 ) nonçait qu'il avait donné les ordres nécessaires pour qu'elle pût avoir des nouvelles de son fils aussi souvent qu'elle le désirerait ; il ajoutait que , nonobstant la victoire qu'il avait plu à Dieu de lui envoyer, il ne voulait pas prolonger la guerre, avant d’avoir tenté tous les moyens de conclure une bonne paix. « Jay, à ceste cause — lui » disait-il — faict mettre, tant en mon nom comme de » mes alliez, ma résolution par eserit de ce qu'est mon » intention d’avoir et recouvrer, comme chose qui juste- » ment m'appartient... J'espère que vous y penserez, et » ne me refuserez chose tant juste et raisonnable pour le » bien et repos de l’universelle chrestienneté (1). » IT. Aussitôt après que les chefs de l’armée impériale avaient eu le roi de France en leur pouvoir, ils s'étaient occupés du choix de celui d’entre eux à qui serait confiée la garde du prisonnier ; leurs suffrages s'étaient unanimement por- tés sur don Fernando de Alarcon. C'était un des plus an- ciens capitaines des troupes espagnoles. Il avait servi sous les ordres de Ferdinand le Catholique, lors de la conquête du royaume de Grenade; il s'était fait distinguer de Gon- salve de Cordoue dans les guerres de Naples; il avait pris part, depuis, à toutes les campagnes d'Italie. Ses exploits lui avaient mérité de nombreux témoignages d'estime du roi Ferdinand, de l'empereur Maximilien, de Charles- (1) Cette réponse de Charles-Quint a été publiée dans les Papiers d'État du cardinal de Granvelle, 1, 265. M. Champollion en a donné un autre texte, mais d’après des copies défectueuses, dans la Captivité de Fran- cois Le", p.169. Il y en a une copie aux Archives du royaume, dans la collec- tion des cartulaires et manuscrits, Documents historiques, L. HT, fol. 49. à VAN NTIC ( 509 ) Quint ; il occupait, depuis plusieurs années, le poste de gouverneur des deux Calabres. Dans la campagne de 1523, il avait fait les fonctions de capitaine général de l’infan- terie, en l’absence du marquis de Pescaire. A la bataille de Pavie, il commandait l’une des trois divisions de la cavalerie; c'était lui qui avait chargé et mis en désordre l’escadron au milieu duquel était François I°' (1). On l’ap- _ pelait communément le seigneur Alarcon; ce titre d'hon- peur, que deux autres capitaines, cités parmi les plus fameux de cette époque, Antonio de Leyva et Fernando de Gonzaga, partagèrent seuls avec lui, lui avait été donné par Charles-Quint (2). Alarcon mena le royal captif au château de Pizzighitone, près de Crémone. Ce fut là que le seigneur du Rœulx vint présenter au roi de France les compliments de l’empereur. Le projet de traité dont Adrien de Croy était porteur devait être proposé à François [°° par le vice-roi de Naples et le connétable de Bourbon. Il y avait, dans ce projet, des clauses auxquelles on devait s'attendre qu'il se refu- serait à souscrire, ou ne souscrirait du moins qu'avec la plus vive répugnance : telles étaient celles qui l’obligeaient a restituer le duché de Bourgogne à l’empereur, à donner à Bourbon le comté de Provence, et à consentir que ce comté, réuni aux autres domaines du connétable, formât un État indépendant de la couronne de France. Charles- Quint, prévoyant bien l'effet que de telles propositions produiraient sur le roi, avait expressément recommandé (1) Comentarios de los hechos del señor Alarcon, marqués de la Valle Siciliana, por don Antonio Suarez de Alarcon, Madrid , 1665, in-fol., p. 291 et passim. (2) Zbid. p. 442. (510 ) à Bourbon et à Lannoy d'employer, pour les lui faire, les paroles les plus honnêtes et les plus douces, de manière à ne pas l'irriter ni le désespérer (1). On a rapporté que, lorsqu'il fut donné connaissance à _ François I® des ouvertures de l’empereur, il fut saisi d'un tel accès d’indignation que, tirant tout à coup son épée, il s'écria : Mieux vaudrait pour un roi mourir ainsi (2)! Les dépêches de Lannoy et de Bourbon ne disent mot de ce mouvement de désespoir, et les deux généraux ne l’au- raient certainement point passé sous silence. Suivant ce qu'ils écrivirent à l'empereur, rien de semblable n'aurait eu lieu; le roi se serait seulement attaché à les convaincre que les demandes qui lui étaient faites étaient exorbi- tantes, et il se serait remis du soin de les discuter à la régente, sa mère, à laquelle 1l donnait tous ses pou- voirs (5). Nous avons cependant un témoignage des senti- ments pénibles qu'elles firent naïtre en son âme, dans la lettre remarquable qu'il écrivit aux grands et aux compa- gnies souveraines de son royaume: « L'empereur — leur » disait-il — m'a ouvert quelque party pour ma déli- » vrance, et ay espérance qu'il sera raysonnable... Mais » Soyez seurs que, comme pour mou honneur et celluy » de ma nassyon, J'é plustost esleu l’onneste pryson que » l’onteuse fuyle, ne sera jamès dyt que, si je n’é esté si (1) Lettre de Charles-Quint au vice-roi et au connétable, du 27 mars, déjà citée. (2) Robertson, Æistoire de Charles-Quint , trad. de Suard , t. I, p. 491. édit. de 1844. — Rey, Æistoire de la captivité de François Z°, p. 95. (5) Lettres de Bourbon et de Lannoy à Charles-Quint, des 25 et 26 avril; lettre commune des mêmes au même, du 26 avril, dans les manuscrits histo- riques du comte de Wynants. — Lettre de Lannoy à l'empereur, du 5 mai, dans Lanz, I, 161. D D CE ( SEE ) » eureulx de faire bien à mon royaulme, que pour envye » d’estre délyvré je y face mal, me estimant bien eureulx, » pour la lyberté de mon pays, toute ma vye demeurer » en pryson (1). » Nobles paroles, que l’histoire devrait graver en lettres d’or sur ses tablettes, si la conduite ul- térieure de François [° ne les avait pas démenties! Quelques jours avant l’arrivée de Croy à Pizzighi- tone (2), ce monarque avait obtenu de Lannoy la permis- sion d'écrire à l’empereur, et de lui envoyer sa lettre par Philippe de Chabot, seigneur de Bryon, l’un de ses favoris, fait prisonnier comme lui à Pavie. Elle était bien humble, cette lettre d’un prince naguère si fier de sa puissance et de ses succès. Après s'être excusé de n'avoir pas plus tôt « fait son devoir » envers l’empereur, sur ce que la liberté ne lui en avait pas été donnée, il lui disait « qu’il n'avait » d'autre confort en son infortune que l'estime de sa » bonté; » 1l exprimait la ferme confiance « qu'il userait » avec modération de la victoire, » et qu'il ne voudrait le contraindre à chose qui ne fût honnête; il le suppliait de juger, en son propre cœur, de ce qu’il devait faire de lui, étant sûr que la volonté d’un tel prince qu'il était ue pou- vait être accompagnée que d'honneur et de magnanimité. « S'il vous plaît done — ainsi terminait-il — d’avoir ceste » honnesteté et pytié de moyenner la seureté que mérite » la prison d'un roy de France, lequel on veult rendre » amy el non désespéré, pouvez estre seur de faire ung (1) Cette lettre, qui ne porte point de date, est dans la Captivité de Fran- çcois Ie, p. 159. (2) D’après les dépêches de Lannoy et de Bourbon, ce fut entre le 15 et le 20 avril que Croy dut aller à Pizzighitone. Il était arrivé à Saint-Just, près de Lyon, où était la régente, le 9. (Voyez sa lettre du 10 à Marguerite d’Au- triche, dans les Végociations entre la France et l’ Autriche , IL, 598.) ( 912 ) » acquest, au lieu d’ung prisonnier inutile, et rendre un » roy à Jamais vostre esclave (1). » | Après avoir reçu communication des instructions ap- portées par le seigneur du Rœulx, François 1” écrivit à l’empereur une nouvelle lettre. Dans celle-ci, il lui annon- çait qu'il avait mandé à sa mère sa résolution; il le sup- pliait de l'accepter et de la juger, « en cœur d’empereur, » qui désirait plutôt se faire honneur que honte à celui qui était en son pouvoir; il lui protestait que, par là, de son esclave il ferait à jamais son bon frère, son ami et son trop obligé (2). Cette seconde lettre fut remise à Adrien de Croy, qui retournait en Espagne. Charles - Quint répondit en peu de mots à l’une et à l'autre. Tout en se montrant sensible aux « bons propos » et aux honnestetez » qu'elles contenaient, 1l témoigna au roi son étonnement que, ni de sa part, ni de celle de la _régente, il ne lui eût été rien dit sur les propositions qu'il avait mises en avant, ni fait quelque autre ouverture. « Ce (1) Cette lettre a été publiée dans l’Æistuire de la captivité de Fran- çois Ze", p.26, dans les Papiers d’État du cardinal de Granvelle, I, 266, dans la Captivité du roi François T°, p. 150. Elle est en copie dans le tome III des Documents historiques , déjà cité, fol. 55. Aucun de ces quatre textes n’est entièrement correct. MM. Rey, Weiss et Champollion ont cru qu’elle avait été écrite immédiate- ment apres la bataille de Pavie, et portée à l'empereur par le commandeur Peñalosa. Il suffit d’en lire attentivement le texte , et de le mettre en rapport avec la réponse de l’empereur (Papiers d État, etc., p. 268), pour recon- naitre cette erreur. Elle n’a pas été commise par Sandoval, qui donne de la lettre de François Ier _ une traduction espagnole (t. I, liv. XIII, Ç 5, p. 488). Cet historien, si bien informé en général des choses de ce temps , nous apprend même que, lorsque Charles-Quint envoya le seigneur du Rœulx en Italie , il ne lui remit pas de lettre pour le roi, parce que le roi ne lui avait pas écrit. (7bid., p. 487.) (2) Papiers d’État du cardinal de Granvelle, 1, 268. mt — a ( 15 ) n’est pas, observait-il, le chemin pour parvenir à la » paix, laquelle je désire générale et durable pour le ser- vice de Dieu et bien de la chrestienneté, y gardant mon honneur sans souüiller le vostre (1). » Cependant les généraux de Charles-Quint étaient fort préoccupés de la garde du roi de France. Ils savaient que des intrigues se formaient pour sa délivrance, en Italie et au dehors. Le château de Pizzighitone ne leur paraissait pas offrir toutes les conditions de sûreté désirables. L'em- pereur avait autorisé Lannoy à transférer le royal prison- nier dans le château neuf de Naples ou dans celui de Milan (2). Le vice-rot ne pensa point qu'il convint de de- mander au duc Francesco Sforza le château de Milan, car ce prince ne l'aurait prêté qu’à regret, et 1l ne fallait pas faire naître en Italie le soupçon, si peu fondé qu'il füt, qu’on voulüt le lui ôter (3); mais, d'accord avec les autres chefs de l’armée impériale, il résolut de conduire le roi à Naples (4). Le 18 mai, François [°° quitta la forteresse de Pizzighitone (5), accompagné de Lannoy et d'Alarcon; il prit la route de Gênes, où il devait être embarqué sur les galères d'Espagne. Il avait été prévenu des intentions du vice- roi; il en profita pour suggérer secrètement à sa mère l'idée de faire attaquer la flotte espagnole par l’armée ŸY L 2 ÿ (1) Papiers d’État du cardinal de Granvelle, 1, 268. Cette lettre de Charles-Quint doit être de la fin de mai. On voit, dans une lettre qu’il écrivit à Lannoy et à Bourbon, le 23 mai, que le seigneur du Rœulx venait d’arriver à Tolède. (2) Lettre du 27 mars 1595, déjà citée. (3) Lettre de Lannoy à l’audiencier du Blioul, du 26 avril, dans les Végo- ciations entre la France et l’ Autriche, etc., II, 600. (4) Lettre de Lannoy à l’empereur, du 10 juin, dans Lanz, 1, 164. (5) Lettre du baïilli de la Barre à la duchesse d'Angoulême , du 18 mai, dans la Captivité de François 1°", p. 185. ( 514) navale de France, dans le trajet de Gênes à Naples (4). C'était là pourtant une entreprise bien chanceuse et dont il courait le risque d’être la première victime : aussi, lorsqu'il arriva à Gênes, d'autres pensées agitaient son esprit. El se figura que, s’il pouvait avoir une entrevue avec l’empe- reur, il recouvrerait bientôt sa liberté; alors il employa les moyens les plus persuasifs pour faire consentir le vice- roi à le mener, non pas à Naples, mais en Espagne (2). Charles de Lannoy souhaitait avec ardeur qu'un prompt arrangement se fit entre les deux souverains (5); il prêta donc volontiers l'oreille aux instances de François L® : mais il voulut avoir des garanties contre toute agression de la flotte rassemblée dans les ports de Toulon et de Mar- seille; de plus, il exigea que six navires de cette flotte fussent mis à sa disposition. Ces deux points furent sans : (1) Lettre du 12 mai, dans la Captivité de François Ie, p. 180. (2) On ne peut s'expliquer l’assertion des écrivains d’après lesquels ce serait Lannoy qui aurait engagé François I‘ à se laisser conduire en Espagne : en effet, dans le préambule même du traité de Madrid , il est dit que c’est à sa requêle, et pour plus tôt parvenir à une bonne amitié avec l’empereur, que le roi a été amené dès Parie aux royaumes de par degça. Le rapport que le trésorier Babou fit au parlement de Paris, le 18 décem- bre 1525 (Captivité de François I‘, p. 452), est encore plus explicite à cet égard; on y lit: « Après la perte de Pavie, le roy, se voyant prisonnier de » l’empereur, espérant que l'empereur luy feroit quelque grâce et useroit » d'humanité envers lui, procura envers le vice-roy de Naples destre » mené en Espagne, et jusques à bailler ses propres galères pour l'y » conduire. » (5) Il écrivait à l’audiencier du Blioul, le 26 avril : « Dieu nous doint une » bonne paix, car il seroit temps de vuider la guerre, si l’empereur peull » avoir ce que de raison il peult demander! » et à l'empereur lui-même, le 6 mai: « Bien vous ose supplier que ce que porez avoir par la paix, à vostre » honneur, ne veuillez refuser. » (Wégociations entre la France et lAu- triche, Il, 600, 603.) tlsomemt ïnt. ETS ( 515 ) difficulté accordés par le roi. Le maréchal de Montmo- rency, Son compagnon de captivité, qui avait été échangé contre don Ugo de Moncada (1), s'offrit à amener les six navires au vice-roi, et il s’obligea, en sa qualité de lieu- tenant général de l'armée de mer, à donner les ordres requis pour qu'elle ne fit aucune offense ou dommage aux sujets et serviteurs de l’empereur, tant que les galères impériales ne seraient pas retournées à Gênes, ou du moins durant les quinze jours qui suivraient leur arrivée en Espagne (2). De son côté, Lannoy prit le double engage- ment de faire, dans le même délai, reconduire les six galères françaises à Marseille ou à Toulon, et d'empêcher, Jusqu'à ce que cette restitution eût été effectuée, toute attaque de l’armée navale de l’empereur contre les pays et sujets du roi (5). François I”, arrivé à Gênes le 24 mai, monta, le 98 (4), avec Lannoy et Alarcon, sur le navire qui lui avait été préparé. La flotte leva l'ancre comme pour se diriger vers Naples; mais, selon les ordres de Lannoy, elle ne s’éloi- gna pas de la côte de Gênes, où elle attendit l'apparition des galères françaises. Celles-ci la joignirent à Portofino le 8 juin. Lannoy en remplaça les équipages par des ma- (1) Lettre de Lannoy à l’empereur, du 5 mai 1525, dans Lanz, I, 161. (2) Instruction donnée par Lannoy, le 11 juin 1525, à Emmanuel Malve- sino, qu’il envoyait à l'empereur. (Manuscrits historiques du comte de Wy- nants.) (5) Captivité de François I, p. 212. (4) Ces deux dates nous sont fournies : la premiere, par la lettre du baron de Saint-Blancard à la duchesse d'Angoulême, du 30 mai, insérée dans la Captivité de François I‘, p. 181; l’autre, par la lettre de Lannoy à l’em- pereur, du 10 juin, qui est dans Lanz, 1, 164, et dans les Veégociations entre la France et l'Autriche, 11, 604. 2% SÉRIE, TOME IX, 510 / ( 516 ) rins espagnols; il y mit des gens de guerre de la même nation. Le 10, elle tourna le cap pour prendre la route de la Catalogne; elle se composait alors de vingt galères bien armées (1). Lorsqu'elle toucha à Monaco, François 1° dé- pêcha le sieur de la Pommeraye à la régente, sa mère, pour lui donner avis de sa nouvelle destination (2). Après avoir, le 17 juin, jeté l'ancre dans le port de Pa- lamos (3), les navires qui amenaient le roi de France mouillèrent devant Barcelone le 19. Le roi descendit à terre et alla loger au palais de l'archevêque de Tarragone. Il avait témoigné le désir qu'on ne fit aucune démonstra- tion pour le recevoir; néanmoins son débarquement fut salué par des décharges de l'artillerie de la flotte et de la ville, par le bruit des timbales , des trompettes et des clai- rons. L’affluence de scurieux accourus pour y assister était immense (4). Le lendemain , les femmes les plus distinguées de Bar- celone allêrent, en cavalcade, au nombre d’une vingtaine, lui rendre visite, Il reçut leurs hommages du haut d’une galerie, leur faisant un accueil plein d’amabilité, et les assurant que l'attention dont il se voyait l’objet de leur part était l’une des choses du monde qui pouvaient lui être le plus agréables. Le jour suivant, il se rendit à l'église (1) Lettre de Lannoy à l’empereur, du 10 juin, déjà citée, — Instruction de Lannoy à Emmanuel Malvesino, déjà citée. — Lettre de la Barre à la duchesse d'Angoulême, du 10 juin, dans la Captivité de François 4°, p. 214. — Guichardin, Zstoria d'Italia , IV, 42, édit. de 1776, in-4°. (2) Lettre de la Barre à M. d’Alluye, du 10 juin , dans la Captivité de François I°", p. 215. (3) Lettre de Lannoy à l’empereur, du 17 juin, dans les Véyociations entre la France et l’ Autriche, 1, 605. (4) Comentarios de los hechos del señor Alarcon, pp. 298, 299. ee ("SIA ) principale de la ville, pour y entendre la messe; 1l mar- _chait, accompagné de Lannoy et d’Alarcon, et suivi d'un grand nombre de gentilshommes, tant de la ville que de la flotte, au milieu des hallebardiers du vice-roi de Naples; une compagnie de soldats armés de piques et d’es- copettes complétait l’escorte. L'église avait été tendue de riches tapisseries; elle resplendissait de lumières; un dais était dressé près du grand autel, Le roi ne voulut pas y prendre place, mais il s'agenouilla à côté, et resta dans cette attitude pendant la plus grande partie de l'office. Tou- tes les cérémonies dont on avait l'habitude d’user quand les rois d'Espagne étaient présents, furent observées pour lui (1). Cette translation du roi de France en Espagne causa un étonnement universel. Lannoy crut devoir l'expliquer au roi d'Angleterre; il écrivit à Henri VII que la garde d’un tel prisonnier « lui était grande; » qu'il ne fallait pas plus de temps pour aller de Gênes en Espagne qu’à Naples; que le séjour de Naples était dangereux pour ceux qui y entraient en juin, juillet et août, et qu'il aurait eu trop de regret, s’il fût survenu au roi quelque maladie (2). Bour- bon et les autres chefs de l’armée impériale, à qui il en avait fait mystère, en conçurent un vif mécontentement : le connétable se plaignit en des termes amers à l’empe- _reur (5). Personne ne supposait que le vice-roi eût agi de son chef; on était persuadé qu’il avait reçu des ordres secrets de l’empereur. Charles-Quint, sachant les bruits (1) Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 500. (2) Lettre écrite du port de Gênes, le 8 juin, dans la. Captivité de Fran- gots 7; :p: 210, (5) Lettre du 12 juin, 2bid., p. 216. (o18 ) qui, autour de lui, et surtout parmi les représentants de la diplomatie étrangère, couraient à cet égard, jura, par Dieu et par l’ordre de la Toison d’or qu'il portait, qu'il n'avait eu aucune connaissance des projets de son vice- roi: ce qui frappa tout le monde, car il ne lui arrivait jamais de jurer (1). Le 22 juin, Lannoy et Alarcon PT e la mer avec leur prisonnier, se dirigeant vers Valence. Là, comme à Barcelone, François I* débarqua au milieu d’un concours innombrable de monde, et il se présenta à lui une foule de personnes atteintes d’écrouelles, qu’il toucha avec la plus grande complaisance (2). Il profita des quelques in- stants qu'il passa dans cette ville, pour aller visiter la reine Germaine de Foix, veuve du roi catholique, et re- mariée au marquis de Brandebourg, qu'elle devait perdre aussi quelques mois après (5). En apprenant la prochaine arrivée du roi de France en Espagne, Charles-Quint avait délibéré avec ses ministres sur le lieu où serait gardé ce monarque; il s'était décidé pour le château de Jâtiva, situé à neuf lieues de Valence (4). C'était une forteresse imposante, entourée d'un double fossé, défendue par une trentaine de tours, presque inac- cessible d’ailleurs de tous les côtés. Sous les rois d’Ara- son, elle avait servi de prison d'État. Alphonse IIF, qui (1) Dépéche des ambassadeurs de Venise, du 21 juin 1525, Della vita e delle opere di Andrea Navagero, pp. 177, 258. (2) Lettre du président de Selve au parlement de Paris, écrite de Tolède, le 18 juillet, dans la Captivité de François Ie, p. 255. (3) Comentarios de los hechos del señor Alarcon , p. 501. (4) Lettre de Charles-Quint à Lannoy, du 20 juin 1525, dans les manus- crits historiques du comte de Wynants. La lieue d'Espagne est égale à peu pres à une et demie des nôtres. CS ) monta sur le trône en 1285, y fit enfermer les infants don Alonso et don Fernando de la Cerda. Ferdinand, dit le Juste, ayant vaincu, en 1412, le comte d'Urgel, un des prétendants à la couronne d'Aragon, l'y constitua pri- sonnier. Un siècle plus tard, Ferdinand, duc de Calabre, fils aîné du malheureux roi de Naples, Frédéric LIT, subit le même sort par ordre de Ferdinand le Catholique; il ne recouvra sa liberté que lors de l’avénement de Charles- Quint à la couronne d'Aragon (1). L'empereur, dans la lettre où 1l fit connaître ses intentions à Lannoy, lui lais- sait la faculté, s’il savait un endroit plus convenable que Jätiva, d'y conduire son prisonnier, pourvu que ce ne fût pas un port de mer (2). Ce qui avait surtout fait désirer à François [° le voyage d'Espagne, c'était l'espoir de traiter directement avec l’em- pereur de sa délivrance. Lannoy ne douta point que, se voyant relégué à Jâtiva , il ne fût amèrement déçu et ne fit entendre les doléances les plus vives. Cette considéra- tion l’engagea à mener le roi à Benisano, village fertile et riant, habité par les Morisques, à cinq heures et demie seulement de Valence. Le gouverneur de cette capitale, don Gérénimo Cabanillas, possédait à Benisano une mai- son spacieuse, ayant servi autrefois de résidence aux sei- gneurs mores de la contrée; le roi y fut logé; Alarcon s’y établit avec lui (5). Lannoy prit la poste pour aller rendre compte à l’empereur de ce qui s'était passé, et demander (1) Madoz, Diccionario geogräfico-estadistico - historico de España, IX, 601, 607. (2) Lettre du 20 juin, ci-dessus citée. (5) Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 501. — Madoz, Diccionario geogräfica-estadistico-historico de España , IV, 224. _ (ST. : ses ordres. Le maréchal de Montmorency l’accompagna, chargé d'une mission de son souverain. | Charles-Quint tenait en ce moment, à Tolède (1), les cortès de Castille. [1 accueillit Lannoy avee la distinction que méritaient ses services, et il approuva sa conduite. Le maréchal de Montmorency avait pour instruction de lui demander trois choses :: 1° que le roi püût s'approcher du lieu où il était et avoir une entrevue avec lui ; © qu'il vouïût donner un sauf-conduit à la duchesse d'Alençon, sœur du roi, laquelle aurait plein pouvoir de conclure la paix; 3° qu'une trêve fût faite, et que, pendant sa durée, les ambassadeurs et les courriers eussent la liberté d'aller de France en Espagne, et vice versa. Il accorda le sauf- conduit pour la duchesse d'Alençon, à condition que le duc de Bourbon en obtint un semblable; il consentit à une trêve jusqu’à la fin de décembre : quant à là personne du roi, il donna l’ordre qu’elle fût amenée à Madrid sans prendre d'engagement au sujet de l’entrevue désirée par François I" (2). Il avait écrit à ce monarque aussitôt qu'il avait su son arrivée en Espagne, lui exprimant le plaisir qu'il en éprouvait, et l'espoir qu’elle hâterait l’œuvre d’une pacification générale, si nécessaire à la chrétienté (5); il (1) Il était à Tolède depuis le 27 avril. Il avait quitté Madrid le 5 de ce mois, (Description des voyages de Charles-Quint, par le S' de Herbays.) Ges simples dates mettent en évidence l’absurdité du réproche fait à Charles-Quint, de s'être éloigné de Madrid pour ne pas s’y rencontrer avec François Ier. , (2) Mémoire au seigneur de Montmorency de ce qu’il a à dire à l’empe- reur de la part du roi, dans la Captivité de François Ze, p. 258. — Rap- port de ce qui a été négocié auprès de l’empereur par M. de Montmorenéy, ibid., p. 241. — Lettre de Charles- Quint à l'archiduc Ferdinand, du 51 juillet, dans Lanz, 1, 166. (5) Sa lettre est dins la Captivité de François T°, p. 955. “hihi ( 521 ) lui envoya, pour le visiter et le complimenter de sa part, . l'évêque d’Avila, don fray Franeisco Ruiz (1). Alarcon, ayant reçu l’ordre de l'empereur par le com- mandeur Figueroa, quitta Benisano avec son prisonnier le 20 juillet. Le gouverneur de Valence, le comte d’Al- bayda, et plusieurs autres personnes de distinction firent cortége au roi jusqu'à Requena, distante de cette capitale de dix-huit de nos lieues. À Requena , François [* rencontra l'évêque d’Avila, qui s’acquitta auprès de lui de la commis- sion dont il était chargé (2). Le 5 août, à Santorcaz, il vit venir au devant de lui le vice-roi de Naples, qui lui remit une nouvelle lettre de l'empereur (5). Il entra, le 10 août, à Guadalajara, où don Diego Hurtado de Men- doza, duc de l'Infantado, lui fit une réception magni- fique, et lui donna lhospitalité dans son palais, l'un des plus beaux d'Espagne. Il passa trois jours dans cette ville, pendant lesquels des courses de taureaux, des joutes et d’autres divertissements furent donnés en son honneur. [l fut si émerveillé de tout ce qu'il vit, qu'on l’entendit dire plus d’une fois que l’empereur faisait injure à Mendoza, en l'appelant duc comme les autres, et qu'il devrait, par ex- cellence, le qualifier de prince (4). À Alcala de Henarès, qu'il traversa ensuite, il fut reçu par l’ayuntamiento et le corps de l’université, que suivaient onze mille étudiants (1) Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 501. (2) Zbid., p. 501. — Lettre de la Barre à la duchesse d’Alencon, du 19 juillet, dans la Captivité de François T°", p. 262. — Lettre du S' de Bryon à M: d'Angoulême, du 20 juillet, ébid., p. 265. (5) Lettre de Lannoy à l’empereur, dans Lanz, I, 167. Santorcaz est à 8 lieues de Madrid , 2 d’Alcala et 15 de Tolède. (4) Sandoval, €. F, liv. XXIIT, & 10, p. 492. (52) immatriculés dans cette école célèbre (1); enfin il arriva à Madrid. Le premier jour, il fut logé en la maison de don Fernando Lujan, l’une des principales de la ville, située sur la plazuela de San Salvador. Le lendemain, on le con- duisit à l’alcazar, qui devait lui servir de prison jusqu’à ce qu’il fût rendu à la liberté (2). JET. Pendant que François L* traversait les provinces d’Es- pagne, objet de l'empressement et de la curiosité des po- pulations, pour lesquelles la vue d’un roi de France captif était un spectacle aussi nouveau qu'extraordinaire, les conditions de sa délivrance donnaient lieu, à Tolède, aux discussions diplomatiques les plus animées. Dès le mois d'avril, Louise de Savoie avait envoyé à la cour de l’empe- reur l'archevêque d'Embrun (5), qui, bien jeune encore, préludait par cette mission au rôle important qu'il était (1) Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 502. (2) Teatro de las grandezas de Madrid , por el maestro Gil Gonzalez d’Avila, 1625, in-fol., p. 168. — Æistoria de la antigüedad, nobleza y grandeza de Madrid, por Gerônimo Quintana, 1629, in-fol., pp. 26 et 556. — Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 505. La plupart des maisons seigneuriales de Madrid avaient alors de hautes tours qui leur donnaient l’aspect d’une forteresse; d’où était venu le dicton : Madril , Madril, Altas torres, villa gentil. On croit que François Ier logea dans la tour même de la maison de Lujan. Au moment où nous corrigeons l'épreuve de ce travail, nous lisons dans les journaux que le gouvernement espagnol vient d'acquérir la tour des Lujanes, qui était dans un assez grand état de délabrement, pour la faire restaurer et la conserver comme monument historique. (5) François de Tournon, successivement archevêque d’Embrun , de Bour- ges, de Lyon, cardinal, ambassadeur à Rome, etc., né en 1489, mort en 1562, nn nn lt ae 0 eee. mime ‘on ( 225 ) appelé à jouer sur la scène politique (1). Elle lui adjoignit , plus tard, Jean de Selve, premier président du parlement de Paris, magistrat renommé pour sa science des lois et du droit public de la monarchie (2). De son côté, François [°, au moment où don Ugo de Moncada partait de Pizzighitone pour l'Espagne (5), s'était décidé à faire, par son entre- mise, des propositions à l’empereur (4); mais celles-ci, qu'avait dictées au roi son vif désir de sortir de prison, ne furent pas agréées du conseil de la régente, « pour estre » telles les aucunes d’icelles qu’elles ne se pouvoient bonne- » ment accorder, consentir ni permettre (5). » François [° pourtant n’accordait pas la restitution du duché de Bour- gogne, regardée par l’empereur comme la base de tout arrangement ; mais sur les autres points qui étaient en débat entre eux il faisait de grandes concessions. Les ambassadeurs de la régente eurent leur première audience de Charles-Quint le 17 juillet. De Selve porta la parole. Son discours dura plus d’une heure. Il s’étendit sur les calamilés qu'entrainait la guerre et les biens qui résultaient de la paix. Il fit appel à la magnanimité et à la clémence de l'Empereur, lui montrant, par une ample déduction généalogique , la parenté qui existait entre les. (1) Son instruction, datée du 28 avril, à Lyon, est dans la Captivité de François I", p. 174. (2) Son instruction, qui est commune à l’archevêque d’Embrun, porte la date du 6 juin. Voy. #bid., p. 198. (5) Le 7 mai. Voir la lettre de Charles de Lannoy à l’empereur, du 6 mai, dans les Négociations entre la France et l’ Autriche, IT, 605. (4) Elles sont données par Sandoval, liv. XIII, À 8, p. 490. On les trouve en français dans la Captivité de François 1°, p.170; mais ici on dit erro- nément qu’elles furent apportées à l’empereur par le sieur du Rœulx. (5) Voyez, dans les Végociations entre la France et l'Autriche, IT, 607, l'instruction de Pierre de Warty, envoyé à Marguerite d’Autriche, ( 524 ) maisons de France et d'Autriche, lai citant de nombreux exemples, tirés de l'Écriture sainte et des historiens de la Grèce et de Rome, de personnages qui avaient usé de libé- ralité envers leurs prisonniers, même de rois qu'avaient rendus à la liberté ceux au pouvoir desquels ils étaient tombés. Il lui mit devant les yeux le tableau de la situa- tion de l’Europe, qui rendait plus nécessaire que jamais l’union des princes; lui parla des rois d'Égypte; lui rap- pela ce que Dieu fit dire au roi Cyrus par le prophète Jé- rémie, etc., etc. C'était là l’éloquence du temps. Charies- Quint, quiavait écouté avec patience cette longue harangue, répondit qu’il n’était pas en état de réciter autant d'histoires et de beaux exemples qu'il lui en avait été allégué, mais qu'il avait toujours désiré et qu’il désirait encore la paix universelle de la chrétienté; qu'il ne tiendrait donc pas à Jui qu'on ne parvint à s'entendre. Les ambassadeurs dirent alors qu'ils étaient autorisés à traiter de la rançon du roi, ou, si l’empereur persistait dans les demandes excessives et déraisonnables dont le sieur du Rœulx avait été porteur, qu'ils étaient prêts à les débattre, mais qu'à léur avis, le meilleur moyen de parvenir à la paix était la conclusion . d'une alliance entre les deux couronnes. Charles-Quint leur répliqua qu'il ne voulait aucune rançon du roi; qu'une alliance était dans ses vœux, s'il pouvait la faire en gardant son honneur, et, quant aux questions en litige, que, sa profession n'étant pas de connaître les matières de droit, il chargerait des gens de son conseil d'en com- muniquer avec eux (1). 0 (1) Lettre de l'archevêque d'Embrun et du président de Selve à la duchesse d'Angoulême, écrite de Tolède, le 19 juillet, dans la Captivité de Fran- çois 7°, p. 255, ( 225 ) Les commissaires qu’il nomma furent son grand chan- celier, Merceurino de Gattinara; le comte Henri de Nassau, son grand chambellan; Laurent de Gorrevod, son grand maître d'hôtel ; le grand commandeur Hernando de la Vega, le vice-roi de Naples, le seigneur du Rœulx et le secrétaire d'État Jean l'Allemand. La première conférence eut lieu le 20 juillet. Les discussions roulèrent principa- lement sur le duché de Bourgogne. Au XVI"* siècle, on croyait que la politique devait avoir pour fondements le droit et la justice : le président de Selve et le chancelier Gattinara firent assaut d’éloquence et d’érudition , afin de justifier les prétentions de leurs souverains respectifs sur ce duché. Les ambassadeurs de la régente, voyant qu'ils ne pouvaient convaincre leurs adversaires, offrirent de remettre la décision du différend à la cour des pairs de France. Sur la question de Milan, ils proposèrent l'arbi- trage des électeurs de l'Empire, et celui du collége des car- dinaux en ce qui concernait le royaume de Naples. Quant à Gênes, à Tournay et au Tournaisis, à Hesdin, à la sou- veraineté des comtés de Flandre et d’Artois, ils se mon- trèrent accommodants (1). Tout cela n’aboutit à rien, et les négociations restèrent en suspens jusqu’à l’arrivée de M"° d'Alençon. Nous verrons plus loin quels furent les fruits de l'intervention de cette princesse. Revenons à François I”. Depuis qu'il était tombé au pouvoir de ses ennemis, — au château de Benisano comme dans la forteresse de Piz- (1) Extraits des proces-verbaux des conférences de Tolède, dans la Capti- vilé de François Ie", p.264 et suiv. — Première protestation du roi, en date du 22 août 1595, ébid., p. 300.—Deunxième protestation, du 15 janvier 1526, ibid, p. 467, ( 526 ) zighitone, durant le trajet de Benisano à Madrid aussi bien que pendant la traversée de Gênes à Valence, — Fran- çois 1‘ n'avait pas cessé un seul instant de jouir d’une santé parfaite. Le bailli de Paris, la Barre, en envoyait régulièrement le bulletin à la duchesse sa mère, pour la- quelle c'était une grande consolation (1). La veille du dé- part de Benisano, la Barre écrivait à la régente : « La santé » du roy, madame, est, je vous asseure, sy bonne que » meilleure ne pourroyt estre; et ne fut oncques, sur ma » foy, plus beau ny plus net qu'il est (2). » Ceux qui étaient préposés à sa garde, exécuteurs fidèles de la vo- lonté de l'empereur, lui prodiguaient les soins les plus empressés, les attentions les plus respectueuses : les am- bassadeurs de France déclarent eux-mêmes « qu'il estoit » tant et si humainement traité et honoré qu'il nestoit » possible de plus, hormis la liberté (3). » À Madrid, on redoubla d’égards envers lui (4) : il avait la faculté d'aller dans les champs, de se promener sur sa mule, de chasser quand cela lui faisait plaisir; on lui permettait tous les autres passe-temps compatibles avec sa situation (5). Cependant, soit l'effet de causes naturelles, soit le cha- grin de n’entrevoir encore aucun terme à sa captivité, et (1) Voyez la Captivité de François T°", pp. 132, 185, 214, 291. Voyez aussi, pp. 141 et 144, les lettres du maréchal de Montmorency aux du- chesses d'Alençon et d'Angoulême. (2) Zbid., p. 254. (5) Lettre des ambassadeurs au parlement de Paris, du 18 juillet, sbid., p. 255. | (4) « En todo se mirava mucho por darle gusto, » (Sandoval, liv. XIIT, Ÿ 11, p. 492.) (5) Sandoval, I. c. — Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 504. — Quintana, Aistoria de las grandezas de Madrid, fol. 550: ( 27 ) la mortification ressentie de l’indifférence de l'empereur, auprès duquel il avait fait faire de vaines démarches pour en obtenir la faveur d’un entretien (1), soit enfin que ses pensées se reporlassent avec tristesse vers cette « amye » à qui il adressait l’épître touchante que l’on connaît sur la bataille où il avait été vaincu (2), François I‘, peu de temps après son arrivée à Madrid, tomba dans une mélancolie profonde. Son sang s’échauffa; il eut une fièvre qui bientôt prit le caractère le plus violent. Deux de ses médecins, Bourgancy et maître Jean de Nîmes, étaient à ses côtés (5) ; Charles-Quint lui envoya le sien propre avec le vice-roi de Naples (4) : au premier avis de sa maladie, il avait dépêché à Madrid don Juan de Züñiga, l’un de ses gentilshommes, pour savoir de ses nouvelles (5). Il était loin de croire pourtant que la vie du roi füt en péril. Il revenait de Ségovie et avait quitté le matin Buitrago, en intention de coucher à San Agustin, vil- lage situé à mi-chemin à peu près de Madrid et de Tolède. C'était le 48 septembre. Il y était à peine arrivé de quelques instants, qu'un courrier expédié par Alarcon lui apporta (1) Des avant son départ de Benisano, il avait envoyé un de ses servi- teurs au vice-roi de Naples, afin de solliciter, par son entremise, une entre- vue avec l’empereur. (Captivité de François 1‘, p. 261.) Ces sollicitations, les ambassadeurs qu’il avait à Tolède les renouvelerent plusieurs fois. (2) Captivité de François Je, p. 114. M. Champollion (pp. xvn et 195) croit que « l’amye » à qui cette épitre est adressée était Anne de Pisseleu, dite mademoiselle de Heilly, qui devint plus lard duchesse d’Étampes. (5) Captivité de François I, pp. 155 et 165. (4) Della vita e delle opere di Andrea Navagero, par M. Cicogna, p. 179. (5) Voir, dans la Captivité de François I, p. 522, la lettre de l'empe- reur, (328 ) des dépêches alarmantes. Cet officier lui mandait que le roi était très-mal , qu’on avait des craintes sérieuses de le perdre, et que le malade réclamait instamment la pré- sence de l’empereur, comme le seul remède qui püt le soulager (1). Charles-Quint s'était refusé jusque- à à à voir le roi, son prisonnier ; il ne croyait point qu'il püt le faire avec bien- séance, tant qu'il ne serait pas d'accord avec lui sur les conditions de sa mise en liberté (2). Mais, après avoir lu les dépêches d’Alarcon, il aurait manqué à ses devoirs de monarque chrétien, s’il avait persisté dans cette résolution. [ dit aux ducs de Calabre, de Bejar, de Nâjara et aux au- tres personnes de sa cour qui l’entouraient : « Il faut que » je fasse tout mon possible pour voir le roi, et j'entends » y aller par la poste. Que ceux qui veulent demeurer ici » y demeurent ! que ceux qui veulent venir avec moi se » pressent (5)! » Au même instant, il monta à cheval et (1) Sandoval, liv. XIIT, $ 16, p. 496. — Comentarios de los hechos del señor Alarcon, p. 506. (2) « Cesare non voleva trovarsi con lui, se prima le vertenze non fossero concluse. » (Dépêche de l’ambassadeur vénitien Andrea Navagero, du 50 août, citée par M. Cicogna, pp. 179 et 247.) (5) Guichardin, qui commet plus d’une erreur dans le récit qu'il fait de la captivité de François L‘, prétend que le grand chancelier Gattinara voulut dissuader Charles-Quint d'aller à Madrid, lui disant que son honneur exi- geait qu'il ne vit pas le roi sans le mettre immédiatement en liberté, etc., mais que d’autres furent d’un avis contraire, et que l’empereur les éconta. ({storia d’Ttalia, Liv. XVI, t. IV, p. 55.) Cette version, répétée par la plupart des historiens, avec les commentaires dont Guichardin l’accompagne, manque d’exactitude. La résolution de Charles-Quint fut toute spontanée; Gattinara n'était pas avec lui à San Agustin ; il ne put donc lui donner le conseil qu’on lui attribue. Que le grand chancelier eût été contraire jusque-là à une entreyue de son maitre avec le roi de France, c’est ce dont on ne saurait guère douter, quand mms: ’ Sade cmt es nt tic. + manne ne. tnt de Si he dt qui dns vé ( 529 ) courut, à bride abatiue, jusqu’à Madrid, En moins de deux heures et demie, il franchit une distance égale à neuf de nos lieues. Ayant mis pied à terre au palais, il se fit aussitôt annoncer au roi ; il fut introduit dans sa chambre par le maréchal de Montmorency : seul des seigneurs de sa suite, Lannoy l’accompagnait ; les autres étaient restés en dehors, afin que la présence de trop de monde ne fau- guât point l’auguste malade. François essaya de s'asseoir sur son séant ; dès qu'il aperçut l’empereur, il Jui tendit les bras; Charles s’y précipita avec effusion. Pendant quelques instants, ils restèrent dans cette attitude sans proférer une parole. François rompit le premier le silence : « Empereur, » mon seigneur, lui dit-il, vous voyez ici votre serviteur » et votre esclave. » — « Non, répondit Charles, je ne » vois en vous que quelqu'un de libre et mon bon frère » el véritable ami. » François repartit : « Je ne suis que » yotre esclave, » Charles répéta à son tour qu'il était libre et son bon frère et ami, « Ce qui importe le plus, » ajouta-t-1l, c’est votre santé; ne pensez pas à autre chose : » pour le surplus, à la venue de M°° d'Alençon, tout s'ar- » rangera comme vous le désirerez, » Il voulait par ces paroles lui donner courage et ôter toute inquiétude de sou esprit. François répliqua : « C'est à Votre Majesté de com- » mander; je ne puis qu obéir à ce qu'elle ordonnera. » Il dit encore : « Sire, ce dont je vous prie et vous supplie, » <’est que je puisse traiter avec vous sans intermédiaire. » Après ce court entretien, l'empereur se retira. Le lendemain, dans l’après-midi, Charles-Quint fit une on a étudié le caractère de ce ministre, et la pari qu’il prit aux négociations qui précéderent le traité de Madrid. ( 590 ) | seconde visite au roi; elle se passa comme la premiere : l'empereur y renouvela à François [* les témoignages d'intérêt et d'amitié qu'il lui avait donnés la veille. Le roi lui dit alors que, s’il mourait, il le priait de tenir ses fils pour ses serviteurs, de ne prétendre d'eux que ce à quoi ils étaient obligés, et de leur accorder sa protection, au cas que quelqu'un les offensàt (1). En ce moment, on vint avertir l’empereur que la du- chesse d'Alençon entrait à l'alcazar. Marguerite d’Angou- (1) Nous avons particulièrement suivi, dans ce récit de la visite de Char- les-Quint à François I«", la relation inédite de Gonzalo Fernandez de Oviedo, conservée à la bibliothèque de Madrid (voir l’Æppendice). Cette relation, qui concorde d’ailleurs avec celle de Sandoval (liv. XIII, Ÿ 16), nous pa- rait digne de toute confiance, l’auteur ayant, le soir même du retour de l’empereur à Tolède, entendu raconter tout ce qu’il rapporte, par le duc Ferdinand de Calabre aux ambassadeurs de Ferrare, au marquis de Mantoue et à d’autres gentilshommes ; mais nous avons profité aussi des détails don- nés par M. Cicogna, d’après les dépêches de l'ambassadeur Andrea Nava- gero, et, comme l'ouvrage de ce savant est peu connu en Belgique, nous reproduisons ici le texte du passage qui nous les a fournis : «... In questo mezzo peggiorando il re, Cesare volle visitarlo in persona a Madrid. Accostatosi al letto, il re si sforzù di sollevarsi il meglio che pote, cd abbracciato Cesare, gli disse in francese queste formali parole : Zmpera- tor mio signor, ecco qui un tuo servitore e schiavo. Cesare rispose che cosi non era, ma suo buono amico e fratello, che tale sperava gli sarebbe , che attendesse pure a star allegro, e non pigliasse altro pensiero che di risanareé, perche alla venuta di madame d’Alanson seguirebbe tra loro buona pace, perch’egli non voleva se non il dovere, e pensava che anche dal re non sarebbe mancato di fare il dovere, e percid sarebbe presto in Jibertà. II re repiglio che a Sua Maestà stava il comandare, perch’egli non poteva se non obbedire a quello che gli era comandato. Partito Cesare, il re migliord d’assai; e Cesare tornato a visitarlo, il re gli disse che, se mai gli toccasse di morire, volesse avere i suoi figliuoli per servidori, non volesse da loro piu di quello ch'era il dovere, e li pigliasse sotto la protezion sua, se da alcuno fossero offesi. Cesare confortollo a stare di buon animo. » (Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p. 179.) ( do1 ) lèême s'était dmbarquée à Aigues-Mortes le 27 août (1). A peine arrivée sur le territoire espagnol , elle avait appris la maladie du roi son frère; elle avait mis alors la plus grande diligence dans son voyage (2) : « Je vous asseure, » écrivait-elle au maréchal de Montmorency, peu de jours » avant d'en avoir atteint le terme, je vous asseure que » je me trouve bien lasse; mais le désir d’être là fera que » tout faix me sera gracieux (3). » Elle ne laissait point pourtant, malgré les fatigues de la route, de se montrer fidèle à son goût pour la poésie. Les vers suivants qu'on nous à conservés montrent les sentiments dont son âme était remplie durant cette longue pérégrination : ‘ Le désir du bien que j'attends Me donne de travail matière ; Une heure me donne cent ans, Et me semble que ma litière Ne bouge, ou retourne en arriére, Tant j'ay de m’advancer désir. O qu’elle est longue la carrière (1): Voir sa lettre de cette date au maréchal de Montmorency, dans les Lettres de Marguerite d’ Angoulême, sœur de François I‘, publiées par M. Génin, p. 182. A la suite de cette lettre, l'éditeur en a placé une que la duchesse écrit aussi au maréchal, de Fargue, le 10 septembre, et il met en note que Far- gue est un village pres de Bordeaux. Cette inadvertance est vraiment inex- plicable : comment la duchesse, partie le 27 août pour Barcelone, et de là pour Madrid, aurait-elle pu se trouver le 10 septembre près de Bordeaux ? Le contenu de la lettre fait d’ailleurs voir qu’elle est écrite en Espagne. Farque doit être le nom francisé d’une localité espagnole : très-probablement Fraga, à 55 lieues de Bacelone et à 19 de Saragosse. (2) Lettre du 10 septembre, citée à la note précédente, (3) Lettre sans date ni indication de lieu, dans les Lettres de Marguerite d'Angoulême, p. 187. 2m SÉRIE, TOME IX. 37 (532 ) Où gist à la fin mon plaisir ! O qu’il sera le bienvenu, Celui qui, frappant à ma porte, Dira : « Le roy est revenu » En sa santé tres-bonne et forte ! » Alors sa sœur, plus mal que morte, Courra baiser le messager Qui celles nouvelles apporte, Que son frère est hors de danger (1). Charles-Quint avait envoyé jusqu’à Barcelone don Ugo de Moncada au-devant de la duchesse; il avait prescrit quon la traitàt partout comme si elle était sa propre sœur (2); il s'empressa d’aller la recevoir au pied du grand escalier du palais. Marguerite était vêtue toute de blanc, en signe de deuil pour la perte qu’elle avait faite de son mari quelques mois auparavant; elle avait une suite de femmes nombreuse. L'empereur l’accueillit de la manière la plus cordiale, la baisa sur la joue, et, lui offrant la main, la conduisit lui-même à la chambre de son frère. Comme elle pleurait, il s’efforça de la consoler par toute sorte de paroles affectueuses et encourageantes. Quand elle fut auprès du roi, 1l prit congé d'eux. I} se proposait ce jour-là d'aller coucher à Getafe, à deux lieues de Ma- drid. Un instant après, il montait à cheval. Le 20 sep- tembre , il fut de retour à Tolède (3). (1) Lettres de Marguerite d’ Angouléme, p. 19. (2) Lettre de l'empereur à la régente de France, du 25 août, dans les Maouscrits historiques du cgnte de Wyÿnants. (5) Voy. la relation de Gonzalo Fernandez de Oviedo, dans l’Appendice, et Sandoval, liv. XIII, $ 16. L'ouvrage de M. Cicogna, que j'ai cité plus haut, contient sur l’arrivée de la duchesse d'Alençon les détails suivants : « Uscito l’imperadore di camera, e passegiando il castello, arrivd madama ( 935 ) François I* éprouva quelque soulagement de la visite de l’empereur, et surtout de la présence de sa sœur ché- rie. Mais cette légère amélioration ne se soutint pas : un abcès que le malade avait à la tête donna bientôt les plus vives inquiétudes (1); le 22 septembre, on crut qu'il ne passerait point la journée; le bruit de sa mort se répandit même dans la ville, et de là dans toute l'Espagne et jus- qu’à Paris (2). Ses médecins et ceux de l’empereur n'at- tendaient plus rien du secours de l’art; les signes d’une fin prochaine et inévitable étaient. empreints sur son vi- sage; pendant un certain temps , il fut sans dire un mot et sans voir, sans entendre, sans connaître personne. Dans cetie situation désespérée, et après que la science des hommes avait épuisé toutes ses ressources, Marguerite d'Angoulême eut recours au seul refuge qui lui restât, à Dieu. Elle fit dresser un autel dans la chambre même du roi : tous les gentilshommeés de la maison de son frère et les siens, ainsi que les dames et les autres Français pré- sents à Madrid, selon le désir exprimé par elle, avaient préalablement communié. L’archevêque d’Embrun dit la messe : lorsqu'il fut à l'élévation, il exhorta le roi à fixer ses regards sur le saint sacrement. François [° le fit, en » d’Alanson. Cesare andolle incontro, e visto che montava la scala, pian- » gendo, la abbraccid et bacid, e presala pel braccio le disse alcune parole, » poscia la menè nella camera del re, e quivi lasciolla. Egli disceso, montd » a cavallo, si ridusse fuor di Madril due leghe, e il giorno dopo, che fu » il 20 settembre 1525, giunse in Toledo sul tardi. » (Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p. 180.) (1) « .... Peggiorava ancora il re cristianissimo, .... avendo scoperto i medici chegli era oppresso da un apostema nella testa, si che ad ogni mo- mento parea dovesse morire; e ciù a 22 del settembre 1525. » ( Della vita e delle opere di Andrea Navagero , p. 180.) (2) Captivilé de François I°", pp. 558 et 548. ( 034 ) élevant les mains. La messe finie, le saint sacrement lui fut présenté, pour qu'il l’adorât. On entendit alors sortir ces paroles de sa bouche : « C’est mon Dieu qui me gué- » rira l’âme et le corps; je vous prie que je le recoive. » La duchesse d'Alençon fit séparer une partie de la sainte hoslie, qu’il reçut avec une dévotion exemplaire ; elle de- manda pour elle-même ce qui en restait. A partir de ce moment, une crise salutaire s’opéra dans l’état du malade; la fièvre qui le dévorait depuis vingt-trois jours le quitta, et sa convalescence fit des progrès assez rapides pour que, le 2 octobre, madame d'Alençon pût se rendre à Tolède, où l’appelaient les graves intérêts qui avaient été commis à ses soins (1). : IV. 4 François [° s'était promis beaucoup de l'intervention de sa sœur; c'était lui qui avait désiré qu’elle vint en Espa- (1) Tous ces détails sont tirés de la lettre du président de Selve au parle- ment de Paris, du 1 octobre, qui est dans la Captivité de François I”, p. 551. Voyez aussi la notice de M. Génin, dans les Lettres de Marguerite d’ Angoulême, p. 20. Il y eut alors des personnes qui crurent (et cette opinion a trouvé de l'écho parmi quelques écrivains) que François I« avait feint une maladie plus grave que celle qu’il avait réellement, dans le but de toucher le cœur de l’empereur : « Non mancù peraltro, dit M. Cicogna, chi credette che il re abbia finto » d'aver maggior male di quello che avea, acciochè Cesare si movesse a » vederlo; » mais il ajoute : « Attestava perd il Navagero il re avere sofferta » gravissima malattia, e non essere tuttavia fuori di pericolo. » (Della vila e delle opere di Andrea Navagero, p. 180.) En présence de cette assertion de l'ambassadeur vénitien, corroborée par les documents que renferme la Captivité de François Z°, il n’est pas pos- sible de douter du danger que présentait la maladie du roi. | y SE 1 2È 4 Le fee TUE ( 55 ) gne (1). Marguerite d'Angoulême était jeune encore (2); elle était belle, gracieuse, spirituelle; elle possédait plu- sieurs langues et parlait en perfection l'espagnol ; les poëtes de son temps chantaient à l’envi ses louanges; ils la sur- nommaient la dixième Muse, la quatrième Grâce; son frère : l’appelait là Marguerite des Marguerites; bref, selon le mot de Brantôme, « c’étoit une princesse digne d’un grand » empire (3). » N’était-1l pas permis de supposer qu’elle se ferait écouter avec faveur d’un monarque de vingt-cinq ans? Mais Charles-Quint était peu accessible aux séduc- tions de la coquetterie; et, s’il eut pour la duchesse d'Alençon toute la courtoisie, tous les égards auxquels elle était en droit de prétendre, 1l ne se montra point disposé à lui sacrifier les principes essentiels de sa politique. Lorsque, le 3 octobre, il apprit que la duchesse ap- prochait de Tolède, il envoya le due de Medinaceli pour la complimenter hors de la ville; lui-même il alla à sa rencontre, avec l'archevêque de Tolède, les ducs de Ca- labre, de Bejar, de Näjara, le connétable de Navarre, l'amiral des Indes, le marquis de Villafranca et plusieurs autres seigneurs de sa cour. Marguerite venait dans sa litière; une vingtaine de ses femmes la suivaient sur des haquenées. Voulant prévenir l’empereur, elle pressa sa marche; elle était déjà bien avant dans la ville, quand ils se rencontrèrent. Elle avait alors quitté sa litière, pour monter un cheval qu'on lui tenait préparé. Charles-Quint était à cheval aussi. Du plus loin qu'il aperçut la duchesse, (1) Lettre de la duchesse d'Alençon au roi, sans date, publiée par M. Gé- nin, p. 178. (2) Elle était dans sa 34° année, étant née le 11 avril 1492. (5) Vies des dames illustres, françoises et estrangères. ( 2306 ) il se découvrit. S’étant approché d’elle, il lui fit la révé- rence; puis il se plaça à sa gauche, et l’accompagna jus- qu'à l’hôtel de don Diego de Mendoza, comte de Melito, où elle devait loger (1). Le lendemain, Marguerite alla visiter l’empereur; il la reçut dans sa chambre, où il était seul ; elle avait amené une de ses femmes qui garda la porte : l’empereur avait promis à François I‘ qu'il en agirait ainsi avec elle (2). La veiile, Charles-Quint s'était montré très-gracieux pour Marguerite; il lui avait exprimé la joie qu’il éprouvait du rétablissement de la santé du roi, et son désir de voir une solide amitié succéder à leurs divisions (5). Ce jour- là, elle le trouva « bien froid (4). » Elle mit en avant le mariage de son frère avec la reine Éléonore, et l'empe- reur lui dit que sa sœur élait promise au duc de Bour- bon, que sa parole était sacrée (5). Elle renouvela l'offre de s’en rapporter au jugement des pairs de France sur la question relative au duché de Bourgogne; là-dessus il répondit qu'il avait à consulter son conseil (6). Bref, cette première entrevue n’amena aucun résultat. Après un assez (1) Relation manuscrite de Gonzalo Fernandez de Oviedo, dans l’Æppen- dice. Dans la lettre sans date (elle est du 4 Béiré où Marguerite rend compte au roi de sa réception, elle reconnaît que l’empereur lui a fait « honneste et » bon recueil. » (Captivité de François 7°, p. 542.) (2) C’est ce qu’elle dit dans sa lettre sans date qu roi, qui est p. 358 de la Captivité de François Ie". Voy. aussi sa lettre du 4 octobre citée à la note précédente , et sa lettre sans date (5 octobre) publiée par M. Génin, p. 188. (3) Lettre de Marguerite, du 4 octobre. (4) Lettre du 5 octobre, citée ci-dessus. (5) Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p. 181. (6) Lettre du 5 octobre, déjà citée. (537) long entretien (1), Charles conduisit la duchesse chez la reine douairière de Portugal, qui lui fit le meilleur ac- cueil (2). | Le 5 octobre, 1l rendit à Marguerite la visite qu’il avait reçue d’elle, et, plus tard, il la fit chercher par le vice-roi de Naples, pour reprendre leur conversation de la veille. De grands débats avaient eu lieu, dans la matinée, entre les négociateurs français et les ministres impériaux (3). Charles, après plusieurs autres propos, dit à la duchesse qu’il désirait la délivrance du roi et son amitié, mais qu’il lui était impossible de se soumettre, en ce qui concernait le duché de Bourgogne, au jugement des pairs de France et du parlement de Paris, qui n'étaient manifestement pas, à son égard, dans les conditions d'indépendance et d’impartialité requises, Elle proposa alors de choisir des arbitres; il y consentit pour lui complaire, bien qu'il s'y fût précédemment refusé (4). (1) Selon la relation de Gonzalo Fernandez de Oviedo, il avait duré plus de deux heures. (2) Lettre du 5 octobre. Dans la protestation du 13 janvier 1526 ( Capti- vité de François T°, p. 471), on fait un grief à Charles-Quint de ce que la reine Éléonore avait quitté Tolède le 6 octobre. La lettre de Nicolas Per- renot à Marguerite d'Autriche, du 18 novembre 1525 ( Végociations entre la France et l’ Autriche, I1, 644), nous apprend qu'Éléonore devait partir plus tôt pour Talavera, et qu'elle avait différé son voyage « par urbanité. » Bien d’autres choses alléguées dans cette fameuse protestation ne sont pas mieux fondées. HS (5) Lettre du trésorier Babou au maréchal de Montmorency, du 5 oc- tobre, dans la Captivité de François I”, p. 344. (4) Dans sa lettre du 5 octobre citée ci-dessus, la duchesse ne dit pas que ce fut elle qui proposa l'arbitrage; mais Nicolas Perrenot l’affirme, comme le tenant d'elle-même. ( Voy. sa lettre du 19 octobre à l’archiduchesse Mar- guerile, dans les Végociations entre la France et |’ Autriche, 11, 622.) ( 938 ) | C'était là de sa part une concession importante, et il : était fondé à croire que les ambassadeurs de France l’ac- cepteraient avec empressement; aussi écrivait-il au roi, en lui envoyant un de ses gentilshommes pour s'informer de son état : « J'espère et ne fais doubte que madame d’Alen- » ÇOn, vostre sœur, conclura tost une bonne paix (1). » Son attente fut trompée. Les ambassadeurs ne crurent pas pouvoir prendre sur eux d'admettre l'arbitrage; l’arche- vêque d'Embrun et le trésorier Babou allèrent à Madrid, pour en référer au roi : François L® persista dans la pré- tention de faire décider la question en litige par le parle- ment de Paris (2). Il était évident dès lors qu'on ne parviendrait pas à s'entendre. La duchesse d'Alençon fit une dernière tentative : elle offrit la vicomté d’Auxonne, avec tout droit de souveraineté, ressort et hommage, de manière qu'elle pût être jointe au comté de Bourgogne, pour en former un duché. Charles-Quint, qui regrettait peut-être de s'être montré trop facile en consentant à un arbitrage, déclara catégoriquement qu’il ne rendrait pas la liberté au roi, si le duché de Bourgogne, avec toutes ses appartenances, y compris la vicomté d’Auxonne et les comtés de Mâcon et d'Auxerre, n’était remis entre ses mains (3). Marguerite quitta Tolède le 14 octobre, avec les ambassadeurs de France, piquée d’avoir si mal réussi (1) Sa lettre est dans la Captivité de François I°", p. 5344. (2) Lettre du président de Selve au maréchal de Montmorency, du 9 octo- bre, dans la Captivité de François Z°", p. 557. — Offres respectives de la duchesse d'Alençon et des ministres de empereur, avec les réponses du roi, tbid., p. 559. | (5) Lettre de Nicolas Perrenot à l'archiduchesse Marguerite , du 19 octo- bre, déjà citée. Deuxième protestation du roi, du 15 janvier 1526. ( 539 ) dans son entreprise (1). L'empereur l'accompagna jus- qu’en dehors de la ville : après lui avoir fait ses adieux, il prit le chemin d'Aranjuez, où il alla chasser pendant plusieurs jours (2). On conçoit la résistance de François [°" à la cession du duché de Bourgogne que l’empereur exigeait de lui : 1l ne pouvait aliéner une province aussi considérable de la mo- narchie, sans encourir les reproches mérités de la France, sans attirer sur lui une impopularité qui se serait à jamais attachée à sa mémoire. Ce qui se conçoit moins, c'est qu'un si grand roi ait eu recours à de si petits moyens pour désarmer la rigueur du prince qui le tenait en sa puissance : nous voulons parler de l'envoi qu'il fit à Tolède, quelques jours après le retour de la duchesse d'Alençon à Madrid, du médecin que l’empereur lui avait donné. Do- cile aux conseils de sa sœur (5), il s'était appliqué à per- suader ce médecin qu'il était très-malade; que le chagrin qu'il ressentait de sa détention le conduirait infaillible- ment au tombeau; que jamais il ne partirait d'Espagne; que l’empereur aurait donc avantage à accepter une bonne (1) Son dépit perce dans ses lettres. Il y en a une, entre eelles qu’elle écrit de Tolède au maréchal de Montmorency, où elle dit : « Si j'avais affaire à » gens de bien et qui entendissent que c’est que d'honneur, je ne m’en soul- » cierois, mais c’est le contraire... v (Lettres de Marguerite d'Angouléme, p. 191.) | | (2) « A di 14 detto (d'ottobre), madama d’Alanson, senza aver concluso cosa, pigliata licenza dall’Imperadore, parti. Cesare l’accompagnà fino fuori della porta; poscia andd di lungo per un’ altra strada alla caccia, sette leghe lontano da Toledo. » (Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p.181.) (5) Elle lui écrivait de Tolède, le 4 octobre: « … Vous suplyant, mon- » seigneur, fère devant le sieur Larcon (Alarcon) contenance foible et en- » nuyée, car vostre débilité me fortifiera et advancera mes dépesches, » (Captivité de François Ze, p. 342,) (540 ) somme d'argent pour sa rançon (1). Mais ni l’empereur ni ses ministres ne furent dupes de ce manége. Remarquons qu'à la nouvelle du rejet de ses dernières ouvertures, François [* avait écrit à Charles-Quint : « Je vois que vous » me voulez toujours tenir prisonnier, puisque vous me demandez chose impossible; eh bien, je me suis résolu prendre la prison en gré, estant seur que Dieu, qui cognoist que je ne l’ai mérité longue, estant prisonnier de bonne guerre, me donnera la force de la porter pa- ciemment (2). » Sur ces entrefaites, l’évêque de Tarbes (3) arriva à To- lède, pour y résider en qualité d’ambassadeur de la ré- gente de France. La première chose qu'il demanda à l'em- pereur (4) fut que l’archevêque d'Embrun et le président de Selve pussent venir lui faire de nouvelles propositions. Charles-Quint y consentit. Le 13 novembre, il donna au- dience aux deux plénipotentiaires. Les offres qu'ils étaient autorisés à lui faire étaient trois millions d’écus pour la rançon du roi leur maître, son mariage avec la reine douairière de Portugal, à qui l’empereur céderait ses pré- tentions sur la Bourgogne, et, sur tous les autres points en > SO à + (1) Voyez la lettre de Nicolas Perrenot à l’archiduchesse Marguerite, du 27 octobre, dans les Négociations entre la France et l’ Autriche, II, 650. M. Cicogna, d’après une dépêche de l'ambassadeur Navagero du 4 no- vembre, dit : « Malgrado che il re di Francia avesse riacquistata in parte » Ja salute, nondimanco ne continuava il male, e il medico dell’ imperadore » che ne era alla cura e altri dicevano che in breve sarebhe per divenire » etico o idropico. Molti altri perd ripetevano che voleasi far credere mag- » giore il suo male, per indur Cesare al sospirato accordo. » ( Della vita e delle opere di Andrea Navagero , p. 182.) (2) Captivité de François I°, p. 384. (3) Gabriel de Grammont. (4) Le 10 novembre. ( 41 ) débat, un arrangement conforme aux articles qui avaient été remis à don Ugo de Moncada (1). Dans l’état où se trouvaient les finances de l’empereur, une somme de trois millions d’écus eût été pour lui une ressource inappréciable; elle l'aurait mis à même, non- seulement de payer ses troupes, dont la solde était depuis si longtemps arriérée, mais encore de pourvoir à d’autres nécessités publiques. La paix lui donnait aussi le moyen d'aller se faire couronner en Italie et d’y établir sa pré- pondérance : double objet de ses plus ardents désirs (2). Enfin , une fois d'accord avec François [°, rien ne se serait opposé à ce qu'il passâl en Allemagne. Mais Charles- Quint, comme le remarque un diplomate qui l'avait ob- servé de près, plaçait au-dessus de tout sa dignité et son honneur (5). Le duché de Bourgogne avait été usurpé par Louis XI sur son aïeule Marie; il croyait de son honneur et de sa dignité d'exiger la restitution d'une province d’où sa maison tirait son origine, dont il portait le nom et les armes, et qui était, selon ses expressions, le fondement de son ordre (4). C'était le même sentiment qui avait mû, (1) Lettre de Nicolas Perrenot à l’archiduchesse Marguerite, du 15 no- vembre, dans les Végociations entre la France et l’ Autriche, II, 642. — Lettre de l’empereur au sieur de Praet, son ambassadeur en France, du 20 novembre, thid., 646. (2) « .… Desidera eziandio sommamente di venire in Italia, pensando che da questa sua venuta dependa la grandezza sua. » (Relation de Gasparo Contarini, déjà citée, p. 69.) (5) « Sua Maestà è intentissima a quel solo che alla dignità ed onor suo appartenga.….. » (Relation de Niccolo Tiepolo, faite en 1552, dans les Honu- ments de la diplomatie venitienne, p. 78.) (4) Telle était aussi la manière de voir de l’archiduc Ferdinand, son frère, comme le prouve une lettre qu’il écrivit à l'empereur, le 1* septembre. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) (542) _ Jorsque le connétable de Bourbon était devant Marseille, à lui mander de faire tout son possible pour avoir la croix de saint André, conservée dans l’abbaye de Saint-Victor, où l'avait déposée un de ses prédécesseurs, roi de Bour- gogne (1). Ses prétentions n'avaient rien, d’ailleurs, qui ne fût conforme au droit public de l’Europe; elles repo- saient sur l'engagement formel que Louis XIT avait pris dans le traité de Blois (2). | | Aussi il répondit aux ambassadeurs français, comme il l'avait fait plusieurs fois déjà, qu'il n'entendait prendre aucune rançon du roi; qu'il voulait avoir ce qui lui appar- tenait, et principalement le duché de Bourgogne; que, s'ils n'avaient pas le pouvoir d'accorder ce point, il était inutile qu'ils prolongeassent leur séjour à Tolède. Le len- demain, l'archevêque et le premier président sollicitèrent une nouvelle audience; ils lui dirent que, si le roi n’était pas en France, il lui serait impossible de restituer la Bour- gogne, Car il ne serait point obéi par les états ni par les parlements; ils proposèrent de livrer des otages, à condi- tion que l’empereur en donnerait de son côté, pour le cas que les arbitres prononçassent contre lui. Il leur répliqua qu’il ne rendrait la liberté au roi que lorsque la possession de la Bourgogne lui aurait été assurée ; que là où son droit était si clair, des arbitres étaient inutiles, et qu'il ne pou- vait être question d’otages à livrer de sa part. Ils demandé- rent alors quelles süretés on leur offrirait de la délivrance du roi, s'ils remettaient préalablement la Bourgogne. Sur (1) Lettre du 2 octobre 1524. ( Précis de la correspondance de Charles- Quint, affaires d’Italie et de Portugal, 1521 et 1527, manuscrit des Ar- chives du royaume, fol. 57.) (2) Du 22 septembre 1504. Voy. le Corps diplomatique de Dumont, t. IV, 1re partie, p. 57. | | | ( 45 ) ce point, l’empereur ordonna à ses ministres de commu niquer avec eux. La conférence eut lieu le 21 novembre. L'archevêque et le premier président de Paris, qui s'étaient ravisés sans doute, en revinrent à vouloir que la délivrance du roi précédàt la restitution. Les ministres impériaux leur déclarèrent que jamais leur maître ne laisserait partir le roi, sans que la Bourgogne, avec toutes ses apparte- nances, lui eût été remise (4). C'était toujours, on le voit, depuis le commencement des négociations, la même diffi- culté. La conférence se termina donc sans que les choses fussent plus avancées qu'auparavant. François I‘ chercha, à cette époque, dans d’autres com- binaisons, les moyens de recouvrer sa liberté : il concerta, avec sa sœur et quelques serviteurs affidés, un projet d'évasion. À la faveur de la trêve, un grand nombre d'agents français traversaient incessamment l'Espagne, allant de Lyon à Madrid et de Madrid à Lyon; il ne leur était pas difficile de faire disposer, de distance en distance, comme pour eux-mêmes, des chevaux qui auraient servi à la fuite du roi (2) : ce qui l'était davantage, c'était de mettre en défaut la vigilance d'Alarcon. Essayer de gagner ce vieux et loyal serviteur de ses souverains, eût été une tentative inutile et dangereuse : on s’adressa à des soldats italiens de la garde du palais, auxquels on promit de grosses pensions en France, s'ils voulaient favoriser l’éva- (1) Lettre de Nicolas Perrenot à l’archiduchesse Marguerite, du 18 novem- bre ; lettre de l'empereur au sieur de Praet, du 20 novembre; lettre du secré- taire l'Allemand au même, du 21 novembre, dans les Végociations entre la France et l'Autriche, II, 644, 646, 649. (2) Dans la lettre déjà citée de Nicolas Perrenot à Marguerite, du 18 no- vembre, il est dit que, lors de la découverte du projet d'évasion, on trouva « les chevaulx assis de lieu à autre. v ( 544 ) vw PR sion du prisonnier (1). Le capitaine Emilio Cavriana, d'une famille distinguée de Mantoue, et qui s'était trouvé à Pavie dans les rangs de l’armée française, était auprès d'eux l'intermédiaire du roi et de la duchesse. Ce capitaine avait obtenu de l’empereur la permission d'aller à Saint- Jacques en Galice : on remarqua qu’il s'arrêtait longtemps à Tolède, et que, de là , il faisait des voyages fréquents à Madrid; on conçut des soupçons, et l’on se saisit de sa personne et de ses papiers (2). Par là avorta ce premier projet. François et Marguerite en formèrent bientôt un autre. [| y avait un esclave noir qui était chargé d'allumer et d'entretenir le feu dans la chambre du roi; il entraiït el sortait sans que les gardes fissent attention à lui : on n'eut pas de peine à le suborner, et il fut convenu qu'un jour, à la tombée de la nuit, le roi, prenant ses vêtements, après s'être noirci les mains et le visage, tenterait, ainsi déguisé, de sortir du château. Ce plan eût réussi peut-être, sans un incident bien inattendu. M. de la Rochepot, l'un des gentilshommes du roi, et son valet de chambre, Clé- ment le Champion, qui, tous deux, étaient dans le se- cret, se prirent de querelle; le premier donna un soufflet à l’autre. [rrité de cet outrage, Champion, pour s’en venger, courut à Tolède, où il découvrit à l'empereur (3) tout ce qui (1) Lettre de Clément le Champion à Charles de Lannoy, du 28 novembre 1525, dans les Manuscrits historiques du comte de Wynants. . (2) Della vita e delle opere di Andrea Navagero, par M. Cicogna, pp 182,253. — Lettre de Nicolas Perrenot, du 18 novembre, déjà citée. (5) Charles-Quint le prit dès lors à son service, et quelque temps après, il le fit passer aux Pays-Bas, où il lui assigna une pension sur ses domaines. C’est ce que nous apprend une instruction de Marguerite d'Autriche, du 25 avril 1527, publiée dans les Bulletins de la Commission royale d'histoire, ge série, t. I. La même pièce nous fait connaître que Champion était abbé de Redon en Bretagne. ee à s'il er » (545) se tramait. Un historien accrédité assure que Charles-Quint ne voulut pas d'abord y croire : la passion que le valet de chambre mettait dans son Fangage lui inspirait de Ja dé- fiance; mais surtout 1} ne pouvait se persuader qu’un prince comme le roi de France füt capable de faire quelque chose de si bas (1). Quoi qu’il en soit, 1} donna l'ordre à Alareon d'exercer une surveillance plus sévère, et d’inter- dire dorénavant à l’esclave noir l'accès de la chambre de son prisonnier (2). Déçu dans ses projets d'évasion, François I® fit un acte auquel , s'il eût été spontané et sérieux, l’histoire ne sau- rait donner assez d'éloges : il abdiqua en faveur de son fils aîné, le dauphin de Viennois (3). Mais ee qui autorise à concevoir des doutes sur la sincérité de cette abdication, et à la ranger aa nombre des expédients que le roi ne dé- daigna pas d'employer pour agir sur l'esprit de l’empe- reur (4), ce n'est pas seulement qu’elle ne reçut aucune sorte de publicité en France, c’est encore qu'elle avait été concertée à Lyon entre la régente et le sieur de Bryon, tout nouvellement arrivé à Madrid. E’ambassadeur de l’em- pereur, le sieur de Praet, en avait été averti, kg ne pas dire menacé (5). (t} « … No se podia persuadir que un principe como el rey de Francia quisiesse intentar eosa tan fea. » (Sandoval, liv. XIE, À 18, p. 497.) (2) Sandoval, I. c. — Lettre de Nicolas Perrenot, du 18 novembre, déjà citée. (3) Les lettres patentes d’abdication, datées du mois de novembre, sont dans la Captivité de François 1°", p. 416. (4j Qu'on lise attentivement les lettres d’abdication , on verra que le rédac- teur a eu soin de n’y rien insérer qui püt blesser l’empereur, à la connaissance duquel on désirait certainement qu’elles parvinssent. (5) Voyez la lettre du sieur de Praet à l’empereur, du 14 novembre , dans les Négociations entre la France et l’ Autriche, IL, 651. ( 946 ) La duchesse d'Alençon quitta Madrid le 27 novembre (1), pour retourner en France, Le sauf-conduit qu’elle avait eu n’était point limité; la durée en était subordonnéeau bon plaisir de l’empereur (2). Les ambassadeurs français en sollicitèrent un nouveau, qui füt valable jusqu’à la fin de mars, avec la faculté de retourner par la Navarre. Charles- Quint, après avoir hésité pendant quelques jours (5), fit expédier, le 23 novembre, à Tolède, le sauf-conduit de- mandé (4). Il n’en étendit pas toutefois les effets autant que la duchesse l'aurait voulu, et il ne lui permit point de traverser la Navarre, pays de nouvelle conquête, où la France comptait un grand nombre de partisans ; mais, en lui accordant, pour sortir d'Espagne, jusqu’au dernier jour de janvier 1526, il lui donnait tout le temps dont elle pouvait avoir besoin. Et, en effet, elle était rentrée en France dès le 25 décembre. | Marguerite d'Angoulême eut le déplaisir d'apprendre, (1) Cette date parait certaine. Elle est indiquée dans une dépêche de l’am- bassadeur vénitien Andrea Navagero, du 50 novembre, dont M. Cicogna (p. 182) nous fait ainsi connaître la substance : « Madama d’Alanson avea » domandato di potere stare a Madril per due altri mesi appresso il fratello » re, ma le fu negato; e domandè eziandio di tornar in Francia per la via di » Navarra, e cié pure non le hanno conceduto : il perché, nel lunedi 27 no- » vembre 1525, parti di Madril per lo cammino di Saragoza. » Ce qui con- firme cette date, c’est que le nouveau sauf-conduit demandé par la duchesse lui fut donné le 25 novembre. On peut donc supposer que, dans la lettre de la duchesse écrite d’Alcala, et que M. Génin a publiée (Lettres de Marguerite d’Angouléme, p.195), la date du 20 novembre a été mal copiée ou mal lue. (2) C’est ce que l’empereur lui-même marque au sieur de Praet dans une lettre écrite de Tolede, le 20 novembre ( Végociations entre la France et l’ Autriche , IL, 648). Ce sauf-conduit n’a pas été publié, non plus que celui du 25 novembre, (3) Voir sa lettre du 20 novembre au sieur de Praet. (4) Manuscrits historiques du comte de Wynants. EC RNP © ‘ | DA EEE u r : 1 , ] ë (47) avant de s'éloigner de Madrid, l’accueil que le connétable de Bourbon venait de recevoir de l’empereur. Dès le mois de juin (1), Charles-Quint avait appelé le connétable à sa cour ; il voulait lui témoigner sa gratitude el son estime; il lui paraissait juste aussi que ce prince intervint dans les arrangements qui le concerneraient. Bourbon arriva à Tolède le 15 novembre (2). Quoiqu'il tombât une forte pluie, l’empereur se porta au-devant de lui jusqu'assez loin hors de la ville, accompagné du cardinal Salviati, légat du pape, des ambassadeurs étrangers et d’une suite nom- breuse (3). Les premières paroles que le connétable dit à Charles-Quint, furent les suivantes : «Sire, j'ai perdu mon État à votre service, et j'ai fait, pour le surplus, ce que je vous promis comme chevalier, comme bon serviteur et comme vassal. Je rends grâces à Dieu de la victoire qu'il a donnée à V. M. Ce que j'ai risqué en cela est peu de chose, comparativement au zèle dont je suis animé pour la gloire de V. M.; et si, de même que j'ai perdu mon État, j'avais perdu un grand royaume, je ne le regrelterais point. » L'empereur lui répondit : « Duc, votre État n’est point perdu et ne le sera pas. Vous le recouvrerez ; c’est moi qui vous le donnerai, et un autre bien plus considérable. Je sais que tout ce que vous dites est la vérité; le temps et les faits vous montreront Se OUT Se CS ES OMAN (1) Lettre du 5 juin. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) Le 15 juillet, Charles envoya à Bourbon le sauf-conduit qu'il avait reçu pour lui de la régente de France, en échange de celui qu'il venait de donner à la duchesse d’Alençon. (7bid.) (2) « … Il duca di Borbone a 15 del novembre 1525 entrd in Toledo. {Cicogna, Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p. 182.) (5) Lettres de Nicolas Perrenot à l’archiduchesse Marguerite, du 18 no- vembre, et du secrétaire l’Allemand, du 21 novembre, dans les Wégociations entre la France et l'Autriche, IT, 644, 649. 27° SÉRIE, TOME IX. 28 (548) » la volonté que j'ai de contribuer à votre grandeur. En » vous voyant, J'ai vu l’homme du monde que j'ai le plus » désiré de connaître personnellement, car vos aclions, » je les connais très-bien. » Bourbon lui dit qu'après la bataille de Pavie, il aurait voulu poursuivre l’ennemi, mais que, n'ayant pas trouvé les mêmes dispositions dans plusieurs des chefs de l’armée, il avait jugé préférable de prendre les mesures nécessaires pour la garde du roi de France et des personnages de marque faits prisonniers avec lui : « Vous fites beaucoup mieux ainsi, répliqua » l’empereur, et ce fut très-bien raisonné et très-sage. Je >» suis parfaitement informé de tout : je n’ignore pas que » c'est vous qui, avec l’aide de Dieu, avez été une des » principales causes de celte victoire; je vous tiendrai » compte de tout cela, comme c'est raison. » Ils continue- rent de causer ensemble jusqu'au palais, où le connétable soupa avec le comte Henri de Nassau. Il se rendit ensuite à l'hôtel du comte de Cifuentes , qui avait été préparé pour son logement (1). Pendant toute la durée de son séjour à Tolède, l’empereur ne cessa de lui montrer la plus grande considéralion, et de le combler d’égards et de prévenances. L François L° avait tout fait pour persuader à l’empereur que, plutôt que de céder la Bourgogne, il resterait sa vie entière en prison; le langage que la régente sa mère tenait, à Lyon, au sieur de Praet (2) était conforme à celui qu'il (1) Relation manuscrite de Gonzalo Fernandez de Oviedo., dans l'#p- pendice. (2) Louis de Bruges, sieur de Praet, que l’empereur, au mois d'août 1525, (d49 ) | tenait lui-même à Madrid et qu’il faisait tenir à Tolède par ses ambassadeurs. Tel n'était pourtant pas le fond de sa pensée; loin de là : Son impatience de sortir de captivité était extrême, et augmentait chaque jour. La duchesse d'Alençon venait à peine de se séparer de lui, qu’il tenta une dernière fois d'émouvoir Charles-Quint. Il lui envoya le maréchal de Montmorency (1), pour lui dire que, étant résolu à demeurer perpétuellement son prisonnier, il dé- sirait voir fixer, d'une façon définitive, le lieu où il serait détenu et le nombre de gens qui lui serait donné pour son service. Charles était prévenu que celte démarche serait faite auprès de lui (2) ; il répondit froidement qu'il était prêt à accéder au désir du roi (5). avait nommé son ambassadeur près la régente de France. (Manuscrits histo- riques du comte de Wynants.) Il remplissait auparavant la même charge à la cour de Londres. | Voir ses lettres du 14 novembre à l’empereur, et du 12 décembre à l’ar- chiduchesse Marguerite, dans les Végociations entre la ui etl’ Autriche, 11, 631, 650. (1) « Avec dépit et aversion, » con despecho y aborrecimiento, dit San- doval, liv. XIII, $ 14, p. 498.- (2) Voir la lettre du sieur de Praet, du 14 novembre, déjà citée. (5) Sandoval, I. c. Dans un rapport que le trésorier Babou fit au parlement de Paris le 18 décembre (Captivité de François Ie", p. 452), on lit « que » l’empereur dépêcha un homme au roi, pour qu'il contremandât la duchesse » d'Alençon, et qu’il enverrait des gens de son conseil à Madrid, pour délibérer » du fait de la paix et de sa délivrance; que le roi répondit qu’il ne contreman- » dérait point la duchesse, que très-volontiers il ouïrait les ambassadeurs de » l’empereur, et qu'il était délibéré et résolu de ne rien faire au préjudice de » son royaume ; etc. » Nous regardons ces détails comme ayant été imaginés pour les besoins de la cause : non-seulement ils sont contredits par Sandoval, mais encore ils sont en opposition avec tous les faits authentiquement con- statés et tous les documents connus; s'ils eussent été vrais, il en aurait certai- nement été parlé, soit dans les dernières instructions données par le roi aux ambassadeurs de la régente (Captivité, etc., p. 425), soit dans la protestation ( 590 ) Fr ançois I* comprit, par cette réponse, qu'il ne gagne- rait rien à feindre davantage. Il fit insinuer à Lannoy qu'il avait reçu de la régente, sa mère, d’amples pouvoirs pour traiter, et que, si l'empereur voulait nommer des plénipo- tentiaires, 11 espérait que la paix serait bientôt conclue entre eux (1). Charles-Quint y consentit; il donna ses pleins pouvoirs au vice-roi de Naples, à don Ugo de Mon- cada et au secrétaire l'Allemand (2). Les plénipotentiaires du roi et de la régente étaient, comme précédemment, l'archevêque d'Embrun et le président de Selve, auxquels avait été adjoint le sieur de Bryon. Louise d'Angoulême, en effet, dans des instructions remises à ce dernier, autorisait ses ambassadeurs à céder la Bourgogne, s'il fallait absolument à ce prix acheter la délivrance de son fils; la personne du roi était à ses yeux d'une valeur telle que, pour obtenir sa mise en liberté, on ne devait pas balancer à faire le sacrifice, non-seule- ment d'une proyince, mais encore d'une portion plus con- sidérable de la monarchie (5). Le traité d'Arras, conclu _— du 15 janvier (tbid., p. 467). Et puis quel était cet homme dépéché au roi? pourquoi ne le nomme-t-on pas ? (1) Sandoval, L. c. (2) Leur commission est du 2 décembre 1525. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) (5) « Si la délivrance du roy ne se peut recouvrer sans le duché de Bourgo- gne, et aux conditions qu’ils demandent, si aucune chose n’estoit rabattue, la personne dudit seigneur est tant à estimer, avec les commoditez qui vien- dront de sa délivrance, et pour ne tomber aux inconvénients qui pourroient survenir de si longue prison, vaut trop mieulx, et non-seullement délivrer Bourgogne, mais trop plus grand’chose , que de le laisser en l’estat où il est.» (Dernières instructions de la régente à ses ambassadeurs, dans la at de François 7°", p. 408.) Ces instructions renfermaient-elles la véritable pensée de la régente? ou | (ot ) entre Charles VIT et le due de Bourgogne Philippe le Bon, et le traité de Bretigny, qui rendit à la liberté Jean IH, prisonnier du roi d'Angleterre Édouard HIT, étaient les ‘exemples sur lesquels elle s’appuyait pour justifier une si grave détermination. Lannoy, Moncada et l'Allemand s'étant rendus à Madrid, la première chose que François F* leur demanda fut la main de la reine Éléonore (1). Charles-Quint avait con- stamment refusé jusque-là d'entendre au mariage du roi avec sa sœur ; il s'y refusa encore, en permettant toutefois que la reine fût consultée à cet égard, et en réservant l’acquiescement du duc de Bourbon, à qui elle était pro- mise. Séduite autant par les brillantes qualités du roi que par la perspective de monter sur le trône de France, Éléo- nore, sans hésiter, se prononça pour le vaineu de Pavie (2), malgré tout ce qu’on avait pu lui dire de l’inconstance de ce prince, des infidélités qu’il avait faites à sa première femme, dont on lui imputait même d’avoir causé la mort, et enfin du caractère impérieux de la duchesse d’Angou- lême (5). Bourbon, instruit de cela, dégagea l'empereur de bien étaient-elles destinées à être communiquées aux plénipotentiaires de l’empereur, et à leur faire prendre le change ? En d’autres termes, Louise de Savoie avait-elle concerté avec son fils le plan qu’il exécuta, et qui consistait à souscrire aux conditions que l’empereur mettrait à sa délivrance, avec l'in- tention de ne pas les accomplir? Les éléments nous manquent pour résoudre cette question. (1) Sandoval, L. c. (2) Sandoval, liv. XIIT, $ 19, p. 498. On sait, de Charles-Quint lui-même, que ce fut Éléonore qui choisit Francois Le, Voir sa lettre du 19 mars 1558 à Luis Quijada, dans la Retraite et mort de Charles-Quint au monastère de Yuste, Il, 554. . (3) Dans son livre, si rempli de faits nouveaux et intéressants, que nous avons cité plusieurs fois déjà, et que nous citerons encore, M. Cicogna (552) sa promesse. Charles-Quint, pour l'en récompenser, lui donna le duché de Milan (1). Ce point réglé, on passa au plus épineux de tous, à celui qui concernait le duché de Bourgogne. L'empereur avait exigé, en dernier lieu, que la Bourgogne lui fût re- mise préalablement à la délivrance du roi, Les plénipoten- tiaires français persistèrent à soutenir que c'était demander la chose impossible, et que, sans la présence et l'autorité du roi, on ne saurait triompher de l'opposition universelle que soulèverait, en France, ce démembrement de [a mo- narchie; ils offrirent de donner en otage le dauphin et l’un de ses frères, pour garantie de l'exécution de leurs pro- messes (2). Charles-Quint accepterait-il arrangement qui lui était présenté comme le seul au moyen duquel il pût entrer en possession de la Bourgogne? Cette question fit éclater une grande divergence d'opinions dans le sein de son con- seil (5). Les Belges — Charles de Lannoy, Henri de Nas- analyse ainsi une dépêche du 10 juillet 1595 de l'ambassadeur vénitjen An- drea Navagero : « Dice il Navagero che avendo cogli altri suoi colleghi desi- » nato un giorno con monsignore di Lursi, agente del duca di Borbone » presso la corte cesarea, questa Lursi loro disse che mos. di Memoranci » cercaya di rimovere la reina di Portogallo dal pensiere di maritarsi col » suddetto re Francesco, perche andrebhe soggetta a madama la reggente, » Ja qual era terribilissima donna, et che la trallaria come serva; poi che » lei havria cagion di esser sempre la più gelosa donna del mondo, per esser » il re di tal natura , oltra questo cheil re, come si sapea da ognuno, havea havuto et havea di mollo mal francese, et che la reina, presolo da Sua » Maesta , era morta da questo. » (Della vita et delle opere di Andrea Na- vagero, p. 259.) (1) Sandoval, liv. XI, Ç 19, p. 498. (2) Sandoval, liv. XIV, \ 2, p.518. (3) Guichardin nous donne les prétendus discours prononcés à celte aeca- sion par le grand chancelier Gattinara et par Charles de Lannoy (Zstoria Y 4 A. ) ee LR TN si | ( 553 ) sau, Adrien de Croy — étaient favorables à un accord avec la Françge. Suivant eux, la prospérité des affaires de leur maître, aussi bien que le repos de la chrétienté, dépen- dait de cet accord; il facilitait le passage de l'empereur en Italie et son couronnement, car le pape ni les Vénitiens, ni aucun autre potentat, n’oseraient rien contre lui, dès que l’appui de la France leur échapperait; il lui permettait de mettre ordre aux affaires de l'Allemagne et aux progrès de l’hérésie luthérienne; enfin il lui offrait l’occasion, si ardemment désirée par lui, de réunir ses forces et celles des princes chrétiens contre le Ture (1). Des raisons par- ticulières à la situation de leur patrie inspiraient aussi ces conseillers de l'empereur; ils savaient tout ce que les Pays- Bas avaient souffert par la guerre passée; ils pré- voyaient tout ce que ces provinces auraient à souffrir en- eore, si les hostilités se renouvelaient. Antoine Perrenot, envoyé par l’archiduchesse Marguerite à Tolède, n'avait rien négligé pour les convaincre de la nécessité de la paix (2). Plus que tout autre, Lannoy souhaitait que la paix se conelüt. [l n'avait céssé de faire espérer au roi sa déli- vrance; il mettait sa gloire à être l'instrument de la récon- ciliation des deux souverains; en outre, il régnait entre lui et Bourbon une animosité qui datait de l’expédition de Provence et s'était accrue depuis; ils avaient eu ensem- d'Italia, t. IV, pp. 75 et 80); mais ce sont là des amplifications dues à l'imaginauion de l'historien. (1) Sandoval, liv. XIV, $ 2, p. 518. — Lettre de Lannoy à l'empereur, du 7 avril 1526, dans les Végociations entre la France et l’ Autriche, I, 658. (2) Voir ses lettres à l’archiduchesse, dans les Négociations entre la France et’ Autriche, IT, passim, ( 5D4 | ble de vifs démêlés, même en présence de l’empereur (1); rien ne lui aurait été aussi pénible que de devoir partager encore avec le connétable le commandement des armées impériales. Il employa donc tout le crédit dont il jouissait auprès de Charles-Quint, et ce crédit était grand , pour le faire entrer dans ses vues (2). On sait combien il s’en re- pentit plus tard (5). ë | Le grand chancelier Gattinara, d'accord en cela avec la plupart des ministres espagnols, était d'un avis opposé à celui des conseillers belges. Il soutenait qu'il ne fallait pas mettre le roi en liberté tant qu'il n'aurait point rendu la Bourgogne; que, puisqu'il ne voulait pas la restituer pour sortir de prison, il était fort à craindre qu'il y fût moins disposé encore, étant libre; quon ne pourrait se fier à ses promesses, non plus qu'aux sûretés qu'il donne- rait, à cause de son naturel bouillant et entreprenant (4); qu'il aspirerait à se venger de l’affront qu'il avait reçu à Pavie, et qu'il ne manquerait pas de gens pour l'y exciter au besoin; que, l’empereur ayant le roi de France en son pouvoir, personne n’oserait lui déclarer la guerre; qu'il était assuré ainsi de passer sans obstacle en Italie et de s’y (1) On trouve à ce sujet de curieux détails dans Sandoval, liv. XIIE, $ 91, p. 499. L (2) Andrea Navagero écrivait au doge, au mois de juillet 1526 : « Il vicere » è il primo uomo di questa corte; ognuno vuol farselo amico. » (Gicogna, Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p. 191.) Les lettres de Gilbert Bayard au connétable de Montmorency, des 2 et 5 janvier 1526, qui sont insérées dans la Captivité de François Je", pp. 458 et 462, font assez voir avec quelle chaleur Lannoy s’employa auprès de l'empe- reur pour la conclusion de la paix. (3) Voir sa lettre du 25 mai 1526 à l’empereur, dans les Négociations entre la France et l’ Autriche, IX, 663. (4) « …. Porque era bulliciaso e esforzada.. » (Sandoval.) ( 598 ) faire couronner; qu'au lieu de traiter, il devait profiter des conjonctures pour s'unir étroitement avec le pape et la seigneurie de Venise, et régler le sort du duché de Milan (1). Gattinara conclut en disant qu'il fallait, ou relâcher le roi sans condition, ou le retenir toujours prisonnier (2). - Charles-Quint, nous l'avons déjà dit, n’avait rien tant à cœur que de voir la paix fermemént établie dans la chré- tienté (5). Il avait toujours déclaré que, la Bourgogne lui étant restituée, il mettrait en liberté le roi de France; on était parvenu à le convaincre que le roi ne serait pas obéi de ses sujets, s’il ordonnait cette restitution, sans être dans son royaume : il voulut prouver à tout le monde qu'il n'avait que sa parole. Il ne pouvait se persuader, d'ailleurs, que François I”, après avoir signé et juré le traité qui serait fait avec lui, ne l’exécuterait pas (4). En vain son grand chancelier insista de la manière la plus forte, lui disant que le passé devait l’éclairer sur l'avenir; que jamais les Français n'avaient observé les promesses faites à la maison de Bourgogne (5) : il enjoignit à ses ambassadeurs de passer outre. Telle était la nature de ce (1) Sandoval, liv. XIV, $ 2, p. 518. — Cicogna , Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p.183. Le sieur de Praet, ambassadeur de l’empereur en France, était assez de l'avis du chancelier Gattinara, ainsi qu’on peut le voir dans ses lettres publiées par M. Lanz, Correspondenz des Kaisers Karl F, I, passim. (2) « El chanciller dixo resueltamente que à le soltasse libremente, à le tu- viesse siempre preso y seguro. » (Sandoval, L. c.) Ed Altro non bramava che pace in tutta la cristianità , » dit Andrea Navagero dans une dépêche du 11 décembre 1525, citée par M. Cicogna, p. 185. (4) Sandoval, liv. XIV, À 2, p. 518. (5) Cicogna , Della vita e delle opere di Andrea Navagero, p. 185. (556) monarque, qu'il revenait difficilement sur ce qu'il avait une fois résolu (1). Il y eut encore quelques débats au sujet des otages. L'empereur voulait avoir le dauphin, le duc d'Orléans et douze des personnages principaux de France à désigner par lui; le roi n’entendait donner que le dauphin seul, ou ses deux autres fils et douze jeunes gens appartenant aux familles les plus considérables de son royaume : après divers pourparlers, on convint que les otages seraient le dauphin et le duc d'Orléans, ou, à la place de ce dernier, si la régente le préférait , douze personnes qu’indiquèrent les plénipotentiaires impériaux (2). Si Charles-Quint était ferme dans ses opinions , le chan- célier Gattinara ne tenait pas moins obstinément aux siennes (5). Lorsque l’empereur lui ordonna de rédiger iris L (1) Le nonce Castiglione, qui était à sa cour à cette époque, écrivait à Rome : « L'imperatore è giovine di xxvi anni, assai fermo nelle sue opi- » nioni.. » (Cicogna, p. 262.) Andrea Navagero mandait au doge, le 8 juin 1526, « che l’imperatore, siccome padrone di tutto, voleva far a sua modo. » (Zbid., p. 190.) Il y avait plusieurs années déjà que le caractère de Charles-Quint s'était manifesté sous ce rapport. Gérard de Pleine, seigneur de la Roche, l'un de ses conseillers, écrivait de Vitoria , le 14 janvier 1522, à l’archiduchesse Marguerite : « Il n’y a si grand ni si sage en son royaume qui lui fasse chan- » ger son opinion, s’il ne lui semble que la raison doive la lui faire changer. » J'ai connu beaucoup de princes en divers âges; mais je n’en ai connu » aucun qui dispasât du sien plus absolument que lui. » (M. Théod. Juste, Charles-Quint et Marguerite d Autriche, p. 155.) (2) Cicogna , p. 185. (5) «… Quando il gran cancelliere si metteva una fantasia in testa, era tanto fermo che alcuno non avrebbe potuto rimovernelo. » (Dépêche d'an- drea Navagero du 22 octobre 1525, citée par M. Cicogna, p. 181.) (4) Cicogna, p. 183. ns. …- ie RARE BNP ‘ EUR Fr) ; ( bù7 } même se démettre de sa charge, et ne renonca à ce dessein, que parce qu'il en fut dissuadé par le cardinal Salviati (1). Enfin, le traité ayant été couché par écrit et toutes ses dispositions bien débattues, on convint qu'il serait signé et juré à Madrid le 14 janvier, non-seulement par les plé- nipotentiaires des deux souverains, mais encore par le roi lui-même (2). La veille, François I°', en présence de l’ar- chevêque d'Embrun, du président de Selve et du baron de Bryon, protesta « qu'il ne pouvait et n’enlendait faire » aucune chose contre l'honneur de Dieu, ni contre son » honneur, ni au préjudice et dommage de son royaume ; » que le traité qu’il lui fallait signer au profit de l'empe- » reur, il l'avait fait et le faisait pour éviter les maux et » inconvénients qui pourraient avenir à la chrétienté et » à son royaume; que c'était par force el contrainte, » détention et longueur de prison; que tout ce qui y était » convenu serait et demeurerait nul et de nul effet; que » son intention était de garder et poursuivre les droits de » la couronne de France, » etc, H fit dresser acte de cette protestation par les secrétaires qui se trouvaient auprès de lui (3). (1) «.. Il gran cancelliere , in mezzo a° trattamenti di pace colla Francia, sdegnato che le cose non passassero com’ egli avrebbe voluto, deliberato aveva totalmente di partirsi da Cesare; pure avendo comunicato questo suo pensiero al legato e dimandato consiglio, questi lo dissuase. » (Cicogna, p. 135.) (2) Dans sa protestation du 13 janvier, Francois I‘ se plaint d’avoir été astreint à cette formalité, « combien que l’empereur ne fust tenu signer les » articles du traité, ne jurer entretenir et garder, jusques à ce que le roy » eust baillé, et madame sa mère aussi, lettres de ratification, après que » ledit seigneur roy seroit en France, en sa liberté. » (Captivité de Fran- çois Z°", p. 467.) (5) Test dans le recueil de Léonard, IF, 210, dans le Corps diploma- ( 558 |) Nous n'énumérerons pas toutes les stipulations du traité de Madrid (1). Nous dirons seulement que le roi cédait à l'empereur, en pleine souveraineté, le duché de Bourgo- gne, avec le comté de Charolais, les seigneuries de Nevers et de Château-Chinon, la vicomté d’Auxonne, le ressort de Saint-Laurent; que l’empereur s’obligeait à remettre le roi en son royaume le 10 mars au plus tard; qu’au même instant où il sortirait des terres d'Espagne, il de- vrait être échangé contre ses deux fils ainés, ou contre le dauphin et les douze personnages désignés à cet effet (2), au choix de la duchesse régente, lesquels resteraient en otage pour garantie de l'exécution du traité; que si, dans les six semaines qui suivraient sa mise en liberté, il n'avait pas accompli la restitution de la Bourgogne, ou si, dans les quatre mois, il n’avait pas fait ratifier et entériner le traité par les états généraux et les parlements de son royaume, il prenait l'engagement de retourner en quelque lieu que se trouvât l'empereur, pour y tenir prison de nouveau; qu'il renonçait, en faveur de l’empereur, à ses . droits sur le royaume de Naples, le duché de Milan, les seigneuries de Gênes et d’Asti, la cité d'Arras, le Tour- naisis, la ville et le bailliage d'Hesdin, ainsi qu'au ressort et souveraineté de la couronne de France sur les comtés de Flandre et d'Artois; que la reine Éléonore lui était donnée en mariage avec 200,000 écus de dot, outre les tique de Dumont , t, IV, 1r< partie, p. 410, et dans la Captivité de Fran- çcois Je", p. 466. ; (1) Voyez Dumont, Corps diplomatique, t. IV, 1"° partie, p. 400. (2) C’étaient le duc de Vendôme, le duc d’Albanie, le comte de Saint- Pol, M. de Guise, M. de Lautrec, M. de Laval, le marquis de Saluces, M. de Rieux, le grand sénéchal de Normandie, le maréchal de Montmorency, M. de Bryon et M, d’Aubigny. D | F ï (959 ) comtés de Màconnais et d’Auxerrois et la seigneurie de Bar-sur-Seine; qu'il pardonnait au duc de Bourbon, de même qu’à tous ses adhérents, et les rétablissait dans leurs biens; enfin qu'il contractait une ligue offensive et défensive avec l’empereur, à la disposition duquel il met- trait son armée navale de la Méditerranée, lorsqu'il vou- drait aller en Italie, et qu'il seconderait dans ses entre- prises, tant contre les infidèles que contre les hérétiques aliénés du giron de la sainte Église. VE. Le 14 jaovier 1526 , un autel fut dressé dans la chambre du roi. L’archevéque d'Embrun y célébra la messe, en présence des plénipotentiaires. Le traité fut ensuite lu de mot à autre; puis le roi, et après lui les plénipotentiaires d'Espagne et de France, en vertu de leur mandat, firent serment, sur l'Évangile, entre les mains de l’archevêque, de l’observer dans toutes ses dispositions (1). Cette pre- mière cérémonie fut suivie d’une solennité plus imposante encore. Sur celle-ci les historiens français, anglais, 1ta- liens, gardent un silence absolu; Sandoval en fait men- tion, mais d’une manière si sommaire et en des termes si vagues, qu’on ne saurait, par ce quil dit (2), en apprécier (1) Proces-verbal dressé par le secrétaire l'Allemand le 14 janvier, en copie, aux Archives du royaume, Collection de documents historiques, t. IL, fol. 172. — Sandoval, liv. XIV, $ 4, p. 545. (2) Voici comment il s'exprime : « El virrey de Näpoles tomd la fe y pleyto » Omenaje en sus manos al rey de Francia, en que, como principe y rey cris- » {ianissimo, prometia y dava su fe y palabra real de bolver 4 España dentro » de seis meses, assi como era prisionero, si à caso no pudiesse cumplir lo » por él capitulado. Con cara alegre y con palabras risueñas dié el rey en ” ( 60 ) lé caractère n1 l'importance. Il est essentiel de la raconter avec quelque détail. | Pour déterminer Charles-Quint à lui rendre la liberté, François [* avait offert de donner sa foi de chevalier, en garantie de l'exécution dé ce qui serait convenu entre eux; l’empereur avait commis Charles de Lannoy pour la rece- voir (1). La foi donnée au nom de la chevalerie était de tous les serments le plus sacré; les souverains, en jurant par le titre de chevalier, se regardaient comme aussi étroi- tement liés que s'ils eussent juré par leur couronne (2). Le chevalier devait garder sa foi, à peine d’être déclaré infâme et parjure (5). Après la cérémonié que nous avons rapportée, Fran- çois [° et Charles dé Lannoy se levèrent simultanément. Lé vice-roi de Naples rappela au monarque l’offre qu’il avait faite. François [°* lui répondit : « Monsieur le vice- » roy, mOn Cousin, je vous promets que J'avons assez » donné ma foy par ce que maintenant jJ'ay juré et signé, » et qu’avons tous ouy lire : caf l’empereur ni vous, ni » homme du monde, ne trouvera jamais faulte en cela, >» et aymerois plutost morir, et de tant plus que tôut est » fait de mon bon gré et contentement. Toutesfois, pour » ce qu'il est vray que Je lui offris semblablement de luy » donner ma foy en la manière que de sa part me requérez, » manos del virrey su fe real, y hizo un solemne pleyto omenaje, aunque » después lo cumplié mal... » (Liv. XIV, \ 4, p. 543.) (1) Par des lettres patentes données à Tolède le 16 décembre 1595, (Arch. du royaume ; Collection de documents historiques, t. IT, fol. 167.) (2) Mémoires sur l’ancienne chevalerie , par La Curne de Sainte-Palaye, édit. in-8° de 1826, 7, 116. (5) Le vray Théâtre d'honneur et de chevalerie, ou Le Miroir héroïque de la noblesse , in-fol., 1648, p. 24. PPS | ( 561 ) c'est raison, puisque je veulx accomplir bien et loyalle- ment ce que j'ay promis, [que] je n’en sçaurois donner » trop de seureté.….. Mon cousin, je vous tiens pour gen- We - tilhomme de nom et d'armes congneues; et puisque je sçay l'empereur vous a habilité de son coustel, je veulx davantaige que soiez habilité du mien, et dès mainte- nant vous habilite et vous tiens pour habilité par luy et par moy, pour prendre ét recevoir ma foy en son nom... Or, dictes maintenant la manière et la substance des motz que je doibs dire à cest effect, » Lannoy repartit que ces mots devaiént être réglés sur les termes mêmes du traité. » » François [° reprenant la parole : « Mon cousin, dit-il, vous dictes vray. Or oyés, et vous tous, messieurs icy présens, approchés-vous de plus près. » Alors il se dé- couvrit, et mettant sa main droite en celle du vice-roi de Naples, 1l prononça à haute voix les paroles suivantes : Y YO Y Ÿ Y % YO ÿ% | « Je, Francois, roy de France, gentilhomme, donne ma foy à l’empereur Charles, roy catholique, gentil- homme, en la personne de vous, Charles de Lannoy, commis et habilité par luy et par moy pour la recevoir, que , en cas que, dedans six semaines après le jour que l’empereur m'aura fait délivrer et effectivement mis en liberté dedans mon royaulme de France, au lieu et selon que par lediet traicté de paix est dict, je ne luy accom- plisse la restitution dû duché de Bourgogne et aultres pièces déclairées par icelluy traicté, que j'ay mainterant juré et signé, et selon la forme d’icelluy, et pareillement en cas que les ratifications et autres seurtés mention- nées audict traicté, selon qu’en icelluy est contenu et promis, ne fussent délivrées dedans quatre mois, en chascun desdicts cas je retourneray au pouvoir de l'em- ( 262 ) » pereur et viendray incontinent, passé lediet temps, par- » devers luy, quelque part qu'il soit, et me rendray son » prisonnier de guerre, comme suis de présent, pour » tenir prison là où il plaira audict empereur me ordon- » ner, tant et si longuement que le contenu audict traité » soit entièrement fourny et accomply. » Lannoy accepta cette déclaration; et tous deux, leurs mains droites toujours jointes ensemble, demandèrent acte de ce qui venait d’être dit, lequel fut à l’instant dressé par le secrétaire d’État l'Allemand, en qualité de notaire public et impérial (1). Voilà la comédie que ne craignit pas de jouer un prince réputé le modèle des chevaliers et des gentilshommes! Il est triste pour l'histoire d’avoir à enregistrer de pareils faits. | Lannoy avait reçu les pouvoirs de la reine Éléonore pour conclure son mariage avec le roi très-chrétien (2); le 20 janvier, il se rendit auprès du roi, qui était au lit, indisposé, et là, sans autre cérémonie, se firent les fian- çailles (5). François [*, dès qu'il eut connu l'intention de l'empereur sur le titre qu'il devait donner à sa fiancée, écrivit à Éléonore une lettre qu’il lui fit porter par le sieur (1) Procès-verbal du 14 janvier, cité ci-dessus. (2) Dumont, Corps diplomatique , 1. IV, 1"e partie, p. 410. . … (6) Manuscrit de Gonzalo Fernandez de Oviedo, dans l’Æppendice. — San- doval, liv. XIV, (5, p. 545. — Captivité de François T°", p. 506. Lannoy, qui allait partir pour Tolède, se présenta devant le roi « tout » houssé et esperonné. » (Captivité, I. c.) On a fait entendre qu’il avait en cela manqué des égards dus au monarque prisonnier. (7bid., Introduction, p. cv.) Il ne paraît pas que François Ier en ait jugé ainsi, puisqu'il écrivait, peu de temps après, à la régente sa mère : « Croyés, madame, que mon cousin le » vice-roy y va honnestement et de bon pied, et toujours dez le commence- » ment ainsy l'a faict. » (Captivilé, p. 505.) . ML ER RPTAN FAN ( 565 } de Bryon, et à laquelle elle s’empressa de répondre (1). - Le traité de Madrid n'entrainait pas un changement immédiat dans la situation de François I“; c'était seule- ment, comme on l’a vu, pour le 10 mars que l’empereur s'était engagé à le rendre libre : on se relàcha toutefois des mesures de surveillance dont il était l’objet. Le 29 jan- vier, il alla en litière à Notre-Dame d’Atocha entendre les vêpres, et revint sur la mule qu'il montait habituelle- ment; le lendemain il assista à la messe dans un des cou- vents de la ville, où il passa toute la journée. Lorsqu'il sortait, la curiosité du public, et des dames surtout, pour le voir, était très-grande; les personnes qui avaient des écrouelles ne manquaient pas de se trouver sur son pas- sage, afin d’être touchées par lui. Il avait à cette époque recouvré toute sa santé. Il se portait si bien qu’il disait à ses serviteurs qu'il se sentait capable de courir le cerf (2). - Aussitôt après la signature du traité, il avait écrit à l’empereur, pour lui en témoigner sa satisfaction, et lui exprimer le désir de le voir (3). Charles-Quint, répondant à sa lettre , l’assura que ce désir était aussi le sien; qu’il se rendrait à Madrid dès qu'il aurait expédié les affaires les plus urgentes qui réclamaient ses soins : en attendant, il lui envoya le comte d'Egmont, pour le visiter de sa part (4). Il (1) Lettre du bailli de la Barre à la duchesse d'Alençon, du 1° février 1526, dans la Captivité de François I, p. 487. — La lettre du roi et la réponse d’Éléonore nous manquent. (2) Lettre de la Barre , du 1er février , citée ci-dessus. (5) Nous n’avons pas celte lettre; mais la réponse de Charles-Quint en fait connaître la substance. (4) Lanz, I, 190. Le comte d'Egmont dont il est question ici, était Charles, vingt-septième seigneur et troisième comte d’Egmont. Il était fils © de Jean d'Egmont et de Françoise de Luxembourg, et frère aîné de Lamoral Qme SÉRIE, TOME IX. 359 ({ 264 ) lui réitéra ces assurances dans une autre lettre : « Je trouve » — Jui dit-il — le temps que j'ay tardé de vous veoir » long; et si ce n’estoit que ce délay est causé de vouloir » me dépescher de ce lieu pour estre avec vous plus lon- » guement, l’eusse treuvé encores plus long...{4).» Était-il possible de se montrer plus courtois, plus gracieux ? Charles ne quitta cependant Tolède que le 12 février; il avait, ce jour-là même, malgré les remontrances réité- rées de son grand chancelier, donné sa ratification au traité de Madrid (2). François alla au-devant de lui, le len- demain , jusque près du pont construit sur le Manzanarès; il avait un manteau de drap frisé et une épée à l’espagnole, et montait sa mule richement harnachée; à sa droite mar- chait le grand maître de Rhodes, Villiers de l’Tle-Adam, et bn] le capitaine Alarcon à sa gauche; les gens de pied de sa d'Egmont, qui périt sur l’échafaud à Bruxelles en 1568. Il avait été attaché de bonne heure à la personne de l’empereur. Il mourut le 7 décembre 1541, au retour de l'expédition d'Alger. (Bullet. de la Comm. roy. d’histoire, 2e série, IX, 61.) (1) Captivité de François T°", p. 485. (2) Voir la lettre qu'il écrivit, le 9 février, à l'archiduchesse Marguerite, sa tante, et où il déduisait les raisons qui l'avaient « principallement meu et » incliné » à la conclusion de la paix. Guichardin prétend que Gattinara refusa de signer le traité de Madrid, alléguant qu'il ne devait point user de l'autorité qui lui avait été donnée pour faire une chose aussi dangereuse et pernicieuse que l'était celle-là, « alle- » gando che l’autorità che gli era stata data non doveva essere usata da lui » nelle cose pericolnse e perniciose come questa ;» que Pempereur, malgré tout le mécontentement qu’il en éprouva, ne put le faire changer de propos, et qu’alors ilse décida à signer le traité lui-même. ({storia d'Italia, liv. XVI, t. IV, p. 89.) Ce qui nous porte à mettre cette anecdote au rang des contes, c'est, d’abord, qu'il eüt été contraire à tous les usages, et par conséquent absurde, que l’empereur signât, au lieu de son grand chancelier; c'est, ensuite, que les traités n'étaient point signés du grand chancelier, mais du souverain, et contre-signés par un secrétaire d'Etat. nt pis dé sc D ———"" ( 565 }) garde ordinaire formaient l'escorte, Charles-Quint, vêtu de velours noir, était à cheval; il venait accompagné de ses principaux officiers et d'environ 250 hommes d'armes. Quand les deux monarques se furent joints, ils s'embras- sèrent avec de grandes démonstrations d'amitié. El s’agis- sait de savoir qui aurait la droite; l’un et Pautre s'en excusaient avec non moins de vivacité : après bien des compliments, l’empereur céda. Els arrivèrent ainsi au pa- lais, où ils prirent part, à la même table, à un souper somptueux; ils restèrent seuls ensuite pendant un très- long temps. François [* demanda à Charles-Quint deux choses aux- quelles il semblait attacher une grande importance : la première était de voir le plus tôt possible la reine , sa fian- cée, l’autre de Femmener en France avee lai (4). L'empe- reur, pour lui complaire, non-seulement accorda lentre- vue qu'il désirait, mais encore il consentit que la reine le suivit à quatre où cinq journées de distance, de manière qu'elle pût lui être délivrée à Bayonne, presque dans le même temps qu’il aurait ratifié et juré le traité fait entre eux (2). De son côté, Charles pria le roi d'accorder au duc de Bourbon une pension de vingt mille livres, jasqu’à ce que le procès pendant au sujet du comté de Provence fût décidé, et François la promit (5). (1) Elle ne devait, selon le traité, être conduite en France qu'après l’en- tière restitution de la Bourgogne. (2) Lettre de Charles de Lannoy à l’archiduchesse Marguerite, du jour des Cendres (14 février), dans les Végociations entre la France et Autriche, 11, 655. — Lettre de Charles-Quint à Louise de Savoie, sans date (16 fé- avrier); ibid. , 654. — Sandoval, liv. XIV, ( 5, p. 543. — Relation manus- crite de Gonzalo Fernandez de Oviedo, dans l’Æppendice. (3) Procès-verbal du traitement fait à François I, etc., dans la Capti- vité, etc., p. 507. | ( 566 ) Le 14, l'empereur et le roi allèrent ensemble à la messe à l’église de San Francisco; les rues, dit l'historien San- doval , étaient pleines de gens qui pleuraient de joie, en voyant ces deux puissants princes, qu’une inimitié pro- fonde avait divisés, devenus de si grands amis, et qui en tiraient le présage d’une longue et heureuse paix (4). Le Jour suivant, les clauses du traité furent publiées à Madrid; elles le furent successivement dans toute la monarchie (2). Charles-Quint croyait réellement à la bonne foi de Fran- çois [” et de la régente. Il écrivit à Louise de Savoie : « Madame ma bonne mère, il m'a semblé que, puisque » J'ay recouvré au roy vostre filz un bon frère, et que je » vous baille la royne ma sœur pour fille, que pour ne » vous rendre ung seul filz, debvois reprendre le nom » dont autresfois avois usé, et vous tenir pour bonne » mère... Ce ne m'a esté petit plaisir avoir entendu » du roy vostre filz l'amour et amitié qu'il m’a déclairé il » me porte, laquelle ne fays doubte et vous prye que ay- » diés à l'entretenir, comme par vos lettres m'avez escript » ferez; et de mon cousté, je vous asseure que l'amour et » amitié que j'ay à luy est toute bonne et vraye, et quil » n'y aura faulte aux choses par moy promises (5). » Il chargea son grand maître, Laurent de Gorrevod, d'aller prendre possession du duché de Bourgogne, dont il le nomma gouverneur provisoirement, et en attendant que Philibert de Chalon, prince d'Orange, eût été mis en liberté (4). (1) Liv. XIV, ( 5, p. 545. (2) Zbid. (5) Lettre du 16 février, ci-dessus citée. (3) Description des voyages de Charles-Quint, par le S* de Herbays. — Phili- PES CO mens ( 567 ) Le 46 février, Charles et François partirent pour Illes- cas. Ils couchèrent à Torrejon de Velasco, dans un château appartenant au comte de Puñonrostro. Le 17, de bonne heure, ils arrivèrent à Illescas, qui n’est qu’à deux lieues de Torrejon. La reine Éléonore y était depuis la veille, ayant en sa compagnie la reine Germaine de Foix et le connétable de Castille, qui lui servait de chevalier d’hon- neur. L'empereur et le roi logèrent dans une maison peu distante de celle qu'occupaient les deux reines. Après qu'ils eurent diné, ils allèrent à pied les voir. Charles entra le premier. François, qui le suivait, ayant fait une révérence à Éléonore, elle fléchit le genou et voulut lui baiser la main; il lui dit : « C’est la bouche que je dois »* vous donner, » et la baisa sur la joue. Il embrassa aussi plusieurs des dames qui étaient là. Les présentations achevées, toute la cour passa dans une salle disposée pour la danse; le roi donnait le bras à Éléonore , et l'empereur à Germaine de Foix. Le bal dura deux heures environ. Charles et François prirent ensuite congé des reines, et retournèrent à Torrejon. Le 18, ils revinrent à flescas, tous deux en une même litière. Il y eut, au palais de la reine Éléonore, une nou- velle fête qui se prolongea fort avant dans la soirée; à la prière de l’empereur, la reine dansa à l’espagnole avee la marquise de Zenete. Les deux princes reprirent le chemin de Torrejon le même soir (1). Aucun de nos documents ne fait connaître l'impression bert de Chalon avait été pris en Italie Auelge temps avant la bataille de Pavie, et conduit en France. (1) Sandoval, liv. XIV, À 5, p. 543. — Relation de ce qui se passa à Ma- drid depuis la signature du traité, dans la Captivité de François I°", p. 50%, (568 ) qu'Éléonore produisit sur François I”. Cette princesse , àgée de quinze mois de plus que Charles-Quint, était _ veuve, depuis quatreans, d'Emmanuel le Fortuné, roi de Portugal. Elle n’était ni jolie ni laide; son abord était froid, son regard sérieux, quoique expressif. Elle avait les cheveux d’un blond ardent, les yeux petits, les lèvres saillantes, signe caractéristique des Habsbourg. En un mot, rien en elle ne rappelait le sang espagnol; tout, au contraire, selon l’expression d’un ambassadeur vénitien qui résidait, à celte époque, à la cour impériale, montrait qu'elle était flamande. Ce qui la distinguait, c'était une grande bonté, une douceur admirable et une soumission sans réserve aux volontés de son frère (1), On aurait pu appliquer à toute sa vie ce que le commandeur don Luis d'Avila disait d'elle, lors de sa mort : « qu'elle était une » sainte innocente, et n'avait pas plus de malice qu'une » colombe (2). » Nous laissons à juger, d'après ce por- trait, si Éléonore avait les qualités qu'il fallait pour fixer le cœur volage et l'esprit inconstant de François [°. (1) « Madama Leonora.… non è brutta nè bella; a me pare sia molto buona; non ha per alcun modo di quelle grandezze ispane, ma è vera fiam- minga.. » (Relation de Gasparo Contarini sur l'Espagne, lue au sénat de Venise le 16 novembre 1525.) Andrea Navagero, dans une dépêche du 1° juin 1528, disait d’Éléonore : « Questa regina, com’ è& buona cosi & fredda, ed ha tanto rispetto al fra- » tello che non seppe far queilo che era bisogno per scegliere il modo più » acconcio a concludere la pace.. » (Cicogna, p. 250.) M. Aimé Champollion la dépeint ainsi, d’après un dessin du temps : » Une figure calme, à gros traits, des yeux pelits, un regard sérieux et » expressif, la chevelure d’un blond plus ardent encore que celle de Charles- » Quint, les lèvres saillantes. » (Cæptivité de François Z, Introduction, p. Lx.) (2) Zetraite et mort de Charles-Quint au mon&stère de Fuste, HW, 315, Pa. M ge EC + ur ( 569 ) Ce fat pendant son séjour à Illescas, et en présence du roi, que Charles-Quint, voulant récompenser les services de Lannoy, lui donna la principauté de Sulmone, avec seize mille ducats de reveau (1). Il ne borna pas là ses bienfaits, mais il y ajouta le comté d’Asti et la charge de grand maître de sa maison, devenue vacante par la nomi- nation de Laurent de Gorrevod au gouvernement de Bour- gogne (2); il l'avait créé, quelques jours auparavant, comte de Lannoy et du saint-empire romain (3). Il fit aussi à François 1° une gracieuseté qui mérite d’être citée. François, à la bataille de Pavie, portait la Toison d’or que Charles lui avait envoyée lors de la conclusion du traité de Noyon. Dans le feu de l’action , il la perdit; elle fut trouvée par un soldat espagnol, auquel l’empereur la racheta au prix de 400 ducats. À Torrejon, il la replaça de sa propre main au cou du roi (4). | Le 19 février, Charles-Quint et François [* quittèrent Torrejon à cheval, l'empereur pour aller se marier à Séville avec l’infante Isabelle de Portugal, le roi pour retourner à Madrid, d'où il devait se diriger vers la France. Ils che- vauchèrent ensemble quelques instants. Au moment de se séparer, l'empereur, ayant pris le roi à part, lui dit : « Mon » frère, vous souvenez-vous de ce dont vous êtes convenu » avec moi? » — « Je m'en souviens si bien, répondit le » roi, que je vous dirais tous les articles de notre traité, ». et 1l les dit en effet. L'empereur repartit : « Puisque » vous Vous en souvenez si bien, dites-moi franchement (1) Sandoval, liv. XIV, Ÿ 7, p. 544. (2) Description des voyages de Charles-Quint, par le S° de Herbays. (5) Supplément au Nobiliaire des Pays-Bas, p. 109. (4) Sandoval, L ç. (570) » si vous avez l'intention de les accomplir, ou si vous y » trouvez quelque difficulté; car, dans ce dernier cas, nous » serions exposés à voir nos inimitiés se renouveler. » Le roi répliqua : « J'ai l'intention d'accomplir le tout, et je » sais que personne n’y mettra obstacle en mon royaume, » Si Vous Voyez que j'agisse autrement, je veux et consens » que vous me teniez pour méchant et lâche. » — « Je veux » que vous en disiez autant de moi, reprit l'empereur, si » je ne vous rends pas la liberté. Je vous demande surtout » une chose : c’est de ne pas m’abuser en ce qui touche la » reine ma sœur, à présent votre femme, car ce serait là » une injure que je ressentirais vivement et que je devrais >» venger.» Là-dessus ils se saluërent, se disant mutuelle- ment : « Dieu, mon frère, vous ait en sa garde (4)! » VIT. Deux jours après, François [° se mettait en route pour la France, heureux de quitter ce château de Madrid qui lui rappelait de si pénibles souvenirs. C'était encore en la compagnie de Lannoy et d’Alarcon qu'il devait voyager : Lannoy avait reçu de l’empereur la mission de le conduire à la frontière, et, en le délivrant, de recevoir les otages nommés dans le traité de paix (2). Le 26 février , à Aranda de Duero, il fit avec le vice-roi une convention pour ré- gler le cérémonial de sa délivrance (5). Un arrangement complémentaire relatif au même objet fut signé à Saint- (1) Sandoval, L. c. (2) Lettre de Lannoy à l’archiduchesse Marguerite, du 15 février, dans les Négociations entre la France et l'Autriche, 1, 655. (5) Elle est dans la Captivité de François I, p. 510. (d11) Sébastien le 45 mars (1). François écrivit de celte dernière ville à l’empereur, lui disant « qu’il espérait dedans peu » de jours être en liberté, pour après mettre fin à ce qui » avait été traité entre eux le plus tôt qu’il serait possi- >» ble (2). » Le 17 mars (5), à sept heures du matin, sur la Bidassoa, entre Fontarabie et Andaye, eut lieu sa délivrance, qui se fit conformément au cérémonial con- venu. Au milieu de la rivière, et à une égale distance des deux rives, était amarré un bateau en forme de pont; sur chaque rive, il y avait une barque. François I‘, qu’accom- pagnaient Lannoy, Alarcon et dix gentilshommes espa- gnols (4), descendit dans la barque qui était sur la rive appartenante à l'Espagne, tandis que le dauphin et le duc d'Orléans (5), avec Lautrec et dix gentilshommes français, s’'embarquèrent sur la rive opposée. Les deux barques arri- vèrent au pont en même temps; les personnages qu’elles portaient y montèrent en même temps aussi. Lannoy remit le roi de France à Lautrec, lequel en échange lui délivra les deux jeunes princes, que leur père embrassa tendre- ment, en leur donnant sa bénédiction. Lannoy dit alors (1) Sandoval, liv. XIV, 12, p. 550. (2) Captivité de François Ier, p. 518. (5) Et non le 18, comme le disent Robertson, Gaillard, Rey, etc. La lettre que le président de Selve écrivit au parlement de Paris , « de Bayonne, » le dimanche, 18": jour de mars,» et que M. Champollion a donnée dans la Captivité de François Te", p. 518, est très-précise quant à cette date. La con- vention du 15 mars portait expressément que la délivrance aurait lieu le 17. (4) Robertson et Rey ne parlent que de huit gentilshommes de l’un et de l’autre côté; mais la convention du 15 mars en fixe positivement le nombre à dix. (5) La régente de France et ses ministres, usant de l’alternative que leur offrait le traité, avaient mieux aimé donner en otage le second fils du roi que les douze seigneurs qu’il remplaçait. Ils ne se séparaient ainsi que d’un enfant, et gardaient les meilleurs capitaines du royaume. (572) à François [* : « Sire, vous êtes libre maintenant; que » Votre Altesse, comme un bon roi, accomplisse ce qu’elle » a promis. » François répondit : « Tout sera accompli » ponctuellement. » Alors il entra dans la barque de Lau- trec, et il mit une telle précipitation à sauter à terre qu’il se mouilla les pieds. Un cheval turc l’attendait près de la rive; il partit au grand galop, en agitant sa main au- dessus de sa tête, et s’écriant avec des transports de joie : Je suis roi encore! sans tenir compte, dit un historien, de l'autorité ni de la gravité royales. Il s'arrêta à Saint-Jean de Luz, pour y passer la nuit. Le lendemain il arriva à Bayonne (1). : Charles-Quint avait chargé son ambassadeur en France, le sieur de Praet, de recevoir la ratification que le roi devait donner du traité de Madrid, dès qu'il serait arrivé dans ses États. A Bayonne, François I° prit des prétextes pour la différer. De Praet le suivit à Mont-de-Marsan, à Bordeaux, à Cognac, sans pouvoir en obtenir autre chose que des assurances vagues et des raisons spécieuses (2). Alors l’empereur lui envoya Lannoy, comme celui qui, ayant reçu sa foi, était, plus que personne, autorisé à lui rappeler le devoir que lui imposait cet engagement d’hon- neur (5). Lannoy ne réussit pas mieux que de Praet, Une (1) Lettre du président de Selve du 18 mars, déjà citée. — Sandoval, liv. XIV, $$ 12 et 15, pp. 550 et 551. — Rey, Zistoire de la captivité de François Ie", p. 175. (2) Lettres du sieur de Praet à l’empereur, des 21, 25,30 mars, 2, 5, 17 avril. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) — Explications du roi données, le 2 avril, à Mont-de-Marsan, dans les Négociations entre la France et l’ Autriche, I], 656. (5) Lettre de Charles-Quint à Lannoy, du 14 avril 1526. (Manuscrits histo- ‘riques du comte de Wynants,) Lannoy n'accepta cette mission qu'avec regret, ainsi que le prouve sa ré- (578 ) nouvelle comédie fut jouée à Cognac le 27 et le 28 avril. Sept ou huit députés avaient été appelés du duché de Bour- gogne. Le roi, qui avait fait assurer les villes et les états de celte province que jamais il ne les céderait à l’empe- reur (1), remontra à ces députés l'obligation qu'il avait contractée, et déclarant qu'il la voulait remplir, les re- quit de lui donñer conseil et aide pour le faire en la meil- leure façon possible. Ils répondirent naturellement que le roi, à son avénement à la couronne, avait juré de ne jamais rien aliéner de la monarchie, et qu'il devait plutôt avoir égard à ce serment qu'à tout autre, L'orateur de la députation, le docteur Pouillot, qui avait été ambassadeur en Angleterre, appuya cette opinion sur quantité de textes et d'arguments qu'il développa avec prolixité. [ dit, entre autres, qu'il en était de tout royaume comme de la robe de Notre-Seigneur, laquelle était faite de manière à ne pouvoir être décousue; il compara la prison du roi à Ma- drid à celle de Daniel dans la fosse aux lions. Le sieur de Praet était présent à celle scène, à laquelle assistaient aussi le chancelier du Prat et le duc de Vendôme. Fran- çois [” eut l’air de recevoir avec déplaisir les remontrances a ——— ponse du 23 avril. Il arriva à Cognac le 8 mai, avec Alarcon. Il suivit la cour de France à Angoulême. Sur la fin de juin, il retourna en Espagne. Français [*°, qui lui avait eu tant d'obligations pendant sa captivité, lui fit offrir de grands présents. Il les refusa. (Zbid.) (1) Le sieur de Praet écrivait à l’empereur, de Mont-de-Marsan, le 30 mars 1526, qu'il avait appris de bon lieu que, seize jours auparavant, le bailli de Dijon avait été envoyé en cette ville par la régente; qu'ayant fait assembler les membres du conseil municipal, il leur avait déclaré qu’il était bien vrai que le roi, pour sortir de prison, avait promis de rendre le duché de Bourgogne, mais que, ce nonobstant, ils ne devaient rien craindre, car LE BOI ÉTAIT RÉSOLU DE NE PAS TENIR SA PROMESSE. ( 274 ) des députés bourguignons; il les invita à être sages, à se soumettre à la loi qu'il était forcé de subir lui-même, et à conseiller à leurs compatriotes d’obéir de bonne volonté, car il était décidé à accomplir ce à quoi il était tenu. A l'issue de la séance, il prit à part l’envoyé de l’empereur, pour lui dire que l'opposition de ces députés n’avait rien dont il fallut être surpris, tous étant ses officiers et à ses gages, et pour l’assurer qu’il n’en ferait pas moins ce qu'il avait à faire (1). Toutes ces feintes, tous ces subterfuges devaient cependant avoir un terme : le 22 juin, à Angou- lême, le chancelier du Prat, dans une assemblée solen- nelle du conseil, où étaient le duc de Vendôme, Lautrec, les premiers présidents de Paris et de Bordeaux, les grands officiers de la couronne et plusieurs autres, déclara nette- ment au vice-roi de Naples et au sieur de Praet que le gouvernement français tenait le traité de Madrid pour nul et non avenu (2). Dés l'instant qu’il sut que le roi était parti de Bayonne sans ratifier le traité, Charles-Quint comprit qu'il avait été joué. Il en ressentit une indignation profonde. La pru- dence ne lui permettait pas cependant de la faire éclater. Les circonstances étaient graves. Il avait sincèrement complé sur la paix ; il n’était pas prêt pour la guerre. Son (1) Nous tirons tous ces détails de deux dépêches adressées par le sieur de Praet à l’empereur, en date des 28 et 30 avril 1526. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) Dans celle du 50, de Praet dit que le roi, pour donner à connaître « qu'il » entendait bien la farce », fit semblant, la plupart du temps, de ne pas écouter la harangue de l’orateur bourguignon. (2) Lettre de Charles de Lannoy, du sieur de Praet et de Nicolas Perrenot à l’empereur, écrite d'Angoulême le 22 juin 1526. (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) EL ait (NUE 24 ( 918 ) alliance avec Henri VIT était rompue; il ignorait encore dans quelles dispositions se trouvaient le pape et les Véni- tiens ; il avait des craintes pour les Pays-Bas et l'Italie (1). Mais lorsque, au mois de septembre 1526, à Grenade, les ambassadeurs de Rome, de France et de Venise voulu- rent le persuader d’adhérer à la sainte ligue (2), et de rendre les fils du roi, en lui déduisant les raisons qui devaient l'engager à la paix, il donna un libre cours à$es sentiments. Se tournant vers l'ambassadeur de France, il lui dit que, si son maître avait observé ses promesses, la chrétienté serait en paix; qu'il avait usé envers le roi de magnanimité et de libéralité; que le roi, en échange, n'avait montré que de la pusillanimité et de la malice; qu'il ne s'était conduit ni en chevalier ni en gentilhomme, mais qu'il avait agi lâchement et méchamment, et que, s'il y prétendait contredire, il était prêt à le lui prouver par combat de sa personne à la sienne (5). (1) Il ÿ a une lettre de Charles-Quint au vice-roi de Naples et au sieur de Praet, du 9 juin 1526, où il leur dit « qu’il est résolu de dissimuler pour » aucun temps, et d'entretenir toujours le roi de bonnes paroles de conf- » dence et d'amitié, jusqu’à ce qu’il sache ce qu’on pourra conclure avec le » pape, les Vénitiens et les autres princes d'Italie, ainsi qu'avec les Anglais. » (Manuscrits historiques du comte de Wynants.) (2) Le traité du 22 mai conclu à Cognac entre le pape, le roi de France, la seigneurie de Venise, le duc de Milan et la république de Florence. (Du- mont, Corps diplomatique , 1. IV, 1° partie, p. 451.) (3) Sandoval, liv. XV, À 12, p. 570. L'ambassadeur vénitien Navagero , qui était présent à cette audience, en parle, dans une dépêche du 6 septembre 1526, avec plus de détail encore que Sandoval. Voici comment il rapporte les paroles de Charles-Quint : « Cesare, voltatosi all ambasciadore francese, disse che, se il re di Francia » avesse osservato quanto ayeva promesso, ora la cristianità sarebbe in pace ; » che Cesare aveva usato verso il re magnanimita e liberalità, e in cambio » il re con lui pusilianimità e malizia, e non si era portato né da buon gen- ( 9176 } Cette apostrophe était sévère; mais n’était-elle pas mé- ritée? François [* n’avait-il pas abusé Charles:Quint? n’avait-il pas signé et juré un traité dont il était résolu d'enfreindre les conditions? n’avait-il pas violé la foi donnée par lui comme roï et comme chevalier? Ses apo- logistes ont allégué les mauvais traitements qu'il aurait essuyés, la contrainte qu’il aurait subie : le récit que nous venons de faire, et qui s'appuie, dans tous ses détails, sur des témoignages irrécusables, démontre la futilité de cette justification. On à prétendu aussi qu’il ne fut pas le maitre d'exécuter le traité de Madrid ; que la France entière se serait opposée à la cession de la Bourgogne. En admettant cela pour vrai, l'exemple d’un de ses prédécesseurs lui tra- çait la conduite qu’il devait tenir. Jean HE avait été fait prisonnier comme lui; comme lui il avait signé un traité désastreux pour la monarchie : l'exécution de quelques- uns des articles de ce traité ayant rencontré des obsta- cles, il alla, sans hésitation, se remettre au pouvoir d'Édouard HE. En vain on avait voulu lui persuader que les engagements contractés en prison n’obligeaient pas; il avait rejeté cette défaite frauduleuse : « Quand la bonne » for, avait-il dit , et la vérité auraïrent disparu de la terre, » elles devraient Se retrouver dans la bouche et dans le » cœur des rois (1). » » tiluomo , nè da buon cavaliere, ma meçantemente ( ché in lingua francese » € assai peggio che dir vêélmente nella nostra); che Dio volesse che questa » cosa si avesse à terminare tra loro due, accid che fosse con menor dänno della cristianità, etc. » (Cicogna, Della vita e della operé di Andrea Navagero , p. 192.) (1) L'Art de vérifier les dates, t. VE, p: 47, édit. in-8°. 3 (577) APPENDICE. Extraits d'un manuscrit de la Bibliothèque nationale, à Madrid, intitulé : RELACION DE LO SUCEDIDO EN LA PRISION DE Francisco Î, por el capitan Gonzalo Fernandez de Oviedo y Valdez (1j. Foi. 2 ve. … É fué cosa muy notable, é digna de quien el empera- dor es, que ansi como le fué dicho, sin hablar palabra ni mos- trar alteracion, se entro en un oratorio é retraimiento solo à dar gracias à aquel soberano señor y Dios dispensador de todo, por la victoria avida, y estuvo bien media hora retraido alabando à Dios. En el eual tiempo se hinchié el alcazar de euantos gran- des y señores y embajadores se hallaron en su corte, que fueron à darle el parabien de tan préspera nueva é glorioso suceso ; é qe — — —— — (1} Ce manuscrit, coté X 227, est in-4°, en papier; il a 165 feuillets. Il est relié en maroquin rouge, avec filets et vignettes dorés. I est original et paraît même autographe. L'auteur parle en homme bien informé des faits qu’il raconte. Il dit (fol. 81 v°) : « Depuis le mois de décembre 1525, que j'arrivai en Espagne, s venant des Indes, jusqu’en 1526, que l'empereur, notre seigneur, par- » tit de Séville, je résidai en la cour de S. M., et je pus bien voir et con- » sidérer quelques-unes des choses qui se passèrent en ces trois années, » parce que j'apportai grand soin à m’en enquérir. » Gonzalo Fernandez de Oviedo est auteur de plusieurs ouvrages qui ont vu le jour , entre autres d’une Astoria general de las Indias, in-fol., Sé- ville, 1555, et Salamanque, 1547; d’une /istoria del estrecho de Maga- llanes, 1552, in-fol., etc. [1 avait laissé aussi, en manuscrit, un Memorial de la vida y acciones del cardenal don Francisco Ximenez de Cisneros. (Voy Pibliotheca hispana nova , de Nicolas Antonio , E, 554.) ( 578 ) no se conocié en su persona alteracion ni movimiento, ni sele 0y6 palabra que sele pudiese notar à imprudencia , sino con la gravedad é semblante comun à su alta magestad, respondia à todos que se diesen muchas gracias à Dios de todo lo que hacia é hiciese, en cuya disposicion està la victoria y el castigo de los mortales. Otro dia por la mañana, sabado, cavalgé é fué à una devota hermita Ilamada Sancta Maria de Atocha, que es agora casa de frailes dominicos, à oir misa, bien un cuarto de legua fuera de la villa; é predicé fray Juan de Hempudia, fraile de la misma érden, muy altamente al préposito de el Evangelio é de tan encunbrada nueva. E de alli, oïda misa, se torn6 à Madrid à comer, con tanta humildad é aun con tanta flaqueza que en verdad dié admiracion, y que contemplar à cuantos le vimos aquel dia... Fol. 15 v°. | …… É partié de Buitrago, para se tornar à Toledo, un lunes que se contaron diez y ocho de setiembre, é Ilegô à dormir temprano à San Agustin, lugar de Juan Arias, primero conde de Puño en Rostro, pensando de parar alli aquella noche, por- que Ileg6 bien hora y media antes que fuese de noche; y luego Ilegé una posta por la cual le hacian saber los médicos que cura- ban al rey de Francia, que estava enfermo en Madrid, que si Su Magestad lo queria ver vivo, que se debia dar prisa à caminar, porque estaba ya muy al cabo de la vida. É ansi como al empe- rador le dieron esta carta, é la leyô en presencia del duque de Calabria , é del duque de Bejar, é del duque de Näjara, é del duque don Pedro Giron, é de don Beltran de la Cueva, é de otros caballeros, dixo : « Yo entiendo hacer todo lo que à mi » fuere posible, é me entiendo ir por la posta ; el que quisiere » quedar, quédese, é el que quisiere ir comigo, aguije » ; é en aquel instante cavalgé, é se fué camino de Madrid câsi à todo correr del cavallo. É como llegé al lugar que Ilaman Alcovendas, tres leguas de San Agustin é tres de Madrid, Ilegé alli otra posta al encuentro, en que los médicos escrivian que Su Magestad 1 7e (For) aguijase, y que si no se daba prisa, aunque lo hallase vivo, lo hallaria frenético 6 sin sentido, porque cada momento empeo- raba. El emperador se dié muy mayor prisa, de manera que llegé à Madrid entre las ocho é las nueve, por manera que, en obra de dos horas é media, corrié aquellas seis leguas que hay del lugar de San Augustin à Madrid. É ansi como iba de camino, entré en la camara donde estaba el rey de Francia, solamente con el visorey de Näpoles, Mingoval, é delante con un candelero monsieur de Memoransi, gran privado del rey de Francia. A la puerta de la câmara, al tiempo que el emperador quiso entrar en ella, bolvié la caveza al daque de Calabria é à los otros duques, é dijoles que se sperasen à la puerta, porque no le diesen con- goja al enfermo ; que luego se saldria y entrarian, é ansi que- daron aquellos señores à la puerta de la camara, é el emperador entré. Ÿ como entr, quité su chapeo de la cabeza, quedando con un bonetico de gualteras de grana, é Ileg6 à lo abrazar; é el rey se sentô en la cama, é se quité unos paños que en la cabeza tenia con ciertas.unciones para su salud, é abiertos los brazos lo tom6, é estuvieron asi gran espacio sin hablar. É en soltän- dose, ambos tuvieron los ojos asaz tiernos, éel rey dixo : « Señor, » veis aqui vuestro esclavo é prisionero. » El emperador dixo : « No, sino libre y mi buen hermano é amigo verdadero. » El rey replicé : « No, sino vuestro esclavo. » El emperador torn6 à replicar : « No, sino libre y mi buen hermano é amigo; é lo que » yo mas deseo es vuestra salud, é à esta se atienda, que en » lo demäs todo se ha de hacer como vos, señor, lo quisiéredes. » Ë el rey replicé que no, sino como él lo mandase. E dixo mas : « Señor, lo que yo os ruego é suplico es que entre vos y mi no » haya otros terceros. » É estas palabras dijo el rey no entera- mente en su sentido. Estuvo el emperador alli algun espacio, hasta que se pasé al cuarto donde durmi6 esa noche. É entraron aquellos señores que à la puerta habian quedado, à lo visitar, é le pidieron la mano, é no sela quiso dar, é los saludé à ellos; é en breves palabras lo consolaron é animaron, é se salieron de 27e SÉRIE, TOME IX. | 40 ( 580 ) la câmara. El emperador durmi6 esa noche en el cuarto à que se havia pasado. E el dia siguiente, en la tarde, torné à visitar al rey; y estando con él, supo como Ilegava de camino madama de Alanzon, hermana del dicho rey. El emperador la salié à reci- vir hasta el patio é escalon mas bajo de la escalera principal del dicho alcazar; la eual venia vestida de blanco, que es el luto que las señoras traen en Francia, el cual traia por su marido el duque de Alanzon, que escapô herido de la batalla de Pavia, é desde à pocos dias que Ilegé en Francia, era muerto. El empe- rador la abrazo é.besé en el carrillo, é la Ilevé de la mano hasta la câmara donde estava el rey, consoländola con muy dulces palabras, é diciéndole que con su venida luego el rey estaria bueno; que todo lo demäs en las otras cosas se haria muy bien é como Dios se sirviese, é mediante ella havrian buen fin los negocios; é la madama respondié que ansi lo esperava ella en Dios y en la clemencia de Su Magestad que ello seria. Después que la madama Îlego al rey é él la vidé, se consolé mucho con ella. Desde à poco espacio que el emperador estuvo alli, é les dijo otras muchas palabras dulces de buena esperanza, equivo- cas, aunque tiravan à consuelo para entrambos, cobalgé é fué à dormir à Xetafe, dos leguas de Madrid; é otro dia siguiente, miércoles, que se contaron veiute del dicho mes, entré en To- ledo hora y media 6 mas antes que fuese de noche : ansi que anduvo diez leguas este dia. Y esa mesma noche, oi contar todo lo que dicho es al serenisimo señor duque de Calabria à los em- bajadores del duque de Ferrara y al marqués de Mantua é al obispo de Niza, é à otros caballeros que le suplicaron les digese como se havia avido el emperador en la visita con el dicho rey de Francia; y como yo fui criado un tiempo del rey Federico de Näpoles, padre del dicho duque, é le servi en la câmara hasta que salié de Näpoles, y ansi mesmo fui después en Castilla uno de los criados que, por mandado del rey catélico, sirvieron al mesmo señor duque, y doméstico de Su Excelencia, halléme à la plâtica cuando el duque dixo todo lo que dicho es …. (581) Fol. 25 vo. Martes, tres dias de octubre, entr en Toledo madama de Alanzon, hermana del rey de Francia; é el emperador la salié à recivir; é ella sospechando esto se di6 tanta prisa à caminar, que cuando el emperador salié de palacio, ya ella estava en la ciudad, é se toparon al tiempo que ella entrava en la plaza de Zocodover, donde poco antes ella havia parado é salido de una litera, é aca- baba de cabalgar en una hacanea, é venian con ella el arzobispo de Ambran é otros cavalleros franceses ancianos, é hasta veinte mugeres en sus hacaneas. É como el emperador la vidé, se quité la gorra é se Ilegé par della, é le hizo gran mesura; é ella le hizo grande acatamiento é reverencia; é Su Magestad la tom6 à su mano derecha. Iban con el emperador el duque de Calabria, el arzobispo de Toledo, el duque de Bejar, el duque de Näjara, el condestable de Navarra, el almirante de las Indias, el marqués de Villafranea é otros muchos señores de titulo é caballeros; é fueron asi hasta las casas de don Diego de Mendoza, conde de Melito, donde la dicha dama posé. A la puerta de la dicha casa se despidi el emperador de ella con la gorra en la mano, é no se ape6; é la dicha madama, fecha una gran reverencia al César, se quedé en su posada. El emperador se fué à su palacio. Antes que la dicha madama entrase en la ciudad, havia enviado S. M. al duque de Medinaceli al camino à recivirla; é fué muy acom- pañado de cavalleros sus parientes, é de los de su casa, é la hallé bien una legua antes que Ilegase à Toledo. É otro dia siguiente, madama de Alanzon fué à palacio, y estuvo con Su Magestad mas de dos horas, hablando en la deliveracion de su hermano el rey de Francia; é desde alli pasé al aposento de la viuda reyna de Portugal madama Leonor, hermana del emperador, con la eual estuvo hasta que fué bien tarde; é de alli se torné à su po- sada. É otro dia siguiente, el emperador fué à la posada de madama de Alanzon, é estuvo con ella mas de una hora. É ansi de esta manera se visitaron tres 6 cuatro veces.…….. : A ÉD , : a L s A S k | ANS PE; -. ( 582 ) | Fol. 352. .… Las primeras palabras que Borbon dixo à César, después que torné à cabalgar, é continuando el camino para la ciudad, fueron estas : « Señor, yo he perdido mi Estado en vuestro servi- » cio, y en lo demäs mi persona ha hecho lo que os ofreci como » Ccaballero é buen servidor é vasallo, é ya doÿ gracias à Dios » porque las cosas estân en tal estado é con tanta gloria é vic- » toria de V. M. Lo que yo he aventurado en esto es poco, segun » lo que deseo la prosperidad de Vuestra Magestad; é si, como » perdi mi Estado, perdiera un gran reyno, tambien lo tuviera por bueno é por muy bien empleado. » El emperador le res- pondié asi : « Duque, vuestro Estado no es perdido, ni se per- » derà; vos habreis vuestro Estado, é yo os lo daré, é otro muy » mayor; é yo conozco que es verdad todo lo que decis, é el » tiempo é la obra diran la voluntad que tengo para vuestro » acrecentamiento. Yo he visto en véros el hombre del mundo » que mas deseaba ver é conocer de vista, pues de obra os tengo » muy bien conocido. » É ansi procediendo en su razonamiento, replicé el duque : « Yo quisiera, señor, el dia de la batalla de » Pavia, seguir el alcance; é si lo dexé de hacer, fué porque » conoci que no havia tal voluntad en algunos cavalleros de los » del egército de Vuestra Magestad, porque me parecié que » conociendo yo esto, convenia mas al servicio de Vuestra Ma- » gestad atender al recaudo de la persona del rey de Francia » 6 de los otros cavalleros principales que se prendieron con él, » é à reintegrarnos de la victoria. Por esto cesé en el alcance, » é atendi juntamente con la victoria à poner en ello el recaudo » que me parecié que en esto debia haver. » El emperador dixo : « Muy mejor hecho fué lo que hicistes, é muy bien pensado é » acertado; é yo estoy muy certificado é informado de todo, é » Con0ZC0 que vuestra persona fué, mediante Dios, una de las » mayores causas de esta victoria, é yo lo pagaré todo eso como » es razon. » De estas palabras saltaron à preguntarle el empe- ÿ ( 89 ) rador como le havia ido en la mar en su pasage, é después en su camino. El duque de Borbon le dié la cuenta de su navegacion é de lo demäs. ÉË ansi fueron hasta palacio, donde cené con el conde de Nasao; é después se fué à su posada, que fué la casa del conde de Cifuentes. Fol. 40 vw. .… Viernes, 16 del dicho mes de febrero, partiô de Toledo madama Leonor, hermana del emperador, à la cual ya todos Ilamaban reyna de Francia, é fué à Illescas, é con ella la reyna Germana, para se ver con el rey de Francia. É antes desto, el martes trece del dicho mes, dia de Carnestolendas , havia Ilegado à Madrid el emperador, é salié el rey de Francia à lo recivir, é fué desta manera : iba el rey, con una capa de paño frisado é una espada à la española, en una mula bien guarnecida, é à su mano derecha el gran maestre de Rodas, é à la siniestra el señor Alarcon, que tenia en guarda al dicho rey, é muchos caba- Ileros con ellos. É hacia äspero dia de aire; é como el rey estava aun flaco de la enfermedad que havia tenido, entrôse en el hos- pital de la Concepcion , que estä à la salida del arrabal de la villa hâcia Toledo. Estuvo alli un poco, é salié de alli, é fué poco mas adelante, é entrôse en un meson que està par del camino. É como supo que el emperador pasava ya la puente que Ilaman Toledana, que estä sobre el rio, sali del meson é procedié por el camino; é ivan entorno todos los campos Ilenos de gente, ansi por ser la paz deseada, como por ver é notar como se ha- vrian estos principes en sus corlesias é cuando juntos fuesen. Ivan de los continuos del emperador, de la capitania de don Alvaro de Luna é de otros hombres d’armas, hasta docientos é cinçuenta muy bien aderezados é armados, sin armaduras de caveza, las cuales Ilevaban deträs de ellos sus pages de la lanza à cavallo, é ivan, por los costados de fuera del camino, tre- cientos infantes de la guarda que el dicho señor Alarcon tenia ( 584 ) ordinaria con el rey de Francia; é poco adelante de ana cruz estañada , que està en aquel camino, se encontraron el empera- dor é el rey. El emperador venia en cuerpo en una hacanea, con un sayo de terciopelo negro é una espada en la cinta; é en vién- dose, se quitaron à la par el rey el bonete, é el emperador un chapeo, é se abrazaron muy estrechamente é gran rato é con mucho placer, é luego comenzaron à porfiar sobre cual iria à la mano derecha : en fin el emperador, vencido de cortesia, tom6 al rey à su mano siniestra; é ansi fueron hasta el alcazar, donde se apearon, é comieron é cenaron juntos en un banquete sufi- ciente al dia que era é à tan grandes principes. Al tiempo que se vieron en el campo, aquellos gentiles hombres de armas hicie- ron unas gentilezas en sus cavallos. Ya el casamiento del rey de Francia é de la reyna madama Leonor estaba asentado, porque un säbado en la noche, veinte dias del mes de enero, el visorey de Nâpoles, cavallerizo mayor del emperador, por su mandado é con poder de la reyna, se desposé en nombre de ella con el rey de Francia, en el alcazar de Madrid, secretamente, hasta tanto que el desposorio fuese manifiesto é personalmente se celebrase.…. Fol. 49. Viernes, diez y seis de febrero, partieron de Madrid el empera- dor y el rey de Francia, é fueron cuatro leguas à dormir-ä Tor- rejon de Velasco, lugar del conde de Puño en Rostro, à una for- taleza muy buena que en aquella villa av. Y este mesmo dia, la reyna de Francia y la reyna Germana partieron de Toledo, 6 fueron seis leguas à dormir à Ilescas, villa del arzobispo de To- ledo, que està à dos leguas de la dicha Torrejon de Velasco. É otro dia, säbado siguiente, partieron el emperador y el rey de Francia de Torrejon después que oyeron misa, é fueron à Illes- cas, donde las reynas estavan, é Ilevaba el emperador à su mano derecha al rey de Francia; é fuéronse à apear à una casa muy cerca de aquella donde las reynas estavan, en las casas de Luis ( 585 ) de Hérrera. É al tiempo que entraron en la posada el emperador é ekrey con los chapeos en las manos, el uno al otro se requi- rieron de cortesia sobre cual entraria primero : en fin el empe- rador entro delante, é comieron cada uno en su aposento. É después que ovieron comido, salieron de la posada, é fuéronse à pié à la de las reynas; é en saliendo de la puerta con los cha- peos en las manos, porfiaron un poco por cüal iria 4 la mano dérecha : en fin el emperador füé à la mano derecha, y ansi entraron en la casa donde las reynas los atendian, é subieron la escalera; é las reynas estavan en pié en un corredor, esperän- dolos à la puerta de la escalera. É como el emperador Ileg6 delante, quité su chapeo, é hizo una gran reverencia de pié à sû hermana; élla le hizo otra muy baja. En continente el empe- rador hizo otra à la reyna Germana ; ella hizo otra 4 Su Magestad. A todo esto el rey de Francia estava quedo, é su chapeo en la cabeza, dos 6 tres pasos desviado. É luego que se hizo lo que es dicho, el emperador é las reynas volvieron los rostros hâcia el rey, el cual se quitô el chapeo, é hizo à su esposa una gran reverencia de pié, é ella otra à él muy vaxa. Estando à dos pasos el uno del otro, la reyna se hinc6 de rodillas, é le pidié la mano ; el rey le dixo : « No os he de dar sino la boca, » é la abrazô é bes6, é se dié por todos los cavalleros una grita mostrando mucho regocijo. É hecho esto, el rey hizo otra gran reverencia à la reyna Germana; ella le hizo otra muy baxa; é luego todas aquellas señoras é damas de entrambas reynas Ilegaron à besar las manos al rey, é algunas selas besavan, é él las abrazava, é à muchas no las dava. Después tom6 de la mano à la reyna su esposa, é el emperador à la reyna Germana, é à la par todos _cuatro, con mucho placer, se entraron de los corredores à una sala, é de alli en una cuadra donde estuvieron hasta dos horas poco mas 6 menos tiempo; é danzaron algunos cavalleros é damas. Hecho esto, salieron el emperador é el rey, é las reynas con ellos hasta la puerta del corredor, é con sendas reverencias se despidieron; é el emperador é el rey cavalgaron é se fueron à Mn. . è RU. : Dr M + 2 F. We. ( 586 ) dormir à la dicha fortaleza de Torrejon de Velasco. El empe- rador Ilevé à su mano derecha al rey. É otro dia siguiente, domingo, tornaron el emperador y el rey de Francia à Illescas, é vinieron ambos dentro en una litera ; é fueron al palacio donde Jas reynas estavan; é ovo fiesta de danzas, é danz6 la reyna de Francia con la marquesa del Cenete, é luego danzaron otros cavalleros é damas; é duré la fiesta mas de cuatro horas. El rey de Francia se despidié de la reyna su esposa é de la reyna Ger- mana, é se fué con el emperador, en la dicha litera en que vinie- ron ambos juntos, à dormir à Torrejon de Velasco; é las reynas se quedaron en Illescas. Lunes siguiente, veinte de febrero (1), se despidieron el emperador é el rey de Francia el uno del otro; é el rey se fué à Madrid , é el emperador se fué à Illescas à se des- -pedir de las'reynas, y estuvo alli aquel dia é el siguiente, Après la lecture de cette étude historique, M. Ducpe- : taux entretient l'assemblée du principe de l’association | dans ses rapports avec l’amélioration du sort des classes ouvrières et indigentes. Les considérations étendues dans lesquelles l’auteur est entré, et que l'importance de la question molivait d’ailleurs pleinement, l’ont déterminé, | d'accord avec la classe, à faire insérer son travail dans la © collection des Mémoires in-octavo ; il paraîtra dans Île tome X. — M. le secrétaire perpétuel a ensuite donné con- naissance des élections faites dans la séance précédente, ainsi que des résultats du concours académique (Voyez pages 466, 469, 476, 482 et 495). (1) L'auteur s'est ici trompé de date. Le lundi était le 19 février, ( 587 ) Il a donné également lecture de l'arrêté royal qui ac- corde le prix quinquennal de littérature flamande, pour les années 1855-1859, à feu Prudens Van Duyse, confor- mément aux propositions failes par le jury et consignées dans le rapport de M. Snellaert. A la suite de cette proclamation, M. le président de l’Académie s’est rendu l'interprète des sentiments de la compagnie el s'est, aux applaudissements unanimes de l'assemblée, exprimé dans les termes suivants : MEsstEurs, Vous assistez, en ce moment, à un fait extraordinaire, unique dans les annales de notre Académie, et qui peut- être ne se produira plus jamais. À la suite de son concours annuel, la classe des lettres décerne deux médailles d’or. _ Ces médailles sont attribuées à deux questions essen- tiellement distinctes. L'une exige de l'éloquence, la connaissance des origines de notre vieille poésie flamande, une étude approfondie des écrivains qui l'ont illustrée. L'autre veut de longues et patientes recherches; elle ne peut être traitée avec succès que par quelqu'un qui pos- sède parfaitement l'histoire politique et littéraire de nos provinces. Malgré ces différences essentielles, c’est le même con- current qui remporte les deux prix. Avec le concours annuel de la classe coïncide le con- cours quinquennal que le Gouvernement a institué en faveur de la littérature flamande, ( 588 ) Et c'est encore à ce même concurrent que la palme est décernée par le jury. | | N'ai-je pas raison de dire qu’un pareil fait est extraor- dinaire ? | L'Académie, messieurs, aurait été heureuse de pouvoir placer cette triple couronne sur le front de celui qui l’a- vail si justement méritée : c'est avec une vive douleur qu’elle se voit réduite à la déposer sur ün tombeau. Elle veut du moins saisir cette occasion, la première qui se soit offerte à elle, pour payer publiquement un tribut de regrets à Prudens Van Duyse, au confrère qui, entré l’un des derniers dans la famille académique, était destiné à y occuper une place brillante, si la mort ne l’eût prématurément enlevé; au poëte qui a chanté en si beaux vers nos gloires nationales; à l'écrivain varié et fécond qui, toujours inspiré par les élans du plus ardent patrio- tisme et par les principes de la plus saine morale, a ré- pandu tant d'éclat sur cette littérature flamande dont on aurait grand tort de méconnaitre l'importance : ear il lui revient une part considérable dans l'illustration de la Bel- gique, et elle constitue l’un des plus solides fondements de notre nationalité. ( 589 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 10 mai 1860. _ M. Baron, directeur. M. An. QueTeLer, secrélaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, Fr. Féuis, Leys, Navez, Van Hasselt, Snel, Fraikin, Ed. Fétis, De Bus- scher, Portaels, membres ; Daussoigne-Mehul, associé ; Balat, Demanet, correspondants. M. le baron de Witte, membre de la classe des lettres, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. a M. le Ministre de l’intérieur transmet une expédition de l'arrêté qui confie au sieur Fabri, d'Anvers, lauréat du grand concours de sculpture en 1859, la pension de 2,500 francs instituée par arrêté royal du 17 avril 4817. — La Société royale pour l’encouragement des arts, à Auvers, fait parvenir le programme de son concours pour l’année 1861. — M, Delbarre fait hommage d’un exemplaire de la ( 590 } médaille frappée en l'honneur de M. Pierre Simonsavec une inscription rappelant l'inauguration du buste de cet ingénieur distingué qui faisait partie de l’Académie, en qualité de membre correspondant. Ce buste a été placé dans une des salles de la station du chemin de fer à Bruxelles. res RAPPORTS, - # M. Edmond De Busscher, rapporteur de la commission chargée de répondre à M. le Ministre de l’intérieur pour les questions relatives à la restauration des anciens tableaux, donne lecture du rapport suivant : « Une commission à été nommée, dans la séance du mois de mars dernier, pour délibérer el aviser sur la mis- sive qui vous à été adressée par M. le Ministre de l’inté- rieur, au sujet de la restauration des anciennes peintures. Elle s'est réunie à deux reprises, et il a été décidé de vous présenter le rapport dont je vais avoir l'honneur de vous donner lecture. » Le département de l'intérieur est sollicité fréquem- ment d’allouer des subsides pour la restauration d’an- ciennes peintures qui ont subi des dégradations. L'admi- nistration n'autorise, par son concours, ce genre de travaux, que lorsque l’avis motivé d'hommes compétents lui en a démontré la complète opportunité. » Cette manière de procéder est à la fois sage et ra- tionnelle; vos commissaires y applaudissent sans réserve. » Toutefois, dit M. le Ministre, même avec cet usage ms à ( 594 ) prudent du moyen, la restauration des tableaux, quand il s’agit d'ouvrages de valeur, conslitue une mesure si grave, que l'application ne saurait en être entourée de trop de précaution, dans l'intérêt de l’art, et pour la res- ponsabilité du Gouvernement et des administrations pu- bliques qui possèdent des collections d'œuvres anciennes. ‘» Vos commissaires partagent ce sentiment, et ils pensent que si la commission royale, instituée pour la conservation des monuments et des œuvres d'art, était renforcée de deux ou trois membres peintres, elle serait plus à même de remplir son important mandat, au point. de vue surtout de la conservation et dela restauration des _anciennes productions plastiques. L'avis officiel de ces EEE ment hommes spéciaux sauvegarderait pleinement la responsa- bilité du Gouvernement et des administrations qui s’adres- seraient à leurs lumières et à leurs connaissances pra- tiques. » Le Gouvernement vous demande ensuite si la restau- ration des anciens tableaux doit être recommandée.ou seulement autorisée; — à quels caractères on reconnaît que la restauration d'un tableau est devenue indispensable; — dans quelles limites 1l faut la circonscrire; — à quels : systèmes 1l convient de donner la préférence? » Ce sont autant de problèmes qui ne peuvent être résolus que dans des cas déterminés, et aps examen des peintures délériorées. » En effet, si, en principe, la conservation et la res- tauration de la plupart des tableaux anciens sont recom- mandables, ces tableaux peuvent le mériter à des titres divers. Tel le sera pour sa valeur artistique, tel autre pour son intérêt historique ou local; celui-ci pour son ancien- neté, celui-là pour sa rareté. Mais, dans chacune de ces ( 992 ) circonstances, la restauration n'en doit être autorisée, encouragée et parfois subsidiée par le Gouvernement, qu'après examen et appréciation par les membres compé- tents de la commission des monuments. | » Sil est difficile d'énumérer et de constater ici les cas où la restauration des anciennes productions est à recom- mander, il ne l’est pas moins de spécifier les différents , les multiples caractères auxquels on reconnaît que la res- tauration d'un tableau est devenue nécessaire, indispen- sable, et, tout autant, de fixer ainsi dans le vague les limites où il faut la circonscrire, le mode, le procédé auquel il convient d'accorder la préférence. » Sans doute, la missive de M. le Ministre de l’intérieur soulève une question artistique bien digne de fixer l’at- tention de notre classe, qui s'intéresse avec une extrême sollicitude à la bonne conservation des anciennes pein- tures; mais ce serait manquer complétement le but, que de généraliser la solution de cette question. Les spécifica- tions qui nous sont demandées sont du domaine des hommes d'expérience que le Gouvernement honorera de sa confiance, et elles dépendent de considérations parti- culières et de l’examen des œuvres sur lesquelles ils auront à se prononcer. » Ces conclusions ont été adoptées, à l'unanimité, par MM. Navez, De Keyser, Leys, Portaels et De Busscher, membres de la commission. Ce rapport est également adopté par la classe, et il en sera donné communicalion à M. le Ministre de l'intérieur. : | | L ( 395 ) Séance générale des trois classes (10 mai 1860, à 1 heure). ——— M. GacnarD, président de l’Académie. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : Classe des sciences : MM. Van Beneden, directeur ; Liagre , vice-directeur ; d'Omalius d'Halloy , Sau- veur, Wesmael, Martens, Cantraine, Stas, De Koninck, Ad. De Vaux, de Selys-Longchamps, le vicomte B, du Bus, Nyst, Gluge, Nerenburger, Melsens, Schaar, Du- prez, Brasseur, Poelman, d'Udekem, Dewalque, membres ; Schwann, Lacordaire, associés; Donny, Gloesener, cor- respondants. Classe des lettres : MM. de Ram, vice-directeur ; Bor- gnet, le baron de Saint-Genois, Paul Devaux, De Decker, Haus, Bormans, Leclercq, Polain, le baron de Witte, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Cha- lon, membres; Nolet de Brauwere van Steeland, associe ; Th. Juste, correspondant. | Classe des beaux-arts : MM. Baron, directeur ; Alvin, Braemt, Fr. Fétis, Navez, Van Hasselt, Snel, Fraikin, Ed. Féus, De Busscher, membres; Daussoigne-Méhul, associé; Demanet , correspondant. Les questions suivantes sont inserites à l’ordre du jour: 1° Proposilions de la Commission des trois classes char- ( 594 ) gée de présenter un plan pour la rédaction d'une Biographie nationale (M. le baron J. de Saint-Genois, rapporteur) ; 2° Rapport et propositions de la Commission des trois classes chargée d'examiner les questions relatives à la pro- priéle des mémoires académiques. La première de ces deux questions ayant donné lieu à une discussion prolongée, l'examen de la seconde a du être renvoyé à la séance générale de l’année 1861. Il a été dé- cidé, en même temps, que la note publiée par M. Alvin en qualité de membre de la commission spéciale, note qui n'est cependant que l'expression de son sentiment personnel, sera insérée au Bulletin de la séance. Rapport présenté par M. le baron J. de Saint-Genois, sur les moyens de mettre à exécution l'arrété royal du 1° dé- cembre 1845, en ce qui concerne la publication d'une Biographie nationale (1). Nous n'’insisterons pas, au début de ce rapport, sur l'oppor- tunité qu'il y a de publier enfin une Biographie nationale, ni sur les nombreux titres de gloire que nous avons à faire valoir pour que cette biographie soit à la hauteur des monuments littéraires du même genre, entrepris par d'autres nations. Nous aborderons de prime abord le côté pratique de la ques- tion, afin de mieux aboutir à une prompte solution. : En réorganisant, en 1845, l'Académie royale, un ministre ami des lettres, M. Sylvain Van de Weyer, membre de notre (1) Les membres de la commission étaient, outre le président et le se- crétaire perpétuel de l’Académie, MM. Kickx et Wesmael, pour Ja classe des sciences ; MM. le baron de Gerlache et le baron J. de Saint-Genoïs, pour la classe des lettres; MM. F. Fétis et Van Hasselt, pour la classe des beaux-arts. ES É U ( 295 Compagnie, proposa à S. M. le Roi un arrêté qui avait entre autres pour but la publication d’une biographie générale de tous les hommes remarquables du pays. Dans le rapport qui précède cet arrêté, le Ministre déclare que cette entreprise sera confiée à l'Académie, et que celle-ci sera autorisée à s'adjoindre des savanis et des littérateurs pris en dehors de son sein, pour la mener à bonne fin. Dès le 6 avril 1846, M. le Secrétaire perpétuel fut chargé de faire, aux trois classes réunies, un rapport sommaire sur les moyens de satisfaire aux dispositions de l'arrêté royal de 1845, et dans la séance générale du 12 mai suivant, il proposa de nommer une commission composée d'académiciens des trois classes, à qui serait confiée la tâche de présenter un plan et d'indiquer les voies pour répondre d'une manière pratique aux vues de l'arrêté susmentionné (1). Cette commission fut constituée au mois de juin suivant (2) et composée, indépendamment du président et du secrétaire perpétuel de l’Académie, de MM. Morren et Kickx pour la classe des sciences, de MM. le baron de Gerlache et le baron de Reïffen- berg pour la classe des lettres, et de MM. Fr. Fétis et À. Van Has: selt pour la elasse des beaux-arts. A peine était-elle nommée que M. le baron de Reïffenberg, dont le zèle pour l'Académie ne se refroidissait jamais, s'em- pressa, dans la séance du 3 août 1846, de communiquer à la classe des lettres quelques-unes de ses vues sur la manière de mettre l'arrêté de 1845 à exécution (3). Cette première tentative pour arriver à un résultat immédiat, resta sans suite. Toutefois, — et nous saisissons cette occasion pour rendre hommage à la sollicitude de M. Quetelet pour tout ce qui touche aux intérêts de l'Académie, — M. le secrétaire perpétuel dans la (1) Pulletins, t. XIIT, I'° part., pp. 589 et 506. (2) Zbid., t. XIII, II part., pp. 685, 754 et 795. (5) Zbid., t. XIII, Ile part., p. 205. Qme SÉRIE, TOME IX. + ( 596 ) séance du 10 janvier 1848, rappela de nouveau à la classe des lettres la nécessité de commencer enfin la Biographie natio- nale (1). | Depuis cette époque, diverses circonstances mirent obstacle à la réalisation de ce projet, et la question était de nouveau per- due de vue, lorsque M. le Ministre de l'intérieur erut devoir rappeler à l’Académie l'accomplissement de la mission dont il l'avait chargée (2). À la suite de cette communication, la classe des lettres dé- cida, dans sa séance da 1% décembre 1851, que la commis- sion serait assemblée dans un bref délai pour satisfaire au vœu exprimé par M. le Ministre de l'intérieur. Quoique ces divers faits attestassent la volonté de l'Académie de ne point perdre de vue les prescriptions de l'arrêté royal du 1° décembre 1845, les choses en restèrent à ce point pendant quelques années encore. | Dans l'intervalle, MM. de Reiffenberg et Morren vinrent à décéder. | Dans la séance de la classe des lettres du 4 avril 1859, j'ai eru pouvoir appeler l'attention de la Compagnie sur l'inexécution de celte partie de l'arrêté royal en question, et l'ai priée de sou- mettre, à sa séance générale des trois classes, les observations que j'avais émises à ce sujet. Cette note, accueillie favorable- ment par l'Académie, fut insérée dans nos Bulletins (3). Peu de temps après, M. le Ministre de l'intérieur, par sa lettre du 28 mai 1859, insista de nouveau auprès de l'Académie pour que l'arrêté du 1% décembre 1845 reçût son exécution. Voici le contenu de cette missive : (1) Bulletins, t. XV, [re part., p. 55. (2) Zbid., t. XVIII, Ie part., p. 510. (5) Zbid., 2° série, t. VI, p. 484. es — mr ne, gt à... Ji: Gi CESR A LE CNE ( 597 ) « MOonsIEUR LE SECRÉTAIRE PERPÉTUEL, » L'arrêté royal du 1e décembre 1845 porte que l’Académie s’occupera de la publication d'une Biographie nationale. Mon dépar- tement a rappelé plusieurs fois cet objet à l’attention de l’Académie. Je vous prie, Monsieur le Secrétaire perpétuel, de vouloir bien lui signaler de nouveau l'intérêt que le Gouvernement attache à l’ac- complissement de cette partie de sa mission. » Dès que l’Académie, en conformité de l’article 2 de l'arrêté royal du 4 décembre 1845, m'aura soumis les mesures d'exécution de ce travail, j’examinerai le concours que le Gouvernement pourra prêter pour le faciliter. » Un point sur lequel je crois devoir attirer l'attention de l’Aca- démie, c’est celui de savoir si tout en lui laissant la direction et la . part principale de la rédaction de la Biographie nationale, il n’est pas convenable d'admettre également la collaboration d'écrivains belges n’appartenant pas à la Compagnie, qui auraient fait preuve, dans des travaux antérieurs, d’un mérite distingué. » Agréez, Monsieur le Secrétaire perpétuel, l'assurance de ma ‘considération très-distinguée. » Le Ministre de l’intérieur, » CH. ROGIER. » Cette nouvelle communication, qui nous assure d’une manière si positive le concours du Gouvernement, vous engagea à com- pléter sans délai la commission de la Biographie nationale par l’adjonction de MM. Wesmael et le baron de Saint-Genois, en remplacement de MM. Morren et de Reiffenberg. ILest important de se bien convaincre que la commission spé- ciale dont nous faisons partie n’est pas chargée de rédiger et de publier la Biographie nationale, mais seulement d'élaborer un plan d’exéeution et d'indiquer les meilleurs moyens pour y arri- ver. À cela se borne son rôle. L'Académie aura à discuter ce plan et à se prononcer sur Îles différents points qu'il contient. Votre commission s’est réunie la première fois d’une manière (598) régulière le 5 juillet 1859. Dans cette séance, elle a décidé qu'avant d'arrêter un plan pour la publication d’une Biographie nationale, il faut entreprendre un travail préalable, à savoir l'examen des éléments qui, dans l’état de la question, existent déjà pour faciliter l'exécution de cette vaste entreprise litté- raire, hérissée de tant de difficultés de tous genres. A raison des occupations bibliographiques dont je suis chargé, comme bibliothécaire de l’université de Gand , votre commission a bien voulu me confier le soin de vous faire, en son nom, à ce sujet, un rapport circonstancié, suivi d’un avant-projet de rè- glement. Je m'acquitte aujourd'hui de cette mission, avec l'espoir que de la lecture de ce rapport résultera pour vous à l'évidence la conviction qu'on peut atteindre plus promptement qu'on ne le pense le but indiqué par l'arrêté royal. Les matériaux d’une Biographie nationale existent, pour la plus grande partie, mais épars, disséminés dans des ouvrages sans nombre qu'on ne lit plus, perdus dans des recueils périodiques, dans des brochures, où il s’agit de les rechercher patiemment. Depuis une trentaine d'années surtout, il a été énormément biographié en Belgique, si nous pouvons nous exprimer ainsi et employer un néologisme qui traduit exactement notre pensée. Il n'y a pas d'hommes de quelque mérite que ce soit, décédé chez nous pendant le dernier quart de siècle dont on n'ait publié une notice nécrologique; les vivants mêmes n'ont pas échappé à cette manie d'accorder une certaine notoriété à tout le monde. Il est essentiel de bien se fixer de prime abord sur la sigmifi- cation des mots : biographie nationale, expression très-élas- tique, lorsqu'il s'agit d’y comprendre des morts de toute espèce. A la première vue, il semblerait qu'on n'ait à s'occuper que des hommes les plus marquants et qu'il ne s'agisse que de faire leur éloge dans un style plus ou moins pompeux. Ce serait là tout simplement reprendre en sous-œuvre la publication des Belges illustres, faite il y a quelques années, avec un certain luxe par 2" lee ( 599 ) un intelligent éditeur de Bruxelles, et refondue plus tard dans une seconde édition. Mais en y regardant de plus près, on s’aper- çoit bien vite qu'une pareille entreprise s’éloignerait complé- tement du but de l'arrêté royal de 1845, qui a réellement de- mandé un ouvrage où tous les Belges remarquables, n'importe à quel titre, reçussent l'hospitalité; un ouvrage qui présentât l'en- semble biographique de tous les noms du pays dont la mention est digne d'être conservée, c’est-à-dire un dictionnaire bio- graphique dans toute l'acception du mot, consacré à la nation belge. Dans la note qu'il communiqua à la elasse des lettres, le 4 août 1846, M. de Reiïffenberg envisageait la question d’une autre manière. | Le travail confié à l’Académie devait être, d’après lui, un aperçu historique, un résumé dans l’ordre chronologique des faits et gestes de tous les hommes qui ont contribué à rehausser la gloire de la Belgique, tant sous le rapport artistique, scienti- fique et littéraire que sous d’autres également dignes d'être signa- lés. Il proposait done de charger chaque classe de la rédaction et de la publication d’'aperçus généraux de cette espèce dans les conditions suivantes : la classe des lettres aurait rédigé : 4° la biographie littéraire, 2° la biographie politique et militaire; la elasse des sciences, la biographie scientifique; la classe des beaux-arts, la biographie artistique. On voit que l'honorable et savant académicien confondait la biographie proprement dite avec un travail du genre de ceux dont, entre autres, la classe des beaux-arts a chargé une commission spéciale, prise dans son sein, en ce qui concerne la rédaction de l’histoire de l’art en Belgique. Selon M. de Reiffenberg le meilleur plan à suivre était celui adopté par les rédacteurs de l'Histoire littéraire de France. Tout en reconnaissant sa parfaite compétence en cette matière, nous pensons que le savant académicien, ne s’attachant qu’à un côté de la question, a considéré trop exclusivement l'œuvre dont ( 600 ) l'Académie est chargée, au point de vue de l'histoire de Ja litté- rature*seule. LEE Reverant donc à notre point de départ, à savoir quela Biogra- phie nationale doit être purement et simplement un dictionnaire biographique, nous abordons l'indication des sources qu'il con- vient de consulter, avant tout, pour rédiger les notices. Dans les vastes compilations qu'on nommie dictivnnairés bio- graphiques et encyclopédies, compilations qu'on rencontre par- tout, tels que Bayle, Moréri, Michaud, Courtin, Ersch et Gruber, les Belges sont en général fort oubliés, et quand nosillustrations nitionales y obtiennent droit de bourgeoisie, elles y apparaissent si défigurées , si inexactement traitées, qu'on ne peut sé fier aux assertions qui les concernent. Nous en exceptons le dictionnaire de l'abbé de Keller où, à raison de la nationalité dé l’auteur, qui était Luxembourgeois, nos célébrités militaires, artistiques , littéraires, occupent une plus large placé et y sont mieux appréciées ; nous en éxcéptons encore l'excellent Dictionnaire universel d'histoire et de géographie (1), où les noms belges sont traités avec un soin tout particulier ; si nous somrnes bien informé, nous ajouterons que c’est notre regrelté confrère M. Schayes qui s’y était chargé de cette partie. La Belgique possède déjà quelques dictionnaires biographiques nalionaux et provinciaux; tout le monde connaît les trois vo- lumes des Belges illustres, dont nous avons parlé tantôt. Nous citerons encore : Adeér, le Plutarque des Pays-Bas ; = Delvenne, la Biographie du royaume des Pays-Bas ; — Pauwels-Devis, Dictionnaire biographique des Belyes morts et vivants ; = Van- dermaelen, Dictionnaire des hommes de lettres, etc., de la Belgi- que; — Piron, Algemeene beschryving der mannen en vrouwen van Belgie. Nous nous abstenons de mentionner les grands ouvrages histo- (1) Quatre volumes in-8°, publié à Bruxelles par F. Parent en 1855 et 1854. ( 601 ) riques anciens et modernes qui existent sur nos différentes pro- vinces : Ernst, Kervyn de Lettenhove, Meyer, Sanderus, Bouille, Fisen, Cousin, Poutrin, Boussu, Vinchant, Gaillot, Wilthem, Le Roy, De Vadder, Butkens, Van Ghestel, Diericxsens et bien d’autres sont des sources qu'on ne saurait s'abstenir de consulter pour la biographie des Flamands, des Liégeois, des Luxembour- geois, des Hennuyers, des Namurois, des Brabançons remar- quables. Pour les provinces et les villes, nous avons: le comte de Becde- lièvre, Biographie liégeoise, — Delvaux de Fouron, Dictionnaire biographique de la province de Liége, — Ul. Capitaine, le Vécro- loge liégeois ; — la Biographie des hommes remarquables de la Flandre occidentale; — Ad. Mathieu, Biographie montoise; — Iconographie montoise ; — l'Appendice de Mare Van Vaernewyck, Historie van Belgie. Si nous sommes bien informé, M. le docteur Neyen, de Wiltz, se propose de publier prochainement un recueil biographique consacré au Luxembourg. On trouvera également des notices biographiques intéressantes dans les différentes monographies historiques que M. Wolters à fait paraître sur le Limbourg. . D'autre part, nous avons à vous signaler quelques biographies professionnelles, c'est-à-dire des ouvrages spéciaux où les hom- mes célèbres sont classés par groupes de professions. Pour les peintres, les sculpteurs, les artistes de tout genre, les matériaux de cette espèce sont des plus abondants. Campo- Weyerman, Descamps, Houbraken, Van Mander, P. Baert, Siret, Alf. Michiels, Balkema, Kramm, Van Hasselt, Immerzeel, Éd, Fétis, A. Pinchart et d'autres ont presque épuisé ce vaste sujet. Qui ne connaît l'important dictionnaire des musiciens de M. Fr. Fétis, monument biographique unique dans son genre, dont la seconde édition paraît en ce moment ? ‘ Veut-on écrire l'histoire des hommes de lettres ? une pléiade de biographes, latins, français et flamands se presse sous notre plume. Je citerai les plus connus : Sanderus, Valère André, ( 602 ) Sweerstius, Vernulæus, Hoffman-Peerlkamp, de Stassart, Van Hasselt, Snellaert, de Reïffenberg, Serrure fils, Lecouvet, les frères De Backer, Willems, Van Hulst, Broeckx et Goethals, dont les écrits forment déjà un ensemble pd Ménr sur cette malière. * De leur côté, MM. Van der Meersch et Van der Haeghen ont traité d'une manière complète.et détaillée l'histoire des impri- meurs. Nos gloires militaires ont été mises en relief dans les excel- lentes monographies du colonel Guillaume et dans le travail de M. Vigneron : la Belgique militaire. Les Bollandistes sont, pour l’histoire des saints belges, une source inépuisable à laquelle il faut ajouter un vaste travail que notre savant confrère, M. de Ram, publie en ce moment sous le titre d'Hagiographie nationale. | Permettez-moi de eiter aussi l'essai que j'ai fait paraître, ilya quelques années, sur les voyageurs belges. Mais en fait de biographie professionnelle , une regrettable lacune existe encore pour les hommes qui se sont distingués dans les sciences proprement dites: les mathématiques, l’astrono- mie, la mécanique, l'histoire naturelle, la chimie et la physique- Nous n'avons aucun ensemble de biographie sur cette catégorie de savants. Cependant hâtons-nous de le dire, cette partie des connaissances humaines a toujours eu de dignes représentants en Belgique. Dans les siècles passés, nous pouvons citer avec orgueil les Simon Stévin, les Philippe Laensberg, les Dodonée, les Gré- goire de Saint-Vincent, les Van den Spiegel, les Van Helmont , les Charles de l'Écluse. Pour l’époque actuelle, les noms distingués abondent ; un sentiment de convenance seul nous interdit de les citer. Grâce aux notices de MM. Quetelet, Morren, Kickx, ete., les Bulletins, les Mémoires et l'Annuaire de l'Académie ont com- blé quelques-unes des lacunes que nous signalions tout à l'heure. Les sciences occuperont donc un rang digne d'elles dans une biographie nationale, ( 605 } La vie de quelques jurisconsultes belges a été racontée avec soin dans plusieurs discours de rentrée de MM. les procureurs généraux de nos différentes cours de justice. Nous mentionnerons les notices de M. Raïikem sur De Méan et Louvrex, de M. de Bavay sur Stockmans et Van Espen, de M. Ganser sur Philippe - Wielant. Nous ajouterons que les préfaces des œuvres de nos principaux jurisconsultes contiennent presque toujours leur biographie. Nous ne grossirons pas cette nomenclature des différentes catégories d'hommes remarquables dont la biographie a été publiée. Après avoir jeté un rapide coup d'œil sur ce qui a été écrit en fait de biographie nationale, nous avons cru répondre d’une manière plus complète aux vues de votre commission en vous sou- mettant, dans l'ordre alphabétique, une liste bibliographique de dictionnaires, de recueils périodiques et autres ouvrages dus la plupart à des plumes belges, et dans lesquels se trouvent groupés, tantôt dans un certain ordre, tantôt disséminés sans plan arrêté, un nombre considérable de biographies , de notices nécrologiques et de mémoires utiles à consulter pour connaître la vie de nos compatriotes distingués. Nous sommes loin de con- sidérer cette liste comme complète; chacun de vous trouvera sans doute à y joindre d’autres publications. | Votre commission a manifesté le désir de me voir joindre à cette énumération une appréciation des ouvrages que j'aurais à signaler dans ce rapport. Pour autant qu'il m'a été possible de satisfaire à cette partie de ma tâche, je fais suivre chaque titre d'une note sommaire sur le caractère, le mérite et la valeur du livre que j'ai eu sous les yeux. Il est bien entendu que je n'ai pas la prétention de présenter ces jugements comme absolus. Mais j'assure que presque tous ces ouvrages m'ont passé par les mains. A cette liste déjà très-bien fournie, il convient d'ajouter les histoires des villes qui ont été puhliées en Belgique, surtont de- ( 60% ) puis quelques années, et où l’on trouvera des biographies locales très-étendues. Nous citerons les histoires d'Anvers, par Mertens et Torfs; de Bruxelles, par Henne et Wauters; de Bruges, par Couvez ; d'Audenarde, par Van Cauwenberghe; de Termonde, par Wytsman; d'Eecloo , par Neelemans; d’Alost, par De Smet; l'Historiae Lossensis compendium, par Mantelius; de Huy, par M. Gorissen; de Tongres, par Driessen, etc. Une source d’une valeur inappréciable pour la rédaction d'une Biographie nationale, c'est le vaste dictionnaire de M. Oettinger. Il faut avoir parcouru, page par page, ce répertoire de qua- rante mille noms propres, pour être convaincu de l’incontestable utilité d'une pareille entreprise littéraire, malgré les erreurs de détail sans nombre qui en sont inséparables. Le but de l'auteur n'a pas été de présenter la biographie des hommes remarquables du monde entier, mais d'indiquer ceux de ces hommes dont la vie a été publiée dans des monographies. A cet effet, M. Oetlinger a placé sous chaque nom, classé dans l'ordre alphabétique, la liste des notices spéciales qui lui sont consacrées, avec les indications bibliographiques nécessaires pour les retrouver au besoin. J'ai extrait de cette nomenclature les huit cents noms belges recueillis par M. Oettinger, avec les titres de leurs biographies. Je les ai rangés également dans l’ordre alphabétique pour en faciliter le classement. Je dépose ici ces extraits à titre de ren- seignement. A la fin de l’ouvrage, le savant bibliographe donne une liste des publications biographiques connues, groupées d'abord par nationalités et ensuite par professions. J'y ai trouvé plus d'une indication précieuse pour le travail dont j'ai été chargé. Je dépose encore comme appendice à mon rapport un autre spécimen de latilité que l'on peut retirer, dans l'état actuel de la question, des matériaux bibliographiques éparpillés dans les recueils périodiques : c'est Ja nomenclature de toutes les biogra- phies qui ont successivement élé insérées, de 1823 jusqu'à ce jour, ( 605 ) dans le Messager des sciences historiques. Elles sont au nombre de près de cent. En faisant le même travail pour les Bulletins et l'Annuaire de l'Académie (1), on verrait que ce corps savant a déjà fourni un contingent très-riche à la Biographie nationale. Mon but, en vous faisant cet exposé bibliographique, est de vous démontrer que le travail préalable à faire est d'extraire de tous les ouvrages dont j'ai fourni la liste (sauf les dictionnaires), ainsi que de ceux qui seront encore signalés dans la suite, les titres des innombrables notices qui y sont comme enfouies. Cette listé, augmentée de la nomenclature des biographies spéciales recueillies par M. Oettinger et du catalogue de celles qui existent à l'état de livres ou de brochures qu'il faudra recher- cher, donnera un ensemble complet des notices qui ont été pu- : bliées sur des Belges remarquables. Je suis déjà à même, par ma bibliothèque particulière, de vous présenter les titres d'une centaine de ces biographies indi- viduelles, surtout d'hommes morts récemment. Quänt aux prélats, quant aux religieux célèbres, les Acta Sanc- torum , l'histoire de nos évêchés, l'histoire des différents ordres monastiques suppléeront aisément aux lacunes qui existent dans cette partie, | Une part notable dans cette entreprise littéraire doit aussi revenir aux Belges qui sont allés résider à l'étranger, et qui y ont fait rayonner leur nom du plus vif éclat dans les arts, les lettres, les sciences, l'industrie, la carrière militaire, l’église et la magistrature. Ce nombre est plus considérable qu'on ne le pense. En effet, d’une étendue restreinte, les provinces belges, soumises, depuis Charles-Quint surtout, à des vicissitudes sans cesse renaissantes, (1) L'Annuaire seul contient 76 biographies dues à MM. de Reiffenberg, Quetelet, Voisin, de Chénedollé, Cornelissen, Morren, Roulez, Kesteloot, Lesbroussart, de Ram, De Decker, Louyet, de Stassart, de Koninck, Snel- laert, Alvin, Sauveur, Kickx, de Saint-Genois, etc. ( 606 ) virent beaucoup de leurs enfants s'éloigner de leur patrie pour aller chercher à l'étranger un ciel plus libre, un essor plus vif, une carrière brillante, où honneurs, richesses, considérations accompagnaient leurs pas. Suivant l'exemple de ceux qui, à la suite de la cour et des armées du grand Empereur, parcouraient brillamment l'Europe et se faisaient un nom dans les affaires importantes du temps, nos artistes allaient peindre et s'inspirer sous le beau ciel de l'Italie, nos savants et nos lettrés enseignaient à Bologne, à Salamanque, à Oxford, à Paris, devenaient précepteurs des fils de rois, con- seillers, ministres, diplomates, au service des princes et des empereurs. Des papes et des souverains étrangers choiïsissaient ‘leurs maîtres de chapelle parmi nos musiciens et nos composi- teurs; des prêtres et des religieux nés sur notre sol, obtenaient le cardinalat, des siéges épiscopaux, de grandes charges ecelé- siastiques dans des contrées lointaines. Nous avions de coura- geux missionnaires qui partaient pour évangéliser et civiliser les sauvages de l'Amérique, de hardis navigateurs qui s’en allaient fonder des factoreries dans le nouveau monde, et prêter leur génie entreprenant à la Compagnie des Indes. Tous ces titres de gloire sont à rechercher patiemment. Il y à là pour une biographie nationale un côté intéressant, trop long- temps négligé, que nous recommandons à votre attention. Déjà MM. Gaillard et Édouard Fétis ont traité quelques parties de cette importante question dans les Mémoires et les Bulletins de l’Académie. Nous ferons remarquer en passant que plus d'un compatriote, ainsi sorti du pays natal, a son nom orthographié d’après la prononciation de la langue du pays ou traduit dans un idiome étranger. Cette circonstance fort commune, surtout pour les noms flamands, a fait perdre la trace de la véritable nationa- lité de l'individu, et a été cause qu'on a attribué à une contrée étrangère ce que nous avons le droit de revendiquer comme nôtre, ( 607 ) Sous ce dernier rapport, la biographie qu'on se propose d’en- treprendre, peut rendre des services réellement patriotiques. On sera étonné de voir le nombre de Belges distingués qu'on a dé- pouillés de leur nationalité, soit par erreur, soit avec intention, pour en faire des Anglais, des Français, des Italiens ou des Allemands. En ce qui me concerne, j'ajouterai que depuis bien des an- nées, je réunis les éléments d’un ouvrage intitulé les Belges à l'étranger, et qui sera particulièrement destiné à faire connaître le rôle que les Belges ont joué en dehors de leur patrie. En terminant ce long aperçu, nous émettrons quelques obser- vations finales sur le point de vue auquel il importera, à notre avis, de se placer dans cette vaste entreprise. I ne suffit point de faire connaître le lieu et la date de nais- sance de chaque personnage, les circonstances de sa vie, les productions qu'il a laissées, s’il est artiste, savant, homme de lettres, penseur, philosophe ; les hauts faits d’armes qui lui sont attribués, s'il est pmme de guerre; les découvertes qu'il a faites, s'il est navigateur ou géographe; les lois et les institu- tions politiques auxquelles il a pris part, sil est jurisconsulte ou magistrat; les vertus dont il a brillé; s’il est prince, philan- thrope, prélat, religieux, homme d'Église. Il nous semble que, dans ce travail, surtout dans les biographies d’une certaine im- portance, il faudra insister sur le mouvement imprimé à la eivi- lisation générale par les individus dont on donnera la vie, sur les progrès dont les sciences, les arts et les lettres leur sont rede- vables, sur la part que chacun d’eux a prise au développement intellectuel de l'humanité. Cette manière élevée de concevoir et de traiter le sujet fera disparaître l’aridité qui caractérise ordinairement les diction- naires biographiques et montrera que, dans tous les temps, les Belges ont rempli un rôle qui les met au niveau des autres na- _ tions. La Biographie nationale deviendrait ainsi le tableau par- lant de la vie scientifique, littéraire, artistique, morale et ma- ( 608 ) térielle du peuple belge, en même temps qu’elle serait une page éloquente de ce grand livre qu’on appelle l'histoire du monde. Toutes les notices ne comportent certes point un pareil déve- loppemenÿ; mais partout où la pensée que nous venons d'émet- tre peut se produire, nous devrons nous applaudir de la voir paraître. | Notre pays a produit de grands génies, comme Rubens, Van Dyck et Grétry, de grandes figures historiques, comme Godefroy de Bouillon , Jean le Victorieux, Charles-Quint. Il est permis de leur consacrer des notices étendues. Mais il ne faut pas vouloir donner des proportions exagérées à la biographie d'artistes d’un mérite éminent aussi, à des savants estimables , à des écri- vains laborieux, à de vaillants capitaines d'un courage éprouvé, mais qui, hissés trop haut, ne se trouveraient plus évidemment à leur place. | Gardons-nous donc d'exagérer outre mesure la valeur des hommes qui doivent figurer dans ce livre. Une biographie na- tionale ne doit pas élever la prétention de ne raconter la vie que d'hommes célèbres, ou d'accueillir tous ceux qui ont obtenu quelque notoriété. Ne cherchons pas davantage, poursuivant une vaine gloire, à grossir ce dictionnaire de noms dont la nationa- lité est contestable ; ce serait là un double écueil qu'il faut éviter dans notre entreprise. Une semblable œuvre ne doit pas être un plaidoyer en faveur de l'excellence du caractère belge. La mis- sion qu'il convient de remplir, c'est de mettre en relief la mé- moire des hommes distingués du pays, et d’arracher parfois à l'oubli des noms qui, pour être modestes, n’en opt pas moins un mérite réel. Soyons animés d’un vif amour de la patrie, mais que ce sentiment n'étouffe pas celui, plus sacré encore, de la vé- rité et de la justice. Le chauvinisme littéraire est surtout déplacé dans une biographie nationale. ( 609 ) ANNEXE. Liste alphabétique des recueils périodiques, mémoires et autres ouvrages, surtout récents, que l'Académie pourra consulter avec fruit pour la rédaction de la Biographie nationale, or- donnée par l'arrêté royal du 1" décembre 1845. Académie. — Académie d'archéologie dé Belgique, Bulletins et Annales , in-80. Anvers, 1843-1859. On trouvera dans cet intéressant recueil , où la partie généalogique joue un assez grand rôle, de nombreux renseignements biographiques et quelques bonnes notices. Ader (3.). — Plutarque des Pays-Bas, ou vies des hommes illustres de ce royaume. Bruxelles, 1828; 3 vol. in-8°. Cet ouvrage emphatique, sans savoir véritable, comme toutes les publications du même genre connues sous le nom de Plutarques , renferme pourtant quelques notices assez bien faites, L'introduction est la meilleure partie du livre. Annales. — Annales de la Société royale des beaux-arts et de litérature de Gand. 1842-1859 ; in-8e, {. I-VI. Ce recueil renferme quelques notices biographiques peu étendues, mais faites avéc soin. Annales. — Annales belgiques des sciences, arts et littérature de Gand. Gand, 1817-1829; 14 vol. in-8°. Les biographies des Belges remarquables y sont clair-semées et peu importantes. Annales. — Annales de la Société archéologique de Namur. 1849-1859, Cet excellent recueil renferme bon nombre de notices sur des célébrités namu- roises , lesquelles , quoique d’un intérêt local, méritent de figurer dans une bio- graphie générale du pays. Anmaies. — Annales de la Société d’émulation pour l’histoire et les anti- quités de la Flandre occidentale, Bruges, t. I-IV; 2e série, t. I-X (1839- 1856). On y trouve quelques rares mais bonnes notices sur des hommes celebres , tels que F. Verbist , les frères Van Eyck, ele, ( 610 ) Annuaire. — Annuaire de la Bibliothèque royale de Belgique, par le con- servateur baron de Reiffenberg. Bruxelles, 1840-1851 ; 12 vol. in-18. Il y a dans ce recueil plusieurs notices biographiques dues à M. de Reiffenberg et écrites avec l'esprit et la verve dont ce spirituel auteur avait si bien le secret. Annuaire. — Annuaire de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. 1834 et suiv. Ce recueil contient un grand nombre de notices biographiques sur des membres - décédés de l’Académie, toutes rédigées avec soin, exactitude et impartialite ; elles sont dues pour la plupart à des membres de la Compagnie. Annuaire. — Annuaire de la Société libre d'émulation de Liége. 18.. à 1860 ; in-18. Quelques notices biographiques"de Liégeois remarquables, faites avec beau- coup de soin, y sont insérées. Annuaire. — Annuaire de l’Université catholique de Louvain. 1837 à 1859 et suiv.; 25 vol. in-18. On trouve dans cet annuaire un bon nombre de notices littéraires tres-bien faites , tres-détaillées sur des savants distingués qui ont brillé à l’université de Louvain, tels que Clenardus, Molanus, etc. Archives. — Archives historiques et littéraires du nord de la France et du midi de la Belgique. Valenciennes , 1837 à 1858; in-8. Plusieurs biographies de Belges distingués ont été insérées dans cet excellent recueil. Quelques-unes sont écrites avec beaucoup de developpement et ren- ferment des détails peu connus. Backer (Aug. et 4. de). — Bibliothèque des écrivains de la compagnie de Jésus. Liége 1855 et suiv. ; in-8°, 1, 2, 5, 4. Chaque nom d’auteur est suivi d’une courte notice biographique et de la liste exacte de ses ouvrages. — Tres-complet pour la Belgique. Balkema (C.). — Biographie des peintres flamands et hollandais qui ont existé depuis Jean et Hubert Van Eyck jusqu’à nos jours. Gand, 1844, in-8°. Ouvrage abrégé qui n’est pas sans mérite. Becdelièvre (le comte de). — Biographie liégoise, ou Précis historique et chronologique de toutes les personnes qui se sont rendues célèbres dans l’ancien diocèse et pays de Liége, Limbourg , etc., Liége, 1857; 2 vol. in-8°. Publiée dans l’ordre chronologique , auquel renvoie une table alphabétique de tous les noms, placée à la fin du tome II, cette biographie ne mérite pas toujours la confiance du lecteur; les assertions hasardées y sont nombreuses. Il est bon de contrôler la véracité du comte de Becdelièvre. D'autre part, ce livre a éte un peu le lit de Procuste; on y a, degré ou de force, fait entrer tout ce qui avait l'air d'appartenir à la nation liégeoise. Toutefois, à mesure qu’on s'approche des temps modernes , l'ouvrage est plus digne de foi et plus exact. Belges (les). — Belges illustres (les). Bruxelles, 1845-1846, avec gravures; 5 vol. in-8. OEttinger, IE, 1971, donne tout au long les noms des hommes célèbres qui y figurent. Toutes ces notices ont été écrites en général avec soin et une cerlaine recherche de style, Belgsisch Museum. — Belgisch Museum voor de Nederduitsche tael en letterkunde, enz., uitgegeven door J. F. Willems. 1837-1846; 10 vol. in-8, ÿ C'est le meilleur de tous les recueils littéraires flamands qui aient paru en Belgique. Les notices qu’on y a insérées sont faites avec le plus grand soin el con- tiennent des aperçus vraiment intéressants. Bibliographie. — Bibliographie académique, ou Liste des ouvrages pu- bliés par les membres, correspondants et associés résidents de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. Bruxelles, 1854; in-12. _Bibliophile. — Le Bibliophile Belge. Bruxelles, 1845, 1'° série, t. I-IX; 2me série, t. Ï et suiv. (N. B. La 17e série a une table alphabétique.) Cet intéressant recueil contient , sur des bibliophiles , des hommes de lettres et des imprimeurs belges, de nombreux renseignements biographiques. On y publie, = en ce moment, une biographie luxembourgeoise, Biographie. — Biographie universelle, ou Dictionnaire de tous les hommes qui se sont fait remarquer par leurs écrits, leurs actions. Bruxelles, 1845; gr. in-8. La partie des biographies belges y a été mieux soignée qu’elle ne l’est générale- ment dans ces sortes d'ouvrages; mais elle est peu complete. Biographie. — Biographie des hommes remarquables de la Flandre occi- dentale. Bruges, 1843 à 1849; in-8°, 1, II, et III et IV formant le sup- plément (publiée sous les auspices de la Société d’émulation, à Bruges). Sauf quelques exceptions, les notices contenues dans ces volumes sont d’une grande sécheresse. D'autre part, il y a bien des noms insignifiants qui y figurent. Quoi qu’il en soit, les renseignements qu’on y a réunis ont le mérite de l’exacti- tude et de la vérité. Biographie nationale, — Vie des hommes et des femmes illustres de 2€ SÉRIE, TOME IX. 49 ( 612 ) la Belgique depuis les temps les plus reculés. Bruxelles; 2 vol, in-8°; gra- vures dans le texte. « Biographie. — Biographie nationale, ou Dictionnaire historique de tous les hommes morts et vivants nés dans le royaume des Pays-Bas. Mons, Leroux , 1827. Ouvrage jugé assez défavorablement par M, le baron de Reïffenberz (Nouvelles Archives philologiques , t. WI, pp. 260-263). | Brasseur (Ph.). — Sydera illustrium Hannoniae scriptorum seu elogia et scripta eorum carmine complexa. Mont.; 1637; in-8°., Ed. — Bibliotheca Hannoniae. Mont. : 1639 ; in-4°. &roeckx (C.). — Essai sur l'Histoire de la médecine belge avant le XIX®° siècle. Gand, 1837; in-8°; portr. Mémoire précieux pour l’histoire des anciens médecins belges et pour la biblio- graphie de leurs ouvrages. Bulletin. — Bulletin de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. Bruxelles, 1832 et suiv., 1"e série, vol. 1 à XXIII (et table); 2% série , 1 et suiv.; in-8°. Ce recueil contient un nombre considérable de notices et de documents qui se rapportent à des hommes célebres et qu'on ne peut s’abstenir de consulter pour une biographie nationale. Bulletin. — Bulletin de la Commission royale d'histoire. Bruxelles, 1854 et suiv., t. I-XVI ; (table) 2° série, t. I-XII ; 3° série, t. I et suiv.; in-8°. Sans former des biographies proprement dites, il y a dans ce recueil important des notices et des renseignements nombreux sur nos hommes célebres. Bulletin. — Bulletin de la Société historique et littéraire de Tournai, t. I et suiv. in-8°. | Quelques biographies et notices nécrologiques qui intéressent particulièrement Tournai, y sont insérées. Busscher (Ed. de). — Recherches sur les peintres gantois des XIV®e et XVme siècles Gand, 1859; in-80. Monographie, étayée de documents historiques, qui éclaireissent surtout l'his- toire de l'emploi de la peinture à Fhuile. Capitaine (U.). — Nécrologe liégeois. Liége, 1851 à 1857 et suiv.; 6 vol. Chaque année ne voit point disparaitre de grands génies , d'illustres guerriers, cependant il meurt tous les ans un cerlain nombre d'hommes utiles relativement à er ( 615 ) distingues , dont le souvenir mérite d’être eonserve dans la localite où ils ont en leur cercle d'activité. C’est ce que M. Capitaine à compris pour Liége. Il y a dans le Necrologe liégeois bon nombre d’excellentes notices dignes de figurer dans une biographie nationale. Nous signalerons entre autres celle de l’évêque Van Bommel. Caron (N.). — Biographie des Contemporains belges. Bruxelles, 1847; in-8°. On y trouve des notices sur le comte Félix de Mérode, Gendebien, Van Meenen, — C’est une espece de satire. Chabannes (3.). — Album des Belges célebres; Bruxelles, 1843 à 1850; 2 vol. in-4°, orné de beaux portraits. Le texte est quelquefois sujet à caution. Chalmot (3.-4. de). — Biographisch Woordenboek der Nederlanders. Amsterdam. 1800; 8 vol. in-8°. Collin. — Notices biographiques sur les personnages illustres des Pays- Bas; Bruxelles, 1827 ; in-8°. Collot d'Escury (H.). — Hollands roem in kunsten en wetenschappen; ’s Gravenhage, 1823-1840 ; deel I-VI; in-8°. Ouvrage d’un grand mérite ; les Belges proprement dits ne sont point oubliés dans les savants aperçus que l’auteur y a rédigés sur la civilisation des Pays-Bas. Covmans (ainé). — Notices biographiques. Gand, 1856; in-18. Courtin (M.). — Encyclopédie moderne, ou Dictionnaire abrégé des hom- mes et des choses , des sciences et des arts. Bruxelles, 1827-1830 ; 25 vol.; pl. On trouvera dans ce vaste recueil un dictionnaire biographique assez complet , mais où les rares articles consacrés à des Belges sont en général écrits à un point de vue peu national. Cristyn (3.-B.). — Les tombeaux des hommes illustres qui ont paru au conseil privé du Roi Catholique des Pays-Bas. Liége, 1675 ,in-12; Amster- dan, 1674; in-18. Nomenclature utile pour les dates, Delvenne (N.). — Biographie du royaume des Pays-Bas, ancienne et mo- derne. Liége, 1828; 2 vol. in-8°. Ouvrage incomplet, mais assez bien fait. Pelvaux de Fouron (.). — Dictionnaire biographique de la province de Liége, avec des chronologies des princes, etc. Liége, 1845; in-8°. Descamps (J.-B.). — Vie des peintres flamands, allemands et hollandais. Paris, 1753; 4 vol. in-8°, etc, (614) Dictionnaire. — Dictionnaire universel et classique d'histoire et de géo- graphie. Bruxelles, 1855-1854; 4 vol. in-8. Dans ce dictionnaire, dont F. Parent fut l’éditeur, on a fait une large part aux célébrités belges , qui y sont traitées avec soin, exactitude et impartialité. Dictionnaire. — Nouveau dictionnaire de la conversation, ou Répertoire universel, etc. Bruxelles, 1845; 25 vol. in-8°. Parmi les articles biographiques, la Belgique en a obtenu bien peu dans ce vaste recueil. Dictionnaire. — Dictionnaire historique, ou Histoire abrégée de tous les hommes, nés dans les dix-sept provinces belgiques qui se sont fait un nom par le génie, les talents, les vertus, les erreurs, etc., depuis la naissance de Jésus-Christ jusqu’à nos jours. Anvers, 1786; 2 vol. in-8°. Dufau (3.-B.). Hagiographie belge. Bruxelles, 1846; 1° vol. Ce volume, le seul qui ait paru, donne la vie des premiers apôtres de la Bel- gique et de quelques autres saints du pays au moyen âge. Notices exactes quoique sous la forme légendaire. Eendragt (Be). — Veertiendaegsch Tydschrifs voor letteren, kunsten en wetenschappen. Gent, 1846-1859; in-4°. Recueil littéraire flamand où l’on trouvera de nombreux documents biogra- phiques sur des hommes de lettres, des voyageurs , des peintres, etc., appartenant aux provinces flamandes. Eloy (N.). — Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Mons, 1778; 4 vol. in-4°. Une grande partie de ce dictionnaire encore estimé de nos jours, est consacrée à la biographie. Comme Belge (il était né à Mons), Éloy n’a pas oublié ses compa- triotes dans ce recueil. Fastes. — Fastes militaires belges (les). Bruxelles, 1835-1856; 4 vol. in-8’. C’est une des premières publications nationales , éditées en Belgique après 1850, sur une assez grande échelle; on y trouvera sur les hommes qui se sont distin- gués dans la carriere militaire, chez nous, d’intéressants details historiques. Fétis (Fr.) — Bibliographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique. Bruxelles , 1858-1844; 8 vol. in-8°. Hd. 2m édition, entièrement refondue et augmentée de plus de la moitié, Paris, 1860; t. I. Ouvrage capital dont aucune autre publication n’a jusqu'ici égalé l'importance. — ai ( 615 Fétis (Ed.). — Les musiciens belges. Bruxelles, 1847 ; 2 vol. in-18. M. Ed. Fétis a développé avec beaucoup de science dans cette monographie les notices biographiques consacrées, dans le grand Dictionnaire de son père , aux musiciens d’origine belge. Flamme (3.-B.). — Biographie des hommes célèbres de la Belgique. Tour- nai, 1848; in-8°. D'une médiocre importance. Foppens (3.-F.). — Bibliotheca Belgica, seu virorum in Belgio vita scrip- tisque illustrium catalogus, librorum nomenclatura. Bruxelles, 1739; 2 vol. in-4° portraits. _ Ouvrage estimé. Gaillard (Victor). — De l'influence exercée par la Belgique sur les Pro- vinces-Unies, sous le rapport politique et intellectuel , depuis l’abdication de Charles V jusqu’à la paix de Munster (1555-1648). Bruxelles, 1855 ; in-80. Cet excellent mémoire , couronné par l’Académie royale, en 1854, contient un grand nombre de notices sur les Belges qui émigrerent , dans les Provinces-Unies, après les troubles religieux. Gaillard (Victor). — Épitaphes des Neerlandais (Belges et Hollandais) enterrés à Rome, publiées avec introduction et notes biographiques. Gand 1853; in-8°. Les notices dont ces épitaphes sont précédées, sont très-courtes, mais inté- . ressantes. Gélis (3.-B.) — Précis de biographie belge, ou Exposé des principaux traits de la vie des Belges qui se sont illustrés dans les lettres, les sciences, etc. la Ferté-sous-Jouarre. 1853; in-8. ! Quoiqu’écrite par un étranger, cette biographie n’est pas sans mérite, Ghesquierus (J3.). — Acta Sanctorum Belgii selecta. 1783; in-4°, 6 vol. Pour la vie des saints belges les plus illustres, cette vaste et savante compila- tion est inestimable, Goethals (F.-V.). — Lectures relatives à l’histoire des sciences, des arts, des lettres, des mœurs et de la politique en Belgique. Bruxelles, 1837-1838 ; 4 vol. in-8°; portraits. A la fin de ces notices littéraires , une table, jointe au 4me vol, , range tous les hommes cités dans un ordre chronologique. L'auteur, ce qui est regrettable, n'indique point ses sources, (616) Goethals (F.-W.). — Histoire des lettres, des sciences et des arts en Belgique et dans les pays limitrophes. Bruxelles, 1840-1844; 4 vol. in-8° ; portraits. Dans chaque volume , les notices sont classées dans l’ordre alphabétique; il n’y a pas de table générale. L'auteur, comme dans l'ouvrage précédent , a négligé de ciler ses sources. | Henne (A.) et Wauters(4.). — Histoire de la ville de Bruxelles. Bruxelles, 1845; 3 vol. in-8° Le 3me vol., in fine, contient, dans l'ordre alphabétique, une liste biographique sommaire des Bruxellois célèbres. é Histoire. — Histoire littéraire de la France, ouvrage commencé par des religieux bénédictins , etc., I-XXIII (fin du XIII®: siècle). Paris, in-4°. Cette importante collection où, grâce à de bonnes tables, les recherches sont faciles, contient de précieux renseignements sur les écrivains romans nés en Belgique. Hoffmann (L.-3.) — Essai d’une liste chronologique des ouvrages et dis- sertations concernant l’histoire de l’imprimerie en Belgique et en Hol- lande. Bruxelles, 1859; in-8. (Extrait des Bulietins du bibliophile belge.) Hoffmann-Peerlkamp (P.).—Liber de vita, doctrina et facultate Neder- landorum qui carmina latina composuerunt; ed. altera, emendata et aucta. Harlemi, 1828; in-8°. Cette excellente monographie contient la biographie sommaire et l'indication des poésies latines composées par des auteurs nés dans les anciens Pays-Bas, de l'an 850 à 1800. Travail consciencieux et méthodiquement fait , avec une bonne table des poëtes nommés. | Boubraken (4.). — De Groote Schouburgh der nederlandsche kunstschil- ss ders en schilderessen. Amsterdam , 1718-1721 ; 5 vol. in-8e. Ouvrage capital pour l’histoire des peintres. ; A Hloverlant. — Essai chronologique pour servir à l’histoire de Tournai; 118 vol. in-18. Dans cette informe et bizarre publication , due à un original, comme on le sait, on rencontre quelques biographies, surtout de personnes dela fin du XV{TIme siècle. Hulthem (Ch. Van). — Bibliotheca Hulthemiana. Gand 1859; 6 vol.in-8e, Au vol. IV, p. 27-39, on trouvera une nomenclature importante d'ouvrages sur la biographie. Iconographie. — Iconographie montoise. Biographies des Montois célè- bres ; in-4°, avec portraits lithographiés. Intéressant surtout à cause des portraits, Les notices sont exactes, (617) Joly (W.) — Biographie des hommes de la révolution (belge) , humble allo- cution à nos hommes d’État. Bruxelles; 1832; in-8e. Quatre livraisons de eet ouvrage ont paru sous le pseudonyme de V. Lovy. Immerzeel (3.). — De Levens en Werken der hollandsche en vlaamsche kunstschilders, beeldhouwers, graveurs en bouwmeesters. Amsterdam, 1842-1843; 5 deelen in-8. Publication extrêmement bien faite et Rene depuis par Kramm. — Por- traits dans le texte, , Journal. — Journal historique et littéraire. Liége, 1834 à 1859 et suiv.; t I à XXVI; in-8e. M. Kérsten est, comme critique et comme écrivain, un des hommes les plus res- pectables de notre littérature. Les notices biographiques et articles nécrologiques qu’il a insérées dans ce recueil , méritent toute confiance. HKampen (N. Van). — Geschiedenis der Wetenschappen en Letteren in Nederland.’s Hage, 1812; 3 deelen in-8°. HKervyn de Volkaersheke. — Églises (les) de Gand. 1858; 2 vol. in-8°, avec pl. Ouvrage plein de données biographiques curieuses sur les artistes qui ont con- tribué à enrichir nos églises. Kiauwaert. — Klauwaert Lee Brussel, 1855, 1856 et 1857; 5 années, in-fol. Renferment quelques notices biographiques littéraires flamandes faites avec un peu trop d’emphase. Hluyskens (%ipp.). — Des hommes célèbres dans les sciences et les arts, et des médailles qui consacrent leur souvenir. Gand, 1859; 2 vol. in-8°; pl. Les notices consacrées à des illustrations belges y sont très-nombreuses. Cette catégorie: y est traitée avec beaucoup de soin. Ces notices renferment souvent des détails nouveaux. . HKobus (&) en Rivecourt (Sonkh. WW. de). — Beknopt biographisch Handwoordenboek van Nederland. Zutphen., 1846 et suiv. (2 vol. in-18.) Quoique consacré aux Hollandais principalement, cet ouvrage, rédigé conscien- cieusement, mais d’une manière assez laconique, contient ts de biogra- phies de FE celebres. Kok (Sae.). — Vaderlandsch woordenboek. Amsterdam, 1785 à 1795; 34 vol. in-8°. Dictionnaire biographique.estimé, consacré spécialement aux grands hommes des Provinces-Unies, mais où l’on {rouvera une foule de noms appartenant à la Belgique. j 8 ramum (€.) — De Levens en Werken der holiandsche en vlaamsche kunst- schilders , beeldhouwers, graveurs en bouwmeesters. Amsterdam 1857- 1859 ; deel 1,9,3. Suite et complément de l'ouvrage de M. Immerzeel, dans l’ordre alphabétique , avec indication des sources. Hunst en Letterblad. — Kunst en Letterblad. Gent, 1840-1846; in-40. Contient un grand nombre de biographies et d'articles nécrologiques sur des peintres, des hommes de lettres, des voyageurs, etc., appartenant aux provinces flamandes. Exactitude et vérité. | Fecouvet (F.) -- Hannonia poelica, ou les Poëtes latins du Hainaut. Tour- nai, 1859 ; in-80. Excellent mémoire couronné par la Société des sciences de Mons; il renferme la notice de 38 poëtes hennuyers. — Bonnes appréciations littéraires. 5e Mayeur. — La Gloire belgique. Louvain, 1850; 2 vol. in-8°. Poëme national médiocre, mais enrichi d’un grand nombre de notes curieuses, surtout pour la biographie des Belges illustres. Eivre d'or (le). — Le Livre d’or de l’ordre de Léopold et de la croix de Fer, Bruxelles, 1858; 2 vol. in-8; pl. Bien que, dans cet ouvrage assez consciencieusement fait , on se plaise surtout à glorifier les vivants, ceux-ci passent si vite à l’état de morts plus ou moins incon-- nus, qu’on peut consulter le Livre d’or sans trop de danger pour les notions bio- graphiques. Maiïstre d’'Anstaing (J. le). — Recherches sur l’histoire et l’architec- ture de l’église cathédrale de Notre-Dame de Tournai. Tournai, 1842-1845; 2 vol. in-8°. Le 2me volume, où se rencontrent des inexactitudes assez fréquentes et des dou- bles emplois, par exemple , aux articles & Pratis et Des Pres, Masuris et Des Ma- sures, est consacré à la partie biographique des évêques, chanoines, ete., de Tournai. Ce recueil a une importance locale véritable. Mander (&K. Wan). — Levens der Doorluchtige Nederlansche en eenige Hoogduitsche Schilders. Amsterdam , 1764; 2 vol. Ouvrage qu’on ne peut se dispenser de consulter pour la vie des artistes flamands. Mathieu (Ad.). — Biographie montoise. Mons, 1848; in-8°. Cette biographie locale, dont les éléments ont été réunis avee beaucoup de sain, ( 619) contient la vie d'hommes célebres ou distingués nés principalement à Mons et dans les lieux environnants. Mémoires. — Mémoires des membres, mémoires couronnés et dés savants étrangers (format in-4° et format in-8°), publiés par l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. Bruxelles, 1816 et suiv. Ces recueils renferment des notices sur des célébrités des Pays-Bas. (Voyez la Table des mémoires, etc., publ. à la fin de l'Annuaire de 1858 , art. Biographie.) Mémoires. — Mémoires de la Société des sciences et des lettres du Hainaut ; th a XIV; in-8°, Ces mémoires, où il y a largement à puiser pour l’histoire du pays, contiennent quelques biographies belges tres-bien faites ; nous citerons celles de Jean de Beck, Badius, Roland de Lattre, Buisseret, Malpert , Senault, Bosquier , G. de Bres, Hoschius , Jomart, Ph. de Mons , Mouton , Lucidel , Fahnenberg , Faciaux, le géné- ral Clump. Messager. — Messager des sciences Dorian de Belgique, années 1823- 1860; Gand, 34 vol. in-8° (avec a table jusqu’à 1853). Outre les notices bibliographiques proprement dites, on y trouve encore bon nombre de courtes notices nécrologiques, indiquées à la Table générale, p. 60-61-99 et 123, dont quelques-unes avec des portraits (et années 1854-1858, v. à la table de chaque volume , article Nécrologie). Michiels (Alfred). — Histoire de la peinture flamande et hollandaise, Bruxelles, 1845-1848 ; 4 vol. in-8. On ne peut refuser à M. Michiels un talent d'appréciation très-original , un style qui entraine , des vues neuves ; mais il a des idées préconcues qui ont besoin de contrôle, et il est parfois fort léger dans ses assertions. Michiels (Alfred). — Les peintres brugeois. Bruxelles, 1846 ; in-8o. Moulaert (le P.). — Het Groot Beggynhof van Gent. 1850; in-8e, - Avec une biographie des principales béguines de Gand. Ouvrage où l’auteur a poussé l'exactitude et la conscience des détails jusqu’à la minutie, Namur (3.-P) — Histoire et bibliographie analytique de l’Académie royale, etc., de Belgique. Bruxelles; in-8°; 1'° édit., 1858 ; 2me édit., 1852. Ce livre, fait avec soin, contient la nomenclature des publications de l’Académie, placées dans un ordre méthodique. On y signale un assez bon nombre de hio- graphies. Nederduitseh. — Nederduitsch Letterkundig Jaerboekje. Gent, 1834 tot 1859 en volg.; 26 boekd. in-12. | Cet almanach poétique flamand qui, depuis 25 ans, parait sous la direction in- ( 620 ) telligente de M. Rens, contient quelques courtes mais bonnes notices néerolagiques et biographiques sur des poîtes et des prosateurs flamands distingués. Niceron (3.-P.). — Mémoire pour servir à l’histoire des hommes illustres dans la république des lettres. Paris, 1729-1745, t. 43 (44 vol.) in-8°. Normand (l’abhé). — Galerie des Saints et des Saintes qui protégent la Belgique et les Pays-Bas. Bruxelles , 1841 ; gr. in-8”. Notices sans valeur historique. Notiee. — Notice biographique des hommes illustres dont les statues, bustes et médaillons décorent la Grand’Place de Bruges. Bruges, 1850; in-8° avec lith. Cette nomenclature biographique est peu détaillée ; toutefois elle constitue le noyau d’une biographie brugeoise. Nouvelle biographie. — Nouvelle biographie des Contemporains. Mons, 1829. On y trouve entre autres une bonne notice sur Raepsaet. œettinger (E.-N£.). — Bibliographie biographique universelle. Dictionnaire des ouvrages relatifs à l’histoire. …… des personnages célèbres de tous les temps et de toutes les nations, Bruxelles, 1854; 2 vol. in-8°, Ouvrage d’une grande érudition et où il y à au moïns 800 noms de Belges remarquables. Paquot (3.-B.). — Mémoire pour servir à l’histoire littéraire des dix-sept provinces des Pays-Bas, de la principauté de Liége et de quelques contrées voisines. Louvain , 1765; 18 vol. in-18. Paquot, dans l’énumération des productions littéraires de chaque auteur qu'il cite, est exact et toujours bien renseigné. Sa critique est faible, encore ne perce- t-elle qu'à de rares intervalles. Les notices biographiques sont courtes et sèches en général. Malgré ces défauts , Paquot est le plus précieux auteur que nous ayons sur ce sujet. On peut se fier à ses allégations. Il a , en outre, le mérite de citer les sources où il puise ses renseignements. Les notices , insérées sans ordre ; sont faciles à trouver au moyen de la table alphabetique qui termine le 18me volume. Pauwels-Devis (4.). — Dictionnaire biographique des Belges, hommes et femmes, morts et vivants, qui se sont fait remarquer par leurs écrits, leurs actions, etc, Bruxelles, 1844 ; in-8e, Pinchart (Alex.). — Recherches sur la vie et les travaux des graveurs de médailles, de sceaux et des monnaies des Pays-Bas, d'après des docu- ments inédits. Bruxelles ; 1858, in-8°; t. I. Dans ce premier volume, plein de curieuses recherches, M. Pinehart énumère ( 621 ) les noms des 120 artistes, dont quelques-uns de grand mérite et qui étaient en même temps orfévres et ciseleurs. Cette monographie est des plus intéressantes pour l’histoire des arts , aux Pays-Bas. Piron. — Alsgemeene levensbeschryving der mannen en vrouwen van Belgie, welke zich door hunne dapperheiïd, vernuft, geest, wetenschappen, kunst, deugden, dwalingen of misdaden eenen naam verworven hebben. Vilvoorden, 1859 ; in-4° à deux colonnes. Cet ouvrage , qui est en voie de publication, en est à la lettre G; il ne donne guère qu’un choix de biographies, en général, très-sommaires , et plus particulie- rement de personnages morts récemment. Les notices sont exactes ; point d’indi- cation de sources. Plutarque. — Plutarque belge (le). Bruxelles, 1840; in-8o. Biographie choisie de nos plus grands hommes; recueil assez bien fait et d’une lecture agréable. Revue. — Revue nationale de Belgique. Bruxelles, 1859-1847, t.I, 17; in-8e. Il y a dans cet estimable recueil quelques bonnes études biographiques sur des Belges célèbres, entre autres sur Vésale, Busbecq, etc., etc. | Revue, — Revue de Bruxelles. Bruxelles, 1857-41; in-18. Revue. — Revue trimestrielle. Bruxelles, 1843-1859; in-18. On y trouvera quelques études sur des hommes politiques et des littérateurs de la Belgique. Revue. — Revue belge, publiée par l’Association nationale pour l’éman- cipation et le développement de la littérature en Belgique. Liége, 1833- 1840; in-8°, Ce recueil périodique , fondé et rédigé par tout ce qu'il y avait, à cette époque, en Belgique, de cœurs réellement dévoués aux intérêts de notre nationalité litté- raire , contient plusieurs notices biographiques très-consciencieuses. Hoger (Paul). — Biographie générale des Belges morts ou vivants, hommes politiques, membres des assemblées délibérantes, ecclésiastiques, militaires, savants, artistes et gens de lettres. Bruxelles, 1849; in-8c; fig. Cette biographie, généralement assez exacte, est surtout intéressante pour les personnages de quelque réputation qui vivaient en 1849. Toutefois elle est très- incomplète pour certaines catégories, tandis que, d'autre part, nous y voyons figurer des hommes qui n’ont pour toute notoriété qu’un titre nobiliaire, un diplôme d’avocat ou l'exercice d’une industrie quelconque, Housselle (Mipp.). — Bibliographie montoise, Annales de l'imprimerie à Mons, depuis 1580 jusqu’à nos jours, Mons, 1858; in-8e, (62) Ryckii (Justi). — Parcae id est Epitaphiorum a se cannes libri tres. Gandavi, 1624; in-18. Ces épitaphes, composées en vers latins, célèbrent presque toutes les qualités et les vertus de Belges distingués de l’époque. Au milieu de la phraséologie rimée qu'on y rencontre, il y a çà et là d’intéressants renseignements à recueillir. Saint-Genois (&°* J. de). — Les voyageurs belges du XIII" au XIXme siècle. Bruxelles, 1846-47; 2 vol. fig. Sanderus (A.).— 1. De scriptoribus Flandriae, libri IIL. Ant., 1624; in-4o. Ouvrage estime. 2. Id. de Brugensibus eruditionis fama claris, libri IL. Antv., 1624; in-4°. 3. Id. de Gandavensibus eruditionis fama claris, libri HI. Antv., 1624; in-40. Les écrits de Sanderus resteront toujours la source première à consulter, quand il s’agit de la Flandre et du Brabant. Seènes. — Scènes de la vie des peintres de l’école flamande et hollan- daise , publiées par Madou. Bruxelles, 1842; in-fol. Ces notices, au nombre de 20 , contiennent les biographies des principaux pein- tres de ces écoles, écrites, avec soin et avec une recherche toute littéraire, par MM. Polain, Alvin, De Decker, Bogaerts, Lesbroussart, le barvn de Reiïffen- berg , de Saint-Genois, etc. Serrure (C. père). — Vaderlandsch museum, vol. I-III. Gent, 1857- 1860 ; in-8°. On y trouve des renseignements biographiques très-exacts sur des poëtes fla- mands peu connus. Serrure (C.). — Geschiedenis der Nederlandsche en Fransche Letterkunde, in het graefschap van Vlaenderen. Gent, 1855; in-8. Très-bon mémoire renfermant une foule d'excellents renseignements sur les littérateurs de la Flandre ancienne. Siret (4d.). — Dictionnaire historique des peintres de toutes les écoles. Bruxelles, in-4°; 1848. Sous forme de tableaux synoptiques ; les artistes belges y sont très au complet. Steyaert (3.-3.). — Volledige beschryving van Gent. Gent, 1857; in-18; avec pl. Le chap. IX, p.551-562 contient une notice biographique sommaire des Gan- tois célebres. Sweerts (F.). — Athenae Belgicae seu nomenclator inferioris Germaniae _( 625 ) scriptorum qui disciplinas philologicas, philosophicas, etc. illustrarunt. Antv., 1628; in-fol. Ouvrage estimé. Sweré (F. de). — Necrologium (Belgicum) aliquot utriusque sexus romano catholicorum. Insul., 1739 ; in-8°. | Taelverbond — Het Taclverbond. Letterkundig Tydschrift. Antwerpen, 1845-1854 ; in-8°. Recueil contenant diverses notices biographiques faites avec beaucoup de soin. Trésor — Trésor national. Recueil historique, littéraire, scientifique, etc. Bruxelles , 1842-44; 8 vol. in-8c. Contient des notices détaillées sur Louis de Blois, Godefroy de Bouillon, Bau- douin de Constantinople , Gabriel Mudée, Jean Ier, J. Hubin. Vaderland. — Het Vaderland Tydschrift voor letterkunde en geschie- denis. Antwerpen, 1844-46 ; 5 vol. in-8. Notices sur Andre Vésale et Carausius. Valerius Andreas. — Bibliotheca Belgica in qua Belgicæ sive Germa- niae inferioris provinciae viri item in Belgio vita scriptisque clari et librorum nomenclatura, etc. Lovanii, 1623 ; in-18. L’énumération des productions littéraires, assez exactement faite, du reste, est à peu près la seule chose qu’il faille chercher dans ce livre pour les noms qu’on veut traiter. Les indications biographiques sont presque nulles. Dans le bizarre plan de l’auteur, il faut toujours chercher les écrivains qu’il cite par leur prénom ; — enfin , à la fin du volume , les auteurs sont encore subdivisés en catégories locales, selon les lieux où ils sont nés. Valerius Andreas. — Fasti academici studii generalis Lovaniensis. Lo- vanii, 1655; in-4"; id. ed. de 1650. Ouvrage qui brille autant par l’érudition que par la grande multitude de ren- seignements littéraires qu’on y rencontre. Vander 4a. — Biographisch woordenboek. Haarlem, 1849 et suiv.; in-4° à 2 colonnes. Cette biographie comprend tous les hommes célèbres nés dans les deux parties des Pays-Bas (Belgique et Hollande). Elle est faite avec beaucoup de soin et sert de suite à Album der schoone kunsten. (Litt. À à G et suiv.) Vanderhaeghen (Ferd.). — Bibliographie gantoise. Recherches sur la vie et les travaux des imprimeurs de Gand, 1'° et 2° parties, XVwe-X VIII": siècles ; 1858-1859. ÿ Les notices consacrées aux imprimeurs de Gand sont rédigées avec beaucoup de soin et un excellent esprit de critique, (624 ) Yaudermaclen (Ph.) — Dictionnaire des hommes de lettres, des savants et des artistes de la Belgique, présentant l’énumération de leurs princi- paux ouvrages. Bruxelles, 1837; in-8°. Beaucoup de littérateurs belges , décédés aujourd’hui, ont eté, quant à lénume- ration dé leurs écrits, etce., traites avec exactitude dans ce dictionnaire. Vander Meersch (Pol.) — Recherches sur la vie et les travaux des im- primeurs belges et néerlandais établis à l'étranger. Gand, 1856; 1. I, in-80. 9 ; En restituant aux imprimeurs belges à l'étranger le rôle qui leur «appartient, M. Vandermeersch a consacré une page nouvelle à l’histoire intellectuelle de notre pays. — Ces notices sont de véritables dissertations. Van Hulist (Fél.). — Vie de quelques Belges. Liége, 1841; in-8e. Bonnes biographies de Ph. de Commines , Carlier, Fassin , Ransonnet , Lam- brechts, Jardon et Plasschaert. Van Vaernewyck (M.). — De Hisiorie van Belgis, of Kronyk der neder- lansche oudheyd. Gend, 1829; 2 vol. in-8°; portrait. On a joint au 2m€ volume un A/phabetisch Naemlyst der Gentenaren. C'est un dictionnaire biographique des hommes les plus distingués nés à Gand , formant 4 à 156 pp. Plusieurs de ces notices sont sujeltes à caution. Elles ont été rédigées par un homme instruit et original, le sieur Schellinc , qui ne se génait point pour in- venter, lorsqu'il ne trouvait pas de documents à sa disposition. Toutefois , malgré ce vice capital, cette biographie locale n’est pas sans mérite. Van Voorst. — On trouvera une nomenclature très-complète de dic- tionnaires biographiques, de biographies locales et professionnelles dans le catalogue de la magnifique bibliothèque de MM. Van Voorst père et fils, vendue à Amsterdam en janvier 1860. V. Catal. I partie, p. 9-18, n° 117-289. Vapereau (G.). — Dictionnaire universel des contemporains. Paris, 1858; in-8°. Ç Nos contemporains serout les ancêtres de nos enfants, et plus vite qu'on ne le pense. Bon nombre de Belges figurent dans ce dictionnaire. La plupart de ces articles sont exacts. Vernulæus (N.). — Academia Lovaniensis; ejus origo, incrementum, forma, etc. Lovanii, P. Sassenius, 1667; in-4e. Cette histoire de l’université de Louvain, qui a servi de base aux differents mé- moires publiés par le baron de Reiffenberg sur cet établissement , renferme quel- ques chapitres consacrés aux hommes qui l’ont illustré. Ces biographies sont LEA ( 625 ) classées comme suit : théologiens, jurisconsultes , médecins, mathématiciens, phi- losophes, philologues , religieux. Quoique sommaires, elles renferment des ren- seignements intéressants. Vigneron (wipp.) — La Belgique militaire, Hiéraliil du Roi, des généraux qui ont été revêtus de druide dans l’armée, depuis 1850, et des officiers supérieurs qui ont contribué à fonder l'indépendance nationale. Bruxelles, 1855 ; 2 vol. in-8° ; port. La plupart des officiers généraux qui figurent dans cette monographie (ils sont au nombre de 84) sont décédés aujourd’hui. Quelques-uns, comme Tilly, Clair- fayt, Jordan, appartiennent aux siècles passés. Les biographies sont faites avec - exactitude et respirent un sentiment des plus patriotiques. Viaemsche. — De Vlaemsche Rederyker. Tydschrift ter bevordering van tael- dicht en letterkunde. Antwerpen, 1844-1854; 22 vol. in-8°, Quelques rares notices biographiques littéraires y sont insérées. Viaemsche..— De Vlaemsche School. Antwerpen, jaren 1-6 en vol- gende; in-4°; gravures. On y trouve différentes biographies. Weyerman (3.-C.). — Levens Beschryvingen der nederlandsche konst- schilders. S'Gravenhage, 1729-1769; 4 vol. in-4°; avec portraits. Ouvrage capital pour la vie des peintres. Wiilems (3.-F.). — Verhandeling over de nederduytsche tael- en letter-* kunde, opzigtelyk de zuydelyke provintien der Nederlanden. Antwerpen, 1819-1824; 2 vol. in-8°. | Dans cet intéressant apercu de l’origine et du progres de la littérature et de la langue flamande, Willems consacre aux auteurs qui ont écrit dans cette langue de nombreuse notices fort intéressantes pour l’époque où elles ont été écrites. Wind (M S. de). — Bibliotheek der nederlandsche geschiedschr JNErS ; 1° deel (anno 970-1648). Middelburg , 1855 ; in-8°. C’est un ouvrage estimé qui donne la nomenclature exacte des ouvrages écrits par des auteurs belges ou hollandais sur l’histoire des Pays-Bas. Chaque nom est suivi d’une courte notice biographique. Witsen Geysbeek (P.). — Biograpisch, anthologisch en critischwoor- denboek der nederduitsche dichters. Amsterdam; 6 vol. in-8°. Ouvrage justement estimé. ( 026 ) Le projet de règlement, annexé au présent rapport, ayant été transmis au Gouvernement à été approuvé par lui et a fourni, après quelques amendements, la matière d'un arrêté royal dont voici la teneur : PUBLICATION D'UNE BIOGRAPHIE NATIONALE. LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR , Vu l'arrêté royal du 1* décembre 1845, portant que l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux- arts de Belgique sera chargée de la rédaction d’une Bio- graphie nationale et qu’elle soumettra à la sanction du . Gouvernement les mesures d'exécution de ce travail; Vu le projet adopté en conséquence par l’Académie, dans sa séance générale du 10 mai 1860; ARRÈÊTE : Arr. 1%. L'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts est chargée de la rédaction et de la publi- cation d’une Biographie nationale. Arr. 2. Elle institue à cet effet une commission de quinze membres qui sont élus, en nombre égal de cinq, par chacune des trois classes, au scrutin secret et à la majorité des suffrages. Tous les six ans, chaque classe sera appelée à réélire ou à remplacer les membres de la commission. La commission nomme dans son sein un président el un secrétaire. | ART. 5. La commission peut s'associer, pour le travail de rédaction , les autres membres de l’Académie. ( 627 ) Elle est autorisée aussi à y faire concourir des savants et des littérateurs du pays qui n'appartiennent pas à la Compagnie. Arr. 4. La commission dresse préalablement une liste alphabétique, aussi complète que possible, de tous les hommes remarquables , à quelque titre que ce soit, qui lui paraissent dignes de prendre place dans la Biographie nationale. Ne pourront être compris dans cette liste que des per- sonnages décédés depuis dix ans au moins. Arr. 5. Cette liste est imprimée et rendue PERIMRE par la voie du Moniteur. Arr. 6. La commission revoit et approuve la rédaction des notices, avant de les livrer à l'impression. Elle peut en limiter l'étendue d’après les convenances de la publication et selon l'importance relative des per- sonnages. Les révisions sont communiquées à l’auteur de la notice avant la publication. | | Chaque notice porte la signature de celui qui en-est l’auteur. ART. 7. La commission fait un rapport annuel au Mi- nistre sur l’état de ses travaux. Elle en donne aussi annuellement connaissance à l'assemblée générale de l'Académie. ART. 8. La Biographie nationale sera publiée dans le format in-oclavo, par volume de cinq cents pages au moins. Art. 9. Une indemnité par feuille d'impression, à fixer ultérieurement, sera accordée aux auteurs des notices bio- graphiques. Arr. 10. Les membres de la commission qui ne rési- dent pas à Bruxelles recevront une indemnité de déplace- 2° SÉRIE, TOXE IX. ; 45 PRE) ( 628 ) ment, chaque fois que la commission se réunira en de- hors des jours ordinaires de la séance académique. ART. 11. Une allocation spéciale sera mise à la dispo-: silion de l’Académie, afin de l'aider à pourvoir aux dé- penses qui résulteront de l’exécution du présent arrêté. Bruxelles, le 29 mai 1860, CH. Rocier. Deuxième question relative à la propriété des mémoires académiques. La commission spéciale (1), nommée par les trois classes pour faire un examen préalable de lout ce qui se rallache à ce point, a mis aux voix, après une longue discussion, dans la séance du 51 mars, les propositions suivantes : Les auteurs des mémoires insérés dans les recueils de l'Acu- démie ont-ils le droit de les faire réimprimer ? Quatre membres votent pour l'affirmative, quatre votent contre. Il est décidé que la question sera soumise à l'assemblée géné- rale des trois classes. A la demande de plusieurs membres, la proposition suivante est ensuile mise aux voix et résolue aflirmativement par six contre une : L'Académie a-t-elle le droit de faire imprimer tous les mé- ——— — oo mt (1) La commission était composée de MM. Gachard, président de l’Acadé- mie, Ad. Quetelet, secrétaire perpétuel, De Koninck et Stas, délégués de la classe des sciences, Leclercq et Arendt, délégués de la classe des lettres, Alvin et Ed. Fétis, délégués de la classe des beaux-arts. (629 ) moires qui ont été envoyés aux concours.ou qui lui ont élé pré- sentés, et sur lesquels il lui « été fait rapport? Avant de se séparer, les nrembres de la commission votent l'impression de la note lue, à l'ouverture de la séance, par M. L. Alvin, et décident que cette note sera distribuée aux mem- bres de la compagnie. Note communiquée par M. Alvin à la commission mixte nommee par les trois classes pour la question du droit des auteurs des mémoires. Nous sommes invilés à résoudre une question de règlement intérieur qui semble sujette à controverse, mais dont la solution n’a paru difhicile que parce qu'elle s’est produite à l’improviste, quand on n'était point préparé à la discuter. Il s'agit de déter- miner les droits respectifs de l’Académie et des auteurs sur les mémoires qui sont soumis au jugement de la compagnie. Délégué par la classe des beaux-arts, à raison de l'opinion que j'ai eu l'occasion d'exprimer verbalement, j'ai éprouvé le besoin de justifier mon sentiment, et aussi de m'éclairer moi-même, afin de me rapprocher, autant que mes facultés me le permet- tent, des intelligences d'élite auxquelles il a plu à mes honorés confrères de m'associer pour ce travail. J'ai donc étudié la question d’abord en elle-même, abstraction faite des solutions que j'en pouvais rencontrer dans la législation académique, ne m'occupant que des principes et en cherchant la formule absolue. Cette formule logiquement dégagée, j'ai analysé le règlement de notre compagnie, afin de voir s’il était d'accord avec les prin- cipes que le raisonnement m'indiquait. | Le résultat de ce travail a été de fortifier ma conviction anté- rieure et de me confirmer dans l'opinion, que le règlement de ( 650 ) l'Académie consacre, sur la matière qui nous occupe, un système de dispositions en tout point conformes avec les déduetions de la théorie; que l'interprétation de ces dispositions ne pent parai- tre obscure que si on les isole les unes des autres, en détournant de leur signification les termes dont s’est servi le législateur. C'est l'objet de la présente note. Elle se divise en deux parties. Dans la première, je me suis demandé : Quelle est l'étendue du droit que doivent se réserver les corps savants sur la propriété des ouvrages soumis à leur appréciation ? Dans la seconde partie, je crois avoir démontré que les disposi- tions de notre règlement sont en parfait accord avec la solution que j'ai obtenue de la première question. Arrivé à ce résultat, je me suis cru en droit de conclure, sans faire intervenir, à l'appui de mes conclusions, +: des usages consacrés dans les autres académies. le Quelle est l'étendue du droit que doivent se réserver les corps sa- vants sur la propriété des ouvrages soumis à leur appréciation? Il'existe, pour l’auteur d’un écrit, un droit de propriété d'une nature spéciale, qui prend naissance dans le fait même de la composition de l'ouvrage. Ce droit, qui consiste principalement dans la faculté de reproduire un livre par des copies, soit au moyen de la presse, soit autrement, est ce qu'on appelle propriété litléraire. L'auteur peut aliéner cette propriété, en la cédant, en Lout ou en partie, pour un temps plus ou moins long, à titre onéreux ou gratuit, suivant ses convenances. Le plus souvent, c'est à un libraire, qui prend, dans ce cas, le nom d'éditeur, que l’auteur cède son droit. Dans le contrat qui intervient alors, l'éditeur s'engage à payer à l’auteur une somme que l'un et l’autre acceptent comme représentant la valeur de la chose cédée. D'une part, l'auteur s'assure la rému- sde | ( 651 ) néralion de son travail; d'autre part, l'éditeur prend ses sûre- tés, afin que les dépenses qu'il va faire, les peines qu'il va se donner pour publier l'ouvrage ne soient point perdues, et qu'il en retire un honnête bénéfice. L'auteur alors commettrait une action coupable s'il cherchait à exercer concurremment avec son éditeur le droit qu'il a vendu, et celui-ci pourrait lui intenter une action en dommages et in- térêts. Les tribunaux ne manqueraient pas de faire respecter le contrat par les parties. Les choses se passent-elles de même entre l’auteur d'un mé- moire académique et la compagnie savante qui a mis une ques- tion au concours? Il s'établit sans doute un quasi-contrat entre le concurrent et l’Académie. Ce contrat, d'une nature particulière, réside dans le programme publié d'avance, programme qui est censé accepté des-concurrents par le fait seul de l'envoi de leurs mémoires, et qui lie à son tour la compagnie. Celle-ci, stipulant, non point dans un intérêt mercantile, mais dans un intérêt scientifique et moral, doit agir autrement que l'éditeur, qui n'a à sauvegarder que l'intérêt matériel de son négoce. L'Académie et l'éditeur n'ont done point un rôle iden- tique ; le but étant différent, les moyens doivent l'être aussi. Nous venons de voir que le mobile de l'éditeur est le désir de réaliser le plus possible de bénéfices; nous connaissons les pré- eautions qu’il prend d'ordinaire, afin que ces bénéfices ne puissent Jui échapper, et bien souvent c'est au détriment des auteurs qu’il prend ses sûretés. Rappelons-nous la mission d'une académie. Nous déduirons facilement les moyens légitimes qu’elle doit employer pour la remplir. L'objet que toute académie se propose, c’est l'avancement des connaissances humaines et la diffusion des lumières, l’encoura- gement des leltres, des sciences et des arts; c’est donc aussi l’encouragement de ceux qui se livrent à ces utiles travaux. | L'Académie provoque la discussion des questions obscures et ( 632 ) controversées, afin d'en amener la solution; et, la solution trouvée, son devoir est de la porter, le plus promptement possi- ble, à la connaissance de la grande famille des savants. De plus, elle enregistre et donne unedate certaine aux découvertes qui lui sont communiquées. Elle assure ainsi la propriété des idées à leurs auteurs. On ne saurait concevoir un rôle plus noble, plus généreux, plus désintéressé. Aussi doit-on bien se garder, dans le choix des moyens, de faire déchoir l'Académie de cette magistrature élevée. Les moyens qu’elle emploie sont les suivants: Elle publie des recueils, formant des séries continues, dans lesquels viennent prendre place les travaux de ses membres, ainsi que ceux des savants étrangers qui ont répondu à son appel. Elle imprime et publie, pour répandre au loin, non pas pour vendre et réaliser des bénéfices. Elle n’a point à se couvrir deses dépenses; celles-ci sont couvertes, soit par une dotation de l'État, soit par des fondations, soit par de généreuses cotisations. Elle n’a donc point, comme l'éditeur, à se préoccuper du soin d'acquérir à bon marché et de vendre cher, ee qui est l'unique secret, comme le but unique, du commerce. ‘ Elle ouvre des concours et donne aux vainqueurs des palmes, des médailles et quelquefois même une somme d'argent. Mais ces prix ne sont point une rémunération du travail, un salaire, tel que celui que l'éditeur paye à un auteur, c'est la récompense d'un service rendu à la société, et l'Académie, en la décernant, ne croit point donner au vainqueur une valeur équivalente à celle du manuscrit que celui-ci lui a confié. Il n’y a point là de contrat de vente et d'achat. Mais pour qu'une académie soit assurée de parvenir à son but, pour qu'elle puisse user, sans obstacle, des moyens qui doivent l'aider à atteindre, il est de toute nécessité qu’elle impose aux auteurs certaines conditions, qui sont en réalité l'abandon d'une part de leur droit. Elle doit d'abord s'assurer la faculté d'imprimer dans ses pro- SR Dar ( 635 ) pres publications tout ouvrage qui aura été soumis à son appré- ciation. Il faut que l'auteur ne puisse y venir mettre obstacle. L'impression devant être conforme à la minute qui a été soumise au jugement de l'Académie, l’auteur doit renoncer à amender son ouvrage. La société savante est autorisée à se ré- server l'appréciation de la convenance de tel ou tel changement qu'il pourrait plaire à l’auteur d'opérer pendant l'impression. Elle peut, en consentant à des additions ou modifications, exiger qu'elles portent la date du jour où elles ont élé opérées. Autre- ment elle donnerait à ces additions la date du dépôt du mémoire, ce qui équivaudrait à l'attestation d’un fait faux, attestation qui, dans certains cas, pourrait avoir des conséquences graves. Si le changement est de nature à modifier d'une manière sensible une solution ou l'expression d’une opinion scientifique, il faut encore que l'Académie soit mise à même de l'apprécier, sans cela, elle pourrait paraître approuver et avoir couronné un mémoire contenant des doctrines qu'en réalité elle repousse et condamne; done : . Le mémoire imprimé doit être la reproduction identique du mémoire couronné ou seulement approuvé. 1] ne suffisait pas, pour garantir la responsabilité de la com- pagnie, de ces précautions qui assurent, dans ses recueils, une reproduction fidèle des mémoires; mais il fallait encore se tenir en garde contre les impressions qui peuvent se faire en dehors du cercle des publications académiques. Un auteur qui à échoué dans un concours peut reprendre son travail, le refaire entièrement, lui donner la perfection qui lui manquait lorsqu'il a été soumis aux juges; le rendre meil- leur que le mémoire du concurrent qui lui a été préféré. 11 peut ainsi en appeler au public du jugement de l'Académie. L’Aca- démie doit être armée contre un tel procédé. Elle le sera, si elle possède dans ses archives une pièce probante, ne pouvant en sortir, sous aucun prétexte. Cette pièce, c'est le manuscrit du mémoire, la copie même qui a été envoyée à la compagnie et que ( 634 ) les commissaires ont eue entre les mains pour motiver leurs con- clusions. Telles sont les concessions que l’Académie est en droit. de demander aux auteurs qui lui soumettent leur travail; elles se réduisent à trois : PPT i L L’abandon par l’auteur à l'Académie du droit d'imprimer son travail dans les recueils de la compagnie ; Il. L'engagement, de la part de l’auteur, de n’apporter à son travail aucune modification, sans l'agrément de l'Académie, et de donner, si celle-ci le juge utile, aux changements importants la date de l'époque à laquelle ils ont été opérés; HI. L'abandon, en toute propriété, à l'Académie de la copie du travail qui a été soumise à la compagnie pour obtenir son jugement. Aller plus loin, exiger davantage, ce serait non-seulement dé- passer le but, mais agir contrairement à l'esprit de l'institution. En dehors des restrictions qui viennent d'être indiquées, l’au- teur reste, et doit rester, absolument maître de son ouvrage. Il peut en faire autant d'éditions qu'il le juge convenable; il peut y apporter tous les changements qu'il eroit nécessaires, l'abréger, le développer, le compléter, lui donner une forme nouvelle. Le sentiment des convenances lui commande, sans doute, de prévenir le lecteur des modifications qu'il a apportées à son tra- vail, dans les éditions qu'il produit, en dehors de la publicité académique, mais aucune loi ne peut lui en imposer l'obligation : c'est une simple question de délicatesse. C’est la copie du mémoire et non pas le mémoire lui-même qui devient la propriété de l'Académie; et la compagnie ne peut, en dehors de ses publications officielles, faire une nouvelle édition d’un mémoire déjà inséré dans ses recueils. Supposons le contraire : que l'Académie se considère comme ayant acquis la propriété littéraire de l'œuvre qu'elle a couronnée, qu'elle insère dans son règlement une disposition consacrant ce principe : quelle pourrait en être la sanetion? L'anteur couronné. - J'ovÉ (635 ) ne tenant aucun comple de l’article du règlement, fait, sans l'agrément de la compagnie, une nouvelle édition de son mé- moire ; quel expédient la compagnie pourra-t-elle employer pour réprimer cet abus? Un procès? Je ne vois pas d'autre moyen. D'abord on se demandera si une académie est une personne civile, apte à ester en justice. La question, quant à l'Académie de Bruxelles, est résolue négativement; mais admettons que celle-ci ait qualité pour poursuivre et qu’elle gagne son procès, quel en pourrait être le résultat? La suppression de l'édition considérée comme une contrefaçon, c'est-à-dire une restriction apportée à la diffusion du mémoire et des lumières qu'il peut renfermer. L'Académie se serait mise en flagrante contradiction avec le but qu'elle poursuit. Elle aurait restreint la publicité donnée à une découverte jugée, par elle-même, utile et pro- fitable au progrès des sciences, puisqu'elle lui a accordé un prix. Et pour quel intérêt se placerait-elle dans une situation aussi fausse et aussi peu digne? Je le cherche en vain; je n’en vois aucun. La suppression de l'édition condamnée ne profiterait à personne. Cette édition ne pouvait causer aucun dommage aux publications de l’Académie; sa disparition ne lui sera d'aucune utilité. En effet, les mémoires des corps savants forment collection, rassemblent dans un même volume des travaux de natures très- diverses; ils sont tirés à un nombre déterminé d'exemplaires qui ont, tous ou à peu près, leur destination et leur placement assurés. S'il en reste quelques-uns pour le commerce, après la distribution officielle, ce n’est pas la compagnie qui en tire pro- fit. Ce mode de publication présente d'ailleurs, quant au débit, plusieurs inconvénients qui le distinguent des exploitations in- dustrielles. Pour se procurer un mémoire, il faut acheter le volume entier dont le mémoire ne forme peut-être que le dixième partie. L'Académie ne peut vendre les tirés à part; elle ne peut même autoriser l'imprimeur à le faire. J} n'y a done aucune concurrence possible entre les publica- 48 nl N " k ue ET. (636 ) tions de l'Académie et les éditions qu’un auteur peut publier d'un mémoire couronné. Voici une autre conséquence du système restrictif que je combats. | Les questions que posent les académies sont, la plupart du temps, des questions spéciales; on ne demande guère ni un traité complet, ni une histoire générale, on pose des problèmes déterminés, on demande des monographies. Qu'un écrivain dont toute la vie a été consacrée à l'étude de l'histoire de la peinture, par exemple, soit en train d'achever un grand ouvrage sur cette matière, lorsqu'il voit, dans le programme de l'Académie, une question telle que celle-ci : Dire en quoi consiste l'invention des frères Van Eyck, quant à la peinture à l'huile. Un chapitre de son ouvrage général, non encore imprimé, traite cette ques- tion et en donne une solution admissible. Il détache ce fragment de son œuvre et l'envoie au concours; l'Académie lui décerne le prix. Dans le système opposé à celui que je défends, l’auteur, par le fait seul de sa participation au concours, abandonneraït la propriété de ce chapitre de son livre, et il lui faudrait l'agré- ment de la compagnie pour l'imprimer avee le reste. Un tel résultat serait absurde; il constituerait un tort sérieux pour l’auteur sans le moindre avantage pour la compagnie. Ji. Les dispositions du règlement de l'Académie royale de Belgi- que sont en parfait accord avec les principes qui viennent d'être exposés. Quelles sont, dans le règlement général de l'Académie royale de Belgique, les dispositions qui peuvent être appliquées aux di- vers cas dont je viens de m'occuper ? L'arrêté royal du 1° décembre 1845, portant réorganisation de la compagnie, dit, en son article 21 : « Les mémoires des trois classes sont publiés, dans un même F NT SE PE ( 637 ) volume , et ont chacun leur pagination. Il en est de même » pour la collection des mémoires couronnés et des mémoires des savants étrangers, dont l'impression aura été ordonnée par chaque classe. Un bulletin paraît mensuellement et contient le résumé des travaux des trois classes. » Cette disposition faisant partie des statuts organiques, déter- mine la forme des publications de l’Académie; elle est exclusive de toute autre; c'est ensemble et dans les mêmes volumes que les mémoires doivent être publiés : l'Académie n’est point libre de les imprimer séparément. On peut encore tirer, de cet articie 21, la conséquence, que l'Académie a le droit de publier les mémoires qui sont soumis à son jugement par leurs auteurs, sans être obligée de demander l'assentiment desdits auteurs : cet assentiment est préjugé. Le règlement de Marie-Thérèse et celui du roi Guillaume n'allaient pas aussi loin : ils exigeaient le consentement des au- teurs. Dans l’un et l'autre, on trouve un artiele 17 ainsi concu : « Tous les écrits que les académiciens apportent aux assemblées » sont laissés par eux aux mains du secrétaire, et l'Académie » ne peut les rendre publics par l'impression que du consente- » ment des auteurs. » Cette seule restriction au droit d'imprimer attribué à l'Aca- démie à disparu de la législation de 1845. Il en résulte que ce droit reste aujourd'hui tout entier à la compagnie, que personne ne peut s'opposer à l'impression d’un mémoire ou d'une notice, du moment qu'il y a eu décision de l'Académie. Le règlement général du 4° décembre 1845 consacre seize articles au mode de publication des productions académiques; c'est là que se rencontrent spécialement les dispositions relatives . aux droits respectifs des auteurs et de la compagnie, dans les articles 29, 23 et 24. | Examinons les successivement. « Art. 22. Le secrétaire peut confier aux auteurs les mémoires » qui ont été adoptés pour l'impression, afin qu'ils y fassent les ÿ 4 > ÿ ŸY 40 ( 658 ) » corrections nécessaires, mais il est tenu de les reproduire aux » commissaires , si ces mémoires ontété modifiés pour le fond, » ou si l'on y a fait des intercalations. » Quand de pareils changements ont été faits, il faut les » désigner d’une manière expresse ou donner aux mémoires la » date de l'époque à laquelle ils ont été modifiés. » Cet article consacre : d'une part, en faveur de l’auteur, la fa- eulté de corriger son travail avant l'impression; —en faveur des juges, le droit de contrôler.ces changements et d'exiger qu'ils soient désignés d'une manière expresse et, au besoin, de faire reporter la date du mémoire à l'époque des corrections. Tout cela est parfaitement légitime, parce que tout cela est nécessaire et que, sans ces précautions, la responsabilité de l'Académie pourrait être compromise, ainsi qu'on l'a exposé plus haut. « Art. 23. Dans aucun cas, on ne peut rendre aux auteurs » les manuscrits des mémoires qui ont concouru. Les change- ments qui peuvent être adoptés pour des mémoires de con- cours qu'on imprime sont placés, sous forme de notes ou d'additions, à la suite de ces mémoires. » La sévérité est plus grande à l'égard des mémoires de con- cours, et cela se conçoit. Le jugement de l'Académie constate la supériorité du travail du lauréat sur celui de tous ses coneur- rents; c'est donc l'ouvrage couronné lui-même, tel qu'il était au moment où les commissaires l'ont apprécié, qui doit être mis sous les veux du public. Et si des changements y sont apportés, ils doivent être produits d’une manière assez distincte pour qu'il ne puisse y avoir de méprise, volontaire ou involontaire. Les manuscrits des mémoires ne peuvent être rendus aux au- teurs. 11 y a ici une différence notable entre les mémoires de concours et les mémoires simplement adoptés pour l'impres- EASY CA sion. L'article 22 autorise le secrétaire à confier ces derniers à leurs auteurs; l’article 23 interdit cette faculté, en ce qui con- cerne les pièces de cancours. C'est qu'il se pourrait qu'un auteur + ( 659 ) substituät une nouvelle copie à la première ou qu'il fit à son manuscrit des modifications contre lesquelles on ne saurait prendre trop de précautions. « Art. 24. Les mémoires des membres dont l'impression n'a » pas été ordonnée peuvent être rendus aux auteurs, qui, dans » tous les cas, peuvent en faire prendre une copie à leurs frais. » Les manuscrits des mémoires de concours, de même que » des mémoires communiqués par des associés, des correspon- » dants ou des savants étrangers, sur lesquels il a été fait des » rapports, deviennent la propriété de l’Académie. » Cet article consacre encore la distinction signalée plus haut entre les mémoires des membres et les mémoires de concours. Les premiers peuvent être rendus à leurs auteurs, si l'impres- sion n’en a pas été ordonnée; les auteurs peuvent, en tout cas, en faire prendre copie. Il n’en est pas de mème des pièces des concours et des mémoires des associés, des correspondants et des savants étrangers : les manuscrits de ces travaux sont dé- clarés la propriété de l’Académie, du moment qu'ils ont donné lieu à un rapport. C’est qu’en effet, la compagnie est sérieuse” ment intéressée à demeurer nantie des pièces d'un procès dans lequel elle a prononcé son jugement. Et ce n’est pas seulement le manuscrit du mémoire couronné qu’elle doit conserver dans ses archives, ce sont aussi les manuscrits des concurrents moins heureux. Toutes ces dispositions sont parfaitement légitimes ; elles sont d'accord en tout point avec les principes qui ont été ex- posés dans la première partie de ce travail. D'où vient donc la difficulté ? Comment peut-il y avoir des doutes sur l'interpréta- tion ? Le texte n'est-il pas clair? Et quelle est la question que nous sommes appelés à résoudre? On a soutenu que par ces mots : {es manuscrits des mémoires deviennent la propriété de l'Académie, le rédacteur du règlement général avait attribué à la compagnie le droit de propriété lit- téraire sur ces productions. > * # ( 640 ) Ilyaici, me semble-t-il, une double confusion d'idée. D'abord, on confond la possession effective d’un manuscrit avec le droit qu'a l'auteur de reproduire son œuvre; en second lieu, on at- tribue une signification égale aux mots réunis manuscrits des mémoires, et au mot isolé mémoires. C'est de celte confusion que provient toute la difficulté. Chaque année, l’Académie contribue, sans s’en douter, à ac- créditer l'erreur. A la suite du programme du concours, on lit : « L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que, dès » que les mémoires ont été soumis à son jugement, ils sont dé- » posés dans ses archives comme étant devenus sa propriété. » D'après cette rédaction, ce sont les mémoires eux-mêmes, et non la copie des mémoires envoyée par les concurrents, qui de- viennent la propriété de l'Académie. | C'est, à mon avis, la copie seule, et une copie déterminée, celle qui a servi au jugement, qui devient la propriété de l’Aca- démie. L'Académie n'a pas besoin d'autre garantie, et, n'en ayant pas besoin, elle n’a pas le droit de l’exiger. L’abandon ab- solu de leur droit d'auteur, qu'on semble vouloir demander aux concurrents, serait une véritable spoliation dont personne ne profiterait. C'est tellement bien d'une copie, et non du mémoire lui-même, de l’autographe de l’auteur, que le règlement s'occupe, que, la plupart du temps, l’auteur qui enverrait un travail écrit de sa main s'exposerait à se voir repoussé du concours, puisque ce pourrait être pour lui un moyen de se faire connaître avant Je prononcé du jugement. Si done c'est une copie qu'il a adressée à l'Académie, l’auteur conserve la possession effective du manu- scrit original ; quel moyen pourrez-vous employer pour l'empé- cher d’en faire usage ? Bien loin de consacrer un système aussi étroit, le règlement de l'Académie montre la plus grande libéralité à l'égard des au- teurs. C’est dans tout l’ensemble de ce règlement qu'il faut cher- cher l'esprit qui l'a dicté. Ainsi, l’article 28 me paraît un élo- > ( 641 ) quent commentaire de l’article 24. En vertu de cet article, « les » auteurs des mémoires et notices insérés dans le Bulletin de » l'Académie ont droit à recevoir cinquante exemplaires parti- » culiers de leur travail. Ce nombre est porté à cent pour Îles » écrits imprimés dans le recueil des mémoires. Les auteurs » ont, en outre, la faculté de faire tirer des exemplaires en » sus de ce nombre, en payant à l'imprimeur une indemnité de » quatre centimes par feuille. » | Remarquez qu'aucune limite n'est apportée au droit accordé aux auteurs de faire tirer des exemplaires à part. L'auteur peut profiter de l'occasion pour faire une édition de son ouvrage; l'Académie l'y autorise; elle l'y convie même par Ia modicité des prix imposés à son imprimeur. En résumé, je crois que la législation académique, en ce qui concerne les droits respectifs de la compagnie et des auteurs sur les mémoires qu'elle a appréciés, est parfaitement d'accord avec les principes, et qu'il n’y a rien à y changer. Seulement, à l'avis qui suit le programme du concours, au lieu de supprimer le mot manuscrits, dans l'expression manu- scrits des mémoires , il faudrait maintenir les deux mots, comme à l’article 24 du règlement général, et de plus, expliquer l’ex- pression, dans ce sens, que c'est la copie même qui a servi pour le jugement qui devient la propriété de l'Académie, et non le droit d'auteur ou de copie, connu sous la dénomination de propriété littéraire. Les seules conclusions à présenter me semblent celles-ci : Il nw'y a pas lieu de demander une modification quelconque des statuts. Il n'y a qu'un léger changement à apporter à la ré- duction de l'avis qui accompagne le programme des concours. L'intervention de l'assemblée générale serait même inutile, si les trois classes adoptaient successivement ces conclusions. OUVRAGES PRÉSENTÉS. Recueil des ordonnances des Pays-Bas autrichiens, 3"° sé- rie. — 1700-1794, tome I‘,.contenant les ordonnances du 18 novembre 1700 au 23 juin 1706; par M. Gachard, Bruxelles, 1860; 1 vol. in-fol. Observations sur Agrippine et Postume; par J. de Witte. Paris, 4 broch. in-&. ; Programme du cours de géométrie descriptive, fait à l’uni- versité de Liége ; par J.-B. Brasseur, 3"° édition. Liége, 1859; in-4°. Vaderlandsch museum voor nederduitsche letterkunde, oud: heid en geschiedenis ; uitgegeven door C.-P. Serrure. Derde deel, 15 en 2% stuk. Gand, 1859-1860; in-8°. Académie royale de peinture, de sculpture, Pare el de gravure de Bruxelles. Réponse à quelques critiques adressées à l'enseignement de cetle institution (par L. Jéhotte). Bruxelles, 1860; 1 broch. in-8". Documents statistiques publiés par le Département de l'inté- rieur , avec le concours de la Commission centrale de statistique. Tome IV. Bruxelles, 1860; in-4°. | Mémoires anonymes sur les troubles des Pays-Bas, 14562- 1580, avec notices et annotations par J.-B. Blaes. Tome 1l"*°. Bruxelles, 1860; 1 vol. in-&. Mémoires de Frédéric Perrenot, sieur de Champagney, 1575- 1580 ; avec notices ct annotations par A.-S.-P. de Robaulx de Soumoy. Bruxelles, 1860; 1 vol. in-8°. Mémoires du prince de Ligne, suivis de pensées et précédés d'une introduction; par Albert Lacroix. Paris - Bruxelles, 1860; 1 vol. in-12. La révolution des Pays-Bas au XVI" siècle; par John DT ( 645 ) Lothrop Motley, traduit de l'anglais par Gustave Jottrand et Albert Lacroix. Tome IVe, 1"° partie. Bruxelles, 1860 ; in-&. * Examen des doctrines religieuses de M. Renan; par l'abbé Doyen. Bruxelles, 1860 ; in-8°. Mémoire sur la machine à vapeur ; par M. Steichen. Bruxelles, 1860; 1 vol. in-8°. Manuel d'anatomie générale ; par E.-M. Van Kempen, nou- velle édition. Louvain, 1860; in-$. Essai sur la queue des comètes; par Léonard Pirmez, seconde édition. Bruxelles, 1860; in-8°. Prolégomènes philosophiques de la géométrie et solution des postulats; par J. Delbœuf. Liége, 1860; 1 vol. in-8°. = Rapport de la commission directrice de la Société royale pour l'encouragement des beaux-arts, à l'assemblée générale des socic- taires, tenue le 20 mars 1860. Gand, 1860 ; in-8. Considérations sur la vie et le principe vital; discours par J.-B.-E. Husson. Bruxelles, 1860; 1 broch. in-&. Note sur la visite des lépreux à Anvers depuis le 11 mai 1517 jusqu'au 14 mars 1524; par C. Broeckx. Anvers, 1869 ; in-8°. Histoire de la révolution belge de 1850 ; par Carlo Gemelli, traduit de l'italien par P. Royer. Bruxelles et Ostende, 1860; in-8°, Répertoire général de photographie pratique et théorique; par D. Van Monckhoven, 3° édition, avec atlas composé de 19 planches. Gand , 1859; 2 vol. in-8. | L'humanité, poëme; par Denis Sotiau. Liége, 1860; pet. in-8°. Étude économique sur le porc, ses races, ses dépenses el ses produits ; par Phocas Lejeune. Bruxelles, 1860; in-8°. Portefeuille de John Cockerill, 58"° à 62% livraisons, Paris- Liége, 1860 ; in-fol. Revue de la numismatique belge; troisième série, tome IV, 9me Jivr. Bruxelles, 1860; 1 cahier in-8. 27° SÉRIE, TOME IX. 44 ( 644 ) L'Abeille, vevüe pédagogique, IV" année, 4me à Ge divr. Bruxelles, 4860; 3 broch. in-8°. Revue populaire des sciences, rédigée par M. J.-B.-E. Husson. He année, n° 4 à G. Bruxelles, 1860 ; 3 broch. in-8°. Revue trimestrielle, 26% volume. Bruxelles, 4860; 4 vol. 10-12, Journal des beaux-arts, I"° année, n° 8 à 10, Anvers, 4860; 5 feuilles in-4°. # Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique, tome XVI”, 1re Jiv. Anvers, 1860 ; 1 broch. in-$°. Messager des sciences historiques, ou archives des arts et de.la bibliographie. Année 1860, 1"° livr. Gand; 4 broch. in-8°. Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, tome I, 4e livr. Liège, 1860; in-8°. Revue de l'administration et du droit administratif de la Bel- gique, VII®e année, 1'° à 5"° livre. Liége, 1860; in-4°. Bulletin de l'Académie royale de médecine de Belgique, année 1860; 2° série, tome IT, n° 1 à 2. Bruxelles, 1860; 2 broch. in-8°. Mémoires de l'Académie royale de médecine de Belgique, 3" fascicule du tome IV. Bruxelles, 1860; 1 cahier in-4°. Mémoires des concours et des savants étrangers, publiés par l’Académie royale de médecine de Belgique, 1° fase. du tome V. Bruxelles, 1860 ; 4 cahier in-4°. Le Scalpel, 21° année, n° 24 à 30. Lübees 1860; 7 feuilles in-4°. Journal d'horticulture pratique de la Belgique, IN"® année, avril à juin. Bruxelles, 4860 ; 3 broch. in-8°. La Belgique horticole , rédigée par Édouard Morren. Prologue et frontispice du IX" volume; 40° année, 4° à Gme iv. Liége : 1860; 4 broch. in-4. | Annales de la Société historique et archéologique à Maestricht, tome Il, 2e et 35% fascicules. Maestricht, 4857; 2 cahiers in-8°. ( 645 ) Historiseh Genootschap gevestigd te Utrecht : — Werken, kro- nyk, 4859, bl. 14-24 met omslag; — codex diplomaticus, 2% sèrie, JV deel, 2% afd., blad 1-12; Vie deel, blad 51-60 met titels, inleiding en omslag. Utrecht, 1859 ; 3 vol. in-8°. Tijdschrift voor entomologie, onder redäctie van prof. J. Van der Hoeven, D' M.-C. Verloren en Mr S.-C. Snellen Van Vol- lenhoven, vol. If, n° 6; vol. HI, n® 4- -2-5. Leide, 1859; 4 broch. in-8°, Journal de l École impériale polytechnique, publié par le con- seil d'administration de cet établissement, t, XXI. Paris, 4838; 4 vol. in-8°. Revue numismatique, publiée par J. de Wicte et sde de Longpérier, nouvelle série, tome IV, mars à décembre; tome V, janvier à avril. Paris, 1859-1860; 6 cahiers in-8°. Journal de la Société de la morale chrétienne, tome X, n° 1 et 2. Paris, 1860; 2 broch. in-8°. L'Investigateur, journal de l'institut “VEN XXVII® année, 504% livr. Paris, 1860; 1059. Revue de l'art chrétien, IV année, n° 4 à 3, janvier à. mars. Paris, 4860; 3 broch. in-8°. Bulletin de la Société géologique de France, deuxième série, tome XVII:, feuilles 7-12 ; 13-20. Paris, 1839 à 1860 ; 2 broch. in-8°. Revue de l'instruction publique en France, XX" année, n° 1 à 10. Paris, 1860 ; 10 doubles feuilles in-4°. Traité élémentaire des séries; par Eugène Catalan. Paris, 1860 ; in-8°. … Mémoire sur le calendrier musulman et sur le calendrier hé- braïque; par Martin (René), d'Angers. 1° partie. Paris, 1857; 4 vol. in-8°. Observations sur les données qui ont servi de base aux diverses théories des vents, el principalement sur le système de circulation atmosphérique de M. Maury; par M. Fra Paris, 1860; 4: broch, in-8°, ( 646 ) Traité de perspective- relief; par M. Poudra. Paris, 4860; 4 vol, in-8° et 1 atlas in-4° obl. Biographie du général baron Testot-Ferry, vétéran des armées républicaines et impériales, et exposé des événements militaires de 1792 à 1815; par Mignard. Paris-Dijon, 1859 ; 1 vol. in-8°. Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie, année 1860, n° 4. Amiens , 1860 ; 1 broch. in-8°. | Institut des provinces de France. Mémoires, des série, sciences physiques et naturelles. Caen, 1859; 1 vol. in-4°. Programme du congrès archéologique de France, qui sera ou- vert à Dunkerque le 16 août 1860. Dunkerque, 1860; in-4°. Précis analytique des travaux de l’Académie impériale des sciences , belles-lettres et arts de Rouen, pendant l'année 1858-59. Rouen, 1859; 1 vol. in-8&°. Société des sciences naturelles de Neuchatel : — Mémoires, tome IV ; — Bullelin, tome V, 1* cahier. Neuchâtel 1850; 1 vol. in-4° et 1 cahier in-8°. Zeitschrift für die gesammten Naturwissenchaften ; herausge- geben von dem naturw. Vereine für Sachsen u. Thüringen in Halle; redigirt von C. Giebel und W. Heintz. Jahr. 1859, XI, XIV Bandes. Berlin, 1889; 2 vol. in-8. Verhandlungen des naturhistorisch-medizinischen Vereins zu Heidelberg, Band H, N° 1. Heidelberg, 1859; in-12. Heidelberger Jahrbücher der Literalur, unter Mitwirkung der vier Facultäten. LIT Jahrg., 1*-5'* Heftes. Heidelberg, 1860; 3 broch. in-8°. Verhandlungen der kaiserlichen-leopoldinischen-carolinisehen deutschen Akademie der Naturforscher, XVII Band, Jena, 1860; 1 vol. in-4°. Allgemeine geographische Meteorologie, oder versuch einer uebersichtlichen Darlegung des Systems der Erd-Meteoration in ihrer klimatischen Bedeutung;: von A. Mübry. Leipzig und Heiï- delberg, 1860; in-8°. Anzeiger für Kunde der deutsche Vorzeil, neue Folge, 185, ( 647 ) titre et n° 12; 1856, 1857, 1858, 1839 et 1860, n°° 1 à 4. (Man- quent 1856, n® 7, 10, et 1859, n° 2). Nuremberg, 1855-1860; in-4°. Germanischen national Museums zu Nürnberg; 3-6 Jahresb. Nuremberg , 1856-1859; in-4°. Denkschriften der k.-bayer.-botanischen Gesellschaft zu Re- gensburg, VI Band, 1°'° Abth. Regensburg , 1859 ; 1 vol. in-4°. Flora, oder allgemeine botanische Zeitung, herausgegeben von der kônigl.-bayer.-botanischen Gesellschaft zu Regensburg. Neue Reïhe, XVII Jahrgang. Regensburg , 1859; 1 vol. in-8°. Das Gesetz des menschlichen Wachsthumes und der unter der norm zuruckgebliebene Brustkorb als die erste und wichtigste Ur- sache der rhachitis, scrophulose und tuberculose; von Franz Liharzik. Vienne, 1858 ; 1 vol. gr. in-S&. Verhandlungen der physicalisch-medicinischen Gesellschaft in Würzburg ; herausgegeben von der Redactions-Commission der Gesellschaft, X'* Band, 2° und 5° Heft. Wurtzhbourg, 1860; 4 cahier in -4°. Würzburger naturwissenschaftliche Zeüschrift; herausgege- ben von der physicalisch -medicinischen Gesellschaft, redigirt von H. Müller, A. Schenk, R. Wagner. If Band, 1 Heft. Wüzbourg, 1860; 2 broch. in-8°. Corrispondenza scientifica in Roma, vol. VI®, n° 21-93, Rome, 1860; 3 doubles feuilles in-4. Bullettino naulico e geografico. Appendice alla Corrispondenza seientifica di Roma, vol. 1, n° 4 et 2, Rome, 1860 ; 2 feuilles in-4°, Atti dell img.-reg. Istitulo Veneto di scienze, lettere ed arti, tomo V', serie terza, disp. 5-6. Venezia, 1859-60 ; 2 broch. in-S°. Almanaque nautico para 1861, calculado de orden deS. M. en el observatorio de marina de la ciudad de San Fernando. Cadiz, 1859, 1 vol. in-8. Observations météorologiques faites à l'observatoire de l'infant * janvier à mars The quarterly J Londres, 1860; in oui rie dt The american Journal of science and aris _ n° 86. New- Haven, Es inst 1 * ; EUR Per PTT LL L 1 + my ben Des E Dei » ul S« ..… » | 4 : à à #; à ‘ “à L - f 1 A # L , m1 * s dt RE Li : : V2 wine 5 € À er ; | È :ù | : sx A FIN DU TOME ÏX DE LA one $ SÉRIE, # de | LA BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELCIQUE. to — TABLES ALPHABÉTIQUES DU TOME NEUVIÈME DE LA DEUXIÈME SÉRIE. 1860. — TABLE DES AUTEURS. A. Académie royale des beaux-arts d'Anvers. — Envoi de son programme du grand concours de peinture, 101. Aguilar ( Antonio). — Avis aux astronomes relatif à l’éclipse de soleil du mois de juillet 1860, 355. Alvin. — Communication relative à la révision du règlement de la caisse centrale des artistes, 348; note communiquée à la commission mixte nommée par les trois classes pour la question du droit des auteurs des mémoires, 269. Anonyme. — Envoi d’un mémoire pour le concours sur le lieu de naissance de Charlemagne, 285. | Arendt. — Commissaire pour un mémoire de concours, 172; rapport sur ce mémoire , 492, Association britannique pour l’avancement des sciences. — Annonce de sa trente-huitième réunion, à Oxford , 555. 650 TABLE DES AUTEURS, B.. Balat, — Commission pour un travail de M. Holst, 394. Baron. — Remerciments au directeur sortant, 106. Bayer. — Voyez Schlieper. Benoit. — Rapports de MM. Fr. Fétis , Snel et Daussoigne-Méhul sur sa com- position musicale intitulée : Petite cantate de Noël, 102, 104, 105. Bernardin. — Dépôt d'observations botaniques faites à Melle en 1859 et 1860, 115, 556, 404. sen — Élu correspondant de la classe des ms 496. Bochart. — Note sur le lieu de naissance du musicien Cu! 221. Borgnet. — Commissaire pour un mémoire de concours , 172 ; rapport sur ce mémoire , 482; rapport sur une notice relative à un psautier manuscrit du IX siècle, par M. Namur, 182. Bormans. — Rapport sur une notice relative à un psautier manuscrit du IXre siècle, par M. Namur, 180. - Boué (Ami). — Statistique intellectuelle , 279. Braemt. — Situation de la caisse centrale des artistes belges au 1° janvier 1860, 106 ; idem depuis son origine , 348 ; réélu membre de la commission administrative pour 1860, 186. Buchinger. — Dépôt d'observations botaniques faites à Venise en 1859, 114. C. Carton. — Commissaire pour un mémoire de M. De Smet, 170; lecture de son rapport sur ce mémoire , 591 ; rapport sur un projet de concours pour . l’histoire de la ville d’Ypres, 175. Chalon. — Hommage d'ouvrages, 99, 286; commissaire pour deux mé- moires de concours, 171 ; rapport sur un mémoire, 465. Coemans. — Recherches sur la genèse et les métamorphoses de la Peziza sclerotiorum , Lib., 62; rapports de MM. Martens et Kickx sur cette no- (ICE, 740. Congrès archéologique de France. — annonce de sa vingt-septième réu- nion à Dunkerque, 590. D. Daussoigne-Méhul. — Rapport sur une composition musicale de M. Benoit intitulée : Petite cantate de Noël, 105, + Hi send CARE. nds: - 0. TABLE DES AUTEURS, 651 David. — Commissaire pour trois mémoires de concours, 171, 172; rap- ports sur ces mémoires , 495 , 480. De Borre. — Dépôt d'observations botaniques faites à Jemeppe en 1860, 556. De Busscher. — Commissaire pour une lettre du Ministre de l’intérieur relative à la restauration d'anciennes peintures, 547 ; rapport sur celte lettre, 590. De Decker. — Rapport verbal sur un mémoire de M. Dupont-Marin, 99; commissaire pour deux mémoires de concours, 171; rapport sur ces mé- moires, 391, 468; membre de la commission pour la présentation de candidats aux places vacantes dans la classe des lettres, 172. De Gerlache (le baron). — Commissaire pour deux mémoires de concours, 171; rapport sur ces mémoires, 591, 469. De Keyzer. — Commissaire pour une lettre de M. le Ministre de l’intérieur relative à la restauration d'anciennes peintures , 547. De Koninck. — Commissaire pour une notice de M. Scohy, 558; rap; ort sur cette notice, 411 ; communication verbale concernant des fossiles, 388. Delbarre. — Hommage de médailles, 557, 589. D’Omalius. — Hommage d’un ouvrage, 557. De Pouhon. — Proposition relative à la question sur le lieu de naissance de Charlemagne , 170. É Députation permanente du conseil provincial du Hainaut (la). — Hom- mage d’une médaille , 59. De Ram. — Hommage d'ouvrages, 99, 169; élu directeur pour 1860, 100; commissaire pour un mémoire de M. De Smet, 170; lecture de son rapport sur ce mémoire, 591. De Saint-Genois (le baron J.). — Commissaire pour un mémoire de M. De Smet, 170; lecture de son rapport sur ce mémoire , 391 ; commis- saire pour trois mémoires de concours, 171, 172; rapports sur ces mé- moires, 591, 478 ; rapport sur un programme de concours pour l’histoire de la ville d'Ypres, 179 ; rapport sur une notice de M. Namur relative à un psautier manuscrit du IX" siècle, 182; membre de la commission pour la présentation de candidats aux places vacantes dans la classe des lettres , 172; rapport sur les moyens de mettre à exécution l’arrêté royal du 1e décembre 1841 relatif à la Biographie nationale, 594. De Selys-Longchamps. — Commissaire pour deux mémoires de M. Van Be- neden , 62; lecture d’un rapport sur ces mémoires, 119 ; dépôt d’observa- tions botaniques, faites à Waremme, en 1860, 556, 404; communication verbale concernant des fossiles , 588. De Smet. — Présentation d'un mémoire sur la première eroisade , 169; lec- 659 TABLE DES AUTEURS. ture des rapports de MM. de Saint-Genois, Carton et de Ram sur ce mé- moire, 591 ; rapport sur un programme. de concours pour l’histoire de la ville d'Ypres , 179 ; renaissance de la ville de Gand, après la retraite des pirates du Nord, 287. D’ Udekem. — Approbation royale dé son élection de membre, 2; remerci- ments pour sut élection, 2 ; commissaire pour deux mémoires de M. Van Beneden , 62 ; lecture de son rapport sur ces deux mémoires, 119, De Vaux (4d.). — Communication relative aux moyens de der les édifices contre les ravages de la foudre , 277. De Wael (Émilien). — Envoi d’ Obsérttiths botaniques ses à Eeckeren, en 1859, 5% Dewalque. = Approbation royalé de son élection de membre, 2; remerci- ments pour son élection, tbid.; dépôt d'observations météorologiques et botaniques faites à Stavelot en 1859 et 1860, 114 , 115, 404; observations météorologiques faites à Stavelot pendant l'orage du 19 février 1860, 274. De Witte (le baron). — Commissaire pour deux mémoires de concours, 171 ; rapport sur ces mémoires, 591, 460; hommage d'ouvrages , 460. Ducpetiaux. — Rapport verbal sur un mémoire de M. Düpont-Marin , 99; commissaire pour deux mémoires de concours , 171; rapport sur ces mé- moires, 391, 467; lecture d’un discours sur le principe de l'association dans ses rapports avec l’amélioration du sort de la classe ouvrière , 391, 586. Dupont-Marin. — Lecture des rapports de MM. Ducpetiaux et De Decker sur son mémoire relatif au suicide, 99. ‘ Dupréz. — Observations météorologiques faites pendant l'orage du 19 février 1860, 275; commissaire pour un mémoire de M, Noël, 558 ; commissaire pour une notice de M. Florimond , 558; annonce d’ün travail sur les para- tonnerres , 455. E. Encke, — Accuse la réception du montant de la souscription destinée à la fondation de Humboldt, 555. Fr. Fabri. — Arrêté royal qui lui accorde une pension comme lauréat du grand concours de sculpture, 589. Fétis (Éd.). — Présente la situation de la caisse centrale des artistes belges au 1° janvier 1860, 106, 222; notice sur Gérard Edelinck, 225. Fétis (Fr.). — Rapport sur une composition musicale de M. Benoit inti- tulée: Petite cantate de Noël, 102; annonce de la mort de M. Spohr et de at ie tn tt D Rs ha és TABLE DES AUTEURS, 653 l'intention de lui consacrer une notice dans l'annuaire de l'Académie, 106 ; hommage d’un ouvrage, 394;. rapport sur une demande ministérielle re- lative au voyage d’un lauréat du grand concours de musique , 595. Florimond. — Aurore boréale de 1859, observée à Louvain, le 1°r janvier 1860 ; 5; bolide observé à Louvain, 115; note sur l'orage du 19 février 1860; etc., 358. à G. Gachard. — Nommé président de l'Académie pour 1860, 98; remerci- ments au directeur sortant , 100 ; rapport verbal concernant la biographie nationale, 286; rapport sur la propriété des travaux publiés dans les recueils académiques, 390 ; sur la captivité de François I‘' et le traité de * Madrid, 498. Galimard. — Hommage d’une photographie , 394. Ghaye. — Dépôt d'observations botaniques faites à Waremme, en 1860, 556. | Gilbert. (Ph.). — Note sur quelques propriétés des lignes tracées sur une surface quelconque ; 46 ; lecture des rapports de MM. Schaar, Lamarle et Timmermans sur cette note, 6. Grote. — Élu associé de la classe des lettres , 496. Guillaume. — Élu correspondant de la classe des lettres, 496. H. Haïdinger. — Remerciments pour son élection d’associé, 2; exprime le désir d'obtenir un fragment d’un aérolithe tombé à Saint-Denis-Westrem, le 7 juillet 1855, 2; renseignements sur un bolide observé en Bohême, 115. Heis. — Dépôt d'observations botaniques faites à Munster, en 1860, 556 ; suite des observations sur la lumière zodiacale, faites à Munster, du 20 décembre 1859 au 25 février 1860 ; 559. Holst (Chrétien). — Présentation d’un travail imprimé, 594. Husson. — Dépôt d'observations botaniques, 464. J. < . James (Henri). — Transmet des renseignements géodésiques et hommage d'un ouvrage, 555. Jehotte. — Annonce l'exécution d’un buste de feu M. Dewez, 286, 654 TABLÉ DES AUTEURS, Juste (Th.). — Note concernant un travail historique sur les comtes d'Eg- mont et de Hornes, 184. K. Kervyn de Lettenhove. — Proposition relative à la question sur le lieu de naissance de Charlemagne, 170; les bibliothèques de Rome (notes et ex- traits), 306. Kickæ. — Rapport sur les recherches sur la genèse et les métamorphoses de la Peziza sclerotiorum , de M. Eug. Coemans, 8; rapport verbal concer- nant la Biographie nationale, 262, L. Zamarle. — Lecture de son rapport sur la notice de M. Gilbert, relative à quelques propriétés des lignes tracées sur une surface quelconque, 6; note sur l'écoulement des eaux qui circulent à la surface de la terre, 12; solution géométrique d’une série de problèmes relatifs à l'art des con- structions , 127, suite et fin, 361. Lamont. — Remerciments pour son élection d’associé, 2; sur la période annuelle de l'intensité horizontale du magnétisme terrestre, 116. Lanzweert. — Envoi d'observations ornithologiques faites à Ostende en 1859, 5, 115. Le Bas (Ph.). — Élu associé de la classe des lettres, 496. Leclercq. — Envoi d'observations météorologiques faites à Liége en 1859, 5. Leclercq (M. N. J.). — Réélu membre de la commission administrative pour 1860, 100; membre de la commission pour la présentation des candidats aux places vacantes dans la classe des lettres, 172. Lelewel. — Élu associé de la classe des lettres, 496. Leys. — Commissaire pour une lettre de M. le Ministre de l’intérieur rela- tive à la restauration d’anciennes peintures, 547. Liagre. — Commissaire pour une notice de M. W. Zytphen, 3; rapport verbal sur cette notice, 119; élu directeur de la classe des sciences pour 1861, 6; lecture de son rapport sur une notice de M. Montigny relative à la vitesse du bruit du tonnerre, G. Lyell. — Hommage d'ouvrages, 2. M. : Maas. — Dépôt d'observations météorologiques et botaniques faites à Na- mur en 1859 et 1860, 114, 404; observations météorologiques faites à Namur pendant l'orage du 19 février 1860, 404. TABLE DES AUTEURS. 655 Mailly. -—- Hommage d’un ouvrage, 5. Maury. — Observations barométriques recueillies en mer, 554; remerci- ments pour son élection d’associé, 555; projet de conférence interna- tionale pour étendre, sur le monde entier, le système des observations météorologiques adopté pour la mer, dans la conférence de 1853, 415. Martens. — Rapport sur les recherches sur la genèse et les métamorphoses de la Peziza sclerotiorum.,-Hib:; de N. Eug. Coemans, 7. Martynowski. — Préséntation d’un mémoire, 119. Melsens. — Communication verbale sur le perfectionnement d’un mano- mètre métallique, 284. Ministère de l’intérieur. — Communication d’un arrêté royal approuvant l'élection de deux membres dans la classe des sciences, 2; idem formant un concours extraordinaire d'une somme de 5000 francs, 114 ; annonce que les membres de l’Académie peuvent prendre part à ce concours, 262; an- nonce l’envoi du buste de M. Dumont, 546; accorde une somme de 500 francs , destinée à la Caisse centrale des artistes belges , ébid ; lettre rela- tive à la restauration d’anciennes peintures, 346; envoi d'ouvrages pour la bibliothèque de l’Académie, 554; adresse des documents pour la Bio- graphie nationale transmis par le gouverneur de la province d’Anvers, 589; annonce l’acquisition du buste de M. Dewez, 595 ; envoi d’une lettre de M. Van Poucke, ibid. ; demande de renseignements relatifs aux prix de 5000 francs, 404; annonce le résultat du concours quinquennal de lit- térature flamande, 456; lettre relative à la Biographie nationale, 457; annonce l'exécution du portrait de Marie-Thérèse, ibid ; communique le programme de concours pour l’histoire de la ville d’Ypres, ibid; arrêté royal relatif au sieur Fabri, 589. Montigny. — Note sur la vitesse du bruit du tonnerre, 56 ; lecture des rap- ports de MM. Plateau, Ad. Quetelet et Liagre sur cette notice, G. N. Namias. — Hommage d’un ouvrage, 356. Namur. — Rapports de MM. Bormans, Borgnet et le baron de Saint-Ge- nois, sur la notice relative à un psautier manuscrit du IX" siècle, 180, 182. Navez. — Commissaire pour une lettre du Ministre de l’intérieur relative à la restauration d’anciennes peintures, 567. Neumayer. — Perturbations magnétiques observées à Melbourne en 1859 et 1860, 360. Nève (Æ.). — Élu correspondant de la classe des lettres, 496. 656 ABLE DES AUTEURS, « Voël (Ch.). — Présentation d’un travail sur un nouveau système enregis- treur des observations de tous les instruments météorologiques, 357. DNolet de Brauwere van Steeland. — Commissaire pour deux mémoires de concours, 171; rapport sur ces mémoires, 476; hommage d’un ouvrage, 590. Nyst. — Commissaire pour une notice de M. Scohy, 358 ; rapport sur cette notice , 405. | F P. Parent, — Dépôt d'observations botaniques faites à Herve, en 1859, 114. Plateau. — Lecture de son rapport sur une note de M. Montigny relative à la vitesse du bruit du tonnerre, 6, Poelman. — Hommage d’un ouvrage, 114. Polain. — Commissaire pour un mémoire de concours, 172; rapport sur ce mémoire, 495. Portaels. — Commissaire pour une lettre du Ministre de l’intérieur, relative à la restauration d'anciennes peintures, 547. Q. Quetelet (4d.). — Hommage d'ouvrages, 5, 286, 459; lecture de son rap- port sur une notice de M. Montigny, relative à la vitesse du bruit du ton- nerre, 6; occultation des pléiades, le 8 décembre 1859, 11 ; dépôt d’ob- servations météorologiques et botaniques faites à Bruxelles, en 1859 et 1860, 115, 356, 404; note sur l'orage du 19 février 1860 , 263 ; commis- saire pour un travail de M. Noël, 358 ; commissaire pour une note de M. Florimond, 558 ; annonce de la réunion du Congrès international de statistique à Londres, 459. Quetelet (Er.). — Observations de la lune et des étoiles de même culmina- tion faites en 1859, 120 ; aurore boréale observée le 9 avril , et halo lunaire observé le 6 avril 1860, 433; éléments magnétiques du mois d'avril 1860, 455. n. Rigouts-}'erbert. — Dépôt d'observations botaniques faites à Anvers, en : 1859, 556. Rodigas. -— Dépôt d'observations botaniques faites à Lierre , en 1860, 404. Roelandt. — Commissaire pour un travail de M. Holst, 594. S. Schaar. — Lecture d’un rapport sur la note de M. Gilbert, seïative à quel- TABLE DES AUTEURS, 657 ques propriétés des lignes tracées sur une surface quelconque, 6 ; com- missaire pour un mémoire de M. Martynowski, 119. Schlieper. — Recherches sur le groupe urique , 161. Schnepp. — Envoi de publications de l’Institut égyptien, 555. Sc0hy. — Sur des ossements fossiles découverts à Lierre, le 28 février 1860, 358, 456; rapports de MM. Nyst, De Koninck et Van Beneden sur cette notice, 405, 411, 415. Sénat (le Président). — Remerciments pour l'envoi des publications acadé- - miques, 285. Snel. — Rapport sur une composition musicale de M. Benoïitintitulée : Petile cantale de Voël, 104. Snellaert, — Commissaire pour trois mémoires de concours, 171, 172; rapports sur ces mémoires , 469, 476. Société royale des arts d&’ Anvers. — Envoi de son programme de concours pour 1861, 589. Spohr. — Annonce de sa mort par M. Fr. Fétis, 106. Stas. — Présentation d’une note concernant des découvertes chimiques, 455. Storks Eaton (Henri). — Demande de renseignements météorologiques sur les tempêtes d’octobre et novembre 1859, 2; communication d’une note sur les oscillations du baromètre, 281. Struve. — Remerciments pour son élection d’associé, 555. Suys. — Élu directeur pour 1861, 105; commissaire pour un travail de M. Holst, 394. T. Texeira de Vasconcellos (le chevalier). — Hommage d’un ouvrage, 169. Theiner (le R. P.). — Élu associé de la classe des lettres, 496. Thonissen. — La guerre et la philosophie de l’histoire, 185. Timmermans. — Lecture de son rapport sur la note de M. Gilbert, relative à quelques propriétés des lignes tracées sur une surface quelconque, 6. W: Vun Beneden. — Remerciments au directeur sortant, 6 ; présentation de deux mémoires manuscrits sur les Cétacés et sur les Turbellariés, 61 ; lec- ture des rapports de MM. de Selys-Longchamps et d'Udekem sur ces mé- moires, 119; sur un nouveau genre de Crustacé lernéen, 151;communication verbale sur un effet d'hypnotisme observé chez un homard, 284; commis- saire pour une notice de M. Scohy, 558; rapport sur cette notice, 415. Vander Hoeven. — Hommage d’un ouvrage, 114. 658 TABLE DES AUTEURS. Vander Looy. — Découvertes géographiques faites en mer, 556. Van Duyse. — Lauréat du concours quinquennal de littérature flamande, 456; lauréat du concours de la classe des lettres pour 1860, 476, 482. Van Poucke. — Demande relative à l'adoption d’un diapason musical uni- forme , 395. | Vincent (père et fils). — Dépôt d'observations ornithologiques faites à Bruxelles, en 1859, 115. Vrolik (G.). — Annonce de sa mort, 114. W. WW auters (Alph.). — Élu correspondant de la classe des lettres, 496. W/esmacl (A1f.). — Envoi d'observations botaniques faites à Vilvorde, en 1859, 5. | JVilbert, — Demande relative à la communication de documents académi- ques manuscrits, 990. IJillich (Ch.). — Hommage d’un ouvrage, 262, Z. Zytphen (W.) — Présentation d’une notice avec plan d'un bateau sous- marin , 5; rapport de M. Liagre sur cette notice, 119. TABLE DES MATIÈRES. A. Arrélés royaux. — Approuvant l'élection de MM. Dewalque et d’Udekem comme membres, 2; nommant M. Gachard président de l’Académie pour 1860, 98; nommant les membres du jury chargé de décerner le prix de littérature flamande pour la 2"° période quinquennale, 98; appliquant à - un concours extraordinaire la somme de 5,000 francs provenant du prix quinquennal non décerné des sciences mathématiques, 114; accordant à M. Van Duyse le prix quinquennal de littérature flamande, 456 ; accordant au sieur Fabri, lauréat du grand concours de sculpture de 1859, la pension de 2,500 francs, 589; chargeant l’Académie de la publication d'une bio- graphie nationale, 626. Astronomie. — Occultation des pléiades, le 8 décembre 1859, notice par M. Ad. Quetelet, 11 ; observations des passages de la lune et des étoiles de même culmination , faites en 1859, notice par M. Ern. Quetelet , 120; suite des observations sur la lumière zodiacale faites, à Münster, du 20 décem- bre 1859 au 23 février 1860, par M. Heis, 359. B. Bibliographie. — Rapports de MM. Bormans , Borgnet et le baron de Saint- Genois sur une notice relative à un psautier manuscrit du IXme siècle, par M. Namur, 180, 182; les bibliothèques de Rome (notes et extraits), par M. Kervyn de Lettenhove, 306; lettre de M. Wilbert relative à un manu- scrit de dom Bévy, 390. Biographie. — Note de M. Eug. Bochart sur le lieu de naissance du musi- cien Gossec , 221; notice sur Gérard Edelinck par M. Ed. Fétis, 223; rap- ports verbaux sur la Biographie nationale instituée par arrêté royal, 262, 286 ; envoi par le Ministre de l’intérieur de la liste des hommes 2° SÉRIE, TOME IX. A5 660 TABLE DES MATIÈRES. célébres nés dans la province d'Anvers, 589; lettre ministérielle relative à l'arrêté royal du 1°" décembre 1845, 457; rapport présenté par M. le baron de Saint-Genois, sur les moyens de mettre à exécution l'arrêté royal du 1°" décembre 1845, en ce qui concerne la publication d’une Bio- graphie nationale, 594. Botanique. — Recherches sur la genèse et les métamorphoses de la Peziza sclerotiorum, Lib., par M. Eug. Coemans, 62 ; rapports de MM. Martens Kickx sur cette notice, 7, 8. C. Caisse centrale des artistes belges. — Situation au 1°" janvier 1860, 106> lecture du rapport annuel présenté par M. Ed. Fétis, 222 ; situation de la caisse depuis son origine, 548. Chimie. — Recherches sur le groupe urique, par MM. A. Schlieper et A. Bayer, 161; dépôt d’un billet constatant des découvertes nouvelles faites par M. Stas, 435. Commissions. — Pour le programme d’un concours extraordinaire ouvert dans le domaine des sciences mathématiques, 114; pour la présentation de candidats aux places vacantes dans la classe des lettres, 172, 287; pour l’examen du meilleur mode de restauration des anciennes peintures, 347. Concours (grands). — Envoi du programme du grand concours de peinture par l’Académie des beaux-arts d'Anvers, 101. Concours. — Projet d’un concours pour l’histoire de la ville d’Ypres soumis à l'examen de l’Académie, 173; rapports de MM. Carton, le baron de Saint-Genois et De Smet sur ce projet, 175, 179; programme de ce con- cours , 458. Concours de la classe des sciences. — Programme pour 1860 et 1861, 5. Concours de la classe des lettres. — Présentation d’un travail sur la ques- tion de numismatique, 99; proposition de M. de Pouhon relative au con- cours sur le lieu de naissance de Charlemagne, 170; résultats du concours de 1859 et nomination de commissaires, 170; lecture du rapports sur ce concours , 391 ; rapports de MM. de Witte, Chalon et le baron de Saint- Genois sur la question concernant les localités des dix-sept provinces des Pays-Bas où l’on a frappé monnaie, etc., 460, 465, 466; rapports de MM. Ducpetiaux , De Decker et le baron de Gerlache sur la question rela- tive au principe de l'association , 467, 468, 469; rapports de MM. Snellaert, David et Nolet de Brauwere van Steeland sur l'éloge de Cats, 469, 475, 476 ; rapports de MM. Snellaert , le baron de Saint-Genoiïs et David sur la > diratiinns - aff is me gs TABLE DES MATIÈRES. 661 question relative aux chambres de rhétorique 476 , 478, 480; rapports de MM. Borgnet, Arendt et Polain sur la question concernant l’origine belge des Carlovingiens, 482, 492, 495. Concours de la classe des beaux-arts. — Question pour le programme de 1861, 222. D. Dons. — Hommage d'ouvrage par sir Charles Lyell, 2; par M. Ad. Quetelet, 3, 286, 459; par M. Mailly, 5, par M. de Ram, 99, 170; par M. Chalon, 99, 286 ; par M. Vander Hoeven, 114; par M. Poelman, 114; par M. le chevalier Texeira de Vasconcellos, 169; par M. Willich, 262 ; par le major Henry James, 555; par M. Namias, 556 ; par M. d’Omalius, 357; médailles par M. Delbarre, 357, 390; ouvrage par M. Nolet de Brauwere, 390; mé- daille par le conseil provincial du Hainaut, 594 ; ouvrage par M. F. Fétis, ibid.; photographie par M. Galimard, #bid. ; ouvrage par M. de Witte, 469. E. Élections. — M. Liagre, élu directeur de la classe des sciences pour 1861, 6; M. Leclercq, réélu membre de la commission administrative pour 1861, 100; M. de Ram, élu directeur de la classe des lettres pour 1861, 100; M. Braemt, réélu membre de la commission administrative pour 1860, 106 ; M. Suys, élu directeur de la classe des beaux-arts pour 1861, 106 ; MM. Le- clercq, De Decker et le baron de Saint-Genois, élus membres de la com- mission chargée de la présentation des candidats aux places vacantes dans la classe des lettres, 172; MM. Guillaume, Nève, Wauters et Blommaert, . élus correspondants, et Grote, Lelewel, Le Bas et le R. P. Theiner, élus associés de la classe des lettres, 496; élection des candidats pour le jury chargé de décerner le prix du concours ouvert en l'honneur de Van Maer- lant, 496. | G. Géographie. — Découvertes faites en mer et communiquées par M. A. Van- der Looy, 356. H. Histoire. — Note de M. Th. Juste concernant un travail historique sur les comtes d'Egmont et de Hornes , 184; Renaissance de la ville de Gand, après 662 TABLE DES MATIÈRES. la retraite des pirates du Nord, notice par M. De Smet, 287; sur la cap- tivité de François [+ et le traité de Madrid , par M. Gachard , 498. M. ” Mathématiques pures et appliquées. — Note sur l'écoulement des eaux qui circulent à la surface de la terre, par M. Lamarle, 12; note sur quel- ques propriétés des lignes tracées sur une surface quelconque, par M. Ph. Gilbert, 46; solution géométrique d’une série de problèmes relatifs à l’art des constructions, par M. Lamarle, 127 ; suite et fin, 361. Météorologie et physique du globe. — Demande concernant un aérolithe tombé en Belgique, par M. Haïdinger, 2; note sur la vitesse du bruit du tonnerre, par M. Montigny, 56; météore observé en Bohême, note par M. Heidinger, 115; bolide observé à Louvain par M. Florimond, 115; sur la période annuelle de l'intensité horizontale du magnétisme terrestre, par M. Lamont, 116; orage du 19 février 1860, note de M. Ad. Quetelet, 265; observations météorologiques recueillies à Stavelot pendant ce même phénomène, par M. Dewalque, 274; idem, par M. Duprez, pour la ville de Gand, 275; communication relative aux moyens de prémunir les édifices contre les ravages de la foudre, par M. Ad. De Vaux, 277 ; observations barométriques recueillies en mer et communiquées par M. Maury, 554 ; lettre de M. Neumayer sur des perturbations magnétiques observées à Mel- bourne en 1859, 360 ; note sur l’état de l’atmosphère à Namur le 19 février 1860, par M. Maas, 404; nécessité d’une nouvelle conférence des nations pour étendre, sur le globe entier, le système des observations météorolo- giques déjà adopté pour la mer, dans la conférence de 1853, lettre de M. Maury, 415; annonce d’un travail sur les paratonnerres, par M. Duprez, 435. Musique. — Rapports de M. Fr. Fétis, Snel et Daussoigne-Méhul sur une composition musicale de M. Benoît intitulée : Petite cantate de Noël, 102, 104, 105; lettre de M. Van Poucke sur l'adoption d’un diapason musical uniforme, 393; rapport fait par M. Fr. Fétis sur une demande ministérielle relative au voyage d’un lauréat du grand concours de mu- sique, 395. N. Nécrologie. — Annonce de la mort de M. Spobr, 106; annonce de la mort | de M. G. Vrolik, 114. | D RET | TABLE DES MATIÈRES. 663 0. Ouvrages présentés. — 107, 257, 349, 596, 642. P. Paléontologie. — Sur une découverte d’ossements fossiles, notice par M. Scohy, 405, 456; rapports de MM. Nyst, De Koninck et Van Beneden sur cette notice, 405, 411,413. Peinture. — Lettre ministérielle relative à la restauration des anciennes “peintures , 546 ; rapport de M. De Busscher sur cette communication , 590. Phénomènes périodiques. — Dépôt d'observations faites, 5, 114, 356, 404. Prix quinquennaux. — Nomination du jury pour le prix quinquennal de littérature flamande, 98; arrêté royal appliquant à un concours extra- ordinaire le prix quinquennal des sciences mathématiques non décerné en 1859, 114; lettre ministérielle autorisant les académiciens à concourir pour ces prix, 262; annonce des questions proposées pour ce COnCOurs , 358 ; demande de renseignements par le Ministre de l’intérieur sur ce concours , 403 ; arrêté royal accordant à M. Van Duyse le prix quinquen- nal de littérature flamande pour 1860, 456. S. Sciences morales et politiques. — La guerre et la philosophie de l’histoire, par M. Thonissen, 185 ; statistique intellectuelle par M. Ami Boué, 457. Statistique. — Annonce de la réunion du congrés international de statistique à Londres, par MM. Quetelet, 559. Sculpture. — Exécution du buste de M. Dewez, par M. Jehotte, 285, 546, 393. Z. Zoologie. — Présentation de deux mémoires par M. Van Beneden, 62; un nouveau genre de crustacé lernéen, par le même, 151. ERRAT A. 3, ligne 5, ajoutez et ornithologiques. 170, — 19, au lieu de : concours de 1859, lisez : concours de 1860. 357, — 16, — E. 4 N., — EE UNE. 358, — 90, — naturelles, — physiques. 388, — 16, — St-Nicolas , — Lierre, ms) @ eu = * 2 rAA BULLETINS DE DES CADÉMIE ROYALE +: LA, Ca CE Si SCIENCES , DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 4, 4 pi me NW? y ET + C . - on “ ANNÉE, 2% SÉR., T. IX. | 1860. BRUXELLES, M. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. M.DCCCLX. NA 21 dE" r F ANR HT RE RENTE : NC hp HhMibn CHAN KTUT AUS “ns ha 115 AVE AT ON ES avr rte FAT Ÿ: ; TE MONET Tel 2 RE TE | EAUX RNA CE E LT IT ER DAS UE AANR LT TETE Us LAN: PTUeS | MU ETUIS Pr FAN EUIONT D NRA TRS La PA SN RIT OR PART UE Mt CRT ER # CARE DYNELE LE A PE DE re NF 1 Hirbouru L DA LTÉE ; W M SON Ce s! ; ua 10 Ein Qu MO ET TE | i BTE # 7UN xs [128 A n NID RESTE “igaimti 2°. 00 Hana ar. AT Mot d'A RAP 13 PARIS VAGUE Ag PEN à DE LAGADEMIE ROYALE De n = 4 à $ à er tar 6 lettres de Bruxelles, tome I à XIX; in-4e. Mémoires de PAcadémie royale des sciences, ds Le . Fe . beaux-arts de Belgique, tome XX à XXXI; in-40. — = Prix : 8 franes par volume, à partir du tome X. Mémoires couronnés par l’Académie royale des seiences et belles-lettres de Bruxelles, tome I à XV;in-40 | Le Mémoires couronnés et Mémoires des savants étrangers, publiés par l’Académie royale des sciences et des belles - [ee ae PAS. tome XVI à XVIII; in-40. | E Mémoires couronnés et Mémoires des savants Re 2 publiés par l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, tome XIX à XXIX; in-Ae, — Prix : 8 ren par vole, t à partir du tome XII. Mémoires couronnés et autres méotrnl collection ins, tome I à X. — Prix 4 francs par volume. Annuaire de l’Académie, re à 26me année. 1855-60; in-18. Bulletins de l'Académie royale des sciences et belles HU de Bruxelles, tome I à XII; in-8e. $ Bulletins de endèmie royale des sciences, des etre et des beaux-arts de Belgique, tome XIII à XXIII. — 2m série, tome 1 à IX; 1860; in-8e. s Annexe aux Bulletins de 1854, 1 vol. in-8°. — Prix : 4 francs. Bibliographie académique, ou liste des ouvrages publiés par les membres, correspondants et associés résidents. 1854; 1 vol. in-18. Tables des Mémoires des membres, des Mémoires couronnés et des savants étrangers (1816- 1857). 1 vol. in-18 ; 18582 cm eee Tables générales et analytiques du recueil des Bulletins Fi l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Bel- gique, comprenant les tomes Ï à XXII (1852-1856). 1858 ; À v. in-8o. Catalogue des livres de la bibliothèque de l’Académie Sont des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. 1850; 4 vol. in-8e, Commission pour la publication des monuments de la littérature flamande. Der Naturen Bloeme van Jacob Van Maerlant, publié par M. Bormans, tome Ier, 4857; 1 vol. in-8°. Eymbybel van Jacob Van Maerlant, publié par M. J. David, tomes 1, Il et HI, 1858-1859 ; 3 vol. ins8e. Commission royale d'histoire. Collection de Chroniques belges inédites , publiée par ‘ordre du Gouvernement; 19 volumes in- | Compte rendu des séances de « Commission royale d'histoire, ou Recueil de ses Bulletins, 46 vol. in-8° (1857-1849). — Deuxième série, tome I à XIT, in-8° (1859). | Annexes aux Bulletins, 5 volumes in- 8°. — Table générale des Bulletins de la dre série, par E. Gachet, 1 vol. in-8° (182). 5 Nouveaux Mémoires de l'Académie. navales des: sciences et belles ? : * | ï [ . \ o L à 4 L 4 L) » L] SMITHSONIAN INSTITUTION LIBRARIES LULU 3 9088 01300 2175