BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'HISTOIRE NATURELLE DE TOULOUSE ce SIXIÈME ANNÉE. — 1871-1872 a PARIS SAVY, LIBRAIRE-ÉDITEUR RUE HAUTEFEUILLE, 24 | “ 1872 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'HISTOIRE NATURELLE DE TOULOUSE. te do RAC. Pons - V2 BULLETIN SOCIÉTÉ YHISTOIRE NATURELLE DE TOULOUSE a SIXIÈME ANNÉE. — TOME Vi. ————_———_—t TOULOUSE TYPOGRAPHIE DE BONNAL ET GIBRAC RUE SAINT-ROME, 44 1872. = je OL HACRE Jrag ju ù l k sp Perd À LT HA NAS LATE M AT c ee ue Ne Ex + je 29 où Hart {L | di . K° * ia * BULLETIN. DE LA SOCIÉTÉ D'HISTOIRE NATURELLE DE TOULOUSE. | SIXIÈME ANNÉE 1872. RECHERCHES SUR LE LIAS DE LA RÉGION DE MARvÉJOLS (LOZÈRE) (1), Par M. Gaston ne MALAFOSSE, membre titulaire. # INTRODUCTION. La Lozère a déjà été explorée, au point de vue géologique, en certaines de ses parties : à diverses reprises, d’impor- tants travaux ont été publiés, ayant pour objet l'étude des régions dont Mende, Villefort et Florac sont les centres. Mais, jusqu’à ce jour, le sud-ouest et l’ouest du département n'ont fourni matière à aucune monographie de quelque étendue ; à peine a-t-on vaguement signalé leurs richesses paléontologiques et le beau développement qu’y présente le Lias. Dans les quelques pages qui vont suivre, je n’ai nulle- ment la prétention d’avoir comblé cette fâcheuse lacune. Mon frère, L. de Malafosse et moi, explorons, depuis quel- ques années, les environs de Marvéjols, et je viens simple- (4) Séances du 47 et du 24 avril 4872. — La nécessité d'assurer la priorité à l’auteur de ce travail est cause de sa publication hors tour, avant les procès-verbaux. FD Es ment résumer ici nos observations, encore bien incomplètes, comme on pourra le voir. Laissant de côté l’oolithe, trop peu connue de nous, et les roches azoïques, dont l'étude serait surtout intéressante pour le minéralogiste, je me bornerai à décrire le Lias, si bien représenté dans cette région. C'est dire que je n’aborderai qu’incidemment les aperçus généraux et les questions de géologie comparée. Quelque restreint que soit ce cadre, quelque modestes que soient les résultats obtenus, nous espérons que ces notes ne seront point sans intérêt pour ceux qui ont à cœur l'étude géologique de notre France méridionale. HISTORIQUE. Si je re bornais à analyser les travaux publiés jusqu’à ce jour sur la région de Marvéjols, je n'aurais à citer que quelques phrases éparses en divers ouvrages. Mais il con- vient, ce me semble, que je dise un mot des travaux qui ont eu pour objet l’étude d'un point quelconque de la Lozère, ou du département en général. On trouve dans «l'Explication de la carte géologique de France (1), » quelques détails sur les environs de Mende. Les grès à meules de l'infralias, le calcaire à gryphées, les marnes du lias et l'oolithe inférieure out été reconnus par MM. Dufrenoy et Elie de Beaumont: auprès de Flora, ils signalent l’oolithe moyenne. Mais ils ne séparent pas les deux étages supérieurs du lias ; au-dessus du calcaire à gryphées, ils placent une prétendue couche à Ammonites Bucklandh ; de plus, ils font à tort descendre lostrea arcuata jusqu’au contact des grès de la base. En 1854, M. Kœchlin-Schlumberger publia une Coupe (4) Explication de la Carte géologique de France, 1. II (1848), p. 706-709. . Û NE géologique des environs de Mende, qui restera un modèle du genre ({). L'auteur divise le lias en quatre étages, et dans chacun d'eux il établit des subdivisions le plus souvent très logi- ques et très naturelles ; sa coupe s'élève jusqu’à loolithe où 1l décrit les couches à fucoïdes, les bancs à Ostrea sublobala et le calcaire à entroques. Ce remarquable travail fit faire à la connaissance des terrains sédimentaires de la Lozère un pas des plus impor- tants. Le Bulletin de la Société géologique de l'année 1859 con- tient un Mémoire de M. Hébert (2), au début duquel est une coupe du ravin des Balmelles, près Villefort. M. Hébert y étudie spécialement les parties inférieures des couches hasiques, et cherche à prouver que les grès de la base ne peuvent rentrer dans le trias, mais font au contraire partie de la zone à Avicula contorta. Un an plus tard, parut, dans le Bullelin de la Société d'agriculture de Mende, une «Esquisse géologique du département de la Lozère, » par M. Dorlhac (3). C'est la monographie la plus détaillée qui ait été publiée sur ce sujet. M. Dorlhac résume les observations de ses devanciers et y joint les résultats de ses propres recherches : il Sétend surtout longuement sur la description des ter- rains azoïques et l'étude des filons métallifères. En ce qui touche les terrains jurassiques, la notice de _ (1) Coupe géologique des environs de Mende, par M. Kœchlin- Schlumberger. — Bull. de la Soc. géol. de France, 2 sér., t. XI, p. 605 (1854). (2) Note sur la limite inférieure du lias et la composition du trias dans le Gard et la Lozère, par M. Hébert. — Bull. de la Soc. géol., 2e sér., t. XVI, p. 905 (4859). (3) Esquisse géologique du département de la Lozère, par M. Dorlhac, mgénieur-directeur des mines. — Bull. de la Soc. d'agriculture, indus- trie, Sciences et arts du département de la Lozère, t. XI, p. 375 (1860). EN © 1 M. Dorlhac n’ajoute guère aux travaux antérieurs. Dans les listes de fossiles, il cite à plusieurs reprises Marvéjols comme lieu de provenance. A M. Dorlhac revient, si je ne me trompe, l'honneur d’avoir le premier décrit les couches tertiaires du Malzieu. Sa consciencieuse ÆEsquisse est accompagnée d’un Essai de carte géologique de la Lozère, le seul publié jusqu'à ce Jour. J'arrive aux deux travaux les plus récents, parus tous deux dans le Bulletin de la Société géologique : je veux parler des Mémoires de M. Jaubert et de M. Dieulafait. M. Jaubert (1) décrit un grand nombre de localités des régions du Bleymard et de Villefort. Au sujet des grès infraliasiques, il arrive aux mêmes conclusions que M. Hébert. Au-dessus, dans les calcaires, il reconnaît la zône à Ammonites planorbis. Il admet l’exis- tence du lias inférieur, mais sans preuves paléontologiques. Quant au lias supérieur, 1l déclare n'avoir pu en constater la présence. Dans Poolithe, qui parait surmonter immé- diatement le lias moyen, il signale les couches à Lima heteromorpha et les calcaires à fucoïdes. M. Dieulafait, dans une importante notice (2) sur l'in- fralias de certains départements méridionaux, s’est longue- ment occupé de la Lozère. Il a parcouru les régions de Villefort, Mende, Florac, Mevyrueis, relevant un grand nombre de coupes, qu'il compare à celles prises par lui dans les départements limitrophes : De ce parallèle, il conclut : 1° Que les grès, dits infraliasiques du Midi, doivent être (1) Note sur les formations jurassiques qui recouvrent le versant nord du mont Lozère, par M. Jaubert. — Bull. de la Soc. géol., 2e sér., t. XXVI, p. 216 (1868). | (2) Zône à Avicula contorta et infralias dans le midi de la France, à l'Ouest du Rhône (Ardèche, Aveyron, Hérault, Lozère), par M. Louis Dieulafait. — Bull de la Soc. géol., 2e sér., t. XXVE, p. 398 (1869). in. Qt ie considérés comine appartenant à létage des grès bigarrés dans la Lozère, l'Ardèche, l'Aveyron et l'Hérault ; | 2 Que, jusqu'à preuve du contraire, on ne saurait admettre la présence du lias inférieur dans l'Aveyron, l'Hérault et la Lozère. | A la suite de la communication de M. Dieulafait, vient une Courte mais lucide réponse de M. Hébert (1) qui, je l'ai déjà dit, ne partage pas la manière de voir du savant professeur de Toulon. Tels sont les principaux travaux publiés jusqu'à ce jour sur la géologie de la Lozère. Mais il est encore un ouvrage que j'aurai souvent à citer dans le cours de cette notice : c’est l'excellent Essai de géologie Aveyronnaïse , dont M. Revnés est l’auteur (2). De tous les départements méridionaux, l'Aveyron est, en effet, celui qui, par la composition du sol, présente les analogies les plus frappantes avec la région étudiée par nous. ENSEMBLE DES TERRAINS. I suffit d’un coup d'œil jeté sur la carte géologique de France ou sur celle qui accompagne la notice de M. Dorlhac, pour avoir une idée assez nette de la répartition des terrains dans la Lozère. Le nord du département est occupé par les granits : à l’est, ils forment un second massif autour duquel les micaschites s'étendent sur une vaste surface. Les couches sédimentaires se montrent dans deux régions bien distinctes. A l’ouest et au sud-ouest, entre l’Aubrac, la Margeride et le mont Lozère, elles remplissent un vaste (4) Observations sur les couches inférieures de l’infralias du midi de la France, par M. Hébert. — Bull. de la Soc. géol. de France, 2 sér., t XXVI, p. 447 (1869). (2) Essai de géologie et de paléontologie Aveyronnaises, par P. Reynès. Paris, 1868. CLMER D bassin au pourtour relevé qui ne fait qu’un avec celui de l'Aveyron. A l'est, au contraire, on ne voit que des lambeaux de terrains secondaires, disposés de part et d'autre d’une ligne qui irait de Mende à Villefort. Marvéjols est situé sur le pourtour nord du bassin de l'ouest, dont les causses des environs de Sainte-Enimie occupent le centre et Meyrueis l'extrémité sud. | La région qui fait l'objet de cette étude forme comme un golfe secondaire, qui va s’avançant entre les pentes de l’Aubrac et les derniers chainons de la Margeride. Les terrains sédimentaires des environs de Marvéjols semblent, à première vue, pouvoir se décomposer en trois grandes subdivisions. A la base, sont des hauteurs aux contours droits, angu- leux. Leur pied est formé de micaschites tourmentés : au- dessus , viennent quelques couches de grès, puis une succession de marnes versicoiores et de calcaires d’abord ocreux, plus haut blanchätres. Le tout est couronné de puis- santes falaises calcaires de couleur sombre. Sur ces falaises repose un vaste ensemble de marnes et de calcaires d’un bleu grisàtre. Les calcaires dominent à la partie inférieure, mais ils sont bientôt remplacés par les marnes dont la structure devient de plus en plus schis- teuse. La pente, d’abord assez douce, devient très raide dans le haut. Du milieu des assises marneuses s'élèvent des éminences calcaires, aux tons chauds et jaunâtres, aux contours par- fois arrondis, mais plus souvent abrupts et profondément fissurés. Là où la série est complète, lon voit plus haut des mas- ses de calcaire sombre, figurant à s'y méprendre d'impo- santes ruines, et enfin des couches encore calcaires, mais blanches et lithographiques. Des trois régions dont je viens d’esquisser l’aspect, la première comprend l'infralias et peut-être le Has inférieur, Î Î la seconde le lias moyen et supérieur, la troisième rentre entièrement dans l’oolithe. Ce qui frappe tout d’abord dans cet ensemble, c’est la parfaite concordance des strates, de la base de l'infralias au sommet des calcaires oxfordiens. Les couches se succèdent parallèles et bien réglées au- dessus des micaschites qui, eux, affectent des inclinaisons, des directions très diverses, et tranchent nettement sur les bancs qui les surmontent. | Ces derniers plongent vers le S. S. E. de 5° à 6° en moyenne. Le géolozue n’a point à y étudier de ces contournements et redressements gigantesques, tels qu'il en admire dans les Alpes ou les Pyrénées. Mais si ces grandioses accidents ne viennent pas apporter un nouvel intérêt à ses recher- ches, d’autre part il y gagne au point de vue de la facilité et de l'exactitude des observations. Ce n’est point à dire néanmoins qu'il n’y ait aux envi- rons de Marvéjols ni brisures du sol, ni plissements de couches. Il me serait facile de citer de nombreux exemples de ces accidents géologiques. Ainsi, auprès de Montredon, au pied du truc de Malevielle, les schistes du lias supérieur viennent lutter par faille con- tre les marnes à Ammonites spinatus Au lias moyen. Ainsi encore, sur la route de Marvéjols à Mende, à côté du village de Boudous, on voit le lias inférieur en contact, d'une part avec le lias supérieur, de l'autre avec linfralias. Dans la vallée du Regourdel, près Marvéjols, l’on peut suivre de curieux plissements des couches infraliasiques. Cest vers la limite des terrains secondaires que l’on observe surtout brisures et redressements. L’altitude des étages va en diminuant du pourtour au centre du bassin : à Valadou, au nord-est de Marvéjols, linfrahias atteint 900%, tandis que, dans la région des causses, l’oolithe n'arrive pas toujours à 1000". En somme, le relief du sol ne peut, en beaucoup de cas, L4 être attribué aux actions dynamiques, et c’est l'érosion qui a vraiment joué le rôle principal. Sur de vastes étendues, elle n’a parfois iaissé des puis- santes assises oolithiques que des témoins, situés à des distances considérables les uns des autres, ou séparés par de profondes vallées. Que n’a-t-elle point dû enlever sur les bords des massifs granitiques, où les brisures dans les couches rendaient son œuvre bien plus aisée! Avant d'entreprendre la description détaillée des étages du lias, je dois dire un mot des schistes micacés qui, je l'ai déjà fait remarquer, supportent directement les couches secondaires. | Leurs caractères ne sont rien moins que fixes : ils pas- sent aux gneiss par des transitions nombreuses, et alter- nent même avec eux. Leurs éléments varient de dimension , de nature, d’aspect. La couleur normale est le gris argenté un peu roussâtre. Mais la partie qui se trouve en contact avec les couches jurassiques est imprégnée de sels de fer qui colorent les feuillets en rouge et vert pâle. En même temps, la propor- tion de mica augmente dans la roche qui devient friable, douce au toucher. M. Jaubert, qui a parfaitement décrit cette curieuse modification (1), l’'attribue aux infiltrations des eaux Juras- siques chargées de matières ferrugineuses. Cette explication est fort plausible à mon avis. La direction des micaschites est loin d'être partout la même : souvent ils présentent des plissements répétés sur une large échelle. Mais ce qui est constant, c'est leur, dis- cordance avec les couches secondaires : on voit, en maint endroit, ces dernières reposer presque horizontales sur la anche des feuillets schisteux. Il serait difficile de déterminer exactement l’âge relatif des micaschites. L'on peut seulement avancer qu'ils sont (1) Bulletin, loco cit., p. 227. antérieurs au silurien, puisque, dans l'Aveyron, M. Reynès (1) a trouvé au-dessus d'eux la partie inférieure de ce terrain. Représenteraient-ils le Laurentien ? La puissance des micaschites est énorme. Quant à celle de l’ensemble des couches Jurassiques, les documents me font malheureusement défaut pour l’évaluer. Je me bornerai à dire que le lias peut atteindre une épaisseur de 250 à 300. | | Je ne parle ici, bien entendu, que du lias de la région de Marvéjols, et le chiffre est très approximatif. Je passerai maintenant à la description particulière du las, renvoyant, pour plus amples détails sur les généralités, aux travaux de M. Dorlhac et de M. Jaubert. DESCRIPTION PARTICULIÈRE DES ÉTAGES. INFRALIAS. M. Jaubert divise l'infralias du Bleymard en trois sous- étages : | 1° Grès. 2° Calcaires brun de capucin. 3° Calcaires lumachelles et marnes. Dans la région de Marvéjols, ces trois termes se retrou- vent. Mais je me hâte de dire que je n’attache qu'une importance secondaire à leur délimitation. Il ne s’agit point en effet ici de zônes paléontologiques : entre les trois sub- divisions de l'infralias les transitions sont le plus souvent insensibles, et l’on doit les considérer comme des coupes provisoires établies en attendant mieux. (1) Loc. cit., p. 14. DEN | LES Ces réserves faites, voici, de bas en haut, les dénomina- tions que j'adopte pour les sous-étages : A. Grès, calcaires gréseux, calcaires et marnes grisâtres. B. Calcaires bruns et ocreux et marnes versicolores. C. Calcaires blancs marneux et dolomitiques et marnes versicolores. À Grès, calcaires gréseux ; calcaires et marnes grisâtres. Au-dessus des micaschistes et en complète discordance avec eux, se trouve presque partout an ensemble de grès, de marnes charbonneuses, et de calcaires gris de fumée. Il serait difficile de donner de ces couches une description concise et exacte. L’observateur qui veut les suivre sur une étendue même peu considérable, leur voit subir des transformations étonnantes. Leur puissance d'abord varie dans de larges proportions. Tantôt (Boudous) les grès mesurent près de 15" d'épaisseur ; tantôt au contraire (Rodemiole, Truc des aspics) ils arrivent à peine à 1», ou même s’atrophiant de plus en plus, laissent venir les calcaires presque au contact des micaschistes. Le plus souvent ces grès sont arkosiques, fréquemment aussi calcarifères. La dei de leurs éléments est peu constante : parfois, surtout vers la base, ils passent à de vrais conglomérats quartzeux (Rodemiole) ; parfois ils sont formés de grains ténus entre lesquels il semble qu'il n'existe aucun ciment (Valadou, Boudous). Rouges, violacés sur certains points (Croix des Anglais), 1ls sont ailleurs jaunâtres ou brun clair (Valadou). En diverses localités (Côteau de Raz, près Chirac) ils renferment, dans une pâte d’un beau vert, des grains anguleux de quartz rougeûtre : le tout si évidemment emprunté aux micaschis- LAURE 1 tes sur lesquels ils reposent que l'œil, à quelque distance, peut à peine les en séparer. Les grès se relient visiblement aux calcaires qui les sur- montent : ils y passent par des bancs où l’on voit des grains de quartz empâtés par un ciment calcaire brunâtre et abondant. Bien mieux, on peut les voir conservant leurs caractères de grès à meules alterner avec les calcaires bruns dont nous parlerons tout à l'heure (Vallon des Redondes, près Marvéjols) Entre les bancs de grès et au-dessus d'eux , comme entre les calcaires gris de fumée que l’on remarque en cer- taines localités, se trouvent des lits assez minces de marnes grises; friables, sèches, micacées, très charbonneuses, et sur lesquelles on peut souvent observer des efflorescences nitreuses. ' Le charbon ne se rencontre pas seulement dans les mar- nes : il abonde encore dans les grès et calcaires de ce sous- étage. Les végétaux qui l'ont fourni n’ont-laissé le plus souvent que des empreintes indéterminables. Cependant on à pu recueillir dans les grès des fougères assez bien conservées, et dans les calcaires gris (Raz) de petites bran- ches qui semblent appartenir à quelque brachyphyllidée. Quant aux fossiles animaux, ils sont des plus rares, et en mauVais état. Malgré de longues et patientes recherches, nous n'avons encore pu en découvrir que dans le vallon même de Marvéjols. Je crois devoir donner une coupe de la base de l'infralias, relevée sur le point où se montrent les fossiles en question. COUPE DE LA BASE DE L’INFRALIAS AU COTEAU DE RODEMIOLE (Sud du vallon de Marvéjols). 1° Grès jaunâtre calcarifère, assez grossier, avec nom- breux débris végétaux. Il devient, en s’élevant, de plus en 1] ER plus fin et caicarifère et de moins en moins chargé de grains de quartz. Il passe dans le haut aux calcaires du sous- étage B— 1», | 2. Marne grise, micacée, friable, charbonneuse avec fossiles : Natica Rhætica (Gümb.). Mytilus Ervensis (Stoppani). Littorina clathrata (Desh.). Cypricardia porrecta (Dumort). Gervillia præcursor (Quenst.). Corbula Ludovicæ (Terq.). Mytilus minutus (Goldf.). Turritella... .…. ane à — minimus (SOW.). = 0,17. 3. Calcaire marneux jaune, friable, avec paillettes et charbon; mêmes fossiles que dans la marne — 0,18. 4. Grès calcaire grossier, jaune-grisàtre = 0,03. 5. Grès calcarifère peu charbonneux, gris clair, fin; il tranche nettement sur les autres couches = 0,40. 6. Calcaire marneux gris-jaunâtre, avec gros grains de quartz, paillettes et charbons = 0,38. 7. Grès jaune-brun à pâte calcaire avec gros grains de quartz translucide. Rares traces de bivalves = 0,10, 8. Grès et conglomérats violacés ou noirâtres, quartzeux avec élément calcaire. Forte proportion de matières char- bonneuses. Au dessus et au-dessous de ces grès, mince couche charbonneuse feuilletée avec quelques mytili indéterminables = 0,15. Schistes micacés verdâtres. Les fossiles ainsi placés à moins d'un mètre au-dessus des micaschites sont à l'état de moules calcaires souvent déformés, et dès lors difficiles à reconnaitre. Ne me fiant pas pour leur détermination à mes pro- PSE jy Nr pres et bien insuffisantes lumières, j'en ai envoyé quelques- uns à M. Dumortier, le savant auteur des Etudes sur le lias du bassin du Rhône. Cet éminent paléontologiste a répondu à ma demande, avec une bienveillance dont je ne saurais trop le remercier. _ Je lui dois non-seulement la détermination de mes espèces infraliasiques , mais encore celle de beaucoup d'échantillons du lias proprement dit, ainsi que de précieux renseignements. Si maintenant l’on jette un regard sur la liste des fossiles trouvés dans la marne n° 2, on verra qu’elle comprend, réunis dans une mince couche, des types propres à cha- cune des trois zones du bassin du Rhône. — En effet, dans cette région, la Gervillia prœcursor se rencontre avec PAvicula contorta ; les Cypricardia porrecta et Corbula Ludovicæ, avec l Amm. planorbis ; la Littorina clathrata avec l’Amm. angulatus. Mais remarquons tout de suite que ce ne sont point là des fossiles absolument caractéristiques : la Gervillia se montre parfois dans des couches moins anciennes que la base de l’infralias. La Corbula est, dans l’est de la France, associée à l'Amm. angulatus ; à l'inverse, la Litiorina des- cend, même dans le bassin du pat au niveau de lAmin: planorbis. Pour ne prendre que les quatre espèces les plus répan- dues dans la couche de Rodemiole, et qui sont : Mytilus minutus, | Cypricardia porrecta, Natica Rhætica, | Corbula Ludovicæ, on voit que les deux derniers fossiles ne descendent jamais au-dessous du niveau de l’Amm. planorbis. Pour le Mytilus, il est vrai qu'on le trouve souvent avec PAvicula contorta ; mais en certaines régions, en Normandie, 2 — 18 — par exemple (1), il est tros abondant dans des couches plus élevées, accompagné de : Corbula Ludovicæ, Ostrea anomala, Diademopsis seriale, etc. Quant à la Natica, elle a été rencontrée au niveau de l’Avicula, mais fort loin de nos contrées, et je ne pense pas que ce soit une espèce bien caractéristique : j'en dirai de même des Mytih Ervensis et minimus, qui du reste sont très rares, comme aussi la Gervillia et la Laittorina. De la discussion qui précède, il semble donc ressortir que la couche de marne n° 2 et celle de calcaire n° 3 appartiennent à la base de la zone à Ammon. planorbis, ou tout au plus à la partie supérieure de la zone à Avicula contorta. C'est là une question de peu d'importance qui reste à résoudre : entre la base d’une zone et la partie supérieure de l’autre la différence est souvent si minime! Toujours est-il que le sous-étage des calcaires bruns, placé au-dessus de celui que je viens de décrire, doit ren- trer tout entier dans la zone moyenne de linfralias. Dans la région de Villefort et du Bleymard, M. Jaubert a en effet trouvé l’Amm. planorbis dans des couches bien plus élevées que les calcaires bruns (2). Je reviendrai bientôt à la question si discutée de l’âge des grès de la base. Caleaires bruns et ocreux et marnes versicolores. Au-dessus des couches que je viens de décrire, com- mence ce que J'appellerai le règne définitif des marnes et des calcaires. (4) Deslongchamps, Etudes sur les étages jurassiques inférieurs de la Normandie, p. 18-19 (4864). (2) Jaubert, loc. cit., p. 247, 259. um 19 = La deuxième subdivision de l'infralias est en effet ( sauf de rares exceptions, V. p. 14) essentiellement composée de calcaires bruns et ocreux, marneux ou magnésiens, et de marnes où dominent deux teintes : le vert et le violet passant au rouge vineux. A la base, les calcaires sont foncés, en bancs épais, durs, veinés de spath laiteux : ils se débitent en fragments polyédriques. En s’'élevant, l’on voit la coloration pälir de plus en plus _et arriver au jaune-grisàtre. En même temps, les bancs, plus minces, tendent à prendre la structure en plaquettes. Quant aux marnes, dont limportance va croissant, elles sont tantôt assez tenaces et se divisent sous le choc en petits fragments à arètes vives; tantôt, au contraire, fria- bles et schisteuses. Souvent on y remarque de singulières concrétions calcaires aux couleurs éclatantes et variées ; parfois aussi de minces plaquettes mi-translucides où domine l'élément nitreux. Dans les couches que je viens de décrire, et que l’on retrouve à Mende comme au Bleymard, je n’ai encore trouvé aucun vestige de fossiles. Néanmoins, on peut aisé- ment arriver à déterminer lenr âge, ainsi que je lai dit plus haut. La puissance du sous-étage B atteint parfois 307. C Calcaïres blancs marneux et dolomitiques et marnes versicolores. Les marnes continuent ici à alterner avec les calcaires : ceux-ci sont blanchätres, marneux oudolomitiques, souvent fissiles et rubannés (1). (1) Ils fournissent la pierre de taille la plus estimée dans la région. — 90 — Certains bancs sont pétris de petits bivalves à l’état spathique dont les sections apparaissent en courbes bril- lantes sur le fond mat des cassures de la roche. Ce niveau fossilifère est très remarquable : les échantillons qui en proviennent offrent une surprenante ressemblance avec les plaquettes à tæniodon et schizodus des couches à Avicula contorla; telle fut l'impression de notre ami et collègue M. Magnan, à qui jen montrai quelques-uns ; telle a été aussi depuis celle de M. E. Dumortier. Cependant il n’y a pasle plus léger doute à avoir sur la position des calcaires blancs : il s’agit ici d’un horizon puissant, constant et placé à une grande hauteur au-dessus des grès de la base. On en jugera en parcourant les deux coupes générales que je vais donner, et dont la première fut relevée par mon frère, il y a plus de trois ans. COUPE DE L’INFRALIAS A LAVALETTE, A L’O. DE MARVÉJOLS. A. Plateau. Calcaires grisâtres et jaunâtres et games versicolores — 17", 2. Calcaire sableux jaunâtre avec nombreux moules de bivalves (Gervillia..… mytilus) — 1,30. 3. Marnes versicolores — 0,40. 4. Calcaire marneux, blanc sale — 414", 5. Calcaires brunâtres ou grisätres alternant avec des marnes vertes — 13". 6. Calcaire blanc en plaquettes, pétri de petits bivalves (tæniodon.…. schizodus) — 6". 7. Calcaires friables et marnes bleuâtres — 5". 8. Calcaire gris, sableux — 0",60. 9. Calcaires ocreux en bancs minces alternant avec marnes — 3", 10. Marnes versicolores, assez tenaces, se débitant en Ah fragments polyèdriques avec petites plaquettes nitreuses. — Quelques assises calcaires — 12", 11. Banc calcaire assez compacte, formant barre — 2. 12. Calcaires ocreux, marneux, friables, veinés de Spath, alternant avec marnes versicolores — 419». 13. Arkoses et grès moyennement fins, à ciment brun- jaune empâtant des grains de quartz laiteux OU TOSÉ — 3": Micaschistes. COUPE DE L'INFRALIAS AU COTEAU DE RAZ, PRÈS CHIRAC. À . Calcaire assez compacte, gris, à parties verdätres—0",20 2. Calcaire compacte, gris — 0,60. 3. Calcaire gris-brun, avec veinules spathiques : il est marneux et plus clair dans le bas — 0,70. k. Marne vert-grisätre — 0,40. 5. Calcaires marneux blanchâtres et marnes versico- . Jores; vers le bas, les calcaires sont pétris de petits bivalves (tæniodon...) — 5". 6. Calcaires et marnes stériles — 3,80. 7. Calcaire gris, dur, assez compacte — 0",40. 8. Calcaires marneux et dolomitiques, blancs ou jaunä- tres, feuilletés, fragmentaires ou moyennement nec — Marnes 1 TUTO M0 9. Calcaires ocreux et bruns et marnes panachées, 15%, 10. Marnes feuilletées — 0,75. 11. Marne solide, d’un gris-verdätre — 0,40. 12. Calcaire dur, gris jaunissant à l'air — 2, 13. Marne grise charbonneuse — 0",20. A4. Calcaire jaunätre — 0,90. — 99 — 15. Calcaire très dur, gréseux (à grains de quartz one), charbonneux — 0,30. 16. Calcaire gris, dolomitique, jaunissant à l'air — 2», 17. Marnes charbonneuses d’un gris bleuâtre — 0,25. 18. Calcaire gris, assez compacte, avec charbon — 0,20. 19. Marne charbonneuse — 1". 20. Grès calcarifère grisâtre, à grains roses — 0,42. 24. Marnes versicolores — 0,40. 22. Grès à pâte verte, avec gros grains de quartz rose ; faiblement calcarifère — 1". Micaschistes rougeûtres. J'ai retrouvé l'horizon des petits bivalves (tæniodon) auprès de Mende, dans le Valdonez, au pied des monts Lozères. En certaines localités (Truc des Aspics, Raz) j'ai recueilli à ce niveau quelques petits gastéropodes turriculés, mais en si petit nombre, que je n’en puis tirer aucun argument pour placer ces couches dans la zone à Amm. angulatus. Quant au banc à Gervillies de la coupe de Lavalette, il m'est encore impossible de décider ce qu’il peut bien repré- senter; au reste, cet horizon est bien moins constant que l’autre. Il me reste à exposer maintenant les motifs qui m'ont porté à limiter l’infralias comme je l'ai fait dans les pages précédentes. C'est ici le moment de discuter le problème de l’âge des grès à meules. En abordant cette question, qui a soulevé de si nom- breuses et si vives controverses, j'écarterai tout ce qui pourrait ressembler à des querelles de principes ou d'école. Il n'est pas douteux que, dans bien des cas, les savants auteurs de la Carte géologique de France n'aient fait rentrer NN deu à tort dans le lias des couches triasiques : la chose a été surabondamment prouvée. Mais, d'autre part, je ne vois pas pourquoi l’on proscrirait à tout jamais l'expression de grès infraliasiques du Midi, pourquoi l'on poserait cette règle absolue que tout ce qui est grès vers la base des terrains jurassiques doit être réuni au trias. Il ne s’agit ici que de faits et non de théories, et c’est une observation très impartiale qui m’a porté à adopter à cet _ égard les vues de M. Hébert. Aujourd'hui encore, les argu- ments qu’il présente à l'appui me semblent difficiles à détruire (1). Que leur objecte-t-on ? D'abord que les grès, dits infraliasiques , supportent, sans changer d'aspect, les dépôts les plus divers (2). Cela ne prouve qu’une chose : c’est que leur composition dépend bien plus de la nature des matériaux mis en œuvre, matériaux presque partout les mêmes, que de l’âge de leur dépôt. Qu’indique en effet leur analyse ? Qu'ils sont formés de particules siliceuses et feldspathi- ques, variables de volume, diversement teintées, mais empruntées bien certainement aux roches anciennes sur lesquelles ils reposent. On aurait pu, même à priori, prévoir ce résultat: Les eaux jurassiques ont eu à opérer tout d’abord un nivellement : la mer nouvelle s’est fait un lit. Alors des phénomènes se sont produits, qui se répéteraient encore si les flots envahissaient de nos jours les régions où domi- nent les formations granitiques et schisteuses. Là où les eaux ont trouvé d’abondants débris à rema- nier, ou quelque vaste dépression à combler, de puissan- tes couches de grès se sont promptement accumulées. Ailleurs, au contraire, les matériaux étant rares, l’action (1) Hébert, loc. cit. — Bull., t. XXVI, p. 449 et suiv. (2) Dieulafait, loc. cit., p. 441-446. à Ê aà détritique a eu moins d'activité, et les strates calcaires se montrent presque à la base de la série. Toutes les variations que présentent les couches fférieulée s'expliquent ainsi aisément, en n'invoquant que les causes actuelles, et sans rien préjuger de l'âge de leur formation. Entrant plus avant dans la question, il serait aisé de prouver que ces couches ont avec les calcaires qui les surmontent d'évidentes relations. Des transitions parfois insensibles les unissent; on les voit même alterner ensemble. Il serait fastidieux de répéter ici ce que ie dit plus haut ‘ à ce sujet. L'on fera encore remarquer que l’Avicula contorta a été trouvée en Lozère au-dessus des grès. Je ne saurais le nier. Le fait est pourtant des plus rares : il n'a été constaté qu'une fois par M. Dieulafait, loin de la région dont je m'occupe. Mais d’ailleurs il faut éviter un excès qui serait de consi- dérer les zônes paléontologiques comme des plans sans épaisseur ; laissons cette fiction à la géométrie. Je m’ex- plique : si lon trouve lAvicula contorta au-dessus d’un ensemble quelque peu puissant de grès, de cargneules, d’argiles bariolées et gypsifères, que l’on range ces couches dans le trias, je le comprends. Mais lorsque, entre lassise où se montre le rare fossile et la base des terrains secon- daires il n’y a que quelques mètres à peine, quelques centimètres parfois de grès et de calcaires variables, dont le dépôt n’a dû exiger qu’un temps relativement assez court, comment voir dans ces strates un trias en miniature ? Comment arriver à les assimiler aux grès observés dans d’autres départements où la formation triasique est bien développée? Sur quelles données fonder ce parallèle, sinon sur une vague ressemblance dans l'aspect, la composition ? Caractères de mince valeur dans une contrée où, par exemple, le lias moyen ici marne bleue (Marvéols), est plus loin grès brunâtre (le Bleymard)', et où dès lors, SAGE comme le dit fort bien M. Hébert, il ne faut guère faire de cas des données minéralogiques ! Je ne pousserai pas plus loin cette discussion déjà trop longue. Pour me résumer en un mot, je dirai qu'à mon avis les grès infraliasiques de la région de A IOE méri- Le cette dénomination. J'ai provisoirement limité linfralias dans le haut à la disparition des marnes versicolores, et à l’apparition des gros bancs de calcaire compacte qui forment falaise au sommet des côteaux. On verra dans les pages qui vont suivre combien cette démarcation établie en l’absence de toute donnée paléontologique est hasardée, et quels doutes il me reste à cet égard. Limité comme je viens de le dire, Pinfralias atteint de 100 à 425", IX LIAS INFÉRIEUR. On a discuté et l’on discute encore sur les limites à assi- gner à l'infralias. Mais à propos du lias inférieur, il va s'agir d’une question bien autrement capitale : l’existence même de cet étage a été contestée. Cela n’a rien qui doive nous étonner; car, on va le voir, le pour et le contre ne sont insoutenables ni l’un ni l’autre sur cet obscur chapitre de la géologie Lozérienne. Si les caractères minéralogiques suffisaient pour séparer deux étages, le doute ne serait pas permis. Décrivons en effet brièvement les couches qui surmontent les calcaires : blancs à {æmodon. Au-dessus, on voitles marnes disparaître brusquement ; les calcaires perdent leur élément marneux et rembrunis- sent assez fortement. On a alors quelques mètres d’une roche compacte, gris-noisette, dendritifère. ss GG = Plus haut, ce sont des bancs épais d’un calcaire gris de fer, rugueux et jaunissant à l'extérieur ; les fossiles s’y déta - chent en brun rouille sur le fond de la roche, ou font saillie aux surfaces exposées à l'air. Cà et là de nombreux pointil- lements de rouille. Souvent aussi ces calcaires gris sont largement tachés de bleu foncé (1) (les Bories, Pailhers). La teinte bleue envahit même parfois toute la roche : elle est alors très dure, saccharoïde, à cassure conchoïde ou ridée; les fentes des strates sont tapissées de cristaux calcaires (Pont de Grèzes). En s’élevant dans la série des couches, on voit l'élément spathique abonder de plus en plus. La roche devient subla- mellaire, et présente aux surfaces vives de nombreuses facettes miroitantes ; la couleur varie du jaune brun au gris- rosé. Elle se divise en dalles rugueuses, sonores, fragiles, qui jonchent les petits plateaux (Rodemiole, Truc des Aspics). Parfois les calcaires prennent une texture confusément concrétionnée (les Bories), ou deviennent même franche- ment oolithiques (Lachamp). Au-dessus des couches décrites jusqu'ici, les bancs perdent peu à peu leurs caractères distinctifs : rugueux, sublamellaires et jaunâätres d’abord, ils gagnent de plus en plus en finesse ; leur aspect ternit par l’apparition de l'élé- ment marneux, leur teinte devient bleutée. Ils passent enfin tout-à-fait aux calcaires du lias moyen. Dans les assises dont je viens de donner un aperçu, le silex hornstein abonde: il sy montre en blocs lenticulai- res (2) d’un blanc sale, jaunes ou rouges. On y trouve aussi de petites géodes de quartz hyalin et des concrétions de chalcédoine. Des rognons de limonite et des lignites s'y rencontrent assez fréquemment. (4) La roche était sans doute d’abord entièrement bleue, et c’est une décoloration allant de la surface au centre qui n’a laissé que des taches de cette couleur. (2) Au-dessus de Valadou, au N. E. de Marvéjols, l'érosion a fait disparaître les parties calcaires de l'étage, et d'énormes blocs de silex jonchant le sol témoignent seuls de son existence passée. Le qu Eliminant donc tout ce qui n’est que facies local ou accident, je puis dire : Entre les calcaires blancs de linfralias et la zone à Amm. fimbriatus du lias moyen, on trouve aux environs de Marvéjols 30 à 40 de calcaires durs, compactes, saccha- roïdes ou sublamellaires, à teintes sombres et renfermant de nombreux amas de silex et de limonite. Ces calcaires en bancs bien réglés se succèdent sans interposition de marnes. Voilà certes un ensemble de couches bien caractérisé. On les distmgue à première vue de celles qu’elles dominent comme de celles qui les surmontent : les carriers du pays eux-mêmes ne s’y trompent pas. En l'absence de données paléontologiques, il n’y aurait rien que de très naturel à considérer ces calcaires comme appartenant au lias inférieur. N'y retrouve-t-on pas en effet les calcaires durs, subla- mellaires qui, dans le bassin du Rhône, renferment l’'Amm. oæynotus et lAmm. PBucklandi (1) ? N'y voit-on pas aussi les analogues de ces calcaires compactes, sonores, rugueux, avec silex et petits fossiles jaune-rouille sur fond gris, que M. Magnan décrit dans le lias inférieur du S. O. du plateau central (2)? Mais si l’on aborde la question au point de vue paléonto- logique, elle devient douteuse ; et l'opinion de MM. Jaubert et Dieulafait, qui seraient portés à voir dans les falaises calcaires la zone à Amm. angulatus, peut invoquer des arguments, sinon décisifs, du moins très-spécieux. La faune de l'étage est assez riche à certains niveaux, mais il est rare que les fossiles soient déterminables. (1) Dumortier, Etudes paléontologiques sur les dépôts jurassiques du bassin du Rhône, 2e partie, Lias inférieur (1867), p. 5-95. (2) H. Magnan, Etude sur les formations secondaires des bords S. O. du plateau central. — Bulletin de la Soc. d'hist. naturelle de Toulouse, 3e année (1869), p. 65. D | Sur les calcaires gris de fer se détachent en brun des coupes de gastéropodes turriculés de taille moyenne, et de bivalves. Plus haut, apparaissent en abondance les pentacrines (P. scalaris ?), et avec eux des fragments de coque et de baguettes d’oursins. Dans les calcaires sublamellaires (Bori del Biau) se retrouve ce remarquable horizon de polypiers signalé au Bergougnon par M. Jaubert (1), et que M. Dieulafait (2) dit avoir reconnu dans tout le Languedoc. Mais ici les zoophytes ne sont pas accompagnés de ces petits gastéropodes si nombreux au Bergougnon, et dont la présence a porté M. Jaubert à ranger ces couches dans la zone à Amm. angulatus. En revanche, on trouve avec eux de petits tubes régulièrement criblés de trous et qui pourraient bien être des foraminifères monostègues. Quant aux polypiers, ce sont des Eunomia indétermina- bles, et surtout des Cyathocænia globosa (Duncan) (3), espèce recueillie jusqu'ici dans la zone à Amm. Bucklandi. A la surface des calcaires, lon voit aussi souvent en relief de petites ramifications spathiques qui rappellent singulièrement certaines tigelles de Neuropora, et des valves d’huîtres peu distinctes qui pourraient être l'Ostrea irregularis. Enfin, dans les calcaires pisolithiques de Lachamp j'ai trouvé le Pecten Hehli (d’Orb.), accompagné de pentacrines et des petits foraminifères dont j'ai parlé plus haut; sur un autre point (Truc des Aspics), dans un bloc de silex, J'ai détaché une Spiriferina Walcotii (Sow. sp.). | Groupant et comparant ces diverses données paléontolo- giques, j'en arrive à cette conclusion : aucun des fossiles (1) Bulletin, loc. cit., p. 258. (2) Bulletin, loc. cit., p. 438. (3) La détermination de ce fossile est une de celles que je doisà | M. Dumortier. PL |) RNCS trouvés par moi ne caractérise suffisamment le lias inférieur ou l'infralias. Le Pecten Hehli se rencontre en cffet dans ces deux étages ; il en est de même des Weuropora. Les oursins, les pentacrines, les foraminifères- n’ont qu’une très vague signification. Restent les polypiers : on sait qu'ils abondent générale- ment dans la zone à Amm. angulatus ; mais, d’autre part, la seule espèce déterminée a été trouvée ailleurs avec ’Amm. Bucklandi. La Spiriferina Walcotu est rare, l’Ostrea 1rregularis dou- teuse dans les couches que j'ai décrites. Ainsi, incertitude au point de vue paléontologique. Si maintenant j'étudie la faune des strates supérieures, de celles qui supportent directement le lias moyen à bélemnites, la même difficulté va surgir. Aux environs de Marvéjols, on n’y trouve aucun fossile autre que la Spiriferina Walcotüi, la Rhynchonella variabilis et ces valves rapportées avec doute à l’Ostrea irregularis Mais auprès de Mende, si les caractères minéralogiques de l'étage sont moins accusés, en revanche la faune est plus riche. Je l'ai surtout étudiée dans la Valdonez, sur la lisière du bois de Blachères. | On trouve là d’abord le calcaire à gryphées pétri d’Ostrea obliqua (Goldf.); dans le haut de ce calcaire se montrent quelques rares Ostrea cymbium (Lam.), et même lOstrea gigantea (Sow.) Est-ce là le commencement du lias moyen? On serait tenté de le croire. Mais au-dessus viennent ces couches, nommées par M. Kæchlin zone de transition (4). La roche a déjà un aspect hasien, bien que sa texture soit encore quelque peu saccharoïde: on y trouve avec de (4) Kæchlin, doc. cit., p. 643. 2 lg grands mytili etle Pecten disciformis (Schübl.) deux ammo- nonites de la zone à Amm. oxynotus du bassin du Rhône : l’'Ammonites vilicola (Dumort.) et l'Ammonites Edmund (Dumort.) Quelle est la signification de ces fossiles ? Tous, à l'exception de l’Ostrea cymbium et des Ammoni- tes, appartiennent à des epèces neutres que l’on peut aussi bien rattacher au lias moyen qu’au lias inférieur. C'est ainsi que l'Ostrea obliqua (Goldf. sp.) se trouve tout aussi abondante dans le bassin du Rhône, vers le haut de la zone à Amm. oxynotus, qu’à la base de la zone à Belemnites clavatus. (1) A plus forte raison en dirai-je autant du Pecten disci- formis, de la Lima punctata, de la Rhynchonella variabi- lis, etc. Que reste-t-il donc? L’Ostrea cymbium ; mais on ne le trouve qu'en petit nombre, vers la partie supérieure des couches, et cependant au-dessous de deux ammonites que l’on a regardées jusqu'ici comme spéciales au lias inférieur. De cette discussion il ressort que, si l’ensemble des strates que je viens de décrire est fort bien caractérisé au point de vue lithologique, on ne peut au contraire, lors- qu'on examine sa faune, prendre un parti tranché au sujet de son âge géologique. Faut-il, comme le voudrait M. Dieulafait (2), diviser cet ensemble et le réunir partie au lias moyen, partie à l'infralias ? Ou bien doit-on y voir aussi un lias inférieur, confus, atrophié sans doute, mais néanmoins réel ? Je répondrai simplement : « Je ne sais. » J'avoue pourtant qu'il me répugne d'admettre la dispari- tion totale du lias inférieur entre un lias moyen complet et (4) Dumortier, Etudes paléontologiques sur les dépôts Jura du bassin du Rhône, 3° partie : Lias moyen, p. 142. (2) Dieulafait, loc. cit., p, 439, seat DURS un infralias énorme de puissance : hiatus gigantesque qu'aucune discordance ne viendrait révéler. Le même scrupule a tourmenté M. Jaubert et M. Reynès. Le premier (1) voit le lias inférieur dans un calcaire brun, stérile, géodique et veiné de barytine qui se développe auprès de Villelort, au-dessous du lias moyen. Mais, à l'appui de son opinion, il n'apporte guère d’autre argument que celui de la place occupée par cette formation. Dans l'Aveyron (2), M. Reynès remarque que la partie supérieure de l’infralias affecte une teinte bleuâtre : il y a trouvé la Spiriferina Walcotii et le Plagiostoma giganteum ; il croit dès lors pouvoir rapporter ces couches au lias infé- rieur. Mais ce sont là, il faut le reconnaître, des caractères bien peu significatifs. Quant à moi, je crois devoir accompagner d’un point de doute très accentué la dénomination que j'impose à cet étage, et sans croire à l'absence complète du lias inférieur, je puis dire qu'en tout cas il ne joue qu’un assez mince rôle dans la Lozère. .M. Dieulafait regarde la disparition du lias inférieur comme un caractère propre aux terrains jJurassiques de Aveyron, la Lozère et l'Hérault. Parmi les arguments qu'il met en avant, il en est un dont je dois dire un mot en terminant. Si l’on mesure, dit-il, dans le Languedoc l'épaisseur des couches qui séparent la zone à Amm. planorbis de la zone à Amm. fimbriatus, on arrive au résultat suivant : dans les régions où le lias inférieur existe sans nul doute, l’épais- seur est plus considérable que dans celles où sa présence est contestée. Mais, d'autre part, si l’on retranche des coupes le cal- - caire à gryphées, là où le lias est complet, les proportions sont renversées, la différence se produit en sens inverse. (1) Jaubert, loc. cit., p. 230-260. (2) Reynès, loc. cit., p. 43. MAL: 1 ras J'avoue que je ne saisis pas la valeur de cet argument : le second résultat me semble ôter toute importance au pre- mier, et prouver au contraire que, puisque en négligeant le lias inférieur dans la première région on arrive à renverser les proportions, c’est que ce terme du lias existe aussi, quoique atrophié, dans la seconde région. En somme, c'est là un genre de preuves à double face, que lon peut employer pour soutenir les deux opinions opposées. Aux environs de Marvéjols, la puissance des couches que je viens de décrire peut arriver jusqu'à 35 et 40m, III LIAS MOYEN. Du seul étage dont l'existence soit problématique dans la Lozère, je passe à celui qui y est peut-être le mieux connu. Je pourrai désormais établir dans les couches des subdi- visions nettement délimitées, et plusieurs fois J'aurai l’oc- casion de reconnaitre ce que j'appellerai des niveaux classiques. Comme à Mende, comme dans l'Aveyron, comme dans le bassin du Rhône (1), le lias moyen est, auprès de Marvé- jols, essentiellement calcaréo-marneux. Il n’en est pas de même dans la région de Villefort où cet étage est représenté par des calcaires roux et des grès « souvent assez grossiers (2): c'est là un fait assez anormal et qui ne contribue pas peu à donner à l'Est de la Lozère une physionomie géologique particulière. (4) V. Kæchlin, Reynès, etc., loc. cit. V. Dumortier : Lias moyen, p. 348. (2) Jaubert, Bulletin, loc. cit., p. 240, 243, 260. LÉ à Re CU LEN Avec Kæchlin, avec M. Reynès, je subdiviserai le las moyen en deux grandes zones, séparées par leurs caracte- res minéralogiques aussi bien que par la paléontologie. À Zone de i Ammonites fimbriatus. Je ne recommencerai point ici les discussions sur Îles limites à assigner au lias moyen. Laissant de côté toutes les couches douteuses, je ferai commencer la zone à partir de celles dont l’âge est bien certain. Ce sont d’abord des strates épaisses d’un calcaire bleu- gris, déjà marneux et assez attaquable par les agents atmosphériques, mais cependant fort dur (1). Les fossiles y sont rares : Pholadomyes, parmi lesquelles la Pholadomya Hausmanni (Goldf), Lina punctata (Sow.), etc. L’Amm. fimbriatus ne se montre avec abondance que plus haut, _ mais on trouve à ce niveau inférieur des fragments d’une grosse ammonite, voisine del'Anm. quadrarmalus (Dumort). Le Belemnites niger commence à apparaitre. Bientôt, en s’élevant, l'on rencontre des marnes : d’abord alternant en minces its avec les calcaires, elles gagnent peu à peu en importance ; enfin, à 10 ou 15" de la base, elles règnent à peu près seules et l'on entre dans la zone supérieure. Au reste, entre les marnes et les calcaires, les transi- tions sont peu sensibles ; en s’effritant, les calcaires don- nent de vraies marnes, où l’on voit encore enclavés des fragments de roche non altérés. (1) Ce calcaire, appelé blaou dans le pays, est employé comme pierre à bâtir; mais il est loin de valoir les calcaires inférieurs ou ceux de loolithe. 3 EE re Les fossiles se trouvent aussi bien dans les marnes que dans les calcaires. Ils sont à l’état de moules assez mal conservés et de grande dimension. Voici la liste des plus répandus : Belemnites niger (List.). Pecten disciformis (Schübl.). Ammonites fimbriatus (Sow.). — textorius (Schloth.). — hybridus (d'Orb.'. Lima gigantea (Sow.). — capricornus — punctata (Sow.). ( Schloth. ). — succincta (Schloth). — Henleyi (var. Bech21) Pholadomya Hausmanni (Sow.). (Goldf.). — Normanianus Fragments d’oursins..... (d’Orb. ). Remarquable par la taille de ses céphalopodes, cette zone ne l'est pas moins par la constance de ses caractères. On la retrouve identique à Mende et dans l'Aveyron. On peut la suivre toujours reconnaissable dans le Gard, le bassin du Rhône, le S. O. du plateau central, la Bourgogne et en bien d’autres régions. Zone de l'Ammonites margaritatus. Ici les marnes prédominent entièrement : elles sont d’un gris bleuâtre, assez pyriteuses, friables et feuilletées. Les calcaires n'apparaissent que sous la forme de gros blocs sphéroïdaux très aplatis, disposés à de grands inter- valles en cordons parallèles à la stratification. La roche est bleue, toujours assez fortement imprégnée de pyrite, et jaunit à l'air. Be en me ec PO ve La faune de cette subdivision du lias moyen est riche et bien connue. En voici le tableau : Vertèbres d'ichthyosaurus. Serpula. Belemnites niger (List.). — Fournelianus (d'Orb.) — clavatus (Blainv.). Ammonites margaritatus (Montf.). — spinatus (Brug.). — Algovianus (Oppel.). — Nilssoni (Hébert). — Mimatensis (d'Orb.). — subarmatus (Young). — Ragazzonü? (Hauer) Pleurotomaria Anglica (Defr.), — expansa (SOW. Sp.). : Pecten œquivalvis (Sow.). — textorius (Schloth.). Plicatula spinosa (Sow). Leda palmæ (Sow. sp.). Pholadomyc Z'ieteni (Ziet. sp.). Pleuromya unioides (Goldf.). — Galathæa (Agass.). Terebratula Jauberti (Deslongch) — punctata (Davids). — subnumismalis (Davids). Spiriferina Hartmann (Ziet. sp.) — pinguis (Liet. sp.). Rhynchonella liasica (Reynès). — variabilis (Schlot. sp.) — acuta (SOW.). Pentacrinus basaltiformis (Schlot.). — tuberculatus (Mill.) — fasciculosus (Sch].). Millericrinus. . .... | Cidaris (fragments). Enaulofungia Papareli (de From.). Ces fossiles sont, les uns à l’état spathique (Bélemnites), les autres pyritisés (Ammonites). M. Revynès (1) reconnait dans la zone à Amm. margari- tatus de l'Aveyron trois niveaux qui sont ceux de : L’'Ammonites spinatus. L'Ammonites margaritatus. L'Ammonites Ragazzont. Je n'ai trouvé ce dernier que rarement : encore les échantillons étaient-ils bien peu sûrs. Il me serait donc difficile de dire quel niveau il occupe dans la Lozère. (4) Reynès, loc. cit., p. 53. A | La 225 La base de la zone à Amm. margarilatus est plutôt caractérisée aux environs de Marvéjols par la présence du Belemnites clavatus, et l'abondance des Brachiopodes ; les Ammonites n'y sont pas communes. Plus haut vient le niveau PrOPFORE dit de l’Amm. margaritatus. Enfin, au sommet de la zone, l’'Amm. spinatus se montre accompagné de deux bivalves spéciaux : les Pleuromya unioïides et Galathæa. Je redirai, à propos de lhorizon de lAmm. spinatus , ce que j'ai dit pour celui de l’'Amm. fimbriatus. Son étendue géographique est encore plus vaste. Ce n’est pas seulement dans le Midi ou dans le bassin du. Rhône qu’on le peut suivre : on le retrouve jusqu’en Nor- mandie, et même au-delà des Alpes, en Allemagne. Quant à l'Amm. margaritatus, 1 se rencontre partout, mais à un niveau moins spécial : en certaines régions, il est associé aux Ammon. fimbriatus, capricornus, etc. Je l'ai recueilli, bien rarement, dans la zone inférieure. Les fossiles végétaux du lias moyen offrent peu d'intérêt. Ce sont de Ab lignites ; ou encore des fragments de silex ou de calcaire pseudomorphiques, le tout générale- ment mal conservé. La puissance du lias moyen peut atteindre 55"; mais parfois aussi elle n’est pas même de 40". EV_ LIAS SUPÉRIEUR. Ici encore l'élément marneux domine, ou pour mieux dire, il règne à peu près seul. Mais dans cet étage la marne est éminemment schisteuse, surtout vers la base, et sa leinte générale est d’un bleu plus foncé que celui du lias moyen. AD CRE La faune est riche et très caractéristique : il n’y a, au point de vue paléontologique, aucune transition entre les deux étages supérieurs du lias. La remarque en a aussi été faite en Normandie par M. Eug. Deslongchamps (1), qui en a tiré argument pour ranger le foarcien de d'Orbigny dans les marnes infra- oolithiques, tandis qu'il laissait le liasien dans le lias proprement dit. Quoi qu'il en soit, je diviserai le lias supérieur en trois zones, dont l'établissement n’a rien d’artificiel ; chacune d'elles correspond à un niveau reconnu presque partout où se montre cet étage. Disons, avant d'entrer dans leur description, que le lias supérieur parait manquer absolument dans la région du Bleymard : du moins des observateurs aussi savants que consciencieux n'ont-ils pu encore l'y retrouver (2). Cette absence est bien remarquable, et accentue encore les diffé- rences déjà signalées par nous entre le lias de l’est et celui de l’ouest de la Lozère. À Zone de l’'Ammonites serpentinus. Au-dessus des marnes à Ammon. spinatus, les rangées de blocs calcaires disparaissent complètement ; les marnes bleuissent et leur schistosité s’accuse très nettement. Elles enclavent à ce niveau des bancs d’un calcaire brunâtre, toujours très apparents et formant barre. Au-dessus, les schistes marneux se levant par grandes plaques règnent sur une hauteur de 8 à 15". (4) Eug. Deslongchamps, loc. cit., p. 68. (2) Jaubert, loc. cit., p. 235-261. — 38 — Sur leurs feuillets, ces schistes montrent des empreintes en nombre immense. On y reconnait : Ammonites serpentinus | Aptychus........ (Reineck. sp.). Inoceramus dubius (Sow.) — annulatus (Sow.). | Posidonomya Bronni (Voltz). — communis (SOw.). | Dans toute la zone, les débris végétaux abondent, soit à l’état de lignite passant au jayet, soit à celui de moules calcaires. Les bancs calcaires de la base sont nettement délimités : la roche est brune, dure, fragile, spathique ; très fissile dans le sens de la stratification, elle sé divise verticalement en plaques polygonales aux côtés d’une étonnante rectitude : phénomène dû à la présence de grandes et minces lames de spath blanchâtre, saccharin, suivant la direction des- quelles la roche se fragmente. Bien que ces calcaires rh en sur les schistes marneux qui les encaissent, ils finissent néanmoins par perdre leurs caractères après une longue exposition à l'air, et l’on trouve des couches à demi altérées qui établissent comme une transition. Dans les calcaires que je viens de décrire, on rencontre souvent des débris de poissons et parfois même des pois- sons entiers, assez bien conservés: ce sont de petits sauroïdes voisins des Leptolepis, dont le squelette, passé à l'état de spath enfumé, fait saillie à la surface des plaques calcaires. Cet horizon si remarquable de la base du lias supérieur se retrouve dans l'Est, en Bourgogne, en Normandie (1). Dans cette dernière contrée, il est formé d’argiles grises avec nodules calcaires, où se montrent de petits ganoïdes : (4) Deslongchamps, loc. cit., p. 77. 160 Lepiolepis, Sauropsis, Lepidotus, etc.; puis, plus haut, VAmm. serpentinus , avec de nombreux Aptychus, des Inocerames et des débris de bois. On le voit, la ressem- blance est parfaite avec la zone de la Lozère. Inutile de dire que l'identité est tout aussi grande avec la base du lias supérieur Aveyronnais. Je m'étonne, pour- tant, de ce que M. Reynès n’a point trouvé de ganoïdes à ce niveau (1). A Mende, ces poissons ne sont pas rares, mais je com- prends qu'ils aient échappé à M. Kæchlin : n’occupant qu'un niveau restreint, ils sont difficiles à découvrir lors- qu'on parcourt rapidement la région (2). En somme, la zone à Amm. serpentinus est encore un de ces points de repère que le géologue retrouve avec tant de joie à des distances parfois énormes. Elle est incontes- tablement parallèle au Posidonen-Schiefer des Allemands. B Zone de l’Ammonites bifrons. Cette subdivision si connue du lias supérieur est toute marneuse. La pyrite sy montre en abondance en petits rognons impurs : un grand nombre de fossiles en sont pénétrés. Le calcaire n'apparait le plus souvent qu’en concrétions arrondies, aux formes bizarres, souvent géodiques à l’in- térieur ; parfois cependant on le voit aussi s'étendre en bancs très minces, dans un sens oblique à la stratification ; (4) Reynès, loc. cit., p. 64. (2) Notre ami M. l'abbé Boissonnade, de la Suciété Géologique de France, nous a le premier signalé cet intéressant horizon, ainsi que celui des polypiers du lias inférieur. — 0 — | ces bancs sont couverts d'une multitude d’impressions régu- lières que l’on serait tenté d'attribuer , n’était leur unifor- mité et leur étendue, à des Zamia où à des Columnaria. Çà et là sont épars de petits amas de gypse grisàtre, mi- translucide, en cristaux groupés et confus. Je dore la liste des fossiles de cette zone, où je par- viendrai sans doute plus tard à reconnaître plusieurs NIVEAUX : Vertèbres d'ichthyosaurus. Ammonites variabilis (d'Orh.). Écailles de ganoïdes rhombifères — sternalis (v. Buch.). et Cy clifères. — Calypso (d'Orb.). Serpula. — torulosus (d'Orb.). Belemnites tripartitus (Schloth.) _— mucronatus (d'Orb.). — eæilis (d'Orb.). — _ acanthopsis (d'Orb.) — irregularis (Schloth) — Zitteli (Oppel.). Nautilus intermedius (Sow.). Natica Pelops (d'Orb.). Ammonites bifrons (Brug.). Pleurotomaria. . . .….. — cornucopiæ (Young). Pecten pumilus (Lam.). — hircinus (Schloth.). Inoceramus. . .…. —- falcifer (Sow.). Mytilus..... — radians (Reineck sp.) Leda palmæ (Sow. sp.). — complanatus (Brug.) Lucina plana (Ziet.). — discoides (Ziet.). Rhynchonella liasica (Reyn ). _— concavus (SOW.). Pentacrinus Jurensis (Quenst.). —— Mercati (Hauer). — basaltiformis (Mill.) — insignis (Schübl.). C Zone des marnes sans pyrite à turbo subduplicatus. Vers le haut des marnes à Amm. bifrons, l'élément pyriteux tend de plus en plus à disparaitre, et les fossiles à affecter l'état de moules calcaires. Enfin, la pyrite fait absolument défaut, et l’on arrive à une zone où se trouvent : PEL Nautilus intermedius (Sow.). Arca inæquivalvis (Goldf.). Ammonites radiosus (Seebach). Nucula Hammeri (Defr.). — primordialis (Schlot.) Leda rostralis (Lam. sp.). Purpurina Patrocles (d'Orb.). Trigonia pulchella (Agass.). Cerithium armatum (Goldf.). Astarte Voltzii (Hœning. sp.). Neritopsis Philea (d'Orb.). Pentacrinus basaltiformis (Mill.) Turbo subduplicatus (d'Orb.). Thecocyathus mactra (Edw. et Eucyclus capitaneus (Münst. sp.) Haym.). Les ammonites sont rares et en mauvais état; ce sont les Gastéropodes et les Lamellibranches qui dominent. Plusieurs de ces fossiles se montrent déjà dans la zone inférieure ; mais ce n’en est pas moins ici leur niveau propre : ceux que l’on rencontre avec l'Amm. bifrons ont souvent roulé du haut des talus. St je veux paralléliser cet horizon du lias supérieur, J'aurai à répéter l’énumération déjà faite à propos de la zone à Amm. serpentinus. M. Deslongchamps le regarde (1) comme un des plus constants et des plus précieux pour les stratigraphes. Au midi, à l'est, en Bourgogne, en Norman- die, partout enfin les gastéropodes et les acéphales dont j'ai donné la liste caractérisent, avec les Thecocyathus et les Ammonites voisines de la Primordialis, la partie supé- rieure du lias. Dans l'Aveyron, M. Réynès trouve, entre la zone de lAmm. bifrons et celle de l'Amm. aalensis, une zone à Amm. Jurensis (2). Je n'ai pu encore recueillir ce fossile dans la Lozère, et je ne lai vu que bien rarement dans les collections locales. Au-dessus des marnes à turbo viennent de raides talus calcaréo-marneux : ils finissent par de vraies falaises d’un bleu jaunissant à l'air, criblées de petites géodes spathiques et contenant de minces lits de charbon. Les fucoïdes paraissent bientôt. À Mende, M. Kæchlin (1) Deslongchamps, loc. cit., p. 84. (2) Reynës, loc. cit.; p. 67. FE a trouvé avec eux les fossiles de la zone à Amm. Murchi- sonæ (1). | La même zone a été reconnue au Bleymard, au Mas-de- l'Air, aux Vans, par MM. Jaubert (2), Dieulafait (3); dans l'Aveyron, par M. Reynès (4). | Les fucoïdes, ainsi que l’a fort bien remarqué M. Fabre(5), se trouvent à Mende et à Marvéjols dans la partie moyenne de la zone à Amm. Murchisonæ, au-dessous de l’Ostrea sublobata (Desh.) ; c'est-à-dire qu’ils occupent le 2° niveau de M. Dieulafait, et le vrai niveau des fucoïdes, d’après M. Dumortier. | Aux Vans, au Mas-de-lAir, les fucoïdes se développent au contraire au-dessus de la zone à Amm. Humphriesianus parfaitement caractérisée : on les trouve donc là au 3° niveau, et non plus au 2° comme dans l’ouest de la Lozère (6). Je n'insiste pas sur celte curieuse différence. Il n'est pas facile d'établir nettement les limites du lias et de l’oolithe : les fossiles sont rares et mal conservés aux abords du contact; plusieurs d’ailleurs sont communs aux deux étages. Dans l'Aveyron (7), M. Reynès indique, comme fossile se trouvant sur le plan de séparation, une petite Rhyn- chonelle qu'il nomme Ruthenensis et qui me semble identi- que avec l'epihiasina (Leym.). Mais cette espèce se montre * dans la Lozère avec l’'Ostrea sublobata, bien au-dessus des premiers fucoïdes. Il y a là une exception à la proposition (4) Kœchlin, loc. cit., p. 618 et suiv. (2) Jaubert, loc. cit., p. 235. (3) Dieulafait, loc. cit., p. 402. (4) Reynès, loc. cit., p. 80. (5) Fabre, Note sur la base de l'oolithe inférieure aux environs de Nancy, p. 355, 358. — Bull. de la Soc. géol., 2e sér., t. XXVI (1869), p. 353. F1 (6) Jaubert, loc. cit., p. 263. (7) Reynès, loc, cit., p. 80. 2" DU avancée par M. Leymerie (1): que les deux fossiles en question caractérisent dans le Midi la partie supérieure du toarcien. | Quoi qu'il en soit, la limite de cet étage devant être pla- cée entre les dernières marnes à turbo et les fucoïdes, on peut toujours être sûr de ne pas s’en écarter de beaucoup. A. d'Orbigny (2) signale, dans un de ses ouvrages, la puissance extrème du lias supérieur auprès de Marvéjols : à l'en croire, il y atteindrait 150". Ce chiffre est sans aucun doute exagéré, et l'étage ne m'a pas paru dépasser pU'a 807. DERNIÈRES REMARQUES. Ce travail, je l'ai dit en commençant, est surtout des- cripuf : poser quelques jalons utiles pour l'étude géologique d'une contrée encore peu connue, tel a été notre but. Ces jalons sont malheureusement bien espacés pour les deux étages inférieurs du lias : tout ou presque tout reste à faire à cet égard. Quant aux étages supérieurs, ils sont maintenant connus dans leur ensemble, et il ne reste plus quà y tracer nettement quelques subdivisions encore douteuses. D'une notice du genre de celle-ci, on ne saurait évidem- ment dégager d'importantes conclusions : le mieux est, à notre avis, de terminer par un tableau qui résume la des- cription des terrains. Je veux pourtant insister encore ici sur les deux faits que je signalais au début : ressemblance frappante entre le lias “de l’Aveyron et celui de la région de Marvéjols ; différences sensibles au contraire entre cette région et celle de Villefort. (4) Leymerie, Éléments de minéralogie et géologie, . 2e partie (1866), p. 594. (2) D'Orbigny, Cours élémentaire de paléontologie et de géologie stratigraphiques (1854), t. II, p. 470. ds, DRE Il me parait impossible d'expliquer une telle diversité dans des dépôts contemporains et situés à une distance relativement insignifiante, sans admettre la proximité du rivage de la mer jurassique. L'abondance des débris de végétaux terrestres dans le lias vient confirmer cette supposition. be AUS dre Tableau du lias de la région de Marvéjols- LIAS SUPÉRIEUR (Toarcien). Puissance : 65 à.80 mètres, Lithologie. Marnes d’un gris bleuâtre, friables, sans pyrite. Fossiles en moules calcaires, souvent à l’état spa- thique. Marnes bleu-gris feuilletées, pyri- teuses, avec nombreux rognons calcaires et petits amas de gypse translucide. Fossiles. Nautilus intermedius (Sow.). Am - monites radiosus (Seebach). À. primordialis (Schloth). Purpu- rina Patrocles (d'Orb.). Ceri- thium armatum (Goldf.). Ne- ritopsis Philea (d'Orb.). Turbo subduplicatus (d’Orb.). Eucyclus capitaneus (Münst. sp.). Arca inæquivalvis (Goldf.). Nucula Hammeri (Defr.). Leda rostralis (Lam. sp.). Trigonia pulchella (Agass.). Astarte Voltzi (Hæ- ning. Sp.). Pentacrinus basal- tiformis (Mill). Thecocyathus mactra (Edw. et Haym.). Vertèbres d’ichthyosaurus. Écailles de ganoïdes. Serpula. Belemnites tripartitus (Schloth.). B. exilis (d'Orb.). B. irregularis (Schl.). Nautilus intermedius (Sow.). Ammonites bifrons (Brug.). 4. cornucopiæ (Young.). A. hir- cinus (Schl.). À. falcifer (Sow.). A. radians (Reïineck sp.). À. complanatus (Brug.) À. discoides (Ziet.). À. concavus (Sow.). À. Mercati (Hauer). À. insignis (Schübl.). À. variabilis (d'Orb.). A. sternalis (V. Buch }. 4. Ca- lypso (d'Orb.). À. heterophyllus (Sow.). À. torulosus (d'Orb.). 4. mucronatus (d'Orb.). À. Raqui- nianus (d'Orb.). À. acanthopsis (d'Orb.). A. Zütteli (Oppel.). de 6 = Natica Pelops (d’Orb.) Pleuroto- maria. Pecten pumilus (Lam.) Inoceramus... Mytilus. Leda palmæ (Sow. sp ). Lucina plana (Ziet.) Rhynchonella liasica (Reyn.) Pentacrinus jurensis (Quenst.) P. basaltiformis (Mill.) Schistes marneux se divisant en | Poissons sauroïdes (leptolepis ?).… plaques minces, bleus ou grisà- Aptychus... Ammonites serpen- tres avec. lits dé calcaire dur, tinus (Reineck. sp.). A. annu- brunâtre ; fossiles à l’état d'em- latus (Sow.). Posidonomya preintes. Bronni (Voltz.). Inoceramus dubius (Sow.). Lignites. * | LIAS MOYEN (Liasien). Puissance : 40 à 50 mètres, 1er Niveau. Marnes gris bleuâtre, pyriteuses | Ammonites spinatus (Brug.). Pleu- avec quelques bancs de calcaire romya unioïdes (Goldf.). Pleu- bleu en rognons sphéroïdaux. romya Galathæa (Agass.). (Fossiles spéciaux à ce niveau). 2e Niveau, Vertèbres d'ichthyosaurus. Ser- pula. Belemnites niger (List.) B. Fournelianus (d'Orb.). Ammo- nîtes margaritatus MP a À. Algovianus (Oppel.) À. Nilssoni (Hébert) À. Mimatensis (d'Orb.) A. subarmatus (Young). À. Ra- gazzonii (Hauer) (?) Pleuroto- maria Anglica (Defr.). Pl. ex- pansa (Sow. sp.). Pecten æqui- valvis (Sow.). Plicatula spinosa (Sow.). Leda palmæ (Sow. sp.) Pholadomya Zieteni (Ziet. sp.). Rhynchonella variabilis (Schlot. sp.) À. liasica (Reynès). Penta- crinus basaltiformis (Sch].). P, tuberculatus (Mil.). P. fascicu- losus (Schl.). Millericrinus.….…. 4 Enaulofungia Papareli (From.) - ES Ve Calcaires bleus, marneux, durs ; alternant dans le haut avec des lits de marne bleue sans pÿrite. Fossiles de grande taille à l’état de moules calcaires. 3e Niveau. Belemnites clavatus (Blainv.) Pec- ten textorius (Sch].) Terebratula Jauberti (Deslongch.). T. punc- tata (Davids.). T. subnumis - mas (Davids.) Spiriferina Hart- manni (Ziet. Sp.). Sp. pinguis (Ziet. sp.). Rhynchonella acuta (Sow.). R. variabilis (Schl. sp.) Cidaridés....… (Fossiles les plus abondants à ce niveau.) Belemnites niger (List.). Nauti- lus striatus (Sow.). Ammonites fimbriatus (Sow.). A. Bechei (Sow.). 4. hybridus (d'Orb.). A. Normanianus (d’Orb.). À. ca- pricornus (Schl.). Pecten disci- formis (Schübl.). Lima gigantea (Sow.). L, punctata (Sow.). L. succincta (Schloth. sp.). Phola- domya Hausmanni (Goldf.). LiAS INFÉRIEUR ? (Sinémurien supérieur.) Puissance : 30 à 40 mètres. Calcaires durs, jaunâtres ou rosés avec grains de quartz, bleuâtres dans le haut, se divisant en dalles ; calcaires sublamellaires. — Rognons de silex. Calcaires durs, gris de fer taché de rouille, jaunissant à la sur- face, compactes, à cassure ridée. ” Calcaires bleus ou tachés de bleu, durs, sonores, saccharins, avec rognons de silex et de limonite. Calcaires à texture concrétionnée, blancs ou rosés. Calcaires compactes dendritiferes, gris-noisette. Ostrea irregularis (Münst.). O. gi- . gantea (Sow. sp.) ? Pecten dis- ciformis (Schübl.). P. textorius (Schl.). Spiriferina Walcoti (Sow. Sp.) Rhynchonella varia- bilis (Schl.). Pentacrinus sca- laris (Goldf.) ? Cidaridés..…..… Eunomia..…… Cyathocænia glo- bosa (Duncan). Foraminifères. Pecten Hehli (d'Orb.). Petits gastéropodes, — pentacrines, — foraminifères. LA HQE INFRALIAS (Sinémurien inférieur.) Puissance : 400 à 195 mètres. | Calcaire jaune, sableux, friable. Mytilus ou Gervillia. Calcaires marneux ou dolomiti- | Schizodus........ Tœniodon......…… ques d’un blanc grisâtre ou jau- | Petits gastéropodes. nâtre, en bancs assez minces, souvent feuilletés ; alternant avec des marnes panachées. Calcaires bruns ou ocreux parfois | fissiles et rubannés ; souvent se débitant en petits fragments anguleux. polyédriques. Ils al- ternent avec des marnes bigar- rées de consistance variable. Marnes grises, micacées, charbon- | Natica Rhætica (Gümbel). Lit- neuses ; calcaires gris marneux | {orina clathrata (Desh). Ger- et dolomitiques ; calcaires gré- villia præcursor (Quenst.). My- | seux Jjaunâtres, carbonifères ; tilus minutus (Goldf.). M. mi- grès siliceux rouges, Jaunes, nimus 1S0W.). M. Ervensis « violacés, noirâtres, charbon- (Stoppani). Cypricardia porrecta neux, arkosiques et souvent cal- (Dumort.). Corbula Ludovicæ carifères, à éléments variables (Terq.). Turritella ; de volume ; conglomérats quart- ZEUX.. Micaschistes rougedtres ou d’un blanc verdâtre. — 19 — APPENDICE. DESCRIPTION D'UNE ESPÈCE NOUVELLE DE SPONGIAIRE : L’Enaulofungia Papareli (From.). Notre collègue, M. Paparel, percepteur à Mende, m’ayant envoyé de curieux spongiaires du lias de la Lozère, je les ai mis sous les yeux de M. le docteur de Fromentel, savant bien connu par ses belles études sur les zoophytes et les amorphozoaires. Sur ma demande, il a bien voula décrire et nommer l'espèce nouvelle découverte par M. Paparel. Je transcris ici la description rédigée par M. de Fromentel, tout heureux de pouvoir, à la suite de mon humble Notice, placer quel- ques lignes signées d’un nom aussi honoré dans lascience: Genre : Enaulofungia. Ex Fromentel : Introduction à l'Étude des spongiaires fossiles, p. 48 (1859). ENAULOFUNGIA PapareLr (de Fromentel) (Nov. sp.). Spongier pelit, globuleux, présentant à sa base une forte épithèque plissée. Partie supérieure subconique, impres- sionnée par des sillons assez profonds et ramifés. Les sil- lons principaux sont plus larges et plus profonds que les sillons qui en dérivent. Le parenchyme est très serré, à tissu uniforme et présentant des pores très fins et réguliers. Hauteur du spongier, — 8 millim. Largeur à la base, — 10 millim. | La forme générale de cette espèce, son plateau aplati, son sommet subconique et la finesse de son parenchyme Péloi- gnent de toutes les Enaulofungia connues jusqu’à ce jour. Localité. —Trouvée entre Cultures et Rocherousse (Lozère), par M. Paparel. Etage. — Dans les marnes à Amm. margaritatus du lias moyen. LOY ñ — 50 — CATALOGUE DES INSECTES COLÉOPTÈÉRES DU LANGUEDOC ESPÈCES OBSERVÉES DANS QUELQUES RÉGIONS DE CETTE PROVINCE, NOTAMMENT À TOULOUSE, BÉZIERS, CETTE, ETC. Par M. MARQUET, MEMBRE FONDATEUR. 2me partie. : DYTISCIDÆE. HALIPLIT. Cnemidotus, Tlliger. cæsus, Duft. . . . .. . Toulouse, Béziers, commun dans les ruisseaux et les mares. rotundatus, Aubé. . . . idem. idem, avec ce dernier; aussi commun. _ Haliplus, Latreille. obliquus, Fabr. . . . . Toulouse, assez commun dans les eaux stagnantes. badius, Aubé.. . . .. HAE Béziers, ruisseaux, mares ; plus com- - mucronatus. Steph. . . mun, variegatus, Sturm. . . . idem. idem. idem. fulvus, Fabr.. . . . . . Toulouse, dans les fossés de la prairie du Calvaire; commun. flavicollis, Sturm.. . . . Languedoc, ruisseaux, mares ; commun. ruficollis, de Géer. . . . Toulouse, très-commun dans les mares. lineatocollis. Marsh, . . Languedoc, dans les ruisseaux, les eaux dormantes. MENT "HR Brychius, Thomson. elevatus, Panz. . . . . . Toulouse, sous les pierres, dans les eaux courantes; pas commun. PELOBII. « ’ Pelobius , Schonherr. Hermanni, Fabr. . . . . Languedoc, dans les mares vaseuses ; il est parfois très-commun. HYDROPORI. Hyphidrus, [lliger. ovatus, Linné. . . . . . . Béziers, assez commun dans les mares vaseuses. variegatus, Aubé. . . . . Languedoc, très-commun ; dans les mêmes condi- tions que ce dernier. Oxynoptilus, Kiesenw. cuspidatus, Kunze.. . . Béziers (M. Grandin de Leprevier). Je nai jamais trouvé cette espèce, et je la signale avec doute, Hydroporus , Clairv. inœqualis, Fabr. . . . . Béziers, Toulouse, dans les ruisseaux ; commun. confluens, Fabr.. . . . . Béziers, Toulouse, dans les flaques d’eau; pas ; commun. parallelogrammus,. . . . Environs de Montpellier, selon M. Fairmaire. Abrens. bicarinatus, Clairv.. . . Languedoc, surtout dans les eaux saumâtres des étangs. : minutissimus, Germ. . . Béziers, parmi les graviers de lOrb. Pas com- | mur. geminus, Fabr. .. . . . Languedoc, commun dans les ruisseaux et les mares. unistriatus, Schrank. . . Toulouse, Béziers, commun dans les eaux bour- beuses. pumilus, Aubé. . . . . . Bézicrs, assez commun dans les eaux saumâtres. pictus, Fabr.. . . . . . Béziers, dans les mares ; fort rare. flavipes , Oliv. . . . . . Toulouse, très-commun dans les mares vaseuses. D uen granularis, Linné.. . . . Toulouse, fort rare dans les trous des ruisseaux, en été. varius , Aubé.. . . . . . Béziers, mares et ruisseaux. lepidus , Oliv.. . . . . . Béziers, très-commun dans les ruisseaux; on trouve ensemble le type et la variété pâle. meridionalis , Aubé.. . . Montpellier ( Jacquelin Duval }. Je Pai prise dans o l'étang de Vendres. opatrinus, Germ.. . . . Béziers, Gabian, en été dans les trous des ruisseaux où l’eau séjourne, : vestitus, Fairm.. . . . . avec ce dernier; ces deux espèces sont parfois très-communes. duodecimpustulatus.. . . Languedoc, commun dans les ruisseaux et les Fabr. mares. depressus , Fabr. . . . . Toulouse, fort rare dans les détritus des inonda- tions. Ceresyi, Aubé. . . . . . Cette, dans les eaux saumâtres; assez commun, Halensis, Fabr. . . . . . Languedoc, très-commun dans les ruisseaux et les flaques d’eau. £ | griseostriatus, de Géer. . Cette, se prend en compagnie de Ceresyi. memnonius, Nicolaï. . . Cette, dans les fossés et les mares ; rare. marginatus, Duft.. . . . Toulouse. Un seul individu pris dans les détritus d’une inondation. Espèce très-commune dans les mares bourbeuses de tout le Languedoc. Etang de Vendres. analis, Aubé. . . . . . . Cette (Von Kiesenwetter). Je ne l'ai jamais trouvée. planus, Fabr. . . . . . . Toulouse, Béziers, dans la vase des mares. nigrita, Fabr. . . . . . . Béziers, dans les flaques d’eau de source, sur la route de Corneilhan. palustris, Linné. . . . . une des espèces les plus communes du Languedoc. angustatus, Sturm. . . . Languedoc, dans les mares. Pas commun. lituratus, Fabr... . . COLYMBETI. Noterus , Clairville. crassicornis, Fabr. . . . Toulouse, Béziers, dans les mares bourbeuses ; pas commun, sparsus, Marsh. . . . . . Languedoc, avec ce dernier ; commun. lævis, Sturm., . . . . . Toulouse idem, idem. Laccophilus, Leach, interruptus, Panzer. . . Languedoc, commun dans les fossés et les mares. | obscurus, Panzer.. , . . idem. avec ce dernier ; commun. Met Lie variesatus, Sturm. . . . Languedoc ; très-commun dans toutes les mares bourbeuses,. Colymbetes, Clairville. S. G. Scutopterus, Eschsch. coriaceus, Lap. . . . . . Béziers ; parfois très-commun , en été , dans les trous du ruisseau de Bagnols où l’eau séjourne, S. G. Cymatopterus , Eschsch. fuscus, Linné. . . . . . une des espèces les plus répandues dans le Langue- doc. On la trouve dans tous les ruisseaux et dans toutes les mares. S. G. Rantus , Eschsch.. pulverosus, Sturm. . . . Languedoc, très-commun dans les ruisseaux et les LT AN mares. adspersus , Fabr. . . . . idem. avec ce dernier. Ilibius, Erichson. fenestratus, Fabr. . . . . Toulouse , Béziers , ruisseaux et mares ; pas com- mun. fuliginosus, Fabr.. . . . Languedoc, avec ce dernier, mais très-commun. Agabus, Leach. femoralis, Payk. . . . . Un individu trouvé dans des détritus des inondations de la Garonne. chalconotus, Panzer. . . Toulouse, pas commun; dans les conditions de ce dernier. maculatus, Linné.. . . . très-commun à Toulouse sous les galets immergés des bords de la Garonne. didymus, Olivier. . . . . Béziers, dans les ruisseaux ; commun. brunneus, Fabricius. . . idem. idem plus rare, Toulouse, à Saint-Simon, rare. paludosus, Fabricius. . . Toulouse, mares de Saint-Simon, rare. bipunctatus, Fabricius. . Languedoc, très-commun dans les ruisseaux. guitatus, Payk. . . . . . idem. moins commun ; même habitat. bipustulatus , Linné. . . idem commun; dans'les mares et les ruise seaux. Roœselii, Bergstr. . . marginalis, Lin. . . Pisanus , Lap. . . . circumflexus, Fab. . punctulatus, Fab. . . dimidiatus, Bergstr. . sticticus, Lin. . . ., sulcatus, Lin, . . .. cinereus, Lin... .. Hybneri, Fabr. . . . transversalis, Fabr.. urinator, Illig. . . . natator , SCOP. . . . DYTISCI, Cybister, Curtis. . . commun dans tout le Languedoc , dans les eaux stagnantes. Dytiscus , Linné. . . Languedoc, très-commun dans toutes les eaux. . .« Béziers, Cette, dans les ruisseaux et les mares. . . Languedoc, commun dans toutes les eaux , surtout saumätres. Je n’ai jamais trouvé la variété femelle ; perplexus. Lacord. . . pas commun dans le Languedoc ; dans les ruisseaux. et eaux stagnantes. . . Toulouse, selon M. Martin. Je ne l'ai jamais trouvé. Eunectes, Erichson. . . Toulouse, dans les mares ; Béziers, dans les eaux stagnantes et saumâtres; pas commun. Acilius, Leach. . . Languedoc, dans toutes les mares et ruisseaux ; commun, Hydaticus, Leach. . . Toulouse, Béziers, dans les eaux stagnantes; assez commun. . Béziers, rare, . . Languedoc, dans les mares et surtout dans Peau saumâtre, très commun. GYRINIDÆ. Gyrinus, Geoffroy. . . Béziers, étang de Vendres; parfois commun, . . très-commun dans tout le Languedoc; dans les ruis- seaux et les eaux stagnantes, © S [æ, —— bicolor, Payk. . . . . . moins commun que le précédent; on trouve à Bé- ziers les deux variétés de cette espèce. Dejeanii, Brull. . . . . . Béziers, dans l'étang de Vendres, où il est, parfois, très-commun. Orectochilus , Lacordaire. villosus, Fabr. . . . . . Languedoc; commun; on le trouve blott sous les galets de la Garonne et de lOrb, dans la mon- tagne,. " HYDROPHILIDÆ. HYDROPHILI. Hydrophilus, Geoffroy. piceus, Lin. . . . . . . très-commun dans les eaux stagnantes de tout le Languedoc. pistaceus, Lap. . . . . . Béziers, Cette; moins commun. Même habitat que ce dernier. Hydrous, Brullé. caraboides, Lin.. . . . . Languedoc, très-commun dans les mares et les ruisseaux. flavipes, Stev.. . . . . . très-commun dans l'étang de Vendres, près Béziers. Toulouse, plus rare. Hydrobius, Leach. fuscipes , Lin. . . . . . Languedoc, commun dans les mares. oblongus, Herbst.. . . . idem. avec ce dernier. convexus, Brull. . . . . quelquefois très-commun dans les détritus jetés par l'étang de Vendres. æneus, Germ. . . . . . Languedoc, dans les mares ; assez commun. confusus, Pandellé. . . . idem. avec ce dernier ; assez commun. ( inédit ). globulus, Payk. . . . . idem dans les mêmes conditions; commun. bipustulatus, Pandellé. . idem idem. commun. ( inédit ). Philhydrus , Solier. testaceus, Fabr. . . . . . Languedoc, dans les mares vaseuses; très-commun. ER: er melanocephalus, Fabr. . idem. même habitat ; moins commun. marginellus, Fabr. . . . idem. assez commun dans les mares. ovalis, Thoms. . . . . . idem. idem. idem. angustus, Pandellé. . . . idem. idem. idem. (inédif ). Helochares, Mulsant. lividus, Forst. . . . . . très-commun dans toutes les eaux bourbeuses des | mares du Languedoc ; les individus pris dans les . eaux saumâtres de Vias sont plus forts. Laccobius, Erichson. minutus, Lin. . . . . . Languedoc, très-commun dans les mares vaseuses. pallidus, Kiesenw. . . . idem moins commun, idem. nigriceps , Thoms. . . . idem. rare; même habitat. alternus, Motsch. . . . . idem. idem. idem. Berosus., Leach. æriceps , Curtis. . . . } commun dans les mares du Languedoc; il vit sur signaticollis, Charp.. . tout dans les eaux saumâtres. luridus, Lin. . . . . . . Cette, étangs ; rare. affinis, Brull . . . . . . habitat d’œriceps ; plus commun. Limnebius, Leach. : papposus , Muls. . . . . Languedoc, dans les eaux stagnantes. nitidus, Marsh. . . . . . idem. idem. très-commun. sericans, Muls. et R,. . idem. idem. très-rare, HELOPHORT. Helophorus, Fabr. aper, Pandellé (inédit). . Languedoc, presque toujours hors de l’eau, au pied des plantes ( verbascum et carduus ). Cet insecte est généralement confondu avec le rugosus. nubilus, Fabr... :..°" peu commun dans le Languedoc, dans les détritus des rivières. intermedius, Muls. . . . idem. idem. idem. aquaticus , Lin.. . . . . très-commun dans toutes les eaux du Languedoc. obscurus, Pandellé. . . . Languedoc , assez rare , dans les ruisseaux etles : ( inédit). mares, SA granularis, Lin.. . . . . Languedoc, plus commun, dans les ruisseaux et les mares. discrepans, Pandellé. . . Toulouse , peu commun , dans les détritus de la (inédit ). Garonne. Hydrochus , Germar. elongatus, Schall.. . . . très-rare, dans les eaux stagnantes du Languedoc. angustatus, Germ. . . . très-commun, idem. idem. Ochthebius, Leach. exsculptus, Germ. . . . espèce assez rare, dans les mares des environs de Toulouse. Mulsantis, Pandellé . . . Toulouse, Béziers, dans les détritus des inonda- (inédit). tions, assez commun dans l'étang de Vendres. margipallens, Latr. . . . Béziers, étang de Vendres, commun. marinus, Payk. . . . . . idem. Cette, excessivement commun dans les étangs. Toulouse, dans les mares. lutescens, Pandellé.. . . avec ce dernier, mais beaucoup plus rare. ( inédit ). exaratus, Muls.. . . . . Languedoc, mares et détritus des cours d’eau, très- commun, surtout dans létang de Vendres. æratus, Steph.. . . . . . Béziers, étang de Vendres ; Toulouse, rare. foveolatus , Germ. . . . Toulouse, mares et détritus ; assez rare. punctatus, Steph. . « . . Cette, étang de Vendres, dans les eaux saumâtres; assez rare. Hydræna , Kugelann. testacea, Curt. . . . . . Toulouse, commnn dans les mares ; Cette, dans les petits étangs. carbonaria, Kiesenw. . . deux individus pris dans l’Orb, à Cessenon, parmi les galets immergés. “riparia, Kugel. . . . . . Languedoc, eaux stagnantes et courantes , en grat- tant les plantes aquatiques. nigrita, Germ. . . . . . Toulouse, commun dans les détritus des cours d’eau et dans les mares. angustata, Sturm. . . . . Béziers, dans les détritus au bord de lOrb. gracilis, Germ. . . . . . idem. même habitat, rare. | flävipes, Sturm. . . . . Toulouse , mares et ruisseaux , parmi les plantes aquatiques. HD LE SPHÆRIDII, Cyclonotum, Erichs. orbiculare, Fabr. . , . . Languedoc, mares et ruisseaux ; très-commun. Sphæridium , Fabricius. scarabæoïdes , Lin. . . . très-commun dans tout le Languedoc ; dans les excréments des mammifères. V. quadrimaculatum.. idem. idem. idem. Küst. bipustulatum , Fabr. . . mêmes mœurs, même habitat. | | Cercyon, Leach. hœmorrhoiïdale , Fabr. . Toulouse, un seul exemplaire dans les détritus de la Garonne. hœmorrhoum , Gyll. . . Languedoc; commun dans les bouses. aquaticum, Muls. . . . . idem. détritus jetés par les cours d’eau; rare. flavipes , Fabr. . . . . : Béziers, idem idem. idem. unipunctatum, Lin. . . . Toulouse, idem. idem. idem. littorale , Gyll. . . . . . Cette, un seul individu dans les varechs. quisquilium , Lin.. . . . Languedoc, détritus des rivières ; assez rare. melanocephalum , Lin. . idem. dans les bouses ; pas commun. Megasternum , Mulsant. obscurum , Marsh. . . . Toulouse, dans les bolets; rare. Cryptopleurum , Mulsant. atomarium , Fabr. . . . assez commun dans les bouses et les bolets ainsi que dans les détritus des inondations de la” Garonne , à Toulouse. HISTERIDÆ. Hister , Linné. major, Lin.. . . . . . . Béziers, commun; sur les chemins, dans les détritus. quadrimaculatus, Lin, . Languedoc, trèscommun partout ; bouses , détri=. lus, etc. | ET De v. gagates, Illig. . . . Languedoc, moins commun que le type. unicolor , Lin. . . . . . Toulouse (M. Gonthier ). cadaverinus, Ent., Hft. . commun dans le Languedoc ; champignons, cada- ! vres d'animaux , etc. merdarius, Ent., Hft. . . Toulouse, dans le voisinage des latrines; pas commun. binotatus , Erichs. . . . Béziers, sous les plantes pourries, en automne, carbonarius, Ent., Hft. . Languedoc, commun dans les immondices. purpurascens, Herbst.. . idem. dans les fumiers, les détritus; commun. sinuatus, Illig. . . . . idem, avec ce dernier ; aussi commun. quadrinotatus, Scrib. . . idem. dans les bouses ; assez rare. bimaculatus, Lin. . . . . idem. dans le fumier, les détritus; pas commun, duodecimstriatus , Schrn. idem. avec ce dernier ; commun. corvinus, Germ. . . . . idem, dans les détritus, au pied des plantes, assez commun. Carcinuops, de Marseul, minimus , Aubé. . . . . espèce très-commune au 4er printemps, à Béziers et à Toulouse, sous les pierres et sous les mottes de gazon. pumilio, Erichs. . . . . Béziers, sous les cadavres des quadrupèdes , à la voirie, Hetærius, Erichson. sesquicornis, Preyfsl. . . Toulouse, avec la fourmi fauve, à la Ramette ; assez rare. Saprinus , Erichson. maculatus, Rossi. . . . . Béziers, dans les cadavres des serpents et des lézards; assez commun. Un individu a été trouvé à Toulouse. semipunctatus, Fabr. . . Béziers très-commun dans les creux à fumier et sous les animaux crevés. detersus, Illig. . . . . . parfois commun à Béziers, sous les cadavres des animaux. mitidulus, Payk. . . . . très-commun dans tout le Languedoc , dans les immondices et les cadavres d'animaux. subnitidus, Mars.. . . . Béziers, assez commun dans les excréments. furvus, Erichs. . . . . . idem. rare; sous les animaux crevés. sh l'E speculifer , Latr. . . : . Languedoc, dans les excréments et les détritus ; commun. œneus , Fabr. . . . . . idem. avec ce dernier ; aussi commun. virescens, Payk. . . . . Béziers, espèce rare que j'ai trouvée au pied des plantes, dans les endroits sablonneux. chalcites, Illig. .. . . . , commun à Béziers, sous les détritus et les excré- ments. | | Biterrensis, Mars. . . . . Cette espèce a été découverte par M. Pellet sous des cadavres de serpents et de lézards; pas commun. tridens , Duval. . . , . . J'ai pris deux exemplaires de cette rare espècà Cette, sur le littoral, dans des matières décom- posées. | spretulus , Erichs. . . . . Béziers, Narbonne; rare; dans les excréments. metallescens, Erichs. . . idem. rare; dans des matières en décomposition, à la voirie. œmulus, Illig. . . . . . idem. dans les terrains sablonneux, sous les excré- ments. rufipes , Payk. . . . . . sables du littoral, à Béziers et à Cette ; très rare, sous les excréments. granarius, Erichs. . . . avec ce dernier, mais excessivement commun. conjungens, Payk. . . . espèce rare trouvée à Béziers sous des matières en décomposition. Pelleti, Mars.. . . . . . J'ai découvert cette espèce dans le sable, à la suite des inondations de l’Orb, à Béziers; pas commun specularis, Mars. . . . . Toulouse, rare; dans les détritus des inondations de la Garonne. crassipes, Erichs. . . . . commun à Béziers, au pied des plantes et dans les détritus de lOrb. grossipes, Mars. . . . . . assez rare à Béziers ; même habitat. rugifrons, Payk. . . . . Languedoc ; très-commun , surtout à Béziers, dans les terrains sablonueux, sous les excréments. apricarius, Erichson. . . excessivement commun sur tout le littoral, à Béziers, Agde, Cette, etc.; sous les matières en décomposition, dimidiatus, Illig. . . . . même habitat, et aussi commun. Gnathoncus, Duval. rotundatus, Illig. . . . . Toulouse , très-commun dans le voisinage des latrines. NES Onthophilus , Leach. exaratus, [Hig. . . . . . Languedoc ; pas rare sous les plantes pourries. striatus, Fabr. . = ÊT: . . .« . Toulouse, assez commun dans les bouses. Acritus , Le Comte. nigricornis, Ent. Hft.. . sous les bouses desséchées et dans le terreau , à minutus, Fabr. . Germanicus, Lin. humator, Fabr. . . vespillo, Lin. . . Béz'ers. . même habitat et même localité ; ces deux espèces sont assez rares. SILPHIDÆ. SILPHI. Necrophorus , Fabricius. Toulouse (M. Lespés). rare à Toulouse, sous les petits mammifères crevés. Toulouse. Je n’en ai trouvé qu'un seul individu errant. vestigator, Hersch. . . . très-commun dans tout le Languedoc, sous les cada- fossor, Erichs. . Gallicus, Duval. littoralis, Lin. rugosa, Lin.. . sinuata, Fabr. . . D e L . vres de chats, taupes, etc. . . . . Languedoc, assez rare; sous les cadavres d'animaux. Det me UT ARIEINe idem. idem. Silpha, Linné. S. G. Necrodes, Leach. . Languedoc; commun, quelquefois, dans les cadavres des chevaux. S. (G. Oiceoptoma, Leach. . commun dans tout le Languedoc, dans les cadavres sus Idem, idem. idem. S. G. Siülpha, i. spec. puncticollis, Lucas. . . . J'ai trouvé deux ou trois fois, à Béziers, cette espèce, en grande quantité, sous des meules de luzerne, granulata , Oliv. . . . . pas rare dans le Languedoc, sous les végétaux en tristis, Illig.. . . décomposition. idem. idem. idem. CC 0 . MUC EN... . . idem, idem. idem, = DES .. S. G. Phosphuga, Leach. lævigata, Fabr. . . . . . très-commun dans le Languedoc, surtout à Béziers, dévorant les helix terrestres ; on rencontre cette ! espèce partout. | Choleva, Latreille, | | angustata, Fabr.. . . . . Languedoc, sous les feuilles mortes et au pied des plantes ; commun. cisteloides, Frohl. . . . . Toulouse; un seul exemplaire sous des feuilles mortes. Catops , Paykull. grandicollis, Erichs. . . Bas-Langucdoc { M. Ecoffet ). AUNCUB PANTIN idem. . idem. Toulouse , un seul individu dans des détritus. Waisoni, Spence. . . . . Toulouse, en fauchant dans les prairies, rare. anisotomoides, Spence. . idem. un seul exemplaire sous une plante. fumatus, Spence. . . . . idem détritus de la Garonne ; pas commun. sericeus, Panz. . . . . . commun dans tout le Languedoc , sous les détritus et sous les feuilles radicales des plantes. Catopomorphus, Aubé. Marqueti, Fairm. . . . . Je n’ai trouvé cet insecte qu’une fois en battant les branches d’un orme. Depuis ma découverte, on a repris cette espèce dans des nids de fourmis. Colon, Herbst. fuscicorne, Kraatz. . . . Béziers, Toulouse; deux exemplaires pris le soir en fauchant. confusum, Fairm.. . . . Toulouse, pasrare; en fauchant, au crépuscule, près des pépinières. ( brunneum, Latr. . . . . Languedoc, rare, même habitat. ANISOTOMII. Hydnobius, Schmidt. | “ Ll punctatissimus, Steph. . Toulouse, un seul individu pris au Pech-David en. arrachant une plante. Jp Anisotoma , Illiger. ovalis, Schmidt.. . . . . Languedoc, assez rare; dans les détritus des inon- dations de la Garonne et de lOrb ; on le trouve aussi sous les feuilles radicales des plantes. dubia, Panz. . . . . . . Toulouse, un seul exemplaire en fauchant dans une prairie. badia, Sturm. . . . . . . Béziers, inondations de l’Orb ; pas commun, Cyrtusa, Erichson. minuta, Ahr. . . . . . . un seul exemplaire pris à Toulouse, en fauchant. Colenis, Erichs. dentipes, GyIl. . . . . . pas rare à Toulouse, en fauchant dans les bois. Agathidium, Illiger. rotundatum, Gyll. . . . Toulouse ; deux individus dans un vieux tronc de saule. CLAMBIDÆ. Clambus , Fischer. pubescens, Redt. . . . . Languedoc, commun dans les détritus des inonda- / tions et en battant les fagots. minutus, Sturm. . . . . idem. idem. idem. armadillo, de Géer. . . idem. idem. idem. Comazus , Fairmaire et Laboulb. dubius, Marsh.. . . . . commun à Béziers et à Toulouse, dans le fumier et | les détritus TRICHOPTERIGIDÆ. Ptenidium, Erichson, apicale, Erichs. . . . . . Béziers, assez rare; en tamisant du terreau. 66 Etilium , Erichson. . . 4 . Kunzei, Heer.. . . . . Languedoc, dans les creux à fumier et dans le terreau. j | Trichopteryx, Kirby. grandicollis , Mannh. . . Toulouse, Béziers, sous les détritus des végétaux et dans le terreau. fascicularis, Herbst. . . idem. idem. sous les feuilles mortes. fucicola, Fairm. . . . . Cette, sous les varechs de l’étang de Thau. SCA PHIDIIDÆ. | | Scaphidium , Olivier. | quadrimaculatum, Oliv. Béziers, commun dans des bolets ligneux. Scaphisoma, Leach agaricinum , Oliv. . . . Toulouse, assez commun dans les bolets. SCYDM ÆNIDÆ. Eutheia, Stephens. plicata, GyIl. . . . . . . Toulouse ( M. Lespès ). scydmænoides , Steph.. . idem. sous des feuilles mortes ; un seul exem- plaire. Scydmænus , Latreille. scutellaris, Müll. . . : . Toulouse, dans les détritus des inondations ; rare, pusillus, Müll. . . . . . idem. un seul individu trouvé dans des détritus. Helferi, Schm. . . . . . idem. dans les alluvions des cours d’eau; très- rare. subcordatus, Fairm.. . . idem. idem. idem. rutilipennis, Müll. . . . trouvé une seule fois à Béziers, sous des feuilles mortes. hirticollis, Ilig. . . . . pas commun à Toulouse et à Vias, près de Béziers, dans les détritus. Weterhalii, Gyll. . . . Toulouse, pris deux fois seulement sous des feuilles sèches. intrusus, Schm. . . . . commun dans l'étang de Vendres, au pied des joncs: cerastes, Saulcy. . . . . Béziers, en tamisant du terreau. tarsatus, Müll. . . . . . dans tout le Languedoc ; le soir’on le prend, très communément, volant près des creux à fumier. Chevrolatia, Duval. insignis, Duval. . . . . Cette rare espèce a été prise pour la première fois, à Toulouse, par M. Lespès. Jai eu le bonheur d’en capturer deux individus : le premier, à La Ramette, en fauchant dans une prairie ; le second, à Balma, en battant les branches d’un chêne. M. Mayet l’a trouvée à Montpellier , sous une feuille radicale de verbascum (4 exemplaire). PSELAPHIDÆ. Chennium , Latreille. bituberculatum , Latr. . pris une fois à La Ramette , près Toulouse, sons une pierre (M. Lespès). Centrotoma. penicillata, Schauf. . . . trouvée une seule fois, par nous , à Béziers, en novembre, dans un nid de fourmis. Ctenistes, Reichenbach. palpalis, Reichb. . . . . espèce assez commune à Toulouse et à Béziers, dans les détritus, sous les pierres exposées dans les endroits secs, et sous les plantes. Pselaphus, Hebst. Heisei, Herbst. . . . . . Toulouse, assez commun dans les prairies, au pied des saules, sous les mottes de terre qui les avoi- sinent. Tychus , Leach. niger, Payk.. ..... Béziers, inondations de lOrb , dans les détritus ; rare. | Ibericus, Motsch. . . . idem. Toulouse, très-rare; sous les pierres, dans , les lieux secs. Batrisus , Aubé. venustus, Reichb. . . . espèce trouvée une seule fois à Blagnac, près Tou- | | louse, dans un tronc carié. is) sanguinea, Fabr. . . . 667 Bryaxis , Leach. . commun à Béziers, à l'étang de Vendres. Toulouse. fossulata, Reichb. .-. . . Lefebvrei, Aubé. . Hart) SONT ES Schuppelii, Aubé. . .. hæmatica, Reichb. nigriventris, Schm. . impressa, Panzer. .. antennata, Aubé. . . . Pyrenæus, Saulcy. . . . dans les détritus de la Garonne. Toulouse , très-rare ; dans les détritus des inon- dations. . . excessivement commun à Toulouse, au pied dau sau- les, dans les prairies. Béziers, Vias, dans les détritus des étangs salés. fort rare dans les détritus de lOrb, à Béziers. . Toulouse ; détritus des inondations de la Garonne. . très-rare à Béziers; sous les pierres , dans les … détritus. . Béziers; en tamisant les détritus de lOrb; pas commun. idem. idem. idem. rare. Curtisii, Leach. . . . . . Securiger, Reichb. . . . sanguineus, Denny. . Karstenii, Reichb. Duvalii, Saulcy. . Toulouse , un individu trouvé par M. de Saint- Simon. Bythinus , Leach. Toulouse, au premier printemps , sous les pierres au Pech-David ; pas commun. | idem. rare dans les détritus de la Garonne. idem. . idem. idem. Euplectus , Leach. . Béziers, Toulouse, en tamisant du terreau; assez rare. idem. idem. idem plus rare. Claviger , Parreys. . Cette espèce, autrefois confondue avec ol he en a été séparée par M. de Sauley ; elle est très- | répandue, en automne, dans les vieilles souches des peupliers , en compagnie de fourmis noires qui minent les dites souches. — Toulouse, prai- . ries rive droite de la Garonne , vis-à-vis Pou- vourville. | : N. B. Une espèce , que l’on trouvera tôt ou tard à Toulouse, est le Claviger | longicornis, Müller ; je l'ai prise à Martres, en rivière, sous les péree, non loin t de la Garonne. Elle vit aussi avec des fourmis. ' lang re DE L'EXISTENCE DU BETULA PUBESCENS (Errx.) DANS LE DÉPARTEMENT DU TARN Par M. le professeur CLOS. M. de Martrin-Donos, dans sa Florule du Tarn, p. 651, dit du Beiula pubescens : « n’a pas été observé dans notre département. » | Cependant l’herbier de feu le D' Jean Antoine Clos renferme plusieurs échantillons de cet arbuste ou petit arbre cueillis en 1824, au-delà d’Arfons (Tarn), peu après être entré dans Ramondens, dans les endroits humides du bois : mon père y voyait une variété du Betula alba. Les rameaux de ce bouleau se distinguent bien de ceux du bouleau blanc, à la couleur plus brune de leur écorce, à leurs feuilles à base cunéiforme et non tronquée, d’un vert plus foncé, serretées et non doublement dentées en scie, à nervure moins saillante à la face inférieure, à pétioles pubescents comme les jeunes rameaux (tandis que ces organes sont glabres chez le bouleau commun) ; enfin, tan- dis que dans l’espèce vulgaire les deux lobes latéraux des écailles des chatons femelles sont arrondis et déjetés en dehors, ces appendices sont tronqués et horizontaux chez le bouleau pubescent, comme le montrent les ramules mis sous les yeux de la Société. L’étiquette qui accompagne ces échantillons porte en note : « Cet arbuste sert à faire des balais excellents pour les aires dépicatoires et les écuries; ils durent fort longtemps, et sont bien préférables à ceux du genêt et du sanguin. Les “habitants de Cals en font une très grande quantité qu’ils vont vendre à Pevyriac et autres lieux. En passant dans ce hameau, nous en avons vu de grands tas.» Le botaniste qui étudie la Flore de la Haute-Garonne ne saurait se limiter rigoureusement à ses frontières géogra- phiques; un attrait particulier l’entraîne vers cette belle De Je Montagne-Noire, si rapprochée de nous, et qui réserve encore bien des richesses pour celui qui saura l’explorer ‘avec soin. Le fait signalé dans cette note en est, je crois, la meilleure preuve. : NOTE SUR LES ESSAIS SULFHYDROMÉTRIQUES FAITS À AX EN 1871 Par MM FILHOL et MELLIES. Nous avons procédé, dans le courant du mois d’octobre 1871, à une série d'expériences ayant pour but de bien établir la richesse des eaux d’Ax en sulfure de sodium. Le dosage du soufre a été effectué par des procédés variés, qui pour la plupart comportaient une grande précision. Ayant eu recours à la méthode sulfhydrométrique, nous avons constaté un fait important sur lequel il nous a paru nécessaire d'appeler l'attention des chimistes qui s'occupent de travaux d’hydrologie minérale. Il résulte de nos obser- « vations que lorsqu'on détermine, au moyen d’une solution . titrée d’iode, la richesse d’une eau sulfureuse très-chaude et contenant, en même temps que le sulfure, ur carbonate ou un silicate alcalin, le résultat qu’on obtient, conduit à une détermination inexacte de la quantité du composé sul- furé qui minéralise l’eau. La quantité de soufre est loin de correspondre dans ce cas à la quantité d’iode employée; elle est beaucoup trop forte. Si l’on prend deux quantités égales d’une même eau pro=« venant d’une source très chaude et qu’on analyse l’une d'elles sans avoir la précaution de la faire refroidir, tandis qu’on analyse l’autre, après l’avoir refroidie jusqu’à 15 ou 20 degrés au-dessus de zéro, l’eau chaude absorbera. beaucoup plus d’iode que l’eau froide ; mais si on réchauffe. Ei M cette dernière de manière à la ramener à sa température primitive, elle exigera sensiblement autant d’iode que celle qui n’a pas été refroidie. Ainsi l’iode accuse des quantités différentes de sulfure dans la même eau, suivant qu’elle est chaude ou froide; par exemple : l’eau de la source Viguerie à Ax, dont la température est de 75° exige 0,0760 d’iode par litre, tandis que la même eau refroidie par ser- pentinage, n’absorbe plus que 0,0550. L’essai à chaud indiquerait donc 0,0233 de sulfure de sodium par litre d’eau, tandis que l'essai à. froid n’en indiquerait plus que 0,0168. La différence est énorme. Un fait non moins remarquable résulte de nos observations. Ce fait est le suivant : Si avant de faire l’essai sulfhydrométrique din eau très chaude, on y verse une solution de chlorure de barium, le titre de l’eau minérale baisse immédiatement et devient sen- siblement le même que celui qu’on eût constaté en opérant sur l’eau refroïdie. Ce dernier fait nous paraît de nature à permettre de donner une explication exacte de ce qui a lieu. L’un de nous a prouvé dans un mémoire publié en 1859, qu’une eau sulfureuse qui contient en même temps un sulfure et un carbonate ou un silicate alcalin absorbe beaucoup plus d’iode, que si elle ne contenait que le sulfure; et en outre que la quantité d’iode absorbée par l’eau contenant un pareil PPRnBPRe est supérieure à la somme des quantités diode qu’eussent absorbé séparément le sulfure et le car- bonate ou le silicate alcalin. M. Péan de St-Gilles a confirmé l’exactitude de cette observation et a montré qu’en présence d’un carbonate où dun silicate alcalin une partie du sulfure est transformée en sulfate, par l’iode qui agit comme l'indique l’équation sui- - vante Na s+It+4Ho—N a o, 505 +Hh I. L'un de nous a donné un moyen de se mettre à l’abri . de l'erreur qu’entraîne la réaction précédente ; ce moyen - consiste à verser dans l’eau minérale un peu de chlorure RL TON de barium qui rend impossible la production du sulfate alcalin et restitue à la méthode Mn M | sa pré- cision première. Les expériences que nous venons de rapporter prouvent qu’on arrive au même résultat, à peu de chose près, en refroidissant le liquide thermal avant de l’analyser. Ainsi l’action du carbonate ou du silicate alcalin est presque nulle à froid, tandis qu'elle est très énergique à chaud. Il ressort des considérations précédentes que des deux analyses faites l’une sur l’eau chaude, l’autre sur l’eau froide, la dernière seule est exacte, à moins qu’en opérant sur l’eau chaude on n’ait eu le soin d'employer Le chlorure de barium, comme nous l’avons indiqué plus haut. Les eaux d’Ax sont donc beaucoup moins sulfureuses qu’on ne serait tenté de le croire d’après les analyses anté- rieures à celles que nous venons d'exécuter. Le tableau suivant résume les résultats que nous avons obtenus. ESSAIS SUR L'EAU NON REFROIDIE. ESSAIS SUR L'EAU REFROIDIE. RE SN e = , Ge RE & 2'a = NOMS ss ts Nr) eee cal à 5 n + Be | 5° à | Sa + S 5 ne Sue | Re | ES | À os | 28 |£8S |248 | Sas | Sa | 88 | a$ |£ 3 |22$ | 2sé | Sc | 2 EÈ So l'est MES S) ans etre) Be RE Cd se Cd CES 2 EE 22 |2SE | vs | 224 | Sas | SE D DES SOURCES. Des nE Line Cost See lus De GC È= RC en $ 5 a à Sa s9e | 2SE | SES | 45 E & dre Re = SE © € De © = ÉÉa ST = ee DS, Es 4 + Dre = oi S &= nm © a Dr |ser Loéetrse- sense ER eh er d s 5 5 ENQUE Dim ce) ä =] 3 SR AS r= 5 Ars sn | CÈM:| ÊE TS |© à ne | QSS | SE 2 ES | S |#s “A+ ar | gr gr gr 0 gr sr EEE | gr = Source Viguerie..…| 74,40|0,0760| 0,0233|0,0640]0,0196| 45,87] 22,00! 0,0552|0.0447|0,0555 0,0170! 41,23[0,0470 LS 4 À Source Joly.....….…..| 71,0010,0564| 0,0473|0,0536|0,0464| 5,20] 24,00] 0,0540|0,0465|0,0536)0,0164| 0,6 |0.0164 | | Sourcede la Pyramide.| 68,00! 0,0540| 0,0165|0,0485|0,0149! 9,69) 21,5 |0,048010.0147/0,0180)0,0147! 0 0,0447 9 Source Fontan......| 58,00|0.0623| 0,0193|0,0550!0,0468| 12,95) 24,0 | 0,050010,0159] 0,0480)0,0147|- 3.90|0,0447 Petite sulfureuse.. | 43,601 0,0576| 0,0476| 0,0520| 0,0159| 9,65] 22,00] 0,0480|0,0447] 0,0480)0,0447) O0 |0,0147 3 Grande source...….| 60,00!0,0592| 0,0484]0,0470!0,0144! 20,50! 23,0 | 0,0496|0,04F910,0476|0,0145) 4,60/0,0145 Source des Abeilles! 46,6010,0600! 0,0484|0,055210.0169! 8,19 24,5 | 0,0563]|0,04173|0,0560 o,01 72) 0,5 |0,0172 4 | Bain fort.…..…......| 48,8 |0,0510/0,0456/0,0485]0,0148| 5,12] 20,4 | 0,0485]0,0148] 0,0185 0,0148| 0 0,0148 . A Établissement du Teich. — 2 Établissement du Breil. — 3 Établissement modèle. — 4 Établissement de Couloubret. + " nus. VOS REMARQUES ” ns. te s'en rte es De té Sd sé de SUR LES GISEMENTS DE CHAUX PHOSPHATÉE DES CANTONS DE SAINT-ANTONIN ET DE CAYLUS (Tarn-et-Garonne) at Éd T pébt… Par M. Evcène TRUTAT. Dans la séance de lInstitut du 30 octobre 1871, M. Daubrée a lu une note sur les dépôts de chaux phos- phatée récemment mis en exploitation dans les départe- ments du Tarn-et-Garonne et du Lot : note dans laquelle le savant professeur a attribué ces dépôts à des sources phosphatées fortement chargées d’acide carbonique qui sourdaient pendant l’époque miocène. Comme il nous a été donné d’étudier avec quelques détails les gisements de phosphate des cantons de Saint- Antonin et de Caylus, nous avons pu reconnaître quelques faits nouveaux qui modifieraient l’âge assigné à ces dépôts et permettraient d'expliquer plus complètement peut-être leur mode de formation. Si l’on examine attentivement la direction des divers gisements, l’on reconnaît bientôt que fous se rangent dans les deux directions signalées par M. Daubrée : les uns ” allant de l’est à l’ouest, les autres étant sensiblement per- pendiculaires aux premiers. Evidemment ces deux directions constantes ont dû être produites par des causes puissantes et qui ont étendu leur action à la contrée tout entière. Ces . causes, nous les trouvons décrites avec la plus grande « exactitude dans une Étude sur les formations secondaires des bords S. O. du plateau central que M. Magnan a publié - il y a deux ans (1). Dans ce travail, ce géologue a signalé plusieurs failles qui ont doriné au pays son relief (4) Bulletin de la Soc. d'Hist. Nat. de Toulouse, t. IT. Année 1869. De de actuel. L’une, la faille de Varen, est dirigée E. O. et suit plus ou moins la rivière de l'Aveyron; l’autre, la faille de la Bonnette, marche aucontraire suivant une direction N. 25° E. et se trouve ainsi sensiblement perpendiculaire à la pre- mière. Ces deux directions sont précisément celles de nos gisements, et nous devons ajouter que la manière d’être de ces dépôts est différente, suivant qu’ils marchent dans lune ou dans l’autre de ces directions. Les uns, d’après les termes mêmes de M. Daubrée (1), « sont des veines allongées avec deux parois verticales » sensiblement parallèles ; » ils sont orientés N. 25°E.; tan- dis que dans lesautres dirigés E. O. « le phosphate a rempli » des cavités irrégulières ouvertes dans le calcaire. » Dans le premier cas (Pendaré) la chaux phosphatée occupe les fentes du calcaire dans toute leur étendue, elle est compacte, à texture rubanée, à cassure vitreuse, et ce n’est qu’accidentellement que certaines parties de ces gise- ments contiennent des masses géodiques. La densité du dépôt diminue à la partie supérieure et prend alors un aspect marneux avec mélange de fer pisolithique. Quel- quefois (Tabarly) ces mêmes dépôts rubanés sont injectés de bas en haut, au milieu de masses argileuses He à grains de fer. Les gisements de cette première catégorie ne renferment jamais d'ossements fossiles, mais l'argile rouge supérieure en contient quelquefois. Dans le second cas, tout paraît s’être produit au milieu de circonstances différentes, car, tandis que les gisements dont nous venons de parler semblent s’être formés avec lenteur et sans accidents, ceux-ci, au contraire, portent les iraces d’un bouleversement violent. Toutes les parties phosphatées sont géodiques : quand les géodes sont intactes, elles sont remplies, tantôt par de l'argile pure, tantôt par de argile à grains de fer, tantôt par des cristaux de carbonate (1) Comptes rendus de l'Ac. des Sc., t. LXXIIE, p. 1032. ARR de chaux, mais le plus souvent l’on ne trouve plus que des fragments dé géodes, mélangés confusément à des argiles, à des débris de calcaire, les uns anguleux, les autres érodéssur toutes leurs faces, enfin une sorte de marne à grains deferet à cailloux roulés de quartz laiteux empâte le tout ; quelquefois encore des infiltrations calcaires sont venues cimenter tous ces éléments en une masse compacte et qe grande dureté. Nous ferons remarquer, en outre, que, dans la première catégorie, les parois des filons sont verticales et nettement découpées (Pendaré, Tabarly); dans le second, au con- traire, le dépôt occupe de véritables poches à parois large- ment érodées et arrondies (Cos, Servanac). Le calcaire est fortement corrodé et la surface des blocs (1) se trouve trans- formée en «une masse pulvérulente comme la farine » que: l’eau de carrière réduit en une couche de boue compacte de plusieurs centimètres d'épaisseur. L'on rencontre des ossements fossiles dans toutes les parties des dépôts de cette espèce; ils sont le plus ordinai- rement (les dents surtout) transformés en chaux phosphatée, à physionomie de silex résinite. Dans certains cas, la base de ces dépôts présente les … caractères de ceux de la première catégorie, mais alors la « partie compacte est très-peu développée. 4 Nous venons ainsi de constater deux sortes de dépôts . bien distincts par leur direction en même temps que par « leur composition ; l’un correspondrait à la faille de la Bon- nette (N. 25° E), l’autre à la faille de Varen (E. O.). Nous regardons les premiers comme les plus anciens, les autres” n'étant que secondaires et résultant d’un remaniement pos- térieur. Et si nous disons avec M. Daubrée que c’est « à des” » sources minérales que l’on doit cette abondante précipi- » tation de phosphate » (2), nous croyons ne pas devoir (4) Daubrée, Loc. cit. (2) Daubrée, loc. cit. se {5.2 accepter que « la présence de l'acide carbonique dans ces » sources contribuait à en augmenter le pouvoir dissol- » vant. » ” En effet, nous avons constaté que dans les fentes dirigées N. 25°E., les parois calcaires ne portaient pas trace de cor- rosion, que les couches de phosphate étaient compactes et semblaient s'être formées dans un milieu tranquille. Dans ce cas, le dépôt nous paraîtrait entièrement dû à des eaux chargées de chaux phosphatée, venue des profondeurs de la terre. Au contraire, dans les fentes dirigées E. O. le dépôt phosphaté aurait été ultérieurement repris par des eaux fortement chargées d’acide carbonique, qui auraient dissous à la fois la chaux phosphatée primitive et le calcaire envi- ronnant, en même temps qu’elles délayaient l’argile à grains de fer pisolithique ; plus tard, le dégagement d’acide ayant cessé, une nouvelle précipitation se produisit laissant quel- quefois à sa base un témoin du dépôt primitif. M. Daubrée pense que ces sources phosphatées datent de l’époque miocène, mais les débris fossiles assez nombreux que nous avons pu étudier nous obligent à reculer l’âge de cette formation, jusqu’à l’époque éocène. Pour le moment nous citerons parmi les espèces domi- nantes des Paleotheriums très voisins du medium de Cuvier. Un autre argument viendrait encore appuyer notre manière de voir à ce sujet. Nous avons parlé de la présence dans les dépôts qui nous occupent, de cailloux roulés de quartz laiteux, et justement ces cailloux accompagnent “Souvent l’éocène supérieur du Midi de la France : rappe- .lons Issel et les environs de Mazamet. de TU CATALOGUE ri DE MOLLUSQUES TERRESTRES ET FLUVIATILES ® DANS LES DÉPARTEMENTS DES BASSES-PYRÉNÉES, DES HAUTES-PYRÉNÉES | ET DES LANDES … Par M. LE GÉNÉRAL C. re NANSOUTY. Notes de l'auteur. 40 Nous avons coordonné les mollusques de notre catalogue d’après la classification de Woodward; celui-ci, d’ailleurs, n’a fait que suivre le plan adopté par les premiers zoologistes et paléontologues de l’Angle- terre : Forbes, Owen, Henslow, etc., etc. Nous pensons, néanmoins, que certaines modifications partielles peuvent être faites. Ainsi, le genre zonites fondé sur des différences anatomiques importantes qui le M séparent des Hélices doit être adopté, cest ce qu'ont reconnu de nombreux « malacologistes français. Les Limaces et les Testacelles, mollusques carnas- « siers, ne sont pas nettement séparés dans l'ouvrage de Woodward du M genre Arion phytophage. La même observation s'applique aux Vitrines qui diffèrent des Hélices sous le même rapport. Quant au genre succinea dont l’armature linguale est caractérisée par des dents marginales com- « posées chacune de deux groupes de denticules, structure semblable à celle des Ancyles, il pourrait occuper une place séparée. 4 2° Nous engageons nos lecteurs à consulter les catalogues publiés sur les mollusques des environs de Saint-Jean-de-Luz par M. J. Mabille. Voir Journal de Conchyliologie 1858, p. 158-160 et 1865, p. 248-265. Nous les engageons aussi à prendre connaissance des Essais de géographie malacologique par MM. de Grateloup et Raulin, en 41855. « 1. Paludina ventricosa (Gray). | Bayonne ( Allées-Marines). Lac de la Négresse près Biarritz. C. C. | 2. Valvata piscinalis (Müll. sp.). Bayonne (Allées-Marines). Etang du Moulin-Neuf(Landes), 1 à 3 kil. de Bayonne ; route de Bordeaux. C. 1 de Te 3. Neritina fluviatilis (Müll. sp.). Dans la Nive : à Ustaritz, à Itsatsou. Dans l’Adour : Campan, Bagnères-de-Bigorre, Tarbes. Je crois que la Veritina de ces dernières localités n’est _ pas la fluviatilis : elle est de moitié plus petite que celle de l’Adour. 4. Helix alliaria (Mill) Cambo (ravins de Olla Sahara). R. 5. Helix Apicina (Lam.). Tarbes (jardin de la subdivision). Hs un peu partout. 6. Helix aspersa (Müll.). Bayonne (citadelle). Partout. C. C. C. 7. Helix constricta (Boub.). Cambo {ravins de Olla Sahara). Route de la Croix-de- Mouguei, faubourg de Bayonne (chez M. Detroyat). Etangs du Moulin-Neuf et d'Ondres. Rives droites (Landes), route de Bordeaux. CG. C. C. 8. Helix cinctella (Drap). Hendaye, Cambo (établissement de pisciculture). KR. 9. Helix cespitum (Drap.). Hendaye. C. 10. Helix costata (Müll.). Bayonne (citadelle). CG. C. pi A1. Helix carthusiana (Müll.). Bayonne (citadelle). Hendaye, étang d’Ondres, par- tout. C. C. ; NS: 12. Helix carthusianella (Drap.). Bayonne (citadelle). R. 13. Hehx conspurcata (Nrap.). . Bayonne (Citadelle). Cambo, Hendaye. C. C. PER jee 14. Helix cellaria (Müll.). Bayonne (citadelle). Cambo, Hendaye. C. C. 15. Helix ericetorum (Müll.). | Bayonne (citadelle). Depuis le phare de Biarritz jusqu’à Hendaye. C. C , 16. Helix hortensis (Müll.) Bayonne (citadelle). Cambo. R. 17. Helix lapicida (Linn.). Bagnères-de-Bigorre. C. C. «18. Helix limbata (Drap.). * Bayonne (citadelle) et environs. C. C. C. Variété brune à Bagnères-de-Bigorre ; à Tarbes (jardin de la subdivi- sion). R. R. 49. Helix maritima (Drap.). : Bayonne ( citadelle). Embouchure de l'Adour, Biar- rit" CCC: 20. Helix neglecta (Drap.). Bayonne (citadelle). C. C. C. | 21. Helix nemoralis (Linn.). Cambo, Hendaye, Bayonne (citadelle). C. C. 22. Helix nitida (Müll.). Biarritz. Lac de la Négresse (rive gauche). R. 23. Helix nitens (Mich.). Hendaye. R. 24. Helix olivetorum (Gmel.). Cambo, Hendaye, Bayonne (citadelle). C. C. 25. Helix Pisana (Müll.). Barre de Adour. Toute la côte jusqu'à Hendaye. C. C. G. 26. Helix pulchella (Müll.). Bayonne (citadelle). C. C. LE ES 27. Helix Quimperiana (Fer.). Hendaye (massif du vieux fort). C. 28. Helix rotundata (Müll.) Cambo, Bayonne (citadelle). Hendaye, Itsatsou. C. C. 29. Helix rupestris (Drap.). Bagnères-de-Bigorre. C. C. 30. Helix Terverü (Mich.). 44 Saint-Jean-de-Luz. C. . Helix variabilis (Drap.). Barre . ri Biarritz, Hendaye, Bayonne (cita- delle). C. C. C. | 32. Succinea putris (Linn. sp.). Bayonne (Allées-Marines). 33. Bulimus acutus (Müll. sp. ). De la barre de l’'Adour à Hendaye et Fontarabie, k var. GC 34. Bulimus ventrosus (Fer. sp.) Aux Pignadas, près Bayonne (Blanc-Pignon). Biarritz (phare), Saint-Jean-de-Luz, Hendaye. C. C. C. 35. Zua lubrica (Müll. sp.) Bayonne (citadelle). C. C. C. 36. Pupa muscorum (L. sp.). Cambo, Hendaye, Bayonne (citadelle). G. C. 37. Pupa Goodalli (Mich.). Lourdes (sentier près la grotte, montant an chemin “icinal de Lourdes à Omex. Dans le mur de soutènement). R . Helix Carascalensis. Lac de Gaube (pâturages de Spumouse), lac Bleu (vallon de Bizourterre), Baréges (vallon d'Escoubous), pic du Midi de Bigorre (Arrises). C. C — 80 — 39. Helix nubigena. | Mêmes habitats, mais généralement rare. 40. Vertigo antivertigo (Drap.). Bayonne “Es R. | . Clausilia Pauli (Mabille). | Cambo ut d'Olla-Sahara). R. R. | 42. Clausilia ventricosa (Drap.). Camboô, Hendaye. R. 43. Clausilia rugosa (Drap.). Cambo, Hendaye, Bayonne (citadelle). G. C. " &k. Testacella haliotidea (Drap.). Bayonne (citadelle). R. R 45. Limnæa stagualis (Linn. sp.). Etang d'Ondres. Ruisseau de la Yasse (Landes). C C. 46. Limnæa auricularia (Linn. sp.). Bayonne (Allées-Marines). R. 47. Limnæa elongata (Sow.). Itsatsou, Ruisseau de la Yasse (Landes). R. 48. Limnæa minuta (Drap. sp. ). Route de la Croix-de-Mouguer, dans le fossé. C. 49. Limnæa ovata (Drap.) Etangs d'Ondres ( Landes ), Ruisseau de la Yasse ,. Basoiie (Allées-Marines). Diverses var. C. G. C. 50. Limnæa thermalis (Boub.). Bagnères-de-Bigorre, Ruisseau de Salut. C. 51 Limnæa peregra (Gmel. sp.). Bayonne (fontaine d’Anglade), Ruisseau de la Yasse. GC» 52. Limnæa pellucida (Gassies). | Tarbes (jardin Massé), Lourdes (fontaine au-dessus des groltes à ossements), Espélugues. C. | O1 53. Limnæa glabra (Müll. sp.). Dans Adour, Montgaillard, près St-Sever (Landes). C. 54. Physa fontinalis (Linn. sp.). Bayonne (Allées-Marines). 55. Ancylus capuloïdes (Porro.). Tarbes (jardin Massé), Bagnères-de-Bigorre, Adour et ruisseau de Salut. G. CG. C. 56. Planorbis albus (Müll.). Bagnères-de-Bigorre, ruisseau et fontaine de Salut. 57. Planorbis carinatus (Müll.) Bayonne (Allées-Marines). R. 58. Planorbis contortus (Linn. sp.). Bayonne (faubourg, chez M. Detroyat). R. 59. Planorbis septemgyratus (Liegl.). Bayonne (Allées. Marines). R. R. 60. Planorbis submarginatus (Crist. et Jan.) Bayonne (Allées Marines et faubourg, chez M. Détroyat). Etang de la Yasse (Landes), ruisseau de Mouligna près BBiarntz. C. C. C. 61. Cyclostoma elegans (Müll. sp.) Partout, de Bayonne à Hendaye, (Cambo, Istatsou. PC: C. 62. Pomatias crassilabris (Dupuy). Bagnères-de-Bigorre, Lourdes. C. C. C. 63. Pomatias obscurus (Drap. sp.) Bayonne (citadelle), Hendaye, St-Jean-de-Luz. C. C. C. 64. Unio pictorum (Linn. sp.) M Etangs d'Ivieux (Landes), lac de la Négresse, près Biar - | ritz. R. s -A99" 65. Unio litoralis (Drap.). Dans l’Adour, à Dax et en amont. C. 66. Unio Requienü (Mich.). Dans l’Adour, à Dax et en amont. C, 67. Anodonta complanata (Ziegl.). Dans lAdour, à Dax. C. 68. Anodonta cygnæa (Linn. sp.). | Lac de la Négresse, près Biarritz. Ruisseau de Mouligua. C. 69. Anodonta Normandi (Dup.) Lac de la Négresse près Biarritz. R. 70. Cyclas cornea (Linn. sp.). Ruisseau de la Yasse (Landes). C. 71. Cyclas fluvialis (Müll. sp.). Bayonne (Allées-Marines). R 72. Pisidium thermale (Dup.). Bagnères-de-Bigorre. Ruisseau et fontaine de Salut. R. N. B. Un autre pisidiüm se trouve dans les fontaines … d'Anglade et les voisines à Bayonne, ainsi qu'à Cambo. Je n'ai pu le déterminer. Ë Bagnères-de-Bigorre, 30 avril 4872. O0 ce DEUXIÈME NOTE SUR LES DÉPOTS PHOSPHATÉS DU QUERCY Par M. Evcèwe TRUTAT. Lettre à M. Paul Gervais, professeur au Muséum. Toulouse, 5 juin 4872. Monsieur, Je viens de lire dans la Revue des cours scientifiques un compte-rendu de la dernière séance de la Société géologi- que, dans laquelle vous avez parlé des ossements recueil- lis dans es carrières de chaux phosphatée du Quercy. Vous me permettrez de vous soumettre quelques obser- vations sur la manière d’être de ceux de ces dépôts qui sont fossilifères, et j'espère qu’alors disparaîtront les dif- ficultés d'explication que semble donner la réunion, dans une même station, d'espèces regardées comme d’âges différents. Dans une communication faite à l’Institut le 11 décem- bre dernier (1), j'avais déjà signalé les rapports qui existent entre la direction et la composition des gisements de phos- phorite du Tarn-et-Garonne, et j'avais cru devoir conclure “que les dépôts à ossements étaient postérieurs aux dé- pôts phosphatés proprement dits. Depuis j'ai eu l’occasion de voir à nouveau les exploitations du Tarn-et-Garonne et celles du Lot, et je suis arrivé à des conclusions plus précises, mes dernières observations vont me permettre de démontrer qu'il existe plusieurs niveaux d’âges diffé- (1) Voir ci-dessus, p. 72. and | À: 2 rents, et que le mélange anormal d'espèces que vous avez signalé, n’est qu'apparent et provient de remaniements SuC- cessifs. Voici très-succinctement le résultat de mes recherches. Un premier dépôt Geysérien de chaux phosphatée est venu remplir les fentes du calcaire ouvertes suivant une direction N. 25° E (faille de la Bonnette), ces dépôts ne contiennent jamais de fossiles : aussi ne nous en OCCupe - rons-nous pas ICI. Plus tard, une seconde faille se produit suivant une direction E.-0. (faille de Varen), et partout où les nou- velles fentes recoupeni des dépôts phosphatés, un rema- niement se produit. En même temps une véritable éruption d'eaux fortement chargées d’acide carbonique, d'argile et de fer, vient dissoudre la chaux phosphatée et les parois calcaires environnantes ; de nouveaux éléments sont en- core apportés à ce dépôt par des courants diluviens qui entrainent à la fois du sable , des cailloux roulés et des débris d'animaux. I y a donc remaniement des plus com- plexes dans ces dépôts ossifères et les débris fossiles qu'ils renferment ne donnenten rien l’âge des phosphates, ils ne peuvent que nous indiquer l’âge du manteau diluvien argileux rouge à rares cailloux roulés de quartz laiteux, qui recouvre les Causses calcaires des bords S.-0. du > teau central. La diversité des faunes ainsi mêlées dans ce dépôt rema- nié semble indiquer également une très-longue durée dans ce phénomène d’apport des eaux diluviennes. Mais certains caractères vont nous permettre d'établir plusieurs catégo- ries dans ies parties constituantes de ces amas et l'examen attentif des débris osseux nous servira à établir deux niveaux, abstraction faite des espèces auxquelles elles ap= partiennent. En effet, les uns sont entièrement transformés en chaux phosphatée, tandis que beaucoup d’autres ne Le Se QT A semblent avoir subi aucun changement de ce genre; les premiers sont noirâtres, à cassure vitreuse, les seconds ont presque une physionomie calcaire et se rapprochent, comme aspect, de ceux que nous rencontrons dans nos calcaires tertiaires supérieurs du bassin sous-pyrénéen. Jusqu'à présent tous les ossements à physionomie phospha- tée que nous avons examinés appartiennent à des espèces d’une faune ancienne (paléothériens) , les autres sont plus récents ( rhinocéros, cainotherium). Nous pourrions donc déjà, par ce caractère, diviser en deux catégories les dépôts ossifères, comme nous avons été amenés à le faire pour les dépôts phosphatés ; les plus anciens pourraient être assez bien caractérisés par la com- position chimique des ossements ; ceux-là seraient Eocène. Les phénomènes de remplissage dont nous avons déjà parlé se seraient continués pendant presque toute la période tertiaire. La nature même de ces dépôts indique suffisamment la difficulté d'y trouver un élément complet de stratigra- phie, et, le plus souvent, chaque poche contient une seule sorte de débris osseux. Lorsqu'une même station fournit des ossements des deux catégories , il est à remarquer que les espèces récentes, à physionomie calcaire, occu- pent, d'une manière générale, les parties supérieures des poches (l'argile rouge), les ossements phosphatés, au con- traire, sont au bas. Ces derniers sont plus rares, plus frag- mentés que ceux des parties supérieures, mais, comme dans tout dépôt remanié, des os phosphatés occupent quel- quelois les parties supérieures et réciproquement. Pres- que toujours, enfin, le dépôt supérieur se confond telle- ment avec le dépôt inférieur, qu'il est fort difficile de les délimiter Dans un cas, cependant, j'ai pu, tout récemment, étudier une exploitation dans laquelle un lt de calcaire concré- 86 — tionné stalagmitique sépare nettement le dépôt inférieur du dépôt supérieur; dans ce cas les couches supérieures ne contenaient que des débris osseux sans traces de transfor- mation phosphatée et faciles à caractériser (rhinocéros , cainoterium, oiseau, tortue). Les couches inférieures ne m'ont donné que des débris indéterminables, mais ils sont tous phosphatés ; d'autre part, nous avons reconnu que les ossements ainsi transformés appartiennent aux espèces les : plus anciennes ; 1l nous est donc permis de dire qu'il y a bien réellement dans nos gisements de chaux phosphatée plusieurs niveaux fossilifères (au moins deux) d'âge diffé- rent et qu'ici il n’y a pas d'exception à la loi de répartition des espèces qui servent à caractériser l’âge des différentes couches du globe. | Veuillez, etc. Et) 0: y TOC ÉTUDE SUR LES FILTRES ET SUR L'EAU DES FONTAINES DE TOULOUSE Par M, le Dr Féux GARRIGOU. INTRODUCTION. A la suite d’un grand accroissement de la population Toulousaine, la quantité d’eau fournie par les filtres d’Au- buisson pour lalimentation des fontaines de Toulouse sembla insuffisante à la municipalité chargée d’administrer la ville. Sous les auspices de M. de Campaigno, maire, on avait entrepris de construire de nouveaux filtres pour parer au défaut des premiers et aussi dans l'espoir de subvenir aux besoins plus pressants de la population. M. Filhol, devenu maire, continua ces travaux. La fin de la construction des nouveaux filtres fut mar- quée par un changement complet dans la nature de l’eau que l’on buvait à Toulouse. Tandis que l’eau des filtres d'Aubuisson était d'excellente qualité, celle que fournis- saient les nouvelles galeries avait fini par acquérir un - goût détestable qui suscita des réclamations générales. | Une Commission fut alors nommée par M. le maire Ebelot, dans le but de chercher à connaître les causes du mal qui menaçait de priver la population d’une eau saine et fraiche, et pour indiquer le remède à opposer à cet inconvénient. Après avoir suivi les actes de cette Commission, sans en LR Ne faire partie, après avoir entendu plusieurs des membres de cette Commission, déclarer qu'on ne pouvait arriver à saisir la cause du mal, je n'hésitai pas à dire qu'un seul moyen pouvait permettre de résoudre les problèmes posés à la Commission des eaux : c’était d'entreprendre létude chimique, mais surtout géologique, du gisement de la nappe d'eau qui alimentait les filtres. Après une absence de deux mois, je rentrai à Toulouse dans les derniers jours du mois de janvier 1872. Mon premier soin fut de m'informer des progrès faits par la Commission des eaux depuis mon départ. J'appris par les mêmes mem- bres de la Commission, auxquels je m'étais déjà permis de donner mon opinion, que les efforts accomplis jusqu’à ce Jour étaient restés infructueux. La cause du mal et, par suite, le remède à lui opposer étaient encore tout-à-fait inconnus. Mis au courant des essais chimiques entrepris sur les eaux des filtres, édifié sur les résultats obtenus, je n’hésitai pas à dire à M. Bibent, adjoint, que la géologie et la chimie. comparées pouvaient seules convenablement éclairer la grave question qui était à l'étude, et qu'enfin les procédés opératoires employés par les deux chimistes attachés à la Commission étant tout-à-fait fautifs ne pouvaient sérieuse ment rien démontrer d'exact. J'exposai en même temps, à M. Bibent, que pour mo: l'infection de l’eau des filtres, venait de ce que le creusement de ces derniers à un niveau inférieur à celui des filtres d'Aubuisson avait forcément amené dans les nouvelies galeries la nappe d’eau des puits de Saint-Cyprien, eau déjà infectée, comme le sont, d'après M. Boussingault, toutes les eaux des puits des grandes, villes, et dont l’insalubrité était augmentée par suite de son passage dans le sous-sol artificiel*de la prairie Vivent M. Bibent me dit alurs que M. Desplas, ancien conduc- teur des travaux de la prairie des filtres, croyait ég alement AN que les nouvelles galeries recevaient des eaux étrangères aux infiltrations de la Garonne, traversant, avant d'arriver dans les filtres, un banc de vase tourbeuse qui lui fournis- sait ses propriétés infectantes. M. Bibent fut frappé de la corrélation qui existait entre ma manière de voir et celle de M. Desplas. Cet administrateur de la ville de Toulouse m’ayant prié de vouloir bien faire partie de la Commission des eaux, j'acceplai son offre. J'ai consacré à l'étude des eaux de Toulouse les mois de février, mars, avril et mai de la présente année. Pour éviter toute discussion possible (je ne parle pas des chica- nes que le mauvais vouloir fait naître toujours), je n'ai pas hésité à faire vérifier certains de mes dosages par des hom- mes choisis parmi les plus remarquables de ceux qui s’oc- cupent, en France, d'analyser les eaux de toute sorte. Jai mis à la recherche des substances que j'avais à doser tout le soin et toute la rigueur possibles. J'ai fait soit à la balance soit avec les liqueurs titrées près de 2,000 dosages. Je n'ai pas craint de travailler bien souvent jusqu’à 18 heures con- sécutives dans mon laboratoire pour ne pas abandonner des Opérations commencées. En un mot, J'ai voulu porter à mon travail la conscience qu’on doit avoir dans des recherches intéressant non seulement la science, mais surtout une population dont la santé était gravement menacée. Le travail que je publie aujourd’hui a été lu et approuvé par des ingénieurs, des géologues et des chimistes qui ‘m'ont engagé à le publier immédiatement. J'espère qu'il sera de quelque utilité, non seulement pour la ville de Toulouse, mais pour toutesles grandes villes qui se trouvent dans la même situation que cette dernière. NE CHAPITRE PREMIER. Aperçu géologique sur les vallées sous-Pyrénéennes, au point de vue du gisement des sources et des nappes d’eau souterrai- | nes. Conséquences de l'étude géologique de la vallée de la Garonne, à Toulouse. Avant d'aborder une question aussi spéciale que celle. dont j'ai à m'occuper, il est de toute nécessité, surtout lorsqu'on s'adresse à des masses, d'entrer dans quelques explications générales, afin de pouvoir faire comprendre la « suite l’un raisonnement basé sur des faits d'observation et d'expérience, et conduisant à des conclusions pratiqués | d’un grand intérêt. Pour être facilement suivi dans l'étude que je vais entre-M prendre, je dois poser quelques principes de géologie faciles à comprendre. Les grandes vallées descendant du sommet des haine | de montagnes se divisent naturellement en deux portions : l’une dans laquelle les rivières courent à travers les roches. escarpées et disloquées ; elle porte le nom de vallée de frag=« ture. L'autre, la vallée d’érosion conduit jusqu'à la mer les. cours d’eau coulant avec lenteur sur un sol presque horisn zontal. Ce sol a été recouvert par les débris plus où moinss roulés des roches entrainées par les eaux du sommet des montagnes. Le sol des vallées de fracture a été tourmenté et violemment entr'ouvert par suite des mouvements dem l'écorce solide du globe. Celui des vallées d'érosion formé» depuis les dernières révolutions géologiques de notre planètes" a été simplement creusé, entamé par les cours d’eau tumul-. tueusement descendus des montagnes. Les vallées d'érosion font toujours suite aux vallées de fracture. La pente généralen de ces vallées étant au maximum dans le cœur des montas — 91 — gnes, est au minimum dans les plaines, elle devient nulle sur les bords de la mer. Pour donner un exemple pratique, je prendrai la vallée | de l’Ariége et je la suivrai depuis son origine au milieu des Pyrénées, jusques à sa jonction avec la Garonne qui la conduira à l'Océan. De l'Hospitalet à Varilhes, sur une longueur de 68 kilomètres, l’Ariége a une chute de 800 mètres environ. Elle coule sur tout ce parcours dans la val- _ lée de fracture. Depuis Varilhes jusqu’à la mer, sa longueur étant de 300 kilomètres, sa chute est de 300 mètres seu- lement, elle forme la vallée d’érosion, au milieu des plaines immenses du bassin sous-Pyrénéen. La constitution physique des roches et des éléments divers qui composent soit la vallée de fracture, soit la vallée d’érosion doit nous arrêter un moment. La vallée d'érosion est constituée par des roches soit schis- teuses, soit granitiques, soit calcaires , plissées dans divers sens à la façon des feuillets d’un cahier épais que l'on ser- rerait horizontalement entre les deux mains. Le sommet | des courbes a été souvent rompu, brisé, de sorte que les | plans d’inclinaison des roches ressemblent, dans ce cas, à | des séries de planchettes juxtaposées et inclinées soit dans Lun sens, soit dans un autre. Dès que l’on arrive, au con- Ltraire, dans la vallée d’érosion, les roches qui n’ont été que fort peu tourmentées par les mouvements de la croûte terrestre, sont restées presque horizontales, ce qui forme Lun contraste frappant avec celles de la vallée de fracture. C'est ainsi que les choses ont lieu dans les Pyrénées. On peut représenter le fait par la coupe suivante, toute théo- brique (fig. 1, pl. 1). La figure montre les roches redressées et fracturées pas- } sant sous les roches horizontales. C'est ainsi que les choses se passent dans tous les cas. Et en effet, en creusant des | puits assez profonds pour traverser les terrains horizontaux, a RE ont on arrive à retrouver au-dessous les roches verticales plus anciennes Il importe beaucoup, avant d'aller plus loin, d'étudier l'état plus ou moins grand de perméabilité des terrains horizontaux qui forment les plaines du bassin Sous-Pyrénéen, puisque ce sont les eaux coulant sur ces terrains que ‘nous avons à suivre, soit à la surface du sol, soit dans les couches inférieures. e | Si l'on fait une tranchée de quelques mètres de profon- « deur dans un point quelconque des plaines du bassin Sous- w Pyrénéen, dans la plaine de Toulouse, par exemple, on . trouve d'une manière régulière, en allant de la surface dans les profondeurs : 1° Une couche d'épaisseur variable » de terre végétale ou de lœæss (boulbène des paysans); 2° des alternances de cailloux roulés plus ou moins gros, et de M sable ; 3° une roche calcaire, en général assez dure, à la su: . perficie de laquelle on voit souvent couler les fleuves de la M région que j'examine. Cette roche prend, suivant les loca- lités, les noms de tuf, de balme, de marne , de molasse, de gréplo, etc. Ce tuf qui appartient à ce que l’on appelle, en géologie, le. É terrain miocène (partie moyenne des terrains tertiaires) est généralement imperméable, de sorte que de l’eau versée à sa surface ne disparait que par suite de la déclivité du terrain ou après avoir été évaporée par le soleil ou par le | vent. Elle n’est nullement absorbée comme lorsqu'on. la verse sur des cailloux ou sur du sable. Les terrains supérieurs à ce tuf, plus récents que lui, et d'époque quaternaire, c’est-à-dire les cailloux roulés et les F sables, absorbent au contraire l’eau versée, à leur surface, à la façon d’une véritable éponge. Il suit de là que si un cours d’eau coule sur les couches perméables, et c’est ce qui arrive presque toujours, une partie de l’eau pénétrant à travers les cailloux et les sables nue) eg doit forcément descendre dans la masse jusqu’à ce qu'elle rencontre les roches imperméables tertiaires, à la sur- face desquelles elle s'arrêtera, pour suivre leur plan de déclivité Ainsi donc les plaines du bassin Sous-Pyrénéen se com- posent de deux éléments : 1° Un soi perméable composé surtout de terre végétale, de sables et de cailloux roulés, absorbant l'eau à la façon d’une éponge, et reposant direc- tement sur 2 un sous-sol imperméable constitué par des calcaires plus ou moins argileux et marneux. Ce sol et ce sous-sol ont une pente dirigée des Pyrénées vers la mer. Si les surfaces respectives de lun et de lautre de ces terrains étaient parfaitement unies, il s’ensuivrait que la recherche de l'eau dans les couches inférieures des dépôts de cailloux ne présenterait aucune difficulté; il suffirait de | creuser, dans un point quelconque du voisinage d’un fleuve, | un puits jusqu’à la rencontre de la molasse pour y retrou- | ver la nappe d'infiltration formée par ile fleuve. Mais il n’en | est pas toujours ainsi. Les recherches faites dans de sem- blables conditions permettent de voir que lécartement de kces infiltrations varie beaucoup par rapport aux rives des fleuves. C’est surtout la nature du sol traversé qui influe hsur la distance des infiltrations à gauche et à droite du | cours d’eau. . | Pour expliquer la marche de ces infiltrations dans le sol, supposons les conditions établies dans la fig. 3, pl. 3. Une vallée DD’ est creusée dans la molasse M et remplie Men partie par les alluvions A, composées de sable et de cailloux roulés purs. Dans le milieu de ces alluvions un cours d’eau F a creusé son lit. Dans sa marche, ce cours Md’eau imbibe les cailloux roulés et les sables ; il se forme des | infiltrations. Si la quantité d’eau débitée par le cours d’eau était assez 1 mn | AE considérable, et si la largeur de la vallée était de peu d'étendue, ces infiltrations pourraient complète ment remplir la vallée à. travers les alluvions, et le niveau de l’eau d’in- filtration serait, dans ce cas, le même que celui du cours d’eau; c’est-à-dire que la ligne AA’ se prolongeant en B et B' indiquerait le niveau de cette nappe souterraine. Mais le volume d’eau infiltré de la rivière n'étant pas suffisant pour imbiber complètement les alluvions, lorsque les vallées sont fort larges, il s'ensuit qu'une seule partie de ces allu- vions est atteinte par les infiltrations. Celles-ci se faisant d'après les lois de la pesanteur, et la pression du cours d’eau s’exerçant latéralement et verticalement, il arrivera que les infiltrations maximum se produiront au-dessous de la rivière, tandis qu'elles seront au minimum sur les bords du lit. Elles se limiteront donc tout autour de la nappe, coulant librement et constituant le cours d’eau. Mais les frottements produits par l’eau contre les cailloux et les sa- bles à travers lesquels elle s’'infiltre diminueront la force d'impulsion due à la pression latérale du fleuve ; cette force diminuant, le volume d’eau d'imbibition diminuera lui aussi à mesure que l’on s'écartera des bords. Et comme finale- ment les lois de la pesanteur solliciteront la masse d’eau infiltrée vers la surface de la molasse, il s'ensuivra que les lignes horizontales théoriques d’imbibition AB et A'B' seront transformées en lignes inclinées ac et æc’. Il pourra donc arriver qu'en creusant des puits le long d’un fleuve, dans un point voisin de GC ou de C', on ne trouve qu'une faible quantité d’eau. Pour se rendre un compte exact de ce que lon pourra obtenir, il faudra sur- tout étudier l’état de perméabilité plus ou moins grande des alluvions, non seulement dans le point choisi pour la re- cherche d’eau, mais encore aux environs Mais les A soit du sol een CR Elel soit du sol perméable, sont loin d'être régulières. Bien au contraire, RQ LE l'irrégularité est la règle générale, et cette irrégularité rend très difficile la recherche des sources dans les pays de plaine. | Etudions à ce point de vue la plaine de la Garonne, et voyons de combien d'éléments peuvent se composer les courants d’eau souterrains qui coulent à la surface de la couche imperméable formant le sous-sol de la vallée. Pour cela, supposons qu’une immense tranchée ait été ouverte dans ia direction E. O , depuis les coteaux de Pech-David jusqu'aux coteaux les plus élevés qui séparent les plaines de Toulouse de celles de lIsle-en-Jourdain (1). Etudions d’abord la nature et allure des couches mises à découvert, et représentées en grand dans le diagramme (pl. 4, fig. 2). À Le terrain miocène, la molasse, que j'ai désignée par la lettre M, forme le sous-sol de toute la région, et supporte les énormes dépôts de cailloux roulés qui constituent le sol de la plaine. Avant la formation de l'immense fossé creusé entre a et a’ et avant le dépôt successif des nappes . de cailloux roulés que j'ai désignées par les lettres d, di, d?, d3,d#,ïil ny avait aucune solution de continuité entre les couches miocènes : de a en a’, la surface de la molasse était absolument uniforme. Un cours d’eau, pro- bablement très volumineux, descendu des Pyrénées, alors couvertes d'immenses glaciers, entrainant avec lui des - masses de cailloux quartzeux, a commencé à creuser le sol miocène jusque-là intact, laissant ces cailloux quartzeux …d comme témoins de son passage et de son œuvre. Ce cours “d'eau, limitant peu à peu son action par suite de la dimi- nution de son volume, et roulant avec lui, non seulement (1) Les études géologiques exécutées jusqu’à ce jour permettent de “bien connaître le sol et le sous-sol de cette région de la plaine de la Garonne. J'ai négligé de représenter les cours d’eau secondaires qui cou- … pent les terrasses de cailloux roulés pour ne pas faire de complication. — des cailloux quartzeux, mais aussi des cailloux granitiques, a déposé peu à peu les nappes de galets et de læss for- mant les terrasses d'1, d?, d3, dt. Il a creusé de plus en plus le terrain miocène sur les points où son action érosive était la plus concentrée. Il est résulté de cette série d’éro- sions et de remplissages successifs opérés par le fleuve, une série de creusements et de dépôts ayant dans leur ensemble la forme d’un escalier dont les marches immen- ses ont une ancienneté décroissante avec leur niveau res- pectif. La terrasse : étant la plus élevée et la plus ancienne, la terrasse d# et même d5 serait la plus récente. Voyons maintenant comment se comportent dans ces terrains de dépôt les nappes d’eau souterraines. Pour peu que lon se livre à l'étude des puits creusés dans ces divers plateaux d, d1, d?, etc., dans le but de fournir de l’eau aux habitants de ces plaines, en général dépourvues de sources jaillissantes, il est facile de constater que la profondeur des puits d'une même région est loin d’être la même. C’est que l’eau, suivant les lois de la pesanteur, descend à tra- vers. les couches de cailloux roulés jusque sur la molasse qui la retient par suite de son imperméabilité. Il est donc permis de conclure de ce fait que la molasse, au lieu d’of- frir partout une surface unie, présente, au contraire, des » creux et des élévations qui prouvent qu'elle a été usée inégalement. Il résulte de là que, tandis que dans un creux, on rencontre de grandes quantités d’eau, tout à côté une protubérance de la molasse empêche complètement le, sol alluvien de se trouver dans la zone aquifère. La figure 3 de la planche 4 va donner une idée du fait que je viens de formuler : Les puits P, P', P” sont creusés dans les dépôts de cail- loux roulés jusque sur la molasse. Tandis que le puits Pa alteint une profondeur plus grande que les deux autres, et a traversé une nappe d'eau assez épaisse parce qu’un Creux Nr de la molasse en est rempli, le puits P”, qui a rencontré la molasse à une profondeur moindre, n’est alimenté que par une couche d’eau plus faible, et le puits P”, qui s’est arrêté sur un monticule assez proéminent de la molasse, s’est trouvé complètemeut à sec. Cette inégalité de la surface de la molasse permet d’ex- piquer plusieurs phénomènes se rattachant d’une manière directe à l’étude des nappes d’eau souterraines, phénomèe- nes dont il est indispensable de se rendre compte dans une étude du genre de celle que j ’entreprends. Les bassins successifs qui peuvent résulter de cette usure inégale de la surface de la molasse tertiaire communiquent généralement entre eux par des canaux, par des trop- pleins, qui font que, lorsqu'un bassin s’est rempli, l'excès de l'eau trouvant un déversoir se rend dans un second bassin, puis dans un troisième. Mais 1 peut se faire que des surélévations plus ou moins allongées séparent longi- tudinalement un ou plusieurs bassins collatéraux alimen- tés par une même source initiale. Dans ce cas, le niveau de leau dans ces bassins dépendra du niveau du point d'écoulement de l’eau à leur sortie. Si l’un de ces deux points est inférieur à l’autre, le niveau de l’eau dans les bassins sera inégai, quoiqu’ayant la même origine. On peut expliqner, par ces faits, la difficulté que l’on éprouve quelquefois à obtenir par des tranchées faites dans une plaine, comme celle de Toulouse, la quantité d’eau “que l'on pouvait espérer y trouver. On peut également expliquer, par ces données fournies par l'expérience, com- ment il arrive souvent que lépuisement complet d’une “nappe aquifère ne diminue en rien le débit d’une nappe Voisine, mais à niveau différent. Nous verrons dans un chapitre subséquent combien il est utile d’avoir de tels renseignements, qu'une étude pratique peut seule donner, lorsque l’on veut réunir toute l’eau d’une | 7 4 l nappe souterraine dans des vallées semblables à celles qui sillonnent le bassin Sous-Pyrénéen. Mais poursuivons l'étude de ces courants souterrains et faisons voir d’abord que ces nappes d’eau ne sont pas sta- tionnaires, qu'elles ont un mouvement de translation très prononcé, quelquefois même très rapide. Le meilleur moyen de se rendre compte de ce mouvemeut est de vider complè- tement un puits. Une fois que l’eau est épuisée, il en arrive une nouvelle quantité, le puits se remplit de nouveau et cela sans porter préjudice à des puits voisins alimentés par le même courant. Dans le voisinage de la Fourguette, les sources soulerraines sont même tellement abondantes qu’elles charrient du sable dans le fond de certains puits, où les petits cailloux sont eux-mêmes mis en mouvement. Puisque les eaux souterraines coulent à la façon d’un fleuve, mais avec une lenteur différente, il est utile de savoir dans quel sens se fait le mouvement de translation. L'exa- men général d’une contrée donne promptement la solution. de ce nouveau problème. La pente de l’ensemble des plateaux d, d', d?, di, etc., se dessine nettement dans le sens du fleuve actuel ; celui ci suit à peu près dans sa marche le talweg, c’est-à-dire le point le plus creusé de la vallée. Les nappes d’eau souter- raines des plateaux supérieurs ont donc une tendance à s’écouler vers le fleuve. Si nous examinons la vallée de la Garonne à Toulouse, et si les observations que je viens de faire sont exactes, nous devons retrouver au pied de chacune des terrasses » d, d' d?, etc., des sources abondantes coulant à ciel ouvert et venant se rendre finalement dans les alluvions qui for- ment le sol de la terrasse sur laquelle coule la Garonne. « C'est, en effet, ce que nous voyons; et pour ne parler que des sources les plus connues, je citerai les sources de la terrasse d ? de Lardenne, venant sourdre au pointe de la — 99 — l figure 2, continuant leur chemin au contact du sous -sol de la terrasse d 3 pour venir sourdre à Perpan et au Polygone au point c. De là, descendant toujours à travers les allu- vions de la terrasse d'#, elles alimentent tous les puits de Saint-Cyprien et viennent enfin se perdre dans le talweg avec la Garonne. Mais la pente générale vers le fleuve n’est pas la seule. Il y a encore une pente générale vers la mer. La combinaison de ces deux sortes de pentes fait, par exemple, que les sources souterraines, partant du pied du plateau d3 à la Cipière, au lien de venir sourdre direc- tement (pl. 4, fig. 4) dans la Garonne, en suivant la perpendiculaire a, y arrivent sous linclinaison de la flèche b. Il est indispensable de poser la question de la prove- nance de ces nappes d'eau souterraines, dans le courant du chapitre actuel. Je n'hésite pas à dire qu'on ne peut trouver que deux sources d'alimentation à ces courants souterrains : la pluie et les cours d’eau superficiels. Lorsque l’eau tombe de latmosphère, soit sous forme de pluie, soit sous forme de neige, une partie de cette eau imbibe les terrains qui la reçoivent, elle les pénètre et sy accumule ; une autre portion glisse à la surface de la terre et vient augmenter le volume des ruisseaux et des fleuves. Les terrains très perméables, tels que les plateaux des envi- rons de Toulouse, absorbant l’eau comme le ferait une éponge, forment un vrai réservoir d'alimentation pour les “sources. Aussi voit-on celles-ci très sensiblement diminuer ‘avec l'absence prolongée des pluies, pour augmenter de nouveau lorsque les pluies deviennent abondantes. —…. Les fleuves, ainsi que je l'ai dit plus haut, en coulant sur les alluvions perdent une partie de leur eau qui pénètre au loin en aval, à travers les cailloux roulés et les sables. De Jàtune nouvelle cause de formation des nappes d’eau sou- ë = {00% terraines. Ce sont surtout ces nappes d'eau dépendant du voisinage des fleuves qui ont été exploitées par lalimen- tation des fontaines des grandes villes. Elles n'existent géné- ralement avec un grand développement que dans les terrains inférieurs des grandes vallées. Cependant il suffit qu’un cours d'eau coule sur l’une des terrasses alluviennes, pour que le phénomène de linfiltration naturelle se produise. Ces données conduisent naturellement à se demander de quelle façon se comportent respectivement les nappes sou- terraines des deux origines, lorsqu'elles existent toutes deux dans la même vallée. C’est surtout leurs surfaces de contact qui doivent présenter les phénomènes les plus importants à connaître pour l'étude que nous poursuivons. La figure suivante (pl. 2, fig. 5) va permettre d'établir les faits que lon peut constater au. contact des deux nappes aquifères. 4 eprésentons par la couleur jaune la nappe d’eau souter- » raine venant des coteaux de la Cipière et de Perpan à Tou- louse, et, par la couleur bleue, la nappe d'eau d'infiltration « venant de la Garonne. La nappe d’eau de la Cipière mar-" che dans le sens de la flèche a vers le talweg et le fleuve,. en vertu des simpies lois de la pesanteur. La nappe d'eau” d'infiltration de la Garonne, en vertu de la pression exercée par le fleuve, marche, au contraire, en sens inverse, dans“ le sens de la flèche b. Il arrivera donc un moment où les deux eaux se mélangeront d’après des rèzles connues, celles des densités et du mouvement des liquides. Et tandis que, dans le voisinage du fleuve, l'eau d'infiltration, plus légère que l'eau de la nappe des coteaux (1) et animée d'un mou vement de translation plus rapide, glisse au-dessus de cette nappe d’eau souterraine en se mélangeant incomplètement à à (1) Toutes les eaux descendant des coteaux, surtout après leur pas- sage dans les villes, renferment une bien plus grande quantité d'éléments” salins que les eaux des fleuves. Elles sont donc plus denses. a a a Le dr à = £ & 2INITIAqUI 2ÛdEU [ap : 5 2[[89 3p 39 SUCRE EU ‘AUUD.IE2) EI 3p & S3P NEO [ 3p SQUEJA SUONE TU SINSUANUE 24e ïe SU — 101 — _ elle; à mesure que lon s'éloigne du fleuve, le mélange s'opère de plus en plus, et en se rapprochant des coteaux, la nappe d’eau qui en provient finit par dominer dans le mélange. On a donc, outre les deux eaux d’origine différente, une série de couches, représentées en vert sur la pl. 2, fig. 2, qui auront une coraposition chimique moyenne rappelant celle des deux eaux primitives. Cette composition rappellera de plus en plus celle de l'eau du fleuve si Pon se rapproche de celui-ci, tandis qu’en s’en éloignant on retrou- vera une eau rappelant tout-à-fait celle des coteaux. Cest, en effet, ce qu'indique l'analyse chimique de la façon la plus formelle et la plus irrécusable. Une fois l'équilibre établi dans les couches d’eau mélan - gées, cet équilibre se maintient tant que le régime du fleuve et celui de la nappe souterraine restent les mêmes. Mais si la quantité des eaux d’infiltrations ou de celles des coteaux augmente, il en résulte une rupture d'équilibre en faveur de l’eau là plus abondante. Ces principes une fois posés, nous pouvons pousser plus | loin les investigations qui nous sont nécessaires pour l'étude | spéciale que nous avons abordée. Les nappes d’eau souterraines forment, en bien des | points, au pied des coteaux, des sources coulaat en plein | air. Souvent aussi, dans la plaine de la Garonne , aux | environs de Toulouse, des travaux de défoncement ont mis | à nu sur une grande surface ces eaux courant dans lPin- | térieur du sol. Au pied du coteau de Perpan, en avant Let en arrière de la butte du Polygone, dans le quartier LSaint-Michel , etc., etc., de grandes mares d'eau, sta- | gnantes en apparence , mais alimentées par des sources ‘souterraines, existent depuis des années. Ces eaux sont généralement limpides ; les seules plantes qui y croissent sont la lentille d'eau et quelques autres ; et le goût de ces eaux, quoique légèrement terreux, n'est jamais infect. — 102 — Cette remarque, dont l'exactitude peut être vérifiée bien facilement, est très-importante. J'ai cru devoir la faire ici, car elle est appelée, dans l'un des chapitres suivants, à venir jeter une grande lumière sur le problème que nous avons à étudier : la cause de la naissance et du dévelop- pement de l’algue, que nous accusons, à juste titre, d'être la marafestation de l'infection de l’eau des filtres de Toulouse. CHAPITRE II. Etude comparative des filtres d’Aubuisson et des nouveaux filtres de la prairie. Il me serait impossible d’entrer avec fruit dans les détails de l'installation comparée des filtres anciens et nouveaux de Toulouse, si je ne faisais auparavant une étude géologique succincte du terrain qui compose la prairie des filtres. Or, pour faire cette étude, il m'a été impossible de trouver dans d'Aubuisson des renseignements suffisants. Il y a dans le Mémoire, si intéressant, d’ailleurs, du savant ingénieur , une lacune fort regrettable à ce sujet. Il a donc fallu s’en- tourer de renseignements de toutes sortes pour arriver à formuler une étude à peu près exacte. J'ajouterai que j'ai inutilement cherché à me procurer la coupe géologique qu'auraient dû relever les ingénieurs auxquels avait été confié le soin de faire l'énorme tranchée pour linstallation du filtre nouveau . Ces coupes n'ont pas été recueillies. Je dois les renseignements que je vais mettre au jour, un peu à ce que j'ai pu étudier par moi-même, et aussi à M. Cantié, surveillant des travaux des filtres. Cet intel= ligent ouvrier avait eu, malheureusement pour lui, le talent de voir assez clair dans les travaux exécutés pour comprendre les fautes que l’on faisait dans l'énorme tra- vail qu'il était chargé de surveiller. Il voulut en avertir — 103 — ceux qui les commettaient ; on le mit à la porte (1). M. Desplas, conducteur des ponts-et-chaussées, attaché aux travaux de la prairie des filtres, a donné également à la Commission des eaux queiques renseignements g60- logiques. intéressants. | Avant tout, maintenant, il me parait important de rap- peler la constitution de la prairie des filtres, avant qu’elle fût ce qu'elle était du temps de d’Aubuisson, et ce qu’elle est aujourd’hui. Une carte, dont je donne ici la reproduction (pl. 5), nous (1) Je considère comme un devoir pour moi de raconter icr ce qui m'est arrivé avec M. Cantié au sujet de l'étude des filtres de Toulouse. Lorsque j'eus exposé à la Commission des eaux mes idées scientifiques sur la cause qui avait produit le mal existant dans les filtres, plusieurs. de mes confrères de la Société d'Histoire Naturelle de Toulouse me prièrent d'expliquer à la Société les faits scientifiques que j'avais observés. Par respect pour la Commission et pour éviter de faire causer dans le public de choses qui ne devaient pas manquer d’exciter la curiosité, les com- mentaires et les passions, je priai le zélé et savant secrétaire de notre Société, M. Cartailhac, de ne pas parler de ma communication dans le procès-verbal à donner aux journaux. Pendant trois semaines je résistai aux demandes qui m'étaient faites à ce sujet. Ce ne fut que sur les instances de l'administration municipale que je consentis à faire un résumé de ma communication et à le donner au secrétaire pour le laisser insérer dans le procès-verbal de la séance que l’on devait donner aux journaux. Le jour même où le public put avoir sous les yeux le texte de ma communication, on avait la bonté d'envoyer dans mon laboratoire un homme qui, m’avait-on dit, me donnerait de précieux renseignements sur les nouveaux filtres. Cet homme, c'était M. Cantié. Cet ancien employé des ponts et chaussées ne connaissait pas encore ma communication à la . Société d'Histoire Naturelle. Je la lui donnai à lire; et après que je lui eus expliqué au moyen d’une figure faite au tableau la façon dont je croyais qu'on avait introduit dans les filtres l’eau de la nappe inférieure … de Saint-Cyprien, M. Cantié ne put s'empêcher de s’écrier avec un accent de véritable joie : « Monsieur, moi j'ai vu la chose pendant que je surveillais, et vous, grâce à la science géologique, vous l'avez devinée. » M. Cantié me remit alors un Mémoire qu'il venait de rédiger, et dans … lequel il débute en disant que les travaux exécutés n'ont servi qu'à - conduire l’eau des puits de Saint-Cyprien dans les'filtres. — 104 — montre, en l’année 1766, la prairie des filtres composée alors de trois ilots juxtaposés et baiïgnés de toute part par la Garonne. Les abords de ces îlots devaient forcé- ment recevoir des dépôts vaseux et mélangés de détritus de toute sorte, ainsi que nous le voyons encore actuelle- ment sur les rives voisines du fleuve. Des cailloux roulés et des sables recouvrant à leur tour ces dépôts, devaient former une alluvion composée de couches alternantes vaseuses et caillouteuses. Peu à peu les intervalles des ilots se sont comblés à mesure que les dépôts se for- maient, soit naturellement, soit aussi par la main de l’homme ( ainsi que cela est arrivé pour le ramier Vivent), et finalement la prairie des filtres s’est trouvée formée. Des inondations résultant des grandes crues annuelles ont dù, ainsi que cela se voit encore, venir déposer des limons auxquels se mélangeaient les débris de la végétation de la prairie. Un sol composé d'éléments hétérogènes s’est ainsi trouvé constitué naturellement, et l'épaisseur de cette terrasse a dù insensiblement augmenter de quelques mil- limètres après un certain nombre de crues. | C'est dans ce sol ainsi composé que l'ingénieur d’Au- buisson a eu à creuser ses filtres. Les galeries ayant une pente du sud au nord, pour faciliter l'écoulement de l’eau vers le Château d'Eau, il s'ensuit que tous les points des filtres ne se trouvent pas à une même distance de la sur- face du sol. Grâce à M. Cantié, je puis mettre sous les yeux de mes lecteurs une coupe comparative des filtres d’Aubuisson et des filtres nouveaux. La partie du filtre d'Aubuisson, qui est ici représentée fig. 1, pl. 2, n’est pas la même que celle donnée par l'ingénieur dans son Mémoire imprimé par ’Académie des Sciences de Toulouse. Cest une portion retrouvée au fond de la galerie de la prairie près le tam- pon, et qu'on a démolie. Il ne faut donc pas s'étonner si mot alor par mer de mer et « forr vas! ilot: mai l’ho et | InO ain aux la ain (er: lim — 105 — | |a cote de 4,30 environ que l’on retrouve comme hauteur du radier du filtre au-dessous de la surface du sol de la prairie, diffère de celle de 3",60 indiquée dans le Mémoire de d’Aubuisson pour la même partie du filtre, c’est-à-dire le radier. La cote de d’Aubuisson est prise dans une por- tion amont du filtre, la cote de M. Cantié est prise dans une portion aval. La pente de la galerie explique cette dif- férence. Comme on peut le voir , l’ensemble géologique de la prairie se compose d’une première couche supérieure for- mée par du sable, de la vase, de la terre végétale et un peu d’humus. M. Cantié lui donne ie nom de couche de sablon. Au-dessous se trouve une assez forte épaisseur de terre végétale mélangée de couches irrégulières de débris végétaux et de racines. Au-dessous encore com- mence une forte épaisseur de cailloux roulés mélangés à _ du sable plus ou moins grossier ainsi qu’à des couches irrégulières et plus ou moins épaisses de vase tourbeuse (c'est une de ces couches que d’Aubuisson a rencontrée dans le creusement de son 2° filtre). Les cailloux roulés L reposent sur la molasse, dans laquelle ils sont quelquefois . incrusiés, ainsi que le dit M. Cantié. C’est dans ces cou- ches que ce surveillant a retrouvé des débris d'instruments en fer qui semblent remonter à une très-haute antiquité. La molasse, enfin, qui supporte tout cet ensemble pré- sente une surface irrégulière et plus ou moins mame- lonnée. | Le radier du filtre d'Aubuisson ne descend guère que - de un mètre, en moyenne, au-dessous de la terre végé- tale, et il est tout entier dans les cailloux roulés purs. Le niveau des basses eaux de la Garonne est indiqué , à peu près , par la base des dalles D qui couvrent la galerie filtrante F. Il était tout naturel que l’eau de la Garonne fût la seule à arriver par infiltration dans ce filtre. — 106 — Le radier de la nouvelle galerie est installé à une hau- teur de 1,50 au moins au-dessous de celui du filtre d'Aubuisson. Souvent il est plus bas, et atteint 2 mètres. C'est le niveau très-inégal de la molasse qui a réglé son installation définitive, car, presque partout, les piliers de soutien de la galerie reposent sur la roche tertiaire. Il “était naturel qu'en descendant aussi bas dans la couche de cailloux roulés, on rencontràt la nappe d’eau inférieure qui existe dans toutes les vallées. Il était également impos- sible, dans un semblable travail, de ne pas dessécher les anciennes galeries filtrantes de d’Aubuisson, puisque, par le,vide produit au-dessous de leur niveau, on appelait toutes es eaux d'infiltration. Cest, en effet, ce qui est arrivé ; aussi les anciens filtres sont-ils aujourd'hui tout-à-fait à sec. Bien des personnes demandent pourquoi l'on ne se sert plus de ces filtres pour avoir de la bonne eau. Le simple exposé des faits précédents leur permettra de comprendre l'état dans lequel se trouvent les appareils, et leur mon- trera l'impossibilité complète où l’on est de faire fonctionner . en même temps les anciens filtres et les nouveaux. Une seule chose permettrait, peut-être, de retrouver l’usage des anciens filtres : ce serait de fermer lorifice d'écoulement des nouveaux, de manière à forcer l’eau à remonter jusqu’au niveau indiqué par la ligne a b; de cette façon l’équilibre s'établissant insensiblement dans les allu- vions, l’eau retrouverait son ancien point d'écoulement dans les filtres d’Aubuisson où elle atteindrait les points a’ b’. Cette eau, plus élevée dans les cailloux roulés que celle de. la nappe souterraine, ne se composerait que des infil- trations pures de la Garonne, et on aurait de l’eau parfaite comme pendant tout le temps que ces filtres ont fonctionné régulièrement. LE Cependant, il n’est pas possible d'affirmer que le résultat Pen ue précédent serait immanquablement atteint ; car, lorsque lon a ainsi remué des masses alluviennes à travers les- quelles des cours d’eau souterrains se sont tracé natu- rellement une route, il arrive souvent qu'après ces rema- niements 1l se produit des fuites qu'il est impossible de fermer. Les niveaux anciens, lorsqu'on rétablit la pression naturelle et primitive, ne sont plus atteints par les griffons. Il faudrait n’avoir jamais manié des sources pour mécon- naitre ce principe. La masière dont on a construit les deux systèmes de filtres que je viens d'étudier est des plus instructives, et prouve le grand talent de l'ingénieur d’Aubuisson. Dans les anciens filtres, la construction était faite à sec, C'est-à-dire par la superposition directe, sans mortier, de briques à travers les joints desquelles l’eau circulait facilement. Tout le long de ces murs à jour, l’eau, déjà hmpide, circulait sans arrêt et venait s’écouler dans la galerie filtrante F. Le fond de ce canal de drainage était formé par des cailloux roulés de diverses dimensions, à travers lesquels s'élevait également de l’eau d'infiltration. Lorsque les pompes du Château-d'Eau n’enlevaient pas de l'eau outre mesure, la galerie F pouvait être presqu’en- tièrement noyée dans cette eau filtrée, car ses dimensions ne dépassaient pas 0" 90 centimètres de hauteur et 0" 60 centimètres de largeur. | Dans les nouveaux filtres, la construction a été combinée | d’après un principe exact en théorie, mais faux dans l’'ap- plication spéciale de la prairie et du ramier Vivent. On s'était dit qu’en portant le radier du filtre aussi bas que possible dans les alluvions, on aurait une pression d'eau très-considérable qui forcerait l'alimentation de la galerie à être à son maximum. On n'avait malheureusement pas pensé à l’envahissement forcé de la galerie ainsi des- Mcendue, par la nappe d'eau des puits de Saint-Cyprien. — 108 — ÿ On n'avait pas, non plus, supposé que, par suite d’un envahissement du lit de la Garonne par la vase, ou par suite de l’encrassement des couches filtrantes, la quantité d’eau fournie par la galerie pourrait être un jour bien diminuée. De semblables suppositions pouvaient bien ne pas venir à l'idée des hommes chargés de semblables travaux, et Je suis le premier à les excuser de ne pas les avoir eues. Mais ce qui me semble impardonnable chez eux, cest la façon dont ils ont construit la galerie. Et je laisse ici la parole au surveillant dont j'ai déjà parlé, à M. Cantié, qui a vu par lui-même toutes les fautes commises, et qui a payé de sa place la franchise de les avoir signalées : « La galerie faite tout d’un bloc en béton est supportée directement dans presque tous les points par la marne tertiaire imperméable. Dans l'épaisseur des parois de la maçonnerie on avait ménagé des drains communiquant d'un côté avec les cailloux roulés du dehors, de l’autre avec intérieur de la galerie. Ces drains étaient distribués à diverses hauteurs. Il n’y avait qu'eux qui pouvaient fournir de l’eau à la galerie. De sorte que si les infiltrations n'avaient pu atteindre que les drains les plus inférieurs sans arriver au nivean des supérieurs, la couche d’eau fournie par ces filtres aurait été réduite à un volume tout-à-fait insuffisant. C'est, eu effet, ce qui se serait produit si un heureux hasard n’était venu porter remède à cette déploras ble combinaison. « En effet, lorsqu'on a eu préparé la tranchée au fond de laquelle le béton devait être coulé, les pompes qui mon- taient l'eau laissant toujours à désirer dans leur fonctionne-. ment, on ne mettait jamais complètement à sec le fond de celte tranchée. Il en est résulté que presque toujours nous avons coulé le premier béton sur une lame d’eau de 0 m. 45 à O0 m. 20 centimètres d'épaisseur, et quelquefois même cette côte d'eau était dépassée. Aussi, malgré toutes les … — 109 — minutieuses précautions que nous avons pu prenürep or bien faire le coulage, il est arrivé que nous r’avons jamais pu empêcher le lavage du béton immergé. Celui-ci, détruit sur certains points, laissait à sa place une épaisse couche de graviers incomplètement reliés entre eux et tenant encore au reste des pieds-droits. Des infiltrations se sont pro- duites à travers ces cailloux, et les drains sont devenus inutiles. La galerie a été ainsi alimentée depuis le temps qu’elle a fonctionné. » On est en droit de se demander de prime abord si cette nouvelle galerie, quatre fois plus volumineuse que celle de d'Aubuisson, eût fourni, même la moitié du volume d’eau de cette dernière, sans l’heureux accident qui a rendu perméa- ble le mur destiné à empêcher l’arrivée de l’eau. * Grâce à ces détails, il est facile de voir les différences qui existent dans l’installation et surtout dans la combinai- son des deux systèmes de filtres appliqués dans la prairie des filtres de Toulouse. De ma description l’on pourra tirer, je l'espère du moins, un enseignement utile pour l'avenir, surtout lorsque les chapitres suivants auront fourni les éléments pour la solution du problème que je me suis posé, celui de la découverte des causes de l'infection de l’eau filtrée distribuée dans les fontaines publiques de Toulouse. CHAPITRE IL. Histoire de l'infection de la fontaine-lavoir, dite de Saint-Jean, (propriété Carrère), dans la rue des Fontaines à St- Cyprien. J'aborde maintenant un chapitre qui pourra paraitre oiseux à quelques personnes, mais dont l’importance sera bien vite reconnue par ceux qui n’ont d'autre but dans cette question que la recherche de la vérité. La nappe d'eau souterraine qui s'écoule dans le sol de la — 110 — terrasse d; pour former les sources alimentant les puits de Saint-Cyprien, trouve un point d’issue naturel au pied d’une petite terrasse secondaire, formant un léger accident de terrain, entre le polygone et la Garonne, tout le long de la rue des Fontaines. Là, cette nappe d’eau, par son écoulement sur divers points, alimente une quantité considérable de lavoirs. Les sources qu’elle fournit sont toujours parfaite- ment claires et limpides. De mémoire d'homme on ne s'était plaint d’une altération quelconque survenue dans cette eau, qui n’avait aucun goût désagréable; le blanchissage du linge y était irréprochable. Au mois de décembre 1865, M. le juge de paix du can- ton de Saint-Cyprien me nomma comme expert dans une affaire dont l'intérêt scientifique me parut considérable. La fontaine dite de Sainj-Jean, appartenant au sieur Carrère de Toulouse, et située dans la rue des Fontaines, immédiatement après la barrière de loctroi, était depuis quelque temps envahie par une végétation cryptogamique ocreuse, paraissant ressembler au premier coup d'œil à certaines conferves trouvées dans des eaux thermales. Cette végétation, en s’attachant au linge lavé, lui communiquait une couleur jaune, ferrugineuse, qu'il était ensuite fort difficile de faire disparaitre. Il résulta de ce fait un délaisse- ment complet de la fontaine pour le blanchiment du linge. Le sieur Carrère intenta un procès à son voisin le sieur Ronso pour lobliger à fermer des cloaques dont le contenu était supposé fournir les produits anormaux et étranges de la fontaine Saint-Jean. Appelé à me prononcer sur l’origine de laltération de celte eau, j'étudiai tout d’abord la production organique qui, par son abondance, remplissait presque tout le bassin ouest de la fontaine. L'eau du bassin était recouverte d’une membrane irisée semblable à celle que l’on rencontre ordinairement dans — A1 — les sources ferrugineuses stagnantes. Au-dessous, s’aper- cevaient les longs plumets soyeux de la conferve ocreuse, très-abondante, attachée soit aux parois de la boiserie qui entourait le bassin, soit aux galets répandus sur le fond. Examinée au microscope, cette plante me parut devoir se rapporter à une algue, de l’ordre des Nematogènes, de la famille des Oscillariées, du genre leptothria ou du genre hypheotrix ; je ne pus en déterminer l'espèce. Avec elle, je constatai, surtout dansles portions recueillies sur les cailloux, des quantités considérables de diatomacées de divers gen- res, des navicules, des pleurostorum ? des schizonema ? etc. Des échantillons de ces produits végétaux ocreux exis- taient 1l y a encore fort peu de temps, quoiqu’en très-petite quantité, dans le bassin ouest de la fontaine Saint-Jean. A peine avais-je commencé létude des causes qui avaient produit cette algue, jusque-là inconnue dans la source Saint-Jean, qu’une circonstance fortuite nr'obligea à quitter Toulouse pour plusieurs mois, je dus me désister de mes fonctions d'expert. M. le juge de paix nomma à ma | place M. le professeur Filhol qui fit l'analyse de l'eau et reconnut également l’existence d’une conferve. Il conclut dans son rapport en faveur de la fabrique de bougies stéari- ques de M. Rouède, accusée d’avoir infecté la source Saint- Jean, et contre le sieur Ronso voisin de la source. On fit fer- mer les cloaques de la propriété de ce dernier, d’où l’on supposait qu’il s'échappait des eaux infectées et infectantes. Les cloaques ayant été fermés et le mal continuant à se produire, un nouvel expert, M. le pharmacien Couseran fut nommé par M. le juge de paix pour étudier de nouveau les causes de l'infection de la fontaine Saint-Jean. Ce chi- miste exécuta de nombreux sondages aux environs de la ontaine ;, il accepta les résultats des analyses faites par M. Filho!, professeur à la faculté et inspecteur des pharma- |. cies, et conclut que les produits de déjection de la fabrique de ZE Me M. Rouède pouvaient contribuer, en même temps que la présence de détritus encombrant un ancien fossé de vidange voisin de la source, à altérer l’eau de la fontaine Saint-Jean et à y produire la conferve ocreuse. Trois autres experts, pharmaciens à Toulouse, MM. Mon- medan, Monthus et Cazac, furent appelés à faire une nou- velle expertise. La présence de la conferve, si préjudiciable au blanchissage du linge, est encore signalée dans le nouveau rapport, et les experts en attribuent exclusivement la présence aux terreaux humides et au machefer accumu- lés artificiellement dans le voisinage. Pour eux, l'usine de bougie sléarique n'est pour rien dans la production de l'altération de l'eau. M. le juge de paix n’ayant rendu aucune ordonnance efficace pour empêcher l’état anormal de la fontaine de se perpétuer, le conseil de préfecture obligea le propriétaire ; de l’usine de bougies stéariques à ne plus jeter ses produits dans lPimmense fosse non étanche qui lui servait pour cet usage. On exigea la construction d’un bassin parfaitement cimenté pour recevoir les liquides gras rejetés par lusine. A partir de ce moment eau de la fontaine Saint-Jean revint 4 à son état naturel, l'algue ne se reproduisit plus qu’en très-faible quantité, la couche irisée qui existait habi- , tuellement à la surface de l’eau du bassin ouest ne se forma plus, et le blanchissage du linge put se faire dans des con- ditions aussi favorables qu'auparavant. L'examen nouveau que j'ai pu faire un peu plus tard du terrain environnant la fontaine, m'a permis de tirer la conclusion que le mélange des produits aqueux de la fabrique de bougie stéarique aux détritus de toute sorte de l’ancien fossé de vidange avait. dû amener l’état d'infection de l’eau de la fontaine Saint- Jean, chose déjà supposée par M. Couseran. | Ce qui rend les faits que je viens de décrire fort impor » nd tn tants pour l'étude des causes d’altération des filtres de . — 113 — Toulouse, c’est que la conferve produite dans la fontaine Saint-Jean est exactement la même que la conferve dont la présence a été signalée dans le filtre du ramier Vivent. Averti de ces faits, tout homme désintéressé et dévoué à la ville par une position officielle aurait dû éviter le mal survenu dans les galeries filtrantes de Toulouse. CHAPITRE IV. Etude chimique des eaux de la Garonne, du filtre Vivent, du filtre de la prairie et de la nappe d'eau des puits de Saint- Cyprien. Lorsque j’eus l’honneur d’être nommé membre de la Commission des eaux de Toulouse, après avoir exposé mes idées sur la question qui se trouvait à l’étude, j’exprimai le regret de voir suivre, par les chimistes de la Commission, des procédés incorrects dans les analyses chimiques qu’ils faisaient journellement sur les eaux des filtres. En même temps, je proposai un plan d’étude complet sur la compo- sition de l’eau qui occasionnait les inquiétudes de la popu- lation et du Conseil municipal. Ayant constaté devant la Commission, que, pour moi, le -mal dont on cherchait la cause ne tenait absolument qu’à Pintroduction dans les filtres, et surtout dans le filtre Vivent, de la nappe d’eau infectée des puits de Saint-Cyprien, je demandai à la Commission de me donner les moyens de vérifier le fait sur une grande échelle. Il fallait pour cela suivre un plan déterminé. Voici celui que je proposai : 1° Ouvrir deux puits entre les filtres et la place de l’ancienne barrière de Muret, afin d'étudier sur plusieurs ponts l’eau de la nappe souterraine avant son entrée dans les filtres. … 2° Ouvrir un troisième puits entre la Garonne et les & LME filtres, afin d'étudier l'eau de la nappe d'infiltrations du: fleuve avant son entrée dans les galeries. 3° Faire l’analyse chimique complète de Peau de la Garonne, de l’eau des filtres, de l’eau des nouveaux puits : à creuser, et enfin de l’eau du puits le plus rapproché du faubourg Saint-Cyprien. J’affirmais qu'avec ces données on pourrait savoir si, d’après mes prévisions, l’eau qui coulait dans les filtres était un mélange d’eau de la Garonne et de la nappe sou-, terraine, et quelle était l’origine de la cause infectante. L'un des chimistes de la Commission, M. Filhol, déclara que le travail proposé était très-long à exécuter et qu’il n’ap- prendrait absolument rien sur la question à résoudre (4). Malgré cette assertion d’un homme compétent et qui n’était pas intéressé, j'aime à le croire, à ce que la vérité sur les causes d'infection des nouveaux filtres ne se fit pas jour dans le publie, je déclarai que j’entreprendrais le tra- vail dont je venais d’exposer le plan. Les données scienti- fiques que Jje possédais sur le sujet me paraissaient suffisantes pour affirmer qu’on aurait un résultat instructif, | je devais consciencieusement faire ce que d’autres membres. de la Commission auraient dû faire avant moi. Dès les premiers jours du mois de février 1872, je com-" mençai mes essais, quoique la Commission m’ait accordé” seulement l’ouverture d’un puits. Son refus pour l’entre- prise des deux autres était motivé par l’absence de fonds suffisants. C'était créer une nouvelle difficulté pour més recherches. Je voulus néanmoins me passer des puits, et je” modifiai mon projet. Il fallut m’arrêter à ce qui suit : 1° Faire journellement une analyse quantitative, mais succincte, de l’eau de la Garonne, du filtre Vivent et du puits de Saint-Cyprien le plus rapproché des filtres. (1) Procès-verbaux des séances de la Commission des eaux, page 43, Toulouse, 1873. “ — 115 — 2 Analyser complètement ces {rois mêmes eaux, plus celle de la prairie des filtres, puisées en même temps dans Ja même journée. 3° Analyser une seconde fois l’eau du filtre Vivent lorsque en fermant le robinet de communication avec le filtre de la prairie, on aurait forcé les alluvions de la Garonne à s’ac- cumuler dans la galerie Vivent. 4° Faire une analyse chimique de l’algue desséchée. Je m’occuperai successivement de ces quatre genres d'opérations accomplies sur les eaux de Toulouse. J’entrerai pour chacune d’elles dans des détails pratiques fort impor- tants et qui n'ont été signalés encore nulle part jusqu’ici. 4° Examen de Peau puisée journellement dans les diffé- rents points signalés plus haut : Garonne, filtres, puits de Saint-Cyprien (propriété Sévin). J'avais lPintention de faire porter mon analyse sur les substances suivantes : Matière organique, résidu salin, ammoniaque, acide azotique, chlore, acide sulfurique, acide carbonique, chaux et magnésie. Malgré ma bonne volonté et malgré celle de M. Castel, mon intelligent et zélé préparateur, 1l a été impossible de terminer chaque jour l’analyse ainsi combinée sur les trois eaux différentes. Je me suis donc borné à suivre régu- lièrement le dosage de lacide sulfurique, de la chaux, et “de la magnésie. Je prenais de temps à autre les degrés alcalimétriques, je dosais par intervalle lammoniaque, les nitrates, le chlore et le résidu salin. Je pouvais ainsi com- parer les quantités de chaque substance dans les trois sortes d'eaux en même temps, de manière à savoir ce qu'étaient “les infiltrations arrivées dans les galeries, par rapport à la “Garonne et à la nappe souterraine de Saint-Cyprien. Certaines précautions sont mdispensables pour faire con- “venablement et avec précision les analyses de ces eaux. Il faut d’abord s’empresser d'opérer sur des eaux fraîche- "140 U— ment puisées, sans cela on ne peut avoir, pour certaines M opérations, que des résultats totalement inexacts. Et en # effet, chacune des eaux signalées tient en solution des substances qui se déposent pour peu que l’on ait attendu à % en faire l'examen. La chaux, par exemple, qui donne à. Peau une grande partie de son alcalinité, est tenue en dis- # solution par un excès d’acide carbonique, avec lequel elle « forme un sel connu sous le nom de bicarbonate de chaux. En laissant une eau bicarbonatée calcique au contact de . l'air, même pendant très-peu de temps, celle-ci perd une“ partie de son acide carboniqne, et le carbonate de chaux qui reste, n'étant plus soluble, se précipite en adhérant aux parois du vase. C’est par suite de cette décomposition chi- mique, opérée au sein de certaines eaux dites calcaires, qu'il se forme des dépôts blancs sur les vases de verre qui ont longtemps servi à les contenir. Il n’est pas difficile de comprendre que, si l’on cherche“ dans l'eau ainsi altérée la chaux qu’elle renferme, on new pourra pas retrouver la totalité de cette substance. De même si l’on prend le degré alcalimétrique de cette eau, on sera loin de l'obtenir d’une manière exacte, puisqu’une* partie de la chaux aura formé un précipité insoluble ets insensible pour les réactifs. \ Le dosage de la magnésie sera également fautif dans de: semblables conditions, car cette subotaues se comporte à peu près comme la Chauas | Aussi ne saurais-je trop recommander, dans de sembla=« bles recherches, de transformer en sels solubles la chaux» et la magnésie qui auraient pu se déposer par suite du long séjour des eaux dans les bouteilles. Pour cela, 1l n’y. a simplement qu’à ajouter quelques gouttes d'acide azotiques dans l’eau conservée, ou, ce qui vaut mieux ençore,« lorsqu'on a à doser aussi les azotates, il faut faire passer, pendant quelques moments, un rapide courant d'acide car QE À DT SE bonique dans l’eau à analyser, afin de reconstituer le bicar- . bonate de chaux. C’est toujours sur l’eau fraîche que j'ai dosé le résidu salin contenu dans un litre, ainsi que la matière organique, Pammoniaque, les nitrates et l’acide carbonique. Quant au chlore et à l’acide sulfurique qui sont parfaite- ment solubles, sous quelque forme de sels qu’ils se présen- tent dans ces eaux, je les ai dosés sur des eaux conservées pendant quelques jours. Toutes les chaux et les magnésies n’ont pas élé traitées ainsi que je le recommandais quelques lignes plus haut, aussi ne donnerai-je pas tous les dosages que j'en ai faits. Dans les essais journaliers, la matière organique a été dosée par incinération, en prenant les précautions néces- saires et indiquées dans tous les traités de chimie. Après avoir fait évaporer un litre d’eau au bain-marie, je recom- mençais l’évaporation en ajoutant dans la capsule de platine de l’eau distillée tenant en solution du bicarbonate d’ammo- niaque dont j’achevais la destruction complète en portant, à la fin, la capsule à une température de 4 10° environ. Je suis loin de préconiser ce procédé comme étant tout-à-fait exact. Il ne m’a servi qu’à faire des comparaisons. Dans une sem- blable opération, on perd toujours une certaine quantité d'acide carbonique que l’on compte comme matière organi- que, ce qui donne, avec les pertes d’eau de composition de plusieurs sels également rapportées à la matière végéto- animale, des différences de pesées en faveur de la matière “réellement incinérée. … Je n’admets pas non plus comme exact le dosage de la ‘matière organique par le permanganate de potasse, et je “considère comme complètement erronés les chiffres fournis, ‘au moyen de ce procédé, par les chimistes de la Commission. Ici la perte est en moins, contrairement à ce qui avait lieu par l’incinération. Le permanganate n’oxyde pas, ne brûle — 118 — pas toute la matière organique, de sorte que la quantité de solution de permanganate de potasse employée pour faire l'essai ne peut pas servir à distinguer, même d’une manière approximative, le chiffre de la matière organique. J'ai consulté à ce sujet plusieurs chimistes des plus com- pétents dans les facultés de province, au Conservatoire des arts et métiers et à l'Institut. M. le professeur Boussingault a bien voulu consacrer plusieurs jours à étudier par lui- même la méthode du permanganate et il m’a déclaré dans une lettre, en réponse à ma demande, qu’il la considérait comme tout-à-fait inexacte et fautive. Elle ne lui a fourni que des résultats erronés. M. le professeur Baudrimont de Bordeaux n’a, en elle, aucune confiance. | | M. le professeur Béchamp de Montpellier considère les résultats qu’elle fournit comme inadmissibles. M. Champion, ancien préparateur de M. Payen, n’a rien pu obtenir d’exact avec le procédé en question. M. L’hôte, professeur de chimie à l’école de commerce, considère le permanganate de potasse comme incapable de brûler complètement les matières organiques en présence desquelles on le met dans les diverses espèces d’eaux. M. G. Tissandier, directeur du laboratoire d’essais de l'Union Nationale, n’emploie jamais cette méthode, qu'il déclare tout-à-fait inacceptable. M. Franklan dans son travail sur les eaux de Londres est arrivé, comme tous les chimistes précédents, à rejeter l’usage du permanganatc de polasse dans le dosage des. matières organiques. Il le considère comme ne donnant même pas des résultats approximatif. Dans son travail sur les eaux de la Seine, M. Péligot n’a jamais employé cette méthode. | Quant à l’hydrothimétrie de MM. Boutron et Boudet que lon a cru pouvoir mettre en usage dans les analyses RER PE ee ST 7 2: D ee journalières de l’eau de la Garonne, comme parallèle de la méthode par le permanganate, 1l n’y a qu’à se joindre à tous les chimistes expérimentés pour la condamner. On ne se donne même pas le soin, avec cette méthode empirique, de chercher à connaître préalablement la composition du réactif que l’on emploie. Qui donc a songé encore à faire une analyse préliminaire du savon qui sert à composer la liqueur hydrothimétrique ? Cependant les savons sont loin d’avoir une composition identique. On comprendra facilement que j'aie rejeté dans mes essais des procédés qui r’offraient pas la moindre garantie d’exaciitude. Je donnerai plus loin, à l’analyse quantitative complète, les détails sur les méthodes suivies pour les dosages de la chaux, de la magnésie et de l’acide sulfurique. Voici maintenant le résultat des chiffres obtenus pour acide sulfurique des trois eaux examinées pendant 17 jours . de suite : Je transforme ces chiffres en courbes qui frappent la vue beaucoup mieux que des nombres (fig. 12). L’examen des trois courbes permet de juger au premier coup-d’oœil de plusieurs faits importants. Ainsi, l’augmen- tation de l’acide sulfurique ou sa diminution dans l’eau de - la nappe souterraine et dans celle de la Garonne suivent à peu près les mêmes variations. Ceci s'explique très-bien par linfluence des pluies sur ces deux sortes de courants d’eau. Pendant les fortes pluies, le fleuve devient bourbeux, dissout une plus forte proportion de matières salines que lorsqu'il est à son étiage, et se trouve ainsi plus chargé de substances solubles. De même, lorsqu'une grande quantité “de pluie tombe à la surface de la terre, cette eau pluviale entraine dans les nappes courantes souterraines une plus “srande quantité de matières solubles. Il est donc naturel de “ouver une augmentation de celles-ci dans les eaux du fleuve et dans celle des couches profondes de la plaine. — 120 — La courbe obtenue pour l’eau du filtre Vivent tient à la fois, 1l est aisé de le voir, de la courbe de l’eau de puits etde la courbe de l’eau de la Garonne. Il m'est donc permis de dire que, sous ce rapport, l’eau du filtre Vivent est un composé tenant le milieu entre les deux sources qui ont servi à la former. N’étant. pas complètement satisfait des dosages de la chaux et de la magnésie que j’ai faits journellement sur les trois espèces d'eaux, bien qu’ils aient été souvent répétés jusqu’à trois et même quatre fois, je ne donnerai pas les courbes qui les représentent. Mais je puis dire que la quan- tité de ces substances trouvée dans l’eau du filtre Vivent a été, d’une manière constante, un intermédiaire entre l’eau de la Garonne et l’eau des puits. Voici, en effet, quelques- uns des chiffres obtenus. CHAUX. — CaO MAGNÉSIE, M90. EE DATE Garonne! Vivent | Puits DATE Garonne| Vivent | Puits 20 févr. 1872.| 0,012] 0,022! 0,037|120 févr. 1872. 0,002! 0,009 21 « « 0,013! 0,021| 0,047,122 « « 0,00%| 0,004 22 « « 6,020! 0,036] 0,040|! 3 mars « 0,004! 0,0°5 25 « « 0,018! 0,031| 0,054! 6 « « 0,004! 0,009 26 « « 0,016, 0,031! 0,054|| 7 « « 0,003| 0,006 27 « « 0,018! 0,033! 0,054 3 mars « 0,015] 0,020! 0,036 5 « « 0,011! 0,020! 0,024 6 « « 0,012! 0,016| 0,022 PR « 0,017| 0,018] 0,035 Les chiffres obtenus en recherchant le degré d’alcalinité # de l’eau ont conduit à un résultat identique au précédent, » c'est-à-dire que l’alcalinité de l’eau du filtre Vivent est intermédiaire entre celle de la Garonne et celle des puits. En effet : Garonne| Vivent | Puits Le 20 février 1872. 0,156 | 0,286 | 0,329 Le 21 « « 0,145 | U,280 | 0,324 Alcalinité. De même, en prenant le résidu total (matière organique et résidu salin) fourni par,une quantité égale d’eau des trois provenances, on arrive à un résultat identique aux précédents ; c’est-à-dire que le chiffre du résidu total de eau du filtre Vivent tient le milieu entre ceux de l'eau de la Garonne et du puits. En effet, on a : Garonne! Vivent | Puits Résidu total. Le 20 février 1872. 0,2425 | 0,3525 | 1,0500 Ces dosages préliminaires une fois connus, je vais abor- der l’étude chimique complète des diverses eaux dont jai laissé déjà entrevoir la composition. Pour ne pas allonger inutilement ce chapitre, je ne pro- céderai pas ainsi qu'il est d'usage de le faire ordinaire- ment dans les analyses. Sans m’arrêter longtemps à un examen qualitatif des diverses eaux, je donnerai la descrip- tion de chacun des procédés que j'ai mis en pratique dans Ja recherche de chaque élément et je fournirai ensuite les chiffres produits par l’analyse. 1° Analyse qualitative. — Chacune des trois espèces d’eau est parfaitement limpide en temps ordinaire. L’eau de à Garonne seule se trouble à la suite des pluies. Toutes trois ramènent au bleu la teinture de tournesol rougie par un acide, le phénomène est plus intense avec l’eau de puits qu'avec Peau du filtre, qui la b'euit elle-même plus promptement que celle de la Garonne. L’ébullition produit un trouble très-prononcé dans l’eau de puits, par suite de la précipitation de carbonate de chaux. Ce trouble est encore très-sensible dans l’eau des filtres, et un peu moins dans l’eau de la Garonne. La constatation des acides carbonique et sulfurique, de la chaux, de la magnésie dans les trois eaux, permet de dire au simple coup-d’œil que l’eau du filtre Vivent four- nit constamment des précipités moins abondants que ceux . de l’eau de puits, et plus abondants que ceux de l’eau de la Garonne. | En outre de la potasse et de la soude, j’ai constaté dans les trois sortes d’eau la présence de la lithine, au moyen du spectroscope. L'eau de la Garonne paraissait en contenir beaucoup plus que les deux autres. Les nitrates, très-abondants dans l’eau de puits, l’étaient beaucoup moins dans l’eau des filtres et dans celles de la Garonne. L’ammoniaque abondait dans l’eau des filtres , surtout dans l’eau recueillie après son passage dans les deux Châ- teaux-d’Eau. Je n’ai pu constater la présence d'aucune trace dr64e dans 30 litres des trois espèces d’eaux. L’oxyde de fer, très-peu abondant dans l’eau des puits. et dans l’eau de la Garonne , existait en quantité très- notable dans l’eau des filtres. 2° Analyse quantitative. — 1° Acide carbonique. = Dans une quantité déterminée d’eau fraichement puisée, j'ai ajouté quelques gouttes d’ammoniaque, puis de l’azotate de baryte. Il s'est formé un précipité de carbonate de baryte« que j'ai recueilli sur un filtre, où il a subi plusieurs lava- ges à l’eau distillée. Ce filtre, desséché à 100°, a été incis ie néré dans un creuset de platine, puis le carbonate ainsi préparé a été transformé en sulfate par l'addition de quel- ques gouttes d'acide sulfurique pur. Ce sulfate de baryte, chauffé au rouge pour chasser l'excès d’acide sulfurique, a été pesé. Son poids une fois connu, j'ai pu calculer à com- bien d'acide carbonique il correspondait. Cette précaution de prendre le poids du sulfate de baryte et non du carbonate, est indispensable. Eu effet, à la tem- pérature du rouge blanc, le carbonate de baryte perd une partie de son poids par suite du départ d’une portion de acide carbonique. Si l’on se fiait donc au poids du carbo- nate de baryte obtenu pour calculer le poids de Pacide carbonique de l’eau, on aurait un poids trop faible. Le poids du sulfate de baryte ne pouvant changer, même au rouge blanc, il est bien plus exact pour l’analyse de calculer la quantité d’acide carbonique fixé par la baryte en pesant le sulfate et en en retranchant le poids de lacide nRUne naturellement contenu dans l’eau. 2° Acide sulfurique. — Une quantité déterminée d’eau a été additionnée d'acide azotique jusqu’à réaction franche- ment acide, puis J'ai ajouté encore de l’azotate de baryte en excès, 1l s’est immédiatement formé un précipité de sul- fate de baryte; je l'ai recueilli sur un filtre où il a été longtemps lavé à l'eau distillée. Après avoir fait sécher le filtre et le précipité à 4100, je les ai chauffés au rouge dans un creuset de platine. Le poids du résidu de lPinciné- ration m’a fait connaître à la première fois le poids du sulfate de baryte, duquel j'ai pu tirer par un simple calcul d'équivalents le poids de l'acide sulfurique. … 3° Silice. — Une quantité déterminée d’eau a été éva- porée à siccité après addition d’une petite quantité d’acide azotique. Il s’est formé un précipité que jai fait chauffer fortement dans un creuset de platine. Repris ensuite par de leau distillée additionnée d'acide chlorhydrique, ce LS précipité a été dissout en partie. J’ai filtré, et le précipité insoluble resté sur le filtre a été lavé à l’eau distillée jus- qu’à ce que l’eau de lavage ne précipitât plus par lPaddition d’azotate de baryte. A ce moment, j'étais sûr que la silice seule était restée sur le filtre. Il a fallu un temps fort long pour arriver à ce résultat, le sulfate de chaux qui accom- pagnait la silice ayant été très-difficile à dissoudre. Le filtre qui renfermait la silice a été séché à 100, puis inci- néré et pesé. J’ai obtenu ainsi, directement, le poids de la silice. 4° Acide azotique. — Le dosage de l’acide azotique des eaux se fait de plusieurs manières; j'ai cru devoir adopter la méthode de M. Boussingault, qui est la plus commode et la plus sensible La préparation des réactifs est seule longue, délicate et dangereuse quand on ne possède pas les appareils nécessaires pour distiller de grandes quan- tités d’éther. Obligé de distiller près de 80 litres d'éther pour préparer une quantité suffisante d’indigo pour pou- voir faire du sulfate, l’opération préliminaire aux dosages m'a coûté beaucoup de temps. La réaction sur laquelle est basé le dosage de l’acide azotique par le sulfate d’indigo, est la suivante : l'acide azotique libre a la propriété de décolorer très-rapidement le sulfate d’indigo. Si donc l’on met en présence un azo- tate soluble, du sulfate d’indigo et un acide capable de décomposer l’azotate sans que cet acide agisse lui-même sur le sulfate d’indigo, il arrivera un moment où l’azotate étant décomposé avec production d’acide azotique libre, cet acide azotique agira sur le sulfate d’indigo en le déco- lorant. L’acide chlorhydrique parfaitement pur et surtout parfaitement privé d’acide azotique, décompose, à chaud , les azotates en produisant de l’acide azotique. Après avoir purifié de l’indigo du commerce par les moyens classiques que M. Boussingault énumère dans son » te Traité de Chimie agricole et physiologique, j'ai fait du sulfate d’indigo avec de l’acide sulfurique Nordhausen. Ce sulfate m'a servi à produire une liqueur d’un bleu intense, con- tenant 20 gouttes de sulfate d’indigo pour 100 centimètres cubes d’eau disullée. Ayant préparé également une solu- tion titrée d’azotate de potasse parfaitement pur, j'ai pu calculer combien 1l fallait de la solution de sulfate d’indigo pour obtenir avec une quantité déterminée d’azotate de potasse la coloration vert chrome persistant malgré une ébullition prolongée du liquide en présence d’une faible proportion d'acide chlorhydrique parfaitement pur. Cela fait, j'avais une solution de sulfate d’indigo dont le titre permettait de doser un azotate alcalin et par suite Pacide azotique contenu dans une eau quelconque. Voici comment j'opérais : Deux cent cinquante centimètres cubes de l’une des eaux à analyser étaient concentrés de manière à ne plus occuper qu'un volume de 3 à 4 centimètres cubes. Ils étaient alors mis dans un tube à expérience, en même temps que les eaux de lavage de la capsule dans laquelle la concentration s'était faite. Je réduisais encore le volume de cette eau, et lorsqu'elle n’oceupait plus que 2 à 3 centimètres cubes , J’ajoutais quelques gouttes de sulfate d’indigo, puis 1 cen- timètre cube d’acide chlorhydrique parfaitement pur et _ essayé à blanc. Dès que Pébullition était obtenue au-dessus d’un bec de Bunsen, la surveillance active de la coloration bleue du liquide no: indispensable. Lorsque cette coloration avait une tendance à passer au vert, j’ajoutais une ou deux gouttes de solution titrée d’indigo que je tenais dans une burette graduée. À mesure que l'opération s’éloi- gnait du début, la coloration bleue passait au vert avec . plus de lenteur. Enfin, lorsque la coloration vert chrome du liquide devenait persistante malgré l'addition d’une nou- velle quantité d'acide chlorhydrique et malgré la prolonga- (HG AR tion de l'ébullition, l'opération pouvait être considérée | comme achevée. La lecture du nombre de dixièmes de cen- timètre cube de solution d’indigo employés correspondait à une quantité d’acide azotique qui n’était autre que celle contenue dans les 250 centimètres cubes d’eau analysée. Mes dosages ont toujours été répétés en moyenne trois fois pour chaque eau; souvent j'ai fait de très nombreux essais pour vérifier ces dosages avec des liqueurs titrées différentes. 5° Chlore. — Le dosage du chlore m’a d’autant plus préoccupé, que dans nos discussions à la Commision des | eaux, M. Brhune, combattant mon opinion({), avait affirmé « à plusieurs reprises que le chlore de l’eau des filtres se | trouvait en même quantité que le chlore de l’eau de la Garonne, tandis que je soutenais que le chlore dans l’eau des filtres existait, au contraire, en quantité supérieure à celui de la Garonne, mais en suantité notablement moin - dre que le chlore de l’eau de puits. Persuadé que M. Brhune avait borné son examen à une analyse qualitative, chose tout-à fait insignifiante, et non à une analyse quantitative, chose autrement sérieuse et autrement importante, j'ai. cru devoir prouver à mon collègue, non seulement par mes propres dosages, mais par celui de trois autres chi- mistes en renom, qu’il faisait une erreur très-regrettable pour la solution di problème. J'ai suivi, pour doser le chlore, le procédé de Bunsen. Après avoir mis le chlore en hberté, dans un appareil spécial, on recueille le chlore libre dans une solution d’iodure de potassium parfaitement pur. Le chlore décom- pose cet iodure de potassium en mettant de l’iode en« liberté, Cet 1ode, grâce à lexcès d’iodure de potassium, reste dissous et on a ainsi une liqueur A. : (4) Loc. ct., pag. 64. D'autre part, on compose une autre solution B d’iode dans de l’iodure de potassium, en pesant avec le plus grand soin la quantité d’iode que lon fait dissoudre. Enfin, une solution d’hyposulfite de soude pur dans de l'eau distillée constitue un troisième liquide C, qui va per- mettre de doser la quantité d’iode déplacé par le chlore. Pour opérer, on commence par déterminer la quantité d’hyposulfite contenue dans 50 centimètres cubes du liquide G. Ce titre se prend au moyen de la liqueur B et d’une solution d’amidon. On verse dans les 50 c. ce. de liqueur C quelques gouttes d’amidon, on agite, puis on verse goutte à goutte la solution titrée diode B, jusqu’à ce que la coloration bleue de liodure d’amidon apparaisse d’une manière persistante, à ce moment la réaction est opérée. On lit sur la burette contenant le hquide B, la | quantité d’iode absorbée, soit 25 cette quantité. Pour savoir maintenant combien la liqueur A contient d’iode mis en liberté par le chlore, on opère comme il suit : On verse toute la liqueur A dans une capsule de porce- laine, et on y ajoute une quantité plus que suffisante de la liqueur C, l’hyposulfite de soude, pour faire disparaître la coloration brune due à liode libre; soit 50 c. c. cette quantité de liqueur C. On ajoute alors au mélange des deux liqueurs une petite quantité d’amidon, puis on verse “avec la burette graduée une quantité de liqueur B (solu- tion diode titrée) suffisante pour produire la couleur bleue -d'iodure d’amidon, soit 45 cette quantité. Puisqu’avec les 50 c. ce. de la liqueur G seule, il fallait 25 de la liqueur B pour produire la coloration bleue, et “puisque, d'autre part, avec le mélange de la liqueur A avec les 50 c. c. de C, 1l ne faut plus que 15 c. ce de liqueur A “pour amener la même coloration, on peut dire que les “10c. c. manquant pour arriver au chiffre 25 ont été — 128 — fournis par la liqueur A. Ïl y a donc dans cette liqueur A, 10 c. c. d’iode qui proviennent de Papport d’une ou équivalente de chlore. Je considère comme inutile de décrire ici l'appareil dont je me suis servi dans cette opération, car il est à très-peu de chose près semblable à celui de Bunsen. Je dirai seulement que les liqueurs titrées dont J'ai fait usage ont été préparées avec des réactifs d’une pureté exceplion- nelle que j'ai produits dans mon laboratoire. Les liqueurs étaient ttrées au dixième, ce qui permettait de compter avec la plus grande assurance sur la quatrième décimale des chiffres obtenus. La vérification de mes dosages a été faite au conserva- toire des arts et métiers par M. L’Hôte, au laboratoire par- ticulier de M. Champion, et enfin au laboratoire de l’Union Nationale par M. G. Tissandier. Les chiffres obtenus par ces savants prouvent de la façon la plus formelle qu’ainsi que je l’avais affirmé, la quantité de chlore contenue dans l’eau des filtres Vivent est intermédiaire entre celle de la Garonne et celle de l’eau des puits. Voici les nombres donnés par les trois chimistes dont je” viens de citer les noms : | Eau paisée Garonne| Vivent | Puits Chlore. Le 14 mars 1872 0,0024 | 0,0066 | 0,0600 6° Chaux. — Elle a été dosée sur l’eau fraîchement puisée. Une quantité déterminée d’eau a été additionnée de chlorhydrate d’ammoniaque, puis de quelques gouttes d’ammoniaque et enfin d’un excès d’oxalate d’ammoniaques Après 24 heures de repos, le précipité formé était recueilli. sur un filtre, lavé à l’eau chaude, séché et incinéré. .Le = 199 — carbonate de chaux ainsi formé pouvant être en partie détruit par la température élevée de l’incinération était transformé en sel de chaux fixe, au moyen de quelques gouttes d’acide sulfurique pur. Porté de nouveau au rouge sous cette forme, le sulfate de chaux était pesé. De son poids je calculais celui de la chaux. T° Magnésie. — L’eau provenant de la filtration du précipité d’oxalate de chaux et les eaux de lavage de ce précipité ayant été conservées avec soin, étaient de nou- veau additionnées d’une faible quantité de chlorhydrate d’'ammoniaque, et d’ammoniaque, puis de phosphate de soude. Le précipité de phosphate ammoniaco-magnésien produit après 12 heures de repos était recueilli sur un filtre, lavé à l’eau chaude, puis à l’eau ammoniacale, séché à 100% et enfin incinéré avec précaution. Le résidu formé par du pyrophosphate de magnésie était pesé et de son poids je calculais celui de la magnésie. 8° Alumine. — Après avoir ajouté du chlorhydrate d’am- moniaque et un peu d’'ammoniaque à une quantité déter- minée d’eau, j'ai fait bouillir cette eau pendant quelques minutes. Il s’est formé un précipité que j'ai recueilli sur un filtre et qui a été incinéré, dans une capsule de porce- laine, après avoir été préalablement séché. Ce précipité, repris à chaud par de la potasse caustique, s’est en partie dissous, mais il est resté un résidu ferrugineux insoluble que j'ai recueilli sur un filtre. Le liquide filtré et les eaux - de lavage traitées de nouveau par lammoniaque à chaud - ont fourni un précipité gélatineux complètement blanc. Je ai recueilli aussi promptement que possible et à l’abri du contact de l’air, sur un filtre où je l’ai lavé avec de lam- - moniaque bouillante. Séché d’abord à 100e, le filtre et le … précipité ont été incinérés à feu doux dans un creuset de platine couvert. A la fin de l'opération, le couvercle du creuset étant enlevé, j'ai porté celui-ci au rouge blanc. 9 — 130 — Le résidu était composé par de l’alumine pure dont j'ai pris le poids. 9° Fer. — Le précipité ferrugineux resté sur le filtre une fois lavé a été séché incinéré dans un creuset de por- celaine, puis dissous dans de lacide chlorhydrique. Après avoir saturé la liqueur par de lammoniaque, je Pai traitée par le succinate d’ammoniaque qui m’a fourni un précipité ferrugineux. Recueilli sur un filtre et lavé à l’eau, d’abord, puis à l’eau fortement ammoniacale et chaude, ce précipité desséché à 100° a été incinéré dans un creuset de platine. Le résidu était formé pur de l’oxyde de fer dont j'ai pris le poids. 10° Potasse. — Une quantité déterminée d'eau a été concentrée dans une capsule de porcelaine en présence d’un excès d’eau de baryte, de manière à précipiter l’acide sulfurique, l’acide carbonique, la silice, la chaux, la magnésie, l’alumine, le fer, afin de ne conserver que la potasse et la soude. Le liquide filtré a été de nouveau porté à l’ébullition après addition de carbonate d’ammoniaque, afin de précipiter l’excès de baryte, l’ébullition a été pro- longée jusqu’au complet dégagement de l’excès de carbonate d'ammoniaque, après avoir toutefois ajouté quelques gouttes d'ammoniaque pure pour forcer la portion de magnésie qui reste toujours non précipitée par l’eau de baryte, à former un précipité insoluble de carbonate ammoniaco-magné- sien. Après avoir suffisamment bouilli, le liquide encore chaud a été filtré, et puis concentré dans une capsule de pla- tine après avoir été additionné d'acide chlorhydrique pour former avec la potasse et la soude un chlorure soluble. Après une évaporation complète le résidu a été chauffé au rouge pour décomposer le chlorure de magnésium, dans le cas où toutela magnésie n'aurait pas été enlevée par les opérations M précédentes. Repris par l’eau distillée, le résidu sec a été dissous puis filtré. Le liquide recueilli et les eaux de lavage | | | | NS ST PE du filtre ne contenant plus, cette fois, que le chlorure de sodium et celui de potassium, ont été évaporés à siccité dans la capsule de platine. Les deux chlorures alcalins fondus avec précaution dans la capsule elle-même ont été pesés ensemble. Repris par un peu d’eau distillée, ils ont été traités par le bichlorure de platine et par l’alcool éthéré. Le précipité de chloro-platinate de potasse recueilli sur un filtre taré bien lavé avec de l'alcool éthéré a été pesé avec le filtre. La différence du poids du filtre vide et du filtre avec le sel platinique m'a donné un premier résultat pour calculer le poids de la potasse de l’eau Mais j'ai voulu pousser plus loin la vérification de mon opération. Le filtre a été lavé à l’eau distillée qui a dissous le chloroplatinate de potasse. Cette eau évaporée à siccité dans une capsule de porcelaine, au bain-marie, a donné un résidu de chloroplatinate de potasse que j’ai pesé. D’où un second poids pour la potasse. Enfin, ce chloroplatinate de potasse chauffé au rouge a été décomposé en donnant du platine métallique que J'ai lavé sur un filtre. Le poids du platine ainsi obtenu après incinération du filtre m’a fourni un troisième résultat me permettant de vérifier les deux autres. Ce dernier a été constamment inférieur de quelque dixième de milligramme aux deux autres. C’est celui auquel je me suis arrêté. Ale Soude. — Connaissant le poids de la potasse, j'ai calculé le chlorure de potassium qui lui correspondait. Ce poids de chlorure de potassium retrarché de celui des chlorures de potassium et de sodium réunis, a fourni celui du chlorure de sodium et par suite, par un simple caleul, le poids de la soude. A2 Ammoniaque. — Une quantité déterminée d’eau a été versée dans un ballon de verre au fond duquel j'avais déjà jeté une dizaine de grammes de magnésie calcinée — 132 — parfaitement pure. Ce ballon une fois bouché a été mis en communication avec un serpentin au-dessous duquel était placé un récipient. L’ean du ballon portée à l’ébullition a donné naissance à de la vapeur, qui, refroidie dans le ser-- pentin s’écoulait dans le récipient inférieur. J’ai recueilli la moitié environ du volume d’eau ainsi soumis à la distil- lation et je l'ai vidé dans un appareil semblable au précé- dent, mais contenant une solution de potasse caustique parfaitement pure. L’eau du ballon de cet appareil a été également soumise à la distillation et je recevais la vapeur condensée dans un vase de verre d’une petite contenance, mais parfaitement jaugé. Chaque fois que ce vase était rempli jusqu'au point de repère, je prenais le degré alca- limétrique exact du liquide qu'il contenait, et ainsi de suite jusqu'à ce que le degré d’alcalinité se trouvât réduit à zéro. En faisant une addition de tous ces degrés alcalimétriques et un simple calcul, j'arrivais à connaître la quantité d’ammoniaque libre contenue dans l’eau à analyser. Voici sur quels principes repose cette opération. Lorsqu'on met de la potasse en présence d’un composé ammoniacal contenu dans de l’eau et que l'on porte cette eau à l'ébullition, la potasse déplace l’ammoniaque. Celle- ci devenue libre est entraînée par la distillation et peut-être recueillie avec l’eau distillée qui se produit, ce qui permet de la doser. Mais la potasse a également la propriété de décomposer les matières végéto-aninrales azotées et d’en chasser l’ammoniaque. Comme toutes les eaux contiennent. une quantité plus ou moins considérable de matière végéto-animale, 1l s'ensuit qu’en traitant ces eaux par de « la potasse directement, on doit forcément produire de l’ammoniaque étrangère à celle qui est à l’état de sel solu-… ble. La magnésie calcinée pouvant chasser également Pam- moniaque de ses composés sans altérer la matière organique ) 1 | J | — 133 — est employée dans la première opération. La potasse est mise en usage dans la seconde, car l’eau distillée ne con- tenant pas de matière organique, on n’a pas à craindre la décomposition de celle-ci. L’on peut se demander pourquoi l’on ne dose pas direc- tement l’ammoniaque après la première opération. Voici le motif qui a conduit à faire la seconde opération comme complément de la première : L’eau à analyser peut conte- nir des gaz que la première ébullition met en liberté, tels que Pacide carbonique, lPacide sulfhydrique; dans ce cas, ces gaz peuvent s'unir à l’ammoniaque dégagé et former des composés dont le titre alcalimétrique doit être pris différemment que sur l’ammoniaque pure. Dans la seconde ébullition la potasse retient ces composés gazeux et l’on n’a que de l’ammoniaque pure à la distillation. Le procédé que je viens de décrire est du tout entier à M. Boussingault et à M. Péligot. Le premier de ces savants la décrit en grande partie dans son traité de chimie physiologique et agricole. Il est d’une sensibilité extrême. 13° Iode. — J'ai concentré jusqu’à siccité 30 litres de chacune des eaux à étudier, après y avoir ajouté 20 gram- mes de carbonate de soude parfaitement pur. Le résidu sec ainsi obtenu a été porté à rouge dans un creuset de por- celaine. Réduit ensuite en poudre, dans un mortier parfaite- ment exempt de toute impureté, 1l a été traité à plusieurs reprises par de lalcool bouillant. Cet alcool évaporé à siccité a donné un résidu que j'ai dissous dans une faible proportion d'eau distillée, à laquelle j’ai ajouté une goutte de solution d’amidon, puis une trace d’acide azotique par- faitement pur. Il ne s’est produit aucune coloration bleue. … Ilÿa déjà cinq ans j'avais étudié à ce point de vue l’eau de la Garonne en traitant 100 litres d’eau de la même manière. Je n'avais rien obtenu qui pût me faire même — 134 — soupçonner la présence de l’iode dans l'eau de ce fleuve. 14 Acides crénique et apocrénique. — J'ai évaporé, presque à siccité, au bain-marie, une quantité déterminée d’eau qui a fourni un précipité sur lequel j'ai versé une lessive de potasse avec laquelle il a bouilli pendant un , peu plus d’une heure. Après filtration du liquide, j'ai | | acidulé avec de l’acide acétique et ajouté de l'ammoniaque. Après 12 heures de repos, il s'était formé un précipité qui a été séparé du liquide par un filtrage. De l'acide acétique a été ajouté jusqu’à réaction acide, puis enfin de l’acétate neutre de cuivre. Il ne s’est formé de précipité d’apocrenate de cuivre dans aucune des eaux à analyser, et j'avoue que J'en ai été fort étonné, car je m'attendais à en trouver dans l’eau du filtre Vivent. | J'ai additionné de carbonate d’ammoniaque le liquide contenant déjà l’acétate de cuivre, jusqu’à ce que la couleur ait changé en passant au vert, puis J'ai chauffé. Il ne s’est pas non plus formé de crénate de cuivre. Pour être parfaitement sûr que la manière d’opérer n’était pas fautive, j'ai deux fois recommencé mon opération « et le résultat a été le même chaque fois. î Je ne saurais admettre, cependant, sans faire une recher- che nouvelle que l’eau du filtre Vivent ne contient pas des acides organiques, aussi je crois devoir laisser un point de doute sur cette partie de mon analyse que je me propose « de refaire. 15° Matière organique. — J'ai dû procéder de deux manières différentes pour m'assurer que l’eau contenait une matière organique et pour en connaître la quantité. 1° J’ai suivi le procédé le plus habituellement employé … dans les analyses d’eaux minérales, celui de lincinération: Ce procédé ne peut donuer que des résultats approximätifs, je l’ai déjà reconnu. Maïs je crois ces résultats plus rappro=M chés de la vérité que ceux obtenus au moyen du perman=« Peas fr PE TRS ganate de potasse, surtout lorsqu'on prend toutes les pré- cautions voulues, et que j'ai décrites plus haut. 2 J'ai cru également devoir mettre en pratique l’analyse organique complète ; car c’est le seul procédé qui puisse donner quelque chose d’exact avec toute la rigueur exigée dans une analyse bien faite. Malheureusement les chiffres que j'ai obtenus dans plusieurs analyses successives n’ont pas concordé d’une manière parfaite, aussi ne les ferai-je pas connaître ; seulement, ce que je puis dire, c’est que les résultats indiquent d’une manière bien évidente que leau du filtre Vivent contient une quantité de matière organique sensiblement plus considérable que les autres eaux. _Je me contenterai donc de donner dans les résultats de mes analyses, les quantités de matière organique obtenues par le premier procédé, celui de l’incinération, et je laisse- rai un point de doute sur l'exactitude absolue des résul- tas. Je ne puis cependant m'empêcher de donner à côté de ces résultats, le chiffre obtenu dans une autre opération sur la matière organique. Après avoir fait évaporer à siccité au bain-marie une assez forte quantité d’eau, j'ai traité le résidu par l'alcool. Celui-ci a dissous une matière organi- que que j'ai pu obtenir en faisant évaporer l’alcool. Cette matière brülait en répandant une odeur empireumatique, et laissait un faible résidu salin. Voici maintenant les chiffres de chacune des analyses : — 136 — ou 0710‘0 [62200 |3610‘0 | 58000 ,9z80‘0 |£c00°0 | 29700 |3600‘0 |6£00‘0 |8900‘0 |£000°0 |8cr0‘0 | zL18£"0 | ‘oxtoresoqe np euruog ë 0€0‘0 so981) |0CF0‘0 | 600‘0 |8760‘0 |0700‘0 |£200‘0 | 7000 |0800°0 |8700‘0 |8700‘0 |60&0‘0 [64170 |" * © © © * IU9AIA ont 6 ‘CL8Y IAE 9 al 44SINd NVA 7900‘0 60000 | F9£0‘0 8c00°0 |*€00°0 |6100‘0 |T070‘0 82000 |£8L0‘0 |‘(e1I142G ‘H) euuores oc 0810‘0 £800°0 |£070‘0 |1800‘0 97900 |F100‘0 |96000 |9700°0 |3200‘0 |£00‘0 |9700‘0 |Z070‘0 | 16170 |" * * * * * ‘euuouer 04 6 0860°0 |S700‘0 |0£70°0 |00€0°0 | og10‘o |Z£1r‘0 |£200‘0 |L080‘0 |0800‘0 69000 | 58000 |+800‘0 |8720‘0 |S9E 0 |” © * * ‘IUSAIA MINT 0€ è è 08&0°0 £e00‘0 |0€00‘0 |6800‘0 |8640‘0 |6000 ‘0 |££70°0 |S100‘0 |££00‘0 | 0900 ‘0 |2100°0 |8E70‘0 |SEZS 0 |” * * * ‘eIEIQ ONINX 08 è &190°0 soës1 | F100‘0 | 800 |8672‘0 |£000“0 |8020‘0 |Z100“0 |0600‘0 | F00‘0 |e800‘0 |8820‘0 |7285“0 |‘ * * * * ‘u1A9S sunq o} é è entres LéANIOUT "QUIu "OIS “onberu enpr02e | *ImJnS | ‘uoqueo *“SLSY SIP YF I -10 —X9 PER ‘xneu”) ‘2pnos |‘2s$2]04| *910[4) | *99IS ane l'oxne -nv |-Ju$eN -OULULY | apr v | 2pHY | oproy aASINd AV "AULIT NA ANS SAAILVLILNVAND SASA'TVNV — 137 — Ainsi que j'en ai l'habitude dans mes analyses d'eaux ther- males, j'ai laissé de côté la discussion de l'analyse qui con- duit à formuler une combinaison supposée des substances entre elles. A part certains cas particuliers, il est impos- sible de dire avec exactitude qu'une eau contient en solution telle ou telle substance saline plutôt que telle autre. Toutes les analyses qui montrent les combinaisons toutes faites, sont bien un peu le résultat des calculs après des dosages bien faits, mais elles sont surtout le résultat de la fantaisie ou des théories de chaque chimiste. Je laisse donc les chiffres bruts des dosages; chacun pourra les interprêter à sa façon. J'ai eu le soin de mettre un point d'interrogation sur les résultats qui ne m'ont pas paru aussi satisfaisants que je l'aurais voulu. | L'analyse de la Garonne, faite par H. Deville, il y a quelques années , m’a paru devoir être ajoutée à mon tableau, car elle peut servir de point de comparaison avec la mienne, et je puis dire que son étude comparative est fort instructive. En effet, 1l est facile de voir que les dosages des sub- stances fixes ont donné dans les deux cas des résultats que l’on peut considérer comme identiques. Les petites diffé- rences qui existent entre les deux , tiennent à des varia- tions journalières auxquelles tous les cours d’eau et toutes les sources sont soumis. | Les quantités de chlore, de potasse et de soude sont, à “très-peu de chose près, les mêmes dans lanalyse de Deville et dans la mienne. L'augmentation d'acide sulfurique dans mes résultats ‘peut tenir à ce que j'ai analysé l’eau de la Garonne pen- dant une crue. | L’acide carbonique, la chaux et la magnésie présentent “des différences notables dans les deux analyses, mais il — 138 — / est facile de trouver la cause de ces différences. Cela pro-" vient simplement de ce que Deville a fait son analyse sur « l’eau de la Garonne transportée, tandis que je l’ai faite sur. l’eau fraichement puisée. Dans le transport , ainsi que je. Vai fait remarquer plus haut, les bicarbonates de chaux et de magnésie se décomposent en perdant de l'acide car- bonique, il se dépose du carbonate de chaux et du carbo- nate de magnésie. La portion de ces substances devenue insoluble et formant un dépôt ne pouvait donc être retrou-" vée dans l’eau à l’état de sel dissous. Cet inconvénient” n'ayant pas lieu dans l’eau fraîchement puisée, il fallait. nécessairement que les chiffres donnés par l’analyse faite sur cette dernière eau soient plus élevés que ceux résultants de l’analyse de l’eau transportée. Les soins que j'ai mis à faire mes dosages, la concor-M dance de mes résultats avec ceux d'H. Deville par rapport au chiffre des substances fixes, me permettent de considé= rer mes analyses comme suffisamment exactes pour en tirer la conclusion essentielle à laquelle j'arrive maintenant. Si l’on examine le tableau précédent, dans lequel sont, énumérés les résultats des dosages, le premier fait qui frappe l’esprit est celui de la progression croissante qui existe dans les chiffres pour chacune des substances, en: remontant de l'analyse de l'eau de la Garonne à ceux dem l'analyse de l’eau du puits. Les chiffres fournis par l’eau des deux filtres restent d'une manière presque constante intermédiaire entre ceux que fournissent les analyses de« la Garonne et du puits Sévin. Quelques-unes des substances seulement échappent à cette règle. L'ammoniaque est plus abondante dans l’eau du filtre Vivent que dans les autres. L'origine de cette ammoniaque n’est pas difficile à trouver ; elle provient de la décompo®= sition de la partie de l’algue qui se pourrit dans les gale= ries filtrantes en dehors de l’eau. L’atmosphère étant saturée» \ er 139 Puee d’ammoniaque, il n’est pas étonnant que l’eau dissolve dans les filtres une grande quantité de cette substance dont la solubilité est si grande. Je n’hésite donc pas à dire que l’assertion dont j'avais fait part à la Commission dès le jour de mon arrivée dans son sein, se trouve vérifiée d’une façon frappante par mon analyse. Il reste, en effet, démontré par ce travail, con- damné d'avance comme inutile par lun des chimistes de la Commission, que l’eau des filtres , et surtout celle du filtre Vivent, tient le milieu par sa composition chimique entre l’eau de la Garonne et l’eau de la nappe souterraine de Saint-Cyprien. Cette eau des filtres Vivent et de la prai- rie n’est donc pas autre chose qu’un mélange se produisant dans le radier des galeries entre les eaux d'infiltration venues de la Garonne et les eaux de la nappe souterraine qui alimente les puits du faubourg Saint-Cyprien. Les chapitres suivants vont fournir les preuves physi- ques qui viennent à l’appui de l'interprétation de mon analyse chimique. CHAPITRE V. Influence exercée par le creusement des fondations du quai de la rue Viguerie, par la construction des aqueducs du fau - bourg Saint-Cyprien et par l'ouverture des tranchées de la prarne des filtres ainsi que du ramier Vivent, sur la nappe d'eau qui alimente les puits de Saint-Cyprien. Er science comme en toute chose, les faits acquis for- -ment la base des raisonnements qui conduisent aux théo- mies ; les faits acquis sont irrélutables et doivent comme tels, servir de jalons dars la pratique. Lorsque lon a creusé le sol du quartier Saint-Cyprien — 140 — pourinstaller des aqueducs, un quai et les filtres, le régime de la nappe d’eau qui alimentait les puits de ce faubourg de Toulouse situé sur la rive droite de la Garonne a été complètement changé. Il importait beaucoup, pour lintel- ligence du travail de la Commission des eaux, de recher- cher les changements qui étaient survenus dans cette nappe souterraine. Personne, à ma connaissance, n’a fait une étude sérieuse de ces changements. Il n’y avait cependant aucune difficulté à arriver à un résultat utile dans cet ordre de recherches. J’ai tâché de remplir la lacune qui existait au point de vue de ces renseignements. Ne possédant aucun document écrit, car les ingénieurs chargés de ces travaux n’en ont consigné nulle part, J'ai dû interroger les hommes les plus intelligents et les mieux renseignés du faubourg Saint-Cyprien. Pour arriver à con- naître la vérité stricte, je ne leur faisais aucune question spéciale. Je les priais simplement de me raconter ce qu'ils savaient sur l’histoire de leurs puits. J’ écrivais mes notes sous leur dictée. Voici d’abord le récit très-net, très-catégorique, que m’a fait M. Fieux, l’un des négociants les plus importants de Saint-Cyprien. | Avant que l’on ait bâti le mur du quai qui longe la rue Viguerie, le nivean de l’eau des puits se trouvait dans le quartier à # m. 50 environ au-dessous du sol. Lorsque le quai fut construit, on fit reposer les fondations sur le tuff. Quand le mur fut élevé, les maisons de la rue Viguerie furent peu à peu envahies par une nappe d’eau souterraine.qui rendait les rez-des-chaussées fort humides ; sur plusieurs points cette eau arrivait même au niveau du sol, et l’ou était fort en peine pour, s’en débarrasser. A l’époque où l’on construisit le canal de fuite pour ancien Château-d’eau, on creusa dans le voisinage de la rue Viguerie une énorme tranchée, dans laquelle vint se ARTE …. déverser une quantité d’eau très-considérable, et le niveau = dela nappe d’eau qui avait envahi le quartier de la rue ” Viguerie baissa d'une manière très-notable. Les maisons se … trouvèrent de nouveau assainies. Dans une maison voisine de celle de M. Fieux, la maison Launa, le creusement des galeries pour le canal de fuite du nouveau Château-d’eau a amené encore un changement dans le régime du puits. L’eau n’a n1 augmenté ni diminué dans son volume, mais elle est devenue très-mauvaise, et. pour retrouver de l’eau potable il a fallu creuser le puits jusqu’à 10 mètres de profondeur. Le même phénomène … s’est produit chez M. Pierre Angely, et chez M. Fieux. - Dans toute la partie du faubourg Saint-Cyprien, longeant … |a grande rue, la nappe d’eau qui alimente les puits s’est —_jrouvée abaissée de deux mètres environ, à la suite du —…_ creusement du canal de conduite du nouveau château. … C’est ce qui résulte des renseignements donnés par … M. Bonnafous, fabricant de pompes du quartier, chargé dans … bien des maisons d’allonger, à cette époque, de deux mètres mu moins les tuyaux servant à l’ascension de l’eau des … puits. Le fond de la tranchée dans laquelle a été construit “l'aqueduc reliant les deux châteaux-d'eau était complète- ment envahi par l’eau. Il y avait Ges sources énormes. —. Sices faits sont importants déjà pour l’étude que nous faisons, j'arrive maintenant à une nouvelle série de faits semblables dont l'importance est encore bien plus grande. — Persuadé, avant d'entrer dans la Commission des eaux, «que l’eau de la nappe des puits de Saint-Cyprien avait été attirée dans les nouveaux filtres de la prairie, dès le début 4 “de mes recherches à ce sujet, je voulus choisir un puits “permettre d'en faire un type. Je choisis le puits le plus - rapproché. …—. Je fus conduit naturellement à visiter celui d’un proprié- — 142 — taire M. Sévin, tout à côté et au nord du moulin Vivent. Voici l’histoire de ce puits que j'ai écrite sous la dictée de M. Sévin lui-même, auquel je posai simplement la question suivante : Voudriez-vous me faire l’histoire de votre puits ? Autrefois, il y avait un puits dans la maison, alimenté par une source et en même temps une autre source Cou- lant à 4 m. 70 environ au-dessus du niveau de la Garonne. Il y a 8 ou 9 ans, lorsque l’on commença à faire les premiers nouveaux filtres, à l'extrémité de la prairie, la source élevée disparut complètement, et celle du puits diminua. Le lavoir qu’alimentait cette eau se trouva à sec. Lorsque l’on continua à creuser les filtres, la source du puits disparut à son tour 1l fallut augmenter la profondeur du puits pour la retrouver. Enfin, la prolongation des gale- ries filtrantes de la prairie amena une nouvelle diminution dans le débit de la source du puits. Or en augmenta de nouveau le débit en creusant encore le sol. Depuis lors, la source n’a plus changé. Mais au lieu de couler comme autrefois directement dans les bassins où l’on blanchissait le linge, elle ne peut y être conduite qu’au moyen d’une pompe. M. Sévin me signala la reproduction de ce fait à la même époque, dans tous les puits du voisinage, dont quel- ques-uns avaient même complètement tari. Prévenu par ce récit, j'ai visité la majeure partie des puits de la rue Laganne, de l’avenue de la République et de la rue de Muret, à partir du moulin Vivent jusqu'aux dernières maisons Dore la barrière. Le résultat de mes recherches fut que les puits des environs du moulin Vivent, de la maison Lacoume et du côté sud de l’allée de la République avaient subi la même influence que la source de M. Sévin, mais à un degré moins fort. Ainsi, tandis que la source de M. Sévin s’était abaissée — 143 — de près de 3 mètres, depuis le creusement des filtres de la . prairie, les autres puits n'avaient guère subi qu’un abaisse- ment de ! mètre à 1 m. 50. Quelques-uns cependant - avaient été complètement desséchés. . Pour m'expliquer ces faits, je cherchai à me rendre un compte aussi exact que possible du niveau auquel on avait trouvé la molasse, afin de tracer à peu près les courbes - que la surface de cette roche présente au-dessous des + alluvions. Cela complétait mon étude. … Ensuivant les bords de la Garonne en amont de Toulouse, … j'ai trouvé partout la molasse un peu au-dessus du fleuve. Ce qui prouve bien l'exactitude de mes mesures, c’est que les crues de la Garonne sont sans influence sur la hauteur de Peau dans les puits de cette région. Quelques-uns, fort rares, subissent seulement l'influence des plus fortes crues. — Sur certains points on dirait qu'en s'éloignant de la Garonne le niveau de la molasse est plus bas que sur les bords. En effet, dans la maison n° 4 de l'avenue de Muret, … le puits traverse une mince couche d’eau. Pour en avoir une provision suffisante on a été obligé de creuser un … bassin dans la molasse ; elle s’accumule ainsi et s’emma- m…sasine. Exactement en face de l’autre côté de l’avenue, le fond du puits n’a pas atteint la molasse, et cependant la couche d’eau rencontrée est suffisamment épaisse pour ali- …_ menter abondamment le puits. —…. Si nous étudions maintenant la molasse sur le parcours 2 dune ligne passant par l’éxtrémité du cours Dillon et allant directement vers la Garonne à l'Est et vers la maison “Lamarque à l'Ouest, sur l’allée de la République, les puits —creusés dans ce parcours nous donnent de précieux ren- » seignements. 1 Ainsi, dans la prairie des filtres la molasse se trouve à 6 m. 70 au-dessous du niveau du sol. Le radier des gale- | ries est à 0,70 centimètres environ au-dessus de cette | ETES molasse. Le niveau de la surface du sol de la prairie des filtres se trouve à # mètres à peu près en contre-bas du niveau du sol de la rue Lagane ainsi que le montre la figure 6. Dans le café Dujardin, donnant sur la place de l'ancienne barrière de Muret et dans la rue Lagane, existe un puits creusé Jusque dans la molasse. Celle- -ci a été ren- contrée vers 6 mètres de profondeur. En poussant plus loin notre investigation sur le côté sud- ouest de l’allée de la République, dans la maison Lamar- que, nous Le un puits dans lequel on aperçoit la molasse à 2 m. au plus au-dessous du sol. On peut donc affirmer qu'aux environs de l’extrémité sud du cours Dillon, la molasse est de plus en plus profon- dément située, à mesure que l’on se rapproche de la Garonne. (est donc le contraire de ce que nous venons de voir pour un point plus éloigné de l’avenue de Muret. Autrefois, la nappe d’eau souterraine qui alimentait les puits précédemment désignés, était beaucoup plus élevée, puisque le puits Lamarque ne manquait jamais d’eau. Depuis l’époque où M. Sévin a vu diminuer sa sourcé dans son volume et dans son point d'écoulement, c’est-à-dire depuis le creusement des filtres, le puits Lamarque est complètement à sec et l’eau ne l’atteint pas, quelle que soit la quantité de pluie qui tombe sur Toulouse. Dans le voisinage, les puits des maisons Lassance, Delaye, Huet, Vieillard, Lacoume, De Signac, du jardin Bonnal, ont tous beaucoup diminué. Mais ces puits ne se trouvant pas sur une proéminence de la molasse, comme celui de la maison Lamarque, aucun d’eux n’a pas complè- tement tari. Tous sont creusés dans les alluvions ; aussi, en descendant leur fond de quelques pieds, on a pu atteindre de nouveau la couche aquifère et les alimenter de nouveau avec abondance. L'état de chose que je viens de décrire s’est maintenu — 145 — d’une manière tout-à-fait régulière depuis le moment où il s’est produit jusqu’à ce jour. Les pluies abondantes qui ont fait augmenter de beaucoup les sources des environs de Toulouse, à diverses époques, ont été incapables de faire reprendre leur ancien niveau aux puits dont je viens de parler. Ceci permet d'affirmer que la sécheresse n’a pu en aucune façon produire à elle seule l’abaissement de niveau de la nappe aquifère de Saint-Cyprien, ainsi que certains membres de la Commission avaient semblé le croire. La coïncidence de ce dessèchement des puits avec le creusement des galeries filtrantes de la prairie permet de supposer avec juste raison que C’est bien à cette cause qu'il faut attribuer la disparition de l’eau dans certains puits et l’abaissement général de la nappe d’eau souter- raine de la partie du faubourg de Saint-Cyprien située aux environs du cours Dillon. Les probabilités augmentent si l’on se rappelle que le creusement des canaux de fuite de l'ancien et du nouveau château-d’eau ont produit le même effet sur la nappe d’eau des puits du reste du faubourg. Enfin la supposition que je viens de faire peut être regardée comme se rapprochant encore plus de la vérité, en Sachant que la fermeture du robinet d'écoulement des infiltrations de la galerie Vivent a entraîné une augmenta- tion de 2 mètres d’eau environ dans cette galerie et d’un mètre dix centimètres au moins dans quelques puits voisins de ceux dont je viens d'étudier plus haut le régime, et dont M. Desplas, conducteur des ponts et chaussées, a suivi, comme moi, les changements. C'était donc l’eau de la nappe inférieure des puits de Saint-Cyprien qui était entrée dans les filtres et qui les — alimentait en partie. Et en effet, l’analyse chimique nous a montré que la composition de l’eau du filtre Vivent se … rapprochait énormément de celle de la nappe des puits les … plus voisins. 40 1 10 CHAPITRE VI. Expériences faites pour rechercher la provenance exacte de l’eau infectée des galeries filtrantes de Toulouse. Avant de chercher le remède à un mal, il est de toute nécessité de connaitre les causes de ce mal; car vouloir guérir sans savoir ce qu’il faut guérir, c'est se lancer dans un empirisme que répudie la science, c'est s’exposer à ne pas attaquer le principe morbide que l'on veut combattre. La Commission a-t-elle suivi une route scientifique pour arriver à connaître exactement la provenance du germe qui a porté une atteinte si profonde à la salubrité de l’eau que boit la population Toulousaine ? Je ne le pense pas. On avait bien cru de plusieurs côtés que la conferve née dans le radier des filtres s’altérait au contact de l’air et communiquait à Peau l’odeur infecte que nous lui connais- sons tous. Mais il fallait aller plus loin, et personne, j'ose le dire, n’a encore décrit la cause qui produit et le mauvais goût de l’eau et la végétation que cette eau renferme. Bien plus, quelques membres de la Commission ont cher- ché à éloigner toute discussion relative à ce sujet, tant il leur paraissait hérissé de difficultés insurmontables. Il n’y avait pourtant qu’à se donner la peine de chercher pour vaincre ces difficultés ; on ne l’a pas fait. Je me propose dans ce chapitre, en m’appuyant sur les données fournies dans les chapitres précédents, ainsi qu'avec d’autres observations, de montrer quels sont la véritable origine et le véritable véhicule de la conferve dont la présence et l’altération ont coïncidé avec le mal qui nous préoccupe. | Et tout d’abord, qu'il me soit permis de donner ici les détails d’une longue visite que je crus devoir faire le + nn fé — 147 — 14 mars dans les galeries filtrantes de la prairie et dans celle du ramier Vivent. En remontant la galerie de la prairie vers le sud, on voit le fond du radier tapissé d’une couche anormale de pro- duits végétaux que l’on reconnaît bientôt comme étant due à une conferve d’une espèce particulière. À mesure que Von approche du fond de la galerie, et surtout du point où vient s'ouvrir le tuyau de fonte qui fait communiquer la galerie Vivent avec la galerie de la prairie, la conferve ou plutôt l’algue prend une coloration ocreuse de plus en plus marquée, la végétation atteint son maximum de dévelop- pement et s’arrête brusquement à l'entrée de ce tuyau, dans l'intérieur duquel on la voit s'engager. Au-delà de l’ouver- ture du tuyau, l’eau du filtre de la prairie est parfaitement dépourvue de tout produit hétérogène, l’eau est d'excellente qualité et n’a pas le moindre mauvais goût. Il était donc possible, en suivant ainsi le mal à la piste, de se dire à l’avance : que le mal tout entier devait venir de la galerie Vivent. J’allai done immédiatement étudier cette galerie filtrante. J'étais accompagné dans cette visite par M. J. Castel, mon préparateur, par M. Mazuc, membre de la société géologique de France, et par trois ouvriers qu'avait bien voulu mettre à ma disposition M. Roux, ingénieur de la ville. | _ L’odeur ammoniacale qui régnait dans la galerie nous frappa dès notre descente sous la voûte. À mesure que nous avancions vers le sud, l’odeur devenait de plus en plus piquante, et à notre arrivée à l'extrémité de ce long boyau Souterraln, NOUS respirions un air aussi puant que celui des latrines ; nos lumières avaient grand peine à brûler, et J'éprouvai avec une assez notable chaleur les mêmes malaises que j'ai ressentis bien souvent, dans des cavernes basses et étroites renfermant des quantités notables d’acide carbonique. MS Il restait évident pour moi, surtout après un premier examen des eaux fournies par ce filtre, examen que je ferai connaître plus loin, que c’était bien dans le filtre Vivent qu’il fallait chercher la cause du mal (1). Après avoir reconnu que le filtre Vivent était bien le lieu dans lequel se manifestait tout le mal, il restait encore plusieurs choses à chercher et à trouver. En effet, ma visite, je vais le prouver plus loin, m'avait (4) Qu'il me soit permis de fixer la date exacte de la fermeture défini- tive du filtre Vivent, et de faire connaître les circonstances dans lesquelles ce filtre a été définitivement fermé. La Commission des eaux, instruite par M. Brunhes que l’eau du filtre Vivent fournissait à l'analyse une plus grande quantité de matière orga- nique que celle du filtre de la prairie, avait décidé, bien avant mon entrée dans la Commission, de rechercher si en fermant le filtre Vivent on n’améliorerait pas l’état de l’eau des fontaines. Le 44 mars, quand je fis ma visite dans les galeries, le filtre Vivent se déversait encore dans le filtre de la prairie. C'est là, er effet. que l’on puisait tous les jours l’eau Vivent destinée à être analysée par M. Brunhes, par M. Filhol et par moi. En sortant de faire ma tournée dans les galeries, et ignorant complè- tement les décisions antérieures de la Commission des eaux, j'allai trouver M. le Maire qui se trouvait en ce moment aux abattoirs avec deux de ses adjoints MM. Bibent et Rességuier, et avec M. Roux, ingénieur de la ville. Je déclarai de la manière la plus formelle à M. le Maire que j'étais sûr d'avoir trouvé la source du mal produit, et je lui désignai l’eau du filtre Vivent comme étant le véhicule du végétal qui s'était développé et dont l’altération au contact de l’air était une nouvelle source d’infec- tion. Je demandai que l’on fermât immédiatement toute communica- tion de ce filtre avec le reste des galeries. On accepta unanimement cette décision, et le soir même j'écrivis à M. le Maire la lettre suivante à ce sujet, après avoir également prévenu M. Joly président de notre Commis- sion, du résultat de mes observations : Monsieur le Maire, Attaché depuis un mois environ à la Commission chargée d'étudier Les causes du mauvais état des filtres qui alimentent les fontaines de la ville, je n'ai pas hésité à laisser de côté tous mes travaux scientifiques ainsi que toutes les analyses chimiques qui m'ont été confiées dans ces derniers temps, pour m'occuper exclusivement de la solution du problème qui intéresse à un sihaut point mes compatriotes, vos administrés. Persuadé, dès le début de ma mission, que la géologie et la chimie — 149 — fait constater que l’eau de la galerie était de bonne qualité et dépourvue de mauvais goût à l'extrémité sud du filtre, tandis que sur d’autres points elle avait un goût infect. Comme les infiltrations provenaient soit de l’eau de la nappe souterraine, soit de celle du fleuve, il fallait étudier quelle était la source du désordre dans le filtre. Où que ce soit que lon examine soit la Garonne, soit les mares d’eau qui en proviennent, et la chose est facile à combinées pouvaient seules donner un résultat dans la question actuelle, j'ai exposé mes vues à ce sujet, au sein de la Commission à laquelle vous avez confié le soin d'étudier le problème dont je m'occupe en ce moment. En résumé j'ai expliqué qu’une seule cause pouvait avoir gâté l’eau des fontaines de Toulouse, réputée avec juste raison comme étant la meil- leure de France, tant que les filtres d'Aubuisson étaient seuls à la fournir. Quand on a creusé les nouvelles galeries filtrantes, on est descendu bien au-dessous du niveau de celles qu'avait établi l'ingénieur d'Aubuis- son. Ce travail a eu pour résultat le dessèchement de ces dernières. Par ce creusement si profond on à installé les nouveaux filtres dans une couche perméable, à travers laquelle arrivent les eaux clarifiées de la Garonne pour se mélanger avec les eaux de la nappe souterraine qui alimente les puits de Saint-Cyprien. Lorsque la Garonne à été envasée entre la chaussée du Basacle et celle du moulin Vivent, la coùche énorme de vase, qui se voit encore le long des berges du fleuve, a formé un obstacle presque complet aux infiltrations de la Garonne. En quelque sorte, l'équilibre étant rompu entre ces infiltrations et celles de la nappe d’eau inférieure de la vallée, celle-ci a envahi les filtres. Je possède aujourd’hui la preuve certaine et scientifique de ce que _ j'avance. | Lesinfiltrations de cette nappe d’eau inférieure traversent sur plusieurs poinis, entrautres aux abords du filire Vivent, des couches de terres infectantes transportées artificiellement en ces points depuis plusieurs années. C’est là que se fait le mal principalement. Mais une couche naturelle de terre contribue aussi à l’entretenir. Après avoir entendu ma communication, la Commission des eaux de Toulouse à accédé à ma demande d'ouvrir un puits de recherche qui servirait à connaître : 1° Si, comme je le suppose, l’eau du filtre Vivent tient le milieu, par sa composition, entre l’eau de la Garonne et l’eau de la nappe inférieure de Saint-Cyprien; 2° Si la cause de l’altération de leau vient bien du passage des infiltrations sur des détritus infectants. — 150 — faire le long des rives du fleuve, nulle part on ne voit la moindre trace d’une conferve ocreuse rappelant celle des filtres ou de la fontaine Saint-Jean. Quel que soit le temps que l’on conserve, dans un flacon bouché, de l’eau puisée dans la Garonne, jamais cette eau ne forme de concrétion végétale abondante pouvant faire supposer qu’elle porte en elle-même les germes nombreux d’un individu quelconque, animal ou végétal, capable de s'organiser peu à peu. Cest Persuadé que je possède la solution complète des questions relatives à l'infection de l’eau des fontaines, je viens vous prier, M. le Maire, de faire faire le puits dont j'ai demandé l'ouverture. Après un examen attentif des galeries, je reste persuadé que le plus grand mal se produit dans le ramüer Vivent. Détourner complètement l'eau des filtres venant de ce ramier et nettoyer à fond la galerie de la prairie des filtres, serait une mesure qui constituerait déjà une améliora- tion notable dans l'état actuel des fontaines. Veuillez, Monsieur le Maire, agréer, etc. Dr F. GarriGou. Toulouse, le 44 mars 1872, Dans la séance du 25 mars, un ingénieur civil, qui était venu faire à la Commission des eaux ses offres de service comme auteur d'un procédé de filtrage et comme entrepreneur, déclara à la Commission qu’il avait reconnu que le mal si déplorable pour les habi- tants de Toulouse se produisait dans le filtre Vivent. Je formulai égale- mént la même opinion citée dans la lettre précédente que je résumai, et nous votâmes à l’unanimité l'isolement définitif du filtre Vivent. En résumé, c’est avant mon arrivée dans la Commission des eaux que la Commission a émis l’idée de rechercher si, par hasard, la fermeture de la galerie Vivent pourrait modifier l'état de l’eau des filtres. — C’est le 14 mars que j'ai affirmé à M. le Maire et au Président de la Commission des eaux, que la majeure partie du mal venait de l’eau produite par le filtre Vivent, dont je demandais formellement la séparation d'avec le reste des galeries. — C'est enfin le 25 mars, ainsi qu’on peut le constater dans une brochure sur les eaux de Toulouse, qu’un ingénieur civil a émis également mon idée, circulant déjà en ville, pour la formuler devant la Commission. J'ai voulu entrer dans les détails qui précèdent pour faire sa part d'initiative à chacun et pour montrer combien on a été d'accord, de tous les côtés, pour accuser la galerie Vivent du mal produit sur l’eau des filtres. —— 15T — à peine si elle fournit, après fort PSE un dépôt insignifiant. Les mares d’eau de la nappe souterraine ne m'ont jamais présenté non plus, dans la plaine de Toulouse, (et j’en ai examiné un très-grand nombre) les traces d’une conferve ocreuse, semblable à celle que j'ai signalée avec d’autres observateurs dans le filtre de Toulouse. Mais si l’on conserve dans un flacon bouché, ainsi que je Vai fait, une certaine quantité d’eau de la nappe soüterraine de la plaine de Toulouse, on y voit se produire, après quelques semaines, un singulier phénomène. Des flocons gélatineux apparaissent, se couvrent bientôt de quelques taches verdâtres, et une véritable végétation s’y développe. On voit en peu de temps la plante adhérer sur certains points aux parois du vase. Le même phénomène se produit avec l’eau des puits de Paris. L'examen que j'ai pu faire de quelques puits voisins de la Garonne, m'a conduit à un résultat analogue. L'eau des puits venue du fleuve ne produit pas sur les murs qui en forment les parois, des végétations semblables à celles qui tapissent au contraire, sous la forme d’une mince pellicule verte, certains puits éloignés du fleuve et alimentés par l’eau de la nappe souterraine. De prime abord, on est donc conduit à considérer l’eau de la nappe souterraine de la plaine de Toulouse, comme tenant en dissolution une matière végétale ou végéto- animale capable de s'organiser. L'eau des filtres de Toulouse devait naturellement me servir à répéter les mêmes expériences que j'avais exécutées avec les eaux de la Garonne et de la nappe souterraine. L'eau du filtre Vivent, puisée alors qu'il en coulait seule- ment une couche de 30 centimètres au-dessus du radier, a été gardée ea bouteille fermée. Elle a déposé peu à peu une matière végétale ocreuse que je n’ai plus retrouvée qu’à Pétat radimentaire dans l’eau des filtres de la prairie. — 152 — Lorsque le robinet de communication du filtre Vivent avec. les filtres de la prairie a été fermé, et que, par suite, le niveau de l’eau dans le filtre s’est accru très-notablement, à cause de l’arrivée des infiltrations de la Garonne, ainsi que je lai prouvé, l’eau puisée dans ce filtre n’a plus fourni de dépôt organique ocreux, même après une conservation de plusieurs semaines. Ainsi donc l’eau du filtre Vivent, alors qu’elle se compo- sait en grande partie de l’eau de la nappe souterraine de Saint-Cyprien, conservait un trait de ressemblance physique avec l’eau de cette nappe, c’est-à-dire, qu’elle avait comme elle la propriété de déposer une matière organique après quelques semaines d’embouteillage. Mais une expérience bien concluante vient, encore mieux que toute autre, donner raison aux observations précéden-, tes et à ma supposition sur la véritable origine de l’algue des filtres. Si Von fait évaporer dans une capsule de porcelaine une quantité égale d’eau de la Garonne, d’eau du puits Sévin, d’eau des drains actifs du fond de la galerie Vivent, d’eau du radier Vivent et d'eau de l’ancien filtre d’Aubuisson (1), on voit au premier coup-d’œil une différence entre toutes ces eaux et celle du radier du filtre Vivent. Les premières donnent un dépôt parfaitement blanc qui contraste d’une manière frappante avec le dépôt ocreux laissé par l'évapo- ration de l'eau du radier du filtre Vivent. De plus, cette eau portée à l'ébullition en même temps que toutes les autres, est seule à répandre une odeur infecte sui generis. Une expérience semblable faite comparativement avec l’eau du filtre Vivent puisée en divers points de la galerie, devient fort instructive et très-concluante. En eflet, ainsi (1) J'ai eu bien souvent l’occasion de faire évaporer à siccité de l'eau des filtres d’Aubuisson, alors qu'ils alimentaient seuls les fontaines de Toulouse. Je puis donc mettre cette eau en parallèle d'étude avec les autres. que je viens de le dire, l'eau des drains du fond de la galerie se rapproche complètement par ses caractères physiques et chimiques de l’eau de la Garonne : 1l n’y a pas de mauvaise odeur naturelle, et il ne s’en développe pas pendant ébulli- tion. L'évaporation à siccité ne laisse pas non plus de dépôt ocreux. Mais l'eau puisée à 10 mètres environ du fond de la galerie sur le radier, possède déjà un goût fort désagréable (4); ébullition y développe une odeur nauséuse et l'évaporation à siccité fournit un abondant dépôt ocreux. Ce dépôt augmente encore avec l’eau puisée à l'entrée de la galerie. En portant au rouge sombre les capsules qui rem- ferment ces dépôts, on développe une odeur empyreumatique très marquée, et après le refroidissement la coloration ocreuse persiste encore, quoique à un degré moindre, dans l’eau du radier Vivent. On reconnait facilement à l’aide de l'acide chlorhydrique et du cyanure jaune que cette dernière coloration est due à de l’oxyde de fer. La dégustation seule de l'eau pouvait faire prévoir l’ensemble de ces résultats. En effet, à l'extrémité sud de la galerie, ainsi que je l’ai dit, l’ean fournie par les deux seuls drains qui contribuent à l'alimentation du filtre est de parfaite qualité. Cette eau ne fournit aucune végétation, et elle se conserve ainsi excellente jusqu’à 8 ou 10 mètres du fond. Là se développe brusquement un goût détestable, rappelant un peu celui que je viens de citer au renvoi pré- cédent, dans le puits du moulin Vivent. C'est à peu près en ce point que commencent à paraître les productions végétales. Un ingénieur civil, entendu par la Commission des k (1) Un puits du moulin Vivent fournit une eau qui se trouve exacte- ment dans les mêmes conditions. L'eau est tellement infecte qu’en la goûtant simplement on est saisi à la gorge par le goût acre, métallique et mordant qu’elle possède. M. Bibent, premier adjoint au Maire, auquel J'ai envoyé une bouteille de cette eau a pu, comme moi, se rendre compte de ce goût désagréable et particulier. IL n’est pas étonnant que l’eau du filtre Vivent ait un goût analogue, car il est voisin. — 154 — eaux, a soutenu devant elle la théorie absolument fausse, que ce mauvais goût de l’eau venait de ce que le courant dans la galerie étant nul, la plante se putréfiait dans l’eau et l'infectait. Il n’est pas difficile de réfuter cette manière d’expliquer les faits. D'abord l’algue ne s’altère pas dans l’eau tant qu’elle y est vivante, et elle ne meurt qu'au contact de l'air. Quand elle meurt au contact de l'air, l'eau n’est pas direc- tement infectée par lesémanations de cette putréfaction, car l’eau la meilleure du filtre Vivent coule dans le point de la galerie où l'air est réellement infecte, où l’on sent l'odeur de latrines. Enfin, je déclare, qu’entre le fond de la galerie et le point du radier où j'ai commencé à trouver le mauvais goût à l'eau, c’est-à-dire, huit ou dix mètres de distance, il y a un Courant fort rapide relativement surtout. L'eau qui arrive de bas en haut par le radier, s'écoule très-facilement et d'une manière continue. On n’a qu’à remuer les petits gra- viers et le sable de ce radier pour voir le courant ascendant se manifester. Nous pouvons également trouver de précieux renseigne- ments, pour la question qui nous occupe, dans les observa- tons faites par M. Roux pendant la mise à sec, le nettoyage et l’utilisation nouvelle de la partie du canal de fuite du moulin Vivent qui a été privée d’eau pendant la confection du filtre Vivent. Exposons d’abord l’état de la prairie traversée par ce canal. La figure 9 nous donnera une idée des situations respec- tives de chaque point mis en relief dans cette description. Au sud, nous trouvons le moulin Vivent MV. Le canal de fuite de ce moulin C occupe tout l’espace AB dans la prairie dite ramier Vivent RV ; il coule dans le sens de la flèche pour venir se déverser au nord, dans la Garonne G. La galerie filtrante dite filtre Vivent F est creusée dans le — 155 — ramier. Entre le moulin Vivent et le filtre on a creusé un canal de fuite secondaire C’ pour faire passer l’eau du canal primitif, pendant que la partie A'B était fermée par un barrage de bois; ce batardeau était destiné à faciliter le nettoyage de la partie A'B du canal, et en même temps à éviter les infiltrations de cette portion du canal dans la prairie, pendant le creusement et la construction de la galerie filtrante F. Or, pendant tout le temps que la portion A'B du canal de fuite était à sec, on a remarqué qu’il arrivait néanmoins une quantité considérable d’eau dans le radier de la galerie filtrante et cette eau était littéralement infecte. Lorsque l’on a remis l’eau dans le canal de fuite AB, l’eau de la galerie F a augmenté sensiblement et son goût s’est amélioré. L’expé- rience a été plusieurs fois répétée et le résultat était toujours le même : En l'absence de l’eau du canal de fuite A’B, dimi- nution de l’eau filtrée dans la galerie F et augmentation du mauvais goût ; pendant que l’eau coulait dans la portion A’B du çanal de fuite, la quantité d’eau filtrée de la galerie F augmentaitet le mauvais goût diminuait. Que se passait-il dans ces circonstances ? Il n’est pas difficile de le dire. | Pendant que le canal A'B était à sec, l'eau qui arrivait dans le radier ne pouvait être qu'un mélange d’eau des infiltrations de la Garonne avec l’eau de la nappe souterraine de Saint-Cyprien, puisqu'encore, en ce moment, nous trou- vons chimiquement à cette eau une composition exprimant le mélange de ces deux eaux. Pendant que le canal de fuite A'B était alimenté par l'eau de la Garonne, celle-ci s’in- filtrant avec rapidité à travers le lit du canal nettoyé et s’écoulant vers le filtre F en partant d’un niveau supérieur à celui de la nappe souterraine, devait en partie arrêter les infiltrations de cette dernière, en diminuer labondance dans le radier de la galerie et arriver avec une vitesse et par conséquent avec un volume plus considérable que celle — 156 — qu'elle arrêtait par son poids. De là, augmentation du volume d’eau de la galerie de filtration et l’amélioration de sa saveur. Quand l'eau était enlevée du canal de fuite, les choses revenaient dans leur état primitif, c’est-à-dire que l'eau de la nappe inférieure et souterraine arrivait dans le radier du filtre dans les mêmes conditions qu'auparavant; de là le re- tour du mauvais goût de l’eau et la diminution de son volume. Une semblable expérience était bien instructive et pouvait servir de démonstration complète aux assertions déjà avan- cées dans tout ce travail. L'on se trouve donc dans la galerie Vivent en présence de deux eaux : 4° Celle des drains coulant de haut en bas ct présentant tous les caractères de pureté désirables ; 2° l'eau du radier naissant de bas en haut et offrant de très- nombreux signes d’impureté. Ces deux eaux qui naissent l’une à côté de l’autre doivent avoir nécessairement une origine différente. Celle du radier que nous avons vu prove- nir de la nappe souterraine de Saint-Cyprien traverse le sol du ramier Vivent, s’y infecteet arrive altérée. Elle a dissous, avec de la matière organique, et des nitrates, un sel de fer dont nous verrons plus loin le rôle par rapport à l’algue. Tous ces faits rappellent complètement ce qui se passe dans les eaux minérales, surtout dans les eaux sulfureuses, où nous voyons se produire l'organisation des matières végéto-animales dissoutes, lorsque ces eaux se trouvent dans les conditions indispensables à cette organisation. La matière organique servant ainsi à la formation des conferves de toutes sortes qui peuvent naïtre dans les eaux, préexiste sous forme de matière dissoute. Elle ne nait pas spontanément, ainsi qu'on l’a dit dans un lan- gage anli-scientifique et tout de fantaisie. Soit que ces êtres, ces conferves, proviennent de germes venus d’ail- leurs, avec la matière végéto-animale dissoute, soit qu’ils soient dus à l'organisation directe de cette matière végéto- animale, et à son évolution naturelle sous l'influence de causes physiques et chimiques, la matière organisée dissoute est le plasma au sein et aux dépens duquel leur vie et leur développement se forment, eise maintiennent. À coup sûr, la conferve des filtres cesserait d’exister si l’eau ascen- dante qui lentretient cessait de dissoudre la matière organique, les nitrates et le sel de fer qui servent à son entretien. Ce qui le prouve, c’est que partout où les eaux de la Garonne ainsi que celles des puits ne traversent pas de couches infectantes, ces eaux restent parfaitement pures et ne produisent jamais d'accidents semblables à ceux que nous avons à déplorer dans des filtres conçus par des gens inexpérimentés et creusés en dehors de toute règle scienti- fique. Je n'hésite donc pas à conclure que c’est l'eau ascendante du radier du filtre Vivent provenant de la nappe d’eau des puits de Saint-Cyprien, qui, après avoir traversé un sol infecté, a porté les éléments nécessaires à la praduction de l’algue et à son entretien. Comment cette eau a-t-elle pu sintroduire dans la galerie filtrante? C'est ce que je vais dire dans le chapitre suivant. CHAPITRE VIL Étude de la cause déterminante qui a entraîné en abondance la nappe d’eau des puits de Saint-Cyprien dans le filtre Vivent. Reinarques diverses faites sur phénomènes pré- sentés par l’eau de ce filtre. Nous avons vu que le creusement des filtres à un niveau plus bas que ceux de l'ingénieur d'Aubuisson, en entrainant le desséchement de ces filtres, avait également été cause que le radier à travers lequel se faisaient les infiltrations nouvelles se trouvait en contact avec la molasse. Or, dans — 158 — ces conditions, il devait arriver forcément, je l'ai prouvé plus haut, que l'on rencontrerait la nappe d’eau passant sous Saint-Cyprien (1). C'est en effet ce qui a eulieu. Or, la théorie et la pratique, c’est-à-dire le raisonne - ment et l'analyse chimique, ont prouvé qu’il existe une sorte d'équilibre entre la couche d'infiltrations fluviales et la nappe d’eau souterraine, dans leurs points de contact, équilibre faisant que le mélange offre une composition, qui, dans un point à peu près central, rappelle une moyenne entre les éléments des deux sources d’eau, tandis que cette moyenne est rompue vers les extrémités des points de contact en faveur de la source dont on se rapproche. C'est dans l’un des points de ce contact que les filtres ont été creusés ; ils ont donc reçu une eau dont la composition mixte aurait pu être connue d'avance. Dans de semblables conditions, l’eau des filtres devait rester la même, tant que des causes imprévues ne seraient pas venu rompre l’équili- bre existant. Mais supposons que, par suite d’un fait inattendu, l’accès de l’eau d’une des deux sources soit interrompu, ce sera l’autre source qui alimentera alors le filtre. Et la disparition de la première entrainant la rupture de l'équilibre, la seconde n'étant plus maintenue dans son écoulement arri- vera plus vite et par suite en plus grande abondance. Or, c'est là ce qui est survenu brusquement dans les filtres de Toulouse. En effet, par suite d’une crue énorme il s’est produit un envasement du lit de la Garonne, qui a causé un colmatage LU (4) Si le mur du Cours Dillon repose sur la molasse, 1l doit arrêter cette nappe d’eau (voir la fig. 6 ) et l'empêcher de s’écouler vers la Garonne et par conséquent vers les galeries filtrantes. Mais à l'extrémité sud du Cours Dillon, le mur cesse et la nappe souterraine de Saint- Cyprien trouve en ce point un écoulement naturel vers le filtre Vivent et vers l'extrémité sud des filtres de la prairie. — 159 — complet des alluvions sur lesquelles elle coule entre les deux chaussées du moulin Vivent et du moulin du Bazacle. L'épais- seur de vase déposée dans ce bassin a été tellement puissante que les ouvriers dragueurs se sont trouvés dans l’impossi- _bilité de pêcher du sable et des cailloux. Ils ont été obligés de quitter le bassin de la Daurade où ils étaient établis depuis un grand nombre d'années, et ils sont allés s'installer ailleurs. Cest à ce moment que la population Toulousaine a constaté une augmentation très-sensible dans le mauvais goût de l’eau, déjà légèrement altérée, au dire de bien des gens, depuis l'emploi des nouveaux filtres. Le simple bon sens permet de comprendre ce qui a dû se passer dans les galeries filtrantes. | A la suite du dépôt de l'épaisse couche imperméable de vase produit dans le lit de la Garonne, leau du fleuve a cessé de traverser les alluvions perméables à travers les- quelles elle filtrait jusque dans la prairie des filtres et dans le ramier Vivent. Dès lors, l'équilibre qui permettait primi- tivement le mélange constant et régulier entre les eaux d'infiltration du fleuve et celles de la nappe souterraine a été rompu; les eaux souterraines ont pu s'épancher avec plus d’abondance et elles ont immédiatement envahi les filtres. | Or, j'ai constaté que l’eau arrivant à travers le radier de la galerie Vivent a un goût infecte, quelque rapide que soit - son arrivée dans le filtre. Mais cette eau n'est autre, + l'étude chimique l’a prouvé, que l'eau de la nappe souter- - raine; il n’est donc pas étonnant, que, se mélangeant à celle … de tousles autres filtres, elle ait produit un aliment infect | pour eux ainsi que pour le Château-d'eau, et qu’elle ait, … pour ainsi dire, empoisonné les habitants de Toulouse. …. Mais le lit de la Garonne peu-à-peu balayé par de nouvelles —… inondations, a perdu une partie de sa vase, les infiltrations Ont pu reprendre insensiblement leurs cours, cependant — 160 -- leur quantité est demeurée infiniment moindre qu’aupara- vant. Comme les eaux infectées de la nappe souterraine ont également continué à abonder dans le filtre Vivent, elles ont conservé aux eaux des fontaines les mauvaises qualités si préjudiciables à la population. C’est lorsque le filtre Vivent se trouvait dans les condi- tions que je viens de décrire que j'ai formellement demandé à Monsieur le Maire de Toulouse de le faire fermer pour éviter qu'il ne continuàt à empoisonner les filtres de la prairie. Il est fort utile d'étudier ici les phénomènes qui depuis lors se sont accomplis dans ce filtre et dans les fontaines de Toulouse. 1° Fontaines de Toulouse. — Un mois après la fermeture du filtre Vivent, le 6 avril 1872, le degré d'alcalinité des fontaines de la ville est descendu de 08,259 à O0:,095. L'eau n'avait plus un mauvais goût aussi prononcé qu'avant le 14 mars, époque où le filtre Vivent se déversait encore dans les filtres de la prairie. Enfin le dépôt ocreux laissé par l'évaporation de l’eau à siccité était à peine sensible. 2 Filtre Vivent. — Depuis le moment où le robinet du filtre a été fermé, le niveau de l'eau dans la galerie s’est accru de deux mètres environ. L’odeur de latrine a complè- tement disparu, le goût de l’eau parfait, je m'en suis assuré par moi-même. Par l’évaporation à siccité elle ne laisse pas de résidu ocreux très-net. Son degré alcalimétrique est tombé de 05,280 à 05,123. Son analyse chimique prouve qu’elle se rapproche énormément par sa composition de l'eau de la Garonne, ainsi qu'on peut s’en assurer en con- sultant le tableau de la page 136. Ces faits dont l'importance n'échappera à personne prouvent une fois de plus que la distinction des deux sources d'alimentation du filtre Vivent est parfaitement exacte. Pendant que l’eau du filtre Vivent s’écoulait dans le — 161 — filtre de la prairie, l’eau de la nappe souterraine et celle des infiltrations de la Garonne se déversaient dans le radier et s’écoulaient aussitôt en fournissant un Hhiquide dont la composition tenait une moyenne entre l’eau de la Garonne et celle des puits. Lorsque le filtre a été fermé, les eaux s'y sont accumulées et ont presque atteint le niveau des. eaux dela Garonne. Or la Garonne seule pouvait fournir ces eaux par des infiltrations, car la nappe souterraine des puits est en ce point à 3 mètres au moins au-dessous du niveau du fleuve et ne peut atteindre un niveau supérieur. Aussi la composition chimique de l’eau ainsi accumulée dans la galerie était-elle la même, à très-peu de chose près, que celle de la Garonne. Ces faits éclairent donc la question d’une manière remar-: quable et permettent d’arriver à la discussion des autres causes invoquées pour expliquer l'infection des filtres. CHAPITRE VII. Discussion des causes invoquées en dehors de l’envasement du bassin de la Daurade et de l'introduction de la nappe d’eau de Saint-Cyprien dans le filtre Vivent, pour expliquer l’in- fection de l’eau des galeries filtrantes. u » I. La cause à laquelle on a d’abord attribué laltération de l’eau des filtres de Toulouse, est l'introduction dans les galeries filtrantes des eaux bourbeuses de la Garonne, un jour de forte crue. Que, dans le principe , alors que tout était inconnu dans la question qui nous occupe , on ait invoqué une semblable cause comme point de départ de désordres si profonds et si grands, cela pouvait se com- prendre. Mais 1l m'est difficile d'admettre aujourd’hui que lon puisse encore soutenir une semblable théorie. Les faits 11 — 162 — observés ont assez nettement éclairé le sujet pour qu'il n’y ait plus possibilité de s'arrêter à une cause aussi fugace. Pour linstraction de tous, je rappellerai succinctement ici les faits qui ont occasionné Penvahissement des galeries par les eaux troubles de la Garonne. Pendant l'exécution des travaux qui devaient relier le filtre Vivent avec le filtre de la prairie, on avait mis à sec, au moyen de deux batardeaux placés en A’ et en B (voir la fig. 9), la partie A" B du canal de fuite du moulin Vivent. La tête inférieure de la galerie filtrante du ramier Vivent était mise en communication avec la tête supérieure des filtres de la prairie, au moyen d’un énorme tuyau de fonte; les deux galeries étaient largement ouvertes. I survint une crue considérable de la Garonne, .et par malveillance (4), lon brisa avec des pinces de fer quelques planches du batardeau d’amont. L'eau de la Garonne fit irruption dans le canal de fuite et s’introduisit dans les filtres. Immédiatement averti par le gardien du Château- d'Eau, M. Roux, ingénieur de la ville, fit réparer le batar- deau; les pompes du Château-d'Eau vidèrent en quelques heures les galeries, dont le nettoyage complet fut terminé en très-peu de temps. L'accident s'étant produit dans la nuit, le travail d’appro- priation était achevé assez tôt pour que les habitants de Toulouse n’aient pas eu à souffrir de ce mécompte. Dans la matinée même, l’eau, à peu près limpide, coulait dans les fontaines de Toulouse. Ce fut cette crue qui envasa le bassin de la Daurade, et ce fut bientôt après sa manifestation que commencèrent les plaintes de la population au sujet du mauvais goût de l’eau. Il n'est donc pas étonnant qu'on ait pu invoquer tout L (4) M. Roux, ingénieur de la ville de Toulouse, en a fait la déclara- tion officielle. Re Ed ed nd it Dé ù à : — 163 — d’abord l’encrassement des filtres par les eaux bourbeuses de la Garonne comme cause du désordre. Mais des objections sans nombre se dressent devant cette théorie. D'abord, il est indispensable de faire connaitre le fond du raisonnement de ceux qui la soutiennent. Suivant ces personnes, la Garonne aurait puisé sur ses rives les germes de la végétation qui est accusée de donner, par sa décom- position, le mauvais goût à l’eau. Ces germes se seraient déposés dans les galeries en même temps que la vase du fleuve, et là ils se seraient développés au point d’envahir tout le radier des galeries filtrantes. C'est là, il faut l'avouer, une singulière façon de connaître les éléments les plus simples de l’histoire naturelle. Nous avons, en effet, sous les yeux, un fait inadmissible; car on aurait affaire à un végétal refusant de naître et de se développer en plein jour, les rives de la Garonne n’ayant jamais, soit avant, soit après une crue, présenté une algue aussi singulière et aussi peu connue que celle en présence de laquelle nous nous trouvons, tandis que cette algue se serait développée avec une abondance inouïe, à l’abri du jour et de l'air, dans le radier des filtres. Si c’est la crue de la Garonne qui a introduit les germes de l’algue dans les galeries filtrantes, comment se fait-il que ces germes ont pu, dans si peu de temps (l’espace de quelques jours), croitre, se développer et mourir, de manière - à augmenter, jusqu'à le rendre insupportable, le mauvais goût de l’eau, mauvais goût qui existait, il ne faut pas l’ou- blier, avant laccident. Comment se fait-il encore que l’eau coulant des drains de la galerie sur le radier se conserve bonne et parfaite, tandis que celle qui monte avec rapidité dans le radier est mauvaise et infecte ? Pourquoi, enfin , la tête sud du filtre de la prairie, * Ve TRES immédiatement en amont de l'embranchement avec le tuyau Vivent est-elle restée tout-à-fait intacte et dépourvue de végétation? Pourquoi l’eau que fournit le radier de cette portion du filtre est-elle parfaite quant au goût et à la composition ? Si la Garonne avait infecté par sa vase les galeries, il eùt été bien difficile de ne pas retrouver le germe de lin- fection dans toute l'étendue des filtres. Il n’y aurait pas eu de raisons pour que la galerie Vivent füt plus infectée que les autres. On le voit, cette théorie non seulement n’explique rien dans l’accident survenu, mais elle tourne encore au ridi- cule sur bien des points. Mais, s’il faut en revenir à l'entrée de l’eau de la nappe souterraine pour tout expliquer, comment peut-il se faire, demanderont bien des personnes, que cette eau n'ait pas envahi le radier de la partie du filtre de la prairie en amont du tuyau de communication du filtre Vivent ? Les faits s’expliquent tout naturellement ici. En effet, la molasse sur laquelle reposent presque partout les piliers soutenant la voûte de la galerie, ne se retrouve en ce point que profondément située au-dessous du radier. Dès lors la nappe d’eau souterraine qui suit toujours la surface de la molasse n'arrive pas jusqu’au niveau du radier. Celui-ci reçoit directement les infiltrations, soit de la Garonne, soit surtout du canal de fuite du moulin Vivent qui coule à quelques mètres de là. Aussi, l’eau que fournit cette por- tion du filtre et dont j'ai donné la composition, pagé 436, (filtre prairie), se rapproche énormément de celle de la Garonne tant par les chiffres de ses éléments que par sa pureté et par son bon goût. , Ainsi donc, la théorie de l’encrassement des galeries fil- trantes par l'irruption de la Garonne comme cause de leur - CPS ET. SAIS EE 1 Ÿ LÉ Sun, J dE” : — 165 — imperfection, est insoutenable, de quelque façon qu’on l’en- visage. IL. La seconde manière d'expliquer l'altération que j'étu- die, a été la suivante : Lorsque lenvasement de la Garonne a eu lieu, l’eau a continué à filtrer à travers la vase, et c’est dans cette vase qu'elle a puisé le mauvais goût et les germes de la végé- tation. Mécaniquement, cette théorie était impossible à soutenir. En effet, la vase est constituée par de largile assez cal- caire formant presque une argile plastique. Or, pour peu qu'une argile soit grasse et consistante, elle ne se laisse pas traverser par l’eau. Les filtrations, si toutefois il s'en faisait à travers cette vase, devaient donc être très-réduites. Néan- moins, j'ai institué quelques expériences pour montrer que Veau ne prenait aucun mauvais goût en séjournant sur cette vase. 1° J'ai fait puiser dans la Garonne une provision de vase dont jai à moitié rempli un filtre placé dans un grand entonnoir. De l’eau distillée a été jetée sur cette vase, et après son écoulement à travers le filtre, elle a été succes- sivement et continuellement repassée sur la vase pendant six jours. Au bout de ce temps, l’eau n'avait pas le moin- dre mauvais goût comparable à celui de l’eau du filtre Vivent. Elle sentait légèrement la vase, mais elle était par- faitement potable. Bien des personnes en ont goûté dans mon laboratoire, et M. Bibent, premier adjoint au Maire, peut, entrautres, témoigner de l’absence de mauvais goût. Une analyse qualitative de cette eau m'a laissé supposer que la composition devait se rapprocher beaucoup de celle de l'eau de la Garonne. J'ai cru devoir faire une seconde expérience plus complète. 2° Une nouvelle et considérable quantité de vase, envi- — 166 — ron 5 kilos, a été enfermée dans une bonbonne que jai ensuite remplie au 4; d’eau distillée. Pendant toute une semaine, j'ai agité plusieurs fois par jour ce liquide boueux pour bien opérer son mélange avec l’eau. Après huit jours, j'ai filtré le liquide jusqu’à ce qu'il passât parfaitement clair. Iln’avait pas le moindre mauvais goût, mais simple- ment une légère odeur de vase. J'en ai fait l'analyse quan- titative, dont voici les résultats rapportés à 1 litre. gr Acide carbonique. . . . . 0,0592. »' sulfurique. ;: 14,2. 10/071008 »} isiiciques > 41 144510 0,00Æ0! Potassenit.dh “té 164400: 0088 Soude..!. #44 us Nc OS DURS Chaux: 520 0604211. SONDE Magnésie hote ce HOSDAEE Aluninec tr Cia 0,0008? Fers.dui bel: cit 78 SLR Matière. organique. . . . 0,0225? Chlore: : .:.4. 18e 0000008 J'ai cru devoir laisser un point d'interrogation devant les chiffres qui ne m'ont pas pleinement satisfait comme exac- titude après trois dosages successifs. 3° Non content de cette analyse, j’ai encore voulu savoir si la vase renfermait une grande quantité de matière orga- nique et jai dosé son azote, en faisant l'analyse avec la chaux sodée. Sur 100 grammes de vase desséchée à 100 et refroidie au-dessus de l’acide sulfurique, j'ai trouvé 0 gr. 0608 d'azote. 4 Après ces opérations, j'ai encore recommencé les mêmes expériences dans les mêmes conditions, avec de la vase puisée dans la Garonne, ailleurs que la première fois. Je n'ai plus trouvé les mêmes chiffres que précédemment. | | \ R à dd en ©" , star ns de DS "7. " \ { — 167 — En effet, l'analyse organique de cette vase m'a donné O gr. 0163 d'azote par 400 gr. Et, l’analyse des éléments minéraux dissous par l'eau m'a fourni les chiffres sui- vants : gr- Acide sulfurique... . . . . 0,0246, par litre Acide carbonique. . . . . 0,0157. DDR nd. 12/0102: Maanosie ne 0.0.7... ‘O,O05E:. " Alumine et fer. . . . . . faibles quantités. Matière organique. . . . 0,,0060 ? Si l’on se donne la peine de comparer ces résultats avec ceux qu'a fournis analyse de l’eau du filtre Vivent, on peut s’assurer de leur dissemblance complète. Ce n’est donc pas la filtration à travers la vase qui a pu communiquer à l’eau son mauvais goût ainsi que sa Composition. Ces faits nous éclaireraient d’une manière complète sur le lieu de provenance de l’eau infectante des filtres (en pro- cédant par élimination), si nous n'étions déjà complètement renseignés sur l'origine de cette eau. IE Je ne m’arrêterai pas longtemps à la théorie qui consistait à dire, d’abord, que l’eau des filtres était de l’eau de la Garonne pure, mais que les éléments organiques de l'algue y avaient ensuite pris spontanément naissance et avaient enfin formé l’algue de toute pièce. En second lieu, l’auteur de cette théorie supposait que si l’eau des filtres contenait une plus grande quantité de substances salines que l’eau de la Garonne, on devait en attribuer la cause à la dissolution par l'eau des mortiers qui avaient servi à bâtir les galeries et nullement-au mélange de la nappe d'eau souterraine des puits de Saint-Cyprien avec leau d'infil- tration de la Garonne. Je ne dirai rien de cette nouvelle théorie de génération . spontanée qui ne pouvait manquer d’exciter l’hilarité de — 168 — ceux devant qui elle était développée. Mais je répondrai à la seconde supposition par un résultat d'observation et d'expérience. Les mortiers ne contiennent pas du sulfate de chaux; ils n'ont pas pu fournir, par conséquent, à l'eau des filtres celui qu’elles contiennent en plus grande abon- dance que l’eau de la Garonne. D'ailleurs, si les mortiers s'étaient laissés dissoudre par l’eau d'infiltration, il aurait élé tout naturel de trouver une plus grande quantité de substances salines dans l’eau, alors qu'après la fermeture du robinet du filtre Vivent, cette eau s'était accumulée jusqu’à deux mètres de hauteur dans la galerie. Or, c’est précisément le contraire qui est arrivé, puisque l'analyse de l’eau du filtre Vivent faite un mois après la fermeture du robinet m’a fourni un résidu total moindre que dans la première analyse. | Cette troisième théorie est donc encore moins soutena- ble que les autres. IV. J'arrive à la quatrième des suppositions émises : L’algue en se desséchant à l’air s’altère, se pourrit et donne le mauvais goût à l’eau des filtres. A vrai dire, il n’y aurait qu’une seule objection à faire à . cette théorie; c'est que le point où l’eau du filtre Vivent acquiert brusquement le goût le plus détestable est celui où l’algue est le mieux recouverte par l’eau courante; c’est donc le lieu où la plante est le moins en contact avec l'air; il est à 140 ou 45 mètres de distance de la tête supérieure du filtre. Là, dans le radier, je l'ai déjà dit, on a deux points séparés seulement par deux ou trois mètres de distance : dans l’un se trouve l’eau qui n’a pas le moindre mauvais goût, dans l’autre celle qui est infecte. Dans le cas où la putréfaction de la plante suffirait pour infecter l’eau, il serait totalement impossible, dans les circonstances actuelles, que cette infection se soit produite sur un parcours aussi restreint dans une eau courante. | ; { | — 169 — Cependant je ne crois pas qu'il faille complètement reje- ter cette cause. La putréfaction de la plante a une certaine influence sur le mauvais goût de l’eau, mais cette influence ne sexerce qu'à la longue, c’est-à-dire surtout lorsque l’eau a traversé avec les détritus de la plante, les corps de pompe des deux châteaux d’eau, après avoir déjà couru assez longtemps sur l’algue altérée et pourrie. Ce qui le prouve, c'est que si l’on met dans un flacon ouvert une cer- taine quantité d’algue détachée du sol des galeries filtrantes avec de l’eau distillée, cette eau prend peu à peu l’odeur infecte à mesure que la plante se putréfie, et elle la prend d'autant mieux qu’elle a été plus souvent agitée. V. J'arrive maintenant à la théorie formulée dans le tra- vail de M. Roux, ingénieur de la ville, dont on ne saurait trop louer le dévouement à la question des eaux. «Il faut autant que possible éviter dans l'avenir, »dit l’au- teur, «les accidents qui se sont produits dans les galeries actuelles et qui ont si vivement et si Justement ému la popu- lation, nous voulons parler de la production des végétations aquatiques dont le contact avec l'eau donne à celle-ci le mau- vais goût nauséabond qui la rend impropre à l'usage de la boisson. » Si l’on avait goûté l'eau dans la galerie Vivent en la pui- sant dans le radier à différentes distances, on n'aurait pas été entrainé à soutenir une théorie erronée. En effet, le point du radier où M. Castel, M. Mazuc et moi-même ayons trouvé à l’eau le goût le plus détestable, se rencontre à 415 ou 20 mètres du fond de la galerie Vivent, justement à . l'endroit où les végétations commencent à se montrer. Tandis que dans le point où la végétation a un maximum de déve- loppement, c’est-à-dire au sortir du tuyau de fonte de la ga- lerie Vivent vers la galerie de la prairie, le mauvais goût de l'eau est peut-être un peu moins prononcé qu’au point précédent. — 170 — Ce n’est donc pas le contact de la végétation qui commu- nique à l’eau son mauvais goût. Bien plus, je puis prouver que l’algue conservée vivante dans l’eau infecte du filtre Vivent, dépouille complètement. cette eau de son mauvais goût et la rend parfaitement potable en lui enlevant sa matière organique, ses nitrates et son fer. J'ai, en effet, enfermé dans un grand vase de verre d’une contenance de 10 litres au moins, ayant la forme d’un cône renversé recouvert par une lame de verre, une quan- tité assez considérable d’algue recueillie avec le plus grand soin sur le radier du filtre Vivent. Le bocal a été remph d'eau; cette eau avait été puisée en même temps que l’algue. Elle avait un goût infecte très-prononcé. J'avais eu soin de fermer le tuyau d'écoulement du bocal avec un bouchon de liége légèrement poreux, ce qui per- mettait à l’eau de s’écouler avec une lenteur extrême (5 à 6 gouttes par jour), et à l'air de pénétrer avec une égale lenteur. L’algue s’est tassée dans la partie rétrécie et effilée du bocal, en arrivant jusque sur le bouchon, mais en même temps la portion supérieure s’est épanouie en forme de houppe et a occupé tout le bas fond du vase. La coloration de la plante était ocre jaune clair. Après quelques jours, la portion inférieure, en contact avec le bouchon, a commencé à se colorer en noir et la portion envahie par cette couleur s'est limitée après trois mois à l’algue occupant la moitié de la partie tubulaire du vase en verre. Cette coloration noire était semblable à celle que prenait l’algue conservée dans un flacon rempli d’eau différente (1) de celle du filtre Vivent, avec laquelle elle avait été fortement agitée ; elle était aussi la même que celle (4) Il m'a été impossible de conserver de l’algue vivante dans une autre eau que celle du filtre Vivent. — 171 — des détritus d’algue nageant dans l'eau du filtre de la prairie, c’est-à-dire des détritus d’algue privée de vie et putréfiée au contact de Pair. | La portion noire tranchait d’une manière remarquable et nette avec la partie jaune, qui s’'épanouissait en forme de houppe. Après une quinzaine de jours, cette eau du bocal n'avait presque plus de mauvais goût. Après trois mois, le mauvais gout avait totalement disparu et lanalyse de leau m'a révélé un phénomène déjà connu, d’après des observations du même genre que la mienne, mais qui n’en était pas . moins très-instructif dans la solution du problème actuel. Cette eau ne contenait plus de fer, son degré d'alcali- nité avait diminué de plus de moitié, la matière organique était sensiblement moindre; l’ammoniaque n'avait pas très- sensiblement augmenté. En faisant évaporer à siccité un litre de cette eau, on n'avait plus le résidu ocreux qu’elle avait fourni le jour où elle avait été puisée. De l’eau Vivent gardée en bouteille, mais sans algue, depuis le jour où celle du bocal avait été puisée, avait con- servé son mauvais goût, son fer, sa matière organique. En la faisant évaporer à siccité, on avait le même dépôt ocreux que le jour du puisage. C'était donc l'algue, qui, à la façon des warechs absor- bant l’iode de l’eau de mer , avait vécu en absorbant insen- siblement les matières qu’elle avait trouvées dans l’eau et peut-être en en cédant d’autres. En effet, pendant qu'une portion de lalgue vivait, une autre portion s'était putréfée et avait pris la coloration noire caractéristique. Cette portion avait fourni de petites quantités de produits ammoniacaux. Ce qui s’est passé en petit dans mon laboratoire se passait en grand dans les filtres. Les caractères de la plante vivante et morte sont tellement tranchés qu'il est facile d'étudier et HIDE de suivre sa manière d’être en divers points des galeries. La plante vivante est jaune fauve, la plante morte est noire. Or, la coloration fauve persiste dans toute l'étendue du filtre Vivent et dans une partie du filtre de la prairie, celle qui se trouve le plus rapprochée du débouché du tuyau de fonte dans la galerie de la prairie et où l’eau Vivent est presque pure. Mais à mesure que l’on avance dans la galérie de la prairie en se dirigeant vers le Château-d’'Eau, on voit l’algue jaune diminuer et les cailloux du radier sont de plus en plus encombrés de détritus noirs qui deviennent excessive- ment abondants vers le milieu de la galerie, à mesure que l'eau venue d'amont se mélange de plus en plus avec des infiltrations du fleuve qui en améliorent la qualité et en changent la composition (1). En même temps dans ce milieu de la galerie de la prairie principalement, les cailloux sont chargés d’une sorte de glaire adhésive noire n'ayant pas trop d’odeur tant qu’elle est dans l’eau, mais qui infecte bien vite au contact de lair, et dont il est difficile de les dépouiller par le lavage, tant elle leur est adhérente. On voit que la végétation première a peu à peu été détruite à mesure qu’elle s'est éloignée du filtre Vivent, et il s'est déposé en même temps une nouvelle substance glaireuse encom- brée de fragments d’algue. | Le goût acquis par l’eau dans le filtre de la prairie au point indiqué ci-dessus et qui se conserve dans les fontaines de la ville est de nature différente de celui qwelle possède dans la galerie Vivent dont on reconnait pourtant encore la (1) En effet, l’on peut s'assurer par l'examen du tableau d'analyse de la page 136 que, tandis que l’eau du filtre Vivent puisée au robinet de sortie est très-riche en substances salines, l’eau des fontaines résultant du mélange de toutes les eaux des 2 galeries est moins riche en sels Celà ne peut s'expliquer que par le mélange de l’eau Vivent dans le parcours des galeries, avec d’autres eaux de composition et de provenance différentes. — 173 — trace, bien qu'il ait très-sensiblement diminué. On croirait que l’algue ne trouvant plus dans l’eau des filtres de la prairie la même abondance des éléments de nutrition qu'elle avait dans l’eau plus infecte du filtre Vivent, s’y est complètement épuisée et y a été remplacée par une produc- tion végétale différente, de nature glaireuse et en quelque sorte dépourvue de vie. En faisant dans les galeries les observations que je viens de signaler et qui étaient d’une manière à peu près exclusive di ressort des yeux et du goût, on aurait pu trouver la clef de la première partie du problème. Mais pour le résoudre complètement, il fallait après avoir appelé à son secours l'expérience, demander au raisonnement et à la comparaison d’achever l’œuvre commencée. L'étude des eaux thermales ainsi que celle de leurs pro- ductions végéto-animales, en effet, en permettant une com- paraison des plus justes, devait conduire aux conclusions auxquelles je suis arrivé. Et la supposition faite quelques lignes plus haut, après la description de ce qui se passe dans les galeries, est devenue une conclusion forcée. En effet, des recherches que je poursuis depuis 42 ans sur les matières végéto-animales déposées par les sources sulfureuses, ilrésulte plusieurs faits nouveaux et intéressants dont voici le résumé. Les sources sulfureuses les plus chaudes, les plus miné- ralisées, les plus riches en matière organique dissoute, en un mot les plus pures, se trouvant dans des conditions suffisantes de refroidissement, forment en plus grande abondance que toutes les autres des dépôts de filaments blancs organisés, plus ou moins adhérents les uns aux autres, flottant dans l’eau, auxquels on a donné le nom de sulfuraires. Lorsque ces sources sont mélangées à d’autres eaux peu ou pas sulfureuses, froides, ayant une autre origine directe que celle des eaux sulfureuses chaudes, les — 174 — sulfuraires deviennent de plus en plus rares et les dépôts nouveaux quise forment alors sont gélatineux, adhérents aux roches ou aux obstacles qui se trouvent sur le passage de l’eau ; ces dépôts constituent la barégine (4). L'eau des filtres Vivent et celle du filtre de la prairie se comportent donc, comme les eaux sulfureuses dont je viens de parler. Dans le filtre Vivent, l’eau infectée par la matière organique dissoute dans le sous-sol de la prairie é$t assimi- lable à l’eau sulfureuse pure et produit surtout de l’algue, de même que l’eau sulfureuse produit la sulfuraire. Dans le filtre de la prairie, l’eau Vivent infectée, se trouvant modifiée par des infiltrations de la Garonne et par suite devenue plus pure, a surtout fourni un dépôt gélatineux organique, de même que l’eau sulfureuse altérée dépose la glairine. Le résultat définitif de cette première partie de la dis- cussion est donc la conclusion formelle que le mauvais goût initial de l’eau ne peut être attribué à la présence de la végétation aquatique de couleur ocre jaune qui encombre le radier de la galerie. Ainsi donc, de toutes les causes d’infection invoquées de plusieurs côtés, aucune ne peut supporter un examen approfondi et scientifique. Il faut en revenir forcément à celle que j'ai primitivement indiquée et dont j'ai développé l'examen dans les chapitres précédents, c’est-à-dire l’arrivée en abondance, dans le radier des filtres, de l’eau des puits de Saint-Cyprien infectée d’abord dans le sous-sol de ce faubourg de Toulouse, et puis encore dans le sous-sol de la prairie Vivent. (4) Plusieurs naturalistes ont cru pendant longtemps que la barégine se formait aux dépens de la sulfuraire. Une étude attentive et ration- nelle de ces dépôts permet de dire au contraire, qu’ils constituent pour la matière végéto-animale que les eaux sulfureuses tiennent en solutions deux manières d'être différentes de se manifester en s’organisant, suivant le-milieu ambiant. On est maintenant en droit de me demander comment cette eau souterraine peut s'infecter dans sa marche. Je vais consacrer le, chapitre suivant à répondre à cette demande toute naturelle. Mais auparavant, je dois aborder la dis- cussion d'une série de faits que lon serait en droit d’op- poser à toutes mes expériences et à tous mes raisonnements, si je ne l’entamais pas dans ce chapitre. « L'accident survenu à nos galeries, a-t-on dit, n’est que la production de celui du premier filtre d’Aubuisson, et qui s'est partiellement renouvelé dans les deux autres, » L'accident survenu dans le premier filtre d’Aubuisson n'est pas tout-à-fait comparable à celui qui est survenu dans le filtre Vivent. Ce premier filtre, en effet, était creusé à peine un demi-mètre au-dessous d’une couche terreuse avec débris de végétaux ; il est resté ouvert pendant près de deux ans avent que la végétation s’y développät ; l’eau exposée au soleil et, du reste, peu abondante, offrait déjà une condition essentiellement favorable au développe- ment de toutes les « plantes aquatiques dont le vent pouvait porter les germes. » « Par suite, dit d’Aubuisson, la végétation (quil ne décrit nullement ) y acquit une vigueur extrême; les divers moyens employés pour la détruire furent sans effet, des reptiles s'y joignirent; et ces plantes, ces animaux, en se putréfiant dans une eau tiède, la rendaient très-mauvaise. » On le voit, tandis que l’eau du filtre Vivent était déjà mauvaise avant qu'il s’y soit développé une végétation quel- conque, alors que le canal de fuite du moulin Vivent était à sec, celle du premier filtre d’Aubuisson n’a donc été infectée que lorsque les plantes aquatiques et les animaux morts s'y putréfiaient. De plus, l'eau Vivent puisée même au point du radier où l’algue commence à se dévelohper, est déjà infecte, surtout à l’ébullition, je l'ai dit plus haut, l'eau du filtre d'Aubuisson n’a jamais eu cette odeur. AS es L'accident du second filtre d'Anbuisson est seul compa- rable à celui du filtre Vivent. Dès le début, en effet, l’in- génieur d’Aubuisson trouva l’eau à travers une couche vaseuse qui communiqua immédiatement au produit du filtre un mauvais goût particulier, et peu à peu il se déve- loppa dans cette eau « une végétation de petites plantes aquatiques et chevelues, que M. Magnes reconnut pour être des conferves et bissus. » La couleur de ces filaments était roussàtre, ainsi-que le ditle savant ingénieur däns son beau travail. Ceci nous rappelle complètement laccident du filtre Vivent : eau mauvaise dès le début, et formation consé- cutive d’une conferve ocreuse dans lun comme dans l’autre cas. Je reste donc dans les limites de la vérité et de l’exacti- tude en disant que pour discuter sur la production de l’algue du filtre Vivent, on n’a le droit de s'appuyer que sur le même accident survenu dans le deuxième filtre d’Aubuis- son, et nullement sur le premier. Fi ceci est d’autant plus important à tous les points de vue, que l’on voit l'infection de ce deuxième filtre d’Au- buisson se produire à l'abri de la lumière , alors que le filtre était couvert, et se propager encore, quoique on ait eu la précaution de le fermer hermétiquement pour éviter le renouvellement de lair. CHAPITRE IX. Causes de l'infection de l’eau de la nappe inférieure de Saint- Cyprien avant son arrivée dans les filtres. Depuis les belles recherches de M. Boussingault sur Peau des puits des grandes villes, il est aujourd'hui tout-à-fait démontré qu’une nappe d’eau qui traverse le sous-sol de grands centres de population, dissout dans le sol des élé- ments organiques et azotés. Ces éléments sont surtout cons- titués par des substances végétales ou animales solubles, semblables à celles qu’abandonnent à l’eau les terreaux , ainsi que l’humus, et par des nitrates que renferment sur- tout en abondance les terres grasses et remplies de détritus organiques. Les terres qui constituent le sol des grandes villes, constamment imbibées par les eaux pluviales et par les eaux d'arrosage, cèdent à ces eaux les substances dont je viens de parier, et ces eaux, entrainées dans les pro- fondeurs du sol, se mêlent, ainsi altérées, aux nappes d'eau souterraines. Ces eaux souterraines contenant des nitrates et de la matière organique dissoute, donnent nais- sance, même lorsqu'on les conserve dans des flacons, ainsi que nous l’avons vu plut haut, à des végétations particuliè- res dont j'ai déjà parlé. Telle est l’une des premières causes de l'infection de l'eau qui arrive dans le filtre Vivent. On peut s'assurer, en effet, dans les analyses précédentes , que l'eau du puits Sévin contient une quantité notable d'acide azotique. Mais là n’est pas seulement la cause de l'infection de Veau. 11 faut chercher ailleurs un grand adjuvant à cette première infection, Tout le monde sait à Toulouse qu'autrefois (1), en 1766, et encore il y a 25 ou 30 ans, le ramier Vivent n'avait pas l'étendue que nous lui connaissons aujourd’hui. Ce n’est que par les décombres et par les détritus de toute sorte portés dans ce point avec des charrettes et des tombereaux que l’on a gagné peu à peu sur la Garonne. Le ramier Vivent est donc en grande partie composé par des alternances de dé- tritus et de cailloux roulés. Ce qui le prouve, c’est que le sol de ce ramier ayant été profondément entamé pour le (1) Voir la carte de Toulouse jointe à ce travail. 12 — 178 —- creusement du bras accessoire du canal de fuite du moulin, s’est trouvé composé, ainsi qu'on peut s’en assurer encore, de débris de toute sorte, venant des démolitions de la ville, de vase tourbeuse, de terre végétale, de cailloux roulés et de sable. Tous ces débris forment un monticule auprès de l'embranchement de ce canal creusé pendant la dérivation du canal de fuite. Or, on trouve que ce terrain, exposé depuis près de deux ans aux lavages incessants de la pluie, contient encore des nitrates, car on y trouve 05,021 d'acide azotique par kilo de terre. Il v a aussi de l’ammoniaque, puisque jen ai trouvé 0f',0007 par kilo. La matière organique est également assez abondante dans cette terre, puisque l’incinération après dessiccation à 100° m’a donné comme perte 148",55 par kilo. Une portion fraichement remuée de ce ramier Vivent, tout près de la Garonne, au point où vient aboutir le che- min auquel conduit le pont situé au nord du moulin Vivent, était constituée par une terre encore plus vaseuse, tourbeuse et nitreuse que celle du reste du ramier. Jy ai trouvé 05,910 d’anmoniaque par kilo de terre desséchée, et 45,177 d'acide azotique. Par la calcination, un kilo de terre sèche perdait plus de 20 grammes. Des végétations se sont pro- duites dans les flacons qui m'ont servi à conserver cette terre. Si l’on veut admettre, et cela se peut sans difficulté, que pendant la longue période de temps où le ramier Vivent s’est formé, le bas fond de ce futur ramier a reçu, comme tous les bords de rivage (1), des boues et des vases avec des matières organiques végétales, il sera facile de com- prendre que l’eau souterraine ait pu s'infecter dans cette vase abondante. (4) Le deuxième filtre de d'Aubuisson a été creusé dans une couche vaseuse de la prairie des filtres, profondément située sous les alluvions, et l’on se rappelle que cette couche vaseuse et tourbeuse située à près de 3 mètres au-dessous de la Garonne, donnait de l’eau infecte. — 179 — Nous voilà donc en présence de toute une série de cau- ses d'infection pour l’eau qui coule dans les couches pro- fondes du ramier et de la prairie. Etque l’on ne dise pas que cette présence des nitrates et des matières organiques dans Îles terres du ramier ne peut influer en rien sur la production végétale de la gale- rie filtrante. D'abord, l'avis d’un homme spécial dans l'étude des pro- ductions en face desquelles nous nous trouvons, est assez formel ; M. Cornu, de la Société Botanique de France, à déclaré qu'il a vu des choses assez analogues à l’algue dont je lui aï envoyé un échantillon, dans les fossés d’égout des tourbières, au milieu de flocons de peroxyde de fer. D'autre part, nous savons que lorsqu'une eau contient des nitrates et de la matière organique, cette matière organique s’or- ganise et vit. D'autre part, enfin, M. Boussingault a prouvé dans ses magnifiques études sur les nitrières , l’exactitude de cette vérité, à savoir, que « toute terre est propre à la fabrication du sel de nitre, pourvu qu’elle ne soit pas trop compacte ni trop sableuse. Les terres qui proviennent des écuries, des caves, des démolitions, méritent la préférence; le limon des étangs, la boue des rues. » Toutes les conditions voulues pour que des végétations et des productions organisées puissent se développer, se trouvaient réunies dans le ramier Vivent; on ne peut donc pas être étonné que jinvoque ces causes pour expliquer la production de lalgue qui a envahi les filtres de Tou- louse. Ce qui m'étonne, c’est que l'exemple de l'infection de la fontaine Saint-Jean, dans le faubourg Saint-Cyprien, r’ait pas mis sur la voie de la possibilité d’un accident semblable dans un terrain altéré, et dans lequel un chimiste instruit et expérimenté devait prévoir de prime abord, surtout en présence des végétatiors signalées par d’Aubuisson dans son deuxième filtre, l'existence de causes infectantes. — 180 — CHAPITRE X. Etude botanique et chimique de l’alque des galeries filtrantes de Toulouse. Bien que j'aie déjà eu l’occasion, en 1865, d'étudier algue de la fontaine Carrère, dont la détermination, comme espèce, m'avait fortement embarrassé , je ne voulus pas men rapporter à mon seul examen pour lalgue de la galerie du ramier Vivent. En conséquence, j'envoyai à M. le professeur Boussingault un premier flacon de ce pro- duit végétal. Le savant et consciencieux naturaliste s’em- pressa de me répondre qu’il m’engageait, pour avoir une détermination très-exacte, à m'adresser de sa part au directeur de l'Ecole normale supérieure qui ferait examiner mon algue par des savants spéciaux. M. le Directeur de l'Ecole normale, auquel j'écrivis à ce sujet, voulut bien me demander des échantillons de la substance à étudier. Je les lui envoyai, et il les remit à deux savants qui, après avoir examiné les pièces, me firent honneur de m'écrire les lettres suivantes : « Monsieur, » J'ai reçu de M. le directeur de l’école le flacon que vous lui aviez adressé. Permettez-moi de vous remercier de l’honneur que vous faites à notre école, en la consultant ainsi. » Les déterminations que vous me demandez sont fort difficiles, même pour quelqu'un qui s’est spécialement occupé d'algues. » Ce que j'ai observé avec mon ami, M. Lemonnier, pré- parateur à l'Ecole de Botanique, était très confus, mais il y avait de rares diatomées mélangées à des filaments PR de dl tt L'far “nr à … — 181 — incolores, non cloisonnés, ambigus (algues?). Je suis fort embarrassé pour mettre un nom sur tout cela. J'ignore , du reste entièrement, dans quelles circonstances cette végé- tation s’est produite. | » Jai vu des choses assez analogues dans les fossés d'égout de tourbières, au milieu de flocons de peroxyde de fer. » Agréez, Monsieur, l'assurance de ma parfaite consi- dération. » Votre serviteur dévoué, » M. Cornu. » Le flacon que M. Cornu à examiné contenait un mélange d’algue recueillie vivante et de dépôt glaireux, noir, dans lequel sont principalement les diatomacées. Voici maintenant une seconde lettre dans laquelle se trouve la description d'un autre échantillon composé d’algue exclusivement vivante : « Monsieur, » Jai reçu, 1ly a déjà plus d’un mois, de M. le direc- teur de l'École normale un échantillon d’algue que vous lui avez adressé, ainsi que la lettre d'envoi qui l'accompa- gnait. L'incertitude où j'étais et où je demeure malheureu- sement au sujet de la détermination de l'espèce exacte de cette plante, m'a fait retarder de jour en jour ma réponse, dans l’espoir de la faire plus satisfaisante. » Le premier coup d'œil jeté sur cette algue porte à la ranger dans les oscillariées, dans la tribu des leptotrichées. Par sa végétation libre, indépendante de tout support végé- tal, elle s'éloigne des leptothrix, et l’on ne peut la comparer quà ces espèces d'hypheothrix dont le plasma ocreux nest pas subdivisé en articles, et dont les filaments sont — 182 — extrèmement étroits, aux Hypheothrix tenuissima et lutea, par exemple. Ces espèces sont assez nombreuses, mais il vous sera facile, connaissant le diamètre des filaments et, ce que j'ignore, le mode de végétation de la plante, d'en achever, à l'aide de Rabenhorst, la détermination spécifique. » Je regrette de ne pouvoir vous satisfaire plus complè- tement sur ce sujet, et j'attends avec impatience les lumières que votre travail va jeter sur le mode de vie et de nutrition de ces singuliers êtres encore si peu connus. » Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de ma considé- ration la plus respectueuse. » PH. VAN TIEGHEM, Maître de conférences à l’école normale supérieure. Armé de mon microscope, j'ai étudié également l’algue vivante et la production gélatineuse noire du filtre de la prairie, exactement comme j'avais étudié sept ans aupara- vant la production de la fontaine Saint-Jean. Comme la première fois je reconnus que l’algue appartenait à la famille des Nematogènes, à la tribu des Hypheotrix, et je crus pouvoir la ranger dans l'espèce fontana. Mais en pré- sence du doute dans lequel sont restés des hommes spéciaux quant à la détermination spécifique, je ne conserverai pas ma détermination de fontana, et je laisserai l'espèce indéterminée. Quoi qu'ilen soit, ilest aisé de voir que les déterminations faites à l’école normale supérieure de Paris, ainsi que celles qui ontété faites dans'mon laboratoire, à Toulouse, sont à peu près identiques. On peut saisir également l'importance du renseignement fourni par M. Cornu, qui me dit avoir vu des productions analogues dans l’eau sortant des fossés d’égout de tourbières, au milieu de flocons de peroxyde de fer. Le sol du filtre Vivent, dans sa profondeur, de même qu’à la surface, est composé en partie de terres renfermant — 183 — des detritus végétaux, etles eaux qui v circulent contiennent des nitrates en abondance. Il y a donc tout ce qu'il faut pour voir se développer un végétal. Je n'ai pas voulu borner à ce seul examen botanique l'étude de l’algue, j'ai cru devoir en étudier la composition chimique et faire une analyse organique pour savoir combien elle renfermait d'azote à l’état de matière orga- nique. Je ne donnerai pas ici les procédés que j'ai employés pour faire mon analyse, car ces procédés se rapprochent de ceux que J'ai décrits plus haut à analyse des eaux. Voici simplement les résultats que j'ai rapportés à À gramme d’algue desséchée à 100. Acide carhonique. 4.41... 0,0076 Acide sulfurique. ...... D A STATE 0,022 De a de nr A eee 0,134 OR NAIL tee AC AE 0,0011 Te no Aya me EN à 0,014 RIRE A Al tie ae 0,006 DR RS fon ll mr 0,033 MS PSIGLMEL Qt plus à à 0,0135 Pyde detre eine. 0,122 mn ei je ne 0,059 Matière organique totale........ 0,4897 ADR M EE NE AT Désert, à: 0,044 Rene nr. RESTO ES CARE MATOS 0,0541 1,0000 Je m'étendrai maintenant avec assez de détails sur la manière dont se développe et se propage cette algue, et ceci va forcément m’entrainer à réfuter quelques assertions inadmissibles émises dans le rapport fait par M. Roux. — 184 — Je dirai tout d’abord que la plante paraît devoir son abondante production au développement de spores se répan- dant en dehors des cellules allongées qui forment les filaments de l’algue. Mais j'ajouterai que, contrairement à ce qu'on avait cru jusqu'à ce jour, la lumière n’influe en rien sur le développement de cette végétation si gênante. » Les végétations, dit M. Roux, se produisent par l’action de la lumière sur le fond des fouilles qui contiennent l’eau ; elles se développent d'autant plus que la lame d’eau est moins grande et que sa vitesse est plus faible. D ss... Pendant toute la durée des travaux de jonction sou de ba de fuite du moulin Vivent, les galeries ont dù rester ouvertes; l'air et la lumière y doilaiet à volonté, surtout aux Hors des reg gard... L'air, la lumière, la chaleur agissant ainsi fees sur le pont des galeries, la végétation s’est abondamment développée. » On a remarqué qu’elle était plus abondante aux abords des regards, parce que là l’action extérieure était plus sen- sible. On a également remarqué que la galerie Vivent donnait de plus mauvaise eau que la galerie de la prairie, parce qu'elle est restée plus longtemps ouverte. On a remar- qué encore que la partie de la galerie des filtres, située en amont de la jonction, n’a jamais eu de végétation, parce qu’elle se trouve au fond d’un cul de sac où l'air et la lumière qui circulent partout ailleurs n’ont jamais pu pénétrer. » Un naturaliste lisant les lignes précédentes, après avoir étudié ce qui se passe dans les galeries, et après avoir acquis également quelques connaissances spéciales sur la formation des dépôts organiques des eaux, restera persuadé, je n’en doute nullement, que ce n’est pas un autre naturaliste qui a écrit ces passages que je viens de citer. En effet, je me permettrai de dire au rédacteur de ces lignes, que l’algue végète et se multiplie à plus de cent mètres de la seule ouverture par laquelle on descend dans la galerie Vivent. On peut être certain que la lumière n’atteint — 185 — pas à ce point de la galerie, puisque déjà lorsqu'on est à 8 ou 10 mètres de l’entrée, on ne voit plus rien; une bougie allumée est indispensable pour diriger ses pas. Et j'ai cons- taté que vers le fond de la galerie, à 108 mètres de l'entrée et du jour, en remontant le courant de l’eau, l’algue prend un développement énorme. Il en estde même dans les filtres de la prairie. Le maximum de développement de l’algue se produit justement au sortir du tuyau de communication du filtre Vivent, dans un point où la lumière du jour ne peut pénétrer, car, même lorsque le regard le plus rapproché est ouvert, il est impossible de rien distinguer dans cet endroit sans le secours d’une lumière artificielle. Quant à l'absence d’air dans le cul de sac en amont de la jonction des deux filtres, que M. Roux invoque pour expli- quer l'absence de végétation, mon collègue me permettra de lui dire qu’il commet là une nouvelle erreur. On respire tout aussi bien dans ce point des galeries que dans tous les autres : donc il y a autant d’air que partout ailleurs, donc, il nest pas possible d'en appeler à l’absence d’air pour expliquer l'absence d’algue (1). Nous avons vu dans un autre chapitre que la même algue s’est produite et propagée dans le 2° filtre d'Aubuisson, quoiqu'’on ait pris la précaution de le fermer hermétiquement. D'ailleurs, il faut, pour se rendre un compte exact des phénomènes relatifs au développement de cette algue, savoir ce qui se passe dans les galeries de _ captage des sources thermales. Les eaux sulfureuses, par exemple, déposent des végé- taux, des conferves, qui ont une parenté irrécusable avec la production organisée des filtres de Toulouse. Or ces con- (4) J'ai montré dans un chapitre précédent, que s’il n’y a pas d'algue en ce point, cela provient tout simplement de ce que l’eau infectée de la nappe souterraine ne pénètre pas jusques là. Les infiltrations viennent directement en ce point de la Garonne ou du canal de fuite du moulin Vivent. — 186 — ferves prennent naissance non seulement dans les galeries qui ont été creusées à ciel ouvert, puis voûtées, mais on les voit se produire encore avec la même intensité, la même abondance, au fond des galeries creusées dans le roc et dans lesquelles la lumière du jour n’a jamais pénétré. Quel est aussi le naturaliste, qui, se promenant dans les couloirs les plus profonds des mines de fer, n’a pas remar- qué les petites conferves ocreuses déposées dans les filets d'eau ferrugineuse chargée de matière organique. La lumière ne pénètre pourtant pas dans ces souterrains immenses que les lampes blafardes peuvent seules éclairer, el cependant les produits organisés, les végétations de nature spéciale, les conferves s’y développent admirablement. Continuant à soutenir sa thèse de la production de l’algue sous l’influence de la lumière et de l'air, M. Roux invoque, pour donner de la force à ses arguments, la fermeture de tous les regards comme un moyen ayant produit une diminution dans la quantité d'air des galeries, et dans la quantité de lumière qui peut y pénétrer, et par suite ayant entrainé la diminution de la végétation ainsi que l’amélio- ration dans les qualités de l’eau fournie par le filtre. Je ne doute pas un instant que M. Roux, si soigneux, si intelligent, si dévoué à la question des eaux de Toulouse, neût complètement changé d'avis après une étude scienti- fique et rigoureuse des faits. La seule cause que l’on puisse invoquer pour expliquer scientifiquement et pratiquement l'amélioration du goût de l'eau du filtre Vivent, ainsi que la diminution de lalgue, c’est l'augmentation de la quantité d’eau arrivée dans ce filtre après la fermeture du robinet de communication. Cette eau venant de la Garonne, ainsi que nous l'avons vu, et forcée, à cause de son origine, d'atteindre dans le filtre un niveau supérieur à celui de la nappe souterraine infectée, a exercé sa pression sur celle-ci, l'a refoulée et a empêché, — 187 — en partie, son entrée dans le filtre. De l'eau potable a remplacé de l'eau mauvaise. L'analyse donnée plus haut l'a prouvé. Quant à l’algue, elle vit au fond de cette eau, j'ai pu m'en assurer par moi-même. Et si l’on donnait un nouvel écoulement à cette eau du filtre Vivent, l’eau qui arriverait encore dans ce filtre, tout ce que j'ai dit jusqu'ici permet de l’affirmer, serait toujours mauvaise; car infectée par son passage sous la ville, elle continuerait encore à puiser un plus mauvais goût dans le sol profond du ramier Vivent, et elle charrierait encore les germes de cette algue. Celle-ci trouverait de nouveau dans les éléments qui entrent en solu- tion dans cette eau, de quoi vivre et se développer abon- damment, ainsi que des expériences faites dans mon labo- ratoire l’ont prouvé, comme on a pu le voir dans un chapitre précédent. J'en ai la certitude, cette algue se développerait encore et l’eau du filtre ainsi vidé acquerrait du premier jet son ancien mauvais goût. Une cause pourrait empêcher cet accident de se repro- duire : ce serait l’arrivée en plus grande abondance des infiltrations de la Garonne, par suite du balayage naturel des boues et de la vase qui ont colmaté le fleuve. Dans ce cas, le poids de la nappe d’eau infiltrée et abondante agirait pour repousser la nappe d’eau inférieure et infectée. Mais, au moindre arrêt de la nappe infiltrée d’eau de la Garonne, la nappe infectée reprendrait son cours dans la galerie. CHAPITRE XI. Coup d'œil sur les divers projets proposés pour remédier aux inconvénients des filtres infectés. Avant même que l’on se soit rendu un compte exact des causes du mal qui s’est produit dans les galeries filtrantes de Toulouse, plusieurs projets d'installations nouvelles — 188 — avaient déjà été mis sous les yeux, soit de la commission des eaux, soit du public toulousain. Je me plais à penser que l'idée de réaliser un bénéfice en les faisant exécuter eux-mêmes, n'avait pas été le seul but des auteurs des divers projets présentés. Il est bien certain que le désir d'être utile à Toulouse et à ses habitants guidait les personnes qui se sont-empressées de soumettre leurs plans à la ville. Mais il me sera permis de constater que généralement la science pure et vraie n’avait pas présidé aux solutions données au problème qui a tant préoccupé la ville ainsi que ses zélés administrateurs. M. Cordier, l’habile ingénieur hydraulique qui a laissé des traces impérissables de son talent dans plusieurs villes d'Europe et d'Egypte, a le premier, dans les circonstances actuelles, émis des idées rationelles sur le moyen de four- nir de l’eau à Toulouse. Il a voulu qu'on prit l’eau surtout dans les profondeurs de la plaine alluvienne de Braqueville et qu'accessoirement on fit un nouveau filtre naturel tout le long des rives de la Garonne pour augmenter l’approvision- nement fourni par les tranchées transversales de la plaine. Il y a deux choses à envisager dans la première partie des indications fournies par M. Cordier. Il faut se poser les deux questions : la plaine fournira-t-elle une quantité considérable d’eau ? Cette eau sera-t-elle de bonne qualité? La géologie répond à la première question. Il est sûr que l'on trouvera de l’eau, car dans cette plaine il y a des puits nombreux, dont quelques-uns même, ceux des envi- rons de la Fourguette, sont assez abondants. Mais comme nous savons que le terrain solide, imperméable, la molasse, sur lequel coule la nappe d’eau souterraine, est très-bos- selé, très-inégal, qu'il forme des bassins dont il est impos- sible de deviner la direction, il faudra faire une tranchée aux mille détours pour suivre les points les plus aquifères de la vallée. De là, un travail d’une longueur et d’une éten- — MOD: due tout-à-fait incaleulables à l'avance, et à coup sûr très- coûteux pour la ville. D'ailleurs, en faisant ce travail, qui serait d’un bon résultat s’il était bien conduit, on priverait d’eau un grand nombre de propriétés particulières bâties dans la plaine. La chimie et l'expérience répondent à la seconde des questions posées relativement à la qualité de l’eau. Faute d'autre, cette nappe souterraine peut servir à abreuver une ville, mais l’eau qu’elle fournit est calcaire et séléniteuse ; quoique fraiche en été, elle n'en conserve pas moins les propriétés peu agréables de toutes les eaux qui renferment avec du bi-carbonate de chaux des sulfates peu solubles, ainsi que des quantités notables de nitrates (1). Les habi- tants de la plaine de Braqueville en font usage, mais 1l est certain qu'ils l’abandonneraient s'ils en trouvaient une meil- leure. Quant à la tranchée parallèle à la Garonne proposée par M. Cordier, très-utile en théorie, elle ne donnerait pratique- ment qu'un résultat très-incomplet,; car la molasse étant supérieure à la rivière dans bien des endroits entre Toulouse et Portet, il en résulterait qu’on n’aurait pas dans ces points la moindre goutte d’eau d'infitration de la Garonne. Ainsi donc, présenté sous cette forme, le projet de M. Cordier, tout rationnel et tout scientifique qu'il était, ne pouvait trouver son application dans le cas actuel. En sui- vant les idées de l’habile ingénieur, un membre de la com- mission des eaux, M. Roux, a cherché sur la rive gauche du fleuve un emplacement convenable qui permit l'installa- tion de la tranchée proposée par M. Cordier. La persévé- rance de l'ingénieur de la ville de Toulouse a été couronnée (1) J'ai trouvé 0 gr. 073 d'acide azotique par litre dans l’eau des puits de VAsile de Braqueville. Cette eau conservée dans des flacons bouchés donne naissance à des dépôts organiques floconneux. — 190 — de succès. Nous examinerons en dernier lieu le projet qui est résulté des expériences qu'il avait entreprises dans la plaine alluvienne de Portet. Dans une série de communications faites au sein de la Commission des eaux, dans une longue suite de publica- tions données aux journaux de Toulouse, dans plusieurs bro- chures, un ingénieur civil a prétendu donner à la ville de Toulouse, à un bon marché inoui, et enfin à ses risques et périls, toute la quantité d'eau qui lui serait nécessaire, en utilisant les filtres qui existent déjà et en les perfectionnant. Ce projet se divise en deux parties : 4° faire rendre aux filtres actuellement. altérés, et surtout au filtre Vivent, une plus grande quantité d’eau, en abaiïssant le plus possible leur radier; 2 filtrer, au moyen d’un système de drainage spécial, les eaux du fleuve prises dans le canal de fuite du moulin Vivent. | D'après tout ce que j'ai dit jusqu'ici, il est aisé de com- prendre que la première partie du programme proposé est impraticable. Plus l’on abaissera le niveau du radier des filtres, plus on entrera en profondeur dans la nappe d’eau infectée de Saint-Cyprien, plus on sera exposé à avoir de la mauvaise eau. Et le filtre Vivent qui a été jusqu'ici la principale cause du mal, deviendrait une nou- velle source d’altération pour l'eau que pourrait procurer le nouveau sytème de filtrage. Quant à l'application de ce système dans la prairie des filtres à l'eau du canal de fuite du moalin Vivent, on a prouvé à son inventeur que ses filtres seraient immédiate- ment envasés faute de rapidité dans le courant, ou bien qu'ils donneraient de l’eau filtrée trouble. Néanmoins, ce serait là une expérience à faire, quoique des procédés sem- blables employés dans d’autres grandes villes de France n'aient pAs fourni de bons résultats. Cependant, dans l'état actuel des choses, il vaut mieux marcher à coup sûr et ee non pas au moyen d'expériences et de tâtonnements, qui perpétueraient l’état de souffrance de la ville. Du reste, le procédé en question, en admettant qu'il füt applicable et appliqué, ne servirait qu'à entretenir le grand inconvénient qui existe dans le jeu des Châteaux- d’eau. Ces deux grands appareils resteraient solidaires Yun de l'autre, tandis qu'il faut, autant que possible , les rendre tout-à-fait indépendants , afin que la ville puisse continuellement être alimentée d'eau, dans le cas où un accident surviendrait à l’un des deux engins. Le projet présenté jadis par M. Brassine, plus tard par M. Esquié, et que j'ai moi-même rappelé à la Commission des eaux, consistant à aller puiser de l’eau filtrée dans le ramier du Moulin-du- Château, est bien autrement sérieux que le précédent. Mais sil offre des avantages, il présente aussi de graves inconvénients. Je vais succinctement l'analyser et le discuter. S'il est, de prime abord , un endroit favorable pour aller chercher de l’eau pure et de bonne qualité, c’est le milieu d'un fleuve. L'ile du ramier ne pouvait pas être méconnue comme devant donner théoriquement une eau filtrée abon- dante et de première qualité. Ses rives sont sans cesse net- toyées par un courant rapide; son étendue est de plusieurs kilomètres, sa position est en amont de Toulouse. Il était donc permis de songer à l'utiliser comme filtre naturel. Deux inconvénients se présentaient pourtant au premier coup-d’œil : c'étaient d'abord l'impossibilité de conduire Veau du ramier aux Châteaux-d’eau sans un appareil spé- cial pour lui faire traverser la Garonne. En second lieu, les filtres devraient être trop profondément situés pour qu’on ne soit pas obligé d'élever leur produit au moyen d'un nouvel engin, afin qu'il puisse gagner les deux Châteaux- d'eau séparément lun de l’autre. De plus, si l’on se trouvait dans la nécessité de donner — 192 — aux galeries filtrantes une grande étendue, on ne pouvait faire autrement que de traverser les divers bras de la Garonne qui coupent le ramier sur-plusieurs points. I] fallait établir des conduites sous l’eau Des usines existant déjà dans l'ile pouvaient se trouver gènées par l'installation des galeries filtrantes; il aurait fallu les indemniser à grands frais. N’aurait-on pas gèné et n’aurait-on pas été gêné éga- lement par les grandes usines qu'on a lintention de venir installer dans cette ile prédestinée pour le développement de l'industrie ? En face de semblables inconvénients, on pouvait cepen- dant trouver des avantages considérables au point de vue de la qualité de l'eau. J'ai voulu examiner par moi-même les puits qui ont été creusés le long des rives de la Garonne, etie puis affirmer que Peau de ces puits, entr'autres celle des puits de M. Garipuy et du garde, est d'excellente qualité, surtout en l’examinant d’une manière comparative avec l’eau des puits de la rue de Muret qu’alimente exclusi- vement la nappe souterraine de la vallée. Le degré alcali- métrique est presque le même que celui de la Garonne, tandis que l’eau des puits de Saint-Cyprien, de Braqueville et de la rue de Muret, est infiniment plus élevé. Mais il n’en est pas de même de l’eau que j'ai pu exami- ner dans lintérieur de l'île. Celle-ci est d'assez mauvaise qualité. J'ai même trouvé un puits dans lequel avaient séjourné des feuilles mortes et dont l'eau répandait une odeur bien franche d’acide sulfhydrique (œufs couvés). Si les graves inconvénients que j'ai signalés plus haut n’ayaient pas existé, et si, d'ailleurs, on n'avait pas eu un emplacement meilleur, en réalité, que celui du ramier du Moulin-du-Château, je suis persuadé qu'on aurait pu se procurer dans ce ramier de l’eau d’un goût et d'une qualité . irréprochables. Il aurait suffi de conduire des galeries de … drainage le. long des rives du fleuve de chaque côté de | | | 1 k 1 — 193 — l'ile, en traversant , au moyen de larges tuyaux de con- duite, les parties de terrain tourbeux signalées par la Commission des eaux. On aurait eu, par ce procédé, de l'eau en quantité suffisante pour l'alimentation de la ville, et enprolongeant les galeries suivant la nécessité avec l’aug- mentation de la population, on n'en aurait jamais manqué. Mais, jele répète, faire dans le ramier un nouveau Chà- teau-d'Eau pour monter l'eau filtrée à la hauteur des deux autres qui sont chargés de la distribuer en ville, installer une conduite sous le fleuve ou un syphon allant directement du ramier dans les pompes d’Abbadie en longeant le quai de Tounis et en traversant le Pont-Neuf, c'était s’exposer à bien des dangers. Bon par lui-même, le projet du ramier du Moulin-du- Château n'était pas le meilleur. M. Roux la parfaitement prouvé en faisant son intéressant travail et ses recherches si utiles au sujet de l’eau fournie par les graviers de Portet. Le choix des graviers de Portet fait par ia Commission des eaux, comme point d'installation des filtres nouveaux, est parfaitement motivé par l'état de ces graviers. Leur étude scient:fique et lanalyse de Peau qu'ils fournissent justifie pleinement les décisions définitives du Conseil inunicipal. Je me-permettrai d'ajouter aux descriptions données par M. Roux, dans son rapport à la Commission des eaux, les résultats de l'examen géologique de ces graviers, et je ‘ferai connaître également les résuliats de l'analyse de l'eau Winfiltrations fluviales qui coule à travers. leurs interstices. M'étant trouvé forcément éloigné de ia Commission pendant un certain temps par suite de ma position médicale à Luchon, j'ai voulu fournir néanmoins à mes collègues présents à Toulouseles moyens de répondre aux objections puériles qu'on s'est empressé de faire, je ne sais trop dans quel but, à leurs décisions si bien motivées, ainsi qu'à celle du Conseil municipal. A cet 13 — 194 — effet, j'ai publié dans les comptes rendus de l’Académie des Sciences (Institut) une note sur les cailloux de Portet. Ainsi que l'a dit M. Roux, les graviers de Portet offrent une superficie exploitable énorme, de 1280 mètres de long sur 200 de large; leur composition est parfaite, puisqu'on n'y trouve que des cailloux de diverses gros- seurs et du sable plus ou moins grossier; ils sont complè- tement dépourvus de couches de vase tourbeuse , de racines d'arbres et de matières végétales. Ils donnent en abondance une eau d'excellente qualité, et les calculs faits d’après les résultats des expériences permettent d'affirmer que les 1000 pouces d’eau cherchés seront très-facilement obtenus. De plus, enfin, le produit des nouveaux filtres , grâce à une pente de 0",000% par mètre, pourra arriver directement à Toulouse, et à volonté dans chacun des deux Châteaux-d’eau, après un parcours de 9 kilomètres. Tels sont, en résumé, les avantages réels de Vlinstalla - tion des filtres à Portet, auxquels il faut joindre celui d'être éloigné de tout grand centre de population capable d’infecter les eaux souterraines. Etudions maintenant la coupe géologique des graviers dans lesquels l’expérience a été faite et déterminons leur âge en même temps que leur provenance. Le diagramme de la figure 7 nous montre la coupe de la tranchée d'essai passant dans le milieu du puits où se faisait épuisement de la nappe d'eau. A la surface du sol existe une couche fort mince de terre végétale a avec quelques cailloux roulés très-peu volumi- neux. Au-dessous se trouve une forte épaisseur de sable quelquefois légèrement terreux b, dans lequel se développent quelques lentilles de limon c. Immédiatement au-dessous, commencent les cailloux roulés dont l'épaisseur atteint 4 mètres environ. La partie supérieure de cette couche d est formée par des galets un peu plus que pugillaires, et au- dessous, la partie inférieure f est constituée par des cail- — 195 — Joux à moitié roulés dont quelques-uns atteignent des dimensions et un poids considérable. En moyenne, ils ont bien 40 centimètres de diamètre et pèsent 15 à 20 kilos. J'en ai examiné plusieurs dont le diamètre le plus grand était de 60 centimètres environ et le poids de près de 50 kilos. Ces cailloux reposent sur la marne. Celle-ci se trouve à 6 mètres environ de profondeur. Les infiltrations ont un niveau qui s'arrête à quelques centimètres au-dessous de la face inférieure de la poutre p, indiquant elle-même le niveau à peu près constant de la Garonne. La figure 8 représente la coupe en Fe de la tranchée A nentation: La surface du sol a est constituée par une faible couche de terre végétale ; en b, est une épaisseur variable de sable terreux avec quelque peu de limon. En d se rencontrent les cailloux roulés reposant sur la marne M. L'étude minéralogique etphysique des cailloux de la base, ainsi que la détermination de l’époque à laquelle ces cailloux ont été apportés dans le lit du fleuve est aujourd’hui d’un intérêt majeur. Elle permettra de faire voir aux ingénieurs qui se sont opposés au projet des filtres de Portet, que leurs objections ne sont basées que sur une étude superficielle de ces graviers. Eu effet, les gros cailloux de la base ne sont pas tous complètement arrondis. leurs arètes sont émoussées, mais ils ressemblent beaucoup aux cailloux volumineux que les rivières torrentielles détachent aujourd'hui des roches ensplace, dans les Pyrénées, et qu'elles entrainent avec vigueur pendant un certain espace; plusieurs portent quel- ques stries qui me semblent cependant douteuses (1). (1) On a cru avoir découvert des cailloux franchement striés à Portet, et M. Trutat les a signalés comme confirmant ce que j'avais déjà dit, c’est-à-dire la présence de dépôts glaciaires non loin de Toulouse. Ce fait ne s'est pas confirmé. Il importe du reste peu en présence de l'ensemble d'observations déjà faites et qui sont concluantes. Au premier coup-d'œil, le géologue reconnait là des témoins de celte période géologique, bien antérieure à tous les temps historiques, où les glaciers descendus des sommets Pyrénéens savançaient encore jusques à l'entrée des plaines sous-pyrénéennes. A l'époque de leur fusion, ces glaciers fournirent des torrents énormes et impétueux qui arrachèrent aux moraines frontales, barrant leur passage, les éléments qui ne pouvaient résister à leur pression (cailloux et limons) et les entrainèrent avec une grande vitesse jusqu'à des distances assez éloignées. Les blocs ainsi trans- portés furent échelonnés d’après leur grosseur le long du lit du fleuve, les plus lourds s’arrêtant les premiers à mesure que diminuait la vitesse et la force de transport des eaux fournies par les glaciers. Si nous étudions l'état des cailloux roulés superlficiels, ceux que la Garonne entraine aujourd'hui, et si nous les comparons à ceux du fond des tranchées de Portet, 1l est aisé de voir que les premiers n’atteignent même pas géné- ralement le dixième du volume des seconds. Ceci prouve mathématiquement à l’observateur muni du simple bon sens qu'il est impossible au fleuve actuel de rouler les masses de gros cailloux qui composent le fond des tranchées. Le simple bon sens avertit donc que la Garonne était torren- tielle lorsqu'un semblable phénomène s’est produit, et la géologie donne le moment du dépôt de ces gros cailloux à demi-roulés; elle le fixe à la fin d'une période glaciaire, c'est-à-dire à une époque qu'il est possible d'estimer à plusieurs milliers d'années. Or, si ces cailloux roulés qui forment un lit résistant au Fe actuel sont en place depuis tant de siècles sans que les crues les plus fortes qui aient depuis lors gonflé la Garonne, aient pu les déplacer, il est permis de supposer .que cet ancien lit torrentiel du fleuve, recouvert par une couche de dépôts plus récents, restera encore bien long- lermps intact. — 197 — Dès lors se décider à creuser des galeries filtrantes dans ‘un caiïlloutis de ce genre, dans le lit ancien de la Garonne torrentielle, est tout naturel, puisque pour déplacer ce lit de blocs à demi-roulés le fleuve devrait acquérir une telle force que ce phénomène coïnciderait avec une véritable révolu- tion géologique ou glimatérique dans nos régions (1). Si analyse chimique n’était venue éclairer la question de la composition du cailjoutis de Portet, son origine géologi- que aurait permis d'assurer d'avance une grande pureté aux matériaux qui le constituent. Pendant la période glaciaire, en effet, les éléments des moraines qui ont plus tard fourni le caïlloutis de Portet, étaient arrachés à un sol dans lequel la végétation était réduite à son minimum, grâce à la température ambiante si froide. Par conséquent les débris végétaux renfermés dans les moraines étant nuls, les cailloutis dont ces moraines ont été lorigine, ne devaient contenir aucun débris de plantes. Aussi par l’analyse chimique c’est à peine si lon trouve des traces d’ammoniaque dans les sables du fond de la tranchée de Portet,etla perte que leur ps l’incinération est minime, Il n’en serait pas de même si à Portet, comme dans la prairie des filtres et le ramier Vivent, 1éS cailloux roulés étaient recouverts d’une épaisse couche de terre végétale avec débris très-nombreux de racines et de feuilles. Les eaux d'infiltration de la surface traversant ces couches de la prairie des filtres que j'ai signalées plus haut, dans la coupe comparative des filtres d’Aubuisson et Guibal, entrai- nent, dans le cailloutis servant à la filtration, des eaux chargées de matières végétales, de germes de plantes, de produits de la décomposition des matières organiques, et (1) En faisant reposer et adhérer en certains points les piliers de soutien de la galerie filtrante sur la marne, au-dessous des couches de gros cailloux, on donnera une résistance suffisante à l’ensemble de ces galeries. Aucune inondation ne pourra les détruire. — 198 — contribuent à rendre ce cailloutis mal sain pour la filtration naturelle de l’eau. A Portet, le dépôt supérieur aux cailloux roulés est assez pur dans sa composition pour ne ge entraîner de semblables inconvénients. Du reste, l'analyse chimique donne, au sujet de la com- position de l’eau de la tranchée de Portet,des renseignements aussi catégoriques qu'instructifs. La limpidité de l’eau est parfaite, son goût est celui d’une eau excellente pour la boisson. Suivant que l’on puise l’eau dans les infiltrations descen - dant à l’ouest et à l’est de la tranchée, lorsque la pompe vide le puits, le degré alcalimétrique est plus ou moinsélevé. Ainsi, pour les infiltrations de l’est on trouve 05,088 (l'al- calinité étant calculée comme précédemment en hydrate de chaux) tandis qu’à l’ouest on trouve 05,094. On ne peut pas dire que les eaux de la nappe souterraine soient entrées déjà dans la tranchée, en voyant ce degré d’alcalinité légè- rement plus élevé. On peut si supposer que ‘les infiltrations s'étendant à l'ouest (le fleuve coulant à l’est) ont séjourné plus longtemps dans le sol que celles qui se trouvent à l’est du puits; par suite ces infiltrations, grâce à la quantité d'acide carbonique qu'elles tenaient en suspen- sion, ont pu dissoudre une plus grande quantité de car- bonates alcalino-terreux et présenter un degré d’alcalinité un peu plus élevé que celui des infiltrations venant du côté de l’est. Ii est certain cependant qu’en descendant le plafond de la galerie à un niveau trop bas, on y attirerait l’eau de la nappe inférieure venant des côteaux. Voici quelles sont les substances renfermées dans un litre d’eau de Portet : Acide carbonique. ...: ns 0,186 Acide sulfurique.....,.... 0,013 APRES CROP EU 0,049 EDS. de one ren ... : 0,0016 POMBS CREER ENEARS 0,0038 Soudan A0 0S 7 inerte, Un Mr traces. LEUR AN AARN AMEN L MED ONG Mägnésie mn ce gr 0,005 Ammoniaque :........... 0,0004 Rome asotque PURE traces. Alumine etoxyde de fer.... 0,055 Matière organique.... .... 0,014? L Quoique ces chiffres se rapprochent beaucoup, suivant toute apparence, de la vérité, je considère comme un devoir de dire que je ne les donne que sous toute réserve, car les dosages n’ont été faits qu’une fois seulement. Dans les autres analyses, ils ont été faits au moins trois fois. Néanmoins, 1l est bien permis de considérer cette eau comme de parfaite qualité, surtout si l’on compare sa com- position à celle de-la Garonne. Je crois donc, pour ma part, que le projet des galeries filtrantes à Portet, est une excellente solution du problème que s'étaient posé l'administration municipale et la Com- mission des eaux. J'aurais cependant deux reproches à faire à la solution donnée : 1° Je crois que les galeries filtrantes sont trop éloignées des rives du fleuve. Dans les conditions de soli- dité où se trouve le gravier dans lequel on les creuse, il me semble qu'on aurait pu s'approcher beaucoup plus du cours d'eau de manière à avoir un débit bien plus considé- rable pour une étendue moins grande de galerie. J'ai expli- qué plus haut comment se comportent les infiltrations par rapport au fleuve, et je n'ai pas besoin de dire ici en vertu de quelle loi hydrostatique les filtres débiteraient davantage en les rapprochant du cours d'eau. D'ailleurs, des puits auraient parfaitement pu montrer si les gros cailloux de — 200 — la base s'étendent dans toute la largeur de la terrasse alluvienne dans laquelle coule la Garonne, et on aurait pu régler le rapprochement des galeries suivant la présence ou l'absence de ces cailloux. 2 Je reprocherai au projet en question de vouloir utiliser les galeries filtrantes de la prairieet du ramier Vivent, en: les laissant dans l’état où nous les connaissons maintenant. On peut accepter cette solution pour les filtres de la prairie, mais pour le filtre Vivent, elle est inadmissible Cette galerie ne fonctionnant que dans des conditions æl'équilibre parfait entre les deux nappes qui l’alimentent, peut donner de l’eau . potable ; mais si cette galerie reste ouverte pour fournir . de l'eau, on peut être certain, au prochain envasement du lit de la Garonne sur ce point, de voir surgir de nouveau tons les inconvénients que l’on a déjà essauyés : altération de l’eau et développement d’ane végétation aquatique spéciale. On devrait laisser ce filtre à jamais fermé, ou bien lui creuser un canal de fuite spécial en le conservant pour permettre aux naturaïistes d'y étudier les altérations des eaux qui s'infectent dans des terrains de mauvaise nature. L'exemple serait d’une grande utilité pour toutes les grandes villes ; 11 deviendrait instructif pour ceux qui veulent s’adonner à l'étude de l'alimentation des fontaines des centres considérables de population. Nous avons pu juger par la série des débats auxquels à donné lieu l'étude entre- prise au sein de la Commission des eaux, que le manque de connaissances spéciales a bien souvent entrainé loin de la vérité ceux-là même qui auraient dû être par leur posi- tion les plus aptes à donner des conseils utiles. Je reprocherai, enfin, à tous ceux de mes collègues qui auraient été à même de le faire connaître à la Commission des eaux, d’avoir négligé de discuter à fond le système des filtres d’Aubuisson modifié par M. Delon, ingénieur des ponts et chaussées à Béziers. ee (Ni = Voici en quoi consistent les filtres de M. Delon, d’après le dessin qu'a bien voulu m'en faire M. Morlière, ingé- nieur des ponts et chaussées, auquel M. Delon avait montré toute son installation : | _ Lorsqu'on épuise une série de points dans un gravier rempli d’eau d'infiltration , l'épuisement se fait dans un espace déterminé, suivant des cônes renversés, dont les bords se recoupent dans le cas où les points épuisés sont suffisamment rapprochés lun de l'autre. M. Delon, partant de ce principe, à eu l’idée d'établir, au milieu même des cailloutis aquifères, de grands réservoirs de bois, ayant la forme de pétrins renversés. Les planchers de ces réservoirs communiquent entr'eux au moyen de tuyaux se soudant eux-mêmes à un tuyau-mère pour le déversement de l’eau filtrée. Les caisses de bois sont remplies aux deux tiers de cailloux roulés ainsi que le montre la figure 11. La surface de la nappe de cailloux est séparée par un vide de la sur- face inférieure de la caisse renversée. L'eau s’accumulant dans l'intérieur de ces espèces de bassins, arrive à gagner le tuyau d'écoulement et de là va dans une pompe aspi- rante qui attire incessamment l’eau à chaque coup de pis- ton. La nappe aquifère s'épuisant suivant des cônes , ainsi que le montrent les lignes pointillées de la figure, si l'on rapproche suffisamment les appareils, on peut utiliser toute l’eau de cette nappe sans faire.des galeries continues en maçonnerie, et par conséquent fort dispendieuses. Puisque ce système a réussi entre les mains de M. Delon, pourquoi n’a-t-on pas appelé cet ingénieur expérimenté pour donner son avis à la Commission des eaux? Depuis mon départ de Toulouse , au mois de juin, j'ai deux fois écrit pour qu'on avisàt à ce sujet, et lon n’a pas écouté ma demande. On aurait pent-être , en appliquant l'invention de M. Delon dans les ramiers de Portet, réalisé une éco- nomie notable dans la confection des galeries filtrantes que lon exécute. de OU 2 Je terminerai, enfin, par l'examen du projet de M. Mau- rel, dans lequel l’auteur a montré une grande intelligence, mais, il me permettra de le dire aussi, un défaut de prati- que pour le cas actuel. M. Maurel a proposé d'utiliser encore la prairie des filtres, la Garonne et le canal de fuite du moulin Vivent, pour envoyer de l’eau filtrée dans des galeries nouvelles que l'on construirait à quelques mètres seulement des rives du fleuve. Il est sûr que par ce rapprochement des galeries filtrantes de la source même des infiltrations, l’on aurait une plus grande quantité d’eau de la Garonne dans les filtres, à la condition que l'on baissàt suffisamment le radier des gale- ries, Mais, dans ces conditions, la nappe d’eau de Saint- Cyprien traversant ce terrain infectant du ramier Vivent serait venue encore troubler la bonté de l’eau. En injectant l’eau du canal de fuite du moulin Vivent dans les terrains supérieurs du ramier et de la prairie, ces terrains étant littéralement pourris sur certains points et contenant des matières organiques en abondance, ainsi que je lai démontré, on aurait bien une grande quantité d’eau filtrée provenant de cette source, mais l’eau serait tout aussi mauvaise que l’a été celle du filtre Vivent. Elle occasionnerait inévitablement des accidents se rapprochant de ceux que l’on a eu à combattre. Les galeries pourraient également se trouver quelque jour complètement privées d'eau de la Garonne, si une nouvelle crue semblable à celle de 1870 venait encore colmater son lit de manière à arrêter toute filtration. D'ailleurs, la position des filtres dans la prairie aurait entrainé le maintien de la solidarité des deux Châteaux- d'Eau, inconvénient qu'il faut éviter à tout prix. Si lon avait encore voulu se servir de ia prairie des filtres pour chercher une nouvelle quantité d'eau, il ay — 203 — avait, d’après moi, qu'une seule chose à faire. On aurait dû se rapprocher le plus possible des rives du fleuve en fai- sant une nouvelle galerie filtrante au niveau de celle de d'Aubuisson. Cette galerie aurait longé, ainsi qu’on l'avait proposé en 1868, en forme de demi-cercle, les bords de la Garonne et du canal de fuite du moulin Vivent. Elle aurait épuisé toutes les infiltrations supérieures des cailloux roulés, et son produit, probablement un peu plus abon- dant que celui fourni par les filtres d’Aubuisson réumis , aurait suffi à alimenter la ville en eau filtrée. On aurait pu chercher ailleurs pour l’arrosage des rues. Mais la combinaison de Portet me semble, grâce aux avantages signalés plus haut, la conclusion préférable à toutes celles que j'ai examinées. Elle sera coûteuse, pro- bablement même beaucoup plus coûteuse qu'on ne la supposé, mais elle donnera un résultat certain. C'est ce que doit chercher la ville. | Aux ingénieurs qui conduiront les travaux, de montrer la sévérité la plus grande pour que tout soit exécuté d’une manière irréprochable. Nora. — Depuis que ce travail a été rédigé, l’on boit à Toulouse de l'eau passable et même bonne, si on la compare à celle que fournissaient les filtres il y à deux ans. Bien des personnes ont pensé, dès lors, que le mal des filtres était guéri. Il n’en estrien. Une nouvelle analyse com- plète de l’eau des fontaines m'a prouvé que cette eau conserve toujours une composition intermédiaire entre celle de la Garonne et celle de la nappe aquifère de Saint-Cyprien, mais elle se rapproche beaucoup plus aujourd'hui de celle de la Garonne qu'au moment de mes dernières analyses faites en 1872. Cependant l’algue s'y développe toujours, car chaque 15 jours je suis obligé de laver un bassin alimentant mon labora- toire et dans lequel les débris de Ja végétation s'accumulent d’une manière . régulière. Cette amélioration si notable de l'eau prouve que les infiltra- tons de la Garonne sont actuellement bien plus abondantes dans les filtres qu'elles ne l’étaient avant. Le lit de la Garonne s’est donc nettoyé. Les publications faites, dans ces derniers temps, par M. Belgrand léminent ingénieur hydraulique de Paris et membre de l'Institut, au sujet de l'influence réciproque qu’exercent sur elles-mêmes les eaux infil- trées de la Seine et l’eau de la nappe souterraine alimentant les puits de Paris, sont venues confirmer de la manière la plus complète tout ce que jai dit dans ce Mémoire sur les eaux introduites dans les galeries filtran- tes de Toulouse. — 264 — UN SQUELETTE HUMAIN DE L'AGE DU RENNE à Laugerie-Basse (Dordogne) Rapport par M. Émile Cartailhac Membre titulaire fondateur. MESSIEURS, Je suis heureux de vous annoncer une bonne nouvelle : la science possède enfin un squelette humain de Pdge du renne, sans qu’il soit possible d'en douter un seul instant, comme vous allez en juger vous-même. Ces restes précieux viennent d'être découverts dans un gisement classique, à Laugerie-Basce (Dordogne). Ils font aujourd'hui partie de : Padmirable collection préhistorique de M. ELre MAssenaT, à Brives, un de vos membres correspondants. Depuis que les grottes et abris sous roche sont l’objet des plus actives explorations, il a été trouvé souvent des ossements humains que lon a attribués à l’époque quater- naire. Permettez-moi de vous rappeler les principales décou- vertes de ce genre. En 1828, Tournal mentionne la présence d’ossements humains dans la grotte de Bize ; 1ls auratent été associés à des fragments de poterie et à des débris de Rennes princi- palement. Marcel de Serres ÿ signale aussi un fragment de maxillaire supérieur et une portion d'humérus ; des fouilles plus récentes ont, enfin, livré une dent incisive. | Malheureusement, on est loin d’être certain qu’il n'y a pas remaniement dans les grottes de Bize et j'ai vu au musée de Narbonne, quelques objets qui en proviennent et sont de l’époque de l’âge de la pierre polie. Lui 906) — Il en est de même pour les groites de Pondres et de _ Souvignargue, d'où MM. de Christol et Emilien Dumas ‘ont retiré les ossements des espèces les plus anciennes de la période quaternaire et quelques débris de Fhomme joints à de la poterie, mais la présence d’ure hache en pierre polie rajeunit considérablement ceux-ci. En 1839, Jœger recueillait dans les environs de Canstadt, près Stuttg re ‘ ossements de l’homme mêlés à ceux des ours, des ane: des éléphants, etc. M: de Meyer, à la même époque, signalait la mème réunion à Mosbach, près Wiesbaden. Nous r’avons pas de détails, je crois, sur ces deux faits. Quelques autres trouvailles de ce genre ont eu lieu dans le bassin du Rhin. En 184%, M. Aymard annonça que des débris os avaient été rencontrés dans les couches du volcan éteint de Denise, près le Puy-en-Velai; les géologues ses confrères, MM. Bertrand de Doue, Lecoq, Croizet, F. Robert confir- ment cette découverte. Gette fois, il s’agit d’osstments assez nombreux, quoique fragmentés, et l’on parait d'accord pour ies considérer comme Contemporains sinon de l'elephas meridionalis, du moins des dernières éruptions volcaniques, c’est-à-dire post-pliocènes. En 1860, M. le marquis de Vibraye, dans la grotte des fées à Arcy-sur-Cure, met la main sur une mâchoire qui gisait dans la couche profonde de cette cavité caractérisée par l’ursus spelœus, ’hyæna spelæa, l'êlephas primiyenius, le rhinoceros tichorhinus. Plus tard, M. Franchet découvrait dans la même couche un atlas humain. Cette même année 1860 est célèbre par la publication du mémoire de M. Edouard Lartet, sur une ancieñne station humaine, avec sépulture contemporaine des grands mammifères fossiles caractéristiques de la dernière période géologique. Notre - maitre àtous arrivait à Aurignac malheureusement longtemps B ; 4 h L : après la découverte et la violation de la grotte. La sépulture. proprement dite ne présentait plus que des restes presque F — 206 — informes, et sauf quelques rares débris, les ossements humains avaient été portés au cimetière du village, perdus à ja mais pour la science. On sait que M. Lartet reconnut et explora avec le plus grand soin un foyer quaternaire qui re- couvrait la petite terrasse formant talus à l'entrée de la grotte. Ses conclusions produisirent une grande émotion et converti- renttous ceux que les faits mis en lumière par Boucher de Perthes laissaient encore hésitants. C'était la première fois qu'il était question d’une sépulture trouvée en contact avec un dépôt d’ossements de rhinocéros, d'éléphants, d’ursus speleus, de renne etc., dù à l'homme sans le moindre doute. À ce moment donc et dans l'état de la science, il était, je crois, impossible de songer à faire une distinction et à attribuer le foyer et la sépulture à deux époques différentes de l’âge de la pierre, et cette constatation était d'autant plus difficile quela couche de ia sépulture, encore une fois, n'avait pu être vue.en place, étudiée par l'éminent observateur. Ces doutes sur la contemporanéité des deux gisements, plusieurs personnes les ont éprouvés. M. Gervais les a ma- nifestés assez nettement à la page 44 de ses recherches sur l'ancienneté de l’homme (Paris) 4867 ; en 1871, M. Trutat et moi nous avons cru devoir insister üans ce sens par une note à l’Institut qui a été publiée dans les Comptes-rendus, séance du 34 juillet. En effet, en juillet 1870, nous avions longuement discuté cette question en étudiant l'élat actuel de la grotte, le mémoire de M. E. Lartet à la main, et voici quel est notre sentiment. 4° Certainement, la grotte d’Aurignac a servi de stalion à l'homme quaternaire, dont le foyer et les débris de repas sont le point de départ des conclusions capitales que tant de découvertes ont si vite justifiées. | 20 Longtemps après cette première occupation, la grotte, réduite dans ses dimensions, a servi de crypte sépulcrale que les poteries et les rondelles percées de cardium per- 4 1 CR iv D 0 — 207 — mettent de classer à l’âge de la pierre polie comme celles de Saint-Jean-d’Alcas (Aveyron), de Durfort (Gard), de Sinsat (Ariége), etc. L'importance de cette rectification est sérieuse pour plusieurs motifs; d’abord, il ne faut pas regretter outre mesure les ossements humains puisqu'ils sont d’une époque qui en a fourni en nombre très-considérable soit dans les grottes sépulcrales soit dans les tombeaux, surtout les dol- mens. Il faut ensuite renoncer à ce que lon pourrait appe- ler la poésie d’Aurignac; il n'y a plus à songer à ce festin des funérailles, ordinaire chez des tribus assez nombreuses de sauvages modernes, mais dont les traces aux époques préhistoriques ne sont pas aussi nettes qu’on aurait pu le croire. Mais ce qu'il faut surtout, c’est reprendre létude des stations qui ont montré une sépulture au-dessus d’une couche quaternaire, et réviser, sil y a lieu, si du moins c'est. encore possible , les conclusions qui présentaient les deux gisements comme contemporains. L'influence du mémoire sur Aurignac a été, en effet , _ considérable sur la direction des études préhistoriques, et les explorateurs étaient surtout à la recherche de stations identiques. De fait, leurs vœux furent souvent comblés , quelquefois déçus. Cest ainsi que M. P. Cazalis de Fondouce, en 1864, signale à l’Institut, « une caverne avec débris de l’industrie humaine primitive. Cest une caverne funéraire qui se rapporte au type de celle décrite par M. Ed. Lartet, à Aurignac. » … Elle renfermait, entr’autres choses, « des anneaux de colliers ou de bracelets en test de coquil- lages , comme ceux d’Aurignac. » Et plus loin mon savant ami ajoutait avec regret : « Je n'ai pu y découvrir... aucun indice du repas des funérailles signalé à la caverne sépul- crale d’Aurignac; mais, comme pour celle-ci, les parents et les amis des morts avaient, sinon fermé complètement, du moins considérablement retréci l'ouverture de la — 208 — cavité, etc. » C'est de la grotte de Saint-Jean-d’Alcas, près Saint-Affrique (Aveyron), qu'il est question. Maïs M. Caza- lis de Fondouce la décrivait peu de temps après d’une manière complète, et cette fois en insistant sur l'identité de son contenu avec celui des dolmens du même pays, il la rapportait avec certitude à la fin de Pàge de la pierre polie. « Au reste, vous pouvez en juger vous-même, Messieurs, en examinant, au Musée d'Histoire Naturelle de-notre ville, les charmants objets qu'elle m'a livrés , ceux que j'ai recueillis aussi dans les dolmens, et dans une autre vitrine vous pourrez examiner la poterie et les disques de curdium d'Aurignac que M. Trutat et moi avons donnés. En 4864, M. E. Dupont fouillait, dans la vallée de la Lesse (Belgique), un abri sous roche auquel il donnait le nom de Trou du frontal, et qui présenta des conditions identiques à celles d’Aurignac. « Les dépôts de l’âge du » mammouth comblaient l'abri extérieur de manière à » arriver, en plan légèrement incliné, à l'orifice du caveau » dont le fond contenait aussi un petit amas de limon » fluviale. Au-dessus de ces dépôts, et présentant dans » lexcavation un plan incliné en sens inverse de celui de » ces couches plus anciennes, s'étendait un épais amas » d'argile jaune pétrie de fragmentsde la roche adjacente, » tous débris annonçant l'existence de l’homme et situés » entre le limon fluviatile et celte argile jaune était, par » conséquent, de l'âge du renne. De tels débris s'y trou- » vaient en abondance. » La caverne proprement dite renfermair les restes bou- leversés et brisés de seize individus. À l'entrée du caveau élaient des silex taillés, des coquilles éocènes perforées , : des fragments de fluorine perforés, ure urne avec une ouverture resserréc et des anneaux de suspension. Enfin, « une dalle renversée au milieu de ces derniers débris, s'adaptait aux dimensions de louverture du caveau et dénotait évidemment une sépulture. Devant la cavité étaient des restes de repas aves des indices d’un foyer et des u gi Î Bis du GE Pr lemar re Curs Dire à Jade (Bite Te 2/2 Kris 01e Prenéen : : Î Galere. Flteant= GIE Ve LOST 5 SC EE DOO0 9 CU, 06 6 26046) v600% (é Père On W À füronne EST A4 ete — 209 — instruments usuels qui seraient les témoins des festins funéraires faits lors de l’inhumation d’un cadavre. « Il n'échappera à personne, ajoute M. Dupont, que lexplica- tion de la présence des ossements humains du Trou du frontal comme résultant des coutumes funéraires d’une peuplade quaternaire , est, en quelque sorte, calquée sur ladmirable interprétation par laquelle M. Lartet inau- gura définitivement l'ère des recherches si fécondes sur les mœurs des antiques habitants de cavernes. Les faits observés à Furfooz ne sont que la répétition , quasi de point en point, de ceux que lillustre savant dévoila en 1861. » | C'est aussi mon avis, et je crois bien que les foyers, les débris de repas, les silex, etc., sont de l’âge du renne, mais que la sépulture, avec son urne d’un art si avancé et la dalle qui fermait son ouverture, sont néolithiques; seule- ment, en Belgique, l’âge de la pierre polie a laissé beau- coup moins de traces dans les grottes que chez nous, les populations de cette époque paraissent moins riches, moins ornées; voilà pourquoi M. Dupont n'aurait pas trouvé avec les ossements d'objets bien caractéristiques et qui aient pu lui donner l'éveil. D'autre part, il est évident que l'exemple d'Aurignac lui enlevait toute idée de faire la distinction qui me parait vraisemblable. Parmi les autres sépultures dites de l’âge du renne, et sur lesquelles, à mon avis, planent quelques doutes, je dois citer encore Bruniquel, Cro-Magnon et Solutré. M. V. Brun, auquel je me plais à rendre hommage pour le zèle, ia patience et le désintéressement qu'il a mis à fouiller les stations de Bruniquel et à former un musée qui est l'honneur de Montauban, a découvert, en 4864, des ossements humains dans les circonstances suivantes : La montagne sur laquelle sont bâtis le village et le chà- teau offre, en aval, un abri sous roche que M. Brun a décrit sous le nom de Lafaye. Le sol, à cet endroit, a offert les détails suivants : ; 1 — 210 — Dans la partie ouest étaient les vestiges d’une petite construction fort ancienne, dont les murs avaient À mètre d'épaisseur et reposaient sur le dépôt ossifère. A 45 centimè- tres au-dessous des fondations, dans le limon non remué, une tête humaine fut immédiatement levée, un autre coup de pioche amena une mâchoire d’enfant. Bref, deux sque- lettes, dont le premier au moins était accroupi, se trouvè- rent là. Le limon fut passé au crible. La base d’un petit bois de renne était à côté du crâne; il y avait aussi une mà- choire supérieure d’un jeune bouquetin, plusieurs frag- ments de màchoire de renne, une dent de cheval, quelques ossements d'animaux cassés en long, des rognons et des débris de silex bruts et quelques silex taillés. Le crible a fait découvrir deux incisives humaines trouvées dans la même pelletée de limon. Elles paraissent appartenir à un individu adulte et ne sont pas usées comme celles du squelette, Le crible a procuré aussi un petit poinçon et un fragment de bois de renne travaillé. Nous citons maintenant in extenso le travail de M. Brun (pages 12 et 13). : « J'ai relevé avec exactitude la coupe du terrain où étaient les ossements humains. J'ai été frappé de trouver, dans le milieu des 45 centimètres de limon qui les recouvre, une couche très-noire renfermant des cendres et du charbon, ayant # centimètres d'épaisseur et plus d'un mètre d'éten- due. La partie du limon qui surmonte cette couche ren- ferme aussi quelques petites veines charbonneuses. Ces lieux ont donc été habités postérieurement à lenfouisse- ment du squelette. » Le limon, entre le squelette et la couche noire Gsailiee, présente encore une épaisseur de 90 centimètres et se nes en quatre couches bien distincles, qui sont également entrecoupées de veines charbonneuses : ce qui établit - Pidentité de constitution avec le limon supérieur. Enfin, la couche ossifère présente à cette place une épaisseur de ho R —. — 211 — 30 à 40 centimètres et est EN Le elle-même de vei- nes charbonneuses. » L'exploitation de ce gisement s'est continuée en avan- ie toujours vers le nord-ouésté le limon et la couche noire étaient devenus peu productifs ; les ouvriers avaient négligé de fouiller une lisière de limon qu’un suintement calcaire avait retenue contre le roc. Désirant ne rien laisser à exa- miner, Jordonnai qu’on abattit cette stalagmite. Au premier coup de pioche, une tête humaine fut découverte et recueillie parfaitement intacte; elle touchait à la montagne et occu- pait une petite excavation de la roche. La face était tournée vers le ciel et inclinait un peu en avant. Dans les débris écroulés autour de la tête a été trouvé un fragment de poterie, d'environ dix centimètres sur huit, légèrement concave, d’une terre grossière et noirâtre. Cette circons- tance est d'autant plus remarquable, que c’est le seul fragment de poterie d’une ancienneté authentique que j'aie rencontré dans le cours de mon exploitation. Dans les mêmes débris, il a été recueilli quelques silex et quelques poinçons grossièrement taillés, un fragment de bois de renne scié, un sifflet, un grand os plat travaillé, une tête et des ossements d'un jeune sanglier, une mâchoire de blaireau. Tous ces objets, rassemblés autour de cette tête, témoignent qu'ils y avaient été mis intentionnelle- ment. Le crible n’a fait découvrir dans cette partie de la stalagmite rien d'important. Le crâne est dépourvu de sa mâchoire inférieure , et la mâchoire supérieure n’a pas toutes ses dents. C'est une tête de vieillard, qui en avait déjà perdu plusieurs de son vivant. Le reste du crâne est d’une conservation parfaite. Je me suis assuré que le premier squelette et cette tête étaient à peu près au même niveau. » Je ne puis m'empêcher, messieurs, de trouver ces ren: seignements incomplets à un point de vue essentiel : ces squelettes humains ont-ils été enterrés à l’endroit où on les a trouvés? Dans ce cas, un trou a été fait, les cadavres y — 212 — ont pris place, et la terre qui les a recouverts étant celle-là même qu’on venait d'enlever, il n'y a pas à s'étonner de trouver avec eux quelques os de renne, des silex et tout ce que cette terre pouvait contenir ; et, en réalité, l'époque de l’ensevelissement reste tout-à-fait ignorée. Elle peut être de beaucoup postérieure à la formation de la couche, et précisément cette dernière opinion est corroborée par la présence d'un fragment de poterie, le seul que M. Brun ait jamais rencontré dans les dépôts ossifères de Bruniquel. Si les corps humains n'ont pas été enterrés, s'ils sont contemporains de la couche-de limon, j'avoue ne plus com- prendre la formation de cette couche, et la présence au milieu d’elle de squelettes accroupis, dont les ossements n'ont pas été disjoints d’une façon complète et en partie entrainés. Ge n’est pas ainsi que se trouvent d'ordinaire les squelettes non humains dans nos alluvions quaternaires. Si lon se donne la peine de réfléchir, on reste persuadé qu’une seule hypothèse est admissible, celle d’une sépulture, c’est- à-dire ensevelissement postérieur au gisement ossifère et plus ou moins récent. En résumé, l'abri de Lafaye a offert une sépulture que l’âge de la pierre polie peut sans doute revendiquer. | Je ne veux pas quitter Bruniquel sans dire qu’on y a cependant trouvé quelques ossements humains brisés dans des conditions à peu près certaines de contemporanéité avec le dépôt quaternaire. Ainsi, le musée de Toulouse possède deux fragments de mächoires inférieures et plusieurs mor- ceaux de crâne qui ont été recueillis au beau milieu du gisement non remanié de la grotte dite des Forges, avant les fouilles de M. de Lastic, celui qui a vendu le contenu au British muséum. La présence de ces débris d'ossements humains, au milieu des restes de cuisine et des vestiges d'habitation, ne doit pas être, comme je l'ai toujours dit, une preuve d’an- thropophagie. Ce n’est pas ici le cas de discuter cette ques- tion, mais je veux faire observer que l'hypothèse du canni- — 213 — balisme est la moïns vraisemblable et la plus incertaine des explications. | J'arrive maintenant à une découverte que les anthropolo- gistes ont considérée comme une des plus importantes qui aient encore été faites. Je veux parler du gisement célèbre de Cro-Magnon, aux Evysies (Dordogne), en 1868. Après avoir enlevé # mètres de détritus qui couvraient un abri ignoré, les ouvriers du chemin de fer, en pénétrant sous le banc rocheux qu'ils avaient ainsi dégagé, ne tardè- rent pas à en retirer des ossements brisés, des silex taillés, et, enfin, des crânes humains, dont les entrepreneurs devi- nèrent aussitôt ancienneté et l'intérêt scientifique. Les tra- vaux furent arrêtés; quelques jours après, M. Alain Laganne, prévenu, continuait les fouilles, exhumait les squelettes ; enfin, M. Louis Lartet arrivait, et au-dessous de la couche qui avait renfermé les squelettes humains il découvrait et étudiait avec beaucoup de soin une riche station quaternaire, antérieure à la dernière époque des cavernes, Si nous avons bien compris son excellente notice, et comme on peut en juger par la coupe qui l'accompagne, les ossements humains étaient à la partie supérieure d’une couche jaune recouverte par les éboulis calcaires, et qui renfermait encore quelques silex taillés, mêlés à des osse- ments brisés et à d’autres os intacts se rapportant à de petits rongeurs, ainsi qu’à un renard particulier. La sépul- ture occupait une aire très limitée, et on n’en trouve aucune trace dans une section voisine. En résumé, la grotte, d’abord simple rendez-vous de chasse, habitée plus tard d’une façon permanente, se trouva à peu près remplie par l'accumula- tion des débris de cuisine. Elle fut abandonnée, mais on y revint une dernière fois pour y cacher les morts. Ur, je ne suis pas certain que ces ossements humains soient bien ceux des chasseurs de renne. Les personnes qui ont visité la vallée de la Vézère savent que, de nos jours même, une couche d'éboulis ne peut se former sur un — 214 — point quelconque sans être remplie de débris de silex et d’ossements quaternaires. Îl en était ainsi, à plus forte rai- son, à l’époque où les gisements ossifères étaient encore plus mobiles, moins recouverts, moins pourris que de nos jours; une couche d’argile jaune déposée dans l'abri de Cro- Magnou ne pouvait pas manquer d'os ou de silex, bien plus anciens peut-être que sa formation. D'ailleurs, cette couche jaune dans laquelle à peine un dernier lit charboneux de faible épaisseur aurait été vu par M. Laganne, devait être formée lorsque les sauvages sont venus lui confier leurs morts auprès desquels on a trouvé près de 300 coquilles marines. Que cette sépulture soit très ancienne, c’est ce que prouve jusqu’à l'évidence l'énorme talus qui la recouvrait. Il est très possible qu'elle ne soit pas beaucoup plus récente que le dépôt sous-jacent, mais ilest difficile d’être certain qu’elle est quaternaire. Il ne faut pas oublier que le gisement des squelettes humains était fouillé à l’arrivée de M. Louis Lartet, et par conséquent des observations impor- tantes peuvent nous manquer. En 1856, on fit près Elberfeld, dans une vallée latérale de la Dussel, nommée Neanderthal, la découverte d’un crane devenu célèbre à partir de 1865 ; dans une grotte, à 60 pieds au-dessus du niveau de la rivière, était une cou- che horizontale de Lehm. A 2 pieds de profondeur, cette argile contenait les os d’un squelette humain étendu hori- zontalement dans le sens de la longueur. Le Lehm était si adhérent, qu’on ne prit pas garde aux ossements. On jeta la calotte crânienne avec d’autres débris, croyant avoir trouvé des ossements d'ours des cavernes jusqu'à ce que le professeur Fublrott d'Elberfeld les reconnut et sauva d’une destruction complète la calotte crânienne, le fémur, l’humé- rus, un Cubitus, une clavicule, la moitié gauche du bassin, un fragment de l'omoplate droite et plusieurs morceaux de côtes. Il y a eu sur l’homme du Néanderthal des discussions nombreuses et passionnées. Un certain nombre de paléonto- a logistes l'ont repoussé comme quaternaire et regardé comme un cas pathologique ; il a été réhabilité en partie dans ces derniers temps, grâces aux trouvailles de MM. Faudel et Cocchi, qui ont démontré que ses caractères, réputés exceptionnels, se retrouvent presque au même ‘degré sur d’autres sujets incontestablement quaternaires. Mais il me sera permis de faire alors observer que ce sont des données ostéologiques seules qui établiraient son âge. Les preuves tirées du gisement sont plus qu'incertai- nes. Je crois pouvoir dire que tout squelette humain com- plet peut ètre a priori considéré comme postérieur à la cou- che fluviale qui le renferme. Est-ce donc quand la Dussel creusait sa vallée, coulait à pleins bords et remplissait de ses argiles et de ses cailloux les cavités situées à 60 pieds au-dessus de son niveau actuel, qu'il était possible à un cadavre humain d'être placé par l’eau au milieu de la grotte, entier, allongé, la tête vers l'ouverture ? Ces conditions indiqueraient plutôt une sépulture ; mais alors elle est postérieure au Lhem qua- ternaire ; son âge est incertain. Lorsque les ossements sont contemporains de lalluvion qui les renferme, ils sont isolés, plus ou moins entiers, sauf de rares exceptions, quând par exemple le dépôt fluvial s’est fait brusquement, à la suite d’une crue subite. Je voudrais parler avec quelques détails d’une station que les beaux travaux de MM. Arcelinet de Ferry ont rendue célèbre, celle de Solutré (Saône-et-Loire). Là, dans des dépôts incontestablement de l’âge du renne, il y avait des: sépultures nombreuses. Quelques-unes étaient limitées par des dalles brutes formant un parallélogramme ; d’au- tres étaient au milieu des foyers non remaniés, sans que lon puisse savoir si le foyer avait été funéraire , allumé pour obéir à quelque rite, ou si le cadavre avait été placé, suivant un usage consacré, au lieu même où l’homme avait longtemps séjourné. Feu M. de Ferry et M. Arcelin, qui vient de publier ses notes à la suite d’un grand ouvrage de — 216 — son regrettable collaborateur, pensent même que plusieurs fois la hutte qui avait abrité les vivants fut incerdiée et renversée sur les morts. Tout cela est bien précis et bien poétique ! Cependant je ne connaïs pas encore ce gisement et, dans ce cas, mon devoir est de réserver mon opinion au sujet de l’âge des ossements de plus de 50 squelettes humains que le Cros du charnier, au pied du Roc de Solutré, a livrés aux explorateurs et aux discussions des anthropo- logistes. Je reprends maintenant l'énumération des découvertes effectuées depuis 1861. En 1863, Boucher de Perthes, après trente ans de recherches, découvre dans le sable noir argilo-ferrugineux d’une carrière des environs d’Abbeville (Moulin-Quignon), à 5 mètres de profondeur et presque au contact de la craie, et à 30 mètres environ au-dessus du niveau de la Somme, une mâchoire humaine devenue bien célèbre. Depuis lors, surtout en 1864, Boucher de Perthes a pu recueillir dans les mêmes conditions, c’est-à-dire avec la faune et les silex taillés quaternaires, de nombreux frag - ments osceux. Un débris humain vraiment quaternaire, c’est la mâchoire de la Naulette que M. E Dupont trouva, en 1866, dans le trou de ce nom, sur la rive gÂuche de la Lesse (Belgi- que). Avec celte mandibule inférieure, il n’y avait qu’un cubitus, et ces débris étaient associés avec des ossements épars d'animaux quaternaires et surmontés de couches dont l’âge n'était pas douteux, Le’ crâne de l'Olmo a été découvert en juin 1863, avec un petit fragment de face et une belle pointe du type de Saint-Acheul, à une profondeur de 15 mètres environ, dans une argile lacustre qui contient des restes de la faune post-pliocène et à laquelle sont superposés, sans remaniements aucuns, les sables et les cailloux ferruzi- neux du post-pliocène inférieur ou supérieur, un lehm ou limon souvent dénudé, enfin, les alluvions récentes. Voilà un exemple d’un gisement bien déterminé à la fois — 217 — par la paléontologie et l’archéologie, et d’un ossement humain quaternaire sans l'ombre d’un doute. D'autres débris humains ont été découverts, à plusieurs reprises, autour de Paris. Je rappellerai seulement que le 18 avril 1868, M. Eugène Bertrand trouvait des vestiges assez nombreux d’un squelette dans une carrière de Clichy. La discussion qui eut lieu à la Société d’Anthropologie laissa quelques doutes dans l'esprit des plus circonspects. Plus authentiques sort les ossements que M. Reboux a recueillis dans les bas niveaux de la Seine: 1° à la Révolte, petits fragments de crâne; 2 à la Chaumière, mâchoire inférieure d'enfant, deux morceaux d’occipital et de parié- tal, fragment d’un maxillaire supérieur d’adulte ; 3° à Clichy, différents fragments de crâne et un maxillaire inférieur d’adulte. En 1869 et 1870, M. Emile Martin a découvert dans les alluvions anciennes de Grenelle (moyens niveaux), au milieu des produits industriels similaires à ceux des caver- nes, d'assez nombreux ossements humains se rapportant à trois squelettes, que nous n’avons aucune raison pour ne pas considérer comme quaternaires. Des ossements isolés ont été recueillis dans presque tous les dépôts ossifères des grottes et abris de la der- nière époque paléolithique. Ainsi, M. A. Fontan a recueilli deux dents humaines à Massat ; M. Ed. Lartet, un frag- ment de mâchoire inférieure aux Eysies, un morceau de frontal , de mâchoire, et p'usieurs os longs à la Made- laine, etc. M. Elie Massénat, dans ses fouilles à Laugerie-Basse, avait recueilh , avant 1869, une quantité assez considéra- ble de dents humaines; des màchoires inférieures entières en même temps que d’autres grands ossements, tels que femur, tibia, etc., en général brisés mais non fendus en long. Dans ses récentes explorations, il avait été encore plus heureux , et les foyers autour desquels étaient des débris de toutes sortes lui ont livré d’autres os humains — 218 — et même des crânes plus ou moins entiers, mais toujours isolés; et dont l’âge reculé ne pouvait guère être mis en doute. Laissez-moi vous donner, en effet, quelques renseigne- ments sur celte admirable station de Laugerie-Basse. La Vézère fait un grand coude avant d'arriver au village des Eysies, et depuis le petit village de Laugerie-Haute jusqu’au delà de Gorge-d’Enfer, la rive droite est dominée par des escarpements de rochers qui surplombent et qui ont plus de 50 mètres de hauteur. Au pied de ces rochers majes- tueux, se voit un talus, plus ou moins large, élevé de douze mètres au maximum au-dessus de la rivière qui, en face du lieu dit Laugerie-Basse, est à la distance de soixante-dix mètres. Pendant 500 mètres environ, ce talus présente d'innom- brables traces du séjour de fee il est, en majeure partie, constitué par des accumulations de débris decuisine et de débris d'industrie. Mais sur les points nombreux qui n'ont pas été abrités par le surplomb des rochers, et là où des sources ont entretenu une trop grande humidité, les ossements sont à peu près pourris, et les dents et les silex seuls attestent la richesse des lieux d'occupation, des foyers que décèle aussi la coloration toute spéciale des terres. Dans l'endroit le mieux préservé de cette immense sta- tion, MM. Lartet et Christy et MM. le marquis de Vibraye et Franchet, avaient exécuté jadis, on le sait, des fouilles fructueuses. Depuis six années, M. Massénat, notre con- frère, poursuit, sans se lasser, des recherches lentes, mais complètes. L'époque à laquelle lhomine a commencé à vivre, d’une façon plus ou moins temporaire, sous les escarpements de Laugerie, est facile à déterminer. Dans la grotte du Mous- tier (à haie kilomètres en amont, à 200 mètres de la rivière, à 24 mètres du lit actuel), la couche archéologique, renfermant des silex semblables à ceux d’Abbeviile et de — 219 — Saint-Acheul et les ossements d’une faune antérieure au grand développement du renne, se trouve divisée en deux par un lit de sable dont la nature et la position démontrent qu'il a été déposé par les eaux. La vallée n'avait pas alors sa profondeur actuelle, car on ne saurait admettre une crue qui remplirait son large lit jusqu'à 24 mètres de hauteur. D'ailleurs, des faits nom- breux établissent que les cours d’eau ont creusé leur Hit précisément pendant cette période que l'industrie et la faune de la grotte du Moustier caractérisent tout-à-fait. Quand les hommes y séjournaient, la Vézère coulait à pleins bords et creusait la base des rochers verticaux de Laugerie. Peu à peu, son volume diminua, et la vallée, à la fin, devait avoir à peu près sa physionomie actuelle, lorsque des groupes de sauvages jugèrent l'endroit propice et vin- rent s'installer dans les anfractuosités récemment creusées, à Laugerie-Haute. Sur ce point, en effet, M. le marquis de Vibraye a fait des fouilles considérables , et il a pu recueillir, en plus grand nombre que les autres explorateurs, des silex taillés bien caractéristiques. Ce sont des têtes de lances soigneuse- ment taillées à petites facettes sur les deux côtés, en géné- _ ral de grande dimension. Vous pouvez voir à notre Muséum la jolie série donnée par M. de Vibraye. Ces pointes pro- cèdent directement des types plus anciens, tels que ceux du Moustier : on les a retrouvées sur d’autres points, à Solutré (Saône-et-Loire) principalement, et tout démontre qu’elles caractérisent, en France et en Belgique, l’industrie d’une période assez courte, mais encore mal connue, que M. de Mortillet a placée avant la dernière époque des cavernes. En effet, MM. de Vibraye, Franchet, Massénat et moi- même, nous avons noté que les couches ossifères qui, à Laugerie-Haute , renferment ces silex lancéolés, sont infé- rieures aux dépôts qui nous donnent les vestiges d’une faune peu différente, sans doute, mais d’une autre indus- trie : celle de la Madeleine, des Eysies, de Bruniquel , de — 222 — blocs ; quelques-uns avaient 5 mètres de longueur et 2 de largeur et d'épaisseur ; pour parvenir au-dessous d'eux , il fallut reprendre les fouilles à une certaine distance” et faire une étroite galerie; pendant ce travail, on n’a pas cessé de recueillir des ossements, des bois de rennes, et de nombreux silex taillés. Quand cette galerie est arrivée sous les grands rochers indiqués plus haut, nous avons constaté qu’ils recouvraient une couche de 1",20 d'épaisseur, très-riche en objets et dans laquelle on remarquait des lits de terre brûlée et de charbons. L’horizontalité de ces couches avait été dérangée par le choc et le poids des rochers; mais c’est : encore au-dessous d'elles que nous avons découvert un: squelette bamain. | La tête était au nord-est du côté de la Vezère, les pieds au sud-ouest vers le rocher. Il était allongé sur le côté et tout-à-fait accroupi: la main gauche sous le pariétal gauche , la droite sur le cou; les coudes touchant à peu près les genoux, un pied rapproché du bassin. Les os étaient presque en place; il y avait eu à peine un très- léger tassement des terres : mais la colonne vertébrale était écrasée par l’angle d'un gros bloc, et le bassin était brisé. Nous avons pensé que nous avions devant nous les restes d’une victime d'un éboulement. Elle avait été ren- versée sur le foyer et s’était en vain repliée pour éviter la chute des rochers; mais finalement, ceux-ci et la terre qui accompagne toujours un éboulement l’avaient ensevelie ; nous ne pouvons admettre que l'on puisse ici parler de sépulture : le squelette offre tout-à-fait la situation d'un homme renversé, effrayé, portant ses mains à sa tête, et se faisant instinctivement aussi petit que possible. Inutile d’insister, Messieurs, sur l'attention que nous avons mise à étudier scrupuleusement la situation des objets qui accompagnaient ces précieux débris,-qui, par malheur, n’ont pu être retirés qu’un à un, les moyens que nous avons essayé d'éfnployer ayant tous échoué. —— 223 — Nous avons trouvé une vingtaine de coquilles disséminées par couple sur le corps : deux couples sur le front, un près de chaque humérus, quatre dans la région des genoux, deux sur chaque pied. Il faut donc écarter l’idée d’un collier ou de bracelets. Ces coquilles, qui étaient percées par une entaille , devaient orner un vêtement. M. de Mortillet a bien voulu les étudier. Voici ce qu'il en a dit à la Société d’Anthropologie de Paris, le 4 avril dernier : « J'ai eu entre les mains deux de ces coquilles apportées à Paris par M. Massénat, qui m'a chargé de les détermi- ner. Cest ce que jai fait avec le bienveillant concours de MM. Fischer et Rousseau. Ces deux coquilles sont des cyprées, plus grosses qu'un œuf de pigeon. Elles appartien- nent incontestablement à la faune de la Méditerranée. L’une d'elles est, sans aucun doute, la Cyprœa pyrum de Gmelin, Cypræa rufa de Lamark. L'autre est la Cypræa lurida de Linné, un peu plus globuleuse que la première, et s’en dis- tinguant par les dents de l'ouverture. M. Rousseau et moi n'avons point hésité dans cette dernière détermination. Mais comme l’individu apporté par M. Massénat est jeune et n’a pas de dents columellaires bien formées, M. Fischer a fait quelques réserves. » Ges cyprées, par suite de leur long enfouissement et _par l'effet des actions atmosphériques, sont maintenant mates et incolores ; mais à l’état frais elles ont eu, comme toutes les espèces du genre, un grand poli et un vif éclat. L'une d'elles, la pyrum, était d’un beau fauve roux, comme Pindique le nom de Lamark, rufa. L'autre était gris de sou- ris. Ces coquilles devaient donc constituer une fort jolie parure. » Ce n’est pas la première fois que les grottes et abris de la commune de Tayac ont fourni des cyprées méditerranéennes. On peut en voir une figurée dans les planches du Dictionnaire des Gaules, provenant des fouilles exécutées par Edouard Lartet et Henri Christy. C'est, autant qu'on peut en juger par le dessin, une Cypræa lurida. Il est fort intéressant de ren- — 92 — contrer dans la vallée de la Vézère, en plein versant océanien de la France, et même à une faible distance du golfe de Gas- cogne, des coquilles incontesiablement méditerranéennes. L'Océan, dans les parages français, ne contient, en fait de cyprées, que des espèces toutes petites, de la grosseur d’un pois à celle d’un haricot au maximum. Les habitants des cavernes des bords de la Vézère avaient donc des relations avec les côtes de la Méditerranée. Ils en avaient aussi avec celles de l'Océan, comme le prouvent les coquilles recueil- lies dans la sépulture de Cro -Magnon, également commune de Tayac. Il y avait là de nombreuses ZLültorina littorea, Linné, coquille abondante sur les côtes de l’ouest de la France, et qui fait complètement défaut dans la Méditer- ranée. » Je crois que M. de Mortillet se trompe quand, après avoir dit que les populations de l’époque de la Madeleine étaient éminemment nomades et voyageuses, et ne méritent pas le nom de troglodvytiques que plusieurs personnes leur ont donné, il ajoute qu’ « elles campaient seulement dans les cavernes et n’y passaient tout au plus, dit-il, que certaines saisons. Cela serait confirmé par les débris de nourriture ; ils se rapportent presque exclusivement à deux ou trois espè- ces par station : ce sont les espèces qui occupaient le pays à la saison où l'homme ÿ venait. » Or, je conteste ces asser- tions. M. de Mortillet, si prudent d'ordinaire, si soucieux d'appuyer les opinions sur des faits, me semble s'être départi cette fois de ses habitudes. La faune est beaucoup plus variée qu'il ne le dit à Laugerie-Basse et dans les stations similai- res, et rien ne permet de supposer que ce soit la faune d'une seule saison. Je dois ajouter que des débris de nourriture ou des rejets de fabrication ne peuvent pas servir de base pour établir une proportion quelconque dans la faune d’un pays. Les animaux ne manquaient pas, l’homme avaitle choix ; et dans les lieux d'habitation ou de stationnement nous trouvons en majorité les ossements des espèces préférées, soit parce que NAS NN ANNEE NS NN NS NN NN NN NN N : NN NN NN NN NK\ K NN NN SANS la grotte d' ir A. Intérieur 2e la Carile où l'on a Lfiqure 3 uelelles . B. Liber AlE ou de lrouvaienten gages quelques ofjements Aumaindiy Si tulle bois derennes ele. D. Salus. E. rien foyer E. Tlace Rs dalle. . Cailloux roulés. . Limon fluviatile. Limite supérieure de l'ar- sile-à-blocaux qui se for- ma après l'établissement de la sépulture. Dalle fermant [a sépulture. . Salle aux festins funé Fat . Foye A Roe formant les parois de ja caverne. Coupe de la Grotte TR Caleaire crétacé. fermant L butael: Abri. LL. Salusenlevé.. K. Cloulis calcaires. b.et d. sépulture. e,e, Wocs boules. J Lit de graviers, lrace à peétre-vrétile dur fe YETT H .CenDres foyers : x K< st KES Us NNAENNAE VMARNNNE AGENT ARE RE NAS Sn NN SANG NES. NUNSeS AN \ SN KR NES \ * NE NA. Guckhe 2e limop entremelée + de petiles couches charlonnaides. B. Tice du Squelette etde lo léle 2 enfarr. C. Luce de la LEE de via! - +1 CSATE D. Guche notre ofiifere- —. 5 Ti EE, palmé, qui existent à Luchon, se trouvent également à Ax.» (V. l'ouvrage cité plus haut, p. 164, au renvoi). M. H. Macnan voit dans cette communication une nouvelle preuve de l'identité des terrains de même étage à des distances considérables. Le Laurentien des Pyrénées est identique à celui des Etats-Unis. Séance du 15 mai, Présidence de M. le Dr Gournon. La Société reçoit : Valeur comparative des eaux minérales de la France et de l’Al- lemagne, par le D: F. Garrigou. (Paris , 1871.) Ophites des Pyrénées, leur origine sédimentaire et métamorphi- que, par M. F. Garrigou. Ages de l'ours, du renne, de la pierre polie et des dolmens dans le département du Lot, par MM. F. Garrigou et H. Duportal. — 262 — Note sur le niveau des cavernes, par M. F. Garrigou. La sulfhydrométrie et ses diverses applications, par le même. Remarques sur la sulfhydrométrie, par le même. Note sur la sulfhydrométrie et sur la formation du sulfure de sodium. I. Théorie de la formation des eaux sulfureuses chaudes. I. Etude du terrain stratifié, dit Laurentien, dans l'Ariège ou les autres parties des Pyrénées. Id. Divisions fondamentales des eaux thermales des Pyrénées . Hd. Habitations lacustres du Midi de la France, région pyrénéenne. Id. Monographie de Bagnères-de-Luchon, par le même auteur. T. ler, 1872. [n-8°, 342 p., 4 planches. Le Président annonce deux présentations. M. Gaston de Malafosse donne connaissance à la Société du catalogue de 70 espèces de mollusques terrestres et fluviatiles des Hautes, Basses-Pyrénées et des Landes, par M. le général pe Nan- soury, membre titulaire à Bagnères-de-Bigorre (publié, p. 76). M. le Dr GarriGou, ayant fait remarquer l’importance des cata- loyues pour la question de l’espèce, M. le D' Gourpox entre dans quelques détails sur l’état de la science, au sujet des hybrides, de leur fécondité, etc: M. G. DE MALAFOSsE, à ce propos, donne quelques renseigne- ments sur la récolte des mollusques dans la dernière course de la Société ; il a été recueilli un certain nombre d'espèces, et entr'au- tres quelques échantillons d’hélix hybrides tenant le milieu entre l’hortensis et le nemoralis. M. Fécrx ReGnaucr communique à la Société le résultat de ses explorations dans quelques grottes de l’Ariége : | Grotte de Niaux. — La grande et belle grotte de Niaux, située à 4 kil. de Tarascon, se compose d’une série de vastes couloirs et de chambres spacieuses, armées de stalactites, en grande partie rem- plies par du sable et des cailloux roulés. Les fouilles sont impossi- bles, vu la difficulté d'arriver au sol primitif. Grotte de Massat. — La grotte supplémentaire de Massat, à 5 kil. de Massat, sur une montagne appelée le Quaire, se compose — 263 — de deux ouvertures reliées entre elles par un couloir. Cette grotte est assez spacieuse et s’enfonce profondément dans la montagne. M. Régnault rappelle les fouilles qui ont été faites par M. Fon- tan et le D' Garrigou. Quant à lui, il a pu recueillir, dans le cou- loir qui sert de communication aux deux entrées, de nombreux fragments d’ossements d'ours (ursus spæleus), et, parmi les espèces qui ont pu être déterminées, le félis spelea, le boa, l’hyène, le mou- ton, mêlés à des fragments de poteries anciennes. Grotte d’Auber. — Pour arriver à la grotte d’Auber ou Tai del Debrembéré (trou de l’oubli), il faut suivre la rive gauche du Lez, on traverse Lédur et l’on arrive (5 kil.) au village d’Auber, célè- bre par ses antiquités romaines. En trois quarts d'heure de marche, sur les flancs de la montagne, on a atteint l’entrée de la grotte. A l'Est se dresse la haute montagne de Surroc (912 m.), coupée du côté de Saint-Girons par des escarpements à pic. La grotte d’Aulus est une des plus élevées des Pyrénées. En entrant, une vaste salle ayant 25 à 50 mètres de large sur 5 à 6 de haut se présente au visiteur. Le sol est parsemé, à certains endroits, de blocs de toute dimension amoncelés en désordre. Cette pre- mière salle va en se rétrécissant pour se fondre en couloirs, qui donnent accès à d’autres vastes excavations. M. Régnault a reconnu quelques légères traces de fouilles, mais elles ne paraissent pas avoir été profondes. | A 40 cent. environ, dans une terre noire à cailloutis roulés, M. Régnault a pu recueillir des mâchoires d’ours taillées, ainsi que des ossements du même animal également cassés par un instru- ment tranchant; des vertèbres d'ours, de cheval, de bœuf, de nombreuses dents d’ours et de ruminants, etc. Grotte de Montesquieu-Avantés. — Cette grotte, que l’explora- teur a déjà décrite à la Société d'histoire naturelle et à la Société d'anthropologie, est située près du petit hameau de Montesquieu- Avantés, à 5 kil. de Saint-Girons, près les bains d’Audinac. Les espèces recueillies par M. Régnault et M. Seignette, principal du collége de Foix, sont : l'ours (ursus spæleus), le renne, le cheval en quantité, le bos, le mouton, une grande quantité d’ossements humains mêlés à des silex fortement taillés. Les fouilles dans cette grotte devraient être continuées. M. Régnault fait don à la Société, pour le Musée, des objets qu’il a pu recueillir dans les différentes fouilles qu’il vient de faire. — 264 — M. Trurar prend la parole au sujet de cette lecture. Il remercie M. Régnault du don qu'il à fait à la société pour le musée, qui ne possèdait rien de Montesquieu-Avantés. Au contraire, il est très riche en ossements d’Auber. Dans cette grotte, en effet, comme dans tous les gisements d'ours on a recueilli des mâchoires brisées, que plusieurs observateurs ont cru longtemps et peut-être croient encore cassées par la main de l’homme. M. Trutat ne partage nul- lement leur manière de voir, et, tout en se tenant à la disposition de la Société pour le cas où elle désirerait qu’un débat contradic- toire eût lieu devant elle sur ce point, il fait observer que dans les grottes à ours, assez nombreuses, ces mâchoires cassées seraient, - à la presque unanimité des cas, la seule preuve, l’unique témoi- gnage de la présence de l’homme ; que l’on ne trouve pas les ins- truments qui auraient pu servir à casser ces mâchoires, que le but de ces cassures ne se comprendrait pas; il ajoute que, pour lui, ce sont les carnassiers qui ont brisé ces mâchcires, la hyène surtout ; il a retrouvé sur un grand nombre d’échantillons les traces irréeu- sables de leurs dents, et il les soumettra à la Société si elle le désire. M. DesyariNs donne les détails suivants sur trois plantes trou- vées aux environs de Toulouse. 40 Allium roseum, L. Cette plante a été trouvée à l'embouchure du Touch, elle est là subspontanée, car c’est, parait-il, le bota- niste Moquin-Tandon qui l’a plantée en cet endroit, il y a une vingtaine d’années. Elle est commune dans l’Aude. 2 Lychnis diurna, Sibth. Trouvée sur les bords du canal du Midi, en face la Cité ouvrière. Cette plante, très-commune dans les Pyrénées, est très-rare dans nos environs. 5° Glyceria spectabilis, Mert. et Koch., Poa aquatica L. que j'ai trouvée, il y a dix ans, sur les banquettes du Canal du Midi, entre le pont Matabiau et celui des Minimes. Il n’y avait qu'un seul pied lorsque je l’ai découverte ; aujour- d’hui, elle s’étend sur un espace de 4 à B mètres. Je ne l’ai jamais récoltée en fleurs, parce qu'elle est toujours coupée, quand on procède au nettoyage du canal. Je n’ai pu en avoir des panicules qu’en la cultivant à l'Ecole vétérinaire où j'ai obtenu de très-jolis échantillons. Cette plante, très commune dans l’Aude, a dû être apportée là par graines, par les eaux du canal. — 965 — Séance du 25 mai 1872, Présidence de M. le colonel Belleville. La Société reçoit : Bulletin de la société des sciences historiques et naturelles de PYonne (1871), 25e vol., le 5 de la 2e série. Mémoires de la Socicté des sciences physiques et naturelles de Bordeaux.T. I à VII (avec quelques lacunes). De la part de M. Boislon, des ossements des phosphates du Tarn-et-Garonne. De la part de M. Bidaun, une hache en pierre des Caraïbes et deux fragments d’ossements fossiles des Antilles. Sont nommés membres titulaires : M. Alfred de Saint-Simon, à Toulouse, présenté par MM. Nou- let, Gaston de Malafosse et Magnan. M. Paul Gay, à Villefranche (Haute-Garonne), présenté par MM. Magnan et Cartailhac. La Société s'occupe de plusieurs affaires d'administration. Séance du 29 mai. Présidence de M. le Dr Gourdon. La Société reçoit : Etude géologique ct chimique des eaux sulfureuses et bitumi- neuses de St-Boes, par le Dr F. Garrigou. Pau 4872. | Bulletin de la Société polymathique du Morbihan, 2 sem. Année 1871. Actes de la Société linnéenne de Bordeaux, 1. XXVII à XXVIIL, 1872. Annales de la Société littéraire et scientifique d’Alais, année 1871, 3° bull. Une lettre de M. de Folin remerciant la Société de sa nomination et annonçant un travail. — 266 — Une lettre de M. Prosper Huguet, sec. gén. du congrès scient. de France, sollicitant des adhésions pour la session de ce congrès qui doit avoir lieu cette année à Saint-Brieuc et annonçant deux volumes. De la part de M. le colonel Belleville, un manuscrit ayant pour titre : Quelques mots sur la Nouvelle-Calédonie et sur l’état actuel de cette colonie, 1863, par M. le capitaine Pierron, commandant la 4re compagnie disciplinaire des colonies, 90 p., in-80. M. Car- tailhac est chargé de faire un compte-rendu de cet ouvrage qui est précédé d’une note de M. le colonel Belleville. La Société adresse ses remerciements à ce dernier. M. Macnax offre de la part de M. Delprat, briquetier, à Tou- louse, un fragment de maxillaire inférieur d’anthracotherium minimum, provenant du miocène inférieur de Bessens, près de Dieupentale et avec lui une vertèbre axis de rhinocéros. L’anthracoterium minimum et la vertèbre ont été trouvés dans des arènes renfermées dans des poches du miocène. Avec ces débris, est un canon postérieur de ruminant. On sait que Cuvier créa le genre anthracotherium sur des ossements provenant de Hautevigne (Lot-et-Garonne) et que M. Aymard l’a retrouvé dans le tertiaire du Puy. M. Magnan fait remarquer que nos terrains de Toulouse sont du miocène moyen; l’inférieur se montre à Dieu- pentale et le supérieur à Sansan. Il serait très-important d'explorer soigneusement le gisement de Bessens qui semble riche et pourrait donner quelques ossements intéressants de l’anthracotherium dont on ne connaît jusqu'ici, par un singulier hasard, que le maxillaire inférieur. La découverte de la vertèbre de rhinocéros offre ceci d’intéressant que jusqu'ici les restes de cet animal n’avaient pas élé rencontrés à cette altitude moyenne (110). Séance du 5 juin 1872. Présidence de M. le Dr Gourpox. La Société reçoit une lettre de M. Frossard, président de la . société Ramond, annonçant que cette société a reçu les bulletins — 267 — qui lui avaient été envoyés et nous fera parvenir toutes ses publi- cations. Sur la proposition de M. Magnan, la Société décide que l’excur- sion à Bouconne se fera le dimanche 16 juin M. le colonel Belleville fait don de deux poissons fossiles pro- venant de l’éocène d'Aix. Des remerciements sont adressés au donateur. M. Lacroix offre au nom de l’auteur le Catalogue des oiseaux observés dans le département de la Loire-Inférieure, par M le docteur Blondin (Nantes, 1864). Il fait remarquer la parfaite coïncidence de méthode qui existe entre cet ouvrage et le catalogue des oiseaux de la Haute-Garonne qu'il a récemment présenté à la Société. À ce propos, 1l insiste sur l’utilité des travaux de ce genre : ce n’est que grâce à eux que l’on pourra élucider les points encore obseurs de l’ornithologie, points bien plus nombreux qu’on ne le pense généralement. M. Lacroix signale plusieurs de ces questions encore douteuses, de ces aspects de la science qui offrent à l'observateur un vaste champ à explorer. Il entre dans quelques détails au sujet des migrations de certains oiseaux, des diminutions ou réapparitions brusques de quelques espèces. Plusieurs membres présentent des observations où font des questions à ce sujet. M. le président fait remarquer tout l'intérêt qui s'attache aux questions générales du genre de celles dont M. Lacroix vient de nous entretenir. M. le D' Gourdon croit qu’il serait bon qu’à l’avenir, imdépen- damment des travaux spéciaux portant sur des faits nouveaux et souvent peu accessibles à tous, l’on s’occupât dans les séances de ces aperçus d'ensemble, de ces vues sur l’état actuel de chacune des sciences naturelles. Il pense que chacun y trouverait son avantage et que l’on attirerait ainsi ceux qui, sans s’adonner à une étude spéciale, tiennent néanmoins à ne pas demeurer étrangers aux sciences naturelles et à leurs progrès. Une discussion s'engage, à ce propos, entre la plupart des membres de la réunion. La proposition de M. Gourdon est adoptée. . — 268 — M. DeszarpiNs annonce qu'il vient de découvrir aux environs de Toulouse, sur la rive du canal, le ranunculus muricatus (L.), espèce du littoral méditerranéen dont la présence dans notre région est, sans doute, due à un fait accidentel. Séance du 11 juin. Présidence de M. le D' Gournon. La Société reçoit : Contributions pour servir à l'histoire naturelle des éphémérines, n° 5. Nôte sur la prétendue crustacée dont Latreille a fait le genre prosopistoma, par Emile Joly, membre de la Société. (Ext. des Mém. de la Soc. des sciences naturelles de Cherbourg), in-8&, 10 p. Annales de la société d’agriculture, industrie, sciences, arts et belles-lettres de la Loire,.tome XV, 1871. Saint-Etienne, in-8°, 1872. Mémoires de la société d’émulation de Montbéliard, 2° série, fer vol., 2e vol, 4re livr. Soc. il d'agriculture, d'horticulture et d'acclimatation de Nice, année 1870, 1, 38 à 46° bulletin, in-8&. Association nique de France, bulletin hebdomadaire, n° 240, 9 juin 1872. Annales de la société d'agriculture, sciences, arts et commerce du Puy, tome XVII à XXX, 1852-1869, 14 ol in-8e, Voyage aux Pyrénées, par H. Taine, Paris, 1867, donné par M. le colonel Belleville. À Connaissance des plantes les plus souveraines pour la conserva- tien de la santé, par Alp. Rouget, Toulouse, 1867, in-12( Don du colonel Belleville). La photographie mentale des esprits dévoilés, par cle: même (Don de M. le colonel Belleville). Réapparition du genre arethusina. — Faune silurienne des environs de Hof, en Bavière, par J. Barrande 1868, et Défense des colonies, par le même, 1870, 2 brochures in-8. (Don.de M. E.. Cartailhac). "269 — De la part de M. Gantier une série d’ossements et de silex recueillis par lui, en 4870, soit aux environs, soit à l'intérieur de la grotte même d’Aurignac. \ p sujet, M. Emile Cartailbac fait quelques observations, et rappelle la note qu’il a publiée en collaboration avec M. Trutat sur celte station classique. Au nom de M. Trutat absent, il est donné lecture de la lettre que celui-ci a envoyée à M. Gervais au sujet des phosphates (publiée p. 83). Le Secrétaire général annonce que M. Jules Peyre, donne à la Société les AU de son fils, notre regretté confrère, plus de quarante. oiseaux ou mammifères montés, choisis dans le petit musée qu'il avait formé, un herbier des plus remarquables, et plus de cent volumes sur la botanique. La Société exprime à M. Jules Peyre ses plus vifs remerciments. Séance du 26 juin. Présidence de M. le D' Gourpox. La Société reçoit : En don de M. E. Cartailhac, le Bulletin de la Société des natu- ralistes de Moscou, 1869-1870, nos 3 et L. Une demande d'échange de la part de la Société entomologique de Belgique, qui envoie le tome XVe de ses Mémoires. De la part de M. A. de Saint-Simon, notre confrère, les ouvra- ges suivants : Nouvelles observations sur les Pomatias du Midi de la France, par A. de Saint-Simon. Toulouse, 1868. In-8°, 15 p. Observations anatomiques sur quelques Pomatias, 1867, In-&, 16 p. Mémoires sur les Pomatias du Midi de la France. Toulouse, 1867. In-8°, 16 p. Descriptions d'espèces nouvelles du genre Pomatias suivies d’un aperçu synonymique sur les espèces de ce genre. Gr. in-8°, 28 p. Paris, 1869, Note sur le Rumina decollata. Toulouse, 1870. — 2170 — Descriptions d'espèces nouvelles du Midi de la France. Miscellanées malacologiques, 1848-1856, 41. re et 2 décades. Congrès scentifique de France, 22e session, 1856. Montpellier, 2 vol. in-8o. Rivista scientifica industriale da G. Vimercati Firenze , 1872. Programme. Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées-Orienta- les. 10 vol. (Don de M. Marquet.) Société académique des Hautes-Pyrénées. 1853 à 1870. 10 tomes. M. le colonel Belleville communique un rapport sur l’état de notre bibliothèque et offre à la Compagnie les ouvrages suivants : Les glaciers, par Zurcher et Margollé. Paris, 1870. In-18. L’eau, par Gaston Tissandier. Paris, 1869. In-18. Les merveilles des fleuves et des ruisseaux, par C. Millet. Paris, 1871. In-18. Voleans et tremblements de terre, par Zurcher et Margollé. Paris, 14872. In-18. Les météores, par les mêmes. Paris, 1869. In-18. Histoire de l’homme, par A. de Quatrefages. Paris, Hachette. In-18, 5 brochures. 1868. L'année scientifique et industrielle, par L. Figuier. In-12. Paris, 1872. Les insectes, par Loue Figuier. Paris, in-80. 4869. Les poissons, les reptiles et les oiseaux, par le même. In-&. Paris, 1869. Les mammaféres, par le même. Paris, 4869. In-&o, L'homme primitif, par le même. Paris, 4870. In-8o. Mœurs et coutumes de l'Algérie, par M. le général Daumas. Paris, Hachette, 1858. In-12. Dictionnaire des lettres, sciences et arts, par Bouillet. Nouvelle édition. Grand in-8°. Paris, 1872. Au nom de la Société, M. le Président exprime à M. le colonel Belleville toute sa gratitude pour les soins qu’il a bien voulu don- ner à l’organisation de notre bibliothèque augmentée par ses dons M généreux. ‘+ Le Président annonce deux présentations. MM. Gourdon, Marquet et Desjardins rendent compte de l’ex= cursion qui vient d’être faite dans la forêt de Bouconne. = OM. = M. G. ve Mararosse fait passer sous les yeux de ses confrères l'enanlofungia Papareli, de Fromentel. (Voir ci-dessus, page 49.) Séance du 5 juillet, _ Présidence de M. le colonel BELLEVILLE. La Société recoit : Association scientifique de France. Bulletin hebdomadaire, n° 243. , Mémoires de la Société des sciences de Cannes, 2% vol., 1872, M.E. Carrarcnac donne lecture d’un Mémoire de M. le Dr Broca sur la déformation toulousaine du crâne. Il présente ensuite quel- ques observations. Ainsi, le savant anthropologiste croit que l’usage de la coiffure qui déforme le crâne des Toulousains modernes remonte aux temps anciens. Cependant , les crânes du 16° et 17e siècle recueillis sur plusieurs points de la ville semblent indiquer jusqu'ici que le mode et l’emploi de ce bandeau est postérieur à ces dates. La question sera examinée avec précision. MM. Bidaud, Delisle, Trutat prennent la parole sur le même sujet. 44 juillet, Interprète de notre douleur, M. le colonel BeLLeviLce déplore en quelques mots la mort fatalement inattendue d’Hevrr MAGnan, membre fondateur de la Société, si savant et si zélé, estimé et affectionné par tous. En signe du deuil profond qui est dans nos cœurs , la Société ne tient pas séance. Séance du 19 juillet. Présidence de M. le D' Gourpon, La Société reçoit : Bulletin de l'association scientifique de France, n°° 244 et 245. 2e — Mémoires de l’Académie impériale des sciences, belles. lettres et arts de Savoie. 2 série, tome VIII à XL. Huit cartes de l’Atlas météorologique annuel de l'observatoire de Paris. Congrès archéologique de Montauban, Cahors, Guéret. 1866. 4 vol. in-8°. Don de M. le colonel Belleville. MM. A.de Saint-Simon, Bidaud, Gourdon, lisent des comptes- rendus de plusieurs ouvrages reçus par la Société. | M. Trurar donne quelques renseignements sur la géographie ancienne de la côte d’Aigues-Mortes éclairée par les données de la géologie ; il dit, par exemple, que les collines situées entre la ville et la mer sont formées de dépôts quaternaires, et que c’est le « canal du roi» qui a permis à saint Louis de s’embarquer dans la ville même. Séance du 25 juillet. Présidence de M. le Dr Gourpox. La Société reçoit : Un bon de la Société des sciences, agriculture et des arts de Lille pour retirer le volume 1871. Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne: Année 1869. 23° vol., 1° semestre. Mémoires de la Société De de Maine-et-Loire. Vol, 1 à 9,13 et14, 17, 25 et 26. Bulletin de l’association scientifique, nos 247 et 248. Bulletin de la Société d'anthropologie de Parts; der, 2eljet “3° fascicule. Bulletin de la Société d’études scientifiques d’ Havèrél n° 4. 1872. MM. Regnault, Belleville et Cartailhae lisent des rapports sup plusieurs publications envoyées à la Société. Le Président entretient la Compagnie de diverses affaires d’ad- M ministration intérieure. 4 Les séances de l’année académique 1871-1872 sont terminées. Le Secrétaire général, E. CaRTAILHAC. __ TABLE DES MATIÈRES. MÉMOIRES. Pages. Recherches sur le lias de la région de Marvejols (Lozère), par D DA MALAFOSSE. 7... 2... . : . , | . , ... 1 Catalogue des insectes coléoptères du Languedoc, 2e partie, par 5 LU 50 De l’existence du Betula pubescens (Ehrh) dans le département 0 Dar M le prolessenr CLOS. 27 +, ee, 67 Note sur les essais sulfhydrométriques faits à Ax, en 1871, par OP COMEDIE "0.1. ue 0 a, 68 Remarques sur les gisements de chaux phosphatée des cantons de St-Antonin et de Caylus (Tarn-et-Garonne), par M. E. TRUTAT. 72 Catalogue de mollusques terrestres et fluviatiles recueillis dans le département des Basses-Pyrénées, des Hautes-Pyrénées et des | Landes, par M. le général C. DE NANSOUTY. . . . . . . . . . . 76 Deuxième note sur les dépôts phosphatés du Quercy, par ns Le 83 Etude sur les filtres et sur l'eau des fontaines de Toulouse, par A RAIN LD Le te Loge 9 à « « pee 87 Un squelette humain de l’âge du renne à Laugerie-Basse (Dordogne), TE CABTAILHAG.. 2. .. : . 4, à : . . : 204 PROCÈS-VERBAUX. Séance de rentrée du 17 novembre 1871... ... ...... 227 Sur l’ancien lit de l’'Agoût et le quaternaire des bords de la Mon- tagne-Noire. — Discussion entre MM. le Dr JEANBERNAT et A NUE fol etie lien pans ot 5 ne 2 MS REC ee: 1. 229 Séance du 17 décembre.. . . . . .. 5 LCR TET 2 282 D' CLos.— Lettre accompagnant l'envoi a au Ministre de la pétition pour l’enseignement de l’histoire naturelle. . . . . . . . .. . 232 MOMENT EL) LS à Late one ce rate dat eee à 233 — 274 — Pages Conservation des plantes. — Infusoires et sulfhydrométrie des eaux d’Ax. — Phosphorite de Caylus. E. Fiznoc. . . . . : . . tra Séance du 29 décembre. - . :. «253. 2 RU TRUE 235 À propos d’une note de M. Alem, sur la géologie du col de Bazert, de Labroquère, etc. H. MaGnan. . . : . . . . . . .. Haüerile et wavellite accompagnant les phosphates de chaux. CHARTE LE. CPS NUE Tee Aa ne te UE SOPTOIUIRRES 2 Sur Ta maturation des fruits..E: FBnoL ii 4.2 Get Re "de Sur l’ophite des Pyrénées et des Corbières. H. Macni, Arséniure de fer du port de Salau (Ariége). E. Fiznor. . . . . . Séance du 12:janvier 1872: EE DORE DOS Élections NS 0 NE EL APS SOUS OCR Séance "du 3 févner. 117.7. 0 CANON NA HR Sur les jardins des environs de Cannes. — Lettre de M. Fieuzet. . Séance: du: février. à... 1e Te Re MONO SRIP IRC ES Sur un picus minor lué aux environs de Toulouse. H. Carmes. . Schistostega osmundacea. E. DESJARDINS. . . . . . . . +. ).. Séance du 25, février, "5 NME ME TRE Sur l'Atlas physique de la France. E. Carrie ., HF. PRIT TORS Sur un échantillon de klaprothine du Bergougnon (Lozère). Séance du 8 mars. à à 0. 0e 7e Te SEP ERR ONE " Sur certaines pegmatites et tourmalines de l'Ariége. B. CHeLLE. . Séance du:90 MArS D 4 “se = 6 ve ee SON ON USINE Sur les roches volcaniques de la région de Marvejols. G. DE MACATOSSE. ne m5. 5 0 eee ee OUT UN 1 Sur les basaltes de l’Ardèche. H. Magna. . . . . . . 1,18 40 Transformation du primula grandiflora. E. DesarDiNs. . . . . Échantillons minéralogiques recueillis à Montréjeau. HuTriEr. . . Séance du 27 mars... ‘5. rod nr MU be 54 où da Séance du F0 arr eS C AN eR MAS . 252 Séance: du 17 .avnit..: MAIRIE 250, à À propos d’une Note de M. Leymerie « sur un trait particulier de la constitution des Pyrénées. » H. MaGNan. . . . : . . .. Sur une excursion à Bayonne. E. TRuTAT, G. DE MALAFOSSE. . . Séance. du. 24" Gun, 7. 7 PR ETIE es MU s Sur les terrains secondaires et primordiaux du Midi. H. MaGNAN, De GanRIGOUs . 51,10 D. 20 NT PIONEER of Sur un ouvrage de M. Jeanjean: « Les Cavernes des Basses- Cévennes. » L. DE MALAFOSSE. . . . . . . FRNTE à 10 Sur la grotte de Crussoles (Drôme). Dr GounsoN; E. Castaitnans 257 Pages. Séance ae ie do nt AS Sur les phosphate et leur origine. E. Canne E. TaUTAT, um et ave, Se NAN TOeSS Sur les oiseaux de la Haute-Garoune. A. Lacroix. . . . . . . .. 258 Séance du 8 mat. . . . 3. . . . À 4 HO AA ARE CE D PA 259 Sur divers minéraux à base de lithine, d'Ax et de Luchon a ao poto no + 07209 Observation sur la communication précédente. H. MAGNaAN. . . . 261 D su, + :11002067 Sur des Hélices, recueillies à Saint-Girons. G. DE MALAFrOSSE. . . 262 Explorations dans quelques grottes de l’Ariége. F. REGNAULT. . . 262 Observations sur la communication précédente. E. TRUTAT. . . 264 Sur trois plantes des environs de Toulouse. E. DeszanDins. . . . 264 AR OR AMAR ER ui os. 265 M EL RO SN LL IN DUR. non, 265 Sur deux fossiles du miocène de Dieupentale. H. MaGnan. . . . 266 Sur les travaux d'ornithologie. A. Lacroix. . . . . . . . . . . . 267 Ranunculus muricatus trouvé aux environs de Toulouse. — ONE RP BD RONA nt 268 M AO EAU ES) En ER ue. 268 Den dUAMijuin, 1 amis za LUN CT) 2h20 EL AT Ke late nu AG re ef 443 271 À propos d’un Mémoire de M. Broca sur les crânes toulousains. E. CARTAILHAC. CP, UE RAT LES REA Re 271 A RTL nn a Un ile. à 271 le nc SN DOM. \ MMA Sur la géographie d’Aigues-Mortes. E. TRUTAT. . . . . . . . .. 272 Mid 20 Juillet : sou. co 2 Hoi : - 272 FIN DE LA TABLE. — 216 — ERRATA. | \ Pag. 14, lig. 23, au lieu de : lutter, lisez : butter. Pag. 66, lig. 36, au lieu de : Martres en rivière , lisez : Martres-de- Rivière. Pag. 69, lig. 33, Rétablissez la formule ainsi : NaS + & I 4 HO —Na0, SOS + 4 HI. Pag. 76, lig. 4, au lieu de : dans les départements, lisez : recueillis M dans les départements. Pag. 77, lig. 9, au lieu de : Apicina, lisez : apicina.. Pag. 80, lig. 43, au lieu de : stagualis, lisez : stagnalis. Pag. 82, lig. 17, au lieu de : pisidiüm, lisez : pisidium. Pag. 138, lig. 27, au lieu de : intermédiaire, lisez : intermédiaires. Pag. 204, lig. 21, au lieu de : les, liséz : les. Pag. 241, lig. 20, au lieu de : Rubescens, lisez : pubescens. Pag. 257, supprimer lignes 24, 25, 26. Pag. 263, lig. 6, au lieu de : spœleus, lisez : spelœus. — lig. 7, au lieu de : boa, lisez : bœuf. — lig. ‘7, au lieu de : spelea, lisez : spelæa. — lig. 34, au lieu de : spœleus, lisez : spelœus. Pag. 265, lig. 10, au lieu de : Bidaun, lisez : Ridaud. Pag. 271, lig. TOULOUSE, —— TYPOGRAPUIE BONNAL ET GIBRAC, RUE SAINT-ROME, #4. 2, au lieu de : enanlofungia, hsez : enaulofungia. RTS mers PEL Arbre) pe RERE gt pie) 2e - \ 1 Toulouse. Typogr. de BONNAL et GIBRAG, rue Saint-Rome, 44. ÿ Aer | QOAA \EL TRE 4 Car ” JR oo |) ru "pe" Sol es 7. = - “, Le “ire 1e eg Le a RE ES le 7 mms à ! MUR LS 7, ses cn DE A Ag ei - nt 9 eg PCR se dre pet CE LS part Ter he . LÉ TP FrUe Re . ge" - ; = Vars L# : mg LELNTT LORS A : te Li APR ETS = vip IE