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LES CLASSIQUES FRANÇAIS DU MOYEN AGE

publiés sous la direction de Mario Roques

LES CHANSONS

DE

CONON DE BÉTHUNE

ÉDITÉES PAR

AXEL \C^ALLENSKÔLD

PARIS LIBRAIRIE ANCIENNE HONORÉ CHAMPION, ÉDITEUR

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INTRODUCTION

I. Vie de Conon de Béthune.

Monseigneur Conon de Béthune appartenait à une famille illustre, descendant peut-être des anciens comtes d'Artois 2. On considère comme le fondateur de la maison de Béthune Robert, surnommé « Faisseux », seigneur de Béthune, de Richebourg et de Carency, et avoué de l'abbaye de Saint- Vaast à Arras, mort en io36. Cette dignité d'avoué d'Arras appartint dès lors toujours au chef de la famille. A Robert Faisseux succédèrent, de père en fils, Robert II (f en 1072), Robert III, dit le Chauve, compagnon de Godefroy de Bouil- lon dans la première croisade (f en iioi), Robert IV, dit le Gros (f en 1128), Guillaume 1er (-]- en 1144) et Robert V,

1. J'ai déjà publié, en iSgijUne édition des chansons de Conon de Béthune, qui fut ma thèse de doctorat; la présente édition n'en est pas seulement une réduction, mais une revision soi- gneuse. J'ai abrégé la biographie du poète et les chapitres sur la filiation des manuscrits et l'attribution des chansons. J'avais, dans ma première édition, tenté une reconstruction de la langue littéraire du poète : j'ai renoncé à cette restitution arbitraire et j'ai adopté l'orthographe des manuscrits que j'ai indiqués pour chaque chanson. Enfin, j'ai estimé inutile de réimprimer les chansons dont je tiens pour erronée l'attribution à Conon de Béthune.

2. Voir A. Du Chesne, Histoire généalogique de la maison de Béthune (Paris, lôSg), p. 4. Les indications généalogiques qui suivent sont empruntées au même ouvrage (voir le tableau, p. 74 et passim).

IV VIE DE GONON DE BETHUNE

dit le Roux (f en 1191 au siège de Saint-Jean-d'Acre). Gonon de Béthune, notre trouvère, était le cinquième fils de Robert V et d'Adélaïde de Saint-Pol. C'est d'un frère aîné de Conon, Guillaume II, surnornmé le Roux (f en 1214), que descend, entre autres, le célèbre ministre de Henry IV, Sully. Depuis Guillaume 1er, grand-père de Gonon, la maison de Béthune était apparentée à la maison de Hainaut et de Flandre, Guillaume ayant épousé Clé- mence d'Oisi, petite-fiUe d'Ade de Hainaut. Ainsi, Gonon eut pour parents, entre autres, Baudoin IX, le premier empereur français de Gonstantinople, et ses successeurs sur le trône byzantin. Gette parenté contribua sans doute à le désigner pour les hautes dignités qu'il obtint à la suite de la quatrième croisade.

On ne connaît pas la date précise de la naissance de Gonon de Béthune, qui doit se placer vers le milieu du xiie siècle. De sa jeunesse, nous savons seulement qu'il eut pour « maître » dans l'art de « trouver », comme il nous l'apprend dans une de ses chansons (V, 5i-52), son parent Huon d'Oisif La première mention du nom de Gonon de Béthune se trouve dans une charte de 1180 (ou 1181) par laquelle Robert V, avec ses enfants Robert, Guillaume, Baudoin, Jean et Conon, octroie plusieurs donations et immunités à l'abbaye de Saint-Jean-Baptiste de Ghoques^. Vers la même époque, Gonon a séjourner à la cour de France, puisque, dans une de ses chansons (III, 5-14), il raconte comment les « Français », la reine (Alix de Cham- pagne) et son fils (Philippe-Auguste) en tête, ont blâmé son

1. 11 s'agit de Huon III d'Oisi, châtelain de Cambrai, qui prit en 1181-1182 le parti du comte Philippe de Flandre dans sa guerre contre Philippe-Auguste. On a conservé sous son nom un petit poème, le Tournoiement des dames (Raynaud, 1024, p. p. A. Jeanroy, Romania, XXVIII, p. 240 et suiv.), et une chanson lyrique (Raynaud, io3o, p. p. J. Bédier, Les chansons de croi- sade, Paris, 1909, p. 5i et suiv.).

2. Voir Du Chesne, ouvr. cité, p. i32; preuves, p. 49.

VIE DE CONON DE BETHUNE V

langage artésien en présence des Champenois et d'une cer- taine « Comtesse », dans laquelle il est facile de reconnaître la célèbre Marie de Champagne, fille de Louis VII et d'Éléo- nore d'Aquitaine ^

Les deux chansons de croisade qu'on a de Conon de Béthune (nos IV et V) se rapportent à la troisième croisade (1189-1193), à laquelle il a pris part lui-même, mais d'où il paraît être revenu dès 1189, à en juger par un « serventois » (Raynaud, no io3o) se trouvent de violentes diatribes contre un Quenes'^, qui ne peut être que notre poète^. Dans la quatrième croisade (1202-1204), au contraire, il joua un rôle prépondérant, comme nous l'apprend la chronique de Villehardouin^. Il fut le chef de la mission qui, en 1201,

1. Voir, pour la vie de Marie de Champagne, E. Winkler, Fran:{ôsische Dichter des Mittelalters : II. Marie de France {Sit- pmgsber. der Akad. d. Wiss. in Wien, t. 188, mém. 3), p. 79 sq.

2. Cas-sujet de Conon.

3. Ce « serventois », déjà mentionné ci-dessus (p. iv, n. i), est attribué, par les deux mss. apparentés de près qui le donnent, à Huon d'Oisi. Or, celui-ci était déjà mort en 1189 ou 1190 (voir l'argument décisif apporté par O. Schultz, Arch. f. d. Stud. d. neu. Spr. u. Lit., LXXXIX, p. 448). Par suite, dans ma première édition (p. loi, n. 3), supposant que Conon était revenu de la croisade avec Philippe- Auguste à la fin de 1 191 , j'avais admettre la possibilité que l'attribution de la chanson à Huon d'Oisi fût erronée : quelque copiste y avait vu une riposte aux paroles par lesquelles Conon de Béthune rejette la responsabilité de son blâme des barons croisés sur son « maître d'Oisi » (V, envoi). M. Bédier {oiivr. cité, p. 58 et suiv.; cf. <\é]k Romania, XXXV, p. 384 et suiv.) a trouvé moyen de concilier l'attribution des mss. avec le fait que Huon d'Oisi était déjà mort en 1191 : il suppose que Conon de Béthune est revenu, en 1 189, avant le départ retardé de Philippe-Auguste pour la Terre-Sainte, ce à quoi, en effet, ne s'oppose pas le texte de la chanson R. io3o (v. 14 : Si remaindroi:{ avoec vo roi failli).

4. La conquête de Constantinople par Geoffroi de Ville-Har- douin, p, p. N. de Wailly (Paris, 1872).

VI VIE DE CONON DE BETHUNE

eut à négocier avec les Vénitiens le transport des croisés en Palestine, et ce fut lui qui, en i2o3, adressa la réponse hautaine des barons croisés au vieil empereur de Constan- tinople, Alexis, qui les avait sommés de s'éloigner de ses terres. Quand le nouvel empereur, le jeune Alexis, que les croisés avaient placé sur le trône grec, fit mine de ne pas vouloir tenir ses engagements, ce fut de nouveau Conon de Béthune qu'on chargea de parler au nom des barons cour- roucés. Le chroniqueur Philippe Mousket* raconte que Conon de Béthune assista à la seconde prise de Gonstanti- nople en 1204, et, à l'avènement de Baudouin de Flandre sur le trône de l'empire grec, Conon fut promu grand- maître de la garde-robe impériale ou « protovestiaire w^. Par la suite, Conon de Béthune fut intimement mêlé aux événements politiques et militaires de l'empire latin de Gonstantinople. Par les chroniques de Villehardouin et de Henri de Valenciennes^, nous apprenons quel rôle impor- tant il joua sous la régence et le règne de Henri de Flandre, frère et successeur de Baudouin. A partir de l'année 1209, au milieu de laquelle finit la chronique de Henri de Valen- ciennes, il n'y a que très peu de renseignements sur la vie de Conon de Béthune. L'on sait cependant qu'après que le nouvel empereur, Pierre de Courtenai, eut été fait prison- nier par le despote d'Épire, Théodore l'Ange' (en 1217)^, Conon de Béthune occupa, sous la régence de Yolande de Flandre, femme de Pierre de Courtenai, le poste de « séné-

1. Éd. Reifténberg, t. II (Bruxelles, i838), p. 3o8, v. 20451.

2. Voir Du Gange, Histoire de l'Empire de Gonstantinople sous les empereurs françois (Paris, lÔDy), t. II, p. 14.

3. La chronique de Henri de Valenciennes, remaniement en prose d'un poème historique (voir G. Paris, Romatiia, XIX, p. 63 et suiv.), a été publiée par N. de Wailly à la suite de la chro- nique de Villehardouin.

4. Il s'agit bien de Théodore l'Ange, et non pas de Théodore Lascaris, comme je l'avais admis par erreur dans ma première édition (p. 20) ; voir O. Schultz, ouvr. cité, p. 447.

LES MANUSCRITS VII

chai », et qu'à la mort de l'impératrice Yolande (août 1219), les barons élirent Gonon « bail » ou régent de l'Empire ^. Dans les Annales ecclesiastici de Raynaldus^, on le trouve encore mentionné à la date du i5 décembre 1219. Il mou- rut le 17 décembre 3 de la même année ou de l'année sui- vante. Cette dernière date est bien le terminus ad quem de sa mort, puisque, dans une lettre du mois de juin 1221, le nouvel empereur, Robert de Gourtenai, lui donne l'épi- thète bonae memoriae^.

II. Les chansons attribuées

A CONON DE BÉTHUNE.

Les manuscrits. D'après la Bibliographie des chanson- niers français de G. Raynaud (Paris, 1884), les quatorze chansons suivantes sont attribuées à Gonon de Béthune par un ou plusieurs mss.^ :

Raynaud i5 : Chanter m'estuet, car pris m'en est courage.

R. 3o3 ; Si voirement con celé dont je chant.

R. 629 : Chanson legiere a entendre.

R. II25 : Ahi, amours, con dure départie.

R. 1128 : Se rage et derverie.

R. i3i4 : Bien me deiisse targier.

R. i325 : Bêle douce dame chiere.

R. 1420 : Tant ai amé c'or me convient haïr.

R. 1574 : L'autrier avint en cel autre païs.

1. Voir Du Gange, ouvr. cité, t. II, p. 73.

2. T. XIII (Rome, 1646), p. 3i3 b.

3. Voir, pour ce jour, le Martyrologe de Saint-Barthélémy de Béthune (Du Chesne, ouvr. cité, p. i63; preuves, p. 76).

4. Voir Raynaldus, Ann., l. c.

5. Les mss. donnent les rubriques suivantes : Mesire Quenes (12 fois), Mesire Quenes de Betune (5 fois), Quenes de Betune (5 fois), Mesire Quenes chevalier (2 fois), Quenes (2 fois). Sire Quenes (i fois) et Maistre Quenes chevalier (i fois).

VIIÏ CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

R. 1628 : L'autrier un jour après la saint Denise. R. 1837 : Moût me semont Amours que je m'envoise. R. 1859 : Voloirs de faire chanson, R. i960 : Au comencier de ma nouvele amour. R. 2000 : Amis Bertrans, dites moi le meillourK De ces quatorze chansons, on peut immédiatement rayer la dernière, qui est un jeu-parti entre Sires Guichairs et Amis Bertrans ; elle n'est attribuée à notre poète que par un ms. (C = Berne 889) dont les attributions, ajoutées après coup, sont souvent erronées 2. Les treize chansons qui restent sont réparties entre dix-sept manuscrits; le tableau ci-contre résume cette répartition et indique les attributions faites par les mss.^.

1. M. Alfred Jeanroy {Romania, XXI, p. 418 et suiv.) a, en outre, fait observer que les chansons anonymes R. ii3i et R. iiSy ne font qu'un avec R. i325, ainsi que la chanson anonyme R. 895 avec R. 1420. Je laisse de côté le jeu-parti provençal (Bartsch, Grundriss, p. 184, 892, 29) entre Rambaut (de Vaquei- ras) et un certain Seingner Coine, dans lequel M. V. de Bar- tholomaeis {Romania, XXXIV, p. 44 et suiv.) a cru reconnaître notre trouvère. Ce jeu-parti, publié en dernier lieu par M. de Bartholomaeis {ouvr. cité, p. 4.5 et suiv.), aurait été composé en Remanie entre les années 1201 et 1207.

2. Ce qui peut expliquer l'erreur, c'est que le jeu-parti suit immédiatement une chanson (R. 11 25) attribuée, avec raison, à Conon de Béthune.

3. J'ai adopté les sigles de Schwan conformément à la Biblio- graphie des chansonniers français de M. A. Jeanroy {Classiques français du moyen âge, n" 18), l'on trouvera sur les divers mss. toutes les indications utiles. J'ai cependant désigner par x et y deux mss. qui n'ont pas de sigles dans cette bibliographie : x est le fragment de Stuttgart, aujourd'hui perdu, p. p. Fr.-J. Mone dans An:^eiger fur Kunde der teutschen Vor:(eit, t. VII (Carlsruhe, i838), p. 411; j est le ms. prov. O (Rome, Vat. 32o8), p. "p. C. de LoUis dans Atti délia Reale Ace. dei Lincei, 4* série, partie 1, année 1886, p. 4 et suiv.; cf. P. Meyer, Romania, XVII, p. 3o2 et suiv., et A. Jeanroy, Bibliographie des chansonniers provençaux [Classiques français du moyen âge, 16).

LES ATTRIBUTIONS IX

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X CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

De ce tableau, il résulte que, K N P X qui forment un groupe très étroitement lié ignorant le nom de Conon de Béthune et H I O U V e y ne donnant jamais de nom d'au- teur, seuls peuvent entrer en ligne de compte pour l'attri- bution d'une chanson à Conon de Béthune les mss. M R Ta, qui appartiennent à une même famille, et les mss. C x, qui appartiennent à la même famille que K N P X, mais non au même groupe; malheureusement, les attributions de C sont en général douteuses elx ne peut nous servir que pour une chanson.

Dans ces conditions, l'attribution à Conon des chansons R. i5 et R. i960, pour lesquelles R est contredit par MT, est peu vraisemblable, et il en est de même pour R. iSSg, pour laquelle l'attribution de C est contredite par M T a; j'ai donc rejeté ces trois pièces ^

Pour les dix autres chansons que j'ai recueillies dans mon édition, l'attribution de II (par C) et de III, VI, VII (par M T, mss. apparentés de près) était discutable, mais elle n'est pas contredite par la tradition manuscrite; il en est de même pour V et VIII [M T), malgré l'anonymat de l'une de ces pièces dans C et de l'autre dans K N X; l'attribution de I est mieux assurée par R T, et plus encore celle de IX par C et M T, ainsi que celle de X par C et M T, malgré l'indication contraire de A" iV et l'anonymat de P; enfin IV est attribuée à Conon par C M R T a x, ce qui ôte beaucoup de vraisemblance à l'attribution de cette pièce au châtelain de Coucy par K N P X^-

D'après le contenu des chansons, seule l'attribution des

IV et Va Conon reçoit une confirmation du rapprochement avec R. io3o (voir ci-dessus, p. v), qui nomme Conon et

1. On les trouvera imprimées en appendice à ma première édition.

2. De la place qu'occupe la chanson IV dans V, ms. apparenté de près au groupe K N P X, on peut conclure que la source de

V attribuait aussi cette chanson au châtelain de Coucy.

LES ATTRIBUTIONS XI

fait évidemment allusion à ces deux pièces^. Comparez Conon de Béthune, IV,. 10-12 :

Car je ne doi faillir mon Creator. Ki li faura a cest besoig d'aïe, Saiciés ke il li faura a grignor,

et R. io3o, 7-8 (éd. Bédier) :

Quant Dex verra que ses besoin:^ ert granz, 11 faudra, car il li 2i failli)

Conon, IV, 33-34 :

Ki chi ne velt avoir vie anuieuse

Si voist por Dieu morir liés et joieus,

et R. io3o, 12 :

Ne vousistez por Diu morir joian:^;

Conon, IV, 41-42 :

Dieus ! tant avons esté pj-eiis par huiseuse, Or i parra ki a certes iert preus,

et R. io3o, 17-18 :

Moût fu Quenes preus, quant il s'en ala, De sermonner et de gent preechier;

Conon, IV, 47-48 :

S'or i laissons nos anemis morteus, A tos jors mais iert no vie honteuse,

et R. io3o, II :

Or menrez vous honteuse vie ci;

I. Confirmation d'autant plus intéressante qu'elle contredit l'at- tribution de IV au châtelain de Coucy par K N P X {V) et affaiblit la valeur du témoignage de ce groupe contre l'attribu- tion de X.

XII CHANSONS DE CONON DE BÉTHUNE

Gonon, V, Sy-SS :

Dehait li bers qui est de tel sanblance Con li oixel qui conchïet son nit,

et R. io3o, 21 :

Or est venuz son lieu reconchïer.

Contenu et style des chansons. Les chansons de croisade IV et V, qui sont sûrement de Conon de Béthune, se distinguent par un style vif et énergique, avec le mélange traditionnel d'enthousiasme religieux et de regrets amers d'être obligé de quitter la dame aimée. C'est dans V (v. 5i) que se trouve l'allusion à Huon d'Oisi, mentionnée plus haut. La pièce X est un spirituel débat entre un chevalier et une dame qu'il avait jadis aimée d'un amour malheureux. La dame, vieillie, est prête à céder, mais trop tard : le che- valier renonce à ses faveurs. Dans cette chanson sont nom- més deux grands personnages de la fin du xne siècle : // Marchis (v. 89), probablement le marquis Boniface II de Montferrat, un des héros de la quatrième croisade, qui a régné de 1192 à 1207, mais devait être, au moins depuis 1187, corégent de son frère aîné Conrad, parti cette année-là pour l'Orient et mort assassiné en 1192^, et // Barrais (v. 40), Guillaume des Barres, connu pour sa force prodi- gieuse et qui, vers 1188, vainquit Richard Cœur de Lion dans un combat singulier^.

Toutes les autres chansons sont des « chansons d'amour », qu'on peut diviser en deux catégories : celles le poète apparaît comme l'amant fidèle et humble (I, II, III) et celles il accuse sa dame de trahison et de félonie (VI, VIII et IX). Dans VII, le couplet i appartient à la première catégo-

1. Voir L'Art de vérifier les dates, 3' éd., t. III (Paris, 1787), p. 632 b; cf. O. Schuliz y ouvr. cité, p. 448.

2. Voir H. -F. Delaborde, Œuvres de Rigord et de Guillaume le Breton, t. II (Paris, i885), 1. III, v. 431-435 et 485 et suiv.

CONTENU ET STYLE XIII

rie et le couplet ii à la seconde, ce qui a fait supposer, non sans raison, qu'il y a deux chansons incomplètes, dont l'une serait l'imitation extérieure de l'autre ^. Dans ces « chansons d'amour », qui, pour le style, montrent beau- coup de différences, se rencontrent quelques renseignements personnels : dans III (v. 5-14), la petite scène, rapportée ci -dessus (p. iv), la reine mère et son fils Philippe- Auguste raillent le poète de son langage dialectal, et (v. 7) la mention de la « Comtesse », Marie de Champagne, dont l'opinion a tant de valeur pour le poète et dans qui on a même voulu voir l'objet de l'amour courtois du jeune gen- tilhomme^; la chanson I est adressée à un certain Noblet (v. 43)3, probablement le même qu'on retrouve dans l'œuvre de Gace Brûlé-'. Dans VII (v. 16-18), il y a une allusion à la participation de Conon à la troisième croisade. IX débute par les vers :

L'autrier un jor après la Saint Denise Fui a Betune, ou j'ai esté sovent.

Des chansons II, VI et VIII, il n'y a rien à dire, sinon que VIII, que deux bons mss., Met T, attribuent à Conon de Béthune, est remplie d'allusions obscures et écrite dans un langage singulièrement contourné.

Quant aux chansons que j'ai rejetées (R. i5, 1869 et i960), la première est une violente diatribe contre l'amour, les femmes et les faux amants. R. 1859 et i960, dont le style est particulièrement vague et incolore (dans R. 1859, il y

1. Voir A. Jeanroy, Romania, XXI, p. 421. Il ne semble guère possible d'admettre avec A. Scheler {Trouvères belges, p. 2']2) qu'il s'agisse, dans la même chanson primitive, de deux amies différentes, de la nouvelle (couplet i) et de l'ancienne (couplet 11).

2. Marie, née en 1145, aurait, quant à son âge, bien pu être l'inspiratrice amoureuse du poète.

3. Le ms. R donne Robers.

4. Voir Chansons de Gace Brûlé, éd. par G. Huet (Paris, 1902), Table des noms propres, p. 149.

XIV CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

a notamment un abus surprenant de la construction péri- phrastique avec aler et le gérondif), contiennent quelques indications personnelles. L'auteur de R. iSSg se réfère aux chansons d'amour de Monseigneur Gasson (v. 14), qui est sans aucun doute le trouvère Gace Brûlé, contemporain de Conon de Béthune^ et antérieur à Guillaume le Vinier^, à qui les mss. M T a attribuent la chanson. Cette dernière attribution peut cependant bien être exacte : Guillaume le Vinier a pu mentionner Gace comme un de ses prédé- cesseurs célèbres dans l'art de « trouver». Enfin R. i960 est adressée à un certain comte de Gueldre (v. 36), dans lequel on est tenté de voir Othon III, connu pour s'être intéressé à la poésie, mais qui n'a régné qu'après la mort de Conon de Béthune (1229-1271)3.

Versification, Le nombre des couplets est variable : 6 dans I, IV, V et X (avec envoi dans I et V), 5 dans II et VI, 4 dans VIII et IX, 3 dans III et 2, sûrement authen- tiques, seulement dans VII -•.

Rapport des couplets. I, III, IV, VI, VIII, X sont à coblas doblas, I et VIII donnant en partie les rimes des couplets pairs dans l'ordre inverse de celles des couplets impairs. Dans IX, les trois premiers couplets sont sur les mêmes rimes, le quatrième est isolé, construction strophique rare dans la poésie lyrique française du moyen âge s. Dans V, les

1. Pour l'époque a vécu Gace Brûlé, voir G. Huet, Chansons de Gace Brillé, p. i-xvii.

2. Guillaume le Vinier, religieux d'Arras, ne mourut qu'en 1245; cf. A. Guesnon, dans Bulletin hist. et philol. du Comité des travaux hist. et scient., année 1894 (Paris, 1895), p. 432-434.

3. Voir P. Paris, dans l'Histoire littéraire de la France, t. XXIII (i856), p. 619 et 685.

4. Dans C, il y a à la fin de IV un demi-couplet qui semble avoir été ajouté après coup; V a dans U un second envoi sûre- ment apocryphe.

5. Mais il n'est pas impossible que le couplet m, qui ne se

VERSIFICATION XV

six couplets se répartissent par trois entre deux types, dont la tradition manuscrite ne permet pas de retrouver sûre- ment l'ordre : je me suis arrêté à la combinaison aab ab b. La chanson II est à coblas capcaudadas. VII est à coblas sin- gulars, mais ce peut être par suite d'une erreur de la tra- dition manuscrite (voir ci-dessus, p. xii et suiv.)^.

Structure strophique. Les couplets ont 8 vers dans II, IV, V, VI, Yîfî< IX et X, 7 dans I et III, 12 dans VIL Le vers est le décasyllabe dans II, III, IV^ IX et X; il est de 7 syllabes dans I et de 6 dans VI ; il y a un mélange de vers de 10 et de 7 syllabes dans V et VIII, de 7 et de 3 syllabes dans VIL Le vers de 3 syllabes est remplacé par un vers de 4, lorsqu'il commence par une voyelle devant laquelle s'élide Ve final du vers féminin de 7 syllabes qui précède, de sorte que ces deux vers ont toujours ensemble 11 syl- labes2.

La structure strophique de IV et IX (et aussi de R. i5) est identique, mais la musique diffère complètement, comme me l'a indiqué M. A. Jeanroy.

Césure. Les décasyllabes sont en général coupés à la 4e syllabe, souvent avec césure lyrique (c'est-à-dire après

trouve que dans les mss. C et U (apparentés de très près), soit apocryphe.

1. La même explication ne peut s'appliquer à R. i5, dont la construction à coblas singulars est ainsi inconnue des pièces d'at- tribution certaine.

2. Les mss. ont des leçons très différentes pour ces vers courts et les savants ont différé d'avis sur le compte de 3 ou 4 syllabes. Dans ma première édition (p. ni et suiv.), j'avais admis que ces vers étaient uniformément de 4 syllabes. Mon opinion s'est modi- fiée devant les observations de M. J. Bédier sur la pièce I de Colin Muset (éd. des Classiques français du moyen âge, 1912, p. 33) et devant les cas analogues que j'ai trouvés dans Thibaut de Champagne. Cf. F. Gennrich, Musikwissenschaft und roma- nische Philologie (Halle, 1918), p. 47, et Zs. f. roman. Phil.,

XXXIX, p. 354.

XVI CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

une finale féminine); II, V, VIII et X présentent des déca- syllabes sans césure après la 4e syllabe, mais il n'y a aucun cas certain de césure épique'.

Rime. Contrairement à l'opinion que P. Meyer fondait sur l'examen de certains mss., Conon de Béthune ne s'est pas permis des assonances au lieu de rimes 2. Il y a de nom- breux exemples de rimes équivoques ^homonymes) et iden- tiques. On rencontre aussi quelques cas de rimes dites gram- maticales (III, 8 et 12 : cortoise, cortois, 10 et 11 : franchoise, franchois; IV, 44 et 48 : honteus, honteuse). Mais il n'y a aucun exemple de rime riche.

Langue. Conon de Béthune ayant dit lui-même que sa parole n'était pas franchoise (III, 10) et qu'il avait dit mos d'Artois, parce qu'il n'avait pas été norris a Pantoise (III, i3-i4), il y a lieu de rechercher les traits artésiens (picards) qui peuvent se rencontrer dans les rimes et la mesure des chansons qui lui sont attribuées.

1. -en- distinct de -an- (avec les exceptions connues). Rimes pures en -ance dans I, V et IX, en -ans dans I et V, en -endre dans I, en -ens dans II, en -ent dans I et 1X3.

2. -s : -f. Rimes mêlées en -aus dans VIIH, en -ens dans II, en -eus dans IV, en -is dans VIII et X, en -ois dans III. Au contraire, il y a des rimes pures en -an^ dans I, en -an^ et -le^ dans V, en -is et -ous dans VIP.

1. Les cas il serait possible d'introduire une césure épique (II, 17 et 23; IV, 26; V, 5o) sont des erreurs de copiste.

2. Les mss. C I U en particulier présentent des assonances, mais il n'y a que des fautes de copiste que la comparaison des autres manuscrits suffit le plus souvent à faire rejeter.

3. R. i5 a des rimes pures en -ent; R. i960 a quatre rimes pures en -ente^ mais mêle ailleurs -en^ avec -a«^; R. iS5g a aient : -ant.

4. Je suppose que le mystérieux sans (VIII, ig) vient de salïcem.

5. R. i960 a, comme I et V, des rimes pures en -an^^ (-en;^) à côté de la confusion de -V^ et -/^ (comme dans VIII et X).

V LANGUE XVII

3. -iee : -ie. Les chansons I, IV, VI, VII et X ne présentent que des rimes pures en -ieK

4. -eine : -aine. Rime mêlée dans VIII (v. 5 : paine < pœna : -aine)^.

5. Le pronom ceaus (e c c e - i 11 o s) : -aus dans VIII (v. 17). Dans les chansons qui sont, selon toute probabilité, de

Conon de Béthune, il y a, en outre, à la rime quelques formes qui attestent Pabsence de certains traits picards pro- noncés : lieus (et non lius) : -eus IV, 45; entière, manière (et non entire, manire) : -iere, VII, 2 et 10 3.

La mesure du vers nous atteste aussi quelques traits « picards » dans les chansons d'attribution certaine : la désinence monosyllabique -iés de la 2e pers. du plur. de l'imparf. de l'ind. et du cond. (V, 19 : sériés; X, 22 : sariés; X, 44 : estiés)*; 20 la forme abrégée de l'adjectif possessif de la ire pers. du plur. no (IV, 45 et 48), à côté de nombreuses formes non abrégées^.

Conon de Béthune s'est donc servi, dans ses chansons, d'un langage qui tenait le milieu entre le francien et le dia- lecte picard prononcé, donc probablement Vartésien, mitigé peut-être par des traits franciens. Les chansons R. i5, iSSg et i960, dont les rimes et la mesure attestent des traits de langue divergents, ne peuvent donc pas lui appartenir; ainsi se trouvent confirmées les indications fournies par les

1. Il en est de même de R. i5 et R. i960, mais R. 1859 mêle les deux finales (v. 55 : atachie : envie, etc.). R. i5 fait, par contre, rimer le parfait en -ut avec le part, passé en -u (v. 18 : connut : -«), trait caractéristique du picard.

2. Cette rime se trouve aussi dans des textes franciens.

3. R. i5 fait rimer au cas-sujet coraige (v. i) avec -aige.

4. Le classement des mss. permettrait cependant aussi les formes savïés et estîés.

5. Le classement des mss. permettrait, à la rigueur, d'admettre une altération de la leçon primitive. La chanson R. 1859 pré- sente deux traits inconnus aux pièces attribuables à Conon : chute de e en hiatus (v. i5 : ramentu pour ramenteû) et contrac- tion de ne la en nel (v. 42).

Chansons de Conon de Béthune. 2

XX

CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

IV 33-34 01 or vuet avoir horfte et vie enuiouse Si voist morir lie^ et bau^ et joian^ Ox Ki chi ne velt avoir vie anuieuse Si voist por Dieu morir liés et joieus TMRa + CKNPVX. La leçon de Ox est un non-sens, et le mot joiani[ (qu'a aussi adopté V) pèche contre la rime.

Le ms. y, de son côté, se rattache de très près à H. Les preuves en foisonnent dans la chanson IV.

J'arrive ainsi à établir pour les dix-sept mss. les filiations suivantes :

Mais il faut ajouter que plusieurs mss., notamment C, O, P et U, sont des mss. « contaminés » et ont ainsi une valeur relativement peu importante pour le rétablissement du texte supposé primitif. Ce texte, il faut en général, d'après notre classification des mss., le chercher dans le groupe I (= Schwan : s^), et c'est de préférence le bon ms. M que j'ai pris comme base de mon texte critique. Cependant, j'admets en règle dans le texte une leçon commune à deux des groupements principaux de II (Schwan : ^n et 5"i).

La graphie du texte critique est, autant que possible, celle du ms. T, dont le langage est légèrement « picard ».

BIBLIOGRAPHIE XXI

Bibliographie. Je donne ci-dessous la liste des ouvrages qui contiennent des chansons de Gonon de Béthune :

Aubry (P.), Le chansonnier de V Arsenal, reproduction pho- totypique du ms. 5ig8 de la Bibl. de l'Arsenal; Paris, 191 1 et suiv. (= Aubry).

Auguis (P.-R.), Les Poètes françois depuis le Xlh siècle, t. II; Paris, 1824 (= Auguis).

Bartsch (K.), Chrestomathie de l'ancien français; Leipzig, 1866; 3e éd., 1875; 5e éd., 1884; 8e éd., 1904 {=z Bartsch, Chrest.).

Bartsch (K.), Altfram^ôsische Romani^en und Pastourellen ; Leipzig, 1870 (= Bartsch, Afr. Rom. u. Past.).

Bartsch (K.) et Wiese (L.), Chrestomathie de Vancien fran- çais; Leipzig, 9e éd., 1908; 12e éd., 1920 (= Bartsch-Wiese).

Bédier (J.), Les chansons de croisade; Paris, 1909 (= Bé- dier).

Bertoni (G.), La sepone francese del manoscritto pro- vençale estense, dans Archivum romanicum, t. I (1917), p. 307-410 [repr. photot. et dipl. du ms. H] {= Bertoni, Arch. Rom.).

Brakelmann (J.), Die altfran^ôsische Liederhandschrift Nro. 38g der Stadtbibliothek s^u Bern, dans Archiv fur das Studium der neueren Sprachen und Literaturen, t. XLI (1867), p. 339-37^; t. XLII (1868), p. 73-82 et 241-392; t. XLIII (1868), p. 241-394 [repr. dipl. du ms. C] (— Brakel- mann, Arch.).

Brakelmann (J.), Les plus anciens chansonniers français ; Paris, 1870-1891 {=: Brakelmann, Chansonniers).

Buchon (J.-A.-G.), Recherches et matériaux pour servir à une histoire de la domination française aux XIII^, XIV^ et XFe siècles dans les provinces démembrées de l'empire grec à la suite de la quatrième croisade, t. I; Paris, 1840 (= Buchon).

Dinaux (A.), Trouvères, jongleurs et ménestrels du Nord de la France et du Midi de la Belgique^ t. III (Les Trouvères artésiens) ; Paris et Valenciennes, 1843 (= Dinaux).

Grùtzmacher (W.), reproduction partielle du ms. y dans

XX

CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

IV 33-34 Q^ 0 r vuet avoir horfte et vie enuiouse Si voist morir lie:( et bau^ et joian:^ Ox Ki chi ne velt avoir vie anuieuse Si voist por Dieu morir liés et joieus TMRa + CKNPVX. La leçon de Ox est un non-sens, et le mot joian^ (qi^'a aussi adopté V) pèche contre la rime.

Le ms. y, de son côté, se rattache de très près à H. Les preuves en foisonnent dans la chanson IV.

J'arrive ainsi à établir pour les dix-sept mss. les filiations suivantes :

H y C U I O X V

N K X

Mais il faut ajouter que plusieurs mss., notamment C, O, P et U, sont des mss. « contaminés » et ont ainsi une valeur relativement peu importante pour le rétablissement du texte supposé primitif. Ce texte, il faut en général, d'après notre classification des mss., le chercher dans le groupe I {= Schv^^an : s^), et c'est de préférence le bon ms. M que j'ai pris comme base de mon texte critique. Cependant, j'admets en règle dans le texte une leçon commune à deux des groupements principaux de II (Schwan : .y" et .yi").

La graphie du texte critique est, autant que possible, celle du ms. T, dont le langage est légèrement « picard ».

BIBLIOGRAPHIE XXÏ

Bibliographie. Je donne ci-dessous la liste des ouvrages qui contiennent des chansons de Gonon de Béthune :

Aubry (P.), Le chansonnier de V Arsenal, reproduction pho- totypique du ms. 5ig8 de la Bibl. de l'Arsenal; Paris, igii et suiv. (= Aubry).

Auguis (P.-R.), Les Poètes françois depuis le XI I^ siècle, t. II; Paris, 1824 (= Auguis).

Bartsch (K.), Chrestomathie de l'ancien français] Leipzig, 1866; 3e éd., 1875; 3e éd., 1884; 8e éd., 1904 (— Bartsch, Chrest.].

Bartsch (K.), Altfran^ôsische Roman'^en und Pastourellen ; Leipzig, 1870 (= Bartsch, Afr. Rom. u. Past.).

Bartsch (K.) et Wiese (L.)? Chrestomathie de Vancien fran- çais: Leipzig, 9e éd., 1908; 12e éd., 1920 (r= Bartsch-Wiese).

Bédier (J.), Les chansons de croisade-, Paris, 1909 (= Bé- dier).

Bertoni (G.), La sepone francese del manoscritto pro- vençale estense, dans Archivum romanicum, t. I (1917), p. 807-410 [repr. photot. et dipl. du ms. H] (= Bertoni, Arch. Rom.).

Brakelmann (J.), Die altfram^ôsische Liederhandschrift Nro. 38g der Stadtbibliothek ^u Bern, dans Archiv fiir das Studium der neueren Sprachen und Literaturen, t. XLI (1867), p. 339-37^; t. XLII (1868), p. 73-82 et 241-392; t. XLIII (1868), p. 241-394 [repr. dipl. du ms. C] (— Brakel- mann, Arch.).

Brakelmann (J.), Les plus anciens chansonniers français ; Paris, 1870-1891 (= Brakelmann, Chansonniers).

Buchon (J.-A.-G.), Recherches et matériaux pour servir à une histoire de la domination française aux XIII^, XIV^ et XFe siècles dans les provinces démembrées de l'empire grec à la suite de la quatrième croisade, t. I; Paris, 1840 (= Buchon).

Dinaux (A.), Trouvères , jongleurs et ménestrels du Nord de la France et du Midi de la Belgique., t. III {Les Trouvères artésiens); Paris et Valenciennes, 1848 (= Dinaux),

Grùtzmacher (W.), reproduction partielle du ms. y dans

XXII CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

Archiv fur das Studium der neueren Sprachen und Litera- turen, t. XXXIV (1864), p. 368-385 {= Grûtzmacher, Arch.).

Hofmann (K.), Fine An^ahl altfraniôsischer lyrischer Gedichte aus dem Berner Codex 38 g, dans Sit^^ungsberichte der Kgl, bayer. Akad. der Wiss. jw Miinchen, année 1867, t. II, p. 486-527 {z= Hofmann, Siti^ungsber.).

Jeanroy (A.), Sur deux chansons de Conon de Béthune, dans Romania, t. XXI (1892), p. 418-424 (= Jeanroy, Rom.).

Keller {A.), Romvart. Beitrâge sur Kunde mittelalterlicher Dichtung aus italienischen Bibliotheken; Mannheim et Paris, 1844 (= Keller).

La Borde [i.-B.), Essai sur la musique ancienne et moderne^ t. Il; Paris, 1780 (= La Borde).

Leroux de Lincy (A.-J.-V.), Recueil de chants historiques français depuis le XII^ jusqu^au XVI^ siècle, t. I ; Paris, 1841 (=: Leroux de Lincy).

Lollis {C. de), Il Canponere proven!j[ale 0(Cod. Vat.32o8), dans Atti délia R. Accademia dei Lincei, anno CCLXXXIII {Roma, 1886), série quarta, parte la, p. 4-1 11 (= Lollis, Atti

Màtzner (E.), Altfran^ôsische Lieder, berichtigt und erlàu- tert; Berlin, i853 {■= Màtzner).

Meyer (P.), Rapport sur une mission littéraire en Angle- terre, dans Archives des missions, 2e série, t. III (1866), p. 247-328, et V (1868), p. 154-162 et 216-244 (= Meyer, Arch. des missions).

Meyer (P.) et Raynaud (G.), Le chansonnier français de Saint-Germain-des-Prés [Bibl. nat. fr. 2 0o5o), reproduc- tion phototypique, t. I; Paris, 1892 {■= Meyer-Raynaud).

Michel (Fr.), Chansons du Châtelain de Coucy; Paris, i83o {= Michel).

Mone (Ft.), reproduction du ms. x dans An^eiger fur Kunde der teutschen Vor^eit, t. VII (i838), col. 411 (= Mone, An^.).

Oulmont (Gh.), La Poésie Française du Moyen Age ; Paris, 1913 (=1 Oulmont).

BIBLIOGRAPHIE XXIII

Paris (G.) et Langlois (E.), Chrestomathie du moyen âge; Paris, 1897; loe éd., 1917 (= Paris-Langlois).

Paris [P .), Le Romancero français ; Paris, i833(=P. Paris).

Scheler (A.), Trouvères belges du XII^ au XIV^ siècle; Bruxelles, 1876 {= Scheler).

Sinner (J.-R.), Catalogus codicum mss. Biblioihecae Ber- nensis, t. III; Berne, 1772 (= Sinner).

Steffens (G.), Die altfran^ôsische Liederhandschrift der Bodleiana in Oxford^ Douce 3o8, dans Archiv fur das Stu- dium der neueren Sprachen und Liieraturen, t. XCVII (1896), p. 283-3o8; t. XCVIII (1897), p. 59-80, 343-382; t. XCIX (1897) p. 77-100, 339-388; t. c"lV (1900), p. 33i-354 (= Steffens, Arch.).

Sudre (L.), Chrestomathie du Moyen Age; Paris, 1898 (= Sudre).

Wackernagel (W.), Altfran:[dsische Lieder und Leiche; Baie, 1846 (= Wackernagel).

Wallenskold (A.), Chansons de Conon de Béthune, ti'ou- veur artésien de la fin du XII^ siècle. Édition critique pré- cédée de la biographie du poète; Helsingfors, 1891 (= Wal- lenskold, C. de B.).

Wallenskold (A.), Un fragment de chansonnier, actuelle- ment introuvable, du Xllh siècle, dans Neuphilologische Mit- teilungen, 1917, p. 2-17 [repr. dipl. du ms. e] (= Wallenskold, N. Mit t.).

^

LES CHANSONS

DE

CONON DE BÉTHUNE

I. Chançon legiere a entendre.

I. Chançon legiere a entendre

Ferai, car bien m'est mestiers

Ke chascuns le puist aprendre

Et c'on le chant volentiers; 4

Ne par autres messaigiers

N'iert ja ma dolors mostree

A la millor ki soit née. 7

II. Tant est sa valors doblee C'orgeus et hardemens fiers Seroit, se je ma pensée

Li descovroie premiers; ii

Mais besoins et desiriers

Et çou c'on ne puet atendre

Fait maint hardement emprendre. 14

III. Tant ai celé mon martire Tos jors a tote la gent Ke bien le devroie dire

A ma Dame solement, 18

LES CHANSONS

DE

CONON DE BÉTHUNE

I. Chançon legiere a entendre.

I. Chançon legiere a entendre

Ferai, car bien m'est mestiers Ke chascuns le puist aprendre Et c'on le chant volentiers; Ne par autres messaigiers N'iert ja ma dolors mostree A la millor ki soit née.

II. Tant est sa valors doblee C'orgeus et hardemens fiers Seroit, se je ma pensée

Li descovroie premiers;

Mais besoins et desiriers

Et çou c'on ne puet atendre

Fait maint hardement emprendre.

III. Tant ai celé mon martire Tos jors a tote la gent Ke bien le devroie dire A ma Dame solement,

2 CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

K'Amors ne li dit noient;

Ne por quant, s'ele m'oblie,

Ne l'oublierai je mie. 21

IV. Por quant, se je n'ai aïe

De li et retenement, Bien fera et cortoisie

S'aucune pitiés l'em prent. 25

Au descovrir mon talent Se gart bien de l'escondire, S'ele ne me velt ochirre. 28

V. Fols sui ki ne li ai dite

Ma dolor, ki est si grans.

Bien deùst estre petite

Par droit, tant sui fins amans; 32

Mais je sui si meschaans

Ke quanques drois m'i avance

Me retaut ma mescheance. 35

VI. Tous i morrai en soffrance,

Mais sa beautés m'est garans, . De ma Dame, et la samblance Ki tos mes maus fait plaisans, 39

Si ke je muir tous joians; Ke tant désir sa mérite Ke ceste mors me délite. 42

VII. Noblet, je sui fins amans,

Si aim la millor eslite Dont onques cançons fust dite. 45

SI VOIREMANT CON CELE DON JE CHANT.

II. Si VOIREMANT CON CELE DON JE CHANT.

I. Si voiremant con celé don je chant

Valt melz que totes les bones qui sont,

Et je l'aim plus que rien qui soit el mont,

Si me doint Deus s'amor senz décevoir; 4

Que tel désir en ai et tel voloir,

Ou tant ou plus, Deus en seit la verte,

Si con malades desirre santé.

Désir je li et s'amor a avoir. 8

II. Or sai je bien que riens ne puet valoir Tant con celi de cui j'ai tant chanté, Cor ai veû et li et sa bealté

Et si sai bien que tant a de valor 12

Que je doi faire et outrage et folor

D'amer plus hait que ne m'avroit mestier;

Et non por cant maint povre chevalier

Fait riches cuers venir a halte honor. 16

III. Ainz que fusse sospris de ceste amor, Savoie je autre jent conseillier,

Et or sai bien d'altrui geu enseignier

Et si ne sai mie lo mien juèr; 20

Si sui con cil qui as eschas voit cler

Et qui très bien ensengne as autres gens.

Et kant il jue, si pert si son sens

Qu'il ne se seit escore de mater. 24

IV. Hé! las, dolanz, je ne sai tant chanter Que ma Dame parçoive mes tormenz, N'encor n'est pas si granz mes hardemanz

CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

Ke je li os dire les mais que trai, 28

Ne devant li n'en os parler ne sai;

Et kant je sui aillors devant autrui,

Lors i paroi, mais si pou m'i dedui

K'un anui valt li deduiz que j'en ai. 32

Encor devis comment je li dirai

La grant dolor que j'en trais senz anui,

Ke tant l'ador et désir, kant g'i sui.

Que ne li os descovrir ma raison ; 36

Si va de moi con fait del champion

Qui de Ion tens aprent a escremir.

Et kant il vient ou champ as cous ferir,

Si ne seit rien d'escu ne de baston. 40

MOUT ME SEMONT AMORS QUE JE M ENVOISE

III. MOUT ME SEMONT AmORS QUE JE m'ENVOISE.

I. Mout me semont Amors ke je m'envoise, Quant je plus doi de chanter estre cois; Mais j'ai plus grant talent ke je me coise,

Por çou s'ai mis mon chanter en defois; 4

Ke mon langaige ont blasmé li François

Et mes cançons, oiant les Champenois

Et la Contesse encoir, dont plus me poise. 7

II. La Roïne n'a pas fait ke cortoise,

Ki me reprist, ele et ses fieus, li Rois. Encoir ne soit ma parole franchoise, Si la puet on bien entendre en franchois; n

/ Ne chil ne sont bien apris ne cortois, S'il m'ont repris se j'ai dit mos d'Artois, ' Car je .ne fui pas norris a Pontoise. 14

III. Dieus! ke ferai? Dirai li mon coraige? Li irai je dont s'amor demander? Oïl, par Dieu ! car tel sont li usaige C'on n'i puet mais sans demant riens trover; 18 Et se jo sui outraigeus del trover, Se n'en doit pas ma Dame a moi irer. Mais vers Amors, ki me font dire outraige. 21

CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

IV. Ahi ! Amors, com dure départie.

I. Ahi! Amors, com dure départie Me convenra faire de la millor Ki onques fust amee ne servie! Dieus me ramaint a li par sa douçour, 4

Si voirement con j'en part a dolor! Las! k'ai je dit? Ja ne m'en part je mie! Se li cors va servir Nostre Signor, . Mes cuers remaint del tôt en sa baillie. 8

II. Por li m'en vois sospirant en Surie, Car je ne doi faillir mon Creator. Ki li faura a cest besoig d'aïe, Saiciés ke il li faura a grignor; 12

Et saicent bien li grant et li menor Ke la doit on faire chevallerie Ou on conquiert Paradis et honor Et pris et los et l'amor de s'amie. 16

III. Dieus est assis en son saint iretaige; Ore i parra con cil le secorront Cui il jeta de la prison ombraje,

Quant il fu mis ens la crois ke Turc ont. 20

Honi soient tôt chil ki remanront,]^

S'il n'ont poverte ou viellece ou malaige ! '

Et cil ki sain et jone et riche sont

Ne poevent pas demorer sans hontaige. 24

IV. Tôt li clergié et li home d'eaige

Qui ens ausmogne et ens biens fais manront Partiront tôt a cest pelerinaige,

AHI ! AMORS COM DURE DEPARTIE. 7

Et les dames ki chastement vivront 28

Et loiauté feront ceaus ki iront;

Et s'eles font par mal consel folaige,

A lasques gens mauvaises le feront,

Car tôt li boin iront en cest voiaige. 32

V. Ki chi ne velt avoir vie anuieuse

Si voist ppr Dieu morir liés et joieus,

Car celé mors est douce et savereuse

Dont on conquiert le resne presïeus, 36

Ne ja de mort n'en i morra uns sels,

Ains naistront tôt en vie glorieuse;

Et saiciés bien, ki ne fust amereus,

Moût fust la voie et boine et deliteuse. 40

VI. Dieus! tant avons esté preus par huiseuse, '' Or i parra ki a certes iert preus; S'irons vengier la honte dolereuse Dont chascuns doit estre iriés et honteus; 44 Car a no tans est perdus li sains lieus Ou Dieus soffri por nos mort angoisseuse. S'or i laissons nos anemis morteus, A tos jors mais iert no vie honteuse. 48

CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

V. Bien me deûsse targier.

I. Bien me deiisse targier

De chançon faire et de mos et de chans,

Quant me convient eslongier De la millor de totes les vaillans, 4

Si em puis bien faire voire vantance, Ke je fas plus por Dieu ke nus amans, Si en sui moût endroit l'ame joians, Mais del cors ai et pitié et pesance. 8

II. On se doit bien efforchier

De Dieu servir, ja n'i soit li talans, Et la char vaintre et plaissier, Ki tos jors est de pechier desirans; 12

Adont voit Dieus la doble penitance. Hé! las, se nus se doit sauver dolans, Dont doit par droit ma mérite estre grans, Car plus dolans ne se part nus de France. 16

III. Vous ki dismés les croisiés, Ne despendés mie l'avoir ensi;

Anemi Dieu en sériés. Dieus! ke porront faire si anemi, 20

Quant tôt li saint trambleront de dotance Devant Celui ki onques ne menti! Adont seront pecheor mal bailli. Se sa pitiés ne cuevre sa puissance. 24

IV. Ne ja por nul desirier

Ne remanrai chi avoc ces tirans, Ki sont croisiet a loier

BIEN ME DEUSSE TARGIER 9

Por dismer clers et borgois et serjans; 28

Plus en croisa covoitiés ke créance.

Et quant la crois n'en puet estre garans,

A teus croisiés sera Dieus moût soffrans,

Se ne s'en venge a peu de demorance. 32

V. Li Quens s'en est ja vangiés,

Des haus barons, qui or 11 sont faillit.

Cor les eùst anpiriés, Qui sont plus vil que onques mais ne vi! 36

Dehait li bers qui est de tel sanblance Con li oixel qui conchïet son ni-t! Po en i a n'ait son renne boni, Por tant qu'il ait sor ses homes possance. 40

VI. Qui ces barons empiriés

Sert sans eùr, ja n'ara tant servi

K'il lor em prenge pitiés; Pour çou fait boin Dieu servir, ke je di 44

Qu'en lui n'afiert ne eùr ne kaance; Mais ki mieus sert, et mieus li est meri. Pleiist a Dieu k'Amors fesist ausi Ensvers tos ceaus qui ens li ont fiance. 48

VII. Or vos ai dit des barons ma sanblance; Si lor an poise de ceu que je di, Si s'an praingnent a mon mastre d'Oissi, Qui m'at apris a chanter très m'anfance. 52

Chansons de Conon de Béthune.

10 CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

VI. Se raige et derverie.

I. Se raige et derverie

Et destrece d'amer i M'a fait dire folie ' \

Et d'amors mesparler,|l| 4

Nus ne m'en doit blasmer. S'ele a tort m'i fausniej Amors, qui j'ai servie/ Ne me sai ou fier. [ 8

II. Amors, de félonie

Vous vaurai esprover;

Tolu m'avés la vie

Et mort sans defFier. 12

La m'avés fait penser

Ou ma joie est perie;

Celé qui jou em prie

Me fait d'autre espérer. 16

III. Plus est belle k'imaige Gelé ke je vos di, Mais tant a vil coraige,

Anuieus et failli, 20

K'ele fait tôt ausi

Com la leuve sauvaige

Ki des leus d'un boskaige

Trait le pieur a li. 24

IV. N'a pas grant vasselaige Fait, s'ele m'a traï;

Nus ne l'en tient por saige

SE RAIGE ET DERVERIE I I

Ki son estre ait oï; 28

Mais puis k'il est ensi

K'ele a tort m'i desgaige,

Je li renc son homaige

Et si me part de li. 32

Moût est la terre dure,

Sans eve et sans humor

Ou j'ai mise ma cure,

Mais n'i keudrai nul jor 36

Fruit ne foille ne flor.

S'est bien tans et mesure

Et raisons et droiture

Ke li rende s.'amor. 40

12 CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

VII. Belle doce Dame chiere.

Belle doce Dame chiere, Vostre grans beautés entière

M'a si pris Ke, se iere em Paradis, 4

Si revenroie je arrière, Por convent ke ma proiere

M'eiist mis La ou fuisse vostre amis 8

Ne vers moi ne fuissiés fiera, Car aine ens nule maniera

Ne forfis Par coi fuissiés ma guarriara. 12

Ne lairai ke je ne dia *- De mes maus une partie

Come irons. Dehaiz ait cuers covoitos, 16

Fausse, plus vaire ke pie, Ki m'envoia en Surie !

Ja por vous N'avrai mais les ieus plorous. 20

Fous est ki en vous sa fie, Ka vos estes l'Abeïe

As Soffraitous, Si ne vous amarai mie. 24

TANT AI AMÉ c'OR ME CONVIENT HAÏR

VIII. Tant ai amé c'or me convient haïr.

I. Tant ai amé c'or me convient haïr

Et si ne quier mais amer, S'en tel lieu n'est c'on ne saice traïr

Ne dechevoir ne fausser. 4

Trop longement m'a duré ceste paine

K'Amors m'a fait endurer; Et non por quant loial amor certaine

Vaurai encoir recovrer. 8

II. Ki or vauroit loial amor trover

Si viegne a moi por coisir! Mais bien se doit belle dame garder

K'ele ne m'aint pour traïr, 12

K'ele feroit ke foie et ke vilaine,

S'em porroit'tost mal oïr, Ausi com fist la fause Ghapelaine,

Gui tos li mons doit haïr. 16

III. Assés i a de celés et de ceaus

Ki dient ke j'ai mespris De çou ke fis covreture de saus.

Mais moût a boin droit le fis, 20

Et de l'anel ki fu mis en traîne,

Mais a boin droit i fu mis, Car par l'anel fu faite la saisine

Dont je sui mors et trais. 24

IV, A moult boen droit en fix ceu ke j'en fix.

Se Deus me doinst boens chevals! Et cil ki dient ke i ai mespris

14 CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

Sont perjuré et tuit fauls. 28

Por ceu dechiet bone amor et descline

Que on lor souffre les mais, Et cil ki cellent lor faulse covine

Font les pluxors deloiauls. 32

l'aUTRIER un JOR après la saint DENISE

IX. L'aUTRIER un JOR APRES LA SaINT DeNISE.

I. L'autrier un jor après la Saint Denise Fui a Betune, ou j'ai esté sovent. La me Sosvint de gent de maie guise Ki m'ont mis sus mençoigne a entïent : 4

Ke j'ai chanté des dames laidement; Mais il n'ont pas ma chançon bien aprise : Je n'en chantai fors d'une solement, Qui bien forhst ke venjance en fu prise. 8

II. Si n'est pas drois ke on me desconfise, Et vous dirai bien par raison coment : Car se on fait d'un fort larron justise. Doit il desplaire as loiaus de noient? 12

Nenil, par Diu! qui raison i entent; Mais la raisons est si arrière mise Ke çou c'on doit loer blasment la gent Et loent çou que nus autres ne prise. 16

m. Dame, lonc tans ai fait vostre servise, La merci Deu ! c'or n'en ai mais talant. Que m'est ou cuer une autre amor assise Que me requiert et alume et esprant 20

Et me semont d'amer si hatement, C'an li n'en a ne orgoil ne faintise; Et jel ferai, ne puet estre autrement, Si me métrai dou tout an sa franchise. 24

IV. A la millor del roiaume de France, Voire del mont, ai mon cuer atorné,

CHANSONS DE CONON DE BETHUNE

Et non por quant pavor ai et dotance

Ke sa valors ne me tiegne en vilté, 28

Car tant redoc orgelleuse beauté;

Et Dieus m'en doinst trover bone espérance,

K'en tôt le mont n'a orgoill ne fierté

K'Amors ne puist plaissier par sa poissance. 32

l'autrier avint en cel autre païs 17

X. L'autrier avint en cel autre païs.

I. L'autrier avint en cel autre païs

C'uns chevaliers eut une dame amee.

Tant com la dame fu en son bon pris,

Li a s'amor escondite et veee. 4

Puis fu un jors k'ele li dist : « Amis,

Mené vous ai par parole mains dis;

Ore est l'amors coneiie et provee.

Des or mais sui tôt a vostre devis. » 8

II. Li chevalliers le regarda el vis,

Si la vit moût pale et descoulouree.

« Dame », fait il, « certes mal sui baillis

Ke n'eiistes piech'a ceste pensée. 12

Vostres cler vis, ki sambloit flors de lis,

Est si aies, dame, de mal em pis

K'il m'est a vis ke me soies emblée.

A tart avés, dame, cest conseil pris. » 16

III. Quant la dame s'oï si ramprosner, Grant honte en ot, si dist par sa folie :

« Par Dieu, vassal, jel dis por vos gaber.

Quidiés vos dont k'a chertés le vos die? 20

Onques nul jor ne me vint em penser.

Sariés vos dont dame de pris amer?

Nenil, par Dieu! ains vos prendroit envie

D'un bel vallet baisier et acoler. » 24

IV. « Dame », fait il, « j'ai bien parler De vostre pris, mais ce n'est ore mie; Et de Troie rai jou conter

l8 CHANSONS DE CONON DE BÉTHUNE

K'ele fu ja de moût grant signorie; 28

Or n'i puet on fors les plaices trover.

Et si vous lo ensi a escuser

Ke cil soient reté de l'iresie

Qui des or mais ne vous vauront amer. » 32

V. « Par Dieu, vassal, moût avés fol pensé, Quant vous m'avés reprové mon eaige. Se j'avoie tôt mon jovent usé, Si sui iou riche et de si haut paraige 36

C'om m'ameroit a petit de beauté. Encoir n'a pas un mois entir passé Ke li Marchis m'envoia son messaige. Et li Barrois a por m'amor josté. » 40

VI. « Par Dieu, dame, ce vos a moût grevé Ke vos fiés tos jors ens signoraige; Mais tel set ont ja por vos sospiré. Se vos estiés fille au Roi de Gartaige, 44

Ki ja mais jor n'en aront volenié. On n'aime pas dame por parenté. Mais quant ele est belle et cortoise et saige. Vos en savrés par tans la vérité. » 48

VARIANTES ET NOTES ^

I. Ghançon legiere a entendre.

Raynaud 62g.

Manuscrits : R, f. 10 (Mesire Guesnes); T, f. loi (Mesire Quenes); e, /. 2; musique notée dans R et T. Graphie de T.

2 que b. T; c. il m'est R 5 Gar p. autre messagier e

8 montée e 9 Orgieus e 10 se ja T" i3 Et con c'on T 19 dist Te 20 Et non pour q. ce m'oublie R

21 m'oublirai R 22 se manque dans R 23 ne r. e; recouvrement R 25 aucume T 29 Faus R; fui quant e 3o dolors r— 35 Ne r— 37 M. la e 38 dame a R 41 ma m. i? 42 amors T 43 Robers R 44 Si ai /? 45 fu T.

Éditions : Buchon, I, 423; Dinaux, III, 386; Scheler, i5; Brakelmann, Ghansonniers, 71; Wallenskôld, G. de B., 218, et N. Mitt., 1917, 12.

II. Si voiremant con celé don je chant.

Raynaud 3o3.

Manuscrits : C, /. 224 (Gunes de Betunes); i/, /. 22^ (couplets i, II, V, m); U, f. 28. Graphie de U.

I. Les variantes des mss. (sont omises les variantes purement graphiques) sont toujours données avec la graphie du ms. placé en tête de la liste. Le commencement d'un vers est indiqué par une majuscule. Je sépare par une virgule les variantes qui se correspondent, par un point-virguIé celles qui ne se correspondent pas. Les mots abrégés ont exactement la graphie du texte cri- tique.

20 VARIANTES ET NOTES

I de cui ge H 2 les altras H 3 Et cum eo l'am p. de r. de ces H ô Deus t. et iï" 7 Gom li C, Cum hom H; désira H; la s. C 9 E si sai b. q. nom pot valer tant H 10 Cum fai celi H; celé U; gié ai canté //, j'a {ou i a) ch. U II Que je ai bien w. \i H 12 q. la a t. de H i3 je doz U, j'en d. C; cuit f. oltrage H 14 si h. L^C; que manque dans C; ne m'averoit C, non avreit H i5 no per tantii/" lôpoieradi/ 17 que je C; che je sui de cest amor apris H 18 Saveie bien H; ensignier C 19 manque dans H; d' manque dans C 20 E savoit bien de lo meillor H 21 Aissi cum H 22 Quant il sor enseigne al altra gen H; e. l'autre gent UC 23 si per p. C ; p. isi H; sen {dernier mot du vers) UCH 24 Qui U ; défendre H ; dou maiter U 25 iriés C 26 mon tor- ment UC 32 manque dans C 33 Trestout C ; Gié pens assez ço que je H 34 Mas quant je sui a présent devant lei H 35 Gié ne li pos rien dire ne no sai H;X. la dout C 36 Que manque dans H 37 Chel es de H; comme dou C, cum es del H 38 longamen après H 39 Mais H; k. ceu f/, quant se C; al colp al champ H; a cols C 40 II H; bast[on] U.

Éditions : Dinaux, III, 405 ; Wackernagel, 41; Scheler, 28; Brakelmann, Chansonniers, 90; Wallenskôld, G. de B., 220; Meyer-Raynaud, 28; Bertoni, Arch. Rom., I, 340, 391.

III. MOUT ME SEMONT AmORS QUE JE m'eNVOISE.

Raynaud jSS'j.

Manuscrits : M,f. 45 (Quenes); T,f. gg (Mesire Quenes);

e, f. 2 (couplet lu); musique notée dans M et T. Graphie

de T.

4 s'ai nus TM 8 ne fist pas T 16 Et irai a li por merci e 17 Oie e; teus est li usages e 18 G'on ne done mais riens sans demander e 19 se g'i e; de parler e; trover etc. jusqu'à la fin du couplet manque dans M par suite d'une mutilation; le tus. e ajoute le vers : Si m'ait Dieus n'i doi avoir damage 20 Ne s'en e 21 M. a e; fait e.

CHANSONS II-IV 21

Éditions : P. Paris, 83; Buchon, I, ^20 ; Leroux de Lincy, I, 3o; Dinaux, III, 889; Bartsch, Ghrest., i83; 5e éd., 235; Scheler, 20; Brakehnann, Chansonniers, 74; Wallenskôldy G. de B., 223; Paris-Langlois, 281; Bartsch-Wiese, i58; Wallenskôld, N. Mitt., 191 7, 12.

Remarque. Pour la petite scène racontée aux vers 5-14, voir ci-dessus, p. iv.

IV. Ahi! Amors, com dure départie.

Raynaud 1 125. Chanson de croisade, composée après la prise de Jérusalem par les Sarrasins en iiSj (cf. ci-des- sus, p. xvin). Il y en a une imitation évidente, Raynaud 1022 (Oies, seigneur, pereceus par oiseuse), attribuée à Richard de Fournival par le seul ms. (a) qui la donne, et publiée en dernier lieu par M. J. Bédier (Les chansons de croisade, Paris, 1909, p. 2g3 et suiv.). La musique même, telle qu'elle est donnée par les mss. M, T et O (il y a encore deux autres mé- lodies, partagées entre les mss. comme suit : R et KNPX, V, a; voir Bédier, ouvr. cité, p. 2g et suiv.), a servi de modèle à Raynaud 1022 (cf. F. Gennrich, Zs. f. rom. Phil., XXXIX, 33g, et Musikwiss. und roman. PhiloL, Halle, igi8,p. 10).

Manuscrits : C,f. i (Cunes de Betunez; couplets i, 11, vi,

V, IV, m); H, f. 22 j [couplets i-iii); K, p. g3 (Ci... com- mencent les chançons le Ghastelain de Gouci; couplets i, II, V, m, iy); M,f.46 (Quenes); N,f. 3g (Gi... commencent les chançons au Ghastelain de Gouci; couplets i, 11, v, m, iv); O, f. go [couplets i, 11, vi, v, iv, m); P, f. 2g (Li Ghas- telains de Gonci [sic]; couplets i, 11, v, m, iv); R, f. 40 (Mestres Quesnes chevalier; couplets i-y) ; T, f. 100 (Mesire Quenes); V, f. y 4 [couplets i, 11, v, m, iv); X, f. 6 y (Gi... commencent les chançons le Ghastelain de Gouci; cou- plets i, II, V, m, iv); a, f. 23 (Mesires Quenes de Bietune; couplets i-v); x (Messires Quenes de Betune; couplets i, 11,

VI, V, iv);y, f. 54 (couplets i-iii); musique notée dans K, M, N, O, P, R, T, V,X et X (?). Graphie de T.

Les quatre premiers vers manquent dans y. i Oimi

22 VARIANTES ET NOTES .

Ojc, R; si dure Ox 2 Moi a; covient f. a perdre la C; sofrir per H; pour KNPVX 3 fust manque dans x

4ramaine T; a lui V 5 vraiement RVXa; ke m'en p. TMRa, corn ..em vait x; pert F 6 Deus CKNOP VXax; k'a je T; je ne O, et ne R, che ne Hy; départ m. Hy 7 Ainz va mes cors KNPVX; mos c. Hy

8 Li TMRa; Tous li miens eu ers remaint en COx

9 lui R; sulie Rx 10 Ke COPx; nuls ne doit f. son CKNOPVXax 11 Quant V; Ki la a; Quar qui le {Wy) faut en ses besoignes un dia (besoing s' d^idi y) Hy ; faudra cest besougne V 12 Saiche COx; Ben cre que deus (c'adés y) li faldreit al Hy; de voir faurait li CO.r, de voir q'il faudra KNPVX— i3 Si a; sachiez KNOPXx

i5 G'on en COx, G'on i KNPVX, On i i? 16 Et los et pris CHVay; a l'amor y; V manque dans H; sa vie x

17 haut O, droit V, gran ^ 18 Or parra bien O, E raparra H ; se cil TM^ se il a; cum li secorreront Hy 19 Que KNRVX; A ceus qu'il (Iceu q'el y) trais Hy; jeté Ta; pr. de ombrage Hy 20 Dont Hy ; mors e. TMRa; quill t. H, qel t. >^; tuit o. COV 21 Bien sont h. KNPVX; Certes tuit cil sont h. ki n'i vont CO, Saichiés chil sont trop h. ki n'iront TMRa 22 Si a; Se nés retient povretez ou malage KNPVX, Si veill non es (n'estoitj') paubretés e (o y) malatge Hy; ou mellee ou maillege C 28 Mas y; cil manque dans V; tut li ries que sans e jovne Hy ; qui jone et sain O; qui riche et sain €t fort seront KNPX, qui riches et fort et sain seront V; riche et jonne s. R 24 N'i KNPVX; poront CHO; remaner Hy 25 Tous (Tout a) li clergiés TMRax

26 de bien (biens O) fais et d'amones vivront COx; aumosnes KPVa; bien fet KNPRX; mauront a, mor- ront TMR 27 tuit en C 28 chasteé tenront KNPVX, chastes se tendront O 29 manque dans MRTVa; Se l. font a ceus qui i vont KNPX; loialteis C; porte C, portent Ox 3o Et manque dans V; celles CPRX 3i As TPVX; Elais keilz C, Ha les quelx O, Ha las queus

CHANSON IV 23

jc; lasses R; recreanz et mauvais M; g. et mauvais Ta^ g. et a mavez R, genz mauvese x^ g, menasces C; les f. O, lor f. C 32 s'en vont KNPX; cel v. C 33 Ki or COx; ne manque dans Ox ; mener A''; a. honte et {ce mot manque dans x) vie Ox ; vie honteuse KPVX, honteuse vie A^ 34 S'aille morir pour dieu KNPVX; v. m. 1. et baus et COx; joianz OF^r 35 Ke TMRa; ceste KNPVX, telle R; bone et glorieuse KNPVX 36 manque dans P; Qu'en i KNV, G'on en X; Ou conkis est paradis et honor COx; glorïeus KNVX 37 manque dans V; des mors n'en i avrait un soûl C 38 manque dans V; vivront COx; naisteront en TMRa; précieuse A^ 39 manque dans a; Je n'i se plus KNPVX; Ki revenra moût sera (par ert R) eùreus TMR 40 manque dans a; Trop KNPVX; A tos jors mais en iert honors (a honneur/?) s'espeuse TMR; v. bêle O; V ajoute le vers : Pour dieu vengier le père precïeus 41 Lonc tens a. COx; por oxouse Cx 42 Or verra on T 43 K'il voist Cx ; Vescu avons a h. O 44 tous li mons est COx 45 Qu'a nostre M, Quant a (en x) nos COx 46 soffri et por nos inter- vertis dans COx; glorieuse TM, engoisse C, et engoisse X 47 Or ne nos (vos x) doit retenir nulle honors COx 48 D'aleir vengier ceste perde COx C donne à la fin de la chanson (rimes du couplet précédent de C) le demi- couplet suivant :

Lais! je m'en voix ploranr des eulz del front Lai ou Deus veult amendeir mon coraige, Et saichiés bien c'a la millor dou mont Penserai plux ke ne fais a voiaige^.

Éditions : Sinner, III, 36j; La Borde, II, 3o2; Michel, 85;

I. J'ai exclu ce demi-couplet, d'abord parce que son admission exigerait un ordre des couplets qui me semble moins bon, et ensuite parce que, par la façon vraiment choquante dont le poète exprime son indifférence à l'égard de la croisade, ces vers semblent être en contradiction avec le reste de la chanson.

24 VARIANTES ET NOTES

P. Paris, g3; Mone,Anz., VII, 411; Buchon, I, 421 ; Leroux de Lincy, I, ii3; Dinaux, III, 897; Keller, 254; Wacker- nagelj 89; Màt^ner, 7, 86, 87, 88, 90, 91; Griit^machery Arch., XXXIV, 3y6;Bartsch, Ghrest., 184; 3e éd., 222; 5e éd., 236; Scheler, 2; De Lollis, Atti, 1886, 62, no 87 (cf. P. Meyer, Romania, XVII, 3o2 et suiv.; Wallenskôld, G. de B., 32, n. i); Brakelmann, Chansonniers, yb; Wallenskôld, G. de B., 224; Sudre, 140; Bartsch-Wiese, ibg; Bédier, 25; Oulmont, 286; Bertoni, Arch. Rom., I, 840, 892; Aubry, g3.

Remarques. Dans la chanson Raynaud io3o il est fait allusion aux vers 10-12, 33-34, 4i~4^ ^^ 47--48 (voir ci-des- sus, p. xi). Le début de Raynaud 1022 (voir ci-dessus, p. 21) fait allusion au vers 41.

V. Bien me deusse targier.

Raynaud i3i4. Chanson de croisade, composée après l'établissement de l'impôt du mois de mars 1 188, connue sous le nom de « dîme saladine » (cf. ci-dessus, p. xviii^.

Manuscrits : K, p. 3g 8 {couplets i, iv, 11, vi, v); M, f. 47 (Sire Quenes; couplets i-iii, vi, iv); N, f. j83 (couplets i, iv, II, VI, v); O, f. 18 (couplets i, iv, 11, vi, v, vu); T, f. 100 (Mesire Quenes; couplets i-iii, vi, iv); U, f. g6; X, f. 255 {couplets i, IV, II, VI, v); musique notée dans K, M, N, O, T et X. Graphie de T, pour les couplets v et vu celle de U. I a taisir U 2 chançons KMX; et f. X; dis U

3 moi T; je me doi KNOX, il m'estuet U; aloingnier U

5 Et s'en U; Et si en puis f. KNOX 6 p. certes TM

7 suix bien U ; m'arme U 8 S'en ai a cuer U; j'ai du cors KNOX 9 L'en X; Ghascuns se doit enforcier C7— II En KNOX; fraindre TM; plaier T 12 Que KNUX; adés T; de pechier (péchiez N) est adès KNOX; pechiés U i3 Et lour U; le noble U i5 doit estre la mérite (li mérites O) mult KNOX, doit bien estre ma meriteit U 16 Que U; si dolenz nus se part KNOX; ne s'en U 17 robeis U 19 en manque dans U 20 Las

CHANSONS IV-V 25

U; dire U 21 Lai ou li s. torbleront U 28 A icel jor s. tuit m. U 24 pesance U 26 remainrat si U; r. avecques KNOX 27 aloigniés U 28 doner KNOX, daimmier U; le premier et manque dans NT; et cheva- liers et ^ 29 Por an creûxe anvie c'an cr. U; en croit sa KNOX; et cr. N 3o Pues que la creus an U; Mais celé cr. ne leur iert ja TM; gardans X 3i A sous U; A nul croisié ke (quar M) d. est si poissans TM; trop s. U 32 Ke il se TM; poi sanz N 33-36 manquent dans KNOX 33 Li ques U^ 35 vosist anpirier U^ 36 qu'onques U 37 Si mal d. b. de si faite U; fiance N 39 Po i a ceus n'a U 40 Puis qu'il i ait fors U 41 les b. KNOX; si ait baron anpiriet U 42 C'est TM; ja n'en ara s. T, ja tant n'avra (A^X ajoutent jor) s. KNOX^ 43 Que lour f/, Que jor A^, K'il vous TM 44 doit on KNOX, vaut mues U; servit U, s. et amer KNOX; ke le T; ke je di manque dans K—4b Que 1. U; Q'il n'i couvient KNOX; 1. ser-

1. C'est avec hésitation que j'ai rejeté la leçon de l'unique ms. {Li ques = lequel, c'est-à-dire Dieu) en adoptant l'ingénieuse conjecture de M. Bédier [Chans. de crois., p. 43), selon laquelle il s'agirait du comte Philippe de Flandre, qui, vers le mois d'oc- tobre 1188, avait refusé le service à Philippe-Auguste et déclaré qu'il ne se servirait de ses armes contre des chrétiens qu'après avoir accompli son vœu de croisé.

2. M. Bédier {ouvr. cité, p. 46; cf. p. 49) propose la leçon Cor les veïsse empirie:^.

3. M. Jeanroy {Romania, XXXVIII, 445) propose de corriger, contre la leçon de tous les mss., sans eûr en en eilr, en interpré- tant le passage de la façon suivante : « Il est clair que le poète oppose le service de Dieu à celui des barons empirie:{ : l'un est soumis à tous les risques, l'autre ne l'est à aucun. » Scheler {Trouvères belges, p. 274) me semble cependant déjà avoir bien expliqué ce passage : « L'auteur veut dire qu'en servant de tels mauvais barons sans succès, il ne faut pas s'attendre à la moindre indulgence de leur part, tandis que Dieu ne fait pas dépendre sa récompense de la bonne ou mauvaise chance, mais rémunère tout homrne qui bien le sert (v. 46). »

Chanson.i de Canon de Réthiine. 4

20 VARIANTES ET NOTES

vir n'a ( T ajoute ens lui ne) eûr TM ; chevance U 46 Ki bien le TM; bien TM 47 Car pleùst d. KNOX; ansi U 48 qu'en li ont sa f. U 49 Or ai je 0; de b. la U 5o je le di 0, ju ai dit f/ 5i praingne U 52 des enfance O U ajoute à la fin les vers :

Par Deu, compains, adés ai ramanbrance

Conques aùst amin,

Ne tous li mons ne vadroit riens sans li;

Magrei Gilon, adés croif {lire croist) sa vaillance 1.

Éditions : P. Paris, gb; Buchon, I, 422; Leroux de Lincy, I, 109; Dinaux, III, 398; Scheler, 12; Brakehnann, Chanson- niers, 78; Wallenskôld, C. de B., 228; Meyer-Raynaud, 96; Bédier, 89; Aubry, 398.

Remarques. Dans la chanson Raynaud io3o, il est fait allusion au vers 38 {voir ci-dessus, p. xiiy. Les vers 5i- 52 contiennent une allusion ironique à l'enseignement dans l'art de « trouver » qu'avait reçu Conon de Béthune de la part de Hiion d'Oisi (cf. ci-dessus, p. iv),

VI. Se raige et derverie.

Raynaud 11 28,

Manuscrits : M, f. 46 (Mesire Quenes de Betune); T, f. gg (Mesire Quenes); e,f. 2 ; musique notée dans M et T. Graphie de T.

I C'est Te, dans M un grattage après Se 6 Se a M

7 qe j'ai e 11 Tolue m'as e i3 Ki L. m'as e 18

I. Il est toujours possible, comme le croit M. Bédier {puvr. cité, p. 5o), que ce demi-couplet défiguré ait formé un second envoi. Le fait qu'il est adressé à un compains non nommé, et qu'il y est également question d'un ami inconnu, semble cepen- pendant indiquer qu'il s'agit d'une addition de copiste, peut-être d'un fragment de sotte chanson, comme l'ont supposé J. Brakel- mann {Les plus anc. chansonniers français, p. 80 et suiv.) et O. Schultz {Arch.f d. Stiid. d. neu. Spr. u. Lit., LXXXIX, 449).

CHANSONS V-VII 27

C. dont e 19 M. molt (?) e 21 ansi e 28 illisible

dans e 3o dechasce T 84 sève e; amor e 35 Ou ai

e; gure (?) e.

Éditions : Buchon, I, 421; Dinaux, III, 892; Scheler, 27; ^raAre/manw, Chansonniers, 88; Wallenskôld, C. de B., 282, et N. Mitt., 1917, 10.

Remarque. Le trait singulier de la vie des loups auquel il est fait allusion aux vers 22-24 ^^^ souvent mentionné dans les écrits du moyen âge; voir, par exemple, Brunetto Latini, Li Livres dou Trésor, éd. Chabaille (Paris, i863), p. 24'j (l. I, part. V, chap. CXCII) : Et quant li tens de sa luxure vient, plusor masle ensuient la louve, mais à la fin ele regarde entre touz, et esleist le lait qui gise o li. Cf. Sche- ler, Trouvères belges, p. 280.

VII. Belle doce Dame chiere.

Raynaud i325, i i3i, i iSj. Le second couplet du texte est peut-être le fragment d'une autre chanson parodiant le premier couplet (voir ci-dessus, p. xn).

Manuscrits : M, f. 46 (Mesire Quenes de Biethune); 0, /. S g (couplet II et un second couplet adventice); T, f. g g (Mesire Quenes); U, f. 36 (couplet i, en troisième lieu, avec trois couplets adventices); musique notée dans M, O et T. Graphie de T.

3 si sospris TMU^ 4 Se j'estoie U 5 S'en T; ven-

droie U ; je manque dans T 6 Par U 7 la mis TMU^

8 Ke f. TM, Que je fusse ^— 9 N'a moi TM; frère T

10 Conques U 12 Ke f. TM i3-i4 Por une k'en ai haïe Ai dit as autres folie TM 16 Mal ait vos TM 17- 18 Ki m'envoia en surie Fausse estes voir plus ke pie TM

19 Ne mais p. TM 20 N'avérai mes i. TM 21

I. Pour les corrections apportées aux vers 3 et 7, voir ce qui a été dit ci-dessus (p. xv) sur le nombre des syllabes des vers courts de cette chanson.

28 . VARIANTES ET NOTES

manque dans TM 22 Vos estes de TM 23 Au O 24 nomerai TM.

Second couplet de O (les rimes seulement en partie iden- tiques à celles du couplet i) :

Hé! bêle très douce amie Qui semblez rose espannie,

Aiez merci De vostre leal ami, 4

Qui de si fin cuer vos prie Que, s'il a troite florie

Au vanredi, N'a pas le bec si jauni 8

Que de vos ait grant envie; S'aimme mieuz, que que nuns die,

Oisel rosti Que la vostre compaignie. , 12

Voici les couplets i, 11 et iw de U* :

I. Talent ai que je vos die

De mes mais une partie 2

En autre {corr. autrui) chant, Q'ensi me vient a talent; 4

Mais ma chiere dolce amie, Por cui mes cuers s'umelie,

Maintenant Q'ele me face créant 8

De sa dolce compaignie ; Ne por riens que nus m'en die

A mon vivant N'istrai de sa seignorie. 12

II. Fine amors n'esgarde mie A savoir nen a folie

N'au melz {corr. N'a) vaillant, Ainz fait de tôt son talant, 16

1. D'après M. A. Jeanroy {Remania, XXI, 428), ces couplets seraient une imitation de R. i325, dans laquelle s'est glissé le premier couplet du modèle.

2. Ce vers est le vers 14 du texte critique.

CHANSONS VII-VIII 29

Et cil {corr. cel) qui plus l'a servie Et qui ne la triche mie

Doit faire {corr. Face) tant Que nuns ne s'en voist plaignant, 20

Mais chescuns jure et affie Que nus hom qui soit en vie

N'aime tant; Por ce nés conoist hom mie 24

III (vers 25-36/ = le couplet i du texte critique.

IV (manquent les vers 37-40^

Por tôt l'or de Saint Denise N'istroie de son servise,

Ainz faz savoir C'ancor[e] la cuiz veoir 44

. Tote nue en sa chemise, Si k'entre ses deus braz gise

A mon voloir; S'iert del tôt a ma devise. 48

Éditions : P. Paris, 88; Buchon, I, 421 ; Leroux de Lincy, 1, 43; DinauXy III, 3g3 ; Scheler, 10; Brakelmann, Charnson- niers, 86; Wallenskôld, G. de B., 284; Jeanroy, Romania, XXI, 419, 422; Meyer-Raynaud, 36.

, VIII. Tant ai amé c'or me convient haïr.

Raynaud 1420, 8g5.

Manuscrits : C, f. 23 j {couplets i, m, iv, 11); M, f. 45

(Mesire Quenes; couplets i-iii); O, f. ii'j (couplets 11, m);

^j /• 99 (Mesire Quenes; couplets i-iii); musique notée

dans M, O et T. Graphie de T, pour le couplet iv celle

de C.

2 ne répété dans C 3 leu non C ; mentir C 5 ai souf- fert C 7 Maix C 8 Poroie C 9 Ki vauroit or TM; amin C, amant O 10 a mon loz choisir C 11 Maix belle dame se doit bien C; boine d. TM 12 Ke ne m'ainst pais C i3 com f. et com C 14 Si l'em por- roit maus venir TM; bien m. C i5 Ensi C 17 Or i

30 VARIANTES ET NOTES

a moût O; de ceus et de celles [fin du vers) C i8 Par . cui je sui moût laidiz 0; je m. M 19 Por 0; A ceus k'ai fait C; covretures TM; des eulz O 20 Mais manque dans M; Et dient tuit j'ai m'espris O, Maix li pluxor ont mespris C; a moût b. T 21 De son anel ke je mix en terainne C 22 Car C, Et m. O; Dont li miens cors fu traïs TM 23 Que O; p. celui TM 24 Par que je s. entrepris O; s. mal baillis T, s. si mal baillis M 26 boen cheval C 28 perjur C 3o Car C 3i les fauls co- vines C.

Éditions : Buchon, I, 420; Dinaux, III, 390; Brakelmann, Arch., XLIII, Sjb ; Schelerj 3o ; Brakelmann, Chansonniers, 82; Wallenskôld, G. de B., 235; Jeanroy, Romania, XXI, 423.

IX, L'autrier un jor après la Saint Denise.

Raynaud 1623.

Manuscrits : C, /. 128 (Gunes de Betunes); M, /. 47 (Mesire Quenes; couplets i, 11, iv); T, f. 100 (Mesire Que- ues; couplets i, II, iv); Z7, /. 97; e, /. 2 [couplets i, 11, iv); musique notée dans M et T. Graphie de 7", pour le cou- plet III celle de U.

2 1ère C, Eire U; butunes CU 3 G'i (?) fui rep[ris] e; Remenbrait (Ramanbre U) moi des gens CU\ gens T" 4 mis et sus intervertis dans CU 5 Ke ja T; folement C 7 K'ains CU; ne Ue; ke d'une TM 8 Mais tant U; Ke me fist tant C; fust TMe 9 Ge e, Il CU; d'un home [U ajoute a) desconfire CU; desconfisse TM 10 Se Ce; Et se d. U; b. la r. CZ7, b. r. et e 11 Por ce s'en e; S'on prant per droit d'un lairon la CU ; justice tous les mss. 12- K'en afiert il a loiaul C ; il manque dans f/, ce (?) e; a leals U; mellors e; de la gent U i3 Niant C; N. certes U; a droit ce (?) e i5 cou ke d. T; blasmer loent TM] blâme U 16 Si M; ke li saige moins prisent (s. des- prisent U) CU ; a. mesprise (?) e 17 a f. U 18 c'

CHANSONS VIII-X 3l

manque dans C 19 C'une autre amor m'est el c. si C; ou cors U 20 Ke tous li cors m'en a. C 22-23 interver- tis dans les deux mss. 22 K'en moy ne truis C 28 Et j'amerai C 24 sa manque dans C 23 En C 26 métrai (ai mis U) tout mon penseir CU 27 Et ne e; Maix ceu me fait sovent estre en CU 29 Quant trop M; Maix ceu m'en ait mainte fois conforteit C ; l'orguillouse U 3o manque dans C ; Or m'i doint dieus M ; Mais ce me fait avoir U; vraie TM 3i K'el monde n'ait nulle si grant f. CU— 32 plaierT.

Éditions : La Borde, II, 169; Auguis, II, 21; P. Paris, 89; Buchon, I, 422; Leroux de Lincy, I, 41; Dinaux, III, 396; Hofmann, Sitzungsber., 1867, II, 607; Brakelmann, Arch., XLII, 368; Scheler, 24; Brakelmann, Chansonniers, 87; Wallenskôld, G. ne B., l'i-j ; Meyer-Raynaud, 97; Wal- lenskôld, N. Mitt., 1917, 11.

X. L'autrier avint en cel autre païs.

Raynaud i5j4. Débat^fictif entre un chevalier et une dame.

Manuscrits : C, f. g 8 (Messirez Gunes de Betunes); H, f. 22g ; I,f. i55 ; K,p. 22^ (Mestre Richartde Fornival;coM- plets i-v); M, f. 45 (Mesire Quenes, d'après la table du ms.); N, f. log (Mestre Richars de Fornival; couplets i-v); O, f. 74 (couplets i-\); P,f. i52 (couplets i-v); T, f. g8 (Mesire Quenes); U, f. i36; musique notée dans K, M, N, O, P et T. Graphie de T.

I II avint jai C; Ce fu l'autrier en un KNP; au c. U 3 Et lai dame tous jors an lOU 4 Li out H; vee TCHKNPU— 5 Tant k'a un jor C, Jusqu'à un jor KNP; Kant vint après ce (si O, se U) li ait dit lOU 6 Moneit C, Amé O; Par parolles vos ait (ai U) meneit lU; m'avez K, nos ai A^; parolles CH; tous /, tôt U ; Jors / 7 donee KNP, moustree M, grée T, esprovee lU 8 Très P; D'ore en avant serai a vo TM, Si ferai mais dou tout v.

32 VARIANTES ET NOTES

O; soiez li miens amis H, seux a (an U) v. plaisir CIU 9 l'esgardait ens el C lo Moût la vit paule tainte et 0; V. tinte p. U; m. tainte et T ii Par dieu d. HKNP; dit 0; fait il manque dans KNP; certes manque dans CHIKNOPU; bien sui morz et trahiz O, mort m'aveis et trait CIU, mort [répété dans P) sui et entrepris KNP 12 Quant CIKNOPU; des l'autrier ne soi KNP, des (de lU) l'autre an n'ostes (ne sai /, ne soi U) CIU ; l'autrier O; vostre lU i3 Li vostre vis KNP; Ke vostre vis me lU; biauls v. C 14 M'est si torneis dou tout de CKNOP, Qui or est si (ci U) aleis de lU i5 Ce m'est IKNPU; k'il C, vos lU; que vos m'estes H 16 avés a moi cest M, avez vers moi cest HO; quis H 17 s'oï et si inter- vertis dans T 18 Vergoigne CIU;> Honte en ot grant O; duel KNP; et a (au /) cuer l'en prist ire CIU, si res- pondi marrie O; p. félonie HKNP 19 Danz chevaliers KNP; ge di H; on (l'an /) vos doit bien CIKNPU, je vos sai bien 0; vous dis pour g. M; ameir CIU 20 Ne cui- diez pas H; donkes U; lou deïsse CIU 21 Conques H; Nenil per deu CIOU, Nenil certes KNP; onc (ainz 0) ne l'oi KNOP 22 Voulez KNP; C'onkes nul jor je vos doignaisse CIU; dont manque dans HO 28 Ke vos aveis sovent (par deu lU) gringnor CIU; certes TKNOP (répété dans le premier ms.); plus avez grant H, ains avrïez KNOP 24 Du NP; garçon HO; escoleir / 25 Par deu dame j'ai CIU, Certes dame j'ai O; conter H 26 vo biaulteit CIU; mies IU—1-; troies TCIU; ai CIKNPU; roï je ja H; oïr c. (7 28 Qui fu ja dis O; grant manque dans N 29 l'on HM; que lU ; la plaice CIOU 3o Si vos lo bien par tant H, Por ceu vos lo (loz I, loi U) dame CIU, Par tel reson vous lo KNP, Ensi dame vos lo 0 5r Kil cil U, Ke tuit cil I; repris HO, roteit C, arresteit /, aratteit U; de iresie T, d'ere- sie U, d'azérie /, de tricherie C 32 ne voldroient H 33^Danz chevaliers KNP; trop T; mar nos (vos HIOU) vint en CHIOU; mar i avez gardé KNP; penser TCIU

CHANSON X 33

34 Ke CHIOU; m' manque dans KNP 35 Car se H; j'eusse ja O; tôt et mon jovent intervertis dans TM; tens O 36 je si (tant KNOP) riche (bêle KNP) et de h. HKNOP; de moult h. CIU; grant TM 3; On CU, L'on /; a mult pou KNOP; d'avantage 0—38 Qu'oncor KNP; N'a pas ancor H, Ne il n'a pas encor O, Certes aincor n'a pas CU, Certes n'ait pas ancor /; p. ce cuit un [le dernier mot manque dans N) KNP; deus CIU; entir manque dans CIKNOPU 40 barvois P, baviers O, bre- tons C, borjois /; alait por moi josteir C; p. moi moût U; ploreit IKNOPU 41 Certes H; Dame fait il TM; puet bien (moût lU) greveir CIU 42 gairdeis CIU; f. ens vostre s. TM; a lU 43-48 se trouvent dans CIU dans l'ordre 4-5-6-1-2-3 43 Car teil cent ont por vostre amor josteit (ploreit lU) CIU; t. -XIIII- ont ^. H 44 S'or estiez H, Ke c'estïés (s'estïeiz /, s'astïez U) CIU 45 N'en averoient (N'an avront il /, N'an n'avront il U) ja maix la (lour lU) CIU 46 Out [sic] £/, L'en H; por signoraige C 47 Ains (An U) l'aimme l'om (on /) quant elle est belle (prous lU) et CIU; est cortoise et preus e\. H 48 saveis C, savriez /; per tenson [ce mot biffé) la verteit C.

Éditions : La Borde, II, 194; P. Paris, 107; Buchon, I, 419; Leroux de Lincy, I, 36; Dinaux, ÎII, 394; Meyer, Arch. des missions, 2e sér., V, 226; Bartsch, Afr. Rom. u. Past., 76; Brakelmann, Arch., XLII, 33o; Scheler, 20; Brakel- tnann, Chansonniers, 84; Wallenskôld, C. de B., 239; Meyer- Raynaud, i36; Steffens, Arch., XCVII, 293; Bertoni, Arch. Rom., I, 344, 401; Aubry, 226.

Remarques. Pour le contenu des vers 23-24, cf. Eneas, p. p. J. Salverda de Grave (Halle, i8gi), p. 3i8, vers 8567-J7.

INDEX DES NOMS PROPRES

Artois III 1 3 ; pour les mos d'Ar- tois, voir ci-dessus, p. xvi.

Barrois (li) X 40, Guillaume des Barres; voir ci -dessus,

p. XII.

Betune IX 2, Béthune; le pas- sage montre que le poète, lors de la composition de la chanson, vivait en Artois.

Cartaige X 44; fille au roi de C, jeune fille extrêmement riche.

Champenois III 6.

Chapelaine (la fause) VIII i5. Allusion obscure; peut-être s'agit-il de quelque fabliau perdu.

Denise (la Saint) IX i, fête de saint Denis, apôtre des Gau- les, probablement celle du g octobre; l'or de Saint D., VII var. {ms. U, add. v. 41J, les richesses de l'abbaye de Saint-Denis.

France V 16 ; la millor del roiaume de France IX 25 montre l'importayice de la cour de France pour un grand seigneur artésien de la fin du XIII' s.

François III 5.

GiLON V var. (fin), personnage inconnu.

Marchis (li) X 39, le marquis Boniface II de Montf errât; voir ci-dessus, p. xii.

NoBLET I 43, personnage incon- nu; voir ci-dessus, p. xiii.

Oissi (mon mastre d') V 5i, Huon III d'Oisi; voir ci-des- sus, p. IV.

Pontoise III 14; on voit que, déjà vers 11 80, Pontoise (Seine-et-Oise) était renom- mée pour sa bonne pronon- ciation du français. Cf. E. Schwan, Rom. Stud., IV, 362 et suiv.

Robert, I 43 [var.), personnage inconnu.

Surie IV 9, VII 18, Terre- Sainte.

Troie X 27.

Turc IV 20, Sarrasin.

GLOSSAIRE

aferir V 45, convenir, falloir. aint VIII 12, 3^ pers. sing. prés.

siibj. de amer, anpirier, voir empirier. anuieus VI 20, qui cause du

chagrin, désagréable; IV 33,

triste. arrière; mètre a. IX 14, né^^liger. asseoir IV 17, assiéger. ausmogne IV 26, charité. autrier (!') IX i, X i, Vautre jour,

naguère.

baillir, voir mal.

baston II 40, lance.

bers V 37, c.-s. sing. de baron.

c' devant or V 35, introduisant un souhait ; voir aussi ke.

certes, chertés (a) IV 42, X20, sérieusement.

chant V 2, mélodie.

clergié IV 25, clerc.

coisier III 3, réjl., rester tran- quille.

conchiier V 38, souiller.

consel, conseil IV 3o, X 16, dé- cision.

convent; por c. ke VII 6, à con- dition que.

covine VIII 3i, manière d'être; le sens des vers 3i-32 est peut- être : « Ceux qui cachent leur fausseté rendent beaucoup de gens déloyaux. »

covoitié V 29, convoitise.

covoitos VII 16, égoïste (?).

cuevre V 24, 3" pers. sing. prés, ind. de covrir.

dechiet VIII 29, 3^ pers. sing, prés. ind. de decheoir, dimi- nuer.

defois- mètre en d. III 4, renon- cera.

dehait V 37, dehaiz ait VII 16, maudit soit. Cf. Romania, XVIII, 46g et suiv.

delitier I 42, réjouir.

deliteus IV 40, agréable.

départie IV i, séparation.

derverie VI i, folie.

desconfire IX 9, détruire, décré- diter.

desgaigier VI 3o, donner congé.

destrece VI 2, désir violent.

devis X 8, désir.

deviser II 33, méditer.

dismer V 17, 28, frapper d'im- pôts; au V. 17, le poète veut sans doute dire que les « ba- rons », en employant la « dî- me saladine » pour leurs querelles particulières, impo- saient indirectement les croi- sés eux-mêmes. Cf. J. Bédier, Chans. de crois., p. 42.

doint, doinst II 4, VIII 26, 3^ pers. sing. prés. subj. de doner; avec un inf. IX 3o, permettre de.

dotance V 21, IX 27, crainte.

embler X i5, enlever.

empirier, anpirier V 35, mettre dans un état inférieur, anéan- tir; ptc. p. V 41, méchant .

emprendre I 14, entreprendre.

encoir III 10, encore que.

36

GLOSSAIRE

entïent (a) IX 4., à dessein.

entir X 38, entier.

eschas II 21, jpl.^ jeu des échecs.

escondire I 27, X 4, refuser.

escore II 24, re/Z., se préserver.

escremir II 38, s'exercer à Pes- er ime.

eslite I 44, ptc. p. fém. de es- lire.

espérer {avec de) VI 16, être dans l'attente de, attendre (?); d'autre espérer signifie peut- être « attendre une autre [4). convaincre.

joie » {cf. V. li iprover.Vl 10, <

esprover

failli VI 20, trompeur. fausrriier VI 6, tromper. fausser VIII 4, agir faussement. folaige IV Zo, folie. folor II iZ, folie.

gaber X lO, se moquer de. garant I By, V 3o, protection,

sauve- garde. guerrière VII 12, ennemie.

hatement IX 21, en haut lieu. hontaige IV 24, honte. huiseuse (par) IV 41, oiseuse-

ment. humor VI 34, humidité.

iresie X 3i, sodomie, immora- lité. Pour le sens exact du mot, comparer v. 23-24.

iretaige IV 17, héritage; le saint iretaige de Dieu est Jérusa- lem.

jeter IV 19, délivrer. jovent X 35, jeunesse.

ke, k', c' I 19, 41, V 6, VIII i3, IX 18, car; III 8, VIII i3, comme hoir A. Tobler, Verm. Beitr., I, p. 11 et suiv.).

keudrai VI 36, i' pers. sing. fut. de coillir.

ki, qui IV 11, si quelqu'un; IV 39, IX i3, si l'on.

lascjue IV 3i, lâche,.

legier I i, facile.

leu VI 23, loup.

leuve VI 22, louve. Pour le sens

des vers 22-24, ^^'^ ci-dessus,

p. 27. loër X 3o, conseiller. loier (a) V 27, contre salaire,

par intérêt. los IV 16, louange.

mal; m. bailli V 23, X 11, dans . une mauvaise situation, mal- heureux; m. oïr VIII 14, se faire un mauvais nom.

malaige IV 22, maladie.

manrônt IV 26, 3' pers. plur. fut. de manoir, persévérer, rester appliqué {peut-être avec le double sens de « res- ter [en France] »; cf. J. Bé- dier, Chans. de crois., f. 3j).

merir V 46, récompenser.

mérite I 41, V i5, récompense.

mesparler VI 4, médire.

mesure VI 38, occasion favo- rable.

mont II 3, VIII 16, IX 26, 3i, monde.

muir I 40, /• pers. sing. prés, ind. de morir.

norrir III 14, élever.

ombraje IV 19, obscur; la pri- son ombraje est l'enfer.

outrage, ouiraige II i3, pré- somption, extravagance; III 21, paroles extravagantes.

outraigeus III 19, téméraire.

paraige X 36, parenté, rang.

partir IV 2-], prendre part; réfl., IV 6, VI 32, se séparer; V 16, partir.

pelerinaige IV 27, croisade.

penitance V i3, souffrance ; la doble penitance est la par- ticipation à la croisade et la séparation de la dame aimée.

perjuré {ms. perjur) VIII 28, parjure.

ENTÏENT-TRAINE

37

pesance V 8, chagrin.

pieur VI 2a, c.-rég. de pire. Pour

le sens aes vers 22-24, voir ci- dessus, p. 2 7. pitié V 8, souci. plaissier V 11, IX 32, dompter. plorous VII 20, en larmes. pluxor (li) VIII 32, la plupart.

Cf. sous covine. poise III 7, V 5o, 3" pers. sing.

prés. ind. de peser, causer du

chagrin. por tant que V 40, pourvu que. poverte IV 22, pauvreté. praingnent V 5i, prenge V 43,

3" pers. plur. et sing. pré^.

subj. de prendre, preu IV 41, 42, brave.

quens V 33, c.-s. de conte, com- te. Pour cette forme conjec- turale, voir ci-dessus, p. 25, note I.

qui, voir ki.

quier VIII 2, i" pers. sing. prés, ind. de querre, désirer.

rai X 27, i" pers. sing. prés.

ind. de ravoir, avoir de même. raison II 36, pensée. ramaint IV 4, pers. sing.

prés. subj. de ramener, raniprosner X 17, railler. redoc IX 29, l' pers. sing. prés.

ind. de redoter, renne, resne IV 36, V 39, règne,

seigneurie. Le resne presïeus

IV 36 est le Paradis. reprover X 34, reprocher. resne, voir renne, retaut I 35, 3^ vers. sing. prés.

ind. de retolir, tirer en ar- rière. retenement I 23, soulagement,

bon accueil. reter X 3i, accuser. riche II iD, noble, généreux.

samblance, sanblance I 38, apparition, figure; V 37, ca- ractère] V 49, opinion.

saus VIII 19, plur. de sauz, saule (?)', V expression co- vreture de saus m'est in- compréhensible. M. R. Ber- ger (Canchons und Par- tures des altfr. Trouvère Adan de le Haie le Bochu d'Aras. /, Halle, igoo, p. 407) est enclin à voir dans saus la forme picarde de solidos, « sous », et rattache de l'anel {y. 21) à covreture [v. 19"), coordonnant ainsi de saus (qu'il imprime à tort des saus) et de 1 anel, et tradui- sant covreture par « Unter- schlagung » (accaparement); mais sa traduction du couplet reste, elle aussi, obscure. Voir aussi traîne.

sauver V 14, réfl.^ faire son sa- lut.

se, s', conj., I 10, 20, 28, V 24, etc., si.

sels IV 37, c.-suj. sing. masc. de seul.

signoraige X 42, seigneurie, do- mination.

soffraitous VII 23, misérable. Les vers 22-23 contiennent uneallusionobscure ;M.Jean- roy (Romania, XXI. 421) propose de traduire l'Abeïe as soffraitous par « le ren- dez-vous des misérables » : le poète aurait voulu dire que la situation que lui a faite sa dame n'est pas de son goût.

soffrance I 36, patience.

soffrant V 3i, patient.

talent, talant I 26, III, 3, V 10, IX 18, désir.

tans IV 45, VI 38, temps; par t. X 48, bientôt.

targier V i, réfl., tarder.

tart (a) X 16, trop tard.

tirant V 26, tyran, bourreau.

traîne (mettre en) VIII 21, Comme il s'agit de quelque chose qu'a fait le poète (voir V. 19^ cette expression ne peut

38

GLOSSAIRE

guère avoir le sens défavorable de « s'approprier traîtreuse- ment » que lui donne Sche- ler (Trouvères belges, j?. 2 82). Le sens général du couplet doit être : « Beaucoup de per- sonnes disent que j'ai commis une erreur à propos d'une covreture de saus, que je fis à bon droit, et d'un anneau, ki fu mis en traîne à bon droit, et cela parce que l'anneau a amené ta prtse de possession qui a causé mon malheur. » Voir aussi saus. traire VI 24, attirer; II 28, 34, souffrir.

très V 52, dès.

trover III 19, subst., art de faire des chansons.

vaintre V 11, vaincre. vair VII 17, changeant. vantance V 5, vanterie. vasselaige VI 25, prouesse. vaurai VI 10, VIII 8, vauront

X 32, vauroit VIII 9, fut. et

cond. de voloir. veer X 4, refuser, interdire. voie IV 40, voyage. voist IV 34, 3' pers. sing. prés.

subj. de aler.

TABLE DES MATIERES

Pages

Introduction iii-xxiii

I. Vie de Conon de Béthune m

II. Les chansons attribuées à Conon de Béthune, vu

Les manuscrits vu

Contenu et style des chansons xii

Versification xiv

Langue xvi

Ordre chronologique des chansons . . . xviii

Établissement du texte critique .... xix

Bibliographie xxi

Les chansons de Conon de Béthune 1-18

I (R. 629) : Chançon legiere a entendre .... i

II (R. 3o3) : Si voiremant con celé don je chant. . 3

III (R. 1837) : Moût me semont Amors que je m'en-

voise 5

IV (R. II25) : Ahiî Amors, com dure départie . . 6 V (R. i3i4) : Bien me deûsse targier 8

VI (R. 1128) : Se raige et derverie 10

VII (R. i325, ii3i, 1137) : Belle doce Dame chiere . 12

VIII (R. 1420, 895) : Tant ai amé c'or me convient haïr. i3

IX (R. 1023) : L'autrier un jor après la Saint Denise. i5

X (R. 1574) : L'autrier avint en cel autre pais . . 17

Variantes et notes 19

Index des noms propres 34

Glossaire 35

Table des matières 39

NOGENT-LE-ROTROU, IMPR. DAUPELEY-GOUVERNEUR.

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PQ thune, Gonon de 14.31 Chansons B23 1921

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