..^... IMAGE EVALUATION TEST TARGET (MT-3) // 1.0 1.1 laiM 12.5 i "^ iiiiiM I "- IIIIIM lllllm 11.25 i 1.4 1.6 V v] ^-^ ^J> Hiotographic Sciences Corporation 23 WEST MAIN STREET WEBSTER, N.Y. 14580 (716) 872-4503 •S? \ :\ \ % 6^ ^ CIHM/ICMH Microfiche Séries. CIHM/iCIVIH Collection de microfiches. Csnadian Institute for Historlcal Microreproductions / Institut canadien de microraproductions hlstorlq uas Technical and Bibliographie Notas/Notes techniques et bibliographiques The Institute has attempted to obtain the beat original copy available for filming. 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DE BvFFON, Intendant du Jardin du Roi: de /'Académie Françoife , & de celle des Sciences, &c, NOUVELLE ÉDITION. H. Tome Quatrième. A PARIS, DE U IMPRIMERIE ROYALE. M. D C C L X 1 X. Il ' '. \ K, " Chez PanckOUCKE, Libraire, à r hôtel de Thou, rue des Poitevias, quartier Saint- André-des^ Arcs. ^ f C il ■v./ "'i . -"i«fv •*îx . • ■ 1 ■: t- \\ w^mml^mÊi^^^f^^mm^ TABLE De ce qui eft contenu dans ce . Volume,, Chapitre X» Z)^ la formation dii fœtus Page i Chap. XL Du développement & , de l'aaroijfement du Fœtus , de l'accoU" ihement, &c,.. 64 Récapitulation 14.1 Hiiloire Naturelle de l'Homme, De la nature de l* Homme* • • • i j 1 De l'Enfance*. •••••••• 173 'i, . '■ De la Puberté, 221 De l'Age viril Defcription Je l'Homme, 269 De la Vieillejfe & de la Mort. 3 3 8 Du fens de la Vue 425 Du fens de tOuie, *.••/..♦ 4^^ Dei Sem en géntraL • • *• • • • 4p4 • . - _ , ^ ^^ ■ - \ \ HISTOIRE HISTOIRE NATURELLE. CHAPITRE X. De la formation du Fœtus. IL paroît certain par les obfervatîons de Verrheyen , qui a trouvé de la lemence de taureau dans la matrice de la vache , par celies de Ruifch , de Fallope & des autres Anatomifles qui ont trouvé de celfe de i'homme dans la matrice de piufieurs femmes, par celles de Leeu-> wenhoek qui en a irouvé dans la matrice d'une grande quantité de feiiielies , toutes difTéquées immédiatement après l'accou- plement, il paroît, dis-;e, très- certain que la liqueur féminale du mâle entre dans la matrice de la femelle , foit qu'elle y arrive en fubitance par i'orlfice interne Tomi IV» A -* i: 'Bflolre Naturelle: ' ' - C[v\ paroît être rouvcrmre naturcife par* où elle doit palier , foit qu'elle fè fafîè un pafïïtgc en pénétrant à travers le tiffu du col & des autres parties infifrieures de la matrice qui aboutiiïènt au vagin. II eil très-probable que dans le temps de la copulation i'orifice de la matrice s'ouvre pour recevoir la liqueur féminale, & qu'elle y entre en effet par celte ouverture, qui doit la pomper; mais on peut croire auHi que cette liqueur , ou plutôt la fubflance aiHiive & prolifique de cette liqueur , peut pénétrer à travers ïe tiffu même des membranes de la matrice ; car la liqueur féminale étant , comme nous l'avons prouvé , prefque toute com]:)ofée de molécules organi- ques qui font en grand mouvement , & qui font en même temps d'une petiteffè extrême , je conçois que ces petites parties aélives de la femence peuvent paffer à travers le liffu des membranes les plus ferrées, & qu'elles peuvent pénétrer celles de la matrice "avec une grande facilité. Ce qui prouve que la partie adivc de cette liqueur peut non - feulement clîe pat' fe fafTe i le tiHit fcrîcures 1 vagin, le temps matrice éminale , par cette mais on cur , ou )rolifique à travers ;s de la je étant, prefque organi- ment, & petiteflc es petites peuvent embranes peuvent avec une t\e adivc têulement Des Animaux: f, pafTer par les porcs de la matrice, mais même qu'elle en pénètre la fubftancc, ccll le changement prompt & , pour ainfi dire , fubit qui arrive à ce vifcère, dès les premiers temps de la grofTefTe , les règles êc. même les vidanges d'un accouchement qui vient de précéder , ibnt d'abord fupprimées , la matrice devient plus moila/fe , elle Ce gonfle , elle paroît enflée à rintéricur, &, pour me iêrvir de la comparaifon de Harvcy, cette enflure reflemble à celle que pro- duit la piqûre d'une abeille fur les lèvres des enfans : toutes ces altérations ne peuvent arriver que par i'adtion d'une caufe extérieure , c'eft - à - dire , par h pénétration de quelque partie de la li({ueur féminale du mâle dans la fub- ftance même de la matrice; cette péné- ttation neft point un effet fuperficiel qui s'opère uniquement à la furface, ibit extérieure , (bit intérieure , des vaiflcaux qui conftitucnt la matrice , & de toutes les autres parties dont ce vifcère cft compofé ; mais c'eft une pénétration intime , (èmblable à celle de la nutri- tion & du développement ; c'eft une Ai/ 4 Hipoire Naturelle. pcnetratioti dans toutes les pnrties du moule intérieur de la mutricc , oj)t'réc par des forces fcmblables à celles cjui contraignent la nourriture à pénéirer le moule intérieur du cor|)S y & qui en produisent le développement fans en changer la forme. . ..*. On (è perfuadera facilement que cela eft ainfi , lorfque l'on fera réflexion que la matrice , dans le temps de la grofleliè, non - leulement auginente en volume , mais encore en maïïe , & qu'elle a une efpèce de vie , ou , l'on fi veut , une végétation ou un développement f|ui dure & va toujours en augmentant juf- qu'au temps de l'accouchement ; car fi la matrice n'étoit qu'un fac , un récîj)ient defliné à recevoir la femence & à con- tenir le foetus , on verroit cette efpèce de fac s'étendre & s'amincir à mefure que le foetus augmenterolt en grofîeur, & alors ii n'y auroit qu'une extenfion , pour ainfi dire , fuperficielle des membranes qui compofènt ce vifcère ; mais l'ac- croiflTement de la matrice n'eft pas une fimpie extenfion ou une dilatation à l'or- dinaire | non- feulement la matrice s'étend' Des Anifmww ^ :i incfurc que le foetus aiigmtiue , mais clic prend en même temps tic lu folicliie, de l'épnifTcur , clic acquiert , en un mot, du volume & de U malle en même temps ; ce:te cr])ècc d'augmentation eft un vrai développement , un accroifîê- mcnt i'cmblable à celui de toutes les autres parties du corps, lorfqu'clics fe dévcIoj)pent, qui dès-lors ne peut être produit que par la pénétration intime des molécules organiques analogues à la fubftance de cette partie ; & comme ce développement de la' matrice n'arrive jamais que dans le temps de l'imprégna- tion , & que celte imprégnation fuppofe néceiïairement Tacflion de la lif|ueur du mâle , ou tout au moins qu'elle en eft i'effet , on ne peut pas douter que ce ne foit la liqueur du mâle qui produife celte altération à la matrice , & que cette liqueur ne foit la première cauiê de ce développement, de cette efpèce de végé- tation & d'accroifTement que ce vifcère prend , avant même que le fœtus foit aflez gros & qu'il ait alîèz de volume pour le forcer à fe dilater. vb \ II paroît de même tout aufll certain A iij tf Hifioire NatureVe, par mes expériences, que la femeîîe a une liqueur féminale qui commence à fe former dans les teftîcules, & qui achève de fe pcrfedionner dans ics corps glan- duleux ; cette liqueur coule & diltiile continucHement par les petites ouver- tures qui font à l'extrémité de ces corps glanduleux , & cette liqueur féminale de la femelle peut , comme celle du mâle , entrer dans la matrice de deux façons dif- férentes , foit par les ouvertures qui font aux extrémités des cornes de la matrice , qui paroifTent être les pafîûges les plus naturels, foit à travers le liflu membra- neux de ces cornes , c{uc cette liqueur hume^e & arrofe continuellement. Ces liqueurs féminales font toutes deux un extrait de toutes les parties du corp« de ranimai, celle du mâle e(l un extrait de toutes les parties du corps du mâle, celle de ia femelle efl: un extrait de toutes les parties du corps de la femelle ; ainfi dans le mélange qui ie fait de ces deux liqueurs il y a tout ce qui eft néceflliirc pour former un certain nombre de mâles & de femelles ; plus la quantité de liqueur fournie par l'un & par l'autre ell grande_, lelle a une ncc à fe [ui achève n'ps glan- & diitili^ ïs ouver- ces corps fminale de du mâle, Façons dif^ s qui font i matrice , s les plus membra- te liqueur ent. mtes deux du corj)« Ua. extraie du mâie, : de toutes lie ; ainfi ces deux nt'ceflîiirc ) de mâles k liqueur \ grande^ t Des Animûux» Jf eu, pour mieux dire, plus cette liqueur cïl abondante en molécules organiques analogues à toutes les parties du corps de l'animal dont elles font l'extrait , & plus k nombre des foetus eft grand , comme on le remarque dans les petits animaux ; & au contraire , moins ces liqueurs font abondantes en molécules organiques , & plus le nombre des fœtus cil petit, comm« if arrive datis les efpèces des grands animaux. Mais pour fuivre notre fujet avec plus d'atteruion , nous n'examinerons ici que la formation particulière du foetus humain » fauf à revenir enfuite à l'examen de la formation du fœtus dans les autres efpèces d'animaux, foit vivipares, foie ovipares. Dans lefpèce humaine, comme dans celle des gros animaux , les liqueurs féminales du mâle & de la femelle ne contiennent pas une grande abondance de molécules organiques, analogues aux individus dont elles font extraites , & l'homme ne produit ordinairement qu'un & rarement deux foetus ; ce foetus eft jiiâle fi le nombre des nnolécules organiques du mâle prédomine ilans le mélange des deux liqueurs, il eft A lli} 'i 8 fJipire Naturelle. lëmelle fi le nombre des parties organi- ques de la femelie eR le plus grand , & l'enfant re(îembleau père & à la mère, ou bien à tous deux , félon les combinaifons différentes de ces molécules organiques , c'eft-à-dire, fuivant qu'elles fe trouvent en telle ou telle quamiié dans le mélange des deux liqueurs. . Je conçois donc que la liqueur fémi- nale du rnâlc , répandue dans le vagin , & celle de la femelle répandue dans la îRâtrice, font deux matières également aélives , également chargées de molécules organiques propres à la génération ; & cette fuppofition me paroît afîcz prou- vée par mes expériences , puifque j*aî trouvé ies mêmes corps en mouvement dans la liqueur de la femelle & dans celfe du mâle ; je vois que la liqueur du mâle entre dans la matrice, où elle rencontre celle de la femelle , ces deux liqueurs ont entr'elles une analogie parfaite , puif- qu'ellés font compofées toutes les deux de parties nori-feulement fimilaires par leur forme , mais encore abfolumcnt fcmblabfes dans leurs <,nouvemens & dans leur a. comme le (ont les molécules organiques des parties communes aux deux indivi- dus , peuvent agir les unes fur les autres iàns (ê déranger, & fe ra(îèmbler , comme fi elles avoient été extraites du même corps ; mais les parties diffemblables , c^Hiime le (but les molécules organiques Des A/maux, i i\ des parties fexueUes , ne peuvent agir Tes unes fur les autres , ni fe mêler intime- ment, parce qu'elles ne font pas (cm- blables , dès- lors ces parties feules con- ferveront leur nature fans mélange, âc fe fixeront d'elles-mêmes les premières , fans avoir befoin d'être pénétrées par les autres ; ainfi les molécules organiques qui proviennent des parties fexuelles , feront les premières fixées, & toutes les aiurps qui font communes aux deux individus, fe fixeront enfuite indifférem- ment & indifiindement , (bit ceHes du mâle, (bit celles de la femelle, ce qui formera un être organifé qui redèmblera parfaitement à fbn père (î c*eft un mâle , & à (a mère fi c*eft une femelle, par ces parties (èxuelles , mais qui pourra refTembler à Tui? ou à l'autre , ou à tous les deux , par toutes les autres parties du corps. Il me (êmble que cela étant bien entendu « nous pouvons en tirer l'ex- plication d'une très - grande queftion , dont nous avons dit quelque chofè au thaphre V^ dans l'endroit où nous avons rapporté le fentim«nt d'Ariftote au fujet A y) i 1 Hiflotre Naturelle: de la génération : cette queflîon efl Je favoir pourquoi chaque individu maie ou femelle ne produit pas tout (eul fon femblable. Il faut avouer, comme je l'ai déjà dit, que pour quiconque appro- fondira la matière de la génération & (e donnera la peine de lire avec attention tout ce que nous en avons dit jufqu'icîy il ne reliera d'obfcurité qu'à l'égard de cette queftion , fur-tout iorfqu'on aura bien compris la théorie que j'établis ; & quoique cette efpèce de difficulté ne foit pas réelle ni pardcuiière à mon fydènie, & qu'elle foit générale pour toutes les autres explications qu'on a voulu , ou qu'on voudroit encore donner de la génération , cependant je n'ai pas cru devoir la diflimuler, d'autant plus que dans la recherche de la vérité , la première règle de conduite efl d'être de bonne foi avec foi-même. Je dois donc dire qu'ayant réfléchi fur ce fujet, auffi long-temps & auffî mûrement qu'il l'exige, j'ai cru avoir trouvé une répon(è à cette quef- tion, que je vais tâcher d'expliquer, fans prétendre cependant la faire entendre parfaitement à tout le mnde. me je l'ai le appro- ition âc Ce attention jufqu'ici, 'égard de u'on aura ftablis; & [té ne foh fyftcnie, toutes les Dulu , ou ler de ia pas cru plus que première 50nnc foi qu'ayant ig- temps j'ai cru te quef- uer, fans entendre Des Animaux: ff Il cfl clair pour quiconque entendra bien le fyftème que nous avons établi dans les quatre premiers chapitres , de que nous avons prouvé par des expé- riences dans les chapitres fui vans , que ia reprodu(5lion fe fait par la réunion de molécules organiques renvoyées de chaque partie du corps de i'animal ou du végétal dans un ou piufieurs rélervoirs communs ; que les mêmes molécules qui fervent à la nutrition & au développe- ment du corps , fervent enfuite à ia repro- dudion ; que l'une & l'autre s'opèrent [par la même matière & par les mêmes loix. H me femble que j*ai prouvé cette vérité par tant de raifons & de faits , qu'il n'eft guère pofîible d'en douter ; je n'en doute pas moi-même, ôi j'avoue qu'il ne me refte aucun fcrupule fur le fond de cette théorie, dont j'ai examiné très- rîgoureufèment les principes, & dont j'ai combiné très - fcrupuleufement les conféquences & les détails ; mais il efl vrai qu'on pourroit avoir quelque raifon de me demander pourquoi chaque animal , chaque végétal , chaque être organifé ne produit pas tout feul fon femblabie, // ^ï 4 Hl/foire Naturelle: puifque chaque individu renvoie de toutes les parties de Ton corps dans un réiervoir commun toutes les molécules organiques nécedàires à la formation du peiit être organifé. Pourquoi donc cet ctre organifé ne s'y forme-t-ii pas , & que dans prefque tous ies animaux il faut que ia liqueur qui contient ces molécules organiques , (bit mêlée avec celle de l'autre fexe pour produire un animal! Si je me contente de répondre que dans prefque tous les végétaux, dans toutes les efpèces d'animaux qui (è produifem par la divi- iîon de leur corps , & dans celle des pu- cerons qui (è reproduifent d'eux-mêmes , la Nature fuit en effet la règle qui nous paroît la plus naturelle; que tous ces individus produifent d'eux-mêmes d'au- tres petits individus fêmblables ; & qu*oil doit regarder comme une exception à cette règle, l'emploi qu'elle fait des (èxes dans les autres efpèces d'animaux , on aura raifon de me dire que l'exception cil plus grande & plus univerfclle que la règle, & c'eft en effet là le point de la difficulté; difficulté qu'on n'afFoiblit que très-peu lorfqu'on dira que chaaj Des Animaux* \ f Lidividu prodiiiroic peut-être (on ièin- blabie y s'il avoit des organes convenables & s'il contenoit fa matière nécefTaire à la nourriture d% i'embryon ; car alors on demandera pourquoi les femelles qui ont cette matière & en même temps les organes convenables , ne produifent p>as d'elles-mêmes d'autres femelles^ puifque dans cette hypothèfe on veut que ce ne foit que faute de matrice ou de matière propre à Taccroiflement & au dévelop- pement du foetus, que le mâle ne peut pas produire de lui-même. Cette ré- ponle ne lève donc pas la difficulté en entier, car quoique nous voyons que les femelles des ovipares produifent d'elles - mêmes des œufs qui font des corps organifés , cependant jamais les femelles , de quelque efpèce qu'elles fbient , n'ont feules produit des animaux fc/nelfes, quoiqu'elles foient douées de tout ce qui paroît nécefTaire à la nutrition & au développement du foetus. II faut au contraire , pour que la produdion de prefque toutes les efpèces d'animaux s'accomplifle , que le mâle & h fe- melle concourent; que les deux liquettrs îî*^. • pI'h 'i 6 Hifloire Naturelles fémînales fè mêlent Su (c pénètrent , fans quoi il n'y a aucune génération d'animal. Si nous difons que !*etablifîèment loca! des molécules organiques & de toutes les parties qui doivent former un fœtus ^ ne peut pas (c faire de (bi-même dans l'Individu qui fournit ces molécules, que , par exemple, dans les tedicules & (es véficules féminales de l'homme qui con- tiennent toutes les molécules nécefiàires pour former un mâle , l'établiiïèment focal , l'arrangement de ces molécules , ne peut (e faire, parce que ces molécules , qui y font renvoyées, font auffi conti- nuellement repompées , & qu'il y a une cfp'èce de circulation de la femence , ou plutôt un repompement continuel de cette liqueur dans le corps de l'animal , & que comme ces molécules ont une très -grande analogie avec le corps de . l'animal qui les a produites, il eil fort naturel de concevoir que tant qu'elles font dans le corps de ce même individu y la force qui pourroit les réunir & en former un fœtus , doit céder à cette force plus puilTante par laquelle elles font Des Animaux, IJ repompt'cs dans !c corps de l'animal , ou ;du moins que Teffèt de cette réunion efl empêché par i'ndion continuelle des nouvelles molécules organiques qui arri- vent dans ce rcfervoir , & de celles ((ui en font repompées & qui retournent Idans les vaidéaux du corps de l'animal : fi nous difbns de même que les femmes dont les corps glanduleux des teAicuIes contiennent la liqueur féminnle, laquelle diilille continuellement fur la matrice , ne produiient pas d'elles - mêmes des femelles, parce que cette liqueur qui a, comme celle du mâle , avec le corps de l'individu qui la produit, une très- grande analogie , eft repompée par les parties du corps de la femelle, & que comme cette liqueur eft en mouvement , \ài , pour ainii dire , en circulation continuelle, il ne peut (e faire aucune réunion, aucun établiflement local des parties qui doivent former une femelle , parce que la force qui doit opérer cette réunion , n'cft pas auiîi grande que celle qu'exerce le corps de l'animal pour repomper & s'aflimiler ces molécules qui en ont été extraites, mais qu'au contraire. l8 Hiflelre Naîurelle. iorfque les liqueurs fcminales font mh- iées , elles ont entr'elies plus d'analogie qu'elles n'en ont avec les parties du corps de la fonelle ou fe fait ce mélange, A: que c'eft par cette raifon que la réunion ne s'opère qu'au .moyen de ce mélange , nous pourrons par cette rcponfe avoir fatisfait à une partie de la queftion ; mais en admettant cette explication , on pourra me demander encore , pourqud la manière ordinaire de génération dans les animaux n'eft-elle pas celle qui s'ac- corde le mieux avec cette ruppofition ! car il faudroit alors que chaque individu produisît comme produifent les limaçons, que chacun donnât quelque choie à l'autre également & mutuellement y & que chaque individu remportant les mo- lécules organiques que l'autre lui auroit fournies, la réunion s'en fît d'elle-même & par la feule force d'affinité de ces molécules entr'elies , qui dans ce cas ne feroit plus détruite par d'autres forces comme elle Tétoît dans le corps de l'autre individu. J'avoue que fi c'étoit par cette icule raifon que les molécules or- ganiques ne fè réuniûènt pas dans chaque J es font mé- is d'analogie ties du corps mélange, âc c ia réunion ce mélange , ponfe avoir i queHion ; ication, on , pourquoi ération dans lie qui s*ac- uppofuîon ! [ue individu es limaçons, ^ue chofe à llemcnt , & ant les mo- 'e lui auroit i'elle-mêmc lité de ces is ce cas ne itres forces ! corps de i c'ctoit par ilécuîes or- ans chaque Des Animaux.' i^ îndivîdu , il feroit naturel d'en conclure que le moyen le plus court pour opérer la reprodu^ion des animaux, feroit celui de leur donner les deux fcxes en même temps, & que par conféquent nous de- vrions trouver heaucoup plus d'animaux i doués des deux fexes , comme font les limaçons , que d'autres animaux qui n'auroient qu'un (èul fexc ; mais c'ed tout le contraire , cette manière de génération eA particulière aux limaçons & à un petit nombre d'autres efpèces d'animaux ; l'autre où ia communication n'efl pas mutuelle , où l'un des individus ne reçoit rien de l'autre individu , & où il n'y a qu'un individu qui reçoit & qui produit, ett au contraire la manière la plus géné- rale & celle que la Nature emploie le plus îfouvent. Ainfi cette réponfe ne peut '/aiisfaire pleinement à la queftion , qu'en fuppolànt que c'eft uniquement faute d'organes que le maie ne produit rien, que ne pouvant rien recevoir de la femelle , & que n'ayant d'ailleurs aucun vifcère propre à contenir Si à nourrir le fœtus , il cft impoffible qu'il produife comn^e la femelle qui eft douée de ces organes. 2 0 NiJIolre Naturelle» On peut encore fuppofer que dans îa liqueur de chaque individu, l'adivité des molécules organiques qui proviennent de cet individu , a beîbin d'être contre- balan- cée par i'at^ivité ou ia force des molécules d'un autre individu, pour qu'elles puifTent fè fixer ; qu'elles ne peuvent perdre cette adlivité qu^ par la réfiftance ou le mou- vement contraire d'autres molécules fem- biables & qui proviennent d'un autre in- dividu, & que fans cette efpècc d'équilibre entre l'aiflion de ces molécules de deux individus difFérens , il ne peut réfultcr i'état de repos , ou plutôt l'établiflèment local des parties organiques qui ell né- ceiïàire pour la formation de l'animal ; que quand il arrive dans le réfervoir féminal d'un individu , des molécules organiques fêinblables à toutes les parties de cet individu dont elles font renvoyées , ces molécules ne peuvent fe fixer , parce que leur mouvement n'efl point contre- balancé , & qu'il ne peut l'être que par l'aiîtion & le mouvement contraires d'autant d'autres molécules qui doivent provenir d'un autre individu , ou de par- ties différentes dans le même individu ; i Des Animaux, 2 i [que, par exemple, dans les arhres chaque bouton qui peut devenir un petit arbre, a d'abord été comme le réfèrvoir des mo- lécules organi(|ues renvoyées de certaines parties de l'arbre; mais que l'adivité de CCS molécules n'a été fixée qu'après le renvoi dans le même iieu de plufieurs [autres molécules provenant d'autres par- ties, & qu'on peut regarder fous ce point de vue les unes comme venant des parties niàles , ôi. les autres comme provenant des parties femelles; en forte que dans ce (ens tous les êtres vivans ou végétans doivent tous avoir les deux (exes conjointement ou féparémcnt, pour pouvoir produire leur femblabïe : mais cette réponfe eft trop générale pour ne pas lai((ër encore beaucoup d'obfcurité ; cependant Ci Ton fait attention à tous les phénomènes, il kHic paroît qu'on peut i'éclaircir davantage. Le réfultatdu mélange des deux liqueurs » mafculine & féminine, produit non-(èu- lement un foetus mâle ou femelle., mais encore d'autres corps ôrganifés, & qui d'eux-mêmes ont une efpèce de végé- tation, & un accroiffement réel ; le pla- centa >ies membranes, &c. font produits ;/ 1 2 Hiftoire Naturelle, " ■ en même temps que ic fœtus , & cette produdlion paroît iii''me fc développer la première ^ il y a donc dans la liqueur féminale, foit du mâle, fuit de la femelle, ou dans le mélange de tous les deux , non-fèulement les molécules organiques nécefîaires à la production du fœtus , mais aufn celles qui doivent former le placenta & les enveloppes ; & l'on ne fait pas d'où CCS molécules organiques peuvent venir, . puifqu'il n'y a aucune partie dans le corps, îbit du mâle , foit de la femelle , dont ces molécules aient pu être renvoyées, & que par conféquent on ne voit pas qu'il y ait une origine primitive de la forme qu'elles prennent, lorfqu 'elles forment cesefpèces de corps organifés difFérens du corps de l'animal. Dès-lors il me femble qu'on ne peut pas fe difpenfêr d'admettre que ics moléculej» des liqueurs féminales de chaque individu mâle 5c femelle , étant cgaferaent organiques & adives, forment toujours des corps organîfés toutes les fois qu'elles peuvent fe fixer en agiffant mutuellement les unes fur les autres ; que ks parties employées à former un mâle, feront d'abord celles du 6xe m^fculûi mw Des Ammaus. ij «(Ui fc fixeront ïcs premières êc formeront les parties fexueiles , & qu enfuiic celles qui font communes aux deux individus pourront fe fixer indifFcremment pour former ie refte du corps , âc que (c placenta & les enveloppes (ont formées de l'excédant des molécules organiques ui n'ont pas été employées à former le œtus; fï, comme nous le (uppofons, ie Ifcctus cft mâle , alors il relie pour former ie placenta & tes enveloppes , toutes les molécules organiques des parties du fexe féminin qui n'ont pas été employées , & auffi toutes celles de l'un ou de l'autre «les individus qui ne feront pas entrées dans la comfvofnion du ^tus, qui ne eut en admettre que la moitié; & de iiême fi le fœius cft iêmeUe, il relie pour or mer le placenta , toutes les molécules rganiques des parties du fèxe mafcuJin celles des autres parties du corps , tant u mâle que de la femelle , qui ne font pas entrées dans la compofition du fœtus, ou qui en orM été exclues par la préfence des autres molécules fèmblablçs qui fc ibnt réunies les premières. Mais, dû:a>t-on, les eiweloppes & la a 4 Hipoire Naturelle, placenta devroient alors être un autre foetus qui feroit femelle fi le premier étoit mâle, & qui feroic mâle fi le premier étoit femelle , car le premier n'ayant confommé pour fe former, que les molécules orga- niques des parties fexuelles de i'un des individus, & autant d'autres molécules organiques de i'un & de l'autre des indi- vidus, qu'il en falloit pour fà compofitîon entière , il relie toutes les molécules des parties fexuelles de l'autre individu , & de plus la moitié des autres molécules com- munes aux deux individus. A cela on peut répondre que la première réunion , le premier établifîèment local des molécules organiques, empêche que la féconde réunion fe fàffe , ou du moins (e fafi!è fous la même forme ; que le fœtus étant formé le premier, il exerce une force à l'exté- rieur , qui dérange l'établifi^ement des autres molécules organiques , & qui leur donne l'arrangement qui eft néceffàire pour former le placenta & les enveloppes ; que c'eft par cette même force qu'il s'approprie les molécules nécefifaircs à (on premier accroiflèment, ce qui caule nécef- Virement ua dérangement qui empêche d'abord -Js Des Ammmix, Ij d'ïibord la formation d*un fécond foetus , & qui produit enfuite un arrangement dont rérultc ia forme du placenta & Clq^ membranes. Nous fommes aflures par ce qui a été dit ci-devant, & par les expériences & les obfer valions que nous avons faites, que tous les êtres vivans contiennent une grande quantité de molécules vivantes & adlives; la vie de l'animal ou du végétal ne paroît être que le réfuliat de toutes les avions , de toutes ies petites vies particu- ^lières ( s'il m'eft permis de mcxprimec lainfi ) de chacune de ces molécules ac- ftivcs dont la vie eft primitive & pareît ne pouvoir être détruite ; nous avons trouvé ces molécules vivantes dans tous les êtres vivans ou végétans , nous fommcs affurés que toutes ces molécules s organiques font également propres à la nutrition , & par conféqucnt à la repro- duction des animaux ou des végétaux. II n'efl donc pas difficile de concevoir que quand un ccrraio nombre de ces molé- cules font réunies , elles forment un être jvivant; la vie étant dans chacune des par-* tics , elle peut fe retrouver dans un tout Tome Jy, ^ B 1 2 6 'Hifloire Naturelle: dans un afTemblage quelconque de ces parties. Ainfi les molécules organiques 6c vivantes étant communes à tous les êtres vivans , elles peuvent également former tel ou tel animal , ou tel ou tel végétal , félon qu'elles lèront arrangées de telle ou telle façon : or cette difpofnion des par- tics organiques , cet arrangement dépend abfolument de la forme des individus qui fournifTent ces molécules ; {\ c'eft un animal qui fournit ces molécules orga- niques, comme en effet il les fournit dans ia liqueur féminale , elles pourront s'ar- ranger fous la forme d'un individu fem- blable à cet animal ; elles s'arrangeront en petit, comme elles s'étoient arrangées en grand lorfqu'ellcs (èrvoient au dévelop- pement du corps de l'animal ; mais ne peut-on pas fuppofer que cet arrangement lie peut fe faire dans de certaines efpèces d'animaux, & même de végétaux, qu'au moyen d'un point d'appui ou d'une efpèce de bafe autour de laquelle les mo- lécules puiflTent fe réunir, & que fans cela elles ne peuvent fe fixer ni fe raflembJer, parce qu'il n*y a rien qui puifîè arrêter leur aéliyité \ or c'eft cette bafe que fournit fc^' e de CCS miqiies & i les êtres u former l végétal , ie telle ou n des par- nt dcpencJ iividus qui i c'eft vin iiles orga- ournit dans irront s'ar- lividu fem- uigcront en |rrangées en u dévelop- il : mais ne rrangement mes efpèces jiaux , qu'au ou d'une elle les mo- |ue fans cela ralTembler , ulfl'e arrêter que fournit Dûs Animaux: I7J 'individu de l'autre fexe : je mVxpïique. Tant que ces molécules organiques Font feules de leur efpèce , comme elles le font dans la liqueur féminale de chaque idividu, leur adi prod uit aucun ^fFet , parce qu'elle eft fans réadion ; ces olécules font en mouvement continuel s unes à regard des autres, & il n'y a ien qui puifïè fixer leur adlivité, puif» u'clles font toutes également animées, alement actives, ainlj il ne fe peut faire aucune réunion de ces molécules qui (bit "mijlable à l'animal, ni dans Tune, ni ns l'autre des liqueurs féminales des ux fexes , parce qu'il n'y a , ni dans ne , ni dans l'autre , aucune partie (Temblable , aucune partie qui puiflc vir d'appui ou de bafe à l'adion de ces lécuies en mouvement ; mais ïorfque s liqueurs font mêlées , alors il y a des nies diffemblables , & ces parties font molécules qui proviennent des parties xuelles , ce font celles-là qui fervent de (e & de point d'appui aux autres molé- les, & qui en fixent l'adivité ; ces parties ant les feules qui foient différentes des très , il n'y a qu'elles feules qui puiifent ai 8 Hiflaire Ndturefle. avoir un effet différent , réagir contre les îiutres, & arrêter leur mouvement. Dans cette ruppofuion les molécules organiques qui , clans ie mélange (\c% liqueurs féminales des deux iiulividus, rcpréfentent les parties (cxueilcs du mâle, iêrort les feules qui pourront fèrvir de bafc ou de point d'appui aux molé- cules organiques qui proviennent de toutes les parties eu corps de la femelle, & de même les molécules organiques <]ui , dans ce mélange , repréicnient les parties (exueiles de la femelle , feront les feules qui fervirom de point d*appui aux molécules organiques qui provien» nent de toutes les panies du corps du mâle, & cela, parce que ce font les feules ^ui foient en effet différentes des autres. r)e-là on pourroit conclure que Ten- fant mâle. e(t formé des molécules orora-l niques du père pour les parties fexuelles, & des molécules organiques de la mère pour le refte du corps, & qu'au contraire la femelle ne tire de (a mère que le IcxeJ & qu'elfe prend tout le refte de fon père ; les garçons devroient donc , à l'exception des parties du fèxe^ r^ffçmbkn Des Animaux, ap' davantage à leur mère qu'à leur père, âc les filles plus au père qu'à ia mère ; ccuc confeqiience , qui luit néceflairemeiu de • notre ruppofition , n'eft peut-être pas ' allez conforme à l'expérience. En confRlcrant fous ce point de vue lia génération par les Texes, nous en con- 4 durons que ce doit être la manière de * reproduction la plus ordinaire, comme f elle i'ert en clîêt. Les individus dont i'or- ganifaiion eit la plus complète , comme celle des animaux dont le corps fait un tout qui ne peut être ni féparè ni divifé, dont toutes ks puiflances fe rapportent à un leui point & fe combinent exade- mcnt , ne pourront fe reproduire que par cette voie , parce qu'ils ne coniien- iient en efïet que des parties qui font toutes feHiblables cnir'elles , dont lu réu- nion ne peut fe faire qu'au moyen de quelques autres parties différentes , four- vies par un autre individu ; ceux dont l'organifation efl moins parfaite , comme i'ell celle des végétaux dont le corps f»ût un tout qui peut être divifé & féparé fms êire détruit , pourront fe rcpro- Uiiire par d'autres voies, i.** parce qu'ils B uy f30 hijloire Naturelle. coniienncnt des parties diiïèmbîabici , A." parce que ces êtres n'ayant pas une forme aiifll déicrminée & aufli fixe que celle de ranimai , \q$ parties peuvent fup- pléer les unes aux autres, & (è changer félon les circonftances, comme l'on voit les racines devenir des branches & pouf- fer des feuilles lorfqu'on les expofe à l'air, ce qui fait que la pofiiion & l'établiffc- ment du local des molécules qui doivent former le peut individu,, fe peuvent faire de pluficurs manières. II en fera de même des animnux dont i'organifation ne fait pas un tout bien déterminé , comme les polypes d'eau douce & les autres qui peuvent fe repro- duire par la divifion; ces êtres organifés font moins un feul animal que plufieurs corps organifés femblables , réunis fous une enveloppe commune , comme les arbres font auffi compofés de petits ar- bres femblables ( voyei^ chapitre II ), Les pucerons qui engendrent feuls , con- tiennent auffi des parties diflemblables , puifqu'après avoir produit d'autres pu- cerons , ils fe changent en mouches qui ne produiiènt rien. Les limaçons fe Des Animaux, 3 l communiquent mutuellement ces parties ciifTemblables , & enfuite ils produilent tous les deux ; ainfi dans toutes les ma- nières connues dont la génération s'o- père , nous voyons que la réunion des molécules organiques qui doivent former la nouvelle produdion , ne peut fe faire que par ie nioytn de quelques autres parties différentes qui fervent de point d'appui à ces molécules, & qui par leur réa\îlion foient capables de fixer le mou- vement de ces molécules a(!ilive$. Si l'on donne à l'idée du mot fexe toute l'étendue que nous lui fuppolbns ici, on pourra dire que les ï^inti fe trou- vent par-tout dans la Nature ; car alors le fexe ne fera que ia partie qui doit fournir les molécules organiques difté- rentes des autres , & qui doivent lervir de point d'appui pour leur réunion. Mais c'efl aflez raifonncr fur une queftion que je pouvois me difpenfer de mettre en avant , que je pouvois auffi réfoudre tout d'un coup , en difint que Dieu ayant créé les k\t% , il eft nécefTaire que les animaux fe reproduifent par leur moyen. En efîèt , nous ne femmes pas faits, Biii] 32 'Htjlolre Naturelle. comme je i'ai dit, pour rendre raîfbn du pourcjuoi des chofès ; nous ne fomrotfl pas en état d'expliquer pourquoi ia Na- ture emploie prefque toujours les fexcs / pour la reprodu même temps à leur père & à leur mère;. & ce qui pourroit confirmer ce que j'ai dit ci-delTus , c'efl que toutes les parties communes aux deux fexes fe mêlent ,: au lieu que les molécules qui repréfen- tent les parties fêxuelles, n& fe mêlent jamais ; car on voit tous les jours des- enfans avoir , par exemple , les yeux du- père, & le front ou la bouche de la mère, mais on ne voit jamais qu'il y ait un fem- biablé mélange dei parties fexuelles , &. il'^ Bv. 3 4 ' Hijhire Naturelle» n'arrive pas qu'ils aient , par exemple , les tefticules du père & le vagin de la mè : je dis que cela n'arrive pas, parce que l'on n'a aucun fait avéré au fujct des hermaphrodites, & que la plupart des lu jets qu'on a cru être dans ce cas , n'étoicnt que des femmes dans iefqueiles certaine partie avoit pris trop d'accroiffement. Il efl; vrai qu'en réfléchiflant fur ïa ftrucn:ure des parties de ia génération de l'un & de l'autre fexe, dans i'efpèce hu- maine, on y trouve tant de reffemblance & une conformité fi fmguiière , qu'on leroit aflez porté à croire que ces parties qui nous paroiffent fi différentes à l'ex- térieur , ne font au fond que les mêmes organes, mais plus ou moins dévelojlpés. Ce fentiment, qui étoit celui des An- ciens, n'eft pas tout-à-fait fans fonde- incnt , & on trouvera dans le cinquième volume les idées que M. Daubeiiton a eues fur ce fujet (a); elles m'ont paru très- ingénieu les , & d'ailleurs elles (ont fondées fur des obfervations nouvelles qui probablement n'avoient pas été faites (n) Voyez le cinquième vofuvie , pa^e 261 dc Ifcdltion ca trente-un volumes, exemple , agin de la pas, parce lu fujct des rt des fil jets n'étoicnt es certaine ement. Fant fur la lération de efpèce hu- fleniblance re , qu'on ces parties ites à l'ex- les mêmes lévelojlpés. li des An- ans fonde- cinquième [lubeiiton a m'ont paru s elles font s nouvelles as été faites ^ûffe z $1 de Des Animaux: ' y y par îe« A aciens , & qui pourroient con- iirmcr leur opinion fur ce Itijer. La formation du fœtus fe fait donc par la réunion de^ molécules organiques contenues dans le mélange qui vient de fe faire des liqueurs féminales des deux individus, cette réunion produit l'éta- bliiïèment local des parties, parce qu'elle fe fait félon les loix d'afifini:é qui font entre ces différentes parties , & qui déter- minent les molécules à fe placer comme elles l'étoient dans les individus qui les ont fournies; en forte que les molécules qui proviennent de la tête, & qui doivent la former , ne peuvent , en vertu de ces loix , fe placer ailleurs qu'auprès de celles qui doivent former le cou , rolumeiU » ce mé- molécules es parties t d'cilcs- ouvoir fc 3viennent lie, parce fiérantes , înt beau- ou toute reflèmble tre partie te efpècç entre de ganiques dans le dans le c les mo- de l'autre ondantes 't Des Animaux: 3/ M ou plus voîfines de ce point d'appui , elles ^ entrent en plus ou moins grande quantité dans la compofition du nouvel être i'cnibryni, quoi((uc forme en entier, y demeurera ^ans aucun mouvement , & les molécuîes orgnn'ques dont il cfl com- pofe, re/icront fixc'es (ims qu'elles puiflent cl elles -mêmes donner le mouvement & la vie à l'embryon qui a tfié formé par leur réunion. Aiufi après que le mou- vement des molécules organiques a été déuuii, après la réunion de ces molé- cules & l'étiiblintment local de toutes les parties qui doivent former un corps animal, il fimt encore une puiflance ex- térieure pour ranimer & lui donner la force de fe développer en rendant du mouvement à celles de ces molécules qui font contenues dans les vaifîbux de ce petit corps , car avant l'incubation la machine animale cxiile en eniier , elle cft 4^ Nijfohè Naturelle. entière, complète & toute prête à jouer; mais il faut un agent exicrieur pour la meure en mouvement , & cet agent e(t ia chaleur qui en raréfiant les iicjucurs , Us oblige à circuler , & met ainli en adion tous les organes qui ne font plus cnfuite que fe développer & croîire , pourvu que cette chaleur extérieure con- tinue à les aider diins leurs fon<5tions, âc ne vienne à cefîer que quand ils en ont aflez d eux mêmes pour s'en palier , & pour pouvoir , en venant au monde , faire ulage de leurs membres Se de tous leurs organes extérieurs. - ; ■ ? Avant l action de celle chaleur exté- rieure , c'eft-à-dire , avant l'incubation , l'on ne voit pas la moindie apparence de fang, & ce n'eft qif environ virngi-quatre heures après que j'ai vu queiqucs vaif- fcaux changer de couleur & rougir : les premiers qui prennent cette couleur enve- dc Tex- ucs qui pofiiion nfermé de la ord, & Donioii lère, & rice , il forina- eft né- e com- |ueurs , Des Animaux, 47 dîe met en Jeu tous les organes , & le fang "c forme dans le placenta & d;uis le corps e iVmbryon , par le feul mouvement ccafionné par cette chaleur; on peut lême dire que la formation du fuig de Vnf.int ert auffi indc|)cndanic de celui *de la mère, que ce cjui fe p.^flè dans l'œuf f[\ iiulc'pendant de la poule qui le couve, u du four qui l'éthauffr. Il cfl certain que le produit total de la éncration , c'clt- ;i-dire , le foetus, fou laccnta , fcs enveloppes , croifTent tous ar intufTufception ; car dans les premiers rips le fie cjui contient l'œuvre entière c la ge'nération, n'eft point adhérent à matrice. On a vu par les expériences e Graaf fur les femelles des lupins , qu'on eut faire rouler dans la matrice ces glo- ules 011 cfl renfermé le produit total de a génération , & qu'il appeloit mal-à- ropos des œufs : ainfi dans les premiers emps ces globules & tout ce qu'ils con- icnncnt, augmentent & s'accroilTent par "lintufrufccption en tirant la nourriture des ."liqueurs dont la matrice eft baignée, ils |s'y attachent endiiie d'abord par un Ijiuicilage dans lequel avec le temps il ie '-M ,7 48 Hijloire Naturelle» forme de petits vaiffeaux, comme nom le dirons dans la fuite. Mais pour ne pas fortir du fujet que je me fuis propofé de traiter dans ce cha- pitre , je dois revenir à ia formation immédiate du .fœtus, fur laquelle il y a plufieurs remarques à faire, tant pour ic lieu où fê doit faire cette formation, que par rapport à diffe'rentes circonftances qui * peuvent l'empêcher ou l'altérer. Dans l'efpèce humaine, la {êmence du mâie entre dans la matrice, dont la cavité eft confidérable , «Se lorfqu'elle y trouve une quantité fuffifante de celle de ia femelle , le mélange doit s'en faire , ia réunion des parties organiques fuccède à ce mélange , & la formation du fœtus fuit, !e tout ell peut-être l'ouvrage d'un inf- iant, fur-tout fi les liqueurs font toutes deux nouvellement fournies, & Çi elles font dans l'état acSif & florifTant qui ac- compagne toujours les productions nou- velles de la Nature. Le lieu où le foetus doit (è former, eft la cavité de la matrice, parce que la (èmence du mâle y arrive plus aifément qu'elle ne pourroit arriver dans les trompes , & que ce vifcère nVyant ! Des Animmixi ^ 4? n'ayant qu'un petit orifice , qui même fe tient toujours fermé , à l'exception des inftans où les convulfions de l'amour peuvent le faire ouvrir , l'œuvre de la génération y efl en fiireté, &l ne peut guère en relTortir que par des circonf- lances rares & par des hafards peu fré- qucns ; mais comme la liqueur du mâle arrofe d'abord le vagin , qu'enfuiie elle pénètre dans la matrice, & que pir fou adiviié & par le mouvement des molé- cules organiques qui la compolcnt , clic peut arriver plus loin & aller dans les trompes, & peut-être jufqu'aux lelli- cules , fi le pavillon les eli>brafîe dans ce moment; & de même, crtmme la liqueur féminale de la femelle a déjà toute fi per- feiHiion dans le corps glanduleux des lelli- cules , qu'elle en découlé & qu'elle arrofe le pavillon de les trompes avant que de defccndre dans la matrice, & qu'elle peut fortir par les lacunes qui font autour du col de la matrice , il efl poffible que le mélange des deux liqueurs fe fajfle dans tous ces différens lieux. \\ efl: donc pro- bable qu'il fe forme fouvent des fœtus dans ie vagin, mais qu'ils en letombent, pour Tome IV. C ijô Hifloh'c Nûfurelk, . ' ainfî dire, aufiltôt qu'ils font formés, parce qu'il n'y a rien qui puifle les y retenir; il doit arriver aulîi quelquefois qu'il fc forme des fcetus dans les trompes, mais ce cas fera fort rare , car cela n'arri- vera que quand la liqueur féminale du lîiaie fera entrée dans la matrice en grande abondance, qu'elle aura é\é pouflec jus- qu'à cts trompes , dans lefqueîles eJIc fè fera mêlée avec ia liqueur féminale de la femelle. Les recueils d'obfcrvaiions anatomi- ques font mention non - feulement de fcetus trouves dans \gs trompes , mais aufli de fœtus trouvés dans les tefticules ; on conçoit très-aifément par ce que nous venons de dire, comment il fc peut qu'il s'en forme quelquefois dans les trompes ; mais à l'égard des teftiçules, l'opération ine paroît beaucoup plus difficile , ce- pendant clic n'efl: peut-être pas abfolu- rnent impodlble ; car fi l'on fuppofe que la liqueur féminale du mâle foit lancée avec aflèz de force pour être por- tée jufqu^à l'extrémité des trompes, & qu'au moment qu'elle y arrive , le pa- ■vUIojî vienne à fe rcdreflèr & à em brader m )ir lu 'il 'uni îina !es < frc ?s » * - formés t fe les y :lquefois rompes, la n*arri- inale du n grande ifiée juf- e'.les elle ninale de anatomi- emeat de •es , mais tefticules -, ' que nous peut qu'il trompes ; opération cile, ce- as abfolu- n fuppofe mâle foit être por- )mpes, & le pa- braffer em Des Amnmtix, 5 t* Jlc tedicuTc , niors il peut fe ^lire qu'elle %■ s'élève encore plus haut, & que ic mé- llange des deux liqueurs (ê fafîe dans le ^iicu même de l'origine de cette liqueur , Mc'cfl - à - dire , dans la cavité du corps ^glanduleux, & il pourroit s'y former un fo tus , mais qui n'arriveroit pas à û perfedion. On a quelques faits qui Jcmblent indiquer que cela cft arrivé Quelquefois. Dans l'hiftoire de l'ancienne ^ cadémie des Sciences (tome II, p. p i ), î trouve une obfcrvation à ce iiijet. • . Thcroude, Chirurgien à Paris, fit - 1k)ir .\ l'Académie une maiîè informe Éu'ii ?• trouvée dans le tefticule droit .■'une *aie âgée de dix- huit ans; on y" l^marquoit deux fentes ouvertes & gar-* jiies de poils comme deux paupières, au- ijefî'us de ces paupières étoit une efpèce front avec une ligne noire à la place s fourcils; immédiatement au- deflus y avoit plufieurs cheveux ramaffés - deux paquets , dont l'un étoit long ' fept pouces & l'autre de trois"; au- :(îous du grand angle de l'œil forioient eux dents molaires, dures, grofles &; anches, elles étoicm avec leurs gencives, V Ci; "5 2* . Hï^oire Naturelle: . v »/ elles avoîent environ trois lignes Je lon- gueur, & étoient éloignées i'une de l'auirc d'une ligne ; une troifième dent pius grofîè forioii au-deflous de ces deux-ià ; il paroifloit encore d'autres dents diffé- remment tloignées ies unes des autres & de celles dont nous venons de pnrler; deux autres entr'autrcs de la nature des canines, fortoicnt d'une ouverture placée à peu près où efl l'oreille. Dans le même volume (page 2 4j^), il efl: rapporté que M. Méry trouva dans le tefticulc d'une femme, qui étoit abcédé, un os de la mâchoire rupcrieure avec pluCeurs dents fi parfaites, que quelques-unes parurent avoir plus de dix ans. On trouve dans le Journal de Médecine (janvier i6S^ j, publié par l'Abbé de la Roque, l'hiftoire d'une Dame qui, ayant fait huit enfans fort heurcufement, mourut de la grof- fèfîè d'un neuviènie, qui s'étoit formé auprès de l'un de fes teflicules , ou même dedans ; je dis auprès ou dedans , parce que cela n'efl: pas bien clairement expli- qué dans la relation qu'un M. de Saint- Maurice, Médecin, à qui on doit ccttes ©bfèrv,aticn , a faite de cette grolîefïè ; jij s de loii" de l'auirc lent pius deux -là; nts difft- les autres de parler ; lature des Lire placée 5 le même porté que cule d'une 1 os de la leurs dents ?s parurent ive dans le rr i68^ ), e, l'hiftoire luit enfans le la grof- étoit formé 15 , ou mêniel [ans, parcej nent expli- L. de Saint- n doit cette KrofîeflTe ; il dit fcuîement qu'il ne doute pas que (q {(tftus ne fut dans le tefticule, m;iis iorf- «ju*^!! le trouva , il étoit dans l'abdomen; ce foetus étoit gros comme le pouce i ' ition |ufque dans le fcrotum du 'le, peu près com ■ * le virus vénérien y pénètre fouvent ; & que dans ces cas, qui fans doute feroiem aufîi fort rares , il peut fe former un corps organifé dans le fcrotum , par le mc.'ange de cette liqueur féminale de la femelle avec celle du mâle , dont une partie qui étoit dans l'urètre aura re- brouffé chem n , & fera parvenue avec celle de la femelle julcjue dans le fcro- tum; ou bien, fi Ton admet l'autre hy- poihèfe qui me paroît plus vraifêmblable, & qu'on fuppolè que la liqueur fémi- nale de chaque individu ne peut pas à la vérité produire toute (eule un animal , un fœtus , mais qu elle puifle produire des maffes organiféeslorfqu'ellefe trouve dans des lieux ou Çc^ particules avives peuvent en quelque façon fe réunir,.; j& où Je produit de cette réunion peut ijij '56 Hijloire Naturelle» trouver de la nourriture , alors ou pourra dire que toutes ces j^rodudions o/îeufes , chnrnues , chevelues , dans les tcfticules des femelles & dans le fcroîum des mâles, peuvent tirer leur origine de la feule liqueur de i'iiidividu dans lequel elles fe trouvent. Mais c'eft afîez s'a- rêter fur des obfervations dont les faits me paroiiï'ent plus incertains qu'incx- plkables , car j'avoue que je fuis très- porté à imaginer que^huis de certaines circonilances & dans de certains c'cats la liqueur fcminale d'un individu mâle ou femelle , peut feule produire quelque choie. Je fcrois, par exemple, fort tenté de croire que les filles peuvent faire des moles (ans avoir eu de communication avec le- mâle, comme les poules font des ceufs fins avoir vu le coq, je pourroîs appuyer cette opinion de plufiçurs ob- fervations qui me paroiflcnt au moins auffi certaines que celles que je viens de citer, & je me rappelle que M. de la Sôiie Médecin & Anatomifte de l'Aca- démie des Seiences, a fait un Mémoire fur ce fujet , dans lequel il affure que df Keiigieufes bien cloîtrées avoieut itw \ -^ *l & là. alors eu •odudlions , dans les e fcroîum origine de [ans lequel afîèz s'a- it les faits qu'incx- fuis ircs- e cenaines ns états la 1 mâle ou e quelque , fort tenté [i faire des iiunication ;s font des 2 pourroîs fiçurs ob- au moins ç viens de M. de la de l'Aca- L Mémoire jre que de Yoieut fliu Des ^mmaux'. jT" des moles , pourquoi cela fcroît - il im- poflib'e , puifque les poules font des . j ceufs lans communication avec le coq, 1 & que dans la cicatricule de ces œufs on •^"voit, au lieu d'un poulet, une mole avec "■•) des appendices \ l'analogie me paroît ' avoir alFcz de force ])0ur qu'on pui/îê au moins douter & fufpendre fon juge- t ment. Quoi c[u'il en (bit, il eft certain '. <"[u'il faut le mclange des deux liqueurs ipour former un animal, c{ue ce méliinge Ijie peut venir à bien que quand il fc fait Idans la matrice, ou bien dans les trompes de la matrice, où les Anatomiflcs on, trouvé quelquefois des fœtus, & qu'il ell naturel d'imaginer qux ceux qui ont été trouvés hors de la matrice (Se dans la cavité de l'abdoinen , font fortis par rcNtrémiîë des tromj>es ou par cp-jel- c{ue ouverture qui a'eft faite par accident à la matrice, & (jue ces foetus ne (c^nt pas tomf)é3 du tellicule, où il me paroît fort difficile qu'ils puiflent fe former , parce que je regnrde comme une chofe prerr[ue impoOible que la liqueur fé- minile du maie puilTe remonter jufque- ià. Leeuwenhoôk a fupputé la vîtefTe Ç y. '7 y 9 Hijiohe Nutureïïe, Ju inoiiveinent de fei prétendus anîmaut i'pcrmatiques , & il a trouvé qu'ils pou* \oient faire quatre ou cinq pouces Je chemin en quarante minutes : ce mou- veinent fcroit plus que Tuffifant pouc parvenir du vagin dans la matrice , de la jBiatrice dans les trompes, ÔL des trompes d'ans les tefiiculcs en une heure ou deux û toute la liqueur avoit ce même mou- vement; mais comment concevoir c|ue les molécules organiques qui font en mouvement dans cette liqueur du mâle, & dont le mouvement celTe aufli - tôt que le liquide dans lequel elles fe ineu- vent, vient à leur manquer, comment concevoir , dis-jc , que ces molécules puiflcnt arsiver jufqu'au teflicuie , h. moins que d'admettre c(ue la liqueur elle-même y arrive & les y porte î ce mouvement de pcogrelîion cj^u'il fliut iiipporer dans la lîq^ieur même, ne peut être produit par celui des molécules or- ganiques qu'elle contient ; ainfi quelque a verùm enimverb cîim non mem'inerit ûuâor an id in utrâque tuba ita depre- henderit / an in virgine ! an fatus ife pmternaturalis ferilitatem inducat ! an vera conceptio niliilomimis feri pofjlt / an à princfpio vitœ talis fruélura fuam originem ducat l fm m traâu tempori ita degenerart Dei Animaux. &f lia poffînt ! facile perfpichnus muha nobiT nltâa e'Jl' problcmata quœ , utcumque foluta , lultùm negoùi facefcant in txemplo noftro, 'Irat en'im hœc femina maritaia ^ vigintt mtuor annoi mnn , quœ filium pepertrat 'lem v'idï ipfc , oâo jnm nnnos natum. Die fitur tubas ab incimabulis clanfas fîerilita- inducere : quart hœc nojlra femina pepe- ' / Die concepifle tubis c/aiijls : quomodà \ulum invrredi tubam putuif ! Die coaluijjc )ai pojl pari uni : quomodb id nojli ! quO' klo adeb evanefcere in ulwque latere fim- \œ poffunt , tanquani nunquam adfuijfent / quidcm ex ovario al tubas alia daretur prœier illarum orificium , unico greJfU j/ies fuperarenlur difficidlaus : fed fâiones fel/fâum quidem adjuvant , rci veriiatem demonjlrant ; prœjtat igitur ignoratio- \in faieri , quam fpeculationibus indulgere, fVide Comment. Acad, Petropol. vel. IV, }g. 26 1 éz 2 62). L'auteur de cette ob- Irvation, qui marque, comme l'on voit, itant d'efprit & de jugement ciùe de Diinoiflance en Anatoniie, a raifon f'9 fa re ces difficultés, qui paroiflent êtts effet infurmontables dans le fyflème ss oeufs, uiiiîs c[ui difparoiiTent Jans^ 6i Hipalre Naturelle, notre explication ; & cette obftrvatîoit fenible (èulement prouver , comme nçus l'avons dit , que la liqueur iéminale de la femelle j)eut bien pénétrer le tilFu de la matrice, & y entrer à travers les pores des membranes de ce vifcère , comme je ne doute pas que celle du mâle ne puifîe y entrer au(fi de la même. façon; il me ièmble que pour le le perfuader, il fufFit de faire attention à l'altération que la liqueur fcminale du mâle cauic à ce viL- cère , & à i'efpèce de végétation ou de développement qu'elle y caufcr D'ailleurs la liqueur qui ibrt par les lacunes de Graaf, tant celles qui font autour du col de la matrice , que celles qui font aux environs de l'orifice extérieur de l'urètre, étant, comme nous l'avons in- finué, de la même nature que la liqueuci du corps glanduleux, il eft bien évident que cette liqueur vient des teflicules , & cependant il n'y a aucun vaifleau qui pui/Te la conduire , aucune voie connue par où elle puifîè paflêr ; par conféquent , on. doit conclure qu'elle pénètre le tiffu fpongieux de toutes ces parties^ & que non-feulement elle enti^ i> Des Animaux* 6}< aSn(i dans la matrice , mais mênie qu elle en peut fortir lorfciue ces parties font en Irritation. Mais quand même on fe refureroit à cette idée, tk cpi'on traiteroft de chofe impolîibfe fa pénétration du tiila de la mairice & des trompes par les molécules a<^ives des liqueurs féminales , on ne pourra pas nier que celle de la femelle qui découle des corps glanduleux des terticules , ne puifTe entrer par l'ouver- ture qui cft à l'extrémité de la trompe & qui forme le pavillon , qu'elle ne. puifîe arriver dans la cavité de la ma- trice par cette voie , comme celle du. mâle y arrive par Tori^cc de ce vi(^ cère , & que par conféquent ces deux liqueurs ne putflent fe pénéirer , le mêler intimement dans cette cavité, & y former le foetus de la manière doiU lK)u$ Tavons cxplicjué* r.'t '^4 JHîfioîre Naturelle: HJMll.BIIIII CHAPITRE XI. Du développement & de ï accroïffcmenî du Fœtus , de ï Accouchement , &c, ON doit diftingucr dans le déve- loppement du foetus , des degrés différens d'accroiflement dans de cer- taines parties qui font, pour ainfi dire, des efJDèces différentes de développe- ment. Le premier développement qui fliccède immédiatement à la formation du fœtus , n'cft pas un accroifieinent proportionnel de toutes les parties qui le compofcnt ; plus on s'éloigne du temps dé la formation , plus cet ace roi (- lement eft propori.ionnel dans toutes les parties , & ce n'eft qu'après être forti du fein de la mère que l'accroiflcment de toutes les parties du corps fe fait à peu près dans la même proportion. Il lie faut donc pas s'imaginer cjue le foetus au moment de fa formation loit un homme infiniment petit , duquel la figure & la forme foient abfolumciit Des Animaux. 6j feniblabîes à celles de l'homme adulte; il ell vrai que le petit embryon contient réellement toutes les parties qui doivent compofer l'homme , mais ces parties fe dJveloppent fucceiîivemeat & diffcrem- mcnt les unes des autres. Dans un corps organife comme Teft celui d'un animal, ou peu( croire qu'il y a des parties plus clîcnticlles les unes que les autres, & fans vouloir dire qu'il pourroit y en avoir d'inutiles ou de fu- perflues, on peut foupçonner que toutes ne font pas d'une néc^îîté également ahfolue , Ôl qu'il y en a quelques - unes dont les autres femblent dépendre pour Jour développement & leur difpofition. On pourroit dire qu'il y a des parties fondamentales fans lefquelles l'animal ne peut fe développer , d'autres qui (ont plus acceflToires & plus extérieures , qui paroiflent tirer leur origine des pre- |mîères, oc qui femblent être faites autant pour l'ornement, la fymétrie & la per- tedidu extérieure de l'unimil , que pour il néceflité de fon cxiftcnce & l'exercice des fon(rtions eiïentielles à la vie. Ces deux efpèces de parties difFéremes fe. il 66 Hljlotre Naturelle. ' développent fucceiîivement, & font déjà toutes prel'que également apparentes loi !• que le foetus Ion du fein de la m ère , mais il y a encore d'autres parties , comme ici I dents, que la Nature femble mettre en '^ réfcrve pour ne les fiùre paroîirc qu'au bout de plufieurs années ; il y en a , comme les corps glanduleux des telU-Jj cules des femelles, la barbe des mâles, &c. qui ne fe montrent cjue quand lej temps de produire foa fembiable elt' arrivé , &c. Il me paroît que pour reconnoître les! parties fondamentales & eflèiiiielles du corps de l'animal ; il fiut faire atientidii au nombre , à la fituation & à la nature le blelfer-, ou même fans le faire périr, peuvent être regardées comme moini Des Ammauxi fj néccflaîres & plas acceflToires à la ma- chine animale. Ariflote a dit que les feules parties qui fuffem efTeniietles à tout ani- mal , étoient celle avec laquelle il prend la nourriture, celle dans laquelle il U digère , & celle par laquelle il en rend le fuperflu ; la bouche & le conduit inief- tinal, depuis la bouche jufqu'à l'anus, font enerf'et des parties (impies , «5c qu'au- cune autre ne peut fuppléer. La téie & l'épine du dos font aulîi des parties fimples , dont la pofuion eil invariable ; l'épine .du dos fert de fondement à la charpente du corps , & c'eil de la moelle alongée qu'elle contient , que dépendent les mouvcmens & l'adioa de la plupart des membres & des orgai^es, c'eft auift ceite partie qui paroît une des [)reniicres dans l embryon , on pourroit même d'rc qu'elle paroît la première ; car la pre- ' jiiière choie qu'on voit dans la cicairi- cuie de l'œuf, eft une mifTc alongée dont l'extrémité qui forme la têie , ne diffèiç du total de la mafTe que par une cfpèce de forme contournée & un peu plus renflée que le refte : or ces parties fnn- ples & qui paroifTent les premières, foui r II '6% 'Hifloire Naturelle. toutes eiîentielles à l'exiflence , à la formi & à la vie de i'animal. li y a beaucoup plus de parties doubles dans le corps de i'animal que de parties fimples , ^ CCS parties doubles fembicnt avorr été produites rymctriquement de chaque côté des parties fimples, par une elpèce de végétation , car ces parties doubles font fcmblables par la forme , & différentes par 'la pofition. La main gauche, par exemple, reffembîe à la mairt droite , parce qu'elle ell compofée du Blême nombre de parties, lefqueUes étant prifes ftparément , & étant comparées une à une & plufieurs à plufieurs, n'ont aucune différence ; cependant fi la main gauche (e trouvoit à la place de ia droite, on ne pourroit pas s'en fervir aux mêmes wfages , 5c on auroit raifon de la regarder comme un membre très - différent de la jnain droite. II eti efl: de même de toutes les autres parties doubles , elles font lèm- blables pour la forme, & différentes pour ia pofition ; cette pofition fe rapporte au corps de l'animal , & en imaginant une ligne qui partage le corps de haut en bas en deux parties éorales, on peut rapporter Des Animaux, 6^ a cette ligne comme à un axt , la pofuioa de toutes ces parties (eniblai)ics. La moelle alongce , à la prendre depuis le tervcau jufqu'à fon extrémité intérieure, & les vertèbres qui la con- tiennent, paroiiïènt être l'axe réel auquel on doit rapporter toutes les parties doubles du corps animal , elles feniblent en tirer leur origine & n'être que les rameaux fymétriques qui partent de ce tronc ou de cette bafe commune; car on voit fortir les coies de chaque côié des vertèbres , dans le petit poulet , & le développement de ces parties doubles & fymétriques fe l'ait par une elpcce de végétation, comme celle de plufieurs rameaux qui partiroient de plufieurs boutons difpofés régulière- ment des deux côtés d'une branche prin- cipale. Dans tous les embryons , les parties du milieu de la tête & des vertèbres paroiffent les premières , enfuiie on voit aux deux côtés d'une véficule qui fait [e milieu de la tête , deux autres véficules qui paroiflent fortir de la première ; ces deux véficules contiennent les yeux & les autres parties doubles de la tête : de même on voit de petites émiiiences fortir i70 * 'Hlfloire 'Naturelle, ' "* en nombre égal de chaque côté de< vertèbres , s*éiendrc , j)rendre de i*ac- croifTement & former les côtés & les autres parties doubles du tronc ; enfuite à côté de ce tronc déjà formé , on voit paroître de petites émincnces pareilles aux premières , qui fe développent , croifrcnt infenfiblement & forment les extrémités fupcrieures & inférieures , c'eft - à - dire , ïes bras & les jambes. Ce premier déve- loppement eft fort différent de celui qui iè fait dans la fuite ; c'eft une produ l'œuf; &. nous !s Ana- \ccou- îmbbnl \s qu'ils iiarques )ns faire n. iimédia- iqueurs arénéra- L forme t par les Lie trois Dn , il y ]ui a au amèire , & quatre lignes fur ic pal: ; cette bulf« cft formt'e par une membrane extrême^ ment fine , qui renferme une liqueur limpide & aflez femblabie à du blanc d'œuf. On peut déjà apercevoir dans ceue liqueur quelques pe.iies fibres réu- nies, qui font les premières ébauches du foetus ; on voit ramper fur la flirface de la bulle un lacis de peiiies fibres , qui ©Gcupe la moitié de la fuperficie de cet ovoïde depuis l'une des extrémités du grand axe jufqu'au milieu, c'eft-à-dire, jufqu'au cercle formé par la révolution du petit a^xe ; ce font - ià les premiers vefliges du pLicenta. Sept jours après la con-cepiion l'on peut diliinguer à l'œil fimple les premiers îitiéamcns du^ fœtus ; cependant ils font encore informas , on voit feulement au bout de ces fept jours , ce qu*on voit dans l'œuf au bout de vingt - quatre heures , une maflTe ti''une gelée prefque tranfpa- renie qui a déjà quelque folidité , & dans kquelle on reconnoît la lêie & le tronc , parce f{ue cette mafTe eft d'une forme alongée , que la partie fupérieure qui rcpréiente le tronc, eil plus déliée & plus 96 Htjîoire Naturelte; longue; on voit aufli quelque*^ petîtci fibres en forme d'aigrette qui fortent du milieu du corps du foetus , &.. qui abou- tiiïent à ia membrane dans laquelle il e(l renfermé auffi - bien que la liqueur qui I former fibres doivent dans la fuite le cordon ombilical. Quinze jours après la conception Ton commence à bien diflinguer la tête , & à reconnoître les traits les plus apparens du vifîige , le nez n'eft encore qu'un petit filet proéminent & perpendiculaire à une ligne qui indique la féparation des lèvres ; on voit deux petits points noirs à la place des yeux , & deux petits trous à celle des oreilles : le corps du foetus a aufîi pris de raccroiffcment ; on voit aux deux côtés de îa partie fupérieurc du tronc & au bas de la partie inférieure , de petites protu- bérances qui font les premières ébauches des bras & des jambes, la longueur du corps entier eft alors à peu près de cinq lignes. Huit jours après , c'eft- à-dire , au bout de )is (emaines , le corps du foetus n*a augmenté que d'environ une ligne, mais ks bras & les jambes , les mains & les piedi )n l'on , & à eus du in petit e à une lèvres ; la place elle des pris de IX côtés k au bas 5 protu- ibauches ueur du de cinq i, - i , ! . au bout betus n'a ne , mais , : les piedi ' I Des À m maux» 87 font apparens; i'accroiflèmcnt des bras cfl plus prompt que celui des jambes, & les doigts des mains Ce féparcnt plus tôt que ceux des pieds ; dans ce même temps l'organilation intérieure du fœtus commence à être fcnfibie , les os font marqués par de p" its filets aulfi fins cjuc des cheveux ; on reconnoît les ^tes, elles ne font encore que des filets ti^^ofé» régulièrement des deux côtés de ' ; les bras , les jambes , & les doi^^ Je* pieds & des mains, font aufli rcprclentt» par de pareils filets. A un mois le fœtus a plus d'un pouce de longueur, il eft un peu courbé dans la fi tua lion qu'il prend naturellement au milieu de la liqueur qui l'environne, le» membranes qui contiennent le tout , (c font augmentées ert étendue &. en épaif- feur ; toute fa mafTe eft toujours de figure ovoïde , & elle eft alors d'environ un pouce & demi fur le grand diamètre, ôc d'un pouce & un quart fur le petit diamètre. La figure humaine n'eft plus équivoque dans le fœtus, toutes les par- ties de la face font déjà reconnoiffables; k corps eft deiliné ^ les hanches ôl le IMAGE EVALUATION TEST TARGET (MT-3) // 1.0 l.l 2.5 IIIIIM IIIIM 1122 IIL il 2.0 1.8 1.25 1.4 iiiiiiA == lii — < 6" ► Photographie Sciences Corporation ,\ V ^> ^ #>^ ^9>^ 33 WEST MAIN STREET WEBSTER, N.Y. 14S80 (716) 872-4503 O^ ,/ '8 s Hiflotre Naturelle. vcmre font élevés , ies membres foilt formés , les doigts des pieds & des mains font féparés les uns des autres , la peau eft extrêmement mince & tranfparenie , les vileères lont déjà marqué^ par des frbres peloionnées , les vaif^aux font menus comme de^ fils , & ies membranes extrêmement déliées, les os forn encore mous , & ce n'eft qu'en quelques endroits qu'ils commencent à^ prendre un peu de folidité ; les vaifTeaux qui doivent com- poser le cordon ombilical , font encore en ligne droite les uns à côté des autres; fc plutcnia n'occupe plus cjue le tiers de ia mafle toi aie , au lieu que dans ies premiers^ jours il en occupoit la moitié ; il parpït donc qur Ion accroiflement cil étendue rupcrficielle n'a pas été auffi grand que celui du fœtus & du refte de Ja malîe , mais il a beaucoup augmenté en folidité , fo" épaifl^eur eft devenus plus grande à proportion de celle de i'enveioppe du foetus , & on peut déjà diftinmier les deux membranes dont cette enveloppe eft compolee. Selon Hippocrate, le fœtus mâîe fc développe pins promptcnieat que ie '^Des Ammmix. . 8p foetus femelle ; il prétend qu'au bout de trcne jours lou es les parties du corps du maie (ont apparentes , & que celles du fœtus femelle ne le font qu'au bout de quarante deux jours. A fix femaines le fœtus a près de deux pouces de longueur , la figure humaine commence à (e perfe<îlionner , la tête eft feulement beaucoup plus grolTe à proportion que les auires parties du corps , on aperçoit le mouvement du cœur à peu près dans ce temps ; on l'a vu batire dans un fœtus de cinquante jours , & même continuer de battre afîèz long-temps après que le fœtus fut tiré hors du (ein de la mère. A deux mois le fœtus a plus de deux pouces de longueur , roflification eft îenfible au milieu du bras, de Tavant- bras , de la cui^Te & de la jambe , & dans ]a pointe de la mâchoire inférieure, qui cft alors fort avancée au-delà de fa mâchoire fupérieure. Ce ne'font encors, pour ainfi dire , que des points ofTeux ; mais par l'effet d'un développement plus prompt les clavicules font déjà ollifiées en ciuicf, le cordon ombilical eft formé, \ 50 Hiftoire Naturelle» les vaifTeaux qui le compofcnt , com- xnencent à fe tourner & a fe tordre à peu près comme les fils qui compoient une corde ; mais ce cordon efl encore fort court en comparaifon de ce qu'il doit être dans la fuite. A trois mois le foetus a près de trois pouces, ii pèfc environ trois onces. Hip- pocrate dit que c'eft dans ce temps que les mouvemens du fœtus mâle commen- cent à être fenfibles pour la mère , & ii affure que le foetus femelle ne fc fait (cniir ordinairement qu'après le quatrième mois ; cependant il y a des femmes qui difcnt avoir (ènu dès Je commencement du fécond mois , le mouvement de leur en- fant : ii eil afièz difficile d'avoir fur cela quelque chofè de certain , la (ènfàdon que les mouvemens du foetus excitent, dépendant peut - être plus dans ces commencemens , de la (enfibilité de la mère, que de la force du fœtus. -' Quatre mois & demi après* la concep- tion , la longueur du fœtus cfl de ùx à fept Tces; toutes les parties de fbn corps {<.. . fi fort augmentées qu'on les didingiie parfaitement les unes des autres | Des Animaux» pi' les ongîes mêmes paroiflTent aux doigts des pieds & des mains. Les teAicuies des mâles font enfermées dans le ventre au- deflus des reins ; i*eflomac eft rempli d'une humeur un peu épaifTe & aflcz icmblable à celle que renferme i'amnios ; on trouve dans les petits boyaux une matière latteufe , & dans içs gros une matière noire & licpjide; il y a un peu de bile dans la véficule du fîel , & un peu d'urine dans la veiïic. Comme (e fœtus Hotte librement dans le li<|uide qui l'environne , il y a toujours de refpace entre fon corps & les membranes qui l'enveloppent j ces enveloppes croifTeiic d'abord plus que Je fœtus ; mais après un certain temps c'eft tout le contraire , le fœtus croît à proportion plus que ces enveloppes , if peut y toucher par les extrémités de fon corps , & on croîroît qu'il eft obligé de les plier. Avant fa firi du troifième mois la têce eft courbée en avant, le menton po(e fur fa poi- trine , les genoux font relevés > les jambes repliées en arrière, (buvent elles font croifées , & lai pointe du pied eft tournée en haut & appliquée contre la cuiHè^ N // ^1 HiJIoke Nature/te. de forte que les deux talons font fort près l'un de l'autre : quelquefois tes genoux s'élèvent fi haut qu'ils touchent prefque aux joues , les jambes (ont pliées fous les cuiÎTes , & la plante du pied cft toujours en arrière; les bras font abaifles & repliés fur la poitrine : l'une des mains ,. ibuvent toutes les deux , touchent le vrfage , quelquefois elles font fermées , quelquefois auflj les bras font pendans à côté du corps. Le fœtus prend enfuite des fuuations différentes de celles-ci ; lorfqu'il eft prêt à fortir de la matrice , & mêirte long - temps aupa- ravant, il a ordinairement la tête en bas ,& la face tournée en arrière, Ôc il cft naturel d'hnaginer qu'il peut changer de fîtuation à chaque inflant. Des perfonnes expérimentées dans l'art des accouchc- niens, ont prétendu s'être afTurécs qu'il en changeoit en effet beaucoup plus ibuvent qu'on ne le croit vulgairement. On peut le prouver par plufieurs obfer- vations, i .** on trouve fou vent le cordon ombilical tortillé & pafFé autour du corps & des membres de l'enfant, d'une ma- nière qui fuppofe néceirairemcnt que k -y* •M rlbiines :ouchc- es qu'il p plus rem eut. à ob fer- cordon u corps ine ma- que k Deï A/iimaux» p3 fetûs au fait des mouvemens dans tous les fens , Se qu'il ait pris des pofitions fuc- ccHivcs irès-difFe'rcnteii emr'elles; 2." les mèies feiitent les mouvcmens du fœtus tantôt d'un côté de la matrice & tantôt d'un autre côte , il frappe également en plufienrs endroits diflJerens^ ce qui fup- pofe qu'il prend des fuuations différentes ; 3.° comme il nnge dans un liquide qui l'environne de tous côtes, il peut très- aifément (c tourner , s'étendre , Cç plier par Tes propres forces , & il doit audi prendre des fituations différentes , fuivant les différentes attitudes du corps de la mère , par exemple , lorfqu'elle efl cou- chée , le foetus doit être dans une autre fituation que quand elle ell debout. La plupart des Anatomides ont dît que le foetus eft contraint de courber fon corps &. de plier (es membre^ » parce qu'il eft trop gêné dans fbn enveloppe ; mais cette opinion ne me paroit pas fondée , car il y a , fur-tout dans les cinq ou fîx premiers mois de la grofleffe , beaucoup plus d'efpace qu'il n'en faut pour que le fœtus puiffe s'étendre, à. cependant il çA dans ce temps même courbé & replié ; JP4 t^if^olre Naturelle. ^ on voit auffi que le poulet efl courbé dans la liqueur que contient l'amnios; dans ic temps même que cette membrane cft aflcz étendue & cette liqueur aflez abondante pour contenir un corps cinq ou fix fois plus gros que le poulet; ainli on peut croire que cette forme courbée & repliée que prend le corps du fœtus , cft naturelle , & point du tout forcée ; je (êrois volontiers de l'avis de Harvey , qui prétend que le foetus ne prend cette attitude que parce qu'elle cft la plus favo- rable au repos & au fommcil , car tous les animaux mettent leur corps dans cette pofition pour iê repofer & pour dormir ; & comme le fœtus dort presque toujours dans le (ein de la mère , il prend natu- rellement la fttuation la plus avanjageuie : Cnù , dit ce fameux Anatomifte, anîmaliû 4)mnia , dum quiefcunt & dormîuntt membta fua ut plurimùm adducunt & complicant , Jiguramque ovalem ac conglobatam quœrunt : ita pariter embryones qui atatem juam ma-' x'imè fonmo tranfigunt , membrafua pqfitione eà nuâ plafmantur (tanquam naturalijfimâ ac maxime mdolenti quieti^ue ûptiffïmâj compo^ mnt, (V. Harvey , de Générât, p. 257)» Des Atûmditw p j La matrice prend, coininc nous l'avons dit , un alTcz prompt accroiiïemcnt dans les premiers temps de la groirefîc, elle continue aufll à augmenter à mefure que le fœtus augmente ; mais l'accroillèinent du fœtus devenant enfuiie plus grand que celui de la matrice , fur- tout dans les derniers temps , on pourroît croire qu'il s'y trouve trop ferré, & que quand le temps d'en fortir eft arrivé , il s'agite par des mouvemens réitérés ; il fait alors en effet fucceffivement & à diverles re- priies âiGi efforts vioiens , la mère en re(^ fent vivement rimpreflion ; l'on dcfigne ces fenfations douloureufes & leur retour périodique , quand on parle des heures du travail de l'enfantement; plus le foetus a de force pour dilater la capacité de la jnatrice , plus il trouve de réfiflance , le reffort naturel de cette partie tend à la refîèrrer & en augmenter la réadion : dès - lors tout l'effort tombe fur Çc n orifice ; cet orifice a déjà été agrandi peu à peu dans les derniers mois de la grofTeffe ; la tête du fœtus porte depuis long - temps fur les bords de cette ouverture ; & la dilate par une preflloa c)(î Hïjloire Naturelle. continuelle ; dans le moment de l'ac- couchement ie fœtus en réunifiant les propres forces à celles de Ja mère , ouvre enfin cet orifice autant qui! ell néceffaire pour fè faire pafLge & fonir de la matrice. • ^ Ce qui peut faire croire que ces dou- leurs qu'on défigne par le nom 6'heures du travail , ne proviennent que de la dilatation de l'orifice de la matrice , c'eft que cette dilatation efl: le plus fur moyen pour recoanoître Çi les douleurs que reffent une femme groflè , (ont en effet les douleurs de l'enfantement : il arrive afîèz fouvent que les femmes éprouvent dans la groiïefTe des douleurs très - vives & qui ne font cependant pas celles qui doivent précéder l'accouchement ; pour diflinguer ces fauffes douleurs des vraies , Deventer confeille à l'Accoucheur de toucher l'orifice de la matrice , & il afTure que fi ce font en effet les dou- leurs vraies, la dilatation de cet orifice augmentera toujours par l'effet de ces douleurs; & qu'au contraire, fi ce ne font que de fauffes douleurs , c'efl-à- dire, des douleurs qui proviennent de * quelqu'autrç "Des Ammmi)fi ^y tjtieTqu'autrc cau(è que de celle d'un «nfanieinent prochain , l'orifice de la niatrice le rétrécira phitôt qu'il ne Ce tlilatcra, ou du moins qu'il ne continuera pas à fe dilater ; dès - lors on eft affez fondé à imaginer que ces douleurs ne proviennent que de la dilatation forcée de cet orifice : h fcuie choie qui foic embarradante , e(l cette alternative de repos & de foufFrance qu'éprouve la mère; lorfque la première douleur cft pafTéc , il s'écoule un tomps confidé- rable avant que la féconde fe fade fentir : & de même il y a des intervalles , fouvent très-longs, entre la ieconde & la troi- fième, entre la troifième & la quatrième douleur , &c. «Cette circonflance de l'ef- fet ne s'accorde pas parfaitement avec la caufe que nous venons d'indiquer, car la dilatation d'une ouverture qui (è fait peu à peu & d'une manière continue, devroit produire une douleur confiante & continue, & non pas des douleurs par accès ; je ne fais donc fi on ne pourroit pas les attribuer à une autre caufè qui me pàroît plus convenable à l'effet , cette caufe fcroit la féparation du placenta; Tome IV. £ '/ j8 Hi(lo]rc NutureVe. on fait qu'il lient à la matrice par tfî| certain nombre de mamelons qui pénè- trent dans les petites lacunes ou cavités de ce vifcère ; dès- lors ne peut-on pas fuppofer que ces mamelons ne (brtent J^as de leurs cavités tous en même temps ! e premier mamelon qui fc féparcra de la matrice , produira la première douleur, un autre mamelon qui fe féparera quel- que temps après , produira une autre douleur , &c. L'effet répond ici parfais tement à la caufe , & on peut appuyer cette conjedure par une autre obferYa- tion ; c'eft qu'immédiatement avant l'ac- couchement , il fort une liqueur blan- châtre ^ vifqueufe , (emblable à celle que rendent les mamelons du placenta lorfqu'on les tire hors des lacunes où ils ont leur inferiion , ce qui c|oit faire pcnfcr que cette liqueur qui fort alors de la matrice, eft en effet produite par là réparation de quelques mamelons du placenta. Il arrive quelquefois que le foetus fort de la matrice fans déchirer les membranes qui l'enveloppent , & par conféqucnt ^iàBS que la liqueur qu'elles contiennent, 'Des AmmatiXi çç fe folt écoulée , cet accouchement paroît être le plus naturel, & reffeinble à celui de prelque tous les animaux ; cependant le fœtus humain perce ordinairement Tes membranes à l'endroit qui fe trouve fur l'orifice de la matrice, par l'effort qu'il fait contre cette ouverture ; & il arrive afîêz fbuvent que Tamnios qui efl fort mince, ou même le chorion , fe déchi- rent fur les bords de l'orifice de la ma- trice, & qu'il en rcfle une partie fur fa tête de l'enfant en forme de calotte , c'cft ce qu'on appelle naître coiffé. Dès que cette membrane efl percce ou déchirée, la liqueur qu'elle coniient s'écoule : on appelle cet écoulement le ùain ou les eaux de la mère; les bords de l'orifice de la matrice & les parois du vagin en étant humedlés, (e prêtent plus facile- ment au paffage de l'enfant ; après l'é- coulement de cette liqueur, il refle dans la capacité de la matrice un vide dont les Accoucheurs intelligens (âvent pro- fiter pour retourner le fœtus , s'il eft dans une pofition déiavantageufè pour l'accouchement , ou pour le débarrafler des entraves du cordon ombilical, qui ff 043» 'Hiflolre Naturelle; i*cmpêche quelquefois d*avariicer. Lorf^ que le foetus e(l forti , l'accouchement ji'eft pas encore fiiii , il refte dans la matrice le placenta & les membranes; i'enfant nouveau-né y cft attaché par le cordon ombilical, la main de i'Accou^ cheur , ou (èulement le poids du corps de Vtnhïity les tire au dehors par le moyen de ce cordon : c'cll ce qu'on appelle /délivrer la femme , & on donne alors au placenta & aux membranes le nom de délivrance, *^ Ces organes qui étoient ncr ceflaires à la vie du foetus , deviennent înmiles^ même nuifibies à celle du nou- veau-né; on les fépare tout de fuite du corps de l'enfant en nouant Je cordon à un do'gt de diftance du nombril, &. on le coupe à un doigt au-deffus de la liga- ture ; ce refte du cordon fe defsècne peu à peu, & fè fépare de lui-même à l'endroit du nombril , ordins^ir^ment au fixièmc ou (êptième jour. En examinant le fœtus dans le temps ^ui précède la naifTance , Ton peut prendre quelqu'id^ du mécanifme de fès fondions naturelles ; H a des organes qui lui fom nécejOTaii'es dans le fein de là mère^ \ Des Amfnûu:^^ 'lot maïs qui lui deviennent inutiles dès qu*îl en cft forii. Pour mieux entendre Icf inécanifmc des fon<îlions du foetus , il fliut expliquer un peu plus en détail ce qui a rapport à ces parties accefloireSy qui font le cordon , fe$ enveloppes , la liqueur qu'elles contiennent , & enfin le placenta : le cordcïn qui ed attaché au corps du fœtus à l'endroit du nombril y eft compofé de deux artères & d'une' yeine qui prolongent le cours de fa cir- culation du ftng, la veine ell plus grofTe' que les artères ; à Textrémité de ce cor- don , chacun de ces vàiffeaux (c divife en une infinité de ramifications qui s'é- tendent entre deux membranes^, & qui s'écartent également du tronc commun ^ de forte que le compofé de ces ramifi- cations eft plat & arrondi ; on l'appelfe placenta t parce qu'il relTemble en quel- que fiçon à un gâteau , la partie du centre en eft plus épaifle que celle des- bords , l'épaifîbur moyenne eft d'envi- ' ron un pouce , & le diamètre de huit ou neuf pouces & quelquefois davan- tage ; la face extérieure qui eft appliquée contre la matrice ; eft convexe , la faos- TT< •• • ^tbl Hiftoke Ndîiirelle. intérieure eft concave , le (àng du fœtus circule dans le cordon & dans le pla- centa ; fes deux artères du cordon (brtcnt de deux grofTes artères du fœtus & en reçoivent du fang qu'elfes portent dans les ramifications artérielles du placenta, au fortir defquelles il pafTe dans les rami- fications veineu fes qui le rapportent dans la veine ombilicale , cette veine com- munique avec une veine du fœtus dans laquelle elle le verfè. La face concave du pîacenta eft revê- tue par le chorion, l'autre face eft auul recouverte par une forte de membrane molle & facile à déchirer , qui (emble éfre une continuadon du chorion , & le fœtus eft renfermé fous la double enve- loppe du chorion & de l'amnios; la forme du tout eft globuleufe, parce que les Intervalles qui ic trouvent entre les en- veloppes & le fœtus , font remplis par une liqueur tranfparente qui environne le fœtus. Cette liqueur eft contenue par l'amnios qui eft la membrane intérieure de Tcnveloppe commune ; cette mem- brane eft mince & tranfparente , elle fe îepiie fur le €9rd9|]^ ombUiçal à l'e^'^yroit t ■■ Des Afiimaux. 103^ 3e fon h :tion dans le placenta, & îe revêt fur rouie (a longueur jufqu'au nom- bril du foetus: le chorion ed la membrane extérieure^ elle eft épKiKTe & fpongieufe, parlêmée de vaiffeaux fanguins , & com- pose de plufieurs lames dont on croit que l'extérieure tapifïè la face convexe du placenta ; elle en fuit les inégalités , elle s'élève pour recouvrir les peiits mamelons qui fortent du placenta , & qui font reçus dans les cavités qui le trouvent dans le fond de la matrice & que l'on api^elle Lacunes; le foetus ne tient à la matrice que par cette feule infertion de quelques j^oints de fon en- veloppe extérieure dans les petites cavités ou liiîuofités de ce vifcère. Quelques Anatoniiftes ont cru que te fœius humain avoit comme ceux de cer- tains animaux quadrupèdes , une mem- brane appelée Allantoide , qui formoit une capacité deftinée à recevoir l'urine , & ils ont prétendu l'avoir trouvée entre le chorion & l'amnios , ou au milieu du placenta à la racine du cordon' ombilical, fous la forme d'une velîie allez groflè, ^auâ lacjuelk l'uriaç entroit par un long Eiiij r»04 'Nijloke Naturetîe; tuy»u qui faifbit partie cki cordon, & quf aiioit s'ouvrir d*un côté dans ia veffie, & de l'autre dans cette membrane allan* toïde ; c'étoit , félon eux , l'ouraque tel que nous le connoiffons dans quelques animaux* Ceux qui ont cru avoir fait cette découverte de l'ouraque dans le foetus humain, avouent qu'il n^^toit pas à beaucoup près fi gros que dans les quadrupèdes, mais qu'il étoit partagé en piufieurs filets fi petits , qu'à peine pou- voit-on les apercevoir; que cependant ces filets étoient creux y Su que Turine' pafToit dans fa cavité intérieure de ces iilets , comme dans autant de canaux. L'expérience & les obfervations du plus grand nombre des A natomifles font contraires à ces faits ; on ne trouve ordi- nairement aucuns vefliges de l'allantoïdc entre Tamnios & le chorion , ou dans ie placenta, ni de l'ouraque dans le cor- don; il y a feulement une forte de liga- ment qui tient d'un bout à la face exté^ rieure du fond de la veflie , & de l'autre au nombril, mais il devient fi délié ^n entrant dans le cordon, qu'il y eft réduit .1 ïkn] pQur l'ordinaire ce ligam^it n'^ -i. Des Aiùmûii^» loji pas creux, & on ne voit poin. d'ouverture dans le fond de la veflle , qui y réponde. Le fœtus n'a aucune communication avec Tair libre, & les expériences que l'on a faites fur fès poumons , ont prouvé qu'ils n'a voient pas reçu l'air comme ceux de l'enfant nouveau-né, car ils vont à fond dans i'eau , au lieu que ceux de i'cnfant qui a refpirc , furnagent ; le foetus> ne refpire donc pas dans le fein de la mère^~ pai conféquent il ne peut former aucun- fon par l'organe de la voix, & il femble- qu'on doit regarder comme des fables les hiftoircs qu'on débite fur les gémiflè- mens Sa les cris des enfàns avant leur naiflance. Cependant il peut arriver après l'écoulement des eaux , que l'air entre dans la capacité de la matrice , & que l'en- fant commeiicc à refpirer avant que d'en être forti; dans ce cas il pourra crier, comme le petit poulet crie avant même que d'avoir caflTé la coquille de l'œuf qui le renferme , parce qu'il y a de l'air dans la cavité qui eft entre la membrane exté- rieure & la coquille, coïnme on peut s'cn^ afîurer fur les œufs dans lefquels le poulet «il déjà fort avancé, ou feulement fiuj' {ib6 Hiflolre Naîurtlle. ceux qu'on a gardés pendant quelque temps & dont le petit lait s'efi évaporé à travers les pores de ia coquiiie; car eu caflànt ces œufs on trouve une cavité confidérable dans le bout Aipéreur de l'œuf entre la membrane Sa ia coquille, & cette membrane efl dans un état de fermeté & de lenfjon, ce qui ne pourroit eue , n cette cavité éioit abiolument iriJe, car dans ce cas, le poids du rede de la matière de Tœuf cafleroit cette membrane , & le poids de raimofphère brilcroit ia coquiiie à l'endroit de cette cavité: il eft donc certain qu'elle eft rem- plie d'air , & que c'eft par le moyen de cet air cjue le poulet commence à ref- pirer avant que d'avoir calTé ia coqu'lle ; & fi l'on demande d'où peut venir cet air qui eft renfermé dans ceue cavité , il eft aifé de répondre qu'il eft produit par la fermentation intérieure des matières con- tenues dans l'œuf, comme i'on fait que toutes les matières en fermentation en produifent. Voye^la Statique des végétaux» thûp. VI. Le poumon du foefus étant fans aucun fnQUYement; il n'euire dans ce vifcèie \ '1 Des Ammawei 107; ^qu'autant de fang qu'il en faut pour te nourrir & le faire croître, & il y a une autre voie ouverte pour ie cours de la circulxiiion : ie fang qui cft dans l'oreil- lette droiic du cœur , au lieu de paffer dans l'artère pulmonaire & de revenir, après avoir parcouru le poumon , dans 1 ortilleue giuche par la veine pulmo- naire, pafle immédiatement de l'oreilletic droite du cœur dans la gauche par une ouverture nonmiée le trou oval , qui cft dans la cloilbn du cœur entre les deux: oreillettes; il entre enfuite dans Taorte, qui le difliibue dans toutes les parties du corps par toutes fès ramificadons arté- rielles, au (ortir defquelles les ramifica- tions veincufes le reçoivent & le rappor- tent au cœur en (e réuniffunt toutes dans la veine - cave qui aboutit à Toreillette droite du cœur : le fàng que contient cette oreillette, au lieu de paffer en entier par le trou oval , peut s'échapper en partie dans l'artère pulmonaire , mais il n*entre pas pour cela dans le corps des poumons , parce qu'il y a une communication entre l'artère pulmonaire & l'aorte, par un canal artériel qui Y«t iinuiédkiiemeat de l'une io8 Hîjfoire Naturtlle» ^ l'autre ; c'eft par ces voies que le (âng^- du foetus circule fans entrer dans le pou^ mon, comme il y entre dans les enfhns, les adultes, £c dans tous les animaux qui refpirent. On a cru que !e (àng de la mère paiïbît dans le corps du fœtus, par le moyen-du placenta & du cordon ombilical : on (up- pofoit que les vaiflèaux fânguins de fa matrice étoient ouverts dans les lacunes; & ceux du placenta dans les mamelons, & qu'ils s'abouchoient les uns avec les autres, mais Texpérience eft contraire à cette opinion ; on a in jcélé [es artères du cordon, la liqueur eft revenue en entier par les veines , & il ne s'en eft échappé aucune partie à l'extérieur : d'ailleurs on peut tirer les mamelons des lacunes où ils font logés , fans qu'il forte du fàng , ni de la matrice , ni du placenta ; il fuinte feulement de Tune & de l'autre une liqueur laiteufe ; c'eft , comme nous l'a- vons dit , celte liqueur qui (èrt de nour- jiture au fœtus ; il femble qu'elle entre dans les veines du placenta, comme le chyle entre dans la veine fous-clavière^ !JBc peut-être le placenta fait-il en grande 'Des Amntûux* ^^^ iparnc Toffice du poumon pour h fan- guification. Ce qu'il- y a de fur, c'cft que le (âng paroît bien plus tôt dans le placenta que dans le foetus, & j'ai (bu vent obfèrvé dans des œufs couvés pendant un jour ou deux, que ie fang paroît d'abord dans les membranes, & que les vaiff eaux fanguins y font fort gros & en très-grand nombre , tandis qu'à l'excep- tion du point auquel ils aboutiffent, le corps entier du petit poulet n'eft qu'une. matière blanche & prefque tranfparente , dans laquelle il n'y a encore aucun vaif- ièau fànguin. On pourroit croire que la liqueur de l'amnios efl une nourriture que le foetus reçoit par la bouche ; quelques obferva- teurs prétendent avoir reconnu cette, liqueur dans fon eflomac , & avoir vu quelques foetus auxquels ie cordon om-^ bilical manquoit entièrement , & d'autres qui n'en avoient qu'une très- petite portion qui ne tenoit point au placenta; mais dans ce cas la liqueur de Tamnios ne pourroit-elle pas entrer dans le corps- du foetus par la petise portion du cor- don ombilical, ou. par l'ombilic mêiner 1 1 d Hifloke NûUirelki d'ailleurs on peut oppofer à ces oblerva- IJons d'autres oblervations. On a trouvé quelquefcMs des fœtus qui avoient fa bouche fcrtnée , & dont les lèvres n'e- toient pas fépartes ; on en a vu aufli dont l'cefophage n*avoit aucune ouver- ture: pour concilier tous ces faiis, il s'cft trouvé dçs Anmotniftes qui ont cru que les aiimens pafToient au fœtus en partie par le cordon ombilical , & en partie par fa bouche. Il me paroît quaucune de ces opinions n'efl fondée; il n'ed pas queQion d'examiner le (èui accroifle- ment du fœtus , & de chercher d'où & par oii il tire fa nourriture ; il s'agit de fàvoir comment fe fait l'accroifiement du tout, car le placenta, la liqueur & les enveloppes croflent & augmentent aufli- bien que le fœtus , & par confequent ces !nftrumens , ces canaux , employés à recevoir ou à porter cette nourriture au fœtus, ont eux-mêmes une efpèce de vie. Le développement ou l'accroifle- ment du placenta & des enveloppes efl: aufn difficile à concevoir que celui du fœtus, & on pourroit égaleinem dire, comme je l'ai déjà inilxiué ^ que le foetus 'Des Anhmmx, 1 1 1' trourrît îc placenta, comme l*on dit que le placenta nourrit le foetus. Le tout ell , comme Ton fait, flottant dans la matrice, & Hms aucune adhérence dans les com- mencemens de cet accroirTemcnt , ainft Il ne peut (c faire que par une intufl^uf- ception de la matière laiteufe qui cft con- tenue dans la matrice; le placenta paroît tirer le premier cette nourriture , con- venir ce lait en fang, & le porter au foetus par des veines : la liqueur de l'amnios ne paroît être que cette même liqueur laiteiifè dépurée , dont la quantité aug- mente par une pareille intuflufception , à mefure que ceite membrane prend de i'accroifîéinent , 6c le foetus peut tirer de cette liqueur par la même voie d*in- tuflufception , la nourriture néceflaire à fon développement; car on doit oblerver que dans les premiers temps , & même juiqu'à deux ou trois mois le corps du feus ne contient que très- peu de fang: il eft blanc comme de l'ivoire , & ne paroît être compofé que de lymphe qui a pris de la folidiié; & comme la peau ell tranfparentc, & que toutes les partie^ font trèâ-inoUes, on peut aiiémeat concevoir. 1 1 1 Hijlolrc Ndiurelle. que la liqueur dans laquelle le foetus nage, peut (es pénétrer immédiatement, & fournir ainfi la matière nécellùire à fa nutrition & à Ton développement. Seule- ment on peut croire que dans les derniers temps il prend de la nourriture par la bouche, puifqu^on trouve dans Ton eflo- mnc une liqueur femblable à celle que coniicwt l'amnios, de l'urine dans la vef- f ie , & des excrémcns dans les inteftins ; & comme on ne trouve ni urine, ni meco" vium , c'cft le nom de ces excrémens, dans la capacité de l'amnios , il y a teut lieu de croire que le foetus ne rend point d'cxcrémens , d'autant plus qu'on en a vu naître fans avoir Tanus perCé, & fans qu'il y eût pour cela une plus grande qu.mtité de meconîum dans les inteflins. Quoique le foetus ne tienne pas im- médiatement à la matrice, qu'il n'y foit attaché que par de petits mamelons exté- rieurs à ks enveloppes , qu'il n'y ait aucune communication du làng de la mère avec le fien, qu'en un mot, il foit à plufieurs égards auffi indépendant de la mère qui le porte, que l'œuf l'eft de la poule qui le couyc^ on a prétendu cj^ue Des Animaux» 1 1 J tout ce qui affcdloit ia mère , afTcdoit aufii le foetus ; que les impreffions de Tuiic agifToient fur le cerveau de l'autre, & on a attribué à cet e influence imagi- naire les refïcmblances , les monftruo- fîtés, & fur- tout ies taches qu'on voit fur la peau. J'ai examiné pluficurs de ces marques, & je n'ai jamais aperçu que des taches qui m*ont paru caufées par un dérangement dans le ti/Tu de la peau. Toute tache doit néceflTairement avoir une figure qui refTemblera, fi Ton veut» à quelque chofe ; mais je crois que la ref- femblance que Ton trouve dans celles-ci , dépend plutôt de l'imagination de ceux qui les voient, que de celle de la mère. On a pouffé fur ce fujet le merveilleux aufli loin qu'il pouvoit aller; non- feule- ment on a voulu que le foetus portât les. repréfentations réelles des appétits de fa mère , mais on a encore prétendu que - par une fympathie frngulière les taches qui repréfentoient des fruits, par exemple^ des fraifès , des cerifes , des mûres , que la mère avoit defiré de manger, chan- geoient de couleur ; que leur couleur- devenoit plus foncée dans la faifoii q\i. \ ^l 1 4 JJiJtolre Naturelle: ces fruits étoient en maturité. Avec un peu plus d'attention & moins de préven- tion , l'on pourroit voir cette couleur des taches de ia peau changer bien plus fouvent; ces changemens doivent arriver toutes les fois que le mouvement du fang ell accéléré , & cet effet efl; tout ordinaire dans le temps où la chaleur de l'été fait mûrir les fruits. Ces tache'» font toujours ou jaunes, ou rouges, ou noires, parce que le iang donne ces iciiucs de couleur à la peau lorfqu'il entre en trop grande quantité dans les vaiileaiix d( nt elle efl: parfemce : fi ces taches ont pour caufe l'appéfit de Ja mère , pourquoi n'ont-elies pas des formes & des couleurs aiilîi variées que les objets de ces appétits î que de figures fingulières on vcrroit fi les vains defirs de la mère écoient écrits fur la peau de l'enfant! > Comme nos fenlaiions ne refîèmblent point aux obiets qui les cnuient, il efl impofljble que le defir, la frayeur, l'hor- reur, qu'aucune paffion , en un mot, aucune émotion intérier.re, puifTent pro- duire des repréfentations rcelle> de ces mêmes objei$ ^ ^ i'e9fam étant à ^%\ Des Animaux. tl J cgard auffi indépendant de la mère qui le porte , que l'œuf l'eft de la poule qui le couve, je croirai tout aufli volontiers ou tout aufli peu ; que l'imagination d'une poule qui voit tordre le cou à un coq, produira dans les œufs qu'elle ne fait qu'échaufïèr , des poulets qui auront le cou tordu , que je croirois l'hifloire de la force de l'imagination de cette femme qui , ayant vu rompre les membres à un criminel, mit au monde un enfant dont ies membres éioient rompus. Mais fuppofbns pour un inftant que ce fait fût avéré, je foutiendrois toujours que l'imagination de la mère n'a pu pro- duire cet effet ; car quel eft l'effet du fài- fiflèment & de Th^rreurî un mouvement intérieur, une conVulfion, fi Ton veut, dans le corps de la mère , qui aura fecoué , ébranlé , comprimé , reflerré , relâché , agité la matrice ; que peut- il réfulter de cette commotion \ r'ren de fèmblable à la caufè , car fi cette commotion eil très- violente, on conçoit que le fœtus peut recevoir un coup qui le tuera , qui le bfeHera, ou qui rendra difformes quel- ques-unes de$ panier qui auront ét^ Il 6 Hiflotre Naturelie. \ frappées avec plus de force que les autres; mais comment concevra -t- on que ce mouvement , cette commotion commu- niquée a la matrice, puifTe produire dans ïc fœtus quelque chofe de fcmblable à la penfée de fa mère, à moins que de dire, comme Harvey , que la matrice a la fa- culté de concevoir des idée^, & de les réalifer fur le foetus î Mais , me dira-t-on , comment donc expliquer le fait; ù ce neft pas i'imagi- najon de la mère qui a agi fur ie foetus, pourquoi eil-il venu au monde avec les membres rompus! À cela je réponds que quelque témérité qu'il y ait à vouloir expliquer un fait, iorfqu'il eft en même temps extraordinaire ^ incertain , quel- que dé(àvaniage qu'on ait à vouloir rendre raifon de ce même fait fwppofé comme vrai, lorfqu'on en ignore les cir- eonftances , il me paroît cependant qu'on peut répondre d'une manière fatisfaifante à cette efpèce de queftion, de laquelle on n'eft pas en droit d'exiger une folu- tion direour bien des gens; ie préjuge, fur- tout celui qui eft fondé fur ic merveilleux , triom- phera toujours de la raifon, Sa l'on feroit bien peu philofopFie fi l'on s*en éion- noit. Comme il eft fouvent qu^ftion -dans le monde , de ces marques des en- fans , & que dans le monde les raifons générales & philolbphiques font moins d'efîèt qu'une hifloricite , il ne faut pas compter qu'on puiflê jamais perfuader aux femmes que les marques de leurs cnfans n'ont aucun rapport avec les en- vies c|u'elles n'ont pu faiisfaire ; cepen- dant ne pourroit-on pas leur demander avant la naifîance de l'enfant , quelles j ont été les envies qu'elles n'ont pu fatis- fj faire, & quelles feront par conféquent les marques que leur enfant portera! j'ai fait quelquefois cette queftion , & j'ai, fâché les gens fans les avoir convaincus. La durée de la grofTeffe eft pour l'or- dinaire d'environ neuf mois, c'eft-à-dire, de deux cents foixante & quatorze ou deux cents foiJ^ante & quinze jours , ce temps eft cependant quelquefois plusl long. Des Ainmciwxi 1 2 t long , & très- fou vent bien pîus court ; on fait qu'il naît beaucoup d'enfaiis à fept & à huit mois, on fait aufli qu'il en naît quelques-uns beaucoup plus tard qu'au neuvième mois ; mais en générai » les accouchemens qui précèdent le terme de neuf mois font plus communs que ceux qui le palîent. Aufli on |:)cut avan- cer que le plus grand nombre des accou- chemens qui n'arrivent pas enire le deux cents foixanic & dixième jour & le deux cents quatre-vingtième , arrivent du deux cents foixanticme au deux cents foixanie & dixième, & ceux qui di{cnt que ces accouchemens ne doivent pas êire regar- des comme pre'maiurés, paroifient bien fondés; félon ce calcul les temps ordi- naires de l'accouchement naturel s'éten- dent à vingt jours, c'eft-à-dirc , depuis huit mois & quatorze jours jufqu'à neuf mois & quatre jours. On a fait une obrervation qui paroît prouver l'étendue de cette variation dans la durée des groflèriès en général , & donner en même temps le moyen de la réduire à un terme fixe dans telle ou telle groflefle particulière. Quelques Toms JF* ^ F ■ ^ \ 122 Hifloire Naturelle, perfonnes prétendent avoir remarqué que raccouchement arrivoit après dix mois lunaires de vingt-fept jours chacun , ou neuf mois folaires de trente jours , au premier ou au fécond jour qui répon- cloient aux deux premiers jours auxquels l'écoulement périodique arrivoit à la mère avant (à groflcflè. Avec un peu d'attention Ton verra que le nombre de autres : - il pas s même, ^ dreî or au con- :ndre le après la du dia- du pou- 5c eau le ir de ccttî Des Animaux, ' 1 2 p cette évacuation qui ne fe feroît pas fuis cela , puifque l'on n'a point trouvé de vucon'ium dans l'amnios des fœtus de dix & onze mois, qui n'ont pas refpiré, Ôc qu'au contraire, un enfant à fix ou fept mois rend ce meconîum peu de temps après qu'il a refpiré. D'autres Anatomiftes, ins qu'il I grande ' pafrage ppofée ; :, & s'il )rtement la fbruK 'fi qu'elle avoit auparavant , parce que le làng ayant r'ouvcrt tous les canaux qui s'éioient fermés, ils reviendront au même état qu'ils étoient : fi le (Img ne force qu'une parde de ces canaux , l'œuvre de la génération ne fera pas détruite , quoi- qu'il paroiflc du (ang , parce que la plus grande partie de la matrice fe trouve encore dans l'état qui efl néceiïiiire pour qu'elle puifTe s'exécuter ; dans ce cas il paroîtra du fang , & favortement ne iuivra pas ; ce lang fera feulement en moindre quantité que dans les évacua- tions ordinaires. Lorfqu'il n'en paroît point du tout , comme c'eft le cas le plus ordinaire, la pre- mière révolution périodique ne laifTe pas de fe remarquer & de fe feire fen tir par les mêmes douleurs, les mêmes fymptômes; il fe fait donc dès le temps de la première fupprefîion , une violente adion fur la matrice , & pour peu que cette aJlion fiit augmentée, elle détruiroit l'ouvrage de la génération : on peut même croire avec allez de fondement , que de toutes les conceptions qui fe font dans les der- niers jours qui précèdent l'arrivée des F v| ft^i Hifloke Naîiircïïc, menftrucs , il en réufllt fort peu , & que l'adion du fang détruit aifément les foibles racines d'un germe ï\ tendre & fi de'licat ; les conceptions au contraire qui fe for^t dans les jours qui Ibivent l'écoulement périodique , font ccifes qui tiennent ôc (jui réiifliflent le mieux , parce que le produit delà conccpiion a plus de temps pour croître, pour fe fonifier, & pour réfiftcr à l'acflion du fang & à la révo- lution qui doit arriver au terme de l'é- coulement. Le fœtus ayant (libi cette premitrc épreuve, & y ayant réfiUc, prend plus die force & d'accroifTement , & efi: plus en état de fouffrir la féconde révolution <{ui arrive un mois après la première ; aufll les avortemens caufés par la féconde période, font-ils moins fréquens que ceux qui font caufés par. la première; à la trol- fième période le danger eft encore moins grand ,. & moins encore à la quatrième & à la cinquième, mais il y en a toujours; K peut arriver ,. & il arrive en effet de faudès couches dans les temps de toutes ces révolutions périodiques , feulement oa a ohfervé qu'elles font plus rares diins f, *y \\ \ \ Des Ammauii. 'i~y^ fc milieu de la groiïefTe, Ôc plus fré*- c]ucntes au commencement & à la fin ;. on entend bien par ce que nous venoi"» de dire, pourquoi elles font plus frc- quenies au commencement, il nous reftc à expliquer pourquoi elles font aulTi plus fréquentes vers la fin que vers ie nailiea de la groiTefîe. Le foetus vient ordinairement au monde dans le temps de la dixième révolution ; lorfqu'il naît, à la neuvième ou à la hui'- lième , il ne laiiïe pas de vivre, & ces accouchemens précoces ne font pas re- gardés comme de faufîes couches, parce que l'enfant, quoique moins formé, ne îaifîe pas de l'être afTez pour pouvoir vivre ; on a même prétendu avoir des exemples d'cufans nés à la feptième , ôc même à ia fixième révolution , c'eft-à-dire, à cinq ou fix mois, qui n'ont pas laiflé de vivre ; il n'y a donc de différence entre l'accouchement Ôc fa fauffe couche , que relativement à la vie du nouveau-né ; ôc en confidérant la chofe généralement , le nombre des faufles couches du premier , du fécond & du troifième mois , eft très* conlidérable par les raifoiis que nou6> j ^4, HiJIoh-e NatureUr. avons dites, & le nombre des accouche- mens précoces du feptième & du hui- lièine mois eft auffi aiïez grand, en com- paraifon de celui des faufles couches des quatrième ,^ cinquième & fixième mois, parce que dans ce temps du milieu de îa grofTefTe, l'ouvrage de la génération a ]:)ris plus de folidité & plus de force, qu'ayant eu celle de réfirter à l'acflion des quatre premières révoluiions périodique*, il en faudroit une beaucoup plus violente que les précédentes pour le détruire : la même raifon fubfifte pour- le cin- quième & le fixième mois , & même avec avantage , car l'ouvrage de la géné- ration efl encore plus fohde à cinq mois qu'à quatre , & à fix mois qu'à cinq ; mais lorfqu on eft arrivé à ce terme , le /' fœtus qui jufqu'alors eft foible , & ne peut agir que foiblement par iès pro- pres forces commence à devenir fort & à s'agiter avec plus de vigueur , & Jorfque le temps de la huitième période arrive , & que la matrice en éprouve l'ai^^ion , le fœtus qui l'éprouve aufli , fait des efforts qui, fe réunifîimt avec ceux de la mère ; facilitent fon exclufion > & g' \ î Des Anmcîux\ ■5* ■m ny il peut venir au monde dès le fepijtme mois toutes les fois qu'il efl à cet âge plus vigoureux ou plus avancé que les autres, & dans ce cas il pourra vivre ; au con- tniirc , s'il ne venoit au monde que par la foiblcfle de la matrice qui n'auroit pu réfjfîer au coup du lang dans cette huitième révolution, l'accouchement fe- roit regardé comme une faufTe couche, & renfant ne vivroit pas; mais ces cas font rares , car fi le foetus a réfifté aux fcpt premières révolutions , il n'y a que des accidens particuliers qui puiflent faire qu'il ne réfifle pas à la huitième , en fup- j/ofant qu'il n'ait pas acquis plus de force & de vigueur qu'il n'en a ordi- nairement dans ce temps. Les fœtus qui n^iuront acquis qu'un peu plus tard ce même degré de force & de vigueur plus grande , viendront au monde dans le temps de la neuvième période, & ceux auxquels il faudra le temps de neuf mois pour avoir cette même force , vien- dront à la dixième piîriode, ce qui cft le terme le plus commun & ic plus général ; mais loriquè le foetus n'aura pas acquis dans ce teinps de neuf mois ce même 1^6 Hi/folre Nature /le. degré de perfedion & de force, il poui'ra relier dans ia matrice jufqu'à la onzicinî, & même jufqu'à la douzième période , c'ell-à-dire, ne naître qu'à dix ou onie mois , comme on en a des exemples. Cette opinion que ce font les menf- trues qui font la caufe occafionnelie de i'accouchement en différens temps, peut €tre confirmée par plufieurs autres rai- fbns que je vais cxpofer. Les femelles de tous les animaux qui n'ont point de menftrues , mettent bas toujours au même terme à très- peu près, il n'y a jamais qu'une trè^- légère variation dans îa durée de ia gellution : on peut donc foupçonner que cette variation , qui dans les femmes eft fi grande , vient de l'adion du fang qui iè tait lèntir à toutes ies périodes. Nous avons dît que le placenta ne tient à ia matrice que par quelques ma- meions , qu'il n'y a de fang, ni dans ces mamelons , ni dans ies lacunes où ils font nichés, & que quand on ies en fépnre, ce qui fc fait aifément &. (ans efforts, il De- fort de ces mamelons & de ces iacun^-s qu'une liqueur iaiteufe j or coiument ie • Des Anmatixi 137 faît - îl donc que raccouchemcnt fok toujours fuivi d'une hémorragie, même confjdtfrable, d'abor'' Je flmg aflez puF, enfuite de (îmg mêlé de férofués, &c î Ce fang ne vient point de la féparaiion du placenta , les mamelons font tirés hors des lacunes fans aucune cffufion de fang,, puifque ni les uns , ni les autres n'en con- tiennent i raccouchemcnt qtii conTifie précifémentdans cette réparation , ne deit donc pas produire du fang : ne peut- on pas croire que c'cfl au contraire l'avion du fang qui produit l'accouchement î qui fert à la nutrition & au dcîveloppemcnt de tout ce qui vit ou végète , cette matière ne peut opérer la nutridon & le développement qu'en s'affimilant à chaque partie du corps de l'animal ou du végétal , de en pénétrant intimement la forme de ces parties, que j'ai appelée le moule intérieur, Lorfque cette matière nutritive eft plus abondante qu'il ne fmt pour nourrir & développer le corps animai ou végétal, elle cd icnvoycç [14^ Hiftoire Naturelle. de toutes les parties du corps dans un ou dans plufieurs rélêrvoirs fous la forme d'une liqueur; cette liqueur contient toutes les molécules analogues au corps de l'animal , & par conféquent tout ce qui eft nécefTaire à la reproducflion d'un peiii être entièrement fembiable au pre- mier. Ordinairement cette matière nutri- tive ne devient furabondante , dans le plus grand nombre desefpèces d'animaux, que quand le corps a pris la plus grande partie de Ton accroi/Tement, & c'efl: par cette raifon que les animaux ne font en état d'engendrer que dans ce temps. Lorfque cette maiière nutritive & pro- dud:ive, qui eft univerfeilement répan- due, a paffé par le moule intérieur de i'animal ou du végétai, & qu'elle trouve une matrice convenable , elle produit un animal ou un végétal de même efpèce; mais lorfqu'ellc ne (e trouve pas dans une matrice convenable , elle produit des êtres organises diflférens des animaux & des végétaux , comme les corps mouvans & végétans que l'on voit dtfns les liqueurs fémînales des animaux , dans les infufions des germes des plantes, &c. - • ms un . forme ontient i corps out ce n d'un lu prc- î nutri- dans le limaux, grande :'eft par font en ips. & pro- répan- ■icur de trouve duît un efpèce; ans une uit des laux Ôc louvans iqueurs ifufiom Des Animaux, 145 Cette matière produdivc eft com- pofée de particules organiques toujours, adives , dont le mouvement & l'adion font fixes par les parties brutes de la matière en géne'ral , ôc particulièrement, par les particules huileufes & (alines ; mais dès qu'on les dégage de cette madère étrangère , elles reprennent leur a<5lion & produifent différentes efpèces de végéta- tions & d'autres êtres animés qui fe meu- vent progrefîivcment. . On peut voir au microfcope les effets de cette matière produ<^ive dans les li- queurs féminales des animaux de l'un & de l'autre fexe : ia femcnce des femelles vivipares eft filtrée par les corps glandu- leux qui croiffent fur leurs tclticuies, & ces corps glanduleux contiennent une allez bonne quantité de cette fèmence dans leur cavité intérieure ; les femelles ovipares, ont , aufîi bien que les femelles vivipares, une liqueur féminale , & cette liqueur féminale des femelles ovipares eft encore plus adive que celle des femelles vivipares, comme je fexpliquerai dans î'hiftoire des oifèaux. Cette (cmence de la femelle efl en général feinblable à celle V 144' Hîftoire NdtureUe: du mâle, lorfqu'elles font toutes deux dans l'état naturel ; elles fè décompolent de la même façon, elles coniiennent des corps organiques fèmblables, & elles offrent également tous les mêmes phénomènes. Toutes les fubflances animales ou vé- gétales renferment une grande quantité de cette matière organique & produdlive, il ne faut , pour le reconnoître , que (è'parer les parties brutes dans icfquelles les particules adives de cette matière font engagées, & cela fe fait en mettant ces iubflances animales ou végétales infuièr dans de l'eau , les fels (è fondent , les huiles fe féparent & les parties organiques fê montrent en fê mettant en mouvement; elles (ont en plus grande abondance dans les liqueurs férainales que dans toutes les autres fubflances animales , ou plutôt elles y font dans leur é=tat de développement «Se d'évidence , au lieu que dans la chair elles font engagées & retenues par les parties brutes , & il faut les en féparer j)ar i'in- fufion. Dans les premiers temps de cette infufion , lorfque la chair n'efl encore que légèrement diffoute , on voit cette matière organique fous la forme de corps V mouvans ^uaniité ludlive, e, que fquelles hrc font :tant ces i infufer les huiles liques fe vcment ; ^ce dans outes les utôt elles emcnt & lair elles parties par rin- de cette l encore oit cette de corps iTiouvans :s . Des Animaux'. \ t4j- mouvans qui font prefque aufïl gros que ceux des liqueurs iéininaics ; mais à inefure que ia décoinpofition augmente, ces parties organiques diminuent de grofîeur & augmentent en mouvement ; & quand ia chair efl entièrement décorn- poiee ou corrompue par une longue infuiion dans l'eau , ces mêmes parties organiques font d'une peiitcfîe extrême , & d:ms un mouvement d'une rapidité infinie ; c'eft alors que cette matière peut devenir un poifon , comme celui de la dent de la vipère, où M. Mead a vu i.:c infinité de petits corps pointus qu'il i4 i pour des Tels, & qui ne font que t:^ Les matières faines & qui font propres tous nourrir , ne fournifîênt des mole- iles en mouvement qu'après un temps G ij H" \ 148 Hipoire Naturelle. afîcz conficlcrablc, ii faut quelques jours d'infufion dans l'eau pour que la chair fraîche , les graines , les amandes des fruits , &c. oflrent aux yeux des corps en mouvcnieni ; mais plus les matières font corrompues, dccompofées ou exaltées, comme le pus , le blé ergoté , le miel , ies liqueurs féminales , &c. plus ces corps en mouvement fc manifeftent promptc- mcnt ; ils font tous développés dans ies liqueurs féminales , il ne faut que quel- ques heures d'infufion pour les voir dans le pus , dans le blé ergote, dans le mid, &c. Il en eft de même des drogues de médecine, l'eau où on les met infuferj en fourmille au bout d'un très-petit | temps. , , Il exifte donc une matière organique! animée ,' univerfeilcmjcnt répandue dan>j toutes les fubftances animales ou végé* taies , qui fert également à leur nutrition, à leur développement & à leur rcpro-l duélioii ; la nutrition s'opère par la pcnt- traiion intime de cette matière dans tout«| ks parties du corps de l'animal ou dul végétai ; ic développement n efl qu'uwj cfpéce dp nutrition plus étendue, quif(| Des Animaux, ' 'i4p fiiit & s*opère tant que les parties ont afièz de ductilité pour fc gonfler & sVtendre, ÔL la rcj)rodu organes matériels de nos fens, que Ibnt-ils eux-mêmes, finon des convenances avec ce qui les afîe<5le î & notre fens intérieur, notre ame a-t-ellc rien de fem!)luble , rien qui lui foit commun avec la nature de ces organes extérieurs I la fenfation excitée dans notre ame par la lumière ou par le fon , ref- femble-t-elle à cette matière ténue qui (èinble propager la lumière , ou bien à ce tréinoufîement que le fon produit dans l'air I ce font nos yeux & nos oreilles qui ont avec ces miiières toutes les c nve- nances nécefTaires , parce que ces organes font cû effet de la même naiu -• queceite G V j I 5 6 Hifloire Naturelle matière elle-même ; mais la (enfaiîon qife nous éprouvons n*a rien de commun , rien de femblabie ; cela feul fie ruffiroii-il pas pour nous prouver que notre ame eu en effet d'une nature différente de celle de la matière l n -ï^r. y: * Nous fommes donc certains que la Çtu» fàfton intérieure eft tout- à- fait différente de ce qui peut la caufer , & nous voyons déjà que s'ii exifte des chofes hors de nous , elles (ont en elles-mêmes tout- à-fait idifferentes de ce que nous les jugeons, .puifque la fenfation ne reffemBle en au- cune façon à ce qui peut la eau 1er ; dea- lers ne doit-on pas conclure que ce qui caufê nos fenfations, eft néceffairement & par Ça nature toute autre chofe que ce que nous croyons î cette étendue que nous apercevons par les yeux , cette impé- nétrabilité dont le toucher nous donne une idée , toutes ces qualités réunies qui conftituent la matière, pourroient bien ne pas exifter, puifque notre fenfation intérieure, & ce qu'elle nous repréfente par l'étendue, l'impénétrabilité, &c. n'eft nullement étendu ni impénétrable, & n'a même rien de commun avec ces qualités. î > . .. Je r Homme, 1 5 7 Si l*on fait attention que notre ame cfl fou vent pendnnt le fommeil & l'abfence des objets , affédée de fenfations , que ces (ënlaiions font quelquefoii fort diffé- rentes de celles qu'elle a éprouvées par ia préience de ces mêmes objejts en faifmt ufage (\cs fens , ne viendra- 1- on pas à penier que cette préfence des objets n'eft pas néceffaire à 1 exiftencc de ces fenfations , & que par conféquent notre ame & nous , pouvons exilîer tout (èuls & indépendamment de ces objets î car dans le fommeii & après la mort noire corps exifle , il a même tout le genre d'exifteiice qu'il peut comporter , il eO le même qu'il étoit auparavant ; cependant lame ne s'aperçoit plus de Texiftencc du corps , il a ce (Té d'être pour nous : or je demande fi quelque chofe qui peut être, & enfuite n'être plus, fi cette chofe qui nous afîcde d'une manière toute diffé- rente de ce qu'elle eft , ou de ce qu'elle a été , peut être quelque choie d'afîêz réel pour que nous ne puiffions pas douter de fon exiftence. Cependant nous pouvons croire qu'if y a quelque chofe hors de nous, mois 158 Hifloire Néiînrelle nous n*en fommes pas fûrs , au lieu que nous foitimes aflTurés de l'exillencc rtelle de tout ce qui cfl en nous ; celle de notre ame eft donc certaine, & celle de noirç corps paroît douicufc , dès qu'on vient à pcnfer que lu matière pourroii bien n'être c|u*un mode de notre ame , une de fes façons de voir; notre ame voit de cette fitçon quand nous > veillons , elle voit d'une auire façon pendant le fommeil, elle verra d'une manière bien plus diffé- rente encore après notre mort , & tout ce cjui caule aujourd'hui fes fcnfations, la matiùre en général , pourroit bien ne pas plus exifter pour elle alors que notre propre corps qui ne (êra plus rien pour nous. Mais admettons cette exiftence de la matière, & quoiqu'il foit impoflible de la démontier , prêtons-nous aux idées ordinaires , & difons qu'elle exifte , & qu'elle exifte même C(imme nous la voyons ; nous trouverons , en comparant notie ame avec cet objet matériel, des diftéreiiccs fi grandes, des oppofitions ^\ miircjutes , que nous ne pourrons pas douter un ûiAant qu'elle ne foit d'une Je l'Homme. 159 nature totaTeincnt différente , & d'un ordre infiniment fupérieur. Notre ame n'a qu'une forme très-Gm- pîe, très-généraie , très-coiiftame, cette forme eft la pcnfce » il nous e(l impof- fible d'apercevoir notre ame autrement q.ie par la penfée ; cette forme n'a rien de divifihle, rien d'étendu , rien d'impé- nétrable , rien de matériel ; donc le fujet de cette forme , notre ame , efl indivifible & immatérielle : notre corps au contraire & tous les autres corps ont plufieurs formes , chacune de ces formes eft com- pofée , divifible , variable , deftrucftiblc , & toutes font relatives aux différens or- ganes avec iefqueis nous les apercevons ; notre corps , & toute la matière , n'a donc rien de conftant , rien de réel , rien de général par oiJ nous puifîions la fuifir & nous aflurer de la connoîire. Un aveugle n'a nul'e idée de l'objet matériel qui nous repréfen c les images des corps ; un lépreux dont la peau iéroit itifenfible , n'auroit aucune des idées que le toucher fait naître ; un fourd ne peut connoître ics Ions ; qu'on détruile fuccefïivement €e$ trois uioyem de i^jifatlons dans 14 160 Hijioîre Ndturelte ' Thommc qui en cft pourvu , l'amc n'en cxiilera pas moins, (es fondions inté- rieures fubfifteront , & la penfée fe mani- feftera toujours au dedans de lui-même : étez au contraire toutes ces qualités à la Kiaiière , ôicz - lui fes couleurs , Ton étendue , fa folîdité & toutes les autres propriétés relatives à nos fens , vous l'anéantirez ; notre ame eft donc impérif- iable , & ia matière peut & doit périr. Il en eft de même des autres facultés de notre ame comparées à celles de notre corps & aux propriétés les plus efTen- ticiles-à toute matière. Lame veut & commande , le corps obéit tout autant qu'il ie peut ; i'ame s'unit intimement à tel objet qu'il lui plaît , la diftance , la grandeur, la figure, rien ne peut nuire à cette union lorfque l'ame la veut , elle iè fait, & fe fait en un inftant; le corps ne peut s'unir à rien , il eft blefte de tout ce qui le touche de trop près , il lui faut beaucoup de temps pour s'approcher d'un autre corps , tout lui réfifte , tout eft obftacle , fon mouvement cefîè au moindre choc. La volonté n'eft ~ elle donc qu'un mouvement corporel^ & la A -'V ik l'Homme, i6i contcmj)!atîon un finiple attouchement î comment cet attouchement pourroit-it fe fiiirc fur un objet éloigné , fur un fujct ahftrait î comment ce mouvement pour- roit-il s'opérer en un inftani individble ? a t-0!i jamais conçu de mouvement fans qu'il y eut de l'efpacc & du temps î la volonté, fi c'efl un mouvement, ncîl: donc pas un mouvement matériel , & fi l'union de l'ame ;i fon objet eft un attou- chement , un contacfl , cet attouchement ne fe fait- il pas au loin l ce contact n'cfl-il pas une pénétration î qualités abfolument oppofées à celle", de la matière , & qui ne peuvent par conféquent apparienir qu'à un être immatériel. Mais je crains de m'êtrc déjà trop étendu fur un fujet que bien des gens regarderont peut-être comme étranger à notre objet ; des confidérations fur lame doivent - elles fe trouver dans un livre d'Hiltoire Naturelle \ J'avoue que je ferois peu touché de ce: te réflexion , ft je me fentois affez de force pour traiter dignement dci matières auiï: élevées, âc que je n'ai abrégé mes penfécs c(ue par ia crainte de ne pouvoir compretadre ce l6i Hiflolre Naturelle grand fujet clans toute Ton ércnJiie : pourquoi voulrvir retrancher de l'Hiftc^irc Naturelle de l'honiine l'hiiioire de la partie la plus noble de (on être î pour- quoi l*avilir mal - à- propos & vouloir nous forcer à ne le voir que comme un animal , tandis qu'il efl en effet d'une nature très - différenie , irès-diftinguéc, & fi fupérieure à celle des bêtes, cju'il faudroit être aufij peu éclairé qu'elles le font pour pouvoir les confondre! . Il eft vrai que rhonimc rcffemble aux animaux par ce qu'il a de matériel , & qu'en voulant le comprendre dans l'énu- mération de tous les êtres naturels , on eft forcé de le mettre dans la claffe des animaux ; mais , comme je Tai déjà fait fcntir , la Nature n'a ni claiîes ni genres, elle ne comprend que des Individus ; ces genres & ces clafTes font l'ouvrage de notre cfprit, ce ne font que des idées de convention , ôl iorfquc nous mettons l'homme d:ins l'une de ces clafTes , nous jie changeons pas îa réalité de fon être, nous ne dérogeons point à fa nobleffe, nous n'altérons pas fi condition , enfin nous n'ôtons rien à la fupériorité de la i s 1 I y^f. Je l'Homme» 163 nature humaine , fur celle des brutes , nous ne faifons que placer l'homme avec ce qui lui refTemble le plus , en donnant même à la partie maiérielle de Ton être le preuiier rang. En comparant l'homme avec Tanimal, on trouvera dans l'un & dans l'autre un corps , une matière organilee, des fens , de la chair & du fang , du mouvement & une infinité de choies Icmblables; mais toutes CCS refîbmljlances font extérieures & ne fuffifeiit pas pour nous fliire prononcer que la nature de l'homme e(l femblable à celle de l'animal ; pour juger de la nature de l'un & de l'autre , il faudroit connoître les qualités intérieures de l'animal aufTi-bien que nous cor»- noiflons les noires, & comme il n'eft pas polUble que nous ayons jamais con- noiflance de ce qui (è pafTe à Tintérieur de l'animal , comme nous ne faurons jamais de cpiel ordre, de quelle efpèce peuvent être Tes fenfations reladvement â celles de l'homme, nous ne pouvons JLiger que par les effèis , nous ne pouvons que comparer les réfultats des opérations naturelles de l'un Sa de l'autre. 'I (?4 Hîjfolre Naturelle ' Voyons donc ces refultats en corn-» mençant par avouer toutes les refl^em- bJanccs particulières , & en n'examinant cjue les différences, même les plus géné- rales. On conviendra cjue le plus (lupide des hommes fuffit pour conduire le j)lus rj)irituel des animaux , il le commande ÔL le fait (èrvir à Tes ufages, & c'eil moins par force & par adrefîé que par fupério- rité de nature , & parce qu'il a un projet raifonné , un ordre d'adions & une fuiie de moyens par lefquels il contraint l'ani- mal à lui obéir , car nous ne voyons pas que les animaux qui font pi as forts & plus adroits ,, commandent aux autres & les faffent fervir à leur ufage j les plus forts mangent les plus foibles , mais cette adiion ne fuppofc qu'un belbin, un appétit, qualités fort différentes de celle qui peut produire une fuite d'adions dirigées vers le même but. Si les ani- maux étoient doués de cette faculté , n'en verrions-nous pas quelques-uns prendre l'empire fur les autres 5c les obliger à leur chercher la nourriture , à les veiller , à les garder , à les foulager lorfqu'ils font malades ou bleffes l or il s*. Je ï Homme, ' 165 n'y a parmi tous les animaux aucune marque de cette fuborcJination , aucune apparence que quelqu'un dentr'cux connoifTe ou (ente ia fupériorité de (a nature fur celle des autres; par confé- quent on doit penfer qu'ils font en effet tous de même nature , & en même temps on doit conclure que celle de l'homme cft non - feulement fort au - defTus de celle de f'animal , mais qu'elle eft au(îi tout-iVfait différente. . j, • L'homme rend par un figne exté- rieur ce qui fe paffe au dedans de lui , il communique là penft'e par la parole , ce fjgne eff commun à toute l'efpèce humaine; l'homme fauvage parle comme l'homme policé , & tous deux parlent naturellement, & parlent pour fe faire entendre : aucun des animaux n'a ce figne de la pcnfée, ce n'efl pas, comme on le croit communément , faute d'or- ganes ; la langue du finge a paru aux Anatomifles ^ aufli parfaite que celle de l'homme : le finge parleroit donc s'il penfoit; fi l'ordre de (es penfées avoit (f) Voyez- les Defcriptions àt M. Perrault dani foQ I lifloire des Animaux. l66 Hljîoke Naturelle quelque chofè de commun avec \ti nôtres , il parleroit notre langue , & en fuppoGnt qu'il n'eût que des penfées de fînge, il parleroit aux autres finges ; mais on ne les a jamais vus s'entretenir ou difcourir e/ilèmble; ils n'ont donc pas même un ordre , une fuite de penfées »i leur façon ; bien loin d'en avoir de (cm- blahles aux i ôtres ; ii ne fe paffe à leur intérieur rien de iuivi, rien d'ordonné, puisqu'ils n'expriment rien par des fignes "ombinés & arranges ; ils n'ont donc pas la pcnlée, même au plus petit degré. Il eft il vrai que ce n'eft pas faute d'organes que les animaux ne parlent pas , qu'on en connoît de plufieurs efpèces auxquels on apprend à prononcer des mots , & même à répéter des phrafès afîèz longues, & peut-être y en auroit-il un grand nombre d'autres auxquels on pourroit, fi l'on vouioit s'en donner la peine, faire articuler quelques fons (gj ; mais jamais on n*eft parvenu à leur faire naître l'idée que ces mots expriment ; ils f gJ M. Léibnîtz feit mention d'un chien auquel en avoir appris à prononcer que^ues mots allemands <& fVançois» i I Je T Homme. ^ iC-f (cmblent ne les répéter , & même ne les articuler, que comme un écho ou une machine artificielle les répctcroit ou (es aniculeroit ; ce ne (ont pas les puifTances mécaniques ou les organes matériels , mais cti\ la puiflTance inielleduelle , c'eft la |)enrée qui leur manque. C'eft donc parce qu'une langue fuppofe une fuite de penfées , que les animaux n'en ont aucune ; car quand même on voudroit leur accorder qutlque choie de femblable à nos premières appréhenfions, & à nos fenfations les plus groffières & les plus machinales, il paroit certain qu'ils iont incapables de former cette. aflbciation d'idées , qui feule peut pro- duire la réflexion , dans laquelle cepen- dant confiftc l'efïbnce de la penfée; c'cft parce qu'ils ne peuvent joindre enlembîe aucune idée , qu'ils ne penfent ni ne parlent ; c'eft par la même raifon qu'ils n'inventent & ne p'.Tfedlionnent rien ; s'ils étoient doués de la puiiïance de réfléchir , même au plus petit degré , ils leroicut capables de quelqu'efpècc de progrès , ils acquerroient plus d'induftric, les caftors d'aujourd'hui bâtiroient avec plus d'art at •|68 nijlohc Na,. :!Ie ' eu forte qu'on le l'Homme. 'i8f tïouifoît croire qu'elle produit déjà une cfpccc de feniiineiit , mais ce fcntiiiicnt c(l fort obtus; ie nouveau- né ne dillingue rien , car les yeux , même en prenant liu niouveineni, ne s'arrêient fur aucun ©bjct ; l'o' ^une eft encore imparfait , la corne'e eft ridée, & peut- re la rétine cll-ellc aufii trop molle p- cevoi^'Ics iningcs des objets (k domn ';•. lenfaiioa de la vue diftiucfle. Il paro»i en êirc de même des autres fens , iL^ n'ont pas encore pris une certaine confiltancc nécefTaire à ieurs opérations, & lors même qu'ils font arrivés à cet état, il (e paiïe encore beau- coup de temps avant que l'enfant puiflc avoir des fenfations julles & completies. Les fens font des efpèces d'inftrumens dont il faut apprendre à fe fervir ; celui de la vue, qui paroît être le plus noble Se h plus admirable, eft en mSme temps îc moins fur & le plus illufoire, fcs (enfà^ lions ne produiroient que des jugements faux, s'ils n'étoient à tout inftant rei^ifiés par le témoignage du toucher ; celui-ci eft le fens fjlide , c'eft ia pitrre de touche Sl la incfure de tous les autres fens, c'efl k fcul q^ui fou abfoiiuucm eileaùci k -IV 4«' IMAGE EVALUATION TEST TARGET (MT-S) A V «^^ 1.0 i.i 1^ lin IIIII22 M 1.8 1.25 1.4 1.6 -^ 6" - ► Photographie Sciences Corporation 23 WEST MAIN STREET WEBSTER, N.Y. 14580 (716) 872-4503 4t» mi? i/j - ci la (âge précaution de ne laver Vendant qua\ec des liqueurs tièdes, cependant des nations enières , celles même qui habitent les climats froids , font dans fufige de plonger leurs enfans dans Teau froide auffitôt qu'ils (ont nés, fans ({u'il leur en arrive aucun mal ; on dit même que les Lappones laifîcnt leurs enfuis dans la neige jufqu'à ce que le froid les ait faifis au point d'arrêter la refpiraiion , & qu'alors elfea les plongent dans un bain d'eau chaude ; ils n'en ibnt pas même quittes pour être lavés i n ' de l'Homme, i 87 flvcc fi peu de ménagement au moment de leur naiHfànce , on les lave encore de la même façon trois fois chaque jour pendant la première année de leur vie, éi dans les fuivantes on les baigne trois fois chaque (èmaine dans l'eau froide. Les peuples du nord font perfuadés que les bains froids rendent les hommes plus forts ôc plus robufles, &. c'efl par cette raifon qu'ils les forcent de bonne heure à en contrader l'habitude. Ce qu'il y a de vrai, c'eft que nous ne connoiflbns pas aflez jurqu'où peuvent s'étendre les limites de ce que notre corps e(l capable de foufîrir , d'acquérir ou de perdre par l'habitude ; par exemple , les Indiens de Tiithme de rAméri(|ue fe plongent im- punément dans lem froide pour fe rafraîchir iorfqu'ils font en fueur; leurs femmes les y ietent quand ils (ont ivres pour faire pafler leur ivrcflc plus promp- tement , les m-ères fe baignent avec leurs cnflins dans l'eau froide un inftant après leur accouchement ; avec cet ufage que nous rcg:»rderions comme fort dange- reux , ces femmes périlîènt très- rarement par les fuites des couches^ au lieu ^uc ri 8 8 Bifloire Naturelle malgré tous nos foins nous en voyons périr un grand nombre parmi nous. Quelques inftans après fa naiffance l'enfant vuine, c*efl ordinairement lorf- qu'il fent la chaleur du feu, quelquefois îl rend en même temps le meconium ou les excrcmens qui fe font formés diins les întcdins pendant le temps de fon liéjour dans fa matrice ; cette évacuation ne fe fait pas toujours aufîi promptement , fouvent elle eft retardée, mais fi elle n'ar- rivoit pas dans i efpace du premier jour, îl feroit à craindre que l'enfant re s'en trouvât incommodé, & qu'il ne reffentît des douleurs de colique , dans ce cas on tâche de ficîliter cette évacuation par quelques moyens. Le meconium eft de couleur noire; on connoît que ^enfant en t{\ àbfolumcnt débarrafTé lorfque les cxcrémens qui fuccèdent, ont une autr« couleur , ils deviennent blanchâtres ; ce changement arrive ordmairement le deu- xième ou le troifième jour; alors leur odeur efl beaucoup plus mauvaifè que n'eft celte du meconium, ce qui prouve que la bile & les fucs amers du corps ^ CQ^nmencent à s'y mêler. de V Homme, ° i8(J' Cette remarque paroît confirmer ce que nous avons dit ci - devant dans le chapitre du développement du fœtus, au lujet de la manière dont ii fe nourrit; nous avons infinué que ce devoit être par intufrufceptron , éc qu'il ne prenoit aucune nourriiure par la bouche; ceci fcmble prouver que l'eflomac <5c les inteftins ne font aucune fondion dans le foetus , du moins aucune fon<5lioii femblable à celles qui s'opèrent dans la fuite iorfque la refpiraiion a commence à donner du mouvement au diaphragme & à toutes les parties intérieures fur Icf- quelles il peut' agir , puifque ce n'ell qu'alors que fe fait la digeftion & le mélange de la bile & du fuc pancréatique avec la nourriture que l'cftomac Iai(re pafîèr aux inteftins; ainfi quoique la fé- crétion de la bile & du fuc du pancréas fe fafTe dans le fœtus , ces liqueurs de- meurent alors dans leurs réfèrvoirs & ne paffent point dans les inteftins , parce qu'ils font , auffi - bien que i'eftomac , fans mouvement & fans adion , p ir rap- port à la nourriture ou aux exçrémens qu'ils peuvent contenir., . ^ ...,,, ipô Hifloîre Ncittireîle On ne fuit point tctcr l'enfant auflltôt qu'il efl né, on lui donne auparavant it icmps de rendre la liqueur & les glaires Cjui font dans fon eftomac , & le meco- nium qui efl dans fes inteflins : ces ma- tières pourroient faire aigrir le lait & pro- duire un mauvais effet , ainfi on com- mence par lui faire avaler un peu de \in fucré pour fortifier fon eflomac & procurer 'es évacuations qui doivent le difpofèr à recevoir la nourriture & à la digérer ; ce n'eft que dix ou douze heures après la naifTance qu'il doit teter pour la première fois. / ^' ' A peine l'enfant efl -il foriî du fein Je fà mère, à peine jouit- il de la liberté de mouvoir & d'étendre (es membres, qu'on lui donne de nouveaux liens, on l'em- raaillotte, on le couche la lêtc fixe & les jambes alongées , les bras pendans à coté du corps, il efl entouré de linges & de bandages de toute cfpèce qui ne lui per- metieni pas de changer de fituation; heu- reux, fi on ne l'a point ferré au point de l'empêcher de refpirer, & fi on a eu la pré- caution de le coucher fur le côté , afin que les eaux qu'il doit rendre par la bouche, de r Homme» 1 9 t puîffcnt tomher d'cllcs-mcmes, cnr H n'au- roit pas la liberté de tourner la lêic fur le cùié pour en fliciii;er recoulcmciit. Les jîcu})les qui fe contentent de couvrir ou de vêiir leurs enfans (ans les nie.tre au maillot, ne foni-ils pas mieux que nous! les Siamois, lesJaponois, les Indiens, les Nègres, les Sauvages du Cîtnada, ceux de Virginie, du Brefil, & lu plupart des peuples de la partie mt'ridionale de l'A- mérique, couchent les cnfans nus fur des lits de coton fuijjendus, ou les mctrciit d.ins des efpèces de berceaux couverts & garnis de pelleteries. Je crois que ces ulages ne font pas fujets à autant d'in- convéniens que le nôtre; on ne peut pas évier , en cmmaillottant les entans , de les gêner au point de leur faire relîeniir de la douleur; les efforts qu'ils font pour fc débarraffer, font plus capables de cor- rompre i'afleniblage de leur corps , que les mauvailes fituau'ons où ils pourroient fe meure eux - mêmes s'ils éioient en liberté. Les bandages du maillot peuvent être comparés aux corps que Ton fait porter aux filles dans leur jeuneffe; cette cipècc de cuiraffc, ce vêtement iacom- ' '!« Ilp2 Hifloke NainnUe mode qu*on a iin;iginc pour foutciiîr fa mille & l'empêcher de (ë déformer, caulc cependant plus d'incommodités & de difformités qu'il n'en prévient. Si le mouvement que les enfînis veulent fe donner dans le maillot peut leur être funefle , Tinuâion dans laquelle cet état les relient, peut aufli leur être nuifiblc. Le défitut d'exercice eft capable de retar- der raccrcinement i\^% membres , & de diminuer les forces du corps ; ainfi les enfans qui ont la liberté de mouvoir leurs membres à leur g4"é , doivent être plus forts que ceux ([ui font emmaillottés ; c'étoit pour cette raifon que les anciens Péruviens laifîbient les bras libres aux en- fans dans un maillot fort large; lorfqu'ils les en liroient , ils les mettoient en liberté dans un trou fait en terre & garni de linges , dans lequel ils les defcendcicm julqu'à la moitié du corps ; de cetic façon ils avoient les bras libres, & ils jxxuvoient mouvoir leur tête & fléchir leur corps à leur gré , lîins tomber & fans fe blefîer; dès qu'ils pouyoient taire un pas , on leur préfentoit la mamelle d'un peu loin comme un appât pour les obliger à marcher^ Je r Homme* 'xpj' marcher. Les petits Nègres font quel- c]ucfbis dans une fituàtion bien plus fiifgante pour teter, ils cmbrafTent l'une cjCï hanches de la mère avec leurs genoux & leurs pieds » & ils la ferrent ii bien qu'ils peuvent s*y fbutenir iuns le fecours des bras de la mère, ils s'attachent à la mamelle avec leurs mains , & ils la fucent c on (tain ment fans fè déranger & (ans tomber, malgré les différens mouvemcns de la mère, qui pendant ce temps travaille à Ton ordinaire. Ces enfans commencent à marcher dès le fécond mois, ou plutôt il fe traîner fur les genoux & fur les mains ; cet exercice leur donne pour la fuite la facilite de courir dans cette fituation prefque aufli vite que s'ils éioient fur leurs pieds. Les enfans nouveaux -nés dorment beaucoup , mais leur fommeil eft fouvent interrompu ; ils ont auflî befoin de prendre fouvent de la nourriture , on ies f it teter pendant la journée de deux heures en deux heures , & pendant la nuit à chaque fois qu'ils (e réveillent. Ils dorment pendant la plus grande partie du jour & de la nuit dans les premiers temps Tome IV* . I «♦- \ I( i j ; I 1 \m 'i()4 Htftolre Naturelle de leur vie , ils (êmblent même n être cveilies que par la douleur ou par la faim , aufii les plaintes & les cris fuccè- dent prefque toujours à leur fbmmci! : comme ils font obligés de demeurer dans la même fiiuaiion dans le berceau, & qu'ils font toujours contraints par les en- traves du maillot , cette fituation devient fatigiinte & douloureufè après un certain temps ; ils font mouillés & fouvent re- froidis par leurs excrémcns , dont l'âcreié ofFenfe la peau qui efl fine & délicate , & par conféquent très-fènfiblc. Dans cet «Jiat , les enflins ne font que des efforts împuifî'ans , ils n'ont dans leur foible/Te que rexprefîjon des gémiflcmens pour demander du foulngcment; on doit avoir la plus grande attention aies (ccourir, ou plutôt il faut prévenir tous ces incon- "véniens , en changeant une partie de leurs vêtemens au moins deux ou trois fois par jour, & même dans la nuit. Ce foin efl fi nécefîhire que les Sauvages mêmes y font attentifs , quoique le linge manque aux Sauvages & qu'il ne leur foit pas pofTible de changer aufli fouvent de pelleterie que nous pouvons changer par la fuccè- mmcil : er dans eau, & r les en- , devient -i c?riain vent re- i l'âcreic délicate , Dans cet les efforts r foibleffe ens pouf cleit avoir ourir , ou es incon- partie de ou trois nuit. Ce Sauvages .x le linge l'il ne leur 1 (buvent iS changer de r Homme» ipj ck linge ; ils fuppléent à ce défaut en mettant dans les endroits convenables quelque matière adez commune pour qu'ils nç foient pas dans la nécefliié de l'épargner. Dans la partie (eptentrionale de l'Amérique , on met au fond des berceaux une bonne quantité de cette poudre que l'on tire du bois qui a été rongé des vers, & que l'on appelle com- munément Ver - moulu; les enfans Ibnt couchés fur cette poudre & recouverts de pelleteries. On prétend que cette forte de lit eft au(fi douce & aulîi molle que fa plume ; mais ce n'eft pas pour flatter la dclicateffe des enfans que cet ufage eft introduit , c'eft feulement pour les tenir propres : en effet , cette poudre pompe l'humidité , & après un certain temps on la renouvelle. En Virginie, on attache les enfans nus fur une planche garnie de coton , qui eft percée pour fécoulc- ment des excrémens ; le froid de ce pays devroit contrarier cette pj-aiiquc qui eft prefque générale en Orient , & fur- tout en Turquie ; au refte, cette précaution fupprime toute forte de foins , c'eft tou- jours le moyen le plus fîir de prévenir 1 1 iç6 Hi flaire Naturelle les effets de la négligence ordinaire des jiourricLS: il n'y a que la tendreflè mater- nelle qui ioit capable de cetie vigilance cominuelle , de ces petites attentions fi nccelîaires ; peut-on i'efpt'rer des nour- rices mercenaires & groiiièresî Les uiies abandonnent leurs cnfàns pendant plufieurs heures fans avoir la moindre incfuiétude de leur état , d'autres font aflez cruelles pour n*être pas tou- chées de leurs gémilTemens ; alors ces petits infortunés entrent dans une forte de défelpoir ; ils font tous les efforts dont ils font capables; ils pouflcnt des cris qui durent autant que leurs forces ; enfin ces excès leur eau lent des innladies , ou au jnoins \ts mettent dans un état de fatigue & d'abattement qui dérange leur tem})é- rament & qui peut même influer fur leur cara/dère. Il eft un ufige dont les nour- rices nonchalantes & parefîeufes abufent fou vent ; au lieu d'employer des moyens efficaces pour foulnger l'enfant ; elles fe contentent d'agiter le berceau en le faifant balancer fur les côtés , ce mouve- ment lui donne une forte de dillradion ^u! appaife fç$ cris ; ea cpaiinuant i; fie VHomsi '' ïp/ même mouvement , on rétourdît , & à fa fin on i'enclort ; mais ce fommcil forcé n'efl qu'un palliatif qui ne détruit pas ia caufe du mal préfent , au contraire on pourroit caufer un mal réel aux cnfans en les berçant pendant un trop long temps , on les feroit vomir , peut-être aufîi que cette agitation eft capable de leur ébranler la tétc 6c d'y caufer du dérangement. Avant que de bercer les enfans , il fiut être fur qu'il ne leur manque rien , & on ne doit jamais les agiter au point de les étourdir ; fi on s'aperçoit qu'ils ne dor- ment pas aiïez, il fuffit d'un mouvement lent & égal pour les aflToupir ; on ne doit donc les bercer que rarement , car fi on les y accoutume , ils ne peuvent plus dormir autrement. Pour que leur fanté foit bonne, il faut que leur forameil foit naturel &long; cependant s'ils dormoient trop , il feroit à craindre que leur tempé- rament n'en foufFrît ; dans ce cas il faut les tirer du berceau & les éveiller par de petits mouvemens , leur faire entendre des fons doux & agréables , leur faire voir quelque chofe de brillant. C'cll à liij illi ipS HiJ!oire I^dturclk cet âge que l'on reçoit les premières impreliions des feus , elles font fans doute plus importantes que l'on ne croit pour ie reftc de ia vie. .•. r : Les yeux des enfans fe portent toujours du côié le plus éclairé de l'endroit qu'ils habitent , & s'il n'y a que l'un de leurs yeux qui puifîè s'y fixer, l'autre n'étant pas exercé n'acquerra pas autant de force : pour prévenir cet inconvénient , il faut placer le berceau de façon qu'il fcit éclairé par les pieds , foit que la lumière vienne d'une fenêtre ou d'un flambeau; dans cette pofiiion les deux yeux de l'en- fant peuvent la recevoir en même temps, & acquérir par l'exercice une force égale: il Tun à^s yeux prend plus de force que l'autre, l'enfant deviendra louche, car nous avoris prouvé que l'inégalité de force dans les yeux eft la caufe du regard louche. ( Vey, /es A/émoires de l'Académie aes Sciences , année i J^^-S)* La nourrice ne doit donner à l'enfant que le lait de fes mamelles pour toute nourriture, au moins pendant les deux premiers mois , il ne fcudroit même lui faire prendre aucun autre aliment pendant M I 1 fie l'Homme, ipp fc troîfième & le quatrième mois, fur- tout lorfque Ton tempérament efl foible & délicat. Quelque robufte que puiffc être un enfant , il pourroît en arriver de grands inconvéniens , fi on lui donnoit d'autre nourriture que le lait de la nour- rice avant la fin du premier mois. £n Hollande , en Italie , en Turquie , & en général dans tout le Levant , on ne donne aux enfans que le lait des mamelles pendant un an entier ; les Sauvages du Canada les allaitent jufqu'à fâge de quatre ou cinq ans, & quelquefois jufqu'à iîx ou fept ans : dans ce pays-ci , comme la plupart des nourrices n'ont pas afTe^ de lait pour fournir à Tappéiit de leurs enfans , elles cherchent à i*épargner , ^ pour cela elles leur donnent un aliment compofé de farine & de lait, même dès les premiers jours de leur naiffance ; cette nourriture appaife la faim , mais l'cflomac & les inteftins de ces enfans étant à peine ouverts , & encore trop foibles pour digérer un aliment groflier & vifqueux , ils fouffrent , deviennent malades & périfîênt quelquefois de ceue efpèce d'iudigeilion. 1 iiij i ^I h il '200 Hijfoire Naturelle Le lait dos animaux peut fupple'cr an défaut de celui des femmes ; fi les nour- rices en manquoient dans certains cas , ou s'il y avoit quelque cho(è à crain-drc pour elfes de la part de l'enfant , on pourroit lui donner à teter le mamelon d'un animal , afin qu'il reçût ie lait dans un degré de chaleur toujours égal & con- venable , & fur- tout afin que fa propre faiive fc mêlât avec le lait pour en faciliter la digeftion, comme cela fe fait par le moyen de la fuccion , parce que les muf- cles qui font alors en mouvement , font couler la faiive en prefîant les glandes & les autres vaiffeaux. J'ai connu à la cam- pagne quelques payfans qui n'ont pas eu d'autres nourrices que des brebis, & ces payfans étoîent auflî vigoureux que Icj autres. Après deux ou trois mois, ïorfque l'en- fant a acquis des forces, on commencer lui donner une nourriture un peu pins folide : on fait cuire de la farine avec du iait , c'efl vme forte de pain qui difpofe peu à peu fon eftomac à recevoir le pain ordinaire & les autres a'iniens dont il doit fe nourrir dans la fuite. \ie V Homme. 20 1 Pour parvenir à l'ufage des alimens folides, on augiiien e peu à peu la con- fiihiiice des ailmcns liquides, ainfi aj)rè.s avoir n )urri l'enfant avec de la farine délayée & cuite dans du lait , on lui donne du pain trempé dans une licjueur convenable. Lesenfans, dans ia première anne'e de leur âge, (ont incapables de broyer les alimens , les dents leur man- cjueiit , ils n'en ont encore que le germe enveloppé dans des gencives (î molles , que leur foible réfiftance ne fcroit aucun effet fur des matières folides. On voit certaines nourrices, fur-tout dans le bas peuple, qui mâchent des alimens pour les faire avaler enfuite à leurs enfms : avant que de réfléchir fur cette pratique, éc^irtons toute idée de dégoiit , & foyons perfuadés qu'à cet âge les enfms ne peuvent en avoir aucune imprefîlon ; en effet, ils ne font pas moins avides de recevoir leur nourriture de la bouche de ia nourrice , cfue de {a mameiles , au contraire il (emble que la Nature ait introduit cet ufage dans plufjeurs pays fort éloignés les uns des autres, il eft en liaiic, en Turcjuie &. dans prcfquc toute 1 V \v I I -11' 2 02 HiJJoire Kim-eïïe i'Afie , on le retrouve en Amérique , dans les Antilles, au Canada, &c. Je le crois fort utile aux enfans,-& très-con- venable à leur état , c'eft le feul moyen de fournir à leur eftoniac toute la fallve cjui cft néccfTaire pour la digeftion des alimens folides : fi la nourrice mâche du pain , fa falive le détrempe & en fait une nourriture bien meilleure que s'il ctoît détrempé avec toute autre liqueur; cependant cette précaution ne peut être néceffaire que jufqu'à ce qu'ils puiflent faire ufage de leurs dents , broyer les alimens & les détremper de leur propre fàlive. Les dents que i*on appelle înàfives ^ font au nombre de huit , quatre au devant de chaque mâchoire ; leurs germes fe développent ordinairement les premiers , communément ce n'efl pas plus tôt qu'à l'âge de fcpt mois , fouvent à celui de huit ou dix mois , & d'autres fois à la fin de la première année; ce développement cft quelquefois très -prématuré; on voit «flez fouvent dts cnfans naître avec des dents aficz grandes pour déchirer le fein de leur nourrice \ on a auHi trouvé des de l'Homme^ 203' dents bien formées dans des fotus long- temps avant ic terme ordinaire ds ia naiuance. Le germe des dents efl d'abord con- tenu dans l'alvéole & recouvert par h gencive, en croiflTant il poufTe des racines au fond de l'alvéole , & il s'étend du côté de la gencive. Le corps de la dent j^reffe peu à peu contre cette tnembrane , & la diftend au point de la rompre & de la déchirer pour pafîer au travers \ cette opération , quoique naturelle, ne fuit pas les loix ordinaires de la Nature , qui agit à tout infiant dans le corps humain fans y caufer la moindre douleur, & même fans exciter aucune fcnfuion ; ici il iè fait un effort violent & douloureux qui eft accompagné de pleurs & de cris , & qui a quelquefois des fuites fâchcufes ; les enfans perdent d'abord leur gaieté & leur enjouement, on les voit triftes & inquiets , alors leur gencive efl rouge & gonflée , & enfuiie elle blanchit lorfque la prefîjon efl au point d'intercepter le cours du fing dans les vaiffcaux ; ils y portent le doigt à tous momens pour lâcher d'appaifcr la démangeai fon qu'ils Ivj \\ 204. Hifloire Niiturelle y refTentent ; on leur facilite ce petit Ibulngement en mettant au bout de leur hochet un morceau d'ivoire ou de corail , ou de quelque autre corps dur & poli ; ils le portent d'eux-mêmes à leur bouche & ils le (errent entre les gencives à l'en- droit douloureux ; cet effort oppofé- à celui de la dent , relâche la gencive & calme la douleur pour un inftant , i{ contribue aufîi à raminciflcinent de I2 iiieinl)rane de la gencive , qui étant preHée des deux côtes à la fois, doit fc rompre plus aifément, mais fbuvcnt cette rupture ne fe fait qu'avec beaucoup de peine Ck de danger. La Nature s'oppole îi elle-même fes propres forces, lorfque les gencives font plus fermes qu'à l'ordi- naire par la folidité des fibres dont elle* font tifîucs , elles réfi fient plus long- temps à la prefllon de la dent , alors l'effort eft fi grand de part & d'autre , cju'il caiife une inflammation accom- pagnée de tous fes fympiômes , ce qui cft , comme on le fut , capable de eau fer la mort ; pour prévenir ces accidens on a recours à l'art, on coupe la gencive fur la dent, au nioyen de cette peiitc Je r Homme: loj' opération, la teiifion & l'inflammation de la gencive ceflent, & la dent trouve un libre pa(îage. , Les dents canines font à côté des inci- fives au nombre de quatre , elle* fortent ordinairement dans le neuvième ou le" dixième mois. Sur la îii\ de la première ou dans le courant de la féconde année, on voh paroîire (cizc autres dents que J'on apjîclie rmlaires ou mâcheliercs , quatre à côié de chacune des canines. Ces termes pour la foriie des dents , varient ; on prétend que celles de la mâchoire Tupé- rieure paroiflcnt ordinairemeni plus tôt, cependant il arrive aufli (juelquefois quelles fortent plus tard que celles én la mâchoire inférieure. Les dents incifives, les canines & les quatre premières mâchclières tombent naturellement dans la cinquième, la fi- xième ou la fepiième année , mais elles font remplacées par d'autres qui paroif- fent dans la feptième année , fouvent plus tard , & quelquefois elles ne forcent qu'à i'nge de puberté ; la chute de ces (eize dents efl caufée par le dévelo})pemem d'un fécond germe placé au fy^nd de 1 1 20 6 Hïjloire Naturelle l'alvéole y qui en croinfant les pouffe au dehors; ce germe manque aux autres mâchelières, aufli ne tombent-elles que par accident , & leur perte n'ed prcfque jamais re'pare'e. .. • ^ II y a encore quatre autres dents qui font placées à ciiacune des deux extré- miles des mâclioires; ces dents manquent à plu fleurs perfonnes , leur développe- ment eft plus tardif que celui des autres dents , il ne (e fait ordinairement qu'à 1 âge de puberté , & quelquefois dans im âge beaucoup plus avancé , on les a nommées dents de fagejfe; elles paroiflent fuccelîivement l'une après l'autre ou deux en même temps, indifféremment en haut ou en bas, & le nombre des dents en général ne varie que parce que celui des dents de fageffc n'eft pas toujours le même , de-Ià vient ia différence de vingt- huit à trente- deux dans le nombre total des dents ; on croit avoir oblervé que les femmes en ont ordinairement moins que les hommes. Quelques Auteurs ont prétendu que ies dents croilîcient pendant tout le cours de ia vie ^ &i qu'elles augmenteroient en de î Homme» 207 longueur dans l'homme , comme claii5 certains animaux , à mefure qu'il .i\ 111- ccroit en âge , fi ic froiicment des ali- mcns ne les ufoit pas continuellement ; mais cette opinion paroît être démentie par l'expérience , car fes gens ffui ne vivent que d'alimens liquides, iVont pas les dents plus longues que ceux fjui mangent des chofcs dures, & fi quelque choie eft capable d'ufer les dents, c'eft leur frottement mutuel des unes contre les autres plutôt que celui des alimens ; d'ailleurs on a pu le tromper au fujct de raccroifTcmcnt des dents de quelques animaux , en confondant les dents avec les dcfenfes; par exemple, les défenibs des fanglicrs croifTcnt pendant toute la vie de ces animaux ; il en eft de même de celles de l'éléphant , mais il eft fort douteux que leurs dénis prennent aucun accroiflement lorfqu 'elles font une fois arrivées à leur grandeur naturelle. Les défcnfes ont beaucoup plus de rapport avec les cornes qu'avec les dents, mais ce n'eft pas ici le lieu d'examiner ces diffé- rcncesT; nous remarquerons feulement que les premières dents ne font pas d'une \! '208 H i flaire Ndturelle fubftance aufli Iblide que l'efl celfe (\ti dents qui leur fuccèdeiii ; cc.^ premicres dents n'ont aulii que fort peu de racine , elles ne font pas infixées dans la mâchoire & elles s'ébranlent très-ailénient. Bien des gens préicndeni que les che- veux que l'enfant aj)pcrte en naiflant, font toujours bruns , mais que ces prc- îTiiers cheveux tonibem bientôt , & cju'ils font remplacés par d'autres de couleur différente ; je ne fais fi cette reinarcjue cft vraie , prefcjue tous les enfans ont les cheveux blonds, & fouvent prefque blancs ; c|uel(|U€S-uns les ont roux , & d'autres les ont noirs, mais tous ceux c|ui doivent ê.re un jour blonds, châtains ou bruns , ont les cheveux plus ou moins blonds dans le premier âge. Ceux qui doivent être blonds ont ordinairement ies yeux bleus, les roux ont les yeux d'un jaune ardent , les bruns d'un jaune foible & brun ; mais ces couleurs ne font pas bien marquées dans les yeux des enfans qui vicnnentt de naître , ils ont alors prelquc tous les yeux bleus. Lortqu'on lai(ie crier les enfans trop fort & trop long- temps, ces eiions kur Je r Homme, 209 caufcnt des defccntes qu'il faut avoir grand foin de rtitabiir promptement par un bandage , ils gucriffem aifénient par ce fecours, mais Ti l'on négligeoit cette incoinmodiic , ils feroicnt en daiiorcr de h garder toute leur vie. Les b(;rnes que nous nous fommes prefcritcs, ne per- mettent jias que nous parlions des mala- diL^s particulières aux enfans; je ne ferai fur cela qu'une remarque , c'cfl: que les vers & les maladies vcrraineufcs aux- quelles ils font fujeis , ont une caufe })ien marquée dans I:i qualité de leurs aliincas; le lait eft une cfpcce de chyle , une nour- riture dépurée qui contient par confé- quem plus de nourriture réelle, \}\\v% de cette niaiicre organique & produs ca temps un peu de vin, on préyiendioit a I o Hïfloire Naïuteîle l^' peut - être une partie é^$ mauvais effets que caufent les vers; car les liqueurs ler- nientées s'oppofcnt à leur génération , elles contiennent fort peu de p?.rues organiques & nutritives , & c*eft princi- palement par Ton a(5lion fur les folides , que le vin donne des forces , il nourrit moins le corps qu'il ne ie fortifie; au refte, la plupart des enfans aiment le vin, ou du moins s'accoutument fort aifément à en boire. Quelque délicat que l'on foit dans i*enfancc, on eft à cet âge moins fên- fîble au froid que dans tous les autres temps de la vie ; la chaleur intérieure e(l apparemment plus grande, on fait que le pouls des enftns cli bien plus fréquent que celui des adultes » cela feul fufikoît pour faire penier que la chaleur intérieure eft plus grande dans la même proportion , & l'on ne peut guère douter que les petits animaux n'aient plus de chaleur que les grands par cette même raifon; car la fré- quence du battement du cœur & des artères eft d'autant plus grande que l'ani- mal eft plus petit ; cela s'obfcrve dans ies différentes efpèces auiC-bien que dans ! • - tïvais effets jueurs ler- énéraiion , de p?.rues eft princi- es folides , il nourrit srtifie; au lent le vin, rt aifément i (bit dans noins fên- les autres térieure eft )n fait que s fréquent il fufjfkoit intérieure oportion , e les petits ur que les car ia fré- ur & des que I*ani- crve dans i que dans y. de ï Homme. :z 1 1 la même efpèce; le pouls d'un enfant ou d'un homme de petite fta^ture eft plus fré- quent que celui d'une perfonne adulte ou d'un homme de haute taille ; le pouls d'un bœuf eft plus ient que celui d'un homme , & celui d'un chien eft plus fré- quent, & les baitemens du cœur d'un animal encore plus petit , comme d'uii moineau, (è fuccèdent (i promptement qu'à peine peut- on les compter. La vie de l'enfant eft fort chancelante jufqu'à rage, de trois ans, mais dans les deux ou trois années fui vantes elle s'af- fure , & l'enfant de fix ou (èpt ans eft plus afturé de vivre, qu'on ne l'eft à tout autre "âge : en confultant les nouvelles tables (h) qu*on a faites à Londres fur les degrés de la mortalité du genre humain dans les différens âges , il paroît que d'un certain nombre d'enfans nés en même temps , i{ en meurt plus d'un quart dans la première année , plus d'un tiers en deux ans , & au moins la mqj ié dans les trois premières années. Si ce calcul étoit jufte, on pour- roit donc parier lorfqu'un enfant vient (h) Voyez les Tables de M. Simpfbn , puWiées à Lûndres ça 17^2% ' Il a. 11 Hifiake Néiîuyelle au monde, qw'il ne vivra que trois ans, obfervation bien trille pour l'elpèce hu- maine; car on croit vulgairement qu'un homme qui meurt à vrngt-cinq ans, doit ctre plaint fur (a deflinée & fur le peu de durée de (à vie , tandis que , fui vaut ces tables , la moitié du genre humain devroit périr avant l'âge de trois ans, par conféquent tous les hommes qui ont vécu plus de trois ans , loin de le plain- dre de leur fort , devroient fe regarder comme traités plus favorablement que les autres par le Gréaieur. Mais cette mortalité des enfans n'ed pas à beaucoup près auffi grande par-tout , qu'elle l'elt à Londres ; car M. Dupré de S/ Maur s'eft afTuré par un grand nombre d'ob le r- vations faites en France, qu'il faut fept ou huit années pour que k moitié des enfans nés en même temps foit éteinte ; on peut donc parier en ce pays qu'un enfant qui vient de naître vivra fept ou huit ans. Lorfquc l'enfant a atteint V^g& de cinq , fix ou Icpt ans , il paroit par CCS inêmes oblervations que fa vie eft plus alTurée qu'à tout autre âge , car on peut parier pour quarante-deux ans de rJe F Homme, 1 1 3 vîe de plus, au lieu qu'à nicfure que i'on vil au delà de cinq, fix ou fept ans , le ïioni}3re des années que l'on peut efpérer de vivre, va toujours en diminuant, de forte qu'à douze ans on ne peut plus parier que pour trente- neuf ans , à vingt ans j)0ur trente- trois ans & demi , à trente ans pour vingt - huit années de vie de plus, & ainfi de fuite juf ju'à (juatre-vingt- cinq ans qu'on peut encore parier raifon- nablement de vivre trois iTiis. (Voye^ ci'- ûprcs les Tables , page ^ 8 ^ & fuiv.) Il y a quelque chofe d'aflez remar- quable dans l'accroidèment du corps humain, le foetus dans le fein de fa mère croit toujours de plus en plus jufqu'au moment de la naifîànce , l'enfant au contraire croît toujours de moins en moins jufqu'à i'âge de puberté , auquel il croît pour ainli dire tout-à-coup , & arrive en fort peu de temps à la hauteur qu'il doit avoir pour toujours. Je ne parle pas du premier temps après la concep- tion , ni de i'accroiflement qui fuccèdc immédiatement à la formation du fœtus ; je prends le foetus à un mois , lorfque îouies fes paniçs font développées, il jj 1 4 Hifloire Naturelle a un pouce de hauteur alors , à deux mois deux pouces un quart, à trois mois trois pouces & demi , à quatre mois cinq pouces & plus y à cinq mois fix pouces & demi ou fcpt pouces , à fix mois huit pouces & demi ou neuf pouces , à fept mois onze pouces & plu^ , à huit mois quatorze pouces, à neuf mois dix- huit pouces. Toutes ces mefurcs varient Jseaucoup dans les différens fujets , & ce n*e(l qu'en prenant les termes moyens que je les ai déterminées , par exemple , il naît des enfans de vingt-deux pouces & de quatorze, j'ai pris dix-huit pouces pour le terme moyen, il en efl de même des autres mcfures ; mais quand il y auroit des variétés dans chaque mefure particulière , cela feroit indifférent à ce que j'en veux conclure , le réfultat fera toujours que le fœtus croît de plus en plus en longueur , tant qu'il eft dans le (ein de (a mère; mais s'il a dix -huit pouces en naiffant , il ne grandira pen- dant les douze mois fuivans cjue de fix ou fept pouces au plus , c'eft- à-dire qu'à la fin de la première année il aura vingt- quatre ou vingt-cinq pouces, à deux (k l'Homme, 2 1 5 ans il n'en aura que vingt-huit ou vingt- neuf, à trois ans trente ou trente -deux au plus, & cnfuite il ne grandira guère que d'un pouce & demi ou deux pouces par an jufqu'à l'âge de puberté : ainfi le foetus croît plus en un mois fur la fin de fon féjour dans la matrice , que l'en- fant ne croît en un an jufqu'à cet âge de puberté , où la Nature femble faire un effort pour achever de développer & de perfedionncr fon ouvrage , en le portant pour ainfi dire, tout-à-coup au dernier degré de fon accroiffement. Tout le monde fait combien il eft important pour la fanté des enfans de choifir de bonnes nourrices, il eft abfo- himent nécefl^aire qu'elles foient faines & qu'elles fç portent bien , on n'a que trop d'exemples de la communication réciproque de certaines maladies de la nourrice à l'enfant , & de l'enfant à la nourrice ; il y a eu des villages entiers dont tous les habitans ont été infecftes du virus vénérien que quelques nourrices malades avoiem communiqué en don- nant à d'autres femmes leurs enfans à allaiter. . ♦ a I 6 Hiftotre Naturelle Si îes mères nourriflbient leurs enfans, il y a apparence qu'ils en feroiem plus forts & plus vigoureux, le lait de leur mère doit leur convenir mieux qiie le lait d'une autre femme, car le fœtus fe nourrit dans la matrice d'une liqueur laiteuie qui ell fort Icmblable au lait qui fe forme dans les mamelles; fenfant eft donc déjà, pour ainfi dire, accoutumé au lait de fa mère, au lieu que le lait d'une autre nour- rice eft une nourriture nouvelle pour lui, & qui eft quelquefois affez différente de la première pour qu'il ne pui/fe pas s'y accoutumer ; car on voit des enfans qui ne peuvent s'accommoder du lait de cer- taines femmes , ils maigriiTent , ils de- viennent languiiTans & malades; dès qu'on s'e\i aperçoit, il faut prendre une autre nourrice , fi l'on n'a pas cette attention , ils périflent en fort peu de temps. Je ne puis m'empêcher d'oblërver ici que i'ufàgt où l'on eft de raft^embler un grand nombre d'enfans dans un même lieu, comme dans les hôpitaux des grandes villes , eft extrêmement contraire au prin- cipal objet qu'on doit fe propofèr , qui eli de le* confcfver; la plupart de ces enfans enfans, :m plus de leur Vie le lait i nourrit leule qui fe forme >nc déjà, lait de (a itre nour- pour lui , ^é rente de fe pas s'y rnfaiis qui lit de cer- t , ils de- dès qu'on une autre attention , nps. blerver ici mbler un un même es grandes e au prin- ijofer , qui art de ces en fans Je l'Homme. 217 cnfans pt'rifîcnt par une cfpccc de fcorbut ou par d'autres maladie^ qui leur font communes à tous , auxquelles ils ne fcroicnt pas fuj€ts , s'ils étoient élevés fép-.ircmcnt les uns des autres , ou du moins b'ils étoieiit diflribué» en plus petit noml-)re dans différentes habitations à la ville , & encore mieux à la campagne. Le mtiue revenu luffiroii fans doute pour les cîurctcnir , & on éviieroit la pcrie d'une infinité d'hommes , qui, comme l'on fait, font la vraie richefîe d'un Éiat. Les enfans commencent à bécraycr à douze ou quinze mois; la voyelle c[u'ils ariiculent le plus aifément efl VA, parce qu'il ne faut pour cela qu'ouvrir les lèvres & pf)ufrer ini fon ; VÈ fuppofe un petit * mouvement de plus, ia langue fe. relève en haut en même temps que les lèvres s'ouvrent; il en efl de même de 1'/, la Lingue (e relèv encore plus , & s'appro- che des dents de la mâchoire fupérieure; \'0 demande que la langue s'abaifle , & ([ue les lèvres le ferrent ; il faut qu'elles s'aiongent un peu , & qu'elles fc fei rent encore plus pour prononcer i'6^. Les premières conlbnnes que les cni^ms pro- Tvme IV* l\ jm8 Hifleke NatureUe noncent , font aufTi celles qui demandent le moins de mouvement dans les organes ; \q B y VM ai le P font les plus airées h aniciîler ; il ne faut pour le B <& le P, c[uc joindre les deux lèvres & les ouvfir avec vîie/Te , & pour VAl les ouvrir d'abord & enluiic les joindre avec vîiciTe : l'articulation de toutes ies autres cori- fonnes fuppofe des mouvemens plus compliqués que ceux-ci, & il y a un mouvement de la langue dans le C , le U , !e G, VL.VN, le Q, l'/?, i'J^A le T; il faut pour articuler Vf un fon continué plus long-temps que pour les autres con- ionnes ; ainfi de toutes les voyelles VA e(l la plus aifée , & de toutes les confonnes le i?, le P & VM font auffi les plus ftciles à articuler ; il n'eft donc pas can- nant que les premiers piots que les enfans prononcent , foicnt coippofés de cette voyelle & de ces confonnes , & Ton doit ccdêr d'être furpris de ce que dans toutes les langues & chez tous Ic$ peuples les enfans conunencent toujours par bégayer Baba, Marna, Papa, ces mots ne font , pour ainfi dire , que les ^cas les plus naturels à l'homme, parce que parce de l'Homme. ' ' *2 ! (> qu'ils font les plus ailés à artîcu!cr; les lettres qui les compofcnt , ou plutôt les caïadcrcs qui les repréfentent , doivent cxiltcr chez tous les peuples qui ont l écriture ou d'autres fignes pour rcpre'- Icnter les Ions. On doit leulcment obfcrvcr que les fons de quelques confonncs étant à peu près feinblables , comme celui du ^ & du P, celui du C & de VS , ou du K ou du Q dans de certains cas , celui du D ou du 7', c'clui de VF & de l'^ confonne , celui du 6* & de \'J confonne ou du 6^ & du AT, celui de VL & de V R ; il doit y avoir beaucoup de langues où ces différentes confonncs ne fe trouvent pas, mais il y aura toujours un B ou un /^, un C ou une J^, un 6* ou bien un AT ou un Ç dans d'autres cas , un D ou un 7", une i^ou un K confonne, un G ou un »/ confonne, une L ou une R ; & il ne peut guère y ^ avoir moins de fix ou (ept confonncs ' dans le plus petit de tous les alphabets, parce que ces i^w ou Icpt tons ne fuppc- Icm pas des mouvemens bien compli- ques, & qu'ils font tous très-fenfible- meat differcns entr'eux. Les enfans qui Kij :î2 0 llipolrc Naturelle n'nrticuîcnt pus aircincnt 1'/^, y fubftî-. tuent r/. j au lipii du T iU articulent le D , parce qu'en tfîct ces preuiicres leures fuppofent dans les organes des mouvc- jiicns plus diflicilcs que les dernières ; ^ c'ell de celte difîerence & du choix des confonnes plus ou moins difificiles à exprimer , que v»ent la douceur ou la dureté d'une langue, mais il cfl inutile de nous étendre l'ur ce fujct. Il y a des enfans <[ui à deux ans prononcent diftinc^ement & répètent tout ce qu'on leur dit, jnais la plupart ne parlent qu'à deux ans & demi , & très- fouvent beaucoup plus tard ; on remarque que ceux qui commencent à parler fort tard , ne parlent jamais aufîi aifément que les autres; ceux qui parlent de bonne Jieurc, font en état d'aj")prendre à lire avant trois ans; j'en ai connu quelques- uns cjui avoient commencé à apprendre ^ lire à deux ans , qui lifoient à merve.iilc îi quatre ans. Au relie on ne peut guère dccidcr s'il efl foft utile d'inltruire les entans d'auHi bonne heure, on a tan: d'excmpÎTi- du dcu de luccès de ces fJucaiions prématurées, ou a yu crmt de <7r ÏIIommc\ Il'lX prodiges Je quatre ans , de huit ans , de di)U/-c ans, de Icizc ans, qui n'ont été (jue des lois ou dc^ hoinnics fvjrt com- muns \ vingt cinq ou à trcn c ans , fju'oii jlroit poric à croire que Li meilleure de louies les éducations ell celle c[ui ell \\ plus ordinaire , celle par hKjuclIc oa rie force j^as la N.iture , celle c(ul ell l.i moins fcvère , celle c[ui ell la plus pro- j)onionnee , je ne dis pas aux forces j mais à la foibicfîc de l'entant. HISTOIRE NATURELLE D £ L'H O M M E. De la Puberté, LA Puberté accompagne radolefcence , fa faifon des plaifirs. Pourrons- nous écrire l'hiftoire de cet âge avec affez de circonfpedion pour ne Té veiller dans l'imagination que des idées philofophiques î La puberté , les circon- ilances qui l'accompagnent , la circonci- ijon, la caflratlon , la virginité, l'impuif- fancc , font cependant trop efTentielles à l'hifioire de l'homme pour que nous puiflions fupp rimer les faits qui y ont rapport ; nous tâcherons feulement d'en- trer dans ces détails avec cette fagc retenue qui fait fa décence du ftyle , & de les préfenter comme nous les avons vus ïious-jTiêmes , avec cetic indiiiérencc de ï Homme. 11'^ j^îiilofophiqiie qui dctruit tout fentiment dans i'exprellion , 6c ne laillc aux mots que leur fimple fignificaiion. La circoncifion efl un uHgt extrêiife- mcnt aticien & qui fub/illc encore dais ïa plus grande partie de l'A fie. Chez fes Hébreux, cette opcraiion devoit Te faite huit jours après la naifllmce de l'enfant ; en Turcjuie on ne la fait pas avant l'àgc de fept ou huit ans , & mëine on attend fouvtnt jufqu'à onze ou douze ; en Perfe c*eft à l'âge de cinq ou fix ans ; on guérit la plaie en y appliquant des poudres cauftiques ou aftringentes, & pardculièrement du papier brûlé , qui cfl , dit Chardin, le tneillcur remède; il ajoute que la circoncifion fait beaucoup de douleur aux perfonnes âgées , qu'elles font obligées de garder la chambre pen- dant trois femaines ou un mors , & que quelquefois elles en meurent. Aux îles Maldives, on circoncit les enfans à l'âge de fept ans , ^ on \(is baigne dans la mer pendant ù\ ou re[)t heures avant l'opération , pour rendre Ja peau |)lus tendre & plus nioilc. Les Ifraëlitcs fè fèrvoieat d'uji couteau de K 11 tj J2 2 4 liijhhc Naturelle pierre; les Juifs conlervent encore aw- juurd'liui cet ulàgc cJans In plupart de leurs ryn:igogues, mais les Mahoinctano fc fervent d'un couteau de fer ou d'un raloir. Dans certaines maladies, on cfl obligé de faire une opération pareille à la cir- concifion ( ^'oye-^ rAnatcmie de IJicn'is , JJein. ^). On croit que les Turcs ^ plulJcurs autres pcuj:>lcs chez qui la cir- concifion elt en ufage, auroicnt naturel- lement le prépuce trop long , d on n'a voit pas la précaution de le couper. La Bou- Jaye dit qu'il a vu dans les dé fer t s de Méfopotamic & d'Arabie, le iong des rivières du Tigre & de l'Euphrate , quan- tité de petits garçons Arabes qui a voient le prépuce ^v iong , cju'il croit que fuis le fecours de la circoncifion , ces peuples feroient inhabiles à la génération. La peau des paupières efl au(fi plus longue chez les Orientaux que chez les autres peuples , & cette peau efl , comme l'on fait , d'une fubflancc femblable à celle du prépuce ; mais quel rapport y a-t-il entre l'accroiflèment de ces deux parties fi éloignées î. lié m Je l'Homme* 1 2 5 Une autre circoncifion cft celle des filles, elle leur cii ordonnée comme aux garçons en quelques pays d'Arabie & de Perle , comme vers le golfe Ptrfique & vers la mer rouge ; mais ces peuples ne circoncirent les filles que quand elles ont pafîé IVige de la puberté , parce qu'il n'y a rien d'excédant avant ce temps-là. Dans d'autres climats cet accroidemcnt trop grand des nymphes efl bien plus prompt , & il cft fi général chez de cer- tains peuples , comme ceux de la rivière de Bénin , qu'ils font dans l'ufage de cir- concire toutes les filles auiïi- bien que les garçons huit ou quinze jours après leur nailfance ; cette circoncifion des filles cil même très-ancienne en Afrique ; Hérodote ^cn parle comme d'une cou- tume des Éthiopiens. La circoncifion peut donc être fon- dée fur la néceffité , & cet ufige a du moins pour objet la propreté , mais l'in- fibulation à. la callration ne peuvent avoir d'autre origine que la jaloufie, ces opérations barbares & ridicules ont été imaginées par des efprits noirs & fana- tiques, qui par une bafle envie contre K y à 'i;!ï ' I ' 2.16 Hi-flolre NdtiircUe le genre humain ont ciidé des loix tnfîes & cruelles, où ia privation fait la vertu, & ia mutilation le nicriie. L'infibukuion pour les garçons fe fait en tirant le prépuce en avant , on le perce & on le traverfe par un gros fil que Ton y laKTe jufqu'à ce que les cicatrices des trous foient faites ; alors on fubfliiue au fil un anneau afîèz grand c|ui doit refter en place auffi long - temps qu'il plaît à celui qui a ordonné l'opération , & quelquefois toute la vie. Ceux qui parmi les Moines orientaux font vœu de chafteté , portent un très - gros anneau pour fe mettre dans l'impolfibilité d'y irianquer. Nous parlerons dans la fuite «le J'infibulation des filles, on ne peut Tien imaginer de bizarre & de ridicule fur ce fujct que les hommes n'aient mis en pratique , ou par paflion , ou par ib perdition. rXans l'enfance il n'y a quelquefois qu'un tefticule dims le fcrotum , & quel- quefois point du toui ; on ne doit cepen- dant pas toujours juger que les jeunes gens qui font dans l'un ou l'autre ck i^th ca^ ; folem en eifet privés de ce qui Je l'Homme, l^y paroît îcLir manquer; il arrive aiïez fou- vent que les tefticules font retenus dans rabdomea eu engagés dans les anneaux des mufcles , mais fouvent ils furmontent avec le temp* !cs obflacles qui les arrê- tent , & ils defcendent à leur place ordinaire ; cela fe fait naturellement à l'âge de huit ou dix ans , ou même à IVigc de puberté ; aiiifi on ne doit pas s'inquiéter pour les enfans qui n'ont point de ttflicules ou qui \\çn ont qu'un» Les adultes font rarement dans le cas d'avoir les tcflicules cachés , apparem- ment qu'à l'âge de puberté la Nature fait un efîort pour les faire paroître au dehors , c'cft aufii quekjuefois par l*efFet d'une maladie ou d'un mouvement violent , tel qu'un faut ou une chute , &c. Quand même les tcfticuîes ne fe manifeitent pas , on n'en cft pas moins propre à !a génération ; l'on a même obfervé que ceux qui font dans cet état , ont plus de vigueur que les autres. il fe trouve des hommes qui n'ont Te'ellement qu'un tellicule , ce défaut ne nuit point à la génération ; l'on a remarqué que le tcfliciile qui eft feul^ K vj 2iS H/loirc Ndturclte ell alors I)ear.couj) plus gros (jii'à lorji- jiairc ; il y a aulii des honmics qui un ont trois, ils font, dit - on , bcaiicoij[) plus vigoureux & plus forts de corjjj que les autres. On peut voir par i'exetii- pie des animaux , combien tes j^anies toniriln;cnt à U lorte & au courage ; fjuelle difîercncc entre un bœut <îk un taureau, un bélier .& un mouton, un coq & un chapon î L'ufage de la cafl ration des hommes eft fort ancien &. généralement nfîe?, répandu , c'éioit la peine de l'adultère chez les Egyjîtiens; il y avoit beaucoup d'eunucjuei chez les Romains, aujour- d'hui dans toute l'Afie di, dans une partie de l'Afrique on fe fcrt de ces hommes mutilés pour garder les femmes. En Italie cette oj)ération infâme & cruelle n'a j)our objet que la perfedion d'un. vain talent. Ees Hotientots coupent un tefli- culc dans l'idée que ce retranchement les rend plus légers à la courfe; dans d'autres pays fes pauvres mutilent leurs enfms pour éteindre leur poftérité , & afin que ces enfans ne fe trouvent pas un jour dans la misère t^ dans i'aiîlidioa I orcli- 'i qui cîi iV uicoup 1 ' corpj i i'cxctu- 1 pallies uiagc ; ' 6c un 1 m , un 1 lommes »' ■ it a fît?, iclulicrc 'aucoup au j our- le partie 1 ioinmes : ■' Ln Italie ,"♦; elle n'a ■ 1 an .vain m tefli- 1 - 9 rhement '■ ê ; dans - ( nt leurs frite , d: "4 ent pas fflidioa hI i'""'-, s'en tiroient aulli heureufement. Selon Tlicvenot , il périt toujours un grand nonil)re des Nègres que les Turcs iou- nieticnt à cette opération , quoiqu'ils prennent des enfans de huit ou dix ans,. Outre ces eunuques Nègres , il y a d'autres eunuques à Conllaniiuopie, dans toute la Turquie , en Perle , &c. qui viennent pour la plupart du royaume de Goicondi , de la Prefqu'île en-deçà du Gange, des royaumes d'Afîan, d'Ara-- can , de Pégu & de Malabar où le teint c(l gris , du golfe de Bengale , où ils iônt de couleur olivâtre ; il y en a des blancs de Géorgie & de Circaffie , mais en petit nombre. Tavernier dit qu'étant au royaume de Golconde en 1657, ^^ y fit jufqu'à vingt- deux mille eunuques. Les noirs viennent d'Afrique , principîv- iemcnt d'Ethiopie ; ceux - ci font d'au» tant plus recherchés & plus chers qu'ils font plus horribles , on veut qu'ils aient le nez fort aplati , le regard affreux , les Itvres fort grandes & fort groiïes, & fur- Jtom ks dem& noires & ti^artées les luiq; 22 3 2' Hijloke Kdturclk des autres ; ces peuples ont commune- ment les dents belles , mais ce fcroit un défaut pour un eunuque noir qui doit être un monftre hideux. Les eunuques auxquels on n'a ôté que !es tefticules , ne laifTent pas de fentir de l'irritation dans ce qui leur refte , & d'en avoir le fignc extérieur, même plus fré- quemment que les autres hommes ; cette partie qui leur refle , n'a cependant ])ris qu'un irès-pciit accroiiïemcnt , car clic demeure à peu près dans ic même état où elle étoit avant l'opération ; un cunurjuc fait à l'âge de fcpt ans , eft à cet égard à vingt ans comme un enfant de fept ans , ceux au contraire qui n'ont fubi i'opcia- tion que dans ic temps de la puberté ou un peu plus tard , font à peu près comme les autres hommes. Il y a des rapports fingulîers, dont nous ignorons les caufes entre les parties de la génération & celles de la gorge; les eunuques n'ont point de barbe , leur \oix , quoique forte & perçante , n'eft jamais d'un ton grave ; fou vent les mala- dies fecrettes fe montrent à la gorge. La correipondance qu'ont Certalues parties 1 Ole que feniir de , & d'en pïus frc- les ; cette dant pris car clic le état où eunuque :t égard à fept ans , 31 l opcia- uberié ou •es comme g iers, dont les parties la gorge; irbe, leuf inte , n'eft t les mula- gorge. La .les panieî {le ïHoiiimc: 2 3 J du corps humain avec d'autre? fort cloî- s , & qui crt ici li g IK'Cs & fort diffcrciuc obl( I) >li marquée, pourroit s obicrvcr Dicn puis gt'iicralcnient , mais on ne fait j)as aflcz cl attention aux cffc^ts lorG^ron ne foup- çoiinc pas quelles en peuvent ttre les cailles ; c'efl fans doute par cette raifoii qu'on n\i jamais fongé à exam'iicr avec foin ces corrcfpondances dans le corps Iiutnain , fur lefquelies ccjicndaiu rouie une grande partie du jeu de la machine aniinaîe : il y a dans les femmes une grande correfpondance entre la matrice , les mamelles & la tête ; combien n'en trouvcroit~on pas d'autres fi les grands Médecins tournoient leurs vues de ce côté - là î il me paroît cjuc cela feroit j)eut-être plus utile que la nomenclature de Tanatomie. Ne doit - on pas cire bien perfuadé que nous ne connoîtrons jamais !es premiers principes de nos mjuve- mens î les vrais reflbrts de notre orga- nilation ne font pas ces mufcles , ces veines , ces artères , ces nerfs que Ton décrit avec tant d'exaditude & de foin ; if réfide , comme nous l'avons dit , des forces iûtcflcures dans les corps orgaaifés , qui '^34 Hi foire Natiirelte ne fuivcnt point du tout les loJx de h méc:ini(|.uc groffitTe que nous avons iniaglnce , <5c ;i laquelle nous voudrioib tout réduire, au Ikn de chercher à ccn- Koître CCS forces par leuri. efïets , on 3 B lAché d'en tcariÉi jufqu'à l'rdee , on ;i voulu les bannir de la Philofophie; elles ont rej^aru ccpendimt , & avec j)iiij d'éclat (jue j:imais , dans la gravitation, dans les affinhés chymiques, dans les phe'nomènes de l'éledricitc , &c. mais malgré le :r évidence & leur univerfulité, comme elles agifîeni à rinur'eur , coinrae nous ne pouvons les aticindrc que par le raifonncment , comme en un mot dits échappent à nos yeux , nous avons peine à ïes admettre , nous voulons toujours juger par l'extérieur, nous nous imagi- nons que cet extérieur cfl tout , il fémble qu'il ne nous foit pa? permis de pénétrer au-delà, & nous négligeons tout ce qui pt)urroit nous y conduire. Les Anciens , dont le génie ctoit moins limité & la philoft^phie plus éten- due , s*ct( nnoicnt moins que nous des K faits qu'ils ne pouvoicnt expliquer , ils Yoy oient mieux la Nature tciic qu'di< ilr l'Homme, 2 ^ 5 ffl, une fympaihic, une correfpondancc iingulicic n'ttoit j30iir eux qu'un phé- iioinène, & t'cft pour nous un paradoxe des (jue nous iit pouvons le rtipporicr à iiob prcicndues uàx du mouvement ; ils fi voient que la Nature opcrc par des moyens inconnus la plus graiidc partie de les ciTcts , ils étoient bien perfuadc'j que nous ne pouvons pas faire l'enuiiié- ra ion de c4n moyens ai de ces reiTources de h Nature, (|u'il eft par conréqutm i.'nponihle à lelprit huniaiii de voulair h liini er en la réduilant à un certain nombre de principes d'action & de moyens d'opéraiion ; il leur Tuffifoit au contraire d'avoir remarqué un certain nombre d'effets relatifs & du n^me ordre pour conftituer une caufc. Qu'avec les Anciens on appelle fym«- pa hie cet e correfpondance fingulière des différentes parties du corps , ou qu'avec les Modernes on la confidère comme un rapport inconnu dans i'aclioa des nerfs , cette fympaihie ou ce rapport cxirte dans toute l'économie animale , & l'on ne fauroit trop s'appliquer à fjl obferver les eifeis ^ fi l'on yeuî :s 3 ^ Fliflohe NaîureUe ' perfedionner la théorie de b Méclecme, inaijj ce n'ell pas ici le lieu de m'étendre fur ce fujet important. J'obferverai feu- lement que cette corfcfpondance entre la voix 6i le^ parties de la génc'ration , (e reconnoîî non- feulement dans les eunu- ques, mais auiïi dans les autres hommes, & même dans les iemmes , la voix change dans les hommes à i'age de puberté , 6c ks femmes qui ont la voix forte , font foupçonnées d'avoir plus de penchant à l'amour , &c . Le premier figne de la puberté eft une tfpèce d'cngourdifTement aux aines , qui devient plus lènfible lorfque l'on marclic ou lorfque l'on plie le corps en avant ; fouvent cet engourdiffement eft accom- pngné de douleurs afîèz vives dans toutes les jointures des membres, ceci arrive prefque toujours aux jeunes gens qui liennent un peu du rachiiifme , tous ont éprouvé auparavant, ou éprouvent en même temps une fênfation jufqu'alors inconnue dans les parties qui caradé- rifent le fexe , il s'y élève une quantité de peiies proéminences d'une couleur i^lgnchâtrc^ ces petits boutons font k$ Je l'Homme 2^ y germes d'une nouvelle prodiidîon , de cci;e cfpcce de cheveux qui doivent voiler ces parties ; le Ton de h voix change , il devient rauque & inégal pendant un efpace de temps aflez long , après Ie(|ucl il fe trouve plus plein , plus aiTuré, plus fort & plus grave qu'il n'ctoit auparavant j ce changement eil très - fendble dans Jcs garçons, & s'il l'eft moins dans les tilles , c'eft parce que le fon de Içur voi)C el\ naturellement plus aigu. Ces fjgnes de puberté font communs aux deux fexes , mais il y en a de paniculiers à chacun ; l'éruption des rneiillnies , faccroiflement du fcin pour k^ ièmmes ; la barbe & l'émiflion de la, li(|itcur feminale pour les hommes : il cil vrai que ces fignes ne font pas aufîx conflans les uns que les autres , la barbe , par exemple , ne paroît pas toujours prccifément au temps delà puberté , il y a même des nations entières où les hommes n'ont prefque point de barbe, & il n'y a au contraire aucun peuple chez qui Isi ubcrié des femmes ne foit marquée par 'accroiflcnient des mamelles. Dsns ;quic i'efpèce humaine Ic| F: ^i33 HijJmre Naturelle femmes arrivent à fa puberté plus tôt que les mâles , mais chez les diffcrens peuples , l'âge de puberté eft différent & lembfe dépendre en partie de la température du climat (Se de la qualité des alimens ; dans les villes & chez les gens aifés les cnfaqs accoutumés à des nourritures lucculentes & abondantes arriven* plus tôt à cet état ; à la campagne & dans îe pauvre peuple les enfans Ibnt plus tardifs , parce qu'ifs font mai & trop peu nourris , il leur faut deux ou trois années de plus ; dans toutes les parties méridionales de l'Europe & dans les villes la plupart des filles font pubères à douze ans & les garçons à quatorze , mais dans les provinces du Nord & dans les campagnes , à peine les filles le font - dles à quatorze ôt les gar- çons à feize. Si Ton demande pourquoi les filfcs arrivent plus tôt à l'état de puberté que les garçons , & pourquoi dans tous les climats , froids ou chauds , les femmes peuvent engendrer de meilleure heure que les hommes , nous croyons pouvoir fatisfaire à cette quellion en répondant que comme les hommes font beaucoup de ï Homme: 23^ nliïs grands & plus forts que les femmes , comme ils ont le corps plus folide, plus madif, les os plus durs, les mufcles plib fermes , la chair plus compaéle, oii (Joit préfumer que le temps néccfîairc à l'accroilTcment de leur corps , doit être plus long que le temps qui eft nécefTaire à raccroifTement de celui des femelles ; & cotnme ce ne peut être qu'après cet .nccroiffêmcnt pris en entier , ou du moins ea grande partie , que le fupertïu de la nourriture organique commence à être renvoyé de toutes les parties du corps dans les parties de î? «:;éncration des deux ^ {ç.xz'î^ il arrive qu*» *ij's les femmes la nourriture eft renvoya': -Jus tôt que dans [es hommes , parqe que leur accroiffe- mem fe fait en moins de temps, puif- I qu'en total il eft moindre , & que les femmes font réellement plus petites que i les hommes. Dans les climats les plus chauds de iTAfie, de l'Afrique & de l'Amérique, la plupart des filles font pubères à âXt, & même à neuf ans; l'écoulement pério- I d'que , quoique moins abondant dans ces pays chauds , paroît cependant plus tôt m- '^40 Hiflotre Nciîureïïe que Jnns les pays froids : f'intcrvîilfe de cet écoiilcmem cfl à peu près le même clans toutes les nations , & il y a fur cc'a pîus de diveiTiié d'individu à individu cjuc de peu]:)(e à peuple ; car dans le même climat & dans ia même nation , il y a des femmes qui tous les quinze jours font fujcties au retour de cette évacua- tion naturelle, & d'amres qui ont jufqu'.i cin([ & fix fcmaines de libres ; mais ordinairement l'intervalle efl d'un mois, à cjuelques jours près, La quantité de i'évacuatîon paroit dcjjcndre de fa quantité des aiimens , & de celle de la tranfpiiation infenfibie. Les femmes qui mangent plus que les aiiircs & qui ne font point d'exercice, ont des menflrues plus abondantes ; celles des climats chauds , où iu tranfpiration efl: plus grande que dans les pays froîd>, en ont moins. Hippocrate en avoit cflimé ia quantité à la mefure de deux cmines , ce qui fait neuf onces pour fe poids ; il efl furprenant que cette cfli- maiion qui a été faite en Grèce , ait été trouvée trop forte en Angleterre, & qu'on pit prétendu la réduire à trois onces oc au-defîous; ralîe de fur ce' a dans le iiion , il ze jovns évacua- t jufqu'^ ; muiâ ,n mois , d pnroît mens , & filcnfibic. i que les exercice, :es ; celles fpi ration s froids, en avoir de deux s pour le Icette c(li- , ait été ^,& qu'on onces & -dcffousj 1 iflfe r Homme» ^' î^t au-Jeflous , mais il faut avouer que les indices q«c l'on peut avoir fur ce fait-^ font fort incertains ; ce qu'il y a de fur, c'eft que cette quantité varie beaucoup dans les difFércns fujets & dans les diffé- rentes circohftances , on pourroit peut- être aller depuis une ou deux onces jufqu'à une livre & plus. La durée de l'écouiement eft de trois , quatre ou cinq jours dans la plupart des femmes, & de ûx, (ept & même huit dans quelques- unes; la furabondance de la nourriture & du (àng éd la caule matérielle des menftrucs ; les fymptômes qui précèdent leur écoulement , font autant d'indices certains de plénitude, comme la chaleur, la tenfion , le gonflement , & même la douleur que les femmes reiïentent , non- feulement dans les endroits mêmes où font les réfèrvoirs , & dans ceux qui les avoifinent , mais auffi dans les mamelles î elles font gonflées , & l'abondance du fang y eft marquée par la couleur de leur aréole qui devient alors plus foncée ; les yeux font chargés, & au deffous de l'orbi e la peau prend une teinte de bleu ou de violet ; ks joues fe colorent , k Tome iy\ h k 3f^i Hijî^îre Ndtmlle tête eft pefarite & doîulouiieufe , & en général tout Je corps eft dans un état d'accablement caufé par la furcharge du . C efl: ordînaîrcment à Tâge de pul>€rté que le corps achève de prendre (on ac- croiflement en hauteur ; les jeunes gens grandiflènt prcfque tout- à-coup de plu- iieurs pouces, mais de toutes les parties du corps celles où l'accroifTement eft fe plus prompt & le plus fènfibîe, font les parties de la génération dans i'un & l'auue fexe ; mais cet accroiiïcment n'eft dans les mules qu'un développement ,: une augmentation de volumie , au lieu que dans les femelles , il produit fouvent un rétréciUèment auquel on a donné diffé- rens noins lorfqu'on a parlé ^lès lignes de la virginité. Les honmics jaloux des prim^iutés en tout genre , ont toujours tait grand cas de tout ce qu'ils ont cru pouvoir poiïe- der exciufivemcm & les premiers; c'eft celte efpèce de folie qut a fait un être Téel de la virginité ài'^^ tilles. La virginiié qui elVun être moral, une vçrtu qui ne <;onfiftc que dans la pureté du cœur , cft t-A ...'.J 11. & en n éiat ge du de ï Homme, ^43' devenu un objet phyfique dont tous les hommes fe loni occupes ; ils ont ciabli fur cela des opinions , des ufages , des cérémonies, des fuperftiiions, & même des jugemens & des peines ; les abu5 ies plus illicites, ies coutumes les piuf des- honnêtes ont été autorifés; c a 'mis à l'exaiYicn de matrones ignorantes, <& cxpofé aux yeux de Médecins prévenus les parties les plus iècrettes de la Nature , fans fongcr qu'une pareille indécence eft un attentat contre Ja virginité, que c'eft h violer que de chercher à la reconnoîirc, que toute fituation honteufc , tout état indécent dont une fille efl obligée de rougir intérieurement, efl: une vraie dé- floration. Je nVrpère pas réufllr à détruire les préjugés ridicules qu'on s'eft formés fur ce fujet ; les chofes qui font plaifir à croire , (èront toujours crues , quelque vaines & quelque déraifonnables qu'elles puifTent être ; cependant comme dans une hiftoire on rapporte non-feulement la fuite des évèneniens & les circonf- tances des faits , mais aufîi roriorine des opinions & des erreurs dominantes , j'ai \ . 244 Hifloire Naturelle cru que dans l'hiftoire de l'Homme , je ne pourrois me difpenfer de parler de Tidole favorite à laquelle il (àcrifie, d'exa- miner quelles peuvent être les raiions de fon culte , & de rechercher fi la virginité eft un être réel, ou fi ce n'cfl qu'une divinité fabulcufe. Fallope, Vefale, Dîemcrfcroëk, Rio- lan , Bartholin , Hcider, Ruifch & quel- ques autres Anatomifles prétendent que ia membrane de l'hymen eft une partie réellement exiftante , qui doit être mife au nombre des panies de la génération des femmes , & ils difent que cette mem- brane ell charnue, qu'elle eft fort mince dans les enfans, plus épailFe dans les filles adultes, qu'elle eft fituée au-deffous de l'orifice de l'urètre , qu'elle ferme en partie l'entrée du vagin , que cette mem- brane eft percée d'une ouverture ronde , quelquefois longue , &c. que l'on pour- roit à peine y faire paflèr un pois dans l'enfance , & uiiC groflè fève dans l'âge de puberté. L'hymen, félon M, Winf- low , eft un replis membraneux plus ou moins circulaire, plus ou moins large, plus ou moins égal, quelquefois féini* de l Homme, 145 lunaîrc , qui laifTe une ouverture très- petite dans les unes , plus grande dans les autres, &c. Ambroife Parc, Duiaurent, Graaf , Pineus , Dionis , Mauriceau , Paifyn , & plulieurs autres Anaiomides audi fameux & tout au moins aufli accré- dités que les premiers que nous avons cités, foutiennent au contraire que b membrane de i'hymcn n'efl qu'une chi- mère , que cette partie n*eft point natu- relle aux filles , & ils s'étonnent de ce que les autres en ont parlé comme d'une chofe réelle & confiante ; ils leur op- pofènt une multitude d'expériences par lefquelles ils fe font aflurés que cette membrane n'exifte pas ordinairement ; ils rapportent les obfervations qu'ils ont faites fur un grand nombre de fiUes de dilFérens âges , qu'ils ont difféquées , & dans lefquelles ils n'ont pu trouver cette membrane, ils avouent feulement qu'ils ont vu quelquefois, mais bien rareiiïent, une membrane qui uniflbit ^cs protu- bérances charnues qu'ils ont appelées caroncules myrtiformes , mais ils foutien- nent que 'îtte membrane ctoit contre IVtat liai el. Les Anatomiftes ne font L ii) M i t I 24.6 Hiflohe Natiircîk pas plus d'accord enir'eux fur la qualité & le nombre de ces caroncules ; font- elles feulement des rugofités du vagin î font -elles des parties dillindes & liépa- rccbî (ont-elles des reftes de la membrane de riiymcn î le nombre en cfl-il confiant ! n'y en a-t-il qu'une feule ou plufieurs dans i'éiat de virginité î chacune de ces queflions a été faite , & chacune a été réfblue différemment. Cette contrariété d'opinions fur un fait qui dépend d'une fnnple infpet^ion , prouve que les hommes ont voulu trou- ver dans la Nature ce qui n'éioit que dans leur imagination, puilqu'ii y a plufieurs Anatomilles qui difent de bonne foi qu'ils n'ont jamais trouvé d'hymen ni de caroncules dans les filles qu'ils ont diffe- quées , même avant l'âge de puberté, puifque ceux qui foutiennent au con- traire que cette membrane & ces caron- cules exiltent , avouent en même temps que ces parties ne font pas toujours les mêmes , qu'elles varient de forme , de grandeur & de confiftance dans les diffé- rens fujets , que f3uventau lieu d'hymen il n'y a qu'une caioncule, que d'autres fois I ie l'Homme, 247 H y en a deux ou pluficurs réunies par une membrane, que rouvcriurc de cetie rieml.>rane cfl de differenie forme, ^c. Quelles font les confcqiienccs qu'on doit tirer de toutes ces obfervationi ' qu'en peut-on conclure, finon que les caufês du prétendu réirécifTement de l'entrée du vagin ne font pas confiantes, & que lorfqu elles cxiftent, elles n'ont tout au plus qu'un effet pafïiiger qui cft fuf- cepiible de différentes modifications î L'Anatomie laiffe , comme l'on voit, une incertitude entière fur l'cxiftence de cette membrane de l'hymen & de ces caron- cules , elle nous permet de rejeter ces fignes de la virginité , non - feulement comme incertains , mais même comme imaginaires ; il en cft de même d'un autre figne plus ordinaire , mais qui cependant ell tout auffi équivoque , c'eft le fang répandu ; on a cru dans tous les temps que l'effufion du fang étoit une preuve réelle de la virginité , cependant il eft évident que ce prétendu fignc eft nul dans toutes les circonftances où l'entrée du vagin a pu être relâchée ou dilatée naturellement. Aufil toutes les filles , quoique non llij 248 Hiftolre Naturelle déHor^cs> ne répandent pas du fâng, d'autres qui le font en effet ne laiflcnt pas d'en répandre; (es unes en donnent abondamment & plu fieurs fois , d'autres très-peu & une feule fois ; d'autres point du tout , cela dépend de l'âge, de la ibnté, de la conformation & d'un grand nom- bre d'autres circonflances ; nous nous contenterons d'en rapporter quelques- unes en même temps que nous tâcherons de démêler fur quoi peut être fondé tout ce qu'on raconte des lignes phyfiqwcs de la virginité. •.-«/ Il arrive dans les parties de l'un & de l'autre fèxe un changement confidérabic dans le temps de la puberté ; celles de l'homme prennent un prompt accroifTe- ment, & ordinairement elles arrivent en moins d'un an ou deux à l'état où elles doivent rcfler pour toujours : celles de }a femme croiflent aulîi dans le même temps de la puberté , les nymphes fur- tout qui étoient auparavant prefque in- feufibles , deviennent plus groffes , plus apparentes, & même elles excèdent quel- quefois les dimenfions ordinaires , l'écou- lement périodique arrive en mêmç temps. Je T Homme. 249 & toutes ces parties fe trouvent gonHccs par l'abondance du fang, & étant dans un ctat d'accroiflcment, elles fe tuméfient, elles (e ferrent mutuellement & elles b'at- taclicnt les unes aux autres dans tous les points où elles (e touchent immcdiitt- iiient; l'orifice du vagin le trouve ainll plus rétréci qu'il ne i'étoii , quoique le vagin lui-même ait pris auffi de l'accroif- femcni dans le même temps; la forme de ce rétréciffemcnt doit, comme l'on voit, être fort différente dans les difierens fujeis & dans les différens degrés de l'accroif- fenient de ces parties : auflj paroît-il par ce qu'en difent les Anatomilîes, qu'il y a quelquefois quatre protubérances ou caroncules , quelquefois trois ou deux , & que fou vent il fe trouve une ef])èce d anneau • circulaire ou fémi-lunaire , ou bien un froncement , une fuite de peiiis ])lis ; mais ce qui n'efl pas dit par les Anatomiftes, c'eft que quelque forme I (jue prenne ce rétréciffeinerit, il n'arrive I que dans le temps de la puberté. Les petites filles que j'ai eu occafion de voir* I dilîequer, n'avoient rien de femblable,' à ayant recueilli des faits fur ce fujet, j« L V I i !• 250 Hiflmre Naturelle puis avancer que quand elles ont com- merce avec les hommes avant la puherié , il n*y a aucune efFufion de (îing , pourvu qu'il n'y ait pas une dirproportion trop grande ou des efforts trop brufques ; au contraire iorfqu'elles font en pleine pu- berté & dans le temps de l'accroifîemcnt de CCS parties , il y a trcs-fouvent effu- iion de (àng pour peu qu'on y touche , iur-tout fi elles ont de l'embonpoint & fi les règles vont bien , car celles qui font maigres ou qui ont des fleurs blanches , n'ont pas ordinairement cette apparence de virginité; & ce qui prouve évidem- ment que ce n'efl en effet qu'une appa- rence trompeufe , c'eft qu'elle fc répète même pluficurs fois , & après des inter- valles de temps aflez confidérables ; une interruption de quelque temps fait re- naître cette prétendue virginité , & il eft certain qu'une jeune perfonne qui dans les premières approches aura répandu beaucoup de fang , en répandra encore ajirès une abfence, quand même le pre- mier commerce auroit duré pendant plu- fieurs mois, & qu'il auroit été aufîi intime Ck aulli fréquent qu'on le peut fuppofcr ; Je r Homme, ■ ^ 251' fant que le corps prend de l'accroifle- mcnt, i'cffufion de fang peut (e répéter, pourvu qu'il y ait une interruption de commerce affez longue pour donner le temps aux parties de fe réunir & de re- prendre leur premier état, & il cft arrive plus d'une fois que des filles qui avoient eu plus d'une foiblefle , n'ont pas laifîé de donner enfuite à leur mari cette preuve de leur virginité faus autre artifice que celui d'avoir renoncé pendant quelque temps à leur commerce illégitime. Quoi- que nos moeurs aient rendu les femmes trop peu fincères fur cet article , il s'en eft trouvé plus d'une qui ont avoué les faits que je viens de rapporter ; il y en a dont la prétendue virginité s'eft renou- velée jufqu'à quatre & même cinq fois , dans l'efpace de deux ou trois ans ; il faut cependant convenir q«e ce renouvel- lement n'a qu'un temps , ceft ordinai- rement de quatorze à dix-fept , ou de quinze à dix-huit ans; des que le corps a achevé de prendre fon accroiffêmem , les chofes demeurent dans l'état où elles font, & elles ne peuvent paroître diffé- rentes qu'en employant des fecours L v) H 5 i Hîjloke Naturelle étrangers & des artifices dont nous nouf difpen ferons de parler. . Ces filles dont la virginité fe rcnou- velfe, ne font pas en aufli grand nombre que celles à qui la Nature a refufé cette efpèce de faveur ; pour peu qu'il y ait de dérangement dans la fanté , que Pé- coufement périodique fè montre mal &. difficilement , que les parties foient trop humides & que les fleurs blanches vien- nent à les relâcher , il ne iè fait aucua rétréciffemcnt , aucun froncement , ces parties prennent de l'accroiflcment , mais étant continuellement hunie^ées-, elles n'acquièrent pas afTez de fermeté pour ik réunir , il ne (è forme ni caroncules , ni anneau , ni plis , l'on ne trouve que peu d'obflacles aux premières approches, ^ elles fe font fans aucune efîufion de fang. Rien n'eft donc plus chimérique que les préjugés des honimcs à cet égard, & rien de plus incertain que ces prétendus fignes dt la virginité du corps; une jeune perfonne aura commerce ^veç un homme avant l'âge de puberté, & pour la prjs- jnaière fois ; cependant elle nç doni^çra Ae r Homme; 2 55* aucune marque de cette virginité; enfuiic la même perfonne après quelque temps d'interruption, lorfqu'eile fera arrivée à la puberté , ne manquera guère , fi elle fe porte bien, d avoir tous ces fignes & de répandre du (ang dans de nouvelles approches ^ elle ne deviendra puceKe qu'après avoir perdu fà virginité , elle pourra même le devenir plufjeurs fois de fuite & aux mêmes conditions ; une autre au contraire , qui fera vierge en effet , ne (era pas pucelle, ou du moins n'en aura pas !a moindre apparence. Les hommes devroicnt donc bien fe tran- quiilifer fur tout cela , au L'eu de fê livrer comme ils le font fbiïvem , à des foup- çons injufles ou à de fautes joies , fdon qu'ils s'imaginent avoir rencontrée Si l'on vouloit avoir un figne évident, & infaillible de virginité pour les filles , il faudroit le chercher parmi ces nations làuvages & barbares , qui n'ayant point de fentimens de vertu & d'honneur à donner à leurs enfans par une bonne édu- cation , s'aflurent de la ehafteté de leurs iilles par uri moyen que leur a fuggéré fa grolîjèreié de leurs mœurs. Les EihicH 's 5 4 fiijfom Ndturelle Î)îen5 èi pîufieurs autres peuples de 'Afrique , les habitans du Pe'gu & de l'Arabie péirte <& quelques autres nations de l'Afie, auffiiôt que leurs filles font nées , rapprochent par une forte de cou- ture les parties que la Nature a féparées , & ne laiflent libre que l'efpace qui eft nécefïaire pour les ccoulemcns naturels : les chairs adhèrent peu à peu à mefure que l'enfant prend fon accroilfenYent , de forte que l'on eft obligé de les féparer par une incifion lorfque le temps du ma- riage eft arrivé; on dit qu'ils emploient pour cette infibuïation des femmes un fil d'amiante, parce que cette matière n'cft pas fujette à la corruption. Il y a certains peuples qui pafTent feulement un anneau ; les femmes font foumifcs , comme les filles, à cet ufage outrageant pour la vertu, on les force de même à porter un anneau, la feule différence eft que celui des filles ne peut s'ôter , & que celui des femmes a une efpèce de ferrure dont le mari feula la clef. Mais pourquoi citer, des nations barbares , lorfque nous avons de pareils exemples aufîi près de nous î la clélica- tefTe dont quelques-uns de nos voifins fe es de & de laiions 'i font [c cou- )arées , qui eft iturels : mefure eiiicnt , réparer du ma- lploient ïs un fil de Itiomme, - 5 5" piquent fur la chafteté de leurs femmes eft-elle autre chofe qu'une jaioufie brutale & criminelle î Quel contrafte dans les govits & dans les mœurs des différentes nations I quelle contrariété dans leur façon de penfcr ! Après ce que nous venons de rapporter fur ic cas que la plupart ^0:% hommes font de ia virginité , fur les précautions qu'ils prennent & fur les moyens honteux qu'ils (c font avifés d'employer pour ^tïi affurer , imagineroit - on que d'autres peuples la méj)rifent , & qu'ils regardent comme un ouvrage (ervile la peine qu'il faut prendre pour i'ôter. La fuperfliiion a porté certains peuples à céder les prémices des vierges aux prêtres de leurs id'oles , ou à en faire une cfpèce de facrifice à l'idole même ; les prêtres des royaumes de Cochin & de Calicut jouiffent de ce droit, & chez les Canariens de Goa , les vierges font proflituées de gré ou de force par leurs plus proches parens à une idole de fer, la fupcrlUiion aveugle de ces peuples leur fcit commetire ces excès dans des vues de religion \ à%% vues purement humaines '2^6 Hijloire Naturelle en ont engagé d autres à livrer avec em-» preffement leurs filles à leurs chefs, à leurs maîtres, à leurs (èigneurs f les habitans des îles Canaries , du royaume de Congo , profthuent leurs filles de cette façon ians qu*ellcs en foient déshonorées ; c*eft à peu près la même chofê en Turquie & en Perfè, & dans plufieurs autres pays de l'Afie 6c de l'Afrique, où les plus grands fèigneurs (e trouvent trop honorés de recevoir de la main de leur maître les femmes dont il s'eft dégoiué. Au royaume d'Aracan & aux îles Phi- lippines, un homme fe croiroit désho- noré s'il époufoii une fille qui n*eut pas «té déflorée par un autre , & ce n'eft qu'à prix d'argent que l'on peut engager quelqu^un à prévenir l'époux. Dans fa province de Thibet, les mères cherchent lits étrangers & les prient inflamment de mettre leurs filles en état de trouver des maris î les Lappons préfèrent aufli les filles qui ont eu commerce avec des étran- gers , ils penfent qu'elles ont plus de mérite que les autres , puifqu'elles ont fu plaire à des hommes qu'ils regardent comme plus coiinoiÛeur3 §<- meilleurs Je r Homme. 257 juges de la beauté qu'ils ne le font eux- lîiêmcs. A Madagafcar & dans quelques autres pays, les filles les plus libertines & les plus débauche'es font celles qui font le plutôt mariées ; nous pourrions donner plufieurs autres exemples de ce goût fin- gulier, qui ne peut venir que de la grof-* iièreté ou de la dépravation des mœurs. L'état naturel des hommes après fa puberté efl celui du mariage ; un homme ne doit avoir qu'une femme , comme une femme ne doit avoir qu'un homire; cette Ici efl celle de la Nature, puifque le nombre des femelles efl à peu près égal à celui des mâles ; ce ne peut donc être qu'en s'éloignant du droit naturel, & par la plus injuflc de toutes les tyrannies, que les hommes ont établi des loix con- traires; la raifon , l'humanité, la juflice réclament contre ces férails odieux , où l'on facrifie à la pafTion brutale ou dé- diiigneufe d'un feui homme, la liberté & le cœur de plufieurs femmes dont cha- cune pourroit faire le bonheur d'un autre homme. Ces tyrans du genre humain en font-ils plus heureux î environnés d'eu- nuques & de femmes inutiles à eux* J2 5 8 Hifloîre Naturelle mêmes & aux autres hommes , ils font affez punis , ils ne voient que les malheu- reux qu'ils ont faits. Le mariage , tel qu'il efl établi chez nous & chez les autres peuples raifon- iiables & religieux, efl donc l'état qui convient à Thoinme & dans lequel il doit faire ulage des nouvelles facultés qu'i' a acquiles par la puberté , qui lui devien- droient à charge, & même quelquefois funeftes , s'il s'obftinoit à garder le cé- libat. Le trop long féjour de la liqueur féminale dans fes réfervoirs peut caufer deâ maladies dans l'un & dans l'autre fexe, ou du moins des irritadons fi violentes que la raifon & la religion feroient à peine fuffifantes pour réfifter à ces paflions împéiueules , elles rendroient l'homme femblable aux animaux , qui font furieux & indomptables lorfqu'ils reÛentent ces Impreffions. L'effet extrême de cette irritation dans les femmes eft la fureur utérine ; c'efl une cfpcce de manie qui leur trouble i'el])rit & leur ôte toute pudeur ; les difcours tes plus iafcifs, les allions les plus indé- centes accompagnent cette trifle maladie [s font lalheu- )\i chez raifon- tat qui ;l il doit qu'i' a devien- Iqucfois r le cé- liqueur t eau fer tre fexe , violentes t à peine partions ['homme furieux tent CCS 'Je r Homme, 259 & en décèlent l'origine. J'ai vu & je l'ai vu comme un phénomène, une fille de douze ans, très- brune, d'un tehit vtf& fort coloré , d'une petite taille ; mais déjà formée , avec de la gorge & de l'embon- point, faire les allions les plus indécentes au feu! afpcft d'un homme ; rien n'étoit capable de l'en empêcher, ni la préfente de fa mère , ni les remontrances , ni les châtlmens ; elle ne perdoit cependant pas la raifon, & fon accès, qui ctoit marqué au point d'en êirc affreux , cefToit dans le moment qu'elle demeu- roit feule avec des femmes. Ariftote pré- tend que c'eft à cet âge que l'irritaiioii eft la plus grande, & qu'il faut garder le plus foigneufement les filles; cela peat être vrai pour le dimat où il vivoit , mais il paroît que dans les pays plus froids le tempérament des femmes ne commence à prendre de l'ardeur que beaucoup plus tard. Lorfque la fureur utérine ell à un cer- tain degré , le mariage ne la calme point ; il y a des exemples de femmes qui en font mortes. Heureufement, la force de la Nature caule rarement toute feule ces 26o Hiftoke Naturelle funefles paflions, !or$ même qu"* le tcm* péramcm y eft difpofc*, il fiiut , pour qu'elles arrivent à cette extrémhé le con« cours de pfufieurs caufes dont ia princi* pale e(l une imagination allumée par le feu des convcrfaiions licentieu(ês 6c des imngcs obfcènes. Le tempérament op- pofé efl infiniment plus commun parmi les femmes , la plupart font naturellement froides ou tout au moins fort tranquilles fur le phyfique de cette paHion; il y a audi des homr^es auxquels ia cFiaHeté ne coûte rien; j'en ai cqnnu qui jouiflToient d'une bonne fanté , & qui avoient aiteim i'age de vingt-cinq & trente ans, fans que la Nature leur eût fait fentir des befoins a/fez preflàns pour les déterminer à les fàcisfaire en aucune façon. Au relie les excès font plus à craindre que la continence , le nombre des hom- mes immodérés eft aflèz grand pour en donner des exemples , \ts uns ont perdu ia mémoire, les autres ont été privés de ia vue, d'autres font devenus chauves, d'autres ont péri d'épuifèment, la faigiice eft, comme l'on fait, mortelle en pareil cas. Les perfonnes fages ne peuvent trop de r Homme, 16 t avertir îes jeunes gens du tort irréparable qu'ils font à leur fantéf combien n*y en a>t-il pas qui ceffent d'être hommes , ou du moins qui ceflènt d'en avoir les facul- tés, avant l'Age de trente ans! combien d'autres prennent à quinze & à dix- huit ans les germes d'une maladie hontcu(c y & fouvent incurable ! Nous avons dit que c'étoit ordînaî- rcment à i*âgt; de puberté que le corps aclievoit de prendre (on accroinèment : il arrive affez fouvent dans la jeuneffè que de longues maladies font grandir beaucoup plus qu'on ne grandiroit fi l'on étoit en fanté , cela vient , à ce que je crois , de ce que les organes extérieurs de la génération étant lans adlion pen- dant tout le temps de la maladie, la nour* titure organique n'y arrive pas , parce qu'aucune irritation ne l'y détermine, & que ces organes étant dans tin état de fciblelTe & de langueur , re font que peu ou point de fécréiion de liqueur féminale ; dès-lors ces particules orga- niques reliant dans la mafTe du fang , doivent continuer à développer les extrémités des os , à peu près comme j.6i Hijfoke Naturelle il arrive dans les eunuques ; aufîf voît-on très -fou vent des jeunes gens après de longues maladies être beaucoup plus grands , mais plus mai faits qu'ils n'étoient; les uns deviennent contrefaits des jambes, d*âutres deviennent boiïus, &c. parce que les extrémités encore dudiles de leurs os (e (ont développées plus qu'il ue falloit par le fuperflu dts molécules organiques, qui dans un étac de famé n'uuroit été employé qu'à former la liqueur féminale. L'objet du mariage eft d'avoir des eiifans , mais quelquefois cet objet ne fe trouve pas rempli ; dans les différentes caufès de la ftérilité , il y en a de com- munes aux hommes & aux femmes , mais comme elles font plus apparentes dans les hommes, on les leur attribue pour J'ordinaire. La flérilité eft caufée dans i'un & dans l'autre fêxe , ou par un défaut de conformation , ou par un vicç acci- dentel dans les organes ; les défauts de conformation les plus elîèntiels dans les hommes , arrivent aux lefticuîes ou aux mufcles ére<5leurs; la faufTe diredion di; canal de l'urètre j qui quelquefois '»e/r l'Homme, iCt^ eft détournée à côté ou mal percé , cft auffi un défaut contraire à la génération, mais ii faudroit que Ce canal fût fup-> primé en entier pour la rendre impof- fihle ; l'adhérence du prépuce par fe moyen du frein peut être corrigée , Ce d'ailleurs ce n'ed pas un obitacle in- furmontable. Les organes des femmes peuvent auffi être mal conformés , la ^ matrice toujours fermée ou toujours ouverte feroit un défaut également con- traire à la génération ; mais la caulê de flérilité la plus ordinaire aux hommes & aux femmes , c'eft l'altération de la liqueur féminalc dans les tefticules , oa peut fe fouvenîr de l'oblervation de Vaîlifnieri que j'ai citée ci-devant, qui prouve que les liqueurs des tcflicules des femmes étant corrompues , elles demeu- rent ftérilcs ; il en efl de même de celles de l'homme , fi la fécrétion par laquelle fe forme la femence, e;l viciée, cette liqueur ne fera plus féconde ; & quoiqu'à rextéricur , tous les organes de part & d'autre paroiff*ent bien difpofés, il n'y aura aucune production. Dans Içs ci^s de ftérilité on » fourcnt '\\ i64 Hifloïre Naturelle empïoyë dîflferens moyens pour recon- noître fi le défaut^venoit de i*homme ou de la femme : l'infpedion efl le premier de ces moyens , & il fuffit eu eSet , fi la flériiité e(t caufée par uni défaut extérieur de conformation ; mais Çi ics organes dé- fèélueux font dans l'intérieur du corps , alors on ne reconnoît ïe défaut des or- ** ganès que par la nullité des effets. li y a éts. liommes qui à la première iiif- pedion paroidènt être bien conformés, auxquels cependant le vrai figne de la bonne conformation manque abfolu- ment; il y en a d'autres qui n'ont ce figne que fi imparfaitement ou fi rare- ment, que c'efl moins un figne certain de la virilité qu'un indice équivoque de î'impuifîànce. Tout le monde (ait que !e méca- liifme de ces parties eft indépendant de la volonté , on ne commande point à ces organes, Tame ne peut les régir; c'eft du corps humain la partie la plus animale , elle agit en effet par une efpèce d'inftind dont nous ignorons les vraies eau Tes : combien de jeunes gens élevés dans In pureté & vivans dans la plus parfaite innocence Je l'Homme, 26 f innocence & dans l'ignorance totale des plaifirs, ont reflenti les iinpreflions les plus vives , fans pouvoir deviner quelle en étoit h caufe & l'objet î combien de jeunes gens au contraire demeurent dans la plus froide langueur malgré tous les efforts de leurs fens êc de leur îm igi- nation y malgré la préfence des objets p malgré tous les (ecours de l'art de la débauche ! Cette partie de notre corps eft donc moins à nous qu'aucune autre, elle' agit ou cLie languit fans notre participation , fes fon«5bions commencent & ftnifTent dans de certains temps , à un certain âge ; tout cela fe fait làns nos ordres, & fou vent contre notre consentement. Pourcjuoi donc l'homme ne traite - t - il pas cette partie comme rebelle , ou du moins comme étrangère! pourquoi lemble-t-il lui obéir ^ eit-ce parce qu'il ne peut lut commander î Sur quel fondement éioient donc appuyées ces loix fi peu réfléchies dans le principe & fi deshonnêies dans Texé- cuiion î comment le congrès a-t-il pu ctr^ ordonné par des hoiniiies qui doivent Tome IV. M f z66 Hiflohe 'Naturelle fe coniioître eux-mêmes & fa voir quç» riea ne dépeacl moins d'eux que l'a(flioa de ces organes , par des hommes qui ne pouvoient ignorer que toute émoiion de Tame , & fur- tout la honte, font contraire» à cet e'tat , & que la publicité & i'appareil feuls de cette épreuve étoient plus que fuffifans pour qu'elle fïit Hms fuccès \ Au reftc la (térilité vient plus fouvent à.Q% femmes que des hommes lorfqu'il n'y 9 aucun défaut de conformation à l'exté- rieur , car indépendamment de l'cfïèt àti fîcurs blanches , qui , quand elles font continiïclles , doivent caufer ou du moins occafioiiner la flérilité , il me paroît qu'il y a une autre caufe à laquelle on n'a pas fait attention. On a vu par mes expériences (chap. VI) que les teflicufes des femelles donnent naifTance à des efpèces de tubérofités na- turelles que j'ai appelées corps glanduleux] ces corps qui croifTent peu à peu , & qui fervent ù filtrer , à perfectionner & à contenir la liqueur féminale , font dans un état de changement continuel , ils commencent par grofUr au-deflTous de h membrane du tefticule, cnfuite ib la ny ft-Mnm; fera a caufe lia de van I i".auc( r que a<5lion qui ne ion tic itraire? Lppareil us que ces l fou vent ju'il n'y à Texte- effet des lies font lu moins oît qu'il n n'a pas Je l'Homme, 16-/ percent , ils fe gonflent , leur extrémité s'ouvre d'elle- même , elle laifTe diflillcr ia liqueur féminale pendant un certain temps , après quoi ces corps glanduleux s'affliifient peu à peu , (e defsèchent , (c reiïerrent & s'oblitèrent enfin prefque entièrement ; ils ne laiflent qu'une petite cicatrice rougePtre à l'endroit où ils avoient pris naiiïance. Ces corps glan- duleux ne font pas fiiôt évanouis qu'il en pouflc d'autres , <5c même pendant l'affaifrement des premiers il s'en forme de nouveaux, en forte que les lefticuies des femelles font dans un état de travail continuel , ils éprouvent des changemens & des altérations confidérables ; pour peu qu'il y ait donc de dérangement dans cet organe , foit par répaifîiiTemcnt des li- queurs , foit par la foibleiTe des vaiffeaux , il ne pourra plus faire fès foncflions , il n'y aura plus de fécréiion de liqueur fcininalc , ou bien cette même liqueur fera altérée , viciée, corrompue, ce qui caufera nécefîairemcnt la ilérilité. , . . Il arrive quelquefois que la conception devance les fignes de îa puberté ; ii y a beaucoup de tèmincs qui font devenue^ Mij AI . ( 268 Hïjloire Naturelle mères avant que d'avoir eu la moindre marque de récoulement naturel à leur fexe ; il y en a même quelques-unes qui , fans être jamais fujeties à cet écoulement périodique, ne laifFent pas d^engendrer; on peut en trouver des excnipies dans nos climats fans ies chercher jufque dans le Brefil , où des nations eniières (e perpé- tuent, dit-on , fans qu'aucune femme ait d'écoulement périodique , ceci prouve encore bien clairement (|ue le fang des menftrues n'efi: qu'une matière acceiïoire à la génération, & qu'elle peut être lup- pléée , que la matière efîentielle & nécef- îhire efl: la liqueur féminale de chaque individu ; on fiit aufîi que la ceflàtion des règles qui arrive ordinairement à quarante ou cinquante ans , ne met pns toujours les femmes hors d'état de con- cevoir ; il y en a qui ont conçu à foixantc & foixante ';: ce c in- fait ({ue de par "lie re émlf- p-nte de , iiqueur elle e(l & pref- om men- ue denx femme a niient ou refTem, moment me dure cond cft afTurcnt être eniicrcmcnt fermé après h conception, ! 'uis il !nc paroît c[uc cc3 figncs lont au moins bien équivoques ,• à 'ils ne (ont pas im:iginaires. Le faifilîemcnt cjui arrive au moment de la conception eft indiqué ])ar Hippo* crate , dans ces termes : Licjuido confiât harum rcrum peritis , quod nmlicr , iibi con- (cpit , Jlatim inhorrcjcit ac dentibus jhïdet if articulum rci'iquumque corpus convuljîû, prehendit. C'cft donc une forte de frifîon que les femmes rcfîcntent dans tout le corps au moment de la conception, félon Hip[)Ocraie, & le fri/Ton feroit afTez fort pour faire choquer les dents les unes contre les autres , comme dans la fièvre* Galien explique ce fymptome par un mouvement de contraction ou de reffer- rcment dans la matrice , & il ajoute que des femmes lui ont dit qu'elles avoient eu celte lenfaiion au moment où elles avoient conçu; d'autres Auteurs l'expir- ment par un llniimcnt vague de froid qui parcourt tout le corps , ik ils emploient suffi le mot (i'/iorror ôi (ïliorripilatio ; la plupart éîablifFent ce faît , comme Ga- lien, fur le rapport de plufieurs femmes. M mi zyz Hifloire Nûtitrelk Ce fymptôme (eroit donc un fflrèt de la coniraélion de la matrice qui fe refler- leroit au moment de la conception , pénétration de la liqueur fcminalc aa travers du tiflu de la matrice î ., La gruflefTe a encore un grand norn^- I)re de fymptômes équivoques auxquels- on préiend communément la rcconnoître dans les premiers mois , fivoir, une dou-^ leur légère dans la région de lu matrice* & dans les lombes, un en^ourdiiïcmettî: M v; ^> ..^a^ <<";^^> i¥» ' ^"^ .1 IMAGE EVALUATION TEST TARGET (MT-S) 1.0 H"^ lliâ M ■s K ISJ Iz m M 1.8 1.25 1.4 J4 ^ 6" - ► Photographie Sciences Corporation s. N^ é i\ O % V a^ ^9.^ o^ 23 WEST MAIN STREET WEBSTER, N.Y. 14580 (716) 872-4503 2. y 6 Hijlolre Naturelle dans tout le corps , & un afToupiflèment continuel , une mélancolie qui rend les femmes triées & capricieu(ès , des dou- leurs de dents, le mal de tête , des vertiges qui offufquent la vue; ie rctrécifTement des prunelles, ies yeux jaunes & injedés, les paupières affaiiïees , la pâleur & \ti taches du vifage , fe goût dépravé , le dégoût, les vomifîemens , ies crache- mens , les fymptômes hyftériques , les fleurs blanches , la cefîaiion de l'écoule- ment périodique ou (on changement en hémorragie , la fècrétion du lait dans les mamelles, &c. Nous pourrions encore rapporter plufieurs autres fymptômes qui ont été indiqués comme des fignes de la groffèiïe , mais qui ne font fouveni que les efïèts de quelques maladies. Mais laiffons aux Médecins cet examen à faire , nous nous écarterions trop de notre fujet (i nous voulions confrdérer chacune de ces choies en particulier ; pourrions - nous même le faire d'une manière avantageule , puifqu'il n'y en a pas une qui ne demandât une longue fuite d'obfèrvations bien faites l il en eft ici comme d'une infinité d'autres fujets de THomme, ^ lyj Je phyfiologie & d'économie animale , à l'exception d'un petit nombre d'hommes rares (i) qui ont répandu de ia lumicrtf fur quelques points particuliers de ces fciences, ia plupart des Auteurs qui en ont écrit , les ont traitées d'une manière il vague , & les ont expliquées par des rapports (i éloignés ai par des hypothèfes fi ^uffes, qu'il auroit mieux valu n'en rien dire du t«at; il n'y a aucune matière fur laquelle on ait plus raifonné , fur laquelle on ait raffemblé plus de faits & d'obfcrvaiîons', mais ces raifonnemens, ces faits & ces obfervations font ordinal- renient fi mal digérés , & entafTés avec fi peu de connoilTance , qu'il n'efl pas furprenant qu'on n'en puidê tirer aucune lumière , aucune utilité. (i) Je mets cte et nombre Fauteur ; .i .'-^ i^.-v*^^»^îta 4|^\-t?W*H(. zy^ Hïjfoire Naturelle HISTOIRE NATURELLE DE L'HOMME. De tJge ViriL Defcription de t Homme, LE corps achève de prendre fbn accroiflement en hauteur à l'âge de la puberté & pendant les premières années qui fuccèdent à cet âge ; il y a des feunes gens qui ne grandi iïent plus après la quatorzième ou la quinzième année , d'autres croiflTent jufqu'à vingt-deux ou vingt- trois ans ; prefque tous dans ce temps font minces de corps , la taille cft effilée , les cuifles & les Jambes font menues , toutes les parties mufculeufes ne font pas encore remplies comme elles le doivent être ; mais peu à peu la chair augmente , les mufcles (è defllnent , les intervalles lè rempiifTent; les membres X 'v ■ t âe r Homme: ' ly^ fe mouîent & s'arrondifTent , & le corps eft avant l'âge de trente ans dans ies hommes à fon point de perfcdion pour les proportions de fa forme; Les femmes parviennent ordinairement beaucoup plus tôt à ce point de per- fedlon; elfes arrivent d'abord plus tôt à J'âge de puberté , leur accroifTcment qui» dans le total eft moindre que celui des hommes, fc fait aufîi en moins de temps, ies mufcles , les chairs & toutes ies autres parties qui compofent leur corps , étani moins fortes, moins compares, moins folides que celles du corps de Thomme y il faut moins de temps pour qu'elles arri* vent à leur développement entier, qui eft le point de perfection pour la forme; aufîi le corps de la femme eft ordinairement à vingt ans aufll parfairement formé que celui de l'homme i'eft à trente. Le corps d'un homme bien fait doÎ8 être carré, les mufcles doivent être dure- mem exprimés, le contour des membres fortement defliné, les traits du vil^ige bien marqués. Dans h. femme tout eft: plus arrondi, les formes font plus adou- cies^ le$ traits yA\x% finsj i'hojpime a U >8o Hifloire Naturelle force & la majeflé , les grâces & la beauté • font i'apanage de l'autre fexe. Tout annonce dans tous deux les maîtres de la terre , tout marque dans l'homme , même à l'extérieur , fa fupé- riorité fur tous les êtres vivans ; il Çq foutient droit & élevé, fon attitude eR celle du commandement , fa tête regarde le ciel & pré fente une face augude fur laquelle eft imprime le cara regarder de près : car loifqu'on les voit à quelque diihnce, ou qu'ils font tournés à contra* //aroit de couleur uniforme , renvoie par- tout Jes mêmes reflets , mais on didingue des modifica- tions dans la lumière qui anime les yeux bleus, parce qu'il y a plufieurs teintes de couleurs qui produifent des reflets différens. , II y a des yeux qui fc font remarquer fans avoir, pourainfi dire, de couleur, ifs paroiffent être compofés différemment àcs autres ; Tiris n'a que des nuances de lileu ou de gris, fi foibles qu'elles font prefque blanches dans quelques endroits, les nuances d'orangé qui s y rencontrent font il légères qu'on les diflingue à peine du gris & du blanc , malgré le conirartc de ces couleurs ; le noir de la prunelle eft alors trop marqué parce que la couleur de l'iris n'eft pas affez foncée, on ne voit, pour ainfi dire, que la prunelle ifolée au Je l Homme, 287 milieu de I*Gei( , ces yeux ne dilcnt rien » & le regard en paroît fixe ou effaré. II y a aufn des yeux dont la couleur de l'iris tir^ fur le vert , cette couleur cft plus rare que le bleu , le gris , le jaune Ôc le jaune-brun ; il fe trouve auffi des per- Tonnes dont les deux yeux ne font pas de la mém5 couleur : cette variété qui fe trouve dans la couleur des yeux, cft par- ticulière à refpèce humaine , à celle du cheval , &c. Dans la plupart des autres cfpèces d'animaux la couleur des yeuK de tous les individus e(l la même , les yeux des boeufs font bruns , ceux des moutons font couleur d'eau , ceux des chèvres font gris , &c. Ariftotc qui fait cette remarque , prétend que dans les hommes les yeux gris font les meilleure , que les bleus font les plus foibles , que ceux qui font avancés hors de Torbite ne voient pas d'aufïl loin que ceux qui y font enfoncés, que les yeux bruns ne voient pas (i bien que les autres dans l'ob feu rite. Quoique l'œil paroilîè fe mouvoir coiBïjie s'il étoit tiré de difFérens côtés, il n'a cependant qu'un mouvement de 2 83 Hiftoire Natureîlô rotation autour de Ton cenu-e, par lequel la prunelle paroît s'approcher ou s'éloi- gner des angles de rœil, & s'élever ou s'abaifler. Les deux yeux font plus près i'un de l'autre dans l'homme que dans tous les autres animaux , cet intervalle e(l même fi confidérable dans la plupart dzi efpèces cfanimaux , qu'il n'eft pas poiTible qu'ils voient le même objet des deuK yeux à la fois , à moins que cet objet ne ibit à une grande diftance. Après les yeux, les parties du vilâge qui contribuent le plus à marquer la phyfio- nomie , font les fourcils ; comme ils font d une nature différente des autres parties, ils font plus appareils par ce contraflc ôc frappent plus qu'aucun autre trait ; les fourcils font une ombre dans le tableau, qui en relève les couleurs Su les formes; les cils des paupières font aufli leur effet, iorfqu'ils font longs & garnis , les yeux en paroiffent plus beaux & le regard plus doux ; il n'y a que l'homme & le finge qui aient des cils aux deux pau- pières , les autres animaux n'en ont point à la paupière inférieure; & dans l'homme même il y en a beaucoup moins à la paupière ar lequel 3U s'éloi- ;lever ou plus près que dans srvalle eft lu part des is poiTible des deux t objet ne * Âe V Homme, 285^ paupière inférieure qu*à la fupérieure; le poli des fourcils devient quelquefois iî long dans ia vieillciTe , qu'on eft obligé de le couper. Les fourcils n'ont que deux nîouvemens qui dépendent des mufcles du front , l'un par lequel on les tiève, & l'autre par lequel on les fronce & on les abaifTe en les approchant l'un de l'autre. Les paupières fervent à garanir les yeux & à empêcher la cornée de (c def- fécher , la paupière fupérieure (è relève & s'abaifle, l'inférieure n'a que peu de mouvement , & quoique le mouveiiient des paupières dépende de la volonté, cependant on n'eft pas maître de les tenir élevées lorfque le fommeil prefîè, ou lorfque les yeux font fatigués ; il arrive auffi très - fouvent à cette panîe des mouvcmens convulfifs & d'autres mouvemens involontaires , defqucls on ne s'aperçoit en aucune façon ; dans les oifeaux & les quadrupèdes amphibies la paupière inférieure eft celle qui a du mouvement , & les poiflbns n'ont de paupières ni en haut ni en bas. Le front eft une des grandes parties de TQmi JV. N r Ipo Hijloke -Naturelle îa fiice, & l'une de celles qui contrIFjuent ie plus à la beauté de fa foriue ; il iaut ^|u'il (bit d'une jufte propordon , qu'il ne foit ni trop rond , ni irop plat , ni irop étroit , ni trop court , & qu'il Toit régulièrement garni de cheveux au dciîus & aux côtés. Tout le monde fait combien les cheveux font à la phyfionomie', c'tft un défaut c|ue d'être chauve; l'ufage de poner des cheveux étrangers , qui eft (devenu fi général, auroit du fe borner à cacher les létes chauves , car cette efpèce de coiffure empruntée altère ia vérité de ïa phyfionomie , & donne au vifâge un air différent de celui qu'il doit avoir naturellement : on jugcroit beaucoup mieux les vidages fi chacun portoit les cheveux & les laiffoit flotter librement, Là partie la plus élevée de la tête ell celle qui devient chauve la première, auffi-bien que celle qui eft au-dcffus des tempo; il eft rare que les cheveux qui 'accom- pagnent le bas des tempes tombent en entier , non plus que ceux de la partie inférieure du derrière de la têie. Au rede, il n'y a que les hommes qui deviennent chauves en avançant en âge , les ftinmcs itribuent ; il la ut »n , qu'il plat , ni qu'il Ibit au dtflus . çombi^?a nie', c'l(1 rufage de , qui e(l ; bori"ier à nte efpcce a vérité cie vifage un doit avoir beaucoup porioit les librement, ête ert celie , auiïi-bita les tempes; lui*accom- ombeiit en ic la pariie _ Au relie, deviennent les femm'^ = ' i^e l'Homme. 2p i confervent toujours leurs cheveux , Se quoicju'ils deviennent blancs c(Mnine ceux des ho.nmes lorfqu'elles approci.cnt de la vieiilefie , ils tombent beaucoup moins: les enfans & les eunuques ne font pas plus fujeis à être chauves que les fl^umes, aufli les cheveux font-ils plus *grnnds & plus abondans dins la jeunefî'e qu'ils ne le font à tout autre âge. Les plus longs cheveux tombent peu à peu , à mefurc qu'on avance en âge ils dinii- nuent & fe defsèchent; ils commencent à blanchir par la pointe ; dès qu'ils font devenus blancs, ils font moins forts &: fe caffent plus aifément. On a des exemples de jeunes gens dont les cheveux de\ ctius blancs par l'effet d'une grande maladie, cm enfuite repris leur couleur naturelle peu à peu lorfque leur finté a été parfai- tement rétablie. Ariftote & Pline difent qu'aucun homme ne devient chauve avant d'avoir fait ufige des femmes , k l'exception de ceux qui font chauves dès leur naiffance. Les anciens Ecrivains ont appelé les habitans de l'île de Myconc, têtes chauves ; on prétend que c'étoit un dcluut naturel à ces infulaires, obiervations mciopoleopiqucs. Les parties de la tête qui font le moins à la phyTionoinie t • nous parlerons dans la fuite : 1^ ^ , de prefque tous lt> animaux quar vivipares cfl en entier couvert de poils ; le derrière de la tête de Thomme eft jufqu'à l'âge de pu- berté la (èule partie de Ion corps qui en foit couverte , & elle en efl plus abon- damment garnie que la tête d'aucun animal. Le finge reffemble encore à l'homme par les oreilles , par les narines , par les dents : il y a une très-grande diverfité dans la grandeur, la pofition & le nombre des dents des diffcrens animaux , les uns en ont en haut & en bas, d'autres n'en ont qu'à la mâchoire inférieure; dans les uns les dents font 1 réparées les unes des autres ; dans d'autres lome Jy, 0 314 Hifloire Nafiirelîe elles font continues & réunies , le palais Oe certains poidons n'eft qu'une cfpècc de maffe ofTeufe très- dure & garnie d'un très -grand nombre de pointes qui font Toffice des dents (m). Dans prefque tous ïes animaux Fa par- lie par laquelle ils prennent la nourriture cft ordinairement folide ou armée de quelques corps durs ; dans l'homme , les quadrupèdes & les poifTons les dents, le bec dans les oifeaux , les pinces , les fcies, &c. dans les infedes , font des inflru- mens d'une matière dure & folide, avec lefquels tous ces animaux faififTent & M ' : (ffi) On trouve «îans le Journal âit^ Savans, atincc 1675, un extrait de ï'J/hria Anatomicn dclV ofa M forpo ktniano , Hi Bernardino Gcnga , iTc, par lequel i! paroît que cet Auteur prétend qu'ît sert trouvé piufîcurs pcrfonnes qui n'a votent qu'une feule dent qui occupoit toute la mâchoire , fur laquelle on yoyoit de petites lignes diltindes , par le moyeu delquelles il fembloît qu'il y en eût eu p!ufiellr^: ii dit avoir trouvé dans le cimetière de l'hôpital du Saint- Efprit de Rome, une tête qui n'avoit point de mâchoire inférieure , 6c que dans h. fupériture il n'y avoit que trois dents, favoir deux molaire^, dont chacune étoit divifée en cinq avec les racine féparces, & l'autre formoit les quatre dents incirivw ^ Ic5 dcMN qij'on, ^appelle çanints, page ^/f » palais îfpècc î d'un xï font ■ Je l'Homme, 315 broient leurs alimens ; toutes ces parties dures tirent leur origine des nerfs , comme les ongles, les cornes, &c. Nous avons dit que la fubftance nerveufe prend de la folidité & une grande dureté dès qu'elle fe trouve expofee à i'air; la bouche eft une partie divifëe , une ouverture dans le corps de Tanimal , il eft donc naturel d'imaginer que les nerfs qui y aboutifîènt, doivent prendre à leurs extre'mités de la dureté & de la folidité , & produire par conféquent les dents , les palais ofTeux , les becs , les pinces , & toutes les autres parties dures que nous trouvons dans tous les animaux , comme ils produilênt aux autres extrémités du corps auxquelles ils aboutiiïènt , les ongles , les cornes , les ergots , & même à la furface les poils , les plumes, les écailles, &c. . Le cou foutient la tête & la réunît avec le corps; cette partie eft bien plus confi- dérable dans la plupart des animaux qua- drupèdes , qu'elle ne l'eft dans l'homme : les poiftbns & les autres animaux qui n'ont point de poumons fèmblables aux nôtres n'ont point de cou. Les oilêaux font en général les animaux dont le cou Oi; \^ 316 HiJIoire Naturelle cft le plus long ; dans les efpèces d*oi(êaux qui ont les pattes courtes , le cou cft aiiffi allez court , & dans celles où les pattes font fort longues, le cou eft aufîi d'une très -grande longueur. Ariftote dit que les oilèaux de proie qui ont des ferres, ont tous le cou court. La poitrine de Thomme eft à l'exté- rieur conformée différemment de celle des autres animaux , elle eft plus large à proportion du corps, & il n'y a que l'homme & le finge dans iefquels on trouve ces os qui font immédiatement au-defTus du cou & que l'on appelle les clavicules. Les deux mamelles font pofécs fur la poitrine, celles des femmes font plus grofîes & plus éminentes que celles des hommes , cependant elles paroiiTent être à peu près de la même conliftance, & leur organifation eft affez lemblable, car les mamelles des hommes peuvent former du lait comme celles des femmes; on a plufieurs exemples de ce fait, & c'eft fur-tout à l'âge de puberté que cela arrive; j'ai vu un jeune homme de quinze ans faire foriir d'une de iès mamelles plus d'une cuillerée d'une liqueur laiteufe , ou de l'Homme, 3 1 7 plutôt de véritable lait. Il y a dans les animaux une grande variété dans la fitua- tion & dans le nombre des mamelles ; les uns , comme le finge , l'éléphant , n'en ont que deux qui font pofécs fur le devant de ia poitrine ou à côté ; d'autres en ont quatre , comme Tours; d'autres, comme les brebis , n'en ont que deux placées entre les cuiflTes ; d'autres ne les ont ni fur la poitrine ni entre les cuiHIes , mais fur le ventre , comme les chiennes, les truies, &c. qui en ont un grand nombre; les oileaux n'ont point de mamelles non plus que tous les autres animaux ovipares : les poifTons vivi- pares , comme la baleine , le dauphin , le lamentin , &c. ont aufli des mamelles & du lait. La forme des mamelles varie dans les différentes efpèces d'animaux» & dans la même efpèce fuivant les difîé- rens âges. On prétend que les femmes dont les mamelles ne font pas bien rondes, mais en forme de poire, font les meilleures nourrices , parce que les enfans peuvent alors prendre dans leur bouche non- feulement le mamelon, mais encore une partie même cîe l'extrémité de la Oii; M [318 Hijîotre Naturelle mamelle. Au refle, pour que les mamelles des femmes foient bien place'es, il faut qu'il y ait autant cl'efpace de l'un des mamelons à l'autre, qu'il y en a depuis le mamelon jufqu'au milieu de la fofretie des clavicules , en forte que ces trois points fiiflent un triangle équilatéral. Au-defTous de la poitrine cft le ventre, fur lequel i'ombrlic ou le nombril eit apparent & bien marqué, au lieu que dans la plupart des efpèces d'animaux il eft prefque infenfible, & fouvent même entièrement oblitéré ; les finges mêmes n'ont qu'une efpèce de callofité ou de dureté à la place du nombril. , Les bras de l'homme ne reflemblent point du tout aux jambes de devant des quadrupèdes, non plus qu'aux ailes à^i oi féaux ; le finge efl le feul de tous les animaux qui ait des bras & des mains, mais ces bras font plus groffièremem formés & dans des proportions moins exades que le bras & la main de l'homme, les épaules font aulîi beaucoup plus larges & d'une forme très- différente dans l'homme de ce qu'elles font dans tous les autres animaux ; le haut des épaules eA Ae V Homme. 3ip la partie du corps fur laquelle l'homme peut porter les plus grands fardeaux. La forme du dos n'eft pas fort diffé- rente dans i'Iîomme de ce qu'elfe efl d.uïs plufieurs animaux quadrupèdes ; la partfè des reins efl: feulement pius mufculeufe & plus forte, mais les fefîes qui font les parties les pïus inférieures du tronc , n'appartiennent qu'à l'efpèce humaine, aucun des animaux quadrupèdes n'a dé felfcs , ce que l'on prend pour cetiè partie (ont leurs cuifl^es. L'homme efl lé feul qui fe foutienne dans une fnuation droite & perpendiculaire ; c'eft à cette pofition des parties inférieures qu'efl: relatif ce renflement au haut des cuifTes qui forme les feffcs. Le pied de Thommc eft aufîi très- différent de celui de quelque animal qi;e ce foit, & même de celui du finge; le pied du finge efl plutôt une main qu'un pied, les doigts en font longs &. difpofés comme ceux de la main , celui du milieu efl plus '>'rand que les autres , comme dans la h»ain; ce pied du finge n'a d'ail- leurs point de talon fembiable à celui de l'homme: raliiCne du pied cft aufîi plus G iii; 320 Htjloîre Naturelle grande dans i'homme que dans tous îes animaux quadrupèdes , & les doigts du pied fervent beaucoup à maintenir l'équi- libre du corps & à aflurer fcs mouvemens dans la démarche, la cour(e, la danfe, &c. Les ongles font plus petits dans l'homme que dans tous les autres ani- maux ; s'ils excédoient beaucoup l^s ex- trémités des doigts, ils nuiroient à Tufrigc de la main ; les Sauvages qui les lalflent croître , s'en fervent pour déchirer la peau des animaux , mais quoiqlic leurs ongles foient plus forts & plus grands que les nôtres, ils ne le font point aflez pour qu'on puifle les comparer en aucune façon à la corne & aux ergots du pied des animaux. On n'a rien obfêrvé de parfaitement exaifl dans le détail des proportions du corps humain; non- feulement les mêmes parties du corps n'ont pas les mêmes dimenfions proportionnelles dans deux perfonnes différentes, mais fou vent dans îa même perfonne une partie n'eft pas exactement femblable à la partie corref- pondante; par exemple, fouvcnt le bras ou la jambe du côté droit n'a pas ife l'Homme. 32 1 exaélement les mêmes dimennons que le bras ou la jambe du côié gauche , &c. Il a donc fallu des obfervatiuns répétées pendant long -temps pour trouver un milieu entre ces différences, afin d'établir au juHe les dimenfions des parties du corps humain, & de donner une idée des proportions qui font ce que l'on appelle la belle Nature : ce n'efl pas par la comparaifbn du corps d'un homme ivec celui d'un autre homme , ou par des mefures are- mière lame » Sl eu même temps cette première lame augmente en denfité ; il ie fait donc deux couches nouvelles de bois, l'une à la face extérieure, & l'autre à la face intérieure de la première lame , ce qui augmente i'épaiffeur du bois & rend plus grand l'intervalle qui fépare les deux membranes dudiles ; l'année fuivante elles s'éloignent encore davan- tage par deux nouvelles couches de bois qui fis collent contre les trois premières 2 -U '34^ I-Jifoire Naturelle l'une à l'extérieur & l'autre à i'mtërîeur, & de cette manière le bois augmeme toujours en épaiffeur & en foiidité : la cavité intérieure augmente auffi à me- furc que la branche groffit , parce que la membrane intérieure croît , comme l'extérieure, à mefure que tout le relie s'étcpd, elles ne deviennent toutes deux ligneufès que dans la partie qui touche au bois déjà formé. Si l'on ne confidère donc que la petite branche qui a éic produite pendant la première année . ou bien fi l'on prend un intervalle entre deux noeuds , c'cft- à-dire , la produc- tion d'une (èulc année , on trouvera que cette partie de la branche conferve en grand la même figure qu'elle avoit en petit ;»les nœuds qui terminent & fépa- rent les produirions de chaque année, marquent les extrémités de Faccroiflè" ment de cette partie de la branche, ces extrémités font les points d'appui contre iefquels fè fuit Taélion des puifiances qui fervent au développement & à i'extenfion des parties coniiguës qui fc développent l'année fuivanie ; les bou- tons fupérieurs pouiTent & s'étendent en de r Homme» 343 reagîffint contre ce point dappui, & forment une féconde punie de la branche, (le ia même façon que s'efl forme'e la première, & ainfi de fuite tant que ia branche croît. «s La manière dont fè forment les os Icroit aflez (èmblable à celle que je viens de décrire, fi les points d'appui de l'os fiu lieu d'être à fes extrémités , comme d.ins le bois , ne fe trouvoiem au con- traire dans la partie du milieu , comme nous allons tacher de le faire entendre. Dans les premiers temps les os du foetus \\Q font encore que des filets d'une ma- tière dui^iie que l'on aperçoit aifément & diflin^emcnt à travers ia peau & les autres parties extérieures, qui font alors extrêmement minces & tranfpa- rentes : l'os d€ la cuifie , par exemple , n'eft qu'un petit filet fort court qui ,. comme le filet herbacé dont nous venons ce parler , contient une cavité : ce petit tuyau creux efl ferme aux deux bouts par une matière ducflile, & il eft revêtu à fa furlace extérieure & à l'intérieure de (à cavité , de deux membranes compofées daiw leur épainèur de plufieurs plans de f» • • • * V iiij i j '344 Hifoire Naturelle fibres toutes molles & ducfliles; a mefiire que ce petit tuyau reçoit des fucs nour- riciers , les deux •extrémités s'éloignent de la partie du milieu, cette partie reile toujours à la même place , tandis que toutes les autres s*ea éloignent peu à peu des deux côtés ; elles ne peuvent s'éloi- gner daris celte diredion oppofée , l'ans réagir fur cette panie du milieu : les parties qui environnent ce point du milieu, prennent donc plus de confi fiance , plus de (blidité, & commencent à s'ofllfier les premières : la première lame ofTeufe eft J:)ien , comme la première lame ligneufe, produite dans l'intervalle qui fépare les deux membranes , c'eft - à - di^re , entre ïe périofte extérieur & le période qui tapifîê les parois de la cavité intérieure, mais elle ne s'étend pas , comme b lame ligneufe, dans toute la longueur de la partie qui prend de i'extcnfion. L'inter- valle des deux périodes devient ofTeux, d'abord dans la partie du milieu de la lon- gueur de l'os, enfuite les parties qui avoi- îinent le milieu font celles qui s'olTifient, tandis que les extrémités de l'os & les pnr- lies qui avoifmcnt ces extrémités redent y^ l'Homme: \ "54 j' âu.i »., Les membranes , dont la fubftance a bien des chofcs communes avec celle des cartilages , prennent auffi à mefurc qu'on avance en âge, phis de denfité & de fecherefîè ; par exemple , celles qui en- vironnent les os , ceflent d'être dudiles de bonne heure; dès que l'accroinêment du corps èft achevé , c'eft- à-dire, dès l'âge de dix-huit ou vingt ans , elles ne peu- vent plus s'étendre , elles commencent donc à augmenter en Ibiidité , ôe. conti- nuent à devenir pius dcnfes à mefure qu'on vieillit ; il en eft de même des fibres \\u\ compofent les mufcles & h chair, plus on vit, plus la chair devient dure; cependant à en juger par l'attou- chement extérieur , on pourroit croire que c'eft tout le contraire, car dès qu'on a pafîe l'âge de la jeunelTe , il (cmbie que la chair commence à perdre de fa fraîcheur & de fa fermeté; & à mefure ' de l'Hommer \ 34^] qu'on avance en «ge il paroît qu'elle de- vient toujours plus molle. IJ faut faire attention que ce n'efl pas de la chair , mais de la peau que cette apparence dé- pend ; lorfque la peau e(l bien tendue y comme elle l'efl: en effet tant que les chairs & les autres parties prcnncnr de l'aug- meniation de volume , la chair , quoique moins folïde qu'elle ne doit ie devenir ^ paroît ferme au loucher , cette fermeté commence à diminuer lorfque la graifîe recouvre les chairs , parce que la graiffe, fur-tout lorfqu'elle cfi: trop abondante , forme une efpèce de couche entre la chair & la peau ; cette couche de graiflè que recouvre la peau , étant beaucoup plus molle que la chair fur laquelle ia peau portoit auparavant , on s'aperçoit au toucher de cette différence, & ia chair paroît avoir perdu de fa fermeté ; ia peau setend & croît à mefure que ia graiffe augmente, de enfuite pour peu qu'elle diminue , ia peau fc pliffc & ia chair paroît être alors fade & molle au toucher: ce n'eft cfonc pas la chair elle-même qui fe ramollit, mais c'eft la peau dont elle cil couverte j qui ii'étam plus aflie;^^ 3 5© Htflolre Naturelle tendue, devient molle-, car la cFiaîr prend toujours plus de dureté à mcfure qu'on avance en âge, on peut s'en afTurer par la comparaiion de ia chair des jeunes animaux avec celle de ceux qui iunt vieux , l'une eft tendre & dclicae , & l'autre eft fi sèche & fi dure qu'on ne peut en manger. La peau peut toujours s'étendre tant C]ue le volume du corps augmente, mais lorfqu'il vient à diminuer elle n'a pas tout le reiïbrt qu'il fâudroit pour fe rétablir en entier dans fon premier état , il i efle alors des rides & des plis qui ne s'effacent plus ; les rides du vifage dépendent en partie de cette caufe, mais il y a dans leur produdion une efpèce d'ordre relatif à la forme , aux traits & aux mouvemens habituels du vifàge. Si l'on examine bien le vifage d'un homme de vingt- cinq ou trente ans , on pourra déjà y découvrir l'origine de toutes les rides qu'il aura dans fa vieilleffe , il ne faut pour cela que voir le vifàge dans un état de violente aflion , comme eft celle du ris , des pleurs , ou feulement celle d'une fone grimace y tous les plis qui fe formeront -> 'de r Homme: \ 351 dans ces différentes avions , feront un jour des rides ineff.çabies ; elles fuivent en effet la difpofition des miifcles, & fè gravent plus ou inoins par l'habitude plus ou moins répétée des niouvemens qui en dépendent. A mefure qu'on avance en âge les os, les cartilages , les membranes , la chair , la peau & toutes les fibres du corps, de- viennent donc plus foiides, plus dures» plus sèches, toutes les partiss fè retirent, le refTerrcnt , tous les mouvemens de- viennent plus lents , plus difficiles ; la circulation des fluides fè^it avec moins de liberté , la tranfpiration diminue , les fécrétions s'altèrent , la digeftion des ali- mens devient lente & laborieufe, les fucs nourriciers font moins abondans, & ne pouvant être reçus dans la plupart des fibres devenues trop foibles , ils ne fer- vent plus à la nutrition ; ces parties trop foiides font des parties déjà mortes , puif- qu'elles cefîent de fe nourrir ; le corps meurt donc peu à peu & par parties , fon mouvement diminue par degrés, la vie s'éteint par nuances fucceffives, & la mort n'cA que k dernier ternie de cette 55f Mi/îo'irfi Natttreîle iuitc de degrés , la dernière nuance it ia vie. Comme ics os, îcs cartilages, ïes muf- dcs & toutes les autres parties qui com- pofent le corps , fom moins folides ^ plus molles dans les femmes que dans les hommes, il faudra plus de temps pour que CCS parties prennent ceue folidiié qui caufc la mort, les femmes par conlé- qucnt doivent vieillir plus que les homme^ c'eft aufîi ce qui arrive, & on pciit obferver, en confultant les tables qu'on a faites fur la mortalité du genre humain, que quand les femmes ont pafTé un cer- tain âge,^ elles vivent enfuite plus long- temps que les hommes du même Age: on doit aufll conclure de ce que nous avons dit , que les hommes qui font en apparence plus foibles que les autres, & qui approchent plus de la eonftitution des femmes , doivent vivre plus long- temps que ceux qui paroi/îènt être les plus forts • 3c les plus robuftes ; & de même on peut croire que dans Tun & l'autre fexe les perfonnes qui n'ont achevé de prendre leur accroiffement que fort tard ; fom celles qui doivent vivre, te de ï Homme, ♦ 3 j ^ plus , tar dans ces deux cas les os , les cariilag^s & toutes les fibres arriveront p'us tard -à ce degré de fulidiié qui doit produire leur deltruc^ion. Celte caufe de la mort naturelle cfl générale & commune à tous les animaux, & même aux végétaux; un chêne ne périt que purce que les pariies le^ plus anciennes du bois, qui font au centre, deviennent fi dures & fi compares quelles ne peuvent plus recevoir de nourriture ; l'humidité qu'elles contien- nent n'ayant plus de circulation & n'étant pas remplacée par une sève nouvelle, fermente , fe corrompt & altère peu à peu les fibres du bois , elles deviennent rouges , elles fè déforganifent , enfin elles tombent en pouflière. La durée totale de la vie peut (e mefurer en quelcfue fliçon par celle du temps de l'accroiflement ; un arbre ou un animal qui prend en peu de temps tout fon accroiflement, périt beaucoup plua tôt qu'un auire auquel il faut plus de temps pour croître. Dans le^ animaux , comme dans les végétaux , raccroiflTement en hau- teur eft celui qui eft achevé le premier ; 3 54 Hijloire Naturcllt un chêne cefTc de grandir longtemps uvani cju'il cefTe de grofîîr : 1 homme croît en hauteur jufciu'à fcizc ou dix- huit ans, & cependant le développement entier de toutes les parties de Ton corps en grofîcur ii*cft achevé qu'à trente ans: les chiens j)rcnneni en moins d'un an leur accroifîcnient en longueur, & ce n'cfl que dans la féconde année qu'ils achèvent de preiidre leur groflcur. L'homme qui ell treille ans à croître, vit quatre-vingt- dix ou cent ans ; le chien c|ui ne cioit que j^endant •: beaucoup plus longue, pourquoi ils vivoient neuf cents, neuf cents trentt, <& /ufqu'à neuf cents foixante & neuf a»' - , nous p jurrions peut-être en donner une raifon, en dîiant que les produirions de ia terre dont ils fàifoient leur nourriiure , ctoient alcr; 'Je r Homme. ^5^' tViinr nature difFérente de ce quelles font aujourd'hui , la iurface du globe clevoit être comme on l'a vu ^ Volume l, Ihéorie de la Terre), beaucoup moins folidc & moins compa & que tous les termes de i'accroifTement c^ f^s produélions aient été fixés aufil-bien que celui de ia durée de la vie. Indépendamment des maladies acci- dentelles qui peuvent arriver à tout âge, & qui dans ia vieillefTe deviennent plus dangcrcufes & plus fréquentes , les vieil- lards font encore fujets à des infirmités naturelles , qui ne viennent que du dépé- riflèment & de i'afî^ifîèment de toutes les parties de leur corps; ies puifTances mufculaires perdent leur équilibre, fa tête vacille , fa main tremble , fes jambes font chancefantes , fa fenfibilité des nerfs diminuant , les lens deviennent obtus , fe toucher mêmes'émoufïè, maft ce qu'on doit regarder comme une très- grande mfirmité , c'efl que fes yiciifards fort Tome IV, Q ^6± Hifioire Naturelle âgés font ordinairement inhabiles à h, génération ; cette impuiffance peut avoir deux eau Tes toutes deux Tuffifantcs pour la produire, l'une efl le défaut de tenfion dans les organes extérieurs , & l'autre l'altération de la liqueur féminale. Le défaut de tenfion peut aifément s'expli- quer pîir la conformation & la texture de l'organe même , ce n'eft , pour ainfi dire , qu'une membrape vide , ou du moins qui ne contient à l'intérieur qu'un tiiïu cellulaire Su fpongieux, elle prête, s'éîend & reçoit dans lés cavités inié- l"ieures une grande quantité de fang qui produit une augmentation de volume apparent & un certain degré de tenfion; l'on conçoit bien que dans la jeuneffe cette membrane a toute la foupleflc requife pour pouvoir s'étendre & obéir ai.émcnt à i'jmpuifion du fang, & que pour peu qu'il foit porté vers cette panic îiveç quelque force , il dilate & développe ailéinent cette membrane molle & flexible; mais à mefure qu'on avance en âge , elle acquiert , comme toutes les autres parties du corps, plus de lolidité, elle perd i^e fa ioupiefle & de fa flexibilité; imM dès-îors, en ruppofant même que Tim- pulfioil du fang fe fît avec la même force que dans la jeunefîê, ce qui efb une autre queflion que je n*cxamlne point ici , cette impulfion ne fèroit pas fuffifante pour dilater aufll aifémem cette membrane devenue plus folide , & qui par conlequent refifte davantage à cette aâion du fang; & lorfque cette mem- brane aura encore pris plus de folidité & de Ic'cherefîe , rien ne (era capable de déployer lès rides & de lui donner cet état de gonflement & de tcnfioa néceflTaire à la^fle de la génération. À l'égard de l'altération de îa liqueur féiiiinale , ou plutôt de fon infécondité dans la vieillefle , on peut aifément con- cevoir que la liqueur féminnic ne peut iêire prolifique que lorsqu'elle contient |fans exception, des molécules organiques jreavoyécs de toutes les pariies du corps; |car, comme nous l'avons établi, la iproduu ^ ils 1.8 \25 _u 1.6 .4 6" — ► V] (^ /^ ors; ^% v: y /À Photographie Sciences Corporation 23 WEST MAIN STREET WEBSTER, N.Y. 14S80 (716) 872-4503 S. % N^ \ :\ V \ ^9> V C> <^ ^v- Pi? ^°v^* %<' m... 3^8 Niftolre Naîurene entièrement, & dans le réel il y a peut-être plus ioin de la caducité à la jeunefTe , que de la décrépitude à la mort y car on ne doit pas ici confidérer la vie comme une chofe abfblue , mais comme une quantité fufceptible d'augmentation & de diminution. Dans i'inflant de la forma- tion du fœtus , cette vie corporelle n'cft encore rien ou prefque rien , peu à peu elle augmente , elle s*étend , elle acquiert de la confi (lance à mefure que le corps croît , fe développe & (e fortifié ; dès qu'il commence à dépérir, la quantité de vie diminue; enfin lorfqu'il (e courbe, iè defsèche & s'affaifTe, elle décroît, elle (e reflèrre , elle fe réduit à rien , nous commençons de vivre par degrés & nous finilTons de mourir comme nous commençons de vivre. Pourquoi donc craindre la mort , fi Ton a afTez bien vécu pour n'en pas craindre les fuites ! pourquoi redouter cet indant, puifqu'il eft préparé par une infinité d'autc£S inflans du même ordre, puifque la mort e(l aufli naturelle que la vie, & que l'une & l'autre nous arri- vent de la même façon (ans que nous <" de T Homme j6^ le (entions , iàns que nous puî/fions nous en aprt'cevoir î qu'on interroge les. Médecins ôc les Miniftres de VEgliCcy accoutumés à obfèrver les adlions de& tnourans , & à recueillir leurs derniers fentimens, ils conviendront qu'à Icxcep- tion d'un très-petit nombre de maladies aiguës, où l'agitation eau fée par des mouvemens convulfifs (emble indiquer les fouffrances du malade^ dans toutes les autres on meurt tranquillement ^ doucement & fans douleurs ; & même ces terribles agonies effraient plus les fpertatcurs , qu'elles ne tourmentent le malade ; car combien n'en a-t-on pas vu qui , après avoir été à cette dernière extrémité, n'avoient aucun fouvenir de- ce qui s'étoit paffe , non plus que de ce qu'ils avoient fenti I ils avoient réellement cefle d'être pour eux pendant ce temps ,. puifqu'ils foi:\t obligés de rayer di» nombre de leurs jours tous ceux qu'ils ont palTés dans cet état duquel il ne leur rede aucune idée. La plupart des honynes meurent donc fans le favoir , & dans le petit nombre de ceux qui confbrvent de la connoinancc Qv 37<3 Hijîoire Naturelle jufqu'au dernier foupir, ii ne s*cn trouve peut-être pas un qui ne Conlerve eit même temps de l'efpcrance, & qui ne fe ffatte d*un retour vers la vie î ia Nature a, pour le bonheur de i'homme , rendu ce fcniiment plus fort que ia raitbn. Un malade donc te mal eil incurabk , qui peut juger Ton état par des exemples fréquens & familiers , qui en cfl averti par (es mouvemens inquiets de (a familie, par les larmes de fes amis , par b conte- nance ou i'abandon des Médecins^ n'en efl pas plus convaincu qu'il touche à fù dernière heure; l'intérêt eft fî grand qu'on ne s'en rapporte qu'à foi, on n'en croit pas !es jugeinens des autres , on les regarde comme des alarmes peu fondées ; tant qu'on fe (ènt & qu'on penfe , on ne réfléchit , on ne raifonne que pour foi , & tout eft mort que i'efpérancc vit encore. ^ ' Jetez îes yeux fur un malade qui vous aura dit cent fois qu'il fè feut attaqué à mort , qu'il voit bien qu'il ne peut pas en revenir, qu'il eft prêt à. expirer, examinez ce qui fè paflè fur fon vii'age lorfc^ue par zèle ou par indifcrétion I jp Je l'Homme» jyi quelqu'un vient à lui annoncer que fa fin eft prochaine en effet ; vous le verrez changer comme celui d'un homme auquel on annonce une nouvelle imprévue; ce malade ne croit donc pas ce qu'il dit lui- même y tant ii efl vrai < qu'il ne(l nullement convaincu qu'il doit mourir > il a feulement quelque doute, quelque inquiétude fur Ton état , mais il craint toujours beaucoup moins qu'il n'efpère ^ & ù l'on ne réveiiioii pas Tes frayeurs pav ces trides foins & cet appareil lugubre qui devancent la mort, il ne la. verroit point arriver, La mort n'eft donc pas une cho(e aufîî terrible que nous nous l'imaginons, nous la jugeons mal de k)in, c'eii un fpei^re qui nous épouvante à une certaine dif- tance , & qui difparoît iorfqu'on vient à* en approcher de près , nous n'en avons donc que des notions faulTes , nous U regardons non-fèulement comme le pli^$ grand malheur ,. mais encore comme urv mal accompagné de la plus vive doùieuc & des pluj» pénibles angolfles ; nous» avons même cherché à groffir dans nptr.Q ïmaainatioii ces funelUs images-,,. 5j^,||u Q v; 37* Hiflotre Naturelle augmenter nos craintes en raifonnant fur la nature de la douleur. £lle doit être extrême, a-t-on dit lorfque l*ame fe fépare du corps , elle peut audi être de très - longue durée , puifque le temps n'ayant d'autre mefure que ia fucccflion de nos idées , un inllant de douleur très -vive pendant lequel ces idées fê fuccèdent avec une rapidité propor- tionnée à la violence du mal , peut nous paroître plus long qu'un fiècle pendant lequel elles pouient lentement & relative- ment aux (êntimens tranquilles qui nous affedent ordinairement. Quel abus de la Philofophie dans ce raifonnement ! il ne mériteroit pas d'être relevé s'il étoit (ans conféquence, mais ii ihflue fur le malheur du genre humain, il rend l'afpedl de ia mort mille fois plus affreux qu'il ne peut être , & n'y eût- il qu'un très-peut nombre de gens trompés par l'apparence /pécieufe de ces idées , il feroit toujours utile de les détruire & d'en fiiire voir la ^uflèté. Lorfque Pâme vient à s'unir à notre corps , avons •> nous un plaifir cxceflif , une joie vive & prompte qui nous Je r Homme, v 373 tranfporte & nous ravifïè î non , cette union fe fait (ans que nous nous en aperce- vions, la défunion doit s'en faire de même fans exciter aucun fentiment, quelle raifon a-t-on pour croire que la féparaiion de i'aine & du corps ne puiH^e fe faire (ans une douleur extrême! quelle eau fè peut produire cette douleur, ou l'occafionner î la fera -t- on réfider dans Tame ou dans le corps î la douleur de l'ame ne peut être produite que par la penfée, celle du corps eft toujours proportionnée à (a force & à (a foiblefTe ; dans Tinflant de la mort naturelle le corps e(l plus foible que jamais, ii ne peut donc éprouver qu'une très-petite douleur, fl même il en éprouve aucune. Maintenant, fuppofbns une mort vio- lente, un homme, par exemple, dont la tête eil emportée par un boulet de canon, fouffre-t-il plus d'un inflant ! a-t-il dans Tinter vallc de cet inftant une fucceflion d'idées affez rapides pour que cette douleur lui paroifTe durer une heure, un jour, un fiècle \ c*e(l ce qu'il &ut examiner. J'avoue que la fucceflion de nos idées 374 Hipoire Naturelle ' efl en effet , par rapport à nous , la (èuïe niefure du temps ; i que nous devons le trouver plus court ou plus long , (clon que nos idées coulent plus uniformé- ment ou fe croiient plus irrégulièrement, mais cette mcfure a une unité dont la grandeur n'eil point arbitraire ni indé- finie , elîe eft au contraire déterminée par la Nature même , & refative à notre organifaiFon : deux idées qui fe fuccè- dent, ou qui font feufement différentes Tune de l'autre , ont néccffairement entre elles un certain intervalle qui les fépare ; quelque prompte que foit la penfée , il faut un petit temps pour qu'elle foit fuivie d'ime autre penfce , ceue fuccef^ fîon ne peut fe faire dans un inftant îndivifjble ; il en efl de même du fenti- raent , il faut un ceriaih temps pour paffcr de la douleur au plaifir, ou même d'une douleur à une autre douleur; cet intervalle de temps qui fépare néceiîài- rement nos penfées, nos lèniimens , eft Funité dont je parle , ii ne peut être ni extrêmement long, ni extrêmement court , il doit même ê»re à peu près égA dans fa durée , puif(|^u'eiie dépend de la de f Homme* J7j* rawre Je notre ame & de l'organifation de notre corps dont les mouvemens ne peuvent avoir qu'un certain degré de vitefTe dé.erminc'e ; il ne peut donc f avoir dans le même individu des fuecef- fions d'idées plus ou moins rapides ai» degré qui feroit nécefîàire pour produile cette différence énorme de durée, qui d une minute de douleur feroit im fiècle, un jour, une heure. Une douleur très - vive , pour peu qu'elle dure , conduit à l'évanoui If èment ©u à la mort , nos organes n'ayant qu'un certain degré de force, ne peuvent péfiiter que pendant un certain temps à un certain degré de douleur ; fi elle devient exceffive , elle cefîe , parce qu'elle eft plus forte que le corps , qui ne pouvant la fupporier , peut encore moins la iranrmetire à l'ame avec laquelle il ne peut eorjFefpondre que quand les orgv^nes agifïcnt ; i< ? ra ( Voy. ci-devant la Defcript'ion de l'Homme) que leurs mouvemens , même les plus prompts , dépendent toujours de la réflexion , & ne font que des effets d'une volonté habituelle de l'ame. Je ne me fuis un peu étendu fur ce (iijct, que pour tâcher de détruire un Je ï Homme'* ^77 {)r^jugé fi contraire au bonheur de 'homme ; j*ai vu des vidimcs de ce préjugé, des perfonnesquelafr.yeur de la mort a fait mourir en eflet, des femmes fur - tout , que la crainte de la douleur ancantifToit ; ces terribles alarmes fembicnt inême n'être faites que pour des per(bnnes élevées & devenues par leur éducation plus fenfibles que les autres, car le com- mun des hommes , fur- tout ceux de la campagne , voient la mort fans effroi. La vraie philofophie eft de voir les cbofes telles -qu'elles font ; le (èntiment intérieur feroit toujours d'accord avec cetie philofophie, s'il n'étoit perverti par les illuHons de notre imagination & par l'habitude malheureule que .nous avons prife de naus forger des fantômes de douleur & de plaiur : il n'y a rien de terrible ni rien de charmant que de loin . mais pour s'en affurer il faut avoir le courage ou la (àgede de voir L'un â: l'auire de près. / ■ '-' ' ' Si quelque chofê peut confirmer ce que nous avons dit au fujet de la ceffation graduelle de la vie, & prouver encore mieux que fa fin n'arrive que par nuances }78 Ht flaire Natarelle fou vent infènfibles, c'efl l'incerthude Jei figfies de la mort ; qu'on conlulte les recueils d'ohlervaiions , & en pariiculicr celles que M." Winilow & Bruhicr nous ont données fur ce fujet , on fera con- vaincu qu'entre la mort & la vie il n'y a fouvent qu'une nuance (\ foiblé , qu'un ne peut l'apercevoir même avec toutes les iumières de l'art de h Médecine ^ de robfervaiion ïa plus atteniive: félon eux ce le coloris du vifige, la chaleur du » corps , ia molleflc des parties flexibles » font des fignes incertains d'une vie » encore fubfi liante , comme ia pilleur » du vi^ige, ie froid du corps , ia roideur » des extréiiiités , la cefTaiion des mou- » vemens & l'abolition des fens externes » font des fignes très-équivoques d'une mort certaine » : il en ell 3e même de la cefTation apparence du pouU &. de ia refpiration , ces mouvemens font quel- quefois tellement engourdis & afToupis, qu'il n'eft pas polîibie de les apercevoir, on approche un miroir ou une lumière de la bouche du mabde, fi le miroir fe ternit , ou fi ia lumière vacille , on con- dud qu'il refpire encore; mais fouvent i^'^ êe T Homme, 375' CCS cfltts arrivent par d*autrcj caufes , lors même que !c malade efl mort en ei!èt, dk quelquefois ils n'arrivent pas quoiqu'il foit encore vivant ; tes moyens font d( ne très- équivoques ; on irrite les narines pur des llernutatoires , des liqueurs pénétrantes, on cherche à ré- veiller les organes du tacfl par des piqûres, de» hriiluies, &c. on donne des lavcmens de fumée, on agite les niembies par Ati mouvemens violens , on fatigue l'oreil'e par des fons aigus & des cris , on fcarifie les omoplates , le dedans des mains & la plante des pieds ; on y applique des ^crs rouges, de la cire d'Efpagne brii- lan.e , &c. lorfqu'on veut être bien convaincu de la certitude de la mort de quelqu'un ; mais il y a des cas où toutes CCS épreuves font inutiles , & on a des exemples , fur-tout de perlbnnes cata- leptiques , qui les ayant fubies ftns doniier aucun figne de vie , font enfuite revenues d'elles-mêmes , au grand éton- nement des fpedateurs. Rien ne prouve mieux combien un certain état de vie reflemble à l'éiai de la mort, rien aufll ne feroic plus raifbanabfe 380 Hipoïre Naturelle & plus félon l'humanité , que de fe prefTer moins qu'on ne £iit d'abandon- ner, d'enfévelir & d'enterrer les corps; pourquoi n'atiendre que dix , vingt ou vingt -quatre heures, puifque ce temps ne fuffit pas pour diftinguer une mort vraie d'une mort apparente, & qu'on a des exemples des perfonnes qui font forties de leur tombeau au bout de deux ou trois jours î pourquoi laiflèr avec indifférence précipiter les funérailles des perfonnes mêmes dont nous aurions ardemment dedré de prolonger la vieî pourquoi cet ufage , au changement duquel tous les hommes font également IniéreflTés , fubfifte - t-il î ne fuffit- il pas qu'il y ait eu quelquefois de l'abus par les enierremens précipités , pour nous engager à les différer & à fuivre les avis des fàges Médecins , qui nous dilent (0) ^ • 5 *H7 Années de la vie. 3 '5 578 44' 2JI 89 359 103 170 34^ '4 565 686 ) 73 75 43 16 58 ^4 3' 61 57 '298 3^ 3' 1 1 9 18 30 8 24 «9 96 29 27 '3 7 ,19 ai 4 1 1 ^5 1. 38, i SiPARATIOM des Î080J , Q morts (lins les amie» «le ( 37'3 " iavîe où Ils font décèdes. Morts avani l.i fin Af leur. „ I.*, 2.* année, &c. fur^ 373" 1080; (cpultures. Nombre des ^^erfonnes I g entrées dans leur i.*, z.* y l OoOjJ année, &c. fur loSnj. / ,v> .47 or 7067 350 505 61 04 256 5307 5754 Tome IV. R 386 m^oire Naturelle PAROISSES de P A m s. S.*-Aiidré S'-Hippolytc. S.*-Nicolas.... Total des Morts. Morts. Années de la vie. 1718 894.5 13189 191 754 1761 122 93» 9+ 117 414 p^i 82 298 SÉrARATiotf Jes 13189k . moits «Inns les années «ief *7 in vie on ils font déc^és. Morts avapt lïfin «le leur . ^ i.% a,* année , &c. fwr 131 89. '♦M 4'3» 1047J ^35 444 4766 5210 9Pj9 842 j ^pp" SÉPABATioi; des 23994 1 morts fur les[3 paroif^s de ^ Paris, & fui lès 1 2 villages. Hsit Morts avant la fin de leur. I,*, al' année, &c, d^> 0454" 23994 lepuituref. NoMBR einrées année i E des perfonnes r s dans leur 1.*, a-'^ 2 3 994 , &e. fur 23994, \ wimmimmmmmmmimimmm ^378 m }7W mmm 985 9817 »5»<>a 700 105.7 »4«77 H \' ^(p V Homme * 387 Années de la V lE. 5 6 7 8 9 ID \ù 16 •4 10 8 4. lO 16 9 9 8 5 5 8 4 4» 41. s 1 1 ^OOI 6045 6081 61 62 574 1 i5^ > 'l ^ 7 " +8 tfi <î3 4» 81 €616 666^ ^7*5 ^788 ^830 <9.. 6^30 ^^71 <55»5 <4<54 6401 ^359 1 «04 ••5 14.1 93 161 148^5 12980 13085 13^26 «33'9 13480 Il 1*53' 1 11A9 11014 1 0909 10768 10675 i cA' l'Homme, 393 Années de la V I E. 23 1 0 24. 25 26 27 28 7 22 9 '3 1 0 7 1 1 »4 9 7 •3 4 + 5 2 2 3 3 # 1 I 1 3 8 <; XI 3 5 10 3 é I 1 10 4 9 I I 2 2 i 5 6 + 5 4 4 3 10 8 7 3 3 3 I t I jr 2 I 5 6 1 1 9 9 8 10 9 10 H 5 9 68 62 12 1 d6 55 77 ($637 (1^99 6820 (^886 ^94' 7018 38<5^ +»3<5 4168 4.10^ 3985 39'9 394 Hijfoire Nm a relie Années de la vie. ^3 1 1 7 66 6977 6*78 2+ 9 9 4-1 25 9 10 59 26 I 27 8 47 '7 10 53 28 '3 10 5' 59 7036 6z \x 78 7114. (S153 6^ 718; 5 4 5» + 8 a 5 4 3 I 4 + 1 ^^ a8 a 9 3 16 8 7 5 74- a a 3 jr — — 8 1 8 5 33^ 6 1 10 4 % 1 2 f !• 10 4- >4 7 9*7 •5' h354 '3 8 1 1 18 10 +Z .46 +» 1 01 6a 50 7060 7*06 7*4-8 7549 7441 7461 37»7 37+5 Î599 ^'>^7 345<5 3394 \ •39^ Hifloîre Naturelle ^9 A N N 30 É E s 1 3» D E Li" 32 l V I i 33 34 34 1 1 9 3 + 2 1 7 ^3 6 9 »5 10 I 2 57 '7 41 ■ . . -, 1 1^ " • :'£ i 5+ 9> 40 79 7600 7' 8i 739Ô 748. 75*» 7^71; î 7753 5853 5799 5708 5<568 5 5 «9 55.8 I 96 -^7- 82 ïi8o »33 !3Î 144,50 14^87; '47<îsi •4949 1^5 082 «52M.. 9^4.0 9544 ••-■.. .■ ; j • 1 9507 9245 9045 891: 35 '7 20 »3 '7 18 7 7 8 <5 8 '9 \\6 7Ô07 3H4 7tfi Tomi de V Homme. 1 397 3J Années e E LA 38 VI E 39 4.0 36 37 '7 20 1 1 8 ■ 8 8 '5 8 - 3 6 4» 37 «5 6 7 4 1 20 c 4 4- I I 4 '7 5 5 4 # 4' 18 9 4 5 1 22 7 « I 2 3 4 7 8 4 5 I 5 2 3 20 8 6 8 5 8 n 5 5 2 7 7 >4 '9 ^2 »3 23 3 27 146 77 7» 76 *7 »45 7607 7684 77)5 7831 7858 810J Î544- 5.98 • 5121 30J0 2974. 2947 Tome IV* u 398 Hiflotre Naturelle 35 A N N £ 36 : E s DE LA 37 38 V I E. 39 40 ï »• 16 i 8^ «4 2 1 75 « '5 58 1 2 »3 59 4 10 46 26 109 119 1 10 8t 84 ^lO «59 83^6 4982 787Z 7982 8o<Î3 8147 8207 5+34 58 10 9 4) a4 33 1 1 1 2 1 4 54 . 4«5 1 10 84 ^4 i63 89 84.12 8522 8^06 8670 Î8j8 89:7 «( 4823 4777 4667 4583 45«9 43J» 1 .' 81 191 128 116 307 '7*93 140 »74-H 16550 1 6742 16870 1 Ci)%6 75*5 7444 7151 7'»4 7008 670» An 47 ^ 8 6 4 3 3 /y 4 2 5 7 r 43 86 22 854.9 "99 Je VHomme^ 401 ÀNNltES DE LA V 1 E. 47 48 4-9 50 5» 5^ 8 5 2 18 >9 59 96 M' J804 152 8408 573^ ife l'H ommè. 403 Années de la V I I. 53 5 + 55 56 57 58 •4 5 4 1 6 6 3 7 4 2 2 3 »3 2 10 3 I 4 3 4 6 4 7 10 4 9 I 2 9 6 to 10 10 rj 9 19 II «3 «3 38' • 44 Il 1 54 5» 61 «9^5 9009 9120 9 '74 9225 928^ 1878 1840 i79<î 1685 lé3l 1580 ^Ki^^^^a , IIIIPI, mmÊmm 404 Hiftoire Naturelle [•^ A N N 54- É£ s ] 55 [>£ LA 56" V lE, 57 58 < 6 +9 ^ 10 10 4.6 »9 "5 ri 9 $<5 »5 48 '7 18 86 <) 66 169 7<î 78 121 9H4 9^10 f 9775 9855 993 3 10054 j7o8 j($4.5 5579 54.10 3334' 3256 1 loi 1 10 280 1 8899 130 1*9 182 18509 18^19 19029 19158 19340 1 558« 5485 5Î75 5095 4965 4.83e 59 < 1 •t - »9 a 95 1 3 9305 'S'9 - 1 i/f VHonîmi. 40 f Années de la vie ;_^ 8 '7 59 60 61 62 63 6+ • ♦ 5» 2 é 5 a " i8 24 I 3 4 7 86 20 f 5 a 4 2 # # 1 i.. 35 « » 1 121 22 6 3 if 3 7 a 5 1 1 27 « 4 3 4 0J4. »3 3 7 5 4 3 ir 1 24 6 • 9 .7 256 40 3 I 2 14 1 1 -"■ 1 1 182 »9 269 2 1 5' jo 48 1 i 340 930J 9574- 9595 9646 9696 9744 836 1 15.9 1500 123, 12 10 "59 1 109 1 1 40 6 Hijfoire . Naturelle 59 A N N 60 iLS DE LA Vil 61 62 63 64 1 1 11 +8 46 35 184 1 1 7 42 2 1 28 77 '9 7» •7 7î *, %. 7» atf^ 60 126 1 1 1 »'3 10125 10390 10450 10576 10687 10800 3'35 3o<54 1799 2739 261 3 2502 1 90 534- 81 177 161 161 19430 19964 10045 20222 20383 205^4 4.^54 45^4 4030 3949 377* 361 1 A N N J 6s (>(i 5 7 6 2 1 3 7 3 1 12 7 7 6 3 13 »7 '4 ai 82 75 9826 9901 1061 979 Je VH omme. 407 Années delà V 1 E. 6s 5 66 6j 68 69 70 S * 4 1 1 7 6 6 6 5 a 1 3 3 1 Ê # 5 3 a 9 7 3 5 >9 a 1 I 7 la 7 6 C 18 7 é 5 9 a 3 I 4 '3 '7 13 »5 16 ' + ai »3 7 3» Sa 75 4.2 69 »5 «33 98z6 9901 9943 10012 M037 10170 io6i 979 904. 862 793 768 1 40 s Hifloire Naturelle 65 A N N 66 É E S " 67 DE LA VI] 68 69 • 70 3^ 35 »77 ao 95 »7 »9 95 21 12 «7 »5 20 »«5 9 50 140 141 100 i<5o 7* 248 10940 1 1081 1 1 181 11341 11413 i\66\ 1 2389 4249 iloS 2008 1848 1776 1 122 2l/> 142 «29 97 38. 207^6 20982 2 1 124 *M5î 21450 2iS3( 3450 3228 wmmmmÈÊm 3012 2870 2^41 2544 • ^e THenmex 1 40? Années de i.a vie » 7« 7^ 5 73 74 75 5 76 1 3 ï 1 2 2 tf + 2 a « I 1 f 2 « V y V l + # n 3 * 1 1 5 5 8 // 2 1 M tt // 10 » ft 18 2 8 ? 4 9 1 B // » II /r t £2 12 ni ^6 é 6 ■2 1 i 1 19 «4. 12 »5 lao 37 44 88 ^ 24. 10195 10295 10332 10376 104.^4. «0488 «Î5 610 J'« 473 4>9 34« 7i?w^ yf^. M 410 H'i flaire Naturelle A N N i E S DE L A V I E. 7« 10 ^4 7^ M 28 118 73 >4 5 53 74- •9 «5 90 75 20 M 127 76 <53 «3 '744 1528 171 7» •*4 170 II9I5 A 1987 I 2 1 1 1 1 228 i «445 1274, I202 1078 90 12371 908 108 271 109 i(!8 258 11939 22210 22319 224.87 2274.5 21^0 *M5 «784 i«75 1507 "+ 22 1249 77 317 'I , ^^ /'//^WW^ • • 4Tf Années de la V !E. 77 78 79 80 81 82 1 2 6 « i 3 3 t « 2 «r i « I f i< 1^ 7 » 3 + 6 t 1^ t ^ 4 4 »7 î 4 a 5 4 2 1 1 f d 8 «7 6 9 1 1 »4 9 »9 7 »4 33 3« »5 89 16 30 1052 1 10559 10574. 10^63 10679 10709 317 284 246 231 142 ift6 T ij 412 Hiftoire Natwetk Années d-e la v^e. 77 lO 18*. 59 : 7% ^5 »5 69 79 »o «7 18 1 2 I 81 82 10 5 41 87 H 5 S 818; »o<^ 12 567 73 +<5 1161 )2Z 5<5 11 7^9 57(J t i 009 i2 0 56 »£ 865 120, 22 979 II 55 147 251-26 101 m M*«^P él JI87 868 H5 234J2 8 07 5^88 86 5 574- ÇO( Kl 8î ir ■' ' 4 — h f I- ro72o i< 1 9tf ■ de l'Homme.'A ^\f A 8? L N'N É 84. ES D 85 E LA V 1 E. 87 88 1 4 3 t » il M 1 M 7 7 ê Ê t # 4 # 0 a 5 1 § K M f 4 4 n , .. .. . 1 f 1 1- « 4 a- 1 1 h- % Ê » 3 1 \ f t ^ « 9 8 9 1 tûJXO • •74r' 1075} toyéx >o77o »o779 9d 8j <4 5» 4J ; 1 l ; Ti^ i ) 414. Htffbire Nntureïïè Années pe la vie. 8-3 8 16 37 84. 7 »5 «5 3 10 35 86 I 87 7 4 »9 I 2.0 8H +1 5 4 M I di VXf)X(> 3;H 3E LA 92 V 1 E» 93 94 • % % ' 4 4 »■ ►7 * 5 2 a 9 1 5 1 \ 4 ; ' - ï ' S *J 7 '3 t 7 7 ijio7 »jt3o 13137 r3r5o »3»57 1316^ 9<»! «a ^9 1 î* 39' 1 3» t * »5 j» 8 >• fi 7 7 »>»9i aj^aj Ï393» *3947 *î>54 a39(Ji 1'- • toj 7» H 1 -JT 40 i ■ • ' # \ Je l'Homme. 4»7 Années de la *vie. 95 96 I 97 98 \ 1 0000 100.01 08 1 000 1 10 B04. 8: 99 1,00 I OOOi}. 0805 41 8 Hifioire Naturelle Années de la vie. 9Î 96 97 98 99 100 # a 5 I I a 1 ë I I 4 13171 «5 •3'75 18 13177 14. 3,8 i)ioa la 13.83 3187 k 10 » 8 *J97> a 3 976 83978 a398é 3987 »399» '•! : . n »3 16 8 de l'Homme,^ 41^ On peut tirer plu fleurs connoîflànces utiles de cette Table que M. Duprc a fiiite avec beaucoup de foin, mais je itie bornerai ici à ce qui regarde lc> degrés de probabilité de la durée de la vie. On peut obferver que dans les colonnes qui répondent ï 10, 20, 30, 40, 50, 60, 70, 8oans, & aux autres nombres ronds, comme 2 5, 3 ^, 6cc. il y a daus les paroifTes de cam- pagne beaucoup plus de morts que dans les colonnes précédentes ou fuivantes , cela vient de ce que les Curés ne mettent pas fur leurs legiftres , l'âge au jufte , mais à peu près : la plupart des payians ne favent pas leur âge à deux ou trois années près ; s'ils meurent à 5 8 ou J9 ans, on écrit 60 ans fur le regiftrc mortuaire ; il en e(l de même des autres termes en nombres ronds , mais cette irrégularité peut aifément s'eftimer par la loi de la fuite des nombres, c'eft- à-dire par la manière dont ils (e fuccèdent dans la table ; ain(î cela ne fait pas un grand inconvénient. 1 S Par la table des paroiffcs de la cam- pagne , il paroît que la moitié de tous les entans qui naifîent , meurent à peu près avant fâge de quatre ans révolus i par 42 o Hiftoire NaUireîle celle des paroifTes de Paris , il parott au contraire qu'il faut (tize ans pour éteindre la moitié des cnfàns cjui naifknt en même temps ; ceite grande différence vient de ce qu'on ne nourrit pas à Paris tous les -çnfans qui y naifTent , même à beaucoup près , on l«s envoie dans les campagnes où il doit par conléquent mourir plus de perlbnnes en bas âge qu'à Paris ; mais fn eftiniiuit les degrés de mortalité par les deux tables réunies, ce qui me paroît aj)procher beaucoup de la vérité, j'si calculé les probabilités de la durée de U vie comme il fuit ; TABLE des Prohabi LIT Es de kl durée de la Vïe, AGE. ans. '■•'•'44 I. 2. 3- DURÉE DE LA VIE. AGE. aniK-es. mois. aii.<^ 8. // 5- 33. , 6. 38. H 7- 40. H 8. 41. // 9- DUREE Dr. LA VIE. années. 42. 4-1. 40 mon, 6. 3- 6. 10, Ae V Homme, 421 :)tt au eindre même ■■■■■■■iVi AGE. DURÉE DE LA VIE. ÂGE. (aiij. DURÉE OE LA Vin. cnt de ans. années. mois. années. moii. us les 10. 4.0. 2. 30. 2.%. § Licoup I I. 39- 6. 3'. 27. 6. }agnes lus de mais par es paroîi 12. IJ. '5- 16. 38. 38. 37. 36. 36. 9- I. 5- 9- 3^- 33. 34" 35. 36. 26. 24.. 1 1. 3- 7- AT 5- : de la '7- 35. 4' 37. ■ ^3- 10. ^ 18. 3+. 8. 38. ^3- 3- 19. 34- Il 39- 22. 8. mmmm H 20. 33- 5- 4.0. 22. I. TÉS I 21. 32. 1 1. 4.1. 21. 6. I 22. 32- 4" 4.2. 20. 1 1. KÉE ^ VIE. 1 23- 24.. 3'- 3'- 10. 3- 4-3- 4.4.. 20. 19. 4" 9- 1 25- 26. 30. 30. 9- 2. 4-5. 4.6. 19. 18,. 3- 9- inoh. ■ 6. I 27. 29. 7. 4-7- 18. 2. /r 1 28. 29. Il 4.8. «7. 8. 3» 6. 10. ^B j 29. 28. 6. 4.9. 17. ^ ^H r^f ne m V 422 ' Hiflolre NatuveHé AGE. ans. 50. 53- 54- 55- 56. 57- 58. 59- 60. 61. 62. 6î- 65. 66. 67- DURÉE DE LA VIE. années. 16. 16. '5- «5- 14.. 14.. '3- 12. 12. 1 1. 1 1. 10. 10. 9- 9- 8. 8. 7- mois 7- u 6. tf 6. /' 5- 10. 3- 8. I. 6. 6. 6. 6. ÂGE. ans. 68. 69. 70. 7'- 7^- 73- 74" 75- ^(^, 77' 78. 79» 80. 81. 82. 83. 85. DURÉE DE LA VIE. années. 7- 6. 6. 5- 5- 5- 4.. 4. 4.. 4. 3- 3- 3- 3- 3- 3 3- 3« mois. // 7- 2. 4. 9- 6. 3- I. 1 1. 9- 7- 5- 3- 2. I. On voit par cette Table , qu'on peut cfpérer raifonnablement , c'eft - à - dire ; ,*iç. v*.( de l'Homme, ' " 42 j' ferler un contre un qu'un enfant qui vient de naître ou qui a zéro d'âge, vivra huit ans y qu'un enfant qui a déjà vécu un an ou qui a un an d'âge , vivra encore trente- trois ans; qu'un enfant de deux ans ré- volus vivra encore trente-huit ans; qu'un homme de vingt ans révolus vivra encore trente-trois ans cinq mois; qu'un homme de trente ans vivra encore vingt-huit ans^ & ainfi de tous les autres âges. On obfèrvera i .* que i'âge auquel on peut efpérer une pîus longue durée de vie , eft l'âge de lept ans , puifqu'on peut parier un contre un qu'un enfant de cet âge vivra encore 42 ans 3 mois; 2.° qu'à i'âge de 1 2 ou i 3 ans on a vécu le quart de fa vie, puifqu'on ne peut légitime- ment efpérer que 3 8 ou 3 9 ans de plus, & de même qu'à i'âge de 28 ou 29 ans on a vécu ta moitié de (a vie, puifqu'on n'a plus que 28 ans à vivre, & enfin qu'avant 5 o ans on a vécu les trois quarts de (à vie , puifqu'on n'a plus que i 6 ou 17 ans à efpérer. Mais ces vérités phy- fiques fi mortifiantes en elles-mêmes peu« vent (c compenfer par des confidérations nioraies ^ un homme doit regarder comme Vij 424 Htjlotre Naturelle, &c, nulfes ies 1 5 premières années de fà vîe, tout ce qui iui eft arrivé , tout ce qui s efl pafTé dans ce iong intervalle de temps efl effacé de fa ^némoire, ou du moins a fi peu de rapport avec les objets & les chofès qui l'ont occupé depuis, qu'il ne ^'y intércfîè en aucune façon , ce n'eft pas ia même fuccelfion d'idées , ni , pour ainfi dire ia même vie ; nous ne com- mençons à vivre moralement que quand nous commençons à ordonner nos pen- fécs, à les tourner vers un certain avenir, ^ à prendre une cfpèce de conf^(\ance, pn état relatif à ce que nous dev^> nre dans ia fuite. En confidérant ia c " c de la t^ie fous ce point de vue qui eft le plus réel , nous trouverons dans la table qu'à l'âge de 2 5 ans on n'a vécu que le quart de fa yie, qu'à i*âge de 3 8 ans on n'en a vécu que ia moitié , & que ce n'eft qu'à l'âge de 56 ans qu'on a vécu les trois quarts de iâ vie. 1 4^- 5 HISTOIRE NATURELLE D E L*H O M M E. Du fens de la Vue. APRÈS avoir donné la del^cripiion J<5 difFércnies parties qui compofent le corps humain , examinons fes princi- paux organes , voyons le développe- ment & les fondions des fens , cherchons à reconnoître leur ufage dans tome Ton étendue , & marquons en même temps les erreurs auxquelles nous fommes, pour ainfi dire, affiiiettis par ia Nature, Les yeux paroiffênt être formés de fort bonne heure dans le fcetus , & font même , des parties doubles , celles qui paroiffent fe développer les pre- mières dans le petit poulet, & j'ai ob- fervé fur des œufs de plufieurs efpèces d'oifëaux , & fur des ceufs de lézards, que les yeux étoient beaucoup plus gros ta plus avancés dans leur développement Vii; 42 tf Hîfiotre Naturelle f]ue toutes les autres parties doubles de leur corps ; il eft vrai que dans les vi- vipares, & en particulier dans le foetus humain , ils ne font pas à beaucoup près auffi gros à proportion qu'ils le ibnt dans les embryons des ovipares, mais cependant ils font plus formés - 43^ f^lftoke Naturelle r fimpîe & dans le milieu , pnrce que nous avons redlific par le.fcns du toucher cette erreur de la vue. De même fi l'oii regarde des deux yeux deux objets qui foient à peu près dans la même dire(5lion par rapport à nous, en fix nt (es yeux lur le pie. nier, qui cft le plus voifin , on le verra Hmile , mui^ en même icm])S on verra douI)le celui qui ert le plus éloigné , il les voit feulemtii? plus gros ou plus petits, félon qu*ils s'approchent ou qu*»I$ s'éloignent de ies yeux ; une mouche 4J^ Hiptre Ndtuveïïê qui s'approche de fou œil doit îuî pa^ roîire un animal d'une grandeur énorme, un cheval ou un bœuf (jui en eft éloigné, lui paroît plus petit que la mouche^ ainfi j1 ne peut avoir par ce fens au- cune connoilljnce de la grandeur rela- tive des objets, parce qu ii n'a aucune idée de la difhuice à LKpellc il les voit; ce n'eft qu'après avoir mefuré la dif- tance en éiendant la main ou en tran[^ ponant fbn corps d'un lieu à un autre, qu'il peut acquérir ceite idée de fa dif- tance & de fa grandeur des objets; auparavant il ne connoît point du tout ceue diflance , & il ne peut juger de la grandeur d'un objet que par ceiie de l'image qu,'il forme dans fon œil. Dans ce cas le jugement de Li grandeur n*eft: produit que par l'ouverture de l'angle, formé par les deux rayons extrêmes de ia partie fupérieure & de la partie inr férieure de l'objet , par conféquent ii doit ji'ger grand tout ce qui eft près^ & petit tout ce qui eft loin de lui, mais après avoir acquis par le toucher ces idées de diftance , le jugement de b grandeur des objets comaieucc à ïk de l'Homme. " 437, rc^ificr, on ne fe fie plus à la première appréhenfion qui nous vient par les yeux pour juger de cette grandeur, ©n tâche de connoîire la diAance, on cher- che en même iem|)S à reconnoîire l'objet par fa forme , & cnfuitc on juge de ia grandeur. • , Il n'ell pas douteux que dans une file de virgt foldats , le premier, dont je fuppofe qu'on foit fort près , ne nous parût beaucoup plus grand que le dernier Ç\ nous en jugions feulement par les yeux , & fi par le toucher nous n'avions pas pris l'habitude de juger, également grand le même objet , ou des objets femblables, à différentes dif- tances. Nous iavons que le derr^'cr foldat elt un foldut comme le premier, dès-lar» nous le jugerons de la même grandeur, comme nous jugerions que le premier feroit toujours de la même grandeur quand il pafferoit de la têie à ia queue de la fife , & comme nous avons l'habi- tude de juger le même objet toujours également grand à toutes les diftunces ordinaires auxquelles nous pouvons en letoiinoître aifémcm la forme, nous iifi II .*vî , 438 Hijîoke Naturelle nous trompons jamais fur cette grandeur que quand la diflance devient trop grande, ou bien iorfque l'intervalle de cette dis- tance n'ed pas dans la diredion ordi- naire; car une diftance ceflè d'être ordi- naire pour nous toutes les fois qu'elle devient trop grande, ou bien qu'au lieu de ia inefurer horizontalement nous ia mefurons du haut en bas ou du bas en haut. Les premières idées de la compa- raifbn de grandeur entre les objets nous font venues en mefurant, foit avec la main , fort avec le corps en marchant , ia didance de ces objets relativement à nous & entr'eux; toutes ces expériences par lefquelles nous avons re c e- de ï Homme. 445' objets extrêmement gros, maïs à mefure qu'il voyoit des choies plus grofl'^s eu effet, il jugeoit les premières plus peiiies; il croyoit qu'il n'y avoit rien au-delà des limites de ce qu'il voyoit; il favoit bica que la charubre dans laquelle ii étoit , ne faifoit qu'une partie de la maifon , cependant il ne pouvoit concevoir com- ment la maifon pouvoit paroître plus grande que fa chambre. Avant qu'on lui eût fait l'opération , il n'efpéroit pas un grand piaifir du nouveau fens qu'on lui promettoit , & H n'étoit touché que de l'avantage qu'il auroit de pouvoir apprendre à lire & à écrire; ii difoit, par exemple, qu'il ne pouvoit pas avoir plus de plaifir à fe promener dans le jardin , iorfqu'il auroit ce (èns , qu'il en avoit , parce qu'il s'y promenoit iibrcment éc aifément, & qu'il en coimoifl!bit tous les différcns endroits ; il avoit même très-bien remarqué que fon état de cé- cité lui avoit donné un avantage fur les autres hommes , avantage qti'il confcrva long - temps après avoir obtenu le (cns de la vue, qui étoit d'aller la nuit plus aifément & plus fûrement que ceux qui 444 f^iflolre NaturelU voient. Mais iorfqu'il eut commence à fê fèrvir de ce nouveau fens , il étoit tranfporté de joie , il difoit que chaque nouvel objet étoit un délice nouveau , «Se que Ton plaifir étoit fi grand qu'il ne pouvoit i'cxprimer. Un an après on le mena à Epfom où ïa vue eft très-belle & très - étendue ; il parut enchanré de ce fpe<îlacle , & il appeioit ce payfagc une nouvelle façon de voir. On lui fit la même opération fur l'autre œil plus d'un an après ia première, & elle réu(Tit égale- ment ; il vit d'abord de ce fécond œil les objets beaucoup plus grandi qu'il ne les voyoitde l'autre , mais cependant pas aufli grands qu'il les a voit vus du premier œil, & lorfqu'il regardoit le même objet des deux yeux à la fois, il difoit que cet objet lui paroiffoit une fois plus grand qu'avec fon premier œil tout (èul ; mais il ne le voyoit pas double, ou du moins on ne put pas s'affrirer qu'il eût vu d'abord les objets doubles, lorfqu'on lui eut procuré i'ulàge de fon fécond œil. M. Chefeldcn rapporte quelques autres exemples d'aveugles qui ne le fouve- Eioient pas d'avoir jamais vu, & auxquels il 11 avoît i que lor: à voir, que le J4 parler , détail, j comme de faire temps c cmbarral mouverr objet er que peu temps qi yeux, <& defiroien Lorf ticulières idée ;ufl< . (P^ o. intéieirans Ouvrage qi Lettre fur L'Auteur très -fine ï de toutes fefprit d!ur àt ia vue. Terne ?■■: 'cle rHomme, 445 il avoît fait îa même opération, & il afTure ■•» . ♦ -14»*».* < ,-• •• j..'. f ^.. j ♦' i^ Tome IV. X ^^6 Hi/Io/re Naiurelle pouvons juger des objets que par la gran- deur dcTiinglc ou plutôt de l'image qu'ils forment dans nos yeux, nous nous trom- pons alors néceffairement fur la grandeur de ces objets ; tout le monde a éprouvé qu'en voyageant la nuit, on prend un buiflbn dont on eft près pour un grand arbre dont on ell loin, ou bien on jjrciid un grand arbre éloigné pour un buifîon qui elt voilin : de même fi on ne con- ïioît pas les objets par leur fo» me , (Se qu'on ne puiiFe avciir par ce moyen au- cune idée de diflance , on fe trompera encore nécciïairemcnt ; une mouche contioitre la forme de ces objets , pour juger de leur gfiindeur , mais iorfque nous connoifTofis cette forme , & qu'ea même temps nous voyons plufieurs ob» jets femblables & de cette même forme , nous jugeons que ceux (|ui font les plus éclairés lont les jilus voifins, & que ceux f{ui nous paroifîcni les plus obfcurs font les plus éloignés , «Si ce jugement produit quelqueroii des erreurs & dca apparences iingulièrcs. Dans une file d'objeis difpo- fes lur une ligne droite , comme le font, par exemple, les lanternes fur le chemin de Verfailles en arrivant à Paris, de la proximité ou de l'éloignement defquelles nous ne pouvons juger que par le plus ou le moins de lumière cju'cllcs envo.ent il notre œil, il arrive fouvent que loa voit tou:es ces ian ernes à droite au lieu de les voir à gauche où elles font réel- lement, ioriqu'on les regarde de loin comme d'un demi - quart de lieue. Ce changement de fituation de gauche à droite el\ une apparence trompeu(è , & qui efl produite par la caufe que nous X iij ^450 H i flaire Ndt tir elle "venons d'indiquer ; car comme îe fpciîla- teiir n'a aucun autre indice de ia diftance où il cft de ces lanternes que la quamiië de lumière qu'elles lui envoient., ii juge que la plus brillante de ces lumières ell ia première & celle de laquelle il eft le plus voifin : or s'H arrive que les pre- mières lanternes foicnt plus obfcures, ou ièulement fi dans la file*de ces lumières ji i'en trouve une feule qui foit plus bril- lante ^ \ :\ \ ^ ^9.^ 23 WEST MAIN STREET WEBSTER, N. Y. 14580 (716) 872-4503 * % ^ & '462 Hîjlotre Naîttrelk par le trop grand renflement des humeurs réfringentes de l'œil ; mais cette caulë n'efl: pas unique, & Ton a vu dts per- fbnnes devenir tout d*un coup myopes -par accident, comme le jeune homtne dont parle M. Smith dans Ton Optique, 'Tbme II, page 1 0 des notes, qui devint myope tout- à-coup en fortant d'un bain froid , dans lequel cependant il ne s'étoit pas entièrement plongé , & depuis ce temps- là il fut obligé de fe icrvir d'un verre concave. On ne dira pas que fc criflallin & l'humeur vitrée aient pu tout d'un couple renfler afTez pour pro- duire cette différence dans la vifion , & quand même on voudroit le fuppofcr , comment conccvra-t-on que ce renfle- ment confîdérable , & qui a été produit en un înftant, ait pu fe con fer ver tou- jours au même point î En effet, la vue courte peut provenir aufli - bien de la pofition refpe<5live des parties de l'œil & îur-tout de la rétine, que de la forme des humeurs réfringentes, elle peut provenir d'un degré moindre de fenfibilité dans ■la rétine, d'une ouverture moindre dans la pupille; &€. mm il eit vrai que pour ^ ces deux dernières efpèces de vues courtes , les verres concaves feront inu- tiles , & même nuifibles. Ceux qui font dans les deux preiniers cas peuvent s'en fêrvir utilement , mais îamais ils ne pour- ront voir avec le verre concave qui leur convient fc mieux , les objets auffi' dif- tin(^ement ni d'aufli loin que les autres hommes les voient avec les yeux feuls , parce que, comme nous venons de le dire, tous les gens qui ont la vue courte» voient les objets plus petits que les autres ; & lorfqu'ils font ulâge du verre concave , l'image de l'objet diminuant encore, ils celTeront de voir dès que cette image deviendra trop petite pour faire une trace fenfible fur la rétine , par conféquent ils ne verront jamais d'aufli loin avec ce verre que les autres hommes voient avec les yeux feuls. Les enfans ayant les yeux plus petits que les perfonnes adultes, doivent auni voir les objets plus petits , parce que le plus grand angle que puifîè faire un objet dans l'œil, eft proportionné à la grandeur du fond de J'œil , & fi Ton fuppofe que 'ie tableau eniier des objets qui fe peignent 4^4 Hîfîoke NaiureÏÏé fur la rétine, cft d'un demi- pouce pour les adulies, il ne fera que d'un tiers ou d'un quart de pouce pour les-enfans, par conféquent ils ne verront pas non plus dauin loin que les adultes, puifque les objets ieur paroiflant plus petits » ils doivent nécefl'airementdifparonre plus tôt; mais comme la pupille des enfans eil or- dinairement plus large à proportion du lefte de l'œil, que la pupille des per- fonnes adultes, cela .peut compenfer en partie l'effet que produit la petiteire de leurs yeux, 6c leur faire apercevoir les ©bjets d'un peu plus loin j cependaiu il s'en faut bien que la compenfiuion foit com- plète, car on voit pnr exj)érience que les enfans ne lifent pas de ^\ loin , & ne .peuvent pas apercevoir les objets éloignt's ^d'auiïi loin que tes per(bnne9 adultes. La cornée étant très-flexible à cet âge, prend .irès-aifcmemla convexité néceflàire pour voir de plus près ou de plus loin, 6c ne peut par conféquent être la caufe de leur vue plus courte , & il me paroît qu'elle dépend uniquememdç <^ q^i^ leurs yeux ibnt plus pc • '\ \ ' ^ î .. ':' .,^^1.1 |i!dV^oac pas douteux que fj 'Je T Homme: 4^5 toutes les parties de i*oeil fouffroient en même temps une diminution propor- tionnelle ) par exemple, de moitié, on ne vît tous les objets une fois plus petits ; ies vieillards dont les yeux, dit -on, fe deisèchent, devroient avoir la vue plus courte, cependant c*eft tout le contraire , ils voient de plus loin & ceflent de voir diftinélcment de près : cette vue plus lon- gue ne provient donc pas uniquement de la diminution ou de raplatiHement des humeurs de Tœil, mais plutôt d'un changement de pofiiion entre les parties de i œil , comme entre la corne'e & le criftaliin , ou bien entre Thumeur vitrée & la rétine ; ce qu'on peut entendre aifément en fuppofant que la cornée de- vienne plus folide, à mefure qu'on avance en âge, car alors elle ne pourra pas prêter aufn aifément, ni prendre la plus grande convexité qui eft néceffaire pour voir les objets qui font près, & elle (c fera un peuaplatieen (èdeflechant avec Tâge , ce qui fuffit feul pour qu'on puiïïè voir de plus loin les objets éloignés. On doit diAinguer dans la vifîon deux qualités qu'on regarde ordinairemeai. ^'^6 Hipolre Naturelle comme la même ; on confond mal-à-pro- pos la vue claire avec ia vue diftindc, quoique réellement l'une (bit bien diffé- rente de l'autre; on voit clairement un objet toutes les fois qu'il eft affez éclairé pour qu'on puiiïe le reconnoîire en gé- néral, on ne ic voit diftin4^ }m l5ocTic ou un thiibre de pendule, un fcul coup produit d'abord un fun qui fe ré- pète enfuit^ par les ondulations du corps Ibnore & fc rauinplie rceiiement autant de fois qu'il y a d'ofciiiations ou d« vibrations dans le corps fonorc. Nous devrions donc juger ces fons , non pas coii)4iie iîmrplcs, mais 'comme compo- fés , fi par l'habitude nous n'avions pas appris à juger qu'un coup ne produit qu'un Ton. Je dois rapporter ici une chofc qui Hi 'arriva il y a trois ans : j'étois dans mort lit ;i dertii- endormi , ma pendule fonna & je comptai cinq heures, c'eil-à- dire, j'entendis diftinôement cinq coups de maricau fur le timbre, je me levai fur k champ , A ayant approche la lu- mière, je vis qu'il n'éioii qu'une heure, <& la pendule n'a voit en effet fonné qu'une heure, car la fonnerie n'étoit point dé- rangée: je conclus après un moment de réflexion, que Ç\ l'on ne (âvoit pas par expérience qu*un coup ne doit produire qu'un (on , chaque vibrîition du timbre feroit entendue comme un différent fon, & comme Çi plufieurs coups (c fuccé*» doicAt réellemem fur le corps fonorc 47-*^ Hiflolre Naturtlle Dans »fe moment que j'entendis (bnn^ ma pendule, j'étois dans Je cas où (èroit quelqu'un qui emendroit pour la pre- mière fois, & qui n'ayant .aucune idée de la manière dont fe produit le Ton, ju^eroLt de la fuccefïion des différens ions fans préjugé, audi-hien que iaiu régie, & par la feule imprefljon qu'ils font fur l'organe, & dans ce cas il en- tendroit en etfèt autant de fors, diflint^ qu'il .y a de vibrations fucceflives dans le corps fonore. .on i n C'eA la fucccHion^de tous ces pep^s coups répétés , ou , ce qui revient au même, c'efl le nombre des vibrations dp corps. élaAique qui fait le ton.du.fpn» 9 n'y a point de ton dans yn fon.fimplc, un coup de fufil,.un coup.de fouet, un coup de canon prodjuifçnt des Ions différens qui cependant n'ont aucun ton, il en e(l de même de.tous les autres fpns qui ne durent qu'un inftant. Le ton confiée donc dans la continuité du mcme fon pendant un certain temps ;cett^ con- tinuité de fon peut êtfe opérée de deux manières différentes, la première & la plus ordinaire fil la.fucççffion des vibrations * Jle ï Homme, 47 jl Jans Tes corps élaftiques & fonorcs , d'un à quatre , &c. & de tous les rapports compris entre le fimple & le double, ceux que nous aper- cevons le plus aifément , font ceux de deux contre un, de trois contre deux,, de quatre contre trois, &c. ainfi nous ne pouvons pas manquer en jugeant les fons, de trouver que Todave cft le fon que convient ou qui s'accorde le mieux avec le prejner , & qu'enfuite ce (|ui s'ac- corde le mieux eft. la quinte & la quarte, p-irce que ces tons font en effet dans çitiwe proporiioa i car fuppofons que, le» ^ Y parties ofTeufes dé i'îmcifieuti àei oreilles; r©lent \t?, corps durs & incapables de vibrations, qui reçoivent les coups frap- pK?s par ces malîes égales, nous rappor- terons beaucoup mieux à une cenaine. Unité de fo^n produit par une de cc^ inafTes , les iautres foiis qui- feront prb-^ duits par dés 'mafîeçS. dont *l»s rapports- f«ront à la premit-re 'mafTe coimme i à £, du 2 à 3 , ou 3 a 4J parce que ce font en cfFei les rcipporis que l'ame aperçoit- le plus ailéjnent. En confidérant donc le Ion comme fenfaiion, on peut donner là raifoû du plaifir que jfont Ses (bns har-» inoniques ,, il con fille dans ia propor» tfon du Ion fondamcntiil aux autres fons,. fi ces autres Ions mefurent exadlement de par grandes parties le fon fondamental, ils feront toujours harmoniques & agré- ables; (i au contraire ife font incommen- Airabfesou feulement commBnfurables par petites pariics , ils feront difcordans de défigréab'es. On pourroit me dire qu'on ne conçoit pas trop comment une proportion peut caufer du plaifir, & qu'on ne voit pas pourquoi tei riapport>. parct' qu'il eit ife t* Homme, éjy les nerfs fêuls font capables d'en produire la fenfation. Or dans l'orgaie de l'ouïe la feule partie qui Ibit nerf, ell cette portioa de la lame fpirale, tout le refle eiV f)liu'e^ ^ c'eft par ceue roifou que je iàif^ ■iil I i h' 4*^' Hijbtrt Natmïïè confifter clans cette partie Torgahe Ttnm^ diat du (on, on, peut tiiéme le prouver par les réflexions fui vantes. L'oreille extérieure n'eft cfu*un accef> ibire à i*oreiile ime'rieure, (a concavité , iès plis peuvent lêrvir à augmenter la quaiMité du fon y mais on entend encore fort bien fans oreilles extérieures , on le Toit par les aniinaux auxquels on les a coupées; la membrane du tyiBpan, qui cil entité la partie la plus extérieure de cet organe, n efl pas plus effi^ntielle que l'orerilè exiérievire à la filiation du Ton; tt y a des perlèfines dans lelquelles cette membrane e(l détruite en tout ou. iCn partie, qui nelaifFentrpas d'entendre fort fliftintSlcmcni : on voit des gews qui font palTèf de lai»>uche dans l^;oreiile, & font iomx au dehors de ib fumée idu i ta bac ^ ëes tordons de foie, dies lames ée plomb, &c. & iqoi eependBh de i'ou'i^e, ît^ed arrivé plus d'une foli* 4^ ces ^ITeleis iê ibm cariés eu ioal après de qui n'av pas d'en orTclets ièaux ;, fine & eulaires eé font dans l'o à dirige ^fqu'à I fiir laqi produdl Une dans la peut ex plus de membrs elle au g avance fblide < a'ofTifîe qii'alorj 6ble da la'^iifa ^MiUlitd ■renié (ôrtb »/ ;vttAt (le cette canfc eft mcuiabieL| um^ 484 Hiflùlre Natmlle elle peut aufîi quelriuefois Venfr d'une caufe plus extérieure ; ie canal audiiif peut fê trouver rempli & bouché par des matières épaifles, dans ce cas il me femble qu'on pourroit guérir lu difdité, foit en (êringuant des liqueurs ou en intro- duifant même des inllrumens dans ce \ canal ; & il y a* un moyen fort (impie pour reconnoître Çi la furdité e(l inté* rieure ou ù elle n'eft qu'extérieure , c'eft- ■à-dire, pour reconnoître ii la lame fpi- raie e(l en efïèt infènfîbie , ou bien fi o'efl la partie extérieure^ du canal auditif qui efl bouchée, il ne faut pour cela- que prendre' une peiite montre à ré- pétition , ia- mettre dans la bouche du fburd & la faire Tonner , s'il entend ce ibn , (à furJité fera certaine^nem caufce p»r un emf>arras extérieur aiiquel il efl tOtiioufs poffible de remédier en partie, f, J^ai aufîi remarqué fur piufieurs per- (bnnes q4.ii avoient l-'orpitie & U voix fauf- (ês , qu'elles entend<)icnt mieux d'une oreille que d'une autre; on |)eut fe fou- ven'r de ce que j'ar dit au fujei des yeux ieucnes, la caulè de ce déf;iut efl i'iaé- galité de force ou de portée diuis: i€^ yeux; 1 d'auff] qu'avec faire qu qui ont j'ai iroi oreille vent de deux fe rale des ndigns, il jie parut pas avoir «< jpouflé fcs penfçcs jufquc - là ; quoi- <^ qu'il fût né de parens catholiques , qu'il ee afliflât à la MefTe. qu'il fût inftruit à «e faire le figne de la croix & à fe mettre ce à genoux dans fa contenance d'un «c homme qui prie ^ ii n'avoit jamais 3 tement ce que c'étoit que la mort , & K) ii n'y pcnfoit jamais, il mcnoit une vie » purement animale ; tout occupé des ï> objets feiifibles & préfêns, & du peu » d'idées qu'il recevoit par les yeux , il >5 ne liroit pas même de la comparai Ton >3 de ces idées tout ce qu'il (cmble qu'il » en auroit pu tirer ; ce n'cft pas qu'il » n'eût naturellement de l'cfprit , mais X» rcfprit d'un homme privé du commerce » des autres eft fi peu exercé & fi peu >3 cultivé, qu'il ne penie qu'autant qu'il » y eft indifpcnlâbiement forcé par les » objets extérieurs ; le plus grand fond » des idées des hommes eft dans leur commerce réciproque. » Il fcrolt cependant très-pofîibîe de communiquer aux fourds ces idées qui leur manquent, âc même de leur donner des nouons exades & préci(es des chofes abftraites & générales par des fîgnes & par l'écriture ; un fourd de naiffance pourroit avec le temps & des fecours afli- dus lire & comprendre tout ce qui fcroit "-^é» l'Homme;^ 49 p l?cr't, & par conféquent écrire îuî-même & fc faire entendre fur ies chofes même les plus compliquées; il y en a, dit-on, dont on a fuivi l'éducaiion avec aflez de foin pour les amener à un point plus dif- ficile encore qui eft de comprendre le fcns des paroles par le mouvement des lèvres de ceux qui les prononcent, rien n« prouveroit mieux combien les fcns fc reffcmblcnt au fond , & jufqu'à quel point ils peuvent fe fuppléer; cependant il me paroît que comme la plus grande partie des fons fe forment & s'articuïent au dedans de ia bouche par des mou- vcmens de la langue, qu'on n'aperçoit pas dans un homme qui parle à la ma- nière ordinaire , un fourd & muet ne pourroit connoître de cette façon <|uc le petit nombre des fyllabes qui font en effet ardculces par ie mouvement des lèvres. Nous pouvons citer à ce fujet un fait tout nouveau , duquel nous venons d'être témoins. M. Rodrigue Percire, Portugais , ayant cherché ies moyens ies plus faciles pour faire parler les fourds & wue;s de naiflàncc , s'cft exerce aflcs II 49^ Hifi^lre Natunlk long-: temps dans cet art iingulierpour 1« porter à un grand point de perfèÂion ; ii m amena. it y a, environ quinze jours fo^ ^ièvc, M. d'Azy d'Étavjgny, ce jeune homme , fourd Su muet de naiflance , eft âgé d'environ 19 ans; M. Pçreire entre- prit de iui apprendre a parler, à lire, &c. ^u mois de juillet 174^; au bout de quatre mois, il prononçoit déjà des fylr- labes &. des mots, & après dix mois il avoit 4'intelligence d'environ treize cents mots, .& ii Jes prononçoit tou5 a^çz diClinde- ment. Cette éducation (1 heureuièment xom.qiencée ^ fiu interrompue pendant neuf mois par l'àbfènce du maître, & U Xie reprit fon éièye qu'au mois de février 174.8 ; il le retrouva bien moins inflruit qu'il ne Favoît laiffc ; fa prononciation ëtoit devenue très-vicieu(è, & la plupj»rt des mots qu'il avoit appris, étoient déjà ibrtis de fà mémoire , parce qu'il ne s'ep c'toit pas (ervi pendant un adèzjong- temps .pour qu'ils eu/Tent fait des ifnpreffîor^ durables Sa permaiienies. M. Pereire com- mença donc ài'inftruire, pour ainfi dire, de nouveau au mois de février 1748, ^ depuis ce temps -là U i^e l'a pas quiué julqu'à i'une on fui H y a 1 ture q pronoj rude, tremen talion ( organe & bier fourd f DE y H O M M E. Des Sens en général. LE corps animal eft compofé de pîu- fieurs matières différentes , dont les unes , comme les os , la graiffe , le fang , !a lymphe, &c. font infenfibles, & dont les autres, comme les membranes & les nerfs , paroiffent être des matières actives defquelies dépendent ie jeu de toutes les Î parties & l'adion de tous les membres , es nerfs fur-tout font l'organe immédiat du fentiment qui fc diverfitie & change , peur ainfi dire, de nature fuivant leur différente difpofition , en forte que félon kur pofition , leur arrangement, leur *êe r Homme, J^^f qualité , iTs tranfmettent à l*anie des cf- pèccs difFérentes de fèntîmcnt , qu'on a diftinguces par le nom de fenfation , qui femblent en effet n'avoir rien de fem- biablc entr'elies. Cependant fi l'on fait atîeniion que tous ces fcns externes ont un fu/et commun, & qu'ils ne font tous que des membranes nerveufcs différemment difpofées & placées; que les nerfs font l'organe général du (èntiment , que dans _ le corps animal nulle autre maiièrc que les nerfs n'a cette propriété de produire ie fentiraent , on fera porté à croire que ics (èns ayant tous un principe commun , ' & n'étant que des formes variées de la même fubftance , n'étant en un mot que des nerfs différemment ordonnés & dif- " pofés , les fênfations qui en réfulient ne font pas aufïi ^ffeniiellemeht différentes entre elles qu'elfes ie paroiffent. J L'œil doit être regardé comme une ' cxpanfion du nerf optique , ou plutôt ' l'œil lui-même n'eft cjue i'é^ anouificment ' d'un faifceau de nerfs , qui étant expofé à l'extérieur plus qu'aucun autre nerf, efl auffi celui qui a le (cntiment le plus yif & le plus délicat \ il fera donc ébranlé * Zi; ^ ji^i^d H'ifloire Naturelle par les plus petites parties de fa matière , teifcs que font celles de la lumière , & il nous donnera par confëquent une ftn- iiition de toutes les fubOanccs les plus éloignées , pourvu qu'elles foient capa- JjIcs de produire ou de réfléchir ces petites particules de matière. JL'orcillc qui n*efl pas un orgape au (fi extérieur que l'œil , & dans lequel il n'y a pas un auffi grand épanouiflement de nerfs , n'aura pas le même degré de fenfibiliié & ne pourra pas être affedce ))ar d^s parties de matière auffi petites que celles de la lumière , mais elle le fera par des parties plus grofles qui font celles qui forment le Ton, & nous donnera encore une (ènlaiion des chofo éloignées qui pourront mettre en mouvement ces par- ties de m^ntière ; comme elles font beau- coup plus grofles que celles de ia lumière, & qu'elles ont moins de vîtefle , elles ne pourront s'étendre qu'à de pentes dif- tances, & par conféqucnt l'oreille ne nous donnera ia fenflition que de chofès beaucoup moins éloignées que celles dont l'œil nous donne la fenfation. La snerpbranc qui eft le fiégc de l'odorat '7 ^tant encore moins fournie de nerfs que celle qui fait le fiégc de l'ouïe, clic ne nous donnera la fcnfaiion f{ue des parties de matière qui font plus groffes & moins tioignces , telles que font les particules odorantes des corps, qui font probable- ment celles de l'huile effentielle qui s'en exhaie & fumage, pour ainfi dire, dans i'air , comme les corps légers nagent dans i'eau ; & comme les nerfs font encore en moindre quantité, & qu'ils font plus divifés fur le palais & fur la langue, les particuïcs odorantes ne font pas anez"" fortes -"^pour ébranler cet organe, il faut que ces parties huileufes ou falines fc détachent des autres corps & s'arrêtent fur la langue pour produire une fenfation qu'on appelle le goût, & qui diffère prin- cipalement de l'odorat , parce que ce dernier fens nous donne la fenfation des chofes à une certaine diftnncc, <5c que le goût ne peut nous la donner que par une cfpèce de contaél qui s'opère au moyen de la fonte de certaines parties de matière , telles que les fels , les huiles, &c. Enfin comme les nerfs font les plus divifés qu'i! cft poflible , & qu'ils font très-légèrcmcnt JL 11/ ^ i m! -, 11! !4j8 Bfioire Naturelle ^ parfbmës dans la peau , aucune partie auffi petite que celles qui forment la lumière ou les fons , les odeurs ou les faveurs , ne pourra les ébranler ni les affeder d'une manière fcnfiblc , <5c il faudra de très-grofTes parties de matière, c'efl- à-dire , des corps folides pour qu'ils puifTent en être affedés : aulîi le fens du toucher ne nous donne aucune fenfation des choies éloignées , mais feulement de celles dont le contaél eft immédiat. 4 II me paroît donc que la dific'rence qui eft entre nos fens ne vient que de la pofition plus ou moins extérieure des nerfs , & de leur quantité plus ou moins grande dans les différentes parties qui conftituent les organes. C'eft par cette raifon qu'un nerf ébranle' par un coup ou découvert par une bleflTurc , nous donne fou vent la fènflition de la lumière , fans que l'œil y ait part , comme on a fou vent auffi par la même caufe des tintemens <5c des fenfations de fons, quoique l'oreille ne (bit affectée par rien d'extérieur. Lorfque les petites particules de fa matière lumincufe ou fonure fe trouvent réunies en très -grande quantité, cll«i Je l'Homme) 499 forment une efpcce de corps fcjlicle qui produit différentes eipcccs c!e leniaiions , icfquclles ne paroifTerit avoir aucun rap- port avec les premières , car toutes les fois que les parties qui comporeiu ia lumière , font en très-grande quantité, alors elles affeétent non - feulement les yeux, mais aufîî toutes les parties nerveufes de la peau , & elles produifent dans i'ocil la lènfatioa de la lumière , & dans le rcfte du corps la fenfaiion de la chaleur , qui eft une autre cfpèce de fentiment différent du premier, quoiqu'il foit produit par la même caufe. La chaleur n'efl donc que le toucher de la lumière qui agit comme corps folide ou comme une maffc de matière en mouve- ment; on reconnoît évidemment l'aétion de cette mafle en mouvement iorfqu'on expofe des matières légères au foyer d'un bon miroir ardent, l'adion de la lumière réunie leur communique, avant même que de les échauffer , un mouvement qui les pouife & les déplace ; la chaleur agit donc comme agifîent les corps foiides iur les autres corps , puifqu'elle efl capable de les déplacer en leur communiquant un mouvement d'impulfion. •^» Z. 117 yi.. fjôo "Hifloire Natnrefle " De nicmc lorfquc les parties fonottS ic irouvcnt réunies en très-grande quan- tité, elles procluifent une fccouflc & un ébranlement très-icnfibles , & cet ébran- lement cil fort diffeient de i'adion du fon lur roreille ; une violente cxplofion , lin grand coup de tonnerre , ébranle les mailons , nous frappe Ôc communique une cfjiècc de tremblement à tous les corps voifinsy le fon agit donc aufli comme corps folide fur les autres corps , car ce n'elt pas l'agitation de l'air qui caufc cet ébr:!nlement , puifque dans le temps qu'ii fe fuit on ne remarque pas our que nous puiHions la làifir ik la toucher par différens côtés. i\ la fois; c'elt ce (|ui fait auifi que les Fluides font licjuides : les particules (jui les conipolent , ne ]:)eu- vent être touchées par les particules voi- fnies que dans un jK")int ou un fi petit nombre de points , qu'aucuric partie jic peut avoir d'adhérence avec une autre partie. Les corps folides réduits en pou- dre, mêaie impalpable, ac perdent pas Z y lit '50 2 Hijîoire Naturelk abiolr.mcnt leur folicliiti , parce que îes parties le louchant par pltifieurs côicî , coiifervent de radhércnce entre elles , & c'ell ce qui fiiii qu'on en peut faire dcii niafîes & les ferrer pour en palper une grande quantité à îa fois. Le fens du toucher eft répandu dans le corps entier , mais il s'exerce diffé- remment dans les différentes parties. Le le.uiment qui réfuiic du toucher , ne peut être excité c[ue par le contact & l'appli- cation immédiate de la fuperficie de quelque corps étranger fur celle de notre propre corps ; c|u'on ap})lique contre la poitrine ou fur les épaules d'un homme un corps étranger, il le fentira, c'eft-à- dire, il iaura qu'il y a un corps étranger qui le touche , mais il n'aura awcune idée de Li forme de ce corps , parce que la poitL'ine ou ks ép.iulés ne touchant le corpts que dans un k*ul pkiii, il ne pourra en l'éfulicr aucune connoiffance de la figure de ce corps ; il en efl de même de toiites les autres parties di* corps qui ne peuvent pas s'ajuiler fur la furface des corpi étrangers , & fe pliei^ pour em- jbrafîèr à b tois plufieurs parties de leur \^{ie r Homme*' 5-03' fupcrficîe , ces parties de notre corps ne peuvent donc nous donner aucune idée julte de leur forme ; mais celles qui , comme la main , font divifées en pluficurs petites parties flexibles & mobiles , & qui peuvent ])ar conféquent s'appliquer en même temps fur les diffcrens plans de la fuperficie des corps , font celles qui nous donnent en effet les idées de leur forme & de leur grandeur. Ce n'eft donc pas uniquement parce qu'il y a une plus grande quantité de houppes î^erveufes à l'extrémité des doigts que dans les autres parties du corps , ce n'eft pis , comme on le j^rétend vulgaire- ment , parce que la main a le fen timent plus délicat , qu clic e(t en effet le prin- cipal organe du toucher , on pourroit dire au contraire qu'il y a des parties plus fcnfibles & dont le toucher eit plus délicat , comme les yeux , la langue , &c. mais cell uniquement parce que la main cft divifce en plufieurs parties toutes mo- biles , toutes Hexibles , toutes ngifluintcs eru' même tem.ps & obéiffantes à la volonté, qu'elle cil le feul organe qui jious donne des idées diftiniks de b forme des corps ', Z v| 1504 'Hijloire Naturelle le toucher, n'efl qu'un contadt de fuper- ficie ; cju'on fuppute la fuperficie de ia main & des cinq doigts , on la irouvera plus grande à proponion que celle de toute autre partie du corps , parce qu'ii n'y en a aucune qui foit autant divifee ; iiinfi elle a d'abord l'avantage de pouvoir prcfenter aux corps étrangers plus de îiiperfiçiç , çnfuitc les doigts peuvent s'é- tendre, fe raccourcir, fe plier, fc féparei*, it joindre &l s'ajufter à toutes fortes de iurfaces; autre avantage qui iuffiroit pour rendre cette partie l'organe de ce ienti- ment exael & précis qui eft néceflairc pour nous donner l'idée de la forme dts corps. Si la main avoit encore un pins grand nombre de parties , qu'elle lût par exemple , divifee en vingt doigis , que ces doigts cufleiu un plus grand nombre d'articulations & de mouveiiiens j, il n'eu pas douteux que le fentiinent du toucher ne fûtx infiniment plus p;]rrait dans cette conformation , qu'ii ne i'eftj parce que cette main pourroit alors s'ap- pliquer beaucoup plus immédiatement &: plus précifément fur les dilTcrentes ibr- îàces des corps; & fi nous fuppofiuna ': '^e Womwè: '505 Qu'elle fut divifcc en une infinité de parties toutes mobiles & flexibles, ik qui puflent toutes s'appliquer en inétne temps fuï tous les points de la (urface àei, cor[)S , un pareil organe feroit une cipèce de géométrie univerfelle ( fi je puis m'ex- prinier ainfi), par le lecours de laquelle nous aurions dans le moment même de l'attouchcinent , des idées exadcs & pré- ci(es de la figure de tous les corps , 6c de ia différence , même infiniment petite, de ces figures : fi au contraire ki main étoit f?ins doigts, elle ne pourroit nous donner cjue des notions très-imparfiiies de la foi me des choies les plus palpables , ôi nous n'aurions qu'une connoiffance très - confufe des objets qui nous envi- ronnent , ou dti moins il nous faudroit beaucoup plus d'expériences & de temps poirr les acquérir. Les animaux qui ont des mains pa-' roiflcnt être les plus fpirituels : les fingcs font des choies fi (emblables aux allions mécaniques de l'homme , qu'il femble lu e lies de fenfai aient ions pou . /v r cau.e la même Çu lie ;iles corporelles : tous les autres les animaux qui iont pnvei de cet orguic M ^^o6 ITtjIoke Naturelle ne peuvent avoir aucune connoîfïïincc allez d'ftinvfle de la forme des choies ;. comme ils ne peuvent rien laifir &* qu'ils n'ont aucune partie aflcz divifée ôi aiïcz iîexible pour pouvoir s'ajufter fur ia fuperfîcie des corps , ils n'ont certaine- ment aucune notion précife de la forme non plus que de la grandeur de ces corps , c'efl pour cela qtic nous les voyons fouvent incertains ou effrayes à l'afped: des chofcs qu'ils devroient le mieux connoître , & qui leur font les plus familières. Le principal organe de îcur toucher eft dans leur mufeau , parce que cette partie eft divifée en deux par ia bouche , & que ia langue ci\ u*ne autre partie qui leur fert en même temps pour toucher les corps qu'on leur voit tourner & retourner avant que de les faifir avec les dents: on peut aufTi conjedurer que les animaux qui, comme les sèches, les polypes & d'autres infedes , oiat un grand nombre de bras ou de pattes qu'ils peu- vent réunir & joindre , & avec lefquels ils peuvent faifir par diffèrens endroits les corps étrangers; que ces animaux, clià- je, ont de l'avantage fur les autres, & qu'ils c mieux Lfîs p( d'écaill doiven les ani aucune corps , ies em du (en fentim( vent f( tous le d'extrc des pai jambei moins autres llupid( quoiqi qu'ils &: éca leur c< étrang en qu coup poiÛb de r Homme:. ^ôj qu'ils connoifTcnt & ehoifiiîcnt beaucoup mieux les choies qui leur conviennent. Les poiflbns dont le corps ell couvert d'ecailles & qui ne peuvent fe plier , doivent être les plus ikipidcs de tous les animaux , car ils ne peuvent avoir aucune connoiflance de la forme des corps , puifqu'ils n'ont aucun moyen de ies embrafîer , & d'ailleurs rimprelîion du feniimcnt doit être très - foible & le fentimem fort obtus , puifqu'ils ne peu- vent feniir qu'à travers les écailles; aind tous les animaux dont le corps n'a point d'extrémités fju'on puifle regarder comme des parties divifécs ,. telles que ies bras , les jambes, les pattes^ &c. auront beaucoup moins de fentiment par lé toucher que les autres : les (crpens font cependant moins- ftupides que les poifTons , parce que, quoiqu'i'ls n'aient point d'extrémités , & qu'ils foient recouverts d'une peau dure & écaiileule , ils ont la faculté de pliei: leur corps en piufieurs fens fur les corps étrangers , êi par conféquent de les faifir en quelque façon & de les toucher beau- coup mieux que ne peuvent le faire les poiiîbns dom le corps iie peut fe plier* •508 Hifloke Naturelle Les deux grands obftacles à i'exercîctf du fens du toucher , font donc premiè- rement l'uniformité de la forme du corps de l'animal , ou , ce qui cft la même chofe , fe défaut de pariies différentej^r, divifées & flexibles ; & fecondement le revêtement de la peau, foit par du poil, de la piume , des écailles , des taies , des coquilles , &c. plus ce revêtement fera dur & fol de , & moins le feniiment du toucher pourra s'exercer, plus au con- traire la j)eau fera fine & déliée, & plus le fentiment fera vif <& exquis. Les femmes ont entre autres avantages fur les hommes , celui d'avoir la peau plus belle & le toucher plus délicat. Le foetus dans le fein de !a mère a la peau très- délice , il doit donc feniir vive- ment toutes les imprefîions extérieures , mais comme il nage d.ns une liqueur, & que les liquides reçoivent & romj)cnt: i'adion de toutes les caufes qui peuvent occalîonner des chocs, il ne peut être blelTé que rarement & feulement par des COU] 3 ou des e/Torts très • vioiens ; il a donc fo/i peu d'exercice de cette partie ir.cme du toucher, qui ne déptad 'de r Homme, 500 que de ïa finciïe de la peau & qui tfl commune à tout ie corps ; comme il ne ï'âi aucun ufage de fcs mains, il ne peut avoir de fenfaiions ni acquérir aucune connoiffance dans le fein de {a mère, à moins qu'on ne veuille fuppoicr qu'il peut toucher avec Tes mains différentes pariîcs de Ton corps , comme Ton vifage, ia poitrine, Tes genoux; car on trouve fou vent les mains du foetus ouvertes ou fermées, appliquées contre fon vidage. ' Dans l'enfant nouveau - né les mains reftent aufll inutiles que clans le fœtus , parce qu'on ne lui donne la liberté de s'qw fervir qu'au bout de ilx ou^ fept ftmaines , les bras font cmmailloités avec tout le refle du corps jufqu'à ce terme, & je ne fais pourquoi cette manière ell en ufage. II eft certain qu'<3n retarde par-là ie développement de ce fens imj:)ortant, duquel toutes nos connoifiancei dépen- dent , <îk qu'on feroit bien de iaifier à i'cnfant le libre ufage de les mains dès îe moment de fa nailfancc , il acquerroit plus tôt les premières nodons de la forme des chofes , 6c ([ui fait jufqu'à quel point :es premièreâ idées inlluent (\xï iea '5 I O Hiflvire Naturelle autres î un homme n'a peut-être beaucotip plus d'efprit qu'un autre que pour avoir fait dans fà première enfance un p!us grand & un plus prompt ufage de ce iens ; dès que les cnfans ont la liberté de fe fervir de leurs mains , ils ne tardent pas à en faire un grand ufage ; Hs cherchent à toucher tout ce qu'on leur prcfenic ; on ics voit s'amufer & prendre plaifir à manier les chofes que leur petiie main peut faifir , il fènible qu'ils cherchent à connoître la forme des corps en les louchant de tous côtes & pendant un temps confidérable \ ils s'amufènt ainfi , ou plutôt ifs s'inftrui- fent de chofes nouvelles. Nous- mêmes, dans le reAe de la vie , (î nous y faifons re'flexion , nous amufons - nous autre- ment qu'en fàifant ou en cherchant à faire quelque chofc de nouveau l C'eft par le toucher feul que nous pou- vons acquérir des connoifTances com- plètes & réelles , c'eft ce fens qui redlifie tous les autres fens doRt les effets ne feroient que des illu fions & ne produi- roient que des erreurs dans notre efprit , il le toucher ne nous apprenoit à juger, Miiis commeat iè fait le développement de T Homme, 5ïîl s 1 de ce fcns important î comment nos pre- mières connoiflances arrivent - elles à notre ame \ n'avons - *ious pas oublié tout ce qui s'eft paffé dans les ténèbres de notre enfance! comment retrouverons- nous ia première trace de nos pcnfèes î n*y a-t-'il pas même de la témérité à vou- loir remonter jufquc-Iàî fi ia chofe étoit moins importante , on auroit raifon de nous blâmer ; mais elle eft peut- être j)lus que toute autre digne de nous occuper, & ne fliit-on pas qu'on doit faire des efforts toutes les fois qu'on veut atteindre à quelque grand objet \ J'imagine donc un homme tel qu'on peut croire qu'étolt le premier homme au moment de la création, c'eft-à-dire, un homme dont le corps & les organes fèroient parfaitement formés , mais c|ui s'éveilleroit tout neuf pour lui - même & pour tout ce qui l'environne. Quels fèroient fcs premiers mouvemens , Çts premières fenfaiions, les premiers jugc- mens î Si cet homme vouloit nous faire l'hifloire de fes premières penfées , qu'au- roit - il à nous dire î quelle feroit cette hiltoire î Je ne puis me difpenfcr de le I « !>il II I ^512 injJolre N<îUireI!e " faire parler lui-même, afin d'en rendre les faits plus (ciifibfcs : ce récit pliilofo- phiqiie qui fera court , ne fera pas une digrefllon inutile. Jeme fouv'mns de cet injfant plein de joîe ^ de trouble , ou je fcntis pour In première fois ma fmguHire ex'îfknce ; je ne Javois ce que j' et ois , où j'étois , d'où je venais. J'ou- vris îes yeux , quel fur croît de fenfition l la lumière , la voûte célejle , la verdure de la terre , le crijlal des eaux , tout m'occupoit , m'ûnimoit , ù' me donnoit un fentiment inexprimable de plaifir ; je crus d'abord que tous ces objets étoient en moi ù' faijoient partie de moi - même» Je în' affermi [jois dans cette penfce naif- fante lorfque je tournai les yeux vers l'ajlre de la lumière , fon éclat me bleffc. • je fermai involontairement la paupière , Ù' je fentis une légère douleur, Davs ce moment d'obfcurité je crus avoir perdu prcfque tout mon être. Affligé , faifi d'étonnement , je penfois k ce grand changement , quand tout -à- coup j'entends des fons ; le chant des o féaux , le murmure des airs formoicnt un concert dont la douce impreffion me remuoit jufqu'rdi fend de l'ame ;. j'écoutai long- temps , & j^ de niowmâ. 5 r | mt perfuadaî bientôt que cette harmonie était moi. Attentif, occupé tout entier de ce nouveau genre dexijience , j 'oubliais déjà la lumière , celte autre partie- de mon être que j'avois connue la première , lorfque je rouvris Us yeux. Quelle joie de me retrouver en pofjefflon de tant d'objets brillans ! mon plaifir furpafja tout ce que j'avois Jènti la première fois , & fu [pendit pour un temps le charmant ejfet des fons. Je fixai mes regards fur mille objets di^ vers, je m* aperçus bientôt que je pouvois perdre ù* retrouver ces objets , Ù" que j'avois la puijfance de détruire & de reproduire à mon gré cette belle partie de moi - même , ù* quoi qu elle me parût immenfe en grandeur par la quantité des accidens de lujnière (f par la variété des couleurs , je crus reconnoUre que tout était contenu dans une portion de mon être* Je commençais a voir fans émotion , ^ h entendre fans trouble , Lîf qu'un air lêge^f dont je fentis la fraîcheur , m'apporta des parfums qui me causèrent un épanouifement intime Ù' me donnèrent un fentiment d'amour pour moi-mtme. Agité par toutes ces fenfaiio.ns , preffe par l^splaifrs d'une fi belle &fi grande exifence , 514 HifJotn Naturelle je me levai tout ifun coup , & je me fentU tf an/porté par une force inconnue* . • Je ne fis qu'un pas , la nouveauté âe ma. fituation me rendit immobik , ma jurprije fut extrême , je crus que mon exïfence fuyait , le mouvement que ) 'avois fait, avoit conjondu les objets, je ni imaginais que tout était en dcfordre* Je portai la main fur ma tête , je louchai won front & mes yeux , je parcourus mon corps , ma main me parut être alors le prin^ cipal organe de mon exiflence ; ce que je f entais dans cette partie était f dijlinâ & fi somplet, lajouifjance m'en paroi (fait ft parfaite en comparai/on du plafir que m'avaient caufé la lumière ù* les fom , que je m'attachai tout entier à cette partie folide de mon être , ^ je fentis que mes idées prenaient de la profondeur & de la réalité. Tout ce que je touchais fur moi femhloit vendre a ma main fentimcnt pour fentiment, Hîjloîre Naturelle^ ère. perdu pendant quej'avois cejfé d'être, je crus m 'être doublé. Je portai ma main fur ce nouvel être, quel faijîjjement ! ce n'é toit pas moi , mais c'étoit plus çae moi , mieux que moi; je crus que mon exijîence allait changer de lieu ^ pi^jfff toute entière à cette féconde moitié de moi- même. Je la fin fis s* animer fous ma main, Je la vis prendre de la penfée dans mes yeux , les fiens firent couler dans mes veines une nouvelle fource de vie fj'aurois voulu lui donner tout mon être ; cette, volonté vive acheva mon exifience ,. Je fentis naître un ftxième fins, ^ Dans cet infiant , l'afhe du jour Jur la fin de fa courfe éteignit fon flambeau , je m'aperçus à peine que je perdais le fins de la vue , j'ex'iflois trop pour craindre de ctjfir d'être , ù* ce fut vainement que l'obfcurité ou je me trouvai , me rappela l'idée de mon premier fommeil Fjn dii quatrième volume» ^':!•, >^ 0 *-«,